Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 21 novembre 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 Le témoin est introduit dans le prétoire.

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 35.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. Puis-je vous rappeler,

7 Monsieur Vukasinovic, que vous avez fait la déclaration solennelle au début

8 de votre témoignage et cette déclaration est toujours en vigueur.

9 LE TÉMOIN: LJUBISA VUKASINOVIC [Reprise]

10 [Le témoin répond par l'interprète]

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic, vous avez la parole.

13 M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

14 Monsieur les Juges et tous les participants dans cette affaire.

15 Interrogatoire principal par M. Lukic : [Suite]

16 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vukasinovic.

17 Monsieur le Président, avant de continuer, j'ai une intervention par

18 rapport au compte rendu d'hier. Cela concerne une de mes questions. Je

19 pense que la traduction en anglais était bonne, mais peut-être que pendant

20 que le compte rendu a été consigné, il y a une erreur qui s'est glissée.

21 C'est à la ligne 13, à la page 14 491, ma question à M. Vukasinovic était

22 la suivante : "Quel était votre grade à l'époque, à savoir est-ce que votre

23 grade à l'époque était le grade de commandant et il a répondu : "Oui." Et

24 la version en anglais dit: "Your rank of the time was that of imagine." La

25 page 14 991, la ligne 13.

26 Monsieur Vukasinovic, les interprètes hier m'ont demandé de faire un repos

27 un peu plus long entre les questions et les réponses. C'est pour cela que

28 je vous prie encore une fois de ralentir un peu pour qu'il n'y ait pas de

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1 problèmes par rapport à l'interprétation. Hier, vous nous avez parlé des

2 tâches en tant que commandant de lieu, vous nous avez parlé qui entrait

3 dans votre région et qui sortait de votre zone de responsabilité, à savoir

4 du village de Negoslavci. Vous nous avez dit que vous saviez qu'il y avait

5 des représentants de la communauté internationale qui venaient dans votre

6 zone de responsabilité et que vous deviez toujours avoir des informations

7 par rapport à cela.

8 Voilà ma question concernant ce sujet : savez-vous si, au village de

9 Negoslavci et dans la zone des activités de combat, seraient venus des

10 journalistes, et si oui, quelle était la procédure pour les faire entrer

11 dans la zone de responsabilité dans laquelle vous étiez le commandant de

12 lieu ?

13 R. Ils sont venus lors des activités de combat surtout vers la fin de

14 l'opération. Il fallait autoriser leur entrée par le biais du commandement

15 supérieur. J'obtenais les noms des personnes qui allaient venir, après

16 quoi, je les ai laissés passer. Il y avait un centre de presse dans un

17 bâtiment au village de Negoslavci à l'époque où ils venaient et d'où les

18 personnes compétentes les amenaient où ils voulaient aller.

19 Q. Savez-vous quel officier était en charge de ce centre de presse ?

20 R. C'était le commandant adjoint chargé du moral, Marko Maric, le colonel

21 Marko Maric.

22 Q. Radojica Sforca vous dit quelque chose, ce nom ?

23 R. Oui, lui, il était l'un des officiers qui étaient en charge de

24 contacter les journalistes et d'être dans ce centre de presse pour les

25 accueillir.

26 Q. Quelle était la relation entre l'organe de la sécurité qui était le

27 vôtre, c'est-à-dire l'organe chargé de la sécurité de la Brigade de la

28 Garde - c'est le Procureur qui utilise le terme du groupe opérationnel - et

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1 les autres organes de la sécurité qui se trouvaient sur le territoire du

2 Groupe opérationnel sud ou bien qui faisait partie du Groupe opérationnel

3 sud ?

4 R. Il n'y avait pas de rapport de force ni -- on était à pied d'égalité.

5 Chaque organe de la sécurité était compétent pour son unité. Le rapport a

6 été envoyé au commandant -- et par rapport aux opérations de combat dans la

7 zone de responsabilité de chacun de ces organes chargés de la sécurité, il

8 pouvait demander de l'aide au chef de l'état-major du Groupe opérationnel

9 sud, à savoir que cet organe lui donne une sorte d'évaluation de la

10 situation.

11 Q. Est-ce que vous vous souvenez de certaines de vos activités par rapport

12 à ces autres organes chargés de la sécurité au sein du groupe

13 opérationnel ?

14 R. Oui. A une occasion, quand la 20e Brigade des Partisans est arrivée

15 dans la zone de responsabilité du groupe opérationnel, j'ai eu pour tâche

16 de me rendre sur le terrain, de réunir les organes chargés de la sécurité

17 pour les informer sur la situation sur le front, et en particulier pour ce

18 qui est des mesures de sécurité et des problèmes du contre-renseignement.

19 Parce que toutes les unités qui viennent dans la zone des activités de

20 combat devaient être accueillies pour leur expliquer quelle est la

21 situation sur le terrain. C'est ce que j'ai fait par rapport aux organes de

22 la sécurité de la 20e Brigade des Partisans.

23 Q. Vous souvenez-vous dans quelle région cette unité se trouvait au moment

24 où vous les avez contactés, les membres de cette unité ?

25 R. Ils étaient dans la région d'Ovcara/Jakubovac, sur cet axe. Le

26 commandement se trouvait dans la région d'Ovcara.

27 Q. Vous souvenez-vous si les organes de la sécurité de la

28 20e Brigade des Partisans, à n'importe quel moment, vous auraient envoyé

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1 des rapports portant sur leurs activités, à vous en tant qu'organe chargé

2 de la sécurité du Groupe opérationnel sud ou de la Brigade de la Garde ?

3 R. Non, pas à moi. Mais selon ce que j'ai dit tout à l'heure, il est

4 probable qu'ils aient envoyé ces rapports à leur organe qui leur était

5 supérieur, qui était au sein de la 1ère Région militaire. Est-ce que le

6 commandant de cette unité avait besoin de l'aide du commandant du Groupe

7 opérationnel sud ou s'il a demandé à

8 M. Sljivancanin de demander cela, je ne peux pas vous dire. S'il avait fait

9 cela, M. Sljivancanin l'aurait certainement appris.

10 Q. Est-ce que l'on peut afficher sur l'écran la pièce à conviction 841.

11 Ma question, Monsieur Vukasinovic, est la suivante : est-ce que vous vous

12 souvenez si l'opération de Vukovar, vous avez participé à la rédaction d'un

13 rapport ? Nous avons déjà vu ce document les jours précédents. Je veux

14 poser une question seulement par rapport à ce document.

15 R. [aucune interprétation]

16 Q. Est-ce que l'on peut afficher d'abord la deuxième page et après revenir

17 à la première page. Donc, la deuxième page, la partie inférieure de la

18 deuxième page.

19 Monsieur Vukasinovic, dites-nous ce que vous en savez.

20 R. Oui. Ce document c'est le document que j'ai rédigé moi-même.

21 Habituellement, à la fin des activités de combat, on procède à l'analyse de

22 la tâche qui a été exécutée et on évalue nos points faibles par rapport à

23 l'utilisation des unités, par rapport à l'exécution des tâches et des

24 activités de combat. On évalue l'état de notre équipement, de nos armes, et

25 cetera, donc tout ce qui est lié à l'exécution des activités de combat.

26 Puisque j'étais compétent pour m'occuper des unités de la police

27 militaire et d'évaluer leur aptitude au combat, ma tâche était de rédiger

28 mes expériences et mes remarques par rapport à l'utilisation des unités de

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1 la police militaire à Vukovar.

2 Q. Sur la base de quoi, dans ce document, vous dites que vous avez

3 participé à la rédaction de ce document ?

4 R. Mes initiales figurent ici, JV, Ljubisa Vukasinovic, je suis l'auteur

5 de l'acte. ZM derrière, c'est la personne qui a dactylographié cela, et à

6 droite, c'est l'organe compétent qui a signé ce document, le lieutenant-

7 colonel Sljivancanin.

8 Q. Est-ce qu'on peut afficher maintenant la première page du document ?

9 M. LUKIC : [interprétation] Au compte rendu, il faut que j'apporte une

10 correction. C'est à la page 5, la ligne 21. Je pense que c'est clair que le

11 témoin a dit LJV, maintenant cela a été corrigé, ça va.

12 Donc, ZM est la personne qui a dactylographié cela, c'était Zoran

13 Moncilovic, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire défiler le document un

16 peu plus vers le haut. Parce que nous avons besoin de voir la partie au

17 milieu. Merci, c'est bien comme cela.

18 Q. J'ai une question liée à ce document parce qu'il parle de lui-même.

19 Ici, il est indiqué, vers le milieu du document : "Les tenues ne sont pas

20 adaptées à l'exécution des tâches lors des combats dans un lieu habité,

21 surtout les uniformes M-77."

22 Ma question est la suivante : comment les membres de la police

23 militaire de la Brigade de la Garde étaient habillés ? Quels uniformes

24 portaient-ils au cours des activités de combat et est-ce que ces uniformes

25 différaient des uniformes des unités de la police militaire d'autres

26 brigades qui ont participé aux combats au sein du Groupe opérationnel sud ?

27 R. La formation des unités de la police militaire ainsi que d'autres

28 unités, donc les membres portaient des uniformes M-77. La compagnie

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1 antiterroriste et certains officiers de ces compagnies portaient des

2 uniformes de camouflage. Les autres unités dans la zone des activités de

3 combat portaient les uniformes M-77 ou d'autres uniformes, anciens modèles

4 d'uniformes. On appelait cela --

5 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi la fin de la phrase du témoin.

6 M. LUKIC : [interprétation] Le dernier mot, c'était quoi ? L'ancien modèle

7 d'uniforme.

8 R. C'était l'uniforme fait d'un tissu de laine.

9 Q. Est-ce que les membres de la police militaire d'autres brigades

10 portaient le même type d'uniforme, comme les membres de la police militaire

11 de la Brigade de la Garde au cours des activités de combat ?

12 R. Oui. Ils portaient des uniformes M-77. Pendant les activités de combat,

13 ils portaient des ceinturons gris et ils portaient toujours une sorte

14 d'insigne de la police militaire.

15 Q. Voilà. Maintenant, les dates du 18, 19 et du 20 novembre, ce sont ces

16 trois dates qui nous intéressent le plus par rapport à cela. Monsieur

17 Vukasinovic, nous savons que le 18 novembre, c'est la date où les activités

18 de combat ont cessé. Pouvez-vous nous dire, si vous pouvez vous en

19 souvenir, ce que vous avez fait à cette date-là, à savoir le 18 novembre ?

20 Je ne m'intéresse pas à toute la journée, mais plutôt, savez-vous si ce

21 jour-là, le groupe de Mitnica s'était rendu et si, par rapport à cela, vous

22 avez procédé à certaines activités ?

23 R. Je vais essayer de vous raconter brièvement cela. Après des activités

24 sur cet axe, des activités à succès, on a planifié à procéder aux

25 négociations pour que les forces croates qui défendaient sur cet axe se

26 rendent. Dans ces négociations, le colonel Pavkovic a participé. Ces

27 négociations ont pris fin à la fin de la journée, et on a réussi, on est

28 parvenus à un accord par rapport à la reddition du groupe de Mitnica, du

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1 Bataillon de Mitnica.

2 Au cours de l'après-midi, je suis arrivé là-bas, parce qu'on m'a

3 informé qu'une foule de personnes est arrivée au moment où le Bataillon de

4 Mitnica s'est rendu. Il y avait des civils, des citoyens de ce lieu habité

5 qui sont arrivés après le bataillon. On a informé de cela le bataillon, et

6 c'est pour cela que j'ai pu évaluer la situation. Le chef chargé de la

7 sécurité m'a invité pour que j'aide à résoudre la situation liée à la

8 sécurité et pour réunir les conditions pour s'occuper d'un tel nombre de

9 personnes. Il y avait entre 2 500 et 3 000 personnes, selon mon évaluation,

10 et peut-être qu'il y en avait plus.

11 C'était une situation très difficile. Il m'est difficile de parler

12 des éléments liés au temps lorsque ces problèmes sont survenus. Mais

13 l'événement même, on peut le retenir et on peut le reproduire aujourd'hui,

14 le décrire, plutôt.

15 Je suis arrivé là-bas, chez Sljivancanin, donc chez mon commandant,

16 et j'ai vu un grand nombre de personnes. Il fallait prendre des mesures

17 pour s'occuper d'un tel nombre de personnes et comment répondre à leurs

18 demandes. Le commandant a été informé là-dessus, et tout de suite après, il

19 a pris de mesures nécessaires pour résoudre cela. Il allait envoyer des

20 moyens de transport pour ce qui est des combattants qui se sont rendus

21 ainsi que pour les habitants de ce lieu. Il y avait beaucoup de camions qui

22 étaient arrivés ainsi que des bus pour pouvoir évacuer les gens de la

23 région de Vucedol et de Mitnica.

24 Q. Juste un instant, s'il vous plaît. Comment s'appelle la région où

25 vous vous trouviez à ce moment-là avec M. Sljivancanin ?

26 R. Cette région s'appelle Vucedol. C'est un peu plus vers le sud par

27 rapport à l'endroit où le Bataillon de Mitnica s'est rendu. Cela s'appelle

28 Vucedol.

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1 Q. Pendant que vous étiez à Vucedol, dites-nous s'il y avait d'autres

2 événements que vous avez retenus, des événements particuliers ? Est-ce que

3 quelqu'un d'autre est arrivé à cet endroit-là ?

4 R. Je me souviens bien quand c'était entre Salu, à la tombée de la nuit.

5 Je me souviens qu'une estafette est arrivée pour nous remettre une dépêche,

6 une enveloppe dans laquelle se trouvait une dépêche, et cette estafette,

7 elle a remis cette dépêche, cette enveloppe à Sljivancanin.

8 Q. Est-ce que vous vous souvenez du contenu de cette dépêche ? Est-ce que

9 vous avez eu l'occasion de voir le contenu de cette dépêche ?

10 R. Oui. J'ai eu l'occasion de voir le contenu de ce télégramme parce que

11 c'était codé. Sljivancanin m'a dit d'ailleurs quel était le contenu de ce

12 télégramme. Voilà, je vais vous dire de quoi il s'agissait. Il était écrit

13 dans ce télégramme qu'un grand nombre de nos soldats et de nos officiers se

14 trouvaient en détention chez les forces croates et qu'il fallait assurer,

15 si c'était possible, un certain nombre de personnes pour organiser un

16 échange. C'était le contenu du télégramme.

17 Q. Vous souvenez-vous si ce télégramme a été signé, si oui, qui a signé ce

18 télégramme ?

19 R. Ce télégramme a été signé par Aca Vasiljevic, qui était chef de

20 l'administration chargée de la sécurité à l'époque.

21 Q. Dites-nous, si ce jour-là, vous étiez à Ovcara, et si oui, quand, à

22 quel moment de la journée ? Vous ne devez pas être précis, mais pouvez-vous

23 nous dire approximativement à quel moment de la journée ? Dites-nous ce que

24 vous avez fait.

25 R. Si vous me permettez d'abord, il faut que je vous dise quelle était la

26 réaction de Sljivancanin à ce moment-là. Je me souviens bien de ses mots

27 qu'il a prononcés à ce moment-là. Il a dit : "Vukasin," parce que tout le

28 monde m'appelait Vukasin, donc il s'est adressé à moi en me disant :

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1 "Vukasin, regardez cette foule qui est là, il faut s'occuper d'eux."

2 C'était notre tâche principale, à savoir comment s'occuper des gens qui

3 étaient effrayés et comment les mettre dans un abri, comment les faire

4 sortir de cette région et comment répondre à leurs demandes.

5 Cela a duré longtemps. La population était effrayée, irritée, tout le

6 monde voulait partir quelque part. Il fallait beaucoup de temps pour

7 rétablir la paix et l'ordre, et pour démarrer, faire démarrer les bus ainsi

8 que pour leur parler, tout simplement. Cela a duré longtemps, tout cela.

9 A part cela, nous avions des problèmes avec les gens qui voulaient

10 sortir à bord de leurs voitures et ils ont insisté à ce qu'ils partent avec

11 leurs voitures dans de différentes directions. Mais nous ne pouvions pas

12 assurer cela, parce qu'il y avait toujours des combats qui étaient en

13 cours. Nous leur avons dit que dans la région d'Ovcara, nous organiserions

14 tout cela pour qu'ils puissent se reposer, après quoi, ils allaient partir.

15 Tout cela, toutes les personnes ont été transportées jusqu'à Ovcara.

16 Au moment où nous sommes arrivés à Ovcara, dans la région du commandement,

17 à savoir dans la région de la maison jaune - c'est comme cela qu'on

18 l'appelait - et vers les hangars, donc sur ce trajet, il y avait des bus

19 qui étaient garés. A droite par rapport à la route, sur une sorte de

20 pelouse, ils devaient garer leurs voitures privées en laissant les clés des

21 voitures à l'intérieur des voitures.

22 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire combien de voitures il y avait

23 environ ?

24 R. Dans la mesure où je me souviens, je pense qu'il y avait une trentaine

25 de voitures, une quarantaine de voitures. Il s'agissait de véhicules

26 différents, de marques différentes. Il s'agissait essentiellement de

27 voitures Zastavas, donc de marques de fabrication locale, puis il y avait

28 peut-être une ou deux Mercedes. En fait, c'était déjà tard. Je pense que

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1 c'était 22 heures ou 23 heures. Je sais que lorsque nous avons réglé toute

2 la situation et lorsque nous étions prêts pour que le commandement puisse

3 prendre des mesures et envoyer d'autres organes qui auraient pu conduire le

4 convoi dans d'autres directions vers la Serbie, et cetera, je sais que

5 c'était déjà très tard.

6 Q. A propos de cette dernière réponse que vous venez d'apporter, est-ce

7 que vous savez si on a offert à ces civils d'aller en Croatie s'ils

8 souhaitaient se rendre en Croatie, et est-ce qu'on leur a offert d'aller en

9 Serbie si c'est ce qu'ils voulaient faire ?

10 R. Oui, bien sûr, nous leur avons demandé. La question leur a été posée.

11 Ils ont tous été placés dans le convoi qu'ils avaient choisi, et nous avons

12 pris en considération leurs desiderata. C'était la moindre des choses.

13 Q. Les civils qui étaient venus en voitures et qui ont laissé leurs

14 véhicules à cet endroit, est-ce qu'ils sont partis d'Ovcara ce soir-là ?

15 R. Oui. Il y en a un certain nombre qui ont été transportés à Sremska

16 Mitrovica ainsi qu'à Sid. Il y en a d'autres qui sont allés vers

17 Velepromet. Voilà comment je me souviens de ce qui s'est passé.

18 Q. Dites-moi, je vous prie, combien de temps êtes-vous resté à Ovcara ce

19 soir-là ? Est-ce que vous pouvez me le dire ?

20 R. Si j'évalue le temps nécessaire pour que nous terminions tout cela, je

21 dirais que je suis resté six heures, sept heures à cet endroit.

22 Q. Est-ce Sljivancanin était avec vous ce soir-là à Ovcara ?

23 R. Oui. Nous étions dans cet endroit jusqu'au moment où toute la situation

24 a été réglée et jusqu'au moment où les gens sont montés dans les autobus et

25 au moment où les convois sont partis. Alors, je suis allé avec lui au

26 village de Negoslavci.

27 Q. Nous allons passer maintenant à la journée du 19 novembre. Est-ce que

28 vous vous souvenez de vos activités le matin du

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1 19 novembre ? Est-ce qu'il y a quelque chose qui évoque un souvenir pour

2 vous ce matin-là ?

3 R. Le 19 novembre est une journée remplie, truffée de toutes sortes

4 d'activités, en commençant par la visite de M. Cyrus Vance, le représentant

5 des Nations Unies, qui est venu, qui est arrivé le matin. C'était une

6 visite extrêmement importante. Il a fallu que nous prenions certaines

7 mesures pour que cette visite puisse avoir lieu. Puis, il fallait également

8 que nous assurions la sécurité nécessaire pour que M. Vance et les

9 personnes qui faisaient partie de sa délégation puissent être protégés de

10 toute influence.

11 J'ai reçu M. Cyrus Vance. Je ne l'ai pas reçu personnellement mais ce

12 sont mes forces qui l'ont accueilli à Sid. Il a été transporté jusqu'au

13 village de Negoslavci dans notre véhicule de combat. Il a été ainsi conduit

14 au commandement du Groupe opérationnel sud, et là, il a passé un certain

15 temps avec le commandant ainsi qu'avec le reste des membres du

16 commandement. Puis, une escorte lui a été donnée pour assurer sa sécurité,

17 et c'est alors qu'il a été conduit dans la caserne de Vukovar. Je ne sais

18 pas ce qu'il a fait après.

19 Q. Vous savez seulement ce qui s'est passé dans la région de Negoslavci ?

20 R. Oui.

21 Q. Cela, c'est à propos de cette visite. Je ne vais plus vous poser

22 d'autres questions à ce sujet, mais j'aimerais toutefois vous poser une

23 autre question.

24 Au cours de cette journée, est-ce que vous avez vu M. Sljivancanin,

25 si oui, quand l'avez-vous vu, et si vous l'avez vu, si vous lui avez parlé,

26 de quoi avez-vous parlé ?

27 R. Comme je l'ai déjà dit, nous avions l'habitude de nous rencontrer après

28 les séances d'information militaire. Pendant la conversation que nous avons

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1 eue, il a voulu, dans un premier temps, savoir comment M. Vance avait été

2 reçu, ce qu'il avait dit à propos de la situation qu'il avait pu observer

3 et à propos des mesures que nous avions prises, puis il m'a dit qu'il était

4 satisfait de la façon dont nous l'avons reçu et des préparatifs qui avaient

5 été organisés ainsi que des garanties et de la sécurité que nous avons

6 fournies, et ce, dans des circonstances particulièrement difficiles.

7 Puis, à ce moment-là, je l'ai informé d'un autre problème ou d'autres

8 problèmes qui s'étaient posés le 19 novembre. Il n'était absolument pas au

9 courant de ces problèmes. Tous les convois qui avaient été envoyés vers la

10 Croatie étaient revenus pendant l'après-midi ou vers 18 heures, 19 heures,

11 parce que les forces croates n'avaient pas voulu les laisser passer. Il y

12 avait un convoi qui était revenu de Zupanja qui se retrouvait basé à

13 nouveau à Ovcara.

14 Donc, il y avait des problèmes à ce sujet, parce qu'il fallait plus

15 précisément faire en sorte que ces personnes puissent avoir à manger,

16 puisse avoir de l'eau pour qu'elles puissent survivre pendant la nuit, et

17 ce, jusqu'au matin suivant. Puis, le commandant a pris toutes les mesures

18 possibles pour faire en sorte que des vivres et de l'eau leur soit donné.

19 Je lui ai dit, qu'en dépit de cela, les forces et les autorités croates

20 étaient en train de nous compliquer la vie et de provoquer des problèmes,

21 puisqu'ils renvoyaient leur propre population. Donc, je voulais vous

22 informer de ce genre de problèmes.

23 Q. Juste un petit moment. Nous aborderons cette question un peu plus tard.

24 Mais je voulais tout simplement, à ce moment-là, savoir si vous avez parlé

25 de l'évacuation de l'hôpital ?

26 R. Oui, oui, nous avons parlé de l'évacuation de l'hôpital. Cela s'est

27 passé plus tard, lorsque je l'avais informé des problèmes et lorsque je

28 l'avais informé des problèmes posés par les voitures qui étaient restées.

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1 Il m'a écouté, ensuite il m'a dit que nous avions une mission difficile qui

2 nous attendait et qu'il allait me confier des tâches.

3 Le lendemain, le 20, il m'a demandé de préparer les autobus, de me

4 présenter à l'hôpital où je me trouvais afin de pouvoir prendre des

5 personnes qui avaient été choisies afin de les transporter jusqu'à la

6 caserne de Vukovar. Lorsque toutes ces personnes, ou après le transport de

7 toutes ces personnes plutôt, j'étais censé organiser un convoi en partance

8 pour Sremska Mitrovica. Voilà la mission très précise qu'il m'a confiée ce

9 soir-là.

10 Si vous m'y autorisez, je vais répéter ce que je viens de dire. On

11 m'a dit d'aller à l'hôpital avec un certain nombre d'autobus pour que

12 montent à bord de ces autobus des personnes qui avaient été triées pour les

13 envoyer vers la caserne de Vukovar pour pouvoir organiser les convois et la

14 sécurité à ce moment-là, et ensuite pour pouvoir envoyer ce convoi vers

15 Sremska Mitrovica. Voilà la mission qui me fut confiée.

16 Q. A propos de cette mission qui visait le lendemain. Est-ce que M.

17 Sljivancanin a mentionné Ovcara à un moment donné ? Est-ce que ce mot a été

18 prononcé par lui ?

19 R. Non, non, Ovcara n'a pas été mentionné. Puisque la mission était très,

20 très claire. Il s'agissait de transporter les personnes de l'hôpital vers

21 la caserne de Vukovar alors que - on n'a même pas songé à Ovcara. On n'y

22 pensait même pas, en fait, à Ovcara.

23 Q. Est-ce que vous savez qui était censé fournir les autobus le 20,

24 puisque maintenant nous parlons de cette mission ?

25 R. Tout cela avait été organisé au niveau du commandement. Quoi qu'il en

26 soit, les autobus ont été fournis par le chef des services de la

27 circulation, le lieutenant-colonel Loncar. C'est lui qui m'a fourni les

28 autobus. Les policiers militaires venaient du

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1 2e Bataillon de la Police militaire. Cela, c'était la deuxième composante.

2 Donc, tout cela était préparé pour moi devant mon poste de commandement à

3 Negoslavci. Je me suis contenté de monter dans mon véhicule, ensuite j'ai

4 suivi les différentes étapes de cette mission.

5 Q. Cette conversation que vous avez eue le soir du 19 avec Sljivancanin,

6 au cours de cette conversation, est-ce que vous avez mentionné ou est-ce

7 que vous avez discuté du nombre d'autobus, du nombre de personnes, par

8 exemple, ou vous n'en avez pas parlé ?

9 R. Nous ne savions rien des chiffres. Les chiffres n'ont absolument pas

10 été mentionnés. Nous avons tout simplement dit que nous devions préparer

11 des véhicules pour pouvoir transporter les personnes qui avaient été

12 choisies. Personne n'avait la moindre idée du nombre de ces personnes.

13 Q. J'aimerais maintenant vous poser une question à propos de cette

14 expression, "tri des personnes." Lors de la période précédente à ce jour-

15 là, vous, en tant qu'organe de la sécurité, est-ce que vous saviez qui

16 étaient les personnes qui se trouvaient dans l'hôpital et est-ce que vous

17 saviez à quelle fin avait été utilisé l'hôpital ?

18 R. Oui, oui. Nous avions des informations à ce sujet. C'est naturel, c'est

19 logique. Notre administration supérieure, donc l'administration de la

20 sécurité envoyait constamment au chef de la sécurité des informations

21 qu'elle avait reçues et ces informations portaient sur la situation et sur

22 certaines mesures du contre-renseignement qui avaient été prises, et elle

23 nous informait de la situation générale qui prévalait dans notre région,

24 dans notre zone des opérations de combat. Ce sont des informations qui

25 arrivaient continuellement.

26 Il faut savoir qu'après la chute de Vukovar, un grand nombre des

27 membres du ZNG qui n'avaient pas voulu se rendre alors qu'on leur en avait

28 donné la possibilité. Ils se sont en quelque sorte dissimulés, se sont

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1 camouflés. Ils se sont dissimulés dans l'hôpital ainsi que dans d'autres

2 endroits en plus de l'hôpital. Donc, nous, nous savions qu'à l'hôpital il y

3 avait des membres du ZNG qui s'étaient débarrassés de leurs fusils, qui

4 avaient changé leurs tenues vestimentaires et qui utilisaient l'hôpital

5 pour pouvoir sortir de la ville par l'entremise de la Croix-Rouge. Nous

6 avions également des renseignements que nous avions collectés nous-mêmes

7 car nous avions placé sur écoute certaines conversations. Nous avions nous-

8 mêmes nos propres sources de renseignement. Donc, effectivement, nous

9 savions qu'il y avait des personnes qui avaient refusé de se rendre et qui

10 avaient ainsi choisi cette solution pour fuir. Ils s'étaient déguisés en

11 personnel de l'hôpital.

12 Q. Ma question était comme suit : lorsque vous avez dit un peu plus tôt,

13 "choisi des personnes, vous avez fait état au fait qu'il y avait des

14 personnes qui avaient été choisies. Est-ce qu'il s'agit de ces personnes-

15 là, des personnes dont vous venez de parler qui devaient être transportées

16 vers l'hôpital ?

17 R. Oui. Toutes les personnes qui n'étaient pas blessées, qui n'étaient pas

18 des patients de l'hôpital ou qui n'étaient pas membres du personnel de

19 l'hôpital étaient des personnes dont il fallait déterminer l'identité.

20 Parce qu'il y avait beaucoup trop de personnes à l'hôpital qui n'auraient

21 pas dû être à l'hôpital.

22 Par conséquent, il existait un péril. Le danger étant que si nous ne

23 faisions pas, si nous ne procédions pas à ce choix, il y aurait un

24 incident, il y aurait des problèmes. C'était des mesures de sécurité qu'il

25 fallait prendre lors de l'évacuation des blessés. Parce que si nous ne

26 l'avions pas fait, il y aurait eu potentiellement un gros problème qui

27 aurait pu se poser. C'était justement la tâche de l'organe chargé de la

28 sécurité. Il s'agissait d'assurer que toutes les mesures prises pour les

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1 patients et pour les blessés puissent être prises de la façon la plus sûre,

2 et ce, afin d'assurer également la sécurité de nos forces qui participaient

3 à l'évacuation.

4 Q. A ce moment-là, lorsque vous avez parlé à Sljivancanin, est-ce que vous

5 saviez si les unités du Groupe opérationnel sud étaient déjà venues à

6 l'hôpital ?

7 R. Nos unités y étaient arrivées vers midi ou 13 heures, en début d'après-

8 midi. Plus tard, lorsque je suis arrivé là-bas, je les ai vues. J'ai vu ces

9 unités qui s'acquittaient de leur mission. Il s'agissait de notre unité du

10 2e Bataillon de la Police militaire.

11 Q. Est-ce que vous êtes allé à Ovcara ce soir-là, et le cas échéant, quand

12 êtes-vous allé à Ovcara et en compagnie de qui ?

13 R. Oui, j'étais à Ovcara ce soir-là. J'y étais le soir du 19. Je vous ai

14 déjà dit un peu plus tôt que j'avais informé Sljivancanin du fait que le

15 convoi avait été renvoyé. Je lui avais dit que nous avions ce problème posé

16 par des véhicules privés qui faisaient partie du convoi. C'est pour cela

17 que nous sommes allés voir quelles mesures pouvaient être prises, quelles

18 mesures avaient été prises et comment on pourrait régler le problème,

19 comment est-ce que ces véhicules, ces voitures pourraient être sorties de

20 cette situation, parce que nous n'avions pas suffisamment d'effectifs à

21 notre disposition. Il n'y avait pas suffisamment de forces de sécurité. Le

22 risque était, à ce moment-là, que des gens auraient pu prendre des mesures.

23 Ce que je veux dire, c'est qu'il était risqué de laisser ces véhicules,

24 parce qu'il y avait toujours le risque de pillage ou de vol d'ailleurs.

25

26 Après la séance d'information militaire, après que nous avons discuté

27 de tout cela, lui et moi-même, nous nous sommes rendus là-bas pour faire le

28 point de la situation, pour observer la situation. Cela a duré environ 20

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1 minutes, une demi-heure. Nous sommes arrivés là. C'était le secteur d'une

2 autre unité, et leur patrouille nous a arrêtés. Puis, ils ont reçu

3 l'autorisation de nous laisser entrer dans le secteur, ce que nous avons

4 fait. Il y avait un officier qui nous attendait et qui s'est présenté au

5 rapport devant lui.

6 Q. Qu'avez-vous fait là-bas ?

7 R. Je me trouvais à côté des véhicules, et j'étais en train d'analyser la

8 situation. Je me demandais comment nous pouvions régler ce problème avec

9 les véhicules qui étaient restés là. Eux, ils ont emprunté le chemin vers

10 les autobus, vers les hangars et ils parlaient de quelque chose.

11 D'ailleurs, je ne sais pas de quoi ils parlaient. Quoi qu'il en soit, après

12 quelque 20 minutes de conversation avec lui, le commandant est revenu et a

13 dit que tout était bien là-bas et que nous devions régler le problème des

14 véhicules en faisant en sorte qu'ils puissent les transporter à Velepromet

15 le lendemain parce que cela était extrêmement dangereux. La conclusion

16 était que les véhicules pouvaient rester sur place ce soir-là. Voilà

17 comment la situation a été réglée. Nous sommes repartis dans la voiture. Je

18 suis allé vers mon poste de commandement et lui vers le sien. Nous sommes

19 repartis vers Negoslavci.

20 Q. Est-ce que vous vous souvenez avoir vu des membres de la TO à ce

21 moment-là, je parle de la Défense territoriale de Vukovar ?

22 R. Oui. Je me souviens qu'il y avait plusieurs personnes présentes, mais

23 je ne serais absolument pas en mesure de les identifier. Ils étaient peut-

24 être sept ou huit. En règle générale, ce qui les intéressait c'était les

25 véhicules. Sljivancanin leur a dit que personne n'avait le droit de prendre

26 ces véhicules, que ces véhicules avaient été réquisitionnés de façon

27 provisoire et qu'aucune personne n'avait le droit de les prendre, de s'en

28 emparer. Que ces véhicules allaient être conduits vers Velepromet, car

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1 Velepromet avait été choisi comme centre pour ce genre de bien.

2 Q. Je ne vous avais pas posé une question d'ordre général avant ces

3 événements du 18 et du 19. J'aimerais savoir si vous connaissiez Miroljub

4 Vujevic et Stanko Vujanovic à ce moment-là ? Est-ce que vous aviez des

5 contacts avec eux ? Je parle maintenant des événements qui ont précédé le

6 18.

7 Un petit moment, je vous prie. Parce que je pense qu'il y a une erreur

8 d'interprétation vers l'anglais. A la page 18, ligne 14. Ma question était

9 comme suit : est-ce que vous connaissiez Miroljub Vujevic et Stanko

10 Vujanovic ?

11 R. Ecoutez, connaître quelqu'un, qu'est-ce que l'on entend par cela; c'est

12 un terme très vague. Je les ai vus une ou deux fois, au départ, avant le

13 début des opérations de combat. Puis, à partir du moment où ils ont

14 commencé à participer au combat, je ne les ai plus vus. Je les avais vus

15 auparavant, je les avais vus cinq ou six fois, comme cela, en passant.

16 Sinon, je ne peux pas dire que nous nous connaissions personnellement. Nous

17 n'avions pas de discussions très approfondies. Toutefois, je savais que ces

18 personnes existaient et qu'elles dirigeaient certaines unités, ou plutôt

19 des groupes de combat.

20 Q. Qu'en est-il de Milan Lancuzanin dont le surnom était Kameni, qui

21 s'occupait du détachement de Leva Supoderica ? Est-ce que son nom signifie

22 quelque chose pour vous ?

23 R. Ecoutez, c'est la même chose pour ces trois gens. J'avais entendu

24 parler d'eux. Je les ai peut-être vus une ou deux fois. Je savais que ces

25 deux-là étaient les commandants du Détachement de Petrova Gora et que

26 Kameni était le commandant du Détachement de Leva Supoderica. C'est ainsi

27 que les gens parlaient de lui.

28 Q. Nous allons maintenant parler des événements du 20. Là, vous avez été

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1 plutôt actif ce jour-là. Nous allons donc commencer par la matinée du 20.

2 Est-ce qu'il y a un événement de taille dont vous vous souviendriez à

3 propos de la matinée du 20 novembre ?

4 R. Il y a beaucoup de temps qui s'est écoulé depuis, je vais essayer

5 d'être aussi bref que faire ce peut. Lors de ma description, je vais vous

6 narrer ce dont je me souviens et je vais vous relater ce qui, d'après mes

7 souvenirs, est véridique et réaliste. Car il est difficile de se souvenir

8 de tous les faits maintenant. Je me suis constamment préparé pour parler de

9 cela. Mais pour vous dire la vérité, tant d'années se sont écoulées depuis,

10 qu'il est un tant soit peu, difficile de fournir une réponse exhaustive. Je

11 savais que je devrais fournir cette réponse pour que la Chambre de première

12 instance puisse statuer en bonne et due forme à ce sujet. Donc, je vais

13 véritablement faire de mon mieux pour vous expliquer ce qui s'est passé et

14 pour vous expliquer quel était mon rôle.

15 Le 19 au soir, après avoir terminé ma conversation avec

16 M. Sljivancanin, je me suis vu confier la mission dont je vous ai parlé. Le

17 20 au matin, vers 6 heures du matin, très tôt le matin, parce que plus

18 tard, lorsque les unités ont commencé à être actives et à se déplacer, les

19 choses sont devenues ou allaient devenir plus compliquées. Je me suis levé

20 tôt parce que je voulais arriver tôt à l'hôpital. J'ai pris avec moi six

21 autobus militaires dont les conducteurs étaient des civils. Il y avait deux

22 policiers militaires à bord de chaque bus. Je leur ai fait former une

23 colonne et j'ai dirigé moi-même cette colonne dans un véhicule Puch avec un

24 conducteur et nous sommes allés à l'hôpital.

25 Q. N'allez pas trop vite en besogne. Je voudrais bien m'assurer de bien

26 tout comprendre. J'aimerais savoir où vous avez conduit, ou plutôt quand

27 est-ce que vous avez récupéré -- où avez-vous récupéré les autobus ?

28 R. Les autobus m'attendaient devant mon poste de commandement à Negoslavci

Page 15014

1 sur la route.

2 Q. Où se trouvaient les policiers militaires à ce moment-là ?

3 R. Oui. Les policiers militaires étaient à bord des autobus.

4 Q. Devant votre poste de commandement, il y avait six autobus, et dans

5 chacun de ces autobus, il y avait déjà deux policiers; c'est exact ?

6 R. Oui, c'est exact.

7 Q. Poursuivons.

8 R. Je suis arrivé à l'hôpital, et en cours de route, la route qui

9 aboutissait à l'hôpital avait été endommagée par des obus, donc il y avait

10 toute une kyrielle d'obstacles sur cette route. Enfin, nous sommes quand

11 même passés sans encombre et nous avons franchi le pont qui avait été

12 partiellement endommagé. Nous sommes arrivés à l'hôpital. J'ai garé les

13 autobus sur cette route qui se trouvait devant le portail et j'ai garé les

14 autobus l'un après l'autre près de la barrière ou de la clôture. Ils

15 étaient garés suivant un alignement militaire.

16 Q. Un petit moment, je vous prie.

17 M. LUKIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, nous aimerions

18 afficher une photographie à l'écran pour que le témoin puisse la décrire.

19 Il s'agit de la photographie numéro 5, de la pièce à conviction 170, et ce,

20 afin que le témoin puisse la décrire.

21 Q. Monsieur Vukasinovic, reconnaissez-vous cela, cet endroit ?

22 R. Oui.

23 M. LUKIC : [interprétation] Je prie Mme l'Huissière de donner un crayon au

24 témoin pour que le témoin puisse nous dessiner.

25 Q. En vous appuyant sur vos souvenirs, où les autobus étaient garés ?

26 C'est l'hôpital de Vukovar, n'est-ce pas ? Vous pouvez utiliser ce crayon

27 pour dessiner cela ?

28 R. Ce bâtiment, c'est l'hôpital.

Page 15015

1 Q. Juste un instant, Monsieur Vukasinovic. Vous devriez dessiner en

2 utilisant ce crayon. Vous pouvez librement tirer des lignes sur l'écran et

3 dessiner où se trouvaient les bus garés.

4 R. [Le témoin s'exécute]

5 Les bus étaient garés à partir de cette petite maison jusqu'à ce

6 point-là.

7 Q. Après, nous allons parler des personnes qui montaient à bord des bus.

8 Apposez le numéro 1 au début de la ligne, s'il vous plaît.

9 R. [Le témoin s'exécute]

10 Q. Pouvez-vous reconnaître sur cette photographie l'endroit où se

11 trouvaient les gens qui montaient à bord des bus par rapport aux bus même.

12 Pouvez-vous indiquer cela sur la photo.

13 R. Je vais tirer une ligne. C'est la ligne numéro 2. Voilà. Ils se

14 trouvaient sur la partie qui est en pente par rapport à l'hôpital.

15 Q. Peut-être que la photo n'est pas bonne pour que le témoin puisse

16 dessiner tout cela sur la photo. Vous avez dit que c'était en pente ?

17 R. Oui, c'est une partie qui est légèrement en pente pour que l'ambulance

18 puisse entrer à l'hôpital.

19 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que cette

20 photographie pourrait être versée au dossier.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cette photographie est versée au

22 dossier.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce à conviction portant la

24 cote 859, Monsieur le Président.

25 M. LUKIC : [interprétation]

26 Q. Monsieur Vukasinovic, j'ai une question pour vous. Est-ce que ce matin-

27 là, au moment où vous êtes parti de Negoslavci sur la route vers l'hôpital

28 et plus tard - nous allons entendre cela - lorsque vous êtes parti de

Page 15016

1 l'hôpital, est-ce que vous avez vu des voitures, les voitures des

2 représentants de la Croix-Rouge internationale sur cette portion de votre

3 trajet ?

4 R. Dans la matinée de ce jour-là, je ne les ai pas vues. Je ne les ai pas

5 vues au moment où je suis arrivé à l'hôpital.

6 Q. Je vous remercie.

7 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je m'excuse, Maître Lukic, mais la

9 photographie n'est pas entrée dans le système.

10 M. LUKIC : [interprétation]

11 Q. Il y a un problème technique. Pouvez-vous dessiner encore une fois la

12 ligne, tirer la ligne et apposer le numéro 1 à côté de cette ligne qui

13 représente la position des bus.

14 R. [Le témoin s'exécute]

15 Q. Maintenant, dessinez la ligne qui indiquerait la position des gens qui

16 allaient monter à bord des bus.

17 R. [Le témoin s'exécute]

18 C'est ici qu'ils se trouvaient. C'est donc à cet endroit qu'ils se

19 trouvaient.

20 M. LUKIC : [interprétation] Le témoin s'est exécuté. Encore une fois, est-

21 ce que cette photo pourrait être versée aussi en tant que pièce à

22 conviction, maintenant.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La photographie améliorée sera

24 versée au dossier.

25 M. LUKIC : [interprétation] Est-ce qu'une cote a été accordée à la photo ?

26 Je ne l'ai pas vue. Oui, maintenant je la vois.

27 Q. Monsieur Vukasinovic, nous allons continuer. Lorsque vous êtes arrivé à

28 l'hôpital, qu'est-ce que vous avez vu ? Quelle était la situation que vous

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1 avez vue ?

2 R. Quand je suis arrivé à l'hôpital, j'ai vu la situation suivante : dans

3 la partie numéro 2 sur la photographie se trouvait un groupe de personnes

4 qui était séparé des autres. Je ne sais pas quel était le nombre de

5 personnes faisant partie de ce groupe.

6 De l'autre côté, devant les bus, de l'autre côté de la rue se

7 trouvait un groupe de membres de la Défense territoriale. A ce moment-là,

8 c'était ce que j'ai vu, rien ne se passait.

9 Q. Pendant cette période-là, où vous vous trouviez la plupart du

10 temps ?

11 R. Pendant cette période-là, je me trouvais la plupart du temps

12 devant la réception. Je me déplaçais du premier bus jusqu'à la réception et

13 jusqu'à la barrière qui est devant la réception ou la guérite en attendant

14 le moment où je devais m'acquitter de ma tâche, à savoir le moment où ce

15 groupe allait venir à ma rencontre.

16 Q. Est-ce que vous auriez pu voir qui procédait à la fouille des

17 personnes ? Est-ce que vous avez eu l'occasion de voir un soldat ou un

18 officier qui procédait à la fouille de ces personnes qui se tenaient là-

19 bas ?

20 R. Non. Il n'y avait aucune fouille à ce moment-là. Ces personnes

21 avaient été probablement déjà fouillées. Ils étaient tous debout là-bas.

22 Sur cette portion, ces personnes qui étaient alignées dans une colonne sur

23 une élévation en béton, ils étaient debout.

24 Q. Est-ce que vous êtes entré dans le bâtiment de l'hôpital ?

25 R. Non, non, je ne suis pas entré à l'hôpital.

26 Q. Est-ce que pendant cette période-là, vous êtes entré dans la cour de

27 l'hôpital ?

28 R. Oui, je suis entré dans la cour en passant la barrière. Je suis allé à

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1 peut-être 5 ou 6 mètres en profondeur dans la cour jusqu'à ce groupe de

2 personnes.

3 Q. Est-ce que vous avez vu, pendant que vous étiez là-bas, est-ce que vous

4 avez vu Sljivancanin, et si oui, où l'avez-vous vu ?

5 R. Pendant que j'étais là-bas, je ne l'ai pas vu, mais je l'ai vu plus

6 tard, au moment où il entrait de l'hôpital et il revenait à l'hôpital. Il a

7 fait cela à plusieurs reprises.

8 Q. Lorsque vous dites "plus tard," c'était avant le départ des bus ou

9 après ? Pour être précis, est-ce que pendant la période jusqu'au départ du

10 premier groupe, vous avez vu Sljivancanin ?

11 R. C'était après que le premier groupe a été amené.

12 Q. Qui a commandé l'embarquement des personnes dans les bus ?

13 R. Puisque le capitaine Simic m'a dit que ce groupe pouvait être embarqué,

14 j'ai accueilli ce groupe et j'ai procédé à l'embarquement lentement de ce

15 groupe de personnes, l'un après l'autre. Ils étaient en train de s'asseoir

16 sur les sièges à bord du bus.

17 Q. Vous avez mentionné le capitaine Simic. Pouvez-vous nous dire ce qu'il

18 a fait à ce moment-là là-bas et quel était votre contact avec lui ?

19 R. Pour autant que j'en sache, lui avec sa compagnie assuraient la

20 sécurité de l'hôpital. C'est dans ce sens-là qu'il a coopéré avec moi par

21 rapport au groupe qui a été trié pour que je puisse m'occuper de ce groupe.

22 C'était dans ce sens que nous avons coopéré.

23 Q. Est-ce que vous avez vu d'autres officiers pendant cette période-là,

24 d'autres officiers appartenant à la Brigade de la Garde ou au Groupe

25 opérationnel sud ?

26 R. J'ai vu mes collègues. Je me souviens de mes collègues qui étaient avec

27 moi. Il y avait Karan, le commandant Mladen. J'ai vu le capitaine Paunovic

28 Radoje, j'ai vu Simic, j'ai vu certains de ses subordonnés. J'ai vu

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1 quelques-uns qui appartenaient au département médical. J'ai vu certains

2 médecins de l'hôpital.

3 Q. Est-ce que vous saviez que la veille certains officiers chargés de

4 l'administration de la sécurité de la 1ère Région militaire étaient

5 arrivés ? Est-ce que vous saviez cela ? Est-ce que vous les aviez

6 rencontrés, vous, en personne ?

7 R. Non, je ne les ai pas rencontrés. Puisque j'étais au poste de

8 commandement, j'ai vu que cela était enregistré. Dans la soirée, le groupe

9 des officiers de l'administration chargé de la sécurité est arrivé au poste

10 de commandement et j'ai vu que leur arrivée avait été enregistrée.

11 Q. Merci. Monsieur Vukasinovic, quelle était votre tenue vestimentaire à

12 cette occasion-là ? Comment étiez-vous habillé à cette occasion-là ?

13 R. Je portais un uniforme de camouflage. J'avais un pistolet, un

14 ceinturon, et je portais un casque. Lorsque je ne portais pas ce casque, je

15 portais un couvre-chef qu'on appelait le couvre-chef de Tito, avec une

16 étoile à cinq branches.

17 Q. Est-ce que votre supérieur, M. Sljivancanin, portait le même type

18 d'uniforme de camouflage pendant cette période-là ?

19 R. Oui, nous portions le même type d'uniforme.

20 M. MOORE : [interprétation] Puis-je demander à mon éminent collègue, mon

21 éminent confrère de poser des questions attentivement. Parce que je dirais

22 que la structure de cette question suggère au témoin la réponse à donner.

23 La question devrait être posée de façon suivante : "Quelle sorte d'uniforme

24 M. Sljivancanin portait-il ?"

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] On vous demande, Maître Lukic, d'être

26 prudent en posant vos questions.

27 M. LUKIC : [interprétation]

28 Q. Monsieur Vukasinovic, pouvez-vous me dire quelle est votre taille ?

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1 R. Je mesure 1 mètre 90.

2 Q. Merci. Je vais vous poser des questions, encore des questions par

3 rapport à l'embarquement à bord des bus. Si j'ai bien compris, vous avez

4 dit que les gens qui arrivaient, vous les avez fait monter l'un après

5 l'autre à bord des bus ?

6 R. Oui.

7 Q. Lors de l'embarquement des personnes à bord des bus, est-ce qu'il y

8 avait eu d'autres personnes ? Est-ce qu'il y avait eu d'autres personnes,

9 excepté des soldats, des membres de la police militaire, vous-même et des

10 soldats ? Est-ce qu'il y avait d'autres personnes dans cette région, dans

11 cet espace autour des bus ?

12 R. Devant les bus, à partir de la barrière jusqu'aux bus, il n'y avait

13 personne, excepté moi et mes policiers.

14 A une distance de 10 mètres par rapport à moi, dans la rue, il y

15 avait des membres de la Défense territoriale.

16 Q. Avez-vous vu les membres de la TO dans la cour de l'hôpital au moment

17 où vous étiez dans la cour de l'hôpital ?

18 R. Non, ils n'y étaient pas.

19 Q. Est-ce que pendant que vous y étiez, à part les bus, vous avez vu

20 d'autres voitures garées ?

21 R. Non, il n'y avait pas d'autres voitures sur cette partie de la route où

22 je me trouvais.

23 Q. Avez-vous vu des camions médicaux, ou des ambulances, plutôt ?

24 R. Il y en avait de l'autre côté de l'hôpital.

25 Q. Pendant que vous y étiez, avez-vous vu qu'une personne sur une civière

26 ait été amenée jusqu'au bus ?

27 R. Non.

28 Q. Est-ce que pendant que vous étiez près des bus, est-ce que vous avez vu

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1 des femmes devant les bus ?

2 R. Non, il n'y avait personne.

3 Q. Bien. Pendant que vous étiez là-bas, avez-vous entendu des menaces

4 adressées aux personnes qu'on embarquait à bord des bus ?

5 R. Il y avait des conversations entre les gens, mais il n'y avait rien de

6 spécial par rapport à ce qu'ils disaient, ce qu'ils adressaient aux gens

7 qui montaient à bord des bus.

8 Q. Avez-vous entendu quelqu'un dire : "Ils vont être engloutis par la nuit

9 au milieu de la journée."

10 R. Non.

11 Q. Pendant que vous étiez près des bus, avez-vous vu Sljivancanin en train

12 de descendre du bus dans la partie où se trouvait la barrière, autour de

13 l'hôpital ?

14 R. Non.

15 Q. Est-ce que le nom de Bogdan Kuzmic vous dit quelque chose ?

16 R. Non.

17 Q. Est-ce que le nom de Darko Kovacevic, surnommé Drka, vous dit quelque

18 chose ?

19 R. Non.

20 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais aborder un

21 autre sujet. Je me demande si l'on pourrait faire la première pause un peu

22 plus tôt. Parce que la deuxième partie de l'audience va durer jusqu'à 12

23 heures 45, et il serait peut-être mieux de faire la première pause

24 maintenant.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La deuxième partie de l'audience, oui,

26 vous avez raison, durera jusqu'au 12 heures 45. Donc, nous allons finir une

27 heure plus tôt que d'habitude.

28 Maître Lukic, nous allons faire une pause maintenant et nous allons

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1 continuer à 11 heures 15.

2 --- L'audience est suspendue à 10 heures 55.

3 --- L'audience est reprise à 11 heures 23.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je m'excuse de ce retard, mais

5 je me suis occupé d'une autre question. C'est pour cela que j'ai été en

6 retard de 10 minutes, donc c'est ma faute.

7 Maître Lukic, vous pouvez poursuivre.

8 M. LUKIC : [interprétation]

9 Q. Monsieur Vukasinovic, est-ce qu'à un moment donné, vous avez quitté la

10 cour de l'hôpital ? Comment avez-vous fait cela et quelle était la suite de

11 cela ?

12 R. Quand j'ai fini avec l'embarquement des gens à bord de tous les trois

13 autobus, puisqu'il n'y avait plus personne, j'ai estimé qu'il fallait que

14 je quitte moi-même cet espace.

15 Q. Quel était le nombre de bus devant l'hôpital ?

16 R. Il y en avait six.

17 Q. Vous avez dit que les bus venaient l'un après l'autre pour que les gens

18 montent à leur bord ?

19 R. Oui.

20 Q. Quel était le nombre de bus qui étaient partis, je dirais, au sein de

21 ce premier groupe ?

22 R. Le groupe qui était déjà fouillé, le groupe de personnes qui ont été

23 déjà fouillées, je les ai fait monter à bord des trois bus, et après, j'ai

24 décidé que ce groupe de personnes qui était déjà à bord des autobus parte.

25 Il ne fallait plus rester sur place pour attendre d'autres personnes parce

26 que je ne savais pas s'il y en aurait. J'ai décidé d'acheminer les autobus

27 vers la caserne à Vukovar. A bord de mon véhicule, je suis parti avec ces

28 trois bus dans la direction de la caserne de Vukovar.

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1 Q. Sur place, quel nombre de bus est resté sur place ?

2 R. Trois bus sont restés sur place.

3 Q. Vous savez que je vous ai présenté lors de la séance de récolement, et

4 lors du procès à Belgrade cela vous a été présenté, à savoir qu'il y a des

5 personnes qui affirmaient que tous les six bus étaient partis en même

6 temps. Je vous ai déjà dit cela. Encore une fois je vous demande si vous

7 êtes certain de cela, à savoir que vous avez emmené avec vous le premier

8 groupe de personnes qui étaient à bord des trois bus.

9 R. J'en suis certain, absolument certain, parce que je me suis occupé en

10 personne de cela. Et ici, devant le Tribunal, j'affirme que ces autres

11 histoires ne correspondent pas à la réalité et que je pense que ce que j'ai

12 dit c'est exact parce que je sais ce que j'ai fait. J'ai emmené les gens se

13 trouvant à bord des trois bus et j'ai dit qu'il y avait entre 100 et 150

14 personnes à bord de ces bus. Je les ai emmenées dans la direction de la

15 caserne à Vukovar.

16 Q. Pouvez-vous nous dire approximativement l'heure à laquelle cela s'est

17 passé, à savoir à quel moment de la journée approximativement vous êtes

18 parti avec ce premier groupe en direction de la caserne à Vukovar ?

19 R. J'ai déjà parlé de cela dans mes déclarations. Je pense qu'il

20 s'agissait de 10 heures de la matinée. Cela aurait pu être l'heure du

21 départ.

22 Q. Quel était l'axe de votre déplacement dans la direction de la caserne

23 par rapport à l'axe que vous avez emprunté auparavant ? Est-ce que c'était

24 la même route que vous avez empruntée en allant vers la caserne ?

25 R. Oui. Il n'y avait pas beaucoup de choix. Il n'y avait qu'une seule

26 route, et nous avons emprunté cette route en traversant le pont et nous

27 sommes arrivés à la caserne.

28 Q. Pouvez-vous nous dire, Monsieur Vukasinovic, pour autant que vous vous

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1 en souveniez, quand vous êtes arrivé à la caserne où se trouvaient les bus

2 près de la caserne, et quelle était la suite des événements ?

3 R. Quand je suis arrivé à la caserne, je suis entré dans l'enceinte de la

4 caserne par un point de contrôle qui se trouvait à l'entrée de la caserne.

5 La barrière ne marchait pas, elle se trouvait en position verticale, on ne

6 pouvait pas la faire bouger. Je suis entré dans l'enceinte de la caserne,

7 j'ai fait garer les bus en forme de cercle dans l'enceinte de la caserne

8 l'un après l'autre, en cercle, à une distance convenue, l'un après l'autre.

9 Q. A bord de quel véhicule vous trouviez-vous dans cette colonne de bus

10 qui partait de l'hôpital dans la direction de la caserne ?

11 R. C'était le véhicule de type Puh, P-u-h, qui se trouvait devant la

12 colonne.

13 Q. Dites-nous ce qui s'est passé au moment où vous êtes arrivé dans la

14 caserne.

15 R. Quand je suis arrivé dans la caserne et après avoir fait garer les bus,

16 j'ai pu m'apercevoir de la présence des voitures privées à bord desquelles

17 se trouvaient les membres de la TO de Vukovar. Ils étaient juste derrière

18 moi. Ils sont entrés dans la caserne à pied. Ils se trouvaient en face des

19 bus.

20 Lorsque je suis descendu de mon véhicule, j'ai vu qu'il y en avait un

21 certain nombre. A mon avis, il y en avait entre 30 et 40, membres de la TO.

22 Ils étaient à côté des bus. Ils ont commencé à exprimer leur

23 mécontentement. Ils ont commencé à menacer les gens qui se trouvaient à

24 bord des bus. Il s'agissait probablement des personnes qu'ils ont pu

25 reconnaître en tant que leurs voisins, avec lesquels ils vivaient en temps

26 de paix.

27 Ils se sont montrés agressifs. Ils les ont reconnus, les gens qui

28 étaient à bord des bus, et ils ont voulu les menacer parce qu'ils ont fait

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1 quelque chose auparavant. Ils ont reconnu certains d'entre leurs voisins

2 qui leur devaient quelque chose. Ils les insultaient, ils les menaçaient,

3 ils leur criaient dessus. C'était un grand vacarme qui --

4 Q. Est-ce qu'ils ont essayé de monter à bord de ces bus ?

5 R. Non, non. J'étais parfaitement conscient du fait qu'ils n'oseraient pas

6 le faire. Les autobus étaient fermés. Il y avait des policiers qui se

7 trouvaient à la porte des autobus. Ils n'avaient aucune possibilité

8 d'entrer dans les autobus. C'était complètement exclu comme possibilité.

9 Q. J'ai oublié de vous poser une question précédente. Nous entendrons ce

10 que vous avez à dire à ce sujet. Est-ce que ces autobus qui ont été

11 escortés ? Est-ce qu'ils ont été escortés par d'autres personnes hormis la

12 police militaire ? Est-ce qu'il y avait des officiers également présents ?

13 R. Non, non, j'étais le seul officier.

14 Q. Merci. Avec l'évolution de la situation, au vu de la tournure que

15 prenait la situation, est-ce que vous avez pris des mesures pour ce qui est

16 de la situation qui prévalait à l'extérieur des autobus ?

17 R. Au vu de la situation, je pouvais voir qu'ils étaient agressifs. Le

18 commandant de la Compagnie de la Police militaire était présent, c'était le

19 capitaine Predojevic. C'est lui qui s'occupait de la sécurité de la

20 caserne, qui devait assurer la sécurité de la caserne. Je l'ai appelé, et

21 il a été surpris par mon arrivée et par l'arrivée de ces membres de la TO

22 dans cette enceinte. Je lui ai dit que c'était une mission qui devait être

23 exécutée pendant cette journée et que nous allions très vraisemblablement

24 organiser un convoi vers Sremska Mitrovica et depuis cet endroit.

25 Je lui ai dit que je devais repartir à l'hôpital et que de ce fait, il

26 devait assurer la sécurité et la protection des personnes qui se trouvaient

27 dans les autobus pour éviter que ces personnes soient harcelées, pour que

28 l'on se rapproche de ces personnes. Je lui ai dit qu'il fallait qu'il

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1 assure la sécurité des autobus.

2 Q. Est-ce que vous avez entendu ou est-ce que vous saviez s'il y avait

3 d'autres officiers présents à ce moment-là ?

4 R. Oui, oui, j'en ai entendu. Nous avions le poste de commandement avancé

5 à cet endroit-là, et le commandant avait établi son poste de commandement

6 avancé pour la caserne, avant et après la chute de Vukovar. Lukic était

7 présent, le lieutenant-colonel Panic était présent également, et ils

8 étaient probablement dans la caserne. Je ne les ai pas vus. Ils étaient, je

9 suppose, dans l'enceinte de la caserne.

10 Q. Il est indiqué, et je fais référence à la traduction, "je suppose".

11 Vous dites donc que vous saviez qu'ils étaient là ? Je fais référence à

12 Panic et à Lukic.

13 R. Oui, oui, c'était le poste de commandement avancé. C'était le

14 commandant du poste de commandement avancé. Je suppose qu'il était présent.

15 Q. Est-ce que vous avez entendu Panic ? Est-ce que vous avez entendu que

16 Panic se trouvait là au moment où vous y étiez ?

17 R. Oui, je l'ai entendu. J'ai entendu que Panic se trouvait dans la

18 caserne, et c'est Mladen Predojevic qui me l'a dit.

19 Q. Merci. Que s'est-il passé ensuite ?

20 R. J'ai insisté afin de voir qui était leur dirigeant. J'ai vu que c'était

21 cet homme, le commandant Vujovic.

22 Q. Vous dites "parmi eux", alors quel était le groupe auquel vous faites

23 référence ?

24 R. Le groupe de la TO.

25 Q. Que s'est-il passé alors ?

26 R. Je lui ai dit d'exercer des pressions sur ces combattants pour faire en

27 sorte de calmer le jeu un peu et pour les faire sortir de la caserne. Je

28 lui ai également dit que j'avais d'autres obligations dont il fallait que

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1 je m'acquitte vis-à-vis de l'hôpital.

2 Q. Quelle fut sa réaction ?

3 R. Il n'y a pas véritablement eu de réaction de sa part. Il s'est contenté

4 de me regarder sans vraiment réagir, un peu comme si ce que je lui disais

5 n'était véritablement si important. Alors j'ai insisté pour qu'il exerce

6 des pressions, pour qu'ils arrêtent de crier, de vociférer, et cetera.

7 Q. Est-ce qu'il y a eu un affrontement en quelque sorte ou une

8 confrontation entre vous et eux, à un certain moment ?

9 R. Oui, oui. Il y a eu quand même une altercation un peu plus grave qui

10 s'est produite au moment où un conducteur, le conducteur de M. Sljivancanin

11 est arrivé. Il avait un document imprimé qu'il m'a remis, et il était

12 inscrit sur ce document le nombre de personnes qui devaient repartir à

13 l'hôpital. C'était une liste, une liste sur laquelle figuraient les noms de

14 20 personnes.

15 Q. Qu'avez-vous fait ?

16 R. J'ai dit au conducteur que tout allait bien. Je lui ai dit d'amener un

17 autobus vide pour que je puisse mettre ces personnes à bord de cet autobus

18 pour les transporter entre-temps. Je me suis rendu de bus en bus en faisant

19 l'appel de ces personnes pour revoir si ces personnes se trouvaient dans

20 l'un ou l'autre de ces autobus.

21 Je les ai tous trouvés. Je leur ai dit de se rapprocher de la porte

22 d'entrée. Je leur ai dit que je ferais l'appel par la suite pour les

23 transférer dans l'autobus qui entre-temps était arrivé. Ils ne savaient pas

24 où ils allaient être conduits. Ils ont tout simplement entendu qu'ils

25 devaient se présenter et ils ont réagi lorsque j'ai fait l'appel et que

26 j'ai prononcé leur nom.

27 Puis, le bus est arrivé. Je me suis rapproché d'une dizaine de mètres, donc

28 je me trouvais à mi-chemin entre tous ces autobus pour que je puisse faire

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1 monter dans l'autobus les gens le plus rapidement possible. Il y avait des

2 gens qui venaient du premier bus, du deuxième bus et du troisième bus, et

3 je voulais en fait qu'ils montent dans l'autre autobus.

4 Pendant ce transfert, là il y a eu encore des manifestations

5 d'arrogance de la part de personnes assemblées. Il y a même eu une ou deux

6 personnes qui ont essayé de frapper de leurs mains. Ils n'avaient pas de

7 matraques ou de bâtons, mais il y a certaines personnes qui ont reçu un

8 coup ou deux. D'ailleurs, j'ai certainement dû recevoir un ou deux coups

9 également. Je ne sais pas combien exactement.

10 Il y a eu donc cet affrontement, cette altercation avec ce conflit,

11 mais j'ai réussi quand même à surmonter le problème. Puis, finalement, ils

12 ont renoncé. Peut-être qu'ils attendaient une autre occasion. Entre-temps,

13 j'attendais qu'ils quittent la caserne, j'attendais qu'ils sortent de cette

14 enceinte.

15 Puis, il faut savoir que dans cet intervalle, M. Vujevic est parti de

16 la caserne.

17 Q. Je vais vous poser un certain nombre de questions à ce sujet, puis

18 ensuite nous passerons à autre chose. J'aimerais savoir, Monsieur, si vous

19 avez autre chose à dire à propos des autobus et du fait que vous les avez

20 déplacés.

21 R. Non. J'étais juste en train de dire que j'ai ramené le bus à l'hôpital.

22 Q. Nous étions juste sur le point d'aborder ce thème, Monsieur.

23 Pour ce qui est de ce groupe d'hommes de la TO qui manifestaient leur

24 mécontentement, si je peux m'exprimer de la sorte, j'aimerais savoir si

25 vous avez vu parmi ce groupe des soldats de la JNA.

26 R. Non. Pour autant que je m'en souvienne, les soldats de métier de la JNA

27 étaient autour des autobus et les protégeaient, ces autobus contre les

28 attaques de ces personnes. D'après ce que j'ai pu observer, je n'ai vu

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1 aucun de nos soldats de métier parmi ce groupe. Je n'ai pas vu de soldats

2 qui auraient hué, persiflé, vociféré. Cela ne s'est pas passé.

3 Q. Est-ce que vous avez vu certain de vos collègues, de vos collègues

4 officiers qui auraient été là et qui auraient agi de façon plutôt passive

5 et qui eux aussi auraient eu recours aux insultes ?

6 R. A ce moment-là, il n'y avait personne hormis moi-même et Mladen

7 Predojevic. Je ne sais pas s'il y avait ou je ne sais pas qui, quels sont

8 les officiers qui auraient pu donc insulter ou persifler.

9 Q. Je suppose, d'après votre déposition, que vous étiez donc en train de

10 faire monter ces personnes à bord des autobus, et vous aussi vous avez

11 écopé d'un ou deux coups dans cette situation, n'est-ce pas ?

12 R. Oui, mais je suis assez solide physiquement, donc cela ne m'a pas

13 véritablement beaucoup impressionné.

14 Q. Durant ce moment que vous avez passé à la caserne et avant que vous ne

15 partiez pour repartir à l'hôpital, est-ce que vous avez vu des camions ?

16 Est-ce que vous avez vu des camions avec ces autobus ou à côté de ces

17 autobus ?

18 R. A l'intérieur de la caserne, vous voulez dire ?

19 Q. Oui.

20 R. Il n'y avait aucun camion à l'intérieur de la caserne. Bien au

21 contraire, d'ailleurs, parce que c'était mon unité qui se trouvait là. Il y

22 avait également les véhicules de transport de troupes, mais c'était une

23 unité de la police militaire avec son propre matériel.

24 Q. Pendant que vous vous trouviez à la caserne, est-ce que vous avez

25 remarqué une camionnette ou une fourgonnette qui serait arrivée jusqu'à

26 l'endroit où se trouvaient les autobus ? Est-ce vous avez vu quelqu'un que

27 l'on aurait fait sortir de l'autobus, et ce, contrairement à la décision

28 que vous aviez prise auparavant, en sus des personnes que vous aviez fait

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1 vous-même descendre des autobus ?

2 R. Non, non, absolument pas, pas tant que j'étais là, et d'ailleurs il n'y

3 avait pas d'autres véhicules là-bas.

4 Q. Pendant que vous étiez dans la caserne, est-ce que vous avez vu à un

5 moment donné M. Sljivancanin ?

6 R. Non, je ne l'ai pas vu.

7 Q. Qu'en est-il du nom de Milan Bulic, connu également sous le nom de

8 Bulija ? Est-ce que cela évoque quelque chose pour vous ?

9 R. Non.

10 Q. Ce bus vide qui est arrivé, qui venait de l'hôpital, est-ce qu'il y

11 avait également dans cet autobus deux policiers militaires, si vous vous en

12 souvenez, Monsieur ?

13 R. Oui.

14 Q. Outre ces policiers, est-ce que quelqu'un d'autre est monté dans cet

15 autobus à part les personnes que vous avez fait monter dans l'autobus ?

16 Est-ce qu'il y a des soldats ou des membres de la TO qui seraient entrés

17 dans cet autobus, à l'exception de ces officiers de police militaire ?

18 R. Non.

19 Q. Que s'est-il passé ensuite ?

20 R. J'ai fait monter à bord de cet autobus 20 personnes, et ce, sur la base

21 de la liste dont je disposais. Ensuite, nous sommes repartis vers

22 l'hôpital. J'ai donc dirigé ces personnes juste à l'extérieur du portail de

23 l'hôpital, et là j'ai vu beaucoup de membres du personnel médical. Il y

24 avait d'autres personnes également, puis une fois de plus, j'ai remarqué

25 Vujevic, le commandant de la TO, ainsi que leur ancien commandant, M.

26 Stanko Vujanovic. J'ai également vu, à l'extérieur, la personne qui à

27 l'époque était le commandant Sljivancanin.

28 Q. Cet autobus que vous avez conduit, qu'en est-il des deux autres

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1 autobus ?

2 R. Les deux autres autobus avaient à leur bord les autres personnes qui

3 avaient été séparées. Ils attendaient dans les autobus. Les portes des

4 autobus étaient fermées, et les policiers se trouvaient à l'intérieur des

5 autobus.

6 Q. Qu'en est-il des personnes qui vous avez reconduites à l'extérieur de

7 l'hôpital ? …

8 R. Lorsque je suis arrivé avec ces personnes, le commandant Sljivancanin

9 leur a parlé, à chacune d'entre elles. Il leur a parlé de leur libération.

10 Il a parlé à chacune de ces personnes individuellement, leur a demandé ce

11 qu'elles avaient fait, où elles avaient été. Chacune de ces personnes lui a

12 fourni des garanties, car tout le monde connaissait quelqu'un qui faisait

13 partie du personnel de l'hôpital parmi les infirmières, parmi les médecins.

14 Chaque fois qu'une personne arrivait, il donnait leur avis sur la personne

15 en disant si ces personnes avaient commis ou perpétré un délit au pénal ou

16 s'ils avaient participé aux combats, il disait si ces personnes devaient

17 être libérées ou non.

18 Il a véritablement étudié tous les cas de figure et il demandait

19 l'approbation de tout le monde. Lorsque la conclusion dégagée était que

20 cette personne n'avait absolument pas provoqué de tort à personne, cette

21 personne était libérée. Parfois, il y avait même les commandants de la TO

22 qui disaient : "Non, mais celui-là, il n'a pas causé de problèmes. Il peut

23 être libre de partir et de disposer."

24 Il y en a trois ou quatre qui se sont exprimés pour dire qu'ils avaient

25 participé aux combats. Ils ont indiqué qu'ils avaient été envoyés là-bas,

26 donc nous les avons renvoyés. Je pense, en fait, que le commandant

27 Sljivancanin a dû libérer une quinzaine, 15 ou 16 personnes pour lesquelles

28 il avait été indiqué qu'elles étaient innocentes, et que ce n'était pas la

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1 peine de continuer à les séparer de la sorte.

2 Q. Un moment, je vous prie. J'aimerais revenir sur quelque chose de très

3 précis. Lorsque vous êtes revenu de la caserne à l'hôpital, est-ce que vous

4 avez informé le commandant Sljivancanin de ce qui se passait ? Est-ce que

5 vous lui avez relaté ce qui se passait à ce moment-là ?

6 R. Oui. Je dois dire que j'étais un peu courroucé pour la première fois.

7 J'étais plutôt tolérant dans certaines situations, mais là, c'était quelque

8 chose qui m'était difficile de faire. Au vu des circonstances, il était

9 assez difficile de faire sortir ces personnes. Je me rends compte que ces

10 personnes étaient très arrogantes et j'avais peur des conséquences. Je lui

11 ai demandé, en fait, je lui ai dit que nous ne devrions pas faire ce genre

12 de chose, que ce n'était pas nécessaire, que cela allait entraver notre

13 mission et que cela ne faisait qu'inciter ces hommes de la Défense

14 territoriale qui pensaient très certainement : "Regardez, regardez ils sont

15 en train de les libérer, ils sont sur le point de libérer," enfin ce genre

16 de chose.

17 Donc, je lui ai demandé de ne pas procéder à ce genre de chose, mais

18 plutôt de nous en tenir à la mission principale qui nous avait assignée. Il

19 s'agissait d'organiser les groupes au sein de la caserne, de former un

20 convoi, d'organiser ou de mettre sur pied un système de sécurité et de

21 protection et d'emmener ces personnes à Sremska Mitrovica où elles étaient

22 censées d'ailleurs être emmenées.

23 Il devait y avoir un autre tri là-bas avec des interrogatoires. Il

24 aurait été facile d'évaluer et de déterminer qui était criminel de guerre

25 et qui était innocent. C'est ce que je lui demandais à l'époque, à ce

26 moment-là. J'ai dit qu'il fallait faire sortir ces gens de là afin d'éviter

27 de susciter davantage d'irritation de la part des hommes de la TO.

28 Q. Est-ce que vous lui avez dit ce qui s'était passé à la caserne, avant

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1 votre départ ? Est-ce que vous lui avez relaté ce qui s'était passé, qui

2 était présent sur les lieux, et cetera ?

3 R. C'est quasiment inutile de le dire. C'est la raison pour laquelle je

4 lui ai relaté ce que je lui ai relaté. Je lui ai dit que j'avais eu

5 quelques problèmes avec certains, qu'ils m'avaient suivi tout le trajet,

6 qu'ils étaient arrivés jusqu'à la caserne, qu'ils manifestaient leur

7 mécontentement et qu'ils avaient quasiment attaqué physiquement ces

8 personnes.

9 Il a semblé surpris. "Qu'est-ce qu'ils faisaient, Grand Dieu, là-

10 bas," dit-il. Je lui ai dit : "Et bien, voilà, ils y sont en tout cas là-

11 bas. Nous avons des problèmes à la caserne." C'est pour cela en fait que je

12 lui ai demandé de ne pas procéder à ce genre de chose. Il a été un tant

13 soit peu surpris de leur comportement. Je lui ai dit qu'il y avait un

14 système de sécurité qui était en vigueur dans la caserne. Je lui ai dit

15 qu'il n'y avait aucun problème de sécurité, qu'il y avait quelques petits

16 problèmes qui n'étaient pas très importants. J'étais assez catégorique en

17 lui disant qu'il ne faudrait pas faire ce genre de chose. Puis, je lui ais

18 dit que la sécurité ne posait pas de problème. Je les ai également mis en

19 garde. Je leur ai dit que de telles mesures pouvaient compliquer la

20 situation au vu des circonstances qui prévalaient en temps de guerre.

21 Q. Vous avez décrit la situation telle que vous l'avez trouvée à l'hôpital

22 lorsque vous y êtes arrivé le matin. A ce moment-là, est-ce que vous avez

23 remarqué quelque chose de différent ? Est-ce qu'il y a eu des

24 modifications, des changements par rapport aux premières impressions que

25 vous aviez eues lorsque vous étiez à l'extérieur de l'hôpital ?

26 R. Oui, bien sûr. Car la situation était que ce groupe allait se déplacer.

27 M. MOORE : [interprétation] Ce n'est pas de sa faute. Je ne sais pas s'il

28 s'agit d'une erreur de traduction ou non. Mais voilà ce que j'aimerais

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1 dire. Si vous prenez la page 43 [comme interprété] : "Je lui ai dit qu'il

2 n'y avait pas de problème de sécurité, mais je les ai également mis en

3 garde, car je leur ai dit que ce genre de mesures pourrait peut-être rendre

4 les choses un peu difficile." Est-ce qu'il s'agit d'une mise en garde

5 destinée à la Défense territoriale ou une mise en garde destinée à M.

6 Sljivancanin ?

7 L'INTERPRÈTE : Les interprètes indiquant qu'ils ont dit non pas "je les ai

8 mis en garde," mais "je l'ai mis en garde."

9 M. MOORE : [interprétation] C'est ce que je pensais.

10 M. LUKIC : [interprétation]

11 Q. Vous avez entendu ce qui vient d'être dit, Monsieur Vukasinovic, est-ce

12 que vous pourriez répéter et nous dire qui vous avez mis en garde à ce

13 moment-là, ce que vous avez relaté, ce que vous avez vu à la caserne ?

14 R. J'ai informé le commandant Sljivancanin de leur présence là-bas. Je lui

15 ai parlé du comportement des hommes de la TO. Je l'ai informé et j'ai

16 réitéré en lui disant qu'il n'y avait pas de problème de sécurité, mais

17 qu'il ne devrait plus me confier ce genre de mission. Il ne fallait pas

18 qu'il me renvoie là-bas en s'attendant à ce que je procède à l'évacuation.

19 J'ai demandé que ces personnes ne puissent plus intervenir de la

20 sorte. Je voulais m'en tenir à notre mission de départ qui consistait à

21 prendre ces personnes, à les emmener à la caserne et à les faire sortir de

22 la caserne. C'est en ce sens que j'ai informé le commandant Sljivancanin

23 des mesures qui avaient été prises par les hommes de la TO à la caserne.

24 Q. C'est beaucoup plus simple maintenant. J'aimerais savoir ce qui

25 représente la différence entre cette arrivée de votre part et la première

26 fois que vous êtes arrivé à l'extérieur de l'hôpital ?

27 R. Il y avait beaucoup plus de mécontentement qui était manifesté à ce

28 moment-là. Ils utilisaient force slogans, en disant : "Ils sont en train de

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1 tous les libérer, ils sont en train de protéger ces personnes qui ont tué

2 les membres de notre famille." Ce genre de choses qui était dite. Il

3 s'agissait de manifestation, de mécontentement.

4 Puis, ils pensaient à l'époque que nous étions sur le point de mettre

5 en liberté toutes ces personnes. Ils exprimaient en des termes très durs

6 leur mécontentement et leur désaccord avec le fait que Sljivancanin avait

7 libéré une quinzaine de personnes. Lorsque je dis, "ils," j'entends les

8 hommes de la TO qui restaient à ce moment-là. Il y en avait un peu plus que

9 par rapport au matin. Peut-être qu'à un moment donné, ils étaient partis de

10 la caserne et étaient partis de l'hôpital. Ils étaient beaucoup plus

11 nombreux à ce moment-là par rapport au matin.

12 Q. Qu'en est-il de ce qui s'est passé dans l'enceinte de l'hôpital, dans

13 la cour de l'hôpital ? Est-ce que vous avez remarqué quoi que ce soit ?

14 R. Oui, j'ai observé la situation de loin et j'ai remarqué qu'un certain

15 nombre de journalistes étaient arrivés. Ils étaient assez nombreux. Ils se

16 trouvaient près de l'entrée de l'hôpital. Ils parlaient. Ce qui, en fait,

17 commentait l'indication que les équipes de journalistes et de la presse

18 étaient arrivées un peu avant que je ne revienne à l'hôpital.

19 Q. A un moment donné, pendant cette journée, est-ce que vous êtes allé à

20 Velepromet, Monsieur Vukasinovic ?

21 R. Non.

22 Q. Est-ce que vous-même, vous avez assisté à la réunion gouvernementale

23 pour la Slavonie orientale et le Srem occidental ?

24 R. Non.

25 Q. Que s'est-il passé à ce moment-là ?

26 R. Nous avons libéré les personnes que nous avons libérées. Il y avait cet

27 autobus avec trois ou quatre autres personnes, puis il y avait un autre

28 autobus qui était bondé. Donc, il y avait un total de trois groupes. Il y

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1 avait un autre groupe. Je les ai tous conduits vers la caserne. Lorsque je

2 suis arrivé à la caserne, j'ai remarqué qu'il n'y avait pas d'autobus à la

3 caserne. Je ne suis pas entré dans l'enceinte de la caserne. Le capitaine

4 Predojevic est venu à ma rencontre au niveau du portail, et il a dit :

5 "Commandant." Je lui ai dit : "Où sont les autobus ?" Il m'a dit :

6 "Camarade commandant, les autobus sont partis pour Ovcara." Je lui ai dit :

7 "Qui en a donné l'ordre ?" Il m'a répondu : "C'est le commandant qui l'a

8 fait." Et il m'a dit : "Il va falloir, qu'avec ce groupe, vous vous

9 dirigiez vers la même direction." Je dois dire que j'étais quand même un

10 tant soit peu surpris. Au vu des réponses qui m'ont été apportées, je

11 n'avais pas véritablement de raison que cela ne s'était pas passé. Donc,

12 j'ai fait faire demi-tour à mes autobus et nous avons ainsi emprunté la

13 direction d'Ovcara.

14 Q. Quand est-ce que vous avez vu pour la dernière fois Sljivancanin ?

15 R. C'est à ce moment-là, lorsque nous avons étudié la situation des 20

16 personnes qu'il avait libérées. Voilà, c'est la dernière conversation que

17 nous avons eue. Je ne l'ai plus revu jusqu'à plus tard, le même jour, en

18 soirée.

19 Q. Lors de cette dernière rencontre, vous a-t-il jamais mentionné le terme

20 "Ovcara" ? L'a-t-il jamais prononcé ?

21 R. Non.

22 Q. A un moment quelconque, vous a-t-il mentionné un changement par rapport

23 au planning que vous aviez établi pour la journée d'avant ?

24 R. Non, non. Il n'y a eu aucune modification.

25 Q. Que s'est-il passé par la suite ?

26 R. Lorsque je suis arrivé dans Ovcara avec mon groupe d'autocars, j'ai

27 remarqué que les trois premiers cars qui constituaient le premier groupe

28 étaient vides. Je suis descendu de mon véhicule et j'ai vu qu'il y avait

Page 15038

1 plein de membres de la TO, une quarantaine, une cinquantaine également

2 devant le hangar. J'ai vu un groupe assez large qui circulait devant le

3 hangar qui était ouvert. Je me suis retourné pour voir ce qui se passait,

4 j'ai vu le chef d'état-major, le colonel Panic. Il était le chef d'état-

5 major à l'époque.

6 Q. Avant de poursuivre, vous avez dit que ces autocars étaient vides. Où

7 est-ce que vous avez garé les vôtres, vos autocars par rapport à ces

8 autocars que vous avez mentionnés ? Il y en a combien maintenant ? Il faut

9 que je les compte. Les trois, les trois qui, de toute évidence, étaient

10 arrivés avant vous ?

11 R. Je me suis rangé dans la colonne, derrière eux.

12 Q. Par la suite, que s'est-il passé ?

13 R. J'ai vu que c'était quelque chose qui ne correspondait à aucune règle.

14 C'était quelque chose qu'il m'avait donné. J'ai vu qu'il n'y avait pas

15 d'ordre, et je me suis adressé au colonel Panic. J'étais en colère. J'ai

16 dit : "Qu'est-ce qui se passe ? Qui a donné l'ordre pour qu'on fasse

17 cela ?" Et lui, il a été surpris à son tour. Il m'a dit que c'était suite à

18 un ordre qui avait été donné.

19 Donc, j'ai rebroussé chemin et je suis reparti droit dans le hangar

20 pour vérifier ce qui se passait à l'intérieur. Là-dedans, j'ai vu qu'il y

21 avait à l'intérieur un groupe de membres de la Défense territoriale, que

22 les individus qu'on avait descendus des autocars semblaient avoir peur et

23 qu'ils étaient en train de recevoir des coups, des gifles. C'était évident,

24 les gens avaient peur.

25 Alors, la conclusion que j'en ai tirée, c'est qu'ils étaient rentrés

26 dans le hangar pour rechercher des individus qu'ils avaient menacés

27 précédemment. Ils cherchaient à les repérer. Il y avait une espèce de cohue

28 à l'intérieur et j'ai vu de nouveau le commandant, le commandant de la TO,

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1 Vujovic. Alors, j'ai décidé de les mettre tous dehors, d'établir l'ordre.

2 Pour ce faire, je me suis dit qu'il fallait que je m'adresse à lui pour

3 qu'il me donne un coup de main.

4 Q. Où est-ce que vous avez vu Vujovic, à l'intérieur du hangar ou à

5 l'extérieur, devant celui-ci ?

6 R. Vujovic était devant le hangar. Devant le hangar, je lui ai parlé. Je

7 lui ai dit : "Mais toi, tu es leur commandant, il faut qu'on fasse quelque

8 chose, qu'on les mette dehors, ces hommes. Tes hommes, ils ne peuvent pas

9 rentrer comme cela à l'intérieur, asséner des coups, entreprendre quoi que

10 ce soit physiquement face à des individus qui sont placés sous nos ordres,

11 enfin dont nous sommes responsables."

12 Q. Que s'est-il passé ? Comment a-t-il réagi ? Quelle a été la suite ?

13 R. Entre-temps, j'avais vu des policiers de la 80e Brigade. Ils étaient

14 sur place. Il y en avait cinq ou six. Eux aussi, ils avaient peur. Je pense

15 qu'il y avait un officier parmi eux. Je ne sais pas lequel. Ils avaient

16 peur.

17 Je les ai appelés. J'ai appelé mes policiers pour qu'on rentre à

18 l'intérieur. Avec l'aide du commandant Vujovic, on voulait résoudre la

19 situation. On voulait les mettre dehors pour que ces individus qui avaient

20 été placés là restent seuls à l'intérieur.

21 Pendant cette conversation avec Vujovic, pendant quelques temps il

22 m'a regardé d'un air détendu comme s'il allait m'aider, puis il n'allait

23 pas m'aider. Je circulais, je faisais les cent pas. Lui, il disait : "Mais

24 je ne peux pas résoudre cela. C'est rien." En fin de compte, lorsque j'ai

25 vu que je ne pourrais pas résoudre la situation tout seul, je lui ai dit :

26 "Ecoute, Vujovic, la situation est grave. Je veux que tu m'aides pour qu'on

27 jette dehors ces gens-là. On ne les a pas amenés ici pour que vous les

28 jugiez, pour que vous les passiez à tabac." C'est cela que je lui ai dit.

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1 Lui m'a répondu : "Bien." Les nôtres, les vôtres, on va voir. Je vais

2 t'aider. Il a commencé à agir auprès de ces hommes petit à petit. On

3 cherchait à les voir dans cette masse, dans cette foule, puis on les a mis

4 dehors les uns après les autres.

5 Une fois que j'étais sûr qu'il n'y en avait plus à l'intérieur, j'ai

6 tourné les trois autocars vides, puis à l'aide de mes soldats, j'ai fait

7 descendre et entrer dans le hangar les hommes que j'avais emmenés.

8 Il n'y a pas eu de passages à tabac ou de coups pendant ce transfert

9 à l'intérieur du hangar, d'après ce que j'ai pu voir. Ils étaient sur

10 place. Il y avait des voix peut-être un peu élevées, des choses, mais à

11 l'intérieur du hangar, j'ai vu qu'il y avait des gens qui saignaient, qui

12 étaient un peu désorientés, et j'ai compris qu'il y avait eu des coups qui

13 avaient été donnés.

14 Q. Page 45, ligne 11 du compte rendu d'audience, votre dialogue avec

15 Vujovic, peut-être que la phrase est un petit peu maladroite. Est-ce que

16 vous pouvez essayer de nous répéter les propos de Vujovic en réponse,

17 lorsque vous avez insisté pour qu'il vous aide ?

18 R. Je ne peux pas me rappeler les mots exacts. Peut-être que je sais qu'on

19 s'est un petit peu querellé, et je sais qu'il a dit quelque chose comme :

20 "Ce sont les leurs." Je pense que j'ai

21 répondu : "Non, mais ce sont les nôtres." C'est ce sens-là. Mais pour

22 l'essentiel, il s'agissait pour moi de lui demander de faire sortir ces

23 hommes du hangar; ils n'avaient pas leur place à l'intérieur.

24 Enfin, si je me souviens bien, c'était cela, cette conversation. Je

25 voulais qu'il m'aide, qu'il me porte assistance pour résoudre le problème.

26 Q. D'après vos souvenirs, quand vous êtes entré dans le hangar, il y avait

27 combien de membres de la Défense territoriale à l'intérieur ?

28 R. Je pense qu'ils étaient une quinzaine. Une dizaine, une quinzaine

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1 devant et à peu près une quinzaine pouvant aller jusqu'à 20. Je ne pourrais

2 pas vous dire exactement, mais c'est à peu près cela. C'était cela, c'était

3 cela la taille du groupe, car quand on les a poussés à l'extérieur, j'ai pu

4 apprécier à peu près combien ils étaient.

5 Q. Quand vous êtes entré pour la première fois -- enfin, il faut que je

6 vous demande tout d'abord : est-ce que vous êtes entré à plusieurs reprises

7 dans le hangar ?

8 R. J'y suis resté à l'intérieur jusqu'à ce qu'on les fasse sortir. Après,

9 j'étais à l'extérieur. Je me suis attardé là jusqu'à ce que l'on prenne

10 toutes les mesures, mais toutes les mesures, fermer les portes, et même là,

11 j'étais encore devant le hangar. J'avais des conversations avec Vujovic au

12 sujet du fait qu'il fallait qu'il éloigne ses hommes de là-bas, parce

13 qu'ils mettaient en péril la sécurité des personnes placées dans le hangar.

14 Q. Vous avez vu le lieutenant-colonel Panic pendant votre conversation

15 avec Vujovic ? Il était toujours là ?

16 R. Non. Le lieutenant-colonel Panic est parti tout de suite après que je

17 lui ai brièvement adressé la parole. Je ne sais pas où il est parti.

18 Q. Pendant ce temps où vous vous êtes trouvé dans le hangar puis devant le

19 hangar, auriez-vous vu le lieutenant-colonel Vojnovic, par hasard ?

20 R. Non. Cet homme-là, il m'est peut-être arrivé de le croiser, mais je

21 serais incapable de le reconnaître. Je ne sais pas comment il était, je ne

22 le connais pas. Je savais qu'il était commandant d'une brigade, mais on n'a

23 pas eu l'occasion de se voir. C'est l'unité qui est arrivée ce jour-là.

24 Dans notre zone, c'est une unité avec laquelle je n'avais - en fait,

25 j'avais entendu parler d'eux, mais je n'avais pas de contacts directs avec

26 eux.

27 Q. Pendant ce temps-là ou cette période-là, d'après vos souvenirs, est-ce

28 qu'un officier de la JNA se serait adressé à vous ? Vous, à votre tour,

Page 15043

1 est-ce que vous avez adressé à la parole à l'un quelconque des officiers de

2 la JNA ?

3 R. Non. Cela, c'est une contrevérité totale. Personne n'est venu me

4 parler. Je n'ai parlé à personne, si ce n'est à ce M. Vujovic.

5 Q. Quand ces membres de la Défense territoriale ont été raccompagnés,

6 quand ils sont sortis du hangar, quelles sont les mesures que l'on a

7 prises ? Que s'est-il passé sur le plan de la sécurité de ces individus et

8 du hangar ?

9 R. Premièrement, lorsque j'ai terminé cette conversation avec Vujovic, une

10 grande partie des membres de la Défense territoriale se sont retirés de là-

11 bas. Lorsque j'en ai terminé, il y avait peut-être encore un groupe d'une

12 dizaine d'hommes sur place qui circulaient dans le secteur au sens large du

13 hangar, mais un grand nombre était parti. M. Vujovic est parti peu de temps

14 après, et moi, j'ai fait venir les soldats qui étaient sur place et je leur

15 ai demandé de prendre place et de s'occuper de la sécurité comme ils

16 devaient le faire. Je leur ai dit même : "Pourquoi vous ne réagissez pas ?

17 Pourquoi vous ne faites rien ?" Quand ils ont vu que la situation s'était

18 calmée, ils ont accepté effectivement de prendre place, de s'occuper de la

19 sécurité.

20 On a fermé la porte du hangar. Je leur ai dit de faire le nécessaire

21 pour que personne n'entre dans le hangar sans qu'il n'ait eu l'autorisation

22 de leur officier supérieur. Une fois que la situation a été rétablie comme

23 cela, j'ai décidé de quitter le secteur d'Ovcara, de prendre mon véhicule

24 et de partir avec les autocars et avec mes soldats vers Negoslavci, à mon

25 poste de commandement.

26 Q. Très bien. Nous avons quelques questions plus concrètes à aborder,

27 maintenant. Monsieur Vukasinovic, d'après vous, vous avez passé combien de

28 temps à Ovcara, entre le moment où vous êtes arrivé et le moment où vous

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1 êtes reparti ? Il s'est passé combien de temps ? Dites-nous à peu près à

2 quel moment de la journée et à peu près combien de temps, si vous le

3 pouvez.

4 R. Dans certaines de mes déclarations, j'ai parlé de la période de temps

5 qui s'est écoulée, mais cela varie énormément. Je peux évaluer d'après les

6 activités, d'après le moment de la journée, mais il m'est difficile de vous

7 dire l'heure précise. Seulement, je peux vous dire que vers 13 heures 30

8 jusqu'à 14 heures, j'ai dû être là. Je suis arrivé une heure et demie plus

9 tard, d'après certaines de mes estimations.

10 Je ne peux vraiment pas vous certifier que c'est exact, mais comme il

11 faut que je vous dise quelque chose, que je vous fasse part d'une

12 évaluation, je vais vous le dire. Il me semble que je suis parti d'Ovcara

13 vers 15 heures 30, d'après mes souvenirs. D'après les différentes activités

14 qui ont eu lieu et d'après ce qu'ont dit d'autres témoins, je suppose que

15 vous finirez par trouver le temps exact qui s'est réellement passé.

16 Q. Ce qui nous est important aussi, c'est combien de temps vous y êtes

17 resté, et l'heure précise. C'est quelque chose qu'il nous restera à établir

18 ici. J'ai quelques petites questions encore à vous poser. Pendant que vous

19 étiez à Ovcara, vous avez vu des colonels de la JNA en uniforme de colonels

20 de la JNA; vous les avez vus devant le hangar ou à l'intérieur de celui-

21 ci ?

22 R. Non. Si seulement il y en avait eu, cela m'aurait vraiment servi, mais

23 ils n'étaient pas là. Je leur aurais demandé de m'aider s'ils avaient été

24 là.

25 Q. Est-ce que vous vous souvenez, pendant que vous étiez devant le hangar,

26 si vous avez vu un groupe de civils qui étaient gardés, qui auraient été

27 mis de côté ? Est-ce que cela fait partie des images que vous auriez pu

28 voir, dont vous vous souvenez ?

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1 R. Non.

2 Q. Pendant que vous étiez là, vous avez vu une excavatrice, un tracteur

3 près du hangar ou avec le moteur, l'engin en marche ?

4 R. Non.

5 Q. Pendant que vous étiez dans le hangar, vous avez vu une corde tirée à

6 l'intérieur ?

7 R. Non.

8 Q. Pendant que vous étiez dans le hangar, vous avez vu quelqu'un dresser

9 la liste des individus placés à l'intérieur ?

10 R. Non.

11 Q. Pendant que vous étiez dans le hangar, avez-vous vu quelqu'un asséner

12 des coups à ces hommes, passer à tabac ces hommes en votre présence ?

13 R. Non. Nous nous sommes mis immédiatement à réaliser cette idée que

14 j'avais eue de les mettre dehors et nous avons réussi à les faire sortir.

15 Q. Pendant que vous étiez dans le hangar ou à l'extérieur, est-ce que vous

16 avez entendu un coup de sifflet et des gémissements, des cris ou quelque

17 chose de comparable après ce coup de sifflet ?

18 R. Non.

19 Q. Kemal Ajiti [phon], est-ce un nom qui vous est familier ? Kemal Sajiti

20 ou Kemo ?

21 R. J'ai dit dans ma déclaration que j'ai vu un Albanais dans le hangar,

22 que de toute évidence on l'avait battu un peu plus que les autres, et comme

23 je parle albanais, je lui ai adressé la parole. On a eu une conversation.

24 C'est vrai, qu'effectivement, qu'il a eu plus de coups que d'autres, mais

25 il était en vie quand je lui ai parlé. Je l'ai remarqué en tant

26 qu'Albanais. Je ne savais pas son nom.

27 Q. Avez-vous vu une femme dans le hangar ?

28 R. Oui, il y avait une femme, une blonde. Je pense qu'elle pouvait avoir

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1 entre 25 et 30 ans. Je ne sais pas si elle était plus âgée que cela.

2 Q. Pendant que vous étiez soit dans le hangar, soit à l'extérieur, est-ce

3 que quelqu'un est venu vous parler, vous demandant de faire sortir

4 quelqu'un du hangar ?

5 R. Non.

6 Q. Vezmarevic Dragan, est-ce que vous le connaissez ?

7 R. Non. J'ai entendu dire que c'était un chef de compagnie, mais je ne

8 l'ai jamais vu. Il est possible que je l'aie vu, d'ailleurs, mais comme on

9 n'a pas été présentés, je ne pouvais pas le reconnaître.

10 Q. Pendant que vous étiez à Ovcara - et vous nous avez dit combien de

11 temps vous y avez passé à un moment - est-ce que vous avez vu sur place

12 Veselin Sljivancanin ?

13 R. Non.

14 Q. Après Ovcara, où êtes-vous parti ?

15 R. Une fois que la situation a été calmée là-bas, je suis parti pour

16 Negoslavci et je me suis rendu à mon poste de commandement. Là, j'ai eu à

17 parler à mon adjoint, mon suppléant au sujet des affaires à traiter. Au

18 crépuscule, c'était vraiment la fin de l'après-midi, je suis parti pour

19 aller voir le commandant.

20 Q. Quel commandant ? Où cela ?

21 R. Le colonel Mrksic, au poste de commandement.

22 Q. Pour quelle raison ?

23 R. Puisqu'on avait complètement modifié l'itinéraire et comme on a

24 rencontré des problèmes à Ovcara, j'étais tenu d'informer le commandant. Il

25 fallait qu'il soit au courant des modifications. Je suis entré dans la

26 pièce. Je me suis adressé à mon commandant et je lui ai dit littéralement :

27 "Camarade colonel, je suis allé à Ovcara. Les gens ont été placés là-bas.

28 J'ai rencontré des problèmes avec la Défense territoriale. J'ai calmé la

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1 situation. Ils sont partis quelque part. Pour le moment, je propose que

2 l'on renforce les mesures de sécurité, car il est à prévoir que de nouveaux

3 problèmes se posent."

4 Le commandant a écouté ces propos et il ma dit : "Très bien, Vukasin,"

5 c'est comme cela qu'on m'appelait, "tu peux disposer." Je suis reparti à

6 mon poste de commandement. C'est l'essentiel que je devais transmettre au

7 commandant au sujet de cette situation-là.

8 Q. Ce jour-là, ce soir-là, avez-vous rencontré M. Sljivancanin ? Si oui,

9 est-ce que vous vous souvenez de cette rencontre et de la conversation que

10 vous auriez éventuellement eue avec lui ?

11 R. Oui. D'après ce dont je me souviens, il est arrivé en retard au

12 briefing. Il est passé devant mon poste de commandement et on s'est vus

13 pendant quelques secondes. Je lui ai dit que j'étais allé à Ovcara. Lui, il

14 était pressé, et il m'a dit : "Je suis pressé."

15 Il est parti à la réunion d'information, et une fois que c'était terminé,

16 il est venu me voir. Non, excusez-moi. Je crois qu'il m'a invité. Au moment

17 où je lui ai dit qu'il y avait des hommes à Ovcara, il a été surpris de

18 l'endroit où on avait placé des gens. Puis, à ce moment-là, je lui ai

19 relaté aussi les problèmes qui s'étaient posés, et que pour le moment, ces

20 problèmes étaient résolus.

21 Lui, il m'a répondu : "D'accord." Il m'a dit : "Tu as très bien fait.

22 Tu as protégé les gens. Je savais que tu allais mener à bien ta mission."

23 C'était la fin de notre conversation. Je pense qu'il allait, lui, voir ce

24 qu'il en était.

25 Q. Est-ce que vous avez entendu dire qu'une réunion du gouvernement s'est

26 tenue ce jour-là à Vukovar, ou plutôt à quel moment avez-vous appris que

27 cette réunion a eu lieu ?

28 R. Cette réunion, c'est uniquement à mon retour à mon poste de

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1 commandement que j'ai appris qu'elle avait eu lieu. Car pendant ces

2 déplacements que j'ai eus, pendant que j'ai traité ces problèmes, je ne me

3 suis pas tenu au courant. Je ne savais pas tout cela. Quand je suis arrivé

4 à mon poste de commandement, mon suppléant m'a dit : "Voilà, Chef, une

5 réunion du gouvernement est prévue, et on va prendre un certain nombre de

6 décisions très importantes à notre égard."

7 J'ai dit : "Quelles décisions ?" Il m'a répondu : "Apparemment, ils

8 ont tenu une réunion et insistent pour prendre le pouvoir, le pouvoir

9 civil, et ils disent que tous les prisonniers allaient être placés sous

10 leur responsabilité."

11 Je lui ai dit : "Mais où est-ce que tu as appris cela ?" Il a répondu

12 qu'il y a eu un communiqué de presse, que cela a été diffusé à la radio et

13 qu'il en a entendu parler des gens au poste de commandement et dans les

14 parages. Voilà, c'est ce que j'ai appris au sujet de la réunion du

15 gouvernement.

16 Q. Qui était votre suppléant ?

17 R. C'était le capitaine Bozic Mile.

18 Q. Tout cela se passe à votre poste de commandement, n'est-ce pas ?

19 R. Oui.

20 Q. A Negoslavci, n'est-ce pas ?

21 R. Oui.

22 Q. Est-ce que quand vous êtes rentré d'Ovcara, est-ce que vous vous êtes

23 rendu à Ovcara encore une fois avant d'avoir quitté Vukovar ?

24 R. Non.

25 Q. Dites-moi si vous vous souvenez si le lendemain ou les jours qui ont

26 suivi à Negoslavci seraient arrivés les représentants de la Croix-Rouge

27 internationale ? Savez-vous s'ils auraient rencontré des personnes là-bas ?

28 R. Oui. Il me semble qu'ils étaient arrivés le 21, ces représentants de la

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1 Croix-Rouge internationale. Ils avaient une réunion avec, me semble-t-il,

2 le commandant Sljivancanin. Il est possible qu'il ait été là-bas avec eux,

3 mais je n'en suis pas sûr. Je sais qu'ils étaient arrivés et qu'ils ont été

4 enregistrés lors de leur arrivée.

5 Q. Les jours qui ont suivi, dites-nous quelles étaient vos activités.

6 Dites-nous quand vous avez quitté Vukovar. Dites-moi cela en quelques mots

7 seulement.

8 R. Mes activités consistaient principalement à préparer le retour à

9 Belgrade. Le poste de commandement du Groupe opérationnel sud devait être

10 évacué, à savoir devait être prêt à partir. Donc, je devais tout préparer

11 pour remettre mes responsabilités pour ce qui est de la zone de

12 responsabilité au commandant de la 80e Brigade motorisée, pour que nous

13 puissions nous retirer en toute sûreté dans la région de Negoslavci, dans

14 la direction de Belgrade. Il fallait s'occuper de la passation des

15 responsabilités de la zone de responsabilité, il fallait introduire tous

16 les nouveaux officiers à des modalités d'accomplissement des tâches. Je

17 devais lui parler des problèmes et des marches à suivre pour résoudre ces

18 problèmes, les problèmes que j'avais eus là-bas.

19 Q. Nous savons que la brigade a quitté la région de Vukovar et de

20 Negoslavci le 24 novembre. Dites-nous, pendant que vous étiez là-bas, si

21 vous avez entendu des histoires ayant trait aux gens qui se trouvaient dans

22 le hangar. Si oui, dites-nous ce que vous avez appris et de la bouche de

23 qui.

24 R. Oui. Le lendemain, à savoir le 21, j'ai eu beaucoup de travail et je me

25 trouvais pas mal de temps au poste de commandement. Puisque j'ai dû prendre

26 beaucoup de décisions, je devais être présent là-bas. Mon adjoint a résolu

27 ces problèmes, a commandé ces unités à lui. Il partait sur le terrain.

28 A une occasion, il est rentré du terrain et il m'a dit en passant,

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1 parce que je n'étais pas son vrai commandant, j'étais son commandant

2 provisoire, il m'a dit : "Chef, nous avons entendu que les gens à Ovcara

3 ont disparu. La nuit précédente, ils auraient dû être menés quelque part et

4 ils auraient dû être liquidés."

5 Je n'y croyais pas, j'ai été surpris. Je ne croyais pas que quelque

6 chose comme cela aurait été possible. J'ai été surpris. A l'époque, pendant

7 les combats, il y avait des histoires diverses qui circulaient. Il

8 s'agissait d'une sorte de guerre entre ceux qui plaçaient des informations

9 vraies et des informations qui n'étaient pas vraies, des informations

10 erronées.

11 J'ai considéré cela comme étant une information erronée comme s'il y

12 en avait autant à l'époque. Par exemple, il y avait une information erronée

13 selon laquelle on disait que des enfants ont été brûlés vifs à Borovo

14 Naselje, qu'on a trouvé dans la voirie de la ville de Vukovar des bébés qui

15 ont été tués, et cetera. Je pensais qu'il s'agissait d'une information

16 erronée et je ne considérais pas cette information comme étant une

17 information vraie.

18 Après cela, j'ai pensé à cela, mais je n'ai pas eu de confirmation de

19 cet événement. Personne ne m'a confirmé la véracité de cet événement.

20 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que je n'ai

21 plus de questions à poser. Est-ce qu'on pourrait faire la pause maintenant

22 pour que je puisse parcourir brièvement mes notes et pour que nous

23 puissions recommencer cinq minutes avant, parce que le témoin m'est très

24 important et j'aimerais vérifier que je n'ai rien omis. J'aimerais donc

25 recommencer cinq minutes avant pour en finir avec ce témoin et pour laisser

26 mes collègues lui poser des questions.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, Maître Lukic. Nous allons

28 suspendre l'audience maintenant pour avoir à profiter de la pause pour

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1 déjeuner, et nous allons recommencer à 13 heures 55, donc cinq minutes

2 avant le temps prévu pour la continuation de l'audience.

3 L'audience est suspendue.

4 --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 40.

5 --- L'audience est reprise à 14 heures 00.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Lukic.

7 M. LUKIC : [interprétation] Je souhaite uniquement préciser deux questions

8 et j'en aurai terminé.

9 Q. Avant l'interruption de séance, Monsieur Vukasinovic, on parlait des

10 rumeurs que vous avez entendues. Vous avez dit que votre suppléant vous en

11 a parlé. Qui vous en a parlé précisément ?

12 R. J'ai dit que c'est à mon poste de commandement que j'en ai entendu

13 parler, que c'est mon suppléant qui m'en a parlé, le capitaine Bozic.

14 Q. Est-ce que vous pouvez répéter pour que ce soit consigné au compte

15 rendu d'audience.

16 R. Le capitaine Bozic.

17 Q. Est-ce que vous en avez fait part à Sljivancanin de ces rumeurs ?

18 R. Non, je n'en ai pas parlé à lui, car j'ai estimé que c'était

19 impossible. Je pensais que c'était vraiment insensé.

20 Q. Il ne me reste plus qu'une seule question. Le jour où vous vous êtes

21 trouvé à Ovcara et plus tard, lorsque vous êtes allé voir le colonel Mrksic

22 à son poste de commandement, est-ce que vous avez à moment quelconque

23 croisé, rencontré, vu le capitaine Karanfilov ?

24 R. Non. Je n'ai jamais eu de contacts avec lui et je n'en avais pas de

25 besoin. Je le déclare ici que pour ce qui est de ce capitaine, que je ne me

26 suis jamais trouvé avec lui ni Ovcara ni dans la caserne. En d'autres

27 termes, je ne l'ai pas vu du tout.

28 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur le Juge

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1 j'en ai terminé avec mon interrogatoire principal.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic.

3 Maître Vasic, vous avez la parole.

4 M. VASIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

5 Interrogatoire principal par M. Vasic :

6 Q. [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Bonjour, Monsieur

7 Vukasinovic.

8 R. Bonjour.

9 Q. Je représente ici M. Mrksic et je vais vous demander la même chose que

10 pendant l'interrogatoire mené par mon collègue,

11 Me Lukic. Est-ce que vous pouvez faire une petite pause après la question

12 pour que les interprètes puissent nous suivre.

13 R. Oui.

14 Q. Merci. Mon collègue, Me Lukic, vous a posé une question à laquelle vous

15 avez répondu en disant que le 19 au soir,

16 M. Sljivancanin, lors de la réunion de l'organe chargé de la sécurité, vous

17 a parlé de l'évacuation de l'hôpital et vous a énoncé ce que vous aviez à

18 faire le lendemain. Est-ce que je vous ai bien compris, le lendemain, le 20

19 novembre ?

20 R. Oui.

21 Q. A cette occasion, vous a-t-il dit également que cette mission qui

22 consistait à évacuer l'hôpital avait été précisée lors du briefing régulier

23 chez le commandant de la brigade, et que maintenant, lors de la réunion à

24 l'organe de sécurité, il était en train de préciser la mission en

25 question ?

26 R. Non, non, pas dans ce sens-là. Il n'a pas expliqué qui allait faire

27 quoi à cette réunion. Tout simplement, il s'est contenté de dire quelle

28 était ma mission.

Page 15053

1 Q. Le soir en question, M. Sljivancanin vous a-t-il dit que les individus

2 qui allaient être sélectionnés en tant que participants à la rébellion

3 armée ou en tant qu'auteur de crime, que ces gens-là devaient partir pour

4 Sremska Mitrovica et que c'était la décision du commandement du Groupe

5 opérationnel sud ?

6 R. Il m'a dit que pour ce qui est des personnes sélectionnées qui allaient

7 être trouvées à l'hôpital, que j'étais chargé de les transporter à la

8 caserne de Vukovar et que c'est de là, que par convoi, ces gens allaient

9 partir pour Sremska Mitrovica. Je ne sais pas vous dire où il a appris

10 cela.

11 Q. En répondant à Me Lukic, vous avez dit que vous avez fait votre

12 déclaration aussi aux enquêteurs du bureau du Procureur du Tribunal de La

13 Haye, le 16 novembre 2002, signée le 26; c'est bien cela ?

14 R. Oui.

15 Q. Merci. D'après vos souvenirs, auriez-vous déclaré aux enquêteurs du

16 bureau du Procureur, page 01152264.

17 M. VASIC : [interprétation] Monsieur l'Huissier ou Madame l'Huissière, est-

18 ce qu'on pourrait remettre un jeu de déclarations au témoin. C'est la

19 version anglaise qu'on pourrait afficher à l'écran, page 5 sur 10, ERN

20 01152269.

21 M. MOORE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, puis-je

22 interrompre un instant. Me Vasic a demandé s'il pouvait se servir des

23 déclarations que nous avions préparées. Il m'a posé la question avant le

24 déjeuner. Nous ne les avions pas à ce moment-là. J'ai un jeu préparé avec

25 le sommaire. Si mon éminent confrère souhaite s'en servir, on pourrait tout

26 à fait les remettre à la Défense ainsi qu'à la Chambre pour assurer la

27 continuité.

28 Excusez-moi de changer d'attitude, mais je ne les avais pas avant.

Page 15054

1 M. VASIC : [interprétation] Je remercie mon éminent collègue. Ce serait

2 effectivement utile peut-être pour la continuité et pour le compte rendu

3 d'audience, parce que je suppose que mes confrères poseront des questions

4 en se basant sur les mêmes documents.

5 Je vous remercie de m'aider.

6 M. MOORE : [interprétation] Je ne sais pas si cela peut vous être utile,

7 mais je peux vous expliquer comment on a organisé ce jeu de documents. Ceci

8 pour être utile à Me Vasic qui n'a pas encore eu l'occasion de voir ce jeu

9 de documents.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, ce serait très bien, Monsieur

11 Moore, faites-le.

12 M. MOORE : [interprétation] La page de garde, c'est un sommaire, un tableau

13 récapitulatif. Nous avons 12 entrées en B/C/S. La date -- excusez-moi,

14 c'est en anglais pas en B/C/S. Donc, le premier document de l'original

15 B/C/S pour le 16 novembre 1998. Au point 4, la date est celle du 21

16 décembre. Encore une fois un document en B/C/S; puis, au point 6, le

17 document du 16 et

18 26 novembre 2002; au point 8, le 28 novembre 2003; au point 10, le

19 16 décembre 2004, et enfin la dernière déclaration au tribunal du district

20 de Belgrade, le 11 novembre 2006.

21 Tous ces documents devraient normalement s'inscrire dans l'ordre

22 chronologique, puis nous avons les autres entrées correspondant en version

23 anglaise. J'espère que ceci a été utile.

24 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie de cette assistance. Puisque

25 nous avons tous les documents devant nous maintenant, est-ce qu'on pourrait

26 peut-être afficher les documents à l'écran en version électronique pour que

27 les accusés puissent également suivre à l'écran la version en B/C/S. Je

28 vous remercie.

Page 15055

1 Q. Revenons maintenant au document que j'allais aborder. C'est

2 l'intercalaire 6, Monsieur Vukasinovic -- c'est l'intercalaire 16.

3 Je précise cela à l'intention de la Chambre, mes confrères,

4 l'intercalaire 5, c'est page 4 sur 10.

5 Monsieur Vukasinovic, est-ce qu'il est dit ici que les organes de sécurité

6 de la Brigade de la Garde avaient des missions régulières au cours des

7 actions de combat, "entre autres, nos missions comprenaient l'évacuation

8 des prisonniers de guerre de Vukovar."

9 Est-ce que c'est bien ce que vous avez déclaré aux enquêteurs du

10 bureau du Procureur ?

11 R. Oui.

12 Q. Dans ce paragraphe, vous mentionnez le télégramme de Vasiljevic que

13 vous avez mentionné aujourd'hui et de ces prisonniers qu'il fallait

14 échanger ?

15 R. Oui, c'est cela.

16 Q. Le soir en question, Monsieur Sljivancanin, vous a-t-il dit comment

17 devait se préciser cet itinéraire ? Il fallait aller d'abord à la caserne

18 et depuis la caserne, comment fallait-il poursuivre le chemin ?

19 R. Au début, j'ai dit que précisément ma mission, lorsque je suis devenu

20 le commandant du poste de commandant de Negoslavci, ma mission était

21 d'assurer la sécurité des convois. C'était justifié que je fasse cela car

22 j'avais les forces nécessaires pour s'en occuper. Je pense que dans ce

23 sens-là, c'était justifié que je m'applique à faire cela. J'ai précisé

24 qu'il s'agissait de mettre de côté des suspects qui n'appartenaient pas à

25 l'hôpital. Sur le plan de la sécurité, il fallait faire en sorte que la

26 mission principale soit menée à bien, à savoir l'évacuation des blessés et

27 des malades de l'hôpital. C'était la mission de tout le commandement.

28 C'était le commandement qui en a été chargé. Tous les organes du

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1 commandement avaient leur part du travail dans ce cadre.

2 Entre autres, les organes chargés de sécurité dont la mission

3 principale était de prendre des mesures de sécurité qui s'imposaient pour

4 que la mission principale puisse être menée à bien, et ce, pour quelle

5 raison ? Parce qu'il y avait des données, des informations à l'hôpital,

6 comme quoi un grand nombre de membres du HDZ, qui n'ont pas voulu se

7 rendre, avaient enfilé d'autres vêtements et s'étaient dissimulés à

8 l'hôpital en tant que patients ou en tant que personnel de l'hôpital. Comme

9 on a reçu, entre autres, plein d'informations disant qu'il était nécessaire

10 de prendre des dispositions, parce qu'il y avait des groupes qui menaçaient

11 encore de s'en prendre au poste de commandement, poste logistique ou des

12 groupes isolés faisant partie de nos unités, l'hôpital qui est un bâtiment

13 neutre devait être débarrassé de ces gens-là pour que l'un d'entre eux ne

14 provoque pas une attaque soit contre les membres de nos unités ou soit

15 contre les membres d'autres missions.

16 C'est là qu'intervient l'organe de sécurité pour procéder à ce tri

17 pour mettre de côté ces gens-là, et plus tard, pour les déplacer de

18 l'hôpital vers la caserne, ensuite de la caserne d'agir de manière

19 organisée, à savoir la 1ère Compagnie blindée devait organiser un convoi à

20 la caserne pour escorter ce convoi vers Sremska Mitrovica.

21 C'était cela la substance de sa mission et c'était cela que j'ai

22 compris et que je devais exécuter.

23 Q. Ce soir-là, lorsqu'on vous a confié cette mission, vous avez prévu le

24 nombre de véhicules qu'il vous faudrait pour escorter ce convoi ? Combien

25 de patrouilles ? Ces véhicules et ces patrouilles pourquoi n'ont-ils pas

26 constitué ce convoi depuis l'hôpital ? Pourquoi il n'est pas parti

27 directement de l'hôpital ?

28 R. Nous avions une tactique précise prévue à l'avance. J'étais à mon poste

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1 de commandement et j'ai élaboré une tactique visant à escorter toutes

2 colonnes. Nous avions deux véhicules de combat, un en tête de colonne, un à

3 la fin, et nous avions le contrôle de circulation. C'étaient des mesures

4 régulières prévues en tout temps.

5 Alors l'hôpital, pourquoi on n'est pas parti de l'hôpital ? C'est un

6 bâtiment neutre, mais d'une complexité certaine à ce moment-là. Vous aviez

7 là des différentes catégories d'individus qui n'étaient pas encore très

8 claires. Ce n'était pas naturel de constituer un convoi à cet endroit-là et

9 ce n'était pas pratique.

10 La caserne était entre nos mains. La caserne s'avérait être le meilleur

11 endroit sur le plan de la sécurité, le mieux adapté. Nous avions

12 suffisamment de forces d'hommes, et aussi, c'était un endroit où on pouvait

13 faire des préparatifs. Dans l'ensemble, on pouvait charger quelqu'un

14 d'organiser le convoi et de l'accompagner jusqu'à Sremska Mitrovica.

15 C'était cela notre objectif principal. C'est pour des raisons de sécurité,

16 pour des conditions réunies à la caserne qui nous convenaient qu'on voulait

17 partir de là-bas.

18 Q. D'après vous, cette évaluation sécuritaire, pour ce qui est de la

19 caserne, est-ce que cela s'est avéré juste sur le plan de la sécurité,

20 comme vous venez de dire ?

21 R. Oui, absolument. Je pense qu'il n'y avait pas de meilleur endroit, par

22 de meilleur bâtiment. On n'aurait pas pu en trouver de meilleurs à ce

23 moment-là.

24 Q. Si je puis me permettre de vous rappeler quelque chose, vous l'avez dit

25 aussi à Me Lukic, à savoir plusieurs convois étaient partis de Vukovar, le

26 18 de Mitnica, ils se trouvaient à Ovcara; puis il y avait le convoi de

27 civils qui a rebroussé chemin de l'autoroute de Litzopas et qui est parti

28 pour Noustar [phon] qui se trouvait à Ovcara. Est-ce que vous trouvez que

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1 le hangar d'Ovcara était plus en sécurité que la caserne, à ce moment-là,

2 un lieu plus sûr que la caserne ?

3 R. D'après moi, non. Pour ce qui est d'Ovcara, c'est logique que dans cet

4 axe-là d'actions qu'on se serve d'Ovcara. Pour notre axe maintenant, Ovcara

5 n'est pas du tout approprié. Vous avez la caserne qui est un poste de

6 commandement avancé. Vous savez ce que c'est. C'est pratiquement la majeure

7 partie du commandement qui s'y trouve. Vous avez là une unité qui est tout

8 à fait à même d'assurer le déroulement de n'importe quelle activité dans la

9 caserne. La caserne se trouve sur le chemin de l'évacuation la plus sûre de

10 l'hôpital et le plus court.

11 M. VASIC : [interprétation] Excusez-moi.

12 Q. Me Lukic vous a demandé ce que vous avez fait les 18, 19 et 20

13 novembre. Le 18 novembre, avez-vous vu M. Mrksic ?

14 R. On se voyait tous les jours. J'étais là. Bien sûr que je l'ai vu. Je ne

15 sais pas à quelle heure. Je ne sais pas quelle est la finalité de votre

16 question, mais il est certain que je l'ai vu.

17 Q. D'après ce que j'ai compris vous n'alliez pas à ces réunions

18 d'information régulières. C'est le chef de l'organe de sécurité, M.

19 Sljivancanin, qui y allait; c'est bien cela ?

20 R. Oui. Je n'y allais pas, mais je pouvais venir au poste de commandement.

21 Je pouvais venir parler à mon commandant. Si nécessaire on pouvait se

22 parler ou il pouvait me confier une mission directement et je pouvais

23 l'exécuter. Il n'était pas interdit d'accéder au poste de commandement.

24 Q. Vous nous avez dit que le 20, vous êtes entré au poste de commandement

25 également et vous avez dit de quoi vous avez parlé avec M. Mrksic. C'était

26 dans l'après-midi du 20. Après ce jour-là, plus tard, l'avez-vous revu ou

27 non ?

28 R. Mon commandant, je l'ai vu à ce moment-là, et par la suite, je ne l'ai

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1 pas revu. Je ne sais pas à quel moment mon commandant est parti en

2 déplacement. Après lui avoir transmis cette information, je ne l'ai pas

3 revu.

4 Q. Merci. S'il vous plaît, on vous a confié cette mission. Vous êtes

5 arrivé avec six autocars devant l'hôpital et vous nous avez dit qui vous

6 avez trouvé devant l'hôpital. Y avait-il aussi le capitaine Karanfilov, là-

7 bas ? Vous avez dit que vous ne l'avez pas vu à Ovcara, pas plus qu'à la

8 caserne. Est-ce que vous l'avez vu ce matin-là devant l'hôpital ?

9 R. Dans une déclaration, j'ai dit que je l'ai vu. Mais maintenant, ici, je

10 dois émettre quelques doutes à ce sujet. Il me semble l'avoir vu, mais je

11 n'en suis pas certain. J'ai dit que je l'ai vu. Après, quand je me suis

12 reposé la question, je vois les deux images, que je l'ai vu et que je ne

13 l'ai pas vu. Je ne sais pas. J'ai la sensation de l'avoir vu, mais je ne

14 peux pas l'affirmer. Je ne sais pas véritablement comment vous répondre.

15 Oui et non. Je ne sais quoi vous dire. Pour l'instant, c'est ce que me

16 dicte ma mémoire.

17 Q. Vous avez l'impression de l'avoir vu, mais vous n'en êtes pas sûr.

18 R. Je n'en suis pas sûr.

19 Q. Merci. C'est vous qui avez désigné les soldats du

20 2e Bataillon de la Police militaire pour escorter le convoi ?

21 R. Non. Je ne les ai pas désignés. Je les ai reçus. Ils ont été affectés à

22 venir faire cela pour moi et ils sont venus.

23 Q. C'est vous qui décidiez combien de soldats devaient monter à bord de

24 quels autocars et ce qu'ils devaient faire ?

25 R. Oui. J'ai placé les militaires à bord des autocars et je leur ai confié

26 leurs missions. Je leur ai dit qu'avec moi ils étaient chargés d'assurer la

27 sécurité, monter la garde des individus qui allaient monter à bord des

28 autocars. Je leur ai précisé leurs places à bord des autocars. C'est dans

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1 ce sens-là que je leur ai confié leur mission.

2 Q. Pendant que vous étiez devant l'hôpital, ces militaires, ils étaient

3 tout le temps dans les autocars ou étaient-ils dans l'enceinte de

4 l'hôpital, devant celui-ci ? Est-ce que vous vous en souvenez ?

5 R. Les militaires, les soldats, ils ont toujours été dans les autocars,

6 assis au premier rang dans les autocars. Ils ne pouvaient pas descendre de

7 là-bas sans mon autorisation.

8 Q. Vous avez dit que vous avez rempli trois autocars, et par la suite, que

9 vous êtes parti pour la caserne avec ces trois autocars. M. Sljivancanin,

10 est-ce qu'il vous a chargé de partir pour la caserne avec ces trois

11 autocars ?

12 R. Non. J'ai dit dans ma déclaration que j'ai décidé de les emmener, car

13 il n'y avait pas besoin qu'ils restent là. Il n'y avait pas beaucoup de

14 place. C'était très exigu. J'ai décidé de les envoyer à la caserne, là où

15 était leur destination, un groupe d'individus pour avoir plus de place pour

16 manœuvrer, pour faire ce qui restait à faire, à savoir évacuer les blessés

17 et les malades. C'est moi qui ai pris la décision de les emmener de là-

18 bas.

19 Q. Votre déclaration que vous avez donnée au tribunal militaire, je pense

20 que c'est l'intercalaire 4. En anglais, c'est le 3. Troisième page en

21 B/C/S.

22 M. MOORE : [interprétation] Je voudrais aider mon confrère. En anglais - je

23 pense que la Chambre l'a. Dans la version anglaise est inscrit le numéro de

24 la page correspondante au B/C/S. Si mon éminent confrère pouvait citer le

25 numéro de la page en version B/C/S, ceci nous permettrait de repérer la

26 page en anglais.

27 M. VASIC : [interprétation] Oui. C'est le paragraphe 2.

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ai en anglais.

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1 M. VASIC : [interprétation] L'intercalaire 4, non pas 3.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Qu'est-ce que vous avez dit ? Quelle

3 page ?

4 M. VASIC : [interprétation] Le deuxième paragraphe, page 3. Vous dites tout

5 d'abord : "Un groupe de 150 personnes, je les ai transférés, je les ai

6 conduits de l'hôpital à Vukovar vers 10 heures, de l'hôpital à la caserne

7 de Vukovar sur ordre du commandant Sljivancanin.?

8 Vous vous souvenez d'avoir déclaré cela, au juge du tribunal

9 militaire ?

10 R. Oui, je m'en souviens.

11 Q. Ce groupe, il a été transféré à ce moment-là sur ordre de M.

12 Sljivancanin, conforme à ce quoi vous avez parlé le 19 dans la soirée au

13 sujet de l'évacuation de l'hôpital ?

14 R. Pour l'essentiel, c'est le 19 au soir qu'on nous a confié cette

15 activité. C'est dans ce sens-là que cette phrase a dû être formulée et

16 consignée. Cela dépend un peu de la question qui a été posée par le juge

17 d'instruction. Mais si vous insistez, c'est exact, au sens général du

18 terme. Mais pour ce qui est de la prise de décision, c'est moi qui ai pris

19 la décision sur place, concrètement.

20 Q. Pouvez-vous nous dire combien de temps vous avez passé à l'hôpital, du

21 moment où vous êtes arrivé avec les six autocars jusqu'à ce que les trois

22 autres autocars pleins partent vers la caserne avec vous en tant

23 qu'escorte ?

24 R. Et bien, je pense que, à peu près jusqu'à 3 heures à la caserne. J'ai

25 donc passé à peu près trois heures, puis le premier groupe est parti. C'est

26 une approximation; cela doit être à peu près 3 heures, trois heures et

27 demie. Je suis parti de mon poste de commandement vers 6 heures. Ce qui

28 fait qu'en tout - parce que nous sommes arrivés à la caserne vers 10

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1 heures. C'est ce que j'ai d'ailleurs dit dans ma déclaration.

2 Q. Pourriez-vous nous dire ce que vous avez fait au cours de ces quatre

3 heures ? Si vous êtes parti de Negoslavci vers 6 heures, la route vous a

4 pris à peu près 45 minutes; c'est cela ?

5 R. Oui.

6 Q. Qu'avez-vous fait ensuite, vous et vos soldats qui étiez là autour des

7 autocars, dans les autocars au cours de ces 3 heures et

8 15 minutes ?

9 R. Et bien, nous attendions que toutes les activités soient terminées. Les

10 fouilles cela prend du temps. Le triage, les fouilles cela prend du temps.

11 Il faut du temps pour arriver à séparer les personnes les unes des autres.

12 Donc, on attendait juste là, on était plantés là et on attendait que tout

13 soit prêt. Effectuer une fouille de ce type ce n'est pas simple, il y a une

14 procédure à suivre. En plus, ici, nous sommes dans un environnement

15 hospitalier. Il y avait des gens malades, des gens blessés. J'imagine que

16 c'est pour cela que cette procédure a pris tant de temps, et j'étais en

17 train d'attendre, attendre que ces activités soient terminées pour pouvoir

18 entreprendre ma mission. Ce qui m'avait été demandé.

19 Q. Quand vous avez embarqué toutes ces personnes qui vous ont été remises,

20 avez-vous poursuivi le triage à bord des autocars ?

21 R. Non, le triage était terminé, puisque la séparation des personnes dans

22 l'hôpital était terminée. Mais pour ce qui est de l'identification des

23 personnes, les analyses ultérieures, tout ceci devait se faire à Sremska

24 Mitrovica. En tout cas, tout ce qui concerne notre partie de la mission,

25 c'était terminé.

26 Q. Soyons clair. Ceci porte-t-il sur toutes les personnes qui avaient été

27 triées à l'hôpital ou uniquement au groupe que vous aviez embarqué ?

28 R. Cela concernant l'autre groupe aussi. Il fallait que le triage soit

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1 terminé pour que je puisse tous les embarqués vers la caserne, où là il y

2 aurait interrogatoire et identification à Sremska Mitrovica. Puisque notre

3 service avait des renseignements sur ces groupes et ces individus, et je

4 pense que là-bas, il y aurait décision quant à savoir qui serait détenu et

5 qui serait libéré. Ce n'était pas du tout entre nos mains, de toute façon.

6 Q. Si tout le groupe a subi un triage, pourquoi n'avez-vous pas amené les

7 cinq ou six autocars, si tout le groupe avait bel et bien subi ce triage

8 préliminaire ? Y a-t-il une raison pour cela ?

9 R. Non, il n'y avait pas de raison. C'était juste que les conditions

10 n'étaient pas adéquates pour ce faire. Le premier groupe avait déjà été

11 trié, le deuxième groupe était en train d'être trié. Je ne voulais pas

12 attendre que le processus de triage du deuxième groupe soit terminé. C'est

13 la seule raison. Je voulais embarquer tous ces gens, les déplacer pour

14 qu'il n'y ait pas de cause de conflit. Puisque au fur et à mesure que le

15 temps passait, il y aurait eu des problèmes encore pires avec les six

16 autocars pleins de gens en train d'attendre.

17 Cela aurait compliqué l'évacuation des blessés et des malades,

18 puisque nous étions quand même dans un endroit extrêmement étroit où il

19 n'y avait pas de place. Donc, je me suis dit : "Maintenant, puisqu'on a

20 déjà un tas qui a été traité, je les amène à la caserne." Et je pensais que

21 le deuxième groupe serait plus restreint. D'ailleurs, il a été plus

22 restreint, il y avait beaucoup moins de monde. Je ne pense pas que j'aie

23 fait une erreur. Il y avait une décision à prendre. Il fallait soit rester

24 là, soit partir, j'ai décidé de partir.

25 Q. Après vous être rendu à la caserne - c'est ce que vous dit au

26 capitaine Predojevic qui était assez surpris à votre arrivée, ensuite vous

27 lui avez expliqué ce qui convenait de faire et comment il pouvait assurer

28 la sécurité des autocars. Savez-vous que le capitaine Predojevic en a

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1 informé M. Lukic, le commandement de la caserne à propos de tout cela ? Je

2 pense qu'il était commandant.

3 R. Personnellement, je ne le savais pas que c'était cela, mais le

4 capitaine Predojevic devait assurer la sécurité des personnes qui étaient

5 hébergées dans sa caserne. Puisque c'était sa responsabilité de s'occuper

6 de cette caserne.

7 Q. Pendant votre séjour dans la caserne avec les trois autocars, qui a

8 assuré la sécurité des personnes qui étaient en train d'être triées, donc

9 le deuxième groupe qui était en train d'être trié encore à l'hôpital ?

10 R. Il y avait deux officiers de police par autocar. Il y avait une unité

11 qui assurait la sécurité de l'hôpital aussi. Donc, la sécurité de ces

12 personnes était assurée. En plus, c'était un laps de temps très court

13 puisque je suis revenu dans l'heure, enfin au bout d'une heure et demie, je

14 suis revenu.

15 Q. Pourriez-vous nous dire, ou plutôt savez-vous qui avait autorisé ce

16 groupe qui était membre de la TO à rentrer dans l'enceinte de la caserne ?

17 Puisque la caserne devait quand même être gardée par son propre service de

18 garde ?

19 R. Je suppose que c'est au commandement de la caserne de donner la

20 réponse, je ne peux pas vous répondre. Ce n'était pas ma mission; c'était

21 la mission du commandant de la caserne. Puisque la caserne, bien sûr, avait

22 ses propres services, c'est évident. Puis, il y a une enceinte, bien sûr,

23 autour de cette caserne, une enceinte grillagée. Malheureusement, le

24 grillage avait été assez endommagé. Les soldats avaient été postés pour

25 sécuriser l'enceinte.

26 Il n'y avait pas assez de soldats visiblement pour s'assurer que

27 personne ne rentre dans la caserne. Je pense que c'est par les trous dans

28 les barrières que les membres de la TO sont rentrés dans l'enceinte de la

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1 caserne. Tout ceci était de la responsabilité du commandement de la

2 caserne.

3 Q. Monsieur, vous avez donné l'ordre à M. Predojevic d'utiliser ses

4 troupes pour chasser les membres de la TO et pour rétablir l'ordre au sein

5 de la caserne. Il l'a fait d'ailleurs, n'est-ce pas ?

6 R. Oui. D'abord, je lui ai donné l'ordre de s'assurer que personne ne

7 puisse monter à bord des bus, donc que les bus soient bien fermés, bien

8 gardés. C'était sa première tâche, de s'assurer que personne ne force les

9 portes des bus pour les ouvrir.

10 Ensuite, avec d'autres troupes, c'était quelque chose que je ne lui

11 ai pas demandé, mais son commandant Susic qui lui a enjoint de le faire,

12 qui était de chasser tous ces gens de la caserne. Puisque ma première

13 mission était de protéger toutes ces personnes, et j'insistais pour que

14 cette protection soit assurée.

15 Q. Comment savez-vous que c'est Susic qui a donné l'ordre à Predojevic de

16 chasser toutes ces personnes ? Comment l'avez-vous appris ?

17 R. Je l'ai appris en parlant à mes collègues. Vous savez, on ne peut pas

18 être un témoin sans avoir demandé quoi que ce soit aux gens autour de vous

19 ou sans avoir regardé les documents. Alors, ce qui a rafraîchi ma mémoire,

20 c'est quand j'ai reçu des documents. Parce que, après si longtemps il est

21 difficile de se rappeler de tous ces détails. Au cours de ces entretiens,

22 nous nous sommes vraiment rendu compte de ce qui s'était passé, qui avait

23 fait quoi, et je me suis rendu compte que c'est lui qui avait exécuté cet

24 ordre.

25 Q. Quand l'avez-vous appris ? Pouvez-vous nous le dire ?

26 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la réponse du témoin.

27 M. VASIC : [interprétation]

28 Q. Votre question n'a pas été enregistrée. Pourriez-vous la répéter, s'il

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1 vous plaît.

2 R. Avant ce qui s'est passé à Belgrade à propos d'Ovcara.

3 Q. Si je vous dis que M. Susic à l'époque n'était pas le supérieur

4 hiérarchique de Predojevic, dans ce cas, une affirmation comme celle que

5 vous avez faite serait sans fondement.

6 R. Je ne comprends pas très bien votre question. Qu'est-ce que vous voulez

7 dire par n'était pas son supérieur hiérarchique ? Avant que je ne témoigne

8 dans l'affaire Ovcara à Belgrade en 2003.

9 Q. Nous sommes en train de parler du 20 novembre. Le capitaine du 1er

10 Bataillon de la Police militaire, l'unité du capitaine Predojevic dans la

11 2e Compagnie avait été rattaché au 2e Détachement d'assaut sous le

12 commandement du commandant Lukic. Bien sûr, si je vous dis cela, cela

13 rafraîchit votre mémoire. Vous me dites que c'est ainsi que les choses

14 étaient, n'est-ce pas, maintenant ?

15 R. Maintenant, tout est clair. Mais vous me poser des questions qui sont

16 en dehors de ma compétence. Quand il est revenu à la personne qui était

17 censée son supérieur, il y a la question, certes, de leur relation entre

18 les deux, mais je ne pouvais pas savoir quelle était la relation entre

19 Predojevic et Susic.

20 Q. Mais qui vous a dit que Predojevic était allé voir Susic ? Qui vous a

21 donné cette information ?

22 R. Je vous l'ai déjà dit. Après les deux déclarations que j'ai faites, la

23 première devant l'administration de la sûreté, l'autre devant le tribunal

24 militaire, on s'est rendu compte qu'il fallait que l'on rafraîchisse notre

25 mémoire à propos de certains faits. Pour ce faire, on a parlé des activités

26 qui avaient eu lieu. Parce qu'on ne peut pas se souvenir de tout. On s'en

27 est parlé entre nous, comme collègues, comme amis. On a essayé de se

28 rappeler de ce qui s'était passé. Cela c'était avant l'affaire Ovcara à

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1 Belgrade. Donc c'était à l'été 2003. C'est à ce moment-là que nous avons

2 fait cet exercice de remémoration collective.

3 Q. Saviez-vous que le chef d'état-major, Milorad Panic, avait donné des

4 ordres au capitaine Predojevic selon lesquels il fallait qu'il assure la

5 sécurité des autocars et qu'il empêche à quiconque de s'approcher de ces

6 autocars ? En avez-vous eu connaissance ?

7 R. Non.

8 Q. Avez-vous vu le chef d'état-major, Milorad Panic, à l'époque, à la

9 caserne, quand les autocars y étaient et quand les membres de la TO étaient

10 justement tout autour de ces autocars ?

11 R. Non.

12 Q. Merci. Vous souvenez-vous qu'en 2005, j'imagine après ces fameuses

13 consultations dont vous venez de nous parler, enfin cette remémoration

14 collective, dans votre déposition dans l'affaire Sasa Radak, le 1er novembre

15 2005 - ici, c'est l'intercalaire 12. Pour la version anglaise nous aurons

16 l'intercalaire 11 dans le dossier. Et la page qui nous intéresse est la

17 page 8 sur 24. Cela c'est pour la version en B/C/S. Si vous voulez bien

18 m'excuser, mais j'ai du mal à trouver la page en anglais.

19 M. MOORE : [interprétation] Si mon éminent collègue nous dit quelle est la

20 page qui figure en haut à droite dans la version en B/C/S, nous trouverons

21 immédiatement la page correspondante en anglais.

22 M. VASIC : [interprétation] C'est le 06042901. Merci.

23 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, regarder le dernier paragraphe. Vous

24 faites référence à la caserne et vous dites, la situation la pire était

25 dans la caserne lorsqu'ils s'étaient rencontrés pour la première fois avec

26 leurs rivaux, ils se sont reconnus, alors celui-ci a tué mon père; celui-ci

27 a tué ceci, cela.

28 Est-ce la conclusion à laquelle vous êtes arrivé au procès de Belgrade,

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1 après avoir échangé des informations, après avoir communiqué avec vos

2 collègues qui avaient été aussi à Vukovar à l'époque, ou est-ce que ceci

3 est une affirmation que vous avez faites de votre propre chef uniquement ?

4 R. Non. C'est uniquement ma propre affirmation, ma propre observation.

5 Quand j'ai dit qu'il fallait en retirer 20, c'était encore pire parce que

6 je pense qu'ils pensaient qu'on allait les libérer. C'est ainsi qu'ils sont

7 devenus très énervés, très agressifs. C'est pour ceci, à mon avis, qu'ils

8 ont eu cette conduite envers moi.

9 Cela c'est de la façon dont j'ai analysé la situation.

10 Q. D'après vous, c'était la situation à la caserne qui était la pire, bien

11 pire qu'à l'hôpital, bien pire qu'à Ovcara par la suite ?

12 R. Non. La pire situation a eu lieu à Ovcara. A l'hôpital, il n'y avait

13 pas trop de problèmes. A la caserne, il a commencé à y avoir des problèmes,

14 mais personne ne s'est fait frappé, mis à part nous qui étions en train de

15 transférer ces personnes. On s'est fait gifler, mais rien de plus, alors

16 que la situation la plus difficile, elle, a eu lieu à Ovcara, puisque-là,

17 il y a eu des problèmes que je n'ai pas pu contenir d'ailleurs parce que je

18 n'y étais pas. Une fois que je m'y suis rendu, je me suis rendu compte

19 quels problèmes ils avaient eu. Je le voyais sur les visages des personnes.

20 Je le voyais sur leur physionomie.

21 Q. Pourquoi dites-vous que la situation la pire c'était dans la caserne ?

22 Vous n'avez pas dit que la situation la pire avait eu lieu à Ovcara ?

23 R. Mais aujourd'hui maintenant, officiellement dans ce prétoire, je vous

24 dis que la situation qui était la pire, c'était celle que j'ai vue à

25 Ovcara. Peut-être que j'ai fait un lapsus précédemment. En tout cas, voici

26 ma réponse aujourd'hui : la situation la pire à laquelle j'ai assisté,

27 c'était à Ovcara.

28 Q. Monsieur Vukasinovic, êtes-vous absolument certain que ce soir-là c'est

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1 le commandant Sljivancanin qui vous a donné ordre, d'abord emmener les gens

2 à la caserne, ensuite d'arranger un convoi pour qu'ils soient emmenés à

3 Sremska Mitrovica ? D'autres dépositions que nous avons entendues ici

4 semblent indiquer que cette décision n'a été prise que le lendemain matin,

5 c'est-à-dire que le convoi doit d'abord être envoyé à la caserne.

6 Est-ce que cela modifie vos souvenirs ou est-ce que vous adhérez

7 toujours à votre version ?

8 R. Je ne change rien à mon témoignage. C'était cette mission que l'on m'a

9 donnée. Je ne vois pas ce que je peux dire d'autre, d'ailleurs. C'était

10 l'ordre qu'on m'a donné. C'est la mission qu'on m'a donnée. Toutes ces

11 hypothèses, toutes ces réflexions, je ne les connais pas.

12 Q. Comment devait être le système qui devait être mis en place pour

13 assurer la sécurité de ce convoi ? Qu'avez-vous planifié et comment alliez-

14 vous établir des listes à propos de personnes qui devaient aller à Sremska

15 Mitrovica ?

16 R. Il faut que je vous redise un peu ce qui s'est passé. Certaines

17 personnes m'ont empêché de faire ce que je voulais. Qui ils étaient, il est

18 vrai que ce sont ces personnes qui m'ont obligé à changer mon fusil

19 d'épaule.

20 Q. Je vous ai demandé quand ? Quand est-ce que vous deviez faire ces

21 listes ?

22 R. Il y avait deux véhicules de combat; un qui était devant la colonne,

23 l'autre qui était en queue de colonne. Il y avait une patrouille d'agents

24 de la circulation pour réglementer la circulation sur la route selon les

25 méthodes d'intervention quand on est en convoi, et cetera. Pour ce qui est

26 des listes, j'avais prévu que les listes soient préparées à la caserne.

27 Cela dit, c'était impossible à cause des règlements qu'il fallait

28 observer, c'est-à-dire qu'il fallait que les listes soient établies soit à

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1 la caserne, soit quand on était en route. Une fois qu'on est arrivés à

2 notre destination, Sremska Mitrovica, les listes devaient être terminées.

3 Il n'est écrit nulle part où on doit établir ces listes. On peut très bien

4 le faire alors qu'on est en route. Ce qu'il fallait, en tout cas, c'était

5 qu'à l'arrivée il y ait des listes correspondant aux personnes qui sont

6 dans les bus.

7 Q. C'est ma question. J'avais cru comprendre que vous aviez envisagé à un

8 certain moment d'établir des listes. Ce serait quand même assez anormal

9 d'emmener des personnes sans savoir qui elles sont ?

10 R. Bien sûr, il fallait faire des listes. Comme cela on sait qui on remet

11 à qui. Ce n'était pas là qu'était le problème.

12 Q. Savez-vous que ces listes ont aussi été établies quand le groupe

13 Mitnica a été repris, le groupe qui est parti le 19 au matin ?

14 R. Cela, je le sais. Je sais exactement combien de personnes il y avait.

15 Dans des conditions normales, quand on veut assurer la sécurité, ce sont de

16 mesures qu'on ne peut pas négliger. Il est tout à fait normal de prendre

17 ces mesures.

18 Q. Dites-moi, d'après ce que vous nous dites, vous avez été chargé de

19 mettre de côté certains individus à la caserne, de les ramener à l'hôpital.

20 A ce moment-là, qu'est-ce que vous avez prévu sur le plan de la sécurité

21 des autocars qui étaient restés à la caserne ? Qui avez-vous chargé de

22 surveiller, d'assurer la sécurité jusqu'à votre retour ?

23 R. C'est Predojevic qui en était chargé. Depuis le premier moment, je suis

24 entré. Jusqu'à la fin, c'était sa mission. L'unité de la police militaire,

25 c'est notre unité, c'est notre immeuble. Il ne convient pas de le préciser.

26 Il sait naturellement quelles sont les actions qui doivent être menées à

27 bien. Pour moi, ce n'était pas un problème. C'était clair.

28 Q. S'il vous plaît, dites-moi quand vous êtes arrivé à la caserne, ces

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1 deux autocars, ils étaient là pleins, ou plutôt à l'hôpital, excusez-moi,

2 ils vous attendaient déjà pleins, est-ce qu'ils attendaient votre décision

3 pour prendre la route vers la caserne ? Entre-temps, pourquoi ils n'étaient

4 pas partis eux-mêmes à la caserne ?

5 R. Les individus étaient à bord des autocars et il fallait qu'ils

6 m'attendent. C'était moi la personne en charge. Personne ne pouvait les

7 amener en mon absence. Ils étaient obligés de m'attendre et mes soldats,

8 ils le savaient, ceux que j'avais sous mes commandes. Ils le savaient, ils

9 ont attendu mon arrivée.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic.

11 M. LUKIC : [interprétation] Page 77, ligne 18. Le témoin a dit, "mes

12 soldats le savaient, ces soldats qui étaient à moi à ce moment-là,

13 temporairement, provisoirement." C'était cela littéralement les propos du

14 témoin. La traduction est un peu différente.

15 M. VASIC : [interprétation]

16 Q. Monsieur Vukasinovic, vous êtes resté combien de temps à la caserne

17 entre le moment où vous êtes arrivé avec les trois premiers autocars et le

18 moment où les trois autres autocars ne vous aient rejoint. Vous vous

19 souvenez combien de temps s'est passé jusqu'à ce que tout le convoi n'y

20 arrive.

21 R. Tout le convoi ne s'est pas trouvé à la caserne; c'est cela le

22 problème. Je vous ai dit, j'étais à la caserne vers 10 heures. Il a fallu

23 que je m'occupe de ce qu'on m'a confié par la suite. Il m'a fallu une heure

24 pour cela. Je suis revenu à l'hôpital.

25 Je suppose que c'est vers 12 heures 30 ou 13 heures que je suis parti

26 de l'hôpital. C'est à peu près dans ces plages-là. Très certainement vers

27 13 heures, je suppose à peu près. Je l'ai souligné, et il m'est très

28 difficile de préciser l'heure. Mais à en juger d'après les différentes

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1 choses qui ont été faites, je suppose que j'ai pu rester sur place une

2 heure de plus à peu près.

3 Q. Les autocars qui étaient à l'hôpital, s'ils étaient déjà pleins, qu'est-

4 ce que vous avez fait pendant cette heure en attendant le convoi ?

5 R. Je vous l'ai déjà dit. Je ne sais pas si vous m'avez écouté. Il fallait

6 libérer 20 hommes sur chacun d'entre eux. Pour chacun d'entre eux, il faut

7 dire, "Tu es libre." J'écoutais ces conversations individuelles menées par

8 le commandant Sljivancanin, au cas par cas, pour chaque homme. Je suis sûr

9 qu'une heure a dû être perdue à cela sinon plus. Ce n'est pas aussi simple

10 que cela puisse en avoir l'air maintenant.

11 Q. Très bien. A quel moment est-ce que vous arrivez à Ovcara ? Vous pouvez

12 nous le dire ?

13 R. Dans les déclarations que j'ai déjà données, j'ai dit vers 13 heures

14 30, 13 heures, 13 heures 30, c'est ce qu'on trouve dans mes déclarations.

15 Cela a pu être moins ou plus, mais c'est à peu près cela; vers une heure et

16 demie.

17 Q. Au bureau du Procureur, vous avez fait une déclaration dans laquelle

18 vous dites que vous y avez vu Miodrag Panic, chef d'état-major, et que

19 d'après vous, il est parti d'Ovcara vers

20 13 heures. Vous auriez dû vous trouver à Ovcara un peu avant, n'est-ce pas?

21 R. C'est dans ces zones-là. La seule chose que je puisse vous dire, c'est

22 que nous nous sommes trouvés là. Il n'aurait pas pu partir, je ne l'ai pas

23 inventé. On s'est vu, quant à l'heure à laquelle on s'est vu, il m'est très

24 difficile de le dire. Il était sur place quand je suis arrivé. Ce qui est

25 certain, ce qui est exact, je pense que le témoin l'a confirmé, enfin je le

26 suppose. D'après tous les éléments qu'on a, on s'est trouvés à Ovcara

27 ensemble, c'est-à-dire, je l'ai trouvé sur place quand je suis arrivé.

28 Q. Vous dites vous espérez que le témoin l'a confirmé ?

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1 R. Je ne sais pas s'il l'a confirmé ou pas.

2 Q. C'est ce qui a été consigné au compte rendu d'audience ?

3 R. Oui, je ne sais pas si le témoin l'a confirmé.

4 M. VASIC : [interprétation] J'explique pour le compte rendu d'audience : le

5 témoin a dit qu'il ne le savait pas si un autre témoin l'a corroboré ou

6 confirmé.

7 Page 79, ligne 12, il est dit que "le témoin," pensait que "mon" témoin

8 l'avait confirmé, mais le terme "mon" ou "vôtre" n'a pas été employé du

9 tout par le témoin.

10 Q. Le chef d'état-major, Miodrag Panic, il est resté pendant combien de

11 temps à Ovcara pendant que vous y étiez vous aussi ? De toute évidence, il

12 est arrivé avant vous. Est-ce que vous pouvez nous dire combien de temps

13 vous y êtes trouvés ensemble ?

14 R. Je ne sais pas quand il est arrivé. Après que je lui ai adressé la

15 parole, je lui demande : Que se passe-t-il ? Pourquoi êtes-vous ici ? Il

16 m'a dit : Ce sont les ordres. Je pense que tout au plus nous avons eu un

17 contact d'une minute. C'est surtout moi qui lui ai parlé.

18 Q. Merci. A présent, est-ce qu'on peut examiner votre déclaration donnée

19 au bureau du Procureur. C'est à l'intercalaire 6, pour la version anglaise,

20 l'intercalaire 5. Le paragraphe 35, s'il vous plaît. L'avez-vous trouvé ?

21 R. Oui, oui

22 Q. Le même paragraphe en anglais.

23 "Les prisonniers de guerre que j'ai amenés à Ovcara ont été placés

24 dans le hangar en ma présence. A cette occasion, personne n'a subi des abus

25 physiques, personne n'a été maltraité. Je ne sais pas si tel a été le cas

26 du groupe précédent car je n'étais pas présent à ce moment-là. Je crois que

27 tous ceux qui ont été pris en charge dans le hangar ne devaient rester

28 qu'au plus une journée pour qu'une certaine vérification soit faite, et que

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1 par la suite, ils soient transférés à Sid ou à Sremska Mitrovica, comme

2 ceci avait été fait auparavant avec ceux qui avaient été faits prisonniers

3 et détenus à Ovcara."

4 C'est ce que vous avez déclaré en employant ces termes-là aux enquêteurs du

5 bureau du Procureur. Est-ce que vous pouvez juste nous apporter une réponse

6 pour le compte rendu d'audience ?

7 R. Oui.

8 Q. Sur la base de quoi dites-vous que d'après vous ils devaient rester

9 tout au plus une journée là-bas pour des vérifications, et que par la

10 suite, ils devaient poursuivre le chemin jusqu'à Sremska Mitrovica, comme

11 ceci a été le cas du groupe précédent s'étant trouvé à Ovcara ?

12 R. Je ne sais pas quelle est la question qui m'a été posée, mais cela

13 c'est le fruit de ma réflexion. C'est ce que j'ai trouvé après avoir tout

14 pris en compte. Ce changement de destination était nécessaire tout comme le

15 groupe de Mitnica a dû rester là pour passer la nuit. C'était déjà tard. Il

16 faisait noir, il faisait nuit. C'était l'hiver qui commençait.

17 C'est cela ma réflexion. Je me suis dit que c'était un grand hangar

18 et il y avait où les placer pour passer la nuit. Je me suis dit, ils

19 allaient repartir le lendemain, tout comme l'autre groupe. J'ai établi un

20 parallèle entre les deux groupes. Je me suis dit que la méthode appliquée

21 allait être la même.

22 Q. Vous nous avez dit qu'un groupe était déjà dans le hangar et la police

23 militaire de la 80e Brigade motorisée, elle le gardait déjà à ce moment-là,

24 n'est-ce pas ?

25 R. Oui.

26 Q. De la même façon qu'avec le groupe précédent de Mitnica, du 18 au 19

27 novembre ?

28 R. Probablement.

Page 15076

1 Q. D'après vous, quelle était la zone de responsabilité de la 80e Brigade

2 motorisée à ce moment-là ? Le savez-vous ?

3 R. Non, ce n'est pas quelque chose que je pourrais savoir. Mais de manière

4 approximative, cela devait être Ovcara, ce secteur au sens large. Mais

5 c'est le commandant du Groupe opérationnel sud qui parle bien de ces ordres

6 précis, les zones de responsabilité. Je pense que je ne suis vraiment

7 habilité ni compétent à préciser quelle était la zone de responsabilité de

8 la 80e Brigade motorisée.

9 Q. Il n'empêche que le 11 novembre 2005, quand vous avez déposé à

10 Belgrade, vous avez expliqué cela, me semble-t-il ? Si vous ne vous en

11 souvenez plus, je peux vous le montrer ?

12 R. Ce n'est pas moi qui ai tracé les frontières de la zone de

13 responsabilité. Si c'est cela qui vous intéresse, je ne sais pas. Mais si

14 vous parlez du commandement d'Ovcara, évidemment que c'est leur zone de

15 responsabilité. Quant à savoir où sont ces frontières, jusqu'où elles

16 s'étendent, c'est autre chose. Là où se situe le commandement, là est la

17 zone de responsabilité.

18 Q. Ma question est la suivante : est-il normal que l'unité dont c'est la

19 zone de responsabilité assure la sécurité des prisonniers qui se trouvent

20 dans le hangar en l'occurrence ?

21 R. Tout à fait. Ils ont l'unité de police militaire dont c'est la tâche de

22 faire cela.

23 Q. Vous avez dit que ce jour-là, à Ovcara, vous n'avez pas vu le

24 lieutenant-colonel Vojnovic, ou plutôt vous avez dit que vous ne le

25 connaissiez pas. Est-ce que vous avez vu un quelconque officier dans le

26 hangar ou dans les parages du hangar à Ovcara, mis à part le lieutenant-

27 colonel Panic au moment où vous êtes arrivé, vous ?

28 R. Le lieutenant-colonel Vojnovic, je ne l'ai pas vu. Cela je peux vous

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1 l'affirmer en toute responsabilité. Je ne l'ai pas vu. J'ai dit dans ma

2 déclaration qu'il y avait là un capitaine au moment où je suis arrivé.

3 Etait-ce ce capitaine-là ou non, je ne sais pas. Si vous me parlez de

4 Vezmarevic cela ne me dit rien. J'ai vu un officier dont le grade était

5 celui de capitaine. C'est tout ce que j'ai vu. Je n'ai vu personne d'autre.

6 Q. D'après votre déposition, avec ce capitaine vous avez réussi à mettre

7 de l'ordre dans le hangar d'Ovcara; est-ce exact ?

8 R. J'y ai fait régner l'ordre grâce au commandant Vujovic, plus qu'aux

9 autres et aux militaires et aux soldats qui étaient encore là-bas.

10 Q. Quand on a fait régner l'ordre à Ovcara, est-ce qu'on a prévu quelqu'un

11 pour monter la garde au hangar ? Est-ce que vous pouvez nous dire où les

12 prisonniers de guerre étaient à ce moment-là ?

13 R. Lorsqu'on parle de prisonniers de guerre ou de personnes sélectionnées

14 ou mises de côté, je pense que nous avons quelques petits problèmes avec la

15 terminologie. Lorsqu'on parle de prisonniers de guerre, c'est une

16 terminologie un peu plus lourde que lorsqu'on parle de personnes

17 sélectionnées ou mises de côté. Ils étaient à l'intérieur du hangar. Ils

18 étaient seuls. Il n'y avait personne d'autre. La porte était fermée. Devant

19 le hangar, il y avait les policiers militaires de la 80e Brigade. Un groupe

20 à l'entrée et aussi autour du hangar. C'est la mission qui leur a été

21 confiée.

22 J'ai insisté lorsque tout s'est terminé pour qu'ils prennent place,

23 qu'ils se mettent à leurs postes et qu'ils ne laissent plus personne

24 rentrer à l'intérieur. C'était cela leur mission. Je leur ai rappelé la

25 possibilité qu'ils avaient de s'acquitter de leur mission tant qu'on n'aura

26 pas trouvé de solution à la question.

27 Q. Ils avaient suffisamment d'effectifs pour faire cela ou ils vous ont

28 demandé des renforts ?

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1 R. Ils ne m'ont pas demandé des renforts. Ils avaient suffisamment de

2 forces. Ils avaient une compagnie de police militaire avec trois sections,

3 plus de 100 hommes. C'étaient les militaires de l'unité de réserve,

4 c'étaient des conscrits, des policiers militaires mobilisés, des hommes

5 expérimentés. Ils faisaient partie de la réserve et qui pouvaient s'en

6 charger sans aucun problème.

7 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si le

8 moment est venu de faire une interruption de séance ?

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] On pourrait le faire, Maître Vasic, si

10 ceci vous agrée ou est-ce que vous voulez qu'on aille jusqu'à la demie.

11 M. VASIC : [interprétation] Ce serait peut-être bien qu'on interrompes

12 maintenant, sinon plus tard.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons faire une suspension

14 d'audience, nous allons reprendre à 15 heures 45.

15 --- L'audience est suspendue à 15 heures 22.

16 --- L'audience est reprise à 15 heures 50.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore.

18 M. MOORE : [interprétation] Je tiens à vous dire une petite chose. J'ai

19 parlé avec mon éminent confrère M. Borovic et ses confrères. Il y a une

20 question à soulever en ce qui concerne le Témoin 002. Peut-être cela nous

21 prendra-t-il un peu de temps. Je me demandais s'il serait peut-être

22 possible après le contre-interrogatoire qui, à mon avis, se terminera vers

23 17 heures, si nous pourrions quand même traiter de cette question avant la

24 fin de l'audience.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourrons-nous savoir quelque chose à

26 ce propos, Monsieur Moore ?

27 M. MOORE : [interprétation] Et bien, on soulèvera le voile au dernier

28 moment. Cela porte sur le fameux carnet, l'emplacement de ce carnet, la

Page 15079

1 traduction de ce carnet, du carnet de 002. En fait, nous voudrions avoir

2 quelques conseils de la part de la Chambre par rapport à ce que demande la

3 Défense. Si tout doit être mis en œuvre comme prévu, il faudrait que nous

4 commencions à nous y mettre tout de suite pour avoir le temps.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, Monsieur Moore, pensez-vous que

6 vous aurez besoin de plus de cinq minutes ?

7 M. MOORE : [interprétation] C'est M. Borovic qui décidera du temps qu'il

8 lui faut, mais je pense qu'il lui faudra au moins dix à 15 minutes.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Vous aurez donc cinq

10 minutes, Monsieur Moore.

11 Je pense que M. Borovic vous doit une fière chandelle.

12 Monsieur Vasic, vous pouvez reprendre.

13 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie. Je vais peut-être aider en

14 essayant de trouver une solution à ce problème, puisque j'ai presque

15 terminé mon interrogatoire principal. Il y aura donc assez de temps pour

16 mes éminents confrères de poursuivre et d'explorer ce dont ils viennent de

17 parler.

18 Q. Monsieur Vukasinovic, j'aimerais clarifier une chose. Lors de mon

19 interrogatoire, nous avons déjà parlé du passage de votre déclaration

20 portant sur les personnes que vous avez vous-même emmenées à Ovcara. Avez-

21 vous vu la moindre de ces personnes qui sont venues avec vous à bord de ces

22 trois fameux autocars, être l'objet de sévices ?

23 R. Non. Ils n'ont pas été battus. J'avais pris des mesures en ce sens pour

24 qu'ils ne le soient pas, c'est-à-dire que j'avais bel et bien mis mes

25 soldats au poste devant le hangar. Ils étaient en rang serré, et ainsi, ils

26 empêchaient à qui que ce soit d'entrer dans le hangar pour tabasser les

27 gens. C'est ainsi que ces personnes sont rentrées dans le hangar, en

28 passant par cette haie serrée de mes gardes qui les protégeaient.

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1 Q. Au cours des opérations de Vukovar, savez-vous si les soldats ont été

2 prévenus des lois internationales au cas où ils auraient été capturés, au

3 cas où ils auraient fait des captifs ?

4 R. Oui. Il me semble qu'une ordonnance dans ce sens a été rendue par le

5 commandant de l'OG sud. Il y avait aussi des lignes directrices et d'autres

6 ordres nous venant du 1er District militaire. Nous étions des soldats de

7 métier. En tant que tel, il était de notre devoir de former nos soldats, de

8 leur enseigner les rudiments des activités de combat ainsi que de la

9 conduite à tenir en matière de convention de Genève et de lois et de

10 coutumes de la guerre, afin que les conscrits aussi bien que les soldats de

11 métier soient bien prévenus de leurs droits et de leurs devoirs avant

12 d'aller au combat. Ainsi, tous les soldats de notre unité de la Brigade des

13 Gardes avaient été bel et bien formés de leurs droits et de leurs devoirs

14 au cas où ils auraient été captifs ou ils auraient pris des captifs.

15 Q. Merci, Monsieur Vukasinovic. Maintenant, j'ai d'autres questions pour

16 vous. Si vous pouviez reprendre le classeur et regardez l'intercalaire 10.

17 En anglais, ce sera l'intercalaire 9. En version B/C/S, ce sera la page 15.

18 Pour ce qui est de la version anglaise, il s'agira de la page 11. J'espère

19 que vous avez trouvé le passage, Monsieur le Témoin.

20 R. Page 15. Oui, j'ai trouvé.

21 Q. Oui, c'est une réponse que vous avez donnée au Président de la Chambre.

22 On vous avait demandé ce que vous aviez fait après avoir quitté Ovcara.

23 Voici votre réponse et je cite :

24 "L'ordre a été rétabli. Il y a eu cet ordre qui a été donné, Puis, il y

25 avait des phases un peu différentes. Parfois, ils ricanaient. Parfois, tout

26 à coup, étaient pris de quelque chose. Ils étaient agressifs. En fin de

27 compte, on a quand même réussi à calmer la situation. Après avoir effectué

28 tout cela, je me suis rendu à mon poste de commandement.

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1 "Bien sûr, après une petite pause où j'ai déjeuné, et cetera, je suis

2 allé au commandement vers 5 heures, cinq heures et demie de l'après-midi

3 pour voir si Sljivancanin était là et pour lui faire rapport, lui dire ce

4 qui se passait là-bas, qui s'y trouvait et comment était la situation. Je

5 suis arrivé dans la salle des opérations. Le colonel qui était à l'époque

6 le commandant si Sljivancanin n'était pas encore là, le commandant était

7 là, en revanche." Vous avez ensuite parlé à Mrksic.

8 C'est bien ce que vous avez dit au tribunal de Belgrade dans l'affaire

9 Ovcara ?

10 R. Oui.

11 Q. Monsieur le Témoin, je n'ai plus de questions pour vous. M. VASIC :

12 [interprétation] J'en ai terminé avec ma partie de l'interrogatoire.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Borovic, c'est à vous.

14 M. BOROVIC : [interprétation] Bonjour.

15 Interrogatoire principal par M. Borovic :

16 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, connaissez-vous le capitaine

17 Miroslav Radic ?

18 R. Oui.

19 Q. Très bien. Le 20 novembre 1991, quand vous avez emmené ces gens pour

20 les embarquer à bord d'autocars, le capitaine Miroslav Radic vous a-t-il

21 aidé d'une façon quelconque ou a-t-il participé à cette activité ?

22 R. Non.

23 Q. Vous avez fait une déclaration au bureau du Procureur en déclarant qui

24 se trouvait dans l'enceinte de l'hôpital le 20. Vous avez répété cela. Vous

25 nous avez répété que nous ne l'aviez jamais le 20 novembre 1991; c'est bien

26 cela ?

27 R. Oui.

28 Q. Merci. Quand vous avez ramené ces 20 personnes à l'hôpital selon la

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1 liste et comment vous avez détaillé, vous avez bien détaillé comment vous

2 étiez passés de bus, d'autocars à autocars. Vous avez lu les noms. Vous

3 avez compté les personnes. Dites-nous si le capitaine Radic a participé à

4 ces activités d'une façon ou d'une autre ?

5 R. Non.

6 Q. Cela signifie que vous ne l'avez jamais dans la caserne ce jour-là ?

7 R. En effet.

8 Q. Très bien.

9 M. BOROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé avec

10 mon interrogatoire - mais j'ai maintenant une autre question encore à

11 poser, s'il vous plaît.

12 Q. Vous êtes-vous jamais rendu au poste d'observation du capitaine Radic

13 au cours des événements de Vukovar ?

14 R. Jamais.

15 Q. Est-ce que cela signifie que vous ne connaissiez aucun de ces soldats ?

16 R. En effet, c'est ce que cela signifie.

17 Q. Je vous remercie.

18 M. BOROVIC : [interprétation] Dans ce cas, j'en ai terminé.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Borovic.

20 Monsieur Moore, c'est à vous.

21 Contre-interrogatoire par M. Moore :

22 Q. [interprétation] On nous a dit que M. Sljivancanin était un homme très

23 grand, très courageux, très attrayant. Il avait une moustache le 20, n'est-

24 ce pas ?

25 R. Non.

26 Q. Vous avez eu l'occasion de parler avec ces gens. Vous vous adressez à

27 différentes institutions qui vous ont posé des questions sur votre

28 participation à cet incident. On serait en droit de dire que la première

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1 fois où apparemment vous avez eu un entretien de cette nature que c'était

2 le 16 novembre 1998; est-ce exact ? Etait-ce la première fois ?

3 R. Oui.

4 Q. Vous avez été convoqué, la date était celle du

5 16 novembre 1998. Est-ce que vous confirmez cela ?

6 R. Oui.

7 Q. De toute évidence, pas pour des raisons de culpabilité ou autre chose

8 de ce genre, mais ceci a dû vous préoccuper un petit peu de faire une

9 déclaration au sujet de cette affaire. Ce n'est pas quelque chose

10 d'agréable, n'est-ce pas ?

11 R. Mais naturellement.

12 Q. Pour terminer là-dessus, beaucoup de gens ont dit, que d'après eux,

13 c'est vous qui aurait dû faire l'objet d'un acte d'accusation pour des

14 infractions qui ont été commises à Ovcara. Vous êtes au courant de cela,

15 n'est-ce pas ?

16 M. LUKIC : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec cette question,

17 Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Lukic.

19 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que mon confrère exerce une sorte de

20 pression, mais je ne vois pas sur la base de quoi, sur la base de quel fait

21 M. Moore avance ce genre de conclusion. S'il se permet ce genre

22 d'affirmation, et bien, il doit citer ses sources. Donc, qui lui a dit que

23 M. Vukasinovic devrait être l'accusé, ici, ou devrait être accusé de ces

24 faits.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore.

26 M. MOORE : [interprétation]

27 Q. Je vous soumets, qu'à plusieurs reprises, on vous a entendu au sujet de

28 votre participation, n'est-ce pas ? Et on vous a mis en garde, n'est-ce pas

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1 ?

2 R. Je ne comprends pas de quel avertissement vous parlez. J'ai fait des

3 déclarations. Mais vous insistez sur une mise en garde ou un avertissement.

4 Q. Essayons d'examiner la première déclaration qu'on vous a invité à

5 fournir. Il est clair qu'il s'agit de fournir des éléments d'information

6 nécessaire au sujet de MM. Sljivancanin, Mrksic et Radic eu égard à

7 plusieurs crimes commis contre des civils, des prisonniers de guerre. Il

8 est exact, n'est-ce pas, qu'à l'intercalaire 2, on trouve la toute première

9 déclaration que vous avez faite ?

10 C'est l'intercalaire 2.C'est une déclaration, n'est-ce pas ? On vous

11 pose des questions précisément au sujet de ces événements, n'est-ce pas ?

12 R. Si.

13 Q. A votre avis, pourquoi est-ce que vous avez été convié pour faire cette

14 déclaration ? Quelle était la finalité de cela, d'après vous ? Il est

15 question ici très clairement de recueillir des informations.

16 R. La finalité de ma déclaration, en tant que témoin, je devais contribuer

17 par le truchement de ma déposition pour parler de ce qui s'est passé là où

18 j'étais, là où j'ai vu des événements et pour que, comme vous le dites, on

19 trouve des responsables. Que par ma déposition, je mette en lumière

20 certains événements qui se sont déroulés là où je me suis trouvé.

21 Q. Serait-on en droit de dire que lorsqu'on a découvert qu'un crime de

22 masse a été commis à Ovcara, que pour le groupe de personnes dont vous

23 étiez responsable, que vous avez toutes les raisons de vous sentir

24 préoccupé ?

25 R. C'est vrai que je me sens préoccupé, mais je n'assume pas et je

26 n'endosse pas la responsabilité. Je ne suis pas responsable.

27 Q. Non, mais je vous pose ma question au sujet de 1998. Vous allez vous

28 présenter devant un tribunal pour fournir votre version des faits, n'est-ce

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1 pas ?

2 R. C'est exact.

3 Q. Il était parfaitement clair que vous deviez parler vrai et dire des

4 choses exactes, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, fournir une déclaration exacte sur la base de mes souvenirs.

6 Q. Mais c'est la première fois que vous déposez ici, et nous savons que

7 vous avez continué jusqu'en 2005. A moins que votre esprit ne ressemble à

8 du bon vin, à un grand cru, et bien, ce n'est pas avec l'âge que le cerveau

9 a tendance à s'améliorer. C'est la première fois que vous avez donné une

10 déclaration, n'est-ce pas ?

11 R. Oui.

12 Q. Je vais donner lecture de votre déclaration en anglais : "A un moment

13 donné, dans la soirée du 18," il me semble de que vous avez dit que c'était

14 le 19, enfin dans une autre déclaration. Donc, "A un moment donné dans la

15 soirée du 18 novembre, après la libération de Vukovar, le commandant

16 Sljivancanin m'a donné l'ordre d'organiser l'évacuation des gens de

17 l'hôpital vers la caserne de Vukovar le

18 19 novembre 1991." Je pense que vous avez reconnu dans le passé, que vous

19 vous êtes trompé d'un jour, qu'il faut faire avancer la date d'un jour.

20 "Je suis arrivé avec trois autocars devant l'hôpital de Vukovar à 6

21 heures du matin le 16 novembre 1991 et les gens étaient déjà prêts pour

22 être évacués.

23 "J'ai pris environ 150 personnes à bord de trois autocars, dans la

24 première relève et le premier groupe et je les ai amenées dans la caserne

25 de Vukovar. Une fois arrivé à la caserne de Vukovar, j'ai dit que la

26 compagnie de police militaire commandée par le capitaine Predojevic, Milan,

27 était là pour assurer la sécurité. Je leur ai donné l'ordre d'assurer la

28 sécurité de toutes les personnes à bord des autocars.

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1 "Il y avait entre 30 et 40 hommes en arme, des membres de la Défense

2 territoriale à la caserne. Ils se sont précipités sur les autocars et ils

3 m'ont demandé l'autorisation de faire descendre des gens pour s'en occuper

4 immédiatement. Je n'ai pas accepté que cela se fasse, je n'ai pas donné

5 l'autorisation et j'ai donné l'ordre au feu capitaine Predojevic d'assurer

6 la sécurité des autocars avec la police militaire et de ne laisser personne

7 ouvrir les portières de l'autocar.

8 "Puis, je suis revenu avec deux autocars vides à l'hôpital de

9 Vukovar. J'ai pris 100 personnes et je suis parti pour la caserne de

10 Vukovar. Il n'y avait pas de liste qui aurait été faite pendant qu'ils

11 montaient. Lorsque je suis arrivé à la caserne de Vukovar, j'ai remarqué

12 qu'il n'y avait ni d'autocar ni de personnes du premier groupe que j'avais

13 laissé sur place. Le feu capitaine Predojevic m'a informé qu'on avait

14 organisé le transfert de ces personnes avec une police pour assurer la

15 sécurité à Ovcara.

16 "J'ai poursuivi vers Ovcara avec les autocars et des personnes à bord

17 de ces autocars. Lorsque je suis arrivé là-bas, j'ai trouvé que toutes les

18 150 personnes étaient dans le hangar, et c'est là que j'ai placé les 100

19 qui restait. Puis, j'ai remarqué un groupe de personnes armées. C'étaient

20 des paramilitaires. Parmi eux, j'ai reconnu Stanko Vujanovic, Miroljub

21 Vujovic. J'ai remarqué qu'ils étaient plutôt bruyants et que c'est

22 verbalement qu'ils menaçaient les civils dans le hangar."

23 "Vers 18 heures le même jour, je suis revenu au poste de commandement

24 et j'ai informé le colonel Mrksic du comportement de ce groupe. A cette

25 occasion, j'ai dit qu'en se comportant de cette manière, ils risquaient de

26 mettre en danger les civils dans le hangar. Le colonel Mrksic m'a donné

27 l'ordre et au commandant Sljivancanin d'y retourner et de vérifier sur

28 place ce qui était en train de se passer. C'était vers 22 heures. Une fois

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1 arrivés sur place, nous avons constaté que la situation était tout à fait

2 calme. Nous avons trouvé sur place Miroljub Vujovic avec certains de ses

3 hommes qui ne posaient pas problèmes."

4 "Après leur avoir parlé pendant une trentaine de minutes, nous sommes

5 revenus au commandement et nous avons rendu compte au commandant de la

6 situation que nous avions trouvée sur place. Je ne sais pas ce qui s'est

7 déroulé par la suite. Le lendemain, le

8 20 novembre, nous avons découvert que toutes les personnes d'Ovcara avaient

9 disparu pendant la nuit et que leur sort n'était pas connu. De manière

10 catégorique, je déclare qu'aucun membre de la JNA n'a pris part aux

11 meurtres des civils emprisonnés. Je n'ai rien à ajouter. Tous mes propos

12 font partie de ces déclarations. J'ai dicté sa teneur et j'ai signé sans

13 objections."

14 Je voudrais maintenant aborder plusieurs aspects de cette déclaration. La

15 page 2, s'il vous plaît. Ici, comme vous avez d'ailleurs dit à la Chambre

16 de première instance, vous affirmez que vous avez informé le colonel Mrksic

17 de leur comportement et que, par conséquent, c'est moi qui ajoute : "Le

18 colonel m'a donné l'ordre à moi et au commandant Sljivancanin d'y retourner

19 et de vérifier sur place ce qui est en train de se passer. C'était vers 22

20 heures."

21 Très bien. Ici, dans le cadre de votre déposition, vous n'avez absolument

22 pas mentionné Sljivancanin allant à Ovcara après que vous ayez vu les

23 mauvais traitements des prisonniers ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce que cela signifie que Me Lukic vous a montré ces déclarations

26 avant que vous ne veniez déposer ici ? Est-ce que vous avez vu cette

27 déclaration ? Vous êtes là depuis une semaine. Est-ce que vous avez eu

28 l'occasion de voir cette déclaration avant de venir dans le prétoire ?

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1 R. Oui.

2 Q. Aurais-je raison de dire que pour les autres déclarations que j'ai

3 l'intention de parcourir partiellement, que celles-là aussi vous les avez

4 vues ?

5 R. Oui.

6 Q. Je vous demande des choses au sujet desquelles vous saviez que vous

7 alliez avoir à répondre. Vous avez des personnes qui se trouvent en danger

8 à Ovcara. Par la suite, vous vous adressez à Mrksic, et par conséquent,

9 vous et Sljivancanin, sur demande de Mrksic, vous vous rendez à Ovcara.

10 C'est en 1998, c'est sept ans après les événements. Aujourd'hui, nous

11 sommes à 15 ans après les événements. Comment est-ce que vous auriez pu

12 vous tromper en 1998, alors que vous le savez bien et sans erreur en 2006 ?

13 Est-ce que vous l'avez entendu de la part de quelqu'un d'autre ou est-ce

14 que votre mémoire s'est améliorée avec le temps ?

15 R. La mémoire peut s'améliorer, mais on ne peut pas entendre cela de la

16 bouche de quelqu'un d'autre. Ce que j'ai déclaré, c'est que j'ai du mal à

17 me situer pour ce qui est des heures, des minutes et des dates. Vous

18 insistez sur le fait que j'avais cette mémoire-là à l'époque, et que j'ai

19 condensé le 19 et le 20 en une seule journée. En fait, j'ai placé les

20 événements des deux journées en une seule.

21 Par la suite, par conversation avec mes collègues et dans le journal

22 j'ai vu qu'il manquait une journée entière, une journée des activités que

23 j'ai eues. C'est là que j'ai pris conscience du fait que les dates ne

24 collaient pas. Je sais très précisément que je suis allé à Ovcara deux fois

25 avec le commandant Sljivancanin, mais c'était les 18 et 19.

26 Le 20, je n'y suis pas allé. Je l'ai vu dans le journal de guerre où

27 c'est écrit que c'était le 20 à cet endroit. Le 19, c'est la date sur

28 laquelle je fais confusion. Je décris les événements de deux journées. Les

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1 gens ont été ramenés de Zupanja, des véhicules étaient là et aussi les gens

2 de l'hôpital.

3 Dans mon esprit, tout cela s'était condensé, concentré sur la journée

4 du 19. A l'époque, c'était comme cela que je voyais les choses et c'est

5 cela que j'ai fait valoir dans cette déclaration.

6 Q. Peu importe les dates. Ce sont les incidents qui sont pertinents. De la

7 manière dont vous avez organisé votre déclaration, c'est la conséquence des

8 actions menées face aux prisonniers qui vous ont incité à aller parler à

9 Mrksic; c'est exact ?

10 R. Cela c'est exact.

11 Q. Lorsque dans cette déclaration vous dites : "J'ai fait part de ma

12 suspicion. J'ai dit que le comportement ou le fait de se comporter de cette

13 manière-là pouvait mettre en danger les civils dans le hangar," c'est ce

14 comportement-là qui vous a incité à aller voir Mrksic ?

15 R. C'est exact.

16 Q. En conséquence, Mrksic vous envoie vous et Sljivancanin pour retourner

17 sur place pour voir si les choses continuent. Il vous a demandé : "D'y

18 retourner pour voir ce qui s'y passait."

19 Cela n'a rien à voir avec les véhicules. Cela a à voir avec les gens

20 qui sont en train de se faire tabasser ?

21 R. Oui.

22 Q. En réalité, si on parle de votre mémoire, c'est votre mémoire sans

23 qu'elle ait subi une influence due à des éléments d'information fournis par

24 d'autres personnes; c'est bien cela ?

25 R. Ma mémoire des événements n'a pas changé. Cela c'est sûr. L'événement

26 principal est ce qui s'est passé avec les gens dans le hangar. Il y a des

27 civils qui sont revenus de Zupanja. C'est un gros convoi de civils. C'est

28 cela que j'ai ajouté là. C'est la raison pour laquelle j'ai mis que tout

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1 cela c'était le 19. Je ne sais pas si vous pouvez le comprendre. Quand on a

2 à l'esprit les événements des deux journées condensées en une journée,

3 c'est là qu'il y a eu une erreur dans ma déclaration. J'ai dit que c'était

4 le 20 que j'y suis allé mais, en fait, ce n'est pas du tout vrai. C'était

5 le 18 et le 19.

6 Tout simplement, c'est une interversion des deux dates. L'événement

7 principal je l'ai placé la journée du 19. C'est l'évacuation de l'hôpital.

8 J'ai fait un lien entre cela et l'arrivée des civils qui ont eu des

9 problèmes de véhicules, qui sont arrivés en fin d'après-midi, début de

10 soirée. Mais cela, c'est marginal comparé à cela.

11 J'espère que vous comprenez. Je n'essaie pas de nier que cela a eu lieu.

12 J'étais présent lors de la prise en charge de ces gens. Je ne peux pas être

13 responsable si j'ai pris toutes les mesures nécessaires pour que ces gens

14 sur place soient protégés contre tout abus, et en tant qu'officier j'en ai

15 informé mon supérieur direct. Je n'étais pas responsable de prendre des

16 mesures, donner des ordres à des unités. Je ne sais pas lesquelles, enfin

17 j'ai pris toutes les mesures. Je me suis adressé à mon supérieur direct, je

18 lui ai présenté la situation, proposé des mesures. En tant qu'homme, en

19 tant qu'officier, je pense que je me suis acquitté de la principale partie

20 de ma tâche à protéger les gens. J'ai empêché, personnellement, j'ai

21 empêché qu'on continue de les maltraiter. En ma présence, ils étaient

22 protégés.

23 Q. C'est très intéressant, Monsieur Vukasinovic. Mais si vous pouvez juste

24 répondre à ma question ? En 1998, votre récit n'avait pas subi l'influence

25 des suggestions, des éléments d'information fournis par d'autres personnes.

26 Que ce soit exact ou confus, mais ce sont vos souvenirs; c'est bien cela ?

27 R. C'est la substance : il n'y a pas vraiment de différence de substance

28 entre ces deux déclarations. On parle de la même chose. Ce sont les gens

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1 qui ont été exposés à différentes actions. On les a protégés et on a dit

2 qu'il faut prendre des mesures. Je ne vois aucune différence. C'est juste

3 sur la date que vous insistez. Mais je n'insiste pas sur la date; j'insiste

4 sur les événements, mon rôle, le rôle que j'ai joué dans ces événements et

5 les fruits de mon travail, pour ainsi dire, face à mon commandant, à mon

6 supérieur. En tant que témoin, c'est de cela que je me suis souvenu et

7 c'est cela qui figure dans ma première déclaration.

8 Rien de tout cela ne doit être mis en question au sujet des gens, du

9 problème qui s'est posé, leur protection et les mesures prises, les mesures

10 optimales de ma part en tant qu'homme et en tant que militaire. Je ne sais

11 pas si vous arrivez à comprendre ce que je suis en train de vous dire.

12 Q. Oui, je vous comprends. Mais je n'ai pas parlé de la date. Très

13 précisément, je vous ai dit que ce n'était pas la date qui m'intéressait,

14 mais que c'était l'incident. Je vous soumets que c'est l'incident, les

15 faits et les conséquences des actes qui sont importants. Tout d'abord, vous

16 avez vu le mauvais traitement. Ensuite, vous vous êtes adressé à Mrksic au

17 sujet de vos préoccupations, et trois, en tant que conséquence, Mrksic vous

18 envoie vous et Sljivancanin, vers 10 heures, pour que vous voyez vous-même

19 ce qui se passe sur place. Et quatre, vous constatez qu'il ne se passe

20 rien, vous revenez une demi-heure plus tard.

21 Je ne me réfère pas à la date; je mentionne une série d'événements de cause

22 à effet; est-ce exact, n'est-ce pas ? Quant à savoir si vous vous trompez,

23 si vous êtes un peu confus, cela c'est autre chose, mais c'est la substance

24 de votre déclaration, n'est-ce pas ?

25 R. Premièrement, je ne suis absolument pas confus. Je n'ai aucune raison

26 d'être confus. Deuxièmement, nous parlons de la même façon. Mais ce que

27 vous voulez, c'est que je vous dise que se sont produites des choses qui ne

28 se sont pas produites. Telle était la situation. Rien ne s'est passé au

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1 moment où le 19, le commandant Sljivancanin et moi-même sommes allés là-

2 bas. Je vous ai dit explicitement le 20, je n'étais pas là, lui non plus, à

3 partir de trois heures et demie et plus tard.

4 Je n'ai rien omis. J'ai tout expliqué au sujet du comportement

5 réservé à ces civils du début à la fin, pendant cette période-là. C'est

6 comme cela que cela s'est passé. Je ne peux pas vous dire maintenant qu'il

7 s'est passé autre chose puisque ce n'est pas le cas. Vous me comprenez ?

8 Q. Essayons de l'examiner. Vous avez dit aux Juges de cette Chambre ainsi

9 qu'aux autres, que le 19 vous êtes allés, le 19 précisément, parce que vous

10 vouliez savoir si les véhicules étaient en ordre. Vous étiez très préoccupé

11 par les véhicules et peut-être aussi par la situation de manière générale.

12 Ceci n'a rien à voir avec les véhicules, rien à voir avec la

13 situation. Cela a à voir avec les passages à tabac des personnes sur

14 lesquelles vous aviez la responsabilité, que cela vous plaise ou pas. Vous

15 avez vu ce qui se passait et c'est la raison pour laquelle vous êtes allé

16 voir Mrksic. Il ne s'agit pas de voitures. Dans votre déclaration, il

17 s'agit de ce que vous avez vu et du fait d'en avoir informé votre

18 supérieur, qui lui, vous a donné l'ordre d'y retourner pour constater ce

19 qui se passait.

20 Cela se passe à 10 heures, 10 heures 30 du soir et comme nous le

21 savons, Monsieur Mrksic, à ce moment-là, est censé être chez lui en train

22 de prendre un bain. Je ne sais pas si vous en avez entendu parler. On vous

23 a dit cela, que M. Mrksic est rentré chez lui dans la soirée du 20, que le

24 chauffe-eau a été mis en marche parce qu'il devait se laver.

25 Etes-vous au courant de cela, Monsieur Vukasinovic, 10 heures du soir

26 que M. Mrksic est censé être de retour à Belgrade ?

27 R. Je ne suis pas au courant de cela, mais dans le journal de guerre, j'ai

28 vu qu'il est écrit que M. le commandant Mrksic est parti pour Belgrade, le

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1 21 dans la matinée. Je pense qu'il faut faire confiance au journal de

2 guerre, un document de guerre qui est censé être le document le plus exact

3 qui soit. Je ne veux pas entrer là-dedans, où était Mrksic, ce qu'il

4 faisait, je ne pense pas que ce soit cela le problème.

5 Vous prenez cela pour de l'argent comptant, ce que je dis et vous

6 estimez que c'est inexact. Je ne comprends pas votre attitude face aux

7 événements. Qu'est-ce que vous permet d'affirmer que Mrksic était chez lui

8 et qu'il a allumé le chauffe-eau ? Qu'est-ce qui vous permet de l'étayer ?

9 Q. Peut-être que j'ai mélangé deux sujets. Mais je veux en venir au

10 journal de guerre.

11 Tout simplement ce que je vous dis, c'est que c'est cela votre récit.

12 Vous et Sljivancanin, vous êtes envoyés à Ovcara vers

13 10 heures et il ne se passe rien.

14 Est-ce qu'on vous a dit qu'on a entendu des dépositions disant qu'on

15 vous a vu à Ovcara dans la soirée du 20 ? Me Lukic vous en a-t-il parlé ou

16 qui que soit d'autre ?

17 R. Non, je ne le sais pas. D'ailleurs, je suis prêt à faire face à tout

18 témoin qui l'aurait affirmé. Il y a des faits qui permettent de savoir si

19 quelque chose est exact ou pas. S'il y a plusieurs faits qui tendent à

20 montrer que c'est exact alors c'est exact. Sinon, je vous en prie, ce n'est

21 pas exact. Ici, tout doit être fondé sur des faits. Vous savez, je peux

22 dire que vous étiez ici simplement parce que cela me plaît et je peux

23 affirmer le contraire. Mais si nous sommes dix à affirmer que vous étiez

24 ici, la logique d'interprétation des faits nous impose de penser que c'est

25 vrai. En toute responsabilité, ici, devant vous et devant cette respectable

26 Chambre, j'affirme que je n'étais pas à Ovcara après 3 heures 30, le 20

27 novembre 1991.

28 Q. Dans cette déclaration, aucune mention n'est faite de ce qu'on a appelé

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1 la réunion du gouvernement, n'est-ce pas ? On vous a posé des questions au

2 sujet "du gouvernement," mais enfin il n'est pas question de gouvernement

3 dans cette déclaration, il n'est pas mentionné du tout ?

4 R. On m'a demandé au sujet du gouvernement et j'ai dit ce que

5 j'en ai entendu dire où et quand.

6 Q. Mais voyez-vous, il paraît que ce gouvernement aurait une certaine

7 importance, puisque c'est la raison pour laquelle ces gens ne sont pas

8 partis de Sremska Mitrovica. C'est à cause de cela qu'ils ont été emmenés à

9 Ovcara. C'est cela qui expliquerait le changement d'itinéraire, n'est-ce

10 pas ? Vrai, n'est-ce pas ce que vous avez dit à la Chambre ?

11 R. C'est peut-être la raison, mais ce n'était pas de mon ressort. Je

12 n'avais pas à savoir ce que faisait le gouvernement, quand le gouvernement

13 siégeait ou quoi que ce soit. J'étais juste là pour exécuter des ordres. Je

14 suis tout à fait en dehors de la boucle de décision. Je n'étais pas

15 informé. Ce que vous me dites, c'est peut-être vrai, mais je n'avais aucun

16 lien avec le gouvernement. Je n'étais pas informé.

17 Je suis d'accord avec vous, certes. Mais je pense que vous devriez

18 poser la question à quelqu'un d'autre, parce que je n'avais aucune raison

19 de savoir ce qui se passait au niveau du gouvernement.

20 Q. Je vous ai posé une question, et je pense que la question que je vous

21 ai posée est tout à fait raisonnable.

22 R. [aucune interprétation]

23 Q. S'il vous plaît, ne me couper pas la parole.

24 Vous savez que nous sommes en train d'enquêter sur des crimes qui

25 auraient été commis à Ovcara. Alors, si ce que vous dites est vrai, il est

26 bien vrai que le gouvernement, donc M. Mrksic et le gouvernement ont décidé

27 que ces personnes qui ont été présélectionnées ne vont pas être emmenées à

28 Sremska Mitrovica mais vont être emmenées à Ovcara. On pourrait croire que

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1 c'est peut-être pour cela qu'ils ont été tués. Je ne suis pas en train de

2 dire que c'est la raison derrière ces meurtres, mais je dis qu'on pourrait

3 croire que c'est la raison derrière ces meurtres.

4 Pourquoi avez-vous dit au juge d'instruction militaire tout cela ?

5 Pourquoi ne lui en avez-vous pas fait part ? C'est une question très

6 simple, après tout. Pourquoi n'avez-vous pas fait mention de tout cela au

7 juge d'instruction à Belgrade ?

8 R. Vous savez bien qu'on ne peut pas répondre à une question qui ne vous a

9 pas été posée. Je n'ai répondu qu'aux questions que m'a posées le juge

10 d'instruction. Quand il me posait la question, je répondais. Quand il ne

11 posait pas la question, je ne répondais rien. Je ne pouvais pas dire autre

12 chose que les réponses aux questions qui m'étaient posées.J'ai bien dit que

13 quand j'étais arrivé j'avais entendu certaines choses, mais ultérieurement.

14 Je n'avais jamais entendu parler de ce fameux gouvernement qui siégeait.

15 Je n'étais pas informé, je n'étais qu'un commandant, j'étais qu'un

16 sous-officier. Je n'étais pas censé savoir ce qui se passait au niveau plus

17 élevé. Je n'avais pas de responsabilités de commandement, je ne faisais pas

18 partie du commandement, je n'étais pas au briefing. J'étais là pour

19 exécuter les ordres qu'on me donnait.

20 Q. Avec le respect que je vous dois, Monsieur Vukasinovic, on ne peut

21 quand même pas dire que vous êtes quelqu'un de peu bavard, puisque vous

22 avez tendance à répondre avec profusion, quand même.

23 R. Je ne comprends pas ce que vous me dites. Je vous écoute, mais je ne

24 vous comprends pas. Je réponds à vos questions et je vous donne mon point

25 de vue de l'époque, pas d'aujourd'hui. Les choses sont différentes

26 maintenant, avec le recul. Je vous réponds en me remettant à l'époque.

27 Q. Très bien. Revenons-en à ce journal de guerre. Vous dites qu'il faut

28 faire confiance au journal de guerre et qu'il y est inscrit que Mrksic est

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1 parti le matin du 21 novembre; c'est bien cela ?

2 R. Oui, en effet. C'est ce qui a été enregistré dans le journal de guerre

3 de la Brigade des Gardes. Que ce soit vrai ou faux, alors là, ce n'est pas

4 à moi d'interpréter ce qui est écrit dans ce journal. Mais je sais que

5 c'est écrit noir sur blanc dans ce journal.

6 Q. Mais ce n'est pas votre réponse à l'époque. Vous nous avez dit qu'il

7 faut absolument faire confiance au journal de bord. Ce n'est pas à l'époque

8 d'ailleurs; c'était il y a quelques minutes.

9 R. En effet, tout à fait. En matière de documents de combat, le carnet

10 d'ordres de missions et le journal de guerre sont les documents les plus

11 fiables. Ils doivent donc être conservés et archivés pendant très

12 longtemps.

13 Q. Cette interview, de toute façon, s'est terminée. J'ai encore une

14 question à vous poser.

15 Regardez la dernière question qui est à la fin du paragraphe. Voici

16 ce qui est écrit : "Le jour suivant le 20 novembre," nous savons, bien sûr,

17 qu'il s'agit du 21.

18 A la fin de l'intercalaire 2, tout à la fin - j'espère que vous avez

19 trouvé le passage - je cite, cela commence par : "Le jour suivant, le 20

20 novembre …"

21 R. Vous voulez parler de la première déclaration ?

22 Q. Il vous suffit d'aller à l'intercalaire 2 en B/C/S. C'est un

23 intercalaire rose, j'en suis presque sûr, j'y mettrais ma main à couper.

24 R. Oui, je vous écoute.

25 Q. Je voulais juste savoir si vous avez trouvé le passage dont je vous

26 parlais.

27 R. Oui, je l'ai trouvé.

28 Q. Merci, je cite : "Le jour suivant, le 20 novembre," il s'agit du 21,

Page 15098

1 "nous nous sommes rendu compte que toutes les personnes d'Ovcara avaient

2 disparu pendant la nuit et que leur sort était inconnu."

3 Vous dites, "Nous nous sommes rendu compte," il ne s'agit pas de rumeurs.

4 Là, vous vous êtes rendu compte. Quand on se rend compte, c'est autre

5 chose. Il y a d'un côté "se rendre compte" et de l'autre côté "avoir

6 entendu dire que," ce n'est pas la même chose, quand même, si vous voyez ce

7 que je veux dire. Pourriez-vous, s'il vous plaît, m'expliquer pourquoi vous

8 avez utilisé cette façon de parler; dire, "Nous nous sommes rendu compte"

9 plutôt que de dire "Nous avions entendu des rumeurs que nous avons

10 négligées."

11 R. Tout d'abord, il est écrit : "Le jour suivant, nous nous sommes rendu

12 compte que les gens qui étaient Ovcara," et ce n'est pas écrit toutes les

13 personnes qui étaient à Ovcara. C'est une première réponse. Donc, cette

14 personne m'a demandé comment j'avais appris que des personnes avaient

15 disparu et voilà la réponse que je lui ai donnée. Une réponse très courte.

16 Q. Oui. Mais les conséquences devaient être très différentes, n'est-ce pas

17 ? Parce que si vous aviez dit : "Nous avions entendu dire qu'il y avait une

18 rumeur selon laquelle ces personnes avaient disparu," cela c'est une chose,

19 parce qu'il y avait beaucoup de rumeurs à l'époque. On peut très bien,

20 peut-être, laisser tomber la rumeur et ne pas s'y intéresser. Alors que là,

21 vous dites : "Nous nous sommes rendu compte que les personnes à Ovcara,"

22 j'imagine qu'en serbe la même différence existe entre les deux façons de

23 parler ?

24 R. Je vais à nouveau vous expliquer. J'ai répondu de façon très courte à

25 la réponse. J'ai été précis, puisqu'on m'avait demandé qui me l'avait dit,

26 de qui je l'avais appris, ce que j'avais fait en ayant entendu une telle

27 information.

28 Pourquoi cela m'a été posé de cette façon-là ? Parce que cela n'a pas

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1 été confirmé par la suite. Cette histoire n'a pas été répétée. Il n'y avait

2 pas beaucoup de gens qui répétaient toujours les mêmes histoires. Si oui,

3 on aurait fait une enquête. On a interprété l'information comme étant une

4 rumeur, parce qu'on n'avait pas de fait pour étayer cette rumeur. Je

5 n'avais pas eu de confirmation.

6 Q. Je vais peut-être un petit peu vite en besogne, mais je tiens à vous

7 poser une question. Pourquoi n'êtes-vous pas aller voir Mrksic ou

8 Sljivancanin pour leur dire : "Les choses n'allaient pas fort hier. J'ai

9 entendu une rumeur. Il faudrait peut-être qu'on vérifie ? Ou bien vous

10 auriez pu aller vérifier vous-même.

11 Vous avez peut-être soif, Monsieur le Témoin ?

12 R. Non, je suis très bien, je vais bien.

13 Je ne pense pas qu'il est à faire de commentaire sur ce type de

14 remarques. Il ne convient pas d'utiliser ce type de stratagème. Je pense

15 qu'on devrait en rester au type de conversation que nous avions auparavant.

16 Je vous répète, j'étais commandant du poste de commandement de

17 Negoslavci à l'époque. J'avais des devoirs et des responsabilités qui

18 traitaient uniquement de ce poste de commandement. Ce n'était pas à moi de

19 m'occuper de choses qui étaient en dehors de ma zone de responsabilité.

20 S'il y avait eu des problèmes, ce n'était pas à moi de toute façon de les

21 résoudre, il y avait d'autres unités présentes. Je ne voulais pas

22 interférer avec des choses qui se passaient en dehors de ma juridiction,

23 j'avais énormément de choses à faire aussi. Il fallait préparer le retrait,

24 il fallait se préparer à passer le relais à une autre unité, en ce qui

25 concerne ma zone de responsabilité. Personne n'est venu pour me poser des

26 questions à propos de ce qui s'était passé. Aucune personne qui aurait pu

27 lancer quoi que ce soit ou une enquête n'est venue me poser deux questions.

28 Certes, après, une équipe d'enquêteurs est venue à Vukovar, et eux, ils

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1 étaient intéressés à ce genre de choses. Donc, des enquêteurs sont venus,

2 et si la rumeur avait été fondée, ils auraient enquêté là-dessus. Or, ils

3 ne l'ont pas fait. J'avais mes propres tâches, mes propres missions à

4 effectuer, à préparer, à remettre, passer le relais. Pour ce qui est de ma

5 zone de responsabilité, retirer le poste de commandement, se retirer sur

6 Belgrade, et cetera. C'est pour ceci que je n'ai pas considéré que ce soit

7 utile de faire quoi que ce soit.

8 Q. Vous n'étiez pas inquiet ?

9 R. Oui, certes. Mai on ne peut être inquiet que si on est certain que

10 quelque chose s'est mal passé. Dans ce cas-là, il serait normal d'être

11 inquiet. Mais je n'étais absolument sûr de rien. Il y avait certaines

12 rumeurs, mais cela ne me concernait pas. Donc, je n'étais pas inquiet.

13 Q. Mais ce n'est pas vrai cela. Vous vous souvenez quand vous avez déposé,

14 vous avez dit vous êtes revenu, vous vous êtes reposé. Vous vous souvenez

15 avoir déposé à propos de ce fameux repos et de cette sieste. Ensuite, vous

16 êtes allé voir le colonel Mrksic, donc vous étiez quand même inquiet

17 puisque vous êtes allé voir le colonel Mrksic ? Vous pouvez me répondre par

18 oui ou par non ?

19 R. Oui, oui.

20 Q. Je peux aussi dire que vous êtes aussi reposé, enfin vous êtes un petit

21 peu reposé, parce que vous vous êtes rendu compte que vous étiez - en

22 fait, vous êtes retrouvé dans une situation où vous aviez été plus ou moins

23 impliqué dans un acte criminel. Alors, vous, vous vous êtes reposé, vous

24 vous êtes retiré pour réfléchir quant à la marche à suivre, puis vous vous

25 êtes dit, que finalement, la meilleure chose à faire était d'aller voir

26 votre commandant pour lui faire part de ce qui s'est passé. C'est ainsi que

27 cela s'est passé; non ?

28 R. Non, absolument pas.

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1 Q. Donc, vous vous êtes reposé, parce que vous étiez fatigué, ensuite vous

2 êtes allé voir le colonel Mrksic, n'est-ce pas ?

3 R. J'étais fatigué. J'avais beaucoup de choses à faire. Puis, je ne

4 pouvais pas aller voir le commandant à n'importe quel moment. Le briefing

5 approchait, donc je me suis dit autant attendre une demi-heure, une heure

6 et je pourrais faire rapport au commandant à propos de ce qui s'est passé.

7 Ce n'est pas le lendemain.

8 Je pense que j'ai bien agi au moment opportun, comme tout officier

9 doit le faire. J'ai suivi la règle de l'art.

10 Q. Je ne sais pas si on vous l'a dit, mais le capitaine Susic - et je

11 crois que vous avez dîné avec lui la semaine dernière - il était capitaine.

12 Il a contacté Mrksic à propos de ce qui s'est passé à la caserne. Et vous

13 nous avez dit maintenant qu'est-ce qui s'est passé à Ovcara était encore

14 pire que ce qui se passait à la caserne.

15 Alors, si un capitaine peut aller voir Mrksic presque sur le champ pour lui

16 parler, je me demande pourquoi un commandant qui se trouve à Negoslavci,

17 dans la même zone, ne peut pas faire la même chose et aller voir Mrksic sur

18 le champ plutôt que d'aller se reposer. Si vous voyez ce que je veux dire ?

19 R. Les choses ne se sont pas passées aussi différemment que ce que vous

20 vouliez dire. Puis, le groupe qui était là et qui était en charge

21 s'assurait de la sécurité. Alors, je ne sais pas pourquoi j'allais courir

22 pour m'y rendre alors qu'il y avait des personnes qui assuraient la

23 sécurité du hangar. J'ai juste dit, qu'à mon avis, il fallait augmenter la

24 sécurité, mais je ne les ai pas laissés sans aucun garde, sans aucune

25 garde. Là déjà il y a une différence.

26 De plus, en ce qui nous concerne, là où nous étions, on prenait

27 toujours les mesures nécessaires.

28 Q. Vous avez dit que vous êtes allé voir M. Mrksic. Avant de lever la

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1 séance pour la journée, pourriez-vous nous dire quelle mesure que vous avez

2 prise pour vérifier si tout se passait bien à Ovcara mis à part d'aller

3 voir Mrksic.

4 R. Ce n'était pas de mon ressort, une fois avoir briefé mon commandant,

5 fait mon rapport, et bien, je n'avais plus rien à faire. C'était ensuite au

6 commandant de donner des autres aux unités d'augmenter le niveau de

7 sécurité, de renforcer la garde, de prendre des mesures. Suite à mes

8 recommandations, ce n'était pas à moi de décider ce qu'il fallait faire. Je

9 n'étais pas là pour m'occuper des prisonniers 24 heures sur 24.

10 Je devais juste les envoyer à la caserne, ensuite à Sremska Mitrovica.

11 Je ne pouvais pas laisser, cela dit, ces personnes. Donc, je suis resté là,

12 je les ai protégés. Je suis revenu voir le commandant, faire un rapport. Je

13 n'avais pas d'autres choses à faire puisqu'il y avait déjà une unité

14 spécialisée qui était là sur place. Je pense que, en faire plus aurait été

15 impossible vu mes capacités, vu mon grade surtout.

16 Je n'étais pas à un grade très élevé. Je ne pouvais pas prendre des

17 décisions pour faire les choses comme ce que vous semblez dire que j'aurais

18 dû faire. Si j'avais agi comme vous êtes en train de le dépeindre, j'aurais

19 été le commandant de Groupe opérationnel sud.

20 Q. Donc, vous n'avez pas fait grande chose, mis à part de faire rapport à

21 Mrksic ?

22 R. Oui. Je n'ai rien fait d'autre cette nuit-là, tout du moins en ce qui

23 concerne l'affaire Ovcara.

24 M. MOORE : [interprétation] Je ne voudrais pas être trop peu optimiste pour

25 ce qui concerne le ton, mais je pense que je peux encore continuer,

26 poursuivre mon contre-interrogatoire pendant dix minutes avant que nous

27 traitions du problème dont je parlais.

28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous avions décidé que nous allions en

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1 parler, Monsieur Moore, maintenant. Je vais demander à M. Vukasinovic de

2 quitter le prétoire, l'Huissière va l'escorter hors du prétoire. Nous

3 reprendrons demain à 9 heures 30, Monsieur le Témoin pour poursuivre votre

4 déposition.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

6 [Le témoin se retire]

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Borovic, qu'avez-vous à

8 dire ?

9 M. BOROVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

10 ne voudrais surtout pas prendre trop de temps à propos de points qui ont

11 déjà été évoqués, donc je serai rapide.

12 Le 15 septembre 2006, il y a deux mois, nous avons envoyé un courriel à

13 l'Accusation en demandant deux choses : un compte rendu de la déposition du

14 Témoin P002 et la traduction du carnet. Pour être sûr que ce courriel ne se

15 perdait pas, nous l'avons envoyé à tous les membres de l'équipe.

16 Le 18 septembre, nous l'avons renvoyé à nouveau. Nous n'avons reçu

17 aucune réponse. Ces e-mails ont été envoyés après la décision qui a été

18 prise par vous-même le 30 août en attendant qu'il soit fait droit à notre

19 requête dans le but de pouvoir réinterroger ce témoin.

20 Qu'est-ce que nous vous demandons exactement ? Tout d'abord, nous

21 voudrions que l'Accusation confirme que les notes sont bien là au Tribunal

22 pour que nous puissions les scanner. Il faudrait les scanner en couleur et

23 non pas en noir et blanc. C'est très important, parce que comme cela, on

24 verra qu'il y a différentes couleurs qui sont utilisées quand les notes ont

25 été rédigées.

26 Je pense que le greffe pourrait le faire. Au mieux, il me semble que

27 mon éminent collègue, M. Moore, considère qu'ils ne peuvent pas faire cela.

28 Si ce n'est pas possible, nous pouvons le faire à la Défense.

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1 Techniquement, nous pouvons le faire. Cela dit, nous pensons vraiment que

2 le greffe est bien plus en mesure que nous de faire ces photocopies

3 couleur.

4 Nous ne voulons pas traiter de tout le carnet de notes, parce que

5 nous voulons, bien sûr, satisfaire à votre ordonnance. Donc, nous ne

6 voulons qu'il y ait photocopie uniquement des notes qui parlent de Vukovar

7 pour la première fois. Il n'y a qu'un passage assez court qui sera

8 réutilisé dans le nouvel interrogatoire du témoin. Et nous voulons que ce

9 soit transcrit, parce que c'était difficile à lire et difficile à

10 traduire.

11 Donc, ces deux petites choses. Il est important qu'il y ait ce

12 scanning. Enfin, c'est important pour les Juges, pour la Chambre ainsi que

13 pour l'Accusation et la Défense. Il faut aussi que les notes soient

14 traduites, parce que nous pourrons ainsi présenter de nouvelles preuves

15 devant la Chambre.

16 C'est peut-être la première fois que l'Accusation n'a pas coopéré

17 avec nous d'une façon adéquate. Peut-être que la Chambre devrait enjoindre

18 l'Accusation de scanner ces carnets de notes, de les transcrire et de les

19 traduire surtout pour ce qui est du passage commençant avec "Vukovar pour

20 la première fois." Ainsi, nous pourrions reprendre notre interrogatoire

21 supplémentaire en temps utile.

22 Maintenant, malheureusement, il nous manque du temps. Nous sommes un

23 petit peu dans une espèce de panique. C'est pour ceci que nous vous

24 demandons vraiment cette requête.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore.

26 M. MOORE : [interprétation] Je n'ai pas les dates sous les yeux.

27 Peut-on en revenir au début ?

28 Mes éminents confrères, M. Borovic, en particulier, voulait ce carnet

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1 de notes, le carnet de notes du Témoin 002. Il voulait qu'il soit examiné

2 par un expert graphologue.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pouvons-nous, s'il vous plaît, en

4 venir au vif du sujet.

5 M. MOORE : [interprétation] Oui, mais il faut que je vous parle un petit

6 peu du contexte. Voici, c'est très simple. "Mon éminent collègue a essayé

7 de tout court-circuiter. Je n'ai pas la traduction complète de la chose.

8 Nous n'avons qu'une traduction très lacunaire ne portant que sur ce qui a à

9 voir avec le domaine qui nous intéresse à Vukovar."

10 Mon éminent collègue, lui, parle le B/C/S. Il a tout le carnet de notes

11 sous les yeux. Il peut le lire en entier. Je ne sais pas quels sont les

12 passages qui l'intéressent. Je ne sais pas sur quoi va porter son contre-

13 interrogatoire alors que lui, il le sait. S'il vous plaît, s'il veut que

14 nous l'aidions pour la traduction, il faudrait qu'il nous dise exactement

15 ce qu'il voulait qu'on lui traduise.

16 Ensuite, pour ce qui est du scanning en couleur, je ne suis pas très

17 au courant de ce processus. Voilà ce qui m'inquiète. Je sais, qu'en tout

18 cas, dans mon pays, le danger serait que l'on essaie de "by-passer," que

19 c'est la "by-pass" de graphologue et que l'on demande ensuite aux Juges de

20 devenir des experts par rapport à l'analyse graphologique. Je ne vois pas

21 du tout à quoi cela servirait cette demande scanning.

22 Je ne sais pas du tout pourquoi mes éminents confrères me demandent

23 que l'on fasse une photocopie en couleur ou un scanning en couleur. Je ne

24 sais pas du tout où ils veulent en venir. La demande première était qu'il

25 fallait que l'on puisse analyser l'encre et que l'on analyse aussi ce qui

26 avait été écrit à la main. Je pense qu'il y a deux ou trois passages qui

27 sont intéressants. Mais je ne vois pas pourquoi ils demandent absolument

28 que tout soit scanné en couleur.

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1 Je veux bien assister mon éminent confrère, mais j'aimerais savoir

2 absolument pourquoi il veut tout cela. Je ne voudrais pas faire de

3 l'obstruction, mais j'ai besoin de savoir quel est le but derrière cela,

4 parce que si c'est pour faire des conclusions d'experts avec le scanning en

5 couleur, là, dans ce cas-là, je soulèverai une objection.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Borovic, vous avez une

7 minute. Pouvez-vous nous dire pourquoi vous voulez tout cela ?

8 M. BOROVIC : [interprétation] Si mon éminent collègue avait bel et bien lu

9 votre décision, je pense que les choses seraient plus claires.

10 Deuxièmement, il nous faut un scanning en couleur pour vous, Messieurs et

11 Madame les Juges. Parce que les notes que nous voulons avoir traduites et

12 transcrites ont été écrites par trois types de stylo. Or, quelqu'un dans un

13 champ de bataille ne peut pas utiliser trois crayons différents, de trois

14 couleurs différentes, dans un seul texte. On voulait vérifier cela.

15 Ensuite, il est vrai que ceci est écrit à la main, mais ce n'est pas

16 suffisant pour les Juges de la Chambre. Cela ne peut pas être présenté

17 ainsi à la Chambre. Donc, le passage qui m'intéresse est celui qui commence

18 par "Vukovar pour la première fois." Je n'ai besoin que de ce texte-là.

19 Suite à votre décision, je voudrais que les Juges de la Chambre puissent

20 suivre par eux-mêmes les preuves que je veux présenter. Même les passages

21 qui sont pertinents par l'Accusation n'ont pas été encore traduits en

22 anglais.

23 J'ai encore quelques secondes. Je tiens à vous dire, Monsieur le Président,

24 que dans notre requête, il est bien spécifié quels sont les passages et les

25 paragraphes sur lesquels nous allons nous attarder lors de l'interrogatoire

26 du témoin en question. Vous êtes d'accord avec cela d'ailleurs. Je pense

27 que mon éminent confrère,

28 M. Moore, a dû négliger de lire notre requête à fond, mais je pense que ce

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1 n'est pas un vrai problème.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Borovic, pourrez-vous dire

3 demain matin à M. Moore quels sont les passages que vous voulez voir

4 transcrits ?

5 M. BOROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie. Bien

6 sûr, je suivrai vos instructions.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Demain matin, serez-vous en mesure

8 d'expliquer à la Chambre si vous avez fait des recherches et si vous pouvez

9 nous assurer que ce scanning en couleur peut être fait soit par le greffe,

10 soit par le bureau du Procureur ?

11 M. BOROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai déjà vérifié tout

12 cela. Mon éminente collègue qui est à côté de moi peut le faire elle-même.

13 Elle peut utiliser la technique qui existe. Vérifier avec le greffe que

14 c'est possible. Je peux vous répondre tout de suite. Techniquement, tout

15 est possible.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. La réponse est donc --

17 [La Chambre de première instance se concerte]

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La réponse est la

19 suivante : une fois identifiés, les passages, à moins que M. Moore arrive à

20 nous prouver que cette demande n'est pas raisonnable, dans ce cas-là, s'il

21 n'y arrive pas, les passages qui seront précisés par M. Borovic seront

22 transcrits et traduits.

23 Et Monsieur Borovic, nous vous demandons de vous organiser avec le

24 greffier pour avoir accès à ce carnet dans le but de scanner les parties

25 dont vous avez besoin, ensuite de faire des copies des scans [comme

26 interprété] afin de les distribuer à la fois au bureau du Procureur et aux

27 autres parties.

28 Maintenant, nous devons lever la séance et nous reprendrons demain à 9

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1 heures 30.

2 M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation]

3 M. MOORE : [aucune interprétation]

4 M. LE JUGE PARKER : [aucune interprétation]

5 --- L'audience est levée à 17 heures 04 et reprendra le mercredi 22

6 novembre 2006, à 9 heures 30.

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