Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 3 juin 2010

  2   [Audience]

  3   [Audience publique]

  4   --- L'audience est ouverte à 8 heures 47.

  5   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Monsieur le Greffier, puis-je vous demander de citer l'affaire qui se

  7   trouve à l'ordre du jour de la Chambre d'appel.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-95-

  9   13/1-R.1, le Procureur contre Veselin Sljivancanin.

 10   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Puis-je demander à M. Sljivancanin s'il

 11   entend les débats dans une langue qu'il comprend par le biais de la

 12   traduction.

 13   M. SLJIVANCANIN : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire. Je suis

 14   en mesure de suivre les débats et je comprends ce que vous dites.

 15   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

 16   M. SLJIVANCANIN : [interprétation] Merci.

 17   M. LE JUGE MERON : [interprétation] L'Accusation.

 18   Mme BRADY : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Helen

 19   Brady accompagnée de M. Paul Rogers au nom de l'Accusation, et nous sommes

 20   assistés aujourd'hui par M. Kyle Wood et notre commis à l'affaire, M. Colin

 21   Nawrot.

 22   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Brady.

 23   Il s'agit d'une audience qui se tient dans le cadre d'une audience

 24   préalable à la révision dans l'affaire le Procureur contre Veselin

 25   Sljivancanin. Je vais commencer par résumer brièvement les questions qui

 26   sont en instance devant la Chambre d'appel et la manière dont nous allons

 27   poursuivre aujourd'hui. Je souhaite insister sur le fait qu'aucuns des

 28   commentaires que je vais faire aujourd'hui n'illustre d'une manière ou

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  1   d'une autre la position de la Chambre d'appel sur la requête en révision.

  2   Cet appel va aborder deux points : Tout d'abord, la valeur en tant que

  3   preuve et la pertinence du témoignage à venir de M. Panic pour ce qui est

  4   de certaines questions ayant trait à la condamnation de M. Sljivancanin

  5   pour avoir aidé et encouragé le meurtre, en tant que violation des lois et

  6   coutumes de la guerre; et deuxième point, de voir si ce témoignage qui est

  7   prévu pour constituer un nouveau fait relevant des articles 119 et 120 des

  8   Règles de procédure et de preuve.

  9   Pendant cette audience, le conseil va tout d'abord interroger le témoin

 10   Miodrag Panic, et présenter des arguments sommaires à propos de son

 11   témoignage. Ensuite, ils présenteront des arguments, à savoir si le

 12   témoignage supplémentaire de M. Panic constitue un nouveau fait. Je

 13   souhaite insister sur le fait que les parties doivent donner des références

 14   exactes des documents qu'ils souhaitent citer à l'appui de leurs arguments.

 15   Je souhaite également insister sur le fait qu'à chaque fois que les parties

 16   évoquent un nouveau document, ces parties doivent nous communiquer le

 17   numéro du document qui a été attribué lorsqu'ils ont remis les exemplaires

 18   de ce document aux Juges de la Chambre d'appel.

 19   Avant d'aborder les débats de ce matin, je souhaite m'excuser car je n'ai

 20   pas demandé la présentation du côté de la Défense, le conseil de M.

 21   Sljivancanin.

 22   M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour le compte

 23   de M. Sljivancanin, je m'appelle Novak Lukic, je suis conseil principal de

 24   M. Sljivancanin. Je suis accompagné de M. Stephane Bourgon qui est co-

 25   conseil, et deux assistantes juridiques, Mme Maja Dokmanovic et Mme

 26   Caroline Bouchard-Lauzon.

 27   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Veuillez m'excuser de ne pas vous avoir

 28   demandé ceci plus tôt.

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  1   Je souhaite maintenant vous donner l'ordre du jour de cette audience

  2   d'aujourd'hui. L'audience se tiendra conformément au calendrier défini dans

  3   l'ordonnance lorsque nous avons répondu à la requête de l'Accusation sur

  4   l'administration de cette audience, et l'ordonnance porte un calendrier

  5   modifié qui date du 21 mai 2010. Le conseil de M. Sljivancanin mènera son

  6   interrogatoire principal de M. Panic pendant 15 minutes. Après 15 minutes

  7   de pause, l'Accusation contre-interrogera ensuite M. Panic pendant une

  8   heure 15 minutes. Après une pause de 15 minutes, le conseil de M.

  9   Sljivancanin posera des questions supplémentaires à M. Panic pendant 15

 10   minutes, qui sera suivi par des arguments de sommaire de 15 minutes à

 11   propos du témoignage de M. Panic. Pour finir, l'Accusation présentera ses

 12   arguments sommaires à propos du témoignage de M. Panic, qui durera 15

 13   minutes.

 14   Je remarque les Juges de la Chambre d'appel aborderont de façon favorable

 15   toute demande de la part du conseil de M. Sljivancanin d'une demande de

 16   temps supplémentaire pour l'interrogatoire principal ou les questions

 17   supplémentaires. Dans l'après-midi, à 1 heure 45, le conseil de M.

 18   Sljivancanin présentera des arguments à propos du témoignage de M. Panic,

 19   et ce, pendant 45 minutes, et indiquera s'il s'agit d'un fait nouveau. Ceci

 20   sera suivi par des arguments présentés par l'Accusation sur la même

 21   question, et ce, pendant 45 minutes et une réplique par le conseil de M.

 22   Sljivancanin qui durera 15 minutes. Bien sûr, les parties n'auront pas

 23   épuisé tout leur temps qui leur aura été alloué.

 24   Il serait très utile aux Juges de la Chambre d'appel si les parties

 25   pouvaient présenter leurs arguments de façon claire et concise. Je souhaite

 26   rappeler aux parties que les Juges sont en droit de les interrompre à tout

 27   moment pour poser des questions ou ils préféreront peut-être poser des

 28   questions après les arguments présentés par l'une ou l'autre partie. Je

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  1   souhaite également rappeler aux parties que certaines pièces à conviction

  2   sont sous pli scellé; par conséquent, si les parties souhaitent faire

  3   référence à ces documents, elles doivent demander à passer à huis clos

  4   partiel.

  5   Cela étant dit, je souhaite maintenant faire entrer dans le prétoire

  6   le témoin Miodrag Panic.

  7   Monsieur le Greffier, s'il vous plaît.

  8   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  9   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Bonjour M. Panic.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour à vous.

 11   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Veuillez lire le texte de la

 12   déclaration solennelle que vous remet l'huissier.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 14   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 15   LE TÉMOIN : MIODRAG PANIC

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Panic. Vous

 18   pouvez maintenant vous asseoir.

 19   Monsieur Panic, on va vous demander de témoigner, et ce,

 20   conjointement avec la demande de M. Sljivancanin portant sur une demande en

 21   révision pour cette condamnation pour avoir aidé et encouragé le meurtre en

 22   tant que violation des lois et coutumes de la guerre. Dans le courant de la

 23   matinée, le conseil de M. Sljivancanin ainsi que le Procureur vous poseront

 24   des questions sur certaines questions qui ont trait à cette condamnation.

 25   Les Juges choisiront peut-être de vous poser des questions également.

 26   Je souhaite maintenant demander au conseil de M. Sljivancanin de

 27   commencer son interrogatoire principal pour lequel, comme vous le savez,

 28   vous avez 1 heure et 15 minutes à partir de maintenant.

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  1   M. BOURGON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour

  2   à tous les Juges de la Chambre d'appel. Bonjour à mes confrères et

  3   consoeurs de l'Accusation. Je vais mener mon contre-interrogatoire de ce

  4   témoin ce matin et, à cet effet, je souhaite remettre à l'huissier un

  5   classeur qui contient tous les documents qui ont été remis aux Juges de la

  6   Chambre d'appel, de façon à faciliter ce témoignage.

  7   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  8   M. BOURGON : [interprétation] Nous avons montré ce classeur à l'Accusation

  9   ce matin, et il ne contient que les documents que nous avons peut-être

 10   l'intention d'utiliser.

 11   Monsieur le Président, si vous me permettez d'ajouter avant que je ne

 12   commence, vous avez suggéré cette éventualité, à savoir de nous accorder un

 13   temps supplémentaire pour nos questions supplémentaires.

 14   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourriez-vous

 15   nous remettre un autre casque de traduction, s'il vous plaît. Tout va bien.

 16   Pardonnez-moi, Maître Bourgon. Veuillez poursuivre.

 17   M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Veuillez m'en

 18   excuser.

 19   Vous avez indiqué un peu plus tôt, Monsieur le Président, cette

 20   éventualité, à savoir qu'il sera possible de nous accorder un temps

 21   supplémentaire pour nos questions supplémentaires. Je vais voir si cela

 22   s'avère nécessaire. J'espère, Monsieur le Président, pouvoir terminer mon

 23   interrogatoire principal en l'espace d'une heure. Bien évidemment, on ne

 24   sait jamais comment les choses évoluent.

 25   Interrogatoire principal par M. Bourgon :

 26   Q. [interprétation] Bonjour, Général Panic.

 27   R.  Bonjour.

 28   Q.  Nous nous sommes rencontrés déjà cette semaine, mais je souhaite me

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  1   présenter. Je m'appelle M. Stephane Bourgon, je vous accompagne aujourd'hui

  2   pour votre témoignage. Je suis assisté en cela par Me Novak Lukic, Mme Maja

  3   Dokmanovic et Mme Caroline Bouchard-Lauzon.

  4   Général, je vais vous poser une série de questions ce matin. Je souhaite

  5   vous rappeler qu'à tout moment, si vous avez une quelconque question que

  6   vous ne comprenez pas, n'hésitez surtout pas à m'interrompre, de façon à ce

  7   que je puisse reformuler ma question. Il est très important que vous

  8   compreniez chaque question que je vais vous poser.

  9   Général, lorsque nous nous sommes rencontrés hier, je vous ai expliqué

 10   l'objet de l'audience de ce matin. Donc nous allons en venir droit aux

 11   faits et aux éléments qui nous intéressent dans votre témoignage. Mais

 12   avant de procéder de cette manière, je dois vous indiquer que les Juges de

 13   la Chambre de première instance [comme interprété] connaissent votre

 14   témoignage dans l'affaire Sljivancanin lorsque ceci était en phase de

 15   procès, c'est la première fois qu'ils vous voient ce matin. Donc, pour les

 16   Juges de la Chambre d'appel, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous faire un

 17   résumé de votre carrière militaire.

 18   R.  J'ai obtenu mon diplôme à l'académie militaire en 1972. Je suis devenu

 19   à ce moment-là un officier professionnel de l'armée yougoslave. Pendant ma

 20   carrière, j'ai occupé des postes de commandant et tous les postes de

 21   commandement qui existaient, du commandant de section au commandant du

 22   corps des unités spéciales, assistant de l'état-major principal de l'armée

 23   de terre, ainsi que chef de l'inspectorat pour la préparation au combat;

 24   c'était en 2002. C'était mon dernier titre. Lorsque je suis parti à la

 25   retraite, j'avais le grade de lieutenant de division. Pendant ma formation

 26   et mon service militaire, j'ai terminé et obtenu mes diplômes à l'école

 27   militaire, y compris celle de la Défense nationale. Je suis maintenant à la

 28   retraite, et j'habite à Belgrade.

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  1   Q.  Merci, Général. Je vais vous poser des questions ce matin sur une série

  2   de thèmes, et ce qui m'intéresse plus particulièrement, c'est votre

  3   témoignage dans les affaires Mrksic, Sljivancanin, et Radic. Vous souvenez-

  4   vous du moment où vous avez témoigné devant ce Tribunal dans le cadre de

  5   ces affaires ?

  6   R.  Oui, je m'en souviens. C'était en 2006, dans la première moitié du mois

  7   de novembre.

  8   Q.  Avez-vous eu l'occasion de revoir vos témoignages depuis ce moment-là ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  En quel moment cela s'est-il passé et comment avez-vous procédé ?

 11   R.  J'ai passé en revue mes témoignages il y a un mois environ, et c'est

 12   ainsi que je l'ai fait : J'ai reçu du bureau de M. Lukic, par

 13   l'intermédiaire de M. Dokmanovic, l'enregistrement vidéo de ce témoignage.

 14   Q.  Et ce témoignage était en quelle langue ?

 15   R.  Cet enregistrement vidéo était dans ma langue maternelle, la langue

 16   serbe.

 17   Q.  Et donc en ayant regardé votre témoignage, est-ce que vous pouvez nous

 18   dire si les réponses que vous avez données à ce moment-là seraient

 19   différentes et est-ce que vous souhaitez les modifier aujourd'hui ?

 20   R.  Lorsque j'ai revu mon témoignage, j'ai décidé que je m'en tenais à ce

 21   que j'ai dit à ce moment-là lorsque j'ai témoigné. La seule exception près,

 22   que je pourrais aujourd'hui préciser certains événements et quelques

 23   détails minutieux liés à ce témoignage. Peut-être que je pourrais préciser

 24   certains événements avec davantage de précision.

 25   Q.  Général, y a-t-il une question qui vous vient à l'esprit ce matin pour

 26   laquelle vous pourriez nous fournir davantage de précisions ?

 27   R.  Eh bien, aujourd'hui, après tout ce temps, je pourrais vous parler avec

 28   plus de précision de l'endroit où se trouvait M. Sljivancanin et le rôle

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  1   qu'il a joué pendant l'évacuation de l'hôpital; et plus précisément, je

  2   pourrais vous parler du rôle qu'il a joué dans toutes les questions

  3   relatives à la sécurité, la sélection des formations paramilitaires qui

  4   s'étaient abritées ou avaient trouvé refuge dans l'hôpital. Ceci, je

  5   pourrais vous l'expliquer avec davantage de détails.

  6   Q.  Général, je ne vais pas vous poser de questions sur ce thème-là

  7   aujourd'hui. Peut-être l'Accusation va aborder ce point-là  dans le cadre

  8   de son contre-interrogatoire. Ceci est une autre question. Je vais passer à

  9   un thème suivant. Le jugement qui a été rendu lors du procès de

 10   l'Accusation contre Mrksic, Radic, et Sljivancanin, savez-vous quand le

 11   jugement a été rendu dans cette affaire ?

 12   R.  Ce jugement a été rendu en 2007, dans le courant du mois de septembre.

 13   Q.  Est-ce que l'issue de ce procès vous a intéressé, et si oui, pourquoi ?

 14   R.  Oui, tout à fait. Et toute l'opinion publique s'y intéressait, et moi

 15   en particulier, parce que je connaissais les hommes en question. J'étais

 16   avec eux lorsque certaines choses se sont passées, et ceci est dû en

 17   particulier au fait que j'ai témoigné devant ce Tribunal. C'est la raison

 18   pour laquelle l'issue de ce procès m'intéressait.

 19   Q.  Maintenant, je vais parler d'un autre sujet, l'issue de ce jugement.

 20   Savez-vous ce qui est advenu de M. Radic jugé dans cette affaire, et quelle

 21   a été votre réaction ?

 22   R.  Oui, je me souviens que M. Radic a été acquitté de tous les chefs

 23   d'accusation. J'ai trouvé cela tout à fait acceptable. Cela m'a plu. Je

 24   n'ai jamais connu Radic. Je ne me suis pas rendu compte du fait, quand je

 25   suis venu témoigné ici, qu'il faisait partie de tout ceci, donc je suis

 26   satisfait que les choses se soient passées ainsi.

 27   Q.  Et qu'en est-il de Sljivancanin, savez-vous ce qui lui est arrivé et

 28   quelle a été votre réaction après le jugement rendu par la Chambre de

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  1   première instance ?

  2   R.  Oui, je me souviens. M. Sljivancanin a été condamné à cinq ans

  3   d'emprisonnement. Ce qui est une peine importante, d'après ce que j'ai

  4   compris, c'était le prix à payer pour l'endroit où il s'était trouvé

  5   pendant l'opération de Vukovar et pour le fait qu'il avait été davantage

  6   exposé.

  7   Q.  Pourriez-vous développer cela, lorsque vous dites qu'"il était

  8   davantage exposé" ?

  9   R.  Bien, M. Sljivancanin, comme vous pouvez le constater, a une

 10   personnalité frappante. Il a beaucoup de courage, et il s'est trouvé à de

 11   nombreux endroits où les choses se sont passées, et en particulier vers la

 12   fin des opérations, il s'est trouvé aux endroits où les civils étaient

 13   censés être protégés physiquement, à savoir ceux qui avaient été fait

 14   prisonniers et ceux qui étaient fragiles. Je pense qu'il s'agit là d'un

 15   défaut de sa part, il aimait être représenté dans les médias, il aimait

 16   qu'on le prenne en photo. Et c'était une personnalité très médiatique.

 17   Q.  Et qu'en est-il de Mrksic, que lui est-il arrivé et comment avez-vous

 18   réagi au jugement ?

 19   R.  M. Mrksic, en tant que commandant, a été condamné à 20 ans. C'est une

 20   peine fort lourde. C'est un châtiment important. Et moi, j'ai estimé que

 21   c'était le prix à payer parce qu'il était commandant. Lorsqu'on est

 22   commandant, cela signifie qu'un homme a des responsabilités et connaît ses

 23   heures de gloire. Et donc j'estimais que c'était le prix à payer pour la

 24   responsabilité de commandant.

 25   Q.  Ma question suivante, les raisons ou les motifs pour lesquels M. Mrksic

 26   a été condamné. Savez-vous pourquoi il a été condamné ?

 27   R.  J'ai appris que Mrksic a été condamné parce qu'il avait ordonné le

 28   retrait des hommes chargés de la sécurité à Ovcara, où les prisonniers

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  1   avaient été gardés.

  2   Q.  Est-ce que cela vous a surpris, Monsieur ?

  3   R.  C'est quelque chose qui m'a énormément surpris.

  4   Q.  Pourquoi ?

  5   R.  Je connais Mrksic, je le connais comme un commandant. Je le connais

  6   assez bien. Nous travaillions ensemble pendant un certain nombre d'années,

  7   et je sais que c'est un homme assez sévère, mais c'est quelqu'un qui

  8   s'impose. Je ne pensais pas que cela était possible qu'il ait donné cet

  9   ordre, qu'il ait approuvé ou qu'il ait été d'accord avec ce genre de

 10   décision, à savoir de retirer les hommes chargés de la sécurité. Lorsque

 11   j'ai réfléchi, il n'a jamais parlé à quiconque. C'était mon premier élément

 12   de surprise. Et comment se fait-il qu'il a été condamné pour quelque chose

 13   dont nous ne savions rien ? Encore une fois, en y réfléchissant

 14   aujourd'hui, c'est le seul à pouvoir donner cet ordre et cette décision,

 15   mais moi, je n'ai jamais su ou été au courant de cet ordre, et au jour

 16   d'aujourd'hui, je ne peux pas être convaincu qu'il ait fait quelque chose

 17   comme cela. C'est cela qui m'a énormément surpris.

 18   Q.  Merci, Général. Nous allons maintenant passer au jugement en appel ou

 19   l'arrêt rendu par la Chambre d'appel. Avez-vous appris, Monsieur Panic, que

 20   ce jugement était en appel ?

 21   R.  Oui. Oui, je l'ai su.

 22   Q.  Et comment avez-vous appris cela ?

 23   R.  Bien, c'était dans les médias. Et l'opinion publique chez nous s'y

 24   intéressait beaucoup, ainsi que moi, et tous mes camarades également.

 25   Q.  Vous souvenez-vous de la date de l'arrêt rendu par la Chambre d'appel ?

 26   R.  Oui, je m'en souviens. Je me souviens du fait que M. Sljivancanin était

 27   en liberté provisoire à ce moment-là, et il a dû rentrer parce que l'arrêt

 28   devait être rendu, et ceci était au mois de décembre -- pardonnez-moi, non,

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  1   c'était au mois de mai, il y a un an environ. Ou en réalité, pour être plus

  2   précis, lorsque je me suis préparé ici, j'ai vu que c'était au mois de mai

  3   2009, oui.

  4   Q.  Merci, Général. Que pensez-vous de l'issue de cet arrêt ? Tout d'abord,

  5   vous souvenez-vous de ce qui est arrivé à Mrksic, et quelle a été votre

  6   réaction à cet égard ?

  7   R.  Oui. Je sais que la peine de Mrksic de 25 ans d'emprisonnement a été

  8   confirmée, et je m'y attendais compte tenu du fait qu'il avait été

  9   commandant, et c'est tout.

 10   Q.  Et qu'en est-il de Sljivancanin, que lui est arrivé et comment les gens

 11   ont-ils réagi à Belgrade lorsqu'ils ont entendu cet arrêt ?

 12   R.  Bien, pour ce qui est de l'arrêt concernant M. Sljivancanin, ceci a été

 13   une surprise très grande. Tout d'abord, c'est quelque chose qui m'a

 14   beaucoup surpris personnellement et qui a beaucoup surpris l'opinion

 15   publique à Belgrade.

 16   Q.  Veuillez nous dire, Monsieur, ceci, pourquoi ceci vous a-t-il

 17   énormément choqué ?

 18   R.  Pour moi, c'est quelque chose qui m'a énormément choqué parce que tout

 19   à coup il a été condamné à 12 ans supplémentaires. Nous pensions qu'il

 20   avait purgé sa peine et qu'il allait revenir et qu'il serait libre.

 21   Cependant, la peine qui lui a été imposée était trois fois supérieure.

 22   C'est ce qui est arrivé à ce moment-là. Ensuite, j'ai été très surpris

 23   lorsque j'ai constaté pourquoi cette peine avait été imposée. C'est ce qui

 24   m'a le plus surpris. Je comprends que c'est aux Juges de la Chambre

 25   d'évaluer, d'établir tous les faits et de les comparer. Cependant, à ce

 26   moment-là, à mes yeux, M. Sljivancanin ne méritait pas ce type de peine.

 27   Q.  Monsieur, pourriez-vous nous dire exactement comment ça s'est produit,

 28   à quel moment précisément vous avez été choqué ?

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  1   R.  Voyez-vous, j'ai suivi ce procès sur internet, et je regarde et je

  2   n'arrive pas à croire mes yeux, je n'arrive pas à croire mes oreilles. Je

  3   regarde, je lis, et il y a là quelque chose de pas normal, d'inconcevable.

  4   Il y a une phrase ou deux phrases, à savoir que M. Sljivancanin, qu'il

  5   s'est vu asséner ces peines parce que Mrksic, en tant que commandant,

  6   aurait ordonné que les hommes de la sécurité soient retirés d'Ovcara, qu'il

  7   a informé de cela Sljivancanin, et que Sljivancanin, en tant qu'organe

  8   chargé de la sécurité, n'a pas réagi pour protéger les prisonniers

  9   d'Ovcara. En fait, ce qui est écrit là-bas, c'est qu'il n'a pas influé sur

 10   la décision de Mrksic.

 11   Et après, j'ai essayé, en écoutant les bulletins d'information et les

 12   autres médias, j'ai essayé de voir si c'était vrai, si ce n'était pas dû à

 13   une erreur de traduction, si j'avais mal entendu. Et nombre de personnes

 14   m'ont téléphoné pendant la journée. J'ai parlé à beaucoup de gens, et en

 15   fait, s'est avéré que c'était bien cela. Et j'étais très impatient en

 16   attendant que ma fille rentre du travail, elle qui maîtrise parfaitement la

 17   langue anglaise parce qu'elle a soutenu une thèse de troisième degré à

 18   Cambridge, et donc je lui ai demandé de vérifier, elle, pour sa part,

 19   qu'elle essaie de retrouver en anglais cela et qu'elle me le traduise pour

 20   que je puisse bien voir si c'est ce que j'avais vu et entendu. Et enfin,

 21   pour ne plus m'attarder là-dessus, elle m'a retrouvé ce texte où la même

 22   chose est écrite. Je ne sais pas, je peux répéter si vous le voulez. Je

 23   peux répéter ce qui est écrit à ces endroits.

 24   Q.  Général, votre fille et vous-même, est-ce que vous avez vous-mêmes

 25   trouvé ces éléments d'information, et si tel est le cas, où ?

 26   R.  Ma fille, elle est parvenue à retrouver cela. C'est un résumé, c'est

 27   une version en anglais, et elle me l'a traduite, et c'était sur internet.

 28   Q.  Mais ce résumé, c'était un résumé de quoi plus précisément ?

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  1   R.  C'était le résumé de l'arrêt de la Chambre d'appel.

  2   Q.  Monsieur, à l'intercalaire 8 du classeur qui est devant vous --

  3   M. BOURGON : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la pièce

  4   RD8.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le vois.

  6   M. BOURGON : [interprétation]

  7   Q.  Reconnaissez-vous ce document ?

  8   R.  Oui. Oui, ça c'est le résumé de l'arrêt de la Chambre d'appel.

  9   Q.  Y a-t-il une partie très spécifique de ce texte qui était importante

 10   pour vous ce jour-là; et si oui, est-ce que vous pouvez nous indiquer de

 11   quel texte il s'agit ?

 12   R.  Oui, tout cela était important à mes yeux. J'ai bien suivi le tout,

 13   mais ce qui a particulièrement attiré mon attention, ce qui m'a choqué, ce

 14   qui a provoqué ma réaction, c'est ce résumé-là où la Chambre d'appel

 15   observe, constate que la Chambre de première instance, et cetera.

 16   Cependant, la seule --

 17   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire, s'il vous plaît, quelle est la page

 18   que vous êtes en train de suivre, pour que tout un chacun dans le prétoire

 19   puisse suivre ?

 20   R.  Voilà, si l'on tourne les pages, donc les pages dactylographiées,

 21   deuxième, troisième, quatrième, cinquième, et puis on arrive à la sixième

 22   page dactylographiée.

 23   Q.  Le document que vous avez sous les yeux, il est en quelle langue,

 24   Monsieur ?

 25   R.  Moi, je l'ai dans ma langue, en serbe, et ça, c'est le deuxième

 26   paragraphe.

 27   Q.  Et est-ce que c'est exactement le document que vous avez vu cette nuit

 28   ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Dans cette langue-là ?

  3   R.  Ça, c'était en anglais.

  4   Q.  Très bien. Veuillez poursuivre, s'il vous plaît. Dites-nous quel est le

  5   paragraphe qui vous a le plus intéressé.

  6   R.  Le paragraphe le plus important pour moi, c'était celui page 6, le

  7   deuxième paragraphe, et en particulier là où il est dit :

  8   "Cependant, la seule conclusion raisonnable que l'on peut tirer est la

  9   suivante, à savoir que M. Mrksic, pendant la réunion qu'ils ont tenue au

 10   retour de M. Sljivancanin à Negoslavci cette nuit-là, a dit à M.

 11   Sljivancanin qu'il avait retiré les membres de la JNA chargés de protéger

 12   les prisonniers de guerre à Ovcara."

 13   Q.  Monsieur, dites-nous qu'est-ce qui a fait que ce paragraphe se trouvait

 14   aussi important pour vous tout à coup.

 15   R.  C'est devenu important pour moi -- j'ai été témoin ici et j'ai déposé

 16   sur toute une série de faits, mais là c'était quelque chose de complètement

 17   nouveau pour moi, et c'est la raison pour laquelle cela a attiré mon

 18   attention, parce que je sais qu'à ce moment-là, j'étais à Negoslavci. Je

 19   sais que j'étais au poste de commandement. Je sais à quel moment M.

 20   Sljivancanin est arrivé. Je sais qu'il a rencontré M. Mrksic. Et je sais,

 21   je sais que Mrksic ne lui a pas dit cela à ce moment-là, qu'il avait retiré

 22   les hommes de la sécurité. C'est la raison pour laquelle cela a constitué

 23   une surprise pour moi.

 24   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Bourgon, est-ce que vous

 25   pourriez nous renvoyer à l'endroit exact qui correspond à ce passage dans

 26   la version anglaise ?

 27   M. BOURGON : [interprétation] Tout à fait. Je suis en train de regarder

 28   cela. Cela se trouve page 6, je pense.

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 13  pagination anglaise et la pagination française.

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  1   M. ROGERS : [interprétation] Je ne sais pas si cela peut vous aider. Page 6

  2   en anglais, sous l'appel interjeté par l'Accusation, au milieu du troisième

  3   paragraphe.

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] "La Chambre d'appel constate…" Est-ce

  5   que c'est bien cela ?

  6   M. BOURGON : [interprétation] Tout à fait.

  7   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci.

  8   M. BOURGON : [interprétation]

  9   Q.  Donc, Monsieur, après avoir vu cet élément d'information dans ce

 10   résumé, comment avez-vous réagi ?

 11   R.  Quand j'ai vu cela, j'ai été troublé. Je n'ai pas pu dormir cette nuit-

 12   là et j'étais très impatient en attendant le lendemain matin et j'allais

 13   téléphoner au bureau de M. Lukic. D'ailleurs, c'est ce que j'ai fait, la

 14   première chose le lendemain matin. J'ai pu parler au bureau de M. Lukic.

 15   Lui, ne s'y trouvait pas. Je suppose qu'il était ici; en fait, il était

 16   ici. C'est Mlle Dokmanovic qui m'a répondu. Et je lui ai demandé s'il était

 17   possible que j'entre en contact avec l'avocat Lukic. Elle m'a répondu

 18   qu'elle ferait tout ce qui était en son pouvoir, dès qu'elle le pourrait,

 19   elle demanderait à M. Lukic de m'appeler. Et dans la soirée de cette même

 20   journée, M. Lukic m'a appelé de La Haye.

 21   Q.  Et pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, qu'avez-vous dit à M.

 22   Lukic quand il vous a appelé ?

 23   R.  Quand il m'a appelé, je lui ai demandé d'emblée, sans grand

 24   introduction et commentaire : Que s'est-il passé M. Lukic ? Mais comment

 25   cela se fait-il qu'il y ait ce retournement soudain ? Je n'arrive pas à

 26   croire ce que j'ai vu. Est-il exact ce qui est écrit, à savoir que

 27   Sljivancanin a été condamné parce que Mrksic lui aurait donné l'information

 28   comme quoi il avait retiré la sécurité et que Sljivancanin n'aurait pas agi

Page 17

  1   auprès de lui pour qu'il change sa décision ? M. Lukic m'a répondu qu'il en

  2   était ainsi, que c'était exact. J'ai --

  3   Q.  Oui, allez-y, s'il vous plaît. Dites-nous ce qui s'est passé pendant

  4   cette conversation.

  5   R.  Je lui ai dit: "M. Lukic, mais ce n'est pas exact. J'étais sur place.

  6   J'étais présent au moment de la conversation. Il est impossible que Mrksic

  7   ait donné cette information à Sljivancanin sans qu'il me l'ait donnée à moi

  8   qui étais là, à côté d'eux, ou avant cela ou après à un moment quelconque

  9   d'ailleurs. Donc tout simplement, cela n'est pas exact et, s'il vous plaît,

 10   faites quelque chose." Donc, ce serait le récit le plus bref de ça.

 11   Q.  Et M. Lukic, comment a-t-il réagi à son tour ?

 12   R.  Il m'a dit : "Gardez cette information, et puis on en reparlera plus en

 13   détail à mon retour à Belgrade. Essayez de votre côté de vous rappeler tout

 14   ce qui s'était passé au poste de commandement ce soir-là, qui était présent

 15   en plus qui pourrait confirmer cela."

 16   Q.  Merci, Monsieur. Et M. Lukic, est-ce qu'il s'est déplacé, est-ce qu'il

 17   est venu à Belgrade pour vous rencontrer; et si oui, à quel moment ?

 18   R.  Quelques jours plus tard, donc cela n'a pas pris longtemps, M. Lukic

 19   est arrivé à Belgrade, et nous avons reparlé de cela.

 20   Q.  Et pouvez-vous nous dire qu'est-ce qui s'est passé pendant cette

 21   rencontre ?

 22   R.  M. Lukic m'a fait savoir qu'il était arrivé, nous nous sommes

 23   rencontrés chez lui dans son bureau, son cabinet. Et puis nous avons

 24   reparlé de manière plus détaillée de ce sujet.

 25   Q.  Et M. Lukic vous a-t-il dit quoi que ce soit au sujet de l'information

 26   que vous lui aviez fournie ?

 27   R.  On a parlé de cela, et de nouveau je lui ai demandé si tout cela était

 28   ainsi, et il m'a donné plus d'informations, plus de détails. Et puis nous

Page 18

  1   avons parlé de l'information que je lui ai donnée, moi. M. Lukic voulait

  2   savoir à ce moment-là pour quelle raison je réagissais et il voulait savoir

  3   quels sont les faits, quelles sont les informations que j'ai à fournir. Il

  4   m'a tout simplement demandé si j'étais présent au poste de commandement,

  5   qui d'autre s'y trouvait, à quel moment M. Sljivancanin est-il arrivé au

  6   poste de commandement, de quoi ont parlé MM. Mrksic et Sljivancanin. Il m'a

  7   demandé pour quelle raison cette information, je ne l'avais pas donnée à

  8   qui que ce soit avant, comment se faisait-il que j'arrivais à ce moment-là

  9   avec un fait nouveau. Et je lui ai dit tout simplement que j'étais venu

 10   témoigner à plusieurs reprises, que j'ai donné beaucoup de déclarations,

 11   mais que jamais personne ne m'a posé de questions là-dessus. Et il m'a

 12   également demandé si, le moment venu, il était nécessaire de revenir à

 13   témoigner, si j'étais prêt à le faire, et je lui ai dit: "Oui, absolument,

 14   à tout moment."

 15   Q.  Merci.

 16   R.  Juste, excusez-moi. Il a juste remarqué qu'il fallait que ce de

 17   quoi on a parlé, que je le garde pour moi et puis qu'on verra plus tard, au

 18   bout de quelques temps.

 19   Q.  Ce qui m'incite à vous poser une autre question. Est-ce vous avez signé

 20   une déclaration à ce moment là ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  D'accord. A ce moment là, les médias accordaient-ils une grande

 23   couverture à cela ou non ?

 24   R.  C'était assez présent dans les médias. On parlait beaucoup de cet

 25   arrêt, mais il y a eu aussi un petit article qu'on a vu paraître dans la

 26   presse disant que la Défense de M. Sljivancanin disposait désormais de

 27   certains faits nouveaux.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, vous reporter à l'intercalaire

Page 19

  1   14 dans votre classeur.

  2   M. BOURGON : [interprétation] Je précise à l'attention de la Chambre qu'il

  3   s'agit de la pièce RD14, 1-4. Nous avons une traduction officieuse en

  4   anglais, Monsieur le Président, mais l'original est en B/C/S.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le vois.

  6   M. BOURGON : [interprétation]

  7   Q.  Et pourriez-vous nous dire si vous avez appris cela à l'époque ?

  8   R.  Oui, je l'ai vu dans la presse.

  9   Q.  Au milieu du document, bien entendu, j'ai quant à moi une version

 10   anglaise : 

 11   "Les nouvelles informations que nous avons reçues et au sujet

 12   desquelles nous avons déjà amorcé une enquête…"

 13   Est-ce que cela correspond à l'information que vous aviez fournie à

 14   M. Lukic ?

 15   R.  Oui, cela correspond. J'ai vu cela et j'ai compris que cela avait à

 16   voir avec moi. J'ai compris que cela concernait mon information. Peut-être

 17   qu'il y avait quelqu'un d'autre aussi, mais c'est ce que j'ai compris.

 18   Q.  Alors, je passe au sujet suivant que je souhaite aborder, à savoir est-

 19   ce vous avez eu d'autres rencontres après cette première rencontre avec

 20   l'un quelconque des membres de l'équipe de Défense de Sljivancanin ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  A quel moment ?

 23   R.  Cela a eu lieu quelques mois plus tard. C'était à Belgrade. Je vous ai

 24   vu vous-même, M. Lukic, et Mlle Dokmanovic était présente.

 25   Q.  Quelle a été la durée de cette réunion et de quoi a-t-il été question ?

 26   R.  Cette réunion a été brève, pas longue du tout. J'ai compris qu'il

 27   s'agissait, en fait, tout simplement de se rencontrer, que j'allais

 28   confirmer les informations que j'avais, et j'ai appris à ce moment-là qu'il

Page 20

  1   était possible que je vienne témoigner. Vous m'avez demandé si j'étais prêt

  2   à venir témoigner.

  3   Q.  Merci. Et à cette occasion, avez-vous donné une déclaration ?

  4   R.  Non, à cette occasion non plus.

  5   Q.  Nous savons que vous avez fourni une déclaration à un moment donné; à

  6   quel moment ?

  7   M. ROGERS : [interprétation] Cela ne me dérange pas que mon confrère

  8   précise la date par une question directrice.

  9   M. BOURGON : [interprétation]

 10   Q.  Donc, vous auriez fourni une déclaration en date du 8 octobre 2009.

 11   Est-ce vous pouvez vous rappeler comment cela s'est passé ?

 12   R.  Oui, c'est exactement cette date-là qui figure sur la déclaration. Il

 13   s'agit de deux pages manuscrites. Je les ai écrites moi-même, et j'ai donné

 14   cette déclaration en présence de Me Lukic dans son cabinet. Il y avait

 15   d'autres personnes qui étaient présentes dans leurs bureaux, mais Me Lukic

 16   et moi-même, nous étions seuls. 

 17   Q.  Est-ce qu'on vous a fourni des instructions, des lignes directrices sur

 18   la teneur souhaitée de votre déclaration ?

 19   R.  J'ai reçu des petits commentaires, des remarques, sous forme de petits

 20   résumés. Donc, il fallait que je me présente et que je dise où je me suis

 21   trouvé, à quel moment je me suis trouvé, mais en plus on s'attendait de moi

 22   à ce que j'écrive exactement ce que j'ai entendu, ou plutôt le contenu de

 23   la conversation entre Mrksic et Sljivancanin. Premièrement, de savoir s'il

 24   est exact que Mrksic a dit à Sljivancanin qu'il avait retiré la sécurité et

 25   que Sljivancanin n'ait pas réagi et qu'il n'ait rien fait pour que Mrksic

 26   change sa décision. Deuxièmement, il voulait que j'écrive pour quelle

 27   raison je ne venais qu'à ce stade-là parler de ces faits, et que j'écrive

 28   dans mon texte pourquoi j'avais pris la décision de témoigner.

Page 21

  1   Q.  Très bien. Alors, physiquement, dites-nous comment vous avez fourni

  2   votre déclaration à M. Lukic ?

  3   R.  Cette déclaration, je vais ajouter, Lukic m'a encouragé à écrire juste

  4   une phrase de plus, à savoir est-ce que j'allais demander les mesures de

  5   protection ou non. Et j'ai écrit : "Je suis prêt à venir témoigner, je ne

  6   demande aucune mesure de protection." Et j'ai signé de ma main cette

  7   déclaration que j'ai remise à M. Lukic.

  8   Q.  Monsieur, entre le moment où vous avez donné cette déclaration en

  9   octobre de l'an 2009 et aujourd'hui, est-ce vous avez revu, à d'autres

 10   occasions, des membres de l'équipe de Défense Sljivancanin ?

 11   R.  Oui. A Belgrade, j'ai vu Mlle Dokmanovic et puis vous-même et M. Lukic;

 12   donc l'équipe de Défense. Je vous ai rencontré ici quand je suis arrivé

 13   pour témoigner.

 14   Q.  Je vois que nous avons déjà utilisé beaucoup de temps. Donc je vais

 15   changer de sujet à présent, et je vais parler des personnes que vous avez

 16   rencontrées avant de venir déposer pendant le procès en première instance.

 17   Donc très rapidement, je voudrais que vous nous donniez les noms des

 18   personnes que vous avez rencontrées avant votre premier témoignage à La

 19   Haye.

 20   M. ROGERS : [interprétation] : Ce sera un peu laborieux, Monsieur le

 21   Président. Cela ne semble pas évoquer un sujet très précis. Je suppose que

 22   le témoin a eu beaucoup de conversations portant sur beaucoup de points.

 23   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mais votre temps est limité.

 24   M. BOURGON : [interprétation] Oui, j'ai rencontré mon confrère. J'essaie

 25   vraiment de ne pas poser de questions directrices.

 26   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je m'en remets à vous. Vous êtes libre

 27   de choisir comment vous allez procéder.

 28   M. BOURGON : [interprétation]

Page 22

  1   Q.  Donc, Monsieur, avez-vous rencontré les représentants du bureau du

  2   Procureur avant votre témoignage à La Haye ?

  3   R.  Oui. J'ai rencontré des représentants du bureau du Procureur. Ils ont

  4   un bureau à Belgrade, et je leur ai donné une déclaration. En fait, je me

  5   suis entretenu avec eux pendant deux jours, et j'ai donné ma déclaration à

  6   ce moment-là. Et puis, avant cela, vous m'avez posé une autre question.

  7   Oui, j'ai collaboré assez étroitement avec la Défense de M. Mrksic, et à

  8   l'époque, j'étais prêt à témoigner pour n'importe quelle équipe de Défense,

  9   voire pour le Procureur. A l'époque, cela ne m'était pas important du tout

 10   de savoir pour qui j'allais venir déposer, parce que ce qui était le plus

 11   important à mes yeux c'était que l'on dise la vérité ici, donc peu importe

 12   quelle est la partie qui me cite comme témoin. Et c'est la raison pour

 13   laquelle je suis revenu. Oui, il est vrai que j'ai rencontré aussi le

 14   bureau du Procureur. J'ai collaboré avec eux.

 15   Q.  Monsieur, il est précisé au compte rendu d'audience que vous avez

 16   témoigné à deux reprises à Belgrade. Vous vous en souvenez ?

 17   R.  Oui. J'ai témoigné devant le tribunal spécial de Belgrade, où des

 18   poursuites sont engagées contre des accusés chargés de meurtres à Ovcara.

 19   Il y a 16 personnes qui sont accusées. Je suis venu déposer deux fois

 20   devant la Chambre. J'ai répondu à toutes sortes de questions devant 15

 21   avocats, voire les accusés avaient le droit de me poser toutes les

 22   questions qu'ils souhaitaient.

 23   Q.  Ma question suivante sera très simple. Pour quelle raison avez-vous

 24   rencontré toutes ces personnes que vous venez de citer, à savoir

 25   l'Accusation, la Défense Mrksic, ou pendant la procédure à Belgrade -- ou

 26   plutôt, est-ce qu'à un moment quelconque quiconque vous a posé des

 27   questions au sujet des conversations qui ont eu lieu entre Mrksic et

 28   Sljivancanin le 20 novembre 1991 ?

Page 23

  1   R.  Jamais personne ne m'a posé des questions au sujet de la conversation

  2   entre le commandant Mrksic et le commandant Sljivancanin, des questions

  3   relatives à leur conversation du 20 novembre 1991 à 20 heures au poste de

  4   commandement.

  5   Q.  Passons maintenant à la journée du 20 novembre 1991. Est-ce que vous

  6   pouvez décrire brièvement les activités qui ont été celles du Groupe

  7   opérationnel sud de ce jour-là ? Très brièvement, s'il vous plaît.

  8   R.  Le 20 novembre 1991, c'est la deuxième journée à partir de laquelle il

  9   y a eu cessation des combats principaux dans la ville de Vukovar. Nous

 10   avons eu à ce moment-là bien des obligations et des missions. Je dirais

 11   même que pour certaines personnes, la situation était plus aisée du point

 12   de vue du déploiement au combat que maintenant que la paix était arrivée.

 13   Tout à coup, nous avons été surpris par un grand nombre de civils. Ces

 14   gens-là étaient sortis de leurs abris et demandaient notre aide pour aller

 15   en Croatie, en Serbie ou en Bosnie-Herzégovine. Il y a eu pas mal de

 16   travail à effectuer au sujet de l'évacuation des blessés. Il y avait des

 17   devoirs à effectuer au sujet des activités à venir pour notre unité. En

 18   termes simples, c'était très, très mouvementé, dynamique.

 19   Ce jour du 20, je m'en souviens en particulier par l'évacuation de

 20   l'hôpital. Je m'en souviens par cette session du gouvernement qui s'est

 21   tenue à l'époque dans Vukovar, et d'après toute une série de détails. Si on

 22   a le temps, je peux aborder les détails aussi.

 23   Q.  Oui, maintenant nous allons revenir exactement à la soirée du 20

 24   novembre 1991. Vous trouviez-vous donc au poste de commandement OG sud

 25   cette nuit-là ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  A quelle heure êtes-vous arrivé au poste de commandement et qu'y avez-

 28   vous fait ?

Page 24

  1   R.  Je suis arrivé au commandement vers 16 heures. J'arrivais d'Ovcara à ce

  2   moment-là. Et lors d'une rencontre avec le commandant Mrksic, je lui ai

  3   brièvement présenté un rapport pour dire ce que j'avais fait ce jour-là et

  4   où je l'avais fait. Je lui ai dit que j'étais à la caserne, à la session du

  5   gouvernement, que j'avais été à Ovcara, que j'avais vu la situation, et en

  6   bref, j'ai présenté un rapport à ce sujet à son intention. Ensuite, je suis

  7   resté au poste de commandement jusqu'au bout.

  8   Q.  Y avait-il un briefing quotidien ce jour-là; et si oui, à quelle heure

  9   avait-il eu lieu ?

 10   R.  Ce jour-là, du reste comme les jours précédents, il y a eu une réunion

 11   qui d'habitude commençait vers 18 heures. Et ce jour-là aussi, la réunion a

 12   eu lieu à 18 heures.

 13   Q.  Qui a précédé cette réunion quotidienne et qui y a assisté, si vous

 14   vous en souvenez ?

 15   R.  Oui, je m'en souviens. Le briefing était conduit par le commandant

 16   Mrksic, et étaient présents la plupart des commandants et de ses adjoints.

 17   Un certain nombre était absent parce qu'ils avaient eu des missions à

 18   accomplir pour ce qui est de l'évacuation des civils, voire pour ce qui est

 19   du raccompagnement des convois d'autocars pour les emmener vers les

 20   destinations au niveau de la frontière, ou ils faisaient tout simplement

 21   autre chose.

 22   Q.  Est-ce que --

 23   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mon collègue le Juge Guney a une

 24   question à poser.

 25   Le Juge Guney.

 26   M. LE JUGE GUNEY : Monsieur Panic, quel était votre intérêt personnel ainsi

 27   que votre capacité -- dans le cadre de votre capacité de se souvenir de

 28   tous les détails de la conversation entre Mrksic et Sljivancanin ? Veuillez

Page 25

  1   préciser quel était votre intérêt personnel.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] A l'époque, j'étais chef d'état-major de la

  3   Brigade de la Garde. En même temps, j'étais chef d'état-major pour le

  4   Groupe opérationnel sud dans ce secteur. Et j'étais l'adjoint du commandant

  5   Mrksic lorsqu'il était absent. J'ai été présent lors de l'accomplissement

  6   de toutes les missions importantes et lors de la présentation de la

  7   totalité des rapports. Et j'ai directement été présent au moment de

  8   certains événements lorsque ceux-ci se sont produits. Je n'ai pas d'intérêt

  9   particulier. Je ne faisais que mon travail.

 10   M. LE JUGE GUNEY : Merci.

 11   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur

 12   Bourgon.

 13   M. BOURGON : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que vous vous souvenez ce qui était évoqué lors de ce briefing

 15   quotidien ce jour-là ?

 16   R.  Je m'en souviens. Je me suis penché sur certains documents lorsque je

 17   me suis préparé lors du récolement. Et il a été question ce jour-là de

 18   quelques missions cruciales. D'abord, la zone de responsabilité --

 19   M. ROGERS : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre, mais je ne suis pas

 20   très sûr de la pertinence de la teneur de ce briefing quotidien peut-être.

 21   En fait, ce qui nous intéresse, c'est la teneur de la conversation que M.

 22   Mrksic a eue avec M. Sljivancanin en présence de M. Panic. Ça ne va pas

 23   plus loin. Sinon, je ne vois du tout quelle est la pertinence d'évoquer la

 24   teneur des briefings quotidiens. Ceci a été discuté à longue vie dans le

 25   cadre du procès.

 26   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je suppose que vous y allez ?

 27   M. BOURGON : [interprétation] Monsieur le Président. Oui, j'allais y

 28   arriver, et j'espère que mon collègue fera de la même et sera patient avec

Page 26

  1   moi –- lui, Sera patient avec lui s'il est patient avec moi, donc.

  2   Q.  J'aimerais savoir à quelle heure M. Sljivancanin est arrivé pour ce

  3   briefing ?

  4   R.  M. Sljivancanin est arrivé vers 20 heures au poste de commandement du

  5   groupe opérationnel.

  6   Q.  Qui était présent au poste de commandement lorsqu'il est arrivé ?

  7   R.  Lorsqu'il est arrivé, il y avait de présent moi, il y avait de présent

  8   le lieutenant-colonel Trifunovic, et il y avait deux hommes de transmission

  9   qui étaient présents. S'agissant de ces deux hommes là, j'en suis certain,

 10   Mais il se peut qu'il y ait eu aussi ceux qui traitent les documents, et

 11   quelques autres agents opérationnels. Et il y avait de temps à autre des

 12   gens qui rentraient, des chefs de camps, des gens qui amenaient du courrier

 13   ou emportaient du courrier.

 14   Q.  Maintenant, dites-nous exactement ce qui s'est passé exactement lorsque

 15   le commandant Sljivancanin est arrivé au poste de commandement OG Sud. Si

 16   vous vous en souvenez, bien sûr.

 17   R.  Je me souviens du fait qu'à ce moment-là j'étais assis à mon bureau, M.

 18   Mrksic était là. D'habitude, il allait et venait quand il n'avait pas de

 19   réunion, qu'il n'avait pas quelque chose à faire au bureau même, il allait

 20   et venait le long de la salle du groupe opérationnel, d'un mur à l'autre

 21   jusqu'aux hommes chargés de la transmission. Et je me souviens que

 22   Sljivancanin, grand comme il est, est entré à la porte et il a rencontré le

 23   commandant. Il a failli percuter le commandant. Alors il lui a dit :

 24   "Camarade Colonel, j'arrive de l'hôpital. Ma mission est accomplie. Je vous

 25   prie de me dire ce qui s'est passé et ce qui a changé la décision qui était

 26   celle de faire que ces membres des groupes paramilitaires qui s'étaient

 27   enfuis à l'hôpital, pourquoi ces gens-là n'ont-ils pas été transportés vers

 28   Mitrovica ? Pourquoi y a-t-il eu changement de décision pour les acheminer

Page 27

  1   vers Ovcara ?"

  2   Mrksic a brièvement dit : "Ça été une décision du gouvernement. Il y a eu

  3   une session du gouvernement aujourd'hui et c'est le gouvernement qui a

  4   décide. Ecoute bien quelle est ta mission pour demain et ça, on pourra en

  5   reparler après."

  6   M. BOURGON : [interprétation] Monsieur le Président, je remarque qu'il y a

  7   une petite erreur de traduction en ce qui concerne les propos du témoin.

  8   Q.  Monsieur Panic, je vais vous relire une phrase que l'on trouve ici au

  9   compte rendu et vous allez me corriger pour me dire si c'est bien vos

 10   propos. Il est écrit -- la question était qu'a dit Sljivancanin et vous

 11   avez dit : "Colonel, je reviens de l'hôpital. Ma mission est terminée.

 12   Monsieur, pouvez-vous me dire exactement ce qui est arrivé ?" Et ensuite la

 13   phrase qui m'intéresse, celle qui m'intéresse : "Tout ce que je sais c'est

 14   qu'une décision a été prise en ce qui concerne les paramilitaires qui

 15   étaient à l'hôpital. Pourquoi n'ont-ils pas été envoyés à Mitrovica, mais

 16   plutôt à Ovcara ?"

 17   Est-ce bien vos propos ?

 18   R.  Ce n'est pas ce que j'ai dit. Je vais répéter ce que j'ai dit. Au

 19   moment où M. Sljivancanin a informé le colonel Mrksic du fait qu'il était

 20   arrivé de l'hôpital et qu'il accompli sa mission, dans le même souffle,

 21   sans interruption dans le texte, il a dit : "Mais qu'est-il arrivé,

 22   pourquoi a-t-on changé la décision qui était celle de faire que les

 23   paramilitaires de l'hôpital qui s'étaient cachés à l'hôpital, pourquoi ne

 24   sont-ils pas allés à Mitrovica, mais à Ovcara ?"

 25   Mrksic a dit : "C'est une décision du gouvernement. Il y a eu

 26   aujourd'hui une session du gouvernement. C'est le gouvernement qui a décidé

 27   de la sorte. On en parlera plus tard."

 28   Q.  Pouvez-vous nous dire quels sont les autres sujets qui ont été évoqués

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  1   dans le cadre de cette conversation ?

  2   R.  Alors Mrksic lui a dit : "Ecoute, Sljivo", c'est ainsi qu'il

  3   l'appelait, "la 80e Brigade se charge de la zone de responsabilités sur ce

  4   territoire. La Brigade de la garde rentre à la garnison de Belgrade. Demain

  5   matin, il viendra un grand groupe de journalistes du pays et de l'étranger,

  6   ils seront 120 environ. Aide donc Panic afin que les choses se passent

  7   comme il faut. Je ne serai pas là, je vais à Belgrade voir le secrétaire

  8   fédéral."

  9   Alors je peux juste vous faire juste une petite observation. Il lui a dit :

 10   "N'exagère pas dans ta façon de t'exposer devant les journalistes."

 11   Q.  Je vous remercie. Où se trouvaient exactement Mrksic et Sljivancanin

 12   dans cette pièce par rapport à l'endroit où vous vous trouviez à l'époque ?

 13   R.  C'était à proximité immédiate de là où j'étais, à proximité de la porte

 14   d'entrée de cette salle où se trouvait le commandement.

 15   Q.  Avez-vous participé à la conversation ?

 16   R.  Je n'ai pas participé à la conversation. J'étais en train de faire

 17   quelque chose là. Je n'ai fait qu'écouter leur conversation à eux. J'avais

 18   véritablement envie d'entendre ce qu'ils allaient se dire.

 19   Q.  Avez-vous entendu la conversation ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et sur quoi vous basez-vous pour dire que vous avez entendu la

 22   conversation ?

 23   R.  Eh bien, je me base sur le fait que j'étais d'abord tout près, assez

 24   près, et le fait est qu'ils parlaient assez fort. Ceux qui connaissent

 25   Mrksic savent que lui, c'est quelqu'un qui parle fort, et Sljivancanin, il

 26   parle plus fort encore.

 27   Q.  Au cours de cette conversation, la situation des prisonniers de guerre

 28   détenus à Ovcara, elle était évoquée d'une manière ou d'une autre ?

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  1   R.  Non, non, il n'en a pas été question.

  2   Q.  Cela fait longtemps, alors comment est-ce que vous pouvez être

  3   absolument sûr de tout cela ?

  4   R.  J'en suis sûr. Si je n'étais pas sûr, je ne me serais pas présenté

  5   auprès de M. Lukic, et je ne serais pas assis ici aujourd'hui. J'en suis

  6   certain, parce que si je n'ai pas pu retenir chaque mot au bout d'autant de

  7   temps, et il est normal de ne pas pouvoir se souvenir du moindre des mots,

  8   mais je suis certain de ce qui n'a pas été dit. Et c'est ce qui m'a troublé

  9   et ça m'a incité, ma conscience m'a poussé à le dire. Ce n'est pas vrai que

 10   d'affirmer que Mrksic aurait dit à Sljivancanin, à aucun moment il n'a

 11   mentionné qu'il aurait ordonné, approuvé le retrait des forces de sécurité

 12   depuis Ovcara. Et ça, je peux le témoigner deux jours et deux nuits, devant

 13   Dieu et devant le peuple. Je veux bien admettre que je n'ai pas pu tout

 14   entendre et tout garder en mémoire. J'ai peut-être tout entendu, mais je

 15   n'ai pas tout gardé en mémoire. Mais ce sont des choses qui ne s'oublient

 16   pas. Ce sont des choses qui influent directement sur la sécurité des gens à

 17   Ovcara.

 18   Parce qu'une fois arrivé d'Ovcara, j'ai informé Mrksic de la

 19   situation à Ovcara. Je lui ai proposé de renforcer les effectifs de

 20   sécurité. Je lui ai proposé d'envoyer des gens pour aider, sur le plan

 21   professionnel, Vojnovic, au cas où il y aurait besoin d'avoir plus

 22   d'officiers ou de personnel. Et Mrksic était d'accord. Et pour autant que

 23   je m'en souvienne, et j'ai témoigné ici, me semble-t-il, à cet effet, je

 24   crois que le capitaine Bozic y est allé et quelqu'un d'autre des instances

 25   de sécurité. Je veux dire, il est allé à Ovcara après le rapport que j'ai

 26   présenté à Mrksic. Et c'est la raison pour laquelle j'affirme qu'il n'a

 27   nulle part et en aucune façon dit cela à Sljivancanin. Et s'il l'avait dit

 28   à Sljivancanin, il aurait pu me le dire. J'étais le chef d'état-major.

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  1   J'étais son adjoint. J'étais constamment là-bas avec lui, à ses côtés.

  2   Excusez-moi si j'ai été quelque peu plus véhément.

  3   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Bourgon, j'ai une

  4   question à poser au témoin, s'il vous plaît.

  5   Monsieur Panic, il y a un moment, vous avez dit, et je cite le compte rendu

  6   en anglais : "J'étais occupé à faire autre chose." Donc il était occupé à

  7   faire autre chose lorsqu'il y a eu cette discussion entre M. Mrksic et M.

  8   Sljivancanin. Voici ma question. J'aimerais savoir si vous vous souvenez

  9   des détails de cette conversation entre Sljivancanin et Mrksic, mis à part

 10   le fait que Mrksic n'aurait pas informé Sljivancanin du retrait. Ou est-ce

 11   le seul point que vous gardez à l'esprit ? En effet, dans votre déposition

 12   au cours du procès et dans vos déclarations précédentes, vous n'avez jamais

 13   déclaré de façon affirmative ou de façon positive de propos qui auraient

 14   été tenus ou qui n'auraient pas été tenus au cours de cette conversation

 15   entre ces deux hommes. Comment se fait-il que tout d'un coup vous vous

 16   souvenez si clairement qu'on n'a absolument pas évoqué le fait que la

 17   protection de la JNA serait retirée ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, voilà. J'étais en train de faire un

 19   travail quelconque. J'étais assis. Sljivancanin venait de droite. J'ai

 20   cessé de travailler. Les deux se rencontrent, et j'étais en train de suivre

 21   la conversation. Alors je veux bien admettre que je n'ai pas retenu le

 22   moindre des détails de cette conversation. Je sais qu'il a été question de

 23   ceci. Quand Sljivancanin est arrivé, il a dit Mrksic : "J'arrive de

 24   l'hôpital. J'ai accompli ma mission." Et il a demandé à Mrksic pourquoi il

 25   y a eu changement pour que ces paramilitaires qui avaient fui vers

 26   l'hôpital avaient été d'abord mis de côté pour être envoyés à Sremska

 27   Mitrovica, et pourquoi alors les a-t-on envoyés à Ovcara; pourquoi la chose

 28   a-t-elle été changée. Mrksic a répondu que c'était le gouvernement qui

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  1   l'avait décidé à sa session du jour même et qu'ils en parleraient plus

  2   tard.

  3   Ça, je m'en souviens parce que le jour d'après, Sljivancanin, à mes côtés,

  4   était censé effectuer une mission, entre autres missions régulières, pour

  5   ce qui est du transport de civils, pour ce qui est de l'accomplissement

  6   d'autres mesures, et parce qu'il y avait encore des escarmouches ça et là.

  7   Et je sais que Mrksic lui avait confié plusieurs missions. Chose

  8   importante, chose qu'il devait savoir forcément, c'est que la zone de

  9   responsabilité était prise en charge par la 80e Brigade, que la Brigade de

 10   la Garde rentrait. Ça, c'est très important. Et on ne peut pas l'oublier.

 11   Elle rentrait à la garnison de Belgrade. Et lui devait m'aider, moi, le

 12   jour d'après, lorsqu'il y avait l'arrivée d'un grand groupe de journalistes

 13   pour l'accueil de ces gens et pour organiser le tout, en sus de toutes les

 14   autres missions ordinaires.

 15   Si Mrksic, à ce moment-là, avait dit à Sljivancanin : J'ai approuvé ou j'ai

 16   ordonné le retrait des forces de sécurité depuis Ovcara, c'est d'abord moi

 17   qui aurais réagi en ma qualité d'officier, en ma qualité de chef d'état-

 18   major, en ma qualité d'adjoint du commandant, et j'aurais réagi en tant

 19   qu'être humain : Commandant, ce n'était pas ce qu'on avait prévu. Que

 20   s'est-il donc passé ? Je sais que M. Sljivancanin l'aurait fait en sa

 21   qualité de chef des effectifs de sécurité. Et je sais parce que j'avais été

 22   à Ovcara et j'ai présenté un rapport au commandant à cet effet. Et juste

 23   une heure avant cela, le commandant était d'accord avec ce que je lui avais

 24   dit.

 25   Cette information, cette partie de conversation, je l'aurais retenue pour

 26   tout le reste de ma vie, comme je me souviens de ce qui n'a pas été dit,

 27   parce que si ça avait été dit, je vous affirme que j'aurais été le premier

 28   à réagir.

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  1   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie. La Juge Vaz a une

  2   question.

  3   Mme LE JUGE VAZ : Je vous remercie, Monsieur le Président.

  4   Monsieur Panic, pourriez-vous préciser, vous avez dit tout à l'heure que

  5   vous êtes arrivé au poste de commandement à 16 heures le 20 novembre, que

  6   vous êtes resté jusqu'au bout. Alors, pouvez-vous préciser ce que veut dire

  7   "jusqu'au bout." A quelle heure avez-vous quitté, si vous avez quitté les

  8   lieux à un certain moment ? Où se trouvait Sljivancanin à ce moment-là ? Et

  9   il a été également question des tâches futures. On vient d'en parler

 10   brièvement. Etes-vous en mesure de nous dire, cette conversation qu'il y a

 11   eue donc entre Sljivancanin et Mrksic s'agissant de ces tâches futures,

 12   quelle a été donc la réponse précise de Mrksic à la question de

 13   Sljivancanin sur ces tâches futures dont on vient de parler à l'instant,

 14   s'il vous plaît. Je suis désolée, mais ma voix est un peu -- J'espère que

 15   vous avez entendu et compris ma question. Sinon, je suis prête à répéter.

 16   Merci.

 17   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, la Juge Vaz.

 18   La question, a-t-elle été claire ? Allez-y.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] La question a été claire. Il faut bien

 20   comprendre que le commandement et l'essentiel, le gros des activités du

 21   commandement, ça se déroulait dans une grande salle. Il s'agit d'une salle

 22   des opérations. Et il y a constamment un certain nombre d'officiers qui s'y

 23   trouvent. J'y séjourne, et il y a le commandant aussi, lorsque nous

 24   n'inspectons pas des unités sur le terrain. Et ce soir-là, je suis arrivé à

 25   16 heures, une fois que j'avais terminé mes missions quotidiennes. J'ai

 26   présenté mon rapport au commandant et je me suis assis à mon bureau de

 27   travail. Et au poste de commandement, dans cette salle donc, j'y étais tout

 28   le temps. En face, j'avais une petite chambre pour me reposer. Je pouvais

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  1   passer la nuit. Et j'y ai passé la nuit jusqu'au lendemain lorsque nous

  2   avons eu de nouvelles missions à accomplir.

  3   Mais j'ai compris ce qui vous intéressait. A aucun moment, je ne suis

  4   sorti tant que les deux étaient en train de s'entretenir, parce que la

  5   conversation était, somme tout, assez courte. Maintenant, pour ce qui est

  6   des missions que Mrksic a confiées à Sljivancanin, je vais répéter que

  7   l'une des missions c'était de faire en sorte que la zone de responsabilité

  8   soit reprise par la 80e Brigade, parce que Sljivancanin n'était pas au

  9   briefing quotidien lorsqu'il en avait été question. C'est le commandant de

 10   la 80e qui avait reçu cette mission et, pour lui, en sa qualité de chef de

 11   la sécurité, il était important qu'il sache qu'à l'avenir, il allait avoir

 12   d'autres compétences, puisque c'est la brigade qui avait pris en charge la

 13   zone de responsabilité.

 14   Ensuite, il lui est dit que la zone de la brigade revenait à Belgrade

 15   parce que pour lui c'est important, en sa qualité de chef de la sécurité,

 16   parce qu'il peut planifier et réaliser ses tâches relatives à la sécurité

 17   dans une situation complexe où il a 12 000 civils qui, d'un coup, se

 18   dirigent vers nous pour que nous leur apportions de l'aide, pour leur

 19   donner des boîtes de conserves, du pain, les mettre à bord d'autocars et

 20   les emmener jusqu'à la frontière ou jusqu'au lieu où ils ont exprimé le

 21   désir d'aller. Ensuite, la mission d'après, pour la journée à venir,

 22   s'agissant de Sljivancanin et je l'ai précisé cela, il était très exposé au

 23   niveau des médias. Mais indépendamment de ce fait, en sa qualité d'organe

 24   chargé de la sécurité, il doit garantir la sécurité d'un grand nombre de

 25   journalistes du pays et de l'étranger dans une situation assez trouble

 26   parce que le lendemain, il y en avait 120 qui allaient venir. Donc, il

 27   avait pour mission de m'aider dans tout ceci afin que cette tâche soit

 28   accomplie comme il se devait, parce que ces gens sont venus, la conférence

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  1   de presse s'est tenue. On peut en parler si vous le souhaitez. Ce serait en

  2   bref. Si vous avez des questions complémentaires, faites.

  3   Mme LE JUGE VAZ : Je vous remercie, Monsieur Panic. Peut-être vous nous

  4   avez dit que la conversation sur la question donc qui nous préoccupe

  5   aujourd'hui n'a pas duré longtemps. Etes-vous en mesure quand même de

  6   préciser à peu près pendant combien de temps cela a duré ? Et était-il

  7   possible de revenir sur cette question ? Vous dites que vous êtes resté là

  8   pratiquement tout le temps, vous ne vous êtes pas absenté. Mais pouvez-vous

  9   imaginer un moment où M. Mrksic aurait pu dire à Sljivancanin ce qui nous

 10   préoccupe aujourd'hui, à savoir ce qu'on allait faire avec la sécurité

 11   qu'on allait enlever ? Etait-il possible, à votre avis, qu'à un moment ou à

 12   un autre cela ait pu être dit sans que vous ayez pu l'entendre vous-même ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] : Je vous dis, une fois de plus, que j'étais

 14   très près. La conversation a duré peu de temps. Si vous me demandez

 15   d'exprimer cela en minutes, ça n'a pas duré plus de cinq ou dix minutes,

 16   cette rencontre entre eux. Et il aurait été impossible d'avoir eu Mrksic

 17   qui aurait dit cela et que moi je n'aie pas pu l'entendre, parce que j'ai,

 18   pour l'essentiel, entendu la totalité de leur échange. Je veux bien

 19   admettre que je n'ai pas pu  retenir le tout, au fil de toutes ces années,

 20   mais je vous affirme que j'ai tout entendu. Et j'affirme aussi que si

 21   j'avais pu entendre qu'il avait retiré les forces de sécurité, j'aurais été

 22   le premier à réagir parce que pour moi, ça aurait été un revirement de la

 23   situation, ça aurait été une enfreinte à ce que nous avions constaté tous

 24   les deux quelques minutes auparavant, parce que je lui avais indiqué

 25   comment se présentait la situation à Ovcara. Et je lui ai dit que cela

 26   signifierait automatiquement une mise en péril des gens qui se trouvaient à

 27   Ovcara, chose que moi je n'aurais pas pu laisser passé. Et je sais aussi

 28   que Sljivancanin l'a dit aussi. Et ça n'a pas pu se produire parce que nous

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  1   étions là. A quelque moment que ce soit, en notre qualité d'instance

  2   chargée de la sécurité, on aurait réagi.

  3   M. LE JUGE MERON : [interprétation]  Monsieur Bourbon, je suis désolé, j'ai

  4   une question de suivi à poser après les questions posées par ma consœur,

  5   Mme le Juge Vaz.

  6   Monsieur Panic, vous souvenez-vous, oui ou non, ce qui s'est passé

  7   lorsque M. Sljivancanin a posé des questions à M. Mrksic à propos de ces

  8   missions à venir ? Est-ce vous vous en souvenez de cela ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] : M. Sljivancanin n'a pas réclamé qu'on lui

 10   confie des missions. Lui, il a écouté attentivement l'énoncé des missions

 11   que lui a confiées Mrksic. Et je réitère ceci, M. Sljivancanin arrive, il

 12   informe qui de droit de ce qu'il avait fait, et Mrksic enchaîne pour lui

 13   donner d'autres missions. Si vous voulez tout le détail, je peux vous

 14   redonner le détail.

 15   M. LE JUGE MERON : [interprétation] : Monsieur Bourgon, aidez-nous.

 16   Il me semble que M. Sljivancanin a témoigné et a dit qu'il avait demandé à

 17   Mrksic quelles étaient ces missions à venir. J'essaie juste de savoir si le

 18   témoin se souvient de cette bribe de la conversation. Je vois que Me Lukic

 19   opine de chef, donc il se souvient aussi de cela.

 20   M. BOURGON : [interprétation] Oui. Au compte rendu, nous avons les propos

 21   de M. Sljivancanin dans le cadre de sa déposition. Mais aujourd'hui, nous

 22   avons droit aux souvenirs de M. Panic. S'il y a des différences, c'est

 23   comme ça, et ce sera à la Chambre d'appel d'en tirer les conclusions. Si

 24   jamais il y a des différences entre les souvenirs des deux personnes, cela

 25   fait très longtemps que c'est arrivé, 19 ans.

 26   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Oui, je comprends bien.

 27   Voulez-vous ajouter quoi que ce soit, Monsieur Panic ? En effet, il

 28   semble qu'il y ait un passage de la conversation dont vous ne vous souvenez

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  1   pas. Alors, si vous ne vous souvenez pas de ce passage de la conversation,

  2   il se pourrait qu'il y en ait d'autres que vous n'ayez soit pas entendus,

  3   soit dont vous n'ayez aucun souvenir. Et nous demandons vraiment l'aide de

  4   tous pour y voir clair.

  5   M. BOURGON : [interprétation] Je pense que tout ceci sera discuté au cours

  6   du contre-interrogatoire. Ici, nous avons ce dont le témoin se souvient.

  7   M. ROGERS : [interprétation] Je ne pense pas que c'est à M. Bourgon de

  8   commenter sur les propos du témoin. Vous avez posé une question qui est

  9   très intéressante, et j'aimerais beaucoup entendre la réponse à cette

 10   question, je dois dire. Donc j'aimerais vraiment que le témoin réponde à la

 11   question du Président.

 12   M. BOURGON : [interprétation] C'est en effet essentiel. Je suis d'accord

 13   avec vous. Je peux poser la question; vous pouvez la re-poser, si vous

 14   voulez. Je vais la poser.

 15   Q.  Général Panic, M. Sljivancanin, au cours de sa déposition, dans son

 16   procès, a dit qu'il avait posé des questions à Mrksic à propos de ses

 17   missions à venir. Est-ce ainsi que les choses ont eu lieu ?

 18   R.  Cela se peut. Cela se peut. Je veux bien admettre que cela est

 19   possible.

 20   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mais vous ne vous souvenez pas

 21   précisément de cela; oui ou non ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce dont je me souviens, c'est les missions qui

 23   ont été dites. Sur le coup, est-ce que Sljivancanin a posé une question; ce

 24   détail, je ne sais pas trop. Il se peut qu'il ait posé une question qui

 25   m'ait échappé. Il se peut qu'il y ait des points qui m'aient échappés. Mais

 26   moi j'affirme que j'ai entendu et mémorisé l'essentiel de l'échange.

 27   M. BOURGON : [interprétation] J'ai encore deux questions. Je sais que je

 28   manque de temps, mais j'ai encore deux questions.

Page 38

  1   Q.  Monsieur Panic, après cette conversation, qui était la première

  2   personne à quitter la pièce ?

  3    R.  Après cet échange, M. Sljivancanin a été le premier à quitter la

  4   pièce.

  5   Q.  Et où s'est-il rendu, si vous le savez ?

  6   R.  Il est parti à ce site de Negoslavci. Il avait un commandement, c'est-

  7   à-dire les instances chargées de la sécurité dans la maison numéro 9.

  8   Q.  Après cette conversation que vous venez de nous relater, y a-t-il

  9   d'autres échanges, d'autres conversations entre Mrksic et Sljivancanin ?

 10   R.  Je pense vous avoir dit ce que j'avais gardé en mémoire et les choses

 11   que je ne peux pas oublier. Il se peut qu'ils aient eu quelques autres

 12   échanges de propos, mais je ne pense pas que cela ait pu m'échapper, parce

 13   que la conversation était brève.

 14   Q.  Oui, mais après cette conversation, est-ce qu'ils ont à nouveau

 15   discuté, plus tard ?

 16   R.  Non. Non. M. Sljivancanin a quitté la pièce. M. Mrksic est resté avec

 17   moi, dedans. Et M. Mrksic, au bout d'un certain temps est parti lui aussi

 18   inspecter, me semble-t-il, visiter nos blessés à l'hôpital de Negoslavci.

 19   Q.  Dernière question. Vous avec parlé d'une conférence de presse, cette

 20   conférence de presse a-t-elle bel et bien eu lieu le lendemain ?

 21   R.  Oui, la conférence de presse s'est tenue dans la caserne de Vukovar. A

 22   cette conférence, je l'ai déjà mentionné, il y avait 120 journalistes du

 23   pays et de l'étranger.

 24   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, regarder l'intercalaire 7 du classeur ?

 25   Il y a une image, une photographie dans cet intercalaire, et j'aimerais que

 26   vous nous la décriviez, s'il vous plaît.

 27   Reconnaissez-vous cette photo ?

 28   R.  Je reconnais cette photo.

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  1   Q.  De quoi s'agit-il ?

  2   R.  Sur cette photo, une salle, la plus grande salle de la caserne, c'était

  3   une salle de classe, et c'est là qu'on a reçu les journalistes, et c'est là

  4   que s'est tenue la conférence de presse le 21 novembre au matin.

  5   Q.  M. Sljivancanin se trouve-t-il sur cette photo ?

  6   R.  Oui, M. Sljivancanin est là. Il est juste devant le micro.

  7   Q.  Et qui était au centre de toute l'attention au cours de cette

  8   conférence de presse ?

  9   R.  La conférence de presse, indépendamment du fait qu'elle ait été

 10   conduite par notre instance chargée du moral et des activités politiques de

 11   l'éducation, les journalistes étaient surtout intéressés par M.

 12   Sljivancanin. Et c'était lui l'homme médiatisé ce jour-là, la personnalité

 13   la plus en vue par les médias ce jour-là.

 14   Q.  Vous trouvez-vous sur cette photographie ?

 15   R.  Oui, je suis aussi sur cette photo. Moi, je suis dans la deuxième

 16   rangée, je suis debout.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   M. BOURGON : [interprétation] Je n'ai plus de questions pour le témoin,

 19   Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Bourgon. Votre

 21   interrogatoire principal est terminé.

 22   Monsieur le Témoin, on me dit qu'il faut plutôt 20 minutes que 15

 23   pour changer les bandes. Nous faisons donc une pause, et nous reprendrons à

 24   11 heures moins le quart, précises.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 25.

 26   --- L'audience est reprise à 10 heures 48.

 27   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Nous allons maintenant commencer

 28   le contre-interrogatoire de M. Panic, contre-interrogatoire conduit par

Page 40

  1   l'Accusation.

  2   Et Monsieur Rogers, vous avez une heure et quart. Vous avez la parole.

  3   M. ROGERS : [interprétation] Merci.

  4   Contre-interrogatoire par M. Rogers : 

  5   Q.  [interprétation] Bonjour. Je suis Paul Rogers. Et je vais vous contre-

  6   interroger au nom de l'Accusation.

  7   R.  Bonjour.

  8   Q.  Vous nous avez dit dans le cadre de votre déposition que vous avez pris

  9   connaissance de l'arrêt et que suite à cet arrêt, vous avez contacté Me

 10   Lukic le jour même, en fait le lendemain matin; c'est bien cela ?

 11   R.  Le jour d'après.

 12   Q.  Et je pense que vous avez dit que vous avez très mal dormi, ou

 13   carrément pas dormi du tout de la nuit, n'est-ce pas ?

 14   R.  [aucune interprétation]

 15   Q.  Lorsque vous avez pu vous entretenir avec Me Lukic, il vous a dit qu'il

 16   serait utile pour lui de savoir un certain nombre de faits; c'est bien cela

 17   ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Tout particulièrement, vous avez dit qu'au cours de cette première

 20   conversation, il vous a demandé si vous étiez présent; vous êtes d'accord

 21   avec ça ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Il vous a demandé aussi quelles étaient les autres personnes qui

 24   étaient présentes ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et la teneur des conversations ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et plus particulièrement, la teneur de la conversation entre M.

Page 41

  1   Sljivancanin et M. Mrksic ?

  2   R.  J'ai demandé à M. Lukic de me confirmer si ce que j'avais appris au

  3   sujet du jugement rendu était juste.

  4   Q.  Oui, voilà ma question : Je voulais savoir si Me Lukic vous a demandé

  5   si vous connaissiez la teneur de la conversation qui avait eu lieu entre M.

  6   Mrksic et M. Sljivancanin; c'est ce que voulait apprendre Me Lukic ?

  7   R.  M. Lukic m'a dit -- enfin, quand il m'a expliqué que cela était bien

  8   vrai et que le jugement était rendu tel que, suite à ma réaction, au terme

  9   de quoi j'avais été présent là-bas et que je ne pouvais pas accepter cela

 10   comme étant vrai et exact. Il m'a dit de garder cela pour le moment où il

 11   viendrait.

 12   Q.  Ma question était très simple, et je vous la répète une dernière fois.

 13   Lorsque vous vous êtes entretenu avec Me Lukic, il voulait savoir

 14   exactement ce que vous pouviez dire à propos de la conversation qui avait

 15   eu lieu entre M. Sljivancanin et M. Mrksic; c'est bien le cas ?

 16   R.  Ce qui l'intéressait, c'était de me demander d'essayer de me souvenir,

 17   de faire revenir en mémoire ce que j'avais gardé comme souvenir de cette

 18   conversation.

 19   Q.  Merci. Vous l'avez déjà dit d'ailleurs dans le cadre de votre

 20   déposition 092949. Donc, vous l'avez déjà dit. Il vous a dit que si vous

 21   vous souvenez de la conversation, vous ne devriez en parler à personne ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Lorsque vous avez rencontré Me Lukic pour la première fois, avant de

 24   faire votre déclaration, lorsque vous avez répété votre récit, est-ce que

 25   M. Lukic était en train de prendre des notes de vos souvenirs ?

 26   R.  Non, il n'a pas pris de notes.

 27   Q.  Très bien. Ensuite, vous vous êtes rencontrés à nouveau, quelques mois

 28   plus tard, vers le 8 octobre 2009 pour donner votre déclaration en bonne et

Page 42

  1   due forme; c'est bien cela ?

  2   R.  Nous nous sommes rencontrés une fois de plus.

  3   Q.  Oui --

  4   R.  C'est moi qui m'excuse. Nous nous sommes rencontrés au bout de quelques

  5   mois encore. Et c'était à notre troisième rencontre que j'ai signé une

  6   déclaration.

  7   Q.  Et vous nous dites qu'on vous a donné une certaine ligne directrice en

  8   vue d'élaborer votre déclaration; c'est cela ?

  9   R.  C'étaient des instructions cherchant à éviter que j'aille trop en

 10   largeur.

 11   Q.  Vous dites que cela vous a été donné sous forme de plan, de points

 12   principaux; c'est bien cela ? Est-ce que c'était écrit ?

 13   R.  C'était plus verbal. C'est moi qui ai pris des petites notes.

 14   Schématiquement, j'ai noté ce qu'il fallait; il fallait ça, ça et ça.

 15   Q.  Et vous nous avez répété ce qu'il vous avait demandé. Vous l'avez dit

 16   ce matin dans le cadre de votre déposition : "Qui j'étais, où j'étais, et

 17   d'écrire sur papier ce que j'avais entendu, c'est-à-dire la teneur de la

 18   conversation."

 19   Voilà ce que Me Lukic vous a demandé de faire, c'étaient vos

 20   consignes, écrire dans le cadre de votre déclaration la teneur même de la

 21   conversation ?

 22   R.  Oui, il y a cela. Et ensuite, pourquoi je n'en avais pas parlé

 23   auparavant, et pourquoi ai-je décidé de témoigner ou d'accepter d'aller

 24   témoigner.

 25   Q.  Certes. Mais vous convenez avec moi que l'un des buts principaux de

 26   votre déclaration, c'était de mettre sur papier tout ce dont vous vous

 27   souveniez de cette conversation. Vous êtes d'accord avec moi ?

 28   R.  Oui, en bref.

Page 43

  1   Q.  En bref, c'est vous qui le dites. Il n'empêche qu'il vous a demandé de

  2   reprendre la totalité de la conversation qui a eu lieu entre M. Mrksic et

  3   M. Sljivancanin. C'était là le but de cette déclaration que vous alliez

  4   faire.

  5   R.  Moi, j'ai compris que la finalité de cette déclaration, en sus du fait

  6   de donner les renseignements les plus élémentaires me concernant et de

  7   préciser que j'avais déjà témoigné, indiquer les éléments les plus

  8   importants de cette conversation de la rencontre Mrksic/Sljivancanin, et

  9   indiquer que j'étais disposé à témoigner pour tirer tout ceci au clair lors

 10   du témoignage même. Et c'est la raison pour laquelle je suis ici.

 11   Q.  Le but était donc d'essayer de vous souvenir du plus grand nombre

 12   d'éléments portant sur cette conversation et de les rédiger et de les

 13   mettre sur papier; c'est bien cela ?

 14   R.  Non. S'il m'avait dit cela, moi j'aurais truffé la déclaration de

 15   détails et la déclaration aurait eu plus de 20 pages. La déclaration était

 16   censée être courte, avoir donc et contenir l'essentiel des points sur

 17   lesquels je serais à même de témoigner. Et si vous vous penchez sur celle-

 18   ci, c'est sur deux pages, c'est manuscrit.

 19   Q.  La totalité de ce que vous avez rédigé dans votre déclaration --

 20   M. ROGERS : [interprétation] Mais je vois que M. Bourgon est debout. Je

 21   pense qu'il a une objection à faire.

 22   M. BOURGON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 23   pense que nous allons en avoir pour plus d'une heure. Donc je tiens à dire

 24   à mon éminent confrère qu'il peut éventuellement faire des propositions au

 25   témoin, mais qu'il ne doit pas mettre dans la bouche du témoin des paroles

 26   qu'il n'a pas tenues. Ici, par exemple, il a dit, non pas en tant que

 27   suggestion, mais il n'a pas fait une proposition au témoin. Il a dit, et je

 28   recherche à le citer exactement. Je cite : "Le but était donc d'essayer de

Page 44

  1   vous rappeler le plus grand nombre d'éléments possible à propos de cette

  2   conversation."

  3   Donc, ce n'est pas ce que le témoin a dit précédemment. Donc, j'aimerais

  4   vraiment, lorsque mon éminent confrère cite le témoin, qu'il le cite

  5   précisément.

  6   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci.

  7   M. ROGERS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Bourgon. Enfin,

  8   c'est quand même une proposition, et je pense que c'était une question

  9   parfaitement correcte dans le cadre d'un contre-interrogatoire. On peut

 10   proposer quelque chose et mon éminent confrère le sait très bien

 11   d'ailleurs. Enfin, je poursuis.

 12   Q.  Monsieur Panic, vous avez dit que la finalité était de donner un

 13   résumé. Je vais vous le lire, c'est le document de la Défense RD6, septième

 14   paragraphe. Voici ce que vous avez dit, septième paragraphe donc :

 15   "Au cours de cette conversation, Mrksic a informé Sljivancanin que la

 16   Brigade des Gardes allait rentrer à Belgrade et que la 80e Brigade

 17   motorisée allait prendre la responsabilité de la zone. Mrksic a aussi dit à

 18   Sljivancanin qu'il devrait m'aider le lendemain pour gérer le grand nombre

 19   de journalistes qui allaient arriver à Vukovar, ce qui représentait une

 20   mission importante pour tous les membres du commandement. A aucun moment au

 21   cours de cette conversation Mrksic n'a informé Sljivancanin que les membres

 22   de la police militaire de la 80e Brigade motorisée avaient reçu l'ordre de

 23   se retirer de cet endroit, c'est-à-dire d'Ovcara."

 24   Voilà l'essentiel de ce que vous avez noté à propos de la conversation, et

 25   c'est ce que vous avez noté le 8 octobre. Aujourd'hui, pour la première

 26   fois, vous avez donné beaucoup plus de détails à propos de ce qui s'est

 27   passé ce jour-là, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

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 13  pagination anglaise et la pagination française.

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  1   Q.  Et vous nous avez donné un grand nombre d'éléments à propos de ce que

  2   M. Sljivancanin aurait dit. Par exemple, vous avez dit qu'il venait de

  3   revenir de l'hôpital, après avoir exécuté sa mission. Vous l'avez dit,

  4   n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Or, cela ne se trouve pas dans cette déclaration écrite, à aucun

  7   endroit.

  8   R.  Ça ne figure pas dans la déclaration parce que j'ai la possibilité et

  9   j'entendais avoir la possibilité de le déclarer ici viva voce.

 10   L'INTERPRÈTE : L'interprète serait reconnaissant si le témoin se

 11   rapprochait un peu du micro.

 12   M. ROGERS : [interprétation]

 13   Q.  Dans votre déclaration écrite, il n'est nulle part fait référence au

 14   fait que les prisonniers soient remis à d'autres personnes. Enfin, il n'est

 15   même pas fait référence à la session du gouvernement. Vous ne faites pas

 16   référence dans cette déclaration à la séance du gouvernement ou à aucun

 17   ordre donné par cette séance du gouvernement.

 18   R.  Ce n'est pas écrit dans la déclaration. Ça fait l'objet de mon

 19   témoignage aujourd'hui ici, et j'ai parlé de cette session et de cette

 20   décision. Et je l'ai mentionné à l'occasion de l'audition précédente ici,

 21   lorsque j'ai été entendu précédemment ici en l'an 2006.

 22   Q.  Lorsque j'ai étudié votre déposition, je comprends que la première fois

 23   qu'on vous a demandé de vous rappeler de quoi que ce soit à propos de cette

 24   conversation ou de donner des détails à propos de cette conversation, c'est

 25   lorsque vous avez rencontré Me Lukic la première fois, mais dans le but de

 26   préparer cette révision d'appel ?

 27   R.  La première fois que j'ai rencontré M. Lukic, j'en ai parlé un peu plus

 28   longuement, et je lui ai raconté certains des détails issus de la rencontre

Page 47

  1   Mrksic/Sljivancanin, suite à quoi il m'a dit, lui, que cela devait être

  2   laissé en attente pour qu'il puisse voir si moyen il y avait d'en faire

  3   quelque chose. J'ai cru comprendre qu'il allait avoir à procéder à d'autres

  4   enquêtes, pas peut-être des enquêtes, mais recueillir d'autres

  5   informations, parce que je n'étais pas la seule personne impliquée dans ces

  6   événements.

  7   Q.  Lorsque vous vous êtes entretenu avec le bureau du Procureur pour faire

  8   votre déclaration, vers le 1er septembre 2005, on vous a demandé ce qui

  9   s'était passé lors du briefing du soir, et on vous a demandé si on avait

 10   parlé de l'évacuation de l'hôpital dans le cadre de ce briefing. Et vous

 11   avez dit, je cite :

 12   "Je ne me souviens pas si le commandant Sljivancanin a parlé de

 13   l'évacuation de l'hôpital lors du briefing, mais j'imagine qu'il en a

 14   informé Mrksic."

 15   Ceci se trouve dans votre déclaration faite auprès du bureau du

 16   Procureur, RP16, page 24, paragraphe 88. Vous souvenez-vous avoir déclaré

 17   cela au bureau du Procureur, que vous imaginiez que Sljivancanin en avait

 18   informé Mrksic ?

 19   R.  Pendant deux jours, j'ai travaillé avec le bureau du Procureur.

 20   J'ai donné une déclaration, et il est vrai que l'on voit dans cette

 21   déclaration que je ne me souviens pas qu'il ait parlé. Mais là, on se

 22   réfère au briefing du soir à 18 heures. Et après, pendant les préparatifs,

 23   avant la déposition de 2006 et pour ce témoignage ici, en regardant le

 24   journal et en rafraîchissant ma mémoire, en regardant d'autres documents,

 25   en fait, les choses se sont passées autrement. Sljivancanin n'était pas là

 26   du tout. Donc c'est la raison pour laquelle j'ai dit que je ne me souvenais

 27   pas qu'il ait pris la parole.

 28   Q.  Mais voyez-vous, Général, vous avez dit, je suppose qu'il a informé

Page 48

  1   Mrksic sur l'évacuation de l'hôpital. Mais le fait est que vous saviez, non

  2   seulement vous l'avez supposé, mais vous saviez qu'il l'avait fait, parce

  3   que vous étiez là, dites-vous, à cette réunion par la suite lorsque ce

  4   thème même a été abordé et fait l'objet de cette audience aujourd'hui. Donc

  5   pourquoi avez-vous dit : "Je suppose qu'il a informé Mrksic," alors qu'en

  6   réalité vous saviez, d'après votre témoignage, qu'il en avait informé

  7   Mrksic ?

  8   R.  A son arrivée, lorsqu'ils se sont vus, lorsqu'il s'est présenté, moi,

  9   j'avais terminé ma tâche à l'hôpital; ça c'est vrai. Mais cela n'est pas

 10   écrit dans la déclaration pour la raison suivante. Je n'étais pas préparé à

 11   l'époque au moment où j'ai donné cette déclaration. Et je l'ai donnée dans

 12   une situation qui, psychologiquement et physiquement, était très difficile

 13   pour moi. Donc je me suis rendu à cette réunion avec le Procureur au moment

 14   où mon épouse était mourante suite à un cancer, et hélas, elle devait

 15   décédée rapidement par la suite. Donc au vu de ces circonstances, à ce

 16   moment-là, il est possible que ces faits m'aient échappé parce que j'étais

 17   sous l'emprise de difficultés personnelles, de problèmes personnels. Il se

 18   peut qu'il s'agisse là d'une omission, et je l'admets.

 19   Q.  Général, vous avez été contre-interrogé pendant votre déposition au

 20   procès, et on vous a posé des questions sur le fait de vous souvenir

 21   d'avoir donné ces déclarations au bureau du Procureur. A la page du compte

 22   rendu d'audience 14 485 à 90, vous avez dit avoir procédé à des

 23   modifications à quasiment toutes les pages de la déclaration du bureau du

 24   Procureur, car vous dites qu'il y avait des erreurs commises au niveau de

 25   la teneur, du style et de la langue, et d'erreurs typographiques, et

 26   cetera. Page du compte rendu d'audience 14 485, lignes 25 à 3 -- 485 -- 6,

 27   25 à 3.

 28   Ceci est quelque chose qui aurait dû être corrigé au vu de la teneur,

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  1   n'est-ce pas, parce que ceci est erroné ? Vous n'avez pas supposé, vous le

  2   saviez. Vous avez eu toutes les occasions du monde pour changer cela, mais

  3   vous ne l'avez pas fait.

  4   R.  Cela a duré deux jours, le processus où j'ai donné ma déclaration, et

  5   puis un jour on m'a montré ma déclaration. J'ai corrigé certaines choses

  6   pour lesquelles j'ai estimé qu'il fallait les corriger. Il est possible -

  7   je vous dis quelle était la situation à ce moment-là - il est possible que

  8   nombre de points m'aient échappés et que je ne les ai pas corrigés.

  9   Q.  Général, votre souvenir des événements semble s'améliorer au fil des

 10   jours plutôt que l'inverse, n'est-ce pas ? Après 19 ans, votre souvenir

 11   semble être bien meilleur qu'au moment où vous avez donné une déclaration

 12   au bureau du Procureur. Vous fournissez davantage de détails aujourd'hui

 13   par rapport à ce que vous avez fait dans le passé.

 14   R.  Oui, excusez-moi, cela est un petit peu sarcastique. C'est normal

 15   qu'avec le temps, avec les années, la mémoire s'efface, que les souvenirs

 16   ne soient pas aussi bons. Mais c'est un fait que pour ma déposition en 2006

 17   et aussi avant de déposer aujourd'hui, j'ai trouvé du temps pour me

 18   préparer. J'ai eu pas mal de conversations avec d'autres personnes, et je

 19   me suis préparé sur des points précis. Concrètement, c'est de cela qu'il

 20   s'agit. Il en allait du sort des gens, des hommes. Il fallait avoir

 21   suffisamment de faits et de preuves. Je me suis préparé. J'ai revu un

 22   certain nombre de documents, le journal de guerre. J'ai rafraîchi ma

 23   mémoire, et je suis d'accord avec vous sur le fait qu'avec les années qui

 24   passent et avec l'âge, on ne rajeunit pas.

 25   Q.  On vous a également donné l'occasion pendant l'interrogatoire principal

 26   dans le cadre du procès de parler davantage de la conversation entre M.

 27   Mrksic et M. Slijvancanin. Je souhaite vous reporter à votre déposition du

 28   9 novembre 2006, compte rendu d'audience au procès, lignes 1 à 7, 14 330,

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  1   vous avez dit ceci, et je vous cite, lorsqu'on vous a posé la question sur

  2   Sljivancanin :

  3   "Bien sûr, Sljivancanin a eu le temps de dire quelque chose ou pouvait dire

  4   quelque chose à toutes les réunions."

  5   Le contexte ici, ce sont les briefings, des retours d'information.

  6   "Bien sûr, Sljivancanin a eu l'occasion de dire quelque chose à

  7   toutes les réunions, de dire quelque chose et de poser des questions. Je ne

  8   me souviens pas du fait qu'il ait été présent," à savoir lors de cette

  9   réunion d'information, "parce que je me serais certainement souvenu de ses

 10   propos sur ce qu'il avait fait à l'hôpital. Pour autant que je m'en

 11   souvienne, il est arrivé un peu plus tard au poste de commandement. Il

 12   faisait nuit. Et en toute équité à 18 heures il fait nuit également. Je

 13   crois qu'il est arrivé vers 20 heures, et je sais qu'il s'est entretenu

 14   avec le commandant."

 15   Et là, vous vous êtes arrêté, rien de plus n'a été dit sur cette

 16   conversation-là.

 17   Vous avez eu l'occasion à ce moment-là, n'est-ce pas, d'expliquer ce que

 18   vous nous expliquez ici aujourd'hui ?

 19   R.  Oui. Et j'aurais aimé que quelqu'un m'ait posé cette question à

 20   l'époque. On ne serait peut-être pas appelé à être ici aujourd'hui.

 21   Q.  Pardonnez-moi, d'après ce que j'ai compris et à la manière dont j'ai

 22   compris votre déposition, la première fois que cette question a été

 23   soulevée, à savoir eu égard à cette conversation, c'est lorsque ces

 24   questions ont été abordées dans la phase d'appel, n'est-ce pas ?

 25   M. LE JUGE MERON : [interprétation] M. le Juge Pocar a une question à

 26   poser.

 27   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Monsieur Rogers, en réponse à une

 28   question qu'a répondue le témoin pendant l'audience en 2006.

Page 51

  1   Quelle a été la question précisément qui a été posée à ce moment-là, s'il

  2   vous plaît.

  3   M. ROGERS : [interprétation] La question était celle-ci :

  4   "Vous souvenez-vous précisément si oui ou non Sljivancanin a assisté à

  5   cette réunion", à savoir ce briefing, cette réunion d'information, "à

  6   savoir s'il a dit quelque chose, s'il a rapporté quelque chose, avez-vous

  7   un quelconque souvenir à ce sujet, et l'avez-vous vu quelque peu ce soir-là

  8   ou pas du tout ?"

  9   La réponse ensuite :

 10   "Evidemment Sljivancanin avait l'occasion de dire quelque chose lors de ces

 11   réunions…"

 12   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

 13   M. ROGERS : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Panic, voici donc ma question : D'après ce que j'ai compris, à

 15   la manière dont j'ai compris votre déposition, vous nous avez dit la

 16   première fois que vous avez eu l'occasion de le faire et de parler de ces

 17   événements, la première fois lorsque cela s'est avéré nécessaire, ou d'en

 18   parler à quiconque, c'était dans la phase d'appel, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui, c'est exact. Mais permettez-moi de vous expliquer quelle en est la

 20   raison. En venant déposer ici et devant le tribunal spécial et en donnant

 21   toute une série de déclarations, jamais personne ne m'a posé de questions

 22   sur le contenu de la conversation entre Mrksic et Sljivancanin, c'est-à-

 23   dire jamais cela n'a pu être l'objet d'une conversation, que Mrksic ait

 24   retiré la sécurité d'Ovcara et qu'il ait fourni cette information à

 25   Sljivancanin. Donc, c'est cela qui m'a incité à parler. Donc, je prouve

 26   quelque chose qui, à ce moment-là, ne s'est pas passé entre les deux.

 27   Q.  Pardonnez-moi --

 28   M. ROGERS : [interprétation] Je crois qu'on a demandé au témoin de répéter

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  1   sa dernière phrase.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc, puisque personne ne m'avait posé cette

  3   question lors de toutes ces dépositions que j'ai données, les témoignages,

  4   je l'ai déjà dit, donc je n'en ai pas parlé jusqu'au moment où j'ai vu

  5   quelque chose d'impossible : Mon commandant prend la décision de retirer la

  6   sécurité, il ne m'apprend pas sa décision, et je ne réagis pas.

  7   M. ROGERS : [interprétation]

  8   Q.  J'entends bien. Mais ce qui m'intéresse, avez-vous jamais évoqué la

  9   conversation, cette réunion à M. Lukic ou à l'équipe qui a défendu M.

 10   Sljivancanin pendant le procès ?

 11   R.  Non. Mais cette conversation, encore une fois, cette conversation, elle

 12   découle de cet arrêt, c'est-à-dire j'ai réagi, je me suis présenté à cause

 13   de quoi M. Sljivancanin a été condamné.

 14   Q.  J'entends bien.

 15   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je crois que Me Bourgon a quelque chose

 16   à dire.

 17   M. BOURGON : [interprétation] C'est une correction importante, page 51,

 18   lignes 6 à 7, on peut lire ici au compte rendu d'audience : "M'informe de

 19   cette décision, et je réagis." Parce que ce que le témoin a véritablement

 20   dit "il ne m'a pas informé de cette décision." Donc, je pense qu'il est

 21   important d'apporter cette correction avant de poursuivre.

 22   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie.

 23   M. ROGERS : [interprétation]

 24   Q.  Voici ma question, je ne sais pas si vous pouvez nous être utile,

 25   l'Accusation a reçu les notes de récolement concernant la déposition que

 26   vous pouviez faire avant votre témoignage au procès, RP17. Et dans cette

 27   note de récolement, à la deuxième page, l'avant-dernier paragraphe, on peut

 28   lire ceci :

Page 53

  1   "Le témoin a assisté aux réunions et aux rapports réguliers du colonel

  2   Mrksic le 20 novembre 1991 à 18 heures. Sljivancanin n'a pas assisté à la

  3   réunion, mais plus tard, après la réunion, il était là au moment où

  4   Sljivancanin et Mrksic ont eu leur conversation."

  5   Il semble, Monsieur Panic, que vous ayez déjà évoqué la teneur de cette

  6   conversation ou, en tout cas, le fait que cette conversation entre M.

  7   Sljivancanin et Mrksic ait eu lieu plus tôt, et que cette même question qui

  8   se pose par rapport à ce qui a été dit est quelque chose qui a été abordé.

  9   Est-ce que vous conviendrez de cela ?

 10   R.  Excusez-moi, je ne comprends pas votre question.

 11   Q.  Il y a une note qui a été fournie --

 12   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Lorsque vous en avez terminé avec

 13   question, M. le Juge Guney aura une question à vous poser.

 14   Je vous laisse terminer.

 15   M. ROGERS : [interprétation] Je vais l'expliquer au témoin.

 16   Q.  Monsieur Panic, donc, vous comprenez qu'il y a une note qui nous a été

 17   fournie qui évoque ce que vous avez dit lors de votre déposition au procès,

 18   ceci a été fourni aux avocats avant votre déposition au procès. Dans cette

 19   note, on fait référence à ce que vous pourriez dire à propos d'une réunion

 20   au cours de laquelle Sljivancanin et Mrksic étaient présents, puisqu'ils

 21   "ont eu cette conversation". Je veux m'assurer que vous compreniez bien.

 22   Donc là où je veux en venir, je souhaite que vous commentiez cela. Il me

 23   semble que ceci laisse entendre que vous avez évoqué la teneur de cette

 24   conversation avant votre déposition, et ce n'était pas la première fois que

 25   vous l'abordiez. Je souhaite recueillir votre commentaire.

 26   R.  Oui. Avant de coucher sur papier ma déclaration, effectivement, j'ai

 27   parlé à M. Lukic du contenu de la conversation entre M. Mrksic et

 28   Slijvancanin.

Page 54

  1   M. ROGERS : [interprétation] Je crois qu'il s'agit, en fait, de quelque

  2   chose sur lequel je souhaite recueillir un commentaire. Je lui laisse

  3   l'occasion pour le faire. Il ne veut pas commenter sur ce que d'aucuns ont

  4   écrit. Il a eu l'occasion de le faire, et pour moi ceci est terminé.

  5   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je souhaite vous interrompre, Monsieur

  6   Rogers. M. le Juge Guney et ensuite M. le Juge Pocar souhaitent dire

  7   quelque chose. Avant la question de M. le Juge Guney, ou est-ce que vous

  8   souhaitiez --

  9   M. BOURGON : [interprétation] Ceci a trait directement à la dernière

 10   question.

 11   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Alors, allez-y.

 12   M. BOURGON : [interprétation] Je m'excuse auprès du M. le Juge Guney.

 13   Lorsque mon confrère a lu un extrait de la note de récolement, il a

 14   évoqué, et je cite la phrase exacte. Il faut que je regarde le compte rendu

 15   d'audience. Il a dit : "On vous a donné l'occasion". Je cite à partir de la

 16   page 52, ligne 22, où on peut lire :

 17   "Ce à propos de quoi vous avez peut-être témoigné au procès, quelque

 18   chose qui a été remis aux avocats avant votre déposition au procès".

 19   Ensuite : 

 20   "Dans cette note, on fait référence à ce que vous pourriez dire au

 21   sujet d'une réunion…" et ce n'est pas ce que contient la note de

 22   récolement. La note de récolement dit comme suit, vous avez ce document,

 23   Messieurs les Juges, dans l'intercalaire numéro 4. Cette note dit

 24   simplement qu'après la réunion, il était là au moment où Sljivancanin et

 25   Mrksic ont eu cette conversation.

 26   Donc, nous ne devrions pas essayer de poser une question directrice

 27   par rapport à quelque chose qui ne figure pas dans la note de récolement.

 28   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Est-ce que vous souhaitez répondre

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  1   rapidement avant que nous passions à la question de M. le Juge Guney.

  2   M. ROGERS : [interprétation] Ce que laisse entendre la note de récolement,

  3   c'est la raison pour laquelle je souhaite davantage recueillir le

  4   commentaire du témoin. Ce qu'on laisse entendre dans la note de récolement,

  5   c'est que le témoin était en mesure d'expliquer la teneur de ces

  6   conversations parce qu'on l'évoque dans la note de récolement. Donc, c'est

  7   là ou je voulais en venir. Et comme je l'ai dit, c'est peut-être plus

  8   quelque chose qui relate d'un commentaire, mais j'estimais être juste

  9   envers le témoin pour qu'il puisse lui-même faire ce commentaire. Je crois

 10   que nous pouvons nous en tenir à cela.

 11   M. LE JUGE MERON : [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Veuillez répéter votre question,

 13   Monsieur le Juge Guney.

 14   M. LE JUGE GUNEY : Mrksic n'aurait-il pas mentionné l'ordre de retirer les

 15   troupes lors de cette conversation avec Sljivancanin ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais c'est ça l'essentiel. La fois précédente

 17   que je suis venu déposer, et maintenant, je vous dis que je connais très

 18   bien Mrksic. C'est un bon commandant. S'il a pris une telle décision, de

 19   retirer la sécurité d'Ovcara, il fallait qu'il m'en parle à moi, en ma

 20   qualité de chef d'état-major, qui participe à la réalisation de ses ordres.

 21   Il aurait fallu qu'il porte cela à la connaissance de tous les autres

 22   membres du commandement et tout simplement Mrksic ne l'a communiqué à

 23   personne. Donc, est-ce qu'il a pris cette décision, je ne sais pas. Mais

 24   encore une fois, une telle décision ne peut être prise que par le

 25   commandant. Seul le commandant est habilité à retirer un ordre qu'il avait

 26   donné précédemment. Je n'étais pas au courant d'une telle décision. Je n'ai

 27   pas entendu qu'il l'ait dit à Sljivancanin, et c'est la raison pour

 28   laquelle je suis devant vous, devant Dieu et devant le peuple pour affirmer

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  1   ce fait.

  2   M. LE JUGE GUNEY : Merci.

  3   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Panic, je vais poser une

  4   question de suivi. Vous savez que les hommes chargés de la sécurité se sont

  5   retirés, n'est-ce pas ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est quelque chose que j'ai entendu assez

  7   tard, que la sécurité a été retirée ou que la sécurité, subissant des

  8   pressions, je ne sais pas quelle force étrange, était partie de là-bas, et

  9   j'ai entendu parler des conséquences de cela. Mais ça je l'ai appris à mon

 10   retour à Belgrade. D'ailleurs, je l'ai dit, cela, dans ma déposition ici,

 11   devant ce Tribunal. Je ne savais pas et je n'ai pas entendu dire, et je ne

 12   pouvais pas croire qu'une telle chose était ordonnée par Mrksic ce soir-là.

 13   Il ne l'a pas fait à moi, il ne l'a pas fait en ma présence, il ne l'a pas

 14   fait devant moi.

 15   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie. Les hommes chargés de

 16   la sécurité, les militaires, se sont retirés, nous parlons de mouvement de

 17   forces militaires. Vous étiez le chef de l'état-major principal du colonel

 18   Mrksic à l'époque et vous n'avez aucune thèse à présenter ? Ce n'était pas

 19   un cas de force majeure. Comment pouvez-vous expliquer ce retrait ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, avant, en 2006, quand j'ai

 21   témoigné ici, je me souviens bien d'avoir dit : "Qui aura répondu à la

 22   question qui est de savoir qui a ordonné le retrait de la sécurité ou qui,

 23   de son propre chef, a retiré la sécurité et a mis en péril ces hommes, mais

 24   c'est ça la clé de la vérité sur les événements survenus à Ovcara."

 25   Moi, je répète, je n'étais pas au courant d'une telle décision.

 26   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie.

 27   M. ROGERS : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Panic, vous avez dit que vous avez donné des détails

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  1   supplémentaires aujourd'hui concernant la teneur de cette conversation,

  2   mais vous admettez que votre souvenir est peut-être parcellaire eu égard à

  3   tous les détails concernant ces conversations entre Sljivancanin et Mrksic;

  4   êtes-vous d'accord avec cela ?

  5   R.  J'admets qu'il y a eu des choses qui m'aient échappées et qu'il y a

  6   beaucoup de temps depuis.

  7   Q.  Voyez-vous, quand M. Sljivancanin a témoigné à propos de cette réunion,

  8   une des choses qu'il a évoqué était le fait que le commandant lui avait dit

  9   que le gouvernement avait pris le contrôle d'un groupe de suspects qui se

 10   trouvaient à l'hôpital qui avait été emmené à la caser pour qu'il y soit,

 11   par la suite, échangé contre des Serbes qui avaient été fait prisonniers.

 12   Ceci se trouve au compte rendu d'audience à la page 13 655 à 6.

 13   Vous n'avez rien dit dans votre déposition aujourd'hui à propos de

 14   cette référence à des suspects de l'hôpital qui ont été emmenés à la

 15   caserne pour être échangés. Pourriez-vous nous faire un commentaire là-

 16   dessus, s'il vous plaît.

 17   R.  Oui, ça, je l'ai dit dans mon témoignage. Peut-être que cela vous a

 18   échappé. M. Sljivancanin, au moment de sa rencontre avec Mrksic, il a dit :

 19   "J'arrive de l'hôpital, j'ai fait ma mission. Commandant que s'est-il passé

 20   ? Comment a-t-on modifié la décision que ces membres des unités

 21   paramilitaires," mais c'est la même chose, ils étaient des suspects parce

 22   que c'est un fait qu'eux, au moment de la reddition de leur unité à

 23   Mitnica, ils se sont rendus. Ces gens qui se sont rendus, c'étaient ceux

 24   qui savaient qu'ils n'avaient pas commis de crimes. Et eux aussi, ils se

 25   sont trouvés à Ovcara. Donc, c'était du 18 au 19. C'est là qu'ils ont passé

 26   la nuit et la sécurité était la même, c'est la même unité, la 80e Brigade.

 27   Donc, le lendemain, par autocar, on les a transportés à Sremska Mitrovica.

 28   L'autre partie de cette unité, excusez-moi, en sachant qu'ils s'étaient

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  1   rendus coupables de crimes, ils sont partis vers l'hôpital. Ils se sont mis

  2   à l'abri à l'hôpital, ils se sont alités. Pour nombre d'entre eux, ils sont

  3   couverts de plâtre sur un bras, une jambe, la tête, et puis, ils

  4   attendaient qu'on les insère dans ce groupe d'évacuation de blessés sous

  5   l'égide de la Croix-Rouge internationale et des observateurs européens. Et

  6   c'est à ceux-là que faisait référence Sljivancanin, ceux-là de l'hôpital.

  7   Je les ai qualifiés de membres de l'unité paramilitaire --

  8   Q.  Général, pardonnez-moi si je vous interromps. Ceci n'est pas la

  9   question que je vous ai posée. Ma question portait sur ce quoi a déposé M.

 10   Sljivancanin, à savoir ce que Mrksic lui avait dit, que le gouvernement

 11   avait pris le contrôle d'un groupe de suspects à l'hôpital, emmenés à la

 12   caserne pour être, par la suite, échangés contre des Serbes qui avaient été

 13   fait prisonniers. Dans votre déposition, et jusqu'à présent, vous n'avez

 14   rien dit à ce sujet. Et je vous pose la question pourquoi. Ceci a-t-il été

 15   dit ou non ?

 16   R.  Il a été dit. Donc, je continue. Sljivancanin demande à Mrksic : "Mais

 17   que s'est-il passé, on a modifié la décision que ces hommes-là ne vont pas

 18   à Mitrovica, ils vont plutôt à Ovcara ?" Et Mrksic lui dit : "Il y a eu une

 19   réunion du gouvernement, c'est la décision du gouvernement, on en parlera

 20   plus tard." Et c'est ce que j'ai dit dans ma déposition, je ne peux que

 21   répéter.

 22   Q.  C'est effectivement ce que vous avez déclaré, mais ce que M.

 23   Sljivancanin a laissé entendre, c'est que ces derniers devaient être

 24   échangés par la suite contre les Serbes qui avaient été fait prisonniers.

 25   Telle était sa déposition devant la Chambre, et moi, la question que je

 26   vous pose, c'est si vous avez entendu parler de cela, à savoir que ces

 27   hommes allaient être échangés contre les Serbes qui avaient été fait

 28   prisonniers ?

Page 59

  1   R.  Permettez-moi de vous le dire, le groupe que j'ai évoqué est allé à

  2   Sremska Mitrovica. Il y a eu échange de tous pour tous, et ils sont, Dieu

  3   merci, encore en vie de nos jours. Le deuxième groupe, suivant la même

  4   méthodologie, était censé être échangé, et le gouvernement avait insisté

  5   pour les juger. C'était la seule différence. M. Sljivancanin peut en parler

  6   plus longuement que moi. Et peut-être dans l'envergure de la réponse qu'il

  7   a apportée, y a-t-il une différence, mais la substance est la même. Je ne

  8   vois pas le problème. Eux étaient censés être échangés aussi.

  9   Q.  Oui, mais lors du procès, vous avez déposé, d'ailleurs, ce que vous

 10   avez présenté a été rejeté par la Chambre de première instance, c'est

 11   qu'ils allaient être jugés, absolument pas échangés, ces personnes allaient

 12   être jugées. Et visiblement, Mrksic est en train de dire à Sljivancanin,

 13   maintenant, qu'ils vont être échangés. Alors, c'est complètement l'inverse

 14   de ce que vous aviez cru comprendre. Qu'avez-vous à dire ?

 15   R.  Alors, si les Juges de la Chambres ont le temps de l'entendre, je peux

 16   en parler longuement, parce que j'ai été présent à la session du

 17   gouvernement. La session du gouvernement se tient le 20 novembre, j'étais

 18   présent, et j'ai entendu les conclusions qui ont été formulées. J'ai

 19   transmis à Mrksic, et Mrksic a accepté --

 20   Q.  Ma question est très simple, Général, très simple, et elle porte sur ce

 21   qui s'est dit lors de la réunion, et vous, vous essayez de contourner ma

 22   question, et vous ne voulez pas répondre. Dans votre déposition, vous ne

 23   faites absolument aucune référence à cet échange éventuel avec des Serbes;

 24   ce n'est que très récemment que vous en parlez. Or au départ, vous n'avez

 25   fait aucune référence à l'échange de ces prisonniers contre des Serbes

 26   capturés. Ce qui serait, d'ailleurs, en contradiction avec ce que vous

 27   pensiez qui allait leur arriver, puisque vous pensiez qu'ils allaient être

 28   jugés.

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  1   R.  Oui. A la session du gouvernement, une décision a été prise, qui est

  2   celle de les juger. Je peux vous parler des détails de la session et des

  3   conclusions adoptées. Et Mrksic a accepté la décision qu'ils ont rendue.

  4   Q.  Oui -- enfin, ce récit que vous avez donné selon lequel ils allaient

  5   être jugés a été rejeté par les Juges de la Chambre de première instance

  6   comme étant, en fait, une contre-vérité.

  7   R.  [aucune interprétation] 

  8   Q.  Mais vous la répétez à nouveau ?

  9   R.  Mais permettez-moi d'expliquer de quoi cela a découlé.

 10   Q.  Je vous demande juste de savoir si vous maintenez votre déposition

 11   initiale sur ce point, sur le fait qu'ils allaient être jugés.

 12   R.  Mais je maintiens le fait que ça été une décision prise par le

 13   gouvernement et qui a été acceptée par Mrksic. La décision disait qu'il

 14   fallait qu'ils soient jugés de façon équitable. Et permettez-moi, le chef

 15   de ce gouvernement, le jour même après la session, a fait une déclaration à

 16   la télévision où il a dit que : "Aujourd'hui, il s'est tenu une session du

 17   gouvernement où il y a eu une décision de prise qui est celle de juger ceux

 18   parmi ces gens-là qui avaient du sang sur les mains; ceux qui n'avaient

 19   rien à se reprocher seraient libérés." C'est ce qu'il a déclaré devant les

 20   médias, à la télévision. Le président de ce gouvernement qui était reconnu,

 21   à l'époque, comme gouvernement.

 22   Q.  Mais vous conviendrez avez moi --

 23   M. ROGERS : [interprétation] Mais je vois que M. Bourgon est debout.

 24   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Bourgon, vous êtes debout, y

 25   a-t-il un problème ?

 26   M. BOURGON : [interprétation] J'aimerais une référence. Mon éminent

 27   confrère dit que la Chambre de première instance a rejeté cet argument. Il

 28   a dit, et je le cite exactement :

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  1   "Ce récit que vous avez donné selon lequel il y aurait des procès a

  2   été rejeté par la Chambre de première instance comme étant une contre-

  3   vérité…"

  4   J'aimerais vraiment avoir une référence parce que ça, je ne m'en

  5   souviens pas, je ne me souviens pas l'avoir lu dans le jugement.

  6   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Pourrions-nous avoir les références ?

  7   M. ROGERS : [interprétation] Jugement, première instance, paragraphe 307.

  8   Il est écrit :

  9   "Alors que la Chambre est convaincue que Panic est bien arrivé à Ovcara peu

 10   de temps après l'arrivée des autocars venant de la caserne de la JNA, la

 11   Chambre de première instance ne peut pas accepter son explication selon

 12   laquelle il explique pourquoi il se trouvait à Ovcara. Il n'y a aucune

 13   crédibilité lorsqu'il dit qu'il pensait que les prisonniers allaient être

 14   jugés à Ovcara. Il n'y avait absolument pas le temps de le faire, puisqu'il

 15   n'y avait même pas eu d'enquête…"

 16   M. BOURGON : [interprétation] Oui, mais là, on vous demandait quelle était

 17   la raison pour laquelle ils étaient rendus à Ovcara, absolument pas si les

 18   prisonniers allaient être jugés ou non, si l'intention était de les juger

 19   ou non.

 20   M. ROGERS : [interprétation] Oui -- enfin, écoutez, mon éminent confrère

 21   peut interpréter les choses comme il le veut. Moi, je les interprète de

 22   cette façon. Si je me trompe, je me trompe. En tout cas, il explique peut-

 23   être pourquoi il se trouvait à Ovcara, et il dit, c'est parce qu'ils

 24   allaient être jugés, et il pensait que les procès avaient déjà commencé.

 25   Alors que, bien sûr, au vu du contexte, la Chambre de première instance ne

 26   pouvait pas accepter ça, il n'y avait même pas de gouvernement qui

 27   fonctionnait à l'époque. Donc, le fait de dire qu'ils allaient être jugés

 28   ou qu'ils étaient en train d'être jugés, c'est une contre-vérité. Voilà.

Page 63

  1   Enfin, poursuivons.

  2   M. LE JUGE MERON : [interprétation] En effet, nous pouvons poursuivre.

  3   M. ROGERS : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Panic, vous parliez -- enfin, vous nous donniez votre version

  5   des faits, et vous nous avez dit que vous étiez occupé à faire quelque

  6   chose. Mais que faisiez-vous, donc, qui vous occupait tant, lorsque M.

  7   Mrksic et M. Sljivancanin ont eu cette conversation ?

  8   R.  Comme on avait terminé le briefing quotidien et que les missions

  9   étaient distribuées à tout un chacun, le chef de l'état-major, l'état-major

 10   - cette coutume est dans toutes les armées - élabore, développe la décision

 11   du commandant pour en faire des ordres à l'intention des unités, propose au

 12   commandant des solutions relatives à l'exécution des missions confiées, et

 13   chacun d'entre nous intervient au niveau de ses préparatifs personnels.

 14   Moi, pour être concret, étant donné que les missions étaient nombreuses ce

 15   jour-là, il fallait veiller à l'accueil d'un grand nombre de civils, une

 16   autre unité devait prendre en charge la zone de responsabilité. Donc, il

 17   fallait tout muer en ordre. Il fallait préparer les unités pour le retour à

 18   la garnison. Et moi, je devais me préparer pour cette conférence à

 19   l'intention des journalistes, parce que mon commandant, le lendemain,

 20   n'était pas censé être présent.

 21   Q.  Oui. Enfin, j'ai l'impression que dans le centre opérationnel, il y

 22   avait beaucoup de choses en cours ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Il y avait beaucoup de choses en cours, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et vous nous avez dit que la conversation entre M. Sljivancanin et M.

 27   Mrksic aurait duré plus d'une minute, mais pas plus de cinq à dix minutes.

 28   Donc, mettons que cette conversation aurait pu s'entretenir pendant environ

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  1   cinq minutes, c'est ça, cinq ou dix minutes ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Monsieur Panic, je vous propose la chose suivante : Le contexte était

  4   assez chaotique et la salle des opérations était comme une ruche. Donc, il

  5   se peut que vous ayez peut-être raté quelques passages de la conversation,

  6   que vous ne les ayez pas bien entendus ou que vous n'avez pas tout à fait

  7   tout entendu, au vu de tout ce qui se passait dans cette salle à ce moment-

  8   là ?

  9   R.  A ce moment-là, le briefing a eu lieu à 18 heures. La pièce a été

 10   quittée par les différents commandants qui ont pris part au briefing. Au

 11   poste de commandement, il est resté le commandant, moi, le lieutenant-

 12   colonel Trifunovic, et les gens qui sont chargés des transmissions; eux,

 13   ils font leur travail. Les missions ont déjà été distribuées et les devoirs

 14   sont en train d'être réalisés. Je ne suis pas chargé de la totalité des

 15   devoirs. Moi, j'ai procédé à la distribution, et j'étais en train de

 16   préparer ce qui me concernait, moi, à ce moment-là, et lorsque besoin est,

 17   de me consulter ou de m'apporter quelque chose pour une signature. Donc,

 18   j'étais là pour cela, et j'étais là pour l'établissement de certains

 19   plannings.

 20   Je suis, donc, présent, je suis assis là. A un moment donné, la porte

 21   s'ouvre. Mrksic, lui, il se promène dans la pièce. Si vous voulez, je peux

 22   vous donner les détails. Il va et vient. Il va et vient entre la fenêtre et

 23   le mur, et ils tombent l'un sur l'autre, et ils se rencontrent à côté de ma

 24   table. Ils sont en train de se parler. Et regardez Sljivancanin, sa taille,

 25   il ne peut pas m'échapper, on ne peut pas ne pas le voir, j'ai entendu la

 26   conversation, donc. Il se peut qu'un détail m'ait échappé, je veux bien

 27   accepter la chose. Si j'avais eu de quoi enregistrer, si j'avais su ce que

 28   cela pourrait susciter comme intérêt, le mieux aurait été de faire un

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  1   enregistrement sonore.

  2   Q.  Mais pourquoi auriez-vous voulu enregistrer sur une bande-audio cette

  3   conversation ?

  4   R.  Mais aujourd'hui, on n'en débattrait pas autant. Est-ce que j'ai

  5   entendu, est-ce que je n'ai pas entendu. Là, on aurait pu entendre, nous

  6   tous, ce qui s'est dit. Mais moi, je vous affirme, je vous affirme cent

  7   fois, mille fois, si vous le voulez, que je ne peux pas comprendre que

  8   Mrksic ait pu donner ce type d'ordre. Moi, je suis en train d'affirmer pour

  9   la millionième fois qu'il ne l'a dit à personne. Il ne l'a dit ni à moi ni

 10   à Sljivancanin en ma présence, et ils étaient là, brièvement, à côté.

 11   Q.  Mais vous dites que si vous aviez entendu quelque chose de la sorte,

 12   vous auriez réagi immédiatement, vous auriez été le premier à réagir, parce

 13   que vous vous seriez immédiatement rendu compte que les prisonniers étaient

 14   en danger et qu'il fallait faire quelque chose pour les protéger ?

 15   R.  Merci de me poser cette question justement. Je l'ai dit, j'aurais été

 16   le premier à réagir. J'aurais bondi, j'aurais dit : "Mon Commandant, mais

 17   que vous arrive-t-il ? Pourquoi modifiez-vous votre décision ? Vous savez

 18   que j'ai été à Ovcara ? Je vous ai présenté un rapport concernant la

 19   situation là-bas. Est-ce qu'on n'a pas convenu tout à l'heure de renforcer

 20   les effectifs de sécurité ? Ne vous ai-je pas proposé que quelqu'un aille

 21   là-bas, du côté technique, voir ce qu'il fallait ? Pourquoi alors -- mais

 22   en substance" --

 23   Q.  Ma question était la suivante : Auriez-vous réagi parce que vous auriez

 24   compris que les prisonniers étaient en danger, qu'il vous aurait fallu,

 25   vous, faire quelque chose pour les protéger ? En tant que chef d'état-

 26   major, en tant qu'officier, vous auriez dû faire quelque chose pour les

 27   protéger s'il y avait eu un tel ordre ?

 28   R.  Absolument. C'est ce que j'étais en train de vous dire tout le temps.

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  1   Le retrait des forces de sécurité met directement en danger les gens qui

  2   sont en prison. D'abord, il risquait d'y avoir des évadés, des évasions,

  3   parce qu'il y avait, parmi eux, des criminels de toutes sortes. Il aurait

  4   pu y avoir de représailles de la part de la population. Il y aurait eu des

  5   manifestations de revanchisme.

  6   Q.  Et si vous n'agissiez pas, vous auriez encouru des sanctions au vu des

  7   dispositions des articles 20 et 21 de votre propre manuel de règlements

  8   militaires, n'est-ce pas; vous êtes d'accord avec moi ?

  9   R.  Absolument. Si j'avais omis de faire quelque chose, moi --

 10   Q.  Certes, oui. Et c'est pour cela, Général, que vous ne pouvez absolument

 11   pas admettre avoir entendu cet ordre de retrait au cours de cette

 12   conversation. Il vous est impossible de donner une version où ceci aurait

 13   eu lieu, parce que de ce fait, vous seriez impliqué ?

 14   R.  Oui, de votre point de vue à vous, cela semble correct. Moi, de mon

 15   point de vue à moi, si j'avais redouté quoi que ce soit, si j'avais peur

 16   pour ce qui est de ma responsabilité personnelle, je n'aurais pas contacté

 17   M. Lukic. Au contraire, je me bats devant cette Chambre pour que la vérité

 18   soit connue de tous, et la meilleure des façons possibles, c'est d'essayer

 19   de faire en sorte que Mrksic puisse nous dire : J'ai donné l'ordre ou je

 20   n'ai pas donné l'ordre, et si j'ai donné l'ordre, à qui j'ai donné l'ordre;

 21   donc, déterminer ce fait-là. Mais si on me l'avait dit, et que si -- au cas

 22   où je n'aurais rien entrepris, moi, je veux bien répondre, je suis là.

 23   Q.  Oui. Ou peut-être que vous voulez venir ici aujourd'hui pour vous

 24   assurer, une bonne fois pour toutes, que vous ne serez jamais impliqué dans

 25   toute cette affaire ?

 26   R.  Dans le courant de mon témoignage, j'ai dit aussi qu'avec ces gens,

 27   j'étais là-bas. J'ai été le chef d'état-major. Je sais ce que se passait

 28   là-bas. Et je vous prie de prendre en considération le fait que Mrksic n'a

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  1   pas donné cet ordre-là à l'un quelconque d'entre nous. Je ne peux pas

  2   croire qu'il ait donné cet ordre à qui que ce soit, connaissant Mrksic,

  3   connaissant sa position.

  4   Q.  La Chambre de première instance, lorsqu'elle a pris en compte votre

  5   déposition dans ce paragraphe que j'ai cité, a considéré, en fait, que vous

  6   sembliez voir plutôt votre propre intérêt, et dire tout cela afin de ne pas

  7   être impliqué dans un éventuel comportement criminel. Donc, voici ce qui

  8   est dit, paragraphe 585, en ce qui concerne le gouvernement. Peut-être

  9   cette citation est-elle meilleure que la citation que j'ai faite

 10   précédemment. Il est écrit, et je cite :

 11   "Dans sa déposition à propos de la réunion," réunion du SAO, "le général

 12   Panic a dit que suite aux débats de la réunion, il semblerait que le

 13   gouvernement de la SAO avait l'intention de juger les criminels de guerre.

 14   Il a indiqué qu'il considérait que c'était leur intention et qu'il en a

 15   fait part à Mile Mrksic. La Chambre de première instance ne peut pas

 16   accepter qu'il ait dit ceci en toute honnêteté. C'est visiblement pour

 17   servir ses propres intérêts et c'est aussi pour essayer de mettre la JNA et

 18   Mile Mrksic dans une position plus favorable."

 19   Ensuite, au paragraphe 297 du jugement, il est écrit, et je cite :

 20   "Malheureusement, la Chambre de première instance remarque aussi qu'au

 21   cours de sa déposition, le colonel Panic a voulu se montrer sous un jour

 22   plus favorable, et a voulu faire la lumière sur certains points qui

 23   auraient pu éventuellement être interprétés comme l'impliquant dans une

 24   conduite plus criminelle."

 25   Donc est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 26   R.  A aucun moment. Est-ce que vous me prenez pour ce genre d'individu,

 27   après tout ce qu'on a fait, après tous ces procès et tous ces témoignages,

 28   et le fait de m'être présenté et d'être venu aujourd'hui ?

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  1   Q.  Ce n'est pas à moi de prendre des décisions à propos de l'impression

  2   que vous faites sur moi. Ce qui est important, c'est l'impression que vous

  3   avez faite sur la Chambre de première instance à l'époque.

  4   Donc, il est parfaitement ridicule de penser que vous, en tant que chef

  5   d'état-major, n'auriez pas pu être au courant du retrait des troupes, et

  6   ce, dans votre zone de responsabilité, surtout en sachant que vous deviez

  7   reprendre le commandement le lendemain lorsque Mrksic serait parti. Vous

  8   deviez forcément être au courant de ce qui se passait ?

  9   R.  Le jour d'après, M. Mrksic, vers 8 heures, est parti en compagnie d'un

 10   groupe d'officiers à Belgrade pour voir le secrétaire fédéral à la Défense

 11   nationale. Moi, en compagnie d'un groupe d'officiers, je suis allé à la

 12   caserne de Vukovar. Et aussitôt après, il est arrivé un grand groupe de

 13   quelque 120 journalistes. Ce jour-là donc, j'étais officiellement le

 14   remplaçant du commandant Mrksic, mais Mrksic est vivant, il est là. Il a

 15   des moyens de communication, des transmissions. Il est très rapidement

 16   revenu de Belgrade aussi. Je ne suis pas en train de me défendre. Il ne

 17   faut pas se méprendre sur ce que je dis. Je suis l'adjoint de Mrksic, oui -

 18   -

 19   Q.  Enfin, Général, vous semblez dire que ce qui était plus important ce

 20   jour-là, c'était la conférence de presse du lendemain, bien plus important

 21   que la sécurité des quelque 200 prisonniers de guerre, alors que vous en

 22   aviez quand même parlé, vous avez parlé de leur sécurité la veille. Donc

 23   vous êtes en train de nous dire que vous ne vous êtes pas du tout inquiété

 24   du sort de ces personnes ?

 25   R.  Voyez-vous, le jour d'avant, lors du briefing, le commandant Mrksic a

 26   donné des ordres pour que la 80e Brigade prenne en charge la zone de

 27   responsabilité. La 80e Brigade, soit dit en passant, c'est la brigade qui

 28   avait dans sa zone de responsabilité Ovcara, avant et maintenant, ou au

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  1   moment. Alors, la Brigade de la Garde était en train de procéder à des

  2   préparatifs pour revenir à Belgrade; c'était l'une des missions. L'autre

  3   mission, c'était de veiller aux civils et au transport des civils, et cette

  4   conférence de presse. Or, moi, j'ai reçu des ordres. Mrksic m'a confié

  5   cette mission, et il m'a dit : "Tu vas les saluer en mon nom, et

  6   fournissez-leur la possibilité de poser les questions qu'ils veulent et

  7   d'aller où ils veulent." Voilà.

  8   Q.  Mais votre responsabilité en tant que chef d'état-major, vous étiez

  9   censé vous assurer que les ordres du commandant ont été exécutés sur le

 10   terrain, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui. Le chef de l'état-major et tous les autres sont chargés d'exécuter

 12   ses ordres sur le terrain.

 13   Q.  Une partie de ses ordres, d'après vous, en tout cas, c'est que les

 14   prisonniers devaient être remis au gouvernement afin que l'on les juge.

 15   Alors, quelles sont les mesures que vous avez prises pour vous assurer que

 16   ceci allait être bel et bien effectué le lendemain, si tant est que c'était

 17   ce qui était prévu ?

 18   R.  Le 20 novembre, il y a eu une évacuation de l'hôpital, et il y a eu une

 19   sélection, un tri à l'hôpital. Et il y avait un certain nombre de personnes

 20   chargées de cette tâche. En parallèle, ce jour-là, il y avait une session

 21   du gouvernement. Maintenant, si vous me demandez ce que j'ai fait après la

 22   session du gouvernement, je suis rentré à la caserne, j'en ai informé

 23   Mrksic.

 24   Q.  Je pense que vous n'avez pas compris ma question. Moi, je parle du 21

 25   novembre, le lendemain. Il faut que ce soit clair. Donc, je parle du 21.

 26   Vous avez l'ordre selon lequel ces personnes devaient être jugées, et donc

 27   remises. Alors, avez-vous pris des mesures pour vous assurer que ceci

 28   allait avoir lieu ? Parce que dans ce cas-là, vous vous seriez rendu compte

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  1   de ce qui se passait au niveau des prisonniers ?

  2   R.  Permettez-moi de vous l'expliquer, j'étais en train de vous le dire.

  3   Cette décision de gouvernement a été mise en œuvre le 20. Le 20 déjà, dans

  4   l'après-midi, c'est des gens qui ont été casés dans un hangar à Ovcara.

  5   Moi, j'ai quitté la session de gouvernement, je suis allé à la caserne,

  6   j'ai informé Mrksic. Et une fois que j'ai terminé ce que j'avais à faire à

  7   la caserne, en revenant vers mon poste de commandement, j'ai dévié, et je

  8   suis allé à Ovcara. Et j'étais devant ce hangar à Ovcara. J'ai vu ces gens.

  9   J'ai vu le commandant dont l'unité était chargée de les sécuriser. Et j'ai

 10   vu que les hommes chargés de sécuriser les lieux étaient disposés. J'y ai

 11   passé un quart d'heure au plus.

 12   Sur mon retour vers le poste de commandement, j'ai rendu un rapport

 13   au commandant Mrksic sur ce que j'avais fait ce jour, et je lui ai dit

 14   également, pour ne pas m'étendre davantage, quelle était la situation ou

 15   comment se présentait la situation à Ovcara. Voilà ce que j'ai fait. Ça,

 16   c'est le jour du 20. Le 20, eux, ils sont placés sous une force de

 17   sécurisation qui est celle de la 80e Brigade, comme cela a été le cas du

 18   groupe précédent qui, lui, a été déplacé vers Mitrovica.

 19   Q.  Y a-t-il des réunions avec la 80e Brigade motorisée le matin du

 20   21 novembre ? Avez-vous contacté leur commandant au matin du 21 novembre ?

 21   R.  Le 21, je vais le répéter, Mrksic et la délégation se préparent

 22   pour aller à Belgrade, et ils s'en vont à Belgrade. Moi, M. Sljivancanin,

 23   et le lieutenant-colonel Maric, qui est chargé du moral des troupes, et

 24   cetera --

 25   Q.  Général --

 26   R.  -- nous, on va à la caserne --

 27   Q.  Général --

 28   R.  -- il n'y a pas eu de réunion le matin, aucune réunion.

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  1   Q.  La question était très, très simple. Etes-vous rentré en contact avec

  2   le commandant de la 80e Brigade motorisée le matin du 21 novembre ?

  3   R.  Non, je n'en ai pas eu, et je ne sais pas si Mrksic en a eu une.

  4   Q.  Donc vous dites que vous ne saviez absolument pas que tout un groupe de

  5   soldats avaient été retirés de la ferme d'Ovcara ? Vous n'en aviez aucune

  6   idée, vous ne saviez pas que ce jour-là et pendant plusieurs jours, vous

  7   n'avez pas su donc que la police militaire était partie et ne protégeait

  8   plus les prisonniers ? C'est ce que vous dites, c'est votre version des

  9   faits, n'est-ce pas, alors que vous êtes quand même adjoint du commandant

 10   chargé de cette zone de responsabilités, le 21 ?

 11   R.  Oui, ce jour, et d'une manière générale, je ne suis ni allé à Ovcara ni

 12   j'ai eu de contacts avec le commandant de la 80e. Lui, il a eu l'ordre de

 13   prendre en charge la zone complète de responsabilités de la Brigade de la

 14   Garde, et nous, nous étions en train de nous préparer pour un retour.

 15   Q.  Donc, dans votre version, vous semblez dire --

 16   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Panic, veuillez répéter la

 17   dernière partie de votre question, car les interprètes de la cabine

 18   anglaise vous le demandent.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que le 21, j'étais à la caserne. Je

 20   n'ai pas rencontré le commandant de la 80e. Le commandant de la 80e a pris

 21   le commandement à l'égard de ce territoire, et la Brigade de la Garde,

 22   elle, est en train de procéder à des préparatifs pour rentrer à la garnison

 23   de Belgrade. Nous n'avions plus de compétence pour ce qui est de cette zone

 24   de responsabilité là.

 25   M. ROGERS : [interprétation]

 26   Q.  Oui. Au vu des consultations faites par la Chambre de première

 27   instance, qui est que c'est bien Mile Mrksic qui a ordonné que les troupes

 28   se retirent d'Ovcara, votre version des faits semble indiquer que Mile

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  1   Mrksic aurait délibérément induit vous-même et toutes les autres personnes

  2   en erreur à propos de cet ordre de retrait. Il a délibérément omis de vous

  3   faire connaître un fait extrêmement important portant sur le commandement

  4   et l'opération ayant lieu dans la zone opérationnelle du Groupe sud. C'est

  5   votre version des faits ?

  6   R.  Non, ce n'est pas ma version des faits. Ce que je vous affirme, c'est

  7   que je connais Mrksic depuis longtemps, et je le connais assez bien. Et je

  8   ne peux pas croire qu'il ait pu donner un tel ordre à qui que ce soit.

  9   J'affirme qu'il se peut qu'un tel ordre ait pu venir rien que de la bouche

 10   du commandant, mais il ne l'a pas donné en ma présence. Et moi, je n'étais

 11   pas au courant d'un tel ordre, et il n'en a pas été question lorsque

 12   j'étais présent et lorsque je m'étais entretenu avec Sljivancanin. C'est ce

 13   que j'affirme.

 14   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Rogers, vous n'avez plus

 15   beaucoup de temps. J'ai l'impression qu'on se répète. Allez-vous aborder un

 16   nouveau sujet ?

 17   M. ROGERS : [interprétation] Je ne suis pas sûr que le témoin suive bien,

 18   mais je voudrais qu'il comprenne bien que le résultat de ce qu'il dit, en

 19   fait, c'est qu'étant donné les constatations faites à propos du commandant

 20   qui a bel et bien donné l'ordre, cela veut dire qu'en fait le commandant

 21   voulait l'induire en erreur à propos d'un point absolument essentiel

 22   portant sur sa zone de responsabilité dont il était chef d'état-major, et

 23   qu'il était évident que cela devait être découvert.

 24   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Madame la Juge, oui.

 25   Mme LE JUGE VAZ : Je vous remercie, Monsieur le Président.

 26   Je ne sais pas si nous allons pouvoir avancer, mais j'aimerais poser une

 27   question au témoin. Dans la hiérarchie militaire, tel que cela fonctionnait

 28   chez vous, était-il possible que M. Mrksic prenne une décision sans vous

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  1   consulter, sans consulter M. Sljivancanin, et que cela soit exécuté quand

  2   même ? Je vous remercie.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Quand j'ai vu le jugement contre M. Mrksic, on

  4   y voit qu'il a été condamné parce qu'il a ordonné que la sécurité se retire

  5   d'Ovcara. C'était nouveau pour moi. C'était quelque chose d'impossible pour

  6   moi, puisque je le connais en tant que commandant, et parce qu'il n'a dit

  7   cela à personne. Mais dans le système de commandement dans notre armée,

  8   comme dans toute autre armée du monde, fondé sur le principe de

  9   subordination et de voie unique de commandement, le commandant n'est pas

 10   tenu d'informer de la totalité de ses décisions ses subordonnées. C'est la

 11   raison pour laquelle il en assume la responsabilité. D'une part, c'est

 12   l'honneur et la dignité du commandant, et d'autre part c'est la

 13   responsabilité.

 14   Si la Chambre est arrivée à la conclusion qu'il l'a fait, alors il

 15   l'a fait de son propre chef, ou en informant celui qui devait se charger de

 16   la sécurité, donc celui qui était chargé d'exécution. Donc cet ordre ne

 17   peut venir que du commandant. C'est ça que je dis. Aucun autre individu

 18   dans la filière de commandement n'aurait pu donner cet ordre, puisque celui

 19   qui exécute l'ordre n'aurait pas été tenu de l'exécuter. Cela aurait

 20   entraîné une responsabilité pénale.

 21   Donc, la conclusion est la suivante, Mrksic aurait pu prendre cette

 22   décision, donner un tel ordre, et comme vous le voyez, sans en informer qui

 23   que ce soit. Quant à savoir s'il l'a fait, moi je ne sais pas. Vraiment je

 24   n'arrive pas à y croire. Mais c'est possible.

 25   Permettez-moi. Le commandant de la 80e Brigade d'Ovcara était directement

 26   son subordonné. Donc entre les deux hommes il n'y a pas d'intermédiaire.

 27   Donc ça aussi, c'est possible.

 28   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous dites donc que ceci n'est pas

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  1   impossible, que Mrksic ait donné cet ordre et que cet ordre ait été destiné

  2   à la 80e Brigade, sans que le chef d'état-major ne soit du tout au courant,

  3   à savoir vous-même, ou qu'il ait une quelconque idée de cela ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie.

  6   Je crois que vous en avez terminé, Monsieur Rogers, n'est-ce pas ?

  7   M. ROGERS : [interprétation] Oui. Il semblerait que oui, puisque vous me le

  8   dites, effectivement. Puis-je simplement poser une autre question ?

  9   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Si c'est bref.

 10   M. ROGERS : [interprétation] Je souhaite parler de la région militaire.

 11   Q.  Ceci simplement, Général : Ce que vous laissez entendre par rapport au

 12   traitement de ces prisonniers est quelque chose qui non seulement, bien

 13   évidemment, porte sur leur remise, il y avait un ordre de la 1ère Région

 14   militaire que votre poste de commandement a reçu dans les premières heures

 15   du 20 novembre, et qui exigeait que les prisonniers soient traités et

 16   échangés un pour un. Est-ce que vous vous souvenez de cela, l'arrivée de

 17   cet ordre ? C'est le RP -- pardonnez-moi. Je crois que c'est le RP5.

 18   M. ROGERS : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, pardonnez-moi.

 19   Je n'arrive pas à mettre la main dessus maintenant. Pardonnez-moi. C'est le

 20   RP11.

 21   Q.  Il s'agit d'un ordre qui est daté du 19 novembre, ordre dans lequel on

 22   dit ceci. Je crois que vous ne le contestez pas.

 23   "Les organes compétents vont continuer à travailler de façon intense à la

 24   mise en œuvre de l'accord sur l'échange des membres de la RSFY OS qui ont

 25   été arrêtés, ainsi que les membres capturés du ministère de l'Intérieur et

 26   des Gardes nationaux croates, conformément au principe de un pour un."

 27   Et à la page 2, nous avons la date du 20 novembre, et on parle de 0045. Il

 28   s'agit de 1 heure du matin.

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  1   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Maître Bourgon, vous avez du mal à

  2   trouver le passage en question ?

  3   M. BOURGON : [interprétation] Non, je souhaite simplement que le témoin

  4   dispose --

  5   M. ROGERS : [interprétation] RP11. Il dispose du classeur. Ceci se trouve

  6   dans le système Sanction également 00 heure 45 du matin.

  7   Q.  Si vous disposez de l'ordre original, vous voyez le premier paragraphe

  8   où on évoque le principe de un pour un, et la deuxième page vous pouvez

  9   voir le tampon, et si vous tournez la page vous verrez le tampon qui montre

 10   à quel moment ceci a été reçu dans les premières heures du matin du 20

 11   novembre.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Après avoir reçu cela, est-ce un ordre dont vous aviez connaissance le

 14   20 novembre, ce principe de un pour un de la 1ère Région militaire ?

 15   R.  Oui, justement, c'est comme cela qu'on a travaillé. Et ce premier

 16   groupe est parti pour Mitrovica, d'après ce principe. Ici, juste avec ce

 17   deuxième groupe, il y a eu la décision du gouvernement puisqu'ils

 18   sanctionnaient déjà comme des autorités. Ils ont décidé qu'ils allaient les

 19   juger.

 20   Q.  Donc, il y avait déjà un ordre qui avait été enfreint. Cet ordre donné

 21   par la 1ère Région militaire, et vous avez toléré cela, n'est-ce pas ? Ces

 22   prisonniers étaient censés être échangés un pour un, et non pas jugés.

 23   R.  C'est d'après cette méthode que cela aurait dû se passer, et c'est

 24   comme ça que ça s'est passé jusqu'à ce moment-là, mais le 20 il y a eu une

 25   réunion du gouvernement. Les décisions du gouvernement ont été acceptées

 26   par le commandant Mrksic, mais c'est toujours d'après la même méthode

 27   qu'ils sont placés dans ce hangar d'Ovcara et la sécurité est assurée par

 28   la même unité que pour le premier groupe qui avait été transféré à Sremska

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  1   Mitrovica.

  2   Q.  Donc, vous conviendrez de la façon dont ces prisonniers ont été traités

  3   enfreignait l'ordre donné par la 1ère Région militaire et vous étiez au

  4   courant de cela à l'époque ?

  5   R.  En partant à la réunion du gouvernement, j'avais la position de mon

  6   commandant, et c'est avec cette position-là que je me suis présenté là-bas.

  7   Eux, ils ont pris les décisions, les conclusions je les ai portées à la

  8   connaissance de mon commandant. Il a accepté. Et moi, je n'étais que l'un

  9   des exécutants. Je ne suis pas celui qui a conçu cette décision.

 10   Q.  Ma dernière question. Donc, vous mettiez en œuvre cet ordre en

 11   violant directement l'ordre donné par la 1ère Région militaire; n'est-ce pas

 12   ce que vous dites ?

 13   R.  Non, ce n'était pas une manière d'enfreindre, s'agissant de ma mission.

 14   Mes missions ne m'étaient pas confiées par le commandant de la 1ère Région

 15   militaire, c'était mon commandant, le commandant de la brigade, le colonel

 16   Mrksic qui me donnait des ordres. Quant à savoir si lui a enfreint quelque

 17   chose ou est-ce quelqu'un lui a donné son aval pour qu'il fasse cela, je

 18   suppose que lui aussi, il aurait dû demander à quelqu'un l'autorisation de

 19   faire cela, parce que c'est une décision importante. Donc, la décision du

 20   gouvernement, le colonel l'accepte, les autorités sont en place, le pouvoir

 21   est en place. Donc, je suppose qu'ils sont en contact, Mrksic et ses

 22   supérieurs. Mais, à ce moment-là, lui est mon supérieur hiérarchique. Je me

 23   suis contenté d'exécuter la tâche qu'il m'avait confiée, à savoir de me

 24   rendre à cette réunion.

 25   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Panic. Bien,

 26   nous avons maintenant terminé le contre-interrogatoire de Panic fait par le

 27   Procureur. Nous allons avoir une pause de 20 minutes et reprendre à 12

 28   heures 35 précise. Et nous aurons les questions supplémentaires posées par

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  1   le conseil de Sljivancanin posées à Panic.

  2   --- L'audience est suspendue à 12 heures 17.

  3   --- L'audience est reprise à 12 heures 37.

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] La prochaine fois que nous nous

  5   retrouvons, j'espère que chacun attende les Juges de la Chambre et que ce

  6   ne soit pas l'inverse, s'il vous plaît.

  7   Le conseil de M. Sljivancanin va maintenant poser ses questions

  8   supplémentaires à M. Panic pendant 15 minutes. Après quoi, nous aurons les

  9   arguments sommaires à propos de la déposition de M. Panic, et ensuite

 10   l'Accusation va présenter ses arguments sommaires pendant 15 minutes.

 11   J'apprécierais que tout un chacun tienne compte des contraintes de temps

 12   qui ont été évoquées.

 13   M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Je viens de retrouver la page qui me manquait, pardonnez-moi.

 15   Nouvel interrogatoire par M. Bourgon :

 16   Q.  [interprétation] Bienvenue à nouveau, Monsieur Panic. Je n'ai que

 17   quelques questions à vous poser, Monsieur Panic, dans le cadre des

 18   questions supplémentaires que je souhaite vous poser ce matin. Ma première

 19   question porte sur une question qui vous a été posée par mon collègue, à la

 20   page 42, lignes 22 à 25. A ce moment-là, mon collègue attirait votre

 21   attention sur la déclaration que vous avez fournie à la défense de

 22   Sljivancanin le 8 octobre. Donc, vous comprenez bien de quelle déclaration

 23   il s'agit, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Bien, mon collègue vous a suggéré l'idée suivante : lorsque vous avez

 26   rédigé cette déclaration, vous étiez censé informer et donner tous les

 27   détails de cette conversation entre Mrksic et Sljivancanin. Ce que je

 28   souhaite savoir de vous, c'est comment avez-vous compris cela au moment où

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  1   vous rédigez cette déclaration, étiez-vous censé donner un récit complet de

  2   cette conversation ou étiez-vous censé évoquer les éléments essentiels de

  3   cette conversation ?

  4   R.  Cette déclaration ne comporte de deux pages manuscrites. Il n'y a que

  5   quelques lignes qui se trouvent en page 3. Tous les détails n'auraient pas

  6   pu être contenus dans cette déclaration. Et en partie j'ai répondu à cette

  7   question. Si j'avais cherché à écrire tout dans le détail, il m'aurait

  8   fallu 20 pages. Donc, de la manière dont j'ai compris et la manière dont

  9   j'ai fait, c'était de donner les informations de base, de fond qui

 10   pourraient être utiles à la Défense. Donc, qui allaient voir si cela était

 11   quelque chose de valable, quel but de s'en servir pendant le procès. C'est

 12   de cette manière-là que je l'ai compris.

 13   Q.  Merci, Monsieur Panic. Bien, pendant le contre interrogatoire, mon

 14   confrère a établi - et bien sûr c'était évident - que dans cette

 15   déclaration vous n'avez pas évoqué quelque chose à propos de l'hôpital,

 16   mais aujourd'hui vous avez parlé de l'hôpital. Donc la question que j'ai à

 17   vous poser est celle-ci. Lorsque j'ai regardé votre déclaration, j'ai vu

 18   que vous avez évoqué le fait que la Brigade de la Garde avait été

 19   redéployée à Belgrade, que la 80e Brigade motorisée était sur le point de

 20   prendre en charge la zone, et vous avez également évoqué une conférence de

 21   presse. Y a-t-il des raisons pour lesquelles vous avez évoqué ces trois

 22   éléments et que vous n'ayez pas évoqué l'hôpital et les autres éléments ?

 23   R.  Eh bien, j'ai esquissé les missions essentielles et ce qui me

 24   préoccupait le plus, ce qui relevait de mes activités, ce que j'étais tenu

 25   de faire pendant la journée. C'est la raison pour laquelle j'ai indiqué ces

 26   missions principales qui ont été celles de notre commandement et des unités

 27   subalternes.

 28   Q.  Pendant l'interrogatoire principal, vous avez dit avoir peut-être omis

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  1   certains termes dans cette conversation entre Mrksic et Sljivancanin, et

  2   mon confrère a établi ceci pendant son contre-interrogatoire avec vous.

  3   Voici ma question : pour autant que vous vous en souveniez, Général Panic,

  4   avez-vous omis d'évoquer des sujets qui ont été abordés au cours de cette

  5   conversation ?

  6   R.  Au mieux de mes souvenirs et après avoir examiné des documents, en

  7   essayant de rafraîchir ma mémoire, je n'ai pas omis les sujets principaux

  8   de la conversation. Il est possible que quelque chose secondaire m'ait

  9   échappé après tant de temps.

 10   Q.  Général, maintenant, je souhaite reprendre une question qui vous a été

 11   posée par M. le Juge Guney, et je crois qu'il s'agit d'une question fort

 12   importante. La question était celle-ci : Pourquoi Mrksic n'a-t-il pas

 13   évoqué l'ordre de retrait ou n'en a-t-il pas parlé à vous ou à son officier

 14   chargé de la sécurité. Et vous avez répondu à cela. Pour que nous puissions

 15   pleinement comprendre la réponse que vous avez fournie, pourriez-vous

 16   développer un petit peu et nous parler des rapports qui existaient entre

 17   Mrksic et Sljivancanin à l'époque ?

 18   R.  Oui. Pour faire bref, les relations entre Mrskic et Sljivancanin se

 19   fondaient sur le principe de la subordination et du respect mutuel que les

 20   deux hommes se vouaient, de l'estime. Mrksic avait la réputation d'un

 21   commandant rigoureux, mesuré, qui n'aimait pas s'entourer de manière très

 22   proche. En conclusion, leurs relations étaient correctes et militaires.

 23   Puisque Sljivancanin était un officier chargé de la sécurité, je peux vous

 24   donner mon opinion subjective puisque j'étais commandant moi aussi.

 25   Souvent, les commandants n'aiment pas avoir près d'eux un officier chargé

 26   de la sécurité pour des raisons qu'ils connaissent. Ils estiment peut-être

 27   que parfois ils s'occupent de questions qui sortent du ressort du service.

 28   Q.  Merci, Général. Il a été établi pendant votre déposition aujourd'hui

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  1   que - et c'est quelque chose dont vous avez parlé pendant le contre-

  2   interrogatoire - des conséquences du retrait de la police militaire

  3   d'Ovcara. Donc si nous examinons ce rapport entre Mrksic et Sljivancanin,

  4   qui, bien évidemment, est le chef de la sécurité, compte tenu de votre

  5   expérience militaire qui est fort importante, est-ce que vous vous

  6   attendriez à ce qu'un commandant, qui vient de donner un ordre qui a des

  7   conséquences désastreuses sur les prisonniers de guerre, de dire ce qu'il

  8   vient de faire à l'officier chargé de la sécurité ?

  9   M. ROGERS : [interprétation] Il s'agit d'une question directrice. On laisse

 10   entendre la réponse. Et quoi qu'il en soit, je ne sais pas si les

 11   conjectures sont utiles en présence de ce témoin, les mobiles et les

 12   raisons d'agir de tel ou tel individu.

 13   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Néanmoins, il nous serait utile

 14   d'entendre la réponse.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Si Mrksic, en tant que commandant, avait

 16   pris la décision d'agir ainsi, donc d'ordonner qu'on retire la sécurité

 17   d'Ovcara et de mettre directement en péril la sécurité et les vies des

 18   personnes, il n'est pas logique, s'il a fait, que par la suite il en parle

 19   avec son officier chargé de la sécurité, parce que dans le cadre des

 20   attributions des missions qui sont celles d'un officier chargé de la

 21   sécurité, il y a aussi le devoir de s'opposer à des actes qui entraînent

 22   une responsabilité pénale. Donc sur-le-champ, il aurait pu faire un rapport

 23   contre lui et demander qu'il y ait des poursuites au pénal, et pas

 24   seulement un officier chargé de la sécurité, mais n'importe lequel autre

 25   officier aurait pu réagir suite à cela. Et si jamais il a pris cette

 26   décision, il ne l'a communiquée à personne, et encore moins à un officier

 27   chargé de la sécurité.

 28   M. BOURGON : [interprétation]

Page 82

  1   Q.  Merci, Général. Je vais maintenant passer à la date du 21 novembre, qui

  2   a été abordée pendant le contre-interrogatoire. Vous avez évoqué le fait

  3   d'avoir participé à une conférence de presse --

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous êtes au courant des contraintes de

  5   temps, me semble-t-il.

  6   M. BOURGON : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Vous avez déjà eu 15 minutes, n'est-ce

  8   pas ?

  9   M. BOURGON : [interprétation] Je viens de commencer, Monsieur le Président.

 10   J'ai encore deux -- trois questions encore, Monsieur le Président.

 11   Q.  Général, hormis la conférence de presse, quelles sont les autres

 12   actions ou activités auxquelles vous avez participées vous-même le 21

 13   novembre ?

 14   R.  Personnellement, avec un groupe d'officiers, dont faisait partie le

 15   commandant Sljivancanin et le lieutenant-colonel Maric, nous sommes partis

 16   à la caserne eu égard à cette conférence de presse, nous avons accueilli

 17   les journalistes, et il y a eu la conférence. Ma deuxième tâche, et je

 18   n'étais pas prêt à faire cela et je ne m'attendais pas à ça, c'était que le

 19   commandant m'a envoyé pendant que j'étais en train de m'acquitter de ma

 20   mission précédente, il m'a appelé par téléphone et il m'a demandé de me

 21   rendre à la réunion du gouvernement. J'ai assisté à la réunion du

 22   gouvernement. Je suis revenu à la caserne --

 23   Q.  Pardonnez-moi, Général, nous parlons du 21 novembre.

 24   R.  Ah, du 21, excusez-moi.

 25   Q.  Le matin, vous auriez participé à une conférence de presse. Et quoi

 26   d'autre pendant la journée ?

 27   R.  Après la conférence de presse, je suis revenu à mes missions relatives

 28   à la préparation de la brigade pour qu'elle retourne à la garnison de

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  1   Belgrade. Puis, il y avait un très grand nombre de civils qui ont commencé

  2   à revenir de la frontière, des autocars, des convois que personne ne

  3   voulait accueillir. Et ces gens, ils étaient vraiment dans une situation

  4   très difficile. Puis, les unités qui, avant, étaient réparties selon les

  5   affectations dans une situation de combat, il fallait les mettre au repos.

  6   Parce qu'il faut savoir que nous avons passé à peu près deux mois à

  7   combattre. C'était déjà l'hiver qui arrivait, et nous avions nombre de

  8   problèmes à résoudre ce jour-là.

  9   Q.  Merci, Général. La dernière question que j'ai à vous poser est celle-ci

 10   : Quelle unité était responsable de la région et des prisonniers de guerre

 11   à Ovcara le 21 novembre 1991 ?

 12   R.  Le 21 novembre 1991, la zone de responsabilité dans laquelle se situent

 13   Ovcara et le hangar, où se sont trouvés les suspects, était placée sous la

 14   responsabilité de la 80e Brigade. Donc la 80e Brigade avait cette zone de

 15   responsabilité, dont font partie Ovcara, Negrovac, Grabovo, et elle s'était

 16   déjà chargée de la zone de responsabilité qui avait précédemment été celle

 17   de la Brigade de la Garde. Cette zone, pour préciser, ils l'avaient eue

 18   précédemment également.

 19   Q.  Merci, Général. Je n'ai plus d'autres questions.

 20   M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Bourgon. Vous

 22   avez maintenant 15 minutes pour vos arguments sommaires.

 23   M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Est-ce que le

 24   témoin reste dans le prétoire pendant que je soumets ces arguments ?

 25   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Je ne pense pas. Je crois que nous

 26   pouvons remercier le témoin, mais il doit rester à notre disposition dans

 27   le cas où nous aurions besoin de lui dans le courant de l'après-midi.

 28   M. BOURGON : [interprétation] Je suis disposé à commencer maintenant.

Page 84

  1   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Monsieur Panic, pour votre

  2   témoignage. Vous pouvez disposer.

  3   [Le témoin se retire]

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Jusqu'à 13 heures 10.

  5   M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   J'ai l'honneur de m'adresser aux Juges de la Chambre en appel concernant le

  7   témoignage du témoin Panic, que nous venons d'entendre. Conformément à

  8   l'ordonnance portant calendrier, je n'ai que 15 minutes, donc je vais en

  9   venir droit aux faits. L'objet de l'audition du témoin Panic ce matin était

 10   d'évaluer la valeur en tant que preuve et la pertinence du témoignage de ce

 11   dernier.

 12   Il faut dire que nous comprenons les préoccupations de M. le Juge

 13   Pocar lors de son opinion dissidente concernant cette audience

 14   d'aujourd'hui. En tant que conseils de la Défense, nous sommes toujours les

 15   premiers à dire que nous souhaitons que le Statut et le Règlement soient

 16   appliqués au pied de la lettre. Néanmoins, nous vous remercions, Monsieur

 17   le Président, d'avoir l'occasion d'évaluer la valeur probante des éléments

 18   fournis par le témoin Panic. En réalité, nous estimons, comme cela est

 19   indiqué dans notre demande en révision, que le fait de citer à la barre

 20   Miodrag Panic devant la Chambre d'appel ce matin à propos de ce nouveau

 21   fait qui est proposé est non seulement justifié, mais tout à fait

 22   nécessaire compte tenu des circonstances exceptionnelles dans cette

 23   affaire.

 24   Nous sommes maintenant en mesure de dire que nous l'avons entendu,

 25   mission accomplie, Monsieur le Président. L'objet de cette audition a été

 26   réalisé. Nous savons maintenant au-delà de tout doute que Miodrag Panic

 27   était présent lorsque Sljivancanin a eu cette courte conversation avec le

 28   commandant Mrksic dans la soirée du 20 novembre 1991. Nous savons que Panic

Page 85

  1   a entendu la conversation. Nous savons qu'au cours de cette conversation,

  2   Mrksic n'a pas dit à Sljivancanin qu'il avait retiré les membres de la

  3   police militaire de là où ils gardaient les prisonniers à Ovcara.

  4   Panic a clairement indiqué pendant son témoignage que si quelque chose de

  5   la sorte avait été mentionné par Mile Mrksic au cours de cette

  6   conversation, ceci n'aurait pas pu lui échapper, et comme il nous l'a dit,

  7   il aurait réagi instantanément. Pourquoi ? Parce qu'il a dit que ceci

  8   correspondrait à un changement de plan, et Panic savait que ceci aurait

  9   compromis la sécurité des prisonniers qui étaient détenus à Ovcara.

 10   Il aurait réagi à l'ordre en tant que tel, à savoir le changement de

 11   plan, mais il a dit : "J'aurais également réagi parce que j'aurais dû être

 12   informé, ainsi que d'autres membres qui faisaient partie du commandement."

 13   C'est ce qu'il a dit. Il a parlé du commandant, et je n'ai pas besoin de

 14   répéter ses propos ici. Ceci était nécessaire également pour pouvoir

 15   planifier tout ceci.

 16   Compte tenu de la déposition de Panic, rien ne nous permet de douter que la

 17   conversation entre Sljivancanin et Mrksic au commandement OG sud faisait

 18   état de retrait des policiers militaires qui montaient la garde pour les

 19   prisonniers à Ovcara, alors qu'avant il n'y avait pas d'éléments de preuve

 20   directs sur ce qui a été dit au cours de cette conversation, hormis la

 21   déposition de Sljivancanin - bien sûr, il est important de noter, lorsque

 22   nous parlons de Sljivancanin, que la question ne lui a même jamais été

 23   posée : Hé, Sljivancanin, est-ce que le commandant ne vous a pas informé de

 24   cet ordre ? Jamais. Ni pas Mrksic, ni par l'Accusation, ni par M. Lukic, ni

 25   par les Juges. Donc nous avons maintenant une source qui est une source de

 26   preuve directe, c'est ce que nous avons entendu ce matin. Et nous avançons,

 27   Monsieur le Président, qu'il faut accorder une pleine et entière valeur

 28   probante à cela.

Page 86

  1   Bien sûr, j'ai vu que M. Panic hésitait par moments. Je ne savais pas si

  2   c'était lié à la traduction ou s'il réfléchissait à sa réponse. Mais la

  3   question-clé qui est celle à laquelle doivent répondre les Juges de la

  4   Chambre ce matin est de savoir si M. Panic est un menteur. Le général Panic

  5   a-t-il inventé de toutes pièces la déposition qu'il a faite devant les

  6   Juges de la Chambre ce matin ? Nous avançons, Monsieur le Président, que

  7   cela ne fait pas l'ombre d'un doute que la réponse à ces deux questions est

  8   un simple non.

  9   Que pouvons-nous donc en conclure d'après son témoignage ? Eh bien, je ne

 10   peux pas énumérer tout ce que nous pouvons en conclure. Je vais néanmoins

 11   essayer d'aborder les questions les plus pertinentes et les plus

 12   importantes. Panic est un officier qui était respecté, qui a fini sa

 13   carrière en étant général à deux étoiles. Et lorsqu'il a suivi le procès

 14   sur internet et qu'il a entendu l'arrêt en appel, quelque chose l'a

 15   troublé. Peut-être que je deviens un petit peu émotif. Mais il a expliqué,

 16   il a dit qu'il a vraiment voulu vérifier si c'était bien ce qu'il avait

 17   entendu. Et jusqu'à ce soir-là où sa fille est venue, et avec l'aide de sa

 18   fille, il a vérifié sur internet. Il a trouvé le résumé, et il a dit : Mon

 19   Dieu, ce que j'ai entendu est vrai. Mais je sais que ceci n'est pas vrai.

 20   Qu'est-ce que je fais ? Eh bien, il n'a pas dormi cette nuit-là, et il le

 21   dit.

 22   Ce qu'il a fait ensuite, il a pris son téléphone et il a appelé M.

 23   Lukic, parce qu'il devait le dire. Il devait dire que cette conversation

 24   était quelque chose qu'il ne pouvait pas accepter, qu'un homme soit

 25   condamné pour cela, ce pourquoi Sljivancanin a été condamné. Et c'est pour

 26   cette raison-là qu'il fait cet appel et il évoque avec M. Lukic ce que nous

 27   savons qu'il sait. Voilà l'origine de ce nouveau fait. Nous savons pourquoi

 28   il est ici ce matin.

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  1   Le deuxième point, Monsieur le Président, lorsque Panic témoigne devant une

  2   Chambre de première instance dans cette affaire, il est significatif de

  3   constater que la Chambre de première instance a constaté que c'était un

  4   témoin crédible. A certains égards, mon confrère a soulevé certaines

  5   questions lorsque les Juges de la Chambre n'ont pas pleinement accepté son

  6   témoignage, mais après l'avoir entendu ce matin, je crois que nous

  7   comprenons mieux ces questions-là, les questions pour lesquelles les Juges

  8   de la Chambre de première instance n'ont pas complètement accepté son

  9   témoignage. Ces questions pour lesquelles la Chambre de première instance

 10   n'a pas entièrement accepté son témoignage ne portaient pas sur la

 11   conversation qui faisaient l'objet de l'audience d'aujourd'hui.

 12   Troisième point, Madame, Messieurs les Juges, il est important de faire

 13   remarquer que l'Accusation, aujourd'hui, a tenté de minimiser la

 14   crédibilité du témoin - c'est leur rôle, je ne m'attendais pas à autre

 15   chose - en revanche, pendant le procès ils se sont reposés sur son

 16   témoignage lors du mémoire en clôture et des réquisitoires. Ils se sont

 17   reposés dessus, et aujourd'hui, l'Accusation nous dit que ce qu'il dit

 18   n'est pas envisageable. Lorsque Mrksic, au moment de l'appel, a indiqué que

 19   Panic n'était pas un témoin crédible, en réponse, ils ont dit que l'appel

 20   devait être rejeté. Et les Juges de la Chambre ont évalué comme il faut la

 21   crédibilité de Panic. Le quatrième point, la Chambre d'appel a déjà eu

 22   l'occasion, lorsqu'elle a rejeté les moyens d'appel soulevés par Mrksic à

 23   propos de la crédibilité de Panic, d'évaluer sa crédibilité. Et nous

 24   avançons, Monsieur le Président, ce matin, maintenant que vous l'avez

 25   entendu, vous devriez être encore davantage convaincu que c'est un témoin

 26   crédible.

 27   La Chambre d'appel doit savoir que l'objet de son témoignage n'était

 28   pas de le protéger, sinon il ne serait pas venu ce matin ici, comme il nous

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  1   l'a dit. Cinquième point, le fait que le témoin ait fourni des déclarations

  2   à toutes les parties au procès est quelque chose de très important. Il

  3   était prêt à témoigner pour l'une ou l'autre partie, que ce soit

  4   l'Accusation, que ce soit la Défense, que ce soit à Belgrade, que ce soit à

  5   La Haye. Son seul et unique objectif consistait à établir la vérité.

  6   Sixième point, même si le témoin Panic - et ceci est l'élément

  7   primordial - même s'il a été surpris par la constatation de la Chambre de

  8   première instance, à savoir que c'est Mrksic qui a donné l'ordre, et il a

  9   été surpris par cela, mais il l'explique, et il l'a expliqué pendant le

 10   procès avant les constatations, et il l'explique, aujourd'hui, après les

 11   constatations. Je connais Mrksic "dobar komandant," ce n'est pas le genre

 12   de personne qui va donner un ordre comme cela. Mais il n'a pas hésité à le

 13   dire et à dire en même temps, et il l'a redit aujourd'hui, que ceci

 14   n'aurait pu provenir que du commandant. Ceci est un point tout à fait

 15   critique, Monsieur le Président.

 16   Septième point, le fait que personne n'ait posé la question à Panic

 17   auparavant sur la teneur de la conversation, même s'il avait été établi dès

 18   le départ qu'il avait assisté à cette conversation, ceci constitue

 19   également quelque chose d'important, et d'après nous, ceci est révélateur

 20   et la raison de sa présence ici, aujourd'hui.

 21   Je vais avancer, Monsieur le Président, et aborder une autre question

 22   forte importante, et j'en ai presque terminé. Comme on le voit dans le

 23   témoignage qu'il a donné ce matin, les souvenirs qu'il a de la conversation

 24   qu'il a entendue ne sont pas exactement identiques à ce dont se souvenait

 25   M. Sljivancanin. Mais, Monsieur le Président, c'est quand même normal. Il

 26   n'y a pas deux personnes qui peuvent avoir la même version d'une

 27   conversation à laquelle ils ont participé ou qu'ils ont entendue il y a 19

 28   ans, et rapporter cette conversation en utilisant exactement les mêmes

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  1   mots. Est-ce qu'il a oublié de parler de points, de questions importantes ?

  2   Même les questions qu'a soulevées mon collègue qui étaient importantes à

  3   propos de l'échange de prisonniers, il s'en souvient quand même, il se

  4   souvient l'avoir entendu. Mais ce qui est évident, en tout cas, c'est que

  5   le témoin est absolument sûr et certain que Mrksic n'a fait aucune

  6   référence, dans cette conversation, au retrait de la police militaire, et

  7   il est sûr aussi à 100 % que si cela avait été dit, il l'aurait entendu. Il

  8   n'a pas pu rater cela. Il a expliqué ce qu'il aurait fait, s'il l'avait

  9   entendu, d'ailleurs.

 10   La dernière chose que j'aimerais soulever est la chose suivante :

 11   Bien sûr, l'Accusation a essayé de dire, c'est impossible, Mrksic n'a pas

 12   pu donner cet ordre sans le communiquer aux autres. Or le témoin dit : Si,

 13   c'est possible, ça peut arriver. Ça peut arriver, pas souvent, mais ça peut

 14   arriver. Le commandant n'est pas tenu de dire absolument tout ce qu'il fait

 15   et de communiquer tous les ordres qu'il donne. Mais le témoin a dit de

 16   façon très franche : J'aurais dû être au courant. J'aurais dû être au

 17   courant. Ça, c'est la pratique normale. Normalement, le chef d'état-major

 18   est mis au courant. C'est la pratique courante. Mais il n'y a aucune

 19   obligation de la part de Mrksic d'informer absolument tout le monde. Mais

 20   ce n'est pas ce qui est important ici. Ce qui est important c'est de savoir

 21   s'il y a une raison pour laquelle Mrksic n'aurait pas évoqué cela au cours

 22   d'une conversation. Il y a beaucoup de raisons d'ailleurs. Et d'ailleurs,

 23   on en a parlé au cours de sa déposition. Et l'autre raison que nous

 24   connaissons maintenant, c'est qu'il y avait une ligne directe entre Mrksic

 25   et Vojnovic, on l'a appris aujourd'hui.

 26   Donc, il y a toutes sortes de questions, de points d'interrogation

 27   quant à se demander ce qui s'est vraiment passé. Ce qui ne modifie

 28   absolument pas les conclusions de la Chambre de première instance selon

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  1   lesquelles Mrksic a donné l'ordre. Il est surpris que Mrksic ait donné cet

  2   ordre. Il l'accepte, cela dit. Mais il a encore du mal à accepter cela,

  3   aujourd'hui, mais il l'accepte.

  4   L'Accusation ne lui a pas demandé, ni à Sljivancanin ni à qui que ce

  5   soit. Donc, c'est un peu tard maintenant de dire : Monsieur le Chef d'état-

  6   major, allez, vous deviez être au courant de cet ordre quand même ? Comment

  7   se fait-il que lors du procès, l'Accusation n'a pas posé cette question au

  8   témoin ? Ils ont utilisé, instrumentalisé ce témoignage.

  9   Enfin, en ce qui concerne la charge de la preuve applicable dans ce

 10   type de question, nous affirmons que ce n'est pas à nous de prouver ce

 11   nouveau fait au-delà de tout doute raisonnable pour que notre demande de

 12   révision soit admise. Très honnêtement, je n'ai rien vu au compte rendu qui

 13   explique exactement, à un moment ou à un autre, ce qu'est la charge de la

 14   preuve applicable. Mais selon nous, nous considérons que la seule chose qui

 15   nous est demandée, c'est que nous prouvions le fait avec suffisamment de

 16   force pour que cela suscite un doute en ce qui concerne la conclusion

 17   adoptée par la Chambre d'appel, au paragraphe 62, auquel cas, bien sûr,

 18   selon nous, l'arrêt ne peut pas rester en l'état. Cela dit, même si on met

 19   de côté tous nos arguments, si on les écarte, si on ne les accepte pas,

 20   finalement, ça n'a aucune importance. Si la Chambre de première instance

 21   [comme interprété] considère que ce nouveau fait doit être prouvé au-delà

 22   de tout doute raisonnable, nous considérons, de toute façon, que nous avons

 23   réussi à prouver cela par le biais du témoignage du général Panic ce matin.

 24   C'est pour cela, à notre avis, nous affirmons que Mrksic n'a pas

 25   informé Sljivancanin dans la soirée du 20 novembre 1991 lorsqu'ils se sont

 26   rencontrés au poste de commandement de l'OG sud au cours d'une conversation

 27   bien précise qui sert de base au jugement,  sachez que nous avons prouvé

 28   que Mrksic n'avait jamais dit à Sljivancanin qu'il avait retiré les membres

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  1   de la police militaire qui montaient la garde auprès des prisonniers

  2   d'Ovcara.

  3   Merci.

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Rogers, c'est à vous

  5   maintenant. Vous avez 15 minutes.

  6   M. ROGERS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, nous considérons

  7   que la valeur, en tant qu'élément de preuve du témoignage de cette personne

  8   en l'espèce et dans les circonstances qui l'entourent, en fait, est nulle.

  9   Il n'y a aucune valeur, à notre avis, à ce témoignage, parce qu'il ne peut

 10   pas être digne de foi en ce qui concerne ces points, ces questions. De lui-

 11   même, d'ailleurs, il a dit que s'il savait que cet ordre avait -- le

 12   retrait lui avait été communiqué, aurait tendance à l'incriminer lui-même.

 13   Donc, il ne peut pas admettre -- il l'a bien dit, d'ailleurs, qu'il ne peut

 14   pas admettre que ceci ait été dit, parce que selon nous, il aurait été au

 15   courant, et il aurait, donc, omis d'accepter d'agir. Et il l'a dit quand

 16   même, il a dit exactement ce qu'il aurait dû faire s'il avait été mis au

 17   courant de ces faits portant sur le retrait des gardes.

 18   Lorsqu'il est impliqué dans les circonstances ou lorsqu'il a tendance à

 19   risquer d'être incriminé, il a toujours minimisé son rôle. La Chambre de

 20   première instance s'en est bien rendu compte d'ailleurs. Il a menti, il a

 21   induit en erreur la Chambre. Et nous sommes parfaitement d'accord avec les

 22   constatations de la Chambre de première instance en matière de crédibilité,

 23   parce qu'elles étaient nuancées, extrêmement intelligemment formulées et

 24   très sensibles aux circonstances, et au cours des quatre jours, ils ont

 25   quand même pu entendre le général Panic déposer pendant quatre jours, et

 26   ils ont identifié extrêmement précisément quels étaient les endroits et les

 27   passages de son témoignage qui n'étaient pas fiables. Ces passages qui ne

 28   sont pas fiables sont les passages où il était impliqué lui-même.

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  1   La Chambre a fait un grand nombre de constations extrêmement nuancées en ce

  2   qui concerne cette personne. Ils ont dit que c'était un menteur. Bon, ils

  3   n'ont pas employé ce terme dans le jugement, mais c'est exactement ce que

  4   cela voulait dire, en fait. Au paragraphe 307 du jugement, ils ont

  5   considéré que la Chambre n'était pas convaincue de son explication sur sa

  6   présence à Ovcara, et je cite :

  7   "Il n'y a aucune crédibilité, il est tout à fait invraisemblable

  8   qu'il ait cru que des procès des prisonniers de guerre pouvaient avoir lieu

  9   à Ovcara. Même avec les moyens nécessaires à disposition, locaux,

 10   enquêteurs, procureurs, avocats et juges qualifiés, moyens en l'occurrence

 11   qui n'étaient pas réunis…" Ensuite, ils ont expliqué pourquoi il s'y

 12   trouvait, et selon eux :

 13   "Il était là, il se trouvait à Ovcara pour juger de la situation et

 14   rendre compte à Mile Mrksic."

 15   Donc, c'est une personne qui n'a aucune crédibilité. En fait, quand

 16   on trouve qu'une personne n'a aucune crédibilité à propos d'un point, cela

 17   veut dire, en fait, qu'il a menti.

 18   Ensuite, au paragraphe 585 du jugement :

 19   "Lorsqu'il parlait de la réunion, le lieutenant-colonel Panic a dit

 20   qu'il semblerait que le 'gouvernement' du SAO avait l'intention de juger

 21   ces criminels de guerre. Il a indiqué qu'il considérait qu'il s'agissait de

 22   leur intention, mais lorsqu'il a relayé la position de Mile Mrksic, il a

 23   dit : La Chambre de première instance ne peut considérer que sa déposition,

 24   ici, était honnête. Il est, ici, en train de servir ses propres intérêts et

 25   il essaie aussi de montrer la JNA et Mile Mrksic sous un jour plus

 26   favorable."

 27   Et de façon identique, nous considérons qu'il s'est distancé de cette

 28   conversation. En fait, il dit, rien n'a été mentionné à propos de l'ordre

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  1   de retrait. Là aussi, il sert ses propres intérêts, et il essaie, là, à

  2   nouveau, de mettre M. Sljivancanin, de le montrer sous un jour plus

  3   favorable. Il l'a déjà fait par le passé, et visiblement, il est prêt à

  4   recommencer.

  5   La Chambre a continué, ensuite, paragraphe 297 :

  6   "De façon très regrettable, la Chambre considère que le lieutenant-

  7   colonel Panic, au cours de sa déposition, a essayé de présenter son propre

  8   rôle sous un jour plus favorable et évité de présenter des points qui

  9   pourraient l'auto-incriminer."

 10   C'est exactement la question qui est à débattre ici.

 11   Ensuite, la Chambre de première instance a déjà considéré qu'il

 12   n'était pas extrêmement honnête à propos de son propre rôle. Vous vous

 13   souviendrez qu'en 1996, on a dit qu'"il avait eu une certaine économie en

 14   ce qui concerne sa propre vérité." Ça c'était dans le procès Spycatcher, au

 15   Royaume-Uni, en 1986. Et bien, au paragraphe 297 :

 16   "La Chambre est convaincue que les éléments de preuve présentés par

 17   le lieutenant-colonel Panic ne montrent pas la totalité de ce qu'il savait

 18   à propos de la situation de la caserne ce matin."

 19   Ensuite, lorsqu'on lui a posé la question à propos de cet aspect des

 20   éléments de preuve, il a dit que les prisonniers n'étaient pas menacés, que

 21   toutes les mesures de sécurité avaient été prises, et il semble, donc, nier

 22   avoir vu le moindre sévice infligé aux prisonniers dans les casernes de ce

 23   jour-là. En ce qui concerne les constatations de la Chambre sur le rôle

 24   joué par le lieutenant-colonel Panic lorsqu'il a relayé les instructions à

 25   Mile Mrksic et son rôle, il est écrit, et je cite : "Son rôle en fait,"

 26   selon lui, "il n'était pas extrêmement honnête à propos des événements

 27   auxquels il a assisté concernant le convoi des prisonniers de guerre."

 28   Paragraphe 308, ensuite, maintenant :

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  1   "…le témoin n'était pas très honnête lorsqu'il disait ce qu'il savait

  2   à propos des sévices infligés aux prisonniers de guerre ce jour-là. Donc,

  3   il a voulu, en fait, minimiser la vérité…," ici, c'était au paragraphe 308.

  4   C'était le paragraphe 308.

  5   Ensuite, au paragraphe 262 :

  6   "La Chambre reconnaît aussi que le lieutenant-colonel Panic a peut-

  7   être vu plus de sévices de prisonniers de guerre en dehors du hangar que

  8   ceux qu'il a bien voulu reconnaître dans le cadre de sa déposition. Ce qui

  9   fait que sa déposition, en fait, sur ce point-là, n'était pas totalement

 10   honnête. C'était sans doute uniquement pour servir ses propres intérêts."

 11   Et si ça ne suffisait pas, d'ailleurs en ce qui concerne sa

 12   crédibilité, ils ont quand même poursuivi pour essayer d'expliquer comment

 13   le témoin était prêt à altérer ou influencer la vérité. Ils ont dit, et je

 14   cite, paragraphe 396, à propos d'un conflit qui aurait eu lieu à propos des

 15   propos tenus par le colonel Panic dans sa déclaration, devant le bureau du

 16   Procureur, à propos du rôle de Sljivancanin et de sa déposition, donc :

 17   "La Chambre de première instance admet aussi l'honnêteté de la

 18   version de la déclaration de Mile Mrksic lors de la réunion donnée par le

 19   lieutenant-colonel Panic dans sa déclaration écrite devant le bureau du

 20   procureur. La Chambre l'a fait en prenant compte, de façon très prudente,

 21   les éléments de preuve fournis par le général Panic, mais ils se sont rendu

 22   compte, par la suite, qu'il essayait, en fait, de gérer sa propre version

 23   avec les documents qui lui avaient été présentés, et qui lui ont permis de

 24   réaliser que dans sa déclaration, il avait donné à Veselin Sljivancanin

 25   certains pouvoirs qu'il n'avait pas à l'époque."

 26   Donc, ici, je vous rappelle que le général Panic qui est à la

 27   retraite maintenant a quand même pu se rafraîchir la mémoire en regardant

 28   les documents qui lui ont été montrés. Je tiens à vous dire qu'on lui a

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  1   donné aussi la déclaration de M. Sljivancanin avant qu'il ne dépose ici. On

  2   lui a lu des parties pertinentes de ce témoignage afin de l'aider.

  3   Et ils poursuivent en disant : "Il semble, donc, qu'on a essayé de

  4   persuader le général Panic que le rôle joué par" --

  5   Encore, ils ont montré qu'il avait été influencé. On pourrait le

  6   trouver au paragraphe 396. Ensuite, jugement, au paragraphe 261 :

  7   "Les éléments de preuve présentés par Panic et d'autres témoins en ce

  8   qui concerne le déroulement des événements sont basés sur -- plutôt essayer

  9   de rationaliser le déroulement de l'après-midi, plutôt que des souvenirs

 10   bien précis."

 11   Donc, de notre avis, tous ces facteurs doivent être pris en compte

 12   dans le cadre de la déposition, ce jour, du général Panic. Il semble être

 13   l'une des seules personnes qui peut, tout d'un coup, avoir la mémoire qui

 14   s'améliore au bout de 19 ans, plutôt qu'une mémoire qui a tendance à

 15   oublier les faits après 19 ans. Donc, chaque fois qu'il vient pour se

 16   rappeler d'événements, sa mémoire est de plus en plus bonne, plutôt que de

 17   pire en pire. Il a de plus en plus de souvenirs, tout d'un coup, bien plus

 18   que ceux auxquels on pourrait s'attendre. Est-ce parce qu'il essaie

 19   vraiment de rationaliser les faits ? Est-ce parce qu'il est impliqué dans

 20   ces faits et qu'il doit maintenir une certaine distance face à ce qui s'est

 21   passé, ou est-ce vraiment parce qu'avec le temps qui passe, il ne se

 22   souvient plus correctement, en fait, de ce qui s'est passé ? Vous vous

 23   rappellerez, j'imagine, du grand nombre de questions qui ont été posées,

 24   des questions à propos de la teneur de ce qu'il a dit, lorsqu'il faisait sa

 25   déclaration, lorsqu'il déposait, lorsqu'on lui présentait de nouveaux

 26   éléments de preuve au cours du procès, où il a plus ou moins réussi à faire

 27   jouer ses souvenirs pour que cela serve, en fait, ses éléments de preuve.

 28   Donc, en fin de compte, c'est à vous de voir s'il est digne de foi.

Page 97

  1   Mais avant même de voir quelle est l'absurdité de la situation quand même,

  2   d'après nous, le chef d'état-major d'un groupe opérationnel est dans le

  3   noir complet à propos du sort de 260 [comme interprété] prisonniers, alors

  4   que la veille, à deux reprises, il avait fait rapport à Mrskic de la

  5   sécurité de ces prisonniers. Vraiment, il était tellement occupé par la

  6   conférence de presse qui allait avoir lieu le lendemain qu'il n'a plus

  7   pensé à ces 200 prisonniers alors qu'il a quand même dit qu'il était

  8   inquiet sur leur sécurité. Souvenez-vous quand même qu'il a tendance à dire

  9   qu'il a joué un rôle mineur alors qu'il était plus important ? Donc est-il

 10   vraiment réaliste qu'il ne suive absolument rien pendant des jours ? Il est

 11   inconcevable de penser qu'au cours de cette conversation, il n'a pas

 12   entendu ce qui s'était passé, il n'a pas entendu cet ordre de retirer les

 13   gardes, surtout quand on sait pourquoi Sljivancanin était à la caserne ce

 14   jour-là et au poste de commandement. Il était là pour rendre compte. Et

 15   nous considérons qu'il était aussi là pour informer son commandement de ce

 16   qu'il avait fait pour obtenir de nouvelles missions aussi. Mais est-il

 17   vraiment réaliste de penser que, étant donné qu'il était chargé de

 18   l'évacuation, qu'il n'en ai pas parlé du tout, et que cette information

 19   n'ait pas été communiquée à M. Sljivancanin en présence de M. Panic ? C'est

 20   inconcevable dans une chaîne hiérarchique qui fonctionne, dans une unité

 21   aussi disciplinée que la Brigade des Gardes. Vous vous souviendrez de ce

 22   qu'a dit Panic à ce propos. Il a dit qu'il s'agissait quand même d'un corps

 23   d'élite. Donc, cette chaîne hiérarchique ne peut pas tout d'un coup se

 24   briser comme elle l'a fait; c'est impossible.

 25   Et c'est pour ces raisons que les éléments de preuve apportés par le

 26   général Panic en l'espèce ne sont pas crédibles, ne sont pas dignes de foi.

 27   Et c'est pour cela que nous considérons que vous devez l'écarter et donc

 28   rejeter la demande de révision.

Page 98

  1   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Monsieur Rogers.

  2   Nous allons maintenant faire une pause d'une heure et nous reprendrons à 14

  3   heures 25. Et nous entendrons des arguments visant à démontrer si le

  4   témoignage de Panic constitue un nouveau fait ou non. Donc nous levons la

  5   séance pour une heure.

  6   --- L'audience est suspendue à 13 heures 25.

  7   --- L'audience est reprise à 14 heures 27.

  8   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Avant de commencer l'audience de cet

  9   après-midi, je souhaite noter que tous les documents qui ont été évoqués au

 10   cours de l'audience d'aujourd'hui qui ne font pas partie du dossier seront

 11   considérés comme des annexes aux requêtes déposées par les parties, pour

 12   simplifier les choses. Je suppose qu'il n'y a pas d'objection à cela.

 13   Nous allons maintenant passer à la dernière phase de notre appel

 14   aujourd'hui, l'argument consistant à demander si la déposition de M. Panic

 15   peut constituer un nouveau fait. Maître Bourgon, je ne sais pas si c'est

 16   vous ou Me Lukic, et ensuite M. Rogers. Je vois que Mme Brady est là. Mme

 17   Brady aura 45 minutes, et ensuite Monsieur Bourgon, vous aurez les 15

 18   dernières minutes supplémentaires en guise de réplique.

 19   Bien. Allez-y.

 20   M. BOURGON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Merci

 21   beaucoup. Je souhaite dire bonjour à tous les Juges de la Chambre d'appel

 22   ainsi qu'à mes confrères et consoeurs de l'Accusation.

 23   Conformément à l'ordonnance portant au calendrier, Monsieur le

 24   Président, et au nom de M. Sljivancanin, j'ai l'honneur de m'adresser aux

 25   Juges de la Chambre d'appel pour les 45 minutes suivantes sur une seule

 26   question, à savoir si oui ou non le témoignage de Panic qui a été entendu

 27   ce matin constitue un fait nouveau. Nos arguments juridiques, au sens

 28   strict du terme, sur cette question figurent, comme vous le savez, Monsieur

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  1   le Président, dans notre demande en révision, et figurent encore davantage

  2   dans notre réplique à la réponse de l'Accusation. Je n'ai pas l'intention

  3   de répéter ces arguments un à un. Je suis sûr que vous avez eu l'occasion

  4   des les lire. Et je vais me concentrer sur quelques questions bien

  5   précises.

  6   Ce que je souhaite véritablement faire cet après-midi, c'est vous

  7   convaincre que les nouvelles informations fournies par le témoin Panic, en

  8   premier lieu dans sa déclaration qui nous a été fournie en octobre 2009 au

  9   moment, Monsieur le Président, vous vous en souviendrez que nous avons

 10   déposé notre requête pour réexamen où nous avons évoqué Panic; c'est la

 11   raison pour laquelle nous avions choisi cette date-là pour qu'il vienne

 12   témoigner; mais également au cours de sa déposition de ce matin. Cette

 13   information constitue un fait nouveau, conformément au droit applicable et

 14   la jurisprudence de la Chambre d'appel sur cette question. J'ai l'intention

 15   de le faire en attirant votre attention sur quatre aspects différents ou

 16   quatre différents moyens d'examiner les nouveaux éléments de preuve fournis

 17   par le témoin Panic qui mènent tous à la même conclusion.

 18   Le fait que Miodrag Panic a entendu la conversation entre

 19   Sljivancanin et son commandant, à savoir dans la soirée du 20 novembre

 20   1991, à savoir la conversation qui s'est déroulée au moment où Sljivancanin

 21   est retourné au Groupe opérationnel sud vers 20 heures ou 8 P.M, pour ceux

 22   qui n'ont pas de connaissances militaires, est un fait nouveau, ce qui

 23   nécessite que la Chambre d'appel revoie son jugement et acte l'acquittement

 24   de M. Sljivancanin qui a été prononcé au procès devant la Chambre de

 25   première instance, après avoir entendu tous les éléments de preuve et

 26   évalué la crédibilité des 88 témoins pendant le procès qui a duré quelque

 27   18 mois. En d'autres termes, la question qui se pose cet après-midi est

 28   circonscrite à quatre critères qui doivent être remplis pour que la Chambre

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  1   d'appel puisse revoir son propre arrêt. Bien évidemment, notre position est

  2   tout à fait claire. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute que la déposition

  3   du témoin Panic répond tout à fait aux exigences de ce critère.

  4   Mes arguments, cet après-midi, par conséquent, seront divisés en quatre

  5   parties. Je vais tout d'abord aborder le fait nouveau, conformément au sens

  6   des termes que nous retrouvons à l'article 26 du statut des Règlements de

  7   procédure et de preuve 119, 120; deuxièmement, je vais démontrer comment et

  8   pour quelles raisons le témoignage de Panic répond aux critères de fait

  9   nouveaux développés dans la jurisprudence de la Chambre d'appel;

 10   troisièmement, je vais expliquer pourquoi la nouvelle information fournie

 11   par le témoin Panic, qui bien évidemment est quelque chose que nous pouvons

 12   distinguer de nouveaux faits allégués qui ont été à la base de demandes

 13   précédentes de révision. C'est la raison pour laquelle il s'agit

 14   effectivement d'un fait nouveau. Quatrièmement et dernièrement, j'aborderai

 15   le témoignage du témoin Panic conformément à ce que j'appelle le test

 16   "forest". En d'autres termes, je vais faire en sorte que cela soit clair.

 17   Même l'Accusation vous demande de regarder tous les arbres du monde, ceci

 18   ne vous empêche pas néanmoins de voir la forêt.

 19   Avant de passer à mon premier argument, il y a bien évidemment une

 20   question supplémentaire qui a été soulevée dans l'ordonnance portant au

 21   calendrier que je dois adresser en guise de question préliminaire, à savoir

 22   les circonstances exceptionnelles.

 23   Je m'excuse auprès des interprètes. Ça faisait un certain temps que

 24   je suis dans le prétoire, et j'essaie de m'en tenir à mon délai de

 25   45 minutes.

 26   Avant de poursuivre, voilà une des questions que je souhaite

 27   soulever, qui figurait dans l'ordonnance portant au calendrier, à savoir

 28   les circonstances exceptionnelles de cette affaire. Parce que nous estimons

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  1   que ceci a un lien direct avec la question de savoir si oui ou non cela

  2   constitue un fait nouveau ou pas. Les circonstances exceptionnelles de

  3   cette affaire ont été décrites dans notre demande en révision au paragraphe

  4   30 à 38. Mais je vais brièvement résumer.

  5   L'annulation de l'acquittement de Sljivancanin pour meurtre et sa

  6   condamnation en appel repose sur une seule déduction, parce que la Chambre

  7   d'appel a confirmé qu'il n'y a pas d'éléments de preuve directs que

  8   Sljivancanin ait été informé du retrait pendant sa réunion avec Mrksic, et

  9   la Chambre d'appel a ajouté Mrksic et Panic, au paragraphe 62.

 10   Bien évidemment, nous savons, Monsieur le Président, que Sljivancanin

 11   a eu une réunion avec Mrksic en présence de Panic et non pas avec Mrksic et

 12   Panic. Mais je vais revenir là-dessus un peu plus tard, parce qu'il s'agit

 13   de quelque chose de différent.

 14   Comme nous l'avons entendu ce matin, le témoin Panic a entendu la

 15   conversation entre Sljivancanin et son commandant, conversation au cours de

 16   laquelle Mrksic n'a pas informé Sljivancanin du retrait. Bien, Monsieur le

 17   Président, si vous accordez probante au témoignage du témoin Panic, tout

 18   simplement ce qui peut être déduit par la Chambre -- la déduction de la

 19   Chambre d'appel est rendue nulle compte tenu du fait qu'on ne peut plus

 20   dire que Mrksic a dû dire ou a dû parler à Sljivancanin du retrait. En

 21   conséquence, sans cette déduction qui marque la différence, la condamnation

 22   de Sljivancanin pour meurtre, en appel, ne peut pas être retenue. Aucun

 23   fait nouveau ne peut être plus décisif que celui-ci, Monsieur le Président.

 24   Je vais être bien clair, et je vais vous prendre en exemple. A

 25   supposer que Sljivancanin avait été déclaré coupable d'aider ou encourager

 26   le meurtre de M. Smith, et que la semaine suivante, il a été établi que M.

 27   Smith n'a jamais été assassiné et qu'en réalité il est en vie. Est-ce que

 28   la condamnation de Sljivancanin, pourrait-elle être retenue dans ce cas ?

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  1   Je ne veux pas parler, Monsieur le Président, de la même situation que

  2   celle que vous avez évoquée dans votre opinion dissidente dans la décision

  3   Niyitegeka demandant en révision en mars 2007, mais je vais revenir sur ce

  4   thème un peu plus tard. Ce que nous disons, Monsieur le Président, c'est

  5   que l'affaire qui nous intéresse tombe exactement dans la même catégorie.

  6   C'est la raison pour laquelle ceci a un caractère exceptionnel. Comme ceci

  7   a été établi par Panic, Mrksic n'a pas informé Sljivancanin du retrait. Par

  8   conséquent, la Chambre d'appel et sa déduction est rendue nulle par son

  9   témoignage, qui est quelque chose qui n'était pas su auparavant. En

 10   conséquence, une condamnation pour meurtre ne peut pas être retenue.

 11   Et d'après nous, Monsieur le Président, il y a un lien direct entre le

 12   caractère décisif des éléments de preuve fournis par le général Panic et de

 13   savoir si oui ou non ceci constitue un fait nouveau. De même, Sljivancanin

 14   n'aurait pas pu être condamné pour le meurtre de M. Smith si les éléments

 15   indiquaient qu'il était en vie. Et sa condamnation dans l'affaire qui nous

 16   intéresse n'aurait pas pu être possible si les éléments et le fait nouveau

 17   fourni par Panic, à savoir bien évidemment que Mrksic n'a pas informé

 18   Sljivancanin du retrait, si cet élément avait été disponible. Mais cette

 19   information n'était pas disponible aux Juges de la Chambre d'appel. Dans

 20   les deux cas, l'exemple que j'ai donné de M. Smith ou l'exemple qui nous

 21   intéresse, l'information qui est venue à la surface doit constituer un fait

 22   nouveau conformément à l'article 26 du Statut qui a été conçu précisément

 23   dans le but d'aborder de tels cas.

 24   Ce qui m'amène à mon premier argument sur les quatre, à savoir le sens du

 25   terme "nouveau" à l'article 26 du Statut et du Règlement de procédure et de

 26   preuve numéro 119. Par rapport au New Oxford, le dictionnaire américain :

 27   "Quelque chose de nouveau est quelque chose qui n'était pas là auparavant,

 28   quelque chose qui a été découvert pour la première fois."

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  1   Si j'applique cette définition à l'article 26 du Statut et des articles 119

  2   et 120 du Règlement, il s'ensuit qu'un fait nouveau n'est pas plus qu'un

  3   fait qui n'existait ou un fait qui n'a pas été établi au moment de la

  4   procédure devant une Chambre de première instance ou une Chambre d'appel et

  5   qui a été découvert pour la première fois après cela. Manifestement,

  6   Monsieur le Président, ceci est un terme difficile, si on veut interpréter

  7   ce terme théologique.

  8   Encore une fois, la condamnation de Sljivancanin pour meurtre a été

  9   infirmée en appel sans qu'il y ait une quelconque autre possibilité en

 10   appel. Mais la Chambre d'appel a confirmé qu'il n'y avait pas de preuve

 11   directe qui indiquait que Sljivancanin était informé du retrait lors de la

 12   réunion qu'il a eue avec Mrksic.

 13   Si nous tenons compte du fait que les éléments fournis par M. Panic

 14   entendus ce matin constituent un élément de preuve direct sur ce qui a été

 15   dit au cours de cette conversation, il est manifeste que cette information

 16   n'existait pas, ou en d'autres termes, n'était pas connue ou n'a pas été

 17   établie au moment des débats devant la Chambre d'appel. Par conséquent,

 18   ceci constitue un fait nouveau.

 19   Une autre façon d'aborder le problème est de tenir compte de

 20   l'opinion dissidente de Mme la Juge Vaz en annexe à l'arrêt de la Chambre

 21   d'appel. Mme la Juge Vaz a dit, au paragraphe 2 de page 170 [comme

 22   interprété], et je cite :

 23   "Il n'y a pas d'éléments de preuve clairs cités à l'appui de la

 24   conclusion de la Chambre d'appel que Mrksic a dû dire à Sljivancanin qu'il

 25   avait retiré la protection de la JNA. Bien au contraire, cette conclusion

 26   essentielle, qui doit être la seule conclusion raisonnable, semble se

 27   fonder uniquement sur le témoignage de Sljivancanin, à savoir qu'il s'était

 28   renseigné sur d'autres tâches ou obligations, même s'il n'existe aucun

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  1   élément de preuve sur la façon dont Mrksic a en réalité réagi à cette

  2   demande de renseignement ou d'enquête."

  3   En tenant compte des éléments de preuve proposés par Panic lors de

  4   cette conversation avec Mrksic, la seule conclusion raisonnable consiste à

  5   dire qu'il existe un élément de preuve qui n'existait pas et que cet

  6   élément d'information nouveau n'existait pas au moment des débats devant la

  7   Chambre d'appel, et que ceci constitue un fait nouveau.

  8   Je vais maintenant passer à mon deuxième argument. Nous faisons

  9   valoir, Monsieur le Président, que si nous appliquons la définition du fait

 10   nouveau telle que ceci a été développé et correspond à la jurisprudence en

 11   appel, à savoir que les éléments proposés par Miodrag Panic constituent

 12   effectivement un fait nouveau. Conformément à la jurisprudence de la

 13   Chambre d'appel, la question-clé qui se pose à toute Chambre lorsqu'il

 14   s'agit de déterminer si un fait proposé lors d'une procédure en révision,

 15   est en réalité nouveau est de savoir si le fait soulevé et proposé à la

 16   lumière des informations nouvelles était quelque chose qui a fait l'objet

 17   des débats pendant le procédure ou lors de la procédure en appel.

 18   Paragraphes 15 et 40 de la demande à révision dans l'affaire Blaskic.

 19   De surcroît, la Chambre d'appel a interprété cette question-clé en

 20   estimant que ceci signifie que ce fait n'a pas ou n'aurait pas dû faire

 21   partie des facteurs dont on a tenu compte au moment ou le verdict a été

 22   rendu.

 23   Tadic paragraphe 25; Blaskic paragraphe 14; Rutaganda paragraphe 9.

 24   Il s'agit, ici, du flot de demandes à révision.

 25    En d'autres termes, ce qui est pertinent, c'est de savoir si

 26   l'organe qui a pris la décision, l'instance, la Chambre d'appel dans ce

 27   cas, était au courant du fait ou non lorsque cette dernière est parvenue à

 28   sa décision; Tadic paragraphe 25; Rutaganda paragraphe 9.

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  1   Si nous appliquons ce critère à la nouvelle information fournie par

  2   le général Panic dans sa déposition ce matin, nous ne pouvons que conclure

  3   que sa déposition constitue un fait nouveau. Comment et de quelle manière ?

  4   Tout d'abord, le fait nouveau de Panic a été clairement identifié dans

  5   notre demande en révision, ainsi que dans notre réplique, à la réponse de

  6   l'Accusation, et nous avons expliqué pourquoi le fait nouveau Panic n'était

  7   pas quelque chose qui était débattu au cours du procès, au niveau de la

  8   Chambre de première instance et en appel. Je ne vais pas répéter ces

  9   arguments.

 10   L'élément essentiel ici conformément au critère mis en œuvre par la

 11   Chambre d'appel est de savoir, et je cite : "L'exigence de la partie

 12   demanderesse est de montrer que la Chambre n'avait pas connaissance du fait

 13   lorsqu'elle est parvenue à sa décision".

 14   Dans l'affaire qui nous intéresse, que savait la Chambre d'appel ? Eh

 15   bien, la Chambre d'appel savait, entre autres, que Sljivancanin n'assistait

 16   pas aux réunions quotidiennes, n'a pas assisté à la réunion quotidienne

 17   dans la soirée du 20 novembre. La Chambre d'appel savait que Sljivancanin

 18   n'a pas participé à la transmission de l'ordre portant sur le retrait. La

 19   Chambre d'appel savait lorsque Sljivancanin est retourné au commandement du

 20   Groupe opérationnel sud, vers 20 heures le 20 novembre. La Chambre d'appel

 21   savait également que lorsqu'il est arrivé au commandement, Sljivancanin a

 22   eu une courte conversation avec son commandant. Et la Chambre d'appel

 23   savait également que Panic était présent lorsque cette conversation s'est

 24   déroulée. Quoi qu'il en soit, ce qui est le plus important ici, c'est de

 25   constater que la Chambre d'appel ne savait pas que Panic a entendu leur

 26   conversation et, ce qui est encore plus important, que Mrksic n'a pas dit a

 27   Sljivancanin, pendant cette conversation, ou n'a rien dit à Sljivancanin au

 28   cours de cette conversation à propos de cet ordre portant sur le retrait.

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  1   Comment pouvons-nous affirmer ceci ? Tout d'abord, lorsque

  2   Sljivancanin a témoigné et qu'il a mentionné la présence de Panic lors de

  3   sa conversation avec Mrksic, c'est lui qui a soulevé la question. Il

  4   témoignait dans le cadre de sa propre défense, et c'est lui qui a soulevé

  5   la question, et lorsque ceci s'est produit, personne ne lui a posé la

  6   question, personne ne lui a demandé si Panic était une des parties à la

  7   conversation. Si tel était le cas, qu'a-t-il dit au cours de cette

  8   conversation. Si Panic n'était pas une partie à cette conversation, dans ce

  9   cas, est-ce que Panic pouvait entendre la conversation. Aucune de ces

 10   questions n'ont été posée à Sljivancanin.

 11   Deuxièmement, compte tenu du fait que Panic est venu témoigner à la

 12   barre après le témoignage de Sljivancanin et qu'il a confirmé qu'il était

 13   là au Groupe opérationnel sud et au commandement lorsque Sljivancanin est

 14   revenu dans la soirée du 20 novembre et qu'il a eu une conversation avec

 15   son commandant, Panic était là, à la barre, et personne ne lui a posé la

 16   question. Personne ne lui a dit : "Etiez-vous une partie à la conversation,

 17   Général ?". Cette question n'a pas été posée. Si vous avez été une partie à

 18   la conversation, qu'avez-vous dit vous-même ? Aucune question n'a été posée

 19   là-dessus. Et s'il n'était pas partie à la conversation, est-ce que vous

 20   avez pu entendre la conversation, Général ? Pas un mot là-dessus.

 21   Et je vais marquer une courte pause, Monsieur le Président pour dire

 22   que ceci est très important, car ce matin, l'Accusation a demandé aux Juges

 23   de la Chambre d'appel de citer des constatations spécifiques sur la

 24   crédibilité, conclusions qu'a pu tirer la Chambre de première instance, et

 25   savoir s'il fallait appliquer cela aux questions parce que ceci n'avait

 26   jamais été posé à Panic. Ce qui est tout à fait incroyable, mais je vais

 27   poursuivre.

 28   Troisièmement, sur la base de questions qui ont été posées à d'autres

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  1   témoins, on aurait pu demander si Panic a entendu quelque chose, ce que

  2   Panic a entendu, ce qui a été dit, mais personne n'a posé ce type de

  3   questions à un autre témoin ou tout autre témoin.

  4   Ceci est étayé par les conclusions de la Chambre au paragraphe 389.

  5   La Chambre de première instance a constaté que le lieutenant-colonel Panic

  6   était là. Point Final. Aucun commentaire n'a été fait par les Juges de la

  7   Chambre de première instance. Aucune information n'a été fournie concernant

  8   ce que Panic aurait pu dire, aurait pu entendre au cours de cette

  9   conversation. Bien évidemment, la Chambre de première instance, sa

 10   conclusion n'était pas une surprise, parce que comme il était indiqué à la

 11   note en bas de page 1153, ceci se fonde uniquement sur le témoignage de

 12   Sljivancanin et sur rien d'autre.

 13   Bien. Même si la Chambre d'appel a déclaré au paragraphe 61 qu'il n'y

 14   a pas d'éléments de preuve directs qui indiquent que Sljivancanin était

 15   informé du retrait dans le courant de sa réunion avec Mrksic et Panic, ce

 16   qui semble constituer une constatation différente au vue de cette dernière,

 17   nous savons maintenant, compte tenu de l'interprétation exacte en anglais,

 18   que Sljivancanin a réellement eu une conversation avec son commandant en

 19   présence de Panic, exactement comme l'a constaté la Chambre de première

 20   instance.

 21   Je suppose, Monsieur le Président, je dis que Sljivancanin a

 22   véritablement dit : Je souhaitais le dire, mais je ne voulais pas leur

 23   dire. Page du compte rendu d'audience, 13 987, lignes 5 à 7.

 24   Et également parce qu'il a vraiment dit : "Et, je suis vraiment passé

 25   voir le colonel Mrksic", et "je l'ai informé brièvement" et "je ne les ai

 26   pas informés". Compte rendu d'audience 13 665, lignes 14 à 18.

 27   Monsieur le Président, si l'on prend en considération que la Chambre

 28   d'appel a cité les mêmes références du compte rendu d'audience que la

Page 109

  1   Chambre de première instance pour étayer ses déclarations et qu'aucun

  2   élément nouveau n'a été avancé par l'Accusation pendant la procédure

  3   d'appel concernant cet événement, nous faisons valoir qu'il ne s'agit pas

  4   d'une question contestée. Il s'ensuit, Monsieur le Président, que la

  5   Chambre d'appel ne savait pas que Panic a entendu la conversation, que

  6   Mrksic n'a pas prononcé, durant la conversation, dit à Sljivancanin quoi

  7   que ce soit au sujet du retrait. Ça c'est un premier point, Monsieur le

  8   Président. Mais il y a une deuxième phrase, et ce, qui est encore plus

  9   importante. Si l'on se penche sur la déduction qui a été adoptée par la

 10   Chambre d'appel, paragraphe 62, et je donne lecture de cette déduction :

 11   "La seule conclusion raisonnable qui peut être tirée est que Mrksic a

 12   nécessairement dit à Sljivancanin qu'il avait retiré la protection de la

 13   JNA relative aux prisonniers de guerre détenus à Ovcara et, par conséquent,

 14   la responsabilité de Sljivancanin pour les prisonniers de guerre".

 15   En tirant une déduction aussi lourde de conséquences, il est très

 16   important, Monsieur le Président, que la Chambre d'appel ne s'est ni

 17   référée au rôle joué par Miodrag Panic pendant et/ou par rapport à la

 18   conversation Mrksic-Sljivancanin, ni par rapport à ce qu'il a entendu de

 19   cette conversation. Rappelons-nous, dans l'affaire Celebici, la Chambre

 20   d'appel a constaté au paragraphe 458 que :

 21   "Si dans un cas d'éléments de preuve indirects une conclusion est

 22   adoptée, qui permet raisonnablement d'être déduite sur la base des éléments

 23   de preuve et qui est consistante par rapport à l'innocence de l'accusé, il

 24   convient de prononcer l'acquittement."

 25   La Chambre d'appel a récemment réitéré cette conclusion dans l'arrêt

 26   d'appel Boskoski au paragraphe 271.

 27   Il s'ensuit, Monsieur le Président, qu'une déduction telle que celle

 28   que l'on trouve au paragraphe 62 de l'arrêt en appel ne peut être tirée que

Page 110

  1   s'il s'agit de la seule conclusion raisonnable sur la base des éléments de

  2   preuve reçus en l'espèce. Bien entendu, la Chambre d'appel connaît sa

  3   jurisprudence, et il n'y a aucun doute qu'il ne s'agit pas là d'un appel.

  4   Cela ne fait aucun doute que la Chambre d'appel a appliqué sa propre

  5   jurisprudence, mais de toute évidence, si la Chambre d'appel avait été au

  6   courant de nouveaux éléments d'information fournis par Panic pendant sa

  7   déposition ce matin, qu'il a entendu la conversation et que Mrksic n'a rien

  8   dit au sujet du retrait à Sljivancanin pendant cette conversation, la

  9   Chambre aurait fait l'une des deux choses : soit la Chambre d'appel

 10   n'aurait pas à tirer la déduction que Mrksic aurait nécessairement mis

 11   Sljivancanin au courant de l'ordre; ou la Chambre d'appel, avant de tirer

 12   une telle déduction si lourde de conséquences, ça ne fait aucun doute que

 13   la Chambre d'appel aurait expliqué pourquoi le fait que Panic a dit qu'il a

 14   entendu la conversation pendant laquelle Mrksic n'a pas dit à Sljivancanin,

 15   pourquoi cela ne constituait pas un obstacle empêchant la Chambre d'appel

 16   de tirer une déduction aussi importante.

 17   Pour résumer, le fait que la Chambre d'appel ne s'est ni référée au

 18   rôle joué par Miodrag Panic au sujet de la conversation de M. Sljivancanin

 19   ni au fait qu'il a entendu cette conversation, cela rend clair que les

 20   éléments de preuve fournis ce matin par Miodrag Panic n'étaient pas connus

 21   de la Chambre d'appel et constituent en effet un fait nouveau.

 22   Et à ce sujet, Monsieur le Président, il est intéressant de savoir

 23   quels sont les arguments avancés par l'Accusation aux paragraphes 13 et 14

 24   de leur réponse, à savoir que le témoignage fourni par Panic ne constitue

 25   pas un fait nouveau parce que Panic a dit pendant son témoignage qu'il ne

 26   savait pas qui avait émis l'ordre. C'est tout à fait intéressant, parce que

 27   cela vient à l'appui de ce que je suis en train de vous dire. Compte tenu

 28   de la déposition de Panic en l'espèce, premièrement, il dit qu'il sait que

Page 111

  1   Sljivancanin a parlé au commandant à son retour au commandement. Ça, c'est

  2   à la page 14 330, ligne 7. Deuxièmement, Panic dit qu'il ne savait qui

  3   avait ordonné le retrait de la police militaire d'Ovcara.

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Monsieur Bourgon, vous êtes un avocat

  5   très capable, vous défendez très bien M. Sljivancanin. Comment cela se fait

  6   que pendant le procès, vous n'avez pas essayé d'interroger plus en détail

  7   M. Panic au sujet du contenu de cette conversation ?

  8   M. BOURGON : [interprétation] Puisque ce n'était pas un question pertinente

  9   à l'époque. Ce qui était important pour les conseils défendant Sljivancanin

 10   - bien sûr, je n'étais pas présent, mais je connais parfaitement l'affaire

 11   et je peux vous répondre - donc ce qui était pertinent, c'est de savoir si

 12   Sljivancanin était présent au briefing. Et pourquoi était-ce important ?

 13   Parce qu'au vu de la cause de l'Accusation. La cause de l'Accusation - ce

 14   matin d'ailleurs, nous avions la sensation qu'ils revenaient à leur cause

 15   de départ, à savoir l'entreprise criminelle commune. Donc il était très

 16   important pour les défenseurs de Sljivancanin de faire valoir qu'il n'était

 17   pas présent à cette réunion. Pour quelle raison ? Parce qu'il y avait des

 18   éléments de preuve pendant la présentation des moyens à charge que c'était

 19   à peu près à ce moment-là qu'on a donné l'ordre. Donc pour démontrer qu'il

 20   ne faisait pas partie de cette entreprise criminelle commune, la Défense

 21   s'est focalisée sur le fait de démontrer qu'il n'était pas présent à la

 22   réunion.

 23   Lorsque M. Panic a dit qu'il n'était pas à la réunion, il n'y avait plus de

 24   raison de l'interroger plus en profondeur là-dessus. Si l'Accusation avait

 25   présenté sa cause à Sljivancanin au moment où il a déposé, bien sûr qu'il

 26   aurait posé la question à Panic, mais ça n'a pas été le cas. Si

 27   l'Accusation avait demandé à Panic : Qu'avez-vous entendu ? Bien sûr que la

 28   Défense aurait réagi, mais cela ne s'est pas produit.

Page 112

  1   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Et qu'en est-il de la réunion de 20

  2   heures ?

  3   M. BOURGON : [interprétation] Mais justement, c'était ça, la réunion de 20

  4   heures, c'est Sljivancanin qui arrive au commandement. Et il arrive tard au

  5   commandement. Et lorsqu'il est arrivé, le briefing était déjà terminé. Donc

  6   c'était ça la question importante pour la Défense, et la Défense est allée

  7   au-delà à partir de ça.

  8   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Mais compte tenu de ce qui a été dit

  9   pendant le briefing, n'était-il pas naturel d'interroger Panic à ce sujet ?

 10   Avez-vous entendu quoi que ce soit au sujet de l'ordre ? N'avez-vous rien

 11   entendu au sujet de l'ordre ?

 12   M. BOURGON : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, nous sommes du

 13   côté de la Défense. La charge de la preuve repose sur l'Accusation. Si

 14   l'Accusation avait posé la question, on aurait réagi, mais la Défense n'a

 15   aucune espèce d'obligation, ni n'a besoin, et ce serait d'ailleurs stupide

 16   de la part de la Défense d'avancer des questions, d'avancer des questions

 17   sur des événements sur lesquels elle n'a pas de réponse. Donc c'est une

 18   question de fond, de base. Je suis certain que M. Lukic aurait préféré

 19   avoir posé la question à M. Panic au sujet de cette conversation lorsqu'il

 20   l'a rencontré avant la déposition. Et je suis certain que M. Lukic aurait

 21   été heureux de l'avoir fait, mais cela n'a pas été le cas.

 22   Je vous remercie. Je continue. Je disais que Panic a dit : Je sais que

 23   Sljivancanin a parlé au commandant, mais je ne sais pas qui a émis l'ordre

 24   de retrait. Excusez-moi. Il sait que Sljivancanin a parlé au commandant à

 25   son retour au commandement. Il s'agit de la page 14 330, ligne 7. Et

 26   deuxièmement, il a dit qu'il ne savait pas qui avait ordonné le retrait de

 27   la police militaire d'Ovcara.

 28   Alors, si l'on prend conjointement ces deux éléments, il s'ensuit que si la

Page 113

  1   Chambre d'appel avait su ou s'il avait été établi que Panic, soit a pris

  2   part à la conversation soit qu'il a entendu la conversation, à ce moment-là

  3   la Chambre d'appel n'aurait pas pu en tirer la conclusion sans prendre ses

  4   distances par rapport à ce que Panic avait dit, puisque la déduction

  5   n'aurait pas été la seule conclusion raisonnable.

  6   Par conséquent, le fait que la Chambre d'appel -- examinons ce qui existe

  7   aujourd'hui et non pas des éventualités. La Chambre d'appel n'est pas

  8   entrée dans ce genre de détails. Cela démontre que la Chambre d'appel ne

  9   savait pas que Panic avait entendu la conversation, et la Chambre d'appel

 10   certainement ne savait pas que Panic a entendu que Mrksic n'a pas dit à

 11   Sljivancanin quoi que ce soit au sujet du retrait. Ainsi l'argument avancé

 12   par l'Accusation vient confirmer que les éléments de preuve fournis

 13   aujourd'hui, ce matin, par Panic constituent un fait nouveau.

 14   Il me reste 15 minutes, Monsieur le Président. Je vais passer à mon

 15   troisième argument, à savoir nous faisons valoir que d'après les éléments

 16   fournis par Panic, il convient de se pencher sur toutes les décisions, tous

 17   les arrêts précédents rendus par les Chambres d'appel à la fois du TPIY et

 18   du TPIR; 18 demandes de révisions ont été déposées à ce jour devant la

 19   Chambre d'appel. A peu près 18, mais comme nous le savons, Monsieur le

 20   Président, il y a eu plusieurs demandes mixtes de réexamen et de révision.

 21   Dont une a été accordée, et puis toutes les autres ont été rejetées.

 22   J'hésite à le dire, mais je dois le dire, Monsieur le Président.

 23   Monsieur le Président, je sais à quel point ce genre de demande est

 24   difficile pour la Chambre d'appel, et je sais quelle est l'importance que

 25   les jugements ou les arrêts soient des décisions finales. Cela fait un

 26   moment que je suis chef de cabinet, que j'exerce ici, mais je me souviens -

 27   le Juge Guney s'en souviendra - du moment où on a fait droit à la demande

 28   dans l'affaire Barayagwiza. Je sais comment cela a eu lieu. Je sais à quel

Page 114

  1   point cela est difficile. Mais lorsque nous avons des circonstances

  2   exceptionnelles, il est important, Monsieur le Président, de les prendre en

  3   considération.

  4   Alors, si nous nous penchons sur la demande dans l'affaire

  5   Barayagwiza qui a été accordée : 

  6   "La Chambre d'appel a estimé qu'un fait nouveau, important, pertinent

  7   était démontré. Et dans sa décision, la Chambre a constaté que, sur la base

  8   des éléments de preuve qui ont été fournis à ce moment-là, l'Etat du

  9   Cameroun était prêt à transférer l'accusé comme il n'y avait pas de preuve

 10   contraire."

 11   Et ce fait nouveau a été avancé donc dans l'arrêt de la Chambre

 12   d'appel au paragraphe 57. Il est évident que le témoignage du témoin Panic

 13   qui a été entendu ce matin constitue en effet un fait nouveau. La Chambre

 14   d'appel a adopté cette déduction-clé au paragraphe 62 sur la base du fait

 15   qu'il n'y avait pas d'élément de preuve direct que Mrksic a dit à

 16   Sljivancanin qu'il avait retiré la police militaire d'Ovcara. Le témoignage

 17   du témoin Panic non seulement fournit un élément de preuve direct quant à

 18   ce qui a été dit pendant la conversation, mais cela montre aussi que Mrksic

 19   n'a pas dit à Sljivancanin ce qu'il en est du retrait pendant la

 20   conversation.

 21   D'autres exemples où la Chambre d'appel est arrivée à la conclusion

 22   que les éléments de preuve présentés ont constitué des faits nouveaux, même

 23   si ces demandes ont été rejetées, peuvent être trouvés dans la requête

 24   Tadic aux fins de révision du 30 juillet 2002, où la conclusion de la

 25   Chambre d'appel, après le jugement final, a été considérée comme un fait

 26   nouveau.

 27   Puis dans la première demande de Josipovic aux fins de révision du 7

 28   mars 2003, où la découverte du policier qui ressemble à Josipovic et qui

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  1   aurait pris part à l'attaque sur Ahmici était considérée comme un fait

  2   nouveau parce qu'il n'a pas fait objet de débat au procès.

  3   Puis la demande Rutaganda du 9 décembre 2006, où des conclusions ont

  4   été faites dans une autre affaire sur un manque de crédibilité générale, et

  5   en particulier sur les déclarations fournies aux autorités rwandaises avant

  6   leur déposition par deux témoins ont été considérées comme faits nouveaux

  7   parce qu'elles n'ont pas été débattues pendant le procès.

  8   Si on compare ces trois instances au témoignage de Panic ce matin, puisque

  9   ce n'était ni connu de la Chambre d'appel ni a fait objet de débat, que ce

 10   soit en première ou en deuxième instance, puisque aucune question n'a été

 11   posée aux témoins pertinents, comme mentionné précédemment, cela nous

 12   montre la même conclusion, à savoir les éléments d'information fournis par

 13   Panic constituent en effet un fait nouveau.

 14   Pour ce qui est d'autres décisions qui ont été rendues par des Chambres

 15   d'appel en rejetant des demandes en révision, le raisonnement a toujours

 16   été le même, à savoir que des éléments de preuve proposés constituaient des

 17   éléments supplémentaires, factuels, et ne constituaient pas des faits

 18   nouveaux.

 19   Nous estimons que le témoignage du témoin Panic ne peut pas être pris

 20   comme un élément de preuve supplémentaire. Simplement, cela ne s'applique

 21   pas en l'espèce, et c'est la raison pour laquelle, en l'espèce, nous sommes

 22   face à des circonstances exceptionnelles qu'il convient de distinguer de

 23   toute autre demande qui a été rejetée de par le passé.

 24   Je pourrais expliquer pourquoi ce fait n'a pas été débattu, mais la

 25   conclusion de la Chambre a été que Sljivancanin n'avait pas le mens rea

 26   nécessaire pour aider et encourager le meurtre dans la mesure où il pensait

 27   que les forces de la JNA étaient toujours à Ovcara. Tel est l'élément qui a

 28   été débattu pendant le procès.

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  1   Quant à savoir si Sljivancanin a appris que les forces de la JNA qui

  2   gardaient les prisonniers à Ovcara ont été retirées, sur interprétation, on

  3   pourrait dire que c'est devenu un élément débattu au moment où la Chambre

  4   d'appel a posé la question aux parties vers la fin de l'appel. Toutefois,

  5   si l'on prend en considération les conclusions de la Chambre de première

  6   instance que Mrksic a donné l'ordre de retirer la police militaire

  7   d'Ovcara, que Sljivancanin, lui, n'a pas pris part à la transmission de cet

  8   ordre, et pendant qu'on peut considérer sur cette base-là que si

  9   Sljivancanin avait appris que Mrksic avait retiré la police militaire

 10   d'Ovcara, et si oui quand, en dernière instance, puisque la question a été

 11   posée par la Chambre d'appel, ce n'était pas la cause de l'Accusation; et

 12   cela ne l'a jamais été jusqu'aux plaidoiries réquisitoires. A l'opposé, le

 13   deuxième moyen d'appel de l'Accusation était que

 14   "Il n'était pas raisonnable que la Chambre de première instance

 15   arrive à la conclusion qu'elle ne pouvait pas conclure qu'au moment où il

 16   s'est rendu à Ovcara, Sljivancanin savait que les prisonniers de guerre

 17   auraient probablement été tués."

 18   Et ce qui est encore plus important, si on se penche sur les éléments

 19   qui ont été présentés par les parties pendant le procès et en particulier

 20   par l'Accusation, il est évident que la question qui est de savoir si

 21   Sljivancanin a appris que Mrksic avait retiré la police militaire d'Ovcara

 22   n'a pas fait objet de débats et certainement n'a pas fait objet de

 23   contestations par les parties. Les seuls témoins qui ont dit quoi que ce

 24   soit au sujet de la conversation entre Mrksic et Sljivancanin, c'est

 25   Sljivancanin lui-même. Et l'Accusation ne lui a jamais posé la question qui

 26   est de savoir si Mrksic ne l'a jamais informé qu'il avait retiré la garde

 27   de prisonniers à Ovcara. Donc il a été interrogé, mais pas à ce sujet.

 28   Tous les autres témoins qui sont venus déposer pendant le procès en

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  1   première instance et qui auraient pu parler de la question qui est de

  2   savoir si Sljivancanin a appris que Mrksic avait donné l'ordre de retirer

  3   la police militaire d'Ovcara, on ne les a jamais interrogés à ce sujet.

  4   Trifunovic, Gluscevic, Vukasinovic, Sljivancanin, Vojnovic, Lesanovic, et

  5   bien entendu, le témoin Panic, que nous avons entendu ce matin.

  6   Par conséquent, Monsieur le Président, quant à savoir si et quand

  7   Sljivancanin a appris que Mrksic avait retiré la police militaire d'Ovcara

  8   n'a certainement pas fait l'objet de débats par les parties en l'espèce

  9   pendant le procès en première instance. Les témoins n'ont pas été

 10   interrogés, non pas été contre-interrogés. Et compte tenu de ces

 11   circonstances, les éléments de preuve directs qui ont été présentés par

 12   Panic disant que Mrksic n'avait pas informé Sljivancanin qu'il avait retiré

 13   la police militaire d'Ovcara, ne peuvent en aucun cas être considéré comme

 14   étant des éléments de preuve supplémentaires.

 15   J'avance très rapidement. Il ne me reste que trois minutes. Mon

 16   quatrième argument, qui sera mon dernier, Monsieur le Président.

 17   Nous faisons valoir que les arguments avancés par l'Accusation,

 18   lorsqu'elle fait valoir que le témoignage de Panic ne constitue pas un fait

 19   nouveau, se polarisent sur le détail, tout comme mon collègue a fait ce

 20   matin lorsqu'il a contre-interrogé le témoin Panic. Mais en fait, c'est la

 21   conclusion la plus évidente qu'il ne voit pas, à savoir celle qui découle

 22   de la déposition de ce témoin et sur laquelle se fonde notre demande de

 23   révision. Autrement dit, l'Accusation vous demande de regarder les arbres,

 24   et en même temps, elle vous demande de faire abstraction de la forêt.

 25   D'autre part, l'acquittement de Sljivancanin a été annulé en appel sur la

 26   base d'une seule déduction-clé, à savoir celle qui a été faite en l'absence

 27   d'éléments de preuve directs que Mrksic a dit à Sljivancanin ce qu'il en

 28   est du retrait. D'autre part, le témoignage fourni par le témoin Panic nous

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  1   fournit une source d'éléments de preuve directe, établit que Mrskic n'a pas

  2   dit à Sljivancanin ce qu'il en est du retrait pendant leur conversation.

  3   Monsieur le Président, si cela ne constitue pas un fait nouveau,

  4   alors jamais rien ne le sera. L'objectif des 26 demandes en application

  5   d'article 26 est précisément d'empêcher qu'il y ait un déni de justice dans

  6   des situations où un nouvel élément d'information qui n'était pas connu à

  7   l'époque où la décision était rendue permet de savoir clairement que la

  8   décision était erronée. Il est évident que le témoignage fourni par le

  9   témoin Panic constitue ce cas de figure. Et pourtant l'Accusation vous

 10   demande de ne pas le prendre en considération. D'autre part, nous

 11   saisissons cette occasion pour rappeler la décision de la Chambre d'appel

 12   dans l'affaire Barayagwiza qui s'applique directement en espèce. Donc

 13   rejeter le fait présenté par Panic à la lumière de l'impact de la décision

 14   serait près de fermer ses yeux face à la réalité.

 15   Monsieur le Président, j'en ai terminé. Aujourd'hui j'ai évoqué quatre

 16   nouvelles manières d'évoquer un fait nouveau. La jurisprudence, la

 17   signification des mots, et le test à la fin. Si vous essayez de dire que

 18   ceci n'a pas fait -- que ceci a été débattu pendant le procès : non, cela

 19   ne l'a pas été. Il s'agit de quelque chose de nouveau, de quelque chose qui

 20   n'était pas connu de l'instance qui a pris la décision.

 21   Et pour terminer, très rapidement, une dernière phrase. Ceci ne constitue

 22   pas la substance de notre requête aujourd'hui, mais s'il y avait un doute

 23   sur la qualification de cela, à savoir est-ce qu'il s'agit d'un fait

 24   nouveau ou non, nous avons deux Juges qui se sont exprimés par voix de leur

 25   opinion dissidente. Monsieur le Président, vous-même et le Juge

 26   Shahabuddeen, vous avez toujours le pouvoir en tant que Chambre d'appel, de

 27   rectifier les choses. Bien sûr, ce n'est pas ce que nous vous demandons

 28   aujourd'hui, mais nous sommes certains que vous saurez que ce que nous

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  1   avons entendu aujourd'hui est très important. Vous avez entendu ce matin

  2   qu'il n'a pas su Sljivancanin dans la nuit du 20 novembre 1991 et cette

  3   condamnation ne peut pas être maintenue.

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Très bien Monsieur Bourgon.

  5   Maintenant Madame Brady, c'est à vous. Vous avez vous aussi 45

  6   minutes.

  7   Mme BRADY : [interprétation] Je vous remercie.

  8   Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Donc les éléments de preuve apportés

  9   par Panic, même s'ils étaient acceptés - et pour des raisons présentées par

 10   mon confrère M. Rogers ce matin ne devraient pas être acceptées - même si

 11   vous les acceptiez, ne satisfont pas aux critères pour en faire un fait

 12   nouveau, ce qui est nécessaire pour que la Chambre d'appel décide de

 13   revenir sur son arrêt. Et c'est pour ces raisons-là que la demande de

 14   Sljivancanin devrait être rejetée.

 15   En se basant sur la jurisprudence du TPIY et du TPIR de la part de la

 16   Chambre d'appel, le témoignage de Panic que nous avons entendu aujourd'hui

 17   ne correspond pas un nouveau fait. Au cours de la première instance et de

 18   l'appel, la question de savoir si Sljivancanin avait appris que le 80e

 19   Brigade motorisée avait été retirée d'Ovcara; à savoir de qui il l'avait

 20   appris, c'est-à-dire Mrksic; de savoir quand il l'avait appris aux environs

 21   de 20 heures le 20 novembre 1991; à savoir où il l'avait appris, c'est-à-

 22   dire au poste de commandement; et comment il l'avait appris, dans le cadre

 23   d'un réunion, tout ceci a été débattu et pris en compte. Sljivancanin a

 24   témoigné à propos de tout cela, et nous ne sommes pas d'accord avec M.

 25   Bourgon à propos de ce qu'il vient de dire. Alors ce qu'il dit, qu'il ne

 26   s'agit pas d'élément de preuve sur un même fait, nous ne sommes pas du tout

 27   d'accord avec lui. D'après nous, le témoignage de Panic que nous avons

 28   entendu aujourd'hui ne fait qu'ajouter des éléments de preuve sur un fait

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  1   qui a déjà été débattu. Et d'après la jurisprudence, cela ne suffit pas

  2   pour qu'il y ait révision.

  3   Donc, en ce qui concerne la jurisprudence sur la révision, la Chambre

  4   d'appel fait bien sûr la différence entre d'un côté le fait nouveau et d'un

  5   autre côté, les éléments de preuve supplémentaires à propos d'un fait qui a

  6   déjà fait l'objet de débats et qui a déjà été pris en compte par la Chambre

  7   de première instance ou d'appel. La Chambre d'appel a défini ce qu'était un

  8   nouveau fait, et voici maintenant, je cite, ce qu'est un nouveau fait :

  9   "Ce sont des informations probantes étayant un fait qui n'a pas été évoqué

 10   au cours de la première instance ou de la deuxième instance. Le fait que ce

 11   fait n'aurait pas été débattu au cours des débats signifie qu'il n'a pas

 12   été pris en compte, donc par la Chambre lorsqu'elle a décidé de son

 13   verdict."

 14   Et nous savons qu'il n'y a que si l'on trouve un nouveau fait que l'on peut

 15   lancer une révision d'arrêt, et ceci a été mis en exergue d'ailleurs dans

 16   la décision de révision de Delic. Si l'élément proposé constitue un fait

 17   nouveau, c'est-à-dire un fait qui n'a pas été débattu lors des procédures

 18   précédentes, une révision en application de l'Article 119 constitue la

 19   procédure adéquate qui doit donc être présentée à Chambre qui a rendu le

 20   jugement sur ce point.

 21   "Si cet élément proposé correspond à des preuves supplémentaires

 22   portant sur un fait déjà débattu, que ce soit en première, soit en deuxième

 23   instance, cet élément ne constitue pas un fait nouveau selon l'Article 119,

 24   et il n'est donc pas possible d'admettre une révision éventuelle."

 25   D'ailleurs cet après-midi, je vais expliquer que l'approche de la Chambre

 26   de première instance en ce qui concerne la définition d'un fait nouveau

 27   reflète bien le fait que cette procédure en révision est de nature

 28   extrêmement exceptionnelle et doit être courue dans l'intérêt d'obtenir des

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  1   jugements définitifs et certains.

  2   Venons en au fait, à ce nouveau fait, soi-disant. Les parties demanderesses

  3   déclarent que ce nouveau fait venant soi-disant du témoignage de Panic est

  4   le fait suivant : Panic, qui a assisté à la conversation entre Mrksic et

  5   Sljivancanin lors de la soirée du 20 novembre 1991, il a donc entendu la

  6   conversation, mais il n'a pas entendu Mrksic dire à Sljivancanin qu'il

  7   avait ordonné que la 80e Brigade motorisée se retire d'Ovcara.

  8   Donc, la partie demanderesse a restreint ce nouveau fait de façon

  9   extrêmement précise, spécifique et étroite. Et ensuite, la partie

 10   demanderesse étudie les comptes rendus de l'appel et de la première

 11   instance et considère que cet élément de preuve, il en parle d'ailleurs en

 12   même temps que l'élément de preuve, il dit donc que cet élément de preuve

 13   n'a pas été pris en compte, ni par la Chambre de première instance, ni par

 14   la Chambre d'appel lors de la rédaction de leur verdict. Et selon nous,

 15   cette démarche est erronée. Etudiez les quelques 20 demandes de révisions

 16   qui ont déjà été envisagées par cette Chambre d'appel. Il faut dire qu'il

 17   faut tout d'abord identifier quels sont les faits en question dans le cadre

 18   de la première procédure. Une fois cela fait, la nouvelle information, le

 19   nouvel élément doit être évalué pour voir s'il peut en effet être baptisé

 20   nouveau fait ou s'il ne s'agit en fait que d'éléments de preuve

 21   supplémentaires portant sur un fait qui a déjà fait l'objet de débat et qui

 22   a déjà été pris en compte par la Chambre.

 23   Et selon, en l'espèce, ce que Sljivancanin a appris lorsqu'il est revenu au

 24   poste de commandement de Negoslavci vers 20 heures le 20 novembre 1991, en

 25   particulier de savoir s'il avait appris que Mile Mrksic avait retiré les

 26   troupes restant de la JNA d'Ovcara, est un fait qui a été débattu à la fois

 27   en première instance et en deuxième instance. Donc, commençons d'abord par

 28   la procédure d'appel, puisque c'est à ce moment-là que la constatation

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  1   factuelle a été faite.

  2   On ne peut pas dire, comme l'a dit M. Bourgon, que ce n'est que quand la

  3   Chambre d'appel a posé ses questions que cette question a été soulevée.

  4   Absolument pas. L'Accusation avait déjà soulevé ce point lors de l'appel

  5   dans le cadre de son mémoire en appel déposé en janvier 2008. Je vais très

  6   rapidement en lire, en donner lecture, de deux paragraphes pour vous

  7   rappeler quelle était notre position sur ce point. Paragraphe 76, tout

  8   d'abord, donc, du mémoire en appel de l'Accusation. Voici nos arguments :

  9   "Plus tard dans la nuit, vers 20 heures, Sljivancanin a appris plus sur ce

 10   qui s'était passé à Ovcara, y compris que Mrksic avait donné l'ordre à la

 11   JNA de se retirer."

 12   Ensuite, au paragraphe 112 [comme interprété], nous continuons :

 13   "Sljivancanin est rentré à Negoslavci vers 20 heures le 20 novembre 1991,

 14   et a été briefé sur ce qui s'était passé à Ovcara par le commandant

 15   Vukasinovic. Il a ensuite fait rapport à Mrksic. Et la seule décision que

 16   l'on peut faire à ce propos est que Sljivancanin a été informé par Mrksic

 17   lorsqu'il est rentré à Negoslavci. Sljivancanin a admis qu'il avait eu une

 18   conversation à propos du transfert des prisonniers lorsqu'il est revenu à

 19   Negoslavci cette nuit-là."

 20   Note de bas de page qui fait référence à la déposition de Sljivancanin sur

 21   cette même réunion qu'il a eue avec Mrksic lorsqu'il est revenu au poste de

 22   commandement.

 23   La Chambre de première instance n'avait pas fait de constatation

 24   positive sur ce point, quant à savoir comment il l'avait appris et ce qu'il

 25   avait appris. Au paragraphe 661 et 389 du jugement, on voit bien qu'ils

 26   n'ont pas fait de constatation positive en faveur de l'argument de

 27   l'Accusation sur ce point. Il était donc important d'établir les faits, et

 28   ceci a été fait, d'ailleurs, par la Chambre d'appel, parce que c'était

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  1   ainsi que l'on savait que Sljivancanin avait devoir de protéger les

  2   prisonniers. Et la constatation factuelle en question ici portait sur la

  3   conversation que Sljivancanin avait eue avec Mrksic au poste de

  4   commandement de Negoslavci.

  5   La Défense a répondu, d'ailleurs, en détail, à ce propos. Dans son mémoire

  6   en réponse, il y a plusieurs paragraphes qui ont été consacrés à ce point,

  7   178, 179, le 208 au 216 aussi. Sljivancanin, non seulement a nié avoir su

  8   que Mrksic avait donné un ordre à la JNA de se retirer d'Ovcara, mais il a

  9   aussi argumenté plus précisément que :

 10   "Les éléments de preuve ainsi que les conclusions de la Chambre de première

 11   instance ne montrent pas que Mrksic aurait informé Sljivancanin qu'il avait

 12   donné l'ordre aux membres de la sécurité de la JNA de se retirer d'Ovcara

 13   le 20 novembre 1991."

 14   Donc ce point, le fait de savoir ce que Sljivancanin a appris ce soir-là,

 15   sa conversation avec Mrksic plus précisément, tout ceci est un fait factuel

 16   qui devait être déterminé dans le cadre de l'appel. Voici comment les deux

 17   parties considéraient la chose, et la Chambre de premier appel a bien

 18   reconnu cela dans son addendum à son ordonnance portant calendrier rendu

 19   quelques jours avant l'audience en appel. En se concentrant sur ce que

 20   disait Sljivancanin sur lequel il ne savait pas que Mrksic avait ordonné le

 21   retrait, les parties -- la Chambre de premier appel a demandé aux parties

 22   de chercher à savoir quand Sljivancanin avait appris cet ordre de Mrksic.

 23   Et sur ce point, lors de l'audience en appel, les parties ont répondu

 24   de façon extrêmement étoffée. Pages 219 à 224 pour l'Accusation, et pour la

 25   Défense, ce sont les pages 283 à 287.

 26   L'Accusation a considéré et a affirmé que la seule conclusion raisonnable

 27   est que lorsqu'il est revenu au poste de commandement cette nuit-là, vers

 28   20 heures, Sljivancanin a dû apprendre qu'il y avait eu un ordre de retrait

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  1   au vu, plus précisément, de sa conversation avec Mrksic et de la teneur

  2   même de cette conversation. Et je me souviens avoir lu des citations

  3   extrêmement longues de la déposition de Sljivancanin à propos de cette

  4   conversation. La Chambre d'appel, d'ailleurs, a consacré, en ce qui la

  5   concerne, deux très longs paragraphes à ce point, savoir ce que

  6   Sljivancanin avait appris lorsqu'il est revenu au poste de commandement. La

  7   Chambre d'appel a dû étudier tous les éléments de preuve correspondant au

  8   compte rendu d'audience, y compris le témoignage de Sljivancanin à propos

  9   de sa conversation avec Mrksic, et ils ont parlé, entre autres, de ces

 10   prisonniers qui étaient à Ovcara sous l'autorité du gouvernement de la SAO.

 11   Et vous trouverez cela aux pages 13 665 et 13 983 à 13 988. Et c'est sur

 12   cette base que la Chambre d'appel a fait sa constatation cruciale au

 13   paragraphe 62 selon laquelle Mrksic avait dû dire à Sljivancanin que les

 14   troupes avaient été retirées.

 15   Maintenant, avant de parler de ce point essentiel qui a été quand même

 16   débattu dans le cadre du procès, je tiens à parler des problèmes de

 17   traduction entre B/C/S et anglais.

 18   De notre avis, aucune des modifications qui ont été faites et qui ont

 19   été approuvées par le CLSS à partir du B/C/S en anglais à propos de cette

 20   conversation n'ont le moindre impact sur la teneur même de la conversation.

 21   Mais il y a un point que je tiens à dire, cela dit. M. Bourgon a déclaré

 22   que la déposition de Sljivancanin avait été corrigée, page 13 665, le

 23   témoignage de Sljivancanin. Si j'ai bien compris, il y a deux points qui

 24   ont été corrigés, et nous sommes d'accord avec le premier, d'ailleurs, mais

 25   pas avec le deuxième. Il est vrai que la traduction a été corrigée et

 26   maintenant, il est écrit que Sljivancanin avait été voir Mrksic plutôt que

 27   rendre compte à Mrksic. Mais M. Bourgon a aussi déclaré que la modification

 28   avait été faite par le CLSS et que maintenant, on voit : "Je l'ai

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  1   brièvement informé de ce qui était en train d'arriver à l'hôpital."

  2   Mais cette modification n'a pas été acceptée par le CLSS. Le CLSS a

  3   conservé ce qui avait été dit dans la première traduction, c'est-à-dire :

  4   "Je les ai brièvement informés," rien de plus. Donc, si vous allez ensuite

  5   dans le cadre du contre-interrogatoire à la ligne 13 987 [comme

  6   interprété], Sljivancanin, donc, est en contre-interrogatoire et à nouveau,

  7   là, il donne sa version de ce qui s'est passé et de cette conversation --

  8   de certains passages de la conversation, et il dit donc, dans cette page 13

  9   987 [comme interprété], Sljivancanin a dit :

 10   "Je suis allé voir Mrksic pour lui dire ce qui était arrivé à l'hôpital et

 11   ce qui s'était passé là-bas ce jour-là et pour voir ce que j'avais à faire

 12   à partir de maintenant."

 13   Et ensuite, en ligne 22, il dit, et je cite :

 14   "Etant donné que le chef d'état-major, M. Panic, était sur place, je

 15   pensais qu'il était au courant. Au courant, ça veut dire qu'il savait ce

 16   qu'il se passait, qu'il savait pourquoi ces gens étaient là."

 17   Ce qui étaye la version du CLSS qu'il les a informés, "informed them", les

 18   a informés.

 19   Donc, en ce qui concerne ce que savait Sljivancanin ce jour-là lorsqu'il

 20   est revenu au poste de commandement et le problème de sa conversation avec

 21   Mrksic était un point factuel lors du procès. J'ai déjà parlé, d'ailleurs,

 22   de l'appel, mais la Chambre d'appel a pris sa décision. Mais le fait est

 23   qu'en première instance, la thèse de l'Accusation était peut-être plus

 24   vaste, puisque Sljivancanin, selon l'Accusation, faisait partie d'une

 25   entreprise criminelle commune visant à nuire et à viser des prisonniers et

 26   qu'il avait été impliqué dans cette transmission de l'ordre de retrait,

 27   mais ce fait-là ne signifie pas, comme l'a argumenté aujourd'hui la partie

 28   demanderesse, que ce qu'il a appris lorsqu'il set rentré à Negoslavci et

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  1   que sa conversation avec Mrksic n'était pas, en fait, des faits en

  2   question. Je vais m'expliquer.

  3   Au contraire, ce qu'a fait Sljivancanin, ce qu'il savait au soir du 20

  4   lorsqu'il est revenu était pertinent à la fois pour que l'on comprenne bien

  5   quelle était sa conduite précédente, et ceci faisait partie, bien sûr, de

  6   la théorie de l'Accusation à propos de l'appartenance éventuelle de cette

  7   personne à une entreprise criminelle commune, donc ce qu'il avait fait

  8   précédemment est important pour savoir -- ce qu'il a fait ce soir-là et ce

  9   qu'il a appris ce soir-là était important pour savoir s'il était ou non

 10   membre d'une entreprise criminelle commune. Et c'est sans doute pour cela

 11   que le conseil de Sljivancanin a -- vous avez les questions à propos de

 12   cette réunion avec Mrksic. La conversation que Sljivancanin a eue avec

 13   Mrksic a été soulevée tout d'abord dans le cadre d'une question posée dans

 14   l'interrogatoire principal. Et la réponse montre que c'était fait pour

 15   prouver que lorsque Sljivancanin est revenu au poste de commandement, ce

 16   soir-là, c'était un jour comme un autre, c'était de la routine. Il a

 17   demandé ce qu'il devait faire le lendemain et n'a obtenu aucune information

 18   et est resté dans le noir quant au sort des prisonniers. C'était pour cela

 19   que ces questions avaient été posées, dans ce but.

 20   Son état d'esprit après les événements a aussi été un point que nous

 21   avons pris en compte, puisque lors de la déposition dans le procès, il a

 22   toujours dit qu'il n'avait pas su ce qui était arrivé à ces prisonniers

 23   pendant très longtemps. Il n'a appris ce qui leur était arrivé qu'en 1998,

 24   mais pas avant. Il avait entendu des rumeurs précédemment, mais il n'était

 25   vraiment sûr de ce qui leur était arrivé. Ce n'est qu'en 1998, lorsqu'il y

 26   a eu une procédure devant le tribunal militaire, à Belgrade, qu'il l'a

 27   appris.

 28   Donc le fait qu'il le savait a toujours extrêmement essentiel, à la

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  1   fois en ce qui concerne la thèse de l'Accusation et en ce qui concerne sa

  2   stratégie de défense.

  3   Mais lors du procès, Sljivancanin a aussi dû prendre en compte la

  4   défense de Mrksic et s'y adapter. Or, la défense de Mrksic n'a pas été

  5   acceptée par la Chambre de première instance, ainsi que par la Chambre

  6   d'appel, mais elle est importante pour bien comprendre quels sont les faits

  7   qui ont été débattus lors du procès. La défense de Mrksic était la suivante

  8   : Vers 19 ou 20 heures ce soir-là, il a quitté Negoslavci par hélicoptère

  9   pour se rendre à Belgrade, et il a donc laissé son chef d'état-major, le

 10   commandant adjoint Panic, aux commandes, si je puis dire. Et les arguments

 11   de Mrksic qui n'ont pas été acceptés, d'ailleurs, étaient les suivants :

 12   l'ordre de retrait a eu lieu, alors que c'était Panic qui était de garde,

 13   et il a considéré que la source de cette information était très

 14   certainement l'administration de la sécurité.

 15   Donc, ce que savait Sljivancanin, ses interactions et ses discussions avec

 16   Mrksic ce soir-là, sont des points qui étaient à débattre, étant donné que

 17   Mrksic était en train d'essayer de faire endosser la faute à Panic et à

 18   Sljivancanin. Lors du contre-interrogatoire par le conseil de Mrksic à

 19   propos de l'heure à laquelle il avait eu cette conversation avec Mrksic ce

 20   soir-là, et lorsque Sljivancanin a déclaré que Mrksic lui avait dit que le

 21   gouvernement avait pris en charge un groupe de suspects, Sljivancanin a

 22   répondu de la sorte, lorsqu'il était contre-interrogé par Me Vasic; il

 23   s'agit du compte rendu pages 13 724 à 13 725 :

 24   "Je ne suis pas sûr à 100 %, mais à 1 million pour cent que j'étais chez le

 25   commandant le 20 au soir. En ce qui concerne la séance du gouvernement,

 26   avant d'avoir appris ce qui s'est passé de la bouche du commandant, j'ai

 27   déjà appris ce qui s'était passé de la bouche de mon officier de sécurité,

 28   Borisavljevic".

Page 129

  1   Donc Sljivancanin déclare qu'il est question de ce qu'il a appris ce soir-

  2   là à propos des prisonniers, surtout le fait qu'ils n'étaient plus sous

  3   protection de la JNA. Lorsque l'on dit que ceci n'a pas été débattu au

  4   cours de la première instance, c'est absolument infondé.

  5   La Chambre de première instance n'a pas fait de constatations

  6   positives quant à savoir si Sljivancanin avait bel et bien appris qu'il y

  7   avait eu cet ordre ce soir-là. Il n'a pas fait de constatations positives à

  8   ce propos, ce qui ne signifie pas - alors que c'est qu'allègue Sljivancanin

  9   - que la Chambre de première instance aura pris en compte ce point.

 10   Regardez la façon dont est libellé le paragraphe 6, lignes 389 au 661. On

 11   voit bien que la Chambre de première instance a pris en compte ce point,

 12   mais n'a pas été suffisamment convaincue pour faire une constatation. C'est

 13   pour cela que nous avons demandé, d'ailleurs en appel, de faire cette

 14   constatation, parce que la Chambre de première instance ne l'avait pas fait

 15   en faveur de l'Accusation précédemment.

 16   Voilà quels ont été les points qui avaient déjà été débattus : ce

 17   qu'il appris, c'est-à-dire retrait de la 80e d'Ovcara; de qui il l'avait

 18   appris, de Mrksic; quand il l'avait appris, vers 20 heures  le 20 novembre

 19   1991; où il avait appris cela, au poste de commandement; et comment il

 20   l'avait appris, dans le cadre d'une réunion.

 21   Maintenant, penchons-nous sur la déposition de Panic ce matin, pour

 22   la comparer aux faits qui ont déjà été débattus, comme je l'ai déjà dit, et

 23   déjà pris en compte. On voit bien que ce ne sont que des éléments de preuve

 24   supplémentaires qui portent sur des faits qui ont déjà fait l'objet de

 25   débats. Et à plusieurs reprises, d'ailleurs, dans ses écritures, la partie

 26   qui demande a dit que ce sont des éléments de preuve qui corroborent ce

 27   qu'a dit Sljivancanin dans le cadre du procès.

 28   Or, si Sljivancanin déclare aujourd'hui que ni la Chambre d'appel ni

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  1   la Chambre de première instance n'ont disposé de cet élément de preuve bien

  2   précis fourni aujourd'hui par M. Panic, le fait que Panic n'a pas entendu

  3   Mrksic dire à Sljivancanin qu'il avait ordonné que l'on retire la JNA

  4   d'Ovcara. Il y a deux réponses ici à envisager. Tout d'abord, même si vous

  5   preniez une interprétation extrêmement élastique que ce concept de nouveau

  6   fait en espèce, même si vous adoptiez l'approche que vous propose l'équipe

  7   Sljivancanin, ces éléments de preuve ont déjà été débattus et déjà

  8   présentés à la fois à la Chambre de première instance et à la Chambre

  9   d'appel. Il y a deux facteurs à prendre en compte ici. Tout d'abord,

 10   Sljivancanin et Panic ont témoigné au procès que Panic était bel et bien

 11   présent lorsque Sljivancanin a rencontré Mrksic ce soir-là. Ce matin, M.

 12   Rogers vous a lu la déposition de Panic; compte rendu 14 330. Je vous

 13   rappelle ses propos. On a demandé à Panic si Sljivancanin était présent

 14   pour le briefing de 18 heures : "Est-ce que vous vous en souvenez ? Est-ce

 15   que vous l'avez vu ?"

 16   Donc il a dit qu'il ne se souvenait pas de l'avoir vu au briefing, et

 17   Panic ensuite déclare :

 18   "Je crois qu'il est venu…" - il, c'est Sljivancanin - "…vers 20

 19   heures et je sais qu'il a parlé au commandant".

 20   Donc il est bel et bien là. Ça, on en est sûr.

 21   Ensuite, lors du procès, Panic a témoigné pour dire qu'il n'avait

 22   jamais su qui avait donné l'ordre du retrait. C'est sa position. Il n'a

 23   jamais su qui a bien pu donner cet ordre. Mais avec le temps, il a fini par

 24   accepter ou il a fini par conclure, avec énormément de réticence, que

 25   c'était très certainement Mrksic qui avait donné cet ordre. Je vous invite

 26   d'ailleurs à lire avec attention le témoignage de Panic, pages 14 409 à 10

 27   et 14 999 à 14 502. Voici ce qui est dit; à la page 14 409, on pose à M.

 28   Panic la question suivante :

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  1   "Question : Mais qui devait remettre ces personnes aux autorités civiles ?

  2   "Réponse : Mais, c'est là le problème. C'est ça ce qu'il faut prouver.

  3   "Question : Et vous savez qui ?

  4   "Réponse : Non, je ne sais pas. Mais lorsque cela deviendra évident, on

  5   saura toute la vérité sur ce qui s'est passé. Il n'était pas censé y avoir

  6   de transmission à qui que ce soit. Ils étaient censés être filtrés,

  7   choisis, sélectionnés. On devait séparer les combattants des non-

  8   combattants, les malades des autres, et ils devaient être ensuite

  9   transportés à Sremska Mitrovica. On n'a jamais rien dit en présence de qui

 10   que ce soit au poste de commandement, dans les casernes ou ailleurs, à

 11   l'époque, à propos d'une remise de ces prisonniers aux autorités civiles.

 12   Le problème de savoir qui les a remis, c'est quelque chose qui doit être

 13   prouvé. Et une fois que ce sera prouvé, on saura exactement ce qui s'est

 14   passé."

 15   Ce qu'il est en train de dire, personne n'a jamais dit quoi que ce

 16   soit, y compris au poste de commandement. Et il sait très bien que ici,

 17   c'est l'élément essentiel de ce point. Et il en a encore fait référence ce

 18   matin comme étant l'élément essentiel.

 19   Maintenant, à la page 14 998, Panic est contre-interrogé par

 20   l'Accusation et, avec réticence, il arrive à la conclusion suivante : ça

 21   doit être Mrksic qui a donné l'ordre. C'est tout à fait étrange de le voir

 22   ce matin nous dire qu'il a été vraiment choqué lorsqu'il a lu l'arrêt,

 23   alors qu'au cours du procès, il a bien montré qu'il avait conclu plus ou

 24   moins que l'ordre devait venir de Mrksic. Enfin, cela dit, ce sera à vous

 25   d'en juger. A la page 14 498, l'Accusation présente à Panic sa première

 26   déclaration au bureau du Procureur. C'est au paragraphe 32 de cette

 27   déclaration au bureau du Procureur. On lui lit; M. Weiner, le substitut du

 28   Procureur le lit : 

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  1   "Question : A mon avis, les deux questions essentielles à propos d'Ovcara

  2   sont les suivantes : Premièrement, pendant combien de temps est-ce que la

  3   JNA a pu assurer la garde auprès du hangar; et deuxièmement, pourquoi la

  4   JNA a-t-elle quitté cette zone ? Cet ordre de retrait de la police

  5   militaire n'a pu être donné que par le commandant de la police militaire,

  6   soit de la 80e Brigade motorisée soit de la Brigade des Gardes. En tant que

  7   commandant de l'OG sud, le commandant Mile Mrksic était le plus haut gradé

  8   dans la région, ce qui signifie que l'ordre de retrait de la JNA a dû être

  9   donné, ou autorisé par cette personne. Je connais très bien Mrksic. Je ne

 10   peux pas imaginer qu'il donne un ordre de ce genre. Cela dit, l'ordre de

 11   retrait de la police militaire ne pouvait venir que de lui. La police

 12   militaire de la 80e Brigade motorisée s'est retirée sur ordre de la JNA,

 13   elle n'a pas été forcée par la TO serbe locale. Le lieutenant-colonel

 14   Vojnovic aurait pu ordonner ce retrait, mais il aurait dû consulter Mrksic.

 15   Il est possible que quelqu'un ait effectué le retrait de la police

 16   militaire de la 80e Brigade motorisée sans autorisation, mais c'aurait été

 17   une infraction au règlement.

 18   C'est bien ce que vous avez dit ?

 19   "Réponse : Oui."

 20   Et ensuite, dans les quatre pages suivantes, Panic acquiesce à toutes les

 21   propositions qui lui sont présentées.

 22   A partir de ces faits, les faits à savoir qu'il était présent et qu'il n'a

 23   jamais su que Mrksic avait donné l'ordre du retrait, ces faits ont été

 24   établis au procès. Et Panic nie avoir entendu Mrksic parler à Sljivancanin

 25   ce soir-là ou même à aucun moment que ce soit qu'il a ordonné le retrait de

 26   la 80e d'Ovcara. Il est vrai que Panic n'a jamais dit de façon positive au

 27   procès, il n'a jamais dit dans sa déposition : Je n'ai pas entendu Mrksic

 28   dire à Sljivancanin qu'il avait donné l'ordre de faire retirer les hommes

Page 133

  1   chargés de la sécurité à Ovcara. Mais c'est la seule conséquence logique de

  2   sa déposition ainsi que celle de Sljivancanin au procès. Donc j'aborde ici

  3   des éléments de preuve et l'interprétation que fait M. Bourgon, eu égard à

  4   ce nouveau fait. Nous estimons en fait que ceci est trop rétréci. C'est

  5   quelque chose qui a déjà été présenté aux Juges de la Chambre d'appel.

  6   Mais deuxièmement, et l'approche la plus correcte consiste à dire que Panic

  7   n'ajoute rien de plus par rapport à ce que Sljivancanin a déjà dit dans sa

  8   déposition pendant le procès. Ce qu'il propose, c'est simplement des

  9   éléments de preuve supplémentaires d'un fait qui a déjà été plaidé et

 10   examiné. Ce fait, et j'ai insisté au cours de mes arguments, consiste à

 11   dire et à se porter sur ce que Sljivancanin a appris, quand il l'a appris,

 12   où il l'a appris, de qui il l'a appris; autrement dit, qui, quoi, quand,

 13   comment, où, que j'ai évoqué un peu plus tôt cet après-midi.

 14   Et ce témoignage que nous avons entendu de M. Panic aujourd'hui ne diffère

 15   en rien des éléments de preuve supplémentaires que les Juges de la Chambre

 16   d'appel ont rejetés en tant que fait nouveau lors de toute une série de cas

 17   en révision. Et notre point de vue est différent. Il défère pour beaucoup

 18   de l'argument avancé par le requérant cet après-midi, eu égard à ce fait

 19   nouveau. Et nous demandons aux Juges de la Chambre d'appel d'appuyer

 20   l'Accusation. Je ne vais pas passer en revue toutes ces affaires. La

 21   Chambre d'appel, par exemple, a rejeté en tant que fait nouveau de nouveaux

 22   éléments qui avaient été présentés pour établir un alibi qui avait déjà été

 23   présenté au moment du procès dans l'affaire Josipovic le 7 mars 2003,

 24   l'affaire ou les affaires Niyitegeka. Et la raison avancée par la Chambre

 25   d'appel était de dire que la question d'alibi avait déjà été plaidée et

 26   examinée pendant le procès.

 27   La Chambre d'appel a également rejeté en tant que fait nouveau de nouveaux

 28   éléments qui avaient tendance à montrer que, par exemple, lorsqu'une

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  1   Chambre de première instance s'est reposée sur un témoin qui n'était pas

  2   crédible; dans l'affaire Naletilic, une décision rendue le 19 mars 2009 et

  3   la décision rendue dans l'affaire Niyitegeka le 12 mars 2007. Pourquoi la

  4   Chambre a-t-elle rejeté cela ? Parce que la question de crédibilité avait

  5   déjà été abordée au moment du procès.

  6   De même, Madame, Messieurs les Juges, vous avez refusé de placer dans la

  7   catégorie de fait nouveau des éléments de preuve qui avaient été présentés

  8   qui avaient tendance à minimiser l'identité de l'accusé comme assaillant du

  9   crime dans l'affaire Delic, du 24 avril 2002. Si vous vous penchez sur le

 10   raisonnement, comment cela se fait-il ? La Chambre d'appel a indiqué que

 11   c'était en raison de l'identité de l'accusé comme étant la personne qui a

 12   fait sortir la victime et que ceci avait déjà été débattu et examiné durant

 13   le procès.

 14   De même, dans l'affaire Radic, 31 octobre 2006, pourquoi cette

 15   Chambre a rejeté comme fait nouveau de nouveaux éléments de preuve qui

 16   montraient que l'accusé n'avait aucun accès à une pièce dans laquelle il a

 17   été constaté qu'il avait violé une victime. La question était celle de

 18   l'accès et de l'usage de cette pièce par l'accusé, qui avait déjà été

 19   examinée lors du procès.

 20   Et pour finir, Madame, Messieurs les Juges, vous avez rejeté comme un

 21   fait nouveau dans une demande de l'Accusation dans l'affaire Blaskic, le 23

 22   novembre 2006, vous avez rejeté comme fait nouveau de nouveaux éléments de

 23   preuve qui montraient que des ordres oraux auraient peut-être été donnés

 24   par l'accusé, encore une fois, en se fondant sur le fait et sur la question

 25   de savoir si l'accusé avait ordonné les crimes à Ahmici déjà examiné au

 26   procès, même s'il s'agissait d'ordres écrits.

 27   Le témoignage de Panic ne diffère en rien de ces autres cas que je viens

 28   d'évoquer dans lesquels la Chambre d'appel a rejeté cet élément

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  1   d'information nouveau et ne l'a pas passé dans la catégorie de fait

  2   nouveau. Nous souhaitons également que vous rejetiez, suite à ces

  3   précédents, le témoignage de Panic et que vous ne considériez pas qu'il

  4   s'agisse d'un fait nouveau, ce qui donnerait lieu à une révision.

  5   Je vais parler des différents critères appliqués lorsqu'il y a une demande

  6   en révision. Madame, Messieurs les Juges, je ne vais pas les examiner

  7   maintenant, puisque les deuxième et troisième critères ont déjà été

  8   longuement abordés dans notre mémoire en réponse; le quatrième critère

  9   également, lorsqu'il s'agit d'une demande en révision. Et nous nous en

 10   tenons aux arguments déjà présentés dans notre mémoire en clôture.

 11   Dans ma conclusion, je souhaite réitérer un certain nombre de points

 12   évoqués par M. Rogers ce matin, lorsqu'il a parlé du témoignage de M.

 13   Panic. Son témoignage n'est pas crédible. On ne peut pas raisonnablement

 14   considérer qu'il s'agit de quelque chose de crédible. Ceci est proposé 18

 15   ans après les événements pour essayer de marquer une distance entre lui et

 16   Sljivancanin, de toute forme de responsabilité que ce soit, par rapport à

 17   ce qui est arrivé aux prisonniers d'Ovcara.

 18   Je souhaite brièvement répondre à une question évoquée par Me Bourgon cet

 19   après-midi, lorsqu'il a indiqué qu'il était surpris par le fait que

 20   l'Accusation avait demandé à cette Chambre d'appliquer des constatations

 21   précises sur la question de la crédibilité à laquelle est arrivée la

 22   Chambre de première instance et d'appliquer ce raisonnement à des questions

 23   qui n'avaient jamais été posées à Panic. Peut-être que je n'ai compris ce

 24   qu'il a dit, mais il semble ne pas comprendre ce que nous disons. Ce que

 25   nous faisons valoir, c'est que la même analyse sur la crédibilité, qui est

 26   fondamentale et qui est analysée par la Chambre de première instance, doit

 27   s'appliquer aujourd'hui. Tout d'abord, Madame, Messieurs les Juges, vous

 28   avez retenu les constatations au niveau de la crédibilité faites par la

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  1   Chambre de première instance à propos de Panic. Mais deuxièmement, le même

  2   raisonnement qui a été appliqué par la Chambre de première instance

  3   s'applique à votre examen de son témoignage aujourd'hui, car en termes très

  4   simples, lorsque Panic commence à aborder des questions qui pourraient

  5   l'impliquer ou le compromettre ou ne pas se présenter son rôle ou le rôle

  6   qu'il a joué sous un angle favorable, à ce moment-là, comme l'a dit M.

  7   Rogers, il est économe avec la vérité, et je dirais qu'il n'est pas

  8   crédible et qu'il sous-estime son rôle, sa connaissance des événements et

  9   ce qu'il a vu et entendu. Il s'agit encore d'un autre exemple de ce que

 10   nous avons entendu ce matin. Il prend des distances par rapport à tout ce

 11   qui pourrait augmenter sa responsabilité d'une manière ou d'une autre ou le

 12   toucher, de près ou de loin.

 13   Mais, Madame, Messieurs les Juges, même si vous estimiez que le témoignage

 14   de M. Panic est crédible, même si vous qualifiez les faits débattus à la

 15   lumière d'une interprétation étroite ou large, si vous parlez de

 16   Sljivancanin, s'il a appris le retrait des troupes, si vous qualifiez ceci,

 17   qualifiez la conversation de Sljivancanin avec Mrksic, si vous la qualifiez

 18   au sens étroit du terme, à savoir que le requérant aurait présenté les

 19   choses à Panic mais qu'il n'a pas entendu Mrksic dire ceci à Sljivancanin

 20   et qu'il ait donné l'ordre, quelle que soit la façon dont vous qualifiez le

 21   fait ancien par rapport au fait nouveau, vous ne pourrez pas conclure que

 22   ce nouvel élément constitue un fait nouveau, car il ne répond pas à ce

 23   critère-là.

 24   J'en ai terminé avec la présentation de mes arguments cet après-midi, et je

 25   serai tout à fait heureuse de pouvoir répondre à des questions si vous en

 26   avez.

 27   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci, Madame Brady. Je ne sais pas

 28   s'il y a des questions.

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  1   Les 15 dernières minutes.

  2   M. BOURGON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais essayer

  3   de faire plus court. La première question que je souhaite aborder et à

  4   laquelle je souhaite répondre est la question qui a été abordée par mon

  5   collègue de l'Accusation, le mémo que nous avons reçu du CLSS, des services

  6   de traduction sur la question de la traduction. A l'origine, la traduction

  7   nous est revenue du service de traduction du Tribunal. Sur la première

  8   question, les services ont dit "J'ai voulu dire" et "Je leur ai dit". Ils

  9   sont d'accord, nous sommes d'accord. Pour ce qui est de la deuxième

 10   question, cette traduction est revenue et le "eux" et "les" étaient

 11   toujours là. Nous avons réécouté la bande, nous avons renvoyé le document

 12   au service de traduction et d'après nous, "nous voulions leur dire", le

 13   "leur" n'y figurait pas. Alors, question qui se pose est que le verbe

 14   "informer" nécessite un objet. Ça doit être un verbe plus un objet. Ça doit

 15   être "lui" ou "eux" ou "les". Si vous lisez ce paragraphe, qui se lit comme

 16   suit, le paragraphe exact se lit comme suit :

 17   "Je les ai brièvement informés sur ce qui se passait, en somme, à

 18   l'hôpital…"

 19   Mais si vous lisez l'ensemble du paragraphe en question, "je suis passé

 20   voir Mrksic", "je suis passé voir Mrksic et je les ai informés," il doit y

 21   avoir une virgule, "et je l'ai informé." Pour être logique, s'il s'agit du

 22   même paragraphe, il ne peut pas parler de lui et ensuite parler d'eux.

 23   L'objet est là mais le complément d'objet devait certainement être "lui".

 24   C'est en tout cas l'argument que nous avançons, et nous pouvons vérifier,

 25   bien sûr.

 26   La deuxième question que je souhaite aborder, Monsieur le Président, est la

 27   suivante. Ma collègue a dit que -- à savoir si oui ou non il y avait un

 28   argument en faveur de l'entreprise criminelle commune ne fait aucune

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  1   différence. Monsieur le Président, nous estimons que ceci fait une

  2   différence, car il est important de savoir quelles questions sont posées au

  3   témoin et quels sont les éléments que tente de recueillir l'Accusation

  4   lorsqu'elle pose sa question. Et si elle souhaite étayer sa thèse de

  5   l'entreprise criminelle commune, l'Accusation souhaitait s'assurer du fait

  6   que Sljivancanin faisait partie du processus et qu'il a participé à la

  7   transmission de l'ordre. Et, bien évidemment, comme nous le savons tous,

  8   ils ont échoué et n'ont pas pu faire valoir leur argument. La Chambre de

  9   première instance a indiqué qu'il n'y avait pas d'entreprise criminelle

 10   commune et qu'il n'y avait pas de participation de Sljivancanin dans la

 11   transmission de l'ordre. Si cette question a été débattue au procès, cela a

 12   été fait au procès.

 13   La connaissance de Sljivancanin sur le retrait en tant que tel n'est pas

 14   quelque chose qui a été débattu dans le procès. C'est quelque chose que

 15   nous avons déjà abordé dans nos mémoires. A savoir si c'est devenu une

 16   question litigieuse en appel, voilà, nous estimons que non. Si cette

 17   question avait été une question litigieuse présentée en appel, dans ce cas,

 18   l'Accusation en aurait fait un moyen d'appel. L'Accusation n'aurait pas dit

 19   que la Chambre d'appel avait commis une erreur en disant que Sljivancanin

 20   ne disposait pas de l'élément mental nécessaire lorsqu'il était à Ovcara.

 21   Ils auraient dit que la Chambre d'appel a commis une erreur parce qu'ils

 22   n'ont pas réussi à démontrer que Mrksic l'avait informé et qu'il disposait

 23   de l'élément mental nécessaire pendant la nuit. Ça n'est pas du tout ce

 24   qu'ils ont dit. En fait, ils ont dit dans leur argument qu'à 8 heures, au

 25   poste de commandement, il a appris davantage et qu'il a encore appris plus

 26   par la suite, mais ceci n'a pas fait l'objet de débats.

 27   Ils insistent sans cesse sur la question de l'élément litigieux.

 28   Evidemment, cette question porte à confusion. On essaie de savoir s'il

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  1   s'agit d'un fait qui est débattu, si c'est un fait matériel, un fait-clé.

  2   En fait, le problème est ailleurs. Ce qui est important, c'est de savoir si

  3   l'instance qui a pris la décision, qui a rendu la décision était informée.

  4   Nous n'avons pas entendu grand-chose à ce sujet aujourd'hui, mais

  5   l'Accusation a dit que ceci faisait partie du dossier, déjà. C'est une

  6   surprise pour moi. Si ceci avait fait partie du dossier au moment où la

  7   Chambre d'appel a posé la question à l'Accusation : quand Mrksic a-t-il

  8   appris ou quand Sljivancanin a-t-il eu connaissance de l'ordre donné par

  9   Mrksic ? Comment se fait-il qu'ils n'aient jamais évoqué quoi que ce soit à

 10   cet effet lorsqu'ils ont répondu à la question posée par les Juges de la

 11   Chambre d'appel ? Ils n'ont jamais dit que ceci figure déjà au dossier, que

 12   Panic a dit ceci ou cela. Rien de tout ceci n'a été évoqué par

 13   l'Accusation. Je peux deviner pourquoi, mais cela n'est pas là où je veux

 14   en venir.

 15   La même chose vaut pour nous. Nous, est-ce que l'intimé a répondu à cela

 16   par rapport à ce qui était dans le dossier ? Est-ce que cela fait l'ombre

 17   d'un doute dans l'esprit de quiconque dans ce prétoire ? Si nous avions su

 18   ce que Panic allait dire ce matin, que nous ne nous en serions pas servis

 19   lorsque nous avons dû répondre à la question posée par la Chambre d'appel,

 20   nous vous l'aurions dit alors, nous vous aurions dit, Monsieur le

 21   Président, nous aurions parlé de Panic. Et nous ne l'avons pas fait.

 22   Nous représentons l'intimé, et donc, si c'était une question

 23   débattue, comment se fait-il que l'Accusation n'ait pas soulevé la question

 24   ? Ils ne l'ont pas expliqué aujourd'hui, ils n'ont pas posé la question à

 25   Sljivancanin. Comment se fait-il qu'ils n'aient pas posé la question à

 26   Panic ? Comment se fait-il qu'ils n'aient pas posé la question à qui que ce

 27   soit ? Si vous regardez la jurisprudence, si vous regardez les définitions,

 28   si vous vous penchez sur ce qui est important aujourd'hui pour qu'une

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  1   demande de révision soit acceptée, on ne peut parvenir qu'à une seule

  2   conclusion : le témoignage que nous avons entendu ce matin constitue un

  3   fait nouveau. Merci.

  4   M. LE JUGE MERON : [interprétation] Merci beaucoup. Cette audience portant

  5   sur les éléments de preuve est maintenant terminée. Je souhaite tout

  6   d'abord dire que je souhaite dire à M. Panic, et nous le remercions, qu'il

  7   peut rentrer chez lui. Je souhaite remercier le Greffe, les interprètes,

  8   bien sûr, ainsi que les parties, pour les arguments qu'ils ont présentés

  9   aujourd'hui et pour avoir adhéré au temps qui leur a été imparti. Nous

 10   rendrons notre décision lorsque nous serons prêts. Je vous remercie.

 11   --- L'audience est levée à 16 heures 03.

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