Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL               AFFAIRE N° IT-96-21-T

  2   POUR L'EX-YOUGOSLAVIE  

  3  

  4   Lundi 11 août 1997

  5   L'audience est ouverte à 10 heures 05.

  6   M. le Président (interprétation). - Mesdames et

  7   Messieurs, bonjour. Nous sommes donc de retour ce matin. Maître Niemann,

  8   où en sommes-nous ?

  9   M. Niemann (interprétation). - Nous sommes prêts à procéder.

 10   M. le Président (interprétation). - Les comparutions.

 11   M. Niemann (interprétation). - Je m'appelle Grant Niemann, je

 12   comparai ce matin avec Me McHenry, Me Turone et Me VanDusschoten, au nom

 13   de l'accusation.

 14   M. le Président (interprétation). - Pour la défense ?

 15   Mme Residovic (interprétation) - Bonjour, Madame et

 16   Messieurs les Juges. Je m'appelle Edina Residovic. Je défends M. Delalic,

 17   avec Me Eugene O’Sullivan, professeur canadien. Merci.

 18   M. Olujic (interprétation) - Bonjour, Madame et Messieurs les

 19   Juges. Je m'appelle Zeljko Olujic, je défends M. Zdravko Mucic. Hélas, mon

 20   confrère, Me Greaves est indisposé ce matin. Il ne pourra pas comparaître

 21   ce matin. J'espère qu'il se remettra rapidement et, avec votre permission,

 22   je demanderai que mon assistant, M. Miko Duric (?), qui a suivi les débats

 23   du procès depuis Naganre (?), soit présent jusqu'au retour de Me Greaves.

 24   Si le besoin s'en fait sentir nous présenterons une procuration.

 25   M. Karabdic (interprétation) - Bonjour, Madame et Messieurs les


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  1   Juges. Je m'appelle Salih Karabdic. Je défends M. Hazim Delic, avec

  2   Me Thomas Moran, avocat du Texas.

  3   M. Ackerman (interprétation). - Je m’appelle John Ackerman. Je

  4   comparai ici pour défendre M. Esad Landzo, en compagnie de

  5   Me Cynthia McMurrey, avocat de Houston.

  6   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Le

  7   transcript n’apparaît pas à l’écran. Que se passe-t-il ?

  8   Avant que vous ne commenciez, il faudrait peut-être permettre à

  9   l’assistant de Me Olujic d’entrer dans le prétoire, puisque Me Greaves

 10   n'est pas bien, mais nous pouvons y aller.

 11   M. Niemann (interprétation). - J'aimerais présenter une requête,

 12   au tout début. Il y a un témoin dénommé Harraz, il était le suivant dans

 13   la liste. Cette requête le concerne.

 14   En effet, il y a deux motifs à cela. Le témoin lui-même tient à

 15   déposer aujourd'hui. Puis, il voudrait retourner chez lui car il a

 16   d'autres engagements. Mais il y a peut-être une raison plus importante. Il

 17   a fallu prendre des dispositifs particuliers, parce que ce témoin parle

 18   arabe et nous avons dû veiller à avoir des interprètes qui soient amenés

 19   au Tribunal pour permettre l'interprétation.

 20   Il m'a été dit que les frais encourus pour cela sont très

 21   élevés. Il faut payer les interprètes, qu'on les utilise ou pas. Ils se

 22   trouvent ici aujourd'hui et ils sont prêts à travailler. Si nous

 23   n'utilisons pas ces interprètes, il faudra quand même que le Tribunal

 24   veille à assurer leurs frais. Alors que cela ne concerne pas le témoin,

 25   que nous aimerions repousser pour le moment. Voilà les motifs pour


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  1   lesquels nous présentons cette requête.

  2   M. le Président (interprétation). - D'accord, pour que vous

  3   puissiez permuter l'ordre de comparution des témoins.

  4   M. Niemann (interprétation). - Je vous remercie.

  5   M. le Président (interprétation). - Faites entrer le témoin.

  6   Mme McHenry  (interprétation). - Bonjour Madame et Messieurs les

  7   Juges. C'est M. Assaad Harraz qui va comparaître. Je vais l'appeler.

  8   (Le témoin est introduit dans la salle d’audience.)

  9   Mme McHenry  (interprétation). - S'agissant du serment,

 10   j'aimerais dire au Greffe que le témoin parle anglais et je pense qu'il

 11   pourra prêter serment en anglais. Ce serait peut-être plus simple de cette

 12   façon.

 13   M. le Président (interprétation). - Il a un interprète avec lui.

 14   Mme McHenry  (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Il

 15   parle l'anglais, certes, mais il ne se sentirait pas à l'aise s'il devait

 16   déposer en anglais.

 17   M. le Président (interprétation). - Il faudrait d'abord que

 18   l'interprète prête serment.

 19   L’Interprète (interpétation). -  Je déclare solennellement que

 20   j'interpréterai avec fidélité, avec impartialité et en respectant

 21   pleinement mon devoir de confidentialité.

 22   M. Harraz (interprétation). - Je déclare solennellement que je

 23   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 24   Mme McHenry (interprétation). - Puis-je procéder ?

 25   M. le Président (interprétation). - Allez-y.


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  1   Mme McHenry (interprétation). - Pourriez-vous décliner votre

  2   identité ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Hassan Harraz.

  4   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous d'autres surnoms ?

  5   M. Harraz (interprétation). - Non.

  6   Mme McHenry (interprétation). - Votre nationalité ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Egyptienne.

  8   Mme McHenry (interprétation). - Quel âge avez-vous ?

  9   M. Harraz (interprétation). - J'ai 42 ans.

 10   Mme McHenry (interprétation). - Quelle est votre profession ?

 11   M. Harraz (interprétation). - Je suis journaliste.

 12   Mme McHenry (interprétation). - Lorsque vous faites des

 13   publications, utilisez-vous toujours votre identité ou avez-vous un nom de

 14   plume ?

 15   M. Harraz (interprétation). - Je donne le nom Hassad†Taha.

 16   Mme McHenry (interprétation). - C'est un nom que vous utilisez

 17   quelquefois pour vos publications ?

 18   M. Harraz (interprétation). - Taha est le nom de mon père. Mon

 19   nom est également Hassan†Taha.

 20   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, vous vous trouviez en

 21   ex-Yougoslavie en†1992, n'est-ce pas ?

 22   M. Harraz (interprétation). - Oui

 23   Mme McHenry (interprétation). - Pour qui travailliez-vous à

 24   l'époque ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Je travaillais pour plusieurs


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  1   quotidiens en tant que free-lance, journaliste free-lance.

  2   Mme McHenry (interprétation). - Quelle langue parlez-vous,

  3   Monsieur ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Je parle arabe, un peu d'anglais

  5   et un peu d'allemand.

  6   Mme McHenry (interprétation). - En ex-Yougoslavie, en†1992,

  7   avez-vous eu l'occasion d'aller à Konjic, qui se trouve en Bosnie-

  8   Herzégovine?

  9   M. Harraz (interprétation). - Oui, je suis allé à Konjic à cette

 10   époque.

 11   M. le Président (interprétation). - Poursuivez, Madame.

 12   Mme McHenry (interprétation. - Merci. Pourriez-vous nous dire

 13   quand vous vous êtes rendu à Konjic, approximativement ?

 14   M. Harraz (interprétation). - En mai†1992.

 15   Mme McHenry (interprétation). - Bien. Pour que tout soit bien

 16   précis, pour qu'il n'y ait pas d'erreur d'interprétation, vous avez bien

 17   dit: mai 1992 ?

 18   M. Harraz. (interprétation) - Exactement. Pour autant que je

 19   m'en souvienne, je me trouvais à Konjic en mai†1992.

 20   Mme McHenry (interprétation). - Pourriez-vous rapidement nous

 21   dire comment vous avez organisé votre voyage ? Qui vous a accompagné ?

 22   Parlez-nous un peu de la logistique qui accompagnait ce voyage.

 23   M. Harraz (interprétation). - Au départ, rien n'avait été prévu

 24   ni préparé, étant donné les circonstances qui régnaient à l'époque dans la

 25   région : vous savez qu'il y avait la guerre. Je suis allé à Split et, là


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  1   j'ai rencontré certaines personnes. Elles nous ont aidés à nous déplacer

  2   dans des zones où il y avait le conflit. Non pas que nous avions

  3   l'intention d'aller à Konjic particulièrement; nous voulions aller dans

  4   des régions où il y avait des combats

  5   Mme McHenry (interprétation). -  Qui vous a accompagné dans ce

  6   voyage?

  7   M. Harraz (interprétation). - Certains Bosniaques, dont je ne me

  8   souviens plus le nom, nous ont accompagnés. Il y avait aussi une autre

  9   personne que j'avais rencontrée, un cameraman.

 10   Mme McHenry (interprétation). - Connaissez-vous le nom de cette

 11   autre personne et d'où elle était ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Ahmed†Ahmech*.

 13   Mme McHenry (interprétation). - Savez-vous d'où était cette

 14   personne ?

 15   M. Harraz (interprétation). - Je crois qu'il était de Lybie.

 16   Mme McHenry (interprétation). - Vous dites qu'il était

 17   caméramen ? Etait-il caméraman pour vous ou était-il lui aussi

 18   indépendant ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Il était indépendant, mais je l'ai

 20   rencontré à Zagreb.

 21   Mme McHenry (interprétation). - Vous dites qu'il était

 22   caméraman. Je peux supposer dès lors qu'il avait une caméra vidéo.

 23   M. Harraz (interprétation). - Oui, il avait un équipement

 24   professionnel, une caméra professionnelle.

 25   Mme McHenry (interprétation). - Etiez-vous aussi accompagné d'un


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  1   interprète ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Oui, j'avais un interprète parlant

  3   arabe, que j'ai rencontré à Split.

  4   Mais j'aimerais préciser l’un de mes dires du début. J'étais en

  5   Bosnie en mai†1992, mais c'est fin juin ou en juillet que je me suis

  6   trouvé à Konjic. Je ne me souviens plus exactement.

  7   Mme McHenry (interprétation). - Merci. S'agissant de

  8   l'interprète, vous avez dit que c'était un interprète arabe. Est-ce que je

  9   comprends bien : cette personne parlait à la fois arabe et serbo-croate,

 10   et était d'origine arabe ? Est-ce bien ce que vous voulez dire ?

 11   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'était un étudiant arabe qui

 12   étudiait en ex-Yougoslavie. Il parlait donc très bien la langue du pays.

 13   Bien sûr, il parlait arabe.

 14   Mme McHenry (interprétation). - Merci. Aviez-vous une caméra sur

 15   vous, pas une caméra vidéo mais une caméra ordinaire. ?

 16   M. Harraz (interprétation). - Oui. C'était peut-être un appareil

 17   photo.

 18   Mme McHenry (interprétation). - Hormis Konjic, où êtes-vous allé

 19   dans cette région ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Après Konjic, je suis allé à Split

 21   et, de là à Zagreb.

 22   Mme McHenry (interprétation). - Au cours de ce voyage et avant

 23   que vous n'alliez à Konjic, avez-vous visité d'autres régions de la

 24   Bosnie ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Je me souviens être allé à Mostar


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  1   mais je ne sais pas si, à cette époque précise, je suis allé à Zenica.

  2   Mme McHenry (interprétation). - Pourriez-vous dire combien de

  3   temps vous avez passé, à partir de Split jusqu'à la fin de votre séjour,

  4   en Bosnie ?

  5   M. Harraz (interprétation). - Moins d'une semaine, peut-être

  6   cinq jours.

  7   Mme McHenry (interprétation). - Pourriez-vous rapidement nous

  8   dire où vous êtes allé, ce que vous avez fait au cours de ce voyage ?

  9   M. Harraz (interprétation). - Nous sommes arrivés à Konjic, le

 10   soir. Nous avons rencontré une des personnes responsables, Rosim†Hadzi.

 11   Nous avons parlé avec lui. En fait, nous avons même eu une interview avec

 12   lui et, le lendemain, nous sommes allés au camp.

 13   Il se peut qu'il y ait d'autres éléments dont je ne me souviens

 14   plus aujourd'hui, mais, vers la fin de la journée, nous avons rendu visite

 15   au commandant de la région.

 16   Mme McHenry (interprétation). -  Vous souvenez-vous du nom qui

 17   était donné à ce camp où vous êtes allé en visite ?

 18   M. Harraz (interprétation) - Non. Je sais que c'était un camp

 19   pour des personnes détenues, pour des prisonniers, mais je ne me souviens

 20   plus du nom.

 21   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous rédigé un article

 22   intitulé... rappelant vos expériences au cours de ce voyage ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Oui, cela a été publié dans

 24   Asharq-Al-Awsat, un quotidien.

 25   Mme McHenry (interprétation). -  Pourriez-vous nous dire,


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  1   s'agissant de ce quotidien, où il sort et dans quelle langue il est

  2   publié ?

  3   M. Harraz (interprétation). - C'est un quotidien, comme je vous

  4   le disais, en langue arabe, mais publié à Londres. Il est financé par un

  5   grand financier saoudien.

  6   Mme McHenry (interprétation). -  Quand avez-vous publié cet

  7   article, combien de temps après être rentré de ce voyage ?

  8   M. Harraz (interprétation). - Je crois qu'entre le début du

  9   voyage et la publication, il a dû s'écouler une ou deux semaines.

 10   Mme McHenry (interprétation). - Avec l'aide de l'Huissier,

 11   j'aimerais qu'on montre au témoin... En tout cas, d'abord, je voudrais que

 12   cela soit numéroté aux fins d'identification, après quoi le document sera

 13   présenté au témoin. La défense a déjà reçu exemplaire de cette pièce.

 14   M. le Greffier (interprétation). - Il s'agira de la pièce 167,

 15   la traduction portant la cote 167/A.

 16   M. Harraz (interprétation). - C'est l'article que j'ai publié

 17   dans le quotidien.

 18   Mme McHenry (interprétation). - Je demanderai à l'interprète de

 19   parler un peu plus fort.

 20   Pourriez-vous dire rapidement quelle était la teneur de cet

 21   article, sur quoi il portait ?

 22   M. Harraz (interprétation). - Dans cet article, j'ai décrit ce

 23   que j'ai vu dans ce camp de Konjic. J'ai relaté les scènes auxquelles j'ai

 24   assistées dans ce camp.

 25   Mme McHenry (interprétation). - A quelle date cet article a-t-il


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  1   été publié ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Le vendredi 24 juillet 1992.

  3   Mme McHenry (interprétation). - J'aimerais vous montrer

  4   désormais une autre pièce, toujours avec l'aide de l'Huissier. Ces pièces

  5   ont déjà été présentées et fournies au conseil de la défense.

  6   Monsieur, on est en train de vous présenter la pièce de

  7   l'accusation 168. Je vous demanderai de l'examiner et de nous dire si vous

  8   reconnaissez cette pièce, auquel cas vous nous direz de quoi il s'agit.

  9   M. Harraz (interprétation). - Dans cet article, publié le samedi

 10   25 juillet 1992, je parle des unités de combat qui se trouvaient dans la

 11   région et d'un entretien que j'ai eu avec le commandant de la région,

 12   Zejnil Din.

 13   Mme McHenry (interprétation). - Ces deux pièces représentent-

 14   elles votre écrit, ce que vous-même avez rédigé de ces articles qui ont

 15   été publiés ?

 16   M. Harraz (interprétation). - Oui, ce sont les copies que j'ai

 17   gardées pour moi-même après que les articles ont été publiés ces jours-là.

 18   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous eu l'occasion de

 19   revoir ces articles de suite après leur publication ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Oui, je les ai lus. Je pense que

 21   la quintessence est tout à fait correcte et correspond à ce que j'ai

 22   envoyé. Je n'ai pas vérifié le mot à mot, mais l'essentiel est bien

 23   repris. C'est bien ce que j'ai envoyé au quotidien.

 24   Mme McHenry (interprétation). - Ces informations, que vous avez

 25   envoyées à ces directions de quotidiens, représentent-elles bien ce que


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  1   vous avez vécu à Konjic ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Oui. Je tenais toujours à vérifier

  3   que c'était bien ce que j'avais vu pour voir, si c'était bien la réalité.

  4   Mais effectivement, c'est ce que j'ai vu, de mes yeux vus.

  5   Mme McHenry (interprétation). - Il y a des photos aussi qui

  6   accompagnent les articles. Qui les a prises ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Moi-même.

  8   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous toujours les négatifs

  9   de ces photos prises au cours du voyage ou d'autres photos qui n'auraient

 10   pas été publiées ?

 11   M. Harraz (interprétation). - Etant donné que je voyageais

 12   constamment d'une région à l'autre, d'un endroit à l'autre, je crois avoir

 13   perdu les négatifs.

 14   Mme McHenry (interprétation). - A votre connaissance, auriez-

 15   vous d'autres photos qui n'auraient pas été publiées, mais qui seraient

 16   toujours en votre possession ?

 17   M. Harraz (interprétation). - Je vous l'ai dit, hélas, du fait

 18   de mes déplacements permanents ces dernières années, je ne pense pas

 19   détenir d'autres négatifs ou des photos supplémentaires qui pourraient

 20   vous aider.

 21   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous encore des notes que

 22   vous auriez prises au cours du voyage ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Non. Je ne les ai pas gardées.

 24   Mme McHenry (interprétation). - Merci. Ai-je raison de dire que

 25   dans cet article un certain nombre de noms sont énoncés ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - C'est tout à fait exact. Il y a

  2   des noms, ceux des commandants que j'ai rencontrés.

  3   Mme McHenry (interprétation). - Pouvez-vous nous dire si oui ou

  4   non vous êtes, à l'heure actuelle, à même de nous dire comment il faut

  5   prononcer ces noms en serbo-croate, de nous dire comment il faut les

  6   écrire avec l'alphabet latin ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Je ne parle pas le serbo-croate

  8   moi-même, par conséquent j'avais écrit à l'époque ces noms de façon

  9   phonétique. J'avais entendu l'interprète les prononcer.

 10   Mme McHenry (interprétation). - Est-il exact que l'alphabet

 11   romain et l'alphabet arabe sont des alphabets très différents l'un de

 12   l'autre ?

 13   M. Harraz (interprétation). - C'est absolument exact. Il y a une

 14   différence entre ces deux alphabets. Il y a une différence du point de vue

 15   de l'écriture et de la prononciation. Par conséquent, j'ai transcrit ces

 16   noms phonétiquement.

 17   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, pouvez-vous nous

 18   donner les noms des personnes que vous avez rencontrées au cours de votre

 19   voyage, les postes qu'ils occupaient ? Connaissez-vous les noms et les

 20   postes de ces personnes ?

 21   J'aimerais ajouter que vous avez dit tout à l'heure avoir

 22   rencontré un Monsieur appelé Rosim Hadzi*, je crois que c'est ce que vous

 23   avez dit, est-ce exact ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Je me souviens de deux personnes.

 25   M. Zejnil Din et M. Rosim Hadzi. je ne me rappelle pas d'autres noms. Je


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  1   ne m'en souviens plus.

  2   En fait, cela me donne l'occasion de vous rappeler à tous que

  3   ces événements ont eu lieu il y a cinq ans. Il est, par conséquent, très

  4   difficile pour moi de me souvenir de chaque détail. Il est notamment à

  5   préciser que ce n'était pas une visite unique. C'est un voyage comme un

  6   autre. J'avais fait beaucoup de voyages au cours des dernières années dans

  7   de nombreuses régions. C'était un voyage parmi d'autres.

  8   Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur. Bien

  9   entendu, tout le monde comprend cela. En ce qui concerne M. Rosim Hadzi*,

 10   êtes-vous à même de nous dire quelle était sa position à l'époque de votre

 11   voyage ?

 12   M. Harraz (interprétation). - On me l'a présenté comme étant le

 13   dirigeant politique de la région. Il était la première personne que j'ai

 14   rencontrée lors de mon arrivée ce soir-là dans la région, comme je l'ai

 15   dit précédemment.

 16   Mme McHenry (interprétation). - En ce qui concerne Zejnil Din,

 17   quel était son poste à l'époque ?

 18   M. Harraz (interprétation). - On me l'a présenté comme étant le

 19   commandant de la région, le commandant général, le commandant militaire

 20   général pour la région.

 21   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, savez-vous qui a

 22   organisé ces rencontres avec M. Zejnil Din* ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Je ne me rappelle pas très bien.

 24   Je ne me souviens pas notamment des noms des personnes concernées, de plus

 25   je ne les ai jamais rencontrées, ni revues depuis.


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  1   Mme McHenry (interprétation). - Savez-vous qui a organisé votre

  2   visite au camp ?

  3   M. Harraz (interprétation). - M. Rosim Hadzi a organisé cette

  4   visite avec l'aide des autres personnes, comme je l’ai dis précédemment.

  5   Mais, je le répète, je ne me souviens pas des noms de ces autres

  6   personnes.

  7   Mme McHenry (interprétation). - A des fins d'éclaircissement,

  8   Monsieur, quelles visites M. Rosim Hadzi a-t-il organisées ? Une visite ?

  9   Deux visites ? Pouvez-vous le préciser et nous le dire, s'il vous plaît ?

 10   M. Harraz (interprétation). - M. Rosim Hadzi, en tant que

 11   dirigeant politique, responsable politique de la région, avait promis de

 12   nous permettre de couvrir les événements de la région pour les besoins des

 13   médias. Mais je ne me rappelle pas du tout des détails précis.

 14   Mme McHenry (interprétation). - Si vous vous souvenez, Monsieur,

 15   si vous vous en rappelez, pouvez-vous nous dire si M. Rosim Hadzi vous a

 16   aidé à rencontrer le commandant de la région, ou vous a-t-il aidé à vous

 17   rendre dans le camp ? Ou bien vous a-t-il aidé dans ces deux cas ?

 18   M. Harraz (interprétation). - En fait, le soir même, il nous a

 19   promis de nous apporter toute l'aide nécessaire, aide qui permettrait de

 20   rendre d'autres visites dans la région possibles. Il a insisté sur le fait

 21   que le matin suivant nous commencerions à visiter les régions

 22   environnantes. De fait, le lendemain matin, nous avons rendu visite au

 23   commandant. Nous nous sommes rendus au camp. Je ne me rappelle pas avoir

 24   visité une autre région ou un autre établissement. Il a fait cette

 25   promesse donc le soir même, et il a honoré sa promesse le lendemain matin.


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  1   Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie.

  2   M. Harraz (interprétation). - J’aimerais également ajouter, pour

  3   être plus précis, qu’à l'époque ce type de situation n'était pas du tout

  4   organisé. Il n'y avait pas de hiérarchie des membres dirigeants. Il y

  5   avait des dirigeants plus importants, des dirigeants moins importants,

  6   mais on peut dire que les choses étaient mal organisées. L’aide, qui nous

  7   était apportée, l'était sur une base personnelle ou individuelle, mais pas

  8   sur une base d'organisation hiérarchique ou d'organisation

  9   gouvernementale.

 10   Mme McHenry (interprétation). - En aviez-vous été informé ou

 11   est-ce l'impression que vous avez retiré de ce que vous avez pu voir ?

 12   M. Harraz (interprétation). - C’est l'impression que j'ai eue au

 13   vu de la situation générale qui prévalait en Bosnie, après le début de la

 14   guerre. Du fait de la faiblesse du camp musulman, les choses n'étaient pas

 15   entièrement organisées, notamment parce qu'ils ne disposaient pas d'une

 16   force militaire qui leur permettait de mettre en place la hiérarchie

 17   militaire dont ils avaient besoin.

 18   Mme McHenry (interprétation). - Lorsque vous vous êtes rendu au

 19   camp, avez-vous rencontré une personne qui était responsable du camp ?

 20   M. Harraz (interprétation). - J’ai rencontré une personne

 21   croate. On m'a dit que c'était l'homme qui était responsable du camp.

 22   Mme McHenry (interprétation). - Aujourd'hui, vous rappelez-vous

 23   du nom de cette personne ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Non, je ne me rappelle pas.

 25   Mme McHenry (interprétation). - Pouvez-vous nous dire comment il


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  1   est possible que vous vous rappeliez que cet homme, ce responsable, été

  2   d'origine croate ?

  3   M. Harraz (interprétation). - C’est ce dont je me souviens et je

  4   crois que c'est ce que j'ai dit dans l'article du journal. J'avais précisé

  5   qu'il était d'origine croate. Je ne me rappelle pas avoir rencontré un

  6   autre Croate occupant une telle position de responsabilité dans la région.

  7   Mme McHenry (interprétation). - Pour en revenir à votre

  8   déplacement au camp, vous rappelez-vous qui vous a reçu lors de votre

  9   arrivée au camp ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Comme je l’ai dit précédemment,

 11   j'ai été reçu par ce commandant croate. Il était accompagné de trois ou

 12   quatre autres personnes dont on m'a dit qu'elles étaient également

 13   responsables de la gestion du camp.

 14   Mme McHenry (interprétation). - Vous rappelez-vous du nom de ces

 15   personnes ?

 16   M. Harraz (interprétation). - Malheureusement pas.

 17   Mme McHenry (interprétation). - En ce qui concerne le groupe que

 18   vous avez rencontré, qui était la personne responsable, s'il y avait un

 19   responsable ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Excusez-moi, Madame, à quel groupe

 21   vous référez-vous ?

 22   Mme McHenry (interprétation). - Vous avez dit que vous aviez

 23   rencontré le commandant et quelques autres personnes. Je vous demande si

 24   vous vous rappelez qui, parmi ces personnes, était responsable de la

 25   gestion du camp ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - Ce dont je me souviens, c'est que

  2   cet homme croate, ce dirigeant croate, était responsable du camp.

  3   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous noté quelque chose de

  4   particulier quant à ses rapports avec les personnes qui étaient avec vous

  5   et qui vous ont accompagné lors de votre déplacement au camp ?

  6   M. Harraz (interprétation). - Il était évident qu'il était le

  7   commandant du camp, qu'il était le chef. C'est lui qui donnait les

  8   instructions à ceux qui l'entouraient.

  9   Mme McHenry (interprétation). - Pouvez-vous brièvement nous dire

 10   ce que vous avez fait lors de votre visite au camp et combien de temps

 11   cette visite a durée ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Oui, absolument. Nous avons visité

 13   les bâtiments dans lesquels étaient les personnes détenues. Je crois qu'il

 14   s'agissait de deux bâtiments. Puis, nous avons visité une petite pièce où

 15   se trouvaient quelques malades. Ensuite, j'ai posé des questions à des

 16   personnes détenues, mais de façon très brève. Je leur ai demandé pourquoi

 17   elles étaient détenues là, comment cela était arrivé. Au cours de cet

 18   entretien, nous étions accompagnés par des membres responsables du camp,

 19   qu'ils s'agissent du commandant croate ou de son entourage, je veux dire

 20   par là qu'ils étaient constamment à mes côtés. Nous sommes restés dans le

 21   camp pendant trois quart d'heure ou une heure.

 22   Mme McHenry (interprétation). - Pour être très précis, votre

 23   visite au camp s'est faite en trois quart d'heure, voire une heure. Est-ce

 24   bien exact ?

 25   M. Harraz (interprétation). - C 'est ce dont je me souviens.


Page 5699

  1   Mais je dois dire que j'ai beaucoup de mal à me rappeler. Je crois que

  2   c'est une visite de quarante cinq minutes ou une heure.

  3   Mme McHenry (interprétation). - Vous ai-je bien compris ? Avez-

  4   vous dit que lorsque vous aviez adressé la parole à certaines des

  5   personnes détenues les responsables du camp étaient présents ?

  6   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Ils étaient à mes

  7   côtés.

  8   Mme McHenry (interprétation). - Merci, Monsieur. En ce qui

  9   concerne les articles que vous avez écrits, vous est-il possible

 10   aujourd'hui de vous souvenir de toutes les informations qui figurent dans

 11   vos articles ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Bien sûr, J’ai relu les articles

 13   et donc je m'en souviens. Mais malheureusement, je ne me souviens de rien

 14   d'autre, de rien qui puisse être utile dans ce cas présent. Il ne

 15   s'agissait pas d'une enquête portant sur le camp. Il s'agissait d'un

 16   reportage qui visait à décrire les circonstances qui prévalaient de façon

 17   générale dans la région à cette époque-là.

 18   Par conséquent, j'ai simplement essayé de voir comment les

 19   choses fonctionnaient à ce moment-là. Je ne me suis pas concentré sur

 20   l'aspect militaire ou sur l'aspect de la situation des personnes détenues

 21   ou de leur origine.

 22   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, en ce qui concerne le

 23   commandant du camp, vous rappelez-vous maintenant de son nom ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Non, je ne m'en souviens pas.

 25   Mme McHenry (interprétation). - L'article que vous avez écrit


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  1   pourrait-il vaut aider à retrouver ce nom ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Lorsque je lis l'article, je vois

  3   son nom écrit dans l'article. Mais moi je ne m'en rappelle pas. Je me

  4   souviens qu'il était proche de Zejnil Din ou plutôt qu'il pensait qu'il

  5   était nécessaire pour les Musulmans et les Croates de s’allier.

  6   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Président, le témoin

  7   n'arrive pas à se souvenir de tous les détails de sa visite, par exemple

  8   les noms. Mais il a, dans son article rédigé à l'époque, établi très

  9   clairement les noms. Par conséquent, je demande que l'article 167/C,

 10   l'article qui fait état de sa visite, soit lu par les interprètes, puis

 11   par la suite j'aurai des questions supplémentaires à poser au témoin

 12   concernant ce document.

 13   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Président,

 14   m’autorisez-vous à demander à l'interprète de lire tout haut le compte

 15   rendu de la visite du témoin au camp ? Il s'agit de la pièce 167.

 16   M. le Président (interprétation). - Absolument.

 17   Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie. Si les

 18   interprètes pouvaient maintenant nous lire l'article.

 19   L’Interprète arabe (interprétation). - Quel est l'article qui

 20   doit être lu ?

 21   Mme McHenry (interprétation). - Il s'agit de l'article rédigé le

 22   24 juillet 1992.

 23   L’Interprète arabe (interprétation). - Il s'agit de la visite du

 24   camp à Konjic pour le journal Asharq Al Awsat.

 25   "Quatre cents prisonniers serbes sont traités selon les codes


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  1   internationaux concernant les détentions. De notre correspondant à Konjic

  2   pour le journal Asharq Al Awsat :

  3   Dans une émission diffusée par une télévision croate, on a pu

  4   voir un certain nombre d’interviews avec des prisonniers musulmans qui

  5   avaient été récemment relâchés dans le cadre du processus d'échanges de

  6   prisonniers entre les deux camps. Ils parlaient des tortures sauvages dont

  7   ils avaient été l'objet et des conséquences. On pouvait bien voir sur leur

  8   figure, sur leur corps, quelles avaient été les conséquences de ces

  9   tortures. Cette émission m'a beaucoup préoccupé et je me suis rendu au

 10   camp de concentration de prisonniers serbes qui se trouvait à Konjic, une

 11   ville à majorité musulmane qui se trouve à environ 50 kilomètres de

 12   Sarajevo. Ces prisonniers allaient-ils être eux-aussi soumis à de telles

 13   tortures ?

 14   Quelques minutes plus tard nous sommes arrivés à ce camp. A

 15   l’origine, il s'agissait de baraques militaires qui avaient été prises par

 16   les Musulmans. Les portes très impressionnantes de ce camp se sont

 17   ouvertes et nous avons fait notre entrée dans le camp. Puis, escortés par

 18   le commandant, nous avons fait un tour rapide du camp avant de pouvoir

 19   rentrer dans un des quartiers de détention. Là, nous avons vu une image

 20   extrêmement frappante, nous avons vu ce qu'était la tragédie que

 21   provoquait cette guerre maudite. Le commandant du camp a déclaré qu'il y

 22   avait près de quatre cents prisonniers dans ce camp, parmi lesquels on

 23   trouvait des prisonniers qui avaient été capturés lors de batailles

 24   extrêmement violentes et qui avaient révélé les lieux de résidence de

 25   certains de leurs collègues des milices serbes. Nous décidons de leur sort


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  1   lorsque les opérations militaires arrivent à un terme.

  2   Même si nous avons de nos yeux vu ces hommes abattre les

  3   personnes âgées, des hommes et des femmes âgés, nous ne les battons pas,

  4   nous ne les torturerons pas, nous ne violerons pas les droits de l'homme,

  5   nous voulons leur donner un procès équitable. Nous ne voulons pas faire

  6   preuve d'injustice envers qui que ce soit, en dépit des injustices dont

  7   nous avons soufferts.

  8   Le commandant du camp, un Croate, mais un Croate extrêmement

  9   proche du commandement musulman, a déclaré : "Chacun de ces prisonniers

 10   portait deux armes sur lui, armes qui avaient été données par le

 11   commandement serbe. Fort heureusement, des listes de noms prouvant ces

 12   faits sont entre nos mains. Le simple fait de les voir (m'a-t-il dit) me

 13   fait énormément de mal. J'aimerais pouvoir me venger pour le sang des

 14   victimes innocentes qui a été versé. Mais j'ai des ordres, je ne dois pas

 15   utiliser quelque forme de violence contre eux et je respecterai cet

 16   ordre". Après s'être arrêté brièvement il a ajouté : "J'ai vraiment pitié

 17   de ces personnes pour ce qu'elles ont fait, mais si nous les relâchions

 18   demain matin, le soir même ils se battraient contre nous. Ils n’ont pas

 19   d'autre objectif que de dominer tous les individus qui vivent avec eux.

 20   Dans cette ville, ils représentent 15,5 % de la population et pourtant

 21   leur ambition c’est d'arriver à dominer cette ville".

 22   Le commandant d'origine croate a déclaré que les dirigeants

 23   croates étaient, à ce moment-là, en train de jouer le même rôle que les

 24   commandants serbes, c'est-à-dire qu'ils essayaient de mobiliser la

 25   population contre les Musulmans. Cela conduit à l'implication du peuple


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  1   croate dans des batailles et a également conduit à une situation de grande

  2   confusion vis-à-vis des Musulmans. Cependant j'ai décidé de mettre un

  3   terme à la conversation car j'avais hâte de mener à bien ma mission.

  4   Nous avons été dans une salle de taille moyenne qui, m'a-t-on

  5   dit, était une clinique médicale pour s'occuper des prisonniers. Il y

  6   avait sept lits dans cette pièce occupés par sept prisonniers. Les lits

  7   avait des couvertures de laine et ils semblaient très propres. A gauche,

  8   il y avait des médicaments sur une table, devant laquelle se tenait un

  9   médecin serbe. Il semblait que tous les blessés ne souffraient que de

 10   blessures légères.

 11   J'ai parlé à un de ces prisonniers. Il m’a dit je m’appelle :

 12   "Mikajic Risto, je viens de Bradine. J’ai reçu une balle alors que je me

 13   trouvais assis dans la maison. Je me suis rendu aux forces musulmanes

 14   lorsque je me suis rendu compte que j'étais dans une mauvaise situation.

 15   Je n'ai pas entendu moi-même, je n'ai entendu personne, parmi mes amis,

 16   parmi mes proches, dire qu'il y avait un massacre des Musulmans dans la

 17   région. Cependant, j'ai entendu à la radio, et j’ai vu à la télévision aux

 18   nouvelles, qu'il y avait eu de tels massacres".

 19   Un autre prisonnier m'a déclaré : "Je me suis rendu, après

 20   m’être aperçu que mes commandants s'étaient livrés à de mauvaises actions

 21   et avaient dévié du droit chemin. Je me suis rendu compte que les

 22   Musulmans avaient raison et que, en leur nom, je me suis opposé à ce que

 23   mes proches ou mes frères serbes tirent sur ces Musulmans". J'ai demandé :

 24   "Mais alors, pourquoi êtes-vous ici ? ". Il ne m'a pas répondu.

 25   Après avoir entendu de telles réponses plusieurs fois, j'ai


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  1   décidé de me rendre dans un autre quartier de détention. Il était beaucoup

  2   plus important que le premier. Il y avait des prisonniers qui s'appuyaient

  3   sur les quatre murs de la chambre. Et puis il y avait deux lignes de

  4   prisonniers qui étaient assis au milieu de la salle. Ce quartier semblait

  5   également tout à fait propre. Très rapidement, j'ai regardé toutes les

  6   figures qui se trouvaient devant moi mais, sur aucune d'entre elles, je

  7   n'ai vu des traces de torture. C'est du moins ce que j'ai vu.

  8   J'ai parlé à un certain nombre d'autres prisonniers. On peut

  9   classer leurs réponses en deux catégories. La première catégorie qui

 10   disait qu'ils avaient refusé d'abandonner les perceptions nationalistes

 11   extrêmement étroites qui avaient déclenchées la guerre. Tous ces

 12   prisonniers ont donné des réponses extrêmement ambiguës à mes questions.

 13   La deuxième catégorie de réponses portaient sur les prisonniers qui ont

 14   déclarés qu'ils avaient essayé d'échapper à une punition et ce à tout

 15   prix. Ils étaient prêts à exprimer des regrets et à condamner violemment

 16   le commandement serbe de Belgrade.

 17   En tout cas, il était clair que les prisonniers serbes avaient

 18   ou jouissaient d'une certaine liberté d'expression. Par exemple,

 19   M. Midinic de Bradine pensait que les problèmes étaient notamment dus au

 20   fait que le commandement n'avait pas été capable de les informer que les

 21   forces musulmanes avaient reçu un ordre à la suite duquel la ville avait

 22   été attaquée. Par la suite, je lui ai posé un certain nombre de questions.

 23   Lorsque je lui ai demandé si les massacres de victimes innocentes vous

 24   ont-ils été cachés, il m'a répondu : "Je n'ai jamais su qu'il y avait eu

 25   de tels massacres". J'ai demandé au prisonnier voisin qui s'appelait


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  1   Georgi Jiberko s’il pensait que la Bosnie est une République indépendante

  2   ou si elle est une partie de la Serbie. Il a baissé la tête et a déclaré :

  3   "Certains pays ont reconnu la Bosnie comme étant une République

  4   indépendante". Je me suis ensuite tourné vers Climentije Jilco et je lui

  5   ai demandé s’il avait entendu dire que les Musulmans avaient violé des

  6   femmes serbes. Il a répondu à cette question : "Non. Je n'ai rien entendu

  7   de tel, bien au contraire. J'ai entendu dire que des quantités

  8   impressionnantes de femmes musulmanes avaient été violées à Bjile".

  9   Entre les questions et les réponses, je me suis aperçu que les

 10   commandants du camp faisaient des efforts considérables pour maîtriser

 11   leur colère. De temps en temps, ils se penchaient et murmuraient à mon

 12   oreille : "Vous savez, celui-là a tué un Musulman ; celui-là est un

 13   meurtrier ; celui-là a violé des femmes".

 14   Il s'agissait bien là d'une situation tragique et très

 15   spectaculaire. Les deux parties présentes dans ce camp s’étaient un jour

 16   retrouvées assises sur les mêmes bancs de l'école. Ils avaient travaillé

 17   ensemble. Il y avait eu des cas de mariage entre ethnies. Ils partageaient

 18   des histoires tout à fait intéressantes. Ils partageaient des souvenirs

 19   communs, des souvenirs de fêtes, des souvenirs d'enterrements.

 20   Alors comment tout cela pouvait-il subitement être consumé par

 21   les flammes de la guerre ? C'est ce que j'ai demandé à un autre prisonnier

 22   qui m'a répondu : "Moi je crois, du moins dans ma région, que tous les

 23   Serbes ont suivi des yeux, sans se poser de questions, leurs dirigeants. 

 24   Ils ont essayé de pousser le plus de personnes possibles à s'impliquer

 25   dans la guerre."


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  1   Il a continué en disant que l'armée et le parti serbe avaient

  2   armé, chacun, des membres de notre population en Bosnie, même dans cette

  3   région qui était extrêmement difficile à dominer, puisque nous ne

  4   représentons que 13 % de la population. Mais il est nécessaire que des

  5   guerres éclatent et que les volcans de colère explosent. J'ai demandé à un

  6   autre prisonnier s'il pensait que les prisonniers musulmans capturés par

  7   les Serbes recevaient un traitement comparable à celui que les prisonniers

  8   serbes recevaient ici. Il a déclaré : "Le traitement que nous recevons ici

  9   est très bon. Nous ne nous plaignons pas. Je ne sais pas quelle est la

 10   situation dans les camps de concentration serbes. J'ai entendu dire que

 11   les conditions de vie étaient extrêmement difficiles et qu'il y avait eu

 12   certains assassinats. "

 13   Après cet entretien, j'ai décidé de cheminer dans le camp. Mais

 14   le commandant du camp a déclaré : "Attendez un instant, je vais vous

 15   conduire aux cellules qui sont réservées aux cas extrêmement dangereux et

 16   vous allez rencontrer un leader chetnik. Ces gangs armés ont été formés

 17   en 1940 et ont perpétré des crimes extrêmement brutaux envers les

 18   Musulmans et les Croates. Tout le monde sait que s'ils entrent dans un

 19   village, ils ne laissent rien derrière eux. Ils tuent tous les hommes,

 20   toutes les bêtes, plantes ou oiseaux. Ils ont même brûlé des maisons.

 21   C'est exactement ce qu'ils ont fait également au cours de cette guerre".

 22   Ils ont amené un prisonnier pour que nous puissions le voir. Il

 23   s'appelait Rajko Krjig. En sortant, il grognait terriblement. J'ai regardé

 24   ces mains pour m'assurer qu'il ne portait pas d'armes. Le commandant du

 25   camp m'a déclaré en me le présentant : "Cet homme est responsable d'avoir


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  1   coupé la route qui va de Mostar à Sarajevo. Il est également responsable

  2   de la distribution d'armes". Cependant, l'homme a déclaré : "Je ne sais

  3   rien concernant une distribution d'armes". Cela s'est passé en dehors de

  4   mon champ de compétence et cela s'est fait en coordination avec un parti

  5   serbe auquel je n'appartiens pas. J'ai demandé : "Pourquoi portez-vous une

  6   arme ?" Il a répondu : "Je suis un ancien officier. J'ai pris ma place au

  7   sein du comité de crise pour défendre ma ville". Mais défendre la ville

  8   contre qui ?, ai-je demandé. "Pour défendre notre région", m'a-t-il

  9   répondu. "Nous ne souhaitions pas attaquer qui que ce soit", a-t-il

 10   déclaré. Mais défendre contre qui ?, ai-je répété. "C'est une question qui

 11   couvre différents problèmes", a-t-il dit. "Cela recouvre des aspects

 12   politiques, militaires. Et de toute façon, ici, nous sommes liés par des

 13   relations de voisinage". Là, il a été interrompu violemment par tout le

 14   monde, par le commandant du camp, par les gardes, par son escorte et par

 15   l'interprète.

 16   Tous ont posé des questions très véhémentes quant au type de

 17   rapports de voisinage qui avait donné lieu aux massacres de ces mêmes

 18   voisins. Le commandant a alors posé la question suivante : "Qui vous a

 19   donné le droit de couper la route de Sarajevo à Mostar". "Personne n'en

 20   avait le droit", a-t-il répondu. "Comment la Serbie vous a-t-elle aidés à

 21   faire cela ?", a demandé le commandant du camp ? L'homme a répondu très

 22   froidement : "Nous en voulons beaucoup au commandement serbe qui ne nous a

 23   pas donné l'aide nécessaire".

 24   J'en ai conclu qu'il était temps de mettre un terme à cette

 25   conversation. Cependant, nous continuerons nos récits, car le commandement


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  1   militaire de la région voisine a accepté de nous aider à atteindre les

  2   lignes de front avec les serbes. Nous vous en informerons dans un autre

  3   article. (Fin de l'article.)

  4   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, dans cet article, vous

  5   parlez de trois endroits différents. Il y avait l'infirmerie, une grande

  6   salle et cet endroit réservé aux cas difficiles, n'est-ce pas ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  8   Mme McHenry (interprétation). - Vous-même, vous êtes-vous rendu

  9   dans chacun de ces trois endroits différents ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Je suis allé à l'infirmerie. Je

 11   suis allé dans une l'infirmerie, puis dans une salle où étaient détenus

 12   des prisonniers. Vers le portail d'entrée, se trouvaient les cas

 13   difficiles. Je n'y suis pas entré. Effectivement, un homme a été amené à

 14   l'extérieur et j'en parle dans l'article.

 15   Mme McHenry (interprétation). - Pourquoi n'êtes-vous pas allé

 16   personnellement dans cet endroit réservé aux cas difficiles ?

 17   M. Harraz (interprétation). - On ne m'en a pas donné le droit.

 18   Mme McHenry (interprétation). - Pourriez-vous nous dire combien

 19   de temps vous avez passé là où se trouvaient les malades ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Peu de temps, très peu de temps.

 21   Je ne sais plus exactement, mais c'était vraiment très rapide.

 22   Mme McHenry (interprétation). - Vous souvenez-vous du climat qui

 23   régnait dans cet endroit, en particulier par rapport aux autres que vous

 24   avez visités ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Qu'entendez-vous par là ? Vous


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  1   parlez du camp ou de la région de Konjic ?

  2   Mme McHenry (interprétation). - Ce que je veux dire ou vous

  3   demander, c'est si vous avez constaté une différence de climat,

  4   d'atmosphère entre l'endroit où certains prisonniers malades se trouvaient

  5   et l'autre grande pièce ou salle que vous avez visitée ?

  6   M. Harraz (interprétation). - Vous parlez de différence qu'il y

  7   aurait entre l'endroit où les malades étaient gardés et les autres ?

  8   Mme McHenry (interprétation). - Oui.

  9   M. Harraz (interprétation). - Là où les malades étaient gardés,

 10   le climat, l'ambiance étaient un peu différents. L'endroit était petit et

 11   les malades étaient alités sur des lits, alors que dans les endroits plus

 12   grands les détenus étaient à même le sol.

 13   Mme McHenry (interprétation). - L'un ou l'autre de ces endroits

 14   paraissait-il parcouru de plus de tension, plus détendu, plus sérieux, des

 15   choses de ce genre ?

 16   M. Harraz (interprétation). - L'atmosphère ambiante était bonne,

 17   mais il est certain que c'était quand même un camp où les gens n'étaient

 18   pas en liberté. Toutefois, l'impression générale que ressentait un

 19   visiteur, c'est que ce camp n'était pas un lieu de tortures, mais c'était

 20   une impression générale qu'on avait rapidement ou qui venait d'une visite

 21   rapide.

 22   Effectivement, la personne qui est responsable du camp savait

 23   que le lendemain nous allions venir au camp. J'aimerais rappeler une fois

 24   de plus que l'atmosphère générale n'était pas une atmosphère caractérisée

 25   par la tension ou le stress.


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  1   Mme McHenry (interprétation). - Pendant le temps que vous avez

  2   passé au camp, avez-vous observé des mauvais traitements infligés aux

  3   prisonniers ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Non.

  5   Mme McHenry (interprétation). - D'après votre article, dans la

  6   pièce plus grande, vous avez un peu balayé la salle pour voir les visages

  7   des prisonniers sur lesquels vous n'avez constaté aucune séquelle de

  8   tortures, de mauvais traitements.

  9   M. Harraz (interprétation). - C'est ce que j'ai dit.

 10   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous eu l'occasion de voir

 11   de près ces prisonniers ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Oui. Je l'ai dit. J'ai pénétré

 13   dans ces différents endroits et ceux-ci étaient assez spacieux. C'étaient

 14   des grandes pièces. Les détenus était assis le long des murs. Certains

 15   d'entre eux se trouvaient aussi au milieu des pièces. Il n'y avait aucun

 16   lit. Les personnes étaient à même le sol. Je rappelle que c'était une

 17   visite rapide. J'ai, certes, pu poser quelques questions à certains

 18   détenus.

 19   Mme McHenry (interprétation). - Avez vous remarqué que l'un

 20   quelconque des prisonniers portait des signes de blessure ?

 21   M. Harraz (interprétation). - Il se peut que deux ou trois

 22   prisonniers aient eu des blessures légères. Ils avaient peut-être des

 23   pansements ou du sparadrap. Mais rappelons-nous quand même qu'il

 24   s'agissait d'une zone de combats. Si j'avais bien compris, certaines

 25   personnes avaient été arrêtées ou capturées au cours des combats, alors


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  1   que d'autres s'était rendues dans leurs propres villages, voisins, où

  2   elles avaient été arrêtées.

  3   Mme McHenry (interprétation). - S'agissant de ces personnes que

  4   vous avez vues avec des pansements ou des bandages, avez-vous vu ou reçu

  5   des informations précises quant à la façon dont ces blessures auraient été

  6   infligées ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Je n'ai pas d'informations

  8   particulièrement précises, mais l'impression que j'ai eu alors c'est que

  9   c'était le résultat des combats qui avaient eu lieu avant l'arrestation de

 10   ces personnes. Je répète que c'est ce que j'ai vu.

 11   Je ne peux parler que de ce que j'ai vu ou de ce qu'on m'a dit.

 12   Je ne sais pas exactement ce qui se passait à l'époque.

 13   Mme McHenry (interprétation). - Je demanderai que la pièce de

 14   l'accusation 167 soit passée sur le rétroprojecteur, bien sûr avec l'aide

 15   de l'Huissier. Excusez-moi, il faudrait que ce soit l'original qui soit

 16   posé sur le rétroprojecteur. Il s'agit de la pièce 167. C'est l'article

 17   qui a été publié le 24 juillet. Je crois que vous avez en main la

 18   pièce 168.

 19   Monsieur, pourriez-vous nous indiquer, non pas sur l'écran mais

 20   bien sur le rétroprojecteur, quelles sont ces photos que vous avez

 21   prises ? Je me permets de vous interrompre parce que je vous demanderai

 22   d'indiquer ceci sur l'article même, sur le rétroprojecteur.

 23   M. Harraz (interprétation). - La photo qui se trouve à gauche

 24   est celle d'une des salles de détention, celle où les prisonniers ou les

 25   détenus étaient assis au sol. La photo du bas, à gauche, vous montre


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  1   l'endroit où les malades étaient gardés. La photo suivante vous montre un

  2   des détenus. Je ne me souviens pas exactement, mais c'était peut-être

  3   l'homme qu'on a fait sortir de cette cellule réservée aux cas difficiles.

  4   Au-dessus, coin supérieur droit, c'est la photo d'un des commandants du

  5   camp au cours de ses entretiens avec un détenu. La photo dans le coin

  6   inférieur droit, c'est un camion militaire qui vient d'un autre endroit.

  7   Mme McHenry (interprétation). - S'agissant de la photo montrant

  8   un des commandants du camp, vous souvenez-vous maintenant si c'est bien le

  9   commandant du camp croate dont vous avez parlé dans votre déposition ou

 10   s'agit il d'un autre commandant ?

 11   M. Harraz (interprétation). - Je ne me souviens plus exactement

 12   si c'était lui, le dirigeant croate, mais je sais que c'était une des

 13   personnes responsables du camp.

 14   Mme McHenry (interprétation). - Merci. Je demanderai que la

 15   pièce de l'accusation 167 soit versée au dossier.

 16   M. le Président (interprétation). - Y a-t-il une quelconque

 17   objection ? Qu'en pense la défense ?

 18   M. Ackerman (interprétation). -  Permettez-moi un bref

 19   commentaire, Monsieur le Président.

 20   De coutume, un tel article de journal ne pourra pas être versé

 21   au dossier. Il serait irrecevable parce que c'est de l'ouï-dire parfait.

 22   Au vu des circonstances présentes aujourd'hui, ce témoin a utilisé cet

 23   article pour se rafraîchir la mémoire. Ce serait là une utilisation

 24   correcte d'un tel article. J'aurais toutefois une objection plus pointue

 25   s'agissant de cette pièce précise.


Page 5713

  1   Mais je ne veux pas renoncer à la possibilité d'élever

  2   d'objection à l'égard d'articles de journaux que l'accusation aimerait

  3   nous présenter en guise de pièces à conviction. Je ne voulais pas

  4   simplement dire : non.

  5   M. Moran (interprétation). - Je suppose que ce journaliste

  6   voudra garder son original. Je n'ai pas d'objection à ce que des

  7   photocopies soient faites de l'original si le témoin veut garder

  8   l'original.

  9   M. O'Sullivan (interprétation). - Madame et Messieurs. les

 10   Juges, nous nous rallions aux remarques faites par notre confrère,

 11   Maître Ackerman.

 12   M. Olujic (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges,

 13   nous sommes tout à fait d'accord avec ce que vient de dire notre confrère,

 14   Maître Ackerman.  Il est certain que nous pensons que si le témoin veut

 15   garder son original, il faudra en faire des photocopies.

 16   M. le Président (interprétation). - La pièce 167 est versée au

 17   dossier.

 18   Mme McHenry (interprétation). - Merci, Madame et Messieurs les

 19   Juges.

 20   S'il est exact que nous allons remplacer l'article par des

 21   photocopies, je demanderai que, tant pour les conseils de la défense, les

 22   Juges aient la possibilité de voir l'original, la qualité des photos étant

 23   supérieure. Vous déciderez par la suite si vous voulez garder l'original

 24   ou pas.

 25   Le témoin a dit qu'il était prêt à laisser l'original entre les


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  1   mains du Tribunal. Je demanderai que l'Huissier nous aide pour montrer

  2   l'original, tant à la défense qu'aux Juges, pour qu'une décision puisse

  3   être prise.

  4   Nous poursuivons. Vous avez donc rendu visite au camp.

  5   Vous avez tout à fait raison, Monsieur l'Huissier : c'est moi

  6   qui me trompais. Vous pouvez laisser l'autre article sur le

  7   rétroprojecteur.

  8   Après cette visite rendue au camp, êtes-vous allé à un autre

  9   endroit, ce jour-là ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Après la visite faite au camp, le

 11   soir ou plus tard, nous avons rencontré le commandant, et cela entre deux

 12   visites. Je ne sais plus si je me suis rendu dans une autre région par la

 13   suite, mais il me semble que la visite du camp s’est faite au début de la

 14   journée. Par la suite, il y a eu une visite pour rencontrer le commandant

 15   de la région. Il faut tenir compte aussi des distances qu'il y a à

 16   parcourir, du temps qu'il faut attendre pour que la visite soit bien

 17   préparée et puisse avoir lieu.

 18   Mme McHenry (interprétation). - Comment saviez-vous que

 19   M. Zejnil Din était le commandant de la région ?

 20   M. Harraz (interprétation). - C'est de cette façon là qu'on nous

 21   l'a présenté. Je parle ici des personnes qui nous accompagnaient, qui nous

 22   ont dit que c'était lui le commandant de la région.

 23   Mme McHenry (interprétation). - Avant votre visite sur le

 24   terrain, est-ce qu'au moment où vous avez rencontré Rosim Hadzi ou

 25   quelqu'un d'autre, on vous a parlé de la position qu'occupait au camp


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  1   M. Zejnil Din ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Dans la soirée du premier jour, au

  3   moment où nous avons rencontré M. RosimHadzi, c'est lui qui nous a promis

  4   de nous aider, afin que nous puissions rencontrer le commandant général de

  5   la région, M. Zejnil Din. Les personnes qui nous escortaient nous ont fait

  6   la même promesse le lendemain.

  7   C'est effectivement le lendemain que nous avons rendu visite au

  8   commandant. Lorsque nous nous sommes dirigés pour le rencontrer, il était

  9   assis à une table. Il y avait aussi un petit carton qui indiquait

 10   "commandant général de la région" sur cette table.

 11   Mme McHenry (interprétation). - Combien de temps a duré cette

 12   rencontre avec le commandant ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Pas plus d'une demi-heure. En

 14   effet, nous étions pressés. Nous tenions à rentrer avant la tombée de la

 15   nuit.

 16   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous reçu des informations

 17   quant aux antécédents de cette personne, où elle habitait avant la guerre

 18   et quelle était sa formation militaire ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Ce qu'on nous a dit à son propos,

 20   c'est que c'était un homme d'affaires qui vivait en Allemagne, mais

 21   qu'après que la guerre a éclaté il avait quitté l'Allemagne pour revenir

 22   en Bosnie et participer à la défense des régions où résidaient des

 23   Musulmans.

 24   Mme McHenry (interprétation). - J'aimerais appeler votre

 25   attention sur la pièce de l'accusation 168. Je vous demanderai de nous


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  1   dire si vous reconnaissez la photo représentant le commandant, et si tel

  2   est le cas pourriez-vous nous indiquer de quelle photo il s'agit ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Volontiers. La photo centrale est

  4   celle qui représente le commandant. A sa gauche, vous avez la tente qui se

  5   trouvait au même endroit. Il y avait aussi des équipements de transmission

  6   à l'intérieur. A droite, vous avez une photo de certains des combattants.

  7   Je ne sais plus si la photo a été prise au même endroit que celui où nous

  8   avons rencontré le commandant, ou si elle provient d'un autre endroit.

  9   S'agissant des drapeaux, cette photo a été prise ailleurs et pas à

 10   l'endroit ou nous avons rencontré le commandant.

 11   Mme McHenry (interprétation). - Merci. Je demanderai que la

 12   pièce 168 soit versée au dossier.

 13   M. le Président (interprétation). - Des observations, des

 14   remarques de la part de la défense, à propos de la pièce 168 ?

 15   M. Ackerman (interprétation). - Oui, Monsieur le Président.

 16   Je crois que cela nous est présenté uniquement en ce qui

 17   concerne la photo, ou les photos, et non pas pour la teneur écrite de

 18   l'article puisqu'on n'en a pas du tout parlé. On n'y a pas fait la moindre

 19   référence. Je ferai objection à tout ce qui n'est pas photo.

 20   De surcroît, en vue éventuellement de vous aider, si les

 21   originaux vont être remis au témoin par la suite, je pense que notre

 22   service audio-visuel devrait être en mesure de procéder à des copies de la

 23   photo. Et c'est de loin supérieur à ce qu'une photocopieuse pourrait

 24   faire. Quand je vois ce qui apparaît sur le rétroprojecteur, je me dis que

 25   c'est vraiment mieux qu'une photocopieuse. Peut-être est-ce là une façon


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  1   de répondre à ces deux souhaits.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges,

  3   je partage l'avis de mon confrère, Maître Ackerman.

  4   S'agissant de cet article précis, je ne pense pas qu'on puisse

  5   le verser au dossier, parce que cette photo ne peut pas constituer une

  6   base sur laquelle l'ensemble de l'article peut être versé au dossier. Je

  7   crois qu'une décision ne pourra être prise qu'après le contre-

  8   interrogatoire.

  9   Mme McHenry (interprétation). - Aucun problème à ce que seules

 10   les photos soient versées au dossier. Je crois que le conseil de la

 11   défense a raison. C'est surtout à cause de ces photos que nous demandons

 12   le versement de cette pièce. Je crois que les informations reprises dans

 13   l'article ont déjà fait l'objet des dires du témoin dans le cadre de sa

 14   déposition pour ce qui est de ses souvenirs.

 15   M. Olujic (interprétation). -  Monsieur le Président, pour ce

 16   qui est de cet article, en principe nous sommes opposés au versement de

 17   cet article au dossier. Toutefois, la photo présentée par l'accusation n'a

 18   pas une importance telle qu'elle soit vraiment nécessaire pour

 19   l'identification requise.

 20   Cela étant, nous nous opposons, parce que le témoin n'a pas

 21   donné son avis sur le contenu de l'article. Nous estimons, donc, qu'il

 22   faudrait attendre que le témoin rapporte toutes les précisions nécessaires

 23   avant d'accepter le versement au dossier.

 24   M. le Président (interprétation). - En fait, vous vous

 25   intéressez surtout aux photos, n'est-ce pas ?


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  1   Mme McHenry (interprétation). - Tout à fait. Nous serions tout à

  2   fait d'accord pour que seules les photos de cet article soient versées au

  3   dossier.

  4   M. le Président (interprétation). - Puisqu'il y a pas

  5   d'objection soulevée à l'encontre des photos, je suppose qu’elles peuvent

  6   être versées au dossier.

  7   Mme McHenry (interprétation). - Où êtes-vous allé après avoir

  8   rencontré le commandant général ?

  9   M. Harraz (interprétation). - Nous sommes retournés à Split.

 10   Mme McHenry (interprétation). - Nous avançons un peu dans le

 11   temps, si vous le voulez bien. Après ce voyage fait à Konjic et dans

 12   d'autres régions de la Bosnie-Herzégovine, avez-vous eu l'occasion de voir

 13   le documentaire préparé par votre collègue, M. Ramic. Je pense qu'il

 14   s'agissait-là du caméraman qui était au départ de la Libye.

 15   M. Harraz (interprétation). - Oui. J'ai vu ce documentaire à

 16   l'époque.

 17   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous utilisé tout ce que

 18   M. Ramic avait tourné ou cela fait-il parti du documentaire final ?

 19   M. Harraz (interprétation). - J'ai vu le film définitif à

 20   l'époque, mais pas toutes les photos qu'il avait prises.

 21   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous une copie du film que

 22   M. Rami a tourné ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Non.

 24   Mme McHenry (interprétation). - Nous en avons ainsi terminé de

 25   notre interrogatoire principal, Monsieur le Président. Je vous remercie.


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  1   M. le Président (interprétation). - Va-t-il y avoir contre-

  2   interrogatoire ?

  3   M. O'Sullivan (interprétation). - Oui, dans l’ordre suivant : le

  4   conseil de M. Landzo, suivi de celui de M. Delalic, du conseil de M. Mucic

  5   et nous terminerons par le conseil de M. Delic.

  6   M. Ackerman (interprétation). - Puis-je commencer ?

  7   M. le Président (interprétation). - Oui.

  8   M. Ackerman (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

  9   Monsieur Harraz, je m'appelle John Ackerman. Je défends un des

 10   accusés dans ce procès, celui qui s'appelle Esad Landzo. Je suppose que

 11   c'est un nom qui ne vous est pas nécessairement familier ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Vous avez raison. Je ne connais

 13   pas ce nom.

 14   M. Ackerman (interprétation). - Je vais vous poser des questions

 15   courtes, simples. Je suppose qu'on peut y répondre simplement, souvent par

 16   un simple oui. Si vous voulez apporter des précisions à une réponse que

 17   vous donnez d'une quelconque façon, vous pouvez me le dire. Libre à vous

 18   de le faire. J'essaierai de vous poser des questions aussi simples que

 19   possible. Sommes-nous d'accord ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 21   M. Ackerman (interprétation). - Je suppose que vous n'avez aucun

 22   lien avec une organisation de Belgrade qui s’appelle l’Association des

 23   détenus. Et je suppose que cette association ne vous a ni envoyé ni donné

 24   des renseignements particuliers avant que vous ne veniez déposer. Est-ce

 25   bien exact ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - Je n'ai aucun rapport avec cette

  2   association.

  3   M. Ackerman (interprétation). - J'aimerais attirer votre

  4   attention. Au moment où vous rendez visite, où vous visitez le camp de

  5   Celebici, le camp de détention dont vous avez parlé, vous pensez que cela

  6   s'est passé fin juin, début juillet peut-être, 1992. Est-ce bien exact ?

  7   M. Harraz (interprétation). - C'est ce dont je me souviens, mais

  8   avec beaucoup de difficultés. Je ne suis pas sûr du tout du moment exact.

  9   M. Ackerman (interprétation). - Mais vous savez que c'était sans

 10   doute deux semaines avant la publication de cet article dans le quotidien,

 11   je suppose que cela vous permet de mieux cerner ce moment ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Effectivement. Le temps qui s'est

 13   écoulé entre la visite et la publication est de deux semaines.

 14   M. Ackerman (interprétation). - Vous n'aviez aucune raison de

 15   venir devant ce Tribunal pour essayer de l'induire en erreur d'une

 16   quelconque façon, n'est-ce pas ?

 17   M. Harraz (interprétation). - Certes pas. Je suis venu ici pour

 18   parler de ce que j'ai vu, que ce soit dans l'intérêt d'une partie ou de

 19   l'autre.

 20   M. Ackerman (interprétation). - Un des bâtiments que vous avez

 21   vu dans ces installations de détention, c'était un endroit réservé à des

 22   soins, un petit hôpital pour ainsi dire, c'est bien cela ?

 23   M. Harraz (interprétation). - C'était une pièce du camp réservée

 24   aux malades, aux personnes qui n'étaient pas bien. Il y avait des patients

 25   qui dormaient sur des lits et certains médicaments qui leur étaient


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  1   réservés.

  2   M. Ackerman (interprétation). - La pièce elle-même était-elle

  3   propre ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  5   M. Ackerman (interprétation). - Les lits semblaient-ils

  6   propres ?

  7   M. Harraz (interprétation). - J'ai trouvé que les conditions

  8   étaient bonnes, en général.

  9   M. Ackerman (interprétation). - Vous y avez vu des médicaments ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Oui, quelques-uns.

 11   M. Ackerman (interprétation). - Vous y avez vu un médecin ?

 12   M. Harraz (interprétation). - De cela, je ne me souviens pas.

 13   Mais, à la lecture ou relecture de l'article, je me suis souvenu qu'il y

 14   avait aussi un médecin serbe qui semblait faire partie du camp.

 15   M. Ackerman (interprétation). - Fort bien. A la vue des malades

 16   que vous avez vu dans cette pièce ce jour-là, vous ne pourriez pas

 17   conclure, de leur aspect, qu'ils avaient été victimes de tortures, de

 18   mauvais traitements, outre les traitements infligés lors des combats ou

 19   reçus lors des combats ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Je suis désolé de rappeler, de

 21   répéter ce que j'ai vu, mais cela s'est passé il y a cinq ans. Je savais

 22   qu'il y avait des malades et non pas des blessés.

 23   M. Ackerman (interprétation). - Fort bien. Vous êtes aussi allé

 24   visiter un endroit bien plus grand, un espace de détention, là où l’on a

 25   vu la photo des personnes assises au sol.


Page 5722

  1   M. Hazzaz (interprétation). - Oui.

  2   M. Ackerman (interprétation). - Ce bâtiment vous semblait-il

  3   d'aspect propre ?

  4   M. Harraz  (interprétation). - Oui.

  5   M. Ackerman (interprétation). - Y avait-il de mauvaises odeurs

  6   dans cet endroit qui vous auraient frappées ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Non, je n'ai rien noté de la

  8   sorte.

  9   M. Ackerman (interprétation). - Tous les prisonniers que vous y

 10   avez vus étaient-ils assis au sol ? Y en avait-il quelques-uns qui étaient

 11   allongés au sol à gémir ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Non, ils avaient exactement

 13   l'aspect que rend la photo.

 14   M. Ackerman (interprétation). - Avez-vous vu dans cet endroit,

 15   pendant le temps que vous y avez passé, des personnes, et d'après vos

 16   observations, qui auraient été victimes de passages à tabac ou de

 17   tortures ?

 18   M. Harraz (interprétation). - Non.

 19   M. Ackerman (interprétation). - Vous avez parlé à certains des

 20   prisonniers qui se trouvaient là, n'est-ce pas ?

 21   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 22   M. Ackerman (interprétation). - Et au moins l'un d'entre eux

 23   vous a dit que le traitement qu'il y recevait était excellent et qu'il

 24   n'avait aucune plainte à formuler ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Oui.


Page 5723

  1   M. Ackerman (interprétation). - Est-ce que vous, le cameraman ou

  2   une quelconque personne vous accompagnant, vous auriez vu des prisonniers

  3   être torturés ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Non. Nous étions en mission en

  5   tant que journalistes.

  6   M. Ackerman (interprétation). - Si je vous disais que certains

  7   témoignages ont déjà été entendus selon lesquels vous auriez participé aux

  8   passages à tabac des prisonniers, diriez-vous que c'est tout à fait faux ?

  9   M. Harraz (interprétation). - Bien sûr.

 10   M. Ackerman (interprétation). - N'êtes-vous pas également allé

 11   dans un endroit réservé dans ce camp aux cas difficiles, comme cela vous

 12   avez dit ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Ce n'était pas un camp séparé.

 14   C'était un endroit du camp, une salle, une pièce dans ce camp.

 15   M. Ackerman (interprétation). - Et vous avez dit qu'un de ces

 16   prisonniers est sorti, on l'a fait sortir. Avez-vous observé cette

 17   personne ?

 18   M. Harraz (interprétation). - Oui. On a fait sortir cette

 19   personne d'une pièce et nous avons parlé avec elle.

 20   M. Ackerman (interprétation). - D'après ce que vous avez observé

 21   à son propos, des signes vous ont-ils montré que cette personne aurait été

 22   torturée ou frappée d'une quelconque façon ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Non. Rien de son aspect extérieur

 24   ne pouvait nous suggérer une telle réalité.

 25   M. Ackerman (interprétation). - J'aimerais rapidement passer à


Page 5724

  1   un autre sujet. Au cours de cette visite, ou de ce voyage, vous vous êtes

  2   rendu à Mostar, n'est-ce pas ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Je suis allé à Mostar avant de me

  4   rendre à Konjic.

  5   M. Ackerman (interprétation). - Et d'après ce que vous avez

  6   écrit, c'est à Mostar que vous avez rencontré des membres de l'armée

  7   bosniaque, des Musulmans ? Vous avez parlé avec des soldats musulmans,

  8   n'est-ce pas ?

  9   M. Harraz (interprétation). - Je ne me souviens plus aujourd'hui

 10   de ce qui s'est passé à Mostar, je vous l'avoue.

 11   M. Ackerman (interprétation). - D'accord. Mais pour ce qui est

 12   de la visite que vous avez rendue au camp de détention à Konjic, est-ce

 13   que quoi que ce soit, que vous auriez vu, vous aurez donné l'impression

 14   que des prisonniers eussent été maltraités à ce point qu'il eût été

 15   nécessaire pour vous d'alerter une organisation internationale

 16   humanitaire ?

 17   M. Harraz (interprétation). - Bien au contraire. Comme je l'ai

 18   dit dans l'article qui a été publié, je n'ai rien vu qui puisse évoquer

 19   des côtés infligés aux détenus.

 20   M. Ackerman (interprétation). - A voir les détenus, rien ne vous

 21   disait que ces détenus étaient affamés ?

 22   M. Harraz (interprétation). - Non.

 23   M. Ackerman (interprétation). - Ils étaient bien nourris,

 24   apparemment ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Impossible de juger. D'après ce


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  1   que j'ai vu, à la fin de la visite, on a apporté de la nourriture aux

  2   prisonniers.

  3   M. Ackerman (interprétation). - Je suppose que vous avez vu des

  4   photos de certains camps serbes dans la même région ! Quand vous voyez

  5   vraiment des prisonniers émaciés, manifestement, on les avait affamés. Ils

  6   ressemblaient aux détenus des camps de concentration allemands pendant la

  7   guerre mondiale.

  8   M. Harraz (interprétation). - C'est ce que j'ai vu dans les

  9   médias, mais pas de mes propres yeux.

 10   M. Ackerman (interprétation). - Ma question était la suivante :

 11   vous n'avez pas vu de prisonniers à Celebici qui aient cet aspect ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Non.

 13   M. Ackerman (interprétation). - C'est tout ce que je voulais

 14   vous poser comme question. Merci, Monsieur.

 15   M. le Président (interprétation). - Je pense que le moment est

 16   venu de nous arrêter. Nous faisons la pause et nous reprendrons à midi.

 17   L’audience, suspendue à 11 heures 30, est reprise à

 18   12 heures 05.

 19   (Le témoin est introduit dans la salle d’audience.)

 20   M. le Président (interprétation). - Veuillez nous rappeler, s'il

 21   vous plaît, où nous en sommes.

 22   M. le Greffier (interprétation). - Je vous rappelle que vous

 23   êtes toujours sous serment.

 24   M. Harraz (interprétation). - J'en suis bien conscient.

 25   M. le Président (interprétation). - Madame Residovic, vous avez


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  1   la parole.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

  3   Bonjour, Monsieur Harraz.

  4   M. Harraz (interprétation). - Bonjour, Madame Residovic.

  5   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. Je vous

  6   salue dans votre langue : Salam aleikum, Monsieur Harraz.

  7   Monsieur Harraz, devant cette Cour, vous avez déclaré, dans le

  8   cadre de votre témoignage, qu'en juillet 1992 vous vous êtes rendu dans la

  9   région de la localité de Konjic.

 10   Je crois que l'interprétation n'arrive pas aux oreilles du

 11   témoin. Pourtant l'Interprète arabe fait signe quelle est en train

 12   d'interpréter.

 13   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.

 14   Madame Residovic, pouvez-vous tout recommencer depuis le début, je vous

 15   prie.

 16   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. Avant toute

 17   chose, j'aimerais me présenter. Je suis Edina Residovic. Je suis le

 18   conseil de la défense de M. Zejnil Delalic.

 19   Monsieur Harraz, dans le cadre de votre témoignage, vous avez

 20   déclaré devant ce Tribunal qu'en juillet 1992 vous vous êtes rendu dans la

 21   région de la municipalité de Konjic. Vous avez ajouté que, suite à cela,

 22   vous avez écrit un certain nombre d'articles. Est-ce bien exact ?

 23   M. Harraz (interprétation). - C'est absolument exact.

 24   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, en rapport

 25   avec cette visite, vous avez rédigé trois articles; est-ce bien exact ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Ces articles ont été publiés

  3   les 24, 25 et 26 juillet. Est-ce exact ?.

  4   M. Harraz (interprétation). - C'est exact, tout à fait exact.

  5   Mme Residovic (interprétation). - En outre, Monsieur Harraz, le

  6   7 mars de cette année, vous avez fait une déposition devant Sabine Manke,

  7   une enquêtrice du Tribunal pénal international.

  8   M. Harraz (interprétation). - C'est exact.

  9   Mme Residovic (interprétation). - Vous avez également témoigné,

 10   Monsieur Harraz. Vous vous êtes rappelé de ce que vous avez écrit dans ces

 11   articles en 1992 dans le cadre de ce témoignage. Est-ce exact ?

 12   M. Harraz (interprétation). - C'est tout à fait exact.

 13   Mme Residovic (interprétation). - Par conséquent,

 14   Monsieur Harraz, je vais vous poser des questions qui sont en rapport avec

 15   ces articles. Je vous demande, par conséquent, d'avoir ces articles sous

 16   les yeux, ainsi vous serez à même de vous rafraîchir la mémoire et vous

 17   pourrez répondre à mes questions.

 18   Monsieur Harraz, est-il exact que, dans ces articles, dans la

 19   déclaration qui a été faite à Mme Sabine Manke et dans la déclaration que

 20   vous avez faite pour le Tribunal, vous avez déclaré qu'une partie de ce

 21   que vous avez écrit dans vos articles était le résultat de votre

 22   observation précise, de votre observation des événements ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Ce n'est pas ma perception des

 24   choses; c'est ce que j'ai vu, c'est ce dont j'ai été le témoin.

 25   Mme Residovic (interprétation). - Entendu.  Ma prochaine


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  1   question touche précisément à un sujet auquel vous avez déjà répondu. Vous

  2   avez vu des choses, vous avez assisté à certains événements, vous avez

  3   appris d'autres faits de tierces personnes. Est-ce bien exact ?

  4   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Certains des faits à

  5   propos desquels j'ai écrit sont des faits dont j'ai été le témoin. Pour

  6   certaines informations, il est vrai qu'elles m'ont été communiquées par

  7   des personnes qui étaient autour du commandant ou qui nous accompagnaient.

  8   Il se peut que j'ai fait part de ces informations dans mes articles.

  9   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, vous n'avez

 10   passé que très peu de temps à Konjic. Vous n'avez pas eu l'occasion de

 11   corroborer par vous-même ce que vous aviez entendu dire d'autres

 12   personnes ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Ma mission n'était pas d'aller

 14   vérifier des faits. Ma mission, c'était de décrire la situation générale

 15   qui prévalait dans la région.

 16   Mme Residovic (interprétation). - Justement, quant à la nature

 17   de votre mission, vous n'avez pas essayé de trouver et vous n'avez pas vu

 18   de documents dans la municipalité de Konjic. Est-ce exact ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Non, je n'ai vu aucun document.

 20   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, vous avez

 21   également déclaré devant ce Tribunal que vous aviez à vos côtés un

 22   interprète.

 23   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 24   Mme Residovic (interprétation). - C'est parce que vous ne parlez

 25   pas vous-même le serbo-croate. Est-ce exact ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Je ne peux dire que

  2   quelques mots.

  3   Mme Residovic (interprétation). - Oui, vous en savez à peu près

  4   autant que moi en arabe.

  5   Monsieur Harraz, convenez-vous avec moi du fait que ce que vous

  6   avez découvert, ce que vous avez entendu dire par les tierces parties,

  7   sont des informations qui dépendent surtout de la précision de

  8   l'interprétation qui vous était fournie concernant les faits qui étaient

  9   abordés ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Bien entendu. L'interprète a pu

 11   jouer un rôle, un rôle positif ou un rôle négatif, dans la transmission et

 12   la précision des faits.

 13   Mme Residovic (interprétation). - Par conséquent, vos articles

 14   offrent une peinture générale de la situation et proposent votre

 15   impression sur la situation générale qui prévalait à l'époque dans la

 16   région de Konjic. Est-ce exact ?

 17   M. Harraz (interprétation). - C'est tout à fait exact. Et pour

 18   confirmer cela, j'ai précisé que dans l'article ce sont les événements

 19   dont j'ai été le témoin. C'est l'impression que j'ai reçue au cours de mon

 20   voyage.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Et en ce qui concerne les

 22   fonctions de certains personnages, vous vous êtes également appuyé sur ce

 23   que vous disaient les tierces personnes. Est-ce exact ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'est exact. Les dirigeants

 25   qui étaient dans la région, les dirigeants qui faisaient partie


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  1   d'escortes, les dirigeants qui étaient responsables, j'ai appris tout cela

  2   par des tierces personnes.

  3   Mme Residovic (interprétation). - Cela explique sans doute la

  4   raison pour laquelle, dans vos articles, dans vos déclarations devant ce

  5   Tribunal aujourd'hui, il y a des différences assez importantes en ce qui

  6   concerne les postes occupés par certaines personnes. Est-ce exact ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Pourriez-vous me donner un

  8   exemple, si vous plaît, Madame ?

  9   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, dans votre

 10   article, cet homme, M. Rusmir, je ne sais pas exactement quel nom vous lui

 11   avez donné, mais je crois que c'est M. Rusmir, vous l'avez qualifié de

 12   maire dans votre article. Vous vous êtes référé à lui sous le nom du

 13   maire. Puis, dans votre troisième article, vous avez déclaré avoir dit

 14   rendre visite à la présidence de guerre. Vous avez eu un entretien avec la

 15   présidence de guerre. Dans votre déclaration à Mme Sabine Manke, vous avez

 16   déclaré que la question du gouverneur local avait été abordée.

 17   Aujourd'hui, pour autant que j'ai compris ce que vous avez dit, vous avez

 18   déclaré qu'il était le dirigeant politique de la région.

 19   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Cette personne

 20   pouvait, peut-être, être chargée de tous ces différents postes. Mais comme

 21   je l'ai dit précédemment, il n'y avait aucune organisation hiérarchique

 22   précise et ces titres sont les titres que l'on m'a donnés à l'époque, lors

 23   de ma visite.

 24   Mme Residovic (interprétation). - Pour ce qui est de l'exemple

 25   de M. Rusmir, n'en est-il pas de même ? Je vous ai donné l'exemple de


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  1   M. Rusmir, mais n'en est-il pas de même pour toutes les personnes que vous

  2   avez rencontrées dans la région ?

  3   M. Harraz (interprétation). - J'ai parlé des postes occupés, des

  4   responsabilités dont les personnes étaient chargées, mais je me suis

  5   appuyé sur les informations que l'on m'avait données pour faire cela. Je

  6   me suis référé à ce que l'on m'avait dit quand j'étais dans la région. Je

  7   n'ai pas eu cela de sources, par exemple, du gouvernement de Sarajevo.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, êtes-vous

  9   conscient du fait que c'est précisément à cette époque-là qu'une

 10   organisation arabe à Konjic avait lancé des opérations d'aides

 11   humanitaires ? L'objectif de cette aide humanitaire était de découvrir des

 12   faits qui pouvaient aider à la collection d'aides matérielles à la

 13   population locale.

 14   M. Harraz (interprétation). - En Bosnie-Herzégovine, d'une façon

 15   générale, il y avait des organisations de secours, d'aides. Il y en avait

 16   beaucoup. Mais en ce qui concerne Konjic, je ne me rappelle pas

 17   précisément s'il y avait une organisation de ce type à l'époque où je m'y

 18   trouvais.

 19   Mme Residovic (interprétation). - L'objectif de votre compte

 20   rendu de la situation à Konjic était-il d'expliquer à la population arabe

 21   quelle était la situation qui prévalait dans la région ? Etait-il de

 22   multiplier les efforts en matière d'aide humanitaire ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Oui. C'était une mission d'ordre

 24   générale, pardon, de journalisme. Je voulais informer la population arabe

 25   de ce qui se passait dans une autre partie du monde.


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  1   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, est-ce la

  2   raison pour laquelle vous avez plutôt souligné le fait que ces populations

  3   étaient pour l'Islam ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Pouvez-vous reformuler votre

  5   question, Madame, s'il vous plaît ?

  6   Mme Residovic (interprétation). - Je vais lancer une autre

  7   question. Dans cette région, Monsieur Harraz, vous n'avez rencontré

  8   personne qui soit Islamiste fanatique, des personnes qui s'étaient

  9   engagées à lutter à mort pour faire prévaloir le fanatisme islamiste ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Je ne crois pas qu'à cette époque

 11   en Bosnie il y ait eu des tendances fanatiques. En fait, au contraire, les

 12   Musulmans était très détachés de leur religion.

 13   Mme Residovic (interprétation). - Donc, malgré le fait qu'ils

 14   avaient terriblement souffert avant votre arrivée dans la région, vous

 15   n'avez pas senti au contact des combattants qu'ils avaient besoin, qu'ils

 16   ressentaient le besoin, de se venger ?

 17   M. Harraz (interprétation). - Non. J'ai ressenti qu'il y avait

 18   un désir ardent de défendre leur région. Ils étaient convaincus que

 19   c'était le seul choix possible, qu'ils ne pouvaient que défendre ce

 20   territoire, qu'il n'y avait pas d'autres régions qui pouvaient les

 21   accueillir et que personne n'allait venir à leur secours. Par conséquent,

 22   l'impression générale est qu'ils avaient l'impression qu'il fallait qu'ils

 23   se défendent eux-mêmes pour défendre la région dans laquelle ils

 24   habitaient.

 25   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, vous avez


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  1   déclaré que lors de la soirée où vous avez rendu visite à M. Huseinovic,

  2   M. Hadzi,, est-il vrai que M. Hadzi Huseinovic vous a donné des

  3   informations relatives à la répartition de la population dans la région,

  4   relative à l'administration et à la situation militaire prévalant dans la

  5   région à l'époque ?

  6   M. Harraz (interprétation). - Les informations que l'on m'a

  7   communiquées -et je répète que M. Hadzi était le gouverneur de la ville-

  8   on pourrait dire qu'il était le gouverneur militaire de la ville- c’est

  9   qu’il avait en outre des responsabilités politiques. C'est en tant que tel

 10   que je l'ai interviewé à l'époque.

 11   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Hadzi Huseinovic vous

 12   a également précisé qu'il y avait énormément de réfugiés qui étaient

 13   arrivés à Konjic à l'époque, des réfugiés qui arrivaient de régions qui

 14   étaient placées sous une occupation d'autres parties, une occupation

 15   provisoire.

 16   M. Harraz (interprétation). - Il a effectivement abordé la

 17   question des réfugiés. Je ne me rappelle pas des détails de ce qu'il a

 18   dit.

 19   Mme Residovic (interprétation). - Cependant, Monsieur Harraz,

 20   vous vous rappelez sans doute qu'il vous a déclaré qu'à cette époque la

 21   situation humanitaire, la question de l'approvisionnement de la population

 22   et des réfugiés, était extrêmement critique.

 23   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Il m'en a fait part.

 24   C'était un fait bien connu de tous. Tout le monde le savait et pas

 25   seulement les personnes de Konjic. Tout le monde en Bosnie était conscient


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  1   de la situation.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Vous avez déclaré devant ce

  3   Tribunal que vous aviez appris que le système de la hiérarchie n'était pas

  4   très clair, notamment pour ce qui est des fonctions gouvernementales. Vous

  5   avez déclaré que vous avez déduit cela de ce que vous saviez sur la

  6   Bosnie-Herzégovine en général. Est-ce exact ?

  7   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Je pense qu'à

  8   l'époque cette organisation hiérarchique n'existait pas vraiment et que

  9   chaque région, d'une façon ou d'une autre, se chargeait de la défense de

 10   ses limites, de la gestion de ses affaires intérieures. Bien évidemment,

 11   il y avait une certaine communication entre les régions. D'une façon

 12   générale, je le répète, il n'y avait pas de structure administrative bien

 13   définie.

 14   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie de votre

 15   appréciation en ce qui concerne la situation en général en Bosnie-

 16   Herzégovine. Pouvez-vous nous confirmer que, après tout, vous n'avez pas

 17   vraiment eu une connaissance réelle de la situation en matière

 18   d'organisation hiérarchique pour la municipalité de Konjic ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Non, bien sûr que non. D'ailleurs,

 20   ce n'était pas du tout le but de ma mission. Je répète que j'ai passé, en

 21   fait, peu de temps dans cette région. J'ai décrit ce que l'on m'a dit, ce

 22   dont j'ai été témoin. Je n'ai pas essayé de vérifier les informations qui

 23   m'ont été données parce que ce type d'article n'a pas pour objectif de

 24   fournir des preuves. Cet article a pour objectif de décrire la situation,

 25   les événements qui se déroulent dans une région.


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  1   Mme Residovic (interprétation). - Donc, bien qu'ayant parlé au

  2   maire au cours de cet entretien, au cours de votre séjour dans la région,

  3   vous avez découvert que, dans la ville de Konjic, il y avait des

  4   structures qui avaient du mal à fonctionner du fait des différents types

  5   de barricades qui avaient été mis en place par les forces serbes, par les

  6   forces croates également à l'époque.

  7   M. Harraz (interprétation). - Ce dont je me souviens, c'est que

  8   ces structures avaient été attaquées par les Serbes. Pour ce qui est de la

  9   partie croate, je crois qu'à l'époque la situation était encore

 10   relativement calme entre les deux parties. Je me réfère aux Musulmans et

 11   aux Croates ; du moins pour ce qu'on pouvait percevoir de l'extérieur.

 12   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, je vais vous

 13   poser des questions qui ont pour but de clarifier ce que vous dites pour

 14   tous ceux qui sont présents aujourd'hui.

 15   Je crois qu'en tant que témoin de la situation qui prévalait

 16   dans la région à cette époque, vous devez être très précis pour ce

 17   Tribunal, car il y avait peu de personne qui, à l'époque, ont eu le

 18   courage que vous avez eu, c'est-à-dire le courage de vous rendre en

 19   Bosnie-Herzégovine. Je crois que, par conséquent, au vu de ce que je viens

 20   de vous dire, vous allez comprendre la nature de la question que je vais

 21   vous poser maintenant.

 22   Monsieur Harraz, vous venez de dire que vous avez été le témoin

 23   du pilonnage, des bombardements de Konjic par les forces serbes. Est-ce

 24   exact ?

 25   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. La région a été


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  1   soumise à un pilonnage et à des bombardements des forces serbes.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Au cours de votre séjour, de

  3   votre bref séjour dans la région, vous avez été le témoin de destructions

  4   massives, de destructions d'habitations, de bâtiments dans toute la ville.

  5   Est-ce exact ?

  6   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'est exact. Konjic à

  7   beaucoup souffert. Il y a eu beaucoup de destructions de bâtiments dans

  8   cette ville.

  9   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, vous avez

 10   décrit, dans l'article du 24 juillet 1992 qui a été également lu devant le

 11   Tribunal, la situation dans le détail. Par conséquent, et en rapport avec

 12   cet article, je voudrais vous poser un certain nombre de questions.

 13   Vous êtes entré dans le camp et vous êtes entré dans une pièce

 14   qui était, en fait, l'infirmerie du camp. Est-ce exact ?

 15   M. Harraz (interprétation). - Vous parlez de la pièce où se

 16   trouvaient les malades ?

 17   Mme Residovic (interprétation). - Oui. Dans l'article du

 18   24 juillet, vous avez écrit des choses qui sont, en fait, le résultat de

 19   ce que vous avez vu de vos propres yeux, n'est-ce pas ?

 20   M. Harraz (interprétation). - C'est exact.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Vous êtes entré et vous avez

 22   vu cette large pièce où se trouvaient aussi de nombreux prisonniers. Est-

 23   ce exact ?

 24   M. Harraz (interprétation). -  Oui, c'est exact.

 25   Mme Residovic (interprétation). - Ce que vous avez dit dans


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  1   votre article quant à l'apparence de cette pièce, quant à l'apparence des

  2   prisonniers, quant aux conditions dans lesquelles ils étaient détenus dans

  3   cette pièce, tout cela est bien le résultat de vos observations

  4   personnelles. Est-ce bien exact ?

  5   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. J'ai écrit cet

  6   article sur la base de ce que j'avais vu moi-même et non sur la base de ce

  7   que quelqu'un aurait pu me dire.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Des photos ont été montrées à

  9   ce Tribunal. Nous avez dit, à leur propos, qu'elles décrivaient notamment,

 10   ou qu'elles montraient, une personne dont vous avez dit qu'elle était

 11   vraiment la personne qu'on a fait sortir de cette cellule réservée aux cas

 12   difficiles. Cette photo-là, vous l'avez prise personnellement, n'est-ce

 13   pas ?

 14   M. Harraz (interprétation). - J'ai dit, ce matin, que cet homme

 15   -du moins je le suppose- se trouvait dans cette cellule pour cas

 16   difficiles. Mais je ne suis pas certain que ce soit vraiment la personne

 17   que l’on voit sur la photo.

 18   Mme Residovic (interprétation). - On a fait sortir cet homme de

 19   cette pièce. Permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire. Cette personne,

 20   c'est Rajko Djordjic. L'homme est réputé pour être l'organisateur de la

 21   défense de Bradina, ainsi que du fait que les Serbes étaient armés.

 22   M. Harraz (interprétation). - L'information que j'ai répercutée

 23   se fonde sur ce qu'on m'a dit de cet homme, de cet homme qu'on a fait

 24   sortir de cette cellule spéciale. Mais, je le répète, je ne suis pas

 25   certain que la photo qui a été publiée soit vraiment la photo de cet


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  1   homme-là.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Ma question ne porte pas sur

  3   la photographie, Monsieur Harraz. Elle s'intéresse plutôt à la

  4   conversation que vous avez eue avec cet homme dont vous parlez dans votre

  5   article.

  6   M. Harraz (interprétation). - Les informations que vous trouvez

  7   dans l'article sont des informations qui m'ont été fournies et, la

  8   conversation que j'y rapporte, c'est la conversation que j'ai eue avec cet

  9   homme.

 10   Mme Residovic (interprétation). - Par conséquent, vous avez été

 11   témoin du fait qu'on a dit, à cet homme, en votre présence, qu'il était

 12   responsable du fait que cette route de Mostar à Sarajevo a été coupée.

 13   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 14   Mme Residovic (interprétation). - Vous étiez présent aussi

 15   lorsque cet homme a répondu. Il a dit qu'il était frustré de l'aide

 16   apportée par la direction serbe en vue de permettre la résistance.

 17   M. Harraz (interprétation). - Ce que je rapporte dans l'article,

 18   c'est la conversation que j'ai eue avec cet homme. Je ne me souviens plus

 19   des détails précis de cette conversation. Ce que vous trouvez dans

 20   l'article, ce sont nos propos à lui et à moi.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Cet homme, pour autant que

 22   vous pouviez en juger, ne présentait aucune séquelle, aucune trace de

 23   tortures ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Non.

 25   Mme Residovic (interprétation). - Cet homme n'a pas été torturé


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  1   en votre présence ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Personne n'a été torturé en notre

  3   présence.

  4   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, j'aurais

  5   plusieurs questions à vous poser en rapport avec votre article du

  6   25 juillet. Il vous a été permis de vous rendre sur la ligne de front,

  7   cette ligne qui marquait la démarcation avec les Serbes.

  8   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'était là que s'affrontaient

  9   les parties. Mais l'endroit où je me suis rendu, c'était un endroit

 10   montagneux. Il y a eu des échanges de coups de feu entre les deux parties.

 11   Mme Residovic (interprétation). - Vous pouvez attester du fait

 12   que, vers 14 heures, alors que la route était dangereuse, impraticable,

 13   vous êtes monté par les montagnes jusqu'au premier poste de commandement

 14   de l'artillerie.

 15   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 16   Mme Residovic (interprétation). - Souvenez-vous de votre

 17   article : il vous a fallu deux heures de route dangereuse pour parvenir à

 18   ce poste de commandement de l'artillerie bosniaque. Là, vous avez vu un

 19   canon qui datait de 1918, qui était pratiquement le seul moyen permettant

 20   à la force territoriale de Konjic de combattre.

 21   M. Harraz (interprétation). - Oui. Nous nous sommes rendus sur

 22   trois lieux. D'abord, le poste de commandement, la zone de confrontation,

 23   la zone de combats et l'endroit où se trouvait ce camp de détenus. Je ne

 24   sais plus aujourd'hui si nous avons visité d'autres endroits.

 25   Mme Residovic (interprétation). - Vous vous souvenez de la


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  1   teneur de votre article. Pour ce qui est de la première position, vous

  2   avez vu un canon qu'on avait sorti du musée de Jablanica et qu'on avait

  3   adapté pour servir aux combats, à la défense.

  4   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'est exact.

  5   Mme Residovic (interprétation). - Et là, vous vous êtes

  6   entretenu avec les combattants, avec le commandant qui s'appelait Esad.

  7   Vous avez pris des photos de la tente de commandement, mais aussi d'un

  8   autre canon, de calibre 130 mm, que les combattants appelaient leur

  9   fiancée ou la jeune épouse. Vous avez aussi appris qu'il s'agissait d'un

 10   canon qu'il fallait traiter avec le plus grand soin parce qu'il était

 11   censé être déplacé vers la zone de Sarajevo afin d'y aider les combattants

 12   qui essayaient de démanteler le siège qu'on faisait de Sarajevo.

 13   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 14   Mme Residovic (interprétation). - On vous a dit, à l'époque, que

 15   c'était le seul canon de ce calibre qu'on pouvait trouver à proximité de

 16   Sarajevo.

 17   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 18   Mme Residovic (interprétation). - Dans une partie de l'article,

 19   vous parlez des objectifs, des conditions de combats avec le commandant

 20   Esad. Vous y traduisez ,en fait, les propos que vous a tenus ce commandant

 21   Esad ?

 22   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 23   Mme Residovic (interprétation). - D'après votre article, ce

 24   dernier vous a donné davantage de détails quant aux objectifs poursuivis

 25   par ce combat. Il vous a parlé de la ligne de front. Il vous a également


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  1   parlé du fait qu'il y avait quelques trois milles combattants dans cette

  2   région.

  3   M. Harraz (interprétation). - Tout ce qu'il m’a dit, à l'époque,

  4   est traduit dans l'article. Mais je ne me souviens plus aujourd'hui de

  5   tous les détails.

  6   Mme Residovic (interprétation). - Si vous avez des doutes quant

  7   à mes questions, vous pouvez aisément vous rafraîchir la mémoire en

  8   consultant l'article qui a été publié le 25 juillet.

  9   En fait, le commandant Esad, d'après ce que vous nous avez dit

 10   dans votre article, ce commandant, a souligné le fait que l'ennemi avait

 11   une certaine supériorité du fait qu'il possédait une artillerie de longue

 12   portée.

 13   M. Harraz (interprétation). - C'est exact.

 14   Mme Residovic (interprétation). - A cet endroit précis, vous

 15   avez vu la tente du commandant et aussi ce que les combattants avaient

 16   inscrit, ou avaient écrit, gravé dans les arbres, qui entouraient la tente

 17   aux alentours ?

 18   M. Harraz (interprétation). - L'endroit où se trouvait la tente

 19   du commandant, ce n'est pas le même endroit que celui où j'ai vu vraiment

 20   les échanges de feu se produire entre les adversaires.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Vous avez parlé à

 22   M. Hadzi Huseinovic. Il vous a proposé de rencontrer le commandant Esad.

 23   Je peux peut-être vous aider à vous rafraîchir la mémoire. C'est

 24   Esad Ramic qui était commandant du quartier général de la défense

 25   territoriale de Konjic. Est-ce bien exact ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - J'ai peine à m'en souvenir.

  2   M. Rosim Hadzi nous a promis, quand nous l'avons vu le soir, que nous

  3   pourrions rencontrer certains dirigeants, peut-être le commandant général,

  4   ou en tout cas nous pourrions nous rendre sur le lieu d'opérations

  5   militaires.

  6   Il se peut que cette information ne vous suffise pas, mais c'est

  7   ce dont je me souviens, malheureusement.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Avant de vous mettre en route,

  9   vous saviez que M. Zejnil Delalic se trouvait aussi dans la zone de

 10   combat ?

 11   M. Harraz (interprétation). - Oui, il y était présent.

 12   Mme Residovic (interprétation). - Vous saviez également,

 13   Monsieur Harraz, que M. Zejnil Delalic n'avait pas hésité à dépenser de sa

 14   propre poche pour équiper les unités de combat ?

 15   M. Harraz (interprétation). - Je n'étais pas conscient de cela.

 16   Qu'entendez-vous par là : pour équiper cette unité ou ces unités ?

 17   Apporter des équipements militaires ?

 18   Mme Residovic (interprétation). - M. Zejnil Delalic n'a pas

 19   hésité, homme d'affaires réputé qu'il était à l'Ouest, à fournir l'argent

 20   nécessaire à l'achat de produits alimentaires, de denrées, d'équipements

 21   militaires, de produits pharmaceutiques.

 22   M. Harraz (interprétation). - C'est ce qu'on nous a dit.

 23   Mme Residovic (interprétation). - M. Hadzi Huseinovic vous a

 24   sans doute dit que M. Delalic se chargeait de la coordination entre les

 25   autorités civiles et militaires à Konjic ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Vous saviez, Monsieur Harraz,

  3   que sa fonction dans la zone de combat consistait à fournir le soutien

  4   logistique aux combattants alors qu'il s'agissait vraiment de combats

  5   importants.

  6   M. Harraz (interprétation). - C'est ce qu'on nous a dit. On nous

  7   a dit qu'il avait apporté son aide, notamment qu'il avait assisté à

  8   renforcer les équipements militaires.

  9   Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur Harraz.

 10   M. Hadzi ou d'autres personnes, avec qui vous vous êtes entretenu, vous

 11   auraient dit que M. Delalic pouvait vous fournir les données les plus

 12   précises quant à l'état dans lequel se trouvaient les unités, ce qu’elles

 13   avaient comme équipements à leur disposition, et qu'il pourrait aussi

 14   apporter des précisions quant au soutien logistique nécessaire, ce qui

 15   manquait encore, ce dont la défense avait besoin pour s'organiser ?

 16   M. Harraz (interprétation). - J’étais là en tant que

 17   journaliste. Je n'ai donc pas posé de question sur le type d'armes

 18   utilisées, sur la façon dont elles étaient amenées sur le théâtre des

 19   opérations. Je n'ai pas posé de questions dans ce sens.

 20   Mme Residovic (interprétation). - Merci. Vous avez dit, dans

 21   votre article, que vous étiez arrivé au poste de commandement de

 22   M. Esad Ramic en deux heures.

 23   Mme McHenry (interprétation). - Objection. Le témoin a déjà dit

 24   qu'il ne se souvenait pas du nom de la personne dénommée Esad. Je

 25   demanderai donc au conseil de la défense d’en tenir compte lorsqu'elle


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  1   pose ses questions.

  2   M. Harraz (interprétation). - Quand je parle de Esad, je n'ai

  3   pas donné son nom de famille parce que, pour autant que je m'en souvienne,

  4   je crois qu'il y avait une autre personne dénommée Esad. On m'a dit que

  5   s'il y avait trois personnes dénommées Esad en Bosnie, elles apporteraient

  6   des douceurs, des sucreries. Il y avait moi et deux autres. Donc le compte

  7   y était. Mais je ne me souviens pas du nom de famille. Je n'ai pas non

  8   plus obtenu ce qui m'avait été promis.

  9   Mme Residovic (interprétation). - Oui, effectivement, si des

 10   douceurs vous avaient été apportées, cela aurait été du halva. C'est la

 11   coutume chez nous.

 12   Vous avez donc constaté quel était l'endroit où se trouvait le

 13   commandant Esad et puis vous avez poursuivi votre chemin pendant une demi-

 14   heure à travers une région montagneuse interdite pour arriver à un endroit

 15   où vous avez rencontré M. Delalic.

 16   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 17   Mme Residovic (interprétation). - Vous vous trouviez donc à plus

 18   de 50 kilomètres de distance du coeur de la ville ; pourrait-on le dire de

 19   cette façon-là ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Je ne me souviens pas du

 21   kilométrage exact. Je me souviens qu'il pleuvait. Il n'y avait pas de

 22   route. Alors, je ne sais pas, parce qu'une demi-heure ne fait pas

 23   nécessairement 50 kilomètres : on n'était pas sur une autoroute.

 24   Mme Residovic (interprétation). - Sans doute, mais vous avez dit

 25   qu'il vous a fallu deux heures pour arriver à l'endroit où se trouvait le


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  1   commandant Esad, et une demi-heure -ou plus- pour aller à l'autre

  2   position. Là, on était à deux heures ou deux heures et demie de route de

  3   la ville, n'est-ce pas ?

  4   M. Harraz (interprétation). - A peu près.

  5   Mme Residovic (interprétation). - Vous dites, dans votre

  6   article, avoir vu une tente et une petite table où certains noms avaient

  7   été creusés au couteau.

  8   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  9   Mme Residovic (interprétation). - Aussi, autour de la tente, il

 10   y avait des arbres sur lesquels vous avez vu des inscriptions en plusieurs

 11   langues, surtout en anglais et en arabe ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Je pense que la seule chose qui

 13   avait été inscrite ou gravée en anglais, c'était "commandant général".

 14   Cela se trouvait à l'endroit où se trouvait le commandant Zejnil Din.

 15   D'autres noms avaient été gravés au couteau dans les arbres, mais je ne

 16   m'en souviens plus.

 17   Mme Residovic (interprétation). - Vous savez s'il y avait

 18   d'autres inscriptions comme OTAN ou Pentagone.

 19   M. Harraz (interprétation). - Je ne m'en souviens plus

 20   aujourd'hui.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous eu l'occasion de

 22   voir plusieurs soldats également à cet endroit ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 24   Mme Residovic (interprétation). - Tous les soldats que vous avez

 25   vus là étaient des Bosniaques, n'est-ce pas ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - Oui, du moins si vous parlez de

  2   l'endroit où se trouvait le commandant. Parlez-vous plutôt de la ligne de

  3   front ? Là où se trouvait le commandant, il y avait quelques soldats qui

  4   étaient sans nul doute bosniaques. Je ne sais pas s'il y avait aussi des

  5   Croates parmi eux. Dans la région, il y avait des soldats croates. Mais,

  6   s'agissant de cet endroit précis dont vous parlez, il y avait un petit

  7   groupe de soldats.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Il est certain que vous n'avez

  9   vu là aucun étranger.

 10   M. Harraz (interprétation). - Non, effectivement.

 11   Mme Residovic (interprétation). - Vous avez, avec l'aide de

 12   l'Interprète, parlé à tous ces soldats ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 14   Mme Residovic (interprétation). - Cette inscription "Bureau du

 15   commandant principal" était écrite en anglais uniquement, n'est-ce pas ?

 16   M. Harraz (interprétation). - Il y avait des noms, des

 17   inscriptions, mais la seule chose dont je me souvienne aujourd'hui, c'est

 18   qu'il y avait le titre du commandant qui était inscrit. C'était la seule

 19   chose écrite en anglais.

 20   Mme Residovic (interprétation). - Mais ce titre n'était-il pas

 21   aussi reproduit en bosniaque ? C’était uniquement en anglais, et c'était

 22   la seule inscription en anglais ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Je pense que tous les noms étaient

 24   en bosniaque et il n'y avait que ce titre de commandant général qui se

 25   trouvait en anglais. C'est ce dont je me souviens. Mais rappelez-vous que


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  1   cinq ans se sont écoulés depuis.

  2   Mme Residovic (interprétation). - A votre arrivée, y a-t-il eu

  3   une cérémonie d'accueil, de réception ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Non.

  5   Mme Residovic (interprétation). - Cet endroit vous a-t-il donné

  6   l'impression d'être un lieu où se trouvaient le haut commandement, avec

  7   les services afférents : équipements, gardes ?

  8   M.   (interprétation). - Vous savez, on était en plein bled.

  9   C'était un endroit élevé, où il y avait la tente et quelques soldats qui

 10   gardaient ou aidaient le commandant. Comme je l'ai dit dans l'article, à

 11   proximité il y avait une famille bosniaque qui s'occupait du

 12   ravitaillement, de l'alimentation et qui donnait un coup de main.

 13   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Delalic s’est

 14   présenté en se contentant de décliner son identité, est-ce bien exact ?

 15   Nom et prénom ?

 16   M. Harraz (interprétation). - En fait, il nous a été présenté.

 17   Mme Residovic (interprétation). - Il n'a rien dit du poste qu'il

 18   occupait alors ou qu'il avait occupé précédemment ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Non. On l'a simplement présenté.

 20   C'est tout.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Et en votre présence, il n’a

 22   pas donné d'ordre et personne n'est venu lui faire rapport ?

 23   M. Harraz interprétation). - Non.

 24   Mme Residovic (interprétation). - Vous vous êtes entretenu avec

 25   lui des problèmes généraux, de la situation qui prévalait en Bosnie, de la


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  1   situation politique ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  3   Mme Residovic (interprétation). - Ce qui l'intéressait surtout,

  4   c'était l'acquisition d'équipements, d'armements du fait que nous étions

  5   vraiment sous-équipés et que les unités étaient vraiment mal

  6   approvisionnées ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  8   Mme Residovic (interprétation). - De fait, il était frustré par

  9   le manque d'assistance fournie par le monde arabe ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 11   Mme Residovic (interprétation). - Avant d'arriver là, vous aviez

 12   visité une position où il y avait bien plus de soldats, n'est-ce pas ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 14   Mme Residovic (interprétation). - Auparavant, vous avez aussi

 15   été intercepté par des gardes, n'est-ce pas ?

 16   M. Harraz (interprétation). - Impossible de me souvenir de tels

 17   détails. Je sais que nous avons été escortés par des gardes qui nous ont

 18   amenés à l'endroit où se trouvait M. Zejnil Din.

 19   Mme Residovic (interprétation). - Lorsque vous vous êtes trouvé

 20   à l'endroit où était M. Delalic, il vous était possible de voir les

 21   positions serbes de cet endroit et on vous a mis en garde contre le fait

 22   que leur artillerie était disposée là aussi ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 24   Mme   (interprétation). - Il vous a également été dit que les

 25   combats se poursuivaient depuis pratiquement déjà trois semaines alors ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Lorsque vous êtes rentré,

  3   Monsieur Harraz, M. Delalic est resté avec ses soldats dans les collines.

  4   M. Harraz (interprétation). - Oui. Nous l'avons laissé sur place

  5   et nous nous sommes rentrés.

  6   Mme Residovic (interprétation). - Quand vous êtes arrivé à

  7   Konjic, vous vous êtes rendu dans une maison dont il vous a été dit que

  8   c'était la maison de M. Delalic.

  9   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 10   Mme Residovic (interprétation). - Il vous a été dit également

 11   que, dans la cave de cette maison, on trouvait le centre de transmission

 12   de l'armée de Konjic ?

 13   M.   (interprétation). - Pas tout à fait. Ce qui nous a été dit

 14   et ce dont je me souviens, c'est que cette maison-là était le point de

 15   rencontre de beaucoup de responsables de la région.

 16   Mme Residovic (interprétation). - Comme vous l'avez dit,

 17   Monsieur Harraz, à cette occasion, l'épouse de M. Delalic vous a été

 18   présentée ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 20   Mme Residovic (interprétation). - Etes-vous sûr que c'était bien

 21   l'épouse de M. Delalic que vous avez rencontrée à cette occasion ?

 22   M. Harraz (interprétation). - Comment pourrais-je en être sûr ?

 23   Il m'a été dit que c'était sa femme, c'est tout.

 24   Mme Residovic (interprétation). - Ce fait, ainsi que d'autres

 25   qui vous ont été soumis, vous ne les avez pas vérifiés vous-même, n'est-ce


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  1   pas ?

  2   M.   (interprétation). - Non. Je répète que c'est ce que j'ai

  3   dit dans l'article.

  4   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, j'aimerais

  5   vous poser plusieurs questions portant sur l'article du 26 juillet 1992.

  6   M. le Président (interprétation). - L'heure est venue de faire

  7   la pause du déjeuner. Nous reprendrons à 14 heures 30.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

  9   L’audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 35.

 10   (Le témoin est introduit dans la salle.)

 11   M. le Président (interprétation). - Veuillez rappeler au témoin

 12   qu'il est sous serment.

 13   M. le Greffier (interprétation). - Je vous rappelle,

 14   Monsieur Harraz, que vous êtes sous serment.

 15   M. Harraz (interprétation). - Absolument.

 16   M. le Président (interprétation). - Madame Residovic, vous avez

 17   la parole.

 18   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

 19   Président. Monsieur Harraz, êtes-vous prêt à continuer ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Avant d'en venir à l'article

 22   le plus récent que vous avez écrit, j'aimerais simplement vous poser une

 23   question en rapport à votre visite à M. Delalic, chez lui. Vous avez

 24   déclaré devant la Cour qu'il y avait beaucoup de personnes présentes, que

 25   cela servait un peu de lieu de réunion pour nombre de personnes, ou plutôt


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  1   vous avez dit que c'est ce qu'on vous avait dit. Est-ce exact ?

  2   M. Harraz (interprétation). - C'est exact.

  3   Mme Residovic (interprétation). - Puisque vous avez vu la

  4   maison, vous pouvez confirmer que cette maison se trouve à proximité de la

  5   route et qu'elle est protégée des bombardements. Est-ce exact ?

  6   M. Harraz (interprétation). - En ce qui concerne le lieu où se

  7   trouve la maison, quelle soit près de la route ou protégée des

  8   bombardements, je ne m'en rappelle pas. Ce dont je me rappelle, c'est

  9   qu'il y avait là nombre de personnes devant la maison. On nous a dit que

 10   c'était sa résidence principale. La personne qu'on nous a présentée, était

 11   sa femme, du moins c'est ce qu'on m'a dit.

 12   Mme Residovic (interprétation). - Cependant, vous savez sûrement

 13   ou on a bien dû vous dire que Zenjil Delalic ne se trouvait pas dans la

 14   maison depuis un moment puisqu'il se trouvait sur la ligne de front, mais

 15   que les personnes se retrouvaient là tout de même. Est-ce exact ?

 16   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Il n'était pas lui-

 17   même dans le maison. Nous l'avons laissé sur la ligne de front. Nous nous

 18   sommes rendus chez lui, mais il n'était pas présent.

 19   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. J'en viens

 20   maintenant à un autre article que vous avez écrit lors de votre retour de

 21   voyage dans la région. J'aimerais tout d'abord vous demander si vous avez

 22   l'original de cet article en votre possession ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Vous parlez de ce que j'ai moi-

 24   même écrit ?

 25   Mme Residovic (interprétation). - Non. Je parle de l'article qui


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  1   a été publié dans les journaux. Un article qui commence avec le récit de

  2   votre visite à Mostar.

  3   M. Harraz (interprétation). - Je ne suis pas absolument certain

  4   d'avoir cet article à ma disposition. Je dois avoir un exemplaire de cet

  5   article, je crois.

  6   Mme McHenry (interprétation). - Je crois que l'accusation a cet

  7   article. Cela pourrait peut-être aider le conseil de la défense.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. Je vais

  9   demander à l'Huissier de m'apporter cet exemplaire de l'article et qu'il

 10   donne un exemplaire de cet article au témoin, s'il vous plaît.

 11   J'aimerais également vous informer,

 12   Madame et Messieurs les Juges, du fait que cet article ou plutôt les

 13   photocopies de cet article ont été communiquées à la défense par

 14   l'accusation. Elles étaient accompagnées d'une traduction en anglais.

 15   Une fois que les originaux auront été annotés, j'aimerais qu'un

 16   exemplaire de ces articles et de la traduction vous soient communiqués,

 17   Madame et Messieurs les Juges.

 18   M. le Greffier (interprétation). - Il s'agit du document

 19   D 5.8/1.

 20   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, cet article

 21   est daté du 26 juillet 1992. En mars de cette année, lorsque vous avez

 22   fait une déclaration devant Mme Sabina Manke, elle ne vous a pas posé de

 23   questions relatives à cet article ?

 24   Aujourd'hui, l'accusation ne vous a posé aucune question

 25   relative à cet article. Est-ce bien exact ?


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  1   M. Harraz (interprétation). - Je n'ai aucun souvenir d'une

  2   question relative à cet article.

  3   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, est-il exact

  4   que vous avez rédigé cet article sous le nom de Assaad Taha, comme vous

  5   l'avez déjà dit précédemment ? C'est-à-dire que c’est un article qui porte

  6   le nom de votre père.

  7   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'est exact, le nom de

  8   Assa’ad Taha.

  9   Mme Residovic (interprétation). - Est-il exact qu'après votre

 10   visite à Konjic vous vous êtes rendu à Mostar ? Est-il exact que vous avez

 11   écrit ce récit vers la même époque, après votre visite à Konjic ?

 12   M. Harraz (interprétation). - Ce dont je me souviens, c'est que

 13   je suis d'abord passé par Split et ensuite de Split je me suis rendu à

 14   Mostar. Je précise bien que c'est ce dont je me rappelle. Je n'en suis pas

 15   absolument certain. Ce dont je suis certain, c'est que, lorsque nous avons

 16   quitté M. Zejnil Din, nous nous sommes rendus à Split.

 17   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, regardez cet

 18   article pour vous rafraîchir la mémoire et dites-nous s'il est vrai que,

 19   dans cet article, vous faites référence à votre visite à Konjic, vous

 20   faites référence aux entretiens que vous avez eus à Konjic concernant la

 21   situation prévalant dans la région.

 22   M. Harraz (interprétation). - Pourriez-vous me donner un petit

 23   délai, un délai qui me permettrait de lire cet article ?

 24   Mme Residovic (interprétation). - Absolument. Prenez le temps de

 25   le lire. J'attends que vous ayez terminé de le lire.


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  1   M. Harraz (interprétation). - Dans le premier paragraphe de

  2   l'article, je parle de Konjic.

  3   Mme Residovic (interprétation). - Maintenant que vous avez

  4   rafraîchi vos souvenirs quant au contenu de cet article, permettez-moi de

  5   vous poser quelques questions et, pour répondre à ces questions, si cela

  6   est nécessaire, vous pourrez vous référer au texte.

  7   Voulez-vous me dire, s'il vous plaît, s'il est exact que vous

  8   avez écrit dans cet article que la direction de l'Union démocratique

  9   croate avait, quelques jours avant votre arrivée dans la région, proclamé

 10   l'indépendance de la Herceg-Bosna ?

 11   M. Harraz (interprétation). -  Non pas quelques jours avant

 12   notre arrivée, mais il est bien connu de tous que, au début de la guerre,

 13   les Croates ont proclamé la création de la communauté de Herceg-Bosna.

 14   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Harraz, est-il exact

 15   que, dans cet article, vous avez écrit que, à votre retour de Konjic, vous

 16   avez dû traverser dix postes de contrôle le long de la route qui mène de

 17   Konjic à Mostar, des postes de contrôle qui étaient sous la responsabilité

 18   de membres du HVO.

 19   M. Harraz (interprétation). - J’aimerais dire que, dans des

 20   missions de type journalistique, ou lorsqu'il s'agit de couvrir un

 21   événement pour la presse, il n'est pas toujours nécessaire de préciser

 22   quelles ont été les villes visitées au début ou à la fin de la mission. Il

 23   est nécessaire pour le journaliste de s'en tenir aux faits. Ce que je dis

 24   dans cet article est exact. Il y avait beaucoup de postes de contrôle sur

 25   la route qui mène à Mostar. Ces postes de contrôle étaient tenus par des


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  1   soldats.

  2   Mme Residovic (interprétation). - Vous voulez dire : des soldats

  3   membres du HVO ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'est ce que je veux dire.

  5   Mme Residovic (interprétation). - Et le long de cette route,

  6   vous avez également observé que, là où les contrôles étaient exercés par

  7   les membres de la HVO, des drapeaux de la communauté croate flottaient au

  8   vent, et non pas des drapeaux de la Bosnie-Herzégovine ? Est-ce exact ?

  9   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. On ne voyait que des

 10   drapeaux de la République croate.

 11   Mme Residovic (interprétation). - Vous avez été une des rares

 12   personnes, à l'époque où il y avait encore une alliance entre le HVO et

 13   l'armée, à être arrivée à la conclusion que la volonté, le désir de

 14   sécession commençait à faire son chemin, non seulement dans les postes de

 15   commandement, mais également dans toutes les unités constitutives du HVO.

 16   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. On s'attendait à ce

 17   que la guerre devienne un conflit opposant les Musulmans aux Croates.

 18   Mme Residovic (interprétation). - Est il exact, Monsieur, que

 19   vous avez appris de certains combattants que des membres du HVO avaient

 20   refusé de donner de l'essence aux combattants de la Défense territoriale

 21   pour leur permettre de transporter les blessés dans des hôpitaux ?

 22   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. C'est ce que l'on

 23   nous a dit à l'époque.

 24   Mme Residovic (interprétation). - On vous a également dit que le

 25   HVO avait saisi des camions chargés de transporter de l'aide humanitaire


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  1   et que cela avait bien sûr aggravé la situation, déjà très difficile, qui

  2   prévalait en Bosnie-Herzégovine ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Je répète que c'est ce que l'on

  4   nous a dit.

  5   Mme Residovic (interprétation). - Est-il vrai que vous ayez

  6   entendu dire que vous avez par la suite écrit que le maire de Konjic avait

  7   dit que Mate Boban avait déclaré l'indépendance de la République de

  8   Herceg-Bosna sans avoir eu l'accord de la partie bosniaque ?

  9   M. Harraz (interprétation). - Pourriez-vous, s'il vous plaît,

 10   répéter la question ? Il serait peut-être bon que la question soit

 11   répétée.

 12   Mme Residovic (interprétation). - Est-il vrai qu'au cours de

 13   votre séjour à Konjic le maire, Hadzic Huseinovic, vous ait déclaré, entre

 14   autres, ce que vous avez écrit dans votre article. Je cite ce que vous

 15   avez écrit : "Cependant Mate Boban, l'un des dirigeants croates en Bosnie,

 16   a déclaré l'indépendance de la communauté croate de Herceg-Bosna sans nous

 17   consulter". Est-ce exact ?

 18   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. C'est ce que l'on

 19   nous a dit.

 20   Mme Residovic (interprétation). - Tout de suite après cette

 21   phrase, vous écrivez dans cet article et je vous prie de le confirmer, que

 22   le commandant des unités se trouvant dans la région, Essad, a déclaré :

 23   "Les médias, d'une certaine façon contrôlés par le HVO, et la non

 24   participation du HVO dans la défense de nos régions, sont en train de

 25   générer nombre de problèmes très importants pour nous, notamment du fait


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  1   que ces problèmes ne sont pas seulement dus au fait qu'ils sont incapables

  2   de nous aider". Serait-il possible d'avoir...

  3   Mme McHenry (interprétation). - Je crois qu'il y a un problème

  4   de traduction. Je crois qu'il faut préciser que l'on ne dit pas dans cet

  5   article que le commandant était responsable des unités dans cette région.

  6   Peut-être que cela permet de clarifier les choses. Si cela est repris, je

  7   ne pose pas d'objection à la question.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Pour que tout soit clair pour

  9   tout le monde, peut-être que M. Asaad Harraz peut nous lire le passage en

 10   arabe.

 11   M. Harraz (interprétation). - "Le commandant Esad a déclaré la

 12   Bosnie-Herzégovine indépendante et il a déclaré que la non-participation

 13   des forces croates posent nombre de problèmes graves, notamment parce que

 14   cela ne les empêche pas de ne pas apporter une aide. Ces problèmes vont

 15   encore au-delà de cela. Cela empêche l'approvisionnement de nous arriver.

 16   Nous ne pouvons pas avoir accès à l'approvisionnement. Cela dit, nous ne

 17   pouvons pas nier le fait que nous recevons, de temps en temps, une

 18   certaine aide".

 19   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. S'agit-il

 20   bien là de ce que le commandant Esad vous a dit ?

 21   M. Harraz (interprétation). - Oui. C'est ce que le commandant

 22   nous a dit. Et je répète que je ne connais pas le nom de famille du

 23   commandant Esad.

 24   Mme Residovic (interprétation). - S'agit-il du Esad dont vous

 25   avez parlé tout à l'heure, lorsque vous parliez des lignes de front, à


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  1   savoir le Essad qui se trouvait sur la ligne de front ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Je le pense.

  3   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Président, je

  4   voudrais non pas faire une objection, mais simplement demander si le

  5   conseil de la défense utilisera ou non cela comme moyen de preuve.

  6   Parfois, je ne sais pas très bien si le témoin utilise ses souvenirs à

  7   lui, ou bien s'il se fonde sur quelque chose qu'il trouve dans l'article,

  8   mais dont lui ne se souvient pas réellement. Je ne soulève pas une

  9   objection, mais notons que nous ne savons pas exactement quelle est la

 10   position du témoin. Il faudrait que les choses soient plus claires.

 11   Mme Residovic (interprétation). - Le témoin répond à mes

 12   questions du mieux qu'il peut. Lors de ses réponses à l'accusation, il a

 13   dit qu'il avait relu les articles et que, par conséquent, cela lui avait

 14   rafraîchi la mémoire. C'est ce qu'il est en train de faire en ce moment

 15   même. Mes questions sont relatives à la teneur de l'article que le témoin

 16   a reconnu comme étant écrit de sa main.

 17   M. le Président (interprétation). - En fait, quel est le but du

 18   contre-interrogatoire se fondant sur une déposition, une déclaration qui

 19   n'a pas été utilisée lors de l'interrogatoire principal ? A moins que vous

 20   n'ayez d'autres intentions, veuillez vous expliquer.

 21   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, je pose

 22   des questions qui sont relatives au fait qu'il a mentionné certains

 23   individus. Je le questionne pour savoir quels sont les faits qu'il peut

 24   rapporter concernant ces personnes, concernant les postes occupés par ces

 25   personnes et simplement sur la suite de la première déclaration que le


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  1   témoin a faite sur la base des deux pièces versées au dossier et qui ont

  2   été acceptées.

  3   La défense versera probablement cette pièce au dossier après son

  4   enregistrement aux fins d'identification, après son identification par le

  5   témoin. En effet, cette pièce se réfère à la même visite et aux mêmes

  6   circonstances qui prévalaient et dont le témoin a parlées lors de sa

  7   déclaration.

  8   M. le Président (interprétation). - Vous ne le contredisez pas.

  9   Vous voulez faire ce type de déclaration ?

 10   Mme Residovic (interprétation). - Oui, absolument. Je veux qu'il

 11   confirme ce qu'il a dit, que cet article est bien de sa main, que c'est

 12   bien lui qui l'a écrit.

 13   Enfin, nous voudrions souligner que, dans ses dépositions, il y

 14   a une certaine confusion, des choses qui ne sont pas absolument claires.

 15   Mais tout cela se réfère au même sujet. Je crois que si nous n'utilisons

 16   pas cet article, nous n'aurons pas une idée précise de la situation.

 17   M. le Président (interprétation). - En effet, je pense que cela

 18   peut être utile.

 19   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. Par

 20   conséquent, Monsieur Harraz, nous parlions de Esad, dont on vous a dit un

 21   peu plus tôt, qu'il était un capitaine de l'armée populaire yougoslave.

 22   Est-ce exact ?

 23   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. Je ne m'en souviens

 24   pas aujourd'hui.

 25   Mme Residovic (interprétation). - Cependant si c'est ce que vous


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  1   avez écrit dans votre article précédent, alors il s'agit d'un fait dont on

  2   vous a informé lors de votre visite; n'est-ce pas exact ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Toute l'information qui se trouve

  4   dans l'article se fonde sur ce qu'on nous a dit au moment des faits.

  5   Mme Residovic (interprétation). - Monsieur, s'il vous plaît,

  6   veuillez me dire si, à cette époque, vous saviez qu'il s'agissait de la

  7   personne avec laquelle vous aviez abordé un certain nombre de sujets. Il

  8   s'agissait de la personne qui a été le commandant du personnel de la

  9   Défense territoriale qui se trouvait dans la municipalité de Konjic.

 10   M. Harraz (interprétation). - J'ai dû mal à me souvenir de quoi

 11   que ce soit. Je me souviens surtout de ce dont il était question dans

 12   l'article, mais de rien d'autre.

 13   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. J'aimerais

 14   simplement qu'une fois de plus vous confirmiez ce que vous avez dit

 15   précédemment.

 16   Vous n'étiez pas capable de vérifier les faits que l'on vous

 17   avait rapportés concernant certaines personnes, même après avoir quitté

 18   Konjic. Aujourd'hui encore, vous n'êtes toujours pas absolument certain de

 19   savoir quels étaient les postes occupés par ces différentes personnes.

 20   Vous ne savez toujours pas quelles étaient réellement leurs

 21   responsabilités ou leurs missions ?

 22   M. Harraz (interprétation). - Ce dont je suis certain c'est ce

 23   que l'on m'a dit à l'époque, c'est ce qui figure dans mon article.

 24   Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. J'aimerais

 25   maintenant demander à la Chambre de première instance, étant donné que


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  1   dans ces trois articles écrits par le témoin on trouve l'intégralité de ce

  2   qui s'est passé au cours de ce voyage, et que le témoin a déclaré que ces

  3   articles étaient bien de lui, étant donné tous ces éléments, que ce

  4   document daté du 26 juillet, qui porte le titre de Union bosniaque croate,

  5   un mariage pour des intérêts militaires.

  6   Mme McHenry (interprétation). - Si la défense compte faire cela,

  7   alors nous demandons que le deuxième article soit également versé au

  8   dossier. Il me semble que le deuxième article n'a pas vraiment été versé

  9   au dossier. Si les trois articles sont versés au dossier, alors nous

 10   n'avons pas d'objection à élever.

 11   M. le Greffier (interprétation). - Le troisième article portera

 12   la côte D 58/1. Il faudra donner aussi une cotation pour la traduction.

 13   Mme Residovic (interprétation). - Il y aura une traduction en

 14   anglais qui sera fournie à l'intention du Greffe. Je vous remercie

 15   Monsieur Harraz. J'en ai terminé de mon contre-interrogatoire,

 16   Madame et Messieurs les Juges.

 17   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie, Madame. Y

 18   a-t-il d'autres contre-interrogatoires ?

 19   M. Olujic (interprétation). - Oui, Monsieur le Président. Avec

 20   votre autorisation, je commencerai. Bonne après-midi, Monsieur Harraz. Je

 21   défends M. Zdravko Mucic. Ce nom vous est-il connu ? Vous rappelle-t-il

 22   quoi que ce soit ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Il est difficile de me souvenir

 24   des noms, de ce détail.

 25   M. Olujic (interprétation). - Monsieur Harraz, vous êtes cité à


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  1   la barre du Tribunal pénal international. Savez-vous qui sont les accusés

  2   dans l'instance ? Connaissez-vous ces accusés par leur nom ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Oui. Je sais, puisque j'ai appris

  4   que le premier accusé est Zejnil Delalic, commandant de la région et aussi

  5   administrateur du camp. Mais je n'avais plus son nom précis en mémoire. Je

  6   l'ai peut-être mentionné dans l'article, mais je ne m'en souviens plus en

  7   ce moment-même.

  8   M. Olujic (interprétation). - Merci. Avant de vous rendre en

  9   Bosnie, Monsieur Harraz, connaissiez-vous bien la situation que vous

 10   alliez y trouver ? Que saviez-vous de cette situation auparavant ? Avez-

 11   vous fait des recherches ?

 12   M. Harraz (interprétation). - J'avais coutume d'aller en

 13   Yougoslavie, pas seulement en Bosnie. Je l'ai fait au début de 1990. Je

 14   n'ai pas fait d'étude particulière, mais j'ai fait des visites diverses et

 15   variées à Belgrade et à Sarajevo. C'est de là que je tiens mes

 16   connaissances.

 17   M. Olujic (interprétation). - Auriez-vous l'obligeance de me

 18   dire, Monsieur, si, outre ces visites que vous venez de mentionner et

 19   celles que vous mentionniez dans votre article, vous êtes retourné en

 20   Bosnie ? Avez-vous continué à faire des reportages sur la région ?

 21   M. Harraz (interprétation). - Pas nécessairement à propos de

 22   cette région précise, région que j'ai traversée à plusieurs reprises pour

 23   me rendre à Mostar. J'y suis allé plusieurs fois. Mais s'agissant de

 24   Konjic, je n'ai fait que traverser la ville, sans y faire de travail de

 25   journaliste. Pour ce qui est de la date, c'est difficile, parce qu'il y a


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  1   eu quand même trois ans et demi de guerre et je me suis souvent rendu dans

  2   la région.

  3   M. Olujic (interprétation). - Monsieur Harraz, lors de

  4   l'interrogatoire principal mené par ma consoeur de l'accusation, vous avez

  5   dit que le propriétaire du journal, pour lequel vous travailliez, est

  6   d'Arabie saoudite et que ce journal est publié à Londres. Est-ce bien

  7   exact ?

  8   M. Harraz (interprétation). - Le quotidien est publié à Londres

  9   et c'est de là qu'il est distribué au Monde arabe et en Europe.

 10   Effectivement, ce sont des Saoudiens qui sont les bailleurs de fonds.

 11   M. Olujic (interprétation). - Qui est le propriétaire de ce

 12   quotidien ?

 13   M. Harraz (interprétation). - C'est une personne d'Arabie

 14   saoudite.

 15   M. Olujic (interprétation). -Quel est le type de journalisme,

 16   quelle est l'orientation politique, que prône ce quotidien ?

 17   M. Harraz (interprétation). - C'est un journal quotidien

 18   politique, qui s'occupe de la politique générale, des affaires

 19   internationales et qui s'intéresse aussi aux versants culturels,

 20   politiques ou autres. Les intérêts sont multiples. Il est de tendance

 21   générale. Il y a un certain temps que je ne travaille plus pour ce

 22   journal.

 23   M. Olujic (interprétation). - Y travailliez-vous comme free-

 24   lance ou étiez-vous un membre du personnel ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Depuis que j'ai commencé à


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  1   travailler comme journaliste, j'ai toujours été free-lance.

  2   M. Olujic (interprétation). - Merci. Vous avez dit, dans le

  3   cadre de votre déposition, que vous vous étiez rendu sur place pour

  4   décrire les événements et pas pour vérifier des faits.

  5   M. Harraz (interprétation). - C'est exact. J'ai couché sur

  6   papier ce que j'ai vu, les événements auxquels j'ai assistés à l'époque.

  7   Mon intention n'était pas de vérifier les questions qui avaient été

  8   soulevées dans le cadre de la visite.

  9   M. Olujic (interprétation). - En d'autres termes, on pourrait

 10   dire que tous vos articles, la teneur de tous ces articles se fonde

 11   uniquement sur les impressions que vous avez recueillies.

 12   M. Harraz (interprétation). - C'est fondé sur ce que j'ai vu, ce

 13   à quoi j'ai assisté personnellement. Et aussi, j'ai relaté ce qui m'a été

 14   dit. J'ai toujours mentionné qui était à l'origine des propos qui

 15   m'avaient été rapportés pour m'exonérer de toute responsabilité. Je ne

 16   pense pas avoir fait passer des idées qui n'aient pas été étayées, parce

 17   que j'aurais vu ce qui m'aurait été dit, que ce soit en rapport avec la

 18   réalité ou pas.

 19   M. Olujic (interprétation). - Je comprends.

 20   Pourriez-vous nous expliquer ce que vous avez déjà dit au cours

 21   de votre déposition, à savoir que vous avez constaté que les Bosniaques

 22   étaient mal organisés. Je parle de la chaîne de commandement, de la

 23   structure hiérarchique. Pourriez-vous élaborer ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Volontiers. Au début de la guerre,

 25   la situation était difficile, surtout pour les Musulmans, car ils


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  1   n'étaient appuyés par aucune force extérieure. Les Musulmans devaient se

  2   renforcer au plan administratif, établir des structures, d'autant qu'ils

  3   avaient peu d'expérience à l'époque.

  4   J'ai effleuré ce sujet comme d'autres et j'ai insisté sur

  5   l'absence de structure hiérarchique, au sens conventionnel du terme.

  6   Beaucoup de correspondants étrangers partageaient cet avis. Il était

  7   facile d'aller où que ce soit dans la région, fusse dans les zones de

  8   combats. Alors que si c'était un autre pays, et dans d'autres

  9   circonstances, il nous aurait fallu beaucoup de laisser-passer et de

 10   tracasseries administratives pour aller dans ces endroits.

 11   Mais, parallèlement, j'aimerais faire une distinction entre

 12   l'absence d'organisation ou le manque d'organisation et le chaos. Il n'y

 13   avait pas de chaos, mais il n'y avait pas non plus de structure très

 14   poussée.

 15   M. Olujic (interprétation). - Monsieur Harraz, à la lecture de

 16   vos articles, il apparaît que vous avez parlé à des gens du terrain.

 17   Comment se sont passées ces conversations ? Etait-ce sous la forme

 18   d’interviews, comme l’aimaient les journalistes, ou votre récit est-il

 19   simplement une interprétation de ces conversations que vous avez

 20   éventuellement eues avec d'autres personnes ?

 21   Je m'explique. Lorsque vous rencontriez quelqu'un, si vous

 22   faites une interview, en général vous demandez l'autorisation de votre

 23   interlocuteur avant de publier ces propos dans un journal ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Si j’ai eu des interviews, j'ai

 25   fait cela sous forme de question-réponse. Je crois l’avoir dit dans les


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  1   articles, c'était vraiment la formule question-réponse, surtout pour ce

  2   qui est du camp de détention.

  3   M. Olujic (interprétation). - Avez-vous donné aux personnes que

  4   vous avez interviewées la possibilité de relire ce qu'elles auraient dit

  5   avant de publier ?

  6   M. Harraz (interprétation). - Hélas non, le temps manquait pour

  7   ce faire. Parce qu'en général, quand je rentre, j'ai mon petit

  8   enregistreur, mon magnétophone. J'ai bien sûr enregistré les interviews,

  9   je fais un peu de sélection et puis je rédige mon article.

 10   M. Olujic (interprétation). - Qui avait mis au point votre

 11   visite, Monsieur ? Je parle du moment où vous arrivez en Bosnie en

 12   juillet 1992 ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Vous parlez du voyage à Konjic ou

 14   bien en Bosnie de façon générale ?

 15   M. Olujic (interprétation). - Là, je pense plutôt à Konjic.

 16   M. Harraz (interprétation). - Je vous l’ai dit, nous sommes

 17   arrivés en groupe. Cela s'est passé dans la soirée. Nous avons rencontré

 18   M. Rusmir. Nous avons discuté avec lui, et il nous a promis de nous aider

 19   parce qu'il avait des contacts avec des responsables et cela dès le

 20   lendemain matin, ce qui s'est passé effectivement. Nous avons rencontré

 21   M. Zejnil Din, le commandant de la région, et nous sommes allés au camp de

 22   détention.

 23   M. Olujic (interprétation). - Qui avait organisé ce voyage,

 24   cette mission ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Il n'y a pas d'organisation,


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  1   d'instance particulière, qui s'occupe de ce genre de détail. Tout cela a

  2   été une initiative personnelle. On a essayé de trouver une voiture, un

  3   chauffeur et puis intervient tout ce que j'ai déjà raconté. Cela se passe

  4   comme cela à chaque fois. C'est de cette façon là aussi que d'autres

  5   journalistes étrangers ont travaillé en Bosnie. Chaque fois, en général,

  6   il nous faut innover. Ce n'est jamais la même structure qui se répète.

  7   M. Olujic (interprétation). - Monsieur Harraz, vous dites avoir

  8   enregistré tout cela sur cassette.

  9   M. Harraz (interprétation). - Effectivement, j’avais une petite

 10   cassette.

 11   M. Olujic (interprétation). - L’avez-vous toujours ou les avez-

 12   vous toujours ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Non. Excusez-moi. J'aimerais

 14   répéter que cette visite est une visite parmi tant d'autres. Je me suis

 15   souvent rendu en Bosnie pendant la guerre. Il est donc particulièrement

 16   ardu pour un journaliste de garder toutes les notes, tous les éléments

 17   qu'il aurait utilisés parce que, à l'époque, cet événement n'était pas

 18   particulièrement unique à ce point du moins que j'en ai conservé la

 19   moindre trace.

 20   M. Olujic (interprétation). - En réponse à une question posée

 21   par l'accusation, vous avez déclaré avoir vu que des soldats croates

 22   arboraient l'insigne de la République de Croatie. Est-ce exact ?

 23   M. Harraz (interprétation). - J'ai dit qu'ils portaient le

 24   drapeau croate, c'est du moins ce dont je me souviens. Je parle de

 25   drapeau. Quant à savoir si c'était le drapeau de Bosnie-Herzégovine ou de


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  1   Croatie, j'ai dû mal à le dire maintenant. En tout cas, ils portaient des

  2   drapeaux croates.

  3   M. Olujic (interprétation). - Si je vous pose cette question,

  4   c'est précisément pour apporter des éclaircissements, parce que le procès-

  5   verbal d'audience, le transcript, dit que c'était là les insignes de

  6   l'Etat Croate.

  7   M. Harraz (interprétation). - Je ne pourrais ni confirmer ni

  8   infirmer ce fait aujourd'hui.

  9   M. Olujic (interprétation). - A quoi ressemblait ce drapeau que

 10   vous auriez vu ? Pourriez-vous nous le décrire ?

 11   M. Harraz (interprétation). - Les couleurs étaient rouge et

 12   bleu. Au milieu, au centre, il y a une forme particulière. Je crois que,

 13   il y a toute une série de lignes rouges et blanches qui s'entrecroisent.

 14   M. Olujic (interprétation). - Merci, Monsieur Harraz. Je n'ai

 15   plus de questions à poser. Merci, Madame et Messieurs les Juges.

 16   M. Moran (interprétation). - Bonne après-midi, Monsieur. Je

 17   m'appelle Tom Moran, je défends Hazim Delic. Hazim signifie-t-il quelque

 18   chose pour vous, soit-dit en passant ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Pour moi, ce n'est pas un nom

 20   étranger. Mais je ne me souviens pas du poste qu'occupait ce monsieur.

 21   M. Moran (interprétation). - C'est bon. Je reviens à votre

 22   déposition d'il y a quelques instants. On vous a dit que le premier accusé

 23   c'était Zejnil Delalic. Qui vous l'a dit ? Est-ce quelqu'un du bureau du

 24   Procureur qui vous l’aurait dit ? Quelqu'un du bureau du Procureur vous a-

 25   t-il dit que la personne que vous aviez interviewée en Bosnie était en


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  1   fait un accusé dans ce procès ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Ce qui m'a été dit c'est

  3   simplement le nom, et que le nom de la personne que j'avais rencontrée

  4   alors était le nom d'un accusé aujourd'hui.

  5   M. Moran (interprétation). -  Quelqu'un du bureau du Procureur

  6   vous aurait dit que Zejnil Din était quelqu'un qui était accusé dans cette

  7   affaire ?

  8   M. Harraz (interprétation). - Oui.

  9   M. Moran (interprétation). - Fort bien. Monsieur, je crois que

 10   vous êtes un témoin capital. Je vais dire pourquoi et je vais vous dire ce

 11   que j'ai l'intention de faire dans le cadre du contre-interrogatoire.

 12   Vous êtes le premier à qui nous ayons parlé jusqu'à présent, qui

 13   se soit trouvé dans le camp au cours de la période couverte par l'acte

 14   d'accusation et qui ne soit lié à la guerre ni d'un côté ni de l'autre.

 15   Mme McHenry (interprétation). - Objection quant à la pertinence.

 16   Je ne pense pas qu'il soit convenable d'apporter ces caractéristiques à un

 17   témoin, d'une façon ou d'une autre.

 18   M. le Président (interprétation). - Poursuivez.

 19   M. Moran (interprétation). - Merci beaucoup. J'aimerais tout

 20   d'abord parler du rôle d'un journaliste pour, par la suite, parler plus

 21   précisément de Konjic et du camp. J'en aurai ainsi terminé.

 22   Parfois, il m'arrive de parler rapidement. Mes questions ne sont

 23   pas des plus limpides. Si vous ne comprenez pas, n'hésitez pas à

 24   m'interrompre.

 25   J'ai cru comprendre que vous compreniez un peu d'anglais. Je


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  1   sais que votre anglais est bien meilleur que mon arabe. Vous avez aussi

  2   votre interprète. Je veux simplement veiller à ce que le courant passe et

  3   que nous nous comprenions.

  4   Vous êtes journaliste free-lance, ce qui veut dire qu'au fond

  5   vous travaillez pour quiconque demande vos services, récit par récit, à la

  6   pièce. Je crois comprendre qu'outre ce quotidien pour lequel vous

  7   travailliez lorsque vous vous êtes trouvé en Bosnie en 1992, vous avez

  8   également été publié et que vous avez travaillé pour des chaînes de

  9   télévision dans la région du Golfe persique.

 10   M. Harraz (interprétation). - Pour ce qui est de la télévision,

 11   j'ai travaillé surtout pour NBC, mais c'était beaucoup plus tard,

 12   consécutivement à ma visite à Konjic.

 13   M. Moran (interprétation). - Donc, tout le reste s'est passé par

 14   la suite ?

 15   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 16   M. Moran (interprétation). - En interrogatoire principal, vous

 17   avez dit que cela fait des années que vous voyagiez sans arrêt. Vous vous

 18   intéressez à quels sujets, en général ?

 19   M. Harraz (interprétation). - Cela dépend. C'est en fonction des

 20   événements. Parfois, cela ressort de l'humanitaire, du politique. Mais je

 21   me concentre sur ce que je vois et je ne m'intéresse pas particulièrement

 22   à quelque chose, et je fais une étude.

 23   M. Moran (interprétation). - Vous intéressez-vous à la guerre du

 24   Golfe et à l'opération "Desert Storm" ?.

 25   M. Harraz (interprétation). - Non, pas du tout.


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  1   M. Moran (interprétation). - Mais vous avez couvert d'autres

  2   opérations militaires et de guerre ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Oui. La guerre en Tchétchénie par

  4   exemple; ce qui s'est passé en Albanie et aussi au Zaïre (Congo-Kinshasa).

  5   Mais je me suis aussi intéressé à des moments chauds de l'activité et de

  6   l'actualité politiques internationales.

  7   M. Moran (interprétation). - Quand vous parlez de l'humanitaire,

  8   de quoi parlez-vous précisément ?

  9   M. Harraz (interprétation). - Dans le domaine de l'humanitaire,

 10   je m'intéresse aux conséquences, aux séquelles de la guerre telles que

 11   pénurie alimentaire, détérioration de la situation en matière de santé et

 12   d'habitation, problèmes familiaux qui pourraient résulter de la guerre,

 13   tout ce qui est le drame de la guerre.

 14   M. Moran (interprétation). - Je ne sais pas si, par exemple,

 15   vous vous intéressez à la famine en Somalie. Vous intéressez-vous à ce

 16   genre de choses ?

 17   M. Harraz (interprétation). - Non.

 18   M. Moran (interprétation). - Où avez-vous été sur le terrain des

 19   missions humanitaires ? Avez-vous vu beaucoup de personnes en proie à la

 20   famine au cours de ces missions ?

 21   M. Harraz (interprétation). - J'ai vu des choses pour ce qui

 22   concerne des situations pénibles en matière humanitaire.

 23   M. Moran (interprétation). - Vous travailliez surtout pour la

 24   presse écrite ?

 25   M. Harraz (interprétation). - A l'époque, oui, surtout avec la


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  1   presse écrite.

  2   M. Moran (interprétation). - Maintenant, manifestement, vous

  3   faites aussi du journalisme électronique ?

  4   M. Harraz (interprétation). - En ce moment, je travaille surtout

  5   pour la télévision.

  6   M. Moran (interprétation). - Donc, vous avez assuré la

  7   couverture de la guerre en ex-Yougoslavie, pratiquement depuis le début ?

  8   Aviez-vous un visa de résidence en Croatie de mai 1992 jusqu'en

  9   janvier 1997  ? Cela veut sans doute dire que vous parcouriez l'ex-

 10   Yougoslavie dans tous les sens ?

 11   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'est vrai. Mais, par

 12   exemple, je suis allé à Belgrade au début de la guerre, en mai 1992. Plus

 13   tard, je n'ai plus pu y retourner.

 14   M. Moran (interprétation). - Il y a votre conception du rôle

 15   qu'un journaliste à à jouer. Des questions vous ont été posées à ce

 16   propos. Peut-on sonder ce terrain quelques instants durant ? Il y a bien

 17   sûr toutes sortes de traditions dans le journalisme.

 18   Ma question est celle-ci : un reporter, comme on dit chez moi, a

 19   peine à être juste. Ce n'est pas facile d'être équitable. Bien sûr, un

 20   journaliste essaie de faire la traduction la plus fidèle, le récit de ce

 21   qu'il voit, de ce qu'il entend, de ce que les gens lui disent. S'il a une

 22   opinion personnelle, il l'indique alors clairement lorsqu'il l'exprime.

 23   Cela ressemblerait-il à la tradition qui est la vôtre et dans laquelle

 24   vous avez grandi ?

 25   M. Harraz (interprétation). - Je pense que cette tradition se


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  1   retrouve dans mes articles, puisque j'ai raconté ce que j'avais

  2   personnellement vu, ce que les gens m'ont dit. J'y ajoute aussi mes

  3   opinions personnelles, ce que l'on voit clairement.

  4   M. Moran (interprétation). - Finalement, cela ressemble à ce que

  5   je vous présentais, présentation la plus impartiale possible des faits.

  6   C'est bien ce que vous essayez de faire, n'est-ce pas ?

  7   M. Harraz (interprétation). - Effectivement, c'est exact.

  8   Mais je m'empresse d'ajouter que, par exemple en ce qui concerne

  9   le camp, je n'ai pas cherché à glaner plus d'informations sur les raisons

 10   de la détention de ces personnes. Est-ce qu'elles étaient coupables ou

 11   pas ? Etaient-elles innocentes ou pas ? Etaient-elles vraiment bien

 12   traitées ? Je n'ai pas pensé que ma mission consistait à vérifier ces

 13   éléments. Pour cela, j'aurais eu besoin de beaucoup plus d'aide. J'ai

 14   essayé d'être le plus proche de la réalité.

 15   M. Moran (interprétation). - Je comprends parfaitement,

 16   Monsieur. Il y a autre chose que je comprends tout aussi bien, mais peut-

 17   être n'est-ce pas aussi clair que cela devrait l'être. Afin que tout soit

 18   limpide entre nous, si vous avez déjà écrit beaucoup d'articles comme vous

 19   l'avez fait ces dernières années, il ne serait pas inutile d'oublier tout

 20   à fait une histoire précise, une couverture, un reportage précis.

 21   M. Harraz (interprétation). - Il est certain que je n'ai pas

 22   oublié ce qui s'est passé. Mais lorsqu'on parle de détails très précis,

 23   c'est une autre paire de manches, parce que je pense que mes propos

 24   pourraient être utilisés dans un sens ou dans un autre, ici, dans ce

 25   prétoire. Peut-être que hors Tribunal, je dirai autre chose, mais ici, je


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  1   veux dire la vérité, rien que la vérité.

  2   M. Moran (interprétation). - Lorsque vous avez rédigé ces

  3   articles en juillet 1992, vous disposiez des meilleurs éléments possibles

  4   vu les circonstances à l'époque ?

  5   M. Harraz (interprétation). - C'est exact.

  6   M. Moran (interprétation). - Bien. En fait, l'ensemble de ces

  7   reportages, du moins d'après ce que je comprends, avait pour but de

  8   décrire les conditions qui prévalaient dans la région de Konjic. Je ne

  9   parle pas seulement du camp. Je parle de l'ensemble de la région.

 10   M. Harraz (interprétation). - Oui.

 11   M. Moran (interprétation). - C'est une déclaration exacte,

 12   n'est-ce pas ?

 13   M. Harraz (interprétation). - Absolument. Notre visite à Konjic

 14   n'était pas une visite que nous avions prévue. Nous n'avions pas du tout

 15   prévu de nous rendre à Konjic lorsque nous avons quitté Split. Nous ne

 16   pensions pas nous rendre dans cette ville et visiter un tel camp.

 17   L'objectif était de se rendre dans toute région où se déroulait un

 18   conflit, de se rendre là où il était possible de comprendre ce qui se

 19   produisait.

 20   M. Moran (interprétation). - Fort bien. Avez-vous compris la

 21   situation du point de vue de l'approvisionnement de la nourriture des

 22   civils et des militaires dans la région de Konjic ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Il y avait une pénurie, c'était

 24   évident, une pénurie aussi bien pour les civils que pour les militaires.

 25   M. Moran (interprétation). - Qu'en était-il de la situation en


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  1   matière d'approvisionnement de médicaments ? Y en avait-il beaucoup ?

  2   Etes-vous à même de formuler une opinion là-dessus ?

  3   M. Harraz (interprétation). - Pour ce qui est du point de vue

  4   médical, il y avait une pénurie grave de médicaments. Il n'y avait, par

  5   exemple, pas du tout d'anesthésiants. Il n'y avait rien qui puisse

  6   permettre de faire une opération d'urgence.

  7   M. Moran (interprétation). - Fort bien. Permettez-moi de

  8   regarder mes notes quelques instants.

  9   Je vais maintenant me concentrer surtout sur votre visite dans

 10   le camp. Ma première question portera sur la première pièce où il y avait

 11   beaucoup de personnes réunies. D'après ce que vous savez, d'après votre

 12   expérience de journaliste qui a couvert des guerres, qui a couvert des

 13   opérations d'aide humanitaire, en vous fondant sur ce type d'expérience,

 14   lorsque vous avez observé les personnes qui se trouvaient dans cette

 15   pièce, vous semblait-il qu'il s'agissait-là de personnes qui souffraient

 16   de la faim ?

 17   M. Harraz (interprétation). - Non. Comme je l'ai dit à maintes

 18   reprises, l'impression générale était que ces personnes n'avaient pas subi

 19   de tortures et ne souffraient pas de la faim. C'est l'impression générale

 20   qui prévalait.

 21   M. Moran (interprétation). - Cela, c'est l'impression que vous

 22   avez eue. Pour la formuler, vous vous êtes appuyé sur toute votre

 23   expérience en la matière ?

 24   M. Harraz (interprétation). - Evidemment.

 25   M. Moran (interprétation). - Après avoir été dans des régions où


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  1   vous avez vu des personnes qui avaient été soumises à la torture, qui

  2   souffraient de la faim, des personnes qui avaient été traumatisées, vous

  3   faites cette observation ?

  4   M. Harraz (interprétation). - Je n'ai pas pu visiter des régions

  5   qui se trouvaient sous le contrôle des Serbes. Alors, les exemples que

  6   vous donnez, je ne peux pas les corroborer. Je n'ai assisté ou je n'ai vu

  7   que certains prisonniers qui avaient été relâchés et qui ont, ensuite,

  8   expliquer quelles avaient été leurs conditions de détention.

  9   M. Moran (interprétation). - Je vous demande votre impression

 10   quant au traitement des prisonniers qui se trouvaient dans ce camp.

 11   L'évaluation que vous faites de ces conditions se base-t-elle sur votre

 12   expérience personnelle en tant que journaliste qui a couvert d'autres

 13   situations d'aide humanitaire ?

 14   Je ne vous demande pas de faire une comparaison avec ce qui se

 15   passait dans les camps serbes, mais de répondre en vous fondant sur votre

 16   expérience en tant que journaliste ayant couvert d'autres guerres.

 17   M. Harraz (interprétation). - Je dois dire que oui.

 18   Quiconque aurait pu penser ce que j'ai pensé. Ne vous fâchez

 19   pas, mais je dois vous répéter une fois de plus que c'était l'impression

 20   générale qui prévalait.

 21   M. Moran (interprétation). - Vous n'avez donc passé que quelques

 22   heures dans ce camp. Je vois bien que vous ne pouvez pas nous en dire

 23   plus. Je vous remercie beaucoup de ce que vous venez de dire.

 24   Je voudrais aborder encore quelques points et ensuite, nous en

 25   aurons terminé.


Page 5777

  1   Soyons directs. Nous avons entendu des dépositions dans ce

  2   prétoire. On nous a dit qu'un certain nombre d'événements s'étaient

  3   produits lorsque vous vous trouviez dans ce camp. On nous a dit, entre

  4   autres, que certains des gardes de ce camp ont revêtu des uniformes -je

  5   crois qu'il s'agissait d'uniformes serbes ou portant des insignes serbes,

  6   peut-être des insignes croates- et qu'ils ont ensuite battu les

  7   prisonniers et que ces passages à tabac étaient filmés, afin de faire

  8   croire qu'il s'agissait que l'on était en train de battre des prisonniers

  9   musulmans. Avez-vous assisté à ces événements ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Qu''entendez vous par battre des

 11   Musulmans ?

 12   M. Moran (interprétation). - Il semble qu'il y ait eu une

 13   tentative de propagande qui visait à montrer que certaines parties de la

 14   guerre battaient des prisonniers d'un camp adverse, dans ce cas précis des

 15   prisonniers musulmans.

 16   M. Harraz (interprétation). - Non, je n'ai aucun souvenir de ce

 17   type d'événements, je n'ai aucun souvenir d'actes de violence lors de ma

 18   visite dans le camp.

 19   M. Moran (interprétation). - Si quelqu'un déclarait qu'on a

 20   battu des individus pendant des heures sous vos yeux, sous les yeux de vos

 21   caméraman, alors les personnes qui affirmeraient de telles choses seraient

 22   en train de mentir ou se tromperaient ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Je n'en sais rien. Peut-être

 24   qu'ils se refèrent à des événements qui se sont produits sous les yeux

 25   d'autres reporteurs. Je ne peux parler que pour moi-même et pour ce que


Page 5778

  1   j'ai vu lors de ma visite au camp. Même s'il y a eu des actes de torture,

  2   des actes d'humiliation dans le camp, cela ne s’est pas produit sous les

  3   yeux des caméras.

  4   M. Moran  (interprétation). - Si quelqu'un disait que, lors de

  5   votre présence dans ce camp, vous et votre cameraman, des personnes sont

  6   arrivées prétendant être blessées, avez-vous vu des blessés arriver ou des

  7   personnes prétendant être blessées arriver et passer devant vos caméras ?

  8   M. Harraz (interprétation). - Des Serbes ?

  9   M. Moran  (interprétation). - Cela m’est égal, des Serbes ou

 10   d'autres personnes. Je parle du camp de Celebici.

 11   M. Harraz (interprétation). - Comme je l’ai dit, dans ce camp il

 12   y avait un petit groupe, trois ou quatre personnes qui souffraient de

 13   blessures légères. Mais je ne les ai pas vues être blessées. J'ai compris

 14   qu'ils avaient reçu ces blessures au cours d'un combat.

 15   M. Moran (interprétation). - A propos de blessures -et ce sera

 16   ma dernière question-, dans l'infirmerie du camp, vous avez déclaré qu'il

 17   y avait des médicaments en quantité relativement importante. Par rapport à

 18   ce que vous avez pu voir dans la région de Konjic, à la même époque,

 19   quelle était votre impression ?

 20   M. Harraz (interprétation). - Il y avait une petite table où se

 21   trouvaient quelques médicaments. Mais je serais incapable de vous dire de

 22   quel type de médicaments il s'agissait. La pièce en elle-même était très

 23   petite. Je le répète, il n'y avait que quelques malades dans cette pièce.

 24   Je crois que la quantité de médicaments était proportionnelle au nombre de

 25   malades présents. Il y avait du coton, des bandes stérilisées. Mais je


Page 5779

  1   n'ai rien vu d'autre.

  2   M. Moran  (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur.

  3   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. En avons-

  4   nous fini du contre-interrogatoire ? Madame McHenry, vous avez la parole.

  5   Mme McHenry (interprétation). - J'aimerais faire quelques

  6   observations, Monsieur le Président.

  7   Monsieur, lors du contre-interrogatoire de Mme Residovic, vous

  8   avez déclaré que certaines personnes, avec lesquelles vous avez parlées,

  9   désiraient obtenir des fonds de certains pays arabes. Est-ce exact ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Ils ont déclaré qu'ils étaient

 11   frustrés du peu d'aide qu'ils recevaient des pays arabes et musulmans.

 12   Mme McHenry (interprétation). - Madame Residovic vous a

 13   également posé une question concernant le fait que, dans certaines parties

 14   de votre article, il est fait référence à l’Islam, à l'engagement de

 15   certaines des personnes, avec lesquelles vous avez parlées, vis-à-vis de

 16   l'Islam. Est-ce exact ?

 17   M. Harraz (interprétation). - Ce que j'ai dit lors de ma réponse

 18   à la défense, c'est qu'il ne m'a pas semblé qu'il y avait des tendances

 19   islamiques extrémistes, et cela s'explique notamment par le fait que ces

 20   personnes sortaient d'un régime de type communiste qui prévalait en

 21   Yougoslavie auparavant. On ne parlait pas beaucoup de religion.

 22   Mme McHenry (interprétation). - Peut-on dire que, même s'il ne

 23   s’agit pas là de fondamentalisme, on trouve dans votre article un certain

 24   nombre de références à l’Islam, à l'engagement des individus vis-à-vis de

 25   l'Islam, au désir de certaines personnes d'assister à la création d'un


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  1   état islamique ?

  2   M. Harraz (interprétation). - Je ne crois pas que, dans mon

  3   article, je fasse état d'un Etat musulman, mais peut-être d'une présence

  4   musulmane au vu du nombre de Musulmans présents en Bosnie. Certains

  5   individus partageaient des sentiments que moi-même je ressentais. Donc je

  6   les ai fait figurer dans mon article.

  7   Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie. Mme Residovic

  8   a également souligné le fait que nombre de Musulmans bosniaques étaient

  9   tout à fait détachés de leur religion. Est-ce exact ?

 10   M. Harraz (interprétation). - Oui, c'est exact.

 11   Mme McHenry (interprétation). - Est-il exact que vous-même et

 12   votre éditeur étiez conscients du fait que, comme vous vous adressiez à

 13   des lecteurs arabes, vous souhaitiez produire des articles qui

 14   présentaient un intérêt pour ce type de lecteurs et que, par conséquent,

 15   vous avez mis l'accent sur l'Islam dans ces articles ?

 16   M. Harraz (interprétation). - Moi, je suis Arabe. Bien

 17   évidemment les gens qui me parlent, savent fort bien à qui ils

 18   s'adressent. Peut-être qu'ils décident d'adopter un certain discours,

 19   d'utiliser certains mots parce qu'ils savent que je suis Arabe.

 20   Mme McHenry (interprétation). - Cela n'aurait-il pas aidé à

 21   l'obtention de fonds supplémentaires si l'article avait montré que des

 22   prisonniers avaient été torturés ou maltraités ?

 23   M. Jan (interprétation). - Etes-vous en train de faire un

 24   contre-interrogatoire de votre propre témoin ?

 25   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur  le Juge, ce n'est


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  1   absolument pas le cas. Mme Residovic a suggéré, dans le cadre de ses

  2   questions, que ce témoin n’était pas absolument impartial. Malgré le fait

  3   que le témoin peut être parfois un peu subjectif dans ce qu'il dit, il est

  4   important de comprendre jusqu'à quel degré le témoin est subjectif dans

  5   ses réponses. Il est important de savoir exactement ce qu'il en est. Je ne

  6   fais pas du tout un contre-interrogatoire de mon propre témoin. J'essaie

  7   de clarifier certains points qui ont été soulevés par la défense.

  8   Mme Residovic (interprétation). - Je n'ai jamais posé ce type de

  9   questions au témoin. Le témoin a répondu de façon très claire à ces

 10   questions. Par conséquent, les questions de l'accusation ne découlent pas

 11   des questions que j'ai pu poser lors de mon contre-interrogatoire.

 12   M. Moran (interprétation). - Le témoin a essayé de présenter les

 13   choses de la façon la plus précise qu'il pouvait. Il a essayé de se

 14   rappeler les faits du mieux qu'il a pu.

 15   M. le Président (interprétation). - Je pensais qu'elle était en

 16   train d'établir quel était le degré de subjectivité du témoin.

 17   Mme McHenry (interprétation). - Votre Honneur, si je puis

 18   répondre, j'aimerais simplement signaler quelques questions qui ont été

 19   posées par le conseil de la défense. Elles sont très révélatrices. Je la

 20   cite : "Monsieur Harraz, était-il dans vos intentions de présenter la

 21   situation qui prévalait dans la région comme étant une situation

 22   extrêmement difficile afin d'encourager des efforts qui viseraient à

 23   apporter une aide humanitaire dans la région ? ". Le témoin a répondu :

 24   "Oui" à la question.

 25   Question suivante : "Monsieur Harraz, cela expliquerait-il la


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  1   raison pour laquelle vous avez surtout insisté sur le fait que ces

  2   personnes parfois faisaient part de leur soutien, de leur parti-pris pour

  3   l'Islam ? ".

  4   Ce sont des questions qui ont été posées par la défense dans le

  5   cadre du contre-interrogatoire. Je crois que cela touche directement à mes

  6   questions à moi.

  7   Mme Residovic (interprétation). - Cette question a été

  8   reformulée et nous avons essayé de poser une question plus sur le point de

  9   vue de l'intégrisme des personnes interrogées et, sur ce point le témoin a

 10   donné une réponse très précise. Il est incorrect de citer une question qui

 11   a été reformulée et de présenter cette question comme une question qui a

 12   été de fait posée au témoin.

 13   M. Moran (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges,

 14   j'espère avoir mal compris l'esprit de la dernière déclaration de

 15   Mme McHenry, mais il me semble que la religion d'une personne est utilisée

 16   comme fondement pour une récusation du témoin. Quelle que soit la religion

 17   d'une personne, cela n'a aucun intérêt pour nous. Ce n'est absolument pas

 18   pertinent.

 19   Mme McHenry (interprétation). - J'aimerais répondre à cela, ne

 20   serait-ce que pour le compte rendu.

 21   M. le Président (interprétation). - Vous pouvez répondre pour

 22   que nous mettions un terme à ces controverses.

 23   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Président, je ne

 24   crois pas que mes questions aient été, en quelque manière, liées à la

 25   religion du témoin ou à la religion de qui que soit d'autre. Je ne crois


Page 5783

  1   pas que mes questions visaient à dire que la religion d'une personne peut

  2   avoir des conséquences sur la capacité à dire la vérité.

  3   M. le Président (interprétation). - Avez-vous d'autres questions

  4   à poser ?

  5   Mme McHenry (interprétation). - Oui. Monsieur le Président.

  6   Monsieur, vous avez également déclaré à Mme Residovic que les

  7   soldats que vous avez vus en Bosnie étaient des Bosniaques ou peut-être

  8   des Croates. Est-ce exact?

  9   M. Harraz (interprétation). - Quels soldats ?

 10   Mme McHenry (interprétation). - Les soldats que vous avez

 11   rencontrés dans la région de Konjic.

 12   M. Harraz (interprétation). - Comme je l'ai dit, dans la région

 13   il y avait le commandant du camp qui était croate et il y avait également

 14   sur la ligne de front des Croates. C'est ce que les soldats m'ont dit sur

 15   place, c'est également ce dont j'ai fait état dans mon article.

 16   Mme McHenry (interprétation). - Pouvez-vous également expliquer

 17   au Tribunal ce que vous entendez lorsque vous dites qu'il y avait des

 18   Mudjahedins dans la région de Konjic?

 19   M. Harraz (interprétation). - Je me référais aux combattants

 20   bosniaques. Je n'ai pas du tout vu d'Arabes parmi eux. Je n'ai pas vu de

 21   ressortissants d'autres pays musulmans parmi eux.

 22   Mme McHenry (interprétation). - Pouvez-vous...

 23   M. O'Sullivan (interprétation). - Objection. Cela n'a pas été

 24   abordé lors du contre-interrogatoire.

 25   Mme McHenry (interprétation). - Je crois que cela découle


Page 5784

  1   directement du contre-interrogatoire. J'essaie simplement de clarifier

  2   toute ambiguïté. Je répète que les trois articles ont été versés au

  3   dossier, que deux de ces articles ont été versés au dossier dans le cadre

  4   du contre-interrogatoire. Ces articles contiennent certaines références et

  5   ont fait l'objet de certaines questions posées par Mme Residovic.

  6   M. le Président (interprétation). - L'objection est rejetée.

  7   Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, voulez-vous, s'il vous

  8   plaît, expliquer ce que vous entendez par le fait que M. Zejnil...

  9   M. Harraz (interprétation). - Le mot qui a été utilisé dans

 10   l'article était en fait un mot destiné aux lecteurs arabes. C'est vrai que

 11   cela donne une idée plutôt positive du personnage. Mais je ne veux pas

 12   créer une controverse. Les Mudjahedins sont des gens qui défendent leur

 13   territoire, qui ne veulent pas que leur territoire être soit occupé par

 14   d'autres parties. C'est bien la situation qui prévalait à l'époque où

 15   j'étais dans la région.

 16   Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie.

 17   Pour aborder une autre question, lors de votre présence dans le

 18   camp, M. Ackerman vous a posé une question vous demandant si vous saviez

 19   que les prisonniers avaient été maltraités ou non. Vous aviez déclaré que

 20   vous n'aviez aucun élément permettant de prouver cela. Est-ce exact?

 21   M. Harraz (interprétation). - J'ai déclaré que je n'ai vu aucun

 22   signe de mauvais traitements. Je ne peux rien dire concernant ce qui s'est

 23   passé avant ou après notre arrivée.

 24   Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous bien dit que vous avez

 25   vu quelques prisonniers qui portaient des blessures, qui devaient remonter


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  1   à un moment qui a précédé votre arrivée dans le camp ? Est-il exact que

  2   vous ayez dit que ces blessures devaient dater d'une époque précédant

  3   l'arrivée de ces prisonniers dans le camp ?

  4   M. Olujic (interprétation). - Monsieur le Président, objection.

  5   Mme McHenry (interprétation). - C’est exact. Il est vrai que

  6   cette question a déjà été posée et que la responsabilité a été apportée à

  7   cette question. J'utilise cela comme fondement à ma question. Est-il exact

  8   que le fait que vous avez dit qu'il n'y avait pas de signe de mauvais

  9   traitement se fondait sur ce que les autorités du camp vous avaient dit?

 10   M. Harraz (interprétation). - Je ne sais pas de quoi vous

 11   parlez. J'ai compris l'interprétation, mais que voulez-vous entendre par

 12   votre question?

 13   M. Jan (interprétation). - Ce sont les autorités du camp qui le

 14   lui ont dit.

 15   Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

 16   Juge.

 17   Le caméraman travaillait-il avec vous ?

 18   M. Harraz (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit, un

 19   camaréman travaillait avec moi, que j'ai rencontré dans la région en

 20   Croatie, et qui est venu avec moi. Moi-même, j'avais un appareil photos.

 21   Mme McHenry (interprétation). - Pour être plus précis, ce

 22   caméraman ne travaillait-il pas pour vous ?

 23   M. Harraz (interprétation). - Non. Il ne travaillait pas pour

 24   moi. Il travaillait pour une agence. Il préparait un documentaire. Il m'a

 25   demandé d'écrire le texte.


Page 5786

  1   Mme McHenry (interprétation). - Je vous remercie. Je n'ai pas

  2   d'autres questions.

  3   M. le Président (interprétation). - En dehors de ce que l'on

  4   vous a dit, avez-vous vu des signes de mauvais traitements dans les

  5   limites du camp ?

  6   M. Harraz (interprétation). - Par mauvais traitements, ou

  7   plutôt, si vous me demandez si certains prisonniers ont été battus avant

  8   mon arrivée, je n'en ai aucune connaissance. Si des prisonniers ont été

  9   battus devant moi, je n'en ai aucune connaissance.

 10   Mme McHenry (interprétation). - Il semble que le Greffier et un

 11   des membres du bureau du Procureur demandent qu'au moins les deux premiers

 12   articles du 24 et du 25 juillet soient versés au dossier et que l'original

 13   soit versé au dossier. Je sais qu'il y a eu une discussion quant à la

 14   qualité des photocopies de ces articles. Les photocopies ne sont pas aussi

 15   bonnes que l'original. Il faudrait donc que l'original soit versé au

 16   dossier. Par la suite, ces originaux seront remis au propriétaire.

 17   M. le Président (interprétation). - Il s'agit donc de la

 18   pièce 167 et de la pièce 168. Est-ce exact ?

 19   Mme McHenry (interprétation). - C'est absolument exact,

 20   Monsieur le Président.

 21   M. le Président (interprétation). - Vous n'avez pas d'autres

 22   questions à poser Madame Mc Henry ? Le témoin peut donc disposer. Je vous

 23   remercie.

 24   (Le témoin est reconduit hors de la salle d’audience.)

 25   La Chambre de première instance va lever la séance. Nous


Page 5787

  1   reprendrons avec le prochain témoin.

  2   L'audience, suspendue à 16 heures, est reprise à 16 heures 35.

  3   M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)

  4   L'accusation remet la déclaration à l'intention des Juges.

  5   M. le Président (interprétation). - Veuillez faire à nouveau

  6   prêter serment au témoin.

  7   M. Sudar (interprétation). - Je déclare solennellement que je

  8   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   M. le Président (interprétation). - Je crois que nous en étions

 10   toujours au stade du contre-interrogatoire.

 11   Mme Residovic (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges,

 12   je tiens à vous dire que nous n'avons plus de questions à poser à

 13   l'intention de ce témoin. Je vous remercie, Monsieur le Président.

 14   M. Olujic (interprétation). - Avec votre permission...

 15   M. le Président (interprétation). - Vous pouvez commencer.

 16   M. Olujic (interprétation). - Merci, Madame et Messieurs les

 17   juges.

 18   J'aimerais me présenter. Je m'appelle Zeljko Olujic ; je défends

 19   M. Zdravko Mucic, surnommé Pavo.

 20   Voilà déjà quelques jours que vous vous trouvez à La Haye. Je ne

 21   serais pas long ; je ne vais pas procéder à un long contre-interrogatoire,

 22   mais j'aimerais vous demander, du fait que nous parlons des langues

 23   similaires, que nous nous comprenons et que nous tenons un dialogue,

 24   d'attendre la fin de ma question afin qu'elle puisse être traduite vers

 25   les autres langues, vos réponses feront l'objet du même traitement. Par


Page 5788

  1   exemple, lorsque vous me répondrez, j'attendrai que les interprètes aient

  2   suffisamment de temps pour interpréter vos propos dans les langues

  3   officielles du Tribunal.

  4   Monsieur Sudar, dans votre déclaration préalable, vous avez dit

  5   avoir remarqué à plusieurs reprises M. Pavo au camp. Combien de fois

  6   exactement l'avez-vous vu ?

  7   M. Sudar (interprétation). - J'ai vu Pavo dans le camp : il y

  8   venait. Comment dire ? Il est peut-être venu cinq sixfois au moins. Nous

  9   étions dans la salle des sports. Mais, en sus, nous avons chargé et

 10   déchargé des munitions. Il fallait donc aller souvent au hangar pour le

 11   faire. Je l'ai vu souvent : parfois il venait en moto, parfois il

 12   s'arrêtait devant la porte sans entrer dans le bâtiment.

 13   M. Olujic (interprétation). - Vous avez également dit dans votre

 14   déclaration avoir vu beaucoup d'uniformes, de personnes en uniforme dans

 15   le camp. Est-ce exact ?

 16   M. Sudar (interprétation). -  Au camp ?

 17   Il y avait plusieurs uniformes qui étaient portés. C'est surtout

 18   vers le soir que les gens en uniforme venaient. Ils ouvraient la porte.

 19   Nous ne savions pas qui étaient ces gens, ce qu'ils étaient. Mais il y

 20   avait moins d'uniformes croates, d'après ce que j'ai pu constater. Ceux

 21   qui étaient en noir sont peut-être venus deux ou trois fois. La plupart du

 22   temps, les gens portaient des uniformes musulmans.

 23   M. Olujic (interprétation). - A avoir lu votre déclaration, je

 24   sais que vous n'étiez pas tellement politique, que la politique vous était

 25   assez étrangère et que vous ne vouliez pas trop vous engager dans ce


Page 5789

  1   domaine.

  2   Avez-vous été à même de reconnaître ces uniformes ? Quand je

  3   parle d'uniformes, je vous demande si c'étaient surtout des uniformes de

  4   policiers ou de soldats. Pourriez-vous les décrire ?

  5   M. Sudar (interprétation). -  C'étaient des vêtements noirs, des

  6   chemises noires surtout. Il y avait ceux du HVO qui sont venus deux ou

  7   trois fois, du moins pour ce que j'ai pu observer. Par la suite, il y a eu

  8   des gens de Sandjak qui parlaient avec un accent monténégrin.

  9   C'est souvent ce qui se passait. La plupart du temps, ces

 10   personnes en uniforme étaient devant les portes. Ceux qui étaient là

 11   pouvaient en voir davantage.

 12   M. Olujic (interprétation). - Fort bien, Monsieur Sudar. Vous

 13   avez dit aussi dans cette déclaration et lors de votre déposition devant

 14   ce Tribunal que la plupart des mauvais traitements infligés au camp se

 15   déroulaient lorsque M. Mucic ne se trouvait pas, lui, au camp.

 16   Est-ce bien exact ?

 17   M. Sudar (interprétation). -  Pour autant que j'ai pu en juger

 18   quand je me suis trouvé au camp, c'est vrai que, la plupart du temps,

 19   lorsque Pavo venait, on n'était pas battu. C'est vrai.

 20   M. Olujic (interprétation). - Peut-on en déduire que M. Mucic

 21   protégeait, dans une certaine mesure, les prisonniers ?

 22   M. Sudar (interprétation). -  Je ne peux pas en juger. Je n'en

 23   ai pas les moyens.

 24   M. Olujic (interprétation). - Je vais peut-être reformuler ma

 25   question.


Page 5790

  1   L'un quelconque des prisonniers n'a-t-il jamais été maltraité en

  2   présence de M. Mucic ?

  3   M. Sudar (interprétation). -  Je ne l'ai pas constaté.

  4   M. Olujic (interprétation). - Fort bien. Merci, Monsieur Sudar.

  5   Précisons quelques points en ce qui concerne votre statut. Vous

  6   avez un statut de réfugié, si j'ai bien compris ?

  7   M. Sudar (interprétation). -  Oui.

  8   M. Olujic (interprétation). - Connaîtriez-vous un certain

  9   médecin, le Dr Bjelica.

 10   M. Sudar (interprétation). - M. Bjelica ?

 11   M. Olujic (interprétation). - Oui.

 12   M. Sudar (interprétation). - Peu.

 13   M. Olujic (interprétation). - Vous avez entendu parler de lui ?

 14   M. Sudar (interprétation). -  Pas vraiment. Je ne sais pas où il

 15   se trouve.

 16   M. Olujic (interprétation). - Vous êtes au courant qu'il y a une

 17   Association d'anciens détenus à Belgrade ?

 18   M. Sudar (interprétation). - Oui, je le sais. J'ai été dans

 19   leurs locaux.

 20   M. Olujic (interprétation). - Etes-vous membre de

 21   l'Association ?

 22   M. Sudar (interprétation). - Oui.

 23   M. Olujic (interprétation). - Avez-vous entendu parler du

 24   Dr Bjelica à l'Association ?

 25   M. Sudar (interprétation). - Non, jamais.


Page 5791

  1   M. Olujic (interprétation). - Merci, Madame et Messieurs les

  2   Juges, je n'ai plus de questions à poser. Merci Monsieur Sudar.

  3   M. Sudar (interprétation). - Merci.

  4   M. Moran (interprétation). - Puis-je commencer ?

  5   M. le Président (interprétation). - Allez-y.

  6   M. Moran (interprétation). - Merci. Monsieur, bonjour et bon

  7   après-midi.

  8   M. Sudar (interprétation). - Je n'entends plus rien.

  9   M. le Président (interprétation). - Il y a interruption de la

 10   communication. Est-il possible de vérifier si c'est le bon canal ?

 11   M. Moran (interprétation). - Est-ce que nous nous entendons un

 12   peu mieux maintenant ?

 13   M. le Président (interprétation). - Entendez-vous ?

 14   (Le témoin hausse les épaules.)

 15   M. Moran (interprétation). - Est-ce que cela passe mieux ?

 16   M. Sudar (interprétation). - Oui, maintenant, j'entends.

 17   M. Moran (interprétation). - Je m'appelle Tom Moran. Je défends

 18   Hazim Delic dans ce procès. Je vais vous poser quelques questions.

 19   M. Sudar (interprétation). - Je sais, oui, Monsieur Moran.

 20   M. Moran (interprétation). - Vous sentez-vous un peu mieux ? La

 21   semaine dernière, vous n'étiez pas trop bien ?

 22   M. Sudar (interprétation). - Oui, je me sens mieux, merci.

 23   M. Moran (interprétation). - Si vous avez des problèmes

 24   poitrinaires ou thoraciques au cours de notre entretien, faites-le moi

 25   savoir. Il ne devrait rien vous arriver de dangereux.


Page 5792

  1   M. Sudar (interprétation). - Fort bien.

  2   M. Moran (interprétation). - Je vais donc vous poser quelques

  3   questions. Veuillez les écouter et vous contenter d'y répondre. Je pense

  4   que nous aurons terminé assez rapidement. Si la question nécessite une

  5   réponse par l'affirmative ou par la négative, répondez de cette façon

  6   simple et nous en aurons vite terminé. Etes-vous prêt à le faire ?

  7   M. Sudar (interprétation). - D'accord, Monsieur Moran.

  8   M. Moran (interprétation). - S'il vous arrive de ne pas

  9   comprendre une de mes questions, interrompez-moi, je m'arrangerai : je

 10   reposerai la question différemment pour que vous la compreniez.

 11   M. Sudar (interprétation). - D'accord.

 12   M. Moran (interprétation). - Pour ne pas vous ménager un effet

 13   de surprise, je vais respecter l'ordre dans lequel les questions vous ont

 14   été posées dans l'interrogatoire principal. Peut-être que telle ou telle

 15   chose n'aurait pas été évoquée dans ce cadre ; à ce moment-là, je vous

 16   informerai.

 17   Première question. Vous avez dit que des gens achetaient des

 18   armes : des Serbes vivant dans la région de Konjic et de Bradina

 19   achetaient des armes.

 20   M. Sudar (interprétation). - Oui, des gens achetaient des armes

 21   parce qu'il était manifeste, au vu de la situation, que l'évolution était

 22   peu souhaitable. Certains avaient des armes, d'autres pas.

 23   M. Moran (interprétation). - De quelles armes parlons-nous ? De

 24   fusils de chasse ou d'armes plutôt militaires ?

 25   M. Sudar (interprétation). - J'ai surtout remarqué qu'il y avait


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  1   des fusils de chasse.

  2   M. Moran (interprétation). - A propos, vous avez dit qu'il n'y

  3   avait pas de forces militaires serbes dans la région, au moment où votre

  4   village a été attaqué. Qu'entendiez-vous par là ? Qu'il n'y avait pas de

  5   forces militaires serbes dans votre village uniquement ou n'importe où

  6   dans la région ?

  7   M. Sudar (interprétation). - Pour autant que je pouvais en

  8   juger, il n'y avait pas de formations serbes. Ce n'était d'ailleurs pas

  9   possible, puisque nous étions un petit village encerclé de partout.

 10   Comment y aurait-il pu y avoir des formations serbes ?

 11   M. Moran (interprétation). - Il n'y avait donc pas de groupes de

 12   partisans, de résistance organisée dans votre village, n'est-ce pas ?

 13   M. Sudar (interprétation). -  Non, rien n'était organisé dans

 14   notre village. Des gens sont venus de Donje Selo, de Bjelovcina; des

 15   réfugiés affluaient de partout.

 16   M. Moran (interprétation). - C’est bien. Mais là, je fais un

 17   bond et j'arrive au moment qui a suivi votre arrestation. Vous vous

 18   trouviez au pont. Vous avez remis votre arme. Tout le monde l’a fait

 19   d'ailleurs, tous ceux qui ont été appréhendés. Vous vous en souvenez,

 20   n'est-ce pas ?

 21   M. Sudar (interprétation). - Oui.

 22   M. Moran (interprétation). - A ce moment-là, vous avez été

 23   frappés, tabassés ?

 24   M. Sudar (interprétation). - Oui. Nous sommes arrivés au pont et

 25   là nous avons tous été passés à tabac.


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  1   M. Moran (interprétation). - Ma question vise surtout ceci : je

  2   crois comprendre qu'à ce moment précis, les personnes qui vous ont

  3   arrêtés, qui vous ont appréhendés, ont pris, ont saisi tous vos objets de

  4   valeur -anneaux, bagues, argent, tout ce qui valait quelque chose.

  5   M. Sudar (interprétation). - Les montres, tout : les permis de

  6   conduire, les cartes d'identité, tout a été pris, même les lacets de

  7   chaussures. Tout a été pris.

  8   M. Moran (interprétation). - Et par la suite, effectivement, ils

  9   vous ont fait marcher environ deux kilomètres et demi pour arriver au

 10   camp ?

 11   M. Sudar (interprétation). - En direction du camp. Je ne peux

 12   pas vous dire combien de kilomètres cela  fait. Peut-être trois.

 13   M. Moran (interprétation). - Ce n'était pas une distance très

 14   longue, ni très courte, n'est-ce pas, à parcourir à pied ?

 15   M. Sudar (interprétation). - Nous avons franchi la voie ferrée,

 16   le pont de Celebici. Nous avons suivi la voie ferrée jusqu'à l'entrée du

 17   camp. Je n'étais jamais allé dans cette partie-là avant.

 18   M. Moran (interprétation). - Je fais de nouveau un grand bond,

 19   j'avance dans votre déposition. Vous avez dit, en interrogatoire

 20   principal, qu'il y avait eu un incident concernant M. Delalic. Il aurait

 21   tiré avec son arme en direction du toit du hangar n° 6. Vous en souvenez-

 22   vous ?

 23   M. Sudar (interprétation). - Il a tiré en direction du plafond

 24   ou du toit du hangar n° 6.

 25   M. Moran (interprétation). - Cela a fait ricochet. Est-ce bien


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  1   cela ?

  2   M. Sudar (interprétation). - Effectivement, la balle a d'abord

  3   frappé la charpente en métal, a fait un ricochet et a touché un des

  4   Kuljanin, je ne sais plus qui parmi toutes les personnes qu'il y avait

  5   dans le hangar.

  6   M. Moran (interprétation). - D'accord, mais vous ne nous dites

  7   pas qu'il a délibérément tiré sur quelqu'un ?

  8   M. Sudar (interprétation). -  Ce n'est pas ce que j'ai dit. Il a

  9   tiré en l'air et la balle a ricoché sur le toit et a fini par toucher

 10   l'homme.

 11   M. Moran (interprétation). - Bien. Vous avez dit aussi, dans le

 12   cadre de l'interrogatoire principal, qu'il y avait un homme dénommé Buric.

 13   Vous vous en souvenez ?

 14   M. Sudar (interprétation). -Buric, oui, je m'en souviens.

 15   M. Moran (interprétation). - Vous avez dit qu'il avait donné à

 16   manger à un homme dénommé Cecez. Je n'ai pas saisi le prénom de cette

 17   personne. Quel est-il ?

 18   M. Sudar (interprétation). - Il a donné de la nourriture à

 19   Cedo Cecez, le mécanicien.

 20   M. Moran (interprétation). - Cette personne a-t-elle un rapport

 21   de parenté avec Grozdana Cecez ?

 22   M. Sudar (interprétation). - Je ne sais pas s'ils sont de la

 23   même famille. Je ne le pense pas. Mais, en fait, je ne sais pas.

 24   M. Moran (interprétation). - Je crois que je n'ai plus qu'une

 25   question à vous poser ou un sujet à aborder. Je ne pense pas que vous en


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  1   ayez parlé dans l'interrogatoire principal. Nous sommes en août 1992. Le

  2   premier groupe de prisonniers est relâché, libéré du camp de Celebici.

  3   M. Sudar (interprétation). - Oui, je me souviens.

  4   M. Moran (interprétation). - Vous vous souvenez que Hazim Delic

  5   est entré au hangar n° 6. Il avait une liste de noms de personnes qui

  6   allaient être libérées, n'est-ce pas ?

  7   M. Sudar (interprétation). - Oui, je m'en souviens bien.

  8   M. Moran (interprétation). - Il a cité le nom de toutes les

  9   personnes sur le point d'être libérées.

 10   M. Sudar (interprétation). - Effectivement.

 11   M. Moran (interprétation). - Et votre nom se trouvait sur cette

 12   liste, n'est-ce pas ?

 13   M. Sudar (interprétation). - Oui. Il a cité mon nom. Je n'ai pas

 14   osé rentrer parce que j'avais entendu dire qu'auparavant un certain Zivak

 15   avait quitté le camp et avait été tué. Je craignais le même sort.

 16   De plus, les gens de la Croix-Rouge étaient venus. Je croyais

 17   être protégé au camp.

 18   M. Moran (interprétation). - Vous avez dit espérer être libéré -

 19   attendez un instant, Monsieur- et vous avez dit que plutôt qu'être libéré,

 20   vous avez décidé de rester au camp parce qu'à votre avis, c'était plus sûr

 21   pour vous. Est-ce bien ce que vous avez dit aux Juges ?

 22   M. Sudar (interprétation). -  Je voulais dire aux juges que je

 23   n'osais pas quitter le camp parce qu'on avait appris que ce Zivak avait

 24   été tué après avoir quitté le camp. Comme les gens de la Croix-Rouge

 25   étaient venus, je croyais être protégé. Je n'ai pas osé partir du fait des


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  1   récits qui couraient.

  2   M. Moran (interprétation). - Donc vous aviez l'occasion d'être

  3   libéré en août 1992, et vous avez rejeté cette possibilité parce que vous

  4   pensiez que le camp était un endroit plus sûr pour vous, oui ou non ?

  5   M. Sudar (interprétation). - Non. Je m'étais dit que puisque nos

  6   noms avaient été pris par la Croix-Rouge et que ce jeune homme, ce Zivak

  7   qui avait quitté le camp, avait été tué, je craignais de rentrer à la

  8   maison. Je croyais que j'allais y être tué.

  9   Comme je vous l’ai dit, il y avait eu la Croix-Rouge. Nous

 10   avions été inscrits par la Croix-Rouge et je n'osais pas demander. J'ai

 11   demandé à être échangé, mais je n'osais pas rentrer à la maison parce que

 12   je croyais que la situation y serait la même. Je ne pouvais aller nulle

 13   part.

 14   M. Moran (interprétation). - Fort bien. J'en ai terminé. Je vous

 15   remercie.

 16   M. le Président (interprétation). - Vous pouvez y aller,

 17   Maître McMurrey.

 18   Mme McMurrey (interprétation). - Merci. Bonne après-midi,

 19   Monsieur Sudar.

 20   M. Sudar (interprétation). - Bonne après-midi, aussi.

 21   Mme McMurrey (interprétation). - Je m'appelle Cynthia McMurrey.

 22   Je suis un des conseils de la défense de M. Esad Landzo. Je sais que

 23   Me Niemann de l'accusation a discuté avec vous avant votre déposition. Il

 24   vous a dit que vous êtes uniquement censé parler de choses que vous

 25   connaissez, que vous avez connues personnellement. Ai-je bien raison dans


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  1   ce que je dis ?

  2   M. Sudar (interprétation). - Je ne sais pas. Jamais je n'ai été

  3   témoin dans un procès, alors je n'y connais rien. Je ne connais pas la

  4   procédure pénale.

  5   Mme McMurrey (interprétation). - Oui, mais l'accusation vous a

  6   dit qu'il ne vous fallait parler que de ce que vous aviez connu

  7   personnellement. C'est bien exact, n'est-ce pas ?

  8   M. Sudar (interprétation). - Comment pourrais-je dire quoi que

  9   ce soit ? Je vous parle de ce que j'ai vu.

 10   Mme McMurrey (interprétation). - Ce n'est pas ce que je vous

 11   demande. Avant que nous ne commencions, j'aimerais parvenir à un accord.

 12   Je vous pose des questions et vous ne parlerez que de ce que

 13   vous avez vous-même vu, entendu, de ce à quoi vous avez personnellement

 14   assisté. Sommes-nous d'accord ?

 15   M. Sudar (interprétation). -  Oui, nous sommes d'accord.

 16   Mme McMurrey (interprétation). - Merci.

 17   Le 26 février 1996, vous avez reçu l'accusation et le Procureur

 18   vous a dit que nous aimerions aussi avoir un entretien avec vous. Est-ce

 19   exact ?

 20   M. Sudar (interprétation). -  Je ne m'en souviens pas.

 21   Mme McMurrey (interprétation). - Je crois que vous avez déjà dit

 22   faire partie de l'Association des anciens détenus à Belgrade, n'est-ce

 23   pas ?

 24   M. Sudar (interprétation). - Oui, j'en fais partie. Je suis

 25   membre.


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  1   Mme McMurrey (interprétation). - Et vous donnez pour adresse

  2   l'Association des anciens détenus de Belgrade, n'est-ce pas ?

  3   M. Sudar (interprétation). - C'est exact.

  4   Mme McMurrey (interprétation). - Outre la déclaration que vous

  5   avez déjà faite en 1996, lors du contact avec le bureau du Procureur, avec

  6   qui avez-vous discuté de ce que vous avez vécu à Celebici ?

  7   M. Sudar (interprétation). - Avec personne. J'ai fourni cette

  8   déclaration et rien d'autre.

  9   Mme McMurrey (interprétation). - Vous et Mirko Babic, vous êtes

 10   de bons amis, n'est-ce pas ?

 11   M. Sudar (interprétation). - Non.

 12   Mme McMurrey (interprétation). - Je voudrais que nous revenions

 13   à ce que vous avez dit jeudi dernier. Je crois que vous avez dit, et

 14   excusez la prononciation qui est vraiment atroce, que Strahinja Cecez et

 15   Slobodan Draganic avaient négocié les conditions de reddition de Celebici.

 16   M. Sudar (interprétation). - Non, pas les conditions de

 17   reddition. Les gens ont appelé le président de la municipalité pour

 18   demander qu'il n'y ait plus de pilonnage parce qu'on pilonnait Cerici. Des

 19   gens ont appelé le président de la municipalité pour le supplier de mettre

 20   fin à tout cela; et cela a été fait. Personne ne tirait depuis Cerici ; il

 21   n’y avait pas vraiment de combats à Cerici.

 22   Mme McMurrey (interprétation). - Qu'on parle de conditions de

 23   reddition ou de cesser-le-feu, en tout cas, voilà les deux personnes que

 24   vous avez désignées comme étant les négociateurs, n'est-ce pas ?

 25   M. Sudar (interprétation). - Il n'y a pas eu de reddition. On


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  1   s'est contenté de téléphoner au président et, effectivement, après cet

  2   appel, le pilonnage a cessé.

  3   Mme McMurrey (interprétation). - Donc les deux personnes que

  4   vous avez mentionnées jeudi sont les personnes qui ont négocié le cesser-

  5   le-feu à Cerici ?

  6   M. Sudar (interprétation). - Ils n'ont pas négocié à propos du

  7   cesser-le-feu. Il n'y avait pas de feu qui venait de Cerici : du côté

  8   serbe, personne ne tirait. Il n'y avait pas non plus d'uniforme militaire,

  9   rien du tout ; on était tous des civils, en civil.

 10   Mme Mc Murrey (interprétation). - Veuillez m'aider. Vous avez

 11   dit que ces deux personnes ont négocié quelque chose, soit de mettre un

 12   terme au pilonnage par les forces de la Défense territoriale sur Cerici.

 13   Etait-ce là l'objet des négociations ?

 14   M. Sudar (interprétation). - Exactement.

 15   Mme Mc Murrey (interprétation). - Merci. Connaissez-vous par

 16   hasard Miro Golubovic ?

 17   M. Sudar (interprétation). - Oui, Miro Golubovic, je le connais.

 18   Il vivait en ville, mais il est né à Cerici.

 19   Mme Mc Murrey (interprétation). -  Si Miro Golubovic dit que son

 20   père, Slavko, avait négocié la fin du pilonnage sur Cerici, il se

 21   tromperait, n'est-ce pas ?

 22   M. Sudar (interprétation). - Slavko était là aussi. Mirko Cecez

 23   aussi. J'ai simplement mentionné deux personnes. Mais moi je m'y trouvais

 24   aussi, à côté de la maison de mon père. Mais nous ne sommes pas entrés à

 25   l'intérieur, c'est tout.


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  1   Mme Mc Murrey (interprétation). - Je sais que jeudi -il y a

  2   beaucoup de temps, j'ai peine à me souvenir de ce qui s'est dit jeudi-

  3   vous avez dit que lorsqu'on vous a emmené au camp de Celebici le 22 mai,

  4   vous avez été placé dans un petit bâtiment qu'on appelle le hangar n° 22.

  5   Je crois que vous l'avez même indiqué sur la maquette, n'est-ce pas ?

  6   M. Sudar (interprétation). - Oui, le 22. C'est le bâtiment qui

  7   est proche du portail d'entrée. Après, c'est devenu l'hôpital ou le

  8   dispensaire.

  9   Mme Mc Murrey (interprétation). - Et vous avez dit, je crois,

 10   que vingt d'entre vous ont été emmenés à ce bâtiment en même temps ?

 11   M. Sudar (interprétation). - Environ une vingtaine ont été

 12   amenés au bâtiment 22 où se trouvaient déjà d'autres personnes. J'ai

 13   reconnu Slobodan. Ils étaient couverts de sang. Il y en avait un,

 14   Babic Slobodan, qui était couvert de sang et gisait sur le sol.

 15   Mme Mc Murrey (interprétation). - Il y avait donc quelques

 16   personnes déjà dans ce bâtiment n°°22. Il ne pouvait, en aucune façon, y

 17   avoir une centaine de personnes à ce moment-là, n'est-ce pas, comme cela a

 18   été le cas par la suite ?

 19   M. Sudar (interprétation). - Je ne sais pas. Il n'y en avait pas

 20   une centaine, mais peut-être trente ou quarante. Impossible de vous dire

 21   exactement. On était vraiment entassé les uns sur les autres. A ce moment-

 22   là, impossible de jeter un coup d'oeil aux alentours. Je ne me souviens

 23   pas. On était vraiment entassé.

 24   Mme Mc Murrey (interprétation). - Vous êtes né en Bosnie-

 25   Herzégovine, n'est-ce pas ?


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  1   M. Sudar (interprétation). - Je suis né à Cerici, municipalité

  2   de Konjic.

  3   Mme Mc Murrey (interprétation). - C'est bien en Bosnie-

  4   Herzégovine, n'est-ce pas ?

  5   M. Sudar (interprétation). - Oui, tout à fait. En ex-

  6   Yougoslavie.

  7   Mme Mc Murrey (interprétation). - Et si vous en aviez décidé

  8   ainsi, vous auriez pu voter lors du référendum de mars 1992 ?

  9   M. Sudar (interprétation). - Quand exactement ?

 10   Mme Mc Murrey (interprétation). - Vous savez que le 1er mars il

 11   y a eu un référendum. Vous auriez pu voter !

 12   M. Sudar (interprétation). - Je ne sais pas. Je ne me souviens

 13   pas de ces choses-là. Impossible de me souvenir si j'ai voté ou pas. Je ne

 14   sais pas ce qui s'est passé. J'ai oublié tous ces détails.

 15   Mme Mc Murrey (interprétation). - Ma question n'était pas de

 16   savoir si vous avez effectivement été aux urnes. Mais vous en auriez eu

 17   l'occasion, la possibilité et vous aviez toutes les conditions nécessaires

 18   pour participer aux élections ?

 19   M. Sudar (interprétation). - Que dire ? Je ne sais pas. Que dire

 20   aux juges ? Je ne sais pas. Etais-je censé voté ? Vous savez que le peuple

 21   avait été divisé à l'époque. Pour qui voter ? On ne voulait pas se passer

 22   de la Yougoslavie. On ne voulait pas voter, parce qu'on était en

 23   Yougoslavie. Je ne savais pas pour qui, pour quoi voter. Je ne me souviens

 24   vraiment pas de ce moment précis.

 25   Mc Murrey (interprétation). - Vous avez dit que lorsque vous


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  1   êtes arrivé le 22 mai 1992 à Celebici, il était vrai que des officiers ou

  2   des soldats du HVO surtout géraient le camp, l'administraient.

  3   M. Sudar (interprétation). - Ce n'est pas ce que j'ai dit.

  4   Comment aurais-je pu dire une telle chose, que c'était surtout le HVO qui

  5   était présent ? Il y avait des militaires, des Musulmans. Je ne sais pas.

  6   J'ai remarqué que certains portaient des uniformes noirs, des chemises

  7   noires. On nous a forcés à nous aligner contre le mur. Il était donc

  8   impossible de voir quoi que ce soit. Il fallait tenir les mains croisées

  9   derrière la nuque contre le mur.

 10   Mme Mc Murrey (interprétation). - Du 22 mai...

 11   Vous avez été absent du camp pendant un certain temps. Quand

 12   êtes-vous revenu au camp ?

 13   M. Sudar (interprétation). - Jusqu'à la fête du bayram, mais je

 14   ne me souviens plus de la date. Je sais bien qu'on fêtait le bayram

 15   lorsque j'ai été transféré de la salle des sports à Celebici.

 16   Mme Mc Murrey (interprétation). - Je sais personnellement... Je

 17   ne connais pas bien l'Islam, mais je sais qu'il y a au moins deux Juges

 18   qui connaissent bien la foi islamique, mais veuillez préciser ceci à notre

 19   intention. Pouvez-vous nous donner une idée du début des fêtes de bayram ?

 20   M. Sudar (interprétation). - Je ne m'en souviens pas. Je crois

 21   que cela s'est passé au mois de juin, pour autant que je le sache, mais il

 22   y a longtemps de cela. Je me souviens, en tout cas, que ce soir-là, on

 23   fêtait bayram.

 24   Mme Mc Murrey (interprétation). - Lorsque vous dites le mois de

 25   juin, auparavant vous avez déclaré dans votre déposition que vous aviez


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  1   passé une vingtaine de jours à Musala, est-ce à peu près cela ?

  2   M. Sudar (interprétation). - Je ne sais pas exactement. Je n'ai

  3   pas compté les jours. J'ai été sous une pression énorme. Je ne pouvais pas

  4   compter. Comment aurais-je pu compter ? Comme si quiconque parmi nous

  5   pouvait compter. Personne n'a compté. Je n'avais pas le temps de compter.

  6   En gros, je ne sais pas exactement, je ne sais pas combien de temps. Je

  7   sais simplement que c'était bayram.

  8   Mme Mc Murrey (interprétation). - Lorsque vous êtes retourné à

  9   Celebici...

 10   M. Sudar (interprétation). - C'est M. Delic qui m'a ramené. Il y

 11   avait trois ou quatre autres personnes. Je ne sais plus. Je ne me rappelle

 12   plus. Il y avait également quelqu'un d'autre.

 13   Mme MacMurrey (interprétation). - Rappelez-vous, nous nous

 14   sommes mis d'accord tout à l'heure. Ecoutez ma question. Je ne vous ai pas

 15   demandé qui vous a ramené au camp. Je vous ai demandé la date de votre

 16   retour. J'essaie d'obtenir de vous une demande précise. Je ne vous demande

 17   rien d'autre.

 18   M. Sudar (interprétation). - Je comprends.

 19   Mme Mc Murrey (interprétation). - Je pense, parce que je ne sais

 20   pas ce que c'est bayram, que vous êtes retourné à Celebici vers le milieu

 21   du mois de juin. Ce serait à peu près précis ?

 22   M. Sudar (interprétation). - Je ne peux pas être précis. Tout ce

 23   que je sais, c'est que c'était la fête de bayram. Je ne sais pas à quelle

 24   date cela a eu lieu. J'avais peur. Je ne pouvais pas compter.

 25   Mme Mc Murrey (interprétation). - Vous souvenez-vous d'une date


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  1   vers le milieu du mois de juin, date à laquelle sept ou huit nouveaux

  2   jeunes gardes sont arrivés au camp de Celebici ?

  3   M. Sudar (interprétation). - Quelle date ?

  4   Mme Mc Murrey (interprétation). - Vers la mi-juin, peut-être le

  5   12 juin.

  6   M. Sudar (interprétation). - Je ne me rappelle pas de ce type de

  7   détails. Peut-être, si j'ai le temps de me plonger dans mes souvenirs,

  8   j'arriverai à me rappeler. Je ne me rappelle pas du jour. Le 8... Laissez-

  9   moi réfléchir.

 10   Mme Mc Murrey (interprétation). - Je vous demande vers quelle

 11   époque sont arrivés de jeunes gardes âgés de dix-huit ou dix-neuf ans.

 12   Vers le milieu du mois de juin ? Si vous ne vous en rappelez pas, ce n'est

 13   pas grave. Vous vous en rappelez ou non ?

 14   M. Sudar (interprétation). - Je ne me rappelle pas. Je ne m'en

 15   souviens pas.

 16   Mc Murrey (interprétation). - Je vous remercie beaucoup. Je

 17   crois que quand vous êtes retourné à Celebici, on vous a mis dans le

 18   hangar n°°6. Est-ce exact ?

 19   M. Sudar (interprétation). - Oui, c'est exact.

 20   Mme Mc Murrey (interprétation). - Jeudi dernier, dans votre

 21   déposition, vous avez déclaré que vous étiez assis près de la porte et que

 22   vous tourniez le dos à la porte. Est-ce exact ?

 23   M. Sudar (interprétation). - Je me trouvais dans la deuxième

 24   rangée, près de l'entrée. J'étais le troisième ou le quatrième dans le

 25   rang.


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  1   Mme Mc Murrey (interprétation). - Monsieur l’Huissier, s'il vous

  2   plaît, cette pièce a déjà été versée, pièce n°°1. J'aimerais simplement

  3   qu'on m'en donne un exemplaire tout neuf et qu'on le présente au témoin

  4   pour qu'il le place sur le rétroprojecteur. J'aimerais également qu'elle

  5   soit enregistrée aux fins d'identification et versée au dossier.

  6   M. le Greffier (interprétation). - La pièce porte la cote

  7   10D17/4.

  8   Mme Mc Murrey (interprétation). - Je vous remercie. Le

  9   rétroprojecteur pourrait-il être allumé ? Si le témoin peut regarder la

 10   pièce, il doit y avoir une baguette. A-t-il au moins un crayon avec lequel

 11   il puisse indiquer les choses sur le rétroprojecteur ?

 12   Monsieur Sudar, si vous voulez bien regarder le dessin qui se

 13   trouve sur le rétroprojecteur. Reconnaissez-vous cela ? Pour vous, cela

 14   représente-t-il le hangar n°°6 ?

 15   M. Sudar (interprétation). - Oui, il me semble que la porte se

 16   trouve quelque part par là. Le portail d'entrée était par là, la route se

 17   trouvait là. Là, il y avait un bloc, quelque chose en ciment.

 18   Mme Mc Murrey (interprétation). - Voulez-vous me décrire ce que

 19   vous voyez ? Est-ce l'intérieur du hangar n°°6 ?

 20   M. Sudar (interprétation). - Je ne peux pas reconnaître. C'était

 21   une structure en acier. Je ne peux pas reconnaître. Je ne suis pas du tout

 22   bon en dessin. Je dessine très mal. C'était un hangar fait en acier. Je ne

 23   l'ai pas mesuré. Je n'en ai mesuré ni la longueur, ni la largeur.

 24   Mme Mc Murrey (interprétation). - Combien de mois avez-vous

 25   passé au hangar n°°6 ? Pouvez-vous nous dire cela ?


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  1   M. Sudar (interprétation). - J'y suis resté depuis la date de

  2   bayram jusqu'au début du mois de septembre à peu près. Je ne me rappelle

  3   pas des dates précises. Pour moi, c'est le plus difficile les dates, c'est

  4   ce dont je me rappelle le moins.

  5   Mme Mc Murrey (interprétation). - Regardez la pièce qui se

  6   trouve sur le rétroprojecteur. Vous voyez qu'en bas à droite, il y a une

  7   porte. Diriez-vous que c'est la porte qui permettait d'entrer dans le

  8   hangar n°°6 ?

  9   M. Sudar (interprétation). - Qu'entendez-vous par là ? D’entrer

 10   ou d'arriver dans le hangar n°°6 ?

 11   Mme Mc Murrey (interprétation). - Je vous en prie, regardez ce

 12   dessin. C'est une pièce versée au dossier.

 13   M. Sudar (interprétation). - Je ne reconnais pas ce dessin. Je

 14   ne sais pas ce que cela représente. Ce n'est que si je voyais le hangar

 15   reconstruit d'une certaine façon que je le reconnaîtrais. Je ne peux pas

 16   reconnaître des dessins.

 17   Mme Mc Murrey (interprétation). - Ce que je vous demande, c'est

 18   d'indiquer avec une croix le lieu où vous vous trouviez assis à

 19   l'intérieur du hangar. Si vous ne reconnaissez pas du tout le hangar, je

 20   ne peux pas vous poser cette question. Pouvez vous ?

 21   M. Niemann (interprétation). - Monsieur le Président, à

 22   plusieurs reprises, le témoin a déclaré qu'il ne reconnaissait pas le

 23   hangar. J'objecte à d'autres questions de ce type, des questions se

 24   référant au hangar.

 25   Mme Mc Murrey (interprétation). - Monsieur le Président, s'il ne


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  1   reconnaît pas le hangar n°°6, il est clair que je ne peux pas poser

  2   d'autres questions relatives au hangar.

  3   M. le Président (interprétation). - C'est bien ce qui me

  4   semblait.

  5   Mme Mc Murrey (interprétation). - Absolument.

  6   Puis-je demander à l'Huissier de nous aider une fois encore,

  7   s'il vous plaît ? J'aimerais que le compte rendu fasse bien état du fait

  8   que le témoin n'a pas été capable de reconnaître le hangar n°°6 tel qu'il

  9   a été présenté par le bureau du Procureur.

 10   Monsieur l'huissier, veuillez retirer cette pièce du

 11   rétroprojecteur. Veuillez demander que cette pièce soit enregistrée aux

 12   fins d'identification et placée sur le rétroprojecteur.

 13   M. Niemann (interprétation). - Je ne suis pas d'accord avec

 14   l'utilisation de ces termes. On n'a pas montré le hangar n°°6 au témoin.

 15   On a montré une pièce au témoin. Je demande que le compte rendu fasse bien

 16   état du fait que le témoin n'a pas été capable de reconnaître le hangar

 17   d'après la pièce qui lui a été montrée.

 18   Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, si vous

 19   me permettez de répondre à cela, je voudrais simplement que le compte

 20   rendu fasse état du fait que le témoin n'a pas reconnu une pièce versée

 21   par le bureau du Procureur comme moyen de preuve. C’est tout ce que je

 22   voulais dire.

 23   M. le Président (interprétation). - Laissez-nous avoir une idée

 24   de la chronologie des questions. On a montré au témoin une pièce qui

 25   représente le hangar. Le témoin n'a pas pu identifier le hangar. Voilà.


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  1   Mme McMurrey (interprétation). - Absolument. C'est exactement

  2   cela. Je vous remercie.

  3   M. Sudar (interprétation). - Je peux reconnaître les rangées de

  4   personnes, mais je ne peux pas reconnaître le hangar, seulement les

  5   rangées de personnes.

  6   Mme McMurrey (interprétation). - Peut-être que ce sera plus

  7   facile pour vous sur la prochaine pièce. Veuillez placer cette pièce sur

  8   le rétroprojecteur, Monsieur l'Huissier, s'il vous plaît.

  9   Je sais bien que ce n'est pas à l'échelle, qu'il n'y a pas les

 10   bonnes proportions. Ce n'est qu'une approximation. Je sais qu'il y avait

 11   des personnes assises dans une autre partie du bâtiment, que ce n'est pas

 12   très fidèle, mais voulez-vous vous pencher sur cette pièce et nous dire si

 13   quelque chose ressemble à la disposition des personnes qui se trouvaient

 14   assises dans le hangar n° 6 à une certaine époque de l'année 1992.

 15   M. Sudar (interprétation). -  Dans le hangar n° 6, il y avait

 16   une rangée qui suivait ces murs-là, tout autour du hangar. Et puis, il y

 17   avait une rangée au milieu, une rangée en face. Je me trouvais dans cette

 18   rangée-là, je ne sais pas exactement où. Il y avait des gens derrière moi,

 19   il me semble, quelque part par là.

 20   Mme McMurrey (interprétation). - Pour être très précis, en bas

 21   du mur à droite, il y avait des personnes assises tout au long du mur,

 22   n'est-ce pas ?

 23   M. Sudar (interprétation). - Ce n'est pas un mur. C’est de la

 24   tôle, des feuilles de tôle. Il n'y avait pas vraiment de murs, que je

 25   sache. C'était du métal, de l'acier.


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  1   Mme McMurrey (interprétation). - Je vous remercie. Mais cela

  2   vous semble refléter à peu près la disposition des personnes assises à

  3   l'intérieur du hangar n° 6, n'est-ce pas ?

  4   M. Sudar (interprétation). - Je ne sais pas. Il y avait plus de

  5   50 personnes dans une même rangée. La porte était quelque part par ici. Et

  6   puis, là, il n'y avait personne. Il y avait un seau.

  7   Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Sudar, cela vous

  8   semble-t-il refléter la disposition des personnes assises dans le hangar

  9   n° 6 telle que cette disposition existait en 1992 ?

 10   M. Sudar (interprétation). - Oui. Cela lui ressemble.

 11   Je ne comprends pas les dessins. J'ai dû mal à m’y retrouver.

 12   Mais si je voyais une maquette du bâtiment, alors là, peut-être, oui.

 13   Mme McMurrey (interprétation). - L'endroit qui est indiqué... Je

 14   n'ai pas le document, mais il me semble que l'on indique l'endroit où vous

 15   étiez peut-être assis. Pourriez-vous me dire combien de personnes se

 16   trouvaient à votre droite ?

 17   M. Sudar (interprétation). - A ma droite ? Eh bien, là encore,

 18   je ne sais pas exactement. Il y avait 250 personnes là-dedans. Je n'ai pas

 19   compté les personnes qui étaient à ma droite. Il y en avait des deux côtés

 20   du hangar. Il y avait plusieurs rangées.

 21   Mme McMurrey (interprétation). - Veuillez vous repencher sur ce

 22   dessin. Vous voyez deux rangées indiquées. La rangée qui est la plus

 23   proche de la porte ; cette rangée regarde plutôt vers le mur arrière du

 24   hangar ; l'autre regarde plutôt vers l'entrée du hangar. Est-ce exact ?

 25   M. Sudar (interprétation). - Oui. Il y a deux rangées.


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  1   Deux rangées regardent vers l'avant et deux rangées regardent vers la

  2   porte.

  3   Mme McMurrey (interprétation). - Vous, vous tourniez le dos à la

  4   porte, n'est-ce pas ?

  5   M. Sudar (interprétation). - Oui, c'est exact, mais je pouvais

  6   me tourner. D'ailleurs, je me suis retourné.

  7   Mme McMurrey (interprétation). - Lorsque l'on vous a mis dans le

  8   hangar n° 6, je crois que vous avez également déclaré l'autre jour-je vous

  9   cite- : “Nous étions assis les mains sur les genoux, nous étions accroupis

 10   et nous devions pencher la tête vers nos genoux”. Est-ce bien ce que vous

 11   avez déclaré jeudi ?

 12   M. Sudar (interprétation). -  Oui, c'est ainsi que nous étions

 13   assis. Entre temps, lorsqu'ils n'étaient plus présents, nous nous

 14   tournions.

 15   Mme McMurrey (interprétation). - Si vous leviez la tête

 16   lorsqu'un garde était présent, vous étiez puni pour avoir fait cela ?

 17   M. Sudar (interprétation). - Oui. Ils circulaient parmi nous.

 18   Ils allaient d'un bout à l'autre du hangar. Ils avaient un chien. Je

 19   regardais un petit peu.

 20   Mme McMurrey (interprétation). - Une dernière question à propos

 21   de cette pièce. J'aimerais également avoir la cote de ce document, s'il

 22   vous plaît. C'est la cote D18/4. Sur cette pièce, si vous regardez

 23   l'endroit où vous étiez assis, à peu près, dos au mur arrière du hangar,

 24   combien de personnes étaient plus proches de la porte que vous ?

 25   M. Sudar (interprétation). -  Je ne me rappelle pas. Je ne me


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  1   rappelle pas du nom des personnes qui se trouvaient dans ces rangées. Il y

  2   avait des gens de partout, de Sarajevo, d'autres villes, de Bradina, de

  3   Donje Selo. Je ne peux pas me rappeler. Il y avait Babic...

  4   Mme McMurrey (interprétation). - Je ne vous demande pas les noms

  5   mais combien de personnes il y avait. Je ne veux pas savoir qui, je veux

  6   savoir combien de personnes étaient plus proches de la porte que vous, à

  7   votre droite. Donnez-moi un chiffre approximatif.

  8   M. Sudar (interprétation). - A ma droite, quand je suis arrivé,

  9   j'étais le dernier. Par la suite, deux ou trois personnes sont arrivées.

 10   Quelqu'un appelé Mici Givac. Je ne me souviens pas de ces hommes. Je crois

 11   qu’il y avait trois ou quatre hommes, peut-être cinq. Cela dépend de la

 12   date de leur arrivée.

 13   Mme McMurrey (interprétation). - Donc, vous dites qu'à un moment

 14   donné, à une période donnée, vous pouviez être quatre, cinq ou six près de

 15   la porte ?

 16   M. Sudar (interprétation). - Je ne me rappelle pas de ces

 17   détails. J'ai dit que, quand je suis arrivé, au tout début, j'étais le

 18   dernier. Par la suite, trois ou quatre personnes sont arrivées.

 19   Mme McMurrey (interprétation). - Veuillez une fois de plus vous

 20   reporter à ce dessin. La porte qui se trouve au coin du hangar n° 6, la

 21   charnière de cette porte se trouve au coin du bâtiment. Elle s'ouvre vers

 22   l'extérieur, n'est-ce pas ?

 23   M. Sudar (interprétation). - Je ne me rappelle pas. Je crois que

 24   le dessin n'est pas très fidèle. Si je voyais le hangar, si j'entrais dans

 25   le hangar, bien sûr la situation serait très différente. Je m'y


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  1   reconnaîtrais beaucoup plus facilement. Avec le dessin, je ne m'y retrouve

  2   pas.

  3   Mme McMurrey (interprétation). - Si vous étiez face au hangar,

  4   dehors en train de regarder le hangar, à droite il y avait la porte et,

  5   vers la droite, il y avait également une colline, n'est-ce pas ?

  6   M. Sudar (interprétation). - Oui, il y avait une petite colline.

  7   Quand on se rendait aux latrines, il y avait une petite colline derrière

  8   le hangar.

  9   Mme McMurrey (interprétation). - Sur ce dessin, montrez-nous

 10   l'endroit où se trouvait M. Draganic.

 11   M. Sudar (interprétation). - Monsieur Draganic se trouvait dans

 12   la troisième rangée. Il me faisait face.

 13   Mme McMurrey (interprétation). - Etait-ce vers le fond du hangar

 14   ou plutôt vers la porte ?

 15   M. Sudar (interprétation). - C'était la rangée du milieu, celle

 16   qui était la plus éloignée de moi. C'était vers le haut, vers le bout du

 17   hangar.

 18   Mme McMurrey (interprétation). - Et vers la gauche ?

 19   M. Sudar (interprétation). - Je ne sais pas. Je ne me souviens

 20   pas de ce type de détail. Je n'ai pas compté.

 21   Mme McMurrey (interprétation). - Veuillez montrer sur ce dessin

 22   l'endroit où, d'après vous, Draganic était assis

 23   M. Sudar (interprétation). - Je dirais qu'il se trouvait sur

 24   cette rangée. Mais combien de personnes y avait-il ? Je ne sais pas.

 25   Mme McMurrey (interprétation). - Veuillez indiquer sur le dessin


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  1   qui se trouve derrière vous.

  2   M. Sudar (interprétation). - Voilà, il se trouvait dans cette

  3   rangée. Il n’y a aucune précision que je puisse ajouter.

  4   Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais que le compte rendu

  5   reflète le fait que M. Draganic se trouvait plutôt vers les deux-tiers

  6   arrière du hangar.

  7   M. Sudar (interprétation). - Non, vers le haut, par ici.

  8   Mme McMurrey (interprétation). - Je vous remercie. Peut-être

  9   qu'il a été poussé progressivement vers le fond du hangar. Pouvez-vous

 10   nous montrer où était assis (expurgé), s’il vous plaît ?

 11   M. Sudar (interprétation). - (expurgé) se trouvait

 12   également dans cette même rangée. Il était près de Draganic. Là encore, je

 13   ne m'en souviens plus très bien. Il était par là. Et puis, parfois, la

 14   disposition changeait. Je ne sais pas. On nous faisait lever. Ils

 15   changeaient de position. Donc, je ne peux pas apporter de détail.

 16   Mme McMurrey (interprétation). - Vous n'avez jamais changé de

 17   place vous-même dans le hangar ?

 18   M. Sudar (interprétation). - Effectivement, je suis toujours

 19   resté à la même place.

 20   Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président,

 21   j'aimerais que cette pièce D18/4 soit enregistrée afin que l'on puisse

 22   savoir où se trouvait M. Sudar dans le hangar, la place où il était assis.

 23   M. Niemann (interprétation). - Nous voudrions lever une

 24   objection. Nous sommes contre le versement de cette pièce au dossier. Le

 25   témoin a déclaré qu'il avait beaucoup de mal à se reconnaître sur des


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  1   dessins. On lui a toujours demandé : “Est-ce que cela vous semble

  2   familier ? Reconnaissez-vous quelque chose ?”.

  3   Je crois, Madame et Messieurs les Juges, que nous serions bien

  4   aidés par ceux qui ont dessiné ce plan. Si cette personne pouvait

  5   comparaître devant la Cour et nous dire quels sont les facteurs sur

  6   lesquels elle s’est appuyée pour le dessiner, pour faire une évaluation

  7   des mesures à utiliser dans son dessin, cela pourrait nous aider. Je pense

  8   que si ces moyens de preuve sont donnés à la Cour, alors il n’y aura pas

  9   d'objection à lever sur ce que le témoin a déclaré. Je demande au

 10   Président que cette pièce soit enregistrée aux fins d'identification,

 11   quand l'auteur de ce plan viendra devant le Tribunal, qu'il nous donne

 12   l'information nécessaire. A ce moment-là, elle pourra être versée au

 13   dossier, Monsieur le Président.

 14   Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, puis-je

 15   répondre ? Je crois que Monsieur Niemann essaie d’empêcher ce document

 16   d'être utilisé comme moyen de preuve. Je crois que cela n'a aucune

 17   importance, le fait de savoir qui a fait ce dessin.

 18   Si la défense l’a utilisé en tant que pièce de la défense, si le

 19   témoin a reconnu un certain nombre de choses quant à la disposition des

 20   personnes assises en 1992, alors je crois qu'il faut que ce document soit

 21   admis.

 22   Nous demandons au Tribunal de reconnaître ce que le témoin a

 23   dit. Il a dit où il se trouvait assis et il a identifié la place où se

 24   trouvaient assis (expurgé) et M. Draganic. Il a également montré où la

 25   porte se trouvait. Il est tout à fait utile pour le Tribunal d'avoir ce


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  1   document et de le considérer comme étant un moyen de preuve.

  2   M. Jan (interprétation). - Veuillez m'expliquer,

  3   Monsieur Niemann, exactement l'utilisation de ce document.

  4   M. Niemann (interprétation). - Le témoin a dit qu'il n'arrivait

  5   pas à s'y retrouver. Il a déclaré que les proportions n'y étaient pas, que

  6   cela ne représentait pas fidèlement le hangar. Je n'ai pas levé

  7   d'objection alors que le témoin disait et répétait qu'il n'arrivait pas à

  8   reconnaître le dessin représentant le hangar, lorsqu'il a dit qu'il aurait

  9   préféré se trouver devant une maquette du hangar. Je n'ai rien dit lorsque

 10   le témoin a déclaré qu'il n'était pas du tout satisfait d'essayer de se

 11   retrouver avec le dessin.

 12   J'essaie simplement de dire que nous n'avons pas suffisamment

 13   d'informations, que le Tribunal n'a pas suffisamment d'informations

 14   concernant la précision de ce document. Je pense qu'il faut que la

 15   personne qui a établi ce document comparaisse devant le Tribunal et

 16   explique quelles sont les bases sur lesquelles elle s'est appuyée pour

 17   établir ce document.

 18   A ce moment-là, nous atteindrons peut-être un certain niveau de

 19   précision. Dès lors, le document pourra être utile.

 20   Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, ce

 21   document n'est pas présenté dans le but de refléter fidèlement le

 22   hangar n° 6. Nous essayons simplement d'évaluer la place du témoin dans le

 23   hangar n° 6.

 24   Il vient de dire qu'il avait reconnu à peu près la place où il

 25   était assis, qu'il était toujours resté assis à la même place. Il a été


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  1   capable de se situer dans le hangar. C'était bien notre objectif. Nous

  2   avons réussi à obtenir ce que nous voulions. Le fait de savoir qui a fait

  3   ce dessin n'a aucune importance.

  4   M. le Président (interprétation). - Il y a une pièce qui montre

  5   le hangar n° 6, me semble-t-il.

  6   M. Jan (interprétation). - La description qu'il vous a donnée ne

  7   suffit-elle pas ? Il vous a dit qu'il se trouvait dans la deuxième rangée

  8   de l'autre côté. Cela ne suffit-il pas ?

  9   Mme McMurrey (interprétation). - Bien sûr, aux fins de

 10   récusation, je préférerais revenir à ce document ultérieurement. Je

 11   demande le versement. Je pense que le compte rendu est précis. Je voudrais

 12   demander que ce document soit versé au dossier, ne serait-ce qu'aux fins

 13   de récusation.

 14   M. le Président (interprétation). - Etant donné la nature des

 15   réponses fournies, il ne semble pas que le témoin connaisse suffisamment

 16   bien les paramètres de cette pièce précise. Il sera donc difficile de la

 17   verser, à moins que nous nous basions sur la description qu'il a fournie

 18   de la place qu'il occupait. De ce point de vue-là, oui. Mais je pense que

 19   vous auriez pu utiliser le plan du hangar n° 6, pièce qui est déjà versée

 20   au dossier.

 21   Mme McMurrey (interprétation). - J'aurais voulu le faire. Cela

 22   aurait été beaucoup plus facile. J'aurais pu utiliser celle-là parmi les

 23   pièces de l'accusation montrant ce même endroit. Le témoin n’a pas reconnu

 24   ce premier plan. J'ai dû utiliser un autre moyen. Je retirerai cette

 25   pièce, mais j'aimerais auparavant montrer un autre dessin au témoin pour


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  1   voir s'il le reconnaît. Je garderai la pièce que vous avez rejetée pour un

  2   autre témoin qui sera en mesure de l'identifier. J’aimerais l’aide de

  3   l’Huissier.

  4   M. Sudar (interprétation). - Si vous me montrez la maquette, je

  5   pourrai vous indiquer tout ce dont vous avez besoin. Avec les dessins, je

  6   ne m'y retrouve pas. Il faudrait que l'on fasse figurer les personnes

  7   assises sur le dessin, que chaque individu soit représenté sur le dessin.

  8   Avec ces lignes, je ne m'y retrouve pas.

  9   M. Jan (interprétation). - Est-il possible de soulever le toit

 10   de la maquette pour qu'il puisse regarder la maquette ?

 11   Mme McMurrey (interprétation). - Mais, Monsieur le Juge, pour

 12   des raisons de sécurité le témoin ne peut pas se lever pour regarder la

 13   maquette. Je ne suis pas certaine que nous pourrions avoir une caméra

 14   pointée vers la maquette qui permettrait au Tribunal et à vous, Madame et

 15   Messieurs les Juges, de disposer de l'image qui vous permettrait

 16   d'apprendre quelque chose.

 17   M. Jan (interprétation). - Peut-être pourrait-il indiquer le

 18   lieu où il se trouvait assis. Peut-être le témoin peut-il se déplacer en

 19   prenant les mesures nécessaires.

 20   Mme McMurrey (interprétation). - Si vous vous contentez de ce

 21   qu'il a dit concernant l’endroit où il était assis, alors...

 22   M. Jan (interprétation). - Oui, il a dit : “Deuxième rangée, le

 23   dos vers la porte”. C'est lui qui était le plus près de la porte.

 24   Mme McMurrey (interprétation). - Oui, c'est cela. Il y avait

 25   trois ou quatre personnes entre lui et la porte. Je crois que c'est clair


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  1   et que nous pouvons en rester là.

  2   M. le Président (interprétation). - Je crois que l’on discute de

  3   choses que tout le monde a très bien comprises. Je ne crois pas du tout

  4   qu’il soit nécessaire de continuer sur ce point.

  5   Mme McMurrey (interprétation). - Je retire cela. Mais j’aimerais

  6   simplement que cette pièce, dont la cote est D19/4, soit placée sur le

  7   rétroprojecteur.

  8   Monsieur Sudar, s'il vous plaît, regardez ce dessin et dites-

  9   nous si cela représente la position dans laquelle vous étiez obligés

 10   d'être assis dans le hangar n° 6. Je ne parle pas seulement de vous, mais

 11   de tous les autres détenus.

 12   M. Sudar (interprétation). - Non, nous n'étions pas assis comme

 13   cela, mais comme cela, comme je l'indique. Sur ce dessin, vous nous avez

 14   représenté avec nos têtes entièrement baissées.

 15   M. le Président (interprétation). - Je ne comprends vraiment pas

 16   quel est votre objectif. Pensez-vous que les personnes sont des machines ?

 17   Tout simplement parce qu'on leur demande d'être assis comme cela, cela ne

 18   veut pas dire qu'à tout moment ils vont rester assis comme cela, quelles

 19   que soient les choses qui arrivent.

 20   Mme McMurrey (interprétation). - J'essaie de montrer la

 21   situation telle qu'elle était. Peut-être s'il avait levé la tête de cette

 22   position-là, aurait-il été puni. J'essaie de le récuser.

 23   M. le Président (interprétation). - Je suis d'accord avec vous,

 24   mais ils ne l'ont pas découvert la tête levée ; ils ne l’ont pas puni,

 25   mais il a levé la tête.


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  1   Je crois que maintenant la Chambre de première instance va lever

  2   la séance. Nous reprendrons demain matin.

  3   L’audience est levée à 17 heures 35.

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