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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL Affaire IT-96-21-T
2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE
3 Mardi 28 Juillet 1998
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5 L'audience est ouverte à 10 heures 10.
6 M. le Président (interprétation). - Bonjour Mesdames et
7 Messieurs. Veuillez procéder aux présentations, je vous prie.
8 Mme McHenry (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président.
9 Teresa McHenry pour l’accusation ainsi que M. Giuliano Turone,
10 M. Jim Cowles et M. George Huber.
11 Monsieur le Président, après les présentations, Maître Cowles
12 souhaite soulever un point concernant la réplique. Cela ne devrait pas
13 prendre trop longtemps.
14 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Veuillez
15 passer aux présentations pour la défense je vous prie.
16 Mme Residovic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le
17 Président. Je me présente : Edina Residovic qui défend M. Delalic. Mon
18 collègue, Eugène O'Sullivan du Canada, défend également mon client
19 M. Delalic.
20 M. Olujic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président. Je
21 me présente. Zeljko Olujic, je défends M. Mucic ainsi que
22 M. Tomislav Kusmanovic.
23 M. Karabdic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président.
24 Salih Karabdic, avocat de Sarajevo, je défends Hazim Delic ainsi que
25 Maître Moran, de Huston au Texas.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président,
2 Cynthia McMurrey avec Nancy Boler et Calvin Sanders, nous défendons
3 Esad Landzo.
4 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.
5 J'entendrai Maître Cowles, avant de commencer.
6 M. Cowles (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président.
7 Très brièvement, l'accusation à l'intention de déposer, pardon
8 d'interjeter la question de la réplique, et j'aimerais demander à la
9 Chambre de première instance si elle va publier une ordonnance par écrit
10 concernant cette question des répliques de vendredi dernier.
11 M. le Président (interprétation). - Vous n'avez pas besoin de
12 quelque chose de la part de la Chambre de première instance.
13 M. Cowles (interprétation). - Je pense que cela avait trait à la
14 question de temps sur notre possibilité d'interjeter.
15 M. le Président (interprétation). - Vous êtes libre de le faire.
16 M. Cowles (interprétation). - Si vous me le permettez, étant
17 donné que la Chambre de première instance à décidé que ce dont on a parlé
18 comme moyen de preuve nouveau, ne devait être déposé en réplique, je crois
19 que nous aurions l'intention de déposer une requête qui rouvrirait
20 l'affaire et je me demande si nous devrions le faire par écrit.
21 M. le Président (interprétation). - Si vous le souhaitez, très
22 bien, mais est-ce que vous souhaitez réintroduire de nouveaux moyens de
23 preuves à ce stade ?
24 M. Cowles (interprétation). - Je vous remercie, c'est tout ce
25 que j'ai pour l'instant.
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1 M. le Président (interprétation). - Veuillez poursuivre.
2 Mme le Greffier (interprétation). - Je vous rappelle Monsieur,
3 que vous êtes toujours sous serment.
4 M. le Président (interprétation). - Veuillez poursuivre.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Je crois qu'hier, à
6 17 heures 30, lorsque nous avons terminé, nous étions en train d'aborder
7 des allégations de l'acte d'accusation et je crois que le prochain chef
8 d'accusation qui vous concerne, est le chef d'accusation 11 et le chef
9 d'accusation 12, le meurtre de Slavko Susic.
10 Monsieur Landzo, pouvez-vous dire à la Chambre ce que vous savez
11 de M. Slavko Susic, quels sont vos souvenirs si vous en avez ?
12 M. Landzo (interprétation). - Oui, je connais cette personne. Il
13 habitait à Konjic. Il avait une maison là-bas. Il avait une maison de
14 week-end à Lape, un village à proximité de Celebici, à proximité de la
15 prison. Il a été arrêté par la police parce qu'il aurait pilonné Celebici
16 et Konjic. Je l'ai vu le jour de son arrivée, lorsqu'on l'a amené. Il a
17 été battu et M. Delic m'a dit de l'emmener dans le tunnel n° 9 pour l'y
18 enfermer. Je l'y ai emmené. A l'entrée du tunnel n° 9, il y avait déjà
19 4 ou 5 gardiens qui ont tous commencé à le frapper et à l'entrée du tunnel
20 n° 9, il faut descendre quelques marches, quatre à cinq marches. Il était
21 en train de descendre, moi, je me trouvais sur la route qui passe à
22 proximité. Moi aussi, je l'ai frappé deux fois environ, dans cette cohue.
23 Ce n'était pas vraiment des coups, c'était plutôt que je le poussais pour
24 qu'il entre dans le tunnel, parce que quelqu'un le tenait par les cheveux,
25 d'autres le frappaient avec des bâtons en bois. Il y a été enfermé et,
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1 quelques jours plus tard, j'ai entendu qu'on l'avait tué ou qu'il était
2 mort, je ne sais pas si quelqu'un l'a tué.
3 Ensuite, j'ai entendu qu’un soi-disant un certain Zara Mrkajic
4 qui était enfermé dans le tunnel n° 9 l'aurait tué.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Vous dites que vous avez
6 entendu parler de Mrkajic. Est-ce qu’il s'agissait de Zara Mrkajic qui
7 était détenu à Celebici ?
8 M. Landzo (interprétation). - C'est Zara Mrkajic, un dénommé
9 Zara de Bradina.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit du même
11 Zara Mrkajic que nous avons vu sur une vidéo à bien des reprises où un
12 journaliste de la télévision de Konjic interviewait des personnes devant
13 le hangar n° 6 ?
14 M. Landzo (interprétation). - Oui, je l'ai vu sur la vidéo où il
15 donnait un témoignage à un journaliste qui faisait une interview avec les
16 détenus. Je l'ai reconnu sur cet enregistrement.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Très bien. Je vous remercie.
18 J'aimerais passer à présent...
19 Les chefs d'accusation 13 et 14 ne vous concernent pas, ils ne
20 vous sont pas reprochés. J'aimerais donc passer aux chefs d'accusation qui
21 vous concerne. Si jamais vous souhaitez parler d'autre chose, nous y
22 reviendrons. Les chefs d'accusation 14 et 15 ou plutôt, passons au meurtre
23 de Zeljko Klimenta. Je sais que cela ne vous concerne pas, mais je pense
24 que vous connaissez l’affaire.
25 M. Landzo (interprétation). - Oui, j'ai vu le cadavre de
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1 Zeljko Klimenta quinze minutes après son meurtre. Par la suite, j'ai
2 entendu dire que c'est Padalovic Almir qui l'avait tué. Je ne sais pas
3 exactement. J'ai vu son cadavre, mais pourquoi et comment il a été tué, je
4 l'ignore. Je sais qu'il a été tué d'une arme à feu. Mais la raison, je
5 l'ignore.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Je crois que vous avez parlé de
7 Calomir. Ce n'est pas la personne que vous avez associée à la mort
8 accidentelle de Zeljko Klimenta, n'est-ce pas ?
9 Mme McHenry (interprétation). - Objection, Monsieur le
10 Président.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Je pense que c'était un
12 problème d'interprétation. Nous avons eu des problèmes avec les noms hier.
13 Mme McHenry (interprétation). - A ce moment-là, je propose qu'on
14 ne suggère pas une réponse au témoin, de lui poser une question tout
15 simplement.
16 M. le Président (interprétation). - Veuillez lui demander ce
17 qu'il a dit au lieu de lui demander de répéter ce que vous souhaitez lui
18 faire dire.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Quel est le nom que vous avez
20 associé à celui de M. Klimenta ?
21 M. Landzo (interprétation). - Almir Padalovic.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Veuillez répéter ce nom.
23 M. Landzo (interprétation). - Padalovic.
24 M. le Président (interprétation). - Padalovic.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Et quel était son prénom ?
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1 M. Landzo (interprétation). - Almir.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Et que savez-vous de
3 M. Almir Padalovic, si vous savez quelque chose ?
4 M. Landzo (interprétation). - Il a été gardien à la prison peu
5 de temps. Après ce meurtre, il a abandonné la prison. Je ne sais pas s'il
6 a assumé d'autres fonctions mais je sais qu'il a quitté la prison et après
7 mon départ, je le voyais parfois en ville.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'il s'agissait d'un
9 homicide intentionnel de M. Klimenta ?
10 Mme McHenry (interprétation). - Objection, le témoin a déjà dit
11 qu'il ne se trouvait pas sur place au moment où cela s'est passé.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Très bien. Je passerai aux
13 chefs d'accusation suivants. Chefs d'accusation 15, 16 et 17. Il s'agit de
14 la torture de Momir Kuljanin. Que savez-vous de cela ?
15 M. Landzo (interprétation). – Momir Kuljanin, je crois qu'il
16 s'agit d'une personne...
17 Je vais essayer de vous raconter, je ne sais pas s'il s'agit de
18 cette personne-là car il y avait énormément de personnes qui portaient le
19 nom de famille de Kuljanin. Il m'est donc difficile de m'en souvenir.
20 M. le Président (interprétation). - Veuillez lui dire, je vous
21 prie, ce qui est arrivé à cette personne. Peut-être que cela lui permettra
22 d'effectuer l'association.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo,
24 M. Momir Kuljanin a subi des tortures sur la paume de sa main notamment.
25 M. le Président (interprétation). - Je n'aimerais pas que vous
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1 suggériez des réponses.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Je vais retrouver mon
3 exemplaire de l'acte d'accusation, mais je pense qu'il s'agit du fait que
4 la paume de sa main a été brûlée et si je me trompe, je me corrigerai dès
5 que j'aurai retrouvé mon exemplaire de l'acte d'accusation. Bien.
6 Momir Kuljanin, il aurait été... L'allégation est qu'il aurait
7 été battu, qu'il aurait perdu connaissance à la suite de coups de pied,
8 qu'on lui aurait marqué une croix sur sa main au fer rouge, qu'on lui
9 aurait asséné des coups de pelle et qu'on lui aurait appliqué une poudre
10 corrosive sur le corps. Est-ce que cela vous rafraîchit la mémoire sur
11 cette personne ?
12 M. Landzo (interprétation). - Oui. Oui, c'est exact. Je l'ai
13 brûlé. Je crois qu'il s'agissait d'un couteau ou d'un objet en fer et pour
14 ce qui est du reste, le fait qu'on lui a appliqué quelque chose, une
15 poudre sur le corps et qu'on lui aurait asséné des coups de pelle, je ne
16 sais pas. En tout cas, moi je ne l'ai pas fait. Je ne sais pas si
17 quelqu'un d'autre l'a fait.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Quelles étaient les
19 circonstances qui entouraient cet instant où M. Kuljanin a été brûlé ?
20 M. Landzo (interprétation). - A l'époque, à Celebici se trouvait
21 une unité militaire qui se trouvait dans une autre partie de la caserne.
22 Une personne du village de Homolje, un Musulman du village de Homolje. A
23 l'époque, Hazim Delic faisait le tour du camp. Cette personne a parlé avec
24 lui et il a demandé que cette personne soit battue, car, apparemment, ils
25 avaient des comptes à régler d'avant la guerre. A ce moment-là, je me
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1 trouvais à mon poste de garde. Monsieur Delic m'a appelé et il m'a demandé
2 de lui brûler la paume de la main, de brûler la paume de la main à ce
3 Chetnik pour qu'il ne touche pas ce qu'il ne devait pas toucher. Je pense
4 qu'il s'agissait de femmes. C'est dans ce sens-là qu'il m'a parlé et j'ai
5 donc exécuté les ordres. Le Musulman qui demandait cela se trouvait
6 derrière le hangar et il a regardé, il a assisté à tout.
7 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que M. Delic se trouvait
8 là et est-ce qu'il a observé la scène également ?
9 M. Landzo (interprétation). - Oui. Il se trouvait dans sa Fiat,
10 dans sa voiture. Cette voiture était garée à côté du premier poste de
11 garde, là-bas, et il regardait. Il a garé sa voiture, il a ouvert sa
12 portière et il était assis. Cela s'est produit entre le hangar n° 6 et le
13 hangar atelier.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Bien. J'aimerais passer aux
15 chefs d'accusation 24 à 26 qui concernent Spasoje Miljevic. Est-ce que
16 vous vous souvenez de Sapsoje Miljevic ?
17 M. Landzo (interprétation). - Oui.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pourriez dire à
19 la Chambre de première instance quels sont vos souvenirs au sujet de
20 Sapsoje Miljevic ?
21 M. Landzo (interprétation). - Bien des choses. Il a été battu à
22 plusieurs reprises par plusieurs personnes. J'ai assisté à des passages à
23 tabac de la part de trois membres du HOS. En tout cas, l'un d'eux portait
24 l'insigne du HOS sur sa manche. Les deux autres n'avaient pas d'insigne et
25 ils venaient de Mostar. Ils ont passé à tabac Spasoje, car il faisait
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1 partie des réservistes de l'ex-JNA qui à l'époque agissait à Mostar. Ils
2 l'ont battu. D'autres gardiens l'ont battu à plusieurs reprises. Moi
3 aussi, je l'ai frappé une fois parce qu'il volait de la nourriture aux
4 détenus plus âgés. Et à une reprise je l'ai brûlé, je pense aux pieds.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Vous dites que vous l'avez
6 également brûlé une fois sur ses pieds, sur ses jambes. Dans quelles
7 circonstances l'avez-vous fait ?
8 M. Landzo (interprétation). - Avant de prendre la relève, je
9 pense que c'était autour de 16 heures l'après-midi, M. Delic m'a appelé.
10 Il m'a convoqué à son bureau, il m'a donné le nom de cette personne,
11 Spasoje Miljevic, et il m'a dit que je lui fasse la même chose qu'à Momir,
12 mais sur les jambes, pour qu'il ne puisse plus marcher. Il m'a dit
13 également de lui dire par la suite, si je l'avais fait, que lui allait
14 vérifier. Donc je l'ai brûlé, mais je l'ai fait par-dessus les vêtements,
15 car je pensais que les blessures allaient être moindres. Mais autant que
16 je l'ai appris de son témoignage, il s'agissait de vêtements synthétiques,
17 ce qui a augmenté ses blessures même si moi, je pensais que le fait de le
18 faire par-dessus les vêtements allait diminuer les blessures.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit là de
20 l'incident que M. Miljevic a décrit à l'extérieur, avec quelqu'un qui
21 brûlait un sac, avec un berger qui brûlait un sac ? Est-ce que vous
22 pourriez décrire cet incident ?
23 M. Landzo (interprétation). - Oui. Cela s'est passé entre le
24 hangar n° 6 et le hangar de l'atelier, sur la partie d'herbe qui se trouve
25 à proximité du hangar atelier. A cet endroit-là, une personne qui gardait
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1 des moutons se trouvait sur place. Etant donné qu'il fallait du feu, il
2 s'agissait d'un objet métallique, alors il a apporté un sac et il l'a jeté
3 sur le feu pour augmenter les flammes. Bien entendu, se trouvaient sur
4 place deux autres gardiens qui occupaient leurs postes de garde.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que Hazim Delic se
6 trouvait également sur place ? Est-ce qu’il y a assisté ?
7 M. Landzo (interprétation). - Il est venu vers la fin. Il
8 n'était pas là dès le début, mais il est venu pour voir si je l'avais
9 fait. Donc il aurait pu voir le feu qui brûlait et tout le reste.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Très bien. J'aimerais passer
11 maintenant aux chefs d'accusation 27 à 29. Il s'agit de la torture de
12 Mirko Babic. Est-ce que vous vous souvenez de Mirko Babic ?
13 M. Landzo (interprétation). – De Celebici, de cette période, je
14 ne m'en souviens pas. C'est ici que je l'ai vu pour la première fois et
15 que j'ai entendu son nom. Mais de la période que j'ai passé à Celebici, je
16 ne peux pas m'en souvenir, car il y avait 250 détenus sur place et il est
17 impossible de se souvenir de l'apparence physique et du nom de chaque
18 détenu.
19 Mme McMurrey (interprétation). – Monsieur Babic a déposé devant
20 la Chambre de première instance que vous avez brûlé sa jambe, mais vous ne
21 vous en souvenez pas ?
22 M. Landzo (interprétation). – Tout ce que je sais, c'est que
23 j'ai fait ces deux actions suite à des ordres, mais est-ce que quelqu'un
24 l'a brûlé ou non ? Je n'ai rien à voir là-dedans. Vous savez, je n'étais
25 pas le seul gardien et les autres également exécutaient des ordres. Peut-
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1 être que quelqu'un d'autre l'a fait, mais moi je n'en sais rien.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Passons aux chefs
3 d'accusation 30, 31 et 32 qui ont trait à la torture de Mirko Dordic. Est-
4 ce que vous avez des souvenirs de Mirko Dordic ?
5 M. Landzo (interprétation). – Est-ce que vous pouvez me donner
6 lecture de l'acte d'accusation et me dire de quoi il s'agit ?
7 Mme McMurrey (interprétation). - Oui. On dit qu'à compter de
8 juin 1992 environ et jusqu'à la fin d'août 1992, Esad Landzo a, en de
9 nombreuses occasions, infligé de mauvais traitements à Mirko Dordic, y
10 compris des passages à tabac avec une batte de baseball, des coups assénés
11 pendant qu'il était en train de faire des tractions et des pincements de
12 pinces en métal chauffé sur sa langue et dans les oreilles. Voilà les
13 allégations contenues dans l'acte d'accusation. Est-ce que vous avez des
14 souvenirs de Mirko Dordic, est-ce que vous savez quoi que ce soit sur
15 Mirko Dordic ?
16 M. Landzo (interprétation). – Non. Comme je vous l'ai dit, je ne
17 peux pas me souvenir de cette personne et, je le répète, je n'étais pas le
18 seul gardien. Tout est possible. Je ne dirais pas qu'il est impossible que
19 quelque chose se soit produit, mais je suis sûr que je n'ai rien à faire
20 là-dedans.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Passons aux chefs
22 d'accusation 36 et 37. Il s'agit de la torture de Nedeljko Draganic. Est-
23 ce que vous vous souvenez de Nedeljko Draganic ?
24 M. Landzo (interprétation). – Oui, Nedeljko Draganic, je le
25 connais de l'époque où j'allais à l'école, d'avant la guerre, je le
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1 connais.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pourriez
3 commencer par nous dire quels étaient vos liens avec M. Draganic à
4 l'époque où vous fréquentiez l'école secondaire ?
5 M. Landzo (interprétation). – Je le connaissais à l'école. Nous
6 allions à la même école, donc nous nous voyions. Nous n'avions pas de
7 contacts, mais je sais qu'à une occasion, mon frère et les personnes qui
8 se trouvaient avec mon frère ont frappé Draganic et deux autres de ses
9 amis ou de ses parents. Je l'ai entendu plus tard de récits de mon frère
10 et d'autres. Même si je ne savais pas particulièrement qui était ce
11 Draganic, c'est plus tard lorsque je l'ai vu à Celebici que ces événements
12 me sont revenus. Je le connaissais, je le voyais avant la guerre, juste
13 avant la guerre. Il venait au centre sportif où on pouvait jouer au
14 billard, où on pouvait boire un verre. Il venait souvent. Il venait
15 accompagné de Mici et d'autres personnes de Donje Selo qui avaient pour
16 nom de famille Cecez. Je l'ai vu personnellement et il portait un bonnet
17 de fourrure avec l'enseigne des Chetniks.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Vous parlez de quelqu'un qui
19 s'appelait Mici. Est-ce que vous voulez parler par-là de Mici Kuljanin qui
20 est venu déposer pour l'accusation ?
21 M. Landzo (interprétation). – Oui. Oui. Je voyais le frère cadet
22 de Mici et, en fait, il connaissait mon frère et c'est comme ça que je
23 l'ai connu par la suite.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous
25 décrire les conditions des événements qui sont arrivés à Nedeljko Draganic
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1 à Celebici, autant que vous sachiez ?
2 M. Landzo (interprétation). – Je connais une occasion où il a
3 été battu. Lorsque je suis venu pour relever la garde, j'ai entendu des
4 cris, des gémissements dans le hangar où plus tard se trouvait l'atelier
5 et je suis allé voir ce
6
7 qui se passait. Lorsque je suis entré, j'ai trouvé
8 Adic Alcadic*, Osman Dedic et un gardien qui est mort en 1996 dans un
9 accident de la route. J'ai vu M. Draganic qui était couché par terre. Sur
10 une main, il avait un morceau de corde attaché et ils m'ont dit que je
11 pouvais le ramener parce que c'était à moi de prendre la relève de la
12 garde. Il ne voulait pas se lever. Je lui ai dit de se lever. Alors, je
13 l'ai frappé à l'épaule pour qu'il se relève. Il s'est relevé à grand-peine
14 et il est rentré au hangar n° 6.
15 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'à l'époque vous avez
16 remarqué des traces de brûlure sur M. Draganic ou est-ce que vous avez
17 connaissance de brûlures ?
18 M. Landzo (interprétation). - Non. Je sais qu'il marchait le
19 matin, il marchait lentement, mais je ne savais pas pourquoi. Parce qu'il
20 portait un pantalon long et j'ai remarqué tout simplement qu'il marchait
21 plus lentement, comme pour d'autres personnes âgées également.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Pour les chefs d'accusation 46
23 et 47 qui vous accusent d'avoir infligé des conditions inhumaines dans le
24 camp, est-ce que vous auriez eu une autorité pour changer les conditions
25 du camp de Celebici pendant que vous y étiez ?
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1 M. Landzo (interprétation). - Non.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Pour ce qui est de priver les
3 détenus de vivres, d'eau, de soins médicaux adéquats, ainsi que de
4 facilités pour dormir et d'installations sanitaires, est-ce qu’il s'agit
5 là d'une description fidèle des conditions dans lesquelles vivaient les
6 détenus ? Est-ce qu’ils étaient privés de ces facteurs ?
7 M. Landzo (interprétation). - Non, ils avaient un accès illimité
8 à l'eau. Nous buvions la même eau. En fait, généralement, nous nous
9 adressions aux détenus de garde et, ensuite, les détenus allaient
10 s'approvisionner en eau. Ils avaient un accès illimité.
11 Pour ce qui est de la nourriture, ils recevaient de la
12 nourriture tout autant que nous, tout autant qu'on nous amenait des
13 vivres, nous en donnions également aux détenus, mais nous ne pouvions
14 donner toute la nourriture à une dizaine de personnes et que les autres ne
15 mangent rien. Donc nous avons dû partager cette nourriture entre 250 ou
16 300 détenus et c'était plus équitable de donner un petit peu à chacun,
17 plutôt que d'en donner beaucoup à certains et rien aux autres.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez pris des
19 mesures pour empêcher ces conditions ou pour modifier les conditions à
20 Celebici ?
21 M. Landzo (interprétation). - Non, mais il y a eu des tentatives
22 pour aider des particuliers. Il ne s'agit pas évidemment de modifier les
23 conditions générales qui régnaient dans le camp, mais ce que ne nous avons
24 pu faire c'est quand même de rendre un service à quelqu'un, de le laisser
25 sortir pour quelques minutes pour respirer de l'air frais en dehors du
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1 hangar, lui offrir deux ou trois tranches de pain si jamais il restait
2 quelque chose de nourriture. Evidemment, à l'insu des autres, parce que
3 tout cela n'a pas été permis.
4 Même, j'ai eu quelquefois des problèmes parce que j'ai laissé
5 sortir Klimenta Keljo à plusieurs reprises et j'ai eu des problèmes
6 ensuite avec M. Delic plus tard, parce qu'à ce moment-là je n'aurais pas
7 très bien compris pourquoi... Enfin, il ne le voyait pas vraiment d'un
8 oeil favorable quant à Klimenta.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que Klimenta Keljo était
10 un bon ami à vous ?
11 M. Landzo (interprétation). - Non, ce n'était pas un ami à moi,
12 mais un ami à Rahmetli. Je l'ai connu avant la guerre et au début même où
13 j'étais venu, Ibe était venu rendre visite à Klimenta. J'étais en relève,
14 garde, et il m'a demandé évidemment d'être tout de même un petit peu à
15 l'amiable avec Klimenta pour ne pas que quelque chose de grave lui arrive
16 étant donné qu'ils étaient des amis pendant de longues années. C'est à
17 cette époque que Rahmetli Ibe lui a donné de l'argent. L'autre m'a passé
18 cet argent-là. Evidemment que les détenus n'avaient pas droit de garder de
19 l'argent sur eux.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Quand vous parlez de Ibe, vous
21 parlez de qui ?
22 Quand vous parlez d'une personne qui s'appelait Ibrahim Abdic
23 morte à Bradina, la même personne qui a été tuée Aru Sovski*?
24 M. Landzo (interprétation). - Oui.
25 Mme McMurrey (interprétation). - En dehors du fait que vous avez
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1 rendu service à des personnes, est-ce que vous avez aussi rendu service
2 Spaso Miljanic ?
3 M. Landzo (interprétation). - Oui. Moi-même et Osman Dedic.
4 C'est à lui-même, parmi tous ces détenus, que nous avons donné la
5 permission de voir sa mère pendant quelques secondes, pendant quelques
6 minutes pour échanger quelques paroles au sujet tout simplement des
7 sentiments qui étaient les siens et les conditions de vie.
8 Mme McMurrey (interprétation). - En lui permettant de faire
9 cela, vous et Osman Dedic, est-ce que vous auriez pu vous trouver en
10 difficulté ?
11 M. Landzo (interprétation). - Oui, et de grandes difficultés
12 parce que ceci n'était pas permis. Même ceux qui étaient venus rendre
13 visite aux détenus n'avaient pas le droit d'emprunter ce petit chemin qui
14 allait en dehors du mur d'enceinte, pour ne pas qu'ils voient les
15 personnes détenues, c'est-à-dire que nous avons été obligés de faire
16 marche arrière.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Vous dites qu'on lui permettait
18 de voir sa mère. Cela veut dire simplement qu'il pouvait la voir de
19 l'autre côté de la barrière, n'est-ce pas ?
20 M. Landzo (interprétation). - Oui, elle était de l'autre côté du
21 fil, de la clôture. Lui était de l'autre côté de la porte du hangar,
22 M. Dedic était près de sa mère et lui a scruté justement le chemin pour ne
23 pas que quelqu'un des gardes ou du personnel ne parvienne à ce moment-là.
24 Et pendant que j'étais là, lui devait tout simplement l'avertir du fait
25 que quelqu'un était sur le point de passer par là. Et c'était justement
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1 les quelques moments de passer, d'échanger quelques paroles.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Je voudrais revenir au
3 12 juillet, c'est-à-dire la date de l'incident de Repovci. Ce jour-là,
4 est-ce que vous avez eu un incident ou est-ce que vous avez eu la
5 possibilité d'avoir à traiter avec Senad Memic, et si oui est-ce que vous
6 pouvez en décrire les circonstances ?
7 M. Landzo (interprétation). - Primo, Senad Memic a été le chef
8 du groupe lorsqu'on devait quadriller le terrain. Lorsque ces policiers
9 ont été tués, il était à la tête de ce groupe lorsque j'étais moi-même...
10 Lorsque nous avons dû un peu perquisitionner sur le terrain. Il était le
11 commandant de cette unité de police près de la caserne, mais il avait dans
12 le bâtiment militaire son siège, c'est-à-dire son quartier général. C'est
13 là où il couchait. Le 12 juillet, au coeur de la nuit, un groupe de
14 personnes ont été emmenées. Est-ce qu’ils étaient de Bradina ou des
15 villages voisins ? On ne savait pas. Il s'agissait évidemment de gens
16 d'appartenance ethnique serbe. Il y avait quatre hommes et quelques femmes
17 avec deux enfants. J'ai vu qu'il y avait un vieillard là, avec une oreille
18 coupée. Il était bandé, ensanglanté. Les vieilles femmes évidemment
19 tabassées, parce qu'avec des enflures et hématomes, et il y avait un
20 garçon et une fillette. Les enfants et les femmes ont été confinés
21 aussitôt avec les autres détenus où se trouvaient les femmes et les
22 enfants, et les hommes étaient détenus évidemment dans le hangar.
23 Le jour qui venait, le lendemain, Mucic était venu pour laisser
24 sortir les vieilles femmes avec leurs enfants et le vieillard à l'oreille
25 coupée, et il a laissé pourtant les deux frères Dordic et leur père
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1 détenu. En ce moment-là, ce jour-là, il m'a dit que je devais interroger
2 les frères, avoir également des dépositions par écrit de ces deux frères
3 sur ce qu'ils devaient savoir sur les meurtres des policiers à Bradina
4 étant donné que les personnes qui étaient emmenés étaient accusées d'avoir
5 su ce qui s'était passé, et j'ai pu parler avec à plusieurs reprises.
6 Quelquefois je les sortais du hangar, parfois je parlais même avec eux
7 dans le hangar. J'ai ouvert à plusieurs reprises la porte et je crois que
8 c'est vers la soirée, après avoir su, après avoir eu leur déposition, que
9 je les ai emmenés aux bâtiments administratifs pour que quelqu'un du
10 personnel puisse évidemment s'assurer une déposition par écrit de ces deux
11 personnes. C'est ainsi que j'ai d'ailleurs procédé.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Et quand vous les avez amenés
13 au quartier général pour qu'ils déposent, est-ce que l'officier qui était
14 là, est-ce que c'était Senad Memic ?
15 M. Landzo (interprétation). - Oui, c'est justement ce que je
16 voulais dire, parce qu'étant donné que je pensais que Mucic ou Delic
17 devait être là pour qu'il prenne sa déposition, M. Memic était dans sa
18 pièce et c'est à lui, étant donné qu'il était officier supérieur, que j'ai
19 demandé évidemment de s'occuper de cette déposition. Pendant que nous
20 étions dans l'autre pièce, les deux frères, Memic et un autre garde, il
21 était dans sa pièce avec une femme mais je ne savais pas à cette époque là
22 qu'il était dans la prison, d'ailleurs. Alors une fois qu'il était là et
23 qu'il est entré dans la pièce, il s'est mis à jurer à nous tous, à
24 mentionner le nom de notre mère à moi-même et à l'autre, et qu'il
25 reviendrait sur le hangar pour voir si nous étions tous de retour.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Et quand vous dites qu'il
2 faisait un vacarme, est-ce que cela voulait dire qu'il vous faisait peur ?
3 Au fond, qu'est-ce qu'il faisait quand il sortait ? Est-ce qu’il a dit
4 quelque chose à M. Memic ?
5 M. Landzo (interprétation). - Oui, bien sûr qu'il jurait, mais
6 il s'est adressé à moi-même et à lui pour savoir qui il était, lui, pour
7 se considérer comme supérieur ou autorisé. Il avait toujours deux
8 revolvers, un fusil semi-automatique, un couteau. Ce n'était pas vraiment
9 agréable de le voir, même pour nous qui étions des gardes, mais même
10 d'autres qui n'étaient ni des personnels ni des gardes.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Ensuite que s'est-il passé ?
12 Est-ce qu’il a dit à M. Memic que vous ne pouvez pas accepter les
13 témoignages ?
14 M. Landzo (interprétation). - Oui, Memic n'a pas pris ces
15 dépositions, il s'était mis à écrire mais une fois Delic pénétré dans
16 cette pièce, tout s'est arrêté.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Et une fois que Delic a été
18 dans la pièce, que s'est-il passé par rapport aux frères Dordic ?
19 M. Landzo (interprétation). – Vous parlez toujours de la pièce
20 dans le bâtiment administratif ? Comme je viens le dire, il a fait
21 beaucoup de vacarme, il nous a lancé des jurons à Memic et à moi-même et
22 il nous a donné l'ordre de revenir au hangar n 6 et de l'attendre là-bas
23 et que lui s'occupait des dépositions.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'il est revenu dans le
25 hangar n °6 derrière vous et après que s'est-il passé ?
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1 M. Landzo (interprétation). – Je crois que je n'ai même pas eu
2 le temps de refermer la porte sur moi, qu'il est venu après en voiture en
3 me disant : "Tu vas voir maintenant comment on prend les dépositions des
4 Chetniks, il ne faut pas les emmener à l'autre". Il m'a dit de garder la
5 porte du hangar et de donner l'ordre aux deux frères de se tenir debout
6 dans une pièce où il y a un petit peu une pièce plus vaste je dirai, en
7 leur donnant l'ordre évidemment de se dévêtir. Il m'a donné à moi l'ordre
8 de leur passer l'ordre de se dévêtir parce que lui il était à la porte
9 d'entrée, en me donnant l'ordre à moi de ce qu'ils devaient faire.
10 Alors je leur ai passé l'ordre évidemment de se dévêtir et de
11 mettre mutuellement leur pénis dans la bouche l'un de l'autre. C'est ce
12 que j'ai passé comme ordre et c'est ce qu'ils ont fait.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que M. Delic était
14 debout à côté et il vous disait de faire tout cela ?
15 M. Landzo (interprétation). – Oui. Il se tenait à la porte pour
16 me passer l'ordre à moi, or moi je devais repasser l'ordre aux détenus.
17 Lorsque tout cela fut terminé, il est allé vers sa voiture. C'était une
18 mèche, je ne savais pas ce que c'était, c'était une espèce de câble
19 qu'évidemment on utilisait dans des carrières ou dans des mines, en me
20 donnant l'ordre de l'enrouler sur leur pénis et qu'ils remettent leur
21 pantalon après. C'était l'ordre.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous aviez déjà vu
23 une telle corde auparavant avec une mèche ?
24 M. Landzo (interprétation). – Non.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous saviez comment
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1 utiliser une telle corde ?
2 M. Landzo (interprétation). – Non, je ne l'ai jamais vu avant
3 non plus que je ne savais ce que c'était. Je sais ce que c'était des
4 mèches électriques qu'on utilisait dans l'armée, mais pour ce qui est de
5 cette mèche-là, je ne savais pas. Tant qu'il ne m'aurait pas donné l'ordre
6 de l'allumer évidemment.
7 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que quelqu'un vous a
8 appris comment l'allumer et si oui, qui ? Qui vous a donné l'instruction ?
9 M. Landzo (interprétation). – C'est Delic qui m'a passé une
10 boîte d'allumettes pour l'allumer. Je devais prendre le bout de la mèche
11 et avec évidemment une allumette qui devait toucher le bout même de la
12 mèche. Et d'allumer allumette à ce moment-là. C'est ainsi que j'ai dû
13 faire et c'était la première fois que j'ai dû le faire.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Est qu'est-ce qui est arrivé
15 après aux frères Dordic ?
16 M. Landzo (interprétation). – Je sais qu'ils étaient là. Etant
17 donné qu'ils étaient tout près de la porte d'entrée, tous les gardes qui
18 passaient leur donnaient des coups de botte à tour de rôle et eux, ils
19 étaient accusés d'avoir évidemment porté des vivres, des aliments aux
20 Serbes qui, prétendument, auraient tué les policiers, donc tous évidemment
21 avaient leur sac à vider cette fois-ci sur eux.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Avec l'aide de l'huissier, je
23 voudrais que ce dessin soit mis sur le rétroprojecteur, si cela ne vous
24 dérange pas, je n'en ai qu'un seul exemplaire.
25 (Le document est placé sur le rétroprojecteur.)
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1 On dirait que cette copie porte déjà une marque. Je n'ai pas eu
2 le numéro. Quel est le numéro ?
3 Mme le Greffier (interprétation) - C'était la pièce de la
4 défense 19/4.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Alors, Monsieur Landzo, est-ce
6 que c'est vous qui avez dessiné cela, est-ce que c'est vous qui avez fait
7 ce dessin avec votre ordinateur ?
8 M. Landzo (interprétation). – Oui.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que cela exprime la
10 façon dont les détenus devaient s'asseoir à l'intérieur du hangar n° 6 ?
11 M. Landzo (interprétation). – Oui. C'est dans cette position-là
12 qu'ils étaient assis dans le hangar n° 6. Si quelqu'un du personnel
13 entrait, évidemment. Mais lorsque les gardes n'y étaient pas, ils
14 pouvaient s'asseoir évidemment comme cela leur semblait bon et leur
15 convenait. C'est ainsi que j'ai entendu dire, en tout cas, je ne le savais
16 pas. Toutes les fois où j'entrais, ils étaient assis dans cette position-
17 là.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Alors quand on leur a donné
19 l'ordre d'être assis la tête baissée comme cela, est-ce qu’ils auraient pu
20 voir s'il y avait quelqu'un d'autre dans le hangar, quelqu'un en dehors de
21 vous je veux dire ?
22 M. Landzo (interprétation). – Vraiment, je ne sais pas ce qu'il
23 a pu voir, mais à partir de la position qui était la sienne, je ne pense
24 pas qu'il a pu voir grand-chose. Je ne saurais parler pour d'autres, ceux
25 qui étaient plus près évidemment, pouvaient peut-être voir mieux que ceux
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1 qui étaient plus près de la porte. Du moins, c'est mon avis.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Avec l'aide de l'huissier, je
3 voudrais présenter la pièce 18/4.
4 (Le document est mis sur le rétroprojecteur.)
5 Monsieur Landzo, est-ce que c'est vous qui avez fait ce dessin,
6 le dessin de l'intérieur ? C'est vous qui avez fait cela avec
7 l'ordinateur ?
8 M. Landzo (interprétation). – Oui.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Et qu'est-ce que cela indique ?
10 M. Landzo (interprétation). – Ce qui manque ici, à droite,
11 côté A, il manque une ligne en rouge. C'était le positionnement des
12 détenus. Ils étaient assis et les flèches démontrent, à peu près, la
13 direction vers laquelle ils étaient tournés, par leurs visages.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous
15 indiquer sur le dessin où se trouvaient les frères Dordic à l'intérieur du
16 hangar n° 6 ?
17 M. Landzo (interprétation). – (Inaudible.)
18 Mme McMurrey (interprétation). - Messieurs, Madame les Juges, je
19 voudrais verser au dossier ces deux documents qui ont été créés par
20 M. Landzo. Je pense que ces dessins expriment son opinion quant à la
21 position des personnes et quant à l'emplacement des frères Dordic à
22 l'époque.
23 M. Jan (interprétation). - (L'interprète signale qu'il n'a pas
24 entendu.)
25 Vous avez les photos qu'il a prises ?
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1 Mme McMurrey (interprétation). – C'est la photo qui a été prise
2 à partir de… Cela ne montre pas la porte, je pense qu'il est pertinent de
3 savoir que les détenus regardaient vers l'autre côté par rapport à la
4 porte et pour montrer où se trouvaient les frères Dordic à ce moment-là,
5 c'est-à-dire pour indiquer qu'il serait possible que quelqu'un d'autre
6 soit présent sans que les autres le voient. Alors, je voudrais verser au
7 dossier ces pièces dans ce but.
8 M. le Président (interprétation). - Il y a bon nombre de
9 dessins. Est-ce qu’ils sont nouveaux ?
10 Mme McMurrey (interprétation). - Je les ai déjà présentés, mais
11 je ne les ai pas versés au dossier. Je les dépose maintenant parce que
12 nous avons la personne qui en est l'auteur maintenant et ils ont été
13 authentifiés.
14 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il y a objection
15 de l'accusation ?
16 Mme McHenry (interprétation). - Pas d'objection.
17 Mme McMurrey (interprétation). – Monsieur Landzo, pour revenir à
18 cela, Senad Memic qui se trouvait dans le bâtiment de l'administration
19 lorsqu'on a fait venir les frères Dordic, est-ce qu’il s'agit du même
20 Senad Memic qui était témoin, qui n'est pas arrivé à l'aéroport lundi ?
21 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Président, je
22 soulève une objection. D'abord ce témoin ne serait pas du tout au courant.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, il sait
24 que nous avons appelé ce témoin et que ce témoin n'est pas venu, alors je
25 pense que s'il le sait, il devrait pouvoir le dire.
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1 Mme McHenry (interprétation). - Si c'est ce qu'a dit
2 Mme McMurrey, et si elle lui dit… Si elle veut témoigner elle-même, je
3 n'aurai pas d'objection.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que je dois lui poser la
5 question pour savoir s'il le sait ?
6 M. le Président (interprétation). – Demandez-lui s'il le
7 connaît.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous connaissez
9 M. Mered ? Est-ce qu'il a été appeler pour témoigner pour vous ?
10 M. Landzo (interprétation). – Oui, je le connais et j'ai
11 justement passé le nom de cette personne à mon défenseur pour qu'on
12 l'invite pour qu'il témoigne. Pourtant, il n'est pas venu.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Merci.
14 Monsieur Landzo, je voudrais vous poser une question. En 1992, à
15 Celebici, est-ce que vous étiez ce qu'on peut appeler un soldat parfait
16 selon votre opinion ? Je voudrais qu'il explique son opinion de ce qui
17 constitue un soldat parfait.
18 M. Jan (interprétation). - Un soldat parfait serait celui qui
19 obéissait aux ordres.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Je pense que c'est ce qu'on lui
21 a dit. Je voudrais savoir si c'est là effectivement son opinion. Mais, si
22 MM. les Juges pensent que la réponse a déjà été donnée, d'accord.
23 M. le Président (interprétation). - Si vous voulez qu'il donne
24 une opinion de lui-même, posez-lui la question.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Pour vous, qu'est-ce que c'est
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1 qu'un soldat parfait ? Est-ce que vous étiez un soldat parfait en 1992 à
2 Celebici ?
3 M. Landzo (interprétation). – J'ai tenté de l'être. Je n'ai pas
4 fait le service militaire à la JNA pour connaître les règles militaires,
5 mais je considérais pour ma part que je devais exécuter chaque ordre,
6 remplir toute tâche sans réserve aucune. C'est ainsi qu'il m'a été dit au
7 début, c'est ainsi que j'ai assumé cette assignation en tant que soldat
8 que je devais tout simplement me comporter selon les ordres qui m'ont été
9 donnés, selon les règles. Pour moi, un soldat parfait serait celui qui
10 exécute tous les ordres donnés. C'est ainsi que j'ai fait de mon mieux
11 pour faire au cours de la guerre, non seulement à Celebici mais dans
12 d'autres unités où j’étais affecté pour d’autres missions. Toujours, je
13 voulais satisfaire... Enfin, satisfaire c'est peu dire. Exécuter tout
14 simplement l'ordre d'un officier supérieur.
15 Mme McMurrey (interprétation). - Vous aviez peur de Hazim Delic
16 alors que vous étiez à Celebici ?
17 M. Landzo (interprétation). - Oui. Il n'y avait pas que moi qui
18 en avais peur. D'autres en avaient peur aussi.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Et pourquoi est-ce que vous
20 aviez peur de lui, de Hazim Delic ?
21 M. Landzo (interprétation). – Voyez-vous, pour vous présenter ne
22 serait-ce que l'aspect physique qui est le mien et le sien, j'avais à
23 peine 60 kilos, maigre. Lui, il en faisait 90 ou 100, un petit peu
24 costaud. Lorsqu'il se met à parler, lorsqu'il se met à hurler, il y a
25 quelque chose qui meurt subitement en toi-même. C'était mon sentiment.
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1 Personnellement, j'ai eu peur, une peur stupéfiante. C’est ainsi que j'ai
2 exécuté tous les ordres par peur et entre autre, et parce que je savais
3 que je me considérais comme évidemment quelqu'un qui devait exécuter les
4 ordres. C'est ainsi que j'ai pu accepter tous les ordres, les ordres à
5 exécuter. Tout simplement, je craignais toujours venir lui dire que je
6 n'avais rien fait concernant les ordres. C’est l'une des simples et bonnes
7 raisons. Je ne devais jamais venir lui dire que je n'ai pas exécuté telle
8 ou telle chose qui m'avait été assignée par lui.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous
10 indiquer des incidents très précis qui auraient fait que vous aviez plus
11 peur de lui, de M. Delic, que d’habitude ?
12 M. Landzo (interprétation). - Il y avait de telles situations,
13 mais il m'est difficile de m'en souvenir. Je tâcherai de sortir de ma
14 mémoire. Par exemple dans le cas de Bubalu où il m’a dit que si je
15 n'exécutais pas tel ou tel ordre, je devais être exécuté moi aussi de
16 concert avec Bubalu.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'il avait essayé de
18 tirer sur d’autres personnes ?
19 M. Landzo (interprétation). - Comme vous avez eu l'occasion de
20 voir sur une cassette vidéo où il a tiré en l'air pour chasser les femmes
21 qui s'étaient entassées auprès de la clôture, j'ai entendu dire qu'il a
22 tiré sur l'un des membres de la commission d'enquête militaire qui
23 travaillait là-dessus. Est-ce qu’il a tiré en l'air ? Je crois que cette
24 personne-là s’appelait Hodza et qu'on a tiré dessus. Je ne sais plus pour
25 quelle raison. Lorsque cette personne tentait de pénétrer dans l'enceinte
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1 de la prison. Il y avait des occasions où, sur l'ordre de M. Delic, les
2 gardes tiraient en l'air pour ne pas que les personnes qui passaient à
3 côté de la clôture en fil, évidemment, trop près de la clôture.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Quand vous dites Hodza, quel
5 est son vrai nom ?
6 M. Landzo (interprétation). - Mehmed-Alizja Rizlic, surnommé
7 Hodza. Lui, il travaillait pour le MUP, la police de Konjic.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'il était membre de la
9 commission d'enquête qui devait interroger les détenus à Celebici ?
10 M. Landzo (interprétation). - Oui.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous savez pourquoi
12 cette commission ne se réunissait plus à Celebici ?
13 M. Landzo (interprétation). - Je ne sais pas avec exactitude,
14 mais probablement c'était l'une des raisons, après cet incident ils se
15 sont arrêtés évidemment, ils ne venaient plus pour travailler, je n'en ai
16 plus vu. Mais quelle en serait vraiment la vraie raison ? Je ne peux pas
17 le savoir, je ne peux faire que des hypothèses.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, je
19 voudrais maintenant aborder un incident qu'il vaut mieux discuter à huis
20 clos ou à huis clos partiel.
21 M. le Président (interprétation). - Nous allons passer à huis
22 clos partiel.
23 M. Jan (interprétation). - Cela a trait au camp de Celebici ?
24 Mme McMurrey (interprétation). - Oui, Monsieur le Juge.
25 (L'audience se poursuit à huis clos partiel.)
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25 (Fin de l'audience à huis clos partiel, l'audience se poursuit
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1 en public.)
2 Mme le Greffier (interprétation). - Nous sommes en audience
3 publique.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo, c'était à
5 quelle époque de l'année 1992 que vous avez quitté Celebici ?
6 M. Landzo (interprétation). - Vers la fin du mois de
7 juillet 1992. Je sais que c'était une semaine ou deux après ce meurtre de
8 Bradina. Oui, une quinzaine après cet incident de Bradina.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Et pourquoi est-ce que vous
10 avez quitté Celebici ?
11 M. Landzo (interprétation). - A cette époque-là, mon frère était
12 dans les rangs de la police militaire et toutes les personnes que je
13 connaissais, enfin, les mômes de la rue, etc., étaient en police militaire
14 et le jour où je venais rentrer chez moi, lorsque j'avais une journée de
15 libre, tous ces gens-là, étant donné qu'ils étaient membres de la police
16 militaire, me proposaient d'aller les rejoindre, surtout ma mère en
17 faisait plus étant donné qu'elle disait que Celebici n'était pas un bon
18 poste pour moi. Je lui répondais tout simplement : qu'est-ce qu'elle
19 pouvait savoir là-dessus, etc. Mais lorsque mon frère plus tard m'a appris
20 que j'étais déjà enregistré comme étant membre de la police militaire, fin
21 juillet 1992, alors là tout simplement, depuis Celebici, j'ai été enfin
22 muté à la police militaire.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Donc vous avez été avec la
24 police militaire jusqu'à quel moment en 92 ?
25 M. Landzo (interprétation). - Vers la mi-décembre 92, jusqu'à
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1 mi
2 décembre. Donc depuis le début août 1992, au début, plutôt
3 décembre 1992.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Et vers la mi-décembre 1992,
5 qu'est-ce qui est arrivé pour provoquer votre départ de la police
6 militaire ?
7 M. Landzo (interprétation). - Parce que j'ai été arrêté par les
8 membres de la deuxième brigade, de concert avec Delic, Hastel Beric,
9 Osman Bubic, Ivica et d'autres, nous avons été arrêtés à cette époque-là.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'on vous a mis dans la
11 prison de Parsovici à cette époque ?
12 M. Landzo (interprétation). - Oui, c'était le bâtiment d'une
13 école. C'était plutôt une fosse sceptique de cette école-là, et moi-même
14 avec Dedic Osman nous avons été pendant une dizaine de jours incarcérés et
15 nous avons du coucher sur le béton.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Et combien de temps est-ce que
17 vous êtes restés à Parsovici ?
18 M. Landzo (interprétation). - 50 jours. Après quoi nous avons
19 été déplacés à Celebici au camp. Il n'y avait plus de détenus serbes, nous
20 avons été gardés au bâtiment C, une espèce de stationnaire où nous étions
21 environ sept à huit personnes..
22 Mme McMurrey (interprétation). - Alors pendant combien de temps
23 est-ce que vous avez été emprisonné ?
24 M. Landzo (interprétation). - Donc à compter Parsovici et
25 Celebici, il s'agit de 52 jours à peu près.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Au moment d'avoir été libéré de
2 Celebici, est-ce que vous avez essayé de réintégrer les forces de la
3 police militaire ?
4 M. Landzo (interprétation). - Oui.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'on vous a accepté ?
6 M. Landzo (interprétation). - Non, parce qu'à cette époque-là,
7 la police militaire du corps d'armée a été formée et essentiellement,
8 c'était des gens qui devaient avoir une expérience militaire de l'ancienne
9 JNA, qui ont été incorporés par conséquent, ils voulaient faire maintenant
10 une sélection des gens qui étaient assignés à la police. Il n'y avait plus
11 de gens comme moi ou d'autres, qui souhaitaient peut-être les rejoindre.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Alors est-ce que vous étiez
13 membre de la Défense territoriale par la suite ?
14 M. Landzo (interprétation). - Lorsque j'ai été refusé à la
15 police militaire, j'ai passé quelques jours chez moi pour me reposer après
16 tout ce que j'ai vécu à Parsovici, et à une occasion, j'ai pu rencontrer
17 Ismet Habibovic, surnommé "Broceta", qui lui aussi a passé pendant une
18 période à Celebici. Comme il savait que je n'étais nulle part, il voulait
19 me voir dans une unité qui assurait la sécurité de la prison dans ce
20 village. Comme je savais que je devais tout simplement joindre les gens
21 que je connaissais, alors déjà c'est ainsi que j'ai pu donc être assigné
22 garde à la prison de Mrsala.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Et quel était le nom du
24 commandant de la prison de Mrsala ? C'est-à-dire, qui vous a demandé de
25 devenir membre de la Défense territoriale ?
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1 M. Landzo (interprétation). - Ismet Habibovic, surnommé
2 "Broceta".
3 Mme McMurrey (interprétation). - Par la suite, est-ce que vous
4 êtes devenu garde à Mrsala ?
5 M. Landzo (interprétation). - Oui, c'est cela.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que c'était en
7 janvier 1993 ?
8 M. Landzo (interprétation). - Oui, c'était dans la seconde
9 moitié de janvier 1993 que j'ai été nommé garde à la prison de Mrsala.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez décrire
11 la différence entre être un garde à Celebici et être garde à Mrsala, et
12 quelles étaient ces différences ?
13 M. Landzo (interprétation). - Il y avait d'ailleurs à exécuter
14 les ordres à Mrsala comme à Celebici, mais c'était un autre homme qui
15 administrait les affaires de la prison de Mrsala, par conséquent les
16 ordres étaient différents. Par conséquent, une fois venu à Mrsala, j'ai eu
17 un entretien avec le directeur de la prison, "Broceta" qui m'a expliqué
18 les règles qui régnaient dans cette prison. Par conséquent il n'y a pas eu
19 de maltraitements, pas de passage à tabac non plus que d'autres
20 coercitions quelconques. Les gens devaient être assignés, et si jamais il
21 y a eu des problèmes entre moi-même et le détenu, que je devais toujours
22 faire venir le prisonnier à "Broceta" dans son bureau pour qu'on se parle
23 à trois, et que nous ne devions jamais entreprendre quoi que ce soit de
24 notre propre chef. C'est ainsi que j'ai été tout à fait d'accord avec lui.
25 Je n'ai jamais été emmené dans ces situations où je devais faire quelque
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1 chose à l'encontre de ce qui m'avait été dit. Qui plus est, nous, gardes
2 et détenus, nous étions plutôt dans des conditions, je dirai d'amitié. Les
3 détenus étaient toute la sainte journée dehors, affairés à des travaux,
4 soit bricoler sur les voitures, soit s'occuper de l'entretien des routes.
5 Par conséquent, nous étions vraiment en contact 24 heures sur 24 avec eux.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que cela comprenait
7 aussi un détenu qui s'appelaient Mici Kuljanin ?
8 M. Landzo (interprétation). – Oui, j'ai compris, Mici Kuljanin
9 M. Jan (interprétation). - Il s'agit de quoi ?
10 Mme McMurrey (interprétation). - Cela a à voir avec le fait que
11 ce témoin était contesté et je voulais justement mettre en question le
12 témoin.
13 M. Jan (interprétation). - Est-ce qu'il a indiqué qu'il avait vu
14 frapper un prisonnier ? Pourquoi est-ce que vous continuez sur cette
15 lignée ?
16 Mme McMurrey (interprétation). - Je voulais poser des questions
17 sur Mici Kuljanin parce qu'il avait témoigné devant la Chambre, il a dit
18 qu'il avait été maltraité à Mrsala, pour justement mettre en question sa
19 crédibilité, je pense qu'il serait nécessaire d'avoir recours à ce
20 témoignage. Mais, au fond il ne s'agit que d'une seule question : est-ce
21 que Mici Kuljanin a bénéficié d'un traitement spécial ou est-ce qu'il a
22 été maltraité ?
23 M. Landzo (interprétation). – Oui, son traitement était peut-
24 être meilleur par rapport à d'autres. Mais, il n'a jamais été maltraité
25 non plus que d'autres l'ont été, même à plusieurs reprises, on lui avait
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1 permis de sortir voir sa petite amie. Et puis, il y a eu des gardes qui
2 sont allés en dehors du camp, évidemment, vers ses parents pour lui
3 apporter peut-être des morceaux de vêtements, etc. Même une fois, on lui a
4 sauvé, je crois, la vie, parce qu'il y a eu un membre du HVO surnommé
5 Garo, qui était venu, éméché. Il a sorti un revolver braqué sur la tempe
6 de Mici, sécurité déclenchée. C'est, à ce moment-là, que le garde nous a
7 donné l'ordre évidemment de désarmer Garo, et qu'il n'avait rien à faire
8 dans le camp, dans la prison. Cet incident s'est produit dans le corridor
9 même de la prison.
10 Mme McMurrey (interprétation). – Le Juge Jan vient de se référer
11 à un incident où vous avez été réprimandé pour avoir maltraité un
12 prisonnier à Mrsala. Est-ce que vous pouvez nous en parler ?
13 M. Jan (interprétation). - Est-ce que c'est pertinent ? Ce qui
14 nous intéresse se limite à ce qui s'est passé à Celebici.
15 Mme McMurrey (interprétation). – Mrsala …(inaudible) et
16 Celebici.
17 M. Jan (interprétation). - Alors expliquez cela.
18 Mme McMurrey (interprétation). – D'accord.
19 Est-ce que vous aviez une amie en 1993 ?
20 M. Landzo (interprétation). – En 1993, oui.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Messieurs les Juges, si vous
22 permettez que nous prenions notre pause, un peu plus tôt, peut-être que
23 nous pourrions éliminer quelques questions. Si on peut prendre la pause
24 maintenant et reprendre ensuite, parce que tout ce que je vais demander
25 par la suite a à voir avec ce qui s'est passé après Celebici et je
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1 voudrais avoir une possibilité de revoir tout cela avant de commencer à
2 discuter de choses qui pourraient ne pas intéresser le Tribunal. Et je
3 pense qu'il me faut encore une trentaine de minutes avant d'avoir conclu.
4 C'est-à-dire avoir fini par avoir terminé l'interrogatoire principal.
5 M. le Président (interprétation). - Combien de questions est-ce
6 que vous avez encore à poser ?
7 Mme McMurrey (interprétation). - J'ai deux pages, mais je crois
8 que je pourrais limiter le nombre de questions que j'ai à poser.
9 On peut prendre notre pause.
10 M. le Président (interprétation). – Non, nous pouvons continuer
11 encore pendant une dizaine de minutes.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Oui, Monsieur le Juge.
13 Est-ce que vous aviez une petite amie en 1993 ?
14 Monsieur le Juge Jan, cela à une pertinence pour comprendre son
15 état d'âme et ses rapports qu'il avait avec toute personne occupant une
16 position d'autorité. Je comprends qu'il ne s'agit pas ici de 1992, mais
17 de 1993, mais il s'agit d'un problème de la personnalité qui a commencé
18 dès la naissance et qui continue jusqu'à ce jour. Est-ce que vous
19 permettez que je continue ?
20 Est-ce que vous aviez, en 1993, une petite amie ?
21 M. Landzo (interprétation). – Oui.
22 Mme McMurrey (interprétation). – Comment s'appelait-elle et
23 qu'elle était son appartenance ethnique ?
24 M. Landzo (interprétation). – Elle s'appelait Vedrana Juric,
25 elle était de nationalité croate.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez fait tout
2 ce que vous pouviez faire pour l'aider ?
3 M. Landzo (interprétation). – A l'égard d'elle-même et à l'égard
4 de sa famille. Oui.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez aidé sa
6 famille à regagner la Croatie.
7 Mme McHenry (interprétation). - Je soulève une objection quant à
8 la pertinence.
9 M. le Président (interprétation). - Quelle est l'objection?
10 Mme McHenry (interprétation). - Je pense qu'elle avait dit
11 qu'elle allait traiter de son rapport avec des figures d'autorité, mais
12 d'après ce témoignage, cela n'a rien à voir avec le rapport avec
13 l'autorité. Elle essaie de montrer la bonne conduite. Dès qu'on commence à
14 parler de la bonne ou de la mauvaise conduite, l'accusation à d'autres
15 questions à poser.
16 M. le Président (interprétation). – Evidemment, si l'intention
17 de l'avocat de la défense, c'est d'insister sur la condition mentale de la
18 personne, pourquoi ne voulez-vous pas qu'elle pose des questions ayant
19 trait à cela ? On peut avoir des rapports humains normaux sans avoir de
20 problème. Il y a eu un problème. Alors posez les questions.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Merci, Monsieur le Juge.
22 Monsieur Landzo, est-ce que vous avez été arrêté en raison de ce rapport
23 et de l'aide que vous avez apportée à votre petite amie ?
24 M. Landzo (interprétation). – Oui, à plusieurs reprises j'ai été
25 arrêté pour être relâché, pour être accusé de trahison. Comme quoi je
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1 devais être fusillé parce que j'ai parlé avec les deux de ces frères en
2 dehors de la ligne du front. C'est à deux ou trois reprises que j'ai été
3 incarcéré pour être relâché, ensuite.
4 Mme McMurrey (interprétation). – En 1993, au mois de
5 décembre 1993, est-ce que vous avez été accusé d'un autre crime qui
6 découlait de votre service à Mrsala?
7 M. Landzo (interprétation). – Vous voulez dire qu'il s'agissait
8 d'un acte commis par moi pendant que j'étais à Mrsala?
9 Mme McMurrey (interprétation). - Oui. Un incident. Il s'agissait
10 de Senad Bubalo. Est-ce que vous pouvez expliquer cela, s'il vous plaît ?
11 M. Jan (interprétation). - Il a déjà répondu à cela. Il a déjà
12 répondu.
13 Mme McMurrey (interprétation). - La raison pour laquelle je pose
14 ces questions, c'est pour pouvoir éviter les questions éventuelles du
15 contre-interrogatoire, mais je peux éviter cela maintenant ou attendre que
16 des questions supplémentaires soient posées.
17 Alors que vous étiez dans la prison de Mrsala en 1994, est-ce
18 que vous avez essayé d'attenter à vos jours ?
19 M. Landzo (interprétation). – Oui.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'on vous y a
21 encouragé ? Est-ce que quelqu'un d'autre vous y a encouragé ?
22 M. Landzo (interprétation). – Tout simplement, j'ai demandé des
23 comprimés de M. Delic. Je ne peux pas me souvenir vraiment si c'était lui-
24 même qui me les a passés ou si je les ai pris de la poche de sa jaquette
25 parce que lui-même, il m'a dit qu'il en avait dans sa jaquette. Je ne sais
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1 pas comment ceci a été fait ou est-ce que j'en ai pris moi-même ou est-ce
2 que c'est lui qui m'a donné. Après quoi j'avais eu des comprimés sur moi
3 pour combattre évidemment l'asthme et les douleurs dont je souffrais et
4 c'est ainsi que j'ai pris ces comprimés.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez décrire
6 des incidents violents qui sont arrivés après votre départ de Celebici ?
7 C'est-à-dire des incidents où vous auriez participé.
8 M. Landzo (interprétation). - Après avoir quitté Celebici, j'ai
9 été donc à la police militaire. Là, j'ai eu deux incidents. Tout
10 simplement des incidents qui se sont produits sans aucune intention.
11 C'était plutôt quelque chose qui s'est produit pour ne pas que des gens
12 soient vraiment lésés ou blessés. Beaucoup plus tard, j'ai pu comprendre,
13 me rendre compte de ce qui aurait pu se produire, mais c'est à ce moment-
14 là que, subitement, lorsque j'ai su que ma peau était en question, que
15 j'ai dû réagir. Plus tard, évidemment, je savais qu'il ne fallait peut-
16 être pas réagir ainsi. Mais à ce moment-là où j'ai senti le danger
17 imminent, j'ai agi de la sorte.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Quels étaient ces deux
19 incidents violents auxquels vous avez fait référence ? Est-ce que vous
20 pouvez être plus précis ?
21 M. Landzo (interprétation). - Un incident s'était produit avec
22 mon frère. L'autre avec plusieurs personnes où on était en camarade dans
23 un appartement.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Dans l'appartement, avec
25 quelques personnes autour de vous, quelles étaient les circonstances qui y
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1 régnaient ?
2 M. Landzo (interprétation). - C'était au moment où j'étais
3 membre de la police militaire et j'avais cherché un appartement. Je ne
4 voulais plus vivre avec mes parents. Je voulais avoir un appartement à
5 moi.
6 Une jeune fille qui travaillait à la police militaire me disait
7 qu'elle savait qu'il y avait un appartement vide qui se trouvait dans le
8 bâtiment qu'elle habitait. Evidemment, je me suis occupé de cet
9 appartement pour retaper un peu, changer la serrure de la porte, etc.
10 J'étais de retour évidemment à la police. Est-ce que j'étais en
11 mission, en patrouille, quelque chose de ce genre ? Lorsque j'étais de
12 retour, le gars, celui qui était de garde à l'entrée me disait qu'un
13 garçon me demandait ici à qui appartenait, paraît-il, cet appartement et
14 qui, évidemment, me disait qu'il allait me tuer parce que l'appartement
15 était à lui. Evidemment, laquelle affaire est passée au commandant de la
16 police qui était légèrement éméché. Sans me plaindre vraiment, j'ai dit
17 que l'affaire telle qu'elle était. Alors l'autre qui me répond : "Prend le
18 fusil et va tuer cette espèce de con. Qui s'est qui va maintenant te
19 menacer ici ou nous menacer ici ?" Une fois entré, évidemment dans
20 l'appartement, j'ai vu tous ces gens-là qui étaient à table. Etant donné
21 que tous ces gens-là étaient armés eux aussi, évidemment, en signe
22 d'avertissement j'ai tiré un coup dans le plafond et en ricochet, il y a
23 évidemment une balle qui a touché une personne, mais sans faire trop de
24 choses, trop de dégâts, une égratignure, une lacération sur le visage.
25 Après quoi, tout simplement, j'ai quitté l'appartement parce que tout
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1 simplement j'ai eu peur. Ils étaient armés eux aussi et pour ne pas qu'ils
2 braquent leurs armes sur moi tout simplement, je ne pouvais pas évidemment
3 tirer par la fenêtre, mais vers le plafond. Mais je ne pouvais pas
4 m'attendre à ce qu'il y ait eu des ricochets du genre.
5 M. le Greffier (interprétation). - Je vous rappelle, Monsieur,
6 vous êtes encore sous serment.
7 M. Landzo (interprétation). - Oui.
8 M. le Président (interprétation). - Vous pouvez poursuivre,
9 Maître McMurrey.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Merci, Monsieur le Président,
11 Madame, Messieurs les juges. J'aimerais avec l'aide de l'huissier pouvoir
12 montrer ce document au témoin. J'aimerais également fournir un exemplaire
13 de ce document à l'accusation. Je crois que vous l'avez eu dès le début.
14 J'aimerais également que des copies soit fournies à la Chambre de première
15 instance.
16 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agit du document de la
17 défense D 77/4.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo, veuillez
19 examiner ce document et nous dire si vous le reconnaissez.
20 Mme McHenry (interprétation). - J'aimerais poser une question.
21 L'interprète - Microphone pour Maître McHenry, s’il vous plaît.
22 Mme McHenry (interprétation). - Je pense que l'accusation n'a
23 jamais vu ce document auparavant et j'aimerais demander au conseil de la
24 défense d'où lui vient cette idée que nous aurions ce document entre nos
25 mains.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Vous étiez absente et Me Boler,
2 je crois, a essayé de l'introduire à l'occasion de la présence de
3 Jusufovic ? Le Tribunal n’a pas autorisé l’introduction de ce document car
4 il ne l'avait jamais vu personnellement ; j'essaie de le verser au dossier
5 par le biais de ce témoin-ci.
6 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agit du document déjà
7 enregistré sous la côte 68/D.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous reconnaissez,
9 M. Landzo, ce document ?
10 M. Landzo (interprétation). - Oui.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Comment reconnaissez-vous ce
12 document et de quoi s'agit-il ?
13 M. Landzo (interprétation). - Il s'agit de la prestation de
14 serment en qualité de membre de la police militaire, serment que j'ai
15 prononcé et il s'agit du serment qu'on donne à chaque participant. Mais la
16 signature était apposée sur une autre feuille. Il y avait une liste qui
17 portait des numéros et on inscrivait notre signature dans un registre. Là,
18 il s'agit d'une feuille imprimée de Esad Ramic, le commandant de la TO.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Cette cérémonie dont vous
20 parlez, est-ce qu’il s'agit de la vidéo que nous avons déjà vue concernant
21 la prestation de serment pour la police militaire ?
22 M. Landzo (interprétation). - Oui.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Et avez-vous reçu ce document
24 le jour ou vous avez prêté serment en qualité de membre de la police
25 militaire ?
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1 M. Landzo (interprétation). - Oui.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Etiez-vous présent le jour où
3 les membres de la police militaire sont entrés en fonction à la fin du
4 mois d'aôut 1992 ?
5 M. Landzo (interprétation). - Oui.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Et vous avez reçu ce document
7 ce jour-là ?
8 M. Landzo (interprétation). - Oui.
9 Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais introduire cette
10 pièce comme la pièce 68 / 4 de la défense.
11 M. le Président (interprétation). - Oui.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Très bien. Revenons maintenant
13 aux événements suivants. En 1996, est-ce que vous avez été arrêté ? Est-ce
14 qu'on vous a amené à La Haye comme accusé dans le cadre de cette
15 procédure ?
16 M. Landzo (interprétation). - Je n'ai pas été arrêté. J'ai été
17 convoqué à Sarajevo pour, soi-disant, comme on me l’avait dit, avoir un
18 entretien avec des avocats qu'on m'avait attribués en raison de cela. On
19 m'a dit qu'on allait m'emmener à Sarajevo, moi-même et M. Delic, et qu'on
20 allait nous ramener. Mais lorsque nous sommes arrivés à Sarajevo, nous
21 sommes allés au Tribunal Suprême et là, le juge nous a dit que nous étions
22 en détention et que nous allions être extradés vers La Haye. Nous avons
23 passé environ 45 jours en détention à Sarajevo. Personne à l'époque ne
24 nous a dit que nous étions arrêtés.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Qui vous a emmené à Sarajevo ?
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1 En voiture ?
2 M. Landzo (interprétation). - Une personne qui est venue nous
3 chercher de Sarajevo à Konjic. Je ne sais pas, enfin je sais de quoi il
4 avait l'air, mais je ne connais pas son nom.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous êtes allé à
6 Sarajevo de votre plein gré, à ce moment-là ?
7 M. Landzo (interprétation). - Oui.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Alors que vous vous trouviez à
9 Sarajevo, que vous a dit le juge exactement ?
10 M. Landzo (interprétation). - Lorsque nous sommes arrivés, tout
11 d'abord, nous avons parlé avec l'un des juges. Il s'est présenté comme
12 juge du Tribunal suprême de Bosnie-Herzégovine et à l'occasion de cet
13 entretien, il nous a dits à moi-même et à M. Delic la chose suivante :
14 "Soyez intelligents lorsque vous irez là-bas", donc ici, et il a dit que
15 faute avouée est à moitié pardonnée. Il nous a dits à moi-même et à
16 M. Delic, et ensuite la police est arrivée et on nous a emmenés en prison.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que c'est exactement ce
18 qu'il a dit : "Ceux qui avouent auront une sentence atténuée ?" Est-ce que
19 c'est ce qu'il vous a dit ?
20 M. Landzo (interprétation). - Il a dit que la personne qui avoue
21 aurait une sentence atténuée et que la personne qui ne reconnaît rien, qui
22 n'avoue rien, eh bien on lui pardonnera tout. Donc en d'autres termes, il
23 nous conseillait de ne rien avouer.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Lorsqu'on vous a amené ici,
25 est-ce que c'est le même Conseil qui vous a représenté qu'à Sarajevo ?
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1 M. Landzo (interprétation). - Oui. Moi, je ne l'avais pas
2 choisi. Je ne sais pas qui me l'avait attribué. C'est une personne qui est
3 arrivée, qui s'est présentée en tant que M. Mustafa Brackovic, qu'il était
4 mon avocat. Moi-même, je n'avais jamais demandé à être représenté par
5 cette personne. Il s'est présenté tout simplement, il m'a donné une
6 procuration à signer. Je l'ai fait, j'étais troublé, je ne savais pas ce
7 qui se passait, où j'allais aller. J'avais besoin d'un avocat à l'époque.
8 Quelqu'un l'a envoyé, mais je ne sais pas qui.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Voilà ma prochaine question :
10 est-ce que vous pouvez me décrire quel était votre état mental,
11 psychologique, lorsque vous êtes arrivé à La Haye ici en 1996 ?
12 M. Landzo (interprétation). - Mon état mental n'était pas bon.
13 J'avais des problèmes de sommeil. Je ne sortais pas, même si j'avais la
14 possibilité de le faire, je n'avais pas de volonté de le faire. Je
15 n'arrivais pas à dormir pendant la nuit, j'avais du mal à manger et
16 lorsque j'essayais de m'endormir la nuit, j'avais l'impression que
17 quelqu'un d'autre était dans la pièce. J'entendais des voix, des pas.
18 C'est la raison pour laquelle je gardais la lumière allumée toute la nuit
19 dans la chambre. Et lorsque je me retournais vers le mur, j'avais
20 l'impression d'entendre que quelqu'un marchait dans la pièce et je devais
21 toujours me retourner vers le reste de la pièce pour voir si c'était vrai
22 ou pas.
23 Je n'avais pas la possibilité de me faire des amis à l'époque,
24 donc j'étais entièrement seul. J'étais isolé, comme c'est le cas à
25 l'époque.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez pu voir
2 Voco, à l'époque ?
3 M. Landzo (interprétation). - Après un certain temps, j'ai
4 commencé à voir M. Delic. Lui seulement.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que c'était en 1996 ?
6 M. Landzo (interprétation). - Oui, en 1996 et en 1997, jusqu'à
7 ce qu'on impose des restrictions.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Et est-ce qu'en 1997 des
9 restrictions ont été imposées pour que vous ne puissiez plus voir
10 M. Delic ?
11 M. Landzo (interprétation). - Je continuais à voir M. Delic et
12 les autres après que les restrictions ont été levées.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous
14 dire comment M. Delic vous a influencé vis-à-vis de votre décision avec
15 Me Brackovic?
16 M. Landzo (interprétation). - Lors de l'arrivée de Me McMurrey,
17 j'ai constaté qu'il y avait des problèmes entre Me Brackovic et un autre
18 conseil qui me défendait. Maître Brackovic ne transmettait pas tous les
19 documents qui étaient nécessaires pour que mon co-défenseur ait
20 connaissance de l'affaire.
21 Lorsque nous nous promenions avec M. Delic, nous parlions des
22 problèmes financiers de ma famille et de la sienne et il m'a dit que son
23 avocat de l'époque, M. Karabdic prenait environ 30.000 dollars par mois et
24 que je devais demander de même de M. Brackovic, ce que j'ai fait. Mais
25 Me Brackovic a dit non, il a dit que l'éthique ne lui permettait pas. A ce
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1 moment-là, suite à une conversation avec M. Delic, il m'a conseillé de le
2 renvoyer.
3 "Pourquoi est-ce qu'il devrait dépenser tout l'argent ici dans
4 les casinos, alors que ta famille à toi n'a pas de quoi manger ?" C'est
5 donc ces deux raisons : premièrement, le fait qu'il ne coopérait pas
6 suffisamment bien avec mes co-défenseurs nouvellement arrivés et
7 deuxièmement parce que j'ai estimé qu'il aurait pu aider ma famille et
8 qu'il ne le faisait pas. Eh bien, pour ces deux raisons-là, je l'ai
9 renvoyé.
10 M. le Président (interprétation). - Nous pouvons maintenant
11 prendre notre pause. Nous allons reprendre à 12 heures.
12 L'audience suspendue à 11 heures 30 est reprise à 12 heures.
13 Mme McMurrey (interprétation). - En 1996, est-ce que vous avez
14 essayé de vous suicider pendant que vous étiez à la prison, ici ?
15 M. Landzo (interprétation). - Je ne suis pas arrivé au stade où
16 j'ai pris des comprimés, mais j'ai rassemblé des comprimés. Par la suite,
17 j'ai appris que quatre auraient suffi et non pas vingt comme le chiffre
18 que j'avais. Par la suite, on m'a mis sous surveillance d'un psychiatre et
19 d'un psychologue qui me rendaient visite régulièrement, qui se sont
20 entretenus avec moi, et à ce moment-là, j'ai commencé à recevoir les soins
21 dont j'avais besoin, et d'ailleurs j'aimerais remercier le secrétariat de
22 m'avoir aidé à surmonter cette période de crise. Bien des fois, j'ai eu
23 l'idée de me suicider.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Avec l'aide de l'huissier,
25 j'aimerais vous présenter un autre document, s'il vous plaît.
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1 Mme McHenry (interprétation). - J'aimerais demander si le
2 Conseil de la défense estime que tout cela est pertinent pour établir son
3 état mental en 1992 ?
4 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, il
5 s'agit là des réponses données à l'expert en santé mentale en 1996, qui
6 fournit une base pour établir son état mental en 1992. Nous devons essayer
7 de comprendre ce qui s'est passé en 1996, au moment où il a subi cette
8 évaluation de la part du Dr Lagazzi, du Dr Van Leeuwen, du Pr Roorda. Je
9 pense que tout cela est très pertinent pour sa défense.
10 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agit du document de la
11 défense D 78 /4.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo, reconnaissez-
13 vous ce document ?
14 M. Landzo (interprétation). - Oui, il s'agit d'une lettre que
15 j'ai adressée à l'accusation, à Mme Teresa McHenry.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Vous voulez parler de
17 l'accusation, n'est-ce pas ?
18 M. Landzo (interprétation). - Oui de l'accusation.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que c'était en
20 décembre 1996 ?
21 M. Landzo (interprétation). - Je sais que c'était en 1996, mais
22 je ne sais plus exactement quand c'était. C'était à l'époque où je
23 traversais une crise, je l'appellerai ainsi, en tout cas une période
24 d'instabilité.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez écrit
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1 cette lettre sans que votre Conseil en ait connaissance ?
2 M. Landzo (interprétation). - Oui.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pourriez donner
4 lecture de cette lettre à la Cour ? Qu'avez-vous demandé à Mme McHenry de
5 faire pour vous ?
6 Est-ce que vous souhaitiez être condamné à mort à l'époque ?
7 M. Landzo (interprétation). - Oui.
8 Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais verser cela au
9 dossier pour montrer quel était son état d'esprit en 1996. Mme McHenry
10 dispose déjà de cette lettre depuis longtemps.
11 M. le Président (interprétation). - Il s'agit de la pièce
12 D 79/4.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Il s'agit de la pièce D 78 4.
14 M. le Président (interprétation). - Très bien, D 78/4.
15 Mme McHenry (interprétation). - Pour que les choses soient bien
16 claires et complètes, nous souhaiterions... est-ce que nous souhaitons
17 également une réponse vis-à-vis de cette lettre, compte tenu de la portée
18 limitée, et j'aimerais qu'on fasse état d'une notification au Conseil de
19 la défense.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Oui. L'accusation a répondu
21 immédiatement et a accusé réception de ce document et nous n'essayons pas
22 d'insinuer quoi que ce soit vis-à-vis de l'accusation.
23 M. le Président (interprétation). - Je crois qu'il faut dire,
24 pour que les choses soient bien claires, qu'une réaction est intervenue
25 là-dessus. La défense a reçu cette réaction, et je pense que nous devons
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1 être bien complets et exhaustifs.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Nous reconnaissons qu'une
3 notification, un accusé de réception nous est parvenu vis-à-vis de
4 l'accusation, et nous nous félicitons de cet esprit d'ouverture et de
5 divulgation de la part de l'accusation.
6 J'aimerais maintenant, Monsieur Landzo, passer à votre
7 déclaration au bureau du Procureur. Est-ce que vous pouvez nous expliquer
8 dans quel état mental vous vous trouviez et quelles ont été les conditions
9 de votre déclaration faites au bureau du Procureur ?
10 M. Landzo (interprétation). - C'était une période où je me
11 trouvais mal. C'est à ce moment-là que j'ai déposé. Même si avant
12 l'entretien je l'ai dit à mon avocat qui m'a dit : "Vous pouvez tenir bon,
13 et faire une déclaration à l'accusation, mieux vaut cela que de reporter
14 la chose à demain".
15 Donc j'ai parlé des choses dont je me souvenais à l'époque, et
16 bien sûr, j'ai dit ce que mon avocat m'avait dit de dire.
17 Avant cela, j'ai dit au représentant du Procureur que j'avais
18 des problèmes de sommeil, que je n'avais pas envie de sortir et c'est à ce
19 moment-là que cet entretien a eu lieu, en présence de mon Conseil de
20 l'époque.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que votre déclaration au
22 bureau du Procureur était entièrement honnête ?
23 M. Landzo (interprétation). - Non.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Pourquoi cette déclaration n'a-
25 t-elle pas été honnête ?
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1 M. Landzo (interprétation). - Je peux le dire maintenant,
2 c'était pour deux raisons.
3 Premièrement, j'ai dit un certain nombre de choses sur les
4 conseils de mon Conseil de l'époque, Me Brackovic, et comme on peut le
5 voir dans le compte rendu, à aucune reprise je n'ai mentionné le nom de
6 M. Delic, alors que M. Mucic était mentionné sans arrêt. Il m'a conseillé
7 de rejeter toutes les fautes sur les Croates.
8 Par ailleurs, à l'époque j'étais dans une situation difficile et
9 je ne pouvais pas avoir de souvenirs très clairs. J'avais une
10 représentation dans ma tête et j'estimais qu'il s'agissait de la vérité.
11 A cette époque, j'ai fait une déclaration qui me semblait être
12 la vérité, mais maintenant je peux dire, après avoir entendu tous les
13 moyens de preuves qui ont été exposés, que bien des choses n'étaient pas
14 exactes. Mais je n'avais pas l'intention de leur mentir. Simplement, à
15 l'époque, j'estimais qu'il s'agissait de la vérité et j'ai suivi les
16 instructions de mon défenseur de l'époque, Me Brackovic. Ce n'était donc
17 pas un mensonge intentionnel, mais j'ai dit tout simplement ce qui me
18 semblait être la vérité.
19 M. Moran (interprétation). - Je vous prie de m'excuser
20 Monsieur le Président, nous nous trouvons à un stade ultérieur, estimant
21 que cet accusé souhaite se décharger de son privilège vis-à-vis de
22 Me Brackovic, mais je pense que la Chambre de première instance pourrait
23 informer l'accusé de cela.
24 M. le Président (interprétation). - Je crois que Me Brackovic
25 n'est pas représenté ici. Des accusations ont été formulées à son
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1 encontre. Il a été officiellement son avocat, et je pense donc qu'il doit
2 pouvoir défendre ses intérêts au sujet de cette affaire.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le
4 Président, je vais poser la question d'une manière différente.
5 Maître Moran, à plusieurs reprises, a fait référence à une
6 certaine attitude et après la déposition de plusieurs experts en santé
7 mentale, est-ce que vous pouvez nous dire de quoi, ce qu'il faut entendre
8 par cette attitude malintentionnée ?
9 M. Landzo (interprétation). - Il s'agit de dire des mensonges de
10 manière intentionnelle pour déformer la réalité.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Au moment où vous avez été
12 évalué par d'autres experts de santé mentale en 1996, est-ce que vous
13 pouvez maintenant vous représenter ce qui représentait une attitude
14 malintentionnée de votre part et ce qui ne l'était pas ?
15 M. Landzo (interprétation). - Je ne sais pas ce que j'ai fait
16 exactement, mais je sais qu'à l'époque j'ai parlé d'une consommation
17 d'alcool, d'une consommation de cachets et de comprimés pendant la guerre
18 et avant la guerre, même si ce n'était pas exact.
19 A l'époque, mon avocat fondait sa défense là-dessus. Il essayait
20 de montrer que je ne contrôlais pas mes actes, même si quelque chose
21 s'était passé.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo, est-ce que
23 vous pouvez nous décrire cette simulation, ces propos malintentionnés,
24 sans parler du Conseil qui vous défendait ? Qu'est-ce qui était vrai selon
25 vous et qu'est-ce qui n'était pas vrai, mais sans parler des motifs qui
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1 vous ont poussé à le faire ?
2 M. Landzo (interprétation). - Ce n'est pas vrai que j'ai
3 utilisé... Enfin, avant la guerre, je consommais de l'alcool, mais pas en
4 quantité importante. Je ne prenais pas de comprimés et pendant la guerre,
5 il n'est pas exact de dire que je prenais de tels comprimés ou cachets en
6 même temps que de l'alcool. Cela n'est pas exact.
7 Peut-être que je pourrais revenir sur ma déposition que j'ai
8 faite à l'époque au Procureur, mais il n'est pas vrai que M. Delic n'était
9 pas l'adjoint du directeur. Or, je l'ai dit dans ma déclaration.
10 Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais laisser de côté
11 cette question maintenant. J'aimerais aborder un certain nombre de
12 problèmes. Je sais que vous avez déjà parlé des problèmes vis-à-vis de la
13 venue de témoins à La Haye, mais est-ce que vous avez rencontré d'autres
14 problèmes liés à des tactiques d'intimidation utilisées dans la zone de
15 Konjic et notamment est-ce que votre famille a reçu de l'argent du SDA ?
16 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Président, c'est la
17 même chose que la dernière fois : si elle souhaite aborder des éléments de
18 preuves par ouï-dire, nous souhaitons disposer d'une base pour que la
19 Chambre de première instance puisse estimer la crédibilité de ces propos
20 entendus par ouï-dire.
21 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.).
22 Mme McMurrey (interprétation). - Je laisse cela de côté pour
23 l'instant, je ne poserai pas cette question.
24 Monsieur Landzo de quelle manière votre point de vue, votre
25 perception de la situation, a changé depuis que vous êtes arrivé à
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1 La Haye ?
2 M. Landzo (interprétation). - Entièrement. Je me sens une
3 personne nouvelle. Si j'essayais de me comparer au début de mon séjour ici
4 en 1996, je ne voyais pas d'avenir pour moi. Je ne voyais pas ce que
5 demain allait m'apporter. Maintenant, je vois quelque chose grâce à mes
6 avocats ici. J'ai pu apprendre l'anglais, l'informatique. J'ai maintenant
7 commencé à lire des livres en anglais et j'essaie de m'instruire. J'espère
8 que je pourrais réaliser quelque chose pour moi-même à l'avenir. J'espère
9 que je ne reviendrai pas à l'état dans lequel je me trouvais à ce moment-
10 là.
11 Donc après mes entretiens avec les médecins, les psychiatres,
12 les psychologues qui me rendent visite, tous disent que j'ai changé et moi
13 aussi, je vois que j'ai changé, un certain nombre de choses sont nettement
14 plus claires pour moi qu'auparavant. Je peux expliquer un certain nombre
15 d'événements de manière plus précise qu'auparavant.
16 Mme McMurrey (interprétation). - J'en ai terminé avec mes
17 questions qui ont duré trente minutes et je n'ai pas d'autres questions à
18 poser au témoin.
19 M. le Président (interprétation). - Nous allons... Est-ce qu’il
20 y a des questions de contre-interrogatoire ?
21 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, la
22 défense de M. Delalic n'a pas de questions pour ce témoin.
23 M. Olujic (interprétation). - Monsieur le Président, pour ce qui
24 est de la défense du Conseil défendant la cause de M. Mucic, a des
25 questions pour ce témoin, mais étant donné que ce témoin n'a pas été
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1 annoncé comme quoi il devait témoigner dans cette affaire et comme nous
2 n'avons pas eu le temps comme la règle le prévoit, au moins ne serait-ce
3 que pour parler de jours, pour pouvoir nous préparer, nous demandons à ce
4 qu'on nous rende possible au moins deux jours pour bien nous préparer pour
5 le contre-interrogatoire, car nous avons bien pu voir que durant cet
6 interrogatoire, de façon planifiée, systématiquement, cet interrogatoire
7 initial et principal a été en quelque sorte guidé, et au nom du client que
8 je défends ici. Je souhaite qu'on m'accorde ne serait-ce qu'une journée ou
9 deux pour me préparer.
10 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il y a d'autres
11 commentaires ?
12 M. Moran (interprétation). - Nous sommes dans la même situation
13 que le Conseil de M. Mucic. C'est-à-dire que tout à coup, on nous a
14 présenté ce témoin, c'est-à-dire à 14 h 30 hier après-midi. Il s'agit de
15 personnes dont, jusqu'à ce matin, on n'avait jamais entendu parlé. On
16 voudrait quand même avoir un peu de temps pour préparer notre contre-
17 interrogatoire. Nous avons éventuellement un autre témoin et comme dernier
18 commentaire, je voudrais répéter que l'audience soit suspendue.
19 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il y a contre-
20 interrogatoire amené par l'accusation ?
21 Mme McHenry (interprétation). - Oui, nous allons procéder à un
22 contre-interrogatoire. Nous demandons que le contre-interrogatoire ait
23 lieu après le contre-interrogatoire du Conseil de la défense. Pour cette
24 raison, s'il demande que l'audience soit suspendue, nous demandons de
25 passer après, et que nous passions immédiatement au témoin suivant de
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1 Mme McMurrey.
2 M. Moran (interprétation). - Pour faire une économie de temps,
3 je ne sais que ce qu'on m'a dit. On m'a dit que M. Landzo avait récemment
4 entretenu des discussions avec le bureau du Procureur et si M. Landzo a
5 quelque chose qui pourrait être considéré comme un élément à décharge ou
6 qui renforcerait sa crédibilité, on demande que ces éléments nous soient
7 fournis avant le contre-interrogatoire.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Je peux dire que M. Landzo n'a
9 pas rencontré des représentants du bureau du Procureur et donc je ne pense
10 pas qu'il existe quoi que ce soit qui puisse empiéter sur les droits du
11 contre-interrogatoire.
12 M. le Président (interprétation). - Dans une situation idéale,
13 chaque Conseil devrait s'attendre à ce que l'accusé puisse témoigner en
14 son propre nom. Je suis d'accord qu'un certain préavis est de rigueur
15 conformément au règlement, mais je pense que comme vous avez tous
16 participé aux mêmes transactions, je trouve qu'il y a très peu qui dépasse
17 le cadre de ce qu'il aurait déposé, mais je ne pense pas qu'il soit
18 nécessaire de prolonger ce procès tout simplement parce qu'il doit y avoir
19 des éléments présentés par les accusés. Cela voudrait dire que nous
20 perdrions quelques jours pendant lesquels les Conseils pourraient préparer
21 leurs arguments en se fondant sur la présentation de preuves qui, selon
22 moi, sont connus de tous les accusés. Parce qu'il s'agit ici d'actions qui
23 ont été effectuées toutes en même temps. A moins qu'il y ait quelque chose
24 que le témoin a oublié ou que les coaccusés auraient pu se rappeler.
25 Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de prolonger la suspension
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1 de l'audience à ces fins. Je trouve que ce serait une injustice portée à
2 ce système que de suspendre l'audience pour une raison ayant trait au fait
3 qu'il n'y a pas eu de préavis.
4 Alors même si les témoins qui déposent attendent et ne rentrent
5 pas dans le cadre de son témoignage, est-ce que cela veut dire qu'il faut
6 attendre une semaine ou quinze jours ou trois semaines ?
7 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur le Président, si vous
8 permettez, je propose, je comprends que Mme McMurrey a d'autres témoins et
9 l'accusation ne voulait pas dire que le procès doit être suspendu, mais
10 tout simplement que le contre-interrogatoire soit suspendu pour une courte
11 période et que Mme McMurrey passe à son témoin suivant.
12 Je déclare également que l'accusation avait été informée par le
13 conseil de la défense que M. Landzo n'allait pas déposer et ceci, hier,
14 pendant la matinée.
15 M. le Président (interprétation). - Je comprends qu'il y a
16 toujours un témoin qui n'a pas encore déposé, que la défense doit pouvoir
17 citer. Je m'attends à ce que ce témoin soit cité avant le contre-
18 interrogatoire.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, si vous
20 permettez que je vous aide, le conseil de M. Landzo serait disposé à
21 procéder parce que je comprends que la Chambre nous a permis de remettre
22 la notification de ce témoin en raison de la sécurité d'autres témoins. On
23 pourrait faire témoigner le Dr Gripon après le déjeuner, si la Chambre me
24 permet de l'organiser. Dans ce cas on serait disposé à procéder.
25 M. le Président (interprétation). - Faute de contre-
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1 interrogatoire, on pourrait maintenant passer au témoin suivant et je
2 suppose après son témoignage, cela ne devrait pas prendre trop longtemps,
3 on pourra par la suite entendre le contre-interrogatoire de M. Landzo. Je
4 ne m'attends pas à ce que ce soit demain. Cela ne devrait pas être le cas.
5 M. Moran (interprétation). - Mme McHenry avait mentionné le
6 fait que la défense lui avait dit, hier après-midi, que M. Landzo n’avait
7 pas témoigné et aurait eu un entretien avec l'un de ses avocats concernant
8 un témoignage éventuel, alors moi aussi, j'ai été informé seulement hier
9 après-midi.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Pour le compte-rendu, je
11 voudrais que soit indiquée la raison pour laquelle nous avons dit qu'il
12 n'allait pas témoigner avant d'avoir garanti la sécurité de cinq
13 personnes, on ne pouvait pas divulguer ces informations, mais pour la
14 sécurité de ces cinq personnes, il est important que personne ne sache
15 qu'il allait témoigner avant que l’on soit en mesure de garantir la
16 sécurité des témoins et des victimes, ce n’était pas dans un but de
17 tromper qui que ce soit.
18 Mme Boler (interprétation). - Hier après-midi, Tom m'a demandé
19 s'il pouvait être des miens et j’ai dit oui et il m’a dit :"en outre M.
20 Landzo, qu’est-ce que j’ai voulu dire" et je n’ai pas répondu et chaque
21 fois qu'il m'a posé des questions concernant la stratégie de la défense,
22 il sait que je ne réponds pas. Je n'ai pas répondu, j'ai été chercher un
23 peu de jus d'orange et cinq minutes après il a dit : "est-ce que vous
24 allez faire témoigner Landzo ?" je l’ai regardé et comme je l'ai déjà fait
25 et Tom m'a dit :"lorsque des cochons volent", moi, je ne me suis jamais
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1 exprimé de la sorte, c'est une expression à la "Tom Moran" et j'ai dit oui
2 et voilà l'origine de toute cette histoire. Je voulais expliquer ce qui
3 s'est passé. Une trentaine de secondes après j'ai dit : "je m'excuse, je
4 reprends mon train". Voilà ce qui s'est passé hier matin.
5 M. le Président (interprétation). - Alors je suppose que la
6 confidentialité entre les conseils doit être respectée et que nous ne
7 devons pas nous ingérer dans les discussions et alléguer des conseils.
8 C'est-à-dire les discussions entre conseils relèvent du domaine de la
9 confidentialité et la Chambre ne s'immisce pas. Je pense que Mme McMurrey
10 a dit qu'on pourrait entendre le témoin suivant à 2 heures 30. Donc nous
11 allons reprendre à cette heure-là. Donc la question du contre-
12 interrogatoire est résolue.
13 Une fois que nous aurons terminé le contre-interrogatoire,
14 témoignage de M. Gripon, on reprendra le témoignage de M. Landzo.
15 Apparemment, le conseil ne savait pas et c'est dommage, c'est
16 dommage que les Conseils ne savaient pas qu'il y aurait ce témoignage.
17 Mais en fin de compte, personne ne doit s'en offusquer. Alors l'audience
18 est levée.
19 M. Landzo (interprétation). - Je n’ai plus d’interprétation.
20 Monsieur le Président, si je peux m'adresser au sujet d'un problème.
21 M. le Président (interprétation). - Je n'entends pas
22 l'interprétation, il y a un problème technique. Maintenant je vous
23 entends.
24 Dites ce que vous voulez dire.
25 M. Landzo (interprétation). - Monsieur le Président, hier après
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1 avoir regagné ma cellule, j'ai été averti que j'étais isolé, étant donné
2 que j'ai déposé ici, où prétendument le secrétariat ou le personnel de la
3 prison craint de me voir agresser et léser par M. Delic ou M. Mucic. C’est
4 ainsi que j'ai été averti. Je suis isolé. Je n'ai aucun contact avec
5 personne, avec aucune personne, ce qui est fort difficile pour moi parce
6 qu'une fois cette audience terminée, je veux me reposer un petit peu, ne
7 pas être encore davantage fatigué. Il m'est vraiment désagréable d'être
8 verrouillé pratiquement et dans une pièce tout seul, isolé.
9 M. le Président (interprétation). - Merci des informations que
10 vous venez de nous fournir. Nous trouverons moyens de mieux s'occuper de
11 vous. Merci.
12
13 L'audience suspendue à 12 heures 45, est reprise à 14 heures 35.
14 M. le Président (interprétation). - (Hors micro.) Je vous
15 entends à présent.
16 Mme Residovic (interprétation). - Avant que ma collègue McMurrey
17 commence à interroger le témoin, j’aimerais vous informer que mon collègue
18 Eugène O’Sullivan, qui a des obligations à l’extérieur, ne sera pas
19 présent cet après-midi.
20 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie, Madame,
21 d’en avoir informé la Chambre de première instance.
22 M. Gripon (interprétation). - Je déclare solennellement que je
23 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
24 M. le Président (interprétation). - Veuillez poursuivre.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Avant de poursuivre avec le
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1 Dr Gripon, on vient de me rappeler qu'il y avait deux requêtes en suspens
2 que j'aimerais retirer à ce stade, il s'agissait de la protection de
3 certains témoins ainsi que de la possibilité d'ajouter des témoins à la
4 liste de témoins. J'aimerais retirer ces requêtes à ce stade de la
5 procédure.
6 M. le Président (interprétation). - Nous faisons droit à cette
7 requête.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Je vous remercie.
9 Bonjour, Monsieur Gripon.
10 M. Gripon (interprétation). - Bonjour.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pourriez nous
12 donner votre nom complet ?
13 M. Gripon (interprétation). – Edward B. Gripon.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Quelle est votre profession ?
15 M. Gripon (interprétation). - Je suis psychiatre.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, Madame,
17 Messieur les Juges, si l’huissier pouvait m’aider, j'aimerais distribuer
18 le curriculum vitae du témoin.
19 Monsieur le Docteur Gripon, pendant que l'on est en train de
20 distribuer votre curriculum vitae, est-ce que vous pourriez nous dire si
21 vous êtes spécialisé dans un domaine de la psychiatrie.
22 M. Gripon (interprétation). - Je suis certifié par l'Association
23 des psychiatres en psychiatrie générale et en psychiatrie légale, je suis
24 donc spécialisé dans la psychiatrie légale.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Que faut-il entendre par-là ?
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1 M. Gripon (interprétation). - Il s'agit de l'interface entre la
2 psychiatrie et le système juridique. Il s’agit de la psychiatrie qui est
3 en contact avec le système juridique.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Et combien d'évaluations de
5 psychiatrie légale avez-vous menées, combien en avez-vous fait en un an ?
6 M. Gripon (interprétation). - J'en fais quatre à six par
7 semaine, et plusieurs centaines par an.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Comment êtes-vous devenu
9 impliqué dans cette affaire ?
10 M. Gripon (interprétation). - Aux Etats-Unis, vous m'avez
11 contacté, il y a environ un an et demi de cela. A ce moment-là, vous
12 m'avez donné quelques renseignements sur cette affaire et vous m'avez
13 demandé si j'étais disposé à examiner l'individu que vous représentiez.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que nous nous
15 connaissions avant ce moment-là, avant que je vous appelle ?
16 M. Gripon (interprétation). - Non, pas vraiment. Nous nous
17 étions rencontrés professionnellement. J'avais déposé comme témoin pour
18 les Américains dans un des districts du Texas. Vous étiez conseil de la
19 partie adverse.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous diriez que vos
21 moyens de preuve psychiatrique l'ont emporté sur les miens ?
22 M. Gripon (interprétation). - Oui.
23 Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais revenir à votre
24 curriculum vitae. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que vous avez fait
25 comme études ?
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1 M. Gripon (interprétation). - J'ai fait mes études à
2 l'université de Baylor Waco au Texas, j'ai obtenu mon diplôme en 1964.
3 J'ai fait ensuite des études médicales de 1964 à 1968 à Galvestone. J'ai
4 été stagiaire aux Forces de l'armée de l'air des Etats-Unis, dans
5 l'hôpital des Forces Armées Aériennes des Etats-Unis. J'ai terminé ce
6 stage en 1969. J'ai travaillé en tant que chirurgien de vol. J'ai quitté
7 les Forces de l'armée de l'air et je suis revenu à Galvestone de 1972 à
8 1975. J'ai été interne en psychiatrie. J'ai achevé ces fonctions en 1975
9 et j'ai ouvert un cabinet de psychiatrie en 1975.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez dit que vous étiez
11 certifié, homologué par l'Association. A quelles autres associations
12 appartenez-vous ?
13 M. Gripon (interprétation). - Je fais partie d'un certain nombre
14 d'associations, l’Association américaine des psychiatres, l'Association du
15 Texas des psychiatres, l'Association des psychiatres du domaine juridique.
16 Il s'agit d'associations du domaine médical ou de la psychiatrie. Je
17 pourrais vous en citer une longue liste.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous vous occupez
19 également de formation et d'enseignement ?
20 M. Gripon (interprétation). - Oui, je suis professeur-adjoint à
21 l'université médicale de Galvestone où j'enseigne notamment la
22 psychopharmacologie.
23 Mme McMurrey (interprétation). - Que faut-il entendre par
24 psychopharmacologie ?
25 M. Gripon (interprétation). - Il s'agit des substances utilisées
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1 dans le domaine psychiatrique, notamment des substances psychotropes.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Que savez-vous de M. Esad
3 Landzo ?
4 M. Gripon (interprétation). - Je l'ai rencontré en avril 1997,
5 dans le processus d'évaluation. Je me suis rendu à La Haye. J'ai commencé
6 à l'évaluer à ce moment-là, au centre de détention des Nations Unies à
7 La Haye.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Combien de temps avez-vous
9 passé avec M. Landzo ?
10 M. Gripon (interprétation). - Je l'ai rencontré à plusieurs
11 reprises et à chaque fois, je lui ai rendu visite plusieurs fois, j'ai
12 probablement passé 40 heures ou plus dans des entretiens directs avec
13 M. Landzo, sans parler des documents annexes que j'ai parcouru. J'ai passé
14 énormément de temps avec M. Landzo.
15 Mme McMurrey (interprétation). - En contre-interrogatoire, bien
16 souvent on s'est demandé si vous ne vous fondiez que sur les idées de
17 M. Landzo. Est-ce que vous pourriez expliquer à la Chambre de première
18 instance si vous avez utilisé d'autres sources d'information pour tirer
19 vos conclusions dans l'évaluation de M. Landzo ?
20 M. Gripon (interprétation). - J'ai pris en compte énormément de
21 renseignements. J'ai pris en compte d'autres avis d'experts qui ont vu
22 cette personne, liés au traitement ou au processus d'évaluation.
23 J'ai examiné des renseignements qui m'ont été fournis par le
24 biais de déclarations de témoins ou de déclarations prononcées à un moment
25 ou à un autre. Je me suis rendu en Bosnie-Herzégovine en novembre dernier.
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1 Je me suis entretenu avec des personnes qui l'ont connu quand il était
2 petit. J'ai rencontré des membres de sa famille, ses parents, frères et
3 soeurs, etc. J'ai pris connaissance d'autres renseignements, la
4 déclaration de Bubalo comme on l'a appelée. J'ai une déclaration récente
5 d'un expert de l'accusation Landy Sparr, un certain nombre de
6 renseignements qui couvrent pratiquement six volumes de documentation.
7 C'est une documentation volumineuse. Tout cela, toute l'évaluation
8 psychiatrique est généralement une évaluation face à face. Eh bien,
9 généralement nous nous fondons uniquement sur des renseignements qui
10 proviennent d'autres personnes, d'autres individus, d'autres rapports,
11 d'autres renseignements écrits. Nous prenons tout cela en compte lorsqu'il
12 s'agit de tirer une conclusion définitive, une décision sur l'absence ou
13 la présence d'un trouble mental.
14 Mme McMurrey (interprétation). - A l'occasion de votre visite en
15 Bosnie, est-ce que vous avez parlé à ces enseignants de l'école primaire
16 et de l'école secondaire ?
17 M. Gripon (interprétation). - Oui.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez également
19 visité la caserne de Celebici ?
20 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'était en novembre de
21 l'année dernière.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez parlé
23 également à des amis qui l'avaient connu dans son voisinage ?
24 Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges, j'ai
25 oublié de verser le curriculum vitae au dossier et je demande qu'il soit
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1 accepté pour montrer qu'il est compétent dans ce domaine.
2 M. le Président (interprétation). - Oui c'est tout à fait
3 possible.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Je vous remercie.
5 Mme la Greffière (interprétation). - Il s'agit de la pièce de la
6 défense D79/4.
7 M. le Président (interprétation). - Nous versons cette pièce au
8 dossier.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Je vous remercie.
10 Vous avez rédigé un rapport qui fait état de votre opinion après
11 l'évaluation de M. Landzo, n'est-ce pas ?
12 M. Gripon (interprétation). - Oui.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez fourni un exemplaire
14 de ce rapport à moi-même et à l'accusation, n'est-ce pas ?
15 M. Gripon (interprétation). - Oui.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez
17 reprendre à votre compte toujours ce qui figure dans ce rapport ?
18 M. Gripon (interprétation). - Oui.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez signé ce
20 rapport ?
21 M. Gripon (interprétation). - Oui.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Président, avec
23 l'aide de l'huissier, j'aimerais transmettre un exemplaire du rapport du
24 Dr Gripon, ainsi que d'autres renseignements qu'il a utilisés pour aboutir
25 à son opinion et j'en fournirai un exemplaire à l'accusation dès
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1 maintenant. Mais l'accusation a déjà obtenu une copie du rapport.
2 M. le Greffier (interprétation). - Il s'agit de la pièce de la
3 défense D80/4.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Avant d'entrer dans le rapport
5 à proprement parler et aux conclusions, avec l'aide de l'huissier, une
6 fois de plus, j'aimerais transmettre au Dr Gripon un exemplaire de ce
7 document afin que vous le diffusiez. Merci.
8 Mme la Greffière (interprétation). - Il s'agit de la pièce de la
9 défense D81/4.
10 Mme McMurrey (interprétation). - La pièce D81/4 qu'on vient de
11 vous transmettre. Est-ce qu'il s'agit là d'un complément ?
12 M. le Président (interprétation). - Certaines de ces copies sont
13 de très mauvaise qualité, on ne peut lire tout ce qui y figure.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Je n'ai pas examiné les copies,
15 nous venons de les agrafer. En fait, j'ai remis toutes mes copies, tous
16 mes exemplaires à l'huissier.
17 Mme Boler (interprétation). - J'ai demandé pendant la pause,
18 pendant l'interruption, à la réception de l'hôtel Bel Air de faire ces
19 photocopies.
20 M. le Président (interprétation). - Si vous souhaitez que ces
21 renseignements soient utilisables, il faut qu'ils soient lisibles.
22 Mme Boler (interprétation). - Je vous prie m'excuser. Peut-être
23 que je peux essayer de faire de meilleures copies maintenant ?
24 Mme McMurrey (interprétation). - Peut-être que nous pourrions
25 voir ce qui n'est pas lisible et ainsi nous pourrons remédier à cette
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1 situation ?
2 M. le Président (interprétation). - Veuillez poursuivre, nous
3 éclaircirons ce point ultérieurement.
4 M. Cowles (interprétation). - On vient de nous remettre la pièce
5 D81/4. Il s'agit apparemment d'un complément, d'une annexe au rapport
6 d'origine. Le D81/4 porte la date du 9 juillet 1998. Nous venons de le
7 recevoir à l'instant, or nous ne l'avions jamais vu auparavant.
8 Mme McMurrey (interprétation). - C'est exact. Je l'ai reçu de la
9 part du Dr Gripon pour mon information pour résumer ses constatations et
10 j'ai pensé aujourd'hui, à l'heure du déjeuner, que cela pourrait être
11 utile à la Chambre de première instance.
12 Je souhaitais que le Dr Gripon explique qu'il s'agissait d'un
13 complément à mon intention. Si vous avez une objection, nous pouvons le
14 mettre sur le rétroprojecteur. Le Dr Gripon peut s'exprimer dessus, mais
15 il s'agit essentiellement d'un résumé des troubles de la personnalité qui
16 figurent dans ses conclusions au sujet de M. Landzo. Il pourra parcourir
17 cela oralement, mais je pensais que cela pouvait être utile à la Chambre.
18 En tout cas, cela m'a été utile et nous avons décidé de procéder de la
19 sorte à l'heure du déjeuner aujourd'hui.
20 M. Moran (interprétation). - C'est la première fois que je vois
21 cette annexe D81/4 et j'ai des objections.
22 Je me demande si cela est pertinent dans le cadre de cette
23 affaire. La Chambre de première instance a déjà décidé un certain nombre
24 de choses.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Nous ne nous proposons de les
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1 verser au dossier que parce que M. Gripon les a utilisées dans le cadre de
2 son évaluation de M. Landzo et il s'agit d'éléments sur lesquels il s'est
3 fondé pour évaluer M. Landzo. Il ne s'agit pas d'établir la véracité des
4 points impliqués.
5 Il y a également une poésie et un dessin qui y figurent, je
6 crois.
7 M. Moran (interprétation). - J'ai une autre objection.
8 Monsieur Landzo a dit dans sa déposition au bureau du Procureur
9 que ces documents, cette déclaration qu'il a faite ici, ne sont pas
10 fiables. Tant que la fiabilité n'a pas été prouvée, la décision sur l'ouï-
11 dire dans l'affaire Tadic doit être prise en compte.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Landzo n'a pas parlé
13 de véracité ou non. Il parlait de ses déclarations au Bureau du Procureur.
14 Cela fait déjà partie des moyens de preuve, mais il s'agit d'autres
15 documents utilisés par M. Gripon également. Il s'est fondé sur tous les
16 documents qui lui ont été transmis. Il s'agissait des rapports des autres
17 médecins, des déclarations au Bureau du Procureur et toutes autres
18 déclarations prononcées par M. Landzo qui étaient disponibles, plus les
19 entretiens qu'il a eus avec d'autres personnes de la région de Konjic.
20 Il en va de même dans le cas des témoins experts présentés par
21 Mme Residovic ou par l'accusation : ils n'ont pas fourni de recueil de
22 tous les documents utilisés. Il s'agit tout simplement d'une partie des
23 renseignements utilisés par M. Gripon dans le cadre de son évaluation.
24 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit là des
25 documents sur lesquels il s'est fondé ?
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Je peux lui poser la question.
2 M. le Président (interprétation). - Je crois qu'il faudrait
3 s'occuper de la question.
4 Mme McMurrey (interprétation). - J'allais aborder tous ces
5 documents une fois que nous aurions éclairci tout cela. Monsieur Gripon,
6 est-ce que vous avez examiné les déclarations de M. Landzo en annexe avec
7 votre rapport ainsi que les poésies, les dessins qui figurent en annexe au
8 rapport ? Est-ce que vous avez pris cela en compte dans le cadre de votre
9 évaluation et de vos conclusions ?
10 M. Gripon (interprétation). - Oui.
11 M. le Président (interprétation). - Cela ne vise qu'à montrer
12 qu'il s'est fondé sur ces documents.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Il y a également un autre
14 rapport qui n'y figure pas, c'est le rapport du Dr Landy Sparr, mais je
15 pense que la Chambre de première instance en disposera très très
16 rapidement.
17 M. Cowles (interprétation). - L'accusation a des objections vis-
18 à-vis du D 81/4. Il s'agit de ce nouveau point de vue émanant du
19 Dr Gripon. On ne nous l'a pas fourni auparavant. Nous avons donc des
20 objections vis-à-vis du D 81/4.
21 M. Moran (interprétation). - J'ai une autre objection. On parle
22 du PTSD apparemment, et il me semble, à première lecture, que quel que
23 soit ce sigle PTSD, cela englobe des évènements d'une période importante.
24 Je ne sais pas si cela est pertinent vis-à-vis des mois de mai, juin,
25 juillet et août 1992.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Je pense que Me Moran aura la
2 possibilité de contre-interroger le témoin.
3 M. le Président (interprétation). - Je pense qu'il faut laisser
4 les autres parties élever leurs objections.
5 Mme McMurrey (interprétation). – Oui, Monsieur le Président.
6 M. le Président (interprétation). – Laissez-le nous dire de quoi
7 il s'agit.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Vous avez rédigé un rapport
9 conformément aux documents en annexe et bien d'autres sources
10 d'information, n'est-ce pas ?
11 M. Gripon (interprétation). – Oui.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez ce rapport
13 sous les yeux ?
14 M. Gripon (interprétation). – Oui.
15 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que les autres sources
16 d'information que vous avez utilisées sont énumérées à la page 2 du
17 rapport ?
18 M. Gripon (interprétation). – Oui.
19 Mme McMurrey (interprétation). - En plus de cette liste, est-ce
20 que vous avez d'autres sources d'information que vous venez d'ajouter pour
21 compléter cette liste ?
22 M. Gripon (interprétation). – Oui.
23 Ces renseignements m'ont été fournis en partie après le
24 8 juillet, après la date où cela a été écrit. Les experts… Les rapports
25 des experts de l'accusation ont été faits après cela et ils n'y figurent
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1 pas. Mais ils sont également annexés.
2 Mme McMurrey (interprétation). - Très bien. Je crois que c'est
3 exact. Dans votre rapport initial, quelle était votre conclusion
4 essentiellement, quel était votre point de vue après votre évaluation de
5 l'état mental de M. Landzo, en 1992 ?
6 M. Gripon (interprétation). – Je l'ai dit dans le rapport. Aux
7 Etats-Unis, nous procédons à un diagnostic sur cinq axes et, comme vous le
8 voyez dans le rapport, l'axe n° 1 correspond à un trouble du stress post-
9 traumatique. Pour ce qui est de l'axe 2, nous parlons de retard mental ou
10 de troubles de la personnalité, s'il y a lieu d'en parler. A l'axe 2, j'ai
11 parlé de troubles de la personnalité mixtes avec des caractéristiques
12 schizoïdes et des troubles de la personnalité antisociaux.
13 Pour ce qui est de l'axe n° 3, les catégories ne sont pas
14 pertinentes dans le cadre de ces constatations, mais j'ai diagnostiqué le
15 PTSD sur l'axe n° 1. Un état chronique aurait été présent en 1992, mais
16 les troubles de la personnalité se poursuivent dans le temps, il ne s'agit
17 pas d'une maladie aiguë. J'ai donc procédé à ces deux diagnostics.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Pour les profanes, est-ce que
19 vous pourriez nous expliquer, expliquer à la Chambre de première instance
20 quel était le diagnostic exactement, en termes profanes ?
21 M. Gripon (interprétation). – Je vais essayer de le faire. Le
22 PTSD est un trouble lié à l'anxiété. Le trouble de stress post-
23 traumatique, il y a un certain nombre de façons de le décrire et il y a
24 des différences, ce qui fait que la nomenclature n'est pas très nette dans
25 certains domaines. Le professeur Van Leeuwen en a parler. Il a parlé de
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1 troubles d'adaptation. Cela a trait au cadre temporel. C'est un trouble
2 lié à l'anxiété. Cela signifie qu'un individu répond à un événement
3 particulièrement stressant, ce qui lui fait adopter certaines
4 caractéristiques qui se poursuivent après l'incident. Le PTSD est une
5 réaction, comme cela est dit, à un événement traumatique dont le niveau
6 doit être une certaine ampleur. L'événement doit être grave, stressant, où
7 il y a des menaces physiques sur l'intégrité de la personne, etc. La
8 réaction de la personne doit être d'une certaine ampleur. Il ne s'agit pas
9 d'une expérience mineure, d'une expérience triviale. Mais, une fois de
10 plus, il s'agit là d'un trouble anxieux.
11 L'étiquette particulière utilisée est importante, mais je dirais
12 qu'elle a une importance académique plutôt que pratique.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez rédigé des
14 documents en termes simples pour m'expliquer à moi quels étaient les
15 troubles de M. Landzo et pour expliquer votre évaluation ?
16 M. Gripon (interprétation). – Oui. Ici, en date du
17 9 juillet 1998, vous trouvez une énumération des différentes catégories de
18 diagnostic et cela fait référence aux critères du DSM 4 qui fondent ces
19 diagnostics. Donc cela provient d'une nomenclature particulière que nous
20 utilisons pour catégoriser, normaliser ce dont nous parlons et qui décrit
21 certaines maladies.
22 Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais verser au dossier le
23 rapport du Dr Gripon, qu'il continue d'approuver, mais pour aider la
24 Chambre de première instance, car cela m'a été utile également, j'aimerais
25 verser au dossier ses explications des critères utilisés et de ses
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1 constatations vis-à-vis de M. Landzo.
2 Avant de poursuivre, nous pourrions le verser au dossier et il
3 pourrait en parler petit à petit, car voici ses constations en termes
4 simples sur l'état de M. Landzo en 1992.
5 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il y a des
6 objections quant à ces arguments ?
7 M. Cowles (interprétation). - Nous maintenons notre objection
8 sur D 80/4, donc nous maintenons notre objection. Après une lecture
9 rapide, il ne nous semblait pas y avoir de changement vis-à-vis de
10 l'opinion. Mais tout de même, nous soulevons une objection en raison du
11 fait que l'on vient de nous distribuer un document qu'on n'a jamais vu.
12 M. le Président (interprétation). - Les conclusions tirées par
13 l'expert de ce qu'il a observé ?
14 M. Cowles (interprétation). - Je n'ai pas d'objection quant au
15 versement du rapport initial du Dr Gripon que nous avons reçu. Mais nous
16 n'avons pas d'objection à l'introduction de cette annexe.
17 M. le Président (interprétation). - Donc quelle était
18 l'objection ? Le fait que ce n'est pas lui qui l'a écrit ?
19 M. Cowles (interprétation). - Non, ce n'est pas pour cela.
20 M. le Président (interprétation). - Alors, c'est quoi ?
21 M. Cowles (interprétation). - C'est parce que le Procureur a
22 reçu un autre rapport en provenance d'un autre expert qu'on n'a jamais vu.
23 M. Jan (interprétation). - Il s'agit ici d'un rapport qui est
24 destiné à vous aider.
25 M. le Président (interprétation). - C'est un résumé de tout ce
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1 qu'il a dit, et cela se trouve dans le rapport. Il sera utile pour la
2 Chambre.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Si les juges l'acceptent, cela
4 va nous faire des économies de temps. Cela évitera de nous envoyer ce qui
5 a déjà été présenté et de tout dépouiller de nouveau. Merci beaucoup.
6 Quand vous avez évoqué le PTSD dans votre rapport, vous savez
7 que d'autres utilisent d'autres mots, et l'un a parlé du trouble aigu du
8 traumatisme. Est-ce que c'est un autre mot, une autre expression ?
9 M. Gripon (interprétation). - Cela présente les mêmes
10 caractéristiques parce que cela peut durer entre deux jours et un mois,
11 alors que le PTSD perdure pendant plus longtemps qu'un mois, mais au fond
12 il s'agit de la même condition.
13 La différence relève plutôt de la commodité. Il s'agit de
14 prendre une situation aiguë et d'y attribuer un nom, alors que la
15 condition chronique qui dure plus longtemps dans les mêmes circonstances,
16 avec les mêmes facteurs idéologiques, reçoit une autre interprétation
17 légèrement différente, mais au fond cela revient au même.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Avec l'aide de l'huissier, je
19 voudrais que ce document soit montré au Procureur et au témoin. Il s'agit
20 d'un résumé dont je demanderai l'explication à monsieur le docteur.
21 Alors qu'on distribue ce document, tous les psychologues, tous
22 les psychiatres qui ont comparu devant cette Chambre ont parlé du DSM 4.
23 Est-ce que vous pouvez nous expliquer la différence et la pertinence par
24 rapport à DMS 4 et ICD 10 si vous le pouvez ?
25 M. Gripon (interprétation). - Je peux répondre à la question. Le
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1 DSM 4 représente le quatrième volet du manuel diagnostic. Au fond, il
2 s'agit de la création de la psychiatrie des Etats-Unis utilisée dans
3 d'autres pays, mais au fond, formulée par l'Association des psychiatres
4 américaine et publiée par la presse psychiatrique américaine. Au fond,
5 c'est la nomenclature utilisée communément aux Etats-Unis et dans certains
6 autres pays qui ont adopté cette nomenclature.
7 Quand on étudie les maladies mentales et les troubles mentaux,
8 il existe deux types de nomenclatures qu'on peut utiliser. On peut
9 utiliser DSM 4 ou on peut utiliser ICD 10 qui représente la classification
10 internationale des maladies formulée par l'Organisation mondiale de la
11 santé et cela représente une tentative sur un plan international d'arriver
12 à un consensus quant aux types de conditions affectant des personnes sur
13 le plan physique et mental et quelles seraient les normes auxquelles sont
14 les critères d'appui éventuels.
15 Donc en 1998, on peut utiliser l'une des deux nomenclatures pour
16 présenter un diagnostic. Comme je vous l'ai dit, le DSM 4 est une création
17 américaine.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Vous utilisez le livre dont on
19 a tiré l'ICD 10 ?
20 M. Gripon (interprétation). - Non, il ne s'agit pas de livre
21 ICD. Il y a un livre publié où l'on en parle, mais ici il s'agit d'une
22 partie d'ICD 10, la partie qui a trait aux troubles de la personnalité et
23 l'appareillant avec le DSM 4 (inaudible) qui existait jusqu'en 1987 et de
24 faire une comparaison entre cette date et la date de 1994, parce que cela
25 a évolué un peu avec le temps.
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1 A dire la vérité, il s'agit ici d'une décision qu'on établit par
2 des voix, par des votes. Ce n'est pas quelque chose de permanent qui ne
3 changera jamais. Cela représente la nomenclature actuelle. Il y aura un
4 DSM 5 et un autre ICD à un autre moment.
5 Mme McMurrey (interprétation). - Alors ce tableau que vous avez
6 créé, est-ce que cela représente un récapitulatif de la corrélation entre
7 la norme américaine du DSM 4 par opposition à la norme internationale
8 établie par l'Organisation mondiale de la santé qui s'appelle ICD 10 ?
9 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'est une comparaison entre
10 ICD 10 et le DSM 4, également montrant la comparaison entre 3 R, c'est-à-
11 dire le dernier DSM qui est publié avant l'autre.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez effectué
13 des tests ? Quelle était l'évaluation à laquelle vous avez eu recours pour
14 arriver à votre diagnostic ?
15 M. Gripon (interprétation). - En général, les évaluations
16 psychiatriques sont fondées sur une évaluation face à face, bien qu'il
17 existe d'autres façons de trouver des faits. Il y a des moyens qui sont
18 plutôt standardisés, il y a donc quelques autres informations qu'on peut
19 toujours obtenir. Pour ce qui concerne les troubles de la personnalité, il
20 y a quelques normes acceptées sur la base desquelles on peut établir si,
21 oui ou non, il y a troubles de la personnalité chez un particulier et cela
22 a été fait dans une étude plurinationale, nationale, dans une étude qui
23 date de 1989 ou 1990, où on a utilisé le DSM 3R, pour voir dans quelle
24 mesure on pourrait reproduire, à partir de plusieurs experts. Par exemple,
25 si on compare le Canada à l'Inde ou à un autre pays, pour arriver au but
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1 de la chose, il existe un examen qui s'appelle l'examen du trouble de la
2 personnalité, qui s'est avéré valable au cours du temps. Donc il ne s'agit
3 pas d'un phénomène culturel.
4 Mme McMurrey (interprétation). - Pour ce qui concerne ce test,
5 test du trouble de la personnalité, est-ce qu'on l'utilise pour éliminer
6 tout préjugé culturel qui aurait tendance à avoir une influence sur le
7 diagnostic ?
8 M. Gripon (interprétation). - On a ,en partie, étudié cela. Il y
9 avait une certaine considération prise en compte, que peut-être il ne
10 serait pas valable de faire des comparaisons entre pays, surtout quand il
11 s'agit de différences entre les différentes personnes qui sont
12 responsables de ces tests si elles ne comprenaient pas la culture du pays
13 dont l'examen serait originaire. Cela a été créé par l'OMS pour éviter
14 autant que possible des préjugés ethniques ou culturels. Donc il s'agit
15 d'une tentative de standardisation, de normalisation.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Donc c'est à partir des
17 critères d'ICD 10 ?
18 M. Gripon (interprétation). - Non, cela se fait de deux
19 manières, c'est-à-dire que pour l'examen du trouble de la personnalité, il
20 y a un examen fondé sur l'ICD 10 et l'autre fondé sur le DSM 4, on peut
21 choisir l'un ou l'autre, mais il n'y aura pas une grande différence entre
22 les deux, sauf le libellé et la nomenclature qui est légèrement
23 différente, comme vous voyez, quand vous regardez l'ICD 10, ici sur cette
24 page, et le DSM 4.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Donc d'après les normes
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1 internationales, vous-même, le Dr Lagazzi et le Dr Van Leeuwen, vous venez
2 tous de pays différents et vous utilisez au fond la même nomenclature pour
3 arriver au même diagnostic après l'évaluation que vous avez effectuée de
4 M. Landzo ?
5 M. Gripon (interprétation). - Oui.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Dans le livre rouge que vous
7 avez sous les yeux d'où découlent les informations ICD 10, là on indique
8 le nombre de pays utilisés pour développer cet examen qui n'aurait pas de
9 préjugés culturels. Combien de pays est-ce qu'on a utilisés ?
10 M. Gripon (interprétation). - Onze.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Et les trois personnes qui ont
12 participé à cet examen, est-ce que vous pouvez nous dire qui elles étaient
13 et de quelles universités elles sortaient ?
14 M. Gripon (interprétation). - Cela a été rédigé à la demande de
15 l'Organisation mondiale de la santé, mais M. Lord Grant, il s'appelle
16 Alexandre Jonka, il travaille pour l'Organisation mondiale de la santé,
17 dans la section santé mentale, et il est de l'université de Genève, en
18 Suisse. Il y en a d'autres qui ont participé, dont les noms ne figurent
19 pas sur la liste. Il s'agissait d'un effort de groupe par le biais de la
20 psychiatrie internationale, afin d'essayer de trouver des tests
21 standardisés, pour diagnostiquer les troubles de la personnalité.
22 Mme McMurrey (interprétation). - Pour revenir au test, si une
23 personne ne cadre pas directement dans tous les critères sous DSM 4 et
24 ICD 10, est-ce que cela veut dire qu'il existe toujours un trouble de la
25 personnalité ?
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1 M. Gripon (interprétation). - Il est un peu difficile de
2 simplifier autant que cela. La réponse serait : oui peut-être, c'est-à-
3 dire que ce qui figure dans la liste des troubles de la personnalité
4 représente, si on utilise DSM 4, il y a, à peu près, dix troubles de la
5 personnalité distincts, mais si on trouve des caractéristiques importantes
6 anormales qui représentent les caractéristiques de mauvaise adaptation,
7 mais qui ne répondent pas au seuil exact de troubles de la personnalité,
8 il y a une autre catégorie. Cela veut dire autre catégorie, on utilise un
9 autre terme pour ICD 10. Il s'agit d'une catégorie résiduelle où la
10 personne montre plusieurs caractéristiques de maladaptation, mais qui ne
11 cadre pas directement et cela ne représente qu'une ou deux catégories.
12 Donc je vous dis que c'est assez complexe parce qu'il y a un
13 certain chevauchement au niveau des troubles de la personnalité et
14 certaines personnes peuvent faire preuve de plus d'un seul trouble. Voilà
15 pourquoi nous avons trouvé des termes comme comorbides ou mixtes, c'est-à-
16 dire que nous disons qu'une personne peut faire preuve de plus d'une seule
17 caractéristique anormale en matière de personnalité.
18 Mme McMurrey (interprétation). – Alors, en vous fondant sur
19 votre rapport, vous avez fait le diagnostic de M. Landzo comme souffrant
20 des troubles de la personnalité avant 1992. Est-ce que vous pouvez nous
21 dire exactement quels étaient ces troubles de la personnalité que vous
22 avez repérés ?
23 M. Gripon (interprétation). – En premier lieu, le trouble de la
24 personnalité en cours de son évaluation est effectivement un phénomène de
25 développement. Chez les enfants, chez les adolescents, nous ne trouvons
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1 pas approprié de leur attribuer un trouble de la personnalité, mais on
2 voit les caractéristiques de la personnalité chez les enfants et chez les
3 adolescents au fur et à mesure qu'ils grandissent. Et ces caractéristiques
4 probablement indiquent qu'il y aura un problème une fois qu'ils seront
5 adultes.
6 Pour ce qui concerne les troubles de la personnalité, le
7 diagnostic se fait plus ou moins à l'âge de 18 ans. Il y a des troubles de
8 la personnalité indiqués sur la page que nous avons distribuée, et pour ce
9 qui concerne M. Landzo, il présente un trouble de la personnalité qu'on
10 appelle schizoïde et il a un trouble ce qu'on appelle aux Etats-Unis
11 DSM 4, c'est-à-dire une personnalité antisociale qui relève d'ICD 10. Cela
12 a un autre nom, mais cela revient au même.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Donc selon vous, il souffre
14 d'un trouble de la personnalité qui recouvre plusieurs troubles décrits
15 dans le DSM 4 et l'ICD 10 donc vous l'avez rangé dans la catégorie
16 "autres" ?
17 M. Gripon (interprétation). – On peut dire mixte, on peut
18 indiquer les deux. On peut faire l'un ou l'autre. On peut parler de
19 personnalité schizoïde ou de personnalité antisociale ou parler d'un
20 trouble de la personnalité mixte. Tout cela représente la même chose.
21 Mme McMurrey (interprétation). – Alors, quand vous étiez dans
22 l'armée de l'air, dans le cadre de votre objectif psychiatrique où vous
23 cherchiez à trouver les personne souffrant… Vous cherchiez à trouver
24 d'avance les personnes qui en souffraient, qu'est-ce que vous faisiez ?
25 M. Gripon (interprétation). – Dans les forces armées, dans les
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1 armées professionnelles où il y a les moyens et le temps nécessaire pour
2 évaluer les gens quant à oui ou non s'ils sont aptes au service, un
3 certain triage doit se faire afin de savoir quelles sont les
4 caractéristiques de la personnalité chez telle ou telle personne. Par
5 exemple, dans le monde des civils aux Etats-Unis, par exemple, certaines
6 personnes qui postulent au poste de policier où ils doivent porter des
7 armes à feu, il y a un triage qui se fait afin d'essayer de trouver si,
8 oui ou non, ils ont des troubles de la personnalité. Ces examens se font
9 souvent afin d'essayer d'éviter de les placer dans une certaine position
10 de responsabilité.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Je ferai de mon mieux pour
12 parler un peu moins vite.
13 Si je devais créer une équation pour expliquer votre résumé de
14 la condition de M. Landzo en 1992, est-ce que vous auriez un trouble de la
15 personnalité, plus le PTSD qui chevaucherait sur l'autre ? Est-ce qu'on
16 pourrait dire cela ?
17 M. Gripon (interprétation). – Oui, je crois qu'on pourrait le
18 dire parce que chaque fois qu'il y a un diagnostic d'un axe 1 qu'on
19 utilisait en 1992, il y aurait un trouble qui serait superposé sur un
20 trouble de la personnalité déjà présent, mais par définition, justement,
21 il s'agit d'un problème de développement chronique qui ne disparaîtra pas
22 avec le temps. La personne ne sera pas tout le temps malade mentalement à
23 tout moment. Donc cela pourrait changer au fur et à mesure. Mais le
24 diagnostic axe 2 sera percutant.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Donc quand vous dites axe 2,
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1 vous parlez là de troubles de la personnalité ?
2 M. Gripon (interprétation). – Oui.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Le juge avait déjà posé une
4 question. Elle voulait savoir si une personne qui souffrait de ce trouble
5 de la personnalité tel que nous venons de le décrire, si cette personne
6 recevait… Si on lui donnait une arme à feu, quel serait le résultat ?
7 M. Gripon (interprétation). – Bon, avec toute possibilité, on ne
8 devrait pas donner une arme à feu à une personne de cette sorte, surtout
9 s'il s'agit d'une personne qui démontre des caractéristiques antisociales
10 parce que cette personne ferait preuve d'un certain primitivisme dans la
11 façon de faire face au problème. Par nature, ce sont des personnes qui
12 sont souvent très agressives. Alors si on donne le pouvoir à quelqu'un qui
13 a, sous-jacent, un trouble, le résultat sera assez désagréable.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Quand on vous demande de faire
15 une évaluation d'un individu, il est important de mener des recherches, de
16 trouver d'autres sources ayant trait à des questions psychiatriques
17 précises qui vous intéressent lors de votre examen. Est-ce que vous avez
18 effectué d'autres recherches indépendantes dans ce domaine ?
19 M. Gripon (interprétation). - Oui.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Et quelles ont été les
21 conclusions ?
22 M. Gripon (interprétation). - Pas grand-chose. J'ai étudié tout
23 ce qui a déjà été écrit en la matière, c'est-à-dire sur le trouble et le
24 stress post-traumatique. Cela se voit pendant les guerres, pendant les
25 combats. J'ai trouvé une publication dans "Le Journal de la psychiatrie et
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1 du droit" publié aux Etats-Unis en 1995. Dans cet article, il s'agissait
2 de ce trouble lors des combats, pendant la guerre.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Et ce journal scientifique dont
4 je ne me souviens pas du nom, est-ce que ce journal est fiable ? Est-ce
5 qu’on l'utilise pour fonder des opinions aux Etats-Unis ?
6 M. Gripon (interprétation). - Oui, nous avons deux journaux que
7 nous utilisons dans la psychiatrie légale. D'abord, il y a "Le Journal de
8 la psychiatrie et du droit" et l'autre est le "Bulletin de l’Académie
9 américaine de la psychiatrie et du droit". Et ces deux publications sont
10 les plus importantes que nous utilisons dans le domaine de la médecine
11 légale.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Avec l'assistance de
13 l'huissier, je voudrais distribuer cette publication, cet article qu'a
14 trouvé le docteur, article qui est pertinent pour cette affaire.
15 M. Jan (interprétation). - Il y a une distinction entre ce que
16 l’on fait lors de combats et ce que l’on fait comme garde. Il s'agit là
17 d'un état d'âme différent. Cela ne doit pas être la même chose que d'être
18 assis quelque part comme garde.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Peut-être que le docteur s'est
20 trompé de terme quand il a parlé de combats. Peut-être qu'il voulait dire
21 qu'il parlait d'une guerre d'agression dans sa propre patrie.
22 M. Gripon (interprétation). - C'est ce que je voulais dire. Je
23 ne voulais pas dire qu'il fallait limiter cela à un combat sur une ligne
24 de front.
25 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous avez devant
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1 vous cet article ?
2 M. Gripon (interprétation). - Oui.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous
4 dire de quoi il s'agit dans cet article, qui en est l'auteur et quelle en
5 est la pertinence ?
6 M. Gripon (interprétation). - Cela s'intitule "Le trouble de
7 stress traumatique au sens psychiatrique", publié aux Etats-Unis dans "Le
8 Journal de la psychiatrie et du droit". L'article a été publié par un
9 homme originaire de Croatie qui a mené cette étude en 1991 à 1993. Il
10 s'appelle Miroslav Borenta.
11 Mme McMurrey (interprétation). - Et quand vous avez étudié cet
12 article, est-ce que vous pourriez nous faire un résumé de la pertinence de
13 l’article pour l'affaire de M. Landzo et de ce diagnostic de troubles de
14 stress post-traumatique ?
15 M. Gripon (interprétation). - Il y a plusieurs cas cités dans
16 l'article qui traitait d'à peu près vingt-cinq personnes accusées de
17 toutes sortes d'actes violents difficiles à comprendre. L'évaluation
18 s'était faite dans une installation psychiatrique à Zagreb. Au fond, ce
19 qu'ils ont conclu, c'est qu'il existait une corrélation entre le PTSD et
20 l'augmentation du niveau d'agression. Mais ce qu'il y avait de plus
21 cohérent, c'était la présence de plusieurs troubles de la personnalité
22 chez les individus qui ont commis ces actes et, dans cette étude de vingt-
23 cinq personnes, parmi les vingt-cinq, douze d'après l'auteur démontraient
24 des critères nécessaires pour établir des troubles de la personnalité. A
25 l'époque, cela aurait été le DSM 3R.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Et ce Dr Goreta, est-ce qu’il
2 parle de la défense de la responsabilité diminuée sous la loi en droit
3 yougoslave ? Est-ce que c'est une défense en Yougoslavie ?
4 M. Gripon (interprétation). - D'après cette étude, oui. Il
5 évoque deux aspects qu'il faut considérer. D'abord la capacité diminuée,
6 puis un concept d'une capacité diminuée essentielle. Le deuxième exigeait
7 des critères plus forts que le premier.
8 Mme McMurrey (interprétation). - Pour ce qui concerne cette
9 responsabilité diminuée, en vous fondant sur une évaluation de M. Landzo,
10 est-ce qu'on en a parlé lors d'une de ses évaluations ?
11 M. Gripon (interprétation). – Oui.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez
13 du médecin ? Est-ce que c'était le Dr Cemalovic ?
14 M. Gripon (interprétation). – Oui.
15 Mme McMurrey (interprétation). - Quelle était l'opinion du
16 Dr Cemalovic vis-à-vis de M. Landzo, à cette époque, en 1992 ?
17 M. Gripon (interprétation). – A l'évidence, il a fait une
18 évaluation de deux individus, Esad Landzo et un autre homme. Il a trouvé
19 que l'un des deux avait une capacité mentale diminuée. Il a trouvé chez
20 Esad Landzo qu'il avait une capacité diminuée.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez
22 des circonstances de l'évaluation effectuée par le Dr Cemalovic sur
23 Esad Landzo ? Est-ce qu'il s'agissait d'un examen approfondi ou
24 superficiel ?
25 M. Gripon (interprétation). – Non, je ne sais que ce qu'on m'a
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1 dit. Le rapport était relativement court et je trouve que le processus de
2 l'évaluation même avait été relativement bref également.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Messieurs et Madame les Juges,
4 j'ai oublié de vous présenter le tableau du Dr Gripon qui a fait une
5 comparaison entre l'ICD 10 et le DSM 3. Il a préparé lui-même cela à
6 partir des classements et des recherches qu'il a effectués et je voudrais
7 que ceci soit versé au dossier pour aider les juges à mieux comprendre les
8 différentes nomenclatures possibles pour décrire la condition qu'on
9 attribue après évaluation à M. Landzo. Il s'agit du D82/4.
10 Je demande que soit versé au dossier ce tableau. J'ai oublié de
11 le faire tout à l'heure. Est-ce qu’il est versé au dossier ?
12 M. le Président (interprétation). - Le 82/4 ?
13 Mme McMurrey (interprétation). – Oui, cela a été préparé par le
14 Dr Gripon pour montrer différents noms.
15 M. le Président (interprétation). - Oui, je crois que cela a été
16 versé, je crois que je l'ai déjà vu.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Je pense que vous parlez de ce
18 document, d'un autre document. Est-ce que vous avez entendu parler de
19 celui-là ? Je ne savais pas exactement si ce document avait déjà été versé
20 au dossier. Il est déjà versé au dossier, donc je vous en remercie.
21 Monsieur le docteur Gripon, cette étude effectuée par le
22 Dr Goreta en Croatie, est-ce que vous pouvez nous expliquer la différence
23 qui existe entre cette étude et toute autre étude qui aurait pu être menée
24 au sujet du PTSD lié au Vietnam ?
25 M. Gripon (interprétation). – Cela dépend de la manière dont
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1 vous menez votre étude. Dans le rapport de Goreta, il s'agit d'événements
2 qui ont eu lieu dans un certain pays. D'autres facteurs sont pris en
3 compte dans ce rapport et cela parle des troubles de l'anxiété, y compris
4 le PTSD. Bien entendu, bien des études portant sur le PTSD sont liées au
5 Vietnam, mais ces personnes ont mené une guerre à des milliers de
6 kilomètres de chez elles et bien des études ont pris en compte les
7 capacités d'adaptation ou le fait de se réadapter à une société, mais je
8 pense que des différences de population existent.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Lorsque vous parlez d'une
10 guerre à des milliers de kilomètres de chez eux, cela signifie qu'ils
11 étaient loin de chez eux et qu'ils ne défendaient pas leurs biens, leurs
12 propriétés, leur culture. Est-ce que cela représente une différence ?
13 M. Gripon (interprétation). – Oui, car si vous êtes transféré
14 dans une zone de combat particulière, vous pouvez contracter un PTSD et on
15 a avancé un certain nombre de chiffres, de 30 % notamment. Lorsque vous
16 êtes retiré de cette zone de danger, vous n'avez plus à faire face à cela
17 comme menace directe. Il y a donc des différences dans ce cadre.
18 Mme McMurrey (interprétation). - Le moment où vous êtes exposé
19 au danger dans le cadre de la Croatie ou de la Bosnie-Herzégovine, est-ce
20 que cette situation était relativement différente de celle du Vietnam ou
21 de la Corée du Nord, de la Corée ou d'une autre guerre dont on a beaucoup
22 parlé, sur lesquels on a beaucoup écrit ?
23 M. Gripon (interprétation). – Oui.
24 Mme McMurrey (interprétation). - Après la lecture de cet
25 article, est-ce que vous pouvez estimer qu'il s'applique entièrement à la
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1 situation vécue par M. Landzo en Bosnie en 1992 ?
2 M. Gripon (interprétation). – Oui, il y a certainement
3 énormément de similitudes. Il s'agit d'un article qui porte sur cette
4 condition, sur cette situation. Je pense qu'il y a énormément de choses à
5 apprendre de cet article.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Le Dr Miroslav Goreta, étant
7 donné qu'il a publié un article dans ce journal, est-ce qu’il a été
8 accepté comme une personne faisant autorité dans le domaine de la
9 psychiatrie et du trouble de stress post-traumatique et du traumatisme de
10 la guerre ?
11 M. Gripon (interprétation). - Je dirais que dans cette situation
12 précise, certainement oui, car il a publié un article.
13 Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais verser ce rapport du
14 Dr Goreta comme pièce au dossier, car il fait autorité sur la situation
15 qui prévalait en ex-Yougoslavie à l'époque. Il s'agit d'une étude qui a
16 impliqué vingt-cinq soldats qui ont participé aux combats. Il a établi
17 leurs troubles de la personnalité. Il a parlé de PTSD qui est précisément
18 ce qui nous occupe avec M. Landzo. J'aimerais le verser au dossier.
19 M. le Président (interprétation). - Qu'en est-il de
20 l'authenticité ?
21 Mme McMurrey (interprétation). - Le Dr Gripon a dit que cela
22 avait été publié dans un journal qui est "Le Journal de la psychiatrie",
23 je crois qu'il l'a sur lui d'ailleurs.
24 M. le Président (interprétation). - Qu'en est-il de
25 l'authenticité ?
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Il n'était pas présent, il n'a
2 pas participé à l'enquête, mais il pense que compte tenu de cette enquête,
3 compte tenu de la situation mentionnée, il s'agit d'un élément qui a trait
4 aux mêmes conditions que celles vécues par Esad Landzo. Il s'agit de la
5 période 1992-1993 en ex-Yougoslavie, dans le cadre d'une agression de la
6 part d'une force extérieure et cela est lié aux allégations de
7 responsabilité mentale diminuée que nous alléguons pour M. Landzo à
8 l'époque.
9 M. le Président (interprétation). - Est-ce que M. Gripon
10 l'adopte comme partie des matériaux sur lesquels il se repose ? Dans ce
11 cas, très bien.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que vous reconnaissez ce
13 document comme document sur lequel vous vous êtes fondé ?
14 M. Gripon (interprétation). - Oui.
15 M. Moran (interprétation). - Je ne peux pas l'adopter tant que
16 je n'en ai pas vu un exemplaire. Je n'en ai pas reçu de copie, mais à
17 entendre ce qu'a dit le Dr Gripon, il semblerait qu'il s'agisse d'une
18 situation qui fait qu'il s'agit d'un point de vue dans le cadre du système
19 juridique yougoslave et je suggérerai que...
20 M. le Président (interprétation). - Je pense que cela est
21 légitime. Je pense qu'il est justifié de pouvoir se fonder sur un certain
22 nombre de points de vue. Il s'agit là de son point de vue.
23 M. Moran (interprétation). - Deuxième chose : est-ce que je
24 pourrais en avoir un exemplaire ?
25 M. Cowles (interprétation). - Aux fins du compte rendu,
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1 l'accusation émet la même objection.
2 M. le Président (interprétation). - Vous pensez qu'il n'a pas le
3 droit de s'appuyer sur ce document ?
4 M. Cowles (interprétation). - Bien entendu, un expert peut
5 s'appuyer sur énormément de publications, énormément d'écrits, mais nous
6 émettons une objection vis-à-vis de l'utilisation du point de vue du
7 Dr Goreta. Si le témoin a sa propre opinion, très bien, mais nous nous
8 opposons à ce qu'un autre point de vue soit utilisé pour établir cette
9 responsabilité diminuée et peut-être qu'on aurait pu convoquer et citer le
10 Dr Goreta comme témoin.
11 M. le Président (interprétation). - Très bien, mais je pense
12 qu'ils ont entièrement le droit de le faire.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Pendant la pause, je donnerai
14 au conseil de la défense une copie de cet article pour qu'il puisse
15 l'examiner avant de reprendre l'audience.
16 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)
17 Mme McMurrey (interprétation). - Oui.
18 M. Jan (interprétation). - Il s'agit d'un des documents sur
19 lesquels M. Gripon s'est fondé ?
20 Mme McMurrey (interprétation). - Oui.
21 M. Jan (interprétation). - C'est pour cela que vous souhaitez le
22 verser au dossier ?
23 Mme McMurrey (interprétation). - Oui.
24 M. Jan (interprétation). - Rien de plus ?
25 Mme McMurrey (interprétation). - Non, rien de plus.
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1 Je pense qu'il faut voir si d'autres études ont été menées.
2 M. Jan (interprétation). - Il s'agit donc de vingt-cinq cas.
3 M. le Président (interprétation). - Rien ne vous empêche
4 d'émettre un avis contraire. Qu'il s'agisse de la défense ou de
5 l'accusation, tout le monde a le droit de ne pas être d'accord avec ce
6 point de vue.
7 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.).
8 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Docteur Gripon,
9 est-ce que vous avez examiné ce rapport ? Est-ce que vous vous êtes fondé
10 sur ce rapport pour aboutir à votre évaluation ?
11 M. Gripon (interprétation). - Oui.
12 Mme McMurrey (interprétation). - J'aimerais le verser au dossier
13 pour cette raison, Monsieur le Président. Est-ce qu’il porte une cote ?
14 Mme le Greffier (interprétation). - Il s'agit du document de la
15 défense D 83/4.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Merci.
17 M. Jan (interprétation). - Il ne s'agit pas d'éléments de preuve
18 ayant trait au fond.
19 Mme McMurrey (interprétation). - Non, et je fournirai une copie
20 au conseil de la défense pendant la suspension d'audience.
21 Monsieur le Docteur Gripon, je vous ai demandé d'énoncer une
22 conclusion vis-à-vis de l'état de M. Landzo en 1992. En tant que
23 représentant de la psychiatrie légale, vous avez un certain nombre de
24 critères juridiques et de définitions que vous êtes tenus d'appliquer ?
25 M. Gripon (interprétation). - Oui.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Etant donné que nous avons des
2 normes qui reviennent à la défense de prouver un certain nombre de choses,
3 mais que nous n'avions pas de définition, est-ce que c'est bien ce que je
4 vous ai fait comprendre ?
5 M. Gripon (interprétation). - Oui.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'on vous a donné une
7 définition qui se fondait sur un autre type de droit, et si oui laquelle ?
8 M. Gripon (interprétation). - On m'a fourni en réalité un
9 certain nombre de possibilités quant à cette norme. On m'a fourni
10 plusieurs normes possibles et cela se fondait essentiellement sur des
11 critères britanniques.
12 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit des
13 critères britanniques de la common-law pour la responsabilité mentale
14 diminuée ?
15 M. Gripon (interprétation). - Oui.
16 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce qu'en utilisant ce
17 critère, cette norme, vous en avez tiré une conclusion vis-à-vis de
18 l'application de cette norme par rapport à vos constatations
19 psychiatriques sur M. Landzo ?
20 M. Gripon (interprétation). - Oui.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Quelle était cette conclusion ?
22 M. Gripon (interprétation). - Cette personne souffre d'un
23 trouble de la personnalité évident qui a une conséquence sur son attitude,
24 sa réaction et la manière dont il réagit à des stimuli externes.
25 L'axe 1 parle de troubles de l'anxiété et je pense que cela
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1 aurait peut-être réduit sa capacité de réaction, compte tenu de la norme
2 qui m'a été fournie.
3 Mme McMurrey (interprétation). - En 1992 à Celebici, compte tenu
4 de votre diagnostic du trouble de la personnalité, du PTSD ou du trouble
5 d'anxiété, est-ce que M. Landzo aurait pu agir librement et refuser
6 d'obéir aux ordres de ses supérieurs ?
7 M. Gripon (interprétation). - Le concept de libre volonté est
8 relativement flou et je pense que compte tenu des traits de personnalité,
9 compte tenu de son inadaptation, je pense qu'il n'aurait pas pu le faire.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Je n'ai pas d'autres questions
11 à poser au témoin à ce stade, Monsieur le Président.
12 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il y a contre-
13 interrogatoire pour ce témoin ? Oui ?
14 Mme Residovic (interprétation). - Nous n'avons pas de questions
15 à poser à ce témoin.
16 M. Olujic (interprétation). - Nous n'avons pas de questions à
17 poser au témoin.
18 M. Moran (interprétation). - Nous avons des questions.
19 M. le Président (interprétation). - Allez-y.
20 M. Moran (interprétation). - Bonjour Monsieur. Je vais essayer
21 de le faire sans écouteur, nous en avons déjà parlé, je pense que c'est
22 relativement curieux de parler à quelqu'un qui n'est qu'à quelques mètres
23 de vous, et qui parle la même langue en ayant écouteur, mais nous nous
24 sommes déjà entretenus à plusieurs reprises, n'est-ce pas ?
25 M. Gripon (interprétation). - Oui.
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1 M. Moran (interprétation). - La première fois que nous nous
2 sommes rencontrés, nous avons dîné ensemble il y a environ sept mois de
3 cela avec Mme McMurrey.
4 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'était environ au mois
5 de septembre, en automne dernier.
6 M. Moran (interprétation). - Nous avons dîné la semaine dernière
7 ensemble. Vous êtes entré au restaurant, Salih et moi-même y étions. Nous
8 vous avons invité à nous rejoindre.
9 M. Gripon (interprétation). - Oui, nous avons parlé de votre
10 point de vue, et nous avons également parlé à l'hôtel un certain nombre de
11 fois.
12 M. Moran (interprétation). - Oui.
13 Je crois que je vais essayer d'aborder un certain nombre de
14 points avec vous. Tout d'abord, dans votre rapport, vous parlez du fait
15 que vous vous êtes fondé sur les tests du Dr Verde, je crois.
16 M. Gripon (interprétation). - Oui. Il a effectué deux tests, le
17 TAT, et le Rorshach.
18 M. Moran (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit de tests
19 utilisés par des psychiatres ?
20 M. Gripon (interprétation). - Oui, il s'agit de tests
21 projectifs.
22 M. Moran (interprétation). - Est-ce qu'on peut dire que, à moins
23 qu'une personne ne soit un psychopathe, ces tests projectifs n'ont pas de
24 signification ?
25 M. Gripon (interprétation). - Non, ce n'est pas ce que je vous
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1 ai dit.
2 M. Moran (interprétation). - Alors peut-être que je vous ai mal
3 compris.
4 M. Gripon (interprétation). - Ces tests sont utilisés pour
5 déterminer des psychoses et non pas pour déterminer que quelqu'un est
6 psychopathe. Les psychoses, les schizophrénies ou autres sont plus faciles
7 à déterminer.
8 M. Moran (interprétation). - Monsieur Landzo n'est pas un
9 psychopathe ?
10 M. Gripon (interprétation). - Il n'est pas psychotique.
11 M. Moran (interprétation). - Donc psychotique. Il n'a pas
12 l'impression de voir des animaux sur les murs, il n'entend pas des voix
13 qui lui parlent de Mars.
14 M. Gripon (interprétation). - Il n'est pas psychotique.
15 M. Moran (interprétation). - Parlons maintenant de certaines
16 sources d'informations que vous avez utilisées. Vous êtes venu au Tribunal
17 il y a quelques semaines de cela et vous m'avez entendu parler de la vie
18 d'Esad Landzo, par Esad Landzo, avec un demi-sourire.
19 M. Gripon (interprétation). - Oui.
20 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous avez examiné ce
21 document ?
22 M. Gripon (interprétation). - Oui.
23 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous vous êtes fondé sur
24 ce document ?
25 M. Gripon (interprétation). - Oui. Il s'agit d'une partie de
Page 14400
1 tous les renseignements que j'ai utilisés.
2 M. Moran (interprétation). - Vous avez donc utilisé cela pour
3 aboutir à votre opinion ?
4 M. le Président (interprétation). - Le Conseil de la défense
5 vous suggère qu'il s'agit d'une des informations que vous avez utilisées.
6 M. Gripon (interprétation). - Il s'agit d'une, parmi les
7 informations que j'ai utilisées.
8 M. Moran (interprétation). - Je vais essayer de vous donner un
9 exemple de ce que j'essaie de vous dire.
10 Vous avez fait un diagnostic de personnalité antisociale, de
11 troubles de la personnalité antisociale et, l'un des critères de
12 personnalité antisociale, de troubles de la personnalité antisociale est
13 qu'il y a un trouble de la conduite qui se déclenche avant l'âge de
14 15 ans, n'est-ce pas ?
15 M. Gripon (interprétation). - Oui.
16 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous vous êtes fondé
17 sur l'autobiographie de M. Landzo pour voir ce qui est arrivé avant son
18 quinzième anniversaire ?
19 Mme McMurrey (interprétation). - J'ai des objections, Monsieur
20 le Président, à ce qu'on fasse référence à l'autobiographie d'Esad Landzo.
21 Il s'agit de notes rédigées dans le caractère des rapports confidentiels
22 avec son avocat. Il ne s'agit pas d'une autobiographie. Il s'agit tout
23 simplement de notes à l'intention de l'avocat.
24 M. Moran (interprétation). - Je pense que ces notes font partie
25 des éléments qui ont motivé l'opinion d'un expert et je ne sais pas d'où
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1 elles viennent, cela ne m'intéresse pas et si je veux contre-interroger ce
2 témoin, je dois savoir d'où vient son point de vue.
3 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit des
4 éléments qu'il a utilisés pour aboutir à son point de vue ? Si tel est le
5 cas, le Conseil de la défense a le droit d'en parler.
6 Mme McMurrey (interprétation). - Je mettrai ces notes à la
7 disposition.
8 M. le Président (interprétation). - Mais vous l'avez fait vis-à-
9 vis de l'expert ?
10 Mme McMurrey (interprétation). - Oui, je les ai mises à la
11 disposition de l'expert, mais il ne s'agit pas d'un livre écrit à des fins
12 de publication. Maître Moran a semblé dire que M. Landzo avait rédigé une
13 autobiographie pour qu'elle soit publiée demain à New York.
14 M. Moran (interprétation). - J'aimerais vous transmettre
15 plusieurs pages du DSM 4 et si l'huissier pouvait m'aider, j'aimerais en
16 transmettre des exemplaires à la Chambre de première instance et aux
17 autres Conseils. Il s'agit de la partie supérieure de ces documents, pas
18 de l'ensemble de la documentation mais des dix ou quinze premiers paquets
19 agrafés.
20 Mme la Greffière (interprétation). - Il s'agit du document de la
21 défense 108/3.
22 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous avez une copie de
23 ce document, Monsieur le témoin ?
24 M. Gripon (interprétation). - Oui.
25 M. Moran (interprétation). - J'aimerais vous référer à une page
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1 du DSM 4, la page 990 du DSM 4.
2 M. Gripon (interprétation). - Oui.
3 M. Moran (interprétation). - Au sommet de cette page, lorsqu'on
4 parle de critères de diagnostic et qu'on parle du petit "a", troubles de
5 conduite, on énumère un certain nombre de choses et j'aimerais vous
6 demander ceux que vous avez constatés, ceux qui se sont déclarés avant
7 l'âge de 15 ans.
8 Agression vis-à-vis des hommes ou des animaux. Est-ce que vous
9 avez trouvé des preuves selon lesquelles il a menacé d'autres personnes ?
10 M. Gripon (interprétation). - Non.
11 M. Jan (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit de la page 990 ?
12 M. Moran (interprétation). - De la page 90.
13 Lesquels de ces critères avez-vous observés ?
14 M. Gripon (interprétation). - En tant qu'enfant, il avait des
15 comportements antisociaux, comme il l’a dit ici. Il traînait avec un
16 groupe d'individus plus âgés. Il devait leur procurer un certain nombre de
17 choses, notamment de l'alcool. Ils consommaient de l'alcool. Ils ont
18 essayé de s'opposer à plusieurs personnes, d'obtenir de l'argent et si
19 cette bande ne pouvait l'obtenir, alors elle menaçait physiquement ces
20 individus.
21 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous pourriez nous en
22 dire plus. Vous dites que la bande essayait d'obtenir de l'argent pour
23 acheter de l'alcool et de menaces physiques à l'encontre d'autres
24 personnes. Est-ce que vous pourriez nous donner des exemples précis ?
25 M. Gripon (interprétation). - Il a parlé d'une participation à
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1 un groupe pendant qu'il était plus jeune.
2 M. Moran (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit de quelque
3 chose que nous appellerions dans notre juridiction " vol " ?
4 M. Gripon (interprétation). - Oui.
5 M. Moran (interprétation). - Quoi d'autre ?
6 M. Gripon (interprétation). - Il s'agissait du fait qu'il ne se
7 conformait pas toujours à la norme.
8 M. Moran (interprétation). - Qu'entendez-vous par là ?
9 M. Gripon (interprétation). - Il participait à la consommation
10 d'alcool, ce qui n'était pas adapté pour son âge. Il s'agissait d'autre
11 type de problèmes de comportement. Tout ce qui a trait aux troubles de la
12 conduite.
13 M. Moran (interprétation). - Ces actes de violence étaient-ils
14 associés à l'utilisation d'alcool ?
15 M. Gripon (interprétation). - Parfois.
16 M. Moran (interprétation). - En fait, souvent vous avez
17 constaté que des personnes qui consomment de l'alcool, deviennent
18 violentes ?
19 M. Gripon (interprétation). - Oui, certainement.
20 M. Moran (interprétation). - Bien. Les victimes de ces vols dont
21 nous avons parlé, est-ce que c'étaient des personnes plus âgées, des
22 personnes jeunes ? Est-ce que c'étaient des personnes qui ripostaient ?
23 M. Gripon (interprétation). - Je l'ignore.
24 M. Moran (interprétation). - Bien, vous l'ignorez. Est-ce que
25 vous savez si M. Landzo était la personne responsable de ces menaces avant
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1 l'âge de 15 ans ou s'il ne faisait que traîner avec une bande de loubards
2 qui essayaient d'extorquer de l'argent avant qu'il n'ait atteint l'âge de
3 15 ans ?
4 M. Gripon (interprétation). - S'il en faisait partie, j'en
5 ignore les détails, mais il a un certain nombre de troubles liés à la
6 conduite.
7 M. Moran (interprétation). - Seriez-vous d'accord avec moi pour
8 dire qu'une personne plus jeune, de moins de 17 ans par exemple, suit ce
9 type de conduite, peut-être que l'âge de 18 ans, lorsque cela se répète,
10 ces personnes doivent être tenues responsables de leurs crimes, pardon, de
11 leurs actes.
12 M. Gripon (interprétation). - Je l'ignore ou plutôt
13 généralement.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Il ne dit pas quel critère,
15 quelle norme il applique. Est-ce qu’il applique des normes américaines ?
16 M. Moran (interprétation). - J'ai parlé d'être tenu responsable
17 de leurs actes et j'ai parlé de 17 ans ou de 18 ans.
18 M. le Président (interprétation). - Veuillez poursuivre.
19 M. Moran (interprétation). - En fait, à plus d'une reprise, vous
20 avez déposé devant des tribunaux et vous avez parlé de personnes
21 responsables sur le plan pénal, mais qui avaient moins de 17 ou 18 ans,
22 n'est-ce pas ?
23 M. Gripon (interprétation). - Oui.
24 M. Moran (interprétation). - Cette personne-là était parfois
25 loin d'être aussi intelligente que M. Landzo, n'est-ce pas ?
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1 M. Gripon (interprétation). - Oui, pour certains c'était le cas.
2 M. Moran (interprétation). - En réalité, j'aimerais passer à un
3 autre aspect.
4 Je parcours mes notes.
5 Le PTSD, vous ne trouverez pas le PTSD là-dedans. Si vous
6 souhaitez, je pourrais vous donner des copies d'autres parties du DSM4,
7 mais je n'ai pas pu faire de copie du critère du PTSDC, mais si j'ai bien
8 compris le PTSDC, il s'agit d'une réaction d'évitement.
9 Si je vis une expérience de chocs, si je survis à un accident
10 d'avion ou à une guerre, j'essaie d'éviter de retomber dans ce type de
11 situation. Est-ce que c'est une bonne description de cela ?
12 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'est l'un des sept critères,
13 mais c'est uniquement l'un des sept critères. Il n'est donc pas justifié
14 de décrire le PTSD uniquement de cette manière-là.
15 M. Moran (interprétation). - Donc les personnes qui souffrent de
16 PTSD pourront rechercher les mêmes stimuli ?
17 M. Gripon (interprétation). - Ils vont essayer de les éviter
18 s'ils peuvent le faire, mais il y a très peu de manières absolues de ne
19 pas retourner à cette situation, mais on essaie de l'éviter.
20 M. Moran (interprétation). - En fait, parfois il s'agit d'un
21 trouble lié au stress ?
22 M. Gripon (interprétation). - Oui.
23 M. Moran (interprétation). - Il s'agit d'un trouble de stress
24 réactionnel, n'est-ce pas ?
25 M. Gripon (interprétation). - Il s'agit d'un trouble de
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1 l'anxiété, un des troubles de l'anxiété et il s'agit d'une réaction à un
2 stresseur particulier, un événement stressant particulier. Je pense que
3 vous ne pouvez pas l'appeler de manière générique "stress lié à une
4 situation", car cela s'approcherait d'un stress lié à l'ajustement. Mais
5 cela nous fait entrer dans une terminologie psychiatrique qui peut ne pas
6 avoir sa pertinence, car nous parlons d'anxiété.
7 M. Moran (interprétation). - Très bien. Parfois ces troubles de
8 l'anxiété ne peuvent être si graves, que les personnes ne peuvent assumer
9 un emploi rémunéré en raison de ce trouble tout simplement. En fait, vous
10 avez déposé dans ce sens, n'est-ce pas ?
11 M. Gripon (interprétation). - Oui, cela s'est produit.
12 M. Moran (interprétation). - Et on pourrait s'attendre à ce que
13 quelqu'un souffrant d'un PTSD grave essaie d'éviter ce type de situation
14 stressante.
15 M. Gripon (interprétation). - Selon les circonstances, je dirais
16 oui de manière générale.
17 M. Moran (interprétation). - Très bien. Les personnes qui
18 souffrent du PTSD ou du syndrome de stress post-traumatique, cela
19 intervient généralement après le stress. Il ne s'agit pas de quelque chose
20 qui intervient pendant le stress ?
21 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'est bien ce que cela
22 signifie. Trouble de stress post-traumatique.
23 M. Jan (interprétation). - Oui, cela intervient après.
24 M. le Président (interprétation). - Oui, c'est bien ce que cela
25 veut dire.
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1 M. Moran (interprétation). - Vous avez parler à Mme McMurrey de
2 l'axe n° 1, de l'axe n° 2, de ces troubles. Je n'essaierai pas d'entrer
3 dans un débat là-dessus, mais généralement, lorsque vous avez à faire à
4 quelque chose comme le PTSD et dans le cas de M. Landzo, lorsque vous avez
5 un trouble de la personnalité antisociale, il s'agit là de deux éléments
6 distincts, n'est-ce pas ?
7 M. Gripon (interprétation). - Oui, tout diagnostic de l'axe 2
8 est différent d'un trouble mental important. L'axe 2 concerne uniquement
9 le retard mental ou les troubles de la personnalité.
10 M. Moran (interprétation). - Je sais que nous allons essayer de
11 simplifier à outrance, mais il y a donc deux éléments différents. Est-ce
12 que l'on peut le dire ?
13 M. Gripon (interprétation). - Oui. Il s'agit de deux choses
14 distinctes.
15 M. Moran (interprétation). - Vous avez parler d'un diagnostic de
16 l'axe n° 2 qui, dans le cas de M. Landzo, serait un trouble de la
17 personnalité antisociale qui serait persistant ?
18 M. Gripon (interprétation). - Oui.
19 M. Moran (interprétation). - Et ce trouble existe depuis l'âge
20 de quinze ans chez lui au moins.
21 M. Gripon (interprétation). - Eh bien, on ne peut poser un
22 diagnostic de manière appropriée avant que quelqu'un n'atteigne l'âge de
23 dix-huit ans, mais les affections et les états seront pris en compte une
24 fois que la personne est devenue adulte et cela sera influencé par
25 l'existence ou non de certains problèmes. Il faut prendre en compte les
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1 éléments préalables en termes de développement.
2 M. Moran (interprétation). - En réalité, le trouble de la
3 personnalité antisociale, nous en avons décrit de manières différentes
4 dans le passé. Par exemple le fait d'être sociopathe.
5 M. Gripon (interprétation). - Oui. Aux Etats-Unis, on l'a
6 désigné de plusieurs manières et au niveau international également.
7 M. Moran (interprétation). - Et quelles sont les
8 caractéristiques d'un trouble de la personnalité antisociale ?
9 M. Gripon (interprétation). - Un certain nombre de critères sont
10 énumérés, je peux vous en donner lecture si vous le souhaitez.
11 M. Moran (interprétation). - Je pense que les Juges peuvent les
12 lire, ils les ont sous les yeux. Est-ce que vous pourriez nous le dire en
13 anglais ?
14 M. Gripon (interprétation). - Je peux vous le dire.
15 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous pourriez nous dire
16 lesquels on retrouve chez M. Esad Landzo ?
17 M. Gripon (interprétation). - Oui.
18 M. Moran (interprétation). - Qu'en est-il du fait de ne pas
19 correspondre aux normes sociales ? Il s'agit de la page 649 du document.
20 Est-ce que vous avez assisté à la procédure ce matin ou hier ?
21 M. Gripon (interprétation). - Oui.
22 M. Moran (interprétation). - Donc vous avez entendu une partie
23 de la déposition de M. Landzo ? Très bien.
24 M. Gripon (interprétation). - Oui.
25 M. Moran (interprétation). - Cela ne pose aucun problème car le
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1 Règlement de procédure et de preuve prévoit que les experts peuvent y
2 assister.
3 M. le Président (interprétation). - Je vous propose de faire une
4 pause et de reprendre à 16 heures 30.
5 M. Moran (interprétation). - Merci.
6 L'audience est suspendue à 16 heures, est reprise à
7 16 heures 30.
8 M. le Président (interprétation). - Monsieur Moran, vous pouvez
9 continuer.
10 M. Moran (interprétation). - Cela sera utile pour la défense que
11 je prépare, c'est parce qu'il s'agit de la véracité de certains témoins
12 qui ont témoigné et qui sont en cours de témoignage. Pas celui-ci
13 évidemment, mais d'autres qui sont en cours de témoigner.
14 Docteur, je n'essaie pas de mettre en question votre crédibilité
15 évidemment. Quand on parle du trouble de la personnalité antisociale,
16 parlons-en un tout-petit peu. L'un des critères, peut-être pas des
17 critères mais l'une des caractéristiques les plus importantes de ce
18 trouble, c'est la tromperie et la dissimulation, et les personnes qui en
19 souffrent, qui souffrent de ce trouble, au fond ils manquent de
20 conscience ?
21 M. Gripon (interprétation). - Ca c'est une des définitions qui
22 a été donnée à cette maladie, l'absence d'une conscience sociale.
23 M. Moran (interprétation). - Et ils font tout ce qu'il faut pour
24 avoir ce qu'il veulent ?
25 M. Gripon (interprétation). - Parfois c'est le cas.
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1 M. Moran (interprétation). - Donc l'exemple extrême, quelqu'un
2 qui veut de l'argent et qui abat un employé de magasin.
3 M. Gripon (interprétation). - Cela pourrait être un exemple.
4 M. Moran (interprétation). - Et il vole, avoir quelque chose,
5 pour l'obtenir, donc il ment.
6 M. Gripon (interprétation). - Oui.
7 M. Moran (interprétation). - Alors ce sont de bons menteurs ?
8 M. Gripon (interprétation). - Certains, et en tant que groupe,
9 dépassent la moyenne.
10 M. Moran (interprétation). - Parce qu'ils manquent de
11 conscience. Je me trompe peut-être mais des études ont été faites qui
12 montrent que des personnes qui souffrent autant de ce trouble et qui ont
13 fait ce texte polygraphe, cela montre le mensonge parce qu'ils mentent.
14 M. Gripon (interprétation). - Cela a été avancé comme argument
15 et en partie cela s'explique parce qu'une personne qui fait preuve de
16 caractéristique antisociale, qui raconte des choses qui ne sont pas tout à
17 fait vraies, croit ce qu'elle dit et ne démontre aucune réactivité vis-à-
18 vis de la tromperie. Et il peut être manipulateur.
19 M. Moran (interprétation). - Et il manipule les médecins, les
20 avocats, les comptables, les jurys ?
21 M. Gripon (interprétation). - Il essaie de le faire.
22 M. Moran (interprétation). - Et parfois il y réussit ?
23 M. Gripon (interprétation). - J'en suis convaincu.
24 M. Moran (interprétation). - Est-ce qu'il existe un traitement
25 pour ce trouble, le trouble de la personnalité antisociale ?
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1 M. Gripon (interprétation). - La réponse est difficile. Il y a
2 les traitements mais il n'y a pas de certitude. C'est ce qu'on appelle une
3 personnalité du groupe B, c'est-à-dire des gens qui font preuve de
4 différents résultats. Il y a trois groupes A., B et C, C étant considéré
5 comme traitable, A. pas du tout et B fait preuve de succès parfois non.
6 Certains pensent qu'on peut avoir une influence sur ce trouble et d'autres
7 sont beaucoup plus pessimistes en la matière, mais il est difficile de
8 traiter ce trouble.
9 M. Moran (interprétation). - Alors les personnes qui souffrent
10 de ce trouble de la personnalité antisociale, ces personnes, en général,
11 ne font pas preuve de remords, n'est-ce pas ?
12 M. Gripon (interprétation). - C'est l'une des caractéristiques
13 les plus importantes parmi d'autres.
14 M. Moran (interprétation). - Quelqu'un qui souffre de ce trouble
15 de la personnalité antisociale que vous avez diagnostiqué pour M. Landzo,
16 ce type de comportement n'est pas épisodique, n'est-ce pas, c'est
17 constant ?
18 M. Gripon (interprétation). - Aucun comportement n'est
19 constamment le même. Mais la condition, c'est-à-dire la personnalité
20 antisociale et l'influence de ce comportement est toujours là. On ne peut
21 pas toujours prévoir le résultat, mais si une personne présente des
22 caractéristiques antisociales, la personne va réagir de cette manière le
23 plus souvent. C'est-à-dire qu'il y a très peu de choses qu'on peut dire
24 avec une certitude absolue, en disant que chaque fois qu'il y a réaction
25 c'est une réaction vis-à-vis de ces caractéristiques. Mais cela aura une
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1 influence sur la personnalité.
2 M. Moran (interprétation). - D'accord. Alors quelqu'un qui
3 souffre de ce trouble de la personnalité antisociale, quelqu'un qui en
4 souffre, mettons, qu'il veuille quelque chose, n'importe quoi, une
5 voiture, être libéré de prison, n'importe quoi, la personne ment, la
6 personne manipule pour avoir ce qu'elle veut parce qu'elle pense que c'est
7 la façon de l'avoir, mais si ça ne réussit pas, est-ce que on pourrait
8 s'attendre à ce que d'une perspective psychiatrique, il serait probable
9 que la personne se livrerait à un autre comportement manipulateur pour
10 avoir ce qu'il veut, c'est-à-dire avoir la voiture neuve ou pour sortir de
11 prison ?
12 M. Gripon (interprétation). - Evidemment. Tant que le
13 comportement de la personne est ciblé, quelle que soit la cible, le
14 comportement sera influencé par ce trouble et probablement de façon assez
15 narcissique.
16 M. Moran (interprétation). - Et donc le comportement
17 convaincrait les autres, n'est-ce pas ?
18 M. Gripon (interprétation). - Certaines personnes sont plus
19 capables que d'autres.
20 M. Moran (interprétation). - Alors, n'est-ce pas que les
21 personnes plus intelligentes que les personnes moins intelligentes
22 réussissent plus, n'est-ce pas ?
23 M. Gripon (interprétation). - L'intelligence peut servir pour
24 quelque chose.
25 M. Moran (interprétation). - Alors passons maintenant à ce
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1 Monsieur qui est assis derrière moi, cet homme que vous avez ausculté. Ah
2 non, parlons d'autres choses avant. Pendant la pause est-ce que vous avez
3 parlé de votre témoignage avec quelqu'un ?
4 M. Gripon (interprétation). - Non.
5 M. Moran (interprétation). - D'accord. Parlons de M. Landzo.
6 Vous dites qu'il souffre du syndrome de la personnalité, pardon, du stress
7 de la personnalité et vous vous fondez sur cette étude. Est-ce que vous
8 savez si cette étude a remarqué une corrélation entre les gens qui
9 souffrent du trouble de stress post-traumatique et ceux qui commettent des
10 actes violents, ou est-ce que vous avez trouvé tout seul qu'il y a des
11 gens qui commettent des actes violents qui souffrent du trouble du stress
12 post-traumatique, c'est-à-dire un effet de cause à effet, c'est-à-dire que
13 le trouble et le stress post-traumatique est égal à la violence.
14 M. Gripon (interprétation). - Non, il n'y a pas d'égalité
15 absolue. Il y a une corrélation entre le trouble de stress traumatique et
16 l'augmentation de la fréquence de certains actes de violence. Il faudrait
17 lire l'étude. Ils n'ont pas dit qu'il y a toujours cause à effet.
18 M. Gripon (interprétation). - C’est un des facteurs, mais ce
19 n'est pas la seule cause.
20 M. Moran (interprétation). - Esad Landzo n'a pas évité le
21 stimulus qui, selon lui, est la trouble de son trouble.
22 M. Gripon (interprétation). - Cela dépend du stimulus que l’on
23 étudie. Si on parle d'une expérience croate alléguée dans les camps
24 d'entraînement, il y est resté jusqu'au moment où il a pu partir, mais si
25 on ne parle que de certains aspects de ce conflit, l’arrivée dans ce
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1 territoire avait renforcé des aspects de l'anxiété et du trouble de
2 l'anxiété ; il n'a pas tout à fait évité cela, je ne sais pas dans quelle
3 mesure il aurait pu éviter cela parce qu'il y avait d'autres facteurs qui
4 entraient en compte. Mais non, il n'a pas fui du territoire.
5 M. Moran (interprétation). - Vous aviez parlé du trouble de
6 l'anxiété par rapport au conflit en Croatie. Parlons-en un tout-petit peu.
7 A Konjic, pardon. C'est-à-dire que tout le monde dans le combat a peur,
8 n'est-ce pas ? On vous a déjà dit que vous n'avez pas été sur la ligne de
9 front. Vous êtes d'accord ?
10 M. Gripon (interprétation). - Il est vrai que je n'ai jamais été
11 sur la ligne de front, mais je comprends ce que cela veut dire.
12 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous êtes d’accord que
13 si je dis que quelqu’un fait l’objet de tirs, que cette personne n’a pas
14 peur, alors il y a un problème chez cet individu ?
15 M. Gripon (interprétation). - Les gens sont très variables. Je
16 suppose que la plupart des gens au combat éprouvent une certaine peur vis-
17 à-vis de leur sécurité personnelle. Certaines personnes semblent jouir de
18 cela, alors que d'autres n'y pensent pas tout le temps. Je ne sais pas si
19 on peut classer tout le monde dans une même catégorie.
20 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous dites que la peur
21 est un don de Dieu pour nous protéger ?
22 M. Gripon (interprétation). - Je ne sais pas l'origine de la
23 peur. Mais il existe la fuite, la fuite vis-à-vis du combat et les gens
24 ont un peu tendance à fuir et puis à revenir ou partir définitivement.
25 M. Moran (interprétation). - Quand vous parlez de ce phénomène
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1 de la peur, quand cela devient un stress, un trouble de stress post-
2 traumatique, il s'agit là d'une peur déraisonnable qui dépasse ce qui est
3 normal.
4 M. Gripon (interprétation). - Je ne sais pas si cela devient ce
5 trouble. Etant donné la définition du trouble du stress post-traumatique,
6 il existe un événement stressant important qui a eu lieu et parfois, quel
7 que soit l'événement, on peut finir par souffrir de ce trouble, mais ce
8 n'est pas quelque chose qu'on voit tout le temps, dans 100 % des cas, mais
9 selon l'importance du stress les résultats peuvent produire ou conduire
10 aux troubles de stress post-traumatique. Beaucoup d'études ont été menées,
11 on pourrait passer toute la journée à en parler. C'est dire qu'il y a
12 certaines vulnérabilités de certaines personnes qui les amènent à être
13 plus vulnérables, plus exposées à ce trouble de stress post-traumatique,
14 mais c'est quelque chose de relativement complexe.
15 M. Moran (interprétation). - Parlons de ce camp croate. Un des
16 documents que nous avons reçus tout à l'heure est un rapport rédigé par le
17 Dr Semalovic, je crois. Est-ce que vous avez étudié ce rapport ?
18 M. Gripon (interprétation). - Oui.
19 M. Moran (interprétation). - Est-ce qu'on y parlait de ce camp
20 croate ?
21 M. Gripon (interprétation). - Autant que je m'en souvienne, non.
22 M. Moran (interprétation). - Ce rapport a été rédigé quand ?
23 Cette évaluation date de quand, plus ou moins ?
24 M. Gripon (interprétation). - 1994, je pense. Je crois que
25 c’était 1994.
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1 M. Moran (interprétation). - Et vous connaissez le rapport du
2 Dr Lanzevic qui date du mois de juillet de cette année ?
3 M. Gripon (interprétation). - Oui.
4 M. Moran (interprétation). - Et vous connaissez la partie du
5 rapport où le docteur affirme que, selon lui, il n'y avait pas de PTSD à
6 l'époque où M. Landzo se trouvait dans le camp de Celebici, étant donné la
7 façon dont il a décrit ce camp de la mort croate ?
8 M. Gripon (interprétation). - Je ne m'en souviens pas avec
9 précision. Je n'ai vraiment pas appris son rapport par coeur, je l’ai lu.
10 M. Moran (interprétation). - Voyons. Il s'agit de la page 4 du
11 rapport, où il s'agit de la période de la guerre. Il réduit au minimum, de
12 façon étonnante, l'importance du traumatisme qu'il a vécu dans le camp
13 d'entraînement paramilitaire croate en 1991, où il dit avoir été présent
14 lorsque des victimes non armées ont été tuées. Il trouvait cette situation
15 ou ce type de situation normal. Et par la suite, je pense que le
16 Dr Lagazzi dans son rapport essaie de minimiser le PTSD.
17 M. Moran (interprétation). - Les gens qui souffrent du PTSD,
18 est-ce qu’ils sont capables de contrôler leurs actions ?
19 M. Gripon (interprétation). - A en juger par la condition même,
20 on pourrait s'attendre à ce que cela puisse avoir un impact sur certains
21 aspects du contrôle, mais ce n'est pas une question de psychose et ce
22 trouble ne serait pas la cause unique de cela.
23 M. Moran (interprétation). - Je comprends que si on va aussi
24 loin que possible, quelqu'un qui souffre du PTSD ou d'une forme de trouble
25 du stress, qui serait seul, ne pourrait pas trouver un emploi, n'est-ce
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1 pas ? Ce serait aller jusqu'au bout.
2 M. Gripon (interprétation). - Je ne sais pas ce que vous voulez
3 dire quand vous dites " jusqu'au bout ". Plus les symptômes sont graves,
4 plus on verrait de troubles et cela pourrait avoir une influence négative
5 sur la possibilité de maintenir un emploi.
6 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous savez dans quelle
7 mesure Esad Landzo souffrait ?
8 M. Gripon (interprétation). - Souffrait de quoi ?
9 M. Moran (interprétation). - Souffrait de PTSD.
10 M. Gripon (interprétation). - Quand vous parlez de troubles,
11 qu'est-ce que vous voulez dire ?
12 Evidemment, je n'étais pas là en 1992, mais si on avait fait le
13 diagnostic comme on vient de le faire aujourd'hui, je crois que ce trouble
14 superposé sur les troubles dont il souffrait, un effet négatif sur sa
15 responsabilité. Je ne peux pas quantifier, je ne peux pas vous donner des
16 pourcentages. Personne ne pourrait le faire.
17 M. Moran (interprétation). - Est-ce que cela cadrait avec tout
18 ce que l'on a dit de ce qu'il a vu ?... Quand des gens qui vivent leurs
19 fantasmes ? Est-ce que l'on pourrait voir le rapport entre le PTSD et le
20 trouble du stress antisocial ?
21 M. Gripon (interprétation). - Je n'ai pas compris votre
22 question.
23 M. Moran (interprétation). - A un moment, quand il a parlé avec
24 le Dr Lagazzi...
25 Mme McMurrey (interprétation). - Je soulève une objection vis-à-
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1 vis de ce type de question, parce qu'il y a toute sorte d'autres
2 informations et si M. Moran veut continuer à parler du rapport de
3 M. Gripon, je suis d'accord, mais là on est en train de parler du rapport
4 du Dr Lagazzi.
5 M. Moran (interprétation). - Mais il s'est fondé en partie sur
6 le rapport du Dr Lagazzi et après la conclusion tirée par le Dr Lagazzi
7 était complètement différente de celle qu'il a trouvée lui-même. Je crois
8 qu'il serait utile de savoir s'il y a eu une différence sur le diagnostic
9 et, si oui, pourquoi.
10 Mme McMurrey (interprétation). - Voilà la question qu'il devrait
11 poser.
12 M. le Président (interprétation). - Quand il y a plus d'un seul
13 expert, le conseil n'a pas le droit de comparer, de contraster les
14 différents rapports.
15 M. Moran (interprétation). - Je crois que c'était M. Lagazzi. Si
16 vous permettez, je trouverai la page. Mais il a tout de même parlé des
17 gardes dans le camp qui auraient été capables de vivre leurs fantasmes, si
18 vous voulez, et justement à l'encontre des prisonniers serbes.
19 Quand on parle de vivre ses fantasmes de cette manière, est-ce
20 que l'on pourrait dire que cela cadrerait avec le comportement de
21 quelqu'un... Ah, voilà, je l'ai trouvée, voilà la citation, étant donné
22 une attitude perplexe, mais aussi avec une satisfaction incongrue, il dit
23 que certains gardes ont pu vivre leurs fantasmes et qu'ils trouvaient
24 toujours de nouveaux moyens pour battre les prisonniers.
25 Est-ce que vous vous souvenez de cette partie du rapport de
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1 M. Lagazzi ?
2 M. Gripon (interprétation). - Non, pas précisément.
3 M. Moran (interprétation). - Quand on parle de satisfaire ses
4 fantasmes en torturant les gens, en trouvant des méthodes nouvelles pour
5 battre les prisonniers, est-ce que cela cadre avec quelqu'un qui souffre
6 du PTSD et en même temps du trouble de la personnalité antisociale ?
7 M. Gripon (interprétation). - Il n'y aurait pas d'incohérence à
8 dire cela.
9 M. Moran (interprétation). - Donc il n'aurait pas besoin d'avoir
10 un ordre pour faire cela ?
11 M. Gripon (interprétation). - Non, pas forcément, si cette
12 personne agissait de son propre gré.
13 M. Moran (interprétation). - Oui, il pourrait effectivement agir
14 de son propre gré.
15 M. Gripon (interprétation). - C'est possible.
16 M. Moran (interprétation). - Et si on avait un appartement où on
17 devait emménager et que dans cet appartement il y a quatre jeunes filles,
18 que vous y jetez une grenade, est-ce que cela cadrerait avec quelqu'un qui
19 souffre du PTSD ?
20 M. Gripon (interprétation). - En partie en tout cas et cela
21 traduirait tout de même un trouble antisocial sans doute. C'est possible
22 effectivement si telle est la réaction.
23 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous avez eu le
24 témoignage de M. Landzo de ce matin ?
25 M. Gripon (interprétation). – Oui.
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1 M. Moran (interprétation). - Je ne sais pas s'il en a parlé.
2 Est-ce que vous vous souvenez d'un incident où il se trouvait dans un bar
3 avec des amis. Ils avaient reçu la note.
4 M. Gripon (interprétation). – Oui.
5 M. Moran (interprétation). - Parlez en aux Juges, s'il vous
6 plaît.
7 M. Jan (interprétation). - Ce n'est pas nécessaire.
8 M. Moran (interprétation). – D'accord.
9 Alors le remords où le fait de ne pas avoir de remords. Est-ce
10 qu’il a exprimé un remords ? Chez cette personne, est-ce que vous avez
11 vu ?
12 M. Gripon (interprétation). – D'après mon étude, il a trouvé une
13 façon intellectualisée pour exprimer un certain remords vis-à-vis de ce
14 qu'il a fait. Au départ, c'est-à-dire pendant les 9 ou 12 premiers mois,
15 je n'ai pas vu d'indication qu'il avait du remords.
16 M. Moran (interprétation). - Alors vous dites qu'il a maintenant
17 une certaine capacité à faire des commentaires intellectuels vis-à-vis de
18 sa participation ?
19 M. Gripon (interprétation). – Oui.
20 M. Moran (interprétation). – Alors, est-ce que le remords est
21 intellectuel ou affectif ?
22 M. Gripon (interprétation). – Les deux. Les deux. Il faut avoir
23 un processus de compréhension, donc il y a le volet intellectuel.
24 M. Moran (interprétation). - Est-ce que vous avez vu quelque
25 chose qui montrait du remords ?
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1 M. Gripon (interprétation). – Je dis que je n'ai pas vu de
2 remords jusqu'à une date assez récente où il a appris à intellectualiser.
3 M. Moran (interprétation). - Et parfois, est-ce qu'il semble
4 indifférent où est-ce qu'il cherche à rationaliser le mal qu'il a fait aux
5 autres ?
6 M. Gripon (interprétation). – Oui.
7 M. Moran (interprétation). - Et les gens qu'il a maltraités ?
8 M. Gripon (interprétation). – Oui.
9 M. Moran (interprétation). – N'est-ce pas que l'un des critères
10 de diagnostic, c'est que cela constitue la base du diagnostic de ce
11 trouble ?
12 M. Gripon (interprétation). – Oui. C'était justement… je me suis
13 fondé sur cet élément.
14 M. Moran (interprétation). - J'ai encore quelques questions à
15 vous poser. Mme McMurrey vous a demandé si on lui donnait un pouvoir sûr
16 d'autres personnes. D'après mes notes, vous dites que le résultat sera
17 désagréable. Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous dites "résultat
18 désagréable" ?
19 M. Gripon (interprétation). – Vous savez, le sens commun indique
20 à n'importe qui, qu'étant donné les caractéristiques que vous m'indiquez,
21 c'est-à-dire le manque de remords, certains aspects de comportement
22 agressif, et que si on donnait le pouvoir à cette personne ou si on
23 donnait certaines responsabilités à cette personne, qu'il pourrait
24 utiliser à mauvaise fin, le résultat serait malheureux. Et le résultat
25 serait effectivement ce qu'on voit chez des gens antisociaux.
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1 M. Moran (interprétation). – D'accord. Et cela cadrerait avec
2 votre diagnostic de M. Landzo, c'est-à-dire dire une chose au bureau du
3 Procureur et puis dire quelque chose de tout à fait différent, quelques
4 mois plus tard à un psychiatre. Parce que la première réponse n'a pas
5 produit l'effet voulu, sortir de prison, donc il serait normal et logique
6 qu'il change d'histoire, ou qu'il fasse semblant de souffrir d'un trouble
7 mental afin de sortir de prison. N'est-ce pas que ce serait quelque chose
8 qu'il pourrait faire ?
9 M. Gripon (interprétation). – Oui.
10 Cela pourrait s'expliquer de la sorte. Mais cela n'a aucune
11 incohérence par rapport au trouble de la personnalité, c'est-à-dire la
12 tromperie, afin d'atteindre un certain objectif.
13 M. Moran (interprétation). - Et s'il croyait qu'une façon de
14 sortir de prison plus vite serait de mentir devant les Juges...
15 M. le Président (interprétation). - Vous avez déjà posé cette
16 question.
17 M. Moran (interprétation). - Dernière question et après c'est
18 terminé.
19 Docteur, vous avez fait la connaissance de Walter Keono, le
20 témoin expert que j'ai fait appeler. N'est-ce pas qu'il est possible qu'un
21 professionnel en matière de santé mentale étudie des rapports et des
22 témoignages, des rapports de la police, des aveux et ainsi de suite, afin
23 d'arriver à un diagnostic sans avoir parlé à la personne en cause. N'est-
24 ce pas ?
25 M. Gripon (interprétation). – Oui, cela crée quand même
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1 certaines limitations, mais c'est possible.
2 M. Moran (interprétation). - Et vous avez fait la même chose
3 dans une affaire qui s'appelle : "L'Etat du Texas contre Chares, à
4 Gavelstone", n'est-ce pas ?
5 Je n'ai plus de question à poser.
6 M. le Président (interprétation). – Merci, nous passons au
7 contre-interrogatoire mené par l'accusation.
8 M. Cowles (interprétation). - Je vous remercie Monsieur le
9 Président. Bonjour M. Gripon.
10 M. Gripon (interprétation). – Bonjour.
11 M. Cowles (interprétation). - Je me présente. James Cowles, je
12 représente l'accusation, nous nous sommes rencontrés, il y a quelques
13 semaines de cela, lors de votre dernier séjour à La Haye.
14 M. Gripon (interprétation). – Oui.
15 M. Cowles (interprétation). - Lorsque nous nous sommes
16 rencontrés, pour revenir à votre opinion, si l'accusé M. Landzo devait
17 occuper un pouvoir, une position d'autorité vis-à-vis de quelqu'un,
18 M. Moran, vous a reposé cette question, et à l'origine vous avez dit qu'il
19 s'agissait d'un résultat désagréable et malheureux et vous venez de donner
20 plus de détails maintenant. Est-ce que vous vous souvenez de la réponse
21 que vous m'avez donnée lorsque je vous ai posé la même question ?
22 M. Gripon (interprétation). – J'ai parlé certainement qu'il
23 s'agirait d'un cauchemar ou quelque chose dans ce genre, mais je n'ai pas
24 donné plus de détails.
25 M. Cowles (interprétation). - C'est exactement la manière dont
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1 je l'ai noté.
2 M. Gripon (interprétation). - Je n'ai pas pris de notes moi-
3 même, j'ai donc dû faire appel à ma mémoire. Cela remonte à il y a deux
4 semaines.
5 M. Jan (interprétation). - Ils peuvent être sadiques ?
6 M. Gripon (interprétation). - Oui.
7 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que vous diriez que le
8 témoin connaissait la différence qui existait entre le bien et le mal
9 en 1992 ?
10 M. Gripon (interprétation). - Oui.
11 M. Cowles (interprétation). - Dans votre réponse à
12 l'interrogatoire principal, vous avez dit en réponse à la question de
13 Mme McMurrey sur la libre volonté, la volonté propre, vous avez dit qu'il
14 aurait des limites dans sa capacité à contrôler ses actes. Est-ce exact ?
15 M. Gripon (interprétation). - Oui.
16 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que c'est vrai que cette
17 opinion de votre part ne se fonde pas sur une connaissance des actes
18 criminels prétendument commis par M. Landzo ?
19 M. Gripon (interprétation). - J'ai entendu les accusations. Je
20 ne peux le faire sur ce qu'il aurait fait, mais sur les problèmes
21 émotionnels ou sur les troubles de personnalité qui auraient expliqué son
22 comportement dans ce contexte. Je ne peux vous dire oui ou non. C'est une
23 question juridique quant à l'importance de cela et l'influence sur les
24 crimes.
25 M. Cowles (interprétation). - En tant que psychiatre légiste
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1 dans votre pays, est-ce que vous essayez d'obtenir les faits de l'affaire,
2 des rapports de police ou autres, pour vous aider à vous forger une
3 opinion sur l'état mental de l'accusé ?
4 M. Gripon (interprétation). - Oui souvent on me les fournit
5 parfois non, mais ils sont utiles.
6 M. Cowles (interprétation). - Qu'avez-vous vu dans cette
7 affaire, qu'est-ce que qui vous a donné des renseignements sur la manière
8 dont M. Landzo aurait commis ces crimes ?
9 M. Gripon (interprétation). - Je me suis fondé essentiellement
10 sur ce que vous appelez ici, acte d'accusation.
11 M. Cowles (interprétation). - Oui, acte d'accusation.
12 M. Gripon (interprétation). - J'ai eu les réponses de M. Landzo
13 et il en a parlé dans sa déposition. J'ai parlé à M. Landzo de questions
14 qui sont liées.
15 M. Cowles (interprétation). - Vous n'avez jamais lu de
16 transcription ou autres de témoins qui disent comment M. Landzo a commis
17 ces crimes ?
18 M. Gripon (interprétation). - Non pas précisément.
19 M. Moran (interprétation). - J'ai une objection quant à
20 l'expression "a commis les crimes".
21 M. Cowles (interprétation). - Aurait commis les crimes.
22 M. Gripon (interprétation). - Je n'ai pas lu de dépositions de
23 témoins.
24 M. Cowles (interprétation). - Je vais vous donner une hypothèse.
25 Prenez une situation où l'accusé est en train de frapper, de passer à
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1 tabac un détenu, et imaginez que quelqu'un dit à l'accusé que son
2 commandant s'approche et que l'accusé arrête de frapper le détenu car il
3 ne souhaite pas qu'on s'aperçoive qu'il est en train de battre un détenu.
4 Est-ce que vous pensez que cela montre qu'il peut contrôler ses actes; et
5 qu'il agit de sa propre volonté ?
6 M. Gripon (interprétation). - Dans une situation donnée, dans
7 toute situation, on peut examiner un comportement et on peut essayer
8 d'évaluer, d'estimer le degré dans lequel une personne est en mesure de
9 contrôler ses actes. Si une personne arrête un acte, elle montre qu'à ce
10 moment-là, en tous cas, elle peut suivre une orientation différente,
11 emprunter une voie différente.
12 M. Cowles (interprétation). – Est-il exact de dire que vous avez
13 dit qu'étant donné que M. Landzo avait deux types de troubles de
14 personnalité, cela atténue sa conduite, la conduite qui aurait été la
15 sienne en 1992 ?
16 M. Gripon (interprétation). - Je pense que c'est à la Chambre de
17 première instance de voir si cela atténue quoi que ce soit. Je suis un
18 spécialiste en médecine légale. Je ne suis pas là pour excuser quoi que ce
19 soit. J'essaie de situer les choses en termes psychiatriques.
20 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que vous estimez, est-ce
21 que votre point de vue est théorique quant à la diminution de la
22 responsabilité mentale vis-à-vis de ces actes en 1992 ?
23 M. Gripon (interprétation). - Mon point de vue se fonde sur son
24 état mental et sur la manière dont cela pourrait avoir une incidence sur
25 quiconque, mais la personne qui entend la déposition, s'il s'agit d'un
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1 procès, prendra la décision en fin de cause pour voir s'il s'agit d'un
2 facteur à prendre en compte.
3 M. Cowles (interprétation). - En effet, cela entre en ligne de
4 compte pour décider s'il y a une responsabilité atténuée.
5 M. Gripon (interprétation). – Oui, il s'agit là d'une question
6 d'ordre juridique.
7 M. Cowles (interprétation). - En fait, bien des criminels font
8 preuve d'un trouble de la personnalité antisociale.
9 M. Gripon (interprétation). - Oui. Cela est vrai pour 3 % de la
10 population et 50 % de la population carcérale.
11 M. Cowles (interprétation). - Mais cela n'atténue pas ou
12 n'excuse pas leur attitude pénale criminelle.
13 M. Gripon (interprétation). - Dans notre pays, non. Au Etats-
14 Unis, non. Mais dans certaines juridictions, je crois savoir que c'est le
15 cas mais je n'ai pas à me prononcer là-dessus.
16 M. Cowles (interprétation). - Dans votre avis portant sur
17 l'attitude antisociale de M. Landzo, le DSM4 dit qu'on doit établir un
18 trouble de la conduite avant l'âge de 15 ans. Est-ce exact ?
19 M. Gripon (interprétation). - Oui.
20 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que vous pouvez me dire
21 combien de critères de troubles de la conduite vous avez observés chez
22 M. Landzo ?
23 M. Gripon (interprétation). - Comme je l'ai déjà dit
24 précédemment, il m'a décrit un certain nombre de conduites, d'attitudes
25 qui, en tant qu'adolescent, me ramène au diagnostic du trouble de la
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1 conduite. Le trouble de la conduite est un diagnostic américain qui
2 s'applique essentiellement aux adolescents américains. Dans l'ICD 10, on
3 en parle. Il s'agit du même type de troubles. Aux Etats-Unis, nous
4 recherchons les troubles de la conduite.
5 Nous avons un système qui porte sur la présence ou l'absence de
6 ces critères et M. Landzo, dix ans plus tard, eh bien ce que l'on peut
7 voir à dix ans plus tard, c'est un historique qui appuie des conduites de
8 délinquants. En tout cas, c'est la manière dont nous l'appelons aux Etats-
9 Unis.
10 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que dans le DSM4, vous avez
11 trouvé de tels critères de troubles de la conduite ?
12 M. Gripon (interprétation). - Il a participé à l'intimidation
13 d'autrui.
14 M. Cowles (interprétation). - Qui a-t-il intimidé ?
15 M. Gripon (interprétation). - Il a parlé du fait que l'on
16 essayait d'extorquer de l'argent aux autres pour acheter de l'alcool, que
17 l'on procédait à de l'intimidation, c'est ce qu'il m'a dit, mais je
18 n'étais pas présent.
19 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que c'était avant ou après
20 l'âge de 15 ans ?
21 M. Gripon (interprétation). - Il était jeune. Je ne sais pas
22 quel âge il avait exactement.
23 M. Cowles (interprétation). - Le DSM4 dit que cela doit
24 intervenir avant l'âge de 15 ans ?
25 M. le Président (interprétation). - (Hors micro.).
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1 M. Cowles (interprétation). - Je vous prie de m'excuser, je ne
2 vous entends pas.
3 M. le Président (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit du
4 DSM4 ?
5 M. Cowles (interprétation). - J'utilise le DSM4.
6 M. Gripon (interprétation). - Dans le DSM4, il est dit qu'à des
7 fins légales, ces critères ne sont pas utilisés. A mon avis, il l'a fait.
8 Quant au fait de savoir si c'était 14 ans et 6 mois ou 15 ans et 6 mois,
9 eh bien les Américains se sont prononcés pour cette date limite de 15 ans
10 artificiels.
11 M. Cowles (interprétation). - Vous parlez des Etats-Unis, mais
12 il s'agit là du DSM4 qui est reconnu au plan international ?
13 M. Gripon (interprétation). - Oui, il a été créé aux Etats-Unis
14 et les psychiatres américains sont les seuls à se prononcer sur les
15 critères.
16 M. Cowles (interprétation). - Il a participé à de telles actions
17 d'intimidation, mais vous devez énumérer trois critères ou plus. Est-ce
18 que vous pouvez nous dire quels sont les autres critères de troubles de la
19 conduite pour M. Landzo, selon vous, qui démontrent qu'il souffre d'un
20 trouble de la personnalité antisociale ?
21 M. Gripon (interprétation). - Il s'agit de vol notamment.
22 Mme McMurrey (interprétation). - J'ai une objection, Monsieur le
23 Président. M. Moran en a déjà parlé, en a reparlé à bien des reprises de
24 cet aspect de la conduite antisociale.
25 M. le Président (interprétation). - Maître Cowles peut
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1 poursuivre le contre-interrogatoire.
2 M. Cowles (interprétation). - Monsieur Gripon, pouvez-vous nous
3 donner deux autres critères ?
4 M. Gripon (interprétation). - Il ment souvent, il reste dehors
5 la nuit sans autorisation de ses parents.
6 M. Cowles (interprétation). - Est-ce qu'il vous l'a dit ?
7 M. Gripon (interprétation). - Oui, il me l'a dit certainement.
8 Il m'a dit qu'on contrôlait très peu son comportement chez lui et il a
9 décrit son milieu familial d'une manière qui correspond à cette idée.
10 M. Cowles (interprétation). - Vous dites qu'il a également une
11 personnalité schizoïde, un trouble de cet ordre ?
12 M. Gripon (interprétation). - Oui.
13 M. Cowles (interprétation). - Est-ce qu'on ne peut pas dire
14 qu'un trouble de la personnalité schizoïde relève d'un groupe différent de
15 celui de la personnalité antisociale et de ce trouble conformément au
16 DSM4 ? Et est-ce que vous pouvez expliquer ce qu'il faut entendre par
17 cette idée de groupe ?
18 M. Gripon (interprétation). - Je l'ai expliqué précédemment, je
19 crois. Il existe une distinction artificielle entre le groupe A, le
20 groupe B et le groupe C. Il y a trois groupes A, quatre groupes B,
21 trois groupes C.
22 Le groupe A comporte schizoïde, schizotypal, et paranoïaque.
23 C'est donc un groupe différent, antisocial; relève du groupe B. Le
24 groupe A est le plus difficilement curable de ces trois groupes. Il est
25 difficile de modifier ces comportements par un traitement.
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1 M. Cowles (interprétation). - Vous dites qu'une personne peut
2 avoir un trouble de la personnalité dans un groupe et en même temps le
3 diagnostic peut affirmer qu'il y a un trouble de la personnalité qui
4 relève d'un autre groupe ?
5 M. Gripon (interprétation). - Oui.
6 M. Cowles (interprétation). - Ils ne s'excluent pas
7 mutuellement ?
8 M. Gripon (interprétation). - Non.
9 M. Cowles (interprétation). - Mais certains traits
10 caractéristiques peuvent être communs à différents troubles, n'est-ce
11 pas ?
12 M. Gripon (interprétation). - Oui, il existe des
13 caractéristiques communes. C'est la raison pour laquelle, lorsque vous
14 parlez de troubles de la personnalité, vous énumérez ceux pour lesquels la
15 personne remplit les critères et d'autres traits de la personnalité qui
16 entraînent des problèmes, des difficultés.
17 Mais, bien entendu, vous pouvez avoir plus d'un diagnostic pour
18 un trouble de la personnalité. Ils ne s'excluent pas mutuellement.
19 M. Cowles (interprétation). - A l'origine, votre diagnostic du
20 premier axe dit qu'il souffrait de PTSD en 1992 ?
21 M. Gripon (interprétation). - Oui.
22 M. Cowles (interprétation). - Seriez-vous d'accord pour dire que
23 s'il n'y a pas d'évitements, il n'y a pas de PTSD ? Seriez-vous d'accord
24 pour dire cela ?
25 M. Gripon (interprétation). - Je crois.
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1 M. Cowles (interprétation). - L'évitement est donc un critère
2 important du PTSD ?
3 M. Gripon (interprétation). - C'est un critère, mais si vous
4 voulez couper les cheveux en quatre, je vais peut-être... Si vous voulez
5 les énumérer un par un, il y en a sept ou huit. Il y a également un
6 critère politéthique qui veut dire que vous ne devez pas forcément remplir
7 tous les critères, mais un certain nombre, et que l'absence des autres
8 critères ne nie pas la validité du diagnostic. Je pense que l'évitement
9 n'est pas nécessaire. C'est un des critères que vous pouvez remplir et du
10 moment que vous atteignez un certain seuil, vous remplissez les
11 conditions.
12 M. Cowles (interprétation). - Vous dites donc qu'une personne
13 peut, une personne qui souffrirait de PTSD pourrait se remettre dans la
14 même situation, dans la même expérience et on pourrait tout de même dire
15 que cette personne souffre de PTSD ?
16 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'est possible.
17 M. Cowles (interprétation). - Et quel est selon vous le
18 stresseur qui a été vécu par M. Landzo qui entraîne le PTSD en 1992 ?
19 M. Gripon (interprétation). - Il m'a décrit cette expérience
20 croate qui s'est produite ailleurs peut-être. C'est une expérience qui
21 s'est produite en 1991 et il m'a parlé du conflit dans sa région qui a
22 aggravé ces symptômes. Comme je l'ai déjà dit, les termes, les étiquettes
23 utilisés ont des fins académiques plutôt que pratiques. Il a décrit son
24 expérience dans le camp ainsi que son expérience avec les réfugiés et
25 d'autres événements lors du pilonnage de Konjic.
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1 M. Cowles (interprétation). - Soyons clairs. Est-ce que vous
2 êtes en train de dire que dans votre diagnostic du PTSD, vous n'avez pas
3 constaté d'évitement ?
4 M. Gripon (interprétation). - Si vous me dites qu'il a eu une
5 expérience militaire ou paramilitaire et qu'il n'a pas évité de participer
6 à une opération militaire en partie, si c'est cela que vous appelez
7 "évitement", il n'a pas clairement évité cela. Mais ce critère est plus
8 facile à appliquer lorsque quelqu'un participe à une explosion dans une
9 raffinerie de pétrole. Cette personne-là pourra refuser d'y retourner et
10 l'évitement à ce moment-là est bien plus clair que si l'évitement est
11 d'une autre manière. Ce n'est donc pas si clair que cela pour moi.
12 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que M. Landzo vous a dit
13 qu'il avait infligé des brûlures à des prisonniers ?
14 M. Gripon (interprétation). - Je pense qu'il en a été accusé et
15 je l'ai entendu le dire ce matin, oui, qu'il avait infligé des brûlures à
16 la main de quelqu'un.
17 M. Cowles (interprétation). - Mais vous avez passé énormément
18 d'heures avec lui. Il ne vous a jamais parlé de cela, n'est-ce pas ?
19 M. Gripon (interprétation). - Il a parlé d'un certain nombre de
20 choses qu'il a faites, mais je ne sais pas s'il en a parlé de manière
21 précise.
22 M. Cowles (interprétation). - Vous ne vous en souvenez pas. Est-
23 ce qu’il vous a dit qu'il avait battu plusieurs détenus ?
24 M. Gripon (interprétation). - Oui.
25 M. Cowles (interprétation). - Est-ce qu'il a dit qu'il avait
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1 commis au moins un meurtre ?
2 M. Gripon (interprétation). - Oui.
3 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que vous êtes d'accord pour
4 dire que la consommation d'alcool, de drogues ou des deux ensemble
5 tendrait à exacerber son état ?
6 M. Gripon (interprétation). - Oui.
7 M. Cowles (interprétation). - Et il a modifié son récit vis-à-
8 vis de vous dans le temps pour ce qui est de la consommation d'alcool et
9 de médicaments, n'est-ce pas ?
10 M. Gripon (interprétation). - Oui, il a modifié son récit de
11 manière générale et vis-à-vis de moi, aussi.
12 M. Cowles (interprétation). - Et vous vous fondez dans vos
13 conclusions sur ce qu'il vous a dit, n'est-ce pas ?
14 M. Gripon (interprétation). - Oui.
15 M. Cowles (interprétation). - Même si une partie de votre
16 diagnostic dit qu'il est une personne qui se rend coupable de manipulation
17 et de mensonge.
18 M. Gripon (interprétation). - Vous essayez de faire votre
19 diagnostic au mieux, vous donnez les limites qui pèsent sur vous. Mais
20 j'ai posé ce diagnostic dans ces conditions, oui.
21 M. Cowles (interprétation). - Etes-vous d’accord pour dire
22 qu'étant donné ce que vous savez de M. Landzo en 1992, êtes-vous d'accord
23 pour dire que lorsqu'il a obtenu un uniforme, un fusil et une position
24 d'autorité, cela lui a donné le sentiment qu'il avait une certaine
25 autorité, qu'il était quelqu'un ?
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1 M. Gripon (interprétation). - Oui.
2 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)
3 M. Cowles (interprétation). - Je ne vous entends pas, Monsieur.
4 M. Jan (interprétation). - Le fait d'être un gardien lui
5 conférerait un sentiment d'autorité.
6 M. Gripon (interprétation). - Oui.
7 M. Cowles (interprétation). - Vous nous avez dit auparavant que
8 M. Landzo faisait preuve d'une réactivité émotionnelle.
9 M. Gripon (interprétation). - Oui, dans certains cas.
10 M. Cowles (interprétation). - Par exemple ?
11 M. Gripon (interprétation). - Il peut être très émotif, très
12 réactif, notamment lors d'incidents mineurs, il peut être bouleversé. Bien
13 sûr, il a le droit d'établir des priorités comme il l'entend, mais il peut
14 avoir des réactions plus importantes dans certaines situations. En tout
15 cas, c'est ce que j'ai constaté au moment où je l'ai vu.
16 M. Cowles (interprétation). - Monsieur Landzo a dit qu'il a
17 commis certains de ces crimes qu'on lui reproche. Est-ce que vous savez
18 s'il l’a fait parce qu'on le lui a ordonné ou parce qu'il l'a fait
19 simplement ?
20 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'est sa déposition.
21 M. Cowles (interprétation). - Est-ce qu'il vous a dit surtout
22 qu'on lui avait donné des ordres ?
23 M. Gripon (interprétation). - Oui, c'est ce qu'il m'a dit et il
24 a parlé d'une personne qui est morte mais sans aucun type d'autorité.
25 M. Cowles (interprétation). - Est-ce que cela est cohérent avec
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1 ce qu'il faut appeler un "acte sadique" ?
2 M. Gripon (interprétation). - Oui, tout acte cruel vis-à-vis
3 d'un être humain ou d'un animal est par définition sadique.
4 M. Cowles (interprétation). - Et dans sa situation, cela
5 n'excuse pas ses actions ?
6 M. Gripon (interprétation). - Je ne suis pas là pour excuser des
7 actions mais simplement pour expliquer des comportements.
8 M. Cowles (interprétation). - Un instant, je vous prie...
9 J'en ai terminé avec ce témoin.
10 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Avez-vous
11 d'autres questions ?
12 Mme McMurrey (interprétation). - J'ai quelques questions.
13 M. le Président (interprétation). - Allez-y.
14 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur le Docteur Gripon,
15 M.Cowles vient de vous parler d'actes sadiques.
16 Un incident s'est produit. Monsieur Landzo affirme qu'il a agi
17 sans ordre et cela a entraîné la mort de quelqu'un. Est-ce qu’il s'agit là
18 d'une action qui s'est produite dans le vide, ou est-ce que c'est une
19 action qui s'est produite en raison d'autres facteurs de déclenchement ?
20 M. Gripon (interprétation). - Selon ce qui m'a été dit, il y
21 avait des circonstances qui l'ont déclenchée. J'espère pouvoir être bref
22 et concis. Je dirai qu'en psychiatrie, il existe un transfert ou une
23 transmission d'agression. Quelqu'un, dans des circonstances données, peut
24 transférer à quelqu'un une responsabilité. Bien sûr, cela n'est pas une
25 excuse, mais il s'agit d'une colère intériorisée. Nous ne comprenons pas
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1 bien cela en psychiatrie, mais notre conception d'un acte sadique est que
2 cette personne inflige une punition pour rechercher un plaisir. Il ne
3 s'agit pas de poursuivre un objectif précis.
4 Il s'agit, dans l'autre cas, d'un mécanisme primitif où il a
5 essayé de faire face. Il est devenu très agressif et il a dit que les
6 autres ont vu ces personnes qui représentaient... qui ont rejeté la
7 responsabilité sur ces individus, et ils ont sauté sur eux, tout
8 simplement. C'est un concept très simple. Cela ne l'excuse pas.
9 Mme McMurrey (interprétation). - Est-ce que quelqu'un de sadique
10 aurait essayé de donner une aide médicale immédiatement ?
11 M. Gripon (interprétation). - C'est fort peu probable.
12 Généralement les personnes sadiques infligent des souffrances depuis
13 longtemps et elles le font car cela leur procure un certain plaisir. On ne
14 peut donc pas s'attendre à ce qu'une personne véritablement sadique essaie
15 de venir en aide sur le plan médical à la victime. Cela pourrait se
16 produire, mais cela est peu probable sur le plan médical.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Cowles a dit également
18 que vous ignoriez les fait de l'affaire. En réalité, ce n'est que cette
19 semaine véritablement que vous-même et M. Landzo avez parlé de ce qui
20 s'est passé à Celebici, n'est-ce pas ?
21 M. Gripon (interprétation). - J'ai rencontré M. Landzo à bien
22 des reprises depuis avril 1997. Il m'a dit énormément de choses au cours
23 de ces entretiens. Ce n'est que récemment, lorsque je l'ai réévalué,
24 lorsque je lui ai parlé à nouveau, qu'il m'a parlé de certains aspects. Je
25 lui ai demandé davantage de renseignements. Il ne m'a pas raconté un récit
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1 différent. Il a fait preuve de relativement de cohérence ces quinze
2 derniers mois.
3 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Cowles a également dit
4 que le PTSD ne peut exister à moins qu'il n'y ait des possibilités
5 d'éviter le traumatisme qui en est à l'origine. Que se passe-t-il si vous
6 êtes dans une situation où vous ne pouvez éviter le traumatisme ? Est-ce
7 qu’il n'y a pas de PTSD à ce moment-là ?
8 M. Gripon (interprétation). - Non. Dans les critères du PTSD, on
9 peut dire qu'il ne faut pas les prendre de manière trop rigide. Dans les
10 critères utilisés, il y a un certain nombre de critères qui expliquent cet
11 état. Ils ne sont pas toujours présents en même nombre. Il y a un seuil. A
12 des fin d'information, je dirai que plus un trouble est répandu dans la
13 société, moins de critères vous devez remplir pour qu'il y ait diagnostic
14 de ce trouble, et plus le trouble est rare, plus vous avez besoin de
15 critères pour ne pas diagnostiquer de manière trop fréquente ce trouble.
16 Les critères qui semblent indiquer qu'il y a un trouble ne sont
17 pas rigides. Cela n'a pas... Si on change les critères du DSM 4, cela ne
18 va pas changer les troubles mentaux que nous voyons dans le monde.
19 Il ne faut pas établir de distinction trop précise.
20 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Cowles a parlé du
21 bien, du mal, du comportement antisocial, etc.
22 Vous vous êtes rendu en Grande-Bretagne où on parle de la
23 responsabilité mentale diminuée et lorsque vous avez comparé le droit
24 britannique et le droit américain, quelles ont été vos constatations
25 lorsque vous avez rendu visite à un certain nombre d'établissements en
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1 Grande-Bretagne ?
2 M. Gripon (interprétation). - On s'aperçoit que dans ce système,
3 on se concentre surtout sur certains aspects des troubles de la
4 personnalité. Des personnes antisociales, au lieu de relever du système de
5 justice pénale, se trouvent dans le système de santé mentale et sont
6 traitées de manière différente.
7 Mme McMurrey (interprétation). - Pour ce qui est de la défense
8 de la responsabilité mentale atténuée, cela n'a rien à voir avec le bien
9 et le mal ?
10 M. Gripon (interprétation). - Il s'agit du fait qu'on n'a pas
11 une certaine capacité ou habilité. On parle de "diminué", il y a donc des
12 facteurs qui ont une incidence.
13 Mme McMurrey (interprétation). - Monsieur Moran a parlé à
14 plusieurs reprises du rapport du Dr Lagazzi. Il a dit qu'il n'y avait pas
15 correspondance entre vos deux conclusions. Est-ce que votre conclusion ne
16 correspond pas à celle du Dr Lagazzi ?
17 M. Gripon (interprétation). - En fait, je ne connaissais pas le
18 Dr Lagazzi ou d'autres avant de les rencontrer la semaine dernière. Ils
19 ont diagnostiqué un trouble de l'anxiété, ils l'ont mis sur l'axe n° 1.
20 Ils ont diagnostiqué un trouble de la personnalité. Il y a plus d'éléments
21 communs que d'éléments divergents, mais il ne faut pas s'attendre à ce que
22 les termes utilisés soient les mêmes et ils ne vont pas apprécier les
23 choses de la même manière et leur accorder le même poids. Nous procédions
24 tous avec un certain parti pris compte tenu de l'endroit d'où nous venons.
25 Tous, on fait preuve de cohérence dans leur manière d'aborder les choses.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Maître Moran a essayé de donner
2 l'impression que M. Landzo était entièrement antisocial conformément au
3 DSM4. Ce n'était pas là votre diagnostic, n'est-ce pas ?
4 M. Gripon (interprétation). - Non.
5 M. Moran (interprétation). - J'ai une objection. J'ai simplement
6 posé des questions et obtenu des réponses.
7 M. le Président (interprétation). - Je crois que le témoin a le
8 droit d'éclaircir son point de vue.
9 M. Moran (interprétation). - Très bien, Monsieur le Président.
10 M. Gripon (interprétation). - Il a à la fois des
11 caractéristiques antisociales et schizoïdes et selon moi, il ne faut pas
12 insister sur le plan psychiatrique sur l'un seulement de ces deux
13 facteurs.
14 Ils ne s'excluent pas mutuellement et ils ont tous les deux une
15 incidence sur le comportement. Il ne s'agit donc pas uniquement de
16 l'aspect antisocial.
17 Mme McMurrey (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le
18 Docteur Gripon. Je n'ai pas d'autres questions à poser à ce témoin.
19 M. Cowles (interprétation). - J'ai une question à poser compte
20 tenu de la première question de Me McMurrey. J'aimerais donc pouvoir poser
21 ma question.
22 M. le Président (interprétation). - Est-ce que cela intervient
23 suite à la question de Me McMurrey ?
24 M. Cowles (interprétation). - Oui, cela a trait à sa première
25 question, lors de son deuxième interrogatoire du témoin.
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1 Monsieur Grippon, est-ce qu’il est vrai que M. Landzo vous a dit
2 qu'il infligeait la souffrance aux prisonniers pour deux raisons.
3 Premièrement, on lui a donné l'ordre de le faire et
4 deuxièmement, il s'ennuyait, il était frustré, cela ne lui posait aucune
5 difficulté, il prenait du plaisir à le faire et il estimait que cela
6 n'était pas du tout désagréable.
7 M. le Président (interprétation). - Veuillez répondre.
8 M. Gripon (interprétation). - Oui.
9 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur
10 le Docteur Grippon de votre aide. Votre témoignage a été fort utile.
11 (Le Dr Gripon quitte la salle d'audience.)
12 J'espère que nous pourrons commencer avec le contre-
13 interrogatoire demain matin à 10 heures.
14 L'audience est levée à 17 h 30.
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