Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 30 janvier 2002.)

2 (Conférence de mise en état.)

3 (Audience publique.)

4 (L'audience est ouverte à 15 heures 02.)

5 M. le Président (interprétation): Merci. Madame la Greffière d'audience,

6 merci de nous donner le numéro de l'affaire.

7 Mme Thompson (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames

8 les Juges. Il s'agit de l'affaire n°IT-98-34-T, le Procureur contre

9 Naletilic et Martinovic.

10 M. le Président (interprétation): Afin que tout soit clair au compte

11 rendu, nous allons demander aux différentes parties de se présenter.

12 L'accusation, tout d'abord.

13 M. Scott (interprétation): (Hors micro.)

14 Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames les Juges. Je m'appelle Kenneth

15 Scott, je représente ici le Bureau du Procureur. A mes côtés, M. Douglas

16 Stringer, M. Vasili Poriouvaev, M. Roeland Bos, et notre substitut

17 d'audience, Kimberley Fleming.

18 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

19 Du côté de la défense.

20 M. Krsnik (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Vous voyez,

21 vous savez que nous sommes au complet: Kresimir Krsnik en tant que conseil

22 principal, Christopher Meek, et comme co-conseil et Mirka Pintar, qui est

23 avocate à Zagreb, qui est notre assistante. Merci.

24 M. le Président (interprétation): C'est moi qui vous remercie.

25 M. Seric (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je suis

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1 l'avocat Branko Seric; je défends ici Vinko Martinovic et, à mes côtés, se

2 trouve mon co-conseil, l'avocat Zelimir Par.

3 M. le Président (interprétation): Merci à tous.

4 Monsieur Martinovic? Pouvez-vous suivre les débats dans une langue que

5 vous comprenez?

6 M. Martinovic (interprétation): Oui.

7 M. le Président (interprétation): Avez-vous une plainte à formuler? Avez-

8 vous quelque chose à nous communiquer? Etes-vous en bonne santé?

9 M. Martinovic (interprétation): Je suis en bonne santé, oui.

10 M. le Président (interprétation): Vous pouvez vous asseoir, merci.

11 (L'accusé Vinko Martinovic s'assoit.)

12 Monsieur Naletilic?

13 M. Naletilic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président.

14 M. le Président (interprétation): Pouvez-vous suivre les débats dans une

15 langue que vous comprenez?

16 M. Naletilic (interprétation): Oui.

17 M. le Président (interprétation): Avez-vous quoi que ce soit à communiquer

18 à cette Chambre?

19 M. Naletilic (interprétation): Non. Merci.

20 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Vous pouvez vous

21 asseoir.

22 (L'accusé Mladen Naletilic s'assoit.)

23 Cette conférence de mise en état a été programmée dans le cadre de

24 l'ordonnance portant calendrier du 25 janvier 2002, conformément à

25 l'Article 65bis du Règlement.

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1 L'objectif de cette conférence de mise en état est de passer en revue

2 l'état d'avancement de nos travaux dans le cadre de ce procès, et de nous

3 assurer que ces débats ne seront pas retardés de façon inutile.

4 Il est important également que nous prenions toutes les mesures qui nous

5 permettront d'assurer la tenue d'un procès rapide et équitable.

6 La Chambre de première instance a été saisie de deux requêtes: l'une

7 émanant des conseils de la défense et qui porte le titre suivant:

8 "Suggestion conjointe des accusés relative au délai qui doit intervenir

9 après la présentation des éléments à charge de l'accusation". Cette

10 requête est en date du 21 janvier 2002.

11 L'autre requête, dont la Chambre est saisie, porte la date du 25 janvier

12 2002. Elle émane de l'accusation. Il s'agit de la réponse de l'accusation

13 à la demande de la défense.

14 L'objectif principal de cette conférence de mise en état, les objectifs

15 principaux sont ceux-ci.

16 D'abord, admission des éléments de preuve de l'accusation au dossier.

17 C'est un élément qui a été partiellement traité lors de notre dernière

18 rencontre.

19 Deuxième objectif: clôture de la présentation des éléments à charge de

20 l'accusation.

21 Troisième objectif: les procédures, conformément à l'Article 98bis, qui

22 portent sur la requête aux fins d'un jugement d'acquittement.

23 Dernier objectif, qui n'est pas des moindres: état d'avancement des

24 travaux de la défense et ouverture de la présentation des moyens à

25 décharge.

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1 Puis nous serons également amenés à débattre des différentes questions que

2 les parties souhaiteraient soumettre à l'attention de cette Chambre de

3 première instance.

4 Voici tous les problèmes dont nous aurons à traiter. Nous allons les

5 prendre un par un.

6 -Premier point: l'admission au dossier des éléments de preuve de

7 l'accusation.

8 Conformément à ce qui a déjà été décidé par la Chambre de première

9 instance lors de notre dernière journée de travail, et au vu des documents

10 qui ont fait l'objet d'une demande de versement par le biais du dernier

11 témoin, Sir Martin Garrod, nous demandons à la défense de nous faire part

12 de sa réponse. La défense avait jusqu'à aujourd'hui pour nous faire part

13 de sa réponse. A ce jour, nous n'avons rien reçu.

14 Oui, Maître Meek?

15 M. Meek (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges, j'ai

16 le grand plaisir de vous informer du fait que nous avons remis cette

17 réponse par écrit à Laurent Westerlain, il y a environ une heure. Je parle

18 de la personne compétente qui travaille au bureau du Greffe.

19 Je crois que cela a été remis au bureau du Greffe, il y a environ une

20 heure quinze. Il s'agissait de notre réponse concernant les documents sur

21 lesquels s'est exprimé Sir Martin Garrod.

22 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous vous exprimez en votre

23 nom ou au nom des autres conseils de la défense?

24 M. Meek (interprétation): C'est une réponse conjointe. Et je voudrais

25 également vous préciser, à vous et aux Juges de la Chambre, que nous avons

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1 également déposé une brève réponse à la réponse qui a été déposée par

2 l'accusation.

3 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Nous devons également

4 nous pencher sur deux classeurs de documents supplémentaires qui

5 proviennent des archives de Zagreb. Ces documents nous ont été remis par

6 l'accusation. Nous souhaiterions savoir quelles sont les vues des conseils

7 de la défense sur ces deux classeurs de documents qui nous ont été remis.

8 Nous souhaitons que cela soit fait également dans le cadre de cette

9 conférence de mise en état.

10 Maître Krsnik, vous avez la parole.

11 M. Krsnik (interprétation): Merci, Monsieur le Président. D'après

12 l'ordonnance que vous avez délivrée, nous allons nous exprimer sur les

13 cinq points que vous avez cités concernant les documents qui nous ont été

14 communiqués par le bureau de l'accusation, du Procureur, au travers de ces

15 deux classeurs.

16 Je serai bref et j'essaierai d'argumenter les positions de la défense en

17 cinq points.

18 Comme nous l'avons déjà entendu, la défense, six jours avant la fin de la

19 présentation des éléments de preuve de nos collègues de l'accusation, a

20 reçu ces deux classeurs, quoique nous ayons constaté… comme d'ailleurs M.

21 le Procureur l'avait expliqué à la Chambre en disant qu'ils étaient depuis

22 pas mal de temps déjà en possession de ces documents-là. Et avant vendredi

23 de la semaine passée, ces documents ne nous ont pas été montrés et la

24 défense n'a pas pu en prendre connaissance.

25 Par conséquent, nous n'avons pas pu nous en servir. Nous n'avons pas pu

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1 nous en servir à l'occasion de nos contre-interrogatoires. En outre, avec

2 ces documents-là, s'agissant de ces documents-là, ils n'ont été présentés

3 avec la comparution d'aucun témoin, comme cela est prévu par le Règlement

4 de ce Tribunal et par les ordonnances délivrées par cette Chambre de

5 première instance.

6 En feuilletant les documents en question, en outre des éléments que j'ai

7 déjà mentionnés, j'estime que la défense ferait l'objet de… serait lésée,

8 je pense que certains documents se rapportent aux années 1994, 1995,

9 années qui ont suivi la période couverte par l'Acte d'accusation. Que mes

10 collègues me rectifient si je me trompe, je pense qu'il y a même des

11 documents qui datent de 1996, ces documents-là que la défense n'a pas pu

12 vérifier au travers des personnes qui auraient pu, par exemple, témoigner

13 et dire quelque chose au sujet de ces documents, comme M. Prelec. Et si

14 jamais la Chambre venait à verser au dossier ces documents-là, je crois

15 que cela porterait préjudice de façon irrémédiable à mon client et au

16 procès.

17 Parce que, jusqu'à présent, la défense n'a, à aucun moment, eu

18 l'opportunité de vérifier ces documents, de vérifier l'authenticité de ces

19 documents, de vérifier la provenance, l'origine de ces documents. Chacun

20 de ces documents constitue un ensemble et, dans un groupe où il y a 100

21 documents, nous ne serions pas en mesure de procéder à une admission en

22 global. Parce que chaque document est un tout, un ensemble, et chaque

23 document doit être vérifié au cas par cas.

24 Et nous savons que ces documents proviennent des archives de Zagreb. C'est

25 tout ce que nous savons à leur sujet. Pour ce qui est du reste, nous ne

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1 savons rien.

2 En principe, nous savons que ces documents, avant d'être arrivés aux

3 archives de Zagreb, sont passés par le biais de nombre de services de

4 renseignements. Nous ne savons qui a fait quoi de ces documents, mais nous

5 savons que ces documents ont été en possession de bien des services de

6 renseignements et c'est tout ce que la défense pourrait dire au sujet de

7 l'exposé concernant les documents en provenance des archives de Zagreb,

8 que nous avons d'ailleurs entendu ici dans le prétoire. Par conséquent,

9 nous ne saurions reconnaître de visu l'authenticité de ces documents.

10 Maintenant, si ces documents venaient à être versés au dossier, chose qui

11 porterait préjudice à la défense, la défense devrait demander la

12 comparution de certains témoins, comme M. Prelec par exemple, pour qu'ils

13 viennent nous confirmer l'authenticité des documents et pour qu'ils soient

14 contre-interrogés par nos soins.

15 Je m'excuse un petit moment.

16 (Le banc de la défense se consulte.)

17 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, je voudrais aussi vous

18 communiquer la position de la défense. A l'occasion de l'étude de ces

19 documents, nous avons constaté qu'il y a des documents compris par les

20 classeurs qui ont été confisqués, saisis dans un poste de traitement de

21 tabac à Siroki Brijeg.

22 Je ne voudrais pas répéter ce que j'ai déjà dit mais, dans toutes les

23 requêtes que nous avons présentées à ce jour, nous avons argumenté nos

24 positions s'agissant de tous les documents. Et je ne voudrais pas

25 reprendre ce que nous avons déjà dit. Je ne veux pas reprendre non plus ce

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1 que nous avons dit concernant les positions prises au sujet des archives

2 de Zagreb, parce que nous avons jusqu'à présent de façon très abondante,

3 fourni nos arguments.

4 En tout état de cause, je voudrais conclure par ce qui suit: si jamais ces

5 documents venaient à être versés au dossier, il serait porté préjudice de

6 façon irrémédiable à mon client et à la défense, parce que l'on n'aura pas

7 satisfait à deux conditions, à savoir que les documents sauraient être

8 versés au travers de la comparution de témoins si ces témoins ont été

9 soumis au contre-interrogatoire et, outre les éléments d'argumentation que

10 j'ai présentés, ce serait le dernier que je voudrais mentionner. Et la

11 défense s'oppose complètement et entièrement au versement au dossier de ce

12 document au dernier jour ou à la fin de l'interrogatoire principal.

13 M. le Président (interprétation): Maître Seric, souhaitez-vous ajouter

14 quoi que ce soit?

15 M. Seric (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges, la

16 défense de M. Vinko Martinovic s'oppose également au versement au dossier

17 des dits éléments de preuve, tout comme la défense du premier accusé.

18 Je ne voudrais pas citer tous les documents qui figurent dans les

19 classeurs à compter du 5236 jusqu'à 52896.

20 Je dois dire également, tout en étant d'accord avec ce que le collègue

21 Krsnik a déjà dit, que nous avons juste eu le temps d'examiner

22 superficiellement la documentation en question et ce, notamment, en raison

23 du manque de temps à notre disposition.

24 Donc pour présenter des objections de qualité à chacun des documents en

25 question et qui ont été cités, comme je l'ai dit, dans un certain ordre,

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1 je tiens à préciser que nous ne pouvons pas formuler des raisons

2 particulières pour chacun des documents et dire pour quelle raison tel ou

3 tel autre document ne saurait être agréé par nos soins.

4 Mais, d'une façon générale, nous nous opposons au versement au dossier de

5 tous ces documents-là et ce, notamment, pour la raison suivante. En effet,

6 selon la façon dont le Procureur a demandé le versement au dossier de ces

7 documents, il nous semble que les modalités ne sont pas appropriées. Cela

8 se fait au dernier moment dans une situation où le Bureau du Procureur

9 nous a fait savoir qu'il était surchargé lui-même d'un afflux quotidien de

10 documentations. Si ces documentations étaient versées au dossier, comme

11 proposé par le Bureau du Procureur, nous serions dans une situation où il

12 ne serait pas possible de savoir à quoi il nous convient de s'attendre.

13 Si cela se fait d'un jour à l'autre, la question que nous pourrions nous

14 poser, c'est de savoir si le Procureur en a fini de la présentation de ces

15 éléments de preuve; et c'est le point suivant auquel nous arriverons à

16 cette conférence de mise en état. Ou, si ce n'est pas le cas, parce que la

17 défense doit savoir quand est-ce qu'elle pourra effectivement commencer à

18 travailler sur la défense pour ne pas perdre le temps à gauche et à droite

19 à vérifier tout document qui est survenu en dernière minute.

20 Et il nous faut faire un travail de recherche concernant ces documents,

21 parce que si ces documents sont versés au dossier, Monsieur le Président,

22 Mesdames les Juges, il nous faudra travailler sur chacun de ces documents

23 pour vérifier si ce document est authentique.

24 Nous estimons qu'il appartient à l'accusation de prouver son authenticité

25 et non pas à la défense. Comme il y a une présomption d'innocence, il y a

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1 une présomption de non-recevabilité d'un document s'il n'est pas présenté

2 en temps utile et conformément à la réglementation à laquelle nous nous

3 référons. Et si l'on ne nous a pas dit de quelle façon les documents ont

4 été procurés, d'où ils viennent, et ainsi de suite -comme l'a dit mon

5 collègue tout à l'heure- cela nous fait persister un doute pour ce qui est

6 des raisons que la défense pourrait avoir de douter de ce qui pourrait

7 être dissimulé ou se cacher derrière tout un chacun de ces documents.

8 Merci.

9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Je me tourne

10 maintenant vers l'accusation, afin qu'elle puisse répondre à ce qui vient

11 d'être dit.

12 Monsieur Scott, vous avez la parole.

13 M. Scott (interprétation): Merci, Monsieur le Président, Mesdames les

14 Juges. Il n'y a aucun motif sur lequel on pourrait s'appuyer pour rejeter

15 ces documents. Aucune des dispositions de ce Statut, de notre Règlement,

16 aucune des décisions prises de la Chambre n'ont été violées, de quelque

17 façon que ce soit, par la façon dont ces documents ont été versés. Ce

18 n'est pas non plus le moment où ces documents ont été versés qui est, en

19 une quelconque façon, une infraction au Règlement. Et exclure à présent

20 ces documents, cela supposerait de changer le Règlement après que

21 l'accusation a clos la présentation de ces éléments à charge.

22 Dès le début, nous avons dit à la Chambre quelles étaient les questions

23 que nous souhaitions aborder. Nous avons dit que nous allions procéder

24 d'une certaine façon. La défense savait parfaitement ce que nous allions

25 faire, et n'a jamais -et ce, de façon intentionnelle- essayé d'obtenir une

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1 confirmation de documents conformément à l'Article 66B).

2 Par conséquent, la défense n'avait pas le droit d'avoir accès à l'un

3 quelconque des documents qui a fait l'objet du versement un dossier.

4 A fournir la plupart de ces pièces bien avant la date à laquelle elle en a

5 fait la demande de versement, devant la Chambre, un certain nombre des

6 pièces ont été versées au dossier plus d'un an avant le début du procès;

7 et je dirai que certaines pièces ont également été données à la défense

8 dès le mois d'octobre, alors que d'autres non, alors que ces mêmes pièces

9 n'ont pas fait l'objet d'une demande de versement avant la fin de la

10 présentation de notre affaire, c'est-à-dire juste avant Noël.

11 J'affirme donc que la défense n'a subi aucun préjudice, aucun droit,

12 aucune règle n'a été... A de nombreuses reprises, toujours et encore,

13 l'accusation a fait plus que ce que ne lui demandent le Règlement et le

14 Statut. Je répète que ces documents dont nous venons de parler ont été

15 soumis à l'attention de la défense une semaine avant d'être présenté

16 devant la Chambre. Il n'y a aucune règle qui exige de l'accusation de

17 communiquer ces documents à quelque moment que ce soit. Rien n'oblige

18 l'accusation à les communiquer à la partie adverse avant de les emmener en

19 prétoire.

20 Les conseils de la défense ont reçu ces documents il y a plus de deux

21 semaines, et je trouve un peu fort de café que les conseils de la défense

22 affirment qu'ils n'ont pas eu le temps de se pencher sur ces documents et

23 qu'ils ne seront pas au fait de leur teneur.

24 Pour ce qui est des motifs qui nous ont permis de faire venir ces

25 documents devant la Chambre et qui nous ont permis d'en demander le

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1 versement au vu de leur authenticité, je dirais que M. Marko Prelec est

2 venu deux fois devant la Chambre, il a fait une déposition à deux

3 reprises. Il n'y a aucune raison de contester le fait que ces documents

4 proviennent des archives de Zagreb, M. Prelec s'est prononcé là-dessus à

5 deux reprises. Si la Chambre souhaite que M. Prelec revienne pour

6 expliquer les choses encore une fois de la même façon, eh bien, nous

7 prendrons toutes les mesures nécessaires pour que cela soit fait.

8 Par ailleurs, la défense se plaint du fait que deux documents, d'après

9 elle, sortent du champ couvert par l'Acte d'accusation. Ils disent que

10 deux documents sont datés d'années qui suivent les années qui sont

11 couvertes par l'Acte d'accusation. Ils font effectivement référence à des

12 événements qui se sont produits en 1992 et 1993: le P802.1 fait référence

13 à des événements qui sont survenus le 18 septembre 1993; quant au P896, il

14 fait référence à des événements qui ont pris place avant 1992, ces

15 documents ne sont donc pas hors du champ couvert par l'Acte d'accusation.

16 Je répète ici que tous les documents qui ont été communiqués à la défense

17 proviennent des archives de Zagreb, le 10 septembre, M. van Hecke est venu

18 s'exprimer devant la Chambre de façon très détaillée. Il a expliqué de

19 quelle façon ces documents avaient été obtenus.

20 Je crois, Monsieur le Président, qu'il apparaît clairement à l'écoute de

21 mes arguments qu'il n'y a aucune raison d'exclure le versement au dossier

22 de ces documents, aucune règle n'a été enfreinte, aucune disposition de

23 notre Règlement n'a été enfreinte. Nous considérons donc que la défense

24 n'a pas été lésée. Je vous remercie.

25 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, souhaitez-vous répondre à

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1 ce qui a été dit par l'accusation. Je vous rappelle que vous aurez à être

2 très concis, car ce sujet n'est pas le sujet principal de notre conférence

3 de mise en état.

4 M. Krsnik (interprétation): Merci, Monsieur le Président, et Mesdames les

5 Juges.

6 La défense concernant les propos de l'accusation se doit de répondre comme

7 vous devez le comprendre, parce que j'ai compris que les ordonnances que

8 vous avez émises concernant nos observations verbales devraient porter

9 aujourd'hui sur les deux derniers classeurs que nous avons reçus et, si

10 j'ai bien compris, aujourd'hui nous sommes en train de parler des autres

11 documents qui, au cours des débats ou avant les débats en question, ont

12 été versés aux documents à charge.

13 C'est parce que j'estime qu'il n'est pas approprié maintenant de revenir à

14 des documents qui ont été soumis, il y a longtemps à la défense. La

15 défense est en train de parler des deux derniers classeurs de documents

16 qui nous ont été versés le dernier jour de la présentation des éléments à

17 charge présentés par le Procureur.

18 C'est ce que la Chambre sait et c'est ce que nous savons tous: nous sommes

19 donc dans une situation où les derniers éléments de preuves ont été

20 présentés et la défense a donné sa position.

21 Maintenant, si vous le voulez, nous pouvons faire un retour ou revenir aux

22 témoignages de M. Prelec et de M. van Hecke mais il ne s'agissait pas de

23 témoignages portant sur ces documents-là et leur témoignage ne saurait

24 être, d'une manière générale, pris en considération pour la confirmation

25 de chaque document parce que nous ne savons pas comment cela est arrivé

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1 jusqu'à Siroki Brijeg et aux archives de Zagreb. Ce qui nous dit que

2 quelqu'un n'a pas délibérément rédigé ces documents au détriment du HVO,

3 des accusés ou de qui que ce soit d'autre et les a laissés là-bas. Il se

4 peut que tout soit des faux. Nous n'avons entendu aucun témoin, exception

5 faite des enquêteurs. Des enquêteurs, je vous prie, qui travaillent pour

6 le compte du Bureau du Procureur, donc des gens qui sont partiaux, qui

7 font partie de l'équipe du Procureur, et qui ont expliqué à la Chambre ici

8 présente ce qu'ils ont trouvé et où ils ont trouvé cela. C'est tout.

9 Maintenant, pour ce qui est des transcripts présidentiels, Monsieur le

10 Président, je ne voudrais pas vous fatiguer, la défense a déjà dit quelles

11 étaient ses positions mais je voudrais seulement souligner la chose

12 suivante: si la Chambre accepte des documents dont l'origine est expliquée

13 comme cela a été fait ici, qui auraient pu venir de n'importe où et que

14 nous ne pouvons pas vérifier au niveau de leur authenticité par quoi que

15 ce soit, absolument par rien du tout si ce n'est par les dires des

16 enquêteurs du Bureau du Procureur, nous pourrions, vous comprendrez, faire

17 venir 40 autres témoins. Si le Bureau du Procureur ne l'a pas fait, donc

18 la défense devra le faire. A nous maintenant de le faire, on nous a fait

19 passer la balle dans notre camp. Et ils nous ont dit: "Si cela vous

20 intéresse, vous pouvez faire les photocopies que vous voulez et trouver

21 les éléments que vous voulez".

22 Il y a donc une décision d'une commission parlementaire du gouvernement et

23 du parlement de Croatie qui sont sous scellés pendant 30 ans. Nous ne

24 sommes pas en mesure de vérifier, même si nous le voulons; et si voulons

25 le faire et pouvons le faire. Il ne nous appartient pas, à nous, de

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1 prouver la véracité de ce qui est dit dans ces documents, mais au Bureau

2 du Procureur.

3 Absolument, Monsieur le Président, et Mesdames les Juges, les assertions

4 présentées par le Procureur ne sont pas justifiées. Nous voulons être

5 équitables devant cette Chambre. Et si je me lève et si je dis que cela

6 n'est pas vrai, eh bien, je ne vais pas m'amuser à dire des choses qui ne

7 sont pas vraies devant la Chambre.

8 Je vous ai dit quand est-ce que nous avons reçu ces documents et je parle

9 des derniers classeurs. Maintenant, pour ce qui est des transcripts

10 présidentiels, nous avons reçu un grand paquet de ces transcripts et nous

11 avons répondu au Bureau du Procureur.

12 Je tiens encore à répondre à un élément et je ne tiens pas à vous attarder

13 davantage Monsieur le Président.

14 Il y a une ordonnance, une décision de votre part qui a force d'obligation

15 pour toutes les parties en présence, à savoir les documents doivent être

16 versés aux travers des témoignages des témoins et ces témoins doivent être

17 soumis à des contre-interrogatoires.

18 Ces mêmes documents que nous avons reçus à la fin du procès, c'est-à-dire

19 à la fin de la présentation des éléments à charge, nous aurions pu en

20 disposer à l'occasion du contre-interrogatoire d'autres témoins encore.

21 En feuilletant les documents en question, Monsieur le Président, Mesdames

22 les Juges, nous avons vu beaucoup de documents qui ne sont pas du tout

23 pertinents et la défense commence à craindre la chose suivante: non

24 seulement on nous a fait passer la charge de la présentation de preuves à

25 décharge, il se peut qu'il y ait d'autres procès et d'autres éléments qui

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1 ne soient pas pertinents et que nous ayons à vérifier, par exemple le fait

2 d'avoir emmené des détenus à des travaux forcés, je veux dire. Je vais

3 parler par cœur, je ne peux pas me référer aux documents exacts: parmi 100

4 ou 200 documents, il y a le nom de mon client nulle part; à quoi bon alors

5 ces documents-là? A quoi servent-ils, s'il en est ainsi?

6 La défense donc se doute, à titre justifié; que cela est en train de

7 sonder le terrain pour d'autres procès et comme cela n'a pas été réussi,

8 comme on n'a pas réussi faire passer cela dans l'affaire Kordic, on pourra

9 peut-être essayer de le faire passer dans une autre affaire.

10 Nous estimons que nous avons respecté votre ordonnance, nous nous sommes

11 conformés à votre ordonnance et nous avons versé des objections concernant

12 les deux derniers classeurs. Nous voudrions qu'il soit discuté de ces deux

13 derniers classeurs.

14 Je ne voudrais pas vous attarder davantage, Monsieur le Président, et je

15 crois avoir, de façon très exhaustive, énoncé toutes les positions de la

16 défense concernant ces deux classeurs. Merci.

17 (Les Juges se concertent sur le siège.)

18 M. le Président (interprétation): Y a-t-il des questions des Juges

19 concernant ces documents?

20 Juge Clark, je vous écoute.

21 Mme Clark (interprétation): Eh bien, les commentaires sont dirigés vers

22 les deux parties.

23 J'ai écouté attentivement les arguments que vous avez proposés. Je trouve

24 qu'ils ne sont pas très convaincants. La défense n'est pas très précise

25 lorsqu'elle formule cette objection. Et j'aurais cru qu'au cours des

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1 derniers jours, lorsque vous avez eu le moment de consulter les documents,

2 vous auriez certainement pu nous aider en nous disant par exemple: "Oui,

3 nous avons quelques questions. Nous avons posé quelques questions à

4 certains témoins qui découlent de certains documents d'une façon très

5 spécifique et c'est la raison pour laquelle nous avons subi un préjudice

6 car nous n'avons pas eu la possibilité de le faire".

7 D'un autre côté, d'autre part, je m'attendais à ce que l'accusation, étant

8 donné qu'ils ont entendu les commentaires que nous avons fait jeudi

9 dernier, nous aurait expliqué à ce moment-là, un peu plus en profondeur,

10 quelle est la raison pour laquelle ces documents n'ont pas fait partie des

11 classeurs volumineux que nous avons reçus déjà, nous tous, quelle est la

12 raison pour laquelle on n'a pas parlé de ces documents ou ils n'ont pas

13 été introduits par le biais de M. Prelec lorsqu'il a préparé un classeur

14 de documents sélectionnés.

15 Les deux parties répètent les mêmes positions. Vous avez déjà présenté vos

16 argumentations, jeudi dernier. Il me semble que nous n'avons pas du tout

17 avancé. Je suis un peu déçu, je dois vous l'avouer. Vous n'avez pas du

18 tout rendu notre travail plus facile, plus particulièrement du point de

19 vue de l'accusation, car nous vous avons invités la semaine dernière à

20 nous indiquer l'endroit ou la façon de laquelle vous croyez que vous avez

21 subi un préjudice.

22 C'est la raison pour laquelle je vous demande: pourriez-vous nous dire

23 quels sont les documents pour lesquels vous avez l'impression…, grâce

24 auxquels vous vous sentez…, en fait vous avez été préjudiciés, vous avez

25 subi un certain préjudice?

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1 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik, je vous écoute.

2 M. Krsnik (interprétation): Je vous remercie, Madame la Juge Clark. Je

3 vais répondre.

4 Au cours des derniers jours, nous trois, nous sommes allés document par

5 document. Mais je ne peux pas parler tout seul avec le document et je ne

6 peux pas présenter des arguments à personne qu'avec moi-même et, voilà,

7 c'est la raison pour laquelle il me fallait avoir un homme devant moi qui

8 pourrait me parler de ce document.

9 Pour nous, tous ces documents sont inacceptables. C'est la raison pour

10 laquelle nous n'avons pas analysé les documents un par un, car nous

11 n'avions pas de personne à qui nous pouvions poser des questions. Je ne

12 peux pas établir un dialogue avec le document, je peux simplement voir de

13 quoi il s'agit, je peux lire le document mais je ne peux pas parler au

14 document, je ne peux pas poser des questions au document et c'est la

15 raison pour laquelle je ne peux rien vous dire d'autre sur le document.

16 C'est la raison pour laquelle nous sommes limités d'une certaine façon

17 car, après votre décision de rendre notre opinion de façon orale

18 aujourd'hui et non pas par écrit, mais à cause du tout, nous nous sommes

19 limités à donner des opinions générales sur tous les documents et non pas

20 d'aller document par document car il me manque la partie adverse pour

21 poser les questions.

22 Pour nous, ces documents sont inacceptables, d'autant plus que, si on

23 prend en considération la façon dont l'accusation les présente…

24 Madame la Juge, si vous avez des questions, je suis là pour y répondre.

25 Mme Clark (interprétation): Maître Krsnik, ce que je voulais savoir plus

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1 précisément, c'était la chose suivante: je sais que vous faites objection

2 aux documents. Vous n'êtes pas très heureux avec ces documents, vous nous

3 avez expliqué le tout de façon très vive. Vous nous avez parlé de

4 l'archive de Zagreb, vous n'acceptez pas que ces documents proviennent des

5 archives de Zagreb. Monsieur Prelec nous a aidés là-dessus et vous dites

6 que ce que cela veut dire, c'est que vous ne voulez pas dire que le

7 contenu des documents est nécessairement vrai. Nous allons devoir faire

8 face à cela plus tard.

9 Mais est-ce que vous avez une objection initiale quant au versement de ces

10 documents, outre votre argument général concernant les archives de Zagreb?

11 M. le Président (interprétation): Eh bien, si j'ai bien compris, ces

12 documents pourraient apparaître, donc faire partie de deux catégories:

13 l'une, c'est la liste des détenus qui se faisaient sortir pour faire des

14 travaux forcés, alors que les autres documents sont des ordres ou des

15 directives portant le nom de votre client qui est mentionné de façon très

16 précise sur ces documents.

17 Quel est votre point de vue concernant ces deux catégories de documents?

18 Je comprends -et vous l'avez déjà mentionné- que vous pourriez vous servir

19 de ces listes de noms de détenus pour la présentation de vos moyens à

20 décharge.

21 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges,

22 voilà, je vous remercie de votre aide, je vous remercie de réfléchir comme

23 nous. Nous avons classé ces documents de cette façon-là. Il y a des

24 documents généraux et des documents plus spécifiques qui se rapportent à

25 notre client. Bien sûr, dans notre cas à nous, au cours des sept derniers

Page 8668

1 jours, nous n'avons pas eu le temps de faire des vérifications.

2 Ce que nous avons pu dire de façon générale, c'est que nous faisons

3 objection au contenu et donc à l'authenticité. Nous ne savons pas si ce

4 sont des documents qui sont des documents véridiques, des documents qui

5 ont bel et bien, vraiment, été rédigés de la part du HVO, s'ils émanent du

6 HVO? Est-ce que c'est un document qui a été falsifié, inventé, ou bien

7 est-ce que c'est une guerre spéciale? Ou à cause de la guerre spéciale,

8 est-ce que ce document a été infiltré, a été mis là? Donc la défense doit

9 vérifier tout cela.

10 Si ces documents étaient pour être acceptés, il faudrait vraiment vérifier

11 la provenance et le tout. Donc, cela requiert de nous un travail

12 absolument incroyable. Je veux simplement dire que, si nous avions

13 l'occasion, si ces documents avaient été versés au dossier de la façon

14 convenable et selon votre ordonnance, si nous avons examiné les documents

15 un par un avec la présence du témoin ici, qui de nouveau peut les

16 confirmer, en fait comme de nouveau aussi ce témoin aurait pu confirmer le

17 fait que ces documents ont bel et bien été trouvés dans les archives de

18 Zagreb, ces "slides" de M. Prelec concernant le contenu des documents.

19 En fait, on aurait pu en discuter, mais nous n'avons pas pu en parler de

20 façon qualitative, de bonne façon avec lui. Nous ne croyons pas en la

21 teneur de ces documents.

22 Nous avons également notre équipe d'enquêteurs. Nous allons peut-être

23 avoir des documents semblables concernant certains documents qui émanent

24 des archives de Zagreb. Si la défense s'en sert ici, nous pouvons prouver

25 dans le cadre de notre travail que ce sont bel et bien des documents

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1 authentiques et que l'homme qui les a signés les a bel et bien signés.

2 Donc ces documents seront très pratiques pour nous, donc d'avoir une liste

3 de détenus qui se faisaient sortir. Oui, effectivement, cela serait très

4 acceptable pour nous, cela serait très bien.

5 Mais la façon dont ces documents ont été présentés, nous ne pouvons pas

6 l'accepter car, même si nous trouvons un document comme ce document-là, il

7 faudrait voir par exemple qui a signé le document, aller voir l'homme en

8 question qui a signé le document, lui poser la question si c'est bel et

9 bien sa signature. Et c'est la raison pour laquelle nous faisons

10 objection.

11 Quant au document dont nous allons nous servir dans le cadre de la

12 présentation de nos moyens à décharge, il est vrai que nous n'allons pas

13 présenter de documents ici si l'homme qui peut en parler, qui peut parler

14 sur l'authenticité -soit l'auteur du document, soit quelqu'un qui peut

15 dire: "Oui, c'est un document falsifié et ce n'est pas mon nom qui

16 apparaît"-, donc nous allons seulement présenter des documents lorsque

17 nous aurons un témoin ici.

18 C'est le seul chemin vers la vérité. C'est la seule façon dont nous

19 pouvons arriver à la justice.

20 Nous n'essayons pas de nous servir de trucs, nous n'essayons pas de nous

21 servir d'effets. Un document est soit valide ou non. Selon le droit

22 continental, un document est valide ou non. Je crois que Mme la Juge Clark

23 sera certainement d'accord avec nous pour dire, avec moi pour dire que,

24 dans tous les systèmes juridiques, le document ne peut être authentifié

25 que par son auteur. Donc l'auteur peut accepter ou refuser ce document.

Page 8670

1 Voilà mon objection principale.

2 Et d'autant plus, je veux dire la chose suivante, c'est que nous n'avons

3 pas la possibilité de poser des questions au témoin. Le témoin n'est pas

4 là.

5 Je veux simplement vous dire, mentionner un détail: mon éminent confrère,

6 M. Scott, avec qui il est vrai que nous travaillons de façon merveilleuse

7 -je remercie l'accusation pour bon nombre de choses car il nous ont

8 énormément aidés dans le cadre de notre défense, je ne connais pas le

9 droit américain, j'ai peu d'expérience dans le domaine- mais pour dire que

10 les transcripts sont authentiques et de ne pas amener, pas un seul homme

11 dont le nom est mentionné sur le transcript, puisque nous n'avons pas de

12 disquette, nous n'avons pas de cassette, il faut au moins essayer

13 d'emmener un homme ici pour dire: "Oui, ce jour-là, il y avait une

14 réunion. Nous nous trouvions à cet endroit-là". Cela est vraiment

15 incroyable de ne pas emmener une seule personne pour attester.

16 Alors, qu'est-ce que vous voulez? Comment est-ce que vous voulez que l'on

17 accepte le tout? Comment voulez-vous que la défense fasse son travail?

18 Moi, je vais vous présenter au moins 20 hommes qui parleront d'un

19 incident. Donc, je ne peux pas accepter des documents lorsque nous n'avons

20 pas de personne pour attester l'authenticité.

21 Maintenant, nous avions un témoin qui nous a dit: "Eh bien, voilà…", je ne

22 sais pas si c'était un témoin protégé, donc je ne vais pas mentionner le

23 nom de la personne, mais c'est une personne qui m'a dit: "Quelqu'un m'a

24 donné ce document." Et voilà, il a fallu que nous l'acceptions de cette

25 façon-là. Donc je ne vais plus vous ennuyer plus longtemps.

Page 8671

1 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Seric, vous allez devoir

2 être très concis si vous n'avez rien de nouveau à ajouter à

3 l'argumentation qui était présentée par Me Krsnik, je vous demanderais de

4 ne pas prendre la parole si vous n'avez rien de nouveau à dire.

5 M. Seric (interprétation): En fait, merci, Monsieur le Président. Je n'ai

6 rien de nouveau à dire mais je voulais simplement répondre à

7 l'intervention du Juge Clark.

8 La situation est bien différente, vous savez qu'elle ne l'était en date du

9 24 de ce mois-ci, lorsque vous, éminents Juges, vous nous avez dit qu'en

10 date d'aujourd'hui nous allions savoir dans quel délai est-ce que nous

11 allons devoir remettre notre requête écrite, notre réponse écrite quant à

12 ces deux classeurs de documents.

13 Le lendemain, donc après le 25, après avoir eu notre réunion avec M.

14 Fourmy, nous avons reçu l'indication de votre part, honorables Juges de la

15 Chambre, qu'aujourd'hui nous allons pouvoir nous exprimer de façon orale

16 lors de cette conférence de mise en état. Donc ce laps de temps que nous

17 pourrions avoir à partir d'aujourd'hui serait plus long que les quatre

18 derniers jours car, à partir de maintenant, nous recevrions au moins un

19 autre délai. J'avais espéré recevoir sept jours. Il y a une grande

20 différence entre vendredi et aujourd'hui, et vendredi et l'avenir.

21 Je veux dire par là, pour essayer d'aider la Chambre en ayant une

22 objection un peu plus concrète, je peux simplement dire que la défense de

23 Vinko Martinovic n'accepte pas les documents P5, 6, 5.3, 579.1, P599.1,

24 P611.2, P612.1, P664.1, 705.1, 745.2, 896. Voilà.

25 Donc je le dis de façon brève comme cela, car mon objection, Monsieur le

Page 8672

1 Président, ne serait pas une bonne objection, une bonne objection en

2 profondeur. C'est une objection simplement faite rapidement car je parle

3 de documents qui font mention de mon client alors que, pour les autres, je

4 dirai que je ne fais pas objection aux autres documents car je ne me suis

5 concentré que sur la situation de mon client. C'est une objection qui n'a

6 pas de fondement, qui n'est pas une bonne objection. Comme nous n'avons

7 pas eu assez de temps et que nous sommes sous pression, depuis le 3

8 juillet de l'année dernière.

9 Tous les jours, nous travaillons sur la documentation, tous les jours nous

10 nous préparons -et je suis vraiment désolé si je reviens là-dessus-, mais

11 mon éminent confrère a déjà dit que la défense veut toujours quelque

12 chose, tout le temps, nous faisons objection comme si nous voulions

13 former, créer une quelconque obstruction que ce soit.

14 Nous désirons simplement un procès juste et équitable. Nous ne désirons

15 certainement pas faire d'obstruction. Mais si je parle de cette façon-ci,

16 je crois que, de nouveau, je restreindrais le débat et de nouveau mes

17 objections seraient un peu trop légères et pas assez en profondeur, et

18 c'est la raison pour laquelle nous formulons notre objection de la même

19 façon dont nous l'avons toujours fait jusqu'à présent. Merci.

20 M. le Président (interprétation): Merci. Monsieur Scott, est-ce que vous

21 allez répondre, répliquer aux questions posées par le Juge Clark? Avez-

22 vous quelque chose à dire?

23 M. Scott (interprétation): Je ne suis pas tout à fait certain de la

24 question que le Juge a posée. Je serais bien heureux d'y répondre, mais

25 j'aurais aussi deux réponses très brèves que je voulais formuler à

Page 8673

1 l'endroit de mes éminents confrères.

2 M. le Président (interprétation): Oui, je vous écoute.

3 M. Scott (interprétation): Le problème fondamental, le faux argument qui a

4 été fait ici -et j'espère que la Chambre comprend, nous allons essayer de

5 ne pas trop prolonger-, mais l'argument, par exemple, pour dire que la

6 défense a subi des préjudices lors de leur contre-interrogatoire de

7 témoins, cet argument est établi sur de fausses prémices. Ils n'ont pas

8 subi de préjudice lors du contre-interrogatoire parce qu'ils n'avaient pas

9 le droit de recevoir des documents jusqu'à ce que ces documents soient

10 versés à un moment tout à fait précis lors de l'étape à laquelle ils sont

11 versés. C'est une fausse prémisse de dire que "nous avons subi des

12 préjudices car nous n'avons pas pu examiner les documents lors du contre-

13 interrogatoire" alors que ce n'était pas conforme aux Règles de recevoir

14 ce document avant.

15 C'est une décision qu'ils ont prise il y a bien longtemps, et cela revient

16 sur le compte rendu d'audience déjà il y a un an, lorsque le Juge Wald a

17 été le Juge de la mise en état et les a demandés: "Est-ce que vous voulez

18 la communication des documents? Est-ce que vous comprenez l'article 66 B?"

19 Cette question leur a été posée de façon insistante lors de la préparation

20 de cette affaire et leur réponse a toujours été: "Non, nous ne voulons pas

21 les documents, nous ne voulons pas la communication de ces documents."

22 Donc maintenant, ils ne peuvent pas se plaindre de la non-communication de

23 documents, ils ne l'ont pas acceptée.

24 La façon dont les documents ont été présentés, Monsieur le Président, la

25 seule chose que je peux dire, avec tout le respect que je vous dois, c'est

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1 que la Chambre dans les derniers quatre mois ou quatre mois et demis n'a

2 jamais donné à l'accusation aucune indication quant à la façon dont les

3 documents ont été présentés, n'a pas dit que ces documents n'ont pas été

4 présentés de la bonne façon. Si cela avait été le cas, j'aurais bien aimé

5 que la Chambre nous indique la façon dont elle aimerait que les documents

6 soient présentés. Nous avons toujours appelé les témoins, tel que M.

7 Prelec, tel que M. Aguirre, tel que M. van Heck, pour pouvoir fournir à la

8 Chambre le plus d'informations possibles quant à la façon dont le Bureau

9 du Procureur a obtenu ce document. La Chambre ne nous a jamais demandé, à

10 l'exception des dix pièces très précises, mais la Chambre ne nous a jamais

11 demandé d'obtenir plus d'informations, de leur fournir plus

12 d'informations. Et de nouveau, nous avons présenté tous ces documents de

13 façon très cohérente avec la pratique du Tribunal, la pratique qui prévaut

14 dans ce Tribunal depuis sept ou huit années.

15 Si la pratique maintenant va être changée, si vous désirez changer la

16 pratique, eh bien, à ce moment-là, nous n'avons plus rien à dire, mais je

17 crois que cela serait fondamentalement injuste.

18 M. le Président (interprétation): Bien, bien, bien, Maître Krsnik, vous

19 savez, il faudrait mettre un terme à toutes ces argumentations. Je vous

20 donne une minute. Je vous accorde une minute.

21 M. Krsnik (interprétation): Oui, une phrase simple. Merci.

22 Est-ce que cela veut dire que M. le Procureur ne fera absolument aucune

23 objection quant aux documents que la défense présentera et qui émaneront

24 de l'archive de Zagreb? Est-ce que cela veut dire qu'il n'aura absolument

25 aucune objection à fournir quant à leur authenticité?

Page 8675

1 M. le Président (interprétation): Eh bien, Maître Krsnik, je ne crois pas

2 que cette question soit acceptable à ce moment-ci, soit appropriée.

3 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, vous ne m'avez peut-

4 être pas bien compris. Si l'argument de l'accusation comme cela, à la fin,

5 dit que tous les documents qui proviennent des archives de Zagreb on ne

6 peut absolument rien vérifier plus tard, alors la question de la défense

7 est bien à sa place. Si vous dites… cela veut donc dire que chaque

8 document que nous allons présenter et qui provient des archives de Zagreb,

9 ces documents seront immédiatement acceptés par l'accusation et n'auront

10 absolument, ne feront pas l'objet d'aucune objection quelle qu'elle soit.

11 M. le Président (interprétation): Eh bien, à cette étape-ci, nous n'allons

12 pas essayer de résoudre ce problème. Après m'être consulté avec mes

13 collègues et en ayant, en prenant en considération les arguments qui ont

14 été présentés par les deux parties, cette Chambre de première instance

15 réserve son droit de rendre les décisions concernant l'admission de ces

16 deux classeurs de documents pour une étape ultérieure.

17 Donc, nous allons fermer la discussion du premier point sur le calendrier.

18 Le deuxième point est la présentation des moyens à charge. J'aimerais

19 savoir s'il y a de nouvelles informations.

20 Est-ce qu'il y a quelque chose de nouveau dont l'accusation aimerait nous

21 informer concernant la fermeture ou la fin de la présentation des moyens à

22 charge? Nous comprenons que cette question a déjà été soulevée lors de

23 notre dernière audience.

24 Je vous écoute, Monsieur Scott.

25 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, la position de

Page 8676

1 l'accusation reste inchangée. Comme je l'ai déjà indiqué la semaine

2 dernière, nous avons appelé notre dernier témoin. Nous avons terminé la

3 présentation de nos moyens à charge mais sujette, bien sûr, à des

4 questions qui pourraient survenir quant à la question des fusils de bois.

5 C'est notre position. Cela est inchangé. Nous ne fermons pas la

6 présentation de nos moyens à charge de façon définitive, mais nous nous

7 réservons le droit… nous fermons notre présentation des moyens à charge

8 mais sous réserves.

9 M. le Président (interprétation): Bien. Donc je crois, cette Chambre de

10 première instance croit que la fermeture de la présentation des moyens à

11 charge sera déterminée conformément à l'admission des documents. Cette

12 Chambre entendra les décisions écrites qui lui seront présentées.

13 Le problème suivant est l'Article 98 bis et les procédures qui y sont

14 afférées. On nous a informés que le conseil de la défense a quelque

15 intention de présenter une requête qui est la requête pour acquittement

16 conformément à l'Article 98bis.

17 Est-ce que les conseils de la défense ont quelque chose à dire là-dessus?

18 Oui, je vous écoute, Maître Krsnik?

19 M. Krsnik (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président. La

20 défense a l'intention en effet de présenter une demande d'acquittement qui

21 sera très concise, qui traitera exclusivement de points spécifiques, et

22 nous nous efforcerons de procéder de façon brève, concise et juridiquement

23 fondée pour ce qui est des objections et de la demande d'acquittement que

24 nous présenterons. Et ce, en application de l'Article 98bis.

25 Ce serait tout ce que je pourrai dire, Monsieur le Président. Si les Juges

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1 de la Chambre ont des questions à poser, je suis prêt à répondre. Je crois

2 avoir été suffisamment bref. Donc je ne vais pas m'éloigner de l'Article

3 98bis.

4 Nous allons nous consacrer au point seul parce que nous estimons que le

5 Procureur n'a présenté aucun élément de preuve pour appuyer ses

6 assertions, et c'est de ces points-là que nous allons traiter. Et nous

7 allons aller point par point de l'Acte d'accusation au sujet duquel nous

8 estimons également que le Bureau du Procureur n'a pas avancé de preuves

9 suffisantes pour étayer son affaire. Merci.

10 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Seric?

11 M. Seric (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je voudrais vous

12 informer, tant vous que les membres de la Chambre, que la défense de M.

13 Vinko Martinovic propose d'agir de même en conformité avec l'Article 98bis

14 et formuler une demande d'acquittement.

15 Nous nous proposerons de suivre l'Acte d'accusation point par point,

16 paragraphe par paragraphe, et alinéa par alinéa pour que les choses soient

17 concrétisées à part entière. Merci.

18 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott?

19 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, en fait, je voudrais

20 faire une observation qui pourrait prendre la forme d'une suggestion, si

21 vous me permettez de le faire, et je n'essaie pas d'être présomptueux.

22 J'espère que la Chambre ou les conseils de la défense ne le verront pas

23 ainsi.

24 Maître Meek et M. Stringer seront à même de se souvenir de ce qui est fait

25 parfois dans le système fédéral des Etats-Unis. Je sais bien que nous ne

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1 sommes pas dans un système fédéral, je sais bien que nous ne sommes pas

2 dans le système qui prévaut aux Etats-Unis, mais irrésistiblement, nous

3 avons envie parfois de nous inspirer de ce qui est fait dans nos systèmes

4 respectifs.

5 Monsieur le Président, même dans les affaires pénales les plus complexes

6 qui sont entendues aux Etats-Unis -et j'ai le plaisir de pouvoir dire que

7 j'ai pris part à des affaires très complexes-, il n'y a pas plus de

8 documents qu'il n'y a dans cette affaire. Généralement, à la clôture des

9 présentations de l'accusation, il y a des demandes qui sont faites

10 oralement, des demandes d'acquittement. Généralement, le conseil de la

11 défense se lève et, pendant 20 à 25 minutes s'exprime, façonne des

12 arguments. Ensuite l'accusation fait une réponse orale à ce qui a été dit.

13 Et dans 49 cas sur 50, le juge prononce une décision sur le siège et, le

14 plus souvent, la requête est déboutée parce que le critère de preuve est

15 très élevé, est particulièrement élevé généralement.

16 Je voudrais dire ici, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, qu'il

17 pourrait être utile pour chacun d'entre nous d'écouter ce que la défense

18 aurait à dire. Bien sûr, la défense peut invoquer tous les arguments

19 qu'elle souhaite invoquer de bonne foi et nous n'allons pas, loin de nous

20 cette idée, entraver le travail de la défense.

21 Mais je pense qu'il serait utile, donc, si ces arguments pouvaient se

22 centrer sur des points bien précis. Il serait ainsi possible que la

23 réponse soit concise et bien ciblée.

24 Lorsque le conseil de la défense s'est levé, j'étais un petit peu

25 encouragé de l'entendre dire qu'il allait faire une argumentation très

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1 précise, voire chirurgicale. Malheureusement, les arguments qui ont suivi

2 ne m'ont pas permis d'entretenir l'espoir que j'avais de voir tout cela

3 être résolu rapidement parce que la défense a dit: "Eh bien, nous allons

4 regarder tout ce qui est dans l'Acte d'accusation et nous allons regarder

5 les choses fait par fait et point par point.

6 Je crois, Monsieur le Président, qu'il serait en fait un petit peu

7 étonnant d'avoir à rédiger à ce stade nos mémoires de clôture du procès.

8 En fait, c'est un petit peu ce qu'on nous demanderait de dire.

9 Je crois, en fait, qu'il serait plus utile pour chacun d'entre nous de

10 nous exprimer de façon construite et de bonne foi et d'avoir une réponse

11 qui soit faite point par point et fait par fait.

12 M. le Président (interprétation): Maître Meek?

13 M. Meek (interprétation): Monsieur Scott vient de dire qu'effectivement

14 j'appartenais au système fédéral. Monsieur Stringer et M. Scott ont raison

15 de dire que ce que nous faisons aux Etats-Unis n'a rien à voir avec ce que

16 nous faisons ici. Ça, je suis d'accord. Mais je ne crois pas que nous

17 allons déposer une requête de demande d'acquittement qui pourrait être

18 comparable à un mémoire de clôture.

19 Je voudrais dire que, en tant que conseil de la défense issu du système

20 américain, je comprends M. Scott. Aux Etats-Unis, il y a un système qui

21 permet, une fois que les documents cessent d'arriver dans le dossier ou

22 devant la Chambre, qui permet donc de dire: nous n'avons plus rien à leur

23 donner, donc il n'y a pas préjudice porté à la défense. Ils nous ont donné

24 tout ce qu'ils avaient et puis, effectivement, la semaine dernière ils ont

25 laissé tomber sur nos genoux deux énormes classeurs, à la toute fin de la

Page 8680

1 présentation de leurs éléments à preuve.

2 Nous n'avons pas déposé une requête au titre de l'Article 66B), mais nous

3 n'avions pas à le faire. Nous allons essayer de nous concentrer, comme M.

4 Scott le demande, sur les éléments qui nous paraissent être les éléments

5 les plus lacunaires dans la présentation de l'accusation. Ainsi, j'espère

6 que M. Scott sera satisfait.

7 M. le Président (interprétation): Nous sommes dans un Tribunal

8 international ici, nous ne sommes pas dans le cadre d'une juridiction

9 nationale. Cela suppose que nous agissions conformément au Règlement de

10 procédure et de preuve de ce Tribunal. Et c'est particulièrement l'Article

11 98 bis du Règlement qui m'intéresse ici. Voilà la première chose que je

12 voulais dire.

13 La deuxième chose, c'est que, la semaine dernière, nous avons rendu une

14 décision orale et nous avons établi que la Chambre de première instance

15 s'attendait à ce que tous les arguments soient présentés de façon précise

16 et que les arguments aient un lien évident avec chaque allégation et

17 chaque chef d'accusation.

18 La défense doit avoir cela à l'esprit. Il revient à la partie qui fait une

19 demande d'acquittement de fournir à la Chambre un fondement très clair qui

20 permet de sous-tendre la requête. Par conséquent, la défense doit remettre

21 à la Chambre de première instance des arguments très détaillés et bien

22 construits.

23 Des allégations d'ordre général, des demandes d'ordre général ne seront

24 pas étudiées, ne seront pas considérées comme étant suffisantes par cette

25 Chambre.

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1 Conformément à l'Article 98 bis de notre Règlement, la demande de la

2 défense doit être déposée dans les sept jours suivant la fin de la

3 présentation des moyens à charge. Cela suppose qu'il y ait eu décision sur

4 tous les éléments de preuve dont le versement a été demandé au dossier par

5 l'accusation. Cela suppose également qu'il y ait clôture de la

6 présentation des éléments à charge de l'accusation.

7 J'en profite pour rappeler à l'accusation que le délai de réplique est

8 assez court. Conformément à l'Article 127 de notre Règlement, il apparaît

9 que ce délai n'est que de sept jours, donc une semaine. Telle est la

10 décision rendue par la Chambre sur cette question.

11 Nous passons maintenant à l'autre point qui est à l'ordre du jour, à

12 savoir l'état d'avancement de la présentation des moyens à décharge, donc

13 l'état d'avancement des travaux de la défense.

14 Normalement, après la clôture des éléments à charge, la présentation des

15 éléments à décharge doit commencer rapidement.

16 Donc, la première question que nous, Juges de la Chambre, souhaitons poser

17 aux conseils de la défense est celle-ci: quel est l'état d'avancement des

18 travaux de la défense? Où en êtes-vous?

19 Maître Krsnik, vous avez la parole.

20 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges,

21 comme vous le savez, depuis le mois de juillet de l'an passé jusqu'à ce

22 jour, la défense n'a pu se concentrer et traiter rien que de l'affaire qui

23 est en cours. Et je tiens à dire que nous avons travaillé nuit et jour.

24 Je voudrais donc dire par là que nous n'avons pas eu suffisamment de temps

25 dans cette phase-ci pour traiter des témoins, pour être concret.

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1 Nous allons le faire et nous allons commencer à le faire à compter de la

2 journée d'aujourd'hui. Je ne me propose pas d'en dire davantage à ce

3 sujet, parce que j'attends le point 4. Nous allons avancer tous nos

4 arguments au point 4 et dire là tout ce que la défense considère comme

5 étant important concernant le nombre de témoins à déposition et tout le

6 reste, et tout ce que nous avons pu préparer. Donc j'avais donc

7 l'intention d'élaborer l'ensemble au niveau du point 4.

8 Je m'excuse, mes collègues me font savoir que nous sommes arrivés au point

9 4, justement.

10 Je m'excuse une fois de plus, j'avais mal compris.

11 (Les Juges se consultent sur le siège.)

12 M. le Président (interprétation): Excusez-nous, Monsieur Krsnik, vous

13 pouvez poursuivre, bien sûr.

14 M. Krsnik (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

15 Donc, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, nous sommes arrivés au

16 point des débats que la défense attend depuis longtemps et elle réfléchit

17 depuis longtemps à celle-ci, et nous pensons que c'est un point crucial

18 pour la continuation du procès. Nous considérons que cela est crucial

19 parce qu'il dépend de ce point-là de savoir combien de temps la Chambre va

20 donner à la défense pour la présentation de ses éléments à décharge.

21 Comme l'a dit mon collègue Scott, je vais essayer de procéder de façon

22 chirurgicale et de vous présenter les arguments principaux, les arguments

23 "massue".

24 Il est indiscutable de dire qu'après la première comparution nous avons

25 sans cesse reçu des documents avant le mois de juillet de l'an passé et

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1 nous avons reçu une liste comportant quelque 350 témoins.

2 Dans cette phase-là déjà, nous avons commencé à traiter, à nous occuper de

3 ces 350 témoins. Nous n'avons pas tout eu jusqu'au moment où l'on nous a

4 communiqué les dépositions qui ont été remises à la Chambre pour savoir

5 quels seraient les témoins que l'on citerait à comparaître. compris. C'est

6 le droit et la tactique du Bureau du Procureur.

7 Nous n'avions pas le choix et faire autre chose que traiter de tous les

8 témoins, et travailler, plancher sur l'ensemble.

9 Nous avons, après, reçu une liste de 30 témoins qui ont donné 16 témoins

10 en phase de comparution. Nous avons traité des témoins et des dépositions,

11 donc des dépositions des témoins qui ont été cités à comparaître. Deux

12 jours, ou plutôt une semaine avant le début de ce débat principal, nous

13 avons reçu une liste de 66 témoins et, en fin de compte, on nous a cité,

14 on n'a cité que 53 ou 54. Il y avait donc une liste de 66 témoins sujette

15 à modification.

16 Donc, nous apprenions à chaque fois deux ou trois jours avant le début de

17 l'affaire, c'est-à-dire après la fin des dépositions et avant le début des

18 débats -du débat principal en notre qualité d'avocats sérieux, de juristes

19 sérieux-, dans une affaire où nous avons eu l'honneur de défendre nos

20 clients, nous avons dépensé un mois à supputer qui pourrait être cité à

21 comparaître. Et nous nous sommes aventurés à dire que nous ne pouvons pas

22 le faire, mais nous avons respecté votre ordonnance et nous avons continué

23 à travailler en nous disant en notre for intérieur que nous aurions peut-

24 être pu faire mieux.

25 Mais je tiens à dire que la position générale de la défense est une

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1 position, qui devrait être celle de la Chambre, est la suivante:

2 "L'argument du temps, des délais, ne peut pas être l'argument de justice."

3 Et je crois que toute personne, tant Bureau du Procureur qu'autres

4 personnes, pensant comme nous, à savoir pensant de la bonne façon, qu'il

5 réfléchisse d'une façon conforme à l'esprit qui a créé les Nations Unies,

6 à savoir tout ce que nous faisons est fait dans l'intérêt de la vérité et

7 de la justice.

8 Mais pour y arriver à cette vérité et à cette justice, il nous faut du

9 temps, et je ne voudrais pas que vous vous mépreniez sur ce que je tiens à

10 dire. Je tiens à dire combien de temps concrètement il nous faut pour

11 telle ou telle autre chose.

12 Il ne serait pas sérieux de penser que nous pourrions nous aventurer à

13 nous lancer dans cette affaire, dans la défense de nos clients, si nous

14 n'étions pas en mesure de nous préparer. Je ne saurais regarder le fils de

15 mon client dans le blanc des yeux si jamais, dans dix ans, on venait à

16 découvrir un document -je paraphrase- qui pourrait être d'aide ou

17 d'utilité quelconque à son père et "j'aurais pu le trouver, mais je n'ai

18 pas fait l'effort".

19 Et je tiens à vous dire que dans les archives de Zagreb il y a 10.000

20 classeurs. Je ne sais pas, personne ne saurait vous dire combien de

21 documents il y a là-bas au juste. La défense ne le sait pas, peut-être que

22 certains experts le savent. Il y a au moins dix enquêteurs du Bureau du

23 Procureur qui sont tout le temps là-bas. La défense est limitée

24 financièrement et du point de vue du personnel, et je tiens à vous dire

25 que la défense a examiné quelque 30% de ces archives, à savoir 3000

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1 classeurs, mais il y a encore 7000 classeurs à examiner et à étudier.

2 Ensuite, je tiens à dire qu'il y a de grandes archives à Sarajevo. Ce sont

3 les documents de l'armée de la Bosnie-Herzégovine, du gouvernement de

4 Bosnie-Herzégovine, de la présidence de Bosnie-Herzégovine.

5 Nous avons déjà rédigé je ne sais combien de courriers et de demandes de

6 nous autoriser l'accès à ces documents, et cela n'a pas été fait à ce

7 jour. Cela a par contre permis aux avocats qui défendent des Bosniens, des

8 Musulmans -et je tiens à vous dire les noms: les avocats Edina Residovic,

9 Halid Balijagic, et un autre collègue dont je ne me souviens plus du nom-

10 ont tout de suite eu la possibilité d'y accéder, tout comme les

11 représentants du Bureau du Procureur.

12 Mais la défense de M. Mladen Naletilic, elle, n'a pu pas eu le droit de le

13 faire et je m'attends à me trouver prochainement sur le terrain.

14 J'informerai en effet la Chambre de première instance de tout ce qui se

15 passerait. Et si jamais je ne suis pas autorisé à le faire, je demanderai

16 l'assistance de cette Chambre. J'espère toutefois que la raison va

17 l'emporter et qu'il sera permis à la défense de Mladen Naletilic d'accéder

18 à ces archives.

19 Maintenant une fois que l'on y accédera, je ne sais combien de classeurs,

20 combien de documents, quelle est l'envergure du travail qu'il nous faudra

21 accomplir -et c'est une chose qui devra être déterminée par l'enquêteur-,

22 mais je dois être présent, je veux être informé des documents présents

23 parce que je dois travailler en même temps sur nos témoins à nous.

24 Troisième élément, élément le plus important est le suivant. Monsieur le

25 Président, Mesdames les Juges, nous avons entendu dire, cela est peut-être

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1 dans la pratique de la justice aux Etats-Unis ou dans la pratique de ce

2 Tribunal, c'est qu'il n'y a point besoin d'être objectif. Mais demander

3 les documents qui, selon leur avis, sont là pour prouver la culpabilité

4 -et nous avons dit, entendu dire que l'on a traité de tels documents et de

5 tels témoins-, mais cela signifie que s'il y avait des documents aux

6 témoins qui pourraient aller à décharge, on n'en a pas traité. Donc, en

7 d'autres termes, il faudrait que j'aille à Madrid, que j'aille voir la

8 documentation, les archives du Bataillon espagnol, et voir quels sont les

9 documents qui existent là-bas, m'entretenir là-bas.

10 Nous avons eu deux témoins, ici, mais je pourrais essayer de m'entretenir

11 avec d'autres personnes. Je ne peux pas considéré à être consciencieux si

12 je n'ai pas tout cela. Et où sont les archives de l'ECMM? On ne le sait

13 pas. Chaque gouvernement a ses propres archives au niveau, donc, des

14 différents pays de la communauté européenne. Et comment pourrais-je

15 accéder à l'ordinateur central pour trouver les documents, l'ensemble des

16 documents?

17 Nous avons entendu ici, au prétoire, deux messieurs de l'ECMM qui ont dit

18 ce qu'ils avaient à dire. Mais pour tout le reste, où sont les documents

19 qui sont signés par Hose Jesus? Et où sont les autres documents, où est la

20 documentation, où sont les archives centrales?

21 Je ne peux pas être considéré comme étant un avocat consciencieux si je

22 n'ai pas tout examiné. C'est une affaire énorme, très sérieuse, ce qui

23 nécessite un travail jour et nuit qui dure depuis deux années déjà. Et je

24 n'ai pas à dire ici à cette Chambre que nous avons délaissé nos familles

25 respectives pour travailler, à titre professionnel, sur cette affaire. Et

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1 nous ne traitons que de cette affaire-là.

2 Je sais que vous comprenez que nous le faisons dans l'intérêt de la

3 justice, et l'intérêt de la justice sous-entend un travail beaucoup plus

4 grand de la part de la défense que de la part de l'accusation. J'ai

5 compris depuis longtemps qu'il m'appartiendra de prouver l'innocence de

6 mon client, et non pas entendre des preuves sur la culpabilité de celui-

7 ci.

8 Et, dans ce prétoire-là, je pense que la défense sera appelée, sera

9 obligée de présenter des éléments de preuve à décharge pour prouver

10 l'innocence.

11 Je crois qu'il nous aurait été plus facile de procéder de cette façon-là,

12 mais je tiens à dire que nous avons eu des entretiens très importants qui

13 apporteront des résultats au niveau de la coopération avec le Bureau du

14 Procureur et de la coopération avec M. Fourmy. Je crois avoir souvent

15 présenté nos positions, je ne voudrais pas vous fatiguer davantage. Je

16 tiens à être le plus précis possible.

17 (Note de l'interprète: nous voudrions qu'il ralentisse.)

18 Je m'excuse, bien sûr.

19 Je voudrais dire que la défense a l'intention de procéder en deux phases,

20 comme cela a été fait par nos collègues de l'accusation. Nous avons opté

21 en faveur d'une proposition que nous avons considérée comme étant la plus

22 raisonnable et la plus efficace. Nous voudrions entendre des témoins à

23 Mostar, dans les locaux du Tribunal supérieur, de la Cour supérieure de

24 Mostar qui a été rénovée et qui dispose de toutes les installations

25 logistiques nécessaires pour cette façon de faire.

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1 Et je tiens à dire que nous n'avons pas, donc, à demander la présence de

2 ces témoins, étant donné qu'il s'agit de nos témoins à nous. Et cela ne

3 nécessiterait qu'un nombre limité de personnes qui se déplaceraient comme

4 fonctionnaires ou traducteurs. Nous aurions là une trentaine de témoins

5 qui pourraient peut-être témoigner entre une demi-heure au minimum et une

6 heure au maximum; ce qui fait que l'interrogatoire principal serait suivi

7 d'un contre-interrogatoire -selon la pratique de ce Tribunal.

8 Donc nous pourrions traiter deux témoins par jour et ce, une matinée si

9 l'on travaillait par exemple de 9 heures à 14 heures. Etant donné que ces

10 témoins vivent et travaillent sur place, il n'y aurait point besoin

11 d'avoir recours au service de l'Unité de protection des témoins et des

12 victimes, parce que les témoins vivent sur place.

13 Troisième élément, qui est peut-être le plus important: nous espérons

14 enfin que la Chambre se déplacera vers les lieux d'origine, c'est-à-dire

15 les lieux concernés par l'Acte d'accusation, donc Mostar. On pourrait

16 peut-être aller à Sovici également, cela dépendra bien entendu de vos

17 décisions.

18 Et dans les entretiens que j'ai eus avec mon collègue Fourmy, nous avons

19 traité de bien des sujets -je suis certain que vous avez été informé de la

20 teneur de nos entretiens-, et je crois que cela serait beaucoup plus

21 efficace; cela nous permettrait d'en terminer plus rapidement avec la

22 moitié de nos témoins.

23 Pour ce qui est des témoins que nous pensons devoir citer à comparaître

24 ici, au prétoire, ce sont des témoins pour lesquels nous pensons que la

25 Chambre devrait les entendre en direct. Et il y aurait là une trentaine de

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1 témoins aussi. Je suis en train de parler en principe, parce que je ne

2 sais pas encore quelle va être la liste de témoins finale, mais nous

3 informerons la Chambre en temps utiles, conformément aux dispositions du

4 Règlement de procédure et de preuve, tant pour ce qui est de la Chambre

5 que pour ce qui est de nos éminents collègues de l'accusation.

6 Il y aurait là des témoins qui seraient des témoins d'ordre général, pour

7 ce qui est donc du tissu de fond, et il y aurait ensuite des témoins

8 experts.

9 Et, d'après l'appréciation de la défense, nous pourrions nous en tenir aux

10 délais impartis, et je pense pouvoir dire que la défense de M. Naletilic

11 estime terminer d'ici le 15 juillet. Mon collègue se prononcera sur ses

12 positions à lui. Mais, en tout et pour tout, je crois pouvoir dire que les

13 délais impartis par cette Chambre pourront être respectés.

14 En termes concrets, je crois pouvoir dire -et j'ai tenu à être le plus

15 précis possible pour que vous ayez une idée de l'envergure du travail à

16 effectuer par la défense-, je tiens à préciser que nous ne serions pas en

17 mesure de commencer avant le 15 avril avec les dépositions. Nous pourrions

18 peut-être terminer en 15 jours, faire une pause de 7 jours. Nous pourrions

19 reprendre le 15 mai. Et le 15 juillet, je pourrais dire -ne m'en veuillez

20 pas si je suis peut-être trop optimiste-, terminer donc d'ici le 15

21 juillet. Et je crois que l'affaire complète pourrait être terminée au mois

22 de septembre.

23 Je crois devoir m'excuser pour le fait de citer très souvent le terme de

24 "justice". Nous ne demandons pas un an ou deux, nous ne demandons pas

25 quelque chose d'inconcevable, nous ne demandons pas quelque chose qui

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1 sortirait du cadre des dispositions du Statut. Nous devons disposer, comme

2 le dit d'ailleurs le Statut, de suffisamment de temps. Et nous nous sommes

3 efforcés, en effet, de limiter ce temps au maximum, à savoir au strict

4 nécessaire.

5 La défense, partant de cette requête, dans le cas d'une réponse favorable

6 de la part de la Chambre, je tiens à dire que la défense devra tout de

7 même travailler de jour et de nuit pour répondre à l'ensemble de ses

8 obligations.

9 Ma collègue vient de me faire savoir que le compte rendu dit "15 avril"

10 pour le débat principal, et j'avais dit "déposition". Je crois que le

11 compte rendu ne reflète donc pas exactement ce que j'ai dit.

12 Je pense donc pouvoir répéter que la défense estime qu'elle pourrait

13 disposer alors, à ce moment-là, de suffisamment de temps pour la

14 préparation de ses témoins. Nous pourrions communiquer plus facilement

15 avec les témoins et les magistrats. Nous ne perdrions pas de temps avec

16 les témoins dans le prétoire pour en arriver à ce qui nous intéresse, et

17 ce qui nous intéresse, c'est la vérité. Je crois que ce serait plus

18 efficace et plus rapide, pour nous, pour ce qui est donc d'en arriver à un

19 terme dans l'affaire qui nous intéresse.

20 Je tiens également à prévenir la Chambre d'un fait important. S'agissant

21 de documents qui nous sont fournis par le Bureau du Procureur,

22 indépendamment de nous-mêmes, nous avons remis certains documents pour

23 traduction au mois de septembre, et il n'y a que 10% qui ont été traduits.

24 Alors, que va-t-il advenir des documents qui vont encore nous être

25 fournis? Je crois pouvoir dire en ma qualité de conseil de la défense

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1 qu'il sera impossible pour les traducteurs de faire tout ce travail. Les

2 traducteurs ont, eux aussi, besoin de temps pour faire leur travail.

3 Je crois pouvoir proposer à cet effet -comme je suis certain de

4 l'impossibilité de traduire à temps-, il serait peut-être préférable de

5 traduire dans le prétoire certains documents qui sont brefs; c'est-à-dire

6 de passer par l'intermédiaire des interprètes de la Chambre, parce que

7 nous avons déjà l'expérience des autres conseils de la défense.

8 J'ai mon expérience personnelle parce que des documents remis pour

9 traduction au mois de septembre et qui sont très importants, comme par

10 exemple des comptes rendus d'audience qui ont été versés au dossier par

11 décision de la Chambre -qui avaient dû être traduits-, n'ont pas encore

12 été traduits depuis le mois de septembre à ce jour.

13 On a traduit juste une partie, alors que les documents que nous avons,

14 nous, remis pour traduction n'ont pas encore été traduits. Et il s'est

15 écoulé déjà quatre mois depuis.

16 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, pour ne pas vous ennuyer plus

17 longuement, je voulais simplement vous dire ce que j'ai à vous dire de

18 très, très bref. Croyez-moi sincèrement, je m'adresse à vous avec tout le

19 respect que je vous dois. J'ai également beaucoup de respect envers cette

20 institution, et je vous parle vraiment selon ma conscience; c'est elle qui

21 vous parle.

22 Je ne sais vraiment pas quelle sera la réaction de mon client, ma réaction

23 à moi également, si nous comprenons, si nous arrivons à être coincés de la

24 sorte, et si nous n'avons pas assez de temps pour nous préparer

25 adéquatement.

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1 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, je ne sais pas si je peux me

2 permettre, avec toute l'expérience que j'ai en tant qu'avocat de la

3 défense, je ne sais pas comment j'oserais m'aventurer à essayer de

4 défendre mon client dans une instance qui, en fait, représente le

5 couronnement du droit international de cette fin du XXe siècle. Je crois

6 que ce sont des événements historiques qui se déroulent sous nos yeux, et

7 je crois qu'il est absolument indispensable de nous permettre d'avoir

8 assez de temps pour nous préparer.

9 Nous ne sommes pas responsables, ni vous ni moi, à cause de tous ces

10 délais. Le problème, c'est que nous ne pouvons pas simplement nous

11 entretenir avec un témoin, nous ne pouvons pas non plus disposer d'un

12 témoin. Il s'agit, ici, d'une politique d'événements, il s'agit des

13 événements dans les Balkans, en ex-Yougoslavie, en Bosnie depuis 1991,

14 enfin, des événements qui ont eu lieu entre 1991 et 1994.

15 Rien n'est arrivé de façon inopinée, rien n'est arrivé par un pur hasard.

16 Il est certain que nous n'allons pas nous pencher et revenir au XVe

17 siècle.

18 Mais pour comprendre tout ce qui s'est passé, nous sommes complètement

19 obligés de faire venir des experts car, nous tous, membres de la défense,

20 et nous tous qui avons vécu sur ces territoires, nos familles ont été

21 soumises à toutes ces guerres. Il en est de même pour nous, les Croates

22 également.

23 Je sais que c'est beaucoup plus difficile pour vous de comprendre tout

24 cela, car vous provenez de pays qui sont beaucoup plus stables, beaucoup

25 plus calmes, et vous n'avez pas vécu toutes ces horreurs que nous avons

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1 vécues. Il vous est peut-être un peu difficile de comprendre toutes ces

2 choses, mais c'est la raison pour laquelle la défense ne pourrait pas se

3 satisfaire de ne pas vous venir en aide, de ne pas vous venir en aide

4 plutôt, de ne pas pouvoir emmener tous les témoins, de vous aider à rendre

5 la décision la plus juste et la plus équitable que vous pouvez rendre car,

6 ici, il ne s'agit pas de ma destinée à moi, de mon avenir à moi mais bien

7 de la vie de mon client, de la destinée de mon client. Et je veux lutter

8 pour la vérité et pour la justice, mais j'ai besoin de temps car nous

9 sommes liés par l'Acte d'accusation tel qu'il est.

10 L'Acte d'accusation pèse contre mon client. Nous avons reçu un grand

11 nombre de classeurs, nous avons reçu des documents. Mais nous avons

12 également besoin de nous préparer adéquatement.

13 La défense doit pouvoir répliquer et se préparer, c'est la raison pour

14 laquelle je crois que le délai que l'on nous accorde, le délai d'un mois,

15 au nom de la justice et au nom de tout ce que j'ai évoqué, donc cette

16 période ne veut rien dire, est beaucoup trop courte.

17 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, si vous me permettez, la

18 pression dans cette affaire est grande sur nous. Nous communiquons avec

19 les collègues des autres qui représentent leurs clients dans d'autres

20 affaires. Ils ne sont pas soumis à de telles pressions. Je ne sais pas, je

21 ne connais pas la raison pour laquelle nous sommes soumis à de telles

22 pressions. Il est vrai que, des fois, nous étions fatigués. Il est vrai

23 que, des fois, nous n'avions peut-être pas réagi adéquatement, mais nous

24 vous remercions de votre aide, de vos suggestions, de vos questions, ainsi

25 que de votre patience.

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1 Mais je dois dire que la défense n'a pas compris quelle est la raison pour

2 laquelle la pression est si dure sur nous alors que, dans d'autres

3 affaires dans lesquelles d'autres avocats de la défense défendent leurs

4 clients, quelle est la raison pour laquelle ces derniers ont pu avoir des

5 pauses d'un mois et demi, par exemple, pour se préparer?

6 Je ne veux pas vous ennuyer plus longuement, Monsieur le Président,

7 Mesdames les Juges, je veux simplement, en dernier lieu, dire la chose

8 suivante. Mon client, ou plutôt moi-même, en son nom, nous vous supplions,

9 nous vous demandons, nous insistons de nous accorder suffisamment de temps

10 pour préparer la présentation de nos moyens à décharge car, si vous

11 pensiez que je ne fais pas bien mon travail, je suis certain que vous me

12 le diriez. Nous avons besoin de temps, Monsieur le Président, Mesdames les

13 Juges. Je crois que nous avons été tout à fait corrects. Nous n'avons pas

14 essayé de profiter de votre gentillesse. Nous n'avons pas essayé

15 d'enfreindre les procédures et nous allons, nous avons toujours voulu

16 arriver à la vérité, donc la vérité quelle qu'elle soit. Mais nous voulons

17 arriver à la vérité.

18 C'est la raison pour laquelle nous désirons vous dire que cette défense ne

19 présentera aucun témoin "tu quoque". Nous n'avons absolument aucune

20 intention de faire emmener de tels témoins. Nous ne voulons pas défendre

21 un crime avec d'autres crimes. Nous voulons simplement nous tenir à l'Acte

22 d'accusation car, même s'il y a eu des crimes de l'autre côté, nous savons

23 qu'il y en avait, cela ne suppose pas que l'on ait le droit de faire

24 d'autres crimes.

25 Nous allons simplement essayer de démontrer que mon client n'en a pas

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1 commis. Nous allons essayer de nous concentrer là-dessus. Mais quant à

2 l'Acte d'accusation, nous allons vous donner toutes les réponses là-

3 dessus, car c'est sur cette façon-là que la défense est la moins heureuse.

4 En fait, nous ne sommes pas contents de la façon dont c'est présenté, mais

5 sans une présentation concrète, nous n'allons pas pouvoir…, sans un délai

6 adéquat, nous n'allons pas pouvoir vous présenter de façon concrète toute

7 la défense possible et imaginable. C'est la raison pour laquelle nous vous

8 demandons de nous accorder les délais et, si vous nous accordiez les

9 délais, il est vrai qu'à ce moment-là nous allons nous en tenir aux

10 délais.

11 Nous allons certainement agir en tant que bras droit de ce Tribunal afin

12 d'arriver à la justice et de respecter tous les délais que vous nous

13 accorderez. Merci.

14 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, merci beaucoup de cette

15 présentation d'arguments. Très franchement, je partage certaines des

16 opinions que vous avez exprimées. Nous pensons, nous aussi, que l'intérêt

17 de la justice passe avant tout. Ce qui suppose un total équilibre entre

18 l'aspect rapide et l'aspect équitable de nos procès. Mais demeurent un

19 certain nombre de questions que nous souhaitons vous poser. Peut-être que

20 nous allons attendre le retour de la Chambre après la pause pour vous les

21 poser.

22 Mais exemple de question: nous ne savons pas, à ce jour, le nombre de

23 témoins que vous pensez citer devant la Chambre. Nous n'avons aucune idée

24 du chiffre que vous pensez avancer. Nous ne savons pas non plus quel sera

25 le nombre de documents que vous souhaitez nous soumettre.

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1 Et puis, pour ce qui est de la façon dont vous envisagez de mener les

2 choses, vous avez très clairement indiqué que vous n'alliez pas invoquer

3 le principe du "tu quoque", ce que cette Chambre de première instance,

4 bien sûr, appréciera.

5 Mais nous ne pouvons pas être d'accord avec vous sur tous les points. Vous

6 devez absolument prouver l'innocence de vos clients. Enfin, c'est quelque

7 chose que nous ne partageons pas totalement. Votre client demeure innocent

8 jusqu'à la preuve du contraire et jusqu'à ce que la preuve de sa

9 culpabilité soit établie. Il n'est donc pas nécessaire de prouver

10 l'innocence de votre client. Vous devez simplement contester et réfuter

11 les éléments de preuve qui sont présentés par l'accusation dans le cadre

12 de la présentation des éléments à charge. C'est à nous, Juges, si nous

13 avons des doutes, d'intervenir, mais il vous suffit d'agir ainsi pour

14 mener de façon satisfaisante la défense de votre client.

15 L'autre chose que je souhaite dire ici, c'est que nous sommes dans le

16 cadre d'un Tribunal international, nous ne sommes pas ici dans le cadre

17 d'une commission de vérité et réconciliation. Nous ne prenons pas part à

18 des activités politiques de quelque nature qu'elles soient.

19 Ce qui nous intéresse, ce n'est pas la politique mais c'est la

20 responsabilité individuelle. Et nous essayons de savoir quel va être le

21 sort que la Chambre va réserver à votre client dans le cadre de ces

22 travaux. Voici les premiers éléments de réponse que je peux vous donner au

23 nom également de mes collègues.

24 Nous aurons sans doute d'autres questions à vous poser mais, je le répète,

25 ce sera après la pause. Nous interrompons nos travaux et nous nous

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1 retrouverons à 17 heures.

2 (L'audience, suspendue à 16 heures 30, est reprise à 17 heures.)

3 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, est-ce que vous êtes prêt

4 à répondre aux questions que nous aurions à vous poser?

5 M. Krsnik (interprétation): En effet, Monsieur le Président. Mais avant

6 toute chose, peut-être, Monsieur le Président, je voudrais vous apporter

7 une petite explication aux écritures que nous avons soumises pour ce qui

8 est des préparatifs de la défense.

9 En effet, s'agissant de toutes choses que j'ai dites verbalement

10 aujourd'hui, elles se fondent sur les entretiens que j'ai eus avec M.

11 Fourmy, les entretiens exhaustifs. Et les demandes présentées par la

12 demande sont des demandes minimalistes, en dessous ou en deçà desquelles

13 la défense ne saurait aller, conformément à ce que j'ai déjà expliqué à M.

14 Fourmy. Et pour ce qui est de toutes les autres explications et positions

15 fournies, nous en restons à ce qui figure dans les écritures que nous

16 avons soumises.

17 Maintenant pour ce qui est des témoins, Monsieur le Président, la défense

18 serait la plus heureuse de pouvoir vous dire un chiffre exact aujourd'hui

19 même. Mais nous pouvons juste vous donner une approximation en plus ou en

20 moins, parce que nous manquons de renseignements, certaines décisions de

21 cette Chambre nous font défaut, et autres éléments afférents.

22 Je crois pouvoir dire que, partant des positions que nous espérons vous

23 voir prendre, nous comptons sur une soixantaine de témoins en tout et pour

24 tout. Vous comprendrez que ce nombre s'appuie sur ce que la défense de M.

25 Naletilic pense avoir comme besoin, mais nos conseils, bien sûr, nous

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1 aideront.

2 Une fois que nous aurons entendu toutes vos décisions, nous serons en

3 mesure de vous apporter des réponses plus précises parce que, si certaines

4 décisions portant sur les documents venaient à être acceptées, vous

5 comprenez parfaitement que nous serions amenés à faire venir d'autres

6 témoins, des témoins supplémentaires.

7 Donc ce nombre dépend également de l'un des derniers témoins qui a comparu

8 ici, qui est venu témoigner sous pseudonyme, et nous n'avons pas reçu sa

9 déposition de la part du Bureau du Procureur, élément qui est tout à fait

10 nouveau pour nous et dont il nous convient de traiter.

11 D'une façon ou d'une autre, je ne pense pas que le nombre que j'ai avancé

12 puisse varier de plus ou de moins 10, au cas où les décisions que vous

13 prendrez seraient celles que la défense espère vous voir prendre ou voir

14 le contraire. Nous pourrions donc compter sur une augmentation, voire une

15 diminution du nombre des témoins.

16 Maintenant, pour ce qui est du reste, je tiens à vous dire, comme j'ai

17 l'habitude de le faire s'agissant d'une Chambre -et je tiens à préciser

18 que nous n'avons pas "tactisé"-, je voudrais donc dire que nous sommes en

19 possession de quelque 20.000 documents que nous avons collectés au cours

20 des quelques années de travail et qui proviennent, pour l'essentiel, des

21 archives de Zagreb.

22 Pour ce qui est des autres documents, il nous faut nous débrouiller de

23 façon variée parce que la défense n'a pas de possibilité ou autant de

24 moyens que les confrères du Bureau du Procureur -j'espère qu'ils ne m'en

25 voudront pas de le dire ici. Il s'entend que tous ces documents-là ne

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1 seront pas présentés par nos soins ici, mais il convient de trier et ce

2 tri doit être fait par nos soins, et nous devons décider par la suite des

3 documents qui seront présentés.

4 Selon nos évaluations dans les archives, parmi les 10.000 classeurs, il

5 pourrait y avoir quelque 100.000 documents et ceci est avancé d'une façon

6 très générale.

7 Maintenant, il convient de nous pencher sur les documents des archives de

8 Sarajevo et ce que j'ai mentionné au niveau du spabat, à savoir le

9 bataillon espagnol, et l'ECMM.

10 Mais je tiens à vous assurer, d'ores et déjà, que nous présenterons des

11 documents pertinents seulement et nous nous efforcerons de réduire leur

12 nombre aux points ou aux sujets concrets dont voudrait parler la défense.

13 Nous nous efforcerons donc de faire en sorte qu'il n'y en ait pas plus de

14 1000 à présenter ici au prétoire.

15 Si tant est que d'autres questions voudraient m'être posées, je suis

16 disposé à y apporter les réponses voulues, mais c'est ce que je pouvais

17 vous communiquer d'ores et déjà, d'une manière générale. Tout ce que j'ai

18 dit est apporté comme réponse de principe en attendant de voir quelles

19 vont être vos décisions, parce que bien d'autres éléments dépendent de ces

20 dernières.

21 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Maître Krsnic.

22 Est-ce que je peux entendre Me Seric s'exprimer sur ce même point?

23 Maître, vous avez la parole.

24 M. Seric (interprétation): Grand merci, Monsieur le Président. Je ne vais

25 pas faire de plaidoyer -je vais laisser le plaidoyer pour la période du

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1 plaidoyer-, je m'efforcerai d'être le plus concret possible.

2 Le premier segment dont je voudrais parler, c'est la situation de la

3 défense. La situation de la défense de mon client est de nature à être

4 liée à la situation posée ou mise en place par l'Acte d'accusation.

5 Qu'entends-je par là? Eh bien, il y a d'abord une suprématie du premier

6 accusé par rapport au deuxième accusé. C'est la raison pour laquelle nos

7 deux défenses ont convenu d'adopter la même position pour ce qui est de la

8 présentation des éléments de la défense.

9 Nous avons donc certains points conjoints de l'Acte d'accusation. Nous

10 allons y répondre chacun de son côté mais de façon conjointe, et il y a

11 des chefs d'accusation qui traitent de l'un et de l'autre et la défense se

12 proposera d'en traiter de façon dissociée.

13 Et la situation, compte tenu de cette situation de suprématie d'un accusé

14 par rapport à l'autre Donc la situation, compte tenu de cette situation de

15 suprématie d'un accusé par rapport à l'autre, la défense du premier accusé

16 a pris l'obligation de faire en sorte, et nous les aiderons à le faire, de

17 faire en sorte que les témoins concernant la toile de fond soient cités

18 par la défense du contexte général.

19 Il s'agit en outre, pour ce qui nous concerne et s'agissant du temps

20 nécessaire pour la préparation de notre défense conjointe, c'est le fait

21 que nous ne pouvons pas nous présenter les uns sans les autres, et donc la

22 défense du premier accusé citerait ses témoins et présenterait ses

23 éléments de preuve, comme l'a dit mon collègue Krsnik. Non seulement nous

24 acceptons la chose, mais nous apportons notre appui à cette approche et,

25 s'agissant du temps nécessaire, comme l'a dit M. Krsnik, nous nous

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1 joignons à ces requêtes pour faire en sorte que le 15 avril soit la date

2 de départ.

3 A la suite, suite à la présentation de ces éléments à décharge, nous

4 entamerions celle des nôtres. Une partie de nos préparatifs est déjà

5 effectuée, mais cela est tout à fait insuffisant en ce moment-ci. Cela est

6 insuffisant parce que nous avons ouï-dire qu'il y a la partie, la part du

7 lion au niveau du travail qui nous attend, qui est devant nous encore. Si

8 l'on se réfère à la partie qui a été présentée par le Bureau du Procureur,

9 il s'impose toute une série d'actions au niveau des enquêtes à effectuer

10 sur le terrain; et il convient d'examiner les traces au niveau des

11 microfilms qui ont été pris au niveau des sites d'exhumation pour ce qui

12 est du Corps n°5 que l'on dit appartenir à Nenad Harmandic.

13 Si par la suite nous réussissons à obtenir de la part du MUP de Mostar, de

14 la partie Est de Mostar, ces micro traces, il nous faudra citer un expert,

15 et là aussi il faut du temps, un expert en matière de balistique et un

16 expert en médecine légale.

17 Une autre partie importante, c'est de procéder à des vérifications

18 supplémentaires et nous espérons avec votre aide, Monsieur et Mesdames les

19 Juges, que ces demandes de notre part, à l'intention du MUP à Mostar,

20 seront appuyées et que le MUP répondra à nos requêtes parce que jusqu'à

21 présent, personne n'a répondu à nos requêtes par l'affirmative.

22 Je ne vais pas maintenant polémiquer avec le Bureau du Procureur mais l'un

23 de nos confrères du Bureau du Procureur a dit, à un moment donné,

24 concernant la réciprocité de divulgation des éléments, je tiens à répéter

25 que nous n'avions rien à proposer au Bureau du Procureur pour ce qui est

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1 d'une divulgation éventuelle parce que nous n'avons réussi à nous procurer

2 aucun élément de preuve étant donné que personne ne voulait nous aider.

3 Il convient également de se procurer la documentation médicale, chose

4 nouvelle qui est survenue et dont nous n'étions pas au courant au début du

5 procès. Il faudrait donc que nous confions ces documents à l'expert

6 médical pour qu'il nous dise ce qu'il en est, et ce témoin est un des

7 témoins clés. Il faut donc que nous voyions où nous en sommes avec

8 l'expertise.

9 Il est venu aussi un témoin qui nous a parlé d'une unité qui a passé le

10 même…, qui se trouvait en même temps là-bas sur les lieux avec l'Unité de

11 Vinko Skrobo et c'est une nouveauté. Il faut que nous procédions à des

12 vérifications pour déterminer avec exactitude ce qui s'est passé dans le

13 cadre de cette unité-là afin que nous puissions présenter à la Chambre les

14 éléments qui lui permettront de distinguer certains éléments en dépit des

15 coïncidences qui semblent survenir et qu'il convient que nous fassions

16 parce que personne d'autre ne le fera à notre place.

17 Autre question qui se pose, c'est la question des fusils en bois, cette

18 question en suspend. Pourquoi en suspend? Car s'il nous arrive, à quelque

19 moment que ce soit, que ces fusils en bois en viennent, arrivent devant

20 cette Chambre, puisque le Bureau du Procureur en a parlé, il faudra une

21 expertise pour que l'on voie si, par exemple, ce travail manuel n'aurait

22 pas été accompli après la guerre. C'est la raison pour laquelle nous avons

23 besoin d'encore un peu de temps.

24 Il y a encore les transcripts présidentiels. Si la Chambre adopte ou

25 accepte le versement au dossier de ces transcripts présidentiels, il

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1 faudra que nous contactions tout participant à ces entretiens pour que

2 nous voyions ce que tout un chacun a dit. Il faudrait qu'on leur demande

3 de venir témoigner et que nous les amenions ici, et je pense que c'est la

4 seule façon de faire qui nous permettra de définir s'il s'agit de

5 documents authentiques, s'ils ont pris part à ces entretiens, si leurs

6 paroles ont été transcrites avec exactitude, ou s'il s'agit d'un amas de

7 je ne sais trop quoi parce que nous avons entendu un témoin dire, Marko

8 Prelec qui a été contre-interrogé, un témoin nous dire qu'il ne savait

9 rien à ce sujet. Et c'est donc de cela que dépendra la nécessité de

10 travailler avec dix ou quinze témoins supplémentaires au niveau des

11 transcripts présidentiels.

12 Monsieur le Président, il se peut également qu'il y ait de notre part des

13 propositions, comme l'a dit M. Krsnik, de vous demander de voir sur place

14 quelle avait été la ligne de démarcation à Mostar, quelle était la

15 longueur de ce boulevard. Qu'est-ce que signifiaient ces 70 mètres qui

16 avaient été tenus par mon client, ce que cela représente?

17 Il est un vieux principe, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, qui

18 dit que de bons préparatifs nous font gagner du temps. Ce n'est pas une

19 perte de temps. Cela nous fait gagner du temps parce que si nous faisons

20 cela comme il se doit nous serons plus efficaces au niveau des débats dans

21 la présentation de nos éléments de preuve à décharge.

22 Et pour terminer, je souhaiterais dire que, même si cela semble

23 contradictoire, le principe de l'équité et de l'économie, ce sont deux

24 principes qui ne vont pas de paire. Je vous prierai de bien évaluer que

25 l'un ou l'autre soit adéquatement respecté, mais toujours dans le but de

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1 respecter le principe du droit, donc de nous accorder le temps nécessaire

2 pour pouvoir préparer notre défense.

3 M. le Président (interprétation): Maître Seric, la première chose que je

4 souhaite dire, c'est que la Chambre de première instance peut vous assurer

5 qu'elle fera tout son possible pour vous aider à vous préparer dans le

6 cadre de votre présentation. Si vous avez besoin de notre aide, vous

7 n'avez qu'à la demander. Nous ferons, je le répète, tout notre possible

8 pour vous apporter notre concours en ce sens.

9 Il y a une deuxième chose que je souhaite dire: pour qu'un procès se

10 déroule de façon équitable et rapide, eh bien, il faut prendre certaines

11 mesures. Votre client a le droit à un procès équitable et à un procès

12 rapide. Voilà plus de deux ans qu'il est en détention.

13 Mais, Monsieur Seric, je remarque tout de même que vous n'avez pas répondu

14 à l'une des questions qui étaient posées, question que j'ai, il est vrai,

15 posée directement à Me Krsnik, à savoir "Combien de témoins pensez-vous

16 citer à comparaître devant la Chambre?". Nous avons besoin, au moins,

17 d'une estimation.

18 Et puis, par ailleurs, y a-t-il des éléments de preuve dont vous allez

19 demander le versement par le biais de vos témoins? Voici ce que nous

20 souhaiterions savoir à ce stade de notre procédure.

21 Je vous rends la parole, Maître.

22 M. Seric (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

23 Il est vrai que j'ai omis de dire la chose suivante: c'est que cette

24 défense, dans sa requête écrite, a annoncé qu'elle avait 80 témoins à

25 citer à comparaître.

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1 Par contre, au cours de l'entretien que nous avons eu avec M. Fourmy, nous

2 avons conclu que le nombre minimal de témoins que cette défense désire

3 citer à comparaître, pour qu'elle puisse démontrer à la Chambre ce qui est

4 vraiment important pour pouvoir prouver l'innocence que nous désirons

5 prouver depuis le début, donc ce nombre en réalité serait d'environ 50

6 témoins.

7 Lorsque j'ai dit que la vision de la défense conjointe était d'avoir peut-

8 être 10 témoins de plus ou de moins, donc il faudrait que nous comptions

9 50 témoins pour nous et 60 témoins pour notre collègue, Me Krsnik.

10 Ai-je omis de dire quelque chose? Ah oui! Les documents.

11 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, j'ai déjà dit, au tout début,

12 que tous les documents dont dispose cette défense sont des documents qui

13 nous ont été communiqués par l'accusation. Il n'y a absolument aucun

14 nouveau document. Si nous avions de nouveaux documents, s'il s'avère que

15 nous avons de nouveaux documents à montrer, alors à ce moment-là, nous

16 présenterions ces nouveaux documents par le biais de témoins experts.

17 Il est certain que nous aimerions avoir le plus de documents possibles

18 pour pouvoir appuyer nos affirmations, mais je vous dis que, pour

19 l'instant, nous n'avons absolument aucun autre document que ceux qui nous

20 ont déjà été communiqués par nos collègues de l'accusation.

21 De ces documents qui nous ont été communiqués, si ces documents ne sont

22 pas encore versés au dossier et si jamais la défense désire verser

23 certains documents au dossier, il s'agira à ce moment-là des documents

24 dont la Chambre dispose déjà, qui se trouvent déjà dans ce Tribunal.

25 M. le Président (interprétation): Merci. Nous allons maintenant donner la

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1 parole à l'accusation.

2 Monsieur Scott, vous avez la parole.

3 M. Scott (interprétation): Oui, merci, Monsieur le Président, Mesdames les

4 Juges.

5 Je voudrais d'abord répondre de façon un petit peu précise à certains

6 arguments qui ont été évoqués et, ensuite, j'exposerai quelle est la

7 position de l'accusation quant à certains des problèmes qui ont été

8 soulevés. Nous en avons abondamment débattu entre nous, membres de

9 l'équipe de l'accusation, au cours des derniers jours.

10 Tout d'abord, Monsieur le Président, nous ne sommes pas du tout certains

11 de la façon dont nous arrivons à une liste de témoins qui comprendrait 350

12 témoins de l'accusation.

13 En octobre 2000, donc bien avant que le procès ne commence, nous avions

14 soumis une liste qui comptait 113 noms de témoins. Et puis, au bout du

15 compte, nous n'avons cité à comparaître que 83 témoins. 57 témoins sont

16 venus eux-mêmes déposer devant vous, 16 témoins ont fait des dépositions

17 et puis il y a 10 témoins dont nous avons utilisé les dépositions faites

18 dans le cadre d'autres affaires.

19 83 témoins sur les 113 prévus, ce n'est pas si mal en termes d'estimation,

20 et je ne pense pas que notre liste était particulièrement longue ou trop

21 exhaustive.

22 Je peux vraiment réaffirmer ici que le nombre de témoins qui est venu

23 finalement devant vous n'est pas si différent du nombre de témoins dont

24 nous avions pensé qu'ils seraient cités à comparaître.

25 Et puis, il faut également savoir que plus d'un an avant le début du

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1 procès, il existait une liste de témoins, mais également des synthèses de

2 ce que ces témoins allaient dire. Je ne sais donc pas pourquoi la défense

3 a dit cela.

4 Et puis je ne sais pas non plus pourquoi la défense dit qu'il y a 10

5 enquêteurs de l'accusation qui s'occupent des archives chaque jour. Mme

6 Del Ponte, notre Procureure, ne serait pas particulièrement heureuse

7 d'apprendre qu'il y a autant de gens qui travaillent sur une seule

8 affaire. Nous n'en sommes absolument pas à ce niveau de travail. Peut-être

9 qu'à une ou deux occasions, il y a eu certains membres de nos équipes qui

10 ont travaillé activement sur ce point, mais on ne peut pas en dire plus.

11 Maître Krsnik a parlé d'entretiens très exhaustifs, mais je dois expliquer

12 à la Chambre qu'à ce jour le Bureau du Procureur n'a pas reçu une seule

13 déclaration préalable de témoins de la défense. Il y a sans doute eu des

14 entretiens exhaustifs, mais nous avons encore à recevoir la trace de ces

15 entretiens sous la forme d'une déclaration préalable.

16 Maître Krsnik essaie de faire preuve d'optimisme, c'est bien, et il nous

17 dit qu'ils veulent recueillir la déposition de 30 témoins. Maître Krsnik

18 nous dit qu'il faudra environ une demi-heure à une heure pour chacun de

19 ces témoins. Moi, je ne voudrais pas faire ici le Cassandre, mais je peux

20 dire qu'un certain nombre de témoins de l'accusation n'ont pas dépassé un

21 temps de déposition d'une heure, et je parle là de l'interrogatoire

22 principal. Si l'on se base sur cette donnée de base, eh bien, je ne pense

23 pas que l'on puisse particulièrement se dire que la défense pourrait

24 réussir à diviser ce délai. Il faut consacrer du temps à ces dépositions,

25 mais je reviendrai sur ces points de détail dans quelques instants.

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1 Monsieur le Président, nous estimons que les commentaires qui ont été

2 faits à propos des transcripts de présidentielles sont vraiment exagérés.

3 Que la défense dise qu'elle va devoir citer à comparaître toutes les

4 personnes qui ont, de près ou de loin, pris part à ces entretiens c'est

5 vraiment exagéré, ce n'est pas réaliste. Ce n'est pas dit de façon

6 réaliste. Je crois que l'on essaie, en fait, de nous faire peur; c'est une

7 tactique que l'on peut choisir d'adopter. Il revient à la Chambre de

8 décourager la défense d'entreprendre cette stratégie. Je crois qu'en fait

9 la défense essaie de décourager la Chambre et essaie de faire en sorte que

10 la Chambre n'admette pas certains éléments de preuve. C'est une grosse

11 exagération.

12 Par ailleurs, Monsieur le Président, pour ce qui est du délai,

13 l'accusation a déjà fait état de sa position, cette position nous la

14 maintenons devant vous aujourd'hui. Nous pensons que le procès devrait

15 reprendre le lundi 4 mars 2002 et nous devrions voir, à cette date, la

16 première présentation des éléments à décharge de la défense.

17 Nous pensons que cela respecte la pratique qui a été adoptée par ce

18 Tribunal jusqu'à ce jour, et c'est même une pratique assez -ma foi-

19 généreuse. Certains des délais qui ont pu être accordés dans d'autres

20 affaires, plus longues d'ailleurs, étaient bien plus réduits.

21 Nous souhaitons également rappeler aux Juges de la Chambre que l'Article

22 65ter G) demande à chaque conseil de la défense de déposer une liste des

23 témoins, une synthèse des faits sur lesquels les témoins seront appelés à

24 se prononcer. Ce sont les différents points sur lesquels chaque témoin se

25 prononcera. Nous n'avons rien reçu de tout cela et nous ne pensons pas que

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1 la Chambre ait reçu quoi que ce soit d'autre. Nous demandons également

2 qu'une liste des pièces soit soumise, et nous n'avons pas vu trace de

3 cette liste.

4 Monsieur le Président, dans l'une de nos écritures qui a été remise à la

5 Chambre le 29 novembre dernier, et qui avait un lien avec la notice que

6 nous demandions, nous avions fait une analyse sur les temps de

7 notification qui étaient avancés dans le cadre de la citation à

8 comparaître des témoins. Nous avons regardé ce qui s'était passé pour les

9 20 premiers témoins et nous avons établi, qu'à l'exception d'un seul

10 témoin qui a été appelé un petit peu en retard du fait de la demande du

11 Greffe, à l'exception de ce témoin, donc aucun témoin n'a été appelé par

12 l'accusation dans un délai inférieur à 90 jours. Il y a toujours eu

13 notification d'au moins 19 jours avant l'arrivée de … le temps moyen de

14 notification pour tous les témoins de l'accusation a été de 35 jours.

15 Nous pensons que l'accusation doit bénéficier des mêmes conditions

16 lorsqu'il s'agira de la citation à comparaître des témoins de la défense.

17 Pour ce qui est maintenant des dépositions, Monsieur le Président, nous ne

18 pouvons pas vraiment répondre à quoi que ce soit. Nous avons déjà dit à la

19 défense, dans le cadre de notre réunion de la semaine dernière et dans le

20 cadre de nos différents mémoires, que nous ne disposons pas d'assez

21 d'éléments d'information pour répondre. Nous n'avons pas de liste de

22 témoins prévue pour ces dépositions, nous n'avons pas de synthèse, nous

23 n'avons pas d'arguments qui nous permettent de comprendre pourquoi ces

24 témoins devraient faire l'objet d'un recueil de dépositions. Nous ne

25 comprenons pas toujours pourquoi la défense souhaite opter pour ce recueil

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1 de dépositions.

2 Il a fallu plusieurs mois, plusieurs décisions afin que le terrain soit

3 éclairci. Nous avons établi qu'il fallait justement que les témoins soient

4 cités nom par nom, qu'il y ait une synthèse qui soit apposée au regard du

5 nom, et nous avons essayé de procéder de la façon la plus susceptible de

6 répondre aux dispositions de l'Article 71 du Règlement. Nous n'avons reçu,

7 de la part de la défense, aucun des éléments d'information que j'ai cités

8 précédemment, nous ne pouvons donc pas répondre. Lorsque l'information

9 nous sera fournie, nous la passerons en revue et nous essaierons

10 d'élaborer un petit peu notre réponse.

11 Pour ce qui est maintenant du recueil des dépositions -s'il y a un recueil

12 des dépositions-, et pour ce qui est de la période au cours de laquelle

13 ces dépositions devraient être recueillies, nous pensons -et nous sommes

14 majoritaires dans le Bureau du Procureur-, nous pensons que ces

15 dépositions ne devraient pas être recueillies au tout début de la

16 présentation des éléments à décharge. Ce n'est peut-être pas la façon la

17 plus efficace de procéder. La Chambre pourrait donner certaines

18 orientations à la défense. Nous ne savons pas quels vont être les moyens

19 de défense utilisés. Nous ne savons pas quelle va être la défense qui va

20 être construite pour chacun des accusés. Mais une fois que nous saurons

21 quels sont les moyens de défense retenus, nous nous apercevrons que

22 certaines dépositions ne sont pas nécessaires du tout. Donc il nous

23 semble, avec tout le respect dû, que le recueil des dépositions au tout

24 début des choses, avant qu'aucune information ne soit communiquée à

25 l'accusation, nous pensons donc que ce recueil de dépositions pourrait

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1 être un grand gaspillage de temps. Nous demandons donc que la Chambre

2 attende d'en savoir un petit peu plus sur les moyens de défense.

3 Ensuite, la Chambre et l'accusation pourront répondre de façon

4 constructive, et pourront éventuellement orienter la façon de procéder de

5 la défense.

6 Je vais prendre un exemple pour être un petit peu plus précis: Me Krsnik a

7 dit tout à l'heure que la défense ne souhaite pas invoquer des moyens de

8 défense "tu quoque". Je suis heureux de l'entendre dire, mais j'espère

9 qu'il va me pardonner si je fais preuve d'un certain scepticisme, du moins

10 j'attends de voir pour réagir.

11 Je cite un exemple: et si les 30 témoins qui vont donner une déposition

12 sont pour la plupart des témoins "tu quoque" justement, eh bien, pourquoi

13 aurions-nous besoins de ces dépositions? Pourquoi gaspiller du temps à

14 Mostar ou à La Haye pour recueillir ces dépositions? Vous voyez le

15 problème que j'essaye d'illustrer. Nous avons une absence d'informations

16 qui nous est préjudiciable. Nous ne savons pas si des déclarations

17 s'imposent ou pas. Nous ne disposons pas d'assez d'informations, je le

18 répète.

19 Pour ce qui est maintenant du lieu où ces dépositions devraient être

20 recueillies, en principe -et comme nous l'avons dit dans nos écritures-,

21 nous estimons que ces dépositions devraient être recueillies à La Haye.

22 C'est la position que l'accusation a choisi d'adopter. Et je crois que

23 l'une des choses que nous avons tous apprise ici, y compris les personnes

24 qui travaillent dans ce prétoire à différents titres, c'est que le recueil

25 de dépositions suppose qu'autant de personnes se déplacent et qu'autant de

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1 mesures soient prises que dans le cadre d'une réelle comparution de

2 témoins. Les ressources à utiliser sont les mêmes.

3 Donc, il est beaucoup plus simple de convoquer le témoin ici et de tout

4 faire ici, plutôt que d'avoir à se transporter en dehors de La Haye. Et

5 puis, nous pensons que cela pourrait potentiellement avantager, favoriser

6 la défense qui pourrait avoir accès à des témoins localement qui seraient

7 peut-être plus disposés à témoigner à Mostar qu'ils ne seraient prêts à le

8 faire à La Haye. Comme je l'ai dit à de nombreuses reprises, ce qui vaut

9 pour l'un vaut pour l'autre. L'accusation n'a pas eu, elle, l'occasion de

10 recueillir des dépositions sur le terrain, localement, et nous pensons

11 qu'il n'est que justice que la même règle s'applique pour la défense, à

12 l'exception d'une chose -et nous essayons de faire preuve de raison: s'il

13 y a démonstration du fait qu'il y a des témoins en nombre limité qui

14 pourraient utilement faire l'objet d'un recueil de dépositions, nous

15 serions prêts à envisager les choses d'une façon différente. Nous

16 ménageons une ouverture.

17 Nous pensons qu'un certain nombre très limité de dépositions pourraient

18 être recueillies à l'extérieur de La Haye, mais dans des conditions très

19 précises. Il faudrait notamment que le reste des dépositions soient

20 recueillies à La Haye.

21 Et puis, dans d'autres écritures, il a été fait référence à la possibilité

22 d'organiser des vidéoconférences. Nous répondons de la même façon que pour

23 les dépositions: qui, quoi, comment? Le Règlement prévoit également qu'il

24 y a possibilité d'organiser des vidéoconférences, mais encore faut-il que

25 les arguments présentés par la partie concernée soient fondés, soient

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1 considérés comme satisfaisants. Nous ne savons pas quels sont ces

2 arguments.

3 Monsieur le Président, voici quels sont nos arguments principaux. Nous

4 demandons également que l'Article 65ter soit respecté. Nous voulons qu'il

5 y ait pleine communication de la liste des témoins. Nous voulons cela des

6 deux équipes de la défense. Nous voulons également une liste des pièces à

7 conviction aussi rapidement que possible, et nous souhaiterions également

8 recevoir notification de l'ordre de comparution des témoins aussi

9 rapidement que possible.

10 Et puis, nous aimerions également avoir quelque chose qui corresponde à

11 peu près à ce qui a été fait par l'accusation en termes de temps utilisé

12 pour chaque témoin. Nous ne violons aucune règle en demandant cela; nous

13 n'essayons pas de tendre un piège à la défense, nous n'essayons pas de

14 pousser l'accusé à s'incriminer, mais il faut que tout soit fait de façon

15 parfaitement égale, n'est-ce pas? Il ne faut pas essayer de tirer des

16 ficelles ou d'avoir recours à des trucs.

17 L'accusation estime que ces communications de pièces sont nécessaires,

18 devront se faire, parce que c'est ainsi que la règle du jeu sera la même

19 pour tout le monde. Il faut faire preuve d'équité, tant vis-à-vis de

20 l'accusation que vis-à-vis de la communauté internationale. Merci.

21 M. le Président (interprétation): C'est moi qui vous remercie.

22 Il y a une question que nous souhaiterions poser au conseil de la défense.

23 Conformément à l'Article 65ter G), à l'issue de la présentation des moyens

24 à charge et avant la présentation des moyens à décharge, la défense doit

25 déposer un certain nombre de documents, à savoir une liste des témoins,

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1 une synthèse pour chacun de ces témoins, et une liste des pièces à

2 conviction que la défense entend présenter.

3 Nous souhaiterions savoir ce que les conseils de la défense ont à nous

4 dire sur ces points précis.

5 Maître Krsnik, je vous donne la parole, à vous en premier.

6 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, j'allais d'abord

7 aborder, en fait commencer par la réplique que j'aurai à formuler envers

8 mon éminent confrère. Ou désirez-vous d'abord que je réponde à la question

9 que vous m'avez posée? Bien, j'irai dans l'ordre inverse.

10 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, la défense, en ce moment-ci, ne

11 connaît pas beaucoup de choses. Pour ce qui est de la synthèse, nous

12 allons certainement communiquer la synthèse de nos témoins conformément à

13 la règle, mais pour l'instant, puisque j'ai déjà dit que nous nous sommes

14 entretenus avec des personnes qui pourraient être deux témoins potentiels,

15 nous ne savons toujours pas si ces derniers vont vouloir se déplacer, vont

16 vouloir vraiment venir témoigner.

17 Je peux comprendre tout à fait M. Scott lorsqu'il dit que la défense

18 devrait fonctionner de telle ou telle façon, car ils ont l'impression que

19 nous avons 500 hommes qui travaillent pour nous. Je n'ai pas quatre bras

20 et je ne veux pas me trouver à deux endroits au même moment. Je dois

21 constater, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, que depuis le mois

22 de juillet de cette année je dois répéter de nouveau que nous n'avons pas

23 eu une seule seconde de libre. Et je ne vois pas comment l'accusation a

24 l'impression que nous pouvons nous entretenir avec cinq choses à la fois.

25 Maintenant, pour ce qui est des témoins de synthèse: alors, maintenant,

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1 lorsque nous aurons la liste définitive et lorsque les témoins décideront

2 de vraiment vouloir venir témoigner, eh bien, là, ce sera autre chose

3 mais, pour l'instant, nous ne le savons pas.

4 Après nous être entretenus avec ces personnes, ces personnes semblaient

5 vouloir venir. Mais, à ce moment-là, nous avions 350 témoins potentiels

6 offerts par l'accusation.

7 Cela c'était avant les dépositions, donc deux mois avant la prise des

8 dépositions. C'était la première fois que nous avons entendu qui seraient

9 présents lors des dépositions. Et après les dépositions, nous avons reçu

10 une liste qui, de nouveau, avait été changée. Donc c'est la liste dont

11 nous disposons en ce moment.

12 Mais je ne sais peut-être pas, peut-être que la façon dont je m'exprime

13 est différente que ce qui paraît au compte rendu d'audience. Je ne peux

14 pas contrôler tout ce que je dis. Mais je ne dirai vraiment pas devant la

15 Chambre quelque chose qui n'est pas la vérité. Je n'oserais jamais faire

16 cela.

17 On répète toujours les mêmes choses: la défense avait le temps, nous avons

18 communiqué tous les documents. Non, la défense n'a pas eu suffisamment de

19 temps et le Procureur le sait très bien. Le Procureur sait très bien

20 également qu'il nous a fourni la liste finale en date du 10 septembre. Et

21 quelle est maintenant la raison pour laquelle on essaie, avec des effets

22 de toge, d'essayer de démontrer les choses de façon erronée, alors que les

23 faits sont complètement différents?

24 Nous savions deux mois avant..., nous avions une liste de 30 témoins…

25 Enfin, ces témoins, et nous n'avons pas pu trouver la réponse adéquate,

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1 même si nous avions voulu être très concis. Donc nous avions une liste de

2 30 témoins ou 15. Nous voulons être précis, nous voulons être concis pour

3 ne pas perdre de temps.

4 Si l'accusation s'était comportée de la façon dont elle prétend s'être

5 comportée, à ce moment-là, nous ne serions pas là pour dire cette chose-

6 ci. Il est différent, bien sûr, de parler de 150 témoins, de 10 témoins ou

7 de 15 témoins. Et c'est également autre chose de parler de la

8 documentation qui s'ensuit. Si j'ai reçu de l'accusation 200 documents un

9 an avant le début du procès principal, il aurait fallu que je les lise.

10 Alors que, ici, on nous communique 100 documents. J'aurais donc eu la

11 possibilité de lire 100 documents, et nous serions tous beaucoup plus

12 efficaces.

13 Monsieur le Président, si la défense parle d'une demi-heure après

14 l'interrogatoire principal, nous voulons être le plus concis. Donc

15 l'accusation ne peut pas me dire, en ce moment: "Nous ne savons pas qui

16 seront les témoins, s'il y aurait des témoins "tu quoque"."

17 Donc nous avons l'impression, ils ont l'impression que nous ne sommes pas

18 sérieux, que cette Chambre n'est pas sérieuse. Nous ne pouvons pas inviter

19 ici n'importe qui. Alors que, quand j'ai déjà dit que cela ne sera pas le

20 cas, il est certain que je ferai appel à des témoins qui seront très

21 concis et qui seront très conformes à l'Acte d'accusation.

22 Il est vrai que ces témoins seront très brefs; il y a certains témoins qui

23 n'auront que cinq phrases à dire, comme par exemple: "Monsieur le Témoin,

24 est-ce que vous avez été membre du Bataillon disciplinaire?", il me

25 répondra que non. Je lui dirai: "Merci, je n'ai plus d'autres questions".

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1 L'interrogatoire principal pourrait donc durer cinq minutes. Donc je ne

2 sais pas quelle est la durée du contre-interrogatoire à ce moment-là.

3 Je crois que j'ai été tout à fait clair. Je ne sais pas pourquoi on

4 essaye, avec des effets de toge, de déformer ce que j'ai dit d'une façon

5 très claire.

6 Il est vrai que les langues sont différentes. Il est peut-être vrai que

7 lorsque je parle et que c'est traduit en anglais, j'avoue que peut-être on

8 peut voir autre chose apparaître. Mais si j'ai déjà dit que M. le

9 Procureur n'a pas le droit de parler du temps au moment où l'Acte

10 d'accusation, il doit être prêt pour l'interrogatoire principal le jour

11 suivant, après avoir levé l'Acte d'accusation, après avoir fait l'Acte

12 d'accusation.

13 L'Acte d'accusation a été présenté en 1999, au mois de décembre. Donc, en

14 janvier de l'an 2000, l'accusation aurait dû être prête pour le début du

15 procès. Et voyez-vous ce qui est arrivé depuis le mois de septembre 1999

16 jusqu'au mois d'octobre de l'an 2001? On a interrogé les témoins de façon

17 ininterrompue.

18 Monsieur le Procureur a pris deux ans, il avait deux ans à sa disposition,

19 alors que nous, on nous demande de le faire en 4 semaines.

20 Monsieur le Président, Mesdames les Juges, nous sommes tout neuf ici,

21 devant cette Chambre, nous sommes nouveaux. Mais l'affaire Blaskic, par

22 exemple, a duré 3 ans, l'affaire principale a duré 3 ans; l'affaire Kordic

23 a duré un an et demi. La présentation des moyens à charge a duré un an et

24 demi; Kupreskic a duré également un an et demi. Il y avait seulement un

25 accusé chez Kordic, et chez Kupreskic il y en avait 5. Et donc, tous ces

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1 gens-là étaient accusés d'un ou deux chefs de l'Acte d'accusation.

2 Comment est-ce que l'on peut dire, à ce moment-là, que dans d'autres

3 affaires on a procédé de façon diverse.

4 En plus, Monsieur le Président, il s'agissait d'affaires qui se

5 déroulaient pendant 14 jours et ensuite, ils avaient 14 jours de répit.

6 Alors que là, on demande l'accusation, on coince l'accusation en 4

7 semaines. Je ne comprends pas. Je crois que c'est même dans l'intérêt de

8 l'accusation, car il ne s'agit pas ici d'un Tribunal qui se trouve aux

9 Etats-Unis. Et comme vous l'avez si bien dit, Monsieur le Président, il ne

10 s'agit pas d'une commission chargée de réconcilier les partis politiques.

11 Nous n'allons certainement pas parler des questions politiques qui

12 figurent à l'accusation. Nous devons également nous pencher sur les points

13 de l'Acte d'accusation. Maintenant il nous faudrait faire le tout en

14 quatre semaines. Et à ce moment-là, cela serait juste? Je crois que non,

15 et je crois que c'est dans l'intérêt de l'accusation d'être juste et

16 d'être objective. Et si nous pouvons voir par exemple que, s'il découle

17 que certains points ne sont pas vrais, je crois que l'accusation ou le

18 Procureur sera content également de voir que la justice a été rendue.

19 C'est la raison pour laquelle il est dans l'intérêt de la justice, je

20 crois, que le Procureur nous soutienne. Ce n'est pas ici une petite… ce

21 n'est pas un petit tribunal national, c'est un Tribunal historique.

22 L'histoire parlera de ce Tribunal.

23 Monsieur le Président, je crois que vous le savez, la défense le sait

24 également, il y avait certaines dépositions qui ont été prises à La Haye

25 pour la simple raison parce que les clients voulaient voir les personnes

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1 qui portent des plaintes contre eux. C'étaient des témoins de

2 l'accusation, mais les témoins de la défense ne désirent pas être

3 présents, c'est autre chose.

4 Je crois que c'est très clair car, si nous avions des témoins qui

5 viendraient à La Haye pour prendre des dépositions, je ne vois pas le but

6 de cela. C'est la raison pour cela, c'est la raison pour économiser des

7 frais et pour être économique, pour économiser des frais justement à

8 l'endroit de ce Tribunal, c'est la raison pour laquelle nous voulions

9 procéder de la sorte.

10 Vous allez pouvoir, Monsieur le Président, vérifier le tout. Vous allez

11 pouvoir savoir combien coûte par exemple la venue de 30 témoins à La Haye

12 et combien est-ce que cela coûte de faire entendre ces témoins là-bas. Ces

13 témoins vont témoigner d'une heure à une heure, par exemple.

14 Je n'osais pas dire 10 minutes, je ne sais pas combien de témoins il y

15 aura lors de l'interrogatoire principal, et qui témoigneront de 10 à 15

16 minutes car de 90 témoins, Monsieur le Président, nous allons avoir au

17 moins 90 témoins dont on fait état. Ces témoins qui ont déjà témoigné nous

18 allons devoir vérifier le tout. Est-ce que le Procureur croit vraiment que

19 la défense ne s'efforcera pas de faire amener des personnes pour

20 lesquelles le Procureur a affirmé qu'ils étaient soit des membres du

21 Bataillon disciplinaire ou d'autres bataillons? Mais ce sont des témoins

22 qui pourront venir témoigner que dans l'espace de 5 minutes et qui, sous

23 serment, diront la vérité.

24 Je vois qu'il est déjà tard, je ne veux pas vous fatiguer plus longtemps

25 mais je crois que j'ai été très clair. Et je crois qu'à ce moment-ci et la

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1 défense et l'accusation devraient fonctionner de concert. Merci.

2 M. le Président (interprétation): Maître Seric, je vous donne trois

3 minutes si vous souhaitez ajouter quoi que ce soit qui n'ait pas déjà été

4 dit par le conseil de la défense précédent.

5 M. Seric (interprétation): Non, Monsieur le Président. J'en aurai très

6 vite terminé. Je voudrais répondre brièvement à la question que vous avez

7 posée aux conseils de la défense.

8 Nous allons nous conformer au 65ter)G)i) sous le petit a). Nous n'allons

9 pas fournir les noms des témoins, mais juste les pseudonymes et ce pour

10 des raisons qui sont liées à la situation à Mostar, qui vous sont connues.

11 Nous allons nous conformer au même délai que ce qui avait été respecté par

12 le Bureau du Procureur à l'égard de la défense. Merci.

13 M. le Président (interprétation): Bien. Nous avons prêté une oreille

14 attentive à tous les arguments de la défense et de l'accusation et il

15 reste encore un certain nombre de points que la Chambre souhaite éclaircir

16 en posant des questions aux deux parties.

17 Les conseils de la défense déclarent que, dans d'autres affaires, les

18 délais ont été beaucoup plus longs, Blaskic trois ans, une autre affaire

19 un an et demi, des délais plus longs ont été invoqués. Mais les affaires

20 qui ont été entendues par ce Tribunal se sont déroulées dans des

21 circonstances différentes qui n'ont pas forcément à voir avec la nôtre et

22 il vrai que ce Tribunal a parfois été critiqué pour la longueur des procès

23 qu'il entendait, notamment il a été critiqué du fait de la longueur de la

24 procédure préalable à l'ouverture du procès.

25 Mais j'attire également votre attention sur les délais qui existaient

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1 entre la fin de la présentation des éléments à charge et le début de la

2 présentation des éléments à décharge. Si vous lisez la jurisprudence, vous

3 vous apercevrez que le délai le plus long qui est jamais couru est le

4 délai de deux mois qui a été respecté dans le cadre de l'affaire Blaskic;

5 une affaire très lourde, une affaire qui n'est pas encore arrivée à son

6 terme, je vous le rappelle.

7 Normalement, le délai n'est que de deux ou trois semaines.

8 La deuxième chose que je souhaite vous dire ici a trait au nombre de

9 témoins. Si nous partons du principe que le conseil de la défense a raison

10 de dire que l'accusation a failli citer à comparaître 350 témoins, nous

11 pouvons nous dire qu'effectivement le nombre réel de témoins qui est venu

12 devant nous s'est trouvé réduit à 83. Sur ces 83 personnes, 57 personnes

13 sont venues devant nous, 16 autres personnes ont choisi de comparaître par

14 voie de déposition, 10 autres témoignages ont été tirés de comptes rendus

15 d'affaires précédentes.

16 Nous voyons bien que tout cela est conforme aux limites qui avaient été

17 établies par le Juge de la mise en état, la Juge Wald. Et il faut être

18 très clair, la Juge de la mise en état, Mme la Juge Wald, dit quelque

19 chose dont je me souviens très bien: la Juge a demandé à ce que

20 l'accusation réduise la liste de ses témoins au nombre de 50 et elle a

21 demandé également à ce que le délai de comparution soit réduit à un délai

22 de 10 semaines.

23 Cette Chambre de première instance est fort surprise d'entendre les

24 conseils de la défense dire qu'il faudra citer, pour la présentation de

25 ses moyens à décharge, 120 témoins.

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1 Nous souhaiterions appliquer ici le principe éminemment important de

2 l'égalité des armes, et nous voulons qu'il soit très clairement dit ici

3 que les conditions préalables qui doivent être remplies pour

4 l'établissement de la liste des témoins doivent être les mêmes qu'elles

5 l'ont été pour l'accusation; c'est-à-dire 50 témoins qui doivent

6 comparaître, en principe, dans un délai de 10 semaines.

7 Bien sûr que tout cela est sujet à certains aménagements, à certaines

8 modifications, mais nous ne sommes pas prêts à entendre plus de témoins

9 que ce que j'ai dit et nous ne sommes pas prêts non plus à ce que les

10 comparutions durent beaucoup plus longtemps que le délai qui a été cité à

11 l'instant.

12 Nous estimons également, par ailleurs, qu'il est de l'obligation des

13 conseils de la défense de soumettre leurs écritures préalables à la

14 présentation des moyens à décharge conformément à l'Article 65ter G). Et

15 il est important d'encourager les rencontres entre les deux parties,

16 rencontres qui peuvent favoriser des accords portant sur les temps de

17 communication notamment, et les délais de communication.

18 Je lance à ce titre un appel et un avertissement: s'il n'y a pas d'accord

19 possible entre les parties ou si l'accord conclu est violé, eh bien, la

20 Chambre réagira en conséquence.

21 Pour ce qui est maintenant des délais, la Chambre de première instance

22 prendra bonne note des arguments qui ont été présentés tant par la défense

23 que par l'accusation lors de cette conférence de mise en état, et la

24 Chambre rendra sa décision en temps opportun. Les ordonnances nécessaires

25 seront rendues ultérieurement.

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1 Nous espérons voir la présentation des éléments à décharge commencer

2 aussitôt que possible; nous ne saurions retarder trop longtemps ce

3 deuxième stade de la procédure. Telle est la décision de la Chambre pour

4 le moment.

5 Il nous reste à traiter le point 5 à notre ordre du jour. Je me demande

6 donc s'il y a des questions que l'une des deux parties souhaite porter à

7 l'attention des Juges de cette Chambre; le moment en est venu.

8 Monsieur Scott, je vous donne la parole.

9 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, votre équipe m'a signalé

10 qu'une question se posait quant à l'un des témoins qui a dit qu'un nom de

11 témoin avait été mentionné. On a parlé d'une déclaration, on s'est demandé

12 si cette déclaration avait été recueillie ou pas. Moi, je pensais que

13 cette déclaration avait été fournie. Si ce n'est pas le cas, je suis tout

14 à fait prêt à faire remettre à la Chambre et à la partie adverse cette

15 déclaration. Il s'agit d'un témoin protégé, je ne vais donc pas citer ici

16 son nom. Moi, j'étais vraiment convaincu que ce document avait d'ores et

17 déjà été distribué. La greffière d'audience va nous donner des indications

18 nécessaires.

19 M. le Président (interprétation): Merci beaucoup.

20 Je crois que Me Krsnik avait posé cette question lors de notre dernière

21 rencontre. J'espère que cette intervention de l'accusation va dissiper

22 tous les doutes qui pouvaient peser quant à une révélation de l'identité

23 du témoin protégé.

24 Monsieur Krsnik? Oui, vous avez la parole.

25 M. Krsnik (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

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1 Permettez-moi seulement de prononcer maintenant deux ou trois phrases. Je

2 voudrais d'abord me référer, en deux ou trois phrases, sur ce qui a déjà

3 été dit. Puis, par la suite, j'aimerais soulever une question des plus

4 sérieuses, que nous ne ferons que soulever aujourd'hui.

5 Ce que je voudrais dire, Monsieur le Président, Mesdames les Juges,

6 maintenant, c'est que l'affaire qui sous-entend l'Acte d'accusation à

7 l'égard de mon client comporte plus de chefs d'accusation que pour ce qui

8 est de l'affaire Blaskic. Si l'affaire Blaskic avait été volumineuse,

9 celle-ci l'est davantage.

10 Si, maintenant, nous aspirons à des procès équitables, il convient de

11 prendre en considération cet élément-là aussi. Et j'estime que vous avez

12 tout à fait raison quand vous dites que nous ne pouvons pas comparer une

13 affaire à une autre.

14 Si une affaire a duré -pour ce qui est du principal, du débat principal-

15 trois ans, et si dans cette affaire-là la défense a eu le temps de mieux

16 se défendre et a obtenu quand même deux mois pour se préparer dans des

17 circonstances où les défenses -et je ne vais pas commenter, je ne vais pas

18 m'aventurer dans le détail-, où il y avait 5 à 7 avocats qui étaient assis

19 au banc de la défense… Je ne vais pas comparer avec mon affaire.

20 Donc, ce que je voudrais dire, c'est partir du moment où la présentation

21 des éléments à charge est terminée pour ce qui est du Bureau du Procureur

22 -j'estime que c'est de cette date-là que l'on commence à compter le délai

23 pour la défense. Et je voudrais vous dire, dire à la Chambre, et vous

24 exprimer beaucoup de respect pour tout ce que vous avez dit ici.

25 Je voudrais donc souligner que je ne tiens pas du tout à me lancer dans

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1 des aventures. Et pour moi, aventure… une aventure, c'est toute chose que

2 je n'aurais pas préparée de façon consciencieuse. Je ne veux pas avoir de

3 conséquences catastrophiques pour mon client. J'ai la destinée de mon

4 client sur ma conscience. Je ne voudrais pas que l'on me montre un jour ou

5 l'autre du doigt.

6 Aussi voudrais-je que la Chambre comprenne bien que les paroles que je

7 viens de prononcer viennent du fond de ma conscience, du fond de mon coeur

8 et du fond de l'éducation et du fond de ce que je conçois être ma

9 profession. Et j'entends me conformer à ces convictions.

10 La question que je voulais soulever devant cette Chambre, c'est toute une

11 série de questions que la Chambre en question ignore: elle vit à des

12 milliers de kilomètres des lieux d'événements. Elle ne connaît pas le

13 contexte dans lequel nous vivons. C'est une chose qui nous affecte tous.

14 Je tiens à dire que je vais demander une conférence ex parte, une audience

15 ex parte où je voudrais expliquer à la Chambre les problèmes auxquels fait

16 face la défense et ce, dans l'intérêt de la protection des intérêts des

17 témoins du groupe ethnique bosnien musulman et ce, je voudrais parler de

18 problèmes soulevés par des services, par des coups fourrés, par ce qui est

19 fait au niveau des médias.

20 Je voudrais que la Chambre se mette à ma place: si les journaux publient

21 que Mladen Naletilic inculpe ici des témoins, justement des témoins

22 potentiels -et cela dure depuis un an- et quand je viens voir ces gens-là,

23 quand je frappe à leur porte, vous savez la réponse qu'ils me donnent,

24 vous vous en doutez. Il s'agit là d'obstruction sous forme de guerre

25 spéciale, qui vise à entraver cette défense pour ce qui est d'une bonne

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1 exécution de ce travail.

2 Donc, je ne vais pas maintenant m'aventurer dans ce sujet. Je vous annonce

3 d'ores et déjà que je demanderai très prochainement une audience ex parte

4 où je vous présenterai dans le détail tous les problèmes auxquels nous

5 faisons face, et je demanderai aide et compréhension de votre part. Je ne

6 doute aucunement que cette aide et compréhension me feront défaut de votre

7 part.

8 C'est tout ce que je voulais vous dire pour le moment. Merci.

9 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Nous prenons bonne

10 note de vos propos. Nous en prendrons bonne note également dans le cadre

11 de nos délibérations.

12 Je pense que nous avons tout passé en revue. L'audience est donc levée.

13 Merci à tous.

14 (L'audience est levée à 17 heures 58.)

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