Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 15 mai 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 14 heures 27.)

3 (Audience publique.)

4 (Le témoin, M. Zeljko Glasnovic, est dans le prétoire.)

5 (Interrogatoire principal du témoin, M. Zeljko Glasnovic, par Me Krsnik.)

6 M. le Président (interprétation): Veuillez citer l'affaire, Madame la

7 Greffière.

8 Mme Thompson (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames

9 les Juges. Il s'agit de l'affaire n°IT-98-34-T, le Procureur contre Vinko

10 Martinovic et Mladen Naletilic.

11 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik, vous êtes prêt?

12 M. Krsnik (interprétation): Oui, Monsieur le Président, je vous remercie.

13 Bonjour, Monsieur Glasnovic.

14 M. Glasnovic (interprétation): Bonjour.

15 Question: Continuons avec nos questions, si vous le voulez bien, et je me

16 propose de commencer avec ce qui suit. L'accusation affirme que le HVO -le

17 HVO je dis bien- a commencé en avril 1993 des actions systématiques et de

18 grande envergure visant à expulser des civils musulmans, et ce aux fins de

19 réaliser ou d'aboutir à des territoires ethniquement purifiés s'agissant

20 des territoires habités par les Croates. Que répondriez-vous à de telles

21 allégations ici face aux Juges de cette Chambre?

22 Réponse: Eh bien, je fonderais mon observation sur ce que j'ai vu et sur

23 ce que j'ai vécu en Bosnie-Herzégovine, et ce depuis 1991 à ce jour. Je

24 dirais donc que la théorie est erronée, c'est tout à fait faux.

25 Question: Mais pourquoi? Quelles sont vos connaissances personnelles?

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1 Parce que la Chambre est curieuse de connaître vos connaissances

2 personnelles. Pouvez-vous nous expliquer, partant de quoi, vous nous dites

3 ceci?

4 Réponse: D'une part, les conflits en Bosnie-Herzégovine ne s'étaient pas

5 réduits à un seul conflit. Ces conflits étaient constitués de toute une

6 série de conflits qui avaient une apparence par rapport à quoi la période

7 de Renaissance en Italie ressemblerait à du Disneyland ou à du Parc

8 Astérix.

9 Réponse: Mais je voudrais ajouter également que ce qui m'intrigue c'est

10 également la date. Pourquoi a-t-on pris cette date-là pour désigner le

11 démarrage des animosités entre les Croates et Musulmans, parce que pour

12 autant que je le sache, les premiers conflits ont commencé à un niveau

13 local en été 1992, et ce, dans la municipalité d'Uskoplje. Je pourrais

14 vous citer dans l'ordre chronologique, si vous le souhaitez, les conflits

15 dont il est question.

16 Question: Oui, allez-y.

17 Réponse: Le conflit d'après, dont je suis au courant, avait eu lieu entre

18 les Croates et Musulmans pendant la défense de Jajce, pendant que l'on

19 envoyait des renforts à Jajce, en automne 1990, et pour être tout à fait

20 précis vers début octobre, des barrages routiers musulmans -et pour

21 simplifier la terminologie, je vais parler du MOS, ce qui signifie "Forces

22 Armées Musulmanes"…

23 Question: Et qu'est-ce que cela veut dire?

24 Réponse: Ça veut dire "Forces Armées Musulmanes" et pas "Armée de Bosnie-

25 Herzégovine", parce que l'armée de Bosnie-Herzégovine n'existait pas à

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1 l'époque et il n'y a pas eu de tentative d'intégration de l'armée de la

2 Fédération jusqu'au moment où il y a eu signature des Accords de Dayton.

3 Par conséquent, c'est vers le début octobre 1992 que les unités du MOS ont

4 bloqué les routes susceptibles d'amener des renforts vers Jajce. Le

5 conflit d'après a eu lieu à Prozor.

6 Question: Je voudrais que vous expliquiez également à la Chambre qui est-

7 ce qui a bloqué les routes et pourquoi l'arrivée des forces croates pour

8 défendre Jajce?

9 Réponse: Les unités des MOS avaient bloqué les routes, avaient barré les

10 routes, et il n'y avait qu'une route pour aller à Jajce et c'est cette

11 route-là que l'on avait barré.

12 M. Krsnik (interprétation): A Jajce, il y avait des Musulmans?

13 M. Glasnovic (interprétation): Je ne puis que présumer.

14 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott.

15 M. Scott (interprétation): Je m'excuse, mais on n'a pas à faire de

16 suppositions ou de spéculations.

17 M. Glasnovic (interprétation): La route avait été bloquée, c'était un

18 fait.

19 M. le Président (interprétation): Nous avons des difficultés parce que la

20 traduction précédente a continué. Il y a confusion des réponses et des

21 questions, et nous ne pouvons pas suivre sur le compte rendu d'audience.

22 Alors, Monsieur Scott?

23 M. Scott (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Tout d'abord, on

24 avait posé une question demandant au témoin d'émettre une spéculation en

25 lui demandant de nous dire pourquoi le MOS avait fait quelque chose. Mais

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1 il n'y a pas de raison de savoir qu'il était en mesure de faire des

2 évaluations dans ce sens-là. Il avait dit qu'il était lui-même en mesure

3 de faire des suppositions.

4 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik?

5 M. Krsnik (interprétation): Non, Monsieur le Président.

6 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, reformulez votre

7 question.

8 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, je viens de réétudier

9 les questions et la traduction qui figure au compte rendu. Je n'ai pas

10 demandé que l'on fasse des spéculations, j'avais demandé des connaissances

11 personnelles.

12 Je vais donc reformuler: est-ce que personnellement, vous avez eu

13 connaissance de la chose? Est-ce que vous vous êtes dirigé vers Jajce pour

14 aider les forces croates?

15 M. Glasnovic (interprétation): Pas moi.

16 M. le Président (interprétation): Ralentissez, ralentissez.

17 M. Glasnovic (interprétation): Quand j'ai dit "je suppose", j'entendais

18 que je ne me trouvais pas directement à cet endroit-là à l'époque. Mais je

19 sais que ces choses-là sont arrivées parce qu'à l'état-major, à mon

20 quartier général, nous recevions des rapports quotidiens afférents à la

21 situation et nous avions des briefings quotidiens.

22 M. Krsnik (interprétation): Excusez-moi d'interrompre, vous continuerez.

23 Donc ce sont des connaissances personnelles? N'exposez pas des opinions,

24 je vous prie, mais je voudrais que vous nous parliez de ce que vous savez

25 personnellement à ce sujet. Ou alors, si quelqu'un vous a dit…, et il faut

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1 que vous disiez donc, par son nom et prénom, qui vous l'a dit au sein de

2 l'état-major. Donc, il faut que vous soyez certain de ce que vous êtes en

3 train de nous dire.

4 Réponse: Je me suis entretenu avec de nombreux officiers parce que j'étais

5 intéressé par le tout début des polarisations au niveau de la situation et

6 j'avais obtenu des réponses concrètes de la part du commandant chargé de

7 la défense de Jajce, M. Simunovic. En outre, je crois que le général

8 Filipovic m'avait fourni des réponses de ce genre également. Et je puis

9 continuer: excusez-moi de le faire.

10 Après le conflit de Prozor, il y a eu des combats à Uskoplje en janvier

11 1993 et j'y ai personnellement pris part, tant aux conflits qui ont eu

12 lieu à Prozor qu'aux conflits qui ont eu lieu à Uskoplje.

13 M. Krsnik (interprétation): Dites-nous qui a attaqué à l'occasion de tous

14 ces incidents dont vous êtes en train de parler.

15 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott?

16 M. Scott (interprétation): Je fais objection, Monsieur le Président,

17 partant de la pertinence et de la défense par "tu quoque". Cela n'a rien à

18 voir avec l'affaire.

19 M. le Président (interprétation): Eh bien, Maître Krsnik, je pense que,

20 dès le départ de ce procès, nous avions dit que la Chambre de première

21 instance ne pouvait pas accepter une défense par "tu quoque", à moins que

22 vous ne montriez que ces incidents aient quelque chose à voir avec ce qui

23 est arrivé par la suite; c'est dans ce cas-là seulement que nous pourrions

24 entendre le témoignage du témoin là-dessus, parce que nous pourrions avoir

25 des doutes concernant la pertinence de ce témoignage pour ce qui concerne

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1 notre affaire.

2 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges, je

3 vais tout de même finir par me dire que je fais un travail inutile parce

4 que, dans l'Acte d'accusation, il est clairement précisé -et il a

5 également été présenté des éléments de preuve à cet effet- que le HVO,

6 depuis le mois d'avril, avait commencé à attaquer et avait procédé à des

7 nettoyages ethniques à l'égard de la population civile. Donc, c'est un

8 moment qui est crucial pour ce qui est du procès, en l'occurrence.

9 Donc nous sommes en train de présenter des éléments de preuve qui disent

10 que nous n'avons pas attaqué, mais qu'au contraire, les choses avaient

11 commencé un an plus tôt. Et ceci pour arriver à avril, Konjic, Jablanica,

12 Prozor et finir le 9 mai à Mostar, le 30 juin à Mostar. Si la Chambre n'a

13 pas vu une vue d'ensemble de la situation, partant de témoignages sous

14 déclaration solennelle, nous ne serions pas en mesure d'aboutir à la

15 vérité.

16 Il ne s'agit pas là d'un "tu quoque". Ce n'est pas sous le prétexte

17 d'avoir un "tu quoque", d'empêcher la défense de contester l'Acte

18 d'accusation dans ses parties les plus importantes.

19 Parlant de Mostar, le 9 mai ou le 14 avril, cela ne tombe pas des nues. Et

20 nous avons un témoin qui, à l'époque, avait un grade important en Bosnie-

21 Herzégovine en 1992; il serait juste de l'entendre nous dire la vérité

22 sous déclaration solennelle.

23 Pourquoi le Procureur s'est-il efforcé, lors de ses contre-

24 interrogatoires, de parler de Prozor et Stolac, alors que cela ne figure

25 même pas dans l'Acte d'accusation? Il a procédé à des contre-

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1 interrogatoires avec des témoins de la défense.

2 Voilà un homme qui a été à Prozor. Il aura l'occasion de le contre-

3 interroger.

4 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, tout d'abord, je voudrais

5 dire que cette Chambre de première instance traite de la responsabilité

6 personnelle plutôt que la responsabilité de certaines organisations, comme

7 par exemple le HVO.

8 Deuxièmement, je me dois de dire que les éléments de preuve que vous

9 présentez doivent être en corrélation avec les actes concrets qui figurent

10 à l'Acte d'accusation, les points concrets de l'Acte d'accusation, les

11 chefs de l'Acte d'accusation.

12 Troisièmement, il faut que ce témoignage nous indique qu'il y a

13 corrélation entre ce qu'il est en train de dire et des attaques

14 systématiques et de grande envergure de la part des Musulmans. Et on va

15 vous laisser avancer pour voir jusqu'où l'on en arrivera.

16 M. Krsnik (interprétation): Mais il y a responsabilité personnelle. On

17 affirme que, dans cette campagne-là, mon client avait été un intervenant

18 qui avait pris part. Donc cela a quelque chose à voir et il y a une

19 corrélation avec la responsabilité personnelle.

20 Vous savez très bien ce que le Procureur a dit: que le Président Tudjman

21 avait ordonné, que le HVO avait mis cela en application et que Blaskic,

22 Kordic et les autres avaient organisé le tout.

23 Monsieur le Témoin, vous avez été à Prozor; la Procureure affirme qu'il y

24 a eu une persécution de femmes, d'enfants et de vieillards et qu'on avait

25 mis le feu à des maisons. Est-ce vrai?

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1 M. Glasnovic (interprétation): Cela est tout à fait inexact. Tout d'abord,

2 je voudrais dire que la théorie du nettoyage ethnique, de la terreur

3 planifiée, à mon avis, est plutôt une chose qui relève de l'énigme.

4 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott?

5 M. Scott (interprétation): Je vais faire objection. Tout d'abord, c'est

6 une question qui n'a rien à voir. Deuxièmement, le témoin n'est pas un

7 expert; il n'est pas venu en tant qu'expert politique ou expert en matière

8 d'histoire ou de sociologie.

9 Je n'ai pas à faire objection pour ce qui se situe dans le cadre

10 raisonnable de ses connaissances militaires, de son expérience militaire

11 directe, mais ce que nous avons entendu jusqu'à présent, ce sont ses

12 opinions personnelles et il s'agit d'une personne, d'un témoin qui n'a pas

13 été agréé par la Chambre en qualité d'expert.

14 M. le Président (interprétation): Eh bien, Témoin, lors d'un témoignage in

15 vivo, nous voulons entendre du témoin ce qu'il a entendu, ce qu'il a vu au

16 moment donné. Il ne peut pas y avoir spéculation ou supposition concernant

17 les événements. Nous vous demanderions donc de nous parler de ce que vous

18 avez vu ou de ce que vous avez fait.

19 M. Krsnik (interprétation): Est-ce qu'en votre qualité de commandant,

20 partant de 1992 et par la suite, il vous est arrivé de recevoir des ordres

21 ou de procéder de votre propre initiative à des nettoyages ethniques?

22 M. Glasnovic (interprétation): Si l'on me permettait de terminer mes

23 réponses, je pourrais clarifier les choses.

24 M. Scott (interprétation): Je fais objection! Il n'appartient pas au

25 témoin de décider de ce qui est une réponse importante; c'est à la Chambre

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1 de le dire.

2 M. le Président (interprétation): Eh bien, nous allons entendre le témoin

3 et décider si son témoignage est pertinent ou pas, s'agissant de l'affaire

4 dont nous traitons.

5 M. Glasnovic (interprétation): Avant de commencer à parler de détails et

6 de ce qui est arrivé à Prozor, je voudrais dire une chose. Le fondement

7 d'une campagne militaire réussie, d'une campagne militaire bien planifiée

8 requiert deux choses: d'abord, une mission, une mission claire et une

9 intention bien définie.

10 En ma qualité de commandant de la brigade, lors du conflit à Prozor,

11 j'étais censé avoir des connaissances sur les intentions de mon

12 commandant, et non seulement du commandant qui se trouve à un grade au-

13 dessus de moi, mais au moins à deux grades au-dessus de moi. Donc il ne

14 s'agirait pas non seulement de l'état-major qui avait été à la tête de la

15 zone tout entière, mais également de l'état-major principal, du grand

16 état-major du HVO. Et nul ordre, ni oral ni écrit, ne m'avait été donné;

17 il n'y avait pas eu d'ordre qui me préviendrait, qui nous préviendrait et

18 qui est censé arriver avant toute opération pour procéder à ce que vous

19 avez suggéré au niveau des événements de Prozor.

20 J'ai été à Prozor, j'étais présent à Prozor en date du 22. Je me trouvais

21 là-bas un jour avant les conflits. Je me trouvais en visite de service

22 parce que mon aile droite se trouvait être couverte par la brigade Rama.

23 Et, à l'époque, dans la ville de Prozor, il y avait deux quartiers

24 généraux: il y avait le quartier général de la TO, de la Défense

25 territoriale, et le quartier général du HVO.

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1 Je me suis entretenu avec les deux commandants et je n'ai vu aucun signe

2 précurseur qui nous laisserait entendre qu'il y aurait conflit ni que le

3 conflit serait éminent. Le jour d'après, j'ai reçu un message, un

4 communiqué de la part du chef du quartier général de cette Brigade Rama,

5 que j'ai confié au présent Tribunal lorsque je suis venu ici la fois

6 passée lorsque je n'avais pas parlé du début du conflit à Prozor. Lui-même

7 avait appris la chose à l'occasion d'une réunion conjointe entre les deux

8 quartiers généraux, à savoir le quartier général de la TO, de la Défense

9 territoriale, et du HVO.

10 A l'occasion de la réunion, l'un des membres du HVO, Franjo Zadro, a été

11 tué; il a été tué par un Musulman, un soldat musulman. C'est là qu'il y a

12 eu escalade du conflit. Par la suite, j'ai appris que la Défense

13 territoriale avait quitté ses positions, positions qui étaient tenues de

14 concert avec le HVO, face à la Republika Srpska.

15 J'ai également effectué une visite au niveau de ces lignes de front, une

16 semaine auparavant, et les deux composantes se trouvaient à ce moment-là

17 ensemble sur les lignes de front. Les armes et les équipements ont

18 commencé à disparaître des entrepôts. Et lors de la visite en question, la

19 ville avait été pratiquement divisée, partagée en une partie supérieure et

20 une partie inférieure.

21 La requête présentée par M. Kolakusic, chef du département opérationnel de

22 la Brigade Rama, avait demandé de l'aide en provenance de la brigade

23 voisine et nous nous trouvions être les plus proches, j'ai donc mobilisé

24 cette brigade. J'en ai informé mes supérieurs, à savoir M. Siljeg, et je

25 l'ai prévenu 24 heures à l'avance… Ou plutôt j'avais donné, 24 heures à

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1 l'avance, ordre aux soldats d'être prêts à se déplacer.

2 Je suis arrivé dans la nuit du 24. Je suis entré dans la ville moi-même

3 avec quelques membres du quartier général et dans la ville même, pendant

4 la nuit, je n'ai pas vu de dégâts collatéraux d'importance, exception

5 faite d'une maison qui était en train de brûler en centre-ville et

6 exception faite d'un cadavre qui était vêtu d'un uniforme et qui se

7 trouvait allongé en plein milieu de la rue.

8 Toutefois, on pouvait encore entendre le bruit de combats qui avaient lieu

9 dans la banlieue de la ville et sur les collines qui entouraient-ci. Je

10 suis entré en communication avec le commandant de la Brigade Rama et il a

11 été décidé -en raison de cette situation détériorée, dans la proximité

12 immédiate et pour des raisons de sécurité- d'envoyer la brigade ou plutôt

13 des parties de ma brigade qui arrivaient le jour d'après. Donc, il a été

14 déterminé des paramètres de sécurité, parce qu'à l'époque nous n'avions

15 pas d'idée nette et précise concernant les troupes, c'est-à-dire leur

16 disposition.

17 Des tirs sont survenus du village Kute et Scipe, et c'est à ce moment-là

18 que des membres de ma brigade ont été tués; c'était la première que nous

19 avons eu des morts. Il y a eu des morts, des blessés et des prisonniers

20 dans ces conflits entre Musulmans et Croates.

21 Cette nuit, donc, j'ai contacté le quartier général, l'état-major du HVO

22 et je me suis personnellement entretenu avec le général Praljak. Les

23 termes exacts que j'ai adressés à son intention étaient les suivants: "Il

24 faut arrêter cette folie avant que cela n'aille trop loin". Il m'a informé

25 qu'il y avait eu des négociations; il m'a donné le terme "pregovori" en

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1 croate, pour ces négociations entre le HVO et la TO, et que je serais

2 informé aussitôt que possible des décisions auxquelles on était arrivé.

3 Le matin d'après, j'ai conduit une colonne de véhicules blindés et dans

4 cette colonne, il y avait un char. En fait, c'étaient des effectifs de

5 petite importance, de la taille d'une compagnie. Il y avait avec moi le

6 commandant de cette Brigade Rama; à l'époque, le commandant était M.

7 Beljo.

8 Question: Est-ce que le conflit s'est calmé par la suite? Est-ce qu'il y a

9 eu des délégations qui sont venues à Prozor? Enfin, abrégeons un peu.

10 Réponse: J'y arrive et je pense que cela est d'une importance vitale pour

11 le témoignage.

12 Si nous avions eu l'intention, à cette époque-là, de procéder à un

13 nettoyage ethnique, dans ce cas-là on aurait pu se rendre sans problème à

14 Jablanica. Dans tous les cas, on aurait pu se rendre jusqu'au tunnel, le

15 tunnel qui mène vers Jablanica car il y a une partie, un territoire où

16 j'ai envoyé des unités de reconnaissance et il m'a informé qu'il n'y avait

17 pas de forces qui surveillaient la route, la route dont je viens de

18 parler.

19 J'ai stoppé, j'ai arrêté la colonne et dans un village, le premier village

20 au sud de Prozor, je suis descendu du transporteur de troupes. J'ai pris

21 avec moi quelqu'un qui est de cet endroit-là, qui y habite, puis j'ai

22 rendu visite à quelques villages, ceci pour diminuer les tensions entre

23 les civils, aussi bien que les Croates et Musulmans, et pour leur dire

24 également que les négociations étaient en cours et qu'une solution

25 politique serait trouvée pour leur problème.

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1 Par la suite, je me dois de vous dire également qu'il y a un proverbe

2 chinois selon lequel "l'eau qui brûle, qui a pris du feu, ne va pas

3 pouvoir véritablement sauver; donc l'eau qui est trop loin ne peut pas

4 sauver la maison qui est incendiée".

5 Ceci pour dire que si je savais qu'il y avait le conflit qui allait

6 s'étendre, à ce moment-là, j'aurais réagi différemment. Parce que, si

7 jamais il y avait un projet, un plan pour s'emparer de Prozor, à ce

8 moment-là, dès cette nuit, j'aurais mobilisé les forces pour les

9 transférer jusqu'aux endroits où elles pourraient intervenir, le plus tôt

10 possible.

11 Question: Mais est-ce que vous êtes au courant de ce qui s'est passé à

12 Prozor, parce que je pense qu'il y avait un certain nombre de missions qui

13 s'étaient rendues à Prozor? Vous êtes au courant?

14 Réponse: Oui, tout à fait. C'est le jour même, en effet, qu'une délégation

15 conjointe s'était rendue sur place en provenance de Jablanica. C'est une

16 mission qui était composée aussi bien de civils que de militaires. Et je

17 me souviens que le général musulman Arif Pasalic était sur place, ainsi

18 que Zaric, Mate Zaric, qui avait présidé le HDZ à Jablanica; je me

19 souviens. Et c'est de cette manière-là que le conflit a pris fin.

20 Question: Mais qu'est-ce que vous avez pensé quand vous avez dit, quand la

21 dernière fois vous vous êtes rendu devant le Tribunal?

22 Réponse: Oui, mais moi, j'étais ici au Tribunal, en février de cette

23 année.

24 Question: Mais vous avez témoigné devant le Tribunal, devant une Chambre?

25 Réponse: Non.

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1 Question: Vous pensez probablement à une déclaration que vous avez donnée

2 au Bureau du Procureur?

3 Réponse: Oui, j'ai donné une déclaration préalable.

4 Question: Je le sais. Mais nous allons revenir sur ce sujet-là.

5 Réponse: J'ai donné un certain nombre de documents à l'équipe de Bureau du

6 Procureur.

7 Question: Nous allons revenir sur ce sujet plus tard.

8 Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, répondre à une autre question?

9 D'après vous-même, est-ce que le HVO avait opéré face à la TO, face à LOS

10 ou face à l'armée de Bosnie-Herzégovine? Est-ce que le HVO avait opéré

11 face aux unités militaires du peuple musulman?

12 Réponse: Eh bien, je n'ai aucune indication que ceci s'était produit dans

13 le secteur dans lequel je me trouvais.

14 Question: Est-ce que vous avez été attaqué par ces forces? Vous avez parlé

15 d'incidents: qui a attaqué et qui a provoqué des conflits?

16 Réponse: Il y avait une radicalisation qui s'est produite au sein de

17 l'armée, au sein également de la direction civile, dans des municipalités

18 conjointes où habitaient aussi bien les Musulmans que les Croates. Cette

19 radicalisation a conduit jusqu'à la polarisation et jusqu'au conflit.

20 L'arrivée des Musulmans de Sandzak, de l'Iran, du Maroc et de quelques

21 autres pays -en plus, je dirai que nous étions en présence d'une

22 occupation ethnique parce qu'il y avait un certain nombre de communautés

23 croates qui se sont rendues sur nos territoires- a provoqué un

24 déséquilibre et a provoqué le conflit.

25 Question: Mon Général, je vais vous montrer maintenant les deux pièces à

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1 conviction; l'une est marquée D1/74 et l'autre D1/75. Je vais demander à

2 l'huissier de vous remettre les deux pièces à conviction et surtout de les

3 placer sur le rétroprojecteur.

4 (Intervention de l'huissier.)

5 Monsieur l'Huissier, d'abord D1/74.

6 Monsieur le Témoin, auriez-vous l'amabilité de nous donner lecture de

7 cette phrase qui est en BCS? Nous n'avons pas eu le temps pour la

8 traduire.

9 Réponse: "Les incidents de l'armée de Bosnie-Herzégovine à l'égard du HVO,

10 pour le mois de mai et décembre 1992." (Fin de citation.)

11 M. Krsnik (interprétation): Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît,

12 mettre cette carte sur le rétroprojecteur? Vous avez le pointeur.

13 Est-ce que, d'après vous et d'après vos connaissances personnelles, les

14 incidents de l'armée de Bosnie-Herzégovine face au HVO figurent ici sur

15 cette carte? Et comment ces incidents ont-ils été déclenchés, d'après

16 votre expérience?

17 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott, je vous en prie.

18 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, j'objecte une fois de

19 plus.

20 Je ne vois pas la pertinence de ce témoignage et même les fondements sur

21 lesquels se réfère la déposition de cet expert. Il ne s'agit pas d'un

22 expert; il était à Prozor, il a opéré, il a dit ce qu'il savait, c'est la

23 raison pour laquelle on n'a pas objecté.

24 Maintenant, il faut parler de tous les conflits qui ont eu lieu en

25 fonction de la carte qui lui a été présentée: mais il n'est pas expert!

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1 Tout simplement, ce n'est pas à lui de donner le point de vue.

2 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott, on va d'abord voir ce

3 que le témoin a à nous dire. Ensuite, on verra également si ceci est

4 pertinent ou non et si ceci a quelque chose à voir avec notre procès.

5 Maître Krsnik, vous devez avoir, présentes à l'esprit, les objections qui

6 ont été soulevées par l'accusation et vous concentrer sur les questions

7 qui concernent l'affaire en question.

8 Nous voulons donc entendre le témoin, Maître Krsnik. D'abord, vous posez

9 les questions. Ce n'est pas vous qui allez nous répondre, Maître Krsnik.

10 M. Krsnik (interprétation): Oui, Monsieur le Président, c'est la raison

11 pour laquelle j'ai fait citer mon témoin. Ce que je souhaite, c'est tout

12 simplement de parler de 1992 jusqu'à 1993, jusqu'au 30 juin, et le conflit

13 qui a eu lieu à Mostar, parce que c'est l'itinéraire logique. Et vous

14 voyez que je pose la question: je demande au témoin de nous dire quelle

15 est son expérience personnelle, de nous parler des choses qu'il connaît

16 lui-même en personne ou ses officiers?

17 Vous pouvez commencer, Monsieur le Témoin.

18 M. Glasnovic (interprétation): Tout premièrement, il est d'une importance

19 vitale que de souligner le fait suivant pour pouvoir véritablement dire

20 quelles sont les racines du conflit entre les Musulmans et les Croates

21 -toute chronologie d'ailleurs l'aurait démontré, toute chronologie

22 logique- les indications depuis le début, d'ailleurs j'en ai parlé tout à

23 l'heure. Je parle donc de ces racines qui trouvent leur fondement en été

24 1992 jusqu'à la signature des Accords de Washington.

25 Ce qui prouve que de nombreux conflits ont commencé à un niveau local,

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1 qu'il s'agissait de conflits qui étaient spontanés et que, par la suite,

2 ils se sont transformés en conflits de plus grande envergure. Je suis

3 convaincu que je suis arrivé à parler du conflit à Uskoplje, c'était

4 véritablement un premier conflit d'une grande importance -c'était la

5 guerre- et c'est un premier conflit qui a pris fin en janvier 1993. Ça

6 c'est la première chose. Je ne vais bien sûr pas donner description de

7 chaque incident dont il est question et dont on a parlé. Mais avant que le

8 conflit à Mostar soit déclenché… Personnellement, d'ailleurs, sur la carte

9 je ne vois pas ici qu'il y a des indications.

10 M. Krsnik (interprétation): Mais vous avez une autre carte, c'est D1-75.

11 M. Glasnovic (interprétation): Je vous ai dit qu'une partie de ce conflit

12 qui a eu lieu, comme je l'ai dit, à Mostar et l'ensemble de la

13 municipalité -je parle de la municipalité croate- a vu expulser la

14 majorité des Croates à Konjic, pour commencer. Dans la municipalité de

15 Konjic. Cela a eu lieu à la fin et avant le commencement du conflit à

16 Mostar. Les deux conflits donc ont eu lieu, en quelque sorte,

17 simultanément et se sont passés en Bosnie centrale.

18 Quand je discute avec des personnes sur ce qui s'est passé, ils n'ont

19 jamais compris ce qui s'était passé. Effectivement, la majorité de ces

20 gens-là ne s'est jamais retrouvée sur le terrain, sur le terrai où des

21 conflits ont eu lieu, car la plupart de ces opérations de combat avaient

22 eu lieu dans des terrains qui étaient inaccessibles, souvent sur des

23 terrains qui étaient à 300 mètres ou 2.000 mètres par rapport au niveau de

24 la mer. Et c'est la raison pour laquelle chaque historien militaire

25 comprendrait, pourrait vous dire d'ailleurs, en conclusion, que le conflit

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1 en Bosnie-Herzégovine ne se composait pas d'un seul conflit ou deux

2 conflits, même si la Republika Srpska était un agresseur principal, et les

3 forces de Yougoslavie appuyaient la Republika Srpska.

4 En dehors de ce fait-là, il faut constater qu'en Bosnie-Herzégovine, il y

5 avait une série de conflits. Il y avait un certain nombre de territoires

6 où les Musulmans combattaient contre les Croates. Dans d'autres

7 territoires, il n'y avait pas de conflit entre les Musulmans et les

8 Croates, par exemple à Posavina ou à Bihac, parce qu'à Bihac, par exemple,

9 les Musulmans combattaient contre leurs propres compatriotes, des

10 Musulmans. Par conséquent, il y avait des incidents qui étaient quelque

11 peu éparpillés, et on pourrait les sélectionner sous un dénominateur

12 commun, à savoir la survie biologique.

13 Les Croates, qui étaient la minorité la plus restreinte, la plus petite du

14 point de vue du nombre, ne pouvaient pas mener la guerre sur les deux

15 fronts. Ils n'avaient pas l'intention d'ailleurs de mener de tels types

16 d'opérations de combat, de lutter, de combattre contre leurs voisins, les

17 Musulmans. Mais, comme je l'avais déjà expliqué précédemment, les

18 dirigeants musulmans avaient un plan, un plan qui était tout à fait bien

19 déterminé. Il y a des documents d'ailleurs qui en disent long.

20 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott, je vous en prie.

21 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, excusez-moi. Je m'excuse

22 vraiment d'être obligé de vous interrompre mais je dois soulever

23 l'objection. Le témoin a dit que des Musulmans avaient des plans qui

24 étaient tout à fait clairs et j'aimerais savoir comment lui,

25 personnellement, le sait pour l'affirmer.

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1 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, est-ce que vous

2 pouvez nous dire si vous aviez des expériences personnelles, est-ce que

3 vous connaissiez ces plans?

4 M. Glasnovic (interprétation): Oui, j'ai eu l'occasion de prendre

5 connaissance de certains documents. Les documents portaient les dates. Par

6 exemple, l'un des documents, des nombreux documents, portait la date du

7 début de 1993, il s'agissait du mois de mars 1993; et dans ce document, on

8 pouvait très bien voir quelles étaient les intentions des Musulmans. Un de

9 ces documents qui a été signé par le représentant du SDA à Mostar,

10 actuellement c'est le feu général Arif Pasalic, avait parlé de la

11 formation d'un front conjoint des Musulmans, des Forces Armées Musulmanes.

12 D'un autre côté, j'aimerais ajouter autre chose -pour moi c'est un premier

13 indice- le dialogue entre les Croates et les Musulmans n'existait

14 pratiquement plus.

15 Durant l'été 1992, j'ai pris les représentants de mon propre Q.G. pour me

16 rendre à Jablanica, et nous avons commencé des opérations conjointes.

17 C'était mon intention d'ailleurs de commencer les opérations conjointes

18 avec les représentants de la TO qui s'y trouvaient. On leur a demandé de

19 nous rendre visite et de venir à Tomislavgrad, mais ils ne sont jamais

20 venus.

21 Il y avait également des plans conjoints qui ont été envisagées pour

22 libérer Kupres et les officiers de la TO à Uskoplje, tels le général

23 Praljak, moi-même ainsi que quelques autres, nous avons assisté à cette

24 réunion à Uskoplje, en été 1992. Mais malheureusement, rien ne s'est

25 réalisé.

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1 Question: C'étaient les opérations de combat conjointes face aux Serbes?

2 Réponse: Oui. Il s'agissait des opérations communes contre la Republika

3 Srpska.

4 Question: Vous n'avez pas encore terminé ce que vous vouliez dire à propos

5 d'Uskoplje. Qu'est-ce que vous vouliez dire? Vous vouliez dire que c'est

6 la guerre, la véritable guerre qui s'est déclenchée à Uskoplje?

7 Réponse: La guerre… Je répète: la guerre a commencé au sein de la

8 municipalité; ensuite, il y a eu l'escalade. On a essayé également

9 d'empêcher les opérations de combat. Moi, j'ai envoyé le commandant Egon à

10 Bugojno –Smid, son nom était Smid-; il était accompagné d'un autre

11 officier. Ils ont réussi à arrêter, avec succès d'ailleurs, grâce aux

12 négociations, le conflit qui s'étendait en direction de Bugojno, au nord

13 de Bugojno. Et c'est grâce également à l'aide du Bataillon britannique; je

14 pense qu'il s'agissait du régiment de Cheshire. Nous avons eu un certain

15 nombre d'entretiens de manière continue et ceci dans une société de

16 roulement à billes. Je me souviens que ces négociations ont abouti à un

17 accord et à un cessez-le feu. C'était à la fin du mois de janvier.

18 Au cours de ce conflit, mon commandant en second, celui qui m'était

19 subordonné, trois autres membres de mon quartier général ont été arrêtés,

20 capturés par les MOS de Jajce, à savoir par des gens auxquels nous avons

21 fourni la nourriture, les vêtements, l'armement. Mais ils les ont capturés

22 et ils les ont exécutés; ils ont tiré à bout portant.

23 Question: Et qu'est-ce qui s'est passé à Bugojno?

24 Réponse: Le conflit à Bugojno n'a pas escaladé jusqu'au novembre 1993,

25 mais le scénario, par la suite, a été pratiquement comme celui de Konjic.

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1 Tous les Croates ont été obligés de quitter la municipalité de Bugojno,

2 donc il y a eu une purification ethnique. Et comme vous le savez, il y

3 avait, au stade et à d'autres endroits, les centres de rassemblement; il y

4 en avait également à Jablanica, au musée de Jablanica et dans d'autres

5 secteurs où stationnait la brigade, ma propre brigade.

6 Question: Est-ce que vous-même, vous connaissez M. Zarko Tole?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Est-ce que vous pouvez dire à la Chambre d'où il est venu,

9 qu'est-ce qu'il était? Je sais qu'il était officier, mais est-ce que vous

10 pouvez nous donner des détails?

11 Réponse: Pour la première fois, j'ai rencontré Zarko Tole à Kupres au

12 début du conflit, en avril 1992. Je supposais qu'il était membre d'un

13 quartier général de fortune, qui était mis en place à Grude, et je savais

14 qu'il avait été officier, ancien officier de la JNA. Par ailleurs, je sais

15 qu'il est né au village Ljuti Dolac. C'est la dernière fois que j'ai eu

16 l'occasion de le rencontrer.

17 Jusqu'après la guerre, je ne l'ai pas revu parce qu'il était emprisonné.

18 Je ne connais pas les détails, d'ailleurs personne ne sait dans quelles

19 conditions il a été capturé, car avant le début des conflits qui s'étaient

20 déclenchés entre les Musulmans et les Croates, il y avait un certain

21 nombre de rumeurs qui couraient selon lesquelles il avait été vendu à la

22 Republika Srpska par les extrémistes musulmans de Bugojno.

23 M. Krsnik (interprétation): Où a-t-il été capturé et combien de temps est-

24 il resté en prison?

25 M. Glasnovic (interprétation): Il y a passé 15 mois. Moi, je le sais parce

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1 que mon frère également a été emprisonné; c'est pour ça que je le sais. Il

2 a eu l'occasion de rencontrer Tole, son chauffeur Ugljen et quelqu'un

3 d'autre également: je connais son nom mais là, son nom m'échappe. Mais je

4 sais qu'ils ont été torturés, on leur a fait subir des sévices, on les a

5 affamés; ils étaient dans un état très difficile. Au moment où je l'ai

6 revu, après la guerre, personnellement, j'avais des doutes également en ce

7 qui concerne son état mental.

8 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, nous arrivons à Mostar et

9 à ce qui s'est passé à Mostar en 1993.

10 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges, je

11 voulais justement parler de Mostar car, personnellement, je pense que ce

12 témoin n'ayant pas été à Mostar, il ne peut pas en parler beaucoup, mais

13 il voulait vous expliquer un certain nombre d'événements qui ont précédé.

14 M. le Président (interprétation): Excusez-moi, je n'ai pas reçu la

15 traduction.

16 M. Krsnik (interprétation): J'ai donc essayé de vous expliquer toutes ces

17 opérations qui ont eu lieu avant qu'on arrive à Mostar, parce que lui, le

18 témoin, n'était pas à Mostar. Donc c'est pour cela.

19 M. le Président (interprétation): Excusez-moi vraiment, mais il y a

20 quelque chose qui se passe: moi je n'ai pas de traduction. Il paraît que

21 c'est moi qui ai des problèmes avec ma console et mon casque; les autres

22 peuvent suivre.

23 (Intervention de l'huissier.)

24 M. Krsnik (interprétation): Quelle était l'opération finale de l'armée de

25 Bosnie-Herzégovine en 1993? Et quelle est la raison pour laquelle Mostar a

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1 été un point clé pour eux? Et je parle de la vallée de Neretva, de Konjic,

2 Jablanica. Est-ce que vous-même, vous avez participé à la défense de la

3 ville?

4 M. Glasnovic (interprétation): La configuration du terrain était telle que

5 la route qui mène de Jablanica était indispensable pour Mostar et chaque

6 centimètre de cette route est important; pour la défense; c'est vital. Par

7 la suite, c'est une route qui mène également vers la mer. Il y avait cette

8 opération finale qui a été menée par les forces du MOS. Cette opération a

9 démontré, début août et septembre 1993, que cette route présentait une

10 grande importance.

11 Ensuite il y avait l'opération désignée comme "Opération de la Neretva".

12 Moi, je connais très bien ce terrain. C'est un terrain qui se trouve dans

13 les environs de Jablanica. Moi, j'ai tenu la ligne du côté de Strop, qui

14 est à droite par rapport à Doljani; ça mène vers Boksavica. C'est un point

15 qui est extrêmement important pour surveiller Jablanica.

16 Question: Mais donc pour aboutir à ce plan "l'opération Neretvica 1993",

17 qu'est-ce que les Musulmans auraient dû entreprendre? Qu'est-ce que vous

18 savez, vous personnellement, sur ce plan désigné comme "l'opération de la

19 Neretvica 1993"?

20 Réponse: Ils auraient, pour commencer, dû nettoyer la rive Est de la

21 Neretva, ensuite renforcer la communication Jablanica-Mostar et créer les

22 conditions pour prolonger l'avancement vers la côte.

23 Question: Est-ce que Sovici et Doljani a une importance dans ce cadre-là?

24 Réponse: Oui, certainement.

25 Question: Est-ce que vous pouvez expliquer à la Chambre quelle est

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1 l'importance de Sovici et de Doljani dans le cadre de cette opération?

2 Réponse: Sovici est, en quelque sorte, la porte qui donne sur le plateau

3 de Risovac. C'est à partir de Risovac que vous pouvez rejoindre tous les

4 autres axes de communication. C'est de cette manière-là que vous rejoignez

5 la Herzégovine de l'Ouest et que vous aboutissez à la côte.

6 Question: Par conséquent, ceux qui détenaient les points stratégiques du

7 côté de Sovici, Risovac, etc., est-ce que vous pouvez me dire qui les

8 avait?

9 M. Glasnovic (interprétation): Les MOS.

10 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, je suis en train de

11 regarder l'heure.

12 M. le Président (interprétation): Oui. Monsieur Scott?

13 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, avant la pause, je

14 voudrais que nous obtenions quelques éclaircissements au niveau de la

15 période de temps: est-ce que nous parlons encore d'août, début août/fin

16 septembre 1993, lorsque nous parlons de Sovici et des autres localités

17 dont il a été question dans la réponse du témoin?

18 M. le Président (interprétation): Oui. Maître Krsnik, répondez à la

19 question.

20 M. Krsnik (interprétation): De quelle période et quelle année étiez-vous

21 en train de parler?

22 M. Glasnovic (interprétation): J'avais parlé de début septembre ou plutôt

23 j'avais parlé d'août/septembre 1993, mais les conflits avaient débuté

24 auparavant.

25 Question: S'agissant des régions qui avaient été tenues par les MOS,

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1 dites-nous de quelle période de temps vous parliez?

2 Réponse: Je dirais que cela se situe vers le début avril de l'année 1993,

3 peut-être même un peu avant.

4 Question: Mais Sovici et Doljani: je sais -parce que je viens de

5 l'apprendre- que vous étiez à proximité de Doljani; je voudrais que vous

6 nous parliez de vos connaissances personnelles. Est-ce que cela garde les

7 flancs lors de la réalisation de l'opération "Neretva 1993"?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Et est-ce que, pour les forces musulmanes, cela constituait un

10 point très important, le point stratégique le plus important peut-être?

11 Réponse: Les points stratégiques les plus importants sont au nombre de

12 trois dans cette zone d'opération: il y avait Boksavica, Poklanica et

13 c'est plus connu sous l'appellation de Pisvir, parce que cela va

14 directement jusqu'à Doljani et jusqu'aux portes de Sovici, et cela conduit

15 au plateau de Risovac.

16 Question: Finissons ce sujet-là avant la pause.

17 Est-ce que vous étiez personnellement à Jablanica? Et dites-nous aussi

18 combien d'effectifs des MOS il y avait à Jablanica et, ce faisant, dites-

19 nous quelle est la distance entre Jablanica et Doljani?

20 (Les interprètes signalent que Me Krsnik parle trop rapidement.)

21 Réponse: Je pourrais vous donner une description assez précise des combats

22 ou de la disposition des effectifs armés des MOS à Jablanica parce que

23 j'avais tenu des lignes de front, entre la fin avril 1993 jusqu'à la

24 signature des Accords de Washington. Il y avait là-bas une brigade locale

25 qui s'appelait la Brigade Neretvica. Parfois, certaines parties du

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1 Bataillon de Prozor se trouvaient stationnées, elles aussi, dans la région

2 de Prozor, tout comme d'autres unités que nous appelions unités spéciales.

3 Comme, par exemple, les "Cygnes noirs", "Crni Labudovi", puis "Handzar

4 Divizija", la Division Handzar qui n'avait pas la puissance d'une division

5 mais probablement la puissance d'une compagnie. Puis il y a les "Criminels

6 de Zuko" qui constituaient une force véritable; c'est eux qui décidaient

7 de ce qui allait se passer à Jablanica. Il y avait là-bas également des

8 volontaires originaires de Sandzak, ainsi que des gens originaires de la

9 Bosnie de l'est.

10 Question: Qu'est-ce que c'est que le Sandzak?

11 Réponse: Sandzak est une enclave musulmane. Excusez peut-être ma mauvaise

12 connaissance de la géographie, mais je pense qu'il s'agit d'une région qui

13 se trouve sur le territoire de la Serbie elle-même.

14 Partant de mon expérience et partant des entretiens que j'ai eus avec des

15 individus, tel que Samo Ciketic, le chef du quartier général des effectifs

16 des MOS sur le territoire de Bugojno, qui avait été le négociateur en chef

17 lors des conflits à Uskoplje et qui était lui aussi originaire de Sandzak.

18 Aussi ces individus-là se distinguaient des représentants -des nord-

19 africains, de l'Iran, du Pakistan- qui étaient eux des représentants de

20 l'aile la plus radicale au sein des MOS.

21 Question: Est-ce que vous pouvez nous dire à peu près le nombre de ces

22 effectifs?

23 Réponse: Ils étaient au moins au nombre de 2.500 et, au plus, 3.500

24 personnes sous armes.

25 M. Krsnik (interprétation): Nous allons procéder maintenant à une pause,

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1 si vous vous le voulez bien.

2 M. le Président (interprétation): Nous allons reprendre à 16 heures 10.

3 (L'audience, suspendue à 15 heures 40, est reprise à 16 heures 12.)

4 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik, vous pouvez

5 continuer, je vous prie.

6 M. Krsnik (interprétation): Juste une dernière question concernant

7 Jablanica, puis nous allons passer à l'autre zone. Connaissez-vous

8 personnellement quelle avait été la destinée… Je voudrais dire que par

9 l'Acte d'accusation, il est précisé que le HVO avait procédé à des

10 nettoyages ethniques à Jablanica.

11 M. Glasnovic (interprétation): Puis-je commencer à répondre?

12 Question: Oui.

13 Réponse: Eh bien, je pense, Maître Krsnik, que vous constaterez que

14 Jablanica, elle-même, constitue un microcosme, constitué en général par

15 une population croate. Et vers la fin des conflits entre les Musulmans et

16 les Croates, cela a été le cas. Parce qu'au début des conflits, la

17 population croate faisait à peu près 18% de la population totale de

18 Jablanica. Et si vous partez maintenant à Jablanica, vous serez à même de

19 constater qu'il y a probablement 6%, voire même moins, de Croates qui y

20 sont restés.

21 Question: Et pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé en avril, mai et

22 juin à Jablanica?

23 Réponse: Oui, je sais vous dire pour la municipalité de Jablanica.

24 Question: Eh bien, dites-nous quelle a été la destinée des Croates?

25 Réponse: En été 1993, il y a eu une attaque sur Doljani, attaque de la

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1 part des MOS -les Forces Armées Musulmanes- et, en cette occasion-là, 40

2 ou 50 personnes avaient été tuées, mais je crois que la moitié était

3 civile.

4 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott.

5 M. Scott (interprétation): Peut-être pourrions-nous obtenir quelques dates

6 plus exactes, plutôt que d'entendre parler de l'année 1993 en général?

7 M. le Président (interprétation): Oui. Monsieur le Témoin, pourriez-vous

8 nous cerner la période de temps, de façon plus précise?

9 M. Glasnovic (interprétation): Oui.

10 M. le Président (interprétation): L'année, et le mois peut-être?

11 M. Glasnovic (interprétation): Oui, il s'agissait de l'été 1993, c'était

12 la fête de Ilindan (la Saint Eli). J'ai peut-être besoin d'un peu d'aide à

13 ce sujet, il me semble que c'était au mois de juillet. Et il y avait une

14 attaque de lancée sur Doljani de trois côtés. Le résultat, ou l'issue de

15 l'action qui avait eu lieu à ce moment-là, s'est soldé par la mort de

16 quelque 50 personnes; la moitié étant des civils, le reste ayant été des

17 soldats, et la plupart de ces soldats avaient été tués après avoir été

18 capturés.

19 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Scott.

20 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, je m'excuse vraiment

21 mais il me faut faire objection une fois de plus pour ce qui est de la

22 nature "tu quoque" de tout ce qui se fait ici.

23 Dès le début du procès, nous avions dit que des délits pénaux avaient été

24 perpétrés par toutes les parties. J'avais exprimé, au nom du Bureau du

25 Procureur, les sympathiques condoléances à toutes les victimes des trois

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1 parties. Et je tiens à préciser que ce "tu quoque" n'est pas pertinent

2 pour les questions dont traite la Chambre.

3 M. le Président (interprétation): Oui. Maître Krsnik, dites-nous, parlez-

4 nous des faits, pour ce qui est des ratios de la population à l'époque.

5 M. Krsnik (interprétation): On a dit dans l'Acte d'accusation que le HVO

6 avait procédé à un nettoyage ethnique à Jablanica, et j'ai demandé au

7 témoin de nous parler de ce qui s'était passé, à savoir de Doljani et de

8 Jablanica. Doljani fait partie de Jablanica, mais passons. Dites-nous ce

9 qui s'est passé avec les Croates qui vivaient dans la ville de Jablanica?

10 M. Glasnovic (interprétation): Si vous me laissez finir ce que j'étais en

11 train de raconter au sujet de l'action précédente, j'étais là-bas, et nous

12 avions par la suite libéré la région, la zone.

13 Environ 220 civils –hommes, femmes et enfants confondus- ont été emmenés

14 au musée de Jablanica et y ont été enfermés, incarcérés dans des

15 conditions inhumaines. Mais je vais revenir tout de suite à la question

16 que vous avez posée tout à l'heure. A l'occasion de ma visite à Jablanica,

17 visite qui avait pour objectif d'organiser des actions conjointes avec les

18 Musulmans, donc des actions conjointes entre Musulmans et Croates, face

19 aux forces de la Republika Srpska sur le territoire de la municipalité de

20 Konjic, parce qu'il était resté quelques éléments de coopération entre les

21 autorités civiles -j'entends par-là, autorités civiles musulmanes et

22 croates-, alors au moment où le conflit s'est déclaré -je crois l'avoir

23 d'ailleurs dit auparavant, à savoir vers la fin du mois de mars 1993- la

24 plupart des Croates, originaires de la municipalité de Konjic, ce qui

25 inclut Jablanica, -et je ne voudrais pas fatiguer la Chambre avec une

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1 abondance de détails- mais je voudrais dire seulement que tous les

2 villages, la population de tous les villages est recensée ou plutôt citée

3 par bon nombre de documents que j'ai remis au Tribunal.

4 J'en viens à la conclusion de ma réponse. Je dirais donc, en guise de

5 conclusion, que des Croates ont fini par être mis en prison, ils ont été

6 éliminés ethniquement de ces territoires-là et éloignés de toutes

7 positions ou tous postes de pouvoir. Et il ne s'agissait pas seulement de

8 postes où on exerçait quelque autorité; ils ont perdu leur emploi, ils ont

9 été marginalisés et en définitive, comme je l'ai déjà dit, chose qui est

10 tout à fait claire de nos jours, c'est que la population, la part de cette

11 population, est tombée de 18 à 6%.

12 M. Krsnik (interprétation): Et les villages allant de Konjic et Jablanica,

13 quel était leur sort?

14 M. Glasnovic (interprétation): Ces villages ont été incendiés. Je peux

15 parler de Trusina, Vrse et d'autres villages. Si l'on se penche sur la

16 situation telle qu'elle se présente sur la carte, et s'agissant de l'été

17 1993, dans ces municipalités de Konjic et Jablanica, apparaît clairement

18 le nombre de villages qui ont été incendiés, pillés et abandonnés par

19 leurs populations respectives.

20 M. le Président (interprétation): Mais, Témoin, vous n'avez toujours pas

21 répondu à la question qui vous a été posée par le conseil de la défense.

22 La question n'était pas celle de savoir si les Musulmans avaient

23 ethniquement nettoyé la population croate, mais plutôt celle de savoir si

24 le HVO avait procédé à un nettoyage ethnique à l'égard des Musulmans dans

25 cette ville?

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1 M. Krsnik (interprétation): Dans la municipalité de Jablanica, Prozor et

2 Konjic.

3 M. Glasnovic (interprétation): Monsieur le Président, Mesdames les Juges,

4 cela est physiquement impossible. Tout d'abord, ils n'avaient ni les armes

5 ni l'organisation nécessaires et ils n'étaient pas en nombre suffisant non

6 plus pour pouvoir faire quelque chose de ce genre.

7 Question: Penchez-vous sur le compte rendu d'audience. Il me semble que

8 quelque chose a été sautée une fois de plus parce que vous parlez trop

9 vite. Je crois que le compte rendu d'audience a sauté la question et la

10 réponse que vous avez fournie, disant que cela n'était pas physiquement

11 possible...

12 Vous voyez, vous voyez comment cela se déroule, comment le texte défile

13 sur le moniteur. Donc allez-y plus lentement, je vous prie.

14 Réponse: Certes, je pourrais continuer avec la conclusion que j'avais

15 entamée. J'avais, en effet, répondu en disant que les Croates n'avaient ni

16 les armes ni l'organisation nécessaires, et j'avais dit qu'ils n'étaient

17 pas en nombre suffisant pour essayer de procéder au nettoyage ethnique des

18 ressortissants de la majorité musulmane.

19 Question: Dites-nous, quand est-ce que ces attaques sur les villages

20 croates ont eu lieu, dont vous avez parlé? Quel est le mois, quelle est

21 l'année dont vous aviez parlé pour ce qui est de Jablanica et Konjic?

22 Réponse: Le début a eu lieu vers la mi-mars 1993 et les derniers Croates

23 ont été éliminés ou nettoyés, enfin ethniquement, de là-bas vers la fin du

24 mois de juillet de la même année. Le dernier village à tomber entre les

25 mains des forces armées musulmanes était le village de Klis. Moi, je me

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1 trouvais à Boksevica où s'était enfuie cette population civile et nous les

2 avons, pour la plupart, fait monter à bord de camions pour les confier aux

3 autorités de Prozor.

4 Question: Il est affirmé ou allégué ici, dans l'Acte d'accusation, que

5 votre brigade, à savoir le HVO, avait bénéficié de tout temps de l'appui

6 de l'armée croate, de Croatie?

7 Réponse: Cela n'est pas exact.

8 Question: Répondez.

9 Réponse: Ce n'est pas vrai.

10 Question: Mais dites-nous quelles sont les connaissances que vous avez à

11 ce sujet?

12 Réponse: Eh bien, je pourrais citer un document que j'ai vu, à titre

13 d'exemple. Ce document fait état de la disposition des effectifs du HVO

14 dans la municipalité d'Uskoplje, allant de Crni Vrh, à droite, jusqu'à

15 Torajac sur la gauche. Il s'agit là de dizaines de kilomètres de terrain

16 très accidenté.

17 Le document en question est en fait un rapport qui traite de l'aptitude au

18 combat et qui a été rédigé par Zeljko Siljeg, commandant de cette zone

19 opérationnelle. Il y est précisé qu'il n'avait plus, au moment critique en

20 question, à savoir en été 1993, qu'il avait donc quelque 4.000 hommes plus

21 ou moins chargés de défendre cette ligne de défense très ardue. On y fait

22 état de toute unité par leur nom et par le nombre d'hommes que l'unité

23 comportait, et bon nombre de ces personnes avaient été blessées,

24 physiquement brisées suite à des mois passés dans cette région, sur ce

25 terrain accidenté.

Page 11355

1 Et, à tout point de vue, ils étaient en nombre insuffisant, ils avaient

2 subi de grosses pertes: près de 500 soldats du HVO avaient perdu la vie

3 dans la région d'Uskoplje et près de trois fois autant de soldats avaient

4 été blessés. Ni ces unités ni le nombre d'hommes qui s'y trouvaient

5 n'indiquent qu'il y avait eu des effectifs du HV, de l'armée croate là-

6 bas.

7 Et je soulèverais une question rhétorique. La guerre en Croatie avait pris

8 fin, exception faite de quelques opérations qui avaient encore duré

9 plusieurs semaines de plus. Donc cette guerre en Croatie avait pris fin en

10 janvier 1992. Et jusqu'au moment dont nous étions en train de parler, il

11 s'est passé un an et demi pendant lesquels l'armée croate avait armé,

12 entraîné et consolidé ses propres effectifs.

13 Combien de brigades de réserve -je ne pense évidemment pas aux brigades

14 professionnelles- avaient-elles à leur disposition pour pouvoir envoyer

15 dans ce territoire critique du front ces brigades? A cette époque-là, je

16 tiens à vous le rappeler, il y avait sept brigades complètement

17 professionnelles qui faisaient partie du HVO. Dans mon secteur, il n'y a

18 jamais eu de troupes du HV. Les brigades yougoslaves avaient tenu la

19 ligne, comme je vous l'ai déjà dit de Strop, sur la droite, presque

20 jusqu'à Kucani. A gauche, il y avait la Brigade Jajce ou les vestiges de

21 cette brigade. De l'autre côté, il y avait l'Unité Domobrani, le Bataillon

22 Doljani "Mijat Tomic".

23 M. Krsnik (interprétation): Mon Général, nous avons entendu trois ou

24 quatre représentants de l'organisation internationale des observateurs

25 européens; il y avait un représentant de ces observateurs de l'ECCM, il y

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1 avait également Sir Martin Garrod, mais ils ont dit qu'ils n'ont pas

2 vraiment remarqué les unités de la HV.

3 Mais en ce qui concerne la Bosnie centrale, Uskoplje Vakuf, si je ne

4 m'abuse, ils ont dit ici qu'ils avaient vu les représentants de la HV.

5 Quand, par exemple, un représentant de la communauté internationale dépose

6 devant ce Tribunal, devant la Chambre, quand ils prétendent, les

7 représentants de la HV, ils savent bien sûr qu'ils avaient aperçu les

8 immatriculations HV, ils ne savent pas qui occupait les véhicules.

9 Monsieur Garrod avait dit que le général Andric avait soi-disant

10 représenté l'armée croate.

11 Si je vous en parle, c'est que je voulais simplement savoir ce que vous en

12 pensez. Ils ont vu également qu'ils arboraient les insignes, les

13 immatriculations; ils n'ont pas parlé vraiment des unités, des formations

14 militaires, mais ils avaient soi-disant vu un certain nombre de choses.

15 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott?

16 M. Scott (interprétation): Il s'agit maintenant de dix lignes d'un

17 discours qu'on vient de faire, concernant ce qu'a dit le témoin. C'était

18 tout à fait inapproprié et je soulève une objection.

19 M. Krsnik (interprétation): Je voulais simplement que notre témoin

20 explique, devant cette Chambre d'instance, ce que lui-même sait et quels

21 étaient les commentaires. Il y avait quand même un certain nombre de

22 témoins cités par le Bureau du Procureur, qui ont déposé en audience

23 publique.

24 M. le Président (interprétation): Posez votre question.

25 M. Krsnik (interprétation): Est-ce que vous pouvez me répondre à la

Page 11357

1 question que je vous ai posée?

2 M. Glasnovic (interprétation): Je peux vous le dire et je vous l'ai déjà

3 dit dans la déclaration d'hier: la majorité des personnes que j'ai vues

4 avaient été autrefois dans la HV, des personnes qui étaient nées dans les

5 municipalités, dans l'ouest de la Herzégovine ou dans d'autres villes en

6 Bosnie-Herzégovine.

7 Question: Est-ce que vous-même, en votre qualité de commandant, vous aviez

8 des problèmes ou éventuellement ces soldats se présentaient-ils avec des

9 insignes qu'ils arboraient de la HV? Comment se présentaient-ils dans

10 votre brigade? Est-ce qu'ils se présentaient dans votre secteur, dans

11 votre municipalité, là où vous étiez?

12 Réponse: J'avais une section sous commandement. Il ne s'agissait pas de

13 ressortissants croates.

14 Question: Je vais vous demander, Monsieur le Témoin, la question que je

15 vous ai posée -moi, je ne peux pas vous poser une question suggestive,

16 directrice-: est-ce qu'il y avait des gens qui se sont rendus dans votre

17 secteur et qui provenaient de l'armée croate?

18 Réponse: Il y en avait, oui.

19 Question: Qu'est-ce que vous avez entrepris à leur égard? Est-ce que vous

20 le permettiez? Qu'est-ce que vous avez fait?

21 Réponse: Ces personnes sont venues de leur propre gré. C'était le

22 commandant. Si un soldat arrivait et qui voulait bien participer de façon

23 active dans la Brigade, j'acceptais que cette personne y participe.

24 Question: Est-ce que vous avez permis, étant donné qu'il s'agissait de

25 volontaires, qu'ils arboraient d'autres insignes? Est-ce qu'il y avait des

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1 insignes officiels du HVO, pour commencer?

2 Réponse: En 1994, enfin, nous avons introduit une structure de rang

3 formelle. Et avant cela, beaucoup d'unités portaient des badges non

4 autorisés à l'épaule qui montraient à quelle unité ils appartenaient et,

5 en général, cela avait l'emblème de la brigade. Mais pour ce qui est des

6 badges du HV, moi-même je ne me souviens pas de qui que ce soit dans ma

7 brigade qui en portait, c'est-à-dire des badges du HV.

8 Question: Excusez-moi. Dans la transcription, il n'est pas consigné en

9 quelle année ça s'est passé.

10 Réponse: La structure hiérarchique et les rangs correspondants qu'on

11 portait sur l'uniforme n'avaient pas été introduits au début de l'année

12 1994.

13 Question: Merci, Monsieur. Maintenant… Cette question m'échappe -excusez-

14 moi- que je voulais vous poser. Oui, la question que je voulais vous poser

15 est la suivante: jusqu'à maintenant, le Procureur avait présenté un

16 certain nombre d'ordres. Et ceci, il l'a fait avec de nombreux témoins

17 qu'il avait cités, donc je ne veux pas entrer dans les détails. Je ne veux

18 pas entrer non plus dans les détails, notamment pas en ce qui concerne

19 l'authenticité de ces ordres, mais il paraît qu'il y avait des ordres sur

20 lesquels il fallait donc enlever les insignes HV, c'est-à-dire pour

21 cacher, et arborer d'autres insignes. Si c'était le cas, est-ce que vous

22 pouvez nous dire quelque chose là-dessus?

23 Réponse: Je ne me souviens pas d'un tel ordre. Je répète: je ne me

24 souviens pas d'un tel ordre. Et pour vous dire la vérité, ma position en

25 tant que commandant: pour moi, ce sujet ne représentait pas une priorité.

Page 11359

1 Question: Mon Général, la chose suivante: M. le Procureur affirme ici dans

2 cette Chambre qu'après le 16 avril 1993, dans des secteurs différents, le

3 HVO avait désarmé, arrêté les Musulmans qui faisaient partie des unités du

4 HVO; et ceci, uniquement parce que c'étaient des Musulmans. C'est à vous.

5 Réponse: Je dois insister sur ce que je vous ai déjà dit.

6 Question: Excusez-moi, je vais essayer d'être plus concis. Est-ce que

7 vous-même vous aviez des Musulmans dans votre brigade et dans votre

8 secteur?

9 Réponse: Oui, j'en avais.

10 Question: Est-ce que vous les avez désarmés?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Quand et pourquoi?

13 Réponse: Au cours du septième mois de 1993.

14 Question: Pourquoi?

15 Réponse: La situation était telle qu'à l'époque, en été 1993, le conflit

16 entre les Musulmans et les Croates avait atteint des proportions

17 catastrophiques. Au sein de l'unité, j'avais entre 4 et 500 soldats de la

18 religion musulmane qui, jusqu'à cette date, faisaient partie intégrante de

19 la brigade. Je les ai traités de la même manière que tous les autres

20 membres de la brigade. Lorsque les armes ont commencé à disparaître et

21 lorsque les réfugiés d'autres villes qui étaient tombées se sont déversés

22 à Tomislavgrad, à un moment je crois qu'il y en avait 13.000 de Jajce,

23 seulement de Jajce. La sécurité de la ville avait été mise en question et

24 moi, je voulais éviter le même scénario qui s'était déjà reproduit

25 ailleurs: j'ai pris la décision de désarmer la composante musulmane.

Page 11360

1 Question: Est-ce que vous les avez capturés? Est-ce que vous les avez

2 expulsés?

3 Réponse: Non, je ne l'ai pas fait.

4 Question: Ils sont restés à Tomislavgrad?

5 Réponse: Oui, effectivement.

6 Question: Et qu'est-ce qui se passait dans la municipalité à côté, à

7 Livno? Est-ce qu'on les désarmait?

8 Réponse: Je ne pense pas que ma réponse ait été enregistrée.

9 Ma réponse à votre première question est: non, il n'y a pas eu de

10 personnes mises en prison, leurs propriétés n'ont pas fait l'objet de

11 pillages, il n'y a eu de nettoyage. Et pour ce qui est de Livno, un

12 conflit y a éclaté le lendemain et il y a eu, de part et d'autres, des

13 morts et des blessés.

14 Je pense que j'avais pris la bonne décision à l'époque, parce que pour

15 comprendre la situation telle qu'elle se présentait alors, il faut

16 comprendre qu'il n'y avait qu'une seule route pour entrer et qu'une seule

17 route pour sortir. C'était en Bosnie centrale. Il y a eu des conflits. Et

18 des troupes qui revenaient de la ligne de front auraient très aisément pu

19 se retourner contre la population musulmane pour provoquer un incident. Il

20 y aurait eu des représailles et après, il y aurait des conflits au niveau

21 des villages même. Il y a eu un incident qui n'avait rien à voir avec le

22 nettoyage ethnique planifié mais au fond, un crime sans raison que, à mon

23 sens, vous connaissez.

24 Question: Je ne sais pas. A quoi pensez-vous?

25 Réponse: En été, peu après le désarmement, le commandant de la Forpronu

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1 m'a appelé, le commandant Bauer qui a été stationné à Tomislavgrad. Il m'a

2 dit que des gens avaient été tués dans un village du côté nord de la

3 ville. Je m'y suis rendu avec le commandant de la Forpronu et j'ai vu

4 qu'il y a eu sept morts. Ce ne sont pas les membres de la brigade qui

5 l'ont fait, mais des gens de passage qui, par la suite, ont traversé la

6 frontière à l'un des 350 points illégaux où l'on pouvait traverser, ou

7 même des points légaux, et comme ils se sont évadés.

8 Question: Est-ce que vous-même, vous étiez au courant que ces gens-là

9 avaient été capturés et qu'on les a poursuivis?

10 Réponse: Je l'ai su par la suite. Je l'ai su par la suite, c'est-à-dire

11 que c'étaient des citoyens de la République de la Croatie. Et ils ont été

12 jugés devant les tribunaux croates.

13 Question: Nous allons donc poursuivre pour essayer de nous approcher de la

14 fin; je vais essayer d'être le plus bref possible, Monsieur Glasnovic,

15 mais je ne sais pas comment poser mes questions.

16 Le Procureur affirme ici même, dans notre affaire, que le HVO ne

17 permettait pas le passage des convois humanitaires, ni quand il s'agissait

18 de la communauté internationale ni quand il s'agissait des convois

19 humanitaires qui provenaient du pays. Qu'est-ce que vous pouvez nous en

20 dire?

21 Réponse: Je peux vous dire, comme je vous l'ai déjà dit, que la seule

22 route vers la Bosnie centrale, c'était la route triangle qui allait de

23 Tomislavgrad par Prozor, et puis Bugojno et le reste de la Bosnie

24 centrale. Et toutes sortes de matériels, vêtements, nourriture et

25 évidemment les armes et les munitions devaient emprunter cette route. Cela

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1 a continué, d'après ce que je sais, jusqu'en mai 1993 et plus tard.

2 A titre d'exemple, à l'apogée du conflit croato-musulman, un convoi

3 composé de 350 tracteurs et de remorques avait emprunté cette route pour

4 aller à Tuzla.

5 M. Krsnik (interprétation): Est-ce qu'on avait contrôlé les convois? Est-

6 ce que vous les avez contrôlés? Pour parler concrètement, est-ce que la

7 Forpronu a participé au trafic des armements? Est-ce que vous connaissez

8 quelque chose là-dessus et personnellement?

9 M. Glasnovic (interprétation): Oui.

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott?

11 M. Scott (interprétation): Je porte objection. La raison pour laquelle

12 cela continue si longtemps… Je ne sais pas si ça va durer jusqu'à demain,

13 mais si nous continuons de la sorte avec ce type de témoignage… On ne peut

14 pas me faire précipiter pour terminer mon contre-interrogatoire parce

15 qu'il s'agit ici d'un témoignage qui est interminable, concernant des

16 questions qui ont très peu de pertinence.

17 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik pense qu'il a presque

18 terminé son interrogatoire.

19 Maître Krsnik, nous sommes de l'avis que votre question est pertinente

20 pour la question, mais la question concernant les organisations

21 internationales qui faisaient entrer en contrebande les armes, ça, c'est

22 une question tendancieuse.

23 M. Krsnik (interprétation): Oui, Monsieur le Président, Mesdames les

24 Juges, c'était une question directrice. Mais je travaille pendant 20

25 heures par jour; excusez-moi, je suis quelque peu fatigué. Ou il y a

Page 11363

1 éventuellement un manque de concentration qui me fait justement poser de

2 tels types de questions, mais ce n'est pas par mauvaise intention.

3 Très brièvement, je vais essayer de vous montrer un document, un document

4 qui est traduit en anglais et qui porte la cote D1331.

5 Je vais demander à l'huissier de distribuer une copie de ce document.

6 (Intervention de l'huissier.)

7 Est-ce que vous avez eu l'occasion de parcourir le document, de le lire?

8 Est-ce que vous pouvez nous donner la date également? Est-ce que vous-même

9 êtes au courant, étant donné qu'il s'agit de Tomislavgrad? Est-ce que vous

10 pouvez nous dire également qui est le monsieur qui a signé le document?

11 M. Glasnovic (interprétation): Oui, je connais cet incident. Et je vous

12 réponds que oui.

13 Question: Est-ce que vous pourriez nous donner la date?

14 Réponse: Le 27 juillet 1993.

15 Question: Je pense que le document en dit long. Mais vous étiez présent:

16 est-ce que vous pouvez nous dire si ceci se produisait souvent?

17 Réponse: Le rapport, enfin ce rapport que j'ai devant moi, provient d'un

18 opérant en matière de renseignement, qui ne relevait pas directement de

19 mon commandement, mais avec qui j'ai travaillé. Ici, sont décrites les

20 différentes pièces des armes, avec l'emballage, qu'on a trouvées dans un

21 convoi des Nations Unies du Bataillon canadien.

22 Question: Vous le savez? Vous le savez personnellement?

23 Réponse: Je connais cet incident.

24 Question: Est-ce que ceci se produisait souvent?

25 Réponse: Les armes, le matériel de communication, tout cela entrait en

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1 contrebande, de façon régulière, et surtout après l'imposition de

2 l'embargo sur l'ex-Yougoslavie.

3 Question: Mon Général, mais il s'agit d'un convoi des Nations Unies?

4 Réponse: Je réponds encore une fois: nous avons trouvé des armes dans

5 d'autres convois qui transportaient ce qu'on appelait l'assistance

6 humanitaire. Par exemple, dans les sacs de farine: là, nous avons trouvé

7 du matériel de communication qui avait été soudé dans d'autres pièces de

8 véhicules. Et pour ce qui est du convoi des Nations Unies, ce dossier,

9 enfin ce dossier particulier a été transmis à Mostar.

10 Question: Est-ce que les convois pouvaient passer librement? Est-ce qu'on

11 avait procédé au contrôle de manière continue? Si c'était le cas,

12 pourquoi?

13 Réponse: Maître Krsnik, je pense qu'il est logique, quand on entre dans

14 une zone ou quand on en sort, au moment où un conflit fait rage, il est

15 logique d'être très prudent, de faire attention au personnel, au matériel

16 et aux armes qui entrent dans cette zone.

17 Question: C'est à ce moment-là qu'il y a des rapports des observateurs qui

18 parviennent -je parle évidemment de votre secteur-, il y a des rapports

19 des Nations Unies, des rapports des observateurs selon lesquels le HVO ne

20 permet pas le libre passage aux convois des Nations Unies?

21 Réponse: Ma réponse: Tomislavgrad était le centre du quartier général et

22 la base logistique principale à partir de laquelle les forces des Nations

23 Unies avaient fait avancer l'approvisionnement humanitaire et d'autres

24 matériels en Bosnie centrale, enfin dans la plus grande partie de la

25 Bosnie-Herzégovine.

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1 Question: Est-ce que vous les avez empêchés véritablement?

2 Réponse: Moi, j'étais directement responsable au niveau des négociations

3 avec le Bataillon britannique, à Tomislavgrad, qui leur donnait un accès,

4 une base, des installations pour être plus précis, des lieux où ils

5 pouvaient loger leur personnel, leurs soldats.

6 La base était notre base logistique et nous la leur avons donnée. L'école

7 primaire servait de logement dès le début de l'opération "Grapo" (phon.)

8 -ainsi s'appelait l'opération- pour faire avancer l'approvisionnement en

9 Bosnie-Herzégovine. Tous les efforts ont été déployés à ce bout de la

10 route d'approvisionnent afin d'aider à l'accomplissement de cette mission.

11 Question: J'ai deux dernières questions qui concernent Tomislavgrad,

12 ensuite je passe à la conclusion.

13 Le témoin qui a été cité ici, Allan Knudsen, qui avait déposé au cours

14 d'une audience publique, il a dit qu'il était votre soldat. Il a dit

15 également que le Président Tudjman s'était rendu à Tomislavgrad, qu'il

16 avait passé en revue vos soldats et que vous-même, vous aviez refusé

17 d'être présent parce que vous n'éprouviez pas de sentiment favorable à

18 l'égard de Tudjman.

19 Réponse: Tout d'abord, le nom d'Allan Knudsen est un nom dont je ne me

20 souviens pas en ce moment parce que j'avais une section renforcée,

21 composée d'ailleurs de plus de 50 personnes venant de l'étranger dans ma

22 brigade. Le fait de ne pas avoir beaucoup apprécié le Président Tudjman...

23 Question: La première question était de savoir si le Président Tudjman

24 était à Tomislavgrad, s'il avait passé en revue votre brigade?

25 M. Glasnovic (interprétation): C'est une invention pure et simple.

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1 M. Krsnik (interprétation): Et ensuite…

2 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas de réponse. Monsieur le

3 Témoin, voulez-vous bien répéter votre réponse?

4 M. Glasnovic (interprétation): Je dis que c'est une invention pure et

5 simple. Le Président Tudjman s'est rendu à Tomislavgrad, il y a passé une

6 demi-heure, il y a déjeuné et puis il est parti.

7 M. Krsnik (interprétation): Quand, quel mois et quelle année?

8 M. Glasnovic (interprétation): Je pense que oui, parce que je ne me

9 souviens pas exactement du mois. C'était suite à la réunion entre les

10 responsables onusiens et M. Izetbegovic et M. Tudjman, à Medjugorje.

11 M. Krsnik (interprétation): Ensuite, il y avait le témoin suivant. Comme

12 il n'a pas déposé en audience publique, je vais simplement le citer comme

13 le Témoin X. Il avait dit qu'il avait été capturé à Tomislavgrad, qu'il a

14 fait tout un itinéraire, qu'on l'a torturé, qu'on l'avait gardé pendant un

15 mois ou je ne sais pas combien de temps, qu'on l'avait tout simplement

16 ramassé dans un bus. Il a voyagé dans un bus et on l'a ramassé, on l'a

17 fait descendre et il a été capturé dans un monastère, peut-être un

18 couvent. Je ne sais pas si c'était un monastère ou un couvent. De toute

19 façon, je ne peux pas reproduire exactement. De toute façon, il y avait un

20 couvent ou un monastère à Tomislavgrad et il y avait beaucoup de Musulmans

21 qui y ont subi des sévices, tout comme lui.

22 Est-ce que vous êtes au courant?

23 M. Glasnovic (interprétation): Je répondrai en disant: sur la base de

24 l'ordre de qui? En quelle période? Où? Et tous les autres éléments

25 nécessaires pour rédiger?

Page 11367

1 Mme Clark (interprétation): La question est vraiment de savoir si vous en

2 savez quelque chose?

3 M. Glasnovic (interprétation): Je ne sais rien de cet incident.

4 Mme Clark (interprétation): C'est ainsi donc que vous deviez répondre.

5 M. Krsnik (interprétation): Il y avait un camp ou une prison pour les

6 Musulmans à Tomislavgrad?

7 M. Glasnovic (interprétation): Cela n'existait pas.

8 M. le Président (interprétation): Monsieur Scott?

9 M. Scott (interprétation): Je fais objection.

10 Tomislavgrad ne figure pas dans l'Acte d'accusation. Même sur cette base-

11 là, c'est du quiproquo.

12 M. le Président (interprétation): Oui.

13 Maître Krsnik, laissez tomber cette question.

14 M. Krsnik (interprétation): A ce moment-là, Monsieur le Président,

15 Mesdames les Juges, ce que je vous demande c'est que le Procureur, vous

16 voyez, ses témoins sont déjà partis, et quand le témoin en question avait

17 témoigné ici, il a dit que c'était permanent, que cette Chambre doit être

18 au courant. Il a dit également qu'il y avait beaucoup de cas qui se sont

19 passés, ceci conformément à l'Article 5 du Statut. Et maintenant, il dit

20 que ça n'a rien à voir avec l'Acte d'accusation.

21 Mais pourquoi on avait écouté tout ça, à ce moment-là, lorsqu'il a

22 présenté les éléments de preuves à charge? Pourquoi vous ne voulez pas

23 nous entendre maintenant quand c'est nous qui avons cité les témoins et

24 quand nous présentons les éléments à décharge? Au contraire, il avait dit

25 qu'il y avait des crimes qui ont été commis partout sur l'ensemble du

Page 11368

1 territoire de Bosnie. Si ce n'est pas pertinent, pourquoi il avait dit un

2 certain nombre de choses, il a présenté un certain nombre d'éléments, de

3 preuves? Et c'est contenu dans l'Acte d'accusation.

4 Mme Clark (interprétation): Vous avez le droit de poser toutes les

5 questions que la Chambre estime pertinentes. Jusqu'ici, le Président a dit

6 que les questions étaient pertinentes. Lors de mon intervention, j'ai dit

7 qu'il était possible de répondre simplement, sans poser toute une série de

8 questions. Ne vous excitez pas, s'il vous plaît! Continuez.

9 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, Madame la Juge, je

10 tiens à vous présenter la vérité pour que vous soyez au courant de toute

11 la vérité. Ce Tribunal, cette Chambre, doit connaître la vérité, doit

12 savoir ce qui s'était passé à Tomislavgrad. Je ne vais pas avoir un autre

13 témoin qui va pouvoir parler de Tomislavgrad. C'est la raison pour

14 laquelle je l'ai cité, je pense, ça c'est mon idée que la Chambre est

15 intéressée de le savoir.

16 Bien évidemment, je me réfère à l'Acte d'accusation, aux points qui sont

17 consignés dans l'Acte d'accusation. Mais je veux bien que vous entendiez

18 de la bouche de ce témoin qui était présent à Tomislavgrad, ce qui s'était

19 passé là-bas.

20 Mme Clark (interprétation): Tout ce qui nous disons, c'est qu'il y a une

21 façon de le faire. Vous avez demandé au témoin s'il était au courant de

22 l'incident; la question qui devait donc se poser après est: est-ce que

23 vous connaissez un monastère ou un couvent qui avait servi de centre de

24 détention pour les Musulmans? Et s'il dit "non", nous allons continuer.

25 Mais vous n'avez pas encore posé la question.

Page 11369

1 M. Krsnik (interprétation): J'ai posé la question, oui. J'ai posé la

2 question s'il y avait des camps, s'il y avait des prisons. Puis il y a M.

3 Scott qui s'est levé, le témoin avait répondu; et je ne sais plus ce qui a

4 été consigné dans la transcription. Et maintenant, c'est terminé. Je vais

5 passer à la conclusion, à la toute dernière question.

6 Une fois de plus, je vous pose la question: y avait-il un camp ou une

7 prison pour les Musulmans à Tomislavgrad?

8 M. Glasnovic (interprétation): Je sais qu'il y en avait pas.

9 Question: Merci. Maintenant je vais vous poser la toute dernière question

10 en guise de conclusion.

11 Monsieur le Témoin, est-ce que vous vous souvenez quand, pour la première

12 fois, vous avez eu un entretien avec moi?

13 Réponse: Autant que je m'en souvienne, c'était en hiver 2000.

14 Question: Est-ce que vous vous souvenez quand nous nous sommes rencontrés

15 pour la deuxième fois?

16 Réponse: Au mois de février de cette année.

17 M. Krsnik (interprétation): Est-ce que la première fois et la deuxième

18 fois, vous avez dit que vous vouliez bien témoigner du côté de la défense,

19 comme témoin de la défense? Est-ce que vous avez accepté de témoigner ici,

20 et sur la convocation de la défense?

21 M. Glasnovic (interprétation): Lorsque je suis venu pour la première fois,

22 je n'avais pas pris de décision.

23 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas eu la réponse, Monsieur

24 le Témoin.

25 M. Krsnik (interprétation): Lors de notre première rencontre, est-ce que

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1 vous avez accepté d'être invité par la défense?

2 M. Glasnovic (interprétation): Oui.

3 M. Krsnik (interprétation): Est-ce que vous-même et moi-même…

4 M. le Président (interprétation): Nous n'avons toujours pas eu la réponse.

5 Monsieur le Témoin, attendez au moins 30 secondes après la question.

6 M. Krsnik (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Témoin, attendez. Là

7 maintenant, je pense que rien n'a été consigné dans la transcription. La

8 question que je vous pose: est-ce que lors de la première rencontre que

9 nous avons eue, vous avez accepté d'être le témoin de la défense, ma

10 propre défense, ici devant la Chambre?

11 Doucement, maintenant, là, attendez la fin. Lors de notre première

12 rencontre?

13 M. Glasnovic (interprétation): Oui, je l'ai fait.

14 Question: Est-ce que vous-même et moi-même, nous avons eu un contact

15 quelconque depuis cette première rencontre jusqu'en février 2002?

16 Réponse: Non, nous n'en avons pas eu.

17 Question: Je vous ai contacté au mois de février. Est-ce que je vous ai

18 demandé donc de m'entretenir avec vous?

19 Réponse: Oui, vous l'avez fait.

20 Question: Est-ce que, entre-temps, vous avez également donné une

21 déclaration à quelqu'un d'autre? A qui? quand? Dans quelles conditions? Je

22 parle bien évidemment du Tribunal.

23 Réponse: Oui, je l'ai fait au mois de février de cette année.

24 M. Krsnik (interprétation): A qui avez-vous donné la déclaration?

25 M. Glasnovic (interprétation): A une équipe du Tribunal.

Page 11371

1 Mme Clark (interprétation): Maître Krsnik, on est curieux: pourquoi est-ce

2 que quelqu'un qui prendrait une décision de bien vouloir être un témoin à

3 décharge, en 2000 se propose comme témoin à charge en 2002? On aimerait

4 bien avoir la réponse. Quelle serait la valeur pour l'accusation, et

5 pourquoi avons-nous besoin de le savoir?

6 M. Krsnik (interprétation): Vous allez entendre par le témoin même quelles

7 sont les raisons pour lesquelles il a fait ce qu'il a fait. Je répète une

8 fois de plus: est-ce que vous avez donné la déclaration au Bureau du

9 Procureur ou au Tribunal?

10 M. Glasnovic (interprétation): C'est une équipe du Bureau du Procureur.

11 M. Krsnik (interprétation): Qu'est-ce qui s'est passé? Comment ça s'est

12 passé?

13 M. le Président (interprétation): Attendez! Attendez! On n'a pas encore eu

14 la réponse. Vous répondez trop vite.

15 La question est de savoir si vous avez fait une déclaration au Tribunal,

16 au Procureur. Et est-ce que vous savez à qui vous avez fait ces

17 déclarations? Vous pouvez répondre.

18 M. Glasnovic (interprétation): Oui, je le sais.

19 M. le Président (interprétation): Qui?

20 M. Glasnovic (interprétation): L'une des 13 équipes d'enquête qui font une

21 partie organique de ce Tribunal.

22 M. Krsnik (interprétation): Et qu'est-ce qui s'est passé? Où est-ce que

23 vous avez donné la déclaration? Où est-ce que vous vous êtes rendu? Est-ce

24 que vous avez signé ces déclarations? Qu'est-ce qui s'est passé?

25 M. Glasnovic (interprétation): On m'a contacté au cours du douzième mois

Page 11372

1 de 2001; j'ai été contacté par un membre de l'équipe et on m'a demandé de

2 leur parler à Sarajevo. A l'époque, j'étais adjoint du ministre de la

3 Défense pour des questions militaires, et je leur ai répondu que si le

4 ministre était d'accord pour que je rencontre l'équipe, je le ferai. Ils

5 ont renvoyé un courrier au ministre qui approuvait mon entretien,

6 l'entretien que je devais avoir avec eux. Il a approuvé la demande; nous

7 avons eu une réunion préliminaire à Sarajevo et ils m'ont demandé où je

8 voulais que l'interview se fasse.

9 Je leur ai dit que cela n'avait pas d'importance pour moi et ils ont

10 proposé que je vienne à La Haye parce que c'était moins cher; enfin,

11 c'était moins cher pour moi de venir que d'envoyer toute l'équipe à

12 Sarajevo. Je ne me souviens pas de la date exacte mais je suis resté trois

13 jours ici; j'ai répondu à des questions, j'ai pris l'avion pour aller à

14 Sarajevo et là, j'ai attendu la dernière version de ma déclaration de

15 témoin. On m'a présenté une déclaration de témoin, je l'ai lue et j'ai

16 tout de suite contacté deux personnes au sein du ministère de la Défense

17 pour qu'elles soient témoins et pour vérifier le fait que je refusais le

18 fait de signer cette déclaration.

19 Question: Pourquoi avez-vous refusé?

20 Réponse: Je pense que je vous ai donné la lettre ultérieurement. Je ne

21 peux pas exactement, mot par mot…

22 Question: Madame la Greffière, voulez-vous bien donner le D1330? Cela

23 n'existe qu'en anglais.

24 (Intervention de l'huissier.)

25 Est-ce que vous pouvez donner les raisons pour lesquelles vous avez refusé

Page 11373

1 de signer la déclaration?

2 Réponse: La déclaration du témoin était tout à fait subjective. On avait

3 omis d'y mettre la plus grande partie de ce que j'avais dit, ce que

4 j'estimais être important. Au fond, j'ai été un peu déçu parce que j'avais

5 supposé qu'un témoin doit être quelqu'un qui dit la vérité objective et ne

6 pas être un idiot dont on peut se servir.

7 Si vous voulez, je peux vous lire la lettre.

8 Question: Non, non, ce n'est pas indispensable. Mais dites-moi, s'il vous

9 plaît, est-ce qu'au cours de l'interview, on vous a menacé, par exemple,

10 de terminer dans une prison?

11 Réponse: La réponse est que j'ai travaillé pendant presque dix ans dans

12 une prison. Et il y a eu une tentative de jouer un peu au chat et à la

13 souris avec moi, mais j'en ai fait peu de cas et j'ai dit ce qui, pour

14 moi, était la vérité. C'est la raison pour laquelle j'ai fait cette

15 déclaration.

16 Question: Est-ce que ceci a été enregistré sur une cassette audio?

17 Réponse: On m'a dit qu'on n'allait pas enregistrer l'entretien et, lorsque

18 j'ai lu la déclaration du témoin, je me suis demandé que veut dire

19 "verbatim" ou "en grande partie verbatim", à la première page, à la page

20 d'introduction de ma déclaration.

21 J'en conclus qu'une déclaration de témoin doit être cela: une déclaration

22 d'un témoin et non pas un projet d'écriture créative. On avait évoqué le

23 style de la déclaration; je ne sais pas quel est le rapport entre un bon

24 style et une déposition.

25 Et pour Zadro, j'ai vraiment été vraiment désillusionné, plus

Page 11374

1 désillusionné en fait que frustré.

2 La toute première question que j'ai posée à celui qui avait mené

3 l'audition est: qu'est-ce qui vous a pris si longtemps?

4 Question: Le temps pour quoi faire? Je n'ai pas compris.

5 Réponse: Je pense que c'était en très bonne position, je crois que j'étais

6 en très bonne position pour pouvoir parler de ce qui s'était passé en ex-

7 Yougoslavie. Et par cela, je veux dire qu'il y a eu des théâtres

8 d'opération, des zones d'intérêt où j'ai été engagé.

9 Question: Est-ce que je vous ai compris tout à fait correctement quand

10 vous avez donné la réponse à la question que je vous ai posée: "pourquoi

11 ils avaient besoin d'autant de temps"?

12 Réponse: Oui, c'est la raison pour laquelle je l'ai fait.

13 Question: Maintenant, vous pouvez.

14 Réponse: Au fond, il n'y avait que cela.

15 Question: Est-ce que vous avez remis un certain nombre de documents? Est-

16 ce que vous avez remis ces documents aux enquêteurs du Bureau du

17 Procureur?

18 Réponse: Au fond, j'ai dit les mêmes choses. Au fond, j'ai dit les mêmes

19 choses que je vous dis maintenant. Je vous ai donné un grand nombre de

20 documents et d'autres preuves qui, pour moi, sont critiques pour la

21 crédibilité de ma déclaration.

22 Question: Est-ce quelqu'un vous a demandé -si ce n'est pas le cas, peu

23 importe- si vous alliez être témoin à La Haye?

24 Réponse: Non, on m'a pas posé cette question.

25 M. Krsnik (interprétation): Et vous, vous avez dit ou non que vous alliez

Page 11375

1 déposer?

2 M. Glasnovic (interprétation): On ne m'a pas posé cette question.

3 Mme Clark (interprétation): Est-ce que vous donnez ces informations de

4 votre propre gré, parce que vous ne pouvez pas témoigner pour les deux

5 parties, n'est-ce pas?

6 M. Glasnovic (interprétation): Est-ce que je peux vous répondre?

7 Mme Clark (interprétation): Je vous demande de répondre.

8 M. Glasnovic (interprétation): Oui, je l'ai fait de mon propre gré.

9 Mme Clark (interprétation): Est-ce que vous dites donc que vous avez dit à

10 quelqu'un que vous vous étiez déjà mis d'accord pour témoigner pour la

11 défense?

12 M. Glasnovic (interprétation): Non, non, Madame la Juge, je ne l'ai pas

13 fait.

14 Mme Clark (interprétation): Comment avez-vous compris ma question?

15 M. Glasnovic (interprétation): Permettez-moi de vous expliquer un peu le

16 contexte.

17 Mme Clark (interprétation): Non. La question est très simple: je vous ai

18 demandé si, lors de l'entretien, vous avez dit à ces personnes que vous

19 aviez déjà décidé de témoigner pour la défense. Parce qu'en tant que

20 soldat militaire, quelqu'un qui travaille dans une prison, vous savez que

21 vous ne pouvez pas témoigner pour les deux parties. Alors, est-ce que vous

22 leur avez dit que vous aviez déjà rencontré les membres de la défense et

23 que vous alliez témoigner pour la défense.

24 M. Glasnovic (interprétation): Non, je ne l'ai pas fait, Madame la Juge.

25 Mme Clark (interprétation): Pourquoi pas?

Page 11376

1 M. Glasnovic (interprétation): On m'avait contacté… Enfin, on m'a contacté

2 depuis 1996 pour que je sois témoin éventuellement.

3 Mme Clark (interprétation): Cela n'est pas une réponse. Pourquoi ne leur

4 avez-vous pas dit? Parce que la première question était: pourquoi est-ce

5 que vous avez pris aussi longtemps?

6 M. Glasnovic (interprétation): Je pensais avoir quelque chose à dire

7 concernant les actes criminels qui avaient été commis dans ma zone

8 d'opérations, et j'aurais bien fait ma déclaration si on me l'avait

9 demandé.

10 Mme Clark (interprétation): Colonel, vous avez l'habitude des officiers

11 subordonnés. Je vous pose une question très simple: pourquoi n'avez-vous

12 pas estimé approprié de dire à l'accusation tout d'abord que vous vous

13 étiez déjà mis d'accord pour témoigner pour la défense? Parce que vous

14 savez que vous ne pouvez pas témoigner pour les deux parties?

15 M. Glasnovic (interprétation): Je vous répète, Madame la Juge: à l'époque,

16 je pensais qu'on ne m'appellerait jamais comme témoin, qu'on ne me

17 citerait jamais comme témoin de la défense.

18 Mme Clark (interprétation): Est-ce que vous l'avez dit à Me Krsnik: "Vous

19 savez, peut-être qu'il va y avoir des problèmes au sujet de mon témoignage

20 pour vous parce que peut-être que je serai témoin de l'accusation". Est-ce

21 que vous avez pensé à cela quand vous avez parlé à Me Krsnik?

22 M. Glasnovic (interprétation): Nous n'avons parlé qu'une seule fois, et

23 j'ai parlé par le biais d'un intermédiaire au sujet de la possibilité de

24 témoigner pour la défense. Je n'avais pas rencontré Me Krsnik et je ne lui

25 ai pas parlé longuement; je n'ai même pas demandé de conseils juridiques,

Page 11377

1 en tout cas pas avant d'avoir fait une déclaration de témoin ici.

2 Mme Clark (interprétation): Je comprends. Merci.

3 M. Glasnovic (interprétation): Est-ce que vous me permettez de dire

4 quelque chose?

5 Mme Clark (interprétation): Oui, allez-y.

6 M. Glasnovic (interprétation): J'ai eu très peu de préavis quand on m'a

7 appelé pour témoigner. Je crois qu'il s'agissait de quelques jours,

8 quelques jours avant mon arrivée.

9 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président et Mesdames les Juges,

10 lorsque le témoin a refusé de signer cette déclaration, j'avais estimé

11 qu'il ne l'avait pas faite. Je n'ai rien contre le fait de voir mes

12 témoins faire des dépositions au niveau du Bureau du Procureur; au

13 contraire, j'aurais souhaité, j'aurais préféré que cela ait été le cas il

14 y a sept ans encore, et peut-être les choses auraient-elles évolué d'une

15 autre façon.

16 Mon objection n'avait pas cet objectif, ne visait pas cela. Je voulais que

17 vous ayez une idée de la façon dont les choses se passaient. A mes

18 témoins, je dis à chaque fois que s'ils étaient contactés par le Bureau du

19 Procureur, de faire des dépositions en toute liberté. Je me réjouis de la

20 chose et je tiens à vous dire qu'il y aura d'autres témoins encore. Et je

21 dirai que s'agissant des témoins dont a traité et s'est occupé le Bureau

22 du Procureur, je dirais qu'en faveur des Musulmans il y en avait un sur

23 cent.

24 Merci, Monsieur le Président et Mesdames les Juges. Excusez-moi d'avoir

25 pris peut-être un peu plus de temps. Je n'ai peut-être pas pu prévoir les

Page 11378

1 problèmes de traduction, d'interprétation et puis vous voyez, les

2 interprètes sont des personnalités tout à fait distinctes et je vais être

3 sincère: je n'ai qu'une hâte, c'est de prendre un peu de répit.

4 Merci.

5 M. le Président (interprétation): (Inaudible.) … un autre interrogatoire

6 supplémentaire?

7 Nous devons maintenant faire la pause. Nous allons reprendre à 6 heures.

8 (L'audience, suspendue à 17 heures 38, est reprise à 18 heures 03.).

9 M. le Président (interprétation): A vous, Monsieur Scott?

10 Bonjour Monsieur.

11 Monsieur Glasnovic (interprétation): Bonjour.

12 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Zeljko Glasnovic, par M. Scott.)

13 M. Scott (interprétation): Je m'appelle Kenneth Scott et, dans cette

14 affaire, je suis représentant du Bureau du Procureur. A la lumière du

15 témoignage que vous venez de faire, peut-être devrais-je souligner une

16 chose, à savoir que vous et moi, ne nous étions pas rencontrés avant que

17 vous ne veniez témoigner ici, n'est-ce pas?

18 M. Glasnovic (interprétation): C'est vrai.

19 Question: Vous nous avez dit, Monsieur, que vous avez fait votre service

20 dans l'infanterie légère du Canada de 1975 à 1979 et que vous avez quitté

21 ce service à l'époque avec un rang de lieutenant?

22 Réponse: Non, ce n'est pas exact. J'ai servi de 1975 à 1979, et après

23 avoir quitté, j'ai rejoint le Régiment royal de Edmonton.

24 Question: Dans les forces de réserve?

25 Réponse: Oui.

Page 11379

1 Question: Excusez-moi, donc, vous avez été dans le service actif de 1975 à

2 1979 et vous êtes parti avec un rang de lieutenant, n'est-ce pas?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Et de 1979 à 1989, vous avez été aussi lieutenant dans ces

5 effectifs de réserve qui étaient rattachés au régime royal de Edmonton,

6 n'est-ce pas?

7 Réponse: Non, ce n'est pas exact.

8 Question: Bien. Dites-nous en quoi cela n'est pas exact?

9 Réponse: J'ai rejoint brièvement en 1982.

10 Question: Mais combien de temps avez-vous fait en tout et pour tout en

11 service?

12 Réponse: Eh bien, je suis resté là-bas un mois et demi.

13 Question: Est-ce que vous avez passé un certain temps dans un

14 établissement correctionnel?

15 Réponse: Non, j'ai travaillé pour un établissement correctionnel à

16 Alberta. Il s'agissait d'un établissement de Gouvernement de la province

17 d'Alberta.

18 Question: Et pendant combien de temps?

19 Réponse: De 1980 à 1989.

20 Question: Et pendant cet emploi, aviez-vous occupé un grade ou une

21 position quelconque?

22 Réponse: J'avais commencé en qualité de CO1.

23 Question: Qu'est-ce que cela veut dire?

24 Réponse: Cela veut dire que j'avais été agent en matière correctionnelle

25 1.

Page 11380

1 Question: Et après?

2 Réponse: Après, j'ai été CO2. Et par la suite, j'ai fait mon service en

3 tant que chef au commandement de l'équipe tactique.

4 Question: Et combien de temps êtes-vous resté là-bas?

5 Réponse: Eh bien, pendant deux ans, peut-être même plus. Je crois que cela

6 s'était fait de 1985 à 1988.

7 Question: Et quand avez-vous fait votre service dans la Légion étrangère

8 française? Est-ce que vous pouvez nous donner les années pour que les

9 choses soient tout à fait claires pour nous?

10 Réponse: Je suis parti en Europe en 1989, et j'ai rejoint les rangs de la

11 Légion vers le début des années 90. Et lorsque la guerre a éclaté, je suis

12 rentré en Croatie au mois d'août 1991.

13 Question: Et quel grade ou quelle position, avez-vous occupé dans la

14 Légion étrangère française?

15 Réponse: J'étais légionnaire de première classe.

16 Question: Si vous compariez cela avec l'armée canadienne ou américaine,

17 qu'est-ce que cela nous donnerait comme grade, si l'on faisait la

18 comparaison?

19 Réponse: C'était un grade de légionnaire de première classe. Vous avez des

20 légionnaires de première classe, vous avez des légionnaires de deuxième

21 classe.

22 Question: Mais, est-ce qu'il serait exact de dire que vous étiez soldat de

23 première classe dans l'armée américaine ou britannique?

24 Réponse: C'est exact. Ma réponse est oui, c'est exact.

25 Question: Avant de rentrer en Croatie, suite à ce service dans la Légion

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1 étrangère française, le rang militaire ou le grade militaire le plus élevé

2 que vous ayez eu était celui de caporal en quelque sorte?

3 Réponse: C'est cela.

4 Question: Donc, vous avez quitté, après cette Légion étrangère française,

5 avant que d'avoir complété votre obligation au niveau du service?

6 Réponse: C'est exact.

7 Question: Et pourquoi avez-vous quitté à ce moment-là?

8 Réponse: A l'époque, nous étions rentrés du Golfe. Nous avions vu des

9 tanks de l'armée yougoslave en train de brûler en Slovénie. Et moi-même,

10 de même que d'autres individus, d'autres particuliers qui étaient

11 d'origine croate, avions décidé de rentrer chez nous.

12 Question: Mais d'après ce que vous venez de dire, il y avait d'autres

13 personnes qui étaient d'origine croate dans votre unité, ou à proximité,

14 dans cette Légion étrangère française, qui sont partis également vers la

15 Croatie à l'époque?

16 Réponse: Eh bien, il y avait un grand nombre de ressortissants croates

17 dans la Légion.

18 Question: Peut-être pourriez-vous répondre à la question: y avait-il des

19 gens qui était proches de vous ou se trouvant près de votre unité, qui ont

20 quitté, qui sont repartis, enfin rentrés en Croatie à peu près à la même

21 époque?

22 Réponse: Il y en avait plusieurs que je connaissais. Mais j'en ai connu

23 par la suite bien plus en Croatie et en Bosnie-Herzégovine.

24 Question: Quels sont ceux que vous connaissiez et qui ont quitté La légion

25 en même temps que vous, plus ou moins?

Page 11382

1 Réponse: Il y avait deux IC, deux adjoints du commandant du Bataillon

2 Zrinski de Croatie.

3 Question: Monsieur, quand vous dites "deux IC", est-ce que cela veut dire

4 "commandant adjoint"?

5 Réponse: Oui, c'est exact.

6 Question: Et comment s'appelait cet homme-là?

7 Réponse: Aldo Lucev.

8 Question: Y avait-il quelqu'un d'autre qui était parti en Croatie avec

9 vous à l'époque?

10 Réponse: Oui. Il y avait Michael Surevic et quelques autres individus qui

11 avaient servi dans mon unité ou que j'avais rencontrés par la suite mais

12 qui avaient également fait la légion. Par exemple, le général du HVO, Ante

13 Roso.

14 Question: Mais est-ce que vous aviez servi sous Ante Roso, qui avait été

15 commandant supérieur après Praljak au HVO? Est-ce que vous avez servi avec

16 Roso dans la Légion française?

17 Réponse: Il était dans un autre régiment.

18 Question: Mais est-ce que vous le connaissiez pendant que vous étiez dans

19 la Légion française?

20 Réponse: Non.

21 Question: Quel était son grade dans la Légion étrangère française?

22 Réponse: Je crois qu'il était un sous-officier mais de haut rang.

23 Question: Vers quelle époque avait-il quitté la Légion française pour

24 rejoindre les forces de Croatie?

25 Réponse: Je pense qu'il est arrivé en 1990.

Page 11383

1 Question: En Croatie?

2 M. Glasnovic (interprétation): Oui, oui, oui.

3 M. Scott (interprétation): Serait-il exact de dire que le général Roso,

4 après avoir passé dans la Légion étrangère française de 1990, en 1990 est

5 devenu le plus haut des officiers supérieurs de cette armée en

6 octobre/novembre 1993?

7 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik.

8 M. Krsnik (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président, de cette

9 petite intervention, mais je voudrais vraiment savoir quelle est la

10 pertinence de ces questions. Est-ce qu'il s'agit de questions liées à la

11 crédibilité ou à quelque chose d'autre? Je voudrais seulement savoir

12 vraiment qu'elle est la pertinence des questions.

13 M. le Président (interprétation): Tout au début, je crois que la personne

14 qui procède au contre-interrogatoire est tout à fait en droit de poser des

15 questions liées au passé du témoin.

16 M. Krsnik (interprétation): Oui, mais je ne comprends toujours pas.

17 M. le Président (interprétation): Le témoin peut répondre à la question et

18 s'il ne sait pas répondre, eh bien, il ne répondra pas. Cela dépend du

19 témoin.

20 M. Krsnik (interprétation): Merci beaucoup.

21 M. Scott (interprétation): Je voudrais reformuler ma question. Vous êtes

22 resté officier actif du HVO jusqu'à la fin de l'automne 1993, plus

23 exactement je crois que vous avez dit octobre, n'est-ce pas?

24 M. Glasnovic (interprétation): Je suis resté membre actif du HVO jusqu'à

25 ma démission en avril de cette année-ci.

Page 11384

1 Question: Donc la réponse à ma question serait un oui.

2 Réponse: Je n'ai pas compris la partie de votre question qui avait trait à

3 la fin automne 1993.

4 Question: Est-ce que vous savez que l'officier le plus haut gradé du HVO,

5 la personne qui avait remplacé Slobodan Praljak en novembre 1993, avait

6 été Ante Roso?

7 Réponse: Oui, je le sais.

8 Question: Monsieur, quelle est la valeur de la direction d'une unité

9 militaire?

10 Réponse: La direction, à tout niveau, est la composante la plus importante

11 au niveau de toute organisation militaire.

12 Question: Mais pourquoi en est-il ainsi?

13 Réponse: Je reviens à ma déclaration d'origine, celle que j'ai faite au

14 début. A mon avis, et compte tenu de mon humble passé militaire, je crois

15 qu'il serait tout à fait correct ou équitable de dire, partant des

16 observations que j'ai pu faire, qu'une unité militaire ou qu'une

17 organisation militaire est une organisation ou une unité, où la direction,

18 l'initiative, donc le commandement et l'exercice du contrôle, doive être

19 présente jusqu'aux échelons les plus bas.

20 Question: Mais quelles seraient les caractéristiques les plus éminentes de

21 ce que vous désignez par direction?

22 Réponse: D'après l'expérience que j'ai, et ce au niveau de continents

23 différents, j'ai eu l'opportunité de rencontrer différents styles de

24 direction, et ces styles ou ces façons de diriger ne se ressemblent pas

25 les uns les autres.

Page 11385

1 Il y a le style "fais ce que je te dis" et le style que l'on désigne par

2 "fais comme on te dit de faire". En d'autres termes, il est des officiers

3 que j'ai pu rencontrer personnellement qui s'en tiennent à ce type de

4 style, qui disent que rien n'est impossible, jusqu'au moment où il s'agit

5 de le faire soi-même. Je crois que l'on pourrait résumer la chose en une

6 phrase, à savoir qu'il faut diriger les hommes en donnant l'exemple. Et

7 cela n'a pas changé depuis les temps de Gédéon.

8 Question: Donc vous dites que l'exemple donné par le commandant au niveau

9 de la troupe, de la vie militaire, des soldats autour du chef, est un

10 aspect très important de l'exercice du commandement?

11 Réponse: Oui, c'est très important.

12 Question: Et cela s'appliquerait, n'est-ce pas, Monsieur, tant pour ce qui

13 est aspects positifs que des aspects négatifs des comportements de tout un

14 chacun, n'est-ce pas?

15 Réponse: Le commandement peut faire l'objet d'abus ou peut être utilisé de

16 façon erronée.

17 Question: Vous avez dit tout à l'heure que ce commandement, l'exercice de

18 la direction, avait quelque chose à voir avec commandement et contrôle. Et

19 du point de vue militaire, qu'est-ce que cette direction militaire a à

20 voir avec commandement et contrôle, ou exercice de ces deux activités?

21 Réponse: La différence primordiale entre le style oriental et le style

22 occidental, s'agissant de doctrine militaire, est la suivante: le style

23 occidental fournit un corps officier ou un corps de commandement

24 professionnel. En d'autres termes, cela permet d'avoir des sous-officiers

25 professionnels qui exercent le commandement au niveau auquel la bataille a

Page 11386

1 lieu, à savoir au niveau en dessous de celui du Bataillon.

2 Question: Monsieur, je ne voudrais pas vous interrompre plus que

3 nécessaire mais, si tant est que nous voulons couvrir au moins une partie

4 des questions que j'avais à vous poser pour aujourd'hui, je devrais dire

5 que je n'ai pas demandé quelle était la différence entre les styles à

6 l'est et à l'ouest, mais je voulais savoir quelle est la corrélation qui

7 existe entre direction et commandement et exercice du contrôle?

8 Réponse: Ces deux éléments sont en corrélation directe, l'un influant sur

9 l'autre. Un bon chef souhaite entraîner, former ses hommes; il prend soin

10 de ce qui est bon pour eux. Et je ne suis pas tout à fait sûr de ce que je

11 pourrais encore ajouter à ce sujet.

12 Question: Bien. Monsieur, dans votre travail, dans cette profession

13 militaire que vous exercez depuis pas mal d'années déjà, quand vous

14 regardez autour de vous les officiers que vous avez pu voir, considérez-

15 vous que certains d'entre eux étaient de bons officiers, de véritables

16 officiers professionnels, et pensez-vous qu'ils auraient pu être de bons

17 officiers s'ils n'avaient pas exercé de commandement et de contrôle sur

18 leurs propres soldats?

19 Réponse: Eh bien, s'agissant de cette question, vous avez des armées qui

20 sont des armées de professionnels, des armées qui disposent d'une

21 tradition de plusieurs siècles, qui disposent d'un système de droit

22 militaire.

23 Question: Monsieur, je dois vous interrompre parce que vous êtes en train

24 de parler de l'armée canadienne. Est-ce que vous parlez de la Légion

25 française étrangère et est-ce que vous parlez de l'armée de la République

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1 de Croatie? Est-ce que vous parlez du HVO? Enfin, à tous ces endroits,

2 vous avez vu des officiers autour de vous, n'est-ce pas?

3 Réponse: Personnellement, je n'avais pas une très haute opinion des hauts

4 gradés de la JNA.

5 Question: Monsieur, vous avez fréquenté des officiers que vous avez

6 considérés comme étant des officiers bons et, rectifiez-moi si je me

7 trompe, vous avez vu des officiers également qui, à votre avis, n'étaient

8 pas de bons officiers, n'est-ce pas?

9 Réponse: Oui, cela est exact.

10 Question: On en revient à la question que j'ai posée tout à l'heure:

11 n'est-il pas partie intégrante de cette évaluation au terme de laquelle

12 quelqu'un serait bon ou mauvais officier, ou bon chef ou mauvais chef… Et

13 une question qui consisterait à dire: est-ce qu'il s'agit de quelqu'un qui

14 exerce un contrôle, un commandement effectif sur ses subordonnés, sur les

15 hommes qui sont subordonnés à cet officier?

16 Réponse: En substance et en théorie, dans une organisation militaire qui

17 satisfait à toutes les conditions, à tous les préalables d'une force bien

18 organisée disciplinée, ce qui sous-entend une force militaire formée,

19 entraînée, cela est naturellement vrai.

20 Question: Monsieur, n'est-il pas vrai, partant de votre expérience

21 militaire, qu'il est souvent un cas, à savoir celui où des unités plus

22 spéciales, des unités d'élite ont une personne qui est leur commandant,

23 leur leader, leur chef et qui revêt davantage d'importance encore?

24 Réponse: Eh bien, comme je l'ai déjà dit, le commandement est la

25 composante vitale ou la plus importante de ce que l'on appelle l'aptitude

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1 au combat. Mais je ne suis pas tout à fait sûr de comprendre ce que vous

2 sous-entendez par "rôle de".

3 Question: Mais, Monsieur, par exemple, n'est-il pas souvent le cas de voir

4 de telles unités spéciales ou unités d'élite tirer leur identité et même

5 obtenir leur propre nom de par le nom du chef de l'unité?

6 Réponse: Je crois que cette question… Enfin, je dirai qu'il y a des

7 régiments dans l'armée britannique qui avaient porté des noms de rois, de

8 monarques.

9 Question: Monsieur, je suis en train de vous parler de chefs actuels, je

10 ne suis pas en train de parler de monarques décédés. Je vais vous donner

11 le nom d'un chef de l'actualité. Est-ce que vous avez par exemple,

12 s'agissant du conflit de l'ex-Yougoslavie, entendu parler d'un chef, d'un

13 commandant appelait Arkan?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Et n'est-il pas vrai que son unité avait été souvent connue sous

16 le nom des "Tigres d'Arkan"?

17 Réponse: Oui.

18 M. Scott (interprétation): Et n'est-il pas vrai, Monsieur, de dire que son

19 unité, les membres de son unité s'appelaient les "Arkanovci", les "Hommes

20 d'Arkan"?

21 M. Glasnovic (interprétation): C'est exact.

22 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik?

23 M. Krsnik (interprétation): J'ai reçu beaucoup d'objections de la part de

24 M. le Procureur disant que je spéculais, qu'il y avait des spéculations et

25 maintenant on parle d'Arkan, des hommes d'Arkan sans qu'il y ait de

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1 connaissance personnelle de la part de ce témoin.

2 Je voudrais savoir quels sont les fondements pour les questions posées

3 jusque-là. Là, le témoin ne peut que spéculer.

4 M. le Président (interprétation): Eh bien, Monsieur Krsnik, le témoin a

5 dit que cela était exact. La réponse est claire. Il apparaît avec évidence

6 qu'il en sait quelque chose; il faut peut-être patienter pour savoir

7 quelle sera la question suivante posée par le Procureur.

8 Mme Clark (interprétation): Je me dois de dire que nous avons un contre-

9 interrogatoire très efficace et très intéressant.

10 M. Scott (interprétation): Merci, Madame la Juge Clark.

11 Monsieur, je vais vous donner un autre exemple. Je crois que vous êtes au

12 courant d'un autre chef serbe dont le nom est Seselj; je m'excuse si je

13 prononce mal son nom.

14 Réponse: Oui, Vojislav Seselj. Oui, un extrémiste serbe.

15 Question: Il avait une unité qui s'appelait souvent les "Aigles blancs",

16 n'est-ce pas?

17 Réponse: Je ne pense pas que c'était son unité à lui.

18 Question: Est-ce que vous vous souvenez que ses soldats s'appelaient

19 souvent "Seseljevci"?

20 Réponse: Oui, oui, c'est ça. Peut-être, car ils n'étaient pas dans ma zone

21 d'opération. Je ne pense pas qu'il s'agissait de la même unité.

22 Question: Est-ce que vous vous souvenez, Monsieur, d'un groupe de force

23 serbe connu sous le nom des "Seseljevci"? J'écorche la prononciation.

24 Réponse: Oui, oui. J'ai entendu parler de ce groupe. Et si vous permettez

25 que j'ajoute?

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1 Question: Comme lesquelles?

2 Réponse: La Garde de Walter. Il y avait d'autres unités paramilitaires en

3 Bosnie-Herzégovine qui avaient pris des noms d'animaux ou d'autres noms

4 découlant de leur mythologie. Par exemple: les "Cygnes noirs", "Sejtani"

5 -les diables- et, comme je vous ai dit, il y avait Handzar Divizija et

6 d'autres unités. On peut voir le nom, mais je pense que ce serait contre-

7 productif.

8 Question: Il y avait plusieurs unités. Partout, dans ce théâtre de conflit

9 en ex-Yougoslavie, il y avait des unités de soldats qui ont été

10 identifiées par le nom de leur commandant, n'est-ce pas?

11 Réponse: Oui, enfin, je ne trouve pas le mot que je cherche. Je pense

12 qu'un examen systématique des unités et de l'ordre dans les batailles des

13 parties au conflit confirmerait la réponse de façon positive ou négative.

14 Question: Monsieur, ce n'était pas ma question.

15 Vous dites que vous avez une très bonne connaissance de cette guerre et

16 vous savez que c'est vrai, n'est-ce pas, que toutes les unités de toutes

17 les parties, les Musulmans, les Serbes, les Croates, s'identifiaient par

18 le nom de leur commandant. Est-ce exact?

19 Réponse: Je peux vous donner le nom des quatre brigades du HVO.

20 Question: Non, ce n'est pas la question. Quand vous avez parlé de la

21 "serbinisation", cela était le cas chez les Croates et chez les Musulmans,

22 n'est-ce pas?

23 Réponse: Je m'excuse, mais je ne comprends pas la question que vous venez

24 de me poser.

25 M. Scott (interprétation): Est-ce que vous vous souvenez d'avoir dit, en

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1 répondant à votre conseil, l'expression "serbinisation"?

2 Peut-être que je vous ai mal entendu; si c'est le cas, je m'en excuse,

3 mais je pense que vous avez évoqué cette expression.

4 Mme Clark (interprétation): Il parlait de la JNA et, là, on pourrait

5 parler de la "serbinisation" de la JNA.

6 M. Glasnovic (interprétation): Oui, Madame la Juge, vous avez raison.

7 M. Scott (interprétation): C'est la question que je vous pose, Monsieur.

8 M. Glasnovic (interprétation): J'ai évoqué la "serbinisation" de la JNA au

9 moment où le conflit a éclaté, c'est-à-dire à un moment où il y avait plus

10 de 80% des officiers ainsi que des munitions et le matériel, tout cela

11 était dans la main des Serbes.

12 Question: Tout ce que j'essaie de dire et de faire comprendre, c'est qu'il

13 s'agissait d'un phénomène qui s'appliquait également aux Croates et aux

14 Musulmans: ils se trouvaient tous les deux désavantagés en raison de la

15 domination serbe, la JNA. Est-ce exact?

16 Réponse: Oui, c'est sûr, c'est sûr. Sauf que les Musulmans se trouvaient

17 dans une situation encore pire.

18 Question: Et ce que vous avez dit à propos d'un manque d'entraînement

19 militaire, d'un manque d'organisation militaire, tout cela s'applique au

20 moins autant, dans la même mesure, aux Musulmans qu'aux Croates, n'est-ce

21 pas?

22 Réponse: Je pense que… Enfin, je trouve que vous avez fait une

23 déclaration, une affirmation; ce n'est pas une question. C'est que, à

24 l'heure actuelle, la majorité de la composante musulmane de l'armée de la

25 Fédération et de la composante MOS, au cours du conflit croato-musulman,

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1 était composée d'anciens officiers de la JNA. Et non seulement des anciens

2 officiers de la JNA, mais également de personnes étroitement liées à

3 l'ancien mécanisme de l'ex-Yougoslavie. Par cela, je veux dire KOS, le

4 service de contre-renseignement militaire, ainsi que des organisations

5 chargées de la sécurité interne.

6 Question: Ma question est simple: ces circonstances s'appliquent

7 également, au moins également, tant aux Musulmans qu'aux Croates, n'est-ce

8 pas?

9 Réponse: Je pense avoir déjà dit que les Musulmans se trouvaient dans une

10 position encore pire parce qu'au début de la guerre, en 1992, ils n'ont

11 fait aucun effort, ou il y a eu très peu d'efforts déployés pour se

12 préparer à l'agression qui s'annonçait. Si vous permettez que je vous

13 donne un exemple?

14 Question: Non, je pense que cela suffit. J'ai une autre question à vous

15 poser.

16 Sur la base de ce que vous voulez dire, parmi les trois groupes ethniques

17 -les Croates, les Serbes et les Musulmans-, les Musulmans étaient les

18 moins bien préparés sur le plan militaire, préparés pour le conflit?

19 Réponse: Je vous répète, Monsieur, que cela dépend de l'année qui

20 constitue la base de votre déclaration.

21 M. Scott (interprétation): Vous avez dit qu'au début du conflit -voilà ce

22 dont je parle-, au début du conflit qui, d'après vous, s'annonçait, parmi

23 les trois groupes ethniques, les Musulmans étaient les moins bien

24 préparés. Cela est exact, n'est-ce pas?

25 M. Glasnovic (interprétation): Au début du conflit.

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1 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik?

2 M. Krsnik (interprétation): Permettez-moi, Monsieur le Président,

3 d'expliquer pourquoi. Et je crois qu'il serait peut-être tout à fait

4 honnête d'expliquer pourquoi ils avaient été les moins préparés; je crois

5 que ce ne serait pas non pertinent.

6 M. le Président (interprétation): Le témoin a le droit d'expliquer

7 pourquoi. Il n'a pas encore terminé; nous voulons entendre ce qu'a à dire

8 le témoin au sujet du début du conflit.

9 M. Glasnovic (interprétation): Eh bien, Monsieur le Président, les

10 Slovènes ont réussi à saisir presque 30% des armes de l'ancienne Défense

11 territoriale. Comme l'une des ex-Républiques yougoslaves, ils ont saisi la

12 plus grande quantité d'armes et ils ont pu se défendre. En Croatie, il y a

13 eu des réserves importantes qui ont été saisies par l'armée croate, qui

14 appartenaient également aux forces de la Défense territoriale. Etant donné

15 que la structure des forces de l'ex-JNA était en partie basée sur le

16 principe de la territorialité, cela veut dire que ces armes ont été

17 emmagasinées dans les municipalités des Républiques où elles devaient

18 servir.

19 En Bosnie-Herzégovine, le gouvernement central, représenté par M.

20 Izetbegovic, n'a pris aucune mesure pour retenir ces armes malgré le

21 message très clair envoyé de la Slovénie et de la Croatie. Et par

22 conséquent, à la fin du mois de mars 1992, les Serbes, dans ce qui devait

23 devenir la Republika Srpska, avaient distribué 100.000 fusils à des

24 volontaires serbes et des membres serbes du SDS. Tous les armements lourds

25 ont été pris aux réserves municipales, en Bosnie-Herzégovine, avant 1990,

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1 après le premier tour des élections du pays, de la République.

2 Alors, j'ai mes propres opinions, et je pense que M. Izetbegovic n'avait

3 pas appris les leçons du passé et, malheureusement, ce n'était pas le cas

4 non plus de la communauté internationale.

5 M. le Président (interprétation): Monsieur le Témoin, je dois vous

6 interrompre, nous n'allons pas entendre vos opinions personnelles, nous

7 voulons nous limiter aux questions factuelles.

8 Monsieur Scott, vous pouvez poser vos questions.

9 M. Glasnovic (interprétation): Monsieur le Président, si vous permettez?

10 M. Scott (interprétation): Cela fait déjà quatre minutes que vous répondez

11 à une question qui n'est pas pertinente.

12 M. le Président (interprétation): Nous comprenons ce que vous allez nous

13 dire. Permettez au Procureur de passer à la question suivante.

14 M. Scott (interprétation): Est-ce que, selon vous, vous étiez un bon

15 officier?

16 M. Glasnovic (interprétation): Je pense que, pour répondre à votre

17 question, je vous donnerais une réponse subjective.

18 Question: Je vous pose la question dans un prétoire, vous êtes sous

19 serment, personne ne se plaindra d'un manque de modestie. Est-ce que vous

20 pensez que vous étiez un bon officier? Répondez à la question.

21 Réponse: Je pense avoir fait de mon mieux dans une situation difficile.

22 Mais je pense que les personnes avec qui j'ai combattu, avec qui j'ai

23 servi seraient mieux à même de répondre à cette question. Non seulement

24 les hommes avec qui j'ai lutté, j'ai combattu, mais également les membres

25 de la Forpronu, de l'IFOR, de la SFOR et de la force d'intervention

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1 rapide.

2 Question: Est-ce que vous aviez le commandement, le contrôle de vos

3 soldats?

4 Réponse: Dans les circonstances, je crois que ma réponse serait davantage

5 positive que négative.

6 Question: Donc est-ce que cela veut dire, Monsieur, que vous aviez plus de

7 commandement, de contrôle sur vos soldats que non? Donc ça penchait

8 davantage vers l'affirmatif?

9 Réponse: Je n'ai jamais eu un commandement, un contrôle total, à ce

10 niveau-là, au niveau que j'aurais bien voulu voir dans mes unités, même

11 après la formation des brigades professionnelles. Parce que, comme je vous

12 ai dit au début de mon témoignage, les conditions à l'époque n'existaient

13 pas.

14 Question: Donc pour ce qui est des conditions et de l'époque, est-ce que

15 vous seriez d'accord avec moi quand je vous dis que les qualités de meneur

16 d'hommes, telles que nous en avons parlé ce soir, que les qualités de

17 meneur d'hommes ne dépendent pas toujours d'une position officielle,

18 suivant un organigramme. Est-ce correct?

19 Réponse: Oui, je serais d'accord avec vous parce que, dans toute

20 organisation, même ici dans ce prétoire, je suppose qu'il existe une

21 autorité formelle, officielle et puis, une autorité réelle, autrement dit

22 le respect qui règne entre les personnes qui travaillent ici.

23 Question: Et pour ce qui est des qualités de meneur d'hommes, souvent cela

24 n'est pas le résultat d'un document officiel, n'est-ce pas?

25 Réponse: Eh bien, il est difficile pour moi de répondre à cette question!

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1 La question elle-même n'est pas difficile, mais je pense que toute

2 organisation, qu'il s'agisse de l'armée, qu'il s'agisse d'une société, a

3 besoin d'une chaîne de commandement formelle et d'une connaissance

4 doctrinale qui se trouve à tous les niveaux du commandement. Je ne sais

5 pas si j'ai répondu à votre question?

6 Question: Monsieur, je vous demande: d'après vos expériences, vous avez

7 connu des personnes qui ont exercé des qualités de leadership avec très

8 peu d'autorité officielle; n'est-ce pas le cas?

9 Réponse: Les personnes dotées d'une autorité, d'après mes expériences -et

10 je ne pense pas que je me lance dans des généralités- sont des personnes

11 qui ont combattu au niveau tactique. Et 90% de la guerre en ex-Yougoslavie

12 étaient menés ou ont été menés au niveau tactique, alors les dirigeants

13 tactiques ont été respectés parce qu'ils servaient d'exemples. C'était

14 comme ça qu'ils menaient les autres.

15 Dans ma brigade, à titre d'exemple, il n'y avait pas de commandant de

16 Bataillon et, même parmi le personnel de la brigade, peu étaient ceux qui

17 n'ont pas été blessés, et certains plus d'une seule fois. Dans mon

18 quartier général, il y avait six personnes qui ont été tuées et huit

19 personnes qui ont été blessées.

20 Question: Je crois que nous nous éloignons un peu du sujet, alors je vais

21 passer…

22 Mais je crois que c'est la dernière fois que je vous poserai cette

23 question. D'après vos expériences, je crois que vous avez connu des gens

24 occupant des positions formelles, qui étaient des dirigeants très, très

25 médiocres alors que d'autres étaient dotés de très peu d'autorité

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1 officielle, mais étaient des dirigeants très efficaces, n'est-ce pas?

2 Réponse: Je vous ai déjà expliqué, Monsieur, que les personnes qui mènent

3 les autres au cours d'une bataille, d'habitude, étaient dotées d'une

4 autorité sur leurs hommes et qu'elles faisaient l'objet de respect.

5 Question: Les conditions que vous avez décrites à cette Chambre et la

6 situation où il s'agissait d'un manque d'entraînement, d'un manque de

7 discipline, n'est-ce pas d'autant plus dangereux quand de telles forces se

8 trouvent dans une situation volatile ou –je peux le dire autrement- c'est

9 comme si on allait allumer une allumette?

10 Réponse: Le conflit en ex-Yougoslavie était inévitable. Enfin, cela a fait

11 tâche d'encre et, pour chaque action, il y a eu une réaction. Je pense

12 alors que votre question a un sens qui m'échappe.

13 Question: Monsieur, vous avez dit que des forces, si mal entraînées, si

14 peu disciplinées, vous avez envoyé ces personnes au combat, il y a un plus

15 grand risque de voir les choses échapper au contrôle, n'est-ce pas?

16 Réponse: Très souvent, au cours de la guerre… Je ne veux pas maintenant

17 vous parler de mes expériences personnelles; je ne m'attendais pas à

18 survivre à un jour de plus.

19 Question: Ce n'est pas ma question. Avec tout le respect que je vous dois

20 comme militaire, arrivez au cœur de la question.

21 Réponse: J'essaie d'arriver au point central.

22 Lorsque votre village, votre village, votre famille, votre foyer, vos amis

23 sont mis en danger, lorsque la survie biologique est en jeu, vous ne vous

24 posez pas de questions: vous prenez les meilleures mesures possibles pour

25 vous défendre et pour défendre votre communauté. Au fond, il s'agit ou de

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1 combattre ou de fuir.

2 Question: Ce n'est pas ma question, Monsieur.

3 Je vous pose la question autrement: nous savons tous maintenant que vous

4 avez parlé avec le Bureau du Procureur. N'est-il pas exact que vous-même,

5 vous êtes très fier du fait que vous, vous avez exercé ce qui, d'après

6 vous, était un commandement et un contrôle excellents sur vos hommes?

7 N'est-ce pas que vous en êtes fier?

8 Réponse: Oui, j'en suis fier, oui.

9 Question: Alors, même dans ces circonstances difficiles, vous, vous avez

10 fait un effort pour exercer le commandement et le contrôle, et vous êtes

11 d'opinion que vous avez plus ou moins bien réussi à le faire, n'est-ce

12 pas?

13 Réponse: Je ne peux que vous dire qu'un analyste militaire devrait y

14 répondre ou que cela devrait être la décision d'historiens militaires.

15 Question: Monsieur, je pense que vous êtes trop modeste maintenant.

16 D'après ce que vous avez déjà dit, au fond, vous avez plus ou moins bien

17 réussi quand il s'agissait du commandement de vos forces, n'est-ce pas

18 vrai?

19 Réponse: Je pense que les résultats s'expliquent et montrent ce qui s'est

20 passé. J'ai formé deux brigades, j'ai été le chef de milliers d'hommes, et

21 surtout lors des six derniers mois de la guerre. Je pense que j'ai réussi

22 à faire ce que je devais faire.

23 M. Scott (interprétation): Monsieur le Président, je vais changer de

24 sujet. Peut-être est-ce le moment de nous arrêter?

25 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Krsnik?

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1 M. Krsnik (interprétation): Monsieur le Président, rien… Je voulais

2 simplement, Monsieur le Président, Mesdames les Juges, vous dire que, si

3 jamais mon client ne se sent pas vraiment bien, à ce moment-là, on va

4 peut-être lui permettre de rester… Il m'interdit d'ailleurs de parler en

5 son nom. Il veut assister absolument, mais moi je pense qu'il n'est pas

6 vraiment en très bonne forme.

7 M. le Président (interprétation): Maître Krsnik, je dois m'assurer si, oui

8 ou non, votre client est d'accord pour que les audiences se poursuivent

9 sans sa présence?

10 M. Krsnik (interprétation): Oui, je viens de l'apprendre.

11 Mme Clark (interprétation): Monsieur Naletilic a dit que vous ne lui aviez

12 peut-être pas posé la question.

13 M. Krsnik (interprétation): Monsieur Naletilic, en effet, m'autorise de

14 poursuivre le procès, même s'il ne se sent pas en forme et s'il ne peut

15 pas venir. C'est ce que je voulais vous dire.

16 M. le Président (interprétation): Merci beaucoup.

17 Nous reprendrons demain après-midi.

18 (L'audience est levée à 19 heures.)

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