Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 4 février 2009

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 13.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans et

  6   proches de la salle. Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire, s'il

  7   vous plaît.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, tout le monde.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-04-81-T, le bureau du Procureur contre Momcilo

 10   Perisic.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Surtout aujourd'hui parce qu'il y a

 12   certaines personnes qu'on ne voit derrière les piliers, en commençant, je

 13   voudrais voir les présentations en commençant par l'Accusation.

 14   M. THOMAS : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Mark Harmon, Barney

 15   Thomas et Lorna Bolton, Salvatore Cannata, Carmela Javier; pour

 16   l'Accusation.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 18   Pour la Défense.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour à tout le monde. Daniela Tasic pour

 20   la Défense, Nicki Sethi, Tina Drolec, Milos Androvic, Eric Tully, Chad

 21   Mair, Novak Lukic et je suis Gregor Guy-Smith; pour la Défense.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 23   M. GUY-SMITH : [interprétation] Peut-être que j'ai mal prononcé le nom de

 24   certains stagiaires mais je vous prie de m'en excuser.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

 26   Monsieur Thomas.

 27   M. THOMAS : [interprétation] Merci. L'Accusation demande à ce que soit

 28   amené le Témoin Martin Bell.

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  1   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  2    M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur Bell.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvez-vous prononcer la déclaration

  5   solennelle, s'il vous plaît ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je jure solennellement que je dirai la vérité,

  7   toute la vérité et rien que la vérité.

  8   LE TÉMOIN: MARTIN BELL [Assermenté]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.

 11   Oui, Monsieur Thomas.

 12   M. THOMAS : [interprétation] Merci, Monsieur.

 13   Interrogatoire principal par M. Thomas : 

 14   Q.  [interprétation] Monsieur Bell, pouvez-vous prononcer tout d'abord en

 15   nous donnant votre nom et votre date de naissance ?

 16   R.  Je m'appelle Martin Bell, et je suis né le 31 août 1938.

 17   Q.  Quelle est votre profession actuelle ?

 18   R.  Je suis ambassadeur pour l'Unicef, et je suis écrivain et journaliste.

 19   Q.  Est-ce que vous avez passé une grande partie de votre carrière en tant

 20   que journaliste pour la BBC ?

 21   R.  Oui, à partir de 1966 jusqu'à 1997.

 22   Q.  Pouvez-vous très brièvement nous décrire pour les Juges de la Chambre

 23   les conflits que vous avez couverts pendant cette période ?

 24   R.  Cela a commencé avec la guerre civile au Nigeria, et les guerres de

 25   1967 et 1963 [comme interprété] au Moyen Orient, les guerres du Vietnam, El

 26   Salvador, le Nicaragua, la première guerre du Golfe et puis les guerres de

 27   l'ex-Yougoslavie, principalement la Croatie et la Bosnie.

 28   Q.  En 1997, qu'est-ce que vous avez fait lorsque vous avez quitté la BBC ?

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  1   R.  En 1997, accidentellement j'en suis venu à la politique et pendant

  2   quatre années j'ai été membre de Parlement.

  3   Q.  Vous étiez un indépendant ?

  4   R.  Oui et j'étais le premier indépendant à être élu depuis 1951.

  5   Q.  Pendant votre carrière, avez-vous reçu des honneurs particuliers pour

  6   le journalisme ?

  7   R.  Oui, quelques petites choses. Mais cela ne représente pas grand-chose

  8   pour moi, même quelque chose, une récompense de la Reine, mais je pense que

  9   mon principal avantage c'était mon expérience.

 10   Q.  Donc vous avez reçu a récompense qui s'appelle OBE de la Reine ?

 11   R.  Oui c'est ça. Je pense que je l'ai reçue parce qu'on m'a tiré dessus en

 12   1993 ou quelque chose comme ça.

 13   Q.  Quel est votre travail actuel auprès de l'Unicef ?

 14   R.  L'Unicef a un certain nombre de personnalités très connues qu'ils ne

 15   peuvent pas envoyer dans une zone en guerre et ils m'envoient parce que,

 16   moi, je suis capable de m'occuper de ma protection dans ces zones.

 17   Q.  Quelle est votre fonction ?

 18   R.  En tant que témoin, en tant que quelqu'un qui rassemble des fonds, qui

 19   encourage leur personnel localement, nationalement, quelqu'un qui remonte

 20   le profil, si on peut dire, de ces questions chez moi.

 21   Q. Très brièvement, une fois de plus pour les Juges de la Chambre, pouvez-

 22   vous nous dire dans quelle situation vous avez œuvré dans cette capacité ?

 23   R.  Dans certaines zones, il n'y a pas la guerre comme le Malawi mais

 24   surtout dans des zones qui sont en guerre, l'Afghanistan, Darfour, la

 25   République démocratique du Congo et des endroits de ce type.

 26   Q.  Monsieur Bell, très clairement, vous avez énormément de connaissances

 27   que vous avez acquises au courant des années, grâce à différents conflits,

 28   mais cet après-midi, je voudrais qu'on parle de votre temps passé à

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  1   Sarajevo. Est-ce que vous pouvez nous dire à quel moment vous avez pour la

  2   première fois été à Sarajevo dans le contexte du conflit des Balkans ?

  3   R.  Je me suis rendu pour la première fois à Sarajevo au mois de mars 1992,

  4   à l'occasion du référendum qui portait sur l'indépendance, et puis quand la

  5   guerre a commencé la première semaine du mois d'avril, j'y suis retourné,

  6   j'y suis resté pendant quelques périodes. Pas simplement à Sarajevo mais

  7   également en Bosnie centrale, tout cela à Mostar et partout pendant trois

  8   ans et demi.

  9   Q.  Qu'est-ce que vous avez fait à Sarajevo à ce moment-là ?

 10   R.  J'étais le principal reporter de la télévision BBC, et au début de la

 11   guerre en avril 1992 jusqu'au moment où j'ai été blessé à la fin du mois

 12   d'août 1992, et à la fin de 1992, un peu avec réticence, je suis retourné

 13   et j'ai travaillé en 1993 sur l'autre guerre entre les Musulmans et les

 14   Croates en Bosnie centrale, mais au mois de mars 1994, après le cessez-le-

 15   feu, entre autres, je suis revenu à Sarajevo et j'ai passé la plupart du

 16   restant de la guerre là-bas.

 17   Q.  Entre la fin de 1992, quand vous avez été blessé, et lorsque vous dites

 18   que vous êtes revenu à Sarajevo au mois de mars 1994, est-ce que vous avez

 19   passé du temps à Sarajevo ?

 20   R.  Oui, même quand j'étais basé à Vitez et Gornji Vakuf, je faisais des

 21   séjours à Pale, je m'en allais aux avantages, je passais beaucoup de temps

 22   avec les Serbes, et j'avais une réputation, parmi la presse de Sarajevo,

 23   d'être pro-serbe. Je ne l'étais pas, j'étais neutre et j'avais un très bon

 24   ami qui était l'un des défendeurs de la banlieue de Grbavica, tenue par les

 25   Serbes et j'allais le voir. L'un des points que j'ai soulevé c'était qu'il

 26   n'y avait pas de monopole en matière de souffrance pendant cette guerre.

 27   Q.  Depuis le mois de mars 1994 et par la suite jusqu'à la fin de la guerre

 28   en Bosnie et la signature des accords de Dayton, où étiez-vous

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  1   principalement basé ?

  2   R.  J'ai été basé au Holiday Inn à Sarajevo pendant cette période

  3   principalement. Vers la fin, j'ai été basé à Gornji Vakuf car la mise en

  4   œuvre des accords de Dayton qui s'est faite surtout dans le sud du pays par

  5   les troupes britanniques, en décembre 1995, celles-ci ont enlevé leurs

  6   chapeaux des Nations Unies pour devenir des troupes de l'OTAN et ont rompu

  7   la ligne de front -- les anciennes lignes de front et elles ont mis en

  8   œuvre donc les accords. J'étais avec eux.

  9   Q.  Entre mars 1994 jusqu'à la fin de la guerre, est-ce que vous couvriez

 10   également les autres parties de la Bosnie ? Est-ce que vous vous déplaciez

 11   depuis Sarajevo pour aller couvrir d'autres aspects du conflit ?

 12   R.  Oui, c'était de plus en plus difficile à ce moment-là d'obtenir

 13   l'attention de mes chefs qui considéraient que la guerre était une guerre

 14   où long court à ne s'intéressait plus beaucoup. Mais j'ai fait pas mal de

 15   chose dans le nord de la Bosnie, dans la Bosnie centrale, mais à Sarajevo à

 16   proprement parler, il y a eu des combats très intenses dans l'été de 1995.

 17   Il y eu l'enlèvement des troupes des Nations Unies à Pale, au mois de mai

 18   de cette année. Il y a eu une tentative très forte par l'ABiH de rompre

 19   l'encerclement au mois de juin. J'étais à Sarajevo et je couvrais tous ces

 20   aspects-là.

 21   Q.  Je voudrais maintenant revenir à la situation à Sarajevo en 1992.

 22   S'agissant de votre première arrivée et le début des hostilités en avril

 23   1992, qu'est-ce que cela a eu comme effet sur la ville, sur les civils à

 24   Sarajevo ?

 25   R.  C'était un petit peu comme si la Grande Guerre allait être combattue à

 26   nouveau, mais dans un environ moderne et urbain. Il y avait beaucoup de

 27   gens qui étaient piégés dans ces grandes tours, piégés parce qu'il n'y

 28   avait pas d'électricité, pas d'ascenseur, et l'hiver de 1992/1993 a été

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  1   extrêmement cruel. Il n'y avait pas d'adduction d'eau; la seule eau qui

  2   était disponible était celle du fleuve ou alors d'amener d'eau qui était en

  3   but à des tirs. C'était une période extrêmement désespéré des deux côtés

  4   pour toutes les personnes habitant à Sarajevo.

  5   Q.  A ce moment-là, l'hiver 1992/1993, les lignes de confrontation à

  6   Sarajevo étaient-elles assez fermement établies ?

  7   R.  Oui, elles l'étaient. Il y a eu des combats très, très intenses le 22

  8   mai 1992 à Sarajevo, et ensuite les lignes de confrontation ont très peu

  9   changé jusqu'au mois de novembre/décembre 1995. Parfois une ligne de

 10   tranchée pouvait être perdue, ou un groupe de maisons changeaient de mains,

 11   mais si vous regardez la carte à la fin de 1995, c'est à peu près les mêmes

 12   lignes de confrontation qu'au début de l'été 1992.

 13   Q.  Si je vous montrais une carte, est-ce que vous seriez à l'aise pour

 14   nous donner des indications générales concernant ces lignes de

 15   confrontation ?

 16   R.  Oui, bien sûr.

 17   Q.  [aucune interprétation]

 18   M. THOMAS : [interprétation] Messieurs, Madame les Juges, est-ce qu'on

 19   pourrait voir la pièce P439 qui est la carte numéro 8 dans le classeur ?

 20   Q.  Monsieur Bell, en attendant, vous avez déjà déposé devant ce Tribunal,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Tout d'abord, témoin pour la Défense dans l'affaire Blaskic ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Plus récemment, en tant que témoin de l'Accusation dans l'affaire

 26   Dragomir Milosevic ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Je pense que, déjà lors de l'affaire de Dragomir Milosevic, on

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  1   utilisait cette technologie. Vous voyez une image sur l'écran. On peut

  2   agrandir l'image sans la changer et la manipuler de diverses façons. Vous

  3   allez reconnaître l'image comme étant une carte de Sarajevo ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Pour marquer cette ligne de confrontation, est-ce que vous avez besoin

  6   d'un agrandissement ?

  7   R.  Oui, ça serait bien.

  8   Q.  Est-ce que cela vous suffit ?

  9   R.  Oui, c'est tout à fait suffisant.

 10   M. THOMAS : [interprétation] Je vais demander à M. l'Huissier de vous

 11   donner un stylet vous permettant de marquer électroniquement l'écran qui se

 12   trouve devant vous.

 13   Q.  Ce que nous voudrions, Monsieur Bell, c'est que vous marquiez autant

 14   que possible la ligne de confrontation sur cette carte.

 15   R.  J'espère que je regarde dans la bonne direction, vous allez voir qu'à

 16   peu près au milieu sur le pont de la fraternité et de l'unité, les lignes

 17   des Serbes arrivaient jusque-là, donc ce n'était pas une question d'avoir

 18   des Serbes là-haut dans les collines et les troupes du gouvernement

 19   bosniaque étaient piégées. Non. Ils arrivaient jusque-là, jusqu'à la

 20   banlieue d'Ilidza et Grbavica qui étaient tous les deux dans les mains des

 21   Serbes --

 22   Q.  Faisons une pause maintenant. Tout d'abord, en utilisant le marqueur --

 23   R.  [Le témoin s'exécute]

 24   Q.  Merci d'encercler le pont de la fraternité et de l'unité --

 25   R.  Il me faut une vue plus rapprochée.

 26   Q.  Alors laissons de côté pour l'instant. Pouvez-vous encercler les zones

 27   d'Ilidza et Grbavica que vous venez de mentionner ?

 28   R.  Grbavica était d'un côté de l'aéroport de la piste d'atterrissage de

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  1   celui-ci.

  2   [Le témoin s'exécute] 

  3   Q.  Merci de marquer celle-ci avec un I.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Grbavica ?

  6   R.  Grbavica j'ai un peu de mal parce que peut-être que je remonte trop en

  7   arrière mais je pense que ça se trouve environ ici.

  8   Q.  Est-ce que ça vous aiderait d'avoir un agrandissement ?

  9   R.  Peut-être, en effet, c'est une carte très détaillée.

 10   Q.  [aucune interprétation]

 11   M. THOMAS : [interprétation] Je n'ai pas l'intention de demander le

 12   versement de cette version de la carte. Est-ce qu'on pourrait faire un

 13   agrandissement ?

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pourquoi pas ?

 15   M. THOMAS : [interprétation] Parce que je voudrais que les marques soient

 16   faites sur une version plus claire de la carte par M. Bell.

 17   Q.  On commence par le pont de la fraternité de l'unité; est-ce que vous le

 18   voyez sur la carte ?

 19   R.  Les ponts ne sont pas clairement marqués mais j'hasarderai qu'il se

 20   trouve à environ ici.

 21   Q.  Pouvez-vous y apposer la lettre B, s'il vous plaît.

 22   R.  Oui.

 23   [Le témoin s'exécute]

 24   Q.  Pouvez-vous y apposer la lettre B ?

 25   R.  [Le témoin s'exécute]

 26   Q.  Est-ce que vous pouvez mettre -- encercler la zone d'Ilidza ?

 27   R.  Oui, c'est de ce côté-ci, la piste d'atterrissage.

 28   Q.  Oui, veuillez apposer la lettre I, s'il vous plaît.

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  1   R.  Oui.

  2   [Le témoin s'exécute]

  3   Q.  C'est la marque gauche sur la carte.

  4   R.  En fait, les Serbes se trouvaient aux deux extrémités de la piste

  5   d'atterrissage. La caserne Lukavica se trouvait de l'autre côté, je vais la

  6   marquer et les forces du gouvernement se trouvaient de chaque côté y

  7   compris Dobrinja. Là, je vais apposer la lettre D, qui était donc le

  8   village de la presse pendant les Olympiades d'hiver auparavant. Donc les

  9   forces du gouvernement des deux côtés de la piste et les Serbes, aux deux

 10   extrémités.

 11   Q.  Quand vous parlez des forces du gouvernement, vous parlez de l'ABiH ?

 12   R.  Oui, nous avons eu énormément de difficulté avec la terminologie parce

 13   qu'il y avait également des Serbes qui combattaient à leur côté, ce qu'ils

 14   appelaient les Serbes loyaux. Normalement on les appelait les forces du

 15   gouvernement bosniaque.

 16   Q.  Bien.

 17   M. THOMAS : [interprétation] Est-ce qu'on pourra faire verser ce document

 18   au dossier.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, ce sera fait.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P514.

 21   M. THOMAS : [interprétation] Je voudrais maintenant revenir à la carte sans

 22   marque, vierge qui porte la cote P439.

 23   Q.  Monsieur Bell, pourriez-vous, sur cette carte, nous dessiner ce que

 24   vous alliez faire tout à l'heure, à savoir la ligne de confrontation, et si

 25   vous avez besoin qu'on l'agrandisse, dites-le-nous.

 26   R.  En fait, ça va être assez difficile à faire. Je pense que ça

 27   ressemblait à quelque chose comme ceci, et beaucoup plus de portée ici.

 28   Evidemment, ceci est totalement imprécis mais ce serait de cet ordre-là.

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  1   Q.  Quelques questions à ce propos. La zone que vous avez marquée comme

  2   étant sous les Serbes, enfin tenue par les Serbes, Ilidza, est-ce qu'on le

  3   voit sur la carte ?

  4   R.  Oui, ça se trouve à peu près ici, à cette extrémité de la piste. Peut-

  5   être que ma ligne n'est pas suffisamment proche, en fait elle est assez

  6   proche de cet endroit.

  7   Q.  Il y a également un moyen d'annuler cette ligne, si vous le voulez,

  8   l'Huissier pourra vous aider.

  9   R.  Je crois que j'ai apposé la correction que je voulais faire.

 10   Q.  Je voudrais maintenant donc effacer la partie redondante de la carte de

 11   façon à ce que si on regarde cette carte d'ici quelques mois, ce sera

 12   parfaitement clair.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur l'Huissier, merci de nous

 14   aider en effaçant ce qui a été mentionné.

 15   Pouvez-vous maintenant relier la bonne ligne, Monsieur Bell.

 16   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup. 

 18   M. THOMAS : [interprétation]

 19   Q.  On voit la zone de Hrasnica sur la carte, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, c'était au-delà, en fait c'est écrit très petit mais c'est au-delà

 21   de Butmir, au sud de la carte.

 22   Q.  C'était là que se trouvaient les lignes de confrontation ?

 23   R.  Ce n'était pas un village de ligne de front mais, en tout cas, il a été

 24   bombardé surtout en 1995, avec des roquettes.

 25   Q.  La zone qui s'y trouve à l'intérieur du périmètre que vous avez

 26   dessiné, a été occupée par les forces de quelle armée ?

 27   R.  A l'intérieur, c'était les forces du gouvernement bosniaque, la BiH.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez marquer ABiH, à ce moment-là ?

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  1   R.  [Le témoin s'exécute]

  2   Q.  De l'autre côté de la ligne ?

  3   R.  C'étaient les forces des Serbes de Bosnie qu'on nommait la VRS.

  4   Q.  Pouvez-vous encercler la zone de Hrasnica ?

  5   R.  Je le fais de mémoire parce que je ne le vois pas, mais c'est à peu

  6   près en bas du mont Igman.

  7   Q.  Pouvez-vous apposer la lettre H ?

  8   R.  [Le témoin s'exécute]

  9   Q.  Hrasnica était tenu par les forces de quelle armée ?

 10   R.  Elle était tenue par les forces de la BiH. Evidemment, là, je dois

 11   recorriger ma ligne manifestement parce que Butmir et Hrasnica étaient

 12   tenus par les forces du gouvernement bosniaque.

 13   Q.  Avec l'assistance de l'huissier, pouvez-vous enlever la ligne qui n'est

 14   plus applicable s'il vous plaît ?

 15   R.  Je dois vous prier de m'excuser, cela fait bien longtemps.

 16   Q.  Nous comprenons parfaitement bien, Monsieur Bell.

 17   M. THOMAS : [interprétation] Pouvons-nous verser ce document au dossier ?

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce sera fait. Veuillez lui attribuer

 19   une cote.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P515.

 21   M. THOMAS : [interprétation]

 22   Q.  Vous avez expliqué que ces lignes n'ont pas beaucoup changé entre le

 23   moment où vous êtes arrivé à Sarajevo et jusqu'à la fin de la guerre. La

 24   position ou la forme ou de ces lignes, qu'est-ce qu'elle représentait pour

 25   la population qui occupait cette partie-là à l'intérieur de ces lignes de

 26   cercle, les civils, là où il y est marqué ABiH ?

 27   R.  La plupart du temps il y avait des  -- ils étaient dans la ligne de tir

 28   de tireurs embusqués, mais, en même temps, Grbavica était également dans la

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  1   ligne de tir des tireurs embusqués de l'autre partie qui était dans

  2   l'ancien parlement, et certains points élevés de ce type. Je ne pense pas

  3   que qui que ce soit vivait en sécurité dans cette ville à l'époque.

  4   Q.  Est-ce qu'il y avait des moyens faciles d'accéder, de sortir de la

  5   ville pour ces civils qui étaient dans ces zones tenues par l'ABiH ?

  6   R.  Pas du tout. Dans la deuxième moitié de la guerre, un tunnel a été

  7   construit en dessous de la piste d'atterrissage, ce qui a permis de se

  8   procurer des vivres, et cetera, mais pour les gens qui voulaient partir,

  9   s'ils n'avaient pas les autorisations ni les bons contacts, il fallait

 10   qu'ils endurent tout le siège. Nous, notre situation était différente. On

 11   avait des laissez-passer des Nations Unies sans difficulté, on pouvait

 12   passer les barrages routiers à Ilidza et ailleurs, à la fois du côté serbe

 13   mis en place par les Serbes de Bosnie.

 14   Q.  Vous avez parlé de terrain autour de la ville occupé par la VRS.

 15   M. THOMAS : [interprétation] Moi, je vais maintenant porter votre attention

 16   sur une carte, une photographie portant le chiffre, le numéro 10, qui est

 17   le document 65 ter 09242. 

 18   Q.  Monsieur Bell, est-ce que vous reconnaissez ceci comme étant une vue

 19   aérienne de Sarajevo et ses proches ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous avez parlé d'un aéroport; est-ce que c'est ce qu'on voit en bas, à

 22   droite ?

 23   R.  Oui.

 24   M. THOMAS : [interprétation] J'aimerais pouvoir faire verser cette

 25   photographie sans qu'elle ne porte de marque comme pièce à conviction.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Cela n'a pas déjà été versé ?

 27   M. THOMAS : [interprétation] Pas pour autant que je sache.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Alors, à ce moment-là, attribuez-lui

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  1   une cote.

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P516.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  4   M. THOMAS : [interprétation]

  5   Q.  Etant donné les lignes de confrontation que vous avez déjà dessinées

  6   sur votre carte et votre commentaire concernant le fait que la VRS tenait

  7   les auteurs, est-ce que vous pouvez maintenant nous marquer quelles étaient

  8   ces hauteurs qui étaient tenues par la VRS ?

  9   R.  Il y avait une zone en particulier que je vais…

 10   Cette zone-là, ce sont des hauteurs qu'ils tenaient, ils dominaient donc un

 11   certain nombre des rues qui se trouvaient en contrebas.

 12   Q.  Est-ce qu'il y avait des hauteurs qui étaient tenues au nord de la

 13   ville ?

 14   R.  Les hauteurs que je vais marquer maintenant et c'est très

 15   approximativement, là, il y avait le matériel de transmission pour la

 16   télévision était utilisé comme terrain de formation pour l'ABiH. Les lignes

 17   de conflit plus au nord étaient un peu plus éloignées, donc si on parle des

 18   hauteurs qui dominent le centre-ville, c'est la partie que je viens de

 19   dessiner à droite.

 20   Q.  Pouvez-vous nous marquer les lettres VRS sur ce cercle que vous avez

 21   dessiné à droite ?

 22   R.  [Le témoin s'exécute]

 23   M. THOMAS : [interprétation] Monsieur le Président --

 24   Q.  Une autre question avant de quitter cette photographie. On voit sur la

 25   photographie -- est-ce qu'on voit là où se trouvait le tunnel dont vous

 26   avez parlé ?

 27   R.  Je pense que je peux le mettre ici. Moi, je ne l'ai jamais emprunté, je

 28   le contournais parce qu'il y avait souvent des tirs de mortier sur les

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  1   entrées et c'était à peu près ici sur cette ligne.

  2   M. THOMAS : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait faire verser ce document

  3   au dossier.

  4   M. GUY-SMITH : [interprétation] Avant de le faire, pourrait-on en avoir

  5   ABiH pour les terrains de formation, ou bien un T pour les équipements de

  6   transmission, de diffusion de la télévision.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je mets un T ou un ABiH --

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ce qui marche le mieux.

  9   M. THOMAS : [interprétation] Je n'ai pas de problème avec cela.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pensais que si on pouvait avoir VRS

 11   écrit du côté droit peut-être qu'on pourrait mettre ABiH sur le côté

 12   gauche.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, bien sûr, dans les deux cas, ça n'est

 14   pas le seul endroit où ils se trouvaient. Je marque simplement où se

 15   trouvent les hauteurs par rapport au centre de la ville.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai bien compris. Mais peut-être

 17   qu'on peut mettre un T près du tunnel, et ensuite cette carte avec les

 18   marques qu'elle comporte est versée au dossier comme élément de preuve. Je

 19   demande qu'on lui attribue une cote.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P517, Monsieur

 21   le Président.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 23   M. THOMAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame la

 24   Greffière.

 25   Je me demande si on pourrait voir maintenant, je ne sais pas s'Il est

 26   possible de le faire sur le même écran mais la photographie numéro 12 du

 27   recueil qui porte sur la liste 65 ter le numéro 09241.

 28   Q.  Peut-être que l'on pourrait commencer avec cette image.

Page 3179

  1   Monsieur Bell, vous voyez qu'il y a une marque sur la gauche, il est écrit

  2   "gauche" sur la photographie numéro 12 dans l'album que vous avez et du

  3   côté gauche de la pièce 09241 de la liste 65 ter.

  4   Vous avez parlé d'une colline avec une tour de télévision dessus. Est-ce

  5   que c'est bien ça qu'on voit sur la photographie ?

  6   R.  Oui, c'est bien cela.

  7   Q.  La photographie a été prise également d'une élévation que vous avez

  8   marquée comme étant occupée par la VRS sur la photographie précédente ?

  9   R.  Elle peut avoir été prise de là mais ce pourrait également avoir été

 10   pris depuis le village olympique qui se trouvait sur les terrains tenus par

 11   l'ABiH.

 12   Q.  Je vois.

 13   M. THOMAS : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait maintenant déplacer vers

 14   la droite, Monsieur l'Huissier ?

 15   Q.  Alors, en regardant vers la droite, est-ce que ceci vous aiderait ?

 16   R.  Oui, effectivement, et en allant vers la droite, je dirais qu'il est

 17   plus probable que ça a été pris du village olympique parce que l'élévation

 18   qui surplombe le centre de la ville est peut-être bien à droite. Vous voyez

 19   le Holiday Inn en jaune.

 20   Q.  Oui.

 21   R.  Nous pouvons voir là, nous appelions ça en fait le lieu des tirs isolés

 22   à peu près à 400 yards sur la droite. Donc ceci était surplombé par des

 23   hauteurs contrôlées par les Serbes de Bosnie.

 24   Q.  C'était tel que nous voyons les choses sur la photographie, enfin à ma

 25   droite, du côté droite de la photographie ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Est-ce que ce point de vue ou de vantage pour les positions de la VRS

 28   ont une ressemblance quelconque avec le type de vue qu'on peut voir sur

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  1   cette photographie ?

  2   R.  Bon c'est marginal mais en fait, ils étaient plus proches. Ils

  3   pouvaient voir -- vers les rues. Vous voyez qu'il y avait une colline au-

  4   delà du Holiday Inn, et moi-même, je campais là avec ma caméra en juillet

  5   1995. C'était un lieu dangereux, mais un point de vue excellent et on

  6   l'appelait la colline "Gypsy," des tziganes. De sorte que je dirais que les

  7   soldats de la VRS qui souhaitaient le faire auraient en fait eu une vue

  8   beaucoup plus claire que celle prise de cette position.

  9   Q.  Bien.

 10   M. THOMAS : [interprétation] Je voudrais demander le versement au dossier

 11   de cette photographie, s'il vous plaît, en tant que pièce de l'Accusation.

 12   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document est versé au dossier. Si

 13   vous pouvez lui donner une cote, s'il vous plaît.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P518.

 15   M. THOMAS : [interprétation]

 16   Q.  Vous avez parlé de Holiday Inn, nous voyons que c'est le bâtiment jaune

 17   sur la photographie et est-ce que c'est là que vous étiez stationné, à ce

 18   moment-là, à Sarajevo ?

 19   R.  Oui. Pas au tout début parce qu'il avait été endommagé pour les

 20   premiers jours, mais à partir de juin 1992 j'y allais de temps à autre

 21   parce qu'en fait, je me suis rendu également beaucoup en Bosnie centrale.

 22   Donc en fait j'ai été là jusqu'à la fin de la guerre, c'était le quartier

 23   général principal pour la presse mais il y avait un côté qui était

 24   inhabitable et qui avait été endommagé par des tirs d'artillerie et

 25   d'autres.

 26   Q.  Quel était le côté inhabitable ?

 27   R.  Vous voyez sur le côté droit. Le côté qui fait face au bâtiment élevé à

 28   côté, il y a donc le bureau du Parlement, le bâtiment du Parlement.

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  1   Q.  Bien. C'était le résultat des tirs provenant de quelles forces ?

  2   R.  Ça a été le résultat de tirs provenant du côté tenu par les Serbes de

  3   Bosnie.

  4   Q.  Bien.

  5   M. THOMAS : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant voir une

  6   carte que l'on a déjà vue précédemment, et je voudrais revenir, s'il vous

  7   plaît, à la pièce P439. Est-ce qu'on pourrait faire un gros plan

  8   maintenant, s'il vous plaît, sur la partie principale de la ville ? Merci,

  9   Monsieur l'Huissier.

 10   Q.  Monsieur Bell, pourriez-vous marquer sur la carte telle qu'on la voit à

 11   l'écran maintenant l'endroit où se trouve Holiday Inn ?

 12   R.  [Le témoin s'exécute]

 13   J'imagine, enfin c'est une carte qui est très peu claire pour moi, ce

 14   serait environ à peu près ici.

 15   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plait, mettre un H majuscule, s'il vous plaît

 16   ?

 17   R.  [Le témoin s'exécute]

 18   M. THOMAS : [interprétation] Si on pouvait, s'il vous plaît, verser ceci au

 19   dossier comme pièce de l'Accusation.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document est admis. On lui donne

 21   une cote, s'il vous plaît.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote P519.

 23   M. THOMAS : [interprétation] Merci. Merci, Madame la Greffière.

 24   Q.  Vous avez mentionné, Monsieur Bell --

 25   M. THOMAS : [interprétation] Merci, Monsieur l'Huissier. Nous n'avons plus

 26   besoin de votre aide.

 27   Q.  Monsieur Bell, vous avez mentionné le sort très difficile des civils

 28   dans le territoire tenu par l'ABiH, et les tirs isolés, les tirs

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  1   d'artillerie; est-ce que vous pourriez d'abord nous dire quelle était cette

  2   situation en ce qui concerne disons environ la fin de 1992, au début de

  3   1993 ?

  4   R.  Ceci c'était une guerre qui de notre point de vue, de mon point de vue

  5   était combattue contre toutes les règles et les conventions de Genève. Il

  6   n'y avait pas de distinction entre les objectifs militaires et les

  7   objectifs civils, sauf, bien sûr, le fait que les civils n'étaient pas

  8   capables de se défendre. Il fallait bien qu'ils sortent pour avoir des

  9   aliments, des vivres, de l'eau, de carburant, s'ils le pouvaient en prendre

 10   -- en trouver, un grand nombre, en particulier les enfants ont passé la

 11   plupart du temps de ces trois ans et demi dans des caves.

 12   Q.  Que se passait-il pour les civils qui se trouvent à l'extérieur ?

 13   R.  J'ai eu l'expérience de voir à un moment où j'étais en train de faire

 14   un rapport au début de 1993, nous avons vu qu'il y avait un point d'eau, un

 15   tuyau avec un robinet, il fallait que les gens puissent sortir. Mais ils se

 16   trouvaient à portée des positions des Serbes de Bosnie. Régulièrement, il y

 17   avait des personnes qui se faisaient tirer dessus alors qu'ils allaient

 18   chercher de l'eau. Parfois, c'était même les trams qui étaient pris cible

 19   de la même manière. Pour moi, c'était l'une des images les plus typiques de

 20   la guerre vers la fin, alors qu'il y avait un blindé français, un transport

 21   de personnel qui faisait la navette en gros entre le bâtiment du bureau du

 22   parlement et ce que l'on savait être l'endroit où se trouvaient les tireurs

 23   isolés, et pour une fois, la FORPRONU, la force de protection de l'ONU,

 24   faisait effectivement de la protection. A ce moment-là, les civils

 25   pouvaient avancer, protéger par le transport de personnel blindé pour les -

 26   - en marchant bien sûr, ceci le blindé protégeait les civils qui évidemment

 27   étaient plus sûrs de ce côté-là. Je n'ai jamais vu une guerre aussi

 28   impitoyable que celle-là.

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  1   Q.  Vous avez parlé des effets notamment en ce qui concernait les trams et

  2   également du fait qu'il était nécessaire d'aller se procurer de l'eau. En

  3   plus de ces effets des tirs d'artillerie et des tireurs isolés, qu'est-ce

  4   que ça faisait pour la vie quotidienne de Sarajevo ?

  5   R.  C'était vraiment une ville complètement bloquée. Ce que les gens

  6   faisaient c'était essentiellement d'aller se procurer ce dont ils avaient

  7   besoin pour survivre. Il s'agissait simplement de survivre pendant la

  8   journée, c'était particulièrement difficile en hiver parce qu'il y a eu un

  9   hiver qui était particulièrement froid. Il n'y avait pas de gaz, qui était

 10   la plupart du temps coupé. Il n'y avait pas d'électricité, il n'y avait pas

 11   de source d'aliment sauf ce que les Nations Unies pouvaient apporter. Donc

 12   les gens ont véritablement souffert vraiment beaucoup. Je n'avais jamais vu

 13   c dans les autres guerres où j'étais, pour être franc.

 14   Q.  Quelle était la fréquence, là encore, en se centrant sur la période de

 15   la fin de 1992 ou de 1993, pendant un instant -- quelle était la fréquence

 16   avec laquelle les civils se faisaient tirer dessus ou étaient tués par

 17   balle ou des civils étaient pris pour cible par les tirs d'artillerie des

 18   forces de la VRS ?

 19   R.  Ce n'était pas quelque chose qui se faisait de façon régulière pendant

 20   trois ans et demi. Indépendamment du premier hiver de la guerre en 1992 à

 21   1993, qui a été particulièrement dur, il y a eu en fait dans les premiers

 22   mois de l'année je crois, janvier, février et la mi-mars quelque chose

 23   comme une histoire de cessez-le-feu, et puis c'était au moment où il y

 24   avait des négociations pour le cessez-le-feu. Mais avec la neige et la

 25   glace qui fondaient, vers la mi-mars, on se rendait compte qu'à ce moment-

 26   là le rythme des tirs d'artillerie et des combats s'était accéléré et qu'il

 27   y avait un grand nombre, enfin d'engagement des forces principales comme la

 28   tentative par l'armée BiH de rompre le siège de Sarajevo en juin, juillet

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  1   1995. Donc c'était quelque chose qui avait un caractère presque saisonnier.

  2   Il y avait des moments ou c'était bien pire qu'à d'autres.

  3   Q.  Est-ce que vous étiez en mesure d'évaluer si oui ou non des civils

  4   étaient spécifiquement pris pour cible ?

  5   R.  Le bon sens fait répondre, oui. Je me rappelle un caméraman à Holiday

  6   Inn, qui était juste en train de braquer sa caméra, un matin, sortant par

  7   une fenêtre pour s'assurer qu'elle fonctionnait, et puis il y avait une

  8   veille dame qui sortait d'une voiture et qui rentrait dans une maison, donc

  9   elle était en train de s'assurer -- c'est à ce moment-là qu'on lui a tiré

 10   dessus. Je pense qu'il était hautement improbable que ça ait été un

 11   accident quand on lui a tiré dessus. Donc je crois qu'elle a été prise pour

 12   cible.

 13   Q.  Est-ce qu'il y avait des zones de la ville qui étaient plus sujettes à

 14   des attaques contre les civils que d'autres ?

 15   R.  Oui, en gros, les secteurs où les tireurs isolés et les artilleurs du

 16   côté de la VRS des lignes avaient évidemment une vue très claire, une vue

 17   directe. Plus on gente sur les rues; vous comprenez la rue principale va

 18   d'un bout à l'autre mais les rues latérales étaient particulièrement

 19   vulnérables. C'est là que se trouvait le lieu des tireurs isolés pendant

 20   trois ans et demi. Mais, bien entendu, ayant dit cela, on était également

 21   vulnérable lorsqu'il y avait des tirs de mortier où que l'on soit.

 22   Q.  Bien. Est-ce que cette vulnérabilité a été constante le long de ces

 23   trois ans et demi ?

 24   R.  Non, je ne pense pas que l'intensité des tirs ait été constante pendant

 25   ces trois ans et demi. Je ne dirais pas le pire, c'était l'été de 1992, et

 26   encore, ça avait repris au cours de l'été 1995.

 27   Q.  Quelles étaient les forces respectives ou les faiblesses respectives du

 28   point de vue des armes et du point de vue des effectifs pour les deux

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  1   forces ?

  2   R.  A l'évidence, les Serbes avaient l'avantage pour ce qui étaient des

  3   armes lourdes et des transports de personnel blindé, des chars, ils avaient

  4   même un char dans le quartier de Grabovica, un faubourg, et puis il y avait

  5   des bombes et des roquettes. Tandis que l'armée de la BiH, bien qu'elle ait

  6   été moins bien équipée, avait l'avantage du nombre -- de supériorité du

  7   nombre. Les Serbes, lors de la quatrième ou la troisième année de guerre,

  8   avaient été -- avaient perdu beaucoup d'effectifs. Mais il s'agissait d'une

  9   armée de citoyens quiconque était capable de porter des armes, les portait.

 10   L'unité principale du Corps de la Romanija, qui encerclait Sarajevo, avait

 11   perdu beaucoup de ses effectifs. Il manquait d'officiers, il manquait de

 12   sous-officiers et j'avais de très bonnes relations avec les Serbes jusqu'au

 13   mois d'août 1994.

 14   Parfois avec Karadzic et d'autres, il nous faisait faire une tournée

 15   des lignes de front et nous montrait quel était l'était d'esprit de ses

 16   soldats. Tout ceci faisait partie de ce que j'appellerais une campagne

 17   d'information. Mais je me suis rendu compte qu'il y avait un grand nombre

 18   d'hommes très âgés, et j'ai évoqué ceci avec Jovan Zametica, qui avait été

 19   à Cambridge et qui était son conseiller étranger, et j'ai dit : "Jovan,

 20   est-ce que vous allez perdre ? Pourquoi est-ce que vous ne traitez pas ?

 21   "Enfin, il a dit quelque chose que je n'ai jamais oublié, il a dit : "On

 22   s'en fiche."

 23    Il y avait un déséquilibre entre les deux forces. Les armes lourdes

 24   d'un côté mais les effectifs de l'autre, le nombre d'hommes. Bien sûr, vers

 25   la fin de la guerre, les forces du gouvernement de Bosnie ont trouvé des

 26   manières d'obtenir davantage d'armes en particulier d'armes antichars.

 27   Q.  Comment est-ce que ce déséquilibre s'est manifesté du point de vue des

 28   échanges militaires ?

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  1   R.  Ça s'est manifesté dans une possibilité croissante pour l'ABiH de

  2   menacer sérieusement l'encerclement serbe de la ville. Vers juin 1995, nous

  3   avons eu certaines images étonnantes où ils ont effectivement fait une

  4   percée période un certain temps sur la vielle route de Pale, ils ont essayé

  5   de rompre le siège de l'extérieur mais ils ont subi des pertes très

  6   lourdes, donc ce qu'on pouvait voir vers la fin de la guerre. Ce qui

  7   n'avait pas été le cas jusqu'à présent c'était qu'avant les échanges de

  8   tirs entre les unités principales de chaque côté, mais ça ne faisait pas

  9   que les civils fussent davantage en sûreté. Il y avait des moments où quand

 10   même c'était une guerre d'une armée contre une autre.

 11   Q.  Donc quelles étaient les réactions de la réponse de la VRS ?

 12   R.  Bien, j'ai remarqué que ce qui se passait, il s'agissait de l'endroit

 13   où se trouvaient les forces gouvernementales. Je veux dire je me rappelle

 14   avoir réfléchi, à un moment donné, sur le fait que Siladzic, qui était un

 15   membre de la présidence, j'ai eu l'impression qu'une brigade toute entière

 16   de fusiliers marins ou quelque chose de ce genre nous demanderaient ce qui

 17   se passerait, si les forces gouvernementales pouvaient commencer à tirer

 18   plus agressivement en essayant de rompre le siège et se faisait vraiment

 19   frapper très fort par de l'artillerie par des tirs de chars. On pouvait

 20   voir ça dans les premiers mois de la guerre. Donc ils se retournaient en

 21   disant : "Mais que font-ils ? Nous sommes les victimes." Vous avez tout

 22   particulièrement un cas en 1995 avec l'utilisation de bombes aériennes et

 23   de roquettes, et effectivement l'utilisation de phosphore qui a été

 24   également employé à ce moment-là.

 25   Q.  Je voudrais vous poser quelques questions concernant ces bombes dont

 26   vous venez de parler. Quelles étaient les forces qui utilisaient ces bombes

 27   jetées d'avion et qui avaient une propulsion de roquette ?

 28   R.  C'était les forces qui pouvaient les avoir. En fait, l'armée de Bosnie

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  1   en avait très peu pour ce qui était des armes lourdes, et lorsque les

  2   Croates étaient en train d'assiéger Gornji Vakuf en 1993 et 1994, en fait,

  3   ils utilisaient des mines marines et les faisaient dévaler les collines

  4   vers les villages. Vous utilisiez ce que vous aviez sous la main.

  5   Maintenant il y avait une zone interdiction de survol qui était mise en

  6   place et la partie serbe faisait que ces bombes aériennes ne pouvaient pas

  7   être utilisées parce qu'elle ne pouvait pas utiliser les avions. Donc il

  8   fallait trouver des moyens de les faire propulser par les fusils ou les

  9   roquettes. C'est-à-dire pendant que j'étais là je pense il y a eu trois cas

 10   de ce genre, une fois à Vlasenica, une fois au dépôt des autocars ou des

 11   bus, et une fois pour ce qui est de l'enceinte des véhicules de l'ONU en

 12   face de la station de télévision, et il y a eu de graves dommages à la

 13   station de télévision.

 14   Q.  Pourriez-vous décrire ce que vous savez concernant l'effet de ces

 15   bombes ?

 16   R.  Je ne suis venu qu'après qu'on ne les ait utilisées et je crois que

 17   c'était des bombes aériennes de 500 livres et elles avaient un effet

 18   dévastateur. C'était les armes les plus lourdes utilisées par rapport aux

 19   chars et aux obus d'artillerie utilisés dans les premiers temps de la

 20   guerre. C'était là les armes les plus lourdes qui étaient employées pendant

 21   toute la guerre.

 22   Q.  Ce que vous avez vu ou les sites sur lesquels vous vous êtes rendu,

 23   est-ce que c'était des installations militaires ou des zones civiles ?

 24   R.  Hrasnica je n'ai pas pu voir parce que je n'ai pas pu y aller, je n'ai

 25   pas pu arriver. Mais l'enceinte de l'ONU -- il y avait une enceinte de

 26   l'ONU, c'était un ancien dépôt pour des bus, donc par définition, ça

 27   n'avait pas des fonctions militaires. Il n'y avait pas de militaire compris

 28   dans l'intérieur, et la station de télévision était également une

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  1   installation civile par définition.

  2   Q.  Indépendamment des bâtiments eux-mêmes, est-ce que les alentours

  3   immédiats étaient civils ou militaires ?

  4   R.  Je n'ai eu connaissance d'aucune installation militaire où que ce soit

  5   près de la station de télévision ou de l'enceinte des bus en face. Le

  6   quartier général principal pour l'armée était en ville et les autres zones

  7   militaires, si vous voulez, se trouvaient sur les lignes de front mais pas

  8   autour de ces zones cibles, non.

  9   Q.  D'une façon générale où se trouvaient géographiquement les soldats de

 10   l'ABiH ? Où étaient-ils déployés ?

 11   R.  Ils étaient déployés à l'évidence autour des bords en quelque sorte, on

 12   les trouvait parfois casernés dans les écoles. Mais on n'était pas au

 13   courant, on ne savait pas en vivant dans une ville où il y avait une très

 14   grande masse qu'il y avait une armée qui s'y trouvait. C'était une guerre

 15   qui en fait était combattue en quelque sorte par petit morceau, maison par

 16   maison, secteur par secteur. Indépendamment de ce que je disais là, nous

 17   avons fait un article concernant les forces du gouvernementales de Bosnie

 18   qui s'exerçaient sur ces collines près de la tour de la télévision, et

 19   c'est à ce moment-là -- c'est la seule fois où je les ai vues en masse.

 20   Indépendamment de la tentative visant à briser l'encerclement en juin 1992

 21   où ils se déplaçaient très rapidement en grimpant la colline sous un feu de

 22   couverture, un tir qui les protégeait, mais ça rassemblait à une ville en

 23   ruine. Je dirais : ce n'était pas -- ils n'étaient pas terrorisés en aucune

 24   manière.

 25   Q.  Lorsque vous parlez des soldats déployés autour des bords ou des

 26   extrémités de la ville, que voulez-vous dire ?

 27   R.  Je voudrais corriger quelque chose que j'ai dit.

 28   Q.  Oui, Monsieur Bell, vous avez mentionné donc les soldats, les soldats

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  1   de l'ABiH qui étaient déployés jusqu'au bord, vous vouliez parler de quoi ?

  2   R.  Je veux parler des lignes de front. C'était une guerre dans laquelle et

  3   vous le savez des lignes de front pouvaient être à 30 mètres à peine de

  4   distance les unes des autres. Finalement, c'était également de maison à

  5   maison très souvent. Il y avait une sorte de cessez-le-feu local soit

  6   explicite soit convenu entre les commandants. Mais en fait chaque

  7   centimètre de terrain avait fait l'objet de combat, je dirais à partir de

  8   mai 1992 et par la suite.

  9   Q.  Vous avez parlé tout à l'heure, Monsieur Bell, du fait que le gaz était

 10   coupé, l'électricité était coupé, vous avez décrit les personnes qui

 11   devaient se rendre à certains endroits pour prendre de l'eau. Pourquoi cela

 12   ?

 13   R.  Le gaz entrait à Sarajevo de l'extérieur et l'eau également, bon, il y

 14   avait des conduites principales et donc l'une des sources pour se procurer

 15   de l'eau c'était à partir de la rivière où il y avait des personnes qui

 16   allaient en fait dans le cœur de l'hiver allaient chercher de l'eau avec

 17   des charrettes ou des carrioles à main, parce que ces personnes devaient

 18   sortir pour aller chercher de l'eau. C'était l'un des effets des combats,

 19   je dirais que c'est la raison pour laquelle cette guerre était

 20   particulièrement terrible. Bon, dans cette fin du XXe siècle dans un

 21   environnement urbain, et ça n'aurait pas été aussi dur à la campagne que

 22   cette guerre ne l'était en ville, mais pas seulement à Sarajevo, Mostar et

 23   Tuzla aussi.  

 24   Q.  Vous vous êtes trouvé à Sarajevo pour la première fois à la fin de 1992

 25   et au début de 1993, et vous vous rendiez compte de quoi ?

 26   R.  Bien, je rendais compte essentiellement des résultats de la campagne et

 27   du référendum et du commencement de la guerre des combats de rue dans

 28   Sarajevo, de la fuite en masse de réfugiés venant -- de réfugiés de Bosnie

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  1   orientale. Nous sommes allés à Zvornik où nous avions encore une certaine

  2   possibilité de nous déplacer. Je rendais compte des aspects politiques.

  3   J'ai passé beaucoup de temps à Pale avec Jovan Zametica, et Karadzic, avec

  4   Nikola Koljevic et son vice-président. Vous savez, nous avions essayé

  5   d'être aussi complet que nous pouvions dans des circonstances relativement

  6   difficiles.

  7   Q.  Est-ce que le fait de rendre compte de tout cela comprenait le fait de

  8   dire ce qui arrivait aux civils ?

  9   R.  Oui, bien sûr. Je l'ai fait beaucoup ce rapport -- le rapport que j'ai

 10   fait -- l'article que j'ai écrit à l'extérieur de Zvornik alors que nous

 11   étions en train d'observer, je crois, 20 000 civils qui s'étaient déplacés

 12   en un jour et puisque les civils constituaient les principales types de

 13   cette guerre, et il y a eu évidemment, on a beaucoup rendu compte de leur

 14   sort.

 15   Q.  Y compris également de Sarajevo ?

 16   R.  Y compris quand on rendait compte de Sarajevo, de part et d'autre, des

 17   deux côtés des lignes, oui.

 18   Q.  Lorsque vous étiez là vers la fin de 1992 et en 1993, quelle était

 19   l'importance du nombre de journalistes de la presse internationale à

 20   Sarajevo ?

 21   R.  Je crois qu'au moment les plus importants, c'était environ 50

 22   personnes. C'était un lieu où il était très difficile de parvenir, le coût

 23   de la protection étaient élevés, les aspects logistiques étaient difficiles

 24   de sorte que ceux d'entre nous qui étaient présents et qui ont été présents

 25   tout le temps, en fait, nous étions relativement peu nombreux, ce qui, de

 26   mon point de vue, avait un avantage, à savoir que l'on pouvait accéder aux

 27   personnes les plus importantes. Vous pouviez, à ce moment-là, voir les

 28   généraux de l'ONU, les dirigeants serbes de Bosnie, ça n'était pas fait par

Page 3192

  1   des intermédiaires et des fonctionnaires de presse. Il y a un grand nombre

  2   d'entre nous qui d'ailleurs avons fait un métier où nous nous entendions

  3   bien.

  4   Q.  Est-ce que tout le monde était intéressé dans le même type de récit ou

  5   de rapport que ce que vous avez décrit ?

  6   R.  Bien, il y avait plus qu'un ordre du jour convenu. Je pense, oui, dans

  7   l'ensemble. Il n'y avait pas de presse tabloïd tellement. Je pense qu'il y

  8   avait pas de grandes différences entre nous dans la façon dont nous

  9   rendions compte de ce qui se passait sauf, peut-être du fait que j'ai passé

 10   davantage de temps avec les Serbes qu'avec les autres.

 11   Q. Quels types de réseaux, d'agences de presse ou autres organisations

 12   étaient représentés à l'époque ?

 13   R.  A l'évidence, il y avait Reuters qui était là, une société de presse,

 14   l'Agence France-Presse, l'AFP, la BBC était là, le CNN et la télévision

 15   française. Mais mis ensemble, nous agissions ensemble parce que c'était

 16   tellement dangereux. Donc j'ai pris l'initiative de réunir un certain

 17   nombre d'entre nous, et en fait, nous formions ce que nous appelions le

 18   pool d'agences de Sarajevo de sorte que les cameramen et les camerawomen

 19   n'étaient pas en compétition les uns avec les autres pour aller dans les

 20   lieux les plus dangereux et je pense qu'ainsi, nous avons sauvé quelques

 21   vies. C'était en fait un groupe qui n'était pas en compétition, c'était un

 22   groupe très homogène de personnes.

 23   Q.  Ce groupe, qu'est-ce qu'il faisait ensuite avec ses prises de vue ?

 24   R.  Il les envoyait par satellite dans le monde entier. Je sais cela parce

 25   qu'un article que j'ai envoyé concernant les réfugiés qui étaient chassés

 26   des villages autour de Zvornik et Zvornik par un chef paramilitaire, Zeljko

 27   Raznjatovic, appelé Arkan. Je le connaissais très bien, nous avons commencé

 28   à envoyer des prises de vue prises par un cameraman de mon équipe à

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  1   Zvornik, sur les Musulmans qui étaient morts et qui étaient emmenés, et le

  2   fait que le drapeau serbe avait été hissé et tout ce qui pouvait concerner

  3   cette guerre. Donc j'ai vu à Belgrade qu'on avait utilisé mes commentaires

  4   le lendemain pour essayer de réduire les risques. Le nom de la personne en

  5   question c'était Dragan et il avait été très menacé. Oui, ces images ont

  6   fait le tour de l'Europe et du monde.

  7   Q.  Vous êtes reparti fin 1994 et puis vous êtes resté jusqu'à la fin de la

  8   guerre. Est-ce que les reportages étaient tous les mêmes dans la presse

  9   internationale ?

 10   R.  Non, je pense que là il y avait une certaine lassitude qui s'était

 11   instaurée, une fatigue. Mais parallèlement, il y avait aussi une sécurité

 12   sur les terrains militaires beaucoup plus grande, bien accrue et donc il

 13   était plus facile de s'arrêter un peu partout là où on voulait, on essayait

 14   davantage de manipuler la presse. Pourtant, de mai 1995 et vraiment

 15   jusqu'au moment de Dayton, les images étaient tellement parlantes qu'elles

 16   ont fait le tour du monde à la même vitesse que durant le premier été de la

 17   guerre.  

 18   Q.  De mars 1994 jusqu'à la fin de la guerre, est-ce qu'il y a eu à tout

 19   moment présence de la presse internationale à Sarajevo ?

 20   R.  Oui, constamment. Mais je pense que ça a diminué, l'intérêt a décru.

 21   Les rédacteurs en chef d'Europe et des Etats-Unis se disaient que la guerre

 22   avait duré déjà longtemps, qu'elle avait vieilli pour ainsi dire et qu'il y

 23   avait déjà une certaine rivalité au niveau des titres, par exemple, le

 24   divorce au niveau de la royauté britannique semblait plus important qu'un

 25   guerre en Europe.

 26   Q.  Vers la fin ?

 27   R.  Mai, juin, juillet 1995. Le manque d'intérêt s'était dissipé, les gens

 28   voulaient vraiment être informés.

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  1   Q.  Est-ce que ça veut dire qu'on n'a pas du tout fait de reportages sur le

  2   sort des civils ?

  3   R.  Non, non. On en a toujours parlé. Ce pool des agences de Sarajevo avait

  4   deux cameramen de Bosnie qui allaient partout. On n'a jamais cessé de

  5   travailler d'arrache-pied, et arrivé le début de l'été 1995, mes rédacteurs

  6   en chef se rendaient compte que c'était peut-être là le moment extrême de

  7   la guerre. Le juillet 1995, après le massacre de Srebrenica, c'est devenu

  8   vraiment une guerre qui a laissé une impression indélébile sur la

  9   conscience universelle.

 10   Q.  Est-ce que vous avez fait des reportages sur le massacre de Srebrenica

 11   ?

 12   R.  Oui, mais uniquement de l'extérieur parce qu'on ne pouvait pas y

 13   entrer. Il a fallu des semaines, voire des mois pour vraiment comprendre ce

 14   qui s'était passé là-bas. On savait qu'il y avait des gens qui avaient

 15   disparu mais il était impossible de prouver qu'ils avaient tué. Mais les

 16   Américains avaient pris de photos qui semblaient l'indiquer. Je dirais que

 17   c'est seulement vers le mois de septembre 1995 que des gens ont commencé à

 18   dire que ça ne s'était pas passé, il y a eu des [imperceptible] mais après.

 19   Avant c'était possible, mais après septembre, non, je ne pense pas. Ceci a

 20   contribué à lancer l'initiative politique qui a mis fin à la guerre.

 21   Q.  Qu'est-ce que c'est que Eurovision ?

 22   R.  C'est un groupe qui rassemble toutes les chaînes de radio et télévision

 23   européennes. Il y a, bien sûr, le concours Eurovision mais il y a aussi

 24   d'échange d'images filmées par différentes chaînes de télévision et tout

 25   ceci est réuni et il y avait présentation de ces images de façon régulière

 26   et quotidienne.

 27   Q.  Ça fonctionnait en 1992 jusqu'en 1995 ?

 28   R.  Oui. Nous avions une antenne satellitaire au départ, la première fois

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  1   que nous sommes allés en avril 1995, on était à Ilidza, dans ce quartier

  2   qui était en territoire serbe. Nous étions à l'hôtel Sarajevo et c'était

  3   l'Union européenne, Eurovision, qui était au cœur de cette activité qui

  4   nous a permis de diffuser les images.

  5   Q.  Mais concrètement, ces images elles passaient où, qu'est-ce que

  6   Eurovision en faisait. Pourriez-vous nous dire quel était l'acheminenent de

  7   ces images ?

  8   R.  Avant que ce pool ne soit créé, les agences de presse principales,

  9   Reuters à l'époque s'appelait "Viz News," et puis il y avait WTN, Réseau

 10   mondial, et APTN, c'étaient des agences ou réseaux qui, disons,

 11   rassemblaient ces images, étaient propriétaires de ces images mais il y

 12   avait une chambre de compensation à Genève des images qui décidait des

 13   images à envoyer. Puis, à partir de mai, Eurovision avait des gens sur le

 14   terrain qui allaient faire les gros titres s'il y avait quelque chose de

 15   neuf.

 16   Q. Ce pool d'images d'Eurovision, est-ce que tous ceux qui étaient abonnés

 17   pouvaient obtenir ces images ? Est-ce qu'il était possible de les récupérer

 18   ou de les télécharger ?   

 19   R.  J'avais des lettres venant des quatre coins de l'Europe, ce qui veut

 20   dire que manifestement, il était possible de sortir parce qu'il n'y avait

 21   pas de chaînes de télévision ininterrompues par CNN, à l'époque. Mais tout

 22   autour de Genève, toutes les petites chaînes de télévision ont manifesté un

 23   intérêt très vif. Je l'ai vu par les gens qui sont venus, il y avait des

 24   gens de chaînes autrichiennes, irlandaises, allemandes, françaises,

 25   sûrement, étaient sur place, parce que les gens avaient vu les images sur

 26   leurs écrans, ils voulaient envoyer, dépêcher sur place leurs propres

 27   correspondants. Je pense qu'après la Croatie, c'était -- comprenons que

 28   c'était la première guerre en Europe depuis 1945, donc ce n'était pas

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  1   surprenant qu'un tel intérêt se manifeste.

  2   Q.  Est-ce qu'il y a certaines chaînes de télévision qui ont essayé ou, par

  3   exemple, se sont abandonnées à ces images d'Eurovision, par exemple, en

  4   Serbie ?

  5   R.  Je n'étais pas, manifestement, à Belgrade à l'époque, mais je sais que

  6   la télévision yougoslave était un membre de bonne réputation, d'ailleurs,

  7   dans ce réseau d'Eurovision. Ce qui est certain c'est qu'ils ont reçu les

  8   images que nous avons envoyées; sinon, mes caméramans n'auraient pas été

  9   menacés -- quand est-ce que c'était ? C'était en avril 1992, je pense. Bien

 10   entendu, si vous pensez aux intérêts qu'avaient les Serbes en Bosnie, il

 11   aurait été quand même extraordinaire qu'ils ne s'intéressent pas à ces

 12   images.

 13   Il y avait beaucoup de journalistes serbes qui sont venus. Le correspondant

 14   d'"Associated Press" était Serbe. Beaucoup des chaînes au départ ont envoyé

 15   -- ou les agences ont envoyé leurs reportages en passant par Belgrade parce

 16   que ça faisait toujours partie du système de l'ancienne Yougoslavie, de

 17   l'ex-Yougoslavie. Il y avait, donc, des journalistes qui ont participé de

 18   façon très directe et active.

 19   Q.  Un instant, s'il vous plaît.

 20   M. THOMAS : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, je n'ai pas

 21   d'autres questions à poser à M. Bell pour le moment. On vient de me

 22   remettre une note indiquant qu'il y a éventuellement une ou deux erreurs

 23   qui se sont glissées dans le compte rendu d'audience. Je vais vérifier.

 24   J'aimerais peut-être à la suite de ça demander des précisions à M. Bell.

 25   Peut-être pourrait-on faire une pause maintenant pour que je procède à

 26   cette recherche, et je lui poserai une question par la suite, si c'est

 27   nécessaire ?

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Parfait. Nous allons recommencer à 16

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  1   heures. L'audience est suspendue.

  2   --- L'audience est suspendue à 15 heures 25.

  3   --- L'audience est reprise à 15 heures 59.

  4    M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Thomas.

  5   M. THOMAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il y a certains

  6   passages du compte rendu d'audience sur lesquels j'aimerais revenir pour

  7   tirer certaines choses au clair avec le témoin. Tout d'abord, à la page 27,

  8   ligne 12, ce passage-là, peut-il apparaître à l'écran qui se trouve devant

  9   mes yeux ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous voulez que là, je vide les lacunes qu'il

 11   y a ?

 12   M. THOMAS : [interprétation]

 13   Q.  Excusez-moi --

 14   R.  Vous voulez que je remplisse ce qui manque ?

 15   Q.  Attendez que je me retrouve, que je sache exactement où nous sommes.

 16   Regardez, il est fait référence à 27 -- le temps, 27:1, à gauche; vous

 17   voyez ça ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Continuez pour aller jusqu'à la ligne 12.

 20   R.  Oui, c'est Jovan Zametica, Z-a-m-e-t-i-c-a.

 21   Q.  Merci.

 22   R.  C'est Nikola Koljevic, K-o-l-j-e-v-i-c.

 23   Q.  Merci beaucoup.

 24   M. THOMAS : [interprétation] Un dernier passage, page 31, ligne 10.

 25   Q.  A ce moment-là, une première question, vous voyez le temps concerné,

 26   31:1 ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Regardez la ligne 10, s'il vous plaît.

Page 3198

  1   R.  Oui.

  2   Q.  A ce moment-là, nous parlions de l'Eurovision ?

  3   R.  Oui, c'est, bien sûr, en avril 1992 que nous sommes allés à Sarajevo

  4   pour la première fois.

  5   Q.  Merci. C'est tout. Je n'avais pas d'autres questions à tirer au clair.

  6   Maintenant, la Défense aura des questions à vous poser.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Guy-Smith.

  8   M. GUY-SMITH : [interprétation] Merci.

  9   Contre-interrogatoire par M. Guy-Smith : 

 10   Q.  [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Bell, j'ai un ton assez inégal

 11   et je pose des problèmes aux interprètes qui ne vous entendent pas, alors

 12   ils crient sur moi, et j'ai vraiment beaucoup de difficulté avec eux.

 13   J'ai lu les dépositions que vous avez déjà faites dans d'autres

 14   procès. J'ai aussi lu des livres, en tout cas, un des livres que vous avez

 15   écrit : "In Harm's Way," et pour commencer mon contre-interrogatoire, je

 16   voudrais me baser sur cela aussi bien que sur vos dires d'aujourd'hui, pour

 17   me faire l'écho de ce qu'a dit le Juge Jorda : "Je vous remercie" - a-t-il

 18   dit - "de la qualité de votre déposition. Vous essayez toujours de faire

 19   preuve de hauteur morale et de grandeur d'âme face à ce terrible conflit."

 20   Moi aussi, j'essaie de parvenir à cet équilibre. En effet, vous étiez

 21   dans une position à nulle autre pareille. Vous pouvez, en venant ici, nous

 22   faire mieux comprendre certaines questions-clés posées dans ce procès,

 23   comme dans ce conflit.

 24   Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit ceci : à l'inverse

 25   d'autres guerres que vous avez vues dans vos activités de journaliste,

 26   cette guerre était différente, disiez-vous. A un moment, vous avez donné

 27   que c'était un retour de la grande guerre et vous avez dit que c'était une

 28   guerre du début du XXe siècle qu'on menait dans les dernières années de ce

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  1   siècle. Arrêtons-nous là un instant, si vous le voulez bien.

  2   Pourriez-vous nous dire -- nous expliquer, à votre avis, quelle était la

  3   différence avec cette guerre parce que vous avez une longue expérience de

  4   reporter de guerre sur beaucoup de champs de bataille ?

  5   R.  Je dirais tout d'abord que j'ai surtout senti en essentiel que je me

  6   retrouvais sur des lieux connus de 1914 à 1918 parce qu'à part les bombes

  7   aériennes, on n'avait pratiquement les mêmes armes qui étaient utilisées

  8   pendant la grande guerre. C'étaient des mines, des mitrailleuses, des

  9   mitraillettes mais la différence c'était, je pense, ceci : c'est qu'on se

 10   trouvait fin du XXe siècle en milieu urbain, et les civils étaient vraiment

 11   pris dans cette tourmente. Ce n'est pas tant qu'il n'y avait pas de

 12   différences qui étaient faites entre les soldats et les civils. Parfois,

 13   j'ai eu le sentiment qu'on prenait pour cible les civils, que les chefs

 14   politiques se servaient des souffrances que subissaient leur peuple pour

 15   faire avancer leur cause politique, et ça s'est passé aussi pendant la

 16   guerre en Croatie.

 17   J'ai été reporteur dans 18 guerres et celle-ci a été la plus choquante,

 18   c'est pour cela.

 19   Q.  Vous parlez des chefs, des leaders politiques qui se sont servis des

 20   souffrances subies par leur peuple pour faire avancer leur cause. En

 21   interrogatoire principal, vous avez relaté une des choses qui fut une

 22   résultante de ce qui s'est appelé lorsque l'armée de Bosnie-Herzégovine

 23   essayait de faire une percée, alors il y avait une réponse lourde, et vous

 24   disiez qu'il y avait eu cette réponse, réponse de Silajdzic ?

 25   R.  Oui, exactement.

 26   Q.  Il disait : regardez ce qu'ils nous font. Est-ce que de cela que vous

 27   parliez ? Est-ce que c'était là un exemple de ce que vous vouliez dire

 28   lorsque vous disiez que quelque part, les chefs, les dirigeants politiques

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  1   se servaient de la souffrance de leur peuple pour faire avancer leur cause

  2   ?

  3   R.  Oui, je pense que quelque part, les chefs politiques étaient sincères.

  4   Haris Silajdzic a critiqué le général Sir Michael Rose, commandant de la

  5   FORPRONU, de façon tout à fait publique. Il a essayé de l'humilier. Mais

  6   j'aimerais opérer une distinction entre des affrontements d'unités

  7   importantes comme quand je vous ai dit qu'il y avait eu une tentative par

  8   l'ABiH de briser le siège à l'été 1995 et puis les pilonnages quotidiens,

  9   la prise possible de civils là. Dans cette guerre-ci, les deux choses se

 10   sont passées.

 11    Q.  Dans cette guerre, à votre avis, enfin j'essaie de trouver les bons

 12   mots pour le dire, les mots justes. Le statut des médias dans cette guerre

 13   était-il différent du statut des journalistes dans d'autres guerres dont

 14   vous avez fait le reportage ? Je serai tout à fait franc avec vous. Vous

 15   voyez où je veux en venir, n'est-ce pas ?

 16   R.  Ecoutez, je vais essayer de vous aider du mieux que je peux.

 17   Lorsque la guerre a commencé en avril 1992, la communauté internationale

 18   n'était pratiquement pas sur le terrain. Elle était absente. La FORPRONU

 19   avait un QG à Sarajevo au début de la guerre mais elle est partie à la

 20   hâte, la FORPRONU, en mai 1992. Pour ce qui est de la communauté à

 21   l'origine, il y avait quelques rares observateurs européens mais, pour ce

 22   qui est des gens de là-bas qui ont vu, les seuls gens de la communauté

 23   internationale qu'ils ont vu, c'étaient des journalistes internationaux.

 24   Manifestement, on a essayé de nous influencer, ils ont essayé de faire

 25   valoir leur point de vue ce que nous avons compris aussi. A cet égard

 26   aussi, c'était une guerre inhabituelle.

 27   Q.  Mais ceci me permet d'enchaîner sur un commentaire qu'on entend

 28   souvent, et je ne vous accuse pas de ce genre de dire, mais on dit que la

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  1   première victime d'une guerre, c'est la vérité. Est-ce que c'était là

  2   quelque chose de préoccupant ? Peut-être et je suppose que c'était quelque

  3   chose qui vous préoccupait vous mais aussi vos collègues journalistes. Vous

  4   avez veillé à être sûr que vous étiez objectif et que vous disiez la vérité

  5   ?

  6   R.  Tout à fait, Monsieur. Quoi qu'on fasse, ce sont des bribes qu'on peut

  7   faire parce qu'on se concentre sur ce qu'on trouve à un moment précis, à un

  8   lieu précis. Mais surtout au cours du premier mois de la guerre, nous avons

  9   eu vraiment la possibilité assez extraordinaire d'avoir accès aux deux

 10   parties au conflit. Franchement, un des problèmes que j'ai rencontré, eu

 11   égard à mes rédacteurs en chef - ils n'étaient pas les seuls d'ailleurs -

 12   c'est que très vite, ils ont dit : bon, les Serbes, c'étaient les méchants,

 13   et les Musulmans de Bosnie c'étaient les bons. Vous voyez ce que je veux

 14   dire.

 15   Q.  Tout à fait.

 16   R.  Alors, s'il y avait une ambulance avec des soldats serbes qui était

 17   interceptée, détournée et huit ou neuf Serbes ont été tués de sang froid,

 18   moi, j'ai eu beaucoup de mal à faire comprendre à mes rédacteurs que ça

 19   s'était bien passé. A l'évidence on s'interroge aussi. Mais où est-ce que

 20   je me suis trompé ? Mais je crois que je peux retenir et accepter tout

 21   ceci. Bien sûr, c'était fragmentaire, je ne pouvais pas être omniprésent,

 22   j'étais toujours là où j'étais.

 23   Q.  Vous avez dit que -- je pense que vous avez dit que les vraies guerres

 24   sont des guerres locales.

 25   R.  Oui, toutes les guerres sont locales.

 26   Q.  C'est ce que vous disiez dans votre -- bon. Parce que ce qui se passe

 27   sur le terrain à un moment précis, c'est ce qui est le plus important ?  

 28   R.  Effectivement. C'est le champ de bataille où on combat et c'est la

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  1   tranchée dans laquelle on périt.

  2   Q.  Si je ne m'abuse, vous êtes arrivé dans, sur zone dans le cadre du

  3   processus de referendum ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Voyons ce que vous dites dans votre livre et si ce que vous y avez dit

  6   est toujours vrai aujourd'hui. Ceci concerne la question de la poussée

  7   Genscher impliquée par une canifère [comme interprété] - vous voyez ce que

  8   je veux dire - qui voulait que l'indépendance soit reconnue par la

  9   communauté. Dans votre livre, vous dites, à la page 35 - dans le système du

 10   prétoire électronique, ce sont les pages 2 et 3 - vous dites ceci :

 11   "Javier Perez de Cuellar, qui était alors secrétaire au président

 12   Hans van den Broek qui présidait l'Union européenne pour dire que --

 13   s'inquiéter après avoir rencontré beaucoup des protagonistes dont les chefs

 14   politiques serbes de Bosnie. On a souvent parlé des conséquences tout à

 15   fait effroyables que pourrait avoir cette évolution. On dit que c'était en

 16   puissance une bombe à retardement. Si on reconnaissait trop tôt la Croatie,

 17   ceci pourrait vraiment rendre explosive une situation sur le terrain

 18   surtout en Bosnie-Herzégovine comme en Macédoine. Je pense, par conséquent,

 19   qu'une toute action coordonnée doit être évidente."

 20   Lord Carrington a dit de même, et là, je saute quelques lignes :

 21   "Si on reconnaissait très tôt la Croatie, ce serait la fin de la

 22   Conférence, et le danger existerait. Ce serait même probable que la Bosnie-

 23   Herzégovine demande aussi à être indépendante et que ça soit reconnu ce qui

 24   serait tout à fait inacceptable pour les Serbes de Bosnie, et ça pourrait

 25   être l'étincelle qui fait s'enflamme le baril de poudre que représente la

 26   Bosnie-Herzégovine."

 27   Quelques années plus tard, d'autres réflexions faites, je sais que ça

 28   trouve, dans votre livre, mais est-ce que vous maintenez la position que

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  1   vous y exprimez ?

  2   R.  Oui. J'ai reçu tous les documents en ce qui concerne la reconnaissance

  3   de la Croatie, et rétrospectivement je pense que ce fut un événement

  4   capital et essentiel. Toutes les prédictions, toutes les craintes exprimées

  5   par Carrington et d'autres, malheureusement se sont avérées. 

  6   Q.  Pendant la période que vous avez passé dans la région, avez-vous

  7   discuté avec des dirigeants serbes ou avec des Serbes du fait que la

  8   décision prise par l'Union européenne, décision de reconnaître ou de donner

  9   suite à cette demande d'obtenir l'indépendance ? Est-ce que vous en avez

 10   parlé ?

 11   R.  Oui, en marche de la campagne en vue du référendum, en mars 1992, parce

 12   qu'à cette date, une décision était déjà tombée en ce qui concerne la

 13   Croatie et vous le verrez comme tous, les guerres civiles -- la bande

 14   civile, c'est plus qu'une guerre civile mais c'était en partie aussi une

 15   guerre civile en Bosnie. Elle a mis du temps à démarrer. Ça n'a pas démarré

 16   rapidement parce que les habitants de Bosnie savaient très bien ce qui

 17   allait se passer si la guerre débutait. Il est certain que j'en ai discuté

 18   avec Karadzic et Koljevic, donc avec des dirigeants serbes, après les avoir

 19   rencontrés une première fois.

 20   Q.  Nous parlerons peut-être de Mladic. Je pense que vous n'avez pas parlé

 21   de cela avec le général Mladic ?

 22   R.  Le général Mladic n'était pas encore sur scène, si j'ose dire. Il était

 23   dans la JNA. Il était cantonné ailleurs. Jamais je ne l'ai connu aussi bien

 24   que les autres parce que je me suis surtout entretenu avec les dirigeants

 25   politiques. Nous avons eu, en août 1992, l'occasion -- je suis intervenu

 26   pour qu'il n'étrangle pas Kurt Schork, qui était représentant de l'agence

 27   Reuters.

 28   Q.  Est-ce que vous voulez dire que chacun devait contrôler sa partie ?

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  1   Peut-être parce que le correspondent de guerre a attaqué Mladic de certains

  2   méfaits ?

  3   R.  Tout à fait.

  4   Q.  J'essaie de parvenir à une entente, car ici nous parlons souvent et

  5   c'est bien cela de la perception de ce qui s'est dit, de voir comment ce

  6   qui a été dit a été reçu. Dites-moi si je qualifie bien les faits ou pas.

  7   Page 103 du livre, page 9 dans le système du prétoire électronique.

  8   "Et parallèlement, et c'est une surprise, j'ai trouvé qu'il n'était

  9   pas du tout difficile de fréquenter les Serbes. Lorsqu'ils ont essayé de

 10   faire passer un message au gouvernement britannique, j'ai dit : non, je ne

 11   peux pas, parce que ce n'est pas mon travail. Mais ils étaient chaleureux,

 12   hospitaliers et très innocents."

 13   Voilà ce à quoi je vous en venir : un peu comme si on était au XIVe

 14   siècle, ce qu'il ne les disculpe pas, mais plutôt pour faire comprendre

 15   qu'ils viennent d'un autre âge. Mais qu'ici ils causaient du tort dans ce

 16   siècle-ci, et dans l'autre âge contemporain, et le problème c'était de leur

 17   faire comprendre."

 18   XIVe pour moi c'est la peste, c'est la Guerre de cent ans. A

 19   l'époque, la société était assez fermée. Les gens étaient forcément isolés

 20   et s'inquiétaient de tout ce qui venait de l'extérieur.

 21   Est-ce que c'est là bien caractérisé votre expérience, l'expérience

 22   que vous avez faite des Serbes et de ce genre de chose que vous parliez là

 23   ?

 24   R.  Quand j'ai parlé du XIVe siècle, je pensais à la bataille de Kosovo

 25   Polje, 14 -- 1389, qui était un moment capital de leur histoire. J'ai écrit

 26   ailleurs dans ce livre, et sans vouloir les créditer du tout, j'ai dit que

 27   les Serbes c'est un peuple qui vit sur l'histoire que comme autre peuple.

 28   Ce n'est pas une critique, c'est quelque chose qui est particulièrement

Page 3206

  1   intéressant à leur rencontre.

  2   Q.  D'ailleurs - et je m'excuse envers vous - apparemment, il serait utile

  3   de vous dire à quoi -- de quoi quand j'ai fait référence. Il s'agit de la

  4   pièce 1D05556, ce sont les pages de son livre qui m'intéresse. Je m'excuse

  5   si ces pages n'ont pas été affichées à l'écran.

  6   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je m'excuse auprès de vous, Madame et

  7   Messieurs les Juges de la Chambre.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il y a combien de 5, dans ce numéro ?

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Trois 5 et un 6.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 11   M. GUY-SMITH : [interprétation] S'agissant maintenant de cette même idée,

 12   de ce même type d'idée, vous avez mentionné, et là, vous parliez des Serbes

 13   de Bosnie par opposition à tout autre groupe, si j'ai bien compris à la

 14   page 113 de votre livre, Monsieur, et page 12 donc du document. Vous dites

 15   :

 16   "La plupart du temps leur isolation était auto imposée, ils sont

 17   prisonniers de leur politique et de leur histoire. Mais je me demandais

 18   parfois si la mécanique de la télévision n'avait pas également eu une

 19   influence pendant toute la guerre, nous n'avons pas passé un temps égal

 20   entre une partie qui était l'autre.

 21   "La plupart du temps on n'échangeait pas de côté du tout, on restait

 22   du côté du gouvernement et on faisait nos reportages de ce point de vue.

 23   Pour les opérations de télévision que nous menions, et bien, il y a un

 24   certain centre de gravité qu'on a du mal à déplacer."

 25   Tout d'abord, quand vous parlez de leur isolement auquel ils tiennent,

 26   j'imagine que vous parlez de personnalité, comme Karadzic. Ou est-ce que

 27   vous parlez des gens, en général ?

 28   R.  Bien entendu, j'ai pu connaître pas mal de civils et de soldats à tous

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  1   les niveaux, y compris une sorte de mouvement de la paix à l'époque à

  2   l'intérieur de l'armée serbe de Bosnie qui était sous la direction du

  3   commandant Mawser de Bijeljina. Ce n'était pas simplement les dirigeants.

  4   Je connaissais, j'aimais beaucoup de ces personnes, mais j'avais

  5   l'impression qu'ils avaient très souvent l'impression un peu paranoïaque

  6   que tout le monde était contre eux. C'est pour cela que j'ai parlé de ce

  7   mécanisme. C'était beaucoup plus primitif que maintenant. Il y avait une

  8   antenne pour satellite. Pour pouvoir atteindre les Serbes, une fois que la

  9   guerre avait démarrée, il fallait traverser la ligne. Vous pourriez

 10   éventuellement recevoir un tir, donc il était peu facile de se contenter du

 11   territoire qui était tenu par le gouvernement. Une fois j'ai été blessé,

 12   gravement blessé en traversant la piste, mais néanmoins j'ai continué. Ce

 13   n'est qu'en 1994 qu'on n'a plus pu accéder au territoire serbe de Bosnie.

 14   Q.  Donc jusqu'au mois d'août 1994, je peux bien comprendre pourquoi vous

 15   ne vouliez pas vous déplacer, et peut-être c'était l'une des raisons pour

 16   lesquelles vous avez créé le Corps de Sarajevo pour protéger les vies

 17   plutôt que d'essayer simplement de vous emparer de nouvelles à sensation.

 18   Compte tenu de la compréhension que vous aviez du fait qu'ils étaient

 19   prisonniers de leur politique et de leur histoire, et s'agissant de la

 20   question des reportages télévisuels, j'espère que vous allez me comprendre,

 21   du point de vue de leur isolement, est-ce que vous avez jamais eu la

 22   sensation qu'ils pensaient que l'information qui était diffusée par la

 23   télévision était simplement de la propagande et ne méritait pas d'être

 24   prise en considération ?

 25   R.  Effectivement, pas mal de personnes pensaient ceci. La première chose

 26   qu'ils ont faite, c'est de mettre en place un service de diffusion

 27   télévisuel eux-mêmes, avec des machines qu'ils avaient prises à la BBC, de

 28   façon à ce qu'ils puissent donner leur propre version des événements. Mais

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  1   même en août 1994, à ce stade tardif, ils nous ont fait venir et il y a eu

  2   un referendum sur ce qu'on appelait le plan de groupe contact, et on nous a

  3   amenés dans les tranchées, on nous a dit qu'on pouvait faire des interviews

  4   avec qui on voulait. Le but était de montrer que, unanimement, les Serbes

  5   de Bosnie étaient contre ce plan. Ils ont continué à traiter avec nous

  6   jusqu'à ce moment.

  7   J'ai trouvé si vous avez une réputation d'être quelqu'un de ce que

  8   les soldats appelaient "correct," on pouvait continuer à traiter avec eux.

  9   Q.  Ils vous considéraient comme correct ?

 10   R.  La plupart du temps, oui.

 11   Q.  C'est ce que j'avais compris. Quand vous utilisez ce terme de

 12   "correct," et je crois que vous avez déjà témoigné à ce propos

 13   précédemment, pouvez-vous nous expliquer quel est le sens de ce terme du

 14   point de vue de l'interprétation serbe de ce que cela veut dire ?

 15   R.  L'interprétation serbe de ce que constitue cette correction, c'est

 16   voici un homme qui dissémine les faits tels qu'il les trouve, tels qu'il

 17   les connaît, et ne vient pas nous voir avec une notion préconçue.

 18   Q.   Bien. A un stade précoce, vous avez rencontré un homme qui avait dit

 19   que la BBC était une organisation Oustachi. Est-ce que c'était une vision

 20   partagée par les Serbes dont vous avez parlé ?

 21   R.  Si je me souviens - et vous avez le livre devant vous; moi, je ne l'ai

 22   pas - c'était le commandant d'une batterie d'artillerie serbe qui

 23   effectuait de tir sur la ligne de front. Donc, j'ai été en mesure de le

 24   convaincre que je n'étais pas un Oustachi, à savoir un fasciste croate. En

 25   fin de compte, il a été extrêmement aimable et m'a donné des informations

 26   particulièrement intéressantes à propos de la mentalité serbe de l'époque.

 27   Q.  Un autre point dont vous parlez, à la page 109 -- d'ailleurs, je

 28   voudrais vous préciser que vous avez tout à fait raison, vous vous souvenez

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  1   très bien de ce que vous avez écrit. Maintenant, s'agissant de la page 109

  2   et de la page 11 du document du prétoire électronique, vous avez parlé à un

  3   moment donné de Milosevic qui s'était rendu à Pale pour faire en sorte que

  4   les Serbes du parlement serbe de Bosnie puissent ratifier le plan. Plus

  5   loin dans cette même page, vous dites :

  6    "Ceux qui le pouvaient se sont rendus à Belgrade et le restant, ce

  7   sont retournés dans les tranchées. Les Serbes ont fermé leur rang à

  8   l'encontre du monde extérieur dont nous, nous étions la partie la plus

  9   visible et le symbole, et ils se sont mis à leur réprimer ou à limiter les

 10   intrusions."

 11   Donc vous explicitez les difficultés d'accès que vous avez eues à partir de

 12   ce moment-là.

 13   Je pense que l'une des seules choses qui se passe dans une salle

 14   d'audience et ailleurs aussi, c'est qu'on dépeint les choses en blanc de

 15   manière très dichotomique, ce qui n'est pas exact, et de plus c'est assez

 16   naïf. Mais concernant maintenant la question, une fois de plus, de la

 17   perception qu'avaient les Serbes, et je parle des Serbes de Bosnie, des

 18   reportages qui émanaient des journalistes, est-ce que vous avez jamais eu

 19   le sentiment qu'ils se méfiaient, et je veux dire les images qui étaient

 20   diffusées, est-ce qu'ils s'en méfiaient ?

 21   R.  En tout cas, ils croyaient que le gouvernement de Bosnie menait

 22   une guerre de propagande. Ils ont d'ailleurs fermé leurs lignes de front

 23   pour nous empêcher de les atteindre. Les seuls journalistes à Pale, à part

 24   quelques exceptions, c'était des Serbes ou des Grecs ou des Russes, des

 25   gens de la région orthodoxe. Il était parfaitement impossible pour nous de

 26   faire des reportages exacts de ce qui se passait, mis à part ce qu'on

 27   voyait sur leur service télévision.

 28   La première chose que nous avons sue à propos de l'enlèvement des

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  1   observateurs des Nations Unies au mois de mai 1995, c'était quand on l'a vu

  2   sur nos écrans. Nous en étions réduits à cela. On avait plus d'expérience

  3   directe de pouvoir consulter Mladic ou Karadzic. Je pense que nos

  4   reportages s'en sont ressentis. Ils n'étaient pas partiaux, mais nous

  5   n'avions pas la même liberté à la fin de la guerre que nous avions eue au

  6   début.

  7   Q.  Dans votre livre, vous dites, à la page 139, à savoir page 20 sur

  8   le prétoire électronique : "Le satellite est autant une arme de guerre que

  9   le fusil d'un tireur d'élite, et c'est une extension de la guerre par

 10   d'autres moyens."

 11   R.  Les penseurs militaires, tels que le général Rupert Smith, ont

 12   beaucoup écrit à propos de l'importance des campagnes d'information. Vous

 13   pouvez gagner, d'un point de vue militaire, mais perdre du point de vue

 14   politique. C'est un fait depuis la guerre du Vietnam, je pense.

 15   Q.  Je pense qu'on pourrait être d'accord pour dire que le Vietnam a

 16   été la première fois où les militaires ont bien compris la puissance des

 17   médias, l'ont compris pour la première fois ?

 18   R.  Oui, je suis d'accord.

 19   Q.  C'est ce qui a arrêté la guerre et était à l'origine de la démise du

 20   président, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui. La première fois, feu, pendant la grande guerre, William Howard

 22   Russell était responsable de la démission du gouvernement en 1955 [comme

 23   interprété] --

 24   Q.  Très bien.

 25   R.  [aucune interprétation]

 26   Q.  Ce qui est également important c'est de pouvoir donner à la population,

 27   qu'elle soit audiovisuelle ou de la presse, leur donner une vision exacte

 28   des circonstances qui prévalent autour de la détermination militaire et

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  1   politique d'un Etat qui est en guerre ?

  2   R.  Oui, c'est vrai.

  3   Q.  Maintenant, je voudrais en venir à la question de la FORPRONU. Dans

  4   votre livre, vous parlez de la "mission creep," mais avant d'en venir à la

  5   mission creep, qui est définie, pour ce que j'ai compris comme recevoir un

  6   mandat très large, très peu précis, et en fin de compte, les activités sur

  7   le terrain font que le but de la présence de ces personnes évolues.

  8   R.  Je le dirais différemment. Il y a une force de maintien de la paix qui

  9   est déployée, et une fois qu'ils sont sur le terrain, la situation est

 10   tellement changée que soit cette force ne peut plus faire cette mission ou

 11   la mission doit être changée.

 12   Q.  Concernant la présence de la FORPRONU, est-ce que vous êtes d'accord

 13   avec moi pour dire que son mandat était, premièrement, le fait de maintenir

 14   la paix plutôt que de fabriquer, de constituer la paix ?

 15   R.  Oui. Mais il y a toujours eu cette ambiguïté dans son nom. La force de

 16   protection des Nations Unies qui suggère qu'une partie de sa mission était

 17   de protéger, mais au moment où elle est arrivée, c'était une force de

 18   maintien de la paix dans un pays où il n'y avait pas de paix à maintenir.

 19   Q.  Donc c'était une situation anormale puisque son mandat ne pouvait pas

 20   être mis en oeuvre ?

 21   R.  Oui. Je cite un porte-parole, Aleksandar Ivanko, qui disait : nous

 22   aimerions beaucoup effectuer notre mission si seulement quelqu'un à New

 23   York pouvait nous en expliquer la teneur.

 24   Q.  Pendant la période où vous étiez dans la région, est-ce que vous avez

 25   eu l'occasion de voir que New York avait effectivement expliqué quelle

 26   était la mission de la FORPRONU ?

 27   R.  Est-ce qu'ils l'ont expliquée à la FORPRONU ? Non, pas de manière

 28   cohérente. Le général britannique de la FORPRONU à Sarajevo trouvait que

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  1   c'était une situation extrêmement contradictoire. En fin de compte, le

  2   général Smith a été autorisé essentiellement à modifier le règlement, car

  3   les anciennes règles ne pouvaient pas être appliquées.

  4   Q.  Concernant la FORPRONU, nous avons entendu hier un témoignage

  5   concernant le marché noir, et notamment les échanges en matière de vivres

  6   et de carburant, et je crois que c'est quelque chose, ce sont des sujets

  7   qui avaient également été portés à votre connaissance, même si celle-ci

  8   n'était pas très approfondie. Je crois que vous avez parlé, en particulier,

  9   de l'unité ukrainienne qui était impliquée dans l'échange de carburant sur

 10   le marché noir et d'autres biens aussi; est-ce exact ?

 11   R.  Oui. La FORPRONU était une force qui comprenait des contingents

 12   nationaux dont les compétences étaient très différentes, mais il n'a jamais

 13   été suggéré qu'on puisse avoir trouvé à critiquer le comportement des

 14   Britanniques, des Français ou des Hollandais.

 15   Q.  Je comprends. Est-ce que vous savez si l'information selon laquelle les

 16   unités de la FORPRONU, et en tout cas, pas les Britanniques, les Français

 17   ou les Hollandais, que des unités de la FORPRONU étaient impliquées dans

 18   des trafics sur le marché noir, en collaboration avec des individus dans

 19   cette zone ? Est-ce que ceci a été un sujet de discussion avec les Serbes

 20   de Bosnie dans le cadre de votre travail de reporter ?

 21   R.  Je n'ai entendu parler de ces questions que par ouïe-dire, parce que

 22   pendant toute cette phase-là de la guerre, je n'étais pas présent à

 23   Sarajevo et j'étais basé en Bosnie centrale.

 24   Q.  Est-ce que vous avez eu connaissance d'une protestation faite par

 25   Mladic concernant un véhicule de la FORPRONU qui aurait été utilisé pour

 26   déplacer des armes d'une zone de la région à une autre zone de la région ?

 27   R.  Il a bien pu exprimer une telle plainte, mais je n'étais pas au

 28   courant.

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  1   Q.  J'ai parlé du général Mladic, et vous avez dit que Mladic était une

  2   personne à part et qui acceptait les instructions politiques qui lui

  3   convenaient, mais ne s'occupait pas du reste.

  4   R.  J'ajouterais qu'il bénéficiait également de beaucoup de respect, et ce

  5   n'était pas toujours le cas pour les généraux, mais il était très admiré

  6   par ses soldats. C'était un soldat des soldats.

  7   Q.  Donc il était sur la ligne, il était sur le terrain ?

  8   R.  Oui. Il était très souvent avec eux. Ce n'était pas un général absent.

  9   Q.  Donc vous l'avez comparé à Patton et d'autres ?

 10   R.  Oui. Une fois.

 11   Q.  Il tenait compte des instructions politiques qui lui convenaient, mais

 12   faisait fi du reste. Pendant votre temps dans la région, est-ce que vous

 13   avez eu la sensation que les pouvoirs étaient également répartis entre la

 14   partie militaire et la partie politique, ou que M. Mladic était aux ordres

 15   de M. Karadzic ?

 16   R.  Je savais qu'il y avait des tensions entre eux. L'un de mes amis était

 17   l'officier de liaison. C'était un commandant de l'armée britannique, et il

 18   était officier de liaison à Pale, au QG des Serbes de Bosnie, et plus tard

 19   j'ai su que ces tensions se sont intensifiées, surtout après que le Dr

 20   Karadzic commençait à porter un uniforme militaire. Je cite dans mon livre

 21   que Karadzic regrette qu'ils aient traité trop Mladic en héros, donc il y a

 22   eu des dissensions très fortes.

 23   Q.  En tant que reporter, est-ce que vous avez pu déterminer si oui ou non,

 24   lorsque Karadzic émettait des ordres, Mladic les appliquait ?

 25   R.  Je ne pense pas que ce soit la relation qui convienne.

 26   Q.  D'accord.

 27   R.  Mladic était très souvent présent lors des réunions importantes avec

 28   les médiateurs, mais je douterais fort qu'il se soit considéré, lui,

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  1   Mladic, comme quelqu'un qui mettait en œuvre des décisions politiques.

  2   Q.  Sa position, si j'ai bien compris, est exprimée le mieux, sans doute,

  3   par sa déclaration selon laquelle il serait son seul juge, ce qui est vrai,

  4   sans doute.

  5   R.  Oui, c'est pour cela qu'il ne traitait pas avec la presse. Il disait :

  6   je m'en fiche de la presse, car c'est l'histoire qui sera mon juge.

  7   Q.  S'agissant de la structure de la diffusion de l'information qui était

  8   rassemblée, j'essaye de tourner ceci afin d'en avoir une bonne

  9   compréhension à la fois pour moi, ou peut-être même pour les Juges de la

 10   Chambre, mais moi en tout cas, ce n'est pas clair. Je parle maintenant, et

 11   je vais subdiviser la façon dont les informations sont obtenues, entre la

 12   première période jusqu'en 1993, puis ensuite la période suivante. 

 13   R.  Oui, c'est bien.

 14   Q.  Pendant cette première période, où est-ce qu'on a emmené ces

 15   informations ? Physiquement les clips, les vidéos, où est-ce qu'on les

 16   emmenait ?

 17   R.  Ces clips étaient portés partout dans la ville et parfois ailleurs dans

 18   le pays. On les remettait ensemble tout d'abord à l'hôtel d'Ilidza, et puis

 19   ensuite on allait dans nos bureaux de la télévision. Certains faisaient

 20   l'objet d'échange, il pourrait y avoir un reportage de Sarajevo. Vous

 21   pourriez avoir votre propre caméraman, ou bien ça viendrait des Français,

 22   ou des Allemands, mais évidemment je donnais la priorité à ce que je voyais

 23   personnellement sur le terrain.

 24   Q.  Une fois que vous aviez en votre possession ces informations et je

 25   parle d'images, est-ce que ces images étaient à ce moment-là envoyées en

 26   dehors de la région ?

 27   R.  Ces images -- il y avait deux types d'information; l'image -- les

 28   images et puis les faits. C'est au reporteur de le mettre ensemble et les

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  1   rassembler de façon cohérente et depuis l'arrivée des caméras très légères

  2   au début des années 80, nous faisions nos montages sur site. D'ailleurs,

  3   l'une de nos antennes satellite avait été trouvée par une balle de tireur

  4   embusqué; ceci nous donnait une marche de manœuvre très grande. On n'avait

  5   pas personne qui vous appelait sur votre mobile pour vous dire : voici le

  6   sentiment du rédacteur de son chef à Londres. Non, c'était très direct, et

  7   d'ailleurs, moi, je patrouillais. Je tournais autour -- dans la ville pour

  8   voir ce que je trouvais, maintenant ce n'est plus possible.

  9   Q.  Une fois que vous aviez le produit fini ou une fois que vous aviez

 10   votre article; vous l'envoyez où ?

 11   R.  Je l'envoyais à la BBC à Londres. Il y avait des bulletins de

 12   télévision à 13 heures, 18 heures, et 21 heures. Donc ils le voyaient dix

 13   minutes avant pour la première fois.

 14   Q.  Maintenant pour ce qui est des autres membres du personnel journaliste,

 15   ils faisaient quelque chose d'un petit différent de ce que vous faisiez,

 16   n'est-ce pas ? Je veux dire, on ne vous envoyait pas toutes les stations

 17   dans le monde, ils avaient leurs propres reporteurs ?

 18   R.  Ils avaient leurs propres reporteurs. Le Français était

 19   particulièrement impressionnant. Pour ce qui était des autres, ils

 20   passaient, à mon avis, trop de temps dans les bunkers, et de toute façon,

 21   il n'y avait pas suffisamment qui essayait de contacter les Serbes. Car moi

 22   j'ai toujours pensé que les Serbes tenaient la clé de cette guerre.

 23   Q.  En ce qui concerne une partie de vos collègues, je crois que vous avez

 24   dit tout à l'heure que l'un de vos collègues -- ou est-il vrai que l'un de

 25   vos collègues avait rendu compte une quantité importante, mais je crois que

 26   c'était de la présidence ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Qui était-ce ?

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  1   R.  C'était dans les premières semaines de la guerre, c'était John Burns de

  2   New York Times que je considère en fait comme un excellent reporteur, et

  3   qui avait d'excellentes sources au sein de la présidence.

  4   Q.  Maintenant, aujourd'hui, quand vous étiez là-bas en l'occurrence,

  5   pourriez-vous nous dire, si vous le pouvez, l'effet psychologique ? Quel

  6   serait l'effet psychologique pour les personnes qui voyaient plus

  7   particulièrement les Serbes voyaient de tels reportages venant de la

  8   présidence en ce qui concerne la question des préjugés, des partis pris ?

  9   R.  Bien, pour commencer, ils n'avaient pas ce type d'accès aux articles de

 10   journal de la même manière que pour ce qui était dit à la télévision, et

 11   qui leur était présenté. Je ne veux pas dire pour défendre M. Burns, que

 12   lui aussi -- je voudrais dire que lui aussi essayait de trouver les Serbes.

 13   Q.  Je ne critique pas M. Burns en quoi que ce soit, vraiment, mais c'est

 14   parce que nous comprenons le vrai pouvoir de l'image qui est transmise par

 15   la télévision, et en fait c'est de ça que je veux vraiment parler. Je veux

 16   dire : voir un reporteur au bâtiment de la présidence, qui rend compte dans

 17   une guerre, où il est clair qu'il y a donc deux côtés, peut conduire

 18   quelqu'un à croire qu'il y a une préoccupation tout au moins de ce

 19   reporteur international, si ce n'est de plusieurs reporteurs

 20   internationaux, d'avoir un parti pris contre les Serbes. C'est pour ça que

 21   je vous pose la question, de savoir si c'est exact, très bien; si ce n'est

 22   pas exact, alors ça va très bien aussi, parce que je crois que vous êtes

 23   mieux à même de nous dire cela.

 24   R.  Avec tout le respect que je vous dois, Maître, je ne pense pas que ça

 25   soit exact parce que l'image d'un reporteur de nouvelles n'est pas diffusée

 26   autour du monde. Ce sont ses paroles qui le sont. L'image de la télévision

 27   de ce reporteur par contre elle est diffusée dans le monde entier. Si j'ai

 28   passé trois ans et demi à l'intérieur et à l'extérieur de la présidence, à

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  1   ce moment-là, je pourrais avoir été perçu comme étant le parti pris, mais

  2   ce n'était pas le cas.

  3   Q.  Lorsque vous discutez de la question, enfin, vous dites -- vous parlez

  4   de la corruption du langage, vous parlez de corruption de langue et

  5   corruption de la pensée, c'est à l'évidence quelque chose qui a été repris

  6   d'un livre. En ce qui concerne cette question ici de la corruption de

  7   langage et la corruption de la pensée, pour ce qui est du choix des termes

  8   que vous avez employés, et je ne parle pas de vous, de façon précise, mais

  9   en tant que proposition générale, en prenant en considération certains des

 10   sujets dont nous avons parlé quant aux termes employés dans les médias par

 11   les parties respectives, respectivant par les parties, est-ce que vous

 12   pensez qu'il serait juste de dire qu'en vertu de ce que nous pourrions

 13   appeler une sorte de présentation David contre Goliath par les médias ? Il

 14   y avait en fait la présentation d'un niveau de corruption de ce qui était

 15   dit au point de vue langage et de la corruption de la pensée

 16   R.  Parlant pour moi-même, les mots que j'employais avaient toujours un

 17   profile bas, et l'art de la télévision -- les arts de la télévision c'est

 18   le montrer les choses. Alors on laisse tomber les adjectifs, on laisse

 19   tomber les adverbes, les images sont si puissantes. Je pense que les

 20   articles de journal et de reportage de la télévision sont des choses

 21   totalement différentes à cet égard. J'ai été une fois accusé, je crois, par

 22   le secrétaire du "foreign office," britannique, d'avoir dit quelque chose

 23   d'être fait en Bosnie. Je n'ai en fait jamais fait de campagne ou je ne me

 24   suis jamais plaint de ceci parce que je n'avais pas besoin parce que les

 25   images en fait disaient ce que j'avais à dire. Ce n'était pas de parti

 26   pris, il vaut mieux montrer les choses telles qu'elles sont.

 27   Q.  En ce qui concerne la puissance des images et le choix des images, à

 28   l'évidence, ceci a une influence sur le spectateur indépendant sur

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  1   l'exactitude ou l'inexactitude de ce qui est présenté; seriez-vous d'accord

  2   ou non ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  La répétition et le fait de présenter à nouveau l'image auront le même

  5   effet ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Serait-il juste de dire qu'à un moment donné, lorsque vous pensiez en

  8   ce qui concerne l'ensemble de la question du reportage où vous avez décidé

  9   d'accepter le fait que les habitudes de la BBC en ce qui concerne la

 10   distance et le détachement pour les victimes, en fait, on dira que vous

 11   n'avez jamais plaidé pour quelque chose. Vous avez pris une détermination -

 12   - vous vous êtes déterminé sur le fait que quelque chose devait être faite

 13   et vous êtes allé de l'avant, comme on fait certains de vos collègues, pour

 14   le faire ?

 15   R.  Ceci est extrêmement intéressant. Je suis parvenu à la conclusion qu'un

 16   reporteur peut être impartial ou équitable, mais pas entre les armées --

 17   les personnes armées et les personnes désarmées, entre l'agresseur et la

 18   victime. Par exemple, certaines des images les plus puissantes, au cours de

 19   ces années que j'ai obtenu la partie des Serbes de Bosnie sur la ligne de

 20   Grbavica, lorsque les personnes pendaient des tapis et des draps sur des

 21   fils le long de la route de façon à ce que les tireurs isolés ne puissent

 22   pas voir de l'autre côté. Donc dans cette mesure, je n'aie aucune partie

 23   prise. J'étais en mesure de montrer que les Serbes également se faisaient

 24   tirer dessus, et je pense que c'était très important comme partie du récit.

 25   J'étais également très critique des médias vers la fin de la guerre.

 26   J'avais le sentiment que tout ceci, qu'on rendait compte de tout ceci à

 27   partir d'un couloir d'environ peut-être deux ou trois kilomètres de

 28   longueur sur la route principale du centre de Sarajevo.

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  1   Les pires victimes -- les plus graves victimes dans l'ensemble

  2   c'était à Tuzla, en mai 1995, où près de 90 personnes ont été tuées par un

  3   seul bombardement. C'est la pratique [imperceptible] qui n'a pas été rendue

  4   compte. Donc j'étais très critique de certaines de nos pratiques.

  5   Q.  Je comprends que d'après ce que j'ai lu et ce que je vous ai entendu

  6   dire dans certains discours.

  7   Je souhaiterais pendant un moment changer de vitesse en quelque sorte

  8   ou de sujet, parce qu'on a parlé de quelque chose en ce qui concerne le

  9   document P 515.

 10   Pourrait-on donc, s'il vous plaît, voir le P 515 ?

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant que nous voyons P 515, qu'est-ce

 12   que vous voulez qu'on fasse avec le 05556 ?

 13   M. GUY-SMITH : [interprétation] Rien, pour le moment, Monsieur le

 14   Président.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 16   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 17   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, jeter un coup d'œil à cette image un

 18   instant ? Maintenant ce que je vais faire, juste puisqu'on l'avait vu, vous

 19   avez indiqué une ou deux choses notamment il se peut qu'une partie soit

 20   inexacte.

 21   M. GUY-SMITH : [interprétation] Ce que je voudrais maintenant, c'est qu'on

 22   voit maintenant la carte que nous avons utilisée, est-ce qu'il y aurait une

 23   possibilité maintenant d'agrandir cela, ou est-ce que c'est toujours la

 24   même situation, à savoir qu'on ne peut pas agrandir ? Si on pouvait

 25   simplement agrandir le secteur qui est juste à l'endroit où on voit les

 26   lettres "VRS," peut-on agrandir un petit peu là ?

 27   Q.  Je ne sais pas si ça peut vous aider, mais regardons ce secteur plus

 28   particulièrement là où on voit il y a ces cases noires sous le V, cette

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  1   espèce de carré noir.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je me demande si maintenant on peut à

  3   nouveau rapetisser cela juste pour un instant.

  4   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce secteur comme étant également, faisant

  5   également partie du territoire de l'ABiH ?

  6   R.  Non, ça, ce que nous voyons là, c'est l'extrémité de Lukavica de la

  7   piste d'atterrissage, et ceci était tenu par les Serbes de Bosnie.

  8   Q.  Bien, merci. Pendant l'interrogatoire principal, vous avez mentionné,

  9   Monsieur Bell, que certaines Unités de l'ABiH avaient été logées ou

 10   casernées dans les écoles; est-ce que vous avez des souvenirs du nombre

 11   d'unités qui avaient été ainsi installées dans les écoles ?

 12   R.  Ma propre expérience à l'époque comme je l'ai expliqué, c'était quand

 13   j'étais allé rendre compte en ce qui concernait le fait que l'armée BiH de

 14   Bosnie essayait de faire une percée du siège; et l'unité où nous sommes

 15   allés, nous l'avons trouvée dans une école, c'est ça. Mais pour le reste,

 16   je pense qu'il devait y avoir une sorte de casernement chez les gens, la

 17   population. Je veux dire que, pendant la firme partie de la guerre, il ne

 18   s'agissait pas d'une armée formée, d'une armée de métier, professionnelle,

 19   comme l'armée serbe, bien qu'ils se soient formés, entraînés et qu'ils

 20   soient devenus très professionnels, qui avaient pris du métier au cours de

 21   la guerre. C'était très uni; je veux dire les Serbes respectaient un grand

 22   nombre d'entre eux parce que c'étaient des formateurs, des entraîneurs, si

 23   vous pouvez le croire, mais ils n'avaient pas de bottes ou de grosses

 24   chaussures, de brodequins.

 25   Q.  Ceci veut dire que ce n'était pas de véritables soldats; est-ce que ça

 26   veut dire qu'ils n'avaient pas de crainte ?

 27   R.  Nous allons revenir à la question de la définition de ce qui exact,

 28   mais, bien entendu, ils étaient sous estimés du point de vue danger pour

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  1   les Serbes, parce que c'étaient également de très bons tireurs.

  2   M. GUY-SMITH : [interprétation] Est-ce qu'on pourra retourner au document

  3   1D 005556, s'il vous plaît ?

  4   Q.  Donc l'une des leçons qui avaient été apprises dans les questions de

  5   maintien de la paix, c'était que toutes les menaces seraient utilisées ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Dans votre expérience au cours de la guerre ici, serait-il juste de

  8   dire que le nombre de menaces qui étaient faites par les Nations Unies

  9   étaient non seulement mises à l'épreuve mais une fois mises à l'épreuve,

 10   qu'on se constatait que les Nations Unies présentaient des carences pour

 11   faire ce pour quoi ils étaient mis à l'œuvre ?

 12   R.  Oui, je pense que c'était particulièrement le cas. En 1994, sur ce que

 13   nous voyons maintenant sur des attaques -- coups d'épingles en réponse à la

 14   divulgation de cessez-le-feu ou de mouvement d'armes lourdes. C'était

 15   seulement vers la fin de l'été 1995 que le général Smith a très exactement

 16   et correctement apprécié les forces, l'équilibre des forces de ce qu'il y

 17   avait comme Serbes de Bosnie et qu'il a été en mesure de tirer avantage de

 18   la présence de ce commandant de la FORPRONU à Zagreb, qui était en

 19   vacances. Il y avait le mariage de l'un de ses enfants; le général Smith, a

 20   pu, à ce moment-là, quand ils se sont tournés la clé et utilisé -- enfin,

 21   employé la force, ce qui pour l'essentiel a tout changé.

 22   Q.  Ce faisant, ce qu'il a en fait, fait c'est qu'il a changé la politique

 23   parce qu'il avait exercé le commandement pendant une journée, en ce sens

 24   que l'autre monsieur n'était plus dans le fauteuil de direction, donc il a

 25   pu prendre le contrôle ?

 26   R.  Dans la permission qui était donnée de New York, ce n'était pas une

 27   décision inconsidérée.

 28   Q.  Je comprends cela. Vous mentionnez ceci également dans votre livre, le

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  1   fait que la télévision par sa nature même a une attitude à présenter une

  2   vision par rapport à la réalité qui est quelque peu diminuée lorsqu'elle

  3   est encadrée dans un petit rectangle qui se trouve dans un coin du salon.

  4   Dans la mesure où nous traitons d'une image qui est en fait diffusée dans

  5   le monde entier, dans quelle mesure si vous avez des idées sur la question,

  6   le fait que ce travail qui consiste à rendre compte maintenant depuis tant

  7   d'années, dans quelle mesure est-ce que vous voyez que la réalité sur le

  8   terrain est comprise par ceux qui regardent ça dans la lucarne ?

  9   R.  J'ai beaucoup écrit à ce sujet. Parfois, j'ai écrit des questions de

 10   scènes sur le point de savoir si de Vukovar ou de Tuzla ou de Sarajevo,

 11   vous pouviez donc rendre compte, évitez en quelque sorte les choses. Ça,

 12   c'est simplement parce que vous ne pouviez pas rendre compte, par exemple,

 13   de l'odeur, vous n'avez pas le déroulement de la scène tout autour de vous.

 14   C'est un autre élément, donc ça aussi j'étais forcé de prendre des

 15   décisions relativement timides de faire un peu d'édition pour essayer de

 16   rendre compte par exemple des effusions de sang. Parce qu'on ne voulait non

 17   plus troubler les gens. Ceci avait un effet qui pourrait être de falsifier

 18   quelque un petit peu la couverture, mais j'ai combattu cette bataille avec

 19   ceux qui éditaient ce que j'envoyais pendant de nombreuses années, et j'ai

 20   perdu cette bataille.

 21   Q.  C'est dommage.

 22   R.  C'est dommage.

 23   Q.  Je voulais essayer de comprendre quelque chose que vous avez dit un peu

 24   plus tôt lorsque vous parlez des formateurs, du nom de "trainers" --

 25   R.  Non, ce que je voulais dire c'était il s'agissait de brodequins de

 26   chaussures, des chaussures, c'est -- ce ne sont pas rigides.

 27   Q.  Ah bon. Parce que parfois des trainers c'est --

 28   R.  Parce que je voulais dire --

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  1   Q.  Des chaussures relativement souples.

  2   R.  Je veux dire que vous allez en fait faire la guerre avec des baskets,

  3   question de voir ce qui se passe. On le voit de plus en plus dans le monde

  4   des baskets ou même des pieds nus en l'occurrence.

  5   Q.  Absolument, oui. Est-ce que vous pensez que d'une certaine façon, je

  6   vous pose cette question en me basant sur l'expérience que vous avez eue

  7   pendant toutes ces années au cours de cette guerre et je suis désolé

  8   d'employer ce terme mais cette guerre était la première dans les nouvelles

  9   guerres que nous allons voir et qui a eu pour résultat que toutes les

 10   réactions étaient tout au mieux dans la confusion ?

 11   R.  Oui, c'est ce que le général Smith décrit maintenant comme une guerre

 12   entre les peuples. La guerre en Irak est peut-être entre la population, ce

 13   qui s'est passé à Gaza c'était dans la population, au sein de la

 14   population. La dernière fois qu'il y a eu une véritable bataille de chars

 15   c'était en 1973 donc en fait, nous sommes sortis de la phase de la guerre

 16   industrielle pour passer à un type de guerre différent et le conflit de

 17   Bosnie, avec quelques 97 000 tués, c'est certainement un type de guerre de

 18   ce genre.

 19   Q.  Dans cette situation encore une fois basé sur votre expérience, je

 20   crois qu'il y a eu beaucoup de confusion si j'avais bien compris ce que

 21   vous avez dit, mais je vais utiliser un terme différent, c'est-à-dire

 22   plutôt un manque de clarté sur la façon dont ces guerres sont menées, sont

 23   conduites. Je ne me réfère pas au fait qu'il y ait des torts ou qu'il y ait

 24   tort ou raison d'un côté ou de l'autre mais plutôt par le fait que nous

 25   traitons d'une série de facteurs qui jusqu'à présent n'avaient pas été

 26   évoqués de façon interne à la façon dont les questions ont été évoquées

 27   précédemment. C'est la première fois qu'on doit en quelque sorte en tenir

 28   compte ?

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  1   R.  Oui, je pense que c'est une observation qui est juste. Il y a comme une

  2   sorte de brouillard qui vient à l'esprit, un autre élément, à savoir qu'en

  3   fait, on n'a pas le temps, d'une certaine manière, on n'arrive pas du point

  4   de vue journalistique s'il faut savoir si quelque chose est vrai ou faux,

  5   la responsabilité du journaliste est de ne pas donner des renseignements de

  6   deuxième main, c'est-à-dire qu'on nous disait maintes et maintes fois qu'il

  7   y avait eu telle ou telle atrocité. Je disais : montrez-le moi, et on me

  8   disait non; alors je disais -- on disait cette route est minée; à ce

  9   moment-là, on ne peut jamais rendre compte de cela parce que ça pourrait

 10   faire trop de dommages.

 11   L'INTERPRÈTE : S'il vous plaît, ralentissez.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a des gens qui pensent le pire de ce que

 13   peut faire un autre groupe ethnique et parfois ceci fait que ça atteint

 14   l'objectif qu'ils veulent, donc je pense que ce nouveau type de guerre

 15   donne une obligation supplémentaire aux journalistes de vérifier les faits

 16   et de faire très attention lorsqu'ils en rendent compte.

 17   M. GUY-SMITH : [interprétation]

 18   Q.  En ce qui concerne cette guerre, si vous deviez mettre des notes, je ne

 19   vous demande de nous donner une note à vous-même mais une note aux

 20   journalistes qui ont participé à ce nouveau type d'expérience où de

 21   nouveaux facteurs jusqu'à présent qui n'avaient pas encore été examinés

 22   comprendre ce qui se passait; est-ce que vous pensez qu'ils arrivaient à

 23   niveau ?

 24   R.  Je pense que je donnerais un niveau de alpha moins parce que nous

 25   faisons tous des erreurs et pour certains d'entre eux, franchement je ne

 26   les noterais pas du tout.

 27   Q.  Je vais vous demander un instant, s'il vous plaît.

 28   [Le conseil de la Défense se concerte]

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  1   M. GUY-SMITH : [interprétation]

  2   Q.  Je dois consulter ceux qui en savent plus que moi, ils sont plus au

  3   courant que moi. Je vous remercie beaucoup, Monsieur Bell. J'apprécie

  4   vivement vos réponses. Je vous suis très reconnaissant et je veux vous

  5   remercier de façon tout à fait sincère pour votre franchise et --

  6   R.  Je vous remercie beaucoup.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci, Maître Guy-Smith.

  8   Monsieur Thomas.

  9   M. THOMAS : [interprétation] Merci.

 10   Nouvel interrogatoire par M. Thomas :

 11   Q.  [interprétation] Monsieur Bell, on vous a posé une série de questions,

 12   en fait il y a eu beaucoup de discussion concernant le rôle que les médias

 13   devaient jouer pour ce qui était de rendre compte de la guerre et également

 14   d'orienter ou de guider les différentes décisions qui ont été prises par

 15   les parties intéressées, les parties concernées. Vous avez également parlé

 16   dans votre déposition de réunions, du fait que vous aviez accès aux

 17   autorités politiques et militaires impliquées dans le conflit. Ce que je

 18   vais vous demander c'est si vous avez eu un sentiment sur le point de

 19   savoir si ces autorités étaient conscientes du rôle que les médias

 20   pourraient éventuellement jouer dans ce conflit ?

 21   R.  Oui. Je pense qu'ils étaient conscients de cela. Ils tenaient beaucoup

 22   à ce que leur point de vue soit connu par les médias mondiaux. Il y avait

 23   une autre dimension inhabituelle, à savoir que s'ils étaient impliqués dans

 24   des négociations délicates en ce qui concernait les échanges de prisonniers

 25   ou des échanges de corps, de cadavres, en fait ils demandaient aux médias

 26   internationaux d'être présents parce qu'ils avaient l'impression qu'en

 27   présence des caméras de télévision du monde extérieur ça amènerait peut-

 28   être la partie adverse à faire davantage attention d'honorer ses

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  1   obligations, les obligations qu'elle avait prises. Donc en fait sans peut-

  2   être avoir l'intention de le faire, on a peut-être fait un peu de bien à

  3   cet égard.

  4   Q.  Est-ce que vous avez une idée sur le point de savoir si les autorités

  5   politiques et militaires elles-mêmes consacraient -- ils faisaient

  6   attention à ce qui était dit dans les comptes rendus ?

  7   R.  Oui, je pense que c'était le cas. Il y avait certains commandants

  8   militaires qui en fait avaient leur propre cameramen avec eux, ça faisait

  9   partie de la vieille façon de faire yougoslave et une partie des images les

 10   plus intenses, les plus crues que nous avons reçu tout au long de la guerre

 11   avaient été prises par un jeune homme qui était le cameraman du colonel

 12   Ruskic, qui a comparu devant cette Chambre, donc il y avait un grand nombre

 13   de sources différentes.

 14   Q.  Est-ce que ceci est un élément de ce -- une caractéristique de ce qui

 15   se passait à la fin de la guerre ou est-ce que cette conscience de la

 16   puissance des médias si vous voulez elle existait depuis 1992 ?

 17   R.  Je pense qu'avec le temps, à partir de 1995 où toutes les parties au

 18   conflit étaient devenues extrêmement conscientes du pouvoir des médias et

 19   que c'est la raison pour laquelle nous nous sommes trouvés de plus en plus

 20   gênés en quelque sorte et restreints au fur et à mesure que le temps

 21   passait.

 22   Q.  Est-ce que nous sommes en mesure de nous donner l'indication en tant

 23   que quelqu'un qui s'est trouvé pendant toute la période à un moment précis

 24   où les peuples, les populations commençaient à se rendre compte du pouvoir

 25   potentiel des médias en ce conflit ?

 26   R.  Je pense que c'était probablement après la fin de ce qui s'était passé

 27   entre les Musulmans et les Croates, c'était vers la fin de février, en

 28   février 1994, mais à ce moment-là nous avons eu à faire face à une guerre,

Page 3229

  1   apparemment une guerre sans fin entre la Fédération croate des Musulmans de

  2   Croatie d'un côté et les Serbes de Bosnie de l'autre, et j'ai été de plus

  3   en plus conscient de la faiblesse des Serbes de Bosnie en effectifs, en

  4   nombre d'hommes et bien entendu, je ne pouvais pas avoir un contact direct,

  5   le contact direct je l'avais eu précédemment et j'ai trouvé que du côté

  6   ABiH les barrages de route se trouvaient partout.

  7   Q.  Monsieur Bell, je vous remercie. C'est tout ce que j'ai à vous

  8   demander. Les Juges de la Chambre peuvent avoir des questions à vous poser.

  9   M. GUY-SMITH : [interprétation] Si vous le permettez, avec l'indulgence de

 10   la Chambre et de mes collègues, j'ai oublié de poser une question à M.

 11   Bell. Est-ce que je pourrais être autorisé à le faire. Ça ne couvre rien de

 12   ce que M. Thomas vient de discuter.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Thomas.

 14   M. THOMAS : [interprétation] Je n'ai pas d'objection, Monsieur le

 15   Président, pourvu qu'il s'agisse bien d'une question -- pourvu que si une

 16   question devait se poser, on m'offre la même possibilité.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Effectivement. Maître Guy-Smith.

 18   M. GUY-SMITH : [interprétation] Je vous remercie beaucoup de cette

 19   courtoisie.

 20   Contre-interrogatoire supplémentaire par M. Guy-Smith :

 21   Q.  [interprétation] J'ai parcouru, j'ai lu votre livre très très souvent

 22   et j'ai noté différents éléments et j'avais donc oublié de vous dire que

 23   vous indiquez dans votre livre et je vais revenir sur ce point, c'est à la

 24   page 114 donc ça correspondrait à 13 1D 005556. Je lis au milieu de la page

 25   :

 26   "Dans son mode d'auto-critique, je me demanderais lorsque nous avions

 27   montré une victime civile de tireurs embusqués de la partie serbe, à partir

 28   des lignes, lorsque nous rendions compte depuis les hôpitaux, lorsque nous

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  1   avions entendu les nouvelles, celles de Sarajevo à Grbavica plutôt

  2   qu'Oslobodenje et [imperceptible] le journal de la partie gouvernementale

  3   qui était un symbole du journalisme, un symbole pour la ville."

  4   Ma question -- la question que je vous pose concernant le journal et la

  5   partie gouvernementale c'est quand est-ce que ça a commencé à devenir un

  6   journal pour la partie gouvernementale ?

  7   R.  C'était le quotidien de Sarajevo, mais après la guerre a commencé les

  8   Serbes ont commencé à publier leur propre version de ce journal, qui en

  9   fait était édité, rédigé par un ami. Donc il y avait deux versions

 10   différentes.

 11   Q.  En ce qui concerne ce dont vous parlez pour le côté de l'ABiH, c'est

 12   comme ça c'était présenté ?

 13   R.  Oui, le quartier général était en ruine, et c'était d'ailleurs une des

 14   images symboliques de la guerre, le quartier général. Mis j'étais là en

 15   train de faire une critique de ma propre profession, à cause de certaines

 16   de ces carences, et que je m'étais une question. 

 17   Q.  Je ne vois certainement aucune carence dans votre ouvrage. Je vois au

 18   contraire dans tout ce que vous avez fait je ne vois aucune faute non plus,

 19   Monsieur, je vous remercie.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Thomas.

 21   M. THOMAS : [interprétation] Rien, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Nous allons

 23   suspendre l'audience et nous reviendrons à 6 heures moins quart -- 17

 24   heures 45. L'audience est suspendue.

 25   --- L'audience est suspendue à 17 heures 14.

 26   --- L'audience est reprise à 17heures 45.

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Avant de poursuivre, je voudrais

 28   consigner au compte rendu d'audience que nous sommes deux à siéger en

Page 3231

  1   application de l'article 15 bis, le Juge David a dû s'absenter pour des

  2   raisons d'un cas de force majeure et Mme le Juge Picard est à ma gauche

  3   simplement parce qu'elle a déjà son mot de passe dans l'ordinateur ce qui

  4   explique pourquoi elle reste là où elle était auparavant.

  5   Vous en aviez terminé, Madame la Juge ? Avez-vous des questions à poser au

  6   témoin ? Apparemment pas.

  7   Questions de la Cour : 

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je n'en ai que deux personnellement,

  9   Monsieur Bell. Voici la première : Haris Silajdzic, de quelque côté se

 10   trouvait-il pendant la guerre ? Quelle était sa fonction ?

 11   R.  A l'époque, il était premier ministre de la République de Bosnie-

 12   Herzégovine, il était du côté du gouvernement.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Page 61 du compte rendu

 14   d'audience, à partir de la première ligne, on voit une question qui vous a

 15   été posée : "…nous avons notamment une série de facteurs que nous n'avons

 16   pas encore abordé jusqu'à présent," c'était le libellé de la question et

 17   vous avez répondu en disant : "Oui, je pense que c'est un commentaire

 18   exact." Quels sont ces facteurs auxquels vous deviez faire face à l'époque

 19   ?

 20   R.  Il y en a deux qui me viennent aussitôt à l'esprit. Il y a d'abord le

 21   pouvoir, la puissance des médias et surtout de la télévision qui pouvait

 22   former, configurer la réponse des gouvernements, surtout si la politique de

 23   ce gouvernement n'est pas arrêtée. On a parlé du facteur CNN. Donc ceci

 24   inflige une responsabilité accrue aux journalistes.

 25   Puis c'est la nature de cette guerre. Ce n'était pas une guerre à

 26   l'ancienne, ce n'était pas avec des armes qui étaient vieillottes mais vous

 27   aviez la souffrance des civils qui était à ce point manifeste que cette

 28   souffrance aussi a façonné la réaction mondiale et ceci a exigé une réponse

Page 3232

  1   même si elle a été tardive du gouvernement ou des gouvernements, même si

  2   elle n'était pas obligée d'être ou cette réponse aurait été différente si

  3   c'était pas motivé ou poussé par les militaires.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci. Pas de questions de la part des

  5   parties ?

  6   M. THOMAS : [interprétation] Non.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

  8   M. GUY-SMITH : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE MOLOTO : Merci beaucoup, Monsieur Bell. Ceci met un terme à

 10   votre audition. Merci d'avoir pris le temps de venir déposer ici alors que

 11   vous êtes un homme très occupé, je vous remercie. Vous pouvez maintenant

 12   quitter ce prétoire et je vous souhaite un bon retour chez vous.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

 14   [Le témoin se retire]

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Thomas.

 16   M. THOMAS : [interprétation] C'est Mme Bolton qui va interroger le prochain

 17   témoin. Moi, j'en ai terminé aujourd'hui et est-ce que nous pouvons nous

 18   retirer, M. Cannata et moi-même ?

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Tout à fait.

 20   Madame Bolton, vous avez la parole.

 21   Mme BOLTON : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Le

 22   prochain témoin à charge sera Mesud Jusufovic.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mesud Jusufovic.

 24   Mme BOLTON : [interprétation] C'est un témoin visé par l'article 92 ter du

 25   règlement, Monsieur le Président.

 26   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur.

Page 3233

  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vais demander de prononcer la

  2   déclaration solennelle.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  4   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  5   LE TÉMOIN: MESUD JUSUFOVIC [Assermenté]

  6   [Le témoin répond par l'interprète]

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous

  8   asseoir, Monsieur.

  9   Oui, Madame Bolton. Vous avez la parole.

 10   Mme BOLTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Interrogatoire principal par Mme Bolton: 

 12   Q.  [interprétation] Pourriez-vous tout d'abord décliner votre identité aux

 13   fins du dossier de l'audience ?

 14   R.  Je m'appelle Mesud Jusufovic.

 15   Q.  Quelle est votre date de naissance ?

 16   R.  Je suis né le 17 février 1960.

 17   Q.  Si je comprends bien, le 3 avril 2002, vous avez témoigné dans le

 18   procès Galic; est-ce exact ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Hier, vous avez pu écouter l'enregistrement sonore de votre audition

 21   dans ce procès Galic; est-ce exact ?

 22   R.  C'est exact.

 23   Mme BOLTON : [interprétation] Ah, je pense que j'étais sur le mauvais canal

 24   et je n'ai pas entendu votre réponse, Monsieur.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Vous êtes sur quel canal, Madame ?

 26   Mme BOLTON : [interprétation] Maintenant je suis sur le quatrième, c'est

 27   bon, n'est-ce pas ?

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Effectivement.

Page 3234

  1   Mme BOLTON : [interprétation]

  2   Q.  Excusez-moi, Monsieur. Vous avez entendu cet enregistrement, vous le

  3   compreniez ?

  4   R.  Oui, oui, dans ma langue.

  5   Q.  Les réponses que vous avez fournies lors de cette audition étaient-

  6   elles exactes conformes à la vérité ?

  7   R.  Oui, oui. Tout ce que j'ai dit était exact et conforme à la vérité, et

  8   je maintiens ce que j'ai dit alors.

  9   Q.  Si je vous reposais les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que vous y

 10   répondriez de la même façon ?

 11   R.  Oui, je vous donnerais les mêmes réponses.

 12   Q.  Permettez-moi de signaler une chose, la dernière fois en 2002,

 13   lorsqu'on vous a demandé quel était votre métier, vous étiez commandant de

 14   la brigade des pompiers de Sarajevo; est-ce exact ?

 15   R.  Oui, c'est exact.

 16   Q.  Depuis vous avez bénéficié d'une promotion ?

 17   R.  Oui, au cours des six derniers mois, je suis devenu secrétaire de la

 18   défense civile du canton de Sarajevo.

 19   Q.  A ceci près, est-ce que le reste de votre témoignage de 2002 reste-t-il

 20   le même aujourd'hui ?

 21   R.  Tout à fait.

 22   Mme BOLTON : [interprétation] Madame la Greffière, pourriez-vous afficher à

 23   l'écran le document 09412 de la liste 65 ter ? C'est la transcription

 24   officielle de la bande de son de l'enregistrement sonore qu'a écouté le

 25   témoin hier, et il y a eu des expurgations pour indiquer quelle était la

 26   partie dont nous demandions le versement en application de l'article 92 ter

 27   du Règlement et puis-je recevoir une cote ?

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document est versé au dossier.

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  1   Quelle sera la cote, Madame la Greffière ?

  2   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P520, Monsieur le

  3   Président.

  4   Mme BOLTON : [interprétation] Si vous le permettez, Madame et Messieurs les

  5   Juges, j'ai quelques questions que je voudrais poser pour éclairer

  6   davantage la déposition du témoin, est-ce que vous me permettez en même

  7   temps que le résumé aussi ?

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

  9   Mme BOLTON : [interprétation]

 10   Q.  Lorsque vous avez déposé dans l'affaire Galic, il y avait beaucoup de

 11   bâtiments et de monuments qui avaient subi des incendies à cause du

 12   pilonnage de l'armée des Serbes de Bosnie pendant les conflits; est-ce

 13   exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Mme BOLTON : [interprétation] Pouvez-vous afficher, Madame la Greffière, le

 16   document de la liste 65 ter 030601 ? Normalement il y a une traduction en

 17   anglais de ce document.

 18   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous reconnaissez ce document que vous

 19   avez à l'écran ?

 20   R.  Oui, je le reconnais.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Sauf qu'on n'a pas la version en

 22   anglais à l'écran.

 23   Mme BOLTON : [interprétation] J'ai le numéro ERN, si vous me donnez un

 24   instant je vais le retrouver.

 25   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 26   Mme BOLTON : [interprétation] Apparemment, il y a un problème on ne

 27   parvient pas à afficher la version en anglais. Si vous me permettez de

 28   poser la question, je pense que ce sera tout à fait clair vous verrez très

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  1   vite quelle est la nature de ce document et nous pourrons peut-être trouver

  2   plus tard la version en anglais.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Tout à fait.

  4   Mme BOLTON : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Savez-vous qui est l'auteur de ce document, Monsieur le Témoin ?

  6   R.  C'est une archive que nous avons dans les archives informatisées de la

  7   brigade des pompiers et quand j'en ai eu besoin pour venir ici j'ai

  8   simplement imprimé le document pour montrer quelles avaient été les

  9   installations qui avaient été pilonnées. Je crois que j'ai signé ce

 10   document.

 11   Mme BOLTON : [interprétation] Peut-on voir la troisième page du document ?

 12   Q.  C'est bien votre signature qu'on y voit ?

 13   R.  Tout à fait.

 14   Q.  Parlons du type d'installations, on y voit 120 ici des noms des

 15   installations, est-ce que s'y trouvent tous les lieux de Sarajevo où il y a

 16   eu un incendie ?

 17   R.  Non, pas tous. Rien les plus importantes de ces installations et de ces

 18   lieux qui ont subi des pilonnages et des incendies.

 19   Q.  Ce document porte sur quelle période ?

 20   R.  La période qui commence le 5 avril 1992, et se termine le 10 août 1994.

 21   Q.  Est-ce qu'il y a eu des incendies provoqués par des pilonnages dans des

 22   bâtiments publics après la date du 10 août 1994 ?

 23   R.  Bien sûr. Pendant toute la durée de la guerre des installations civiles

 24   ont été pilonnées, surtout des lieux culturels et des monuments

 25   historiques, des bâtiments d'habitation aussi, des immeubles résidentiels

 26   là où habitaient beaucoup de gens.

 27   Mme BOLTON : [interprétation] Pourrions-nous avoir une nouvelle cote pour

 28   ce document ?

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  1   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, le document est versé au dossier.

  2   .

  3   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P521.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]  

  5   Mme BOLTON : [interprétation]

  6   Q.  Je n'ai plus que quelques questions à vous poser. Vous avez notamment

  7   indiqué pendant le procès Galic qu'il y avait quelques 67 membres serbes de

  8   la brigade qui travaillaient encore à la brigade juste avant le début des

  9   hostilités. Est-ce que ces gens ont décidé eux-mêmes de partir, ou est-ce

 10   qu'on les a licenciés ?

 11   R.  Pour avoir parlé avec ces gens, parce que tous n'étaient pas partis, il

 12   y avait 67 sapeurs pompiers serbes qui sont partis dix sont restés, et ils

 13   m'ont confirmé qu'ils avaient rencontré Radovan Karadzic et qu'à l'occasion

 14   de ces réunions Karadzic leur avait dit de quitter Sarajevo, et ces gens ne

 15   se sont tout simplement pas présentés au travail un bon jour.

 16   Q.  Dans votre déposition vous parliez aussi du fait qu'il y avait

 17   plusieurs membres de votre brigade qui avaient été soit tués soit blessés

 18   pendant la guerre, est-ce que vous aviez maintenant recensé le nombre exact

 19   de sapeurs pompiers qui ont été tués pendant le conflit ?

 20   R.  Pendant le conflit 12 pompiers ont été tués et 58 ont été blessés.

 21   Q.  Sur les 12 pompiers tués, combien y en a-t-il qui ont été tués pendant

 22   l'exercice de leur fonction ?

 23   R.  Trois pendant qu'ils étaient de service. Deux pendant qu'ils

 24   éteignaient un incendie, et l'autre a été tué pendant qu'il réparait la

 25   voiture de pompier à notre siège.

 26   Q.  Quelle était la cause de leur décès ?

 27   R.  Ils ont été tués par obus. Si vous voulez, je peux vous donner d'autres

 28   détails.

Page 3239

  1   Q.  Pour le moment, nous parlons uniquement du nombre total de victime.

  2   Parlons de ceux qui ont été blessés, il y en a eu combien qui ont été

  3   blessés pendant qu'ils étaient de service ?

  4   R.  38 ont été tués.

  5   Q.  Vous dites pendant -- moi, je parlais du nombre de pompiers blessés.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je pense qu'il y a peut-être une

  7   petite erreur d'interprétation.

  8   Mme BOLTON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Oui, en

  9   tout cas, c'est ce qu'a dit l'interprète. Mais je ne sais pas si le témoin

 10   a dit tué ou blessé. Mais l'interprète a dit "tué". Je vois le geste de Me

 11   Lukic, donc je pense que vous, Monsieur le Témoin, vous avez dit blessé

 12   mais qu'il y a eu un petit écart de langue de la part de l'interprète qui a

 13   dit, "tué." Mais c'était sans doute un lapsus, n'est-ce pas, nous parlons

 14   de personnes blessées ?

 15   R.  Moi, j'ai dit "blessé," oui.

 16   Q.  Donc 38 pompiers sur 58 ont été blessés alors qu'ils étaient de service

 17   ?

 18   R.  Exact. Sur les 38, il y en a qui sont subi à plusieurs fois des

 19   blessures, moi, j'étais blessé deux fois, par exemple.

 20   Q.  S'agissant de ces 38 blessés dont vous-même, quelle était la cause des

 21   blessures subies ?

 22   R.  Chaque fois c'étaient les obus, quand on est sorti pour éteindre les

 23   incendies, on intensifiait le pilonnage des zones où on essayait d'éteindre

 24   l'incendie. A Sarajevo, la situation la plus dangereuse, c'était quand il y

 25   avait un lieu en proie à un incendie, parce que tous les habitants, tous

 26   les citoyens s'en échappaient car ils savaient que ceux qui étaient sur les

 27   hauteurs, sur les collines allaient tirer sur les pompiers. C'est pour ça

 28   que c'était si dangereux.

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  1   Q.  Quand vous dites des gens qui étaient sous les collines, qu'est-ce que

  2   vous voulez dire exactement ?

  3   R.  je pense à l'armée serbe.

  4   Q.  D'après ce que vous savez, ces 38 pompiers qui ont été blessés pendant

  5   qu'ils étaient de service, est-ce qu'ils étaient là à titre militaire

  6   disons ?

  7   R.  Non, pas la brigade. Il n'y avait pas de soldats, c'était impossible,

  8   ce n'est pas possible d'avoir des soldats dans la brigade de pompiers,

  9   parce que la plupart des pompiers sont restés de façon ininterrompue à la

 10   brigade parce qu'il était très difficile de faire le trajet du domicile au

 11   travail, de retourner chez soi sans être victime de pilonnage. Pour le dire

 12   autrement, aucun des sapeurs pompiers n'était membre de l'armée.

 13   Q.  Dernière chose. Lorsque vous avez déposé précédemment, vous avez dit

 14   que vous avez éteint des incendies dans des centaines de bâtiments, et dans

 15   le procès Galic, vous avez dit que à l'exception de l'incendie où des

 16   incendies qu'il y a eus à la caserne Tito, où là, ce sont des -- où se

 17   trouvaient des soldats de la FORPRONU, vous avez -- vous n'avez jamais vu

 18   de lieu où on aurait utilisé ces bâtiments à des fins militaires.

 19   Alors précisons ici : est-ce que vous, vous étiez présent sur tous ces

 20   lieux où il y avait des incendies ?

 21   R.  Non, cela n'a pas été possible, physiquement ce n'était pas faisable.

 22   Parfois, il y avait 15 incendies simultanés sur plusieurs endroits.

 23   C'étaient des incendies déclenchés par des balles incendiaires, surtout là

 24   où il y avait des bâtiments, où les gens habitaient -- des monuments où les

 25   gens habitaient. Parce que si les gens ne savaient pas où rester, ils

 26   devaient quitter Sarajevo. Donc c'était toutes des installations civiles.

 27   Q.  Si vous n'étiez pas présent vous-même sur les lieux de ces incendies,

 28   comment savez-vous qu'il n'y avait pas d'installations militaires là où ils

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  1   se sont déclenchés ?

  2   R.  Il y avait des pompiers qui allaient travailler, qui nous faisaient

  3   rapport parfois. Il arrivait qu'il y ait des installations militaires,

  4   parce que pour nous, il n'y a pas de différence. Le feu, c'est le feu et

  5   quand il y a le feu on va pour l'éteindre. Personnellement je ne suis

  6   jamais allé que sur des lieux où qui étaient civils et où il y avait des

  7   incendies.

  8   Q.  Revenons à la liste que vous avez déjà mentionnée, c'est la pièce P520.

  9   Savez-vous si l'une quelconque -- 521, savez-vous une de ces installations

 10   a servi à des fins militaires au moment des pilonnages ?

 11   R.  D'après ce que je sais, non. Je suis arrivé à la brigade vers le 20

 12   juin 1992, à partir de cette date-là, je n'ai connaissance d'aucun cas de

 13   ce genre.

 14   Mme BOLTON : [interprétation] A ce stade, si vous me permettez, je voudrais

 15   lire un bref résumé de la déposition du témoin.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Allez-y.

 17   Mme BOLTON : [interprétation] Merci.

 18   En 1992, M. Jusufovic était l'officier numéro 3 au niveau de la hiérarchie

 19   à la brigade des pompiers de Sarajevo. Son supérieur était notamment

 20   Radomir Spaic, d'origine serbe. A partir du début de l'année 1992, M. Spaic

 21   a ordonné le transfert de la plupart des effectifs et du matériel à Pale,

 22   zone contrôlée par les Serbes de Bosnie. Il y avait donc transfert des

 23   camions pompiers, des équipements de radio, du combustible, du carburant et

 24   d'autres matériels.

 25   Au moment où a commencé le pilonnage de Sarajevo, en avril 1992, les

 26   pompiers n'avaient à Sarajevo que 14 véhicules, peu de carburant et aucune

 27   pièce de rechange.

 28   De surcroît, il y avait 67 pompiers serbes qui ont quitté la brigade

Page 3242

  1   juste avant le début des hostilités, en portant avec eux du matériel

  2   supplémentaire.

  3   Les forces de la VRS ont utilisé des obus ordinaires mais aussi des

  4   obus assortis au phosphore, et même un obus non incendiaire déclenche des

  5   étincelles, provoque des étincelles ce qui provoque des incendies. C'était

  6   quotidien. Les pompiers avaient forte affaire. On a pris pour cible toute

  7   sorte de bâtiments, Sarajevo, des immeubles où habitaient des appartements,

  8   des écoles, des hôpitaux ainsi que les endroits où les gens faisaient la

  9   queue pour avoir de l'eau et des vivres.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ralentissez, s'il vous plaît.

 11   Mme BOLTON : [interprétation] Juste avant un pilonnage, le pilonnage

 12   d'un bâtiment ou d'un monument, la VRS avait l'habitude de tirer sur la

 13   brigade des pompiers. Sans doute, pensait le témoin, que c'était pour

 14   empêcher les pompiers de sortir pour essayer d'aller éteindre le feu. Les

 15   pompiers étaient souvent, régulièrement la cible de tireurs embusqués,

 16   étaient pris pour cible par des mortiers quand ils allaient, quand ils

 17   étaient en route sur un lieu où il y avait un incendie et aussi là où ils

 18   combattaient l'incendie.

 19    Pour ne pas être touché par une balle ou par un obus mortier, ils

 20   garaient leur véhicule là où ils pensaient être à l'abri des obus ou des

 21   balles qui arrivaient. Ils n'entraient pas par les portes mais ils

 22   faisaient un trou dans un mur par lequel ils entraient dans le bâtiment.

 23   Ils ont appris à ramper par des fenêtres pour entrer pour éviter les

 24   tirs des tireurs embusqués. En dépit de ces tactiques, nombreux sont les

 25   pompiers qui furent blessés et certains ont trouvé la mort à cause de

 26   balles de tireurs embusqués, de grenade ou d'obus.

 27   La capacité de combattre l'incendie était compromise par le fait que

 28   la VRS contrôlait l'approvisionnement en eau et le réseau électrique,

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  1   souvent la seule source d'eau c'était le puits qu'il y avait à la

  2   brasserie, et les camions de pompiers furent pris pour cible chaque fois

  3   qu'ils allaient à la brasserie pour essayer de remplir leur réservoir. La

  4   brigade professionnelle a bénéficié de l'aide de volontaires, de bénévoles,

  5   les brigadiers de métier comme les volontaires étaient des organisations

  6   civiles. Aucune d'entre elles n'avait de lien avec l'armée ni avec la

  7   police.

  8   La brigade a réagi à des incendies qui se sont déclarés dans des

  9   centaines de bâtiments pendant le conflit. Il n'a pas vu personnellement

 10   pas plus qu'il n'a entendu parler de preuves selon lesquelles, à

 11   l'exception de la caserne Tito, aucun de ces bâtiments n'aurait été utilisé

 12   à des fins militaires à l'époque.   

 13   Mme BOLTON : [interprétation] J'en ai terminé, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Lorsque vous avez lu cette déclaration

 15   au début vous avez dit à la page 76, ligne 6 : "A partir, au début de

 16   l'année 1992, M. Spaic a ordonné le transfert de la plupart des membres de

 17   la force ainsi que des équipements à Pale."

 18   De quelle force s'agit-il ?

 19   Mme BOLTON : [interprétation] Il s'agit des équipements de la brigade des

 20   pompiers de Sarajevo qui sont transférés dans la zone de Pale.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 22   C'est à vous, Monsieur Lukic, si j'ai bien compris.

 23   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Contre-interrogatoire par M. Lukic: 

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Jusufovic.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  Je m'appelle Lukic et je vais vous poser des questions au nom de la

 28   Défense de M. Perisic.

Page 3244

  1   Vous avez déjà déposé devant ce Tribunal donc vous savez qu'il faut

  2   attendre un petit peu et je vous le rappelle, il vous faut attendre un

  3   instant après ma question car vous voyez déjà le Président me fait des

  4   remontrances. Donc, s'il vous plaît, essayez de répondre à mes questions

  5   lentement de façon à ce que le procès-verbal reflète fidèlement ce qui se

  6   passe ainsi que l'interprétation.

  7   Au début de la guerre, et vous avez d'ailleurs dit que ça s'est passé au

  8   début du mois d'avril 1992, vous viviez à Vratnik et c'est là que vous

  9   étiez basé pendant toute la durée de la guerre. C'est là que vous habitiez,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  A cette époque-là, vous-même et un groupe de citoyens qui habitait dans

 13   cet endroit se sont organisés dans l'espace un moins un, pour mettre en

 14   place des barrages et des points de contrôle dans la zone où vous habitiez

 15   ?

 16   R.  Non. Nous n'avons pas mis en place des barrages. Nous avons creusé des

 17   tranchées à proximité de la caserne de Vratnik.  

 18   Q.  Vous étiez le commandant à cet endroit-là n'est-ce pas ?

 19   R.  Si on peut véritablement appeler le dirigeant d'un groupe de 30 à 40

 20   personnes un commandant, oui.

 21   Q.  Comment se fait-il que vous soyez devenu le commandant ? Comment avez-

 22   vous été désigné pour ce poste ?

 23   R.  Le 5 avril, le pilonnage commençait et les gens ont commencé à fuir, et

 24   fuir leur maison. La plupart se sont rendus dans l'édifice culturel et ceux

 25   qui étaient présents ont dit qu'il fallait défendre nos familles, nos

 26   enfants, nos épouses car nous avions déjà eu une expérience. Nous avions

 27   connaissance de l'expérience en Croatie. Par conséquent, il nous fallait

 28   nous organiser pour défendre Vratnik et nous étions environ 30 ou 20 et les

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  1   gens ont dit que c'était à moi de mener cet effort.

  2   Q.  Qu'est-ce que vous faisiez à l'époque ? Quelle était votre profession ?

  3   Etiez-vous déjà un pompier ou pas ?

  4   R.  Je suis pompier depuis 1983.

  5   Q.  Pour autant que je me souvienne, vous avez été à un certain moment

  6   chauffeur de taxi.

  7   R.  De 1980 à 1986, j'ai été chauffeur de taxi.

  8   Q.  A Sarajevo, pendant tout ce temps, on a reconstruit tout le temps à

  9   Sarajevo. J'y suis né et j'y ai vécu et j'y vis toujours.

 10   Q.  Est-ce que vous seriez d'accord pour dire que déjà au mois de mars

 11   1992, des barrages avaient été mis en place ainsi que des points de

 12   contrôle à Sarajevo à la fois par les membres du Parti SDS et par ceux qui

 13   appartenaient au Parti SDA ?

 14   R.  Au mois de mars, il y avait effectivement des barrages. J'en ai eu

 15   connaissance car mon épouse travaillait à Grbavica, à cette époque-là, elle

 16   ne pouvait pas se rendre à son bureau. Mais je ne sais pas si c'est le SDA

 17   qui a mis en place des barrages. Je n'ai eu connaissance que de barrages

 18   qui étaient le fait de Serbes.

 19   Q.  Donc vous ne savez pas si des membres de la SDA ont mis en place des

 20   barrages ?

 21   R.  Je n'avais pas connaissance de cela.

 22   Q.  Est-ce que vous seriez d'accord pour dire que l'armée de l'ABiH avait

 23   été mis en place au mois d'avril 1992 à partir de la décision prise par la

 24   présidence à l'ABiH ?

 25   R.  Il est possible qu'il y ait eu une décision de la présidence mais à

 26   l'époque il n'existait pas d'armée. Il n'y avait que les unités telles que

 27   l'unité dont je faisais partie.

 28   Q.  A quel moment avez-vous ou considérez-vous que l'armée de l'ABiH avait

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  1   été mise en place et existait bel et bien à Sarajevo ?

  2   R.  Je pense que la Défense territoriale qui n'était pas encore l'armée,

  3   mais la Défense territoriale a été mis en place à la fin du mois de mai ou

  4   peut-être au début du mois de juin, pour autant que je me souvienne. C'est

  5   à ce moment-là que j'ai rejoint la Brigade des Pompiers.

  6   Q.  Est-ce que vous savez ce qui s'est passé lorsque vous avez rejoint à

  7   nouveau la Brigade des Pompiers et, si je peux m'exprimer ainsi, qu'est-ce

  8   qui s'est passé avec vos voisins qui se sont également organisés sous forme

  9   d'un groupe de 30 à 40 hommes ? Est-ce qu'ils ont rejoint l'armée ?

 10   R.  Lorsqu'il y a eu la mobilisation, chacun devait être affecté à une

 11   unité. La plupart de ces hommes faisaient partie de la Défense territoriale

 12   qui par la suite est devenue l'armée BiH.

 13   Q.  Est-ce que vous savez si la présidente de la Bosnie-Herzégovine avait

 14   déclaré la guerre ?

 15   R.  Je ne le sais pas.

 16   Q.  Savez-vous tous les hommes en âge de combattre devaient être mobilisés

 17   pour rejoindre une unité ou recevoir une affectation ?

 18   R.  Effectivement, chacun devait faire partie d'une unité alors. Soit

 19   l'armée, soit la Défense territoriale, soit la police ou la protection

 20   civile.

 21   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que l'une des forces qui était

 22   fidèle à la présidence de la BiH au printemps de 1992 a pris le contrôle

 23   des installations vitales stratégiques de Sarajevo alors que les Serbes se

 24   sont retirés dans les collines autour de Sarajevo ?

 25   R.  Je ne sais pas si les membres de l'armée BiH aient pris des positions.

 26   Je sais qu'avant le mois d'avril, l'armée de la Yougoslavie ou du peuple

 27   yougoslave s'occupait de mettre en place des positions autour de Sarajevo

 28   et de mettre à l'abri les chars. On le voyait à la télévision et certaines

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  1   personnes, je ne sais pas qui exactement, mais on disait qu'ils

  2   protégeaient ces positions d'un ennemi externe. Ensuite ils ont utilisé ces

  3   positions pour pilonner Sarajevo.

  4   Q.  Lorsque vous avez témoigné dans l'affaire Galic, page 6 522, à la ligne

  5   9, mais c'est quelque chose qui a été expurgé plus tard. Donc je vais

  6   rafraîchir un petit peu votre mémoire parce que si ça n'a pas été expurgé

  7   en tout cas plus tard, ça a été modifié. Ligne 9, je vais vous la lire en

  8   anglais : "Ils nous ont pilonné notre poste de pompiers."

  9   Ensuite, en réponse à une question posée par le Juge Orie, page 6

 10   524, ligne 25, vous avez dit que ce que vous entendiez par là, c'est qu'ils

 11   ont rejoint et ils ont combattu en tant que membres de l'armée serbe, mais

 12   pas qu'ils vous aient pilonnés spécifiquement.

 13   R.  Oui, je crois que ce que j'entendais par là, c'est qu'ils avaient

 14   rejoint le côté serbe, mais la raison pour laquelle je pensais qu'ils nous

 15   pilonnaient, c'est qu'ils nous disaient à l'avance, ils nous avertissaient,

 16   ils nous appelaient et ils nous disaient : vous allez recevoir un obus dans

 17   votre direction, et annonçaient qu'il allait y avoir cinq autres qui

 18   allaient atterrir sur le poste de pompiers.

 19   Q.  En tout cas, d'après ce que vous avez dit et les modifications que vous

 20   aviez faites, il n'y avait aucune raison que vous pensiez qu'ils vous

 21   visaient personnellement.

 22   R.  En effet.

 23   Q.  Pouvez-vous nous dire si toutes les positions sur les hauteurs autour

 24   de Sarajevo, est-ce qu'elles étaient toutes tenues par la VRS ?

 25   R.  Je ne connaissais pas toutes ces positions, mais je sais que des

 26   membres de l'armée BiH étaient entre Trebevic et Brijeg, et Spicasta

 27   Stijena, je crois.

 28   Q.  Pour être plus détaillé, savez-vous qui tenait le mont Zuc ?

Page 3249

  1   R.  Je pense que le mont Zuc était sous le contrôle de l'armée BiH.

  2   Q.  Le mont Igman, qu'en est-il ?

  3   R.  Le mont Igman, si je me souviens bien, il me semble qu'il y a eu des

  4   mouvements de l'armée. Il y avait l'armée BiH, et ensuite l'armée serbe.

  5   Q.  Savez-vous si l'armée BiH avait des mortiers ?

  6   R.  Quand j'y étais, nous n'avions rien. On observait ce qui se déroulait

  7   depuis Lapusnica au moment où il y avait les pilonnages, c'était à 800

  8   mètres, et puis on se tenait cois car nous ne pouvions pas riposter, on

  9   n'avait aucun moyen, ni de les pilonner, ni de leur tirer dessus.

 10   Q.  Un instant. Quand vous dites : "Lorsque, moi, j'y étais," vous voulez

 11   dire lorsque vous étiez organisé ? Moi, je vous parle en fait du moment où

 12   vous étiez pompier jusqu'aux accords de Dayton, puisqu'à l'époque, vous

 13   étiez en contact avec pas mal de personnes et que vous aviez participé à

 14   pas mal d'événements. Est-ce qu'à ce moment-là, vous avez entendu parler du

 15   fait que l'armée de la BiH détenait des mortiers sur le théâtre de Sarajevo

 16   ?

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Bolton.

 18   Mme BOLTON : [interprétation] Mon collègue a commencé cette question en

 19   partant de l'hypothèse que le témoin, en fait, parlait du moment où il

 20   était dans la défense de voisinage. Je ne sais pas s'il parle de ceci, mais

 21   en tout cas, il me semble que le témoin doit élucider cette question, et on

 22   ne doit pas partir d'une hypothèse.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] C'est peut-être à vous de le faire

 24   lors des questions supplémentaires

 25   Mme BOLTON : [interprétation] Mais j'ai compris, d'après les directives,

 26   qu'il fallait poser une question à la fois, et c'était la base de mon

 27   objection. Mais, bien entendu, je pourrai l'élucider tout à l'heure.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, faites-le.

Page 3250

  1   Mme BOLTON : [interprétation] D'accord.

  2   M. LUKIC : [interprétation] Je pense que le témoin a mal compris. Dans la

  3   partie où il décrivait cette période, et je voyais qu'il hochait la tête,

  4   donc je n'ai pas imaginé qu'il fallait expliquer la période dont il s'agit,

  5   mais je vais revenir là-dessus.

  6   Q.  Est-ce que vous vous souvenez, pendant la période où il y avait la

  7   guerre, si vous aviez eu des informations selon lesquelles l'armée de la

  8   BiH avait -- détenait des mortiers dans le théâtre de guerre de Sarajevo ?

  9   R.  Je n'avais aucun lien avec l'armée, donc je ne peux rien dire avec

 10   certitude. En fait, nous, nous étions tout le temps occupée à combattre les

 11   feux, donc je ne sais pas. Il est possible qu'à un moment donné, pendant la

 12   guerre, ils en aient eu, mais je n'en suis pas sûr.

 13   Q.  Avez-vous entendu parler, ou est-ce que vous avez pu observer des

 14   preuves montrant que l'armée de la BiH avait des armes à canon long ?

 15   R.  Je ne l'ai pas vu. Quant à moi, je ne sais pas.

 16   Q.  Avez-vous entendu parler par ouï-dire de de tels faits ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Êtes-vous d'accord pour dire que pendant la guerre à Sarajevo, il y

 19   avait environ 35 000 membres de l'armée BiH à l'intérieur de Sarajevo et

 20   autant dans les alentours de Sarajevo -- dans des positions tenues par

 21   l'armée BiH ?

 22   R.  Je ne connais pas les chiffres, mais il est bien possible qu'il y en

 23   ait eu autant.

 24   Q.  Vous nous dites que vous n'aviez aucun lien avec l'armée -- aucun

 25   contact. En tant que pompier, vous faisiez partie de la protection civile,

 26   si j'ai bien compris. Est-ce exact ? Est-ce que c'est vrai d'une Brigade de

 27   Pompiers professionnelle ?

 28   R.  Les pompiers professionnels et tous les -- toutes les organisations de

Page 3251

  1   pompiers volontaires faisaient partie de la protection civile -- étaient

  2   une Unité de la Protection civile.

  3   Q.  Avez-vous eu des réunions avec vos supérieurs de la protection civile ?

  4   R.  Oui, à plusieurs reprises.

  5   Q.  Avez-vous eu des réunions officielles avec des membres de la police ?

  6   R.  Je pense que non.

  7   Q.  Pour être plus précis, à un quelconque moment pendant la guerre, avez-

  8   vous eu une réunion de quel que soit son type, avec des représentants de

  9   l'armée BiH ?

 10   R.  Non, je n'ai eu aucune réunion avec des membres de l'armée de la BiH.

 11   Les seules réunions que nous avions, c'était dans l'hôtel de ville, où on

 12   nous invitait pour des réunions avec le maire.

 13   Q.  Est-ce que vous vous souvenez s'il y avait présents des représentants

 14   de l'armée ?

 15   R.  Si je me souviens bien, et bien, non, car l'armée ne s'occupait pas

 16   véritablement de l'administration civile. Ils sont préoccupés par --

 17   Q.  A la page 6 533, ligne 7, parmi les sites pilonnés, vous avez parlé,

 18   parmi d'autres, du Holiday Inn. Vous avez dit que c'était une cible très

 19   attrayante. Le même jour, mais à la ligne 23, vous dites que vous avez dû

 20   répondre à des appels partant de cette position plus de 500 fois, c'est ce

 21   que vous avez dit, jusqu'à l'été de 1994.

 22   R.  Oui, c'est exact

 23   Q.  Le Holiday Inn était un hôtel qui est resté ouvert pendant toute la

 24   guerre ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Les 500 incendies en question, jusqu'à l'été 1995, étaient si sévères,

 27   et vous avez été si efficace que l'hôtel a pu néanmoins rester ouvert

 28   pendant toute cette période ?

Page 3252

  1   R.  Oui, en effet, car nous nous y rendions très rapidement, nous étions

  2   sur place pour combattre l'incendie.

  3   Q.  Je vais maintenant vous montrer la pièce 521.

  4   M. LUKIC : [interprétation] Pourrait-on l'afficher à l'écran, s'il vous

  5   plaît ?

  6   Q.  Tout d'abord, je voudrais vous poser une question à propos de ce

  7   document. Vous venez de dire que vous aviez imprimé ceci à partir de votre

  8   base de données, dans les archives qui étaient tenues pour cette période.

  9   Ma question, c'est de savoir, tout d'abord, quel est ce titre : "Incendie

 10   dans des sites de haut rang ou de profile élevé." Pouvez-vous nous dire ce

 11   qui est entendu par "équipement de haut profile ou de haut rang," c'est

 12   quoi le critère ?

 13   R.  C'était un endroit où il y avait beaucoup de gens qui vivaient ou qui

 14   avaient une importance culturelle ou historique importante pour l'histoire

 15   et la tradition de notre peuple.

 16   Q.  Est-ce que vous pouvez regarder ces trois pages et nous dire si ces

 17   équipements ou ces locaux sont surtout des édifices publics plutôt que les

 18   habitations ?

 19   R.  D'après ce que je vois ici, il n'y a pas d'immeuble d'habitation.

 20   Q.  Merci.

 21   M. LUKIC : [interprétation] Pouvons-nous maintenant afficher la dernière

 22   page, s'il vous plaît ?

 23   Q.  Je vais maintenant vous poser un certain nombre de questions à propos

 24   de ces équipements ou ces locaux. Peut-on voir la page à nouveau ? Au point

 25   3, il est marqué "le motel MUP," MUP, c'est le ministère de l'Intérieur,

 26   n'est-ce pas ? Il s'agit d'une installation des policiers ?

 27   R.  Oui, MUP c'est le ministère de l'Intérieur.

 28   Q.  Donc c'était une installation de la police ?

Page 3253

  1   R.  Non, c'était un hôtel qui appartenait au MUP.

  2   Q.  Bien. Au point 4, il y a marqué : "Installation du MUP Vraca," de quoi

  3   s'agit-il ?

  4   R.  Il s'agit de l'académie de police, là, où il y avait les cadets et là

  5   il y a eu une attaque de même qu'un incendie. Il s'agissait de jeunes

  6   cadets qui avaient entre 14 et 19 ans.

  7   Q.  Ça s'est passé au début de 1992, au début du conflit, n'est-ce pas, le

  8   10 avril ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Au point 18, on voit : "Magros grossiste;" s'agit-il de locaux

 11   commerciaux ?

 12   R.  Magros c'est une société donc c'est une entreprise commerciale.

 13   Q.  Au point 38, on voit : "Magasin Magros," c'est encore des locaux

 14   commerciaux, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, ils y vendaient des vivres.

 16   Q.  Au point 27, je vois que vous avez mentionné "Holiday Inn," le 24 mai

 17   1992, et on ne voit plus -- il n'est plus fait mention des 500 incendies

 18   touchant le Holiday Inn sur cette liste; pourquoi ?

 19   R.  La mention qui date du 24 mai 1992 cette mention figure parce que nous

 20   nous sommes rendus depuis le poste jusqu'à l'hôtel, car nous n'avions pas

 21   une unité sur place dans ces locaux. Mais puisqu'il était impossible de s'y

 22   rendre à travers Marin Dvar, à cause des pilonnages nous avons mis en place

 23   une unité dans le sous-sol du Holiday Inn, et nous avions des tuyaux tout

 24   autour de l'hôtel de façon à ce que les personnes qui étaient de garde dans

 25   ces locaux pouvaient éteindre les feux. C'est pour cela qu'on ne fait plus

 26   mention de cet hôtel dans la liste.

 27   Q.  Ces autres incendies est-ce qu'ils ont également fait l'objet

 28   d'enregistrement dans votre base de données ?

Page 3254

  1   R.  Non, ils ont simplement figuré dans les journaux du fait de l'officier

  2   de permanence. Car nous enregistrions les interventions lorsqu'un véhicule

  3   prenait le départ.

  4   Q.  Donc ce qui est dans cette liste ce sont les incidents d'incendie lors

  5   desquelles vous avez été obligé d'envoyer des véhicules depuis le poste ?

  6   R.  Oui, c'est exact.

  7   Q.  Pour les environs 500 incendies de l'hôtel Holiday Inn vous n'avez pas

  8   d'archive au poste de la brigade, pas du tout ?

  9   R.  Non, en effet.

 10   Q.  Sous le jeu de 62, la page suivante, il y a le mot "caserne;" s'agit-il

 11   d'une installation pour civils ?

 12   R.  On ne dit pas ici de quel type de caserne. Il est dit -- il y a le nom

 13   de rue, je ne suis pas sûr que ceci n'ait pas été la caserne Tito ou les

 14   soldats de la FORPRONU étaient stationnés.

 15   Q.  Le 21 août 1992, vous rappelez-vous basé sur cette date, vous rappelez-

 16   vous quand l'incendie a eu lieu ?

 17   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

 18   Q.  Au numéro 73, nous voyons qu'il y a un "dépôt, un entrepôt," pour

 19   remiser, un entrepôt frigorifique, et également une chambre froide, et des

 20   entrepôts d'abattoir. Pourriez-vous expliquer ce dont il s'agit, d'abord

 21   des chambres froides, s'il vous plaît ?

 22   R.  Dans une partie de la ville appelée Stup il y a des chambres froides et

 23   un dépôt ainsi qu'un abattoir. C'est là qu'on abat les bêtes.

 24   Q.  Vous rappelez-vous comment -- quelle est la hauteur de ce bâtiment,

 25   combien d'étages ?

 26   R.  Non, je ne m'en souviens pas. Les gens du poste d'incendie de Stup sont

 27   allés là-bas pour éteindre cet incendie, mais je n'y suis pas allé moi-

 28   même.

Page 3255

  1   Q.  Autre question qui avait trait à cette installation : c'est la ligne de

  2   séparation proche de cette installation, est-ce que c'est près des chambres

  3   froides ?

  4   R.  Oui, la ligne de combat était proche. Je viens juste de me rendre

  5   compte de ceci, le 28, ça eu lieu le 28, j'étais blessé à ce moment-là et

  6   je n'étais pas en mesure de marcher, j'ai dû utiliser des béquilles et donc

  7   je n'ai pas pu aller pour moi-même participer à la lutte contre l'incendie.

  8   Q.  Est-ce que vous pourriez me dire, s'il vous plaît, ce qui est écrit en

  9   dessous du chiffre 76, au chiffre 76, on voit "OS Skenderija," qui était

 10   situé quelque part; pouvez-vous dire ce que c'est que "OS," s'il vous plaît

 11   ?

 12   R.  Je ne sais pas. Je n'ai aucune idée de ce que ça peut vouloir dire.

 13   Q.  Est-ce que ça pourrait être l'endroit où l'état-major de la Défense

 14   territoriale était situé ?

 15   R.  Bien, en fait, c'est un secteur assez vaste. Je ne sais pas où cet

 16   état-major était situé. Il fallait bien qu'il soit installé quelque part,

 17   avec son quartier général et où était-il, était-il dans ce secteur, je ne

 18   sais pas.

 19   Q.  En tout état de cause, ce n'était pas un bâtiment résidentiel, un

 20   immeuble résidentiel ?

 21   R.  Non. Comme nous l'avons déjà dit, il n'y a pas d'immeuble résidentiel

 22   dans cette liste.

 23   Q.  Ce qui m'intéresse maintenant c'est l'endroit mentionné au 85,

 24   également mentionné au 97. Cet endroit est appelé Zica ?

 25   R.  C'est une usine qui fabrique du fil de fer.

 26   Q.  Est-ce que vous savez où sont situées les installations de Zica ? On

 27   voit ça ici avec le nom de la rue. Dans quel secteur de Sarajevo ça se

 28   trouve ?

Page 3256

  1   R.  Je pense que c'était dans le secteur d'Ali Pasin Most parce que la

  2   plupart du temps nous avons donc cette association de pompier qui était là.

  3   Q.  Très bien.

  4   M. LUKIC : [interprétation] Pourrait-on, s'il vous plaît, maintenant voir

  5   l'exemplaire de la carte 9244 dans la liste 65 ter, s'il-vous-plaît ?

  6   Q.  Monsieur Jusufovic, étant donné que votre profession était que vous

  7   êtes un chauffeur de taxi, je pense que vous saurez vous orienter sur une

  8   carte de Sarajevo. Je vais vous demander de désigner certains emplacements

  9   sur la carte dans un instant, s'il vous plaît.

 10   Pouvez-vous reconnaître Sarajevo sur cette carte ?

 11   R.  Oui. Je connais ce secteur, à Milicka, où se trouvent les rails de

 12   tram.

 13   Q.  Je voudrais demander au témoin ceci. Quand je vous ai posé des

 14   questions concernant l'usine Zica, pourriez-vous maintenant tracer --

 15   placer une croix et le chiffre 1 à l'endroit où se trouvait cette usine

 16   Zica ?

 17   R.  Je cherche mais je ne le trouve pas en fait. Je sais où se trouve

 18   Bascarsija mais --

 19   M. LUKIC : [interprétation] Pourrait-on, s'il vous plaît, faire un gros

 20   plan ? Sinon, j'essaierai avec une autre carte.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'est pas nécessaire que ce soit précis

 22   mais je crois que c'était à peu près ici, du côté de ce pont, près de ce

 23   pont parce que je vois ici Ali Pasin Most, le pont Ali Pasin.

 24   M. LUKIC : [interprétation]

 25   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, placer une croix et le chiffre 1 à cet

 26   endroit-là, s'il vous plaît ?

 27   R.  [Le témoin s'exécute]

 28   Q.  Pouvez-vous nous dire approximativement où se trouvait le dépôt des

Page 3257

  1   chambres froides ? Est-ce que vous pourriez tracer, mettre les signes à

  2   l'endroit sur la carte. Ça n'a besoin d'être très précis mais juste pour

  3   désigner le secteur d'une façon générale.

  4   R.  C'est près de Stup, à l'endroit où il y a Stup indiqué.

  5   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, placer le chiffre 2 à côté.

  6   R.  [Le témoin s'exécute]

  7   Q.  Je vous ai posé des questions concernant l'immeuble Magros, est-ce que

  8   vous savez où c'est ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  Qu'en est-il du jardin d'enfants Osmi Mart ? Est-ce que vous savez

 11   approximativement où se trouve ce jardin d'enfants ?

 12   R.  Je ne sais pas où est le jardin d'enfants, le bâtiment mais je peux

 13   voir une zone qui est appelée [inaudible] sur la carte.

 14   Q.  Pourriez-vous apposer le chiffre 3 à côté, s'il vous plaît ?

 15   R.  [Le témoin s'exécute]

 16   Q.  Avez-vous entendu parler de l'école élémentaire Petar Jokic ? Si vous

 17   savez son emplacement approximatif, ce serait utile.

 18   R.  J'en ai entendu parler. Je crois qu'une telle école existe mais je n'ai

 19   aucune idée de l'endroit où elle est située.

 20   Q.  L'école appelée Pavle Goranin, on vous a posé des questions à ce sujet

 21   dans l'autre procès où vous avez déposé. Pavle Goranin.

 22   R.  Je ne sais vraiment pas.

 23   Q.  L'école élémentaire Slobodan Vukovic ?

 24   R.  Est-ce que vous savez combien il y a d'écoles élémentaires à Sarajevo ?

 25   Q.  [aucune interprétation]

 26   R.  Je ne sais pas.

 27   Q.  D'accord.

 28   M. LUKIC : [interprétation] Je demande maintenant le versement de cette

Page 3258

  1   carte comme élément de preuve au dossier.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] La carte est admise au dossier. Je

  3   demande qu'on lui attribue une cote.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce D40.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  6   M. LUKIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Jusufovic, seriez-vous d'accord que tout au long de la guerre,

  8   les écoles n'étaient pas ouvertes, ne fonctionnaient pas à Sarajevo, il n'y

  9   avait pas d'enseignement, l'enseignement avait cessé ?

 10   R.  Oui, c'est exact. Je ne sais pas quand ça a commencé mais après une

 11   certaine période, les gens n'envoyaient tout simplement pas leurs enfants à

 12   l'école parce que c'était dangereux.

 13   Q.  Seriez-vous d'accord pour dire que pendant la guerre, il y avait

 14   d'immenses problèmes pour ce qui est de l'électricité à Sarajevo ?

 15   R.  Oui, je suis d'accord avec vous. La plupart du temps, nous n'avions pas

 16   d'électricité plutôt que le contraire.

 17   Q.  Il y avait certaines règles concernant les priorités, qui avait la

 18   priorité pour obtenir de l'électricité et qui avait établi ces règles; est-

 19   ce que c'était un ministère ou d'autres organes de l'Etat compétent ?

 20   R.  Il est très probable que c'est ainsi. Nous n'avons jamais eu à penser à

 21   une priorité. Nous, à la Brigade des pompiers, nous avions un générateur

 22   qui nous permettait de tirer de l'électricité.

 23   Q.  Seriez-vous d'accord que les hôpitaux étaient une priorité ainsi que

 24   l'armée ?

 25   R.  Très probable.

 26   M. LUKIC : [interprétation] Pourrait-on maintenant voir à l'écran D 005592,

 27   s'il vous plaît ?

 28   Q.  Monsieur Jusufovic, je suppose que vous ne connaissez pas ce document.

Page 3259

  1   Je vais vous poser quelques questions à ce sujet. Il est dit ici que c'est

  2   adressé au commandement de la 102e Brigade motorisée -- ou plutôt, le

  3   commandement de la 102e Brigade motorisée, et ceci est daté des six

  4   premiers mois de l'année 1993 parce que la date est illisible. Puis il est

  5   dit que l'objet est prioritaire et ça a été envoyé au commandement du 1er

  6   Corps.

  7   Donc ma question c'est : est-ce que vous savez que dans l'ensemble de

  8   l'usine de Zica où vous êtes allé éteindre un feu, le commandement de la

  9   102e Brigade motorisée de l'armée de la Republika Srpska était situé à cet

 10   endroit-là ?

 11   R.  Je ne suis pas au courant de cela parce que parfois il y avait un

 12   immeuble ou une installation qui pendant une certaine période était

 13   utilisée pour une certaine raison, puis plus tard pour une autre raison. En

 14   tout état de cause, lorsque nous sommes allés éteindre l'incendie, il n'y

 15   avait pas de membres de l'armée, il n'y avait pas d'armée.

 16   Q.  Je voudrais maintenant vous demander en tant que professionnel, vous

 17   êtes maintenant commandant au sein de la Protection civile, donc en cette

 18   qualité, si l'armée peut utiliser des locaux civils alors ce n'est pas une

 19   bonne idée de l'annoncer à tout un chacun que l'armée veut l'utiliser.

 20   R.  Pour vous dire vrai, je n'ai jamais étudié quoi que ce soit concernant

 21   les questions militaires. Je n'ai rien à voir avec l'armée et je ne sais

 22   pas comment ils décident ce qui est secret et ce qui ne l'est pas.

 23   Q.  Alors, en tant que fonctionnaire chargé de la protection civile, en

 24   cette qualité ?

 25   R.  Mais nous en tant que civils chargés de la protection civile, nous

 26   n'avions pas de secrets. Nous ne gardions pas de secret.

 27   Q.   Etant donné que vous êtes allé à certains endroits où il y avait des

 28   incendies, y compris les incendies qui sont énumérés ici, est-ce que vous

Page 3260

  1   savez que, dans les régions résidentielles, il y avait aussi des unités

  2   militaires et des installations militaires qui se trouvaient dans ces

  3   secteurs ?

  4   R.  Je ne l'ai pas vu.

  5   Q.  Mais vous avez entendu dire que, dans le bâtiment où était situé la

  6   société des camions, c'était donc un bâtiment à usage mixte, à la fois

  7   résidentiel et commercial, il y avait des membres de l'armée BiH au rez-de-

  8   chaussée ?

  9   R.  C'est un bâtiment qui fait 150 à 200 mètres de long, et qui a plusieurs

 10   entrées. Ce bâtiment est situé sur la ligne de front. Il y avait des gens

 11   qui vivaient là, donc nous, nous allions à la partie résidentielle de ce

 12   bâtiment et c'étaient les gens de la FORPRONU qui courraient

 13   essentiellement des risques. Vous avez tout à fait raison, j'ai dit ça la

 14   dernière fois, je crois que je le savais que quelque part à l'intérieur de

 15   ce bâtiment il y avait une partie qui était utilisée aussi par l'armée.

 16   Q.  Lorsque vous dites quelque part, vous voulez dire quelque part à

 17   l'intérieur de ce bâtiment ?

 18   R.  Oui, c'est exact, parce que cette installation comporte une vingtaine

 19   de bâtiments.

 20   M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'on pourrait,

 21   s'il vous plaît, verser ce document au dossier.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Document est admis au dossier, et on

 23   lui attribue une cote.

 24   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D41.

 25   L'INTERPRÈTE : Demande que Me Lukic se rapproche du micro.

 26   M. LUKIC : [interprétation] J'essaie de conclure aussi rapidement que

 27   possible, et donc je m'impose à un rythme qui n'est pas raisonnable. Est-ce

 28   qu'on pourrait voir, s'il vous plaît, le document 1D 005591 ?

Page 3261

  1   Q.  On a réussi à trouver que la traduction provisoire de ce document. On

  2   l'a trouvé sur l'EDS. Nous allons le revoir rapidement. Je crois que c'est

  3   un document du commandement de la 102e Brigade motorisée, daté je crois du

  4   14 septembre 1993. Je vais vous en donner lecture de la première partie, il

  5   s'agit d'un ordre, j'ordonne que les installations de Hladnjaca pour les

  6   chambres froides soient utilisées exclusivement pour les nids des tireurs

  7   isolés en tant que poste d'observation et VP pour certaines ressources.

  8   Ceci est signé par le commandant. Je voudrais vous demander : savez-vous

  9   que l'armée BiH avait des tireurs isolés, des tireurs d'élite ?

 10   R.  Je ne suis pas au courant de cela, mais je pense que toute armée en a.

 11   Q.  Quand il s'agit de ces immeubles, ces installations de chambres froides

 12   de Hladnjaca, est-ce que c'est situé assez près de la ligne de front ?

 13   R.  Oui.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Je veux demander le versement de ce document au

 15   dossier, comme élément de preuve également.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est admis et je demande une cote.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera le D42, Monsieur le Président.

 18   M. LUKIC : [interprétation] J'en ai fini de mon contre-interrogatoire.

 19   Q.  Je vous remercie beaucoup, Monsieur Jusufovic.

 20   R.  Je vous remercie.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Madame Bolton, est-ce que vous avez

 22   des questions supplémentaires à poser ?

 23   Mme BOLTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ça va vous prendre combien de temps ?

 25   Mme BOLTON : [interprétation] Je pense de cinq à dix minutes.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Non, je n'ai vraiment pas envie

 27   d'imposer cela aux interprètes et au reste du personnel, donc peut-être

 28   qu'il vaudrait mieux lever la séance jusqu'à demain.

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  1   Mme BOLTON : [interprétation] Je suis entre vous, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous serons -- nous reprendrons

  3   l'audience dans le prétoire numéro II, à 14 heures 15, demain. L'audience

  4   est levée.

  5   --- L'audience est levée à 18 heures 59 et reprendra le jeudi 5 février

  6   2009, à 14 heures 15.

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