Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 19 juillet 2010

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes à

  6   l'intérieur et à l'extérieur de cette salle d'audience. Veuillez, je vous

  7   prie, appeler l'affaire, Monsieur le Greffier.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agit de l'affaire

  9   IT-04-81-T, le Procureur contre Momcilo Perisic.

 10   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

 11   Greffier. Je voudrais demander aux parties de se présenter, en commençant

 12   par l'Accusation.

 13   M. THOMAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 14   Monsieur le Juge. Je m'appelle Barney Thomas et je suis accompagné d'Inger

 15   de Ru et d'Apris Carter. Donc nous représentons les intérêts du bureau du

 16   Procureur ce matin.

 17   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Et maintenant, je me

 18   tourne vers la Défense.

 19   M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 20   Monsieur le Juge, et bonjour à tous et à toutes dans cette salle

 21   d'audience. Je suis accompagné de Tina Drolec, Oonagh O'Connor, Novak

 22   Lukic. Moi-même, je suis Gregor Guy-Smith, je suis également accompagné de

 23   Boris Zorko au nom de M. Perisic. M. Zorko sera le témoin [comme

 24   interprété] qui procédera à l'interrogatoire du prochain témoin.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Merci bien. Maître Zorko,

 26   je vous écoute. Qui est votre prochain témoin ?

 27   M. ZORKO : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Notre prochain

 28   témoin sera Radomir Gojovic.

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  1   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je demanderais au témoin de faire sa

  3   déclaration solennelle.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  5   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  6   LE TÉMOIN : RADOMIR GOJOVIC [Assermenté]

  7   [Le témoin répond par l'interprète]

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous

  9   asseoir.

 10   Merci, Monsieur le Témoin, et bonjour, Maître Zorko.

 11   Interrogatoire principal par M. Zorko : 

 12   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. J'aimerais vous demander

 13   de décliner votre identité pour le compte rendu d'audience.

 14   R.  Je m'appelle Radomir Gojovic.

 15   Q.  Où êtes-vous né et quand êtes-vous né, s'il vous plaît ?

 16   R.  Je suis né le 1er février 1943, dans le village de Sekiraca, village de

 17   Kursumlija, dans la République de Serbie.

 18   Q.  Vous n'êtes pas devant ce Tribunal pour la première fois aujourd'hui.

 19   Pourriez-vous nous dire si vous avez déjà témoigné auparavant devant ce

 20   Tribunal et dans quelles affaires, s'il vous plaît ?

 21   R.  J'ai témoigné dans l'affaire contre Slobodan Milosevic. J'ai également

 22   témoigné dans les affaires du général Ojdanic, et autres qui étaient

 23   englobées par cet acte d'accusation en question. J'ai également témoigné

 24   dans l'affaire Djordjevic. Je ne me souviens plus de son prénom. Oui, ça me

 25   revient maintenant, c'est Vlastimir Djordjevic.

 26   Q.  Très bien. Merci. Mon Général, même si vous n'êtes pas ici pour la

 27   première fois, je vais néanmoins vous donner quelques règles du Tribunal

 28   afin de pouvoir être bref et concis et afin d'éviter qu'il y ait

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  1   chevauchement. Alors je vous prierais de suivre le curseur qui se trouve

  2   devant vous, et donc il nous faudra ménager des pauses entre vos réponses

  3   et mes questions.

  4   Alors, je vais passer en revue votre CV et vous me direz si effectivement

  5   cela correspond.

  6   Vous êtes diplômé de l'école secondaire ou du lycée à Sarajevo, et par la

  7   suite vous êtes diplômé de la faculté de droit à Sarajevo le 28 juin 1971;

  8   est-ce exact ?

  9   R.  Oui, tout à fait.

 10   Q.  Vous avez fait un stage auprès du bureau du bureau des procureurs

 11   militaires du ministère de la Justice de Sarajevo. Après avoir fait votre

 12   examen du barreau, vous avez travaillé --

 13   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 14   M. ZORKO : [interprétation] -- entre mars 1973 et 31 octobre 1976, n'est-ce

 15   pas ?

 16   R.  Oui, tout à fait.

 17   Q.  Depuis novembre 1976 jusqu'au 12 octobre 1980, vous étiez juge

 18   d'instruction de la cour militaire de Sarajevo, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et à partir du 13 octobre 1980 jusqu'à la fin de 1984, vous étiez le

 21   conseiller militaire ou l'adjoint du conseiller militaire pour les affaires

 22   disciplinaires de la cour disciplinaire du commandement de la 7e Armée,

 23   n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Donc à partir du 1 juin 1985 jusqu'au mois de juin 1988, vous étiez

 26   juge président de la chambre pénale de la cour militaire de Sarajevo; est-

 27   ce exact ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Entre le 1er juillet 1988, et ce, jusqu'à la fin de 1989, vous étiez le

  2   procureur adjoint militaire de Sarajevo ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Et entre-temps, vous avez fait votre maîtrise à la faculté de droit à

  5   Belgrade, et ce, dans le domaine du droit pénal, et vous avez obtenu votre

  6   diplôme le 2 novembre 1989 ?

  7   R.  Oui, c'est exact.

  8   Q.  Du 1e janvier 1990 jusqu'à la fin de juin 1992, vous étiez procureur

  9   militaire à Sarajevo, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Entre le 1e juillet 1992 jusqu'au 31 décembre 1993, vous étiez adjoint

 12   du procureur de la cour suprême militaire de Belgrade, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  A partir du 1e janvier 1984 jusqu'au 16 avril 1999, vous étiez

 15   président du tribunal militaire de Belgrade ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Entre le 16 avril 1990 jusqu'au 31 mars 1991, vous étiez chef de la

 18   direction juridique au sein de l'état-major principal de l'armée yougoslave

 19   et au ministère de la Défense ?

 20   R.  Oui. Mais je dois vous donner une explication assez courte. D'abord,

 21   j'ai travaillé à l'état-major principal de l'armée yougoslave, et par la

 22   suite j'ai travaillé au ministère de la Défense. C'était deux institutions

 23   différentes, distinctes.

 24   Q.  Très bien. Merci. Vous avez donc terminé votre carrière professionnelle

 25   le 1e avril 2001 et c'est à cette date que vous avez pris votre retraite ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  S'agissant de votre éducation militaire, après le service des troupes,

 28   vous avez d'abord travaillé dix ans auprès du service juridique, et par la

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  1   suite vous avez travaillé dans le service juridique, d'abord dans l'armée

  2   yougoslave, et par la suite dans l'armée fédérale de la République fédérale

  3   yougoslave. Et par la suite, vous avez exécuté toutes les fonctions dont on

  4   vous demandait pendant toute la période de votre carrière, les 30 années de

  5   votre carrière.

  6   R.  Oui. J'ai eu un cursus militaire, un développement militaire au sein

  7   des organes militaires juridiques.

  8   Q.  Est-ce que vous avez travaillé à d'autres endroits ?

  9   R.  Oui. Après avoir pris ma retraite auprès de l'état-major principal de

 10   l'armée yougoslave, on a procédé à la création d'une commission chargée de

 11   collaborer avec le Tribunal pénal international de La Haye et j'ai été

 12   choisi ou sélectionné, si vous le souhaitez, on m'a demandé d'être

 13   l'adjoint du président de la commission, tâche que j'ai acceptée. Donc

 14   j'étais la seule personne à la retraite. Il y avait une autre personne qui

 15   était déjà à la retraite, qui travaillait pour cette commission, alors que

 16   les autres membres étaient des membres actifs. Il y en avait peut-être de

 17   huit à dix, des membres actifs et des officiers de carrière de l'état-major

 18   principal.

 19   Q.  Très bien. Merci, Mon Général. Pourriez-vous nous expliquer très

 20   brièvement, s'agissant de la RSFY, et par la suite dans la République

 21   socialiste fédérale, pourriez-vous nous dire ce que les tribunaux

 22   militaires représentaient à l'époque ? Ce que je veux

 23   dire, quelle était l'organisation, quel était le travail et quelles étaient

 24   les compétence ?

 25   R.  Conformément à la Loi sur les tribunaux militaires dans la RSFY et plus

 26   tard dans République socialiste de Yougoslavie, les tribunaux militaires

 27   étaient indépendants et il s'agissait d'un système juridique indépendant

 28   qui fonctionnait outre les autres systèmes juridiques qui s'occupaient des

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  1   questions civiles. Les tribunaux militaires étaient compétents de juger les

  2   membres de l'Armée yougoslave ou les membres de la RSFY, et par la suite

  3   ils pouvaient également juger d'autres personnes qui n'étaient pas membres

  4   de l'armée conformément à certaines dispositions de la loi, même si ces

  5   personnes n'étaient pas nécessairement des militaires, des officiers de

  6   carrière.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Microphone, Monsieur Zorko.

  8   M. ZORKO : [interprétation]

  9   Q.  Au début des années 90, nous savons très bien qu'il y avait une crise.

 10   Pourriez-vous nous expliquer ce qui est arrivé avec les tribunaux

 11   militaires existants et de quelle façon est-ce que ces tribunaux militaires

 12   ont fonctionné dans cet Etat qui, par la suite, a vu son démantèlement ?

 13   R.  La crise en RSFY s'est fait sentir surtout lorsque les sécessions de

 14   certaines unités ou de certaines républiques ont eu lieu. D'abord, c'est la

 15   République de Slovénie qui a fait sécession, et par la suite, lorsque la

 16   décision a été prise pour que les unités de JNA se retirent de ce

 17   territoire, ceci valait également pour les tribunaux militaires et les

 18   procureurs militaires. Alors, le tribunal militaire et les procureurs

 19   militaires à Ljubljana, puisque le siège se trouvait à Ljubljana, ils ont

 20   cessé de fonctionner. Par la suite, la même chose est arrivée en Croatie,

 21   de sorte que les tribunaux militaires --

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur, mais vous

 23   parlez trop rapidement. La sténotypiste n'arrive pas à suivre votre débit.

 24   Alors, pourriez-vous, je vous prie, ralentir votre débit, afin que nous

 25   puissions vous suivre.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je suis vraiment désolé. Je vais donc

 27   répéter ce passage.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, faites, je vous prie. Merci.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Après la sécession illégale de la Slovénie,

  2   lorsque la décision a été prise, une décision a été prise au niveau du RSFY

  3   pour que les unités de la JNA se retirent de la Slovénie. Le fonctionnement

  4   du tribunal militaire a cessé également de fonctionner, qui était situé à

  5   Ljubljana. Plus tard, lorsque la situation en Croatie s'est exacerbée,

  6   lorsque les unités de la JNA se sont retirées du territoire de la

  7   République de Croatie, le tribunal militaire et le procureur militaire se

  8   sont retirés de Zagreb, alors que le tribunal militaire et le procureur

  9   militaire qui étaient chargés de s'occuper des questions de la marine

 10   militaire, dont le siège était à Split, a été transféré à Tivat, c'est une

 11   petite localité au Monténégro, sur la côte adriatique. Et c'est ainsi que

 12   ce tribunal a continué ce travail dans ces nouvelles conditions.

 13   En 1992, la situation en Bosnie-Herzégovine était la même et donc la JNA a

 14   dû se retirer du territoire de Bosnie-Herzégovine, ainsi que les tribunaux

 15   militaires ou le tribunal militaire et le procureur militaire ont cessé de

 16   fonctionner à Sarajevo, et à la fin du moi de mai 1992, j'ai été transféré

 17   à Belgrade.

 18   Par la suite, les tribunaux militaires se sont réorganisés dans ces mêmes

 19   conditions et le tribunal militaire et le procureur militaire ont poursuivi

 20   leurs travaux à Belgrade. Le procureur militaire et le tribunal militaire

 21   de Tivat a continué son travail et le procureur militaire et le tribunal

 22   militaire à Nis ont également pu fonctionner. Donc c'est le principe

 23   territorial. Et par la suite, le tribunal militaire s'est transféré de

 24   Tivat à Podgorica, et c'est là qu'on a procédé à la formation du tribunal

 25   militaire de Podgorica, qui a maintenant pris ou repris la juridiction de

 26   la cour militaire de Tivat sur le territoire du Monténégro, et en partie de

 27   la Serbie.

 28   M. ZORKO : [interprétation]

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  1   Q.  Je vous remercie, Mon Général.

  2   M. ZORKO : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche dans le prétoire

  3   électronique un document de l'Accusation qui porte la cote P1187. Je

  4   demanderais également que s'agissant du classeur que l'on a déjà préparé,

  5   de le remettre au témoin après l'avoir montré à mon éminent confrère de

  6   l'Accusation afin que nous puissions travailler de manière plus efficace.

  7   Q.  Mon Général, le document que nous avons à l'écran est identifié dans

  8   votre classeur par l'intercalaire 2. Mon Général, reconnaissez-vous ce

  9   document ?

 10   R.  Voilà le texte portant sur la Loi des tribunaux militaires, qui a été

 11   publié dans le journal officiel à Sarajevo en 1995.

 12   Q.  Merci bien. Veuillez, je vous prie, prendre connaissance de l'article 2

 13   dans lequel on peut lire que les tribunaux militaires fonctionnent de façon

 14   tout à fait indépendante. Je veux vous demander ce que ça représente.

 15   Qu'entendons-nous par là, qu'il s'agit de tribunaux indépendants ?

 16   R.  Il est bien connu en théorie que le pouvoir dans un Etat souverain est

 17   séparé en trois entités. Il y a l'entité judiciaire, l'entité exécutive --

 18   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] -- et étant donné qu'il s'agissait de tribunal

 20   militaire, il était complètement indépendant et aucune de ces branches de

 21   gouvernement judiciaire ne peut avoir une incidence sur le tribunal

 22   militaire. Les juges militaires sont également indépendants, et le juge

 23   militaire prend sa décision de façon tout à fait indépendante, ce qui veut

 24   dire que les juges ne dépendent absolument de personne et ne peuvent rendre

 25   aucune décision sans en avoir suivi ou reçu une suggestion de quelqu'un ou

 26   sans en avoir été contraints par qui que ce soit.

 27   Q.  Bien. Merci bien, Mon Général. Je voudrais attirer votre attention sur

 28   l'article 28 de cette loi dans le prétoire électronique.

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  1   M. ZORKO : [interprétation] Il s'agit de la page 15 en anglais et 13 en

  2   B/C/S.

  3   Q.  Mon Général, voyez-vous cet article ?

  4   R.  Oui, oui.

  5   Q.  Je ne veux pas vous donner lecture de l'article, mais j'aimerais vous

  6   demander de faire un commentaire sur deux mots, leur fonction juridique.

  7   Alors, qu'est-ce que cela veut dire ?

  8   R.  La fonction juridique est constante. Ceci veut dire que le juge du

  9   tribunal militaire, une fois qu'il est nommé à ce poste, à un poste qui

 10   n'est pas limité par le temps - et c'est ce système-là de nomination de

 11   juge qui garantit son indépendance - donc on lui accorde une sécurité de

 12   son poste et on ne peut changer les choses que seulement si les lois le

 13   prévoient, si les lois prévoient le changement. Contrairement à quelques

 14   autres exemples, on pouvait nommer un juge pour une période de quatre ans,

 15   mais ici ce n'était pas le cas. C'est une excellente décision qui était

 16   prise ici, à savoir que c'est une fonction permanente, c'est un poste

 17   permanent.

 18   Q.  Je vous remercie, Mon Général. Dites-nous, s'il vous plaît, qui est

 19   chargé de nommer les juges militaires au poste de juge militaire ?

 20   R.  Les juges des tribunaux militaires, ainsi que les procureurs

 21   militaires, sont nommés par un décret du président de la république à la

 22   suite d'une proposition faite par le ministre de la Défense. Donc

 23   proposition écrite ou opinion du ministère de la Défense.

 24   Q.  Mon Général, pour être tout à fait clair lorsqu'on parle de la

 25   nomination des juges, ici nous parlons de la République socialiste

 26   fédérative de Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Très bien. Merci. Mon Général, aux articles 9 et 10 on parle de la

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  1   compétence des tribunaux militaires. J'aimerais savoir quels sont les

  2   crimes commis qui tombent sous la juridiction des tribunaux militaires.

  3   R.  Conformément à l'article 9 de la Loi sur les tribunaux militaires, les

  4   tribunaux militaires jugent les crimes qui ont été commis par le personnel

  5   militaire, c'est-à-dire chaque fois qu'un officier ou un personnel

  6   militaire commet un crime, il est jugé par les tribunaux militaires, tel

  7   que stipulé par la loi. Outre ceci, les tribunaux militaires ont pour

  8   obligation de juger d'autres personnes également, et ces autres personnes

  9   il s'agit, bien sûr, de civils, donc de personnes n'étant pas des

 10   militaires ayant commis des crimes commis précis. Ces crimes très précis

 11   sont également prescrits par la Loi sur les tribunaux militaires selon

 12   laquelle on retrouvait définition des compétences et des tribunaux

 13   militaires, et on donne description des crimes commis par ces derniers et

 14   qui sont jugés par eux.

 15   Et ils peuvent également poursuivre des civils qui travaillent pour

 16   l'armée pour des crimes commis à leur service, à leur travail.

 17   Q.  Très bien.

 18   M. ZORKO : [interprétation] J'aimerais maintenant attirer votre attention

 19   sur la page 2 en B/C/S et sur la page 5 en anglais, où l'on peut lire les

 20   articles précédemment mentionnés.

 21   Q.  Général, est-ce que cette compétence englobe également la gestion de

 22   procès par les tribunaux militaires de la RFY lorsqu'il s'agit de crimes

 23   commis contre le droit pénal international et le droit humanitaire ?

 24   R.  Oui, oui, s'il y a eu participation de militaires, donc tous les

 25   crimes, tous les actes criminels prévus par le droit pénal, y compris les

 26   crimes commis à l'encontre du droit pénal international.

 27   Q.  Et vous avez parlé de militaires, n'est-ce pas ? Donc je suppose qu'il

 28   y a une distinction qui est faite là, est-ce que vous pourriez nous dire ce

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  1   qu'il en était lorsqu'il s'agissait de civils, de quelle compétence

  2   relevaient-ils ?

  3   R.  Lorsqu'il s'agit de crimes commis contre, à l'encontre du droit pénal

  4   international, s'il s'agit de civils qui ont commis ces crimes, ce sont les

  5   tribunaux civils qui ont la compétence et non pas les tribunaux militaires.

  6   Q.  Il y avait également des procureurs civils dans le système judiciaire

  7   de la RFY, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, bien sûr, parce qu'un tribunal ne peut pas fonctionner sans

  9   procureur parce qu'il y a quand même une interface, une interaction entre

 10   les deux.

 11   Q.  Merci. Général, si un acte criminel est commis par un certain nombre de

 12   coauteurs du crime, mais que seulement certains d'entre eux sont

 13   militaires, qui a compétence en espèce, un tribunal militaire ou un

 14   tribunal civil ?

 15   R.  L'article 12 stipule que si des membres de l'armée ainsi que des civils

 16   commettent un acte criminel conjointement, mais il ne s'agit pas d'un crime

 17   qui relève de la compétence d'un tribunal militaire, alors dans ce cas

 18   d'espèce, le tribunal qui a compétence sur les civils a également

 19   compétence sur les militaires également. Donc dans ce cas, cela signifie

 20   qu'il s'agira d'un tribunal civil qui traduira en justice les militaires

 21   qui ont commis un crime conjointement avec des civils à condition qu'ils

 22   n'aient pas commis d'acte criminel qui relève de la loi relative aux

 23   tribunaux militaires dont nous avons parlé un peu plus tôt.

 24   M. ZORKO : [interprétation] Une petite correction, je vous prie. Au compte

 25   rendu d'audience, à la ligne 14, ou plutôt non, à la ligne 15 en fait, page

 26   12, il faudrait mentionner le terme compétence exclusive. Donc ajoutez

 27   exclusive. Voilà. Je vous remercie donc de la correction apportée.

 28   Q.  Général, est-ce que la loi prévoyait la responsabilité du supérieur

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  1   hiérarchique, donc pour ce qui est du commandement pour la période dont

  2   nous parlons. Est-ce que cette responsabilité est considérée comme un mode

  3   de responsabilité ?

  4   R.  Conformément au code pénal de la RSFY et plus tard conformément au code

  5   pénal de la RFY, et conformément à son système judiciaire, je dirais qu'il

  6   n'y a pas de responsabilité du supérieur hiérarchique ou du commandement

  7   donc qui est prévue comme une responsabilité lorsqu'il s'agit d'un acte

  8   criminel, y compris lorsqu'il s'agit d'un acte criminel commis à l'encontre

  9   du droit pénal international. Alors non seulement il y a l'intention

 10   directe, mais il y a également ce qu'on appelle l'intention aggravée, à

 11   savoir qu'il faut qu'il y ait une intention très claire d'avoir commis un

 12   certain crime.

 13   Donc le seul [inaudible] des responsabilités c'est l'intention, avec

 14   l'intention supplémentaire qui consiste à commettre un crime. Hormis cela,

 15   ce qu'on appelle la responsabilité du supérieur hiérarchique n'est pas

 16   mentionnée, la responsabilité supérieure hiérarchique qui se fonde sur une

 17   responsabilité objective. En d'autres termes, si vous avez un officier, un

 18   commandant et que quelqu'un commet un crime, le commandant aurait dû le

 19   savoir, doit être mis au courant ou doit être informé donc de ce crime et

 20   doit être par conséquent tenu responsable.

 21   Q.  Je vous remercie, Général. Donc à propos, à propos de poursuites

 22   pénales, dans le contexte de la RDY, est-ce que vous pourriez nous dire si

 23   des priorités avaient été établies, je pense donc aux poursuites pénales,

 24   est-ce qu'il y avait certaines priorités qui avaient été dégagées ?

 25   R.  En principe, je pense au travail effectué par les procureurs militaires

 26   et d'ailleurs par l'ensemble des procureurs qui sont habilités à poursuivre

 27   des personnes pour leurs actes criminels. Il va sans dire que les priorités

 28   du procureur consistent à poursuivre l'auteur de crimes les plus sérieux et

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  1   il en va de même pour le tribunal. Il s'agit donc du principe en fonction

  2   duquel ces institutions fonctionnaient, ce sont des cas qui sont -- des

  3   affaires qui sont jugées prioritaires, parce que c'étaient les affaires qui

  4   représentaient un péril social le plus important, les conséquences étaient

  5   les plus lourdes, c'est pour cela que ces affaires se voyaient octroyer la

  6   priorité par opposition, en fait, à des crimes plus secondaires ou à des

  7   actes criminels considérés comme beaucoup plus ordinaires.

  8   Q.  Merci, Général. Justement à propos du statut d'un militaire, est-ce que

  9   les tribunaux militaires ont compétence, ainsi que les procureurs

 10   d'ailleurs, pour pouvoir diligenter des procédures, une procédure contre

 11   des personnes ayant commis des crimes ou des infractions pendant leur

 12   service, ou est-ce qu'il y a des changements faits ou des modifications qui

 13   sont envisagés dans ce type de circonstance, et je pense donc à des

 14   changements, des modifications par rapport à la compétence en fait ?

 15   R.  Il y a un petit moment de cela, nous avons parlé de l'ensemble de la

 16   compétence des tribunaux militaires qui peuvent juger ou traduire en

 17   justice des militaires, donc à partir du moment où vous faites partie de

 18   l'armée, la législation, la loi stipule précisément qui est considéré comme

 19   faisant partie de l'armée. Donc vous avez dans un premier temps les soldats

 20   de métier avec les officiers, les sous-officiers, les conscrits, les

 21   réservistes, et cetera, et cetera.

 22   En fait, dans la réalité, ce qui se passe parfois c'est que le statut d'une

 23   personne cesse d'exister pendant ce type de période. Par exemple, vous avez

 24   donc un officier dont le service d'active se termine n'est plus considéré

 25   comme faisant partie de l'armée. Donc S'il y a des poursuites pénales qui

 26   sont diligentées pour ce type de circonstance, lorsque la personne ne fait

 27   plus partie de l'armée, n'est plus considérée comme faisant partie de

 28   l'armée, là se pose le problème de la compétence et dans de telles

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  1   situations, s'il ne s'agit pas d'actes criminels qui relèvent précisément

  2   de la compétence des tribunaux militaires, le tribunal militaire déléguera

  3   en quelque sorte sa compétence et ne pourra plus diligenter de procédure

  4   contre la personne, à condition, bien entendu, que l'acte d'accusation a

  5   une validité juridique. Parce que dans ce cas de situation, ce sont les

  6   tribunaux militaires qui doivent faire en sorte que la procédure aille

  7   jusqu'à la fin. S'il s'agit de la procédure préalable au procès ou

  8   d'enquête, là le tribunal militaire ne peut pas traduire en justice la

  9   personne et c'est une procédure alors qui est renvoyée devant les

 10   procureurs et les tribunaux civils.

 11   Q.  Général, est-ce que vous pourriez nous expliquer ce que vous entendez

 12   lorsque vous avez dit lorsqu'un acte d'accusation est dressé et entre en

 13   vigueur ou a une validité juridique, qu'entendez-vous par cela ? Est-ce que

 14   vous pourriez nous l'expliquer ?

 15   R.  A partir du moment où le procureur dresse un acte d'accusation, prenons

 16   son acte d'accusation, et le présente au tribunal, il y a une phase qui

 17   s'ensuit au cours de laquelle l'acte d'accusation est visé, en quelque

 18   sorte, et examiné par le tribunal. Et pendant cette phase, le juge qui est

 19   saisi de l'affaire vérifie dans un premier temps l'acte d'accusation pour

 20   voir si cet acte d'accusation a été dressé et prononcé par le procureur

 21   compétent. Ensuite, il vérifie si tous les critères juridiques requis pour

 22   un acte d'accusation sont satisfaits et il vérifie également s'il s'agit

 23   d'un crime qui figure à l'acte d'accusation. Il vérifie que tous les

 24   critères soient respectés.

 25   Donc si toutes ces conditions et ces critères officiels sont respectés, le

 26   président de la chambre vérifie en quelque sorte si la cour ou le tribunal

 27   en question est responsable ou non, à savoir s'il a compétence ou non en la

 28   matière et si la personne, par exemple, fait encore partie de l'armée ou

Page 12904

  1   non.

  2   Donc si cela n'est pas le cas, l'acte d'accusation est envoyé à l'accusé et

  3   son conseil de la Défense, ce qui fait qu'ensuite ils ont tout à fait le

  4   droit d'interjeter appel et ils ont le droit de contester la validité et

  5   donc la légalité de l'acte d'accusation, et ils peuvent utiliser tous les

  6   arguments qui leur permettront de contester l'acte d'accusation.

  7   Mais une fois que l'appel a été reçu, une chambre de première instance est

  8   composée de trois juges qui décide et qui rend son jugement à propos de

  9   l'appel. Et s'ils considèrent que l'appel n'est pas fondé et s'il y a cette

 10   période de huit jours qui est arrivée à échéance, puisque c'est la période

 11   pendant laquelle un appel doit être interjeté, alors l'acte d'accusation

 12   entre en vigueur. L'acte d'accusation est confirmé par un juge, un peu

 13   comme cela se passe ici dans ce Tribunal. Alors s'il y a appel interjeté,

 14   c'est trois juges, en fait, qui confirment l'acte d'accusation. A partir du

 15   moment où l'acte d'accusation est considéré comme valable, le procès peut

 16   alors être programmé.

 17   Q.  Merci, Général.

 18   M. ZORKO : [interprétation] Nous allons maintenant aborder un autre sujet,

 19   ou plutôt, nous allons revenir sur le document P1187, qui est une pièce de

 20   l'Accusation. Je pense que ce document est toujours affiché sur nos écrans,

 21   et je souhaiterais que nous nous penchions sur la page 7 pour la version

 22   B/C/S et page 34 pour la traduction en anglais.

 23   Q.  Général, j'aimerais attirer votre attention sur l'article 74. Général,

 24   vous voyez cet article, l'article 74, qui est un article qui traite de

 25   l'organisation du travail d'un tribunal militaire en temps de guerre, et

 26   j'aimerais que vous nous fournissiez des explications à propos de ce qui

 27   figure dans cet article.

 28   R.  Cette disposition législative organise et structure le travail des

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  1   tribunaux en cas de guerre. Lorsqu'il y a proclamation de l'état de guerre,

  2   nous avons, en fait, une situation d'urgence. Et au vu de cette situation

  3   d'urgence, il faut absolument organiser de façon différente le travail des

  4   tribunaux militaires, différente à la situation de paix, donc il faut

  5   qu'ils puissent s'adapter à la nouvelle situation provoquée par l'état de

  6   guerre.

  7   Ce qui fait qu'il y a une possibilité d'envisager et vous avez la

  8   responsabilité directe des tribunaux militaires qui fonctionnaient en temps

  9   de paix et qui cessent de fonctionner à partir du moment où il y a

 10   proclamation de guerre. Vous avez le tribunal militaire suprême et le

 11   procureur militaire suprême qui travaillent de concert avec l'état-major du

 12   commandement Suprême, et des tribunaux sont ainsi établis et sont en

 13   quelque sorte attachés au commandement des unités individuelles. Il y a

 14   beaucoup plus. Donc vous avez des tribunaux militaires qui sont en quelque

 15   sorte attachés au commandement des régions militaires, donc vous avez des

 16   organes militaires territoriaux dans une zone donnée qui, eux, sont

 17   attachés au commandement des corps, des divisions, des armées. Vous avez,

 18   par exemple, le commandement de la force aérienne, le commandement de la

 19   marine, des attaques antiaériennes, par exemple.

 20   De toutes ces unités ont de nouveaux tribunaux qui relèvent de ces

 21   unités et qui sont en parallèle, vous avez les procureurs militaires qui,

 22   eux, continuent à œuvrer au vu des nouvelles conditions. L'objectif étant

 23   qu'ils doivent devenir partie intégrante en quelque sorte des unités en

 24   question. Ainsi, ils peuvent travailler dans des conditions plus efficaces,

 25   ils peuvent poursuivre les auteurs de crime de façon plus efficace

 26   également. Les membres peuvent donc poursuivre ou traduire en justice

 27   seulement les membres des unités auxquelles ils sont attachés.

 28   Et il en va de même pour les procureurs militaires et le tribunal militaire

Page 12906

  1   suprême. Le tribunal militaire suprême et le procureur militaire mettent

  2   sur pied leurs départements pour pouvoir justement fonctionner de façon

  3   efficace et pour pouvoir gérer, par exemple, les appels qui sont interjetés

  4   auprès des tribunaux de première instance.

  5   Q.  Je vous remercie, Général. Mais les organes judiciaires militaires de

  6   la RFY, donc après désintégration de la RSFY, ont-ils travaillé dans des

  7   conditions de paix ou non, donc si c'était un état de paix ?

  8   R.  En RFY, après la désintégration de la RSFY, les tribunaux militaires

  9   ont été organisés et ont travaillé dans des conditions de temps de paix.

 10   Ils ont fonctionné jusqu'au moment où il y a eu proclamation de l'état de

 11   guerre lorsqu'il y a eu l'agression de l'OTAN lancée contre la RFY le 24

 12   mars 1999. Et cette façon de fonctionner en temps de guerre a fonctionné

 13   pendant la durée de la guerre. A partir du moment où il y a eu fin de la

 14   guerre, leur travail en fonction de ces principes a cessé également.

 15   Q.  Je vous remercie, Général.

 16   M. ZORKO : [interprétation] Je souhaiterais maintenant demander l'affichage

 17   de la pièce P1188.

 18   Q.  Général, c'est un document qui se trouve à l'intercalaire 3 de votre

 19   classeur. Il s'agit de la Loi qui régit les procureurs militaires. Général,

 20   avant que nous n'abordions un autre sujet, vous avez dit que les tribunaux

 21   militaires de la RFY fonctionnaient conformément à l'article 74 du 24 mars

 22   1999. Est-ce que vous pourriez nous dire jusqu'à quelle date a duré cette

 23   situation ?

 24   R.  Ecoutez, c'était pendant l'état de guerre, et pour autant que je m'en

 25   souvienne, l'état de guerre a cessé le 24 ou le 25 juin 1999. C'était à

 26   l'une ou l'autre de ces dates. Je ne sais plus maintenant s'il s'agissait

 27   du 20 ou du 25 juin 1999.

 28   Q.  Je vous remercie. Général, regardez cette Loi relative aux procureurs

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  1   militaires, et notamment son article 1, qui indique que :

  2   "Le procureur militaire est un organe étatique indépendant…," alors

  3   est-ce que vous pourriez nous expliquer le concept de cette indépendance de

  4   cet organe ?

  5   R.  Ecoutez, tout comme l'indépendance et l'autonomie des tribunaux pour ce

  6   qui est de son processus de décision, le procureur militaire est un organe

  7   absolument indépendant qui poursuit les auteurs de crimes, ce qui fait que

  8   le procureur est absolument indépendant lorsqu'il prend une décision à

  9   propos d'une poursuite qu'il diligentera, une poursuite pénale. C'est le

 10   seul organe qui a cette responsabilité. C'est pour cela qu'il est assez

 11   normal et naturel que le procureur soit indépendant et autonome lorsqu'il

 12   prend ses décisions, qui, bien entendu, doivent être prises conformément à

 13   la loi.

 14   Q.  Je vous remercie. J'aimerais également que nous nous penchions sur

 15   l'article 28 de cette loi.

 16   M. ZORKO : [interprétation] Donc je souhaiterais que cet article soit

 17   affiché sur nos écrans, je vous prie. Page 3 de la version B/C/S et page 11

 18   de la version anglaise.

 19   Q.  Général, il est dit que le mandat du procureur militaire et de ses

 20   adjoints sera permanent. Qu'est-ce que cela signifie ?

 21   R.  Cela signifie - c'est la même chose pour les juges - que la fonction du

 22   procureur et de ses adjoints, à partir du moment où ils ont été nommé au

 23   poste, est permanent, ce qui est à nouveau une garantie de sécurité pour le

 24   poste et pour la personne qui assume la fonction en question, à savoir

 25   cette personne est à même de prendre des décisions de façon absolument

 26   indépendante et de façon absolument autonome, et la personne en question

 27   peut être assurée que c'est dans ces conditions qu'il assurera cette

 28   fonction, à savoir personne ne pourra le remplacer hormis en fonction de

Page 12908

  1   conditions et de critères prévus par la loi.

  2   Q.  Merci, Général. Est-ce que vous pourriez nous dire qui nomme les

  3   procureurs militaires à cette fonction ?

  4   R.  Les procureurs militaires, ainsi que les procureurs militaires

  5   adjoints, à l'instar des juges, sont nommés par le président de la

  6   république, et il y a une déclaration ou un exposé des motifs qui doit

  7   accompagner la nomination, et les raisons doivent être déclinées dans ce

  8   document.

  9   Avec votre permission, j'aimerais vous expliquer comment cela fonctionnait

 10   dans la pratique. Donc il y a une décision légale qui est prise en fonction

 11   de laquelle le ministre de la Défense fait une proposition, énonce et

 12   développe ses raisons. Mais pour ce qui est des juges, des procureurs et

 13   des procureurs adjoints, c'est le procureur militaire ou le président du

 14   tribunal qui donne ses raisons pour les candidats potentiels. Dans 99 % des

 15   cas, si le président du tribunal propose le nom d'une personne, après

 16   consultation, la personne ou le candidat, en d'autres termes, est nommé à

 17   ladite fonction, parce qu'il n'y a pas d'autres institutions au sein de

 18   l'armée qui connaît aussi bien les qualités d'un candidat, hormis les

 19   collègues de ce candidat. Ce qui fait que le ministre de la Défense ne se

 20   contente pas tout simplement de prendre un dossier dans un de ces tiroirs

 21   et de proposer le nom de quelqu'un. Il prend en considération les avis et

 22   points de vue fournis par les collègues du candidat, ce qui fait qu'il ne

 23   s'agit pas donc d'une décision unilatérale. Cela se fait après moult

 24   consultations lorsque le nom de la personne est proposé.

 25   Q.  Je vous remercie, Général. Est-ce que vous pourriez nous décrire

 26   brièvement les responsabilités d'un procureur militaire en RFY ?

 27   R.  De façon très simple, je dirais que le procureur militaire est

 28   responsable de la poursuite des auteurs de crimes qui relèvent de la

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  1   compétence du tribunal militaire, donc il s'agit des affaires du tribunal

  2   militaire, et c'est de cela dont s'occupe le procureur militaire. Donc si

  3   quelqu'un prononce un acte d'accusation à l'encontre d'une personne qui ne

  4   relève pas de cette catégorie, l'acte d'accusation sera rejeté et ne sera

  5   pas accepté, et la procédure ne peut pas continuer à être diligentée

  6   conformément à la loi.

  7   Q.  Je vous remercie, Général.

  8   M. ZORKO : [interprétation] Est-ce que nous pourrions demander maintenant

  9   l'affichage de la page numéro 2 de la version B/C/S et page 4 de la version

 10   anglaise.

 11   Q.  Et, Général, je voudrais vous demander de bien vouloir vous pencher sur

 12   l'article 9. Voici ce que dit l'article : le procureur militaire entreprend

 13   une procédure dans le cadre de sa compétence ratione materiae et s'agissant

 14   aussi de sa compétence territoriale. Qu'est-ce que ça veut dire exactement,

 15   pourriez-vous nous aider à comprendre ces deux concepts ?

 16   R.  Quand on parle de la compétence ratione materiae, ça veut dire que le

 17   procureur militaire doit agir dans le cadre du mandat qui lui est confié, à

 18   savoir la poursuite d'auteurs présumés de crimes qui sont de sa compétence.

 19   Il doit poursuivre tout soldat, tout membre de l'armée qui a commis un

 20   crime quel qu'il soit. Il doit aussi poursuivre d'autres personnes pour des

 21   crimes présumés qui, en vertu de la loi, sont du ressort du procureur

 22   militaire.

 23   S'agissant de la compétence territoriale, elle tient au territoire, les

 24   crimes, et les auteurs présumés, supposés commis sur un territoire dont il

 25   a compétence, tout ceci est prévu par la législation militaire où sont

 26   énumérées effectivement diverses notions --

 27   Q.  Vous allez un peu vite là. Pourriez-vous ralentir, Mon Général.

 28   R.  Merci. Tel ou tel tribunal militaire a compétence pour un territoire

Page 12910

  1   donné, et le procureur militaire, lui, est compétent pour ce même

  2   territoire. C'est ce que prévoit la Loi régissant l'activité des tribunaux

  3   militaires, laquelle loi énumère les municipalités dont on dit que ce sont

  4   les unités administratives élémentaires de l'organisation de l'Etat.

  5   Chacune de ces municipalités a son propre territoire délimité par certaines

  6   lignes administratives, et dans certains endroits, les unités militaires,

  7   les institutions et installations militaires sont installées sur ce

  8   territoire. Si un crime est commis dans un territoire pour lequel le

  9   procureur militaire a compétence, il diligente les poursuites.

 10   Donc quand on parle de la compétence territoriale, ça concerne le

 11   territoire et la compétence ratione materiae. C'est l'objet même ou la

 12   nature même des crimes dont il a le droit de poursuivre les auteurs.

 13   Qu'est-ce que ça veut dire en pratique ? Ni le tribunal ni le procureur

 14   n'est habilité à entreprendre quoi que ce soit en dehors de ses

 15   compétences. Ce ne sera possible que si un dossier leur est confié par le

 16   procureur militaire suprême ou par la cour militaire suprême, mais cette

 17   passation de dossier ne se fait que si, disons, des raisons pratiques

 18   l'exigent.

 19   Q.  Je vais vous demander de répéter la dernière phrase, car je ne sais pas

 20   si ça été repris correctement au compte rendu d'audience. Vous parliez de

 21   la compétence.

 22   R.  Je vous disais que la compétence territoriale concerne un procureur

 23   militaire ou un tribunal militaire. L'un et l'autre sont habilités

 24   lorsqu'une infraction est supposée commise dans le territoire qui est de

 25   leur compétence. Et c'est ce que régit la Loi portant activité des

 26   tribunaux militaires. A titre exceptionnel, il arrive que le procureur ou

 27   le tribunal militaire intervienne pour des affaires qui sont à l'extérieur

 28   du cadre de leur compétence, mais il faut alors que le dossier leur soit

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  1   confié. C'est une proposition qui est fait par celui qu'on appelle le

  2   procureur militaire suprême, et pour le tribunal militaire, ce sera fait

  3   par le tribunal militaire suprême.

  4   S'agissant de poursuites, c'est donc le procureur supérieur qui va

  5   confier ceci --

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ralentissez, s'il vous plaît. Je vous

  7   rappelle à l'ordre, parce qu'effectivement, là on entre dans le vif du

  8   sujet, on perd de vue un peu ce qui se passe autour de soi. Et les

  9   interprètes vous demande de ralentir.

 10   Poursuivez, Maître.

 11   M. ZORKO : [interprétation] Merci.

 12   Q.  Mon Général, vous parliez de cette transmission du dossier et vous

 13   dites que quelquefois il y a renvoi d'un dossier, et c'est fait par qui ?

 14   R.  Si une infraction est censée avoir été commise, disons, sur le

 15   territoire qui relève de la compétence de Belgrade, pour des raisons

 16   tactiques ou pratiques, si on estime que c'est à Nis qu'on peut au mieux

 17   traiter de l'affaire, à ce moment-là, il y aura renvoi de l'affaire de

 18   Belgrade à Nis et on va demander, ça c'est ce que fera le procureur et le

 19   tribunal militaire fera de même, il y aura renvoi du dossier de Belgrade à

 20   Nis. Et une décision sera rendue à cet effet par le tribunal militaire, le

 21   dossier étant confié au tribunal de Nis. Ça c'est pour la compétence

 22   territoriale. Mais en principe, chacun est responsable de son territoire de

 23   tutelle, mais parfois on peut accepter des affaires qui viennent d'autres

 24   territoires.

 25   Et c'est vrai aussi pour les tribunaux civils.

 26   Q.  Très bien. Merci, Mon Général. Parlant de responsabilité

 27   professionnelle, le procureur militaire, comment avait-il son service

 28   organisé, à qui devait-il rendre compte ?

Page 12913

  1   R.  Les procureurs militaires et les procureurs civils dans l'appareil

  2   judicaire de la RSFY obéissaient à un principe général qui est celui de la

  3   subordination. Un procureur public de première instance a l'obligation de

  4   respecter les instructions et les directives données par son supérieur

  5   hiérarchique. Le procureur militaire en première instance doit rendre

  6   compte au procureur militaire suprême, et ce dernier a donc sous sa

  7   responsabilité des activités des procureurs de première instance, et lui,

  8   il rend compte au président de la république.

  9   Q.  Très bien. Merci. Examinez une fois de plus la pièce P1188, son article

 10   6 plus précisément, alinéa 1. Il est dit ici qu'un procureur militaire a le

 11   droit et l'obligation d'entamer des poursuites à l'encontre d'auteurs de

 12   faits répréhensibles, non sans se limiter au fait de découvrir des crimes

 13   et de découvrir les auteurs de ceux-ci. Pourriez-vous donner des

 14   explications supplémentaires sur le processus concerné, quelles sont les

 15   mesures concrètes ou les actes concrets que pose le procureur en vertu de

 16   cette loi ?

 17   R.  Il a une fonction et il a une compétence de base, c'est vrai pour le

 18   procureur public et le procureur militaire, c'est-à-dire qu'il doit

 19   poursuivre les auteurs présumés d'infractions données, et dans l'exercice

 20   de ses fonctions, il n'y a aucun problème si on connaît l'identité de

 21   l'auteur si un crime précis a été découvert. A ce moment-là, toutes les

 22   instances responsables de cette première phase de ce processus feront ce

 23   qu'elles ont à faire. Et c'est vrai lorsqu'un crime a fait l'objet d'une

 24   plainte.

 25   Le problème que rencontre un procureur et le problème que rencontrent les

 26   structures chargées de l'application de la loi, ces problèmes apparaissent

 27   si on ne connaît pas l'identité de l'auteur ou si on sait qu'une infraction

 28   pénale a été commise, mais qu'il n'y a pas de preuve directe ou indirecte à

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  1   l'appui. Manifestement, une infraction pénale c'est une infraction qui doit

  2   être poursuivie ex officio, je veux dire que c'est le parquet qui va

  3   automatiquement engager des poursuites, parce que vous avez d'autres

  4   infractions moindres ou délits qui peuvent être réglés au civil.

  5   Mais le procureur - et c'est dit ici dans ce texte - il a un dispositif

  6   général qui lui permet de prendre certaines mesures sans pour autant que

  7   ces mesures soient précisées ici. C'est vrai. Mais si vous regardez

  8   d'autres dispositions du droit, pas seulement celles qui régissent

  9   l'activité des procureurs et tribunaux militaires, si vous regardez

 10   d'autres dispositions qui précisent la nature de ces mesures, ça voudrait

 11   dire que le procureur est habilité à se tourner vers certains organes de

 12   l'Etat, et il se tourne à ce moment-là vers les organes chargés de mener

 13   des enquêtes ou de faire des instructions. C'est vrai aussi dans l'armée

 14   comme dans la vie civile, je pense ici aux organes de l'intérieur :

 15   l'armée, la police, la sûreté, les structures de commandement, les

 16   officiers, les institutions, les différentes organisations régissant

 17   l'organisation sociale.

 18   Ce sont autant d'entités susceptibles de fournir des informations, et

 19   le procureur est habilité à demander ces informations à ces entités que je

 20   viens de nommer. Mais tous ces organes ont l'obligation de donner suite à

 21   sa demande et de fournir les renseignements, les informations, les

 22   documents que ces organes ont peut-être en leur possession. Vous avez ici

 23   tout un éventail de mesures à la disposition du procureur dans le cadre de

 24   ses responsabilités.

 25   Q.  Je vous interromps un instant.

 26   M. ZORKO : [interprétation] Je pense que le moment est venu de faire la

 27   pause.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui. Nous reprendrons à onze heures

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  1   moins le quart.

  2   --- L'audience est suspendue à 10 heures 15.

  3   --- L'audience est reprise à 10 heures 44.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître.

  5   M. ZORKO : [interprétation] Merci, cher Président.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître, j'essaie de savoir où ceci

  7   nous amène.

  8   M. ZORKO : [interprétation] J'aurai bientôt terminé l'examen de ce sujet

  9   qui portait sur les compétences revenant à tel ou tel organe ou instance

 10   s'agissant de la découverte et de la poursuite d'infractions et de crimes.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 12   M. ZORKO : [interprétation] Merci Monsieur le Président.

 13   Q.  Avant la pause, nous parlions des responsabilités du procureur et des

 14   mesures qu'il prenait. Comment va-t-il réunir des éléments d'information,

 15   des éléments de preuve suite à une infraction ou un crime ?

 16   R.  Je vous ai décrit la façon dont il essayait d'obtenir des

 17   renseignements qu'il obtenait auprès d'organes de l'Etat, de services de

 18   l'État, dans un Etat où règne l'état de droit. Et je pense que la RFY et

 19   même avant, c'était un Etat doté d'un appareil judiciaire, un système

 20   juridique. Dans de telles circonstances, le procureur se tourne vers les

 21   agences des services chargées de la détection et de la prévention de la

 22   criminalité pour glaner auprès d'eux des éléments d'information, mais il va

 23   aussi consulter des organes susceptibles de rencontrer, de trouver des

 24   éléments utiles.

 25   Q.  Pour ce qui est de la question de réunir des éléments d'information,

 26   qui en a la responsabilité ? Disons, qui détermine si les éléments

 27   recueillis méritent d'engager des poursuites au pénal ?

 28   R.  C'est là un droit, une obligation revenant au procureur compétent.

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  1   C'est lui qui va diligenter des poursuites, entamer une instruction. Les

  2   autres organes ne sont pas dotés de ce droit.

  3   Q.  Mais s'agissant de l'armée de Yougoslavie, pour être plus précis, est-

  4   ce qu'un officier supérieur avait l'obligation de prendre ce genre de

  5   mesure s'il apprenait que tel ou tel acte répréhensible avait été commis

  6   par un membre de son unité ? Et quels sont les actes de procédure qu'il

  7   peut poser ?

  8   R.  Tout officier supérieur, quel que soit l'échelon auquel il commande,

  9   s'il apprend qu'un membre de son unité a commis une infraction qui mérite

 10   l'engagement de poursuites ex officio, bien, tout commandant a l'obligation

 11   et certaines obligations à remplir. Par exemple, il devra prendre les

 12   mesures pour être sûr que l'auteur présumé d'un crime, s'il est identifié,

 13   soit placé sous garde, sous détention, pour éviter qu'il ne prenne la

 14   fuite. L'officier de commandement a même le droit de l'écrouer, de le

 15   mettre sous les écrous pour veiller à ce qu'il ne puisse pas prendre la

 16   fuite.

 17   Mais pour ce qui est de l'infraction elle-même, il faut que cet officier

 18   prenne des mesures pour d'abord permettre que se fasse un constat des

 19   lieux. Il faut donc sécuriser le périmètre de lieu où s'est commis le

 20   crime. Donc il ne peut y avoir que la police scientifique où il faut

 21   assurer la conservation des éléments de preuve. Et il doit prendre d'autres

 22   mesures susceptibles de mieux éclairer les faits. Il faut enfin informer le

 23   procureur compétent des informations les plus récentes et si ce n'est pas

 24   possible, il faut en faire rapport au commandant supérieur qui, à son tour,

 25   va informer le procureur compétent et la force de police qui pourra à ce

 26   moment-là prendre les mesures nécessaires.

 27   Q.  Merci. L'état-major général de l'armée de Yougoslavie, quel genre de

 28   rapport avait-il, ou quels étaient ses rapports, entre avec le procureur

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  1   militaire et les tribunaux militaires ?

  2   R.  En vertu de la loi régissant auparavant les activités des procureurs et

  3   tribunaux militaires, donc je parle quand je dis "avant" de la loi

  4   précédant celle dont nous avons discuté. Etat donné que le procureur

  5   militaire est au service du commandement de l'armée, alors que

  6   l'administration principale de l'état-major principal s'occupait des

  7   archives et des états de service de ceux qui étaient employés dans

  8   l'appareil judiciaire militaire, il y avait un rapport fonctionnel entre le

  9   tribunal qui est le procureur militaire et l'état-major qui n'existait pas,

 10   puisque l'appareil judiciaire militaire était indépendant, que ce genre de

 11   rapport fonctionnel n'existait pas avec l'état-major, mais pas non plus

 12   avec les services administratifs, à l'exception de la question des achats,

 13   donc des aspects techniques de l'administration, de la gestion.

 14   Q.  Merci.

 15   R.  Permettez-moi d'ajouter ceci. Après l'adoption de la loi de 1995, même

 16   les achats de marchandises n'étaient pas de l'apanage de l'état-major

 17   principal. C'était le ministère de la Défense qui s'en chargeait, ce qui

 18   veut dire que l'appareil judiciaire militaire, lorsqu'il lui fallait

 19   acheter certains éléments, se tournait vers les instances chargées de la

 20   logistique au ministère de la Défense, ce qui veut dire que ce lien

 21   purement pratique avait même été coupé avec l'état-major principal.

 22   Q.  Mais vous parlez de fourniture de marchandises, d'achats de

 23   marchandises. De quoi s'agissait-il exactement ?

 24   R.  Pour que les tribunaux et procureurs militaires fonctionnent, ils ont

 25   besoin de papeterie. Ils ont besoin de matériel de bureau, de véhicules et,

 26   bien sûr, il faut payer les salaires des employés, autant d'éléments

 27   techniques qui étaient de la compétence d'autres organes qui travaillaient

 28   pour l'appareil judiciaire militaire qui n'avait pas son propre budget pour

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  1   les acheter. Ça n'aurait pas été raisonnable de donner un tel budget à

  2   l'appareil judiciaire militaire.

  3   Q.  Le chef de l'état-major général - et nous parlons là de la période qui

  4   précède la création ou l'établissement de la RFY - mais après cette

  5   création, est-ce que ce chef de l'état-major, il était habilité à engager

  6   des poursuites au nom du procureur, et dans l'affirmative, quelles

  7   conditions fallait-il remplir pour que ceci puisse se passer ?

  8   R.  S'il s'agissait d'infractions pour lesquelles les procureurs et

  9   procureurs militaires engagent automatiquement des poursuites, le procureur

 10   est d'abord avisé qu'il y a eu infraction par une plaine au pénal qui vient

 11   de la police, la police militaire ou des services de sécurité,

 12   d'inspection, du contrôle. C'est rarement qu'il va recevoir cette

 13   information de son officier supérieur.

 14   Mais si nous parlons du chef de l'état-major principal - et là nous

 15   avons le poste le plus élevé qui existe dans une armée - celui-ci n'avait

 16   pas le droit de déposer de plainte au pénal, c'étaient les échelons

 17   inférieurs qui étaient autorisés à le faire. En vertu de la loi et de la

 18   constitution dans un pays, tout citoyen a le droit de porter plainte s'il

 19   estime qu'une infraction a été commise. C'est d'ailleurs un devoir civique,

 20   et ça, c'est un droit qu'avait en tant qu'homme le chef de l'état-major

 21   principal, mais il n'y en avait pas d'autres. Ce n'était pas tout à fait

 22   exclu, mais disons qu'il intervenait peut-être lorsque l'infraction

 23   relevait de la compétence d'agences, de services spécialisés, et lorsque

 24   ces services existent dans une armée, parce qu'il s'occupe uniquement de ce

 25   genre de cas précis.

 26   Q.  Merci. Passons à un autre sujet. Parlons du droit international

 27   humanitaire. Est-ce que la RFY avait un système permettant l'application

 28   des dispositions de ce droit ? Est-ce qu'il existait un ordre juridique à

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  1   cet effet ?

  2   R.  La RFY, en vertu de sa constitution de 1992, si je ne m'abuse, en son

  3   article 16 alinéa 2, disait que tous les traités qui avaient été ratifiés

  4   conformément à la constitution du pays mais aussi aux normes

  5   internationales, plutôt ces traités étaient automatiquement intégrés dans

  6   le corpus juridique du pays et conventions de Genève. Autres traités de la

  7   RSFY, ils ont été acceptés et repris par le RFY, donc toutes les

  8   conventions régissant le droit international humanitaire.

  9   Il y avait la constitution, mais il y avait en plus le code pénal qui

 10   disait quels étaient les crimes susceptibles de sanctions dans le droit

 11   international, et on prévoyait aussi un grille [phon] de peine applicable

 12   en SFY.

 13   Q.  Vous venez de parler de la constitution, et qu'il y avait d'autres

 14   instruments juridiques en RFY qui déterminent ce genre de question ?

 15   R.  En sus de la constitution, il y avait la Loi portant Défense, qui

 16   disait notamment que tout membre de l'armée de Yougoslavie en situation de

 17   combat avait l'obligation de respecter et d'appliquer toutes les

 18   dispositions de la loi, et des lois et coutumes de la guerre pour ce qui

 19   est de la façon de traiter les blessés, les prisonniers et les civils.

 20   C'était une obligation incombant à tout membre de l'armée de Yougoslavie en

 21   situation de combat.

 22   Mais en plus, cette Loi portant Défense disait que les membres de l'armée,

 23   s'ils utilisaient leurs armes en situation de combat, devaient le faire

 24   dans le respect des règlements régissant ce genre d'utilisation. Donc ceci

 25   déterminait la façon dont ces hommes étaient utilisés contre l'ennemi en

 26   situation de combat.

 27   Q.  Merci, Mon Général. Outre ce que vous venez de mentionner, j'aimerais

 28   savoir si dans l'armée yougoslave -, et j'entends par là également l'état-

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  1   major principal - prenaient-ils des mesures pour faire en sorte que le

  2   droit international humanitaire soit effectivement respecté par les membres

  3   de l'armée yougoslave ?

  4   R.  Dans les académies militaires et sites dans les écoles militaires entre

  5   autres, on étudie la façon dont il faut appliquer le droit international

  6   humanitaire, et on aborde également toutes les questions relatives aux

  7   violations du droit international humanitaire. C'est un sujet très

  8   important qui est enseigné, et les élèves doivent passer par un système

  9   d'examen également, donc cela fait partie des cours qui sont dispensés dans

 10   ces écoles.

 11   Outre ceci, je sais qu'en 1995, d'après le protocole du ministère de

 12   la Défense établi avec le comité international de la Croix-Rouge, on a

 13   donné des séminaires aux membres de l'armée yougoslave, et ce, d'abord au

 14   niveau de l'état-major principal, dans quel cadre les instructeurs du

 15   comité international de la Croix-Rouge internationale dispensaient des

 16   cours, des séminaires, des ateliers de travail avec des dirigeants de haut

 17   niveau et avec les militaires haut gradés également, et eux, par la suite,

 18   donnaient des cours à leurs membres de l'armée. Donc il ne s'agissait pas

 19   de quelque chose qui se faisait de façon constante. Mais au cours de ces

 20   deux années en question pendant lesquelles ce programme était en vigueur,

 21   on a effectivement procédé à la formation de membres de l'armée.

 22   Je peux vous en parler puisqu'à l'époque, je donnais un cours à

 23   l'académie militaire aux recrues militaires, je leur enseignais la loi

 24   pénale.

 25   Q.  Merci, Mon Général. Je vous demanderais de bien vouloir prendre

 26   l'intercalaire 4 de votre classeur.

 27   M. ZORKO : [interprétation] Et je demanderais également que l'on affiche

 28   dans le prétoire électronique la pièce qui porte la cote 01315D. Il s'agit

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  1   d'un document de la liste 65 ter de la Défense.

  2   Q.  Nous avons le document à l'écran. J'aimerais vous demander, Mon

  3   Général, si vous reconnaissez ce document ?

  4   R.  Oui, je le reconnais. Il s'agit des règlements régissant le

  5   comportement en situation de combat rédigé par la 1ère administration de

  6   l'état-major principal de l'armée yougoslave. Il s'agissait ici, en

  7   l'occurrence, d'une version mise à jour -- il s'agit de documents donc mis

  8   à jour et consolidés d'une certaine façon, et, en fait, ce document faisait

  9   partie de l'équipement que l'on donnait au soldat au moment de sa

 10   mobilisation, et ce, soit pendant la guerre ou pendant une situation

 11   imminente de guerre.

 12   C'est une brochure que l'on dispensait à tous les soldats, qui était une

 13   brochure imprimée sur un papier à l'épreuve de l'eau. Les soldats

 14   recevaient ces brochures avec la trousse habituelle que l'on remettait aux

 15   soldats. Cette brochure portait très brièvement sur les règlements, et le

 16   soldat pouvait toujours avoir ces règlements à la portée de la main et

 17   pouvait également se familiariser avec ces règlements, et toujours, bien

 18   sûr, on pouvait consulter son officier supérieur.

 19   Nous avons également imprimé des brochures similaires chaque fois qu'il y

 20   avait des plans de mobilisation qui avaient été préparés, et donc à ce

 21   moment-là, on s'assurait que les soldats recevaient cette brochure.

 22   Seulement que cette brochure aussi était mise à jour et était quelque peu

 23   embellie d'une certaine façon, si vous voulez. Mais ceci faisait partie de

 24   la trousse dont disposait chaque soldat.

 25   Q.  Je vous remercie, Mon Général.

 26   M. ZORKO : [interprétation] Je demanderais, Monsieur le Président, que l'on

 27   verse ce document au dossier.

 28   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Monsieur Thomas.

Page 12922

  1   M. THOMAS : [interprétation] Le seul commentaire que j'aimerais faire,

  2   Monsieur le Président, c'est que nous n'avons pas encore jusqu'à

  3   maintenant, nous n'avons pas encore entendu le témoin nous dire à quel

  4   moment est-ce que ce document prenait effet.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Maître Zorko.

  6   M. ZORKO : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Q.  Mon Général, le document que nous avons examiné il y a quelques

  8   instants, c'était un document qui était en vigueur pendant quelle période ?

  9   R.  Je crois que le Procureur n'a pas suivi attentivement ce que j'ai dit,

 10   donc je vais essayer de répéter et de vous expliquer ce que je voulais

 11   dire. Il ne s'agit rien ici de nouveau. Ce n'est qu'un résumé très bref

 12   tiré des conventions de Genève et des protocoles additionnels de Genève de

 13   1949, qui portent la date de 1970, et il ne s'agit que de résumés très

 14   courts résumant les conventions de Genève, et ceci faisait partie de

 15   documents que l'on remettait à tous les soldats, c'est un document que l'on

 16   pouvait trouver dans leur trousse qu'ils avaient à la portée de leurs

 17   mains. Et donc après les séminaires qui ont eu lieu et après les cours

 18   dispensés par la Croix-Rouge internationale en 1995, en 1996 et 1997, c'est

 19   à ce moment-là que ce texte a été adapté d'une certaine façon et qu'il a

 20   été imprimé sur ce papier plastifié, papier à l'épreuve de l'eau. Car

 21   auparavant, les soldats ne disposaient pas de ces documents à l'épreuve de

 22   l'eau, plastifiés, comme ceux-là, mais ils avaient néanmoins dans leur

 23   trousse ces textes.

 24   Je me rappelle que lorsque j'ai fait mon service militaire dans les années

 25   1960 et 1970, à chaque fois que l'on nous montrait l'endroit où se trouvait

 26   l'équipement en cas de guerre, effectivement les réserves de guerre, de

 27   toute façon, se trouvaient dans le dépôt central et ces documents faisaient

 28   partie de la trousse. Ce document-ci date de 1996, et c'est à ce moment-là

Page 12923

  1   qu'il a été imprimé sur papier à l'épreuve de l'eau, sur ce papier

  2   plastifié.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur. Vous dites

  4   que ceci a toujours existé, mais ceci voudrait dire que ce vous aviez dans

  5   les années 1960, en réalité, n'aurait pas en soi des conventions de Genève

  6   additionnelles qui ont été adoptées par la suite, après 1960. Alors, vous

  7   nous dites que le document que nous sommes en train d'examiner à l'écran

  8   ici est un document qui a vu le jour en 1995, 1996 et 1997 et vous dites

  9   qu'après que le comité de la Croix-Rouge internationale ait dispensé un

 10   certain nombre de cours, on a rédigé ce document de cette façon-ci, on l'a

 11   imprimé sur papier. Mais dois-je vous comprendre de cette façon-ci, en

 12   fait, pendant la guerre, entre 1992 et 1995, ce document ne faisait pas

 13   partie de la trousse, et vous nous avez dit que vous les aviez dans les

 14   années 1960, mais dans les années 1960, les protocoles additionnels ne

 15   figuraient pas sur ce document, n'est-ce pas ? Donc en réalité, nous

 16   n'avons pas sous les yeux un document qui existait pendant la guerre entre

 17   1992 à 1995, n'est-ce pas ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais vous savez, c'est la teneur. Je

 19   parle ici de la teneur --

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, merci bien. Vous nous avez donné

 21   une explication très claire et je vous ai compris. Je comprends très bien

 22   également le contenu. Toutefois, en 1960, les protocoles additionnels qui

 23   ont été adoptés en 1979 n'y figuraient pas. Et vous dites que vous avez

 24   toujours ce document, mais après les séminaires qui avaient été tenus par

 25   la Croix-Rouge internationale en 1995, 1996 et 1997, vous aviez maintenant

 26   les protocoles additionnels. Mais ce document-ci n'a été publié ou n'est

 27   entré en vigueur, en réalité, dans la RFY qu'en 1995, 1996 et 1997. Donc ce

 28   que je vous demande c'est sur la base de l'explication que vous nous avez

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  1   donnée, doit-on comprendre que le document que nous avons sous les yeux

  2   n'existait pas pendant la période allant de 1990 à 1995 ? Nul besoin de

  3   nous expliquer ce que vous nous avez déjà expliqué. Je vous ai très bien

  4   compris. Essayez de répondre seulement à ma question, s'il vous plaît. Donc

  5   le document que nous avons sous les yeux n'existait pas entre 1992 et 1995,

  6   n'est-ce pas ? Vous pouvez répondre par l'affirmative ou la négative.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis réellement désolé, Monsieur le

  8   Président, mais vous ne m'avez pas compris non plus. Après l'adoption des

  9   protocoles additionnels de Genève, ces protocoles ont été incorporés dans

 10   un document analogue qui existait déjà et qui avait déjà été préparé pour

 11   chacun des soldats, qui figurait dans le paquetage du soldat. Alors que ce

 12   document complet comme ça, sur papier plastifié, si vous voulez aller pour

 13   lui donner une date, a été fait en 1997. Mais la teneur existait même en

 14   1992 et en 1993, mais la teneur avait une autre forme.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] D'accord. Puis-je reprendre ma

 16   question. Nonobstant ce que vous venez de nous expliquer, doit-on

 17   comprendre que ce document plastifié n'existait pas entre 1992 et 1995

 18   puisque ce document imprimé sur papier plastifié a été imprimé en 1997,

 19   puisque vous nous avez parlé d'une année en question ? Donc ce document que

 20   nous voyons ici n'est pas un document qui peut nous donner le contenu qui

 21   était disponible à tous entre 1992 et 1995, n'est-ce pas ?

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Pouvez-vous vous rapprocher du micro,

 23   s'il vous plaît. Les interprètes ne vous entendent pas.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce document concret dans ce format-ci est un

 25   document qui provient de 1997 - si vous voulez, on peut parler de 1997,

 26   ceci n'est pas contesté - dans ce format-ci et imprimé de cette façon-ci,

 27   comme vous le voyez, est émis par l'état-major principal de l'armée

 28   Yougoslave. Mais avant cela, il y avait un document qui était analogue et

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  1   qui avait une teneur très, très semblable à celle-ci.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Très bien. Je crois déjà avoir posé ma

  3   question. Monsieur Thomas, vous aviez ne objection. Est-ce que vous

  4   maintenez votre objection ?

  5   M. THOMAS : [interprétation] Les réponses du témoin ont répondu d'une

  6   certaine façon à mon objection. Merci.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Zorko.

  8   M. ZORKO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais maintenir

  9   mon objection, à savoir que je vais demander que ce document soit versé au

 10   dossier.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, le document est versé au dossier.

 12   Pourrait-on lui attribuer une cote.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document

 14   obtiendra la cote D422. Merci.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 16   M. ZORKO : [interprétation]

 17   Q.  Mon Général, nous allons maintenant aborder un autre sujet, avec votre

 18   permission. Je voudrais pour ceci vous demander de nous expliquer d'abord

 19   ce que c'est la discipline militaire. Donnez-nous donner la définition de

 20   la discipline militaire.

 21   R.  La discipline militaire est régie par des dispositions de la Loi de

 22   l'armée, principalement la discipline militaire, et je vais essayer de vous

 23   expliquer de quelle façon elle est érigée. Donc lorsqu'on parle de

 24   discipline militaire, on entend qu'il faut respecter les obligations

 25   militaires et d'autres obligations de l'armée yougoslave en respectant les

 26   normes morales et les normes acceptées de façon générale. Voici, c'est pour

 27   vous donner très brièvement la définition.

 28   Q.  Merci bien, Mon Général. Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, s'il

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  1   existe des violations à la discipline militaire et de quelle façon les

  2   normes gèrent cette violation de discipline militaire ?

  3   R.  L'armée yougoslave régissait par les normes et par les règlements la

  4   discipline militaire, et c'est ainsi que l'on pouvait définir ce qu'une

  5   violation à la discipline militaire est exactement. Et c'est de cette

  6   façon-là que l'on a proscrit deux types de violations qui, juridiquement,

  7   sont qualifiées comme étant une violation disciplinaire, une erreur

  8   disciplinaire.

  9   Lorsqu'on parle d'une erreur militaire, on comprend -- en fait, il

 10   s'agit d'une infraction militaire moins sérieuse, alors que lorsqu'on parle

 11   d'infraction militaire, il s'agit d'une violation majeure à la discipline

 12   militaire. Donc il y a ces deux types de violations qui existent, donc

 13   mineures et majeures. S'agissant des infractions majeures, elles sont

 14   stipulées par la loi comme étant des crimes, et c'est le procureur qui

 15   décide de la gravité de l'infraction ou de la violation.

 16   Q.  Dans votre réponse, vous avez mentionné un acte criminel. J'aimerais

 17   savoir, Mon Général, si nous avons une infraction qui est définie comme

 18   étant une violation disciplinaire, était-il possible de diligenter une

 19   enquête disciplinaire en même temps qu'une enquête au pénal concernant une

 20   personne qui ait commis une infraction ou une violation de la discipline

 21   militaire ?

 22   R.  Nous pouvons parler ici de deux situations distinctes, mais je vais

 23   d'abord essayer de répondre à la question que vous m'avez posée. Alors,

 24   nous avons d'abord l'exception : pour les mêmes actions de la personne

 25   ayant violé la discipline militaire, si, en même temps, la personne a

 26   commis également un acte au pénal, un acte criminel, à ce moment-là, pour

 27   ces mêmes violations, on peut diligenter une procédure militaire menée par

 28   le procureur ou le tribunal, et de l'organe compétent de l'armée peut

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  1   également examiner le tout pour voir s'il s'agit d'une infraction

  2   militaire, et à ce moment-là, on peut mener deux enquêtes tout à fait

  3   distinctes et trouver qu'une personne est coupable d'avoir commis une

  4   infraction à la discipline militaire, et ce, à côté de l'infraction contre

  5   la loi.

  6   Et alors il s'agit d'intérêts particuliers de la direction militaire

  7   ? Et c'est évalué au cas par cas, bien sûr. C'est le juge compétent qui

  8   décide de ce qui en sera quant à la violation commise.

  9   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Microphone, s'il vous plaît, Monsieur

 10   Zorko.

 11   M. ZORKO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Q.  Monsieur, vous avez parlé d'une exception à la règle. Vous avez

 13   également parlé d'intérêts militaires spécifiques. Dites-nous, de quelle

 14   façon est-ce que l'officier supérieur qui est chargé de diligenter une

 15   enquête, de quelle façon détermine-t-il si un intérêt particulier existe

 16   pour qu'un membre de l'armée yougoslave soit poursuivi d'avoir commis une

 17   violation à la discipline militaire ?

 18   R.  Puisqu'il s'agit d'une évaluation qui doit être faite par l'officier

 19   supérieur, puisque ceci doit être évalué par ce dernier, à ce moment-là, il

 20   doit faire une conclusion pratique, il doit déterminer qu'il s'agit

 21   effectivement de quelque chose qui est dans l'intérêt du service militaire,

 22   donc il faut qu'il y ait un intérêt particulier, ce que l'on peut

 23   comprendre de tout ceci c'est que -- je devrais vous donner un exemple. Je

 24   vous donne un exemple pratique. La plupart des officiers supérieurs, même

 25   s'il s'agit d'exceptions, et en travaillant à l'armée depuis un très grand

 26   nombre d'années, je sais qu'effectivement il y avait des exceptions, elles

 27   étaient rares, mais il y en avait. Et dans ces cas-là, l'officier supérieur

 28   devait être celui qui prenait la décision.

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  1   L'officier supérieur doit d'abord consulter le procureur militaire

  2   qui, à ce moment-là, diligente une procédure, et après s'être concerté avec

  3   ce dernier, s'il estime qu'il est nécessaire de se livrer à une procédure

  4   pénale ou s'il estime que le tribunal militaire ne peut pas être saisi de

  5   cette affaire ou si le tribunal ne peut lui donner une peine de plus deux

  6   ans de prison, mais en deçà de cela, et si une peine de plus de deux ans

  7   devrait lui être accordée à cette personne ayant commis cette violation, à

  8   ce moment-là, le soldat n'a plus sa place dans l'armée et est licencié.

  9   Donc s'il est estimé que la personne ayant commis une violation

 10   militaire ne doit plus être membre de l'armée, on prend une mesure

 11   disciplinaire, et l'une des peines qui est disponible, qui est mise à la

 12   disposition des tribunaux militaires était, en fait, le licenciement ou le

 13   fait de dégrader un soldat.

 14   Donc ce sont des cas qui pouvaient faire en sorte qu'un officier

 15   supérieur mène une procédure parallèle ou des procédures parallèles. Donc

 16   si une offense, une infraction majeure a été commise au niveau pénal, s'il

 17   est tout à fait clair qu'une peine importante de plus de deux ans serait

 18   donnée, il est important de renvoyer cette personne, ou il était possible

 19   de licencier, il était nécessaire de licencier cette personne de l'armée.

 20   Q.  Merci, Mon Général. J'aimerais préciser une chose juste pour être tout

 21   à fait certain que l'on a bien consigné le tout au compte rendu d'audience.

 22   Vous avez dit que ce serait contre-productif. Qu'est-ce que vous avez dit

 23   exactement ?

 24   R.  Non, j'ai dit que cela serait contre-productif dans le sens où cela

 25   impliquerait un travail qui serait futile et qu'il n'aurait pas en réalité

 26   un effet utile, puisque l'objectif peut être atteint d'une façon plus

 27   appropriée.

 28   Q.  Mon Général, si je vous ai bien compris, vous avez dit que l'objectif

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  1   pouvait être atteint d'une façon différente. Alors dites-moi ceci, est-ce

  2   qu'il y a primauté lorsqu'on parle de deux types de procédures afin de

  3   pouvoir établir la responsabilité de quelqu'un, lorsqu'il s'agit de décider

  4   si une personne ait commis une infraction au pénal, une infraction à la

  5   discipline militaire ?

  6   R.  Le procureur diligente une enquête pour laquelle il est compétent de

  7   façon tout à fait indépendante et il ne peut pas laisser passer quelque

  8   chose qui serait une violation grave, une infraction grave à la discipline

  9   militaire. Donc il ne veut pas laisser ceci de côté, il devra absolument

 10   diligenter une enquête. Le chef militaire, ou l'officier supérieur

 11   militaire est celui qui est censé voir si le procureur militaire, enfin,

 12   quelle sera la procédure militaire qu'entreprendra ou diligentera le

 13   procureur si la peine est supérieure à deux ans, donc pour certains crimes

 14   pour lesquels il s'avère qu'il n'est pas digne qu'un membre de l'armée

 15   reste membre de l'armée, donc c'est ceci qui est tenu en compte.

 16   Donc on réfléchit à ceci au cas par cas, et dans ce cas-ci l'acte au

 17   pénal a une priorité, bien sûr, indépendant du fait d'un autre acte pénal

 18   pour lequel l'officier supérieur estime qu'une personne ne devrait plus

 19   servir dans l'armée et doit être licencié. A ce moment-là, une personne est

 20   renvoyée au tribunal militaire qui, à ce moment-là, le poursuit pour une

 21   infraction grave, une violation grave. Mais ceci peut également avoir lieu

 22   même s'il s'agit d'infraction mineure, c'est encore une fois le procureur

 23   qui doit décider s'il rejette l'acte d'accusation ou s'il accepte. C'est le

 24   tribunal militaire relatif à la déontologie militaire qui doit prendre les

 25   décisions car il doit décider indépendamment.

 26   Q.  Général, qu'en est-il en matière de responsabilité disciplinaire, je

 27   pense, par exemple, à un militaire de la JNA qui est dégagé de ses

 28   fonctions ? Là je vous parle de compétences pour pouvoir lancer une

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  1   procédure disciplinaire. Est-ce qu'il s'agira du même organe qui s'en

  2   chargera ou est-ce qu'à ce moment-là il y a un déplacement de compétence,

  3   un glissement de compétence ? Excusez-moi, excusez-moi. Dans un premier

  4   temps, dites-nous, qui sont les organes compétents qui peuvent lancer la

  5   procédure disciplinaire avant de répondre à la question que je viens de

  6   vous poser ?

  7   R.  La décision relative au lancement d'une procédure disciplinaire ou

  8   d'une enquête disciplinaire en cas d'infraction, de manquement à la

  9   discipline, est une décision qui revient à un officier du commandement,

 10   voire quelqu'un de supérieur au niveau des grades. Les officiers de grade

 11   inférieur ne sont absolument pas autorisés à le faire. Alors, la décision

 12   de faire en sorte qu'un soldat -- qu'un militaire donc doive répondre

 13   devant un tribunal militaire est une décision qui relève de la compétence

 14   des officiers supérieurs, de ses officiers supérieurs directs, puis après,

 15   bon, vous avez l'enquête. C'est la première phase. Ensuite, vous avez la

 16   phase suivante au cours de laquelle la décision sera prise de faire en

 17   sorte que la personne réponde devant un tribunal disciplinaire, et ce n'est

 18   qu'après que le procureur disciplinaire peut véritablement prononcer une

 19   accusation. Donc nous avons une procédure qui est très, très

 20   méticuleusement prévue pour ces tribunaux.

 21   Q.  Merci. Alors, pour en revenir à ma première question, vous avez demandé

 22   ce qu'il en était des personnes contre lesquelles une procédure

 23   disciplinaire a été diligentée et qui se sont vues dégagées de leurs

 24   responsabilités, qui ont été démis de leurs fonctions donc ?

 25   R.  Alors dans ce cas, si une procédure disciplinaire est encore en

 26   souffrance, à savoir si la personne est toujours et encore militaire, à

 27   partir du moment où il est démit de ses fonctions, la procédure se termine

 28   également, parce que la procédure, elle ne peut être diligentée que tant

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  1   que l'auteur de l'infraction est considéré comme un militaire de carrière.

  2   A partir du moment où il est relevé de ses fonctions, la procédure est

  3   terminée également puisqu'il ne peut plus être poursuivi, ce qui semble

  4   tout à fait naturel et logique.

  5   Q.  Général, est-ce que la loi prévoyait qu'un organe militaire

  6   disciplinaire de la VJ se charge d'une procédure disciplinaire en cas de

  7   manquement à la discipline militaire, manquement du ressort d'une personne

  8   qui faisait partie de l'armée de la Republika Srpska ou de l'armée serbe de

  9   la Krajina ?

 10   R.  Alors, pour prendre en compte pour qu'il y ait responsabilité

 11   disciplinaire d'un militaire, il faut que ce soit son officier supérieur

 12   qui prenne cela en considération, ce qui signifie qu'aucun officier de la

 13   VJ n'avait l'autorité pour ce faire. Il ne pouvait pas, par exemple,

 14   décider qu'il y avait infraction à la discipline militaire pour des membres

 15   de l'armée de la Republika Srpska ou de l'armée serbe de la Krajina,

 16   lorsque la personne, en fait, était militaire dans ces deux armées.

 17   Q.  Général, est-ce que vous savez que lors de la période qui a suivi la

 18   désintégration de la RSFY, il y avait un système judiciaire militaire en

 19   Republika Srpska et en République de la Krajina serbe ?

 20   R.  Je sais qu'à la fois au sein de la VRS ainsi que dans l'armée de la

 21   République serbe de Krajina, il y avait un régime judiciaire militaire, un

 22   système judiciaire militaire. D'ailleurs, je connaissais personnellement

 23   certains juges de ce tribunal, et je dois dire que j'ai eu avec certains

 24   d'entre eux des contacts informels pendant donc leurs mandats au sein de

 25   leurs tribunaux respectifs.

 26   Q.  Je vous remercie, Général. Est-ce que vous pourriez nous dire quel

 27   était le type de lien qui existait entre le système judiciaire militaire en

 28   Republika Srpska et en République serbe de Krajina, et celui qui existait

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  1   en RFY ?

  2   R.  Les tribunaux de l'armée yougoslave n'avaient pas de relation

  3   fonctionnelle avec les tribunaux que vous venez de mentionner. Il y a une

  4   minute de cela, je vous ai dit que je connaissais personnellement certaines

  5   personnes. Je les connaissais d'avant, parce qu'il y avait très, très peu

  6   de personnes qui travaillaient dans le système judiciaire militaire. C'est

  7   des personnes qui étaient restées là, mais il s'agissait, en fait, de

  8   contacts personnels que j'avais établis avec ces personnes du domaine du

  9   privé, et de temps à autre je les consultais à propos de certaines

 10   questions professionnelles. C'est tout.

 11   Q.  Général, est-ce que vous pourriez, je vous prie, prendre le document de

 12   l'intercalaire 5 de votre classeur.

 13   M. ZORKO : [interprétation] Je souhaiterais que le document D106 soit

 14   affiché dans le prétoire électronique.

 15   Q.  Général, de quel document s'agit-il ?

 16   R.  D'après ce que je vois du titre du document, il s'agit de consignes

 17   permettant de déterminer les critères de poursuite pénales, puis vous avez

 18   au-dessus l'état-major des forces armées de la Republika Srpska, puis juste

 19   en dessous bureau du Procureur militaire à l'état-major principal des

 20   forces armées. Donc il s'agit de principes directeurs, de consignes, de

 21   directives, qui, en fait, sont présentés de façon très professionnelle et

 22   de façon très experte d'ailleurs, parce que j'ai eu la possibilité de les

 23   parcourir pendant la séance de récolement, et je vous dirais qu'il ne

 24   s'agit pas d'un document qui existait à l'époque. C'est une approche tout à

 25   fait novatrice, parce que ce type de principe directeur ou de directive

 26   n'existait pas dans l'armée yougoslave, qu'il s'agisse d'ailleurs de normes

 27   ou qu'il s'agisse de données factuelles, mais étant donné que j'ai

 28   travaillé comme procureur militaire à Sarajevo, je sais que ce type de

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  1   principe directeur existait et permettait de régir le travail du bureau du

  2   procureur militaire et était émis par le commandant en chef à l'époque, à

  3   savoir Josif Broz Tito, qui avait également publié un document semblable

  4   pour les critères ou les principes directeurs destinés aux procureurs

  5   militaires. Mais là je dois dire qu'il s'agissait de la zone de

  6   responsabilité prévue par d'autres règlements, mais je suppose que

  7   quelqu'un, ou que certains dans l'état-major principal de la VRS, ont dû

  8   tomber sur ces principes directeurs, parce qu'il y avait quand même une

  9   partie des archives du procureur militaire qui était restée à Sarajevo, et

 10   donc ils utilisaient les anciennes pour rédiger les nouvelles directives,

 11   ce qui me semble être tout à fait logique.

 12   D'après ces principes directeurs, le Procureur est, comme le diraient les

 13   hommes politiques, encouragés, vivement encouragés à au pénal tous les

 14   membres de l'armée qui ont commis certains crimes, notamment les crimes à

 15   l'encontre du droit humanitaire international. Donc c'est une façon de

 16   donner carte blanche au procureur qui, ainsi, comprend qu'aucun obstacle ne

 17   sera mis sur sa route pour qu'il s'acquitte de ses fonctions.

 18   Q.  Je vous remercie, Général, car vous avez déjà répondu à un certain

 19   nombre de questions que je me proposais de vous poser à propos de ce

 20   document.

 21   M. ZORKO : [interprétation] Est-ce que nous pourrions, je vous prie,

 22   étudier maintenant un autre document. Le document de la liste 65 ter,

 23   document de la Défense, liste 65 ter de la Défense 00001D.

 24   Q.  Général, je pense que vous devriez trouver ce document, bon, le

 25   document est maintenant affiché à l'écran, mais je pense que vous devriez

 26   également l'avoir dans votre classeur, également. Je pense qu'il s'agit de

 27   l'intercalaire 6.

 28   R.  Oui, c'est exact.

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  1   Q.  Général, il s'agit d'un ordre donné par le commandant du Corps de

  2   Sarajevo-Romanija et j'aimerais vous demander d'avoir l'amabilité de nous

  3   fournir quelques observations brèves à propos de ce document. Ou plutôt,

  4   pour procéder de façon plus efficace, j'aimerais attirer votre attention

  5   sur un passage précis de ce document, à savoir le passage où il est

  6   question du capitaine qui fait l'objet d'un jugement disciplinaire et qui

  7   est condamné à une peine de prison, d'emprisonnement.

  8   R.  Oui, je comprends ce que vous me demandez. Il s'agit effectivement d'un

  9   ordre qui a été donné par le commandant du Corps de Sarajevo-Romanija,

 10   conformément à l'article 79 de la Loi relative à l'armée de la Republika

 11   Srpska. Et le capitaine en question est condamné à une peine de prison. Il

 12   s'agit d'une mesure disciplinaire, une peine de prison de 20 jours. Et cela

 13   indique que cette loi dispose qu'un officier peut condamner à la prison un

 14   soldat en cas de manquement à la discipline, ce qui n'était pas le cas

 15   auparavant, parce que conformément aux principes constitutionnels

 16   fondamentaux, il s'agissait toujours d'un tribunal disciplinaire ou d'un

 17   tribunal classique qui pouvait prononcer une peine d'emprisonnement contre

 18   quelqu'un. Alors que là, nous voyons que cela est considéré comme un droit

 19   exclusif d'une personne, d'un officier, et je dirais, en fait, que cela va

 20   à l'encontre de la constitution. Je suppose que leur constitution prévoyait

 21   ce type de procédure, mais si tel n'est pas le cas, cela a dû être fait

 22   pour des raisons d'ordre pratique. Parce qu'à l'époque, l'armée participait

 23   à des opérations de combat, parce que cette décision qui a été prise par un

 24   officier qui consistait à emprisonner quelqu'un s'écartait, en fait, du

 25   principe de base qui était que les personnes pouvaient seulement être

 26   considérées coupables et condamnées à une peine de prison par un tribunal.

 27   Donc là, vous avez le droit discrétionnaire d'une personne qui est pris en

 28   considération et cela montre donc la différence entre les normes qui sont

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  1   utilisées ici et les normes applicables conformément à la législation

  2   relative à la VJ.

  3   Q.  Général, mais si je vous ai bien compris, une mesure disciplinaire, en

  4   fait, n'était pas une mesure disciplinaire, c'était là -- il s'agit d'une

  5   punition, d'une sanction. Donc ce type de punition n'était pas prévu pour

  6   des infractions disciplinaires commises par les membres de l'armée de la

  7   Yougoslavie. Mais alors là, est-ce que vous pourriez nous expliquer la

  8   différence ?

  9   R.  Je vous ai déjà indiqué que conformément à la Loi régissant l'armée de

 10   la Yougoslavie, les prisons de peine allant jusqu'à 20 jours pouvaient être

 11   données, mais cela, en fait, devait être fait par un tribunal à discipline

 12   militaire. Mais ça c'est la peine de prison maximum qui pouvait être donnée

 13   par les tribunaux militaires disciplinaires. Mais un officier militaire ne

 14   pouvait pas recevoir une peine de détention seule. Le tribunal militaire

 15   disciplinaire pouvait le faire. Et c'est là, en fait, que réside la

 16   différence principale et importante.

 17   Q.  Merci, Général.

 18   M. ZORKO : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier de

 19   ce document pour qu'une cote puisse être attribuée.

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Thomas.

 21   M. THOMAS : [interprétation] Avant de le faire, j'aimerais que nous

 22   affichions le bas de la version anglaise du document, si vous n'y voyez pas

 23   d'inconvénient. Est-ce que nous pourrions peut-être obtenir une petite

 24   précision: qui a signé le document.

 25   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, Maître Zorko.

 26   M. ZORKO : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président.

 27   Q.  Général, est-ce que vous reconnaissez la signature ? Qui a signé ce

 28   document ?

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  1   R.  Ecoutez, il est écrit commandant général de division Dragutin

  2   Milosevic. C'était le commandant du Corps de Sarajevo-Romanija. Donc il est

  3   plus que probable que cet officier était habilité de façon tout à fait

  4   légale à envisager ce genre de peine de prison.

  5   M. ZORKO : [interprétation] Je remarque que dans la traduction anglaise, il

  6   est question de Dragutin Milosevic alors que dans la version B/C/S, nous

  7   avons Dragomir. Donc mon estimé confrère a eu tout à fait raison de poser

  8   la question, parce qu'il y a une différence au niveau des deux prénoms

  9   entre eux donc la version B/C/S et la version anglaise. Il y a une erreur

 10   qui a été commise dans la version anglaise. Il ne s'agit pas de Dragutin.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Maître Zorko.

 12   Monsieur Thomas, est-ce que cela vous convient ?

 13   M. THOMAS : [interprétation] Oui. Maintenant que cette précision a été

 14   apportée, le document peut tout à fait être versé au dossier.

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aimerais avoir une cote.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D423.

 17   M. ZORKO : [interprétation]

 18   Q.  Général, est-ce que vous pourriez, je vous prie, prendre le document 65

 19   ter de la Défense qui se trouve dans votre classeur à l'intercalaire 8 ?

 20   M. ZORKO : [interprétation] Et je demanderais l'affichage du document

 21   00013D.

 22   Q.  Général, est-ce que vous voyez ce document ?

 23   R.  Oui, oui, je le vois.

 24   Q.  Alors, qu'est-ce qui fait l'objet de ce document ? Quel est l'objectif

 25   du document ?

 26   R.  Bien, cela est indiqué dans l'en-tête du document. Il est indiqué

 27   conformément amendement 3 de la constitution de la République serbe,

 28   ensuite vous avez la gazette officielle du peuple serbe en Bosnie-

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  1   Herzégovine, numéro 6-92, et conformément à l'article 1 de la Loi relative

  2   aux amendements au droit constitutionnel portant sur la mise en application

  3   de la constitution de la république serbe, gazette officielle du peuple

  4   serbe en Bosnie-Herzégovine, numéro 6-92, la présidence de la République

  5   serbe émet le décret suivant portant sur la nomination de juges

  6   professionnels, de procureurs militaires et d'adjoints au procureur

  7   militaire. Au premier paragraphe, les personnes suivantes sont nommées au

  8   tribunal militaire suprême de Sarajevo : Vidoje Ijacic, juge auprès du

  9   tribunal militaire de Sarajevo; Damjan Kaurinovic, juge; Delimir [phon]

 10   Jakic, juge auprès du tribunal militaire à Bijeljina; Ljubomir Kitic, juge

 11   auprès du tribunal militaire à Bileca.

 12   Q.  Général, excusez-moi, je vais vous interrompre. Ce n'est pas la peine

 13   de nous donner lecture de tous les noms. Mais je souhaitais tout simplement

 14   vous poser une question : alors, nous voyons d'après ce document qu'il n'y

 15   a qu'une personne qui a été nommée au tribunal militaire suprême de

 16   Sarajevo, n'est-ce pas; est-ce que c'est exact ?

 17   R.  Oui, c'est exact. Mais il s'agit probablement d'un amendement. Il y

 18   avait probablement d'autres juges déjà nommés auprès de ce tribunal, mais

 19   ce juge est nommé en plus des autres juges, ce qui signifie que -- pour le

 20   tribunal puisse avoir le nombre exact de juges, puis vous avez ensuite les

 21   juges professionnels, les procureurs militaires et les adjoints aux

 22   procureurs militaires. Ils sont tous nommés sur décret de la présidence de

 23   la république serbe et c'est ainsi d'ailleurs, du point de vue légal, c'est

 24   ainsi que la procédure devait être suivie et c'était adapté sur le système

 25   de la RSFY en matière de nomination des juges et procureurs. Vous voyez

 26   qu'ils ont établi leur propre système juridique et judiciaire, mais ils se

 27   sont fondés pour ce faire sur les anciennes législations de la RSFY parce

 28   que tout fonctionnait dans le cadre de ce système particulier.

Page 12939

  1   Q.  Je vous remercie, Général.

  2   M. ZORKO : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier de

  3   ce document, je vous prie.

  4   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce document sera versé au dossier.

  5   Est-ce qu'une cote peut être attribuée au document.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document D424.

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Greffier

  8   d'audience.

  9   Maître Zorko, je vous en prie.

 10   M. ZORKO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Q.  Prenez le document suivant de votre classeur, Monsieur.

 12   M. ZORKO : [interprétation] Et je souhaiterais demander l'affichage du

 13   document 00014D.

 14   Q.  Général, est-ce que vous pourriez nous dire brièvement quel est

 15   l'objectif du document, et je souhaiterais attirer votre attention sur

 16   l'exposé des motifs qui se trouve dans ce document.

 17   R.  Puisque je dois être concis, je vous dirais que nous voyons dans un

 18   premier temps qu'il s'agit d'une décision qui fut prise par les autorités

 19   du ministère de la Défense de l'armée de la Republika Srpska, et en vertu

 20   de cette décision un certain nombre de personnes entrent dans le service.

 21   Ce sont des personnes qui ont été nommées par décret. Il y a un moment là,

 22   nous avions vu la nomination des juges, des procureurs et des adjoints au

 23   procureur. Vous voyez qu'il est indiqué en bas que les tribunaux militaires

 24   ont été établis et que les personnes suivantes sont nommées. Il s'agissait

 25   tous de juristes, d'avocats qui, je suppose, avaient réussi leur examen du

 26   barreau et qui avaient le grade d'officiers de réserve, ce qui nous permet

 27   de comprendre qu'ils ont respecté les dispositions juridiques précédentes

 28   de la RSFY, parce que pour les juges, les procureurs et les adjoints aux

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  1   procureurs militaires, ne pouvaient être nommées que des personnes qui

  2   avaient réussi leur diplôme du barreau et qui avaient un grade. Parce que

  3   si vous n'aviez pas de grade, vous ne pouviez pas être juge. Donc là, je

  4   vois que toutes ces personnes sont des officiers de réserve, parce que

  5   lorsqu'ils ont fait leur service militaire, ils ont suivi les cours de

  6   l'école militaire pour les officiers de réserve, et donc c'est ainsi qu'ils

  7   ont obtenu leur grade et ils sont maintenant nommés à la fonction de juge.

  8   Si nous prenons leur date de naissance, nous pouvons en conclure que c'est

  9   des personnes qui avaient toutes travaillé dans les tribunaux classiques de

 10   Bosnie-Herzégovine en tant que juges ou en tant que procureurs. Et cela

 11   nous permet de conclure qu'au vu de ces conditions, ils ont fait en sorte

 12   que non seulement des personnes compétentes ayant les diplômes requis

 13   pouvaient êtes nommées à ces fonctions.

 14   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous pourriez consulter le premier

 15   paragraphe de l'exposé des motifs.

 16   M. ZORKO : [interprétation] Page suivante pour la version anglaise, je vous

 17   prie.

 18   Q.  Et j'aimerais que vous nous livriez vos observations à propos de ce

 19   paragraphe.

 20   R.  Là, vous voyez qu'il est à nouveau dit qu'il s'agit de la décision de

 21   la présidence du 31 mai 1992, donc dès cette date une décision avait été

 22   prise pour mettre sur pied des tribunaux militaires. Donc dès le 31 mai

 23   1992, cela avait été fait, c'est la date que nous voyons sur ce document.

 24   Le tribunal militaire de Sarajevo a cessé de fonctionner à la mi-mai 1995.

 25   Moi, je suis parti de Sarajevo et je suis allé à Belgrade le 28 mai 1992,

 26   donc trois jours après la création des tribunaux militaires de l'armée de

 27   la Republika Srpska. Bon, je me suis permis de vous livrer cette digression

 28   pour vous montrer qu'ils ont agi avec célérité.

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  1   Q.  Je vous remercie, Général.

  2   M. ZORKO : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je pense que le

  3   moment est venu de faire la pause. Mais avant de faire la pause, j'aimerais

  4   quand même demander le versement au dossier de ce document pour qu'une cote

  5   lui soit attribuée.

  6   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ce document sera versé au dossier.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D425.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie. Et vous avez tout à

  9   fait raison, Maître Zorko, nous allons faire la pause et nous reviendrons à

 10   12 heures 30. L'audience est levée.

 11   --- L'audience est suspendue à 11 heures 59.

 12   --- L'audience est reprise à 12 heures 29.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Veuillez poursuivre, Maître Zorko.

 14   M. ZORKO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   J'aimerais que soit affiché au prétoire électronique le document de la

 16   liste 65 ter de la Défense 00052D.

 17   Q.  Vous allez bientôt voir ce document, mais vous l'avez déjà dans votre

 18   classeur. Nous le voyons, c'est un document qui vient du commandement du

 19   SRK, du Corps Sarajevo-Romanija. Vous voyez ici "tribunal d'exception

 20   extraordinaire," ou "tribunal militaire d'exception" en anglais, et vous

 21   allez trouver ces termes à l'article 9. De quoi s'agit-il ? Quand on parle

 22   de tribunal militaire d'exception, extraordinaire ou spécial, de quoi

 23   parle-t-on ?

 24   R.  Je vois l'intitulé :

 25   "Etant donné que le président de la Republika Srpska a déclaré l'état

 26   de guerre dans la zone de responsabilité du RSK, j'ordonne notamment que

 27   toutes les unités doivent établir ce tribunal."

 28   Mais ces termes sont anciens ou, disons, que c'est un concept qui est

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  1   rebaptisé. Sans doute puisqu'on avait déclaré l'état de guerre, il était

  2   prévu que soient instaurés des tribunaux militaires spéciaux ou

  3   d'exception. Ce document nous montre qu'un officier général est investi du

  4   pouvoir d'établir ce genre d'instance militaire pour que cette instance

  5   soit saisie de questions précises. Ici, c'est peu de temps après la

  6   Deuxième Guerre mondiale et c'est jusque dans les années 1950 qu'il était

  7   possible d'avoir des cours martiales, et des procédures sommaires étaient

  8   appliquées. Mais cette procédure n'a plus jamais été utilisée après dans la

  9   RFSY. On le voit ici, il est dit, Voilà un tribunal spécial qui sera établi

 10   à titre ad hoc par le commandant aux fins concernées dans son unité.

 11   Effectivement, la procédure peut être accélérée. On a à l'étranger aussi ce

 12   genre de concept du tribunal militaire spécial. Par exemple, dans l'armée

 13   américaine, si vous avez un commandant de tel ou tel grade qui peut établir

 14   ce genre d'instance militaire, qu'il ne sera, bien sûr, pas composé de

 15   juges de métier ni de juristes, mais plutôt de membres d'une unité donnée.

 16   C'est une institution qui n'avait pas beaucoup de sens, qui était prévue

 17   dans le système militaire. Mais je ne pense pas qu'elle peut avoir une

 18   véritable finalité, si ce n'est qu'elle permet au commandant de trancher

 19   sur-le-champ telles ou telles questions auxquelles il doit faire face.

 20   Q.  Merci.

 21   M. ZORKO : [interprétation] Je demande le versement du document, Monsieur

 22   le Président, Madame, Monsieur les Juges.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est versé. Une cote, s'il vous

 24   plaît, Monsieur le Greffier.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] D426.

 26   M. ZORKO : [interprétation] Je propose que soit affiché au prétoire

 27   électronique le document 00737D.

 28   Q.  Est-ce que vous voyez le document, Mon Général ?

Page 12943

  1   R.  Donnez-moi l'intercalaire dans le classeur, s'il vous plaît.

  2   Q.  Je pense que c'est à l'onglet 9.

  3   R.  Non, je ne le trouve pas.

  4   Q.  Très bien.

  5   R.  Attendez. Ce n'est pas cet intercalaire-là. C'est à l'intercalaire 13.

  6   Q.  Oui, effectivement. Je peux vous demander un commentaire rapide de ce

  7   texte. Vous avez le mot "j'ordonne," mais regardons de plus près le point

  8   1, si vous le voulez bien.

  9   R.  Je vois ici que c'est un document de l'état-major principal donné le 15

 10   août 1995, c'est l'état-major principal de la VRS. J'ordonne que deux

 11   avocats doivent être mobilisés pour chaque unité à l'échelon du régiment de

 12   la brigade en passant par les services municipaux du ministère de la

 13   Défense afin qu'ils soient affectés aux organes chargés des questions

 14   religieuses, morales et juridiques, et que :

 15   "Ces avocats ou ces juristes devront entamer toutes les procédures

 16   nécessaires pour les poursuites prévues par des commandants de régiments de

 17   brigades pour toutes les personnes présumées responsables."

 18   Nous voyons donc ici que le commandant de l'état-major principal a, après

 19   tout, décidé de recruter des juristes qui seront chargés d'apporter une

 20   assistance juridique dans l'activité des tribunaux extraordinaires; pour le

 21   dire autrement, pour aider ceux qui seront affectés à ces tribunaux pour

 22   qu'ils leur donnent leur savoir-faire juridique, et c'est quelque chose de

 23   souhaitable.

 24   Q.  [hors micro]

 25   L'INTERPRÈTE : Me Zorko n'a pas branché son micro.

 26   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 27   M. ZORKO : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Merci.

 28   Q.  Nous n'allons pas examiner davantage ce document --

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  1   M. ZORKO : [interprétation] -- dont je demande le versement.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est versé au dossier. Une cote,

  3   Monsieur le Greffier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D427. Merci.

  5   M. ZORKO : [interprétation]

  6   Q.  Regardez maintenant le document suivant, il se trouve à l'intercalaire

  7   14 dans votre classeur.

  8   M. ZORKO : [interprétation] Dans le prétoire électronique, c'est le

  9   document de la Défense 65 ter 00036D.

 10   Q.  Mais je vais vous demander d'examiner ce document et de le commenter.

 11   Dites-nous d'abord ce que ce document représente.

 12   R.  Ici, il s'agit d'une plainte au pénal, c'est-à-dire que c'est un

 13   document qui est à l'origine de la mise en branle d'une procédure pénale.

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [aucune interprétation]

 16   M. THOMAS : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai rien à l'écran. Oui,

 17   maintenant ça y est. C'est bon.

 18   M. ZORKO : [interprétation] Oui, c'est ce que je voulais dire.

 19   Q.  Attendez de voir que le document est affiché à l'écran de sorte que

 20   tout le monde peut suivre ce que vous avez à dire. Maintenant, nous avons

 21   le document à l'écran, Mon Général.

 22   R.  La plainte au pénal déposée devant le parquet militaire de Bijeljina en

 23   Republika Srpska, plainte déposée contre Vaso Vujicic, lieutenant du poste

 24   militaire 7572 de Sarajevo, ou plutôt, Han Pijesak. Sur le plan

 25   professionnel, ce document est intéressant, parce que le colonel Velibor

 26   Jeremic invoque l'article 148, alinéa 1 du code de procédure pénale à juste

 27   titre, car c'est là le code de procédure pénale qui a été repris de celui

 28   qu'il y avait en RSFY et c'est bien l'article qu'il faut appliquer ici.

Page 12945

  1   Autre chose intéressante, il invoque aussi l'article 127 du code de la

  2   Republika Srpska, lequel était, en fait, un acte de ce type subordonné --

  3   qui était venu de la RSFY et qui avait reçu une autre appellation, c'était

  4   le code pénal de la Republika Srpska, code que peut utiliser le procureur

  5   de Drina suite à une infraction pénale où sont remplies toutes les

  6   conditions nécessaires. Ce code donne au procureur compétence pour engager

  7   des poursuites pénales. C'est tout ce que je puis dire par rapport à ce

  8   document.

  9   Q.  Merci.

 10   M. ZORKO : [interprétation] Je demande le versement du document.

 11   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, il est versé au dossier. Une

 12   cote.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D428.

 14   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 15   M. ZORKO : [interprétation] Merci.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, poursuivez.

 17   M. ZORKO : [interprétation]

 18   Q.  Le document suivant dans votre classeur, l'intercalaire 14 normalement.

 19   M. ZORKO : [interprétation] Je vais demander que soit affichée la pièce

 20   P822.

 21   Q.  Est-ce que vous voyez le document, Mon Général ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Parlons de la procédure. Ce document, de quoi a-t-il besoin pour

 24   exister, comme procédure ?

 25   R.  Ici, il s'agit effectivement d'une plainte déposée par devant le

 26   deuxième tribunal municipal de Belgrade pour dommages et intérêts, ou

 27   indemnités. C'est Dragomir Milosevic qui est le plaignant, et ce deuxième

 28   tribunal municipal de Belgrade rend une décision à l'issue de la procédure.

Page 12946

  1   C'est une plainte par laquelle on requiert des dommages et intérêts, mais

  2   d'ordre non matériel.

  3   Q.  Quand on parle d'actions civiles, lorsqu'on entend un procureur, quel

  4   est le rôle qu'il va jouer dans une telle procédure ?

  5   R.  Lorsqu'il y a des actions en justice, se crée une situation par

  6   laquelle le plaignant dans la partie du procès peut être entendu en tant

  7   que partie à la procédure. La différence qu'il y a entre cette possibilité-

  8   là -- donc lorsqu'il intervient en tant que plaignant, c'est différent de

  9   quand il est témoin. Donc ici, il fait partie de la procédure; il n'est pas

 10   simplement un témoin.

 11   Q.  Mais explicitez-nous cette différence au niveau de la procédure lorsque

 12   quelqu'un est entendu en tant que partie à la procédure même ou s'il est

 13   entendu en qualité de témoin ?

 14   R.  Bien, c'est une situation qui se présente rarement.

 15   Q.  Je vais peut-être reformuler ma question.

 16   R.  Non, non, j'attendais simplement la fin de l'interprétation.

 17   Q.  Excusez-moi. Poursuivez votre réponse.

 18   R.  Je vous disais c'est une situation qui se présente rarement. Lorsqu'il

 19   n'y a pas suffisamment de pièces convaincantes au dossier, disons pour

 20   l'instruction, on peut apporter un complément d'élément par la déposition

 21   du plaignant lui-même, qui, lui, va peut-être donner sa version des faits à

 22   l'audience, présenter des arguments, pour peut-être faire la lumière sur

 23   des aspects du dossier. Mais étant donné qu'il n'est pas entendu en qualité

 24   de témoin, il n'a pas l'obligation de dire la vérité. Il n'est pas sous

 25   serment en vertu de la loi. Il peut même décider de garder le silence sur

 26   certains aspects du dossier, et donc c'est une situation classique ici où

 27   vous avez le plaignant qui dépose plainte et qui va quand même garder par

 28   devant soi certains éléments d'information, mais c'est une situation qui

Page 12947

  1   est acceptée en tant que telle et un jugement est rendu.

  2   Ici, le parquet a été entendu en tant que partie à la procédure au

  3   ministère public et a essayé de -- au lieu d'utiliser procureur, je devrais

  4   dire plaignant.

  5   Q.  Mais si un témoin se livrait à un parjure devant un tribunal, quelles

  6   seraient les conséquences éventuelles d'un faux témoignage de sa part ?

  7   R.  Lorsqu'un témoin comparait, quelle que soit la procédure, que ce soit

  8   une action au civil ou que ce soit une action au pénal, s'il fait un

  9   parjure, un faux témoignage, il est passible de poursuites. Cependant, si

 10   vous comparez cette situation au cas où vous avez un plaignant qui est

 11   partie à la procédure, si vous comparez la situation avec une situation

 12   pénale, étant donné la législation actuellement en vigueur en Serbie, il

 13   n'a pas besoin forcément de se prononcer sur des éléments susceptibles de

 14   l'incriminer ou qui peuvent l'exposer à une situation -- à la honte ou même

 15   entraîner des dommages matériels pour lui. Dans de telles circonstances, le

 16   témoin n'a pas besoin de faire de faux témoignage, mais dans tous les

 17   autres cas de figure, il doit effectivement témoigner de tout ce qu'il sait

 18   et dire la vérité. Donc ça c'est la différence fondamentale entre un témoin

 19   qu'on entend en tant que témoin et lorsque que le plaignant est témoin, ou

 20   plutôt, lorsqu'il est partie à procédure.

 21   Q.  Nous allons parler d'un autre sujet. Regardez le document suivant dans

 22   votre classeur.

 23   M. ZORKO : [interprétation] Et c'est le document de la liste 65 ter 01147D

 24   dans le prétoire électronique. C'est un document de la Défense.

 25   Q.  Est-ce que vous reconnaissez ce document ?

 26   R.  Même si vraiment la qualité est médiocre, vraiment la photocopie est

 27   mal faite, c'est un document du tribunal militaire de Belgrade. La chambre

 28   de première instance a rendu cette décision. C'était moi qui étais

Page 12948

  1   président de cette chambre. Et ici, la demande du TPIY de reddition de

  2   Milan Mrksic et Miroslav Radic est rejetée.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] N'oubliez pas votre micro, Maître.

  4   M. ZORKO : [interprétation] Merci, excusez-moi. Merci, Monsieur le

  5   Président.

  6   Q.  Regardez, Mon Général, regardez la page 2, ma question portera sur les

  7   motifs que vous avez invoqués en appui de votre décision. Paragraphe 1,

  8   page 2 en B/C/S ce sera sans doute la même page en anglais. Effectivement.

  9   Premier paragraphe de la page. Comment le commenteriez-vous ?

 10   R.  Lorsque la chambre a délibéré suite à cette demande, elle a respecté

 11   une certaine procédure au cours de laquelle il ne s'agissait surtout

 12   d'établir certains faits. Il fallait se demander si ces personnes étaient

 13   des citoyens de la RFY et nous avons établi que ces trois individus étaient

 14   effectivement des ressortissants de la RFY en application de l'article 17,

 15   paragraphe 3 de la constitution et l'extradition de ces citoyens est

 16   interdite et ceci vaut ou était également dans le code de procédure pénal

 17   qui dispose que des demandes faites par un tribunal étranger ne peuvent

 18   être accueillies que s'il s'agit de ressortissants étrangers et non pas de

 19   ressortissants du pays ayant reçu la demande. En fonction de ces

 20   précisions, nous avons rejeté la demande d'extradition envoyée par le TPY

 21   pour ces trois personnes susnommées.

 22   Cette décision est envoyée d'office au tribunal suprême, au tribunal

 23   militaire suprême pour examen lequel a confirmé la décision et la décision

 24   a été appliquée dans le respect de ce qui était alors la constitution de la

 25   RFY.

 26   Q.  Merci.

 27   M. ZORKO : [interprétation] Je pensais que vous vouliez poser une question,

 28   Monsieur le Président, mais je vois que ce n'est pas le cas. Je vous

Page 12949

  1   remercie. Je demande le versement du document.

  2   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Oui, ce document est versé. Une cote,

  3   Monsieur le Greffier.

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D429.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  6   M. ZORKO : [interprétation]

  7   Q.  Regardez, s'il vous plaît, le document 01148D, ça c'est le numéro de la

  8   liste 65 ter de la Défense. Dites-nous simplement -- attendons d'abord que

  9   le document soit affiché.

 10   Est-ce bien ici la décision du tribunal militaire suprême dont vous venez

 11   tout juste de parler ?

 12   R.  Oui, cette décision confirme la décision prise par le tribunal

 13   militaire de Belgrade et la décision devient ainsi définitive.

 14   Q.  Merci.

 15   M. ZORKO : [interprétation] Je demande ici aussi le versement du document.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est versé au dossier. Une cote,

 17   Monsieur le Greffier.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D430.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 20   M. ZORKO : [interprétation]

 21   Q.  Mon Général, veuillez regarder le document suivant dans votre classeur.

 22   M. ZORKO : [interprétation] C'est le document 01313D dans le prétoire

 23   électronique.

 24   Q.  Qu'est-ce que nous voyons à l'écran, sur quoi porte ce document ?

 25   R.  C'est la Loi portant coopération de la RFY avec le TPIY, le tribunal

 26   chargé de la poursuite de personnes présumées responsables de violations

 27   graves du droit international humanitaire commises sur le territoire depuis

 28   1991.

Page 12950

  1   Q.  Quelle est la date de ce numéro du journal officiel dans lequel ce

  2   décret a paru ?

  3   R.  Cette loi a été adoptée en 2000. Je ne vois pas la date, mais ceci a

  4   été publié au "journal officiel" le 11 avril 2002. C'est un document adopté

  5   par l'assemblée fédérale et elle précise les conditions de coopération,

  6   elle prévoit aussi en droit la possibilité de l'extradition de personnes

  7   présumées responsables de violations graves du droit international

  8   humanitaire commis sur le territoire de l'Ex-Yougoslavie. En vertu de cette

  9   loi, il existait un fondement juridique suffisant pour permettre

 10   l'extradition d'auteurs présumés comme l'exige ce tribunal, et ceci a été

 11   appliqué à l'avenant. Avant cela, avant cette loi, il n'existait pas en

 12   droit de possibilité d'extradition, personne n'aurait pu le faire sans

 13   enfreindre la loi.

 14   Q.  Veuillez simplement confirmer ceci, c'est à la ligne 11, il est dit que

 15   la loi était adoptée en avril 2000 ?

 16   R.  Non, non, ce n'était pas en avril 2000, c'était en avril 2002.

 17   M. ZORKO : [interprétation] Je demande le versement du document, Monsieur

 18   le Président.

 19   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Il est versé. Une cote, Monsieur le

 20   Greffier.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D431.

 22   M. ZORKO : [interprétation]

 23   Q.  Mon Général, je vous prie de prendre le document qui suit dans votre

 24   classeur.

 25   M. ZORKO : [interprétation] Et je demanderais que l'on affiche dans le

 26   prétoire électronique la pièce 01314D.

 27   Q.  Général, j'aimerais vous demander de prendre connaissance du document,

 28   et par la suite je vais vous demander de nous faire quelques commentaires

Page 12951

  1   très brefs sur ce document. Vous attendez avant de répondre que le document

  2   soit affiché dans le prétoire électronique. Mon Général, dites-moi, de quel

  3   document il s'agit ?

  4   R.  Il s'agit ici d'une loi sur les modifications de la Loi sur la

  5   coopération de la République fédérale de Yougoslavie avec le Tribunal

  6   international pénal pour l'ex-Yougoslavie. Cette loi portant modification a

  7   été adoptée, car entre-temps, il y a eu un changement interne de la

  8   République fédérale de Yougoslavie, donc la Serbie-et-Monténégro ont

  9   effectivement commencé -- ou ont été mis ensemble. Ce n'est que la

 10   terminologie qui change, mais il s'agit d'une communauté étatique, et à

 11   l'intérieur de cette dernière, on a procédé au changement de nom. Donc ce

 12   texte de loi ne démontre que certains changements terminologiques, mais il

 13   n'y a pas vraiment de modification quant à la teneur du document.

 14   Q.  Très bien. Merci. Nous allons maintenant passer à un autre document, et

 15   il s'agit d'un autre sujet aussi.

 16   M. ZORKO : [interprétation] Mais avant cela, j'ai oublié de demander le

 17   versement au dossier de ce document.

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Le document est versé au dossier.

 19   Quelle en sera la cote, Monsieur le Greffier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, cette pièce

 21   portera la cote D432.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 23   M. ZORKO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je demanderais

 24   que l'on montre le document de l'Accusation dans prétoire électronique le

 25   document P1747. Je crois que la traduction que nous avons ne correspond pas

 26   à l'original ici, dans le prétoire électronique, je veux dire. Merci

 27   beaucoup.

 28   Q.  Voici, Mon Général, vous voyez de quel document il s'agit dans le

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  1   prétoire électronique. Nous avons les deux versions, en B/C/S et en

  2   anglais. Je vous demanderais de bien vouloir nous dire ce que vous voyez en

  3   examinant ces deux documents ?

  4   R.  Il s'agit ici d'un diplôme qui a été conféré par l'école de Défense

  5   nationale de Belgrade, qui faisait partie de l'armée yougoslave, au nom de

  6   Vinko Pandurevic. Par la suite, on stipule qu'il a été diplômé de l'école

  7   de la Défense nationale en 1997 et 1998 et que ce dernier a obtenu la

  8   mention d'excellent. Et on peut également y lire le tampon de l'école de

  9   Défense nationale. On voit que le diplôme a été délivré le 28 janvier 1999.

 10   M. ZORKO : [interprétation] Très bien. Je demanderais maintenant que l'on

 11   affiche dans le prétoire électronique la pièce P0293 de sorte à ce que l'on

 12   puisse enlever ce document de l'écran.

 13   Q.  Je vous demanderais, Mon Général, de consulter le document qui se

 14   trouve dans le classeur devant vous. Pouvez-vous nous dire, s'il vous

 15   plaît, de quel type de document il s'agit.

 16   R.  Nous avons ici un acte d'accusation qui a été dressé par le juge

 17   disciplinaire contre Vinko Pandurevic, car il a violé la discipline de

 18   l'armée yougoslave -- donc pour avoir enfreint la discipline conformément à

 19   la Loi de l'armée yougoslave, et ici on peut lire que lorsqu'il a souhaité

 20   résoudre ses questions résidentielles à Belgrade, alors qu'il a fait une

 21   demande pour qu'on puisse lui donner un appartement afin qu'il puisse le

 22   louer jusqu'à une date indéterminée, il aurait passer sous silence le fait

 23   qu'il a déjà eu auparavant un appartement à Mali Zvornik, et s'agissant de

 24   ce même appartement, il a pu l'acheter de l'Etat et il l'a revendu.

 25   Ceci faisait en sorte qu'il était disqualifié, c'est-à-dire qu'il ne

 26   pouvait pas obtenir un autre appartement à la suite d'une demande qui avait

 27   été faite et pour lequel un bail lui avait été donné pendant qu'il était en

 28   formation à l'école de Défense nationale. Le bail a été fait le 5 mai 1998.

Page 12953

  1   Q.  Très bien. Merci. S'agissant du document que vous avez sous les yeux,

  2   pourriez-vous nous dire, cette violation a été faite à quel moment

  3   exactement et sur quoi vous fondez-vous pour tirer cette conclusion que

  4   vous nous avez dite ?

  5   R.  D'après cette description qui découle de cet acte d'accusation, on peut

  6   lire que la violation a été faite au moment où il a signé le bail quant à

  7   la location de son appartement, et c'est en date du 5 mai 1998, alors qu'il

  8   ait passé sous silence le fait qu'il avait déjà auparavant obtenu un

  9   appartement qu'il a revendu.

 10   Q.  Pourriez-vous nous dire à quel moment cette violation a-t-elle été

 11   faite ?

 12   R.  Les appartements sont normalement accordés par la direction chargée des

 13   résidences de l'état-major principal de l'armée yougoslave sur la base

 14   d'une demande qui a été faite et des documents appropriés envoyés avec la

 15   demande en question. Alors, des conséquences de cette violation à la

 16   discipline militaire ont été faites à l'encontre de la direction chargée du

 17   logement, donc en d'autres mots, c'était l'armée yougoslave, puisque c'est

 18   eux qui disposaient de ces logements qu'il pouvait attribuer au personnel.

 19   Avec ce comportement, la discipline militaire est sérieusement violée,

 20   puisque cet acte va à l'encontre de toute déontologie quant aux services de

 21   l'armée.

 22   Q.  Très bien. Merci. Mais nous pouvons voir que cet acte d'accusation a

 23   été dressé par les organes compétents, et il s'agit, en fait, de l'état-

 24   major principal de l'armée yougoslave, n'est-ce pas ? En fait, ce n'est pas

 25   l'organe compétent, je suis désolé, mais c'est dressé par le procureur

 26   militaire. Donc permettez-moi de vous demander ceci : de façon concrète,

 27   qui était chargé de diligenter cette procédure-ci et qui a dressé cet acte

 28   d'accusation et sous quelle compétence ?

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  1   R.  Bien, il nous faut revenir aux données précédentes afin de pouvoir

  2   mieux comprendre. Ayant vu le diplôme qui a été accordé à Pandurevic Vinko,

  3   nous pouvons voir qu'à l'époque il était élève de l'école de la Défense

  4   nationale. Et cette école faisait partie de l'état-major principal de

  5   l'armée yougoslave, et Vinko Pandurevic était un auditeur, et donc en tant

  6   qu'élève il a enfreint à cette discipline militaire.

  7   La personne qui avait la compétence d'entamer cette procédure,

  8   c'était le directeur de l'école de la Défense nationale, et l'officier

  9   supérieur, qui est l'officier supérieur immédiat de l'école de Défense

 10   nationale, était celui qui était chargé de prendre ces décisions. Et donc

 11   le procureur a diligenté cette enquête sur la base des informations reçues

 12   par l'officier supérieur ou par le directeur de l'école.

 13   Vinko Pandurevic était un élève de l'école nationale. Indépendamment

 14   de l'unité à laquelle on appartient, c'est le directeur de l'école qui a la

 15   compétence d'entamer toutes les procédures nécessaires quant aux

 16   infractions faites à la loi disciplinaire militaire. Donc tout ceci, c'est

 17   une loi qui est égale et qui est applicable à tous les élèves de l'école

 18   nationale, indépendamment des unités dont ces personnes arrivent. C'est

 19   tout ce que je peux vous dire à propos de l'école et du service.

 20   M. ZORKO : [interprétation] Je vous remercie, Général. Madame,

 21   Monsieur le Juge, je n'ai plus de questions à poser à ce témoin.

 22   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Monsieur Thomas.

 24   M. THOMAS : [interprétation] Monsieur le Président, oui. Je vous remercie.

 25   Je me demandais si nous pourrions peut-être lever l'audience un peu plus

 26   tôt aujourd'hui. J'aurais quelques questions à poser dans le cadre d'un

 27   contre-interrogatoire, mais je pense que je vais ne pas être aussi long que

 28   je l'avais prévu pour le contre-interrogatoire du général Gojovic, et je

Page 12955

  1   crois comprendre que c'est le seul témoin qui est prévu pour cette semaine;

  2   c'est cela ?

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Mais c'est la raison pour laquelle

  4   vous souhaitez lever l'audience maintenant ?

  5    M. THOMAS : [interprétation] Non, j'ai quelques restructurations à faire.

  6   Je pense que si j'avais la possibilité de le faire, ce serait très bien. En

  7   fait, je serais encore plus rapide pour mon contre-interrogatoire.

  8   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Ecoutez, nous allons lever l'audience

  9   un peu plus tôt que prévu et nous nous retrouverons demain. Mais avant de

 10   lever l'audience, Monsieur, j'aimerais vous dire que vous avez déjà

 11   témoigné ici, donc vous saurez certainement qu'à partir du moment où vous

 12   avez prononcé la déclaration solennelle, vous n'êtes censé parler de votre

 13   déposition à personne tant que votre déposition n'est pas terminée. Donc je

 14   voudrais juste m'assurer que vous ne parliez à personne, et notamment pas

 15   au conseil de la Défense. Nous nous retrouverons demain à 9 heures dans ce

 16   même prétoire.

 17   [La Chambre de première instance se concerte]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Donc nous levons l'audience jusqu'à

 19   demain matin à 9 heures dans ce même prétoire. Je vous remercie.

 20   --- L'audience est levée à 13 heures 17 et reprendra le mardi 20

 21   juillet 2010, à 9 heures 00.

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