Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 5 novembre 2007

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Beara n'est pas introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 10 heures 00.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière --

  7   Monsieur le Greffier, pardon. Pourriez-vous nous présenter l'affaire ?

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il s'agit

  9   de l'affaire IT-05-88-T, le Procureur contre

 10   M. Popovic et consorts.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Aux fins du compte rendu, tous

 12   les accusés sont là, si ce n'est M. Beara. Monsieur Meek, qu'arrive-t-il à

 13   votre client ?

 14   M. MEEK : [interprétation] C'est une très bonne question, Monsieur le

 15   Président. J'ai eu l'impression qu'il était malade. Il ne m'a pas

 16   téléphoné. J'ai demandé plus tôt si l'on pouvait vous contacter pour savoir

 17   s'il y avait eu la moindre déclaration écrite, mais je n'en sais rien.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] On nous dit que le document nous

 19   parviendra dans le courant de la journée.

 20   M. MEEK : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 21   J'aimerais pouvoir le consulter également lorsqu'il parviendra au Tribunal.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien, merci.

 23   Parmi les équipes de la Défense, je vois que Me Bourgon n'est pas là ainsi

 24   que M. Ostojic, c'est à peu près tout.

 25   Pour l'Accusation, je vois M. McCloskey, M. Thayer et c'est tout.

 26   Vous savez que nous avons rencontré un problème technique ce matin, que ce

 27   problème demeure. Nous avons attendu une heure pour voir si le problème

 28   pouvait être résolu. On nous dit qu'aucune solution n'a été trouvée jusqu'à

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  1   présent. Quelle est la conséquence de cette difficulté technique ? La voici

  2   : nos débats sont bel et bien enregistrés et retranscrits, donc, même s'il

  3   existe un compte rendu et ce jusqu'à la fin de la journée, rien

  4   n'apparaîtra sur nos écrans, sur les deux écrans.

  5   Nous avons envisagé différentes possibilités, on nous a indiqué que

  6   certains des membres des équipes de la Défense sont un peu réticents pour

  7   suivre en l'absence du moindre compte rendu à l'écran. J'aimerais savoir

  8   quelles les objections à ce que nous poursuivions sans compte rendu de

  9   façon à ce que nous puissions trancher la question, évaluer le poids à

 10   accorder à ces objections et décider si, oui ou non, nous devons poursuivre

 11   l'audience ou pas.

 12   On nous a dit que du côté de l'Accusation, il n'y a pas de difficulté

 13   à entendre le général Smith sans compte rendu à l'écran.

 14   Alors, je me tourne vers les équipes de la Défense. Y a-t-il

 15   quelqu'un qui souhaite que l'audience n'ait pas lieu sans compte rendu ?

 16   Monsieur Zivanovic.

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation]  Merci, Monsieur le Président. Je ne

 18   peux pas suivre le compte rendu. Je ne me souviens plus, sans compte rendu

 19   de l'interprétation, des phrases prononcées par le témoin. Je ne serai pas

 20   en mesure donc de comparer les choses ultérieurement une fois que

 21   j'obtiendrais le compte rendu écrit.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais quelle est votre préoccupation ?

 23   Vous n'allez pas contre-interroger ce témoin aujourd'hui ? Vous n'allez pas

 24   le faire aujourd'hui. Il faudra que ce témoin revienne pour le contre-

 25   interrogatoire et le compte rendu sera mis à votre disposition dès cet

 26   après-midi ou au plus tard demain.

 27   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous n'allez pas contre-interroger le

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  1   témoin demain. Vous n'allez pas le contre-interroger ni demain ni après

  2   demain. Il va y avoir un certain temps entre aujourd'hui et la date de

  3   votre contre-interrogatoire, et cet intervalle vous permettra de parcourir

  4   le compte rendu d'audience et vous allez, de toute façon entendre

  5   l'interprétation de son témoignage. De toute façon, vous n'allez pas

  6   recevoir un compte rendu en B/C/S de ce qu'il dit puisque le compte rendu

  7   sera en anglais.

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait. Tout à fait,

  9   j'obtiendrais le compte rendu plus tard, oui, en effet. Je n'objecterais

 10   pas sur cette base-là.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Y a-t-il d'autres objections ? Alors

 12   que la chose soit claire, le compte rendu sera mis à votre disposition.

 13   Maître Josse.

 14   M. JOSSE : [interprétation] Non, nous n'avons pas d'objection mais

 15   j'inviterais mon éminent confrère, M. Thayer, à faire preuve d'une lenteur

 16   particulière parce que je vais devoir prendre des notes à la main comme je

 17   l'ai fait d'ailleurs au cours des 20 dernières années où j'ai été avocat

 18   avant d'arriver ici. Cela ne pose pas de difficulté, en réalité, mais il va

 19   falloir faire preuve de la lenteur qui s'impose.

 20   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Tout à fait.

 21   Monsieur Thayer, vous êtes d'accord, n'est-ce pas ?

 22   L'INTERPRÈTE : M. Thayer acquiesce.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Y a-t-il qui que ce soit ceux

 24   qui souhaitent objecter à la tenue de cette audience sans compte rendu ?

 25   Très bien.

 26   Pour rassurer les accusés, vous allez pouvoir suivre le débat puisque, de

 27   toute façon, vous allez entendre l'interprétation. Bien.

 28   Avant d'entendre le général Smith, il va falloir, bien sûr, réorganiser un

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  1   petit peu le calendrier -- ou plutôt, l'organisation de la séance

  2   d'aujourd'hui. Nous allons commencer, et au cours de l'audience de ce

  3   matin, nous vous préciserons dont la manière dont nous avons l'intention de

  4   nous organiser. Nous avons perdu une heure et nous allons tâcher de bien

  5   rattraper le plus possible le temps perdu. Bien.

  6   Il n'y a pas semble-t-il de question préliminaire ?

  7   M. THAYER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, en

  8   effet, il n'y en a pas.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il n'y en a pas. Très bien.

 10   Madame l'Huissière, je vous demanderais de bien vouloir faire rentrer

 11   le témoin, le Général Smith.

 12   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Popovic, pourquoi ne portez-

 14   vous pas vos écouteurs ? Pourquoi ne les avez-vous pas à là où ils

 15   devraient être sur vos oreilles ?

 16   L'ACCUSÉ POPOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, ils ne sont pas

 17   très confortables ces écouteurs, alors, je les laisse sur mes épaules et

 18   j'entends assez bien comme cela.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Général.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bienvenu ici même dans ce Tribunal. Je

 22   souhaite vous présenter nos excuses du retard accumulé, nous avons

 23   rencontré une difficulté technique. Cette difficulté technique n'a pas

 24   encore été résolue. Nous en parlions à l'instant avec les parties. Nous

 25   avons décidé de concert de poursuivre néanmoins même en présence de la

 26   difficulté technique à laquelle nous sommes confrontés. Le seul véritable

 27   problème qui se pose également pour vous c'est que, bien sûr, vous serez en

 28   mesure de suivre l'oral mais vous ne serez pas en mesure de suivre le

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  1   défilement du compte rendu d'audience sur les deux écrans que vous aurez

  2   sous les yeux. Il vous faudra donc vous fier à ce que vous entendrez.

  3   Avant que vous entamiez votre déposition, vous devez prononcer une

  4   déclaration solennelle, dont on vous tend le texte, veuillez cette

  5   déclaration à haute voix, qui constituera le serment que vous prononcerez

  6   devant ce Tribunal.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  8   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN: RUPERT ANTHONY SMITH [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Oui, installez-vous à

 12   votre aise. Voici comment nous allons nous organiser. Vous allez entamer

 13   votre déposition aujourd'hui, vous reviendrez par la suite pour la

 14   poursuivre et pour vous soumettre aux différents contre-interrogatoires.

 15   C'est M. Thayer qui vous posera les premières questions. Puisque nous

 16   n'avons pas devant nous aujourd'hui de compte rendu d'audience, et qu'il

 17   nous faudra prendre des notes à la main, je vous demanderais de bien

 18   vouloir parler lentement dans le cadre de vos réponses de façon à ce que

 19   personne n'ait de difficulté. Je vous rappellerais également que M. Thayer

 20   et vous-même parlez la même langue, je vous inviterais donc à toujours

 21   ménager une brève pause entre réponse et question parce que les interprètes

 22   en ont besoin, sans de telle pause nous risquons de rencontrer des

 23   difficultés. Nous allons siéger jusqu'à 11 heures 40 ce matin, puis nous

 24   prendrons une pause de 30 minutes, et nous reprendrons de midi dix à 13

 25   heures 45. De cette manière-là, nous allons rattraper un peu du temps perdu

 26   ce matin.

 27   Monsieur Thayer.

 28   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, bonjour.

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  1   Bonjour, Madame, Messieurs les Juges, bonjour à tous.

  2   Interrogatoire principal par M. Thayer : 

  3   Q.  [interprétation] Bonjour, Général.

  4   R.  Bonjour.

  5   Q.  Voulez-vous décliner votre identité, s'il vous plaît ?

  6   R.  Je m'appelle Rupert Smith.

  7   Q.  Général, nous avons perdu un petit peu de temps ce matin. Je vais donc

  8   parcourir plus rapidement votre parcours professionnel et vos études. Je

  9   vais résumer un peu ce parcours mais si des erreurs se glissent dans ce

 10   résumé, n'hésitez pas à me corriger.

 11   Vous êtes né en 1943, vous avez été à Haileybury, puis à Sandhurst. Vous

 12   êtes devenu membre de l'armée britannique en 1964, vous avez été affecté au

 13   Régiment de Parachutistes en 1964, donc, vous avez été emmené en Afrique,

 14   au Moyen-Orient, en Europe dans la zone des Caraïbes et en Asie.

 15   Je m'intéressais, maintenant, aux dix dernières années de votre activité au

 16   sein de l'armée. Vous avez été commandant d'unité et vous étiez, entre 1990

 17   et 1992, chargé d'un certain nombre de missions, y compris dans le cadre de

 18   la guerre du Golfe. Vous avez été chef de l'état-major de la Défense

 19   assistant chargé des opérations entre 1992 et 1994, et nous y reviendrons

 20   d'ailleurs dans un instant. Vous avez commandé la FORPRONU - FORPRONU pour

 21   la Bosnie-Herzégovine en 1995. Vous avez été commandant d'unité en Irlande

 22   du nord de 1996 à 1998 et vous avez été commandant suprême des forces

 23   alliées adjoint pour l'Europe de 1998 à 2001 et vous avez été chargé

 24   notamment des opérations de l'OTAN dans les Balkans. Et vous avez pris

 25   votre retraite en janvier 2002 et vous aviez à ce moment-là le grade de

 26   général de corps d'armée; c'est bien exact ?

 27   R.  J'étais général lorsque j'ai pris ma retraite. Je n'étais pas

 28   lieutenant-général, et le titre exact de ma nomination au sein du ministère

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  1   de la Défense en 1992 était chef assistant du chef d'état-major de la

  2   Défense pour les opérations et la sécurité.

  3   Q.  Que faites-vous aujourd'hui ?

  4   R.  Je suis consultant.

  5   Q.  J'aimerais revenir à l'époque où vous avez été affecté au sein des

  6   rangs du ministère de la Défense juste avant que vous ne vous rendiez à

  7   Sarajevo dans le cadre de vos activités professionnelles. Pourriez-vous

  8   dire quelles étaient vos fonctions au sein du ministère de la Défense ?

  9   R.  Je pense que la description la plus simple de mes fonctions c'était un

 10   nouveau poste au sein du ministère qui avait été créé après la guerre du

 11   Golfe de 1990 et 91. Je n'avais jamais travaillé pour le ministère de la

 12   Défense avant cela.

 13   Q.  Alors, quel était ce poste ?

 14   R.  Il s'agissait, en réalité, d'un poste d'officier chargé des opérations

 15   pour toutes les forces armées du Royaume-Uni. Chaque opération menée par

 16   nos forces étaient disons passées sous mes yeux dans une plus ou moins

 17   grande mesure.

 18   Q.  Quelle a été votre participation à la mise en place d'opération

 19   organisée pour l'ex-Yougoslavie ?

 20   R.  S'agissant de l'intervention britannique dans ces opérations, moi,

 21   j'étais chargé du déploiement des forces et d'autres aspects de ce genre.

 22   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, donner des exemples précis aux Juges de

 23   la Chambre pour le mieux faire comprendre les domaines dans lesquels vous

 24   étiez amené à intervenir, en particulier en ce qui concerne l'ex-

 25   Yougoslavie lorsque vous étiez chargé des opérations ?

 26   R.  Bien. Il y a eu le premier déploiement. Bon, permettez-moi de revenir

 27   un peu en arrière. Il y avait déjà un déploiement d'hommes en Croatie au

 28   moment où j'ai pris mes fonctions au sein du ministère. Il y a eu un

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  1   premier déploiement vers la Bosnie-Herzégovine dans le cadre de la

  2   FORPRONU. Il y a eu tout un tas de choses à faire dans ce cadre-là. Il y a

  3   eu également toutes les négociations et tout le travail à accomplir avec

  4   l'OTAN, les zones d'exclusion aérienne, les zones de sécurité, les zones

  5   d'exclusion, et cetera.

  6   Q.  Dans une certaine mesure, avez-vous également participé aux activités

  7   du Groupe de Contact dont ont déjà entendu parler ici et là, les Juges de

  8   la Chambre ? Si oui, avez-vous participé et

  9   comment ?

 10   R.  Oui, oui, j'ai effectivement participé au sein de ce Groupe de Contact

 11   mais, en réalité, c'était un autre ministère, c'était le ministère des

 12   Affaires étrangères qui intervenait directement au sein du Groupe de

 13   Contact. Moi, j'étais là en tant que conseiller militaire à l'appui du

 14   représentant du ministère des Affaires étrangères qui intervenait

 15   directement au sein de ce groupe.

 16   Q.  Quelle était la nature de ce groupe ?

 17   R.  Bien, ce groupe a été constitué par un certain nombre de pays après le

 18   refus par les Etats-Unis d'accepter le plan Vance-Owen. Si j'ai bonne

 19   mémoire, en 1993, les pays ayant constitué au départ le Groupe de Contact

 20   étaient, me semble-t-il, les Etats-Unis, la Russie, la France, la Grande-

 21   Bretagne et l'Allemagne. Le "contact group" avait pour but de permettre à

 22   ces différents pays de rester en contact et de coordonner leur politique

 23   d'où son nom.

 24   Q.  A quelle date avez-vous pris la direction de la FORPRONU en Bosnie-

 25   Herzégovine ?

 26   R.  Fin janvier 1995, le 26, me semble-t-il, mais, bon, un ou deux jours

 27   près peut-être.

 28   Q.  Et où était votre QG ?

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  1   R.  Mon QG était à Sarajevo, même la résidence. Il y avait un autre QG à

  2   Split mais, en tout cas, le mien était à Sarajevo.

  3   Q.  Qui avait été votre prédécesseur ?

  4   R.  C'est Michael Rose, général à l'époque, il était général de corps de

  5   l'armée.

  6   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à Sarajevo, qui était votre supérieur direct ?

  7   R.  Mon supérieur direct était le général Janvier à Zagreb.

  8   Q.  Y avait-il une direction civile -- Nations Unies au-dessus de vous ?

  9   R.  Il y avait M. Akashi, oui, qui représentait le secrétaire général.

 10   Q.  Qui était son supérieur ?

 11   R.  Le secrétaire général à New York.

 12   Q.  Général, lorsque des décisions de grande portée devaient être prises,

 13   où étaient-ils prises, à Sarajevo, là où vous vous trouviez ou ailleurs ?

 14   R.  De grande envergure -- de grande portée, vous voulez dire quoi par là ?

 15   0Q.  Bien, par exemple, si un appui aérien était nécessaire dans votre zone

 16   de responsabilité, par exemple, qui prenait la décision ?

 17   R.  Je dois faire une distinction entre un appui aérien rapproché, si vous

 18   voulez, et d'autres formes d'intervention aérienne. S'il s'agit,

 19   effectivement, d'un appui aérien rapproché pour défendre les forces de la

 20   FORPRONU, dans ce cas-là, n'importe qui aurait pu en faire la demande. Nous

 21   avons dû décider parfois de savoir s'il fallait répondre ou pas à ce genre

 22   de demande, et ce, le long de la filière hiérarchique. Les choses n'ont pas

 23   changé sur ce point-là mais ce qui est arrivé c'est que de 1995, et ce,

 24   jusqu'à ou juste après la Conférence qui a eu lieu en juillet à Londres. De

 25   plus en plus des décisions ont été prises le long de la chaîne hiérarchique

 26   politique.

 27   Maintenant, s'agissant d'autres types d'attaques, par exemple, pour veiller

 28   au respect de zones d'exclusion aérienne, dans ces cas-là, il s'agissait

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  1   toujours d'une décision prise à plus haut niveau que de décision relative à

  2   des demandes d'appui aérien rapprochées. Et après mai -- à la fin du mois

  3   de mai 1995, et au cours des mois suivants, à toute fin utile, c'est M.

  4   Boutros-Ghali, le secrétaire général de New York, qui prenait ce genre de

  5   décision et ceci s'est poursuivi jusqu'après la Conférence de Londres.

  6   Q.  Nous reviendrons sans doute sur certains des points que vous venez

  7   d'évoquer plus tard dans le cadre de votre déposition. Lorsque vous êtes

  8   arrivé à Sarajevo, Général, aviez-vous un chef d'état-major ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Au cours de la période que vous avez passée sur place, en avez-vous eu

 11   plus d'un ?

 12   R.  Oui, j'ai changé six mois et j'en ai eu trois -- tous les six mois -

 13   pardon - et j'en ai eu trois.

 14   Q.  Vous souvenez-vous de leurs noms ?

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Excusez-moi, nous avons une

 16   interruption.

 17   Oui, le général Miletic.

 18   L'ACCUSÉ MILETIC : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi de

 19   vous interrompre mais pourrait-on nous en tenir à ce sur quoi nous nous

 20   sommes mis d'accord, à savoir que M. Thayer ralentisse un petit peu et que

 21   le général Rupert Smith fasse de même, de manière à ce que nous puissions

 22   prendre des notes. Il s'agit d'un interrogatoire principal comme les autres

 23   mais j'ai peur qu'il aille encore plus vite que les autres.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, c'est vrai. J'ai l'impression que

 25   vous avez oublié toutes mes consignes, alors, s'il vous plaît ralentissez.

 26   Je m'adresse à vous, Monsieur le Témoin, et à vous, Monsieur Thayer. Merci.

 27   M. THAYER : [interprétation]

 28   Q.  Général, vous souvenez-vous du nom de vos chefs d'états-majors et de

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  1   leur période de service approximativement ?

  2   R.  Le seul qui me vienne à l'esprit comme cela, c'est celui du milieu, le

  3   général Nicolai. Il a occupé ses fonctions de chef d'état-major à mes côtés

  4   de mars à septembre de cette année-là à peu près, cette année-là étant

  5   1995.

  6   Q.  Aviez-vous eu également un chef de cabinet militaire ?

  7   R.  En effet.

  8   Q.  Comment s'appelait-il ?

  9   R.  J'en ai eu deux en fait l'un après l'autres. Le premier était le

 10   colonel Baxter et le second le colonel Carleton [phon]. Si je me souviens

 11   bien, le colonel Baxter est parti à la fin du mois de septembre, début du

 12   mois d'octobre, et Carleton est arrivé juste après.

 13   Q.  Bien. Outre le fait que la FORPRONU se trouvait à Sarajevo, en tout

 14   cas, le quartier général, y avait-il un certain secteur subordonné qui

 15   était également basé à Sarajevo ?

 16   R.  Oui, oui, le secteur Sarajevo avait son propre QG et ce QG se trouvait

 17   également dans la ville.

 18   Q.  Étiez-vous au même endroit dans le même QG, ou le QG du secteur de

 19   Sarajevo était-il ailleurs ?

 20   R.  Oui, ailleurs.

 21   Q.  Et où ?

 22   R.  Si mon souvenir est bon, le QG se trouvait dans le bâtiment des PTT, en

 23   tout cas, par là.

 24   Q.  Qui dirigeait le secteur Sarajevo au cours de la période que vous avez

 25   passée sur place ?

 26   R.  Il y a eu trois commandants, à ce moment-là, pendant que j'y étais,

 27   d'abord le général de brigade Gobillard; ensuite, le général de brigade

 28   Bashley [phon]; et puis, j'ai oublié le troisième, mais il est arrivé en

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  1   novembre, je crois.

  2   Q.  Lorsque vous avez pris la direction des forces de la FORPRONU pour la

  3   Bosnie-Herzégovine, de manière générale, quelle était la situation

  4   politico-militaire en janvier, février 1995 ?

  5   R.  Il y avait eu un accord relatif à la cessation des hostilités qui avait

  6   été signé entre la Fédération et les Serbes de Bosnie peu de temps

  7   auparavant et, globalement, cet accord continuait de s'appliquer lorsque

  8   j'ai pris mes fonctions.

  9   Q.  S'agissant précisément de cet accord relatif à la cessation des

 10   hostilités Général, y a-t-il eu toute une série de réunions qui avaient

 11   pour objet de veiller à la mise en œuvre de l'accord en question ?

 12   R.  Oui, oui.

 13   Q.  Bien. Toute cette série de réunions portaient-elles un nom particulier;

 14   pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre si le processus était bien en

 15   cours au cours de la période où vous avez été à Sarajevo ?

 16   R.  Oui, je crois que ça s'appelait la Commission conjointe mais ce n'est

 17   pas le titre complet; je ne me souviens plus de son titre complet. Mais, en

 18   réalité, le processus n'a pas fonctionné, n'a pas abouti aux résultats

 19   escomptés, en tout cas. Lorsque j'ai pris la direction des forces de la

 20   FORPRONU, cela ne fonctionnait plus, les choses ne se sont pas améliorées

 21   au cours des semaines ultérieures.

 22   Q.  Quelle était l'idée qui sous-tendait cette Commission conjointe ?

 23   R.  Bien, il faudrait que je jette un œil à l'accord pour être tout à fait

 24   précis. Mais, en gros, au sein de cette commission, les deux parties

 25   étaient censées régler les questions qui restaient en suspens et qui

 26   risquaient d'entraîner une reprise des combats et du conflit.

 27   Q.  Bien. A votre arrivée, vous avez rencontré un certain nombre de

 28   dirigeants civils et militaires -- des factions belligérantes ?

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  1   R.  Oui, il y avait tout un programme de rencontres de réunions, réunions

  2   avec les principaux intervenants des deux camps.

  3   Q.  Bien. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous donner le nom d'un certain

  4   nombre des personnes que vous avez rencontrées au sein des deux factions

  5   tant des civils que des militaires, donc, du côté musulman de Bosnie et du

  6   côté serbe de Bosnie, qui avez-vous rencontré ?

  7   R.  Dans l'ordre, le président Izetbegovic; puis, Muratovic qui était l'un

  8   de ces ministres chargé des relations avec les Nations Unies; puis

  9   Silajdzic; le général Delic concernant le côté du gouvernement de Sarajevo.

 10   S'agissant de Pale, maintenant, Karadzic, Koljevic, Krajisnik, Mladic,

 11   voilà, ce sont les quatre noms que j'ai retenus de ce côté-là.

 12   Q.  Y avait-il des fonctionnaires des Nations Unies civils qui

 13   participaient à ces réunions ?

 14   R.  Oui, en général, c'était le cas. Par exemple, les représentants des

 15   Nations Unies, des organisations des affaires civiles, s'ils étaient là

 16   présents au QG, alors, ils m'accompagnaient. Au début, je cherchais

 17   toujours à me faire accompagner d'un fonctionnaire des Nations Unies.

 18   Q.  Et vous souvenez-vous de leur nom des noms de quelques-unes de ces

 19   personnes qui vous accompagnaient ?

 20   R.  Celui qui le faisait le plus souvent au début c'était Enrique Aguilar,

 21   un mexicain; un peu plus tard, Diane Mehoff [phon], de Bulgarie, si je ne

 22   m'abuse. Puis, il y avait une période un peu un trou, puis, Antonio Pedwey

 23   [phon], qui est arrivé par la suite quelque part en septembre. Donc, je me

 24   souviens de ces trois noms.

 25   Q.  M. Akashi, a-t-il participé parfois à ces réunions ?

 26   R.  Oui. Il participait à ces réunions mais il venait en son propre nom; il

 27   ne venait pas pour m'accompagner moi.

 28   Q.  D'une manière générale, quel était l'objectif de la tenue de ces

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  1   réunions, et notamment au début de votre mission, c'est-à-dire février,

  2   mars 1995 ?

  3   R.  Mon objectif vous voulez dire à la différence de l'objectif que pouvait

  4   avoir la Commission conjointe, c'est ça qui vous intéresse ? Alors, bien,

  5   ce qui m'intéressait c'était de rencontrer toutes ces personnes et

  6   d'essayer de comprendre quelles étaient leur position et leurs intentions.

  7   Q.  Cette question vous paraît peut-être trop évidente, mais pourquoi vous

  8   vouliez faire cela ?

  9   R.  Ma mission était de m'assurer que l'aide humanitaire arrive à sa

 10   destination, de mettre en œuvre les instructions du Conseil de sécurité qui

 11   portaient sur les zones de la sécurité de l'explosion aérienne et afin d'y

 12   arriver même si un cessez-le-feu était en vigueur. Je devais rencontrer les

 13   parties en conflit pour comprendre leur position.

 14   Q.  Ce que vous avez entrepris afin de comprendre quelles étaient les

 15   intentions de ces parties-là, c'est quelque chose qui faisait que vous vous

 16   trouviez des réunions différentes ou vous le faisiez d'une matière plutôt

 17   organisée ?

 18   R.  Oui, je le faisais d'une manière organisée -- systématique. J'essayais

 19   de le faire ainsi. Il y avait quelque chose que j'appelais ma thèse que

 20   j'utilisais comme un moyen pour me clarifier les idées. Bien, au moment où

 21   je posais les questions qui me permettait de savoir à chaque instant quelle

 22   question je devais poser à qui, et de quelle manière, et ensuite, analyser

 23   ces réponses et les synthétiser.

 24   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous décrire cette "thèse" entre

 25   guillemets, et cette méthodologie, la méthodologie à laquelle vous aviez le

 26   recours à cette époque-là pour analyser la situation ?

 27   R.  Commençons par le processus d'analyse. Tout d'abord, il y avait des

 28   rapports quotidiens, des sources d'information qui étaient mes officiers,

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  1   puis, les officiers des secteurs -- d'autres secteurs, de secteurs sur le

  2   terrain qui nous fournissaient des informations qu'ils considéraient

  3   importantes, et puis, ils m'informaient de tout ce que les gens leur

  4   disaient au sujet de ce qui se passait. Puis, j'avais aussi des contacts

  5   avec les dirigeants.

  6   Si vous me le permettez, j'aimerais bien vous expliquer un peu cette

  7   théorie que j'avais, et que j'appelais ma thèse, est la suivante : déjà

  8   avant en travaillant, j'ai conclus que, si je devais me trouver -- si je me

  9   trouvais dans une situation -- confrontée une situation que je ne

 10   comprenais pas suffisamment, que dans ce cas-là, je devais poser plusieurs

 11   hypothèses, les plus probables selon les circonstances, puis ensuite,

 12   essayer de réunir des informations vraies ou fausses mais toutes les

 13   informations que je pouvais obtenir, les rassembler et essayer de

 14   travailler à partir de tout cela. Evidemment, cela se faisait à l'aide de

 15   la contribution de mon personnel, évidemment, et de ma propre contribution,

 16   ma propre analyse. Et dans le cas, en l'espèce sur la base de mes

 17   conversations avez les dirigeants, j'ai commencé à comprendre qu'aucune des

 18   parties au conflit ne souhaitaient, à ce moment-là, établir la paix, et que

 19   l'accord relatif sur la cessation des hostilités allait échouer.

 20   Evidemment, il y a eu de plus en plus de preuves de cette absence de

 21   volonté de respecter l'accord, de plus en plus souvent en février et en

 22   mars. Pour dire les choses simplement, la Fédération devenait de plus en

 23   plus forte, et dans certaines zones, elle bénéficiait d'une supériorité

 24   numérique, et les armements qu'ils recevaient devaient leur donner un

 25   certain avantage si les combats, dans ces régions-là, recommençaient et ils

 26   essayaient, à mon avis, de modifier la situation et la tourner à leur

 27   avantage.

 28   D'autre part, les Serbes de Bosnie avaient sous leur contrôle un territoire

Page 17473

  1   tellement grand et disposaient de tellement peu d'effectifs que leurs

  2   forces étaient -- quelles étaient largement insuffisantes. Les accords de

  3   cessation d'hostilité ne les arrangeaient pas parce qu'ils essayaient de

  4   préserver tous ces territoires afin d'avoir une meilleure position lors des

  5   négociations. Le seul moyen pour y parvenir, c'était d'avoir de plus en

  6   plus d'effectifs, de plus en plus de militaires. Et dans une telle

  7   situation où les enclaves, et notamment celle de l'est, Srebrenica, Zepa et

  8   Gorazde, qui de leur point de vue se trouvaient dans leurs arrières dont

  9   étaient gênantes. Et ces enclaves exigeaient que les Serbes y consacrent un

 10   grand nombre de leurs effectifs et équipements. Compte tenu de ces

 11   éléments, je suis parvenu à la conclusion et j'insiste sur le fait qu'il

 12   s'agit d'une thèse tout simplement et que j'étais tout à fait ouvert,

 13   pendant toute cette période, à obtenir de nouvelles informations, et que

 14   par ailleurs, je recherchais sans cesse donc, à mon avis, il était pas

 15   seulement tout à fait probable que l'accord sur le cessez-le-feu échoue,

 16   mais que les Serbes de Bosnie vont essayer de réduire ou d'écraser ces

 17   enclaves pour réduire au maximum les territoires tenus par la Fédération.

 18   Q.  Mon Général, vous avez mentionné plusieurs sources d'information qui

 19   vous parvenaient lors de ce processus d'élaboration de votre thèse. S'agit-

 20   il des informations purement de nature militaire, ou s'agissait-il des

 21   informations qui étaient également de nature politique ?

 22   R.  Nous recevions des rapports de l'aile civile -- de la chaîne du

 23   commandement des Nations Unies. Les Etats fournissaient un soutien au QG

 24   des Nations Unies, et en ce qui me concerne, ce soutien venait de la part

 25   de la Grande-Bretagne, puis, il y avait les Français également, donc, ils

 26   nous fournissaient des informations.

 27   Q.  Etait-il important pour vous d'être au courant du contacte politique

 28   dans lequel ces événements de nature militaire s'inscrivaient ?

Page 17474

  1   R.  C'était très, très important pour moi de le comprendre parce que la

  2   position, dans laquelle je me trouvais, représentait un point de contact

  3   entre le côté militaire et le côté politique.

  4   Q.  Mon Général, j'aimerais maintenant vous poser quelques questions qui

  5   porteront précisément sur une série de réunions qui ont eu lieu au début de

  6   1995 -- mars 1995. J'attire votre attention tout d'abord sur la première

  7   semaine de mars et à la réunion avec le général Mladic à Jahorina.

  8   Pourriez-vous nous dire si vous vous souvenez de quelque chose concernant

  9   cette réunion à Jahorina et si oui de quoi ?

 10   R.  Premièrement, il s'agissait d'une réunion importante. C'est une des

 11   réunions qui m'ont aidé à comprendre beaucoup mieux la situation, ce que

 12   j'ai tout à l'heure appelé -- ma thèse d'arriver à cette thèse. Autant que

 13   je me souvienne, cette réunion, qui s'est tenue, nous avons appris que

 14   cette réunion allait avoir lieu à Jahorina environ 24 à 36 heures avant la

 15   tenue de la réunion. A cette époque-là, un des officiers de mon état-major,

 16   Michael Stanley, est arrivé à Jahorina la veille au soir de ma réunion avec

 17   Mladic. Nous avons également pu voir un certain nombre de véhicules portant

 18   des plaques d'immatriculation de Belgrade, un véhicule russe. Donc, nous

 19   savions qu'il allait y avoir une grande réunion d'une certaine importance,

 20   et si je me souviens bien, on m'a invité à venir à cette réunion mais je ne

 21   sais pas si c'était quels jours c'était exactement. Alors, à mon arrivée,

 22   j'ai d'abord rencontré Koljevic, et puis, Mladic et Koljevic ensemble. Ils

 23   voulaient m'informer d'une grande décision qui avait été prise et qu'ils

 24   considéraient que la Fédération reprendrait la guerre premièrement, et

 25   deuxièmement, que les Nations Unies représentaient un problème également

 26   parce que les Nations Unies maintenaient en vie les enclaves depuis

 27   lesquels on menait des opérations vers l'extérieur.

 28   Q.  Bien. Alors, j'aimerais qu'on examine quelques notes prises lors de

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  1   cette réunion.

  2   M. THAYER : [interprétation] C'est la pièce 2933 de la liste 65 ter.

  3   J'aimerais que ce document soit affiché à l'écran.

  4   Q.  Si vous le souhaitez je peux également vous fournir une copie

  5   papier de ce document, mon Général.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ecoutez, nous ne sommes pas en

  7   situation de perdre davantage de temps. Si on dispose d'une copie papier il

  8   serait mieux de la placer mais je pense que le rétroprojecteur, là, je ne

  9   vois rien du tout. Ne perdons pas de temps, s'il vous plaît. Ah, c'est

 10   affiché maintenant. Place le document sur le rétroprojecteur et faisons

 11   comme ça pour l'instant. Le document est en anglais, de toute façon.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Essayez, s'il vous plaît, maintenant, de

 13   retrouver le document dans le système du prétoire électronique.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon. Procédons de la manière suivante :

 15   j'aimerais que la version de ce document en B/C/S soit affiché à l'écran

 16   pour que les accusés puissent suivre le débat et j'aimerais que l'original

 17   anglais soit placé sur le rétroprojecteur.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame l'Huissière, s'il vous plaît, la

 20   version anglaise est sur le rétroprojecteur. Vous voulez dire que le

 21   rétroprojecteur ne marche pas non plus. Et la version en B/C/S peut-elle

 22   être affichée à l'écran, s'il vous plaît ?

 23   Bien. Alors, le prétoire électronique semble que le système marche. Alors,

 24   si vous avez la version en B/C/S, vous pouvez la -- ah, non, ce n'est pas

 25   la peine. On voit les deux versions affichées à l'écran. Bien. Poursuivez,

 26   s'il vous plaît.

 27   M. THAYER : [interprétation]

 28   Q.  Mon Général, reconnaissez-vous ce document ?

Page 17476

  1   R.  Oui.

  2   Q.  De quoi s'agit-il ?

  3   R.  Il s'agit d'un rapport rédigé par le colonel Baxter, mon chef de

  4   cabinet militaire d'ordinaire. A la fin des réunions telle que celle-ci, il

  5   rédigeait un compte rendu qui, ensuite, était destiné à tous ceux qui

  6   étaient censés être au courant de ce qui s'est passé -- ce qui s'est dit

  7   lors de ces réunions.

  8   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire à la Chambre de première instance

  9   quel était l'objectif de la rédaction de ces comptes rendus des réunions de

 10   votre point de vue ? Quelle était leur utilité ?

 11   R.  Il servait à informer d'autres personnes qui se trouvaient dans le

 12   commandement en soient au courant et également qui est une trace écrite qui

 13   permettrait à mon hiérarchie d'agir.

 14   Q.  Y avait-il quelque chose était important pour vous concernant la

 15   manière dont étaient rédigés ces rapports ?

 16   R.  D'abord, ces rapports devaient contenir un narratif des faits, énumérer

 17   les décisions qui étaient prises, et cetera, et cetera. Ça c'était la

 18   première chose la plus importante. La deuxième c'était de décrire

 19   l'atmosphère qui régnait lors de ces réunions. Les lieux, la manière dont

 20   tout s'était organisé mais également l'atmosphère qui régnait.

 21   Q.  Comment jugez-vous le savoir faire du colonel Baxter dans ce domaine ?

 22   R.  J'étais très content de la manière dont il s'acquittait de cette tâche.

 23   Vous savez, dans notre armée une des attributions du chef du cabinet

 24   militaire était de savoir rédiger proprement les rapports.

 25   Q.  Bien. Nous allons examiner maintenant le paragraphe 1 où il est

 26   mentionné cette réunion entre vous-même et le général Mladic. De plus, ces

 27   gardes du corps, était-il d'ordinaire seul lors de ces réunions ou

 28   accompagné d'officier de la VRS ?

Page 17477

  1   R.  Non, non, il n'était pas seul lors de ces réunions et je ne me souviens

  2   pas d'une seule occasion où il n'était pas accompagné de haut officier, par

  3   exemple, d'officier supérieur, par exemple, le général Tolimir était

  4   souvent présent.

  5   Q.  Bien. On y fait référence à une conversation entre vous- même et le

  6   général Mladic qui a eu lieu la vieille et où on parle d'un convoi de

  7   ravitaillement du Bataillon néerlandais. Vous souvenez-vous de cette

  8   conversation qui avait eu lieu la vieille entre vous et le général Mladic ?

  9   R.  Il ne s'agissait pas seulement d'un convoi mais également de -- il

 10   s'agissait également du fait que moi-même devais m'y rendre. Alors,

 11   c'étaient mes premiers jours, les premiers jours de ma mission et je

 12   souhaitais visiter les enclaves et les forces des Nations Unies que je

 13   commandais qui s'y trouvaient. Ils étaient assez mal ravitaillés et c'était

 14   notamment le cas avec Srebrenica, c'était une question qui me préoccupait.

 15   Donc, je me souviens qu'il y avait d'un côté la nécessité de laisser passer

 16   le convoi de ravitaillement vers les enclaves et de l'autre côté la

 17   nécessité pour moi-même de m'y rendre. 

 18   Q.  Bien. Nous allons discuter ces détails un peu plus tard. Pour

 19   l'instant, pourriez-vous nous dire dans quelle mesure ce thème donc de

 20   ravitaillement du Bataillon néerlandais était un ravitaillement en

 21   carburant, en vivre, et matériel était un thème qui était souvent discuté

 22   plus tard ?

 23   R.  Nous souhaitons que nos forces soient ravitaillées par des canons

 24   séparés de l'aide humanitaire et même l'accès de l'aide humanitaire était

 25   bloqué. Je me souviens que par exemple les médecins sans frontières en

 26   n'avaient pas suffisamment du matériel médical, si je ne me trompe.

 27   Q.  Passons à la page 2 de ce document tant dans la version anglaise que

 28   dans la version en B/C/S, et au paragraphe 4. Bien, je vois que les deux

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  1   versions sont affichées.

  2   Mon Général, à la première ligne du paragraphe 4 il est dit que la majorité

  3   de la réunion est portée sur la question qui tenait le plus à cœur de

  4   Mladic, à savoir l'effet des sanctions sur les Serbes de Bosnie. De quelle

  5   sanction est-il ici question et pourquoi était-elle en vigueur, rapidement,

  6   s'il vous plaît, si vous en souvenez ?

  7   R.  Il y avait toute une série de sanctions qui remontaient au tout début

  8   de cette crise. Il s'agissait de sanctions qui avaient été imposées non

  9   seulement aux Serbes de Bosnie mais à la Serbie également. Il était

 10   question de la circulation d'armes, et cetera, il faudrait que je consulte

 11   les documents pour vous fournir davantage de détails.

 12   Q.  Vers la fin du paragraphe, il est dit que le général Mladic a menacé

 13   d'organiser un blocus de toutes les enclaves, y compris Sarajevo si les

 14   sanctions n'étaient pas levées. Et à la page 2 de la version anglais, il

 15   est dit : "Qu'il exigeait que l'on accepte ces conditions d'ici le 15 mars

 16   faute de quoi il imposerait un blocus sur toutes les enclaves," et à la

 17   page suivante de la version en B/C/S et dans la version anglaise vous

 18   pouvez voir la fin de ce passage.

 19   Mon Général, quelle était votre réaction vis-à-vis de cette menace de

 20   blocus de la part du général Mladic ?

 21   R.  Tout d'abord, je dois souligner qu'en agissant ainsi, il attaquerait de

 22   fait la communauté internationale et qu'il y aurait forcément des

 23   conséquences à ces actes. Ensuite, je lui ai dit qu'il m'empêcherait de

 24   faire ce qu'on m'avait ordonné de faire et que l'étape suivante est que, si

 25   nous pouvions ne pas le faire, nous devrions faire le ravitaillement par

 26   voie aérienne et que enfin de compte cela impliquerait de faire participer

 27   l'OTAN qui devrait envoyer son appui aérien pour accompagner les

 28   hélicoptères.

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  1   Q.  Alors, si je passe au paragraphe 7, de la page 3 de la version anglaise

  2   et de la version en B/C/S, il est question d'une autre réunion entre vous-

  3   même et le général Mladic qui a eu lieu à Vlasenica le 7 mars, et vous avez

  4   fait allusion au fait que le général Mladic vous avez donné l'autorisation

  5   de vous rendre à Srebrenica ? Vous êtes-vous effectivement rendu dans cette

  6   enclave à ces dates ?

  7   R.  Oui. Il y avait eu au moins un si ce n'est deux véhicules

  8   d'approvisionnement qui m'ont accompagné dans l'enclave. Ils ont suivi

  9   différents trajets mais, si je me souviens bien, oui, je me suis rendu dans

 10   l'enclave.

 11   Q.  Vous êtes-vous rendu dans la ville de Srebrenica elle-même, et à la

 12   base du Bataillon néerlandais ?

 13   R.  Oui, je rendais visite à cette unité mais ce faisant on m'a montré la

 14   ville. J'ai rencontré différents officiels. J'ai inspecté les points de

 15   collecte des armes, et cetera.

 16   Q.  Pour la Chambre de première instance, pourriez-vous nous dire quels

 17   sont vos souvenirs relatifs à cette base du Bataillon néerlandais ?

 18   Qu'avez-vous observé sur place, quelle était la situation ?

 19   R.  L'entrée dans l'enclave se faisait via un poste de contrôle spécifique.

 20   Il était clair qu'il contrôlait tous les mouvements de la FORPRONU et des

 21   convois d'approvisionnement à l'entrée et à la sortie de l'enclave. Je ne

 22   me souviens plus si c'était en arrivant ou en partant mais l'un des

 23   véhicules de ravitaillement a été l'objet d'une fouille détaillée à ce

 24   poste de contrôle. Le Bataillon néerlandais étaient basés à un lieu appelé

 25   Potocari. C'était à l'extérieur de Srebrenica dans une usine désaffectée.

 26   Il y avait un certain nombre de structures autour l'usine elle-même. Ils

 27   étaient basés dans ces lieux. La ville elle-même était construite le long

 28   d'une route qui allait jusqu'à cette vallée, et à la périphérie de

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  1   l'enclave, et en particulier à proximité de cette ville, il y avait une

  2   série de postes d'observation que j'avais pu visiter.

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Thayer, mais je

  4   voulais vous informer de ce que -- pendant un très bref laps de temps, nous

  5   avons une vingtaine de lignes de compte rendu d'audience. Mais, bon, cela

  6   s'est arrêté. Alors, peut-être que les techniciens pourront voir ce qui

  7   s'est passé et cela pourra permettre de résoudre le problème.

  8   M. THAYER : [interprétation] Je vois qu'il est question de

  9   Mme Baxendale dans mon compte rendu d'audience. Alors, je ne sais pas ce

 10   que nous obtenons. Cela vient peut-être de l'extérieur.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Cela n'a rien à voir avec ce

 12   procès en tout cas. Poursuivez, je vous en prie.

 13   M. THAYER : [interprétation]

 14   Q.  Mon Général, pourriez-vous décrire la situation que vous avez observé

 15   le contingent du Bataillon néerlandais auquel vous avez rendu visite ?

 16   Quels étaient l'approvisionnement et sa capacité opérationnelle ?

 17   R.  Lorsque le bataillon avait été déployé, si je me souviens bien, il

 18   remplaçait un bataillon -- une Unité canadienne. Les Serbes de Bosnie

 19   avaient empêché tous leurs ravitaillements initiaux en munitions et en

 20   armes. Ils avaient empêché le déploiement dans l'enclave. Il y avait

 21   pénurie de certains biens. Ils n'avaient pas ravitaillé certaines denrées,

 22   notamment un ravitaillant en carburant. Je ne me souviens pas des détails

 23   mais je sais qu'il y avait un approvisionnement limité pour certaines

 24   munitions puisque dès le début il n'avait pas été possible de porter tout

 25   l'approvisionnement. Le bataillon ne mourrait pas de faim mais le menu

 26   n'était pas très varié à cette époque.

 27   Q.   Vous avez dit avoir apporté des ravitaillements médicaux de médecins

 28   sans frontière, lors de votre visite à Srebrenica avez-vous rencontré des

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  1   ONG, mon Général ?

  2   R.  Je ne me souviens pas avoir rencontré des ONG en particulier. Je sais

  3   que des représentants des ONG, c'était tous réunis au QG du bataillon, à un

  4   moment lorsque je m'y trouvais, et je le dis, avais rencontré.

  5   Q.  Excusez-moi. Je vais essayer de ménager une plus grande pause. Les

  6   représentants des ONG vous ont-ils décrit la situation à leurs yeux ?

  7   R.  Oui, mais j'en étais déjà conscient, d'une certaine manière, grâce aux

  8   rapports que j'obtenais dans mon propre QG. Alors, au Commissariat aux

  9   Réfugiés des Nations Unies, il faisait entrer une aide alimentaire et il

 10   avait souligné qu'il y avait pénurie des rations de base qui pénétrait dans

 11   l'enclave. Il y avait de pénurie d'approvisionnement de certains

 12   équipements médicaux. Bon. Encore une fois, je ne me souviens pas des

 13   détails exacts mais il me semble que, dans l'un de nos camions, il y avait

 14   des équipements médiaux -- des approvisionnements médicaux pour médecins

 15   sans frontière.

 16   Q.  Vous avez déjà signalé qu'une réunion avait été prévue pour le 7 mars.

 17   Avez-vous ensuite, effectivement, à nouveau rencontré le général Mladic, le

 18   7 ?

 19   R.  Oui, nous nous sommes rencontrés à Vlasenica comme prévu lorsque je

 20   revenais de Srebrenica.

 21   Q.  Vous souvenez-vous si, oui ou non, vous avez fait part au général

 22   Mladic les impressions que vous avez eues lors de votre visite de

 23   Srebrenica ?

 24   R.  Je ne me souviens pas avoir fait exactement ce que vous venez de

 25   décrire, mais oui nous avons parlé de la situation de l'enclave.

 26   Q.  Et vous souvenez-vous s'il a dit la moindre chose relative au

 27   réapprovisionnement des enclaves ?

 28   R.  Mon souvenir de cette réunion était qu'elle s'inscrivait plutôt dans la

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  1   lignée de la réunion de Jahorina. Alors, comme disait le général Mladic,

  2   ces enclaves étaient vraiment un gros embêtement et j'avais les empêchées

  3   de devenir un problème.

  4   Q.  Très bien.

  5   M. THAYER : [interprétation] Passons à la pièce 65 ter 2934. Pouvons-nous

  6   l'afficher sur le prétoire électronique ?

  7   M. JOSSE : [interprétation] Pouvons-nous avoir à nouveau le numéro ?

  8   M. THAYER : [interprétation] Oui, le numéro 2934.

  9   Q.  Nous constatons qu'il y fait référence à la réunion du

 10   7 mars entre le général Mladic et vous-même. Donc, si vous me le permettez,

 11   mon Général, nous allons passer au bas de la page 1, au paragraphe 4. Cela

 12   figure à la page 2 dans la version B/C/S. Il est dit que : "Le général

 13   Mladic vous a demandé quelles étaient vos impressions suite à votre visite.

 14   Et vous avez fait part de votre préoccupation vis-à-vis des pénuries

 15   d'approvisionnements médicaux dans la zone et qu'une manière général

 16   pénurie d'approvisionnement du Bataillon néerlandais." Cela se poursuit à

 17   la page 2 de la version anglaise. Il est dit que : "Mladic a signalé qu'il

 18   avait autorisé les convois alimentaires médicaux vers Srebrenica et Zepa

 19   ces dernières 24 heures."

 20   Mon Général, qu'est-ce que cela vous a inspiré, si tant est que cela vous

 21   ait inspiré quoi que ce soit, étant donné votre conversation du 4 mars lors

 22   de laquelle le général avait autorisé un convoi qu'est-ce que cela vous

 23   inspirait quant à son autorité pour approuver ou interdire leur

 24   réapprovisionnement des enclaves ?

 25   R.  Bien, cela confirme l'avis que mon prédécesseur et moi-même avions de

 26   longue date, à savoir que c'était Mladic qui décidait. En fait, il y avait

 27   un contrôle central des restrictions et des ordres, contrôle réalisée par

 28   lui et par son QG.

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  1   Q.  Mon Général, pendant cette réunion, vous souvenez-vous que le général

  2   Mladic vous ait fait part de ses intentions au sujet de la taille ou des

  3   délimitations des enclaves de l'est ?

  4   R.  Non, il est toujours périlleux de parler d'un territoire sans carte

  5   sous les yeux mais entre l'enclave de Srebrenica et l'enclave de Zepa, il y

  6   avait une route est-ouest qui était importante pour les Serbes. Cette route

  7   se trouvait en dehors des délimitations de l'enclave de Srebrenica;

  8   cependant, elle était surplombée par les positions -- par les positions de

  9   Bosnie -- des Musulmans de Bosnie depuis l'enclave, donc, elle a été

 10   surplombée et attaquée, donc, c'était une préoccupation pour Mladic. Et

 11   j'imagine également pour ses subordonnés dans la zone.

 12   Q.  Bien.

 13   M. THAYER : [interprétation] Passons maintenant au paragraphe 5, de la page

 14   2 de la version en langue anglaise, et en langue B/C/S.

 15   Q.  Il est question de poste d'observation d'un ou plusieurs postes

 16   d'observation de la FORPRONU dans cette zone. Ensuite, il est question

 17   d'une intervention du général Mladic. Pouvez-vous nous dire en quoi

 18   consistait cette intervention du général Mladic ? 

 19   R.  Il y avait deux principaux arguments. Tout d'abord, le fait que l'ONU

 20   avait autorisé les défenseurs de Srebrenica en l'occurrence à étendre les

 21   territoires de la zone de sécurité pour inclure cette route en particulier.

 22   Cela s'était donc fait à son avantage. Le deuxième argument de Mladic était

 23   que les zones de sécurité étaient à son avis beaucoup plus, beaucoup plus

 24   petites qu'elles ne l'étaient maintenant et il l'a signalé sur la carte. Il

 25   l'a signalé sur la carte de -- elles étaient petites et je crois que, dans

 26   ce paragraphe, il est question de la superficie de quelques cinq kilomètres

 27   sur un kilomètre. Donc, c'est ce qui nous a été indiqué à cette réunion.

 28   Q.  Et si nous allons un peu plus loin dans ce rapport, il est dit que

Page 17485

  1   Mladic a expliqué qu'il procéderait à des attaques dans l'enclave pour

  2   détruire l'armija mais qu'il respecterait son interprétation des

  3   délimitations des zones de sécurité.

  4   A votre avis, que voulait-il dire par là ?

  5   R.  Bien. N'oubliez pas que même si je parle d'une thèse maintenant comme

  6   si c'était une idée qui était fixe, ce n'était rien de tel. En fait,

  7   c'était une thèse qui est en évolution perpétuelle. Il y a eu une réunion à

  8   Jahorina, le fait que j'ai parcouru le territoire des Serbes de Bosnie

  9   jusqu'à Srebrenica et j'ai eu cette réunion du 7 mars. Tout ceci me donnait

 10   davantage d'information et cela permettait d'étalonner ma thèse. J'ai été

 11   alors confronté au commandant des forces Mladic et il me confirmait ce que

 12   j'avais déjà commencé à concevoir comme idée, à savoir qu'il allait vouloir

 13   réduire les zones de sécurité, réduire les enclaves afin qu'elles

 14   constituent un moindre problème si je pouvais confirmer l'exactitude de ma

 15   thèse. 

 16   Q.  Vous avez parlé de vos visites dans le territoire détenu par les Serbes

 17   de Bosnie et dans quelle mesure ces visites sont venues confirmer ou

 18   infirmer votre thèse.

 19   R.  Bien, j'ai été frappé par leur vacuité. Il n'y avait très peu de

 20   personnes et il y avait très peu d'hommes qui étaient en âge de combattre.

 21   Q.  Et qu'est-ce que cela vous a inspiré ?

 22   R.  Bien, qu'il y avait une pénurie d'effectifs pour défendre ces zones et

 23   il devait trouver une manière de libérer des forces.

 24   Q.  Alors, un peu plus tard dans le rapport, le général Mladic, en vue de

 25   restreindre le ravitaillement en aide alimentaire, en médicaments et en

 26   carburant.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'était à la page suivante dans la

 28   version B/C/S.

Page 17486

  1   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Vous souvenez-vous qui vous l'a dit ? Et vous souvenez-vous de votre

  3   réaction, mon Général ?

  4   R.  Bien, j'ai expliqué qu'encore une fois, ce serait interprété comme

  5   étant une attaque à l'encontre des zones de sécurité, cela serait

  6   interprété de la sorte par la communauté internationale par le Conseil de

  7   sécurité, et cetera. Et je lui ai dit qu'à long terme, cela irait à

  8   l'encontre des intérêts des Serbes de Bosnie.

  9   Q.  Je vous poserai des questions à ce sujet un peu plus tard mais, au

 10   sujet du poste d'observation, le long de cet axe est-ouest, vous souvenez-

 11   vous ce qui s'est finalement passé au sud de

 12   l'enclave ?

 13   R.  Oui. Le territoire a été attaqué et, si je me souviens bien, il a été -

 14   - il a essuyé les tirs d'un char des Serbes de Bosnie et les occupants se

 15   sont finalement retirés. Je ne sais plus exactement quand cela set produit,

 16   mais c'était avant la chute de Srebrenica.

 17   Q.  Enfin, sur ce document, mon Général, il y a un commentaire à la fin du

 18   paragraphe 5, il y est question de votre interprétation de cette discussion

 19   avec le général Mladic. Pourriez-vous ajouter quelque chose ou étoffer

 20   cette interprétation ? Pensez-vous que cela révélait la capacité ou

 21   l'incapacité du général Mladic à mener cette guerre sur deux fronts ?

 22   R.  Bien, vous voyez à la formation de la thèse -- je parle après le coup.

 23   C'est un rapport qui a été rédigé sur le champ. En fait, ce que vous voyez

 24   c'est que mon chef de cabinet militaire répète ce que j'avais dit. C'était,

 25   en fait, la thèse que nous commencions à concevoir, à savoir que les Serbes

 26   de Bosnie n'avaient pas suffisamment de force pour faire ce qu'ils avaient

 27   besoin de faire s'ils n'arrivaient pas à réduire les enclaves.

 28   Q.  Dans votre déposition vous avez dit que outre le commandement militaire

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  1   supérieur des Serbes de Bosnie, vous avez rencontré les dirigeants

  2   politiques. Je voudrais attirer votre attention sur une des réunions que

  3   vous avez eues avec le président Karadzic dans un hôtel près de Pale le 5

  4   avril. A cette réunion, vous étiez chacun accompagné d'une personne, vous

  5   souvenez-vous de cette réunion, mon Général ?

  6   R.  Non, je ne m'en souviens pas spécifiquement. Je sais qu'il y a eu une

  7   série de réunions de la sorte entre le mois d'avril et le début du mois de

  8   mai. Cette série de réunions a commencé début avril, donc, j'imagine que

  9   vous faites ici allusion à la première de ces réunions.

 10   Q.  Très bien. Nous allons examiner les différents rapports de ces réunions

 11   plutôt le rapport de ces différentes réunions. Pour quelle raison vous

 12   êtes-vous -- avez-vous rencontré le président Karadzic dans ces

 13   circonstances ?

 14   R.  Tout d'abord, je voulais poursuivre le dialogue avec les Serbes de

 15   Bosnie. Cela semblait être un rôle dans la situation et ensuite je voulais

 16   jouer mon rôle d'appui à M. Akashi plutôt pour poursuivre la cessation des

 17   hostilités -- pour poursuivre l'application de l'accord de cessation des

 18   hostilités. Donc, j'avais tout intérêt à avoir un dialogue avec toutes les

 19   parties et pas uniquement avec le commandement militaire. Si je me souviens

 20   bien, c'est le président Karadzic lui-même qui voulait que nous nous

 21   réunissions de la sorte dans cet hôtel et il a dicté les conditions et les

 22   participants.

 23   Q.  Très bien, mon Général. Pourrions-nous maintenant passer à la pièce 65

 24   ter 2935. Je vois que nous avons également la version en B/C/S.

 25   Voyez-vous ce rapport, mon Général ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous voyez que cela commence par un résumé de la réunion entre le

 28   président Karadzic et vous-même, et il est dit que c'était une réunion

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  1   secrète et privée.

  2   Mon Général, ce caractère secret et privé était-il un fruit de votre choix

  3   ou de celui du président Karadzic ?

  4   R.  Je pense que c'était son choix.

  5   Q.  Savez-vous pourquoi il voulait cette réunion ainsi de manière secrète ?

  6   R.  Dans mon souvenir, il a jugé plus simple de discuter en groupe

  7   restreint plutôt qu'avec de nombreux individus autour de lui, et nous nous

  8   sommes rendus compte au fil du temps qu'il y avait une certaine tension

  9   entre les politiques et les militaires à Pale, et s'agissant des positions

 10   qu'ils défendaient respectivement vis-à-vis de cette crise et de la manière

 11   de la résoudre. Il me semble qu'à ce moment-là, les Musulmans de Bosnie

 12   savaient qu'une attaque allait se produire vers la fin du mois de mars ou

 13   vers le début du mois d'avril. En réalité, les Musulmans de Bosnie avaient

 14   déjà attaqué et je crois que la réunion est intervenue juste après cet

 15   événement.

 16   Q.  Bien. Examinons le document, ce document dit que le président Karadzic

 17   était accompagné du Dr Zametica. J'attire plus particulièrement votre

 18   attention sur le troisième paragraphe de l'anglais. J'aimerais que l'on

 19   fasse défiler la version en B/C/S pour pouvoir prendre connaissance de ce

 20   troisième paragraphe en B/C/S. Merci. On y lit dans ce paragraphe que vous

 21   exprimez de graves préoccupations vis-à-vis d'activités menées récemment

 22   par la VRS, et notamment vis-à-vis d'un nombre accru d'attaques contre des

 23   zones de sécurité et des violations du statut de zone d'exclusion totale,

 24   préoccupé du fait que des membres des forces de la FORPRONU ont été

 25   directement visés, et ensuite, vous parlez éventuellement de l'obligation

 26   de recourir à des frappes aériennes de l'OTAN pour riposter face à de

 27   telles actions.

 28   Alors, vous souvenez-vous de ce que vous a dit M. Karadzic à propos

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  1   de l'approvisionnement des enclaves ? Quel était son point de vue sur la

  2   situation en matière d'approvisionnement des enclaves ?

  3   R.  Ce n'était pas seulement son avis, l'avis était partagé. On

  4   pensait qu'en réalité, nous approvisionnions, c'est-à-dire nous, les

  5   Nations Unies, nous approvisionnions les Musulmans de Bosnie qui

  6   défendaient les enclaves et que nous faisions appel, en réalité, à des

  7   forces supplémentaires pour procéder à cet approvisionnement. Je n'ai plus

  8   de souvenir précis de discussion dans ce sens qui aurait eu lieu au cours

  9   de la réunion qui est décrite ici, mais si je prends connaissance de ce

 10   rapport aujourd'hui, je me rends compte que c'est ce dont il s'agit.

 11   Q.  Merci beaucoup. Passons à la deuxième page de ce document, il est dit

 12   qu'il ne facilitera pas les déplacements de l'aide humanitaire pendant le

 13   blocus, et cetera. Vous souvenez-vous de tout cela ?

 14   R.  Oui, oui. Mais cela nous en avions déjà parlé à Jahorina également. Si

 15   on nous fait cela et bien nous n'aiderons personne d'autre, nous non plus.

 16   Q.  Et ceci n'avait rien à voir avec l'approvisionnement des forces de la

 17   FORPRONU, c'est cela ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Nous allons maintenant examiner brièvement le neuvième paragraphe du

 20   document, c'est un paragraphe qui se trouve en page --

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Attendez, il y a un problème.

 22   Général Miletic, tout va bien ? Le problème est résolu ?

 23   L'ACCUSÉ MILETIC : [interprétation] Nous n'arrivons pas à suivre si les

 24   pages ne suivent pas. Est-ce que l'on ne veut pas nous permettre de suivre,

 25   je ne sais pas si l'on n'affiche pas le B/C/S, nous n'y parviendrons pas.

 26   M. THAYER : [interprétation] Très bien.

 27   Q.  La version en B/C/S est affichée comme il convient à l'écran. Nous

 28   allons examiner le neuvième paragraphe de ce document.  Dans la première

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  1   ligne de ce paragraphe, on lit que M. Karadzic a eu du mal -- a indiqué la

  2   décision -- ou indiquait que la décision avait été prise de lancer une

  3   contre-offensive. Je vous renvoie maintenant au dixième paragraphe -- au

  4   paragraphe 9, il a été dit que Karadzic a insisté pour indiquer que -- et

  5   au dixième paragraphe, on lit : "Karadzic n'a exprimé aucune préoccupation

  6   s'agissant de la menace constituée par d'éventuelles interventions de

  7   l'OTAN et a annoncé qu'il était tout à fait prêt à faire face à l'OTAN."

  8   Général, compte tenu des termes utilisés par M. Karadzic ici, quelles

  9   ont été les conclusions que vous avez tirées de cette rencontre s'agissant

 10   de la position des Serbes de Bosnie ?

 11   R.  Bien, je vois à partir de ce texte que l'attaque a bien eu lieu, enfin

 12   l'attaque dont j'ai parlé tout à l'heure que les Musulmans de Bosnie

 13   avaient lancée une offensive. Le cessez-le-feu était devenu caduc dans les

 14   faits et il a fallu attendre la fin du mois d'avril pour que tout le monde

 15   s'en rende compte, mais enfin là c'est vraiment le début de la fin. J'ai du

 16   mal à me souvenir ce qui m'est passé par la tête en avril maintenant que je

 17   sais ce qui s'est passé depuis et que j'ai entendu ce que j'ai entendu

 18   depuis. Mais il me semble qu'à l'époque je me suis dit qu'en réalité, ceci

 19   correspondait à ce que nous avions déjà commencé à observer, fin février,

 20   début mars, et ce que nous avions constaté depuis cette réunion à Jahorina

 21   et depuis mes visites à Srebrenica. Les Serbes de Bosnie allaient lancer

 22   une contre-attaque, allaient exercer une pression supplémentaire sur les

 23   zones de sécurité particulièrement celles se trouvant à l'est, et que pour

 24   eux l'ONU, l'OTAN allait être neutralisé et qu'ils étaient en mesure de

 25   nous contrôler en imposant des limites à notre liberté de mouvements et en

 26   entravant notre ravitaillement, et cetera.

 27   Q.  Bien, Général, je crois que l'heure de la première pause approche.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, il vous reste deux ou trois

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  1   minutes, mais si vous souhaitez vous interrompre, dès maintenant, c'est

  2   tout à fait possible.

  3   M. THAYER : [interprétation] Oui, ce serait souhaitable, Monsieur le

  4   Président. Nous allons examiner un autre document.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Nous allons faire une pause

  6   de 30 minutes, mais pas plus. Nous allons reprendre après pour rattraper le

  7   temps perdu. Merci.

  8   --- L'audience est suspendue à 11 heures 39.

  9   --- L'audience est reprise à 12 heures 12.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avant de poursuivre, je suis heureux de

 11   pouvoir vous annoncer que le compte rendu d'audience fonctionne à nouveau.

 12   Nous allons donc pouvoir reprendre nos travaux, la partie qui n'est pas

 13   apparue sur nos écrans en début de séance sera rajoutée au compte rendu qui

 14   apparaît désormais sous nos yeux.

 15   Monsieur Thayer, poursuivez.

 16   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Q.  Rebonjour, Général.

 18   R.  Rebonjour.

 19   Q.  Nous avons donc sous les yeux le compte rendu d'audience mais nous

 20   allons tâcher de poursuivre lentement de manière à ce que tout le monde

 21   puisse suivre l'examen que nous allons faire des versions en anglais et en

 22   B/C/S des documents à venir, et il nous faudra continuer à ménager une

 23   pause entre mes questions et vos réponses.

 24   J'aimerais attirer votre attention sur une série de réunions qui remontent

 25   au mois d'avril, et en particulier au 20 avril. Vous avez rencontré des

 26   représentants tant des Musulmans que des Serbes de Bosnie.

 27   M. THAYER : [interprétation] Alors, sans attendre examinons le rapport de

 28   cette réunion, c'est la pièce 65 ter 2936.

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  1   Q.  Voyez-vous ce document, Général ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Sous le titre "Rencontre avec des représentants du gouvernement de

  4   Bosnie," prenons le paragraphe 4, en première page de la version en anglais

  5   que de la version en B/C/S. M. Akashi et vous-même avez dû répondre à

  6   certaines exigences du gouvernement de Bosnie. Il demandait notamment une

  7   interprétation plus stricte du mandat confié à la FORPRONU. Alors, je vous

  8   demanderais de bien vouloir nous dire quelle a été la réponse que vous avez

  9   donnée à cette exigence vous-même et M. Akashi demande, vous invitant à

 10   davantage de vigueur dans l'exécution de votre mandat ? Je vous invite

 11   notamment à examiner le bas de la première page et le haut de la deuxième

 12   dans les deux versions.

 13   Pourriez-vous expliquer peut-être de manière un peu plus approfondie aux

 14   Juges de la Chambre comment vous avez répondu à ces représentants du

 15   gouvernement de Bosnie, et si c'était là un cas isolé, une exigence que

 16   vous entendiez pour la première fois, ou si elle ne faisait que répéter des

 17   exigences formulées antérieurement ?

 18   R.  Non, ce n'était pas la première fois. Il s'agissait là d'un terme

 19   récurrent que l'on retrouve finalement tout au long de l'histoire de la

 20   participation de la FORPRONU en Bosnie. Chacune des parties tentait

 21   d'utiliser l'ONU et les forces onusiennes présentes dans le pays à leur

 22   avantage. J'avais une expression d'ailleurs qui était bien à moi et je

 23   disais qu'il s'agissait d'une situation où il y avait otage et bouclier. A

 24   de nombreux égards, les Musulmans de Bosnie considéraient que les Nations

 25   Unies pouvaient leur servir d'outils de légitimation, pouvaient servir

 26   d'appui à leur population, et puis, s'agissant de l'OTAN, un appui à leur

 27   cause d'un point de vue militaire. Les Serbes de Bosnie voyaient, quant à

 28   eux, les Nations Unies plus comme un otage qu'un bouclier. En réalité, ils

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  1   les voyaient comme un moyen de contrôler, d'influencer la communauté

  2   internationale. Et je crois que c'est l'exemple que vous prenez ici, est

  3   une manifestation de cet état de faits dans le contexte en question.

  4   Q.  Passons au septième paragraphe, à la page 2 de la version en anglais et

  5   en B/C/S. Il y a un résumé ici où l'on lit que : "Vous étiez présent lors

  6   de cette réunion ainsi que M. Akashi, président Karadzic, le professeur

  7   Koljevic, M. Krajisnik et le général Gvero." On y lit que : "Au cours de la

  8   réunion, trois grands termes ont été abordés, une prorogation de l'accord

  9   sur la cessation des hostilités, la sécurité et l'approvisionnement des

 10   forces de la FORPRONU et les rapports de Sarajevo."

 11   Vous souvenez-vous avoir eu une conversation en particulier avec le général

 12   Gvero au cours de cette réunion sur le thème des restrictions de carburant

 13   et de l'approvisionnement en carburant de Srebrenica ?

 14   R.  Si ma mémoire est bonne, nous approvisionnions en carburant les

 15   Musulmans de Bosnie qui défendaient les enclaves. Nous en avions

 16   suffisamment pour nous-mêmes, et c'est-à-dire les Serbes de Bosnie

 17   surveillaient ce que nous avions et ce qui était utilisé.

 18   Q.  Lorsque vous dites que les Nations Unies avaient suffisamment de

 19   carburant et de réserve, et cetera, qui disait cela ?

 20   R.  Le général Gvero.

 21   Q.  Bien. J'aimerais maintenant que nous passons au paragraphe numéro 9 de

 22   ce document, en page 3 dans les deux versions, la page suivante. Au titre

 23   indiquant : "Sécurité et approvisionnement du personnel Nations Unies," on

 24   lit la chose suivante : "M. Akashi a évoqué la question d'attaques visant

 25   directement la FORPRONU et le refus de livrer l'approvisionnement aux

 26   membres de la FORPRONU dans les enclaves." Par la suite, le rapport indique

 27   que : "Lorsque le général Gvero s'est vu demander ou poser des questions

 28   sur la question sur le carburant par le général Smith, celui-ci a donné une

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  1   explication un peu vague selon laquelle il disposait d'information

  2   indiquant que la FORPRONU en particulier -- les membres de la FORPRONU à

  3   Srebrenica fournissaient à l'ABiH le carburant." Il dit également par la

  4   suite : "Savoir que la FORPRONU disposait de réserves suffisantes."

  5   Ce passage reflète-t-il véritablement votre souvenir de ce qui s'est dit au

  6   cours de la réunion ?

  7   R.  Oui. En gros, oui.

  8   Q.  Vous avez déjà effleuré la question, si vous gardez le haut de cette

  9   même page en anglais, il va falloir reculer d'une page en B/C/S, pour

 10   examiner le bas de la page qui nous intéresse. Je vais redonner lecture de

 11   ceci» : "Nous avons évalué la situation et il doit encore prendre une

 12   décision officielle visant à engager les Serbes de Bosnie dans la guerre.

 13   Toutefois, la pression exercée sur les dirigeants serbes et ces fissures

 14   entre les hommes politiques et les membres de l'armée étaient

 15   particulièrement claire."

 16   Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous parler de ces fissures qui semblent se

 17   dessiner entre les autorités civiles serbes et les autorités militaires au

 18   cours de cette période, d'après votre souvenir ?

 19   R.  Dans mon souvenir, moi-même et mes proches collaborateurs commencions à

 20   penser que c'était quelque chose qui se développait dans notre esprit

 21   depuis le mois de février, pensiez donc qu'il y avait une certaine tension

 22   entre les dirigeants politiques et militaires à Pale, au sein donc du camp

 23   serbe.

 24   Quel était l'objet de ces tensions ? Nous ne l'avons jamais su avec la plus

 25   grande certitude mais il est probable que la question ait été de savoir

 26   s'ils devaient poursuivre les combats ou conclure un accord. Je pense que

 27   c'était cela le cœur du problème mais je ne pense pas que nous n'ayons

 28   jamais obtenu d'information qui ait pu nous convaincre de cela et de la

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  1   nature de cette tension. Le fait est que mes rencontres avec Karadzic se

  2   tenaient dans le secret et à l'écart des autres, et il me semble que cela

  3   est un exemple d'éléments qui nous ont emmenés à penser qu'il y avait peut-

  4   être divergences de vue au sein des dirigeants des Serbes de Bosnie. En

  5   l'espèce, et si mon souvenir est bon, je crois que la question qui se

  6   posait là c'était la question de l'aéroport et de savoir s'il fallait qu'il

  7   reste ouvert. Je crois qu'en fait, il n'y avait pas véritablement parfaite

  8   communication entre la main droite et la main gauche. Mais, en ce qui

  9   concerne les détails, je dois dire que je ne m'en souviens pas avec

 10   précision.

 11   Q.  Très bien. Alors, nous allons regarder une dernière partie de ce

 12   rapport et voir quel est votre souvenir de la question qui a été abordée

 13   ici. C'est à la page 3, tant dans l'anglais que dans le B/C/S, paragraphe

 14   10, on y parle de l'aéroport de Sarajevo. On y voit la chose suivante :

 15   "Nous avons remarqué que Krajisnik était en colère parce que l'engagement

 16   qu'il avait pris lors d'une réunion tenue la veille pour veiller à ce que

 17   toutes les garanties nécessaires s'agissant des civils des Nations Unies

 18   soient données, que cet engagement n'ait pas été honoré."

 19   Cet élément a provoqué une discussion nourrie entre Karadzic et le général

 20   Gvero; vous souvenez-vous de cette partie-là de la réunion, Général ?

 21   R.  Bien, outre ce à quoi j'ai fait allusion, s'agissant de ce qui me

 22   paraît s'être passé à ce moment-là, je n'ai pas de souvenir précis de cet

 23   échange.

 24   Q.  Très bien. J'aimerais maintenant que nous parlions d'une réunion qui a

 25   eu lieu une dizaine de jours plus tard, le 30 avril, toujours avec M.

 26   Akashi, le général Janvier qui accompagnait, et vous avez rencontré à cette

 27   occasion le général Tolimir et le président Karadzic, M. Koljevic et M.

 28   Krajisnik.

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  1   M. THAYER : [interprétation] Il s'agit de la pièce 65 ter 2937 et je

  2   demanderais qu'elle soit affichée à l'écran.

  3   Je souhaite simplement attirer votre attention sur une partie de ce

  4   document. Le paragraphe 12 en troisième page. Nous n'avons pas de version

  5   traduite en B/C/S de ce document. Il ne s'agit que de quelques phrases qui

  6   m'intéressent. J'en donnerai lecture pour qu'elles figurent au compte

  7   rendu, et j'espère que vous les verrons

  8   -- verrez s'afficher à l'écran. C'est le document 2937 - je le répète. Ah,

  9   je vois qu'il existe une version en B/C/S, parfait.

 10   Q.  Passons au paragraphe 12, s'il vous plaît, rubrique : "Questions

 11   diverses." C'est la page 6 de la traduction.

 12   Il y est indiqué que vous trois - M. Akashi, le général Janvier et vous-

 13   même - vous avez protesté à cause du carburant qui ne parvenait pas aux

 14   enclaves, aux enclaves orientales. On a annoncé le fait que les Serbes

 15   persistent pour dire que les forces de la FORPRONU fournissaient les

 16   Musulmans en carburant. Et puis, on voit la dernière remarque faite par

 17   Karadzic : "Nous considérons les convois de la FORPRONU et les convois

 18   humanitaires comme des convois commerciaux destinés aux Musulmans de sorte

 19   que nous subissons deux sortes de restriction de sanction et nous pouvons

 20   nous attendre à d'autres."

 21   Alors, que pensez -- à quoi se réfère-t-il ? A quoi il pense quand il dit :

 22   "Double restriction et sanction" ?

 23   R.  Vous m'avez déjà posé cette question et je crois qu'il pense à cela, en

 24   fait, il se réfère au fait qu'il y avait des sanctions imposées à la Serbie

 25   et aux Serbes de Bosnie également.

 26   Q.  Bien. J'attire votre attention sur la réunion que vous avez eue le

 27   lendemain.

 28   Document 2938 -- 2938 de la liste 65 ter. Il s'agit d'une réunion qui a eu

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  1   lieu le 1er mai à laquelle ont participé M. Akashi, vous, le président

  2   Karadzic et M. Krajisnik. Passons à la page 2, de la version en anglais et

  3   de la version en B/C/S également.

  4   Au paragraphe 7, on peut voir qui sont les personnes qui ont participé à

  5   cette réunion, le Dr Zametica y a été également et le général Subotic.

  6   J'attire votre attention sur la page suivante, la page 3 de la version en

  7   anglais et de la version en B/C/S également. Je pense qu'il nous faudra

  8   ralentir un peu, rubrique : "Le commentaire du commandant de la FORPRONU."

  9   Je vous demanderais de lire ce passage et notamment le dernier paragraphe

 10   où on dit : "Il est difficile de comprendre les intentions et la position

 11   des Serbes." Ce paragraphe continue sur la page suivante. Pourrions-nous

 12   passer à la page suivante, s'il vous plaît ?

 13   Mon Général, je pense que ce passage en dit suffisamment long de la manière

 14   dont on voyait la situation à l'époque. J'aimerais attirer votre attention

 15   sur quelques phrases dans ce passage, par exemple : "Il sera important

 16   d'accepter le fait que les Serbes vont réagir et réagir à cette pression et

 17   non pas se laisser porter par le désir de remonter la pression contre eux à

 18   notre tour. Nous devons être préparés à une situation qui sera longue et

 19   pénible où nous serons obligés de faire des sacrifices et nous avons

 20   l'intention de

 21   -- des forces de maintien de la paix, les pressions exercées par le

 22   gouvernement de garder les routes vers Sarajevo ouvertes par l'air ou par

 23   la terre, et les réactions concernant les zones de sécurité, les zones de

 24   l'exclusion aérienne se sont difficiles." Pourriez-vous nous expliquer un

 25   peu cela ?

 26   R.  Il y a eu toute une série de réunions et toutes ces notes ne sont pas

 27   mes notes, mais les notes faites par un officier de mon état-major qui a

 28   déjà rédigé plusieurs comptes rendus de réunions. Alors, il s'agit là des

Page 17499

  1   réunions entre M. Akashi, tenues par

  2   M. Akashi, lors desquelles il a essayé d'établir ou de rétablir les accords

  3   portant sur la cessation des hostilités. J'ai participé à ces réunions mais

  4   en accompagnant M. Akashi. Mais, de toute manière, je voulais que tous mes

  5   subordonnés soient au courant de ce qui se passe, et si je me souviens

  6   bien, il s'agissait là de quelque chose qui -- d'un thème récurrent. On en

  7   parlait au téléphone lors des réunions, et cetera, et cetera. Donc, tout

  8   cela -- cette position-là, c'est le reflet de notre -- du fait que nous

  9   étions conscients que quelque chose allait se passer. C'est ce qui concerne

 10   le contexte général.

 11   Concernant ma thèse, elle a été confirmée par ce que nous avons

 12   entendu à cette réunion, et à ce moment-là, j'ai déjà commencé à étudier la

 13   manière dont nous devions agir dans les circonstances données, comment nous

 14   à la FORPRONU devions nous positionner à l'avenir, et plus précisément, la

 15   manière de voir le rôle de la FORPRONU était qu'il s'agissait des forces de

 16   maintien de paix. C'est une idée qui est née pendant la Guerre froide où

 17   une force armée est présente avec l'accord des deux parties en conflit et

 18   faire une sorte de barrière entre le parti A et le parti B. Ce que nous

 19   essayons de faire avec la FORPRONU en 1993, 1994, 1995 c'était d'interposer

 20   cette force militaire entre les parties en guerre en tant que force de

 21   maintien de paix sachant en même temps que ces parties ne souhaitaient pas

 22   parvenir à la paix alors que nous devions essayer de conduire certaines

 23   opérations et activités qui s'inscrivaient dans le cadre du maintien de la

 24   paix, et tout cela dans un contexte de tension politique même entre les

 25   pays dont les forces faisaient partie de la FORPRONU. Les tensions au sein

 26   du conseil de Sécurité lui même et moi en tant que commandant des forces

 27   sur le terrain, je devais prendre tout cela en considération et bien le

 28   comprendre. Et donc, ce que je voulais dire par ceci c'était qu'il fallait

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  1   tôt ou tard avoir recours à l'OTAN peut-être plus tôt immédiatement afin de

  2   ne pas perdre de temps et pour éviter des dégâts pas nécessaires. Je pense

  3   que c'est ça l'idée générale de ce paragraphe.

  4   Q.  Mon Général, cela n'était pas la dernière réunion. Nous avons

  5   décidé [imperceptible] qui concerne deux autres réunions. Vous avez eu

  6   encore une réunion secrète avec le président Karadzic, le

  7   9 mai. Pourriez-vous examiner, s'il vous plaît, ce rapport - c'est la pièce

  8   6D00163, s'il vous plaît.

  9   M. THAYER : [interprétation] Je demanderais à Mme l'Huissière d'afficher le

 10   document en B/C/S à l'écran et l'original en anglais pour être placé sur le

 11   rétroprojecteur.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Avons-nous la traduction de ce

 13   document ?

 14   M. JOSSE : [interprétation] Non. Mme Stewart a fait son possible pour

 15   que ce document soit traduit mais nous -- même si ce n'était pas une

 16   obligation de leur part. Mais, bon, ces documents ont été traduits mais ne

 17   sont pas introduits dans le système du prétoire électronique. De toute

 18   manière, j'aimerais remercier l'Accusation.

 19   [La Chambre de première instance se concerte]

 20   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Merci, Maître Josse.

 21   Et merci à l'Accusation également.

 22   M. THAYER : [interprétation]    

 23   Q.  Page 1, rapidement. Il serait bien de déplacer un peu le document qui

 24   est sous le rétroprojecteur. Il s'agit donc de la réunion secrète entre le

 25   président Karadzic et vous-même du 9 mai 1995, paragraphe 2, où il est

 26   indiqué que Karadzic a confirmé que les Serbes de Bosnie ont décidé

 27   d'imposer des sanctions aux Nations Unies et qu'ils envisageaient des

 28   actions militaires limitées à la défense décisive de leur territoire et non

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  1   pas sur une contre-offensive de grande envergure.

  2   Alors, vous souvenez-vous un peu plus précisément de ce que le président

  3   Karadzic vous a dit lors de cette réunion au sujet des sanctions imposées

  4   aux Nations Unies ? Sinon, ce qui a dans le document me suffit.

  5   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je demande à

  7   Mme l'Huissière de permettre à présent de voir le haut de la page 2, donc,

  8   de la version anglaise.

  9   M. THAYER : [interprétation]

 10   Q.  Bien. Passons à la page 2 de la version en anglais. Je ne sais pas où

 11   se trouve le texte correspondant dans la version en B/C/S mais il s'agit de

 12   toute façon du paragraphe numéro 5 qu'on peut voir afficher sur l'image

 13   venant du rétroprojecteur.

 14   Alors, le président Karadzic explique ici qu'il a été "convaincu,"

 15   entre guillemets, par l'armée des Serbes de Bosnie, que les Nations Unies

 16   disposaient des réserves de carburant largement suffisantes dans l'enclave.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pourrions-nous un peu ajuster le texte

 18   placé sur le rétroprojecteur ?

 19   M. THAYER : [interprétation]

 20   Q.  Donc, le président Karadzic a expliqué : "Qu'il était, entre

 21   guillemets, convaincu par l'armée des Serbes de Bosnie, que les Nations

 22   Unies disposaient des réserves largement suffisantes de carburant dans les

 23   enclaves. Et il a répété : "Que son affirmation que l'armée bosniaque a

 24   réussi à se faire des grandes réserves de carburant des sources des Nations

 25   Unies à l'intérieur de l'enclave." Alors, il a également déclaré : "Que la

 26   situation était tellement difficile que très bientôt elle échappera à

 27   chaque contrôle même au contrôle de la FORPRONU."

 28   Alors, que pensait-- à quoi se référait-il ?

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  1   R.  Autant que je me souvienne, les gouvernements qui fournissaient les

  2   effectifs pour ces contingents étaient de plus en plus inquiets et

  3   considéraient que les Nations Unies n'étaient plus capables de diriger ces

  4   forces et que pour eux ça devenait une question nationale. Ils essayaient

  5   en fait de retirer le contrôle sur ces effectifs des Nations Unies au

  6   profit du contrôle au niveau national.

  7   Q.  Bien. La dernière phrase quant à la question portant sur les vivres,

  8   les convois de vivres de courrier, et cetera, lui a été posée, il a déclaré

  9   que les Serbes ont imposé leur propre sanction contre les Nations Unies. A

 10   quoi pensait-il ? C'est quoi ces -- il a mentionné également les convois de

 11   permission, à quoi se réfère-t-il ici ?

 12   R.  Bien, il s'agit en fait des véhicules qui faisaient partie des combats

 13   et qui permettaient aux militaires qui se trouvaient dans les enclaves de

 14   prendre permission, en fait, de la -- pour la -- ils servaient à la relève

 15   des effectifs. Et je pense qu'ici, en fait, il parle plutôt de ce qui a été

 16   autorisé à être transporté par ces véhicules faisant partie des véhicules -

 17   -  que des convois particuliers.

 18   Q.  Revenons à la page -- à la première page de la version anglaise, s'il

 19   vous plaît, et je pense qu'il s'agit de la deuxième page de la version en

 20   B/C/S. Il s'agit du paragraphe numéro 3, rubrique : "Les frappes aériennes

 21   de l'OTAN."

 22   Vers la fin de ce paragraphe en anglais, il est indiqué que Karadzic vous a

 23   dit que, si l'OTAN était utilisé contre l'armée des Serbes de Bosnie, entre

 24   guillemets : "Que notre relation n'existera plus et que nous vous

 25   traiterons comme ennemis."

 26   Alors, autant que vous vous en souveniez, est-ce que ces paroles ont été

 27   fidèlement retranscrites dans ce rapport ?

 28   R.  A peu près, oui. Il fallait exercer la pression sur les Nations Unies.

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  1   Il fallait empêcher l'accès des Nations Unies, et cetera, et cetera, mais

  2   ce qui était différent dans ce cas particulier était qu'à cette époque-là,

  3   j'ai compris cela comme une tentative de semer la discorde entre moi, mes

  4   forces et l'OTAN. Et il a dit cela parce que les Musulmans de Bosnie

  5   disaient clairement qu'à leur avis, ils donnaient leur préférence à l'OTAN

  6   plutôt qu'aux Nations Unies.

  7   Q.  Bien. Passons à la page 2, il y a là un commentaire que vous avez fait.

  8   Pourriez-vous le lire et nous dire s'il y a quelque chose que vous devriez

  9   rajouter pour nous expliquer ce commentaire ?

 10   R.  Non. Non, j'ai vu qu'on a essayé de nous impliquer dans des situations

 11   où nous serions plus vus comme un objet -- comme une entité qui pourrait

 12   faire l'objet de sanctions ou de pression, et si nous l'acceptions, alors,

 13   nous tomberons sous les ordres des forces ennemies.

 14   Q.  Vous avez mentionné l'idée d'impartialité de la FORPRONU. A votre avis,

 15   à l'époque, quels étaient les facteurs qui influaient sur votre capacité de

 16   rester impartial dans cette situation ?

 17   R.  Tout d'abord, pour moi, impartialité et neutralité ne sont pas du tout

 18   la même chose même s'il y en a qui le pense. Dans le cadre de la situation

 19   qui prévalait au début de 1995 et qui -- et jusqu'aujourd'hui, il y avait

 20   l'impartialité en ce qui concerne l'envoi de l'aide humanitaire et c'était

 21   notre objectif initial et principal. Mais ce n'était pas à moi de choisir à

 22   qui cette aide était destinée. C'était quelque chose qui était décidée par

 23   le HCR. Mon travail était d'accompagner ces envois et de m'assurer qu'il

 24   parvenait à sa destination. En ce qui concerne la distribution de l'aide,

 25   cela également sortait de mes attributions. Si je devais utiliser les

 26   forces armées pour protéger mes forces pendant qu'elles exécutaient leurs

 27   missions de protection de convois humanitaires, alors, dans ce cas-là, je

 28   le faisais mais, dans la mesure nécessaire pour défendre mes propres forces

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  1   -- mais seulement pour cela. Mais si je le faisais pour tout autre raison,

  2   alors, ça voudrait dire que j'étais en train d'attaquer quelqu'un, et par

  3   ce fait même, j'aurais perdu l'impartialité, alors, avec la création des

  4   zones de l'exclusion aérienne, des zones de la sécurité, et cetera, et

  5   cetera, la FORPRONU et l'OTAN ont reçu la mission de surveiller le respect

  6   de ces zones. Et s'il y avait eu dans le cas de violation de statut de ces

  7   zones, alors, il était possible de faire appel à la force militaire, afin

  8   de rétablir la situation d'avant. Donc, si quelqu'un violait ces zones

  9   d'exclusion aérienne ou les survolait, et cetera, il fallait réagir de

 10   manière militaire, mais non pas avec l'objectif de rétablir ou de modifier

 11   l'équilibre des forces, mais tout simplement d'imposer le respect le statut

 12   de ces zones. Donc, il n'y avait pas là de neutralité, c'était tout

 13   simplement les mesures nécessaires qu'on devait prendre pour exécuter notre

 14   mission. Je pense que ça vous suffit comme explication.

 15   Q.  Oui. Je pense que cela suffit. Bien. J'aimerais bien vous poser

 16   maintenant une question au sujet d'une autre question qui s'est tenue le 21

 17   mai. Il s'agit de nouveau d'une réunion secrète entre le président Karadzic

 18   et vous-même.

 19   M. THAYER : [interprétation] Il s'agit de la pièce 6D00164. Je demanderais

 20   à Mme l'Huissière de nous aider parce qu'encore une fois, la traduction de

 21   ce document en B/C/S n'est pas intégrée dans le système du prétoire

 22   électronique. Passons au paragraphe 3. Nous allons passer directement. Je

 23   pense que nous devrions passer à la page suivante de la version en B/C/S

 24   immédiatement. Merci.

 25   Q.  J'attire votre attention sur le passage où il est indiqué que : "Vous

 26   avez exprimé votre préoccupation à cause des tirs accrus visant le

 27   personnel des Nations Unies et les infiltraient les conséquences négatives

 28   quand les coupures des approvisionnements et les réceptions de mouvements

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  1   dans les enclaves orientales." Et vous posez là la question fondamentale à

  2   Karadzic de savoir : "Si les Serbes de Bosnie souhaitaient que les Nations

  3   Unies restent en Bosnie."

  4   Qu'est-ce qu'il a dit en réponse à cette question ?

  5   R.  Il y avait deux aspects. Premièrement, les Nations Unies étaient partie

  6   prenante dans ce problème. Nous avions aidé l'ennemi, les Musulmans de

  7   Bosnie, et nous avions empêché les Serbes de Bosnie de faire ce qu'ils

  8   voulaient. Mais un autre aspect c'est qu'ils ne voulaient pas que nous nous

  9   en allions en fin de compte.

 10   Q.  Bien. Je voudrais attirer votre attention sur d'autres domaines et

 11   peut-être vous aurez peut-être l'occasion de vous prononcer à nouveau sur

 12   le sujet au vu de ces passages. Pouvons-nous passer à la page 2, c'est le

 13   paragraphe 4 ? Alors, est-ce qu'on peut retrouver le paragraphe 4 dans la

 14   version en langue B/C/S, s'il vous plaît ? En anglais, c'est en page 2.

 15   Cela porte en particulier sur la question des enclaves orientales, mon

 16   Général.

 17   Au bas du paragraphe, le président Karadzic présente les enclaves comme

 18   étant, je cite : "Des bombes à retardement qui vont exploser," et il dit

 19   que : "Les Nations Unies devraient partir des enclaves orientales mais que

 20   le HCR y serait en sécurité."

 21   Vous souvenez-vous qu'il vous l'ait dit, mon Général ?

 22   R.  Non, je ne me souviens pas de ce dialogue en particulier.

 23   Q.  Très bien.

 24   M. THAYER : [interprétation] Nous passons à la page 3 à la partie

 25   commentaire. Il s'agit de la page 3 en langue anglaise. Et il va falloir

 26   trouver le paragraphe 10 sur le rétroprojecteur.

 27   Q.  L'alinéa du milieu, le paragraphe 10 précise que : "La FORPRONU reste

 28   interlocuteur pour les Serbes de Bosnie pour faire pression sur la

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  1   communauté internationale, mais ils voudraient que les Nations Unies ne se

  2   mêlent plus des enclaves orientales."

  3   Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que vous entendiez par ce

  4   passage du rapport ?

  5   R.  Bien, cela revient à ma théorie de l'otage du bouclier dont j'ai parlé

  6   un peu plus tôt. Les deux parties avaient des relations d'otage et de

  7   bouclier avec nous, et bien sûr, ces relations étaient différentes parce

  8   que la situation et les objectifs étaient différents. En l'occurrence, pour

  9   les Serbes de Bosnie, nous pouvions servir d'otage, nous pouvions être mis

 10   sur pression, nous pouvions être utilisés -- on pouvait se servir de nous

 11   pour influencer la communauté internationale, le Conseil de sécurité, et

 12   cetera. Mais pour ce faire, pour qu'ils puissent nous influencer, il

 13   fallait que nous soyons à proximité. Donc, d'une part, ils avaient besoin

 14   de nous en tant que bouclier, mais tant que nous étions un bouclier, ils

 15   pouvaient nous utiliser comme otage. Et les deux parties se servaient de

 16   nous de la sorte.

 17   Q.  Très bien.

 18   M. THAYER : [interprétation] Nous en avons terminé avec cette pièce. Merci,

 19   Madame l'Huissière.

 20   Q.  Mon Général, dans votre déposition, vous avez déjà parlé de vos

 21   nombreuses protestations face aux ciblages de plus en plus fréquents de la

 22   FORPRONU et face aux attaques contre les zones civiles. Vous souvenez-vous

 23   avoir porté des plaintes officielles au sujet d'une activité accrue plutôt

 24   que de vous contenter d'en parler dans ces réunions ?

 25   R.  Je pense que ces réunions étaient déjà elles-mêmes officielles, mais il

 26   y avait eu également des plaintes écrites dans des cas spécifiques. Je sais

 27   que ces plaintes ont été déposées. Certaines par moi-même, d'autres ont été

 28   faites au niveau du secteur. En fait, tout dépendait des circonstances et

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  1   de la gravité du cas particulier. Mais je ne me souviens pas de détail

  2   précis.

  3   Q.  Très bien.

  4   M. THAYER : [interprétation] Passons à la pièce 2939 de la liste 65 ter.

  5   Pouvons-nous aller jusqu'au bas, au bas des deux pages.

  6   Q.  Vous pouvez voir que c'est un courrier que vous avez adressé au général

  7   Mladic; est-ce exact, Monsieur ?

  8   R.  Oui, au général Mladic.

  9   Q.  Il est daté du 26 juin 1995. Je voudrais attirer votre attention sur le

 10   deuxième paragraphe où vous dites que : "Je reçois pratiquement chaque jour

 11   des informations selon lesquelles il y a des pilonnages des zones habitées

 12   de Bihac, Srebrenica, Gorazde et Sarajevo." Ensuite, si l'on saute un

 13   paragraphe vous nous dites ensuite : "Autre ces attaques contre la

 14   population civile, il y a également de plus en plus d'information de

 15   ciblage directs de positions et de véhicules de la FORPRONU. Il y a des

 16   exemples de ces violations telles que les attaques récentes contre le poste

 17   d'observation de Gorazde, Srebrenica et Sarajevo."

 18   Monsieur, vous souvenez-vous de l'attaque des postes d'observation à

 19   Srebrenica en juin 1995 ?

 20   R.  Alors, si, dans les postes que vous avez à l'esprit et ceux que je vous

 21   ai donnés au sujet du poste d'observation qui surplombe la route dont je

 22   vous ai parlé, oui, effectivement, ce poste a été attaqué, je m'en

 23   souviens, par un ou plusieurs chars.

 24   Q.  Très bien.

 25   M. THAYER : [interprétation] Nous en avons fini avec cette pièce. Merci.

 26   Q.  Je voudrais maintenant vous parler rapidement de certains événements

 27   qui sont intervenus au mois de mai, en particulier des frappes aériennes

 28   des 25 et 26 mai. Nous venons de voir un compte rendu d'une réunion qui

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  1   était datée du 21 mai. Je vous ai montré un document du 26 juin. Donc,

  2   certains événements relativement significatifs sont intervenus pendant

  3   cette durée d'un mois environ. Alors, j'aimerais vous parler rapidement des

  4   frappes aériennes des 25 et 26 mai et de la prise d'otage par la VRS, les

  5   otages étant du personnel de la FORPRONU. Alors, je ne vais pas me pencher

  6   longuement sur ces événements, je pense que ce qui est plus pertinent ici

  7   est que vous décriviez dans quelle mesure les frappes aériennes et leur

  8   conséquence, et la prise d'otage ont une influence sur votre réflexion, sur

  9   votre thèse et sur ce que vous pensiez quant à la nécessité de l'emploi de

 10   la force aérienne après ces événements. Je pense que vous y avez fait

 11   allusion un peu plus tôt dans votre exposition mais j'aimerais que nous y

 12   revenions.

 13   R.  Au cours du mois de mai, il y a eu une succession d'incidents, la

 14   situation se dégradait de plus en plus. A la fin du mois de mai, les forces

 15   serbes de Bosnie autour de Sarajevo avaient commencé à utiliser des armes

 16   qui avaient été prises au point de collecte d'armes. Et les forces s'en

 17   servaient pour attaquer des cibles dans la zone de sécurité de Sarajevo. Il

 18   y avait toute une série d'avertissements, de protestations, et cetera. Et

 19   pendant ce mois, j'étais arrivé à une conclusion d'ailleurs. Vous en avez

 20   vu les prémisses, j'en avais donc conclu que le moment était venu de faire

 21   appliquer cette zone d'exclusion et que nous ne nous attelions à cette

 22   tâche, nous n'en aurions plus la possibilité ensuite. La pression était

 23   considérable, en effet, les affrontements s'étaient intensifiés. Il était

 24   nécessaire pour le faire de consulter l'OTAN, ce que nous avons fait. Il

 25   fallait de plus obtenir les instructions de M. Akashi, ce que nous avons

 26   fait. L'idée de se servir de la force aérienne non pas pour attaquer des

 27   armes spécifiques qui étaient extrêmement difficiles à attaquer et à

 28   localiser, l'idée était plutôt d'influencer les décideurs de Pale et les

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  1   convaincre de mettre fin à leurs activités, d'arrêter d'utiliser les armes

  2   dans les zones d'exclusion et de ne pas respecter la résolution des zones

  3   d'exclusion et qu'ils arrêtent d'attaquer les zones habitées de Sarajevo.

  4   Un avertissement avait été lancé, les attaques avaient eu lieu et ce soir-

  5   là, suite aux attaques il y a eu une réponse à ces attaques des Serbes de

  6   Bosnie avec des tirs d'artillerie dans toutes les zones de sécurité. Je me

  7   suis peut-être trompé, cela n'a peut-être pas atteint Bihac, mais je crois

  8   que cela même a atteint ce lieu. Et la plus destructive de ces attaques a

  9   tué quelque 70 personnes à Tuzla. Dans mes projets, j'avais prévu que si

 10   nous n'y arrivions pas la première fois, nous procéderions à l'escalade et

 11   cela avait été approuvé. Nous avons donc lancé une seconde série d'attaques

 12   aériennes qui a entraîné un certain nombre de prise d'otage pratiquement en

 13   une seule fois. On a vu des images à la télévision de ces otages qui

 14   étaient enchaînés à une antenne radio et à un pont je crois. Il y a eu

 15   immédiatement des réactions internationales dans le monde entier et on m'a

 16   dit d'arrêter de procéder à ces frappes. Ainsi dans les 24 heures qui ont

 17   suivi quelque 300 otages, je ne me souviens plus du nombre exact mais

 18   environ 300 ont été pris.

 19   Cela nous amène dans une période qui va jusqu'à la mi-juillet.

 20   Pendant cette période, la FORPRONU est en train de se réajuster si l'on

 21   peut dire. Elle évalue ce qui est possible de faire en plus les commandants

 22   et les décideurs politiques des Nations Unies, donc, mes supérieurs

 23   hiérarchiques sont en train également de revoir leur position pour savoir

 24   ce que va faire la FORPRONU dans cette période, juste après le mois de mai.

 25   Est-ce que je vous l'ai suffisamment expliqué ?

 26   Q.  Oui, merci, mon Général. J'aimerais maintenant passer au mois de

 27   juillet 1995. Je pense qu'il est incontesté que l'attaque de la VRS contre

 28   l'enclave a commencé autour du 6 juillet, voire ce jour même. Où vous

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  1   trouviez-vous à ce moment-là ?

  2   R.  Je me trouvais en permission à Korcula.

  3   Q.  Vous souvenez-vous depuis combien de temps vous étiez en

  4   permission, le 6 juillet ?

  5   R.  Je crois que ma permission avait commencé il y a un peu moins d'une

  6   semaine. Je peux compter le nombre de jours. Je suis parti en permission le

  7   week-end et je ne sais pas quel jour tombait le 6 juillet.

  8   Q.  Très bien. Mon Général, quand vous étiez en permission; étiez-vous en

  9   contact -- toujours en contact avec votre

 10   commandement ?

 11   R.  Oui. J'avais une liaison radio avec moi et un opérateur, un garde du

 12   corps qui me suivait.

 13   Q.  Et vous souvenez-vous approximativement de la fréquence de vos contacts

 14   avec votre commandement ?

 15   R.  Je crois que, si je me souviens bien, au début c'était chaque jour --

 16   chaque jour j'étais en contact avec eux, mais lorsque la situation s'est

 17   aggravée, et après le week-end du milieu de ma permission des deux

 18   semaines, mes contacts étaient beaucoup plus fréquents et j'ai été rappelé

 19   de permission pour me rendre à Genève pendant ce week-end du milieu de ma

 20   permission afin de rencontrer le secrétaire général. Et c'était à ce

 21   moment-là qu'on m'a informé et qu'on m'a donné des instructions.

 22   Q.  Et nous allons brièvement parler de Genève, mais pendant cette période

 23   lorsque la situation a commencé à s'aggraver, avec qui étiez-vous en

 24   contact en fait à Sarajevo ?

 25   R.  J'ai été en contact avec mon chef de cabinet militaire, le colonel

 26   Baxter. Le général Bobar, le commandant du secteur de Sarajevo, avait pris

 27   le commandement en mon absence mais j'avais laissé les chefs de cabinet

 28   militaire sur place afin qu'il y ait continuité.

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  1   Q.  La Chambre de première instance a déjà entendu une déposition sur les

  2   observateurs de la Commission conjointe, qui ont été déployés en Bosnie et

  3   dans l'enclave de Srebrenica. Pourriez-vous nous parler de ce programme ?

  4   Quand il a commencé ? Quel était son but ?

  5   R.  Bien. Ces observateurs de la Commission conjointe, les JCO, si je me

  6   souviens bien, étaient dirigés par le général Rose. Il avait créé ce groupe

  7   qui était principalement présent à Sarajevo et de faire office de lien avec

  8   les Serbes de Bosnie. Je crois qu'il avait été prévu dans l'accord initial

  9   de cessation des hostilités à la fin 1994, ils faisaient partie des

 10   mécanismes d'observation et de contrôle. Ils faisaient partie de l'accord

 11   en quelque sorte. Au fur et à mesure que l'accord sur la cessation des

 12   hostilités était en train de s'effriter, la -- des JCO, pour moi, il était

 13   -- il faisait officier de communication. Ils étaient, en fait, des

 14   contrôleurs aériens avancés puisqu'il était de plus en plus dur de

 15   communiquer avec les enclaves. Il était alors d'autant plus important que

 16   j'ai un moyen de communication fiable avec ces enclaves, ainsi j'ai déployé

 17   l'équipe des JCO à Srebrenica et Gorazde. Je ne crois pas que nous soyons

 18   allés à Zepa, mais je n'en suis pas sûr.

 19   Alors, s'ils faisaient office de contrôleurs aériens avancés, c'est parce

 20   que les nations de l'OTAN avaient des contrôleurs aériens avancés dans

 21   leurs unités qui étaient expérimentés et certifiés pour travailler avec les

 22   forces aériennes de l'OTAN. Mais ce n'était pas le cas avec certaines de

 23   nos troupes -- avec certaines des nations qui y participaient et qui ne

 24   faisaient pas partie de l'OTAN. Donc, c'était l'une des raisons pour

 25   lesquelles nous voulions que les JCO se trouvent sur place.

 26   Ensuite, pour maintenir cette certification, il faut avoir une

 27   certaine expérience -- avoir eu un certain nombre de missions. Et une des

 28   conséquences des restrictions de mouvement était que les unités dans les

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  1   enclaves perdaient leur certification, ne pouvaient plus gérer des agents

  2   de l'OTAN; c'était une autre raison pour lesquelles nous avons envoyé les

  3   JCO dans les enclaves.

  4   Q.  Mon Général, au sujet de ces JCO qui se trouvaient dans l'enclave

  5   de Srebrenica, vous souvenez-vous s'ils s'y trouvaient en secret, ou s'ils

  6   avaient été déclarées à la VRS ?

  7   R.  Non, il est clair qu'ils ne s'y trouvaient pas en secret, il

  8   n'aurait pas été possible de les faire rentrer dans ces enclaves sans les y

  9   avoir conduits. Je ne me souviens plus si nous avions dit exactement qui

 10   ils étaient mais il était clair qu'ils n'étaient pas Néerlandais. Donc, ils

 11   ont bien dû entrer d'une certaine manière et on a dû les voir. Ils avaient

 12   tendance à utiliser un interlocuteur un contact particulier, je ne me

 13   souviens plus de son grade, mais son nom était Indic à Lukavica, et je

 14   pense que nous lui avions dit à lui et c'est ainsi qu'ils ont pu y entrer.

 15   Et je pense que s'ils y avaient -- s'ils étaient entrés en secret, on en

 16   aurait beaucoup plus parlé après la chute de Srebrenica, mais on n'en n'a

 17   pas parlé et ils sont juste partis avec l'Unité néerlandaise.

 18   Q.  Pendant l'événement de l'attaque contre l'enclave, vous souvenez-vous

 19   si vous aviez reçu des informations que vous avez pu attribuer directement

 20   aux JCO qui étaient présents dans l'enclave ?

 21   R.  Non. En fait, si vous voulez dire -- si vous me demandez si j'avais des

 22   communications directes avec eux, non. Je ne pense pas que cela ait jamais

 23   été le cas. Je ne me souviens pas d'avoir eu un rapport spécifique que

 24   quelqu'un me portait qui venait de leur part. Je ne m'en souviens pas, non.

 25   Q.  Très bien. Revenons sur votre rappel de permission pour vous rendre à

 26   Genève. Est-ce que ce rappel était lié directement à l'attaque de

 27   Srebrenica ou y avait-il une autre raison ?

 28   R.  Non, c'était entièrement pour une autre raison. L'idée était de

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  1   discuter du rapport au Conseil de sécurité et les recommandations sur ce

  2   que devrait faire la FORPRONU. Le projet de Zagreb pour ceci avait été

  3   envoyé à la fin du mois de mai et nous à Sarajevo nous y avions contribué.

  4   Le but de cette réunion était de mettre la dernière main à ce rapport pour

  5   le Conseil de sécurité.

  6   Q.  Ensuite, êtes-vous retourné en permission ou êtes-vous rentré à

  7   Sarajevo ?

  8   R.  Non. Je suis revenu en permission. A l'occasion de cette réunion avec

  9   le secrétaire général Boutros-Ghali, bon, je ne me souviens des détails

 10   précis, mais je crois qu'il a été question d'un autre poste d'observation

 11   et de la mort d'un soldat néerlandais. C'est ce qu'on nous a signalé.

 12   C'était un événement général, on pensait que les événements de Srebrenica

 13   étaient des affrontements pour la route dont je vous ai parlée. Et c'était

 14   un autre exemple des pressions du rétrécissement qui a été faites de cette

 15   enclave. En fait, on comprenait mal ce qui se passait et je me souviens que

 16   j'ai demandé, au général Janvier et M. Akashi, s'ils voulaient que je

 17   rentrer de permission et que je me rendre à Sarajevo, et on m'a dit : "Non,

 18   il faut rester en permission et la terminer.

 19   Q.  Et que s'est-il passé ensuite ?

 20   R.  Bien, je suis rentré à Split, et ensuite, j'ai été rappelé de

 21   permission et j'ai entamé un voyage de 24 heures à 36 heures pour entrer à

 22   Sarajevo.

 23   Q.  Et pourquoi êtes-vous rentré, mon Général ?

 24   R.  Parce que, comme je l'ai dit, il y avait eu une mauvaise appréciation

 25   de la situation. L'attaque s'était révélée beaucoup plus grande. La Défense

 26   s'était effondrée. Et les positions défensives de l'enclave s'étaient

 27   effondrées elles aussi et il y avait un très grand nombre de réfugiés, et

 28   cetera, tout autour du Bataillon néerlandais de Potocari.

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  1   Q.  Mon Général, je voudrais vous montrer un rapport de réunion. Vous vous

  2   souvenez d'une réunion avec le ministre Silajdzic, le 13 juillet, lorsque

  3   vous êtes entré de permission ?

  4   R.  Oui, je m'en souviens. Cela faisait déjà quelque temps que j'étais

  5   revenu de permission.

  6   Q.  Permettez-moi d'annoncer ce document. Il s'agit de la pièce 2941 de la

  7   liste 65 ter.

  8   R.  J'ai beaucoup de mal à le lire. Avez-vous une version papier ?

  9   Q.  Oui, mon Général.

 10   R.  Merci beaucoup.

 11   M. THAYER : [interprétation] Pouvons-nous également aller au bas de la

 12   version B/C/S ?

 13   Q.  Je voudrais tout d'abord attirer votre attention sur le paragraphe 3,

 14   Silajdzic a immédiatement abordé la question de Zepa et a demandé un

 15   renfort rapide des forces de l'ONU sur place. Et vous avez répondu que :

 16   "Vous n'aviez ni la capacité ni l'autorité pour le faire à l'époque," et

 17   vous avez dit que : "Votre tâche la plus importante, à l'époque, était de

 18   tirer au clair la politique relative aux enclaves et identifier la position

 19   des Etats membres participants quand à l'action qui allait être entreprise

 20   à Srebrenica cela deviendrait le modèle pour d'autres enclaves."

 21   Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette section ? Quand vous dites

 22   que vous n'aviez ni la capacité ni les ordres pour le faire ?

 23   R.  La deuxième partie est plus facile à expliquer. Je n'avais pas d'ordre

 24   d'envoyer des renforts dans la moindre enclave, à part Zepa, et je n'avais

 25   aucune autre force sous la main si, à partir du principe, que la nation qui

 26   contribue était prête à les envoyer à Zepa. C'est, en fait, ce que je veux

 27   dire ici.

 28   Q.  Voyons maintenant le cinquième paragraphe en page 2, et également page

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  1   2 en B/C/S. Vous avez, avec le ministre, abordé la question de

  2   l'utilisation de la base aérienne de Tuzla pour les réfugiés en provenance

  3   de l'enclave. Et vous expliquez que vous aviez envoyé votre chef d'état-

  4   major adjoint, le colonel Coiffet, afin d'essayer de coordonner l'usage des

  5   ressources. Vous souvenez-vous d'avoir envoyé votre chef d'état-major

  6   adjoint, M. Coiffet, à cette fin, Général ?

  7   R.  Oui, oui.

  8   Q.  Aviez-vous la moindre réserve ou hésitation par rapport à l'utilisation

  9   de la base aérienne ?

 10   R.  Je pourrais peut-être rétablir le contexte des choses. Nous étions

 11   confrontés à un véritable désastre. Toute une enclave venait de

 12   s'effondrer. Un grand nombre de réfugiés devaient être pris en charge,

 13   combien exactement, nous n'en étions même pas sûrs. Et tous les effets

 14   dissuasifs, la FORPRONU et l'OTAN ne fonctionnaient plus, avaient été

 15   neutralisés par ces événements. Ce que j'essaie de dire ici c'est que je

 16   souhaite comprendre la politique. La politique relative aux enclaves et de

 17   déterminer quelles sont les capacités des Etats membres ou ce qu'ils

 18   souhaitent faire puisque clairement ils n'étaient pas en train de faire ce

 19   qu'ils avaient dit qu'ils allaient faire.

 20   Parallèlement, les Bosniaques ont saisi cette occasion pour se tourner

 21   contre les Nations Unies, leur taper sur les doigts en quelque sorte, et

 22   refusaient d'aider ces réfugiés, qui avaient commencé à passer la ligne de

 23   front entre les Serbes de Bosnie et les Musulmans de Bosnie, et il fallait

 24   bien que je les mette quelque part. Et le seul lieu suffisamment grand que

 25   j'avais à ce moment-là c'était Tuzla ou, en tout cas, la base aérienne avec

 26   quelques bâtiments militaires, il était possible d'y monter des tentes, et

 27   cetera. Ce n'était peut-être pas le meilleur lieu pour des réfugiés qui

 28   influaient en masse, mais c'était le seul espace dont je disposais à

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  1   l'époque. Et par la suite j'ai consacré de nombreux efforts à essayer de

  2   faire en sorte que les Musulmans de Bosnie prennent la responsabilité ou,

  3   en tout cas, partagent la responsabilité de la situation dans laquelle se

  4   trouvaient toutes ces personnes et d'essayer de faire en sorte qu'ils

  5   n'utilisent plus ces 20 à 30 000 réfugiés comme un bâton pour taper sur la

  6   tête des Nations Unies.

  7   Q.  Regardez maintenant le sixième paragraphe à la page 2 de la version en

  8   anglais, également en B/C/S. Il est question du premier ministre et du

  9   ministre qui évoquent leurs préoccupations en ce qui concerne des récits

 10   d'atrocité, récits non encore confirmés dans la zone de Srebrenica, en

 11   particulier le viol de jeunes femmes à Vlasenica et l'assassinat de

 12   réfugiés qui se trouvaient à bord d'un autocar. On trouve aussi d'autres

 13   références un peu plus bas. Ils sont préoccupés par des rapports indiquant

 14   que des réfugiés font l'objet d'un triage d'une ségrégation, et que les

 15   hommes, 16 à 60 ans, sont envoyés en différents lieux. Je vois, Général,

 16   que cette réunion a eu lieu à 14 heures 20, le 13 juillet. Vous souvenez-

 17   vous du moment où vous avez entendu pour la première fois à dire qu'il

 18   avait eu des atrocités suite à la chute de l'enclave ?

 19   R.  Je ne m'en souviens pas précisément, c'est sans doute tôt le matin

 20   lorsque ces informations sont arrivées à Sarajevo.

 21   Q.  Bien. Voyons au paragraphe 9 de la version en anglais, passons à la

 22   page suivante pour trouver le neuvième paragraphe en B/C/S. A la première

 23   ligne, du neuvième paragraphe, on lit que vous avez évoqué la question de

 24   mouvement d'éléments du MNB de Tomislavgrad vers la zone Kresevo-Tarcin.

 25   Alors, pourriez-vous nous dire ce dont il est question ici : d'abord,

 26   qu'est-ce que c'est que MNB ?

 27   R.  Le MNB c'est une brigade multi pays. C'est à partir de son siège

 28   qu'était commandée la force de riposte ou de réaction rapide. Cette force a

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  1   été constituée dans le cadre ou à la lumière des événements qui ont suivi

  2   le bombardement, les bombardements des 25 et 26 mai. J'ai constitué deux

  3   unités, l'un britannique, l'autre française, à partir des forces qui se

  4   trouvaient sur le terrain, des Bataillons d'Infanterie blindés. Et ces

  5   hommes devaient être prêts à réagir et à intervenir dans le secteur -- dans

  6   leur secteur, ce qui me permettait de compter sur une petite force et dont

  7   j'aurais pu avoir besoin. Les Britanniques avaient, de manière unilatérale

  8   et presque immédiatement, renforcé les rangs de ces forces, et vers la mi-

  9   juin, le Conseil de sécurité a adopté une résolution chargeant cette force

 10   de réaction rapide d'assurer une meilleure protection de la FORPRONU. Si je

 11   me souviens bien les termes qui ont été employés, les Français aussi ont

 12   mobilisé des hommes supplémentaires. Ces hommes ont commencé à se déployer

 13   au cours du mois de juin et ici il est question d'un certain nombre d'entre

 14   eux qui font leur apparition dans le sud de la Bosnie-Herzégovine.

 15   Q.  Et quelle était la différence entre la force de réaction rapide et la

 16   MNB ?

 17   R.  La force de réaction rapide était bien plus que la Brigade multi pays

 18   ou multinational. Il y avait un Groupe d'Artillerie. Il y avait une Brigade

 19   mobile également et, en fait, elle était distincte de la FORPRONU. Elle n'y

 20   était pas intégrée.

 21   Q.  Et à l'époque où l'enclave de Srebrenica est tombée, la force de

 22   réaction rapide était-elle en mesure d'intervenir ?

 23   R.  Elle n'avait pas encore été pleinement déployée, elle n'y était pas non

 24   plus encore opérationnelle à ce stade.

 25   Q.  Avez-vous ressenti une quelconque opposition ou des soupçons émanant de

 26   l'une ou de l'autre des parties belligérantes vis-à-vis de la force de

 27   réaction rapide ?

 28   R.  La Fédération s'en méfiait parce qu'elle pensait qu'elle aurait pu être

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  1   utilisée contre elle. A ce stade-là, je pense que les Serbes de Bosnie

  2   étaient beaucoup moins inquiets parce que je pense qu'ils pouvaient pouvoir

  3   contrôler la FORPRONU en prenant des otages, et cetera.

  4   Q.  Que pensiez-vous vous-même de cette force de réaction rapide, mon

  5   Général ?

  6   R.  Si je souhaitais utiliser cette force, ceux contre lesquels je

  7   souhaitais l'utiliser ne devaient pas penser que cette force relevait de

  8   moi, sans quoi ils auraient pu la neutraliser par une prise d'otage ou par

  9   une autre méthode. Il était donc très important que cette force ait l'air

 10   de relever d'un autre commandant que le mien, et qu'elle n'ait pas l'air de

 11   faire partie de la FORPRONU.

 12   Q.  Et cette référence dans le document, à savoir que la MNB doive se

 13   déplacer vers le nord; est-ce que cette référence a quoique ce soit à voir

 14   avec l'évolution de la situation à Srebrenica ?

 15   R.  Non, pas du tout. Il s'agissait simplement de nous rendre sur le

 16   terrain et de nous y établir, de nous déployer pleinement sur place.

 17   Q.  Comment décririez-vous votre capacité à l'époque, à l'époque au cours

 18   de laquelle l'enclave de Srebrenica a fait l'objet d'une attaque, capacité

 19   donc à faire usage de la MNB, de la force de réaction rapide ?

 20   R.  Je n'aurais pas pu les utiliser dans les circonstances si j'avais été

 21   présent. Et puis, même si elles avaient été là déployées nous n'aurions pas

 22   été en mesure d'atteindre Srebrenica avec les forces qui étaient

 23   disponibles à l'époque.

 24   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je vois que l'heure de

 25   la fin de notre séance est proche. Je m'apprête à aborder un autre thème,

 26   peut-être qu'il serait bon que nous nous interrompions à ce stade.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Effectivement, l'heure d'interruption

 28   de séance approche. Quand le général reviendra-t-il ?

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  1   M. THAYER : [interprétation] Nous serons prêts demain et pour le reste de

  2   la semaine.

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ah, je vois. Nous allons donc

  4   poursuivre l'audition de ce témoin pendant le reste de la semaine. Bien,

  5   très bien.

  6   Demain, Général, nous reprendrons dans l'après-midi.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Nous allons donc lever

  9   l'audience jusqu'à demain après-midi à 14 heures.

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le mardi

 11   6 novembre 2007, à 14 heures 00.

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