Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 19166

  1   Le jeudi 13 décembre 2007

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour.

  7   Madame la Greffière d'audience, pourriez-vous, s'il vous plaît, appeler la

  8   cause.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. C'est

 10   l'affaire IT-05-88-T, le Procureur contre Vujadin Popovic et consorts.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Madame.

 12   Je vois que tous les accusés sont là. Pour les équipes de la Défense, je

 13   note l'absence de Me Meek -- pour les équipes de la Défense, je remarque

 14   l'absence de Me Meek, de Me Haynes et de Me Bourgon. Pour l'Accusation, je

 15   vois M. McCloskey et M. Thayer.

 16   Bonjour, Colonel.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous sommes heureux de vous revoir.

 19   Nous faisons de notre mieux pour essayer d'achever votre déposition afin

 20   que vous n'ayez pas besoin de revenir. Je ne sais pas si nous réussirons

 21   pleinement; mais comme dans le passé, les équipes de l'Accusation et de la

 22   Défense se sont montrées très coopératives. Nous espérons qu'on va réussir;

 23   essayons voir.

 24   LE TÉMOIN: JOSEPH KINGORI [Reprise]

 25   [Le témoin répond par l'interprète]

 26   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Bonjour. Bonjour à vous, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 28   Juges. Bonjour à tous.

Page 19167

  1   Interrogatoire principal par M. Thayer : [Suite]

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, Colonel.

  3   R.  Bonjour.

  4   Q.  Nous nous étions interrompus au moment où vous aviez mentionné le

  5   colonel Vukovic, ainsi que le commandant Nikolic, avec lesquels vous avez

  6   eu certaines réunions avant juillet 1995. Vous rappelez-vous de cela ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Est-ce que vous pourriez en gros nous décrire avec quelle fréquence

  9   vous vous réunissiez avec l'un ou avec l'autre de ces deux hommes, et où

 10   vous vous réunissiez ?

 11   R.  Je commence par le commandant Nikolic que nous pouvions rencontrer

 12   aussi souvent que possible s'il y avait quoi que ce soit dont nous avions

 13   besoin, quelque chose que nous aurions eu besoin de savoir ou de vérifier

 14   pour donner des renseignements à partir de l'armée serbe de Bosnie, la BSA,

 15   c'était notre contact principal. C'est la personne avec laquelle que nous

 16   communiquions tout le temps par notre interprète, et ceci pouvait être

 17   aussi souvent, peut-être au moins deux fois par semaine ou une fois par

 18   semaine, quelque chose comme ça.

 19   En ce qui concerne le colonel Vukovic, ce n'était pas si souvent. Je pense

 20   que pendant mon séjour sur place, pour des réunions, nous nous sommes

 21   rencontrés deux ou trois fois mais guère plus.

 22   Q.  Où est-ce que ces réunions avaient lieu, par exemple, avec le

 23   commandant Nikolic ?

 24   R.  Avec le commandant Nikolic, normalement on se réunissait à un point que

 25   nous appelions le "pont jaune". C'était un point qui se trouvait quelque

 26   part entre Potocari et Bratunac. C'est là que nous nous rencontrions,

 27   c'était une sorte de point de contrôle pour eux. Il y avait des soldats qui

 28   s'y tenaient. Ils venaient du côté de l'armée serbe de Bosnie, ils venaient

Page 19168

  1   du côté de Srebrenica, ils restaient là pour discuter ce qu'il y avait lieu

  2   de discuter.

  3   Egalement, il vaut la peine de remarquer qu'à l'époque nous nous

  4   réunissions dans un hôtel, l'hôtel Fontana, à l'intérieur de Bratunac.

  5   Q.  Est-ce que ces contacts c'était vous seul qui en preniez l'initiative

  6   ou également vos camarades observateurs de l'ONU ou est-ce que le

  7   commandant Nikolic vous contactait par Petar également parfois ?

  8   R.  Dans certains cas, c'était le commandant Nikolic lui-même qui demandait

  9   à nous rencontrer en raison de certaines questions qu'il voulait évoquer

 10   avec nous; d'autre fois, ça pouvait être nous-mêmes qui prenions

 11   l'initiative d'une rencontre ou parfois même les gens du Bataillon

 12   néerlandais. Le Bataillon néerlandais pouvait parfois demander qu'il y ait

 13   une réunion avec nous-mêmes et le commandant Nikolic au "pont jaune" ou des

 14   choses de ce genre.

 15   Q.  Quels étaient les types de sujets pour ces réunions ?

 16   R.  La plupart du temps, c'était des problèmes qu'ils voulaient discuter

 17   concernant les conditions générales dans l'enclave; des questions

 18   concernant les Musulmans eux-mêmes; la partie de l'armée serbe de Bosnie;

 19   également des questions qui concernaient, plus particulièrement lorsque

 20   c'était nous qui le demandait ou lorsque c'était le Bataillon néerlandais

 21   qui le demandait, des questions concernant les convois du HCR de l'ONU; ou

 22   même pendant l'époque où nous étions allés en reconnaissance en

 23   observateurs militaires de l'ONU, ils pouvaient autoriser lorsqu'on nous

 24   étions obligés de repartir que de nos observateurs puissent venir de façon

 25   à ce qu'on puisse déjà remplacer ceux qui étaient partis. C'était les

 26   diverses questions que nous pouvions discuter.

 27   Q.  Est-ce que le commandant Nikolic, ou le colonel Vukovic, ou l'un

 28   quelconque des chefs militaires serbes que vous avez rencontrés s'est

Page 19169

  1   jamais plaint à vous du fait que les forces musulmanes attaquaient depuis

  2   l'intérieur de l'enclave vers l'extérieur de l'enclave ?

  3   R.  Ça c'est une circonstance dont je ne me souviens pas qu'elle ait jamais

  4   eu lieu parce que la plupart des accusations des attaques provenaient de la

  5   BiH, ils disaient qu'ils avaient été attaqués par la BSA, mais normalement

  6   ce n'était pas le contraire, ce n'était par l'armée serbe de Bosnie qui se

  7   plaignait d'attaques de la BiH. Je pense que ça dû être très rare ou en

  8   tous les cas ça ne s'est jamais produit.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je voudrais m'assurer d'une chose, je

 10   comprends que vous limitiez ces renseignements ou cette réponse que vous

 11   venez de faire au rapport que vous avez reçu vous-même personnellement ou

 12   est-ce que vous comprenez dans votre réponse également ce que vous savez

 13   d'autres rapports reçus par d'autres, par exemple, au HCR ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je me limite absolument

 15   à ce que nous, en tant qu'observateurs, recevions. S'il y avait un rapport

 16   émanant du Bataillon néerlandais, il se peut qu'il n'ait jamais été porté à

 17   notre attention, vraiment je ne sais pas. Mais pour ce qui est des

 18   observateurs de notre côté, ce n'est pas nécessairement moi, mais ça

 19   pouvait comprendre également d'autres observateurs militaires qui se

 20   trouvaient là.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien, je vous remercie.

 22   M. THAYER : [interprétation]

 23   Q.  Mon Colonel, quelle qu'ait été la raison d'une réunion donnée avec des

 24   représentants de la VRS, y avait-il quoi que ce soit en particulier qui

 25   vous a été répété au cours de ces réunions et que vous avez gardé en

 26   mémoire ?

 27   R.  Je crois qu'il y avait une chose qui était particulièrement claire dans

 28   leur esprit et qui était évoquée dans la plupart des discussions qui était

Page 19170

  1   qu'ils souhaitaient que les Musulmans quittent l'enclave. La façon dont ils

  2   quitteraient l'enclave, cela variait d'un individu à l'autre, d'une

  3   personne à l'autre, mais pour l'essentiel c'était ça qu'ils avaient à leur

  4   ordre du jour. Ils voulaient vraiment que les Musulmans quittent l'enclave

  5   de façon à ce qu'elle puisse être vide et libre de tout Musulmans et de

  6   façon à ce qu'elle puisse être habitée par des gens normaux qui sont des

  7   Serbes pour eux.

  8   Ils ont toujours soutenus que cette enclave appartenait aux Serbes et

  9   qu'il ne pouvait pas y avoir de Musulmans au milieu d'entre eux. Ils

 10   voulaient simplement que les Musulmans quittent l'enclave. A un moment

 11   donné, ils ont même fait allusion au fait qu'ils laisseraient passer les

 12   Musulmans pour qu'ils puissent sortir et quitter l'enclave et la laisser

 13   aux Serbes.

 14   Q.  Est-ce que vous avez compris sur la base de ce qu'ils vous disaient

 15   lorsque vous parlez en l'occurrence de "Musulmans", cela se référait

 16   uniquement aux militaires ou à la population musulmane, à la population

 17   civile et militaire ensemble, dont ils voulaient qu'ils quittent l'enclave

 18   ?

 19   R.  Lorsqu'ils disaient qu'ils voulaient que les Musulmans partent, pour

 20   eux ce n'était pas seulement l'élément militaire. Ça voulait dire à la fois

 21   les militaires et les non-civils. Il n'y avait aucun doute dans leur

 22   esprit, dans ce qu'ils exprimaient dans leurs discussions, c'est qu'ils

 23   voulaient vraiment que tous les Musulmans partent de l'enclave de façon à

 24   ce qu'ils puissent occuper à nouveau la place en tant que Serbes; parce que

 25   pour eux ça leur appartenait.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que c'est une conclusion à

 27   laquelle vous êtes parvenu à l'époque ou est-ce que c'est une conclusion à

 28   laquelle vous êtes parvenu après les événements ? En tout état de cause,

Page 19171

  1   sur quoi vous fondez-vous pour le dire ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ça a même été écrit

  3   dans l'un -- je crois une partie de ma déclaration telle que je l'ai faite,

  4   également dans certains rapports de situation où ils disaient qu'ils

  5   voulaient que les Musulmans quittent l'enclave.

  6   M. THAYER : [interprétation] Peut-être que je pourrais poursuivre sur ce

  7   chapitre, Monsieur le Président.

  8   Q.  Colonel, je voudrais maintenant appeler votre attention sur une

  9   réunion, un dîner que vous avez eu à l'hôtel Fontana en juin 1995, auquel

 10   le colonel Vukovic était présent. Vous rappelez-vous cette réunion, et dans

 11   l'affirmative, est-ce que vous pourriez tout simplement décrire les

 12   événements qui se sont produits lors de cette réunion pour les Juges de la

 13   Chambre ?

 14   R.  C'était une réunion qui avait été convoquée par le commandant Nikolic

 15   et son équipe, et ils voulaient nous rencontrer dans cet hôtel avec un

 16   certain nombre d'officiers supérieurs de la BSA. Ils ne nous ont pas dit

 17   quel était l'ordre du jour de la réunion, mais lorsque nous sommes arrivés

 18   il y avait là plusieurs officiers supérieurs y compris le colonel Vukovic.

 19   Pendant cette discussion que nous avons eue là, le colonel Vukovic a été

 20   très clair et a employé les mots précis pour dire que nous devrions aller

 21   dire aux Musulmans de prendre leurs affaires et de quitter Srebrenica.

 22   "Nous ne voulons pas qu'ils soient là."

 23   Il a poursuivi en disant qu'il les laisserait passer en toute sécurité,

 24   sauf-conduit pour quitter l'enclave; et que dans la négative, s'ils ne

 25   voulaient pas sortir de leur propre gré il allait les tuer. C'était très

 26   clair, telles étaient les instructions qu'il a données. C'était les paroles

 27   qu'il a prononcées. Nous avons considéré qu'il était extrêmement clair. Il

 28   leur disait en fait : "Vous feriez mieux de partir; et si vous ne voulez

Page 19172

  1   pas partir de plein gré, nous allons nettoyer l'enclave et vous en faire

  2   partir."

  3   Q.  Maintenant, Monsieur le Témoin, en juin 1995, est-ce que quelque chose

  4   s'est passé concernant notamment les effectifs de votre équipe ?

  5   R.  C'est le moment auquel certains observateurs militaires qui se

  6   trouvaient à l'intérieur de l'enclave avaient fini le temps de leur mission

  7   sur place, et si l'on reprend un petit peu avant cette période, nous avions

  8   tous les mois, enfin chaque fois que quelqu'un avait été de service pendant

  9   30 jours, l'observateur militaire avait six jours de congé lui permettant

 10   d'aller à Zagreb ou où il voulait, de façon à ce qu'il puisse se détendre

 11   et revenir reposé afin de pouvoir mieux servir.

 12   Au cours de cette période, c'est-à-dire un peu après avril, ils ont

 13   commencé à refuser aux observateurs militaires l'entrée, c'est-à-dire que

 14   la BSA a commencé à refuser aux observateurs militaires la permission de

 15   quitter l'enclave. Au bout d'un séjour très prolongé jusqu'à un moment où

 16   trois des observateurs devaient bénéficier d'un roulement, la BSA a dit

 17   qu'ils ne pouvaient pas donner l'autorisation pour qu'ils sortent, de sorte

 18   que plus tard ils leur ont permis de sortir; et une fois qu'ils sont

 19   sortis, ils ont dit qu'ils ne pouvaient permettre à personne d'entrer pour

 20   les remplacer.

 21   En fait, nous sommes restés seulement trois; moi-même; le commandant

 22   De Haan de Hollande; et le commandant David Tetteh du Ghana. Nous étions

 23   les seuls observateurs qui restaient à ce moment-là.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Thayer. Est-

 25   ce que vous avez terminé avec la réunion à l'hôtel Fontana avec le colonel

 26   Vukovic.

 27   M. THAYER : [interprétation] Je pensais que c'était le cas, mais non.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Veuillez poursuivre.

Page 19173

  1   M. THAYER : [interprétation]

  2   Q.  Colonel, sur les trois observateurs militaires dont vous venez de

  3   parler, est-ce que l'un d'entre vous était le chef d'équipe ?

  4   R.  M. Andre De Haan a été nommé comme chef d'équipe et il a commencé à

  5   servir de cette manière comme chef de l'équipe jusqu'à ce que plus tard, il

  6   soit tombé malade. Il a dû être hospitalisé et nous sommes restés là, deux

  7   seulement, moi et David Tetteh.

  8   Q.  Colonel, je voudrais maintenant appeler votre attention sur l'attaque

  9   de la VRS sur l'enclave de Srebrenica. Vous rappelez-vous où vous vous

 10   trouviez au moment où l'attaque a commencé le 6 juillet ?

 11   R.  Le 6 juillet, c'est lorsque l'assaut final a commencé sur Srebrenica,

 12   nous étions en train de dormir dans le bâtiment des PTT, nous avions

 13   entendu des tirs d'artillerie absolument partout. Il était environ 3

 14   heures, du côté de 3 heures, et c'était donc dans les toutes premières

 15   heures du matin. C'est à ce moment-là que nous avons entendu que des obus

 16   pleuvaient en grand nombre, parce que le pilonnage de Srebrenica, parfois

 17   ce n'était pas inconnu; mais à l'époque il y avait un pilonnage continu.

 18   Nous nous sommes rendus compte qu'il y avait quelque chose qui se

 19   passait. Nous sommes allés à la casemate et nous avons écouté et compté le

 20   nombre d'obus qui tombaient, nous sommes sortis, nous avons commencé à

 21   envoyer des rapports et nous savions avec certitude qu'il y avait quelque

 22   chose qui se passait, quelque chose qui avait l'air vraiment d'être grave.

 23   Q.  Maintenant, est-ce que vous pourriez décrire les tirs

 24   d'artillerie que vous avez observés et le fait que vous avez écouté et

 25   compté au cours de la première journée de l'attaque le 6 juillet ? Est-ce

 26   qu'il y avait un schéma particulier que vous auriez commencé à percevoir ?

 27   R.  C'était un schéma très clair, pratiquement très clair. C'était

 28   comme s'ils tiraient quelques obus, non pas quelques-uns, je veux parler de

Page 19174

  1   50 ou plus; puis ils s'arrêtaient pendant un moment; et au bout d'un moment

  2   ils recommençaient et tiraient à nouveau. Ils avaient formé un système par

  3   lequel lorsqu'on se trouvait d'un côté du village.

  4   Vous savez, nous interprétions les choses de cette manière, parce

  5   qu'autrement comment savoir ce qui se passait. Lorsque nous avons compris

  6   ce schéma, nous nous sommes rendus compte qu'il y aurait des moments de

  7   sécurité entre deux salves pendant lesquels nous pouvions sortir des

  8   bunkers et aller voir ce qui se passait vraiment sur le terrain -- sur le

  9   terrain lui-même, analyser les cratères. Peut-être qu'à ce moment-là, s'il

 10   y avait des malades, nous pourrions les emmener à l'hôpital ou des blessés.

 11   Ceux qui avaient été tués, nous les comptions et nous rendions compte de

 12   tout cela. Nous avons vu que tout ceci était assez systématique. Ils

 13   suivaient un système ou un schéma qu'ils avaient formé.

 14   Q.  A ce moment-là le 6 juillet, combien d'observateurs militaires de l'ONU

 15   vous rappelez-vous avoir été opérationnels et qui travaillaient

 16   effectivement à Srebrenica avec vous ?

 17   R.  Les observateurs militaires de l'ONU qui se trouvaient là c'étaient

 18   simplement nous deux, moi-même et le commandant David Tetteh. Il n'y avait

 19   que nous dans l'enclave.

 20   Q.  Vous avez parlé de bunkers. Où se trouvait le vôtre ?

 21   R.  Le nôtre, Monsieur le Président, nous étions en dessous du bâtiment des

 22   PTT, c'est comme une sorte d'étage en sous-sol, vous savez. En dessous de

 23   l'endroit où nous nous trouvions, où nous vivions normalement, et cela

 24   correspondait à une sorte de bunker. C'est là que nous allions nous abriter

 25   des tirs d'artillerie, tout au moins pour avoir un peu un sentiment de

 26   sécurité.

 27   Q.  Mais est-ce que vous aviez quand même la possibilité de compter les

 28   détonations de l'intérieur du bunker ?

Page 19175

  1   R.  De là, nous le pouvions, parce que ces obus, vous savez, font une

  2   déflagration très forte, donc on pouvait les compter tous. On ne pouvait

  3   pas tous les compter. Dans l'ensemble de Srebrenica proprement dite, je

  4   veux dire la ville, jusqu'à Potocari, on pouvait compter parce qu'on

  5   pouvait entendre le bruit, et ce sont des bruits très précis. Je veux dire

  6   qu'on pouvait les entendre quel que soit l'endroit où on se trouvait.

  7   Q.  Vous avez décrit, Colonel, un moment où on était en sûreté que vous

  8   avez remarqué dans ce schéma de tirs d'artillerie. Pourriez-vous dire aux

  9   membres de la Chambre ce que vous-même et le commandant Tetteh avez fait au

 10   cours de ces périodes où cessaient ces tirs, et qu'est-ce que vous avez

 11   observé personnellement.

 12   R.  Pour commencer, c'était un moment très éprouvant pour nous deux.

 13   C'était la première fois que nous nous trouvions dans une situation aussi

 14   grave dans l'ensemble du secteur, dans la zone de responsabilité, et nous

 15   étions là seulement nous deux. Donc il n'y avait plus guère de flexibilité,

 16   à savoir que si on faisait sortir quelqu'un pour s'occuper de patrouilles,

 17   on le faisait, d'autres rédigeaient des rapports, mais à partir du moment

 18   où nous n'étions plus que deux, comment peut-on faire cela ? 

 19   Comment peut-on s'acquitter de ces tâches pour savoir ce qui se passe

 20   à l'extérieur. Nous avions un nombre minimum d'observateurs qui pouvaient

 21   sortir, c'est-à-dire deux, et que vouliez-vous qu'on fasse ?

 22   Nous avons décidé qu'en l'absence d'observateurs supplémentaires,

 23   nous allions au moins nous occuper et nous assurer que nous pouvions

 24   compter avec exactitude ce qui se passait dans l'enclave. Donc nous avons

 25   décidé que l'un d'entre nous sortirait avec un des interprètes dans un

 26   véhicule pour aller vérifier ce qui se passait.

 27   Pour commencer, savoir que quels étaient les effets de ces tirs

 28   d'artillerie dans l'enclave; s'il y avait des blessés et des tués; et

Page 19176

  1   également analyser les cratères dans toute la mesure où on pouvait le

  2   faire, vu le temps très limité qu'on avait à notre disposition; ensuite

  3   revenir et commencer à établir un rapport.

  4   A partir de ce moment-là, une personne pouvait sortir. Si le schéma

  5   des tirs avait recommencé, on pouvait également sortir, faire la même

  6   chose, mais par des roulements. Pour l'essentiel, ce que je dis, c'est que

  7   si nous avions voulu faire tout ce que nous devions faire dans le délai le

  8   plus court possible, en envoyant à l'extérieur un minimum de personnes,

  9   c'est-à-dire nous deux. C'est précisément ce que nous avons fait.

 10   Mais ce faisant, nous avons également réussi à informer les gens, c'est-à-

 11   dire les habitants de la ville, qu'ils ne devaient pas partir. Nous avons

 12   essayé de les sensibiliser, vous savez, autant que nous pouvions le faire,

 13   parce qu'on pouvait leur dire : "Ils vont recommencer à tirer maintenant,

 14   selon leur schéma, vous risquez d'être tués. Donc ne restez pas dans les

 15   rues. Allez ailleurs. Rentrez dans vos maisons et restez là." Bien sûr, il

 16   était difficile de réaliser cela, mais tout au moins nous avons essayé de

 17   notre mieux.

 18   Q.  Colonel, sur la base de votre expérience à Srebrenica, est-ce que vous

 19   avez su si, oui ou non, les personnes avaient effectivement des abris, des

 20   bunkers, dans la plupart des maisons ? Y avait-il des caves où ils

 21   pouvaient être en sûreté.

 22   R.  Naturellement, ce n'était pas suffisant pour toute la population.

 23   Même si vous leur disiez de faire cela, la plupart restaient dans leurs

 24   maisons, dans la partie normale de la maison, parce qu'il n'y avait pas

 25   suffisamment de caves ou d'abris souterrains. Tout au moins, nous essayions

 26   de les informer.

 27   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, maintenant décrire la question

 28   des victimes, s'il y en avait, que vous avez personnellement observées au

Page 19177

  1   cours de cette première journée de pilonnage.

  2   R.  Au cours de cette première journée de tirs d'artillerie, des victimes,

  3   nous en avons eu quelques-unes qui avaient des blessures dues à des éclats

  4   d'obus, à la tête, parfois à l'ensemble du corps, aux jambes, et tout cela.

  5   Mais ce qui était surprenant, c'est que leur nombre n'était pas élevé. Je

  6   ne peux pas me rappeler exactement combien, mais il y en avait quelques-

  7   uns. Nous en avons emmené quelques-uns à l'hôpital. En fait, c'était

  8   surprenant de voir qu'ils étaient si peu nombreux, malgré les tirs

  9   d'artillerie très lourds. Le nombre de victimes était très peu élevé.

 10   Q.  Bien, nous allons parler de cela dans un instant.

 11   Est-ce que vous êtes resté à Srebrenica, vous rappelez-vous, cette première

 12   journée, est-ce que vous êtes allé ailleurs ?

 13   R.  Au cours de cette journée, je pense que je suis simplement resté à

 14   Srebrenica, je n'en suis pas sûr, mais je crois que j'y suis resté.

 15   Q.  Est-ce que vous avez réussi à rendre compte des événements de cette

 16   première journée au quartier général des observateurs militaires à Tuzla ?

 17   R.  Oui. Je l'ai fait. En fait, pour tous les événements, nous informions

 18   le quartier général dès que ces événements se produisaient.

 19   M. THAYER : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait avoir le 65 ter 490

 20   sur le prétoire électronique, s'il vous plaît ?

 21   Q.  Bien. Monsieur, voyez-vous le document que vous avez sous les yeux ?

 22   Est-ce que vous pouvez le lire sans problème ?

 23   R.  Oui, sans problème.

 24   Q.  Reconnaissez-vous ce document, savez-vous de quoi il s'agit ?

 25   R.  Il s'agit d'un rapport de situation courant.

 26   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer les lignes que l'on peut voir

 27   en haut, les premières lignes du document, "de", "à", et "info" ?

 28   R.  "De" montre que cela émane du QG des observateurs militaires des

Page 19178

  1   Nations Unies nord-est, c'est notre secteur, le BH, c'est Bosnie-

  2   Herzégovine. Et "à" signifie, c'est le siège du commandement de la BH des

  3   observateurs militaires des Nations Unies. Le commandement de la BH était à

  4   Sarajevo. "Info", il s'agit là d'un responsable militaire de l'information

  5   au siège de l'OMNU à Zagreb.

  6   Q.  Une autre définition. Au paragraphe 2, il y a là un acronyme "SMO",

  7   "évaluation de la SMO". Que signifie "SMO" ?

  8   R.  Il s'agit de l'observateur militaire principal, "senior military

  9   observer" qui est responsable d'un secteur.

 10   Q.  Donc cette personne aurait été basée à Tuzla, dans ce cas précis ?

 11   R.  Exact.

 12   Q.  Si nous regardons maintenant le paragraphe 3, vous voyez la partie qui

 13   commence par : "L'équipe de Srebrenica a rendu compte", et cetera.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Il y a une référence faite à 250 mortiers et pièces d'artillerie.

 16   Savez-vous d'où vient cette information de 250 pièces d'artillerie et de

 17   mortiers ? Savez-vous d'où vient ce chiffre ?

 18   R.  C'est quelque chose qui venait de nous certainement. Je ne vois pas les

 19   "250".

 20   Q.  Vous pouvez ou vous ne pouvez pas, excusez-moi ?

 21   R.  Non, je ne vois pas.

 22   Q.  Si vous regardez au milieu de ce paragraphe, il s'agit du milieu du

 23   paragraphe 3, à la fois dans la version anglaise et la version B/C/S, il y

 24   a une référence à l'équipe de Srebrenica et ensuite il est dit : "Au moins

 25   250 obus de mortier et d'artillerie ont été enregistrés jusque-là."

 26   R.  Oui, je vois.

 27   Q.  Est-ce que vous savez quelle est la source qui vous a permis de donner

 28   ce chiffre de 250 ?

Page 19179

  1   R.  Je pense, Monsieur le Président, que c'est quelque chose qui venait de

  2   nous, c'est-à-dire des observateurs militaires.

  3   Q.  Pour ce qui est des autres informations concernant les roquettes du

  4   Bataillon néerlandais, est-ce que c'est quelque chose qui émanait de vous

  5   ou du Bataillon néerlandais directement ?

  6   R.  Il s'agit là d'un rapport que nous-mêmes, en tant qu'équipe de

  7   Srebrenica, nous donnions au Bataillon au néerlandais. C'est quelque chose

  8   qui émanait de nous, mais qui à l'origine venait du Bataillon néerlandais

  9   lui-même.

 10   M. THAYER : [interprétation] Bien. Si nous pouvions avancer, est-ce que

 11   l'on pourrait avoir le document 65 ter 491 sur le prétoire électronique,

 12   merci.

 13   Q.  Est-ce que vous pouvez lire ce document sans problème ? Sinon, j'ai un

 14   document sur papier, si cela vous est plus facile.

 15   R.  Je peux lire.

 16   Q.  Pouvez-vous dire à la Chambre de première instance ce qu'est ce rapport

 17   ?

 18   R.  Tout d'abord, il s'agit d'un rapport de situation qui émane du secteur

 19   de la FORPRONU. Il s'agit non pas de quelque chose de l'OMNU, mais de la

 20   FORPRONU.

 21   Q.  Est-ce que vous voyez la date et l'heure en haut à gauche ? Est-ce que

 22   vous pouvez le voir ?

 23   R.  Oui, je vois.

 24   M. THAYER : [interprétation] Passons maintenant à la page 2 de la version

 25   anglaise et B/C/S.

 26   Q.  Si l'on regarde le paragraphe 1, Monsieur, référence est faite à

 27   l'enceinte de Potocari qui aurait servi de cible plusieurs fois dans la

 28   journée. Est-ce que vous le voyez ? C'est au milieu du paragraphe.

Page 19180

  1   R.  Oui, je vois.

  2   Q.  La dernière phrase dans ce paragraphe indique : "Dans l'enclave de

  3   Srebrenica, l'impact d'artillerie a tué un civil et a blessé un garçon."

  4   Est-ce que vous le voyez ?

  5   R.  Oui, je vois.

  6   Q.  Maintenant, sur la base de vos souvenirs, est-ce que vous vous souvenez

  7   s'il s'agit là des mêmes pertes ou blessés que vous-mêmes et le commandant

  8   Tetteh avez pu voir et dont vous avez fait rapport au Bataillon néerlandais

  9   ?

 10   R.  Il s'agit là d'un rapport qui a été fait séparément par le Bataillon

 11   néerlandais, mais ici je crois que c'est la même chose que ce que nous

 12   avions pu voir nous-mêmes.

 13   Q.  Maintenant, si vous regardez un petit peu plus bas, en bas de la page,

 14   à la page 2 de la version anglaise et page 3 de la version B/C/S, il y a un

 15   paragraphe 3 --

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un moment. Mes excuses, Monsieur

 17   Zivanovic. J'étais en train d'essayer de lire le document, et je ne vous

 18   avais simplement pas vu, puisque j'avais la tête sur l'écran.

 19   Vous pouvez y aller.

 20   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Il y a une erreur à la page 15, ligne 3. Il

 21   est dit : "Il a tué un garçon," alors que dans le document d'origine, on

 22   parle d'un garçon "blessé".

 23   M. THAYER : [interprétation] Oui, en fait il faut inverser.

 24   M. ZIVANOVIC : [interprétation] C'est inversé.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 26   M. THAYER : [interprétation] Merci, cher collègue. Ce sera inversé.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien.

 28   M. THAYER : [interprétation]

Page 19181

  1   Q.  Si nous regardons le bas de cette page, il s'agit de la page 2 de la

  2   version anglaise, et le paragraphe 3(e)(3). Il y a une référence qui est

  3   faite à l'enclave de Srebrenica sous le titre "Région est". "150 points

  4   d'impact ont été comptés. En raison des alarmes pendant lesquelles ils ont

  5   dû se rendre dans les casemates, on n'a pas pu avoir de chiffre exact."

  6   Est-ce que vous voyez cela ?

  7   R.  Oui, je vois.

  8   Q.  Est-ce que cette information vous a été donnée par le commandant Tetteh

  9   ou il s'agit des informations que le Bataillon néerlandais a recueillies

 10   eux-mêmes et dont ils ont rendu compte à la FORPRONU ?

 11   R.  Ce n'était pas notre rapport, c'est celui de la FORPRONU et je suppose

 12   que ce chiffre leur a été donné par le Bataillon néerlandais et non pas par

 13   nous.

 14   Q.  Bien.

 15   M. THAYER : [interprétation] Nous en avons terminé avec ce document.

 16   Passons au jour suivant, le 7 juillet, la journée qui suit l'attaque.

 17   Q.  Pouvez-vous nous décrire ce qui s'est passé ce jour-là ? Est-ce

 18   que les attaques se sont poursuivies; est-ce que vous pourriez nous décrire

 19   le pilonnage que vous avez pu constater et observer ce jour-là ?

 20   R.  Monsieur le Président, le pilonnage a continué. La journée suivante

 21   ressemblait à la précédente. Le nombre d'obus était pratiquement le même,

 22   et il semblait que les cibles soient les mêmes également; c'est-à-dire

 23   Srebrenica et Potocari. Le schéma suivi était le même que celui de la

 24   journée précédente, il n'y avait pas de changement. C'était la même chose.

 25   Q.  Est-ce que vous avez pu observer quels étaient les points qui avaient

 26   été atteints par les obus ?

 27   R.  En fait, nous sortions, c'est-à-dire après -- que nous soyons sortis --

 28   quand nous le pouvions, nous sortions, nous allions dans la ville, nous

Page 19182

  1   essayions de voir quelles avaient été les cibles. Nous étions surpris de

  2   constater que les cibles étaient essentiellement la zone du marché et,

  3   chose étonnante, ils avaient également essayé de toucher l'hôpital; c'était

  4   notre propre conclusion, parce que nous avions pu voir qu'ils l'avaient

  5   raté d'un cheveu. Il y a également le bâtiment des PTT qui avait été visé,

  6   et ça, nous avons pu le constater parce que les obus étaient tombés juste

  7   de l'autre côté de la rivière, c'est-à-dire du côté d'une colline qui se

  8   trouvait de l'autre côté.

  9   Sur la région du marché, ils visaient le marché, mais heureusement il

 10   n'y avait personne au marché. Donc il n'y a pas eu beaucoup de pertes et de

 11   blessés en tant que tel, mais ils ont réussi à toucher certaines des cibles

 12   qu'ils visaient. Il y avait également les routes - et je ne sais pas pour

 13   quelle raison en particulier - mais ils visaient les routes.

 14   Q.  Lorsque vous dites, par exemple, ils visaient le marché, à quoi faites-

 15   vous référence ? Qu'est-ce qu'ils ont touché ?

 16   R.  Je disais que les obus tombaient sur le marché ou dans le voisinage;

 17   pas nécessairement à l'intérieur, mais à l'intérieur, à côté ou autour.

 18   Nous pouvions voir que la cible réelle était ce marché en particulier.

 19   Bien entendu, le marché n'avait pas jamais changé d'emplacement

 20   depuis longtemps. Il en allait de même du bâtiment des PTT et de l'hôpital,

 21   ils le savaient.

 22   Q.  Vous avez fait référence aux bâtiments des PTT et de l'hôpital; est-ce

 23   que vous vous souvenez si ces deux bâtiments avaient été visés le deuxième

 24   jour du pilonnage, ou est-ce que ça a été par la suite, ou un autre jour

 25   qu'ils ont été utilisés comme cibles.

 26   R.  Monsieur le Président, même cette fois-là les PTT avaient été

 27   visés, en tous les cas les obus étaient tombés autour à côté, mais les PTT

 28   n'ont jamais été frappés pendant cette période. Même l'hôpital n'a pas été

Page 19183

  1   frappé, mais nous pouvions voir les obus qui tombaient tout autour.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Colonel, si je me souviens bien

  3   l'hôpital est pratiquement à l'opposé du bâtiment des PTT, n'est-ce pas ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Président, il est de l'autre côté, mais

  5   il faut monter un petit peu pour y arriver.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Comment pouviez-vous savoir, en tant

  7   que militaire, si un obus était visé dans une direction ou était dirigé

  8   dans une autre direction, s'ils sont dans la même ligne de tir ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils sont sur la même ligne, mais ils sont

 10   légèrement à côté l'un de l'autre. Il y a une certaine distance entre les

 11   deux, on peut dire si un obus tape au milieu des deux bâtiments. Mais si

 12   l'obus a presque atteint le premier bâtiment alors on peut penser que ce

 13   qui était visé, c'était le bâtiment lui-même.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 15   M. THAYER : [interprétation]

 16   Q.  Le deuxième jour du pilonnage, Colonel, vous-même et le colonel Tetteh,

 17   est-ce que vous aviez quitté Srebrenica pour une raison quelconque ?

 18   R.  Le deuxième jour, j'avoue ne pas me souvenir vraiment, mais je pense

 19   que nous avions été appelés pour une réunion. Je ne me souviens pas

 20   vraiment.

 21   Q.  Bien. Soit le premier ou le deuxième jour du pilonnage, est-ce que vous

 22   vous souvenez être allé à Potocari ?

 23   R.  Oui, oui. Nous sommes allés à Potocari, nous avons été appelés à

 24   Potocari pour une réunion avec le Bataillon néerlandais.

 25   Q.  Oui, très bien. Est-ce que vous vous souvenez alors sur quoi portait la

 26   réunion ?

 27   R.  La réunion portait sur ce qui venait de se produire, les événements qui

 28   venaient de se produire et également pour discuter de certaines

Page 19184

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 19185

  1   informations reçues concernant certains ultimatums.

  2   Q.  Bien, nous allons revenir à cela dans un petit instant.

  3   M. THAYER : [interprétation] Pourquoi ne pas maintenant regarder le

  4   document 65 ter, numéro 492, s'il vous plaît ?

  5   Q.  Est-ce que vous voyez le document qui est devant vous ?

  6   R.  Merci.

  7   Q.  De quoi s'agit-il ?

  8   R.  C'est un rapport de l'OMNU qui vient du siège, le secteur, c'est-à-dire

  9   le Secteur BH nord-est et au commandant du quartier général de l'OMNU, ce

 10   sont des informations également destinées au QG de Zagreb.

 11   Q.  Est-ce qu'il s'agit d'un rapport de situation journalier concernant

 12   cette journée-là ?

 13   R.  Effectivement, c'est un rapport de situation journalier qui couvre la

 14   période qui commence à 7 heures, 7 est également la date et tu qui va

 15   jusqu'à environ minuit c'est-à-dire "0001 Bravo". C'est le moment où nous

 16   étions là-bas jusqu'au soir de cette même journée.

 17   Q.  Donc c'est-à-dire jusqu'à 20 heures ?

 18   R.  Oui, 20 heures, le 7 juillet 1995.

 19   M. THAYER : [interprétation] Regardons maintenant le paragraphe 3 dans la

 20   version anglaise et B/C/S. Est-ce que vous voyez la phrase qui commence par

 21   : "L'équipe de Srebrenica a rapporté que la BSA continuait son offensive."

 22   Est-ce que voyez-vous cela ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Il y a également une référence au Bataillon néerlandais qui pilonnait

 25   autour de la région de Potocari et trois hommes ont été blessés ce faisant

 26   et amenés à l'hôpital. Les observateurs militaires de l'ONU ont confirmé

 27   cela; est-ce que vous vous souvenez que vous-même ou le commandant ait

 28   confirmé ces blessés ?

Page 19186

  1   R.  Oui. Le Bataillon néerlandais nous a rendu compte de cela et lorsque

  2   nous les avons emmenés à l'hôpital, ils étaient là et ils les ont vus.

  3   Q.  Dans ce paragraphe un peu plus loin, là où il est dit : " A 15 heures,

  4   trois obus ont atterri à Srebrenica et blessé deux hommes. L'un a été

  5   emmené par notre patrouille et l'autre par le MSF, mais il est mort pendant

  6   le transport à l'hôpital."

  7   Voyez-vous cela ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que vous vous souvenez avoir vu ou recueilli un de ces deux

 10   blessés ce jour-là ?

 11   R.  J'avoue que je ne me souviens pas très bien, je ne sais pas si c'est

 12   moi qui ai ramassé un de ces blessés ou le commandant Tetteh, mais je sais

 13   que c'est une question dont j'étais parfaitement au courant. Nous les avons

 14   emmenés nous-mêmes à l'hôpital, mais quand je dis nous il s'agissait de

 15   moi-même ou du commandant Tetteh.

 16   Q.  Si nous continuons, il y a également une référence faite à d'autres

 17   obus qui avaient atterri au même endroit ou autour et nous pensions qu'ils

 18   venaient d'un char qui était positionné sur la colline. Cela avait engendré

 19   beaucoup de dégâts au niveau des bâtiments dans la région et peu de

 20   blessés.

 21   Vous avez vous-même fait référence il y a quelques instants à votre

 22   surprise de voir qu'en dépit de tous ces obus, il y avait eu relativement

 23   peu de blessés. Est-ce que vous pourriez vous-même nous donner une

 24   explication concernant vos observations, c'est-à-dire le fait qu'il y ait

 25   eu si peu de pertes ou de blessés à ce moment-là étant donné la quantité

 26   d'obus qui avaient été envoyés ?

 27   R.  Tout d'abord, je dois dire que ça a été quelque chose assez étonnant

 28   pour nous-mêmes de constater que le pilonnage avait été très lourd; et que

Page 19187

  1   néanmoins lorsque nous sommes sortis, nous avons pu constater que le nombre

  2   de pertes et de blessés était très faible. Nous pensons que cela était dû à

  3   plusieurs éléments, l'un d'entre eux étant que les armes qui avaient été

  4   utilisées sont des armes d'artillerie à trajectoire élevée.

  5   C'est d'une certaine façon de là où elles sont placées en général,

  6   elles sont assez sûres parce qu'il s'agit d'artillerie lourde pour une

  7   unité de combat. Tout d'abord il fallait assurer leur sécurité, on les

  8   mettait en général derrière une colline là où on ne pouvait pas les voir

  9   très bien. Donc c'était plus difficile de l'autre côté en raison de leur

 10   "trajectoire élevée" puisqu'en fait elles ne visent pas directement. Elles

 11   prennent de l'altitude, ensuite retombent sur la cible ou sur l'endroit qui

 12   est visé.

 13   Quelquefois, comme ils ciblaient, ils visaient également une région

 14   qui cette fois-ci était une vallée - parce que le village de Srebrenica

 15   lui-même, en fait l'endroit dans son ensemble est un endroit où il y a

 16   beaucoup de vallées, de collines, et cetera - donc c'était un petit peu

 17   difficile de toucher véritablement des cibles en raison de cela. La

 18   trajectoire élevée et le fait qu'il y ait également des collines et des

 19   vallées quelque part, cela rendait la chose plus difficile c'est-à-dire

 20   d'atteindre réellement la cible visée était plus difficile. C'est, je pense

 21   la raison principale ou les raisons principales.

 22   Une autre raison était probablement que nous avions également réussi

 23   à sensibiliser les gens et à leur faire comprendre qu'il ne fallait pas

 24   sortir, mais rester à l'intérieur de leur habitation pendant le pilonnage.

 25   Je ne dis pas que c'était le facteur principal, mais je pense que les gens

 26   avaient écouté et ils étaient là au début quand la guerre avait commencé

 27   dans le pays. Ils savaient un petit peu comment réagir et je pense que cela

 28   a probablement pu aider.

Page 19188

  1   Q.  Y a-t-il d'autres facteurs qui vous viendraient à l'esprit ?

  2   R.  Je ne me souviens pas pour l'instant d'autres facteurs.

  3   Q.  Bien. Continuons dans le cadre de ce paragraphe. Référence est faite à

  4   : "Un nombre de dégâts et de dommages importants sur les bâtiments." Est-ce

  5   que vous avez pu vous-même observer les dégâts sur les bâtiments dans la

  6   ville de Srebrenica ?

  7   R.  La première chose dont il faut se souvenir c'est que la majorité des

  8   bâtiments de Srebrenica avaient été déjà, d'une façon ou d'une autre,

  9   touchés au cours d'autres attaques. Mais au cours de celle-ci, on pouvait

 10   au moins en sortant constater qu'il y avait quelques dégâts qui étaient

 11   tout à fait nouveaux et qui n'étaient pas les dégâts habituels que l'on

 12   avait l'habitude de voir.

 13   On pouvait facilement en déduire que ces bâtiments venaient d'être

 14   touchés, qu'il y avait eu des bâtiments qui venaient d'être touchés au

 15   cours de cette attaque même, parce qu'il semblait que les dégâts étaient

 16   des dégâts tout à fait récents. Nous pouvions facilement le voir,

 17   Président, et l'on pouvait voir que certains avaient été réellement

 18   détruits et que ce n'était pas les bâtiments abîmés qui étaient déjà là.

 19   Q.  Bien, si l'on continue, il y a référence à 17 heures à 21 détonations

 20   qui ont été entendues par les observateurs militaires de l'ONU à Potocari

 21   et je cite : "Nous pensons qu'ils viennent de la MRL située", et il y a une

 22   grille de référence. Je voulais simplement vous poser quelques questions à

 23   ce propos.

 24   Ces 21 détonations entendues par l'OMNU à Potocari, est-ce que vous

 25   vous souvenez si vous-même ou le commandant Tetteh étiez à Potocari à ce

 26   moment-là, et si vous avez entendu soit ces impacts, soit vu le

 27   remplacement, ou si c'est quelque chose dont vous avez entendu parler à

 28   Srebrenica ?

Page 19189

  1   R.  Président, ces informations, nous les avons eu du commandant De Haan

  2   qui était à l'hôpital. Il pouvait encore bouger un peu et il travaillait

  3   également. Il avait entendu parler de ces problèmes. Et comme il en avait

  4   entendu parler, il nous en a parlé. Il nous en a parlé parce qu'il était un

  5   d'entre nous.

  6   Q.  Un peu plus bas, il est dit : "Nous pensons qu'ils venaient d'un lance-

  7   roquettes multiple, ou de NCBU." Qu'est-ce que cela vous dit ?

  8   R.  Nous pensions qu'ils venaient de certains endroits, même si nous avions

  9   la direction générale et une région donnée, mais si l'on ne peut pas

 10   confirmer que ce soit réellement cet endroit-là, on ne peut pas confirmer.

 11   C'est la raison pour laquelle nous avons mis "NCBU", c'est-à-dire non

 12   confirmé par les observateurs militaires de l'ONU.

 13   Président, c'est un endroit où nous savions qu'en général, dans un

 14   endroit où il y avait un lance-roquettes qui était situé quelque part, même

 15   avant cela nous avions l'habitude de voir des roquettes, vous savez, qui

 16   survolaient dans une direction générale. Donc nous savions qu'il y en avait

 17   quelque part, mais nous n'étions pas sûrs, c'est la raison pour laquelle

 18   nous ne pouvions pas confirmer nous-mêmes.

 19   Q.  Lorsque vous dites "avant cela", vous faites référence au moment juste

 20   avant l'attaque qui a commencé le 6 juillet, Monsieur ?

 21   R.  Oui, Président.

 22   Q.  Est-ce que vous vous souvenez approximativement combien d'obus vous-

 23   mêmes et le commandant Tetteh avez notés et qui auraient frappé la ville de

 24   Srebrenica le deuxième jour du pilonnage, c'est-à-dire le 7. Est-ce que

 25   vous vous souvenez approximativement combien il y en avait ?

 26   R.  C'était un petit peu difficile de s'en souvenir, mais il y en avait

 27   sans aucun doute environ 200 -- en fait plus que 200. Sans aucun doute plus

 28   de 200.

Page 19190

  1   M. THAYER : [interprétation] Bien. Passons maintenant au 65 ter 494, très

  2   brièvement, s'il vous plaît.

  3   Q.  Vous avez le document sous les yeux ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  De quoi s'agit-il ?

  6   R.  Il s'agit d'un rapport de situation envoyé par le QG du Secteur nord-

  7   est à destination du QG de la FORPRONU.

  8   Q.  Ce rapport porte sur quelle période ?

  9   R.  La période indiquée ici, il faudrait faire défiler la page vers le bas

 10   -- part de 17 heures le 6 à 17 heures le 7 juin 1995.

 11   Q.  J'ai un certain nombre de questions à vous poser, ce qui nous permettra

 12   de voir si ce qui est écrit ici, 7 juin 1995, c'est une faute de frappe ou

 13   pas ?

 14   M. THAYER : [interprétation] Je demande à ce qu'on affiche la page 2, aussi

 15   bien en B/C/S qu'en anglais. Paragraphe 1, "Evaluation générale"

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Avant d'évoquer ce paragraphe, est-ce que vous voyez des indications au

 18   sujet de la transmission de ce document par fax ?

 19   M. THAYER : [interprétation] Il faudrait remonter en haut, la version en

 20   anglais pour le voir.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois ce qui figure là.

 22   M. THAYER : [interprétation]

 23   Q.  Bien. Et quelle est la date indiquée ici ?

 24   R.  Le 7 juillet 1995, 20 heures 43.

 25   Q.  Bien. Paragraphe 1. Il est indiqué que : "Un char de l'armée des serbes

 26   de Bosnie a tiré à dix reprises sur la centrale électrique à 200 mètres au

 27   sud-ouest du Corps de Potocari." Vous souvenez-vous avoir reçu cette

 28   information ou avoir entendu parler de cette attaque visant la centrale

Page 19191

  1   électrique ?

  2   R.  Je ne me souviens pas d'en avoir entendu parler. Je ne savais pas que

  3   ça avait eu lieu.

  4   Q.  Selon vous ces informations proviennent de quelle source ?

  5   R.  Cette information, d'après ce qu'on a vu à la page précédente, elle

  6   vient de la FORPRONU et pas des observateurs militaires.

  7   Q.  A la ligne suivante, on lit : "En raison des pilonnages de l'ABiH à

  8   l'intérieur de l'enclave, quatre civils ont été tués et 17 ont été

  9   blessés."

 10   Premièrement, vous souvenez-vous d'où provenait cette information ?

 11   R.  Il est très probable que ces informations viennent du Bataillon

 12   néerlandais, mais pas de nous les observateurs militaires.

 13   Q.  Au deuxième jour des pilonnages, vous souvenez-vous du nombre de civils

 14   qui avaient été blessés ou tués ?

 15   R.  Je n'en suis pas tout à fait sûr. Bien entendu, il y avait beaucoup de

 16   blessés, quant aux tués, il y en avait peut-être quatre à peu près, mais je

 17   n'en suis pas très sûr.

 18   Q.  Bien.

 19   M. THAYER : [interprétation] Si on regarde ce qui figure au point 3(e), il

 20   va falloir faire défiler la page aussi bien en B/C/S qu'en anglais.

 21   Q.  Dans la "zone est", il est question de "l'enclave de Srebrenica, 147

 22   détonations." Est-ce que ces informations venaient de vous ou d'une autre

 23   source ?

 24   R.  Ces informations ne venaient pas de nous, ça devait venir du Bataillon

 25   néerlandais, mais ça ne venait pas de nous.

 26   Q.  Passons maintenant au 8 juillet. Pouvez-vous relater et décrire

 27   l'attaque qui a eu lieu ce jour-là ?

 28   R.  Le 8 juillet, autant que je m'en souvienne, c'est le jour qui a été

Page 19192

  1   marqué par les pilonnages les plus violents. Les pilonnages ont commencé

  2   très tôt le matin et se concentraient sur Potocari même et sur le village

  3   de Srebrenica. Je crois que c'est ce jour-là que nous avons compté le plus

  4   grand nombre d'obus, et les dégâts étaient considérables. C'était vraiment

  5   la journée où les pilonnages ont été les plus violents.

  6   M. THAYER : [interprétation] Bien. J'aimerais que l'on examine le document

  7   495 sur la liste 65 ter.

  8   Q.  Quelle est la nature de ce document ?

  9   R.  Il s'agit d'un rapport des observateurs militaires du commandement des

 10   observateurs à Sarajevo, au QG des observateurs de Bosnie-Herzégovine. Il

 11   s'agit de la période du 8 juillet 1995.

 12   Q.  On nous dit qu'il s'agit de "mise à jour d'un rapport de situation".

 13   Qu'est-ce que ça veut dire ?

 14   R.  Normalement, les rapports de situation sont envoyés chaque jour dans la

 15   soirée et évoquent la situation pendant toute la période qui vient de

 16   s'écouler. Mais chaque fois qu'il y a un événement qu'il est nécessaire de

 17   communiquer, on met à jour le rapport de situation de cette manière. On

 18   informe le QG de ce qui s'est passé.

 19   Q.  Examinons la mise à jour numéro 1 : "Les pilonnages ont commencé au

 20   village de Srebrenica ce matin à 8 heures. Ils semblent se concentrer sur

 21   les zones densément peuplées," on donne ici deux références topographiques,

 22   "et sur la ville de Potocari."

 23   On fait référence à : "31 explosions à Potocari et 34 explosions dans

 24   la ville de Srebrenica." Et il est indiqué que : "Un projectile est tombé à

 25   quelque 20 mètres de l'endroit où sont logés les observateurs militaires, à

 26   12 heures 47."

 27   En lisant ce paragraphe, est-ce que vous vous souvenez des événements

 28   concernés, Monsieur ?

Page 19193

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Il est question du bâtiment des PTT et d'éclats d'obus qui l'ont

  3   touché. Est-ce que vous, vous étiez présent à ce moment-là ?

  4   R.  Oui. C'était l'une des périodes les plus effrayantes de mon séjour.

  5   L'explosion a projeté des éclats d'obus en grande quantité vers notre

  6   bâtiment. Il n'y avait plus de vitres aux fenêtres. Mais il y a certains

  7   éclats qui -- ils ont essayé de viser ce qui nous servait de fenêtres, et

  8   nous étions terrorisés à l'intérieur. Le pilonnage était incessant. Les

  9   éclats d'obus ont commencé à pénétrer dans le bâtiment, et nous n'avions

 10   nulle part où aller, sauf peut-être à nous réfugier dans le bunker. 

 11   C'était une période marquée par un grand sentiment d'insécurité. Tout

 12   aurait pu nous arriver à ce moment-là.

 13   Je l'ai expliqué précédemment, le bâtiment des PTT avait une

 14   importance stratégique pour l'armée des Serbes de Bosnie en terme de

 15   communication. Nous avions eu l'impression que peut-être ils souhaitaient

 16   détruire le bâtiment, si bien que nous n'étions plus en sécurité dans ce

 17   bâtiment.

 18   Q.  Il est fait référence ici au chef d'état-major de l'ABiH qui informe

 19   les observateurs que plus de 100 obus sont tombés dans une zone qui est

 20   décrite, mais on voit la mention "NCBU, "non confirmé par les observateurs

 21   militaires". Est-ce que vous avez trouvé ce passage ?

 22   R.  Oui. 

 23   Q.  Est-ce que ceci signifie que vous n'avez pas pu confirmer cette

 24   information, ou quand quelqu'un vous donne une information, vous dites si

 25   vous pouvez la confirmer ou pas ?

 26   R.  Nous ne faisions fi d'aucune information, de quelque source qu'elle

 27   vienne; on la signalait, on la transmettait cette information. Mais si ce

 28   n'était pas confirmé, à ce moment-là, on indiquait "pas confirmé par les

Page 19194

  1   observateurs militaires", afin de faire savoir à la personne à qui nous

  2   transmettions ces informations qu'elles n'étaient pas confirmées.

  3   Mais généralement on essayait de confirmer l'information, et à ce

  4   moment-là, on l'indiquait. Cependant, si ce n'était pas possible, on

  5   précisait que l'information n'était pas confirmée.

  6   Q.  Si on gagnait du temps, je ne vais pas vous poser des questions

  7   supplémentaires au sujet de ce qui figure dans le reste du mémo, mais une

  8   question encore : vous dites que c'est un rapport qui provient du QG du

  9   secteur de Tuzla qui est envoyé au commandement des observateurs militaires

 10   de Bosnie-Herzégovine, à Sarajevo et à Zagreb, mais il semble qu'il

 11   s'agisse ici d'une copie d'un rapport qui vient de vous. Vous dites "nous",

 12   et cetera dans le texte. Pouvez-vous nous expliquer comment votre rapport

 13   était incorporé dans ces autres rapports ?

 14   R.  Pendant l'attaque sur Srebrenica, la plupart de nos rapports de

 15   situation et les mises à jour des rapports de situation étaient transmis

 16   tels que nous les avions rédigés, en partie parce qu'ils ne voulait rien

 17   changer, ils ne voulaient ajouter quoi que ce soit ou présenter leurs

 18   visions des choses. Il fallait que cela ait le même impact que celui qui

 19   était recherché par nous, qui étions les rédacteurs initiaux de ces

 20   rapports.

 21   Et il y avait aussi le facteur temps qui jouait peut-être, parce

 22   qu'ils voulaient que ces informations soient transmises aux échelons

 23   supérieurs le plus rapidement possible, et quand on procède à une nouvelle

 24   rédaction de rapports, ça fait perdre du temps. Or, ces informations

 25   étaient extrêmement importantes, et ils voulaient qu'elles soient

 26   transmises aussi rapidement que possible.

 27   Q.  Pouvez-vous nous expliquer comment vous et le Colonel Tetteh rédigiez

 28   ces rapports pendant l'attaque, en quelques mots ?

Page 19195

  1   R.  Pendant ces attaques, un observateur sortait avec un interprète, et

  2   l'autre observateur restait à l'intérieur pour essayer de commencer à

  3   préparer le rapport.

  4   Si bien que dès que le deuxième observateur revenait de sa

  5   patrouille, on pouvait compléter le rapport et l'envoyer aussi rapidement

  6   que possible. Et dès que celui qui était en patrouille revenait, l'autre

  7   sortait.

  8   Ces rapports étaient établis par nous deux, et peu importe qui a

  9   véritablement écrit ce rapport, mais c'était une synthèse des informations

 10   que nous avons tous deux rassemblées à différentes périodes.

 11   Q.  Est-ce que le 8 juillet vous avez fait une évaluation de la situation

 12   en matière d'approvisionnement en vivres dans l'enclave, et si c'est le

 13   cas, pourquoi l'avez fait ?

 14   R.  L'approvisionnement en vivres de l'enclave préoccupait beaucoup notre

 15   QG, et c'est quelque chose que nous faisions chaque semaine. Chaque

 16   semaine, il y avait un rapport relatif à l'approvisionnement en vivres, et

 17   à la situation y afférente, et ce n'était pas réservé à Srebrenica. Cela

 18   valait pour tous les endroits où nous intervenions.

 19   Il s'agissait de faire état de tout changement, s'il y avait plus de vivres

 20   que prévu, d'où ça venait, est-ce que c'était dû à des trafics classiques.

 21   Est-ce que les vivres du HCR arrivaient, et cetera ? Il faut savoir ce qui

 22   se passe exactement sur place.

 23   Donc s'agissant des vivres, nous voulions savoir s'il y avait toujours

 24   suffisamment à manger pour les gens, quels étaient les prix des vivres ?

 25   Est-ce que c'était ce que les gens pouvaient se permettre d'acheter à

 26   manger. Et quelle était la nature des pénuries, des restrictions, comment

 27   cela fonctionnait, comment ça se présentait. Nous voulions savoir

 28   exactement ce qui se passait.

Page 19196

  1   Q.  Vous parlez de "mafia", de "trafic". Vous parlez de personnes qui

  2   occupent des positions dominantes. J'ai des questions à vous poser à ce

  3   sujet.

  4   Premièrement, parlez-nous de l'approvisionnement en vivres pour la

  5   population de Srebrenica.

  6   R.  L'essentiel des vivres venait du HCR des Nations Unies, la population

  7   était tributaire de l'ONU pour se nourrir. Mais comme dans n'importe quelle

  8   situation de guerre, comme après une catastrophe naturelle, et cetera, il y

  9   a toujours des gens qui essaient de tirer profit de la situation et du

 10   malheur des autres. 

 11   Dans ce cas de figure, vous avez des gens qui essaient de sortir, ça

 12   c'est acceptable. Effectivement, ils sortent de la zone, ils achètent à

 13   manger, ils reviennent et revendent ces vivres à des prix très élevés,

 14   parce que bien entendu dans ce cas-là ils devaient payer les soldats de

 15   l'armée des Serbes de Bosnie pour pouvoir sortir. Et quand ils rentraient,

 16   ils vendaient ce qu'ils avaient acheté, et ils voulaient faire un bénéfice.

 17   Voilà ce qui se passait.

 18   Q.  Est-ce qu'il y avait suffisamment de nourriture qui arrivait à

 19   Srebrenica à l'époque ? Que diriez-vous de cela ?

 20   R.  Il n'y a jamais eu assez de vivres à Srebrenica, à aucun moment. A

 21   aucun moment il n'y a eu suffisamment de nourriture dans cette enclave.

 22   Même au moment où le HCR des Nations Unies était encore présent, il ne

 23   pouvait que subvenir aux besoins de première nécessité. Mais il n'y avait

 24   pas suffisamment à manger pour tout le monde. 

 25   Parfois, les gens essayaient de mettre de côté un petit peu de vivres

 26   qui leur avait été distribués par le HCR des Nations Unies, puis ça se

 27   retrouvait ensuite sur le marché, parce que les gens essayaient de revendre

 28   un peu de ce qui leur avait été distribué.

Page 19197

  1   M. THAYER : [interprétation] J'aimerais qu'on examine la pièce 493 sur la

  2   liste 65 ter.

  3   Q.  Reconnaissez-vous ce document; si c'est le cas, de quoi s'agit-il ?

  4   R.  Il s'agit d'un rapport sur les vivres à Srebrenica envoyé au QG des

  5   observateurs des Nations Unies à Zabreg, et ça vient du QG de Sarajevo,

  6   date : 8 juillet, 9 heures 30.

  7   Q.  Qui a établi ce rapport ?

  8   R.  C'est sans doute nous.

  9   Q.  Vous souvenez-vous de la manière dont vous avez préparé ce rapport ce 8

 10   juillet, alors que les pilonnages étaient en cours ?

 11   R.  Je m'en souviens avec précision parce que nous sommes sortis, il y

 12   avait des petits commerces, des petites boutiques où on vendait à manger.

 13   Il y avait aussi des gens qui vendaient des vivres vers le marché. Donc ça

 14   permettait de se faire une idée des prix en cours. Parce qu'on pouvait

 15   aller là-bas, et ce qu'on faisait, c'est qu'on demandait quel était le prix

 16   de ce qui était en vente, le prix de la farine, et cetera. On posait la

 17   question aussi bien aux acheteurs qu'aux vendeurs, parce que les gens ne

 18   disaient pas toujours la vérité.

 19   Si bien que l'on obtenait les prix à la fois des acheteurs et des

 20   vendeurs, et c'est à partir de cela qu'on préparait ce genre de rapport.

 21   Q.  Vous dites que le marché vous semblait être la cible des pilonnages,

 22   pourquoi est-ce que les gens s'y rendaient quand même ?

 23   R.  Je vais vous dire, quelle que soit la situation, il y avait toujours

 24   des gens. Même pendant le tsunami, il y avait quand des gens qui faisaient

 25   des affaires. Vous me posez cette question, moi-même j'avais du mal à le

 26   comprendre, mais il y avait quand même des gens. Il y avait toujours des

 27   gens sur place. On allait les voir et ils nous donnaient les prix

 28   pratiqués; et, je l'ai dit, il y avait des petits commerces, tout petits

Page 19198

  1   commerces qui étaient à proximité et qui vendaient aussi de la nourriture.

  2   M. THAYER : [interprétation] Examinons la page 2, aussi bien dans la

  3   version en B/C/S que dans la version en anglais du document.

  4   Q.  Au paragraphe 3, je ne vais pas m'appesantir sur ce paragraphe parce

  5   qu'il se passe de commentaires, mais je voudrais savoir où vous avez obtenu

  6   les observations relatives aux distributions du HCR des Nations Unies qui

  7   étaient prévues ?

  8   R.  Il s'agissait de convois habituels du HCR des Nations Unies qui

  9   amenaient à manger, qui amenaient également du carburant, et ils étaient

 10   prévus. Il fallait que nous soyons mis au courant pour garantir la sécurité

 11   pendant le transit. C'est à nous qu'ils faisaient appel pour assurer leur

 12   sécurité.

 13   A ce moment-là, cela faisait un bout de temps qu'on ne leur permettait plus

 14   d'entrer dans l'enclave. Donc il y avait une pénurie de vivres. Tout le

 15   monde se préoccupait de ces convois du HCR, parce que la vie même de

 16   l'enclave en dépendait. Si bien qu'ils étaient accueillis avec beaucoup

 17   d'enthousiasme. C'est quelque chose à quoi on s'intéressait tout le temps.

 18   Q.  Au paragraphe 4, il est question de l'approvisionnement en eau. Est-ce

 19   que c'est quelque chose que vous appreniez ?

 20   R.  Non, parce que c'est quelque chose qui valait pour toute la période.

 21   L'eau, il fallait aller la chercher dans les sources. C'était plus sain que

 22   dans la rivière. L'eau était plus propre. Si bien que le HCR des Nations

 23   Unies avait mis en place une canalisation pour que les gens puissent

 24   ensuite aller chercher de l'eau à un endroit précis. Ce système

 25   fonctionnait bien. Les gens s'alignaient et on pouvait voir cette file

 26   d'attente d'une centaine de mètres, des gens qui attendaient pour pouvoir

 27   récupérer de l'eau.

 28   Q.  L'eau, où est-ce que vous la récupériez ?

Page 19199

  1   R.  Nous, l'eau dont nous nous servions, on allait la chercher à la base

  2   des Nations Unies. C'était de l'eau courante. Les hommes du Bataillon

  3   néerlandais avaient des tonneaux, des conteneurs, c'était de l'eau qu'ils

  4   utilisaient pour faire la cuisine, pour boire aussi.

  5   Pour ce qui est de l'eau pour se laver, pour faire la lessive, et

  6   cetera, à ce moment-là on allait la chercher à la rivière, parce qu'il

  7   n'était pas nécessaire que l'eau soit forcément très propre.

  8   M. THAYER : [interprétation] Paragraphe 7, page 2 en anglais, 3 en B/C/S.

  9   Q.  Ces informations relatives à l'approvisionnement en électricité, est-ce

 10   que c'était nouveau pour vous ?

 11   R.  Non. L'improvisation régnait s'agissant de l'approvisionnement en

 12   électricité. Les gens allaient chercher de l'eau dans la rivière, ensuite

 13   ils détournaient l'eau de la rivière pour produire de l'électricité avec

 14   les équipements appropriés.

 15   Mais ce type de courant n'est pas sûr, n'est pas fiable. Mais c'est ce qui

 16   se faisait. Cette électricité, elle approvisionnait une vidéothèque, là où

 17   les gens regardaient des films. Ça servait à ce genre de choses.

 18   Q.  Et vous, d'où obteniez-vous votre électricité ?

 19   R.  Nous avions un générateur, un générateur qui fonctionnait au fuel, puis

 20   quand il n'y avait pas de fuel ou très peu, on changeait notre emploi du

 21   temps. On mettait le générateur en marche quand on en avait besoin, quand

 22   il n'y avait pas suffisamment de carburant, et cetera, on fonctionnait

 23   notre mode opératoire.

 24   Q.  Passons maintenant, je vous prie, au 9 juillet. Vous nous avez dit que

 25   le 8 juillet avait été la journée marquée par les pilonnages les plus

 26   violents. S'agissant du 9 juillet, est-ce qu'il y a quelque chose qui a

 27   marqué particulièrement votre esprit s'agissant de cette journée, des

 28   décisions qui auraient été prises par vous-même ce jour-là ?

Page 19200

  1   R.  Le 9 a commencé comme les autres jours. Malheureusement, je crois que

  2   c'est le jour où nous avons ensuite remarqué qu'un char s'était approché.

  3   Lorsqu'un char ouvre le feu, il a un tir direct. Il ne s'agit pas d'un tir

  4   à trajectoire élevée à ce moment-là, comme les tirs d'artillerie. Il

  5   s'agissait de tirs directs. Nous avions peur d'être pris pour cible. Ça a

  6   constitué un tournant s'agissant de notre séjour dans la ville de

  7   Srebrenica.

  8   M. THAYER : [interprétation] Je vois que normalement on devrait prendre la

  9   pause dans deux minutes, mais plutôt que d'examiner un autre document, je

 10   pense qu'on pourrait faire la pause tout de suite.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, nous allons faire la pause et nous

 12   reprendrons dans 25 minutes.

 13   [Le témoin quitte la barre]

 14   --- L'audience est suspendue à 10 heures 37.

 15   --- L'audience est reprise à 10 heures 59.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.

 17   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, nous --

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Où est le témoin ?

 19   M. THAYER : [interprétation] Nous avons demandé quelques instants pour,

 20   très rapidement, quelques éléments préliminaires.

 21   Tout d'abord, donner à la Chambre une idée du temps que cela va nous

 22   demander avec ce témoin --

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, effectivement. Nous souhaiterions

 24   le savoir.

 25   M. THAYER : [interprétation] Oui, je comprends. Je comprends que le temps

 26   est important. Nous avons essayé de limiter l'interrogatoire autant que

 27   possible. Néanmoins, les choses vont plus lentement que je m'y étais

 28   attendu.

Page 19201

  1   Je pense que tout le monde le voit et le comprend. Malheureusement, cela

  2   signifie que je pense que je devrais pouvoir terminer mon interrogatoire

  3   aujourd'hui. Je voudrais que mes amis puissent me dire si, sur la base de

  4   cet examen, on pourrait réduire le contre-interrogatoire. Car si

  5   l'interrogatoire direct est assez direct, on peut quelquefois réduire le

  6   contre-interrogatoire.

  7   Une fois que nous en aurons terminé avec la déposition de ce témoin, nous

  8   pensons que les estimations pour le contre-interrogatoire n'ont pas été

  9   modifiées. Et nous pensons que nous pourrions terminer la déposition de ce

 10   témoin avant de clore la session aujourd'hui, de lever l'audience.

 11   Avant de prendre position, j'aimerais d'abord savoir si le témoin a la

 12   possibilité de revenir, si le Tribunal le permet, en  janvier. Son

 13   programme le lui permet, il est disponible.

 14   Nous aimerions savoir si le Tribunal est au courant de ces évolutions. M.

 15   McCloskey a préparé quelque chose. Je ne sais pas si c'est le moment

 16   approprié pour donner les dernières informations à la Cour sur les

 17   questions de Dean Manning et sur les accords qui pourraient être ou ne pas

 18   être finalisés. Je voudrais simplement que ces deux questions soient

 19   mentionnées devant la Cour et avoir une idée réaliste un petit peu de la

 20   situation et où nous en sommes.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Il semble que c'est une symphonie qui

 22   n'a pas encore été achevée pour moi. Vous pensez terminer votre

 23   interrogatoire aujourd'hui ?

 24   M. THAYER : [interprétation] Je pense que je devrais être à  même de le

 25   terminer aujourd'hui.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et demain ?

 27   M. THAYER : [interprétation] Demain, je pense que certains de mes collègues

 28   pourraient peut-être commencer. Je ne sais pas s'ils sont tous d'accord sur

Page 19202

  1   --

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] C'est ça l'important.

  3   M. THAYER : [interprétation] Je ne sais pas s'ils sont d'accord sur une

  4   position pour commencer leur contre-interrogatoire et ensuite, interrompre

  5   le contre-interrogatoire et attendre qu'il revienne s'ils le souhaitent. Ça

  6   je n'en suis pas tout à fait sûr, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Madame Fauveau.

  8   Mme FAUVEAU : Je ne sais pas si on est vraiment complètement unis, mais au

  9   moins cinq équipes de la Défense pensent qu'il serait préférable de

 10   commencer le contre-interrogatoire après la pause, tout simplement parce

 11   que d'abord notre contre-interrogatoire sera interrompu.

 12   Mais une raison plus importante, nous on a été informés par le Procureur

 13   dans le "proofing note" que le témoin est en possession de certains

 14   documents qu'il va apparemment communiqué au Procureur une fois quand il

 15   revient dans son pays. Donc comme il s'agit de certains rapports, des

 16   rapports de l'OMNU, on pense qu'il serait préférable qu'on puisse le

 17   contre-interroger lorsqu'on aura ces documents qui sont en possession du

 18   témoin.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Quels sont les documents dont le témoin

 20   est en possession à l'heure actuelle et que la  Défense n'aurait pas vus ?

 21   M. THAYER : [interprétation] Il s'agit de documents, Monsieur le Président,

 22   qu'aucune des parties n'a vus. L'un étant un journal qu'il a tenu et qui

 23   contient dit-il non pas des notes détaillées des événements, y compris des

 24   événements qui se sont déroulés pendant l'attaque, mais ce sont des notes

 25   qu'il a prises pendant les entretiens de l'OTP en 1997 mais qui n'ont pas

 26   été photocopiées. Je lui ai demandé s'il l'avait. Il m'a dit qu'il l'avait

 27   et qu'il pourrait le fournir.

 28   Les autres documents se sont des exemplaires du rapport de l'équipe de

Page 19203

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 19204

  1   Srebrenica qui ont été envoyés à Tuzla à l'époque. Il avait détruit, à ses

  2   connaissances, tous les originaux, les copies originales des rapports de

  3   l'OMNU pour des raisons de sécurité, donc de Srebrenica à Tuzla avant le

  4   retrait du Bataillon néerlandais et il a constaté qu'il avait encore des

  5   copies qui étaient avec l'équipement. Il a des copies à la maison.

  6   Je lui ai demandé si dans son souvenir il y avait quelque chose dans ces

  7   rapports qu'il n'avait pas déjà présenté ou donné dans les différentes

  8   annexes à sa déposition au bureau du Procureur et qui forment la base des

  9   rapports qui sont montrés maintenant. Il a dit qu'il n'y avait à sa

 10   connaissance rien de différent dans ces rapports.

 11   Vous l'avez entendu dire que ce que Tuzla faisait avec ses rapports c'était

 12   simplement les retransmettre à Zagreb et au commandement de la BH à

 13   Sarajevo. Ce que nous voyons maintenant dans certains cas se sont des

 14   copies de ces rapports qui venaient de l'équipe de Srebrenica, et dont il

 15   aurait des exemplaires à la maison, mais il n'y a rien de nouveau là-

 16   dedans.

 17   Je ne pense pas que l'on y trouve quoi que ce soit de nouveau ni de

 18   surprenant dans ces documents, mais ce serait simplement pour les avoir.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 20   Qui sont les cinq équipes de la Défense qui sont d'accord pour préférer

 21   démarrer le contre-interrogatoire après la reprise, les vacances

 22   judiciaires ?

 23   Monsieur Ostojic.

 24   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne sais pas

 25   qui sont ces cinq, mais je pense simplement que mon collègue a parlé d'un

 26   livre de notes, et le témoin avait parlé d'un journal, et je crois qu'il

 27   avait deux types de journaux, si j'ai bien compris. J'ai cru comprendre

 28   également qu'il écrivait un bouquin et nous aimerions demander à la Cour

Page 19205

  1   d'avoir ce document. Je comprends que ce sont des événements qui concernent

  2   Srebrenica. 

  3   Donc nous aimerions que ces documents nous soient présentés. S'il

  4   s'agit d'un journal, si j'ai bien compris, je pense qu'il tenait simplement

  5   à jour un journal sur les événements qui se déroulaient, donc cela pourrait

  6   être pertinent pour nous tous ici.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien, merci. Donc vous êtes l'un ces

  8   cinq. Je pense que Mme Fauveau en fait également partie. Je viens de voir

  9   que Me Zivanovic a très envie de prendre la parole. Vous vous joignez à vos

 10   collègues ?

 11   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui. Je suis d'accord avec mes collègues,

 12   Me Fauveau et Me Ostojic, et j'ai demandé également des documents

 13   supplémentaires à l'Accusation, mais il faut d'abord l'autorisation

 14   conformément au Règlement 70. Me Thayer nous avait informé de cela

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous avons entendu parler de cela. 

 16   Madame Nikolic, est-ce que vous faites également partie de ces cinq ?

 17   Mme NIKOLIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je suis d'accord

 18   avec mes collègues; même si mon contre-interrogatoire sera beaucoup plus

 19   court et peut-être même réduit à néant une fois que j'aurai entendu leurs

 20   questions.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 22   Maître Lazarevic.

 23   M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous faisons

 24   partie également de ces cinq équipes de la Défense et nous nous joignons à

 25   Mme Fauveau.

 26   Pour être honnête, je ne sais pas exactement quelle est la pertinence de

 27   ces documents qui sont en possession du témoin. Je ne peux pas exclure

 28   qu'ils soient pertinents ou d'autres solutions. Je ne peux pas être sûr, je

Page 19206

  1   ne serais pas à l'aise de commencer ce contre-interrogatoire et ensuite

  2   recevoir des documents qui pourraient peut-être m'amener à aller dans un

  3   sens tout à fait différent.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Le témoin revient de toute façon, donc

  5   vous pourrez poser des questions nouvelles à ce moment-là.

  6   Maître Josse ou Maître Krgovic ?

  7   M. JOSSE : [interprétation] Nous savions [comme interprété] que cette

  8   demande allait être faite, donc je ne peux pas dire que l'équipe de Gvero

  9   fasse partie des cinq. Honnêtement, notre position est que nous souhaitons

 10   maintenir notre position sur cet acte d'accusation. Nous avons déjà dit

 11   cela clairement à nos éminents confrères un petit peu plus tôt que c'est ce

 12   que nous voulions. C'était il y a quelques mois. Je dois dire que je

 13   soutiens ce qui a été dit; dans la réalité, je pense que je me dois de le

 14   faire, parce que si cela leur donne un délai supplémentaire, il est

 15   inévitable que nous en bénéficierons également, donc nous sommes le sixième

 16   à nous joindre.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 18   Et Maître Sarapa ? Monsieur Sarapa ?

 19   M. SARAPA : [interprétation] Nous sommes également d'accord avec nos

 20   collègues et nous sommes d'accord pour dire que le contre-interrogatoire

 21   devrait commencer en janvier plutôt que maintenant.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Quelle en est la raison ?

 23   M. SARAPA : [interprétation] La raison est celle qui a été mentionnée par

 24   Me Fauveau.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc ce n'est pas uniquement une

 26   question de solidarité ?

 27   M. SARAPA : [interprétation] Non, ce n'est pas uniquement une question de

 28   solidarité. Nous pensons simplement que nous pouvons gagner un peu de temps

Page 19207

  1   et ne pas avoir à expliquer tout ce qui aura déjà été dit.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Nous devons discuter entre nous

  3   et prendre une décision que nous vous ferons connaître un petit peu plus

  4   tard.

  5   Oui, concernant les documents qui demandent le Règlement 70.

  6   M. THAYER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, si je pouvais

  7   clarifier un certain nombre de références faites ici. 

  8   Mon collègue, M. Zivanovic, a fait une demande spécifique concernant

  9   les originaux des rapports de l'OMNU de Srebrenica à Tuzla qui viennent de

 10   l'équipe de Srebrenica. Nous avons fait une recherche dans la base de

 11   données, nous n'avons pu trouver aucun de ces documents. Je me suis enquis

 12   auprès du témoin pour voir s'il en avait. C'est là que j'ai compris qu'il

 13   avait deux originaux qu'il avait emmenés avec lui par inadvertance.

 14   Pendant l'entrevue, j'ai regardé également certains rapports de

 15   situation de Tuzla et du Secteur nord-est, et d'autres documents qui

 16   peuvent être datés de la fin de juillet et que l'on n'a jamais montrés au

 17   témoin Kingori. Ils ne portaient pas son nom et qu'il voyait pour la

 18   première fois. Par prudence, j'ai demandé à mon ami s'il souhaitait y avoir

 19   accès. Il m'a dit que oui.

 20   Comme nous n'avions jamais demandé à le faire, nous n'avions pas

 21   l'autorisation de l'article 70 du Règlement, donc nous avons dû demander

 22   cette autorisation. Ce sont ces documents auxquels il était fait référence.

 23   Ce ne sont pas des documents originaux de Srebrenica. Ils couvrent les

 24   périodes de temps qui vont de cette période immédiatement après le 6

 25   jusqu'au 18 juillet. C'est donc une demande séparée.

 26   C'est la première fois que j'entends parler de ce livre sur lequel le

 27   témoin est en train de travailler. J'ai cru comprendre que mes collègues

 28   ont rencontré le témoin pendant le week-end. Je n'ai pas entendu parler de

Page 19208

  1   cela. Je ne vois pas la pertinence que ce livre peut représenter, puisque

  2   c'est quelque chose qui est écrit concernant ces faits, à moins qu'il n'ait

  3   des documents contemporains d'origine, je ne vois pas la pertinence.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, mais c'est quelque chose dont nous

  5   pouvons discuter --

  6   M. THAYER : [interprétation] Oui, mais c'est la première fois que j'en

  7   entends parler, Monsieur le Président.

  8   Pour ce qui est du livre de notes, j'en ai toujours [comme

  9   interprété] entendu parler sous forme de journal. Il avait deux livres de

 10   notes qu'il tenait simultanément, le premier qui était plus détaillé

 11   concernait les réunions. Il l'a détruit avant le retrait du Bataillon

 12   néerlandais, pour des raisons de sécurité. Il a détruit le livre qui

 13   contenait les notes les plus détaillées et des informations qui pouvaient

 14   être un peu sensibles.

 15   Le deuxième livre de notes était beaucoup moins détaillé, comme il l'a dit,

 16   et il y avait également un rapport concernant des incidents de tirs ou de

 17   brèves inscriptions des réunions. Il se sentait beaucoup plus à l'aise

 18   d'emmener celui-ci. C'est celui auquel nous avons fait référence hier, mais

 19   je n'avais jamais entendu parler d'un journal personnel. C'est la première

 20   fois que j'entends parler de cela.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey - ce n'est nullement

 24   une offense à votre égard, Monsieur Thayer, si je vous contourne - mais

 25   nous voulons également nous assurer que tout le temps, pendant que vous

 26   faites ces déclarations, vous êtes également conscient et que vous vous

 27   souvenez encore de ce que nous vous avons dit un peu plus tôt au cours de

 28   la semaine, c'est-à-dire que vous avez un délai pour cette affaire et qu'il

Page 19209

  1   ne peut pas être modifié.

  2   Monsieur McCloskey.

  3   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Je suis tout à fait conscient de cela

  4   et de la position de la Cour sur ce point, et je peux peut-être vous dire

  5   où en sont nos discussions avec la Défense sur certains points. Je pense

  6   que la Défense aimerait également que je le fasse. Ça ne prendra qu'une

  7   minute ou deux.

  8   Comme vous le savez, Alistair Graham est toujours là en tant que témoin, et

  9   je pense qu'avec l'équipe Borovcanin, nous nous sommes mis d'accord sur

 10   certains points concernant son témoignage. Nous ne pensons pas qu'il soit

 11   nécessaire de le rappeler, à moins que vous ne pensiez que cela soit

 12   nécessaire. Donc quelque chose que l'on peut régler. Et s'il n'y a pas de

 13   problème, nous devrions pouvoir avoir cette confirmation avant les

 14   vacances.

 15   S'il y avait un vidéographe avec le film Scorpion, nous pensons également

 16   qu'il ne serait pas nécessaire peut-être de rappeler cette personne qui a

 17   réalisé le film.

 18   En regardant les pièces à conviction de Dean Manning, nous en sommes

 19   là, et il semblerait que la Défense n'a pas d'objections par rapport à un

 20   certain nombre de rapports sur lesquels il a basé ses travaux : l'analyse

 21   des tissus, les douilles d'obus, l'analyse du pollen, et cetera. Mais comme

 22   vous le savez, il y a objection maintenant concernant le matériel ADN qui

 23   faisait l'objet de son dernier rapport. En raison de cela, et je pense que

 24   je l'ai déjà dit, il nous faudra - à moins que vous ne soyez pas d'accord -

 25   il faudra demander à quelqu'un de l'ICMP de venir pour expliquer les

 26   méthodes et les procédures sur lesquelles tout ce matériel est fondé.

 27   J'espère que l'on ne va faire venir quelqu'un qui parlera de

 28   chromosomes et de conformité sur le plan de l'ADN, et cetera; je pense que

Page 19210

  1   le témoin avait les connaissances de base sur ce point et que nous n'en

  2   sommes plus là. Mais pour ce qui est des méthodes et des procédures, et la

  3   façon dont on fait des prélèvements de sang et que l'on compare avec la

  4   famille des disparus sur la base des constatations, je pense que ce serait

  5   bon de le faire.

  6   Nous n'avons pas d'objection concernant le rapport de Helge Brunborg,

  7   quant aux informations importantes, Helge Brunborg avait décrit les

  8   méthodes de base et les procédures de base. Mais comme M. Manning se base

  9   sur certains d'entre eux et que nous avons cette objection, nous sommes en

 10   train d'essayer d'organiser quelque chose pour que quelqu'un de l'ICMP, un

 11   témoin de l'ICMP puisse venir ensuite -- après M. Butler.

 12   Ensuite, on pourrait peut-être faire venir un démographe, parce que

 13   les données que nous ont données l'ICMP sont des données brutes qu'un

 14   démographe peut comprendre, pour que l'on puisse peut-être en faire quelque

 15   chose de ces données pour M. Manning et Helge. Nous allons peut-être

 16   arriver à un accord là-dessus, mais ces deux témoins -- ce sont des

 17   personnes que nous devrons peut-être faire venir. Comme vous m'avez invité

 18   de le faire, nous déposerons également une requête demandant cette

 19   autorisation de faire venir des témoins.

 20   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ceci m'amène également à autre

 21   chose.

 22   Nous avons une requête confidentielle qui a été déposée pour ajouter

 23   un autre témoin à la liste, ce qui nous demandera une bonne journée ou

 24   deux, s'il peut venir. Est-ce que l'équipe de la Défense a pris position

 25   sur cette requête, parce que l'on a besoin de savoir. Sinon nous allons

 26   devoir nous retrouver demain --

 27   M. McCLOSKEY : [interprétation] Ce sera un témoin qui sera très bref -

 28   comme le dit la requête - pour ce qui est de l'interrogatoire de

Page 19211

  1   l'Accusation.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne sais pas ce que ce sera comme

  3   témoignage, mais vous êtes mieux à même que moi de l'évaluer.

  4   Oui, Maître Nikolic.

  5   Mme NIKOLIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voulais simplement

  6   dire quelque chose concernant cette dernière requête dont vous venez de

  7   parler.

  8   Je pense qu'il est un petit peu trop tôt pour exprimer notre

  9   position, puisque le conseil principal de M. Pandurevic n'est pas là, et

 10   j'aimerais également pouvoir le rencontrer avant de répondre.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je pense également que M. Hayes a

 12   maintenant pris une décision, et que Me Sarapa est certainement au courant

 13   de cette information. C'est la raison pour laquelle il y a des co-conseils

 14   qui sont là.

 15   Maître Sarapa.

 16   M. SARAPA : [interprétation] Concernant le témoin qui est proposé, je vous

 17   demanderais de pouvoir donner notre position après la pause.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Après la pause suivante, c'est-à-dire à

 19   midi trente ?

 20   M. SARAPA : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 22   Oui, Monsieur McCloskey.

 23   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, comme vous pouvez le

 24   voir, nous avons discuté avec la Défense sur un certain nombre de points.

 25   Ils vont vous demander de prolonger un certain nombre de délais et nous

 26   avons donné notre point de vue sur cela, sur la base d'un certain nombre de

 27   choses sur lesquelles ils se sont mis d'accord avec nous et qui

 28   permettraient de gagner du temps. Donc je laisse cela entre leurs mains, je

Page 19212

  1   pense qu'ils connaissent notre position, et je peux répondre également.

  2   Mais je pensais qu'il serait bon que tout un chacun sache ce que pensent

  3   les parties avant les vacances judiciaires.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Mais je pensais que cela était

  5   limité uniquement au délai ou à la limite qui était fixée par nous pour le

  6   dépôt des documents sur la liste 65 ter, et pas d'autres prolongations.

  7   C'est ce que j'avais compris en parlant à Me Bourgon.

  8   Oui, Maître Ostojic.

  9   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Vous avez

 10   raison, et ce dont nous avions besoin, nous avons eu besoin de temps

 11   supplémentaire pour la préparation. La Cour connaissait très bien la date

 12   limite du 31 mars, et nous voulions que l'Accusation connaisse également

 13   notre position, si nous pouvions prolonger ce délai pour aller jusqu'au 30

 14   avril. Je pense également que nous avons un accord, ou en tous cas pas

 15   d'objection, et que nous allons demander à la Cour, avec votre permission,

 16   si nous pouvions modifier la requête pour que le délai du témoin sur la

 17   liste 65 ter et les documents soit le 30 avril.

 18   Une autre condition concernant l'accord ou la non-objection que nous avons,

 19   c'est que mon éminent collègue de l'OTP a demandé, ou du moins, nous a

 20   parlé d'experts militaires le 31 mars, conformément au délai qui avait déjà

 21   été fixé par le Tribunal, et sur lequel nous nous étions mis d'accord.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord. Merci.

 23   M. OSTOJIC : [interprétation] Bien sûr, avec votre permission.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, bien sûr. Merci, Monsieur Ostojic.

 25   Il me semble également que nous essayons d'arriver à un accord entre nous.

 26   Si c'est le cas, nous avons également un autre point; je vais essayer de

 27   vous donner les choses dans l'ordre. Mais nous vous donnons un préavis

 28   comme nous l'avons fait avant l'ouverture du procès.

Page 19213

  1   Nous allons vous demander de soumettre une liste de faits acceptés et

  2   de faits qui ont été admis dans d'autres affaires, et sur lesquels

  3   l'Accusation pourrait également se prononcer. Donc c'est un exercice qui

  4   pourrait peut-être justifier de retarder un petit peu la date de dépôt sur

  5   la liste du 65 ter.

  6   Mais en tous cas, excusez-moi, parce qu'il semble que -- de toute

  7   façon nous avançons.

  8   Monsieur McCloskey, mes excuses.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, je suis d'accord avec M.

 10   Ostojic.

 11   Je voulais simplement préciser, nous n'avons pas d'objection pour

 12   cette prolongation de 30 jours pour la liste des pièces à conviction et des

 13   témoins; même si nous aimerions nous en tenir à ce qui avait été dit par

 14   vous-même concernant les experts et les rapports, et les dates concernant

 15   l'obtention de ces rapports, et autrement -- pour les experts militaires.

 16   Les autres experts peuvent également obtenir ces 30 jours. Pour ce

 17   qui est des experts en démographie et d'autres, nous sommes également

 18   d'accord pour leur donner les 30 jours également.

 19   Autrement, vous vous souviendrez peut-être que Me Ostojic et moi-même

 20   avons eu des discussions sur les imageries aériennes avec les Etats-Unis et

 21   que nous sommes arrivés à un accord. La question n'est plus quelque chose

 22   qu'il nous reste à vous présenter; même si Me Ostojic a encore quelques

 23   objections à ces images, mais bien entendu tout va bien. Nous ne pensons

 24   pas qu'il soit nécessaire d'impliquer les Etats-Unis.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Merci.

 26   Donc le seul plaisir aujourd'hui encore qui nous reste, c'est

 27   entendre ce que Me Sarapa aura à nous dire après la pause. Merci.

 28   Nous pouvons faire entrer le témoin maintenant.

Page 19214

  1   M. JOSSE : [interprétation] Je voudrais simplement ajouter une chose :

  2   l'équipe Gvero a déposé une requête hier qui ne m'est pas encore arrivée,

  3   ce qui, de façon très limitée, pourrait peut-être avoir un effet sur le

  4   temps qui était prévu, et l'Accusation aura besoin de la lire.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous ne sommes pas au courant de cela,

  6   si vous aviez un exemplaire que vous pouviez nous donner.

  7   M. JOSSE : [interprétation] Il y a une raison pour laquelle cela n'est pas

  8   encore dans le système, c'est qu'il y avait un problème bureaucratique,

  9   mais je pourrais le donner au greffe.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je ne savais pas qu'il y avait des

 11   problèmes bureaucratiques au Tribunal. C'est la première fois que j'en

 12   entends parler.

 13   M. JOSSE : [interprétation] Il semble que ce soit quelque chose qui

 14   m'arrive en particulier, j'en ai bien peur.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Maître Josse.

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Thayer.

 18   M. THAYER : [interprétation]

 19   Q.  Rebonjour, Mon Colonel.

 20   R.  Bonjour.

 21   Q.  Avant la pause, vous étiez en train de nous parler de ce qui s'était

 22   passé le 9 juillet. Vous avez expliquez qu'il y avait un char qui s'était

 23   approché de l'endroit où vous vous trouviez dans la ville de Srebrenica.

 24   Pouvez-vous nous dire quelles décisions vous avez prises et pour quels

 25   motifs ?

 26   R.  Une correction peut-être que je devrais apporter. Je m'appelle Joseph,

 27   et non pas "Josse". Ah, je vois que c'est quelqu'un d'autre.

 28   M. JOSSE : [interprétation] Non, non, il s'agit de moi.

Page 19215

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord. Nous avons ressenti comme une très

  2   grande menace de la proximité de ce char. Nous avons estimé qu'il n'était

  3   pas sûr pour nous de rester sur place. Comme je l'ai dit avant la pause,

  4   quand un char ouvrait le feu, il le fait directement sur sa cible. Il ne

  5   s'agit pas d'un tir d'artillerie avec une trajectoire haute, si bien qu'il

  6   nous aurait touché indubitablement s'il avait tiré sur nous. On avait peur

  7   d'être visés, d'être touchés. On s'est dit que la meilleure solution

  8   c'était de partir, c'est-à-dire de quitter le bâtiment des PTT et de se

  9   rendre dans le camp du Bataillon néerlandais à Potocari.

 10   Nous avons demandé une réunion avec le maire adjoint afin qu'il nous donne

 11   l'autorisation de nous en aller, de quitter le bâtiment des PTT. Cela peut

 12   vous sembler un petit peu bizarre que nous ayons demandé cette permission,

 13   mais nous nous sentions intimidés par la présence des soldats de l'ABiH qui

 14   circulaient aux alentours. De plus, il y avait un très grand nombre de

 15   civils autour du bâtiment des PTT. Puis il y avait la Compagnie Bravo, la

 16   Compagnie B du Bataillon néerlandais. Nous avons donc estimé que la bonne

 17   chose à faire, la chose à faire, c'était de dire à ces gens qu'il fallait

 18   nous permettre de sortir en toute sécurité pour nous rendre au Bataillon

 19   néerlandais.

 20   Q.  Vous souvenez-vous de celui que vous appelez le maire adjoint ?

 21   R.  Oui. Je crois qu'il s'appelait Osman Suljic ou quelque chose de ce

 22   genre.

 23   Q.  Pouvez-vous nous relater la réunion que vous avez eue avec lui ?

 24   R.  Nous l'avons rencontré à deux reprises, au cours de deux réunions,

 25   parce que précédemment quand nous avions demandé la permission de nous en

 26   aller, il avait dit très catégoriquement que nous ne pouvions pas quitter

 27   Srebrenica parce qu'il pensait que si nous partions, cela marquerait la fin

 28   de l'enclave, que l'armée des Serbes de Bosnie pourrait faire ce que bon

Page 19216

  1   lui semblerait si nous n'étions pas là parce qu'ils n'avaient plus rien à

  2   craindre de nous. Il pensait que nous devions rester jusqu'à ce qu'on fasse

  3   quelque chose.

  4   Nous avons signalé ce qu'il en était à notre QG, et au QG on nous a dit

  5   d'essayer de les persuader avec diplomatie de nous autoriser à partir.

  6   C'est ce que nous avons fait effectivement la même journée. Nous lui avons

  7   parlé à lui et à ses collaborateurs, et grâce à la persuasion et en

  8   essayant de lui faire comprendre que même si on restait et si on était

  9   touchés, plus personne ensuite ne parlerait de ce qui se passait à

 10   Srebrenica.

 11   Finalement, je dois dire qu'il a fondu en larmes. Il a fondu en larmes et

 12   il nous a dit : "Vous voulez nous laisser tout seuls pour que les Serbes

 13   puissent faire ce qu'ils veulent. Vous voulez aller dans un endroit sûr et

 14   nous laisser ici, alors que ce n'est absolument pas sûr ici." Nous lui

 15   avons dit que même depuis le camp du Bataillon néerlandais, nous

 16   continuerions à informer les Nations Unies de tout ce qui se passait dans

 17   l'enclave.

 18   Q.  Qui est allé avec vous de Srebrenica à Potocari, pouvez-vous relater ce

 19   trajet ?

 20   R.  Il y avait moi, David Tetteh, ainsi qu'un interprète, Emir Suljagic, on

 21   nous a donné l'autorisation de partir, le maire adjoint nous y a autorisés.

 22   Nous avons rassemblé les affaires que nous avons pu rassembler. Nous sommes

 23   montés à bord d'une jeep, et moi-même je me suis mis au volant et j'ai

 24   conduit cette jeep jusqu'à Potocari. Je dois vous dire que c'était

 25   effrayant, terrifiant.

 26   Ce n'est pas très long. Cela ne fait que sept kilomètres, mais nous ne

 27   savions pas si nous allions nous en sortir vivants. Sept kilomètres qui ont

 28   paru durer des milliers de kilomètres. Les pilonnages continuaient et les

Page 19217

  1   obus pouvaient tomber des deux côtés de la route, ou devant nous sur la

  2   route, sur la chaussée, ou derrière nous. Mais heureusement, les obus ont

  3   atterri dans les champs cultivés où la terre était meuble, si bien qu'ils

  4   ne produisaient pas d'éclats d'obus qui nous auraient touchés.

  5   J'avançais à une vitesse de quelque 90 kilomètres/heure pour négocier tous

  6   les virages et pour pouvoir éventuellement nous arrêter en cas d'urgence.

  7   Ce trajet a été vraiment terrifiant, le trajet jusqu'à Potocari.

  8   Q.  Vous avez parlé de l'autre interprète et vous avez dit qu'il s'appelait

  9   Hasan, savez-vous où il se trouvait quand vous avez quitté Srebrenica ?

 10   R.  Hasan était avec nous. Il était à proximité et il cherchait les gens de

 11   sa famille. Quand nous lui avons dit que nous voulions aller à Potocari, il

 12   nous a dit qu'il ne pouvait pas partir, lui. Il ne pouvait pas partir avant

 13   d'avoir trouvé les membres de sa famille. Il ignorait où ils étaient et il

 14   avait peur qu'ils ne se fassent tuer. Donc il a dit qu'il ne pouvait pas

 15   quitter Srebrenica avec nous.

 16   Q.  Qu'avez-vous fait quand vous êtes arrivés à Potocari ?

 17   R.  Dès que nous sommes arrivés à Potocari, au camp du Bataillon

 18   néerlandais, nous avons poussé un soupir de soulagement et nous avons

 19   établi les communications avec notre QG. Il fallait mettre en place les

 20   équipements de transmission; et nous avons tout de suite informé notre QG

 21   que nous étions installés dans le camp du Bataillon néerlandais à Potocari

 22   et que nous pouvions réaliser des transmissions sans difficultés.

 23   Ultérieurement, nous nous sommes interrogés sur la manière de nous

 24   tenir au courant de la situation à Srebrenica. Il a fallu prendre une

 25   décision sur la manière de mener notre mission à Srebrenica et dans les

 26   zones environnantes.

 27   Q.  Quelle décision avez-vous fini par prendre, Mon Colonel ?

 28   R.  A ce moment-là, très peu de solutions s'offraient à nous, parce

Page 19218

  1   que nous avons eu le sentiment qu'il serait peut-être impossible pour nous

  2   de retourner à Srebrenica, et que si nous étions allés là-bas en jeep, cela

  3   aurait été très dangereux. Si bien qu'on a discuté de tout cela et on a

  4   décidé d'envoyer un de nos observateurs, Emir Suljagic. On lui a demandé

  5   d'aller sur place pour suivre la situation et pour nous dire ce qui se

  6   passait. Parce qu'on s'est dits qu'il courrait moins de danger que nous,

  7   moins de risques que nous, parce que c'était un habitant de la ville, donc

  8   il était possible que personne ne se rende compte de qui il était, et il

  9   serait peut-être en mesure d'entrer en contact avec nous.

 10   Q.  Je remarque qu'au compte rendu d'audience, il est dit, je cite : "Nous

 11   avons discuté et nous avons décidé d'envoyer un de nos observateurs." Or,

 12   il était traducteur. En fait, vous vouliez parler d'un interprète ?

 13   R.  Oui. Non, non, ce n'était pas un "observateur", c'était notre

 14   interprète, c'était un habitant du coin.

 15   Q.  A quel moment de la journée a-t-il pris la direction de Srebrenica et à

 16   quel moment y est-il arrivé ?

 17   R.  Il est parti le soir lorsqu'il faisait sombre. Il a avancé le long de

 18   la rivière derrière le camp du Bataillon néerlandais. Il a avancé à couvert

 19   ici jusqu'à la ville de Srebrenica.

 20   Q.  Ensuite, est-ce que vous avez été en mesure d'entrer en contact avec

 21   lui; et si oui, de quelle manière ?

 22   R.  Nous lui avions remis un de nos postes de communication, un poste

 23   radio, pour qu'il puisse prendre contact avec nous.

 24   Q.  J'aimerais parler avec vous de rapports qui ont été préparés et envoyés

 25   le 9, certains rapports envoyés avant votre départ. Ensuite, on parlera de

 26   ce qui s'est passé après.

 27   M. THAYER : [interprétation] Il s'agit de la pièce 65 ter, numéro 498.

 28   Q.  Reconnaissez-vous ce document ?

Page 19219

  1   R.  Oui. Il s'agit d'un rapport de situation -- enfin d'une mise à jour

  2   d'un rapport de situation, ça vient du QG nord-est, adressé aux QG de

  3   Sarajevo et de Zagreb. Il est indiqué ici que c'est adressé à notre équipe,

  4   mais ce n'est vraiment pas le cas.

  5   Q.  Je vois qu'il y a une abréviation ici, "TA OMNU Srebrenica". Qu'est-ce

  6   que ça veut dire ?

  7   R.  C'était le code de l'équipe de Srebrenica. Chaque équipe avait un code

  8   particulier. L'équipe "Tango Sierra" c'était une équipe donnée, puis les

  9   autres aussi avaient d'autres noms.

 10   Q.  Au premier paragraphe : "La matinée était magnifique, on a pensé que ça

 11   continuerait de la même manière, mais vers 8 heures, les pilonnages ont

 12   commencé à viser à nouveau Srebrenica."

 13   Il est dit que : "Les observateurs militaires ont compté un total de 113

 14   explosions à Srebrenica et à Potocari."

 15   D'où provenaient ces informations ?

 16   R.  Ces informations venaient de nous, c'est nous qui avons fourni ces

 17   informations. Même depuis Potocari, nous étions en mesure d'entendre ce qui

 18   se passait et de suivre les pilonnages. Emir pouvait nous dire ce qu'il en

 19   était depuis Srebrenica. Il pouvait nous dire de l'endroit où il se tenait

 20   quels étaient les endroits visés, mais nous, nous pouvions également

 21   compter les impacts.

 22   Q.  A ce moment-là, à l'heure où ce rapport a été établi, 14 heures 40;

 23   est-ce que vous étiez toujours à Srebrenica, ou plutôt, à l'heure dont il

 24   est question, vous étiez toujours à Srebrenica ?

 25   R.  Oui, à 14 heures 40 nous étions toujours à Srebrenica. Je crois que

 26   nous sommes partis vers 18 heures pour aller à Potocari. Ce sont là des

 27   informations qui viennent directement de nous.

 28   Q.  Nous allons examiner d'autres documents pour préciser la chose. Dans un

Page 19220

  1   autre paragraphe, il est question du 8 juillet,

  2   22 heures 40; est-ce que voyez-vous cela ?

  3   "Les observateurs militaires ont observé un grand nombre de gens qui

  4   entraient dans la ville de Srebrenica à partir des abris suédois de

  5   Slapovic et des villages environnants. Certains essayaient de se réfugier

  6   chez des membres de leur famille, d'autres sont partis à l'école ou dans

  7   l'enceinte de l'école."

  8   Est-ce que vous avez vu tous ces gens arriver ?

  9   R.  Non. C'était le 8, donc on a pu voir ça nous-même. On a vu les gens

 10   arriver qui venaient de ce qu'on appelait le village suédois. C'est le

 11   village qui se trouvait à l'extérieur de Srebrenica où étaient hébergés des

 12   réfugiés. Il s'agissait d'un projet financé par le gouvernement suédois

 13   pour abriter les gens qui apparemment vivaient à Srebrenica, on pensait

 14   qu'à cet endroit, les gens seraient plus en sécurité.

 15   M. THAYER : [interprétation] Page 2 en anglais, page 3 en B/C/S du même

 16   document. Il va falloir faire défiler la page du document en anglais pour

 17   le B/C/S, c'est bon.

 18   Q.  Ce document n'est pas très facile à lire, il est difficile de s'y

 19   retrouver. Mais à peu près aux deux tiers de cette page, il est question

 20   d'un représentant officiel de Srebrenica, d'un dirigeant de Srebrenica qui

 21   demande au Bataillon néerlandais d'assurer la sécurité de l'hôpital local.

 22   Est-ce que vous voyez ce passage ? C'est plus facile peut-être si vous

 23   partez du bas de la page, je cite : "Cependant, MSF a refusé cette sécurité

 24   estimant que toute présence militaire aux alentours de l'hôpital et à

 25   l'hôpital susciterait une confrontation militaire qui aurait un effet

 26   négatif pour les malades."

 27   Est-ce que vous voyez ce passage ?

 28   R.  Oui.

Page 19221

  1   Q.  Etiez-vous présent au moment de cette discussion ?

  2   R.  Oui, j'y ai participé.

  3   Q.  Quelle a été l'issue de cette discussion ?

  4   R.  On avait demandé à ce que le Bataillon néerlandais envoie des soldats,

  5   mais en fait cette demande a été rejetée. Parce que MSF pensait que la

  6   présence des soldats à l'hôpital ferait de l'hôpital une cible potentielle,

  7   une cible militaire pour l'armée des Serbes de Bosnie, ils pensaient qu'il

  8   valait mieux laisser les choses en état, puis généralement, un hôpital ce

  9   n'est pas un endroit où on est censé trouver des soldats.

 10   Du fait de la convention de Genève, les gens qu'on trouve dans un hôpital

 11   sont considérés comme des personnes protégées, ce sont des blessés, et

 12   cetera, personne n'est censé attaquer un hôpital. Il voulait qu'il n'y ait

 13   aucun soldat autour de l'hôpital pour que cela ne devienne pas une cible

 14   éventuelle.

 15   Q.  Entre le 6 juillet et le moment où vous avez quitté Srebrenica pour

 16   Potocari, est-ce que vous avez eu l'occasion d'aller dans cet hôpital; et

 17   si oui, pour quelles raisons ?

 18   R.  Oui, j'ai été à l'hôpital; ce n'était pas la première fois d'ailleurs

 19   que j'y allais. Je me suis rendu à l'hôpital parce qu'on nous a dit qu'on y

 20   emmenait beaucoup de monde, des gens qui étaient blessés. Il y a même

 21   quelqu'un qui est mort nous avait-on dit. Donc, je suis allé à l'hôpital

 22   pour voir ce qu'il en était.

 23   Q.  Vous souvenez-vous avoir transporté vous-même des blessés à l'hôpital ?

 24   R.  Oui, c'est arrivé à plusieurs reprises. Je me suis rendu, je crois, une

 25   ou deux fois à l'hôpital -- enfin c'était pratiquement tous les jours que

 26   ça se passait. Mais ce jour-là, oui, je me souviens en effet avoir emmené

 27   des blessés à l'hôpital.

 28   Q.  Vous avez été à l'hôpital, vous avez vu ce qui se passait à l'hôpital;

Page 19222

 1  

 2   

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 19223

  1   est-ce qu'il y avait des éléments indiquant qu'il s'agissait d'un

  2   établissement utilisé à des fins militaires ?

  3   R.  Non, je crois qu'il n'y avait aucun local de cet établissement qui

  4   était utilisé à des fins militaires, comme de l'entrepôt, et cetera, parce

  5   que j'ai circulé dans l'hôpital pour voir comment se portaient les blessés,

  6   et cetera. Je n'ai vu aucun soldat, je n'ai vu aucune arme, je n'ai rien vu

  7   qui est quoi que ce soit de militaire. En tout cas, je me souviens que je

  8   n'ai rien vu de tel.

  9   M. THAYER : [interprétation] Bien. Examinons maintenant un autre rapport

 10   qui date du même jour, c'est la pièce 499 sur la liste 65 ter, plutôt 495.

 11   Q.  Pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

 12   R.  Il s'agit d'une mise à jour d'un rapport de situation du Secteur nord-

 13   est adressé au commandement pour la Bosnie-Herzégovine et au commandement

 14   de Zagreb également, cela se passait le 9, vers 17 heures.

 15   Q.  Il est indiqué qu'entre 14 heures et 15 heures 16, votre équipe a

 16   entendu 78 explosions dans la ville de Srebrenica, plus de 70 % de ces

 17   explosions touchaient le centre même de la ville.

 18   Vous avez déclaré que dans les jours qui précédaient, vous avez

 19   entendu des centaines de détonations, vous les avez comptées. Je voudrais

 20   savoir si ce pilonnage-là avait quoi que ce soit de particulier qui le

 21   distinguait des autres pilonnages. 

 22   R.  La seule particularité de ce pilonnage c'était la concentration des

 23   tirs sur un point bien précis, dont les coordonnées sont données ici :

 24   CP6385. Ceci était véritablement terrifiant, parce que lorsque les tirs

 25   sont concentrés de la sorte, c'est qu'on veut chasser les gens qui s'y

 26   trouvent. C'était un peu différent de ce qui se passait auparavant où les

 27   tirs touchaient plusieurs zones. Mais là les tirs étaient vraiment

 28   concentrés sur une zone.

Page 19224

  1   Q.  Vous souvenez-vous de l'endroit où se trouvait précisément ce lieu

  2   défini par ces coordonnées-là ?

  3   R.  Non. Je ne m'en souviens pas, je ne sais plus si c'était le marché ou

  4   si c'était un endroit qui se trouvait tout à côté de l'hôpital.

  5   Q.  Bien. Passons au reste de ce rapport, il est indiqué : "Ils ont

  6   également entendu des tirs d'armes légères dans leur secteur."

  7   Est-ce que c'étaient des tirs d'armes légères qui tiraient vers

  8   l'extérieur ou vers l'intérieur du secteur ?

  9   R.  Il s'agissait de tirs qui venaient de l'armée des Serbes de Bosnie, le

 10   feu n'était pas ouvert à l'intérieur. Il faut savoir, c'est peut-être

 11   utile, la manière dont on identifie les tirs entrants et les tirs sortants.

 12   C'est très difficile [comme interprété] d'identifier les tirs qui

 13   entrent, parce qu'on entend un bruit qui vient au départ qui est très

 14   différent du bruit provoqué par les balles lorsqu'elles arrivent sur leur

 15   cible. C'est très facile d'identifier ce genre de tir. Et si les

 16   projectiles n'arrivent pas dans la zone où vous vous trouvez, vous entendez

 17   un sifflement, vous entendez les projectiles passer au-dessus de vous, et

 18   vous pouvez déterminer exactement où vont ces projectiles.

 19   On peut déterminer la direction des projectiles et l'endroit d'où ils

 20   viennent. A ce moment-là, c'est très facile de savoir qu'il s'agit de tirs

 21   entrants.

 22   Q.  Est-ce que ça avait une importance, le fait qu'il s'agissait de tirs

 23   qui entraient ?

 24   R.  Généralement, lorsque l'on a "préparé la cible" en utilisant soit des

 25   frappes aériennes, soit des frappes de chars, soit des tirs d'artillerie,

 26   ensuite on avance sur le secteur pour nettoyer la zone. C'est ce qui se

 27   passe, l'armée est envoyée une fois qu'on a commencé à traiter la zone.

 28   C'est pour ça qu'on s'est dit, après l'intervention de l'artillerie et du

Page 19225

  1   char, qu'on allait peut-être avoir l'arrivée de l'infanterie qui viendrait

  2   nettoyer le secteur pour s'emparer de la zone, ensuite s'y implanter pour

  3   résister à toute contre-attaque éventuelle.

  4   Ceci nous a montré qu'on entrait dans la dernière phase de l'attaque.

  5   Q.  Dans quelle mesure ceci explique-t-il votre décision de partir en

  6   direction de Potocari ?

  7   R.  Vu la portée des armes légères - il faut savoir que les armes légères,

  8   c'est différent des armements d'artillerie qui ont une portée de 2,5

  9   kilomètres ou même plus. La portée d'un AK-47 se mesure en mètres, ça fait

 10   à peu près 600 mètres. Avec d'autres fusils, vous avez une portée parfois

 11   de 900 mètres ou même un kilomètre. Un kilomètre, c'est très près. Si bien

 12   qu'à ce moment-là, celui qui tire s'approche de vous. Lorsque quelqu'un est

 13   à portée de tir, si vous êtes désarmé, il va vous tuer, c'est indéniable.

 14   Q.  Vous dites quand on n'est pas armé. Il est possible que je vous aie

 15   déjà posé la question, et si je ne l'ai pas fait, excusez-moi, je voudrais

 16   savoir si les observateurs militaires des Nations Unies portaient des armes

 17   pendant leur service ?

 18   R.  Partout dans le monde, les observateurs militaires des Nations Unies ne

 19   portent aucune arme. La seule arme qu'ils portent, c'est un calepin et un

 20   stylo en bon état de marche. Bien entendu, on peut toujours porter un gilet

 21   pare-balles pour se protéger, mais les armes dont nous sommes munies, c'est

 22   un stylo et un calepin.

 23   Q.  Passons au 10 juillet, Monsieur le Témoin. Une toute petite question :

 24   où avez-vous passé la nuit du 9 au 10 ?

 25   R.  Nous avons passé la nuit dans le camp du Bataillon néerlandais. On

 26   s'est trouvé un conteneur où il y avait encore de la place. On s'est fait

 27   un peu de place, et c'est là qu'on a dormi.

 28   M. THAYER : [interprétation] J'aimerais que l'on présente au témoin la

Page 19226

  1   pièce 502 sur la liste 65 ter.

  2   Q.  Vous reconnaissez ce document, j'imagine, Monsieur ? Et si c'est bien

  3   le cas, pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

  4   R.  Il s'agit d'un rapport des observateurs militaires des Nations Unies

  5   envoyé à partir du QG nord-est à Zagreb et au commandement pour la Bosnie-

  6   Herzégovine. Il s'agit d'une mise à jour d'un rapport de situation

  7   concernant Srebrenica.

  8   Q.  Ce rapport porte sur le 10 juillet. Passons directement au point 3 pour

  9   gagner du temps. Il est indiqué ici : "L'équipe a signalé par téléphone que

 10   les pilonnages se poursuivaient dans la zone de Srebrenica."

 11   Vous étiez à Potocari, donc comment saviez-vous ce qui se passait à

 12   Srebrenica ? Comment avez-vous obtenu cette information ?

 13   R.  On entendait les pilonnages depuis plusieurs positions, surtout si on

 14   se tenait sur la route principale allant de Bratunac à Srebrenica, si bien

 15   qu'on était en mesure d'entendre les bombardements, les pilonnages.

 16   Et notre interprète, M. Emir, était sur place, il pouvait entrer en

 17   contact avec nous et nous dire ce qui se passait. Mais même nous, depuis

 18   Potocari, on était en mesure d'entendre les tirs et de les compter.

 19   Q.  Maintenant on va parler du 10 juillet, Monsieur le Témoin. Vous

 20   souvenez-vous d'autres informations qui vous auraient été transmises par

 21   Emir depuis Srebrenica ce jour-là ?

 22   R.  Pour ce qui est du pilonnage, je crois qu'il pouvait nous dire à quel

 23   endroit l'impact avait eu lieu, l'endroit où les obus touchaient; et en ce

 24   qui concernait les blessés, s'il y en avait, et les morts, s'il y en avait,

 25   il pouvait nous renseigner. En fait, la situation à Srebrenica, il pouvait

 26   nous renseigner de là-bas.

 27   M. THAYER : [interprétation] Je voudrais maintenant que l'on présente la

 28   pièce 501 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

Page 19227

  1   Q.  Juste pour faire un peu avancer les choses, ceci est daté du 10

  2   juillet, à 10 heures 25. Au point numéro 1, on peut voir que ça a été

  3   retransmis, on indique que ça a été reçu de vous par le truchement du

  4   commandement des observateurs militaires de l'ONU à Tuzla, retransmis à

  5   Zagreb et à la FORPRONU -- ou au quartier général des observateurs

  6   militaires à Sarajevo; est-ce exact ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Maintenant, si nous regardons ce qui est indiqué à 12 heures 30, il est

  9   question de plus de 100 détonations et ensuite, à 09 heures 30, qu'environ

 10   8 roquettes ont été tirées dans la direction de Srebrenica. Pourriez-vous

 11   dire aux membres de la Chambre comment ces deux rapports ont été confirmés

 12   ?

 13   R.  En ce qui concerne les 100 détonations, à l'évidence nous les avons

 14   comptées nous-mêmes. Quant aux roquettes, les 8 roquettes, à l'évidence

 15   elles ont été tirées depuis -- ce compte rendu nous provenait du Bataillon

 16   néerlandais, donc nous avons rendu compte de la même chose.

 17   Q.  En ce qui concerne les cent détonations dont vous avez dit que vous

 18   pouviez les compter vous-mêmes, quelle confirmation, en l'occurrence de

 19   Srebrenica, avez-vous reçue en ce qui concerne ces détonations ?

 20   R.  Pour ce qui est de la confirmation de Srebrenica, on l'avait obtenue de

 21   notre interprète, Emir, et également nous étions en mesure de compter nous-

 22   mêmes. Nous pouvions compter, mais lui aussi pouvait confirmer pour nous

 23   dire que cela touchait exactement Srebrenica.

 24   Q.  Vous avez utilisé une ou deux fois le terme "carte jaune." Qu'est-ce

 25   que vous voulez dire par là ?

 26   R.  "Carte jaune", c'est une carte d'identification qui a été donnée à tous

 27   les interprètes de façon à ce que nous puissions les désigner facilement

 28   comme "carte jaune", et plus particulièrement lorsqu'on ne voulait pas dire

Page 19228

  1   trop clairement les choses. En termes militaires, vous ne voulez pas

  2   exprimer clairement ce dont vous êtes en train de parler. Donc lorsque vous

  3   disiez "carte jaune", vous vouliez dire en fait l'interprète, mais

  4   quelqu'un d'autre ne pourra pas comprendre. C'est exactement ce qui s'est

  5   fait, mais il se peut qu'on ne comprenne pas toujours ce dont il s'agit.

  6   Q.  Il est question d'un char, un char de l'armée serbe de Bosnie qui

  7   aurait rendu très difficile la possibilité de récupérer un véhicule blindé

  8   de la FORPRONU. Qu'est-ce que vous avez appris au sujet de cet événement ?

  9   R.  Vous savez, dans l'enclave, nous avions plusieurs postes d'observations

 10   qui étaient tenus par des membres du Bataillon néerlandais. Je pense qu'il

 11   y avait à ce moment-là à peu près 10 postes d'observations ou même

 12   davantage. C'étaient des postes qui se trouvaient en dehors du secteur

 13   normal et lorsqu'on voulait véritablement observer et savoir ce qui se

 14   passait sur place, à ce moment-là, on pouvait également rendre compte, et

 15   aussi faire le nécessaire, en cas de nécessité d'avoir rapidement des

 16   forces, donc ces personnes qui se trouvaient au poste d'observation avaient

 17   la possibilité de réagir immédiatement. Essentiellement, de leur point de

 18   vue, c'était des observateurs dans ces postes d'observation. Ça nous aidait

 19   également à savoir où aller pour observer à partir de ces endroits.

 20   En ce qui concerne cet endroit particulier où il y avait un char, un

 21   char de l'armée serbe de Bosnie quelque part où il a été situé. Il avait

 22   été vu. Le poste d'observation qui était là, ils avaient l'impression

 23   qu'ils voulaient se retirer, mais ils ne pouvaient le faire de crainte que

 24   ce char n'intervienne. Donc cela faisait peur, il était très difficile pour

 25   eux de commencer à se déplacer parce qu'ils avaient peur d'être touchés.

 26   Ils ne savaient pas ce qui allait se passer ensuite et quel parti il

 27   fallait prendre.

 28   Q.  Vous rappelez-vous si vous avez reçu des renseignements concernant un

Page 19229

  1   véhicule blindé ou tout autre véhicule sur lequel un char aurait tiré ?

  2   R.  Je ne peux pas me rappeler.

  3   Q.  Très bien. Si nous regardons ensuite le prochain rapport de situation

  4   de mise à jour à 12 heures 55, on lit : "Deux obus de pièce lourde,

  5   probablement du 155 millimètres, ont touché les abords de l'hôpital à 11

  6   heures. Toutes les fenêtres de l'hôpital ont été brisées et des éclats

  7   d'obus sont tombés en pluie et ont criblé les murs et les pièces de

  8   l'hôpital." 

  9   Est-ce que vous vous rappelez qui a rendu compte de cela ?

 10   R.  C'est Emir qui nous l'a envoyé.

 11   Q.  Jusqu'à maintenant vous nous avez dit qu'Emir était un interprète. Est-

 12   ce que vous savez, puisque vous avez travaillé avec lui, dans quelle mesure

 13   il était à même d'apprécier s'il s'agissait d'un obus de 155 millimètres ?

 14   Vous dites "probablement" dans le rapport, mais pourquoi est-ce qu'on

 15   mentionne tout simplement le fait qu'il s'agissait d'un obus de 155

 16   millimètres ?

 17   R.  L'expérience de ces interprètes sur place était très grande, car ils se

 18   trouvaient là depuis près de trois ans, et ils avaient travaillé avec un

 19   grand nombre d'observateurs, ils avaient également été responsables ou ils

 20   avaient été en mesure de nous aider à analyser les cratères lorsque nous

 21   étions là, et tous les autres observateurs, vous savez, faisaient qu'ils

 22   étaient bien placés pour ça. En fait, il se peut même qu'ils aient eu

 23   davantage d'expérience que de nouveaux observateurs venus plus récemment

 24   sur le terrain pour analyser certaines choses, donc ils pouvaient analyser

 25   les choses à fond.

 26   Tout au moins pour ce qui est des questions techniques, ils pouvaient

 27   reconnaître un obus. Ils auraient été capables de distinguer parfois entre

 28   un obus de mortier et un obus d'un canon lourd. Donc l'expérience qu'ils

Page 19230

  1   avaient acquise et la façon dont on avait travaillé avec eux faisaient que

  2   nous savions qu'ils pouvaient nous dire quelle était la situation, la

  3   vérité en la matière.

  4   Q.  Bien, alors passons à autre chose.

  5   M. THAYER : [interprétation] Je voudrais que l'on présente, s'il vous

  6   plaît, la pièce 503 de la liste 65 ter.

  7   Q.  Nous voyons une retransmission, comme il est dit ici, d'une mise

  8   à jour concernant Srebrenica à 13 heures 46 dans la journée du 10. On

  9   indique que la ville même de Srebrenica est encore en train de subir un tir

 10   d'artillerie très lourd. Le rapport indique : "Nous avons enregistré un

 11   certain nombre de chiffres, 49 obus sont tombés entre 12 heures 50 et 15

 12   heures 33, et 9 roquettes ont été lancées sur la ville."

 13   Là encore, en ce qui concerne le pilonnage, d'où provenaient ces

 14   renseignements ?

 15   R.  En ce qui concerne le pilonnage, comme je l'ai dit précédemment, ces

 16   tirs, nous pouvions compter le nombre d'obus qui arrivaient à tout endroit

 17   entre Potocari et Srebrenica. De Potocari, nous étions en mesure de compter

 18   le nombre d'obus, et aussi maintenant notre interprète qui était là pouvait

 19   confirmer que c'était vrai. Nous pouvions donc le dire facilement, c'est-à-

 20   dire en ce qui concerne les obus.

 21   Quant aux roquettes, comme je l'ai dit, la plupart des roquettes

 22   étaient tirées à l'origine d'une colline quelque part près de Bratunac, à

 23   l'ouest de Bratunac, quelque part par là. Donc, ces roquettes-là, on

 24   pouvait même les voir survoler Potocari, c'était donc très facile de les

 25   compter.

 26   Q.  Juste pour être bien au clair, lorsque vous dites "nous", vous

 27   voulez dire vous-même, Monsieur le Témoin; est-ce que c'est exact ?

 28   R.  Je veux dire nous, les observateurs militaires, parce qu'il y a moi, il

Page 19231

  1   y a David Tetteh. Et, à ce moment-là, nous avions déjà Andre De Haan qui se

  2   trouvait là avec nous, bien qu'il n'était pas complètement remis, mais il

  3   était là. Quand je dis "nous", je veux dire les observateurs militaires.

  4   Q.  Juste pour être bien au clair, Monsieur le Témoin, est-ce que vous vous

  5   souvenez personnellement d'avoir vu des roquettes survoler Potocari

  6   provenant de la direction que vous venez de décrire et celles-ci tirées en

  7   direction de Srebrenica ?

  8   R.  Pas une seule fois, je crois. Enfin, je me rappelle personnellement.

  9   Q.  Vous avez dit "pas une seule fois," qu'est-ce que vous voulez dire par

 10   cela ?

 11   R.  Les roquettes n'ont pas survolé Potocari une seule fois. C'est

 12   plusieurs fois que nous avons remarqué qu'elles survolaient Potocari.

 13   Q.  Bien.

 14   M. THAYER : [interprétation] Pourrait-on maintenant présenter la pièce 505

 15   de la liste 65 ter sur le logiciel e-court, s'il vous plaît. Si nous

 16   regardons maintenant la page 3 de l'anglais, la page 6 du B/C/S, si nous

 17   pouvions maintenant nous centrer sur la mention inscrite à 16 heures 45

 18   dans la journée du 10.

 19   Q.  Le rapport parle ici de la carte jaune, et d'après ses

 20   renseignements, il rend compte au point 4, en bas : "Les questions des

 21   derniers renseignements reçus rendent compte du fait que les villages

 22   suivants ont été incendiés par l'armée serbe de Bosnie" à Posovnica [phon].

 23   Je crois malheureusement que l'exemplaire que nous avons réussi à

 24   obtenir s'arrête là. Mais en ce qui concerne ce rapport, est-ce que vous

 25   vous rappelez d'où provenaient ces renseignements ?

 26   R.  Ces renseignements provenaient des personnes qui se précipitaient à

 27   l'intérieur de Srebrenica, qui entraient en masse à Srebrenica, et aussi

 28   tout le long de la route à Potocari. C'est donc des renseignements qu'ils

Page 19232

  1   apportaient, et plus particulièrement ceux qui arrivaient pour commencer à

  2   Srebrenica. Notre interprète était en mesure de nous dire ce qui se passait

  3   et ce qu'ils disaient, et quelle était la situation sur le terrain. Donc,

  4   nous rendions compte de ce qu'ils nous avaient dit.

  5   Q.  Bien. J'ai remarqué -- enfin, si vous regardez cette page, il y a une

  6   série de mises à jour de la situation, toutes datées du 10 juillet à

  7   diverses heures, à différentes heures.

  8   M. THAYER : [interprétation] Si nous pouvions maintenant faire défiler vers

  9   le haut de la page, je voudrais juste éclaircir un point.

 10   Q.  Il est question, vous pouvez voir cela dans le coin droit, en haut à

 11   droite, "Annexe A datée du 9 juillet." Serait-il juste de dire que c'est

 12   probablement une erreur typographique étant donné que les événements ont eu

 13   lieu le 10 ?

 14   R.  C'est une erreur typographique. Faisant partie de tout cela, ils sont

 15   tout le temps là, et nous avons juste indiqué la mise à jour, et parfois on

 16   oublie de changer la date.

 17   M. THAYER : [interprétation] Bien. Nous en avons terminé avec ce document,

 18   je vous remercie.

 19   Q.  Maintenant, nous arrivons à la journée du 11 juillet, est-ce que vous

 20   avez participé à une réunion, Colonel, dans les toutes premières heures de

 21   la matinée du 11 juillet; et si c'est bien le cas, pouvez-vous expliquer

 22   aux membres de la Chambre qui s'y trouvaient et de quoi a-t-on parlé ?

 23   R.  Il y avait une réunion qui avait été convoquée très tôt dans la

 24   matinée, c'était le colonel Karremans, je crois, qui l'avait convoquée.

 25   C'était le chef du Bataillon néerlandais avec les éléments de l'ABiH.

 26   D'après ce que je me rappelle, je crois que pour l'essentiel cette réunion

 27   avait pour but de transmettre certains messages à la BiH, et également de

 28   savoir ce qu'eux-mêmes avaient à dire.

Page 19233

  1   Q.  Vous rappelez-vous, en particulier, si on a discuté de quoi que ce soit

  2   ou si des renseignements ont été donnés ou transmis en particulier

  3   concernant cette réunion ?

  4   R.  Au cours de cette réunion, il y a eu une question, un problème

  5   concernant essentiellement deux aspects, je pense. L'un d'entre eux

  6   concernait l'armée serbe de Bosnie, je pense -- le fait qu'on avait donné

  7   deux ultimatums, et je crois que l'armée serbe de Bosnie avait fait passer

  8   un message selon lequel ils souhaitaient que les Musulmans quittent

  9   l'enclave, qu'on leur garantissait la possibilité de l'équité en toute

 10   sécurité pour sortir. Je crois qu'il y avait également une question qui se

 11   posait concernant une frappe aérienne. Je ne me rappelle pas très bien,

 12   mais je crois que c'était ça les questions principales.

 13   Je crois également qu'il y avait une personne du côté musulman, parce

 14   qu'il y avait un soldat, un soldat néerlandais, qui avait essuyé un coup de

 15   feu et qui plus tard est décédé pendant son transport à l'hôpital, et je

 16   crois que cette question a également été discutée.

 17   Q.  Bien. Vous venez de dire que l'armée serbe de Bosnie avait fait passer

 18   un message selon lequel ils souhaitaient que les Musulmans quittent

 19   l'enclave. Vous rappelez-vous si vous avez reçu cet ultimatum ou si vous

 20   avez entendu vous-même cet ultimatum avant cette réunion ?

 21   R.  J'avais entendu que -- enfin, j'avais personnellement entendu ce

 22   message plus tôt, précédemment, par le truchement, je crois, de Petar ou du

 23   commandant Nikolic, l'un des deux ou les deux. Mais tout au moins j'ai

 24   obtenu ces renseignements par eux, et c'était ou bien il y avait des

 25   ordres, donc je ne sais plus très bien si on peut appeler ça des ordres ou

 26   des demandes, qui demandaient que l'armée serbe de Bosnie -- c'était

 27   l'armée serbe de Bosnie qui demandait que les Musulmans quittent l'enclave

 28   immédiatement de façon à ce qu'ils puissent être mis en sécurité ou ils

Page 19234

  1   seraient forcés de quitter.

  2   Q.  Est-ce que cette question concernant les Musulmans concernait les

  3   civils et les militaires ensemble, ou les uns, ou les autres, si vous

  4   pouvez vous en souvenir ?

  5   R.  Cette référence qui est faite aux Musulmans voulait dire tout le monde,

  6   tous les Musulmans dont on parlait, qu'ils fussent armés ou non, les

  7   civils, tous ensemble. Ce qu'ils voulaient dire, c'est qu'ils ne voulaient

  8   plus qu'il y en ait un seul qui devait quitter, ils ne voulaient plus

  9   qu'ils soient là, qu'ils restent là, et qu'ils devaient quitter l'enclave

 10   immédiatement.

 11   Q.  Vous avez parlé du fait que des frappes aériennes ont été évoquées. De

 12   quoi s'agissait-il exactement ?

 13   R.  Après que nous ayons décrit la situation de l'enclave au quartier

 14   général de l'ONU, ainsi que les différentes positions dans lesquelles se

 15   trouvaient les canons, nous avons demandé aussi qu'il y ait des frappes

 16   aériennes. Ceci également provenait des Musulmans qui avaient également

 17   demandé, je cite : "Pourquoi est-ce que l'ONU ne fait rien concernant cette

 18   situation ?"

 19   Donc, nous avons demandé des frappes aériennes, et on nous disait que des

 20   frappes aériennes allaient certainement avoir lieu, qu'il y aurait des

 21   frappes aériennes dans le secteur.

 22   Q.  Ces frappes aériennes n'ont pas eu lieu immédiatement; est-ce bien

 23   juste de dire cela ?

 24   R.  De façon surprenante, et de façon très frustrante pour nous en tant

 25   qu'observateurs et également pour le Bataillon néerlandais, aucune frappe

 26   aérienne n'a eu lieu dans la matinée de sorte que nous avons eu peur que

 27   peut-être elles n'allaient pas avoir lieu du tout.

 28   Q.  Alors, qu'avez-vous fait, si vous avez fait quelque chose, dans la

Page 19235

  1   matinée lorsque vous avez observé qu'il n'y avait pas de frappes aériennes

  2   ?

  3   R.  Au début, vous savez, lorsque vous attendez des frappes aériennes, vous

  4   vous attendez aussi ou probablement à ce que la partie adverse puisse

  5   riposter parce qu'il y aurait également des frappes aériennes. Donc, nous

  6   nous attendions que peut-être ils feraient quelque chose. De sorte, qu'en

  7   fait, la plupart du temps au cours de la matinée nous étions soit dans

  8   l'abri ou tout près au cas où s'il se passait quelque chose, nous puissions

  9   entrer dans l'abri. Je pense que c'est tout.

 10   Q.  Lorsque vous étiez à l'extérieur de l'abri, est-ce que vous avez

 11   observé quoi que ce soit en dehors de l'enceinte ?

 12   R.  Je pense qu'à l'extérieur de la base ou de l'enceinte, ce que je peux

 13   me rappeler, c'est d'avoir vu des réfugiés qui arrivaient. Ils arrivaient

 14   en masse de Srebrenica. Ils avaient commencé à pénétrer dans l'enceinte.

 15   C'était un flux maintenant de réfugiés dans ce camp.

 16   Q.  Maintenant, je ne pense pas qu'il soit contesté qu'un appui aérien

 17   rapproché ait été donné dans l'après-midi. Est-ce que vous vous rappelez si

 18   cet appui aérien rapproché s'est poursuivi ?

 19   R.  L'appui aérien rapproché, si on peut l'appeler ainsi - parce qu'en fait

 20   ce n'était pas vraiment le cas; c'était simplement une frappe aérienne -

 21   qui a eu lieu, qui a frappé, mais qui a frappé très tard en fin d'après-

 22   midi, et qui n'a pas été efficace. Pour autant que je puisse le dire, ce

 23   n'était pas efficace. Par efficace, je voulais dire que nous avions rendu

 24   compte et expliqué les différentes positions des canons, des lance-

 25   roquettes et d'autres matériels militaires lourds, mais de façon

 26   surprenante, je pense qu'ils ont juste réussi à toucher un char et un

 27   canon, quelque chose de ce genre. Après avoir employé six avions pour cela,

 28   c'était, en ce qui nous concernait, pas efficace parce que vraiment ça n'a

Page 19236

  1   pas arrêté l'attaque contre l'enclave.

  2   Q.  Vous avez parlé du fait que vous aviez indiqué différentes positions

  3   des canons. Qui avait obtenu ces renseignements et les avait transmis, et

  4   qu'est-ce qu'étaient ces renseignements ? De quoi parlez-vous, Colonel ?

  5   R.  Maintenant, pour nous, en partie en tant qu'observateurs militaires,

  6   vous savez, nous savions où nous étions en mesure d'obtenir des

  7   renseignements sur où se trouvaient ces positions. Parce que quand on

  8   tirait de là, on sait immédiatement -- quand on tire, on dévoile sa

  9   position. Donc il était très facile de savoir depuis où. Nous pouvions à ce

 10   moment-là regarder la carte et regarder les coordonnées et les transmettre.

 11   Mais il y avait également des Britanniques qui se trouvaient là. Je crois

 12   on les appelait [inaudible] ou quelque chose comme conjoint quelque chose,

 13   enfin je ne me rappelle pas, c'était des officiers très forts, très

 14   solides, qui pouvaient pénétrer n'importe où. Ils pouvaient aller n'importe

 15   où sans crainte, et ils avaient tout ce qu'il leur fallait. Lorsque je veux

 16   dire "tout ce qu'il leur fallait" ils avaient leurs armes. Ils utilisaient

 17   une Land Rover, mais ils avaient tout un matériel de transmission, de

 18   communication. Ils pouvaient l'installer en très peu de temps, ils étaient

 19   très, très précis. Pour toutes les frappes aériennes, c'étaient eux qui

 20   dirigeaient les avions sur les cibles, toutes les frappes aériennes la

 21   plupart des frappes aériennes où que ce soit, et c'étaient ces hommes-là

 22   qui dirigeaient les frappes aériennes sur les objectifs désignés.

 23   Q.  Est-ce que vous savez, Colonel, s'il y a eu une raison particulière

 24   pour laquelle l'appui aérien rapproché a cessé au cours de la journée du 11

 25   ?

 26   R.  Je n'étais pas au courant. Je n'étais pas au courant de la raison pour

 27   laquelle ils ont arrêté, mais il est difficile de dire quels étaient les

 28   motifs parce que tout au moins, nous nous attendions à ce qu'ils continuent

Page 19237

  1   jusqu'à ce qu'ils aient touché toutes leurs cibles, tous les objectifs.

  2   Mais peut-être, en revanche, que si vous regardez les choses d'un

  3   autre côté, de la partie adverse, peut-être qu'ils ont pensé qu'ils

  4   risquaient de finir par toucher les réfugiés. Mais certainement, ils

  5   auraient dû continuer avec ces frappes aériennes. En fait, c'est ce que

  6   j'ai pensé.

  7   Q.  Maintenant, après les frappes aériennes, est-ce que vous avez observé

  8   s'il y avait des tirs d'artillerie ?

  9   R.  Les tirs d'artillerie, vous savez, ont été repris immédiatement. Il y

 10   avait eu une accalmie, une certaine accalmie. Mais peut-être qu'ils avaient

 11   pensé que ces hommes, enfin ceux qui faisaient les frappes aériennes,

 12   poursuivraient, continueraient, donc ils ont attendu pendant un moment.

 13   Après cela, le pilonnage a repris.

 14   Vous savez, ce qu'ils faisaient c'était ce qu'ils nous avaient dit

 15   précédemment, et que si les frappes aériennes avaient effectivement lieu,

 16   ils allaient bombarder l'ensemble.

 17   Q.  Quand vous rappelez-vous que cette déclaration, indication ou position

 18   a été indiquée par la VRS ce jour-là ?

 19   R.  Ceci avait eu lieu au cours d'une réunion qui avait été convoquée par

 20   l'armée serbe de Bosnie qui nous avait dit que nous devrions dire à l'ONU

 21   de ne pas procéder à des frappes aériennes; sinon, s'il y avait des frappes

 22   aériennes, ils feraient en sorte d'exterminer, de nettoyer l'ensemble de

 23   l'enclave.

 24   Q.  Est-ce que vous vous rappelez si vous étiez ou non présent à cette

 25   réunion ?

 26   R.  J'y étais. Je pense que j'étais à cette réunion.

 27   Q.  Est-ce que vous avez des souvenirs de qui d'autre était présent ? Vous

 28   dites que vous pensez que vous étiez là. Est-ce que vous avez des souvenirs

Page 19238

  1   précis sur qui était présent et à quel endroit a eu lieu cette réunion ?

  2   R.  Cette réunion a eu lieu à Bratunac, et les personnes qui étaient

  3   présentes normalement, vous savez, à toutes ces réunions, il y avait le

  4   commandant Nikolic qui était là, le colonel Vukovic qui était là, et je ne

  5   me rappelle pas des autres officiers supérieurs qui s'y trouvaient. Andre

  6   maintenant, je pense qu'il était là, et tout au moins ces deux là, Nikolic

  7   était là et Vukovic y était.

  8   M. THAYER : [interprétation] Voyons maintenant la pièce 510 de la liste 65

  9   ter, s'il vous plaît. Commençons par regarder la première page de ce

 10   document pendant un instant.

 11   Q.  Il est daté du 11 juillet et il s'agit d'un rapport de situation

 12   quotidien qui couvre la période qui va de minuit et une minute, le 11

 13   jusqu'à 20 heures.

 14   M. THAYER : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait maintenant passer à la

 15   page 3, s'il vous plaît.

 16   Q.  Regardons tout en haut le texte anglais, où on lit, c'est le deuxième

 17   paragraphe, je cite : "C'est alors que l'armée serbe de Bosnie avait un

 18   autre ultimatum, à savoir que le Bataillon néerlandais et les organisations

 19   non gouvernementales devaient quitter l'enclave, devaient remettre leurs

 20   armes, et il serait donné 48 heures à la population pour quitter l'enclave

 21   également. Tous étaient libres de partir."

 22   Colonel, s'agit-il là de l'ultimatum dont vous avez précédemment parlé ou

 23   est-ce un autre ultimatum ? Vous avez dit qu'il y avait eu deux ultimatums

 24   qui avaient été discutés. Je suis en train d'essayer de savoir en ce qui

 25   concerne la partie que je suis en train de lire si, d'après vos souvenirs,

 26   il s'agit de cet ultimatum dont vous avez parlé tout à l'heure.

 27   R.  Ces ultimatums étaient là, ils étaient présentés tout au long de la

 28   nuit en particulier en ce qui concernait le fait de quitter l'enclave.

Page 19239

  1   Chaque fois que l'armée serbe de Bosnie se réunissait avec nous ou chaque

  2   fois qu'ils communiquaient avec nous, ces ultimatums étaient pratiquement

  3   les mêmes, à savoir que ces gens devaient partir. Mais celui-ci en

  4   particulier, je pense que c'était après. Je crois que c'était -- enfin tout

  5   au moins ce n'est pas celui dont j'avais parlé, mais je pense que chaque

  6   fois qu'ils se réunissaient avec nous, ils nous lançaient ces ultimatums,

  7   ils nous les donnaient.

  8   Q.  Bien.

  9   M. THAYER : [interprétation] Regardons maintenant la page 4 de l'anglais et

 10   du B/C/S. Nous allons sauter quelques paragraphes pour gagner un petit peu

 11   de temps.

 12   Q.  Regardons maintenant ce qui est inscrit pour 16 heures. Vous voyez ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Il est question du flot de réfugiés qu'on ne parvient pas à compter.

 15   Vers le bas du paragraphe, on voit : "Le tout dernier ultimatum donné par

 16   l'armée serbe de Bosnie, c'est que si les frappes aériennes se poursuivent,

 17   tout ce qui se trouve à l'intérieur de l'enclave sera bombardé, y compris

 18   la FORPRONU et les autres organisations de l'ONU."

 19   Je voudrais maintenant vous demander de faire appel un peu à votre

 20   mémoire, Colonel. Vous rappelez-vous si c'est bien là l'ultimatum dont vous

 21   parliez, que vous avez entendu à Bratunac, ou s'agit-il ici d'un autre

 22   ultimatum dont on veut parler à cet endroit-là, si vous le savez ?

 23   R.  Comme vous pouvez le voir -- vous voyez que c'est écrit ici, il s'agit

 24   du dernier ultimatum, du plus récent, ça veut dire qu'il y avait eu une

 25   série d'ultimatums qui avait été donnés par l'armée serbe de Bosnie. Celui-

 26   ci maintenant est lancé après que les frappes aériennes ont eu lieu.

 27   Ils ont dit, voyez-vous, que si les frappes aériennes se poursuivent - et

 28   il est bon de savoir exactement à quel moment ils étaient en train de

Page 19240

  1   devenir de plus en plus hardis, en fait ils disaient à l'ONU : "Il n'y a

  2   rien que vous puissiez faire. Ou vous faites vos paquets et vous partez

  3   avec les Musulmans, ou nous allons vous supprimer tous."

  4   Ils disaient cela dans des termes qui étaient sans ambages, ils ne

  5   voulaient plus qu'il y ait qui que ce soit. Si les frappes aériennes

  6   continuaient, ils feraient tout ce qu'ils voulaient à cet endroit.

  7   Q.  Je suppose que l'une des raisons pour lesquelles je fais appel à votre

  8   mémoire, Mon Colonel, c'est que vous avez parlé de vos souvenirs en disant

  9   que vous aviez entendu un ultimatum analogue à Bratunac à un moment donné,

 10   et vous semblez vous rappeler qu'il y avait [inaudible] présent et Vukovic.

 11   Vous rappelez-vous si, le 11, vous étiez en mesure de quitter Potocari pour

 12   Bratunac ?

 13   R.  Je pense que oui. Le 11, je pense que je l'ai fait.

 14   Q.  Bien. Sautons certains passages -- nous allons sauter quelques

 15   questions.

 16   M. THAYER : [interprétation] Si nous pouvions maintenant défiler vers le

 17   bas et nous centrer sur ce qui est indiqué comme mise à jour à 19 heures

 18   10, il s'agit maintenant de la page 5 du B/C/S.

 19   Q.  A cette mention qui indique 19 heures 10, au point 3, le rapport

 20   indique : "Depuis 18 heures 44 jusqu'à 19 heures, l'armée serbe de Bosnie a

 21   tiré 22 roquettes/obus depuis Dugo Polje vers Budak et Gradac."

 22   Au cours de ces 16 minutes, pendant cette période, vous rappelez-vous qui a

 23   compté ces roquettes ?

 24   R.  Oui, c'était celles qui -- excusez-moi, c'était nous qui avons compté

 25   ces roquettes.

 26   Q.  Quel effet, en l'occurrence, est-ce que ces roquettes ont eu à l'égard

 27   des civils qui étaient en train de se masser à l'intérieur à la base ?

 28   R.  Le bruit lorsqu'on tire avec cette arme, plus particulièrement

Page 19241

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 19242

  1   lorsqu'il s'agit de roquettes, est très effrayant, très effrayant pour tout

  2   le monde, en particulier lorsqu'on se trouve groupé dans un endroit précis. 

  3   Vous savez, cette impression que vous êtes là, votre sœur est là,

  4   votre frère est là, votre mère, votre père, votre grand-mère, et tout le

  5   monde, vous avez tous vos parents qui sont au même endroit et vous pouvez

  6   être touchés et tués à tout moment. Vraiment, ça vous donne froid dans le

  7   dos. Vous sentez que n'importe quoi peut arriver.

  8   Donc ils avaient tellement peur qu'on ne pouvait pas le cacher. On le

  9   voyait facilement. Ceci a eu lieu parce que nous sortions pour aller

 10   vérifier ce qui se passait avec eux et nous pouvions le voir. C'était

 11   inscrit sur leur visage.

 12   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je vois qu'il est midi

 13   et demi.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, j'allais justement appeler votre

 15   attention là-dessus. 

 16   Nous suspendons la séance pour 25 minutes.

 17   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 18   --- L'audience est reprise à 13 heures 03.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Sarapa, êtes-vous à même de nous

 20   donner les informations que vous nous aviez promises ?

 21   L'INTERPRÈTE : Il n'y a pas d'interprétation dans la cabine B/C/S.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Excusez-moi, parce que je ne recevais

 23   pas l'interprétation. J'aurais aimé comprendre votre langue mieux; mais en

 24   six ans, je n'ai pas réussi.

 25   M. SARAPA : [interprétation] Est-ce que vous m'entendez maintenant ?

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter ?

 27   L'INTERPRÈTE : Est-ce que vous entendez les interprètes maintenant ?

 28   M. SARAPA : [interprétation] Oui.

Page 19243

  1   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Merci.

  2   M. SARAPA : [interprétation] Merci. 

  3   Monsieur le Président, la position commune de la Défense de M.

  4   Pandurevic, vu les circonstances et le moment où nous avons reçu cette

  5   requête et du fait que si le témoin doit déposer, il le fera après les

  6   vacances judiciaires, nous aimerions à ce moment-là demander un petit peu

  7   plus de temps jusqu'à demain pour des consultations supplémentaires.

  8   Au cours de la journée de demain, nous pourrons vous donner notre

  9   réponse définitive. Donc nous vous demandons d'avoir ce délai

 10   supplémentaire jusqu'à demain.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous aurez ce délai supplémentaire.

 12   M. SARAPA : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous vous communiquerons les diverses

 14   décisions à la fin de la journée d'aujourd'hui, ce qui signifie que cela

 15   vous laissera le temps.

 16   Essayez de conclure votre interrogatoire aujourd'hui. Sinon, nous

 17   continuerons demain --

 18   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] -- et qui sera suivi par un contre-

 20   interrogatoire.

 21   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que vous aurez -

 22   - nous aurons besoin de cinq ou dix minutes à la fin, ce qui est --

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ce sera suffisant.

 24   M. THAYER : [interprétation] Très bien.

 25   Q.  Bonjour Colonel.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  Nous étions en train de parler, avant de nous arrêter, de la panique

 28   que vous avez pu voir suite au vol des roquettes. Je voudrais maintenant

Page 19244

  1   vous montrer un autre rapport.

  2   M. THAYER : [interprétation] Le 511 sur la liste du 65 ter, s'il vous

  3   plaît.

  4   Q.  Je remarque simplement que les informations les plus récentes

  5   concernant 19 heures 10 est une continuité du document précédent, le 510,

  6   donc je vous demanderais de porter votre attention sur le deuxième point

  7   qui concerne 21 heures 35. Vous le voyez ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Cela concerne 45 obus qui ont survolé l'enceinte du Bataillon

 10   néerlandais entre 18 heures 45 et 20 heures 51, ce qui a entraîné une

 11   panique très importante parmi les réfugiés, mais ils ont délibérément raté

 12   les bâtiments."

 13   Quelle était la base, le fondement même de votre conclusion basée sur

 14   vos observations et qui vont amenés à dire que la VRS avait délibérément

 15   raté les bâtiments ?

 16   R.  Notre principale raison c'est qu'on nous avait informés que ces obus

 17   venaient de quelque part près du "pont jaune", près de Bratunac par là, et

 18   venaient d'un char ou de différents chars. Je pense qu'il y avait en fait

 19   deux chars qui étaient là-bas. Avec un char il était extrêmement facile

 20   d'atteindre directement une cible, si vous le voulez, dans une région où le

 21   terrain est praticable par des chars, praticable, j'entends que c'était une

 22   route, même si c'était légèrement surélevé. Donc ils pouvaient facilement

 23   envoyer un tir direct s'ils le voulaient.

 24   En fait, à l'époque j'avais l'impression qu'ils tiraient au-dessus et

 25   non pas sur les gens délibérément. La raison en était peut-être que toute

 26   la communauté internationale le savait que les gens étaient rassemblés dans

 27   un endroit et que ça aurait été un suicide de tirer directement sur

 28   l'endroit où se trouvaient ces personnes, et autrement ils auraient été

Page 19245

  1   confrontés à la condamnation de toute la communauté internationale.

  2   Je pense que c'était le raisonnement qui explique cette situation,

  3   c'est en fait ce que nous pensions.

  4   Q.  Vous avez fait référence à ces deux chars. Maintenant, pour ce qui est

  5   des roquettes qui survolaient l'enceinte, est-ce que vous avez pu

  6   personnellement voir les sources par vous-même -- l'endroit d'où

  7   provenaient ces tirs de roquettes; et savez-vous où est-ce que cet endroit

  8   était situé ?

  9   R.  Nous avons pu voir, nous savions où se trouvait le lance-roquettes.

 10   Même à la fin, lorsque ça partait de cet endroit, ça arrivait directement

 11   vers Potocari. Nous pouvions voir où nous pensions que c'était.

 12   Personnellement je savais où c'était.

 13   Je savais où cela se situait, et nous avions une grille de référence

 14   de l'endroit. Il était évident que c'était un endroit bien défini. Peut-

 15   être pas un seul endroit, mais cela pouvait bouger de quelques mètres. Mais

 16   c'était toujours malgré tout la même grille.

 17   Q.  Lorsque vous faites référence à une grille de référence, il faut que ce

 18   soit clair, vous faites référence au sujet des références qui vous ont été

 19   données concernant cet appui aérien rapproché que vous aviez demandé; est-

 20   ce exact ?

 21   R.  Exact. Président, on nous avait donné une grille de référence qui

 22   aurait pu être marquée avec les cibles.

 23   Q.  Donc pour être clairs, ces 45 obus en plus des 22 roquettes que vous

 24   avez observées auparavant, s'ajoutaient -- pardon, aux 22 roquettes que

 25   vous aviez observées auparavant ou est-ce que cela incluait les 22 ?

 26   R.  Là, j'avoue que je ne m'en souviens pas très bien. Je ne sais pas très

 27   bien si elles se rajoutaient ou si au total cela donnait ce chiffre-là. Je

 28   ne me rappelle pas exactement.

Page 19246

  1   Q.  Bien. Ceci nous ramène au 12 juillet.

  2   Est-ce que vous vous souvenez avoir vu les forces serbes arriver dans

  3   l'enceinte néerlandaise ce matin-là; et si tel est le cas, est-ce que vous

  4   pourriez nous décrire comment est-ce qu'elles sont arrivées et où elles

  5   sont allées ?

  6   R.  Monsieur le Président, la journée a commencé comme n'importe quelle

  7   autre journée. Lorsque nous nous sommes réveillés, j'ai personnellement vu

  8   qu'il y avait la présence de soldats de la BSA qui passaient sur la route

  9   et qui allaient de Bratunac à Potocari, en passant par Potocari vers

 10   Srebrenica. Ces soldats étaient un peu différents des soldats de la BSA que

 11   nous connaissions et ils étaient habillés de noir, ils sont passés par

 12   Potocari. Certains sont allés directement à Srebrenica et d'autres ont

 13   bifurqués, je pense, vers la droite, quelque part.

 14   Q.  Est-ce que vous avez vu d'autres soldats ou d'autres forces militaires

 15   arriver à Potocari; et si tel est le cas qu'ont-ils fait, où sont-ils allés

 16   ?

 17   R.  Monsieur le Président, ces soldats en noir sont passés immédiatement

 18   par Potocari et ils ont été pratiquement immédiatement suivis par les

 19   soldats normaux de la BSA que nous connaissions, qui étaient revêtus

 20   d'uniforme de camouflage. Ils sont venus et ont pris position à Potocari,

 21   c'est-à-dire le long de la route et ils ont commencé même à aller vers

 22   l'endroit où se trouvaient les IDP. On peut voir qu'ils étaient placés un

 23   peu partout et qu'ils avaient mis des hommes un petit partout.

 24   Avec eux, il y avait également des personnes qui, je pense, portaient

 25   un uniforme bleu. En fait, l'uniforme bleu était réservé à la police, et

 26   les uniformes bleus étaient pour la police, et ils ont suivi immédiatement.

 27   Q.  Vous avez parlé d'"IDP", qu'est-ce que cela signifie ?

 28   R.  IDP signifie personne déplacée à l'intérieur. C'est ainsi que nous y

Page 19247

  1   faisions référence.

  2   Q.  Qu'est-ce qui s'est passé lorsque ces soldats ont pris position le long

  3   de la route parmi les réfugiés ?

  4   R.  Monsieur le Président, cela nous a créé beaucoup de soucis, parce que

  5   nous pensions qu'ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient et qu'ils étaient

  6   déjà à l'intérieur, et peut-être que les exercices pouvaient reprendre à

  7   n'importe quel moment, parce que l'idée était de nettoyer l'endroit pour

  8   qu'il n'y ait plus d'éléments ennemis qui restent.

  9   Donc nous nous sommes forcés. Vous savez, je dis, "nous nous sommes

 10   forcés," parce que nous avions peur, nous les craignions, parce que nous ne

 11   savions pas exactement quelles étaient leurs intentions. Mais en même

 12   temps, nous ne pouvions pas nous contenter d'attendre et de voir ce qu'ils

 13   allaient faire.

 14   Donc nous sommes sortis pour voir, enquêter et vérifier ce qui s'est

 15   passé, et nous avons constaté qu'ils se mélangeaient aux locaux, non pas

 16   pour discuter, mais qu'ils étaient là, et ils étaient un peu partout,

 17   partout. La plupart d'entre eux ne parlaient même pas l'anglais. Nous ne

 18   pouvions pas réellement communiquer avec eux. Nous essayions de comprendre

 19   certains qui ne comprenaient rien, et nous ne pouvions pas non plus

 20   comprendre ce qu'ils nous disaient.

 21   Q.  A ce point, est-ce que vous vous souvenez où se trouvaient Emir et

 22   Hasan à cette heure-là le 12 ?

 23   R.  A cette heure-là, Hasan n'avait pas encore fait son rapport. Il n'était

 24   pas encore revenu. Et Emir, je ne me souviens pas très bien s'il était

 25   rentré ou pas encore. Je ne m'en souviens pas très bien. Je ne suis pas

 26   très sûr.

 27   Q.  Est-ce que vous vous souvenez avoir enquêté sur les rapports concernant

 28   des comportements menaçants de la part des forces serbes envers les

Page 19248

  1   réfugiés un peu plus tôt dans la journée ?

  2   R.  Cela faisait partie de nos intentions, lorsque nous sommes allés dans

  3   l'enceinte du Bataillon néerlandais, parce que nous avions reçu des

  4   informations selon lesquelles les soldats de la BSA menaçaient les

  5   Musulmans et se comportaient comme s'ils étaient sur le point de leur tirer

  6   dessus. Ils auraient pu leur tirer dessus à n'importe quel moment.

  7   Donc nous sommes allés vérifier ce qui se passait, et nous n'avons

  8   pas constaté qu'ils se comportaient de façon menaçante. En fait, nous ne

  9   les avons pas vus pointer d'armes vers les Musulmans, même si c'est ce

 10   qu'on nous avait dit, ce qui ne veut pas dire qu'ils ne l'avaient pas fait.

 11   Mais ce qu'on nous a dit n'était pas ce que nous avons pu voir. Donc nous

 12   ne les avons pas vus pointer d'armes.

 13   Q.  En fait, lorsque vous avez fait votre enquête sur ce rapport concernant

 14   ces menaces, qu'est-ce que vous avez vu de vous-même de la part des soldats

 15   serbes ?

 16   R.  Monsieur le Président, je les ai simplement vus donner des bonbons

 17   gentiment, des sucreries, des bonbons, peu importe comment on les appelle.

 18   Donc ils les donnaient et il semblait qu'ils le faisaient tout à fait

 19   naturellement sans problème, très naturellement et de bon cœur. Mais par la

 20   suite, nous avons remarqué que lorsque nous sommes partis, il semblait

 21   qu'ils étaient en train de jouer un rôle un petit peu quand nous étions sur

 22   place.

 23   Q.  Est-ce que vous vous souvenez avoir vu d'autres occasions où des

 24   sucreries ou des bonbons étaient distribués par les soldats serbes aux

 25   réfugiés ?

 26   R.  Ça c'était la première fois; mais plus tard, j'ai assisté à une scène

 27   semblable au cours de laquelle le général Ratko Mladic est arrivé, il s'est

 28   passé beaucoup de choses. Mais à un moment donné, je lui ai dit qu'il y

Page 19249

  1   avait des gens qui étaient séparés, isolés, il s'agissait d'hommes. C'était

  2   dans un lieu qui n'était pas propre à héberger qui que ce soit. Il est allé

  3   sur place et il a distribué des bières.

  4   Puis auparavant, même avant d'aller sur place, dans le pré

  5   là-bas, avec ses soldats, il distribuait des bonbons. Mais dès que nous

  6   avons tourné le dos, nous avons vu que les soldats récupéraient les

  7   bonbons, et on se demandait ce qui se passait.

  8   Lorsqu'ils ont distribué les bonbons, il y avait des caméras qui les

  9   filmaient et je me suis dit : en fait ils veulent montrer, ils veulent

 10   prétendre avoir une attitude amicale envers ces personnes. Ils ne leur

 11   veulent absolument rien de mal, ça je pouvais le comprendre. Mais pourquoi

 12   ils récupéraient ensuite les bonbons, ça je trouvais ça incompréhensible.

 13   Q.  Vous dites avoir rencontré le général Mladic, vous dites qu'il s'est

 14   passé un certain nombre de choses. Pouvez-vous parler à la Chambre de vos

 15   rencontres avec le général Mladic, de ce qui s'est passé, de ce que vous

 16   vous êtes dits ?

 17   R.  D'abord, je suis tombé sur lui au moment où je sortais du camp du

 18   Bataillon néerlandais. J'ai vu un groupe important de soldats attroupés, je

 19   me suis demandé ce qui se passait. Je suis allé vers eux par curiosité,

 20   pour voir ce qui se passait. De loin déjà, j'ai vu un officier -- enfin un

 21   responsable pas très grand, mais il y avait une certaine distance entre lui

 22   et le reste des hommes. Donc on pouvait voir que c'était lui le principal

 23   protagoniste.

 24   Je me suis rapproché et j'ai vu que c'était le général Mladic. Je l'ai

 25   reconnu. Je l'ai reconnu lui, parce que je l'avais déjà vu à la télévision.

 26   C'était quelqu'un qu'on reconnaissait facilement. Je savais que c'était

 27   bien lui, que c'était bien le général Ratko Mladic que j'avais devant moi.

 28   Je suis passé devant un certain nombre de gardes du corps, d'officiers

Page 19250

  1   supérieurs, et cetera, qui le séparaient de moi, puis finalement, je suis

  2   parvenu jusqu'à lui.

  3   Quand il m'a vu, il m'a regardé, il a vu que je venais du Kenya et il m'a

  4   dit : "Vous êtes Kenyan," j'ai répondu : "Oui, oui, je suis Kenyan." Alors,

  5   on a eu une petite conversation à ce moment-là au sujet de l'athlétisme au

  6   Kenya. On a parlé d'un autre général qui travaillait dans un autre secteur.

  7   On a eu une conversation qui portait sur beaucoup de sujets qui n'avaient

  8   rien à voir avec la situation dans l'enclave. On a eu une conversation

  9   assez à bâton rompu.

 10   Ensuite, je suis parti, ensuite je me suis rendu compte qu'il se passait

 11   quelque chose d'anormal, c'est-à-dire qu'on était en train de séparer les

 12   femmes et les enfants des hommes et qu'on amenait les hommes vers un

 13   bâtiment.

 14   A ce moment-là, j'ai jeté un coup d'œil vers ce bâtiment, j'ai vu des gens

 15   qui y étaient amenés, je suis retourné auprès du général et je lui ai dit :

 16   "Qu'est-ce qui se passe ? Je vois qu'on est en train de séparer les hommes

 17   des femmes et des enfants et je vois qu'on amène les hommes dans ce

 18   bâtiment ?" A priori, il semble qu'il y a un problème là, parce qu'il y a

 19   trop de monde dans ce bâtiment, il est surpeuplé. Comment est-ce qu'on peut

 20   enfermer les gens dans un bâtiment comme ça et c'est surpeuplé. Il n'y a

 21   pas suffisamment d'air pour respirer, et cetera." On en a parlé, j'ai posé

 22   ce genre de questions et il m'a dit que non. D'après ce qu'il savait, les

 23   gens qui se trouvaient dans ce bâtiment étaient tout à fait à l'aise et il

 24   m'a dit qu'il allait m'y emmener en personne.

 25   Parce qu'il faut que je vous dise qu'auparavant, j'avais essayé de me

 26   rendre dans ce bâtiment et les soldats de l'armée de Bosnie, les Serbes de

 27   Bosnie m'avaient interdit d'approcher. Donc il m'a dit qu'il m'emmènerait

 28   là-bas et, au bout de quelques minutes, il a dit : "Allez, on y va." On est

Page 19251

  1   allé sur place et on a vu les gens qui étaient sur place, qui étaient

  2   agroupés dans ce bâtiment, entassés les uns sur les autres. L'endroit était

  3   surpeuplé, les gens étaient serrés comme des sardines. Ils murmuraient, on

  4   sentait que les gens étaient très mécontents.

  5   J'ai dit au général que c'était totalement inacceptable. Il m'a

  6   répondu : "Mais non, non, regardez-les, ils vont bien." A ce moment-là, ces

  7   hommes, ces soldats ont commencé à distribuer des bières, des bonbons, et

  8   cetera, des boissons.

  9   Tout ça, c'était pour -- alors que tout ça était filmé bien entendu.

 10   C'était filmé et l'idée c'était de me montrer que tout le monde allait

 11   bien. Mais ce n'était vraiment pas le cas. Alors, je lui ai dit : "Si tout

 12   va bien, pourquoi est-ce que vous séparez les hommes du reste ?" Il m'a dit

 13   : "Non, non, tout va bien. Laissez-les là, tout va bien." Voilà. Et c'est

 14   comme ça que s'est terminée ma conversation avec le général à ce moment-là.

 15   Q.  Est-ce que vous avez essayé d'avoir des contacts avec ces hommes dans

 16   ce bâtiment quand le général Mladic vous y a amené ?

 17   R.  Je lui ai demandé de me permettre d'entrer en personne pour voir de mes

 18   yeux ce qui se passait et il m'a répondu carrément que je ne pouvais pas

 19   entrer dans ce bâtiment. Il m'a refusé l'accès.

 20   Q.  Que s'est-il passé ensuite, Monsieur ?

 21   R.  Il y a quelque chose qu'il convient de préciser ici. Quand on a fait

 22   entrer les hommes dans ce bâtiment, on les a contraints à laisser leurs

 23   effets personnels à l'extérieur. Ils devaient laisser à l'extérieur tout ce

 24   qu'ils avaient sur eux; les ballots de vêtements qu'ils transportaient

 25   éventuellement, leurs papiers d'identité, leurs portefeuilles, et cetera,

 26   ensuite ils entraient dans le bâtiment.

 27   Quand on m'a interdit d'entrer, j'y suis revenu. Je suis entré. Je me

 28   souviens de rien d'autre.

Page 19252

  1   Q.  Vous nous avez dit que vous aviez remarqué que les hommes étaient

  2   séparés du reste des gens, des autres habitants. Qu'avez-vous pu observer,

  3   constater au moment de cette séparation ? Quelle était la réaction de ces

  4   hommes et avez-vous essayé de faire quelque chose; et si oui, quoi ?

  5   R.  Cette séparation, c'était quelque chose de très pénible, quelque chose

  6   d'insupportable. On voyait que ces hommes étaient  séparés, arrachés à

  7   leurs familles. On a ordonné à tous les hommes de s'avancer vers un point

  8   donné.

  9   Au départ, quand le commandant Nikolic est entré dans le camp du Bataillon

 10   néerlandais, il avait dit que ce qu'il cherchait c'était ceux qui étaient

 11   en âge de combattre. Ils ont commencé à emmener ces hommes vers ce

 12   bâtiment, et la peur avait pris aussi bien ces hommes que leurs familles,

 13   parce qu'on ne savait ce qu'il allait advenir d'eux.

 14   Lorsqu'ils s'en allaient, les membres de leurs familles leur donnaient tout

 15   ce qu'ils pouvaient. Parfois c'était l'inverse, c'est eux qui donnaient

 16   tout ce qu'ils avaient sur eux au reste de leur famille. Parce qu'en fait,

 17   nul ne savait qui était le plus en sécurité. Est-ce que c'était les hommes

 18   qu'on amenait ou est-ce que c'était le reste de la famille ?

 19   La confusion la plus totale régnait, les gens éclataient en sanglots, les

 20   hommes eux-mêmes se mettaient à pleurer. Dans toute cette confusion, nous

 21   nous sommes dits qu'on n'aurait jamais dû en arriver là.

 22   On les a séparés du reste, ils ont été regroupés. Ensuite, je me suis

 23   adressé - il faut savoir à certains soldats de l'armée des serbes de Bosnie

 24   - et ils m'ont dit que l'objectif était de reconnaître ceux qui étaient des

 25   soldats pour les emmener à un autre endroit. On y viendra plus tard; mais

 26   voilà ce que j'ai vu à ce moment-là.

 27   Q.  Qui procédait à ce tri ?

 28   R.  Ce tri était réalisé par les soldats de l'armée des Serbes de Bosnie

Page 19253

  1   qui étaient là, mais leurs officiers étaient là puisque je vous l'ai dit,

  2   il y avait aussi le général Mladic. Il y avait aussi tous les colonels,

  3   Nikolic, Vukovic, et cetera. Ils étaient là au moment du tri. C'est les

  4   soldats eux-mêmes qui procédaient au tri, à la séparation, mais les

  5   officiers étaient là eux aussi.

  6   Q.  Vous souvenez-vous d'avoir vu arriver à un certain moment des autocars

  7   ?

  8   R.  Oui, je m'en souviens très bien, parce que j'ai eu une discussion avec

  9   le général Mladic, je lui ai dit que les Nations Unies allaient envoyer des

 10   autocars pour récupérer les réfugiés. Quand je lui ai dit cela, il m'a

 11   répondu tout net qu'il n'avait pas besoin de l'aide des Nations Unies,

 12   qu'il allait organiser le transport de ces gens-là vers Tuzla, où leurs

 13   frères Musulmans se trouvaient.

 14   Je reprends ici les termes qu'il a employés. Il nous a dit : "On va

 15   emmener ces Musulmans à Tuzla pour qu'ils rejoignent leurs frères."

 16   On avait l'impression d'être dans un film pratiquement, parce qu'au

 17   bout d'à peine 20 minutes, on a vu arriver les autocars. Ils se sont

 18   alignés dans la direction de Bratunac. Ils ont tourné pour ensuite se

 19   placer dans la direction de Bratunac. Ils étaient prêts à démarrer dès que

 20   les réfugiés seraient prêts.

 21   Q.  Quelques questions de suivi.

 22   Vous avez parlé de ces conversations que vous avez eues avec le

 23   général Mladic et d'autres soldats serbes. Comment avez-vous communiqué

 24   avec lui ou avec eux, est-ce que vous aviez un interprète ?

 25   R.  C'était très difficile, parce qu'ils refusaient de laisser approcher

 26   nos interprètes, puis nous ne voulions pas non plus nous approcher, nous

 27   avec nos interprètes. Si bien que ce que nous faisions c'était d'essayer de

 28   trouver des soldats de l'armée des Serbes de Bosnie qui comprenaient ou

Page 19254

  1   parlaient l'anglais. Et je suis arrivé à en trouver un.

  2   Bien entendu, l'officier chargé des affaires juridiques dont j'ai

  3   parlé précédemment, Alija [phon], parlait bien anglais; mais c'était un

  4   officier, donc il n'était pas tout le temps disponible. Donc j'ai trouvé

  5   quelqu'un, un homme, un soldat, qui parlait un peu anglais. Il était très

  6   visible, parce qu'il portait une veste ou un blouson bleu des Nations

  7   Unies. Il parlait un petit peu anglais.

  8   Je lui parlais pour qu'il traduise aux autres. C'est lui qui faisait

  9   le lien entre moi et les autres. Et dès qu'il se déplaçait, je faisais en

 10   sorte qu'il soit à proximité quand même pour que je puisse communiquer avec

 11   les officiers de l'armée des Serbes de Bosnie. La communication,

 12   effectivement, c'était un gros problème.

 13   Q.  Est-ce que vous avez vu des gens monter à bord des autocars que vous

 14   aviez vu arriver ?

 15   R.  L'embarquement dans ces autocars, vous savez, a commencé immédiatement

 16   après cela, après leur arrivée. Nous étions là, nous avons pu les voir,

 17   nous avons pu être témoin du fait qu'ils y montaient comme il fallait.

 18   Pendant ce moment, il y avait quelque chose que les gens de l'armée des

 19   Serbes de Bosnie faisaient. Ils étaient en train de regarder plus

 20   particulièrement pour les femmes et les enfants qui montaient dans les

 21   autocars. Ils pouvaient les observer et s'ils repéraient un garçon qui

 22   avait peut-être un peu plus de 14, 15 ou 16 ans, aux environs de cela, ils

 23   pouvaient lui dire à ce moment-là -- ils pouvaient l'expulser à l'extérieur

 24   de l'autocar, et lui dire d'aller dans le bâtiment où les hommes étaient

 25   regroupés.

 26   Ceci était pour moi une question de stupeur, parce qu'ils avaient dit

 27   qu'ils ne voulaient pas des jeunes et des très vieux. Donc j'ai posé des

 28   questions à certains des soldats : "Pourquoi est-ce que vous séparez ces

Page 19255

  1   très jeunes garçons", et en raison des problèmes de communication avec

  2   nous, vous savez, ils ne comprenaient pas ce que je disais. Mais ils

  3   continuaient de leur dire d'entrer là-bas. Donc, plus tard, j'ai commencé à

  4   faire partir certains de ces garçons. Je leur ai demandé leur âge,

  5   personnellement je pouvais poser la question : "Quel est ton âge", et le

  6   garçon pouvait répondre : "14 ans." Bon, bien alors, sort. Après qu'ils

  7   soient sortis, j'ai pu leur montrer, en passant devant les soldats de

  8   l'armée des Serbes de Bosnie, et je leur disais : "Non, non. Ceci, ce sont

  9   seulement des garçons. Laissez-les tranquilles."

 10   Lorsque je suis sorti, lorsque j'ai fait sortir ceux-là, je suis revenu et

 11   j'ai pu voir qu'il y avait encore des garçons à qui on disait d'entrer.

 12   Donc c'était un cercle vicieux. Mais tout au moins j'ai réussi à en sauver

 13   plusieurs. Plusieurs, en fait, ont réussi à monter dans ces autocars, mais

 14   je n'ai pas pu rester là tout le temps jusqu'au bout. Certains d'entre-eux,

 15   j'en suis sûr, ont été forcés dans ces autocars, et enfin --

 16   Q.  Maintenant, pouvez-vous décrire le processus que vous avez

 17   effectivement observé ? Commençons par ces personnes autres que les hommes

 18   qui se trouvaient dans la maison. Est-ce que vous les avez vues monter dans

 19   les autocars ? Pouvez-vous décrire quelle était l'apparence de ce processus

 20   ?

 21   R.  Ce processus n'avait rien d'honorable, en ce sens qu'on ne leur

 22   demandait pas d'entrer. En fait, on les poussait dedans. Au moment où on

 23   essayait soit de résister ou peut-être quelqu'un essayait de crier vers son

 24   frère ou sa sœur, des parents et qu'ils viennent dans le même autocar, on

 25   pouvait être repoussé, même jeté à terre de force.

 26   En fait, si on voulait voir soi-même quelle était la situation, où on

 27   est forcé d'entrer dans un car pendant que votre sœur ou votre frère ou

 28   tout parent proche monte dans un autre car, et on voulait repartir pour les

Page 19256

  1   rejoindre où ils se trouvaient, ceux à qui on disait cela, ils disaient :

  2   "Non, non, non, non. Montez, montez, entrez, entrez."

  3   Et le moment où on essayait de faire cela, on était forcé, on était

  4   poussé même à terre. Donc, ils ont commencé à crier, à pleurer, à faire

  5   beaucoup de bruit : "Pourquoi nous faites-vous cela ?" "Qu'est-ce qui ne va

  6   pas ?" "Qu'avons-nous fait ?" Vous savez, il y a beaucoup de questions, de

  7   problèmes qui se posaient. "Pourquoi est-ce que vous nous faites cela ?"

  8   Nous pouvions comprendre quand même une partie de ce qui était dit, un peu

  9   de leur langue, parce que nous étions là depuis un certain temps. On ne

 10   pouvait pas tout comprendre, bien sûr. Mais on pouvait entendre les cris

 11   des Musulmans qui étaient poussés pour qu'ils montent dans ces autocars, ce

 12   n'était pas la situation la plus confortable.

 13   Q.  Est-ce que vous-même avez eu l'occasion ou la possibilité d'observer

 14   l'un de ces hommes qui quittaient cette maison pour être embarqués dans les

 15   autocars ou qui quittaient les autocars ?

 16   R.  Oui. Lorsque ces hommes étaient emmenés aux autocars, par exemple, ils

 17   n'étaient pas autorisés à retourner en arrière et à prendre leurs effets

 18   personnels. De sorte qu'ils étaient embarqués sans leurs effets personnels,

 19   qu'ils étaient forcés de laisser sur place. Ils étaient emmenés vers ces

 20   autocars un par un, comme les prisonniers de guerre, un par un, l'un

 21   suivant l'autre, en file, sans espace entre eux, et il y avait des soldats

 22   partout.

 23   Entre les autocars, il y avait des soldats pour s'assurer que

 24   personne ne pouvait passer de l'un à l'autre. On les a fait entrer, et

 25   c'était les moments les plus tristes que j'ai jamais vus à cet endroit. Il

 26   semblait que -- bon, vous aviez des hommes, de vrais hommes qui criaient,

 27   qui pleuraient, qui nous disaient : "Vous, de la FORPRONU, pourquoi est-ce

 28   que vous laissez ces gens venir nous prendre ? Pourquoi est-ce que vous les

Page 19257

  1   laissez aller avec nous ? Pourquoi voulez-vous que nous soyons tués par ces

  2   gens ?" Et nous pouvions demander : "Vous savez, mais qu'est-ce que vous

  3   croyez que nous faisons ?" Ils disaient vraiment : "Ces gens veulent nous

  4   tuer. Pourquoi, en premier lieu nous séparer de nos familles ? Pourquoi

  5   nous faire monter dans ces autocars ? Vous savez où ces autocars vont nous

  6   emmener ?" C'est vrai, nous ne savions pas vraiment, indépendamment de ce

  7   qu'on nous avait dit, à savoir qu'ils allaient emmener ces Musulmans à

  8   Tuzla.

  9   C'était des moments très chargés d'émotion, dans ce sens que certains

 10   hommes, on voyait dans le village de Srebrenica des personnes qu'on pouvait

 11   identifier, un tel ou un tel, on pensait reconnaître, et puis ces personnes

 12   qui étaient là, qui pleuraient, qui se tournaient vers vous pour avoir de

 13   l'aide, une aide que vous ne pouviez pas donner. Ils étaient désespérés. Il

 14   n'y avait rien que l'on pouvait faire, rien pour s'assurer -- vous savez

 15   que ces gens allaient dans la direction d'un endroit où probablement ils ne

 16   seraient vraiment pas en sécurité, mais il n'y avait rien que vous pouviez

 17   faire.

 18   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons encore

 19   quelques minutes avant que les cinq minutes soient écoulées. Mon idée

 20   c'était de présenter un document, mais ça peut prendre un peu plus

 21   longtemps, peut-être qu'on pourrait reprendre demain.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, bien sûr.

 23   M. THAYER : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien, Monsieur Kingori, nous avons

 25   besoin de vous revoir demain.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous allez être escorté hors du

 28   prétoire. Je vous remercie. Donc, demain matin 9 heures.

Page 19258

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   [Le témoin quitte la barre]

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur McCloskey, il y a une requête

  4   de M. Josse à laquelle il a fait allusion tout à l'heure, et nous l'avons

  5   déjà examinée au cours de la suspension de séance. Est-ce que vous seriez

  6   en mesure de répondre à cette requête verbalement demain ?

  7   M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de la requête Gvero ?

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, oui.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, je pense que oui.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pour les autres équipes de la Défense,

 11   dans la mesure où il s'agit d'examiner certaines des remarques faites par

 12   l'équipe de Défense Gvero dans leur requête, est-ce que ça pourrait être

 13   pertinent pour certains d'entre vous ?

 14   Excusez-moi, Maître Ostojic.

 15   M. OSTOJIC : [interprétation] Je ne l'ai pas lue, Monsieur le Président.

 16   Nous étions déjà en salle d'audience, je n'ai pas obtenu d'exemplaire.

 17   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Mais dans ce cas-là, prenons

 18   rendez-vous pour demain, et nous en discuterons verbalement; ensuite, si

 19   c'est nécessaire ou nous rendrons une décision verbalement ou ce sera une

 20   décision écrite dans le courant d'une suspension ou dans le courant des

 21   congés.

 22   Nous allons discuter aussi demain après avoir entendu votre position,

 23   une question de savoir s'il y a d'autre chose qui doit être dit en ce qui

 24   concerne la requête de l'Accusation visant à faire ajouter un témoin

 25   supplémentaire. Donc, nous pouvons faire cela.

 26   Qui avait l'intention d'être le premier à faire le contre-

 27   interrogatoire de ce témoin dans vos équipes ? C'est vous, Maître Zivanovic

 28   ?

Page 19259

  1   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je serai le premier, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Combien de temps vous faudra-t-il ?

  3   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Au moins deux heures.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Au moins deux heures. Je pense qu'il

  5   restera bien deux heures. Nous allons voir demain, en tout état de cause,

  6   nous verrons demain.

  7   Dans l'intervalle, je voudrais suggérer que vous commenciez à vous

  8   préparer. Le pire qui pourrait arriver, ce serait que vous rentriez chez

  9   vous et que vous serez prêt lorsque vous reviendrez en janvier, davantage

 10   prêt lorsque vous reviendrez en janvier pour commencer le contre-

 11   interrogatoire.

 12   Dans tous les cas, un instant je vous prie.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous avons également eu la possibilité

 15   de discuter de cette question pendant la suspension, nous avons pu parler

 16   de la position commune en ce qui concerne les demandes verbales de la

 17   Défense qui voulait davantage de temps et une prolongation du délai pour

 18   notre ordonnance portée au calendrier pour le dépôt des documents 65 ter.

 19   Nous avons pris en considération non seulement ce que nous estimions être

 20   une demande justifiée, mais également le fait que l'Accusation n'avait pas

 21   élevé d'objection à cette demande, et donc ceci dénotait qu'il y avait un

 22   accord avec cette nécessité de voir le délai prorogé, donc nous avons

 23   décidé d'y faire droit.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Les documents de la liste 65 ter

 26   auxquels a trait l'ordonnance portant calendrier, donc le délai, comme cela

 27   a été demandé, sera reporté à la fin du mois d'avril au lieu de la fin du

 28   mois de mars, avec tout de même deux mises en garde importantes, deux

Page 19260

  1   conditions importantes. La plus importante, bien sûr, c'est que rien

  2   d'autre ne doit être modifié. Il ne doit pas y avoir d'autres changements.

  3   Les autres dates fixées pour la conférence préalable aux arguments des

  4   charges et les arguments à décharge commenceront à la date prévue. L'autre

  5   condition, c'est que nous pensons que l'Accusation, en ce qui concerne les

  6   rapports d'expert, ne devrait pas se faire dans le délai prorogé, mais que

  7   ces rapports doivent être remis à la disposition de l'Accusation à la date

  8   du 31 mars, comme prévu à l'origine.

  9   Oui, Maître Ostojic.

 10   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je crois que

 11   notre accord se limitait uniquement en ce qui concernait l'expert

 12   militaire, je dis ça pour qu'il n'y ait pas de confusion. Nous voudrions

 13   donc avoir cet éclaircissement de votre part. Nous nous sommes mis d'accord

 14   que nous allions déposer ceci en ce qui concerne l'expert militaire

 15   seulement pour le 31 mars, et que tous les autres experts, s'il en est,

 16   nous présenterions ceci pour le 30 avril, conformément à la prorogation

 17   accordée.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, merci, Maître Ostojic. C'est comme

 19   ça que vous avez compris les choses ?

 20   Monsieur McCloskey.

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bon, alors il en sera ainsi. Je pense

 23   que c'est suffisamment clair.

 24   Maintenant ?

 25   M. OSTOJIC : [interprétation] Juste pour clarifier un autre point un petit

 26   peu. La Chambre, Monsieur le Président, parle des documents de la liste 65

 27   ter, pour qu'il n'y ait pas de doute, la liste des témoins 65 ter et les

 28   documents, je voulais m'assurer que nous parlions bien exactement de la

Page 19261

  1   même chose.

  2   Merci, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, c'est bien cela. Qu'il s'agisse du

  4   31 mars comme délai que nous avons indiqué dans notre ordonnance portée au

  5   calendrier, il s'agit bien des dépôts d'écriture que nous avions à l'esprit

  6   et que nous avons toujours à l'esprit.

  7   L'autre point est ceci : nous accordons cette prorogation étant bien

  8   entendu que dans les mêmes délais, c'est-à-dire à la fin du mois d'avril,

  9   le 30 avril, vous présenterez une position définitive en ce qui concerne

 10   les faits convenus et peut-être les faits admis dans d'autres affaires. En

 11   d'autres termes, dans l'intervalle, entre notre décision conformément à

 12   l'article 98 bis du Règlement et le dépôt des écritures au titre de

 13   l'article 65 ter, il va falloir que vous effectuiez un échange de

 14   correspondance entre vous sur les faits convenus éventuels ainsi que les

 15   faits constatés judiciairement dans d'autres affaires et qui se seront à ce

 16   moment-là cristallisés lorsque les dépôts d'écriture au titre de l'article

 17   65 ter auront lieu.

 18   Vous êtes d'accord ?

 19   Je crois que nous pouvons maintenant lever la séance, et nous nous

 20   retrouverons demain matin à 9 heures. Merci.

 21   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le vendredi 14

 22   décembre 2007, à 9 heures 00.

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28