Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 29 juillet 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour.

  7   Madame la Greffière, veuillez appeler l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  9   Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire

 10   IT-05-88-T, le Procureur contre Vujadin Popovic et consorts.

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.

 12   Je dirais aux fins du compte rendu d'audience, que tous les accusés sont

 13   présents, en d'autres termes, M. Borovcanin est revenu. Pour ce qui est des

 14   équipes de la Défense, je remarque l'absence de Me Tapuskovic et Me

 15   Bourgon. L'Accusation étant représentée aujourd'hui par M. McCloskey, M.

 16   Nicholls et M. Mitchell.

 17   Bien. Le témoin est également présent dans le prétoire.

 18   Maître Lazarevic, hier nous avons suspendu l'audience afin de vous donner

 19   la possibilité de vous préparer rapidement pour un surplus de contre-

 20   interrogatoire en quelque sorte.

 21   M. LAZAREVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 22   Bonjour, et je dois dire que ce fut une décision très utile. J'ai réussi

 23   effectivement à étudier la déposition de ce témoin, ce qui fait que cela,

 24   très probablement, va se soulever par une diminution de la durée de mon

 25   contre-interrogatoire qui durera moins longtemps.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

 27   LE TÉMOIN: PERICA VASOVIC [Reprise]

 28   [Le témoin répond par l'interprète]

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  1   Contre-interrogatoire par M. Lazarevic : 

  2   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Vasovic. Je me présente. Je

  3   m'appelle Me Aleksandar Lazarevic, et je défends M. Ljubomir Borovcanin,

  4   avec mes confrères, et je vais, en son nom, maintenant procéder au contre-

  5   interrogatoire.

  6   J'ai remarqué que vous avez déjà une expérience de témoignage devant ce

  7   Tribunal, ce qui fait que la mise en garde n'est peut-être pas nécessaire

  8   en ce qui vous concerne, mais toutefois je vous demanderais de bien vouloir

  9   ménager un temps d'arrêt entre les questions et les réponses pour que tout

 10   cela ne se chevauche pas au compte rendu d'audience.

 11   Est-ce que nous pouvons commencer, Monsieur ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Monsieur Vasovic, j'ai lu votre déclaration, la déclaration que vous

 14   avez faite le 23 avril 2007, et j'ai remarqué que vous aviez indiqué que

 15   pendant la soirée du 13 juillet, après 20 heures, vous avez décidé de vous

 16   rendre à la coopérative agricole de Kravica. Alors que j'étais en train de

 17   lire le document, je me suis rendu compte qu'il faisait déjà nuit à cette

 18   heure-là. Au vu d'autres informations que nous avons entendues en l'espèce,

 19   je me demande s'il ne faudrait peut-être pas remplacer 20 heures par "22

 20   heures" ? Est-ce que 20 heures n'est pas en fait l'heure à laquelle vous

 21   êtes partis ?

 22   R.  Vous savez, la nuit était déjà en train de tomber lorsque nous sommes

 23   partis. Lorsque nous sommes arrivés, il faisait carrément nuit. Donc il est

 24   difficile de m'orienter en quelque sorte maintenant par rapport à cet

 25   horaire, mais vous savez c'était l'été, donc il se peut finalement

 26   qu'effectivement il s'agissait de 22 heures.

 27   Q.  Merci. Je ne vais pas davantage revenir à la charge. Puis, je suppose

 28   que vous n'avez pas véritablement consulté votre montre ?

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  1   R.  En fait, je n'avais pas de montre.

  2   Q.  Bien. J'aimerais maintenant vous poser des questions à propos de

  3   certains éléments d'information qui figurent dans votre déclaration. Vous

  4   dites que vous, Miladin Jovanovic et Jovan Nikolic, vous êtes arrivés à la

  5   coopérative agricole de Kravica. J'aimerais savoir s'il y avait d'autres

  6   personnes dans cette voiture ? Je fais référence à Niko Periso [phon]. Est-

  7   ce que vous vous en souvenez ?

  8   R.  Oui, oui, il était là. On le connaissait également sous le nom de Misa.

  9   Q.  D'après votre déclaration, à un moment donné, des personnes portant

 10   l'uniforme sont sorties de la pénombre, ont pointé leur fusil sur Jovan et

 11   lui ont demandé de les aider à garder les prisonniers. Vous vous souvenez

 12   d'avoir dit cela dans votre déclaration ?

 13   R.  Alors que nous sortions de la voiture, Jovan Nikolic et moi-même, nous

 14   étions à la droite, et Jovan a commencé à marcher. C'était le premier.

 15   C'est là que, de la pénombre, est sorti un soldat portant un uniforme. Il y

 16   en avait d'autres dans la pénombre, mais nous ne pouvions pas les voir. Ils

 17   ont demandé à Jovan de venir rejoindre les gardes.

 18   Q.  Bien. Je voulais tout simplement savoir si vous vous souvenez de cette

 19   partie de votre déclaration.

 20   R.  Oui, tout à fait.

 21   Q.  Cette personne que vous avez vue et qui est sortie aussi de la pénombre

 22   et qui s'est placée devant Jovan Nikolic, est-ce que cette personne portait

 23   un uniforme noir ?

 24   R.  Il portait, oui, un treillis noir, mais la nuit était tombée, donc on

 25   ne pouvait pas véritablement voir tous les détails.

 26   Q.  Bien. Vous vous souvenez que le 5 ou le 6, peut-être que vous ne

 27   connaissiez pas la date exacte vous-même, mais cela figure dans les

 28   documents, vous avez témoigné dans l'affaire Kravica, et ce, au tribunal de

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  1   Sarajevo en Bosnie-Herzégovine ?

  2   R.  Oui.

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Lazarevic, et je m'adresse

  4   également à vous, Monsieur Vasovic, je souhaiterais que vous ralentissiez

  5   un peu la cadence pour que nous évitions les problèmes.

  6   M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vais essayer

  7   de m'en souvenir.

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je m'adressais plutôt au témoin qu'à

  9   vous, mais je m'adresse à vous deux.

 10   M. LAZAREVIC : [interprétation] Je souhaiterais apporter une correction au

 11   compte rendu d'audience. A la page 3, ligne 20, j'ai dit : "le 5 du sixième

 12   mois," ce qui signifie le 5 juin. Evidemment il s'agissait du mois de juin

 13   2006.

 14   Q.  Monsieur Vasovic, est-ce que vous vous souvenez que lors de votre

 15   déposition dans cette affaire, lorsque le procureur, M. Ipaj [phon] vous a

 16   posé des questions à ce sujet, vous avez également dit que le soldat qui

 17   s'était placé devant vous portait un uniforme noir. C'est ce que j'ai pu

 18   entendre sur la cassette de l'enregistrement de l'audience. Vous avez dit

 19   que cette personne portait un uniforme noir. Vous vous souvenez de cela ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  D'autres questions vous ont été posées à propos du -- ou plutôt, c'est

 22   le conseil de la Défense, Ozren Kajaksic [phon], qui vous a posé des

 23   questions, et vous lui avez également dit qu'il s'agissait d'un uniforme

 24   d'une seule couleur et qu'il s'agissait de la couleur noire; vous vous en

 25   souvenez de cela ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Ce soldat qui s'est approché de M. Nikolic et de vous-même, est-ce

 28   qu'il s'est présenté, est-ce qu'il a décliné son identité complète ?

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  1   L'INTERPRÈTE : Les interprètes indiquant qu'ils n'ont pas entendu la phrase

  2   complète du témoin.

  3   M. LAZAREVIC : [interprétation]

  4   Q.  Est-ce que vous pourriez répéter votre réponse, parce que les

  5   interprètes n'ont pas entendu.

  6   R.  Non, il ne nous a pas donné son nom.

  7   Q.  Est-ce que ce soldat vous a peut-être indiqué à quelle unité il

  8   appartenait ?

  9   R.  Non. Non, cela n'a absolument pas été mentionné.

 10   Q.  Est-ce que vous avez pu voir des insignes sur cet uniforme noir, ce qui

 11   vous aurait permis peut-être de déduire à quelle unité ce soldat

 12   appartenait ?

 13   R.  Nous n'avons pas pu voir les insignes. D'ailleurs, je ne sais même pas

 14   s'il y avait des insignes. Il faisait nuit.

 15   Q.  Lorsque vous avez témoigné -- en fait, je ne vais pas répéter tout ce

 16   que vous avez dit, mais lorsque vous avez témoigné dans l'affaire Kravica,

 17   est-ce que vous vous souvenez qu'Ozren Kajaksic vous a posé des questions à

 18   propos des uniformes et des insignes, vous avez répondu de la même façon

 19   que vous venez de le faire maintenant ?

 20   R.  Oui, je pense que j'avais apporté la même réponse, oui, effectivement.

 21   Q.  A cette occasion, vous étiez avec Jovan Nikolic lorsque ce soldat est

 22   sorti aussi ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous n'avez pas été séparé de Jovan Nikolic ?

 25   R.  Non, nous n'avons pas été placés à une certaine distance l'une de

 26   l'autre, non.

 27   Q.  Donc, en principe, vous étiez présent lors de cet incident entre Jovan

 28   Nikolic et ce soldat qui portait cet uniforme noir, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Vous avez donc été à même d'entendre et de voir exactement ce que Jovan

  3   Nikolic a pu voir et entendre également ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  A cette occasion, est-ce que vous avez entendu le soldat qui portait

  6   l'uniforme noir demander à Jovan Nikolic d'intervenir auprès du

  7   commandement, et ce, afin d'obtenir la relève ou le remplacement des

  8   troupes qui avaient été déployées à cet endroit ?

  9   R.  Moi, je n'ai pas entendu cela.

 10   Q.  Alors je vais vous poser à nouveau cette question. Je viens de vous

 11   poser une question. Cette question vous avait été posée dans l'affaire

 12   Kravica par le conseil de la Défense, Ozren Kajaksic, et à cette occasion

 13   vous avez répondu de la même façon ?

 14   R.  Ecoutez, je ne me souviens pas, mais si vous me posez cette question,

 15   je suis sûr que j'y ai répondu de la même façon.

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Nicholls.

 17   M. NICHOLLS : [interprétation] Je m'excuse d'interrompre mon confrère, mais

 18   je ne pense pas qu'il soit opportun d'indiquer lors d'un contre-

 19   interrogatoire, lorsqu'un témoin apporte une réponse : "Vous avez déjà

 20   apporté la même réponse lors d'une affaire précédente." Je ne pense pas

 21   d'ailleurs que cela soit nécessaire, cela n'a pas été remis en cause, cela

 22   n'a pas fait l'objet d'un litige.

 23   M. LAZAREVIC : [interprétation] Je ne vois vraiment pas où est le problème,

 24   très franchement.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous non plus, d'ailleurs. Poursuivez,

 26   de toute façon, Maître Lazarevic.

 27   M. LAZAREVIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Vasovic, je vais encore vous poser une ou deux questions.

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  1   Dans votre déclaration destinée à l'équipe de la Défense de Beara, vous

  2   avez indiqué que vous étiez arrivé dans l'enceinte de la coopérative

  3   agricole et alors que vous vous trouviez là-bas, vous avez pu voir des tirs

  4   isolés. Est-ce que vous avez été en mesure de déterminer la provenance des

  5   tirs à ce moment-là ?

  6   R.  Non, nous n'avons pas pu déterminer cela, mais nous pouvions les

  7   entendre.

  8   Q.  Cette question vous a été posée dans l'affaire Kravica, et le procureur

  9   vous a posé une question semblable et vous avez répondu de la même façon.

 10   Vous vous en souvenez de cela ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Alors que vous repartiez dans cette voiture vers Bratunac, est-ce que

 13   Jovan Nikolic a dit à un moment donné que les personnes qui gardaient les

 14   prisonniers musulmans faisaient partie de la police spéciale de Skelani,

 15   est-ce que Jovan Nikolic a jamais indiqué cela ?

 16   R.  Non, il ne l'a pas dit, et le lendemain alors que j'étais en contact

 17   avec lui à nouveau, il n'a absolument pas mentionné ni unités ni formations

 18   militaires.

 19   Q.  Merci. Est-ce que Jovan Nikolic a dit à un moment que les soldats que

 20   vous aviez vus dans la coopérative agricole -- plutôt, j'entends, je parle

 21   de ce soldat que vous avez vu, et vous aviez de bonnes raisons de penser

 22   qu'il y avait d'autres soldats à la coopérative agricole de Kravica, est-ce

 23   que Jovan vous a jamais dit qu'ils lui avaient demandé d'informer leur

 24   commandement de leur fournir des renforts ou une relève ?

 25   R.  Non.

 26   Q.  D'après la déclaration que vous avez faite à la Défense Beara, vous

 27   avez dit que deux jours plus tard, vous avez entendu de la part de

 28   personnes qui se trouvaient en ville qu'un incident s'était produit et

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  1   qu'il y avait eu des assassinats ou des meurtres qui s'étaient produits

  2   dans l'entrepôt à Kravica. Est-ce que vous vous souvenez de cela ? Est-ce

  3   que vous vous souvenez de qui vous l'avez entendu, qui est la source de ce

  4   renseignement ?

  5   R.  Les gens parlaient. Il y avait différentes variantes de cette histoire

  6   qui circulaient, donc j'en ai entendu parler, c'est tout.

  7   Q.  Bien entendu, dix années plus tard, dix années après ces événements de

  8   1995, vous ne pouvez pas nous donner le nom de la personne qui vous a

  9   relaté cela, n'est-ce pas ?

 10   R.  Non, non.

 11   M. LAZAREVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Vasovic. Je n'ai

 12   plus de questions à poser.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Maître

 14   Lazarevic.

 15   Monsieur Nicholls.

 16   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,

 17   Monsieur les Juges.

 18   Contre-interrogatoire par M. Nicholls : 

 19   Q.  [interprétation] J'aimerais vous poser, Monsieur Vasovic,

 20   quelques questions.

 21   Vous avez parlé de cette affaire à plusieurs reprises, dans plusieurs

 22   tribunaux et vous avez, pour ce faire, fourni plusieurs déclarations; est-

 23   ce exact ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Vous avez fait une déclaration à la SIPA le 19 juin 2005. Vous

 26   souvenez-vous de cela ?

 27   R.  Je ne sais pas ce que signifie la "SIPA".

 28   Q.  Il ne s'agit pas de la "CEPA", mais plutôt de la déclaration que vous

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  1   avez faite auprès des autorités de la Bosnie qui avaient diligenté une

  2   enquête sur le massacre à l'entrepôt de Kravica, n'est-ce pas ?

  3   R.  J'ai fait une déclaration à la police de la Republika Srpska. Je ne

  4   suis pas informé d'autres services, toutefois je ne pense pas avoir fait

  5   d'autres déclarations.

  6   M. NICHOLLS : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher la pièce

  7   suivante, en fait je n'ai pas le numéro de la liste 65 ter de la Défense.

  8   Il s'agit de la déclaration du 19 juin 2005. En fait, il s'agit de la pièce

  9   3601. Je m'excuse, il s'agit de notre numéro.

 10   Q.  Quoi qu'il en soit, vous vous souvenez avoir fait une déclaration

 11   auprès de ces autorités, vous vous souvenez avoir signé ladite déclaration

 12   ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Vous avez promis de dire la vérité dans cette déclaration ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Vous étiez prudent, vous avez fait preuve de circonscription parce

 17   qu'il s'agit d'une enquête pénale, n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Cela s'est passé à une date qui était beaucoup plus proche des

 20   événements qu'aujourd'hui, n'est-ce pas, cela s'est passé moins de temps

 21   après ces événements que maintenant ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Je vais vous dire ce que vous avez dit à propos de ces tirs :

 24   "Ensuite, nous sommes allés au ZZ de Kravica, étant donné que nous

 25   avions entendu dire qu'il y avait des choses étranges qui se passaient là-

 26   bas, à savoir que des gens se faisaient tuer. Lorsque nous nous sommes

 27   trouvés dans la coopérative agricole de Kravica, j'ai entendu des tirs qui

 28   provenaient de l'entrée de l'entrepôt, plus précisément de la route. Nous

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  1   sommes immédiatement partis de la coopérative agricole de Kravica, étant

  2   donné que nous courrions un danger."

  3   Est-ce que vous vous souvenez avoir dit cela aux enquêteurs et vous

  4   souvenez-vous avoir signé la déclaration en question ?

  5   R.  Il ne faut pas oublier la configuration du terrain puisque nous étions

  6   beaucoup plus proches du bâtiment, et du fait de la configuration du

  7   terrain, on avait l'impression que les tirs venaient de ce côté, mais ils

  8   auraient pu venir du côté opposé également. Ce que nous avons entendu,

  9   c'était un écho. Ce qui ne signifie pas que ce que j'ai dit et ce qui

 10   correspondait à mon évaluation de l'époque, est forcément exact.

 11   Q.  Mais vous n'avez pas répondu à ma question. La question que je vous ai

 12   posée était : est-ce que vous vous souvenez ce que vous avez dit aux

 13   enquêteurs et est-ce que vous vous souvenez avoir signé la déclaration qui

 14   était exacte d'après vous ?

 15   R.  J'ai signé la déclaration, mais j'ai fait cette déclaration alors que

 16   personne ne m'avait demandé ce qui en était de mon aptitude mentale et

 17   physique à faire une déclaration. Je dois dire que j'étais extrêmement

 18   surmené parce que j'avais été sorti d'une église, l'église de la Trinité et

 19   conduit à l'extérieur de cette église pour être interrogé. J'étais

 20   extrêmement déprimé. Il est possible que qu'est-ce que j'ai dit n'était pas

 21   tout à fait conforme.

 22   Q.  Bien. Donc vous ne vous en tenez pas à cette réponse, alors que vous

 23   aviez dit que vous promettez de dire la vérité, et ce, sous peine d'être

 24   sanctionné par les enquêteurs de la Republika Srpska ?

 25   R.  J'ai entendu des tirs. J'avais l'impression qu'ils venaient de l'autre

 26   côté, et je peux confirmer encore aujourd'hui que je les ai entendus ces

 27   tirs. Mais cela ne signifie pas forcément que ce que je disais était exact

 28   puisque je n'étais pas dans une position qui me permettait de décider d'où

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  1   venaient ces tirs, parce qu'il faisait nuit et il y avait l'écho entre une

  2   colline et l'autre.

  3   Q.  Bien.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, une question juste

  5   pour satisfaire ma curiosité personnelle.

  6   Lorsque le témoin a fait ces déclarations à l'enquêteur, est-ce qu'on lui

  7   avait dit qu'il pourrait encourir une sanction ?

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Je n'ai pas de traduction de cela, mais je

  9   l'ai vu et je pense -- bien que je n'ai pas de traduction comme je l'ai

 10   dit, je pense que ce qui est indiqué c'est que si la personne fait une

 11   déclaration erronée ou fausse, elle peut tout à fait être sanctionnée.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien, nous vérifierons cela plus

 13   tard.

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] Ça y est, j'ai reçu quelque chose de

 15   différent, il s'agit toujours de la même agence d'enquête mais il

 16   s'agissait du témoin précédent, et voilà ce qui est indiqué :

 17   "Conformément à l'article 86, au paragraphe 2 de la Loi relative à la

 18   procédure pénale de la Bosnie-Herzégovine, je vous mets en garde, car vous

 19   devez dire la vérité. Vous ne pouvez rien dissimuler. Je vous mets en garde

 20   et vous avertis que s'il y a parjure, et le parjure représente un crime tel

 21   que cela est précisé par l'article 235 du code pénal, crime pour lequel une

 22   peine d'emprisonnement peut être décidée, peine comprise entre six mois et

 23   cinq ans."

 24   Il s'agit de la première page du formulaire de la déclaration.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. OSTOJIC : [interprétation] Mais de quelle déclaration s'agit-il ?

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] De la déclaration de la SIPA.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un petit moment. Maître Lazarevic.

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  1   M. LAZAREVIC : [interprétation] Je pense que nous parlons de deux choses

  2   différentes. Moi, ce que j'ai en face de moi c'est une déclaration qui date

  3   du 19 juin 2005. Est-ce que vous parlez de la même chose, Monsieur Nicholls

  4   ?

  5   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui.

  6   M. LAZAREVIC : [interprétation] Peut-être que M. Nicholls pourra m'indiquer

  7   où il a trouvé cela.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Je n'ai pas de traduction de cette

  9   déclaration.

 10   M. LAZAREVIC : [interprétation] Ce n'est pas du tout ce que moi je trouve

 11   sur ladite déclaration. Voilà ce que je trouve, il est indiqué, cette

 12   déclaration a été faite auprès du centre de la Sécurité publique à

 13   Bijeljina, ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska. Il ne s'agit

 14   pas de la SIPA, qui est l'agence de la fédération de Bosnie-Herzégovine.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] De toute façon, nous pourrons vérifier

 16   tout cela plus tard.

 17   M. NICHOLLS : [interprétation] Si j'ai fait une erreur, je m'en excuse.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Poursuivez entre-temps.

 19   M. NICHOLLS : [interprétation]

 20   Q.  Quoi qu'il en soit, Monsieur, vous avez dit aux enquêteurs le 19 juin

 21   que - il y a trois ans - d'après vos souvenirs, les tirs provenaient de

 22   l'avant de l'entrepôt ou de la route alors que maintenant vous êtes en

 23   train de nous dire qu'il se pourrait qu'il s'agisse d'un écho, n'est-ce pas

 24   ?

 25   R.  Je me souviens bien, mais on est en 1992 et pas mal d'années se sont

 26   écoulées depuis. Aujourd'hui, vraiment, je n'ai plus de certitude. Est-ce

 27   que c'était un écho, est-ce que cela venait d'en haut, je n'en suis plus

 28   sûr du tout.

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  1   Q.  D'accord. Le lendemain, à la date du 14, vous êtes retourné à

  2   l'entrepôt de Kravica aux environs de midi, n'est-ce pas ?

  3   R.  C'était dans cet intervalle de temps.

  4   Q.  Vous en avez parlé dans votre déposition. Vous avez témoigné devant la

  5   cour d'Etat de Sarajevo à ce sujet, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Quand vous êtes retourné à Kravica le 14, vous avez trouvé sur place

  8   des hommes en uniforme, n'est-ce pas ?    

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Vous décrivez leurs uniformes, je vais lire un passage de la page 12 de

 11   votre déposition du 5 juillet 2006 :

 12   "Ils portaient des uniformes de camouflage, tous --", là il y a un mot

 13   illisible, " -- des uniformes gris vert olive, les uniformes type. Ils

 14   étaient en salopette, donc leur tenue était d'une seule pièce, voyez-vous."

 15   Est-ce que vous maintenez cette réponse ? Est-ce que vous disiez la vérité

 16   lorsque vous avez dit cela devant la cour d'Etat ?

 17   R.  J'ai toujours dit la vérité devant ce tribunal comme devant le Tribunal

 18   où je me trouve aujourd'hui, oui.

 19   M. LAZAREVIC : [interprétation] Un point simplement, c'est peut-être un

 20   point mineur, mais dans la lecture faite par M. Nicholls à l'instant, nous

 21   avons entendu les mots censés provenir du témoin comme étant "uniformes

 22   militaires type", or je ne vois pas le mot "militaire" à l'écran au compte

 23   rendu d'audience. M. Nicholls a prononcé le mot "militaire" toutefois.

 24   Ligne 19, page 12.

 25   M. NICHOLLS : [interprétation] Cela se trouve à la ligne 2.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Veuillez procéder.

 28   M. NICHOLLS : [interprétation] Je vois. Excusez-moi, merci.

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  1   Non, je n'ajouterai rien.

  2   Monsieur le Président, excusez-moi. Mes collègues viennent de me remettre

  3   un formulaire de déposition de la Republika Srpska, je vais vérifier, mais

  4   en tout cas on y trouve les mêmes mots, le même libellé qui commence par

  5   les mots :

  6   En vertu de notre paragraphe 2, article 86 de la Loi de procédure

  7   pénale de Bosnie-Herzégovine, le témoin a été enjoint à dire la vérité et à

  8   ne retenir par de vers lui aucune information. Ensuite on a exactement les

  9   mêmes mots.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur Nicholls.

 11   Y a-t-il des questions supplémentaires, Maître Nikolic ?

 12   M. NIKOLIC : [interprétation] Non, je vous remercie.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord, je vous remercie.

 14   Monsieur le Juge Kwon ? Monsieur le Juge Prost ? Madame le Juge Stole, vous

 15   avez des questions ? Non.

 16   Monsieur Vasovic, nous en avons terminé avec votre déposition, vous pouvez

 17   maintenant vous retirer.

 18   Au nom de la Chambre de première instance, je tiens à vous remercier d'être

 19   venu devant le Tribunal, et je vous souhaite un bon voyage de retour.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 21   [Le témoin se retire]

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Des documents, Maître Nikolic.

 23   M. NIKOLIC : [interprétation] Nous demandons le versement au dossier de

 24   certains documents. La déclaration de Perica devant l'équipe du conseil de

 25   la Défense dont la cote est 2D555, et qui a été téléchargée dans le système

 26   électronique.

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Pas d'objection.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pas d'objection.

Page 24263

  1   Des objections du côté de l'une ou l'autre des autres équipes de Défense ?

  2   Non. Donc le document est admis.

  3   Maître Lazarevic, vous n'avez pas de documents dont vous demandez le

  4   versement au dossier, n'est-ce pas ?

  5   M. LAZAREVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, nous n'en avons

  6   pas.

  7   M. NICHOLLS : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi de rester

  8   sur ce sujet. J'ai en main la déclaration en B/C/S du témoin. On m'a aidé à

  9   m'y retrouver. L'avertissement montrant que la déclaration a été faite

 10   alors que le témoin savait qu'il encourait des risques judiciaires se

 11   trouve en page 2. Je dis cela pour répondre à la question qui m'a été

 12   posée. Je peux donner davantage de détails sur la page si nécessaire. Page

 13   2, au dessous de la signature du témoin.

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord, merci.

 15   Est-ce que vous souhaitez ajouter quelque chose, Maître Lazarevic ?

 16   M. LAZAREVIC : [interprétation] Oui, pour aider mon confrère

 17   éventuellement.

 18   Ce que M. Julian a cité, ce sont les paragraphes pertinents du code

 19   de procédure pénale de la Fédération de Bosnie. Toutefois, si je lis la

 20   déclaration, les paragraphes pertinents font état d'une citation des

 21   procédures pénales de la Republika Srpska. Or, les deux sont des choses

 22   tout à fait différentes.

 23   Par ailleurs, pour ajouter ma pâte à cette discussion, je dirais

 24   qu'aucune déclaration n'a été faite sous serment, c'est une précision qui

 25   s'impose.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Mais vous avez des documents dont vous demandez le versement, Monsieur

 28   Nicholls ?

Page 24264

  1   M. NICHOLLS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord, merci.

  3   Ceci met un point final à la déposition de M. Vasovic.

  4   Faites entrer votre témoin suivant, je vous prie, M. Mrkovic.

  5   Par ailleurs, pour le compte rendu d'audience, j'indique que M. Elderkin

  6   est à présent dans la salle d'audience du côté de l'Accusation.

  7   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur Mrkovic.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] En ma qualité de Juge présidant cette

 11   Chambre, je tiens à vous souhaiter la bienvenue dans ce prétoire. Vous êtes

 12   sur le point de commencer à témoigner en l'espèce, et vous avez été cité à

 13   la barre par la Défense du colonel Beara.

 14   Avant de commencer votre déposition, notre Règlement exige que vous

 15   prononciez une déclaration solennelle indiquant que vous vous apprêtez à

 16   dire la vérité dans votre déposition. Le texte de cette déclaration vous

 17   est tendu à l'instant. Veuillez lire ce texte qui constituera un engagement

 18   solennel de votre part.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 20   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 21   LE TÉMOIN: LJUBAN MRKOVIC [Assermenté]

 22   [Le témoin répond par l'interprète]

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Monsieur. Vous pouvez maintenant

 24   vous asseoir confortablement.

 25   L'équipe de Défense du colonel Beara s'exprimera la première et après son

 26   interrogatoire principal, les contre-interrogatoires des autres équipes de

 27   Défense suivront.

 28   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

Page 24265

  1   Interrogatoire principal par M. Ostojic : 

  2   Q.  [interprétation] Monsieur Mrkovic, bonjour. Comme vous le savez, je

  3   m'appelle John Ostojic, et je représente ici la Défense de Ljubisa Beara en

  4   compagnie d'autres membres de mon équipe.

  5   R.  Bonjour.

  6   Q.  Pour le compte rendu d'audience, pourriez-vous décliner vos nom et

  7   prénom ?

  8   R.  Mrkovic Ljuban.

  9   Q.  Est-ce qu'à aucun moment, et notamment au cours de la moitié des années

 10   1990, vous aviez un surnom particulier ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Pourriez-vous nous dire quel était ce surnom ?

 13   R.  Depuis l'enfance, on me surnomme en utilisant une partie de mon nom de

 14   famille. Mon surnom est "Mrki".

 15   Q.  Pourriez-vous, je vous prie, Monsieur, nous donner votre lieu et date

 16   de naissance ?

 17   R.  Je suis né le 28 décembre 1953 à Ljubinje.

 18   Q.  Rapidement, pourriez-vous nous parler des diplômes les plus importants

 19   que vous avez obtenus au cours de votre scolarité ?

 20   R.  J'ai terminé mes études secondaires à Ljubinje, c'est-à-dire à

 21   l'endroit où j'étais né. Après quoi, j'ai suivi les cours de l'école

 22   secondaire d'aviation à Sarajevo, puis je suis allé à l'école du génie de

 23   l'aviation à Raljovac et j'ai enfin obtenu mon diplôme de l'académie

 24   militaire de l'armée de l'air à Belgrade.

 25   Q.  Pourriez-vous nous donner une idée, si cela ne vous ennuie pas,

 26   Monsieur Mrkovic, du moment où vous avez terminé vos études dans cette

 27   école d'aviation, l'année approximative ?

 28   R.  Ce n'est pas une école de pilotes, c'était une école technique destinée

Page 24266

  1   à former des techniciens de l'aviation.

  2   Q.  D'accord. Si j'ai fait une erreur dans ma question, je vous prie de

  3   m'excuser.

  4   Monsieur Mrkovic, apparemment, on a quelque problème à nous entendre,

  5   donc veuillez, je vous prie, nous redonner l'année, car vous n'avez pas été

  6   entendu et donc pas été interprété.

  7   R.  J'ai fini mes études à l'école technique d'aviation de Rajlovac en

  8   1977. Quant à l'école de Belgrade, l'école de l'état-major militaire, j'en

  9   suis sorti avec un diplôme en 1990 à Belgrade.

 10   Q.  Pour que nous rendions un peu mieux compte de votre passé, pourriez-

 11   vous nous dire quels étaient les emplois que vous avez occupés à partir de

 12   1977 et à quel endroit ?

 13   R.  J'ai travaillé pendant un moment à l'école d'aviation de Sombor, après

 14   quoi j'ai passé le reste de ma vie professionnelle à Rajlovac. Après les

 15   deux ans que j'ai passés à Sombor, j'ai travaillé sans discontinuer à

 16   Rajlovac.

 17   Q.  Où se trouve Rajlovac ?

 18   R.  C'est en fait une banlieue de Sarajevo, peut-on dire. Pendant la

 19   guerre, c'était une municipalité qui se trouvait à six kilomètres à peu

 20   près du centre de Sarajevo quand on se dirige vers Ilijas et Vogosca.

 21   Q.  Vous avez dit qu'à partir de 1990, vous avez fait partie d'un état-

 22   major. Pourriez-vous nous dire, si tel est le cas, si vous avez travaillé

 23   entre 1990 et 1992, et à quoi exactement ?

 24   R.  De 1990 à 1992, j'ai travaillé à l'Académie technique de l'aviation de

 25   Rajlovac.

 26   Q.  Veuillez nous dire de façon générale quelles étaient vos

 27   responsabilités, vos fonctions à l'époque au sein de cette école

 28   technique ?

Page 24267

  1   R.  Dans cette école, j'ai occupé des fonctions assez diverses; j'ai

  2   d'abord été directeur de la partie de l'école qui s'occupait des officiers

  3   de réserve, puis je suis devenu directeur du département de formation ou

  4   d'entraînement des ressortissants étrangers. Donc, jusqu'à 1992, j'ai assez

  5   souvent changé de postes, et j'ai occupé notamment le poste de chef de la

  6   sécurité.

  7   Q.  Je vous remercie. Pourriez-vous maintenant nous dire ce que vous avez

  8   fait après 1992, professionnellement ?

  9   R.  Après 1992, en fait en décembre 1991, j'ai rejoint l'organe de sécurité

 10   de l'usine de construction d'aéronefs Orao, qui se trouve juste à côté de

 11   l'école de Rajlovac.

 12   Q.  Nous reviendrons à certaines de vos fonctions professionnelles plus

 13   tard. Combien de temps avez-vous travaillé dans cette usine de construction

 14   aéronavale d'Orao ? Je sais que vous avez dit que vous aviez commencé à y

 15   travailler en 1992 [comme interprété], mais jusqu'à quelle date y avez-vous

 16   eu un emploi ?

 17   R.  J'y ai travaillé jusqu'en 1997.

 18   Q.  Est-ce que vos fonctions à l'usine de construction d'aéronavale d'Orao

 19   sont restées identiques pendant toutes ces années qui séparent 1991 de

 20   1992 ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Vous nous avez rapidement parlé de ce que vous avez fait

 23   professionnellement. Pourriez-vous nous dire en quelques mots quelles

 24   étaient vos fonctions et responsabilités professionnelles de décembre 1991

 25   jusqu'au moment où vous avez quitté l'usine de construction aéronavale

 26   d'Orao ?

 27   R.  Cela prendrait longtemps de tout vous dire, mais je vais essayer d'être

 28   bref.

Page 24268

  1   Cette usine de construction aéronavale d'Orao est une société qui fait

  2   partie de l'industrie militaire, comme on l'appelait par le passé, du

  3   complexe militaro industriel, qui s'occupait d'effectuer les réparations

  4   sur les moteurs d'avions de chasse, pas seulement dans l'ex-Yougoslavie

  5   mais dans tous les pays de la région; dans les pays arabes également, en

  6   Angleterre, au Pays-Bas et dans de nombreux autres pays du monde. C'était

  7   sans doute l'une des compagnies les plus importantes dans ce domaine en

  8   Europe.

  9   En 1992, à Orao, la technologie était si avancée que toute l'ancienne

 10   Yougoslavie investissait dans cette société, et c'est la raison pour

 11   laquelle mes responsabilités au sein de cette société ont été aussi

 12   complexes. Mais, bien entendu, avec la sécession d'un certain nombre de

 13   républiques, les républiques en question se sont séparées de l'ex-

 14   Yougoslavie en conservant par-devers elles un certain nombre d'aéronefs à

 15   deux moteurs. Tout le monde essayait de se saisir de la documentation

 16   afférente à ces aéronefs ou d'obtenir des pièces détachées, et se sont les

 17   choses les plus importantes que nous avons faites pendant la guerre en

 18   Bosnie, s'agissant de la société Orao et de mon travail, à savoir essayer

 19   de protéger la propriété et les documents relatifs aux pièces détachées

 20   pour les conserver à l'intérieur de l'entreprise, qui fonctionnait

 21   toujours. Elle a fonctionné pendant toute la guerre, et fonctionne encore

 22   aujourd'hui. Elle n'est plus ce qu'elle était par le passé, mais elle

 23   fonctionne toujours.

 24   Q.  Pour que tout soit clair au compte rendu d'audience, cette société de

 25   construction Orao se trouvait à Rajlovac, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Comme vous l'avez dit, à quelques kilomètres de Sarajevo. Alors,

 28   veuillez nous dire plus précisément, je vous prie --

Page 24269

  1   R.  Puisque vous en parlez, cette société était mitoyenne physiquement de

  2   la garnison militaire. Il n'y avait qu'une route qui séparait les deux

  3   parties belligérantes, donc nous pouvons dire, sans risque de nous tromper,

  4   que cette entreprise avait son siège sur la ligne de démarcation elle-même.

  5   Q.  Pourriez-vous décrire rapidement les moyens dont vous disposiez pour

  6   remplir votre rôle dans la défense de ces documents, et ce, pendant toute

  7   la guerre. Pourriez-vous nous donner une idée un peu plus précise des

  8   ressources dont vous disposiez à l'époque pour assurer cette protection ou

  9   même la sécuriser à ce moment-là. Est-ce que vous travailliez sur des

 10   avions ou sur des pièces détachées, pouvez-vous nous dire ce que vous avez

 11   en mémoire à ce sujet ?

 12   R.  Le premier objectif que nous avions dans la gestion de cette

 13   entreprise, c'était de maintenir le personnel en état, car sans personnel,

 14   aucune machine ne sert à rien. Donc nous souhaitions que les gens

 15   continuent à travailler. Notre mission suivante, notre obligation suivante

 16   consistait à défendre la propriété de l'usine et, bien entendu, à maintenir

 17   la documentation en bon état, documentation qui avait été élaborée

 18   plusieurs générations avant nous, étant donné l'aspect très sensible de

 19   cette technologie. Donc, voilà quelles étaient nos fonctions principales.

 20   Q.  Combien de personnes travaillaient dans cette usine de construction

 21   aéronavale à l'époque, à votre arrivée en décembre 1991 ?

 22   R.  En décembre 1991, il y avait là à peu près 600 salariés.

 23   Q.  Avez-vous vu ce nombre chuté au cours des années, disons au cours des

 24   trois années qui ont suivi et jusqu'à la fin de 1995, voilà à peu près la

 25   période qui m'intéresse ? Donc, elle s'arrête à peu près à la signature des

 26   accords de Dayton.

 27   R.  Oui. Lorsque les combats ont commencé au moment où la guerre a éclaté,

 28   de nombreuses personnes qui travaillaient à l'usine étaient à Sarajevo.

Page 24270

  1   Certaines d'entre elles ont fui à l'étranger ou à Belgrade. Pour poursuivre

  2   la production, nous avons essayé d'obtenir le retour de personnes qui

  3   étaient parties. Il y a eu un moment où nous n'étions que 30 à 40 salariés

  4   à travailler dans l'entreprise et à la maintenir en fonctionnement. Mais

  5   par la suite, ce nombre s'est accru pour atteindre 150 à 200 personnes.

  6   Aujourd'hui, l'usine emploie environ 300 personnes. Mais à un certain

  7   moment, elle a eu trop de salariés, donc en avril nous avons réduit à 30,

  8   40 personnes, et en 1994, nous avions environ 150 à 200 personnes qui

  9   venaient sur la ligne de front même pour travailler.

 10   Q.  Monsieur, de façon à ce que l'année soit exacte, lorsque vous avez dit

 11   "avril," vous parliez de quelle année, avril de quelle année, cette année

 12   où le personnel a été réduit à 30 ou 40 personnes ?

 13   R.  Avril 1992.

 14   M. OSTOJIC : [interprétation] Je crois que l'interprète --

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] 2002.

 16   M. OSTOJIC : [interprétation] Je le sais, je vais essayer de faire

 17   préciser.

 18   Q.  Monsieur Mrkovic, je crois que vous avez dit "2002," mais en fait ne

 19   parliez-vous pas d'avril 1992, c'est-à-dire du moment où la guerre a éclaté

 20   ? Allez-y.

 21   R.  Je suis désolé, et je m'excuse devant les Juges de la Chambre si j'ai

 22   fait un lapsus en disant "2002." Je pensais à 1992. Excusez-moi.

 23   Q.  Pas de problème, parce que l'interprète même s'en est rendu compte,

 24   puisqu'elle a d'abord dit "1992," puis a repris le terme exact utilisé par

 25   vous, à savoir "2002," mais en se rendant compte que vous aviez fait un

 26   lapsus.

 27   Quel était votre travail exact ? Quelle était la définition de votre poste

 28   entre 1992 et 1995 dans cette usine de construction aéronavale d'Orao ?

Page 24271

  1   R.  Je travaillais au sein de l'organe de sécurité de l'usine de

  2   construction aéronavale d'Orao.

  3   Q.  Combien de temps avez-vous occupé ce poste ?

  4   R.  De 1991 à 1997.

  5   M. OSTOJIC : [interprétation] Je sais qu'il m'arrive souvent de parler en

  6   même temps que le témoin et je présente mes excuses à la Chambre à ce

  7   sujet. A la page 22, ligne 3 du compte rendu d'audience, l'orthographe du

  8   siège de "l'usine de construction aéronavale" est erronée. Il ne s'agit pas

  9   d'Orahovo, O-r-a-h-o-v-o, mais d'Orao, O-r-a-o, se corrige l'interprète. Je

 10   ne sais pas si c'était indispensable, mais nous aimerions que le compte

 11   rendu soit aussi exact que possible, donc je vous remercie, Monsieur le

 12   Président, de m'avoir autorisé à faire cette intervention et je vous

 13   présente encore une fois toutes mes excuses.

 14   Q.  Monsieur, pourriez-vous nous dire combien de personnes travaillaient à

 15   vos côtés au sein de l'organe de sécurité ou dans les mêmes fonctions que

 16   vous à l'usine de construction aéronavale d'Orao ?

 17   R.  Je crois qu'il y avait un autre employé ou responsable administratif

 18   qui plus tard est parti pour Belgrade. Mais nous n'avons jamais été plus

 19   que deux.

 20   Q.  A partir de 1990 -- ou même, disons très précisément, 1995, d'après ce

 21   que vous avez en mémoire, savez-vous combien de personnes ont travaillé à

 22   vos côtés au sein de l'organe de sécurité dans les mêmes fonctions que

 23   vous, fonctions que vous venez de décrire ?

 24   R.  Une seule personne.

 25   Q.  Revenons de façon plus générale à l'usine de construction aéronavale

 26   d'Orao. Pourriez-vous me dire si vous vous en souvenez, si entre 1992 et

 27   1995, la composition ethnique des salariés de l'usine était mixte ou pas ?

 28   Est-ce que les employés étaient tous d'appartenance ethnique serbe ou est-

Page 24272

  1   ce que d'autres groupes ethniques étaient également représentés au sein des

  2   salariés ?

  3   R.  J'en ai déjà parlé devant ce Tribunal dans l'affaire Milosevic. Le

  4   personnel d'Orao était multiethnique. Je ne me rappelle pas la date exacte

  5   aujourd'hui, mais il y avait plusieurs Musulmans et Croates qui ont occupé

  6   des postes identiques à ceux qui étaient occupés par des Serbes, donc il

  7   n'y avait aucune distinction, aucune séparation.

  8   D'ailleurs, l'une de mes fonctions consistait à vérifier que cette

  9   multiethnicité soit respectée. C'était dans l'intérêt d'Orao et dans

 10   l'intérêt de tous que ces personnes d'appartenance ethnique différente

 11   continuent à travailler à l'usine. Nous avons réussi à obtenir ce résultat

 12   pendant toute la guerre, mais malheureusement j'entends dire que maintenant

 13   certains Croates et Musulmans de l'usine sont partis pour le Canada, ou en

 14   tout cas pour l'étranger, en raison de leur grande expertise

 15   professionnelle. Mais c'est parce que les salaires sont trop bas qu'ils

 16   sont partis. Donc en tant que membre de l'encadrement, j'en suis vraiment

 17   désolé.

 18   Mais je me dois d'insister ici pour dire qu'il n'y avait pas uniquement des

 19   Serbes dans les effectifs salariés de l'usine; il y avait des Serbes, des

 20   Croates, des Musulmans qui travaillaient ensemble à l'usine.

 21   M. OSTOJIC : [interprétation] J'entends les interprètes me demander

 22   d'éteindre mon micro pendant que le témoin s'exprime. Je vais le faire,

 23   Monsieur le Président. Je vous remercie.

 24   Q.  Monsieur Mrkovic, je n'aimerais pas vous mettre dans l'impossibilité de

 25   répondre, mais je vous demande tout de même si vous avez en mémoire le nom

 26   de ces employés qui étaient Musulmans ou Croates ? 

 27   R.  Il y a des noms qui sont gravés dans ma mémoire, comme Saban Tabak, qui

 28   était Musulman. Son épouse se trouvait à Ilidza avec ses enfants. Nous

Page 24273

  1   l'avons aidée à se rendre à Belgrade et à revenir. Il y avait aussi Zeljko

  2   Juric, Ivan Jurkovic, qui était Croate. Enfin, 15 ans se sont écoulés

  3   depuis, en tout cas, voilà quelques noms de personnes qui travaillaient

  4   dans l'usine et qui étaient d'appartenance ethnique autre que Serbe.

  5   Q.  Pourriez-vous nous aider à mieux comprendre les autres fonctions de

  6   l'usine et peut-être la structure hiérarchique qui existait dans cette

  7   usine. Qui était directeur ou en tout cas le chef de l'usine entre 1991 et

  8   1997 ? Pourriez-vous nous donner son titre, et si vous vous en souvenez,

  9   son nom et si cette personne a changé au cours des années, pourriez-vous

 10   nous donner le nom des suivants ?

 11   Donc finalement, je vous demande de nous dire qui était la personne la plus

 12   importante à l'usine de construction aéronavale d'Orao, et quelle était

 13   exactement sa description de poste ?

 14   R.  En 1991, l'ancienne JNA existait toujours, et Laza Grbic, décédé

 15   depuis, dirigeait l'entreprise, puis ensuite, lui a succédé le colonel

 16   Milovanovic. En 1992, ils sont partis pour Belgrade sur des ordres

 17   indiquant que tous les membres de la JNA devaient retourner à Belgrade.

 18   Ensuite, il y a eu Milan Prica, qui a dirigé l'entreprise de 1992 à 1997.

 19   Il y a un point que j'aimerais préciser. Dans l'ex-JNA, le commandement des

 20   forces armées -- la logistique des forces armées était responsable de la

 21   nomination du directeur.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Ostojic, peut-être pourriez-vous

 23   vous demander au témoin de répéter ce qui n'a pas été entendu par

 24   l'interprète.

 25   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Q.  Monsieur Mrkovic, nous n'avons pas obtenu l'interprétation complète de

 27   tout ce que vous avez dit, donc le Président de la Chambre a demandé, à la

 28   demande des interprètes, de vous prier de répéter une partie de votre

Page 24274

  1   réponse, là où vous parliez de l'ancienne JNA et du commandement des forces

  2   aériennes, et ensuite quelques mots manquent au compte rendu avant que vous

  3   ne parliez du fait que c'était la logistique du commandement des forces

  4   aériennes qui étaient responsable de la nomination du directeur. 

  5   Alors Monsieur, vous êtes un peu stressé ici devant ces Juges, et je

  6   vous demande de vous détendre, de boire un peu d'eau. Nous allons passer

  7   toutes ces questions en revue afin de mieux comprendre ce que vous faisiez

  8   à l'époque, et je vous demanderais d'être assez aimable pour répéter ce que

  9   vous avez dit au sujet de la logistique et du directeur de l'usine de

 10   construction aéronavale d'Orao. Je vous remercie.

 11   R.  Jusqu'en 1992, plus précisément jusqu'en avril 1992, le directeur de

 12   l'usine d'Orao était le colonel Vlado Tomovanovic [phon], et sur ordre de

 13   l'ancienne armée yougoslave, il a ensuite quitté la Bosnie-Herzégovine pour

 14   se rendre à Belgrade, et donc a déménagé le siège de l'usine à Belgrade, en

 15   avril 1992.

 16   Après le départ de Milovanovic, il a nommé à son poste une des personnes

 17   les plus compétentes de l'usine, à savoir Milan Prica, pour le remplacer.

 18   Ce dernier était diplômé en génie aéronaval. Il travaillait à l'usine

 19   depuis déjà pas mal de temps, moi je ne sais pas si le gouvernement de la

 20   Republika Srpska avait déjà été mis en place à ce moment-là ou pas, mais en

 21   tout cas c'est Milan Prica qui a obtenu ce poste. En septembre 1992, le

 22   ministère de la Défense l'a nommé directeur de l'usine, l'ordre de

 23   nomination existe toujours, en tout cas il était à l'époque dans les locaux

 24   d'Orao. Pendant toute la période où l'usine d'Orao a fonctionné, la

 25   logistique de la Republika Srpska apportait une assistance professionnelle

 26   à l'usine et proposait les nominations de postes. Le ministère de la

 27   Défense rendait les décisions relatives aux nominations du directeur de

 28   l'usine d'Orao.

Page 24275

  1   J'espère que j'ai été clair.

  2   Q.  Oui, tout à fait, Monsieur.

  3   J'aimerais vous poser une question très précise, à savoir quelles étaient

  4   vos tâches et vos responsabilités exactement, est-ce que vous aviez à mener

  5   des missions dans le cadre du contre-renseignement alors que vous

  6   travailliez à Orao dans cette usine aéronavale entre 1992 et 1995 ?

  7   R.  J'ai déjà dit que ma tâche principale était le contre-renseignement de

  8   l'institut aéronaval de ces membres; 80 % de mon travail constituait à

  9   protéger les biens et les personnes de l'institut aéronaval ainsi que de

 10   faire mon travail du contre-renseignement. Si vous voulez, je peux

 11   préciser.

 12   Q.  J'aimerais savoir si vous pouviez me dire, du meilleur de votre

 13   souvenir, en quoi consistaient vos tâches de façon quotidienne alors que

 14   vous faisiez votre travail dans le cadre du service du contre-renseignement

 15   à l'institut aéronaval Orao ?

 16   R.  Je voudrais vous dire que l'institut disposait d'une documentation

 17   énorme et de biens énormes, et ceci avait été constitué pendant des années.

 18   En 1992, nous avions déjà un MiG 29, c'est nous qui assurions les

 19   réparations de cet avion et nous devions également garder le tout.

 20   Lorsque l'éclatement de l'ex-Yougoslavie a eu lieu, vous pouvez

 21   imaginer quelle était la pression sur tous les pays entourant de

 22   s'approprier cette documentation, d'obtenir des pièces de rechange, ils

 23   voulaient essayer de soudoyer le personnel pour faire en sorte que ces

 24   derniers passent chez eux. Je crois que j'ai très bien fait mon travail,

 25   nous étions peut-être l'une des rares usines en Republika Srpska qui

 26   fonctionnaient de façon ininterrompue pendant cette période, et j'estime

 27   que c'est un succès au niveau des cadres et de la direction de l'usine.

 28   Q.  Merci beaucoup, Monsieur. Pour être un peu plus précis, j'aimerais

Page 24276

  1   savoir si vous meniez des opérations ou des enquêtes dans le cadre du

  2   contre-renseignement à l'encontre des employés musulmans et croates ou est-

  3   ce que vous ne faisiez aucune discrimination alors que vous essayiez de

  4   protéger les biens de l'usine et les actifs de l'institut aéronaval ?

  5   R.  Non, absolument pas. Concrètement, nous n'étions pas du tout intéressés

  6   par l'appartenance ethnique des employés. Ce qui nous intéressait c'est que

  7   la personne fasse bien son travail et soit rémunérée adéquatement, c'était

  8   notre but principal, notre objectif principal pendant la guerre et après.

  9   Je viens de me souvenir d'un Bosnien qui était marié avec une Croate,

 10   et elle s'appelait Andja, c'était un couple croate musulman et ils

 11   travaillent encore à ce jour à Orao.

 12   Bien sûr qu'il était certain que nous faisions attention pour ne pas

 13   être surpris, c'était l'organe du contre-renseignement qui devait faire un

 14   suivi pour savoir si tout fonctionne. Moi, on m'appelait "le travailleur

 15   social" pendant une période parce que je venais en aide aux autres

 16   nationalités plus qu'aux Serbes. Ceci arrivait aussi.

 17   Q.  Vous venez de mentionner un Bosnien du nom de -- je n'ai pas

 18   saisi son nom. Jako quelque chose ? Pourriez-vous répéter son nom afin que

 19   nous puissions avoir son nom au compte rendu d'audience. Vous venez de vous

 20   souvenir du nom d'une personne. Quel est son nom de famille ? Vous avez

 21   mentionné que son prénom était Jako, quelque chose comme ça.

 22   R.  Un croate qui s'appelait Zvonko Bosnjak, et il était Croate.

 23   Q.  Très bien, merci. Est-ce que vous avez fait un travail du contre-

 24   renseignement à Orao avant le mois de juillet 1995 ?

 25   R.  Pour certaines personnes, oui, pour certaines personnes c'était avec

 26   succès; d'autres, moins.

 27   Q.  Le ministère de la Défense nommait un directeur. Vous nous avez

 28   expliqué de quelle façon la logistique fonctionnait du point de vue

Page 24277

  1   professionnel, vous nous avez tout expliqué, mais dites-nous qui était

  2   votre supérieur immédiat entre 1992 et 1995 ou 1997 ? La raison pour

  3   laquelle je vous pose ces questions c'est que je voudrais que l'on aille

  4   jusqu'en 1995, qu'on parle de cette période-là. Si ça a changé, dites-le-

  5   nous. Je ne suis pas sûr si ça a changé, mais si les choses ont changé,

  6   vous pourriez nous dire qui était votre supérieur immédiat.

  7   A qui rendiez-vous des comptes d'une certaine façon entre 1992 et

  8   1995 ?

  9   R.  Je faisais des rapports le long de la hiérarchie, j'étais subordonné au

 10   directeur de l'institut. C'est à lui que je rendais compte et aussi à la

 11   direction de la sûreté car j'étais également subordonné à ces derniers, à

 12   la direction de la sûreté de la Republika Srpska, la VRS. Ce rapport était

 13   envoyé de façon quotidienne, de façon hebdomadaire. De temps en temps ça

 14   pouvait changer, mais il était obligatoire d'envoyer des rapports mensuels.

 15   Les rapports quotidiens toutefois étaient envoyés au directeur de

 16   l'institut car l'organe de sécurité était, militairement parlant, nous

 17   étions subordonnés au directeur de l'institut et pratiquement parlant, nous

 18   étions également subordonnés à la direction de la sécurité.

 19   Je voudrais également préciser un point. Pendant que je me trouvais sur le

 20   territoire de la zone de responsabilité du Corps Sarajevo-Romanija, un très

 21   grand nombre de rapports que j'envoyais à la direction de la sécurité,

 22   j'envoyais également ce rapport à la section de la sécurité du Corps

 23   Sarajevo-Romanija puisque je me trouvais dans leur zone de responsabilité

 24   selon la ligne de  commandement, selon la hiérarchie.

 25   Q.  Fort bien, merci. Nous avons entendu un certain nombre d'éléments de

 26   preuve concernant le commandement, le contrôle, les  aspects

 27   professionnels, et cetera. Nous avons entendu parler du 6e Corps d'armée

 28   qui existait dans l'ancienne zone bosnienne, y compris le Corps Sarajevo-

Page 24278

  1   Romanija. Pouvez-vous être un peu plus précis, s'il vous plaît, et me dire

  2   s'il y avait une personne au cours d'une période un peu plus longue à qui

  3   vous rendiez compte à l'intérieur du Corps Sarajevo-Romanija ?

  4   R.  Pour la plupart, c'étaient des renseignements que j'obtenais et ces

  5   renseignements je les donnais à M. Marko Lugonja, qui était le chef de la

  6   section de sécurité, et des fois j'envoyais également mes rapports à

  7   l'état-major principal, des fois c'était lui qui envoyait ces rapports à

  8   l'état-major principal puisque je lui faisais part des renseignements

  9   obtenus.

 10   Il arrivait très souvent que j'informais le Corps de Sarajevo-

 11   Romanija, je les informais des renseignements que j'obtenais liés à la

 12   suite de mon travail qui constituait à obtenir des informations du contre-

 13   renseignement.

 14   Q.  Dites-nous, Monsieur, ceci, vous avez parlé de "Marko Lugonja",

 15   pourriez-vous, je vous prie, nous épeler son nom. Au compte rendu

 16   d'audience que vous avez sans doute sous les yeux, nous pouvons apercevoir

 17   une épellation un peu différente de son nom de famille, alors j'aimerais

 18   simplement m'assurer que l'on ait le bon nom de famille. Pourriez-vous, je

 19   vous prie, prendre la page 30, ligne 20, à partir de la gauche, au compte

 20   rendu d'audience, puisque vous êtes en train de le consulter en ce moment.

 21   R.  M-A-R-K-O, L-U-G-O-N-J-A.

 22   Q.  Merci beaucoup, Monsieur le Témoin.

 23   En parlant de 1991 et allant jusqu'en 1997, est-ce que vous envoyiez des

 24   rapports à une autre personne outre que Marko Lugonja ? Est-ce qu'on vous a

 25   donné des instructions ou vous a-t-on dit d'envoyer des rapports à d'autres

 26   personnes ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Vous nous avez dit à quelle fréquence vous envoyiez les rapports. Ces

Page 24279

  1   rapports étaient rédigés dans votre bureau de l'usine Orao, et vous

  2   envoyiez ces rapports directement au Corps de Sarajevo-Romanija ainsi qu'à

  3   l'état-major principal; est-ce exact ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Dites-nous, s'il vous plaît, si vous connaissez une personne répondant

  6   au nom de Ljubisa Beara ?

  7   R.  Je le connais, bien sûr.

  8   Q.  D'accord, alors établissons les faits. Pourriez-vous nous dire où, et

  9   comment, et à quel titre avez-vous rencontré M. Ljubisa Beara, si vous vous

 10   en souvenez ?

 11   R.  Je ne me souviens pas des dates exactes, mais je crois que c'était en

 12   novembre ou en décembre 1992. C'est à ce moment-là que Ljubisa Beara a été

 13   nommé au poste de chef de l'organe de sécurité de l'armée de la Republika

 14   Srpska. Je crois que c'est à ce moment-là que nous nous sommes rencontrés

 15   pour la première fois.

 16   Q.  Merci, je ne vous demande pas de nous donner plus de précision, c'est

 17   assez clair.

 18   Vous souvenez-vous, si en 1995, M. Ljubisa Beara est venu rendre visite à

 19   l'usine de construction aéronavale à Rajlovac ? Vous souvenez-vous si vous

 20   l'avez vu là ? 

 21   R.  Je ne me souviens pas précisément, mais je sais qu'il venait très

 22   souvent. Lorsqu'il venait rendre visite au Corps Sarajevo-Romanija, il

 23   venait également rendre visite à l'institut Orao. Je ne sais pas si c'était

 24   dix ou 20 fois pendant cette période de trois ans, mais je sais qu'il

 25   venait assez souvent; non pas seulement Ljubisa Beara, mais il y avait

 26   d'autres personnes qui venaient rendre visite à notre institut, et qui

 27   venaient nous prêter main-forte, qui venaient nous rendre visite, nous

 28   donner leur aide pour ce qui est des opérations, de la logistique et ainsi

Page 24280

  1   de suite.

  2   Q.  Très bien. Merci. Vous souvenez-vous si en 1995, il est resté un peu

  3   plus longtemps, a-t-il passé une journée entière lorsqu'il est venu vous

  4   rendre visite, vous et vos personnels de l'usine ? Vous souvenez-vous s'il

  5   est resté plus d'un jour ?

  6   R.  Voyez-vous, nous avions l'habitude de réunir une fois par mois tous les

  7   membres des organes de sécurité sur le territoire du Corps de Sarajevo-

  8   Romanija, c'est à ce moment-là que nous procédions aux analyses mensuelles,

  9   pour les appeler ainsi. Je ne peux pas vous dire à combien de reprises

 10   Ljubisa Beara a pris part à ces analyses, mais je me souviens que j'avais

 11   un carnet de notes.

 12   En date du 5 juillet 1995, Ljubisa Beara avait organisé une réunion et je

 13   sais que j'avais reçu une dépêche ainsi que tous les autres organes, soit

 14   de l'état-major principal ou du Corps Sarajevo-Romanija. Je ne me souviens

 15   pas mais on peut certainement retrouver le tout dans la documentation. Nous

 16   avons eu cette réunion à Ilijas le 5 juillet, et je sais très bien que

 17   Ljubo Beara que nous avons essayé de le garder plus longtemps, je sais

 18   qu'il est resté deux à trois jours sur place, et à chaque fois qu'il venait

 19   il était très occupé, il était toujours pressé. Le front était ouvert pour

 20   Krajina. Il allait à Krajina. Je me souviens qu'en 1995, je me souviens

 21   très bien de cette réunion où Ljubo nous a informés que les fronts étaient

 22   ouverts à Krajina, les fronts allaient ouvrir à Sarajevo, par-ci, par-là,

 23   et je sais que nous étions restés assez longtemps ensemble, cette réunion a

 24   duré assez longtemps. Ensuite, il nous a dit qu'il partait en direction de

 25   la Krajina. Je ne sais pas s'il était effectivement allé là-bas ou pas,

 26   mais je sais que chaque fois qu'il venait nous voir il était toujours

 27   pressé et il devait toujours partir quelque part. Pour ce qui est du 5

 28   juillet 1995, je peux vous dire avec certitude qu'il y a eu une réunion et

Page 24281

  1   qu'il est venu et que nous étions à Ilijas.

  2   Q.  Merci beaucoup, Monsieur. Vous nous avez donné un très grand nombre

  3   d'éléments, je vais essayer de disséquer d'une certaine façon tout ce que

  4   vous nous avez dit, ceci est très utile, mais je vous demanderais de nous

  5   répondre de façon peut-être un peu plus concise.

  6   Vous nous avez dit que vous avez consulté à la page 6, ligne 32 du compte

  7   rendu d'audience, un carnet de notes. Vous avez dit, j'ai vérifié dans "mon

  8   carnet de notes." De quel carnet de notes parlez-vous, Monsieur ?

  9   R.  J'avais un carnet de notes où j'écrivais quand j'avais des réunions. Je

 10   consignais dans ce carnet de notes les rendez-vous. Je me souviens très

 11   bien, hier soir, en réfléchissant dans ma chambre, juste avant d'aller

 12   dormir, j'ai réfléchi à cette réunion, et je crois que cette réunion a eu

 13   lieu le 5 juillet 1995 à Ilijas. Je sais que j'avais rencontré Vojin

 14   Dragutinovic il y a environ un an à Zvornik. Il vient me voir assez

 15   souvent, et nous avons évoqué cette réunion, un déjeuner que nous avions

 16   commandé mais que nous n'avions pas suffisamment de temps pour manger.

 17   C'est quand même des choses qui sont consignées dans les brigades. Je me

 18   souviens très bien que j'avais reçu cette dépêche et que d'autres personnes

 19   l'avaient reçue aussi.

 20   Q.  Dites-nous, s'il vous plaît, où se trouve Ilijas pour nous situer

 21   géographiquement ?

 22   R.  Ilijas se trouve à l'ouest de Sarajevo, c'est à 21 kilomètres de

 23   Rajlovac. On emprunte la route qui mène vers Zenica pour s'y rendre, je

 24   parle de 22 à 23 kilomètres, dépendamment de l'endroit dont où on part.

 25   Q.  Très bien. Pourriez-vous nous dire si au mois de juillet 1995, pour

 26   mieux nous situer et pour une meilleure vue d'ensemble, qui était Vojin

 27   Dragutinovic ?

 28   R.  Vojin Dragutinovic était le chef chargé de la sécurité de la Brigade

Page 24282

  1   d'Ilijas, c'était mon homologue d'une certaine façon. Le travail que je

  2   faisais à l'usine de construction aéronavale, il faisait ce même travail

  3   mais pour la Brigade Ilijas.

  4   Q.  Monsieur, est-ce que vous avez votre carnet de notes avec vous, soit à

  5   l'hôtel ou ici au Pays-Bas, vous l'avez mentionné ?

  6   R.  Non, pas ici.

  7   Q.  Mais vous l'avez quelque part chez vous ?

  8   R.  Je crois que ce carnet de notes se trouve à Zvornik. C'est un carnet de

  9   notes personnel. C'est peut-être le seul document que j'ai feuilleté avant

 10   de venir ici. C'est un carnet de notes, c'est tout, et j'ai vu que j'ai

 11   consigné ce rendez-vous dans ce carnet de notes.

 12   Q.  Très bien. Merci.

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Est-ce que je pourrais vous demander de ne

 14   pas jeter ce carnet de notes ou ce bout de papier, car nous allons peut-

 15   être vous demander de nous le transmettre afin que nous puissions demander

 16   le versement de ce document au dossier.

 17   Q.  Donc le Greffe trouvera sans doute une façon, ou l'Accusation trouvera

 18   un moyen de faire en sorte que ce carnet de notes nous provienne. Est-ce

 19   que je peux vous demander de ne pas le jeter, s'il vous plaît.

 20   R.  J'ai peut-être même, et je vais vérifier, cette dépêche par laquelle

 21   j'ai été convoqué à cette réunion. Je l'ai peut-être à Zvornik. Je ne suis

 22   pas sûr de l'avoir, mais je l'ai peut-être, cette dépêche par laquelle tout

 23   le monde était convoqué à cette réunion, pas seulement moi.

 24   Q.  Merci beaucoup. Encore une fois, j'aimerais faire cette même demande de

 25   ne pas jeter ce document. Tout ce que vous avez qui pourrait être

 26   pertinent, je vous prierais de ne pas vous en débarrasser, de les garder,

 27   car nous allons peut-être vous demander de nous faire parvenir des

 28   exemplaires de ces documents. Donc nous vous demanderions gentiment de ne

Page 24283

  1   pas jeter tout ce matériel, tous ces documents. Est-ce que c'est correct ?

  2   R.  Oui, pas de problème.

  3   Q.  Merci beaucoup, Monsieur Mrkovic.

  4   Maintenant, revenons à cette réunion qui a eu lieu le 5 juillet ou autour

  5   de cette date en 1995, à Ilijas. Quel était l'objectif de cette réunion, si

  6   vous vous souvenez ? Je sais que vous nous avez dit que c'était une réunion

  7   mensuelle, mais pourriez-vous nous donner un survol de sujets discutés dans

  8   cette réunion.

  9   R.  Il m'est bien difficile après tant d'années de vous dire de quoi il

 10   était question normalement, mais c'était une réunion mensuelle. L'un des

 11   points à l'ordre du jour, des points habituels, c'était l'analyse de

 12   l'organe de sécurité au cours du mois passé et  l'évaluation de la

 13   situation sur le terrain. Cela faisait toujours partie de l'ordre du jour

 14   de ces réunions mensuelles, mais je ne me souviens pas des détails de la

 15   réunion. Je ne pourrais pas vous donner de renseignements plus fiables. Si

 16   j'essayais de me rappeler des sujets, je ne pourrais pas être précis.

 17   Q.  Bien. Mais grâce à ces documents, ces originaux, ces carnets de notes,

 18   et cetera, ceci pourrait peut-être rafraîchir votre mémoire, mais ma

 19   question est plutôt de façon générale. Vous nous avez dit quels étaient les

 20   sujets qui faisaient l'objet de discussions lors de ces réunions

 21   mensuelles.

 22   Mais pourriez-vous nous dire, de façon générale, qui prenait part à ces

 23   réunions mensuelles, telles que celles qui aient eu lieu le 5 juillet 1995

 24   à Ilijas ?

 25   R.  Tous les chefs chargés de la sécurité des brigades étaient présents,

 26   des fois il y avait également des organes de sécurité des bataillons, le

 27   chef de sécurité du Corps Sarajevo-Romanija venait également, participait

 28   également, et il y avait toujours quelqu'un de la direction de sécurité.

Page 24284

  1   Plus concrètement, je sais que cette fois-là, c'était Ljubo Beara. D'après

  2   le carnet de notes, j'ai vu qu'il était présent aussi. L'objectif principal

  3   de cette réunion, en réalité, était d'évaluer une situation politique très

  4   difficile, cette politique militaire au sein de l'armée de la VRS. La

  5   situation était très complexe; le champ de bataille de Sarajevo. Selon les

  6   informations du renseignement, on demandait que des unités soient

  7   transférées d'un coin à l'autre, ainsi de suite. Ensuite la situation était

  8   très difficile en Krajina, car les unités provenaient de la Croatie, d'ici

  9   enfin d'ailleurs, et que les offensives étaient sur le point d'avoir lieu.

 10   Donc je crois que c'est de cela qu'on a parlé à ce moment-là pendant cette

 11   réunion.

 12   Q.  Vous avez parlé des théâtres des opérations. Vous avez parlé de

 13   plusieurs sujets. Est-ce que vous vous souvenez si des activités avaient

 14   lieu sur le théâtre des opérations de Bihac, par exemple ?

 15   R.  D'après les renseignements relatifs au renseignement que je recevais,

 16   je peux vous dire qu'il y avait une offensive qui se déroulait à Bihac.

 17   Mais pour ce qui est des opérations concrètes, je ne peux rien vous dire,

 18   je ne sais pas. Mais je sais qu'une offensive était lancée sur Bihac.

 19   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, l'heure est peut-être

 20   arrivée pour prendre la pause. Je vais passer à des parties plus précises,

 21   plus spécifiques du témoignage de ce témoin. Si vous me le permettez,

 22   j'aimerais demander une pause à ce moment-ci.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Prenons une pause de 25

 24   minutes.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 26   --- L'audience est reprise à 11 heures 00.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Ostojic.

 28   M. OSTOJIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président, mais

Page 24285

  1   je voudrais vous dire ce qui suit :

  2   Pendant la pause, le bureau du Procureur et moi-même avons eu une

  3   discussion, et nous aimerions poser des questions au témoin à propos d'un

  4   document dont il semble disposer. Donc si vous m'y autorisez, et

  5   l'Accusation d'ailleurs est également d'avis que lorsque vous aurez entendu

  6   la question, vous comprendrez --

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, je vous en prie.

  8   M. OSTOJIC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Mrkovic, bonjour. Comment allez-vous ? J'aimerais vous

 10   demander, à propos de ce document ou de ce carnet de bord ou de ce journal

 11   que vous avez, mes estimés confrères de l'Accusation m'ont demandé s'ils ne

 12   pouvaient pas envoyer leur enquêteur qui, d'après ce que je pense, se

 13   trouve à l'heure actuelle à Sarajevo, chez-vous, pour qu'il récupère ce

 14   document, et ainsi ils n'auraient pas à vous convoquer à nouveau ici pour

 15   parler de ce document.

 16   Donc, est-ce que vous savez, en fait, si ce document, donc si ce journal de

 17   bord se trouve à votre domicile, et si avec votre permission quelqu'un

 18   pourrait le remettre à l'un des enquêteurs du bureau du Procureur ? Ou si

 19   vous préférez une solution, vous pouvez proposer une autre solution

 20   également.

 21   R.  Ecoutez, lorsque je rentrerai en Bosnie, je pourrais tout à fait faire

 22   en sorte que les enquêteurs puissent l'obtenir dès que possible. Donc cela

 23   pourrait être après-demain ou demain après-midi.

 24   Q.  Je vous remercie. Je voulais juste vous poser cette question pour qu'il

 25   soit consigné que vous donnerez ou remettrez ce journal, et ainsi nous

 26   pourrons en parler. Donc, je vous demanderais de bien vouloir prendre des

 27   dispositions pour qu'à la fin de votre déposition nous pourrons nous

 28   retrouver avec le bureau du Procureur, et nous prendrons des mesures ainsi.

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  1   Je vous remercie, Monsieur Mrkovic.

  2   Alors, pour revenir à ce dont nous parlions, juillet 1995, il s'agit de la

  3   présence de M. Beara. Voilà ce que j'aimerais savoir : est-ce que vous vous

  4   souvenez si avant le mois de juillet, en juin ou en mai, M. Beara s'était

  5   rendu à Ilidza ou à l'usine d'Orao ?

  6   R.  Je ne peux pas l'affirmer d'une façon sûre et certaine, mais je pense

  7   que M. Ljubisa Beara se trouvait dans l'usine à ce moment-là et qu'il se

  8   trouvait à la Brigade d'Ilidza. Je pense même qu'il est venu prendre du

  9   carburant à la station d'essence au niveau de l'usine.

 10   Q.  Bien. Alors j'aimerais vous poser d'autres questions, ensuite nous

 11   allons véritablement aborder le fond de votre déposition à propos de cette

 12   réunion du 5 juillet. Mais avant que je ne vous pose cette question, vous

 13   avez mentionné au début de votre déposition que vous avez témoigné dans

 14   l'affaire Dragomir Milosevic, et nous avons la date, je ne pense pas que

 15   cela fasse l'objet d'un contentieux, il s'agissait des 12 et 13 juillet

 16   2007. Est-ce que cela vous semble exact comme date, c'était il y a environ

 17   un an. Est-ce que c'est à cette date-là que vous êtes venu témoigner dans

 18   cette affaire ?

 19   R.  C'était l'été, et la date de toute façon se trouve dans le document.

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez justement nous aider à ce sujet parce que

 21   l'Accusation nous a fourni toute une série de documents qu'ils appellent

 22   soit le jeu de documents de Srebrenica ou le jeu de documents du Corps de

 23   la Drina. Justement à propos de cette autre affaire, est-ce que vous savez

 24   si le Corps Romanija-Sarajevo avait été l'un des protagonistes ?

 25   R.  Pas pour autant que je le sache. Je vous dirais que pour ce qui est des

 26   documents que j'ai reçus, à la fois en tant que membre d'un organe de

 27   sécurité et ainsi qu'en tant que personne chargée du renseignement, il ne

 28   m'a jamais été indiqué que le Corps Romanija- Sarajevo effectuait des

Page 24287

  1   opérations dans la zone du Corps de la Drina. Je n'ai pu trouver cette

  2   information dans aucun des documents que j'ai reçus.

  3   Q.  Bien. Je vous posais la question pour une autre raison car j'espérais

  4   que l'Accusation puisse avoir des documents du Corps Romanija-Sarajevo et

  5   ainsi ils auraient pu vous demander de nous aider à trouver les documents

  6   auxquels vous avez fait référence. Quoi qu'il en soit, nous allons passer à

  7   autre chose.

  8   J'aimerais savoir si à un moment donné vous avez consulté des conversations

  9   interceptées où figurait votre nom dans le cas où il y avait une

 10   conversation à laquelle vous auriez participé ?

 11   R.  Qu'entendez-vous, est-ce que j'ai consulté ?

 12   Q.  J'aimerais savoir, Monsieur, si je ne vous ai pas montré hier soir une

 13   vidéo de votre conversation ?

 14   R.  Oui, vous me l'avez effectivement montrée hier soir.

 15   Q.  Avant cela, est-ce que vous avez jamais eu une discussion avec moi-

 16   même, avec Me Nikolic, avec d'autres avocats ou d'autres enquêteurs faisant

 17   partie de l'équipe de Défense de M. Beara, qui portait sur des

 18   conversations interceptées ou figurait votre nom ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  J'aimerais que l'on m'autorise à afficher cette conversation

 21   interceptée qui date du 10 juillet 1995 et qui a la cote T001-1340.

 22   M. OSTOJIC : [interprétation] Il s'agit, Monsieur le Président, d'un

 23   document qui a été communiqué par l'Accusation. Nous ne disposons pas de

 24   traduction anglaise. Nous avons passé plusieurs heures à essayer de

 25   traduire ces documents ce matin. Mon estimé confrère de l'Accusation a eu

 26   l'amabilité de me fournir toutes les traductions anglaises des documents de

 27   conversations interceptées qui se trouvent sur ce même disque, donc nous

 28   pensons que nous avons au moins une copie. Nous remettrons cela à la

Page 24288

  1   Chambre pour que vous puissiez en prendre connaissance, et pour que cela

  2   puisse faire partie du dossier, je pense à la version B/C/S de la

  3   conversation interceptée et la version anglaise.

  4   Maintenant, j'aimerais que nous regardions cette vidéo qui est très,

  5   très courte et qui correspond à notre document 2D 557, il s'agit du script

  6   en B/C/S. Nous allons présenter la version anglaise qui nous a été fournie

  7   par l'Accusation ce matin, et je le répète, il s'agit du document T001-

  8   1340.

  9   [Diffusion de la cassette audio]

 10   M. OSTOJIC : [interprétation] Est-ce que vous pourriez interrompre la

 11   vidéo.

 12   Avant que je ne vous pose une question, Monsieur Mrkovic, j'aimerais dire

 13   que nous avons le texte de cette vidéo que nous avons fourni aux

 14   interprètes. Je pensais qu'ils allaient lire ce texte. S'ils n'ont pas la

 15   version anglaise, nous avons notre exemplaire. Mais j'aimerais savoir si le

 16   témoin reconnaît les voix que l'on peut entendre sur cet enregistrement. Ça

 17   c'est une première question de base.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous dirais que nous ne voyons

 19   absolument rien.

 20   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, mais il ne s'agit que de la cassette

 21   audio.

 22   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, mais vous avez dit, c'est une

 23   vidéo très, très courte. Vous n'aviez pas précisé qu'il ne s'agissait que

 24   de l'enregistrement audio.

 25   M. OSTOJIC : [interprétation] Je m'en excuse. Il ne s'agit, je le répète

 26   une fois de plus, que de l'enregistrement audio.

 27   L'INTERPRÈTE : Les interprètes aimeraient avoir une référence précise pour

 28   comprendre comment ils sont censés trouver le document. Est-ce que vous

Page 24289

  1   pourriez nous dire quels sont les premiers mots que l'on entend ?

  2   M. OSTOJIC : [interprétation] Je vais répondre directement. Cela commence

  3   par la voix d'un homme inconnu : "Le début de la conversation n'est pas

  4   enregistré." C'est ce qui est écrit, puis vous avez en haut la date du 10

  5   juillet 1995 à 18 heures 54. La cote interne est CD-96-17-04/06/021. Les

  6   interprètes normalement devraient disposer de ce texte.

  7   Je ne sais pas si la Chambre de première instance dispose de l'intégralité

  8   de la version anglaise, mais je vais faire une lecture fidèle de ce qui se

  9   trouve dans le texte, ensuite nous ferons entendre cela au témoin.

 10   M. ELDERKIN : [interprétation] Si cela peut vous être utile, Monsieur le

 11   Président, j'ai moi-même quelques exemplaires supplémentaires de ce

 12   document que je peux ainsi remettre aux Juges.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Elderkin, ce

 14   sera en effet très utile.

 15   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président --

 16   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Elderkin.

 17   M. ELDERKIN : [interprétation] Autre suggestion d'ordre pratique. Il se

 18   peut qu'il soit difficile pour les interprètes de suivre vu le rythme de

 19   l'enregistrement. Nous pensions qu'une personne de notre équipe pourrait

 20   ainsi suivre sur le rétroprojecteur pour indiquer ligne par ligne le texte

 21   en anglais, cela ne prendrait que cinq minutes de la faire venir dans le

 22   prétoire, et je pense que ce serait utile.

 23   M. OSTOJIC : [interprétation] Je ne pense pas personnellement que cela soit

 24   nécessaire. Je m'inclinerais si vous pensez que cela est plus utile, mais

 25   ce qui m'intéresse c'est essentiellement la page 5 alors que le document

 26   est un document de huit pages. J'allais tout simplement demander que nous

 27   lisions cette page, les interprètes n'ont pas besoin de traduire les quatre

 28   premières pages ou les autres pages. Ce que je souhaiterais, c'est que le

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  1   témoin confirme s'il est en mesure d'identifier la voix des personnes qui

  2   prennent part à la conversation, mais je peux tout à fait accepter ce que

  3   le bureau du Procureur nous a proposé si c'est ce qu'ils souhaitent.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'après ce que je comprends, le bureau

  5   du Procureur pourrait utiliser cela plus tard, c'est cela ?

  6   M. ELDERKIN : [interprétation] Non, pas si on les écoute maintenant. Mais

  7   si justement nous l'écoutons, je sais que j'ai quelqu'un qui fait partie de

  8   mon équipe qui se trouve en haut et qui pourrait venir ici pour nous aider.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Nous allons suivre la suggestion de Me

 10   Ostojic pour le moment et nous verrons si votre suggestion est plus

 11   pragmatique. Maître Ostojic, il faut que nous ayons la page 5, c'est cela ?

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] J'aimerais juste vous faire écouter un peu de

 13   cet enregistrement pour que je puisse poser mes questions de base afin de

 14   déterminer qui sont les personnes de la cassette.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 16   M. OSTOJIC : [interprétation] Je vais commencer dès le début, ensuite je

 17   vous demanderais d'arrêter.

 18   Q.  Monsieur Mrkovic, ensuite je vous poserai quelques questions.

 19   M. OSTOJIC : [interprétation]Est-ce que l'on peut, je vous prie, entendre

 20   le début de la conversation.

 21   [Diffusion de la cassette audio]

 22   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix] 

 23   "Ljuban, merde alors.

 24   Voix de l'homme inconnu : Il vient un peu plus qu'avant.

 25   Ljuban : Un peu plus ?

 26   Voix de l'homme inconnu : Bien sûr.

 27   Ljuban : Mais qui d'autre est là ?

 28   Voix de l'homme inconnu : Juste lui.

Page 24291

  1   Ljuban : Juste lui ?

  2   Voix de l'homme inconnu : Oui.

  3   Ljuban : Il y a quelque chose de nouveau de ton côté ?

  4   Voix de l'homme inconnu : Non, rien, juste quelques choses à faire ici et

  5   là.

  6   Ljuban : Oui.

  7   Voix de l'homme inconnu : D'après l'ancien système.

  8   Ljuban : Oui, l'ancien système, nouvelle méthode, putain alors."

  9   [Fin de la diffusion de la cassette audio]

 10   M. OSTOJIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, je

 11   pensais que j'étais clair. J'ai dit que ce n'était pas la peine de traduire

 12   avant la page 5. Je m'excuse des termes injurieux que vous avez entendus.

 13   Q.  Monsieur Mrkovic, j'aimerais vous poser une question, est-ce que vous

 14   reconnaissez la voix des personnes qui s'expriment sur cette cassette, sur

 15   cet enregistrement que nous venons d'entendre ?

 16   R.  Oui, je peux supposer, oui.

 17   Q.  Mais dites-nous alors.

 18   R.  Vous savez, c'est un peu édifié, mais oui, cela pourrait effectivement,

 19   oui.

 20   Q.  Est-ce que vous reconnaissez la personne qui, dans la version traduite

 21   en tout cas de cette conversation interceptée, n'est pas identifiée

 22   puisqu'il s'agit d'un homme inconnu. Vous êtes ici, vous avez écouté, enfin

 23   peut-être que vous aurez besoin d'écouter davantage cette cassette, mais

 24   est-ce que vous savez qui était cette autre personne ?

 25   R.  Je pense qu'il s'agit de Zoran, Zoran du Corps Romanija-Sarajevo, Zoran

 26   Stankovic, me semble-t-il, c'était un officier du renseignement.

 27   Q.  Monsieur, nous allons maintenant vous laisser écouter la cassette, ce

 28   n'est la peine que les interprètes nous lisent le texte, car je pense que

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  1   la Chambre de première instance a ce texte. Nous aimerions que cela soit

  2   diffusé et lorsque nous arriverons à peu près à la page 5, il faudra

  3   arrêter cela.

  4   M. OSTOJIC : [interprétation] Est-ce que vous pouvez diffuser la cassette.

  5   [Diffusion de la cassette audio]

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Arrêtez, arrêtez, je vous prie. Où doit

  7   commencer notre lecture ?

  8   Moi, je préférerais que les interprètes suivent le texte, et cela

  9   nous permettra de suivre beaucoup mieux. 

 10   M. OSTOJIC : [interprétation] Non, je voulais tout simplement ne pas trop

 11   perdre de temps, mais bon si vous le souhaitez, Monsieur le Président, nous

 12   allons faire en sorte qu'ils lisent cela.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que nous pouvons commencer.

 14   [Diffusion de la cassette audio]

 15   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 16   "Ljuban : Comment se passent les choses là-bas ?"

 17   L'INTERPRÈTE : Les interprètes souhaiteraient savoir quand doit commencer

 18   la lecture. Le texte que les interprètes ont sur le rétroprojecteur ne

 19   correspond pas à ce qui est dit.

 20   [Diffusion de la cassette audio]

 21   M. OSTOJIC : [interprétation] Arrêtez, je vous prie. Les interprètes ont

 22   demandé que l'on indique quand doit commencer le début de la lecture.

 23   J'essaie de trouver cela. S'ils prennent la page 2 sur ces huit pages, en

 24   bas du document, le dernier tiers du document, il y a une phrase qui

 25   commence par : "Laissez-moi vous dire que je devrais venir vendredi." Je

 26   pense que c'est là où nous en sommes maintenant.

 27   Donc s'ils peuvent reprendre à partir de ce moment-là, est-ce que

 28   nous pouvons à nouveau entendre cela. Il s'agit de la page 2, le bas du

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  1   document et cela commence : "Je vais te dire que je devrais venir ce

  2   vendredi."

  3   [Diffusion de la cassette audio]

  4   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  5   "Ljuban, je vais te dire que je devrais venir ce vendredi. Il y a une

  6   voiture, c'est la voiture de Toso. Putain, j'en ai ras le bol. Elle devrait

  7   vous ramener cette voiture de Belgrade et ensuite je la laisserai ici.

  8   Voix inconnue : Bien. Il faudrait qu'il boive un coup.

  9   Ljuban : Oui, je le ferai, je te le promets, dès que je pourrai

 10   partir.

 11   Voix inconnue : Bien.

 12   Ljuban : Bien.

 13   Voix inconnue : Très bien, cousin.

 14   Ljuban : Ciao.

 15   Voix inconnue : Bonjour.

 16   Ljuban : Bonjour, Monsieur.

 17   Voix inconnue : Bonjour.

 18   Ljuban : Allô.

 19   Voix inconnue : Allô, Mrki.

 20   Ljuban : Où est-ce que tu étais ? Cela fait trois jours que je n'ai

 21   pas de nouvelles. Tu es toujours en train de changer de numéro.

 22   Voix inconnue : Et tu me trouves chaque fois que tu veux m'appeler là

 23   où tu m'as laissé.

 24   Ljuban : Non pas vraiment, je le jure.

 25   Voix inconnue : Si, tu peux le voir.

 26   Ljuban : Je te le jure, j'ai appelé hier, ils m'ont dit qu'il fallait

 27   que j'appelle. Il a dit qu'il serait ici mais de toute façon on ne peut

 28   jamais l'attraper.

Page 24294

  1   Voix inconnue : De toute façon, c'est une chose après l'autre.

  2   Ljuban : Ecoute, moi, je ne suis pas encore parti. Appelle ces gens

  3   et fais-les venir.

  4   Ljuban : Mais qu'est-ce qui t'arrive ?

  5   Voix inconnue : Il n'y a vraiment pas de quoi s'en vanter, merde

  6   alors. 

  7   Ljuban : De toute façon, ça ne suffit pas d'être ici.

  8   Voix inconnue : Et toi, comment tu vas ?

  9   Ljuban : Ça va.

 10   Voix inconnue : Comment va le chef.

 11   Ljuban : Ça va, sinon.

 12   Voix inconnue : D'où t'appelles ?

 13   Ljuban : De chez moi.

 14   Voix inconnue : Là-bas, en bas ?

 15   Ljuban : Hm-hm.

 16   Voix inconnue : Puisque justement nous parlons, il y a autre chose.

 17   Ljuban : Oui, oui, seulement est-ce que je dois aller ailleurs --

 18   pourquoi, il y a quelque chose se passe ?

 19   Voix inconnue : Eh bien, j'aimerais que quelqu'un entende cela.

 20   Ljuban : Hm-hm.

 21   Voix inconnue : Ce n'est pas urgent, quand ça t'arrange.

 22   Ljuban : Quand est-ce que tu y seras là-bas ?

 23   Voix inconnue : Moi, je suis ici tout le temps.

 24   Ljuban : A ce numéro ? Bien, écoute, je vais utiliser l'autre ligne qui est

 25   sécurisée.

 26   Voix inconnue : Très bien.

 27   Ljuban : Alors on se reparlera, on reprend contact. Tu as des nouvelles ?

 28   Voix inconnue : Rien de spécial.

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  1   Ljuban : Rien de spécial ?

  2   Voix inconnue : Oui.

  3   Ljuban : Putain alors, qu'est-ce que j'allais dire, j'ai encore oublié.

  4   Voix inconnue : Je ne l'ai pas vu, je ne l'ai pas encore vu. Je n'en sais

  5   rien.

  6   Ljuban : Tu ne l'as pas vu, putain on verra.

  7   Voix inconnue : Mais je ne suis pas du tout allé là-bas.

  8   Ljuban : Oui, moi ce que je pense c'est qu'il faudrait que j'y aille là-

  9   haut, jeudi ou vendredi pour prendre cette IDA.

 10   Voix inconnue : Pour prendre quoi ?

 11   Ljuban : Cette Ascona qui nous appartient.

 12   Voix inconnue : Où est-ce qu'elle se trouve ?

 13   Ljuban : Mais c'est fini, c'est là-haut.

 14   Voix inconnue : Ah bon.

 15   Ljuban : Ecoute, putain de toute façon les gens.

 16   Voix inconnue : C'est bon.

 17   Ljuban : Est-ce que tu peux passer 100 000, donc j'ai dit je ferai 50 et

 18   puis Toso et son équipe ils feront 50. Ça te paraît bien ?

 19   Voix inconnue : Oui.

 20   Ljuban : Est-ce que ça te convient ?

 21   Voix inconnue : C'est bon.

 22   Ljuban : Beara dit que c'est impossible, que ce n'est pas possible. Voilà,

 23   voilà. 

 24   Voix inconnue : Donc tu dis qu'il faut la réparer et puis c'est tout.

 25   Ljuban : De toute façon, je devrais. C'est tous des espions, ils

 26   entendent et ils voient tout.

 27   Voix inconnue : Je les nique.

 28   Ljuban : On ne peut absolument rien leur dissimuler. Beara, il est

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  1   resté avec eux, lui, il est venu et il est resté avec eux pendant trois ou

  2   quatre jours.

  3   Voix inconnue : Ah bon ?

  4   Ljuban : Oui, tu vois.

  5   Voix inconnue : Qu'est-ce que tu faisais ?

  6   Ljuban : Ecoute, on a fait quelque chose. En même temps, ça n'a pas

  7   été très positif.

  8   Voix inconnue : C'était chez toi ou dans ton quartier ?

  9   Ljuban : Les deux, chez moi et dans mon quartier.

 10   Voix inconnue : Hm-hm.

 11   Ljuban : Partout --"

 12   [Fin de la diffusion de la cassette audio]

 13   M. OSTOJIC : [interprétation] Si la Chambre le souhaite, nous pouvons

 14   maintenant donner lecture des trois autres pages, mais nous pouvons tout

 15   aussi bien -- j'ai quelques questions à poser à ce sujet à M. Mrkovic.

 16   Q.  Monsieur Mrkovic, on a l'impression qu'il y a deux conversations

 17   et non pas une conversation, le 10 juillet 1995, vers 18 heures 54, et je

 18   sais qu'hier vous avez été un tant soit peu perturbé il y a eu certaine

 19   confusion du fait des jurons qui se sont glissés dans la conversation et

 20   qui étaient utilisés. Mais il y a la deuxième partie de la conversation qui

 21   commence par : "Allô," puis ensuite quelqu'un qui répond : "Allô, Mrki."

 22   Est-ce que vous pourriez nous dire qui est l'homme à la voix inconnue que

 23   l'on entend dans la deuxième partie de la cassette, ou est-ce qu'il s'agit

 24   de Zoran dont vous avez parlé auparavant ? Est-ce que vous reconnaissez

 25   cette voix ?

 26   R.  Il s'agit de quelqu'un de l'état-major, de l'administration de la

 27   sûreté mais je ne sais pas de qui il s'agit. D'après cette conversation

 28   maintenant, je ne peux pas véritablement vous dire qui est cette personne.

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  1   Q.  Oui, poursuivez.

  2   R.  Je ne peux pas véritablement vous dire qui est cette personne. C'est ma

  3   voix. Il y a toutes ces choses que j'ai dites, mais je ne suis pas sûr de

  4   qui est l'autre personne.

  5   Q.  A cette époque-là, le 10 juillet 1995, et vous avez cette conversation

  6   avec une personne, "un homme dont la voix n'a pas été identifiée," et vous

  7   dites à la page 5, en bas de la page 5 :

  8   "On ne peut rien leur cacher. Beara est arrivé et est resté avec nous

  9   pendant trois ou quatre jours."

 10   Vous souvenez-vous avoir entendu cela ?

 11   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit à mon collègue.

 12   Q.  Alors, pour que tout soit bien clair, le 10 juillet ou aux environs du

 13   10 juillet, est-ce que cette conversation vous permet de vous souvenir que

 14   Ljubisa Beara se trouvait à l'endroit ou près de l'endroit - dont je vais

 15   encore écorcher le nom - il s'agit de Rajlovac ? Est-ce que Ljubisa Beara

 16   se trouvait dans ce secteur pendant trois à quatre jours ?

 17   R.  C'est une conversation qui a été interceptée le 10 juillet. Nous avons

 18   eu cette réunion le 5 à Ilijas. Je suis sûr que j'ai ce document et nous

 19   prendrons des mesures pour que ce document vous soit envoyé. Il s'agit du

 20   document d'invitation à la réunion.

 21   Ljubisa y est resté quelque deux ou trois jours, et d'après cette

 22   conversation interceptée -- enfin moi, je n'aurais pas dit qu'il était là

 23   si cela n'avait pas été le cas. Je suis venu ici pour dire la vérité.

 24   Je ne me souviens pas de cette conversation. Il y a beaucoup de temps qui

 25   s'est écoulé depuis. Il y a eu tellement de conversations en plus, mais

 26   puisqu'il s'agit d'une conversation interceptée et que j'ai été l'un des

 27   interlocuteurs, j'aimerais m'excuser de toutes ces insultes et de tous ces

 28   jurons. C'était une période de guerre. Je dois dire que je suis un peu gêné

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  1   pour tout cela. Ce que j'ai dit, j'ai vraiment dit qu'il se trouvait là. Ce

  2   n'est pas quelque chose que nous pourrions cacher et que nous avons caché

  3   d'ailleurs non plus. Il s'y trouvait. Il s'y trouvait là du 5 au 8 ou 9.

  4   Ça, je ne peux plus vous le dire. Je pense qu'après il est parti pour la

  5   Krajina, parce qu'il se dépêchait toujours d'aller en Krajina. C'était

  6   ainsi en fait que les choses se passaient. Il rendait visite au Corps

  7   Romanija de Sarajevo, puis ensuite il repartait en Krajina.

  8   Q.  Très bien. Avant que nous ne parlions de M. Beara qui se rendait en

  9   Krajina, j'aimerais vous poser une autre question : de quoi vous parliez

 10   dans cette conversation ? Vous parlez de l'Asconas, ensuite vous dites :

 11   "Est-ce que vous pouvez passer 100 000," puis il est question de "50, et

 12   50." Est-ce que vous vous souvenez de quoi vous parliez lors de cette

 13   conversation ?

 14   R.  Je peux supposer de quoi il s'agissait. Etant donné que nous avions une

 15   certaine somme d'argent dans cette usine aéronautique, nous fournissions le

 16   Corps Romanija de Sarajevo en véhicules et en carburant, ainsi que l'état-

 17   major d'ailleurs. Si quelqu'un venait, cette personne pouvait obtenir du

 18   carburant. L'Ascona appartenait à l'administration de la sécurité. Il y a

 19   eu un problème d'huile, donc il y a eu une panne pour le moteur. Cela a été

 20   transféré à Belgrade pour que le véhicule soit réparé. Il a d'ailleurs été

 21   réparé et le garage avait garanti que la voiture pourrait rouler pendant

 22   100 000 kilomètres sans avoir aucun problème, et c'est une boutade de ma

 23   part. "Supposons que je dis, bien moi je vais en faire 50 000 et Tosa

 24   pourra faire 50 000 kilomètres." Donc on parle de cette voiture à ce

 25   moment-là qui apparemment était censée pouvoir rouler pendant 100 000

 26   kilomètres sans pour autant tomber en panne. Donc c'est de cette voiture

 27   dont nous parlons.

 28   Puis lorsqu'il est dit Beara ne me l'a pas donné, en fait il ne voulait pas

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  1   que nous dépensions beaucoup d'argent, donc il ne nous en a pas donné.

  2   Alors voilà, la conversation en fait porte sur la réparation du véhicule,

  3   puis il y a une référence à ces 100 000 kilomètres.

  4   Q.  Je vous remercie. Vous venez de dire, lors de votre réponse précédente,

  5   que vous pensez ou que vous vous souvenez, et j'aimerais que vous nous

  6   permettiez de mieux comprendre cela, qu'après le départ de M. Beara de

  7   Rajlovac, il est allé en Krajina. Et avant la pause, vous nous aviez dit en

  8   fait qu'il y avait ce théâtre de guerre simultané à Sarajevo, en Krajina,

  9   puis ensuite il a été question --enfin je pense que je vous ai posé des

 10   questions à propos de Bihac.

 11   Est-ce que vous vous souvenez si vous avez eu une conversation avec M.

 12   Beara, et est-ce que vous vous souvenez s'il vous a dit où il allait se

 13   rendre après son départ de Rajlovac le 9 juillet ou aux environs du 9

 14   juillet 1995 ? Excusez-moi, je viens de dire "Rajlovic." C'était une

 15   erreur, en fait. Je parle de "Rajlovac."

 16   R.  Je crois que c'est à la réunion à ce moment-là qu'il a dit qu'après

 17   Sarajevo il devait se rendre en Krajina. Je crois que ceci a été dit par

 18   lui pendant la réunion.

 19   Q.  Mais Monsieur, parce que c'est important, je vous demande si vous avez

 20   un souvenir précis à ce sujet ou si simplement vous émettez des conjectures

 21   en vous appuyant sur les habitudes que vous avez observées chez vous, cette

 22   habitude qu'il avait de quitter la région où vous vous trouviez pour aller,

 23   disons, en Krajina, ou à Bihac ou ailleurs ? Est-ce que, assis sur la

 24   chaise du témoin dans ce prétoire aujourd'hui, vous avez un souvenir précis

 25   de cette conversation ?

 26   R.  Je ne saurais l'affirmer avec 100 % de certitude. Non, ça c'est

 27   impossible. Je ne peux pas le dire avec 100 % de certitude. Mais il a

 28   évoqué la Krajina, il a évoqué un départ vers la Krajina. Quant à savoir où

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  1   exactement il était censé se rendre, je ne saurais vous le dire

  2   véritablement.

  3   Q.  Je vous remercie. Nous vous demandons de nous faire part de ce que vous

  4   avez en mémoire, quoi qu'il en soit.

  5   Je change de sujet pour un moment et je vous poserai un certain nombre de

  6   questions au sujet des convois humanitaires. Connaissiez-vous, dans la

  7   période 1992-1995, ou aviez-vous des renseignements relatifs aux convois

  8   humanitaires qui traversaient votre région ?

  9   R.  Au cours du procès Milosevic, j'ai dit la chose suivante : J'ai dit que

 10   l'aide humanitaire arrivait à Sarajevo en traversant régulièrement Kiseljak

 11   et Ilidza, c'est-à-dire en passant par la rue Kasindolska à Sarajevo, ça

 12   c'était un parcours très fréquent. En 1992, c'était notamment le cas, comme

 13   en 1993. A un certain moment, je crois que c'est la Brigade Ilidza qui a

 14   procédé à la fouille d'un des convois. Je ne sais plus si c'était les

 15   policiers ou les militaires qui l'ont fait, mais je sais qu'ils ont trouvé

 16   des armes et du matériel militaire dans un convoi. Par la suite, les

 17   convois ont légèrement été réduits. Il fallait un préavis et la fouille

 18   était devenue obligatoire, parce que c'était un canal qui était susceptible

 19   d'approvisionner Sarajevo en armes et en équipement militaire.

 20   Les convois se sont poursuivis. Ils ont dû affronter quelques difficultés

 21   supplémentaires en raison des fouilles qui étaient obligatoires, mais je

 22   sais que quelqu'un nous a envoyé des casques, par exemple, dans un convoi

 23   et ensuite ces casques ont été retournés par le même moyen. Je ne sais pas

 24   s'il y avait un Bataillon français à l'aéroport ou quelque chose comme ça,

 25   mais en tout cas c'était chez eux qu'ils allaient. Les convois passaient.

 26   Je ne pense pas qu'il y avait le moindre problème pour un convoi

 27   humanitaire à l'époque, pour qu'il traverse Ilidza, Rajlovac, Ilijas. Mais

 28   s'il y avait du matériel militaire dans le convoi, alors il y avait des

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  1   problèmes et le passage était refusé. Mais l'aide humanitaire, les vivres,

  2   les médicaments, et cetera, pouvaient passer sans problème. La seule chose

  3   qu'il fallait subir c'était une fouille destinée à vérifier si la cargaison

  4   correspondait à ce qu'elle était censée être.

  5   Q.  Savez-vous, Monsieur, s'il y a eu du trafic dans le cadre de

  6   l'organisation des convois humanitaires dans la période 1992-1995, dans les

  7   localités que vous avez nommées ? Plus précisément, je crois vous avoir

  8   entendu prononcer les noms de Sarajevo, Kiseljak et Ilidza, puis le nom

  9   d'une rue. Je n'ai pas bien saisi le nom de cette rue, mais je pense que

 10   c'était Kasindol [comme interprété]. Nous pouvons y revenir plus tard. Mais

 11   en tout cas, est-ce que vous êtes au courant ?

 12   R.  La rue Kasindolska était la rue qui menait d'Ilidza à Sarajevo. C'est

 13   une petite rue. Elle n'a pas beaucoup d'importance. Mais enfin, je peux

 14   vous dire ce qui pouvait être suspecté lorsqu'un convoi arrivait qui

 15   portait des insignes de la Croix-Rouge et les fanions de la Croix-Rouge, et

 16   qu'on y trouvait les armes et du matériel militaire. Bien entendu, il y a

 17   eu du trafic et des entrées de produits illégaux. Peut-être que certaines

 18   organisations non gouvernementales se sont servies de ce canal, notamment

 19   certaines personnes, mais il est vrai que c'est arrivé à quelques reprises.

 20   Je recevais des renseignements de la population et nous avions aussi les

 21   écoutes. Toutes nos conversations étaient écoutées. Nous écoutions les

 22   leurs. Mais je suis sûr qu'il y a des personnes qui ont essayé de faire

 23   entrer illégalement des armes et du matériel militaire à Sarajevo et, bien

 24   entendu, la même chose se faisait en face, en contrepartie. Ça c'est

 25   certain.

 26   Q.  Excusez-moi, Monsieur. Pour que tout soit clair, vous n'avez pas

 27   participé aux enquêtes ou travaillé de quelque façon que ce soit en rapport

 28   avec cette question, n'est-ce pas ? Ce n'était pas votre mission, à moins

Page 24302

  1   que je ne me trompe ?

  2   R.  Non, non, pas moi précisément. Je recevais simplement des

  3   renseignements à ce sujet, mais précisément et concrètement je n'ai rien

  4   fait. Je me souviens qu'un détachement de la police militaire d'Ilidza a

  5   fouillé un convoi et qu'on y a trouvé des casques et des armes.

  6   Personnellement, je n'ai pas participé à cela; cela ne relevait de ma

  7   responsabilité.

  8   Q.  D'accord. Je vous remercie. Alors, mon confrère, Me Nikolic, a signalé

  9   dans une note qu'il m'a envoyée que j'ai oublié de vous poser une question

 10   de suivi. Donc, Monsieur Mrkovic, je vais revenir à la date de juin 1995.

 11   Je sais que nous avons parlé de juillet 1995.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Maintenant, je vais demander la diffusion

 13   d'une cassette audio, pièce T001-1332. Comme dans le cas précédent, nous

 14   avons fourni, si je ne me trompe, la traduction anglaise qui nous a été

 15   remise par l'Accusation ce matin. C'est une conversation qui est censée se

 16   dérouler entre M. Beara et M. Tolimir, et par la suite avec M. Mrkovic,

 17   donc vous-même, et Tolimir le 6 juin 1995.

 18   J'en demande la diffusion. C'est une cassette très courte. Trois pages de

 19   long pour la transcription, contrairement à la précédente.

 20   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Elderkin.

 21   M. ELDERKIN : [interprétation] J'ai quelques exemplaires, si la Chambre en

 22   a besoin.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci beaucoup.

 24   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci.

 25   Oui, cela devrait être le premier document reçu par les interprètes dont le

 26   numéro en interne est, si je ne me trompe, CD-96-17-04/06-001. La Chambre

 27   pourrait demander aux interprètes à quel moment ils sont prêts pour la

 28   diffusion.

Page 24303

  1   Peut-on maintenant entendre la cassette, T001-1332.

  2   [Diffusion de la cassette audio]

  3   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  4   "UN HOMME INCONNU : Bonjour.

  5   LJUBISA BEARA : Bonjour.

  6   L'HOMME INCONNU : Oui.

  7   LJUBISA BEARA : Passez-moi le 168.

  8   L'HOMME INCONNU : Bonjour.

  9   LJUBISA BEARA : Bonjour.

 10   L'HOMME INCONNU : Oui.

 11   LJUBISA BEARA : Bonjour, bonjour.

 12   L'HOMME INCONNU : Oui.

 13   LJUBISA BEARA : Ljubo Beara.

 14   L'HOMME INCONNU : Allez-y.

 15   LJUBISA BEARA : Eh, Zelio [phon], est-ce que c'est Toso au bout du fil ?

 16   L'HOMME INCONNU : Oui.

 17   LJUBISA BEARA : Passez-le moi.

 18   L'HOMME INCONNU : Une seconde.

 19   ZDRAVKO TOLIMIR : Oui.

 20   LJUBISA BEARA : Eh, Toso."

 21   [Fin de la diffusion de la cassette audio]

 22   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète française : elle a traduit à vue le

 23   texte affiché sur l'écran sans entendre un seul mot, car la cassette était

 24   totalement inaudible.

 25   M. OSTOJIC : [interprétation] Je crois que nous devons nous arrêter.

 26   Monsieur le Président, manifestement la cassette audio ne fonctionne pas

 27   bien, mais l'Accusation a eu la gentillesse de dactylographier le texte en

 28   B/C/S et en anglais. Je ne crois pas qu'il ait quoi que ce soit d'audible

Page 24304

  1   dans la cassette audio, et les interprètes n'ont rien traduit certainement,

  2   donc cela pourrait peut-être nous aider.

  3   M. ELDERKIN : [interprétation] La cassette, en fait, fonctionne très bien,

  4   si je ne me trompe, pour peu que ce soit la même que celle que nous avons,

  5   mais il faut attendre l'arrivée du curseur à deux minutes 20 secondes, pour

  6   que le son commence à être entendu.

  7   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci.

  8   Alors je demande une avance rapide jusqu'au code de deux minutes 20

  9   secondes, même si dans le document écrit on lit deux minutes 35 secondes.

 10   Mais allons à deux minutes 20 secondes et commençons la diffusion. Merci.

 11   [Diffusion de la cassette audio]

 12   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 13   "HOMME INCONNU : Bonjour.

 14   LJUBISA BEARA : Bonjour.

 15   HOMME INCONNU : Oui.

 16   BEARA : Passez-moi le 168.

 17   HOMME INCONNU : Allô.

 18   BEARA : Allô.

 19   HOMME INCONNU : Oui.

 20   BEARA : Allô, allô.

 21   HOMME INCONNU : Oui.

 22   BEARA : Ljubo Beara.

 23   HOMME INCONNU : Allez-y.

 24   BEARA : Eh, Zeljo [phon], est-ce que c'est Toso au bout du fil ?

 25   REPONSE : Oui.

 26   ZDRAVKO TOLIMIR : Oui.

 27   LJUBISA BEARA : Merde, je suis ici chez Mrki.

 28   ZDRAVKO TOLIMIR : Hm-hm.

Page 24305

  1   BEARA : J'ai tout fait sauf pour 'Maja.'

  2   ZDRAVKO TOLIMIR : D'accord.

  3   BEARA : Oui, et j'ai entendu que Marko avait prévu une réunion pour six

  4   heures avec tout le monde dans cette région.

  5   ZDRAVKO TOLIMIR : D'accord, d'accord.

  6   Et bien, vas-y.

  7   LJUBISA BEARA : Allez-y, y allez, eh.

  8   ZDRAVKO TOLIMIR : Vas-y et reviens, et puis va chez [imperceptible] qui a

  9   été suspendu. Il faut traiter de tout cela sur place.

 10   LJUBISA BEARA : Que se passe-t-il en bas ?

 11   ZDRAVKO TOLIMIR : Quand tu arriveras nous en parlerons.

 12   LJUBISA BEARA : D'accord, d'accord. Et bien, nous irons cette nuit.

 13   ZDRAVKO TOLIMIR : D'accord.

 14   LJUBISA BEARA : D'accord. Mrki veut te parler.

 15   ZDRAVKO TOLIMIR : Salut.

 16   LJUBISA BEARA : Salut. Au revoir.

 17   ZDRAVKO TOLIMIR : Bonjour.

 18   LJUBAN MRKOVIC : Bonjour, Monsieur le général.

 19   ZDRAVKO : Allô, Mrki. Comment vas-tu ?"

 20   [Fin de la diffusion de la cassette audio]

 21   M. OSTOJIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur, vous avez eu la possibilité d'écouter une partie en tout cas

 23   de cette cassette audio. On y évoque une personne qui est censée être M.

 24   Beara, et on dit qu'il est chez Mrki. Connaissez-vous Mrki ?

 25   R.  C'est moi.

 26   Q.  Je sais que vous nous avez dit que c'était votre surnom. Je voulais

 27   simplement entendre une confirmation de votre bouche. Savez-vous où vous

 28   vous trouviez le 6 juin 1995, ou à peu près ce jour-là ? Est-ce que vous

Page 24306

  1   étiez à Rajlovac ou est-ce que vous étiez ailleurs avec M. Beara ?

  2   R.  Nous étions probablement dans mon bureau à Rajlovac, parce que Ljubo

  3   Beara en personne dit qu'il était chez moi.

  4   Q.  Nous allons diffuser le reste de la cassette pour voir si cela est dit.

  5   Mais il y a autre chose que je voudrais vous demander : A la fin, quand on

  6   a interrompu la diffusion, il était fait mention d'un certain Marko. Est-ce

  7   que vous connaissez quelqu'un ou est-ce que vous vous rappelez ce jour-là

  8   qui peut concerner cette référence à Marko ?

  9   R.  Lugonja, Marko Lugonja.

 10   Q.  Et je pense que vous l'avez identifié déjà précédemment, mais est-ce

 11   que vous auriez l'amabilité de l'identifier encore une fois de façon à ce

 12   que ma question ne soit pas directrice ? A quel corps était affilié Marko

 13   Lugonja ?

 14   R.  Il était chef de la sécurité du Corps de Romanija-Sarajevo.

 15   Q.  C'était le corps qui avait dans sa zone de responsabilité l'usine de

 16   construction aéronavale d'Orao, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, oui.

 18   M. OSTOJIC : [interprétation] Je demande la suite de la diffusion de la

 19   cassette audio à partir de l'endroit où on s'est arrêté, page 2 sur un

 20   total de 3. Je crois qu'il nous reste encore une page et demie, après quoi

 21   j'aurai quelques questions à poser au témoin. Donc diffusion de la cassette

 22   audio.

 23   [Diffusion de la cassette audio]

 24   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 25   "BEARA : Oui, j'ai entendu que Marko avait prévu une réunion à 6 heures

 26   avec tout le monde dans la région.

 27   TOLIMIR : Vas-y et puis tu reviendras, et puis tu iras chez celui qui a été

 28   suspendu. Nous devons nous occuper de cela ici.

Page 24307

  1   BEARA : Et qu'est-ce qui se passe en bas ?

  2   TOLIMIR : Quand tu reviendras, nous en parlerons.

  3   BEARA : D'accord.

  4   TOLIMIR : Nous nous occupons de cela.

  5   BEARA : Salut, au revoir.

  6   TOLIMIR : Bonjour.

  7   MRKOVIC : Allo, mon général, Monsieur.

  8   TOLIMIR : Bonjour, Mrki, comment ça va ?

  9   MRKOVIC : Je survirai.

 10   TOLIMIR : Je ne vois aucune lettre, donc donne-la à Ljubo si tu ne

 11   l'as pas envoyée par courrier jusqu'à présent.

 12   MRKOVIC : J'ai tout envoyé à Marko. Il a dit qu'il te le transmettrait

 13   personnellement. Je ne sais pas, je devrais prendre un certain temps pour

 14   parler de tout cela.

 15   TOLIMIR : Nous parlerons de tout cela. Tu vas souvent là-bas, merde.

 16   MRKOVIC : Je ne suis plus allé là-bas depuis, Dieu sait combien de temps.

 17   TOLIMIR : Mets-le par écrit. Ecris-le merde.

 18   MRKOVIC : Non, c'est quelque chose pour toi personnellement.

 19   TOLIMIR : Mets-le par écrit et envoie-le.

 20   MRKOVIC : Je l'enverrai aujourd'hui, plus tard dans la journée.

 21   TOLIMIR : Mets-le par écrit et envois-le."

 22   [Fin de la diffusion de la cassette audio]

 23   M. OSTOJIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur, est-ce que vous reconnaissez votre voix pendant les parties

 25   de cette écoute qui date du 6 juin 1995 ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Pouvez-vous nous donner une idée générale de l'objet de cette

 28   conversation parce que vous avez déjà dit dans une déposition que vous ne

Page 24308

  1   vous souveniez pas si M. Beara était avec vous ou dans le secteur de

  2   Raljovac en juin, ou en tout cas avant le mois de juillet 1995. Selon cette

  3   écoute, M. Beara était avec vous à Raljovac, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Puisque vous connaissez M. Beara, je sais que vous l'avez rencontré un

  6   certain nombre de fois, c'est ce que vous avez déjà dit dans votre

  7   déposition, vous rappelez-vous s'il avait une caractéristique particulière

  8   dans sa façon de parler ou dans son dialecte ?

  9   R.  Il avait l'accent dalmate. C'est ce qui ressort clairement de la façon

 10   dont il parle. Je dirais que c'était un officier de grande expérience, un

 11   commandant de grande expérience qui pouvait vous apprendre beaucoup de

 12   choses. C'était son grand atout, ou plutôt c'était mon problème parce que

 13   je me déplaçais beaucoup et que Ljubisa Beara n'était pas toujours dans un

 14   seul et même endroit, donc je n'ai pas pu apprendre tout ce que j'aurais pu

 15   apprendre de lui.

 16   Q.  Merci, Monsieur Mrkovic.

 17   M. OSTOJIC : [interprétation] Je pense que nous n'avons plus de questions.

 18   Merci, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord.

 20   Maître Zivanovic.

 21   Merci, Maître Ostojic.

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je n'ai pas de questions pour ce témoin,

 23   Monsieur le Président.

 24   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Nikolic.

 25   Mme NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je n'ai pas de

 26   questions pour ce témoin.

 27   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

 28   Me Lazarevic a indiqué qu'il n'avait pas de contre-interrogatoire.

Page 24309

  1   M. LAZAREVIC : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Fauveau.

  3   Mme FAUVEAU : Je n'ai pas de questions.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Krgovic.

  5   M. KRGOVIC : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Haynes.

  7   M. HAYNES : [interprétation] La boucle est bouclée, je n'ai pas de

  8   questions, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord. Monsieur Elderkin.

 10   M. ELDERKIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Nous venons d'entendre citer la date du 6 juin et nous avons entendu

 12   l'écoute qui date de ce jour-là. Je me demandais s'il serait possible de

 13   rediffuser la première demie minute de cette écoute en anglais et en B/C/S

 14   afin que l'on entende les voix.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] La dernière cassette qu'on vient

 16   d'entendre ou la précédente ?

 17   M. ELDERKIN : [interprétation] La dernière qu'on vient d'entendre.

 18   Contre-interrogatoire par M. Elderkin : 

 19   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous demanderais de réécouter

 20   cette partie de la cassette, c'est le début de la séquence audio de façon à

 21   essayer d'identifier les voix que l'on entend.

 22   [Diffusion de la cassette audio]

 23   M. ELDERKIN : [interprétation] Merci.

 24   Q.  Première question, un certain nombre de surnoms sont utilisés dans

 25   l'extrait que nous venons d'entendre. Pourriez-vous, Monsieur le Témoin,

 26   nous dire qui est Toso, si vous le savez ?

 27   R.  Toso c'est Tolimir Zdravko.

 28   Q.  Merci. Quand on entend Beara se présenter, il a dit que son nom est

Page 24310

  1   Ljubo Beara; c'est bien cela ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Quand Beara parlait sur cette cassette audio, vous avez reconnu sa

  4   voix, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  J'aurais maintenant quelques questions à vous poser au sujet du travail

  7   que devait accomplir l'organe chargé de la sécurité à l'usine d'Orao. M.

  8   Spiro Pereula a déjà parlé de cela dans sa déposition ici. Connaissez-vous

  9   cet homme ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  M. Pereula nous a dit parlant des centres industriels des environs de

 12   Sarajevo, que les organes du ministère de la Défense chargés de la sûreté

 13   s'occupaient des problèmes de sécurité en même temps que les instances

 14   chargées de la sécurité au sein de l'armée des Serbes de Republika Srpska.

 15   Pourriez-vous nous parler de la coordination entre ces deux instances ?

 16   R.  M. Spiro Pereula était responsable de l'organe chargé de la sécurité au

 17   sein du ministère de la Défense. Il est normal qu'il ait gardé un œil sur

 18   les centres industriels qui ne possédaient pas un organe précisément chargé

 19   d'assurer la sécurité. La société Pretis, par exemple, qui faisait

 20   également partie du complexe militaire ou industriel, ainsi que l'usine

 21   Famos qui n'avait pas de responsable de sécurité. Donc Spiro gardait un œil

 22   sur ses entreprises et nous collaborions assez bien entre nous. Il

 23   m'apportait son concours, je lui apportais le mien pour couvrir l'ensemble

 24   du complexe militaire ou industriel de Sarajevo.

 25   Q.  Merci beaucoup.

 26   M. ELDERKIN : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser au témoin,

 27   mais je voudrais simplement renvoyer la Chambre à la séquence que j'ai

 28   diffusée qui correspond à celle qui a été diffusée par la Défense Beara.

Page 24311

  1   Dans notre numérotation, il s'agit du document 65 ter numéro 3603, pour le

  2   compte rendu d'audience.

  3   Je n'ai plus de questions.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie,

  5   Y a-t-il des questions supplémentaires, Maître Ostojic ?

  6   M. OSTOJIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation]Monsieur Mrkovic, plus aucune question

  8   ne va vous être posée, ce qui signifie que vous êtes libre de quitter le

  9   prétoire.

 10   Au nom de la Chambre de première instance, je tiens à vous remercier d'être

 11   venu et je vous souhaite un bon voyage de retour chez vous.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à vous.

 13   [Le témoin se retire]

 14   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Ostojic, des documents à verser

 15   au dossier ?

 16   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   Nous demandons le versement au dossier de l'écoute dont nous avons demandé

 18   la diffusion qui est notre document 65 ter 2D 556, pour que tout soit clair

 19   au compte rendu, j'indique que c'est l'écoute du 6 juin 1995, nous

 20   demandons également le versement au dossier de notre document 65 ter 2D

 21   557, qui est la première écoute diffusée dans ce prétoire par nos soins,

 22   celle qui date du 10 juillet 1995 à 18 heures 54.

 23   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Des objections du côté de l'Accusation

 24   ? Non. Ces deux documents sont versés au dossier.

 25   Oui.

 26   M. OSTOJIC : [interprétation] Une fois que nous recevrons les documents

 27   dont il a été question, au cas où nous les recevons, et s'il n'y a pas

 28   objection de la part de l'Accusation, nous en demanderons le versement au

Page 24312

  1   dossier ultérieurement, au cas où le témoin parviendrait à nous transmettre

  2   les documents dont il a été question dans les réponses fournies aux

  3   questions de la Défense.

  4   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord. Je ne pense pas qu'il y ait

  5   des objections à cela, Monsieur Elderkin.

  6   M. ELDERKIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président, aucune

  7   objection.

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Des documents à verser au dossier de

  9   votre côté, Monsieur Elderkin ?

 10   M. ELDERKIN : [interprétation] Simplement une référence numérique, le

 11   document 2D dont il vient d'être question nous, nous l'avons sous la

 12   numérotation 003 [comme interprété], mais c'est tout.

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ceci met un point final à la déposition

 14   de Ljuban Mrkovic.

 15   Est-ce que le Dr Svetlana Radovanovic est ici ?

 16   M. OSTOJIC : [interprétation] Nous pouvons vérifier, Monsieur le Président.

 17   Je crois que nous avions prévu le début de sa déposition demain. J'ai parlé

 18   à mon confrère de la Défense Nikolic, plus précisément à Me Nikolic, je

 19   sais quelle est prête à interroger.

 20   Depuis cinq jours, je n'ai pas eu la possibilité de rencontrer le Dr

 21   Radovanovic que j'ai rencontrée avant. Je demande l'autorisation de la

 22   Chambre de rencontrer Mme Radovanovic même après le début de sa déposition

 23   pour lui demander de préciser un certain nombre de points. Je sais que ceci

 24   n'est pas admissible et je sais que Me Nikolic s'apprête à poser des

 25   questions directrices au témoin, donc il faudrait que je puisse rencontrer

 26   Mme Radovanovic avant le début de sa déposition.

 27   Très honnêtement, j'ai passé les cinq derniers jours hors de ce pays

 28   pour rencontrer un certain nombre de témoins, donc je n'ai absolument pas

Page 24313

  1   eu la possibilité de rencontrer le Dr Radovanovic pour obtenir des réponses

  2   sur cinq sujets qui feront l'objet de mes questions. Je ne sais pas si ceci

  3   constitue un problème grave, le témoin est un témoin expert, mais je m'en

  4   remets à votre jugement, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Me Nikolic n'aurait pas pu faire ce que

  6   vous aviez à faire à votre place ?

  7   M. OSTOJIC : [interprétation] Il était également occupé avec trois témoins,

  8   et j'ai pris la responsabilité, ayant rencontré le Dr Radovanovic à

  9   Belgrade à plusieurs reprises, donc j'ai pris sur moi de m'occuper de cela.

 10   Mais il y a eu une affaire urgente qui m'a contraint à prendre l'avion pour

 11   quitter ce pays, donc je n'ai pas voulu surcharger Me Nikolic de travail.

 12   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord. Vérifions d'abord si le

 13   témoin est dans nos murs.

 14   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent] 

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je propose que nous suspendions

 16   maintenant car le témoin n'est assurément pas dans nos murs. Il eut été

 17   difficile d'imaginer quelle aurait pu se trouver un jour à l'avance dans

 18   les locaux du Tribunal. Les responsables du Tribunal vont essayer de la

 19   localiser pour voir si elle peut arriver dans les plus brefs délais, mais

 20   en attendant nous allons suspendre pendant 30 minutes. Si Mme Radovanovic

 21   arrive, nous commencerons l'interrogatoire principal sous la conduite de Me

 22   Nikolic.

 23   Maître Nikolic, vous pouvez commencer l'interrogatoire principal

 24   aujourd'hui ?

 25   Mme NIKOLIC : [interprétation] Assurément, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Ensuite nous poursuivrons demain.

 27   Entre-temps, nous avons l'intention d'accorder à Me Ostojic l'autorisation

 28   de contacter le Dr Radovanovic. Y a-t-il des objections du côté de

Page 24314

  1   l'Accusation ?

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord, merci.

  4   Essayons de travailler ainsi de façon à ne pas perdre davantage de temps.

  5   Combien de temps devrait durer l'interrogatoire principal ? Je sais que

  6   vous avez indiqué deux heures environ si je ne m'abuse.

  7   Mme NIKOLIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je crois que

  8   cela suffira, comme prévu.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord. Nous allons faire une pause

 10   de 30 minutes et Mme la Greffière nous fera savoir s'il est possible de

 11   procéder de la façon que je viens d'indiquer. Dans le cas contraire, nous

 12   verrons ce qu'il conviendra de faire.

 13   --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.

 14   --- L'audience est reprise à 12 heures 37.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je

 16   souhaiterais dire que j'aperçois du côté de l'Accusation, M. Nicholls n'est

 17   pas là, M. Mitchell n'est pas là et M. Elderkin n'est pas là non plus, mais

 18   je remarque la présence de Mme Lada Soljan. Du côté de la Défense, je note

 19   la présence de Me Tapuskovic.

 20   Le témoin expert est là, donc ce sera Me Nikolic qui procèdera à son

 21   interrogatoire principal. Alors il y a toute une requête pendante que l'on

 22   appelle la deuxième requête de la Défense demandant la modification de la

 23   liste 65 ter -- ou plutôt, des pièces proposées de la liste.

 24   Quelle est la thèse de l'Accusation ? Qu'est-ce que vous proposez ?

 25   Mme SOLJAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Madame Soljan.

 27   Mme SOLJAN : [interprétation] L'Accusation n'a aucune objection quant à

 28   cette modification.

Page 24315

  1   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Merci. Y a-t-il d'autres

  2   membres de la Défense qui souhaiteraient soulever une objection ? Aucune

  3   objection, bien, la requête est donc acceptée, c'est-à-dire on fait droit à

  4   cette requête.

  5   Oui, Maître Ostojic.

  6   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je suis

  7   vraiment désolé, mais au compte rendu d'audience, à la page 55, ligne 21 --

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Un instant.

  9   M. OSTOJIC : [interprétation] En fait, c'est à la ligne 22 de la page 55.

 10   M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]

 11   M. OSTOJIC : [interprétation] Pendant qu'on écoutait la conversation entre

 12   M. Beara et M. Tolimir, dans cette ligne-là, on fait une référence à

 13   "Oustacha," supposément dit par M. Beara. Ce n'est pas au compte rendu

 14   d'audience ou sur le transcript, la transcription écrite en fait de la

 15   bande audio, mais ce n'est pas du tout ce qui a été dit. Je crois que tout

 16   le monde sera d'accord pour dire que ce mot ne figure pas sur la

 17   transcription audio.

 18   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci beaucoup. Oui, Monsieur

 19   McCloskey.

 20   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je ne me souviens pas de ce mot. Je ne sais

 21   pas si ce mot a été annoté. Vous devriez savoir que cette transcription est

 22   arrivée avec la bande audio, et nous allons certainement réécouter la bande

 23   et nous verrons. Mais les transcriptions ne sont pas toujours parfaites,

 24   celles qui arrivent déjà avec -- des fois, il manque certains mots.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bien. Donc nous allons voir si nous

 26   allons retrouver dans le compte rendu d'audience une personne dénommée

 27   "Oustacha," dont le surnom serait "Oustacha." Ce serait Toso, peut-être.

 28   Voilà. Est-ce que vous avez eu l'occasion de vous entretenir avec Mme

Page 24316

  1   Radovanovic ?

  2   M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je n'ai pas tous

  3   les documents que je voulais lui montrer. En fait, si je pourrais avoir la

  4   permission de la rencontrer ce soir, il y a deux tableaux que je voudrais

  5   lui présenter. J'ai également invité les représentants du bureau du

  6   Procureur à être présents, simplement pour être là, car il sait de quoi je

  7   vais lui parler. J'ai passé en revue quelques passages du rapport avec elle

  8   pendant la pause.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je crois que l'Accusation vous a

 10   suffisamment vu aujourd'hui. Je ne sais pas s'ils souhaiteront passer

 11   également la soirée avec vous. Alors, faisons entrer Mme Radovanovic.

 12   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame Radovanovic.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 15   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous souhaite la bienvenue au

 16   Tribunal pénal international. Vous allez sous peu déposer en tant que

 17   témoin expert devant cette Chambre de première instance. Vous avez été

 18   convoquée en tant que témoin expert par trois équipes de la Défense;

 19   notamment, l'équipe de la Défense de M. Beara, l'équipe de la Défense de M.

 20   Nikolic et l'équipe de la Défense de M. Nikolic et l'équipe de la Défense

 21   de M. Pandurevic.

 22   Avant que vous ne débutiez votre témoignage, le Règlement exige de vous que

 23   vous prononciez une déclaration solennelle. Le texte de cette déclaration

 24   vous sera donné par Mme l'Huissière. Je vous demanderais de le lire. Ce

 25   sera votre engagement envers nous.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 27   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 28   LE TÉMOIN: SVETLANA RADOVANOVIC [Assermentée]

Page 24317

  1   [Le témoin répond par l'interprète]

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Merci, Madame. Veuillez vous

  3   asseoir, s'il vous plaît.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Me Nikolic vous posera des questions

  6   dans le cadre de l'interrogatoire principal. 

  7   Allez, Maître Nikolic, c'est à vous. Nous vous écoutons.

  8   Mme NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

  9   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges.

 10   Interrogatoire principal par Mme Nikolic : 

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Radovanovic.

 12   R.  Bonjour.

 13   Q.  Pour le compte rendu d'audience, même si nous nous sommes déjà

 14   rencontrées, je vais me présenter. Je m'appelle Jelena Nikolic, et je

 15   représente les intérêts de M. Dragan Nikolic, accusé par ce Tribunal.

 16   Je voudrais vous demander, étant donné que nous parlons la même langue, de

 17   ménager des pauses entre les questions et les réponses, donc nous devons

 18   faire attention au débit, ceci pourra permettre aux interprètes de suivre

 19   et de bien interpréter.

 20   Je vois que vous avez des documents sous les yeux, avant de passer à la

 21   partie officielle de votre déposition, je vous demanderais d'expliquer aux

 22   Juges de la Chambre et aux parties de quels documents il s'agit.

 23   R.  J'ai devant moi les rapports, tous les rapports réalisés par les

 24   experts de l'Accusation relatifs à Srebrenica. J'ai mon propre rapport

 25   également ici, et j'ai quelques documents que j'ai vus ces derniers jours à

 26   La Haye. C'est des documents que l'Accusation a également communiqués il

 27   n'y a pas longtemps, il y a quelques jours. J'ai également un petit coffret

 28   avec des documents ou une petite valise avec des documents qui se trouvent

Page 24318

  1   dans la salle des témoins.

  2   Q.  Je vous remercie. Et ce sont des documents, j'imagine, que l'Accusation

  3   vous a communiqués le 25 juillet, vendredi dernier ?

  4   R.  Oui, mais il y a également des documents que l'Accusation a communiqués

  5   déjà au mois de mai et que je n'ai vus que récemment à La Haye.

  6   Q.  Très bien, merci beaucoup. Veuillez, je vous prie, nous décliner votre

  7   identité pour le compte rendu d'audience.

  8   R.  Je m'appelle Svetlana Radovanovic.

  9   Q.  Auriez-vous la gentillesse de nous donner la date et le lieu de votre

 10   naissance ?

 11   R.  Je suis née à Sombor, en Serbie, le 14 novembre 1949.

 12   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous parler de votre parcours

 13   professionnel ou de votre parcours universitaire.

 14   R.  J'ai obtenu un diplôme universitaire à l'Université de Belgrade à la

 15   faculté de philosophie. Par la suite, j'ai fait mes études de maîtrise à

 16   l'Université de Belgrade. Par la suite, j'ai obtenu un doctorat en 1995. Le

 17   sujet de ma thèse en maîtrise était le mouvement naturel de la population,

 18   alors que le sujet de ma dissertation concernant mon doctorat s'intitulait

 19   "Le mouvement de la population au Kosovo-Metohija, une étude ethnographique

 20   et ethnogéographique". 

 21   Q.  Très bien. Merci. Pourriez-vous nous dire quelle est votre profession

 22   actuelle ?

 23   R.  Actuellement, je suis professeur à la faculté de géographie de

 24   l'Université de Belgrade.

 25   Q.  Depuis quand occupez-vous ce poste ?

 26   R.  Depuis 1999.

 27   Q.  Dans le cadre de votre profession ou dans le cadre de votre poste,

 28   qu'est-ce que vous enseignez à l'Université de Belgrade à la faculté de

Page 24319

  1   géographie ?

  2   R.  La faculté de géographie à quatre chaires. L'une d'elle est la

  3   démographie, et j'enseigne à la chaire de démographie. J'enseigne

  4   l'introduction à la démographie, la statistique de la population, et

  5   j'enseigne également l'ethno-démographie.

  6   Q.  Auriez-vous la gentillesse de nous parler de votre expérience dans le

  7   domaine de la démographie.

  8   R.  Toute ma vie professionnelle est consacrée au mouvement de la

  9   population et la démographie. J'ai commencé à travailler en 1974 à

 10   l'Institut de la République pour les questions de statistiques en Serbie,

 11   c'était mon premier emploi, et j'y suis restée jusqu'en 1992. J'ai fait

 12   toute ma carrière dans les statistiques, la section relative à la

 13   statistique couvre tous les départements qui ont trait au mouvement de la

 14   population, donc le mouvement de la population, la statistique rythmique et

 15   la statistique de la migration. Pendant que je travaillais à l'Institut

 16   républicain de la statistique, j'ai pris part directement à la création de

 17   toutes les méthodologies de ces services, particulièrement à celle de la

 18   méthodologie concernant le recensement. J'ai pris part indirectement au

 19   recensement de la population en 1971, c'est-à-dire j'ai pris part seulement

 20   à la rédaction, et non pas à la création méthodologique du recensement en

 21   question.

 22   S'agissant du recensement de la population de 1981 et 1991, j'ai été l'une

 23   des membres d'un groupe inter-républicain chargé des la création de la

 24   méthodologie concernant le recensement de la population et de son

 25   organisation, s'agissant de la création de tableaux, l'établissement de

 26   l'analyse et des résultats finaux du recensement de la population. D'après

 27   mes fonctions, j'ai directement dirigé en 1991 le recensement de la

 28   population en Serbie.

Page 24320

  1   Depuis 1991 jusqu'en 1999, donc entre 1991 et 1999, j'ai travaillé à

  2   l'Institut des sciences humaines au centre de la recherche démographique.

  3   J'ai pris part à un très grand nombre de projets scientifiques réalisés par

  4   l'institut, et j'ai personnellement mené deux projets scientifiques. L'un

  5   se rapportait à la population de Yougoslavie, selon le recensement de 1991,

  6   et l'autre se rapportait à la population agricole en Yougoslavie.

  7   En 1999, j'ai obtenu un poste à la faculté de géographie de l'Université de

  8   Belgrade, et pendant un certain temps j'étais le chef de la chaire chargée

  9   de la géographie, et j'étais le doyen adjoint. J'ai ensuite continué mon

 10   travail à la faculté géographique à l'Université de Belgrade, et j'ai

 11   participé à un certain nombre de projets telle la mise en œuvre ou la

 12   création en fait de la faculté de la géographie et d'autres institutions,

 13   telle l'Académie de science.

 14   J'ai pris part à un très grand nombre de projets s'agissant du Centre

 15   européen pour la paix et le développement des Nations Unies.

 16   Et jusqu'à maintenant, j'ai publié environ 60 ouvrages scientifiques qui

 17   ont un caractère national et international.

 18   Q.  Y a-t-il d'autres projets auxquels vous avez pris part ?

 19   R.  Le projet du Centre européen pour la paix et le développement, le

 20   projet de l'Académie des arts et des sciences également.

 21   Q.  Est-ce que vous avez jamais témoigné en tant que témoin expert en

 22   démographie devant ce Tribunal ?

 23   R.  Oui, j'ai déjà témoigné à trois reprises; j'ai témoigné dans l'affaire

 24   Galic, j'ai parlé de Sarajevo, ensuite j'ai témoigné dans l'affaire Simic,

 25   Samac et Odzak, et j'ai également témoigné dans l'affaire qui avait trait à

 26   Srebrenica, et je ne me souviens plus du nom du client, mais je me souviens

 27   de l'avocat toutefois, mais enfin, je ne me souviens pas du nom.

 28   Q.  Est-ce que c'est Blagojevic ?

Page 24321

  1   R.  Oui, voilà, Blagojevic et consorts.

  2   Q.  Merci. Donc s'agissant de tous ces cas que vous avez mentionnés, vous

  3   avez eu à faire des rapports d'expert ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Je vous demanderais maintenant de nous parler de la démographie. De

  6   quelle type de science s'agit-il ?

  7   R.  C'est une question complexe; je vais toutefois essayer de la

  8   simplifier.

  9   La démographie est une science qui porte sur l'analyse de la population,

 10   mais ce n'est qu'une des sciences dans un système de science portant sur la

 11   population, et elle a ses aspects particuliers s'agissant de l'analyse de

 12   certains phénomènes de la population. La démographie analyse le

 13   développement démographique de la population, des liens qui existent entre

 14   les personnes, les conséquences et les causes qui sont responsables de

 15   l'évolution démographique ou du développement démographique. Le

 16   "développement démographique" comprend l'analyse de deux composantes

 17   principales, c'est-à-dire on parle des changements quantitatifs et

 18   qualitatifs de la structure de la population. On peut donc dire que la

 19   démographie analyse le mouvement naturel de la population, ce qui comprend

 20   en soi l'analyse de la naissance, de la capacité de natalité, du taux de

 21   natalité. L'autre composante analyse le mouvement dans l'espace de la

 22   population; j'entends par là la migration, donc tout ce comprend les

 23   mouvements migratoires, tels les mouvements que l'on appelle immigration et

 24   émigration, ainsi de suite.

 25   La démographie est très strictement liée à d'autres sciences

 26   connexes, et elle se sert des mêmes méthodes que ces sciences connexes, des

 27   méthodes d'analyse tout comme elle donne à la disposition des sciences

 28   connexes ses propres méthodes. Dans ce sens, la démographie est une science

Page 24322

  1   multidisciplinaire.

  2   Dans le cadre de la démographie, on peut voir un très grand nombre de

  3   disciplines qui s'occupent de certains phénomènes particuliers, tels par

  4   exemple, la démographie économique, la démographie ethnographique, ensuite

  5   la démographie médicale, la démographie historique, ainsi de suite.

  6   Certains auteurs disent que la démographie est la sœur squelette de

  7   la statistique. Très précisément, la discipline la plus ancienne étant la

  8   discipline analysant les statistiques de la population. Ce lien très étroit

  9   qui existe entre la statistique de la population avec la démographie

 10   explique ce lien. En fait, c'est la raison pour laquelle elles sont

 11   interliées. Il est assez fréquent que le domaine de la démographie et les

 12   sciences sont limitées par le développement de la statistique de la

 13   population; lorsque je parle du développement, je pense à la possibilité, à

 14   savoir à quel point la statistique d'une population est prête à donner des

 15   données statistiques fiables, et ce qui est très bien c'est d'établir des

 16   séries temporelles à long terme grâce auxquelles on peut effectuer des

 17   calculs démographiques, des conclusions démographiques, et cetera, et

 18   cetera. En examinant tout ceci de cette façon-là, si vous avez suffisamment

 19   de statistiques de population, la démographie peut analyser le

 20   développement de la population dans le passé, de donner son évaluation

 21   scientifique quant au développement de la population avec ses problèmes

 22   actuels, on peut également effectuer un pronostic, évaluer et anticiper le

 23   développement de la population future.

 24   En bref, c'est ce que je pouvais vous dire là-dessus.

 25   Q.  Auriez-vous l'amabilité de nous expliquer ce qui doit être fait pour

 26   effectuer une analyse démographique fiable d'un phénomène donné ?

 27   R.  Pour pouvoir procéder à une analyse démographique fiable, vous devez

 28   bien entendu avoir certaines connaissances en démographie, en statistiques,

Page 24323

  1   et vous devez, bien entendu, connaître également les méthodes qui sont

  2   utilisées en démographie, en statistiques. Si vous êtes informé d'autres

  3   méthodes scientifiques, cela peut également être utile. Mais l'élément-clé

  4   qui est essentiel pour effectuer une analyse démographique fiable est de

  5   pouvoir disposer de données statistiques fiables. Seulement des sources

  6   statistiques fiables peuvent donner la possibilité de parvenir à des

  7   objectifs et des conclusions scientifiques à propos de tout phénomène

  8   démographique que vous étudierez pendant une période donnée.

  9   Q.  Alors, en l'espèce, vous avez établi un rapport d'expert qui est

 10   intitulé "Les personnes portées disparues ainsi que les personnes défuntes

 11   eu égard à Srebrenica." Il s'agit d'un rapport de l'année 2005 et la cote

 12   de ce rapport est la cote 3D398.

 13   Est-ce que vous pourriez nous dire précisément quelle tâche vous a

 14   été confiée ? Quelle était la tâche qui vous attendait lorsque vous avez

 15   commencé ce rapport ?

 16   R.  Il s'agissait d'étudier tous les rapports établis par les experts de

 17   l'Accusation, rapports qui avaient trait à Srebrenica. Il fallait que

 18   j'étudie et que j'analyse toutes les sources qui ont été utilisées par les

 19   experts de l'Accusation lorsqu'ils ont établi et rédigé le rapport. Je

 20   devais également étudier et analyser toutes les données disponibles, toutes

 21   les sources disponibles des données auxquelles je pouvais avoir accès, et

 22   je devais également rédiger un rapport dans lequel je devais donner des

 23   précisions à propos de mon travail.

 24   Q.  Dans le cadre de la préparation de ce rapport, et vous venez de nous le

 25   dire d'ailleurs, vous avez donc étudié tous les rapports d'experts préparés

 26   par les experts de l'Accusation ?

 27   R.  Tous les rapports que je connaissais et auxquels je pouvais avoir

 28   accès, oui.

Page 24324

  1   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire quel est votre avis du rapport qui a

  2   été rédigé en 2005 par M. Brunborg ?

  3   R.  Tous les rapports qui ont été rédigés par M. Brunborg ainsi que ses

  4   associés se fondent sur des résultats qui ont été obtenus grâce à des

  5   sources dont la méthodologie n'est pas toujours conforme, et il faut savoir

  6   que ce sont des rapports truffés d'erreurs. Alors, l'erreur étant comprise

  7   entre 30 à 100 %, en fonction des sources qui ont été utilisées.

  8   De surcroît, les experts de l'Accusation ont modifié les normes et les

  9   critères ainsi que les méthodes statistiques et démographiques, de telle

 10   façon à les adapter à leurs propres besoins pour obtenir leurs propres

 11   résultats. C'est la raison pour laquelle les rapports présentés par les

 12   experts de l'Accusation ne peuvent pas être considérés comme des rapports

 13   fournissant des preuves scientifiques, parce qu'ils ne respectent tout

 14   simplement pas les principes, ce sont des rapports qui ne respectent même

 15   pas les critères de base qui sont nécessaires pour toute recherche

 16   scientifique. Personnellement, je pense que les rapports présentés par les

 17   experts de l'Accusation suscitent énormément de confusion lorsque l'on

 18   essaie de donner une perception objective des événements, et en tant que

 19   tel, ils ne représentent aucune contribution à une analyse objective et ils

 20   n'essaient pas justement de comprendre le cœur du phénomène et des

 21   événements qu'ils étudient.

 22   Q.  Vous nous avez donné votre opinion du rapport présenté par M. Brunborg

 23   en 2005; c'est cela ?

 24   R.  Oui, je parle de ce rapport, mais je parle également du rapport qui a

 25   été rédigé en 2000, par le Dr Brunborg. Il y a également un autre rapport

 26   qui a été rédigé par le Dr Brunborg en 2003, et je fais également référence

 27   à deux articles qui ont été publiés par le Dr Brunborg. Je les ai reçus

 28   ici. Il s'agit de rapports en quelque sorte qui ont été publiés en 2001,

Page 24325

  1   l'un a été publié dans le bulletin statistique des Nations Unies, et le

  2   deuxième article, qui est intitulé : "Le génocide en chiffres", je ne vois

  3   pas où il a été publié mais laissez-moi --

  4   Q.  Non, je vais d'abord commencer par vous poser des questions à propos

  5   des conclusions dont vous parlez.

  6   Est-ce que vous pourriez nous dire, par exemple, quelles sont les

  7   sources des données utilisées, quelles sources ont été utilisées, combien

  8   de sources ont été utilisées par l'Accusation, par M. Brunborg lorsqu'il a

  9   rédigé ce rapport et lorsqu'il a présenté ces conclusions ?

 10   R.  En règle générale, lorsque l'on parle des sources de données qui

 11   pourraient nous permettre de mieux comprendre les événements à Srebrenica,

 12   je n'en connais aucune, et le Dr Brunborg et ses associés font état de six

 13   sources dans leur dernier rapport. Ces sources sont notamment les dossiers

 14   des personnes portées disparues, dossiers conservés par le comité

 15   international de la Croix-Rouge, vous avez également les dossiers des

 16   Médecins pour les droits de l'homme, vous avez également le recensement de

 17   l'année 1991, les listes électorales pour les années 1997-1998 et 2008.

 18   Cette dernière source a été utilisée pour leur dernier rapport, et dans ce

 19   dernier rapport il y a également la base des données portant sur les

 20   personnes déplacées et il y a également une autre source, les données

 21   relatives aux corps exhumés et identifiés.

 22   Q.  J'aimerais que vous indiquiez à la Chambre de première instance combien

 23   de sources vous avez utilisées pour préparer votre rapport d'expert qui a

 24   été déposé par les équipes de la Défense auprès de la Chambre de première

 25   instance ?

 26   R.  J'ai utilisé tous les rapports qui ont été utilisés, ou plutôt toutes

 27   les sources qui ont été utilisées par les experts de l'Accusation, et ainsi

 28   que toutes les sources que j'ai pu moi-même trouver dans l'unité

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  1   démographique de l'Accusation. J'ai également pris en considération tous

  2   les documents qui ont été communiqués par l'Accusation à la Défense et que

  3   la Défense m'a transmis, et j'ai également utilisé les sources que j'avais

  4   obtenues moi-même et qui d'après moi avaient une pertinence par rapport à

  5   Srebrenica, je pense notamment au bulletin relatif aux personnes déplacées

  6   qui est un bulletin publié par un ministère de la Bosnie-Herzégovine, et je

  7   pense également à de nombreux rapports qui n'ont pas été rédigés par des

  8   démographes, mais qui pouvaient contenir certaines données utiles pour

  9   s'orienter parmi toutes ces données, je pense par exemple au rapport de M.

 10   Marin.

 11   Je n'en suis pas sûre, mais je pense avoir utilisé 22 rapports. Je ne suis

 12   pas sûre de ce chiffre que j'avance maintenant, mais je pourrais le

 13   vérifier. Non pas 22 rapports mais 22 sources. Je m'excuse.

 14   Q.  Merci. J'aimerais maintenant vous poser une autre question : lorsque

 15   vous avez procédé à votre analyse, est-ce que vous avez remarqué certaines

 16   déficiences dans la façon dont l'Accusation a utilisé les sources, et ce,

 17   afin d'obtenir les résultats qu'ils ont présenté, résultats qui portent sur

 18   les listes des personnes portées disparues à Srebrenica en 1995 ou à propos

 19   de la liste des personnes portées disparues, liste dressée en 2005 ?

 20   R.  Je pensais l'avoir déjà dit, mais je n'ai peut-être pas été

 21   suffisamment claire. Toutes ces sources comportent des lacunes importantes

 22   parce qu'il y a en quelque sorte des décalages méthodologiques et il y a un

 23   grand nombre d'erreurs. Comme je vous l'ai déjà dit, la gamme d'erreurs se

 24   situe entre 30 et 100 %. Mais les experts de l'Accusation font également

 25   état de ces lacunes importantes dans leurs rapports, et je suis entièrement

 26   d'accord avec eux.

 27   Par exemple, dans l'un des articles publiés par le Dr Brunborg, le Dr

 28   Brunborg met en exergue les problèmes principaux relatifs aux sources qu'il

Page 24327

  1   a utilisées, et il parle du problème de la portée et de la couverture. Il y

  2   a également la question de l'exactitude des données. Il y a un autre

  3   problème essentiel dont il est question, il s'agit du manque d'information.

  4   Il s'agit d'autant de facteurs qui indiquent que la source des données est

  5   de qualité médiocre ou limitée.

  6   Q.  Je vous remercie. J'aimerais que vous nous indiquiez, puisque vous avez

  7   mentionné toutes les sources que vous avez utilisées ainsi que

  8   l'Accusation, j'aimerais que vous nous parliez de la liste de la Croix-

  9   Rouge qui a été utilisée comme l'une des sources pour les données, il

 10   s'agit de la liste du comité international de la Croix-Rouge, leur liste

 11   dressée pour les personnes portées disparues.

 12   R.  Si vous m'y autorisez, avant que je ne vous parle de ces deux sources

 13   fondamentales, j'aimerais indiquer que je ne connais pas exactement le

 14   nombre total des sources, et à un moment donné, j'ai essayé d'apprendre au

 15   moins quelles étaient les sources dont disposait l'Accusation. Mais j'ai

 16   toujours dû indiquer à l'Accusation de façon très précise quelles étaient

 17   les sources que je recherchais.

 18   Je le dis parce que je souhaite peut-être en quelque sorte nuancer ce que

 19   j'ai avancé et il se peut qu'il y ait d'autres sources dont dispose

 20   l'Accusation qui se trouvent ailleurs et qu'il s'agit de sources que je

 21   n'ai pas été en mesure de consulter. Donc ce que je veux dire c'est que

 22   j'ai été à même de voir la liste de toutes les sources, mais on ne m'a pas

 23   donné le jeu total des sources. Je n'ai pas pu dire à partir d'une liste

 24   qui aurait été complète, "Je souhaite avoir telle, et telle, et telle

 25   source." J'ai toujours dû leur donner le nom exact de la source que je

 26   recherchais. Pour ce faire, j'ai dû étudier leurs rapports, j'ai dû

 27   rechercher les références. J'ai du écouter leurs moyens de preuve, et ce

 28   faisant j'ai été à même de voir qu'il y avait d'autres sources de données

Page 24328

  1   disponibles.

  2   Vous m'avez demandé ce que je pensais de la liste du comité international

  3   de la Croix-Rouge qui est utilisée comme source. Il y a également la liste

  4   des Médecins pour les droits de l'homme qui est utilisée comme source. Le

  5   Dr Brunborg indique qu'il s'agit des meilleures sources qu'il a utilisées,

  6   et je souhaiterais avancer qu'il s'agit des seules sources qui existent. Je

  7   n'irais pas jusqu'à dire qu'il s'agit des meilleures sources, parce que

  8   vous ne pouvez pas véritablement les comparer à d'autres sources pour

  9   lesquelles la même méthodologie serait utilisée et pour lesquelles les

 10   données seraient collectées de la même façon. Il est de notoriété publique,

 11   la Croix-Rouge internationale est une organisation humanitaire, ce qui fait

 12   que cet organisme compile des données relatives aux personnes portées

 13   disparues pour que - et c'est l'objectif principal - pour que les membres

 14   des familles des personnes portées disparues puissent retrouver la personne

 15   en question.

 16   La méthodologie qui est utilisée par le comité international de la Croix-

 17   Rouge pour ce qui est qui est de leur collecte de données est

 18   diamétralement opposée à la façon dont les données statistiques sont

 19   collectées et compilées.

 20   Q.  Quelle est-elle cette méthodologie ?

 21   R.  J'y arrive, mais la Croix-Rouge n'est pas une organisation statistique

 22   et elle n'est pas tenue d'utiliser cette méthodologie.

 23   La méthodologie qu'a utilisé le comité international de la Croix-

 24   Rouge consiste à collecter des données sur la base de questionnaires où

 25   sont formulées un certain nombre de questions, et ces questionnaires sont

 26   remplis par des personnes qui viennent indiquer que tel membre de leur

 27   famille ou telle connaissance est porté disparu. Ils le remplissent eux-

 28   mêmes ou ils le remplissent par l'entremise de quelqu'un d'autre. Le comité

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  1   international de la Croix-Rouge insère certaines de ces données dans leur

  2   système informatique et à chaque personne correspond une désignation

  3   numérique, ce qui a probablement été fait afin de pouvoir gérer les données

  4   plus facilement parce que le CICR reçoit les données deux ou trois fois

  5   parfois. Mais comme je l'ai déjà dit, il n'incombe pas au CICR de compiler

  6   les données dans des tableaux tel que le font les experts en statistiques.

  7   Le CICR publie ces données et pendant un certain moment vous pouviez

  8   avoir accès à ces données sur Internet.

  9   Contrairement au CICR -- ou plutôt je dirais que le CICR a travaillé

 10   en Bosnie-Herzégovine à partir de l'année 1991 jusqu'à la fin de la guerre,

 11   et le CICR est toujours actif dans ces zones et il s'adonne à d'autres

 12   activités. Comme je le disais, contrairement au CICR, l'organisation des

 13   Médecins pour les droits de l'homme ne couvrait pas tout le territoire de

 14   la Bosnie-Herzégovine pour ces opérations, mais se concentrait

 15   exclusivement sur l'est de la Bosnie. Quand je dis la "Bosnie orientale",

 16   je fais référence seulement à certaines régions de la Bosnie orientale. Ils

 17   disposent, par exemple, de quelques données pour Sarajevo. Mais comme nous

 18   le savons pertinemment, Sarajevo n'est pas en Bosnie orientale.

 19   Ce questionnaire qui a été utilisé par cette organisation, les

 20   Médecins pour les droits de l'homme, qui leur a permis de collecter des

 21   données, contient plus d'une vingtaine de pages. Il est extrêmement

 22   compliqué et complexe. Y sont inclus par exemple certains renseignements

 23   d'ordre médical, il y a également d'autres questions très pointues qui en

 24   font partie. Je ne sais pas quelle est leur procédure, je ne sais pas si ce

 25   sont les personnes qui viennent se présenter dans leur bureau pour indiquer

 26   que telle personne ou que tel chercheur a été porté disparu sur le terrain,

 27   ou est-ce qu'ils le font lorsqu'ils entendent parler de cas de personnes

 28   portées disparues. Toujours est-il que cette organisation a collecté des

Page 24330

  1   informations à propos de personnes décédées, et ce, afin de pouvoir

  2   compiler une base de données avant le décès de ces personnes.

  3   D'après ce que je sais, c'est la procédure qu'ils ont utilisée. Dans

  4   le rapport du Dr Brunborg, et cela a été établi en 1999, je ne sais pas si

  5   les données compilées par cette organisation, les Médecins pour les droits

  6   de l'homme, ont jamais été publiées quelque part.

  7   Q.  Un moment, Professeur. Vous nous parlez de la base de données des

  8   Médecins pour les droits de l'homme, mais est-ce que vous pourriez nous

  9   dire, si tel est le cas, de quel secteur vous parlez ? Est-ce qu'il s'agit

 10   de la zone de Srebrenica ou d'une autre zone ?

 11   R.  Je vous parlais de la zone pour laquelle ils disposent de

 12   données. Nous avons des données pour certaines régions de la Bosnie

 13   orientale, mais il s'agit essentiellement de Srebrenica ou plutôt de zone

 14   de Tuzla et de ses environs. Il y a quelques données pour Sarajevo, mais je

 15   pense que pour l'essentiel ces données ont été collectées en 1996. Je ne

 16   peux pas vous le dire au pied levé comme ça, mais nous pourrons le vérifier

 17   dans le rapport. Ils ont commencé à compiler des informations à partir de

 18   l'année 1991, mais les données relatives aux années qui ont suivi, 1992,

 19   1993, présentent une grande fluctuation et je dirais que le plus grand

 20   nombre de données a été obtenu en 1996.

 21   Ce que je vous dis se fonde sur le rapport du Dr Brunborg et également sur

 22   ce que j'ai pu consulter dans l'unité démographique du bureau du Procureur.

 23   Q.  Je vous remercie. Vous nous avez parlé de la qualité des sources, et

 24   vous parliez à la fois du CICR et de cet organisme, les Médecins pour les

 25   droits de l'homme. Mais pour mettre un terme à l'examen de ce thème,

 26   j'aimerais vous poser juste cette question : quelle est la qualité de ces

 27   sources d'après le Dr Brunborg ?

 28   R.  D'après le Dr Brunborg, la qualité de ces sources n'est pas bonne, mais

Page 24331

  1   il s'agit de bonnes sources. C'est peut-être une caricature, mais si vous

  2   souhaitez, je peux trouver la citation dans son rapport, parce que le Dr

  3   Brunborg avance que l'on peut à la fois voir les avantages et les

  4   inconvénients, les points forts et les points faibles de ces sources. Moi,

  5   je n'ai pas véritablement remarqué qu'il y avait des avantages, mais parmi

  6   la liste des inconvénients, il dresse une liste, par exemple, le fait qu'il

  7   y a de nombreux champs vides, le fait qu'il y a des données qui n'existent

  8   pas, qu'il y a un grand nombre d'erreurs dans les données lorsqu'il s'agit

  9   par exemple des prénoms, noms de famille, dates de naissance, et cetera.

 10   Mais cela pourrait être, je suppose, considéré comme un avantage, bien que

 11   cela ne corresponde pas à ce que je pense. Il avance que si vous mettez

 12   ensemble les deux sources, vous obtenez une source où l'une des sources

 13   corrobore l'autre. Je dois dire que cela ne me semble pas particulièrement

 14   d'une logique implacable, notamment lorsque l'on prend en considération le

 15   nombre d'erreurs, parce que je ne vois pas comment les deux rapports

 16   peuvent se corroborer l'une l'autre.

 17   J'aimerais attirer votre attention sur ce fait : au niveau statistique et

 18   démographique, cela a son importance. Parce que du point de vue technique,

 19   ces deux sources rassemblent des données qui concernent différentes unités

 20   d'observation. Vous avez la Croix-Rouge qui collecte des informations

 21   relatives à des personnes portées disparues et c'est la seule attribution

 22   pour ces personnes. Ces personnes sont juste énumérées comme des personnes

 23   portées disparues alors que les Médecins pour les droits de l'homme

 24   collectent également des informations relatives aux défunts afin de pouvoir

 25   mettre au point une base de données précédant la mort de ces personnes.

 26   Q.  A propos de ces listes du CICR qui est considérée dans votre rapport

 27   comme l'une des sources, avez-vous eu l'occasion de pouvoir étudier la

 28   matière brute en quelque sorte, les éléments d'information bruts, ces

Page 24332

  1   questionnaires qui ont été donnés par le CICR, là où toutes les

  2   informations nécessaires étaient indiquées ?

  3   R.  Non, je n'y ai pas eu accès. J'ai investi beaucoup d'effort pour

  4   obtenir accès à cette matière première, parce qu'en règle générale, cela

  5   est d'une importance capitale pour un statisticien. Mais moi, je ne suis

  6   pas une institution moi-même, donc je n'ai jamais eu la possibilité d'avoir

  7   accès à ces éléments d'information bruts. D'après ce que je sais, même

  8   l'Accusation n'a pas pu avoir accès à ces questionnaires, à ces éléments

  9   d'information bruts. Je ne sais pas s'ils ont jamais essayé de les obtenir

 10   du CICR, mais je pense qu'il serait extrêmement important de le faire et de

 11   les avoir.

 12   Je pense qu'au départ il y a une erreur importante qui a été commise, et

 13   précisément parce que nous n'avons pas ces éléments d'information bruts qui

 14   nous donneraient de grandes précisions et de grandes nuances, qui par la

 15   suite auraient pu nous donner une évaluation qualitative supérieure.

 16   Q.  Vous venez de parler d'un grand nombre d'éléments très importants, qui

 17   sont, selon vous, ces éléments caractéristiques très importants dans les

 18   questionnaires. J'aimerais que la Chambre de première instance puisse

 19   comprendre de quoi vous parlez exactement.

 20   R.  Le CICR recueille des informations au sujet des prénoms, noms de

 21   famille, prénom du père, date et lieu de naissance, date et lieu de

 22   disparition, nom des personnes qui ont fait connaître la disparition de la

 23   personne recherchée et appartenance ethnique de la personne portée

 24   disparue, ainsi que la situation de celle-ci. Lorsque je dis "situation,"

 25   cela veut dire savoir si la personne était un soldat ou un civil. Il y a

 26   aussi les informations relatives au grade, à l'unité, au statut marital, et

 27   cetera.

 28   Q.  Est-ce que ces données brutes facilitent une identification plus

Page 24333

  1   précise des personnes qui font la cible des deux rapports ?

  2   R.  Je ne parlerai pas d'identification plus précise, parce que c'est un

  3   fait que de nombreuses erreurs se sont glissées dans les rubriques

  4   relatives à de nombreux éléments caractéristiques que je viens de citer,

  5   mais je pense qu'il serait très important pour un démographe professionnel

  6   ou un statisticien d'avoir à sa disposition certaines au moins de ces

  7   caractéristiques, telles que le lieu de résidence permanant, ce qui dans

  8   notre cas est très important pour définir la zone ou la région concernée,

  9   puis, il eut pu être important dès le début du projet Srebrenica de pouvoir

 10   établir s'il s'agissait uniquement de civils ou de non-combattants, pour

 11   reprendre un terme utilisé par le Dr Brunborg ou si un grand nombre de

 12   soldats étaient impliqués.

 13   Je pense que qualitativement, cela aurait pu nous donner un point de

 14   vue tout à fait différent sur la situation. Est-ce que cela aurait modifié

 15   quantitativement les conclusions, je n'en sais rien, parce que je n'ai pas

 16   eu les données brutes à ma disposition. Toutefois, lorsqu'un statisticien

 17   professionnel se penche sur un questionnaire, il peut définir avec

 18   précision l'unité et la région qui font l'objet de son étude, et il dispose

 19   une procédure normative très précise, largement utilisée dans le domaine

 20   des statistiques pour recueillir des informations, évaluer la qualité et

 21   déterminer comment améliorer cette qualité. Si l'on applique cette

 22   procédure, si le Dr Brunborg l'avait, peut-être serait-il parvenu à un

 23   nombre de personnes plus limité. Donc, je ne sais pas exactement ce qu'il

 24   en a été, mais je ne doute pas que la qualité des renseignements aurait été

 25   considérablement meilleure. Peut-être le nombre découvert en conclusion

 26   aurait-il été, y compris plus important.

 27    Quoi qu'il en soit, je souligne que la qualité aurait été meilleure, et

 28   c'est un élément qui me paraît important.

Page 24334

  1   Q.  Comment est-ce que cela aurait pu affecter la qualité de la liste des

  2   personnes portées disparues pour la période 2000 et 2005 ?

  3   R.  D'abord, je crois que ce renseignement, le lieu de résidence permanent,

  4   est très important parce qu'il est consigné par écrit par le CICR. Cela

  5   n'est pas publié officiellement, mais je ne donne pas de la qualité de

  6   cette caractéristique. Il aurait été important de disposer de ce facteur

  7   parce qu'il définit précisément la région qui fait l'objet de l'analyse et

  8   qu'il faut analyser.

  9   De façon plus générale, dans tous les rapports, il y a un problème

 10   terrible qui consiste à déterminer ce que signifie le mot "Srebrenica," à

 11   quoi correspond Srebrenica. Dans des situations différentes, la

 12   dénomination Srebrenica est considérée différemment. Donc la définition

 13   étant différente est une chose, mais le fait de manquer des définitions en

 14   est une autre. Cela conduit à des conclusions tout à fait différentes.

 15   Srebrenica peut être considérée comme l'ensemble de 13 municipalités, de 15

 16   municipalités, ou de toute sorte d'autres choses. Alors, si nous avions

 17   disposé du lieu de résidence permanent, nous aurions disposé d'un élément

 18   d'information qualitativement différent ou, en tout cas, nous aurions pu

 19   partir d'un échantillon de lieu de résidence permanent.

 20   Autre chose importante qui aurait pu lever certaines illusions au

 21   sujet du statut des personnes disparues et des personnes décédées suite aux

 22   événements de Srebrenica en 1995, ce facteur aurait pu servir à cela.

 23   C'est un fait que la liste n'inclut pas seulement des non-

 24   combattants, mais des combattants également.

 25   Q.  Pourriez-vous nous dire pourquoi le recensement de 1991 en Bosnie-

 26   Herzégovine et les listes des électeurs pour 1997, 1998 sont aussi

 27   importantes en tant que sources de données statistiques ?

 28   R.  Ces éléments importaient pour les experts de l'Accusation pour deux

Page 24335

  1   raisons principales. Le recensement était important pour l'Accusation dans

  2   le but de prouver que les personnes enregistrées sur ces listes ne sont pas

  3   des personnes fictives, mais des personnes qui existaient réellement,

  4   puisque leurs noms reviennent dans le recensement de la population de 1991.

  5   Donc ça c'était l'objectif principal de l'utilisation des registres de

  6   recensement.

  7   Quant aux listes d'électeurs, elles avaient pour but en tant qu'éléments

  8   d'information de démontrer que les analystes, autrement dit les experts de

  9   l'Accusation, n'incluent aucun survivant, mais là il faut que je précise.

 10   La méthode utilisée par les experts de l'Accusation est ce qu'il est

 11   convenu d'appeler une méthode d'appariement. Alors, qu'est-ce que ça veut

 12   dire "appariement" ? Cela veut dire que vous partez de deux sources ou

 13   davantage et que vous parvenez à identifier une entité statistique

 14   déterminée, dans ce cas précis une personne, de plusieurs façons

 15   différentes, sous plusieurs angles différents. Comment est-ce que vous

 16   identifiez cette personne ? Vous le faites en déterminant la clé qui vous

 17   permettra de réaliser cette identification. La clé d'identification, c'est

 18   un facteur déterminé qui vous permet d'affirmer, avec une très grande

 19   assurance, que la personne dont on voit le nom sur une liste correspond

 20   bien à la personne dont on trouve le nom dans une deuxième, troisième,

 21   quatrième ou cinquième liste. Si la clé de comparaison est numérique, cela

 22   ne pose aucun problème.

 23   Chacun d'entre nous dans sa vie de tous les jours utilise

 24   cette méthode d'appariement. Toute personnes qui a un compte en banque voit

 25   son nom entrer sur une base de données, et donc appartient à un groupe

 26   déterminé, et les banques disposent de cette banque de données. Pour sortir

 27   de l'argent d'un distributeur automatique, il vous faut introduire votre

 28   carte dans le distributeur de la banque, bien entendu, mais il faut

Page 24336

  1   également apporter une clé, c'est-à-dire la série de quatre ou cinq

  2   chiffres constituant votre code personnel. Si vous ne vous y identifiez pas

  3   correctement avec cette clé numérique, l'appariement entre la carte et la

  4   clé ne peut se faire, et vous ne pouvez pas tirer d'argent.

  5   Puisque dans certains de ces recensements nous ne disposions d'aucune

  6   clé numérique, puisque pour certaines sources il n'existait pas de source

  7   numérique, nous les avons trouvées dans le recensement car chacun au cours

  8   d'un recensement se voit assigné un numéro d'identification personnel qui,

  9   en revanche, ne figure pas sur les listes du CICR.

 10   Alors, les experts de l'Accusation devaient choisir une clé

 11   d'identification pour réaliser ces appariements. Cette clé devait répondre

 12   aux exigences fondamentales de fiabilité eu égard aux résultats recherchés.

 13   Les experts de l'Accusation disposent de 71 clés, et si vous me posez la

 14   question, je vous dirais qu'avec 71 clés, on peut apparier n'importe quoi à

 15   n'importe quoi. Le fait que les témoins de l'Accusation aient disposés de

 16   71 clés n'était pas en soi un très grand problème, même si cela constitue

 17   une méthode totalement inadaptée, mais cela n'aurait pas été un problème

 18   très important si les experts de l'Accusation avaient dans l'un quelconque

 19   de leurs rapports cité les données d'appariement en indiquant quelles

 20   avaient été les clés qui avaient servi à obtenir ces données.

 21   Mais qu'est-ce que le mot "appariement" signifie en statistiques ? Il

 22   signifie que l'on dispose d'un premier facteur, comme par exemple, le

 23   prénom du père, le nom de famille ou la date de naissance, et qu'on

 24   découvre un nombre X de paires possibles, d'appariement possibles par

 25   rapport à ces données de base. Si l'on n'a pas le prénom du père, on va

 26   obtenir une correspondance de 30 %. Si l'on n'a pas la date de naissance,

 27   on peut parvenir à une correspondance de 70 %. Alors, pourquoi est-ce que

 28   cela est important ? Parce que ces statistiques démontrent l'aspect très

Page 24337

  1   combinatoire des bases de données et les combinaisons sur lesquelles on se

  2   fonde pour prononcer un jugement quant au degré de fiabilité d'un élément

  3   d'information déterminée par opposition aux éléments d'information que l'on

  4   rejette comme étant totalement dépourvus de fiabilité.

  5   Q.  Je vous remercie. Si vous en avez terminé avec ce sujet, j'aimerais

  6   revenir au recensement de 1991.

  7   R.  J'étais sur le point de reprendre mon souffle, mais je voulais ajouter

  8   qu'en faisant correspondre votre liste avec les renseignements issus du

  9   recensement, le Dr Brunborg a identifié des personnes et a déclaré : "Je

 10   prétends que ces personnes existent effectivement, et qu'elles ont été

 11   enregistrées au cours du recensement de 1991." Le taux de correspondance

 12   annoncé était de 87 %, dans le rapport du Dr Brunborg qui, je le souligne,

 13   s'est appuyé sur 71 clés de départ, sur 71 critères de départ. Pourquoi

 14   est-il parvenu à un pourcentage de 87 %, ça, j'ai été incapable de le

 15   découvrir.

 16   Par ailleurs, en faisant correspondre ces données avec la liste des

 17   électeurs, si vous me posez la question à moi, je dirais qu'un tel

 18   appariement ne s'est pas fait en utilisant tous les critères de départ,

 19   parce qu'avec tous les critères de départ, toutes les clés de départ, le

 20   nombre de correspondance découvert aurait été plus important. Il y a

 21   certains critères qui ont été utilisés uniquement au départ par

 22   l'Accusation, comme par exemple, une date de naissance, ou disons en tout

 23   cas un éventail de cinq critères de départ à une ou deux unités près. Dans

 24   ce recensement de Bosnie-Herzégovine, il y avait trois Svetlana Radovanovic

 25   qui étaient enregistrées.

 26   Bien que je sois résidante de Serbie, mon nom apparaissait dans ce

 27   recensement à trois reprises. Donc à mon avis, pour identifier les

 28   survivants, si on établit une comparaison avec les listes d'électeurs, le

Page 24338

  1   Dr Brunborg n'a pas utilisé tous les critères de départ. Non seulement il

  2   n'a pas utilisé tous ces critères de départ, je ne sais pas s'il a utilisé

  3   le premier ou le second ou le second et le troisième, parce que ceci est

  4   impossible à déterminer. Mais ce qu'a fait le Dr Brunborg, c'est réduire la

  5   zone de correspondance sur laquelle il a travaillé, la zone de recherche

  6   dans laquelle il cherchait à trouver des correspondances.

  7   Qu'est-ce que cela veut dire "réduire la zone de recherche" ? Lorsqu'il

  8   identifie une liste de survivants, ou plutôt lorsqu'il recherche des

  9   survivants dans les listes de recensement par comparaison avec les

 10   registres du recensement, les survivants peuvent être n'importe qui

 11   habitant la Bosnie orientale, et ils peuvent être au nombre de 400 000. Je

 12   ne sais pas exactement quelle est la population totale de la Bosnie

 13   orientale, mais lorsqu'il a cherché à identifier les survivants, en

 14   général, il ne les a pas identifiés dans toute la Bosnie-Herzégovine, ce

 15   qui aurait été normal, parce que les électeurs qui ont fui une localité en

 16   1991 ont obtenu le droit de voter dans d'autres municipalités de Bosnie-

 17   Herzégovine. Ces individus avaient même le droit de voter à partir d'un

 18   pays étranger. Donc des habitants de Srebrenica, quelle que soit la

 19   définition exacte du mot Srebrenica, donc indépendamment du fait que cela

 20   peut être la municipalité de Srebrenica seule ou la municipalité de

 21   Srebrenica plus les cinq municipalités environnantes, en tout cas, les

 22   habitants de Srebrenica n'étaient pas enregistrés comme électeurs

 23   uniquement dans une de ces municipalités.

 24   Donc le Dr Brunborg n'a pas étudié les électeurs de tout le territoire de

 25   la Bosnie-Herzégovine. Il n'a pas même étudié uniquement les électeurs de

 26   la Bosnie orientale. Il a étudié des électeurs dans un cadre défini par lui

 27   comme étant Srebrenica. Or, que veut dire le mot "Srebrenica" ? Et qu'est-

 28   ce que veut dit cette méthode ? Cette méthode signifie qu'il a totalement

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  1   laissé de côté un grand nombre de personnes.

  2   J'ai fait un test en travaillant sur la seule municipalité de Srebrenica. A

  3   partir de cette municipalité de Srebrenica, j'ai pu découvrir plus de 12

  4   000 personnes qui sont originaires de Srebrenica et enregistrées comme

  5   électeurs à Tuzla, Jajce, Sarajevo, et dans d'autres municipalités de

  6   Bosnie-Herzégovine. Et sur le total, un tiers était des hommes de 18 ans. A

  7   partir des électeurs originaires de Srebrenica, mais enregistrés comme

  8   ayant voté ailleurs, j'ai trouvé 2 000 personne. Donc une grande partie de

  9   la population de Srebrenica, et je parle des hommes parce que j'ai été

 10   appelée à ne prendre en compte que les hommes, n'ont pas été pris en compte

 11   dans cette recherche de correspondance, et je pense que ceci était quelque

 12   chose de très important.

 13   Q.  Pour établir cela, est-ce que vous avez consacré davantage de temps à

 14   examiner les documents dont disposait l'unité démographique du bureau du

 15   Procureur ici à La Haye ?

 16   R.  Oui. J'ai passé sept jours de travail à m'occuper de ces documents en

 17   2007.

 18   Q.  Professeur, j'ai deux corrections à apporter au compte rendu

 19   d'audience. L'une se trouve en page 86, lignes 6 et 7, vous avez dit qu'en

 20   utilisant cette méthode d'appariement et disposant de 71 clés, le

 21   pourcentage de correspondance était de 71 à combien le pourcent ?

 22   R.  Non, je n'ai pas dit cela. J'ai dit que si vous avez 71 clés pour

 23   pratiquer cette méthode de l'appariement, vous parviendrez à faire

 24   correspondre tout et n'importe quoi. Quel est le problème ? Si l'on n'a pas

 25   une identification complète reposant sur ce que je peux définir avec

 26   certitude, à savoir que Svetlana, fille de Dragan Radovanovic, est née le

 27   18 novembre 1949, et quand je dis "totalement fiable," cela signifie que le

 28   degré de fiabilité est important, et que cette personne est également

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  1   identifiée à partir d'une autre source de renseignement, alors le probable

  2   qui se pose est le suivant : comment pouvez-vous décider que quelqu'un dont

  3   les initiales ou simplement le nom de famille ou le prénom n'est pas le

  4   prénom du père, ou simplement le nom de famille et le prénom et n'est pas

  5   l'année de naissance, comment est-ce que vous pouvez savoir que cette

  6   personne est bien la personne en question ?

  7   Si vous disposez de renseignement au sujet du lieu de naissance qui est

  8   peut-être exact ou inexact, et que vous n'avez aucun renseignement au sujet

  9   du lieu de résidence permanent, alors vous êtes forcé de recourir à quelque

 10   chose que le Dr Brunborg qualifie comme méthode visuelle qui, bien sûr,

 11   existe en tant que telle, mais en statistiques la méthode visuelle n'a pas

 12   la même importance que dans d'autres sciences. Mais je ne dis pas que cette

 13   méthode est inexistante.

 14   En tout cas, lorsqu'on contrôle logiquement certaines informations du

 15   questionnaire, on peut recourir à la méthode visuelle. Je peux voir que la

 16   personne en question est diplômée de l'école primaire et que sa profession

 17   citée par elle est professeur d'université. Bien entendu, en examinant ces

 18   deux éléments d'information, je peux trouver une erreur dans l'un ou dans

 19   l'autre, puis poursuivre en examinant l'ensemble du questionnaire pour voir

 20   si quelque part il y a d'autres erreurs, ou au niveau, par exemple, du

 21   niveau d'éducation obtenu ou de la profession. Voilà le genre de méthode

 22   visuelle utilisée par les statisticiens. Mais aucune méthode visuelle, y

 23   compris celle-ci, n'ouvre la porte à des décisions subjectives, et en fait,

 24   je ne pense pas, que les experts de l'Accusation disent que des milliers et

 25   des milliers de cas ont été déterminés à l'aide de la méthode visuelle. Je

 26   ne dis pas que des milliers de cas concernent uniquement Srebrenica, mais

 27   je dis que la méthode est utilisée ici dans nombreux rapports, et que c'est

 28   la raison pour laquelle je ne pense pas que les résultats soient très

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  1   fiables, car il peut y avoir de la subjectivité.

  2   Mme NIKOLIC : [interprétation] Nous en avons terminé avec ce sujet, et

  3   peut-être serait-ce le moment de suspendre jusqu'à demain.

  4   Merci, Professeur Radovanovic. Nous pouvons poursuivre demain.

  5   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] De combien de temps aurez-vous besoin,

  6   Maître Nikolic, encore ?

  7   Mme NIKOLIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense à 45

  8   minutes, peut-être même une heure.

  9   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Et vous, Maître Ostojic ?

 10   M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons demandé --

 11   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Quatre heures.

 12   M. OSTOJIC : [interprétation] Excusez-moi ?

 13   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Vous avez demandé quatre heures.

 14   M. OSTOJIC : [interprétation] Je pensais que c'était une heure et demie,

 15   mais je vais vérifier. Au total, il est possible que nous ayons écrit

 16   "quatre heures," parce que toutes les équipes souhaitaient une demi-heure

 17   ou une heure, mais je vais vérifier. Je ne pense pas que j'ai

 18   personnellement demander quatre heures, mais je vérifierai, je le répète

 19   cela ne devrait pas être quatre heures, ce serait plus près d'une heure et

 20   demie, une heure, une heure et demie.

 21   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] D'accord. Maître Haynes.

 22   M. HAYNES : [interprétation] Je vais voir où nous en serons, mais il me

 23   semble que toutes les questions devaient être abordées avant que mon tour

 24   n'arrive.

 25   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Soljan, à combien prévoyez-vous

 26   votre contre-interrogatoire ?

 27   Mme SOLJAN : [interprétation] Deux heures, je pense pour le moment.

 28   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.

Page 24342

  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Donc demain nous aurons une séance

  3   prolongée. En d'autres termes, nous terminerons à 15 heures 30. D'accord ?

  4   Mme SOLJAN : [interprétation] Monsieur le Président, pour le compte rendu

  5   d'audience, je souhaite indiquer qu'aux page 75, ligne 19, il y a une

  6   erreur. Il est question des registres électoraux de 2000 -- de la page

  7   2000, 2008. Or on doit lire 2000.

  8   M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci, Madame Soljan.

  9   Nous allons suspendre et reprendrons demain.

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 30 juillet

 11   2008, à 9 heures 00.

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