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1 Le mardi 26 août 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
6 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Bonjour, Madame la Greffière. Je vous
7 demanderais de bien vouloir citer l'affaire.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
9 Messieurs les Juges. Il s'agit de l'affaire
10 IT-05-88-T, le Procureur contre Vujadin Popovic et consorts.
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci. Aux fins du compte rendu, les
12 prévenus sont les mêmes qu'hier, exactement les mêmes effectifs. Je n'ai
13 pas besoin de répéter ce qui a déjà été dit.
14 Monsieur le Témoin, bonjour.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Je suis prêt à poursuivre, Monsieur
16 l'Aiguilleur du ciel.
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.
18 M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,
19 Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges. Je n'ai pas tout à fait
20 entendu ce qui a été dit, mais je vais essayer d'aller aussi vite que
21 possible de manière à ce que nous puissions rattraper notre retard. Mon
22 collègue éminent de l'Accusation vient de me dire qu'il risque de revoir à
23 la baisse son interrogatoire, et ce, de 50 %, puisque la plupart des points
24 qu'il voulait couvrir l'ont déjà été.
25 LE TÉMOIN: SLOBODAN REMETIC [Reprise]
26 [Le témoin répond par l'interprète]
27 Interrogatoire principal par M. Ostojic : [Suite]
28 Q. [interprétation] Monsieur le Témoin, le 16 juillet 1995, à 11 heures
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1 11, si vous le voulez bien, voilà l'écoute téléphonique à laquelle je
2 souhaiterais faire référence, il s'agit des pièces P1187B et P1187A, qui
3 est la version anglaise. Monsieur le Témoin, dans la version B/C/S de votre
4 rapport page 20.
5 Je vous demanderais de bien vouloir vous y reporter, il s'agit d'une écoute
6 téléphonique dans laquelle on fait état du terme "triage". Vous avez eu
7 l'occasion d'en faire une lecture; est-ce exact, et d'examiner cette écoute
8 ?
9 R. Oui. Effectivement, il s'agit de l'écoute téléphonique supposée d'un
10 entretien téléphonique qui aurait eu lieu à 11 heures 11, le 16 juillet. Et
11 il n'y a ici aucun élément pratiquement permettant de procéder à une
12 analyse linguistique. Il n'y a là qu'environ une dizaine de mots, mots qui
13 n'ont strictement aucune pertinence. Je les ai évoqués dans mon rapport, et
14 je crois qu'il n'y a pas lieu de perdre quelque temps que ce soit. Il n'y a
15 pas suffisamment de mots ici qui permettent de procéder à une analyse;
16 quant au mot "triage", j'ai expliqué dans mon analyse ce mot, j'ai
17 transformé l'analyse ou l'explication provenant de la littérature
18 pertinente.
19 Q. Bien. Si vous le permettez, je souhaiterais montrer à la Chambre
20 s'agissant de la définition du terme "triage" la pièce à conviction 2D583.
21 Je demanderais à ce qu'on la fasse apparaître à l'écran, s'il vous plaît.
22 Il me semble que c'est en fait une encyclopédie militaire dans laquelle on
23 définit le terme "triage". Je vous demanderais de bien vouloir me le faire
24 savoir lorsque vous le verrez apparaître à l'écran.
25 R. Entendu. Oui, je le vois apparaître.
26 Q. Est-ce que c'est sur base de ce document que vous avez composé cette
27 définition du sens du terme "triage" entre autres ?
28 R. Oui.
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1 Q. Votre expérience au cours de vos enseignements vous a-t-elle permis
2 d'être confronté au terme "triage" avec vos collègues ou certains de vos
3 collègues à quelque moment que ce soit, avez-vous eu l'occasion de vous
4 pencher sur ce terme "triage" ?
5 R. Pendant 25 ans, j'étais premier associé de Pavle Ivic, membre de
6 l'Académie des sciences. Il était rédacteur en chef d'un magazine et
7 j'étais, si vous voulez, son adjoint ou son secrétaire. Lorsqu'un papier
8 nous est parvenu dans lequel figurait des données sans grande importance,
9 contenant des informations sans pertinence risquant de charger de façon
10 superflue le texte, d'une manière générale le professeur disait, et je le
11 cite : "Il va falloir 'triager' ce texte. Slobodan, il va falloir que tu
12 t'attelles à une petite tâche de triage," me disait-il.
13 Lorsque l'on nous envoyait un papier dans lequel figurait des données
14 douteuses ou dont on pouvait douter de la valeur et dont il fallait
15 éliminer certains éléments, le professeur me disait alors, et je le cite à
16 nouveau : "Il faut 'triager' ceci dès maintenant, et si l'on ne procède pas
17 à ce triage, le lecteur intéressé ne procède pas à son propre triage." En
18 d'autres termes, il s'agit en fait de passer au tamis ce qui est important
19 et ce qui ne l'est pas. Or, il y a de cela un mois, lors d'une réunion du
20 département des arts et de la littérature de l'Académie des sciences de la
21 Republika Srpska, a eu lieu un entretien portant sur la procédure qui
22 allait être entamée suite à l'élection des nouveaux membres de l'académie,
23 laquelle procédure prévoit que l'on présente à l'académie et que l'on
24 saisisse l'académie de toutes les propositions, et prévoit que l'académie
25 ensuite saisisse le département compétent ou le secteur compétent afin
26 qu'il procède à l'évaluation des propositions, une évaluation se fondant
27 sur la qualité des candidats proposés, qualités devant être étayées par un
28 document écrit.
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1 Rajko Petrov Nogo, un membre de l'académie, lors de cette réunion, Rajko
2 Petrov Nogo, un poète de renom, a résumé notre mission de la façon suivante
3 : "Tous les documents arrivent ici, et nous procéderons au 'triage'." J'ai
4 noté ces termes mot à mot parce que je savais que j'en aurais besoin.
5 Q. Dans le contexte de cette affaire, vous connaissez ou ne connaissez
6 peut-être pas la position de l'Accusation quant à la signification de ce
7 terme "triage," mais dans notre intérêt - et je sais que vous ne savez pas
8 forcément ce qui s'est passé le 16 juillet 1995 - mais afin que nous
9 sachions exactement ce qui éventuellement s'est passé à ce moment-là dans
10 le contexte de l'utilisation du terme "triage" à 11 heures 11, je vous
11 propose de porter votre attention sur une autre écoute téléphonique
12 remontant au 16 juillet 1995. Il s'agit des P1200A et P1200B [comme
13 interprété]. Je vous demanderais de bien vouloir les faire apparaître à
14 l'écran. Il semble qu'il s'agisse d'une conversation entre deux individus
15 répondant au nom de Djurdjic et une femme répondant au nom de Jelena.
16 Monsieur le Professeur, vous avez eu l'occasion de porter votre attention
17 sur cette écoute téléphonique et sa retranscription, et je souhaiterais
18 vous poser un certain nombre de questions. Cette écoute téléphonique, après
19 une situation -- ou une discussion qui a trait à Potocari et à Bratunac et
20 au fait qu'il y avait 59 individus et peut-être même 46 individus à un
21 autre endroit qui avaient été éventuellement blessés.
22 Dans cette écoute téléphonique, les deux individus en question - et
23 je sais que ça ne comprenait pas forcément M. Beara - mais il se trouve que
24 ces deux individus, M. Durdjic et Jelena, est-ce qu'ils parlent de ce terme
25 de "sélection" et/ou "triage" ? Nous n'avons que très peu de temps à notre
26 disposition, donc je vous présente mes excuses si j'ai été très rapide.
27 R. J'ai eu l'occasion de voir ce texte. Il m'a été montré, et c'est très
28 exactement ça. C'est la même sémantique, c'est la même signification, celle
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1 que l'on retrouve dans la littérature et celle pour laquelle je me suis
2 aperçu que sa signification était celle que l'on rencontre dans la vie de
3 tous les jours.
4 Q. Je vous demanderais de bien vouloir marquer d'un cercle le terme
5 "triage" dans le texte, dans la section en question, environ à peu près à
6 la moitié du texte. Et pour la Chambre, si cela vous intéresse, je
7 demanderais que l'on voit le texte 1200D -- pardon, P1200A, la version
8 anglaise, deuxième page de ce document, première phrase où apparaissent
9 apparemment ces termes. Est-ce que vous voyez apparaître ces termes dans la
10 version B/C/S, Monsieur Remetic ?
11 R. Non, je ne le vois pas encore.
12 Q. À peu près au milieu de l'écran maintenant.
13 R. Oui, maintenant je vois, mais je n'ai pas de marqueur.
14 Q. Peut-on apporter son concours au témoin ? Merci.
15 R. [Le témoin s'exécute]
16 Q. Vous venez d'encercler les termes "sélection" et "triage;" est-ce
17 exact, Monsieur le Témoin ?
18 R. Oui.
19 Q. Juste au-dessus de ces termes, est-ce que vous voyez que l'on discute
20 de la discussion de Bratunac et de Potocari et que l'on indique les
21 chiffres de 59 et 46 individus comme ayant éventuellement été blessés ?
22 Est-ce que vous voyez cela ?
23 R. Oui, effectivement, je le vois, et que me posez-vous comme question ?
24 Est-ce que vous me demandez ce que signifient pour moi les termes "triage"
25 et "sélection" ?
26 A mon avis, "selectia" et "triaga" en B/C/S, à mon sens, ces deux termes
27 signifient probablement qu'il faudrait opérer une sélection entre les gens
28 en bonne santé et les gens malades, c'est-à-dire qu'il faudra faire une
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1 séparation, une sélection; c'est cela que l'on entend, à mon sens, par
2 triage, un processus de sélection.
3 Il est dit également ici qu'il faut opérer une sélection quant à ceux qui
4 seront envoyés à Belgrade, ceux qui seront envoyés à Tuzla, peut-être que
5 tout le monde sera acheminé vers Tuzla. Il s'agit d'un processus de
6 sélection se fondant sur un certain nombre de critères. Mais il ne s'agit
7 en aucun cas d'une approche globale et généralisée; en fait, on ne pourrait
8 s'attendre à rien d'autre, lorsque vous voyez le terme "triage", c'est
9 précisément à cela que vous vous attendriez.
10 Q. Merci. En votre qualité de linguiste et dialectologue, est-ce que vous
11 pouvez partir du principe que ces gens sont sélectionnés aux fins de triage
12 vers des hôpitaux, ou est-ce que de quelque manière que ce soit on pourrait
13 comprendre par "triage" possibilité "d'exécution" ?
14 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
15 M. VANDERPUYE : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Il
16 s'agit là du mandat de la Cour de déterminer les faits dans l'affaire, je
17 crois que la question n'a pas lieu d'être, ce n'est pas au témoin qu'il
18 faut la poser.
19 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
20 M. OSTOJIC : [interprétation] Je ne pense pas que cette objection ait lieu
21 d'être, parce que je pense que nous avons ici face à nous un linguiste, et
22 l'Accusation a décidé de donner une définition au terme "triage" en
23 question, ce n'est pas un terme légal sur laquelle la Cour doit prendre une
24 décision, non au contraire, la Cour doit prendre une décision quant à la
25 conséquence qu'elle doit tirer de l'utilisation du terme "triage". Si l'on
26 utilise le terme "triage", on doit pouvoir avoir des experts qui
27 permettront de définir clairement le terme "triage" en question. Je crois
28 que cette objection n'a pas lieu d'être, elle n'a pas de fondement du tout.
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1 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Vanderpuye.
2 M. VANDERPUYE : [interprétation] Cette objection, Monsieur le Président, a
3 trait à la partie de la question qu'a posée Me Ostojic au témoin où il
4 demande la chose suivante : "Est-ce que l'on peut dans quelque circonstance
5 que ce soit penser que le terme "triage" signifie 'exécution' ?" Ça c'est
6 une question de fait. Ce n'est certainement pas une question d'avis ou
7 d'expertise.
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Ostojic, Monsieur Vanderpuye,
11 finalement ici vous avez juxtaposé deux choses, l'utilisation par les
12 interlocuteurs supposés du terme "triage", et dans ce contexte, c'est à
13 nous et non pas au témoin qu'il appartient de décider ce qu'ils entendaient
14 par le terme "triage" au moment où il a été utilisé, et un expert nous a
15 déjà fourni ces explications quant à la signification du terme "triage".
16 Vous pouvez poursuivre et poser vos questions, mais est-ce que vous pensez
17 que ça a quelque intérêt que ce soit ?
18 M. OSTOJIC : [interprétation] J'espérais qu'effectivement ce serait utile,
19 mais compte tenu de vos commentaires, j'imagine que ça servira pas à grand-
20 chose.
21 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
22 M. OSTOJIC : [interprétation]
23 Q. Je vous propose de porter votre attention sur la pièce à conviction du
24 16 juillet 1995, P1187A et P1187B.
25 M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on sauvegarder le
26 document sur lequel le témoin a marqué d'un cercle les termes "sélection"
27 et "triage", s'il vous plaît, avant l'écoute qui vient de lui être montrée.
28 Q. Monsieur le Professeur, je vous demanderais de bien vouloir porter
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1 votre attention sur la pièce à conviction P1187A, en anglais, qui apparaît
2 à l'écran, et P1187B, version manuscrite de l'écoute téléphonique dans
3 laquelle apparaît ce terme "triage". Vous nous avez dit que vous ne
4 disposiez que de trop peu de termes au plan linguistique pour pouvoir
5 porter un jugement sur ces propos attribués à M. Beara, mais je
6 souhaiterais vous poser la question suivante, qui utilise ce terme "triage"
7 ? Est-ce que c'est la personne qui correspond à l'initiale C, Cerovic, ou
8 est-ce que c'est la personne dont l'initiale est B pour Beara ? Donc, de
9 manière à ce que l'on puisse savoir ce que la personne qui a utilisé ce
10 terme "triage" entendait par là ? Qui l'utilise ? Regardez, s'il vous
11 plaît, la première phrase ?
12 R. Monsieur Ostojic, vous le dites très bien vous-même. Cerovic, c'est
13 Cerovic qui utilise ce terme, la personne à qui correspond l'initiale C.
14 Q. Je vous demanderais de porter votre attention cinq phrases plus bas où
15 il utilise une deuxième fois ce terme "triage". Et là, le terme "triage"
16 apparaît face à quelle initiale ?
17 R. Où cinq lignes plus bas ?
18 Q. Mais vous le voyez bien, C, X, puis C à nouveau, puis la lettre X où
19 l'on utilise le terme. Vous le voyez, cinquième ligne ? Le 16 juillet.
20 R. Le 16.
21 Q. [aucune interprétation]
22 R. Vous savez, je les connais pratiquement par cœur tous ces textes, moi.
23 Je vous en prie, dans le texte que j'ai sous les yeux, une fois seulement
24 c'est Cerovic qui parle pour dire qu'il faut effectuer un triage. Après, le
25 terme "triage" n'y est plus, on ne le lit plus.
26 Q. Permettez-moi de vous aider un petit peu. Je ne sais pas si vous avez
27 sous les yeux le bon document, Monsieur le Professeur. Reportez-vous plutôt
28 à l'écran. Regardez un petit peu l'écran du moniteur. La première ligne, il
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1 est dit : "Le triage est à faire aujourd'hui." Ensuite, vous voyez X, C, X,
2 et sous X, nous ne savons pas qui est l'individu qui parle, on dit : "Je
3 vous en prie, procédez au triage," pour la seconde fois. Vous y êtes ?
4 R. Oui. Oui, mais à trois reprises sur cette page nous lisons le terme
5 "triage". D'abord, c'est C qui parle --
6 Q. Permettez-moi de vous aider, Monsieur le Professeur.
7 R. [aucune interprétation]
8 Q. A quatre reprises nous le voyons, d'abord passons à travers ce texte,
9 qui utilise le terme "triage" ? Cerovic une première fois. Ensuite,
10 l'individu qui est marqué par le X. Et puis après encore une fois le terme
11 de "triage". Qui le dit ?
12 R. X, c'est lui qui dit : "Procédez au triage des personnes capturées."
13 Q. Et puis après --
14 R. "Procédez au triage des capturés."
15 Q. Je vous en prie, cinq lignes à partir du bas de page, que dit C,
16 Cerovic ? A-t-il utilisé le terme "triage" ?
17 R. Oui, c'est encore une fois dit : "Procédez au triage."
18 Q. Fort bien, merci. Donc quatre reprises; à trois reprises c'est Cerovic,
19 ensuite X intervient. Avez-vous pu voir que, à l'initiale B qui voudrait
20 désigner Beara, on aurait utilisé le terme "triage" ? Est-ce que, dans une
21 autre conversation interceptée, cela apparaît également, laquelle
22 conversation interceptée vous avez étudiée ?
23 R. Certainement pas.
24 Q. Merci. Pour faire l'économie du temps, Monsieur, procédons ensuite
25 comme suit. Lorsque je dis : "Govorim", "je parle", cela veut dire parler ?
26 R. Oui.
27 Q. Je sais que cet exercice est difficile à faire parce que vous recevez
28 une traduction dans vos écouteurs, mais je devrais me lancer dans cet
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1 exercice dans l'intérêt de la Chambre de première instance et de mes
2 éminents collègues. Il s'agit d'abord de la date du 13 juillet 1995, il
3 s'agit de la pièce à conviction P01130B. Nous allons voir maintenant
4 comment se présente la version en B/C/S, c'est pour vous, et en anglais, il
5 s'agit de la pièce a conviction P01130E, qui commence par E comme
6 "événement".
7 Q. Maintenant, j'ai une version abrégée de la conversation interceptée --
8 mais maintenons-nous à cette page-là. Monsieur le Professeur, je sais que
9 vous êtes censé avoir tout de même une connaissance rudimentaire de la
10 langue anglaise, je suis certain que je pourrais vous aider - vous ne m'en
11 voudrez pas, Messieurs, Madame les Juges, mes éminents collègues non plus -
12 à regarder le texte en anglais. Sous l'initiale B, lorsque cette personne-
13 là intervient, le second mot est "speaking". Donc si je devais téléphoner :
14 "Ostojic speaking." "C'est Ostojic qui parle." Est-ce que vous y êtes, vous
15 me suivez ?
16 R. Oui, bien sûr. Je le vois. Je vous suis.
17 Q. Est-ce que vous pouvez ensuite nous aider un petit peu dans ce qui
18 suit, il s'agit là de la traduction supposée du texte manuscrit présenté à
19 cette Chambre de première instance à titre de pièce à conviction. A la
20 première page, pouvez-vous me dire si le terme "speaking" apparaît
21 lorsqu'on suit le nom supposé être celui de Beara ?
22 R. Non, je ne me souviens pas l'avoir vu ainsi dans aucune section du
23 texte. Pour ce qui est de cette transcription que j'ai sous les yeux, je ne
24 l'ai pas perçue ainsi, je ne l'ai pas traitée ainsi comme quoi ceci devait
25 être la manière dont Beara devait se présenter par son nom de famille en
26 personne. Mon intelligence de ce texte serait la suivante : le nom "Beara"
27 a été ajouté à la main par la personne qui a procédé à l'opération
28 d'interception pour identifier les interlocuteurs. C'est-à-dire
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1 l'interlocuteur que lui a supposément a enregistré.
2 Q. Fort bien, on y parviendra tout à l'heure. Ce qui m'intéresse c'est de
3 voir si vous voyez le terme "govorim", c'est-à-dire "je parle" à la
4 première page. Pour ce qui est de mon serbe, je suis loin de pouvoir me
5 mesurer à vous, mais est-ce que vous y êtes pour suivre le terme "govorim"
6 ? Si vous ne voyez pas d'inconvénient, nous pouvons nous en tenir à ce
7 terme-là. Si vous ne pouvez pas voir cela figurer sur la page qui vous a
8 été affichée, je voudrais que l'on demande à ce qu'on affiche la page
9 suivante du document P01130.
10 R. [aucune interprétation]
11 Q. Pour une raison ou une autre, cette partie du texte est barrée et
12 ensuite retapée. Et nos amis du bureau du Procureur ont été aimables pour
13 nous en fournir une traduction. Par conséquent, nous avons deux versions de
14 cette transcription. Nous parlerons de la seconde version tout à l'heure.
15 Mais maintenons-nous d'abord à cette première version. Est-ce que vous y
16 êtes pour suivre cette première version qui a été améliorée par l'opérateur
17 qui s'est occupé de l'interception de textes ? Est-ce que vous pouvez voir
18 que le nom de "Beara" y est affiché ? Est-ce que vous le voyez dans cette
19 partie du texte intercepté ?
20 R. Non. Il n'y a pas de terme "govorim", "speaking", "parler". Ces deux
21 versions sont différentes, ne serait-ce qu'à en juger d'après le début même
22 du texte.
23 Q. Nous y parviendrons tout à l'heure. Nous allons entendre votre opinion
24 là-dessus.
25 R. [aucune interprétation]
26 Q. Essayons de voir un petit peu pour faire une analyse sans trop de peine
27 et sans grand dégât. Je voudrais que l'on affiche, par le prétoire
28 électronique, la pièce à conviction P1130A, il s'agit du numéro ERN 005256
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1 [comme interprété]. Je sais que vous ne pouvez pas lire ce que le bureau du
2 Procureur nous présente ici, mais d'après vous, comment pensez-vous qu'ils
3 ont pu parvenir à ce terme de "Beara" pour dire "Beara parle", puisque dans
4 la version qui a été barrée et qui a été remaniée le mot n'y apparaît pas ?
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.
6 M. VANDERPUYE : [interprétation] Il n'est pas approprié de présenter ainsi
7 pour poser une telle question au témoin, parce que définitivement le bureau
8 du Procureur n'a rien à voir avec le processus de traduction.
9 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui. Maintenez-vous au texte --
10 M. OSTOJIC : [interprétation] Je dois en parler, Monsieur le Président,
11 parce que je suis conscient du fait qu'il est de leur devoir au bureau du
12 Procureur de prêter attention au fait que la traduction a été remaniée, il
13 y avait une erreur dans la première traduction.
14 Q. Mais, en tout cas, penchez-vous sur la seconde version qui nous a
15 été fournie par le bureau du Procureur. Je sais que vous êtes censé être
16 limité dans votre connaissance de la langue anglaise, mais première ligne,
17 Monsieur le Professeur, nous lisons "speaking," "parler".
18 R. Oui, mais dans la transcription -- dans le manuscrit, il n'y a pas le
19 terme "speaking," "govori". Voilà ce qui me semble essentiel.
20 Q. Bien. Mais à vous penchez sur ce document, vous avez considéré que ceci
21 devait être négatif, lorsqu'il s'agit de la première interception de la
22 conversation en date du 13 juillet à
23 10 heures 09 ?
24 R. Oui.
25 Q. Ayant à l'esprit ce que vous venez de nous dire, à savoir quelle était
26 la façon dont procédait M. Beara pour parler, est-ce que, par exemple, vous
27 avez de sept à huit heures au mois d'avril pu entendre une bande magnétique
28 contenant sa conversation il y a quatre ans ? Avez-vous été en mesure de
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1 faire une distinction entre le dialecte chakavien, ékavien et ikavien ?
2 D'après vous, est-ce qu'avec un degré de certitude on peut attribuer ces
3 propos à M. Beara ?
4 R. Non, je ne pourrais pas attribuer cela à Beara, et en tant que
5 professionnel évidemment je ne devrais pas pouvoir le faire.
6 Q. Pourquoi donc ? Parce qu'il n'y a pas suffisamment de caractéristiques
7 propres aux propos qui seraient les siens du point de vue du dialecte ?
8 R. Non. Parce que tout simplement je ne disposais pas de suffisamment
9 d'éléments pour fonder la base de mon jugement pour en décider. Par
10 exemple, pour traiter de ses propos d'aujourd'hui ou traiter de ses propos
11 du mois d'avril, je dirais que pratiquement il n'y a rien à signaler à
12 titre de différences.
13 Q. Fort bien. Nous allons maintenant nous pencher sur votre rapport à
14 titre de clarification plus approfondie; si nous devons nous occuper
15 d'autres conversations interceptées, je crois que nous aurons le temps de
16 le faire. Voyons d'abord la conversation interceptée en date du 13 juillet
17 à 19 heures 19. Je crois que nous y étions déjà. Et là où le nom de "Beara"
18 apparaît, je ne suis pas tout à fait certain que des éminents collègues
19 sont d'accord avec moi que ceci ne devrait pas être attribué dans cette
20 conversation interceptée à Beara, n'est-ce pas, Monsieur le Professeur ?
21 R. Oui.
22 Q. Penchons-nous sur la conversation interceptée en date du
23 13 juillet 1995 à 19 heures 45. Cette conversation interceptée, elle aussi
24 est une conversation que le bureau du Procureur n'attribue pas à M. Beara.
25 Voilà pourquoi nous allons évidemment passer rapidement au bureau du
26 Procureur pour expliquer à la Chambre de première instance le tout, surtout
27 si le nom de "Ljubisa" apparaît.
28 R. Oui.
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1 Q. Oui. Allons de l'avant sur cette liste-là --
2 R. Excusez-moi. Je crois que c'est le prénom "Ljubo" qui apparaît, mais on
3 suppose que ceci devrait être Ljubo Borovcanin.
4 Q. Bien. Je pense, Monsieur le Professeur, que nous devons faire preuve
5 d'équité ici tout de même. Si on regarde la conversation interceptée en
6 date du 13 juillet à 19 heures 45 - il s'agit de la pièce à conviction
7 P1148 --
8 M. LAZAREVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois avoir
9 aperçu une erreur qui s'est glissée dans le compte rendu d'audience. Le
10 témoin a dit : "On a attribué cela à Borovcanin," alors qu'ici on a dit :
11 "Il est dit que c'était Borovcanin."
12 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie. Merci d'avoir apporté
13 cette correction. Nous ne parlons pas la langue, et par conséquent --
14 M. OSTOJIC : [interprétation] Merci beaucoup.
15 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
16 M. OSTOJIC : [interprétation] Reprenons maintenant pour clarifier.
17 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
18 M. OSTOJIC : [interprétation]
19 Q. On parle de "Ljubo." S'il s'agit évidemment de la conversation
20 interceptée en cette date en 19 heures 45, en 1995, on parle de "Ljubisa,"
21 n'est-ce pas ? Nous pouvons toujours demander l'affichage de ce document au
22 moyen du prétoire électronique. Il s'agit de la pièce à conviction P1148,
23 s'il vous plaît.
24 L'INTERPRÈTE : Les interprètes signalent que le témoin n'avait pas répondu
25 à cette question et que nous ne l'avons pas entendue d'ailleurs.
26 M. OSTOJIC : [aucune interprétation]
27 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
28 LE TÉMOIN : [interprétation] 19 heures 45 vous dites ?
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1 M. OSTOJIC : [interprétation]
2 Q. Oui.
3 R. Oui. On fait mention de Ljubisa, mais il n'y a pas à conclure que ceci
4 doit être attribué à M. Beara. Ceci n'a aucun lien avec Beara. Le bureau du
5 Procureur lui-même a pu conclure qu'il ne s'agissait pas de Ljubisa. Il
6 s'agissait de Ljubisa, de Ljubo, Ljubo Borovcanin, et par conséquent, c'est
7 de lui qu'il s'agit en fait.
8 Q. Fort bien. Passons à la pièce à conviction suivante, Monsieur le
9 Professeur. Je sais que nous y allons très rapidement, mais il s'agit cette
10 fois-ci de la conversation interceptée en date du 13 juillet 1995 à 23
11 heures 05. Il s'agit de la pièce à conviction P1153A et -- il s'agit des
12 versions A et B. En anglais, il s'agit de B. Nous avons parlé de cette
13 conversation à la date du 13 juillet. Il s'agit évidemment de parties
14 pertinentes. Ensuite il s'agit de voir qui parle. Le bureau du Procureur,
15 quant à lui, trouve qu'il s'agissait évidemment de signaler une autre
16 personne. Ce n'était pas Beara. Prenons une autre pièce à conviction,
17 c'est-à-dire la conversation interceptée à 23 heures 05. Est-ce que vous
18 avez eu la possibilité de consulter ce texte-là ?
19 R. Oui.
20 Q. Il s'agit encore une fois d'une conversation interceptée où deux
21 individus interviennent. Il s'agit d'ailleurs d'abord de quelqu'un qui est
22 supposé être Ljubo. Troisième ligne dans le texte. Vous y êtes ? Vous me
23 suivez ?
24 R. Oui.
25 Q. Nous avons présenté nos éléments de preuve pour essayer de dire qu'il
26 s'agit d'un autre individu. Or, le bureau du Procureur, lui, savait qu'il
27 ne s'agissait pas de Beara lorsqu'il s'agit de traiter de cette
28 conversation interceptée, même si le nom de "Ljubo" y apparaît. Savez-vous
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1 combien de surnoms il peut y avoir pour désigner le prénom de "Ljubisa" en
2 B/C/S ?
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.
4 M. OSTOJIC : [interprétation]
5 Q. [aucune interprétation]
6 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je [imperceptible]
7 tout simplement que mon éminent collègue a parlé de l'aptitude du bureau du
8 Procureur alors que le bureau du Procureur, quant à lui, d'après M.
9 Ostojic, n'était pas tout à fait certain qu'il s'agissait de M. Beara ou
10 pas.
11 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Cela me semble un peu plus juste par
12 rapport à ce que M. Ostojic vient de dire tout à l'heure.
13 M. OSTOJIC : [interprétation] Pour autant que je m'en souvienne, mon
14 éminent collègue, McCloskey, a été d'accord avec moi pour dire que Ljubo
15 n'était pas Beara. Et d'après le compte rendu d'audience, il s'agit bien de
16 cela. Il s'agissait d'acheminement de vivres, mais je ne me souviens plus.
17 Q. [aucune interprétation]
18 M. McCLOSKEY : [interprétation] Cela est correct, Monsieur le Président. Je
19 crois que M. Vanderpuye est dans son droit de dire que nous n'avons pas été
20 tout à fait sûrs pour dire de qui il s'agissait.
21 M. OSTOJIC : [interprétation]
22 Q. Monsieur le Professeur Remetic, à suivre ce monologue -- ou plutôt, ce
23 dialogue entre deux individus --
24 R. Oui.
25 Q. -- est-ce que celui qui s'est occupé -- enfin, l'opérateur de
26 l'interception de ce texte, est-ce qu'il a pu noter les deux parties du
27 texte ou seulement a-t-il travaillé unilatéralement ?
28 R. Pour présenter une analyse linguistique, nous manquons de faits car,
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1 d'après l'opérateur qui s'est chargé de la transcription de cette
2 conversation, il s'agit d'un monologue qui est attribué au général Mladic
3 car son interlocuteur, un certain Ljubo, dit-on -- suppose-t-on, n'a pas pu
4 être entendu.
5 Q. Fort bien. Permettez-moi maintenant de vous poser une question sur le
6 prénom "Ljubo." S'agit-il évidemment d'un prénom commun assez courant ?
7 R. "Ljubo" est un prénom très, très commun, et très fréquent chez les
8 Serbes. D'ordinaire il s'agit d'une version abrégée de ce prénom, c'est-à-
9 dire en version abrégée c'est que l'on veut peut-être faire preuve de
10 gentillesse pour abréger le prénom pour pas mal de prénoms, à savoir les
11 prénoms tels "Jubisav, Ljubisa, Ljubodrag, Ljubomir." Or, pour présenter
12 tous ces prénoms dans le dictionnaire qui contient les noms et prénoms
13 serbes, lequel dictionnaire a été publié, il y a plus de trois décennies,
14 ce contient plus de 47 prénoms ayant pour base "Ljub," et de -- pour parler
15 de tous ces prénoms du point de vue hypocoristique, sous forme abrégée,
16 "Ljubo" ou "Ljuba," pourrait être désigné.
17 Q. Fort bien. Vous venez de nous présenter quelques exemples. Qu'en est-il
18 du prénom "Ljubko" ? Est-ce que peut-être le prénom de "Ljubinko" peut-être
19 peut donner une forme abrégée sous forme de "Ljubko" ?
20 R. Ljubinko, Ljubko, Ljupce, Ljuboda tout cela est possible et valable. Il
21 n'y a pas que ça. Il est un autre fait à signaler dans ce cas-là, chez les
22 Serbes, les prénoms présentant une connotation de quelque chose de gentil,
23 de beau, de -- peut-être qui devrait présenter quelqu'un d'aimable, gentil,
24 cher, et cetera, qui nous est cher, ces prénoms peuvent donner à des gens,
25 à des individus en tant que prénoms secondaires, je dirais, qu'il s'agisse
26 de quelques prénoms, enfin qui soient et qu'on a énumérés tout à l'heure.
27 Q. [aucune interprétation]
28 R. Moi, qui connais fort bien les parages, je veux dire ces régions-là, je
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1 sais que Ljuba, Mile, Mico existent aussi, alors qu'ils ont été baptisés
2 comme Nikola, Petar, Ostoja, Slobodan, et cetera.
3 Q. Permettez-moi d'être un petit peu plus concret. Je sais que souvent
4 nous, on emprunte des termes étant de nature à généraliser, nous présentons
5 plusieurs possibilités, mais soyons un peu plus concret, plus stricte. Nous
6 avons pu entendre parler pas mal de témoins dont les prénoms commençaient
7 par Ljuban, Ljubko, Ljubomir, et cetera, mais penchons-nous sur la pièce à
8 conviction 2D592. Je sais que vous n'étiez pas un expert en art militaire,
9 mais je crois que ce document parle de lui-même. Il s'agit du commandement
10 de la 33e Brigade motorisée, il s'agit d'élément de preuve qui date de
11 1996, et je pense que lorsqu'on se penche sur les noms tels qu'ils figurent
12 sur cette liste-là, d'abord les trois premières lignes nous permettent de
13 constater les noms de deux personnes qui se lisent comme Ljubo ou
14 Ljubislav, n'est-ce pas, Monsieur le Professeur ?
15 R. Oui.
16 Q. Bien. Essayons de nous rapprocher un petit peu, dans le passé des
17 événements qui se sont produits en juillet 1995, est pertinent pour la
18 présente affaire. Par conséquent, je voudrais que l'on affiche la pièce à
19 conviction 2D593; je crois qu'il s'agit là d'une liste de noms d'officiers
20 en date du mois de juillet 1995. Nous avons déjà traité de ce document lors
21 des dépositions d'autres témoins. Penchez-vous sur ce document, s'il vous
22 plaît, Monsieur le Professeur, et dites-moi si, sous le chiffre 9, vous
23 pouvez voir quoi que ce soit qui serait une forme abrégée ou un dérivatif
24 quelque chose du prénom de "Ljubo."
25 R. Je crois qu'il s'agit là de Ljubo Sobot, colonel au grade.
26 Q. Merci. Bien. Je voulais savoir tout simplement cela. Je voulais savoir
27 aussi son grade et passer ensuite à la treizième ligne : est-ce que vous y
28 êtes pour lire Ljubo ?
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1 R. Oui. Il s'agit du lieutenant-colonel Ljubo Rakic.
2 Q. Monsieur, il s'agit de la liste datant du mois de juillet 1995. Là, on
3 lit le colonel Ljubo -- le lieutenant-colonel Ljubo; nous ne disposons pas
4 d'autre liste pour vous présenter approximativement environ 17 individus
5 dont les prénoms présentent un tel dérivatif. Est-ce que peut-être ces
6 gens-là pouvaient prendre part à des conversations interceptées, et à qui
7 on devrait attribuer le tout, qu'est-ce que vous en pensez ?
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.
9 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, avec tout le
10 respect que j'ai pour mon éminent collègue, il s'agit évidemment de faire
11 des conjectures, ce témoin peut-il -- ou pouvait-il savoir qu'il a pu ou
12 qu'il n'a pas pu être un interlocuteur dans ces conversations interceptées.
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Maître Ostojic.
14 M. OSTOJIC : [interprétation] Pas de commentaire à faire.
15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Passez à un autre sujet, à votre
16 question suivante.
17 M. OSTOJIC : [interprétation]
18 Q. Sur la base des documents qui vous ont été procurés, le bureau du
19 Procureur vous a-t-il présenté une alternative quelconque pour les noms de
20 telles ou telles personnes qui apparaissent sous le prénom de "Ljubo"
21 "Ljubisa" "Ljubomir" "Ljubislav" "Ljubko" ? Le bureau du Procureur vous a-
22 t-il offert une alternative quelconque là-dessus ?
23 R. Si vous me posez la question déjà, je ne sais pas. Moi, en ma qualité
24 de linguiste, je me dois de dire que chez les Serbes peu importe quel est
25 son prénom qu'il a reçu au baptême dans la pratique peut être Ljubo, et
26 Milan, et Mile, et Dragan. Je vous parle sur la base des expériences qui
27 sont les miennes parce que, moi, je connais fort bien les climats, la
28 région.
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1 Q. C'est la raison pour laquelle je vous ai posé la question, vous avez
2 tout à fait parlé de Mico; Mico peut servir d'un surnom pour pas mal de
3 prénoms, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que vous pouvez dire qu'il en ait --
6 R. [aucune interprétation]
7 Q. [aucune interprétation]
8 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
9 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
10 M. OSTOJIC : [aucune interprétation]
11 Mme FAUVEAU : Il s'agit du compte rendu. Si on peut épeler le prénom "Mica"
12 parce que l'épellation qui est dans le compte rendu, n'est pas exacte ?
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Peut-on épeler, s'il vous plaît,
14 Monsieur Ostojic, le prénom de "Mico" ?
15 Allez-y. Vous connaissez les deux langues.
16 M. OSTOJIC : [interprétation]
17 Q. Nous y allons beaucoup trop vite, je m'excuse. En tout ceci est de ma
18 faute. Lorsque vous utilisez le prénom ou le terme de "Mico," pouvez-vous
19 nous épeler "Mico," comment M-i-c-o, M-i-c-a ?
20 R. Il s'agit de M-i-c, avec un accent aigu en français pour le -- c'est le
21 Ce --
22 Q. "Mica" on devrait évidemment procéder de la même façon mais à la fin,
23 nous avons A au lieu de O ?
24 R. Oui.
25 Q. Présentez-nous, s'il vous plaît, très brièvement, quelques exemples --
26 ou un exemple de différents prénoms qui permettraient de voir qu'il y a un
27 dérivé -- le prénom gentiment -- un surnom de "Mica." Est-ce que, par
28 exemple, "Ljubo" ait évidemment donné lieu à "Mica" ?
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1 R. Oui. Souvent, il s'agira de Milorad, Milutin, Miroslav, Miladin,
2 Milita, Milisa, Miljko, Milos, Milun, et cetera. Tous ces prénoms peuvent
3 donner lieu. Mais, pour parler de Mico, ceci peut être aussi un prénom
4 secondaire qu'on a donné à quelqu'un qui a été baptisé et qui, au baptême,
5 avait reçu un autre prénom. Un de mes voisins avait neuf enfants, sept
6 filles, notamment, et il avait également un fils, un dernier enfant, qui
7 avait pour prénom Tadija. Dans cette famille-là, celui-là n'était connu que
8 sous le prénom de Mico.
9 Q. Merci beaucoup. Alors brièvement, puisque c'est pertinent pour ce qui
10 est des écoutes électroniques qui nous concernent, qu'en est-il du surnom
11 de Zoka ou Zoko ? Est-ce que c'était également un surnom assez commun qui
12 peut être attribué à plusieurs prénoms ?
13 Z-o-k-a.
14 R. D'après ce que je sache, je ne suis pas un expert en prénoms. Je ne
15 suis pas un onomasticien [phon]. Mais "Zoka" est un nouveau nom, c'est-à-
16 dire c'est un nouveau surnom. Zoka ou Zoki est un nouveau surnom qui
17 s'apparente au surnom de Miki.
18 Q. Je souhaiterais que l'on parle de l'écoute électronique du 14 juillet
19 1995, conversation qui porte la cote 65 ter 1164 et qui a eu lieu à 21
20 heures 02. L'anglais, c'est le document qui porte le numéro B. Nous avons
21 la pièce sur le e-court P1164C en anglais, ça c'est la version en anglais,
22 et B pour ce qui est du manuscrit.
23 J'aimerais vous demander, Professeur, de nous dire ce que cette écoute
24 électronique, selon votre opinion personnelle, veut dire. En fait, est-ce
25 que l'on peut attribuer cette écoute électronique à Ljubisa Beara ?
26 R. S'agissant de cette conversation téléphonique qu'il est allégué d'avoir
27 été interceptée, il y a quelques mots qui peuvent être mis en lien avec le
28 nom de M. Beara. Selon l'opérateur, il ignorait le code 155, ce qui est
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1 assez inhabituel pour un officier haut gradé, il est inhabituel qu'un
2 officier ne sache pas le code de son unité. De plus, s'agissant de ce
3 document manuscrit, nous avons également l'affirmation de l'opérateur qui
4 nous parle de certaines erreurs et certaines omissions, et il parle
5 également d'une identité erronée. Plus tard, s'agissant de la lettre B, ils
6 ont ajouté la lettre E, qu'il est assez facile à vérifier puisque nous
7 pouvons le voir à l'écran. C'est de cette façon-là qu'il voulait indiquer
8 que l'on pourrait croire qu'il s'agirait de Beara alors qu'il est question
9 de Badem. C'est le poste Badem, la centrale de Badem. Il est indiqué très
10 clairement ici, d'après les propos de l'opérateur qui disait : "Un instant,
11 s'il te plaît, vieux, un instant, vieux." Ils ont attribué un mot erroné à
12 cette lettre. Et à la fin, l'opérateur mentionne à la main : "A cause d'une
13 erreur de l'opérateur de la centrale de Badem, nous avons intercepté une
14 conversation ayant eu lieu entre une personne X et une autre personne Y qui
15 n'était pas audible." Et pendant l'écoute, la ligne était ouverte pour
16 Jokic 44.
17 Q. Très bien, merci beaucoup, Professeur. Après avoir lu votre rapport et
18 en examinant ceci, le corps linguistique de cette conversation interceptée
19 ne vous permettait pas de déterminer s'il s'agissait de M. Beara. Je sais
20 que vous nous avez parlé d'autres problèmes liés à cette conversation
21 interceptée, nous l'avons déjà entendu.
22 Mais hier, je crois vous avoir demandé, à la page 40, de nous parler
23 du mot "phonologie" et c'était mon erreur et vous m'avez expliqué ce qu'est
24 la phonologie. Pourriez-vous nous expliquer quelle la différence entre la
25 phonologie et la phonétique.
26 R. La phonétique est une science qui traite des sons acoustiques
27 physiquement perçus, les caractéristiques physiques de sons.
28 Q. Je sais que vous nous avez dit hier que les opérateurs n'étaient pas
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1 nécessairement censés capter ces conversations d'un point de vue
2 phonologique. Mais permettez-moi maintenant de vous demander: d'un point de
3 vue phonétique, pourriez-vous nous dire si, phonétiquement, on leur a dit
4 de capturer cette conversation ?
5 R. Oui, je ne me souviens pas tout à fait si on leur a dit d'enregistrer
6 quoi que ce soit de quelque façon que ce soit. Ce sont des personnes dont
7 la terminologie -- enfin, la linguistique -- la terminologie linguistique
8 leur est un peu étrange. Ce ne sont pas des experts en phonétiques ces
9 personnes qui transcrivaient les conversations.
10 Q. Très bien.
11 M. OSTOJIC : [interprétation] Maintenant, avec la permission du Juge de la
12 Chambre de première instance, je vais demander un peu de temps
13 supplémentaire eu égard au fait qu'il y a environ un mois, nous avons parlé
14 du versement au dossier des conversations audio. Il y avait un
15 enregistrement qui se trouve en possession du Procureur depuis le 11
16 octobre 2004. Nous l'avons reçu que le 18 juillet 2008. J'aimerais montrer
17 quelques -- ou faire entendre quelques enregistrements audio au Pr Remetic
18 et j'aimerais vous demander votre permission pour ceci. Qu'est-ce que vous
19 en dites ?
20 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Professeur, est-ce que vous avez des
21 objections pour ce qui est de l'Accusation. Nous avons déjà étiré le temps
22 que vous nous avez demandé de façon assez importante, n'est-ce pas ? Oui,
23 Monsieur Vanderpuye.
24 M. VANDERPUYE : [interprétation] Nous n'avons absolument aucune objection,
25 Monsieur le Président, mais j'aimerais néanmoins dire que cet entretien est
26 un document très court. Je crois qu'on a simplement demandé à la personne :
27 est-ce que vous permettriez de faire l'objet d'un entretien et la personne
28 ne l'a pas accepté.
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1 M. OSTOJIC : [interprétation] Alors, très bien. J'aimerais maintenant que
2 l'on passe à la pièce 2D566.
3 Q. Professeur, nous avons examiné un entretien que vous avez fait avec
4 Ljubisa Beara en 2008, et nous avons vu le document de 2004, mais
5 j'aimerais savoir si nous avons vu le transcript avec
6 M. Beara. Je n'ai pas suffisamment de temps, de parcourir avec vous toutes
7 les questions linguistiques. Je vais probablement demander à ce que l'on
8 vous fasse revenir pour que vous puissiez écouter ces enregistrements
9 audio. Pour l'instant, je vous demanderais de vous pencher sur la pièce
10 2D556. Il s'agit à la deuxième page d'une conversation qui aurait été
11 enregistrée le 6 juin 1995, et temporellement, ceci se rapproche du temps
12 de l'acte d'accusation et dans la cette conversation, il y a plusieurs
13 personnes qui prennent la parole. On parle de Beara et de Zdravka ou
14 Zdravko. Alors prenons la version B/C/S. Dites-moi si vous pouvez lire la
15 deuxième ligne, là où M. Tolimir dit : "nereseno." Est-ce que vous voyez
16 cet endroit, où il dit : "nereseno" ? Ce serait peut-être utile de zoomer.
17 R. Non, non, ce n'est pas nécessaire. Je vois très bien.
18 Q. Très bien, merci. Si vous prenez le texte qui se trouve en bas, il
19 semblerait que l'on retrouve les mêmes mots utilisés par M. Beara. Est-ce
20 que c'est les mêmes mots, ou est-ce que c'est deux mots différents,
21 "nereseno" et "nerjeseno," avec un J ? Est-ce que vous voyez, tout juste en
22 dessous de "nereseno," le "nerjeseno" ?
23 R. Oui, je le vois.
24 Q. Dites-moi, s'il vous plaît : quelle est la différence entre les deux
25 mots, d'abord, y a-t-il une différence quant à la signification des deux
26 mots ?
27 R. Il n'y a pas de différence quant à la signification.
28 Q. Alors dites-moi --
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1 R. Il ne pouvait pas y avoir de différence. Ce n'est pas ceci qui nous
2 intéresse, mais c'est la façon de prononcer et que si on prononcer ce mot,
3 qu'il s'agisse de la façon ékavienne, ikavienne ou ijekavienne, il n'y a
4 absolument aucune différence dans la signification, mais la prononciation
5 est différente.
6 Q. Donc une personne provenant d'une région en employant un certain
7 dialecte le prononcerait de façon différente qu'une autre personne
8 provenant d'une autre région avec un autre dialecte ?
9 R. Oui.
10 Q. Très bien. Alors, maintenant, permettez-moi de vous demander la chose
11 suivante : le mot qu'aurait prononcé M. Tolimir, à l'examen de ce mot, en
12 fait -- non, je reprends. Alors, si l'on prend les mots qui auraient été
13 dits par M. Beara, en écoutant la conversation audio enregistrée en 2004,
14 lors de la conversation qu'il a eue avec le bureau du Procureur. Et si vous
15 comparez tout ceci avec 1995, est-ce que vous pourriez nous dire, en juin
16 de 1995, quel était le dialecte employé par M. Beara, de quelle région
17 pouvait-il provenir ?
18 R. Je n'ai pas suffisamment de matériel ou d'indices me permettant de
19 conclure quoi que ce soit. Je ne peux pas être certain au-delà de tout
20 doute et de vous répondre avec un très grand degré de certitude. Ici, quand
21 on voit le mot "nerjeseno," j'ai entendu comme "nereseno" parce que j'ai
22 cru entendre "nereseno," ce qui ne me surprend pas, donc sans le J.
23 Q. Et pourquoi ?
24 R. Ici, on voit le mot "nerejeseno" attribué à Ljubisa Beara, un J
25 derrière le R se perd très souvent. Il est difficile également de le
26 prononcer. Le mot "vrjeme", v-r-j-e-m-e, si quelqu'un le prononce comme ça,
27 "vrjeme," il arrive souvent que l'on entende ce mot prononcé comme chez les
28 Ekaviens, et c'est pourquoi nous savons de quoi il s'agit.
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1 Q. Très bien. Monsieur, je sais que vous n'avez pas eu énormément de temps
2 pour examiner ces documents, mais vous allez sans doute pouvoir m'aider. Le
3 document 2D587, encore une fois, il semblerait qu'il s'agisse d'une
4 conversation du 13 août 1995, conversation entre deux personnes, une
5 personne qui s'appelle Brke ou Brko et Ljubisa Beara. Ce que je vais vous
6 demander de faire, c'est de nous donner d'abord la date, alors à la
7 première page on voit la date, et ensuite passons à la deuxième page du
8 document.
9 R. Oui, d'accord.
10 Q. Et pourriez-vous, je vous prie, zoomer le centre du document. Pourrait-
11 on voir la partie inférieure. Oui, très bien.
12 D'accord. Il y a une erreur, en fait. Pour ce qui est de la pièce
13 précédente, le numéro P qui lui a été attribué est erroné. La pièce que
14 l'on vient de voir est la pièce 2D556, pour le compte rendu d'audience,
15 alors que la pièce que nous sommes en train d'examiner maintenant, qui est
16 affichée à l'écran, est la pièce 2D587.
17 Monsieur, je remarque au milieu de la page, pour ce qui est des propos
18 prononcés par M. Beara qui sont attribués à ce dernier, vers le milieu de
19 la page, on voit "A Sta Se Dogoja." Qu'est-ce qui se passe ?
20 R. Oui, on voit "A Sta Se Dogoja," D-o-g-o-j-a.
21 Q. Ceci correspond à quel dialecte et à quelle région, cette façon de
22 prononcer ce mot ?
23 R. Ça correspond au chakavien. C'est un dialecte de Split.
24 Q. D'accord. Vers la fin de cette page où on voit "Dobro burazer." Est-ce
25 que vous voyez ceci : "Alors d'accord, mon frère" ? Pourriez-vous nous
26 donner le troisième mot à partir du début de la phrase, pourriez-vous nous
27 dire si c'est le dialecte cakavien ou le dialecte de Split ?
28 R. Vous voulez dire : "Dobro burazer vidicu." "Demain ou après-demain, je
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1 vais pouvoir venir." Donc, en serbe [imperceptible].
2 Q. Oui.
3 R. Alors c'est fort probablement un terme littéraire. Cette forme, chez
4 les Ekaviens -- chez les Ijekaviens, si c'était à Zagreb cela aurait été
5 najviro jatne [phon]. Alors que, dans la langue parlée, c'est tout à fait
6 possible de dire ce mot-là -- enfin, de le prononcer de cette façon-ci, et
7 on dit "vjerovat" [phon] avec un J, en Bosnie aussi, donc chez les Croates
8 en Bosnie.
9 Q. Très bien. Merci. Une dernière pièce que je souhaiterais montrer au
10 témoin, c'est la pièce 2D594, il s'agit du court entretien qui a eu lieu au
11 bureau du Procureur avec M. Beara sans la présence de ses avocats, et qui a
12 eu lieu le 11 octobre 2004. Je sais que c'est très bref, et je connais
13 maintenant les limites, vous nous avez expliqué que c'est assez limité,
14 mais examinons quelques mots qui figurent dans ce document. Prenez la
15 troisième page, par exemple, de ce document. Les lignes sont numérotées,
16 nous allons pouvoir suivre assez facilement. En version B/C/S, je voudrais
17 appeler votre attention sur la page 3, ligne 9. Le mot "razumem" veut dire
18 "je comprends", et M. Beara emploie ce mot ici tel que transcrit et tel
19 qu'entendu sur la bande audio "razumim". Voyez-vous cela ?
20 R. On voit "razumim". Non, je vois, c'est "razumim", ligne 7. On voit très
21 clairement "razumim".
22 Q. D'accord. En fait, moi, je l'ai à la ligne 9. Je suis désolé. Sur ma
23 copie à moi, il semblerait que ce mot soit consigné à la ligne 9. Bon
24 d'accord. Alors je vous concède, c'était à la ligne 7.
25 Est-ce l'emploi de ce terme "razumim", contrairement à "razumem" ou
26 "razumijem", est-ce que ceci correspond au dialecte employé par M. Beara en
27 2008, et est-ce que ceci correspond à l'exemple que vous nous avez donné
28 s'agissant de M. Beara et de sa façon de parler le cakavien, un dialecte de
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1 Split, en 1994 [comme interprété] et en 2008 ?
2 R. J'ai écouté la bande audio, assez rapidement, je dois l'avouer. Il y a
3 très peu de mots, il y a très peu de matériel linguistique. La conversation
4 a eu lieu dans des circonstances très officielles. Une déclaration est
5 donnée au Procureur, et normalement dans ces cas-là on n'est pas détendu et
6 on parle de façon très littéraire. Donc le mot "razumim" a été employé par
7 M. Beara en avril aussi. Je l'ai entendu dire cela en avril, mais je
8 voudrais vous rappeler que nous avons vu dans les transcripts les versions
9 "razumim", "razumem" et "razumijem", mais jamais dans cette version-ci
10 entendue lors de la conversation avec Beara et telle qu'entendue sur cette
11 bande audio. C'est un élément qui m'est très important personnellement, car
12 c'est une preuve me permettant de conclure que j'ai fait mon travail de
13 façon correcte, sans fausse modestie. C'est une confirmation de ce que j'ai
14 pu conclure, car on entend ce terme en avril prononcé par Beara alors que
15 dans les transcripts que j'ai examinés on ne rencontre pas cette forme-là.
16 Q. Très brièvement -- je n'aurai besoin que de trois minutes - et je vous
17 remercie énormément, Monsieur le Président, de m'avoir accordé ce temps
18 supplémentaire. Si l'on prend le mot "lijepa" ou "lejepa" trois lignes plus
19 bas, à la ligne 12, est-ce que vous pourriez nous dire si ceci correspond à
20 une région ? Je crois que c'est à la ligne 12. On parle de "lijepa".
21 R. Hvala lijepa et hvala ljepa, donc la différence entre l-i-j-e-p-a et l-
22 j-e-p-a. Le mot l-j-e-p-a correspond plutôt à la variante occidentale d'une
23 langue qui était notre langue commune à nous tous, mais qui fait partie
24 maintenant de la langue littéraire croate.
25 Q. Je souhaiterais évoquer un autre sujet que j'ai oublié de mentionner.
26 Je sais que c'est quelque chose qui figure dans votre rapport. Cette
27 question a trait à l'écoute téléphonique du 13 juillet 1994 à 10 heures 09.
28 Professeur, est-ce que vous avez vu en examinant les transcripts des
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1 écoutes électroniques, avez-vous rencontré des traces du dialecte cakavien
2 de Split telles que nous les avons vues dans les conversations en 1995, en
3 juin et août de 2004 et 2008 ? J'aimerais que l'on parle de la conversation
4 interceptée le 13 juillet 1994 à 10 heures 09, et il s'agit de la pièce
5 P01130B en B/C/S, et en anglais, P01130E. Au début, on voit que Beara parle
6 -- c'est transcrit, mais ce n'est pas ce que l'on retrouve nécessairement
7 dans le manuscrit. Alors que veut dire "sjor" ?
8 R. C'est un romanisme de "signor". Dans la langue adriatique, c'est une
9 façon de dire "signor", alors "sjor". Cela dérive du cakavien et cela
10 n'apparaît qu'une seule fois. Des mots du type "sjor", "gospon", "berazer"
11 sont des mots qui sont très souvent employés comme des mots -- c'est un mot
12 qui sert pour accompagner, pour soutenir. Donc le mot "sjor" n'apparaissait
13 plus dans le texte. En avril, lors des entretiens qu'il y a eu avec M.
14 Beara, on ne retrouve pas ce type de mots. Cela je le trouve assez
15 inhabituel, je dois l'avouer.
16 Q. Pourriez-vous nous épeler ces mots pour le compte rendu d'audience ?
17 "Sjor", s - avec accent diacritique - j-o-r pour "sjor" dérivé de "signor".
18 Est-ce que vous le voyez ? Est-ce que vous pouvez nous dire si c'est bien
19 épelé pour le compte rendu d'audience ?
20 R. Oui, c'est bien épelé.
21 Q. Il nous reste encore une minute. Je me penche sur la dernière page de
22 votre rapport en anglais, à la page 30, avant-dernier paragraphe.
23 J'aimerais comprendre quelque chose concernant le mot "sjor" et son
24 contexte. Vous avez dit dans votre rapport - et je suis vraiment désolé si
25 je le lis rapidement. "En comparant les langues des conversations
26 interceptées alléguées, la façon dont parle M. Beara maintenant a fait voir
27 des différences diamétralement opposées. Les transcripts nous montrent des
28 traits du langage parlé à Split, une variante du cakavien, ékavien, mais il
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1 n'y a aucun trait morphologique cakavien alors que dans le domaine du
2 lexique ce n'est que le "sjor", épelé s - accent diacritique - j-o-r --
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Ostojic, j'aimerais retrouver
4 le passage, s'il vous plaît.
5 M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, page 30 en anglais, avant-dernier
6 paragraphe.
7 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] C'est 31, c'est à la page 31 en
8 anglais.
9 M. OSTOJIC : [interprétation] Excusez-moi, je suis en train de regarder la
10 page 30 depuis l'avant-dernier paragraphe. Oui, c'est l'avant-dernier
11 paragraphe.
12 Mme LE JUGE PROST : [interprétation] Mais chez nous, c'est à la page 31.
13 M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, c'est donc l'avant-dernier paragraphe du
14 rapport.
15 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, et nous prendrons une pause
16 bientôt, n'est-ce pas ? J'espère que vous allez pouvoir clore votre
17 interrogatoire principal.
18 M. OSTOJIC : [interprétation] Est-ce que vous l'avez, Juge Kwon ?
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur Ostojic. Très
20 bien, veuillez poursuivre.
21 M. OSTOJIC : [interprétation]
22 Q. Monsieur, je vais essayer de vous demander de nouveau ceci : vous dites
23 qu'il n'y a pas un seul trait qui est une variante du Chakavien, Ikavien,
24 il n'y a pas un seul trait morphologique dérivant du cakavien, alors que
25 vous dites que dans le domaine du lexique, il n'y a que le mot "sjor" qui a
26 été vu en juillet 1995, à 10 heures 09, lorsqu'on a intercepté cette
27 conversation, c'est là que vous avez rencontré le mot "sjor". C'est la
28 seule fois que vous avez trouvé ce mot ?
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1 R. Oui, c'est le seul exemple. Le seul exemple.
2 Q. Ma toute dernière question avant la pause. Est-ce qu'à l'exception du
3 1er août 1995, s'agissant de la conversation interceptée dont nous avons
4 parlé qui a eu lieu à 10 heures 02, s'agissant des signes plus que vous
5 avez mis en réponse aux quatre critères, est-ce que c'est la seule
6 conversation que l'on pourrait attribuer de façon raisonnable à M. Beara
7 sur la base d'une certitude linguistique ?
8 R. Je n'ai pas trouvé de fondement pour pouvoir attribuer quoi que ce soit
9 à lui, la seule possibilité la plus rapprochée qui nous permettrait
10 d'établir un lien et d'attribuer cette conversation à M. Beara, c'est la
11 troisième version de cette même conversation, et je crois que c'est cette
12 conversation du 15 juillet qui a eu lieu à 10 heures du matin. Nous avons
13 là trois versions d'une même conversation interceptée obtenues, selon moi,
14 en impliquant des interventions ultérieures et en faisant une équivalence
15 des trois textes enregistrés par trois personnes se trouvant à trois
16 endroits différents probablement.
17 Le transcript de cette écoute, c'est-à-dire ces trois transcripts m'ont
18 occupé le plus, j'ai passé le plus de temps à les examiner. Je les ai
19 comparés de façon très détaillée et, s'agissant des différences
20 linguistiques, je les ai comparés. Au tout début des transcripts, j'ai pu
21 constater qu'il y avait également un manque de correspondance pour ce qui
22 est des temps d'écoute, donc je n'ai pas pu m'expliquer ces incohérences
23 autrement que de dire ceci, ma conclusion finale est la suivante : il ne
24 s'agit pas de trois écoutes distinctes, mais bien d'une seule conversation,
25 d'une seule écoute dont on a transcrit trois versions différentes en les
26 peaufinant. Le troisième transcript s'apparente le plus à Beara, correspond
27 le plus à son dialecte, mais je ne pourrais pas dire que c'est l'écoute qui
28 pourrait lui être attribuée à 100 %.
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1 Q. [aucune interprétation]
2 M. OSTOJIC : [interprétation] Monsieur le Président, il faudrait peut-être
3 prendre une pause maintenant.
4 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien, faisons une pause de 25
5 minutes.
6 --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.
7 --- L'audience est reprise à 11 heures 04.
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Ostojic.
9 M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai donné --
10 je remercie la Chambre pour vos commentaires et pour votre générosité.
11 Merci de me laisser aller au-delà du temps qui m'avait été alloué et nous
12 allons nous arrêter ici et laisser à l'Accusation le soin de poser
13 d'éventuelles autres questions.
14 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien.
15 Dites-moi si c'est le cas, Monsieur Zivanovic.
16 M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je n'ai pas
17 d'autres questions.
18 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.
19 Madame Nikolic.
20 Mme NIKOLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai pas
21 d'autres questions, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Lazarevic.
23 M. LAZAREVIC : [interprétation] Pas de questions.
24 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
25 Mme FAUVEAU : [hors micro]
26 M. LE JUGE AGIUS : [aucune interprétation]
27 M. JOSSE : [interprétation] Pas de questions.
28 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Merci.
Page 24652
1 Monsieur Sarapa.
2 M. SARAPA : [interprétation] Pas questions, merci.
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Voilà qui met la balle dans votre camp,
4 Monsieur Vanderpuye.
5 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
6 Bonjour à tous. Bonjour à mes éminents collègues et amis.
7 Contre-interrogatoire par M. Vanderpuye :
8 Q. [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Remetic.
9 R. Bonjour.
10 Q. Je m'appelle Quekhu Vanderpuye, et au nom de l'Accusation et du bureau
11 du Procureur, je vais vous poser des questions -- questions
12 supplémentaires, et je vais vous poser des questions quant à certains
13 éléments. Si jamais mes questions ne sont pas suffisamment claires,
14 n'hésitez pas à m'en faire part, je viellerais à les reformuler de manière
15 à ce que vous les compreniez bien et à ce que nous puissions nous
16 comprendre vous comme moi.
17 Vous avez déposé de façon assez complète à propos de l'évolution des
18 dialectes dans l'espace de l'ancienne Yougoslavie. Vous nous avez parlé des
19 raisons historiques qui expliquent cette évolution. Vous nous avez parlé
20 des contacts existants entre les populations, des échanges qui ont existé
21 également au plan linguistique entre des individus et l'acquisition de
22 dialecte. Je souhaiterais à présent que nous reportions notre attention, si
23 vous le permettez sur un aspect plus pratique de votre rapport. J'ai noté
24 dans votre rapport en page 17, un certain nombre de termes empruntés par
25 [imperceptible], vous indiquez qu'elle est particulièrement présente cette
26 langue dans la zone du littoral. Vous dites que
27 M. Beara y a séjourné un certain temps.
28 Vous nous parlez de termes tels que "sjor," "gospon," "burazu" et ces
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1 types de termes, qui apparaissent fréquemment dans le langage parlé de tous
2 les jours des gens qui les utilisent. Vous dites que ça n'apparaît pas dans
3 la version au transcript et vous dites que vous ne les avez pas trouvés
4 même après les avoir cherchés.
5 Alors, si vous le permettez, dans une des écoutes téléphoniques que
6 vous avez examinées remonte au 13 juillet à 10 heures 09, et là, je
7 souhaiterais qu'on nous la présente cette pièce 65 ter sur le prétoire
8 électronique. Il s'agit du numéro 1130 en version B/C/S, 1130B, et je
9 pense que le mieux serait que nous portions notre attention sur cette pièce
10 à conviction.
11 Alors je propose que vous vous reportiez à la page 4, cote ERN numéro
12 de page se terminant par 815. Très bien. Alors je vous propose à présent
13 d'examiner les termes attribués à B si à partir du bas de la page, vous
14 allez jusqu'à la troisième ligne où on voit apparaître le terme "burazeru."
15 Monsieur Remetic, voyez-vous ce terme ?
16 R. Oui, je le vois.
17 Q. Alors je vous propose de revenir à la page numéro 813 à présent. En
18 fait, avant de faire cela, permettez-moi de vous dire ceci -- la phrase qui
19 apparaît ici, et je vous demanderais de bien vouloir en faire lecture de
20 manière à ce que nous sachions que nous parlions tous de la même chose.
21 Veuillez en faire lecture, Monsieur le Témoin, s'il vous plaît.
22 R. "Bien. Excellent. Ecoute, burazer."
23 Q. Très bien. Merci. Je vous propose donc de passer à la page se terminant
24 par - on m'interrompt - on me dit page 6.
25 M. VANDERPUYE : [interprétation] Page 6, Monsieur le Président. ERN 813 en
26 principe. Veuillez remonter une page plus haut, 813, s'il vous plaît. La
27 page s'affiche sur le prétoire électronique. Merci beaucoup.
28 Q. Deuxième ligne attribuée à B. Voyez-vous le terme "burazeru" ici,
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1 également, je vous demanderais d'en faire lecture ?
2 R. "Excellent, excellent, burazer, c'est super."
3 Q. Je vous demande maintenant de bien vouloir passer à la page ERN 810.
4 Très bien. Ça me parait bon. En dessous du passage marqué d'une croix dans
5 le texte manuscrit, vous voyez la référence qui est faite au terme "sjor,"
6 Sjor Lucic. Voyez-vous ce terme ?
7 R. Oui, oui, oui. Je vous dis : "Salut, Sjor Lucic. Comment vas-tu ?"
8 Q. Très bien. Alors, ces termes apparaissent tous dans cette écoute
9 téléphonique, n'est-ce pas ?
10 R. Oui.
11 Q. Je vous demanderais maintenant de bien vouloir porter votre attention
12 sur l'écoute téléphonique 65 ter 1178. 1178B, C, me semble-t-il, c'est bien
13 C ? Non, B. Oui, parfait. Merci beaucoup. Je vous demanderais maintenant de
14 porter votre attention sur la cinquième ligne à partir du bas de la page.
15 R. Oui, oui, je vous suis dans le texte, oui.
16 Q. Voyez-vous que cette ligne est attribuée à B dans cette conversation,
17 n'est-ce pas, la ligne qui commence par "Tako" ? Voyez-vous cela ?
18 R. Oui. Alors, "Burazer," tu m'entends.
19 Q. Très bien. Il s'agit du même terme que celui que nous avions vu lors
20 des écoutes téléphoniques du 13 juillet, n'est-ce
21 pas ?
22 R. Oui, oui.
23 Q. Aux fins de compte rendu, il s'agit de l'écoute téléphonique ici du 15
24 juillet 1995, 9 heures 54.
25 Me Ostojic vous a également présenté un certain nombre d'autres
26 retranscriptions d'écoutes téléphoniques. Pièce 65 ter 3603. Peut-on passer
27 à la deuxième page, s'il vous plaît ? J'ai un petit problème de numération
28 de page, je vous demanderais un peu de patience, si vous voulez bien,
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1 voilà, très bien, à peu près au milieu de la page, la page qui apparaît à
2 la droite de l'écran, vous voyez les propos attribués à M. Beara "Dobro
3 burazer." Voyez-vous cela ?
4 R. "Bien, Broth, mon -- voilà Mrki qui veut t'entendre, qui veut te
5 parler."
6 Q. Très bien. Je souhaiterais passer à présent, si vous le permettez, à la
7 pièce 65 ter 3607. Désolé, aux fins de compte rendu 3603 correspond à une
8 écoute téléphonique remontant au 6 juin 1995 entre Tolimir et Beara.
9 Maintenant, pièce 3607 porte la date du 05/12/1995 entre Mrkovic et Beara.
10 Et si vous le permettez, je vous demanderais un peu de patience, ERN 7107,
11 s'il vous plaît. La sixième page à partir du bas de la page termes
12 attribués à M. Beara : "Neman buraz." Voyez-vous ces termes ?
13 R. "Non, je n'ai pas, burazer. Il s'agit de la direction évidemment de
14 nous dire, de nous rendre. Une seconde, s'il te plaît." Je crois que --
15 excusez-moi, dans cet enregistrement audio, je crois qu'on devrait le lire
16 "burazer." Je vous en prie, voulez-vous me renvoyer dans le temps un petit
17 peu ? Donnez-moi le temps de l'interception et la date ?
18 Q. Je peux vous donner la date, il me semble vous avoir signalé qu'il
19 s'agissait du 5 décembre 1995. Pour ce qui est de l'heure, je ne peux pas
20 vous la communiquer, mais je peux la chercher si vous en avez besoin. Dans
21 l'intervalle, je vais confirmer --
22 R. Oui, oui, ici dans l'enregistrement audio on peut entendre "burazer."
23 C'est une faute de frappe qui s'est glissée dans cette version en
24 transcription, d'ailleurs il y a pas mal d'erreurs qui se sont glissées
25 comme ça, mais on voit bien "burazer," là-bas. Je vous remercie.
26 Q. Très bien. Est-ce cela s'écarte d'un point de vue linguistique des
27 autres moments où vous avez eu l'occasion d'observer ce terme dans d'autres
28 écoutes téléphoniques ?
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1 R. Dans quel sens ? Dites-vous "buraz" et burazer" ? C'est là où vous
2 cherchez des écarts ? Avec votre permission, puis-je dire que "sjor" et
3 "burazer" n'ont pas la même signification. "Sjor" représente un chakavisme,
4 un élément de dialecte chakavien et que l'on ne peut rencontrer ou entendre
5 que dans les régions littorales. Il s'agit d'un romanisme, ça vient d'une
6 langue romane. Alors que "burazer" c'est un emprunt au turc, c'est un
7 turcisme et qui est emprunté dans l'ensemble des régions où vivaient les
8 Serbes.
9 Mon frère, il y a cinq jours, m'a appelé et m'a dit comme suit : "Burazer,
10 quand viendras-tu ?" Le secrétaire de l'Académie serbe des sciences et des
11 arts, Radisav Boskovic, pendant une période de dix années pendant laquelle
12 il a rempli la fonction qui est la sienne, des centaines de fois, en me
13 parlant, a justement emprunté des termes parmi lesquels le terme de
14 "burazer" figurait. Or, on emprunte ce terme si on veut mettre l'accent sur
15 tel ou tel élément des propos, mais d'ordinaire pour faire en sorte qu'on
16 formule un jugement qui tient place d'un autre jugement : ce n'est pas
17 comme ça, mon cher burazer, mon très cher frère. Cela est présent dans des
18 émissions de télévision de la station de télévision de Belgrade.
19 D'ailleurs, on n'a qu'à feuilleter les différents dictionnaires de la
20 langue serbe. Il y a une formule abrégée, "buraz", de "burazer," qui semble
21 être plus fréquente en Bosnie qu'en Serbie. Donc le terme de "burazer" n'a
22 pas été vraiment marqué comme étant dominant.
23 Q. Monsieur Remetic, je vous pose ces questions parce que dans votre
24 rapport vous avez écrit que vous estimiez l'absence des termes "sjor",
25 "gospon" et "burazer" dans les écoutes téléphoniques que vous avez
26 examinées. Mais maintenant vous nous dites que ce terme "burazer" n'a
27 strictement aucun intérêt d'un point de vue linguistique ni aucune
28 importance. Alors je vous pose la question : pourquoi est-ce que vous avez
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1 accordé tant d'importance dans votre rapport à ce terme ?
2 M. OSTOJIC : [interprétation] Je formule une objection. Je crois que le
3 bureau du Procureur est en train d'essayer de faire une représentation
4 inexacte du rapport du professeur.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.
6 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je peux lire ce qui figure dans le
7 rapport.
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Madame Fauveau.
9 Mme FAUVEAU : -- de cette conversation --
10 M. VANDERPUYE : [interprétation] -- il s'agit de la page 17 dans le
11 rapport, deuxième paragraphe de la version anglaise, où il est dit : "Le
12 nom 'sjor' représente un emprunt typique des langues romanes qui trouvent
13 ses racines essentiellement dans les zones du littoral et qui indiquent
14 qu'une personne utilisant ce terme a vécu sur le littoral pendant un
15 certain temps. Ceci étant dit, dans le texte utilisé dans 18
16 transcriptions, il n'apparaît qu'une seule fois. C'est là un élément
17 symptomatique dans la mesure où les termes tels que 'sjor' 'gospon'
18 'burazer', entre autres, apparaissent fréquemment dans le langage parlé
19 quotidien de ceux qui utilisent ces langues alors que ces termes
20 n'apparaissent pas dans les transcriptions d'écoute que j'ai examinées."
21 Q. Monsieur le Témoin, j'affirme que, dans les écoutes téléphoniques dont
22 vous avez pu voir les transcriptions, on voit apparaître le terme "burazer"
23 et c'est d'ailleurs ce qui figure dans votre rapport.
24 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Ostojic.
25 M. OSTOJIC : [interprétation] Non, je crois qu'il y a là une représentation
26 inexacte --
27 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Comment peut-il représenter de façon
28 inexacte ce qui s'est dit s'il fait la lecture du rapport ?
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1 M. OSTOJIC : [interprétation] Parce que, dans sa question --
2 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous demande de vous arrêter, s'il
3 vous plaît, Maître Ostojic. Monsieur le Témoin, répondez, s'il vous plaît.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur, ce que vous venez de lire ne
5 concerne que le terme de "sjor", c'est seulement le terme de "sjor" qui est
6 intéressant ici, lequel substantif devrait pouvoir être entendu
7 fréquemment, car d'ordinaire les mots du type "sjor" "gospon" et "burazer"
8 -- "burazer" est utilisé, mais pas "sjor". Voilà pourquoi j'ai dit que ceci
9 était insuffisant pour moi. Monsieur, si vous me le permettez, dans le
10 fragment précédent, nous devons lire pour "burazer" même l'emprunt en turc.
11 "Burazer" sous forme abrégée "buraz", territorialement parlant, ne se voit
12 pas limité, encore que ce terme se fait plus fréquent dans les régions
13 occidentales, par conséquent, celle de Bosnie. Là précisément, dirais-je,
14 dans la pratique quotidienne peut-on l'entendre à la télévision, à la radio
15 et dans la communication directe entre les personnes, le terme "burazer"
16 est entendu également pratiqué en Serbie. Or, "sjor" et "burazer" n'ont pas
17 la même signification dans l'affaire qui nous concerne de très près ici.
18 M. VANDERPUYE : [interprétation]
19 Q. Est-ce que vous contestez le fait que M. Beara utilisait le terme
20 "burazer" ? Est-ce que vous adoptez une position contraire à cette
21 affirmation ?
22 R. Non, je ne conteste pas qu'il ait pu utiliser ce terme, je ne le
23 conteste pas non plus lorsqu'il s'agit de parler de moi, de mes proches, de
24 mes parents, cousins et amis. Toutes les fois où mon frère veut me parler,
25 il m'appelle et me dit : "Burazer." Mais, Monsieur, pour autant, il n'y a
26 pas de "sjor" chez nous, c'est ça qui semble être significatif, c'est ce
27 qui indique le fait qu'il y a une répétition de ce terme. Mais ceci n'est
28 pas le cas pour parler de "sjor".
Page 24659
1 Q. Très bien. Le terme "burazer" utilisé dans les écoutes téléphoniques
2 que vous avez examinées, est-ce que vous vous en êtes servi afin de savoir
3 si le locuteur en question était M. Beara ou pas ? Ou est-ce qu'au
4 contraire, vous avez laissé de côté complètement ce terme ?
5 R. Monsieur, quant à moi, j'ai tout pris en considération; quand je dis
6 tout, cela semble insuffisant. Le corpus pris dans son ensemble était petit
7 quantitativement parlant. C'est ce que je voulais dire à plusieurs
8 reprises. Du point de vue linguistique, il s'agit de parler d'une
9 latéralité également et d'un certain appauvrissement, parce que les ordres
10 sont très courts, les réponses très courtes, les questions elles aussi,
11 sans que l'on puisse deviner le contexte et le sens. Pris dans son
12 ensemble, lorsque je traite du terme "burazer" pour les parties
13 occidentales du pays, c'est le terme de "buraz" qui me semble être plus
14 près. En Serbie, ce serait "burazer" et en Bosnie, "buraz". Quant à moi,
15 j'ai considéré ce terme comme étant l'un des éléments pour procéder à un
16 certain pesage pour voir quels sont les faits qui vont en faveur de ce que
17 je dis pour supposer qu'il s'agissait là, dans ce temps-là de M. Beara. Or,
18 dans mon rapport j'ai dit que je me suis occupé de cette besogne de sorte à
19 chercher d'abord des éléments sous forme de preuve comme étant point
20 d'appui pour moi, pour bien fonder la chose, pour que le tout dans la
21 transcription puisse être lié à M. Beara.
22 Q. Oui, je comprends bien, mais ce que je souhaiterais, c'est que vous
23 répondiez à oui ou par non à ma question. Est-ce que vous vous êtes servi
24 de ce terme pour déterminer s'il s'agissait bien de M. Beara ou pas dans
25 ces écoutes téléphoniques ?
26 R. Oui, j'ai pris cela en considération, c'est-à-dire que j'ai dû
27 respecter cela comme étant un fait, mais puis-je vous le redire, ce qui me
28 semble substantiel, c'était de voir la situation pour traiter des variantes
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1 à titre de distinctions à faire, et lesquelles distinctions sont tout à
2 fait claires.
3 Q. Très bien. Donc vous l'avez pondéré de façon différente en termes
4 d'importance dès lors qu'il s'agissait d'identifier le locuteur. C'est bien
5 ce que vous êtes en train de nous dire ?
6 R. Qu'est-ce que vous voulez dire par là, que j'ai peut-être beaucoup trop
7 appuyé en apportant trop de poids ou quoi ? Pour moi, aura du poids
8 beaucoup plus le cas où on dit "podjeliti" ou "podijeliti" sans parler de
9 "burazer", parce que du point de vue variante territoriale, le terme
10 "burazer" n'et pas quelque chose de significatif, de révélateur, alors que
11 ceci est le cas. Si par exemple, "sjor" a été répété autant de reprises que
12 le terme de "burazer", alors "sjor" aurait vraiment du poids.
13 Q. Très bien. Merci beaucoup. Vous êtes linguiste, n'est-ce pas ? Vous
14 connaissez le terme "dialectijge" [phon], n'est-ce pas ? Vous connaissez ce
15 terme, n'est-ce pas, Monsieur ?
16 R. Mais bien sûr que je connais. Bien sûr, je sais ce que ça veut dire,
17 idiodialectique.
18 Q. Si vous savez ce que c'est, pourriez-vous nous dire ce que signifie le
19 terme idiodialectal ?
20 R. Quand on parle de terme idiodialectal, je considère qu'il s'agit là
21 d'une expression linguistique propre à un individu, laquelle expression
22 s'était formée pendant un temps certain et qui fait qu'on peut reconnaître
23 la personne qui emprunte ce dialecte. C'est un terme qui désigne tel ou tel
24 individu.
25 Q. C'est exact, n'est-ce pas, il peut également correspondre à certains
26 schémas récurrents dans le parler, n'est-ce pas ?
27 R. Bien sûr.
28 Q. Moi, je suis anglophone, et j'utilise le terme "man" assez fréquemment
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1 dans mon parler. Et dans les schémas récurrents de mon parler, c'est
2 quelque chose qui est aisément identifiable. Est-ce que vous vous êtes
3 penché sur la façon de parler de M. Beara, indépendamment du dialecte dans
4 lequel il s'exprimait, dès lors qu'il s'agissait d'identifier la personne
5 dont on entendait la voix dans ces écoutes téléphoniques ?
6 R. Pendant sept ou huit heures, sept heures plus précisément, j'ai été en
7 compagnie de M. Beara. Je l'ai écouté parler. Personnellement, je suis
8 intervenu dans des conversations. La seule chose que je suis capable de
9 dire maintenant là-dessus, c'est que ce qui m'en a imposé, c'est que lui en
10 impose par son calme, le caractère avisé, par sa tenue. J'ai pu me rendre
11 compte du fait qu'il empruntait le parler de Split, j'ai pu me rendre
12 compte du fait que pour parler de sa formation littéraire, tout vient
13 d'ordinaire de la langue littéraire croate; et je n'ai pas eu suffisamment
14 de temps pour me rendre compte du fait très précisément de mots ou de
15 phrases ou de certains points d'appui : "Hé, homme", et cetera, ou
16 "burazer", et cetera. Par conséquent, je n'ai pas pu vraiment me rendre
17 compte d'une grande fréquence à laquelle il empruntait de tels éléments, il
18 n'y a pas eu suffisamment de temps. On n'a pas eu vraiment de possibilités.
19 Si on était dans une conversation beaucoup plus longue, un peu détendue,
20 j'aurais pu peut-être m'en rendre compte, mais il m'a été tout à fait aisé
21 de voir que j'avais en face de moi un Cakavien, un Splitois.
22 Q. La raison pour laquelle je vous pose la question, et je tiens à être
23 certain que nous parlions bien de la même chose. Lorsque vous nous avez dit
24 que vous n'aviez pas eu l'occasion de vous pencher là-dessus, vous parlez
25 de ces sept à huit heures d'entretien avec
26 M. Beara au mois d'avril. C'est exact, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Moi, ce dont je vous parle, c'est de la chose suivante, est-ce que vous
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1 avez pu faire des observations s'agissant de cela ayant trait aux écoutes
2 téléphoniques sur lesquelles on entend la voix qu'on attribue à M. Beara ?
3 En d'autres termes, y a-t-il des points communs entre la forme
4 idiodialectale trouvée dans les écoutes téléphoniques que l'on attribue à
5 M. Beara séparément du point de vue de l'analyse ou logique du dialecte
6 parlé dans ces écoutes téléphoniques ?
7 R. Comme vous avez pu vous rendre compte à la lecture de l'analyse faite
8 par moi, le bureau du Procureur lui aussi a pu conclure, si je ne m'abuse
9 pas, que tel est le cas, que dans un certain pourcentage, ces
10 transcriptions ne sont pas attribuées à Beara. Ensuite, il y a du point de
11 vue intervention lieu de parler de fragmentation, tout est court, tout est
12 fragmenté, et on n'est pas en mesure de porter un jugement linguistique
13 quelconque là-dessus. Et quatrièmement, il a été dit que toutes ces
14 transcriptions, toutes ces interceptions ne s'accordent pas du point de vue
15 linguistique. Il a été dit clairement et de façon tout à fait stricte que
16 souvent il y a des écarts à signaler entre les transcriptions et les textes
17 retapés. Je voudrais rappeler à votre attention la date du 1er août, par
18 exemple, à savoir les conversations qui ont été menées au cours de la
19 matinée et au cours de l'après-midi du même jour, j'ai dit dans mon texte
20 qu'il s'agit là d'un mélange. Voyez-vous, Monsieur, un individu, sans faire
21 des efforts vraiment importants, ne pourrait jamais le faire. Moi, qui suis
22 dialectologue, spécialiste, je pourrais le faire, après une si longue
23 carrière, je peux le faire. Secundo, j'ai parlé par exemple du rapport, et
24 j'ai pu noter la date du 15 juillet, il y a eu un dilemme où il a fallu
25 trancher, s'agissait-il d'une ou de trois transcriptions. Je l'ai appelé
26 "la peau de léopard". Que s'est-il passé avec la peau de léopard ? Que
27 peut-on voir comme étant une particularité à regarder cette peau de léopard
28 s'il y a tant de distinctions à signaler ?
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1 Bref, je voulais dire que dans les transcriptions, il n'y a pas
2 suffisamment de texte qui devrait être consistant, cohérent, pour que l'on
3 puisse faire ressortir une particularité propre au locuteur -- à un
4 locuteur. Je voudrais rappeler à votre attention comme suit : tous les
5 termes attribués supposément -- et supposément par l'opérateur, attribués à
6 Beara, ce que j'ai dû faire entrer dans tout cela, dans mon texte, je n'ai
7 reçu que deux pages et demie. La moitié de cela aurait pu être rejetée
8 comme étant évidemment des détails tout à fait anodins, quelque chose de
9 tout à fait sans importance significative. Pour le reste, il y a évidemment
10 force et moult, je dirais, distinctions à prendre en considération et à
11 signaler à votre attention.
12 Q. Très bien. Merci beaucoup, Monsieur Remetic.
13 Je souhaiterais à présent savoir ceci, et ce que j'essayais de vous
14 demander, c'était la chose suivante. Vous voyez les termes "burazer,"
15 "buraz," qui apparaissent dans un certain nombre d'écoutes téléphoniques.
16 J'ai attiré votre attention sur ce fait, et apparemment cela a été attribué
17 à M. Beara. 65 ter 3607, donc du
18 5 décembre 1995. Ces termes apparaissent également à une, deux ou trois
19 autres reprises, et dans cette écoute téléphonique-là ainsi que dans celle
20 du 6 juin 1995 à une reprise. Le terme apparaît dans l'écoute téléphonique
21 - un tout petit peu de patience, s'il vous plaît - remontant au 13 août
22 1995, une, deux fois. Le terme apparaît dans une autre écoute téléphonique.
23 Il s'agissait de la 3627 65 ter. La 3626 65 ter également est une pièce à
24 conviction où on trouve ce terme à une, deux, trois, quatre reprises. Et on
25 retrouve ce terme dans l'écoute téléphonique portant la date du 15 juillet
26 1995 que nous avons examinée ensemble, Monsieur, ce [imperceptible] une
27 fois. Le terme apparaît dans l'écoute téléphonique du 13 juillet 1995 deux
28 fois, comme je vous l'ai dit. Et la cote 65 ter pour cette écoute est 1130.
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1 Par ailleurs, je ne sais pas si vous avez accordé beaucoup
2 d'attention à la question de savoir si, oui ou non, M. Beara avait tendance
3 à utiliser des termes empruntés à des langues étrangères dans son parler.
4 Est-ce que cela est une des caractéristiques de sa façon de parler ? Est-ce
5 que vous vous y êtes intéressé ? En fait, je souhaiterais attirer votre
6 attention, si vous le permettez, sur l'écoute téléphonique du 1er août 1995.
7 Il s'agit de la pièce à conviction 1380 65 ter; c'est exact ? Oui, oui,
8 c'est bien cela. Ecoute téléphonique à 22 heures 45. Il y a un certain
9 nombre de termes sur lesquels je souhaiterais attirer votre attention dans
10 cette écoute téléphonique. Je pense que nous l'avons. Très bien.
11 Je vous propose de porter votre attention sur la deuxième page de la
12 version en B/C/S. Très bien. Très bien. Dernier paragraphe de cette écoute
13 qui se termine par les termes "ceka dalje." Vous le voyez, à droite de
14 l'écran devant vous, à peu près au milieu de la page, "ceka dalje."
15 D'accord ?
16 R. [aucune interprétation]
17 Q. Ensuite, la phrase qui est juste au-dessus de celle-ci --
18 R. [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE AGIUS : [hors micro]
20 [interprétation] Un petit instant, Monsieur le Professeur, un petit
21 instant, si vous le permettez. Je ne sais pas si je suis le seul à avoir
22 l'interprétation en français, donc il y a un petit problème. Vous pouvez
23 poursuivre.
24 M. VANDERPUYE : [interprétation]
25 Q. Permettez-moi, Monsieur, de manière à être sûr que nous savons bien de
26 quoi nous parlons. Vous voyez le terme "burazer," numéro 999 au milieu de
27 la page. Vous voyez cela ? Le paragraphe qui précède cette mention "broj"
28 [phon] 999, juste au-dessus.
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1 R. Oui, je vois bien.
2 Q. Donc vous voyez "ijerko ova" ?
3 R. Encore que non, je ne vous suis pas dans le texte. Oui. Alors, "Oui, je
4 suis là." Je veux vous donner -- non, non, non. "Alors, je suis là, oui."
5 Q. Juste au-dessus de cela.
6 R. Oui, maintenant j'y suis. Je vous suis dans le texte maintenant. Encore
7 celui-là d'Uzice me dit. Oui, d'accord.
8 Q. Très bien, nous y sommes. Dans ce paragraphe, vous voyez le terme
9 "drugi" et ensuite "befel" [phon].
10 R. "Befel" ? Oui. Le second "befel" c'est "attends" et puis "tu n'as qu'à
11 attendre," la suite.
12 Q. Vous savez ce que signifie le terme "befel" ?
13 R. L'ordre. Cela veut dire un ordre, un ordre donné par quelqu'un.
14 Q. Est c'est bien un mot d'origine allemande, n'est-ce pas ?
15 R. Befel, befel. Non, je ne le sais pas, je dois le reconnaître.
16 Q. Très bien.
17 R. [aucune interprétation]
18 Q. Qu'en est-il du terme "muchachos" ? C'est un terme que vous connaissez
19 ?
20 R. Los muchachos. Non. Pour ce qui est évidemment de mes activités à moi,
21 cela ne m'est pas très connu.
22 Q. Très bien --
23 R. Excusez-moi. Vous m'avez posé la question tout à l'heure au sujet du
24 terme "burazer." Si vous me le permettez, il y a toute une série et une
25 suite de questions. Essayons de tirer au clair le terme de "burazer," s'il
26 vous plaît, si cela est possible. Sur la base d'une analyse à faire du
27 terme de "burazer" et si le terme apparaît fréquemment, je n'ai pas pu
28 attribuer la transcription telle que dans le texte à Ljubisa Beara. En
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1 premier, je veux que vous compreniez bien : chaque Ljubo des forces armées
2 en parlant de "burazer" -- en empruntant ce terme-là, voilà, mon frère me
3 traite de "burazer," moi, tout le long du pays, et voilà où est le
4 problème.
5 Q. Très bien. Mais la question que je vous pose est la suivante : est-ce
6 que vous vous êtes intéressé à la question de savoir si M. Beara avait
7 tendance à utiliser des termes empruntés à des langues étrangères qui
8 n'appartiennent pas à son dialecte et qui ont une influence étrangère dans
9 sa façon de parler, dans sa façon de parler, lui en tant qu'individu et non
10 pas lui en tant que membre de la communauté cakavienne, ékavienne, ou
11 communauté locutrice de cette façon de parler ?
12 R. Je n'ai pas pu me rendre compte du fait que lui devrait procéder ainsi
13 plus que tous les autres hommes avec lesquels lui a communiqué. A titre
14 d'exemple, avec votre permission, puis-je vous dire que dans telle ou telle
15 conversation, vous avez la possibilité d'entendre, c'est comme ça, et puis
16 "schluss." Si on ne connaît pas évidemment la langue allemande, alors là,
17 on s'y perd, mais c'est comme ça le point, c'est tout. Voyez-vous les gens
18 qui empruntent d'autres langues étrangères, il n'y a plus de frontière.
19 Nous sommes tous sans cesse, sujets à des impacts étrangers. On écoute la
20 radio, la télévision et on est forcément censé utilisé des termes
21 étrangers. Je n'ai pas pu me rendre compte de fait que Ljubisa Beara aurait
22 été différent de moi ou d'autres personnes.
23 Q. Peut-être ne formulais-je pas ma question de façon suffisamment claire.
24 Lorsque vous avez examiné le texte des écoutes téléphoniques dont vous avez
25 fait l'analyse, vous êtes-vous intéressé à la question de savoir s'il y
26 avait dans ce texte, le texte des propos attribués à M. Beara, des termes
27 étrangers; et est-ce que vous vous êtes servi de ce critère pour déterminer
28 si ces propos étaient effectivement tenus par M. Beara ou pas ? C'est la
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1 seule question que je vous pose. Si ce n'est pas le cas, dites non. Si en
2 fait vous -- vous, vous en êtes servi, alors dites-nous oui.
3 R. Oui, mais entendons-nous. Moi, je me suis occupé de dialecte, de
4 dialectisme, c'est le terme de "sjor" qui a offusqué mon regard et puis
5 sans plus apparaître. Et je vous ai dit que ce qui n'a pas été marqué,
6 c'est le terme de "burazer." Et je n'ai pas vraiment prêté une attention
7 toute particulière à des emprunts de langues étrangères et lesquels
8 emprunts ne se font pas très fréquents dans toute cette instruction.
9 Q. A vrai dire il n'y en a pas vraiment beaucoup des transcriptions
10 d'écoutes téléphoniques qui sont attribuables à
11 M. Beara, n'est-ce pas ?
12 R. Monsieur, d'après moi, une seule attribution faite mais là aussi il
13 faut bien se démarquer, il faut prendre des réserves. A mon sens, si pour
14 autant vous avez des arguments solides pour prouver qu'il s'agit évidemment
15 de termes à attribuer à Beara, je vous en prie, procéder. Nous sommes en
16 date du 1er août, la première conversation semble avoir le moins de
17 décalage, le moins d'écart, semble être le moins en collision avec Ljubisa
18 Beara d'aujourd'hui que nous avons en face de nous.
19 Q. Très bien. A ce moment-là, ma question est la suivante, lorsque vous
20 avez vu le terme "befel" dans l'écoute téléphonique du 1er août 1995 à 22
21 heures 45, numéro de pièce à conviction 65 ter 1380, est-ce que vous vous y
22 êtes intéressé après avoir vu le 65 ter 3626 dans lequel apparaissent les
23 termes "los muchachos" dans les propos supposés attribuables à M. Beara ?
24 Est-ce que vous vous y intéressé à cette question ? Est-ce que vous vous y
25 êtes intéressé dans le contexte de la pièce à conviction 65 ter 3627 où on
26 voit apparaître le terme "professional," en anglais dans le texte dans les
27 propos attribués à M. Beara ? Est-ce que vous vous y êtes intéressé, oui ou
28 non ?
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1 R. Monsieur, il y a un dicton serbe -- dicton populaire serbe qui dit
2 qu'écouter même en présence d'un empereur, une torche, un bout de bois ne
3 saurait être suffisant pour en faire un grand feu. Je voulais dire qu'un
4 seul exemple extirpé comme cela ne suffit par pour qu'on puisse formuler un
5 jugement de principe -- de base. Or, en bavardant avec des gens, vous
6 pouvez toujours entendre -- dire donc : "Mon vieux" - pour plaisanter -
7 "est-ce que ta femme t'a envoyé en befel, est-ce qu'elle t'a donné un tel
8 ou tel ordre pour faire quelque chose dans la vie, la vie de tous les jours
9 ?" Par conséquent, ce terme n'a pas été vraiment marqué. Il ne sera pas à
10 titre d'indication, ne suffit pas pour que l'on puisse avec sérieux
11 identifier le locuteur en question. Pour faire un jugement ne serait-ce que
12 pour parler de la profession qui est la mienne, les jugements pourraient
13 porter évidemment doivent être fondés sur des faits, plus de faits vous
14 avez, vous, votre jugement est mieux fondé. Et qui plus est, il y a des
15 contre arguments, il y a ces éléments-là qui sont de nature à éliminer ce
16 que vous avez voulu avancer tout à l'heure.
17 Q. Je comprends bien cela; merci beaucoup pour cette réponse. Mais ce qui
18 est intéressant c'est que vous faites référence à ce proverbe, l'habit ne
19 fait le moine ou l'équivalent dans votre langue --
20 R. Oui, oui, une hirondelle, dirais-je.
21 Q. L'hirondelle ne fait pas le printemps, mais, en fait, vous, vous
22 analysez non moins de neuf écoutes téléphoniques, supposées être
23 attribuables à M. Beara, le tout sur une période d'un mois à peu près.
24 C'est à peu près le laps de temps qui s'est écoulé au cours duquel il y a
25 eu des écoutes téléphoniques et qui incluait deux pages et demie de texte
26 que vous avez pu, dont vous n'avez pas tenu compte, que vous pouviez
27 exclure que M. Beara était le locuteur dans plusieurs de ces écoutes
28 téléphoniques. Ceci se base sur sept ou huit heures d'entretien initié avec
Page 24669
1 M. Beara, mais je passerais aux éléments spécifiques dans quelques
2 instants.
3 R. Oui, mais, Monsieur, quant à moi, moi, j'ai consulté toutes les
4 transcriptions de ces conversations interceptées. Pour certaines d'entre
5 elles, il n'y a pas suffisamment de faits linguistiques. Moi, je disais
6 toujours que je n'ai pas sur la base de quoi fait telle ou telle
7 attribution, attribué tel ou tel propos, partie intégrante de la
8 transcription faite à M. Beara, notamment dans le contexte des propos qui
9 sont ceux d'aujourd'hui de M. Beara.
10 Q. Très bien. Si vous le permettez, je souhaiterais passer à l'annexe de
11 votre rapport, 2D551. Alors si on pouvait faire apparaître cela à droite,
12 ce serait bon peut-être d'avoir la version anglaise également à l'écran,
13 sur le prétoire électronique, très bien.
14 Alors je souhaiterais revenir sur les codes que vous utilisés à droite de
15 votre écran, c'est peut-être en deuxième page dans la version anglaise.
16 Quoi qu'il en soit vous l'avez décrit au cours du contre-interrogatoire,
17 mais le zéro indique que vous disposiez de données insuffisantes, donc
18 j'imagine données insuffisantes pour pouvoir tirer quelques conclusions
19 quant aux catégories indiquées au haut des différentes colonnes qui sont le
20 participant s'est révélé être ou a été révélé comme étant Beara. Deuxième
21 colonne le dialecte révèle-t-il clairement l'origine du locuteur. Troisième
22 colonne, le dialecte est-il étroitement lié à une certaine région.
23 Quatrième colonne, le dialecte du locuteur est-il propre de la façon de
24 parler actuelle de Ljubisa Beara ? Lorsque vous faites apparaître un zéro
25 dans la rangée qui correspond à la colonne en question, cela signifie que
26 vous disposiez de trop peu de données pour répondre à la question posée au
27 haut de la colonne en question, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Très bien. Lorsque vous faites apparaître un signe moins, c'est
2 évident, cela signifie qu'il n'est pas satisfait au critère en question ?
3 R. Oui.
4 Q. Et un plus, le contraire, qu'il est -- qui satisfait aux critères,
5 n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Lorsque vous faites apparaître un zéro dans la case, cela n'exclut pas
8 la possibilité que M. Beara soit un éventuel participant à l'entretien que
9 vous avez examiné, n'est-ce pas ?
10 R. Oui, par le zéro on n'a présenté que les conversations où pratiquement
11 il n'y a pas de parler, il n'y a pas de mots, il n'y a pas de texte pour
12 que l'on puisse faire autrement que de façon indirecte attribuer tout cela
13 à tel ou tel individu.
14 Q. Ma question est liée à ceci, l'indication zéro est-elle une désignation
15 inclusive, exclusive ou neutre ?
16 R. Pas inclusive, je dirais, pour attribuer cela à M. Beara, je veux dire
17 tout simplement qu'il nous manque des éléments ou des données sur la base
18 desquelles on pourrait peut-être considérer comme inclusives.
19 Q. Très bien. Parmi les écoutes téléphoniques que vous avez eu l'occasion
20 d'examiner, l'écoute téléphonique du 13 juillet 1919, il s'agit de la pièce
21 à conviction 65 ter 1147, cette écoute téléphonique ne fait pas état de M.
22 Beara et, par conséquent, vous avez indiqué qu'apparemment elle n'avait
23 aucun intérêt d'un point de vue linguistique, ou en tout cas ne vous
24 permettait pas d'établir quelque valeur linguistique pour cette écoute
25 téléphonique. C'est peut-être plus précis, n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Pour ce qui est de l'écoute téléphonique du 13 juillet 1945, il s'agit
28 de la pièce à conviction 65 ter cote 1148, même conclusion, vous ne pouvez
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1 pas extrapoler et indiquer que dans cette écoute téléphonique on peut
2 disposer d'informations suffisantes pour identifier M. Beara; il y a une
3 référence à M. Beara dans cette écoute téléphonique mais pas en tant que
4 personne participant à cet entretien, n'est-ce pas ? C'est une référence à
5 Ljubisa, il faudrait être précis.
6 R. On en fait mention, mais je pense que le bureau du Procureur, quant à
7 lui, pensait à Ljubisa Borovcanin. Monsieur, si je ne me trompe pas,
8 d'après le bureau du Procureur il s'agit d'un autre Ljubisa, il ne s'agit
9 plus de Ljubisa Beara.
10 Q. Je suis d'accord, Monsieur Remetic, mais j'imagine qu'à la suite de
11 votre analyse de ces écoutes électroniques, vous avez employé un jugement
12 indépendant, ce n'est pas ce que nous avancions qui vous intéressait, ni
13 les conseils de la Défense, j'image ?
14 R. Oui, tout à fait.
15 M. OSTOJIC : [interprétation] Objection quant à la façon dont la question
16 est posée, c'est une représentation erronée des choses. Je crois que
17 l'Accusation ne peut pas dire que nous avons interprété ces écoutes
18 électroniques puisque nous ne l'avons pas fait, donc, c'est une fausse
19 représentation du type de travail que nous faisons, et le témoin n'a fait
20 que répondre aux questions qui lui étaient posées.
21 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Demandons au témoin afin de nous
22 confirmer qu'il a bien employé un jugement tout à fait indépendant, qu'il a
23 agi en tant que témoin expert complètement indépendant. C'est tout ce que
24 M. Vanderpuye voulait dire. Passons, puisque le témoin a déjà répondu.
25 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
26 M. VANDERPUYE : [interprétation]
27 Q. Passons maintenant à la conversation interceptée du
28 13 juillet, celle qui a eu lieu à 13 [comme interprété] heures 05 et pour
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1 ce qui est du compte rendu d'audience, il s'agit de la pièce 65 ter 1153.
2 Dans ce cas-ci, on fait référence à Ljubo, et ceci ne vous a pas permis de
3 faire des conclusions, vous n'aviez pas suffisamment d'informations
4 linguistiques ?
5 R. Pour un linguiste, oui, je n'ai pas de travail à effectuer là.
6 Supposément, c'est un monologue du général Mladic, mais ce n'était pas ma
7 tâche à moi d'analyser ce monologue.
8 Q. Fort bien. Pour ce qui est maintenant de l'écoute électronique du 15
9 juillet à 9 heures 52, pièce 65 ter portant la cote 1177 pour le compte
10 rendu d'audience, encore une fois il s'agit d'une entrée indiquant que
11 Beara cherche le général Zivanovic, et vous n'avez pas pu tirer de valeur
12 linguistique à la suite de cette écoute électronique, n'est-ce pas ?
13 R. Oui. L'opérateur dit ce que dit l'opérateur, moi, j'analyse ce qui est
14 indiqué sous B, Beara, colonel, dépendamment du code, mais cela n'y figure
15 pas.
16 Q. D'accord. Merci. Ecoute du 16 juillet à 22 heures 33. Vous avez mis des
17 zéros partout, et c'est une conversation interceptée qui ne vous a pas
18 permis de tirer de conclusion linguistique, n'est-ce pas ?
19 R. Oui, c'est exact.
20 Q. Très bien. Passons maintenant à l'écoute du 23 juillet 8 heures 05,
21 pièce 65 ter 1310. On fait allusion à Ljubo ici, mais non pas en tant que
22 locuteur. Et donc vous n'avez pas pu tirer de valeur linguistique là non
23 plus, n'est-ce pas ?
24 R. Oui, c'est exact. Vous avez raison. Tout à fait. Oui. Oui, je n'ai rien
25 indiqué. C'est un vide qui y figure.
26 Q. Le 2 août, 13 heures. Pièce 65 ter 1394 [comme interprété]. Encore une
27 fois dans cette conversation interceptée on fait allusion à Beara mais ce
28 n'est pas le locuteur ?
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1 R. Oui.
2 Q. Cette écoute ne vous a pas permis de tirer de conclusion linguistique,
3 elle ne vous a pas donné d'information suffisante, est-ce que c'est exact ?
4 R. Oui, c'est tout à fait juste.
5 Q. D'accord. Passons maintenant à l'écoute du 16 juillet, 11 heures 11.
6 Pièce 65 ter 1187, et vous nous avez dit que même si M. Beara s'identifie à
7 un endroit en tant que lui-même, vous n'avez pas suffisamment
8 d'informations linguistiques vous permettant de vous livrer à une analyse,
9 alors vous avez mis le signe de plus pour la question "le locuteur s'est
10 identifié", mais par la suite, il y a des zéros partout; est-ce que c'est
11 exact ?
12 R. J'essaie de voir, le 16 juillet à 11 heures 11. Oui, effectivement,
13 c'est ce qui est écrit.
14 Q. D'accord. Et le 25 juillet à 7 heures 09. Document 65 ter 1328. Vous
15 avez mis des signes négatifs pour indiquer que : "Le locuteur ne s'est pas
16 identifié comme étant Beara," et ensuite vous avez mis des zéros pour ce
17 qui est des autres catégories, et en fait, dans cette conversation
18 interceptée, quelqu'un s'est identifié comme étant Ljubo, mais il n'y avait
19 aucune valeur linguistique pour vous.
20 R. C'est exact. Ce n'est pas suffisamment d'informations.
21 Q. Donc lorsqu'on parle d'une écoute électronique pertinente pour votre
22 analyse, ça aurait été celle du 13 juillet à 10 heures 09; l'écoute du 15
23 juillet à 9 heures 54, 9 heures 55, 9 heures 57 et
24 10 heures; ensuite, on parle de l'écoute du 1er août à 10 heures 02; et
25 ensuite du 1er août à 23 heures 08; et le 2 août, celle qui a eu lieu à 19
26 heure 57.
27 M. OSTOJIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, je crois
28 qu'il faudrait également mentionner le 1er août, 10 heures 02.
Page 24675
1 M. VANDERPUYE : [interprétation]
2 Q. Oui, tout à fait. La conversation qui a eu lieu à 10 heures 02 est une
3 conversation interceptée qui vous permet d'établir un lien direct avec M.
4 Beara, vous l'attribuez de façon positive à M. Beara.
5 M. OSTOJIC : [interprétation] C'est une représentation assez erronée, mais
6 je vais simplement faire une objection pour le compte rendu d'audience.
7 M. VANDERPUYE : [interprétation] Très bien.
8 Q. Donc les autres écoutes ne peuvent pas être attribuées à M. Beara, ce
9 n'est que quelques-unes ?
10 R. Oui. En fait, pour l'une des conversations, je donne une possibilité à
11 l'une des conversations comme étant celle-là. Mais pour les autres, je n'ai
12 pas d'élément.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, pour le compte
14 rendu d'audience, page précédente, page 52, ligne 25, est-ce que ce chiffre
15 est exact.
16 M. VANDERPUYE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Juge. Permettez-
17 moi de retrouver le passage.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La pièce est la pièce 65 ter,
19 conversation interceptée le 25 juillet à 7 heures 09.
20 M. VANDERPUYE : [interprétation] Non, en fait, il faudrait lire 1328. Je me
21 suis trompé, excusez-moi.
22 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
23 M. VANDERPUYE : [interprétation]
24 Q. Bien. Vous nous avez dit - et dites-moi si je m'abuse - vous n'avez pas
25 examiné de témoignage des opérateurs de conversations interceptées qui ont
26 pris part à l'écoute de ces conversations ?
27 R. J'ai lu leurs déclarations, j'ai lu les déclarations des opérateurs. Et
28 comme je l'ai dit hier, certains d'eux sont de ma municipalité, nous sommes
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1 originaires de la même région. Et j'ai lu leurs déclarations, j'ai compris,
2 j'ai vu dans quelles circonstances ils travaillaient, c'était des
3 circonstances assez difficiles. Et j'ai dit hier que les opérateurs et moi
4 sommes quelque peu des collègues car jusqu'à ce jour, j'ai enregistré plus
5 de 1 000 heures de conversations sur le terrain et j'ai pu écouter au moins
6 2 000 heures de conversations, mais pas de ce type-ci. Il s'agit plutôt de
7 documents sonores me permettant d'examiner ou d'analyser les dialectes.
8 Monsieur, j'ai également lu la critique de Nijo [phon] ainsi que son
9 opinion concernant le travail des opérateurs et les conditions dans
10 lesquelles ces derniers devaient travailler, et nous sommes pour ce qui est
11 d'un très grand nombre de points d'accord.
12 Q. Très bien. Merci. Je le comprends. Mais ce que je voulais vous
13 demander, c'est simplement de préciser pour le compte rendu d'audience et
14 de nous dire qu'est-ce que vous avez analysé et qu'est-ce que vous n'avez
15 pas vu. Je voulais simplement faire une distinction entre les déclarations
16 et les témoignages, ma question était de savoir est-ce que vous avez
17 examiné des témoignages de plus outre les déclarations des opérateurs, ou
18 est-ce que vous n'avez lu que les déclarations des opérateurs ? Est-ce que
19 vous avez lu leurs témoignages ainsi que leurs déclarations ?
20 R. Je crois que j'avais leurs déclarations dans lesquelles on peut lire
21 qu'ils sont tout à fait conscients du fait qu'ils pouvaient être appelés à
22 témoigner devant ce Tribunal. L'un d'eux, lorsqu'on lui a demandé s'il se
23 souvient d'une conversation ou du transcript, je crois qu'il s'agissait de
24 l'un de ces opérateurs qui sont en lien avec M. Beara et Konjevic Polje, ce
25 dernier avait dit que l'écriture ressemblait à la sienne, mais qu'un autre
26 opérateur – (expurgé)
27 (expurgé). Il ne se souvenait
28 pas très bien des interlocuteurs et des conversations. Mais il se souvient
Page 24677
1 toutefois d'une conversation dans laquelle on faisait état de problèmes
2 relatifs à un char.
3 Q. Très bien, merci. Je vous demanderais de m'accorder quelques instants,
4 s'il vous plaît.
5 R. Oui.
6 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, pourrait-on passer
7 à huis clos partiel, s'il vous plaît, pour quelques brefs instants ?
8 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Huis clos partiel.
10 [Audience à huis clos partiel]
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 [Audience publique]
28 M. VANDERPUYE : [interprétation]
Page 24678
1 Q. Je ne vais pas m'étaler trop longuement sur cette question, mais les
2 documents dont vous faites état dans votre rapport, les documents que vous
3 avez examinés, ils sont tous dans le rapport ?
4 R. Oui.
5 Q. C'est dans la partie 5 de votre rapport ?
6 R. Oui.
7 Q. Vous ne parlez pas de témoignage dans votre liste ?
8 R. Non, je crois que c'est une erreur, à ce moment-là. Ce sont leurs
9 déclarations. Oui, d'accord, appelons-les déclarations et non pas
10 témoignages, c'est une erreur de termes.
11 Q. Très bien, merci. Vous avez mentionné hier, au compte rendu d'audience
12 page 11, lignes 15 à 20, je ne sais pas si entre-temps on a changé ou
13 modifié quelque chose, je ne sais pas si ce sont les mêmes numéros, vous
14 avez dit : "Le niveau de fiabilité pour déterminer l'identité est
15 directement proportionnel à la qualité des faits linguistiques et des
16 capacités du témoin expert qui essaie de déterminer la question. Plus le
17 corps du texte est riche, plus il y a de chances de succès." Ensuite, vous
18 parlez "des faits linguistiques…" - il semblerait qu'il y a quelque chose
19 qui n'a pas été transcrit au compte rendu d'audience - et vous dites :
20 "…fait en sorte que le travail devient plus difficile."
21 Comme vous avez dit, le corps du matériel que vous avez employé pour votre
22 analyse, vous n'aviez que deux pas et demi, n'est-ce
23 pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Vous avez dit que la moitié de ce matériel ne pouvait pas vous servir,
26 qu'on pouvait simplement le mettre de côté ?
27 R. Oui.
28 Q. Donc, vous aviez une page et un quart d'informations utiles qui
Page 24679
1 pouvaient vous servir à l'analyse ?
2 R. Je n'ai pas pris de calculatrice, je n'ai pas mesuré. Il y a certaines
3 choses qui sont pertinentes et certaines, non, mais c'est un document --
4 c'est un matériel très pauvre, très restreint. Je n'ai jamais travaillé ou
5 procédé à aucune analyse de toute ma carrière professionnelle avec si peu
6 de matériel -- avec un matériel aussi pauvre.
7 Q. Mais ne peut-on pas dire que, si vous n'avez pas suffisamment
8 d'information, les conclusions ne peuvent pas être très concluantes ?
9 R. Il est très difficile d'arriver à des conclusions -- d'apporter des
10 conclusions quelconques lorsque le matériel est pauvre. Les scientifiques
11 ne souhaitent pas tirer des conclusions lorsqu'ils ont à analyser un texte
12 très court ne leur permettant pas d'avoir suffisamment d'informations.
13 Q. Les scientifiques sont assez réticents à apporter des conclusions pour
14 des faits qu'ils ne peuvent pas quantifier --
15 R. Oui, vous savez, la prudence est un allié important dans notre travail.
16 Il est certain que les scientifiques sont réticents. Ne parlons de
17 pourcentages, nous parlons de niveaux de possibilité, de -- nous parlons de
18 nuances, ici. Vous savez, la science, ce n'est pas un dogme; la
19 linguistique ne se rapporte pas à un oui ou un nom. Ce n'est pas des kilos
20 -- des grammes. Vous devez analyser les choses et vous optez pour la
21 solution qui semble être la plus fiable, la plus réaliste.
22 Q. Très bien, merci. Je suis vraiment -- je vous suis reconnaissant que
23 vous ayez mentionné le mot "science" puisque justement j'allais vous poser
24 une question relative à cela. Lorsque vous arrivez à des conclusions pour
25 déterminer si une conversation interceptée ne correspond pas du tout à la
26 façon dont M. Beara s'exprime, et ce s'agissant du mois d'avril de cette
27 année, lorsque vous faites une telle conclusion -- vous arrivez à une telle
28 conclusion, quelle est la probabilité d'erreur lorsque vous adoptez cette
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1 approche -- lorsque vous arrivez à cette conclusion ? De quelle façon est-
2 ce que vous pouvez mesurer ou quantifier le tout dans le domaine de la
3 linguistique ?
4 R. Si, pour en arriver à une conclusion, il faut analyser les transcripts,
5 le langage, les expressions attribuées au nom de
6 M. Beara, et si tout ceci est analysé dans un contexte du -- de son langage
7 d'aujourd'hui, ou celui du contexte des 7 et 8 avril, il faudrait à priori
8 écarter tous les transcripts, d'après la science. J'ai dit hier -- je vous
9 ai expliqué hier quelle aurait été mon approche -- l'approche que j'aurais
10 employée pour faire ce travail. Je ne suis pas tout à fait certain -- je ne
11 peux pas vous dire que mon approche ait été correcte. J'ai demandé
12 d'obtenir la possibilité de lier quelque chose de sûr à M. Beara - et j'ai
13 également dit ceci hier, je le répète aujourd'hui - il s'exprime de façon
14 libre dans le cadre d'une communication libre, lorsqu'il est plus
15 décontracté, lorsqu'il ne parle pas dans un contexte officiel, il emploie
16 un dialecte de Split, le Cakavien. Alors que lorsque l'on parle --
17 lorsqu'il parle la langue littéraire, c'est la variante de Zagreb, du
18 croate d'antan qu'on avait, qu'on appelait le croate et dont j'ai permis --
19 j'ai permis -- j'ai accepté cette possibilité-là que d'abord, une personne
20 ne s'exprime pas toujours en dialecte. Lorsqu'il s'agit d'un officier haut
21 gradé, il ne peut pas s'exprimer de façon dialectique, il parle de façon
22 littéraire, et c'est un fait que les transcripts appartiennent à un langage
23 littéraire relativement correct. Et, lorsqu'il s'agit de langue littéraire,
24 à ce moment-là, Beara parle avec un dialecte de Zagreb, il parle la langue
25 croate. Et dans le transcript du 1er août, j'avais le plus d'éléments pour
26 pouvoir conclure ceci, pour pouvoir attribuer ce dialecte à Beara. Mais je
27 n'ai jamais dit qu'il s'agissait d'une certitude. Ce n'est pas un dogme. Je
28 n'ai jamais dit c'est ainsi, c'est ainsi, c'est absolu, c'est une vérité
Page 24681
1 absolue à 100 %. Ce n'est pas possible, il y a peu de -- de chances de dire
2 cela, mais j'ai dit que les facteurs prévalents étaient ceux qui me
3 permettaient de conclure que ce type de langage était le sien. Donc, Beara,
4 lorsqu'il s'exprime en dialecte et lorsqu'il parle une langue littéraire,
5 il s'agit de deux choses différentes, et c'est pour ceci que j'ai accepté
6 la possibilité qu'il s'agisse de son texte, de son discours à lui.
7 Malheureusement, il n'y a pas de transcript, nous ne savons pas -- nous
8 n'avons pas de transcript manuscrit, c'est-à-dire nous n'avons pas les
9 notes manuscrites de l'opérateur.
10 Q. Très bien. Mais il me semble que vous êtes en train de nous dire que
11 vous avez fait de votre mieux dans les circonstances, et eu égard aux
12 documents que l'on vous a donnés.
13 R. Oui, justement, voilà, c'est -- c'est tout à fait juste votre -- votre
14 explication est bonne, et j'ai passé énormément de temps à faire ce
15 travail. C'était un travail difficile et inhabituel, et j'ai fait de mon
16 mieux car je n'avais pas toujours les données.
17 Q. Mais il me semble aussi que vous avez quelques réserves à savoir si
18 votre approche était la bonne approche, pour ce qui est du domaine de la
19 linguistique et du domaine scientifique. C'est pour ceci que vous dites que
20 vous auriez écarté ces transcripts si vous aviez eu plus d'informations, de
21 documents, de matériel de travail; est-ce que c'est exact ?
22 R. Voyez-vous -- excusez-moi, mais je n'ai pas très bien saisi votre
23 question. Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît ?
24 Q. Je vais reformuler ma question. Lorsque vous avez dit : "Je ne suis pas
25 certain si cette approche est la bonne," est-ce que vous vouliez dire par
26 là si vous n'étiez pas tout à fait certain si la technique employée, car
27 vous n'aviez pas d'autre choix, que c'était une technique acceptable pour
28 un linguiste d'un point de vue scientifique ? Est-ce que c'est ceci que
Page 24682
1 vous vouliez dire ?
2 R. Non, non. Non, je pensais à quelque chose de tout à fait différent.
3 J'ai adopté la même attitude que vous vis-à-vis ce matériel. J'ai essayé de
4 voir qu'est-ce que je peux lier s'agissant du transcript de M. Beara, alors
5 j'ai analysé chaque mot : est-ce que "sjor" est suffisant -- est-ce que
6 c'est suffisant ? Non, parce que cela n'était pas répéter. Est-ce que
7 "burazer" est un mot qui est suffisant ? Non, parce que ce terme est
8 employé sur tout le territoire. Alors vous avez vu, est-ce que l'infinitif
9 "krnje" [phon] est suffisant, non, cet infinitif n'est pas suffisant car il
10 y a un autre terme neutre qui vient à l'encontre de ce dernier. Vous avez
11 vu que j'ai tout analysé en détail, et par la suite, il a fallu évaluer,
12 peser et soupeser les arguments A et les arguments B -- alors comme je vous
13 dis, le corps du texte est pauvre.
14 Q. D'accord, merci. Je crois qu'il faudrait peut-être prendre une pause,
15 Monsieur le Président, si vous le souhaitez, c'est peut-être le moment
16 opportun.
17 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Alors pause de 25 minutes.
18 M. VANDERPUYE : [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] De combien de temps vous aurez encore
20 besoin pour ce témoin ? Croyez-vous pouvoir terminer l'audition de ce
21 témoin avant la fin de la journée ?
22 M. VANDERPUYE : [interprétation] Il est possible que oui.
23 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Très bien. Je n'essaie pas de vous
24 pousser à terminer plus rapidement, mais je voulais simplement savoir s'il
25 fallait appeler un nouveau témoin.
26 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je crois que j'aurai besoin d'encore une
27 heure environ.
28 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Mais nous n'avons pas une heure. Il
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1 nous restera 45 minutes.
2 M. VANDERPUYE : [aucune interprétation]
3 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Est-ce que vous aurez des questions
4 supplémentaires ?
5 M. OSTOJIC : [interprétation] Oui, 15 à 20 minutes, mais il faudrait peut-
6 être permettre au témoin de revenir demain.
7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, justement, je ne voulais pas vous
8 pousser.
9 Madame l'Huissière, veuillez, je vous prie, appeler le service des
10 Victimes et des Témoins et expliquez-leur ce qui est arrivé. Merci.
11 --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.
12 --- L'audience est reprise à 12 heures 59.
13 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Vanderpuye.
14 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à
15 vous, bon après-midi à vous, Monsieur le Président --
16 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Oui, Monsieur Vanderpuye.
17 M. VANDERPUYE : [interprétation] -- Messieurs, Madame les Juges, toutes mes
18 excuses pour -- merci.
19 Q. Très bien. Merci, Monsieur Remetic.
20 Très bien. Lorsque nous nous quittés, je vous posais une question à
21 propos de l'aspect scientifique de l'analyse à laquelle vous vous êtes
22 livré s'agissant de ces écoutes téléphoniques. Il y a une question que je
23 souhaite vous poser. Dans votre analyse de ces écoutes téléphoniques et
24 s'agissant de la possibilité que vous auriez eue d'identifier M. Beara,
25 dans ce contexte, donc, vous êtes-vous intéressé à des aspects
26 linguistiques spécifiques de manière à pouvoir inclure ou ne pas inclure M.
27 Beara comme étant l'auteur des propos tenus dans ces conversations, ou est-
28 ce que vous vous êtes intéressé à des éléments linguistiques aux fins
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1 d'exclusion, afin d'identifier M. Beara comme n'étant pas la personne
2 s'exprimant ?
3 R. Il me semble avoir dit avant la pause, ou en tout cas j'étais sur le
4 point de le dire, que je cherchais à identifier des caractéristiques qui
5 potentiellement pourrait identifier M. Beara, c'est-à-dire des faits
6 linguistiques ayant l'importance nécessaire pour en faire des éléments de
7 preuve fiables. J'essayais de m'assurer de la présence en quantité
8 suffisante de ces faits et j'essayais de m'assurer du fait que ces faits
9 étaient suffisamment distincts. En d'autres termes, j'essayais de m'assurer
10 du fait que l'on pouvait établir le lien entre ces faits et une zone
11 géographique spécifique, une variante spécifique du parler et une région
12 dialectale spécifique. Ce n'est que dans la conversation supposée du 1er
13 août pour laquelle nous ne disposons pas de version manuscrite, et je le
14 déplore, j'aurais préféré disposer d'une telle version manuscrite, ce n'est
15 donc que pour cette conversation que j'ai envisagé la possibilité de voir
16 ces propos, avoir été tenus par M. Beara, avec un certain degré de
17 certitude. Je dis Beara dans le contexte de la langue normée dans la région
18 dans laquelle il a occupé des fonctions pendant 20 ans, langue qu'il a
19 adoptée comme étant son propre dialecte, un dialecte qu'il avait fait sien.
20 Il a fait sien le dialecte de Split, mais lorsqu'il utilise la langue
21 normée, la version commune du Croate, comme je l'ai dit à plusieurs
22 reprises par le passé, qui maintenant est la langue croate standard.
23 Q. Très bien. Il me semble que lors de l'interrogatoire principal, vous
24 avez fait référence à une discipline spécifique de la linguistique dans
25 laquelle vous exercez vos activités qui est la dialectologie ?
26 R. Oui.
27 Q. Vous savez qu'il y a d'autres domaines de la linguistique qui
28 s'appliquent à l'analyse dans le domaine de la police de scientifique, dès
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1 lors qu'il s'agit d'analyser ce type d'écoute téléphonique, n'est-ce pas,
2 une sous-discipline ?
3 R. Oui, mais il était impossible de faire une analyse phonétique à
4 proprement parler. Une analyse phonétique à proprement parler nécessiterait
5 un enregistrement audio d'une meilleure qualité ou un dialectologue
6 professionnel qui prendrait note dans son carnet des propos tenus. La
7 meilleure étude serbe de dialectologie serbe a été publiée en 1905.
8 Q. Très bien.
9 R. Et à cette époque-là, les enregistrements audio n'étaient pas
10 disponibles, mais un professionnel de qualité avait pris des notes.
11 Q. Donc on ne peut pas faire d'analyse linguistique phonétique sur la base
12 des informations dont vous disposiez, du matériel dont vous disposiez; est-
13 ce exact ?
14 R. Vous n'avez pas le timbre de la voix; donc vous ne pouvez pas procéder
15 à une analyse précise. Vous n'avez pas la façon dont sont prononcés les
16 consonnes. Vous n'avez pas non plus l'accentuation. Vous n'avez pas la
17 mélodie non plus; éléments qui permettent précisément d'identifier
18 l'origine de la personne qui s'exprime. L'accent est très révélateur; on ne
19 peut pas le cacher, notamment certaines caractéristiques spécifiques d'un
20 accent.
21 Q. Il me semble que dans votre rapport, vous indiquiez que vous-même
22 seriez à même d'identifier la voix de M. Beara si vous l'entendiez si on
23 l'enregistre sur une cassette audio; est-ce exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Outre l'analyse linguistique phonétique, vous pouvez également vous
26 livrer à une analyse sociolinguistique du matériel qui avait été mis à
27 votre disposition, n'est-ce pas ?
28 R. Dans une certaine mesure. La sociolinguistique peut être une source
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1 d'influence, et ça a été pris en compte. L'influence de l'environnement,
2 l'influence de l'environnement professionnel est présente.
3 Q. Et tout cela est lié à l'acquisition d'un dialecte donné, les
4 circonstances dans lesquelles une personne utilise un dialecte secondaire
5 s'ils en ont un, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Les influences qui sont liées à la possibilité de déterminer si une
8 personne parle tel dialecte ou tel autre dialecte ?
9 R. Oui.
10 Q. Et c'est ce que l'on appelle dans la sociolinguistique, un décalage de
11 code ?
12 R. Oui.
13 Q. Et les informations, vous en avez tenu compte lorsque vous avez
14 rencontré M. Beara au mois d'avril et lorsque vous avez examiné le texte,
15 vous en avez tenu compte également ?
16 R. La façon actuelle de parler de M. Beara et son passage d'un code à
17 l'autre ne peuvent s'expliquer que dans un contexte sociolinguistique. Le
18 dialecte de Split est un dialecte prestigieux. Les gens de Split sont fiers
19 de leur dialecte. Ils n'essaient en aucun cas de le refouler ou de
20 l'atténuer. La population de Split, tant avant que maintenant, jouissait
21 d'un certain renom, et toute personne souhaitant s'intégrer dans cette
22 communauté de Split doit accepter le dialecte et adopter cette façon de
23 communiquer. Ces codes de communication, ils doivent les faire leurs, et
24 c'est ce qu'a fait M. Beara. A mon sens, il a de façon délibérée adopté le
25 parler de Split, il a fait sien le dialecte de Split, et même après la
26 guerre, il n'a pas changé de ce point de vue-là, et ce, même après la
27 guerre et suite aux conséquences de la guerre. Je pense que c'est clair.
28 Q. Très bien. Merci pour cette réponse. Votre analyse de ce matériel se
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1 fondait essentiellement sur l'analyse dialectologique, n'est-ce pas, une
2 évaluation dialectologique, n'est-ce pas ?
3 R. Non, mon analyse se fondait sur un ensemble de choses. J'ai examiné le
4 contexte dans lequel s'inscrit le dialecte de la personne en question, mais
5 j'ai également examiné les versions de la langue littéraire serbe ou
6 croate. Si je ne m'étais intéressé qu'à l'aspect dialectal, j'aurais tout
7 rejeté comme étant impertinent pour mon analyse de la conversation de M.
8 Beara au mois d'avril de cette année. J'ai replacé tout cela dans le
9 contexte de la langue littéraire serbe-croate.
10 Q. Très bien, mais dans votre rapport, vous ne parlez pas de ce passage
11 d'un code à l'autre, c'est-à-dire une personne bidialectale qui utiliserait
12 un dialecte ou passerait à un autre dialecte dans d'autres circonstances.
13 Il n'y a aucune référence faite à ce phénomène sociolinguistique dans votre
14 rapport, n'est-ce pas ? Donc la question que je vous pose est la suivante :
15 est-ce que vous avez tenu compte de cet aspect et si c'est le cas, pourquoi
16 cet aspect sociolinguistique n'apparaît pas dans votre rapport ?
17 R. Je crois qu'il y a un malentendu. J'ai dit, et je pense que vous
18 retrouverez cela dans mon rapport, qu'il était difficile de comprendre et
19 de déchiffrer les éléments qui permettent d'expliquer pourquoi une personne
20 née dans la région ékavienne de Sarajevo à devenir une personne chakavienne
21 et ikavienne. Vous trouverez cela dans mon rapport. Comment peut-on oublier
22 son dialecte chakavien au cours de la guerre, ou en tout cas pendant les 15
23 jours au cours desquels les écoutes téléphoniques ont été faites. Et
24 comment est-il possible que cette même personne soit retournée à ce
25 dialecte chakavien après la guerre ? Il ne fait aucun doute à mon sens que
26 c'est ainsi qu'il parlait avant la guerre ou, pour être plus cohérent
27 encore, sachez que cela figure dans mon rapport. Comme je l'ai dit dans mon
28 rapport, nous avons là un phénomène qui est le suivant : une personne qui
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1 noie son identité linguistique dans une identité qui lui est étrangère. Les
2 membres de son entourage ont dit eux-mêmes qu'ils ne savaient pas qu'il
3 n'était pas Croate jusqu'à la guerre, et ensuite, lorsqu'il a rejoint les
4 rangs de l'armée de la Republika Srpska, les membres de son entourage ont
5 pensé à ce moment-là qu'il était Croate, ce qui veut dire que tel était son
6 dialecte à l'époque et que ça reste le cas aujourd'hui, et ceci est en
7 contradiction avec ce que je lis dans les transcriptions écrites des
8 écoutes.
9 Q. Monsieur Remetic, vous avez posé la question vous-même : comment le
10 dialecte peut-il changer complètement d'une période à une autre et puis
11 rechanger à nouveau au cours d'une troisième période ? La réponse, on la
12 trouve dans la littérature de la sociolinguistique, et on trouve cela tout
13 particulièrement dans un phénomène tout particulier de la sociolinguistique
14 qui est le passage d'un code à l'autre, le "code-shifting". Pourquoi est-ce
15 que contrairement à poser la question, vous n'apportez pas la réponse dans
16 votre rapport et pourquoi n'en avez-vous pas tenu compte ?
17 R. Monsieur, j'ai examiné la retranscription des écoutes. Dans ce
18 contexte, Chakavien, Ekavien avant la guerre; Chakavien, Ekavien après la
19 guerre, ce dont on parle, ça n'appartient probablement pas à la personne
20 chakavienne en question. C'est la seule conséquence logique que je peux en
21 tirer, sinon, je ne peux pas apporter d'explications. Si l'on peut
22 attribuer quelque retranscription écrite que ce soit à Ljubisa Beara,
23 comment cela est-il possible ? Puis il y a autre chose. Il y a des styles
24 fonctionnels. Des registres différents qui se distinguent l'un de l'autre.
25 Par exemple, une discussion à bâtons rompus entre amis d'un côté et une
26 allocution publique de l'autre se distinguent, les façons de parler
27 s'écartent l'une de l'autre. La langue littéraire est utilisée de façon
28 plus courante dans des situations officielles telles que des conférences,
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1 lorsque vous êtes à la tribune, lorsque vous rédigez un texte, un rapport.
2 C'est dans ce contexte-là que j'ai essayé de trouver des liens possibles
3 entre Beara ou la personne décrite comme étant Beara et la variante
4 occidentale de la langue littéraire telle qu'elle apparaît dans ces
5 retranscriptions.
6 Q. Merci pour votre réponse. Vous nous avez dit -- enfin, non, je vais
7 vous poser la question suivante : s'agissant de la question de savoir si
8 une personne maîtrise ou ne maîtrise pas différentes versions d'un dialecte
9 ou différents dialectes, dans cet exemple-ci, vous indiquez dans votre
10 rapport que M. Beara maîtrise de façon infaillible les dialectes ékavien,
11 ikavien et ijekavien, et c'est ce qui figure en page 14 de votre rapport,
12 n'est-ce pas ? Je vais vous en faire lecture. C'est à peu près au milieu de
13 la page 14 --
14 R. Monsieur, ça y est, je l'ai trouvé. C'est bon, je l'ai.
15 Q. Très bien. C'est bien ce qui est dit dans votre rapport, n'est-ce pas ?
16 R. Oui.
17 Q. Cela permet de déterminer si une personne est capable de modifier son
18 dialecte, n'est-ce pas, s'il a une maîtrise infaillible des dialectes ?
19 C'est pertinent, n'est-ce pas ? Vous pouvez répondre par l'affirmative ou
20 par la négative.
21 R. Monsieur, je ne dis pas qu'il maîtrise parfaitement le dialecte, je dis
22 simplement qu'il connaît très bien les distinctions qui existent. Il n'a
23 pas utilisé l'Ekavien suivi de l'Ikavien puis de l'Ijekavien, ce n'est pas
24 cela qui m'a permis de dire qu'il les maîtrisait parfaitement. Simplement,
25 je lui ai posé la question, je lui ai posé des questions à propos de
26 certaines formes de mots qu'on trouvait dans la transcription écrite. Et il
27 a dit de façon très factuelle : "Non, je ne suis pas Serbe, ça n'est pas
28 moi. Je sais comment les Serbes parlent." Et il sait également comment
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1 parlent les Monténégrins et il sait également comment les gens parlent dans
2 les différentes régions, il connaît les différentes distinctions qui
3 existent. Ceci étant dit, lorsque vous écrivez que quelqu'un maîtrise
4 parfaitement, il faut que la personne soit à même de démontrer que c'est le
5 cas. Or, il a démontré qu'il maîtrisait le dialecte chakavien, ikavien de
6 la région de Split, au cours de l'entretien de sept heures que j'ai eu avec
7 lui.
8 Q. Oui, mais sauf votre respect, sachez, et c'est peut-être une erreur de
9 traduction, Monsieur, qu'il est dit dans votre rapport, peut-être une
10 erreur d'interprétation du traducteur, vous indiquez même aujourd'hui :
11 "Après quelques années -- quelques temps passés à Zagreb, il a" - et c'est
12 indiqué ici - "une maîtrise infaillible des dialectes, Ekavien, Ikavien et
13 Ijekavien, et des distinctions qui nous ont été confirmées lorsque nous
14 avons écouté ses conversations avec les différents individus concernés…" et
15 cetera, et cetera. Donc, le terme "maîtrise" ou "command" en anglais, ça
16 n'est pas un terme que j'ai inventé, il apparaît dans votre rapport. Est-ce
17 exact, Monsieur Remetic ?
18 R. Désolé, mais je ne trouve pas où se trouve ce passage. Permettez-moi de
19 consulter mes notes.
20 Q. Vous voyez la partie en caractères gras au milieu du texte, section 7
21 de votre rapport, et tout de suite après, après les termes en caractères
22 gras, Ikavien, Ekavien, Ijekavien, Bosnien, Monténégrin, Serbe, il est dit
23 --
24 R. Oui, Monsieur. Oui, oui, ça y est, je l'ai trouvé. Ça y est, je l'ai
25 trouvé, merci. Il est dit ici "Il maîtrise de façon infaillible les
26 distinctions entre les dialectes, Ekavien, Ikavien et Ijekavien, ce dont
27 nous avons pu nous convaincre en écoutant leur conversation avec d'autres
28 interlocuteurs suite à un contre-interrogatoire," et cetera, et cetera.
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1 Peut-être les choses ont-elles été décrite de façon trop simplistique
2 [comme interprété], de façon terminologique. Lorsqu'il dit "lipodite"
3 [phon], il sait lorsque c'est "lipodeta" [phon] et "lijepodijeta" [phon].
4 Il sait lorsque l'on dit "ditza" [phon], djetza [phon] et dijetza [phon].
5 Il est capable d'entendre la différence, il est sensible à ces
6 distinctions. Mais il n'a jamais montré qu'il était à même de maîtriser
7 l'utilisation de ces termes, je dis simplement qu'il est conscient de leur
8 existence. Il a d'ailleurs -- il n'aime pas le terme -- les termes Ekavien,
9 en revanche, l'Ijekavien ne lui pose strictement aucun problème.
10 Q. Hier, je vous ai demandé s'il maîtrisait très bien cette langue --
11 qu'il maîtrisait très bien le dialecte et vous avez répondu par
12 l'affirmative, n'est-ce pas ?
13 R. Oui, il sait très bien de quelle façon on parle dans cette région, il
14 connaît le dialecte.
15 Q. Oui, donc il a la possibilité -- enfin, il a la capacité -- il sait
16 très bien quels sont ces dialectes. Mais ce que je veux dire c'est : c'est
17 pertinent, oui ou non ? A savoir si -- je ne dis pas qu'il a la possibilité
18 de s'en servir, mais il sait très bien en quoi consiste ces dialectes.
19 R. Je ne sais pas s'il peut parler en différents dialectes, mais il est
20 certain qu'il peut parler en employant diverses variantes de la langue
21 littéraire. Il y a plusieurs dialectes qui sont différents. Moi non plus je
22 ne peux pas parler tous les dialectes, c'est très différent, vous savez.
23 Nous sommes -- alors lorsqu'on parle de l'Ekavien, de l'Ikavien, mais je ne
24 sais pas s'il peut vraiment parler correctement Ijekavien, mais c'est une
25 variante de la langue littéraire et il y a plusieurs dialectes, plusieurs
26 dialectes ékaviens, plusieurs dialectes ikaviens et plusieurs dialectes
27 ijekaviens.
28 Q. Merci, Monsieur Remetic. Vous avez également mentionné dans votre
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1 rapport à la page 14, vous indiquez que M. Beara est une personne très
2 intelligente qui a une grande culture et qu'il est très instruit. Ce sont
3 des phénomènes sociologiques qui peuvent contribuer lorsqu'on évalue ses
4 capacités de parler en dialectes, n'est-ce pas, de parler différents
5 dialectes ?
6 R. Oui, il est certain qu'un homme intelligent se débrouille mieux dans
7 diverses situations -- dans toutes les situations. Et effectivement, c'est
8 un homme très intelligent.
9 Q. Très bien, merci. Pour ce qui est de la fiabilité -- mais avant de
10 parler de cela, dites-nous, pour ce qui est de votre analyse, vous avez dit
11 que la fiabilité de vos conclusions sont directement liées aux documents
12 linguistiques, au matériel linguistique qui était mis à votre disposition.
13 Est-ce que c'est exactement ?
14 R. Oui, bien sûr.
15 Q. Et une analyse de ce type -- pour faire une analyse de ce type, est-ce
16 que vous pourriez nous donner des documents dans la littérature, un
17 protocole ? Pourriez-vous nous expliquer si vous avez pu trouver une
18 information linguistique importante pour que l'on conclu quelque chose ? A
19 combien de reprises doit-on retrouver le même mot afin de pouvoir établir
20 un lien entre ces mots pour pouvoir -- et pour pouvoir arriver à votre
21 conclusion ? Est-ce qu'il y a une méthodologie précise ? Pourriez-vous nous
22 indiquer de la documentation dans le domaine de la méthodologie ou
23 littérature scientifique ?
24 R. Non. Il n'y a pas de chiffres pré-établis, il n'y a pas de pourcentages
25 non plus. Mais, de façon générale, il est tout à fait clair que, lorsqu'on
26 a plus d'information, il est plus facile de donner une évaluation fiable.
27 Mais tous les faits n'ont pas la même importance, toutes les données n'ont
28 pas la même importance. Il y a des différences nous permettant de
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1 classifier divers parlers. J'ai dit que chez nous c'était le "jat" et
2 l'accent ici, nous ne l'avons pas, alors que le "jat," peu.
3 Q. Parmi les écoutes électroniques pour lesquelles vous avez indiqué une
4 valeur négative, de quelle façon est-ce que vous avez pu évaluer, à partir
5 de ces écoutes, quel était le degré de fiabilité que vous pouviez attribuer
6 à ces écoutes ? De quelle façon est-ce que la Chambre peut déterminer ou
7 savoir, lorsque vous mettez un moins ou un zéro, de quelle façon est-ce que
8 ceci influe votre capacité de quantifier les résultats, ou est-ce que ceci
9 a une incidence sur votre façon de présenter les résultats ?
10 R. Il est certain que certaines conversations ou écoutes où j'avais pu
11 travailler avec cinq, six, ou sept mots qui n'avaient rien à voir avec le
12 sujet, il est certain que la possibilité d'établir des liens disparaissait.
13 Mais dans d'autres écoutes où il y avait plus d'informations, plus de
14 données, j'essayais d'établir et de voir s'il y a des mots marquants, des
15 mots qui peuvent être liés aux parties occidentales ou des mots qui sont
16 liés à la variante occidentale de la langue littéraire, et qui peuvent être
17 liés avec un dialecte, avec une pratique, avec une langue adoptée dans le
18 milieu où vivait Beara. Je n'ai pas trouvé si la majorité de données
19 l'identifient afin que je puisse établir un lien entre ces écoutes et lui.
20 Q. Très bien. Donc vous avez dit qu'il n'y a absolument aucune règle, ce
21 qui veut dire que vous ne pouvez pas faire d'évaluation quantitative quant
22 au niveau de fiabilité. C'est ce que vous dites dans votre rapport, n'est-
23 ce pas, outre que de dire c'est probable ou peu probable, cela correspond
24 ou ne correspond pas; est-ce que c'est exact ?
25 R. Oui.
26 Q. En réalité, ce n'est pas possible de quantifier, pour ce qui est de
27 l'importance linguistique, chacun des mots qui contribue aux conclusions
28 que vous avez faites, à savoir s'il est possible d'exclure ou d'inclure M.
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1 Beara -- ou d'attribuer ces propos à
2 M. Beara ? C'est exact aussi, n'est-ce pas ?
3 R. Oui, tout à fait.
4 Q. Dans l'absence de normes quantitatives de fiabilité des résultats et
5 pour ce qui est également de la fiabilité de l'information qui vous permet
6 d'arriver à des conclusions, ce que vous avez fait ici fait en sorte que
7 votre travail que vous avez fait pour cette affaire en l'espèce fait en
8 sorte qu'il est absolument impossible qu'une autre personne fasse le même
9 travail, personne ne peut reproduire ou arriver aux mêmes résultats que
10 vous en faisant les mêmes évaluations ?
11 R. Une autre personne ?
12 Q. Un autre linguiste examinant les mêmes documents, le même matériel que
13 vous pourrait tirer d'autre -- pourrait arriver à d'autre conclusion,
14 complètement d'autre conclusion quant à la possibilité d'attribuer des
15 propos étant attribués à M. Beara dans une conversation interceptée ?
16 R. Je ne peux pas comparer d'autres avec moi-même. Ceci ne se fait pas,
17 mais j'aimerais bien voir les arguments si quelqu'un d'autre s'adonnait à
18 une analyse ou à cette même analyse et arrivait à d'autre conclusion.
19 J'aimerais bien voir les arguments présentés par cette autre personne, bien
20 sûr.
21 Q. Oui, je sais, mais ce dont je parle, c'est une méthode scientifique.
22 J'essaie simplement de dire que lorsqu'on emploie une méthode scientifique,
23 cette dernière porte en soi l'idée de vérification ?
24 R. Oui.
25 Q. La vérification demande ou exige qu'il y ait une norme qui nous permet
26 de vérifier les résultats, de comparer les résultats, d'évaluer ?
27 R. Oui.
28 Q. Vous nous dites qu'il n'y a pas de règle, donc il n'y a pas de moyen
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1 standardisé ou de norme standardisée qui nous permettrait de vérifier ce
2 que vous avancez ?
3 R. Voyez qu'il n'y a pas de norme. On connaît très bien quelles sont les
4 caractéristiques d'un dialecte. Ensuite, nous savons aussi quelles sont les
5 caractéristiques pertinentes qui nous permettent d'établir qu'il s'agit de
6 variantes d'une langue qui jusqu'il n'y ait pas très longtemps était une
7 langue commune à l'ex-Yougoslavie. Nous avons bien sûr de quoi il s'agit,
8 de quoi il en est. C'est sur la base de ces caractéristiques que j'ai fait
9 mon évaluation. J'ai rédigé mon rapport en tenant compte de tous ces
10 paramètres.
11 Q. Monsieur Remetic, s'agissant de votre analyse médico-légale de cette
12 analyse, en fait, c'est que vous avez fait une identification découlant du
13 domaine de la médecine légale ?
14 R. Tout se rapporte à l'identification de la personne, c'est-à-dire tout
15 nous ramène à la même question : est-ce que l'on peut attribuer les
16 conversations interceptées à M. Beara ?
17 Q. L'identification que vous êtes en train de faire est basée sur quelque
18 chose qui appartient à une personne et qui est inhérente à une personne,
19 n'est-ce pas ?
20 R. Je n'ai pas pu vérifier. Je n'ai pas pu vérifier sur la base de quelque
21 chose. Je n'avais que des transcripts. J'ai travaillé avec des transcripts.
22 On peut vérifier seulement si on a les bandes sonores de tous les
23 transcripts que j'ai analysés.
24 Autrement, il n'y a rien d'autre à faire. On ne peut pas faire autre chose.
25 Q. Je vais vous donner un exemple. Un dialecte est quelque chose qui peut
26 changer, n'est-ce pas ? Vous êtes d'accord avec moi ?
27 R. Tout change. Tout évolue. Les dialectes aussi. Mais dans quel sens vous
28 voulez dire que les dialectes changent ? Vous voulez dire que les dialectes
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1 évoluent ou qu'une personne, un homme peut changer de dialecte, le dialecte
2 par le système se développe, ou est-ce que vous voulez dire que moi-même je
3 peux changer mon dialecte ? Qu'est-ce que vous voulez dire ?
4 Q. Excellente question. Je suis désolé de vous avoir posé une question si
5 vague. J'aimerais savoir si lorsqu'une personne déménage, vit ailleurs,
6 tout ceci peut contribuer au développement du dialecte d'une personne, d'un
7 individu ?
8 R. Oui.
9 Q. Le dialecte peut changer plus facilement que, par exemple, la taille
10 d'un adulte ?
11 R. Il faut tenir compte de plusieurs facteurs lorsqu'on parle de
12 changement ou de modification.
13 Q. D'accord.
14 R. Alors il y a plusieurs facteurs dont il faut tenir compte. D'abord
15 l'âge. Un jeune homme, un enfant peut changer de dialecte et s'adapter à
16 son milieu beaucoup plus facilement. Lorsqu'il change de milieu, il peut
17 prendre les caractéristiques d'un nouveau milieu. Deuxièmement, c'est
18 l'importance du dialecte, c'est-à-dire est-ce que vous êtes dans un milieu
19 de prestige, c'est-à-dire le prestige du dialecte ? Lorsque vous arrivez
20 dans un milieu qui parle de façon prestigieuse, est-ce que vous avez
21 l'intention, est-ce que c'est utile de modifier son dialecte ? Car vous
22 allez entrer dans un nouveau milieu qui est plus développé au niveau
23 culturel et industriel, est-ce qu'une jeune personne veut s'adapter ?
24 Ensuite, il faut également tenir compte du profil professionnel de la
25 personne qui change de milieu. Un homme moins instruit pourra plus
26 facilement accepter un autre dialecte et renoncer au sien. Il y a plusieurs
27 facteurs.
28 Il y a également des dialectes qui sont économiquement inférieurs,
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1 et ces derniers vont toujours essayer de s'adapter au dialecte
2 économiquement supérieur. C'est toujours comme ça.
3 Q. Très bien. D'accord, mais je ne parle pas à un niveau social, mais je
4 parle à un niveau individuel, à savoir que l'ADN d'une personne, telle la
5 couleur des cheveux, la taille est moins susceptible de changer que le
6 dialecte de cette même personne.
7 R. [aucune interprétation]
8 Q. Donc lorsqu'on parle du processus d'identification médico-légale, ce
9 que vous êtes en train de dire, ce que vous avez étudié c'est quelque chose
10 qui est beaucoup plus malléable, qui est beaucoup plus facile -- enfin, il
11 est beaucoup plus facile de changer un dialecte que de changer une
12 empreinte digitale ?
13 R. Oui.
14 Q. Toutes ces activités dérivant de la science médico-légale peuvent
15 établir quand même un degré d'erreur. On peut quand même arriver à un degré
16 d'erreur, c'est-à-dire qu'eu égard à ce que vous avez dit aujourd'hui, est-
17 ce que vous pourriez nous dire s'il y a une possibilité d'erreur ? Quel est
18 le niveau d'erreur possible qui peut exister quant à l'analyse de ces
19 conversations interceptées ?
20 R. Seule la personne qui ne travaille jamais ne peut faire d'erreur. Moi-
21 même, je ne vois pas où sont les erreurs. Je ne les décèle pas, et je ne
22 crois pas avoir pu faire un meilleur travail. Dans le cadre de mon analyse
23 et au cours des deux dernières journées ici, je dis qu'il y a très peu de
24 cas où on peut répondre de façon très claire, que l'on peut exclure tout
25 autre chose. Je parle d'un degré de fiabilité, et j'ai tenté de trouver ce
26 qui peut être attribué à M. Beara et non pas ce qui ne peut être attribué à
27 ce dernier ou ce qui existe au premier plan. Alors lorsque je trouve
28 quelque chose, je cherche immédiatement pour savoir s'il y a un témoin
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1 négatif. Tout comme ici, vous avez un témoin positif et ensuite vous avez
2 un témoin négatif. Le négatif exclut le positif. Donc c'est ainsi que je me
3 suis comporté dans le cadre de mon analyse. Je n'ai rien pu faire d'autre
4 eu égard au cœur du matériel.
5 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] Je vous remercie.
6 M. VANDERPUYE : [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE AGIUS : [interprétation] La séance sera levée et nous
8 reprendrons nos travaux à 9 heures.
9 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mercredi 27 août
10 2008, à 9 heures 00.
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