Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 2 décembre 2013

  2   [Audience d'appel]

  3   [Audience publique]

  4   [Les appelants sont introduits dans le prétoire]

  5   [L'appelant Miletic est absent]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 45.

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez

  8   appeler l'affaire.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.

 10   Il s'agit de l'affaire IT-05-88-A, le Procureur contre Popovic et consorts.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Puis-je avoir la

 12   présentation des parties, s'il vous plaît, à commencer par l'Accusation, je

 13   vous prie.

 14   M. ROGERS : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Paul

 15   Rogers du côté de l'Accusation, accompagné de Mme Lada Soljan, Najwa Nabti

 16   et de notre commis à l'affaire, M. Colin Nawrot. Et je m'excuse car le

 17   pilier nous sépare et je ne vous vois pas tous.

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que les excuses devraient

 19   provenir d'ailleurs.

 20   Du côté de la Défense, s'il vous plaît, à commencer par M. Popovic, je vous

 21   prie.

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 23   Messieurs les Juges. Représentant les intérêts de M. Vujadin Popovic, M.

 24   Zoran Zivanovic et Mme Mira Tapuskovic.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] M. Beara.

 26   M. OSTOJIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 27   Messieurs les Juges. Je suis John Ostojic, accompagné de Norman Sepenuk, et

 28   je représente les intérêts de Ljubisa Beara.

 


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  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] M. Nikolic, je vous prie.

  2   Mme NIKOLIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  3   Messieurs les Juges, Jelena Nikolic et M. Stéphane Bourgon, ainsi que

  4   Marlene Yahya, nous représentons les intérêts de Drago Nikolic aujourd'hui.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Et pour M. Pandurevic.

  6   M. HAYNES : [interprétation] M. Peter Haynes, moi-même, et Helena Kaker

  7   pour aujourd'hui.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] M. Miletic, je vous prie.

  9   Mme FAUVEAU : Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs et Madame les

 10   Juges, je suis Natacha Fauveau Ivanovic, avec mon co-conseil, Nenad

 11   Petrusic.

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Le conseil de M.

 13   Miletic, s'il vous plaît. Je remarque que M. Miletic n'est pas dans le

 14   prétoire. Et vous aurez quelque chose à nous dire à ce propos ?

 15   Mme FAUVEAU : Monsieur le Président, est-ce qu'on peut aller en huis clos

 16   partiel, s'il vous plaît.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Certainement. Huis clos partiel,

 18   s'il vous plaît.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes actuellement à huis clos

 20   partiel, Madame, Messieurs les Juges.

 21   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 61-63 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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 11   [Audience publique]

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Ostojic, la Chambre a examiné

 13   votre demande déposée le 27 novembre 2013 aux fins de permettre à M. Norman

 14   Sepenuk de présenter ou de prendre part aux débats et présentations des

 15   arguments oralement, donc de présenter des arguments oraux lors de

 16   l'audience en appel au nom de M. Beara. Je comprends que l'Accusation n'a

 17   pas d'objection. Nous faisons droit à votre demande.

 18   Je vais maintenant brièvement énumérer les conclusions de la Chambre

 19   de première instance, l'appel, et la manière dont nous allons gérer cette

 20   audience d'aujourd'hui.

 21   Le jugement en première instance a été rendu le 10 juin 2010 par la Chambre

 22   d'appel [comme interprété] numéro II, composée de M. le Juge Carmel Agius,

 23   les Juges Kwon et Prost. Le feu Juge Bjorn Stole était juge de réserve.

 24   La Chambre de première instance a constaté qu'une Chambre [comme

 25   interprété] -- les hommes valides de Srebrenica ont été assassinés au mois

 26   de juin [comme interprété] 1995. Une entreprise criminelle commune existait

 27   aux fins de déplacer par la force la population musulmane de Srebrenica et

 28   de Zepa en 1995.

 


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  1   Concernant M. Popovic et M. Beara, la Chambre de première instance a conclu

  2   qu'ils ont été déclarés coupables pour avoir commis en tant que

  3   participants à l'entreprise criminelle commune, commis le crime de

  4   meurtres, de génocide, de complicité en vue de commettre le génocide,

  5   d'extermination en tant que crime contre l'humanité, d'assassinats en tant

  6   que crime contre l'humanité et de violation des lois et coutumes de la

  7   guerre, et de persécution en tant que crime contre l'humanité.

  8   M. Popovic et M. Beara ont tous les deux été condamnés à des peines

  9   d'emprisonnement à vie.

 10   La Chambre de première instance a constaté que M. Nikolic était déclaré

 11   coupable d'avoir aidé et encouragé le génocide, et en tant que participant

 12   à l'entreprise criminelle commune, d'avoir commis le crime d'assassinats en

 13   tant que crimes contre l'humanité, de meurtres et de violations de lois et

 14   coutumes de la guerre, ainsi que de persécution en tant que crime contre

 15   l'humanité.

 16   M. Nikolic a été condamné à 35 ans d'emprisonnement.

 17   La Chambre de première instance a constaté que M. Miletic était coupable en

 18   tant que participant à l'entreprise criminelle commune aux fins de déplacer

 19   par la force un groupe, et il a été condamné pour meurtres, pour

 20   assassinats en tant que crimes contre l'humanité à la majorité - le Juge

 21   Kwon était en désaccord - ainsi que de persécution et d'actes inhumains, de

 22   transferts forcés en tant que crimes contre l'humanité.

 23   M. Miletic a été condamné à une peine de 19 ans d'emprisonnement.

 24   En ce qui concerne M. Pandurevic, la Chambre de première instance l'a

 25   déclaré coupable pour avoir aidé et encouragé l'assassinat en tant que

 26   crime contre l'humanité ainsi que de violations des lois et coutumes de la

 27   guerre à la majorité, M. le Juge Kwon étant en désaccord. Le fait d'avoir

 28   aidé et encouragé la persécution ainsi que d'actes humains, et le transfert


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  1   forcé en tant que crime contre l'humanité, ainsi que l'assassinat en tant

  2   que crime contre l'humanité et violation des lois et coutumes de la guerre

  3   en vertu de l'article 7(3) du Statut de ce Tribunal.

  4   M. Pandurevic a été condamné à 13 ans d'emprisonnement.

  5   Suite au jugement rendu par la Chambre de première instance, l'Accusation,

  6   M. Popovic, M. Beara, M. Nikolic, M. Miletic, ainsi que M. Pandurevic ont

  7   fait appel du jugement de première instance.

  8   Je me propose maintenant de parler de l'appel.

  9   Parmi les motifs d'appel, l'Accusation a demandé à la Chambre d'appel,

 10   entre autres et tout d'abord, de condamner M. Pandurevic pour la commission

 11   de l'extermination en tant que crime contre l'humanité, meurtres et

 12   violation des lois et coutumes de la guerre, et persécution en leur qualité

 13   de crimes contre l'humanité par le biais d'une participation à l'entreprise

 14   criminelle commune visant à tuer ou alternativement, en aidant et en

 15   encourageant l'extermination en sa qualité de crime contre l'humanité,

 16   meurtre en tant que violation des lois et coutumes de la guerre, et

 17   persécution en sa qualité de crime contre l'humanité à l'égard de civils

 18   musulmans de Bosnie; deuxièmement, procéder à la condamnation de M.

 19   Pandurevic parce qu'il a omis d'empêcher et de punir ses subordonnés au

 20   regard de leurs agissements criminels; et troisièmement, de revoir, de

 21   réexaminer la peine prononcée à l'égard de M. Pandurevic.

 22   Dans leurs réponses, M. Pandurevic, M. Popovic, M. Nikolic et M. Miletic

 23   s'opposent aux motifs d'appel de l'Accusation dans la mesure où cela les

 24   concerne à titre individuel, alors que M. Beara n'a pas fourni de réponse.

 25   Dans le mémoire en appel de M. Popovic, il n'est pas procédé à un suivi des

 26   motifs d'appel tels que présentés dans l'appel de l'Accusation. Il parle de

 27   ces différents titres en demandant à la Chambre d'appel de supprimer les

 28   condamnations et de prononcer un jugement de non culpabilité sur tous les


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  1   chefs d'accusation.

  2   Alternativement, il demande à la Chambre d'appel de supprimer les peines

  3   prononcées et d'ordonner un nouveau procès, voire de réduire la peine

  4   prononcée.

  5   L'Accusation présente dans son mémoire une demande de rejet de tous les

  6   motifs d'appel de M. Popovic.

  7   M. Beara présente 40 motifs d'appel, demande à la Chambre d'appel de

  8   renouveler son procès, de supprimer les peines prononcées et de réduire la

  9   peine qui lui a été prononcée.

 10   En réponse, l'Accusation estime que les motifs d'appel de M. Beara

 11   devraient être rejetés dans leur intégralité.

 12   M. Nikolic présente 22 motifs d'appel. Il demande à ce que la Chambre

 13   d'appel supprime ses condamnations, voire, alternativement, demande un

 14   réexamen de la condamnation prononcée, et selon les motifs d'appel, il

 15   propose une nouvelle peine à prononcer.

 16   L'Accusation répond pour dire que l'appel de M. Nikolic devrait être rejeté

 17   dans son intégralité.

 18   M. Miletic présente 28 motifs d'appel en demandant à ce que, soit le

 19   jugement en première instance soit supprimé et de réitérer ou de renouveler

 20   son procès, voire à ce que sa peine soit réduite. Il demande à la Chambre

 21   d'appel de supprimer la confidentialité des éléments du jugement en

 22   première instance, tant dans la partie confidentielle que dans la partie

 23   publique qui a été expurgée.

 24   L'Accusation a répondu aux motifs d'appels de M. Miletic en affirmant

 25   que cela devrait être rejeté, exception faite du motif d'appel numéro 6,

 26   qui se rapporte aux déplacements forcés en sa qualité de crime contre

 27   l'humanité.

 28   M. Pandurevic, lui, présente quatre motifs d'appel et requiert de la

 


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  1   part de la Chambre d'appel une suppression des condamnations prononcées à

  2   son égard et, en sus et alternativement, de procéder à une diminution de la

  3   peine prononcée à son égard.

  4   En réponse, l'Accusation demande à la Chambre d'appel de rejeter

  5   l'appel de M. Pandurevic dans son intégralité.

  6   Je tiens à apporter votre attention l'organigramme que nous avons

  7   établi via l'agenda des audiences en appel, tel qu'établi le 7 novembre

  8   2013. J'encouragerais les parties en présence d'utiliser de façon

  9   raisonnable le temps qu'il leur est imparti, gardant à l'esprit le fait

 10   qu'il y a des points évoqués par la Chambre d'appel qui se trouvent figurés

 11   dans l'ordonnance visant aux préparatifs de cette audience en appel et qui

 12   est datée du 6 novembre 2013. De même, il convient de garder à l'esprit le

 13   vieil adage qui dit que la concision est la sagesse même. Et cela également

 14   est la qualité essentielle de tout conseil.

 15   Je convis le conseil de M. Popovic à présenter ses arguments. Et

 16   avant cela, je ferais juste un commentaire au titre des questions

 17   administratives à aborder. Bien que les pauses aient été prévues pour une

 18   durée de 15 minutes pour ces audiences, je crois que nous avons été par

 19   trop sévères et zélés et les personnes faisant partie du personnel

 20   technique nous indiquent que les pauses devraient au moins durer 20

 21   minutes, ce qui fait que les pauses vont durer 20 minutes.

 22   Je vais demander au conseil de M. Popovic de présenter ses arguments.

 23   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Dans la présentation de l'appel au nom de M. Popovic aujourd'hui, je

 25   voudrais dire qu'il y eu erreur de la part des Juges de la Chambre de

 26   première instance du point de vue factuel pour ce qui est donc d'avoir un

 27   déni de justice. Ces erreurs se rapportent à l'entreprise criminelle

 28   commune qui ont été constatées à avoir existé avant le matin du 12 juillet


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  1   1995 et se rapporteraient à la participation de M. Popovic.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je dois vous interrompre. J'ai omis

  3   de vous indiquer que vous aviez 75 minutes à votre disposition. Bien

  4   entendu, vous n'êtes pas obligé de les utiliser dans leur intégralité.

  5   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  6   Je vais parler ensuite des erreurs qui ont découlé de la condamnation de M.

  7   Popovic vis-à-vis d'un génocide, crime contre l'humanité, crime de guerre

  8   commis suite à la chute de Srebrenica en juillet 1995, et la prétendue

  9   intention de Popovic de commettre un génocide.

 10   Je vais également m'efforcer de démontrer que la Chambre de première

 11   instance dans l'évaluation des éléments de preuve cruciaux s'est éloignée

 12   des critères qui sont sous-entendus pour un jugement raisonnable des faits

 13   et de l'établissement d'une culpabilité au-delà de tout doute raisonnable.

 14   Ceci inclut les témoignages de PW-101, 168, Srecko Acimovic, Momir Nikolic,

 15   et d'autres documents en sus.

 16   Je me propose ensuite de passer la parole à Mme Tapuskovic, qui va se

 17   pencher sur les questions posées par les Juges de la Chambre. Et elle

 18   présentera les erreurs factuelles commises du point de vue du nombre des

 19   victimes, y compris les meurtres allégués commis le 13 juillet 1995 à

 20   Jadar, Rasica, et dans la vallée de la Cerska, tels que décrits dans notre

 21   mémoire aux paragraphes 203 à 210.

 22   Je me propose tout d'abord de faire une démonstration de la façon dont

 23   l'évaluation faite par les Juges de la Chambre de première instance a

 24   manqué d'éléments raisonnables.

 25   Les paragraphes 8 à 16 du mémoire Popovic font référence à une

 26   jurisprudence qui a été utilisée pour ce qui est de la mise en place de

 27   critères de fonctionnement raisonnable de la part des Juges de la Chambre

 28   et de la nécessité de prouver certains éléments au-delà de tout doute


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  1   raisonnable. Je ne souhaite pas répéter dans mes arguments oraux ce qui a

  2   déjà été indiqué. Mais comme dit dans le mémoire, Momir Nikolic a été la

  3   seule source pour la conclusion tirée par les Juges de la Chambre de

  4   première instance, indiquant qu'il y avait eu un planning de procéder à des

  5   exécutions d'hommes musulmans bosniens à Potocari et que cela avait été un

  6   planning établi à la réunion de l'hôtel Fontana à 10 heures du matin à la

  7   date pertinente du mois de juillet 1995. Cela est une erreur. Partant du

  8   témoignage de Momir Nikolic, la Chambre de première instance a établi que

  9   Popovic avait eu une intention génocidaire parce qu'il avait eu

 10   connaissance de ce planning d'exécution à partir de la conception du plan

 11   en question. Je renvoie les Juges de la Chambre au paragraphe 1 178 du

 12   jugement rendu en première instance. Partant de son témoignage au sujet de

 13   la conversation à Bratunac avant le début de l'opération et sa déclaration

 14   qui était celle de devoir tuer tous les Balija. Ça se trouve au paragraphe

 15   1 179 du jugement en première instance.

 16   Je ne vais pas répéter l'argumentation présentée aux paragraphes 34 à 168

 17   de nos écritures, mais je tiens à dire que la Chambre de première instance

 18   a procédé à une lecture sélective de la transcription ou du compte rendu

 19   d'audience, telle que démontrée aux paragraphes 40 à 46 de notre mémoire,

 20   la Chambre a donc erré pour ce qui est des constatations faites par la

 21   déclaration Nikolic, et l'on n'a pas, de façon correcte, interprété les

 22   faits tels que décrits aux paragraphes 47 à 49. D'autre part, la Chambre de

 23   première instance a négligé de prendre en considération les incohérences

 24   flagrantes qui existaient entre la déclaration et le témoignage Nikolic,

 25   telles que décrites aux paragraphes 50 à 64 de notre mémoire.

 26   La Chambre a également omis de prendre en considération une grande quantité

 27   d'éléments de preuve qui démontrent que le processus de séparation avait

 28   été partie intégrante d'un processus, d'un tri opéré, tel que précisé aux


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  1   paragraphes 65 à 73. Au paragraphe 66, note de bas de page 107, il est fait

  2   référence aux propos du témoignage de témoins de l'Accusation, des

  3   prisonniers musulmans, des officiers du Bataillon néerlandais et officiers

  4   de l'armée de la Republika Srpska, qui ont parlé d'un tri qui a été réalisé

  5   aux dates du 12 et 13 juillet 1995. La liste des criminels de guerre, datée

  6   du 12 juillet 1995, montre de façon claire que l'objectif principal de ce

  7   tri à Potocari visait à identifier des potentiels criminels de guerre. Et

  8   suite à ce tri, bon nombre d'hommes musulmans ont quitté Potocari pour

  9   aller vers un territoire tenu par les Musulmans, tel que décrit aux

 10   paragraphes 157 à 162 de notre mémoire.

 11   Les efforts visant à l'accomplissement d'un tri ont démontré l'intention

 12   des forces serbes de Bosnie visant à identifier les suspects de crimes de

 13   guerre. Ce processus de tri dément l'existence d'un plan qui viserait

 14   l'exécution d'hommes musulmans à Potocari, et c'est la seule conclusion

 15   raisonnable qui pourrait être tirée de ces éléments de témoignage.

 16   Popovic a également indiqué que les prisonniers de Potocari étaient

 17   placés sous les autorités des pouvoirs civils entre le 11 juillet et le 14

 18   juillet 1995. La pièce à conviction P10 démontre que les citoyens de

 19   Srebrenica qui ont participé aux activités de combat contre la VRS

 20   tombaient sous la juridiction d'un commissaire nouvellement nommé pour

 21   Srebrenica, à savoir Miroslav Deronjic, tel que décrit au paragraphe 81.

 22   L'officier du Bataillon néerlandais, M. Boering, a parlé de la question de

 23   l'évacuation et du tri après une troisième réunion à l'hôtel Fontana entre

 24   eux et les représentants des autorités civiles, telle que décrite aux

 25   paragraphes 80 et 83 de notre mémoire.

 26   Le Témoin de l'Accusation PW-162 a montré que les autorités civiles

 27   avaient compétence à l'égard des civils de Srebrenica. Et ceci inclut le

 28   fait que Mladic avait présenté Deronjic aux observateurs internationaux


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  1   comme étant l'homme chargé de ces choses-là, tel que décrit aux paragraphes

  2   84 et 85.

  3   Et pour finir, l'entretien de Beara avec Deronjic dans la nuit du 13

  4   juillet, tel relaté par les Juges de la Chambre de première instance au

  5   paragraphe 1 264 du jugement, montre le fait qu'à l'époque, les autorités

  6   civiles avaient eu des responsabilités à l'égard de ces civils. Paragraphes

  7   86 à 88 de notre mémoire.

  8   Par conséquent, une discussion où il y aurait eu participation de

  9   Popovic, Momir Nikolic et Kosoric au sujet de l'hébergement des prisonniers

 10   à différents sites à Bratunac et autour de celui-ci, qu'ils auraient eu en

 11   leur qualité d'officiers de l'armée, était une chose qui sortait de leur

 12   juridiction, au-delà de leurs compétences et responsabilités et, par

 13   conséquent, peu réalisable, telle qu'indiquée aux paragraphes 74 à 88 de

 14   nos écritures.

 15   Dans notre mémoire en appel, nous avons établi, chose qui a été

 16   négligée par les Juges de la Chambre de première instance, le fait que

 17   Momir Nikolic avait tous les motifs possibles de s'incriminer lui-même pour

 18   affirmer que c'était lui qui avait ordonné l'exécution des prisonniers de

 19   l'entrepôt de Kravica et à Sandici, tel que décrit aux paragraphes 89 à 99.

 20   La Chambre de première instance est passée outre, au cours du plaidoyer de

 21   culpabilité négocié, le fait qu'il avait confessé ce terrible crime. Ceci a

 22   été d'abord rejeté par l'Accusation, et l'Accusation l'a incité à

 23   incriminer de façon erronée d'autres accusés, y compris Popovic.

 24   Il y aurait eu un entretien entre Popovic et Kosoric le 12 juillet

 25   devant l'hôtel Fontana. Et, au final, cela a été le seul élément de preuve

 26   qui aurait parlé de l'existence d'un plan visant à exécuter les hommes

 27   musulmans avant le 12 juillet à 10 heures du matin.

 28   La Chambre a commis une erreur pour ce qui est de la diminution du


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  1   rôle et de la responsabilité de Nikolic dans ce qui s'est passé à Potocari.

  2   Toutefois, Popovic affirme que les parties de sa déclaration se rapportant

  3   à son rôle de coordinateur étaient fausses; il n'y a que les commandants

  4   des unités qui pouvaient avoir un rôle de coordination et être chargés d'un

  5   commandement et contrôle à l'égard des différentes unités militaires.

  6   Nikolic n'était pas commandant d'aucune unité et il ne pouvait donc pas

  7   coordonner les activités de différentes unités à Potocari. Ses

  8   connaissances militaires étaient plutôt limitées en sa qualité de sous-

  9   officier. Ses présentations de faits et ses témoignages fournis a

 10   posteriori montrent qu'il y a une méconnaissance élémentaire de la

 11   terminologie militaire la plus élémentaire. Par exemple, lorsqu'il est

 12   question de la coordination de différentes unités, il néglige le fait que

 13   celui qui coordonne exerce une autorité de commandement et qu'il est la

 14   personne habilitée à donner des ordres, et donc il ne connaissait pas la

 15   véritable signification des termes utilisés. C'est ce qui est décrit aux

 16   paragraphes 115 à 118 de notre mémoire.

 17   La Chambre de première instance [comme interprété] a induit la

 18   Chambre de première instance dans l'erreur, elle affirme que son

 19   comportement n'était pas crédible. La Chambre de première instance n'a pas

 20   expliqué de quelle façon le comportement de Nikolic a pu différer des

 21   parties où il a dit la vérité. C'est ce qui est abordé aux paragraphes 119

 22   à 121 de notre mémoire.

 23   En tout état de cause, les constatations de la Chambre de première

 24   instance n'ont pas pris en considération les contradictions évidentes de

 25   son témoignage.

 26   La Chambre de première instance n'a pas réussi à présenter des

 27   éléments de preuve qui corroboreraient les éléments du témoignage de

 28   Nikolic où il n'a pas été convainquant. Aux paragraphes 284 à 288 du


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  1   jugement, il est établi ce qui figure aux paragraphes 122 à 126.

  2   La Chambre de première instance a estimé qu'il n'y a pas eu de plan

  3   de commission d'un génocide pour ce qui est de la conversation qui aurait

  4   eu lieu entre Popovic, Nikolic et autres devant l'hôtel Fontana le 12

  5   juillet. Et rien dans les éléments de preuve utilisés par la Chambre de

  6   première instance ne corrobore des éléments de témoignage de Nikolic pour

  7   ce qui est de cet entretien visant à faire tuer des prisonniers. Vous

  8   trouverez cette analyse aux paragraphes 127 à 157 de notre mémoire.

  9   La Chambre de première instance a également erré lorsqu'elle a conclu de

 10   l'existence d'un plan d'exécution qui aurait englobé également les

 11   prisonniers faits dans la colonne qui se déplaçait. La Chambre a estimé

 12   qu'il y avait eu des opérations de combat qui se déroulaient le 12 et le 13

 13   juillet - et cela figure aux paragraphes 365, 371 et 376 du jugement - et

 14   indépendamment de ces éléments-là, la Chambre de première instance a tiré

 15   la conclusion qui était celle d'affirmer que l'ordre donné par Mladic qui

 16   avait interdit de débattre au sujet de toutes activités militaires était

 17   une preuve d'un planning visant à faire tuer des gens. L'ordre se

 18   rapportait à la restriction de mouvements de personnes non conviées à se

 19   présenter dans Srebrenica et Zepa et fermeture des routes conduisant vers

 20   les théâtres de combat. Cet ordre a donné instruction aux commandants de

 21   brigade d'interdire et empêcher la divulgation d'information aux médias au

 22   sujet des activités de combat, des prisonniers de guerre, l'évacuation de

 23   civils et des personnes qui s'étaient évadées. Ces restrictions, de façon

 24   évidente, servaient à faire en sorte que les forces musulmanes n'apprennent

 25   quels étaient les mouvements et les déplacements de l'armée. Une autre

 26   liste de contradictions et d'incohérences peut être trouvée aux paragraphes

 27   171 à 178 du mémoire Popovic.

 28   La Chambre a également commis une erreur lorsqu'elle s'est appuyée sur


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  1   d'autres éléments de preuve pour conclure que Popovic avait émis un ordre à

  2   Jokic lui indiquant de ne mentionner ni par écrit ni dans des

  3   communications radio les prisonniers et en concluant que cet ordre avait

  4   été envoyé par l'intermédiaire de la ligne de commandement le 13 juillet.

  5   Popovic n'aurait pas pu émettre une telle instruction à l'intention de

  6   Jokic, Jokic qui était en effet chef de la sécurité et chef de génie au

  7   sein de la Brigade de Zvornik. Popovic aurait envoyé une telle instruction

  8   s'il l'avait fait au commandement de la Brigade de Zvornik. Jokic était

  9   subordonné à Obrenovic à l'époque. Obrenovic était le chef d'état-major et

 10   il assumait la fonction de commandant de la Brigade de Zvornik. En tant que

 11   chef de génie, Jokic n'aurait pas pu émettre d'ordre à l'intention de la

 12   brigade. Si Popovic avait voulu émettre ou transmettre quel que ordre que

 13   ce soit, il ne l'aurait pas fait à l'intention de Jokic, mais à celle

 14   d'Obrenovic, qui était le commandant de la brigade à l'époque. Ceci a été

 15   abordé aux paragraphes 179 et 180 de notre mémoire.

 16   Popovic a également énuméré les éléments de preuve indiquant que le meurtre

 17   n'existait pas avant le 14 juillet 1995. Ceci figure aux paragraphes 181 à

 18   202 du mémoire. Les erreurs mises en avant dans cette partie de notre

 19   mémoire portent sur les conclusions du jugement relatif à l'élargissement

 20   du plan visant à tuer les hommes de la colonne le 13 juillet, ainsi que

 21   cela est mentionné aux paragraphes 857, 858 et 861 du jugement.

 22   Le mémoire de M. Popovic démontre pourquoi les meurtres à l'entrepôt de

 23   Kravica et sur le pré de Sandici ne faisaient pas partie d'un plan visant à

 24   assassiner. Il n'y a pas lieu de réitérer ces arguments aujourd'hui, mais

 25   j'invite les Juges de la Chambre à se reporter aux paragraphes 211 à 214 de

 26   notre mémoire.

 27   (expurgé)

 28   (expurgé)

 


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  1   (expurgé)

  2   (expurgé)

  3   M. ROGERS : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, pouvons-nous

  4   passer brièvement à huis clos partiel, s'il vous plaît.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Audience à huis clos partiel.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel. 

  7   [Audience à huis clos partiel]

  8   (expurgé)

  9   (expurgé)

 10   (expurgé)

 11   (expurgé)

 12   (expurgé)

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 24   (expurgé)

 25   (expurgé)

 26   (expurgé)

 27   [Audience publique]

 28   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je renvoie les Juges de la Chambre à la


Page 77

  1   jurisprudence relative aux accords de plaidoyer passés par les témoins --

  2   Juge Prisca Nyambe, dans son opinion dissidente et dans ses opinions

  3   séparées concordantes dans le jugement dans l'affaire Tolimir, paragraphes

  4   5 à 13 du jugement en question.  Lorsqu'il s'agit de témoins dans cette

  5   situation en l'espèce, eh bien, ces témoins ont inventé des intermédiaires

  6   afin de convaincre l'Accusation d'accepter leur plaidoirie et de détourner

  7   l'attention de leur propre responsabilité, ainsi que c'est écrit aux

  8   paragraphes numéro 233 à 237.

  9   Et par excès de précaution, je voudrais peut-être repasser à huis clos

 10   partiel.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos partiel, dans ce cas.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 13   Madame, Messieurs les Juges.

 14   [Audience à huis clos partiel]

 15   (expurgé)

 16   (expurgé)

 17   (expurgé)

 18   (expurgé)

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  1   (expurgé)

  2   (expurgé)

  3   (expurgé)

  4   (expurgé)

  5   (expurgé)

  6   (expurgé)

  7   [Audience publique]

  8   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Les contradictions importantes entre les

  9   dépositions des témoins --

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, nous

 11   sommes maintenant en audience publique.

 12   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Excusez-moi.

 13   Les contradictions considérables entre les dépositions des témoins ayant

 14   passé un accord de plaidoyer, tel qu'exposé aux paragraphes 238 à 268, ne

 15   font que confirmer leurs mensonges. Ces erreurs de faits influent sur les

 16   constatations de la Chambre consistant à dire que Popovic était au courant

 17   du plan visant à assassiner.

 18   La Chambre a de plus commis une erreur en concluant que Popovic avait

 19   directement participé à la commission des meurtres à l'école de Grbavci, à

 20   Rocevic, et à Pilica. Ceci figure au paragraphe 269 du mémoire. A l'opposé

 21   des conclusions de la Chambre de première instance, Popovic ne se trouvait

 22   pas sur les deux sites d'exécution : Lazete 1, également connu sous le nom

 23   d'Orahovac, dans la soirée du 14 juillet, pas plus qu'à Branjevo le 16

 24   juillet. Aucun témoin n'a identifié Popovic comme ayant été présent à l'un

 25   des sites d'exécution. PW-1 [comme interprété] a décrit un lieutenant-

 26   colonel ou un colonel du Corps de la Drina présent au site d'exécution de

 27   Lazete 1, mais n'a pas fait mention de son nom et n'a pas davantage

 28   identifié cet homme. Mais la Chambre de première instance, plutôt que de

 


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  1   tenir compte de cela, s'est appuyée sur des preuves indirectes pour

  2   conclure qu'il s'agissait là de Popovic. Ceci est exposé en détail aux

  3   paragraphes 285 à 298 de notre mémoire.

  4   La déposition du Témoin PW-101 est tout sauf véridique, ainsi que nous le

  5   décrivons et l'expliquons dans le paragraphe 299 et aux paragraphes

  6   suivants jusqu'à 308. Notamment, notre Défense a mis en avant d'autres

  7   éléments de preuve qui contredisent de façon flagrante la déposition du

  8   Témoin PW-101, ainsi que nous l'exposons au paragraphe 301. La crédibilité

  9   de ce témoin a été entièrement mis en lumière après le prononcé du

 10   jugement, lorsqu'il s'est rétracté au sujet de parties pertinentes de sa

 11   déposition, nie avoir jamais dit que --

 12   M. ROGERS : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre à ce stade, mais

 13   ceci tombe sous le coup d'une requête sous le régime de l'article 115, qui

 14   est toujours pendante. Il s'agit de document qui ne figure pas au dossier,

 15   qui ne devrait pas être présenté à cette étape.

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que c'est exact. Maître ?

 17   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Très bien. J'en conviens. Je le retire de

 18   mes arguments.

 19   Alors que son propre commandant a déposé en indiquant que PW-101 avait été

 20   dépêché à Orahovac afin d'aller y chercher un certain Milosevic, commandant

 21   en second chargé de la logistique au sein de la Brigade de Zvornik, ainsi

 22   que nous le décrivons au paragraphe 301(a), le Témoin PW-101, quant à lui,

 23   s'est de façon tout à fait inexplicable rappelé avoir été déployé, dépêché

 24   sur place pour y acheminer du ravitaillement. Il a également dissimulé à la

 25   Chambre que lui-même ne s'était jamais rendu au site d'exécution pendant

 26   que ces exécutions se produisaient. D'après lui, le Témoin 3DW10, PW-101

 27   n'a jamais envoyé de jeunes garçons à partir du site d'exécution, ainsi que

 28   nous le décrivons aux paragraphes 301(c) et (d). Il est plutôt aller


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  1   chercher une telle personne dans une école proche. PW-101 a donné une

  2   fausse représentation en disant qu'il était seul à accompagner ce jeune

  3   garçon dans la camionnette pendant le trajet vers Zvornik, ainsi que c'est

  4   décrit au pour 301(e), et qu'il a conduit cette camionnette directement

  5   depuis le site d'exécution à l'hôpital de Zvornik, ainsi que c'est écrit au

  6   paragraphe 301(f). Mais d'autres témoins se sont rappelés clairement

  7   l'avoir accompagné. Il a enfin menti en affirmant qu'il avait été présent

  8   au site d'exécution de Lazete 1 dans la soirée du 14 juillet. Ces

  9   exécutions se sont produites pendant la nuit après la fin des exécutions au

 10   site de Lazete 2. PW-110 a confirmé ceci, parce qu'il était présent sur le

 11   site, il y est arrivé. Le récit qu'ont fait différents témoins de ces

 12   événements présentent trop d'incohérences pour convaincre au-delà de tout

 13   doute raisonnable un Juge du fait, lui aussi raisonnable, que Popovic

 14   aurait été présent à Orahovac le 14 juillet.

 15   Et ceci est abordé aux paragraphes 305 à 307 du mémoire en appel.

 16   L'évaluation faite par la Chambre de première instance de la crédibilité du

 17   Témoin PW-101 ne saurait être maintenue, comme cela fait d'ailleurs l'objet

 18   d'une requête pendante en application de l'article 115. Par conséquent, la

 19   conclusion de la Chambre de première instance selon laquelle l'officier

 20   présent à Lazete 1 pendant que les exécutions se déroulaient était Popovic

 21   n'est pas la seule conclusion raisonnable que l'on puisse tirer des

 22   éléments de preuve.

 23   La Chambre a commis une erreur plus grave encore en concluant que cet

 24   officier, tel que décrit par Drazen Erdemovic, était Popovic. Erdemovic a

 25   décrit l'officier comme étant un homme très corpulent, sans moustache ni

 26   brûlures [comme interprété]. Popovic mesure 174 centimètres et portait la

 27   moustache à l'époque. Erdemovic n'a pas reconnu Popovic lors de la

 28   présentation de planches photo. La Chambre de première instance a néanmoins


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  1   conclu que cet officier était Popovic. Et ceci est abordé aux paragraphes

  2   271 à 282 de notre mémoire.

  3   La Chambre de première instance s'est également appuyée sur les demandes de

  4   carburant afin d'appuyer ses conclusions relatives à Branjevo; elle a

  5   commis trois types d'erreur. Premièrement, la Chambre n'a pas reconnu que

  6   Popovic n'avait pas nécessairement émis ces requêtes personnellement. En

  7   tant qu'assistant du commandant du Corps de la Drina, Popovic aurait dû

  8   demander le carburant directement à son commandement; il n'aurait pas émis

  9   une telle requête par l'intermédiaire de la Brigade de Zvornik. S'il avait

 10   pu contacter la Brigade de Zvornik, il aurait également été en mesure de

 11   communiquer avec le commandement du Corps de la Drina. Deuxièmement,

 12   deuxième erreur, l'enchaînement des événements, avec d'un côté la demande

 13   de carburant et d'un autre, la livraison, ne cadre pas avec la réalité, en

 14   tout cas, pas d'une façon qui aurait pu contribuer aux exécutions. Et,

 15   enfin, une demande de carburant ne cadre pas non plus avec d'autres

 16   documents démontrant tout à fait concrètement que les engins utilisés par

 17   l'inhumation avaient fait le plein à une station d'essence à Zvornik.

 18   Ce sujet et d'autres ont également été largement remis en question par

 19   d'autres éléments de preuve que nous avons soumis dans notre requête en

 20   application de l'article 115. Cette conclusion n'était donc pas la seule

 21   raisonnable que l'on pouvait tirer des éléments de preuve.

 22   Enfin, la Chambre de première instance a commis une erreur en concluant que

 23   l'interception du 17 juillet 1995 concernait les meurtres et l'inhumation

 24   de prisonniers musulmans. Paragraphe 341 de notre mémoire.

 25   Dans son interprétation, la Chambre n'a pas tenu compte des points de

 26   suspension dans le texte de cette conversation interceptée, points de

 27   suspension indiquant clairement des mots manquants dans la conversation en

 28   question, tel que nous le décrivons aux paragraphes 343 à 345. De plus, la


Page 82

  1   Chambre de première instance n'a pas, non plus, tenu compte du fait que

  2   Popovic avait reçu un ordre de se rendre à visite à Baljkovica dans

  3   l'après-midi du 16 juillet afin de voir ce qu'il en était de l'ouverture

  4   d'un corridor, ainsi que c'est décrit aux paragraphes 346 à 350 de notre

  5   mémoire.

  6   D'après un témoin de la Défense, Rakic, le corridor était une question

  7   importante et extrêmement urgente à l'époque. Et, en effet, même des

  8   officiers haut gradés de l'état-major principal avaient été dépêchés sur

  9   place pour vérifier les rapports relatifs au corridor, qui avaient été

 10   envoyés par Pandurevic, et plus tard par Popovic.

 11   Je montrerai, à présent, la façon dont la Chambre s'est également fourvoyée

 12   en concluant que Popovic avait joué un rôle de coordination à Orahovac;

 13   paragraphes 283 et 284.

 14   Le rôle de Popovic, sa présence alléguée et ses actes et son comportement

 15   allégué à Rocevic le 15 juillet dans la matinée, tout ceci fait l'objet

 16   d'une analyse figurant aux paragraphes 309 à 335 de notre mémoire. D'après

 17   la Chambre de première instance, Popovic serait arrivé devant l'école de

 18   Rocevic afin d'y tuer des prisonniers, mais il serait donc arrivé sans

 19   hommes, sans munitions, sans camions, ni même un site présélectionné pour

 20   mener tout cela à bien. Trois témoins de l'Accusation, qui étaient présents

 21   devant l'école de Rocevic - leurs dépositions sont rappelées au paragraphe

 22   318 de notre mémoire - n'ont en rien confirmé la déposition d'Acimovic. Et

 23   ceci est traité aux paragraphes 321 [comme interprété], ainsi que 331 à 335

 24   de notre mémoire. La Chambre n'a pas correctement évalué la déposition de

 25   deux de ces témoins, ainsi que nous le décrivons au paragraphe 320 de notre

 26   mémoire, elle a même déformé la déposition de l'un d'entre eux; paragraphes

 27   321 et 322 de notre mémoire. A des fins de corroboration, la Chambre de

 28   première instance, de façon tout à fait illogique, a confondu le rapport de


Page 83

  1   causalité et le rapport de corrélation. La Chambre n'aurait dû, pour

  2   confirmer le récit d'Acimovic, s'appuyer que sur les actes ultérieurs

  3   d'Acimovic et d'autres. Mais ce que nous avons ici n'est pas une preuve de

  4   la responsabilité de Popovic. De plus, ces éléments de preuves ainsi que

  5   des documents versés par ailleurs indiquent de façon très claire

  6   qu'Acimovic lui-même avait organisé l'approvisionnement en munitions, en

  7   véhicules, et l'acheminement d'effectifs aux fins d'exécution des

  8   prisonniers à Rocevici et avait également choisi Kozluk comme site

  9   d'exécution. Cependant, il a dissimulé l'identité du ou des supérieurs

 10   hiérarchiques qui lui avaient ordonné cela, comme nous l'expliquons aux

 11   paragraphes 317 et 326.

 12   Enfin, la Chambre de première instance n'a pas reconnu l'importance d'un

 13   témoin à charge, Dragan --

 14   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu le nom.

 15   M. ZIVANOVIC : [interprétation] -- qui avait vu Popovic à l'époque où l'on

 16   prétend qu'il se trouvait à Rocevic, il l'a vu à un autre endroit. Page du

 17   compte rendu d'audience 14 026.

 18   Je vais maintenant aborder les erreurs faites par la Chambre de première

 19   instance quant à la façon dont Popovic s'était chargé de la garde de dix

 20   prisonniers blessés originaire de la caserne Standard. Ceci figure aux

 21   paragraphes 357 à 360 de notre mémoire. La Chambre de première instance a

 22   déformé le contenu de deux conversations interceptées, ainsi que nous

 23   l'abordons aux paragraphes 361 à 365 de notre mémoire, et ainsi qu'un

 24   registre relatif à l'usage de véhicule, il s'agit d'un véhicule de type

 25   Golf, et nous l'abordons aux paragraphes 366 et 367. De plus, la Chambre a

 26   complètement laissé de côté (expurgé)

 27   (expurgé)

 28   (expurgé)

 


Page 84

  1   (expurgé)

  2   (expurgé)

  3   (expurgé). La Chambre a conclu, entre autres, que la

  4   voiture de modèle Golf de Popovic s'était rendue à Zvornik mais n'a pas

  5   conclu comptant la présence ou non de Popovic ce jour-là dans cette

  6   voiture. La Chambre a également manqué de clarté, c'est le moins qu'on

  7   puisse dire, quant au séjour des patients de Milic dans l'hôpital de

  8   Zvornik avant leur transfert à la Brigade de Zvornik, ainsi que nous le

  9   décrivons au paragraphe 369. La Chambre de première instance a laissé

 10   complètement de côté les éléments de preuve en provenance du Dr Novakovic,

 11   qui avait amené les Musulmans blessés de Milici tard dans l'après-midi du

 12   14 juillet mais ne les avait pas retrouvés à l'hôpital dans la matinée du

 13   15 juillet, ainsi que nous le décrivons au paragraphe 370 de notre mémoire.

 14   M. ROGERS : [interprétation] Excusez-moi, pourrions-nous passer brièvement

 15   à huis clos partiel, s'il vous plaît.

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 18   Monsieur le Président.

 19   [Audience à huis clos partiel]

 20   (expurgé)

 21   (expurgé)

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 28   (expurgé)


Page 85

  1   (expurgé)

  2   (expurgé)

  3   (expurgé)

  4   (expurgé)

  5   [Audience publique]

  6   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Je pense qu'il convient de rester à huis

  7   clos partiel, Messieurs les Juges. Je vous prie de m'en excuser.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Par prudence, nous restons donc

  9   à huis clos partiel. Dites-nous lorsque nous pourrons quitter la session à

 10   huis clos partiel.

 11   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Oui.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 13   [Audience à huis clos partiel]

 14   (expurgé)

 15   (expurgé)

 16   (expurgé)

 17   (expurgé)

 18   (expurgé)

 19   (expurgé)

 20   (expurgé)

 21   [Audience publique]

 22   M. ZIVANOVIC : [interprétation] La Chambre de première instance a également

 23   fait fi de la déposition du Dr Zoran Begovic qui avait confirmé que toutes

 24   instructions s'agissant de ces patients qu'ils avaient accueillis

 25   d'Obrenovic, qui avait effectué toutes les dispositions concernant leur

 26   transfert, leur hébergement et leur traitement médical par le personnel

 27   médical de l'hôpital Zvornik. Il a même donné pour instruction au Dr

 28   Begovic de ne pas inscrire ces patients dans le carnet de registre de

 


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  1   l'infirmerie de la Brigade de Zvornik. Ceci se trouve dans les paragraphes

  2   371 à 373 du mémoire; pages du compte rendu d'audience 9 137 à 9 138 et 9

  3   140.

  4   Les éléments de preuve indiquaient également que la protection du centre

  5   médical de Zvornik s'est déroulée le 14 juillet 1995, le jour même où les

  6   Musulmans blessés furent transférés de Milici. Cette tâche a été réalisée

  7   par le subordonné d'Obrenovic, Mihajlo Galic, qui l'aurait fait seulement

  8   sur ordre d'Obrenovic. C'est au paragraphe 374. L'information concernant le

  9   décès d'un des Musulmans blessé à l'hôpital de Zvornik, envoyé très tôt le

 10   matin du 16 juillet, montre très fortement que les autres Musulmans blessés

 11   avaient déjà été transférés à la Brigade de Zvornik à cette date, et non

 12   pas le 20, comme l'avait conclu la Chambre de première instance. C'est

 13   décrit dans notre mémoire aux paragraphes 377 et 378.

 14   Un des patients qui avaient disparu a été traité la matinée du 14 juillet

 15   1995 par le Dr Novakovic et envoyé à la caserne Standard - cela se trouve

 16   au paragraphe 379 de notre mémoire - montrant que ces patients avaient été

 17   envoyés à la Brigade infirmière de Zvornik le 14 juillet. Tous ces éléments

 18   indiquent que ce n'est pas simplement une conclusion raisonnable des

 19   éléments de preuve que Popovic avait tué ou facilité l'assassinat des

 20   patients musulmans blessés.

 21   La question suivante que je voudrais contester implique Bisina. Ces

 22   événements ne faisaient pas partie de la mise en accusation, comme cela est

 23   décrit aux paragraphes 387 à 391. La Chambre de première instance a fait fi

 24   des éléments de preuve présentés par la Défense, en indiquant qu'au matin

 25   du 23 juillet, lorsque les événements à Bisina s'étaient déroulés, Popovic

 26   s'est rendu à Zvornik où il a rencontré le responsable de l'usine. Même si

 27   Vlacic ne se souvenait pas de la date exacte de la réunion, il se rappelait

 28   très nettement qu'il avait posé une question concernant un parent de


Page 87

  1   Popovic, Djordje Popovic, qui a été blessé et fait prisonnier dans l'action

  2   à proximité de Zepa. A 9 heures du matin le 23 juillet, l'officier de garde

  3   du Corps de la Drina a indiqué au commandant du  Corps de la Drina, le

  4   général Krstic, que Popovic s'était rendu à Vlacic. C'est au paragraphe

  5   395. Le carnet de bord du véhicule Golf utilisé par Popovic a également

  6   enregistré son déplacement de Vlasenica à Zvornik et ainsi que le retour,

  7   tels que décrits au paragraphe 396. Deux autres témoins qui ont travaillé

  8   sur la construction de la caserne à Bisina ont indiqué que Popovic était

  9   arrivé là deux ou trois heures après les camions lui montrant le chemin.

 10   Popovic s'y est rendu et est revenu peu de temps après. Dans l'ensemble,

 11   ces éléments de preuve confirment que Popovic est arrivé à Bisina après

 12   l'exécution des prisonniers.

 13   Popovic a contesté la conclusion de la Chambre selon laquelle les forces

 14   des Serbes de Bosnie avaient commis le génocide, tel que décrit aux

 15   paragraphes 19 à 32 du mémoire. D'après la définition de la Chambre, les

 16   Serbes -- forces bosniaques comprennent des milliers de membres, dont la

 17   majorité n'ont absolument aucun rôle dans les événements de Srebrenica. Le

 18   jugement n'a pas identifié de membre particulier de ces forces bosniaques

 19   serbes qui aurait eu une intention génocidaire, à l'exception de Popovic et

 20   Beara.

 21   L'équité judiciaire exige que l'intention génocidaire par l'auteur soit

 22   établie uniquement sur une base au cas par cas. Par exemple, l'auteur de

 23   l'exécution de prisonniers musulmans à Branjevo du camp militaire, Drazen

 24   Erdemovic, n'a pas été condamné pour génocide puisqu'il ne manifestait pas

 25   d'intention génocidaire. Jusqu'à présent, le TPIY a jugé 11 accusés pour

 26   les assassinats de masse à Srebrenica. Aucun -- aucun des commandants

 27   d'unités du Corps de la Drina n'a été jugé coupable de génocide en raison

 28   de l'absence d'intention génocidaire. Mais d'après la Chambre de première


Page 88

  1   instance, des membres inconnus et non indiqués des forces serbes bosniaques

  2   possédaient néanmoins une telle intention.

  3   Le constat selon lequel des membres des forces serbes bosniaques auraient

  4   commis un génocide enfreint la présomption d'innocence et évoque à sa place

  5   la présomption de culpabilité de génocide pour tout membre des forces

  6   serbes bosniaques. Il est notable, toutefois, qu'une telle conclusion était

  7   un élément essentiel pour déterminer l'intention génocidaire de Popovic. En

  8   l'absence d'une telle constatation, l'intention génocidaire doit être

  9   limitée à deux officiers gradés moyens de la VRS, Popovic et Beara.

 10   Les actes des forces serbes bosniaques à l'époque démontraient qu'ils

 11   avaient transporté entre 20 000 et 30 000 Musulmans en sécurité du

 12   territoire détenu par les Musulmans. Outre, malgré leur connaissance du

 13   déplacement de la colonne militaire musulmane qui traversait le territoire

 14   détenu par les Serbes, la VRS a envoyé ses principales forces dans la

 15   direction opposée, à Zepa. Ces actes démontrent clairement l'absence d'une

 16   intention génocidaire de la part des forces serbes bosniaques.

 17   La Chambre a pris deux éléments de preuve de l'intention génocidaire, une

 18   coordination significative, tels que décrits dans le jugement de la Chambre

 19   de première instance aux paragraphes 882 et 933, dans le vaste processus.

 20   C'est l'affirmation de Popovic que ni une coordination significative ni un

 21   processus constituent des éléments caractérisant le génocide. En effet, les

 22   crimes de guerre ou les crimes contre l'humanité, sinon tous les crimes

 23   avec plus de deux co-auteurs, deux traîtres, peuvent poursuivre avec les

 24   mêmes caractéristiques que celles détenus par la Chambre de première

 25   instance. Popovic a analysé en détail ces erreurs aux paragraphes 19 à 33

 26   de son mémoire.

 27   Je vais maintenant donner la parole à Mme Tapuskovic.

 28   Mme TAPUSKOVIC : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, bonjour.


Page 89

  1   Chers confrères de l'Accusation et consœurs de l'Accusation, bonjour.

  2   Une partie de l'appel interjetée par Vujadin Popovic concerne également les

  3   victimes de Srebrenica, les personnes disparues, les personnes exécutées,

  4   qui ont été identifiées. Nous affirmons, et je résume ici simplement, que

  5   la Chambre de première instance a commis des erreurs en déterminant le

  6   nombre total des disparus, lorsqu'elle a déterminé le nombre des personnes

  7   exécutées, en incluant le nombre des victimes de Nova Kasaba dans le nombre

  8   total des personnes disparues, lorsqu'elle a pris en considération et

  9   comptabilisé également des victimes de sites qui n'étaient pas englobés par

 10   l'acte d'accusation. Le nombre des personnes exécutées sur certains sites

 11   ne faisait en rien partie de la thèse de l'Accusation.

 12   La conclusion au paragraphe 607 du jugement en première instance est

 13   particulièrement pertinente en l'espèce, parce que la détermination du

 14   nombre exact de personnes exécutées n'est pas nécessaire pour statuer quant

 15   à la thèse de l'Accusation pour le crime de génocide et d'extermination en

 16   tant que crime contre l'humanité. Nous vous renvoyons à la note de bas de

 17   page 2214 quant au nombre de personnes tuées. Nous considérons que ceci

 18   n'est pas un élément des crimes en question.

 19   Cependant, la Chambre de première instance a affirmé qu'une telle

 20   estimation était pertinente.

 21   Aux paragraphes 457 et 461 de notre mémoire en appel, nous avons affirmé

 22   que la Chambre de première instance avait commis des erreurs aux

 23   paragraphes 659 et 664 du jugement en incluant parmi les personnes

 24   disparues l'identité des personnes qui ne pouvaient être mises en

 25   correspondance avec aucune des personnes figurant sur la liste des disparus

 26   ainsi que celles ayant fait l'objet d'un échange à Batkovic, qu'on a

 27   retrouvées plus tard en vie. La Chambre de première instance a également

 28   commis une erreur en incluant également parmi le nombre total de ceux qui


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  1   avaient été identifiés les personnes qui n'étaient pas été identifiées par

  2   leurs nom et prénom mais uniquement par profil ADN. La Chambre de première

  3   instance, au paragraphe 651 du jugement, constate elle-même qu'il faudrait

  4   réduire le nombre de personnes identifiées d'un nombre correspondant à

  5   celles des personnes dont nous n'avons que le profil ADN et non pas les nom

  6   et prénom.

  7   Au paragraphe 441 du mémoire en appel de la Défense, nous mettons en avant

  8   l'erreur commise par la Chambre de première instance lorsqu'elle a pris en

  9   considération les restes humains retrouvés en surface à Kozluk; alors que

 10   les autres restes humains retrouvés en surface, correspondant à d'autres

 11   paragraphes du jugement, ont été exclus par la Chambre de première instance

 12   du décompte total parce que la Chambre de première instance manquait

 13   d'éléments de preuve indiquant que ces personnes avaient été exécutées.

 14   Nous considérons que ces victimes de Kozluk aussi doivent faire l'objet du

 15   même traitement.

 16   Les victimes de Nova Kasaba sont abordées aux paragraphes 415 à 418 de

 17   notre mémoire en appel.

 18   Au paragraphe 30 --

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, Maître. Pouvez-vous

 20   apporter une précision quant "aux restes humaines retrouvés en surface" ?

 21   Que voulez-vous dire par cela, "surface remains" en anglais ?

 22   Mme TAPUSKOVIC : [interprétation] Oui, Madame et Messieurs les Juges. Dans

 23   le jugement, la Chambre de première instance s'est largement penchée sur la

 24   question des restes humains retrouvés en surface. Ils sont définis dans le

 25   rapport de l'enquêteur Janc, il s'agit d'une pièce à charge, P4490. Il y a

 26   été conclu qu'à l'époque, en tout cas, de la rédaction de ce rapport, il y

 27   avait plusieurs centaines de restes humains retrouvés en surface. Et la

 28   thèse de l'Accusation était que ces victimes étaient principalement tombées


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  1   lors de combats --

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Les interprètes vous demandent de

  3   répéter le nombre de victimes.

  4   Mme TAPUSKOVIC : [interprétation] 648.

  5   Puis-je poursuivre, Monsieur le Président ? Très bien. Merci.

  6   Le paragraphe 30.3.1 de l'acte d'accusation est à charge et reproche les

  7   événements à Nova Kasaba. Cependant, les victimes de Nova Kasaba, comme l'a

  8   conclu également la Chambre de première instance dans sa note de bas de

  9   page 6069, n'ont pas pu être liées à des crimes dont on avait démontré la

 10   commission. C'est pourquoi nous estimons que ces 90 victimes correspondant

 11   à ce site doivent être retirées du nombre total de personnes identifiées

 12   figurant au paragraphe 664 du jugement, parce qu'il n'a pas été démontré

 13   que ces personnes avaient été les victimes d'une exécution. Ceci concerne

 14   tous les quatre charniers de Nova Kasaba, 1996, 1999, 2001 et la tombe

 15   individuelle en 2006. Ceci figure en annexe A, page 2, 3, 30 et 32, pièce

 16   P4490.

 17   Cette réduction du nombre de personnes identifiées devra se faire sous le

 18   même principe que ce que la Chambre a effectué au paragraphes 664 et

 19   précédents du jugement, réduisant ainsi le nombre total de victimes de 12,

 20   correspondant aux restes humains de 12 personnes retrouvées dans le

 21   charnier L de Glogova 1, qui avait été restitué de Serbie, et de dix

 22   personnes provenant du charnier CR4, parce qu'il n'y avait pas de preuve

 23   que ces restes humains soient légués au moindre site primaire.

 24   Me Zivanovic a déjà fait une référence au charnier Cancari Road 4, qui

 25   n'est pas mentionné dans l'acte d'accusation, si bien que ceci a fait

 26   l'objet de la demande de réouverture de procès soumise par la Défense. Les

 27   victimes de Bisina ont été incluses dans le nombre total de victimes

 28   identifiées, mais nous estimons qu'une erreur a été commise, parce que ces


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  1   victimes n'étaient pas référencées dans l'acte d'accusation, ne faisaient

  2   pas partie de la thèse de l'Accusation.

  3   Aux paragraphes 460 et 463 de notre mémoire en appel, nous traitons des

  4   victimes provenant d'autres charniers, qui sont abordées par le Témoin Janc

  5   dans la pièce P4490, annexe A, page 34. Il considère qu'il s'agit de restes

  6   humains en surface, et nous estimons qu'il faut traiter le cas de ces

  7   restes humains retrouvés en surface exactement de la même façon que les

  8   autres restes humains retrouvés en surface, ainsi que cela a été fait aux

  9   paragraphes 651 et 659, ainsi que 660 du jugement. Nous trouvons parmi ces

 10   personnes correspondant aux restes humains retrouvés en surface également

 11   des personnes dont les restes ont été exhumés de sites inconnus. P4490,

 12   annexe A. C'est la raison pour laquelle Janc lui-même a considéré qu'il

 13   s'agissait de restes humains en surface.

 14   Paragraphe 465 de notre mémoire, il s'agit là également des victimes

 15   retrouvées en Serbie pour lesquelles nous ignorons la cause de la mort, et

 16   nous n'avons pas non plus de preuve qu'il s'agisse là de victimes de

 17   meurtre ou d'exécution. Nous retrouvons ceci dans la pièce à charge P4490,

 18   annexe A, page 35. Par conséquent, nous estimons qu'il convient également

 19   de retirer ces victimes-là du nombre total de victimes.

 20   Nous devons ici mettre en avant à l'adresse des Juges de la Chambre d'appel

 21   que la Chambre de première instance, dans son jugement dans l'affaire

 22   Tolimir, qui n'a pas fait l'objet d'un appel de la part de l'Accusation,

 23   est parvenue à des conclusions différentes. Nous savons que dans l'affaire

 24   Tolimir, la Chambre de première instance a usé de son pouvoir

 25   discrétionnaire pour déterminer certains faits et que la Chambre d'appel

 26   n'est en rien liée par cela. Cependant, la tâche de ce Tribunal est de

 27   déterminer les faits. Elle se traduit également par la prise en compte de

 28   la façon dont les Chambres de première instance se sont appuyées sur les


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  1   constatations dans d'autres affaires à travers des faits déjà jugés.

  2   Dans les paragraphes 546 et 569 du jugement Tolimir, la Chambre de première

  3   instance a conclu que pour Bisina, l'acte d'accusation se réfère à à peu

  4   près 39 hommes, alors que la Chambre de première instance, quant à elle, a

  5   conclu que 54 personnes avaient été tuées. Ce nombre, bien que supérieur à

  6   celui référencé dans l'acte d'accusation, résulte de ce qui est évoqué dans

  7   le paragraphe pertinent de l'acte d'accusation. Par conséquent, cela ne

  8   fait pas partie de la thèse retenue à charge contre l'Accusation. Cela va

  9   au-delà des 39.

 10   Concernant ces victimes qui font apparition dans le rapport Janc, dans

 11   cette affaire et dans l'affaire Tolimir aussi, au paragraphe 590 du

 12   jugement rendu de l'affaire Tolimir, il est constaté que les forces des

 13   Serbes de Bosnie n'ont pas tué hors combat ces victimes tel que mentionné

 14   dans cette catégorie. Et ces victimes n'ont pas été comptées parmi le total

 15   des personnes décédées. Dans notre affaire, les victimes des autres fosses

 16   communes ont été comptées dans le total des personnes tuées. Dans l'affaire

 17   Tolimir, la Chambre de première instance a inclus les restes de dépouilles

 18   humaines retrouvées en surface à Kozluk et les a comptées parmi les fosses

 19   autres. Elle ne les a pas comptées dans le total des victimes, ce qui fait

 20   que la Chambre de première instance ne les a pas comptées dans le nombre

 21   total des victimes. 

 22   Lorsque l'on parle des autres fosses communes identifiées et en provenance

 23   de Serbie, nous pouvons dire la même chose que pour Bisina, à savoir que

 24   ces sites n'ont pas été englobés par l'acte d'accusation. Il n'y a aucun

 25   élément de preuve disant que ce sont des exécutions qui sont le résultat de

 26   la réalisation du plan de l'entreprise criminelle commune, et ce chiffre-là

 27   ne devrait pas faire partie du nombre total des victimes.

 28   L'acte d'accusation parle des sites indiqués aux paragraphes 30.1 à 30.4.


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  1   Les autres sites ne sont pas mentionnés.

  2   La possibilité qu'il y ait eu des meurtres de commis à d'autres

  3   endroits n'a pas été mentionnée par le bureau du Procureur ni dans le

  4   mémoire préalable au procès, paragraphes 47 à 130, pas plus que dans ses

  5   propos liminaires, alors que c'est considéré comme étant une pratique

  6   judiciaire pour expliciter l'acte d'accusation à titre complémentaire. Cela

  7   a été fait à l'affaire Naletilic, jugement rendu, paragraphe 34.

  8   Je voudrais, à présent, Madame, Messieurs les Juges, parler des

  9   questions que vous avez posées à la Défense de M. Popovic.

 10   Ces questions ont été posées de la façon suivante - je vais en donner

 11   lecture en anglais aux fins de discuter les affirmations de Popovic, qui

 12   affirme que la Chambre de première instance s'est trompée lorsqu'elle l'a

 13   condamné pour l'exécution de plus hommes à Kozluk à la date du 15 juillet

 14   1995, alors que l'acte d'accusation ne lui a reproché que l'exécution de

 15   quelque 500 Musulmans au même site.

 16   Alors, la Chambre de première instance a demandé comment interpréter le

 17   30.20, 30.8.1 de l'acte d'accusation, note de bas de page 1839 du jugement.

 18   Au 30.8.1 de l'acte d'accusation, il est dit qu'à peu près 500 hommes

 19   musulmans de Bosnie, aux dates du 14 ou 15 juillet, se trouvaient internés

 20   à l'école de Rocevici. Au paragraphe 30.10 de l'acte d'accusation, il est

 21   dit que le 15 juillet 1995, les membres de l'armée de la Republika Srpska

 22   et du ministère de l'Intérieur de la Republika Srpska ont transporté

 23   quelque 500 hommes musulmans vers un site non loin de Kozluk, et ce, pour

 24   les exécuter sommairement, et que le jour d'après ils ont été enterrés.

 25   Ce paragraphe, 30.10, ne dit pas d'où est-ce que ces hommes musulmans de

 26   Bosnie ont été amenés là. A la lecture de l'acte d'accusation, il ne peut

 27   pas être établi un lien entre l'école de Rocevici et Kozluk. S'agissant des

 28   éléments de preuve qui ont été présentés au sujet des événements de l'école


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  1   de Rocevici et à Kozluk, nous montrent de façon indubitable que les détenus

  2   de l'école à Rocevici ont été transportés vers Kozluk. Le jugement rendu,

  3   au paragraphe 516, constate que les détenus de l'école de Rocevici ont été

  4   transférés vers Kozluk avec des corps de personnes déjà mortes, que l'on

  5   avait vus devant l'école, et ceci se trouve être confirmé à la note de bas

  6   de page 1839.

  7   La Défense estime que la note de bas de page 1839 du jugement rendu est

  8   très claire. Cela figure à côté du chapitre du jugement rendu, page 199,

  9   qui est intitulé : "Ecole à Rocevici et Kozluk." Nous précisons en cette

 10   occasion que les détenus de l'école de Rocevici ont été abattus à Kozluk,

 11   et ce sont des personnes qui font partie d'une même transaction telle que

 12   définie à l'article 2 du Règlement de procédure et de preuve. Nous estimons

 13   donc que le jugement rendu, paragraphe 516 et note de bas de page 1839,

 14   procède à la rectification d'une lacune à l'acte d'accusation qui n'a pas

 15   établi un lien correct entre l'école de Rocevici et Kozluk.

 16   Pour ce qui est de la deuxième question posée par les Juges de la Chambre à

 17   la Défense Popovic, qui se lit comme suit : Pour ce qui est de savoir si le

 18   jugement rendu Popovic pour des meurtres commis mis à part les dispositions

 19   susmentionnées.

 20   Alors, au paragraphe 524 du jugement rendu, les Juges de la Chambre

 21   constatent que 1 040 personnes ont été identifiées et il y a un lien

 22   d'établi avec Kozluk, les fosses primaires et secondaires, qui sont au

 23   total sept sur la route de Cancari. Nous mentionnons là qu'il s'agit du 2,

 24   3, 4, 5 et 7, ainsi que 13, la septième étant une fosse primaire à Kozluk.

 25   Et nous estimons que l'un des fondements d'une procédure au pénal, c'est de

 26   ne pas outrepasser l'acte d'accusation. On ne peut pas reprocher à

 27   quelqu'un plus de délits qu'il n'y en a d'indiqués à l'acte d'accusation.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame, juste pour vous faire


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  1   remarquer qu'il n'y a que trois à quatre minutes restantes avant la pause.

  2   Mme TAPUSKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense avoir la

  3   possibilité d'en terminer en l'espace de ces trois ou quatre minutes. Merci

  4   de votre avertissement. Merci.

  5   Alors, la modification du nombre de victimes n'est pas une modification

  6   substantielle. Ce n'est pas un fait juridiquement pertinent parce que cela

  7   ne rajoute aucun délit au pénal en sus de ceux qui existent déjà. Les

  8   circonstances de délit au pénal sont déjà les mêmes que celles qui ont été

  9   reprochées. Le fait de savoir le chiffre fait partie de la thèse de

 10   l'Accusation. Mais est-ce qu'il y a 500 victimes à un endroit ou 1 000

 11   victimes, c'était une question factuelle et non pas juridique. Or, à l'acte

 12   d'accusation, il est reproché à l'accusé 500 victimes.

 13   Le jugement rendu, au paragraphe 523, parle de la route de Cancari 5, où

 14   l'on a identifié 283 personnes liées à Kozluk, mais il y a eu

 15   identification de 283 personnes. Il s'agit du paragraphe P4490, annexe A,

 16   pages 11 et 37. C'est lié à Kozluk parce que l'enquêteur Janc, dans son

 17   rapport, établit un lien avec Kozluk. Mais le rapport de Janc, dans

 18   l'affaire Tolimir, établit un lien dans l'affaire Tolimir à Branjevo, et

 19   c'est un endroit tout à fait autre.

 20   M. ROGERS : [interprétation] Excusez-moi de me lever. Il est tout à fait

 21   inapproprié de faire référence à des éléments de preuve présentés dans une

 22   autre affaire s'agissant de cette affaire-ci alors que les éléments de

 23   preuve ne font pas partie du compte rendu et du dossier de l'affaire. Si ma

 24   consœur demande à ce que ce soit versé, il convient de procéder par le

 25   biais de l'article 115. Et puisque je suis déjà debout, je tiens à dire

 26   qu'il y a plusieurs références de faites au jugement rendu en première

 27   instance dans l'affaire Tolimir. Cela n'est pas approprié non plus, parce

 28   que si l'on fait des références à d'autres jugements rendus s'agissant des


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  1   mêmes questions, cela ne peut pas être pris en considération parce que les

  2   dossiers et la présentation des éléments de preuve dans une autre affaire

  3   sont différents. Donc, mon éminente consœur ne peut pas faire référence à

  4   d'autres jugements rendus parce que cela sort du cadre de ce qui a déjà été

  5   versé au dossier dans cette affaire-ci.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donnez-moi un instant.

  7   [La Chambre d'appel se concerte]

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons faire une pause à

  9   présent, Madame le Conseil. Vingt minutes.

 10   --- L'audience est suspendue à 11 heures 30.

 11   --- L'audience est reprise à 11 heures 57.

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Rogers, oui, je trouve que

 13   bien qu'il y ait des éléments corrects dans ce que vous avez dit en

 14   dernier, mais j'en ai quand même tiré la conclusion que cela n'est pas tout

 15   à fait exact, vous n'avez pas raison lorsque vous dites qu'un conseil de la

 16   Défense ne peut pas faire référence à une autre affaire. Toutes ces

 17   affaires ont donné lieu à des documents publics. Bien entendu, il

 18   appartiendra aux Juges de la Chambre d'appel de déterminer quel est le

 19   poids à accorder et la valeur probante à attribuer à telle référence en

 20   l'espèce. Et je fais remarquer que l'affaire Tolimir est également en

 21   instance d'appel, la Chambre d'appel va certainement tenir compte de tout

 22   ceci lorsqu'elle évaluera la valeur probante de telle référence ou d'une

 23   autre. Et dans d'autres cas de figure, nous avons des conclusions aux

 24   constations factuelles, qui sont celles d'une Chambre, qui n'ont pas valeur

 25   contraignante à l'égard d'une autre Chambre. Mais, compte tenu de la

 26   totalité de ces circonstances, j'estime que votre argument, votre

 27   objection, se trouve être allé vers un extrême. Le conseil de la Défense

 28   peut faire référence à ce type de document et la Chambre déterminera la


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  1   valeur probante à lui accorder.

  2   M. ROGERS : [interprétation] Puis-je faire un commentaire ?

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y.

  4   M. ROGERS : [interprétation] Monsieur le Président, ce qui me préoccupe, si

  5   des éléments de preuve d'une autre affaire sont cités en référence par ma

  6   consœur, ces éléments de preuve devraient figurer au dossier, et la façon

  7   de procéder c'est de passer par l'article 115.

  8   Et une autre façon de procéder, c'est de prendre les constats

  9   judiciaires et constater que c'est un constat judiciaire, mais je ne vois

 10   pas comment on peut procéder dans une affaire en appel, étant donné que

 11   nous sommes limités par des éléments de preuve qui sont versé au dossier.

 12   D'autres documents venant d'ailleurs ne sauraient être versés au dossier, à

 13   moins que la Chambre d'appel ne constate qu'il y ait nécessité de le faire

 14   dans une forme recevable. Et cela n'est pas, dans les circonstances

 15   présentes, le cas. De mon avis, donc, il convient de se limiter dans ce

 16   procès aux éléments de preuve qui sont au dossier de l'affaire.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je trouve que cela va quand même à

 18   l'extrême.

 19   Madame Tapuskovic.

 20   Mme TAPUSKOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Votre

 21   décision, la décision que vous avez rendue est venue avant ma phrase. Je

 22   crois que l'Accusation aurait dû me laisser terminer mes phrases parce que

 23   je n'ai pas fait référence à des éléments de preuve présentés dans

 24   l'affaire Tolimir. Je voulais faire référence aux paragraphes 480, 481 et

 25   581, la note de bas de page 2564, et le paragraphe 596 du jugement, 596 qui

 26   lie la route de Cancari à Branjevo et non pas à Kozluk. Et pour les besoins

 27   de cette Chambre d'appel et pour que dans ces faits historiques qui doivent

 28   être consignés dans les archives de ce Tribunal, j'estime que ceci devrait


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  1   être pris en considération.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, avant que vous ne poursuiviez,

  3   je voudrais présenter un élément administratif qui a été porté à mon

  4   attention. Si une partie en présence tire la conclusion ou présente ses

  5   arguments avant l'écoulement du temps imparti, la partie adverse devrait

  6   être prête à reprendre aussitôt après.

  7   Merci. Alors, vous pouvez maintenant continuer.

  8   Mme TAPUSKOVIC : [interprétation] Les paragraphes 480, 481, 486, 591 font

  9   état de 761 personnes identifiées. Si maintenant nous retranchons la route

 10   Cancari numéro 5, parce que cela fait partie d'un autre site de crime, nous

 11   n'avons pas un chiffre qui dépasse 1 000 victimes liées à Kozluk. Pour ce

 12   qui est de Kozluk phase primaire et phase secondaire. La Défense estime que

 13   ce chiffre de plus de 1 000 Musulmans de Bosnie tués à Kozluk sort du cadre

 14   des allégations présentées aux paragraphes 30.8.1 et 30.10 de l'acte

 15   d'accusation, et cela n'a pas fait partie de la thèse présentée par

 16   l'Accusation à l'encontre des accusés.

 17   J'estime avoir répondu par ceci aux deux questions posées par les Juges de

 18   la Chambre d'appel, et pendant les quelque deux minutes qui me restent, je

 19   voudrais faire référence aux autres allégations présentées dans l'affaire

 20   Popovic.

 21   Aux paragraphes 432 et 436 du mémoire en appel de la Défense, il est

 22   souligné que dans le cas d'Orahovac, le nombre des victimes qui ont été

 23   exécutées à ce site est analogue à ce qui s'est passé avec Kozluk : il y a

 24   eu un acte d'accusation dont les termes ont été outrepassés. Par exemple, à

 25   l'acte d'accusation Orahovac, au paragraphe 30.6, il est dit que le 13 et

 26   le 14 juillet 1995, on a transporté des centaines de Musulmans de Bosnie

 27   vers l'école de Grbavci, et que le 14 juillet, on les a transférés vers un

 28   pré à proximité de cet endroit pour exécuter un millier de Musulmans de


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  1   Bosnie.

  2   Aux paragraphes 491 et 492, la Chambre de première instance constate que,

  3   compte tenu du nombre de personnes qui ont témoigné de l'école de Grbavci,

  4   il y a eu quatre témoins au total qui sont venus dire quelle est

  5   l'estimation du nombre de prisonniers à Grbavci, et ils ont parlé de 1 000

  6   à 2 500 personnes. Dans le jugement rendu, il n'y a pas eu des éléments de

  7   présentés permettant de dire au-delà de tout doute raisonnable qu'il y ait

  8   eu plus de 2 500 personnes. Et nous estimons que l'acte d'accusation passe

  9   outre ce qui a été dit à l'acte d'accusation, ça sort du cadre des

 10   allégations qui se trouvent au paragraphe 30.6 de l'acte d'accusation, et

 11   cela n'a pas fait partie des thèses de l'Accusation à l'encontre des

 12   accusés.

 13   Aux paragraphes 455, 472 à 474 du mémoire en appel, la Défense fait

 14   référence au rapport de l'enquêteur Janc. La Défense a souligné que son

 15   rapport a bénéficié d'un traitement par trop excessif et qu'il ne peut être

 16   considéré comme étant un expert. Si l'on se penche sur les résumés et les

 17   conclusions des Chambres de première instance dans l'affaire Tolimir, et

 18   dans cette affaire-ci, se basant sur ses résumés mis à jour, nous laisse

 19   entendre et conclure du fait que ce résumé n'est pas fiable et qu'il est

 20   contradictoire.

 21   Qui plus est, s'agissant des autres allégations du Procureur pour ce qui

 22   est des victimes et des disparus, la Défense maintient ce qu'elle a dit

 23   dans son mémoire en appel, sans élaborer plus en avant. Merci de votre

 24   attention.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Rogers ?

 26   M. ROGERS : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je suis conscient

 27   de l'ordonnance portée au calendrier ainsi que le temps imparti. Même si

 28   nous venons d'avoir une pause, nous sommes parvenus à l'heure où il était

 


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  1   temps de faire la pause de déjeuner. Est-ce que vous souhaitez que je

  2   poursuive pendant cinq minutes ou est-ce que vous allez modifier l'ordre du

  3   jour pour aujourd'hui de façon à ce que je sache simplement pendant combien

  4   de temps je dois m'adresser à vous ?

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'il serait plus opportun

  6   de faire la pause maintenant. Nous allons reprendre à 13 heures 40.

  7   M. ROGERS : [interprétation] A 13 heures 45, d'après notre programme pour

  8   aujourd'hui. Mais 13 heures 40, c'est bien aussi.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] 13 heures 40, c'est dans une heure

 10   et demie. Merci.

 11   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 10.

 12   --- L'audience est reprise à 13 heures 45.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Rogers, c'est à vous.

 14   M. ROGERS : [interprétation] Paul Rogers, encore une fois, je suis le

 15   représentant du bureau du Procureur cet après-midi.

 16   En réponse à l'appel de M. Popovic, l'Accusation fait remarquer que, comme

 17   dans son mémoire en appel, M. Popovic se concentre sur des parties isolées

 18   des éléments de preuve pour minimiser ses condamnations. Mais nous faisons

 19   valoir qu'il n'aborde pas la matrice complexe de toutes les conclusions qui

 20   sous-tendent ces condamnations ainsi que l'appréciation minutieuse de la

 21   Chambre d'appel [comme interprété] lorsqu'elle a rendu son jugement sur les

 22   éléments de preuve.

 23   Lors de ma réponse, je vais faire des remarques générales concernant

 24   les attaques de Popovic et l'appréciation de la Chambre de première

 25   instance sur les éléments de preuve et la question de la crédibilité des

 26   témoins. Et ensuite, je vais fournir un résumé des condamnations de Popovic

 27   pour expliquer comment la vision holistique de la Chambre de première

 28   instance a conduit aux condamnations qui ont été prononcées.


Page 102

  1   Et ensuite, Mme Soljan abordera vos questions et fera quelques

  2   remarques supplémentaires concernant les contestations de Popovic quant à

  3   sa condamnation en tant que membre de l'entreprise criminelle commune aux

  4   fins de meurtre et ainsi que de son intention génocidaire. Mme Nabti

  5   présentera des arguments sur l'intention génocidaire de M. Popovic.

  6   Madame, Messieurs les Juges, je vais maintenant parler de

  7   l'appréciation des éléments de preuve et des attaques, que nous avons

  8   abordées longuement dans notre mémoire en réplique. Nous avons argué du

  9   fait que les arguments de l'appelant sont sans fondement et qu'une grande

 10   majorité de ces éléments doivent être sommairement rejetés.

 11   Bien sûr, nous sommes d'accord avec tous les arguments qui ont été

 12   présentés en guise de réponse au mémoire de l'appelant. Vous vous

 13   souviendrez que ceci a été présenté lors des arguments, et il a fait

 14   référence à son propre mémoire en appel à l'appui des arguments qu'il a

 15   présentés aujourd'hui.

 16   Madame, Messieurs les Juges, l'appel de Vujadin Popovic se fonde

 17   essentiellement sur une série d'attaques contre l'appréciation de la

 18   Chambre sur les éléments de preuve principaux en l'espèce. En particulier,

 19   il souhaite minimiser l'appréciation de la Chambre de première instance

 20   concernant la déposition de certains témoins. Par exemple, il reconnaît que

 21   l'appréciation de Momir Nikolic et de sa déposition est particulièrement

 22   importante parce que Momir Nikolic le place au cœur de cette opération

 23   meurtrière dès le début, depuis le 12 juillet 1995. Et ainsi, il rejette

 24   les constatations quant à la fiabilité et la crédibilité du témoin. De

 25   même, il reconnaît que l'appréciation du Témoin PW-168 qui implique Popovic

 26   dans l'opération meurtrière de différentes façons -- donc, encore une fois,

 27   il conteste la fiabilité et la crédibilité de ce témoin-là en répétant les

 28   mêmes arguments qui ont été présentés au procès et arguant de


Page 103

  1   l'interprétation qui peut être faite de façons différentes des différents

  2   éléments de preuve.

  3   A chaque fois que les éléments de preuve l'impliquent dans

  4   l'opération meurtrière, il fait valoir encore une fois sa thèse qui a

  5   échoué lors du procès et avance simplement d'autres alternatives concernant

  6   les éléments de preuve sans démontrer qu'aucune Chambre du fait raisonnable

  7   n'aurait pu parvenir à la conclusion que la Chambre n'aurait pas pu décider

  8   de cela en la matière concernant l'ensemble des éléments de preuve.

  9   Il préfère apprécier de façon isolée et parcellaire les éléments de preuve

 10   et ignore que la Chambre a examiné chaque élément de preuve dans son

 11   contexte en tenant compte de tous les éléments de preuve dont elle

 12   disposait avant de parvenir aux conclusions et déductions qu'elle a faites.

 13   Ce faisant, la Chambre de première instance a clairement indiqué

 14   qu'elle avait apprécié comme il se doit l'ensemble des éléments de preuve

 15   en soupesant les différents éléments, ce sur quoi elle était censée être

 16   disposée à se reposer et donnant des motifs détaillés lorsque cela

 17   convenait.

 18   Alors, pour prendre Momir Nikolic à titre d'exemple, Popovic fait tout ce

 19   qu'il peut encore une fois pour expliquer pourquoi Momir Nikolic n'est pas

 20   crédible et il ne parle pas de l'approche générale de la Chambre de

 21   première instance quant à son évaluation des éléments de preuve, et en

 22   particulier les éléments de preuve et les critères applicables en la

 23   matière.

 24   Madame, Messieurs les Juges, la Chambre de première instance expose dans le

 25   détail son approche aux éléments de preuve aux paragraphes 7 à 85, consacre

 26   23 pages du jugement à cela et explique comment il faut apprécier les

 27   éléments de preuve et admet que chaque affirmation factuelle ne doit pas

 28   être analysée dans l'acte d'accusation et ne doit pas clairement donner une


Page 104

  1   analyse détaillée de tous les éléments de preuve détaillés au paragraphe

  2   115 [comme interprété]. Là où un élément de preuve n'a pas été cité, eh

  3   bien, tous les éléments de preuve ont encore une fois été repris au

  4   paragraphe 15, et l'arrêt dans l'affaire Kvocka au paragraphe 23.

  5   Il est absurde de dire que l'appréciation des éléments de preuve revient

  6   aux Juges de la Chambre et à ses pouvoirs discrétionnaires, car telle est

  7   la fonction essentielle de la Chambre de première instance. Et je sais que

  8   vous respecterez cela lorsque vous apprécierez tous les éléments en

  9   question.

 10   Il est utile de noter quels sont les éléments au dossier en l'espèce. Il y

 11   a plus de 5 000 pièces, dont moins de la moitié ont été présentées par la

 12   Défense. La Chambre de première instance a entendu 182 témoins à charge sur

 13   plus de 400 jours, dont les trois quarts étaient des témoins viva voce ou

 14   qui ont été contre-interrogés dans le cadre de l'article 92 ter, et il

 15   s'agissait d'experts. Cent quarante cinq témoins ont été entendus par la

 16   Défense, et la Chambre a cité à la barre un seul témoin. Le compte rendu

 17   d'audience représente quelque 34 000 pages, à l'exclusion des plaidoiries

 18   réquisitoires.

 19   Le jugement est clairement référencé, il existe des notes en bas de page

 20   importantes, avec un total de 866 pages et deux tomes.

 21   La Chambre d'appel, dans sa jurisprudence, reconnaît que la tâche revient à

 22   la Chambre d'appel [comme interprété] s'agissant d'évaluer ces documents

 23   très importants. Dans l'affaire Lukic et Lukic, l'arrêt rendu au paragraphe

 24   296, Madame, Messieurs les Juges, vous avez déclaré que : 

 25   "La Chambre d'appel doit d'abord rappeler, la Chambre de première

 26   instance a un avantage dans le sens où elle est capable d'observer des

 27   personnes, et les témoins en personne et est, par conséquent, dans une

 28   meilleure position que la Chambre d'appel pour apprécier la fiabilité, la


Page 105

  1   crédibilité des éléments de preuve. Par conséquent, il revient à la Chambre

  2   dans ses pouvoirs discrétionnaires d'apprécier les incohérences et de se

  3   pencher sur la question de la fiabilité, de la crédibilité des éléments de

  4   preuve dans leur ensemble, sans expliquer chaque élément dans le détail."

  5   Note en bas de page dans l'affaire Kvocka et consorts, paragraphe 23,

  6   arrêt Celebici, paragraphes 481 à 429 [comme interprété] et l'arrêt

  7   Kupreskic, paragraphe 32.

  8   La Chambre d'appel, à maintes reprises, a reconnu qu'il s'agissait

  9   "d'entendre, d'apprécier, de soupeser les éléments de preuve présentés lors

 10   du procès en première instance. La Chambre d'appel doit donc respecter les

 11   conclusions auxquelles sont parvenus les Juges de la Chambre de première

 12   instance, et ce n'est que lorsque les éléments de preuve n'auraient pu être

 13   retenus par aucun Juge du fait raisonnable ou lorsque l'appréciation des

 14   éléments de preuve sont complètement erronés, ce n'est que dans ce cas-là

 15   que la Chambre d'appel peut remplacer ou présenter ses propres conclusions

 16   ou conclusions factuelles." 

 17   Jugements Mrksic et Kupreskic, arrêts Kupreskic et Mrksic, ainsi que

 18   l'arrêt Lukic et Lukic.

 19   L'arrêt Celebici au paragraphe 481 a confirmé "la Chambre de première

 20   instance n'a pas besoin d'indiquer dans son jugement chaque étape de son

 21   raisonnement et chaque conclusion particulière.

 22   "La Chambre de première instance n'est pas obligée de justifier ses

 23   conclusions s'agissant de chaque argument présenté lors du procès. Et c'est

 24   dans le cadre de ses pouvoirs discrétionnaires qu'elle peut aborder les

 25   éléments qui ont été mis en exergue, lorsque la déposition d'un témoin est

 26   prise dans son ensemble, est considérée comme fiable, et lorsque les

 27   éléments de preuve sont crédibles."

 28   Confer l'arrêt Celebici, paragraphe 498.


Page 106

  1   En l'espèce, la Chambre de première instance n'aurait pas pu analyser

  2   chaque élément de preuve, et les éléments de preuve dans leur ensemble

  3   étaient surtout entendus viva voce et n'avaient pas besoin d'établir de

  4   différence entre les témoins, ni de différences entre les passages ou

  5   portions de déposition d'un témoin. Cependant, la Chambre de première

  6   instance en l'espèce a fait très attention de préciser dans le détail que

  7   son approche était générale, et encore une fois, elle a abordé la question

  8   de façon très précise s'agissant de certains types de dépositions et

  9   certains types de témoins.

 10   S'agissant de Momir Nikolic, la Chambre de première instance a abordé la

 11   question de son attitude vis-à-vis des éléments de preuve dans leur

 12   ensemble aux paragraphe 48 et 53 et, en particulier, la réunion qui a eu

 13   lieu à l'hôtel Fontana. Paragraphes 280 à 287. La Chambre de première

 14   instance a prêté attention à toutes les attaques fortes lancées par les

 15   appelants contre sa crédibilité. C'est Popovic qui a remis en doute sa

 16   crédibilité. Et ces remises en doute ont été prises en compte, y comprises

 17   celles de Borovcanin, étant donné que celles-ci sont énumérées à la note en

 18   bas de page 72, dans le détail.

 19   Dans son appréciation, elle a tenu compte plus particulièrement les

 20   mensonges de Momir Nikolic, parce qu'il souhaitait parvenir à un accord de

 21   plaidoyer concernant l'entrepôt de Kravica. Paragraphe 49. Elle a tenu

 22   compte de ses tentatives à plusieurs reprises de minimiser certains aspects

 23   de sa propre participation aux événements, paragraphe 51, et elle a reconnu

 24   également que quelquefois il a fait des déclarations qui l'impliquaient

 25   encore davantage dans les événements, paragraphe 284 du jugement, par

 26   rapport à l'acceptation de Nikolic que la conversation du 12 portait sur

 27   les plans meurtriers, et que lui, Momir Nikolic, a participé à sa mise en

 28   œuvre en suggérant quels étaient les endroits où ils pouvaient être détenus


Page 107

  1   et quels étaient les lieux de l'exécution.

  2   Elle a tenu compte du fait qu'il était cohérent, au paragraphe 52, et

  3   son comportement dans son ensemble, au paragraphe 53. La Chambre a tenu

  4   compte de la teneur de son accord de plaidoyer, ainsi que l'exposé des

  5   faits et le fait qu'il ait accepté sa responsabilité, aux paragraphes 281 à

  6   282. Elle a tenu compte du fait si oui ou non il existait des éléments

  7   corroborants entre son récit portant sur la réunion du 12 juillet et les

  8   événements qui se sont déroulés, en les comparant avec des séquences vidéo

  9   constituant des éléments de preuve. Paragraphes 285, 286, 287.

 10   Elle a tenu compte de la déposition de Kosoric, au paragraphe 288, et

 11   dans une explication détaillée à la note en bas de page 938, la Chambre a

 12   expliqué comment elle a estimé que la déposition de Kosoric était évasive

 13   et a rejeté son récit par conséquent, puisque dans ses réponses, il était

 14   évasif. Elle a tenu compte du fait si Momir Nikolic, en fonction des termes

 15   utilisés par la Chambre, "a élaboré cette déposition et cette conversation

 16   pour correspondre aux événements qui ont suivi par la suite." Et, par

 17   conséquent, ont rejeté tout cela en estimant que ceci n'était pas une vraie

 18   possibilité raisonnable parce que cette conversation l'incriminait de façon

 19   importante dans l'opération meurtrière à ce stade.

 20   Elle a tenu compte d'autres éléments de sa déposition, le fait qu'il

 21   y avait corroboration entre la réunion entre Beara et Deronjic, 1 269 et 1

 22   270 [comme interprété], et la corroboration de sa propre réunion avec Drago

 23   Nikolic par le truchement de la déposition de PW-168, qu'elle a également

 24   jugé fiable.

 25   La Chambre a reconnu qu'il n'était pas nécessaire de corroborer les dires

 26   d'un témoin tel que Momir Nikolic - paragraphe 26, et confer l'arrêt Lukic

 27   et Lukic au paragraphe 128 - mais a clairement indiqué que la déposition

 28   d'une telle personne devait être considérée avec précaution, en citant la


Page 108

  1   jurisprudence de l'arrêt dans l'affaire Krajisnik au paragraphe 146, où la

  2   Chambre d'appel a décrété que : 

  3   "Une Chambre de première instance doit au moins brièvement expliquer

  4   pourquoi elle a accepté les éléments de preuve qui avaient peut-être des

  5   mobiles ou d'autres mesures incitatives visant à impliquer le témoin. De

  6   cette manière, la Chambre de première instance montre qu'il s'agit d'une

  7   appréciation prudente des éléments de preuve."

  8   La Chambre de première instance a avancé des motifs détaillés pour

  9   expliquer pourquoi elle avait accepté la déposition de Momir Nikolic et

 10   s'est reposée dessus de façon générale.

 11   Par exemple, pour ce qui est de la question de la conversation du 12

 12   juillet avec Popovic à l'extérieur de l'hôtel Fontana avant la troisième

 13   réunion, elle reconnaissait que Momir Nikolic est demeuré très cohérent sur

 14   ce thème-là, ainsi que la question qui a été abordée lors de cette réunion,

 15   malgré un contre-interrogatoire très important sur ces questions. Jugement

 16   aux paragraphes 282 et 927. Popovic remet en cause cette conclusion encore

 17   une fois dans son mémoire en réplique. Il allègue au paragraphe 33 que le

 18   jugement "permettait de corroborer la conclusion que Nikolic ait demeuré

 19   cohérent malgré un contre-interrogatoire très important", confer le Juge

 20   Prost pour ce qui est de la question concernant la déposition de Nikolic.

 21   Et il a été contre-interrogé longuement sur la teneur de la conversation

 22   et, en particulier, sur les références portant sur les lieux d'exécution et

 23   de détention. Vous trouverez ces conversations lors du contre-

 24   interrogatoire, qui fut très long, à la page du compte rendu d'audience 32

 25   916 à 32 918, 32 920 à 32 922, 33 031 à 33 034, 33 040 à 33 041, 33 043 à

 26   33 049 et 33 328.

 27   La Chambre de première instance a décidé que Momir Nikolic était

 28   crédible s'agissant de la question de la conversation, de sa teneur


Page 109

  1   également, ainsi que de la discussion qui a porté sur les lieux

  2   d'exécution, jugement au paragraphe 282. Et en particulier, elle a estimé

  3   que le passage portant sur les détentions et les exécutions était vrai

  4   parce que cela incriminait Momir Nikolic dans l'organisation de l'opération

  5   meurtrière, puisqu'il parlait de cela et des endroits qu'il proposait pour

  6   la détention et le meurtre. Paragraphe 284.

  7   Cette auto-incrimination permettait d'étayer la fiabilité de sa

  8   déclaration dans son ensemble. En outre, elle s'est reposée sur d'autres

  9   facteurs permettant de corroborer les circonstances de la conversation,

 10   paragraphe 285, y compris le lendemain lorsque Beara est allé inspecter

 11   l'usine de brique comme étant un endroit éventuel où l'exécution et la

 12   détention auraient pu se dérouler. Paragraphes 286, 452, 455, 460, 463.

 13   Quoi qu'il en soit, la déposition de Momir Nikolic n'était pas la

 14   seule déposition sur laquelle pouvaient se fondent les condamnations de

 15   Popovic. Il était à l'intérieur de l'hôtel Fontana avec Mladic le 12

 16   juillet, paragraphe du jugement 1 098, Témoin PW-109. Il a passé la nuit à

 17   l'hôtel les 11 et 12 juillet, confer les récépissés de l'hôtel. En tant que

 18   chef de la sécurité du Corps de la Drina, il avait accès aux ressources par

 19   le biais des brigades du Corps de la Drina. Paragraphes 294, 296, 1 069, 1

 20   070, 1 090 [comme interprété], 1 281 et 1 284.

 21   Dans la soirée du 13 juillet, Popovic a transmis à Drago Nikolic,

 22   dans le secteur de la Brigade de Zvornik, l'ordre de Mladic visant à

 23   exécuter les prisonniers dans la zone de responsabilité de la Brigade de

 24   Zvornik, après quoi Drago Nikolic a immédiatement commencé à travailler à

 25   sa nouvelle mission en quittant le poste de commandement avancé, et il

 26   était avec le commandant de la Brigade de Zvornik, Jasikovac, ainsi que

 27   d'autres personnes à l'école Grbavci la nuit du 13 au 14 juillet.

 28   Ceci est corroboré le 14 juillet, après sa réunion qui a duré 15 à 20


Page 110

  1   minutes à la caserne de Standard avec Beara et Drago Nikolic, confer

  2   jugement 1106. Il a accompagné une colonne d'un demi-kilomètre de

  3   prisonniers et de soldats jusqu'à l'école Grbavci à Orahovac, paragraphes 1

  4   107 à 1 108, et il est resté à l'école, il a surveillé l'exécution.

  5   Paragraphes 481, 483, 488, 1 111 à 1 112 du jugement.

  6   Et pendant toute la durée de cette opération, il s'est assuré qu'il y

  7   avait suffisamment d'approvisionnement en carburant pour les travaux

  8   effectués. Paragraphe 1 110 du jugement.

  9   On parle également de sa présence le 15 juillet à l'école de Rocevic

 10   lorsqu'il a essayé de trouver des camions pour transporter les prisonniers

 11   et les personnels qui devaient mener à bien les exécutions à Kozluk; 511 à

 12   516, 1 118 à 1 120, paragraphes du jugement.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je dois explicitement vous demander,

 14   s'il vous plaît, de ralentir.

 15    M. ROGERS : [interprétation] J'essaie de ne pas aller trop rapidement.

 16   Le 16 juillet, il était dans le secteur de Pilica, dirigeant les membres du

 17   10e Détachement de Sabotage, leur donnant des instructions sur les

 18   exécutions à la ferme de Branjevo, mais également au Dom de Pilica,

 19   s'assurant encore une fois qu'ils disposaient de suffisamment de carburant

 20   pour l'opération; 1 124 à 1 127, 1 130 à 1 134, paragraphes du jugement.

 21   Le 17 juillet, il a fait rapport de l'opération de meurtres et des

 22   ensevelissements, 1 142, et vers le 23 juillet, il a facilité le meurtre de

 23   dix prisonniers de Milici; 1 153 à 1 156, paragraphes du jugement. Ce qui

 24   corrobore les conclusions de la Chambre de première instance portant sur sa

 25   participation dans l'opération meurtrière, sa présence aux exécutions de

 26   Bisina le 23 juillet et, en septembre 1995, sa participation à l'opération

 27   de réensevelissement, également en obtenant du carburant; 1 158 à 1 161.

 28   Si nous prenons tous ces éléments ensemble et l'appréciation de la


Page 111

  1   déposition de Momir Nikolic, la Chambre de première instance a clairement

  2   montré qu'elle a fait très attention, non seulement vis-à-vis de Momir

  3   Nikolic, mais également, son attitude était une attitude de prudence par

  4   rapport au Témoin PW-168. Et par rapport au PW-168, la Chambre de première

  5   instance a donné une explication détaillée pour expliquer pourquoi il était

  6   crédible. Donc, 1 347 et paragraphes 28 à 47 du jugement.

  7   La Chambre de première instance était tout à fait au courant des

  8   problèmes que pouvait poser la fiabilité de ce témoin, en particulier la

  9   conversation qui a eu lieu entre Obrenovic et Drago Nikolic dans la nuit du

 10   13 juillet 1995, conversation au cours de laquelle Drago Nikolic a informé

 11   Obrenovic que Popovic avait ordonné à Drago Nikolic de faire les

 12   préparatifs nécessaires pour un nombre important de prisonniers musulmans

 13   qui arrivaient dans le secteur de Zvornik et que, sur l'ordre de Mladic, on

 14   devait les exécuter.

 15   1 345, 1 346, paragraphes du jugement.

 16   La Chambre a donné des raisons détaillées sur les raisons pour

 17   lesquelles elle a accepté le récit de PW-168, en notant la teneur de la

 18   conversation qui était étayée par d'autres éléments de preuve; 1349. Par

 19   exemple, dans la conversation, Drago Nikolic a demandé à ce qu'il soit

 20   relevé du poste de commandement avancé. Le fait qu'il ait été relâché a été

 21   étayé par la déposition du Témoin Mihajlo Galic et le registre du poste de

 22   commandement avancé de la Brigade de Zvornik. Outre la déposition de PW-

 23   168, Drago Nikolic, Jasikovac et les membres de la police militaire de la

 24   Brigade de Zvornik ont participé à la préparation des sites de détention,

 25   ce qui a été corroboré par le Témoin PW-143 et d'autres éléments de preuve,

 26   1350, paragraphe du jugement.

 27   Cette approche prudente vaut également pour l'appréciation de la

 28   Chambre de première instance concernant la déposition de Srecko Acimovic,


Page 112

  1   ainsi que la déposition de PW-101, et tous ces témoins ont déposé et ont

  2   été entendus pour un nombre important de jours et ont été interrogés

  3   pendant de longs contre-interrogatoires. La Chambre de première instance a

  4   été en mesure, par conséquent, d'apprécier la fiabilité et la crédibilité

  5   de ce témoin, et a eu l'occasion d'observer le témoin ainsi que le

  6   comportement, chose que cette Chambre n'est pas en mesure de faire.

  7   Et lorsque la Chambre n'était pas sûre d'éléments de preuve qui

  8   impliquaient Popovic, dans ce cas, la Chambre rejetait lesdits éléments.

  9   Par exemple, ils ont rejeté les éléments de preuve sur la présence de

 10   Popovic au barrage de Petkovci. Paragraphe 1 116.

 11   Madame, Messieurs les Juges, ceci est absurde, mais il ne s'agit pas d'un

 12   procès de novo. Lorsqu'il conteste les éléments de preuve, c'est ce que

 13   Popovic recherche, en réalité. En tout cas, les contestations avancées par

 14   Popovic ne peuvent être retenues, étant donné que la Chambre a

 15   minutieusement abordé les éléments de preuve et les conclusions qui

 16   découlent de cette approche.

 17   Je souhaite maintenant aborder la question du meurtre et de la

 18   participation à l'entreprise criminelle commune. Etant donné que les actes

 19   des accusés sont impliqués les uns aux autres, il est important de

 20   comprendre pourquoi la Chambre a adopté une approche holistique. Je

 21   souhaite parler un petit peu de la structure organisationnelle des forces

 22   qui ont participé à l'opération. Nous avons préparé des diapositives qui

 23   font référence au jugement, et en bas, à droite, j'espère que vous verrez

 24   ceci sur vos écrans lorsque cela s'affichera. Je marque une pause pour

 25   m'assurer que vous l'avez tous sous les yeux.

 26   J'espère que vous voyez bien le graphique, Madame, Messieurs les

 27   Juges.

 28   On va essayer de veiller à ce que la taille de police de caractère


Page 113

  1   soit suffisamment grande pour qu'on puisse la voir clairement. Bon, le

  2   Tribunal devrait peut-être envisager des écrans de 18 pouces. Alors, en

  3   regardant l'écran, ce que nous avons essayé de démontrer, ce sont les

  4   structures sur une page afin que vous compreniez bien les liens. Donc, la

  5   case du haut montre très largement l'état-major principal du VRS avec pas

  6   tous les intervenants, mais ceux qui nous intéressent.

  7   En haut, donc Mladic, le commandant, sous sa responsabilité on trouve

  8   donc le Régiment de Protection 65. Simplement pour indiquer que c'est une

  9   des unités dont vous avez entendu parler, voir où elle s'inscrit. Donc, de

 10   Mladic, en bas Gvero sur la partie gauche pour les affaires religieuses et

 11   juridiques, précédemment un des accusés dans ce cas. Ensuite, plus loin,

 12   Milovanovic, le chef d'état-major. Et sous sa responsabilité, on retrouve

 13   M. Miletic.

 14   Ensuite, vers la partie droite, nous voyons Tolimir, le général

 15   responsable pour la sécurité et le renseignement au sein de l'état-major

 16   principal et sous lui, Salapura et Beara. Et attaché à Salapura, le 10e

 17   Détachement de Sabotage.

 18   Et ensuite, vers le centre, au niveau du corps d'armée, nous voyons

 19   où s'inscrit le corps d'armée. Bien sûr, sous les différents corps d'armée,

 20   le corps de la Drina, étant celle qui nous intéresse. Ici, vous voyez le

 21   commandant Zivanovic et le général Krstic. Krstic qui remplaçait Zivanovic

 22   le 13 juillet.

 23   Ensuite, sur la partie gauche, Borovcanin et là, détaché provisoirement

 24   auprès du Corps de la Drina, et à la droite on retrouve Popovic, bien sûr,

 25   et d'autres. Mais c'est donc là le lien en tant que chef de la sécurité du

 26   Corps de la Drina.

 27   Ensuite, nous passons plus bas au niveau des brigades. A gauche, la Brigade

 28   de Bratunac. Dans la Brigade de Bratunac, on trouve Blagojevic en tant que


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  1   commandant; Momir Nikolic en tant qu'organe de sécurité au temps de la

  2   Brigade de Bratunac. Bien sûr, il est utile de savoir où il s'inscrit, où

  3   il est placé, car nous entendons beaucoup parler de lui. Ensuite, Jankovic

  4   en tant que commandant de la police militaire.

  5   On passe maintenant à la Brigade de Zvornik. On voit son commandant,

  6   Vinko Pandurevic, et sous lui, Ibrahim Obrenovic, le chef d'état-major. Et

  7   par le chef d'état-major, Jokic, le commandant du génie, et Jasikovac,

  8   commandant de la Police militaire et Drago Nikolic, l'organe de sécurité

  9   autour de la Brigade de Zvornik.

 10   Et vous voyez bien donc la ligne en pointillé rejoignant donc les

 11   organes de sécurité qui représentent la ligne hiérarchique. C'est une ligne

 12   en pointillé, pas une ligne continue qui montre effectivement la

 13   hiérarchique professionnelle.

 14   J'espère que ça vous donne des éléments utiles sur une page quant à

 15   la façon dont les structures sont imbriquées.

 16   Comme l'a trouvé le jugement, l'opération d'assassinat était "un

 17   effort coordonné qui allait du commandant de VRS" et Mladic, "et certains

 18   éléments de l'état-major principal par le Corps de la Drina, le MUP

 19   jusqu'aux brigades Zvornik et Bratunac et les bataillons qui en

 20   dépendaient.

 21   "Il est clair que des unités individuelles de la VRS ont travaillé

 22   ensemble dans la mise en œuvre de l'objectif commun."

 23   Paragraphe 1 065 du jugement.

 24   Bien, je pense que nous pouvons enlever le graphique de l'écran.

 25   En poursuivant :

 26   "Ce qui est clair vu les éléments devant la Chambre de première

 27   instance, c'est qu'une opération sur une échelle aussi grande impliquant la

 28   participation de tout un nombre de membres de VRS de l'état-major


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  1   principal, allez en deçà n'aurait pas pu être réalisée sans l'autorisation

  2   et l'ordre du commandant de la VRS Mladic," jugement 1071.

  3   En concluant que :

  4   "La Chambre de première instance était parfaitement d'accord pour

  5   dire que Mladic était un élément moteur derrière ce plan d'assassinat et sa

  6   mise en œuvre."

  7   Le jugement 1071.

  8   Messieurs les Juges, afin de mettre en œuvre cet ordre sur une aussi

  9   grande échelle, la Chambre a, bien sûr, reconnu l'effort concerté qui était

 10   nécessaire. En relation avec l'administration de sécurité, en reconnaissant

 11   :

 12   "…alors que divers bataillons, brigades et commandant de corps

 13   d'armée de force et membres individuels furent attirés au plan en tant que

 14   participants et auteurs, chacun contribuant de manière différente, il

 15   s'agissait d'une opération organisée de façon soutenue et dirigée par la

 16   branche de sécurité du VRS."

 17   Cité TG 1070.

 18   Avec une efficacité redoutable, les forces du Corps de la Drina, y

 19   compris les unités de MUP et, en particulier la Brigade de Zvornik a été

 20   mobilisée pour exterminer mille hommes à l'entrepôt Kravica le 13 juillet,

 21   entre 800 et 2 300 hommes à Orahovac le 14 juillet, plus de 1 800 hommes à

 22   Petkovic et Kozluk, le 15 juillet, entre 1 000 et 2 000 dans la région

 23   Pilica le 16 juillet. Un jour plus tard, le 17 juillet, les corps avaient

 24   été enlevés de vue et inhumés. Dans l'espace de cinq jours, ces pères,

 25   frères et fils avaient tous simplement disparu.

 26   Nous sommes d'accord avec Popovic lorsqu'il affirme dans son mémoire

 27   au paragraphe 180 [comme interprété], les échelons les plus élevés de

 28   l'état-major principal ne pouvaient avoir de plan préconçu de commettre un


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  1   assassinat de masse sans résoudre les moyens logistiques de base, c'est-à-

  2   dire premièrement, où; deuxièmement, quand; et troisièmement, qui serait

  3   chargé de l'exécuter. Paragraphe 82.

  4   "En outre, ce plan exigeait différentes ressources, des moyens en

  5   hommes, en munitions, en véhicules, en machines et en carburant."

  6   Nous en convenons; c'était bien le cas. Cette opération exigeait une

  7   coopération massive et une coopération soutenue entre de nombreuses forces

  8   sur le terrain. La Chambre de première instance a jugé, en outre, que

  9   Popovic a joué un rôle charnière dans la coordination, l'organisation et

 10   l'exécution de l'opération d'assassinat, jugement 1168.

 11   Quant à Beara, il aurait joué un rôle-clé dans l'orchestration de

 12   l'opération d'assassinat en planifiant, coordonnant et en supervisant la

 13   détention, l'exécution et l'ensevelissement des victimes. Jugement 1299.

 14   Ensemble, Popovic et Beara ont organisé d'autres officiers de sécurité pour

 15   les aider, y compris Drago Nikolic et Momir Nikolic, jugement 1068. A

 16   Zvornik, Popovic, Beara et Drago Nikolic ont travaillé en étroite

 17   collaboration afin de traduire le plan d'assassinat en action par leur

 18   planification et leurs préparatifs matériels; jugements 1391 à 92.

 19   Toutefois, leur organisation se réveille, mais sans l'utilisation des

 20   moyens de la brigade et le soutien des commandants de brigade et de corps,

 21   ceci est démontré par la nécessité qu'avaient Drago Nikolic d'obtenir

 22   l'autorisation d'Obrenovic, le chef d'état-major de la Brigade de Zagreb

 23   afin d'être relevé de sa tâche et d'utiliser les moyens de brigade, Sikolac

 24   [comme interprété] et la police militaire dans le jugement 1345.

 25   De la même façon, Beara, un officier de l'état-major principal avec

 26   l'administration de sécurité, placé sous l'autorité directe de Tolimir, le

 27   général de l'état-major principal avait besoin d'obtenir les troupes

 28   additionnelles auprès de Krstic, qui était le commandant du Corps de la


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  1   Drina, le 15 juillet, afin de distribuer 3 500 colis que la Chambre a

  2   relevé comme étant un euphémisme pour l'assassinat des prisonniers comme

  3   cela a été manifesté par l'interception de la conversation avec Krstic le

  4   15 juillet et évoqué au jugement au paragraphe 1 282.

  5   Le fait qu'un aussi grand nombre ait été tué dans un laps de temps

  6   aussi court avec leurs corps placés dans des charniers démontre bien le

  7   caractère redoutable de cette opération d'assassinat opérée par Popovic,

  8   Beara et Nikolic et avec le soutien logistique des Brigades de Zvornik et

  9   Bratunac. Sans leurs gardes, leurs moyens de transport, leurs munitions,

 10   sans ceux prêts à tuer et les machines et les hommes pour enfouir les

 11   corps, cette opération n'aurait pas pu réussir.

 12   Le fait qu'il n'avait qu'une poignée de rescapés montre la

 13   détermination calculée visant à éliminer chacune des victimes pour

 14   s'assurer que les détails de ce crime odieux ne verraient jamais le jour.

 15   Fort heureusement, miraculeusement, certains ont survécu, certains

 16   cachés sous les corps d'amis et de frères, certains qui ont pu survivre

 17   malgré de terribles blessures. Leurs voix ont été entendues en même temps

 18   que les voix de ceux qui ont réalisé ces assassinats, ceux qui ont inhumés

 19   les corps, qui ont organisé les moyens logistiques, qui ont témoigné devant

 20   l'organisation. Ensemble, la Chambre de première instance a pu bâtir un

 21   tableau clair de ce qui s'est passé ces terribles jours entre le 11 et le

 22   17 juillet 1995, et en relation avec l'opération de dissimulation dans les

 23   mois qui ont suivi.

 24    J'en viens maintenant aux événements du 11 au 17 juillet et comment

 25   l'équipe de Popovic, Beara et Nikolic ont réalisé ces assassinats. Je

 26   voudrais tout d'abord brièvement esquisser les événements aboutissant à la

 27   formation de ce plan d'assassinat.

 28   Le 11 juillet, il y a eu la chute de Srebrenica; jugement 260. Des


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  1   milliers de Musulmans de Bosnie ont fui Srebrenica via Potocari; jugement

  2   264. Alors qu'ils prenaient fuite de l'enclave, ils furent sous le feu des

  3   obus; jugement 265. Le soir du 11 juillet, de nombreux hommes valides se

  4   sont retrouvés à Susnjari, ayant été séparés de leurs familles sur la route

  5   de Potocari, car ils redoutaient d'être tués s'ils restaient dans l'enclave

  6   de Srebrenica une fois sa chute entre les mains des Serbes de Bosnie;

  7   jugement 267. Une crainte qui était, bien sûr, bien fondée.

  8   Avant minuit, une colonne de 10- à 15 000 hommes s'est constitué

  9   entre Susnjari et Jaglici, environ 10 kilomètres en long, et a commencé à

 10   évoluer vers Konjevic Polje via Nova Kasaba et vers Tuzla; jugement 269. La

 11   colonne présentait un défi redoutable pour les forces VRS à Bratunac et

 12   Zvornik. Le 11 juillet, les forces VRS reçurent l'ordre de la bloquer et

 13   d'effectuer des opérations d'embuscades; jugement 364.

 14   Je vous demande simplement de regarder cette carte. Il s'agit

 15   de la pièce P02111. Je veux simplement vous orienter autour de la région

 16   afin que vous puissiez comprendre les différents noms des sites et qu'ils

 17   vous deviennent familiers. Vous voyez donc sur la carte, vers le bas,

 18   Srebrenica, et si nous suivons la route de Srebrenica via Potocari, vers le

 19   nord, nous voyons donc de Potocari, à gauche, une petite route qui va vers

 20   Jaglici et Susnjari. Madame, Messieurs les Juges, est-ce que vous avez cela

 21   à l'écran ?

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'il nous faut un

 23   petit peu d'aide.

 24   M. ROGERS : [interprétation] Ah oui, pardonnez-moi.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ah oui. Veuillez reprendre.

 26   M. ROGERS : [interprétation] Oui. Donc, je vais essayer de vous situer pour

 27   que vous puissiez vous retrouver. Donc, nous allons à Srebrenica, en bas,

 28   la grande ville, et nous suivons vers le nord, et nous arrivons à une


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  1   fourche où se trouve Potocari, et là nous avons le choix, soit nous

  2   poursuivons vers le nord jusqu'à Bratunac, ou nous pouvons prendre à gauche

  3   juste avant Potocari et poursuivre la route en voiture vers Jaglici et

  4   Susnjari. Et là, vous voyez deux lignes rouges. Les deux lignes rouges se

  5   dirigent vers le nord-ouest en direction de Novo Kasaba. Si vous les

  6   suivez, vous arrivez à Nova Kasaba et Konjevic Polje. Ce qui indique la

  7   direction de mouvement de la colonne à partir de Konjevic Polje. Et si nous

  8   arrivons à Konjevic Polje, Nova Kasaba, et ensuite nous revenons vers

  9   Bratunac sur la route, nous allons traverser Sandici, Kravica, Glogova, et

 10   enfin nous revenons à Bratunac.

 11   Donc je vous ai situé un peu les emplacements. Je voudrais vous parler un

 12   peu du 12 juillet, et je reviendrai à la carte dans quelques instants.

 13   Le 12 juillet portait sur la séparation des hommes restants, des

 14   femmes et enfants à Potocari. Les femmes et enfants furent envoyés en bus

 15   et les hommes détenus. Les ordres étaient donnés le 12 pour sécuriser la

 16   route de Konjevic Polje à Bratunac de la colonne des hommes musulmans qui

 17   cherchaient à faire une percée jusqu'à Tuzla.

 18   La Chambre de première instance a constaté que l'opération d'assassinat a

 19   démarré le 12 juillet avec les hommes qui avaient été séparés des hommes

 20   [comme interprété] et des femmes réunis à Potocari; jugement 1 050. Des bus

 21   et des camions afin d'acheminer les civils commencèrent à arriver l'après-

 22   midi; jugement 316. Arrangés sous les ordres de Mladic le 11 juillet; 293.

 23   Les hommes étaient séparés par la Brigade de Bratunac et la police

 24   militaire, dirigées par Momir Nikolic, l'organe de sécurité pour la Brigade

 25   de Bratunac qui avait la zone de responsabilité à l'époque où les

 26   présidents [comme interprété] étaient détenus. Avant cette troisième

 27   réunion de l'hôtel de Fontana ce jour-là, Popovic a indiqué à Momir Nikolic

 28   que ces hommes séparés devaient tous être tués. Momir Nikolic, avec ses


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  1   connaissances du terrain, a aidé Popovic et le chef d'état-major du Corps

  2   de la Drina à identifier les emplacements afin de détenir et d'exécuter les

  3   prisonniers. Il a donc identifié l'école Vuk Karadzic et le hangar à

  4   Bratunac, deux emplacements où des centaines de prisonniers furent détenus

  5   par la suite.

  6   Popovic indique dans son mémoire, et là encore aujourd'hui, que le

  7   récit de Nikolic de cette réunion convient d'être rejeté sans préciser

  8   clairement et montrant une certaine incohérence quant à savoir s'il

  9   laissait entendre que des sites de détention et d'exécution ou si seulement

 10   Popovic ou Kosoric l'avait évoqué dans son mémoire d'appel; 75 à 78. Mais

 11   la Chambre a affirmé clairement que Nikolic restait cohérent dans son récit

 12   de la discussion et le contenu de cette discussion le matin du 12 juillet

 13   devant l'hôtel Fontana, et j'ai clairement donné des raisonnements

 14   détaillés à ce que pourquoi cela a été accepté en tant qu'éléments de

 15   preuve; 280 à 288. La Chambre a soigneusement étudié son énoncé du 6 mai

 16   2003, et donc de la pièce à conviction C1.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je pense que vous devez faire

 18   un effort plus soutenu.

 19   M. ROGERS : [interprétation] Désolé. Je fais de mon mieux.

 20   Pour reprendre le récit, donc, les hommes séparés furent détenus à la

 21   maison blanche à Potocari, le 12 et 13 juillet, protégés par les forces

 22   bosniaques serbes, y compris le MUP et VRS. A Potocari, certains hommes ont

 23   pu monter dans les bus avec les hommes [comme interprété] et les femmes se

 24   dirigeant vers Kladanj à l'ouest. A Tisca, les bus furent arrêtés, les

 25   soldats de la VRS les ont fouillés, ont fait descendre les hommes. A une

 26   occasion, 70 à 80 furent emmenés dans la direction de la forêt. Et plus

 27   tard, le 13 juillet, environ 20 hommes avaient été séparés à Luka proche de

 28   Tisca et, la nuit, emmenés dans un champ et fusillés à l'arrière du camion,


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  1   le seul survivant faisant fuite vers la forêt. Il avait entendu les soldats

  2   discutant de Kravica et comment "ils en avaient terminé avec les Balija".

  3   Revenons maintenant à Potocari. Finalement, les hommes de la maison blanche

  4   furent transportés jusqu'à Bratunac. Nous allons revenir maintenant à la

  5   carte. Nous voulons juste l'animer un instant de Potocari à Bratunac pour

  6   vous montrer le parcours.

  7   A Bratunac, comme je l'ai décrit, ils étaient détenus à différents

  8   emplacements, protégés par des gardes bosno-serbes. On garde la carte, j'y

  9   reviendrai.

 10   La nuit du 12/13 juillet, les éléments de la colonne ont attaqué les

 11   forces VRS le long de la route. La route de Bratunac à Konjevic Polje.

 12   J'en viens au 13 juillet. En résumé, c'était un jour où les

 13   prisonniers étaient transportés à la zone de Bratunac et détenus afin

 14   d'attendre leur sort. C'est un jour également où les tueries ont commencé :

 15   à l'entrepôt Kravica, 1 000; à la vallée Cerska, 150; fleuve Jadar, 16.

 16   Bratunac devait être le lieu de rassemblement pour la majorité des

 17   prisonniers. Les exécutions devaient initialement se passer à proximité,

 18   mais il a fallu modifier le plan, ce qui a entraîné le transport des

 19   prisonniers à la zone de responsabilité de Zvornik.

 20   Le 13 juillet, un nouvel ordre de l'état-major de la VRS au Corps de la

 21   Drina et les autres brigades de Zvornik a été donné de bloquer, de

 22   désarmer, de capturer les groupes musulmans et de les empêcher d'arriver

 23   dans le territoire musulman; jugement 379. Dans le cadre de cette

 24   initiative, les forces bosno-serbes ont donc lancé un ultimatum aux membres

 25   de la colonne pour qu'ils, soit, se rendent ou soient tués. Donc, des

 26   milliers se sont rendus, initialement détenus à différents sites à Konjevic

 27   Polje, y compris le pré de Sandici et Nova Kasaba. Et un appel intercepté à

 28   5 heures 30 de l'après-midi le 13 juillet, indiquait que plus de 6 000


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  1   hommes étaient détenus à trois sites dans la région de Bratunac.

  2   Alors, pour poursuivre simplement avec la séquence des faits, je voudrais

  3   vous montrer les développements. Il y avait donc un carrefour sur la route

  4   Bratunac-Konjevic Polje à Nova Kasaba. Donc, dans le nord-ouest, un

  5   déplacement à un entrepôt à Konjevic Polje; référencé par le jugement 389.

  6   Egalement le 13 juillet, de l'entrepôt à Konjevic Polje, un mouvement vers

  7   le terrain de foot à Nova Kasaba.

  8   Egalement le 13, à Sandici, donc en suivant le long de la route à

  9   Sandici, là il y a effectivement mouvement vers l'entrepôt de Kravica; le

 10   jugement 388. Et également de Sandici à Bratunac; mentionné dans le

 11   jugement 388.

 12   Konjevic Polje, de l'entrepôt à Konjevic Polje à Bratunac; jugement

 13   389. Et enfin, du terrain de football à Nova Kasaba à Bratunac. Donc, au

 14   sud de Konjevic Polje, il y a un mouvement là.

 15   Comme vous pouvez le voir, Madame et Messieurs les Juges, il y a

 16   rassemblement de prisonniers dans la zone générale de Bratunac le 13

 17   juillet.

 18   Il y a toute une série de sujets communs, de choses en commun, qui

 19   montrent que les prisonniers détenus à Potocari avaient été désignés pour

 20   être tués. Pour l'essentiel, ils n'ont pas été nourris, ni se sont vu

 21   fournir la moindre eau, ni le moindre accès à des installations médicales.

 22   Aucun enregistrement n'a été fait de leur simple existence. Les noms et les

 23   informations personnelles n'ont pas été collectés concernant la détention

 24   de ces prisonniers et leurs objets personnels ont été empilés. Leurs

 25   documents d'identité leur ont été confisqués, alors que leur argent et leur

 26   or leur ont été volés. Ils ont été détenus dans des conditions effroyables

 27   de surpopulation et d'insalubrité. Ils ont été victimes de sévices,

 28   d'insultes. Et pour nombreux d'entre eux, ils ont été liés et ont eu leurs


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  1   yeux bandés avant d'être assassinés.

  2   Dans la nuit du 13 juillet, Beara s'est lui-même présenté à Deronjic en

  3   tant que l'homme qui était venu pour "tuer tous les Musulmans de Bosnie qui

  4   avaient été entreposés dans les écoles et les autobus à Bratunac"; 1 264 du

  5   jugement de première instance.

  6   Cependant, Beara ne s'attendait manifestement pas à la réélection du

  7   SDS local. Quant à l'emplacement des meurtres, Deronjic -- en fait, les

  8   exécutions de Kravica s'étaient déjà déroulées dans l'après-midi du 13

  9   juillet, donc il y avait déjà un problème d'inhumation. Les solutions pour

 10   l'ensevelissement des cadavres ont été débattues jusqu'aux heures du petit

 11   matin du 14, ce qui a résulté en l'ordre de Beara enjoignant à PW-161 de se

 12   rendre en compagnie de la police militaire sur place afin de trouver un

 13   site d'ensevelissement des cadavres de Kravica. Ils l'ont fait. Et ces

 14   cadavres ont été enterrés à Glogova et à Ravnice.

 15   Afin de résoudre le problème de ces exécutions qui se poursuivaient

 16   sans discontinuer, la Brigade de Zvornik a été également impliquée dans de

 17   nouveaux sites de détention et d'exécution loin de Bratunac qui étaient

 18   nécessaires. Ce soir, le 13 juillet, Beara a ordonné à Momir Nikolic de se

 19   rendre auprès de la Brigade de Zvornik et de son poste de commandement

 20   avancé afin de dire à Drago Nikolic que les prisonniers musulmans de Bosnie

 21   devaient être détenus et tués dans le secteur de Zvornik.

 22   Drago Nikolic a appelé Obrenovic, le chef de l'état-major de la

 23   Brigade de Zvornik, afin de demander à ce qu'on vienne le remplacer afin

 24   qu'il puisse procéder à des préparatifs pour que des prisonniers de

 25   Bratunac soient emmenés dans le secteur de la Brigade de Zvornik et tués.

 26   Nikolic a dit à Obrenovic -- ou, plutôt, Momir Nikolic a dit -- Drago

 27   Nikolic a dit - excusez-moi - à Obrenovic que Popovic l'avait appelé et

 28   avait demandé qu'il prenne les dispositions nécessaires et que Popovic et


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  1   Beara apporteraient les prisonniers. Nikolic a également demandé une

  2   compagnie de la police militaire pour cette tâche. Vous trouverez ceci au

  3   paragraphe 1 345 du jugement de première instance.

  4   Ce soir du 13 juillet, la Brigade de la Police militaire de Zvornik,

  5   sous le commandement de Jasikovac, s'est rendue à l'école de Grbavci afin

  6   de procéder au début des préparatifs concernant les prisonniers. Drago

  7   Nikolic était à l'école cette nuit-là, donnant des ordres à la police

  8   militaire afin que celle-ci garde les prisonniers, et au sujet des

  9   prisonniers arrivant de Bratunac.

 10   Le 14 juillet, Popovic et Nikolic travaillaient de concert afin de

 11   transporter et de détenir les prisonniers et de coordonner leur assassinat.

 12   Popovic et Nikolic ont coordonné le transport, la détention et le meurtre

 13   pendant toute la journée, et la nuit, l'ensevelissement des cadavres s'est

 14   poursuivi.

 15   La dernière carte que je voudrais vous proposer se trouve sur la

 16   planche suivante et indique les mouvements de prisonniers intervenus entre

 17   le 14 et le 16 juillet, en termes généraux, à partir de Bratunac jusqu'aux

 18   sites situés plus au nord où ils ont été tués. Donc, si on commence avec la

 19   flèche de gauche, après il y a séparation, et la flèche pointe vers une

 20   zone proche d'Orahovac. Puis, la seconde pointe vers Petkovci. Et ensuite,

 21   il y a un mouvement de l'école de Petkovic vers le barrage, figuré avec la

 22   petite flèche. La troisième flèche se termine à Rocevic, puis ensuite là-

 23   bas il y a un mouvement vers Kozluk. Et enfin, la dernière flèche se divise

 24   vers l'école de Kula à Branjevo, près de Branjevo, et au Dom de Pilica, le

 25   centre culturel, et ensuite il y a le mouvement à partir de la ferme de

 26   Branjevo. Manifestement, la flèche n'indique pas très précisément le trajet

 27   qu'ils ont suivi. Elle ne suggère pas en fait que ceci s'est passé en

 28   traversant le territoire de la RFY. C'est juste une indication du mouvement


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  1   des prisonniers vers le nord les 14, 15 et 16.

  2   Donc le 14 juillet dans la matinée, vers 8 heures, Nikolic, Popovic et

  3   Beara se sont rencontrés à la caserne Standard, c'est-à-dire au quartier

  4   général de la Brigade de Zvornik à Karakaj. Et Karakaj, c'est juste à

  5   l'ouest -- à l'est d'Orahovac et au nord de Zvornik. La Chambre a conclu

  6   que leur réunion a porté sur l'opération de meurtre; paragraphe 492 du

  7   jugement de première instance. Suite à cela, Beara est revenu à Bratunac

  8   afin d'être présent lors de l'exécution de la tâche de l'ensevelissement

  9   des cadavres de personnes tuées à Kravica et pour trouver de nouveaux sites

 10   où l'on pouvait détenir et tuer d'autres prisonniers. Après la réunion,

 11   Popovic est parti pour accompagner le convoi de prisonniers originaires de

 12   Bratunac. Et, à Bratunac, Popovic dirigeait le convoi, paragraphe 1 108 du

 13   jugement, vers l'école de Grbavci à Orahovac, s'arrêtant à Divic afin de

 14   prendre en route Drago Nikolic. Popovic était à Orahovac alors que les

 15   prisonniers étaient entassés dans l'école. Drago Nikolic a été vu pendant

 16   toute la journée à Orahovac en train de diriger l'opération alors qu'entre

 17   800 et 2 500 prisonniers étaient détenus sur place, étaient déplacés près

 18   d'un kilomètre plus loin sur la route avant d'être tués. Et dans l'après-

 19   midi du 14 juillet, les membres du génie de la Brigade de Zvornik et les

 20   conducteurs d'engins étaient en train de creuser une large fosse à Orahovac

 21   sur le site de l'exécution; paragraphe 482 du jugement. Les prisonniers ont

 22   été détenus dans des conditions effroyables à l'école, ils avaient les yeux

 23   bandés et ils ont eu les mains liées avant d'être entassés à bord de

 24   camions et conduits vers ce qui devait être leur mort; 481 et 484 du

 25   jugement.

 26   Des soldats appartenant au 4e Bataillon de la Brigade de Zvornik et

 27   c'était également du personnel de la logistique qui escortaient les

 28   prisonniers sur le site; paragraphe 483. Des camions, qui comprenaient


Page 127

  1   également des véhicules de la Brigade de Zvornik, transportaient les

  2   prisonniers pendant toute l'après-midi et jusqu'au soir --

  3   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Nous demandons à M. le Procureur de

  4   bien vouloir ralentir. Ceci n'est pas possible du point de vue de

  5   l'interprétation.

  6   M. ROGERS : [interprétation] Excusez-moi.

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je crois que vous devez vraiment

  8   essayer de faire un effort, Monsieur Rogers.

  9   M. ROGERS : [interprétation] Eh bien, je m'y efforce.

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Peut-être que vous devriez être

 11   recruté dans l'équipe olympique britannique. Vous pourriez peut-être

 12   découvrir dans ce cas-là que c'est sur la piste que votre vitesse égale

 13   celle de votre élocution.

 14   M. ROGERS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Eh bien, je

 15   devrai d'abord perdre un peu de poids, je crois.

 16   Alors, au moins un membre du 4e Bataillon a participé à ces meurtres.

 17   La Chambre de première instance a conclu que Drago Nikolic et Popovic

 18   étaient présents lors des meurtres à Orahovac et qu'ils dirigeaient ces

 19   meurtres. Paragraphe 1 112 du jugement.

 20   Lorsque les meurtres d'Orahovac étaient en train de se produire, une

 21   nouvelle demande d'engin de terrassement a été soumise à la Brigade de

 22   Zvornik concernant la tâche "qui était en train d'être exécutée par Popovic

 23   et Beara." Paragraphe 1 277 du jugement.

 24   Et Beara a été vu à l'école de Grbavci et à Orahovac. Il a également

 25   été vu à l'école près du terrain de football de Nova Kasaba, plus tard

 26   également dans l'après-midi, puis il a été vu après son retour au QG de la

 27   Brigade de Zvornik, à la caserne de Standard, où il se plaignait de ce que

 28   :


Page 128

  1   "Nous avons beaucoup de prisonniers et il est très difficile pour

  2   nous de les contrôler. Il y a plusieurs sites dans la municipalité de

  3   Zvornik. Nous devons nous débarrasser d'eux. J'attends de l'aide de la part

  4   de la municipalité."

  5   Paragraphe 1 278 du jugement.

  6   Alors, la Chambre a conclu qu'en parlant d'aide ou d'assistance, il

  7   entendait se débarrasser des morts, c'est-à-dire il entendait les tuer et

  8   enterrer leurs cadavres.

  9   Beara a dit qu'il commandait la caserne et que les ordres venaient

 10   "des deux présidents", paragraphe 1 278 du jugement.

 11   Jokic, l'homme de la logistique, a appelé Beara au QG de la Brigade

 12   de Bratunac, se plaignant qu'il rencontrait d'énormes problèmes avec les

 13   colis, voulant dire par là les prisonniers, paragraphe 1 280 du jugement.

 14   Les registres de la Brigade de Zvornik consignent à 3 heures de l'après-

 15   midi : "Le colonel Beara arrive avec un ordre --"

 16   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu.

 17   M. ROGERS : [interprétation] Paragraphe 1 276 du jugement. Plus tard ce

 18   soir-là, Beara a été vu à l'école de Petkovci accompagné de Drago Nikolic,

 19   paragraphe 1 279 du jugement, et la Chambre a conclu que Beara avait

 20   coordonné la détention, le transport, l'exécution et l'inhumation des

 21   prisonniers détenus à Petkovci.

 22   Entre-temps, également le 14 juillet, d'autres prisonniers étaient

 23   déplacés vers l'école de Kula, près de Pilica, et vers l'école de Rocevic,

 24   près de Kozluk. Drago Nikolic, également par sa participation dans

 25   l'opération à Orahovac, était en contact avec le 1er Bataillon de la

 26   Brigade de Zvornik, demandant à Slavko Peric, l'assistant du commandant

 27   chargé de la sécurité et du renseignement, de se rendre à l'école de Kula

 28   afin de s'assurer qu'il n'y avait aucun problème avec les civils locaux.


Page 129

  1   Quinze membres du 1er Bataillon sont alors allés à l'école pour en assurer

  2   la sécurité en prévision de l'arrivée des prisonniers, paragraphe 527 du

  3   jugement. Les prisonniers sont arrivés, ont de nouveau été détenus dans

  4   l'école dans des conditions de surpopulation et d'insalubrité effroyables,

  5   avec pratiquement aucun approvisionnement en vivres et en eau, aucun

  6   traitement médical. Les prisonniers ont été battus, ils étaient battus

  7   s'ils voulaient utiliser des toilettes, si bien qu'ils étaient obligés de

  8   faire leurs besoins sous eux. Paragraphe 529 du jugement. Sous la garde du

  9   1er Bataillon, ils y sont restés pendant toute la journée et la nuit du 14,

 10   du 15, et jusqu'au 16.

 11   A l'école de Rocevic, les prisonniers bosno-musulmans détenus et sous

 12   la garde de soldats de la Brigade de Bratunac, y compris des policiers

 13   militaires, et ensuite les 14 et 15 juillet, ces mêmes membres se sont

 14   retrouvés à près d'un millier, paragraphe 1 117 du jugement. Dans l'après-

 15   midi du 14, Srecko Acimovic, commandant du 2e Bataillon, a appelé le QG de

 16   la Brigade de Zvornik et il s'est entretenu avec Popovic qui était sur

 17   place au sujet des prisonniers. Popovic a dit qu'ils seraient échangés le

 18   jour suivant. Paragraphe 1 113 du jugement.

 19   Alors, nous passons maintenant au 15. Popovic, Beara et Nikolic ont

 20   continué à travailler ensemble afin de s'assurer de la poursuite de

 21   l'opération de meurtres au même rythme. Les opérations d'ensevelissement à

 22   Orahovac se sont poursuivies et les meurtres à Kozluk des prisonniers

 23   originaires de Rocevic ont commencé et les meurtres à l'école de Petkovci

 24   ont également commencé.

 25   Au cours des premières heures de cette journée, Drago Nikolic

 26   agissait en qualité d'officier de permanence de la Brigade de Zvornik. Un

 27   message a été envoyé du QG de la Brigade de Zvornik à Acimovic, commandant

 28   du 2e Bataillon, afin de constituer un peloton qui devait être envoyé à


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  1   Rocevic afin d'y tuer les prisonniers présents. Vers 2 heures 30 du matin,

  2   Nikolic a donné suite au télégramme en insistant que l'ordre soit exécuté,

  3   paragraphe 1 368 du jugement. Lorsque Acimovic a refusé, Nikolic a dit

  4   qu'il rencontrerait Acimovic ce matin-là à l'école et a rendu compte que

  5   Beara devait venir à 9 heures du matin à la caserne Standard. Vers 10

  6   heures du matin, Popovic a rencontré Acimovic à l'école. Popovic était en

  7   colère, il a demandé pourquoi le peloton d'exécution n'avait pas été mis en

  8   place comme ordonné; paragraphes 511 et 1 118 du jugement. Il était

  9   également en colère lorsqu'un seul camion s'est présenté pour le transport

 10   des prisonniers vers le site d'exécution. Il a dit qu'ils devaient être

 11   tués à l'école. Paragraphe 513 du jugement.

 12   Acimovic a ordonné que les prisonniers soient emmenés à Kozluk, où

 13   ils ont fini par être tués par le 2e Bataillon de la Brigade de Zvornik,

 14   comprenant au moins un policier militaire. Ils ont été gardés par le 2e

 15   Bataillon de la Police militaire de la Brigade de Zvornik. Ils avaient les

 16   yeux bandés, ils étaient liés par ces mêmes hommes qui les ont fait monter

 17   à bord de camions du 2e Bataillon, paragraphe 518, et ce, pour leur

 18   transport et leur meurtre sur un site à Kozluk. Trois caisses de munitions

 19   pour des fusils automatiques ont été envoyées à l'école de Rocevic par le

 20   2e Bataillon et un des soldats du 2e Bataillon a déposé indiquant que les

 21   prisonniers étaient :

 22   "A moitié morts, épuisés, sans eau ni pain, personne, personne n'a

 23   intercédé pour leurs vies. Et ceci me préoccupe énormément. Personne

 24   d'entre eux n'a dit : 'Epargnez-moi.'"

 25   Paragraphe 518 du jugement.

 26   Les prisonniers ont été abattus sur les bords de la rivière. Ce matin, vers

 27   10 heures du matin, Beara a appelé Krstic demandant dix -- 15 à 30 hommes

 28   pour qu'ils les aident dans l'opération de meurtre.


Page 131

  1   Il a dit à Krstic qu'il avait 3 500 colis à distribuer, toujours, ou

  2   autrement dit, qu'il devait les tuer, et qu'il ne pouvait rien faire sans

  3   hommes supplémentaires. On lui a dit de prendre des soldats de la Brigade

  4   de Bratunac, paragraphe 1 282 du jugement. Ils étaient toujours près de 3

  5   000 hommes qui étaient distribués entre Rocevic, l'école de Kula et le

  6   centre culturel de Pilica.

  7   Entre-temps, toujours le 15, les inhumations à Orahovac se sont

  8   poursuivies avec des membres du génie de la Brigade de Zvornik, leur

  9   équipement et des camions qui étaient utilisés pour retirer les corps de

 10   l'école de Petkovci et les prisonniers. Ceux qui étaient détenus à l'école,

 11   des prisonniers, se sont vu dire de retirer l'essentiel de leurs vêtements,

 12   se sont vu confisquer leurs objets personnels, ils ont eu les yeux bandées,

 13   les mains liées, se sont vu charger à bord de camions du 6e Bataillon de la

 14   Brigade de Zvornik et transporter au barrage de Petkovci, au champ

 15   d'exécution, où ils ont été tués. Dans la soirée, Popovic et Beara se sont

 16   rencontrés au QG de la Brigade de Zvornik.

 17   Vers le 16 juillet, seule l'école de Kula et le centre culturel de

 18   Pilica contenaient encore des prisonniers qui n'avaient pas encore été

 19   tués. Le dernier segment de l'opération concernait entre 1 000 et 2 000

 20   hommes. Beara et Popovic, comme cela figure au jugement, sont arrivés à

 21   l'école de Kula vers midi ce jour-là avec 10 à 12 soldats dans une

 22   camionnette et avec un autocar vide. Peu après, les prisonniers ont eu les

 23   mains liées. Certains d'entre eux ont eu les yeux bandés. Ils ont été

 24   emmenés vers la ferme militaire de Branjevo. Et en utilisant des

 25   équipements et des hommes de la Brigade de Zvornik, par groupes de dix, les

 26   prisonniers ont été exécutés. Les meurtres ont été commis par huit à dix

 27   hommes du 10e Détachement de Sabotage et se sont poursuivis de 10 heures du

 28   matin jusqu'à 3 ou 4 heures de l'après-midi, lorsque les meurtriers ont été


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  1   rejoints par des soldats de Bratunac.

  2   Un survivant a déposé en indiquant que : "Quand ils se sont arrêtés

  3   de tirer, je me suis jeté au sol. Mes mains étaient toujours liées dans mon

  4   dos et je suis tombé sur le ventre, la tête contre le sol. Un autre homme

  5   est tombé par-dessus moi, sur ma tête. Je crois qu'il a été tué sur le

  6   coup. Et je pouvais sentir son sang chaud qui coulait sur moi. Les tirs se

  7   sont poursuivis et ensuite, ils ont ordonné aux soldats de tuer les hommes

  8   un par un. Je pouvais entendre une voix qui disait qu'ils ne devaient pas

  9   tirer dans la tête des gens pour éviter que leur cervelle ne se répande,

 10   mais plutôt leur tirer dans le dos."

 11   Paragraphe 539 du jugement.

 12   La Chambre de première instance a conclu que Popovic était en fait le

 13   lieutenant-colonel qui était arrivé à la ferme dans la matinée, accompagné

 14   de policiers militaires et d'un peloton d'exécution appartenant du 10e

 15   Détachement de Sabotage, paragraphes 1 131 à 33 du jugement.

 16   A peu de distance de là, au centre culturel de Pilica, les

 17   prisonniers qui avaient été amenés peu de jours auparavant et qui était

 18   sous la garde de forces bosno-serbes ont tous été assassinés dans l'après-

 19   midi au centre culturel. Popovic était dans le secteur à ce moment-là,

 20   d'après le jugement, et il a commandé 500 litres de carburant demandant

 21   qu'il soit livré à Pilica. Comme cela figure également à la conversation

 22   interceptée du 16, "le travail qu'il est en train de faire s'arrêtera."

 23   La Chambre de première instance a bien pris en considération et a considéré

 24   que ce carburant était nécessaire pour le transport, l'exécution et

 25   l'inhumation des prisonniers.

 26   Le lieutenant-colonel a également ordonné à des hommes du 10e

 27   Détachement de Sabotage de se rendre au centre culturel à partir de la

 28   ferme de Branjevo afin de tuer les prisonniers. Le jugement a conclu que


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  1   c'était bien Popovic, paragraphes 540, 1 133. Il s'était trouvé présent à

  2   un café à Pilica à quelques mètres du centre culturel, et le jugement a

  3   conclu dans ce sens. Les soldats lui ont rendu compte après les meurtres

  4   que "tout était terminé". Paragraphe 1 133 du jugement.

  5   Lorsque les exécutions de la ferme de Branjevo et les meurtres du

  6   centre culturel de Pilica ont été achevés, tout était terminé. Les

  7   prisonniers étaient tous morts. Vers 9 heures du soir, de ce soir-là,

  8   Popovic est enregistré comme rendant compte que :

  9   "Dites au général que j'ai terminé mon travail. J'ai tout terminé."

 10   Conversation interceptée P01201A, paragraphe 1 136 du jugement.

 11   La seule chose qui restait à faire après ces meurtres était

 12   l'ensevelissement des corps, et le 17 juillet, Popovic a rendu compte,

 13   comme le jugement l'a conclu, que l'opération de meurtre s'était conclue de

 14   façon satisfaisante. Les enterrements étaient achevés le 17 et le jugement

 15   a conclu vers 5 heures 42 que les unités du génie et le matériel de la

 16   Brigade de Zvornik qui avaient été engagés dans l'après-midi du 17, eh

 17   bien, avaient fini leur travail. Popovic fait savoir que :

 18   "Tout va bien. Le travail a été fait. Pas de problème. Tout s'est

 19   déroulé au mieux. Nous avons 20 sur 20."

 20   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je dois vous interrompre, Monsieur

 21   Rogers. Mon collègue m'informe que l'interprétation française ne suit pas

 22   votre rythme.

 23   M. ROGERS : [interprétation] J'ai presque fini. Vous serez heureux de

 24   l'apprendre.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais je n'en suis pas surpris.

 26   M. ROGERS : [interprétation] Eh bien, juste pour conclure, dans l'après-

 27   midi du 17, Popovic a rendu compte que :

 28   "Tout allait bien, que le travail était fait, que tout avait été


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  1   achevé, aucun problème, qu'ils avaient 20 sur 20 et que tout allait bien."

  2   Conversation interceptée à 4 heures 22 de l'après-midi, P01224A,

  3   paragraphe 1 142 du jugement.

  4   Et la Chambre de première instance a conclu que le travail auquel il

  5   se réfère n'était rien d'anodin, il n'avait rien d'innocent, il s'agissait

  6   tout simplement de l'opération de meurtre et d'ensevelissement.

  7   Mais la tâche de Popovic n'était pas tout à fait achevée. Le 23

  8   juillet, après que l'opération principale de meurtre s'était achevée, entre

  9   le 13 et le 16, une nouvelle opération de ratissage a été mise en place par

 10   la Brigade de Zvornik dans toute la zone de responsabilité de celle-ci et

 11   ailleurs dans le secteur de Zvornik et Srebrenica. Dix hommes musulmans de

 12   Bosnie blessés, qui avaient été faits prisonniers, ont été emmenés à

 13   l'hôpital de Milici, et le 23 juillet, ils ont été transférés à la caserne

 14   de Standard. Pandurevic a demandé conseil au commandement du Corps de la

 15   Drina quant à ce qu'il fallait faire d'eux, et ceci révèle en soi que

 16   Popovic avait été dépêché par le commandant de corps, comme le conclut le

 17   paragraphe 1 153 du jugement. Et les patients en question ont été emmenés,

 18   ils n'ont plus jamais été revus. PW-168 a déposé en indiquant qu'Obrenovic

 19   s'était vu dire par Pandurevic que Popovic était arrivé avec un ordre de

 20   Mladic enjoignant que les hommes blessés soient liquidés et qu'ils devaient

 21   être emmenés.

 22   La Chambre de première instance a constaté le même jour pour ce qui

 23   est du patient du Milici et des exécutions, que Popovic était impliqué dans

 24   les exécutions en masse à Bisina, où les prisonniers ont été emmenés par

 25   groupes de cinq à bord de camions et ont été exécutés là-bas. Paragraphes

 26   du jugement 1 143 à 1 152.

 27   Et pour finir, en septembre 1995, la Chambre de première instance a

 28   constaté que Popovic a été impliqué dans l'opération de ré-ensevelissement


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  1   [phon] de corps à Glogova, et la Chambre a jugé à juste titre que cela

  2   corroborait son rôle dans l'opération des exécutions, paragraphe du

  3   jugement 1 161.

  4   Madame, Messieurs les Juges, en conclusion, Popovic a été impliqué

  5   dès le début. Il se trouvait à Potocari le 12 juillet en expliquant les

  6   plans des exécutions avant que ne commencent le tri des hommes à la date du

  7   13. Les membres de la VRS, tels que Momir Nikolic, Drago Nikolic et Srecko

  8   Acimovic, ont été chargés par lui de réaliser ce plan. Il a organisé et

  9   conduit les opérations de transport de prisonniers depuis l'école de

 10   Grbavci vers Orahovac. Il était présent à bien des endroits de détention, y

 11   compris l'école de Rocevic et Kula. La Chambre a constaté qu'il s'était

 12   trouvé au domaine de Branjevo et à proximité de la maison de la culture de

 13   Pilica. Il a organisé le carburant pour les transports et les exécutions

 14   des prisonniers. Il a rapporté à ses supérieurs que l'opération a été

 15   terminée avec succès et il a participé à la dissimulation de tout ce qui a

 16   été fait au niveau des ré-ensevelissements. Il a été complètement dédié à

 17   la tâche qui lui a été confiée. Donc, c'est à juste titre et de façon

 18   justifiée qu'il a été condamné pour ce grand rôle dans les atrocités

 19   commises. Son appel doit être rejeté.

 20   Madame, Monsieur les Juges, ceci termine mon exposé, et je vais

 21   donner la pause, j'imagine après la pause à Mme Soljan et ainsi que Mme

 22   Nabti.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez tout à fait raison. Nous

 24   allons faire une pause à présent, et nous reprendrons dans 20 minutes.

 25   --- L'audience est suspendue à 15 heures 00.

 26   --- L'audience est reprise à 15 heures 27.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame le Procureur, s'agissant

 28   de la rapidité d'élocution, je crois qu'il convient de ne pas s'imaginer


Page 136

  1   qu'il s'agit d'une course de chevaux, et il ne s'agit pas de galoper. Il

  2   faudrait aller entre le trot et le galop. Essayez de trouver un juste

  3   milieu.

  4   Mme SOLJAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Le message est

  5   bien compris.

  6   Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Bonjour à tous et à toutes. Je

  7   m'appelle Lada Soljan, et je vais prendre la parole au nom de l'Accusation

  8   aujourd'hui.

  9   Madame, Messieurs les Juges, dans la présentation de mes arguments, je me

 10   propose de faire un résumé des allées et venues de Popovic pendant la

 11   période de temps en question pour démontrer combien il était omniprésent à

 12   Bratunac dans les secteurs de la Brigade de Zvornik et de Bratunac à partir

 13   du jour de la chute de Srebrenica. Et ce faisant, je vais m'efforcer de

 14   présenter les défis qui se plaçaient devant un officier chargé de la

 15   sécurité qui n'avait pas compétence de coordonner les choses et ne faisait

 16   qu'exécuter ses missions à l'ordinaire alors que des milliers d'hommes et

 17   de garçons musulmans de Bosnie ont été exécutés. Comme nous l'avons dit

 18   dans notre mémoire en réponse, la seule conclusion raisonnable s'agissant

 19   de ces éléments de preuve qui sont interconnectés et qui se corroborent

 20   l'un l'autre - la seule conclusion à tirer est celle qui a été tirée par

 21   les Juges de la Chambre de première instance - à savoir que Popovic a

 22   considérablement contribué aux opérations d'exécution par une participation

 23   robuste et vigoureuse. Ça se trouve aux paragraphes 1 178 du jugement et 1

 24   180. Et il a été à juste titre condamné pour persécution, meurtre,

 25   extermination et génocide. Et, pour finir, je me propose de répondre aux

 26   questions que vous aviez posées au sujet du site de Kozluk et pour ce qui

 27   est des autres points. L'Accusation maintient ce qui figure dans son

 28   mémoire par écrit. Et je serai heureuse de répondre à toute question que


Page 137

  1   vous pourriez avoir.

  2    Madame, Messieurs les Juges, comme M. Rogers l'a déjà montré, à la

  3   pièce à conviction 2110, il y a mise en exergue de certains aspects de la

  4   participation de Popovic au plan d'exécution. Ça se passe à moins d'une

  5   semaine pour ce qui est de l'exécution de milliers de garçons et d'hommes

  6   musulmans de Bosnie dans le secteur qui tombe sous sa responsabilité.

  7   Je me propose de me référer à une carte partant de ce qui a été

  8   évoqué dans le jugement par les Juges de la Chambre de première instance.

  9   Le 11 juillet, Popovic a été vu aux côtés du général Mladic et autres

 10   officiers de la VRS dans les rues vides de Srebrenica. Le 12 juillet, il se

 11   trouvait être devant l'hôtel Fontana à Bratunac, avant une troisième

 12   réunion de cet hôtel Fontana. Et c'est là qu'il a dit à Momir Nikolic

 13   qu'"il fallait tuer tous les Balija." Il a parlé également des sites de

 14   détention et d'exécution. Il s'agit du paragraphe 1 097 du jugement.

 15   Popovic a été présent à la troisième et dernière réunion de l'hôtel

 16   Fontana, où il a été question de tri et de la séparation de ceux qui

 17   auraient commis des crimes. Il était aux côtés des forces serbes à Potocari

 18   le 12.

 19   Et le 13, il était à la réunion au QG de la Brigade de Bratunac aux

 20   côtés de Mladic, Vasic et le général Krstic. Et vers cette époque-là,

 21   Mladic s'était adressé en colère à Popovic à l'extérieur du QG pour dire

 22   qu'il devait faire son travail. Ça se trouve au paragraphe 1 100 du

 23   jugement. Le même soir, vers 7 heures ou 8 heures, il a informé Drago

 24   Popovic [comme interprété] qu'un nombre considérable de prisonniers

 25   allaient être amenés de Bratunac vers Zvornik pour être exécutés et il a

 26   demandé l'aide de Nikolic. Paragraphes 1 104 et 1 345 du jugement.

 27   Le matin suivant, Madame, Messieurs les Juges, le 14 juillet, Popovic

 28   était à une brève rencontre de 15 à 20 minutes à la caserne Standard avec


Page 138

  1   Beara et Drago Nikolic. A la lumière de ce timing de la réunion, il est

  2   évident que les Juges de la Chambre ont raisonnablement constaté qu'il

  3   s'agissait d'une organisation et coordination d'une opération d'exécution;

  4   paragraphe 472 du jugement.

  5   Après cette réunion, Popovic est allé à Bratunac pour conduire un grand

  6   convoi comportant des soldats de la VRS et des prisonniers musulmans de

  7   Bosnie en direction de l'école de Grbavci à Orahovac. Il a été creusé une

  8   grande fosse avec des engins. On a demandé "de façon à ce que cette mission

  9   puisse être réalisée, mission qui a été confiée à Beara et Popovic."

 10   La Chambre a constaté qu'il y avait entre 800 et 2 500 hommes

 11   musulmans à avoir été exécutés à Orahovac ce jour-là, et à la lumière de la

 12   totalité des éléments de preuve, il n'y a pas eu de conclusion raisonnable

 13   autre à tirer que Popovic était à Orahovac le 14 juillet et qu'il a dirigé

 14   les exécutions.

 15   Madame, Messieurs les Juges, nous avons parlé aussi de la question du PW-

 16   101, le témoin qui a parlé du site d'exécution. Et nous avons mentionné

 17   ceci dans les paragraphes 169 à 190.

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous êtes encore au galop. Je vous

 19   avais demandé d'aller plutôt au trot.

 20   Mme SOLJAN : [interprétation] Je m'excuse.

 21   Nous avons présenté d'autres arguments au sujet du Témoin PW-101 en

 22   réponse à la sixième requête Popovic en application de l'article 115.

 23   Le soir du 14 juillet, les hommes musulmans de Bosnie ont été détenus

 24   à Rocevic et à l'école de Kula dans des conditions similaires, tout comme

 25   celles de l'école de Grbavci. Popovic s'est entretenu au téléphone avec

 26   Acimovic au sujet des prisonniers. Le matin suivant, le 15 juillet, Popovic

 27   était à l'école de Rocevic. Il a coordonné les exécutions de prisonniers.

 28   Il a demandé à ce que soient procurés des camions de la caserne de Standard


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  1   pour que les prisonniers puissent être acheminés vers les sites

  2   d'exécution, et il a essayé de recourir aux soldats de la Brigade de

  3   Zvornik ainsi qu'à des volontaires pour ce qui est des exécutions.

  4   Paragraphes 511 à 517 du jugement en première instance.

  5   La Chambre a trouvé que plus de 1 000 prisonniers ont été exécutés ce jour-

  6   là à Kozluk, et ce, partant du témoignage d'un témoin oculaire et des

  7   éléments de preuve médico-légaux.

  8   Madame, Messieurs les Juges, Popovic a contesté la fiabilité des

  9   conclusions tirées par les Juges de la Chambre de première instance pour ce

 10   qui est de la fiabilité d'Acimovic, et on semble vouloir indiquer qu'il a

 11   coordonné toute la logistique sur le site pour ce qui est des exécutions

 12   des prisonniers à Rocevic et à Kozluk. Nous maintenons ce que nous avons

 13   dit dans nos paragraphes 198 à 217 du mémoire par écrit.

 14   Vers 6 heures 30 du soir, Popovic a rencontré une fois de plus Beara à la

 15   caserne Standard. Entre-temps, 1 000 à 2 000 prisonniers ont été détenus

 16   dans le secteur de Pilica, référence faite au paragraphe 1 124 du jugement.

 17   Le 16 juillet, Popovic a été vu au QG de la Brigade de Zvornik aux côtés de

 18   deux policiers de la police militaire, et il y avait des membres de la 10e

 19   Unité de Sabotage qui ont reçu l'ordre d'exécuter les Musulmans de Bosnie

 20   qui se trouvaient à bord de plusieurs autocars à la ferme militaire de

 21   Branjevo. Popovic est arrivé à l'école de Kula en compagnie de Beara vers

 22   midi, et lorsqu'ils sont arrivés là, les prisonniers ont été emmenés à la

 23   ferme militaire de Branjevo pour y être exécutés. La Chambre a constaté que

 24   c'est entre 3 et 4 heures de l'après-midi que le lieutenant-colonel, c'est-

 25   à-dire Popovic en l'occurrence, a obtenu des volontaires qui ont été

 26   déployés à la ferme militaire de Branjevo pour aller depuis là vers Pilica

 27   et qui ont exécuté les 500 Musulmans de Bosnie qui étaient détenus là-bas.

 28   Puis, ils ont quitté les lieux en compagnie de Popovic et de deux membres


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  1   de la police militaire.

  2   Donc, entre 1 000 et 2 000 Musulmans de Bosnie ont été exécutés aux

  3   fermes de Pilica et Branjevo ainsi qu'à la maison de la culture de Pilica à

  4   la date du 16 juillet.

  5   Madame, Messieurs les Juges, dans le mémoire en appel, une fois de plus,

  6   compte rendu d'audience pages 21 à 23, Popovic conteste les conclusions

  7   disant qu'il avait coordonné les activités logistiques sur le site et que

  8   le lieutenant-colonel qui était présent à Pilica le 16 juillet, mais

  9   c'était lui, en fait. Et il conteste en s'attaquant à l'impossibilité

 10   d'Erdemovic d'identifier Popovic et toute une série d'interprétations

 11   plutôt spéculatives au sujet des éléments de preuve. Et comme nous le

 12   développons dans notre mémoire en réponse, paragraphes 218 à 228, la

 13   Chambre a raisonnablement constaté, partant de la totalité des éléments de

 14   preuve se corroborant mutuellement, qu'il y a eu conclusion juste et fiable

 15   au sujet de l'identification en question.

 16   Qui plus est, il n'y avait pas un autre lieutenant-colonel de présent

 17   à cet endroit. La Chambre a pris en considération ses déplacements à la

 18   date du 16 juillet, en disant qu'il était à Pilica, qu'il était présent à

 19   l'école de Kula en compagnie de Beara et même plus tard. Le fait qu'il y

 20   ait des notes montrant dans le registre de l'officier de permanence de la

 21   Brigade de Zvornik qu'à 4 heures 40 il était dans le secteur de Pilica,

 22   vers l'époque des exécutions de Branjevo. La Chambre a également pris en

 23   considération le rôle qu'il a joué précédemment dans les exécutions

 24   d'Orahovac et Rocevic.

 25   La Chambre s'est ensuite appuyée sur des éléments de preuve pour ce

 26   qui est de l'approvisionnement en carburant, y compris la conversation

 27   interceptée de 1 heure 58 de l'après-midi où Popovic a d'urgence demandé

 28   500 litres de carburant à délivrer à Pilica, "sans quoi le travail qu'ils


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  1   sont en train de faire devra s'interrompre." Et à 2 heures de l'après-midi,

  2   on a trouvé dans le registre de l'officier de permanence de la Brigade de

  3   Zvornik que Popovic a demandé un autocar avec un réservoir de carburant

  4   plein avec 500 litres de diesel D2. La Chambre a raisonnablement constaté

  5   du fait d'une conversation interceptée ultérieure, à 7 heures 12 du soir,

  6   qu'il y eu "requête d'envoyée à Zvornik" pour ce qui est de la livraison de

  7   carburant. Ça se trouve au paragraphe 1 128. Et on a pris en considération

  8   ce que Branko Bogicevic a dit, qui a confirmé qu'il a transporté 500 litres

  9   de carburant depuis la caserne Standard vers Pilica le même jour. Et en

 10   sus, il y a des registres d'utilisation de véhicule qui montrent que ce

 11   véhicule a été utilisé pour aller à Pilica.

 12   Partant, donc, de ces éléments de preuve qui se corroborent

 13   mutuellement, la Chambre a raisonnablement constaté que la requête faite

 14   par Popovic pour ce qui est du carburant avait à voir avec l'opération

 15   d'exécution des prisonniers à la ferme militaire de Branjevo.

 16   Plus tard dans la soirée, à 9 heures 16 du soir, Popovic a eu une

 17   autre conversation qui a été interceptée. Il a appelé depuis la caserne de

 18   Standard, où il a dit qu'il a été terminé son travail. Compte tenu de la

 19   totalité de ces éléments de preuve et des activités de Popovic ce soir-là,

 20   la Chambre de première instance a considéré que la seule interprétation

 21   possible de ces éléments de preuve se rapportait à une opération

 22   d'exécution.

 23   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à ce que Mme Soljan ralentisse.

 24   Mme SOLJAN : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, comme M. Rogers

 25   l'a déjà indiqué, le job auquel il est fait référence dans la conversation

 26   interceptée le 17 juillet se réfère à l'opération d'exécution et

 27   d'ensevelissement des hommes musulmans de Bosnie à Zvornik entre le 13 et

 28   le 17 juillet. Et dans le rapport Popovic, on dit que ce job a été fait


Page 142

  1   20/20.

  2   Madame, Messieurs les Juges, la Chambre a constaté que Popovic a participé

  3   aux exécutions ou facilité les exécutions de dix prisonniers musulmans qui

  4   étaient blessés à l'hôpital de Milici et qui ont été placés sous sa garde

  5   vers le 23 juillet. Cela fait partie du paragraphe 577 et du paragraphe 1

  6   156 du jugement rendu.

  7   La Défense a répété qu'elle contestait, et elle l'a réitéré

  8   aujourd'hui -- on vise à contester cette conclusion. Mais tout ceci ne se

  9   trouve être que fragmentaire. Cela se base sur des éléments de preuve liés

 10   à deux conversations interceptées de ce jour pour dire que Popovic

 11   arriverait pour s'en occuper, et il y a une note contemporaine de

 12   l'officier de permanence de la Brigade de Zvornik qui dit que :

 13   "A 8 heures 30 - le lieutenant-colonel Cerovic a convoyé un message

 14   disant que le lieutenant-colonel arriverait ce jour-là vers 17 heures."

 15   Ça se trouve au jugement rendu, paragraphe 1 153, et note de bas de

 16   page 3761.

 17   Il y a également un témoignage disant que Popovic était arrivé avec

 18   un ordre émanant de Mladic, disant que les blessés devaient être liquidés,

 19   ils ont été emmenés. S'agissant maintenant du registre de l'utilisation des

 20   véhicules, il est consigné le fait que le véhicule était affecté à Popovic

 21   et qu'il s'en ait servi pour voyager de Vlasenica à Zvornik. Paragraphes 1

 22   154 et 1 155 du jugement rendu.

 23   La Chambre a également constaté qu'il a été impliqué dans les exécutions

 24   des prisonniers à Bisina, et il a été présent lors des exécutions sur le

 25   site de Bisina. On a conclu de sa participation aux opérations de ré-

 26   ensevelissement en septembre 1995, chose qui se trouve corroborée par sa

 27   participation à cette entreprise criminelle commune qui avait pour visée

 28   des assassinats. Le jugement rendu, paragraphes 1 161 et 1 166.


Page 143

  1   Madame, Messieurs les Juges, aux paragraphes 84, 88, 93 à 97, et 232 à 238

  2   de la réponse de l'Accusation dans son mémoire, il est question des

  3   arguments présentés par les conseils de Popovic réfutant la conclusion au

  4   terme de laquelle le secteur de la sécurité avait joué un rôle crucial pour

  5   ce qui est de l'organisation et la gestion des opérations d'exécution.

  6   Popovic n'était pas un officier de la sécurité dépourvu de pouvoir sans

  7   autorité ni accès au personnel et ressources, comme il l'a affirmé tant

  8   pendant le procès que comme maintenant à l'appel. Au contraire, il avait

  9   joué un rôle principal de coordination de la réalisation de ce plan

 10   d'exécution. Il était omniprésent, la Chambre de première instance l'a

 11   constaté au paragraphe 1 179 de son jugement en première instance, et en

 12   particulier dans le secteur de Zvornik, au site des exécutions du 14 au 16

 13   juillet, par la suite. La Chambre a également, à très juste titre, constaté

 14   que son rôle d'officier chargé de la sécurité a fait qu'il avait accès aux

 15   ressources et au personnel des brigades du Corps de la Drina pour organiser

 16   la détention, l'exécution et l'ensevelissement de milliers de prisonniers.

 17   Madame, Messieurs les Juges, je vais maintenant me référer à votre

 18   question.

 19   Section 5 dans le mémoire en réponse, aux paragraphes 272 à 317, nous

 20   avons fourni des réponses à la totalité des éléments de questions posées

 21   par la Défense au sujet du jugement des Juges de la Chambre de première

 22   instance au sujet des éléments de preuve ADN et médico-légaux. Nous

 23   réitérons ce que nous avons déjà dit.

 24   L'une des choses contestée, par exemple, par la Défense Popovic,

 25   c'était le nombre de victimes et qu'il y ait eu erreur de la Chambre de

 26   première instance pour ce qui est de l'exécution de plus de 1 000 hommes à

 27   Kozluk le 15 juillet, alors que l'acte d'accusation ne lui reproche que

 28   l'exécution de 500 hommes musulmans au même site. Ça se trouve aux


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  1   paragraphes 438, 442 et 443 de son mémoire en appel, et dans votre réponse

  2   au paragraphe 132.

  3   La première des questions posées par les Juges de la Chambre a

  4   été celle de voir quelle était l'interprétation des paragraphes 30.8.1 et

  5   30.10 de l'acte d'accusation, avec la note de bas de page 1 839 du jugement

  6   en première instance; et nous avons été conviés à discuter avec le conseil

  7   Popovic pour savoir s'il y a eu un chef d'accusation qui lui reprocherait

  8   plus d'exécutions qu'il y en a eu dans l'acte d'accusation.

  9   Madame, Messieurs les Juges, une brève réponse consisterait à dire que

 10   Popovic avait connaissance du fait qu'il y a eu à Kozluk plus de 1 000

 11   victimes. Par conséquent, Popovic n'a pas été condamné pour plus

 12   d'exécutions qu'indiquées à l'acte d'accusation.

 13   Et pour fournir plus de détails à la question posée, la Chambre de

 14   première instance, dans sa note de bas de page 1 839, a indiqué ce qui suit

 15   :

 16   "L'acte d'accusation fait état d'à peu près 500 hommes

 17   musulmans de Bosnie qui étaient détenus à l'école de Rocevic, qui se sont

 18   vu transporter vers le site à proximité de Kozluk pour y être exécutés.

 19   Paragraphes 30.8.1 et 30.10 de l'acte d'accusation. La Chambre de première

 20   instance fait remarquer que les victimes détenues à l'école de Rocevic sont

 21   les mêmes personnes qui ont été exécutées non loin de Kozluk."

 22   Et si l'on lit attentivement l'acte d'accusation, il y a deux

 23   paragraphes auxquels fait référence la Chambre de première instance dans sa

 24   note de bas de page. Ceux-là se trouvent être cumulatifs. Il n'y a pas de

 25   chevauchement. A titre concret, paragraphe 30.8.1, ce paragraphe dit qu'il

 26   y a à peu près 500 prisonniers de Rocevic qui ont été emmenés à Kozluk pour

 27   y être exécutés. Au paragraphe 30.10, il fait état de 500 autres

 28   prisonniers liés à Srebrenica, ont été pris dans la colonne et séparés à


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  1   Potocari pour finir par être exécutés à Kozluk.

  2   Alors, si on lit ces deux paragraphes ensemble, Popovic se trouve

  3   être informé du fait qu'il y avait à peu près 1 000 victimes à Kozluk. Dans

  4   son mémoire préalable au procès, l'Accusation, aux paragraphes 83 à 87,

  5   fait exactement la même chose ou dit exactement la même chose.

  6   En tout état de cause, Madame, Messieurs les Juges, et bien que cette

  7   note de bas de page puisse être quelque peu ambiguë, il est clair aux yeux

  8   des Juges de la Chambre de première instance quels sont les éléments

  9   reprochés par l'Accusation qui sont indiqués aux paragraphes 794(11), où

 10   l'on dit que : "Plus de 1 000 Musulmans de Bosnie ont été exécutés le 15

 11   juillet à Kozluk." Il est fait référence aux paragraphes 517 à 524, et les

 12   conclusions se basent sur des témoignages de témoins oculaires et pièces à

 13   conviction médico-légales disponibles au cours du procès.

 14   Suite à cela, pour passer à la deuxième question posée par les Juges,

 15   Popovic n'a pas été condamné pour plus d'exécutions que celles qui se

 16   trouvent être indiquées dans ces deux dispositions, deux chefs

 17   d'accusation.

 18   En tout état de cause, Madame, Messieurs les Juges, l'acte

 19   d'accusation fait en sorte que Popovic soit informé en tant utile de

 20   l'éventail des allégations qui lui sont reprochées. Depuis le moindre des

 21   détails à l'acte d'accusation, il a été informé du chef d'accusation

 22   relatif à sa participation à l'entreprise criminelle commune, qui s'est

 23   soldée par des exécutions sommaires de plus de 7 000 hommes et garçons

 24   musulmans de Bosnie, originaires de Srebrenica. Ceci se trouve aux

 25   paragraphes 25, 27 à 29, et 37 de l'acte d'accusation. A aucun moment

 26   l'Accusation n'a modifié les chiffres ou le total des victimes.

 27   Ceci met un terme à mes arguments, Madame, Messieurs les Juges. Si

 28   vous avez des questions, c'est ma collègue, Mme Nabti, qui va finir de


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  1   répondre aux éléments contestés par la Défense Popovic dans son appel.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup.

  3   Mme NABTI : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Je

  4   m'appelle Najwa Nabti, et je vais aborder la question des arguments de

  5   Popovic concernant sa condamnation pour génocide.

  6   Popovic a contesté les conclusions de la Chambre de première instance, à

  7   savoir qu'il était animé d'une intention génocidaire, ainsi que la

  8   conclusion générale précisant qu'un génocide avait été commis. Je vais

  9   aborder ses arguments tour à tour, à commencer par sa propre intention

 10   génocidaire.

 11   Comme vous venez de l'entendre, Popovic a participé et a participé de façon

 12   énergique à quasiment chaque étape de l'opération meurtrière, depuis la

 13   formulation du plan jusqu'aux meurtres à grande échelle et aux

 14   ensevelissements. A Orahovac, et à l'école de Rocevic et Pilica, Popovic a

 15   participé aux meurtres de milliers de Musulmans de Bosnie, en garantissant

 16   les bourreaux, les véhicules, le carburant, tout ce qui était nécessaire

 17   pour que ces travaux puissent être achevés. D'après les propres termes

 18   employés par Popovic, la prise pour cible systématique et exclusive des

 19   Musulmans de Bosnie, ainsi que ses actes destructeurs et discriminatoires

 20   contre eux fournissent de plus amples éléments qui permettent de mettre en

 21   lumière son état d'esprit. Paragraphes 1 178 [comme interprété] à 1 180

 22   [comme interprété] du jugement. Au vu de ces éléments de preuve, la Chambre

 23   de première instance a, à juste titre, conclu que Popovic avait l'intention

 24   de détruire la population musulmane de Bosnie orientale. Compte tenu de la

 25   déduction forte de la Chambre de première instance, il n'est pas surprenant

 26   que les contestations de Popovic remettent en cause les conclusions sous-

 27   jacentes dans son mémoire.

 28   Mes collègues ont déjà adressé le caractère raisonnable de ces


Page 147

  1   conclusions, et nous en parlons longuement dans notre mémoire.

  2   Popovic ne conteste pas le fait que la Chambre de première instance

  3   se soit appuyée sur de tels facteurs, comme l'échelle des atrocités

  4   commises ou l'intention de commettre les actes sous-jacents, pour déduire

  5   qu'il y a eu intention génocidaire et ne pouvait pas non plus, compte tenu

  6   de la jurisprudence en appel clairement étayée par l'approche de la Chambre

  7   de première instance. Paragraphe 823 du jugement avec des références faites

  8   aux arrêts Jelisic, Blagojevic et Krstic. La Chambre de première instance a

  9   conclu eu égard à l'intention génocidaire de Popovic à juste titre des

 10   conclusions qui doivent être confirmées.

 11   Outre ses conclusions concernant la responsabilité de Popovic dans le

 12   cadre du génocide, la Chambre a constaté qu'il y a eu génocide et que

 13   Popovic remet en cause cette conclusion et fait référence à la déduction

 14   qui consiste à dire que les meurtres ont été commis avec une intention

 15   génocidaire. Etant donné que Popovic a été accusé d'avoir commis un

 16   génocide en tant que membre de l'entreprise criminelle commune, le fait de

 17   prouver l'intention génocidaire des auteurs physiques des actes sous-

 18   jacents n'était pas quelque chose qui était requis. Cette conclusion ne

 19   constituait pas, donc, un pilier important de sa condamnation comme il

 20   laisse l'entendre. Et ceci a été confirmé récemment par la Chambre d'appel

 21   dans son jugement au titre de l'article 98 bis dans l'affaire Karadzic,

 22   paragraphe 79. Néanmoins, les conclusions de la Chambre, à savoir qu'il y

 23   avait -- qu'il y a eu génocide, eh bien, ces conclusions ont été éminemment

 24   raisonnables.

 25   La Chambre a constaté cela en quelques jours, à savoir que les

 26   membres des forces bosno-serbes ont systématiquement rassemblé, détenu,

 27   transporté, exécuté et enseveli des milliers d'hommes et de garçons

 28   musulmans. Comme l'indique la Défense, la Chambre de première instance


Page 148

  1   s'est appuyée sur une coordination importante ainsi qu'un processus très

  2   important qui découlait de cette opération, mais ceci ne constituait qu'une

  3   partie de l'analyse de la Chambre, que vous retrouvez aux paragraphes 856 à

  4   863. Et pour conclure :

  5   "L'envergure et le caractère même de l'opération meurtrière, la prise

  6   pour cible des victimes, a été systématique et organisée, la manière dont

  7   tout ceci était organisé, et les intentions claires qui visaient à éliminer

  8   chaque homme musulman qui avait été fait prisonnier ou qui s'était rendu

  9   sont la preuve au-delà de tout doute raisonnable que des membres des forces

 10   bosno-serbes, y compris des membres de la VRS … et du service de la

 11   sécurité, avaient l'intention de détruire les Musulmans en Bosnie orientale

 12   en tant que groupe."

 13   Outre cela, la Chambre a également étayé ses conclusions quant à

 14   l'intention génocidaire de l'accusé d'après d'autres actes répréhensibles

 15   systématiquement dirigés contre le même groupe, et en particulier les

 16   efforts forcenés qui visaient à déplacer par la force le reste de la

 17   population alors que les hommes de ce groupe ethnique avaient été pris pour

 18   cible pour être tués. Au paragraphe 862.

 19   Popovic avance que la Chambre a constaté que tous les membres des

 20   forces bosno-serbes ont commis le génocide. Ceci n'est pas justifié, ou

 21   c'est infondé, comme cela caractérise à tort les conclusions de la Chambre

 22   de première instance, à savoir que le génocide a été commis par des

 23   "membres des forces bosno-serbes, y compris des membres de l'état-major

 24   principal de la VRS et du service de la Sécurité, tels que Popovic et

 25   Beara…" Paragraphe 856 du jugement.

 26   Popovic remet en cause la Chambre de première instance car cette

 27   dernière n'a pas précisé quels étaient les membres qui ont commis le

 28   génocide. Cependant, la Chambre d'appel dans Krstic a indiqué que


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  1   l'intention génocidaire concernant une atrocité particulière peut exister

  2   sans attribuer cette intention à des individus particuliers. Arrêt Krstic,

  3   aux paragraphes 34 et 35.

  4   Outre cela, la Défense répond en arguant du fait que d'autres

  5   personnes ont participé à ces meurtres et qu'ils n'ont pas été mis en

  6   accusation ni accusés de génocide, et la Défense a signalé "que l'intention

  7   génocidaire des auteurs doit être établie au cas par cas seulement." Page

  8   du compte rendu de l'audience d'aujourd'hui à la page 27. La Chambre en

  9   l'espèce a analysé les condamnations ou les déclarations de culpabilité

 10   pour génocide.

 11   En ce qui concerne les points contestés restants de Popovic, la

 12   Chambre en a tenu compte et a rejeté les arguments de ce dernier, et son

 13   approche est cohérente avec la jurisprudence en appel. Et plus

 14   particulièrement, Popovic fait valoir que pour que l'intention génocidaire

 15   puisse être déduite, tous les Musulmans de Bosnie à Srebrenica auraient dû

 16   être pris pour cible. Il fait valoir que les femmes, les enfants et les

 17   personnes âgées, ainsi que les membres de la colonne de la 28e Division de

 18   l'ABiH, qui a opéré une percée pour arriver en territoire de l'ABiH, ont

 19   été épargnés.

 20   Tout d'abord, le droit est clair concernant le meurtre de tous les

 21   membres d'un même groupe, il n'est pas requis pour pouvoir prouver

 22   l'intention génocidaire comme "l'intention de détruire dont était animé

 23   l'auteur de génocide sera toujours limitée par l'opportunité qui se

 24   présente à lui."

 25   Arrêt Krstic, paragraphe 13.

 26   Deuxièmement, les arguments de Popovic ignorent complètement les

 27   faits. La Chambre a constaté qu'il n'y a pas eu même la moindre tentative

 28   pour établir une distinction entre les civils et les soldats lorsqu'il y a


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  1   eu séparation des hommes musulmans de Bosnie pris pour cible et pour être

  2   exécutés. Quelques enfants et personnes âgées ont fait partie de ces

  3   personnes qui ont été exécutées. Effectivement, la Chambre de première

  4   instance a entendu des éléments de preuve à propos du meurtre d'un garçon

  5   qui a supplié pour qu'on lui sauve la vie. Ces personnes n'ont pas été

  6   épargnées. Paragraphes 519, 779, 860, 866 et 990 du jugement. Les efforts

  7   forcenés qui visaient à déplacer le reste de la population qui a été décrit

  8   aujourd'hui par le conseil de la Défense, représentant le transport de

  9   quelque 20- à 30 000 Musulmans qui devaient être transportés en lieu sûr,

 10   constituent une autre preuve de l'intention génocidaire en tant qu'autres

 11   actes répréhensibles dirigés contre le même groupe. Confer paragraphe 862

 12   du jugement.

 13   L'approche de la Chambre de première instance est cohérente et

 14   correspond aux appréciations de la Chambre d'appel sur ce point.

 15   Paragraphes 31 à 33 dans l'affaire Krstic; ainsi que Blagojevic et Jokic,

 16   au paragraphe 123.

 17   La Chambre de première instance a également pris compte et rejeté les

 18   arguments de Popovic, à savoir que l'exécution de milliers d'hommes

 19   musulmans de Bosnie était en riposte mais par rapport à des gens qui ne

 20   constituaient nullement une menace militaire. Et ceux qui avaient été pris

 21   pour cible s'étaient déjà rendus. Savoir si, oui ou non, la colonne

 22   constituait une cible militaire légitime n'a rien à voir avec ce massacre

 23   de milliers d'hommes et de garçons qui s'étaient rendus. Popovic

 24   caractérise à tort le sort réservé à la colonne de la 28e Division de

 25   l'ABiH en faisant valoir qu'il n'y avait eu aucune intention de détruire

 26   les hommes de la colonne qui finalement ont été autorisés à passer. Cela ne

 27   fait pas l'ombre d'un doute que les forces bosno-serbes auraient tué ces

 28   hommes s'ils l'avaient pu. Les forces bosno-serbes ont attaqué la colonne


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  1   les 12 et 13 juillet et ont incité des milliers de personnes à se rendre

  2   pour les exécuter quelques minutes après; paragraphes 380 à 383 du

  3   jugement.

  4   Les membres de la colonne qui ont survécu n'ont pu passer qu'au

  5   moment où il avait été décidé que le fait de les bloquer était devenu

  6   infaisable; paragraphes 551 à 560 du jugement.

  7   Les forces bosno-serbes ont ensuite ratissé le terrain pour essayer

  8   de trouver ceux qui n'avaient pas réussi à passer pour s'assurer "qu'aucun

  9   homme musulman de Bosnie ne puisse échapper ou se soustraire à l'emprise de

 10   l'état-major de la VRS et du service de la sécurité." Paragraphe 860.

 11   Les auteurs du génocide ont pleinement saisi l'occasion qui se présentait à

 12   eux lors de la chute de Srebrenica, tuant autant de personnes qu'ils le

 13   pouvaient aussi rapidement que possible. Encore une fois, la jurisprudence

 14   n'est d'aucun secours à Popovic, qui étaye clairement l'approche adoptée

 15   par la Chambre de première instance à l'arrêt Krstic, paragraphes 26 et 27.

 16   Et pour finir, les arguments de Popovic ignorent les conclusions de la

 17   Chambre, à savoir que les forces bosno-serbes ont perpétré des actes

 18   génocidaires contre les survivants qui faisaient l'objet de souffrances

 19   profondes physiques et psychologiques suite à cette opération meurtrière.

 20   Au paragraphe 30 de son mémoire en réplique, Popovic fait valoir qu'il n'y

 21   avait pas suffisamment d'éléments de preuve pour étayer cette atteinte à

 22   l'intégrité physique et mentale des personnes qui ont survécu et qui,

 23   d'après lui, "ont pu faire du tort à quiconque et toute personne qui a

 24   perdu des membres de sa famille se retrouve dans les mêmes circonstances."

 25   Il fait valoir que "cette atteinte à l'intégrité morale dont souffrent les

 26   membres de la famille de la personne décédée constitue des éléments normaux

 27   de la vie de tous les jours." Ceci est tout à fait répugnant et contredit

 28   les éléments au dossier.


Page 152

  1   Ce désarroi affectif et psychologique provoqué par la capture et le

  2   meurtre de milliers de pères, de fils, de maris et de frères était évident

  3   d'après les déclarations 92 bis des membres de la famille qui ont survécu,

  4   mais également d'après les dépositions de témoins qui ont vu ces

  5   souffrances, les dépositions d'experts ainsi que les faits jugés qui ont

  6   fait l'objet de constats judiciaires. Rahima Malkic, qui a fui son village

  7   près de Srebrenica, se souvient du moment où les soldats serbes ont pris

  8   son mari à Potocari. Il a regardé sa famille et il a dit : Tel est notre

  9   destin. Elle a également perdu deux fils, mais elle ne supporte pas l'idée

 10   de revenir pour identifier les corps. Elle a dit :

 11   "Je ne souhaite pas revenir dans mon village. Je ne peux pas

 12   retourner à Kravica parce que mon fils est mort. C'est difficile pour moi

 13   de voir des jeunes hommes qui vont à l'école sur les images, en fait, de la

 14   chute de Srebrenica que je vois. Me viennent à l'esprit ces images de mes

 15   enfants."

 16   Pièce P3229.

 17   La déposition du Témoin PW-121, également, dont le fils de 14 ans a

 18   été emmené par la force à Potocari, cela se trouve à la pièce P2226,

 19   contenant d'autres informations sur le sort tragique réservé à son enfant,

 20   référencées dans les réquisitoires de l'Accusation, pages du compte rendu

 21   d'audience 34 208 à 34 210.

 22   Les souffrances infligées à Rahima Malkic et Témoin PW-121 ne peuvent

 23   pas être qualifiées de "souffrance mentale qui fait partie de la vie de

 24   tous les jours." Plutôt, cet élément de preuve montre que ces personnes ont

 25   souffert longuement et ne peuvent retrouver une vie normale et

 26   constructive. Néanmoins, il ne s'agit pas d'un cas isolé. Des milliers de

 27   Musulmans de Bosnie ont souffert et perdu des membres de leur famille suite

 28   à ces meurtres en masse. Confer paragraphes 846 et 847 du jugement.


Page 153

  1   D'autres personnes qui ont été le témoin de ces souffrances sont

  2   venues déposer. L'observateur militaire des Nations Unies, le colonel

  3   Kingori, parle du processus de séparation qui était terrifiant et qui a

  4   apporté des larmes aux yeux à Potocari lorsque les hommes et les garçons

  5   ont été emmenés par la force et arrachés à leurs familles. Pages du compte

  6   rendu d'audience 19 251 à 19 257.

  7   L'officier de la FORPRONU chargé des affaires civiles, Edward Joseph,

  8   a témoigné et a dit que la source de désarroi était très clairement, pour

  9   les réfugiés qui sont arrivés à Tuzla vers les 12 et 13 juillet 1995, "leur

 10   souci concernant le sort de leurs hommes, de leurs frères, de leurs pères,

 11   de leurs maris et de leurs fils qui étaient restés." Pages du compte rendu

 12   d'audience 14 151 à 14 152.

 13   Les atteintes à l'intégrité physique et mentale infligées suite aux

 14   meurtres sont de surcroît étayées par la déposition d'expert, P2228, ainsi

 15   que par les faits jugés 505 à 513.

 16   Au vu de tous les éléments de preuve, Madame, Messieurs les Juges,

 17   Popovic a été à juste titre condamné pour avoir commis le génocide contre

 18   les Musulmans de Bosnie orientale en tuant les membres du groupe et en

 19   portant des atteintes graves à l'intégrité physique et mentale des

 20   victimes, de leurs familles et des survivants. Il se trouvait au cœur de

 21   l'opération qui a permis l'éradication violente de milliers d'hommes et de

 22   garçons musulmans de Bosnie en l'espace de quelques jours, et qui a infligé

 23   des cicatrices physiques et affectives sur la population qui a survécu,

 24   quelque chose qui se fera encore sentir dans les générations à venir.

 25   Madame, Messieurs les Juges, nous demandons à ce que sa condamnation soit

 26   confirmée et qu'il soit condamné à l'emprisonnement à vie.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Il

 28   semblerait que le moment soit opportun de faire la pause maintenant. Nous

 


Page 154

  1   reprendrons à 17 heures, 40 minutes. Nous allons faire une pause de 25

  2   minutes, c'est le jugement rendu par Salomon.

  3   --- L'audience est suspendue à 16 heures 10.

  4   --- L'audience est reprise à 16 heures 34.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, la réplique ?

  6   M. ZIVANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Donc, une matrice complexe de conclusions telles qu'évoquées par

  8   l'Accusation n'absout pas le jugement de l'appréciation sur appel.

  9   Contrairement à l'affirmation de l'Accusation, ces constatations-clés en

 10   termes d'éléments de preuve et de faits soulignés dans l'appel, lorsque

 11   celles-ci sont battues en brèche, n'étaient plus la condamnation de

 12   Popovic.

 13   La Défense estime que les normes jurisprudentielles qui ont servi de

 14   base de l'Accusation au début de ses arguments s'appliquent totalement à

 15   cette situation. En effet, la Défense estime que cela est douteux et que la

 16   Chambre a réussi à trouver Momir Nikolic et le Témoin 168 à être crédibles,

 17   en particulier sur les questions essentielles qui ont abouti à la

 18   condamnation de Popovic pour génocide, et là, où il n'y avait pas de

 19   corroboration directe proposée.

 20   Les exécutions décrites en détail sont effectivement tragiques, mais

 21   il est notable de constater combien une poignée de rescapés ou de bourreaux

 22   sur les sites d'assassinat n'ont pas pu identifier Popovic comme étant

 23   présent. La Défense souhaite encourager, Madame, Messieurs les Juges, à ne

 24   pas suivre les efforts de l'Accusation et que cela ne pèse pas sur

 25   l'évaluation de votre raison en prenant votre décision.

 26   L'affirmation de l'Accusation et tous les éléments de preuve

 27   soigneusement passés en revue n'apparaissent clairement par rapport à la

 28   partie remise en cause aujourd'hui dans le jugement où il a été indiqué que


Page 155

  1   la Chambre avait complètement fait fi des éléments de preuve.

  2   Ceci est particulièrement vrai là où Popovic fait valoir qu'aucune

  3   mention d'incompatibilités majeures ont été avancées, où ils ont amoindri

  4   de façon inéquitable le préjudice subi par l'accusé, malgré les

  5   contradictions majeures dans les éléments de preuve. Par exemple, le

  6   mémoire en appel, paragraphe 301, note en bas de page du jugement 1772. Il

  7   y a un risque majeur où des conclusions portant sur la totalité des pièces

  8   à conviction qui se renforcent mutuellement, telle qu'énoncée par

  9   l'Accusation à la page 79 aujourd'hui, sont formulées avec l'objectif

 10   d'obtenir une condamnation plutôt que de servir la justice.

 11   L'Accusation, dans l'évaluation de ce procès, indique de façon

 12   circonstanciée que la légitimité contestée du jugement comme s'il

 13   s'agissait effectivement d'un compte rendu des faits incontestable. En

 14   effet, l'Accusation ne peut citer que des éléments de preuve indirects afin

 15   de corroborer les conclusions de faits les plus contestées à l'appel une

 16   fois que Popovic est lié directement à la responsabilité au commandement

 17   des sites d'exécution.

 18   Comme cela est précisé dans le mémoire en appel, la Chambre applique

 19   manifestement deux poids de mesure aux témoins en fonction du caractère

 20   incriminant de leur récit. C'est particulièrement vrai s'agissant de

 21   Kosoric, qui a fourni des éléments de preuve très différents et qui a été,

 22   en tant que témoin, sévèrement désavantagé par rapport à Momir Nikolic. La

 23   Chambre de première instance n'a donc pas appliqué ces normes indubitables

 24   au juge de Popovic.

 25   Momir Nikolic a donc été jugé partiellement crédible par cette

 26   Chambre, et il est bon de répéter que l'appréciation de la crédibilité a

 27   été sélective. Seuls les récits les plus incriminants ont été crus alors

 28   que d'autres récits ne furent pas acceptés sans corroboration. A cet égard,


Page 156

  1   la Chambre s'est départie de sa propre norme en matière d'appréciation des

  2   témoins notés au paragraphe 53 du jugement.

  3   La fiabilité de cette déclaration n'est pas étayée par l'auto-incrimination

  4   de Momir Nikolic s'agissant de la réunion de l'hôtel Fontana. Notamment,

  5   l'accord de plaidoyer de Momir Nikolic n'a été accepté que sur l'ajout de

  6   ce récit à son témoignage, indiquant par là même qu'il y avait une forte

  7   incitation à s'auto-incriminer davantage.

  8   La Défense a également affirmé que la Chambre de première instance a

  9   fait erreur en se fiant à des éléments de preuve post hoc afin d'étayer les

 10   principales conclusions factuelles. Ceci peut être vu dans le mémoire en

 11   appel aux paragraphes 125, 126, 316 et 319. Ce qui par définition est

 12   déraisonnable.

 13   S'agissant de la question posée par M. le Président, eh bien, l'Accusation

 14   dénature l'avis de la cause des assassinats. Je cite la note en bas de page

 15   1839 pour Madame, Messieurs les Juges :

 16   "La mise en accusation indique environ 500 hommes bosno-musulmans furent

 17   détenus à l'école de Rocevic et ensuite transportés à un site proche de

 18   Kozluk pour y être exécutés." Cela figure dans les paragraphes de l'acte

 19   d'accusation 30.8.1 et 30.10. "La Chambre de première instance note que les

 20   victimes détenues à l'école de Rocevic sont les mêmes que celles qui ont

 21   été tuées à proximité de Kozluk."

 22   L'Accusation affirme que Popovic a cité de façon erronée seulement un

 23   paragraphe de l'acte d'accusation comme se rapportant aux exécutions de

 24   Kozluk, en faisant abstraction des affirmations liées concernant l'école de

 25   Rocevic, où environ 500 hommes bosno-musulmans furent détenus avant d'être

 26   exécutés sur les rives de la Drina à proximité de Kozluk les 14 et 15

 27   juillet, et que cela constituait un avis suffisant. Au contraire, la

 28   Chambre de première instance a explicitement noté que les victimes détenues


Page 157

  1   à l'école de Rocevic étaient les mêmes que celles tuées près de Kozluk.

  2   L'acte d'accusation affirme que 500 hommes, note en bas de page 

  3   1839, n'expliquent pas sa décision de doubler le nombre de victimes

  4   assassinées.

  5   Il est dangereux, voire même irresponsable, Monsieur le Président,

  6   d'affirmer de façon manifeste ou flagrante, comme l'indique l'Accusation au

  7   paragraphe 83, et doubler de façon ambiguë le nombre d'assassinats indiqué

  8   ou laissé entendre, que la mort de 500 personnes de plus est sans

  9   conséquence ou n'exige pas d'être relevée.

 10   A la page 80 du compte rendu d'audience, l'Accusation répète une

 11   erreur majeure de traduction qui a été relevée longuement dans son mémoire.

 12   Pandurevic n'a pas été informé que Popovic arriverait "afin de régler la

 13   question". Comme cela est noté dans le mémoire de Popovic aux paragraphes

 14   361 jusqu'à 364, il venait dire "ce qui devait être fait." Et non pas

 15   régler la question. Il y a donc des conséquences beaucoup plus graves dans

 16   la deuxième affirmation plutôt que dans la première.

 17   L'argument de l'Accusation affirmant que les forces bosno-serbes

 18   avaient une intention génocidaire présente cela comme dangereux, comme

 19   avait affirmé la décision du Tribunal de première instance s'agissant

 20   d'affirmer cette intention génocidaire affectant un groupe entier de

 21   personnes qui ont été identifiées qui n'avaient aucune possibilité de

 22   prendre connaissance des éléments de preuve ou comme cela était affirmé par

 23   les témoins.

 24   En réponse à d'autres allégations faites par l'Accusation

 25   aujourd'hui, Popovic s'en tient à son mémoire en appel et sa réponse, et ne

 26   doivent pas être répétés ici.

 27   Je vous remercie.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.

 


Page 158

  1   [La Chambre d'appel se concerte]

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons poursuivre et passer

  3   maintenant à l'appel de M. Beara, et nous entendrons le conseil de M.

  4   Beara.

  5   Monsieur Ostojic, oui, nous allons poursuivre jusqu'à 5 heures et

  6   quart.

  7   M. OSTOJIC : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Mon

  8   nom est Ostojic, je représente M. Beara, avec mon confrère. Nous allons

  9   présenter nos arguments en relation avec le mémoire en appel. Nous

 10   essaierons de déterminer devant cette Chambre quels sont les points pour

 11   lesquels nous estimons que la Chambre de première instance a commis des

 12   erreurs assez considérables, aussi bien des erreurs de faits que des

 13   erreurs de droit.

 14   Juste à titre préliminaire, je voudrais vous donner une indication quant à

 15   la structure de notre présentation. Initialement, nous aurions prévu

 16   d'entendre Me Sepenuk concernant les aspects strictement juridiques liés à

 17   la question du génocide et à la façon dont ceci concerne M. Beara au sens

 18   où il y a là une erreur de droit dans la décision prise par la Chambre de

 19   première instance.

 20   Et je comptais finir avec mes propres arguments portant notamment sur

 21   l'entreprise criminelle commune de première forme, l'entreprise criminelle

 22   visant à assassiner. Je pense que la Chambre de première instance s'est

 23   appuyée notamment sur un élément de preuve sur lequel il ne faudrait pas

 24   s'appuyer et auquel aucun poids ne devrait être accordé, et je suis sûr que

 25   vous avez consulté le dossier et que vous êtes familier de la déposition

 26   d'un certain Miroslav Deronjic qui a déposé sous le régime de l'article 92

 27   quater. Nous avons soulevé à l'époque une objection quant à la présentation

 28   de sa déposition sous ce régime parce que tout ceci portait uniquement et


Page 159

  1   précisément sur les actes et la conduite de M. Beara.

  2   A l'époque, la Chambre de première instance s'est fourvoyée, et je

  3   vais essayer de mettre en avant l'opinion de la Chambre de première

  4   instance, qui a affirmé avoir fait preuve d'une très grande précaution dans

  5   le cadre de cette déposition considérée comme corroborante de conversations

  6   et d'actes relatés par M. Deronjic à la Chambre de première instance. Mais

  7   ceci ne s'est pas produit. La promesse n'a pas été respectée; c'est plutôt

  8   l'inverse qui s'est produit, puisque la Chambre de première instance s'est

  9   appuyée exclusivement sur la déposition de M. Deronjic pour condamner M.

 10   Beara. Et elle s'est appuyée exclusivement sur la déposition de M. Deronjic

 11   pour conclure que M. Beara avait participé à l'entreprise criminelle de

 12   première forme visant à commettre le meurtre.

 13   Nous considérons que le dossier de l'espèce, comme mon confrère M.

 14   Rogers l'a dit, devrait être examiné très attentivement avant de vous être

 15   présenté afin de détecter toute forme de raisonnement susceptible d'induire

 16   en erreur ou de nature spéculative. C'est ce qui est exactement,

 17   d'ailleurs, ce que la Chambre de première instance a fait. Elle est sortie

 18   de ce cadre strict pour tirer des conclusions défavorables à M. Beara, et

 19   nous estimons que c'était là l'origine des condamnations prononcées à

 20   l'encontre de M. Beara.

 21   Demain, j'entrerai dans le détail concernant les actes et les

 22   conversations de M. Deronjic sur lesquels la Chambre de première instance

 23   s'est appuyée. Je donne simplement un aperçu.

 24   Sauf le respect que je dois à la Chambre de première instance, je

 25   crois que celle-ci a mal compris et certainement mal appliqué ce qui était

 26   la position de la Défense quant à la localisation de M. Beara, l'endroit où

 27   il se trouvait.

 28   Nous affirmons et nous avons établi, sur la base de ce que nous


Page 160

  1   considérons comme des éléments de preuve fiables quant à la localisation de

  2   M. Beara à des moments critiques, qu'il n'est pas nécessaire de réexaminer

  3   la déposition de chaque témoin individuel. Nous allons, cependant, mettre

  4   en avant un témoin, et pour référence pour mes estimés confrères il s'agira

  5   de M. Egbers.

  6   M. Egbers était un officier du Bataillon néerlandais des Nations Unies. Il

  7   est le témoin affirmant avoir vu M. Beara à Nova Kasaba au mois de juillet

  8   -- je crois que c'était à la date du 13 ou du 14 de 1995. Mais à qui

  9   incombe la charge de la preuve en la matière ? D'après la Chambre de

 10   première instance, elle incombe à la Défense. Or, il n'y a aucune

 11   corroboration de la déposition de M. Egbers en dehors de sa propre

 12   corroboration de déclarations et de comptes rendus. Il n'y a aucun élément

 13   de preuve permettant d'étayer que M. Beara se soit trouvé à Nova Kasaba.

 14   L'Accusation, pourtant, avait l'obligation d'après la jurisprudence de

 15   présenter des éléments de preuve au titre d'une corroboration. Alors,

 16   l'ont-ils fait ?

 17   Avant de répondre à cette question, je crois qu'il est peut-être

 18   encore plus important de se demander s'ils auraient pu le faire.

 19   L'Accusation aurait-elle pu présenter des éléments de preuve au titre d'une

 20   corroboration des éléments de preuve auxquels elle aurait pu accorder

 21   crédit ? Je crois que la réponse est oui, pour toute une série de raisons.

 22   Leur propre témoin sous le régime du 65 ter était d'un certain Zoran

 23   Malinic. Il était censé avoir été présent lors de cette réunion lors de

 24   laquelle --

 25   M. ROGERS : [interprétation] Je crois qu'il n'est pas approprié de se

 26   référer à des éléments de preuve qui sortent du cadre du compte rendu, qui

 27   ne sont pas une partie du dossier, parce que ceci invite à spéculer. Le

 28   conseil adresse des critiques à la Chambre de première instance et vous


Page 161

  1   invite maintenant à spéculer quant à ce qui aurait pu être. Ce n'est pas

  2   approprié. Si mon estimé confrère estime qu'il s'agit là d'éléments de

  3   preuve qui pourraient être introduits par l'article 115, il devrait l'avoir

  4   fait.

  5   M. OSTOJIC : [interprétation] Non, non. Je ne suis pas d'accord. La

  6   déposition de M. Egbers identifie Zoran Malinic comme ayant été présent

  7   lors de cette réunion. Or, lors des présentations liminaires de

  8   l'Accusation qui font partie du dossier en l'espèce et dans son mémoire,

  9   l'Accusation, aussi bien dans la phase préalable au procès que dans

 10   d'autres phases, affirme que, certes, Zoran Malinic était présent, mais la

 11   position de retrait de l'Accusation consiste à dire qu'il s'agissait

 12   probablement d'un Serbe, qui était un membre de la VRS et que --

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avant de poursuivre, vous avez dit

 14   que d'après la Chambre de première instance, c'était la Défense qui avait

 15   la charge de la preuve. Est-ce que vous vouliez dire par là que la Chambre

 16   de première instance avait déclaré ceci explicitement ou bien nous dites-

 17   vous que ceci peut être raisonnablement déduit du dossier ?

 18   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai

 19   absolument pas voulu dire que ceci avait été dit explicitement. Mais c'est

 20   tout à fait implicite lorsqu'on voit la façon dont la déposition de M.

 21   Egbers a été prise en considération et que la Chambre de première instance

 22   a omis de prendre acte du fait qu'il n'avait pas d'élément permettant de

 23   corroborer cette déposition. Eh bien, je pense que c'est tout à fait clair,

 24   et nous y viendrons demain plus en détail. Nous montrerons que la charge de

 25   la preuve a été déplacée. Nous suggérons que l'Accusation aurait pu

 26   apporter des éléments de preuve corroborant ceci mais qu'elle s'est

 27   simplement appuyée là-dessus et sur rien d'autre et qu'elle a rejeté les

 28   éléments de preuve de la Défense en la matière.


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  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je préfèrerais que vous nous

  2   présentiez vos arguments plutôt qu'une vision d'ensemble.

  3   M. OSTOJIC : [interprétation] Mais c'est assez long --

  4   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que vous avez l'intention de

  5   passer le temps que vous avez à nous donner une vision d'ensemble, le temps

  6   qu'il nous reste aujourd'hui ? Nous souhaitons entendre vos arguments.

  7   M. OSTOJIC : [interprétation] Mais ceci fait partie de mes arguments. Et au

  8   titre de mes arguments, il y a également la vue d'ensemble --

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. C'est votre temps. Allez-

 10   y.

 11   M. OSTOJIC : [interprétation] Bien. L'Accusation avait non seulement la

 12   possibilité de citer à la barre, mais également elle avait la charge de la

 13   preuve --

 14   [La Chambre d'appel se concerte se concerte]

 15   M. LE JUGE SEKULE : [interprétation] Je voudrais juste m'assurer de bien

 16   comprendre une chose. Votre confrère a indiqué que ce que vous avez évoqué

 17   ne faisait pas partie du dossier, et vous avez répondu à cela. Mais je

 18   voudrais préciser cette réponse. Est-ce que vous affirmez que ces éléments

 19   que vous vous êtes référé font, en fait, partie du dossier en l'espèce ?

 20   Est-ce que c'est ce que vous nous dites ? Je voudrais être sûr de bien

 21   comprendre par rapport à l'argument avancé par l'Accusation. Est-ce que

 22   vous pourriez préciser, s'il vous plaît, quelle est exactement votre

 23   position ?

 24   M. OSTOJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Eh bien, pour

 25   préciser ceci, est-ce qu'il s'agit d'éléments de preuve, j'affirme que oui.

 26   Ceci fait partie, premièrement, de la déposition de M. Egbers.

 27   Deuxièmement, ceci fait partie du dossier au titre du mémoire de

 28   l'Accusation dans la phase préalable du procès. Ces éléments de preuve


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  1   figurent donc au dossier à ces deux titres. Mais également, dans notre

  2   demande visant à faire comparaître ce témoin, je ne crois pas que ceci ait

  3   été marqué comme élément de preuve, mais cela a été présenté à la Chambre.

  4   Et si je me rappelle bien, je crois que l'Accusation en a également fait

  5   part dans ses propos liminaires.

  6   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Maître, est-ce que vous pourriez nous

  7   donner les références précises au compte rendu d'audience, s'il vous plaît

  8   ?

  9   M. OSTOJIC : [interprétation] Madame et Messieurs les Juges, excusez-moi,

 10   je ne voudrais surtout pas vous donner les mauvaises références. Je me

 11   propose de vérifier ceci et de commencer la journée de demain en vous

 12   donnant les références en question.

 13   M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

 14   M. OSTOJIC : [interprétation] Donc, comme je l'ai déjà indiqué, nous allons

 15   parler de la façon dont la Chambre de première instance a commis des

 16   erreurs tant de droit que de fait, aussi bien au sujet de M. Deronjic que

 17   par rapport à la déposition de M. Egbers portant sur les endroits où se

 18   trouvait M. Beara.

 19   Ensuite, nous parlerons, ou plutôt, nous nous attendons avoir un échange

 20   avec la présente Chambre au sujet d'un autre témoin -- en fait, une autre

 21   personne répondant au nom de Milos Tomovic, il s'agit également de la

 22   localisation. Parce que la Chambre de première instance a mal compris

 23   l'échange que nous avons eu avec M. Tomovic. C'était un témoin que

 24   l'Accusation entendait citer. C'était un témoin que l'Accusation, en

 25   réalité, a rencontré à deux reprises pour recueillir sa déclaration, tout

 26   cela pour que l'Accusation finisse par interroger ce témoin sans qu'il

 27   bénéficie de l'assistance d'un conseil et sans qu'il ait prêté serment, et

 28   nous avons à l'époque essayé d'avancer cet argument à la Chambre de


Page 164

  1   première instance, et une partie de ces éléments de preuve ont été

  2   introduits par le truchement de M. Pandurevic en tant que témoin. Et dans

  3   ces questions posées par l'Accusation, il a été demandé à M. Tomovic

  4   explicitement, et je cite, "Nous savons qu'à cette époque," c'est-à-dire

  5   entre le 13 et le 15, "Beara était à Belgrade." Et la Chambre de première

  6   instance a omis de prendre en considération ceci et l'importance de cette

  7   affirmation.

  8   Alors, qui était Milos Tomovic ? En quoi était-il important ? Eh bien, il

  9   était le chauffeur de M. Beara. Il était un témoin crédible qui était en

 10   mesure d'étayer ou de corroborer soit la thèse de l'Accusation, soit celle

 11   de la Défense. La charge de la preuve nous incombait-elle à nous ou bien à

 12   l'Accusation ? Toujours est-il que l'Accusation a choisi de ne pas faire

 13   comparaître ce témoin.

 14   Nous allons également aborder certains éléments de notre présentation des

 15   moyens à décharge pour lesquels j'estime que la Chambre de première

 16   instance les a écartés d'un revers de main sans fournir la moindre

 17   justification quant à son raisonnement. La conclusion de la Chambre de

 18   première instance concernant la présentation des moyens à décharge ne

 19   répond pas aux critères qui voudraient qu'une opinion ou un raisonnement

 20   clair soit fourni à titre de justification. Et lorsqu'on prend en

 21   considération ce manque de raisonnement justifié de la part de la Chambre

 22   de première instance et les conclusions incohérentes et contradictoires qui

 23   concernent M. Beara, je crois que les choses seront tout à fait claires.

 24   Et nous finirons, en fait, par aborder la question soulevée par la Chambre,

 25   à savoir le lien nécessaire au sujet de la rivière Jadar et les meurtres de

 26   Trnovo. La partie suivante de notre argumentation concernera la nécessité

 27   pour le Tribunal et nous tous de rechercher la vérité et de saisir les

 28   meilleures opportunités que nous avons de l'atteindre au mieux de nos


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  1   capacités.

  2   Nous allons mettre en avant plusieurs éléments de preuve qui ont été versés

  3   au dossier, et plus précisément lorsqu'il est question des victimes et des

  4   nombres de victimes évoqués en l'espèce, sans minimiser en rien les

  5   événements horribles concernés et ce qui est arrivé à ces victimes, eh

  6   bien, nous voyons qu'un officier des Nations Unies, M. Egbers -- excusez-

  7   moi, non pas M. Egbers, mais M. Ed Joseph. Edward Joseph. Et je crois que

  8   mon confrère l'a mentionné. Eh bien, il fait part dans un rapport antérieur

  9   de son observation à savoir que quelque 3 000 hommes musulmans avaient été

 10   tués dans des opérations de combat qui présentaient donc un caractère

 11   légitime, par des mines également et dans le cadre d'autres activités. Or,

 12   la Chambre de première instance se contente d'ignorer ces éléments de

 13   preuve comme s'ils n'existaient pas. C'était un rapport qui n'avait pas été

 14   créé ou imaginé par un Serbe de Bosnie, pourtant. Cela venait d'une partie

 15   tierce, un officier des Nations Unies.

 16   Donc, lorsque nous recherchons la vérité et que nous nous efforçons

 17   de l'atteindre, nous devrions essayer d'établir s'il s'agissait de 2 000,

 18   de 5 000 ou de 7 000 personnes qui ont malheureusement connu ce sort au

 19   mois de juillet 1995.

 20   Autres points pour lesquels j'estime que la Chambre de première instance

 21   les a simplement ignorés : lorsque les Juges en première instance ont mis

 22   en balance les propos tenus par M. Beara, en tout cas ceux qu'on lui

 23   impute, et les autres éléments, ils ont affirmé de façon prudente mais

 24   méthodique que M. Beara parlait en code, qu'il ne voulait pas que les gens

 25   sachent ce qu'il voulait dire. Mais avec la déposition de M. Dragomir

 26   Vasic, qui était à la tête du MUP, de la police, et son rapport qui dit

 27   qu'en substance la VRS n'avait plus la charge des prisonniers, il affirme

 28   en substance qu'il allait liquider 5 000 d'entre eux. Eh bien, on trouve


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  1   dans la déposition de M. Butler, dans la réponse qu'il a faite au contre-

  2   interrogatoire quant à la question de savoir à qui appartenait la

  3   responsabilité d'avoir détenu ces prisonniers, il a fini par dire qu'ils

  4   allaient être liquidés, qu'ils allaient tuer ces hommes, et M. Butler

  5   affirme qu'il n'avait pas l'intention de le faire, comme s'il pouvait le

  6   savoir. Alors, la Chambre de première instance a ignoré ces éléments de

  7   preuve qui nous invitent à poursuivre une piste totalement différente que

  8   celle suivie par la Chambre concernant M. Beara.

  9   Nous parlerons également de ce que j'ai mis en avant comme des

 10   éléments à décharge. Il y a deux choses. Nous avons mentionné Milos

 11   Tomovic, le chauffeur de M. Beara, mais nous avons également des

 12   conversations interceptées qui viennent de la Croatie.

 13   M. Beara était placé sous écoute dans certaines conversations. Et

 14   c'est une interception dont nous disposons au milieu de ce qui est

 15   considéré comme les pires crimes qui ont été commis, et il est question de

 16   ce qui s'est passé pendant la Seconde Guerre mondiale. M. Beara ne parle

 17   pas de meurtres, ne parle pas de façon codée. Il dit clairement de déplacer

 18   les hommes au camp de Batkovici, dont on savait que c'était un camp de

 19   détention. Il ne s'agit pas d'un autre endroit, d'une école, mais d'un

 20   centre de détention où tout le monde pouvait s'attendre à ce que les

 21   prisonniers soient emmenés. Mais de façon surprenante, la Chambre de

 22   première instance, sans l'étayer par le moindre raisonnement précis, a

 23   simplement déclaré que c'était encore une fois des propos codés. M. Beara

 24   savait qu'il était sur écoute. M. Beara savait que quelqu'un allait

 25   intercepter ses propos, c'est pourquoi il a trompé tout le monde en

 26   laissant les Croates entendre cette conversation. Et si cela est exact, et

 27   si nous acceptons cette logique et cette façon de raisonner, alors comment

 28   peut-on affirmer que les autres interceptions indiquent soit que M. Beara


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  1   était un participant de l'entreprise criminelle de première forme, soit

  2   qu'il avait la moindre intention génocidaire ?

  3   Enfin, avec votre permission, nous parlerons de la peine à imposer. Les

  4   deux aspects de cette question, à mon avis, concernent d'une part l'erreur

  5   de droit commise par la Chambre de première instance, parce que la Chambre

  6   de première instance a reconnu qu'il y avait des circonstances atténuantes.

  7   Elle a reconnu qu'il y en avait trois, mais en fin de compte, c'est M.

  8   Beara qui s'est vu imposer la peine la plus lourde. De la même façon, la

  9   Chambre de première instance s'est fourvoyée en termes des éléments

 10   matériels puisqu'ils n'ont pas accordé un poids suffisant à ces

 11   circonstances atténuantes, donnant simplement un poids limité ou nominal à

 12   ces circonstances exténuantes.

 13   Enfin, nous aborderons le facteur aggravant où le Tribunal s'est fourvoyé

 14   sur une question de droit et seulement en indiquant en le condamnant que

 15   c'était une aggravation et, donc, l'avait condamné trop sévèrement.

 16   La Chambre de première instance a appliqué le mauvais standard juridique en

 17   évaluant la contribution de Ljubisa Beara à l'entreprise criminelle

 18   commune.

 19    Je pense que ce serait peut-être un bon moment de s'arrêter, avec votre

 20   permission, pour éviter des chevauchements. Et ensuite, j'évoquerai demain

 21   des détails plus précis et j'aborderai les questions qui ont été soulevées

 22   aujourd'hui.

 23   M. ROGERS : [interprétation] Avant de lever la séance, je voudrais juste

 24   évoquer un point s'agissant de ma préoccupation auprès de M. Malinic. De

 25   façon à ce qu'il soit clair quelle est ma préoccupation qui risque d'être

 26   soulevée demain lorsqu'il est fait référence à d'autres témoins qui n'ont

 27   pas témoigné. Ma préoccupation porte davantage sur ce qui a été prêté comme

 28   propos à Zoran Malinic comme étant quelqu'un qui aurait été présent ou ce


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  1   qu'il aurait pu dire, qui est des conjectures. Bien entendu, il y a eu des

  2   interviews, sachant que concernant cet individu, qu'il n'est pas opportun

  3   d'y référer et que, ce à quoi faisait allusion mon collègue estimé, il ne

  4   devrait pas y avoir de mention spéculative à propos de ce que des témoins

  5   qui n'ont pas déposé auraient pu dire. C'est inopportun.

  6   M. OSTOJIC : [interprétation] Si vous permettez de répondre.

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

  8   M. OSTOJIC : [interprétation] Je remercie mon estimé collègue qui essaie de

  9   nous aider en la matière. Il a peut-être mal compris ou il était peut-être

 10   éloquent dans la précipitation d'essayer de faire régler cela. Nous

 11   n'allons pas laisser entendre ce qu'a dit M. Malinic. Nous laissons

 12   entendre que s'il y a des éléments de preuve concernant là où se trouvait

 13   M. Beara, il doit y avoir corroboration des dires de chacun de ces témoins

 14   et qu'il doit y avoir plus une quantité -- parler davantage de la quantité

 15   que de la qualité, mais je pense que dans ce prétoire il faut examiner

 16   chaque témoin, déterminer ce que chaque témoin a pu dire, ce qui a pu

 17   corroborer les éléments de preuve.

 18   S'agissant de M. Egbers, l'Accusation avait la charge de preuve, ils

 19   avaient la possibilité, ils l'ont interrogé, ils savent ce qu'il a dit, ils

 20   l'ont identifié, ils ne l'ont pas amené dans le prétoire. Si cela peut être

 21   tiré de ce qu'il a été dit, ça peut effectivement être concret et tout en

 22   étant précis. Ce qu'on laisse entendre, c'est que ce que la Chambre de

 23   première instance aurait pu tirer comme conclusion était incohérent et ne

 24   corroborait pas son témoignage. Mais je remercie l'aide de mon estimé

 25   collègue là-dessus.

 26   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Eh bien, nous attendrons demain

 27   matin pour voir quels sont vos éléments précis et, le cas échéant, les

 28   réponses précises des conseils de l'Accusation, mais j'incite les parties à


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  1   permettre à l'appel d'aller de l'avant le plus rapidement possible avec le

  2   moins d'interruptions possibles. Je n'ai pas l'habitude d'avoir des appels

  3   conduits d'une façon où il y a des objections, ce qui ressemble davantage à

  4   un procès que je n'en ai l'habitude. Essayons d'avancer le plus diligemment

  5   et le plus rapidement possible avec le moins d'interruptions possibles.

  6   Merci. La séance est levée.

  7   --- L'audience est levée à 17 heures 12 et reprendra le mardi, 3 décembre

  8   2013, à 10 heures 00.

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