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Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le lundi 30 janvier 2006

2 [Conférence de mise en état]

3 [Audience publique]

4 [L'Accusé Praljak est introduit dans le prétoire]

5 [Aucun autre accusé n'est présent]

6 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

8 l'affaire, s'il vous plaît.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, affaire numéro

10 IT-04-74-PT, le Procureur contre Prlic et autres.

11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je vais demander à

12 l'Accusation, qui est au complet, de bien vouloir se présenter.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci beaucoup.

14 L'INTERPRÈTE : Le micro n'est pas branché.

15 M. SCOTT : [interprétation] Est-ce qu'on peut m'entendre maintenant,

16 bien. Excusez-nous, mais nous n'avons pas entendu la traduction parce que

17 le système ne fonctionnait pas.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Je demandais à l'Accusation de bien vouloir se

19 présenter.

20 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Désolé de ce

21 petit problème technique. Kenneth Scott pour le bureau du Procureur. Je

22 suis accompagné de plusieurs de mes collègues et je vais les laisser se

23 présenter eux-mêmes.

24 Mme D'AOUST: Josée D'Aoust pour le bureau du Procureur.

25 M. MUNDIS : [interprétation] Daryl Mundis pour le bureau du Procureur.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci beaucoup.

27 Je vais maintenant demander à la Défense de bien vouloir se

28 présenter.

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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Michael

2 Karnavas pour Dr Prlic.

3 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Tomislav

4 Kuzmanovic pour le colonel Stojic.

5 M. ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Vesna

6 Alaburic, j'interviens ici dans l'intérêt de Milivoj Petkovic.

7 M. JONJIC : [interprétation] Bonjour, pour l'accusé Valen Kincoric,

8 Tomislav Jonjic, avocat de Zagreb, République de Croatie.

9 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour la

10 Défense de M. Pusic, Fahrudin Ibrisimovic, ainsi que notre assistant.

11 L'ACCUSÉ PRALJAK: [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge. Je m'appelle

12 Slobodan Praljak, et je me défends moi-même.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Je salue toutes les personnes présentes. Je salue

14 les représentants de l'Accusation dont je vois avec plaisir qu'un des

15 membres est francophone. Je salue les avocats des accusés. Je salue

16 Monsieur Praljak, ici présent. Je n'oublie pas également de saluer les

17 interprètes qui nous assistent ainsi que tout le personnel de cette salle

18 d'audience, Monsieur le Greffier, Monsieur l'Huissier, et tous les

19 assistants qui nous entourent.

20 Comme vous le savez, nous tenons une audience de mise en état. Je vous ai

21 adressé l'ordre du jour que je vais légèrement modifier, compte tenu du

22 fait que j'ai été avisé ce matin d'une nouvelle requête de l'Accusation à

23 la suite d'une ordonnance qui avait été rendue le 24 janvier 2006. Il y a

24 plusieurs problèmes qui empêchent, pour le moment, le procès d'entrer dans

25 la phase active. Le premier problème concerne M. Praljak et le fait qu'il

26 se défende tout seul. Comme vous le savez M. Praljak a saisi la Chambre par

27 une requête afin que lui soit désigné un avocat. J'ai aussitôt demandé à

28 l'Accusation et aux différents avocats de me faire part de leurs

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1 observations sur les mérites de cette requête.

2 Les observations des uns et des autres ont été déposées, et la

3 Chambre va être à même de rendre très rapidement une décision. A cet effet,

4 dès demain, j'ai une réunion avec les deux autres Juges de la Chambre II

5 pour que nous déterminions notre position concernant la décision à rendre

6 sur la requête de M. Praljak.

7 Afin d'éclairer les deux Juges que je verrai demain, je tiens néanmoins à

8 rappeler un certain nombre de données, et je me tournerai tout à l'heure

9 vers M. Praljak pour recueillir ses observations.

10 Comme je l'ai déjà indiqué, le statut de ce Tribunal prévoit qu'un accusé

11 peut se défendre seul. C'est un droit absolu et c'est aux accusés de dire

12 s'ils veulent se défendre seuls ou s'ils veulent être assistés d'un avocat.

13 Curieusement ce Tribunal, dans au moins deux cas que je cite, le cas

14 Milosevic et le cas Seselj, alors même que ces deux accusés ne voulaient

15 pas d'avocat, la Chambre dont ils relèvent, leur a imposé un avocat sans se

16 préoccuper de la question de l'état de fortune desdits accusés. Dans le cas

17 présent, nous sommes dans une autre situation. Nous avons un accusé qui, au

18 départ, avait un avocat, et qui ensuite n'a pu, semble-t-il, pouvoir faire

19 face aux honoraires de cet avocat, et à ce moment-là, a informé le Greffier

20 qu'il ne pouvait plus payer cet avocat et il demandait un avocat commis

21 d'office. Conformément à la procédure, qui résulte tant du Statut que d'une

22 directive et du Règlement, le Greffier a demandé à M. Praljak de fournir au

23 Greffier toute indication sur son état de fortune.

24 Dans ce cas très précis, la charge de la preuve incombe au demandeur

25 et non pas au Greffier. C'est ainsi que dans un certain nombre de pays,

26 Etats-Unis, France, Allemagne ou d'autres, lorsqu'un accusé est indigent,

27 c'est à lui d'indiquer qu'il est indigent, de justifier de son indigence,

28 et à ce moment-là, on lui attribue un avocat. Ce Tribunal fonctionne comme

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1 cela. Le Greffier a demandé à M. Praljak tout renseignement utile sur son

2 état de fortune. Par ailleurs, le Greffier avait en sa possession des

3 éléments provenant de l'OTAN établissant que l'accusé Praljak disposait de

4 certains biens.

5 Au vu de ces informations et au vu des réponses parcellaires de M.

6 Praljak, le Greffier a rendu une décision disant qu'il ne pouvait pas,

7 conformément au Statut, lui donner un avocat. Cette décision a fait l'objet

8 d'une contestation devant la Chambre I. La Chambre I a rendu une décision

9 confirmant la position du Greffier, à savoir qu'il importe à l'accusé de

10 prouver qu'il est indigent. Sur ce, si on s'arrêtait à ce point de la

11 discussion, M. Praljak devait se défendre tout seul. Il m'apparaît, à titre

12 personnel, que ceci n'est pas possible compte tenu du fait que M. Praljak

13 n'est pas un juriste confirmé. Il n'a pas fait d'études de droit. Il n'est

14 pas professeur de droit. Il n'est pas avocat. Il est dans l'incapacité de

15 former des requêtes et d'appréhender l'ampleur du procès et de suivre, de

16 manière éclairée, toutes les phases procédurales.

17 Il m'apparaît que les conditions d'un procès équitable pourraient, à

18 ce moment-là, être en cause. A partir de là découle un autre problème. Il y

19 a dans la cause six accusés, dont cinq autres accusés sont assistés

20 d'avocats. Si on maintient le système actuel, M. Praljak se défendant seul,

21 il y aurait un risque sérieux que les autres accusés subissent également un

22 préjudice. Il faut tenir compte également de cet élément.

23 Un troisième problème est survenu. M. Praljak, qui ne parle ni

24 anglais ni français, veut, et il en a le droit, avoir dans sa langue, les

25 pièces de la procédure. C'est-à-dire les écritures de la l'Accusation dans

26 sa langue, mémoire préalable, liste de témoins, liste de pièces à

27 conviction, et également toute pièce à conviction rédigée en anglais mais

28 traduite en B/C/S. S'il n'avait pas ces pièces, les conditions même du

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1 procès équitable ne seraient pas remplies puisque comme vous le savez, le

2 Statut mentionne que l'accusé doit avoir connaissance, dans sa langue, des

3 éléments à charge contre lui. Bien entendu, les éléments à charge sont

4 constitués des déclarations des témoins, des pièces à conviction de

5 l'Accusation.

6 A ce stade, je constate néanmoins que le blocage résulte également de

7 la position de M. Praljak qui n'a pas répondu pleinement aux demandes

8 réitérées du Greffier concernant son état de fortune. D'après ce que j'ai

9 pu comprendre de la situation, il y a quelques années, M. Praljak aurait eu

10 en sa possession des participations dans un certain nombre de sociétés et

11 aurait été directement ou indirectement propriétaire d'un bien immobilier.

12 Il semblerait, d'après ce que je comprends des documents, qu'une partie des

13 biens aurait été donnée, selon des procédures que je ne connais pas, car ce

14 n'est pas mentionné dans les écritures, à des membres de sa famille.

15 Ce qui fait qu'aujourd'hui, M. Praljak nous indique qu'il n'a aucun

16 moyen pour pourvoir aux honoraires des avocats et aux coûts de la

17 préparation de sa défense. Comme vous le savez, le coût est colossal. Je

18 vais citer deux exemples qui me viennent à l'esprit. Le premier exemple est

19 un exemple qui est actuellement en cours dans la Chambre II et saisi,

20 l'accusé Seselj demande que le Greffe lui rembourse ses divers frais pour

21 la préparation de sa défense pour un montant de 2,4 millions de dollars.

22 Voilà à titre indicatif, une idée de coûts d'une défense. Dernièrement,

23 j'ai lu dans une dépêche de la l'agence France Presse, pour un procès qui a

24 eu lieu, il y a quelques années, le procès Blaskic, il semblerait que le

25 gouvernement croate aurait rémunéré les deux avocats de M. Blaskic, pour un

26 montant total de 30 millions de dollars. A partir de là, on se rend compte

27 que les coûts sont énormes et que faire face à des dépenses pareilles, il

28 faut avoir un état de fortune, qui permet de rétribuer l'avocat, de payer

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1 ses enquêteurs, de payer ses témoins experts, et cetera.

2 Monsieur Praljak, je me tourne vers vous, et afin d'éclairer mes deux

3 collègues que je vais rencontrer demain, j'aimerais savoir si vous avez

4 répondu intégralement aux demandes du Greffier, concernant votre état de

5 fortune. Concernant votre état de fortune d'aujourd'hui, qu'en est-il,

6 pouvez-vous me fournir tout élément d'explication, car comme vous le

7 comprenez, votre situation paralyse, pour le moment, toute la procédure.

8 Voilà, je vous donne la parole.

9 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. J'aurais

10 besoin peut-être d'un petit peu de temps pour vous répondre car les

11 discussions entre moi-même et le Greffe durent depuis assez longtemps

12 maintenant. Toutes les informations que vous avez reçues de la part du

13 Greffier et du Greffe, au sujet du fait que je n'ai pas répondu à toutes

14 les demandes qui m'ont été faites de manière intégrale, cela n'est pas

15 vrai.

16 J'étais tenu, au terme de la logique de la loi et de la logique

17 humaine, j'étais tenu de faire état de mes ressources matérielles de

18 manière très précise, au moment où l'acte d'accusation a été établi à mon

19 encontre. Cela c'est une question de principe. On peut placer peut-être

20 cette question de manière différente et de dire la chose suivante : est-ce

21 que, jusqu'au moment où l'acte d'accusation a été établi, j'étais un homme

22 libre, et si j'étais un homme libre si, dans le cadre de cette liberté, il

23 y avait le droit pour moi de disposer de mes biens. Bien entendu,

24 conformément au droit et à mon propre libre arbitre puisqu'il s'agissait de

25 mes propres biens ou est-ce qu'à ce moment-là, il aurait fallu penser que

26 j'étais coupable avant, de manière préméditée, ce qui fait que nous

27 n'aurions pas pu nous ranger au sein -- au rang des sociétés civilisées,

28 mais de celles qui pratiquaient le droit comme on l'a fait dans le pays où

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1 j'ai habité pendant de nombreuses années. Donc, c'est une question de

2 principe. Je nie le fait que je n'aurais eu pas le droit de disposer moi-

3 même de mes biens comme je l'aurais souhaité. Cela, c'est un droit dont je

4 disposais.

5 En dehors de cette question de principe, on peut examiner les faits,

6 à savoir qu'est-ce que je possédais exactement avant l'établissement de

7 l'acte d'accusation, quels étaient ces biens ? De quoi étais-je le

8 propriétaire au moment où cet acte d'accusation était établi ? La charge de

9 la preuve, certes, elle repose sur moi. Elle repose sur moi d'une manière

10 où les preuves devraient être établies de manière positive, c'est-à-dire,

11 cela revient à faire une liste de mes biens mobiliers et immobiliers ou de

12 toutes autres sortes de biens.

13 C'est effectivement ce que j'ai fait. Je l'ai fait de manière

14 extrêmement précise. Avec l'aide de mon conseil à l'époque, j'ai fourni ces

15 informations au Greffe. J'ai signé un document qui attestait de la véracité

16 de cette déclaration. J'ai attesté que c'était la situation effectivement

17 qui était la mienne. Je l'ai fait en tout conscience devant la loi. Le

18 Greffe, bien entendu, dispose d'autres informations. Il a le droit de ne

19 pas être d'accord avec les faits que j'ai présentés. Cependant, je ne vois

20 pas très bien en quoi je peux faire face à la demande qui m'est faite par

21 le Greffe, de prouver que je ne suis pas le propriétaire de quelque chose

22 que je ne possède pas.

23 Il y a -- dans deux domaines, j'ai dépassé mes principes pour

24 répondre aux demandes du Greffe. D'abord, quand je suis allé -- j'ai pris

25 contact avec ma banque, parce qu'on m'a demandé de montrer que je ne

26 disposais pas de comptes bancaires dans cette banque en particulier. En

27 dehors de cette banque en Croatie, il y a en Croatie plus de 70 autres

28 banques. En utilisant le principe de la preuve négative, ils auraient pu me

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1 demander de présenter les déclarations des 70 autres banques, stipulant que

2 je n'avais pas de comptes dans aucune de ces 70 autres banques. Mais cela

3 irait à l'encontre de la logique. Il s'agirait de vouloir prouver quelque

4 chose par la négative.

5 Monsieur le Juge, c'est très, très simple. S'agissant de chaque entreprise,

6 de chaque bien sur lequel on m'a interrogé, dans un pays civilisé, c'est

7 très facile d'établir les faits. Aujourd'hui, la Croatie est un pays

8 civilisé. On peut le faire de manière très efficace, conformément au droit,

9 de manière extrêmement précise. Voilà comment on s'y prend normalement. On

10 peut demander aux tribunaux, par l'intermédiaire des organes de la

11 République de Croatie ou ceux de la République de Bosnie-Herzégovine, leur

12 demander de délivrer un document qui sera, ensuite, envoyé au tribunal, de

13 délivrer un document où il est dit qui a mis en place telle usine, quel

14 capital a été utilisé pour établir cette société, quelle a été l'évolution

15 du capital en question, qui a ajouté une certain somme au capital, et

16 cetera. Toutes ces questions qui ont trait à l'évolution d'une entreprise,

17 tout cela est enregistré auprès des tribunaux et auprès de ce type

18 d'organisation. Cela peut fournir une idée très claire de la situation.

19 Dans ces conditions, on voit que jamais mon nom n'apparaît. Jamais mon nom

20 n'apparaît dans ces documents. Je ne vois pas très bien comment vous voulez

21 que moi, en allant à l'encontre de la loi du droit, j'aille chercher

22 quelque chose au sujet duquel je n'ai rien à voir, avec lesquels je n'ai eu

23 aucun lien.

24 J'ai déjà expliqué que c'était quelque chose que je ne possédais pas,

25 que je ne suis pas un enquêteur du Tribunal de La Haye, et que j'aurais

26 violé, j'aurais enfreint le droit positif des deux pays si je m'étais mis à

27 chercher des informations de ce type. Parce que personne n'était tenu

28 d'ailleurs de me fournir ces informations.

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3 (expurgé)

4 (expurgé)Cela

5 stipulait la chose suivante : le Dr Zoran Praljak - c'est mon frère - le Dr

6 Zoran Praljak a construit cette maison en 1993. En 1993, il a obtenu un

7 permis de construire. Nous avons joint ce permis de construire aux

8 documents envoyés au Greffe. C'est en 1994, me semble-t-il, qu'il a payé

9 les taxes nécessaires à la ville de Zagreb pour l'aménagement du terrain --

10 pour la viabilisation [phon] du terrain afin de pouvoir construire sa

11 maison. En l'an 2000, ce processus s'est poursuivi. Ce même Zoran Praljak a

12 continué à construire sa maison. Il a demandé à ce que le plan du

13 rez-de-chaussée et de la zone horticole qui l'entoure - je suis sûr que

14 vous disposez de ce document - le plan du rez-de-chaussée et des terrains

15 aux alentours. Il y a également le plan de tout le système d'évacuation des

16 eaux, les installations électriques, tout cela. Tout cela date de l'an

17 2000, dans la deuxième phase de la construction de cette maison.

18 Comme je l'ai indiqué au Greffe, nous disposons de plusieurs

19 kilogrammes de documents du même type que celui que je viens de décrire.

20 Alors, je vous pose la question suivante : pourquoi est-ce qu'il serait de

21 mon obligation d'enquêter sur mon frère à moi pour prouver que je ne suis

22 pas le propriétaire de cette maison ? De plus, j'ai fourni des informations

23 extrêmement précises, des preuves montrant que mon épouse, lorsqu'elle m'a

24 épousé, possédait déjà un appartement dont elle était propriétaire avant de

25 m'épouser, et qu'elle m'a permis de vendre cet appartement pendant la

26 guerre parce que j'avais besoin d'argent. Cette dame avec qui j'avais

27 partagé ma vie pendant 37 ans dans des relations très harmonieuses, des

28 relations conjugales très harmonieuses. Cette dame, je lui ai promis que

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1 j'allais lui rendre son appartement. Quand j'ai eu terminé le paiement de

2 l'appartement qui m'avait été donné par l'armée, quand j'ai fini tous les

3 paiements relatifs à cet appartement-là, à ce moment-là, j'ai établi un

4 contrat aux fins d'un don que j'ai signé en 2002. En mars 2002, je lui ai

5 restitué cet appartement, je lui ai donné cet appartement. J'ai également

6 précisé que si elle devait quitter cette communauté de mariage qui était la

7 nôtre, à ce moment-là, qu'elle pourrait amener avec elle -- ou qu'elle

8 serait toujours propriétaire de cet appartement.

9 Maintenant, si j'en reviens à la discussion que j'ai eue avec le Greffier

10 du Tribunal, je dois dire que dans le cadre de cette discussion, il m'a été

11 dit que j'aurais dû signer un accord supplémentaire avec mon épouse. Sinon,

12 tout cela aurait pu être assez suspect. Mais j'ai remis en question le

13 droit du Greffier et du Greffe d'imposer son propre modèle culturel, sa

14 propre civilisation sur mes propres modèles. J'ai également remis en

15 question le droit du Greffe à transposer, à imposer ce modèle au mien,

16 parce que j'estime que l'accord que j'ai passé oralement avec mon épouse

17 est fondé juridiquement, qu'il découle d'un droit fondamental et que c'est

18 un accord comme on en trouve beaucoup dans d'autres pays.

19 En conséquence - est-ce que je peux encore continuer, Monsieur le

20 Juge ?

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais résumer votre position qui s'articule en

22 trois volets. Le premier volet, c'est la question des sociétés. Vous nous

23 dites que concernant les sociétés, il était très facile de vérifier à

24 partir des actes constitutifs de ces sociétés, que vous n'êtes actuellement

25 propriétaire d'aucune partie de ces sociétés.

26 Le deuxième volet, c'est ce qui concerne la maison de votre frère.

27 Vous expliquez qu'au départ, il y avait une demande de permis de construire

28 avec votre frère, mais que par la suite, c'est lui qui en a assumé

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1 l'intégralité du coût. La troisième question, c'est la maison de votre

2 communauté avec votre épouse. Vous venez de me dire, qu'en 2002 vous lui

3 avez fait une donation, et que vous ne contestez pas lui avoir fait cette

4 donation. Argument ultime que vous avancez - j'en informerai demain mes

5 collègues - vous dites, qu'en tout état de cause, tout ce qui a pu se

6 passer sur vos biens personnels a été fait dans la phase soit antérieure à

7 l'acte d'accusation, soit concomitamment [phon] avec l'acte d'accusation

8 mais qui, à l'époque, étant présumé innocent, vous disposiez comme vous

9 l'entendiez de l'intégralité de vos biens. Je ferai un rapport demain à mes

10 collègues pour leur faire part de votre position. J'espère ardemment

11 qu'avec mes collègues nous allons trouver une solution afin que vous

12 puissiez, pour le procès à venir, disposer d'un avocat.

13 Ce n'est pas la peine que je redonne la parole aux uns et aux autres,

14 car vous vous êtes exprimés dans vos écritures, notamment

15 Me Karnavas, dans vos écritures pour M. Prlic, qui sont fort complètes et

16 qui permettront évidemment à la Chambre de rendre une décision éclairée en

17 la matière, étant bien conscients que nous touchons là au cœur même des

18 droits de la Défense.

19 Le deuxième sujet est la préparation de ce procès. Comme vous le savez,

20 j'ai adressé, il y a quelques mois, à l'Accusation, une ordonnance lui

21 demandant dans le cadre de la préparation de son mémoire préalable de sa

22 liste des témoins, la liste des pièces à conviction, de m'adresser un

23 tableau constitué de plusieurs colonnes. Pourquoi ai-je demandé cela ? J'ai

24 demandé cela afin de permettre à moi-même et aux Juges qui m'assisteront

25 lors du procès, d'avoir une vue complète et éclairée sur les allégations

26 formées à l'encontre des accusés, dont je tiens a nouveau à souligner, qui

27 sont à ce jour présumés innocents.

28 L'Accusation m'a adressé il y a quelques temps sa liste de témoins, de

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1 pièces à conviction et son mémoire préalable. En étudiant ces pièces, j'ai

2 constaté que les prescriptions n'avaient pas été respectées. Notamment, je

3 suis dans l'incapacité de croiser les témoins, les pièces à conviction et

4 les paragraphes de l'acte d'accusation, et encore moins du mémoire

5 préalable.

6 Je rappelle que dans ce procès qui est un méga-procès, qui n'a nul autre

7 pareil dans l'histoire de ce Tribunal. Le seul méga-procès qui est

8 intervenu, c'était l'affaire Kupreskic. Ils étaient six accusés, mais cela

9 ne concernait, en réalité, que deux faits qui s'étaient déroulés à Ahmici

10 en octobre 1992 et à Ahmici en

11 avril 1993. En réalité, il y n'avait que deux faits, dont la Chambre de

12 jugement a établi les éléments de culpabilité. Dans cette affaire

13 Kupreskic, je vous invite les uns et les autres à regarder et à lire les

14 jugements. Vous vous apercevrez qu'il y a très peu de références aux pièces

15 -- aux listes de pièces à conviction. En réalité, s'il y a eu - je cite de

16 mémoire - 56 témoins de l'Accusation, des 56 témoins de l'Accusation, il y

17 a peu des références dans le jugement. Donc, le précédent Kupreskic n'a

18 rien à voir avec notre affaire.

19 Cette affaire, pour le moment, est constituée de 10 000 pièces à

20 conviction. Il y en avait 9 490 dans un premier stade, et pas plus tard

21 qu'en fin de semaine dernière, il y a quasiment près de 400 documents

22 supplémentaires venant de la MCCE. Nous sommes à 10 000 pièces à

23 conviction. Certaines de ces pièces à conviction font des centaines de

24 pages. Nous avons, les Juges et vous les avocats de la Défense, à faire

25 face à une masse colossale de documents. Par ailleurs, la Défense a fait

26 valoir ses observations, mais l'Accusation a prévu 400 témoins, 400 témoins

27 viva voce ou 92 bis. Concernant les témoins du 92 bis, la Défense a tout

28 contesté. La Chambre à laquelle j'appartiens sera amenée à rendre une

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1 décision, et si cela se trouve les 400 témoins viendront déposer viva voce.

2 Comme vous le savez, le Règlement, le fait en tant que Juge de la

3 mise en état, obligation de veiller à la préparation rapide du procès et à

4 prendre toutes mesures utiles. Qui plus est, je ne l'ai pas vu dans les

5 écritures qui me sont arrivées ce matin de l'Accusation. Le Règlement

6 indique dans son article 73 bis(C) que la Chambre à laquelle j'appartiens,

7 au vu en anglais "In the light", va déterminer le nombre des témoins que le

8 Procureur citera, et la Chambre va déterminer la durée de la présentation

9 des moyens à charge. Comment pourrais-je déterminer ce nombre de témoins et

10 déterminer la durée de l'interrogatoire si je n'ai pas une vision claire de

11 la pertinence de la venue de ces témoins, et de ce qu'ils vont dire par

12 rapport à l'acte d'accusation au mémoire préalable ? Je ne peux pas donner

13 un bon sens à l'Accusation aux motifs qu'elle me donne 400 noms de témoins

14 en me disant : Voilà, ce sont les témoins. Je dois vérifier en quoi ces

15 témoins se rapportent à l'acte d'accusation.

16 Je vais vous citer une décision qui a été rendue le

17 21 janvier 2003, où je constate que dans cette décision, c'était l'affaire

18 Blagojevic. Me M. Karnavas était l'avocat de Blagojevic. C'est une affaire

19 qu'il connaît parfaitement. Je résume : Dans cette affaire, la Défense, en

20 l'espèce Me Karnavas, s'était opposée au fait que la Chambre Blagojevic

21 dispose des documents de l'Accusation. La Chambre, présidée par le Juge

22 Schomburg, qui est actuellement à la Chambre d'appel et le Juge Agius, qui

23 fait partie de la présente Chambre, a rendu une décision dont je vais vous

24 lire quelques attendus, qui vont vous expliquer pourquoi j'insiste sur ces

25 tableaux. Voilà ce que disait cette Chambre : "Attendu que le Règlement ne

26 reflète pas simplement le système accusatoire de la "common law" ou le

27 système inquisitoire de la "civil law," qui ne découle pas principalement

28 d'un seul de ces régimes, il s'agit plutôt d'un hybride des deux systèmes

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1 dont le but premier est de favoriser un procès équitable et rapide."

2 "Le Règlement a pour objectif un procès équitable et rapide, attendu

3 que les pièces demandées par la Chambre lui sont nécessaires pour

4 s'acquitter plus efficacement des tâches et obligations que lui impose le

5 Statut et le Règlement; attendu que les pièces demandées par la Chambre lui

6 permettront de mieux gérer le procès, en l'aidant à prendre des décisions

7 pendant la procédure; attendu que les pièces demandées ne seront nullement

8 considérées comme des éléments de preuve par la Chambre tant qu'elles

9 n'auront pas été présentées et admises pendant le procès."

10 "Attendu que les pièces demandées par la Chambre aideront le Juge de

11 la mise en état à s'acquitter des obligations que lui impose l'article 65

12 ter du Règlement; attendu que les pièces demandées aideront celle-ci, la

13 Chambre, à s'acquitter des obligations qui lui sont faites en vertu de

14 l'article 73 bis du Règlement, notamment celles de déterminer s'il convient

15 d'écourter l'interrogatoire principal de certains témoins, de fixer le

16 nombre de témoins que le Procureur entend citer et de déterminer la durée

17 de la présentation des moyens de preuve à charge."

18 Voilà ce que disait cette Chambre et elle en conclut, et c'est ce

19 que je vais faire, dès demain, en demandant à l'Accusation également, de

20 nous fournir copies de toutes les déclarations de témoins, copies des 10

21 000 pièces à conviction et copies en version papier, pas en CD-ROM.

22 Pourquoi ? Parce que 10 000 pièces, 400 témoins, je dois faire le lien

23 entre le pièces et les témoins. J'ai eu la curiosité intellectuelle de me

24 pencher sur les fait relatés dans l'acte d'accusation. Les faits on les

25 retrouve dans le mémoire préalable de l'Accusation puisque dans le mémoire

26 préalable, en annexe, vous avez par municipalité, des annexes, annexe 1,

27 annexe 2, et cetera qui répertorient les nombres des faits. A titre

28 d'exemple, pour la municipalité de Prozor, il y a dans le document de

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1 l'Accusation, 175 faits. En théorie, ces 175 faits doivent être établis par

2 une pièce, un "exhibit" ou un témoin. Je ne me suis pas contenté du mémoire

3 préalable. J'ai moi-même, avec mes assistants, procédé à une étude

4 particulièrement poussée des mentions figurant dans l'acte d'accusation sur

5 les municipalités.

6 A titre d'exemple, je vais prendre la municipalité qui a le nombre de

7 fait le plus petit. C'est Gornji Vakuf. Dans Gornji Vakuf, il y a, comme

8 vous le savez, les chefs d'accusation qui sont répertoriés dans l'acte

9 d'accusation, et comme vous le savez, il y en a en tout, là pour Gornji

10 Vakuf, il y en avait 23, mais il n'y a pas 23 chefs d'accusation pour

11 Gornji Vakuf, il y en a en réalité d'utiles, il y en a 11. Dans les 11, je

12 constate que Gornji Vakuf recoupe plusieurs municipalités et dans les

13 municipalités, il y a Hrasnica, Uzricje, excusez-moi la prononciation,

14 Zdrimci, Dusa. Il y a au moins quatre villages. Ces faits se sont déroulés

15 le 18 janvier 1991. Il y a eu des attaques, il y a eu des pillages, il y a

16 eu des incendies, des transferts de population, et cetera. Tout ceci doit

17 être, puisque c'est dans l'acte d'accusation, doit être évoqué et prouvé,

18 au moins prouvé par des témoins et des pièces.

19 Comment, avec les 10 000 pièces à conviction que vous me fournissez

20 et les 400 témoins, comment puis-je savoir quelles sont les pièces à

21 conviction, quels sont les témoins qui se rapportent précisément à Gornji

22 Vakuf ? Cela, il n'y a que vous qui pouvez le faire en complétant les

23 tableaux. Ceci c'est dans votre intérêt pour savoir où vous allez. C'est

24 dans l'intérêt de la Défense, qui est en droit de savoir quelles sont

25 charges qui pèsent sur quel témoin, à partir de quelle pièce, pour mener le

26 contre-interrogatoire et évidemment, cela sera utile pour les Juges, qui

27 auront une vision complète de l'acte d'accusation du mémoire préalable des

28 témoins et des listes de pièces.

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1 Ce matin vous m'avez fait des écritures disant que vous n'êtes pas

2 dans la possibilité de le faire, alors que dans mon ordonnance j'avais

3 indiqué que vous aviez jusqu'au 25 février. Vous avez quasiment encore plus

4 de trois semaines pour faire ce travail. Tant que je n'aurai pas ces

5 éléments, je ne peux pas saisir la Chambre, pour que la Chambre puisse

6 déterminer le nombre de témoins et la durée du témoignage de chaque témoin.

7 Je tenais à indiquer cela à l'Accusation pour qu'il n'y ait pas méprise sur

8 les intentions du Juge de la mise en état. Le Juge de la mise en état doit

9 préparer un dossier, qu'il soumettra à la Chambre II et également à ses

10 deux autres collègues, qui seront les Juges ad litem, qui seront nommés

11 pour les besoins du procès. Tant que je n'ai pas cela, je ne pourrai pas

12 demander à mes collègues de statuer sereinement conformément à l'article 73

13 bis du Règlement. Bien entendu, la Défense doit aussi, face à cette

14 avalanche de documents et de témoins, préparer son contre-interrogatoire.

15 Comment préparer un interrogatoire si elle n'a aucune lisibilité ?

16 Est-ce qu'oralement, l'Accusation veut nous faire valoir ses observations

17 sur ce problème qui est un problème énorme ?

18 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Tout d'abord, il me

19 semble que la Chambre doit comprendre que l'Accusation est tout à fait

20 prête mais le procès, pour autant que trois choses soient réalisées, il y a

21 toutes les requêtes pendantes. Il faut qu'elles soient tranchées. Il y en a

22 plusieurs, certaines sont pendantes depuis le mois d'avril 2005. Deuxième

23 condition, lorsque la Chambre complète sera composée, je parle des Juges

24 qui viendront vous aider à régler ces dernières tâches de préparation.

25 Troisième condition, lorsqu'une date sera retenue pour l'Accusation et pour

26 la Défense, un petit compte à rebours qui nous permettra de préparer tout

27 le reste, par exemple, la comparution des témoins.

28 Lorsque ces trois conditions seront réunies, nous sommes prêts à commencer

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1 le procès. La semaine dernière, le 19 janvier, nous avons déposé des

2 écritures, notamment la liste des pièces et la liste des témoins. Ceci

3 répond tout à fait à ce que nous demande le Règlement. Vous savez que

4 vous, M. le Juge Parker et M. Le Juge Agius, avez reçu des informations

5 quant aux détails de notre cause. Vous venez à l'instant même de dire qu'il

6 est nécessaire d'établir une connexion, un lien entre les 400 témoins ou

7 quelques et les différents chefs d'accusation retenus dans l'acte

8 d'accusation. Ce que nous avons déposé la semaine dernière, c'est

9 précisément ce que cela fait. Vous avez la liste des témoins en application

10 du 65 ter et cette liste, reprendre au niveau des paragraphes et des chefs

11 d'accusation, de quels de ces chefs d'accusation et paragraphes, tel ou tel

12 témoin va répondre.

13 Vous n'avez peut-être pas déjà vu, mais notre mémoire préalable au

14 procès est délibérément structuré de façon à ce que les paragraphes du

15 dispositif dans notre mémoire préalable au procès soit en parfaite

16 concordance avec les paragraphes de l'acte d'accusation modifié. Vous avez

17 le même paragraphe dans le mémoire que dans l'acte d'accusation modifié,

18 ceci vous permet d'obtenir toutes les informations voulues à propos des

19 témoins. Pour la durée estimée des déclarations, nous avons là aussi donné

20 une estimation comme l'exige l'article 65 ter (E)(ii). Tout ceci a été

21 fourni, vous disposez de ces éléments, Monsieur le Juge.

22 Pour ce qui est des pièces, dans une écriture que nous avons déposée

23 aujourd'hui, pas seulement pour vous, Monsieur le Juge Antonetti mais aussi

24 pour le Président de cette Chambre, le Juge Agius et pour le Juge Parker,

25 nous avons prévu un tableau de rechange, ce qui permet d'établir un lien

26 entre les pièces et les différents chefs d'accusation des paragraphes de

27 l'acte d'accusation, Dans la même veine, ce que nous avons fait pour les

28 témoins. Vous avez reçu ce tableau, et nous avons indiqué que pour

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1 respecter les délais, je reviendrai au nombre des pièces dans un instant

2 mais vu le nombre volumineux de pièces en l'espèce, nous allons

3 effectivement essayer de le faire pour aider la Chambre mais que ce n'était

4 pas possible hier, ce ne le sera pas aujourd'hui, et ce ne sera pas non

5 plus possible demain. Nous ne pourrons pas respecter le délai du 25

6 février. Nous vous donnons une idée au vu de notre évaluation de ce que

7 nous pourrons faire. Nous avons longuement travaillé sur ces documents et

8 nous espérons pouvoir nous acquitter de cette tâche, la rédaction de ce

9 tableau de rechange versé en annexe à notre écriture d'aujourd'hui d'ici au

10 14 avril. C'est le temps qu'il nous faut pour mener cette tâche à bien.

11 Bien sûr, nous sommes tout à fait prêts à collaborer avec la Chambre

12 pour commencer le plus vite possible, mais à l'impossible nul n'est tenu,

13 et c'est le temps qu'il nous faut pour préparer ce tableau que nous vous

14 avons donné aujourd'hui.

15 Pour ce qui est des pièces, la requête concernant les documents de la

16 MCCE, ces documents ils étaient déjà répertoriés dans notre liste des

17 pièces en vertu du 65 ter. Cela ne vient pas s'ajouter à cette liste, cela

18 se trouve déjà dans les 9 400 et quelques documents, ce ne sont pas de

19 nouveaux documents.

20 Je vous remercie, Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous dites qu'aujourd'hui il y a de nouvelles

22 écritures que je n'ai pas. Dès que je les verrai, je les étudierai.

23 Vous me dites que ce travail vous pouvez le faire mais d'après vos

24 calculs, cela ne pourrait être terminé que le 14 avril.

25 Je prends acte de ce que vous dites. Simplement, j'ai lu avec intérêt

26 votre mémoire préalable, l'articulation de ce mémoire préalable me semble

27 être fondée sur trois facteurs importants : le premier, c'est l'entreprise

28 criminelle commune. L'entreprise criminelle commune, comme vous le savez,

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1 il y a un objectif et il doit y avoir évidemment l'intention animant tous

2 les membres de cette entreprise criminelle commune. L'entreprise

3 criminelle, qui résulte de la jurisprudence Tadic, comme vous le savez, il

4 y a trois formes. Je présume que l'Accusation, à partir de ses témoins et

5 de ses documents, va rapporter la preuve de l'existence d'une entreprise

6 criminelle commune. Pour le moment, je n'en vois absolument pas la trace

7 dans les témoins ou les pièces à conviction.

8 Deuxième facteur : dans votre mémoire préalable, vous analysez ensuite la

9 responsabilité individuelle de chacun des accusés qui aurait planifié,

10 ordonné, commis, et cetera. Cela aussi cela doit être normalement prouvé,

11 prouvé par des documents des témoins.

12 Troisième facteur dans la mémoire préalable, c'est ce que j'appelle les

13 crimes dans les localités : persécutions, pillages, destructions, et

14 cetera, tout cela doit être bien entendu prouvé. Il doit y avoir un rapport

15 entre l'entreprise criminelle, les accusés, leurs comportements, ce qu'ils

16 ont fait et les crimes qui sont répertoriés en 26 chefs d'accusation. Je

17 dois vous dire, que la lecture de votre mémoire préalable et des documents

18 qui lui sont fournis, m'amène à me poser des questions sur la gestion de ce

19 procès. Comment l'Accusation compte faire venir les témoins ? Est-ce

20 qu'elle va, dans un premier temps, faire venir les témoins experts pour

21 mettre en toile de fond le contexte politique, le conflit armé

22 international, le rôle des uns et des autres et ensuite aborder,

23 municipalité par municipalité, tous les crimes qui sous-tendent ?

24 J'aimerais y voir clair et je pense que la Défense, est aussi dans cette

25 optique. Pour le moment, je n'ai aucune indication.

26 J'attendais évidemment de ces tableaux, dûment complétés, des

27 indications. J'ai lu avec intérêt qu'il y a plusieurs experts qui sont

28 prévus. J'en déduis que certains experts vont venir nous parler du contexte

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1 politique. Tout cela est très bien, mais à quel moment ceux-ci vont venir ?

2 Est-ce qu'ils vont venir au début, au milieu, à la fin ? J'aimerais le

3 savoir. De mémoire, il y a un expert, il est prévu cinq heures pour

4 l'Accusation. Evidemment la Défense nous dira tout à l'heure comment elle

5 compte contre-interroger. Cela doit se préparer avant. Le procès ne peut

6 pas démarrer sans qu'on sache où on va.

7 Je donnerai la parole parce que je sais que les avocats ont envie

8 d'intervenir. Je vous donne la parole et les avocats me répondront. Allez-

9 y.

10 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Nous souhaitons tout à fait avoir ce genre de dialogue avec vous,

12 avec d'autres membres de la Chambre de première instance. Je m'excuse

13 d'avoir déposé ce mémoire aujourd'hui. Je comprends tout à fait que vous

14 n'avez pas pu le lire et l'analyser encore, surtout étant donné que nous

15 n'avons pas eu le temps de le faire traduire en français ce matin. Je dois

16 dire tout à fait clairement --

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce n'est pas nécessaire de le faire traduire en

18 français; je le lis en anglais. Il n'y a pas de problème.

19 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Nous nous sommes

20 appuyés sur les instructions contenues dans votre ordonnance la semaine

21 dernière, où il a été dit, au moins en anglais, qu'il fallait aviser la

22 Chambre dès que possible, si possible avant l'audience de la journée

23 d'aujourd'hui afin d'éviter tout malentendu concernant ces points.

24 Dans ce mémoire déposé aujourd'hui, nous avons proposé en termes

25 généraux la présentation de nos éléments de preuve. Nous commencerons par

26 les témoins portant sur le contexte général et certains experts, pas tous,

27 mais certainement les témoins qui déposeront sur la situation politique,

28 sur l'histoire, puis d'autres témoins qui déposeront sur les structures du

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1 HVO, le conseil croate de la Défense, et d'autres témoins qui parleront du

2 contexte général de l'entreprise criminelle commune, de l'idée de la

3 création de la grande Croatie favorisée par le président Tudjman et les

4 coaccusés.

5 Après cette présentation des éléments de preuve par le biais des

6 témoins, nous allons suivre un ordre chronologique des événements selon les

7 municipalités. Ceci suivra encore une fois la structure de l'acte

8 d'accusation. Nous commencerons par la municipalité de Prozor où les

9 événements se sont déroulés en octobre 1992. Ensuite, nous passerons à

10 Gornji Vakuf où les événements ont eu lieu. Ils ont eu lieu ailleurs

11 également, mais en ce qui concerne Gornji Vakuf, il s'agissait du mois de

12 janvier et février 1993. Puis, nous parlerons des événements qui se sont

13 déroulés en avril 1993 sur le territoire d'une autre municipalité, mais je

14 ne vais pas citer tous les détails.

15 Maintenant, en ce qui concerne Gornji Vakuf, afin d'éviter tout

16 malentendu ou confusion, je souhaitais dire que lorsque l'on fait référence

17 à plusieurs villes et villages de Gornji Vakuf, bien sûr, il s'agit des

18 localités situées à l'intérieur de la municipalité de Gornji Vakuf qui

19 contient un nombre de villages et de villes qui ont été touchées par les

20 mêmes événements ou les événements semblables.

21 Nous avons mentionné un autre point dans notre écriture déposée ce

22 matin, à savoir, comme vous le savez, Monsieur le Juge, sur la base de

23 votre expérience, souvent les mêmes témoins vont déposer au sujet de

24 plusieurs éléments pertinents. Je ne vais pas donner des noms de témoins

25 cet après-midi, mais il y a des témoins qui ont d'abord été arrêtés dans le

26 cadre des événements à Sovici et Doljani en avril 1993. Ensuite, ils ont

27 été emmenés à la prison de Ljubuski où ils ont subi un mauvais traitement,

28 d'après le bureau du Procureur. Ensuite, ils ont été transférés à la prison

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1 de Heliodrom. Souvent, ils ont dû s'acquitter des travaux forcés illégaux.

2 Il s'agit ici de quatre aspects différents de la thèse de l'Accusation. Je

3 suppose, Monsieur le Juge, que la Chambre ne souhaitait pas que l'on fasse

4 revenir le même témoin trois ou quatre fois pour déposer au sujet des

5 éléments différents.

6 Il est essentiel, à moins de faire cela, à moins de reciter à la

7 barre les témoins plusieurs fois d'affilée, il est inévitable de se

8 retrouver dans la situation où il y aura les témoins qui parleront de ce

9 qui s'est passé à Sovici et Doljani en avril 1993, dans la tentative de

10 suivre l'ordre logique et chronologique. Ils auront également à déposer

11 dans le cadre de cette même déposition au sujet de l'Heliodrom et des

12 travaux forcés. Je souhaitais clarifier cela. En fonction de ce problème et

13 compte tenu de ces difficultés, nous allons présenter les éléments de

14 preuve plus ou moins de la manière que j'ai énoncée cet après-midi.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je constate avec satisfaction que ce document

16 que je n'ai pas reçu, qui a été déposé aujourd'hui, répond à plusieurs de

17 mes préoccupations. Bien entendu, dès que j'aurai ce document, je vais m'y

18 plonger afin d'être rassuré. J'ai beaucoup parlé. L'Accusation a énormément

19 parlé. La Défense, évidemment, va également avoir la parole. On va

20 commencer par Me Karnavas, ensuite à tour de rôle, et je terminerais par M.

21 Praljak.

22 Maître Karnavas.

23 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Tout

24 d'abord, je souhaite vous féliciter d'avoir pris en compte la complexité de

25 cette affaire, le volume des documents et les difficultés que confronte la

26 Défense. Je souhaite dire que la requête de l'Accusation qui a été soumise

27 aujourd'hui risque de ne pas être si utile que l'on pourrait le croire,

28 d'après ce qui a été dit. Nous le verrons. Je ne suis pas sûr de cela.

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1 Je suis content de pouvoir vous dire que j'étais en position d'être

2 utile en tant qu'avocat dans le cadre de l'affaire Blagojevic. Compte tendu

3 du système qui a été adopté, heureusement pour moi, l'avis du Juge

4 Schomburg n'a pas été retenu, et la décision prise dans cette affaire peut

5 nous être utile. Je pense que ceci peut répondre à la demande de

6 l'Accusation visant à obtenir les documents nécessaires.

7 Je souhaite également ajouter que moi-même, je suis préoccupé en ce

8 qui concerne le calendrier prévu par l'Accusation. Il faut comprendre

9 qu'ils ont eu à leur disposition huit ans pour préparer leur présentation

10 des éléments de preuve. Ils ont eu le choix du temps et de l'endroit. Ils

11 ont dressé l'acte d'accusation au moment souhaité. Il a fallu commencer le

12 procès en octobre de l'année dernière. Ensuite, nous avons appris qu'il

13 s'agirait du mois de novembre, ensuite, décembre, ce qui est devenu par la

14 suite février. Maintenant, on dit peut-être mars. Apparemment, nous

15 attendrons jusqu'en avril. Bien sûr, la Chambre a demandé certaines

16 clarifications qui seront également très utiles pour la Défense.

17 Le problème, c'est la question de savoir comment la Défense peut se

18 préparer de manière appropriée, si l'Accusation a besoin du temps jusqu'au

19 mois d'avril. Car dans aucune affaire d'une telle ampleur, l'avocat de la

20 Défense ne peut se préparer entièrement avant le début du procès. Bien sûr,

21 l'avocat de la Défense doit se préparer dans la mesure du possible en ce

22 qui concerne l'image d'ensemble. Ensuite, lorsque le procès commence, il

23 est possible de se concentrer plus sur la liste des témoins. D'habitude, si

24 l'on se concentre sur les sujets, ceci facilite la tâche à tout le monde,

25 notamment à la Défense qui doit se préparer au jour le jour pour contre-

26 interroger les témoins. Je ne souhaite pas parler trop longuement

27 aujourd'hui, mais je souhaite indiquer qu'au moins dans mon système

28 juridique -- judiciaire, l'Accusation risque d'être sanctionnée si elle ne

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1 respecte pas les termes d'une ordonnance. Nous avons entendu leur réponse.

2 Je comprends bien ce que nous faisons et qu'ils font tout ce qu'ils peuvent

3 afin de respecter votre ordonnance.

4 Il faut savoir que la semaine dernière, nous avons reçu leur mémoire

5 préalable au procès de 242 pages. Nous avons une liste des témoins. Je ne

6 vais pas citer des noms, mais nous allons voir quels sont les sujets qui

7 vont être traités. Il y a un expert en matière d'artillerie, en matière des

8 finances, de l'histoire, de l'écriture, un expert militaire, un expert sur

9 les transcription présidentielles, et cetera. Ils se sont préparés depuis

10 huit ans, et maintenant, ils disent qu'ils vont citer à la barre, au milieu

11 du procès, un expert financier. Je ne vois pas comment je peux me préparer,

12 comment je peux me préparer pour tout cela. Il peut savoir que -- bien sûr,

13 devant ce Tribunal, il n'y a pas d'égalité des armes; ils font tout ce

14 qu'ils peuvent, je le comprends. Mais la Défense dispose des ressources

15 limitées. Afin que l'on puisse nous préparer pour le procès, nous avons

16 besoin d'avoir tous les rapports d'expert. Non pas seulement aujourd'hui,

17 mais nous aurions dû les avoir dès hier. C'est l'une des raisons pour

18 lesquelles j'ai dit que j'étais déçu la dernière fois lorsque le Procureur

19 n'a pas répondu à nos attentes. Maintenant, ils ont eu l'occasion de

20 bénéficier d'un mois supplémentaire pour déposer leur mémoire préalable au

21 procès.

22 Ceci a été fait, mais il y a d'autres déclarations que nous n'avons

23 pas reçues. Ils continuent à faire référence aux déclarations de témoins

24 que nous n'avons pas. Quand est-ce qu'ils vont nous les fournir, car nous

25 avons besoin de cela pour procéder à nos propres recherches. Bien sûr,

26 leurs documents qui sont constitués des milliers de pages doivent être

27 traduits, non pas seulement pour

28 M. Praljak, mais aussi pour tout le monde dans ce prétoire, y compris vous-

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1 même, Monsieur le Juge.

2 Je souhaitais vous faire part de mes préoccupations. Je ne vois pas

3 comment nous pouvons commencer ce procès en mars ou en avril. Bien sûr, je

4 souhaite commencer dès que possible, mais je ne souhaite pas que ceci porte

5 préjudice à qui que ce soit, et surtout pas à M. Praljak. Je ne sais pas

6 comment -- quelle sera la décision concernant sa demande d'avocat

7 supplémentaire. En ce qui concerne les nouveaux documents, je ne sais pas

8 combien de temps il me faudra pour me pencher dessus. J'ai travaillé

9 assidûment dans le cadre de cette affaire dès le début.

10 Il va falloir apporter quelques éclaircissements à un moment donné.

11 Je suis d'accord avez M. Scott pour dire qu'il me serait utile de fixer une

12 date. Mais si nous n'avons pas toutes ces informations, il ne serait pas

13 utile, dès à présent, de fixer une date. Je pense que peut-être, à un

14 moment donné, la Chambre devra imposer une date à l'Accusation, disant que

15 d'ici cette date-là, l'Accusation devra remettre tous les documents

16 pertinents à la Défense. Malheureusement, ici nous ne sommes pas dans un

17 système tel que le système français, où vous avez un dossier avec tous les

18 documents. L'enquête peut se poursuivre. Les membres de l'Accusation, se

19 sont des employés de l'ONU. Je ne souhaite pas les nommer experts. Il

20 s'agit des analystes, des employés du bureau du Procureur qui viendront

21 déposer ici. Ils sont, pour ainsi dire, des experts. De toute façon, où

22 sont leurs rapports ? Ils font leur travail, leur recherche depuis des

23 années dans le cadre de ce Tribunal. Mon client sera dans une situation

24 désavantageuse en raison de cela. Je me suis retrouvé dans une situation où

25 je risque de léser mon client, car je vais devoir me précipiter dans la

26 préparation de cette affaire. Je pense que l'Accusation, avec tout le

27 respect que je lui dois, je pense qu'ils devraient accélérer les choses.

28 Compte tenu de l'importance de tout cela, du fait que cette affaire couvre

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1 une longue période et implique des éléments, historiques, politiques,

2 économiques, financiers, et cetera, je comprends leurs difficultés. Je ne

3 souhaite pas dire que leur approche n'est pas appropriée, mais je pense

4 qu'il sera peut-être nécessaire de donner des instructions à l'Accusation

5 en lui demandant de remettre toutes ces informations. Peut-être nous

6 pouvons organiser une réunion avec les Juges de la Chambre, une réunion

7 telle que la réunion en vertu de l'article 65 ter. Je pense qu'il faut

8 savoir qu'il y a un grand nombre de documents qui ne sont pas corroborés,

9 où il est dit il s'agit de l'ONU. Donc, il est possible de faire un constat

10 judiciaire concernant ce volet-là ou concernant la Mission des observateurs

11 européens, et cetera. J'insiste sur le fait que mon client et les autres

12 clients dans cette affaire ont le droit à avoir une défense équitable. Je

13 vous remercie.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci beaucoup.

15 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Tout d'abord, je souhaite dire que je suis

16 d'accord avec les commentaires émis par Me Karnavas. La difficulté que j'ai

17 rencontrée notamment est que la Chambre de première instance donnait

18 certaines instructions claires au bureau de l'Accusation notamment en ce

19 qui concerne certains documents; les

20 9 700 documents. Il a été indiqué clairement que je n'ai pas besoin de lire

21 tous ces documents s'ils n'ont aucun lien avec mon client. Je ne le sais

22 pas, donc je dois parcourir tous les documents. La Chambre a rendu

23 l'ordonnance et donné des instructions selon lesquelles il est nécessaire

24 d'établir un lien entre les documents, les témoins et les événements. Ceci

25 nous serait très utile, surtout si l'on tient du compte du fait qu'il est

26 nécessaire de se pencher pendant au moins une minute sur chacun des

27 documents. Il ne faut pas oublier que mon client ne parle pas la langue

28 anglaise. Nous avons entendu le point de vue de l'Accusation aujourd'hui.

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1 La Chambre a rendu son ordonnance et a parlé dans cette ordonnance de la

2 manière dont il faut faire les choses, mais cette manière n'a pas été

3 respectée dans la démarche de l'Accusation. Je suis déçu car ceci nous rend

4 la tâche plus difficile.

5 Un autre sujet qui a été soulevé par Me Karnavas concerne le procès

6 lui-même. Le bureau du Procureur a suggéré la possibilité de fixer une

7 date. Je pense que quelles que soient les difficultés que le bureau du

8 Procureur rencontrera afin de communiquer les documents conformément à la

9 manière requise par la Chambre, et quels que soient les problèmes liés à M.

10 Praljak, je pense que si l'on se fixe une date pour travailler à rebours,

11 je pense que ceci exercera une pression supplémentaire sur toutes les

12 personnes présentes. Je sais que le mois de mars a été mentionné comme le

13 début du procès, mais à mon avis, il ne sera pas possible de respecter

14 cela. Il nous serait inutile d'avoir une idée de date pour pouvoir

15 travailler à rebours. Je ne sais pas si la Chambre a examiné cela. Mais je

16 pense que ce serait plutôt une bonne idée d'exercer cette forme de pression

17 sur tout le monde pour que l'on accélère nos activités.

18 Puis, il existe des points qui n'ont pas été mentionnés par

19 M. Scott, et qui ont fait l'objet de nos discussions, nous avons parlé de

20 la méthodologie des interrogatoires, du calendrier, et cetera. Nous avons

21 pu nous mettre d'accord sur un certain nombre de points. Nous souhaitons

22 présenter le résultat de nos travaux à la Chambre et à vous, Monsieur le

23 Juge. J'espère que j'ai réussi à vous expliquer quelles sont nos

24 préoccupations. Merci.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, troisième avocat.

26 Mme ALABURIC : [interprétation] Je suis d'accord avec les points de vue de

27 mes éminents collègues et je souhaite énoncer très brièvement ce que je

28 considère comme important. Tout d'abord, je pense qu'il est très important

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1 que le bureau du Procureur suive les instructions de la Chambre et qu'il

2 présente de manière méthodique les documents importants pouvant être utiles

3 à la Chambre et à la Défense.

4 Puis, je pense qu'il est nécessaire d'indiquer également qu'il n'y a

5 pas de déclarations jointes au 92 bis. Puis, nous n'avons pas de

6 déclarations préalables des témoins qui vont être cités à la barre, et nous

7 allons en discuter directement avec le bureau du Procureur.

8 Puis ce qui nous préoccupe particulièrement, c'est la déclaration

9 d'une personne suspecte, qui est présentée en tant que témoin fiable. Cette

10 personne est proposée en tant que témoin, et l'Accusation propose la

11 déclaration qu'il a faite lorsqu'il était le suspect dans une affaire et

12 lorsqu'il a, dans le cadre de cette procédure, remis en cause certains des

13 clients présents ici. Je pense qu'il s'agit ici d'une démarche inacceptable

14 et il faut savoir que l'interrogatoire et l'entretien avec une personne,

15 qui a le statut d'un suspect, ne peut pas être traité de cette manière-là.

16 Puis troisièmement, si le bureau du Procureur peut bénéficier d'un délai

17 prolongé pour déposer les requêtes, je considère que la Défense devrait

18 pouvoir compter sur une même prolongation pour sa réponse.

19 Puis, je pense que la Défense devra pouvoir bénéficier de

20 suffisamment de temps pour pouvoir préparer cette affaire complexe. Merci.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

22 M. JONJIC : [interprétation] Monsieur le Juge, je souhaite dire que nous

23 sommes tout à fait d'accord avec tout ce qui a été dit par mes éminents

24 confrères. Afin d'éviter toutes répétition, je souhaite dire que je

25 considère que la Chambre devrait insister pour que l'on respecte

26 entièrement les termes de l'ordonnance rendus le 30 novembre 2005. Il ne

27 faut pas oublier que dans l'affaire Kupreskic, qui a été mentionnée, la

28 Chambre d'appel a souligné qu'un mémoire préalable au procès ne sert pas

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1 seulement à répéter les éléments contenus dans l'acte d'accusation mais

2 qu'il s'agit là d'un document extrêmement important dont le rôle primordial

3 est d'aider la Chambre et la Défense afin de préparer sa thèse. Merci,

4 Monsieur Le Juge.

5 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

6 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] La Défense de M. Pusic est entièrement

7 d'accord avec les commentaires émis jusqu'à présent. Je souhaite ajouter

8 que la liste que vous avez demandée auprès de l'Accusation est, à notre

9 avis, extrêmement importante pour une autre raison, à savoir, le temps. Le

10 temps est très important pour nous dans cette affaire. Il y a six accusés,

11 il y a le bureau du Procureur, et nous avons tous besoin de savoir quels

12 sont les délais auxquels nous devons faire face et qu'il faut respecter.

13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

14 Monsieur Praljak, avant la pause.

15 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge, je vous remercie. Je

16 suis bien placé ici pour soulever un point. Quelle que soit l'opinion de

17 l'Accusation, je suis sorti de la guerre et compte tenu de ma capacité

18 d'analyse, je peux dire que je suis convaincu que j'ai fait mon travail de

19 manière aussi équitable que possible. Peut-être que je me trompe, mais

20 depuis dix ans, nous vivons sous la pression indiquant que peut-être nous

21 sommes des criminels de guerre. Ceci risque de se poursuivre pendant dix

22 ans encore. Croyez-moi, je souhaite savoir si tel est le cas ou pas,

23 relativement rapidement pour permettre à ma famille, à mes amis, à mes

24 enfants et à mes petits-enfants, de ne pas vivre pendant 20 ans car nous

25 arriverons à ce délai à la longue, soumis à cette pression de l'éventualité

26 du verdict portant sur un criminel de guerre.

27 Or, votre approche au bout de huit ans, Monsieur le Procureur, semble

28 un véritable, "Je m'en fous."

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1 Deuxièmement, dans l'acte d'accusation vous dites que tous les membres du

2 HVO et du HDZ, que tout un peuple, attendent pour apprendre s'ils ne

3 constituaient rien d'autre qu'une entreprise criminelle commune.

4 Vous vous fondez sur une telle déclaration qui accuse 90 % de cette

5 population, de ce peuple et malgré cela, vous vous rendez sur place et vous

6 recueillez des déclarations de témoins pour corroborer votre thèse. Ne riez

7 pas, c'est exact. Vous avez cité les noms de ces personnes, vous avez dit à

8 ces personnes qu'elles risquaient d'être mises en accusation et, bien sûr,

9 les personnes ont répondu et ont collaboré avec vous.

10 Messieurs les Juges, il faut résoudre trois points. Il faut savoir

11 que je n'ai donné pas une seul euro pour la maison (expurgé). J'ai rendu

12 l'appartement à mon épouse et je n'ai nullement participé dans les

13 sociétés, ni avant l'acte d'accusation ni après. Merci.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de faire la pause, puisqu'on est obligé

15 pour des raisons techniques de faire une pause, j'espère la plus courte

16 possible, un quart d'heure, cela me semblera largement suffisant. Je

17 constate à ce stade que tous les avocats sont unanimes dans leur position.

18 Il y a un front commun des avocats.

19 Je constate que M. Praljak s'associe également à cette position des

20 avocats avec l'idée sous-jacente de savoir quand le procès va commencer.

21 Pour les quelques secondes qui restent à ce stade, j'ai personnellement

22 informé le Président du Tribunal ainsi que mes deux collègues de la Chambre

23 II, qui m'apparaissait pour le moment très problématique le fait de pouvoir

24 commencer le début mars en raison de la question de l'avocat, qu'il faut

25 résoudre très rapidement. Une fois que cette question de l'avocat de M.

26 Praljak sera résolue, nous aurons fait un pas considérable mais par

27 ailleurs, il faudra également que nous nous revoyions, au courant du mois

28 de février, pour tenir d'autres audiences de nature technique. On m'a

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1 indiqué que la salle d'audience, la I, la II, ou la III, ne serait pas

2 disponible. A ce moment-là, nous pourrions nous retrouver dans les salles

3 de réunions 398, je crois, où il peut y avoir une interprétation dans les

4 trois langues, mais si M. Praljak n'a pas à ce moment-là d'avocat, on

5 pourrait, pour lui éviter de venir ici, faire une vidéoconférence, à partir

6 de Zagreb. Mais là encore faut-il que le Greffe m'apporte des précisions

7 complémentaires.

8 En tout état de cause, au mois de février pour le moins, il faudra

9 qu'on se voit au moins deux, deux fois et pendant plusieurs heures.

10 Il est quatre heures moins quart. Nous nous arrêtons pour un quart

11 d'heure et nous reprendrons à 16 heures précises.

12 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

13 --- L'audience est reprise à 16 heures 02.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience étant reprise, je vais aborder maintenant

15 la question des requêtes pendantes. Avant d'aborder la question des

16 requêtes, je signale juste un petit point concernant la traduction. Comme

17 vous le savez, lorsque vous vous exprimez en anglais, c'est traduit de

18 l'anglais en B/C/S et en français, quand je m'exprime en français, c'est

19 traduit soit directement du français en B/C/S, soit du français en anglais,

20 puis en B/C/S, et cetera. Ce qui compte, s'il y a un problème quelconque,

21 c'est de regarder la bande audio. C'est la seule qui fait foi. Le reste, il

22 peut y avoir des incertitudes. Je vais vous donner un exemple. Lors de la

23 dernière Conférence de mise en état, juste avant de terminer l'audience,

24 j'ai dit ceci : "L'ordre du jour étant épuisé, je lève la séance." A ma

25 grande surprise, j'ai constaté à la lecture du transcript français la

26 phrase suivante : "Etant épuisé, je lève la séance." Voilà. Alors ce qui

27 fait foi, c'est la bande audio. Le reste, cela a une valeur indicative. Si

28 jamais, il faut un jour se référer à quelque chose, nous nous référerons à

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1 la bande audio.

2 Maintenant, je vais aborder la liste des requêtes pendantes. L'accusé

3 Praljak nous a formé plusieurs requêtes concernant la traduction des

4 documents et du mémoire préalable. Pour le moment, l'accusé Praljak se

5 défendant seul, il doit avoir les documents dans sa langue. De ce fait, le

6 délai de réponse qu'il a lui-même pour répondre au mémoire préalable est

7 fixé pour lui jusqu'au 15 mars. Il a jusqu'au 15 mars pour répondre au

8 mémoire préalable.

9 La requête du 5 janvier de M. Praljak pour la question de l'avocat, je l'ai

10 abordée tout à l'heure; je n'y reviens pas. Il y a une requête de

11 l'Accusation relative au constat judiciaire de l'article 94(A) et 89(C).

12 C'est une requête en date du

13 27 décembre 2005.

14 A ce jour, il y a eu des réponses. Apparemment, l'accusé Stojic, par

15 son avocat, a répondu tardivement parce qu'il apparaîtrait il en a eu

16 connaissance à son bureau mais qu'il n'était pas à son bureau. Quoiqu'il en

17 soit, l'Accusation soutient dans ses écritures que la requête -- enfin, les

18 écritures de M. Stojic sont hors délai. Quoiqu'il en soit, je rappelle

19 qu'aux termes de l'article 126 bis du Règlement, le délai de réponse de 14

20 jours compte à partir du moment de l'enregistrement au Greffe du dépôt de

21 la requête. A partir du moment qu'une requête est déposée au Greffe, vous

22 avez 14 jours pour y répondre. S'il y a une réplique à demander, il faut, à

23 ce moment-là, demander l'autorisation, et vous avez sept jours. Rappelez-

24 vous que le délai est de 14 jours pour répondre à une requête, et le délai

25 est de sept jours pour demander l'autorisation d'une réplique.

26 Concernant cette requête sur l'article 94(A) et 89(C), j'attendais d'avoir

27 le mémoire préalable, la liste de pièces à conviction et les noms des

28 témoins pour soumettre à mes collègues de la Chambre un projet de décision.

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1 Ceci interviendra très rapidement. J'ai également, depuis le 4 avril 2005,

2 pendante la requête aux fins du constat judiciaire pour les autres affaires

3 dans l'article 94(B). Tout le monde a répondu à cette requête. Il y a eu

4 également des réponses additionnelles. La conclusion, c'est qu'il n'y a

5 aucun accord entre les parties pour le 94(B). La Chambre va très

6 prochainement rendre une décision.

7 L'Accusation a adressé le 27 décembre une requête demandant à la

8 Défense de lui notifier au titre de l'article 67(A) du Règlement sa défense

9 d'alibi ou sa défense spéciale. Plusieurs accusés ont répondu sur cette

10 requête. Comme vous le savez, il n'y a aucune obligation pour la Défense de

11 répondre et d'invoquer une défense d'alibi dès le début ou avant le début

12 du procès. A tout moment, la Défense peut arguer de cela même au moment de

13 la présentation de ses propres moyens. Il n'y a pas une urgence. Je

14 rappelle que dans l'article 67, il y a deux volets : Il y a la défense

15 d'alibi qui, pour me résumer, c'est le cas de l'accusé qui produit un alibi

16 en disant : "On me reproche d'avoir été là mais je n'étais pas là; j'étais

17 ailleurs. Je n'y suis pour rien." Cela, c'est la défense d'alibi. Le

18 deuxième volet, c'est la défense spéciale. C'est le cas -- enfin, cela peut

19 recouvrir plusieurs situations. C'est le cas où un accusé au moment des

20 faits aurait été en état de démence ou aurait eu son discernement aboli. A

21 ce moment-là, il produit des certificats médicaux, et cetera. Voilà grosso

22 modo ce qu'est l'article 67. En temps utile, la Chambre rendra également

23 une décision. Nous avons également trois requêtes confidentielles. Je peux

24 l'aborder, puisque je ne cite aucun nom de témoins particuliers concernant

25 l'article 92 bis A, B, C et D. Je n'entre pas dans les détails. Les uns et

26 les autres, il y a eu des réponses. Bien entendu, une décision

27 interviendra. A ce stade également, je constate que la Défense est unanime

28 pour réfuter tous ces témoignages exigeant que les témoins viennent déposer

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1 ou en arguant du fait que ces témoignages ont plutôt trait aux faits et au

2 comportement et non pas aux éléments de l'article 92 bis. Je suis en train

3 d'étudier tout cela. Je soumettrai aussi à mes collègues prochainement un

4 projet de décision. J'aurai l'occasion d'en parler avec mes collègues.

5 Nous avons également une requête de l'Accusation, confidentielle. C'est

6 pour des documents de la MCCE. J'ai reçu cela pas plus tard que ce matin.

7 Là aussi, la Défense devra, bien entendu, répondre à cette requête. Vous

8 avez 14 jours pour cela.

9 Il y a également une requête confidentielle relative à la suppression

10 de la déclaration d'un accusé. Nous allons aussi statuer sur cette requête.

11 Il y avait également une requête confidentielle relative à une demande de

12 production de documents adressés à la Croatie. La Croatie a répondu. Il y a

13 eu une réponse de l'ambassade de Croatie mais à la Chambre I. Apparemment,

14 ceci a été égaré. J'en ai retrouvé trace. Là aussi, on est maintenant à

15 jour.

16 J'ai également une requête. Mais là, je ne peux pas l'évoquer en audience

17 publique. J'y reviendrai tout à l'heure.

18 J'ai une requête en date du 24 janvier demandant à ce que la Chambre se

19 saisisse de la question de la traduction des documents concernant l'article

20 66 et l'article 68.

21 Sur cette affaire qui est une affaire bien connue du Tribunal, ma position

22 personnelle que j'expose également dans l'affaire Seselj : pour moi, un

23 accusé qui se défend seul doit avoir dans sa langue les documents de

24 l'article 66 et l'article 68, les documents qui vont servir à l'Accusation

25 lors de la venue des témoins de l'Accusation. On comprendrait mal qu'un

26 accusé qui se défend seul n'ait pas dans sa langue les pièces qui vont être

27 présentées à un témoin à charge. Cela serait impensable. Voilà ma position

28 qui est claire et nette. Rien ne me fera changer de position. Un accusé qui

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1 se défend seul doit avoir dans sa langue les documents qui seront présentés

2 au témoin lors de la déposition du témoin.

3 La Chambre II va prochainement rendre une décision dans une requête

4 Seselj, mais concernant la requête pendante de l'Accusation, voici ma

5 position à titre personnel. Si ma position est partagée par mes collègues,

6 il n'y aura pas de problème. Si mes collègues ne me suivent pas, je rendrai

7 une opinion dissidente en la matière, dans le sens que je viens d'exposer.

8 Je dois évoquer également parce qu'il nous reste 45 minutes, très

9 brièvement, je vais demander à M. le Greffier de passer mais un très court

10 instant en audience à huis clos partiel.

11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

12 le Président.

13 [Audience à huis clos partiel]

14 (expurgé)

15 (expurgé)

16 (expurgé)

17 (expurgé)

18 (expurgé)

19 (expurgé)

20 (expurgé)

21 [Audience publique]

22 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la ligne de ce que je viens de dire, j'avais

23 saisi mes collègues de la Chambre, durant novembre, d'une demande de

24 délégation de la Chambre, des pouvoirs de la Chambre au titre de l'article

25 73 du Règlement. Pourquoi ? Parce qu'il m'apparaît que préparer et gérer un

26 méga-procès, cela doit amener d'abord une implication personnelle du Juge

27 de la mise en état dans cette affaire. C'est ce que je fais quotidiennement

28 depuis trois mois, et à partir de là, il convient que le Juge de la mise en

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Page 379

1 état puisse disposer d'une marge de manœuvre lui permettant de rendre

2 personnellement, sous contrôle bien entendu de la Chambre, des décisions

3 qui n'appellent pas des grands débats théoriques. Il en est ainsi des

4 modifications d'une mise en liberté, à savoir, si un accusé peut-être

5 autorisé à faire 15 kilomètres dans un sens ou dans l'autre. Ce n'est pas

6 la peine de saisir trois Juges pour cela. J'en ai saisi mes collègues, et

7 j'attends toujours, à ce jour, leurs positions. J'évoquerai avec eux ce

8 problème. Je sais qu'ils sont aussi pris par de nombreuses affaires. Mais

9 la gestion d'un méga-procès a fait l'objet au Canada d'une commission

10 d'étude spéciale, car ils se sont posés la question comment régir un

11 méga-procès. La conclusion de cette commission, qui remonte en 2003, 2004

12 était de dire qu'il faut pour les méga-procès déroger au droit commun. Il

13 faut permettre d'adapter certaines dispositions du code ou du Règlement aux

14 méga-procès. Cette commission avait fait un certain nombre de

15 recommandations dont notamment la création d'un juge dit de la gestion du

16 procès et qualifié juge de la gestion du procès.

17 Dans notre Règlement, il y a le Juge de la mise en état, qui est le

18 Juge de la gestion du procès. Outre atlantique, dans un pays proche des

19 Etats-Unis, ils se sont penchés sur cette question. Il faut dire que dans

20 ce Tribunal jusqu'à présent, personne ne s'est préoccupé de ce type de

21 problématique. Simplement maintenant, on constate depuis les travaux de la

22 commission du Juge Bonomy, qu'il y a une nécessité absolue que le Juge de

23 la mise en état s'implique dans la préparation du procès. J'ai écouté avec

24 attention l'Accusation, tout à l'heure, évoquer le fait que la Chambre

25 était constituée de trois Juges. Oui, je suis parfaitement conscient que la

26 Chambre est constitué de trois Juges, mais il ne faut pas oublier que la

27 Chambre du procès ne sera pas la Chambre de ces trois Juges. Il y aura moi-

28 même qui va présider ce procès, plus deux ou trois Juges ad litem. Il faut

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1 bien comprendre que le Juge Parker et le Juge Agius ne seront plus là dans

2 ce procès. Ce sera donc trois nouveaux juges.

3 Par ailleurs, concernant la date du procès, je tiens à être

4 transparent à l'égard de toutes les parties. Les Juges ad litem sont nommés

5 par le Secrétaire général de l'ONU que 15 jours avant le début du procès.

6 Les Juges ad litem qui vont arriver auront 15 jours pour découvrir 10 000

7 pièces qui représentent des dizaines de milliers de pages, 400 témoins, et

8 cetera. Voilà, soyez bien conscients de cela. En tout état de cause, si le

9 procès démarre le 1er mars, ils seront nommés le 15 février, si le procès

10 démarre le 1er avril, ils seront nommés le 15 mars, si le procès démarre le

11 1er mai, ils seront nommés le 15 avril. Voilà concernant les dates des

12 renseignements que je vous apporte, étant précisé que, comme je l'ai dit

13 tout à l'heure, nous y verrons beaucoup plus clair dès que la question de

14 l'avocat sera réglée.

15 J'aborde maintenant les points qui sont à l'ordre du jour de notre réunion.

16 La question de la communication des pièces, article 66 et 68. Tout à

17 l'heure, j'ai cru entendre de la part de la Défense une mélodie, qui était

18 de me dire : "On n'a pas les déclarations des témoins." Je crois percevoir

19 quand même, concernant la communication, des problèmes résiduels. Je vais

20 d'abord donner la parole à l'Accusation, pour qu'elle me dise où elle en

21 est concernant les communications, et ensuite, je donnerai la parole aux

22 Défenseurs.

23 Monsieur Mundis.

24 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Oui, nous avons

25 traité rapidement de cette question avec la Défense quand nous les avons

26 rencontrés peu avant la Conférence de mise en état de ce jour. Etant donné

27 que l'Accusation n'a finalisé sa liste des témoins que peu avant le 19

28 janvier, quand nous avons déposé cette liste, il y a encore quelques

Page 381

1 déclarations de témoins et pièces qui sont en rapport avec ces déclarations

2 de témoins qui n'ont pas encore été communiquées. Nous sommes actuellement,

3 au moment où je vous parle, en train de rassembler tous ces éléments, et je

4 pense que nous pourrons réaliser cette communication des pièces en vertu de

5 l'article 66 très rapidement. Nous savons effectivement qu'il y a un

6 certain nombre de déclarations qui doivent être encore être communiquées,

7 et mes collègues de la Défense ont parlé de certaines déclarations dont

8 nous pensons qu'elles ont été communiquées mais qu'ils n'ont pas pu trouver

9 parmi tout ce qui leur a été communiqué, si bien que nous sommes en train

10 de procéder à une nouvelle recherche, pour déterminer exactement les pièces

11 qui doivent être communiquées à la Défense en vertu de l'article 66 et qui,

12 comme je l'ai dit, sont en phase de communication, et ceci aussi rapidement

13 que possible.

14 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur cette question, les avocats. Me Karnavas ?

15 M. KARNAVAS : [interprétation] En quelques mots. Premièrement, je voudrais

16 remercier M. Mundis pour cette réponse extrêmement claire. Oui,

17 effectivement, ils nous ont fourni ces pièces dans la mesure du possible,

18 mais il y a deux choses que je voudrais dire. Premièrement, la liste qui

19 figure dans le mémoire préalable. Bien entendu, nous voulons les

20 déclarations qui y sont mentionnées, mais nous voulons aussi toutes les

21 déclarations qui ont été recueillies auprès de tous les témoins, de tous

22 les suspects. Je sais qu'ils ont des déclarations de témoins qui ont été

23 recueillies, mais il y a des mois et des mois et mois. Ce que je me

24 demande, c'est pourquoi est-ce que je ne peux pas les avoir ces

25 déclarations ? Cela se trouve qu'il y a quelque chose qui peut m'être fort

26 utile. Peut-être qu'on ne veut pas me les donner, je ne sais pas, mais je

27 voudrais les lire. Je veux être sûr de disposer de toutes les pièces dont

28 dispose l'Accusation dans le cadre de son enquête. D'après ce que je

Page 382

1 comprends de la décision Blagojevic, ce qui va être remis à la Chambre,

2 c'est ce qui va être utilisé par le Procureur pendant le procès uniquement.

3 Cela c'était une des questions où j'avais une divergence de vue avec le

4 Juge Schomburg. J'aimerais qu'ils voient quelles sont effectivement les

5 pièces qui ne nous ont pas été communiquées et je souhaite insister

6 cependant sur le fait que l'Accusation, en particulier M. Mundis, ont été

7 très coopératifs chaque fois que nous avons fait une demande.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Je sais que M. Mundis est toujours très coopératif,

9 vous me rassurez.

10 Deuxième avocat.

11 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai demandé

12 au représentant du bureau du Procureur de me communiquer un certain nombre

13 de pièces, qui selon nous manquaient. J'espère que nous allons résoudre

14 cela, en plus de ce que vient de dire M. Karnavas. Merci.

15 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai déjà dit

16 que nous espérons et nous pensons avoir des communications directes avec le

17 Procureur.

18 M. JONJIC : [interprétation] La Défense de Valentin Coric est tout à fait

19 très d'accord avec ce qui a été dit par M. Karnavas.

20 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] L'expérience me permet de dire que M.

21 Scott et les autres représentants du bureau du Procureur vont remplir les

22 obligations qui sont les leurs.

23 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je suis d'accord avec ce qu'a dit M.

24 Karnavas, je n'ai rien à ajouter. Merci.

25 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Je vais aborder un des points qui depuis

26 trois mois me préoccupe, sur la question de la durée du contre-

27 interrogatoire qui sera mené par les avocats, voire également par M.

28 Praljak, s'il n'a pas d'avocat.

Page 383

1 A la suite de l'interrogatoire principal mené par l'Accusation, je

2 vous avais invité la dernière fois à vous rapprocher. Je crois que vous

3 vous êtes rencontrés à partir de midi. J'ai cru entendre tout à l'heure

4 l'écho au terme duquel vous seriez arrivés à un accord. Vous allez peut-

5 être me le confirmer ou pas. Quoi qu'il en soit, le problème est le suivant

6 : l'Accusation a, dans ses écritures, indiqué pour un témoin un tel, par

7 exemple, quatre heures. Quatre heures, c'est quasiment une journée déjà.

8 Le problème, en ce qui concerne le procès équitable, est de savoir

9 comment les six avocats ou les cinq avocats et l'Accusé vont contre-

10 interroger. Est-ce qu'ils vont exiger chacun quatre heures, ce qui fait six

11 fois quatre, 24 heures ou ils vont s'entendre pour qu'il y ait un avocat

12 leader, qui fait le contre-interrogatoire au nom de tous, mais là cela pose

13 d'autres problèmes, et les autres avocats intervenant ponctuellement. Dans

14 un système "civil law," comme c'est le Président qui mène les débats, la

15 question est résolue. C'est de mon avis le meilleur système, mais ce n'est

16 pas le système de notre Règlement. Comme ce n'est pas le système que je

17 préconise mais le système de Règlement, je suis obligé de respecter

18 entièrement le Règlement. J'aimerais savoir à quel stade vous êtes arrivés,

19 et c'est pour cela que j'envisageais dans les semaines à venir à vous

20 rencontrer à nouveau pour qu'on règle ce problème, car c'est un problème

21 important dans un méga-procès. Alors le spécialiste, Monsieur Mundis.

22 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Comme vous

23 pouvez l'imaginer, comme vous pouvez bien le comprendre, après la dernière

24 Conférence de mise en état, vous nous avez suggéré de nous réunir pour

25 discuter de cette question. L'une des questions qui s'est immédiatement

26 posée c'était la disponibilité de M. Praljak, car sachant que nous voulions

27 organiser ces réunions, il nous a écrit en nous disant qu'il aimerait

28 beaucoup y participer. Vu la situation actuelle, nous avons estimé que la

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1 meilleure solution c'était d'attendre la veille de cette Conférence de mise

2 en état d'aujourd'hui, pour permettre à M. Praljak de participer à ces

3 discussions en se représentant lui-même.

4 Je pense qu'il est juste de dire, je crois que mes collègues de la

5 Défense seront d'accord, c'est que notre première réunion sur ce point,

6 aujourd'hui, a été extrêmement productive. Nous ne sommes pas parvenus à

7 une conclusion précise, nous ne sommes pas non plus en mesure de vous dire

8 que nous en sommes arrivés à un accord ou à une proposition que nous

9 pouvons vous soumettre, et qu'il y a même accord entre les parties. Non,

10 non, nous n'en sommes indéniablement pas à ce stade puisque nous n'avons eu

11 que de discussions préliminaires. Mais je peux vous dire que cette réunion

12 a été extrêmement fructueuse, une réunion très ouverte, très transparente

13 selon moi. Je crois que les parties en présence, toutes les équipes de la

14 Défense, ont été en mesure de présenter leurs points de vue initiaux sur ce

15 point. Je crois que l'étape suivante sera pour les équipes de la Défense de

16 discuter de cela entre elles. Peut-être nous, de notre côté, pourrions-nous

17 débattre de la question de notre côté également, et ensuite peut-être que

18 dans quelques semaines, nous pourrons échanger de manière écrite ou autre

19 sur ce point pour arriver à faire avancer cette question avant de vous

20 présenter un projet un petit peu plus concret indiquant où nous en sommes.

21 A ce moment-là, il est fort possible qu'il soit fort utile que vous-même,

22 Monsieur le Juge, interveniez pour jouer un rôle plus actif dans ce

23 processus. Comme je l'ai dit, nous avons eu cette réunion initiale. Tout le

24 monde est d'accord, cela a été très productif, très fructueux, mais après

25 une seule réunion, bien entendu, nous n'avons pas encore trouvé énormément

26 de points d'accord ou un accord définitif. Mais je pense que nous pouvons

27 continuer à travailler sur ce point pour essayer de nous concentrer sur les

28 questions qui se posent, et à ce moment-là, vous, Monsieur le Juge, pourrez

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1 jouer un rôle plus actif dans le processus.

2 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole à Me Karnavas, si

3 vous m'invitez à jouer un rôle actif, bien entendu, j'y consens, je dirais

4 même, j'accours. Encore faut-il que vous me donniez ce rôle dans la mesure

5 où il faut d'abord qu'entre les parties vous vous entendiez sur cette

6 procédure. De mon point de vue, si vous n'aboutissez pas à un accord entre

7 les parties, c'est une hypothèse dont je dois tenir compte, à ce moment-là,

8 la solution mathématique est celle qui préserve les droits de la Défense.

9 Vous avez quatre heures, chacun peut demander quatre heures. Parce que nous

10 ne sommes pas dans une responsabilité collective, nous sommes dans une

11 responsabilité individuelle. Les stratégies des uns et des autres peuvent

12 être diverses, les questions peuvent être diverses, leurs implications

13 pourraient être également modulables en fonction des uns et des autres,

14 d'où la difficulté. Cela tout le monde peut le comprendre. Pour moi,

15 l'idéal c'est que la Défense, s'il y a six avocats ou cinq avocats et M.

16 Praljak, s'entende et là c'est merveilleux. Si vous ne vous entendez pas,

17 il faudra que la Chambre avec mes deux collègues ou mes trois collègues ad

18 litem nous en parlions, le plus rapidement possible. Mais pour moi, la

19 solution à ce moment-là elle est mathématique : quatre heures,

20 l'Accusation, quatre heures, chaque accusé. Comme il y aura des redites,

21 les autres, peut-être le premier utilisera quatre heures, pas les autres,

22 mais cela c'est la solution mathématique. La meilleure solution, c'est

23 l'accord entre vous.

24 M. MUNDIS : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Juge. Je pense que

25 c'est bien dans cet esprit-là que se menait la discussion ce matin ou en

26 début d'après-midi. Je pense que toutes les parties ont fait de leur mieux

27 et ce n'était qu'une première réunion. La réunion a évoqué toutes sortes de

28 questions. On se demandait effectivement s'il fallait quatre heures pour

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1 l'Accusation et quatre heures à se répartir entre les équipes de la

2 Défense ou si chaque Défenseur allait avoir quatre heures ou s'il fallait

3 trouver un terrain d'entente si on utilise une formule mathématique ou une

4 autre démarche moins axée sur les mathématiques, davantage sur

5 l'efficacité. S'il y a des redondances, des répétitions, à ce moment-là, le

6 contre-interrogatoire pourrait devoir se terminer. On a envisagé toute une

7 palette d'options. C'était une première mesure pour essayer de sonder le

8 terrain. Effectivement, parce que ceci a peut-être demandé beaucoup de

9 temps, à un moment donné, une fois que nous aurons affiné nos positions,

10 que nous nous sommes mis d'accord, Défense et Accusation, l'Accusation sera

11 peut-être mieux à même de demander votre intervention plus active.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Je pense que l'expérience de Me Karnavas dans

13 l'affaire Blagojevic pourrait également nous servir.

14 Maître Karnavas.

15 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Je

16 dirai tout d'abord ceci; je suis rassuré par ce que j'entends. Puis, vous

17 reconnaissez les difficultés de la Défense avec une telle précision que

18 ceci me va droit au cœur. Parce que, effectivement, chacun doit défendre

19 son propre client. Je serai d'accord avec vous, effectivement, si le Juge

20 posait toutes les questions, ce serait peut-être une démarche idéale.

21 Effectivement, il faut peut-être un juge d'instruction quelque part au

22 milieu mais cela n'existe pas. Enfin.

23 M. Mundis l'a dit fort bien, à mon avis, cette réunion est une réunion où

24 chacun a présenté ses vues mais dans un bon esprit d'entente.

25 Manifestement, il n'y a pas de solution mathématique même celle que vous

26 suggérez, Monsieur le Président, qui pourrait sembler équitable. Soyons

27 réalistes. Pour certains témoins, il faut plus de temps que pour d'autres.

28 Un accusé aura peut-être besoin de contre-interroger un témoin, mais ce

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1 n'est peut-être pas vrai de tous les accusés.

2 Soyez rassuré, Monsieur le Président, ne soyez pas préoccupé pour ce

3 qui est de nous-mêmes ou même de nos confrères. Nous ne voulons pas

4 simplement perdre du temps. Il faut que les questions restent pertinentes.

5 Si l'Accusation décide de ne pas aborder un certain domaine parce qu'elle a

6 décidé de limiter à certains domaines l'interrogatoire principal, si j'ai

7 besoin d'aborder un thème, je le ferai, mais pour autant que cela soit

8 pertinent pour ma défense. C'est là que les mathématiques ne fonctionnent

9 pas. Peut-être que le meilleur contre-interrogatoire, c'est l'absence de

10 contre-interrogatoire si le témoin n'a rien dit. Nous sommes tous

11 conscients, du côté de la Défense, qu'il est dans notre intérêt d'aider le

12 Tribunal. Le fait de poser des questions, de prendre du temps, ce n'est

13 utile que si ceci nous aide véritablement. Inutile de poser des questions

14 qui ne défendent pas mieux la cause d'un accusé. Nous sommes d'accord,

15 Monsieur le Président, il faudra que chaque avocat intervienne

16 individuellement.

17 Bien sûr, les avocats de la Défense se rencontreront et rencontreront

18 l'Accusation. Je l'ai proposé, je ferai une fois de plus cette proposition.

19 Il est dans notre intérêt de nous rencontrer avant la déposition de tel ou

20 tel témoin. De la sorte, nous pourrons déterminer quels sont les domaines

21 que chacun aura explorés. De cette façon, s'il -- par exemple, aborde

22 l'essentiel, il sera inutile pour un autre de le faire. Effectivement, nous

23 ne voudrions pas maintenant nous batailler entre nous, faisant ainsi

24 avancer la cause de l'Accusation. L'Accusation ne devrait pas avoir la vie

25 plus facile, parce que nous serions en train de nous tirer à boulets

26 rouges, les uns sur les autres au sein de la Défense.

27 Soyez sûr, Monsieur le Président, qu'entre nous, nous allons nous

28 organiser de façon à ce que nous sachions sur quoi contre-interroger ce

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1 témoin avant le début du contre-interrogatoire. J'espère que nous aurons

2 une espèce de plan. Je peux vous dire personnellement que je ne veux pas

3 abuser du temps qui m'est donné. Je crois que si je pense avoir besoin d'un

4 supplément de temps, je le demanderai, car il y a des domaines qu'il faudra

5 aborder à fond. J'espère avoir répondu à certaines de vos préoccupations.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole aux autres avocats, je

7 voudrais faire une parenthèse qui est très importante. Donc, je demande

8 l'attention à tous. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, pour le moment,

9 l'Accusation envisage grosso modo de déposer presque 10 000 documents, ce

10 qui fait peut-être 100 000, 200 000 pages; je ne le sais. Quoiqu'il en

11 soit, lorsqu'un document est admis comme preuve, un document qui peut faire

12 20 pages, l'Accusation posera des questions sur ce document au témoin. La

13 Défense contre-interrogera le témoin sur le document. Il en sera de même

14 lorsque ce sera le témoin de la Défense. Sachez ceci : un document qui est

15 admis en élément de preuve sera examiné à la loupe par chacun des Juges. Au

16 moment où nous ferons notre jugement qui sera motivé, nous pouvons nous

17 baser sur des paragraphes de ce document qui n'auront pas fait l'objet de

18 questions de l'Accusation et de questions dans le cadre du contre-

19 interrogatoire de la Défense. Ce qui veut dire qu'un document qui est versé

20 dans les débats est pris en compte par les Juges de A à Z. Ce qui veut dire

21 que lorsqu'on est contre-interrogateur, on est censé connaître entièrement

22 le document et poser des questions au témoin à partir du document.

23 Ayez bien en tête le fait qu'un document - et vous le savez aussi

24 bien que moi - lorsqu'il y a un témoin, cela va très vite. Cela va très

25 vite, parce que le temps passe, il y a beaucoup de questions, et cetera.

26 Puis, il y a des centaines de documents, notamment quand il y a un expert.

27 Vous voyez donc la masse de travail qu'il faut effectuer, et il faut

28 prendre connaissance du document. Ne soyez pas étonné après, dans le

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1 jugement, de retrouver motion d'un document dont aucune question n'a été

2 posée au témoin sur tel ou tel paragraphe. Parce que le document, il est

3 dans la procédure comme le témoignage est dans la procédure. Voilà. Je

4 tenais à dire cela parce que c'est très important. Il faut que vous ayez

5 bien en tête l'importance des documents.

6 Deuxième avocat - Maître Karnavas, si vous voulez répondre.

7 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, juste sur une chose, Monsieur le

8 Président, parce que je dois dire que je suis vraiment ravi que vous ayez

9 parlé de ceci. Je ne peux pas vous dire à quel point je vous ai gré parce

10 que c'est précisément ce que je disais au moment de la demande de versement

11 d'un document, d'une déclaration venant d'une autre affaire. Parfois, on

12 voit un document faire référence à d'autres documents. Il faut regarder la

13 note de bas de page. Tout d'un coup, lorsque je lis un jugement définitif -

14 je vais vous dire quelque chose que j'ai peut-être concédé - cela se trouve

15 quand même dans le jugement, et c'est vraiment la difficulté énorme à

16 laquelle nous faisons face. Je suis vraiment ravi que vous en ayez fait

17 mention. Parce que si on amène des documents, on nous donne des

18 déclarations préalables de témoins, parce que cela a peut-être l'air

19 innocent, mais peut-être que dans cette déclaration, on fait référence à

20 une pièce qui, elle-même fait référence à une autre pièce. Et peut-être que

21 se niche quelque part dans ce troisième document quelque chose qui concerne

22 directement mon client. Qu'est-ce que j'ai fait ? J'ai accepté que ce

23 document soit versé au dossier. Cela veut dire que j'ai mis un autre clou

24 dans le cercueil de mon client. C'est une autre difficulté parmi celles qui

25 sont les nôtres.

26 M. LE JUGE ANTONETTI : Je me permettais de faire cette observation parce

27 que de ma position de Juge, j'ai eu le privilège d'être également dans vos

28 fonctions, soit les fonctions de l'Accusation, soit les fonctions d'avocat.

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1 Je suis à même d'avoir une vue générale du problème. J'appelle votre

2 attention sur cette question-là. Ce que vous venez de dire, vous avez tout

3 à fait raison. C'est qu'un document, on peut interroger le témoin sur un

4 paragraphe, mais les Juges, quand ils vont délibérer sur la pertinence et

5 la valeur probante du document, ils ont tout examiné. Ce qui fait que

6 l'avocat, il est censé connaître le document dans son intégralité.

7 Deuxième avocat.

8 M. KUZMANOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je ne veux pas

9 vous importuner mais je peux vous dire que nous avons discuté et beaucoup

10 des sujets déjà évoqués sont très importants. Je rejoins ce que Me

11 Karnavas vient de dire. Nous avons tenté, au cours de cette première

12 réunion qui a duré quelque 45 minutes, de parcourir ces sujets mais ce fut

13 un premier temps. Ce fut cependant une réunion fructueuse et je suis très

14 contant que la Chambre comprend que s'il n'y a pas d'accord entre les

15 parties, la Chambre autorisera chaque défenseur à intervenir. J'espère que

16 nous n'y arriverons pas à cette situation mais c'est bon d'avoir cela comme

17 base de départ.

18 M. LE JUGE ANTONETTI : Troisième avocat.

19 Mme ALABURIC : [interprétation] Je rejoins tout à fait ce qu'ont dit mes

20 deux confrères mais j'ajouterais ceci : je pense que nous pourrons avoir

21 une proposition conjointe des Défenseurs, qui pourraient avoir une entente

22 avec le bureau du Procureur et que la Chambre n'aura pas à se prononcer sur

23 ce genre de questions et que la Chambre pourra trouver acceptable notre

24 proposition conjointe.

25 M. JONJIC : [interprétation] Mes confrères viennent de dire ce que je

26 voulais dire donc, inutile d'insister.

27 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Pas d'autres commentaires, Monsieur le

28 Juge. Il y a un instant, j'ai dit que vraiment le temps c'était quelque

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1 chose d'essentiel dans cette affaire. C'est la raison pour laquelle

2 j'insiste sur l'importance de cette liste que doit préparer l'Accusation,

3 conformément à votre ordonnance, effectivement ceci pourrait régler la

4 question. On pourrait faire l'utilisation rationnelle du temps dans

5 l'intérêt de tout le monde. Merci.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Question fortement technique.

7 Monsieur Praljak, s'il vous plaît.

8 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Oui, effectivement j'ai participé à

9 cette discussion. Ce qui pourrait ce passer, c'est qu'on ne me donne pas de

10 conseil ce qui n'est pas ce que je souhaite, bien entendu, parce que nous

11 pensons parce qu'on dit : Voilà. On croit que j'ai fait quelque chose, il

12 faut que je puisse me défendre. Mais je crois que je vais bénéficier de M.

13 Kovacic, et je me trouverai en détention. Avec comme co-conseil Pinter, les

14 Défenseurs, ils vont être logés dans des hôtels confortables et ils

15 pourront prendre un verre de vin, le soir, dans des fauteuils. Je serais de

16 Savica [phon], je ne saurai pas ce qu'ils ont abordé comme questions, ce

17 qu'ils ont décidé. Je devrais procéder à un contre-interrogatoire pour

18 refléter dans la mesure du possible la thèse de l'Accusation. Bien sûr, il

19 faut y réfléchir. Si je ne récupère pas mon avocat ou mes avocats pour me

20 défendre, à ce moment-là, j'aurais une situation un peu distincte, et parce

21 que je ne connais pas le droit, cela ne veut pas dire que je vais léser les

22 autres Défenseurs.

23 M. LE JUGE ANTONETTI : Vos propos vont parfaitement éclairer, je pense,

24 demain, mes collègues sur la nécessité de vous nommer un avocat commis

25 d'office. Je vais accélérer le mouvement parce qu'il nous reste un quart

26 d'heure. On va passer à huis clos partiel.

27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

28 le Président.

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1 [Audience à huis clos partiel]

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16 [Audience publique]

17 M. LE JUGE ANTONETTI : La question de l'admissibilité des pièces,

18 vous vous êtes rendus compte dans une ordonnance précédente, j'ai pris un

19 soin tout particulier à bien faire la distinction entre l'admissibilité et

20 la valeur probante. Ce n'est pas parce qu'une pièce est admise qu'elle a

21 automatiquement une valeur probante. La valeur probante, elle est

22 déterminée par les Juges après qu'il y ait la phase d'interrogatoire

23 principal et du contre-interrogatoire.

24 La Défense peut toujours, dans le cas de contre-interrogatoire, faire

25 valoir que ce document n'a aucune valeur probante. Elle demande évidemment

26 que ce document soit écarté.

27 Quand il y a qu'une centaine ou deux cents documents, l'affaire peut

28 se régler pendant le cours du procès pour donner un numéro. Là, on a

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1 quasiment 10 000 documents, malgré le fait que l'Accusation n'a pas répondu

2 à tous mes souhaits, néanmoins l'Accusation a pris un soin de numéroter les

3 documents de un à 9 400, en indiquant les documents du plus ancien au plus

4 récent. Cette vision dans le temps permet déjà de se rendre compte de

5 certains événements. Dans les jours et les mois à venir, enfin les semaines

6 à venir, parce que les mois ce n'est plus la question maintenant, dans les

7 semaines à venir, il faudra qu'entre vous, vous voyiez ce problème et qu'en

8 ce qui me concerne, favorable à une admission des documents de un à 9 500,

9 avec un numéro P1, P2, P3, et cetera, comme quand la Défense viendra avec

10 tous ses documents, il y en aura peut-être 30 000, je ne sais pas.

11 L'expérience nous montre qu'en règle générale, la Défense en donne beaucoup

12 plus que l'Accusation. Si vous en avez 30 000, cela sera également un

13 numéro. Le numéro évidemment donné à un document n'entraîne pas ipso facto,

14 valeur probante maximale, pertinence maximale.

15 Ceci pour éviter des débats lors de la venue du témoin où les six avocats

16 se lèvent d'un seul bond en disant : Ce document, il n'est pas pertinent.

17 Il peut ne pas être pertinent au temps où la Défense le dit, mais six mois

18 après, le document peut être pertinent, même en faveur de la Défense. Il

19 est toujours hasardeux pendant le procès de dire : Le document n'est pas

20 pertinent, alors que ce n'est qu'à la fin qu'on se rend compte qu'il est

21 pertinent et s'il a une valeur. Réfléchissez à ce problème, c'est un

22 problème capital, important. Cela rejoint ce que j'avais dit tout à

23 l'heure. C'est que lorsque le document a un numéro, cela veut dire que la

24 Défense connaît tous les documents. A ce moment-là, c'est à elle de le

25 réduire à néant par son contre-interrogatoire. Vice et versa, quand ce sera

26 le document de la Défense, l'Accusation aussi aura intérêt à étudier tous

27 les documents de la Défense. Je ne statue pas maintenant, mais réfléchissez

28 à cette question.

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1 Il y avait d'autres points que je ne peux malheureusement pas aborder

2 qui est : comment se déroule la présentation des documents quand un témoin

3 est là. Comme vous le savez, il y a le système "e-court" mais en ce qui me

4 concerne, il n'y a qu'un seul système que je connais, c'est celui-là.

5 C'est-à-dire que l'Accusation ou la Défense face au témoin dit :

6 "Voilà les documents dont je vais demander, je vais présenter au témoin,"

7 et cetera. Cela aussi, réfléchissez à cette question. Le système "e-court"

8 est une avancée dans la technique, mais un document doit se palper, doit se

9 confronter à d'autres documents, et cetera. Je ne peux pas, alors que quand

10 je préside, je suis quasiment à un tableau de bord d'un Boeing 747,

11 manipuler l'informatique pour comparer les documents, et cetera. C'est

12 impossible. Par contre, je peux, tout en regardant l'écran, ou vous

13 écoutant avec attention, manipuler les classeurs. Ce que je vous dis, je

14 pense que mes deux futurs collègues diront la même chose. Là aussi, il faut

15 y réfléchir. Le système "e-court" a coûté très cher. Il peut être utile,

16 mais quand il y a des documents, il faut manipuler les documents, parce

17 qu'un document, il faut regarder le tampon, la signature, et cetera;

18 vouloir parfois, même vouloir voir l'original, si l'original est en

19 possession de l'Accusation ou de la Défense, vice-versa.

20 Je vous ai indiqué cela à titre de pistes de réflexion pour les

21 semaines à venir.

22 Nous allons repasser à huis clos partiel.

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

24 le Président.

25 [Audience à huis clos partiel]

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22 --- L'audience de la Conférence de mise en état est levée à 17 heures

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