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Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 27 avril 2006

2 [Déclaration liminaire de l'Accusé Praljak]

3 [Audience publique]

4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.

6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience de ce jour est ouverte. Pour

7 les besoins de l'audience publique, je vais demander aux uns et aux autres

8 de se présenter. Puisque, comme vous le savez, nos audiences sont

9 retransmises par internet et que par ailleurs, il y a du public, autant que

10 le public connaisse qui intervient.

11 Dans ces conditions, je vais demander à l'Accusation de vouloir se

12 présenter.

13 M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

14 Juges. Je m'appelle Kenneth Scott, premier substitut, en compagnie de M.

15 Daryl Mundis, ainsi que Miguel Longone, Pieter Kruger, notamment, et de

16 Skye Winner, qui est notre commis en audience. Merci.

17 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Scott.

18 Nous allons reprendre l'ordre habituel.

19 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

20 les Juges. Michael Karnavas représente Dr Prlic, avec Suzana Tomanovic, et

21 Mme Vlahovic est notre assistante juridique et notre commis à l'affaire.

22 Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

23 Juges. Je m'appelle Senka Nozica. Je représente les intérêts de Bruno

24 Stojic en compagnie de mon co-conseil, Me Peter Murphy, et M. Slonje

25 Valent, notre commis à l'affaire.

26 M. KOVACIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

27 Juges. Nous représentons, moi-même, Bozidar Kovacic et Nika Pinter, co-

28 conseil, les intérêts de M. Praljak aujourd'hui. Si vous le permettez,

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1 c'est Zeljko Mikovic, qui sera notre commis à l'affaire; il va nous aider

2 au moment de la présentation des éléments visuels de la déclaration

3 liminaire de M. Praljak.

4 Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

5 les Juges. Vesna Alaburic, avec Davor Lazic, représentant M. Milivoj

6 Petkovic.

7 M. JONJIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Tomislav

8 Jonjic. Je suis conseil commis d'office de M. Valentin Coric. Je suis ici

9 en présence de Me Krystyna Grinberg et de Mme Ida [phon] Jurkovic, notre

10 commis à l'audience.

11 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Fahrudin

12 Ibrisimovic, avec Roger Sahota et notre commis à l'audience, Nermin

13 Mulalic, pour représenter les intérêts pour

14 M. Pusic.

15 M. LE JUGE ANTONETTI : Je salue toutes les personnes présentes en cette

16 audience de ce jeudi. Comme vous le savez, nous allons entendre la

17 déclaration liminaire de M. Praljak. Je veux indiquer aux uns et aux

18 autres, comme vous le savez, les audiences sont longues puisque nous avons

19 une heure et demie d'audience avant le break. Si jamais au cours de

20 l'audience quelqu'un se sent mal ou éprouve la nécessité qu'on arrête, à ce

21 moment-là, vous me l'indiquez et je stopperai l'audience afin de permettre

22 à celui qui aurait une indisposition passagère de se reposer. Donc,

23 n'hésitez pas à me demander d'interrompre l'audience si vous en avez

24 besoin.

25 Monsieur Praljak, je vais vous donner la parole. Il est d'usage que celui

26 qui intervient se tienne debout. Si jamais vous êtes fatigué, vous pouvez

27 vous asseoir et continuer à faire votre déclaration liminaire. Vous faites

28 comme vous le voulez. Si vous pouvez tenir debout pendant les quatre

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1 heures, vous le faites; sinon, vous pouvez vous asseoir et continuer à

2 parler. C'est comme vous le voulez. Les avocats sont habitués à être debout

3 et à parler pendant longtemps, mais les autres personnes qui ne sont pas

4 avocats peuvent avoir beaucoup plus de difficulté. Donc c'est à vous de le

5 voir.

6 Je vous donne la parole.

7 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vous

8 remercie de vos propos. Je ne me m'assiérai que si je n'ai des problèmes

9 techniques pour ce qui est du suivi des papiers que j'ai sous les yeux et

10 du moniteur.

11 Alors, je tiens d'abord à saluer les Juges de ce Tribunal de La Haye. Je

12 tiens à saluer les co-conseils de la Défense et femmes ici qui sont

13 présents et je salue la partie adverse, M. Scott et les membres de son

14 équipe. Je vous remercie. Je vous souhaite tous d'avoir la bonne volonté de

15 m'en entendre.

16 Alors, la première fois que j'ai comparu devant M. Antonetti, j'ai prononcé

17 la phrase suivante : Il n'est point de doute que les Juges honorables de ce

18 Tribunal adopteront une décision juste et équitable s'ils entendent la

19 vérité. Alors, pendant la guerre, le problème de vérité de la situation est

20 de plus complexe et des plus grave. Le plus souvent ce qui arrive, lorsque

21 des phénomènes de ce genre se produisent, c'est un comportement qui est

22 fonction des besoins et des nécessités de simplification. Or, quand on

23 cherche à simplifier, on déforme très souvent la vérité et si on réduit ou

24 diminue les choses, l'on risque d'omettre bon nombre d'éléments qui ne

25 coïncident pas avec l'intention principale qui est celle d'aboutir à la

26 vérité.

27 Cela à été, en cours final, l'objectif principal de la création de ce

28 Tribunal de La Haye qui, comme l'a dit le Juge Antonetti, vise à apporter

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1 la justice et la paix. La paix ne saurait être apportée que si l'on ne

2 promu la justice, et la justice ne peut être obtenue que si nous entendons

3 la vérité. La vérité doit se fonder sur les faits non pas sur des mauvaises

4 interprétations, non pas sur des raccourcissements, non pas sur l'omission

5 d'éléments cruciaux, non pas sur des extraits ou des citations à arracher

6 hors contexte. Il s'agit de permettre à ce qu'un organisme entier reste

7 intact sans pour autant omettre les structures détaillées qui se recoupent

8 sous une multitude de variantes dans des situations où la peur, la

9 souffrance, la haine, la fatigue, le désespoir règnent dans la personnalité

10 de tout un chacun. Donc, il peut y avoir des groupes de personnes qui --

11 les hommes sont censés diriger ce qui se passe comme un chef d'orchestre.

12 Or, c'est ce que M. Scott a essayé de présenter. Alors, de tout ce récit,

13 il reste une espèce de squelette qui essaie de faire peur à tout un chacun

14 comme dans une sorte de danse macabre en parlant de la vérité et en

15 arrachant des citations de leur contexte et en citant des éléments qui

16 n'ont pas leur fondement logique tel qu'il souhaiterait le présenter. De ce

17 point de vue-là, j'ai préparé, dans la forme la plus abrégée possible, mais

18 sans pour autant abrégé au point de perdre l'élément principal, à savoir,

19 discerner ce qui s'est passé en réalité avant la guerre, bien avant le

20 début de la guerre et en présentant la thèse principale qui est celle de

21 dire que la guerre n'est, malheureusement, pas la fin d'un mal, mais

22 l'aboutissement d'une tragédie. D'habitude c'est le cinquième acte d'une

23 tragédie, une fois que la mort, les souffrances, les destructions, les

24 viols et tout le reste de ce que le monde civilisé connaît, comme nous l'a

25 dit M. Scott et a déjà connu, pendant toute son histoire, et ce, plus d'une

26 dizaine de milliers de fois. Nous avons vu cela plus de 300 fois pendant la

27 Deuxième Guerre mondiale et nous voyons cela au quotidien de nos jours

28 encore en dépit des efforts déployés par la société civilisée pour y mettre

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1 un terme. Nous pouvons de nos jours citer encore au moins 25 conflits très

2 graves qu'il n'y a point moyen de surmonter autrement.

3 Alors, je voudrais, Monsieur Mikovic, que vous nous présentiez le premier

4 extrait ou le premier clip.

5 Je vais vous parler des territoires qui ont été habités par les Croates sur

6 la péninsule balkanique. Alors, premier clip, je vous prie, ou première

7 diapo.

8 La Croatie a été placée sous l'autorité de Venise. Elle a perdu son

9 autonomie en 1000 -- en 420. Comme toute entité arrivant sur le territoire

10 d'autrui, les Vénitiens ont exploité les richesses naturelles, contrôlé les

11 voies maritimes et 20 000 Croates ont, pendant des siècles, ramé sur des

12 galères de Venise. Ceci pendant -- enfin pendant tout ce règne, nous avons

13 repris un peu d'architecture et tout le reste a été pillage, souffrance et

14 douleur. Merci pour cette diapo. Passons à la suivante, je vous prie.

15 Alors, pour ce qui est de l'union personnelle avec la Hongrie, cela s'est

16 fait en 1102. La centralisation qui a eu lieu, l'imposition de la langue

17 hongroise, la prise en charge de toutes les charges administratives et

18 financières, la langue a fini par se perdre et on a visé à nous faire

19 perdre notre identité culturelle et nationale et tout cela a donné

20 naissance à la volonté de survivre ou de subsister d'un peuple. Il y a eu

21 des manifestations, des victimes, des drapeaux de brûler et des tentatives

22 déployées par un peuple qui a cherché à survivre sur un territoire et à

23 vivre conformément aux façons civilisées qui sont celles des autres

24 peuples, et tout ceci va prendre fin vers l'achèvement de la Première

25 Guerre mondiale.

26 Diapo suivante, je vous prie.

27 Les Turcs sont arrivés sur ces territoires en 1463 et, en 1482, ils sont

28 arrivés en Herzégovine, en 1493, sur-le-champ de Krbava, le reste ou les

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1 derniers restes de la noblesse croate ont péri. C'est ce qui nous a fait

2 perdre, ce qui est aujourd'hui le territoire de la Bosnie-Herzégovine et de

3 la Croatie. Le reste est un tout petit bout de territoire du royaume de la

4 Croatie et un tout petit territoire de la République de Dubrovnik. Il y a

5 ensuite des batailles de Sobic-Zrinjski et de Frankopan, et nous avons,

6 près de Sisak, en 1523, réussi à battre, pour la première fois, les Turcs.

7 C'est là le début de la défaite de l'Empire ottoman. Je crois que toute

8 personne dans ce prétoire connaît les éléments principaux du royaume ou de

9 l'Empire ottoman parce qu'ils avaient pris de jeunes garçons pour en faire

10 des janissaires, avec de très fortes et de lourdes taxes et impôts. Ils ont

11 contraint les gens à changer de religion et pendant toute cette histoire,

12 quand on parle de toute cette période de façon rationnelle, mais quand on

13 se fait, quand on a un peu d'imagination, on s'imagine aisément les cris,

14 la famine, les départs, l'immigration forcée et tout le reste.

15 Carte suivante, je vous prie.

16 En combattant à gauche et à droite, et vous pouvez voir sur la carte

17 de quoi avait l'air la Croatie qui s'étirait un peu vers la gauche, puis

18 vers la droite. Le reste des restes, pour ce qui est donc des différents

19 règnes, nous a laissé des territoires de plus en plus petits, de plus en

20 plus pauvres et de plus en plus pillés sans qu'il y ait possibilité de se

21 développer sur le plan de la civilisation, de la culture, de l'économie ou

22 pour ce qui est sur la garde de l'identité nationale. Les Autrichiens ont

23 procédé à une centralisation. Ils ont tué Zrinjski et Kristof Frankopan.

24 Nous pouvons évidemment constater que certains des conquérants ont été

25 meilleurs que les autres. Mais cela ne nie pas le fait que tous ensemble,

26 ils ont été tous très mauvais et qu'ils ne nous ont apporté rien de bon.

27 Napoléon a conquis ce territoire en 1805. Je prie, la diapo

28 correspondant, -- non, non, la diapo précédente, celui qui est relatif à

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1 Napoléon. Voilà. Voilà.

2 Alors, Napoléon est arrivé jusqu'à Zagreb, jusqu'à la rivière Sava, jusqu'à

3 Samobor, et il se peut que la Révolution française et les événements qui

4 ont suivi ont fini par rompre les chaînes du système féodal. Mais pour ce

5 qui est de la Croatie, nous n'avons fait que perdre après son départ des

6 parties de Boka Kotorska, puis celles qui ont fini dans les mains d'autrui,

7 d'un autre Etat, et la République de Dubrovnik, qui a pendant des siècles

8 été indépendante et libre, et qui a signifié le développement de l'identité

9 croate sur le plan culturel et de celui de la civilisation a cessé

10 d'exister.

11 Je vous dirais également qu'il y a eu des batailles entre Français et

12 Russes pour l'île de Hvar, qui est une très belle ville. Je vous ai donc

13 illustré l'histoire de la Croatie et, au fil de 900 ans, que la Croatie n'a

14 fait que subir les forces d'occupation qui sont arrivées là.

15 Je vous prie, Monsieur Mikovic, de nous passer la diapo suivante.

16 A la fin de la Première Guerre mondiale, disais-je, nous avions les

17 Italiens qui ont occupé avant cela une grande partie de l'Istrie, une

18 grande partie des îles de Dalmatie, Zadar et autres régions. Ensuite, le

19 royaume de Yougoslavie est devenu partie intégrante de l'histoire. Les

20 Italiens ont été les premiers à lancer une attaque fasciste contre la

21 Croatie. L'Italie a chassé plus de 100 000 Croates et Slovènes des

22 territoires qu'elle a conquis. Elle a fermé 150 écoles élémentaires et

23 secondaires des Croates. La langue croate a été bannie et c'est la langue

24 italienne qui a été mise en place. Entre 1927 et 1932, il a été condamné

25 106 Croates de l'Istrie à 1 124 années d'emprisonnement. Cinq personnes ont

26 été condamnées à mort. Le royaume de Yougoslavie a pris naissance en guise

27 de résultat de ce qui a découlé de la Deuxième Guerre mondiale.

28 La conception des droits des petits peuples à l'autodétermination a

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1 échoué comme tant d'autres bonnes intentions des peuples pour ce qui est

2 d'une vie autonome face aux attaques des grandes puissances. Une fois de

3 plus, cela a mal tourné pour ce qui est de la Croatie parce que ce sont les

4 Serbes qui se sont accaparés le butin de guerre, la Croatie sur la paume de

5 la main, leur soldatesque a submergé la Croatie qui, à l'époque --

6 appartenait à l'époque, non pas parce qu'elle le voulait. Elle faisait

7 partie des forces de l'axe et c'est ainsi que la Croatie, en terme simple,

8 est restée une fois de plus sans son indépendance. Elle a été rajoutée

9 comme partie intégrante du butin de guerre serbe. De quoi cela a eu l'air ?

10 S'il y a eu des expulsions, des persécutions politiques, on a tué le

11 Croate, Stjepan Radic, qui a été un leader du peuple croate.

12 Carte suivante, je vous prie, Monsieur Mikolic.

13 Alors, s'agissant de cette carte-ci, nous allons voir de quoi avait

14 l'air le royaume de Serbie avant le début de la Première Guerre mondiale et

15 quel a été le territoire sur lequel elle s'étendait ? Vous voyez, donc, le

16 royaume de Serbie et ce qui appartenait à l'Empire austro-hongrois. Après

17 ceci, tous ces territoires ont été appelé royaume des Serbes, Croates et

18 Slovènes. Peu après, cela a été appelé, royaume de Yougoslavie sous le

19 règne du roi serbe.

20 C'est ainsi que la conception de Wilson, relative aux droits à

21 l'autodétermination, a échoué et la Croatie s'est trouvée partagée ou

22 divisée ou subdivisée suivant le partage territorial que vous allez voir

23 sur la diapo suivante.

24 Oui, c'est bien celle-là.

25 Alors, pour ce qui est de la délimitation territoriale du royaume de la

26 Yougoslavie, vous allez voir de quoi cela avait l'air. On a partagé cela en

27 département ou en district. Il n'y a pas eu l'Istrie et les îles de

28 Dalmatie à en faire partie parce que celles-ci ont continué à faire partie

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1 de l'Italie fasciste.

2 Alors, là, le partage administratif en région de ce type est contraire aux

3 frontières historiques et culturelles de l'époque et cela représente le

4 début du concept de Grande-Serbie sur le plan politique qui évolue sur ce

5 territoire-là, à partir du début -- ou plutôt, de la fin de XIXe siècle.

6 Alors, entre 1914 et 1918, il y a eu une terreur de mise en place. On

7 a dissout le Parlement. On n'a pas reconnu les résultats des élections. On

8 a interdit les activités politiques. On a supprimé les partis politiques.

9 Donc, il y a eu une terreur politique de mise en œuvre. Toute forme, de

10 mécontentement, a été étouffée de la façon la plus brutale. Lors d'un

11 soulèvement des paysans, il y a eu plus de 25 tués et plus de 100 blessés.

12 Donc, sous la coupe du régime, il y avait tous les hommes politiques et

13 notamment, ceux du Parti croate du droit.

14 Entre 1909 et 1932, en Yougoslavie, il y a eu 152 procès politiques. Il a

15 été prononcé 18 peines de mort, 734 personnes ont été condamnées à 2 348

16 ans d'emprisonnement et il y a eu 4 peines d'emprisonnement à vie. Alors,

17 pour ce qui est des membres du Parti du droit croate, 43 ont été condamnés

18 à 289 ans d'emprisonnement, cinq ont été condamnés à mort, et deux

19 emprisonnements à perpétuité, 3 ont été pendus. Donc, tout ceci nous dit

20 que la guerre n'a pas commencé dans les années 1900, mais cela a commencé

21 en 1918. C'est une guerre à faible intensité.

22 Cette création s'est maintenue pendant tout ce temps du fait de la

23 terreur politique des garnitures au pouvoir et, en l'occurrence de la

24 garniture politique serbe, cela a subsisté par grâce à des passages à

25 tabac, des meurtres, des sanctions.

26 Diapositive suivante, je vous prie.

27 Il y a eu des soulèvements et un grand combat pour la survie nationale.

28 Donc, lorsqu'une partie s'est avérée devenir intenable, il y a eu

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1 réorganisation de ce royaume de Yougoslavie pour entraîner, créer des banas

2 [phon]. C'est là que nous en arrivons à l'une des notions cruciales

3 utilisée par M. Scott, le banovina, le bana. Ce n'est pas le début de cette

4 création qui est -- ce n'est pas conforme à ce début de mise en place de

5 banovina comme présenté par les soins de l'Accusation, mais c'était ici

6 qu'on peut voir sur ces diagrammes comment cela a été mis en place. Elles

7 sont nombreuses et cela n'a rien à voir avec la façon dont vivaient les

8 peuples auparavant pour ce qui est des groupes ethniques, économiques ou

9 des entités culturelles. Ce n'est qu'après la dictature entre 1929 jusqu'en

10 1931, dictature du roi Alexandre qui a supprimé toutes les formes de la vie

11 politique et démocratique en Yougoslavie et il a décidé ou il a déclaré

12 qu'entre le roi et le peuple, il ne devait pas y avoir d'intermédiaire. Il

13 a supprimé, aboli l'assemblée de Parlement. Pour des raisons tout à fait

14 compréhensibles, à savoir, aux fins de briser l'identité culturelle,

15 ethnique et autre de ces populations qui résidaient dans les territoires

16 concernés, il a créé ce partage territorial. La résistance du peuple

17 croate, la résistance des intellectuels, la résistance, des poètes, des

18 écrivains, enfin, de tout ce qui constitue l'être pensant des paysans et

19 des ouvriers en Croatie, a été très grande. C'est là qu'a eu lieu

20 l'attentat contre le roi de Marseilles. C'est en 1935 qu'a été créé un

21 gouvernement yougoslave pronazi en 1935 et suite à l'instabilité politique,

22 il a été entamé des négociations pour ce qui est de résoudre la question

23 croate en Yougoslavie. La question croate en Yougoslavie n'a plus été une

24 situation tenable aux yeux des autorités de Belgrade qui avaient

25 l'intention à l'origine de résoudre la question de façon plus simple. Et ce

26 n'est que là, et seulement à ce moment-là, qu'il y a un accord entre

27 Cvetkovic et Macek : Cvetkovic, le premier ministre du royaume de

28 Yougoslavie, et Macek, le chef du Parti paysan croate et, à ce moment-là,

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1 chef du peuple croate tout entier aux fins de faire en sorte que les

2 Croates disposent d'une autonomie territoriale afin qu'ils puissent, dans

3 le cadre d'une telle Yougoslavie, développer les potentiels qui doivent

4 être ceux que tout peuple devrait avoir le droit de développer.

5 Diapositive suivante, je vous prie.

6 C'est là que fait son apparition -- non pas cette diapo, je vous prie, la

7 diapo des banovinas, des banas.

8 Alors, c'est là que fait son apparition, cette carte des banas, qui a été

9 si contestée que cela a constitué la raison substantielle pour tout ce qui

10 a été fait par les Croates pendant cette dernière guerre, suivant

11 l'interprétation qu'en a donné M. Scott. A l'occasion d'un autre procès où

12 je suis venu témoigner, j'ai dit à M. Scott que personne en Croatie ne

13 saurait accepter ces banovinas ou c'est banas parce que sur cette carte-là,

14 vous voyez ce que l'on perd parce que, dans le bana, nous n'avons pas

15 Istria, il n'y a pas la Baranja, il n'y a pas Zadar, il n'y a pas les îles

16 croates. Le bana a été une solution de courte durée à l'époque pour qu'il

17 n'y ait pas une guerre civile en Yougoslavie. Elle a été courte. Ce que

18 vous voyez sur la carte en noir, c'est les pertes de territoires croates

19 qui sont ceux que nous avons de nos jours et ce qui est en rouge devait

20 constituer des gains en Bosnie-Herzégovine au sujet desquels on a tant

21 discuté et débattu, et au sujet desquels nous avons été tant et si bien

22 accusés.

23 Je voulais dire aussi autre chose devant les Juges. Pour ce qui est de ce

24 nationalisme croate, mentionné à tant de reprises en sa qualité de

25 catégorie qui, plus ou moins par une propagande incroyable après la

26 Deuxième Guerre mondiale, a été attribuée aux Croates pour dire que c'était

27 là un code génétique les concernant, cela n'est expliqué que par un fait,

28 le fait où les Hongrois ont structuré une frontière à l'égard de la

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1 Croatie. Depuis lors, il n'y a pas eu de nationalisme vis-à-vis des

2 Hongrois. Ils sont allés à Buda et à Pest, les Croates, pour s'y promener

3 et ils ont senti que ce peuple était amical. Au moment où ils ont sorti,

4 ils ont cessé d'être menacés par ce peuple. Les Croates vont à Vienne après

5 quatre siècles de règne autrichien. Ils y vont comme dans une ville amicale

6 sans qu'il y ait un code génétique de nationalisme de leur part. Donc on a

7 oublié en 40 ans tout ce qu'ils nous ont fait. Les Croates vont à Venise,

8 ils vont au Lido. Les Croates reçoivent les citoyens. Il n'y aura un

9 nationalisme qui sera généré par la peur de la disparition, pour ce qui est

10 donc de la survie la plus élémentaire d'un peuple. Nous n'avons pas

11 ressenti de nationalisme vis-à-vis des Français pour le fait que Napoléon

12 ait été là-bas. Nous n'avons pas un code génétique de ce type. Nous avons

13 eu une peur très forte qui a été causée par les pillages, les viols, la

14 terreur. On a coupé les forêts croates pour construire Amsterdam. L'argent

15 n'est pas allé dans nos caisses, mais c'est parti dans les poches d'autrui.

16 Toutes les forêts de Dalmatie sont coupées. Le terrain est dénudé. Mais

17 l'argent qui a été gagné à, en ce faisant, n'a rien construit en Croatie.

18 On n'a pas construit de meilleures maisons pour la population croate. C'est

19 là, le problème fondamental. Le nationalisme, c'est un phénomène social qui

20 traduit la peur de la disparition, la peur d'être tué. A partir du moment

21 où nous avons obtenu quelques sécurités que ce soit pour ne pas être battu,

22 passé à tabac ou pillé. Il n'y a pas eu de nationalisme chez les Croates.

23 Cela s'est manifesté en guise de peur, là où la survie était menacée. C'est

24 là qu'on verra, et on le verra plus tard, c'est la que les Croates ont fait

25 partie des états, des projets politiques qui nous ont conduits à une

26 catastrophe, à des crimes qui ont été commis au nom du peuple croate par

27 des leaders politiques de ce peuple, chose dont nous avons à avoir honte.

28 Je voudrais maintenant que nous passions à la diapo relative à 4145 [phon].

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1 Partant des faits de ce type, et des aspirations du peuple croate à créer

2 enfin un Etat, cette aspiration, ce désir, cette intention, nous ou plutôt

3 nos ancêtres avons qu'épousé, un concept nazi et fasciste. Avec l'aide de

4 Berlin, du nazisme allemand, nous avons créé un Etat croate indépendant.

5 C'est un problème qui au niveau de l'histoire est difficile à comprendre;

6 comprendre comment la volonté et l'intention une fois cristallisées peuvent

7 aboutir à des perturbations de cette nature. Sans parler de la question qui

8 se pose de dire que les intentions même les meilleures se dévoient, si la

9 méthodologie est mauvaise, ces bonnes intentions vous mènent à l'enfer.

10 Cet Etat indépendant croate a ouvert un territoire relativement grand, mais

11 est de nouveau resté sans Istria, sans Zadar, sans les îles croates.

12 Pas cette diapo. Voilà. Non, celle-là.

13 En haut, nous voyons que cet Etat croate indépendant de Pavelic a été

14 subdivisé en deux parties. La partie supérieure qui est en plus clair a été

15 gérée par les Allemands et la partie inférieure a été gérée par les

16 Italiens.

17 Il convient de préciser que l'armée, les Oustachi, à savoir l'armée de

18 l'Etat croate indépendant qui était une armée politique qui ne devait pas

19 passer, n'avait pas le droit de passer du côté jaune là où il y avait les

20 Italiens, parce que là, ils étaient tués et égorgés et pillés par les

21 Chetniks de Djuic. Ces Chetniks que les historiens de nos jours essaient

22 obstinément d'intégrer à la coalition antifasciste. Dans l'Etat croate

23 indépendant, il a été promulgué hélas des lois martiales. Il a été commis

24 de très graves crimes. Les formations italiennes et allemandes l'ont

25 emporté. Et s'agissant des territoires annexés, l'Italie a chassé 17 000

26 Croates et un tribunal pour la Dalmatie a poursuivi en justice plus de 5

27 000 personnes entre 1943 et 1945, où il y a eu 500 condamnés à mort. Les

28 Italiens ont créé un grand nombre de camps de détention, et dans ces camps

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1 les Chetniks ont égorgé et tué plus de 45 000 Croates et Musulmans.

2 Messieurs les Juges, pour tout ceci il existe des preuves, et on les a

3 présentées ici. Cela a été donné pour être traduit et cela sera disponible

4 dans toutes les phases du procès.

5 Je vous prie maintenant de nous présenter la carte suivante -- ou plutôt

6 non, le tableau. Le tableau qui comporte également en arrière une carte.

7 Alors sur ce tableau, nous pouvons voir où est-ce qu'il y a eu des

8 camps de détention et des lieux d'exécution. Sur la partie inférieure, on

9 voit Rab, Molat, Vodica, Mutar, Olib, Zlarin, Lovran et Prevlaka. Tout cela

10 a été des camps de détention italiens, et voilà le total des personnes

11 tuées. Pour ce qui est des camps tenus par les leaders politiques croates

12 se trouvaient à Jasenovac, Stara Gradiska, Gospic, Pag, et ainsi de suite.

13 Tout ceci est bien pénible. Tout ceci est très teinté d'obscurité, et cela

14 a coûté bien trop de vies humaines. Cela a été la conséquence de tout ce

15 qui s'est produit auparavant sur ces territoires-là et cela a fait de ce

16 peuple des individus fous de désespoir, dénués d'orientation ou de lignes

17 directrices sur le plan politique. C'étaient des peuples, des individus

18 désespérés qui, dans ces situations-là, ont commis de grosses erreurs. Bien

19 entendu, en Croatie il n'y a pas de gens qui n'auraient pas honte de cette

20 partie-là de l'histoire en Croatie.

21 Par la suite, nous allons passer par la Serbie de Nedic. Nous allons passer

22 à la période et au territoire placé sous le contrôle des Partisans.

23 Avancez encore un peu, je vous prie.

24 Vous avez vu avant cela la carte de la Serbie de Nedic et une organisation

25 pro-fasciste qui a été l'une des premières à résoudre la question des Juifs

26 pendant le règne du IIIe Reich. Et la carte que vous avez sous les yeux

27 c'est "le territoire sous le contrôle des Partisans." Là vous avez la NDH,

28 l'Etat croate indépendant, le contrôle des territoires contrôlés par les

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1 Italiens et par les Allemands et en bleu, à l'intérieur, ce sont des

2 régions qui ont été contrôlées par des compagnies et des unités de

3 Partisans.

4 La population croate pendant la Deuxième Guerre mondiale s'est subdivisée

5 en deux parties. Certains ont rejoint les rangs de l'armée de Pavelic et de

6 l'Etat croate indépendant. Une grande partie de ce peuple croate, notamment

7 en Dalmatie et la Croatie centrale, ont été parmi les premiers au monde à

8 rejoindre les rangs des unités de combattants Partisans et qui ont créé des

9 unités de lutte partisane antifasciste non loin de Sisak. Sur les cinq

10 corps d'armée qui ont existé à la fin de la guerre sur le territoire de la

11 Yougoslavie, trois ont été placés sous le commandement des unités croates

12 de Partisans.

13 C'est ainsi que le calvaire de ce peuple s'est poursuivi.

14 Heureusement, l'antifascisme a apporté au peuple croate deux choses;

15 d'abord le droit à l'existence, et ensuite à la session du conseil

16 antifasciste de l'AVNOJ, nous avons eu la possibilité dans le cadre cette

17 fois-ci du parti communiste à prendre part à la création d'une Yougoslavie

18 socialiste. D'autre part, l'esprit communiste radical, qui ne différait pas

19 beaucoup de l'esprit radical fasciste et nazi, a cherché à se venger. Après

20 1945, en leur qualité de vainqueur, ils ont cessé d'être antifascistes et

21 ils sont devenus des communistes de type stalinien, ce qui signifie qu'à

22 Bliborg où un chemin de la croix, au chemin de la croix, ils ont abattu

23 quelques 200 000 Croates. Ils ont changé, modifié la qualité, le caractère

24 de la propriété, et après le conflit avec Staline, Tito a emprisonné

25 quelque 20 000 personnes qui avaient une façon de pensée différente de la

26 sienne, et l'Etat fasciste a été suivi par la création d'un Etat communiste

27 fasciste qui, pour ce qui est de son unité et de sa fraternité, pour ce qui

28 est de sa contrainte économique, elle les a maintenus et mis en œuvre par

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1 la répression, par des meurtres politiques, par des détentions, par des

2 procès politiques.

3 La crise économique, qui est survenu en 1965 lorsque la famine était

4 arrivée aux portes de la Yougoslavie, a été résolue par l'ouverture des

5 frontières. Tito a vendu un million de personnes à l'Occident, Occident qui

6 avait besoin de main d'œuvre. Ils ont d'abord obtenu des hommes et comme le

7 dirait Max Frisch, un homme de plume : "Ils ont demandé des ouvriers et ils

8 ont obtenu des hommes." La différence entre ces catégories est grande et

9 cela pèse lourdement sur l'Europe de façon variée.

10 Alors à Bliborg, il y a eu 200 000 Croates de tuer. Rien qu'en Bosnie-

11 Herzégovine les autorités ont tué 5 098 personnes et ils ont condamné 341

12 prêtres et condamné plus de 5 000 personnes. Dans le conflit avec Staline,

13 il y a eu 55 663 qui ont été suspectés de coopérer avec la "common form",

14 et 16 300 et quelque personnes ont été emprisonnées. Tout le "folks

15 deutscher" [phon], les Allemands du territoire ont été chassés de leurs

16 terres. On a chassé des Italiens, et on les a jetés dans des fosses. On a

17 chassé des Polonais qui étaient 15 000 à travailler dans les mines de

18 Bosnie-Herzégovine, et tout ceci a constitué la triste histoire, la guerre

19 incessante, guerre d'intensité plus faible seulement.

20 A partir de 1945, il a été chassé plus de 500 000 personnes. La minorité

21 nationale a été pratiquement massacrée. La minorité nationale polonaise a

22 été chassée. A Goli Otok, une île on a enfermé plus de 20 000 personnes, et

23 il y a eu plus de 30 000 procès politiques entre 1945 et 1989. Pour ce qui

24 est de l'immigration croate, il y a eu 77 personnes de tuer et 24 attentats

25 organisés qui ont échoué.

26 Cela a été une dictature, une dictature au véritable sens de ce terme.

27 Malheureusement, quand un dictateur vit longtemps comme cela a été le cas

28 de Castro, peu à peu les gens s'habituent aux choses telles qu'elles sont,

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1 et les milieux intellectuels commencent à trouver des aspects positifs. Le

2 fait que de voir les gens fuir sur des canots, sur des pneus de voitures,

3 cela on l'oublie, mais c'est le fruit de cette dictature de cet homme qui

4 est l'un des dix plus grands criminels de ce monde. Il y a eu 120 hommes

5 d'Etat qui sont venus à son enterrement. La Yougoslavie avait bonne mine.

6 Les informations n'étaient pas très grandes ou très importantes, et tout

7 cela a été enveloppé dans un emballage des intérêts d'autrui. Notre effort

8 intellectuel, pour ce qui était de trouver de la compréhension, n'a fait

9 que faiblir au fil du temps. Lorsque nous prenons un bon verre quelque

10 part, lorsque nous voyons des impérialistes français, tout ce qui passe

11 autour de nous commence à nous intéresser de moins en moins ou dans une

12 mesure de moins en moins grande.

13 Parlons maintenant de la période qui va de 1980 à 1989, 1980, 1989,

14 Monsieur Mikovic.

15 Entre 1980 et 1989, nous assistons au décès de Tito, à la crise au Kosovo,

16 à l'intervention de la JNA et de la police. Le congrès de la Ligue des

17 Communistes de désagrègent en raison d'un défaut d'unité. Les intellectuels

18 serbes rédigent leur mémorandum de l'Académie des arts et des sciences en

19 1986. Nous voyons à partir de Moljevic, de Karadzic, de Garasanin, un

20 certain nombre de dirigeants politiques qui commencent à dire que les

21 territoires serbes sont tous ceux sur lesquels résident des Serbes.

22 Slobodan Milosevic, à 8e Session de la Ligue des Communistes, en

23 1987, devient le chef de la Serbie. Il y a répression des Serbes contre le

24 Kosovo qui est absolument violente. Les prisons sont pleines d'Albanais. La

25 constitution de la République fédérative socialiste de Yougoslavie est

26 démantelée. C'est dans ces conditions que nous voyons des préparatifs de

27 plus en plus rapide, de plus en plus intense à ce qui va advenir. La

28 catastrophe se prépare. Tout le monde en est conscient. Tout le monde voit

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1 mais refuse de le voir.

2 Diapo suivante, je vous prie.

3 La crise au Kosovo. L'armée populaire yougoslave intervient. Des

4 représentants de toutes les républiques interviennent au sein de la JNA. Le

5 problème est réglé par le sang. Les travailleurs sont en grève, et les

6 choses semblent se régler.

7 Je vais maintenant vous parler de la politique serbe dans l'ex-

8 Yougoslavie, à commencer par Gracanin en passant par Vuk, Karadzic,

9 Moljevic, et d'autres.

10 Diapo suivante.

11 Vous voyez ici une carte qui illustre ce dont je vais parler. Dans

12 tous les documents rédigés par des intellectuels serbes, nous voyons

13 l'expression des mêmes souhaits sur le plan politique en particulier.

14 Diapo suivante.

15 Le mémorandum de l'Académie serbe, en 1986.

16 Diapo suivante. Ce mémorandum en reste au même concept. Vous avez ici

17 des éléments traduits que je prie chacun de lire car c'est un texte assez

18 long.

19 Diapo suivante.

20 Abrogation de la constitution yougoslave. Diapo suivante. Donc, la

21 Yougoslavie se développe dans les conditions illustrées avec de très

22 nombreuses réunions, répressions contre le Kosovo, abrogation de la

23 constitution, suppression des provinces autonomes qui formaient une

24 catégorie à part dans le pays. Ces provinces donc, n'existent plus en tant

25 que telles en Yougoslavie.

26 1989, 1990, le 1er septembre, 14e Congrès, la dissolution est décrétée. La

27 Yougoslavie ne peut plus exister. Des parties sont créés en Croatie. Des

28 élections se tiennent en Croatie en avril et en mai 1990. Les gens y

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1 envoient des représentants dans des conditions tout à fait pacifiques, qui

2 exercent leur volonté indépendante, et le Dr Franjo Tudjman devient, à ce

3 moment-là, président de la Croatie, dans des conditions très différentes de

4 celles qu'a décrites M. Scott.

5 Je tiens à vous dire au préalable avant de poursuivre que le système

6 yougoslave se composait de deux sous-systèmes. L'un était représenté par

7 l'armée populaire yougoslave, et le deuxième par la Défense territoriale

8 sur le plan de la défense du pays.

9 La Défense territoriale relevait des républiques. Elle répondait au

10 système d'autogestion et était responsable devant les gouvernements des

11 républiques. Elle était partie intégrante du concept de la Défense

12 populaire généralisée.

13 A savoir qu'en cas d'attaques contre la Yougoslavie de la part du

14 pacte de Varsovie à l'est ou de la part de l'OTAN à l'ouest, selon la

15 pensée des responsables politiques de l'époque, la Yougoslavie devait être

16 en mesure de ne pas céder à ces attaques, et donc l'idée, c'était que le

17 peuple allait prendre sur lui, la lutte, car personne ne pouvait accepter

18 de capituler. Dans ces conditions, chaque entreprise, chaque immeuble avait

19 dans un coin du bâtiment, un local dans lequel étaient regroupées des armes

20 destinées à assurer la défense populaire.

21 En 1990, l'armée populaire yougoslave, sans le moindre débat

22 préalable et de façon tout à fait illégitime, en Croatie et en Bosnie-

23 Herzégovine, la JNA confisque tout l'armement de la Défense territoriale,

24 donc il ne reste rien. Le peuple, dans ces conditions, reste les mains nues

25 et la 4e Force européenne va, dès lors, très peu de temps après, démontrer

26 sa façon de procéder, sa façon de se conduire.

27 L'attaque contre la Croatie intervient le 17 août 1990. Vous voyez

28 sur la carte que vous avez sous les yeux actuellement, l'illustration de la

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1 situation au moment où a lieu une rébellion avec intervention, avec prise

2 d'une poste de police. Les hélicoptères de la police croate souhaitent

3 intervenir entre les parties qui s'opposent. Des représentants de la police

4 l'ont envoyé pour rétablir l'ordre constitutionnel, et ils sont interceptés

5 par des avions de la JNA et contraints à atterrir sur l'aéroport de Bihac.

6 C'est cet événement qui peut être considéré comme le début de la guerre en

7 Croatie car, dès lors, que quelqu'un recourt à la force militaire pour vous

8 empêcher de faire valoir les droits qui vous sont garantis par la

9 constitution, il s'agit d'oppressions, et à ce moment-là, l'événement

10 survenu ce jour-là constitue la date du début d'une guerre.

11 Il y a 35 ans, j'étais jeune étudiant, et j'ai acheté un livre de Werner

12 Heisenberg, Prix Nobel de physique, très connu, en matière de physique

13 mécanique. Ce livre présente des théories très intéressantes de la

14 connaissance. Il débat, en particulier, des théories de Newton et de la

15 mécanique quantique dont il était considéré à l'époque comme concernant une

16 distribution statistique susceptible de nous faire rapprocher au plus près

17 de la vérité et ce concept vaut partout, y compris devant ce Tribunal. Est-

18 il réellement possible d'établir des liens aussi étroits, aussi solides

19 entre la phénoménologie d'une guerre et la réalité des combats, seulement

20 de ceux qui y participent ? Car c'est bien cela que M. Scott nous demande

21 de comprendre. Ou les problèmes sont-ils abordés d'une façon un peu

22 différente ? Doivent-ils être considérés comme des problèmes davantage

23 sociaux, dynamiques, avec une évolution statistique, problèmes qui évoluent

24 au jour le jour compte tenu des turbulences qui marquent une guerre et qui,

25 malheureusement, rendent très difficile la recherche d'une solution car, le

26 plus souvent, dans ce genre de situation, le choix n'existe qu'entre deux

27 mauvaises solutions. Il n'existe pas de telle solution malheureusement, et

28 l'on se voit contraint de choisir le moindre mal, à savoir, se prononcer en

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1 faveur d'une solution qui fera moins de mal que la solution qui lui est

2 opposée. Voilà très souvent le problème fondamental qui se pose en cas de

3 guerre. Mais cessons de parler de physique.

4 Le jeune Werner Heisenberg était tout à fait malheureux en 1933 avec le

5 début des persécutions en Allemagne, persécutions qui frappent, y compris

6 les écrivains, les auteurs de livres. Il veut allé voir le Pr Planck, un

7 autre prix Nobel de ses collègues, grand créateur bien connu de "l'Equation

8 constante de Planck," et je vais vous lire une page de ce qu'il écrit, je

9 cite : "Vous êtes venu me demander conseil sur des questions politiques."

10 C'est ce que Planck dit au début de leur conversation. "Mais je crains fort

11 de n'avoir aucun conseil à vous donner. Je n'ai plus aucun espoir de voir

12 la catastrophe qui menace l'Allemagne, et donc les scientifiques allemands,

13 de voir cette catastrophe s'arrêter. Personne n'a pu la possibilité d'agir

14 sur les déplacements de la larve lorsque celle-ci commence à couler, en

15 voyant de victimes, combien de vies humaines vont-elles être détruites. Les

16 lois de la nature l'ont déjà déterminé, même si nous ne le savons pas

17 encore. J'insiste, 'les lois de la nature.' Les énergies de société, à un

18 moment-clé, constituent des lois naturelles : la haine, la révolution, la

19 souffrance, la mort, l'expulsion, la perte de l'espoir, la perte du moral,

20 la perte de tout espoir vis-à-vis de la communauté internationale. Tout

21 cela, ce sont des lois naturelles. Dans cet ensemble, il est très difficile

22 pour un être humain, un individu donné de s'y retrouver."

23 Donc, il nous dit : "Si vous ne démissionnez pas, si vous décidez de

24 rester ici, les tâches que vous aurez à accomplir seront d'une nature tout

25 à fait différente de celle qu'elles sont aujourd'hui. Vous n'êtes pas en

26 mesure d'arrêter la catastrophe. Pour survivre, il va vous falloir sans

27 cesse accepter des compromis. Mais ce que vous pouvez faire, c'est tenter

28 de concert avec d'autres, vous pouvez tenter de créer des îles de

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1 résistance. Je pense que tous ceux, qui auront éventuellement la

2 possibilité de faire quelque chose qui, par exemple en raison de leur race

3 ne sont pas contraints à l'exile, devraient rester ici pour préparer

4 l'avenir plus lointain. Ce sera, sans aucun doute, une tâche très dure qui

5 n'est pas dénuée de danger. Le compromis que vous aurez à déterminer vous

6 sera reproché plus tard. Vous serez même peut-être puni pour l'avoir

7 détermine ce compromis. Mais peut-être est-ce tout de même une chose qu'il

8 importe de faire. Bien entendu, je ne saurais reprocher à personne de

9 prendre une décision allant dans le sens inverse. Je ne saurais reprocher à

10 personne de partir s'il considère que la vie est devenue insupportable en

11 Allemagne, s'il considère ne pas pouvoir supporter d'insister à l'injustice

12 qui se développe ici, pas plus qu'il ne saurait l'empêcher. Mais, dans la

13 situation atroce dans laquelle se trouve l'Allemagne aujourd'hui, il n'est

14 plus possible d'agir dans le respect du droit ou de la justice. Il n'est

15 plus possible d'agir dans le respect du droit ou de la justice. Quelle que

16 soit la décision que vous prendrez, vous participerez à une espèce

17 d'injustice quelle que soit votre décision, vous serez participant d'une

18 injustice. Donc, finalement, chacun se retrouve face à lui-même, seul face

19 à lui-même. Il n'y a plus aucun sens à donner des conseils ou en recevoir.

20 Donc, à vos côtés, la seule chose que je peux vous dire, c'est que quoi que

21 vous fassiez jusqu'à la fin de la catastrophe, vous ne devez pas espérer

22 pouvoir éviter un grand nombre de victimes. Mais avant de prendre votre

23 décision, n'oubliez pas les temps qui viendront par la suite."

24 L'histoire de l'humanité est marquée de plus 10 000 guerres, et les

25 intellectuels se sont toujours trouvés confronter à un dilemme, soit fuir

26 ces guerres, soit s'écarter de ces guerres, soit rester dans ces guerres.

27 Si l'on décide de rester au sein d'une guerre, le pouvoir que l'on va

28 pouvoir exercer n'a rien à voir avec la volonté ou avec le désir que l'on

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1 peut nourrir personnellement. C'est l'histoire des circonstances.

2 Nous n'avons pas voulu le mal. Nous avons confronté le mal. Car le

3 plus souvent, nous savions que nous n'allions pas l'emporter. Mais ce que

4 nous allons prouver ici, en tout cas, je vais le faire avec des preuves

5 tout à fait claires, c'est que les choses qui se sont passées, se sont

6 passées jour après jour, avec 50 à 60 décisions prises à tous les jours

7 avec des hommes qui mourraient, avec des hommes qui étaient blessés, avec

8 des hommes qui étaient expulsés, avec des problèmes qui étaient très

9 difficiles de régler. Le pays avait été attaqué, avait subi une agression,

10 il avait modifié sa structure politique, il n'était pas un état, il était

11 en train de se créer en tant qu'état. Il était en train de modifier sa

12 structure politique durant l'agression.

13 En 1991, ce qui se passait, survient. Monsieur Mikovic, diapo

14 suivante, je vous prie.Sur la carte qu'on nous présente maintenant, vous

15 verrez l'illustration de l'agression serbe contre la Croatie. Pakrac, début

16 du mois de mars 1991. Plitvice, le 31 mars 1991. Borovo Selo, le 2 mai

17 1991. L'armée populaire yougoslave attaque la Slovénie. La guerre dure peu

18 de temps car la Slovénie ne faisait pas partie des plans de la soldatesque

19 serbe, des plans politiques de la soldatesque serbe, qui ne la considérait

20 pas comme devant faire partie de la Serbie.

21 Vous voyez ici, la carte qui nous présente l'attaque générale de la Serbie

22 contre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. Là, j'ai un avertissement à

23 lancer : Si la Bosnie-Herzégovine était un Etat officiel du point de vue

24 juridique, alors elle était l'agresseur contre la Croatie car c'est à

25 partir du territoire de la Bosnie-Herzégovine que la Croatie a été

26 attaquée. Pendant toute la guerre, la Bosnie-Herzégovine, en tant qu'entité

27 officielle sur le plan juridique, si c'est bien ainsi, on doit considérer a

28 attaqué la Croatie avec des conséquences tout à fait tragiques. Deux tiers

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1 des frontières non loin de Dubrovnik, en Dalmatie, à Sisak, à Vukovar, bien

2 dans tous ces lieux la Bosnie-Herzégovine a attaqué la Croatie. Bien

3 entendu, il s'agit de la partie de la Bosnie-Herzégovine qui avait été

4 prise par la Serbie. Mais aujourd'hui cette continuité politique de l'Etat,

5 considérée comme existant sur le plan légal et juridique à l'époque, se

6 poursuit. Si nous faisons l'état des lieux pour voir qui a agressé qui à

7 l'époque, la Bosnie-Herzégovine doit être considérée à cette époque-là

8 comme agresseur de la Croatie.

9 A ce moment-là commence, bien entendu, des tentatives de désarmer la

10 police. Il y a ensuite le référendum sur l'indépendance. Une fois que le

11 Parlement décrète l'indépendance, vous avez la déclaration de Brioni

12 prononcée le 7 juillet. Il est demandé au président du Parlement croate

13 d'accepter, d'affirmer la déclaration d'indépendance de trois mois. La

14 Communauté européenne et l'Europe demandent à la Croatie de geler cette

15 décision de façon à créer les conditions de négociation qui sont censées

16 durer trois mois pour aboutir à une solution susceptible de ne pas

17 déboucher sur la guerre. Selon ces bonnes ou ces anciennes habitudes, la

18 Croatie accepte. Elle n'a aucune raison de refuser.

19 Le 7 juillet a lieu la déclaration de Brioni. Trois mois plus tard, à la

20 fin du moratoire sur la proclamation de l'indépendance, l'armée populaire

21 yougoslave intervient, elle bombarde le palais du gouvernement à Zagreb et

22 le Dr Franjo Tudjman, président de la présidence de l'Etat croate se trouve

23 dans ce palais à Zagreb à ce moment-là.

24 Diapo suivante, je vous prie.

25 Au cours des tous derniers jours du moratoire, il y a tentative

26 d'assassinat sur Franjo Tudjman, car les agents membres des services

27 secrets et dépendant du ministère de l'Intérieur est si important pour

28 espionner la Croatie qu'on sait exactement qui mange à quelle heure, qui

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1 boit à quelle heure et qui se trouve à chaque instant en tel endroit. Vous

2 verrez un peu plus tard au cours du procès un film à ce sujet et c'est dans

3 ces conditions que Franjo Tudjman évacue ce lieu suite à une action tout à

4 fait classique que l'on ne peut qualifier que d'action terroriste.

5 Diapositive suivante, je vous prie.

6 Au cours du mois -- dans la période qui va du mois de novembre 1991 -- au

7 mois de novembre 1992 à Slavonski Brod et dans les environs 180 personnes

8 sont tuées par les bombardements et les pilonnages provenant de Bosnie-

9 Herzégovine. Ce sont eux qui attaquent la ville et qui bombardent la ville.

10 Quand je poserai ici la question de savoir s'il y a eu une seule occasion

11 où Alija Izetbegovic a expliqué cet événement, il n'y en a pas. Lorsque je

12 poserai la question de savoir s'il a proposé un accord militaire à Franjo

13 Tudjman pour que soit organisée une défense commune ? La réponse sera non.

14 Car s'il y avait eu un corps militaire entre la Bosnie-Herzégovine et la

15 Croatie, cela aurait signifié, selon la constitution de Croatie, qu'un

16 soldat croate n'aurait pas eu le droit de franchir la frontière. Cette

17 armée croate dont on a tellement parlé comme étant intervenue dans la

18 guerre en Bosnie-Herzégovine, cette armée croate n'aurait pas pu recevoir

19 l'ordre de franchir la frontière pour se rendre dans un autre territoire,

20 alors qu'il l'a fait de son propre gré, mais cela c'est une autre affaire.

21 Alors, Mesdames et Messieurs, regardez cette diapositive.

22 Vingt-sept enfants ont été tués. Vous voyez leurs photographies. La

23 diapositive s'il vous plaît.

24 Voilà ce qui permet de déterminer le cadre dans lequel existait cette

25 énergie de la société, c'est le cadre qui est fixé ici pour le

26 développement de l'émoi, du trouble dans la population. Des photos

27 d'enfants morts, des photos de personnes persécutées, exécutées, chassées

28 de chez elle, voilà ce que le peuple croate a à l'esprit. Voilà, Mesdames

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1 et Messieurs, ce qui mène à la guerre et c'est à cela qu'il faut penser

2 lorsque l'on réfléchit aux décisions prises par tel ou tel responsable

3 politique à tel ou tel moment par les propos tenus par tel ou tel

4 représentant politique à tel ou tel moment et lorsqu'on réfléchit aux

5 conséquences de ces propos et de ces décisions.

6 Pour ma part, j'ai été volontaire dans le secteur de la Posavina. Si

7 j'avais donné un ordre quelconque à l'un de mes subordonnés, cet ordre, la

8 personne qui le recevait pouvait s'y opposer. Si quelqu'un est en mesure de

9 me montrer un homme qui aurait refusé d'obtempérer à un ordre parce qu'il

10 nous demandait de franchir la frontière illégalement, qu'on me le montre.

11 Il n'y en a pas. Certains ordres de ce genre ont été donnés ici et là et

12 certains y ont obéi, mais rien de cela n'a été fait dans un cadre légal,

13 officiel, général.

14 Monsieur le Président, peut-être serait-il bon de faire une pause ?

15 Je vous remercie de votre attention jusqu'à présent.

16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez tout à fait raison. Il est 15 heures

17 30. Nous allons faire la pause technique de 20 minutes, et nous reprendrons

18 aux environs de 15 heures 50.

19 --- L'audience est suspendue à 15 heures 30.

20 --- L'audience est reprise à 15 heures 56.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience étant reprise, je vais donner la parole à

22 M. Praljak.

23 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

24 Juges, j'aimerais apporter une correction, au début apparemment, j'ai mal

25 prononcé un mot. J'ai parlé ou j'aurais dit impérialisme français, je

26 voulais parler des impressionnistes français. Il suffit simplement d'un

27 lapsus de ma part. Je tiens à m'excuser.

28 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci beaucoup pour cela.

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1 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je m'excuse, encore une fois, Monsieur

2 le Président.

3 Maintenant, au cours de la partie suivante de mon exposé, nous allons

4 examiner certains avis concernant le début de la résolution de la crise des

5 divers avis exprimés par la communauté internationale dans les Commissions

6 d'arbitrage, dans d'autres instances, à propos du début de la crise et de

7 la façon dont elle pouvait être résolue. Par exemple, nous avons la

8 commission d'arbitrage qui estimait que la République fédérative socialiste

9 de Yougoslavie était en processus de désintégration.

10 Diapositive suivante.

11 Nous avons le Parlement de la République de Croatie qui a fait une

12 déclaration à propos de l'agression qu'a subi la République de Croatie.

13 La diapositive suivante, s'il vous plaît. La suivante, poursuivez, s'il

14 vous plaît.

15 Le Parlement de la République de Croatie a pris une décision le 8

16 octobre 1991 afin de couper les liens. La Conférence consacrée à la paix en

17 Yougoslavie s'est exprimée également. Vous avez également l'avis de la

18 Commission d'arbitrage.

19 Quelle fût la réponse croate ? Tout d'abord la Croatie a lancé

20 et formé plusieurs mouvements en rapport de la paix vous aviez les maires

21 en faveur de la paix. Vous avez les forces de l'art croate qui ont essayé

22 de montrer par tous les moyens possibles que le peuple croate et ses

23 instances également élues souhaitent avoir une séparation pacifique et dans

24 la dignité, séparation par rapport aux autres républiques et aux états qui

25 en vertu de la constitution avait constitué la Fédération yougoslave. Vous

26 avez la déclaration de Brioni, vous avez la trêve de Sarajevo.

27 Diapo suivante.

28 Le Parlement de la République de Croatie a pris d'autres conclusions.

Page 936

1 Mais sans cesse on a répété la même chose, à savoir que la Croatie allait

2 être un état démocratique respectant les normes les plus élevées de respect

3 des droits des minorités, des normes les plus élevées qu'on connaisse dans

4 la Communauté européenne.

5 Tout ceci est repris dans un livre. Il y a 227 documents.

6 Tout ce qui a été signé par les institutions de l'Etat croate, notamment,

7 par le président de l'Etat, par le Parlement. Nulle part à quelque moment

8 que ce soit, il n'y a eu un document qui aurait été signé, un mot qui

9 aurait été prononcé en public. Jamais il n'y a eu un seul accord qui aurait

10 jeté le doute sur l'intégrité territoriale de l'Etat de la Bosnie-

11 Herzégovine. Vous avez dans ce document ou dans ce livre 227 documents. Il

12 s'agit de lettres, de décisions, de conférences consacrées à la paix.

13 Jamais aucun organe légalement élu par l'Etat de Croatie n'a douté de la

14 nécessité d'assurer la survie, la subsistance, l'existence et l'intégrité

15 territoriale de la Bosnie-Herzégovine.

16 Le fait que la Bosnie-Herzégovine ait connu des problèmes au niveau

17 de son organisation interne parce que vous avez trois peuples constitutifs

18 qui y vivent, et c'est vrai de tout peuple souverain, chacun de ces peuples

19 a le droit de douter de l'organisation interne de l'Etat et a le droit de

20 voir quels sont ses droits en tant que nation et en tant qu'individu de cet

21 Etat, quels seraient les droits qui lui seraient accordés, et en fait, ce

22 fût là le seul problème, le problème fondamental qu'il y a eu et ceci a été

23 la cause de tous les malheurs qui l'ont frappé l'agression de la Serbie sur

24 la Bosnie-Herzégovine, ce qui a entraîné une vague sans précédent de haine,

25 de souffrance, et de douleur.

26 La déclaration de Lisbonne à propos de la Yougoslavie, prise par les

27 ministres des Affaires étrangères de la Communauté européenne le 17 février

28 1992, dit ceci, elle dit que la conférence est en faveur d'un dialogue, un

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1 dialogue entre toutes les parties intéressées en Bosnie-Herzégovine afin de

2 parvenir à une solution dans le respect de la constitution, solution qui

3 doit contenir compte des aspirations légitimes de chacun des peuples vivant

4 dans les frontières inviolables et inaliénables de cet Etat.

5 Vous avez en mars 1992, un élément qui vous constitué la base de la

6 question qui sera posée au moment du référendum. Dans le cadre de la

7 Commission Badinter, il s'agissait de fournir un avis juridique sur la

8 question de savoir si les républiques pouvaient venir des états. On dit

9 ceci : "La Bosnie-Herzégovine deviendrait un Etat se composant de plusieurs

10 unités constitutives à partir d'un socle national qui tiendrait compte de

11 critères économiques, géographiques et autres. La souveraineté repose dans

12 chacun des citoyens, qu'il soit Serbe, Croate ou Musulman, et repose aussi

13 sur les épaules de chacun des peuples ou groupes qui exercent leur

14 souveraineté dans les unités constitutive et dans les organes de la

15 république. Dans les confins de la Bosnie-Herzégovine, des unités

16 constitutives seront établies, unités dont le territoire est défini dans la

17 partie E du texte concerné".

18 Par conséquent, l'idée des intérêts internationaux du cadre

19 territorial de ces intérêts nationaux n'était pas le seul apanage de la

20 direction ou des dirigeants croates en Bosnie-Herzégovine. Au contraire,

21 cela a été l'avis exprimé par la communauté internationale avant

22 l'agression qu'a subi la Bosnie-Herzégovine. Le plan Cutileiro du 18 mars

23 1992 prévoyait que la Bosnie-Herzégovine allait être un Etat se composant

24 de trois unités constitutives fondé sur le principe national qui tiendrait

25 compte de critère économiques, géographiques, et autres.

26 Tous ces documents se retrouvent dans un recueil de 227 documents

27 dans ce livre. Et je vais, une fois de plus, le répéter, nulle part,

28 jamais, les institutions et instances de la République de Croatie n'ont

Page 938

1 contesté l'intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine ou mis en doute.

2 Poursuivons.

3 La Yougoslavie en 1985, vous avez ici le dispositif de la JNA et de ses

4 différents corps qui la constituent. C'est de cette façon-ci qu'il y a eu

5 de la part de la JNA une division territoriale de la Yougoslavie. Vous avez

6 ici un dispositif militaire.

7 En 1987, en guise de préparatifs en vue de l'agression dirigée sur la

8 Croatie, la JNA a été réorganisée, restructurée. Elle a établi une nouvelle

9 division territoriale, vous le voyez, elle correspond à ce plan notoire

10 politique serbe, tout ce qui part de l'axe Virovitica, Karlovac et Karlobag

11 devrait appartenir à la Serbie. Vous avez ces régions militaires qui ont

12 leur commandement à Belgrade, et ceci a été établi comme étant le schéma

13 directeur qui devait être appliqué à l'avenir pour les plans politiques.

14 C'est de cette façon-ci que la guerre devait se dérouler. Il ne devait pas

15 s'agir d'événements isolés, ici et là, en Bosnie-Herzégovine et en Croatie.

16 On ne peut pas voir cette guerre de façon aussi fragmentaire. Ce fût une

17 guerre intégrale au cours de laquelle deux tiers de la Croatie et la

18 totalité de la Bosnie-Herzégovine étaient conformes à ce qui devait,

19 d'après la pensée politique serbe dont nous avons déjà entendue parler,

20 devait faire partie de la Serbie.

21 Poursuivons.

22 Le déploiement opérationnel des forces, comment s'est-il présenté ? Il y a

23 eu un déplacement de certains corps vers la Serbie, d'autres vers Bihac. Le

24 13e Corps a été muté de Pula vers le Monténégro, des préparatifs étaient

25 déjà en cours en vue de lancer une opération et une attaque généralisée sur

26 la Bosnie-Herzégovine dans sa totalité.

27 Structure nationale, pour ce qui est des officiers de l'armée, vous la

28 voyez ici. Ceci ne correspond aucunement à la composition ethnique de la

Page 939

1 Yougoslavie. Vous voyez les différences ici. Vous avez 51 % de plus de

2 Serbes par rapport à la population totale, vous avez 148 % de plus de

3 Monténégrins, alors que vous avez 5,3 % de moins de Croates, 6,6 % moins de

4 Slovènes, 7,8 % de moins de Musulmans, beaucoup moins d'Albanais et plus de

5 Yougoslaves.

6 Diapo suivante, s'il vous plaît.

7 Hélas, nous arrivons à la partie la plus douloureuse de ce récit. La

8 question est de savoir qui était vraiment à même d'empêcher que la guerre

9 n'éclate en Yougoslavie ? Qui avait les renseignements sur ce qui se

10 passait ? Je le savais, mais je n'avais pas les pouvoirs nécessaires pour

11 empêcher cette guerre.

12 Lorsque M. Baker a déclaré à Belgrade que les Etats-Unis voulaient

13 que la Yougoslavie continue d'exister, ce fût considéré comme étant un

14 droit légitime qui lui revenait, lui qui était au fond le ministre des

15 Affaires étrangères américain. Il exprimait la volonté politique et le

16 souhait de son gouvernement. Mais vu tout ce qui s'était passé auparavant,

17 vu ce qui avait été préparé, quelles furent les implications, les retombées

18 véritables de telles paroles ? Car on a le droit de mettre un pull rouge

19 sur quelqu'un, mais si vous affublé quelqu'un d'un pull rouge lorsqu'il est

20 dans un arène et que c'est une corrida, en face d'un taureau, vous pouvez

21 vous attendre à des conséquences. Ce sont les faits. Ici, en fait, on donne

22 un feu vert.

23 Il n'y a pas d'armes. Vous, vous n'avez pas d'armes, pas même celles

24 que vous achetez avec vos propres fonds. Nous voulons que cet Etat continue

25 d'exister, et il faut trouver une façon d'y arriver.

26 Je ne pense pas que M. Baker ou tout autre partisan de la poursuite

27 de l'existence de cet Etat était conscient des conséquences de ce qui

28 allait se passer. Mais voici comment les Serbes ont interprété ces paroles.

Page 940

1 Par conséquent, l'ignorance a entraîné des événements que tout un chacun de

2 nous connaît.

3 L'événement suivant, là, il est vraiment difficile rationnellement de

4 comprendre la déclaration -- ou plutôt, la Résolution 713 du Conseil de

5 sécurité, qui a imposé un embargo sur les armes, sur l'importation d'armes.

6 A ma connaissance, toutes les Résolutions des Nations Unies confirment que

7 tous les peuples ont un droit illimité à se défendre. Si vous laissez tous

8 les peuples constitutifs sans armes, à l'exception des Serbes, et qu'on est

9 à la veille d'une guerre ou qu'elle a déjà commencé, à quoi pouvons-nous

10 nous attendre, si ce n'est à un massacre, un massacre infligé par une armée

11 démente ?

12 Cette Résolution, tout à fait barbare, va être abrogée, mais trop tard.

13 Plus tard, on va fermer les yeux ou on va regarder de l'autre côté pour

14 permettre à nos bateaux de passer. C'est vrai. Mais je pense que cette

15 Résolution est contraire à toute valeur élémentaire. Elle est inexplicable

16 à mes yeux. Si c'est bien le cas, ces institutions internationales qui sont

17 pourtant importantes, elles ne m'impressionnent du tout.

18 Le 20 mars 1992, la JNA a déployé ses forces en Bosnie-Herzégovine. Ces

19 forces étaient prêtes. Tout avait été préparé, et l'agression pouvait se

20 déclencher dans toute sa force. Vous voyez ici ces annotations vous

21 montrant les lieux de déploiements des formations, le nombre de soldats, le

22 nombre de chars.

23 Sur cette diapo, vous avez le nombre de volontaires, le nombre de

24 soldats qui étaient à la disposition de cette armée. Nous ne pouvons pas

25 malheureusement abordé tout ceci dans tout le détail voulu. Poursuivons.

26 Le récit se poursuit et c'est une continuité. On parle sans arrêt de la

27 réunion de Tudjman et de Milosevic à Karadjordjevo. Ils étaient seuls, mais

28 tout le monde sait ce dont ils ont parlé. Si vous voyez les aspirations

Page 941

1 impériales ou impérialistes de la Serbie, si vous voyez cette carte, la

2 question qui se pose est ceci : Comment Franjo Tudjman a-t-il pu discuter

3 avec Milosevic de la division de la Bosnie, alors que d'après ces plans, la

4 Croatie n'avait pas de frontière avec la Bosnie-Herzégovine, puisqu'elle

5 n'existait pas cette dernière ? Alors, qu'est-ce qu'ils ont pu discuter ?

6 De quoi ont-ils pu parler ?

7 Ceci était contraire à toute logique rationnelle. Cette histoire,

8 elle a été concoctée de toutes pièces. Plus tard, il y a eu

9 l'interprétation de la culpabilité qui lui a été superposée, le fait de

10 fermer les yeux sur les faits et le fait de laver son linge sale en

11 famille, parce que les mesures qu'on pouvait escompter d'une société

12 civilisée n'ont pas été prises. Il était possible d'enrayer la guerre, il

13 était possible de l'empêcher si on avait voulu. Ils en avaient le pouvoir,

14 les moyens. En fait, on aurait dû, je parle ici des forces de maintien de

15 la paix onusienne, qui étaient déployées le long des frontières, elles

16 auraient dû tout faire pour empêcher que ceci ne se produise. On aurait dû

17 forcer ces républiques à choisir la voie démocratique, ce que la Croatie

18 avait déjà faite. On aurait dû les forcer à respecter le droit fondamental

19 de la personne. S'il avait été fait, il n'y aurait pas eu de victimes, il

20 n'y aurait pas eu autant de victimes.

21 Voici une lettre du président Izetbegovic adressée à Tudjman qui

22 parle des sentiments d'amitié qui unissent les Musulmans et les Croates. Il

23 dit : "Ne passez pas d'accords avec lui," lui, étant Milosevic.

24 Puis, nous avons l'accord de Genève sur le retrait de la JNA de la

25 Croatie. Une fois de plus, il s'agit là d'une situation tout à fait

26 insensée. L'essentiel du territoire croate était déjà occupé à ce moment-

27 là. On avait agressé Vukovar. Bon nombre de villes avaient été agressées;

28 250 000 personnes avaient été expulsées. Ce qu'on appelle les forces de la

Page 942

1 communauté internationale, elle a forcé Tudjman et le gouvernement de la

2 Croatie à utiliser les armes de la JNA dans les entrepôts qu'elle avait en

3 Croatie et de les transporter en Bosnie-Herzégovine, comme s'ils ne se

4 doutaient pas de ce qui allait se passer, alors que des exemples s'étaient

5 déjà présentés auparavant.

6 Ceci n'a fait que remplir encore davantage les dépôts et entrepôts de

7 la JNA en Bosnie-Herzégovine avec toutes les conséquences qui ont ébranlé

8 notre conscience. Vu ces circonstances, il est difficile de pointer du

9 doigt les responsables. Il est difficile de déterminer le droit qu'il faut

10 donner aux discours politiques et de voir quelles en sont les conséquences.

11 Voyons maintenant le climat politique qui régnait en Bosnie avant que

12 le conflit n'éclate. Nous allons maintenant examiner la Déclaration

13 islamique. Est-ce que nous pouvons voir, tout d'abord, le programme

14 politique.

15 Nous avons la Déclaration islamique, les élections de Bosnie-

16 Herzégovine. La session de l'assemblée est interrompue, les gens ont

17 commencé à prier. Puis, il y a eu le référendum.

18 Voici l'aspect qu'avait la Bosnie-Herzégovine. Vous avez le nombre

19 d'habitants; le nombre de Musulmans, Serbes et Croates, et autres.

20 Diapo suivante.

21 Alija Izetbegovic a purgé une peine de neuf ans parce qu'il était un

22 intégriste. Il était en prison en Yougoslavie. Voici cette déclaration dont

23 il est l'auteur. Nous en avons traduit certains extraits, et je vais

24 demander à toutes les personnes ici présentes d'en prendre connaissance.

25 Nous pouvons continuer.

26 Il y a deux choses importantes à relever : tout d'abord ceci, avant les

27 premières élections en Bosnie-Herzégovine, ce livre a été publié en 200 000

28 exemplaires et ceci, c'était un programme politique qu'il fallait mettre en

Page 943

1 œuvre. Il y a deux composantes essentielles. Les Islamistes et les non-

2 Islamistes ne peuvent pas coexister et, une fois que nous serons plus de 50

3 %, nous allons introduire les lois islamiques en Bosnie-Herzégovine. Vous

4 avez un homme qui écrivait ce livre en prison, livre qui est sorti en 200

5 000 exemplaires. Une fois que ceci a été lu par les représentants d'autres

6 peuples constitutifs, il était manifeste que ceux-ci ne pouvaient pas

7 l'accepter. Il est normal que ceci nous ait préoccupé. Ceci nous a obligé à

8 exprimer notre avis, avis différent, et nous a forcé à tirer des

9 conséquences, avoir des résultats différents.

10 Au départ, ces différences ne semblaient pas si grandes, mais plus

11 tard, si on applique les lois de la théorie du chaos, vous savez qu'une

12 fois que des événements se répètent, ils gagnent en amplitude, les

13 différences ne font que grandir à l'avenant. A un moment donné, à l'insu de

14 tous, on parvient à un point singulier et tout explose dans le chaos le

15 plus complet ou une situation échappant pratiquement à tout contrôle.

16 Diapo suivante. Nous avons d'abord le référendum où il se pose la question

17 du référendum. Comment est-il possible de dire dans le même souffle que la

18 Croatie voulait annexer une partie du territoire de Bosnie, et d'avoir des

19 Croates qui vont voter à l'occasion de ce référendum ? C'était la condition

20 sine qua non dictée par la Commission Badinter pour que la Communauté

21 européenne donne le feu vert et que soit reconnu la Bosnie-Herzégovine en

22 tant qu'un Etat indépendant. Cependant, c'est ce qu'il fallait faire

23 d'abord : d'abord, nous reconnaître et le reste pourrait se faire plus

24 tard.

25 Soit que ceci ait été fait par des idiots ou par des imbéciles, mais

26 ceci ne cadre pas du tout avec la thèse dans laquelle des dirigeants

27 croates voulaient confisquer et s'emparer d'une partie du territoire de

28 Bosnie. Le référendum c'était le lieu, c'était le rouage qui pouvait le

Page 944

1 permettre. S'il n'y avait pas 51 % des voix exprimées, il n'y avait pas de

2 référendum, en tout cas, il n'y avait pas de résultat valable. Les Serbes

3 n'ont pas voulu participer à ce référendum, donc, il n'était pas possible

4 que la Bosnie devienne un Etat indépendant.

5 Le sort tragique du peuple croate en Bosnie au fil des siècles c'est qu'en

6 fait, ils ont eu le sentiment que ceci ne pouvait pas être leur patrie. Ils

7 ont été forcés d'y vivre. Les frontières se sont tracées dans le sang ou

8 sous le coup des tirs, des tirs de canon turc et les gens ont été séparés

9 par la force. Ce ne fut pas un Etat qui aurait pu créer au sein de ses

10 habitants un sens patriotique.

11 La mentalité politique et le pragmatisme politique de Franjo Tudjman était

12 tel qu'il a laissé entendre par tous les moyens possibles aux Croates de

13 Bosnie qu'il leur fallait aller voter lors de ce référendum en faveur de

14 l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. C'est pour cela - et là je parle à

15 l'Accusation - que le deuxième jour, il y a eu beaucoup plus de gens qui

16 sont allés voter. On ne peut pas donner l'ordre à des gens d'aller voter.

17 On peut les inviter à le faire. On peut leur susciter qu'il est utile de le

18 faire et c'est pour cela que les Croates de Bosnie-Herzégovine sont allés

19 voter et estimaient que la Bosnie-Herzégovine devait être un Etat.

20 Nous sommes sur le point de voir comment se sont comportés les citoyens

21 croates en Bosnie-Herzégovine, et notamment en Herzégovine, lorsque les

22 chars de la JNA allaient vers Kupresko Polje pour attaquer Split. Nous

23 allons voir comment ces citoyens se sont comportés. Nous allons voir ce

24 qu'ils ont dit, ce qu'ils ont fait et comment ils ont établi un lien avec

25 Izetbegovic. Nous allons voir ce récit dans sa totalité parce que ces gens

26 avaient déjà compris ce que voulaient dire ces chars et ce que ces chars

27 allaient faire une fois qu'ils auraient pris la place. Ils savaient que

28 ceci allait signifier une menace sérieuse sur la totalité du sud de la

Page 945

1 Croatie à partir de Split.

2 Nous allons voir ce que dit Karadzic.

3 [Diffusion de la cassette vidéo]

4 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

5 "Karadzic : Il est impossible que la Bosnie-Herzégovine continue d'exister

6 car les Serbes allaient refuser de vivre dans cette Bosnie-Herzégovine-là.

7 Les Serbes ont accepté cet Etat, mais, selon certaines conditions

8 entérinées par l'AVNOJ, ils ne reconnaissent pas les frontières de la

9 république comme étant les frontières de l'Etat à venir. Par conséquent,

10 sur toute l'espace de la Yougoslavie, il y avait des frontières

11 républicaines, légitimes.

12 Milosevic : La solution de compromis, celle d'une Fédération, est

13 inacceptable. En appliquant la formule de la Confédération, ceci

14 signifierait une désintégration de la Yougoslavie, ce qu'il refuse. C'est

15 la raison pour laquelle est-il dit ceci, nous ne l'accepterons pas et nous

16 n'avons pas l'intention de l'accepter."

17 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Voici comment lui répond Alija

18 Izetbegovic en son nom personnel et au nom de la présidence.

19 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

20 "Izetbegovic : "Qu'il annonce une guerre encore plus sanglante. Notre

21 devoir à nous, citoyens de la Bosnie-Herzégovine, c'est d'employer à tout

22 prix ce sang. Mais nous ne pouvions pas le faire et des gens encore bien

23 plus puissants que nous ne peuvent pas le faire non plus. Ce que nous

24 pouvons faire c'est refuser de participer à tout cela. Par conséquent, en

25 prenant comme point de départ la souveraineté des républiques, la position

26 qu'avait prise la présidence et qui avait bien interprété la volonté

27 majoritaire de la Bosnie-Herzégovine, je déclare que la Bosnie-Herzégovine

28 est neutre. Malheureusement, aujourd'hui, nous vivons dans une époque où il

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1 faut plus de courage pour participer à la paix que pour participer à la

2 guerre. Je vous supplie d'avoir le courage nécessaire pour refuser de

3 participer à cette guerre. Ce n'est pas notre guerre à nous."

4 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Est-ce que ce n'est pas merveilleux

5 d'entendre quelqu'un vous dire qu'il est en faveur de la neutralité.

6 Pourtant, à ce moment-là, il y avait déjà en Bosnie-Herzégovine des gens

7 qui avait été tués et chassés. Il n'y avait plus de neutralité. Lorsqu'il

8 parle de neutralité, il pense uniquement aux Musulmans. Nous, Croates, nous

9 n'avons plus de neutralité. Nous sommes menacés. Notre existence même est

10 menacée. M. Izetbegovic

11 dit que ce n'est pas notre guerre, mais il ne parle pas ou il ne pense pas

12 à nous, Croates, ce disant. Tout était déjà en feu, en proie aux flammes.

13 Il y avait des gens qui étaient tués à Bijeljina, or il dit ce n'est pas

14 notre guerre. Il avait déjà vu que sur le territoire de l'Etat dont il est

15 le président légal, légitime, il y avait déjà tellement d'enfants qui

16 avaient été tués, tellement d'hommes envoyés faire la guerre avec la

17 Croatie, donc, en fait, ce sont des lieux communs qu'il prononce en parlant

18 de neutralité.

19 Cependant, nous allons montrer qu'il y avait eu, effectivement, une

20 agression contre la Bosnie-Herzégovine dans le village d'Unista, près de

21 Knin et le village de Ravno.

22 Nous allons voir ces images.

23 [Diffusion de la cassette vidéo]

24 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Nous avons d'abord les chars à Prolog,

25 qui ont été arrêtés par la population même.

26 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

27 "L'armée doit se retirer, or elle ne le fait pas. A l'arrière de

28 Listica, une colonne se forme composée de centaines de voitures, de camions

Page 947

1 qui empêchent la circulation jusqu'à Prolog. A leur retour, nous parlerons

2 -- "

3 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Nous voulons la paix.

4 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

5 "Le général veut que nous nous défendions. Les citoyens doutent des

6 bonnes intentions qui seraient celles de l'armée. Lorsqu'on leur demande

7 pourquoi ils ont arrêté la colonne, nous répondons par une question. On

8 demande : pourquoi sont-ils là ? Pourquoi est-ce que l'armée est là ? Le

9 soldat répète qu'il dit qu'il va faire des manœuvres tout à fait régulières

10 à Duvno. L'officier dit que la population ne veut pas de conflits, ne le

11 souhaite pas. Toute la nuit, nous avons eu et depuis la nuit des temps nous

12 avons eu des relations correctes.

13 Il est difficile de faire des estimations concernant le nombre des

14 personnes ici. Ils viennent des localités voisines et ils disent que

15 l'armée ne peut que reculer, pas avancer, à partir de ce point-ci. Les

16 jeunes chantent et disent qu'ils veulent la paix. Ils chantent pour la

17 paix, pour l'amour.

18 L'armée est bloquée. Personne ne bouge. La situation est très politisée à

19 Vranic et à Bojni [phon].

20 C'est vers 13 heures qu'Alija Izetbegovic, Perevan et Stjepan Kljuic et

21 Mario Ilobic [phon] sont arrives pour dire aux gens de laisser passer

22 l'armée et débloquer la route.

23 Izetbegovic : Vous devez me croire, faites-moi confiance. Je ne sais pas

24 vous trahir. Quand bien même je le voudrais je ne pourrais pas. J'ai été

25 neuf ans en prison quand j'étais jeune et quand j'étais plus âgé, je

26 n'essaie pas de vs trahir. Je ne saurais le faire."

27 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] C'est ainsi que la population croate

28 accueille Izetbegovic là où sont arrêtés les chars.

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1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

2 "On entend la masse scandée 'Alija, Alija.'

3 Izetbegovic : Je vous remercie. Ce que je puis vous dire c'est que je peux

4 me tromper. Je peux me tromper en ma qualité d'hommes. Mais j'estime que

5 nous devrions laisser passer cette colonne pour qu'elle aille là où elle

6 va.

7 Mais, mais, la masse scande -- [inaudible]"

8 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Ils ne sont pas d'accord pour que

9 cette colonne de chars passe vers la Croatie.

10 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

11 "Un autre journaliste : Nous sommes maintenant à la présidence de

12 Bosnie-Herzégovine."

13 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Il parle de la capture de M.

14 Izetbegovic à l'aéroport de Sarajevo par les unités de l'armée populaire

15 yougoslave. Le président de la Bosnie-Herzégovine a été arrêté par le

16 général Kukanjac.

17 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

18 "Le journaliste -- difficilement audible : Il s'agit d'assurer un

19 cessez-le-feu.

20 M. Izetbegovic, est-ce que l'armée pourrait vous transporter jusqu'à

21 Sarajevo ?

22 Izetbegovic : Oui, je sais qu'on dit que nous serons attaqués, et

23 ainsi de suite. Le général Djordjevic a donné l'ordre de -- a ordonné un

24 cessez-le-feu.

25 Une voix non identifiée : Les unités ne doivent pas se déplacer.

26 Elles doivent rester là où elles sont."

27 Djordjevic : Est-ce qu'on peut entendre le général ? On veut tout

28 d'abord --"

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1 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Praljak intervient, c'est le

2 général Djordjevic qui dit.

3 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

4 "Djordjevic : Il faut que l'on cesse de tirer sur nos positions, sur

5 nos casernes. Il faut qu'on nous permette de sortir nos blessés et nos

6 morts. Il faut que le commandement puisse sortir de là ainsi que le

7 personnel afin que nous puissions nous déplacer. Nous n'allons pas vers

8 Sarajevo. Nous allons vers Lukavica.

9 M. Izetbegovic, qui est un homme raisonnable, se trouve être en sécurité

10 ici, il y a des médecins. Il sera bien installé, bien traitée, et il ne

11 manquera de rien.

12 Le journaliste : Général Djordjevic, vous connaissez les règles

13 militaires. Dites-nous : quel est le statut de M. le président de votre

14 caserne ?

15 Djordjevic : Comment ?

16 Le journaliste : Quel est son statut ?

17 Djordjevic : C'est le statut de quelqu'un qui doit aider grandement à

18 ce que l'armée puisse sortir de là ces morts et ces blessés.

19 Le journaliste : J'espère que vous allez autoriser le général.

20 Djordjevic : Ce sont les ordres que j'ai reçus. Appelez donc le

21 général Kukanjac.

22 Le journaliste : Cessez de tirer depuis Lukavice.

23 Djordjevic : On ne tire pas depuis Lukavica. On tire vers Lukavica.

24 Le journaliste : Mais, attendez, je vous dis, j'attends ce qui se

25 passe. On nous tire dessus.

26 Djordjevic : Il se peut qu'il y ait des tirs en riposte, mais nous ne

27 voulons pas qu'il y ait des conflits entre les citoyens et l'armée. Je

28 crois que ce sont des unités paramilitaires du SDS qui tirent depuis l'axe

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1 de Trebevic pour tirer sur l'armée et c'est de là que découle la confusion.

2 On ne sait pas qui tire sur qui ici.

3 Le journaliste : M. Izetbegovic, on veut un cessez-le-feu pour que

4 vous venez ici, et ensuite nous irons avec les soldats pour les sortir de

5 là-bas. Il y a des négociations pour que Doyle vienne jusqu'à toi. Je

6 demande à ce que la TO ne cesse de tirer, jusqu'à nouvel ordre qu'elle

7 cesse de tirer.

8 J'écoute 'Alija.'

9 Djordjevic : Ganic, tu as les plans pour voir pour ce qui est de

10 donner des ordres à mon nom jusqu'à mon arrivée à la présidence.

11 Ganic : "Très bien.

12 Djordjevic : Tes ordres seront les miens."

13 [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

14 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Arrêtez-là. Je voudrais apporter

15 un commentaire pour ce qui est de ces extraits, le premier et le deuxième.

16 Est-ce que les gens que vous avez vus tout à l'heure veulent la guerre ?

17 Est-ce que ceux qui ont chanté et qui ont distribué des chocolats voulaient

18 la guerre ou pas ? Est-ce que c'est là une politique qu'on poursuivait ?

19 Deuxième commentaire : le président de la présidence est arrêté par

20 la JNA, mais tout un chacun a omis de remarquer l'un des les juridiques les

21 plus importants qui découlent de ceci. Izetbegovic dit à la fin : "Ganic,

22 si je ne viens pas à toi de prendre le commandement." Ce n'est pas Ganic

23 qui, de par la constitution et de la par la législation, qui est censé le

24 remplacer. C'est un Croate, Stjepan Kljuic, qui est censé le faire parce

25 que le président de la présidence d'un Etat saute la procédure

26 constitutionnelle et dit à son compatriote, un Musulman, pour lui léguer le

27 commandement, et non pas à celui qui vient juste après à l'échelon -- les

28 échelons à Stjepan Kljuic; je dirais dans la pratique juridique qu'il

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1 s'agit d'un coup d'état. Bien sûr, que tout un chacun l'a remarqué celui

2 qui voulait le remarquer. On a sauté un échelon, parce que cela ne les

3 arrangeait pas.

4 Bien entendu, en subissant de très grosses pertes, les Musulmans sont

5 arrivés dans une position où bon nombre de choses qui a tort de façon

6 déraisonnée et illogique dans le seul intérêt de leur population, ils ont

7 fait si mal les choses qu'il y a eu un fossé qui s'est creusé de plus en

8 plus avec les Croates et qui a fait que non seulement la Bosnie-Herzégovine

9 a agressé la Croatie, mais les Musulmans en Bosnie centrale étant dans la

10 capacité de vaincre les Serbes, se sont retournés sur le HVO.

11 On verra par la suite et je crois qu'on pourra le sauter, on aura le

12 temps de revenir sur ces éléments-là. On verra que tout à l'heure il va

13 parler de la haine. J'aimerais qu'on accélère un peu le dévidement pour

14 qu'on arrive au point où il parle de la haine.

15 [Diffusion de la cassette vidéo]

16 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

17 "Izetbegovic : Avec ce que nous avons e Bosnie-Herzégovine la haine

18 et les armes. C'est cela l'origine des problèmes que nous avons en Bosnie-

19 Herzégovine. C'est la haine et les armes."

20 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bien. Faites-moi entendre le

21 reste.

22 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

23 "Absence de lois qui viennent de cette politique Boshevik et de cette

24 présence de quantité énorme d'armement. Seul des naïfs peuvent croire qu'on

25 pourrait parler non pas de l'armée populaire yougoslave mais d'une armée

26 serbe et que Belgrade n'a rien à voir. Pour nous, c'est une armée

27 yougoslave, c'est l'armée yougoslave, Belgrade, la Serbie sont responsables

28 de ce qui se passe.

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1 La signification, l'intention des accords de Split parlait d'une

2 coopération militaire aux fins de contrecarrer l'agression, agression comme

3 vous le savez, s'est déroulée en même temps…"

4 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Arrêtez-là. Arrêtez-là. Plusieurs

5 mois avant, cela il avait dit que ce n'était pas sa guerre. Puis au terme

6 des accords de Split, une fois de plus, il ne voulait pas. J'étais parti

7 prenant. Nous avions réclamé une alliance militaire qui nous permettrait

8 d'intervenir ensemble. Nous avons obtenu un accord qui juridiquement

9 interdit à la Croatie de s'employer à la création de forces conjointes pour

10 résister à l'agression.

11 J'aimerais que nous passions maintenant à la Ligue patriotique.

12 Le 17 avril 1991, avant la création de la Communauté croate d'Herceg-

13 Bosna, les Serbes se sont dissociés de toutes les autorités de Bosnie-

14 Herzégovine. Ils ont dit que ce n'était pas leur état à eux, et que si ces

15 autres voulaient, eux ne voulaient pas, et ils ont lancé l'agression

16 généralisée.

17 La riposte musulmane et bosnienne à toute cette histoire a consisté en la

18 création d'une Ligue patriotique, le 18 avril, et elle s'est composée

19 uniquement de Musulmans. Sa déclaration d'allégeance s'énonce comme suit :

20 "Je prête serment de par Allah je défendrais en tout temps et en tous les

21 intérêts du peuple musulman." Donc il n'est fait mention de personne

22 d'autre. La Ligue patriotique a été créée par l'élite du groupe ethnique

23 musulman, et elle se trouve au niveau de cette déclaration islamique. Il

24 n'est pas question d'un Etat de groupe ethnique ou de nation sur un pied

25 d'égalité au sein de cette Bosnie-Herzégovine.

26 Bien entendu -- pouvons-nous aller de l'avant, je vous prie.

27 On voit ici la directive du QG principal de la Ligue patriotique de

28 la Bosnie-Herzégovine pour la défense de la souveraineté de la République

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1 de Bosnie-Herzégovine. Ils disent : "Nos forces sont organisées dans une

2 Ligne patriotique de Bosnie-Herzégovine, dans des formations allant d'un

3 peloton jusqu'au régiment et une brigade."

4 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas eu le temps de lire le reste du

5 texte.

6 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Et ce sont là les fondateurs de

7 la Ligue patriotique. Le président de la présidence de Bosnie-Herzégovine,

8 Alija Izetbegovic, puis Hasan Cengic, c'est quelqu'un qui a beaucoup de

9 mérite, qui se réclame de représenter la totalité des citoyens de la

10 Bosnie-Herzégovine. Mais en parallèle, avant la création de l'Herceg-Bosna

11 et avant la création de toute entité du peuple croate qui a déjà vu à quoi

12 il devait s'attendre de la part des Serbes, puisqu'il l'a senti à Vukovar

13 et dans les autres localités, tout ceci met en place les préalables des

14 divergences pour ce qui est des fondements de la pensée politique qui ont

15 été communiqués en public.

16 Dernier document, le document émanant de M. Izetbegovic qui s'appelle

17 : "Décision portant nomination de commandant de toutes les unités de la

18 Défense territoriale." Le 27 mai 1992, l'agression à l'égard de la Bosnie-

19 Herzégovine bat son plein. Et lui, il nomme au total 39 commandants.

20 J'aimerais qu'on nous montre maintenant le tableau.

21 Sur ces 39 commandants nommés au niveau de la Défense territoriale de

22 la Bosnie-Herzégovine, les Musulmans sont 43, à savoir, 97,73 %. Les Serbes

23 sont au nombre de 1, et les Croates, pas du tout. Il n'y en a pas du tout.

24 Alors, pensez-vous que cela puisse constituer un fondement qui ne

25 serait pas susceptible de renforcer les divergences ? En dépit des efforts

26 qui ont été déployés pour concilier tout cela, il n'y a pas un seul Croate

27 ici. Ce n'est que là qu'arrive la décision portant création d'une

28 République croate d'Herceg-Bosna ou plutôt, d'une communauté croate

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1 d'Herceg-Bosna. En réponse à ce que les Serbes ont commencé à faire et en

2 réponse à la création de la Ligne patriotique, une personne assumant des

3 responsabilités vis-à-vis de son propre peuple dans le cadre dans une

4 constitution qui est toujours en vigueur et dans le cadre du droit qui est

5 celui de la République socialiste fédérative de Yougoslavie, s'agissant

6 donc de dire qu'on a le droit de s'associer, de se regrouper, non seulement

7 au niveau des municipalités, mais des groupements de municipalités pour

8 défendre sa vie, la vie de nos propres familles, pour organiser la vie et

9 le fonctionnement de la population. Je vous rappelle que la Bosnie-

10 Herzégovine a cessé d'exister à ce moment-là, à un niveau civilisé ou de

11 fonctionnement civilisé. Il n'y a pas d'électricité, il n'y a pas d'eau, il

12 n'y a pas de banque, il n'y a pas de police, il n'y pas de gouvernement, il

13 n'y a pas de pain, il n'y a pas de commerce, il n'y a pas de monnaie, il

14 n'y a rien. Les gens sont abandonnés à eux-mêmes.

15 Quand vous avez un point zéro, un point nul de civilisation, vous

16 commencez à mettre en place des embryons, et je dis bien des embryons.

17 C'est là l'élément de départ. Quand on parle de "gouvernement", quand on

18 parle "d'armée", de "généraux", quand on parle de "ministère de la

19 Justice", cela donne une connotation qui est la connotation de ces notions

20 qui est en vigueur en France, en Amérique ou ailleurs. On ne sait pas que

21 c'est un papier où 15 hommes se sont déclarés constituer un gouvernement.

22 Mais ils n'ont ni voiture, ni monnaie, ni police, ni autorité. Ils n'ont

23 pas de groupe de citoyens. Ils ont des citoyens qui sont apeurés, qui ont

24 vu à la télévision ce qui se passait avec leurs compatriotes en République

25 de Croatie, ce qui se passait à Bijelina [phon]ou ailleurs. Ce n'est pas

26 une armée, c'est un embryon d'armée. Ce n'est pas un gouvernement. Le

27 ministre de la Justice, ce qu'on appelle un gouvernement, ce n'est qu'en

28 1993, au mois de mars, qu'il a un téléphone installé dans son bureau.

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1 Vous pouvez vouloir; mais est-ce que vous pouvez le faire ? Cela, ce

2 sont deux notions tout à fait différentes.

3 Les Croates veulent mettre en place quelque chose à partir de ces

4 embryons, mais les hommes puissants cherchent à empêcher. Il y a de plus en

5 plus de douleur, plus d'expulsés, plus de sang versé, plus de personnes

6 expulsées et de réfugiés. Je vous donnerai les chiffres. Cela dépasse les

7 possibilités des Etats qui sont bien plus aménagés, bien plus achevés ou

8 parachevés. Je dirais que c'est l'aboutissement des 40 années précédentes.

9 Alors c'est un embryon de quelques semaines à peine, que nous avons eu.

10 J'aimerais maintenant qu'on nous montre les diapos qui suivent :

11 Unista [phon] et Garobo [phon].

12 Le 10 mai 1991, il y a eu attaque de Kijevo, d'Unista qui se trouve

13 sur le territoire de la République de Bosnie-Herzégovine. Dans toute

14 organisation juridique d'un Etat, l'agression à l'égard de quelque partie

15 que ce soit de cet Etat est un acte de guerre. Et je vous préviens d'une

16 chose, à savoir qu'à aucun moment, le gouvernement de Sarajevo et le

17 président de la présidence, M. Alija Izetbegovic, n'ont réagi à la prise

18 d'Unista et d'une partie de ce territoire. Pourquoi ? Parce qu'il n'y avait

19 pas de Musulmans là-bas.

20 Maintenant, qu'on nous montre Ravno. Le 15 septembre 1991 et le 16

21 septembre 1991, on a rasé le village de Ravno en Herzégovine. Ses habitants

22 ont été abattus. Après cela, nous vient la déclaration de la bouche d'Alija

23 Izetbegovic, qui dit : "Ce n'est pas notre guerre."

24 Mais, Messieurs, cela a été notre guerre à nous. Je ne sais pas si

25 c'était la sienne, mais pour les Croates, c'était notre guerre à nous, et

26 personne n'avait le droit de ne rien entreprendre ou de ne pas entreprendre

27 tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher ces choses de se produire

28 ou, au moins, essayer de s'opposer à la possibilité d'avoir des victimes de

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1 cette envergure, même si on devenait des victimes nous-mêmes.

2 Allons de l'avant, je vous prie. Saute cela.

3 Alors, le blocus de Sarajevo au mois d'avril. Alors, les gens de

4 Sarajevo disent que la guerre a commencé. Non, ce n'est pas là que la

5 guerre a commencé. La carte de Mostar, qui a été occupé par les Serbes,

6 avec les bombardements qui sont survenus et que vous allez voir dans la

7 documentation, on a tué des gens sur les routes, on a détruit pratiquement

8 tout. Cela n'intéressait personne parce que -- enfin, c'était le HVO qui

9 était censé en être chargé.

10 Alors voici le territoire qui a été conquis par la JNA et l'armée de

11 la Republika Srpska en période avril, novembre 1992. La Bosnie-Herzégovine

12 se trouve déjà occupée. Les armes sont surchauffées, et on verra combien de

13 réfugiés, d'abord Musulmans, puis Croates, ensuite, sont arrivés de ces

14 territoires ou alors des territoires qu'on a qualifiés de communautés

15 croates d'Herceg-Bosna. Il y avait plus de 30 000 réfugiés de reçus dans

16 cette organisation qu'on appelle HZ HB, parce que cela a été justement une

17 organisation. S'il n'y avait pas eu d'organisation, elle n'aurait pas été

18 en mesure de distribuer des vivres et d'héberger ces gens; 30 000 personnes

19 ont été hébergées sur ce petit territoire, chez un nombre d'habitants

20 faible.

21 Allons de l'avant, je vous prie.

22 La partie est de Mostar occupée. Alors, voilà quelques mots seulement

23 au sujet de Mostar. On a occupé Zenica et on a occupé la partie orientale

24 de Mostar. Lorsque la JNA a chassé les Musulmans de la partie orientale,

25 ils ont tous été reçus dans la partie occidentale.

26 C'est en juin 1992 que je me suis retrouvé à la tête d'une attaque

27 visant à libérer Mostar, et de la rive droite de la Neretva, quelques jours

28 avant. Jamais personne n'est resté sans logement, sans hébergement. Il est

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1 arrivé de l'autre côté plus de 20 000 Musulmans. Ils ont tous été reçus.

2 Une grande majorité des ces gens-là, beaucoup plus nombreux que les

3 Croates, sont entrés dans les appartements qui ont été abandonnés par les

4 officiers de la JNA. Un grand nombre de Croates ont emménagé de façon

5 illicite dans un certain nombre de logements. On le montrera aussi.

6 Mais du côté de l'armée de Bosnie-Herzégovine, il y avait un

7 bataillon avec 150 hommes, en tout et pour tout. La question à laquelle il

8 faudra répondre, c'est celle de savoir comment un bataillon, sans l'aide

9 des Croates, en quatre ou cinq mois, a-t-il pu grandir à tel point pour

10 constituer un corps d'armée, le 4e Corps d'armée de la zone de Mostar ?

11 Tout ce qu'ils ont obtenu, les vivres, les vêtements, les armes, les

12 médicaments et les soins médicaux, tout leur a été fourni par les Croates.

13 Ce sont des préparatifs pour un conflit qui s'annonçait.

14 Allons de l'avant.

15 Ensuite, ils se sont emparés de Travnik, de Vares, puis Kakanj. Puis,

16 Fojnica a été occupé, puis Jablanica a été occupé, Bugojno. Tout ceci a été

17 commis, par exemple, tout a été pris par l'armée de Bosnie-Herzégovine. Les

18 villes ont été prises les unes après les autres, les crimes ou des crimes

19 ont été commis, des hommes ont été chassés de là-bas.

20 Allons de l'avant. Sautez cela. Document suivant. Est-ce que tu veux bien

21 me montrer le document relatif à la Conférence de Paix ?

22 Messieurs les Juges, vous avez sous les yeux un document qui s'énonce comme

23 suit : "Rapport relatif aux activités de la Conférence internationale sur

24 la protection des droits de l'homme en Bosnie-Herzégovine."

25 Bien entendu, comme vous pouvez le voir, cette conférence a lieu à

26 Zagreb, en Croatie.

27 Donc, le plan criminel de Franjo Tudjman prend fin de la façon

28 suivante. C'est de façon tout à fait pacifique que l'on autorise

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1 l'organisation d'une Conférence internationale sur la protection des droits

2 de l'homme. Regardez le nom qui figure au bas. Alors, dans cette

3 conférence, il n'y en pas un seul qui n'est pas Musulman, du Qatar, du

4 Pakistan, d'Egypte, d'Arabie Saoudite, de Malaisie, et ainsi de suite.

5 Alors, c'est une composition monoethnique de responsables d'Etats et

6 d'organisations musulmanes. Le tout se passe, bien entendu, à Zagreb.

7 Ensuite, ils vont rendre visite ailleurs. Sautons toutes ces pages

8 pour aller de l'avant, parce que le temps passe. Tout ceci, nous allons le

9 sauter.

10 Développement au cours de la guerre en Bosnie-Herzégovine, mais nous

11 allons -- alors, pour ce qui est maintenant des expulsés et des réfugiés.

12 Voici les cheminements ou les itinéraires suivis par les réfugiés.

13 Toutes ces routes ne vont que dans une seule direction. Cette direction,

14 c'est la Croatie. Ils arrivent à Split. Une grande partie de ces gens

15 restent sur le territoire ou à 90 % en territoire Herzégovine, c'est à 90 %

16 de Croates. Ensuite, de Split, ils vont ailleurs en Croatie. Il y a plus de

17 300 000 personnes déplacées.

18 Tableau suivant. Sautez. Donnez-moi juste le tableau. Voilà. Est-ce que

19 vous pouvez nous montrer l'itinéraire suivi par les réfugiés ?

20 Je tiens à vous dire que cette couleur rose, c'est le territoire

21 occupé en République de Croatie. Le passage entre la partie sud et la

22 partie nord passe par un pont à semi écroulé et par une ligne de "ferry".

23 Donc, toute cette voie de communication dépend d'une ligne de "ferry"; 400

24 000 personnes déplacées, 201 000 arrivent en République de Croatie, et tous

25 ces gens-là sont hébergés.

26 Non, je ne retrouve pas le document que je cherche. Je vais aller de

27 l'avant. J'aimerais qu'on nous montre le plan de la Bosnie-Herzégovine,

28 pour ce qui est de la prise de la Bosnie centrale et la sortie jusqu'à

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1 Neum.

2 Alors ici, il est traité de la question de "l'Urbicid" de commis. Tous ces

3 renseignements seront fournis aux Juges, et, partant des faits pertinents

4 et de leur corrélation suivant les périodes de temps dans leur suite, les

5 Juges pourront tirer les conclusions qui s'imposent.

6 Allons de l'avant.

7 Voilà, j'y suis. Le plan Neretva 93. C'est un plan d'attaque destiné

8 aux unités musulmanes dans leur attaque contre le HVO. Ce plan a déjà été

9 discuté ici, si j'ai bien compris. L'intention consistait à atteindre Neum,

10 mais même au-delà de Neum, Ploca, c'est-à-dire un lieu qui se trouve sur le

11 territoire croate. Cette offensive a duré plus d'un mois et demi, compte

12 tenu du fait que Vares a été prise et occupée, et il a été cyniquement dit

13 que nous avions quitté Vares pour déplacer la population. C'est ce

14 qu'affirme le Procureur, ici. Par la suite, après la prise de Vares,

15 Fojnica, Jablanica, Konjic et d'autres lieux dont nous parlerons sont

16 tombés, et 124 000 civils, de gens donc, qui ont été regroupés ont été

17 massacrés.

18 C'étaient des gens qui étaient proches les uns des autres, qui

19 étaient réunis, amis les uns des autres. Alors, si nous revenons à la

20 théorie de la mécanique quantique, à la répartition prévue dans cette

21 théorie, 2 % de victimes, c'est déjà un acte de vengeance. Ici, la question

22 qui se pose face aux massacres d'Uzedol - et j'y suis allé - il faut que

23 des centaines et des milliers de personnes se lèvent pour dire que cela ne

24 doit pas arriver, que cela n'est pas autorisé. Mais imaginez la violence,

25 la force qui était nécessaire pour empêcher ce qui devait advenir. Mais

26 dire que tout ce qui pouvait être fait n'a pas été fait, non. Tout ce qui

27 pouvait être fait a été fait pour essayer d'empêcher cela.

28 Alors, diapo suivante. Maintenant, nous allons revenir à un point tout à

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1 fait fondamental, le dernier que j'aborderai avant la pause suivante,

2 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, un point qui concerne les

3 crimes dont les Croates ont été victimes en Bosnie-Herzégovine.

4 Vingt-deux municipalités figurent sur cette carte, 22 municipalités

5 peuplées par des Croates et des Musulmans, aussi bien population civile que

6 soldats. Nous n'allons pas rentrer dans le détail de la Posavina bosniaque.

7 Nous allons sauter quelques diapositives et nous arrivons à la diapositive

8 concernant Vitez. Je demande qu'on montre les diapositives suivantes. Autre

9 diapo. Konjic. Diapo suivante, toujours Konjic. Diapo suivante.

10 Les Moudjahiddines. Vous voyez cette diapositive. Il y en avait une

11 du même genre pour toutes les municipalités. Ici, les visages que vous

12 voyez ne sont pas ceux de personnes dont on se demande s'il s'agissait de

13 Moudjahiddines, mais de personnes avérées comme étant Moudjahiddines. Mille

14 cent vingt-quatre personnes étaient concernées. Bien sûr, il ne vient à

15 l'esprit de personne que le mal doit être vengé par un autre mal, mais le

16 fait que le mal engendre le mal, cela, nous pouvons le constater, et je

17 vous en donnerai un certain nombre d'exemples survenus dans des pays

18 développés. Ceci n'est pas le fait d'une volonté personnelle, mais comme

19 les théories du Nobel lauréat Planck le démontrent, il s'agit de lois

20 primaires, primordiales, de lois naturelles. Malheureusement, l'être humain

21 est fait ainsi. Quand il souffre, quand il ressent de la tristesse, et que

22 celle-ci dépasse ses capacités morales, il en arrive à commettre le mal, et

23 ceci dans des conditions particulières. Bien entendu, de telles situations

24 sont absolument abominables. Nous en voyons des centaines d'exemples dans

25 n'importe quelle guerre, et nous savons bien ce qu'une armée composée de

26 plusieurs milliers d'hommes est capable de faire en matière de crimes,

27 d'atrocités, et cetera. Diapo suivante. Dans une situation atroce, je dis,

28 avec beaucoup de compréhension sur le plan humain, que compte tenu que la

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1 population de Sarajevo était prise pour cible, que la communauté

2 internationale avait imposé un embargo, mais n'avait pas encore décidé

3 d'attaquer les positions serbes, qu'il n'y avait pas de réaction, la porte

4 était ouverte aux Moudjahiddines. Ils ne sont pas arrivés en une seule

5 fois. J'étais là-bas. Nous avons tout fait entre-temps pour faciliter le

6 travail des travailleurs chargés de l'aide humanitaire.

7 Mais après l'arrivée des Moudjahiddines et ce qui s'est passé, tout le

8 monde a eu l'air très surpris. Mais quand on voit qu'à Sarajevo la

9 population était prise pour cible, même si Hitler avait tendu la main à un

10 habitant de Sarajevo pour lui proposer de l'aide, il n'aurait pas regardé

11 le détail et il l'aurait acceptée. Personne ne s'est posé de questions.

12 Les gens venaient volontairement, bénévolement, pour aider. Parce que

13 la population était en train de se faire assassiner. Et ce qu'il fallait

14 empêcher, c'est ce qui est arrivé à Srebrenica après que le protectorat de

15 la communauté internationale ait été installé à Srebrenica. Bien sûr, il y

16 avait des coupables, mais le nombre des coupables est très vaste. Parce

17 qu'il faut bien se rendre compte que c'était, sur le plan intellectuel,

18 tout à fait intolérable, et que savoir ce qu'il est convenu de faire,

19 comment intervenir, n'était pas chose facile. Donc, il faut bien tenir

20 compte de cette situation absolument difficile.

21 Vous avez ici les noms et prénoms des Moudjahiddines. Vous en avez vu

22 les photographies.

23 Je demande maintenant la diffusion de la vidéo.

24 [Diffusion de la cassette vidéo]

25 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

26 "Mais le soldat croate qui refuse d'aller sur le front en Bosnie-

27 Herzégovine peut être puni --"

28 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] On voit ici à la télévision et dans un

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1 grand nombre de documents émanant du ministre Susak et d'autres, qu'un

2 soldat croate n'avait pas le droit d'aller sur le territoire de Bosnie-

3 Herzégovine; c'était un ordre, un ordre officiel pour lui, qui l'empêchait

4 de le faire.

5 [Diffusion de la cassette vidéo]

6 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Vous voyez ici des images des

7 bombardements de Sarajevo.

8 [Diffusion de la cassette vidéo]

9 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Ce que vous entendez ici et les

10 villages que vous voyez dans ce film de propagande qui a été fait par eux,

11 ce sont les ennemis de l'Islam. Voyons qui sont ces ennemis de l'Islam. Le

12 cardinal Puljic, Mladic, les représentants de l'église. Boutros Boutros-

13 Ghali est également un ennemi de l'Islam. L'assemblée générale des Nations

14 Unies l'est également. Un officier de l'armée anglaise, Franjo Tudjman

15 aussi.

16 On tire au nom d'Allah. Vous allez maintenant voir des images un peu

17 choquantes. Je vous préviens à l'avance.

18 M. Izetbegovic inspecte les unités qui à l'époque, à cet endroit, ne

19 comptaient qu'à peine 2 000 hommes.

20 Ici, les Moudjahiddines parlent la langue bosnienne.

21 Vous voyez ici une image de mauvaise qualité. C'est l'inspection de la 4e

22 Brigade de Jablanica.

23 Au sujet de cette dernière image, j'indique que la question qui est posée

24 c'est : "Pour qui vous battez-vous ?" Réponse : "Pour Allah." "Contre

25 qui ?" est la question suivante, et la réponse suivante : "C'est contre

26 Wallachs," qui signifie aussi bien les représentants de l'Eglise catholique

27 que de l'Eglise orthodoxe.

28 Comment aurait-il été possible de collaborer avec une telle armée ?

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1 Combien aurait-il fallu d'effectifs humains pour exercer un quelconque

2 contrôle sur ce genre de situation ?

3 Voilà, j'en suis arrivé au terme de mon sujet actuel et je demanderais

4 maintenant à M. le Juge Antonetti de bien vouloir décréter la pause, après

5 quoi, je parlerai d'un sujet différent qui concernera la République de

6 Croatie. Merci beaucoup, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, de

7 votre attention.

8 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 17 heures 15. Nous allons faire une pause de

9 20 minutes et nous reprendrons aux environs de 6 heures moins 20.

10 --- L'audience est suspendue à 17 heures 15.

11 --- L'audience est reprise à 17 heures 42.

12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise. Je vais donner

13 la parole à M. Praljak. Je rappelle à M. Praljak qu'il lui reste du temps

14 jusqu'à 19 heures. Donc, essayez de faire en sorte que vous terminiez vers

15 19 heures. Vous avez la parole.

16 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je vais maintenant parler de ce

17 qu'a fait la République de Croatie dans toute cette histoire.

18 Je parle bien des parties du territoire qui étaient effectivement

19 sous son contrôle et qui, donc, avaient pour obligation d'appliquer les

20 décisions du gouvernement, du Parlement et des structures officielles.

21 Diapositives au sujet de l'agression contre la République de Croatie, s'il

22 vous plaît, pour que nous voyions de quoi il retourne. Petrinja. C'est une

23 vidéo.

24 [Diffusion de la cassette vidéo]

25 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Occupation de Slunj, brigade de chars

26 de la JNA qui pénètre dans Slunj.

27 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

28 "Slunj est désormais libre et il n'y aura plus jamais d'Oustachi à

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1 Slunj. Va là-bas vers l'église, là-haut. Détruis-là. Mais détruis-là, bon

2 sang. Celle-ci est une maison serbe. Elle est restée intacte. Voilà le

3 travail. Cela, c'est une maison serbe.

4 L'armée a attaqué l'hôpital, ce qui ne s'était pas vu depuis le temps

5 du fascisme. Des événements de ce genre n'ont pas été vécus depuis le temps

6 de l'occupation allemande."

7 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Donc, vous voyez ici l'hôpital

8 d'Osijek; ici, c'est une image de Zadar.

9 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

10 "Attaque de Zadar. Des incendies. On ne pouvait pas reconnaître les

11 lieux dans la matinée, après les multiples attaques de la ville qui, du

12 matin au soir, n'ont cessé de s'intensifier.

13 Le Dr Branko Bulac est mort, des voitures ont été incendiées suite

14 aux échanges de tirs, et des incendies se sont déclarés après les tirs de

15 munitions incendiaires."

16 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bombardements du palais de Zagreb,

17 président du Parlement, ce palais est le siège du gouvernement et de la

18 présidence croate.

19 Dubrovnik.

20 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

21 "Tous les accès de Dubrovnik sont fermés. La ville manque d'eau et

22 d'électricité. Les unités qui contrôlent les accès à Dubrovnik nous ont

23 déclaré que leur objectif premier --

24 -- le grand hôtel en flammes, mais ce n'est qu'un avant goût des

25 destructions à venir. Mardi matin, l'attaque que chacun craignait, mais

26 dont chacun espérait qu'elle n'aurait pas lieu, débute. Attaque délibérée

27 et soutenue sur la ville. Il ne s'agit pas de quelques obus qui se sont

28 écartés de leurs trajets, mais bien de la prise possible délibérée de

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1 monuments historiques. Quand les forces serbes ont quitté la ville de

2 Dubrovnik il y a six semaines, elles ont prévenu la garnison de ce qui

3 allait se passer, mais personne dans le monde ne pouvait s'imaginer que ce

4 que vous voyez dans mon dos était le sens à donner au mot 'conséquences'".

5 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Dubrovnik, toujours. Vukovar, toujours.

6 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

7 "Discussion entre le commandant Sljivancanin et un représentant de la

8 Croix-Rouge européenne au sujet du passage du pont qui a été fermé par

9 l'armée. Lle soldat dit au représentant de la Croix-Rouge : 'Si vous ne

10 tenez pas compte du fait que mes jeunes, ici, mes soldats qui ont 18 à 20

11 ans sont en train de mourir, alors vous n'êtes pas le bienvenu.'"

12 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bien. Passons à la suite. Il y a une

13 chose que j'aimerais dire, ici. Les bandes chetniks que vous avez vu tout à

14 l'heure chantaient les mots suivants : "Slobodan," et ils parlaient de

15 Milosevic, "envoie-nous de la viande, envoie-nous de la salade. Il y aura

16 de la viande. Nous allons égorger les Croates."

17 A la BBC, le résumé de cela c'est : les Serbes chantent leurs chants

18 nationaux. C'est une souffrance intense pour la moralité et pour l'esprit

19 d'entendre de telles phrases.

20 Donc, la communauté internationale présente le plan Cutileiro qui

21 prévoit une division particulière de la Bosnie sur le plan territorial.

22 Dans le Plan Vance-Owen, il est également prévu de diviser la Bosnie, comme

23 on l'a vu hier. Dans le plan Vance-Owen numéro 2, toujours la même chose.

24 Dans le plan Owen-Stoltenberg, toujours la même chose, nouvelles divisions.

25 Et dans les accords de Washington, on parvient finalement à une espèce

26 d'accord.

27 Je voudrais dire que tous les documents qui ont été mis sur la table par la

28 Communauté européenne et présentés à la Croatie comme un moyen d'aboutir à

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1 la paix, les dirigeants croates ainsi que ceux des Croates de Bosnie,

2 d'Herceg-Bosna, autrement dit, les ont eus sous les yeux les premiers. Mais

3 Franjo Tudjman n'a pas cherché à être le premier à apposer sur l'un

4 quelconque des documents qui lui étaient soumis par la communauté

5 internationale. Il les a tous signés.

6 Passons à la suite, reconnaissance de la République de Bosnie-Herzégovine.

7 Dès la reconnaissance de la République de Bosnie-Herzégovine par la

8 Communauté européenne, cette Bosnie-Herzégovine a été reconnue en tant

9 qu'Etat intégré, unifié, et il est permis de se demander comment on peut

10 s'attendre à ce qu'après une telle reconnaissance, il soit prévu qu'une

11 partie de ces territoires soient placés sous le contrôle d'un autre Etat.

12 Je peux vous citer le cas d'un parlementaire qui a attendu des mois et des

13 mois pour pouvoir prendre place à bord d'un avion et exercer les fonctions

14 auxquelles il avait été élu en tant que représentant parlementaire de la

15 partie croate de la Bosnie-Herzégovine.

16 Passons à la suite.

17 Lettre du président Franjo Tudjman adressée à M. Izetbegovic. Passons

18 à la suite.

19 Nous voyons ici un document qui émane du ministère de l'Intérieur,

20 qui est adressé à tous les représentants officiels de la République de

21 Croatie, notamment à tous les commandants militaires. Il est dit dans cette

22 note qu'il est interdit à quelque commandant ou officier de l'armée croate

23 de franchir les frontières de République de la Croatie, et que si celui-ci

24 devait agir dans ce sens, il en supporterait les conséquences. Si des

25 volontaires souhaitent aller faire la guerre dans un autre état de leur

26 propre chef pour défendre leurs maisons, aucun commandant de l'armée ne

27 peut l'empêcher de le faire.

28 Bien, oui, je suis natif de Bosnie-Herzégovine. Ma famille habitait

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1 là-bas en Bosnie-Herzégovine, et j'avais tout naturellement le droit de m'y

2 rendre pour défendre ma patrie et celle de ma famille. Le fait que j'étais

3 citoyen de la Yougoslavie signifiait que j'étais également citoyen de la

4 Bosnie-Herzégovine. Donc, j'étais naturellement habilité à m'y rendre. Il y

5 a des documents qui indiquent que plus de 700 volontaires originaires du

6 territoire de Croatie se sont effectivement rendus sur le territoire de

7 Bosnie-Herzégovine pour participer à la défense de celle-ci.

8 Fait suivant. De fréquentes manipulations en cours quant au nombre

9 d'armes qui ont été fournies à la Bosnie-Herzégovine. Plus de 2 000

10 documents ont été examinés par ce Tribunal, qui portent sur ce sujet.

11 J'affirme que jamais, absolument à aucun moment, la fourniture

12 d'armes à la Bosnie-Herzégovine n'a été interrompue. Les Moudjahiddines qui

13 tiraient à l'aide de mortiers et de lance-grenades avaient reçu ces armes,

14 et l'arrivée de ces armes s'était faite avec un passage par le territoire

15 de la Croatie. Pas une seule fois des armes n'ont été livrées à la Bosnie-

16 Herzégovine sans que nous en soyons informés, sans que nous soyons au

17 courant, sans que nous le sachions. Il n'y avait aucun autre moyen pour que

18 des armes arrivent en Bosnie-Herzégovine. Les voies aériennes étaient

19 inutilisables, et la seule voie utilisable était la voie terrestre qui

20 passait par la Croatie.

21 Jamais dans l'histoire des guerres un phénomène similaire à celui qui

22 a eu lieu dans le cas dont je parle ne s'est jamais produit. Un commandant

23 du HVO, j'ai exercé ces fonctions ainsi que le général Petkovic qui est

24 assis ici à côté de moi. Un commandant du HVO, s'il souhaite faire accéder

25 des armes sur le territoire de Bosnie-Herzégovine, doit trouver un moyen.

26 Or, les possibilités qui existaient à l'époque étaient incroyablement

27 difficiles. Jamais au cours d'une guerre une telle action n'a été aussi

28 difficile. Plus de 2 000 documents traitent de cela, ils ont été examinés

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1 par le Tribunal. Nous avons fait tout ce que nous avons pu. Nous avons

2 déployé des efforts énormes pour faire parvenir ces livraisons d'armes en

3 Bosnie-Herzégovine. On a placé des armes dans des boites de conserve qu'on

4 a d'abord ouvertes, puis ensuite, refermées. On les a placées à bord de

5 camions. On a fait partir ces camions pour la frontière d'abord, et

6 ensuite, Sarajevo. Même au plus fort du conflit, cette action ne s'est

7 jamais interrompue. Chacun peut le vérifier en procédant à des recherches

8 personnelles.

9 Les usines d'armement, il n'y en avait pas. Même si sur place il

10 avait été possible de fabriquer l'une ou l'autre des pièces d'armement, ces

11 armes n'auraient pas eu les munitions nécessaires pour fonctionner.

12 Regardez la diapositive suivante. Le 7 avril 1992, le HVO obtient

13 l'autorisation de passage, et cetera. Vous aviez le nombre de balles et

14 d'autres munitions. Des documents de ce genre, il en sera montré plus de 2

15 000 au cours du présent procès.

16 Document suivant. Ce document montre que Rasim Delic qui a exercé le

17 commandant et qui, plus tard, a été mis en accusation par ce Tribunal comme

18 nous le sommes nous-mêmes, a organisé des distributions d'armes. A

19 l'époque, il était responsable de la logistique. Il organisait les

20 distributions d'armes à Grude, c'est-à-dire que c'était lui qui disait

21 combien de millions de balles étaient attendues, et qu'elles étaient les

22 quantités qui devaient être distribuées ici ou là, à quel moment.

23 Passons à la diapositive suivante. République de Croatie d'où

24 provenaient les armes fournies à l'ABiH. Vous verrez les itinéraires suivis

25 par ces livraisons d'armes sur des cartes qui vous seront montrées pendant

26 le procès.

27 Vous entendrez de nombreux témoignages qui traiteront de ce point.

28 Nous vous présenterons des éléments de preuve.

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1 Nous vous présenterons des documents qui démontreront, qu'à partir de

2 tous ces lieux, et ce, en permanence pendant toute la durée de la guerre,

3 des armes partaient à destination de la Bosnie-Herzégovine.

4 Je mettrai particulièrement l'accent sur la ville de Bihac. Nos

5 petits avions, nos hélicoptères s'envolaient pour aller vers Bihac.

6 Certains ont été abattus. Donc, à partir de la République de Croatie, ceux

7 qui parvenaient à arriver arrivaient tout de même. Je dis que ceci s'est

8 fait, alors que le président du gouvernement, les ministres Gojko, Susak et

9 d'autres ainsi que moi-même et d'autres qui avons pris une part active à

10 tout cela, étions tout à fait au courant.

11 Diapositive suivante. Représentation croate officielle sur le plan

12 économique en Croatie, à Zagreb, à Split, à Rijeka et en

13 Bosnie-Herzégovine. Ce document mérite une certaine attention.

14 Le 12 juillet 1993, la question qui se pose est de savoir combien de crimes

15 ont visé des Croates en Bosnie-Herzégovine. Le

16 12 juillet, voilà ce que nous lisons ici, je cite : "Pour remplir les

17 fonctions dont est chargé l'état-major de l'ABiH, sur le territoire de la

18 République de Croatie, un certain nombre de représentations officielles à

19 Zagreb et ailleurs." Vous voyez les noms Osmanagic, Pejic, et cetera. Tout

20 cela, ce sont des noms de Musulmans.

21 On est face à un Etat, et on peut se poser la question de savoir à

22 quel moment dans toute l'histoire des guerres, un état quel qu'il soit

23 aurait autorisé l'état-major de l'armée d'un autre territoire à créer des

24 bases logistiques sur son territoire, et ce, pour mener la guerre chez lui.

25 On voit que ceci a été le cas entre la Croatie et la République de Bosnie-

26 Herzégovine. Des représentants de Bosnie-Herzégovine venant d'ailleurs, de

27 divers pays, Slovénie, Allemagne ou ailleurs, où ils étaient employés

28 professionnellement - c'était la même chose à Kutin, à Zadar, à Jakovo et

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1 dans bien d'autres localités où ils arrivaient. Ils entraient dans les

2 casernes, ils recevaient leur uniforme pour se battre. Ils recevaient leurs

3 armes, tout cela sans le moindre problème. Ensuite, ils allaient se battre

4 sur le territoire de Bosnie-Herzégovine contre lequel nous avons dû nous

5 battre nous-mêmes par la suite. Voilà ce qui s'est passé.

6 En République de Croatie, des unités de l'ABiH ont été créées. Par exemple,

7 la 77e Brigade de Bosnie-Herzégovine créée à Rijeka; la 17e Brigade, la

8 Brigade de Berbir, la Brigade de Handzak. Des unités entières de l'ABiH ont

9 été créées sur le territoire de la République de Croatie et ont été

10 envoyées sur le territoire de Bosnie-Herzégovine à partir de la Croatie.

11 Bien entendu, tout le monde était au courant. Il est impossible de créer

12 une brigade sans que cela se voie.

13 Nous avons les noms de tous les membres de ces brigades. Une brigade ici

14 compte 150 hommes. Tous ces hommes ont signé lorsqu'ils ont rejoint la

15 brigade, et ils ont été envoyés en Bosnie-Herzégovine. Il y en a qui sont

16 partis vers Sarajevo, d'autres, y compris vers Srebrenica. Pas mal de ces

17 jeunes gens sont morts. Certains sont rentrés. Ils sont restés par la suite

18 officiers de l'armée de Croatie. J'en connais un qui habite à Rijeka,

19 encore à l'heure actuelle.

20 Diapositive suivante. La liste des membres des unités spéciales, unités

21 spéciales du MUP à Sarajevo et ailleurs, 460 et quelques. Je n'ai pas fait

22 figurer tous les noms. Ces jeunes gens suivaient un entraînement spécial en

23 République de Croatie. Une fois qu'on leur a distribué leurs uniformes et

24 leurs armes, on les a envoyés en Bosnie-Herzégovine au milieu du peuple

25 musulman sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine pour défendre cette

26 République de Bosnie-Herzégovine contre l'agresseur serbe qui,

27 effectivement, était l'agresseur le plus dur.

28 Diapositive suivante. Ici, nous voyons le pilote. Est-ce qu'on peut voir le

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1 document, s'il vous plaît. Est-ce que nous pouvoir étudier le document,

2 s'il vous plaît. Le ministère de la Défense et la République de Croatie, la

3 présidence de la République de Bosnie-Herzégovine s'adresse au ministre de

4 la Défense en disant : "Nous vous demandons de bien vouloir autoriser le

5 séjour dans la République de Croatie des membres suivants, qui faisaient

6 partie du système de défense antiaérien de la Bosnie-Herzégovine." On

7 retrouve la liste de 22 noms de pilotes qui ont été formés dans la

8 République de Croatie. Ils ont été hébergés. Ils ont été nourris, et après

9 l'entraînement, ils sont retournés pour rejoindre de l'ABiH afin de

10 repousser le sort qui leur était réservé s'ils n'avaient pas été préparés

11 de cette façon-là.

12 La diapositive suivante montre la situation des réfugiés. Ils étaient

13 au nombre de 402 000, en Croatie, au mois de décembre 1992, et de 260 000

14 de la République de Croatie. Ce chiffre n'est jamais descendu en deçà du

15 chiffre de 195 000 réfugiés et 183 personnes expulsées.

16 Ce tableau montre le nombre de réfugiés de Bosnie-Herzégovine et les

17 personnes qui ont été chassées de Croatie.

18 Cette Chambre de première instance, ainsi que l'Accusation, a tous

19 les moyens à sa disposition pour vérifier tous ces éléments et chaque

20 élément de preuve pendant ce procès.

21 Au début de l'année 1996, la Bosnie-Herzégovine était composée de 2 960 000

22 habitants dont la moitié correspond à des chiffres d'avant la guerre; 1 500

23 000 dans la Fédération et le reste de la Republika Srpska. Sur ce chiffre,

24 390 000 étaient Croates ou 52 % du chiffre des Croates, qui habitaient à

25 cet endroit-là avant la guerre, se trouvaient en Bosnie-Herzégovine, 54 %

26 étaient des réfugiés. Ils ont été chassés des territoires serbes. Lorsque

27 l'ABiH les a de nouveau attaqués, ils ont expulsé tous les Croates. Il ne

28 restait plus aucun Croate à cet endroit-là.

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1 Ce que nous avons fait dans les hôpitaux et comment nous avons traité

2 les malades ? Tous les hôpitaux traitaient tous les blessés. Nous n'avons

3 pas prêtés attention à l'appartenance ethnique des malades. Personne n'a

4 jamais demandé à quiconque d'où ils venaient. Toutes les personnes de

5 Bosnie-Herzégovine ont été traitées. On leur a prodigué des soins.

6 Voici les hôpitaux de Croatie, pas l'ensemble des hôpitaux mais seuls les

7 hôpitaux que nous avons visités à Split, Firule, Krizine, Zagreb, Karlovac,

8 Slavonski Brod, Bosanski Brod et Krapiska Toplica, et cetera. Tous ces

9 hôpitaux ont prodigué des soins aux soldats musulmans entre 1992 et 1995,

10 au total, 10 623. On parle ici de milliards de dollars qui ont été dépensés

11 par soigner ces personnes, dépensés par un Etat qui était en guerre. Un

12 tiers de son territoire était occupé. Ces villes étaient occupées et

13 détruites. Il n'y avait pas de tourisme. Il y avait un embargo sur les

14 armes. Plus de 10 000 personnes de Bosnie-Herzégovine, la plupart des

15 Musulmans ont été soignés dans ces hôpitaux et nous avons les noms de

16 toutes ces personnes.

17 Qu'en est-il du système d'éducation pour les réfugiés ? En 1992, le

18 gouvernement de la République de Croatie, à savoir, le ministère de

19 l'Education a rendu une décision permettant aux enfants réfugiés musulmans

20 de la République de Croatie de recevoir une éducation et de suivre des

21 programmes qui correspondaient à leurs critères d'enseignement et leurs

22 critères culturels. Ce sont les écoles de la République de Croatie qui se

23 sont occupées des Musulmans entre 1992 et 1994. Ces enfants avaient un

24 enseignement personnalisé dans leur propre langue, dans la langue

25 bosniaque. Quatre leçons par semaine, quatre fois par semaine, ces enfants

26 apprenaient leur langue afin de ne pas perdre leur identité nationale et

27 culturelle dans la République de Croatie.

28 Ici, on voit le programme scolaire. On voit le coût de cet

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1 enseignement.

2 Sur la diapositive suivante on voit quelle aide humanitaire a été fournie.

3 Cette aide humanitaire transitait par la Croatie mais c'étaient des

4 médicaments pour les Musulmans. Voici les endroits qui ont reçu des

5 médicaments pour l'hôpital de Split, et ce, pendant l'ensemble de la

6 guerre. Je parle de Srebrenica, Bratunac et tous ces autres endroits.

7 Personne n'a jamais demandé si quelqu'un devait régler la facture, qui

8 devait régler la facture et qui en avait besoin. Tout ce que nous avions a

9 été partagé à parts égales et sans appréhensions et tout à fait

10 spontanément.

11 Voici les notes de remerciement que les médecins musulmans ont envoyé à

12 l'hôpital de Split. Il y a plus de 400 lettres de ce type. Nous allons vous

13 en montrer simplement quelques-unes. Ces lettres sont toutes signées. Vous

14 pouvez voir qu'il s'agit de lettres de remerciement de la part de médecins

15 musulmans. Ces lettres sont signées.

16 Est-ce que nous pouvons voir la lettre suivante ? La lettre suivante,

17 la lettre suivante encore, s'il vous plaît ?

18 Voici les lettres de remerciement.

19 Aide humanitaire entre 1992 et 1995. Cette aide humanitaire

20 transitait par différents ports croates, Rijeka, Pula, Split et Ploca.

21 Malheureusement, au plan logistique, c'était difficile et nous n'avions pas

22 toujours tous les documents à notre disposition. Je n'ai pu présenter, par

23 conséquent, que les documents correspondants au port de Ploca. Il y avait

24 580 millions de kilogrammes, de tonnes qui transitaient par le port de

25 Ploca. C'était à la fois un port d'exportation et d'importation. Les

26 exportations de Bosnie et de bois de construction et des importations

27 d'aide humanitaire. Nous avons des documents pour attester de cela. Lorsque

28 les bateaux entraient dans le port, nous avions un transitaire qui s'en

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1 occupait, et cetera. Au cours du procès, je vais essayer de vous présenter

2 tout ceci, ces documents qui viennent des ports de Rijeka, Split et Trogir.

3 Vous constaterez que l'entreprise Intersped de Bosnie-Herzégovine

4 exportait du bois de construction, du bois de bouleau. C'était une société

5 bosniaque qui a exporté de Bosnie-Herzégovine et qui a exporté les

6 combustibles qui étaient importés. Ceci peut être attesté par certains

7 documents. Ceci était distribué à Mostar et ailleurs.

8 Il faut noter que tout ce qui venait des Etats musulmans n'était

9 envoyé qu'aux Musulmans mais l'aide occidentale a été distribuée à part

10 égale entre tous les citoyens de Bosnie-Herzégovine.

11 Un bateau de Turquie qui était chargé d'armes. Ces armes, nous les

12 avons laissées passer, mais nous avons déclaré qu'il y avait des armes à

13 bord de ce navire et que ces armes ont été envoyées en Bosnie au moment où

14 nous combattions et au moment où les Musulmans assuraient le contrôle de

15 postes de contrôle et montaient la garde devant ces derniers.

16 Entre 1992 et 1995, dans le territoire de la République de Croatie, il y

17 avait 234 organisations étrangères d'aide humanitaire qui venaient de 32

18 pays. Celles-ci venaient surtout de pays musulmans. Il y avait les

19 organisations humanitaires locales; ces organisations étaient très

20 importantes et ont permis d'acheminer l'aide vers les Musulmans de Bosnie-

21 Herzégovine. Personne n'a jamais eu de problème avec ces organisations.

22 Tout était transparent, on pouvait faire ce que l'on voulait.

23 Il y a toutes les adresses de ces organisations. Nous pouvons vous en

24 fournir la liste.

25 Le système de distribution se passait bien en Bosnie-Herzégovine. Un de mes

26 collègues de l'école élémentaire était un Musulman qui s'occupait de

27 l'approvisionnement en électricité en Bosnie-Herzégovine. Il avait un

28 diplôme en génie électrique, et on avait mis en place un système

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1 d'approvisionnement en électricité sur l'ensemble d territoire de la

2 Bosnie-Herzégovine. Ce système ne pouvait fonctionner que si différents

3 liens étaient établis au niveau du système sur l'ensemble de la Croatie.

4 Nous leur avons fourni l'électricité. Ils ont payé une partie de leur

5 facture, mais pas l'ensemble des factures. A aucun moment la Croatie a-t-

6 elle envisagé l'arrêt de cela, bien que le système soit à genoux. La

7 République de Croatie n'a jamais empêché un quelconque citoyen de Bosnie-

8 Herzégovine, que ce soit des Croates ou des Musulmans, d'avoir de

9 l'électricité. Quelles que soient les difficultés, ces difficultés étaient

10 d'ordre technique.

11 Lorsqu'il n'y avait plus d'électricité en Croatie, alors il n'y avait pas

12 d'électricité non plus en Bosnie-Herzégovine. Personne n'en avait, que ce

13 soit les Croates ou les Musulmans.

14 Passons. Parlons maintenant du sport. Un des plus proches collaborateurs de

15 Franjo Tudjman, l'ancien président de la présidence de Croatie, était

16 membre du Comité olympique. Etant donné qu'il avait de bons contacts avec

17 M. Samaranch, il avait réussi à mettre la Croatie sur la liste des pays

18 participant aux Jeux Olympiques de Barcelone, bien que nous n'étions pas

19 reconnus par les Nations Unies à l'époque, ce qui était une condition sine

20 qua non pour participer aux Jeux Olympiques à l'époque.

21 Il a fait de gros efforts pour permettre à l'équipe de Bosnie-Herzégovine

22 de participer aux Jeux Olympiques de Barcelone. Ils se sont entraînés en

23 Istria au détriment des contribuables croates. Une fois préparés, ils sont

24 montés à bord d'un avion en même temps que les athlètes croates et ils ont

25 pris part aux Jeux Olympiques de Barcelone. Ils arboraient un drapeau

26 qu'ils prétendaient être le drapeau bosniaque, mais qui n'existe plus.

27 C'était le drapeau musulman. Il y avait des fleurs de lys sur ce drapeau.

28 Ils ont été représentés, ils ont participé à plusieurs disciplines. Je ne

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1 vous ai pas encore donné tous les éléments.

2 Ceci est très important. En 1992, c'était encore relativement pacifique. Il

3 y avait encore un équilibre, si vous voulez. En 1993, il y a eu les jeux de

4 la Méditerranée en France. La guerre faisait toujours rage et l'Etat

5 croate, malgré la situation, malgré le fait que le peuple croate en Bosnie-

6 Herzégovine et que le conflit subsistait toujours et que l'armée de Bosnie-

7 Herzégovine avait encore préparé une nouvelle fois une équipe. Donc, il y

8 avait cette équipe en Croatie. Ils sont montés à bord de l'avion une

9 nouvelle fois pour aller en France et ils ont pris part à ces jeux encore

10 une fois en arborant leur drapeau national.

11 Mais, Monsieur le Président, nous avons ici un problème juridique un peu

12 difficile. Les Jeux Méditerranéens sont différents des Jeux Olympiques, car

13 les participants de ces pays méditerranéens, et la Bosnie-Herzégovine est

14 un pays méditerranéen, mais étant donné les 20 kilomètres de côtes qui

15 existent entre deux villes croates, comment pouvons-nous confisquer cette

16 partie du territoire tout en envoyant leur équipe aux Jeux Méditerranéens,

17 puisqu'ils sont en droit d'y participer, puisque ce pays a un débouché sur

18 la mer ? Ceci n'est pas contesté. Cette partie du territoire est peuplée

19 par 97 % de la population croate, et ceci confirme au plan légal que nous

20 n'avons aucune aspiration et aucune prétention sur cette partie du

21 territoire.

22 Voici les noms des personnes qui faisaient partie de l'équipe

23 représentant la Bosnie-Herzégovine.

24 Parlons maintenant des questions culturelles. Je n'ai pas beaucoup de

25 document pour cette question-là, mais il n'y a pas un seul artiste de

26 Bosnie-Herzégovine qui ne soit arrivé à Zagreb sans qu'on s'occupe de lui.

27 En général, on lui remettait un passeport, un passeport de la République de

28 Croatie pour permettre à ces artistes d'aller dans les pays tiers sans

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1 qu'ils aient de problèmes ou pour qu'ils puissent gagner leur vie.

2 Un de mes amis, un acteur croate, Zlatko Vitez, qui à l'époque était

3 le ministre de la Culture de la République de Croatie, et il peut venir

4 témoigner si cela s'avère nécessaire, peut vous parler de la manière dont

5 nombre de personnes ont reçu des passeports et n'ont eu aucune difficulté

6 grâce à cela.

7 Est-ce que Franjo Tudjman était responsable de Stolac, Gornji Vakuf ?

8 Est-ce qu'il gouvernait ces groupes et ces personnes ? Je crois que ceci

9 peut être remis en cause. Franjo Tudjman, est-ce qu'il présidait les

10 différents organes du gouvernement de la République de Croatie ?

11 Les armes, la reconnaissance du pays, l'entraînement des hommes qui

12 souhaitaient se battre. Les brigades, les unités spéciales du MUP, les

13 réfugiés et les blessés, l'activité d'aide humanitaire, d'éducation, la

14 culture, le sport; tout ceci n'a jamais été mis en doute. Et j'affirme que

15 jamais, dans toute l'histoire de la guerre, nous avons étudié la question.

16 Jamais quelque chose de semblable ne s'est produit. Personne n'a jamais

17 aidé autant un peuple que les Croates ont aidé les Musulmans au cours de

18 ces guerres. Personne, nulle part, dans aucun pays.

19 Si je voulais être malintentionné, je dirais : comment est-ce

20 possible que de telles choses se déroulent aux Etats-Unis après ce qu'al-

21 Qaeda a fait à New York ? Encore une fois, c'est ce qui nous est arrivé.

22 Comment serait-ce possible à Londres, après l'agression des SS de la

23 Wehrmacht, d'aider les allemands à la manière dont nous les avons aidés ?

24 Le 11 juillet 1993, la présidence de Bosnie-Herzégovine a publié un

25 communiqué après une réunion qui s'était tenue à Zagreb. Ce communiqué

26 n'est pas important en soit, mais la présidence de Bosnie-Herzégovine a

27 tenu une session dans la ville de Zagreb le 11 juillet 1993, dans un pays

28 qui maintenant, est déclaré comme étant un agresseur. S'il y avait un

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1 conflit international, alors les choses étaient inversées. C'était

2 l'agression de la Bosnie-Herzégovine contre la Croatie.

3 Pourquoi tout ceci est-il arrivé ? Il est vrai que le peuple musulman a le

4 plus souffert, que les pires crimes ont été commis contre eux, que le sort

5 qui leur a été réservé a été le pire sort, que les gens de Sarajevo, de

6 Gorazde, Srebrenica, Zepca, n'ont pas été considérés comme aussi important,

7 car les gens de Zagreb ont énormément souffert. Ce n'est pas à nous de

8 porter la faute pour cela. Ce n'est pas la République de Croatie qui est

9 responsable. Cela n'était pas de notre faute. Nous n'avons pas participé à

10 cela.

11 Je ne nie pas que des crimes ont été commis, que des choses atroces

12 se sont produites, mais ceci montre bien que les Croates avaient le désir

13 et le souhait de faire quelque chose. Ce n'était pas que des mots vides de

14 sens. Si on doit parler et réécouter trois jours après ce que l'on a dit,

15 on nous trouverait à redire certainement. Mais il s'agit là des faits, il

16 s'agit là d'actes. On ne peut pas nier cela. Cinquante milles pièces ont

17 été remises au service de traduction, et si cela doit prendre 15 ans, que

18 cela prenne ce temps, car il nous faut parvenir à la vérité.

19 Nous ne pouvons pas être d'accord et dire que nous sommes une victime

20 collatérale parce qu'on a permis à une ville de disparaître, on a permis le

21 génocide contre un peuple.

22 Je vais maintenant vous lire quelque chose à haute voix.

23 M. Clinton, l'ancien président américain, a dit, au mois d'avril 1992, que

24 la Communauté européenne reconnaissait la Bosnie en tant qu'État

25 indépendant pour la première fois depuis le XVe siècle. Entre-temps, les

26 unités paramilitaires serbes continuent de terroriser le peule musulman et

27 tuent les citoyens par l'intermédiaire des médias on tente de convaincre

28 les Serbes de la région qu'ils font ceci pour se défendre contre les

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1 Musulmans.

2 Le 27 avril, Milosevic a promulgué un nouvel Etat en Yougoslavie qui

3 comprenait la Serbie et le Monténégro. Ensuite, il a fait semblant de

4 retirer son armée de Bosnie, alors que toutes les armes stockées ont été

5 déposées dans la région ou placées sous le commandement de Ratko Mladic et

6 des Serbes de Bosnie.

7 Les combats et les massacres se sont poursuivis au cours de toute

8 l'année 1992.

9 Les dirigeants de la Communauté européenne et l'administration Bush ne

10 savaient pas très bien quoi faire. Elle n'était pas disposée à intervenir

11 car c'était une année électorale. C'est une question qui doit être résolue

12 par la Communauté européenne car, malgré cela, le gouvernement Bush est

13 intervenu auprès des Nations Unies pour que des sanctions économiques

14 soient imposées à la Serbie. C'est une mesure auquel s'opposait le

15 secrétaire général des Nations Unies, Boutros Boutros-Ghali, les Français

16 et les Britanniques, qui pensaient qu'on devait donner une chance à

17 Milosevic pour que la violence cesse, la violence dont il avait été à

18 l'origine.

19 Pour finir, des sanctions ont finalement été imposées à la fin du mois de

20 mai, mais ceci n'a pas eu de conséquences très fortes. Les Nations Unies

21 ont continué l'embargo sur les armes contre le gouvernement bosnien ce qui

22 a été imposé à l'origine sur l'ensemble de la Yougoslavie à la fin de

23 l'année 1991. Mais le problème qui se posait malgré l'embargo, les Serbes

24 disposaient de suffisamment d'armes et de munitions pour se battre pendant

25 des années. Donc, la seule conséquence du maintien de l'embargo était de

26 permettre aux Bosniens de se défendre.

27 Au cours de l'été 1992, la télévision et la presse écrite a fait état des

28 crimes serbes en Bosnie du Nord aux Américains et aux Européens et ont

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1 prôné les frappes de l'OTAN. Plus tard, il était apparu clairement que les

2 Serbes avaient mené une campagne de massacre systématique contre les

3 Musulmans de Bosnie, et j'ai proposé que l'embargo sur les armes soit

4 aboli. Au lieu de cela, les Européens ont concentré leur attention sur la

5 violence ethnique. Le premier ministre britannique, John Major, a demandé

6 aux Serbes de faire cesser le siège des villes de Bosnie et de faire en

7 sorte que les armes soient placées sous le contrôle des Nations Unies.

8 Les Nations Unies ont envoyé 8 000 soldats pour protéger les convois d'aide

9 humanitaire. En d'autres termes, il vaut mieux mourir avec le ventre plein

10 que de mourir mourant de faim.

11 Peu de temps avant les élections, Lord David Owen, le négociateur européen,

12 et Cyrus Vance, l'ancien secrétaire d'Etat américain, a présenté une

13 proposition, et cetera. On parle ici des différents gouvernements.

14 Lorsque je suis devenu président, l'embargo sur les armes et le soutien des

15 Européens par l'intermédiaire du plan Vance-Owen s'est trouvé affaibli par

16 la résistance musulmane et les Serbes de toute évidence continuaient leurs

17 massacres des civils et les violations des droits de l'homme puisqu'il y

18 avait des camps de prisonniers et ceci est arrivé à la surface. Au début du

19 mois de février, j'ai décidé de ne plus soutenir le plan Vance-Owen et j'ai

20 rencontré le premier ministre canadien, Brian Mulroney, qui j'ai été

21 agréablement surpris de constater que lui-même n'était pas d'accord avec le

22 plan non plus. Donc, nous avons préparé un autre plan quelques jours après

23 et Warren Christopher a déclaré que les Etats-Unis souhaitaient négocier un

24 nouveau contrat et qu'ils étaient disposés à appuyer sa mise en œuvre, et

25 cetera.

26 Or, voilà les uns n'étaient pas d'accord avec les autres, les uns

27 attendaient des élections, les autres voulaient apporter leur soutien, les

28 autres voulaient condamner Milosevic et, entre-temps, il y a eu le massacre

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1 de Srebrenica. Ce n'est ni la première, ni la dernière fois que c'est

2 arrivé. Les massacres ont duré et perduré autour de nous; en Afrique, en

3 Irlande du Nord -- cela a enfin cessé au Pays basques ou en plein cœur de

4 l'Europe, en Iraq, en Iran, en Afghanistan, au sud de l'Afrique, les Tutsi

5 et les Hutus, les Osed [phon], les Caucasiens, les Tchétchènes, enfin, le

6 champ de morale s'étire à perte de vue. Nous n'avons pas cette force morale

7 mise à part quand on voit la mort devant nous. Cela nous bouleverse, mais

8 on s'habitue très vite et les choses vont comme elles vont.

9 Pour que l'on n'ait connaissance de toute cette histoire mis à part les

10 éléments, les données et les faits, il convient de comprendre ce qui est

11 pas échappe à l'esprit rationnel. C'est ce que nous conseille Aristote.

12 Cela est susceptible d'élargir nos connaissances. Nous lisons des romans,

13 nous suivons des films pour traverser au travers de personnage le fil d'une

14 vie pour que nous fassions partie d'une vie. Nous ne vivons qu'une vie dans

15 notre entourage culturel, la civilisation qui est la nôtre, la famille qui

16 est la nôtre. La littérature et les arts nous permettent de repasser les

17 souffrances de la méduse bleue, de connaître le sourire de la Joconde. Si

18 nous ne sommes pas en mesure de le faire, nous ne pouvons pas comprendre ce

19 qui s'est passé là-bas. Nous ne comprendrons pas la conscience. Nous ne

20 comprendrons pas l'éclatement qui est survenu au niveau de ces jeunes gens

21 qui, jusque-là, étaient tout à fait paisibles. On a vu des hommes

22 maigrichons stoppés des chars, demain ce seront des soldats mais il faut

23 dix ans pour qu'ils deviennent soldats. Ils se sont achetés des fusils mais

24 ils ne savent pas ce que sait que l'ordre, ce que sait que la discipline.

25 Ils ne peuvent pas être trempés à l'art de ce qu'il faut et de ce qu'il ne

26 faut pas.

27 Quand il y a des amis, des collègues, des camarades qui sont tués à

28 côté, il y a quelque chose qui éclate dans la tête. Il y en a au moins un

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1 qui fera du mal. Il ne dira pas où, il ne dira pas quand. Il ne le sait pas

2 lui-même. Ce sont des choses qui sont imprévisibles, se battre ou combattre

3 cela, expliquer. L'un des ordres ne serve à rien. Il faut beaucoup de force

4 ou de puissance de conviction, beaucoup d'amour, beaucoup de confiance.

5 Je répète une fois de plus que la Croatie n'a rien fait de mal. Cet

6 Etat avec tant de réfugiés n'a rien fait de mal. Et je voudrais vous

7 montrer des renseignements, des données à titre de comparaison pour que

8 l'on ait une idée de quoi cela a l'air et là il y a une comparaison avec la

9 France et les "USA."

10 J'ai fait une simulation. En France, il y a 60 millions d'habitants. Je

11 vais arrondir les chiffres. J'ai placé la France à l'emplacement de la

12 Croatie. Je ne peux pas adapter les choses à l'exact ou au point près, mais

13 je crois qu'on comprendra ce que je veux dire.

14 Voilà une agression qui intervient à l'égard de la France. Allons de

15 l'avant.

16 On en vient à occuper ces parties-là de la France. Allons au tableau

17 d'après.

18 Si on prend l'échelle, la France ainsi occupée, dans la situation de la

19 Croatie, a 4 992 000 personnes expulsées et 4 453 000 réfugiés. Il est tué

20 un nombre de Français. Comprenez-moi bien, ce n'est pas vrai, je fais une

21 simulation. Il y aurait 150 000 Français de tués, et 351 000 Français

22 auraient été blessés. Des inconnus qui auraient péri seraient au nombre de

23 10 300 et quelque, et les défenseurs français qui se sont suicidés au bout

24 du compte sont 20 000. C'est comme si en France, il y en avait eu 20 000 de

25 suicidés. Il y a encore des milliers et des milliers de mères qui cherchent

26 les ossements de leurs enfants autour et à proximité de Vukovar et d'autres

27 villes.

28 Il en va de même pour ce qui est des Etats-Unis. On vient de voir le cas de

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1 la France. Voilà. Alors, imaginez la situation suivante. La France a reçu

2 96 460 blessés de Bosnie-Herzégovine, elle en a reçu 9 445 000, et il y a

3 151 000 personnes de tuées.

4 Montrez-moi le graphique suivant. Les personnes expulsées et les réfugiés

5 en France par année. On voit là les chiffres que cela aurait donné. Passons

6 au cas suivant. La Fédération de Bosnie-Herzégovine. J'ai fait des

7 regroupements pour ce qui est de la situation. Si la Bosnie-Herzégovine

8 avait l'équivalent de la population française, on aurait, par exemple,

9 17 %, 38 de Français, et 10 542 000 Français.

10 Simulation suivante. Passez-moi maintenant les Etats-Unis. Alors,

11 6 500 Croates tués par rapport à 700 000 tués en France ou en Amérique, si

12 on transpose cela aux chiffres américains.

13 Image suivante. Les Etats-Unis d'Amérique devraient recevoir

14 24 000 000 de personnes expulsées et 21 000 000 de réfugiés. Il y aurait eu

15 739 000 de tués. Je rappelle, Dieu merci, que pendant la Deuxième Guerre

16 mondiale, les Etats-Unis ont eu 400 000 soldats et citoyens tués. Il y a eu

17 1 715 000 hommes de blessés, 50 000 inconnus ont été tués, et le nombre de

18 suicides parmi les défenseurs se chiffrerait à 97 000 et quelques.

19 Exemple suivant. Plus loin, plus loin. Voilà de quoi cela aurait l'air, à

20 quelques détails près. Allez de l'avant. Allez encore de l'avant.

21 Réfugiés enregistrés ou recensés en Amérique par année. Cela va de 44

22 millions, puis cela décroît suivant les années.

23 Toujours le même schéma. On va de l'avant.

24 S'il y avait en Bosnie-Herzégovine autant d'habitants qu'aux Etats-Unis,

25 cela signifierait que 51 millions d'Américains vivraient de nos jours en

26 Bosnie-Herzégovine. Allez de l'avant.

27 Je veux que vous vous penchiez maintenant sur ces renseignements-ci. Quand,

28 en Croatie, nous avons 700 000 réfugiés, en Amérique cela fait 9 000 -- en

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1 France, cela fait 9 millions et quelques, et en Amérique cela fait 46

2 millions. Si on en a 11 000 de tués, en France cela donne 151 000, et en

3 Amérique 734 000. Quand on a 26 000 blessés, en France cela fait 351 000,

4 et 1 715 000 aux Etats-Unis. Quand, en Bosnie-Herzégovine, nous avons 6 500

5 Croates de tués, cela correspond à 545 000 Français tués, ou 2 661 000 et

6 quelques Américains de tués. Résidant en Bosnie-Herzégovine. Les blessés de

7 Bosnie-Herzégovine que nous avons accueillis sont au nombre de 10 623 en

8 Croatie, et à l'échelle de la France, cela devrait signifier 96 000 hommes

9 soignés par la France, et 470 000 et quelques blessés soignés par

10 l'Amérique.

11 Il y a un élément qui s'appelle la psychologie sociale de la population. Je

12 vais sauter des passages et je me propose d'expliquer cela sur les éléments

13 suivants.

14 J'ai préparé ici des informations concernant, par exemple, des

15 coupures de courant à New York. Dix minutes après une panne de courant, il

16 a été volé 2 000 magasins, essentiellement juifs. On a tué, je ne sais

17 combien de personnes. Des milliers de personnes ont fini par être

18 emprisonnées.

19 Si l'on compare après l'ouragan Katrina à New Orleans, et derrière on

20 voit l'organisation puissante du plus puissant des pays du monde. Quand on

21 voit de quoi ont l'air les manifestations en France et lorsque, par

22 exemple, le ministre de l'Intérieur déclare une chose qui déplaît aux

23 manifestants, combien de millions cela coûte ? Il y a un homme de tué, des

24 milliers de voitures incendiées.

25 Imaginez le tiers du territoire occupé, les villes à 90 % détruites.

26 Lorsque l'on modifie l'ordre politique, lorsqu'on est en train de mettre en

27 place un Etat et lorsqu'on fait face à ces problèmes, quel est le pouvoir

28 véritable de l'individu ? Quel est l'effort qu'il doit investir et quels

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1 sont les résultats qu'on peut s'attendre à avoir ? Les résultats sont

2 impressionnants.

3 La question qu'on arrive à se poser, c'est le désespoir moral de

4 l'individu qui n'a pas le pouvoir et les potentiels d'organisation qui lui

5 sont nécessaires. Il finit par avoir honte. Mais la fierté et la honte

6 doivent avoir leur part.

7 Je peux avoir honte de ce qu'ont fait bien des gens. Mais si on sait

8 qu'à chaque minute il y a des enfants qui meurent, autant que si un avion

9 tombait avec 300 passagers. On voit des gens se tuer, des gens se battre

10 tous les jours. En tant que civilisation, nous pouvons avoir honte, et nous

11 avons honte de ce qui se passe. Ce qui s'est passé et qui a été commis par

12 des ressortissants croates, que ce soit des centres de détention ou des

13 prisons, cela se peut, mais jamais nulle part il n'y a eu intention

14 délibérée de le faire. Nous avons le droit aussi d'être fiers, parce que

15 les efforts que nous avons investis, avec ces présentations, avec ces

16 documents que je vais montrer, démontrent qu'il n'y a pas d'exemple

17 analogue dans l'histoire des guerres à ce jour.

18 Quand il s'agit d'un tel nombre de zones sous la protection des

19 Nations Unies, en Croatie, il a été tué 600 personnes. Il a été tué 400

20 Serbes en Croatie. C'est un chiffre terrible. Chaque individu mérite d'être

21 puni pour ce qu'il a fait. La mesure des choses, c'est la vie de

22 l'individu. Mais si l'on n'oublie pas les 2 millions d'Allemandes violées

23 après la Deuxième Guerre mondiale - et ce n'est pas que les Russes qui ont

24 violé - si l'on n'oublie pas les 100 000 femmes violées à Berlin. Si l'on

25 sait que 10 000 de ces femmes se sont suicidées par la suite.

26 Si l'on sait de quoi a l'air la situation en Iraq, en dépit des

27 efforts déployés. Quand on sait qu'un million d'Allemands sont morts dans

28 des camps de détention après la Deuxième Guerre mondiale, ce qu'il reste à

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1 un esprit rationnel, c'est de faire des comparaisons. Avons-nous à avoir

2 honte par rapport aux autres ? Nous avons honte vis-à-vis des crimes

3 individuels. Il faut les poursuivre en justice. Il faut qu'il y ait un nom

4 et prénom à coller aux criminels. On ne peut pas pêcher un individu au

5 hasard pour le punir.

6 Les procès qui ont eu lieu avant la Révolution française en 1789,

7 lorsque encore, l'on jugeait de façon irrationnelle les femmes pour

8 sorcellerie et lorsqu'on leur mettait la main dans l'huile bouillante; si

9 elles criaient, si elles hurlaient, elles étaient coupables, et si elles ne

10 criaient pas, elles étaient quand même coupables, parce que c'est le diable

11 qui lui avait donné cette force de résister. Dans tous les cas de figure,

12 elles finissaient sur l'échafaud.

13 Je crois que sur subsister, exercer des fonctions, la culpabilité qui

14 serait la nôtre -- c'est ce que j'aurais dû faire, c'est fuir ce pays comme

15 bon nombre d'intellectuels, de faux intellectuels, essayer d'éviter toute

16 responsabilité, m'enfuir, et ailleurs, depuis un fauteuil confortable,

17 parler de ce qu'on aurait dû faire. C'est un peu prendre la position de

18 Dieu et s'accaparer les attributs de Dieu, mais je ne les ai pas. Je dirais

19 que les efforts que nous avons déployés ont été très forts.

20 Je voudrais maintenant que nous visionnions deux films concernant mon

21 comportement; non pas pour témoigner en ma faveur, mais pour démontrer de

22 quoi avaient l'air certaines situations. Certaines de ces situations ont

23 été filmées sur les lieux; Citluk. D'autres, je les ai reconstruites

24 partant des déclarations de témoins. J'ai engagé des acteurs, et on a filmé

25 pour s'imaginer de quoi cela avait l'air avec du champ véritable, des

26 victimes véritables sur le terrain, sans faire de mise à l'échelle, quelle

27 qu'elle soit, aux fins de réduire la situation ou de diminuer la situation

28 qui s'était présentée sur le terrain.

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1 [Diffusion de la cassette vidéo]

2 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Un convoi humanitaire a été arrêté à

3 Citluk en Herzégovine. Il fallait passer jusqu'à Mostar. Ici, les choses ne

4 sont pas contrôlables. Ce sont des réfugiés de la Bosnie centrale, ces

5 gens-là.

6 Mate Ganic, le ministre des Affaires étrangères, est allé là-bas pour qu'on

7 laisse passer le convoi. Il a parlé, mais on n'a pas prêté une oreille

8 attentive. On vous avait vu, M. Prlic. Lui aussi, il a essayé. Mais ici, ce

9 n'est pas des discours, ce n'est pas des prières.

10 Ces femmes sont privées de leurs enfants, des leurs. Mate Boban essaie de

11 faire passer le convoi.

12 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

13 "Mate Boban : Deux cent milles Croates encerclés sans médicament,

14 sans vivres."

15 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Nous avons dû avoir une coopération

16 avec les Serbes de Kiseljak pour survivre. Ici, on voit les enfants des

17 réfugiés. Ce ne sont pas des enfants de la Bosnie-Herzégovine. Vous voyez

18 Cedric Tolbert; c'est un autre officier des Nations Unies. On ne peut pas

19 discuter, on ne peut pas s'entretenir. M. Praljak est en train de crier aux

20 gens de se pousser, de s'éloigner.

21 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

22 "Vous allez prêter oreille à ce que je dis. Ici, il n'est pas

23 question d'amour. Ici, j'ai reçu huit camions de vivres pour la population

24 croate de Vitez. Il faut passer jusqu'à Vares. Il faut remmener neuf

25 cadavres de Mostar. Il ne s'agit pas d'amour. Le convoi a été inspecté.

26 Nous devons sauver des gens là-bas. Ce qui s'est passé s'est passé. L'armée

27 va faire son travail à elle, aux fins de donner à manger aux Croates de

28 Vares, de Zepca, de Vitez, et il faut que ceci passe. Pas de négociation.

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1 Messieurs les soldats, poussez ces gens-là. Le convoi doit passer."

2 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Préparez-moi l'enregistrement de

3 Caplijna. Mais avant de passer cette vidéo, je vais vous dire une chose. Je

4 crois que M. Scott a dit que c'était un acte courageux. Non, c'est un acte

5 déterminé, de détermination. Il fallait y aller par la force, la force

6 brute. Ce n'est pas le chef d'état-major qui doit avoir réglé ses comptes

7 aux civils, mais autrement, cela ne pouvait pas marcher. Autrement, cela ne

8 marchait pas. A chaque fois, il s'agissait d'y aller de toutes ses forces,

9 et qu'on me laisse dire sans me vanter : une fois, je me suis expliqué aux

10 Juges de la Chambre pour avoir eu à parler. Jamais, dans aucune interview,

11 je ne me suis vanté de quoi que ce soit. Ce n'est pas décent de le faire,

12 mais en ma qualité d'accusé, je lève cette interdiction, je lève

13 l'interdiction que je me suis posée, mes connaissances, mon intelligence,

14 mon courage, le temps que j'ai investi.

15 Ce n'est pas des louanges que je m'adresse. Je parle de projet, projet de

16 liberté et de nécessité. J'alterne toutes ces raisons. Je ne sais pas quel

17 est mon mérite pour ce qui est d'avoir été courageux; peut-être est-ce ma

18 taille ou ma barbe qui l'ont fait. Mais jamais je ne laisserai personne en

19 Europe dire qu'à ma place, il en aurait fait plus.

20 [Diffusion de la cassette vidéo]

21 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Ici, on voit que la Croix-Rouge

22 internationale a convenu qu'à la caserne de Capljina, il y ait des

23 rencontres entre des personnes qui étaient venues voir leurs enfants là-

24 bas, et lorsqu'ils sont allés les voir, on leur a tiré dessus. Le médecin

25 que j'ai mentionné était un Serbe. Là, je profère des insultes, des

26 insultes terribles, parce qu'au fusil à lunette, il est en train de tirer

27 sur des gens.

28 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

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1 "Que je te nique ta mère de criminelle."

2 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Que les interprètes le traduisent. Ils

3 ont tiré sur une femme qui portait un enfant. Cette femme avait son mari

4 qui était un officier de l'armée populaire yougoslave. Je suis en plein

5 milieu de la rue. Je suis donc devant le tireur isolé. Le caméraman n'a pas

6 le courage de sortir derrière moi. Il s'est mis de côté, à l'abri. Ils ont

7 dit -- enfin, cela n'a pas été passé à la télévision parce que j'ai

8 beaucoup insulté, mais que voulez-vous ? Que j'aille le supplier ? Quel est

9 cet imbécile qui tue des gens ?

10 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

11 "Criminel, que je te nique ta mère de Chetnik. Ce sont des femmes et

12 des enfants. C'est comme vos mères à vous."

13 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je suis commandant de la zone. J'ai 60

14 kilomètres de front. Je savais que si je ne venais pas là, que si je

15 n'étais pas présent, on leur tirerait dessus.

16 La Croix-Rouge internationale a fait son travail. Ils ont fait leur travail

17 en seigneurs, ces gens-là. Eux, ils ne sont pas responsables s'il y a des

18 gens de tués. Mais si je n'étais pas là, si je n'avais pas prévu cette

19 possibilité, et on va peut-être m'accuser de cela aussi.

20 Regardez les visages de ces femmes. L'homme que vous voyez avec cet

21 imperméable, c'est un Serbe. C'est son fils qui est médecin, un serbe. Le

22 petit homme à gauche, c'est un Bosnien, un Musulman.

23 La deuxième fois, quand ils sont venus à dix mètres de la caserne, on leur

24 a tiré dessus. Dans toute ma taille, ma carrure de 1 mètre 90, je suis

25 arrivé jusqu'à 20 mètres de l'entrée.

26 Je crois que j'ai véritablement abrégé mon discours. Je ne voudrais

27 pas parler aux noms des autres, mais nous sommes venus de notre plein gré

28 comparaître devant cette Chambre, devant ce Tribunal. Tout ce que nous

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1 voulons, c'est que véritablement se partant des faites, l'on détermine la

2 vérité pour que l'on voit que le film que je me suis repassé au moins 100

3 fois, et que chacun d'entre nous s'est repassé au moins 100 fois -- avec

4 tout l'esprit critique qu'on peut avoir vis-à-vis de soi-même, cela nous a

5 montré -- m'a montré que je ne sais pas ce que je changerais. Que voulez-

6 vous que je change ? Vous vous faites face à des accusations pénales très

7 graves. Qu'auriez-vous fait autrement ?

8 J'aurais répondu que je ne sais pas. Il me semble qu'avec tout

9 l'esprit critique que je me dois d'avoir, que j'ai fait tout. J'ai tout

10 fait. Ce sont des détails -- vous avez en entendre encore beaucoup

11 d'autres.

12 Petkovic a eu deux fois un pistolet sur la bouche ou contre la tête.

13 Il a été arrêté, et lorsque des Croates se battaient entre eux, il y avait

14 des chars de tourner les uns contre les autres. On nous tirait au-dessus de

15 la tête. On pouvait fuir ou alors faire ce qu'on a fait avec l'énergie

16 qu'on a investie 18, 19 heures par jour, avec le courage dont on fait

17 preuve. On peut avoir honte à certes de ce qu'on n'a pas réussi de faire,

18 mais je pense je ne peux jamais avoir été à une réunion ou un rassemblement

19 quelconque avec l'une quelconque des personnalités que j'ai rencontrée,

20 jamais elle ne m'a été donné d'entendre quoi que ce soit de contraire à mes

21 principes moraux, et je crois que mes principes moraux sont tout à fait

22 bons et corrects. Toute ma vie, j'ai vécu en en droit.

23 S'agissant des propos de PV qui ne nous ont pas été donnés par l'Etat

24 croate, je dirais que ces PV ont une lacune terrible.

25 Il n'y a pas de corrections. Il y a des plaisanteries, des blagues. Quand

26 Tudjman s'adresse à quelqu'un qui s'appelle Pero Markovic, on n'entend pas

27 le ton qui a été utilisé, mais je sais de quelle façon la chose a été dite.

28 Je le sais, et je sais qu'il y a une connotation tout à fait autre.

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1 Lorsqu'on arrange des citations, lorsque l'on range cela côte à côte,

2 lorsque l'on met côte à côte tous ces faites-là, je crois que cela ne

3 serait être agréé. Je veux bien que l'on fasse ce que l'on veut. La

4 responsabilité individuelle, il n'appartient pas d'en juger.

5 Mais, après tout ceci, après des milliers de documents à présenter,

6 parler d'une entreprise criminelle commune, à mon avis, Messieurs les

7 Juges, est une offense pour la plus élémentaire des logiques, et la logique

8 juridique, notamment, parce que ces types de comportement ne justifient pas

9 ce type de conclusion. Alors, nous avons individuellement fait tout ce que

10 nous pouvions. Nous avons peut-être eu des omissions et des lacunes. Nous

11 avons peut-être une responsabilité de ce faite-là. Peut-être directement ou

12 indirectement aurions-nous pu faire quelque chose. Je veux bien faire face

13 à la justice. Mais s'il s'avère que mon opinion à mon sujet n'est pas

14 bonne, et que les preuves sont différentes, je crois qu'il faut accepter la

15 responsabilité, parce que c'est humain. Les erreurs sont humaines, et nous

16 voulons bien assumer nos responsabilités, et passer en prison le temps

17 qu'il faudra. Mais j'estime que j'ai suffisamment de courage et de force

18 pour parvenir à la vérité par les faits.

19 C'est tout. Merci beaucoup. Merci de m'avoir écouté. Merci, Messieurs

20 et Mesdames les conseils. Merci, Mesdames et Messieurs les juristes.

21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Praljak. Vous avez terminé votre

22 déclaration liminaire dans le temps que vous avez été imparti. Je vous en

23 remercie au nom de la Chambre.

24 Cette audience va donc se terminer. Comme vous le savez, nous reprendrons

25 le cours des audiences la semaine prochaine. Lundi est un jour férié, il

26 n'y aura pas d'audience. La prochaine audience est donc prévue mardi à 14

27 heures 15. Donc, d'ici là, prenons du repos et préparez-vous pour cette

28 prochaine audience qui, je l'espère, le témoin sera présent.

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1 Est-ce que l'Accusation peut bien me confirmer que le témoin sera présent

2 dans la salle d'audience ? Bien. Vous opinez de la tête. Espérons qu'il

3 soit là.

4 Je vous remercie. Je vous invite tous à revenir mardi prochain.

5 --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 2 mai

6 2006, à 14 heures 15.

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