Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 13 septembre 2006

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : Bonjour, Monsieur le Président. Affaire IT-04-74-T, le

  9   Procureur contre Prlic et consorts.

 10   M. LE JUGE ANTONTTI : Bien. En ce mardi 13 septembre 2006, je salue toutes

 11   les personnes présentes. Je salue les représentants de l'Accusation qui

 12   sont complets, je salue notamment M. Mundis qui est tout au fond de la

 13   salle. Je salue également les représentants du gouvernement américain, je

 14   salue le témoin, les avocats ainsi que Messieurs les accusés.

 15   Je vais demander à M. le Greffier de passer pendant quelques minutes à huis

 16   clos.

 17   M. LE GREFFIER : Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur le Président.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 11  Pages 6513-6514 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  5   [Audience publique]

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Murphy.

  7   M. MURPHY : [interprétation]  Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

  8   Juges. Je souhaiterais demander une précision de l'Accusation. Aujourd'hui,

  9   nous avons reçu un exemplaire d'une déclaration de témoin qui aurait été

 10   faite par le témoin aujourd'hui, M. Galbraith. Elle porte la date d'hier,

 11   du 12 septembre 2006, et simplement pour que le compte rendu d'audience

 12   soit tout à fait clair et que l'on s'assure que tout est bien consigné, je

 13   souhaiterais savoir à quelle heure la déclaration a été prise, car je crois

 14   que le compte rendu d'audience fait état du fait que le témoin a déposé de

 15   9 heures du matin jusqu'à 13 heures 45.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 17   Juges, bonjour. Je suis tout à fait bien sûr heureux de clarifier ce point.

 18   Le témoin est venu très tôt le matin hier au bureau du Procureur, peu de

 19   temps après 8 heures, pour fournir une déclaration en connexion avec une

 20   autre affaire qui n'a absolument aucun lien avec celle-ci et c'est à ce

 21   moment-là que la déclaration a été prise. Simplement pour faire preuve de

 22   bonne foi et pour être tout à fait sûrs, nous avons inclus cette nouvelle

 23   déclaration qui fait une demi-page. Nous nous étions assurés que ce

 24   document soit remis à la Défense, mais il est certain que la déclaration

 25   ait été prise avant que l'ambassadeur Galbraith ne soit assermenté.

 26   M. MURPHY : [interprétation] Je remercie à M. Scott pour cette

 27   clarification.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic.


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  1   M. KOVACIC : [interprétation] Je suis désolé d'interrompre. Je voulais

  2   également recevoir une information de la part de l'Accusation. Nous n'avons

  3   pas pu les consulter pour leur poser cette question, c'est la raison pour

  4   laquelle j'en profite maintenant. L'Accusation nous a remis, ce matin très

  5   tôt, un document par fax qui porte le numéro P 07789. Il s'agit d'une

  6   résolution du Conseil de sécurité datant du 3 février 1994. Il me semble

  7   que ce document -- je n'ai pas bien sûr eu l'occasion de faire toutes les

  8   vérifications nécessaires, mais je n'arrive pas à trouver ce document dans

  9   le proofing chart, donc, dans le document que nous avions reçu auparavant

 10   et je crois qu'il est un peu trop de prendre connaissance de ce document.

 11   Je n'ai absolument aucune possibilité de poser des questions quant à ce

 12   document, car je n'ai pas eu l'occasion de vérifier le tout. Il est tout à

 13   fait vrai pour dire -- je souhaiterais vous dire que ce matin, j'ai reçu ce

 14   document et nous n'avons donc pas pu nous informer suffisamment pour poser

 15   des questions, donc, je souhaiterais formuler une objection quant à

 16   l'introduction de ce document comme pièce et --

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Monsieur Kovacic, en même temps que vous

 18   parliez, je lisais le document que j'ai reçu il y a quelques secondes. Je

 19   suis fort capable, si le besoin s'en faisait sentir, de poser d'ores et

 20   déjà des questions au témoin à partir de ce document. Bon. Première

 21   remarque.

 22   Deuxième remarque, c'est un document émanant du Conseil de sécurité. Ayant

 23   trait donc à la situation dans la République de Bosnie-Herzégovine que vous

 24   devez connaître, il serait quand même incroyable que ce document ait

 25   échappé à votre vigilance. Donc ne dites que vous êtes surpris par un

 26   document qui apparaît comme cela au dernier moment. Bien. Alors, on a déjà

 27   passé 15 minutes et il faut maintenant accélérer. Donc, Monsieur Scott, je

 28   vous redonne la parole.


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  1   LE TÉMOIN : PETER GALBRAITH [Reprise]

  2   [Le témoin répond par l'interprète]

  3   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Interrogatoire principal par M. Scott :

  5   Q.  [interprétation] D'abord, je souhaiterais souhaiter un bon après-midi à

  6   l'ambassadeur.

  7   R.  Merci et bonjour.

  8   Q.  J'espère que vous avez passé une -- vous vous êtes bien reposé hier

  9   soir ?

 10   R.  Oui, tout à fait.

 11   Q.  Hier, Monsieur l'ambassadeur, j'ai examiné les pièces et en fait, à au

 12   moins une reprise, je vous ai posé une question quant au lien qui existait

 13   entre l'armée du HVO, l'armée croate, la HV et les forces armées croates de

 14   Bosnie, et donc il y avait un document du Conseil de sécurité qui faisait

 15   état des camps et c'est le document que j'ai découvert. Comme je l'ai

 16   expliqué aux Juges de cette Chambre, j'ai omis de parler de ce document.

 17   Donc, je souhaiterais revenir sur ce document pour préciser certains

 18   points.

 19   M. SCOTT : [interprétation] Donc, je demanderais que l'on montre au témoin

 20   la pièce P 05047. Est-ce que l'on pourrait agrandir, je vous prie, cet

 21   extrait pour le témoin ?

 22   Q.  Monsieur, il s'agit d'une note faite par le président du Conseil de

 23   sécurité daté du 14 septembre 1993. Nous l'avons examinée brièvement hier.

 24   Je souhaiterais revenir sur cette pièce pour nous assurer tout à fait que

 25   nous avions bien parlé du bon document. S'agissant de ce document, je

 26   souhaiterais attirer votre attention sur le deuxième et troisième

 27   paragraphe du document. Le document se lit comme suit, je cite : "Le

 28   Conseil de sécurité exprime sa préoccupation sérieuse sur les récents


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  1   rapports s'agissant du fait que les Croates de Bosnie détiennent les

  2   Musulmans bosniens dans les camps de détention sous des conditions

  3   déplorables. Le Conseil souhaite rappeler la communauté internationale des

  4   conditions déplorables dans lesquelles les Musulmans en Bosnie ont été

  5   détenus l'année dernière.

  6   "Le Conseil réitère le principe du fait que le comité international de la

  7   Croix-Rouge (CICR) doit pouvoir avoir accès à tous les détenus en Bosnie où

  8   qu'ils soient détenus. Le Conseil note que la CICR a récemment eu accès à

  9   certains détenus, mais souligne que les Croates de Bosnie n'ont pas n'ont

 10   pas permis précédemment à la CICR d'avoir accès aux camps pour pouvoir

 11   évaluer les conditions de détention.

 12   "Le Conseil note également la récente demande faite par le président de

 13   Croatie à l'encontre des Croates de Bosnie."

 14   Ensuite, on fait également référence à une autre pièce du Conseil de

 15   sécurité -- un autre document du Conseil de sécurité "(S/26419)."

 16   Monsieur l'Ambassadeur, ce document a été daté du 14 septembre 1993. Je

 17   souhaiterais vous demander si vous avez souligné, si vous avez soulevé

 18   cette question auprès de M. Tudjman et du gouvernement croate.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  La dernière phrase du deuxième paragraphe : "Une demande récente a été

 21   faite par le président de Croatie." Donc, est-ce que vous aviez soulevé --

 22   est-ce que vous avez élevé ces questions auprès du président de Croatie à

 23   l'époque ?

 24   R.  Oui, tout à fait.

 25   Q.  Je demanderais que l'on passe alors au document que j'avais l'intention

 26   de vous montrer, c'est la pièce P 07789. Monsieur l'Ambassadeur, je ne sais

 27   pas si vous voyez ce passage. Pour le compte rendu d'audience, il s'agit

 28   également d'une déclaration formulée par le président du Conseil de


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  1   sécurité en date du 3 février 1994, et je souhaiterais attirer votre

  2   attention sur les deuxième et troisième paragraphes de la page en question.

  3   "Le Conseil de sécurité est très préoccupé par le fait que la République de

  4   Croatie a déployé des éléments de l'armée croate (HV) avec un équipement

  5   militaire très élaboré dans la partie centrale et sud de la République de

  6   Bosnie-Herzégovine tout comme décrit précédemment dans la lettre du

  7   secrétaire général du 1er février 1994.

  8   "Le Conseil de sécurité condamne très sérieusement la République de Croatie

  9   pour cette hostilité qu'elle perçoit comme étant très sérieuse contre des

 10   états membres des Nations Unies, qui constitue une violation du droit

 11   international."

 12   Donc, lorsqu'on lit : "Le Conseil de sécurité," on lit ensuite que : "Le

 13   Conseil de sécurité condamne la République de Croatie et demande qu'elle

 14   retire tous les éléments de l'armée croate (HV), y compris son équipement

 15   militaire, pour pouvoir respecter l'intégrité territoriale de la République

 16   de Bosnie-Herzégovine."

 17   Encore une fois, Monsieur, ma question est la suivante : est-ce que vous

 18   avez soulevé ces questions auprès du président Tudjman ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Est-ce que vous vous souvenez des réponses que vous avez reçues du

 21   président Tudjman ou Susak, ou d'autres représentants, d'autres

 22   représentants hauts gradés auprès desquels vous auriez soulevé ces

 23   questions ?

 24   R.  C'était une question très particulièrement importante et c'était le

 25   point principal, c'était à ce moment-là que les choses ont changé pour ce

 26   qui est de la guerre en Bosnie et des relations avec la Croatie. Cette

 27   déclaration était en fait un ultimatum que les Etats-Unis avait lancé

 28   envers la Croatie, elle avait reçu deux semaines pour enlever ses troupes


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  1   de la Bosnie-Herzégovine; sinon, la Croatie ferait face à des sanctions

  2   sévères, des sanctions qui sont semblables à celles qui se trouvent à

  3   Belgrade. Donc, c'est quelque chose qui a été discuté très fréquemment à

  4   l'époque auprès du président Tudjman, le ministre Granic et le ministre de

  5   Défense Susak. L'explication était tout à fait claire : l'armée croate se

  6   trouvait en Bosnie parce que les Croates de Bosnie perdaient la guerre

  7   musulmane-croate. En réalité, pour eux, il s'agissait d'un effort déployé,

  8   d'une mission de défense. Ils avaient peur que s'ils retiraient l'armée

  9   croate, que l'ABiH, à ce moment-là, serait victorieuse au point de vue

 10   militaire et qu'elle perdrait un très grand nombre de territoires. Donc, il

 11   y avait un élément de désespoir à Zagreb; en fait, désespoir dans le sens

 12   qu'ils n'avaient plus aucun choix et ils faisaient face à un choix

 13   terrible, c'est-à-dire soit de maintenir les troupes et de faire face à de

 14   sérieuses sanctions ou de retirer leurs troupes -- leurs effectifs

 15   militaires.

 16   Q.  Je vous remercie. Avant de passer au dernier sujet de l'interrogatoire

 17   principal, Monsieur l'Ambassadeur, je souhaiterais soulever une autre

 18   question qui émane d'un commentaire qui a été fait par l'un des conseils de

 19   la Défense. Ce commentaire disait que vous étiez ici pour donner votre

 20   appui à l'Accusation. Est-il exact également de dire que vous avez témoigné

 21   dans l'affaire Martic ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-il exact également de dire que c'est une affaire qui implique

 24   principalement les Croates dans la procédure pénale ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Vous avez également témoigné dans l'affaire Milosevic, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, tout à fait.

 28   Q.  Si je ne m'abuse, c'est une affaire qui devant le Tribunal impliquait


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  1   également des victimes croates ainsi que des victimes serbes; est-ce que

  2   c'est exact ?

  3   R.  Oui, tout à fait.

  4   L'INTERPRÈTE : Des victimes croates, musulmanes et probablement serbes, se

  5   reprend l'interprète.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela.

  7   M. SCOTT : [interprétation]

  8   Q.  Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre si, au cours des

  9   premières semaines à Zagreb, alors que les premières semaines s'étaient

 10   écoulées de votre séjour à Zagreb : est-ce que vous avez pu être en mesure

 11   de faire une évaluation quant à l'état du leadership existant, de

 12   dirigeants résistants, de la situation auprès des dirigeants en Herceg-

 13   Bosna ?

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous commencez de discuter un autre sujet. Je

 15   voudrais revenir au Conseil de sécurité. Juste des questions

 16   d'éclaircissement. Cette déclaration du président du Conseil de sécurité

 17   est intervenue le 3 février 1994. Vous avez indiqué que vous aviez vu le

 18   président Tudjman. Vous l'avez vu le lendemain, le surlendemain ? Quand

 19   l'avez-vous vu, dans votre souvenir ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, malheureusement, je

 21   n'arrive pas à me rappeler de la date précise à laquelle je l'ai vu. Ce que

 22   je peux vous dire toutefois c'est que je l'aie vu assez souvent au cours de

 23   cette période et peut-être même plus fréquemment encore le ministre des

 24   Affaires étrangères, le ministre de la Défense.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous pose cette question parce que, dans le

 26   dernier paragraphe de la page 1, on voit que le Conseil de sécurité demande

 27   au secrétaire général, donc, de l'ONU, de lui faire un rapport dans les

 28   deux semaines sur l'avancement du retrait de l'armée croate ainsi que le


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  1   rapatriement de l'équipement militaire. Il y avait des délais très courts

  2   puisqu'en deux semaines, le secrétaire général devait faire un rapport au

  3   Conseil de sécurité. Donc, cela impliquait un suivi à divers échelons de

  4   cette affaire. Est-ce que deux semaines après, c'est-à-dire vers le 18

  5   février, vous, en tant qu'ambassadeur, vous aviez constaté que ceci avait

  6   mis à exécution ou pas ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux dire que j'ai rencontré Tudjman soit

  8   le 17 ou vers le 17. J'ai prononcé une allocution publique, où j'ai fait un

  9   avertissement très -- j'ai donné un avertissement très, très sérieux, et

 10   cela a plutôt choqué le gouvernement croate ce soir-là à Lisinski théâtre à

 11   Zagreb. Ils n'ont pas retiré les troupes, effectivement, toutefois au cours

 12   de ce week-end-là, entre le jeudi le 17 -- en fait, je ne veux pas

 13   témoigner à 100 % sur les dates 13 ans plus tard, mais je crois que c'était

 14   entre le jeudi et le lundi qui a suivi ce week-end. Il a accepté la

 15   proposition des Etats-Unis afin d'accepter une négociation qui mettrait la

 16   fin d'une guerre musulmane-croate et l'établissement d'une Fédération en

 17   Bosnie-Herzégovine. Pour être tout à fait clair, jeudi, le jeudi en

 18   question, il avait complètement refusé d'accepter l'idée. J'étais allé voir

 19   Granic ce week-end-là. Granic était plutôt frustré que Tudjman ait refusé

 20   car je voyais qu'il verrait un désastre imminent pour la Croatie. Granic, à

 21   ce moment-là, avait tout à fait bien compris la situation. Il a parlé

 22   longuement et il a dit : "Je vais essayer de convaincre Tudjman au cours du

 23   week-end," c'est effectivement ce qu'il a fait. Le lundi qui a suivi, je

 24   crois qu'il s'agissait de lundi, l'ambassadeur Redman, qui était le

 25   négociateur -- l'envoyé spécial pour négocier sur la paix, et il est allé -

 26   - qui avait été déployé en Bosnie et nous sommes allés voir Tudjman et, en

 27   fait, il avait accepté. L'armée croate ne s'est pas retirée, la Croatie a

 28   pris une autre façon alternative de mener les choses, ce qui a mené à une


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  1   négociation et à l'accord de Washington et, à la fin du mois de février ou

  2   le 1er mars 1994, au cours d'une très courte période, il  a eu la fin des

  3   hostilités, et il y a eu une alliance entre les autorités bosniennes de

  4   Croatie et le gouvernement.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci pour cette précision.

  6   Monsieur Scott.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Simplement pour

  8   que le compte rendu d'audience soit tout à fait clair.

  9   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, vous avez mentionné la date du 17, donc, pour

 10   le compte rendu d'audience - j'imagine que c'était le 17 février 1993 -

 11   vous n'aviez pas donné le mois et l'année.

 12   R.  Non, c'était le 17 février 1994. Je suis désolé. J'ai oublié de le

 13   dire.

 14   Q.  La question que je vous ai posée, il n'y a pas longtemps, Monsieur

 15   l'Ambassadeur, avant l'intervention du Président ne se trouve plus à

 16   l'écran. Ni lorsque vous avez commencé à travailler, lorsque vous avez pris

 17   votre poste, lorsque vous vous êtes rendu sur place, est-ce que vous avez

 18   pu établir certaines conclusions quant au statut, ou quant au caractère du

 19   leadership militaire existant soit en Herceg-Bosna ou pour ce qui est du

 20   HVO ?

 21   R.  Oui, tout à fait. J'en étais arrivé à la conclusion que nous n'ayons

 22   pas obtenu les résultats que nous escomptions, donc, un accès de convois

 23   humanitaires, la libération des détenus qui avaient été détenus dans des

 24   conditions inhumaines, et la fin de la guerre musulmane-croate ainsi que la

 25   fin du pilonnage de Mostar. Je savais que nous n'allions pas obtenir ces

 26   résultats tant et aussi longtemps que Praljak était à la tête du HVO et que

 27   Boban était président d'Herceg-Bosna. C'est ainsi que j'ai pris la décision

 28   que nous allions faire tous que nous pouvions, et c'était une décision qui


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  1   était bien sûr appuyée par Washington, c'est-à-dire que nous allions

  2   utiliser notre influence sur la Croatie pour que la Croatie retire ses

  3   troupes et c'est sûr que le tout soit arrangé.

  4   Q.  De façon général, est-ce que vous pourriez nous dire de quoi est-ce que

  5   vous parlez ?

  6   R.  Bien, j'en ai parlé à mes homologues croates, et il s'agit, bien sûr,

  7   du président Tudjman, du ministre de la Défense Susak, et du ministre des

  8   Affaires étrangères Granic. Je leur ai avais présenté scepticisme de notre

  9   gouvernement et je leur ai expliqué que si -- je leur ai assuré que tant et

 10   aussi longtemps que ces personnes étaient à leur poste, il sera bien

 11   difficile d'obtenir des résultats. Je crois que le premier ministre Granic

 12   a partagé également mes points de vue, et le ministre de la Défense Susak,

 13   était assez près, le gouvernement de la Croatie était tout à fait tenu leur

 14   démission.

 15   M. SCOTT : [interprétation] J'aimerais qu'on vous présente la pièce P

 16   09510.

 17   Q.  Est-il exact, Monsieur, qu'est-ce que nous voyons actuellement à

 18   l'écran, c'est un télégramme qui vient de l'ambassade américaine à Zagreb

 19   en date du 13 décembre 1993 ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  J'aimerais que vous examiniez ce télégramme et que vous me disiez, si

 22   effectivement nous parlons entre autres de la mise à pied de M. Boban ?

 23   R.  Tout à fait.

 24   Q.  Pouvez-vous nous expliquer ce qui se passait à ce moment-là dans ce

 25   contexte-là ?

 26   R.  Quelque temps auparavant, le ministère des Affaires étrangères Granic

 27   m'avait demandé s'il serait possible d'accorder un visa à M. Boban pour des

 28   vacances prolongées, a-t-il dit, de longues vacances aux Etats-Unis. Ce


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  1   n'était pas possible parce que dans notre système d'octroi de visa, il

  2   était classifié en tant que criminel de guerre, donc, on ne pouvait pas lui

  3   accorder de visa. Il s'agissait donc de trouver un autre pays qui serait

  4   prêt à l'accepter. J'ai eu un entretien, je crois à ce moment-là -- avec un

  5   ministre australien qui était en visite, je crois que c'était quelqu'un qui

  6   s'occupait des affaires d'immigration. En tout cas, l'Australie a

  7   finalement accepté de donner un visa à M. Boban, si bien qu'il est parti

  8   pour de longues vacances. Je me souviens avoir dit au ministre des Affaires

  9   étrangères Granic que j'espérais qu'il avait un billet d'aller uniquement,

 10   et il a été démis de son poste. Ensuite, les choses ont commencé à

 11   s'améliorer.

 12   Q.  J'aimerais vous demander de vous reporter au paragraphe 3, qui

 13   s'intitule : "Boban part pour l'Australie pour quelques mois." Cela

 14   correspond à ce que vous venez de nous dire ?

 15   R.  Oui, et vous constaterez ici que Granic déclare que d'autres

 16   changements ont eu lieu notamment le remplacement de -- pratiquement tous

 17   les membres du HVO et tous les commandants du HVO et 70 % des membres du

 18   gouvernement.

 19   Q.  Sur insistance ou sur pression de la République de Croatie, à ce

 20   moment-là, fin novembre/début décembre 1993, on a vu des changements assez

 21   importants se produire -- on a nettoyé un petit peu -- on a fait un peu de

 22   nettoyage, on fait le ménage.

 23   R.  Oui. Je pense qu'on a fait le ménage, et c'était dû à la pression

 24   exercée par les Américains, et cela a entraîné une amélioration de

 25   l'atmosphère entre les Croates et les Bosniens, et avec l'ultimatum dont

 26   j'ai déjà parlé, cela a créé un environnement dans lequel la Croatie a

 27   accepté la proposition de la Fédération et cela a fait l'objet de

 28   négociations qui ont été couronnées de succès.


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  1   Q.  Pour en terminer avec ce document --

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Juste un instant, Monsieur Scott. On a une question.

  3   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, pendant que nous sommes encore sur

  4   cette question de vacances prolongées de M. Boban, je voudrais avoir une

  5   clarification. Quelle autorité a exactement relevée M. Boban de ses

  6   fonctions ? Est-ce que c'est une autorité en Bosnie-Herzégovine ou bien en

  7   Croatie ? Quelle était la fonction de M. Boban au moment où il a été

  8   limogé ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Boban a été relevé de ses fonctions suite à un

 10   ordre, une décision de Franjo Tudjman, président de la Croatie. Voilà

 11   comment cela s'est passé dans les faits. Maintenant, pour ce qui est du

 12   mécanisme officiel, du mécanisme formel qui a été employé, je ne me

 13   souviens pas exactement. J'imagine qu'il a fait ce qui se passe

 14   habituellement dans ce genre de situation, c'est-à-dire qu'il a dû

 15   démissionner, demandé à pouvoir passer plus de temps avec sa famille,

 16   enfin, ce genre de chose. Mais, en fait, la réalité des choses, c'est que

 17   le président Tudjman a ordonné qu'il soit relevé de ses fonctions, et cela

 18   a été effectivement le cas. Il était président à l'époque de ce que l'on

 19   appelait la République d'Herceg-Bosna.

 20   M. LE JUGE MINDUA : Merci.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une autre question, mais je crois qu'un autre

 22   Juge va vous poser une question. Vous avez dit tout à l'heure en parlant de

 23   Mate Boban qu'il avait été envisagé dans un premier temps qu'il parte aux

 24   Etats-Unis et vous avez indiqué que concernant le visa, cela n'était pas

 25   possible parce qu'il était classifié comme criminel de guerre, alors, il y

 26   a toute une série de questions qui viennent à l'esprit d'un juriste. Il me

 27   semble que lorsqu'un étranger demande un visa aux Etats-Unis, il doit

 28   remplir une demande de visa où il y a une colonne où l'intéressé marquait


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  1   s'il était condamné ou pas, mais là, qui l'a classifié criminel de guerre ?

  2   C'est une décision administrative ? C'est venu comment, cette

  3   classification ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais tout d'abord apporter une précision

  5   avant de répondre à votre question, Monsieur le Président. Je ne sais pas

  6   si M. Boban a jamais pensé qu'il allait véritablement aller aux Etats-Unis,

  7   je sais simplement que M. Granic avait besoin de lui trouver un visa,

  8   obtenir un visa pour lui pour qu'on puisse lui dire à ce moment-là, bien

  9   vous allez aux Etats-Unis, mais, finalement, cela s'est révélé impossible.

 10   Maintenant, il faut savoir que les Etats-Unis ont une liste de personnes

 11   dont on estime qu'ils ne peuvent entrer aux Etats-Unis, qu'ils ne peuvent

 12   demander un visa pour aller aux Etats-Unis et pour toute une série de

 13   raisons et je crois que c'est le consul ou le bureau du consul de Zagreb

 14   qui a placé Boban sur cette liste de personnes qui n'étaient pas

 15   susceptibles d'obtenir de visa parce qu'on le soupçonnait d'être criminel

 16   de guerre.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 18   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je voudrais vous poser la question

 19   suivante. Vous avez mentionné, je n'arrive plus à voir au transcript, qu'il

 20   y a eu une opération de nettoyage, on a fait le ménage un petit peu en

 21   novembre 1993, en tout cas, on a parlé de 1993. Je ne sais pas si c'est,

 22   effectivement, à ce moment-là que cela s'est passé, si c'est à ce moment-là

 23   que le Conseil de sécurité a rendu sa décision ou, plutôt, qu'il y a eu des

 24   déclarations du Conseil de sécurité le 3 février 1994. Donc, ce que je veux

 25   savoir, c'est si cette opération de grand nettoyage a eu avant la

 26   déclaration du président du Conseil de sécurité ou si cela se rapporte à

 27   d'autres événements que ceux dont nous avons parlés. Je vous remercie

 28   d'avance pour votre réponse.


Page 6528

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce grand nettoyage, c'était le résultat des

  2   pressions exercées par les Etats-Unis et par d'autres pays, ainsi que la

  3   déclaration du Conseil de sécurité. Donc, pendant toute cette période dont

  4   nous avons parlée, la période de juin 1993 à la fin février, les Etats-Unis

  5   n'ont cessé d'augmenter la pression qu'ils faisaient peser sur les Etats-

  6   Unis afin d'obtenir la fin des exactions en Bosnie, afin d'obtenir la fin

  7   du pilonnage de l'est de Mostar, afin aussi d'obtenir le départ de l'armée

  8   croate du territoire de Bosnie. Si bien que cette opération de grand

  9   nettoyage dont parle Mate Granic, c'est un des résultats des pressions que

 10   nous avons exercées. Dans le cadre de ces pressions exercées, il ne faut

 11   pas oublier l'ultimatum donné par le Conseil de sécurité. Là encore, il y

 12   avait au départ une initiative des Etats-Unis, de la France et des autres

 13   membres permanents, Grande-Bretagne, Russie, les Chinois aussi se sont

 14   joints à nous même s'ils n'ont pas joué un rôle de premier plan, mais en

 15   tout cas, il y a eu une compagne concertée de pressions exercées ainsi et

 16   tout ceci, je parle toujours de juin 1993, tout ceci a entraîné un virage à

 17   180 degrés dans la stratégie du président Tudjman vers le 19 février -- ou

 18   plutôt vers le 21, puisqu'à ce moment-là, il a abandonné l'idée d'une

 19   République distincte en Bosnie et, à ce moment-là, il a accepté l'idée

 20   d'une Fédération et c'est à ce moment-là qu'il a pris des mesures pour

 21   mettre un terme à la guerre musulmo-croate. Je ne veux pas dire qu'il ait

 22   eu un changement de sentiment véritablement, parce que d'après ce que vous

 23   avez entendu de mon témoignage et le témoignage de l'autre, vous pouvez, je

 24   pense, vous rendre compte que c'est un homme qui a toujours poursuivi cette

 25   idée d'une grande Croatie, cela a toujours été son idée. Mais, à ce moment-

 26   là -- à cette période-là, il a mis cela de côté et je pense que cela a

 27   marqué un tournant dans la guerre en Croatie -- ou plutôt en Bosnie et

 28   c'est ce qui a préparé la voie, 18 mois plus tard, des accords de Dayton.


Page 6529

  1   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci de vos explications, Monsieur

  2   l'Ambassadeur.

  3   M. SCOTT : [interprétation]

  4   Q.  Mais, avant d'en terminer de ce document -- de l'examen de ce document

  5   et de parler de sujets que nous avons évoqués hier, j'aimerais que l'on

  6   regarde le bas de la première page. On parle ici de la situation dans les

  7   camps ainsi que d'une proposition de Granic selon laquelle les camps

  8   seraient fermés "unilatéralement dans les cinq jours." Est-ce que vous

  9   voyez ce passage ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Page suivante, paragraphe 5, on parle encore une fois ici de la

 12   question des convois humanitaires et j'aimerais vous demander de vous

 13   reporter plus particulièrement au paragraphe numéro 6. Parce que vous avez

 14   évoqué la chose il y a quelques instants dans votre réponse, vous avez

 15   parlé de la situation dans laquelle se trouvait les Croates à l'époque et

 16   au paragraphe 6, vous trouverez sans doute quelque chose qui s'y rapporte.

 17   Est-ce que vous avez trouvé le passage concerné ?

 18   R.  Oui, oui, c'était une des préoccupations des Croates, effectivement.

 19   Pendant cette période, Susak me l'a dit plus tard -- pendant cette période,

 20   les Croates ne pouvaient pas permettre d'enlever ou de faire partir leurs

 21   troupes de la Bosnie, parce qu'à ce moment-là, les communautés croates de

 22   Bosnie seraient sans défense.

 23   Q.  S'agissant de ces manœuvres qui ont amené le président Tudjman à se

 24   revirement, le 21 février, à l'acceptation de ce qui allait devenir les

 25   accords de Washington, peut-on dire qu'il y avait deux dynamiques à l'œuvre

 26   sur le terrain : il y avait d'abord la pression internationale qui était

 27   considérable et, en deuxième lieu, le fait que les Croates de Bosnie

 28   étaient en train de perdre sur le terrain ?


Page 6530

  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  Au paragraphe 8 maintenant du même document, j'aimerais que vous lisiez

  3   ce passage pour vous et ensuite je vais vous poser une question quand vous

  4   l'aurez lu.

  5   R.  Est-ce que je peux voir la suite du paragraphe ?

  6   M. SCOTT : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait afficher à l'écran le

  7   haut de la page suivante ?

  8   Q.  Pendant cette période où vous avez traité de toutes ces questions, vous

  9   avez parlé avec Boban, avec les autres dirigeants croates, est-ce que vous

 10   avez pu constater des divergences au sein des Croates de Bosnie ?

 11   R.  Oui, tout à fait, tout à fait. Il y avait des divergences majeures qui

 12   opposaient les Croates de Bosnie et les dirigeants du HDZ en Herzégovine

 13   d'une part et d'autre part, les Croates de Bosnie en Bosnie centrale et à

 14   Sarajevo qui étaient trahis, si on peut dire, si vous voulez, par les

 15   dirigeants de l'Herzégovine, si bien qu'il y avait des tensions entre les

 16   dirigeants d'Herzégovine et les Croates de la Posavina qui subissaient les

 17   pressions exercées par les Serbes. Donc au bout du compte, les Croates de

 18   la Posavina se sentaient trahis, fortement trahis par Tudjman et les

 19   dirigeants, les Croates de l'Herzégovine.

 20   Q.  Au paragraphe 8, on voit une déclaration de M. Granic sur ce point,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, tout à fait. Je pourrais ajouter que la proposition d'une

 23   Fédération qui est devenue la base de la résolution du conflit avec les

 24   accords de Washington, cette proposition, elle venait des Croates de Bosnie

 25   qui étaient mécontents des dirigeants d'Herzégovine, ils sont venus me voir

 26   à l'ambassade de Zagreb, ils ont parlé avec l'ambassadeur Redman qui était

 27   notre négociateur; et c'est de là qu'est sortie cette idée. Ce n'est pas

 28   une idée qui venait des Musulmans, des Bosniaques, c'était une idée qui


Page 6531

  1   venait des Croates de Bosnie.

  2   Q.  Enfin, sur ce document, dernière page, paragraphe 9, on voit qu'ici il

  3   est question une fois encore des détenus musulmans et de l'éventualité de

  4   les déplacer ou de les faire passer par la Croatie. Donc, cela continue à

  5   être une question d'actualité pendant toute cette période, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  On voit à la dernière phrase de ce paragraphe, je cite : "Il," - sans

  8   doute Granic : "Il a déclaré que la réaction initiale du HCR des Nations

  9   Unies à cette proposition était positive."

 10   Est-ce que vous avez des informations vous permettant de dire à la Chambre

 11   si cette évaluation de la situation de sa part était exacte ou pas, à

 12   savoir que si, effectivement, le HCR des Nations Unies était favorable à

 13   cette proposition ?

 14   R.  Je crois que ce que je peux vous dire sur ce point, c'est que le HCR

 15   des Nations Unies n'aurait pas été favorable à une proposition qui aurait

 16   impliqué que le HCR des Nations Unies facilite le nettoyage ethnique de la

 17   population musulmane ainsi chassée de Bosnie. Bien entendu, le HCR aurait

 18   été favorable à une initiative impliquant la remise en liberté des détenus

 19   et qu'on les transfert vers des lieux protégés; et l'idée de leur offrir un

 20   véritable choix, c'est-à-dire de leur donner la possibilité de retourner

 21   chez eux en Bosnie. C'est-à-dire que, pour cela, il aurait fallu que les

 22   conditions d'existences dans leurs lieux initiales d'habitation leur

 23   auraient permis, effectivement, d'y revenir.

 24   Q.  Pour terminer, Monsieur l'Ambassadeur, j'aimerais que nous examinions

 25   la pièce P 07475, pus particulièrement, la page 11 de ce document. Oui, je

 26   crois que c'est la page 11, oui. Il s'agit, Monsieur, du procès-verbal

 27   d'une réunion qui a eu lieu au palais présidentiel le 4 janvier 1994,

 28   c'est-à-dire au cours de la période que nous évoquons ensemble cet après-


Page 6532

  1   midi, période de la fin 1993/début 1994. Si vous regardez la page 11, pour

  2   revenir à un sujet que vous avez évoqué, il y a quelques instants, page 11,

  3   s'il vous plaît.

  4   M. SCOTT : [interprétation] J'aimerais que l'on fasse un zoom sur la partie

  5   médiane de la page. Merci.

  6   Q.  On voit ici Tudjman qui intervient et il dit --

  7   M. SCOTT : [interprétation] Non, non. Il faut remonter un petit peu, vers

  8   le haut de la page.

  9   Q.  Tudjman parle et il dit, je cite : "Est-ce que Mate Granic vous avez

 10   dit qu'il avait parlé à Galbraith au sujet de Boban ? Qu'il lui a dit de

 11   déposer une demande de visa en son nom pour qu'il puisse voyager afin que

 12   nous puissions nettoyer notre réputation devant le monde entier, même si je

 13   ne cesse de répéter dans la lettre à Izetbegovic, je viens de répéter une

 14   fois encore que Boban, c'est le produit d'agression serbe."

 15   "Gojko Susak : Nous allons dîner chez Galbraith mercredi.

 16   Tudjman : Alors, il faudra lui dire directement à lui que Boban peut être

 17   considéré partiellement -- enfin, nous avons besoin de lui pour faire un

 18   accord avec les Musulmans." Ensuite, on passe à un autre sujet.

 19   Est-ce que ceci reflète de manière exacte les conversations que vous avez

 20   eues avec Granic et ce qui se passait à ce moment-là ?

 21   R.  C'est indéniablement une conséquence des conversations que j'aie eues

 22   avec Granic, Susak et Tudjman. Mais, si l'idée est qu'en faisant partir

 23   Boban, en l'envoyant en voyage, à ce moment-là, la Croatie pourrait se

 24   refaire une réputation vu l'absence de Boban, à ce moment-là,

 25   effectivement, cela correspondait à ce que je voulais dire. Cela ne voulait

 26   pas vraiment dire -- je ne pense pas que cela voulait dire que Boban

 27   pourrait expliquer la position croate, parce que je pense que ce n'était

 28   pas la personne idoine pour le faire.


Page 6533

  1   S'agissant maintenant de la question de savoir s'ils auraient besoin de

  2   lui, j'imagine qu'ils parlent de Boban pour conclure un accord avec les

  3   Musulmans, enfin moi, en ce qui me concerne personnellement, je pensais que

  4   quand Boban serait parti -- ou plutôt, son départ était absolument

  5   essentiel pour arriver à trouver un accord avec le gouvernement bosniaque.

  6   D'ailleurs, une fois que Boban a quitté la scène, il a été, effectivement,

  7   possible de conclure un accord.

  8   Q.  Mais, auparavant, Susak dit : "Nous allons dîner chez Galbraith

  9   mercredi." Puis, il est dit : "Alors vous, vous devez le lui répéter

 10   directement, Boban peut être considéré partiellement responsable sur le

 11   plan politique," si bien -- est-ce que vous comprenez ici que Tudjman a dit

 12   à Susak : "Bon, vous allez dîner avec Galbraith, alors dites-lui que l'on

 13   peut considérer que Boban est partiellement responsable sur le plan

 14   politique" ?

 15   R.  Oui, oui c'était le message de Tudjman. Lui, c'est ce qu'il voulait; il

 16   voulait faire peser la responsabilité sur Boban. D'ailleurs, Boban était

 17   effectivement partiellement responsable. Ce qui montre que Tudjman était

 18   capable de se débarrasser de Boban. Ce qu'il a dit : "Regardez, dites à

 19   Galbraith que Boban est responsable. Il a détruit les ponts et voilà ce qui

 20   lui est arrivé."

 21   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, merci beaucoup de votre déposition et d'être

 22   venu devant se Tribunal.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Scott, vous avez terminé

 24   l'interrogatoire principal de ce témoin.

 25   Donc, sans perdre de temps, nous passons à la Défense. Je ne sais qui va

 26   commencer.

 27   Oui, Monsieur Praljak, c'est vous qui commencez ou votre avocat ?

 28   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, Messieurs


Page 6534

  1   les Juges, merci.

  2   Contre-interrogatoire par l’accusé Praljak :

  3   Q.  [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur, je suis Slobodan Praljak. Nous

  4   allons suivre un certain ordre parmi tant de sujets que j'ai énumérés ici,

  5   que j'ai couchés sur le papier. Mais reprenons d'abord la toute dernière

  6   information annoncée par vous, à savoir quelques semaines après votre venue

  7   en poste à Zagreb. Vous avez compris tout, vous avez fait le scanning de la

  8   constitution psychophysique de façon à obtenir une preuve sans contredit

  9   que la situation en Bosnie-Herzégovine, pour ce qui est de l'action du HVO,

 10   tant que je me trouvais sur le terrain, ne pourra être meilleure, parce que

 11   je ne faisais que de mauvaises choses. Monsieur l'Ambassadeur, pouvez-vous

 12   nous dire quand, très exactement, vous avez pu obtenir cette première

 13   information ? Quand était-ce ?

 14   R.  Quant à vos activités, j'ai eu des informations avant même de venir en

 15   poste d'ambassadeur en Croatie. En fin de compte, pour me préparer pour ce

 16   poste, j'ai pu être informé par une série de conversations que j'ai eues

 17   avec des gens. Ce sur quoi j'ai déposé ici témoigne du fait que non

 18   seulement j'ai pu recevoir des informations, des données concrètes vous

 19   concernant, mais j'ai pu conclure que tant que vous et Boban exercerez les

 20   fonctions qui étaient les vôtres, nous ne pourrons pas assurer un terme à

 21   mettre sur les exactions perpétrées en par le HVO en Bosnie. Voilà pourquoi

 22   il était indispensable de vous voir partir, vous et Boban, pour faire tout

 23   ce dont on avait besoin pour qu'il y ait ce terme à des hostilités.

 24   Q.  Monsieur de l'Accusation, M. Scott, vous avait donné amplement des

 25   informations. Je crois, en votre éloquence, je sais que dès le début vous

 26   pouvez tout reprendre tout ce que vous avez dit, mais, je vous prie, dans

 27   le cadre des droits qui me sont conférés ici, dites-moi : de qui, quand, et

 28   sur la base de quoi, vous avez pu obtenir de telles informations, de telles


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  1   connaissances me concernant ? Ou c'est par le biais de votre vue ou de

  2   votre oreille ou par d'autres perceptions que vous avez pu obtenir de

  3   telles informations ou par le biais d'une autre personne ? Par exemple, là

  4   et là se trouve tel et tel homme qui a dit ceci, qui a fait cela ou qui

  5   commis telle ou telle omission. Or, pouvez-vous nous citer un quelconque

  6   exemple par ordre dans lequel je vous ai parlé tout à l'heure pour dire que

  7   Slobodan Praljak, en tel et tel moment, a fait ceci, ceci ou cela et a

  8   commis une erreur, a fait une omission ou a énoncé telle ou telle idée ou

  9   réflexion qui serait contraire à une quelconque des lois en vigueur ?

 10   R.  Je me dois tout de même de reprendre peut-être certaines choses de ma

 11   déposition, mais disons que vous avez été le commandant du HVO, le HVO se

 12   refusait de laisser passer les convois de l'aide humanitaire à leur

 13   destination en Bosnie-Herzégovine. Le HVO a bombardé, a tiré des

 14   projectiles en direction de Mostar est où il y a eu beaucoup de victimes

 15   parmi les civils. Le HVO a également détruit certains musées historiques,

 16   parmi eux, le monument, un des plus connus dans l'ex-Yougoslavie, à savoir

 17   l'ancien pont de Mostar. Le HVO a détenu des gens dans des conditions

 18   inhumaines. Le HVO les a également manipulés, les a exploités pour les

 19   faire venir faire des travaux forcées : en voici une violation de la loi.

 20   Il y a eu des viols dans des camps qui ont été, d'ailleurs, administrés et

 21   dirigés par le HVO. Vous en étiez responsable. Pour ce qui est de

 22   l'administration et lorsque nous avons fait des démarches rigoureuses

 23   auprès des gouvernements croates, lequel gouvernement nous l'avons

 24   considéré comme responsable, les gens du gouvernement ont dit qu'aussitôt,

 25   ils devaient parler avec vous et le problème n'a pas été réglé. Ma

 26   conclusion était simple, que vous et M. Boban, vous deviez quitter vos

 27   postes.

 28   Q.  Merci. Malheureusement, je reste encore et demeure sans détails, ni


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  1   notions de ce que je veux obtenir. M. le Président et Messieurs les Juges

  2   voient, notamment, que c'est Slobodan Praljak qui, n'usant pas de son

  3   autorité -- ou usant de son autorité, laisse passer les convois vers

  4   Mostar. Mais, pouvez-vous répondre à une autre question qui a trait à votre

  5   façon -- à la façon qui est la vôtre, de tirer des conclusions ? Recherches

  6   faites par moi-même, comment tout cela arrive et comment on peut déduire

  7   qui est responsable de quoi, cela dit, je ne conteste en rien vos

  8   informations, j'ai pu faire les recherches suivantes. Aux Etats-Unis

  9   d'Amérique, annuellement, il y a 25 millions de crimes ou de délits

 10   enregistrés, donc, meurtres homicides intentionnels de l'ordre de

 11   14 276, homicides moyennant une arme à feu, 900 000, ensuite, viols, deux

 12   millions, et cetera.

 13   Ipso facto, dire que quelqu'un doit en être responsable, hors les Etats-

 14   Unis d'Amérique constitue un pays, un Etat civilisé, bien organisé et

 15   riche, nanti, croyez-vous que je pourrais emprunter les mêmes propos pour

 16   m'adresser à cette partie-là que sont les Etats-Unis pour dire : il faut

 17   obtenir destitution de tel ou tel responsable parce qu'on ne peut pas

 18   élucider plus de l'ordre de 14 % de la totalité des criminalités et des

 19   crimes. De même en est-il pour parler d'autres pays. Est-ce que vous êtes

 20   capable de partager mon avis là-dessus ?

 21   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 22   ne suis pas tout à fait sûr qu'il y a une question posée là-dessus, on

 23   vient d'entendre une déclaration très longue.

 24   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] La question est --

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : La question est très longue, mais, d'après ce que je

 26   comprends, la question qui vous est posée, Monsieur Praljak, semble dire

 27   que vous avez eu des informations comme quoi lui et Boban étaient

 28   responsables d'une série de faits que vous avez listés. A partir de là,


Page 6537

  1   l'accusé veut savoir sur quelle base vous vous êtes fondé et il tire un

  2   exemple, disons, que concernant le convoi humanitaire, car nous avons eu

  3   des éléments de preuve, il apparaît au moins une fois parce qu'on l'a vu.

  4   C'est lui qui a fait que le convoi humanitaire puisse entrer dans Mostar.

  5   Alors, il semble dire que vu le nombre de crimes qui ont pu se passer sur

  6   place à l'époque; qu'est-ce qui vous permet d'affirmer qu'il est

  7   responsable ?

  8   Alors, cette question était très longue. J'ai essayé de la synthétiser.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai compris, Monsieur le Président, la

 10   question. De toute évidence, je ne suis pas capable de voir un rapport

 11   entre le taux de crimes, de délits commis aux Etats-Unis d'Amérique et la

 12   situation en Bosnie. Quant à nous, nous nous attendions à ce que les

 13   convois humanitaires passent et entrent en Bosnie chaque jour, que chaque

 14   jour parvienne à sa destination à un convoi d'aide humanitaire et presque

 15   chaque jour, le HVO empêchait l'arrivée de ce convoi. Il ne s'agissait pas

 16   des gens qui seraient des hors la loi. Il s'agissait de décisions prises

 17   par le commandement du HVO. Lorsque à la fin des choses nous avons pu

 18   exercer une influence via la Croatie suffisamment forte contre le HVO voilà

 19   qu'ils ont relâché. Ensuite, le bombardement de Mostar est n'était pas

 20   l'œuvre d'un hors la loi ou d'un individuel quelconque. Lorsqu'on tirait

 21   sur le Mostar est ce n'était autre chose qu'un feu d'artillerie par une

 22   force militaire organisée qui opérait entre autres ayant pour cible des

 23   civils et l'héritage culturel de cette ville. Il s'agit de dire que les

 24   civils, des habitants ont été tués

 25   -- parle de camps ce n'était pas des caves ou des sous-sols où une ou deux

 26   personnes auraient été détenues, mais il s'agit de camps où des militaires

 27   ont maintenu ces détenus dans des conditions inhumaines.

 28   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]


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  1   Q.  Monsieur Galbraith --

  2   R.  Ensuite, les travaux forcés organisés ce n'était pas des individuels ou

  3   un groupe d'individus qui menacés par un pistolet devaient se rendre là et

  4   là pour creuser des tranchées. Il s'agit d'œuvres qui étaient résultats

  5   d'une action bien localisée, les autorités bien organisées avec auxquelles

  6   autorités se trouvaient Boban et Praljak. Voilà pourquoi je le considère

  7   comme responsable.

  8   Q.  Par de telles paroles -- par de tels propos, Monsieur l'Ambassadeur,

  9   vous ne pouvez pas prouver que le HVO ou son aile militaire détenait de

 10   tels camps non plus que vous puissiez nous donner des données qu'un tel ou

 11   tel ordre aurait été impossibilité pour le convoi humanitaire de se rendre

 12   dans Mostar ? Il y a eu des gens qui ont prouvé que 360 tonnes d'aide

 13   humanitaire de se rendre dans Mostar. Il y a eu des gens qui ont prouvé que

 14   360 tonnes d'aide humanitaire entraient quotidiennement à Mostar. Après

 15   cela, des convois parvenaient à Mostar sans œuvre, et régulièrement. Je ne

 16   veux pas vous dire grâce à qui. On le verra bien ici.

 17   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je voudrais qu'on présente 3D 00141 par

 18   le système e-court, s'il vous plaît.

 19   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, le 1er septembre, donc, bien avant que l'ONU

 20   exerce une pression sur -- et bien avant que vous-même exerciez une

 21   pression contre Tudjman, Slobodan Praljak a permis l'accès du camp de

 22   Gabela à une chaîne de télévision ZDF avec à sa tête, Mira Ivanisevic.

 23   Serait-il de trop de dire que je ne me suis pas servi de mon autorité ?

 24   Sept équipes d'une chaîne de télévision y ont pénétré pour tourner dans

 25   l'enceinte de ce camp ce qui a été d'ailleurs diffusé de par le monde et ce

 26   n'est qu'ensuite, qu'on a pu diffuser des connaissances à information là-

 27   dessus. De même y a-t-il des réactions tout à fait justifiées ? Mais le

 28  1er septembre, j'ai permis à la chaîne de télévision ZDF et, ensuite, il y a


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  1   eu un journal de Globus, ensuite un autre journaliste qui d'ailleurs a

  2   déposé ici. Mais il ne s'agit pas seulement d'une information grâce à

  3   laquelle on peut dire c'est grâce à mon intervention à moins qu'il y a été

  4   faite une lumière là-dessus et que vous-même, vous, Monsieur l'Ambassadeur,

  5   vous avez pu vous informer et réagir de la façon qui était la vôtre, bonne

  6   ou mauvaise.

  7   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je voudrais que l'on présente

  8   maintenant par e-court -- est-ce que vous avez compris ?

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Non. Posez une question à l'ambassadeur.

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Galbraith, ma question est la suivante : pouvez-vous imaginer

 12   que quelqu'un serait le dirigeant du mal pour que cette même personne

 13   ensuite permet un accès à une chaîne de télévision à moins de me considérer

 14   comme quelqu'un qui serait déraisonné ou personne un peu troublée ? Est-ce

 15   que vous croyez que de telle personne pourrait faire ce dont je vous parle

 16   ou est-ce que ceci permettrait d'avoir à votre esprit un avis tout à fait

 17   contraire à ce que vous venez de dire tout à l'heure sur moi ?

 18   R.  Pour ce qui est de la date de ce document, il s'agit du

 19   1er septembre 1993. Comme je viens de le dire préalablement, hier et

 20   aujourd'hui, mon intervention auprès du pendant Tudjman commence le jour où

 21   je lui ai remis ma lettre de créance en savoir en date du

 22   28 juillet 1993. Déjà le 6 juillet 1993, nous avons menacé la Croatie par

 23   des sanctions à cause des agissements du HVO. Vers le 20 août, vous vous

 24   rappelez que j'avais appelé le président Tudjman qui se trouvait dans

 25   Brioni pour l'avertir en des termes strictes et rigoureux des conséquences

 26   que courraient la Croatie si on ne mettait pas un terme sur des exactions

 27   pour lesquelles nous disions que ces exactions ont été perpétrées par le

 28   HVO ce dont se trouvait à notre avis responsable, la Croatie elle-même.


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  1   Ensuite, il s'agit de sujet présent dans notre conversation avec Tudjman,

  2   Granic et Susak, en juillet et août. On doit en conclure qu'un accès devait

  3   être permis à des camps par des représentants d'ambassades, et grâce à cela

  4   déjà en juillet, nous avons eu accès à de tels camps. Par conséquent, je ne

  5   suis absolument pas surpris de voir que l'une des retombées positives de

  6   cette influence exercée à l'échelle internationale, y compris la menace par

  7   des sanctions, à l'encontre de la Croatie est due au fait que la Croatie a

  8   fini par demander à Praljak en date du 1er septembre de faire diffuser une

  9   telle note -- une telle communication.

 10   Q.  Les témoins qui s'y sont rendus et qui ont réagi avec rigueur parlent

 11   du 6 septembre. Ensuite, le 24, un convoi a pu passer ce dont témoignent

 12   d'ailleurs les témoins qui ont déposé. Monsieur Galbraith, savez-vous quand

 13   j'ai été nommé chef de l'état-major du HVO ? Pouvez-vous me citer la date

 14   de cette nomination ? En quelle date suis-je devenu chef d'état-major du

 15   HVO ?

 16   R.  Au moment où je parle je ne m'en souviens pas, peut-être que vous

 17   pourriez me le dire.

 18   Q.  Oui, je pourrais le faire, mais ne serait-il pas intéressant maintenant

 19   que vous -- quant à vous, vous avez une opinion sur moi, alors que vous ne

 20   savez pas à quel moment commence à courir ma responsabilité. Je vous prie

 21   de ne pas vous tourner vers le bureau du Procureur, vers l'Accusation, s'il

 22   vous plaît. Je vous en prie. Je vous en prie. Ma question est la suivante :

 23   comment se fait-il que vous, américain, personne bien éduquée, bien formée,

 24   vous vous mettiez à parler de la responsabilité de quelqu'un sans savoir à

 25   quel moment je suis entré en fonction, pour parler du début de ma

 26   responsabilité ?

 27   Le 24 juillet --

 28   M. SCOTT : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît. Si


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  1   M. Praljak pose une question au témoin, il faudra qu'il lui permette d'y

  2   répondre de la façon la meilleure possible. On ne peut pas s'attendre à ce

  3   que le témoin sache par cœur et réponde de mémoire puisque déjà il a posé

  4   une question. M. Praljak est censé attendre pour obtenir une réponse. Je

  5   crois que M. Praljak a mal cité le transcript pour ce qui est du convoi et

  6   la venue de ce convoi. Il ne s'agit pas de parler de d'août, mais de fin

  7   d'août, mais de juillet. Il s'agit évidemment de la pièce à conviction P

  8   09506.

  9   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 10   Q.  J'ai dit que c'était le 24 juillet que cela s'est passé. D'après la

 11   documentation qui nous a été offerte par M. Galbraith, il est tout à fait

 12   clair qu'à ce moment-là il y a eu la chute de Bugojno, qu'il y avait un

 13   risque pour Gornji Vakuf et Rama. Voilà les raisons pour lesquelles il a

 14   été nécessaire de savoir, faire des recherches pour savoir ce que, du 24 ou

 15   28 de ce mois-ci, j'évoluais ou ce que je faisais. Mais de toute évidence,

 16   ceci n'a pas été fait. Voilà pourquoi je vous demande de poser sur le

 17   rétroprojecteur un document, à savoir --

 18   R.  Je crois que je pourrais répondre à ce qui a été dit.

 19   Q.  Oui, s'il vous plaît, répondez-moi. Etant donné que j'aie pris mes

 20   fonctions -- bon, élargissons la question : six mois et demi, j'ai été

 21   commandant à Sunja, près de Susak, après quoi j'ai été ministre adjoint de

 22   la Défense, après quoi j'ai été commandant de la partie sud-est de

 23   l'Herzégovine lors de la libération de Mostar et de la vallée de la

 24   Neretva. Est-ce que --

 25   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, Messieurs

 26   les Juges, si de telles informations doivent être énoncées à l'adresse de

 27   M. Galbraith, à savoir j'ai été pendant six et demi commandant, il faut

 28   dire de quelle date à quelle date. Ensuite, ministre adjoint, de quelle


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  1   date à quelle date.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  3   le témoin nous a avancé quelques assertions, quelques données pour dire

  4   qu'il aurait été informé avant de se rendre en Croatie en poste

  5   d'ambassadeur. Maintenant, en qualité d'ambassadeur, il pourrait nous dire

  6   s'il a eu connaissance ou pas de ces dates-là. Il peut dire qu'il ne savait

  7   pas ou, s'il le savait, il peut dire : je ne m'en souviens plus. On peut

  8   lui rafraîchir sa mémoire. On peut le faire pas à pas. Cela me semble être

  9   d'intérêt substantiel car, sur la base de sa déposition, peut-on dire

 10   qu'avant de se rendre en Croatie, il détenait déjà une certaine opinion sur

 11   la base des informations.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Ambassadeur, M. Praljak indique qu'il a

 13   été nommé au mois de juillet, le 24 juillet, et il a indiqué que c'était la

 14   période où il y avait la chute de Bugojno. Alors, étiez-vous au courant

 15   qu'il y avait une offensive de l'ABiH qui a fait qu'il y a eu des

 16   mouvements de troupes et des réfugiés sur le terrain, et savez-vous qu'à ce

 17   moment-là, M. Praljak a été nommé le 24 juillet ? Voilà, cela c'est précis.

 18   Alors, je comprends bien que vous posez une question sur ce qui s'est passé

 19   il y a plus de dix ans, vous pouvez ne pas vous en souvenir, mais, à ce

 20   moment-là, dites que vous ne vous en souvenez pas.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, en effet, je ne peux pas me rappeler des

 22   dates concrètes. Ce que je peux dire, c'est que les Etats-Unis d'Amérique,

 23   comme je l'ai dit lors de ma déposition et avec forces détails, grâce à des

 24   télégrammes qui étaient reçus entre-temps, exerçaient une influence sur la

 25   Croatie, depuis le moment où je me suis rendu en Croatie, en date du 28

 26   juillet [comme interprété]. J'ai fait l'énumération de moments concrets

 27   lorsque nous avons fait cette pression sur la Croatie.

 28   Pour ce qui est des atrocités qui étaient sources de préoccupation de nous


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  1   autres, elles étaient commises sans cesse et de plus en plus nombreuses ces

  2   atrocités au cours de l'été 1993, y compris la période après que M. Praljak

  3   a été nommé commandant chef du HVO. Par conséquent, je m'en tiens ce que

  4   j'aie dit dans ma déposition, je m'en tiens à mes conclusions, et il peut

  5   dire que ma conclusion est erronée, mais, grâce à tout ce que je viens de

  6   dire, j'ai pu avoir cette opinion qui lui doit quitter ce poste et chose

  7   faite. Ce n'était que le résultat de pressions exercées par les Etats-Unis

  8   d'Amérique et, en partie, grâce à ces pressions faites par les Etats-Unis

  9   d'Amérique, il s'est vu obligé de quitter son poste.

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 11   Q.  Merci. Ceci n'est pas exact, Monsieur Galbraith. C'était ma propre

 12   volonté. Je ne sais pas comment se présentait la pression exercée par les

 13   Etats-Unis d'Amérique. Mais, lorsque vous me dites : "les Etats-Unis

 14   d'Amérique," je ne me trouve pas impressionné parce que vous dites. Toutes

 15   les fois où il y a un manque d'argument, vous vous référez aux Etats-Unis

 16   d'Amérique. Du moment où un embargo a été imposé, lorsque toute une

 17   population a été victime des massacres perpétrés par une grande et

 18   puissante force serbe, écoutez, tout ce que vous avez pu faire était réduit

 19   à zéro. Je ne m'attends pas à ce que vous disiez quand, comment, à quel

 20   moment, et cetera. Vous pouvez le faire en réfléchissant comme vous le

 21   faites, mais, en tout cas, je n'ai pas entendu une seule donnée ce dont a

 22   besoin ce Tribunal, à savoir --

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous en témoignez. Ce qu'il faut,

 24   c'est de poser des questions au témoin à l'appui de vos documents.

 25   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je vous en prie. Passez sur le

 26   rétroprojecteur le document que j'avais demandé tout à l'heure, on y va pas

 27   à pas. Est-il là le document ?  Oui, il s'agit bien de ce document-là.

 28   Faites voir le haut, on parle de : "Bosnie-Herzégovine, République de


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  1   Bosnie-Herzégovine, le HVO. Conseil de Défense croate."

  2   Q.  Monsieur Galbraith, voulez-vous, s'il vous plaît, lire ce document ?

  3   R.  "République de Bosnie-Herzégovine, Conseil de Défense croate, l'état-

  4   major principal, ordre numéro 02-2/1-2338/93 Monsieur IZM poste de

  5   commandant Citluk du 6 [comme interprété] septembre 1993. Demande de

  6   transfert par hélicoptère OSHRZ Zagreb. Nous vous prions d'organiser le

  7   transport d'Almira Candzic, ensuite, (écrit à la main doctoresse) née 1940

  8   (illisible diagnostic statut après amputation de l'humérus droit).

  9   "Etant donné la gravité de cette blessure, il faudra transférer de Mostar

 10   (Mostarskoblato) au centre clinique hospitalier de Zagreb." Ensuite, nous

 11   avons eu un texte barré (ajouté à la main Split, illisible).

 12   "Avec respect.

 13   "Commandant du GS HVO.

 14   "Général major Slobodan Praljak (signé et cacheté)."

 15   Q.  Est-ce que vous qui avez connu le pays ? Est-ce que vous savez si

 16   Almira Candzic était une Croate ou une Bosnienne ? D'après le nom, est-ce

 17   que vous allez me croire moi si je vous dis que c'était une Musulmane ?

 18   R.  Si le nom donne une bonne indication, je vous crois sur parole. Cela

 19   est ainsi, ce que vous avez dit tout à l'heure, pour ne pas que je vous

 20   laisse sans réponse, lorsque j'étais en Croatie, je n'étais pas venu en une

 21   qualité tout à fait personnelle, individuelle, mais au nom des Etats-Unis

 22   d'Amérique. Pour ce qui est de l'embargo qui a été imposé sur l'armement,

 23   je dois vous dire que je suis d'accord avec vous. Ne serait-ce que pour

 24   parler de l'administration Clinton, mon gouvernement était d'accord avec

 25   vous pour dire que c'était une grave erreur d'imposer l'embargo et que dans

 26   cette situation-là, on a permis à l'agresseur de détenir des armes, alors

 27   que la Bosnie-Herzégovine et la Croatie qui n'avaient pas suffisamment

 28   d'armes étaient délaissés sans défense. Donc, voyez comment s'est présentée


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  1   la situation à ce sujet.

  2   Q.  Je le sais, merci de votre réponse. Je sais que la situation était

  3   juste comme vous le dites, vous. Il m'est difficile de considérer cela

  4   comme une erreur. On peut parler d'erreur lorsqu'on veut tailler, par

  5   exemple, tel ou tel costume, ou une erreur faute d'orthographe. Pour en

  6   juger d'après ce que M. Clinton a dit que vous allez lui servir et

  7   Holbrooke. Lorsqu'il s'agit de parler d'une des pertes des plus grave

  8   depuis l'époque de Chamberland, Hitler, et cetera. Il ne s'agit pas

  9   d'erreur. Il est difficile de dessiner toutes les conséquences entraîner

 10   par de telles erreurs que vous dites en créant des situations parallèles et

 11   alternatives d'acquisition d'armes, et cetera.

 12   Dites-moi, s'il vous plaît : lorsqu'il s'agit de connaissances et

 13   d'informations d'ordre sociologique, comment un tel acte - non seulement de

 14   façon directe, mais de façon indirecte - peut avoir une incidence sur la

 15   destruction du tissu organisé d'Etat et de la population croate et

 16   bosnienne ? Je crois que de telles conséquences ont été plus que grandes,

 17   mais sur lesquelles reposaient d'ailleurs la moralité des politiques des

 18   pays occidentaux.

 19   R.  Pour le bien du compte rendu d'audience, je me dois de dire que

 20   l'embargo sur l'armement a été imposé en 1991, chose faite par

 21   l'administration des Etats-Unis préalable au président Clinton. Celui-ci a

 22   dit clairement qu'il ne soutenait pas cet embargo. Nous avons demandé à ce

 23   qu'il y ait levée de cet embargo sur l'armement, mais nous n'avons pas pu

 24   l'obtenir, cette levée d'embargo, parce que les autres membres du Conseil

 25   de sécurité avaient leur droit de veto. Par conséquent, M. Holbrooke, quant

 26   à lui, il a dit et je l'ai répété que, quand je me suis trouvé à Zagreb une

 27   fois, que nous ressentions le conflit en Bosnie-Herzégovine comme étant une

 28   destruction de la sécurité collective après la seconde mondiale. C'était


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  1   une situation tragique, mais j'ai été plutôt fier du rôle que jouait mon

  2   pays, l'Amérique pour mettre un terme à de telles hostilités et conflits

  3   entre Musulmans et Croates, notamment et, notamment, nous l'avons obtenue

  4   cette fin par le biais des accords de Washington. Maintenant, que je ne

  5   suis plus un responsable d'Etat, je peux me permettre de vous dire que

  6   voilà, ce que nous avons fait en 1995 devait être fait avant.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : On doit de faire la pause technique de 20 minutes,

  8   donc, nous reprendrons dans 20 minutes.

  9   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

 10   --- L'audience est reprise à 16 heures 07.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous avez la parole.

 12   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je demanderais à

 13   M. l'Huissier de placer le document 3D 00375 sur l'e-court.

 14   Q.  En l'occurrence il s'agit d'une lettre destinée en mains propres à Mme

 15   Duska Lastric-Djuric au consulat général des Etats-Unis pendant la période

 16   lorsque pour la première fois M. le Colonel Richard Herrick est venu me

 17   rendre visite ou est venu, en fait, me rendre visite en tant que

 18   représentant du ministre de la Défense des Etats-Unis. C'est cette lettre-

 19   là qui lui a permis -- qui a permis à M. le Colonel de se rendre à Ploce,

 20   Luka, Zadar, Split, afin de pouvoir évaluer l'accès de l'aide humanitaire

 21   provenant des Etats-Unis. Est-ce que vous voyez cela, Monsieur ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous savez qui est Richard Herrick et est-ce que vous savez

 24   que pendant des années il avait été attaché militaire des Etats-Unis à

 25   Zagreb ?

 26   R.  Oui.

 27   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je demanderais que le document 3D

 28   00037.


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  1   Q.  En tant que adjoint ministre de la Défense j'approuve, je donne mon

  2   aval à ce que M. le colonel, et cetera puisse se rendre sur les lieux et

  3   qu'il évalue ce qui l'intéresse. Je nomme Goran Pavelic pour l'accompagner

  4   à Zadar, Split, Ploce, et cetera. Est-ce que cela reflète effectivement les

  5   choses comme elles étaient à l'époque ? Est-ce que vous voyez que ceci est

  6   écrit là, Monsieur l'Ambassadeur ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Très bien. Merci.

  9   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je demanderais que l'on montre au

 10   témoin la pièce 3D 00736.

 11   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète : 3D 00376.

 12   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] C'est la réponse de M. le Colonel

 13   Richard Herrick qui remercie pour l'aide et l'organisation qui s'en est

 14   suivie. M. Pavelic était d'une aide exemplaire. Les réunions se sont très

 15   bien tenues, tout s'est bien passé et, encore une fois, je vous remercie.

 16   C'est qu'il dit dans cette lettre. Est-ce que vous voyez ceci ? Est-ce que

 17   c'est bel et bien cela qui est écrit dans la réponse du colonel ?

 18   R.  Il vous remercie de l'aide remarquable et de l'organisation que vous

 19   avez faite pour assurer que son voyage se déroule bien, effectivement, oui.

 20   Q.  M. Herrick était venu avant vous et avant cela, c'était un monsieur

 21   qui, je crois, s'appelle Serelis [phon]. Vous êtes arrivé après que la

 22   guerre en Croatie avait déjà lieu, deux ans et deux mois auparavant. Donc,

 23   est-ce que vous savez ce que j'ai fait avec quelques-uns des contacts que

 24   j'avais eus avec M. Herrick et les personnes du consulat des Etats-Unis de

 25   l'époque ? Est-ce qu'ils vous ont informé du travail et des relations que

 26   nous avions eues ? Est-ce que vous avez reçu les informations ? Est-ce

 27   qu'on vous a fait rapport de nos liens ?

 28   R.  Oui, je crois que oui.


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  1   Q.  Est-ce que vous savez la chose suivante ? En fait, je vais vous poser

  2   une question personnelle, j'espère que vous n'allez pas m'en tenir rigueur.

  3   Si je ne m'abuse, pour la première fois que j'ai entendu votre nom, c'était

  4   lié à votre combat pour les Kurdes, il y a bien longtemps, lorsque Saddam

  5   Hussein avait fait lancer envers eux une attaque avec des gaz empoisonnés.

  6   Il les a attaqué avec des armes chimiques.

  7   R.  Oui. Effectivement, j'ai écrit là-dessus dans les années 80, et c'est

  8   justement le sujet de mon livre publié cette année intitulé : "La fin de

  9   l'Irak."

 10   Q.  Très bien. Donc, je ne me suis pas énormément trompé. Donc, à l'époque,

 11   les photographies que j'avais eues, je les ai soit peut-être vu dans Stern

 12   ou Der Spigel, dans les quotidiens allemands, je ne me souviens plus.

 13   Mais est-ce que vous savez, pour revenir à ma question, que moi-même et les

 14   membres de l'équipe militaire des Nations Unies avec M. Richard Herrick,

 15   est-ce que vous savez si, immédiatement après la libération de Mostar,

 16   j'avais fait de mon mieux, j'avais essayé de tout faire et de fournir mon

 17   aide pour enquêter, pour voir, dans l'usine de Mostar à Bijelo Polje, si

 18   effectivement on avait produit de l'ypérite pour les fins de l'armée

 19   yougoslave. Le Dr général Binenfeld avait participé énormément, avait

 20   fourni son aide concernant cette recherche. Est-ce que vous aviez entendu

 21   parler ?

 22   Q.  Je crois que je sais de quoi vous parlez. Je crois que vous parlez du

 23   gaz moutarde. Je crois que je sais de quoi vous parlez, mais j'ai bien peur

 24   que cette série de questions sort du champ de ce dont je peux témoigner.

 25   Q.  Merci beaucoup. Est-ce que vous savez si M. Herrick -- le colonel

 26   Herrick et M. Sarac, dont j'ignore le grade -- pardon ? Que me dites-vous ?

 27   Il était colonel ? Non, non, il n'était pas colonel. Bon. En fait, je ne

 28   sais pas.


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  1   R.  Il est l'officier.

  2   Q.  Très bien. Donc, est-ce que vous savez si, à l'époque, pendant la

  3   période pendant laquelle j'étais le chef du Grand quartier général du HVO,

  4   donc entre le 24 juillet jusqu'au 8 novembre 1993, est-ce que vous savez si

  5   je m'étais rendu sur les yeux pour enquêter, pour voir ce qui se passait

  6   sur les lieux ? Est-ce que vous savez si je leur permettais de se rendre

  7   sur les lieux pour voir ce qu'ils voulaient voir, quand ils voulaient voir

  8   et ce qu'ils voulaient enquêter, s'agissant de la composante militaire.

  9   Est-ce que vous n'aviez jamais reçu cette information ? Donc, je leur avais

 10   permis de se déplacer librement.

 11   R.  Je suis tout à fait au courant que le colonel Herrick et que M. Saric

 12   avaient accès à -- ou avait un excellent accès à l'armée croate. Ils

 13   pouvaient visiter les armées croates et le HVO et je suis tout à fait au

 14   courant que les dirigeants des Croates de Bosnie avaient donné l'accès à

 15   l'équipe des attachés de la défense et à nos diplomates. Donc, oui,

 16   effectivement.

 17   Q.  Merci. Est-ce que vous avez entendu parler soit d'eux ou de quelconque

 18   journaliste, est-ce que vous n'avez jamais entendu dire que pendant que

 19   j'étais commandant, qu'il était interdit de se rendre à quelque endroit que

 20   ce soit, quelque heure qu'il se soit, de voir tout ce qu'il faut voir. Est-

 21   ce que vous avez jamais entendu que j'ai empêché qui que ce soit de se

 22   rendre quelque part à une heure donnée, à une date donnée ?

 23   R.  Je ne me souviens pas du tout d'avoir entendu dire que vous auriez

 24   empêché que les gens se rendent surplace et visiter les lieux. Les membres

 25   de la communauté internationale, la communauté internationale de la Croix-

 26   Rouge, par exemple, la FORPRONU, les journalistes et d'autres ambassades,

 27   d'autres représentants, d'autres ambassades, avaient effectivement

 28   énormément de difficultés d'accéder à certaines places, y compris les camps


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  1   de prisonniers. Même lorsque l'équipe de l'ambassade américaine est entrée

  2   et s'est rendue dans les camps de prisonniers, je serais le premier à dire

  3   que l'ambassade américaine avait un accès particulier puisque nos relations

  4   avec la Croatie était bonne, mais même lorsqu'ils se sont rendus dans les

  5   camps de prison, tel le camp Rodoc sur l'Heliodrom, on ne nous a pas permis

  6   de mener des enquêtes avec des détenus, des enquêtes privées pour pouvoir

  7   bien comprendre ce qui se passait. Donc, le commandant ne voulait pas

  8   donner son nom, par exemple. Les entretiens étaient restreints. Donc, cela

  9   les limitait à arriver à la vérité et à trouver les faits, même si on leur

 10   a permis, effectivement, accès aux camps.

 11   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je n'essaie absolument de nier les informations

 12   que vous détenez, mais je peux simplement vous poser la question suivante.

 13   Est-ce que vous savez quelle était la composition du HVO ? Est-ce que vous

 14   connaissez la structure du HVO ? C'est très important pour pouvoir établir

 15   la responsabilité. Est-ce que vous savez, est-ce que vous connaissez la

 16   structure du HVO ?

 17   R.  Je connaissais effectivement la structure du HVO à l'époque, lorsque je

 18   me suis occupé de cette question. Je crois que j'avais certainement une

 19   idée générale de la structure, oui.

 20   Q.  Très bien, merci. Donc, je souhaiterais ajouter, puisque nous n'avons

 21   pas le droit de parler de ce sujet - je comprends très bien pourquoi un

 22   pays très sérieux essaie de défendre ses intérêts nationaux - mais j'ai ici

 23   une liste de choses que nous avions fait ensemble, il y a à peu près 15

 24   collaborations, c'est-à-dire 15 points sur lesquels j'ai travaillé avec M.

 25   Herrick, mais je sais que je ne pourrais pas en parler maintenant, mais

 26   laissons ces choses de côté. Vous avez certainement lu le livre de M. Bill

 27   Clinton, le président, qui était la personne qui, à l'époque, était

 28   président de votre pays, n'est-ce pas ? Le livre est intitulé : "Ma vie."


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  1   R.  En réalité, je n'ai pas lu l'intégralité du livre.

  2   Q.  Je vous demanderais alors, à ce moment-là, de revenir sur

  3   -- d'avoir une idée globale, de penser au théâtre global, puisque nous

  4   étions un tout petit théâtre, une toute petite scène, mais voyons la scène

  5   internationale. Dites-moi si les choses s'étaient déroulées effectivement

  6   de la façon dont c'est écrit dans ce livre.

  7   Alors, je vais vous citer certains passages. On parle de Slobodan

  8   Milosevic ici et on dit, je cite : "Il a présenté les choses pour dire

  9   qu'il supposément retirait son ABiH, alors que, s'agissant de l'armement,

 10   de l'approvisionnement et des Serbes de Bosnie, elle a laissé sous les

 11   ordres de Ratko Mladic. Les combats et les meurtres se sont poursuivis au

 12   cours de l'année 1992. Les dirigeants de la Communauté européenne étaient

 13   assez réservés et le gouvernement de Bush était encore incertain. Que

 14   faire ? Il n'était pas tout à fait-- il ne souhaitait pas se lancer dans de

 15   nouveaux problèmes à la veille des élections, donc, elle a laissé le

 16   problème à la Communauté européenne à résoudre. Mais le gouvernement de

 17   Bush s'est néanmoins engagé auprès des Nations Unies pour que les sanctions

 18   économiques soient imposées sur les Serbes. Les mesures -- Boutros Boutros-

 19   Ghali, au début, n'était pas tout à fait d'accord avec ces mesures. Les

 20   Français, les Anglais, et cetera, et cetera n'étaient pas d'accord donc

 21   avec ces mesures, ces sanctions."

 22   Est-ce qu'effectivement, cela reflète les choses avant que vous n'arriviez

 23   sur le théâtre des opérations ? Est-ce que c'était effectivement comme

 24   cela ?

 25   M. SCOTT : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, deux

 26   objections. D'abord, numéro un, je souhaiterais faire une objection quant à

 27   la pertinence aucune de ces questions, absolument rien à voir avec

 28   l'affaire qui nous occupe, ne sont pas du tout pertinentes.


Page 6553

  1   Deuxièmement, si je comprends bien les choses, je crois que cela sort du

  2   champ du témoignage que le gouvernement des Etats-Unis a permis à M.

  3   l'Ambassadeur.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous savez que vous ne pouvez

  5   poser des questions qu'en liaison directe avec les questions qu'a posées le

  6   Procureur au témoin. Alors, en quoi votre question se rattache à une

  7   question posée et à une réponse posée ? Puisque là, il y a une objection

  8   qui est formée; alors, en quoi cette question se rattache à une réponse

  9   qu'a donné le témoin ultérieurement ?

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que

 11   c'est la partie la plus importante pour comprendre tout ceci. C'est extrait

 12   nous permet de comprendre les choses. Ici, on essaie de restreindre, de

 13   réduire le modèle en question, de faire un modèle réduit en essayant

 14   d'imposer un déterminisme qui n'a rien à voir avec la compréhension de

 15   toutes les choses avec les intervenants qui sont intervenus, l'embargo qui

 16   ont duré cinq années, les pressions, les lobbys -- donc, le lobbying, tout

 17   ceci a fait en sorte qu'un peuple, un tout petit peuple a eu énormément de

 18   perte de vies chez les Serbes, et cetera. M. l'Ambassadeur essaie d'écarter

 19   tout ceci et d'employer une logique assez incroyable. Les crimes sont

 20   arrivés, Praljak était le chef du Grand état-major, je ne sais pas trop

 21   comment les choses se sont déroulées, mais c'est le coupable. Voilà, c'est

 22   ce qu'il essaie de dire.

 23   Si nous ne comprenons pas, Monsieur le Président, ce qu'écrit très

 24   sincèrement Bill Clinton concernant l'embargo, à savoir quelles étaient les

 25   nations, les pays qui obstruaient la paix et pourquoi la guerre s'est

 26   prolongée, nous ne pourrons jamais comprendre la spirale de la guerre, la

 27   folie d'une population qui était complètement affolée de peur, d'horreur et

 28   de famine. Donc, nous ne pourrons jamais comprendre ce qui a découlé de


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  1   tout ceci. Nous ne pourrons jamais comprendre quels sont les réels

  2   coupables pour tout cela.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kovacic.

  4   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être qu'une

  5   partie de la réponse est la suivante : vous avez estimé que la question que

  6   M. Praljak avait posé était en lien avec la question précédente, mais c'est

  7   un nouveau sujet il a justement mentionné, il avait justement dit, mais ce

  8   n'était pas tout à fait clair, qu'il a passé sur un nouveau sujet.

  9   Maintenant, le nouveau sujet a soulevé cette question, je crois que c'est

 10   tout à fait pertinent. Mon argument est le suivante : je crois que le

 11   témoignage de M. Galbraith commence à partir du moment où il est arrivé en

 12   Croatie, à partir du moment où il a été accrédité en tant qu'ambassadeur.

 13   Donc, e film commence beaucoup plus tôt en réalité, même avant son arrivée.

 14   Le film a commencé lorsque la Croatie et la Slovénie ont été proclamées

 15   comme étant indépendantes. Donc, il faut absolument donner de base, en

 16   guise d'introduction pour pouvoir comprendre l'ampleur et le poids des

 17   faits dont parle le témoin. Mais, à partir du mois de juillet 1993, sauf

 18   que le film a commencé deux ans avant son arrivée, et ensuite, M.

 19   l'Ambassadeur a pris poste et ensuite, on sait comment les choses se sont

 20   déroulées. Donc, il faut voir les choses dans son ensemble et je crois que

 21   c'est tout à fait pertinent. Je crois que cela fait partie de l'étendue de

 22   tout ceci, car le film commence beaucoup plus tôt.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, il aurait été plus approprié de poser la

 24   question à l'Ambassadeur, qu'il réponde à une question sur la situation

 25   politique qu'il a pu découvrir au moment où il a pris ses fonctions. A ce

 26   moment-là, confrontez ce qu'il dit au passage du livre qui pourrait

 27   confirmer ou infirmer. Donc, c'est un problème de technique de

 28   l'interrogatoire.


Page 6555

  1   Alors, Monsieur l'Ambassadeur, l'accusé excipe d'une livre où il y a des

  2   passages sur la situation en 1991, 1992, 1993. Il veut, au travers de ce

  3   passage, vous faire confirmer certains faits ou pas. Alors, une question

  4   qui peut être intéressante sur le plan géopolitique c'est que : quand vous

  5   preniez vos fonctions, étiez-vous bien au courant de toute la situation

  6   générale dans l'ex-Yougoslavie avec les problèmes liés à la Slovénie,

  7   l'action de Milosevic, et cetera ? Est-ce que vous aviez tous les éléments

  8   en votre possession ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je me suis rendu en ex-

 10   Yougoslavie à quatre reprises. J'ai visité l'ex-Yougoslavie à quatre

 11   reprises. Pour la première fois en décembre 1991 et à trois reprises en

 12   1992, j'avais donc une information de première main, j'avais une

 13   information directe. Je connaissais qui étaient les dirigeants de toutes

 14   les républiques, de tous les états émergents et je les ai rencontrés. J'ai

 15   rencontré même M. Rugova du Kosovo, je me suis rendu à Dubrovnik. En fait,

 16   la première fois que je suis allé à Dubrovnik, c'était quelques jours après

 17   l'horrible pilonnage de la ville, le jour de St-Nikolas. J'étais là le 18

 18   décembre 1991, ils devaient faire en sorte que le cessez-le-feu arrive,

 19   puisque je suis arrivé du Monténégro à cet endroit-là. Donc j'ai vu

 20   l'expérience directe de la situation. Comme je l'ai mentionné dans ma

 21   réponse précédente, j'avais effectivement été informé, j'avais reçu des

 22   séances de débriefing et je me suis entretenu avec des personnes, je me

 23   suis préparé pour rentrer en poste. Je me suis préparé pour cette nouvelle

 24   mission qui était la mienne. Il m'est bien difficile de vous faire des

 25   commentaires sur des passages cités du livre du président Clinton. Je n'ai

 26   pas ces passages sous les yeux, c'est bien sûr difficile de comprendre tout

 27   à fait, de me reporter complètement mon propos -- le livre ou les extraits

 28   sont lus en croate et sont retraduits en anglais. Je sais que cela ressort


Page 6556

  1   du champ de la période pour laquelle je suis censé témoigné. Je sais,

  2   effectivement, que ce sont des sujets assez généraux. Les choses que

  3   décrits le président Clinton correspondent avec ma compréhension de la

  4   situation générale, c'est-à-dire en 1992 -- et maintenant, j'oublie la

  5   date, malheureusement, même si je l'ai mentionnée dans mon livre, ou dans

  6   mon rapport qui était intitulé : "Nettoyage ethnique en Bosnie-

  7   Herzégovine," Milosevic, effectivement, a supposément -- alléguément [phon]

  8   -- de façon alléguée, ait retiré les troupes de Bosnie-Herzégovine laissant

  9   derrière les soldats serbes de Bosnie qui avaient simplement changé leurs

 10   insignes et, maintenant, ils étaient venus et l'armée serbe de Bosnie sous

 11   les ordres du général Ratko Mladic, et de la façon dont nous avions compris

 12   les choses, tout ceci était encore contrôlé, effectivement, par Belgrade

 13   avec les soldes et d'autres provisions venant de Belgrade.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, le témoin vous dit qu'il connaît

 15   parfaitement la situation de l'ex-Yougoslavie. Donc, posez-lui une question

 16   par rapport à ce qui a été dit lors de l'interrogatoire principal, qui vous

 17   est utile, parce que parler du livre de M. Clinton c'est très bien, mais en

 18   quoi cela vous sert ?

 19   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Justement, je vais essayer d'expliquer,

 20   mais voilà je vais poser une question avec votre permission.

 21   Q.  Vers la fin du mois d'octobre 1992, est-il exact de dire que Lord Owen

 22   et Cyrus Vance, si ces deux derniers avaient présentés un plan relatif pour

 23   une régionalisation de Bosnie-Herzégovine ? Il l'a présenté aux membres

 24   afin que ces derniers puissent s'exprimer sur ce plan. Est-ce que vous

 25   aviez connaissance de quelque chose de semblable ?

 26   R.  Oui, je connais le plan Vance-Owen.

 27   Q.  Merci. Est-ce que vous savez si le président Clinton au début du mois

 28   de février avait décidé de ne pas donner son aval au plan Vance-Owen ?


Page 6557

  1   R.  En fait, les choses sont beaucoup plus compliquées que cela, et ici

  2   j'ai bien peur qu'il s'agisse d'une zone qui -- de sujets qui ne font plus

  3   partie du témoignage dont je suis censé dépose. Donc, je crois que les

  4   choses sont un peu plus compliquées que de dire que le président Clinton

  5   n'a pas donné son aval ou son appui au plan Vance-Owen.

  6   Q.  Je vous remercie, Monsieur l'Ambassadeur. Mais je dois constater à la

  7   lecture du compte rendu d'audience que chaque fois que l'on parle de ce qui

  8   se passait des événements dans l'ex-Yougoslavie, l'évaluation de la

  9   situation, l'influence de communauté internationale, embargo à l'armement,

 10   le transfert des effectifs de la JNA depuis la Croatie en Bosnie-

 11   Herzégovine, et cetera, chaque fois qu'on aborde ces sujets personne ne

 12   souhaite jamais en parler car c'est ainsi que l'on ouvre des sujets -- que

 13   l'on aborder des sujets qui selon Margaret Thatcher sont la honte de

 14   l'occident. Mais nous trouverons un expert et nous allons aborder ces

 15   sujets avec lui.  Je souhaiterais vous poser une question -- Mostar

 16   orientale, deux sujets, isolation, pilonnage.

 17   Première question : nous avons eu un témoin, M. Beese, aux points 176, 103,

 18   104, dans sa déclaration, c'est un témoin de l'Accusation, on parle

 19   toujours du pilonnage serbe de Mostar. Ma question est la suivante : à

 20   quelle distance se trouve les positions de canons de l'armée des Serbes de

 21   Bosnie-Herzégovine de Mostar, où se trouvaient-ils ? Où se trouvent ces

 22   positions ? A quelle distance ?

 23   R.  D'abord, permettez-moi de faire un commentaire à la suite de votre

 24   déclaration -- relatif à votre déclaration effectivement j'ai parlé de

 25   l'embargo sur l'armement et je vous ai dit que je croyais qu'il s'agissait

 26   d'une mauvaise décision, et j'en ai discuté, j'ai discuté de la façon dont

 27   Milosevic avait transféré les effectifs, ou avait changé les effectifs de

 28   la JNA à l'armée serbe de Bosnie et maintenu son contrôle. Je crois que


Page 6558

  1   c'est injuste de dire que personne n'a voulu parler de ces sujets et j'en

  2   ai parlé dans d'autres forums ailleurs. Je les ai abordés en profondeur,

  3   mais je crois que j'ai dit tout à fait clairement que la communauté

  4   internationale avait une réponse erronée suivant la guerre en Bosnie, et

  5   donc pas seulement en 2006, mais également en 1991 et 1992. J'ai essayé

  6   d'œuvrer pour changer les choses, la réponse, c'est l'une des raisons pour

  7   lesquelles l'administration et moi-même, donc nous avons œuvré vers cette

  8   paix qui existe maintenant. Nous avons déployé nos efforts pour en arriver.

  9   Vous avez cité les points 176, 130 et 134. Je souhaiterais peut-être les

 10   voir avant de vous donner une réponse sur ces points.

 11   Q.  76. Monsieur, je ne sais pas comment vous les montrez, comment -- j'ai

 12   le document entre les mains. Je demanderais de l'aide pour que l'on vous

 13   présente ce document plutôt --

 14   Q.  Est-ce que vous seriez d'accord que je vous lise ces points ? Est-ce

 15   que c'est possible ? Est-ce que vous me feriez confiance si je vous donnais

 16   lecture de ces points parce que je ne peux pas vous donner le document ?

 17   R.  Je ne veux pas certainement pas vous insulter mais si on me pose une

 18   question sur quelque chose qui se trouve consigné au compte rendu

 19   d'audience, je préférerais voir l'article en question car cela me

 20   permettrait d'avoir une compréhension complète sur ce dont on me demande de

 21   répondre. Je crois que comme j'ai déjà expliqué, il est bien difficile de

 22   ce faire lorsque vous êtes en train de nous donner lecture d'un  passage en

 23   croate et que je reçois l'interprétation en anglais.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, avez-vous la référence de la page

 25   du point 176, à la condition que cela a un lien avec les questions qui ont

 26   été posées par le Procureur.

 27   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] 76, 103, 104.

 28   Excusez-moi.


Page 6559

  1   M. SCOTT : [interprétation] Ce n'est pas vraiment d'une grande assistance,

  2   Monsieur le Président. Je suis d'accord avec

  3   M. l'Ambassadeur. Quant à sa préoccupation, il est prêt à coopérer. Si le

  4   conseil de la Défense et les accusés veulent poser des questions, il va lui

  5   soumettre ces questions par écrit. M. Praljak devrait savoir si lui se

  6   réfère à 176, 103, et 104, il doit savoir de quel document il s'agit, quels

  7   sont les numéros de documents il devrait pouvoir nous dire.

  8   M. MURPHY : [interprétation] Le numéro de document, si cela peut être d'une

  9   aide, 9601 --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Murphy.

 11   M. MURPHY : [interprétation] De même, je crois que je devrais rappeler à

 12   l'attention de la Chambre de première instance que sur demande de M. Beese,

 13   il s'agit évidemment d'un document sous pli scellé, par conséquent, on ne

 14   peut pas en donner lecture.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Nous devrions passer en audience à huis clos

 16   partiel.

 17   M. LE GREFFIER : Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur le Président.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 11  Pages 6560-6562 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  9   [Audience publique]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 11   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, l'ONU pendant ce temps, les Etats-Unis

 13   d'Amérique, ont-ils proclamé les zones de Srebrenica, Zepa, Gorazde,

 14   Sarajevo, Bihac comme étant les zones protégées ? Ont-ils proclamé toutes

 15   ces zones-là comme étant les zones protégées ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  En des termes juridiques, cela veut-il dire que les états qui assurent

 18   la protection de telle ou telle région ou zone useront de tout pouvoir qui

 19   est le leur pour protéger la vie, les biens et les propriétés de la

 20   population qui se trouve dans les zones citées ? S'agit-il de parler là

 21   d'un devoir qui incombe à de tels Etats ?

 22   R.  Malheureusement, ceci ne s'était pas produit de cette façon-là. On

 23   aurait dû faire plus. En vérité, maintenant, je ne peux pas parler pour

 24   dire quelle aurait été la responsabilité de chacun de ces états, je crois

 25   qu'il est du devoir moral de l'ONU de placer sous une protection ces zones

 26   dites protégées. Je crois que l'organisation des Nations Unies - je ne me

 27   réfère pas seulement à l'institution de New York, mais je me réfère à des

 28   Etats pays membres - que ni les uns ni les autres se sont acquittés de leur


Page 6564

  1   devoir. Monsieur Praljak, je ne dis pas seulement que ce n'était pas qu'une

  2   responsabilité d'ordre légale, mais je crois que pour répondre à votre

  3   question qui est d'ordre légale, je devrais avoir la possibilité de

  4   réfléchir beaucoup plus que je ne suis pas en mesure de le faire au moment

  5   où j'en parle.

  6   R.  Merci, beaucoup. De toute les façons, nous savons tous de quoi il s'est

  7   agi, ce qui s'était produit et il est tout à fait clair que la destinée de

  8   Kiseljak n'aurait pas été meilleure; si je peux répondre à votre question,

  9   que je m'en tiens à ma décision, à savoir dans un temps limité -- dans un

 10   laps de temps limité, sur un terrain limité, je dois considérer et

 11   proclamer comme agresseur celui qui m'a attaqué mais pas celui qui a été

 12   proclamé comme étant agresseur par vous, par les Etats-Unis d'Amérique. En

 13   ce moment-là, l'agresseur était l'ABiH, par conséquent, je me suis comporté

 14   comme je pense que le demandaient mes responsabilités.

 15   Mais, maintenant, parlons de vos connaissances et informations. Le 9

 16   septembre 1993, à Grabovica, furent tués 32 Croates; le 28 juillet 1993, à

 17   Doljani, 63 Croates ont été tués; le 14 septembre, près de Prozor, 41 -

 18   nous parlons toujours de 1993 - le 16 septembre 1993, à Hudocko, 24 morts;

 19   à Bugojno, la chute de la ville, 118 personnes furent tuées; à Travnik, au

 20   mois de juin, 120 hommes furent tués. Le total de crimes perpétrés par des

 21   Musulmans contre des Croates dans 21 municipalités comprend 1 184

 22   personnes. Est-ce qu'une telle information, vous l'avez eue à l'esprit lors

 23   de l'évaluation faite par vous et des décisions prises par vous ? Est-ce

 24   qu'on peut parler, par exemple, de la présence de telles données, du point

 25   de vue psychologique, numérique également, étant donné la grande dimension

 26   du problème ? Est-ce que vous l'avez à l'esprit lors de votre évaluation et

 27   lors de la prise de décisions faites par vous ?

 28   R.  Monsieur Praljak, ce que vous venez de décrire, je ne l'accepte pas


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  1   comme étant des faits. Il s'agit de chiffres, bien sûr, avancés par vous,

  2   c'est pour moi tout, parce que je ne suis pas en mesure de dire si les

  3   chiffres avancés par vous sont exacts ou pas. Pourtant, j'étais conscient,

  4   j'étais informé par des responsables croates que j'aie pu rencontrés, et

  5   qui d'ailleurs m'informaient amplement sur l'armée et sur les actions

  6   menées par l'armée, le gouvernement de Bosnie-Herzégovine. J'ai été

  7   également informé de toutes les allégations concernant les atrocités

  8   commises. Comme je l'ai dit au président Tudjman et à l'adresse du ministre

  9   de la Défense, Susak, je peux vous le dire à vous-même. Le fait qu'une

 10   partie - peut-être oui, peut-être non, je n'en sais pas grand-chose - le

 11   fait qu'une partie aurait commis un crime ne veut dire aucunement, je

 12   répète aucunement, que ceci devrait justifier les exercions [phon] commises

 13   par le HVO. Voici, le message que je transmettais sans cesse, depuis le 28

 14   juin 1993 jusqu'à la date des accords de Washington, mettant fin à la

 15   guerre entre Croates et Musulmans. Sans égard à ce qui s'était passé

 16   ailleurs en Bosnie-Herzégovine, nous ne pouvons pas accepter que des civils

 17   dans Mostar est devraient être bombardés, qu'un héritage culturel

 18   important, y compris le vieux pont, auraient du être détruits, qu'on

 19   empêchait l'acheminement de vivres pour affamer la population, empêcher les

 20   convois d'aide humanitaire et tenir en détention des humains dans des

 21   conditions inhumaines, dans des centres -- différents centres. Nous

 22   considérons, en effet, tout cela comme étant des délits, des crimes. Ceci

 23   a, depuis toujours, été l'attitude des Etats-Unis d'Amérique, sans aucun

 24   doute, la majeure partie de ces exercions ont été perpétrées, disait-on, du

 25   côté des Etats-Unis d'Amérique par des Serbes de Bosnie sous le

 26   commandement du général Ratko Mladic. Je ne saurais, pour ma part, vous

 27   avancer des chiffres, mais je dirais que de l'ordre de 80 % du total des

 28   atrocités ont été perpétrées par eux.


Page 6566

  1   Ce fait-là, d'aucune façon ne saurait être un prétexte pour que le

  2   gouvernement dont j'étais ambassadeur aurait pu abolir les exercions faites

  3   par le HVO.

  4   Q.  Je suis d'accord avec vous et dans l'intégralité de ce que vous dites.

  5   Mais pourquoi toujours, pour expliquer un phénomène social, la mort, le

  6   meurtre, le crime, les représailles, la haine, nous optons pour une

  7   formulation juridique, nous optons pour une suite vers le droit. "Je ne

  8   justifie pas, dit-on." Je crois que tous les gens enfin dotés d'une raison

  9   quelconque me suivent en cela.

 10   Monsieur l'Ambassadeur, vous avez fait des sciences politiques. Peu importe

 11   comment on fait une approche de la justification à faire, avez-vous trouvé

 12   où que ce soit qu'un mal commis par quelqu'un d'un côté devrait évidemment

 13   abolir les autres parties qui ont connu et commis des maux, par exemple, en

 14   Amérique. Ensuite, à Bagdad, nous voyons très bien comment on peut

 15   contrôler une armée de 200 000 hommes. Lorsque ces gens-là sont pris de

 16   folie, alors, comment peut-on exercer un contrôle quelconque. Ma question

 17   est la suivante : partout où un mal a été fait --

 18   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, excusez-moi de

 19   vous interrompre, mais, en vérité, comme ceci a été dit préalablement, il

 20   me semble que vous êtes sur le point d'argumenter sans poser de question.

 21   Voilà la raison pour laquelle je vous prie de bien vouloir vous concentrer

 22   sur des questions à poser si vous avez l'intention de poser des questions à

 23   M. l'Ambassadeur.

 24   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Oui. Monsieur le Juge, je vous

 25   remercie. Je vais suivre votre instruction.

 26   Q.  Y a-t-il, Monsieur Galbraith, dans l'histoire, un exemple connu de vous

 27   qu'il s'agisse d'une quelconque guerre qu'un crime n'aurait donné lieu à un

 28   autre crime, peu importe ce que l'on dit dans le domaine du droit ? Avez-


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  1   vous un exemple à citer à l'appui ?

  2   R.  Je suppose que c'est là votre question, et qu'en vérité il est

  3   difficile d'y répondre. Probablement il doit y avoir d'exemples, cela

  4   dépend de la façon dont vous êtes en train de définir la situation à

  5   laquelle vous êtes intéressé. Mais si ce que vous voulez nous dire, à

  6   savoir en guerre un mal engendre d'autres mots --

  7   Q.  Je voulais savoir tout simplement si vous en avez des exemples pour ne

  8   pas descendre dans un débat quelconque. Est-ce que vous avez des exemples

  9   peu importe les sanctions juridiques qui s'en suivraient les exemples du

 10   fait qu'un crime engendre un autre crime ? Par exemple, pour le cas de

 11   Praljak, peut-être je ne m'en souviens plus, ou je l'ignore.

 12   R.  Non, non, non, je crois qu'il doit y en avoir des exemples pour une

 13   partie commet des crimes et que l'autre partie adverse ne l'aurait pas

 14   fait, même lorsque l'autre partie adverse était victime. Je crois que de

 15   tels exemples existent bien nombreux.

 16   Q.  J'ai une autre question à poser. Puis je passe à Franjo Tudjman.

 17   Comment -- de quelle façon et par qui s'était fait armée l'ABiH pendant

 18   toute la durée des hostilités y compris pendant celles avec le HVO ? Par

 19   qui se faisait armées les forces armées de Bosnie-Herzégovine ? Qui c'est

 20   qui a laissé passer ces armements ?

 21   R.  Franchement, même si par la même nous sortons du cadre de la déposition

 22   faite par moi au cours de l'interrogatoire principal, et cela nous le

 23   faisons depuis quelques temps, je dois vous dire qu'en vérité je ne vois

 24   pas très bien quel rapport peut ceci avoir.

 25   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, sur

 26   la base des documents fournis par le gouvernement des Etats-Unis

 27   d'Amérique, nous pouvons voir que ceci n'était pas sur la liste des sujets

 28   qui ont été permis.


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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, quelque

  2   chose de pertinent. Cet homme-là était ambassadeur pendant un certain

  3   temps. Il a déposé en nous faisant connaître des assertions, un bon nombre,

  4   il devait en avoir eu connaissance au sujet de l'embargo entre autres. Non

  5   seulement, il charge Praljak, mais il charge la Croatie et Tudjman, y

  6   compris. Nous savons très bien que de lourdes charges d'armement et de

  7   matériels allant de Croatie en Bosnie. Nous savons bien que les Etats-Unis

  8   d'Amérique ont dû fermer un œil là-dessus. Nous savons très bien que l'Iran

  9   se proposait de faire autant et qu'avant que cet homme-là vienne en poste,

 10   l'Iran s'en est occupé pour parler d'armement, quelle est la pertinence de

 11   ces questions ? Cet homme est assis ici, et évidemment après une pause de

 12   deux minutes et plus, il ne peut pas répondre à cette question. Cela tient

 13   de la pertinence.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Pourquoi, Monsieur le Président, entendons-nous

 15   des assertions comme quoi ceci était pertinent, en quoi et pourquoi ? Dans

 16   quelle mesure et pourquoi ceci est pertinent pour le conseil de la Défense

 17   qui lui assure la défense de ces accusés ici. Comment ?

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Ceci est relevant --

 19   M. SCOTT : [interprétation] Qui a donné les armes à l'ABiH ? Comment est-ce

 20   que c'est possible d'être relevant dans ce cas-ci ?

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Ceci est pertinent parce que, si vous voulez

 22   diviser ce pays et si vous voulez tuer les Musulmans pour que nous voyons

 23   que ceci devrait être la vérité, et que vous le croyez, pourquoi vous

 24   voulez des armées?

 25   M. SCOTT : [interprétation] Parce qu'il doit pouvoir riposter, Monsieur le

 26   Président; c'est pourquoi.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : A mon avis, il y a une pertinence parce qu'il est

 28   apparu par les réponses de M. l'Ambassadeur que l'armée croate HV était en


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  1   position en position en Bosnie-Herzégovine et qu'il avait été demandé le

  2   retour de l'armée du HV ainsi que de l'armement. Donc, il y a un contexte

  3   lié à l'armement. Si

  4   M. l'Ambassadeur ne veut pas répondre en se retranchant derrière

  5   l'interrogatoire strict auquel il l'a consenti, libre à lui. Je ne vais pas

  6   vous obliger à répondre.

  7   Donc, Monsieur l'Ambassadeur, vous avez compris que la Défense souhaiterait

  8   avoir des éclaircissements, donc, c'est à vous de vous décider vous voulez

  9   répondre ou vous ne répondez pas. Je ne vais pas vous forcer à répondre.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je vais répondre à ces

 11   questions d'une manière générale. L'ABiH possédait des armes qui étaient,

 12   en fait, des armes que les citoyens de Bosnie-Herzégovine détenaient. Je

 13   suppose qu'il devait y avoir des armes qu'ils ont pu obtenir des entrepôts

 14   de la JNA, pas de tous les entrepôts, mais ne serait-ce que de parler des

 15   entrepôts de la Défense territoriale de l'ex-Yougoslavie dans le territoire

 16   bosnien ? Il y a eu évidemment des armes qui ont été passées en

 17   contrebande, en fraude. Il y avait d'autres armes qui ont pu être acquises,

 18   achetées sur le marché noir. Pour la période 1991 et 1992, il devait y

 19   avoir pas mal d'armes passées depuis des sources croates ou tout simplement

 20   au travers du territoire croate. Si ma mémoire est bonne, du temps de la

 21   guerre musulmane-croate, l'ABiH ne pouvait pas recevoir d'importantes

 22   quantités de matériels de guerre parce que d'un côté elle se trouvait

 23   contourner cette fois-ci bloquée par les Serbes de Bosnie, et d'un autre

 24   côté par le HVO.

 25   Lorsque ces hostilités ont pris fin, il y a eu une nouvelle influence

 26   d'armes par le biais de la Croatie et il s'agit évidemment d'armes assez

 27   importantes, significatives qui a permis à l'ABiH de survivre et de

 28   supposer avec succès aux Serbes de Bosnie. En fin de compte, cette


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  1   influence d'arme a permis à ce que cette chance de guerre se retourne cette

  2   fois-ci au mois d'août 1995 jusqu'en septembre et octobre, le tout en fin

  3   de compte a pu frayer le chemin de négociations de paix et des accords de

  4   paix. Maintenant, si on pose la question, jouer par les Etats-Unis

  5   d'Amérique. Dans tout cela, je crois que j'en ai déposé pendant assez

  6   amplement et longtemps devant le congrès des Etats-Unis d'Amérique. Je le

  7   referais avec plaisir car il s'agit d'une décision prise par le président

  8   Clinton laquelle je l'ai mise en décision -- je l'ai mise en œuvre, à

  9   savoir nous devions avoir aucune objection à faire pour qu'il y ait une

 10   importante influence d'armes en Bosnie-Herzégovine via à la Croatie et que

 11   cette décision devait être considérée comme bonne, correcte. Le conseil de

 12   la Défense a dit que ceci aurait pu être considéré comme fermer un oeil sur

 13   tout cela. Je crois que c'est une possibilité de qualifier la circulation,

 14   mais c'était une décision importante, significative parce que, dans ce

 15   sens-là, il y a eu un changement d'équilibre et ensuite, nous avons obtenu

 16   Dayton.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour votre réponse fort complète.

 18   Monsieur Praljak.

 19   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 20   Q.  Oui, merci. Même si, en fait, je vous ai posé la question suivante.

 21   L'ABiH, malheureusement, ne disposait pas de ce type d'armement. Mais au

 22   cours du conflit musulmane-croate, qui faisait rage, quel type d'armes ont

 23   été utilisés par l'ABiH et est-il exact que, pendant cette période, nous

 24   avons permis à des munitions d'arriver jusqu'à l'ABiH pour qu'elle puisse

 25   procéder à ces tirs et est-il exact que c'est quelque chose qui ne s'est

 26   jamais vu précédemment dans l'histoire ? Vous pouvez répondre que vous n'en

 27   savez rien, et ensuite, nous passerons à autre chose, Monsieur

 28   l'Ambassadeur, afin que nous utilisions mieux notre temps.


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  1   R.  En fait, vous me posez une question à laquelle vous connaissez bien

  2   mieux la réponse que moi-même.

  3   Q.  Merci. Dites simplement que vous ne savez pas, Monsieur, et ensuite, je

  4   passerai à autre chose. Je voudrais maintenant que nous revenions a sujet

  5   qui est celui de Franjo Tudjman, une question brève. Il faisait partie des

  6   partisans, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Il a été un des plus jeunes généraux de l'armée population yougoslave

  9   de Tito, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Il a fait des recherches historiques qui n'étaient pas conformes à la

 12   version officielle de la Yougoslavie à l'époque, oui ou non ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Il a été emprisonné à deux reprises en 1972 et une fois encore en 1983.

 15   Il a été condamné à une peine d'emprisonnement, oui ou non ?

 16   R.  Je crois que c'est exact, effectivement.

 17   Q.  Il a écrit une douzaine d'ouvrages et je vais citer des extraits de

 18   trois de ses ouvrages. La question nationale dans l'Europe contemporaine;

 19   ensuite nous avons grandes idées, petites nations; et puis le cul-de-sac

 20   des circonstances historiques. Est-ce que vous connaissez les idées mises

 21   en avant par Franjo Tudjman dans ces ouvrages ?

 22   R.  Oui, je connais c'est sûr certaines des idées exposées par Franjo

 23   Tudjman dans ces ouvrages.

 24   Q.  Merci. Est-il exact que la solution d'un Etat, la création d'un Etat

 25   pour la Bosnie-Herzégovine, à partir du XVIe siècle, a toujours été imposée

 26   par un tiers et par la force ? Les Turcs, le Congrès de Berlin, l'Anschluss

 27   autrichien, Versailles avec la création d'une seule et unique Yougoslavie,

 28   la première Yougoslavie, Jualta, création de la deuxième Yougoslavie et,


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  1   enfin, on en arrive aux accords de Washington et aux accords de Dayton.Est-

  2   ce que les solutions ont toujours été imposées ? Est-ce que les gens qui

  3   vivaient surplace n'ont jamais eu leur mot à dire, n'ont jamais eu la

  4   possibilité de décider ce qu'ils souhaitaient faire eux-mêmes ?

  5   R.  J'ai le sentiment que vous êtes en train de m'entraîner dans un débat

  6   de portée extrêmement vaste et je pense qu'il faudrait que je vous dise :

  7   mais pourquoi est-ce que vous ne posez pas cette question à un historien ?

  8   Ce n'est pas que je ne la connaisse pas cette histoire, mais la Bosnie-

  9   Herzégovine, tout comme la Croatie et puis la Serbie aussi, d'ailleurs,

 10   c'était des petits pays occupés par des puissances étrangères et qui ont

 11   fait partie d'empires étrangers et qui ont dû adopter les cultures de ces

 12   empires. On a pris des décisions depuis l'extérieur au sujet de ces pays,

 13   c'est vrai pour la Croatie, c'est vrai pour beaucoup d'autres pays

 14   différents. Est-ce que je peux vous dire que le peuple de Bosnie-

 15   Herzégovine, les gens de Bosnie-Herzégovine n'ont jamais pris leur propre

 16   décision, je ne sais pas. Ils ont quand même eu leur mot à dire, il y a eu

 17   des élections démocratiques qui s'y sont tenues. Est-ce que les accords de

 18   Dayton ont été imposés à la Bosnie de la même manière que s'est déroulée

 19   l'occupation ottomane, non, pas du tout. Il y a eu un traité de paix qui a

 20   été conclu entre les parties en présence et qui a mis un terme à une guerre

 21   absolument atroce qui a fait plus de 100 000 morts, au cours de laquelle

 22   ont été commises de très nombreuses atrocités qui ont fait l'objet de

 23   nombreuses procédures devant se Tribunal excellent qu'est le TPIY. En tout

 24   cas, c'est quelque chose qui a été encouragé par la communauté

 25   internationale, particulièrement, par mon pays qui a tout fait pour que

 26   tous les peuples de Bosnie-Herzégovine concluent un accord de paix, aussi

 27   imparfait soit-il. On a estimé que c'était une meilleure solution que la

 28   poursuite de la guerre, et je ne pense pas que quiconque puisse arguer du


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  1   contraire, très franchement.

  2   Q.  Bien sûr, j'aurais des arguments différents à présenter parce que les

  3   mauvais accords -- les mauvais traités ont des conséquences fâcheuses.

  4   Mais, si on prend les accords de Dayton, n'est-il pas vrai que les Serbes

  5   en Bosnie-Herzégovine ou une république, une constitution des lois, un

  6   parlement, un territoire, des chaînes de télévision, ils peuvent utiliser

  7   leur propre langue ? Est-ce que les Croates en Bosnie-Herzégovine ont quoi

  8   que ce soit de semblable ?

  9   M. SCOTT : [interprétation] Premièrement, on sort complètement du champ de

 10   l'interrogatoire principal, des règles qui ont été fixées par les Etats-

 11   Unis d'Amérique, et puis, cela n'a aucune pertinence ici.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez tout à fait raison, Monsieur Scott.

 13   Vous abordez une période postérieure aux faits dont la Chambre a saisis.

 14   C'est peut-être intéressant au point de vue politique ou historique, mais

 15   le champ du témoignage de M. l'Ambassadeur ne porte pas sur les accords de

 16   Dayton.

 17   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je crois que le témoin a mentionné

 18   Dayton.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, est-ce que je pourrais peut-

 20   être vous apporter mon aide. Le témoin, aujourd'hui, page 36 du compte

 21   rendu, lignes 13 à 15, a dit être fier des accomplissements de la

 22   diplomatie de son pays. Or, la diplomatie américaine a fait partie des

 23   efforts menés pour arriver aux accords de Dayton, elle a créé les accords

 24   de Dayton. Donc, je pense que la situation en Bosnie-Herzégovine, tout ce

 25   qui a lien aux accords de Dayton, cela entre dans le cadre de la déposition

 26   de ce témoin.

 27   M. SCOTT : [interprétation] Mais, partir de cette remarque de nature

 28   générale de l'ambassadeur où il dit qu'il est fier d'avoir permis d'amener


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  1   la paix dans ce pays, c'est bien loin de la question de savoir s'il y a une

  2   télévision serbe en Republika Srpska.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, je ne

  4   pense pas que le témoin soit le meilleur pour traiter de ce genre de sujet.

  5   Mais il y a pertinence ici parce que la Republika Srpska est une entité de

  6   la Bosnie-Herzégovine qui est le résultat des accords de Dayton. Si on

  7   garde le processus de paix, on voit que cela a été quelque chose qui a été

  8   sur la table de négociations pratiquement depuis le début. Puis, ensuite,

  9   cela s'est poursuivi avec Dayton, cela a connu son développement avec les

 10   accords de Dayton, mais je ne sais pas si le témoin est vraiment le mieux à

 11   même pour nous répondre. Cependant, le sujet est pertinent parce qu'il

 12   savait -- il connaissait les différentes propositions qui étaient

 13   présentées parce que, quand on regarde les accords de Dayton, on voit qu'il

 14   y avait deux entités au sein d'un gouvernement, plus le district de Brcko,

 15   avec leur propre constitution pour ces entités, tout ceci dans le cadre de

 16   la constitution de la Bosnie-Herzégovine qui existait alors. C'est quelque

 17   chose qu'ont toujours recherché les Croates pendant toute la période. Je le

 18   répète, le témoin que nous avons aujourd'hui ici n'est peut-être pas le

 19   meilleur témoin pour traiter de ce genre de sujet, mais je comprends la

 20   pertinence des questions de M. Praljak.

 21   M. SCOTT : [interprétation] Objection quant au discours de

 22   M. Karnavas et puis, je ne suis pas d'accord, il ne s'agit pas d'éléments

 23   de preuve pertinents, ce n'est pas vrai. Rien n'indique que les dirigeants

 24   de l'Herceg-Bosna étaient favorables à la constitution de la Bosnie-

 25   Herzégovine à cette époque. Donc,

 26   M. Karnavas se lève et fait des affirmations complètement fausses.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] J'invite la Chambre de première instance à

 28   se rapporter au témoignage de M. Kljuic quand il a parlé des différents


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  1   accords de paix. Je ne veux pas entrer dans un débat ici, pas de polémique,

  2   mais je me dis qu'on pourrait peut-être écouter avec un peu plus

  3   d'attention les dépositions et les témoignages des témoins qui viennent

  4   ici.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a une certaine pertinence, mais le témoin n'est

  6   peut-être pas le mieux approprié pour parler de cela et comme la Chambre a

  7   donné une heure et demie à M. Praljak et que le temps tourne, je vous

  8   invite, M. Praljak, à poser vos questions essentielles pour vous, parce que

  9   l'accord Dayton, d'accord, mais

 10   M. l'Ambassadeur a tenu des propos à votre égard, donc, centrez plutôt vos

 11   questions sur votre cas personnel plutôt que sur les accords de Dayton qui

 12   seront certainement évoqués à nouveau, mais recentrer dans votre propre

 13   intérêt.

 14   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, cela ne me gêne

 15   pas.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vous reste 24 minutes.

 17   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Il me faudra moins de temps que cela.

 18   Je vais répéter ce que j'ai déjà dit. Cela ne me gêne pas personnellement.

 19   Je n'ai pas de problème parce que je pense que ce monsieur n'a rien dit qui

 20   soit de nature à m'incriminer et je ne pense pas que ses conclusions, ses

 21   impressions soient fondées sur des documents. C'est apparu très clairement

 22   au cours de cet interrogatoire.

 23   Q.  Ma question est la suivante : ces traités qui ont évolué au fil des

 24   mois en fonction des souhaits des pays qui étaient chargés des

 25   négociations, que ce soit la France, les Etats-Unis, et cetera. Tous ces

 26   accords de paix, est-ce qu'ils n'ont pas d'abord été signés par le

 27   président de l'Etat croate, à savoir le Dr Franjo Tudjman. Est-ce que cet

 28   homme politique, lui, il n'a pas été le premier à signer chacun de ces


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  1   documents, chacun de ces accords ? Est-ce que vous pouvez des exceptions à

  2   cette règle ? Est-ce que ce n'est pas lui qui en premier a signé chacun de

  3   ces accords de paix sans exception ? Ici, on est en train de parler de la

  4   branche politique du HVO.

  5   R.  Je peux vous donner des exceptions si vous estimez que la règle veut

  6   que Franjo Tudjman ait signé tous les accords présentés par les médiateurs

  7   internationaux, à commencer par le plan Z-quatre, qui était soutenu par la

  8   Russie, les Nations Unies, les Etats-Unis et l'Union européenne. De plus,

  9   c'est avec extrêmement de réticence qu'il a fini par accepter les accords

 10   de Washington et, dans d'autres cas, il a signé certains des plans proposés

 11   par la communauté internationale, soit parce qu'il estimait qu'ils

 12   présentaient un avantage pour la population croate de Bosnie, soit parce

 13   qu'il estimait que les autres parties en présence n'allaient pas signer et

 14   que cela pourrait lui donner un avantage que de signer. D'abord, le terme

 15   de signer, ce n'est pas très correct, parce que je ne me rappelle pas qu'il

 16   s'agisse là de documents qui aient été signés. Parce qu'il y a beaucoup,

 17   beaucoup, de documents qui n'ont fait l'objet d'aucun accord, certains de

 18   ces plans.

 19   Q.  Oui, ces plans n'ont pas fait l'objet d'accord parce qu'il y avait

 20   toujours au moins deux des parties en présence, et toujours au moins une

 21   qui refusait de signer. Mais vous avez parlé du plan

 22   Z-quatre. C'est un plan qui envisageait une unité totale pour les Serbes en

 23   Krajina avec une constitution, un gouvernement, une devise, une monnaie, et

 24   cetera.

 25   R.  Je ne crois pas que cela prévoyait une véritable autonomie avec le

 26   statut des Serbes, mais cela aurait donné à la majorité serbe ou plutôt

 27   région à majorité serbe dans la zone de la Krajina un grand niveau

 28   d'autonomie au sein d'une Croatie unifiée.


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  1   Q.  Avec une monnaie et un gouvernement ?

  2   R.  Oui, ils auraient eu leur propre gouvernement, cela se serait présenté

  3   comme les Etats des Etats-Unis d'Amérique ou les Cantons suisses. Mais je

  4   le répète, et j'insiste sur ce point, ils n'auraient pas eu leur propre

  5   monnaie. C'est la kuna croate qui aurait été la devise de cette région. Ils

  6   auraient pu, cependant, avoir leurs propres billets de banque avec leur

  7   propre dessin dessus. Tout comme en Ecosse, vous trouvez la livre écossaise

  8   qui est une unité monétaire qui est la même que la livre britannique, mais

  9   où il y a des motifs qui sont différents de ceux qu'on trouve sur les

 10   billets de banque britanniques.

 11   Q.  Quand Franjo Tudjman s'est opposé aux accords de Washington, où il y

 12   avait Fédération avec les Musulmans qui occupaient 49 % -- ou plutôt quand

 13   vous lui avez dit : vous allez faire partie d'une Fédération avec les

 14   Musulmans occupant 49 % du territoire et ensuite, vous rejoindrez la

 15   Croatie dans le cadre d'une Confédération, quand il a contesté cet accord,

 16   vous lui avez dit qu'il manquait d'humilité parce que ses objections

 17   n'étaient pas valables et toutes les déclarations sur les droits de

 18   l'homme, les droits des citoyens qu'on pense à la déclaration anglaise ou

 19   française, quand on pense à tout cela, qu'est-ce qui vous donne le droit de

 20   prendre cette prise de position et qu'est-ce qui vous permet de dire que

 21   personne ne peut s'opposer à ce genre de proposition sans être

 22   immédiatement qualifié de criminel ? Où est-ce que vous trouvez un

 23   fondement, une raison juridique, légale, à une telle prise de position ?

 24   Je vais vous dire que la nation serbe en Croatie, c'est une minorité

 25   ethnique et que les Croates en Bosnie-Herzégovine sont une nation

 26   constitutive de la Bosnie-Herzégovine. Je voulais simplement ajouter ceci à

 27   ma question.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : S'il vous plaît, permettez le témoin de répondre à


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  1   la question.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant cinq ans, j'étais en poste dans cette

  3   région du monde, donc, je peux faire face à pratiquement toutes les

  4   questions qui me sont lancées, mais j'essaie simplement de la comprendre,

  5   cette question. Première chose, les Etats-Unis, en fait, ils ne sont

  6   impliqués dans ce conflit en ex-Yougoslavie qu'avec beaucoup de réticence.

  7   La Croatie et le président Tudjman voulaient absolument que nous

  8   participions. Donc, ce n'est pas que nous nous soyons imposés, pas du tout,

  9   au contraire, c'est lui qui nous a imploré de venir, d'intervenir. Mais

 10   laissez-moi répondre, je vous prie.

 11   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 12   Q.  Oui.

 13   R.  Je suis en train de vous parler des événements qui se sont déroulés

 14   pendant la période où j'étais ambassadeur, mais il est vrai que même avant

 15   que je n'entre en poste, il cherchait à obtenir l'intervention américaine,

 16   le soutien américain et surtout l'intervention américaine dans le processus

 17   de paix. D'ailleurs, ce processus Z-quatre, au départ, c'était une

 18   initiative russe. Après la signature des accords de Washington ou plutôt

 19   pour aller à Washington, dans l'avion, j'étais avec le président Tudjman

 20   dans l'avion et c'est lui qui m'a demandé de participer à ce processus pour

 21   le soutenir également. Bien entendu, quand les Etats-Unis commence à

 22   participer à un processus - et on nous avait invité à le faire - c'est le

 23   président croate qui nous a invités à le faire. Nous avons accepté de le

 24   faire, ce qui a permis d'améliorer nos relations,  la signature par lui des

 25   accords de Washington. Dès que nous commençons à nous impliquer dans ce

 26   genre de processus, comme tout bon médiateur en la matière, nous essayons

 27   de faire au mieux pour arriver à trouver la meilleure solution de paix

 28   possible.


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  1   Pour ce qui est des accords de Washington, le président Tudjman pendant

  2   longtemps a été très réticent, il a fait preuve de beaucoup de résistance,

  3   et au bon d'un certain temps, avec beaucoup de réticence, je l'ai dit, il a

  4   fini par l'accepter, par accepter ces accords. Mais avant qu'il n'accepte

  5   ces accords de Washington, il est clair que lui il souhaitait annexer à la

  6   Croatie les territoires croates et d'ailleurs aussi des territoires à

  7   majorité musulmane. Même après, même après, il n'a pas abandonné ses rêves.

  8   Il ne cessait de nous montrer des cartes où on voyait un territoire qui

  9   traduisait son rêve d'une Grande-Croatie et il insistait sur le fait que la

 10   Bosnie-Herzégovine ne pourrait pas subsister en tant qu'Etat.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, je crois que votre temps de parole

 12   est épuisé.

 13   Monsieur le Greffier, pouvez-vous m'indiquer combien de temps, parce qu'il

 14   y aura d'autres avocats et comme vous le savez, nous terminons absolument

 15   demain à 13 heures 45.

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez utilisé une heure 26 minutes, donc,

 18   il reste quatre minutes. En quatre minutes, allez à l'essentiel. Votre

 19   avocat, malheureusement, ne pourra pas poser des questions.

 20   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre permission,

 21   nous nous sommes mis d'accord sur la répartition du temps alloué aux

 22   conseils de la Défense. Donc, en plus de l'heure et demie que vous avez

 23   accordées à M. Praljak, nous disposons de 60 minutes. Donc, M. Praljak a

 24   l'intention de me laisser un peu de temps.

 25   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je n'en ai plus que pour trois minutes.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais les 60 minutes supplémentaires, qui c'est

 27   qui vous les a restituées ? Maître Kovacic, qui vous a donné une heure de

 28   plus ?


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  1   M. KOVACIC : [interprétation] Pardon, excusez-moi. On nous a donné 20

  2   minutes, c'est la défense de l'accusé Coric qui nous les a données et puis,

  3   la défense de M. Pusic nous a donné la totalité de son temps. Je les

  4   remercie beaucoup pour cela.

  5   L'ACCUSÉ PRALJAK : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Mais, je l'ignorais.

  7   Bien. Alors, avant la pause, il reste quatre minutes. Allez-y, Monsieur

  8   Praljak.

  9   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant

 10   voir la pièce P 6251, c'est le compte rendu d'une réunion du 29 octobre

 11   1993, et c'est la page 2 dont j'ai besoin en croate. Page suivante, s'il

 12   vous plaît. Page suivante, s'il vous plaît. Oui, cela y est, c'est bon.

 13   Puis, est-ce qu'on pourrait avoir l'anglais, s'il vous plaît ?

 14   Q.  Enfin, je peux en donner lecture à haute voix pour gagner du temps.

 15   M. Wirth dit quatre lignes à partir du haut : "S'agissant de ce qui va se

 16   passer en Europe centrale et occidentale, nous, cela ne nous ait jamais

 17   venu à l'esprit que quelque chose de semblable pourrait se produire, et

 18   personne d'ailleurs n'avait l'idée que cela pouvait se produire."

 19   Franjo Tudjman dit : "Dans mon livre : 'Question nationale dans l'Europe

 20   contemporaine,' j'avais anticipé le fait que les états multiethniques ne

 21   pourraient plus continuer à exister en Europe et que l'unification de

 22   l'Europe, elle ne serait possible que dans le cadre de l'Europe constituée

 23   en Etats-Unis d'Europe."

 24   M. KOVACIC : [interprétation] Je pense qu'il serait fort souhaitable que le

 25   témoin puisse voir le texte.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, vous pouvez faire venir le

 27   texte en anglais ?

 28   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]


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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Bien. Alors, on nous dit qu'il y a un problème

  2   technique qui ne permet pas de voir le texte en anglais.

  3   Bien. Alors, posez votre question. Vous avez traduit --

  4   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

  5   Q.  Ma question est la suivante : comme vous l'avez dit dans Globus,

  6  l'hebdomadaire croate, le 1er septembre 1996, est-ce que vous avez appris la

  7   chose suivante en Croatie ? Je cite :

  8   "Une fois la démocratie établie, on ne peut pas obliger les gens à vivre

  9   dans un tel Etat contre leur volonté. C'est la leçon que j'aie apprise en

 10   Croatie."

 11   Est-ce que je vous ai bien cité, Monsieur ? Est-ce que vous avez appliqué

 12   la logique de la rupture dans le cadre de la rupture qui s'annonce en Irak,

 13   comme vous le dites dans votre livre ? Merci d'avoir bien voulu répondre à

 14   toutes mes questions, Monsieur le Témoin.

 15   R.  Monsieur Praljak, vous avez terminé votre déposition avec un coup de

 16   théâtre, plutôt, de manière extrêmement théâtrale. Il va falloir que je

 17   trouve cette phrase que j'ai utilisée souvent pour décrire la situation en

 18   Irak et le caractère inévitable de l'indépendance du Kurdistan. Ce sont des

 19   paroles que je prononce fréquemment ces jours-ci. Je n'avais pas réalisé

 20   qu'en fait, je les avais prononcées il y a si longtemps, le 1er octobre

 21   1996. Donc, merci d'attirer mon attention sur ce point et, effectivement,

 22   c'est ce que j'ai dit cela, j'ai dit que c'était la leçon que j'avais

 23   apprise ou que j'avais tirée de mon expérience en Croatie.

 24   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci. Merci, Monsieur le Président. Je

 25   m'excuse d'une maladresse d'une partie de mon contre-interrogatoire, mais

 26   je pense que le sujet est tel que nous ne saurions nous limiter à des

 27   questions simplistes parce que ce témoin, il a parlé des conclusions qu'il

 28   a tirées, pas seulement des faits.


Page 6583

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il est 6 heures moins 20. Nous allons faire la

  2   pause obligatoire de 20 minutes. Ensuite, il nous restera une heure et je

  3   crois que c'est Me Kovacic qui va utiliser l'heure qui reste; et donc

  4   demain, les avocats qui resteront, vous ferez en sorte qu'on termine à 13

  5   heures 45.

  6   Voilà, donc, nous nous retrouvons à 6 heures.

  7   --- L'audience est suspendue à 17 heures 41.

  8   --- L'audience est reprise à 18 heures 01.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Kovacic, vous avez donc la parole

 10   pendant une heure.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Contre-interrogatoire par M. Kovacic :

 13   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur l'Ambassadeur, je suis le conseil de

 14   la Défense du général Praljak, accusé en l'espèce dans cette affaire. Je

 15   vais vous poser des questions en croate puisque c'est beaucoup plus facile

 16   pour moi. Je m'appelle Bozidar Kovacic. Vous avez témoigné à plusieurs

 17   reprises donc vous saurez qu'il faut ménager des pauses entre les questions

 18   et réponses. Vous avez dit dans le cadre de l'introduction de votre

 19   déposition que vous étiez ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique et que vous

 20   connaissez bien la situation spécialement s'étant turbulent et j'imagine

 21   que vous avez eu de l'information qui vous est arrivée -- des informations

 22   directes quant aux questions que je vais vous poser, donc, je vous

 23   demanderais de nous donner des réponses à ces questions.

 24   Ma première question : est-il exact de dire que la République de Croatie

 25   avait reconnu les républiques souveraines de Bosnie-Herzégovine le 7

 26   novembre 1992 en tant que le premier Etat qui avait reconnu la souveraineté

 27   de la Bosnie-Herzégovine après la proclamation de l'indépendance, 7 avril

 28   1992 ?


Page 6584

  1   R.  La Croatie a certainement été rapide à reconnaître la Bosnie-

  2   Herzégovine.

  3   Q.  Il n'y avait absolument aucune réserve, aucune condition. C'était tout

  4   à fait simple. Elle a reconnu de façon très directe la Bosnie-Herzégovine

  5   comme étant un Etat indépendant de l'ex-Yougoslavie, c'est-à-dire comme

  6   étant l'une des républiques -- ex-République de l'ex-Yougoslavie ?

  7   R.  De façon général, lorsqu'on reconnaît quelque chose c'est

  8   inconditionnel, et la reconnaissance de la Croatie était également

  9   inconditionnelle.

 10   Q.  Merci. A partir du moment où on a reconnu la Croatie immédiatement on a

 11   commencé à établir des rapports diplomatiques entre ces deux Etats, et je

 12   parle d'un niveau formel, n'est-ce pas, ce qui comprenait également

 13   l'ouverture d'une ambassade de la République de Bosnie-Herzégovine à

 14   Zagreb; est-ce exact ?

 15   R.  Oui, c'est tout à fait juste, oui.

 16   Q.  S'agissant de Zagreb le Corps diplomatique de Zagreb, donc, vous

 17   connaissiez ou vous saviez très bien qu'à Zagreb très rapidement déjà vers

 18   la fion du mois de mai début juin 1992, si je ne m'abuse, une ambassadrice

 19   est venue de Sarajevo, donc une femme ambassadeur est venue de Sarajevo, et

 20   pendant toute la période jusqu'aux accords de Dayton, elle était sur place,

 21   c'est-à-dire cette ambassade avait été créée tout comme les autres

 22   ambassades appartenant à d'autres pays. Est-ce que c'est exact ? Donc,

 23   cette ambassade est restée.

 24   R.  Vous voulez dire l'ambassade est restée ouverte. Oui, elle est restée

 25   ouverte jusqu'à ce jour. Elle existe.

 26   Q.  C'est exact. Merci. Est-il exact de dire que la République de Croatie

 27   en tant qu'Etat au cours des conflits entre les Croates de Bosnie et les

 28   Musulmans de Bosnie en Bosnie-Herzégovine n'a jamais essayé de rompre ses


Page 6585

  1   rapports diplomatiques ni de limiter le travail diplomatique entre les deux

  2   à Zagreb, donc l'ambassade de l'ABiH et de Zagreb ?

  3   R.  La Croatie n'a jamais rompu les relations diplomatiques avec la Bosnie.

  4   Je ne peux pas parler de restrictions je ne sais pas s'il y en a eues, je

  5   ne sais pas si l'ambassade bosnienne avait ou faisait l'objet de

  6   restrictions, je ne sais pas s'il y en avait mais tout du moins je n'en

  7   étais pas conscient.

  8   Q.  Très bien. Merci. Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous savez si

  9   immédiatement après l'ouverture de l'ambassade ou peu de temps après son

 10   ouverture, l'ambassade de Bosnie-Herzégovine à Zagreb, que cette ambassade

 11   avait reçu de la part de la République de Croatie, c'est-à-dire du

 12   gouvernement de la Croatie avait reçu la permission d'ouvrir deux sections

 13   liées à l'ambassade, Département militaire économique et Département de

 14   Logistique, pour le QG des forces suprême des forces armées de l'ABiH; est-

 15   ce que vous n'aviez jamais entendu parler de cela ?

 16   R.  Je ne me souviens pas de tous les détails, mais je sais qu'il y avait

 17   un attaché militaire de Bosnie-Herzégovine et que l'ambassade également

 18   traitait des questions économiques.

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Je souhaiterais vous présenter la pièce 3D

 20   00186 qui a un statut coté pour identification donc cote provisoire au sein

 21   d'identification. Je souhaiterais néanmoins montrer ce document à

 22   l'ambassadeur étant donné qu'il a certains souvenirs de certains événements

 23   qui pourraient être confirmés par ce document. Je demanderais votre

 24   permission de montrer ce document au témoin, et si oui, donc je demanderais

 25   que par le système e-court on voit afficher la pièce 3D 00186.

 26   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, vous verrez sous peu à l'écran le document en

 27   question. A gauche vous aurez bien évidemment l'anglais et à droite le

 28   B/C/S. Voyez-vous ici, il ne s'agit pas d'une noter, c'est plutôt une


Page 6586

  1   lettre, on peut appeler cela note, j'imagine note provenant de l'ambassade

  2   de Bosnie-Herzégovine à Zagreb. La date est le 16 juillet 1993, c'est, à ce

  3   moment-là, que le document a été reçu par le ministère des Affaires

  4   extérieures de Croatie. Je souhaiterais attirer votre attention sur le

  5   passage qui se trouve en bas, donc devant la liste des noms. On peut voir

  6   ici que s'agissant du Département militaire économique, les personnes

  7   suivantes y travaillent. On voit une liste de six personnes, de six noms.

  8   Ensuite, s'agissant de la logistique du Département de Logistique du QG des

  9   forces suprêmes de l'armée encore une fois vous voyez cinq noms ou plutôt

 10   21 personnes et vous pouvez que cela se poursuive sur la page suivante.

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Je demanderais que l'on affiche la page 2.

 12   Q.  Ensuite, vous verrez également un autre groupe, une autre liste de noms

 13   pour laquelle on dit dans le Département de Logistique du QG de l'armée de

 14   Split, vous verrez encore deux personnes, encore deux noms supplémentaires.

 15   Monsieur l'Ambassadeur, ma question est la suivante : étant donné la

 16   situation, même s'il s'agissait de l'été 1993, le conflit entre les Croates

 17   de Bosnie et les Musulmans de Bosnie était déjà en cours -- il existait

 18   déjà en Bosnie-Herzégovine. Comme vous avez dit, Franjo Tudjman ainsi que

 19   ses hommes ou les membres du gouvernement qui l'entouraient étaient -- ou

 20   exerçaient, selon vous, le contrôle complet du HVO dans cette partie-là de

 21   Bosnie-Herzégovine. Comment pouvons-nous réconcilier ces deux

 22   contradictions qu'en même temps, la Croatie qui selon vos thèses car nous

 23   avons également d'autres thèses, vous n'êtes pas le seul à émettre des

 24   thèses, mais comme cela se fait-il que la Croatie souhaiterait prendre sa

 25   partie de Bosnie et se positionner en tant que maître de la guerre à cet

 26   endroit-là sur les Croates de Bosnie et entre guillemets elle permet à son

 27   ennemi, entre guillemet de fonctionner à Zagreb et d'avoir une

 28   représentation -- une déposition qui représente la section militaire


Page 6587

  1   économique et le Département de la Logistique des forces armées, non

  2   seulement elle avait 21 hommes à Zagreb, mais il y avait également un

  3   Détachement à Split. Est-ce que, dans quelque guerre que ce soit, une telle

  4   situation peut exister que la partie adverse permette à la partie avec

  5   laquelle elle est en guerre d'avoir dans son pays dans un conflit

  6   supposément -- quelque chose qui s'appellerait supposément conflit

  7   permettre le travail -- tel genre de travail sur son territoire ? J'exagère

  8   peut-être car je n'ai peut-être pas posé une question précise et simple.

  9   Première question : étant donné que vous aviez certaines connaissances de

 10   la situation, est-ce que vous estimez que ce document établit est vrai ?

 11   Est-ce que cela reflète exactement la vérité ?

 12   R.  Je n'ai absolument aucune raison de douter que l'ambassade de Bosnie-

 13   Herzégovine a envoyé cette note diplomatique que vous avez montrée à

 14   l'écran.

 15   Q.  Je vous remercie. Question numéro 2 : comme je l'ai déjà mentionné est-

 16   ce que vous pourriez nous donner une explication ? Comment se fait-il que

 17   la Croatie alors qu'elle est en guerre contre un autre pays - par ses

 18   agents - pour les appeler ainsi - permet à la partie adverse d'exercer sa

 19   présence de façon illimitée dans son propre pays ? Est-ce que vous n'avez

 20   jamais vu cela quelque part ? N'avez-vous jamais observé une telle

 21   situation dans l'histoire moderne ?

 22   M. SCOTT : [interprétation] Objection. Excusez-moi, Monsieur le Président.

 23   Je crois qu'il est très important et je voudrais insister sur ce point.

 24   Puisque le conflit armé international est une question importante dans

 25   cette affaire, il faudrait d'abord établir qu'une guerre existait entre

 26   l'Etat de Bosnie-Herzégovine et l'Etat de la République de Croatie. Je

 27   crois que le conseil vient de reconnaître l'existence, donc, d'un conflit.

 28   M. KOVACIC : [aucune interprétation]


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  1   M. SCOTT : [interprétation] Il nous a dit à la page 71 [comme interprété]

  2   ligne 19 : "Pourquoi est-ce que la Croatie un pays qui est en guerre avec,"

  3   il me semble que l'on parle d'un conflit international.

  4   M. KOVACIC : [interprétation] Dans l'acte d'accusation et dans les

  5   déclarations du témoin nous avons entendu ces choses. Le témoin a

  6   littéralement dit à plusieurs reprises que la Croatie avait le contrôle

  7   complet du HVO, donc exerçait un contrôle complet.

  8   M. MURPHY : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis intervenir.

  9   Il semblerait que Me Scott a peut-être omis de comprendre une chose, Me

 10   Kovacic a clairement posé la question suivante si l'on prend pour acquis

 11   qu'il y avait une guerre pourquoi -- donc, si l'on prétend qu'une guerre

 12   avait lieu pourquoi est-ce que la Croatie accepterait de se comporter

 13   ainsi ?

 14   M. KOVACIC : [interprétation] Je remercie mes collègues.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question très rapide de ma part qui aurait dû

 16   être posée mais qui ne l'a pas été certainement par oubli. On a un document

 17   qui établit qu'il y a une ambassade de la Bosnie-Herzégovine à Zagreb avec

 18   apparemment une ambassadrice. Est-ce que vous l'aviez rencontrée cette

 19   ambassadrice, parce qu'entre ambassadeurs on se rencontre au moins lors des

 20   fêtes nationales ? Est-ce que vous l'aviez rencontrée le 4 juillet 1993 ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que oui. Je crois que j'ai rencontré

 22   l'ambassadeur Turkovic le 4 juillet. Elle était sans doute venue à notre

 23   fête nationale du 4 juillet, mais j'ai également rencontrée à d'autres

 24   reprises car elle avait besoin de notre aide pour organiser l'accès de

 25   l'aide humanitaire et également, elle avait besoin de notre aide lorsqu'il

 26   était question de problèmes de réfugiés.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, poursuivez.

 28   M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.


Page 6589

  1   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire si dans cette ambassade de Bosnie-

  2   Herzégovine dans la République de Croatie à Zagreb si cette ambassade

  3   comptait 99 -- à 99 % pour ne pas dire à 100 % de --personnels qui étaient

  4   de nationalité musulmane et que c'étaient des gens qui travaillaient à

  5   l'ambassade ? Il s'agissait d'employés du gouvernement de Bosnie-

  6   Herzégovine et qu'ils étaient de nationalité musulmane.

  7   R.  Je ne sais pas qui étaient les employés de l'ambassade bosnien. Je ne

  8   suis pas étonné qu'ils soient tous de nationalité bosnienne, j'imagine

  9   qu'un très grand nombre de ces employés soient Musulmans, cela ne m'étonne

 10   pas. Je dois insister pour dire qu'il s'agit ici d'une note diplomatique

 11   émanant de l'ambassade de Bosnie destinée au ministre des Affaires

 12   étrangères croates ou plutôt au ministère. Ce qui manque ici c'est la

 13   réponse du ministère des Affaires étrangères qui permet donc à ces

 14   personnes de fonctionner et d'avoir leur ambassade en Croatie. Cela est

 15   peut-être -- peut-être qu'effectivement, on a répondu mais ici à la lecture

 16   de cette note diplomatique je ne vois pas à quel moment on a accordé la

 17   permission -- mais même si cela est arrivé il aurait dû avoir un processus

 18   séparé par -- suivant lequel cette ambassade aurait pu être accréditée ou

 19   approuvée. Donc, le fait que cette demande a été faite ne veut pas dire que

 20   le gouvernement croate a effectivement permis à ces personnes de

 21   fonctionner depuis l'ambassade. Je ne peux vraiment pas vous donner de

 22   réponse exacte, mais ce document ne prouve pas la chose.

 23   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je suis tout à fait d'accord avec votre analyse

 24   et commentaire, mais il y a deux faits. Si je ne m'abuse, je crois que vous

 25   avez dit que vous saviez que l'ambassade fonctionnait, que l'ambassade

 26   était ouverte et qu'il y avait également d'autres pour les appeler ainsi

 27   département, je suis sûr que vous nous avez dit que l'ambassade de la

 28   République de Bosnie-Herzégovine à Zagreb était activement fonctionnelle.


Page 6590

  1   C'est quelque chose que vous savez, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui, tout à fait, elle était opérationnelle.

  3   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je suis tout à fait d'accord avec votre

  4   commentaire à savoir si effectivement cette équipe pour laquelle l'on

  5   demande d'être accepté. Je ne sais pas si cela a été approuvé. Vous êtes un

  6   témoin de haut gradé politique. Je ne voudrais certainement pas examiner

  7   ces détails mais un très grand nombre de documents existent pour expliquer

  8   que ces personnes avaient, effectivement, reçu le statut en question et

  9   qu'ils ont bel et bien travaillé dans l'ambassade. Mais nous ne perdrons

 10   pas du temps avec vous, vous allez certainement être beaucoup plus utile

 11   pour répondre à d'autres questions, mais je vous remercie néanmoins de vos

 12   commentaires, et pour ces questions nous appellerons d'autres témoins.

 13   Vous avez mentionné dans votre déposition que la Croatie rémunérait les

 14   soldats du HVO que c'est elle qui assurait le budget pour le HVO. Je crois

 15   qu'il s'agissait -- un instant, je vous prie. Je ne comprends le nombre,

 16   enfin, la page en question, mais est-ce que vous êtes d'accord avec moi

 17   pour dire que c'est quelque chose que vous avez mentionné ?

 18   R.  Oui, que la Croatie avait créé le HVO et qu'elle assurait le budget,

 19   oui.

 20   Q.  Merci. Pour être tout à fait limpide car nous jouons un jeu à cartes

 21   ouvertes.

 22   M. KOVACIC : [interprétation] Je vais vous montrer un autre document. C'est

 23   le document 3D 00299.

 24   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, vous verrez sous peu une communication qui

 25   émane encore une fois du bureau de Bosnie-Herzégovine à Zagreb. Vous verrez

 26   encore une fois que l'ambassade demande la permission pour le

 27   fonctionnement. C'est le 4 janvier 1993, avant que la demande ne parvienne

 28   et que tout ceci soit formalisé, mais déjà en janvier donc -- mais déjà en


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  1   fait en janvier 1993, la délégation  militaire de la République de Bosnie-

  2   Herzégovine demande au ministère de la Défense de la République de Croatie

  3   - et, bien sûr, je saute les politesses d'introduction que pour organiser

  4   pour avoir une meilleure efficacité dans le combat contre l'agresseur serbe

  5   chetnik et pour les besoins du QG de la République de l'ABiH permettait que

  6   les officiers de l'armée croate soient engagés. Ensuite les trois noms sont

  7   énumérés. On voit commandant qui serait déployé sur Gospic, un autre à

  8   Dubrovnik, et cetera, et par ce communiqué, on demande la chose suivante

  9   que le statut de ces officiers soient réglés comme il a été réglé jusqu'à

 10   présent. Car ici nous pouvons voir que ce n'est pas la première fois que

 11   l'on fasse demande -- donc, de leur permettre d'avoir toutes les

 12   compétences comme toutes les autres compétences d'autres soldats du HV,

 13   c'est-à-dire que ces derniers puissent avoir toute la solde et que l'on

 14   s'occupe d'eux. Donc, cela veut dire que, quand ces derniers auront

 15   effectué leur travail en Bosnie, puisqu'on demande de leur permettre d'être

 16   engagés au sein de l'armée croate, nous les remercions, et cetera, et

 17   cetera, colonel Hasan Efendic qui signe. C'est une lettre, comme vous le

 18   voyez, la lettre a été rédigée à Zagreb.

 19   [Le conseil de la Défense se concerte]

 20   M. KOVACIC : [interprétation]

 21   Q.  Donc, en voici un exemple. En lisant le texte, nous pouvons voir qu'il

 22   est autre que de fait. L'ABiH sollicite auprès du ministère de la Défense

 23   de Croatie : faites-nous un transfert de quelques personnes, nous en avons

 24   bien besoin, laissez-les venir en Bosnie, dans l'ABiH, pour s'acquitter des

 25   tâches qui sont les leurs, dans le contexte de la lutte contre les Chetniks

 26   et puis, accorder leur droit de revenir une fois mission accomplie. Entre-

 27   temps, vous les acquittez de leur pays, le reste, évidemment, est acquitté

 28   en Croatie. Faisons tout cela et tout ceci a été fait en janvier 1993,


Page 6592

  1   lorsqu'en vérité, il n'y avait pas vraiment lieu de parler du conflit, à

  2   proprement parlé, entre Musulmans et Croates, mais il y avait des tensions,

  3   il y avait des incidents, et cetera.

  4   Est-ce que cela vous paraît normal, tout comme l'exemple de tout à l'heure,

  5   si vraiment il y a eu conflit entre ces deux pays ou ceci était un conflit

  6   imminent, ceci était évident également, la Croatie, encore toujours,

  7   collabore-t-elle pleinement à un plan militaire, cette fois-ci, en

  8   accordant à la Bosnie ses propres militaires ? Il est vrai que de leurs

  9   noms, ils sont des Musulmans, mais ils sont membres de l'armée croate et

 10   vivent en Croatie. Est-ce que cela vous paraît normal ? Est-ce qu'il

 11   s'agirait là d'un comportement logique ?

 12   R.  La première chose que je voudrais dire, c'est que nous avons à faire

 13   ici avec une demande qui vient de la délégation militaire de la République

 14   de Bosnie-Herzégovine. Vous ne m'avez pas montré la réponse à cette

 15   demande, donc, je ne suis pas en mesure de vous dire si la République de

 16   Croatie a agréé ou a fait droit à cette demande. Si je replace cette

 17   question dans le contexte de ce que vous avez dit précédemment, il est tout

 18   à fait légitime, normal, qu'un gouvernement reconnu sur le plan

 19   international fasse une telle demande par l'intermédiaire de son ambassade

 20   pour que les officiers étrangers viennent servir dans sa propre armée, cela

 21   c'est quelque chose de très différent de l'idée d'envoyer sur un territoire

 22   une armée sans l'autorisation du gouvernement souverain ou d'envoyer des

 23   généraux et des officiés faire partie d'une armée régulière ou non légitime

 24   dans un pays étranger.

 25   Q.  Monsieur l'Ambassadeur, je peux accepter votre analyse un peu

 26   hypothétique, je dirais. Ne descendons pas dans le détail, si ces gens-là

 27   ont vraiment été prêtés ou pas. Je vais vous présenter des pièces à

 28   conviction là-dessus. Je vous respecte comme une personne qui avait formulé


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  1   -- par conséquent, empruntons-nous aussi quelques termes hypothétiques.

  2   Si ces gens-là ont été envoyés, alors, je vous dis pour ma part, que

  3   d'autres membres représentants du peuple croate qui habitaient la Croatie

  4   se sont rendus en Bosnie-Herzégovine à titre de bénévoles, en tant que

  5   volontaires, pour défendre leur pays d'origine. Vous avez parlé de Gojko

  6   Susak qui avait sa maison natale, la maison de ses ancêtres, où il se

  7   proposait d'aller une fois mis à la retraite pour y vivre. Qu'y a-t-il de

  8   fâcheux ou de mauvais si, par exemple, ces gens s'y rendent pour organiser

  9   la défense d'un pays qui est leur pays d'origine ? Vous connaissez fort

 10   bien l'histoire des pays yougoslaves de la Croatie et de la Bosnie. Ces

 11   gens-là se rendent de la Bosnie-Herzégovine en Croatie pour poursuivre

 12   leurs études, pour y trouver un emploi, et cetera. Par conséquent, une

 13   fluctuation existe, ils le font dans le domaine de la fluctuation croate et

 14   musulman, mais ils s'en vont chez eux parce que pour organiser la défense

 15   de leur propre pays d'origine, leur patrie. Etes-vous d'accord avec moi ?

 16   R.  Je dirais que quand les citoyens d'un pays donné se rendent sur le

 17   territoire d'un autre pays en tant que volontaires pour lutter dans les

 18   rangs d'une milice ou d'une force armée non légitime sur le plan juridique,

 19   non légal, j'estime que, quand ceci se produit, c'est illégal et que le

 20   pays d'où viennent ces gens a l'obligation d'empêcher de telles pratiques.

 21   Je dis que cette obligation d'empêcher que ceci se produise est encore plus

 22   impérieuse quand le pays d'où viennent ces gens envoie ses propres troupes

 23   dans le pays en question pour combattre aux côtés de cette milice ou de

 24   cette force illégale. Peut-être que cette obligation de prévention est

 25   encore plus impérieuse quand le pays d'origine envoie un général de son

 26   armée pour être commandant d'une force irrégulière qui n'est pas acceptée,

 27   qui n'est pas reconnue par le gouvernement du pays où la personne est

 28   envoyée. Donc, en résumé, le gouvernement de Bosnie-Herzégovine dont


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  1   l'ambassade se trouvait à Zagreb aurait pu tout à fait légitimement

  2   demander qu'un officier croate vienne servir avec eux ou soit le commandant

  3   en chef. Si la Croatie voulait accéder à cette demande, c'était tout à fait

  4   approprié. Mais ce qui n'est pas acceptable, selon moi, ce qui n'est pas du

  5   tout acceptable, c'est que le gouvernement croate, le gouvernement de la

  6   Croatie, envoie des gens sans l'approbation du gouvernement pour commander

  7   des forces irrégulières.

  8   Q.  Je ne suis pas certain qu'il doive y avoir un sens pour poursuivre ce

  9   débat, car le fait est, j'espère que vous allez vous mettre d'accord avec

 10   moi là-dessus, mais, posons la question. Ces hommes-là ressortissants de

 11   l'ancienne République de Bosnie-Herzégovine, République socialiste

 12   fédérative de Yougoslavie et ressortissant de la Croatie au sein de la

 13   RSFY, une fois se trouve pris de court dans une situation politique

 14   nouvellement créée. Tout d'un coup, au cours de cette année 1992, entre

 15   leur pays d'origine, leur village qui se trouve d'un côté de la frontière

 16   d'un Etat, se trouve maintenant, et de l'autre côté de leur village, un

 17   autre Etat. Peu importe qu'ils soient Musulmans ou autres, laissant de côté

 18   la légalité, ces gens-là décident tout simplement de s'y rendre pour

 19   protéger leur village, chacun. Pouvons-nous, empruntant toutes les normes,

 20   les droits de l'homme les plus à jour, pouvons-nous donc, au nom de cela,

 21   contester le droit de cet homme-là qui va dans ce village qui se trouve au-

 22   delà de la frontière d'Etat nouvellement créée pour défendre son propre

 23   village, sachant surtout que personne n'allait le faire comme lui. Nous

 24   parlons du début des hostilités. Il y a manque de fonctionnement du

 25   gouvernement, manque de l'existence d'une ABiH. Nous parlons d'un moment où

 26   les Serbes se rendent maîtres de cette terre. Izetbegovic, lui, dit : ce

 27   n'est pas notre guerre à nous, à la faire, et cetera. Il viendra le moment

 28   où il changera d'avis. S'agit-il de ces mêmes circonstances où, par


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  1   exemple, on verrait le Mexique envoyer ses hommes pour se rendre en

  2   Amérique pour faire la guerre ? Bien sûr que non. Ce ne serait pas le cas.

  3   Parce que les faits sont différents. Etes-vous d'accord avec moi pour dire

  4   que les faits sont différents ? Nous ne pouvons pas les voir, ces faits,

  5   uniquement d'un œil officiel, juridique, légal dans le contexte des faits

  6   réels pourtant. Est-ce que vous permettez une telle situation ?

  7   M. SCOTT : [interprétation] Avant que le texte ne quitte la page, je

  8   signale qu'il y a une faute, une erreur page 83, ligne 17, on peut lire :

  9   "Approbation du gouvernement de Croatie." En fait, c'est une erreur. Il

 10   faudrait -- en fait, il faudrait -- ce n'est pas le gouvernement de la

 11   Croatie, mais le gouvernement de Bosnie-Herzégovine.

 12   J'en profite pour faire une objection. Me Kovacic fait de très long

 13   discours pour poser une question finalement tout à fait anodine.

 14   M. KOVACIC : [interprétation] Peut-être, ma question est-elle longue, je

 15   suis d'accord là-dessus, mais il y a deux choses à préciser. M.

 16   l'Ambassadeur n'est pas un simple témoin qui vient ici pour lui poser des

 17   questions d'ordre démocratique, mon intention consistait à faire la

 18   description de la situation pour obtenir la réponse qui a été présentée

 19   comme la somme de ses réflexions en deux phrases. C'est dans ce sens-là où

 20   je demande à M. l'Ambassadeur de me répondre d'une façon aussi précise,

 21   succincte que possible parce que ma question est simple. S'agit-il vraiment

 22   de parler de circonstances dans lesquelles on ne traiterait que de ce

 23   contexte-là : "Jusqu'à avant-hier, tu as pu passer à travers ton village

 24   avec un fusil alors que maintenant tu ne peux plus le faire," et cetera.

 25   Nous parlons d'hommes et de femmes communes; êtes-vous d'accord avec moi,

 26   Monsieur l'Ambassadeur ?

 27   R.  Oui, je comprends ce que vous êtes en train de me dire votre argument,

 28   mais je dirais que l'une des conséquences de l'apparition d'Etats


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  1   indépendants, la disparition de la Yougoslavie, c'est que ces Etats

  2   successeurs, ils avaient des obligations, tout comme les Etats-Unis

  3   d'Amérique ont l'obligation d'empêcher -- ou plutôt, je vais prendre un

  4   exemple concret, les Américains cubains, c'est-à-dire des gens qui sont

  5   venus de Cuba et qui habitent aux Etats-Unis, qui ont la nationalité

  6   américaine, le gouvernement a l'obligation de les empêcher de prendre les

  7   armes pour aller lutter à Cuba. Nous devons les empêcher de le faire bien

  8   que nous n'ayons des relations très mauvaises avec Cuba. De la même façon,

  9   il faut donc empêcher les citoyens de traverser la frontière et de

 10   combattre dans les rangs de forces irrégulières sans l'approbation du

 11   gouvernement du pays en question. Je dirais aussi que, vu les circonstances

 12   qui étaient celles de 1992, 1993, bien entendu, j'ai tendance à comprendre,

 13   à sympathiser quelque peu, à comprendre la situation sur le terrain. Mais

 14   même dans la situation que vous nous décrivez, on est très loin du fait --

 15   eu un an plus tard, d'envoyer un général de l'armée croate prendre le

 16   commandement de forces irrégulières, de forces militaires qui ne sont pas

 17   les forces militaires légitimes du pays en question sans l'accord de ce

 18   pays.

 19   Q.  Merci. Merci. Je vous ai compris. Mais dans le cadre de ce sujet-là,

 20   permettez deux petites questions. Saviez-vous qu'en cette année 1992 et

 21   1993, il y avait des accords entre Izetbegovic et Tudjman sur la

 22   coopération, lesquels accords permettaient entre autres de tels

 23   comportements. Probablement, c'est sur cette base-là qu'il y a eu ce mémo

 24   que je vous ai soumis tout à l'heure, qui a permis que des gens traversent

 25   la frontière pour combattre les Serbes. Ce sujet-là, vous ne l'ignorez pas

 26   et j'espère que vous pouvez confirmer l'existence de tels accords de

 27   coopération, qu'ils étaient autre chose qu'un fondement juridique de tout

 28   cela.


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  1   Q.  Indéniablement, il y avait des accords en matière de coopération

  2   militaire entre la Croatie et le gouvernement de la République de Bosnie-

  3   Herzégovine. Je ne peux pas -- enfin, avant de répondre à cette question

  4   générale, il faudrait que j'examine les différents accords pour voir quels

  5   en étaient les termes précis. Mais pour répéter ce que je vous aie déjà

  6   dit, si cette action fait suite à une demande légitime et légale du

  7   gouvernement de Bosnie-Herzégovine, selon moi cet acte est tout à fait

  8   légitime. Puisque après tout, n'importe quel pays a le droit de constituer

  9   des alliances, c'est quelque chose de tout à fait commun et de tout à fait

 10   légal.

 11   Q.  Bien. Monsieur l'Ambassadeur, saviez-vous qu'à plusieurs reprises,

 12   Alija Izetbegovic, président de la présidence a dit en public que le HVO -

 13   ce dans des écrits officiels existent - n'était autre chose qu'une

 14   composante des forces armées de l'ABiH. Secondo, vous le saviez

 15   certainement, de fait le HVO a pris part dans les luttes de défense de

 16   Sarajevo, de concert avec les forces de la Bosnie-Herzégovine. Je crois que

 17   vous pouvez me le confirmer au moins.

 18   R.  La coopération entre l'ABiH et le HVO, à un moment donné, cette

 19   coopération ne signifie pas qu'elle soit légitime, qu'il soit légitime

 20   lorsque des forces irrégulières luttent contre l'armée légitime de la

 21   Bosnie-Herzégovine, de procéder au même genre d'opération, or c'était la

 22   situation en 1993. Cela ne signifie pas qu'un pays étranger ait le droit

 23   d'envoyer son armée sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ou d'envoyer

 24   des officiers de son armée pour commander ces forces irrégulières d'une

 25   armée illicite sur le territoire du pays sans le consentement de ce

 26   dernier.

 27   Q.  Bien. On y reviendra, ne serait-ce que pour parler de certains segments

 28   de cette question. Passons à une série de questions, c'est-à-dire là où il


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  1   y a des faits qui semblent être en contradiction avec la façon dont

  2   certains états voyaient le phénomène qui évoluait, qui se propageait sur le

  3   terrain. Vous avez dit, au début de votre déposition, que la Croatie

  4   prenait en charge des réfugiés de Bosnie-Herzégovine, que la Croatie s'est

  5   occupée d'un bon nombre de réfugiés, pour ne parler que du nombre des gens,

  6   ce qui nous semble tout à fait réel et réaliste. C'est que nous disions

  7   nous aussi, pour notre part. Mais, lorsque vous avez déposé sur les

  8   missions que vous avez envoyées à Obonjan et Gasinci, dans les deux camps,

  9   les deux institutions se trouvant dans le territoire de la Croatie, vous en

 10   avez parlés dans le contexte de transfert des gens de l'Heliodrom qui

 11   devaient passer en Croatie via un pays tiers.

 12   M. KOVACIC : [interprétation] Pour le procès-verbal d'audience, je dis

 13   qu'il s'agit de la page 64 du procès-verbal d'audience d'hier, ligne 24; et

 14   page 65 du procès-verbal d'audience, ligne 9; et ensuite, page 80, lignes 5

 15   à 16. De même, avons-nous pu voir la pièce à conviction P 902.

 16   Q.  Je crois que je vous aie bien rafraîchi la mémoire, vous voyez de quoi

 17   je parle.

 18   R.  Si vous pouviez me poser une question.

 19   Q.  Oui, oui. Mais j'ai dû d'abord vous faire venir enfin sur les lieux

 20   pertinents. Ma question est la suivante : la République de Croatie a pris

 21   part au transfert de réfugiés vers des pays tiers, mais ceci en coopération

 22   avec l'UNHCR et avec les pays tiers qui ont accepté de recevoir les

 23   réfugiés; est-ce exact ?

 24   R.  Il est certain que la Croatie a accueilli des réfugiés qui ont été

 25   accueillis donc en coopération avec le HCR des Nations Unies par les

 26   autorités croates, et un certain nombre d'entre eux, un nombre assez

 27   considérable, ont ensuite pris le chemin de pays tiers, dont notamment les

 28   Etats-Unis d'Amérique.


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  1   Q.  Oui. Parlant toujours de la même époque, nous parlons du mois d'octobre

  2   1992, enfin, reformulons la question pour abréger un peu. Je crois que vous

  3   allez aisément confirmer le fait que l'ensemble de l'aide humanitaire, j'ai

  4   voulu parler un petit peu de ce qui s'était passé par envoi aérien à

  5   Sarajevo, l'ensemble de l'aide humanitaire depuis l'agression perpétrée par

  6   les Serbes jusqu'aux accords de Dayton circulait exclusivement, je dirais,

  7   via la République de Croatie. Tous les transports, tous les axes,

  8   d'ailleurs, passaient par la Croatie. Ne serait-ce que pour parler du port

  9   de Ploce et d'autres territoires en Herzégovine ou pour parler par exemple

 10   de certaines route ou de certains trajets aériens; est-ce exact ?

 11   R.  Oui, une grande partie est vraie. Je crois que le pont aérien de

 12   Sarajevo n'était pas d'importance mineure, au contraire, cela revêtait une

 13   importance considérable, mais on peut dire que l'aide humanitaire qui est

 14   arrivée en Bosnie, elle est venue essentiellement par la Croatie parce que,

 15   sans la Croatie, la Bosnie n'aurait pas pu survivre.

 16   Q.  Merci. Je crois qu'il est tout à fait clair, je vous prie de le

 17   confirmer, vous aussi, le fait que dans son territoire, à aucun moment, la

 18   République de Croatie n'a empêché, ni arrêter des convois d'aide

 19   humanitaire à destination de Bosnie-Herzégovine.

 20   R.  Je crois que ceci est exact.

 21   Q.  Saviez-vous que Merhamet, c'est-à-dire l'organisation humanitaire

 22   bénévole musulmane, était parfaitement libre dans ses opérations et actions

 23   de collecte en Croatie, à Zagreb.

 24   R.  Je crois que oui, essentiellement, c'est exact.

 25   Q.  Merci. Nous avons constaté tout à l'heure l'existence de réfugiés.

 26   Etes-vous d'accord que malgré tout ce qui a pesé lourdement sur la Croatie,

 27   à aucun moment durant les hostilités, la Croatie n'a fermé les frontières,

 28   arrêté des réfugiés, ou dit lors des négociations : cela suffirait. Primo,


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  1   négocions et puis après, occupons-nous des réfugiés. Par conséquent,

  2   essayons d'en faire deux volets de cette question. Sommes-nous d'accord que

  3   la Croatie n'a jamais fermé ses frontières pour ne pas permettre l'entrée

  4   des réfugiés de Bosnie-Herzégovine en Croatie ?

  5   R.  Ce que je peux dire, c'est que la Croatie a agi de manière extrêmement

  6   remarquable pour ce qui est des réfugiés. Je ne saurais penser, ou je ne

  7   pourrais vous donner le nom d'un autre pays qui ait accepté, en une période

  8   aussi brève, autant de réfugiés, si on compare le nombre de réfugiés au

  9   nombre d'habitants du pays. On peut dire que de manière générale,

 10   effectivement, les frontières étaient ouvertes. Je ne peux pas cependant

 11   dire qu'à aucun moment il n'ait essayé d'interrompre ce flux de réfugiés,

 12   car c'était quand même quelque chose qui suscitait des préoccupations de

 13   temps à autres. Parfois, cela suscitait beaucoup de préoccupations au sein

 14   du gouvernement croate et aussi au sein de la communauté internationale.

 15   Mais il est exact de dire que la Croatie s'est comportée de manière

 16   remarquable en la matière. Cela est un facteur extrêmement important qui a

 17   beaucoup joué s'agissant de notre politique envers la Croatie. En tout cas,

 18   c'est une des raisons essentielles qui explique que nous avons eu beaucoup

 19   de réticence à mettre en place des sanctions pendant la période que nous

 20   évoquons, parce que cela aurait pu avoir de graves conséquences pour les

 21   réfugiés.

 22   Q.  Monsieur l'ambassadeur, nous demeurons toujours dans le cadre

 23   concernant les réfugiés. Nous avons tous lu, je ne sais plus d'ailleurs

 24   combien il y a de gens qui figurent dans les procès-verbaux concernant

 25   l'office du feu président Tudjman. Essayons de faire un peu l'économie de

 26   temps, pour accepter une remarque. Moi et l'équipe que je représente, nous

 27   n'avons jamais trouvé de procès-verbaux de l'office dont je parle alors que

 28   vous, vous y étiez présent, où il vous aurait été permis de voir qu'il y


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  1   aurait eu des réflexions politiques ou des négociations avancées par les

  2   uns et les autres, la Croatie veut ceci, Izetbegovic, cela. Il n'y avait

  3   pas vraiment lieu de parler de réflexions, ni de Tudjman, ni de ces

  4   responsables correspondants, que les frontières d'Etat devaient être

  5   fermées aux réfugiées pour que ceci puisse être une arme en vue des

  6   négociations à entamer. Etes-vous d'accord avec moi ?

  7   M. SCOTT : [interprétation] Mais quelle est la question ? Demandant de M.

  8   l'Ambassadeur Galbraith de donner son accord au fait que mon équipe et moi-

  9   même n'avons trouvé aucune trace ? Est-ce qu'on lui demande de donner son

 10   accord sur le fait ou sur ce que dit

 11   Me Kovacic ?

 12   M. KOVACIC : [interprétation] Je suis désolé, je m'excuse, mon confrère n'a

 13   pas compris ma question. Mon attitude est simple. C'est une certitude, à

 14   savoir les procès-verbaux ne permettent pas une seule possibilité de voir

 15   les réfugiés comme étant une raison pour laquelle on devrait négocier ou

 16   pas. C'est peut-être une question difficile à saisir pour l'Accusation,

 17   mais ce n'est pas une raison pour réagir comme cela.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, vous auriez pu aborder la question

 19   différemment en demandant à M. l'Ambassadeur, mais je vais lui demander et

 20   si je prends du temps, c'est votre temps, parce que vous auriez pu lui

 21   poser la question.

 22   Lorsque vous aviez des discussions avec M. Tudjman sur la question des

 23   réfugiés, est-ce qu'il y a eu de la part de M. Tudjman et de ceux qui

 24   étaient autour de lui, des réticences à l'égard de ce flux continuel de

 25   réfugiés qui venaient de Bosnie-Herzégovine qui allaient en Croatie pour

 26   aller, le cas échéant, dans d'autres Etats, comme les Etats-Unis ou

 27   ailleurs. Est-ce que vous avez senti se sa part une irritation ou bien une

 28   volonté de faciliter ces flux migratoires ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, tout d'abord, pour

  2   répondre -- enfin, si vous me le permettez, je voudrais d'abord parler de

  3   ce que viens de dire le conseil de la Défense. Quand il a dit -- enfin, je

  4   voudrais dire que vu l'expérience que j'ai, enfin, non, il dit que le

  5   président Tudjman, selon lui, n'aurait jamais utilisé les réfugiés comme

  6   une menace ou il n'a jamais menacé d'interrompre le flux des réfugiés, il

  7   n'a jamais essayé d'utiliser cela comme un levier, effectivement. Cela

  8   c'est une chose.

  9   Deuxième chose, c'est vrai qu'il y a eu des préoccupations au sujet du flux

 10   des réfugiés parce que le nombre de réfugiés était considérable, énorme,

 11   par rapport à la population croate. Bien entendu, la communauté

 12   internationale a fourni une aide considérable, mais cela constituait malgré

 13   toute une charge énorme pour le pays d'accueil. Si bien qu'on peut

 14   comprendre que, très naturellement, des préoccupations s'exprimaient de

 15   temps à autre au sujet de ce problème, mais la déclaration selon laquelle

 16   il y avait parfois des préoccupations, une réticence, tout ceci ne change

 17   rien au fait que selon moi, le bilan de la Croatie en matière d'accueil de

 18   réfugiés est un bilan excellent. Il y a parfois eu des problèmes, le plus

 19   grave a sans doute été le rapatriement involontaire de certains réfugiés en

 20   Bosnie-Herzégovine. Cela c'est un problème très grave que nous avons

 21   évoqué.

 22   M. KOVACIC : [interprétation]

 23   Q.  Je vous remercie. Quelques brèves questions, toujours au même plan.

 24   Etes-vous d'accord pour dire que la Croatie offrait, je dirais, une immense

 25   aide en termes de soins médicaux, par exemple, pour prendre en charge nous

 26   seulement les réfugiés mais également des personnes blessées qui de Bosnie-

 27   Herzégovine ont été transférées vers les hôpitaux croates sans distinction

 28   de nationalité ni d'appartenance à des armées quelconques. Vous avez dû


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  1   évidemment avoir possession d'information, je dirais, rendue publique, mais

  2   aussi d'autres informations que vous déteniez vous-même. Je vous parle des

  3   hôpitaux de Split, de Slavonski Brod, de Zagreb, de Karlovac; est-ce exact

  4   de dire ainsi ?

  5   R.  Je suis allé dans certains de ces hôpitaux, et effectivement, la

  6   Croatie a fait un travail excellent dans les soins apportés aux victimes de

  7   la guerre qui avait lieu en Bosnie.

  8   Q.  Puis-je ajouter, sans faire preuve de ségrégation aucune,

  9   discrimination, de point de vue de nationalité qui serait les leur; avez-

 10   vous eu ce sentiment-là ?

 11   R.  Je peux dire que les Bosniens, c'est-à-dire les Musulmans, étaient

 12   également soignés dans ces hôpitaux.

 13   Q.  Je vous remercie. Monsieur l'Ambassadeur, nous avons sept, huit minutes

 14   à notre disposition. Etes-vous d'accord ou avez-vous eu la possibilité de

 15   savoir le fait que, toujours pour parler de cette période de 1992 à 1994,

 16   la Croatie n'a jamais imposé des sanctions quelconques pour séquestrer

 17   telle ou telle propriété ou bien qui était propriété de personnes physiques

 18   ou morales parmi les ressortissants de Bosnie-Herzégovine, une fois que ces

 19   derniers se trouvaient dans le territoire de la Croatie; ils étaient libres

 20   de disposer de leurs propriétés et biens, comptes en banque et autres

 21   propriétés, et cetera ?

 22   R.  Je crois que globalement, ce que vous venez de dire correspond à la

 23   réalité.

 24   Q.  Revenons juste pour une seconde ce à quoi j'ai pensé tout à l'heure et

 25   ce dont j'ai fait mention, pour parler d'accords.

 26   M. KOVACIC : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience, Monsieur le

 27   Président, si vous vous rappelez, il y a eu d'abord un livre dont Praljak

 28   se servait. Il s'agit de la pièce à conviction 3D 00520[comme interprété],


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  1   ayant toujours le statut d'une pièce à conviction pour identification.

  2   Ensuite, page 107 -- 1 -- 3 -- 103 et 104, il a parlé d'accord, accord

  3   entre le gouvernement et l'armée de gouvernement de Bosnie-Herzégovine,

  4   ensuite, de Croatie. Il s'agit de parler de Zenica, du 21 avril 1993. Vous

  5   vous en souvenez certainement. Il s'agit d'un accord important. Mais,

  6   permettez-moi de faire confirmer ce que j'aie dit tout à l'heure. Dans le

  7   point 1, on lit : "L'ABiH et le HVO constituent des forces légales armées

  8   de Bosnie-Herzégovine et sont traitées sur un pied d'égalité." Cet accord a

  9   été signé : du côté de l'ABiH, Sefer Halilovic, et au nom du QG croate,

 10   Milivoj Petkovic, ont été apposées également les signatures de Philippe

 11   Morillon et d'un observateur de la Mission d'observation, plus tôt signé

 12   par la MOCE dans Zenica, l'ambassadeur Thébault, tout ceci, tout simplement

 13   pour essayer de faire des comparaisons de faits pareils.

 14   R.  Cet accord, il date d'une période qui précède mon arrivée à Zagreb.

 15   Q.  Je suis d'accord que cela précède votre arrivée, mais est-ce qu'on peut

 16   dire qu'il y a eu une situation en Bosnie où on peut dire, par exemple, que

 17   pour parler de ces gens-là, il s'agit de gens qui représentaient un certain

 18   facteur en Bosnie, pour vous qui avez connu la situation.

 19   R.  Non, aujourd'hui, je ne peux plus me souvenir des détails précis qui

 20   m'ont été communiqués à l'époque. Mais je le répète, je ne suis pas

 21   convaincu que ceci ait donné à la Croatie le droit d'envoyer ses officiers

 22   pour servir d'officiers au sein du HVO ou en Bosnie-Herzégovine.

 23   Q.  Vous l'avez dit très clairement à plusieurs reprises. Je crois que

 24   n'avons guère besoin d'élaborer. Je crois que j'aie encore un peu de temps

 25   pour poser une question. En effet, un argument de plus de ce lot

 26   d'arguments qui accusent une situation contradictoire. Pendant que vous

 27   étiez en poste à Zagreb, avez-vous entendu dire ou avez-vous appris que la

 28   République de Croatie a assuré le financement des préparatifs et des


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  1   déplacements de représentations de Bosnie-Herzégovine à Albertville en 1992

  2   et pendant les jeux méditerranéens en France en 1993. On en a amplement

  3   écrit dans la presse. Est-ce que vous vous en souvenez ?

  4   R.  Le premier événement, cela date d'une période précédant mon arrivée à

  5   Zagreb. Je me souviens des efforts entrepris au niveau international pour

  6   que les athlètes participent aux jeux de 1994 à Lillehammer. Mais, je ne me

  7   souviens pas à ce sujet d'effort particulier de la part de la Croatie.

  8   Q.  Bien.

  9   M. KOVACIC : [interprétation] Je voudrais que l'on place, moyennant l'e-

 10   court, la pièce à conviction P 3112. Il s'agit d'un des procès-verbaux que

 11   nous avons retrouvés dans les offices du

 12   Dr Tudjman et lesquels PV ont été exploités par le bureau du Procureur.

 13   Mais en attendant que l'on nous soumette à cette pièce à conviction, il

 14   s'agit d'une réunion du 2 juillet 1993 tenue dans les locaux et les offices

 15   du feu président Tudjman. Il s'agit du HVO, sécurité d'état de la

 16   République de Croatie. Il s'agit d'un responsable très haut placé. Je

 17   voudrais la page pour laquelle j'ai noté le numéro ERN 01866500. Les trois

 18   derniers chiffres sont 500.

 19   Q.  En attendant que l'on soumette la pièce à conviction, pour ne pas trop

 20   répéter, à un moment donné c'est Anton Brdoljak prend la parole pour

 21   intervenir. Vous le connaissiez, vous. C'était quelqu'un de très, très bien

 22   vu, réputé, un artiste du monde du cinéma et également un fonctionnaire du

 23   monde du sport; vous l'avez connu ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  A un moment donné, il a été directeur aussi de la radiotélévision de

 26   Croatie.

 27   R.  C'est exact. Oui, bien sûr.

 28   Q.  Saviez-vous que lui était président du Comité olympique croate, par la


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  1   suite, aujourd'hui, il est membre du Comité olympique international ? Est-

  2   ce que vous vous en souvenez ?

  3   R.  Je suis sûr que je le savais à l'époque.

  4   Q.  Merci. Bien voilà, à un moment donné, ce que nous avons à l'écran dans

  5   son intervention, il a été dit, mais nous ne le voyons pas figuré à

  6   l'écran. La version anglaise, on n'aura plus le temps, il est 7 heures.

  7   Monsieur l'Ambassadeur, permettez-moi de vous donner lecture d'une seule

  8   phrase : "Le tragique consiste dans le fait que nous avons été obligés de

  9   supporter tous leurs préparatifs depuis les jeux olympiques jusqu'au

 10   championnat d'Europe. Il s'agit d'une équipe d'une sélection nationale. Ils

 11   ont fait leurs préparatifs à Zagreb et à l'heure où j'en parle leurs

 12   sélections juniors se trouvent en Istrie pour faire leurs préparatifs."

 13   M. KOVACIC : [interprétation] En version anglaise, il s'agit d'une toute

 14   première [inaudible] : "Il est tragique que nous ayons payé tous les

 15   préparatifs, et cetera, et cetera."

 16   Pour ne pas perdre trop de temps, le président pose une question. Il dit :

 17   "C'est nous qui avons pris la charge."

 18   Brdoljak répond: "Oui, c'est nous qui avons pris en charge ces

 19   financements."

 20   L'autre : "C'est toi qui paies tout cela,"

 21   L'autre qui dit : "Non.

 22   Q.  Est-ce que tout cela prouve que la Croatie veut même un plan

 23   international, fournir une aide qui parle de sports à l'échelle

 24   internationale c'est d'autre chose, une propagande politique ? Est-ce que

 25   cela vous paraît normal qu'au temps ou prétendument ces deux parties sont

 26   en guerre ? Nous parlons de juillet 1993. Nous voyons la Croatie financer

 27   des élections nationales dans notre pays pour se rendre à des compétitions

 28   à l'étranger. Est-ce que vous ne pouvez pas trouver cela étrange, Monsieur


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  1   le Témoin ?

  2   R.  Je ne peux pas saisir le contexte dans sa globalité, mais il semble que

  3   M. Tudjman ne soit pas très ravi d'apprendre que des fonds croates aient

  4   été utilisés pour financer l'équipe bosniaque.

  5   Q.  Je suis d'accord avec vous ceci pourrait être une réponse, mais je

  6   posais la question à cause du fait qui est un fait.

  7   R.  Oui. J'aimerais répondre à votre question, vous-même avez déclaré me

  8   semble-t-il que la situation était compliquée. Il est indéniable que la

  9   Croatie a apporté une aide à la Bosnie-Herzégovine à plusieurs reprises, la

 10   Croatie a été le premier pays à reconnaître la Bosnie-Herzégovine. Même au

 11   cours de la guerre croate ou musulmane l'ambassade de Bosnie fonctionnait.

 12   Les représentants de la Bosnie et de la Croatie entretenaient des rapports

 13   courtois. Je pense qu'il y a quelque chose qui nous montre que cette guerre

 14   on pouvait y mettre un terme c'est quand on a vu à la télévision Muhamed

 15   Sacirbey envoyé des Nations Unies et Mario Nobilo, l'ambassadeur croate.

 16   C'était la pire époque de la guerre, l'ambassadeur yougoslave était là.

 17   Mais ces deux ambassadeurs, bosniaque et croate, faisaient preuve de

 18   beaucoup de courtoisie l'un envers l'autre. Ils insistaient sur

 19   l'importance de mettre un terme à la guerre. D'ailleurs, c'était, je crois,

 20   l'opinion de la grande majorité des gens en Croatie qui étaient effondrés

 21   devant cette guerre entre les Musulmans et les Croates, je crois que la

 22   majorité d'entre eux n'étaient pas très favorables à l'idée d'une Grande-

 23   Croatie ou de l'annexion de certains territoires en Herzégovine.

 24   Tout ceci, ceci étant dit le président Tudjman voulait créer une Grande-

 25   Croatie et il soutenait l'activité militaire du HVO qui avait pour objectif

 26   de lui permettre d'atteindre ce but.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Très rapidement, Monsieur Praljak.

 28   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Ici, ce sera peut-être continu comme le


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  1   meilleur basketteur. Drazen Petrovic, membre de la Ligue RBA, a été tué

  2   dans un accident de la route et on a fait que scander un homme mort et

  3   voilà comment de façon vulgaire a réagi Franjo Tudjman.

  4   M. KOVACIC : [interprétation] Je remercie mon client. Le temps court et

  5   nous presse. Il ne fallait pas évidemment décrire toute cette situation.

  6   J'ai soumis le papier sur l'ELMO. Merci, Monsieur le Président.

  7   Au nom de mon client, particulièrement en mon nom personnel, je remercie M.

  8   l'Ambassadeur.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 10   Il est donc 19 heures 05. Le contre-interrogatoire se poursuivra demain,

 11   puisqu'il y a encore quelques avocats qui doivent intervenir, et charge à

 12   vous de vous répartir le temps. Etant précisé qu'à 13 heures 45, nous

 13   finirons. Voilà. Je vous remercie. Je vous invite à revenir pour demain 9

 14   heures.

 15   --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le jeudi 14 septembre

 16   2006, à 9 heures 00.

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