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1 Le lundi 21 mai 2007
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, voulez-vous appeler le numéro
6 de l'affaire, s'il vous plaît ?
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
8 tous. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
10 En ce début de semaine, je salue toutes les personnes présentes. Les
11 représentants de l'Accusation, je salue Mmes et
12 MM. les avocats. Je salue MM. les accusés ainsi que toutes les personnes
13 qui se trouvent à l'intérieur ou à l'extérieur de cette salle d'audience et
14 qui nous aident dans nos travaux.
15 Je vais en premier lieu donner la parole à M. le Greffier pour quelques
16 numéros IC.
17 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
18 Plusieurs parties ont déposé des listes de documents à verser par
19 l'intermédiaire du témoin BC. Le bureau du Procureur recevra pour sa liste
20 le numéro IC 565, sous pli scellé, s'agissant de 1D, ce sera 566 sous pli
21 scellé. 2D IC 567 sous pli scellé. 3D IC 568 sous pli scellé. 4D IC 569
22 sous plis scellé. 5D 570, IC 570 sous pli scellé. Enfin, 6D ce sera le
23 numéro IC 571 sous pli scellé.
24 Outre cette liste, certaines parties ont déposé des documents à verser par
25 le truchement du témoin, Enes Delalic. Nous avons la liste du bureau du
26 Procureur, ce sera le numéro IC 572, alors que la liste fournie par
27 l'équipe 3D recevra le numéro IC 573. Merci.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
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1 Un petit rappel concernant une question de procédure. La Défense nous a
2 fait -- donné une demande de certification d'appel concernant le Témoin BB.
3 Aujourd'hui même, la Défense a introduit un complément d'argumentaire dans
4 le cadre de cette requête. L'Accusation avait initialement jusqu'au 23 mai
5 pour répondre à la requête initiale. Compte tenu de l'argumentaire
6 supplémentaire, la Chambre repousse en cas de besoin au 30 mai pour
7 l'Accusation les délais, et de ce fait, donc, l'Accusation aura jusqu'au 30
8 mai pour y répondre.
9 Concernant le témoin qui va venir dans quelques instants, l'Accusation aura
10 cinq heures conformément à ses écritures et à sa demande. La Défense aura
11 globalement sept heures qui pourront se répartir comme suit : Défense de M.
12 Prlic, deux heures; défense de
13 M. Petkovic, une heure 30; défense de M. Praljak, une heure 30; défense des
14 trois autres accusés, 40 minutes chacun; ce qui fait donc un total de sept
15 heures. Bien entendu, les accusés entre eux via leur avocat peuvent se
16 répartir le temps. C'est à eux d'en apprécier la nécessité, en tout état de
17 cause, je rappelle : M. Prlic, deux heures; M. Petkovic, une heure 30; M.
18 Praljak, une heure 30;
19 M. Stojic, 40 minutes; M. Coric, 40 minutes; et M. Pusic, 40 minutes. Voilà
20 donc pour ce témoin qui est prévu pour toute la semaine.
21 Comme j'ai le plaisir de voir M. Scott, il n'était pas là la dernière fois.
22 J'avais indiqué à M. Mundis qu'à la suite de la décision rendue par la
23 Chambre d'appel confirmant le temps que la Chambre alloue, il serait
24 souhaitable d'avoir très rapidement maintenant un calendrier prévisionnel
25 pour les témoins qui viendront dans le reliquat de temps qui reste à
26 l'Accusation d'ici la fin de la clôture de la présentation de sa cause,
27 afin de permettre aux uns et aux autres d'avoir le panorama complet des
28 témoins restants à venir.
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1 Donc, je rappelle cela à M. Scott. Je pense que M. Mundis lui a déjà fait
2 part de notre préoccupation, mais c'est une préoccupation importante à
3 laquelle j'y pense toutes les secondes.
4 Voilà, alors, on va introduire le témoin.
5 Je vais demander à Mme l'Huissière d'aller chercher le témoin.
6 Maître Kovacic.
7 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, jeudi, à la fin de
8 l'interrogatoire du Témoin Delalic, si vous en souvenez, mon micro n'a pas
9 fonctionné. Je n'ai pas réussi à demander une cote IC pour la vidéo que
10 nous avons fait voir en prétoire, à l'occasion du contre-interrogatoire du
11 général Praljak. Alors, je l'ai mis sur le IC, mais il n'y a pas de cote.
12 Donc, j'aimerais qu'on obtienne une cote pour qu'on puisse le mettre sur la
13 liste.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai la vidéo ici,
16 ce sera désormais la pièce IC 574.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, IC 574.
18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
19 LE TÉMOIN : PHILIP ROGER WATKINS [Assermenté]
20 [Le témoin répond par l'interprète]
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je veux d'abord vérifier que vous
22 entendez bien dans votre langue la traduction de nos propos. Si c'est le
23 cas, dites que vous me comprenez.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes cité par l'Accusation pour témoigner dans
26 le cadre d'un procès qui est actuellement en cours. Pour ce faire, je vous
27 demande de nous donner votre nom, prénom et date de naissance ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Philip Watkins. Je suis né le 21 avril 1959.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Quelle est votre profession actuelle ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis directeur général d'une entreprise qui
3 s'intéresse à la régénération ou rénovation urbaine.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous Monsieur, déjà témoigné devant un tribunal
5 international sur les faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie ou
6 bien c'est la première fois que vous témoigné ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la troisième fois que je compare en tant
8 que témoin ici, dans ce Tribunal, Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, c'est donc la troisième fois. Pouvez-vous
10 nous indiquer dans quel procès vous avez déjà témoigné ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été cité par l'Accusation dans le procès
12 de Dario Kordic et en tant que témoin de la Défense dans l'affaire
13 concernant Tihomir Blaskic.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vous demande de lire le serment que
15 nous vous présentons.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
17 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pourrez vous asseoir.
19 Bien, alors, avant de donner la parole à l'Accusation, quelques éléments
20 d'explication de ma part. vous savez l'habitude de ce Tribunal puisque
21 c'est la troisième fois que vous venez, qui plus est, vous avez la
22 particularité d'avoir à témoigner soit à la demande l'Accusation soit à la
23 demande de la Défense. De ce fait, vous ne serez certainement pas surpris
24 par les types de questions qui vont vous être posées. Vous aurez à répondre
25 dans un premier temps aux questions qui vont vous être posées par le
26 représentant de l'Accusation, que vous avez dû rencontrer soit ce matin
27 soit hier. A l'issue de cette phase, les avocats de la Défense qui sont
28 situés à votre gauche, voire les accusés eux-mêmes pourront vous poser des
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1 questions dans le cadre du contre-interrogatoire.
2 Les trois Juges qui sont devant vous peuvent, comme le prévoie le
3 Règlement, intervenir à quelque stade que ce soit, mais pour des problèmes
4 liés à la commodité de la présentation par les parties de leur élément,
5 nous préférons maintenant intervenir qu'à la fin de l'interrogatoire ou du
6 contre-interrogatoire mené par les parties. Mais il se peut qu'en raison de
7 certaines particularités, nous intervenions notamment lorsqu'il y a
8 l'examen de certains documents comme cette fois-ci, nous avons beaucoup de
9 documents - et il y en a je crois près de 54 - il se peut, à ce moment-là,
10 que plutôt que d'attendre la fin pour éviter d'avoir à rechercher le
11 document, nous intervenions en cas de nécessité absolue, bien entendu.
12 Essayez d'être très synthétique dans vos réponses car, comme vous le savez,
13 nous sommes dans une procédure orale, qui est corroborée par des documents
14 qui sont admis une fois votre audition terminée. Mais ce qui compte
15 principalement, ça va être les propos que vous allez tenir en répondant aux
16 questions des uns et des autres. Si vous ne comprenez pas le sens d'une
17 phrase, n'hésitez pas à demander à celui qui vous pose la question de la
18 reformuler.
19 Comme vous le savez déjà dans ce Tribunal, nous faisons des pauses
20 pour des raisons techniques toutes les heures et demie et les pauses sont
21 d'une durée d'environ 20 minutes. Voilà de manière très générale la façon
22 dont va se dérouler cette audience.
23 Si, a un moment donné, vous éprouvez un malaise quelconque ou vous
24 avez besoin qu'on s'arrête, n'hésitez pas à intervenir immédiatement, et à
25 ce moment-là, je provoquerai une interruption de l'audience afin de vous
26 permettre, le cas échéant, de vous reposer en cas de nécessité.
27 Je vais maintenant donner la parole à l'Accusation et M. le Greffier
28 commence à faire le décompte du temps.
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1 Maître Karnavas.
2 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Conformément
3 aux suggestions que nous avons déjà soulevées par le passé, nous voyons que
4 le témoin avait des notes personnelles qu'il a utilisées pour élaborer
5 cette déclaration fournie au bureau du Procureur, en tout cas, la dernière
6 en date. Il a également indiqué qu'il s'était servi de rapports
7 confidentiels de la MOCE. Je sais qu'il ne veut pas fournir ses notes
8 personnelles. J'aimerais tout d'abord savoir s'il a changé d'avis depuis,
9 depuis qu'il a fait cette déclaration préalable; et si c'est le cas, est-ce
10 que nous pourrions les avoir ? S'il n'est pas prêt à les fournir, est-ce
11 qu'il les a revues avant de venir ici ? J'aimerais aussi savoir s'il y a
12 des documents qu'il a examinés, des documents confidentiels de la MOCE qui
13 ne sont pas mentionnés dans sa déclaration préalable, mais qu'il fut le
14 seul à pouvoir consulter, et que les parties, ni la Défense, ni
15 l'Accusation, n'auraient pu consulter ? Voilà des questions que je veux que
16 vous lui posiez, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Témoin, depuis plusieurs
18 semaines, la Défense a systématiquement, lorsqu'il y a un témoin qui vient,
19 demande communication des notes ou documents qui auraient servis à
20 l'élaboration de la déclaration écrite.
21 Alors, avant de répondre à la demande, j'aimerais vous demander,
22 comme vous avez déjà témoigné à deux reprises dans l'affaire Kordic et dans
23 l'affaire Blaskic, est-ce que, dans ces deux cas, la Défense ou
24 l'Accusation vous avait, à l'époque, demandé communication de vos notes
25 personnelles ou des documents que vous auriez pu consulter avant de rédiger
26 votre déclaration écrite ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Les deux fois
28 précédentes, on m'a demandé de communiquer des notes que j'avais prises à
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1 l'époque, alors que j'étais en Bosnie, et à chaque fois j'ai refusé de les
2 fournir. En premier lieu, parce qu'il y a à la fois des réflexions, des
3 commentaires suite à des réunions avec certaines perspectives, mais il y a
4 aussi des informations personnelles, par exemple, les numéros de téléphone
5 des membres de ma famille, ce genre de chose qui fait que je n'ai pas
6 communiqué ces notes.
7 Pour répondre à la question posée, oui, j'ai consulté ces notes avant de
8 venir déposer ici aujourd'hui dans ce prétoire, mais je n'ai pas examiné
9 d'autres documents de la MOCE, à l'exception de ceux qui m'ont été fournis
10 pendant le récolement par l'Accusation.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Deuxième question de ma part : à l'époque vous
12 étiez membre de cette Mission de l'Union européenne; est-ce qu'à l'époque,
13 dans le cadre de la mission, on vous avait donné des instructions précises
14 concernant les documents de la Mission de l'Union européenne, ou bien, rien
15 n'avait été dit ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, rien n'a été dit à propos de documents de
17 la MOCE. On nous demandait de rédiger des rapports quotidiens ce que nous
18 avons fait et rapports que nous avons envoyés, mais il n'y avait pas
19 d'autres instructions que celles-là.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, vous avez entendu tout à l'heure
21 l'avocat, qui s'appelle Me Karnavas, que vous connaissez peut-être, qui
22 demande officiellement communication des documents que vous auriez pu
23 consulter. Alors, quelle est votre position aujourd'hui par rapport à cette
24 demande ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne voudrais pas
26 fournir mes carnets de notes. Je ne voudrais pas qu'ils tombent dans le
27 domaine public.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : -- position de l'Accusation ?
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1 M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Même position
2 que celle déjà annoncée à savoir que le témoin ne veut pas fournir ses
3 notes et ceci est conforme, effectivement, à ce que fait d'autres Chambres.
4 M. MURPHY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les
5 Juges. Il y a peut-être une solution simple, si vous me permettez de faire
6 cette proposition. Elle serait de demander à ce que ces notes fournies à
7 titre confidentiel et que si on y fait référence pendant la déposition du
8 témoin, ce ne soit fait qu'à huis clos. Manifestement, s'il arrivait qu'on
9 fasse référence à ces notes dans le jugement de la Chambre ou à d'autres
10 fins, ça peut faire sous pli scellé aussi. Ceci pourrait évacuer les
11 inquiétudes de M. Watkins s'agissant des éléments personnels tout en
12 permettant à la Défense d'avoir des éléments qui risquent d'être importants
13 et qui peuvent être importants pour le contre-interrogatoire. Vous avez un
14 pouvoir discrétionnaire que vous pouvez utiliser et je pense que c'est une
15 solution préférable à celle qui serait d'empêcher à la Défense de pouvoir
16 utiliser les documents, en puissance potentielle, importants.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez entendu
18 l'argumentation de Me Murphy qui serait que vous communiquiez ce type de
19 documents à titre purement confidentiel en audience à huis clos, ce qui
20 fait que le public n'aurait pas connaissance du contenu, et que dans le
21 jugement les Juges, à ce moment-là, ne fasse qu'une référence à ce qui
22 relève du domaine public et non du domaine privé. Alors, qu'est-ce que vous
23 en pensez ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je préférerais garder l'avis que j'avais; je
25 ne voudrais pas remettre ces carnets. Peut-être qu'ils pourraient être très
26 utiles aux parties, mais vous serez déçu, en fait, ce ne sont que des notes
27 prises à la hâte, des noms, quelques réflexions, quelques pensées qui me
28 sont personnelles et je préférerais les garder.
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1 [La Chambre de première instance se concerte]
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, la Chambre, qui a déjà délibéré sur
3 cette question, estime que ces documents relèvent de la propriété privée du
4 témoin et qu'à ce titre, si le témoin ne veut pas les communiquer, il ne
5 les communiquera, d'autant plus que le témoin dans le cas d'espèce vient
6 d'indiquer que le contenu ne lui est que personnel et de son point de vue,
7 il n'y aurait aucun élément susceptible d'être intéressant, mais ça,
8 évidemment, les Juges pourront en cours -- au cours des questions en
9 apprécier la pertinence.
10 En revanche, j'ai un autre point qui est un peu nébuleux. Monsieur Scott,
11 en regardant la liste, je me rencontre que tous les documents de la Mission
12 européenne sont dans la colonne, Règle 70 marqué, "yes," et dans la colonne
13 sous pli scellé marqué, "yes." Alors, est-ce à dire, à ce moment-là,
14 l'Union européenne a fait savoir au Procureur qu'elle ne voulait pas que
15 ces documents tombent dans le domaine public.
16 M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je l'ai expliqué
17 à certains membres de votre personnel la semaine dernière. Je pense que
18 cette position est en droit de fil de ce que d'autres pourvoyeurs ont fait,
19 par exemple, le gouvernement espagnol, les Etats-Unis s'agissant de notes
20 fournies par ces personnes. On peut mentionner le document en question dans
21 le prétoire. On peut poser des questions à ce propos au témoin, mais ceci
22 ne peut pas être diffusé à l'extérieur du prétoire et ceci restera sous pli
23 scellé dans le dossier, ce qui veut dire qu'aucun membre du public ne
24 pourra voir diffuser ni consulter les documents, ceux-ci ne pouvant être
25 utilisés que dans le prétoire.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais ça veut dire que les questions pourront
27 être posées de manière publique et que le document ne sera sous l'ELMO,
28 mais questions publiques, réponses publiques; c'est bien cela ?
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1 M. SCOTT : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.
3 Bien. Je vais donc donner la parole à M. Kruger que je salue.
4 M. KRUGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
5 Messieurs les Juges. Bonjour à tous et à toutes dans ce prétoire.
6 Interrogatoire principal par M. Kruger :
7 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
8 M. KRUGER : [interprétation] Monsieur le Président, d'amblée, j'aimerais
9 signaler ceci. Il y a déjà eu des témoins qui sont venus parler de la
10 structure de la MOCE ainsi que des méthodes de compte rendu, de la
11 structure adoptée par le document. Je n'aborderais pas ces détails avec ce
12 témoin, à moins que ceci n'ait une importance directe pour son témoignage.
13 Q. Monsieur, pouvons-nous commencer par quelques éléments de votre vie
14 personnelle. Quel est votre parcours ? Que faisiez-vous avant de venir
15 observateur de la MOCE ?
16 R. J'ai étudié l'économie et la politique et j'ai obtenu un diplôme :
17 "Bachelor of Honours," et puis, j'ai fait une maîtrise en science à l'Ecole
18 de Londres d'économie. J'ai travaillé dans la ferme familiale avant de
19 rejoindre l'armée britannique, j'ai été formé à Sandhurst, et puis, j'ai
20 travaillé dans l'artillerie royale ainsi que dans la cavalerie où
21 l'artillerie à cheval royale. J'ai quitté les forces -- l'armée et j'ai été
22 recruté par le ministère des Affaires étrangères, en fait, le "Commonweath
23 Office," pour être observateur détaché en tant qu'observateur de la Mission
24 de la MOCE. J'ai été en Bosnie et en Croatie entre 1993 et 1995, et puis
25 j'ai reçu le -- j'ai rejoint le personnel de M. Yasushi Akashi qui était le
26 secrétaire général des Nations Unies, et j'ai travaillé quatre mois pour
27 lui à Zagreb en 1995. J'ai quitté ce poste et j'ai créé une entreprise avec
28 quelques collègues, entreprise qui asseyait d'œuvrer à la reconstruction de
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1 la Bosnie suite à l'accord de paix. Cette entreprise a existé trois ans,
2 après quoi j'ai été contacté par ce "Foreign Commonweath Office," qui m'a
3 demandé si j'étais prêt à rejoindre une nouvelle Mission de Vérification
4 qui s'est créée au Kosovo. C'est ce que j'ai fait avant l'intervention de
5 l'OTAN au Kosovo et après cette intervention de l'OTAN au Kosovo, je suis
6 resté dans cette organisation qui s'appelle l'OSCE, l'Organisation pour la
7 sécurité de la coopération en Europe, et je me suis spécialisé dans la
8 question des élections, et j'ai participé au processus des élections
9 municipales et autres au Kosovo. Puis, je suis rentré au Royaume Uni et
10 depuis cinq ans, j'essaie d'attirer, de nouveau, investissement dans des
11 régions qui ont été un peu sinistrées notamment dans les villes
12 britanniques là où il y a beaucoup de problèmes.
13 Q. Vous avez passé combien de temps dans l'armée britannique ?
14 R. Huit ans.
15 Q. Sur ces huit ans -- pendant combien d'années avez-vous été officier en
16 artillerie ?
17 R. J'ai passé un an de formation à Sandhurst et puis, j'ai été à l'Ecole
18 royale d'artillerie, j'ai fait une spécialité là aussi. Pendant les sept
19 ans qui restaient, j'ai travaillé dans l'artillerie de Défense aérienne,
20 pour les missiles air -- sol air -- et aussi j'ai été un observateur en
21 poste avancé avec l'artillerie traditionnelle pendant trois ans.
22 Q. Parlons de vos activités en Bosnie. Vous dites que vous y avez été
23 observateur de 1993 à 1995. Pourriez-vous nous préciser dans quelle zone
24 vous vous êtes trouvé à tel ou tel moment ?
25 R. J'ai d'abord travaillé à la Mission de la MOCE fin janvier 1993, une
26 brève séance de formation à Zagreb après quoi j'ai été envoyé en Bosnie où
27 j'ai été membre d'une équipe à Tomislavgrad, mais j'ai passé le plus clair
28 de mon temps à Gornji Vakuf. En juin 1993, j'ai été nommé chef du centre de
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1 Coordination, chargé de plusieurs équipes cantonnées à Travnik, couvrant
2 toute une région qui se trouvait en Bosnie centrale, et ensuite, en octobre
3 1993, j'ai été muté à Mostar. J'ai occupé le poste de chef du centre de
4 Coordination de Mostar, et je suis resté jusqu'en -- je crois que c'était
5 au début du mois de janvier 1994. Ensuite, mon gouvernement m'a demandé de
6 revenir au Royaume Uni où je suis retourné pendant trois mois, et par la
7 suite, j'ai regagné la Mission de la MOCE, où je suis resté pendant deux
8 mois, peut-être trois, et donc, j'ai été -- j'ai eu ma mission en Croatie
9 en tant que chef du centre de Coordination de Topusko, où j'ai travaillé
10 dans la région de Krajina. Par la suite j'ai été nommé chef du centre
11 régional de Zenica, qui plus tard a changé de nom pendant le temps que je
12 m'y trouvais au centre régional de l'ABiH, et j'ai été responsable de
13 toutes les équipes de la MOCE en Bosnie-Herzégovine.
14 Q. Je vous remercie. Pour être tout à fait clair, lorsque vous parlez du
15 centre de Coordination, par exemple -- centre de Coordination de Travnik,
16 est-ce que c'est ce que vous appelez CC Travnik ? Est-ce que c'est
17 l'abréviation qui correspond ?
18 R. Oui. CC Travnik ou CC Mostar.
19 Q. Je vous remercie. Maintenant, en examinant les divers emplois que vous
20 avez occupés et les divers niveaux en tant que membre de la MOCE rattachés
21 au CC de Gornji Vakuf, à quel niveau se trouvaient vos contacts ?
22 R. Principalement, au niveau de brigade, très rapidement, j'ai commencé à
23 travailler avec des personnes qui avaient plus une responsabilité -- de
24 responsables supérieurs. Donc, par exemple, à Gornji Vakuf, quatre semaines
25 après mon arrivée, j'avais des contacts avec le commandant de la zone
26 opérationnelle -- de cette zone opérationnelle-là, le colonel Siljeg, et
27 les forces de l'armija de l'ABiH, le commandant du 4e Corps, le général
28 Arif Pasalic, ainsi que les membres du 3e Corps, donc, les représentants
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1 seniors du 3e Corps.
2 Q. Je vous remercie. Maintenant, lorsque vous êtes devenu chef de
3 coordination -- du centre de Coordination, quel était votre domaine
4 d'intérêt principal ?
5 R. Bien, géographiquement parlant, la zone était beaucoup plus large. En
6 tant que membre de mon équipe, j'étais à "Tomislavgrad," mais j'ai passé la
7 plupart du temps à Gornji Vakuf. J'avais donc des responsabilités de
8 couvrir toute la région allant de Bugojno jusqu'à Prozor et à Jablanica, et
9 en tant que chef du centre de Coordination de Travnik, j'ai été responsable
10 d'une zone qui comprenait également la vallée de la Lasva, la vallée de
11 Vrbas, Zenica, et jusqu'au nord-est de Zepce, Vares et Zavidovici. Mes
12 responsabilités se terminaient là, où le chef du CC Tuzla commençait. Donc,
13 c'est là -- donc, enfin, j'allais jusqu'au corridor de la Posavina.
14 Q. En 1993 -- pendant les années 1993, 1994, en tant que membre de la
15 MOCE, est-ce que vous aviez -- vous concentriez surtout sur les groupes
16 ethniques ?
17 R. En fait, j'avais très peu de contacts avec les Serbes de Bosnie. Même
18 si j'ai participé peut-être à une ou deux réunions avec les Serbes de
19 Bosnie, mais j'étais principalement -- j'avais des contacts principalement
20 avec les Croates de Bosnie et les Musulmans de Bosnie.
21 Q. Lorsque vous êtes devenu chef du CC Mostar, du centre de Coordination
22 de Mostar, est-ce que vous pourriez nous dire brièvement où était vos
23 contacts principalement, où se trouvaient-ils, à quel niveau ?
24 R. A cette époque-là, puisque je me trouvais dans un pays où j'avais -- je
25 m'y trouvais depuis neuf mois, j'avais acquis beaucoup d'expérience et
26 j'avais principalement des contacts avec les dirigeants supérieurs, des
27 Croates de Bosnie, et cela comprend également quelques-uns des accusés qui
28 sont présents ici aujourd'hui. M. Prlic était un interlocuteur, était une
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1 personne à qui je m'adressais assez souvent ainsi que plusieurs autres
2 personnes ici présentes.
3 Q. Très bien, Monsieur.
4 Je souhaiterais maintenant attirer votre attention sur le document 416.
5 C'est donc bien le document 04106, ou la pièce 4106. Ce document semble
6 être un rapport de résumé du 10 août 1993, rapport émanant de l'équipe V2,
7 qu'au centre de Coordination Travnik envoyé à Zenica.
8 Ma première question est la suivante, Monsieur : est-ce que vous
9 reconnaissez ce rapport premièrement ?
10 R. Permettez-moi de préciser. Alors, mon rapport à moi, la date sur mon
11 rapport est la date du 11 août 1994.
12 Q. Excusez-moi, je me suis trompé.
13 R. C'est un rapport qui aurait été envoyé depuis le quartier général du
14 centre de Coordination Travnik au centre régional de Zenica et il s'agit
15 d'un rapport que j'ai rédigé moi-même.
16 Q. Monsieur, pourriez-vous, je vous prie, prendre la deuxième page de ce
17 rapport et dites-nous, en examinant le paragraphe 8, là où on voit
18 évaluation vers la fin, si donc dans cette évaluation nous pouvons voir que
19 le champ de concentration principal du CC de Travnik était le travail du
20 département humanitaire -- travail humanitaire et plus tard, on peut voir
21 que qu'il est ironique, que l'accès à la Communauté croate n'est pas
22 obstruée alors que l'accès à la communauté musulmane de Prozor demeure
23 difficile.
24 Alors, Monsieur, dites-nous pendant que vous étiez moniteur de la MOCE au
25 cours -- des années 1993, 1994, est-ce que vous aviez eu des problèmes à
26 accéder à la zone que vous étiez censée couvrir ?
27 R. Oui, nous avions plusieurs problèmes à avoir un accès. Il nous arrivait
28 de ne pas pouvoir accéder aux communautés musulmanes isolées ainsi que
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1 certaines communautés isolées croates. C'était un facteur qui était
2 permanent dans le cadre de nos opérations. Il nous a fallu toujours nous
3 adressé au niveau supérieur pour pouvoir obtenir accès à ces régions.
4 Q. Cette question d'accès, est-ce qu'elle ne s'est jamais
5 résolue ?
6 R. Non. Très souvent il n'y avait que des accords temporaires et on
7 pouvait peut-être simplement résoudre la question immédiate de problèmes
8 immédiats qui se posaient, mais cela n'a jamais été résolu de façon
9 permanente.
10 Q. Très bien. Merci. Monsieur, brièvement nous aborderons maintenant la
11 période pendant laquelle vous étiez au sein de l'équipe du centre de
12 Coordination de Gornji Vakuf. Quelle était votre mission principale, alors
13 que vous étiez à Gornji Vakuf en tant que membre de la MOCE ?
14 R. Une Commission conjointe avait été établies avant mon arrivée. C'était
15 une commission qui avait été créée avec des représentants du HVO et de
16 l'ABiH. L'idée derrière la création de cette commission était d'essayer de
17 présenter un certain sentiment de confiance puisqu'il y avait eu des
18 problèmes en janvier. D'abord, il fallait -- on parlait de la séparation
19 des forces, l'enlèvement, des tranchées, l'accord -- de rétablir les
20 accords aux endroits où on pouvait ériger des étendards et où l'on devait
21 les enlever, donc, ce dont on se mettait d'accord autour de ces tables en
22 fait c'est ce qui arrivait sur le terrain.
23 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire : s'agissant de cette Commission
24 conjointe, est-ce que vous savez si les Croates de Bosnie et le HVO avaient
25 été impliqués dans la création ?
26 R. Oui, c'était à un niveau très supérieur initialement. Tout ceci avait
27 été établi à un niveau qui impliquait le général Petkovic pendant que je
28 m'y trouvais et quand j'étais sur place et j'avais des contacts avec le
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1 général Siljeg ainsi qu'Arif Pasalic, comme je l'ai dit un peu plus tôt,
2 donc, les militaires sur place et le commandant du corps ainsi que les
3 brigades qui étaient placées sous leurs ordres étaient donc impliquées.
4 Q. Du côté de la MOCE, qui présidait cette réunion ?
5 R. Lorsque je suis arrivé, cette réunion était présidée par un moniteur
6 irlandais qui s'appelait Ray Lane. Lorsqu'il est parti - je ne me souviens
7 plus de la date exacte - mais je crois que c'était assez au début de
8 l'année en février et il a été remplacé par un moniteur suédois qui
9 s'appelait Christopher Beese. Puisque -- et qu'à chaque fois que ces deux
10 personnes n'étaient pas là, c'était le -- l'équipe même qui choisissait
11 quelqu'un au sein de l'équipe pour présider ces réunions, et j'avais été
12 choisi à plusieurs reprises.
13 Q. Merci. Maintenant, vous avez parlé de Christopher Beese, de M. Ray
14 Lane. Lorsque vous êtes arrivé en Bosnie, de quelle façon est-ce que vous
15 avez pu acquérir suffisamment de connaissances pour pouvoir vous permettre
16 de comprendre ce qui se passait, de comprendre la situation ?
17 R. Nous avions eu une séance de formation à Zagreb lorsque je suis arrivé,
18 mais c'était assez général. Ensuite, lorsque je suis arrivé en Bosnie, je
19 me suis entretenu avec des moniteurs qui avaient déjà été là qui avaient
20 déjà passé plusieurs mois à cet endroit-là. Mais il y avait également le
21 chef de l'équipe qui avait beaucoup plus d'expérience, et donc, il fallait
22 obtenir des contacts directs avec les personnes. Donc, il fallait également
23 -- c'est-à-dire que nous avions fait quelques rapports qui avaient été
24 rédigés préalablement, mais l'expérience qui nous permettait de fonctionner
25 c'est l'expérience qui nous pouvions acquérir, de façon rapide, pendant que
26 nous nous trouvions sur place.
27 Q. Très bien. Passons maintenant à la pièce 5502, donc, je répète, il
28 s'agit de la pièce 5502. Il s'agit d'un rapport de la MOCE, daté du 30
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1 septembre 1983, émis par l'équipe V2 de Gornji Vakuf envoyé à CC Travnik au
2 centre de Coordination de Travnik.
3 D'abord, dites-nous, Monsieur : est-ce que vous avez connaissance de ce
4 document ? Est-ce que vous pourriez nous dire d'où provient ce document ?
5 R. Oui, c'est un rapport qui a été rédigé au niveau de l'équipe et envoyé
6 au centre de coordination et on parle ici du contexte de la municipalité de
7 Gornji Vakuf. La raison pour la rédaction de ce rapport est la suivante :
8 il y a eu un changement assez rapide de moniteurs. Il y avait des personnes
9 qui étaient là pendant six semaines et que les autres partaient, certaines
10 personnes restaient avaient des missions de trois mois, d'autres personnes
11 un an, mais c'était assez rare. Donc, nous avions estimé qu'il fallait
12 pouvoir mieux informer les personnes, donc, nous avons demandé à l'équipe
13 de rédiger des rapports de contexte -- des rapports d'information
14 permettant aux personnes qui venaient d'arriver de comprendre la situation.
15 Ce rapport fait partie de ce genre de rapport, c'est un de ces rapports.
16 Q. Permettez-moi d'attirer votre attention au paragraphe deux intitulé :
17 "L'historique de la région." Ce paragraphe évoque les événements du Gornji
18 Vakuf -- enfin, c'est un résumé des événements à Gornji Vakuf -- survenus à
19 Gornji Vakuf. En partant par le -- de 1993, on peut dire que Gornji Vakuf
20 était le point principal sur lequel devait se concentrer les policiers du
21 HVO dans la région et les ordres venaient du QG de Mostar. Le paragraphe 8,
22 du 8 janvier 1993, parle en fait d'un raid qui a eu lieu dans la ville :
23 "Que l'étendard avait été soulevé dans une ville qui était située, enfin
24 dans la ville de Gornji Vakuf." Est-ce que vous vous rappelez de
25 ceci ?
26 R. Oui.
27 Q. De quoi s'agit-il ?
28 R. C'est un résumé assez bref destiné à une personne nouvellement arrivée
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1 pour lui expliquer ce qui se passait à Gornji Vakuf. Lorsque ce rapport
2 avait été écrit en date du 30 septembre 1993, les événements, en fait --
3 les événements étaient déjà ailleurs, mais en date du 30 janvier, les
4 événements de Gornji Vakuf c'étaient cela. Donc, c'était une introduction
5 qui était assez utile mais pas particulièrement complète et importante.
6 Q. Un peu plus bas nous pouvons lire une Commission conjointe avait été
7 établie pour traiter des questions d'expert ou des offenses militaires
8 avaient été impliquées. La création de cette Commission conjointe, est-ce
9 que vous avez été impliqué dans cette commission vous-même ?
10 R. Oui.
11 Q. Cette Commission conjointe, est-ce qu'elle a fonctionné jusque en fait
12 tout au long de l'année 1993 au cours de cette année ?
13 R. Oui, je crois, mais je crois qu'elle a eu le plus d'influence peut-être
14 en février et mars 1993, car en avril, la situation militaire était bien
15 différente, même en fait, dans la région, plus particulièrement en Bosnie
16 centrale. Donc, même si la mission principale de la MOCE était de maintenir
17 les discussions, de garder l'ouverture des discussions entre les Bosniens,
18 enfin, les Croates et les Musulmans de Bosnie, la Commission conjointe, en
19 fait, en tant que tel était évaporée -- la notion de cette Commission
20 conjointe était évaporée après le mois d'avril.
21 Q. Au début de ce dernier paragraphe, je viens de lire -- enfin, je vais
22 vous donner lecture : "Depuis le mois de juin 1993, la situation à Gornji
23 Vakuf a été réduite à un endroit où la guerre était ouverte." Est-ce que
24 vous êtes d'accord avec ceci ?
25 R. Je suis peut-être pas d'accord avec le terme une guerre ouverte
26 existait. Gornji Vakuf était une ville importante. Elle se trouvait sur
27 une ligne de front. Elle était donc importante stratégiquement car elle
28 avait le contrôle sur les routes et d'accès qui permettait de se déplacer à
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1 l'intérieur, en Bosnie. Donc, ce n'était pas une ligne de front intense,
2 mais il y avait, effectivement, des activités militaires à cet endroit-là.
3 Q. Monsieur, en juin 1993 vous dites que vous êtes -- vous avez été muté.
4 Vous étiez maintenant au CC de Travnik. Qui était le chef du centre de
5 Coordination de Travnik lorsque vous y êtes allé ?
6 R. C'était un moniteur suédois, mais je ne sais pas pourquoi je n'arrive
7 plus à me rappeler de son nom. C'était un pilote chasse suédois.
8 Q. Est-ce que vous l'avez remplacé après un temps assez
9 court ?
10 R. Oui, oui, il était peut-être -- il y était une semaine ou deux,
11 ensuite, il est parti.
12 Q. Le quartier général du centre de Coordination de Travnik était
13 situé où ? Est-ce que c'était dans la ville de Travnik même ?
14 R. Oui. En fait, nous avons créé -- nous avions établi ce quartier général
15 dans un hôtel à Travnik.
16 Q. Est-ce que ce quartier général restait à cet endroit-là ?
17 R. Non. Peu de temps après s'être installé dans cet hôtel, les combats
18 entre les Croates et Musulmans se sont intensifiés au mois d'avril et nous
19 avions été évacués car il y avait trop d'opérations de combat dans cette
20 ville. Donc, nous avions toujours -- nous appelions toujours le centre de
21 Coordination de Travnik. Je ne me rappelle pas de la date exacte à laquelle
22 nous avions été évacués, mais vers la fin du mois d'avril, nous avions été
23 maintenant installés à Zenica, et nous couvrions la même région
24 territoriale mais nous n'étions plus physiquement à Travnik.
25 Q. Le centre de Coordination, est-il exact de dire que si -- est également
26 quelque chose qui tombait sur le centre régional de Zenica ou le RC de
27 Zenica, en fait. Elle était placée donc sous les ordres de RC Zenica ?
28 R. Oui.
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1 Q. Au mois de juin, qu'est-ce que vous pourriez dire concernant le centre
2 régional de Zenica ? Combien y avait-il de centres qui lui appartenaient ?
3 R. Le centre régional de Zenica avait été formé au début du mois de
4 janvier, c'est arrivé à la suite d'une scission en Croatie. En fait, ce
5 centre a été organisé pour servir de mécanisme permettant de mettre en
6 œuvre le plan Vance-Owen qui était le plan international de réconciliation
7 principal. D'ailleurs, nous étions sur le terrain pour essayer justement de
8 mettre en place, de mettre en œuvre et d'essayer de construire tout ceci,
9 d'essayer de faire en sorte que cela fonctionne. Il y avait des équipes qui
10 essayaient des liens entre les communautés politiques pour essayer
11 d'envoyer de l'information jusqu'à Vance -- Cyrus Vance et Lord Owen pour
12 leur expliquer quels étaient les sentiments sur le terrain, quelle était
13 vraiment l'intention des gens.
14 Q. Est-ce que cette organisation a changé, en fait ? Est-ce que cela a
15 changé géographiquement quelque chose, la mise en œuvre du plan Vance-Owen
16 et RC Zenica ?
17 R. En fait, géographiquement, cela a changé quelque peu parce que je
18 travaillais à Gornji Vakuf, je devais rendre compte à Mostar. En fait,
19 c'était CC Grude, qui était devenu par la suite CC Mostar, et par la suite,
20 qui a été reconfiguré. Mais le plan Vance-Owen - nous avions compris qu'au
21 début de l'été 1993 - n'en avait pas trop bien marché, c'est-à-dire que
22 nous et nos équipes travaillions dans le territoire, mais il y avait
23 plusieurs autres choses que nous devions faire. Il fallait se rendre
24 visiter les communautés isolées. Il fallait essayer de suivre l'échange des
25 prisonniers. Il y avait d'autres organisations humanitaires. Donc, nous
26 devions observer tout ceci.
27 Q. Très bien. En octobre, vous êtes devenu chef chargé du centre de
28 coordination de Mostar, qui était votre prédécesseur en tant que chef de CC
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1 Mostar ?
2 R. C'était Martin Garrod, moniteur britannique.
3 Q. Lorsque vous êtes arrivé, est-ce que vous avez immédiatement occupé de
4 lui dire quelque chose ?
5 R. Oui, en fait, il avait été le responsable principal du
6 CC Mostar, mais il a été remplacé par un moniteur espagnol qui s'appelait
7 Jesus Amatriain, et Sir Martin Garrod était devenu le chef du centre
8 régional. Il m'avait demandé de me rendre à Mostar, et ensuite, je lui
9 rendais compte en tant que chef du centre régional. Moi, j'ai repris mes
10 fonctions, j'ai remplacé Jesus Amatriain.
11 Q. Est-ce qu'il y avait un période de chevauchement entre vous-même et
12 Jesus Amatriain ?
13 R. Oui, pendant une courte période. Je ne me souviens plus exactement,
14 mais c'était environ une semaine.
15 Q. Sir Martin Garrod était remplacé -- remplaçait qui en tant que chef du
16 centre régional de Zenica ?
17 R. Jean-Pierre Thébault, c'était un moniteur français.
18 Q. Bien. Lorsque vous êtes arrivé à Mostar, quel était le niveau de vos
19 contacts ? Quel niveau aviez-vous -- établissiez-vous vos contacts ? En
20 fait, je vais poser cette question -- excusez-moi, mais je vais vous poser
21 cette question, toutefois : de quelle façon est-ce que vous pourrez décrire
22 les gens avec lesquels vous aviez des contacts lorsque vous êtes devenu
23 chef du CC Mostar ?
24 R. Le but principal était de pouvoir obtenir le plus d'accès que possible,
25 donc, je devais rencontrer des représentants, des hauts dirigeants
26 politiques et militaires.
27 Q. Bien. Nous allons maintenant passer au détail. Pouvez-vous expliquer
28 aux Juges de la Chambre ce que les préoccupations principales étaient en
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1 octobre, novembre et décembre 1993 à Mostar lorsque vous vous y trouviez ?
2 R. Du côté humanitaire à Mostar, il y avait des discussions et des
3 activités organisées autour de l'évacuation des hôpitaux, des échanges de
4 prisonniers et la mise en œuvre du -- l'établissement d'une liberté de
5 mouvement pour l'aide humanitaire. Du côté politique, c'était le
6 développement d'une Communauté croates d'Herceg-Bosna, d'une République
7 d'Herceg-Bosna, et un peu plus tôt, en fait, le mot était -- les mots ont
8 changé quelque peu. En fait, on avait appelé d'abord la Communauté croate
9 d'Herceg-Bosna, et par la suite, c'était devenu la République croate. Donc,
10 nous devions surveiller tout cela et assurer plutôt pour que cela se passe
11 bien, donc, c'était notre point de concentration.
12 Q. Est-ce qu'il y avait -- vous avez parlé d'échange; est-ce qu'il y avait
13 quelque chose de particulièrement important au cours de cette période ?
14 R. Oui. D'abord, j'ai été particulièrement -- dans un premier incident,
15 j'ai été impliqué dans une tentative d'évacuer les personnes qui se
16 trouvaient dans un hôpital de Mostar Est. Il y avait également -- depuis --
17 en Bosnie centrale, et cela se passait de façon simultanée. Donc, l'idée
18 essentielle était d'organiser, de façon simultanée, les évacuations avec
19 deux hôpitaux. L'hôpital de santé Bosna, où les gens allaient être évacués
20 par hélicoptère, alors que l'hôpital, qui se trouvait en Bosnie centrale,
21 les gens allaient être évacués par voie terrestre. J'ai pris part à
22 l'évacuation de l'hôpital à Mostar Est pour essayer d'organiser le tout,
23 mais cela n'a pas fonctionné. Lorsque les hélicoptères qui sont arrivés de
24 Nova Bila sont atterris, en fait, je ne me souviens plus du nom exact de
25 l'endroit où ils sont atterris, mais c'était, en tout cas, sur le
26 territoire d'Herzégovine. Ces hélicoptères ont été saisis et cela a empêché
27 l'évacuation des personnes de l'hôpital de Mostar Est.
28 Q. Ces hélicoptères avaient été saisis par qui ?
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1 R. On nous a expliqué que ces hélicoptères avaient été confisqués par les
2 familles de la population civile, par des gens. Mais c'était tout à fait
3 clair que s'il y avait eu un désir de permettre à ces hélicoptères de voler
4 de nouveau cela aurait pu être fait. Mais c'était une explication qui était
5 assez -- qui convenait aux personnes qu'ils l'avaient saisis. Une
6 explication facile.
7 Q. Est-ce que vous savez qui a saisi ces hélicoptères ?
8 R. En fait, c'étaient les Croates de Bosnie qui voulaient essayer de faire
9 en sorte que ces hélicoptères se s'envolent plus.
10 Q. Cette question d'hélicoptère va revenir dans un bon nombre de documents
11 que nous allons examiner. Combien de temps vous a-t-il pris pour résoudre
12 cette situation ?
13 R. Je me suis occupé de cette question d'hélicoptère jusqu'à mon départ.
14 C'était au début de février 1994. Je ne crois pas que cette question a été
15 résolue au cours de cette période. Donc, pendant trois ou quatre mois, nous
16 avons essayé de résoudre cette question.
17 Q. Je vois que vous vouliez ajouter quelque chose.
18 R. Oui, il y avait deux questions humanitaires principales. C'était l'une
19 des questions humanitaires principales qui nous préoccupait. La deuxième
20 était la libération des prisonniers de guerre mais l'échange de ces
21 prisonniers de guerre, il y a eu plusieurs tentatives et une annonce avait
22 été faite au début du mois de décembre 1993, faite par Mate Boban, disant
23 qu'il allait libérer les prisonniers. C'était un autre champ de
24 concentration particulièrement préoccupant pour nous.
25 Q. Au cours de votre mission à Mostar, c'était donc pendant que le Stari
26 Most ou le vieux pont a été détruit; est-ce que c'est également une
27 question dont s'est préoccupée la MOCE ?
28 R. Oui, tout à fait. C'était une question qui nous a préoccupés.
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1 Q. Est-ce que vous aviez appris également de l'incident de Stupni Do
2 pendant que vous vous y trouviez ?
3 R. Oui. L'incident de Stupni Do était survenu juste après que j'ai quitté
4 la Bosnie centrale était tombée sous -- dans ma zone de responsabilité,
5 mais ce qui est arrivé à Stupni Do, en fait, cela m'a été expliqué par le
6 moniteur qui -- par deux moniteurs qui se trouvaient sur place déjà.
7 Q. Bien. Donc, nous allons parler d'un certain nombre de questions au
8 cours de cet interrogatoire principal. Donc, nous allons revenir sur un
9 certain nombre de questions. Pour revenir maintenant au contact -- à la
10 question des contacts que vous aviez, je voudrais vous parler des contacts
11 que vous aviez en tant que chef du centre du CC Mostar. Pourriez-vous nous
12 dire d'abord -- ou nous décrire d'abord qui étaient les personnes avec
13 lesquelles vous aviez des contacts ? Qui aviez-vous rencontré ?
14 R. J'ai rencontré un très grand nombre de personnes. Mes contacts
15 principaux au niveau supérieur -- enfin, mon contact -- mon interlocuteur
16 principal c'était Jadranko Prlic. J'ai également rencontré M. Pusic qui
17 était le chef de -- qui s'occupait de tout ce qui a trait aux échanges de
18 prisonniers, et j'avais également rencontré quelques membres de la
19 présidence -- de conseillers qui -- de la présidence qui se trouvait dans
20 le cercle de Mate Boban. J'ai également rencontré Mate Boban lui-même et
21 Vladislav Pogarcic. C'était pour vous donner un exemple, ainsi que certains
22 représentants tel que Ivan Bender de Neum et M. Tokic de Tomislavgrad, et
23 d'autres dirigeants supérieurs -- d'autres personnalités.
24 Q. Bien. Pour maintenant parler de notre accusé -- se concentrer plutôt
25 sur les accusés dans cette affaire, est-ce que vous avez rencontré M. Bruno
26 Stojic ?
27 R. Je ne me souviens pas avoir rencontré M. Bruno Stojic, même si nous
28 rencontrions de façon régulière son adjoint, Slobodan Bozic, mais je n'ai
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1 pas eu de contact direct. Je n'ai pas rencontré M. -- la personne dont vous
2 m'avez parlé tout à l'heure.
3 Q. Le général Praljak ?
4 R. J'ai rencontré le général Praljak à plusieurs reprises, mais lorsque
5 j'étais chef du centre de Coordination de Travnik, je l'avais rencontré à
6 Prozor, et tout près de Prozor sur les lignes de front sur Makljen, j'ai
7 essayé de le rencontrer à Citluk qui était le QG du HVO pour parler d'un
8 certain nombre de questions que nous avons déjà abordées. Mais à ce moment-
9 là, c'était assez incertain pour ce qui nous concerne, à savoir qui était,
10 en fait, le commandant principal des forces du HVO. D'abord, nous n'étions
11 pas tout à fait certain quant au moment exact du départ du général Petkovic
12 lorsque le général Praljak l'a remplacé, ensuite, il y avait également Ante
13 Roso, mais j'ai rencontré toutes ces personnes qui étaient dans ma zone
14 opérationnelle. Il y avait également le colonel Lasic et le général Tole
15 également, une personne que j'ai rencontrée.
16 Q. Valentin Coric, est-ce que vous l'avez rencontré ?
17 R. Ce nom me dit -- c'est un nom que je connais bien dès le début. C'est
18 un nom que Ray Lane m'avait mentionné. Il était chef de la police
19 militaire. Il est possible que je l'ai rencontré, mais, là encore, je ne me
20 rappelle pas l'avoir rencontré, même si c'est assez surprenant
21 rétrospectivement.
22 Q. M. Jadranko Prlic quand l'avez-vous rencontré pour la première fois ?
23 R. Je crois que je l'ai rencontré dans les toutes premières semaines quand
24 je suis allé à Mostar parce que mon équipe avait des contacts avec Mostar
25 et Ray Lane. Il faut savoir que la situation était extrêmement complexe au
26 départ. Il y avait beaucoup de nouveaux noms auxquels j'étais confronté. Il
27 m'a fallu de nombreux mois, de nombreuses semaines pour comprendre qui
28 était qui. Je crois que je l'ai rencontré là, mais en tout cas, quand je
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1 l'ai rencontré indéniablement sans aucun doute et quand j'ai commencé avoir
2 d'excellentes relations avec lui, c'est quand je suis devenu chef de CC
3 Mostar.
4 Q. Pour que les choses soient bien claires, vous dites que vous l'avez
5 rencontré pour la première fois dans les premières semaines, est-ce que
6 vous parlez des premières semaines de votre séjour en Bosnie en tant
7 qu'observateur de la MOCE ?
8 R. Oui, c'était en février ou au début mars 1993.
9 Q. Pouvez-vous dire à la Chambre ce que vous saviez de sa position à
10 l'époque ?
11 R. On m'avait dit qu'il était premier ministre de la Communauté croate
12 d'Herceg-Bosna.
13 Q. A partir d'octobre quand vous devenez chef de CC Mostar, où
14 rencontriez-vous généralement Jadranko Prlic ?
15 R. Je le rencontrais dans son bureau à Mostar Ouest, mais ce n'est pas la
16 première seule fois que je l'ai rencontré. Je l'ai rencontré lors de
17 réception, par exemple, organisée pour Noël avec des dirigeants importants,
18 et j'ai été également reçu par M. Prlic lorsque je suis venu avec
19 l'ambassadeur, le chef de la mission, de la totalité de la Mission de la
20 MOCE de Zagreb. Il m'a accueilli, et généralement, il m'accueillait dans
21 son bureau. Je l'ai également rencontré lorsqu'il m'a invité à participer à
22 la première réunion du gouvernement de la République d'Herceg-Bosna.
23 J'avais de bonnes relations avec M. Prlic. C'était quelqu'un avec qui je
24 m'entretenais facilement. Il était toujours très ouvert et il souhaitait
25 ardemment que la Communauté européenne entende la voix de la Croatie --
26 enfin, des Croates de Bosnie, si bien qu'il m'a invité à cette séance en
27 décembre 1993, à la fin de décembre. Je l'ai rencontré donc à plusieurs
28 endroits, mais essentiellement dans son bureau.
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1 Q. Avant que nous n'examinions un autre document, une autre petite
2 question. Vous dites que vous l'avez rencontré dans son bureau à Mostar.
3 Pourriez-vous donner aux Juges de la Chambre une idée de -- sur la question
4 suivante : est-ce que selon vous le ministère de la Défense se trouvait
5 dans le même bâtiment ?
6 R. Je crois que le ministère de la Défense se trouvait ailleurs, mais je
7 ne peux pas l'affirmer avec certitude. J'ai rencontré d'autres dirigeants
8 politiques dans le même bâtiment que
9 M. Prlic, mais je crois que lorsque j'ai rencontré Slobodan Bozic et que je
10 suis allé voir M. Stojic, c'était dans un autre bâtiment.
11 Q. J'aimerais maintenant, Monsieur, que nous examinions ensemble le
12 document 6084, document 6084.
13 Il s'agit d'un document de la MOCE le rapport quotidien, rapport de
14 synthèse quotidien en date du 25 octobre 1993 qui émane de CC Mostar; est-
15 ce que vous reconnaissez ce document ?
16 R. Oui. C'est moi qui ai rédigé ce document et je constate que ce jour-là,
17 ce 25 octobre. Je me présente comme étant le "Des," c'est-à-dire que je
18 suis -- désigné à ce poste, c'est-à-dire que je n'ai pas encore pris
19 officiellement mes fonctions. Donc, mon prédécesseur est toujours sur le
20 territoire, est toujours présent.
21 Q. Si on regarde le premier paragraphe, page 1, on voit ici : "HCC (Des),"
22 est-ce que c'est vous ?
23 R. Oui, HCC, c'est Jesus Amatriain, et je suis celui qui va lui succéder.
24 Des, désigné.
25 Q. Examinons, à la rubrique politique, le deuxième paragraphe, il est
26 indiqué que : "HCC et le HCC (Des) ont rencontré Jadranko Prlic. La
27 situation des Croates en Bosnie centrale était le thème principal et a été
28 évoqué, et donc l'expérience de la région s'est révélée extrêmement utile."
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1 Vous êtes allé à Mostar en tant que chef du CC Mostar ?
2 R. Oui, je crois.
3 Q. Pouvez-nous parler de cette réunion ?
4 R. Je crois que ça permis de créer cette relation -- de travail très
5 fructueux, très ouvert. La raison pour laquelle je parle ici de mon
6 expérience de la Bosnie centrale, c'est qu'il y avait une séparation
7 concrète et physique entre l'Herzégovine et Mostar, entre Mostar, par
8 exemple, et la vallée de la Lasva, et précédemment, je m'occupais de tout
9 ce qui se passait jusqu'à Zepce, Vares, et cetera. Je crois que la
10 connaissance que j'avais de la situation, de l'isolement des communautés
11 croates en Bosnie centrale a beaucoup intéressé mes interlocuteurs, M.
12 Prlic, donc.
13 Q. Au paragraphe suivant -- toutes mes excuses. Au paragraphe suivant, il
14 est question de 5 000 réfugiés qui sont arrivés la semaine dernière et on
15 en attend plusieurs -- beaucoup d'autres
16 10 000 autres dans les deux mois à venir. "Ce chiffre de 5 000 a été
17 également cité par Jadranko Prlic qui a ajouté que leur hébergement
18 constituerait un problème très préoccupant." Avez-vous des observations à
19 faire à ce sujet ?
20 R. Oui, à l'époque, on assistait à des mouvements très importants de
21 population à partir de la Bosnie centrale. C'étaient des Croates de Bosnie
22 qui sortaient en passant par le territoire serbe et qui rentraient sur le
23 territoire croate de Bosnie, et notamment à Celebici au nord de Mostar sur
24 la ligne de front et à Stolac, c'est-à-dire au sud-ouest de Mostar. C'était
25 là les points d'entrée -- ou plutôt, de sortie de Bosnie centrale et de
26 rentrée en Herzégovine. Ces mouvements étaient intéressants à plusieurs
27 égards. Premièrement, ça concernait un nombre très important de personnes,
28 donc, ça avait forcément des répercussions humanitaires. Ensuite, cela
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1 indiquait un niveau de degré de coopération entre les Croates de Bosnie et
2 les Serbes de Bosnie.
3 Q. Passons à la page suivante du même document. Paragraphe 6, le premier
4 paragraphe, il est indiqué que : "Le HCC (Des)" - c'est-à-dire vous - "a
5 contacté au téléphone Vladislav Pogarcic," au sujet des hélicoptère qui
6 avaient été confisqués. Il est dit que : "Suite à ces informations, le HCC
7 et le HCC (Des) ont organisé une réunion avec le général Tole pour le 26
8 octobre. Le général Praljak n'était pas disponible." Avez-vous des
9 observations à faire à ce sujet ?
10 R. D'abord, Vladislav Pogarcic c'était l'un de mes principaux
11 interlocuteurs. C'était un conseiller de Mate Boban et avec qui je pouvais
12 avoir des conversations très ouvertes sur la présidence, sur sa
13 constitution. La raison pour laquelle on parle ici des hélicoptères, je
14 l'ai déjà mentionné précédemment, et ceci, bien entendu, c'est ces
15 hélicoptères -- les hélicoptères toujours confisqués empêchaient les
16 évacuations, les échanges, la coopération entre les Croates et les
17 Musulmans de Bosnie, et nous voulions traiter de cette question. J'ai pensé
18 que le général Praljak c'était manifestement quelqu'un qui avait un rôle,
19 qui jouait un rôle important en terme militaire puisqu'il était commandant
20 du HVO. Ici il est indiqué qu'il n'était pas disponible. Je ne pense pas
21 que nous ayons évoqué des questions particulières, mais nous ne savions pas
22 très bien qui était -- qui commandait quoi.
23 Q. Nous en avons maintenant terminé de ce document. Vous dites que M.
24 Prlic vous avait donné une impression très favorable. A partir des contacts
25 que vous avez pu avoir avec lui, pouvez-vous nous dire quel était le
26 pouvoir qui était le sien, s'il en avait un ?
27 R. C'était le premier ministre de la République croate d'Herceg-Bosna.
28 C'était donc quelqu'un qui occupait un poste de tout premier plan, on
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1 assistait à la formation de la présidence, du gouvernement et du parlement
2 de cette entité. C'était manifestement quelqu'un qui jouait un rôle clé
3 dans tout cela. C'était quelqu'un qui avait à peu près le même âge que moi,
4 qui avait à peu près le même parcours et qui avait -- qui parlait anglais
5 et lui aussi avait étudié l'économie, j'ai trouvé que c'était quelqu'un
6 avec qui on avait un contact très facile, avec qui on pouvait facilement
7 parler.
8 Q. Est-ce que vous avez jamais eu l'occasion de parler de lui avec
9 d'autres dirigeants que ce soit des dirigeants locaux, ou des représentants
10 de la communauté internationale ?
11 R. Oui. Oui, c'était quelqu'un qui avait un rôle important pour nos
12 visiteurs qui venaient de l'étranger. Par exemple, il y a un ambassadeur de
13 Belgique qui est venu et je l'ai emmené voir M. Prlic. M. Prlic participait
14 à certaines discussions, comme par exemple, ce qui se passait à Genève ou
15 Washington. Ce n'est pas lui forcément qui se rendait à ces endroits, mais
16 en tout cas, c'était quelqu'un avec qui on souhaitait parler pour obtenir
17 une idée -- pour se faire une idée, là, du point de vue des Croates de
18 Bosnie.
19 Q. Nous venons d'aborder la question de l'autorité, selon vous quand vous
20 étiez sur place, est-ce que vous aviez l'impression qu'il exerçait un
21 pouvoir, une autorité ?
22 R. Oui. Il occupait un poste d'autorité. Ce qui est apparu cependant de
23 plus en plus clair à mes yeux, c'est que pour -- il fallait comprendre les
24 relations entre le gouvernement et la présidence. Il y avait beaucoup de
25 discussions sur ceux qui étaient des personnalités montantes et d'autres
26 qui disparaissaient de la scène, tant au point de vue militaire que
27 politique. Quant à M. Prlic, je n'ai pas eu le sentiment qu'il était menacé
28 en quoi que ce soit à son poste, mais j'étais très intéressé par son point
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1 de vue sur ce qu'il pensait des autres postes au gouvernement et des
2 personnes qui étaient susceptibles d'occuper ces postes, et j'ai constaté
3 que M. Prlic était tout à fait prêt -- toujours prêt à me fournir des
4 informations.
5 Q. Vous venez de parler de la présidence, des relations entre le
6 gouvernement et la présidence, page 32, ligne 2; à qui faites-vous
7 référence ?
8 R. A quoi faites-vous référence exactement ?
9 Q. Je parle du compte rendu d'audience, de nos débats. Vous dites que vous
10 essayez de comprendre les relations existant entre le gouvernement et la
11 présidence.
12 R. Oui. La présidence c'était Mate Boban. Beaucoup de rumeurs circulaient
13 et il y avait beaucoup de discussions portant sur la question de Mate
14 Boban, Mate Boban dont on disait qu'il allait quitter la scène politique
15 qu'il allait cesser d'être le numéro 1 sur des Croates de Bosnie. Ceci
16 ressortait de discussions avec des dirigeants croates de Bosnie de haut
17 niveau, sa position ne semblait pas être tout à fait sûre. C'est à cela que
18 je fais référence quand je parle de la présidence.
19 Q. Pourriez-vous nous dire de quoi vous parliez avec Jadranko Prlic
20 pendant que vous étiez chef de CC Mostar ?
21 R. Bien, je m'entretenais avec lui essentiellement des institutions
22 politiques de la République croate d'Herceg-Bosna, et forcément dans le
23 cadre de ces discussions, il était question de l'organisation militaire,
24 mais surtout de savoir qui serait ministre de la Justice, qui serait
25 ministre des relations extérieures, et cetera, il était question de celui
26 de pouvoir. Je m'entretenais également avec lui des questions d'ordre
27 humanitaire portant sur l'aide humanitaire, mais c'était surtout M. Pusic,
28 qui s'occupait de cette question, et plus tard une organisation humanitaire
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1 a été mise sur pied sous la direction de Martin Raguz, et c'est avec lui
2 que nous avons eu de nombreuses discussions portant sur les questions
3 relatives à l'aide humanitaire.
4 Q. Est-ce que vous n'êtes jamais entretenu avec M. Prlic au sujet de ce
5 qu'il pensait de la République croate d'Herceg-Bosna et de son rôle ?
6 R. Oui.
7 Q. Quel était son point de vue à ce sujet ?
8 R. La mise en place de la République croate était considérée comme un
9 signal important -- un message important non seulement pour la Communauté
10 croate, mais aussi pour d'autres communautés ethniques au sein de la Bosnie
11 et aussi pour la communauté internationale. La Communauté croate d'Herceg-
12 Bosna, se réunissait ainsi autour d'une communauté d'intérêts et prenait un
13 aspect beaucoup plus gouvernemental qu'auparavant, et c'était un peu
14 l'équivalent de cette république qu'avait autoproclamé les Serbes de
15 Bosnie. Donc, c'était une étape vers la mise en place d'un Etat
16 autoproclamé qui souhaitait être reconnu au niveau international, on
17 semblait donc se diriger vers une sorte de solution de la crise avec trois
18 républiques. Tout ceci c'était avant l'idée de la Fédération. Avant que
19 l'idée de la Fédération n'émerge avec une seule Bosnie, il s'agissait donc
20 de trois républiques, mais la communauté -- la république croate d'Herceg-
21 Bosna, donc, son organisation, ses fonctions, sa légitimité, ses structures
22 militaires, voilà l'essentiel de mes discussions avec lui.
23 Q. Quelle a été la nature de son rôle au cour des mois d'octobre, novembre
24 et décembre dans la mise en place du gouvernement de cette république ?
25 Est-ce qu'il a joué un rôle important dans ce contexte ?
26 R. Oui. Oui, il avait constitué le gouvernement, et le gouvernement devait
27 être présenté au parlement qui donnerait son accord, qui ratifierait le
28 gouvernement. Ce qui nous intéressait plus particulièrement c'était de
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1 savoir qui commandait ? Est-ce que c'était M. Prlic ? Est-ce que c'était M.
2 Boban ? Quelles étaient leurs relations ? Est-ce que la chose allait être
3 présentée au parlement et simplement approuver sans véritable débat, ou
4 est-ce qu'il y aurait véritable débat ?
5 Q. Avant d'examiner le document suivant qui va venir à l'appui de ce que
6 vous venez de nous expliquer, je voudrais revenir sur un point que vous
7 avez mentionné. Vous avez expliqué que lorsqu'il s'agissait des questions
8 d'ordre humanitaire, votre contact c'était plutôt M. Pusic, mais une
9 question d'ordre général sur ce point, est-ce que M. Prlic était informé
10 correctement de la situation humanitaire ?
11 R. Oui, je crois qu'il était informé de ces questions, mais lui ce qui
12 l'intéressait au plus haut point, c'était la structure politique, c'est ce
13 que j'ai constaté, et on m'a renvoyé à d'autres interlocuteurs pour traiter
14 des questions humanitaires. Donc, je pense qu'il était au courant, mais ce
15 qui l'intéressait plus lui c'était les structures politiques.
16 Q. Vous avez mentionné une réunion avec le chef de la Mission de la MOCE,
17 et j'aimerais que nous en parlions brièvement maintenant. Tout d'abord, en
18 octobre, vers la fin octobre, qui était chef de la Mission de la MOCE, qui
19 l'est devenu ?
20 R. A ce moment-là, c'était l'ambassadeur de Baenst.
21 Q. Est-ce qu'il était Belge ?
22 R. Oui, il était Belge. Le chef de mission changeait avec le changement de
23 présidence de l'Union ou de la Communauté européenne, à chaque fois il y
24 avait un changement au poste de chef de mission.
25 Q. Est-il exact qu'à ce moment-là, le chef de mission, l'ambassadeur
26 belge, s'est rendu en Bosnie pour rendre les -- rencontrer tous les
27 dirigeants locaux ?
28 R. Oui, il est venu pour une visite assez longue, il a rencontré Radovan
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1 Karadzic. Il a rencontré Izetbegovic, Haris Silajdzic, Ganic. Il est venu à
2 Mostar, c'est-à-dire ma zone, je l'ai emmené voir Mate Boban, M. Prlic.
3 Slobodan Bozic, je crois, également. Oui, oui, il a participé à cette
4 réunion. Je l'ai emmené également à Mostar Est où nous avons rencontré le
5 nouveau commandant du 4e Corps de l'armija, le général Budakovic. Nous
6 avons rencontré également Smajl Klaric [phon] et Ibrahim Kaluda, qui
7 étaient les dirigeants civils de Mostar Est.
8 Q. J'aimerais que nous examinions ensemble la pièce à conviction 06693.
9 "Rapport spécial numéro 1." C'est un document de la MOCE, qui vient de
10 l'officier de liaison de la MOCE à l'ICFY, Elmar Dinter. Est-ce qu'il
11 s'agit d'un rapport relatif à la réunion avec le chef de mission,
12 l'ambassadeur belge ?
13 R. Oui. C'est un peu inhabituel qu'on est un document manuscrit, mais
14 c'est peut-être simplement une feuille de couverture pour envoyer une
15 télécopie.
16 Q. Examinons la troisième page du document, avec la liste des personnes
17 rencontrées, on voit les noms de Mate Boban. Jadranko Prlic, Arif Pasalic,
18 et on voit que ceci s'est passé le 30 octobre. Est-ce que vous avez trouvé
19 le passage concerné ?
20 R. Oui.
21 Q. Il est indiqué que ces réunions ont lieu à Grude et sur la rive gauche
22 ainsi que sur la rive est et sur la rive ouest de Mostar. Est-ce qu'il y a
23 eu donc plusieurs réunions ?
24 R. Oui, plusieurs réunions.
25 Q. Je vais vous demander de vous reporter à la page du -- certaines pages
26 du rapport. Vous voyez que les pages sont numérotées avec la numérotation
27 suivante, DK00 et j'aimerais que vous trouviez la page suivante DK007227.
28 Est-ce que vous l'avez trouvé ?
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1 R. Oui.
2 Q. Au deux tiers de la page, on voit la rubrique C, objectif croate. Ce
3 qui est indiqué dans ce croate, c'est que tous les interlocuteurs croates
4 veulent une solution avec une division ethnique. M. Boban veut des
5 négociations immédiates, alors que Kordic et Prlic estiment que c'est trop
6 tôt. Observation, s'il vous plaît ?
7 R. Premièrement, ce n'est pas moi qui ai écrit ce rapport. Deuxièmement,
8 je crois que nous avons rencontré le général Budakovic et pas Pasalic, mais
9 cela on pourra peut-être le préciser.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre. J'ai une
11 objection à ce stade de l'interrogatoire principal. Je ne suis pas
12 intervenu précédemment parce que je pensais que le témoin connaissait ce
13 rapport. Il est manifeste qu'il n'y a pas de fondement aux questions qui
14 sont posées ici puisque le témoin n'a pas lui-même rédigé ce rapport. Je
15 m'oppose donc à ce qu'il fasse des commentaires au sujet de ce que
16 quelqu'un d'autre a écrit. Il a peut-être une opinion qui est la sienne
17 mais qu'il souhaite nous faire part, mais il faut savoir qu'il venait à
18 peine d'arriver sur zone, à Mostar en octobre, si j'ai bien compris. Il
19 venait juste d'arriver dans la zone de Mostar. Je pense que donc que ce
20 n'est pas peut-être la personne idéale pour nous dire quelle était
21 l'opinion de quelqu'un d'autre.
22 M. KRUGER : [interprétation] Je vais essayer d'apporter une correction ici,
23 de remédier à cela.
24 Q. Pouvez-vous tout d'abord Monsieur le Témoin, nous dire d'où vient ce
25 document ?
26 R. Ce document était rédigé par l'officier de liaison de la MOCE, le 16
27 novembre. Cela faisait un mois que j'étais là et j'avais déjà passé dix
28 mois en Bosnie. Donc, je pense que j'aurais pu me faire une idée de la
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1 situation assez vite. Je comprends bien les arguments qui viennent d'être
2 présentés, mais j'ai participé à cette réunion, donc, je peux dire ce qui
3 s'y est passé.
4 Q. Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé lors de cette réunion ? Est-ce
5 que cette question a été évoquée et dans quel contexte ? Je pense à la
6 chose suivante, à savoir que Boban voulait donner des négociations, mais
7 que Prlic et Kordic estimaient que c'était encore trop tôt. Est-ce que vous
8 vous en souvenez ?
9 R. Cette visite se déroulait à un moment où on essayait de trouver une
10 solution au niveau international. Mais on n'avait pas encore annoncé l'idée
11 d'une Fédération. Tout le monde regardait cependant vers l'avenir. On
12 voulait savoir quelle était l'opinion des uns et des autres. Mate Boban a
13 dit, en tout cas, qu'il était prêt à une reprise immédiate des
14 négociations, en tout cas, de manière générale, à ce moment-là, la solution
15 envisagée par tous c'était celle de trois républiques. Il y avait encore le
16 problème des Musulmans, des Musulmans qui auraient un accès à la mer. Cela
17 c'est devenu plus important.
18 Ensuite, mais Kordic et Prlic estimaient -- en tout cas, Kordic
19 estimait que c'était trop tôt. Ce serait -- je me lancerais dans des
20 conjectures si je vous disais pourquoi il pensait que c'était trop tôt. Je
21 ne me rappelle pas exactement ce qui a été dit, mais en tout cas, c'était
22 une période à laquelle il commençait simplement à constituer les
23 institutions croates de Bosnie. Il venait ou il s'apprêtait à présenter le
24 gouvernement au parlement. Le parlement ne s'était pas encore réuni parce
25 que ça, cela a eu lieu à la fin de décembre, donc, la mise en place de ces
26 structures faisait comprendre à la communauté internationale qu'il existait
27 un interlocuteur viable avec lequel la communauté internationale pouvait
28 avoir des discussions. Mais cela, ce n'était pas encore tout à fait le cas,
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1 il fallait attendre encore quelques mois. Il y avait encore un certain
2 nombre de démarches à faire avant que cela ne soit le cas.
3 M. KRUGER : [interprétation] Je vois qu'il est bientôt moins le quart.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Un instant, je vous prie. Le témoin nous dit
5 que, d'après ce qu'il sait, Prlic disait qu'il était trop tôt pour
6 négocier. Il a dit qu'il n'était pas à la réunion avec Kordic. Il a donné
7 son explication. Maintenant, d'après ce que nous avons compris, d'après
8 lui, Kordic ---
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Estime que ce type de question, vous pouvez le poser
10 en contre-interrogatoire et ne cassez pas inutilement l'interrogatoire
11 principal.
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Alors, en ce moment-là, mon objection c'est
13 que le témoin dans sa réponse n'a pas répondu justement aux questions
14 posées par le Procureur. Cela ne correspond pas.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 3 heures 45. Nous faisons une pause de 20
16 minutes et nous reprendrons à 4 heures 5.
17 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
18 --- L'audience est reprise à 16 heures 11.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise, Monsieur Kruger.
20 M. KRUGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Q. Pendant la pause, Monsieur, les interprètes m'ont demandé que nous
22 ménagions une pause entre les questions et réponses pour les aider. Je
23 crois que je suis le principal responsable en la matière.
24 Nous étions toujours en train d'examiner le document portant le numéro
25 006693.
26 Je vous demande de vous rapporter à ce même paragraphe que nous examinions,
27 le sixième, les objectifs des Croates. Si vous tournez la page, le rapport
28 dit ceci : "S'agissant du massacre de Stupni Do, Prlic a condamné
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1 l'incident et il a dit qu'il ne s'était pas trouvé là." Ceci se retrouve
2 ailleurs dans le rapport plus précisément deux pages plus loin.
3 On voit DK 007230 en haut de page, point H, massacre de Stupni Do.
4 Deuxième paragraphe, il dit ceci : "Seul le Croate Prlic a condamné
5 l'action alors que Boban et Kordic ont tenté de minimiser la gravité de
6 l'incident, mais il semblait être conscient des répercussions négatives que
7 ceci a eu à travers les médias."
8 Est-ce que vous vous souvenez que la question de Stupni Do a été
9 évoquée lors de votre réunion avec Mate Boban et avec Jadranko Prlic le 30
10 octobre ?
11 R. Oui.
12 Q. Pourriez-vous dire aux Juges en somme quels étaient les avis de M.
13 Boban et de M. Prlic ?
14 R. Oui. Stupni Do s'était passé disons quelques jours avant cette réunion.
15 On avait d'abord une image très floue de ce qui s'était passé, mais des
16 rapports sont arrivés -- des Nations Unies, de la MOCE et on a commencé à
17 mieux comprendre qu'il s'agissait d'atrocités commises par des forces
18 croates de Bosnie. Très rapidement, je pense qu'au cours de nos
19 discussions, les dirigeants bosno-croates de la région d'Herzégovine
20 cherchaient, à savoir ce qui s'était passé parce que c'était manifestement
21 un incident très grave sur le plan international. On a donné toutes sortes
22 d'explications. Ça allait de dire : "Ca n'a rien à voir avec nous," mais
23 aussi, donc, ça c'était l'avis de hauts dirigeants comme Prlic jusqu'au
24 fait qu'il y avait des forces bosno-croate qui avaient commis ces choses.
25 Prlic l'avait reconnu ouvertement, alors que sans nul doute, Mate Boban
26 avait minimisé ceci et apparemment aussi M. Kordic. C'était important pour
27 une autre raison aussi. M. Prlic était prêt à avoir une discussion avec
28 nous. Il essayait de faire entendre la voix des Croates de Bosnie et il
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1 voulait qu'on comprenne toute l'importance qu'il y avait de se livrer à une
2 offensive dans l'immédiat ou les médias pour se présenter sous un meilleur
3 jour que celui sous lequel le voyait la communauté internationale. Ceci
4 montrait que les chefs bosno-croate voulaient dire qu'en fait l'Union
5 européenne, les Nations Unies n'acceptaient que la vision des Musulmans de
6 Bosnie et pas la leur.
7 Il y avait aussi deux ou trois autres personnages. Il y avait Vladislav
8 Pogarcic et un autre Mile Akmadzic, qui étaient tout à fait conscients de
9 l'importance que revêtait, disons, l'optique internationale. Nous n'avons
10 noté qu'il y avait une divergence d'opinions, mais ils essayaient de faire
11 passer certains messages. Ils voulaient être pris plus au sérieux par la
12 communauté internationale, mais voilà que se passait quelque chose qui les
13 remettait à l'avant-plan de la scène internationale.
14 Q. Pouvons-nous revenir à la section C, deux pages en arrière. C'est la
15 page qui porte la mention DK 007228. Nous avons déjà lu la partie consacrée
16 à Stupni Do. On voit juste après quatre lignes plus loin ceci : "Le fait
17 que les Croates d'Herzégovine n'ont pas réussi à libérer les deux
18 hélicoptères chargées d'évacuation médicale." On reparle ici une fois de
19 plus d'évacuation médicale. Ceci me pousse à vous poser cette question.
20 Est-ce que cette question a été évoquée une fois de plus dans votre réunion
21 avec Boban et Prlic ?
22 R. Je suis sûr que j'en ai parlé avec M. Boban, mais je ne sais pas si on
23 en a parlé avec M. Prlic, sans doute que oui, mais je n'en suis pas tout à
24 fait sûr.
25 Q. Examinez la dernière partie de ce paragraphe, il y a une évaluation qui
26 s'y trouve. Je vais vous demander si vous êtes de cet avis ou d'un avis
27 différent. S'agissant de l'incapacité à libérer ces hélicoptères, elle
28 montre que soit les structures de commandement en Herzégovine ne sont pas
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1 fiables ou que les Croates d'Herzégovine accordent plus d'importance à la
2 libération des prisonniers de guerre à Mostar, à Mostar Est car
3 l'évacuation des blessés qui aurait dû se faire depuis longtemps. On parle
4 ici aussi des malades de la poche de Travnik-Busovaca.
5 R. Est-ce que je peux lire la totalité du paragraphe --
6 Q. Oui, certainement.
7 R. Merci. Il y avait des rapports très complexes, très liés imbriqués
8 entre les mouvements d'aide humanitaire, l'évacuation des prisonniers des
9 hôpitaux, des échanges de prisonniers. À tout moment, on pouvait attribuer
10 plus d'importance à un de ces aspects qu'à un autre. Ici, en l'occurrence,
11 on se demande quels sont les motifs, on se demande pourquoi les Croates de
12 Bosnie ne veulent pas relâcher ces hélicoptères. A l'époque, on avait donné
13 une explication très simple, on a dit mais cela représente 30 % des forces
14 aériennes de l'armée, pourquoi leur redonner quelque chose qui constitue un
15 soutien logistique important. Ça c'était la facette militaire.
16 L'autre c'était le levier que ceci représentait dans les négociations que
17 ce soit pour les échanges de prisonniers de guerre ou pour d'autres formes
18 d'évacuation. Je pense qu'ici se retrouve une discussion sur les rapports
19 existants entre ce qui se passe en Herzégovine et les dirigeants de Bosnie
20 centrale. Nous avons toujours à savoir s'il y avait des divergences de vue
21 ou d'accent, mais je ne peux vous en dire plus.
22 Q. Fort bien. Avant d'abandonner la question des hélicoptères, je vous
23 demande de tourner la page pour aborder la section G, à savoir l'évacuation
24 médicale et la libération des prisonniers de guerre. Page suivante,
25 troisième paragraphe, nous sommes en haut de page, page DK007230. "Même si
26 Boban a promis le 30 octobre qu'il ferait l'impossible pour obtenir que ces
27 hélicoptères soient libérés (Je vais y aller et moi-même si Stojic ne --
28 donc, si le ministre Stojic ne peut pas faire ce travail.) Rien ne se
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1 passera -- rien de ce genre ne s'est passé."
2 Vous vous souvenez de ceci ?
3 R. Oui. Boban était lancé, il parlait de la perspective bosno-croate et je
4 me souviens de ce qu'il a dit avec beaucoup d'effet de manche : "Oui,
5 j'irai en personne," a-t-il dit, mais il est intéressant qu'il disait que
6 c'était d'abord la responsabilité du ministre Stojic. Il dit oui, je vais
7 faire quelque chose pour changer cela, mais c'est quelqu'un d'autre qui en
8 est responsable. Nous avions essayé, disons, par la voie militaire, par la
9 voie politique, mais nous n'avons pas pu obtenir la libération de ces
10 hélicoptères.
11 Q. Une dernière chose à propos de ce document. Section E, page DK007228.
12 Cette question concerne le la MOCE et la Communauté européenne. Dans le
13 deuxième paragraphe, il est dit : "Pogarcic et Prlic ont dit qu'ils avaient
14 de bons rapports avec la MOCE même si apparemment les résultats sont assez
15 maigres, alors que Prlic a émis une critique indirecte," et il a dit que :
16 "Boban et Pogarcic étaient moins diplomatiques" quelques lignes plus loin.
17 Est-ce que vous vous souvenez qu'on a évoqué dans cette réunion avec
18 Prlic la question de la MOCE et des rapports avec la MOCE ?
19 R. Oui. Je crois l'avoir déjà dit Prlic tenait à faire comprendre qu'il
20 voulait de bonnes relations. D'ailleurs, de façon générale, nous avions de
21 bonnes relations avec M. Prlic et avec
22 M. Pogarcic, mais la Communauté européenne et la MOCE étaient sans cesse
23 critiquées par les deux fractions. On disait qu'elles ne parvenaient pas à
24 résoudre les problèmes ou qu'elles les provoquaient. Ici, on voit la
25 différence qu'il y a dans l'accent mis sur tel ou tels problèmes. Boban et
26 Pogarcic parlent de façon plus directe, alors que M. Prlic, qui semble
27 faire preuve de modération, manifeste un appui modéré pour la MOCE même
28 s'il fait comprendre que tout n'est pas parfait dans la MOCE, ni dans la
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1 Communauté européenne.
2 Q. Pensez-vous ou au vu votre expérience et du temps que vous avez passé
3 là-bas que c'était une critique justifiée ?
4 R. Non. Je pense que ceci s'inscrit dans cette attitude générale qui est
5 d'accuser quelqu'un d'autre.
6 Q. Dernière chose à propos de ce document, à la toute dernière page
7 section J. Cette section : "Démarche du conseil de la MOCE, le 4 octobre,
8 avec Radic et Boban." Pourriez-vous donner une idée aux Juges de la nature
9 de cette démarche ?
10 R. C'était quelque chose de rare en effet, une démarche a été décidée par
11 l'Union européenne afin d'essayer d'aborder directement le problème de
12 l'entrave à l'aide humanitaire. Je pense que ceci a été évoqué ou plutôt
13 adressé à toutes les parties belligérantes et vous avez ici la teneur de
14 cette démarche. Elle dit précisément qu'il faudrait une liberté de
15 mouvement pour toute l'aide humanitaire.
16 Q. Laissons ce document de côté, après la réunion que vous avez eue avec
17 Jadranko Prlic, est-il vrai que vous avez déjeuné avec lui ?
18 R. Oui, il a invité l'ambassadeur, Sir Martin Garrod, qui était le chef du
19 centre régional, et moi-même à déjeuner. Il était accompagné de Slobodan
20 Bozic qui, était le ministre de la Défense adjoint. Il était aussi
21 responsable des relations avec la communauté internationale, me semble-t-
22 il.
23 Q. Pourriez-vous dire aux Juges ce qui s'est passé pendant ce déjeuner ?
24 R. Oui, cela n'avait pas été prévu dans l'ordre du jour, nous sommes
25 arrivés au bureau de M. Prlic qui avait la gentillesse de nous inviter. On
26 n'a pas osé dire non. Nous avons déjeuné avec lui mais manifestement il y
27 avait d'autres parties prévues dans le programme, dont une visite à Mostar
28 Est. Ceci nous semblait important à réaliser, par conséquent, on a essayé
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1 de terminer le déjeuner plus rapidement, ce qui s'est fait.
2 Q. Pourriez-vous parlez aux Juges de l'échange qui s'est effectué lorsque
3 -- l'échange qu'il y a eu lorsque vous avez dit que vous vouliez partir
4 plus tôt de ce déjeuner ?
5 R. Oui, c'est assez incommode parce qu'on voulait partir plus tôt mais
6 j'ai insisté parce que je savais que nous voulions rencontrer les
7 dirigeants musulmans. Ceci a causé une certaine consternation, il y a un
8 bref échange entre M. Bozic et M. Prlic,
9 M. Bozic est parti là-dessus, plus tard je pense qu'il a passé un coup de
10 fil, puis il est revenu. Il a dit tout est réglé vous pourrez passer.
11 Le lendemain, j'ai rencontré Slobodan Bozic. Il était préoccupé, il était
12 d'ailleurs assez dérangé. Il a dit qu'il ne fallait avertir que nous
13 voulions aller à Mostar Est pour qu'il veille à ce qu'il n'y ait pas
14 d'incident. Effectivement, nous avons pu faire une visite sans aucun
15 incident cet après-midi, aussitôt après le déjeuner.
16 Q. Est-ce que vous avez compris pourquoi il n'y a pas eu d'incident lors
17 de cette visite à Mostar Est ?
18 M. KARNAVAS : [interprétation] Objection. Vraiment, mon estimé confrère
19 sait qu'il pourrait s'y prendre autrement parce que c'est demandé une
20 conjecture, un avis, une hypothèse. Il n'y a pas eu de réponse, cela se
21 passe de commentaire, mais je pense qu'ici c'est exagéré de demander une
22 telle question, à moins que le témoin ne soit en mesure de nous dire s'il
23 peut nous donner des détails concrets.
24 M. KRUGER : [interprétation] Je pense si on laisse la possibilité au témoin
25 de répondre, tout va s'éclaircir.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Pourriez-vous reposer la
27 question ?
28 M. KRUGER : [interprétation]
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1 Q. Vous avez dit que votre visite à Mostar Est s'était effectuée sans
2 problème, après avoir quitté ce déjeuner, la visite que vous aviez eue avec
3 M. Prlic, et je vous ai demandé si vous avez pu vous faire une idée de la
4 raison pour laquelle cette visite a pu se dérouler sans incident.
5 R. Chaque fois qu'on allait à Mostar Est, il n'y avait pas toujours des
6 incidents, mais le fait que nous avons dit que nous allions y aller cet
7 après-midi-là, ça avait beaucoup préoccupé les gens. Il y a eu des
8 communications. Il n'y a pas eu d'incidents peut-être a-t-on donné des
9 instructions, peut-être qu'on n'en a pas données, mais en tout cas il n'y a
10 pas eu d'incidents lors de cette visite-là cet après-midi-là.
11 Q. Merci.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Les termes "incidents," en anglais, on voit à la
13 ligne 14, page 46, le mot "incidents," au pluriel. Pour vous, c'est quoi un
14 incident à Mostar Est ? Qu'est-ce qu'il aurait bien pu se passer s'il y
15 avait eu des incidents ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a tout un éventail de possibilités. On
17 aurait pu ne pas pouvoir y parvenir physiquement. On aurait empêché ou
18 entravé notre déplacement, ce qui ne s'est pas passé. Il n'y a pas eu
19 d'actes directs ou agressifs à notre égard en tant qu'individus ou contre
20 nos véhicules, ce qui s'est parfois passé. Il est arrivé qu'on tire sur
21 nous. Nous avions des véhicules blindés et il n'était pas peu fréquent que
22 ces véhicules blindés fassent l'objet de tirs d'armes légères. Il n'y a pas
23 eu de détonation de mortiers, de pièces d'artillerie, de chars à Mostar Est
24 pendant le temps de notre visite, ce qui veut dire que ce passage s'est
25 effectué sans heurts, ce déplacement s'est effectué sans heurts, pas
26 d'agressions envers nous et pas de détonations que nous aurions observées
27 ou entendues pendant cette période-là. C'est ce que je voulais dire.
28 M. KRUGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Q. Monsieur le Témoin, abordons un autre document.
2 C'est la pièce 6381. Il s'agit d'un rapport spécial qui porte la date du 8
3 novembre 1993. Dès le début on voit ceci, vous trouverez ci-dessous un
4 excellent rapport de Philip Watkins, HCC Travnik; est-ce que c'est bien un
5 rapport que vous avez rédigé ?
6 R. Je dirais d'abord que j'ai fourni un rapport, mais ne tant que HCC
7 Mostar, ce qui est annoté ici en marge, donc, ce n'était pas Travnik. En
8 fait, ce rapport a été fourni par la Section politique du QG de Zagreb.
9 Mais il s'appuyait comme c'est dit ici d'ailleurs sur un rapport spécial
10 que j'ai écrit et que j'ai transmis au QG de Zenica, et de Zenica c'est
11 parti à Zagreb.
12 Q. Vu ce que vous venez de dire, nous examinons le préambule et il y a
13 plusieurs sections; est-ce que ceci représente la teneur de votre rapport
14 initial ?
15 R. Oui.
16 Q. Voyons l'introduction, deuxième paragraphe. On parle ici de l'origine
17 ou : "Des origines de la république -- de la République d'Herceg-Bosna," on
18 dit : "qu'elle trouve son origine dans la Communauté croate d'Herceg-Bosna.
19 La CCHB," est-il dit : "a été établi pour promouvoir les intérêts des
20 Croates en Bosnie-Herzégovine et bon nombre des hommes politiques hauts
21 placés dans la CCHB exerce désormais des fonctions dans cette
22 organisation."
23 Avez-vous un commentaire ?
24 R. Oui, c'était, en fait, l'évolution, le développement, le nourissement
25 [comme interprété] de cette république qui s'était formée elle-même et M.
26 Prlic avait été président du gouvernement de la CCHB et il apparaissait
27 désormais au poste de président de la République croate d'Herceg-Bosna.
28 Q. Partie suivante : "L'autre pilier de cette expérience politique de la
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1 CCHB, on la trouve dans ceux qui occupent des postes dans le gouvernement
2 de Bosnie-Herzégovine lui-même; cependant, ceux-ci ont quitté ces postes et
3 qu'ils estimaient anticonstitutionnels puisque, apparemment, les Musulmans
4 auraient usurpés ces postes" Commentaire ?
5 R. Oui, vous savez qu'il y a cette expérience politique qui s'était
6 manifestée par des personnalités qui avaient joué un certain rôle dans la
7 République de Bosnie-Herzégovine qui avaient été reconnus
8 internationalement. Il y avait eu des combats pendant ces combats, et pour
9 d'autres raisons, on a -- de plus en plus, les Croates de Bosnie disaient
10 que le gouvernement ou la crédibilité du gouvernement de Sarajevo s'érodait
11 même s'il était reconnu par la communauté internationale. Il n'avait plus
12 la légitimité qu'il avait eue puisque les Serbes de Bosnie avaient quitté
13 ce gouvernement et puisque la République croate de Bosnie représentait
14 mieux les intérêts des Croates de Bosnie.
15 Q. Dans la composition -- dans la constitution de la République croate
16 d'Herceg-Bosna, est-ce que vous savez s'il y a eu des élections ?
17 R. Non, c'est difficile et il aurait été impossible d'avoir de véritables
18 élections, mais on a, effectivement, tenté de prouver qu'il y avait une
19 certaine légitimité en autant que beaucoup des titulaires principaux qu'il
20 y avait eu dans le gouvernement au parlement ou dans la république avaient
21 à une certaine époque été élus à ces postes au moment où la République de
22 Bosnie-Herzégovine avait été constituée. Ce qui veut dire qu'il y avait une
23 certaine hérédité légitime là, il y avait eu des élections municipales avec
24 élection de maires notamment.
25 Q. Prenons la page 5, "Gouvernement." Ici, nous avons des ministres -- on
26 dit : "Des ministres n'ont pas été élus. Ils occupent des fonctions par
27 intérim temporaire et le président du gouvernement va présenter ses
28 candidatures à la Chambre basse pour authentification le 10 novembre 1993."
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1 Une explication ?
2 R. Oui, là, nous sommes dans une période de transition incertaine, on ne
3 sait pas trop qui occupe quelle fonction, qui va occuper les postes de
4 gouvernement. Un gouvernement avait été constitué par M. Prlic et ce seront
5 des désignations temporaires. Vous avez un paragraphe où on connaît des
6 noms connus. J'ai indiqué les noms que je connaissais, mais on m'a fait
7 comprendre qu'il faudrait ratification des ces postes, ratification qui
8 devait se faire ultérieurement plus précisément comme c'est dit ici, le
9 10 novembre.
10 Q. Il y a des points d'interrogation au regard de certains postes au
11 ministère; qu'est-ce qu'ils veulent dire ces points d'interrogation ?
12 R. Tout simplement, qu'au moment de la rédaction de ce rapport, je ne
13 pouvais pas désigner nommément le ministre, mais peu de temps après, au
14 cours des semaines qui ont suivi, nous avons pu donner des noms, et à ce
15 moment-là, au moment de la rédaction du rapport, je ne les avais pas.
16 Q. Prenons le premier paragraphe de cette section, où il est dit : "Les
17 postes occupés dans le gouvernement qui sont considérés comme étant
18 solides," et puis, on a : "Président du gouvernement, Prlic," et en dessous
19 de lui : "Vice-président Valenta."
20 Pourquoi estimait-on que ce fût des postes sûrs -- solides ?
21 R. J'ai eu des réunions avec beaucoup de personnes qui occupaient de la
22 position-clé le plus possible, et de cette façon, j'ai essayé d'obtenir des
23 informations que je croisais pour vérifier. Il n'y avait aucun doute me
24 semble-t-il sur le fait que Prlic allait être le chef du gouvernement. Mais
25 il y avait beaucoup d'incertitude quant au rôle que pouvait jouer --
26 certains Croates de Bosnie centrale. Je pensais surtout à Kordic et à
27 Valenta, mais pas seulement à eux, à d'autres de Zepce, Zavidovici. Il y
28 avait un
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1 M. Lozancic et un ou deux autres dont je me souviens dans un instant. Nous
2 étions vraiment très intéressés à savoir quel rôle ces protagonistes
3 importants de Bosnie centrale jouer dans ce nouveau gouvernement, donc, il
4 y avait Prlic et Valenta. A ce moment-là, j'avais suffisamment d'éléments
5 d'information pour être sûr de ces postes mais je sais qu'il y avait un
6 poste dont nous n'étions pas sûr.
7 Q. Est-ce que vous n'avez jamais eu l'occasion de rencontrer Anto Valentin
8 ?
9 R. Oui, je l'ai rencontré en Bosnie centrale à Vitez lorsque j'étais le
10 chef du centre CC Travnik.
11 Q. Très bien. Nous allons nous y revenir dans quelques instants. Vous
12 parlez ici du ministre de la Défense Branko Stojic; est-ce que vous pensiez
13 qu'il pouvait s'agir d'une erreur ? Est-ce qu'il pouvait s'agir de Bruno
14 Stojic ?
15 R. Oui, tout à fait. C'est Bruno Stojic. C'est indiscutable qu'il avait
16 été ministre de la Défense dans le cadre de la Communauté croate d'Herceg-
17 Bosna. Il n'y a absolument aucune indication qu'à cette étape, à ce moment-
18 là, il n'allait pas continuer d'occuper ce poste. Plus tard, il a été
19 remplacé par Perica Jukic, donc, le ministre de la Défense.
20 Q. Vous vouliez ajouter quelque chose ?
21 R. Perica Jukic est un très bon exemple de quelqu'un qui -- de l'extérieur
22 d'Herzégovine. Je crois que sa ville natale était Zepce ou Zavidovici.
23 C'était, en fait, son centre politique. Je crois qu'il était d'ailleurs
24 maire de Zepce. Nous voulions savoir de quelle façon ces derniers allaient
25 être attirés dans tout ceci.
26 Q. Très bien. Je voudrais en dernier lieu vous demander de jeter un coup
27 d'œil au paragraphe 6, "Maison des représentants" -- ou "Chambre des
28 représentants." Pourriez-vous nous expliquer brièvement ce que ceci veut
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1 dire ? Vous parlez de 70 membres de la Chambre des représentants ?
2 R. Bien, je parlais des membres-là du parlement. Ce sont les personnes qui
3 avaient formé le parlement. M. Prlic allait choisir son gouvernement et les
4 membres du parlement allaient rectifier ce gouvernement ultérieurement.
5 Donc, les 70 membres, je crois qu'il s'agissait d'un chiffre qui n'était
6 pas encore tout à fait établi mais c'était quelque chose qui avait envoyé
7 un signal de légitimité. Cela comprenait également les 21 présidents des
8 municipalités, en d'autres mots, les maires qui avaient été élus
9 conformément aux élections qui avaient eu lieu pour former les structures
10 de la République de Bosnie-Herzégovine.
11 Q. S'agissant de ces 13 ministres, si j'ai bien compris, ces 13 ministres
12 allaient être nommés de l'intérieur de la Chambre des représentants ?
13 R. Oui, c'est ce que j'avais cru comprendre, effectivement, oui.
14 Q. Passons à la page suivante. En fait, c'est la dernière page du document
15 qui m'intéresse au paragraphe 7. Au paragraphe, on peut lire : "D'autres
16 instruments formés récemment de la République croate d'Herceg-Bosna
17 comprennent des bureaux de Blade Slapkovici [phon]." Ici, cela confirme
18 également -- le document dit que : "Vladislav Pogarcic informe les
19 représentants sur la nomination de Mate Boban et les institutions ont une
20 autorité dans ceci." Pourriez-vous nous faire un commentaire là-dessus ?
21 R. Oui. Mate Boban allait créer un groupe de conseillers, une série de
22 bureaux qu'il semblait contrôler lui-même; nous n'avions pas tout à fait
23 compris qu'il serait le lien entre ce bureau-là et le gouvernement. Est-ce
24 qu'il recevrait légitimité par le gouvernement ? Est-ce qu'il serait les
25 contrôler ? Il semblait qu'il y avait des structures d'une part à Mate
26 Boban et le gouvernement et la Chambre de représentants. Et plus tard nous
27 avons eu une mesure de voir quelles sont les personnes qui étaient chargées
28 de ces bureaux. Je ne me souviens bien que M. Pogarcic lui-même voulait --
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1 allait devenir le conseiller chargé des droits de l'homme. Il y avait
2 également quelques éléments -- et il allait se charger des rapports
3 internationaux, et je crois que M. Pusic allait devenir le chef du bureau
4 des réfugiés et des personnes déplacées, mais je peux me tromper aussi.
5 Q. Au point C, c'est ce qu'on y lit, n'est-ce pas ?
6 R. Oui. Le nom ait changé, mais plus tard j'ai pu établir que M. Pusic
7 avait un lien direct avec M. Boban par le biais de cette structure de cet
8 organe qui nous n'étions tout à fait sûrs si c'était un organe
9 constitutionnel ou si ces bureaux étaient constitutionnels enfin ou pas.
10 Q. Très bien. Pourrait-on passer à un autre document, la pièce -- ce qui
11 m'intéresse --
12 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Monsieur Kruger, excusez-moi d'intervenir, mais
13 je me dois d'intervenir.
14 Le paragraphe numéro 7, Monsieur le Témoin, tel que l'on lit, il semblerait
15 - je dis bien au conditionnel - il semblerait que
16 M. Mate Boban nomme les responsables des offices qui sont énumérés - il y
17 en a exactement six - dans l'office des réfugiés et des personnes
18 déplacées.
19 Vous avez dit tout à l'heure que vous aviez cru qu'il y avait, en fait,
20 deux structures : la structure du gouvernement présidée par M. Prlic, et
21 cette structure Boban avec les offices. Quand vous écrivez ce paragraphe,
22 numéro 7, c'est à partir de quelles sources ? Qui vous a renseigné, et qui
23 vous permet cette affirmation ? Est-ce que c'est une affirmation au
24 conditionnel, ou pour vous c'est une certitude ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, lorsque je parle de structures
26 parallèles, je crois que ce qui nous avait été présenté c'est un Etat
27 cohérent avec une présidence, un gouvernement, et la Chambre des
28 représentants. Donc, nous -- on voulait comprendre où était le pouvoir à
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1 l'intérieur de tout ceci, et ce n'était pas tout à fait clair s'il
2 s'agissait d'un Etat cohérent, ou bien, s'il y aurait des luttes entre le
3 pouvoir. Lorsque j'ai écrit ce rapport, la source de cette information
4 s'agissant des quatre bureaux et des deux institutions, c'était
5 l'information qui m'avait été donnée par Vladislav Pogarcic, et lorsque
6 j'ai rédigé ce rapport, je n'étais pas en mesure de placer des noms à côté
7 de ces bureaux. Donc, il était en train de me dire -- il me disait qu'il y
8 avait une intention, en fait, si j'avais eu des noms à cette étape-là, je
9 les aurais inscrits puisque je voulais le faire, puisque je l'ai fait à la
10 page précédente lorsque j'avais les noms. Donc, c'était la formation d'une
11 république et nous étions en train de recueillir les informations, mais au
12 moment où ce rapport a été écrit, je ne pouvais pas placer les noms à côté
13 de ces bureaux, et la source qui me permettait de rédiger, ceci c'était
14 principalement M. Pogarcic, mais également, Monsieur le Président, il y
15 avait un autre conseiller dont le conseiller dans le domaine des médias,
16 c'était Lozancic, il y avait un autre conseiller qui s'appelait Maric.
17 C'étaient les personnes avec lesquelles nous étions entretenues pour
18 essayer de recueillir le pus d'informations que possible, mais
19 principalement, c'était Pogarcic clairement qui m'avait informé des
20 structures autour de Mate Boban.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
22 M. KRUGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Q. Passons maintenant au document 6473. C'est un document de la MOCE CC
24 Mostar, rapport quotidien pour le 6 novembre 1993. Vous avez le document
25 sous les yeux ?
26 R. Oui.
27 Q. Est-ce que c'est un rapport que vous avez rédigé ?
28 R. Oui.
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1 Q. Monsieur, prenons le paragraphe 1. C'est le document qui précède le
2 document que l'on vient de consulter il y a quelques instants.
3 Dans la toute première partie de ce document, la partie politique, au deux
4 tiers du premier paragraphe, on peut lire : "Jadranko Prlic, président du
5 gouvernement de la CRHB avait reçu l'autorisation par le parlement de créer
6 un gouvernement. Il allait faire ses recommandations et ces recommandations
7 allaient être ratifiées, entre parenthèses ou pas." Est-ce que vous pouvez
8 nous faire des commentaires là-dessus ?
9 R. C'est un excellent exemple pour expliquer la façon dont nous essayons
10 de recueillir l'information et de confirmer tout ceci. Nous étions allés
11 voir le président de Grude, le maire de Grude, et son affirmation
12 correspondait tout à fait bien avec ce que nous avions entendu plus tôt. M.
13 Prlic allait faire des recommandations et ces recommandations allaient être
14 ratifiées. Le commentaire que j'ai fait ici c'est qu'il semblait que le
15 parlement ratifiait plutôt que d'élire, les élections dans ces
16 circonstances-là n'étaient pas possibles pour permettre de donner la
17 validité à un président. Ce qui n'était pas tout à fait clair c'est que --
18 en fait, ce qui a été clair c'est qu'il y aurait un vote à l'intérieur de
19 la présidence qui aurait été possible, mais, en fait, ici on parle d'une
20 rectification c'est-à-dire de faire -- de donner un tampon, de donner son
21 accord plus tôt que de procéder à des élections démocratiques et légitimes.
22 Q. Passons au paragraphe 7, intitulé : "Evaluation." Alors, vous nous
23 donnez votre évaluation et vous dites que l'opération de Jozo Maric
24 démontre que Jadranko Prlic s'est établi en tant que président du
25 gouvernement de la CRHB, l'avenir pour les autres n'est peut-être pas si
26 sûr, si confirmé. Est-ce que vous pourriez nous dire quelque chose là-
27 dessus ?
28 R. C'était au début du mois de novembre, comme je l'ai dit un peu plus
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1 tôt, ce n'est qu'à la fin du mois de décembre que nous avions reçu une
2 ratification complète. J'envoie un signal disant qu'il y a une
3 ratification, mais qu'il n'y a pas de menace pour ce qui est de sa position
4 à lui en tant que -- lorsque le transfert de la -- entre les deux, donc, la
5 Communauté croate d'Herceg-Bosna en République croate d'Herceg-Bosna. Il y
6 avait des personnes, bien sûr, qui n'allaient pas survivre les transitions
7 d'une communauté d'intérêt en République -- soi-disant République.
8 Q. Un dernier aspect de ce document. Prenez de nouveau la première page,
9 je vous prie, et vous regardez ensemble l'entrée militaire. Armée Jozo
10 Maric semble également parler du massacre de Stupni Do et il dit que les
11 éléments externes avaient pris à l'attaque, et ensuite, il dit autre chose.
12 Est-ce que vous pourriez nous faire des commentaires sur ce qu'il a dit ici
13 ?
14 R. Pour être tout à fait clair, ce document dit : "Ceci condamne l'attaque
15 synchronisée par l'armée de Vares." Je ne vois pas la référence à laquelle
16 vous avez fait de Stupni Do.
17 Q. Excusez-moi, sur "Military," -- donc, le premier paragraphe, intitulé :
18 "Military," en anglais.
19 R. Ah bon, très bien, merci. Oui, effectivement, le 6 novembre était la
20 date. En fait, c'était deux semaines après l'incident à Stupni Do et comme
21 j'ai dit plus tôt, il y avait des versions très différentes et très
22 contradictoires de ce qui s'était passé. Nous pouvons voir ici très bien de
23 cette confirmation que j'ai dit un peu -- de ce que j'avais dit un peu plus
24 tôt que M. Prlic donne sa version des faits. Une autre personne a dit que
25 les éléments externes auraient pu faire référence aux Moudjahiddines, en
26 faisant référence peut-être aux Moudjahiddines. Donc, je voulais une
27 clarification -- une précision : est-ce qu'il voulait dire "Musulmans
28 croates," et il dit -- ou je dis qu'il dit que des éléments externes du HVO
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1 de Kakanj ou Kiseljak semblent être impliqués ? Donc, cela correspond tout
2 à fait à une information que nous avions reçu, c'est-à-dire que le massacre
3 du Stupni Do avait été commis par des éléments du HVO commandés par Ivica
4 Rajic, qui était le commandant de la Brigade de Kiseljak, de la région de
5 Kiseljak.
6 Q. Deux lignes plus bas on lit la chose suivante, le massacre était
7 l'excuse avait demandé l'armija et les attaques coordonnées du 2e Corps sur
8 Vares prouvent qu'ils étaient préparés. Que vouliez-vous dire par là ?
9 R. La poche de Vares était vulnérable militairement parlant et il y a eu
10 beaucoup de circulation, à savoir si les forces de l'ABiH, c'est-à-dire le
11 2e Corps basé à Tuzla, le 3e Corps basé à Zenica, s'ils allaient essayer de
12 reprendre ce territoire, parce qu'ils auraient eu besoin de justification
13 pour ceci; sinon, cela aurait eu des répercussions internationales
14 puisqu'au point de vue humanitaire, il y aurait eu des questions
15 importantes résultant de mouvement de population de Vares. Donc, c'était
16 cela que fait référence ce paragraphe. Donc, la population bosnienne croate
17 de Vares.
18 Q. Très bien. Passons maintenant au document suivant. C'est le document ou
19 la pièce 6382. Je répète, c'est le document 6382. Alors, un rapport
20 quotidien de la MOCE, rapport du CC Mostar en date du
21 3 novembre. Je ne sais pas si vous avez la date ?
22 R. Oui.
23 Q. Reconnaissez-vous ce document ?
24 R. Oui, c'est un document que j'ai rédigé.
25 Q. Monsieur, je vois qu'il y a certaines annotations sur ce document;
26 pourriez-vous nous expliquer ce qu'elles sont ?
27 R. Je peux seulement dire que ces annotations n'ont pas été faites par
28 moi-même, mais cela aurait été transmis de façon électronique. Donc, c'est
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1 quelqu'un qui a reçu ce document qui a placé ces annotations, mais ce n'est
2 certainement pas moi.
3 Q. Fort bien. Nous examinons la première page sous l'intitulé, politico,
4 politique, le premier paragraphe se lit comme suit, le HCC et M2, 3
5 rencontraient Ivan Bender du HCC.
6 R. Oui, c'est moi.
7 Q. La dernière phrase de ce paragraphe se lit comme suit, les nominations
8 actuelles avec l'exception de Mate Boban avaient été -- aient été faites
9 par intérim.
10 R. Je me suis rendu un peu plus tard qui est quoi -- qui était en position
11 de quoi. Donc, ces documents étaient écrits le
12 3 novembre. En fait, la question, s'agissant de Mate Boban et de son poste,
13 du poste qu'il a occupé, c'est que nous avions plus rumeurs, disons,
14 plusieurs choses différentes. La position de Mate Boban était ferme, et
15 pour les autres, je sais que --
16 Q. Alors, ici, on peut voir jusqu'à ce que Perica Jukic ne signe les
17 documents, c'est le représentant de Jadranko Prlic.
18 R. Le rôle de Perica Jukic, je crois qu'à l'époque, il était le président
19 de la Chambre des représentants et aussi, à ce moment-là, on a commencé à
20 parler de lui en tant que possible ministre de la Défense. Nous n'étions
21 pas tout à fait certain quel poste qu'il allait occuper. Ici, nous avons
22 une idée très claire de M. Bender disant que M. Jukic, en fait, avait la
23 possession de séniorité, la possession d'autorité, et avant qu'il n'est, en
24 fait, un aval constitutionnel. En fait, ce qui est arrivé plus tard c'est
25 que Jadranko Prlic gardait son pouvoir. Je ne crois pas que son poste
26 n'avait jamais été vraiment réellement menacé, mais il y a eu quelques
27 intérêts ici contradictoires.
28 Q. Je souhaiterais que l'on passe au document 6687, donc, 6687. C'est un
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1 rapport quotidien du CC Mostar, en date du 16 novembre 1993. Je ne sais pas
2 si vous avez le document sous les yeux ?
3 R. Oui.
4 Q. Reconnaissez-vous ce document ?
5 R. Oui. C'est un document que j'ai rédigé.
6 Q. Au point 1, sous l'intitulé : "Politique," le premier paragraphe, on
7 parle : "D'une réunion avec Slobodan Lovrenovic." Pourriez-vous me dire de
8 qui il s'agissait ?
9 R. Oui, c'est la personne à laquelle je faisais référence -- l'une des
10 personnes à laquelle je faisais référence qui est une très bonne source
11 d'information car il était le conseiller de presse de Mate Boban.
12 Q. Très bien. Il parle ou plutôt Lovrenovic avait dit que la Chambre des
13 représentants se réunira le 23 novembre 1993 et qu'ils donneront une
14 confirmation juridique pour la nomination -- enfin, pour Jadranko Prlic,
15 quant à la nomination des ministres. Pourriez-vous nous dire si c'est
16 quelque chose qui avait déjà été prévu ou bien non ?
17 R. Oui, nous avions une confirmation que cela avait déjà été planifié,
18 donc le 10 novembre, on nous avait dit que dans quatre jours, le 20
19 novembre d'ailleurs la réunion aura lieu.
20 Q. Très bien. En examinant la section qui suit ou la phrase qui suit, on
21 lit : "Lovrenovic a été -- a demandé si Prlic et Boban avaient la primauté
22 quant à la sélection des ministres." Prlic lui-même avait dit que :
23 "C'était son choix à lui, mais avec l'aval du président." Est-ce que vous
24 pourriez nous donner des commentaires ?
25 R. Encore une fois, excellent exemple de ceci. Nous avons essayé
26 d'entendre le lien entre Prlic et Boban qui a la primauté, en fait; est-ce
27 que c'est réellement Prlic, ou est-ce que Boban a quand même le dernier mot
28 ? Ici, l'on nous a plutôt dit que c'était le choix de M. Prlic,
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1 effectivement, sans oublier le fait que M. Boban aurait quand même son mot
2 à dire, à savoir de qui il s'agirait, donc, si j'avais compris ce qu'il y a
3 -- d'après ce que j'avais compris, c'est qu'il y aurait une collaboration
4 entre les deux et que M. Prlic ne pouvait pas nommer de son propre chef
5 ces personnes, qu'il avait quand même besoin de l'aval de Boban pour ceci.
6 Q. Merci. Très bien. Au bas de la page, la section suivante intitulé :
7 "Military," donc, vous pouvez peut-être passer à la page suivante. Au
8 premier paragraphe de cette page, on peut lire : "Le lieutenant général
9 Ante Roso a remplacé le général Praljak en tant que commandant." Ceci
10 correspond à votre souvenir et à ce que vous avez déjà déclaré, un peu plus
11 tôt ?
12 R. Oui, tout à fait. La succession du commandant suprême des forces du
13 HVO, nous savions très bien et il y a une déclaration qui nous avait dit --
14 enfin, nous savions que le général Praljak avait été remplacé par Ante
15 Roso. C'était un nouveau commandant qui se présentait et qui venait de
16 prendre sa place.
17 Q. Ensuite, nous pouvons lire ici que Praljak avait été -- avait reçu une
18 retraite honorable causée par la fatigue mentale et qu'il n'avait pas été
19 licencié.
20 Alors, juste quelques commentaires là-dessus et aussi le commentaire sur le
21 fait qu'on peut lire que Jadranko Prlic a rencontré Ante Roso pour dire
22 qu'une brochure a été donnée aux Unités du HVO étalant les Règlements
23 concernant les prisonniers de guerre, et cetera, et cetera. Est-ce que vous
24 voyez ce passage ?
25 R. Oui, je vois ceci ce que je ne peux pas vous dire à moins de ne le voir
26 nulle part -- quelque part ailleurs. Je ne sais pas quelle est la source de
27 cette information et ce que je dis ici c'est quelque chose qui nous
28 intéressait, en fait, c'est que nous avons une situation politique, d'une
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1 part, en train de se créer, et d'autre part, nous avons un nouveau
2 dirigeant militaire. Donc, ce qui nous intéressait c'était le lien qui
3 existait, bien sûr, entre l'armée et les dirigeants politiques. Il
4 semblerait ici que nous avons un nouveau commandant en train de
5 s'entretenir avec le président du gouvernement -- en train d'essayer
6 d'assurer que l'on observe les codes de la guerre, encore une fois,
7 essayant de donner plus de légitimité plus de légitimité à cette nouvelle
8 république qui était en train de se former.
9 Q. En tant que chef du CC Mostar, à cette époque-là, est-ce que vous
10 pourriez nous dire quelle était l'implication de Jadranko Prlic, s'agissant
11 de cet aspect ?
12 R. Pardon, quel aspect vous intéresse ?
13 Q. En fait, ce qui m'intéresse c'est le fait d'assurer que l'on se plie au
14 code de la guerre s'agissant de cette brochure.
15 R. Je crois que, si vous êtes en train de créer une nouvelle république,
16 ce qui est très important pour la communauté internationale c'est de faire
17 en sorte que le dirigeant politique ait au moins le commandement sur les
18 forces militaires, et il semblerait que nous avons ici une réunion faite
19 entre les deux dirigeants principaux de la structure -- des structures, un
20 dirigeant politique, un dirigeant militaire, pour faire justement ce qui
21 est écrit ici, c'est-à-dire il semblerait que jusqu'à cette date-là, il y
22 avait certaines -- un certain code de comportement en temps de guerre. Mais
23 ici, nous voyons maintenant, à nouveau, ceci marque un nouveau moment où
24 l'on veut s'assurer que les nouveaux codes soient mises en œuvre et que
25 l'on se plie à ces nouveaux codes de la guerre, donc, donne l'impression de
26 la structure des dirigeants politiques -- en train de parler aux dirigeants
27 militaires pour s'assurer que plus bas l'on tient compte de ces codes de la
28 guerre.
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1 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire -- est-ce que vous pourriez nous
2 expliquer quelle était la position adoptée par Jadranko Prlic -- ou plutôt,
3 la position qu'il occupait dans cette nouvelle République croate d'Herceg-
4 Bosna par rapport au poste qu'il occupait avant ?
5 R. C'était donc la même position. Le premier ministre de la République
6 croate ou de la Communauté croate s'est -- en fait, c'était la même chose.
7 Elle occupait le poste de président, mais c'était plus défini, c'était
8 quelque chose qui était plus sûr de façon juridique, plus crédible en tant
9 que participant, interlocuteur avec la République serbe de Bosnie aussi
10 pour essayer d'établir également une légitimité aux regards aux yeux de la
11 communauté internationale.
12 Q. Très bien. Maintenant, s'agissant du paragraphe 7, intitulé :
13 "Evaluation", "Assessment." Vous dites que l'information, qui nous a été
14 donnée par Lovrenovic, doit être confirmée, mais la déclaration que Kordic
15 et Valenta -- le fait qu'ils n'avaient pas un pouvoir exécutif est
16 important. Pourquoi est-ce que c'est important ?
17 R. Encore une fois, il faut comprendre quel était le rôle des dirigeants
18 de Bosnie centrale. Il y avait des spéculations différentes et on essayait
19 de spéculer et de comprendre ce qui se passait. Lorsque j'avais rencontré
20 les dirigeants supérieurs de Mostar et les équipes, par exemple, en Bosnie
21 centrale s'entretenaient avec M. Kordic et M. Valenta, et il y avait des
22 différentes versions quant aux rôles qu'ils allaient jouer, il semblerait
23 ici, s'agissant de M. Lovrenovic, que Kordic et Valenta n'allaient pas
24 avoir un pouvoir exécutif c'était très intéressant pour nous; sinon,
25 pourquoi pas c'est contraire au rapport que nous -- aux informations que
26 nous recevions d'autres sources ? Donc, nous voulions obtenir d'autres
27 informations plus d'informations, et c'est la raison pour laquelle nous
28 voulions comprendre exactement ce qui se passait.
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1 Q. Dans ce paragraphe, vous mentionnez d'une scission politique entre les
2 Croates de Bosnie centrale et ceux en Bosnie-Herzégovine, et que ceci
3 faisait l'objet d'un débat. Pourriez-vous, je vous prie, nous expliquer un
4 peu plus ce que cette scission, cette division voulait dire ?
5 R. De façon générale, encore une fois, je vais peut-être -- je vais peut-
6 être généraliser un peu mais si l'on se déplace de Mostar et si l'on se
7 rend peut-être vers Tuzla et en Bosnie centrale, à cet endroit -- là, dans
8 cette région-là, il y avait moins de certitude quant à la compréhension de
9 ce que l'avenir des Croates allait être. En fait, si une personne était un
10 Croate de Bosnie en Bosnie centrale, cette personne aurait été assez
11 vulnérable dans la région de Tuzla et ce n'était peut-être pas possible
12 d'adopter des positions qui auraient été dites, de façon si claire que les
13 personnes seraient extrêmement [inaudible] à Mostar et cette république.
14 C'est une république qui était assez incertaine quant à la concentration de
15 la Communauté croate qui avait une intégrité territoriale, et ensuite, je
16 crois que ces personnes se sentaient assez vulnérables. Ils avaient -- les
17 gens disaient, par exemple, si l'on se dirige vers trois républiques, une
18 solution de droits républiques, acceptées au niveau international, il
19 faudrait qu'il y ait des limites dessinées, et si vous êtes en Herzégovine
20 centrale, c'était très clair, vous seriez en République croate d'Herceg-
21 Bosna. Mais si vous viviez à Vares ou à d'autres endroits, la vie n'est pas
22 aussi certaine, et donc, cette différence était articulée et dites par des
23 différents dirigeants, indépendamment d'où ils se trouvaient.
24 Q. Merci. Est-ce qu'il a rencontré Jadranko Prlic ? Combien de fois en
25 tout, si vous pouviez nous donner une évaluation ?
26 R. Je dirais entre - je ne sais pas - huit à dix ou à 12 fois peut-être --
27 bon, entre huit à dix fois.
28 Q. C'était en tant que chef de CC Mostar ?
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1 R. Non, je dirais que c'était plus que cela puisque j'ai également eu des
2 échanges avec M. Prlic ultérieurement lorsque je suis devenu du centre
3 régional de l'ABiH. Je dirais qu'au cours de cette période, donc, entre
4 octobre et janvier, une période de quatre mois et pendant cette période,
5 j'ai dû le voir de six à huit fois environ, mais en fait, je ne le voyais
6 pas toutes les semaines, mais aux deux semaines à peu près.
7 Q. Lorsque vous aviez idée de changer de cri, plus tard, est-ce que
8 c'était en tant que chef du centre régional de Zenica ?
9 R. Oui. Sauf que le centre RC Zenica a changé de nom en RC BiH.
10 Q. Il était -- quel poste occupait-il, à l'époque ?
11 R. La Fédération avait été formée, il était encore membre senior de la
12 République croate d'Herzeg-Bosna, mais je crois qu'à ce moment-là, il était
13 devenu ministre des affaires étrangères de la Fédération.
14 Q. Après ceci, après avoir quitté la MOCE, pourriez-vous expliquer aux
15 Juges de la Chambre si vous aviez eu d'autres échanges avec M. Prlic ?
16 R. Oui. Je suis parti en 1995, j'ai quitté la MOCE, et ensuite, je suis
17 allé travailler pour les Nations Unies, et par la suite, j'ai essayé de
18 faire en sorte que les entreprises soient impliquées dans la
19 reconstruction, et il y avait une question de milliards de dollars pour
20 ceci. J'avais l'impression que j'étais au niveau de dirigeant. Les
21 entreprises, qui voulaient être -- qui voulaient investir leur argent,
22 avaient besoin d'avoir quelqu'un avec qu'il peut échanger. Donc, j'avais
23 créé une entreprise avec mes collègues pour essayer d'aider aux entreprises
24 de faire ce genre de travail, donc, c'est pour cela que j'avais dû
25 contacter plusieurs personnes avec lesquelles j'avais des contacts lorsque
26 j'étais au sein de la MOCE, et M. Prlic était l'une de ces personnes.
27 Q. Nous avons parlé brièvement d'Anto Valenta précédemment, et vous avez
28 déclaré l'avoir rencontré. Pourriez-vous dire aux Juges à peu près à quel
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1 moment vous l'avez rencontré ?
2 R. C'est quand j'étais chef du CC Travnik, disons que cela devait être en
3 juin -- enfin, entre juin et octobre. Je ne me souviens pas exactement
4 quand, mais en juin, juillet, août, ou septembre.
5 Q. Où l'avez-vous rencontré ?
6 R. Je l'ai rencontré au quartier général de la zone opérationnelle de
7 Bosnie centrale à Vitez.
8 Q. Pouvez-vous nous parler de la réunion que vous avez eue avec lui, de
9 quoi avez-vous parlé ?
10 R. Je l'ai rencontré à plusieurs reprises, mais lors d'une de ces réunions
11 en particulier, nous avons parlé de l'avenir de la Bosnie, et M. Valenta
12 m'a fait part de ses réflexions au sujet des déplacements de population --
13 il m'a parlé de ce qui s'était passé par le passé, mais de ce qu'il se
14 passerait de ce qu'il se passerait selon lui à l'avenir et qui permettrait
15 d'établir de manière claire les lignes de séparation entre les deux groupes
16 ethniques.
17 Q. Est-ce qu'il vous a montré des documents ?
18 R. Oui. Il a fait référence à un livre qu'il avait écrit -- on me l'a
19 montré, mais il n'y avait pas de traduction. Il m'a montré des cartes avec
20 des flèches illustrant des déplacements de population. Certaines cartes
21 étaient des cartes de la Bosnie-Herzégovine avec des déplacements de
22 population considérables, 100 000 personnes dans uns ensemble, 100 000 dans
23 l'autre, mais il y avait aussi des cartes plus détaillées sur ce qui devait
24 se passer en Bosnie centrale.
25 Q. Vous parlez d'une centaine de milliers de personnes qui se déplacent,
26 100 000 dans l'autre, à quoi faites-vous référence ?
27 R. Je ne sais pas si c'était exactement 100 000, mais cela correspondait à
28 beaucoup d'habitants. En fait, selon lui, l'avenir de la Bosnie-
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1 Herzégovine, ce n'était pas celui d'une -- d'un pays où les communautés
2 seraient mélangées et intégrées, mais un pays où il y aurait séparation et
3 mise en place de trois entités politiques, de trois Etats. C'était la façon
4 pour lui d'assurer la sécurité à l'avenir et que si -- pour ceci, il
5 fallait faire en sorte que ces régions soient purement pures du point de
6 vue ethniques, soient concentrées. Donc, il envisageait des déplacements de
7 croates de Bosnie vers des territoires détenus par les Croates, en
8 Herzégovine pour l'essentiel, pour étendre la Bosnie centrale. Il
9 envisageait des déplacements de musulmans hors de la Croatie, hors des
10 territoires serbes et croates, pour les concentrer autour du Sandzak à
11 Sarajevo, et il envisageait également d'autres déplacements de croates hors
12 des territoires serbes de Bosnie et vice-versa. Donc, ceci afin d'établir
13 trois états ethniquement purs.
14 Q. J'aimerais que nous examinions ensemble la pièce 00021. C'est le
15 premier document dans le classeur qui vous a été remis. Ne vous occupez pas
16 de la traduction et passez directement à l'original en B/C/S, s'il vous
17 plaît.
18 R. J'ai trouvé le document.
19 Q. Est-il exact qu'au cours de notre rencontre avant votre déposition,
20 vous avez eu l'occasion de parcourir ce document ?
21 R. Oui.
22 Q. De quoi s'agit-il ?
23 R. Il me semble qu'il s'agit d'une traduction du livre que j'ai évoqué il
24 y a quelques instants, celui de M. Valenta, et qui représente sa vision de
25 l'avenir.
26 Q. J'aimerais que vous consultiez l'original du document.
27 M. KARNAVAS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Cela ne me
28 gêne pas, bien entendu, que le Témoin 615 passe le document en tant que
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1 tel, mais d'abord, j'aimerais qu'on nous dise pourquoi on présente ce
2 document, quelles sont les bases qui le justifie. Est-ce que le témoin, à
3 ce moment-là quand il a rencontré M. Valenta, a eu une traduction intégrale
4 du livre ? Première chose.
5 Deuxième chose, si ce n'est pas le cas, est-ce que c'est la première
6 fois qu'il examine les passages qui sont ainsi fournis par l'Accusation ?
7 Si la réponse est oui, à ce moment-là, j'ai une objection.
8 Je m'oppose à ce qu'il fasse des commentaires au sujet de ce livre.
9 Il nous a dit ce que M. Valenta lui avait dit, mais lui demander maintenant
10 des observations au sujet d'extraits de ce livre sans qu'il ait eu la
11 possible de lire le livre dans son intégralité. Cela amoindrirait la
12 validité de sa déposition. Il faut placer toute cela dans son contexte.
13 Donc, peut-être que l'Accusation aura l'amabilité de nous présenter les
14 fondements de toutes ces questions.
15 M. KRUGER : [interprétation] Permettez-moi de répondre. Pour rassurer mon
16 confrère, nous n'avons pas l'intention de passer en revue de manière
17 détaillée le livre. Je présente ce livre au témoin
18 -- cette pièce au témoin juste pour m'assurer que c'est bien le livre dont
19 il s'agit, lorsqu'il nous a dit tout à l'heure qu'un livre lui avait été
20 montré.
21 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est bien dans ces conditions, et je
22 ne veux pas ici me lancer dans une discussion inutile, mais il faudrait que
23 le témoin nous dise si une version croate ou bosniaque nous a été montrée,
24 d'accord, mais lui montrer une traduction et lui dire : est-ce que c'est
25 bien ce qui vous a été montré ? A moins que vous ne puissiez montrer que ce
26 monsieur parle et comprend le B/C/S, peut le lire, je ne vois pas très bien
27 comment il peut répondre à cette question. Je ne m'oppose pas à ce que la
28 totalité du livre soit versée au dossier, je le répète.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kruger, posez votre question parce que, si
2 vous abordez le document 21, c'est qu'il y a une raison, et à mon avis,
3 bon, je vous laisse faire.
4 M. KRUGER : [interprétation] Merci.
5 Q. Vous nous avez dit que
6 M. Valenta vous avait également présenté des cartes. J'aimerais vous
7 demander de vous reporter à la page 43 de la version en B/C/S. J'ai une
8 question très simple à vous poser. À partir de la carte que vous voyez ici,
9 est-ce que vous vous souvenez -- est-ce que vous vous souvenez que M.
10 Valenta vous ait montré des cartes semblables, vous ait parlé de ces cartes
11 ?
12 R. Oui, c'est le genre de cartes qu'il m'a montré, tout à fait.
13 Q. J'aimerais que vous vous reportiez à la page 66. La carte qui se trouve
14 à la page 66. Vous souvenez-vous de cette carte en particulier ?
15 R. Oui. Cela correspond au genre de cartes qui m'ont été montrées ce jour-
16 là, avec des grandes flèches qui indiquent des déplacements de population.
17 Q. Merci. Nous n'allons plus parler de ce document pour l'instant, mais
18 une question encore au sujet de M. Valenta et de sa vision telle qu'il vous
19 l'a exposée. Sa vision, son point de vue, est-ce que vous l'avez entendu
20 évoquée par d'autres pendant vous étiez membre de la MOCE ?
21 R. Il a fait le même exposé à Jean-Pierre Thebault, qui était chef de
22 mission et je crois que la plupart des étrangers qui sont allés le voir ont
23 eu la possibilité de l'entendre exposer son point de vue. Je me souviens
24 qu'avant de voir M. Valenta j'ai rencontré Tihomir Blaskic, commandant de
25 la zone opérationnelle à cet endroit, et je lui ai dit que j'allais voir M.
26 Valenta. Là, il a eu un petit sourire entendu un petit -- de façon d'opiner
27 du chef, enfin, ce qui me voulait me dire : "C'est bonne chance." Il y
28 avait un certain nombre manque de respect qui se manifestait envers les
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1 idées ainsi exposées. Certains manques de respect de la part de ceux qui
2 étaient dans le même bâtiment où se trouvait son bureau.
3 Q. Parlons de Bruno Stojic. Vous nous dites que vous ne l'avez pas
4 rencontré directement ou en personne. Mais j'aimerais que nous examinions
5 ensemble la pièce 04083. Il s'agit d'un rapport de synthèse quotidien en
6 date du 10 août 1993, de l'équipe V2 de HCB Travnik, au RC de Zenica.
7 Premièrement, est-ce que vous vous souvenez de ce rapport ? Pouvez-vous
8 nous faire des observations à son sujet ?
9 R. Il s'agit d'un rapport que j'ai établi moi-même. Un rapport qui vient
10 du chef du CC de Travnik à l'intention du centre régional de Zenica.
11 Q. Fort bien. A la page 1, point 2, rubrique concernant les activités
12 politiques. Examinons le deuxième paragraphe. Ici, il est question de c'est
13 passé lors d'une réunion avec Pero Skopljak. Il a indiqué que M. Boban et
14 l'armée ne se faisait pas confiance mutuellement, et un peu plus bas, il
15 dit que l'on parle d'une division ou d'un différent entre Stojic et Boban
16 qui pourrait indiquer que les dirigeants commencent à souffrir des
17 répercussions des défaites du HVO. Est-ce que vous avez des observations à
18 faire à ce sujet ?
19 R. Là, on commence à voir se dessiner ce que j'ai évoqué précédemment au
20 sujet de la position de Boban. Je ne connaissais pas M. Stojic, enfin je
21 connaissais simplement son nom, son poste, sa position. Manifestement, il
22 est indiqué ici qu'il y a tension entre les deux distensions. Mais ce qui
23 est intéressant aussi c'est la cause de ces distensions, à savoir les
24 défaites subies par le HVO et la situation militaire en Bosnie centrale le
25 10 août n'était favorable. Il y a eu des combats à Busovaca dans la vallée
26 de la Vrbas et de la Lasva en janvier. Ça avait été apaisé quelques temps
27 par ces commissions conjointes. Puis il avait eu des combats entre les
28 Croates et les Musulmans en avril. Et au niveau tactique en Bosnie centrale
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1 c'était l'armija. Le HVO n'avait pas enregistré les succès militaires
2 espérés. Je pense que le sentiment en Bosnie centrale c'est que les forces
3 du HVO auraient dû gagner plus de territoires. Ça n'avait pas été le cas.
4 Au contraire ils avaient perdu du territoire. Ça a eu un impact sur la
5 position de M. Boban.
6 Q. Passons maintenant, je vous prie, au général Praljak. Quand avez-vous
7 rencontré pour la première fois le général Praljak ?
8 R. Je l'ai rencontré alors que j'étais à la tête du CC de Travnik. Je l'ai
9 rencontré par hasard quand je suis allé voir le QG de la Brigade de Rama à
10 Prozor, et là, j'ai rencontré le général Praljak par hasard.
11 Q. Pouvez-vous nous dire à peu près à quel moment cela s'est produit ?
12 R. C'était vers le mois d'août ou peut-être au mois de juillet 1993.
13 Q. Qu'avez-vous pensé du général Praljak en tant qu'homme à ce moment-là ?
14 R. C'était quelqu'un de très facile -- de contact facile, très abordable,
15 il nous a bien reçu. Il a répondu tout à fait directement à nos questions.
16 En fait, c'était très différent presque contraire à ce qu'on constate chez
17 les militaires d'ordinaire qui sont très réticents à l'idée de fournir des
18 informations tout à fait le contraire avec le général Praljak. Il était
19 très bavard au sujet de son rôle et puis d'autres questions de caractère
20 plus général.
21 Q. Est-ce qu'il vous a parlé de son parcours personnel ?
22 R. Oui. Il m'a dit qu'il avait servi dans les rangs de la HV à Vukovar. Il
23 m'a expliqué qu'il avait également fait du théâtre enfin des activités dans
24 le théâtre qu'il avait été directeur ou producteur peut-être, il m'a
25 également expliqué qu'il avait fait de la psychologie.
26 Q. Est-ce que vous avez parlé au général Praljak de son poste à ce moment-
27 là ?
28 R. Oui. Il m'a dit qu'il commandait et que le général Petkovic ne l'était
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1 pas. C'est la première fois que je rencontrais le général Praljak, et
2 d'ailleurs, je crois que la plupart des représentants de la communauté
3 internationale ne l'avaient pas rencontré non plus. Donc le monde
4 s'interrogeait. Est-ce que c'était lui ou Petkovic qui commandait, et il a
5 dit très clairement que c'était Petkovic était sous ses ordres. Je crois
6 qu'il s'est présenté comme étant le chef d'état-major.
7 Q. Est-ce qu'il a été question des relations entre le général Petkovic et
8 Mate Boban ? Est-ce que vous vous en souvenez ?
9 R. Non, pas comme ça au débotté.
10 Q. Est-ce que vous avez parlé de l'aide humanitaire avec le général
11 Praljak ?
12 R. Oui. J'en ai profité pour aborder toute une série de questions, la
13 liberté de la circulation notamment, la liberté de circulation pour la
14 MOCE, pour les représentants des Nations Unies, et en particulier pour les
15 convois du HCR des Nations Unies. Le général Praljak a été très clair il
16 m'a dit qu'il fallait trouver une solution militaire à la situation et que
17 tous les moyens nécessaires devaient être mis en œuvre, et il m'a dit que
18 cela inclurait l'interception de convois, et la coupure de l'alimentation
19 en eau.
20 Q. Interception ou arrêt des convois allant où et interruption de
21 l'approvisionnement en eau à qui ?
22 R. L'approvisionnement en eau, en électricité, c'était quelque chose qui -
23 - c'était une question très délicate puisque forcément c'était un des
24 groupes qui contrôlait l'approvisionnement. Donc c'était un facteur qui
25 entrait souvent en ligne de compte. Par exemple, il y avait les sources de
26 l'approvisionnement en eau de Zenica pouvait être interrompu, mais il faut
27 savoir que ça approvisionnait non seulement Zenica, mais aussi les Croates.
28 C'était toujours un outil qui était utilisé tout comme d'ailleurs l'aide
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1 humanitaire parce qu'on reconnaissait, effectivement, que certaines poches
2 isolées avaient besoin d'aide humanitaire mais on s'inquiétait, on se
3 demandait si cette aide humanitaire n'allait pas aussi être destinée à des
4 unités militaires aussi bien que la population civile. Le général Praljak
5 me disait que tous les moyens devaient être mis en œuvre pour vaincre
6 l'armija, et que ceci pouvait impliquer l'interruption des convois ou
7 l'arrêt des convois et l'interruption de l'approvisionnement en eau.
8 Q. Est-ce que le général Praljak vous a parlé de l'armée de la République
9 de Croatie -- de leurs soldats, ou de quelque chose de ce style ?
10 R. Oui. Je crois que dans les jours qui ont suivi mon arrivée en Bosnie je
11 me suis rendu compte qu'une des préoccupations essentielles c'était
12 l'arrivée d'éléments extérieurs. Que ce soit des Moudjahiddines ou autres
13 et on a régulièrement également parlé de l'intervention d'élément de la HV,
14 c'est-à-dire de troupes croates en Bosnie. Nous avons systématiquement
15 essayé d'en savoir un peu plus, le général Praljak m'a dit très clairement
16 que la HV n'avait aucune
17 -- n'avait rien à voir en Bosnie et n'intervenait pas en Bosnie.
18 Quand j'ai dit que certains soldats portaient des insignes de la HV, il m'a
19 dit que tout comme lui-même c'étaient des gens qui étaient nés en Bosnie,
20 mais qui avaient peut-être servi dans les rangs de l'armée croate et qui
21 étaient revenus sur totalement individuel, personnel en Bosnie pour
22 soutenir les Croates de Bosnie et leurs familles. C'était l'explication
23 qu'il me donnait. Il s'agissait de cas isolés, de cas individuels, ce n'est
24 pas d'unité.
25 Q. La présence d'éléments de HV en Bosnie à l'époque; est-ce que c'était
26 quelque chose qui intéressait la MOCE ?
27 R. Nous avions reçu des informations de nombreuses sources, notamment de
28 l'armija essentiellement de l'armija d'ailleurs, selon lesquelles il y
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1 avait différentes unités à différents endroits. Nous avons enquêté sur la
2 chose à plusieurs reprises, mais jamais nous ne sommes parvenus à obtenir
3 des informations très claires jusqu'à ce que moi-même, en janvier 1994 --
4 ou peut-être début février - en tout cas, je ne me souvienne pas exactement
5 de la date exacte, mais je revienne en Herzégovine. J'avais participé à une
6 réunion en Bosnie centrale, j'étais accompagné du chef du centre régional,
7 Martin Garrod. Nous étions sur les itinéraires principaux, diamant et
8 triangle. Nous avons été contraints de nous mettre sur le bord de la route
9 pour laisser passer un convoi militaire qui allait vers Prozor. C'est la
10 première fois que j'ai vu de manière indéniable, une unité constituée et on
11 ne faisait même pas -- pratiquement pas semblant de se cacher. C'était
12 manifestement une Unité de la HV. J'ai fait un rapport sur ce que j'avais
13 vu.
14 Q. Nous y reviendrons un peu plus tard. J'aimerais revenir à ma question
15 initiale. La présence d'éléments de la HV et d'unités de la HV en Bosnie,
16 est-ce que cette question faisait l'objet d'un suivi actif de la part de la
17 MOCE ?
18 R. Vous parlez bien de la HV ?
19 Q. Oui, de la HV -- oui, oui, la HV; est-ce que la présence de la HV
20 c'était quelque chose qui intéressait la MOCE ?
21 R. Oui, effectivement, et pas uniquement la MOCE, mais aussi les Nations
22 Unies, la communauté internationale, parce que cela aurait signifié qu'il y
23 avait participation, intervention d'un autre état reconnu par la communauté
24 internationale et de ces forces armées en Bosnie-Herzégovine.
25 Q. Restons-en. Parlons toujours de votre première rencontre avec le
26 général Praljak. Est-ce qu'à ce moment-là, vous avez parlé de la stratégie
27 du HVO en Bosnie centrale, des objectifs du HVO en Bosnie centrale ?
28 R. Oui. On s'était beaucoup interrogé, on pensait que le HVO allait peut-
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1 être lancer une offensive à partir de Prozor -- de la ligne de Prozor, soit
2 jusqu'à Gornji Vakuf pour s'assurer le contrôle de certains itinéraires,
3 soit jusqu'à la zone de Kakanj, ce qu'on appelait la zone de Kakanj. Cela
4 faisait l'objet de nombreuses conjectures. Moi et beaucoup d'autres avons
5 pensé que ce n'était pas possible, c'était très peu probable parce que le
6 HVO ne s'était pas montré capable de lancer ce type d'offensive militaire.
7 Chaque fois qu'ils avaient enregistré des réussites militaires en Bosnie
8 centrale, ils avaient également enregistré des revers. Il fallait donc une
9 certaine, une dynamique différente pour modifier cet équilibre d'effort.
10 C'est la raison pour laquelle l'implication de la HV revêtait une telle
11 importance.
12 Mais à l'époque la communauté internationale réfléchissait à une solution
13 reposant sur trois républiques en Bosnie-Herzégovine. Il faut s'en
14 souvenir. M. Valenta disait avec sa théorie de déplacement de population,
15 s'il faut constituer cette république, il faut bien qu'il y ait des
16 frontières de délimitation. Le général Praljak m'a dit très clairement
17 qu'il ne serait pas prêt à accepter une République croate où il n'y aurait
18 pas Vitez et la vallée de Lasva en Herzégovine. Il a également dit très
19 clairement que, dans le cadre de l'accord qu'on pourrait conclure, Tuzla et
20 Vares pourraient être cédés à l'une des autres républiques.
21 Q. Est-ce qu'à ce moment-là, vous avez parlé au général Praljak la
22 possibilité d'avoir accès aux familles musulmanes de Prozor ?
23 R. Oui, dans le cadre du rôle qui était le nôtre, nous devions aller
24 rendre visite aux communautés isolées en Bosnie centrale, que ce soit les
25 Croates de Bosnie ou les communautés musulmanes. Etant donné que, dès le
26 premier jour, je travaillais sur la zone de Prozor, dès mon arrivée en
27 Bosnie, je m'intéressais beaucoup à la situation des Musulmans de Prozor.
28 De manière régulière, nous avions essayé d'avoir accès à l'imam de Prozor
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1 et nous étions parvenus parfois. Nous connaissions leur situation, leur
2 difficulté et nous le manifestions clairement, mais cela n'a pas toujours
3 été facile. Je crois qu'une de mes équipes n'avait pas pu aller voir
4 l'imam. Je lui ai donc posé la question sans autre forme de procès et il a
5 dit qu'il me garantirait la possibilité d'aller voir les prisonniers de
6 guerre et l'imam.
7 Q. Est-ce que ceci s'est passé ?
8 R. Oui, je me souviens bien après cette discussion nous avons pu aller
9 voir l'imam.
10 Q. Et les prisonniers de guerre ?
11 R. Les prisonniers de guerre, cela c'était une question plus délicate.
12 L'accès au camp de prisonniers de guerre et au camp dit de concentration
13 c'est quelque chose qui, bien entendu, intéressait la MOCE mais cela le
14 relevait. Il s'agissait essentiellement plutôt de permettre à la Croix-
15 Rouge -- au comité international de la Croix-Rouge de pouvoir avoir des
16 contacts avec ces prisonniers. Nous nous sommes beaucoup intéressés à sa
17 question, mais il était très rare que les Musulmans, les forces de l'armija
18 ou le HVO nous permettent d'aller voir leurs prisonniers respectifs.
19 Parfois c'était possible, moi-même j'y suis parvenu à Gromiljak. À
20 Gromiljak, j'ai vu -- j'ai visité un camp et j'ai fait en sorte que dès je
21 suis devenu CC chef du CC de Mostar, toutes mes équipes puissent aller
22 régulièrement dans certains camps. Mais ce n'a pas souvent été le cas. Ces
23 tentatives n'ont été couronnées que rarement de succès.
24 Q. Après cette première réunion, est-ce que vous avez rencontré le général
25 Praljak à nouveau ?
26 R. Oui, oui, je l'ai rencontré au nord de Prozor, au nord de la ligne de
27 front sur la crête de Makljen. Alors, j'essaie de me souvenir pourquoi
28 j'étais là, mais je crois que c'était parce qu'on pensait qu'il y avait des
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1 forces qui étaient en train de se rassembler pour lancer une offensive. Je
2 l'ai rencontré avec un observateur des Nations Unies, dont je ne me
3 souviens pas du nom de famille. Je me souviens de son prénom, c'était
4 Randy, c'était un Américain. On a parlé avec lui donc je ne me souviens pas
5 exactement de la nature de cette discussion. Une fois encore, une
6 discussion très décontractée, et il était très ouvert dans ses réponses
7 aucune M. KRUGER : [interprétation] Est-ce que j'ai encore le temps
8 d'interroger le témoin sur un document ? Est-ce que nous devons faire la
9 pause ?
10 M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]
11 M. KRUGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Q. J'aimerais donc que nous examinions le document 6244. Il s'agit d'un
13 résumé de synthèse quotidien qui vient de la MOCE de CC Mostar en date du
14 29 octobre 1993. Est-ce que ce rapport a été établi par vos soins ?
15 R. Il ne porte pas ma signature, mais je crois que c'est un rapport qui a
16 été établi par moi-même.
17 Q. J'aimerais que nous nous reportions rapidement à la rubrique numéro 5,
18 à la première page, aide humanitaire. Il est question d'une réunion avec le
19 général Praljak du HVO et de l'ABiH. Cette réunion était prévue pour
20 aujourd'hui, elle a été -- elle devait se dérouler à l'initiative du HVO,
21 mais elle a été annulée parce que Pasalic a refusé d'y participer. Vous en
22 souvenez-vous ?
23 R. Excusez-moi. Je me suis trompé, j'ai examiné le document 6 -- j'ai
24 examiné le mauvais document. Je vois qu'en fait, c'est le document 6244 que
25 je devais examiner.
26 Q. Oui, 6244, excusez-moi.
27 R. Oui, c'est bien moi qui ai signé ce document, c'est mon rapport.
28 Q. La rubrique concernant l'aide humanitaire, dernier paragraphe, en bas
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1 de la page, on voit qu'il est question donc d'une réunion qui devait avoir
2 lieu entre Praljak et l'armée de Bosnie et la Bosnie-Herzégovine. Cette
3 réunion a été annulée parce que Pasalic a refusé d'y participer ?
4 R. Oui. A la fin octobre, nous pensions que c'était le général Praljak
5 qu'il fallait voir pour résoudre la question des hélicoptères. Il est
6 intéressant de constater qu'il semble que le HVO souhaitait que cette
7 réunion ait lieu, mais que cette fois, c'est le général Pasalic qui ne
8 voulait pas. Ceci je pense illustre à quel point pour ce qui est des
9 négociations -- enfin, l'importance qu'il avait cet homme pour tout ce qui
10 concernait les échanges de prisonniers, et cetera, les négociations,
11 notamment.
12 Q. Sous la rubrique politique, il est question d'une réunion avec M.
13 Markovic qui est reportée, est-ce que vous connaissiez
14 M. Markovic ?
15 R. Oui. Le maire de Stolac.
16 Q. Vous l'avez rencontré ?
17 R. Oui.
18 Q. Pero Markovic ?
19 R. Oui, je l'ai rencontré, mais pas cette fois-là.
20 M. KRUGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Il est moins 20, nous reprendrons à
22 18 heures.
23 --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.
24 --- L'audience est reprise à 18 heures 01.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. Je vais demander à
26 parler à M. le Greffier pour un numéro IC pour les listes.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 La réponse de l'Accusation et la pièce versée par le truchement du Témoin
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1 BC par la première défense de M. Prlic portera désormais le numéro IC 575
2 sous pli scellé.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
4 Je redonne la parole à l'Accusation.
5 M. KRUGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 Q. Monsieur le Témoin, voulez-vous bien examiner la pièce 6731, 6731. Je
7 vois que vous voulez intervenir ?
8 R. Oui. Parce que c'est un peu tiré de son contexte ce que je veux dire.
9 Mais avant de commencer ici je viens de me souvenir du nom de l'observateur
10 suédois. C'était M. Junhov et c'est lui que j'ai remplacé lorsque j'ai pris
11 fonction au HC -- comme chef du CC Travnik. Je vais vous l'épeler J-u-n-h-
12 o-v.
13 Q. Mais ça me rappelle quelque chose. Le chef de la mission, l'ambassadeur
14 belge, savez-vous comment épeler son nom pour que tout soit clair au compte
15 rendu d'audience.
16 R. J'espère qu'il ne m'écoute pas. Je pense que ça s'écrit d-a en
17 minuscule, puis on a B-a-e-n-s-t.
18 Q. Merci. Est-ce que vous avez sous les yeux la pièce 6731.
19 R. Oui.
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si on prend la peine d'épeler, ligne
21 11, vous avez dit da Baenst. Est-ce que ce n'est pas plutôt "de," parce que
22 "da," ça ne me parait pas très correct.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis d'accord avec vous. Oui, je pense que
24 ce serait mieux "de," mais -- c'est pour ça que j'avais hésité à m'engager.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Nous avons tous nos hésitations,
26 maintenant, toutes les options sont ouvertes, sont possibles. Poursuivez,
27 Monsieur Kruger.
28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
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1 M. KRUGER : [interprétation]
2 Q. C'est un rapport quotidien du CC Mostar concernant le 18 novembre 1993,
3 vous le reconnaissez ce rapport ?
4 R. Oui. C'est moi qui l'ai écrit.
5 Q. Examinons si vous le voulez bien la rubrique intitulée politique, là on
6 dit HCC, c'est vous chef du CC du centre régional ai rencontré Slobodan
7 Bozic par contre pour un déjeuner qui a confirmé effectivement la
8 nomination ?
9 R. Bien, ça répond -- ça annonce le départ de Praljak de son poste de
10 commandant de chef suprême et nous avons maintenant le nom de son
11 successeur.
12 Q. Prenez maintenant la rubrique humanitaire, cinquième paragraphe,
13 deuxième alinéa, apparemment la question des hélicoptères n'est pas
14 résolue. On dit que : les hélicoptères se trouvent à Medjugorje.
15 R. Oui, je vous ai dit que je ne me souvenais pas. Bon. Ça m'étonne parce
16 que ça devrait être vraiment gravé de façon indélébile dans ma mémoire et
17 effectivement c'était Medjugorje.
18 Q. Je vous remercie.
19 Il y avait une évaluation qui avait été faite à savoir que
20 M. Praljak avait quitté son poste pour des raisons de santé, c'est ce que
21 nous avons vu dans un document précédent. Est-ce que vous partagez cet
22 avis, ou est-ce que vous auriez un commentaire à formuler à cet égard ?
23 R. Nous n'avons reçu aucune indication pour dire si c'était,
24 effectivement, pour des raisons de santé ou pas. Ce qui est intéressant
25 c'est qu'il y avait eu un changement au commandement et quand j'ai
26 rencontré Ante Roso, j'ai été très impressionné par sa stature militaire.
27 C'était visible. Nous avions à faire à un chef militaire sérieux. Bon. Ce
28 n'est pas bien sûr pour minimiser le général Praljak, mais le ton était
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1 différent. Le général Praljak avait servi dans l'armée, mais c'est lui-même
2 qui me l'a dit et il n'était pas un officier de carrière ayant gravi chacun
3 des échelons de la hiérarchie militaire pour arriver au poste où il est
4 arrivé. Ante Roso m'a donné son parcours à une réunion ultérieure et le
5 port qu'il avait émanait beaucoup de confiance de l'autorité dont il était
6 investi en tant que chef militaire. Mais je ne savais pas pourquoi, M.
7 Praljak était parti. Je n'ai que des suppositions.
8 Q. Examinons maintenant M. Pusic. Vous avez dit de lui que vous l'aviez
9 rencontré fin 1993. On serait dans la deuxième moitié de cette année-là.
10 Pourriez-vous donner aux Juges une idée vu que vous avez eu des contacts
11 avec lui de l'autorité qu'il avait peut-être en matière d'échange de
12 prisonniers, puisqu'il était chef de ce bureau ?
13 R. Oui, M. Pusic a été un des premiers dirigeants croates de Bosnie que
14 j'ai rencontré. C'est Jesus Amatriain qui me l'a présenté et il m'a été
15 présenté M. Pusic comme étant la personne qui contrôlait les échanges de
16 prisonniers, et je pense qu'il était ministre, le ministre de tutelle pour
17 ces échanges de prisonniers. C'est comme ça que je l'ai perçu. Dans toutes
18 les réunions que nous avons eues, elles concernaient les déplacements de
19 personnes. Ça allait plus loin que les simples échanges de prisonniers
20 parce qu'il y avait aussi le déplacement de Croates de Bosnie qui venaient
21 de Bosnie centrale en passant par des territoires tenus par les Serbes. Et
22 là aussi ceci concernait M. Pusic.
23 Q. Est-ce que -- vos équipes de la MOCE, est-ce qu'elles ont suivi les
24 mouvements des Croates de Bosnie depuis la Bosnie
25 centrale ?
26 R. Uniquement au point d'entrée en Bosnie-Herzégovine, donc elles n'ont
27 pas suivi le déplacement dans les territoires tenus par les Serbes. Je ne
28 me souviens pas d'avoir vu des [inaudible]. A part à Vares, oui, je sais
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1 que là c'était une région où les Croates de Bosnie -- dont venaient les
2 régions -- les Croates de Bosnie et sont montés dans des bus, ils sont
3 partis. Je vous ai parlé aussi d'arriver à Celebici, et au nord, il y avait
4 notamment Stolac comme point d'entrée.
5 Q. Ces déplacements de civils, pourquoi est-ce qu'ils intéressaient la
6 MOCE ?
7 R. Nous avions plusieurs préoccupations, d'abord d'ordre humanitaire. Ce
8 sont des nombres assez importants. Quand vous avez
9 5 000 personnes qui quittent leurs foyers de Bosnie centrale qui arrivent
10 quelque part, elles ont besoin d'aide. Elles ont besoin d'une destination,
11 donc, il y avait la facette humanitaire. Mais on ne pouvait pas s'empêcher
12 de voir quelles étaient les retombées politiques de ce déplacement surtout
13 quand on avait discuté avec certains dirigeants de mouvement de population.
14 Ils s'intéressaient dès lors à savoir si la Communauté croate, elle, était
15 attirée ou dans un territoire particulier pour qu'elle parte de zones plus
16 vulnérables.
17 Q. Quand est-il de la possibilité de voir des détenus qui se seraient
18 trouvés dans des lieux de détenus du HVO ? Je parle de détenus musulmans.
19 Est-ce que la MOCE s'est intéressé aussi à ces questions ?
20 R. Me permettez-vous d'ajouter un dernier élément à la dernière question.
21 Ça peut être intéressant. En ce qui concerne le déplacement, les mouvements
22 de population. Ça indiquait aussi qu'il y avait un réseau, une connexion,
23 une coopération entre les Serbes et les Croates de Bosnie. Ces mouvements
24 n'auraient pas été possibles sans cette coopération, ce qui nous
25 intéressait aussi. Maintenant je réponds à votre dernière question qui
26 portait sur l'accès aux détenus. Oui, nous avons soulevé cette question
27 auprès de M. Pusic. Ça toujours été une question que nous avons posée -- la
28 communauté internationale a posé de façon générale.
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1 Q. Est-ce que vous avez soulevé cette question avec, par exemple, Jadranko
2 Prlic ?
3 R. Oui. Mais je me souviens fort bien qu'il m'a dit de m'adresser à M.
4 Pusic qui pourrait répondre à mes questions.
5 Q. Veuillez examiner la pièce 5976, 5976. C'est un document qui vient du
6 CC Mostar adressé au QG de Zagreb. Synthèse quotidienne concernant le 20
7 octobre 1993. Vous reconnaissez ce document ?
8 R. Oui. Document de la MOCE envoyé par le CC Mostar. C'est un résumé
9 quotidien. Ça allait surtout au centre région de Zenica. Mais si je vois la
10 date, celle du 20 octobre, il y a plusieurs autres signes qui me disent que
11 je n'ai pas écrit ce rapport.
12 Q. A la fin, on voit : "Salutations, Jesus Amatriain et Philip
13 Watkins." On voit : "Chef du CC et HCC désigné Mostar."
14 R. Oui. Il est probable que ce soit lui qui a écrit ce rapport. Ce n'est
15 pas moi en tout cas.
16 Q. Fort bien. Nous allons l'aborder très brièvement au premier paragraphe,
17 la rubrique politique tout d'abord, A : "HCC et HCC désigné ont rencontré
18 M. Culjak, cet après-midi," est-il dit, et puis, commentaire un peu plus
19 loin : "Uniquement pour vous présenter vous, Philip Watkins." Est-ce que
20 c'est exact ?
21 R. Oui.
22 Q. Page suivante au point 5, questions humanitaires, C, activités, on fait
23 la référence au : "Chef du CC et à celui qui va le remplacer et qui ont
24 prévu une réunion avec M. Pusic sur la rive ouest de Mostar. Lorsque nous
25 sommes arrivés, il n'était pas là." Le Dr Lugonja, là, on fait état de ce
26 qu'il a dit. Avez-vous un commentaire ? Vous vous souvenez de cela ?
27 R. Oui, c'est intéressant, et peut-être cela va éclairer davantage quelque
28 chose que j'ai dit auparavant. M. Pusic a été sans nul doute un des
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1 premiers Croates de Bosnie que j'ai vu. Je me souviens avoir été en
2 compagnie de Jesus. Je pense que j'ai fini par rencontré M. Pusic j'étais
3 seul, mais cette fois-là, mentionné ici, nous y sommes allés mais il était
4 absent, et nous avons rencontré son adjoint.
5 Q. Avez-vous des informations à propos de l'échange de prisonniers qui
6 était prévu ce jour-là ?
7 R. Non, je ne sais qu'une chose générale, à savoir qu'il y avait un niveau
8 élevé des tentatives déployées par le CICR de négocier des échanges de
9 grande envergure de prisonniers de guerre, mais il y avait toujours des
10 échanges qui se passaient au niveau local. Certains étaient sanctionnés par
11 le CICR, d'autres étaient supervisés par la MOCE, parfois pas du tout,
12 donc, quelquefois c'était simplement quelque chose qui était arrangé entre
13 les parties belligérantes. Tout ce que je sais, bon, que ça s'est passé et
14 ce n'était pas quelque chose d'inusité.
15 Q. Puisque vous avez soulevé cette question, vous pourriez peut-être en
16 quelques mots donner une idée aux Juges de ce que pensait la communauté
17 internationale de l'organisation locale ou internationale donc ont
18 coordonné d'échanges de prisonniers ?
19 R. L'avis c'était que c'était une mesure favorable pour renforcer la
20 confiance. Nous n'avons eu de cesse de soulever cette question. Si on
21 pouvait essayer de négocier un échange de prisonniers, ça voulait dire
22 qu'il y avait un des éléments de la -- qui contribuait à cette tension qui
23 disparaissait. Manifestement, c'était surtout la responsabilité du CICR qui
24 était régi par certaines règles sur les modalités de libération de
25 prisonniers sur lieux où pouvaient aller ces prisonniers. Par exemple, le
26 CICR a eu du mal à organiser des échanges. Si vous aviez des prisonniers
27 qui sont en captivité, mais qui se rendaient dans une zone où ils seraient
28 de nouveau en situation de vulnérabilité, ça c'était difficile pour le
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1 CICR, même dans la Bosnie, a confronté le CICR avec d'énormes difficultés
2 parce qu'il y avait des poches. Donc, si on était libéré, disons si vous
3 aviez un Musulman de Bosnie qui était relâché et qui allait dans une zone
4 tenue par les Musulmans, il n'était quand même pas toujours en sécurité.
5 Donc, c'était difficile. Mais on estimait que c'était quand même cette
6 organisation qui pouvait le mieux se charger de la question à un niveau
7 plus élevé.
8 Q. Examinons la pièce 7012. 7012. Ici aussi, c'est un résumé quotidien du
9 CC à Mostar, la date est celle du 2 décembre 1993. Ce qui est intéressant
10 ici c'est que même si vous êtes chef du CC Mostar. Regardez à la dernière
11 page, on voit le nom de Roger Castle. Pourquoi ?
12 R. Manifestement, je n'étais pas là. Je ne m'en souviens plus pourquoi.
13 Peut-être que j'étais à une réunion ou ailleurs, mais Roger Castle c'était
14 un observateur britannique. Il faisait partie de Mike 1, qui d'habitude,
15 était basé à Jablanica qui couvrait cette région de Jablanica et de Konjic.
16 Il se fait que ce jour-là c'est lui qui a écrit le rapport quotidien pour
17 le CC Mostar.
18 Q. Si nous prenons la page 1D, situation politique, auriez-vous un
19 commentaire, notamment sur le milieu du deuxième paragraphe, on y fait
20 référence à M. John Bryan? On dit que : "M3 a rencontré
21 M. John Bryan, on fait état du début d'un échange de blessés ou de victimes
22 à Mostar qui c'est bien passé jusqu'à présent." Puis, on voit plus loin,
23 que : "M. John Bryan espère que cet échange sera couronné de succès et
24 ouvrira la voie pour de nouveaux échanges de prisonniers et la libération
25 des hélicoptères." Vous voyez ?
26 R. Apparemment, c'est une initiative entreprise par le CICR pour mettre ce
27 processus d'échange de prisonniers en branle, mais afin que ça prenne de
28 l'envergure de voir que ni les Nations unies ni la MOCE ne participent à
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1 cela, rien de nature à éveiller le soupçon. C'est tout à fait normal
2 puisque, manifestement, c'était le rôle du CICR et ici, quelquefois on
3 partageait des informations. John Bryan nous informe de quelque chose que
4 fait le CICR. On dit ici que
5 M. Pusic est le chef, non pas ministre, comme j'avais dit, mais chef de la
6 Commission chargée des Echanges de prisonniers.
7 Q. Il y a un autre nom ou d'autres noms qui sont mentionnés ici. Nous
8 pourrions peut-être ralentir dans l'intérêt des interprètes.
9 Voyons les autres noms qui sont mentionnés, il y a celui de
10 M. Pusic, mais aussi le nom de M. Ivo Sandrk, Tomo Sakota et
11 M. Barbaric. Vous les connaissiez ces gens ?
12 R. Je ne connais pas Ivo Sandrk, je ne connais pas Tomo Sakota. M.
13 Barbaric dit quelque chose, mais c'est tout ce que je peux dire. Je connais
14 M. Dziho, qui est le président des échanges pour l'ABiH.
15 Q. Le document qui suit juste celui-ci dans la liasse 07213.
16 R. Permettez-moi de vous dire que je connais aussi
17 M. Alikadic, pour ce qui est des noms.
18 Q. Document 7213, date 16 décembre. C'est un résumé quotidien qui parle de
19 CC Mostar Est, adressé au QG de Zagreb. Vous le reconnaissez ce rapport ?
20 R. Oui, je crois que c'est un rapport que j'ai rédigé.
21 Q. Pourriez-vous je vous prie prendre le paragraphe 5 ou plutôt consulter
22 le paragraphe 5 sous l'intitulé humanitaire. On peut lire : "Berko Pusic,
23 chef croate de l'échange des prisonniers de guerre, avait reçu un fax du
24 CICR disant qu'il ne participerait pas aux libérations des prisonniers
25 musulmans mais Pusic avait demandé au SpaBat de lui donner son soutien pour
26 ce qui est de déplacer les prisonniers de guerre de Gabela pour les
27 déplacer à Jablanica."
28 R. Oui, en fait, Mike 9 c'est moi. Je me souviens bien de ceci, la date
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1 est intéressante puisque c'est un événement qui s'est déroulé après que
2 Mate Boban eu annoncé qu'il avait l'intention de libérer unilatéralement
3 les prisonniers de guerre. Donc, ceci était un incident précis pour lequel
4 le CICR avait dit qu'il ne prendrait pas part avant que la question ne soit
5 résolue. Mais M. Pusic voulait insister, pour voir plus de prisonniers de
6 guerre libérés. Donc, il avait consulté également la FORPRONU plutôt que le
7 CICR, nous lui avons offert notre présence, la présence de la MOCE. Donc,
8 M. Pusic, ici, tente de poursuivre l'échange des prisonniers de guerre,
9 donc, chose énoncée par Mate Boban.
10 C'est un signal important qui avait été envoyé à Mate Boban concernant la
11 coopération avec la Communauté européenne et également, si cela avait pu
12 être fait lorsque l'autre côté ne voulait pas coopérer, cela voulait dire
13 que, du point de vue des relations, c'était bien, mais ce n'est pas ce qui
14 est dit ici dans le document.
15 Q. Deux paragraphes plus bas, toujours sur la même page, on fait référence
16 à Sally Becker, c'est une personne qui a un convoi de 70 convois, et
17 cetera. Ce nom revient, à plusieurs reprises, dans les documents; pourriez-
18 vous je vous prie nous expliquer brièvement de quoi il s'agit ici ?
19 R. Sally Becker était connu que sous le nom de l'ange de Mostar. C'est une
20 femme qui était arrivée en Herzégovine avec un convoi et elle était
21 déterminée à essayer d'évacuer les blessés de Mostar Est. Nous avions
22 échoué lors d'une tentative précédente et en tant que personne, c'est une
23 personne seule qui est arrivée entre toutes les organisations humanitaires.
24 En fait, elle est arrivée à un moment où les Croates de Bosnie voulaient
25 avoir une coopération. Il n'y avait pas de problème avec Sally Becker et
26 les Croates de Bosnie, mais la question est de se présenter si les
27 Musulmans accepteraient l'évacuation. C'était une évacuation qui a eu
28 beaucoup de succès. Nous avons observé cette évacuation, et donc, c'est ce
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1 que je peux vous dire sur cette personne.
2 Q. Fort bien. Passons maintenant au document suivant, le document suivant
3 qui se trouve dans le classeur. C'est la pièce 07226. 7226. résumé ou
4 rapport quotidien plutôt du CC Mostar en date du 17 septembre plutôt 17
5 décembre 1993. Reconnaissez-vous ce document, Monsieur ?
6 R. Oui, c'est moi qui l'ai rédigé.
7 Q. Sous l'intitulé situation générale, on peut voir : "Libération des
8 prisonniers de guerre conformément à la déclaration faite par Mate Boban
9 c'est une question primordiale." Par la suite, on fait allusion à Sally
10 Becker.
11 Prenons le paragraphe 5, à la deuxième page sous l'intitulé : Humanitaire."
12 On y lit, en fait, d'abord : "On peut voir la libération de prisonniers de
13 l'Heliodrom." Un peu plus loin, on peut lire que : "Branko Pusic a informé
14 IM2 qu'il y aurait une autre libération lundi le 20 décembre du camp des
15 prisonniers de guerre de Gabela." Pourriez-vous brièvement faire des
16 commentaires, nous faire un commentaire sur ceci ?
17 R. Encore une fois, c'est quelque chose qui nous montre qu'à l'époque on a
18 essayé de mettre en œuvre la déclaration de Mate Boban et cela nous donne
19 aussi l'idée de la planification derrière tout ceci, puisque nous avons une
20 date ultérieure et nous avons donc un ordre. Donc, une discussion avait été
21 engagée.
22 Q. Est-ce que vous savez si M. Pusic avait donné des statistiques avant
23 que toutes ces personnes avaient été libérées ?
24 R. Je crois que oui et en fait nous avions des chiffres concernant la
25 population et le mouvement de la population en Bosnie centrale.
26 Q. Un peu plus bas, on peut lire : "Les prisonniers de guerre avaient été
27 libérés de l'Heliodrom, ils étaient divisés en trois catégories." Plus
28 loin, nous pouvons lire : "Un certain nombre de personnes sont allés à
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1 Mostar Ouest, nombre de personnes à Mostar Est. Il y avait un nombre de
2 personnes qui s'est déplacé vers un pays tiers en passant par Gabela." Est-
3 ce que vous pourriez nous dire où ils sont allés ? Où est allé ce troisième
4 groupe de personnes qui s'est déplacé vers des pays tiers ?
5 R. A savoir où les prisonniers sont allés, cela, bien sûr, nous
6 intéressait -- le CICR était intéressé par le déplacement de ces personnes
7 et par l'endroit [inaudible]. Comme je l'ai dit plus tôt, si je vous parle
8 des Musulmans de Croatie, ils n'étaient pas heureux que les prisonniers
9 libérés aillent dans un pays tiers. Ils avaient envoyé les signaux disant
10 qu'ils n'étaient très contents. C'était assez difficile alors que pour les
11 Croates, les Croates étaient assez fermes et disaient que cela ne leur
12 importe peu, où les prisonniers sont allés. Donc, si les prisonniers
13 allaient dans un pays étranger, d'outre-mer, cela voulait dire qu'à ce
14 moment-là, ces personnes n'avaient pas d'intérêt pour un territoire
15 musulman. Pour ce qui est de Mostar Est, si c'étaient des hommes en âge de
16 porter des armes, cela ne fait qu'ajouter la question humanitaire. La
17 question humanitaire qui était là mais on pouvait interpréter ceci comme
18 étant un désir de faire partie, de surpasser ce problème des prisonniers en
19 les laissant aller. Donc, nous pouvons voir ici qu'il n'y a pas vraiment de
20 direction très cohérente pour ce qui est des déplacements de prisonniers de
21 guerre. Quelques-uns sont allés dans des pays outre-mer, d'autres vers
22 d'autres territoires tenus par les Musulmans. Mais il n'y a absolument
23 aucune indication qui me dit que les personnes qui sont allées vers des
24 territoires tenus par les Musulmans, si ces derniers avaient été en âge de
25 portée les armes. Cela aurait été, bien sûr, une préoccupation car, à ce
26 moment-là, ils auraient été en mesure de prendre les armes et de combattre
27 contre le HVO.
28 Q. Très bien. Donc, le terme prisonniers de guerre en anglais, "POW," on
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1 s'en sert ici lorsqu'on parle de personnes qui avaient été libérées de
2 l'Heliodrom. Est-ce qu'en réalité, c'était un terme qui était employé dans
3 ces rapports, POW, prisonniers de guerre; est-ce que la définition
4 juridique y est ?
5 R. Ce que cela veut dire -- voulait dire simplement c'est que c'étaient
6 des prisonniers qui avaient été détenus, donc, les prisonniers qui avaient
7 été détenus contre leur volonté, des prisonniers qui avaient été fait
8 prisonniers à la suite de l'activité de combat entre diverses factions.
9 Cela ne correspond peut-être pas à la définition juridique du terme,
10 prisonniers de guerre. Mais la Bosnie a eu plusieurs termes. Des personnes
11 déplacées, par exemple, est un terme, au début nous les appelions réfugiés,
12 par exemple, lorsque ces personnes, alors, étaient appelées donc des
13 personnes déplacées, à moins que les personnes ne passent de l'autre côté
14 d'une frontière internationale, donc, à ce moment-là, cela, ils disaient
15 que c'étaient des personnes déplacées, non pas des réfugiés. Tout ce que je
16 veux dire par ceci c'est que les prisonniers étaient peut-être des
17 prisonniers militaires, c'étaient peut-être des civils mais de toute façon
18 c'étaient des personnes qui étaient détenues contre leur volonté et contre
19 une faction, une opposée, et indépendamment du fait qu'ils soient Serbes,
20 membres de l'armija ou Croates.
21 Q. Prenons la première page de ce document, sous l'intitulé : "Political,"
22 "Politique," donc, premier paragraphe, vous vous entretenez ici avec M.
23 Vladislav Pogarcic, et il est décrit comme étant le secrétaire du président
24 Mate Boban, membre du conseil présidentiel. Vous dites qu'il a confirmé que
25 ce nouveau conseil avait été -- n'était qu'une entité chargée de
26 conseiller, mais qui n'avait pas de pouvoir exécutif, et puis, il a dit que
27 : "L'une des fonctions principales était de permettre à la CRHB de
28 fonctionner en l'absence du président Boban."
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1 Maintenant, ici, vous faites référence à un conseil, le conseil
2 présidentiel dont Mate Boban faisait référence; est-ce exact ?
3 R. Oui, tout à fait. Cela a trait à ce document que nous avons déjà
4 examiné lorsqu'on voit que les présidents créaient des bureaux autour de
5 Mate Boban.
6 Q. Pourriez-vous, je vous prie, nous donner votre commentaire pour ce qui
7 est du reste de ce paragraphe de ce rapport ?
8 R. Je dis ici qu'il n'y a pas pouvoirs exécutifs, donc, c'est une entité
9 chargée de conseillers. Mais la déclaration qui est importante, ici, c'est
10 de permettre le CRHB de fonctionner en l'absence de Boban et cela pour moi
11 voulait dire deux choses. C'était simplement un secrétariat où M. Boban
12 donc est en train de négocier à Genève ou Washington ou ailleurs, et il
13 avait donc pendant qu'il était absent une entité très solide -- une entité
14 consultative. Il y avait eu aussi des structures gouvernementales qui
15 vivaient plus longtemps que les personnalités que les personnes élues.
16 Donc, Mate Boban était une personnalité, était quelqu'un d'important, donc,
17 il avait créé autour de lui une base et lorsqu'il a créé la Communauté
18 croate -- enfin, la Communauté croate, en fait, a été changée en République
19 croate, c'était en fait il fallait s'assurer que les structures du
20 gouvernement puissent survivre.
21 Q. Un peu plus bas on peut voir que l'on parle de la question de
22 l'administration de l'EC de Mostar et vous dites si cela menait à la paix
23 vous le soutiendrez. Quelle est cette question de l'administration de l'EC
24 de Mostar. Pouvez-vous nous expliquer ceci ?
25 R. Il nous arrivait rarement de recevoir des instructions de Zagreb quant
26 à nos activités, mais ce que nous faisions c'est de voir avec les parties
27 de consulter les parties et de voir si lorsqu'une idée surgissait au niveau
28 international, par exemple, pour reconnaître que Mostar est une question --
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1 était une question assez difficile, peut-être que l'un des éléments de la
2 résolution du problème était d'être administré par l'Union européenne, et
3 donc, j'ai commencé, et chaque fois qu'il y avait une réunion avec tous les
4 -- toutes les entités de voir quelles auraient été les -- quelles avaient
5 été les réactions à cette idée, je lançais cette idée à l'ordre du jour.
6 Q. Puis, on voir ici : "Les ponts doivent être le dernier point sur la
7 liste de reconstruction, mais la ville n'est pas négociable, elle ne le
8 sera jamais. Les Musulmans de Sarajevo et Zenica et beaucoup d'autres
9 grandes villes. Le CRBH n'ont qu'une ville et c'est Mostar." Que pouvez-
10 vous nous dire là-dessus ?
11 R. Mostar avait été présentée à la communauté internationale comme étant
12 la capitale de la République croate d'Herceg-Bosna, et c'était vu ici comme
13 la seule ville qui avait -- sur laquelle ils avaient un contrôle important,
14 une présence, non pas -- ce n'était pas la seule ville, mais pour eux,
15 c'était leur capitale et la seule préoccupation qu'ils avaient, c'était que
16 l'administration de la Communauté européenne c'est que cette ville ne soit
17 pas perçue comme étant une capitale.
18 Q. Puisque nous sommes en train de parler de ce sujet, prenons la pièce
19 07356, donc, je répète 7356.
20 C'est un rapport quotidien du CC Mostar daté du 27 décembre 1993. Est-ce
21 que vous reconnaissez ce document, Monsieur ?
22 R. Oui, je l'ai rédigé moi-même.
23 Q. Si vous vous reportez à la fin du document, au
24 paragraphe 7, sous l'intitulé : "Assessment," "Evaluation," ici, on peut
25 voir que Mostar est la capitale de la CRHB et son importance pour les
26 Croates est connue. En fait, c'est la ville la plus importante tenue par
27 les Croates de Bosnie et ils le disent très souvent.
28 Est-ce que vous aimeriez ajouter quelque chose ?
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1 R. Non, mais Drago Maric est la personne à laquelle j'ai fait référence un
2 peu plus tôt comme étant une bonne source d'information nous expliquant ce
3 qui se passait. Tout ceci avait été dit pendant très longtemps. On disait
4 que Mostar appartenait aux Croates de Bosnie et que Mostar serait la
5 capitale de cette république -- soi-disant république.
6 Q. Dans le même paragraphe, on peut lire à la quatrième ligne, peut-être
7 cinq à six lignes à partir du bas, on fait référence à une route vers la
8 mer. C'est également quelque chose que l'on peut voir dans d'autres
9 documents. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que c'était cette route
10 menant à la mer pour les Musulmans ?
11 R. C'était très difficile de savoir ce qui se passait à un niveau
12 international, mais lorsque cette solution de trois Etats avaient été mises
13 à la table, il était identifié que l'un des éléments importants serait que
14 tous les -- toutes républiques musulmanes -- donc, une route menant vers la
15 mer était quelque chose de très important et nous savons, par exemple, que
16 Lord Owen avait demandé que l'on écrive un rapport pour savoir si Neum en
17 tant que ville portuaire était une ville importante. On se demandait si
18 Neum pouvait être une ville menant vers la mer. Il y avait également le
19 Monténégro, on pouvait peut-être faire une route en passant par Monténégro,
20 donc, toutes ces idées avaient été discutées et des commentaires avaient
21 été faits.
22 Q. Prenons le paragraphe 5, sous l'intitulé : "Humanitaire,"
23 "Humanitarian," on voit M9. C'est vous, n'est-ce pas ?
24 R. [aucune interprétation]
25 Q. A été présent lors de la session humanitaire -- lors de réunions
26 humanitaires quotidiennes et a informé le CICR de certaines statistiques
27 concernant la libération des détenus. Est-il correct de dire que la
28 libération unilatérale des détenus par le HVO était encore en cours ?
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1 R. Oui. Cette réunion avait été présidée par Martin Raguz.
2 Q. Prenez, je vous prie, le paragraphe qui traite des questions
3 politiques, c'est la première page de ce document. Nous avons ici Drago
4 Maric qui donc parle et dit Dragun Maric a donné une liste de 69
5 représentants des membres de la Chambre des représentants, et on peut dire
6 que : "Dario Kordic est un membre, mais il ne tient pas -- il n'a pas une
7 position, comme Ignac Kostroman. Aussi Ante Valenta, toutefois, n'est pas
8 un membre tel que reporté précédemment." Qu'est-ce que vous pouvez nous
9 dire
10 là-dessus ?
11 R. Encore, un élément qui indique la confusion qui régnait s'agissant des
12 rôles qui allaient être occupé par chacun à la tête de la Bosnie central et
13 nous pensions que Kordic était vice-président de la présidence et que
14 Valanta était vice-président du gouvernement,
15 M. Maric m'indique qu'en fait, ce n'est pas le cas. Mais, je crois que très
16 peu de temps après, nous avons pu déterminer que c'était faux et qu'en
17 fait, ces personnes occupaient bien ces postes-là, ces postes-clés.
18 Q. Avant le 29 décembre, et vous nous aviez dit que vous aviez été invité
19 par M. Prlic à participer à la séance du parlement au cours de laquelle le
20 gouvernement était officiellement approuvé.
21 R. On m'a invité à cette première session. Je ne sais pas si c'était la
22 réunion ou la séance au cours de laquelle le gouvernement a été
23 officiellement accepté ou pas, en tout cas, je suis sûr que c'est M. Prlic
24 qui m'a invité.
25 Q. Quand vous avez assisté à cette séance, est-ce que vous aviez un
26 interprète avec vous ? Est-ce que vous avez suivi les
27 débats ?
28 R. Oui, j'étais accompagné d'un interprète.
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1 Q. Où vous êtes-vous assis pendant cette séance ?
2 R. M. Prlic a été extrêmement généreux, et d'ailleurs, je ne crois pas que
3 quand je suis arrivé tout le monde pensait que c'était une excellente idée.
4 On nous remarquait tout de suite parce que nous étions habillés en blanc,
5 représentants de la communauté internationale, alors qu'ils étaient en
6 train de parler de questions qui les intéressaient au plus haut point,
7 mais, en fait, nous sommes restés assis là parmi les députés, nous avons
8 observé avec beaucoup d'intérêts voire même de la fascination ce qui s'est
9 produit.
10 Q. Cet interprète qui était à vos côtés, est-ce qu'il a interprété tout ce
11 qui se passait, ou est-ce qu'il vous a dit ensuite ce qui s'est passé ?
12 R. Je ne sais pas si c'était un homme ou une femme. Je crois que c'était
13 Mija Grubesic, mais je peux me tromper. Normalement lorsque lors des
14 réunions on recevait une interprétation simultanée. Je me souviens
15 d'ailleurs qu'on nous demandait de faire attention à ne pas parler trop
16 vite. Mais oui, on nous a chuchoté ce qui se passait, et puis, il y a des
17 moments où il s'est passé des choses tellement évidentes que ce n'était pas
18 la peine de nous traduier les débats. C'était très intéressant.
19 Q. Qui a prononcé le discours principal ce jour-là ?
20 R. Le discours principal a été prononcé par Mate Boban, un discours très
21 impressionnant, de même que celui d'ailleurs du général Ante Roso qui a été
22 accueille avec beaucoup d'enthousiasme. Mais ce qui m'a intéressé c'est de
23 constater qu'il y avait des voix dissonantes qui s'élevaient. J'ai entendu
24 plusieurs personnes remettre en question Mate Boban à partir de la salle --
25 du parlement, et ça m'a intéressé d'entendre ces personnes contester les
26 orateurs. Je me souviens qu'il y a eu un intervenant de Tuzla, dont
27 j'oublie le nom, qui a parlé du corridor de Posavina.
28 Je me souviens également d'Ivo Luzancic de Zepce qui a parlé au sujet
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1 de l'incertitude de la direction politique, et je me souviens qu'on a
2 demandé à M. Roso ce qu'il en était de la position de l'église, nous
3 l'avions vu précédemment l'église c'était prononcé. Je ne sais plus
4 exactement dans quel sens mais ça présenté un certain intérêt à l'époque.
5 Puis on a assisté à l'arrivée assez spectaculaire de M. Kostroman qui était
6 conseiller politique de Dario Kordic, et je me souviens qu'il y a eu les
7 discussions sur la manière dont il avait réussi à sortir de Bosnie
8 centrale. Donc, c'était intéressant.
9 Q. Ces voix dissidentes en désaccord qui se sont élevées, pourriez-vous
10 nous dire quelles zones géographiques elles représentaient ?
11 R. Oui. Zepce et Tuzla, ceci renforce et corrobore ce que j'ai dit
12 précédemment, à savoir que lorsqu'on était en Bosnie centrale on avait une
13 perspective différente de l'avenir et de la manière dont l'avenir se
14 présentait. Peut-être qu'on se sentait plus vulnérable.
15 Q. J'aimerais que nous examinions ensemble la pièce 07372. 07372. Il
16 s'agit d'un rapport journalier du CC Mostar en date du 29 décembre 1993.
17 Reconnaissez-vous ce document ?
18 R. Oui. C'est moi qui l'ai rédigé.
19 Q. Est-ce qu'il s'agit de votre rapport au sujet de cette séance à
20 laquelle vous avez assisté ?
21 R. Oui. Je vois aussi un autre nom que je n'ai pas mentionné précédemment
22 celui de Mile Akmadzic qui a prononcé une allocution extrêmement
23 intéressante au sujet de la nécessité d'envoyer le bon message à la
24 communauté internationale. Puisque lui il avait des relations avec la
25 communauté internationale, et je me souviens qu'il avait une certaine
26 autorité. Son intervention a revêtu une certaine gravité.
27 Q. Passons à la rubrique concernant la politique, la situation politique
28 il y est dit, je cite : "Si Boban était --"
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1 L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi le passage concerné.
2 M. KRUGER : [interprétation]
3 Q. "La République croate d'Herceg-Bosna rejoindrait la Croatie." Vos
4 observations ?
5 R. Oui. Le 29 décembre, il n'a pas eu de discussion fondamentale sur les
6 conséquences de la Fédération des Croates et des Musulmans. Nous avons tous
7 bien compris que l'option qui dessinait c'était celle des trois républiques
8 avec toutes les questions y afférentes.
9 On pensait -- on affirmait qu'on pourrait y arriver. Et ceci il faut
10 le mettre en rapport avec l'arrivée des forces de la HV avec les messages
11 que ça envoyait à la communauté internationale et si ça ne fonctionnait pas
12 à ce moment-là, il y aurait une solution de rechange, et cette solution ce
13 serait d'établir une liaison officielle, une relation officielle avec la
14 Croatie. Ce qui suscitait ou faisait surgir le concept de la Grande-
15 Croatie.
16 Q. Quand vous avez entendu, tenir ce genre de propos, est-ce que c'était
17 quelque chose de complètement nouveau pour vous ?
18 R. Non.
19 Q. Où aviez-vous déjà entendu tenir de tels propos, dans quel enceinte,
20 dans quel contexte ?
21 R. Tout le monde comprenait, avait bien compris et savait que les Serbes
22 de Bosnie voulaient créer une Grande-Serbie, et que les Croates voulaient
23 créer une Grande-Croatie. Je crois que la position des Croates de Bosnie
24 était plus subtile cependant, oui, certes ils appelaient de leur vœux une
25 union avec la Croatie, si la communauté internationale insistait pour que
26 la Bosnie-Herzégovine reste intacte, à ce moment-là, avec une république
27 dirigée par les Croates de Bosnie, ils en seraient satisfaits. Parce qu'il
28 n'y avait pas de frontière entre les Croates de Bosnie et les Croates --
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1 enfin, il y avait une frontière internationale, mais s'agissant des
2 activités économiques de déplacement de population, il n'existait pas
3 vraiment de frontière.
4 Q. A la page suivante, vous évoquez la situation humanitaire, vous parlez
5 de la libération de détenus. Au point 6, autre question : s'agissant de
6 l'arrestation de l'équipe du char du HVO pour la destruction du vieux pont.
7 Safet Dziho dit que c'était simplement -- que c'était un procès spectacle.
8 Pouviez-vous nous faire part de vos observations ?
9 R. Oui, en novembre nous avions fait savoir -- ou plutôt,
10 M. Budakovic, qui commandait le 4e Corps, nous avait indiqué que les forces
11 du HVO avaient visé le vieux pont de Mostar qui ensuite était détruit. J'ai
12 abordé la question avec des militaires, des politiques, au sujet de la
13 destruction du pont, et on m'a fait savoir que c'était un char incontrôlé,
14 une équipe incontrôlée qui était responsable qui avait été arrêté et qui
15 avait été jugé. Je me souviens que
16 M. Villardsen, mes observateurs avaient une formation de juriste, et comme
17 on m'a dit que ces hommes allaient être jugés, je lui ai demandé de suivre
18 la situation -- de suivre l'évolution de ce procès. Safet Dziho, qui est
19 mentionné ici, c'est le commandant de la Brigade de Mostar Est, donc placé
20 sous le commandement de Budakovic et avant de Arif Pasalic. Vous voyez
21 qu'il est nommé comme quelqu'un qui s'occupait d'échanges de prisonniers de
22 guerre. Donc, nous mentionnons l'arrestation de ces hommes, des hommes qui
23 étaient dans ce car -- dans ce char, et lui il dit que cela n'a pas de
24 véritable signification, que c'est un procès spectacle qui n'a vraiment pas
25 de signification.
26 Q. Est-ce que vous avez pu suivre ce procès ?
27 R. Non, je ne l'ai pas suivi. Je ne crois pas que Henri Villardsen en ait
28 vu beaucoup plus. Nous avons suivi dans la presse ce qui se passait
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1 surtout.
2 Q. Vous souvenez-vous de la nature de ce qui était dit ?
3 R. On disait simplement que le procès suivait son cours.
4 Q. Examinons le document suivant, 7405. Un rapport quotidien synthèse de
5 la MOCE du CC Mostar en date du 30 décembre 1993. Est-ce que vous
6 reconnaissez ce rapport ?
7 R. Ce rapport ce n'est pas moi qui l'ai signé mais je crois que c'est moi
8 qui l'ai établi.
9 Q. Premier paragraphe situation politique, le chef du CC a rencontré M.
10 Ivo Tokic. Il a été question du président Mate Boban et ensuite il est dit
11 que Tokic pensait que l'Union européenne contribuait aux rumeurs relatives
12 au remplacement de Mate Boban après la présentation du document en 14
13 points.
14 Quel est ce document en 14 points ?
15 R. Je ne crois pas l'avoir jamais vu. Nous avons demandé des informations
16 sur ce point, mais c'était toujours un petit peu délicat quand les gens
17 nous parlaient sur le terrain du document de l'Union européenne. C'est sans
18 doute un document établi par l'Union européenne mais les Nations Unies au
19 sujet -- à son sujet et il était question du fait qu'il fallait que Mate
20 Boban soit remplacé pour trouver une solution.
21 Q. Qu'en est-il des contacts pris par l'Union européenne avec Franjo
22 Tudjman au sujet du remplacement de Mate Boban ou sa mise à pied ?
23 R. Je crois que personne au niveau international ne pensait que l'on
24 pourrait résoudre la situation en Bosnie-Herzégovine en ayant des contacts
25 uniquement avec les dirigeants de Bosnie-Herzégovine. Il fallait que les
26 dirigeants serbes et croates de plus haut niveau mettent en œuvre une
27 politique destinée à trouver la paix. La communauté internationale estime
28 que Franjo Tudjman est quelqu'un avec qui on peut avoir -- par le
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1 truchement duquel on peut avoir un contact avec les Croates de Bosnie.
2 Qu'il a une autorité, l'autorité lui permettant de démettre de ses
3 fonctions Mate Boban. Ceci correspond à ce qui a déjà été évoqué
4 précédemment au sujet de l'avenir de Mate Boban qui a été évoqué le -- par
5 les délégués lors de la séance du 29 décembre, au sujet de l'incertitude de
6 la présidence qui posait certains problèmes. Nous, nous intéressions à
7 l'avenir de Mate Boban, est-ce qu'il était sur une pente ascendante ou
8 descendante qui le remplaçait, qui allait le remplacer ? Où se trouvait le
9 véritable pouvoir ?
10 Q. Un peu plus bas Tokic nous a informés qu'il y avait eu des discussions
11 au sujet de certaines nominations importantes. Il est question ici des
12 hommes politiques de la Bosnie centrale. Dans ce document encore une fois,
13 est-ce que vous voulez ajouter quoi que ce soit ?
14 R. Non, je ne crois. Je crois que nous en avons déjà parlé précédemment.
15 Q. Vous maintenez ce que vous avez dit précédemment ici
16 aussi ?
17 R. Oui.
18 Q. En quelques mots, le paragraphe suivant, où nous voyons que M3 a
19 rencontré celui qui est présenté comme le président du comité exécutif,
20 Pero Markovic, ancien maire de Capljina, qui lui a expliqué la structure du
21 parti. Vous en souvenez-vous ? Pouvez-vous faire des observations à ce
22 sujet ?
23 R. Oui je me souviens d'un des éléments de la discussion relative à la
24 formation de la CRHB. C'était le rôle des partis politiques. Je me souviens
25 qu'on a dit que le HDZ était le seul parti politique, certains ont dit
26 cela. Il y avait aussi les HOS et d'autres petites formations croates de
27 Bosnie, mais il n'y avait pratiquement aucun doute quant au fait que le HDZ
28 allait être le parti principal avec Pero Markovic à sa tête.
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1 Q. Il ne nous reste que quelques minutes avant la suspension. Je vais donc
2 aborder quelques questions d'ordre très général avec vous. Selon vous,
3 l'Herceg-Bosna, l'Herzégovine, dans cette zone donc pour les Croates de
4 Bosnie, qui assurait la direction politique et idéologique de cette région
5 ?
6 R. La direction idéologique selon moi était entre les mains de Mate Boban.
7 En Bosnie centrale, c'était entre les mains de Dario Kordic. Il y avait
8 d'autres dirigeants clé comme par exemple Jadranko Prlic, Pero Markovic
9 c'était évident également, puis certains autres personnages que nous avons
10 eu l'occasion de mentionner. Mais la différence entre ces personnes-là et
11 M. Prlic c'est que pour moi,
12 M. Prlic n'était pas un idéologue. C'était un homme politique avisé, habile
13 ou calcul politique, mais je ne pense pas que c'était quelqu'un qui -- un
14 porte-parole extrémiste. Donc, je pense que c'était plutôt un homme
15 politique pragmatique, en tout cas un homme politique qui a joué un rôle-
16 clé, cela c'est évident.
17 Q. La direction de la Communauté bosniaque d'Herceg-Bosna -- ou plutôt, de
18 la Communauté croate d'Herceg-Bosna, qui ensuite est devenue la République
19 croate d'Herceg-Bosna, où se trouvait-elle géographiquement parlant,
20 concrètement ?
21 R. A Grude, à Mostar, en tout cas, c'était en Herzégovine. S'agissant de
22 la direction militaire, elle se trouvait à Citluk et ensuite à Posusje.
23 M. KRUGER : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que le moment
24 serait bienvenu pour suspendre l'audience.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, vous nous donnerez demain le
26 décompte du temps de l'Accusation.
27 Alors, Monsieur le Témoin, quelques instructions. Vous reviendrez
28 pour l'audience qui débutera demain à 9 heures. D'ici là, vous ne
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1 rencontrez, bien entendu, personne puisque, comme vous avez prêté serment,
2 vous êtes maintenant le témoin de la justice et non plus le témoin d'une
3 partie. Nous nous retrouvons donc demain à
4 9 heures.
5 --- L'audience est levée à 18 heures 59 et reprendra le mardi 22 mai 2007,
6 à 9 heures 00.
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