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1 Le lundi 5 mai 2008
2 [Déclaration liminaire de la Défense Prlic]
3 [Audience publique]
4 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Affaire IT-
9 04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
11 En ce lundi, 5 mai 2008, date de reprise de nos audiences, je salue en
12 premier les représentants de l'Accusation, je salue Mmes et MM. les
13 avocats, et je salue MM. les accusés et ils sont tous présents.
14 Avant de donner le cas échéant la parole à l'une des parties si elle
15 souhaite intervenir pour une question administrative, je tiens donc à
16 indiquer que, pour cette semaine, nous aurons aujourd'hui une déclaration
17 liminaire et est prévue pour les trois autres jours de la semaine un témoin
18 qui est cité par la Défense de M. Prlic. La Défense de M. Prlic nous a
19 indiqué qu'elle avait besoin de cinq heures pour son interrogatoire
20 principal. Ce qui fait que s'il y a deux heures et demie pour le contre-
21 interrogatoire des autres avocats de la Défense, nous aurions donc sept
22 heures et demie pour la Défense au départ, plus cinq heures pour
23 l'Accusation pour son contre-interrogatoire, ce qui nous amènerait à 12
24 heures 30 sans les problèmes de procédure ni les questions des Juges. Comme
25 nous sommes sur trois jours et que nous terminerons jeudi à 18 heures 30,
26 il est fort possible à ce moment-là que le témoin revienne pour le -- bien,
27 le mardi 13 mai, étant précisé que le lundi 12 mai c'est jour férié, à
28 moins que la Défense de M. Prlic prenne moins que cinq heures.
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1 Alors, il y a que Me Karnavas qui peut nous indiquer quoi que ce soit en la
2 matière. Maître Karnavas, c'est toujours cinq heures de prévues ?
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs
4 les Juges. Bonjour à toutes et à tous dans ce prétoire et à l'extérieur de
5 ce prétoire.
6 Pour l'instant, la réponse à cette question est affirmative. Oui,
7 cependant - cependant, et j'insiste sur ce cependant - nous sommes en train
8 de remanier toutes nos questions pour également réduire le nombre de
9 documents que nous allons présenter à ce témoin, ceci afin d'atteindre
10 notre objectif cette semaine mais afin de ne pas avoir à faire revenir le
11 témoin, donc, nous allons faire tout ce que nous pouvons dans ce sens, et
12 je sais après avoir consulté certains de mes collègues qu'il est possible
13 que certains d'entre eux n'aient pas de questions à poser au témoin. Et je
14 pense que nous serons peut-être en mesure de répondre au désir de tout le
15 monde cette semaine. Voilà. Merci.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Karnavas.
17 Bien. Alors, l'Accusation pas d'intervention.
18 M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Non, nous
19 n'avons rien à dire pour l'instant. Il y a aura peut-être quelque chose à
20 évoquer demain.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
22 Alors, Maître Karnavas, je m'adresse à vous : si j'ai bien compris, il y a
23 donc une déclaration liminaire de votre client.
24 M. KARNAVAS : [interprétation] C'est exact. Conformément à la décision de
25 la Chambre de première instance s'agissant du temps qui nous est imparti -
26 nous sommes bien évidemment conscients des difficultés logistiques - est
27 confrontée la Chambre, nous avons également des difficultés quant à nous,
28 et après consultation interne, nous avons décidé que M. Prlic ferait une
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1 déclaration plutôt que de déposer -- plutôt que de déposer, donc, ce qui
2 nous permettra d'économiser environ un mois d'audience. Donc, il est prêt à
3 s'exprimer, nous pensons qu'il pourra en terminer aujourd'hui de sa
4 déclaration si on commence aussi rapidement que possible.
5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
6 J'ai une question à vous poser, Maître Karnavas. Je suis un peu
7 surpris. Je vois ici, je trouve ici un volume considérable de documents, et
8 sur la première page je vois ceci : déclaration de Jadranko Prlic. Et du
9 point de vue de la procédure je me demande comment ceci se présente et
10 verser au dossier, parce que vous savez pertinemment que cette déclaration,
11 la déclaration de M. Prlic ne sera pas un moyen de preuve. Il ne pourra,
12 bien entendu, pas faire l'objet d'un contre-interrogatoire.
13 Est-ce que vous avez donc l'intention de présenter des documents qui
14 seront présentés de telles sortes que celui qui les présente ne pourra pas
15 être contre-interrogé ? J'aimerais vous poser cette question dans la
16 perspective de la procédure -- des Règles de procédure.
17 M. KARNAVAS : [interprétation] Bien. Très bien. Dans cette
18 déclaration, il fait référence à un certain nombre de documents dont
19 certains ont déjà été versés au dossier. Voilà pour répondre à une partie
20 de votre question. Voilà des documents qui ont déjà été versés au dossier.
21 Il y a des documents qui seront peut-être versés au dossier par
22 l'intermédiaire d'autres témoins. Je ne pense pas comme vous qu'une
23 déclaration qui n'est pas faite sous serment ne constitue pas un élément de
24 preuve. Elle a moins de poids mais c'est à vous d'en décider. Et maintenant
25 nous savons que, d'après vous, il ne s'agit pas d'un élément de preuve,
26 nous allons examiner ce qu'il en est dans la jurisprudence parce que, nous,
27 nous estimons que c'est un élément de preuve mais qui a moins de poids
28 qu'un autre. Mais, bien entendu, nous ne pouvons pas avoir le beurre et
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1 l'argent du beurre. Nous ne pouvons pas présenter la totalité de notre
2 thèse en répondant aux exigences qui nous ont été faites. Malheureusement,
3 c'est une décision qui a été prise par la Chambre de première instance à
4 cause de la stratégie d'achèvement parce que le Conseil de sécurité veut
5 fermer le Tribunal aussi rapidement que possible. Nous essayons donc de
6 nous plier à ces exigences. C'est la raison pour laquelle ces documents
7 sont utilisés comme ils le sont. Il s'agit de références qui sont utilisées
8 dans le cadre de la déclaration de mon client. Je reconnais bien que, par
9 sa déclaration, et ça là, je réponds à votre question. Oui, il est vrai,
10 par le truchement de sa déclaration, on ne peut pas verser de documents au
11 dossier, ça c'est vrai.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. C'est effectivement la
13 précision que je souhaitais obtenir de votre part, et je reconnais que la
14 question de la preuve en tant que telle, elle est ouverte. Elle est entre
15 les mains de la Chambre. C'est une question d'appréciation, bien entendu.
16 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, je vous remercie de vos préoccupations.
17 Merci beaucoup, Monsieur le Juge Trechsel.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour une bonne contribution pour le public et de
19 ceux qui suivent les débats, je vais simplement lire le paragraphe B de
20 l'article 84 bis du Règlement. Ce paragraphe dit
21 ceci : "La Chambre de première instance statue sur l'éventuelle valeur
22 probante de la déposition." Voilà.
23 Monsieur Prlic, vous avez donc la parole.
24 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Monsieur le
25 Juge. Compte tenu de votre décision portant sur le temps qui est imparti --
26 qui nous est imparti, j'ai décidé de donner ce bref aperçu de notre cause,
27 un aperçu que j'avais l'intention de faire pendant ma déposition. Compte
28 tenu également du fait que je suis le premier à prendre la parole,
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1 j'annoncerais une partie de notre théorie qui sera présentée dans la
2 semaine à venir par l'entremise de nos preuves et nos témoignages et
3 dépositions de témoins.
4 Afin de nous faire gagner du temps, j'essaierais d'éviter les redits par
5 rapport à ce qui figure déjà dans mon entretien versé au dossier par la
6 Chambre de première instance mis à part quelques portions qui exigent
7 quelques précisions.
8 Pour commencer, je tiens à dire qu'aucune entreprise criminelle commune n'a
9 existé au sens où cela a été avancé par le bureau du Procureur. L'intention
10 que j'avais, et qui m'a dirigé dans mes actions, de notre travail était
11 tout à fait pure. J'ai apporté ma contribution à la Défense, à
12 l'organisation de la vie civile et à la construction d'une Bosnie-
13 Herzégovine possible. D'aucune manière je n'ai commis, je n'ai pas non plus
14 influé sur la perpétration de quel que crime que ce soit. Je n'ai pas non
15 plus d'élément d'information me permettant de savoir que qui que ce soit
16 parmi des organes temporaires de l'exécutif l'ait fait. C'est tout à fait à
17 l'opposé. Nous avons fait tout pour atténuer les conséquences de la guerre
18 et des destructions dues à la guerre et également afin de faire punir de
19 manière adéquate les auteurs des crimes.
20 Comme je l'avais déjà dit lors de ma première comparution, il y a de
21 cela plus de quatre ans, je ne suis pas coupable. Je ne suis coupable selon
22 aucun des chefs de l'acte d'accusation. Je compatis avec toutes les
23 victimes de la guerre, d'ailleurs moi aussi j'ai d'une certaine manière été
24 la victime de cette guerre. Je suis victime de cette guerre et comme je
25 l'ai déjà dit, ma Défense défend les intérêts des victimes car elle exige
26 que l'on punisse les auteurs.
27 Dans mon exposé, j'adopterais une approche chronologique. Je
28 prendrais en compte à la fois ce que je savais à l'époque où certaines
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1 choses se sont produites mais aussi des éléments d'information
2 complémentaires que j'ai trouvés dans les preuves de l'Accusation, des
3 preuves qui ont été versées au dossier ou comme l'intention de verser au
4 dossier les Défenses et différentes équipes de Défense. C'est quelque chose
5 nous permettra de compléter l'idée que nous nous faisons des événements et
6 à l'époque où j'ai eu mon entretien avec le bureau du Procureur,
7 objectivement je n'avais pas eu la possibilité de compléter cette
8 perception des événements dans mon esprit. Je parlerais de la position de
9 la Bosnie-Herzégovine au sein de la Fédération yougoslave, des élections
10 pluripartites, de la question nationale qui est une question fondamentale,
11 de la guerre qui a sévi en Slavonie et en Croatie, du chaos en Bosnie-
12 Herzégovine, du dilemme qui s'est présenté, à savoir rester en Yougoslavie
13 ou continuer son chemin de manière indépendante, de l'effondrement du
14 système administratif de l'époque. Je parlerais de la création des
15 communautés croates et de la création de la Communauté croate d'Herceg-
16 Bosna, de la mise sur pied de l'armée du HVO et de l'organe exécutif
17 temporaire de la HZ HB, de la création de la République croate d'Herceg-
18 Bosna, du conflit avec l'armée de Bosnie-Herzégovine sur une partie du
19 territoire de la Bosnie-Herzégovine. Je parlerais des crimes de guerre. Je
20 parlerais du rôle que j'ai joué avant, pendant et après le conflit. Je
21 fournirais également quelques précisions, quelques explications eu égard à
22 mon entretien avec le Procureur. Je parlerais de ce que je n'ai pas eu
23 l'occasion de dire, de ce qui a à voir avec les 24 sujets qui m'avaient été
24 communiqués deux mois avant l'entretien par le Procureur.
25 Enfin, j'évoquerais mon prétendu rôle au sein de l'entreprise
26 criminelle commune et je citerais à cet effet les différents paragraphes de
27 l'acte d'accusation.
28 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous connaissez mes
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1 renseignements personnels, mon CV, l'acte d'accusation, vous connaissez ma
2 biographie et mon CV vous sera remis. Compte tenu de toutes les fonctions
3 que j'ai exercées de par le passé je peux dire que je connaissais bien le
4 système de l'époque. Je me suis trouvé dans chacune communauté locale de
5 Mostar, dans toutes les municipalités de Bosnie-Herzégovine. Je me suis
6 rendu dans toutes les entreprises et collectives de travail les plus
7 importantes. J'ai été actif au début et pendant le processus de la
8 transition sociale et économique. Et, en tant que cadre au sein de
9 l'alliance socialiste, j'ai eu l'occasion de reconnaître tous les
10 différents volets de l'activité de la vie, de la prise de décision, donc,
11 allant de l'organisation de la protection sur le plan de la santé, social,
12 question des retraites, de l'emploi, l'import, export, question monétaire,
13 défense, agriculture, environnement.
14 Et Mostar, pendant que j'ai été président du comité exécutif de la
15 municipalité, a franchi le chiffre magique de 50 000 employés et il avait
16 des perspectives d'avenir de développement très exceptionnel. Je suppose
17 que c'est ça qui m'a permis de me faire élire assez jeune à l'époque encore
18 au sein du gouvernement de la République et nous avons amorcé, lancé des
19 réformes d'emblée. En six mois, nous avons vu commencer le dernier
20 programme économique de réforme, le programme le plus étendu. Il s'agit
21 plus ou moins d'un programme comparable à ceux qu'ont connu pratiquement
22 tous les pays de l'Europe centrale, de l'Europe orientale, aujourd'hui,
23 membre de l'Union européenne. Et cette réforme a commencé à renforcer
24 l'importance du gouvernement par rapport aux partis, c'est-à-dire par
25 rapport au comité central de la Ligue des Communistes qui commençait à son
26 tour à perdre de l'importance; cependant, après les élections, on a vu se
27 renforcer des partis de nouveau et on a vu s'affaiblir le mécanisme de
28 l'état - et du moins c'est mon avis - ça a été la raison principale de cet
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1 effondrement dans le sang, dans un bain de sang de l'ex-Yougoslavie.
2 Afin de pouvoir comprendre le contexte le plus large possible par
3 rapport à l'acte d'accusation, il convient de dire que dans l'ex-
4 Yougoslavie, trois niveaux de pouvoir ont été mis sur pied, la fédération,
5 la république et la municipalité. A ces trois échelons, la dénomination des
6 entités était communauté socio politique. Donc, les municipalités n'étaient
7 pas des entités d'autonomie locale comme cela est le cas dans les pays de
8 démocratie occidentale, ces entités avaient une caractéristique de l'état,
9 des attributions de l'état. Donc, une participation dans les impôts
10 directs, un certain nombre de prérogatives judiciaires et les affaires
11 intérieures. Pour le dire en quelques mots, les autorités fédérales avaient
12 la responsabilité de la politique extérieure, une partie du judiciaire de
13 gérer les relations entre les républiques, la défense, la sécurité, la
14 monnaie, les cours de change, les douanes, le commerce extérieur et la
15 production militaire dans sa totalité --
16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] -- diplomatie -- si vous ne le
17 souhaitez pas mais je vois, à la ligne 21 de cette page du compte rendu
18 d'audience, qu'on voit que vous dites que les municipalités n'avaient pas -
19 - il y avait des impôts qui étaient incorrects. Alors, voilà, mais ces moi,
20 j'ai cru comprendre que vous parliez d'impôts indirects. Est-ce que ça vous
21 gêne que je fasse de telles corrections ?
22 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Non, non, pas du tout, au contraire.
23 Merci de votre intervention.
24 Les Républiques socialistes, pour ma part, ainsi la République socialiste
25 de Bosnie-Herzégovine, avaient pleinement la responsabilité portant sur les
26 entreprises publiques et les retraites. C'est uniquement en fait au niveau
27 de la république qu'il y avait ce fond de retraite qui versait les pensions
28 de retraite à tous les citoyens de Bosnie-Herzégovine et en partie
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1 également avait la responsabilité des impôts et des prix. Les institutions
2 de la république finançaient dans son ensemble l'éducation primaire,
3 secondaire et supérieure; le ministère de l'Intérieur : le maintien, la
4 construction des routes, les conduites d'eau, la distribution d'eau et en
5 partie la culture, l'enseignement secondaire et la protection -- donc,
6 sanitaire, le système judicaire et le système des inspections -- enfin, des
7 différents services, les différents inspectorats.
8 Les QG de la Défense territoriale du district faisaient partie du système
9 de financement au niveau de la république tandis que les QG municipaux
10 étaient financés au niveau de la municipalité. Et sur le plan de la région,
11 on garantissait donc le financement de la santé et une partie de
12 l'éducation secondaire.
13 Par exemple, les principales instituions régionales de la région
14 Herzégovine à Mostar était l'université qui était financée depuis le fond
15 de la république et le centre médical régional qui était financé du fond de
16 santé régional et en partie il était pris en charge par la république. Les
17 municipalités, à leur tour, répondaient d'une partie de l'administration
18 générale du cadastre des biens mobiliers, de l'achat, de la vente et de la
19 gestion des terrains, la planification et les activités sociales, la
20 protection sociale, tous les services communaux comme la voirie,
21 l'aménagement du territoire, l'administration municipale, la distribution
22 de local, évacuation d'eau, une partie du judiciaire et l'inspectorat au
23 niveau de la plupart des -- sur la plupart des territoires.
24 En 1990, nous avons renforcé le système de la république. La
25 république a pris à sa charge le financement du primaire, ça relevait de
26 ses obligations constitutionnelles pour faire en sorte que tous les
27 enseignants puissent bénéficier des mêmes rémunérations. Egalement, une
28 partie des affaires de l'Intérieur puisque jusqu'à ce moment-là ce sont les
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1 municipalités qui avaient financé l'Intérieur sur le plan municipal et
2 finançait ce même domaine sur le plan régional. Mais c'était paradoxal
3 puisque les rémunérations à ces niveaux plus élevés étaient moindres que
4 des échelons inférieurs.
5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour la deuxième fois, vous utilisez
6 le terme de "régional." Pouvez-vous nous l'expliquer par rapport à tout ce
7 qui a trait à la fédération, à l'état, à la municipalité ? A quoi vous
8 faites -- faites-vous référence
9 exactement ?
10 R. Il y a trois niveaux, comme je vous l'ai déjà dit : république,
11 municipalité, fédération, mais il y a une institution intermédiaire qui a
12 été établie parfois à l'intérieur de la république. Par exemple, le fond
13 chargé du financement de l'enseignement secondaire, avant que nous ne nous
14 chargions des affaires intérieures, chaque municipalité avait un service
15 qui en était chargé, et on proposait à chaque municipalité de contribuer au
16 financement des institutions régionales. Mais certaines municipalités ne le
17 faisaient pas, si bien qu'on se trouvait dans la situation suivante : le
18 chef de la police régionale avait un salaire inférieur à celui que touchait
19 les chefs de la police dans les municipalités les plus riches. C'est la
20 raison pour laquelle en 1990 nous avons pris le contrôle des Affaires
21 intérieures afin que le système des Affaires intérieures comme on
22 l'appelait de la police.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]
24 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Et je vous en prie, n'hésitez pas
25 effectivement à me poser toutes questions que vous souhaiteriez me poser
26 pour préciser les choses.
27 L'objectif a été de créer un système des affaires intérieures efficaces et
28 organisées, qui allait pouvoir maintenir le système de la république dans
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1 une situation qui devenait de plus en plus complexe, mais le temps montrera
2 dès 1991 que ce système des Affaires intérieures a commencé à s'effondrer
3 le long des lignes d'appartenance nationale, à savoir les parties serbes se
4 sont extraites du système, autrement dit dans son ensemble le système a
5 cessé de fonctionner.
6 Notre objectif était de créer une république qui serait forte sur le plan
7 économique qui où le niveau de vie serait plus élevé que dans d'autres
8 républiques pour qu'elle ne soit plus considérée comme une république sous-
9 développée. Et j'estime que nous avons pris le bon chemin.
10 En 1990 -- ou plutôt, l'année 1990, après la chute du mur de Berlin, a été
11 une année marquée dès son début par un optimisme économique hors pair. Le
12 gouvernement fédéral avait lancé un programme de lutte anti-inflation et
13 comme cela se produit logiquement dès le départ des résultats se sont
14 trouvés excellents. En fait, c'est un programme qui a été secrètement
15 conçu, planifié, et nous l'avons préparé et je m'en souviens Belgrade
16 pendant les derniers jours de l'année 1989.
17 En tant que république, nous étions prêts à assumer un fardeau considérable
18 car des prix des produits de base ont été fixés, des produits qui étaient
19 dominants dans notre structure de l'économie, à savoir le prix du charbon
20 et de l'électricité. Mais, le gouvernement fédéral qui s'appelait le
21 conseil exécutif fédéral à l'époque -- ou plutôt, le gouvernement fédéral
22 en sa personne -- en la personne de son président, M. Markovic, a cédé à M.
23 Milosevic, et je pense que cela a été fait exclusivement pour des raisons
24 politiques. Fin mars 1990, il y a accepté que les prix des produits
25 énergétiques de base augmentent.
26 Dès qu'une partie du programme a été, enfin, revu, revu et corrigé, là je
27 ne rentrerai pas dans les questions politiques. Je me contenterai d'aborder
28 l'exemple des effets économiques. L'ensemble a été remis en question à
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1 savoir premièrement le taux de change fixe. La question du volet économique
2 de l'effondrement, j'estime constitue la raison très importante, bien
3 entendu, sans oublier la question nationale qui n'était pas résolue ainsi
4 que d'autres éléments, les éléments politiques. Je m'attends à ce que
5 l'expert économique y consacre beaucoup d'attention pendant cette partie de
6 la présentation de ma défense.
7 Au sein du conseil exécutif de l'assemblée de la République socialiste de
8 Bosnie-Herzégovine, d'ores et déjà nous avions opté pour une perspective
9 européenne et nous devancions à l'époque tous les autres pays socialistes;
10 cependant, il a été nécessaire de procéder à des modifications
11 essentielles. Avant tout, il fallait mettre sur pied un système
12 pluripartite. Il fallait libéraliser l'économie, y compris il fallait
13 adopter -- procéder à une privatisation de la propriété sociale, et ce,
14 dans une situation socialement difficile, en partie; en fait, tous - et moi
15 en particulier - nous faisions face à une vague de grève à l'époque.
16 Et la question de la propriété est très importante pour pouvoir comprendre,
17 par exemple, le fait de pouvoir bénéficier d'un appartement de fonction, ou
18 appartement de propriété sociale. Leur propriétaire était telle ou telle
19 entreprise concrète qui avait mis à la disposition de tel ou tel employé le
20 logement, et il faut tenir compte de cela lorsqu'on se penchera sur la
21 problématique des logements abandonnés.
22 Nous avions une unanimité au sein du conseil exécutif. Par exemple, c'est à
23 l'unanimité qu'a été accepté la décision que vu les dettes de la Fédération
24 face à la Bosnie-Herzégovine; à partir du mois d'octobre 1990, la Bosnie-
25 Herzégovine cesse de verser sa contribution au budget de la Fédération, et
26 tous les Serbes, membres du conseil, ont voté pour cette décision, que nous
27 avons confirmée une deuxième fois au début de l'année 1991 lors d'une
28 réunion que j'ai présidée. C'est le document de la Défense 1D 02226.
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1 C'était une mesure très claire prise afin de défendre les intérêts de la
2 république et défendre sa souveraineté par rapport au rôle dominant des
3 autorités fédérales, mais par la même on a envoyé un message aux autres
4 républiques en montrant que nous étions déterminés à défendre les intérêts
5 de la Bosnie-Herzégovine. L'on sait plus ou moins bien que la raison
6 principale de l'effondrement de la Yougoslavie a été les sorts du
7 nationalisme serbe ainsi que les modifications entreprises par la Serbie
8 lorsqu'elle a limité les droits de ces provinces autonomes, du Kosovo et de
9 la Vojvodine, ainsi que de la République du Monténégro, ceci a eu un impact
10 sur l'équilibre obtenu au sein de la Fédération sur le plan du
11 fonctionnement de la Fédération et a suscité des réactions auprès des
12 autres républiques, c'est-à-dire auprès des autres peuples.
13 Je me souviens d'une réunion qui a rassemblé les présidents -- les premiers
14 ministres des différentes républiques et des provinces, réunions avec le
15 gouvernement fédéral fin 1990 portant sur les mesures politiques
16 économiques pour 1991. J'ai interrompu l'exposé du premier ministre fédéral
17 Ante Markovic, en disant que tout ceci n'avait pas de sens si la Serbie ne
18 remboursait pas l'argent car elle avait déjà procédé à un coût monétaire.
19 Littéralement, en volant à nous autres tous les autres plusieurs milliards
20 de dinars de l'époque. C'est quelque chose qui se trouvait que possible
21 compte tenu du système monétaire de la Yougoslavie de l'époque, à savoir de
22 faire marcher la planche habillée par d'autres intervenants, et non
23 seulement par la banque centrale de Yougoslavie.
24 Par la suite, cette prise de position je l'ai confirmée également lors des
25 réunions de notre conseil et également devant l'opinion début janvier 1991,
26 là encore en défendant les intérêts économiques de la Bosnie-Herzégovine.
27 Et ceci aussi constitue une pièce à conviction ici. Pièce 1D 002232.
28 L'inflation et la méfiance sont de retour en 1990, les différentes
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1 élections qui ont eu lieu dans les républiques et le fait qu'il n'y ait pas
2 eu d'élection au niveau de la Fédération ont remis en question non
3 seulement le fonctionnement de la Fédération mais également le
4 fonctionnement de notre espace économique yougoslave.
5 Permettez-moi de me référer brièvement aux élections de 1990 et de dire
6 quelques mots de la nouvelle constitution du pouvoir.
7 La création de nouveaux partis politiques rendus possible par les
8 modifications de la loi sur l'association des citoyens, c'est fait de la
9 manière suivante : tout d'abord, il était interdit de s'organiser selon le
10 principe nationale, et telle était l'attitude du gouvernement fédéral, mais
11 c'est quelque chose que nous avons modifié par la suite car cette position
12 était contestée par la Cour constitutionnelle. Il s'agit d'un débat qui est
13 très intéressant et qui en fait annonce l'essentiel du débat
14 constitutionnel portant sur l'organisation du pays. Pièce 1D 01615.
15 Puisque dans l'acte d'accusation, l'Union démocratique croate constituerait
16 prétendument également partie prenante à l'entreprise criminelle commune.
17 Il serait intéressant de savoir que le HDZ d'après nos estimations a été au
18 devant la scène pour défendre la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine, il
19 a défendu plus que tout autre parti politique. Et c'est dans son programme
20 politique qu'il prône, et je cite : qu'il prône la compréhension d'une vie
21 harmonieuse des Croates, des Musulmans, et des Serbes en Bosnie-Herzégovine
22 ainsi que d'autres peuples en Bosnie-Herzégovine, et prône également
23 l'adhésion de la Bosnie-Herzégovine à la Communauté européenne. Document 1D
24 02699.
25 Lors des élections tenues en novembre 1990, ce sont les partis nationaux
26 qui l'ont emporté. Sur la base de leur lutte contre le communisme, et c'est
27 ça qui leur a permis de créer une coalition. Ce que je pense c'est que le
28 communisme s'était déjà vaincu lui-même. Mis à part ces trois partis
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1 nationaux, les deux partis suivants d'après les résultats les ex-
2 communistes, le SDP, c'est-à-dire les réformistes, le parti du président du
3 gouvernement fédéral, du premier ministre fédéral Ante Markovic. Tous ceux-
4 là c'était des partis politiques actifs au-delà de la Bosnie-Herzégovine. A
5 l'époque la Yougoslavie fonctionnait encore.
6 Je n'ai pas souhaité prendre part aux élections. J'ai fait ce que j'avais
7 annoncé au début de l'année 1990, que ceux qui étaient -- j'estimais que
8 ceux qui étaient au pouvoir, compte tenu de leur position et compte tenu du
9 fait qu'ils avaient accès aux médias ne devaient pas prendre part aux
10 élections, que notre tâche devait être plutôt de réunir les conditions
11 permettant aux élections de se dérouler de manière la plus démocratique, la
12 plus libre possible après 50 années d'interruption.
13 Et je souhaitais revenir à Mostar, où j'avais déjà été élu directeur
14 général d'à propos Herzégovine. C'est là que vivait ma famille, mais aussi
15 tous mes proches, tous mes parents. Je souhaiterais également faire part de
16 ma position, mon opinion personnel.
17 Je pensais que la Yougoslavie pouvait se maintenir sur des bases
18 différentes, mais à l'époque les dirigeants politiques serbes ne
19 souhaitaient pas accepter cela. Cela ne leur convenait pas. Et par
20 ailleurs, la Yougoslavie, du moins pendant les années où j'ai été actif
21 politiquement, ne ressemblait pas aux autres pays socialistes. On avait une
22 liberté de circulation, liberté de paroles. Le libéralisme économique était
23 de plus en plus visible.
24 Puisque j'ai fait part de différents gouvernements, pratiquement 14 dans ma
25 carrière, je pense pouvoir dire que les députés dans l'assemblée de
26 l'époque, le parlement de l'époque étaient bien plus exigeants que ça n'a
27 été le cas après l'introduction du pluripartisme.
28 Nous avons remis l'exécutif au nouveau gouvernement -- entre les mains du
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1 nouveau gouvernement, M. Pelivan, je pense que nous allons pouvoir le voir
2 en tant que témoin ici, et cette passation de pouvoir a eu lieu début
3 février 1991; cependant, le nouveau pouvoir n'a pas dirigé en respectant
4 les principes de l'état de droit mais en instituant de principes d'un
5 partage de pouvoir tripartite dans toutes les fonctions selon les bases
6 nationales et à tous les échelons. Le résultat a été l'atrophie totale du
7 système économique et politique.
8 Je ne m'étendrais pas sur l'effondrement de la Yougoslavie. Puisque nous
9 avons vu tout ça plus ou moins déjà. C'est l'effondrement de la Yougoslavie
10 qui a -- elle s'est déroulée d'abord sous forme de guerre en Slovénie,
11 ensuite en Croatie.
12 Je pense qu'il suffirait de se pencher sur les PV des réunions tenues par
13 les organes les plus importants du HDZ de Bosnie-Herzégovine qui pour la
14 plupart constituent des preuves versées par ce Procureur. On condamne
15 l'agression sur la Croatie. On envoie des volontaires, des Croates mais
16 aussi des Musulmans.
17 Comme on le saura par la suite, je me suis trouvé à Mostar. J'ai été
18 directeur d'Apro Holding. J'ai enseigné à l'université, et j'ai pris part à
19 plusieurs études consacrées à la transformation économique en Bosnie-
20 Herzégovine. Notre marché était toute la Yougoslavie. Nous avions, par
21 exemple, deux entreprises à Zagreb et deux entreprises à Belgrade.
22 Dans ces demandes dans les PV des réunions de la HVO ce qui était
23 visible dans les médias également, on a demandé à ce qu'on cesse d'utiliser
24 le territoire de Bosnie-Herzégovine pour attaquer la Croatie. Je ne peux
25 pas dire que cela a été fait avec l'approbation des représentants du
26 pouvoir, mais près des citoyens, il avait une perception selon laquelle ne
27 faisait rien ou pas suffisamment pour rendre impossible l'agression contre
28 la Croatie qui a été faite depuis la Bosnie-Herzégovine, depuis le
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1 territoire de Bosnie-Herzégovine. Par là, la Bosnie-Herzégovine n'était pas
2 neutre et est devenue participant à cette guerre d'autant plus parce que,
3 dans ces opérations, avaient participé les unités de la Défense
4 territoriale de la République, bien sûr, des régions peuplées
5 majoritairement par les Serbes.
6 Les noms d'Alija Izetbegovic résonnement toujours dans nos têtes. Ce
7 n'est pas notre guerre, indépendamment du contexte dans lequel ces propos
8 ont été proférés. Cela voulait dire une approbation tacite que la Bosnie-
9 Herzégovine soit utilisée en guise de base pour lancer des attaques contre
10 leurs compatriotes.
11 Nous avons entendu le témoignage de Stjepan Kljuic dans cette salle
12 d'audience, c'est la page de compte rendu 4017 et 4021. La position neutre
13 proclamée par Izetbegovic pour ce qui est de la guerre en Croatie a été
14 publiée sans avoir consulté les organes légaux de Bosnie-Herzégovine, ce
15 qui représentait l'obligation constitutionnelle.
16 Comme moi, plus tard en tant que président de l'organe provisoire du
17 pouvoir exécutif HVO, comme je ne pouvais pas rendre des décisions de façon
18 autonome mais seulement dans le cadre d'un organe collectif, Izetbegovic
19 non plus ne pouvait pas le faire et personne d'autre qui aurait participé
20 au travail de cet organe collectif.
21 C'étaient tous des sujets qui ont été présentés dans les médias et
22 par les médias dont tout le monde parlait.
23 Dans toute la procédure ici, il faut vraiment faire attention aux
24 éléments du contexte. Les Croates par exemple avaient peur d'un accord
25 entre les Musulmans et les Serbes. La guerre en Croatie a eu des
26 conséquences directes sur les régions peuplées majoritairement par les
27 Croates en Bosnie-Herzégovine et surtout dans la région vers l'ouest, nord-
28 ouest et au village en Herzégovine, Ravno, lors des actions de la JNA et
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1 des forces paramilitaires qui en septembre 1991 ont occupé Mostar et
2 j'étais témoin de cela. La réaction des organes du pouvoir était tiède pour
3 ainsi dire et indéfinie.
4 Les documents qui proviennent des réunions du HDZ BiH et à l'époque,
5 je n'étais pas au courant de cela, je ne recevais que des informations
6 publiées par les médias, je n'étais pas au courant de ces informations ni à
7 l'époque où j'ai eu l'entretien au bureau du Procureur, ces informations
8 montrent clairement ce que les hommes politiques croates faisaient à
9 l'époque et comment ont été créées des communautés croates en Bosnie-
10 Herzégovine. Il y en avait huit avec à peu près 70 municipalités qui par la
11 suite sont réunies en communauté croate unie Herceg-Bosna. Il y avait des
12 objectifs qui étaient complètement différemment exprimés par rapport aux
13 objectifs présentés dans l'acte d'accusation.
14 Dans ces procès verbaux, on peut trouver un moyen pour chercher des
15 réponses pour ce qui est du fonctionnement de ces communautés. Ensuite, je
16 vais vous donner les numéros 41, 47, 50, 58, 60.
17 La présidence de la HDZ à la réunion du 26 août 1991, je cite,
18 condamne l'utilisation du territoire de la République de Bosnie-Herzégovine
19 pour lancer des attaques terroristes de l'armée et des volontaires contre
20 la République de Croatie. C'est P 51.
21 Le mécanisme de fonctionnement de la République fonctionne de plus en
22 plus faible. Il y avait beaucoup plus de division et déjà à l'année 1991,
23 les représentants du gouvernement à Sarajevo publiquement ont avoué qu'ils
24 ne contrôlaient pas la situation sur le territoire tout entier. C'était une
25 chose notoire et dans les médias cela a été dit quotidiennement.
26 Je présente tous ces éléments parce que le Procureur n'a pas présenté
27 le contexte pour pouvoir comprendre ce qui se passait, et en particulier
28 cela a été présenté d'une façon erronée et arbitraire dans soi-disant
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1 expertise de M. Tomljanovich. Je suis conscient, Messieurs les Juges, que
2 vous n'insistez pas trop sur les détails historiques lointains, mais je
3 pense qu'il faut suivre les instructions de l'historien Huising, pour ce
4 qui est de la perception de tous les événements et de toutes les
5 déclarations, il faut voir quelles options ont été à la disposition à un
6 moment donné pour en juger. Et je pense que cela serait une approche juste
7 selon laquelle cette Chambre devrait juger toutes les preuves ainsi que des
8 transcriptions des comptes rendus du président que je vais mentionner.
9 J'ai participé à certain nombre de réunions avec le président Tudjman
10 une fois en 1992, septembre, deux fois en 1993 en décembre et les autres
11 réunions se sont passées après la période couverte par l'acte d'accusation.
12 Je ne savais pas que ces entretiens étaient enregistrés. Il y a bien sûr
13 des parties qui ne sont pas précises dans ces entretiens et enregistrement
14 de ces entretiens. Il y a des erreurs pour ce qui est des mots de
15 locuteurs, parfois il n'y a pas de nom du tout. Mais ces comptes rendus
16 sont intéressants pour l'histoire, bien sûr, mais aussi pour étudier de
17 façon sérieuse le contexte. Tudjman était certes historien et il aimerait
18 avoir le contrôle ou une sorte de trace de tout ce qu'il faisait, et de ce
19 qu'il disait.
20 Mais nous pouvons avoir des opinions différentes par rapport à cela.
21 Maintenant certaines portions de ces entretiens dont nous avons ici dans ce
22 procès au pénal et pour ce qui est du Procureur, il a dit lui même que cela
23 prouve que l'entreprise criminelle commune existait. Pour ce qui est de ma
24 Défense, cela prouve qu'il n'y en avait pas, il n'y avait pas d'entreprise
25 criminelle commune et il n'y avait même pas d'annonce de cette entreprise
26 criminelle commune. Ces instructions on ne peut pas les utiliser d'une
27 position qui englobe, qu'on pouvait les intégrer dans un contexte
28 préalablement imaginer. Il faut les percevoir dans le contexte de la
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1 situation qui prévalait sur le terrain à l'époque et dans le contexte de
2 l'évolution des négociations internationales.
3 La Chambre dans sa Chambre pour ce qui est de la requête 92 bis a
4 mentionné par exemple qu'il a été dit le 5 décembre 1993, c'est le document
5 de l'Accusation P 6454, que je cite : "Cela a été prévu par le plan
6 international portant seulement des trois républiques," et dans ce plan par
7 l'intermédiaire des Nations Unies et de l'Union européenne, il y avait des
8 négociations intenses.
9 Et le dernier témoin pour ce qui est de la présentation des moyens de
10 preuve de l'Accusation, il y avait des documents selon lesquels le côté
11 musulman à Mostar a accepté Mostar en tant que la capitale d'Herceg-Bosna,
12 l'une des trois républiques faisant partie de l'union de Bosnie-
13 Herzégovine.
14 Tudjman a compris - et c'est ce qui provient clairement des
15 transcriptions - que le rôle décisif jouait la communauté internationale de
16 la crise. Il a également compris que les facteurs majeurs de la crise en
17 Bosnie-Herzégovine sont les Serbes et les Musulmans et non pas les Croates.
18 Et c'est pour cela que la préservation de leur position en tant que peuple
19 qui dans le nôtre a été le moindre était le plus complexe.
20 Les transcriptions montrent quelques facteurs constants même où les étapes
21 de l'armée Bosnie-Herzégovine contre les Croates et contre le HVO ont été
22 les plus féroces; Tudjman était pour la coopération avec les Musulmans.
23 Egalement, il a signé avec Izetbegovic un accord secret portant sur la
24 Confédération, après quoi ce dernier seulement quelques jours après le 16
25 septembre 1993, il a signé avec les Serbes l'accord par lequel il leur a
26 permis de quitter la Bosnie-Herzégovine de façon objective deux ans plus
27 tard et que la République musulmane soit internationalement reconnue
28 conformément à la proposition portant sur la République Bosna -- bosnique,
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1 cette Chambre a eu déjà l'occasion de le voir.
2 Ensuite, l'idée constante de Tudjman, après avoir lu toutes ces
3 transcriptions, était de faire cesser la guerre à tout prix. La défense des
4 droits fondamentaux des Croates en Bosnie-Herzégovine était l'élément
5 suivant et c'était l'élément qui était de plus loin, le plus persuasif --
6 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre.
7 Bien sûr, votre déclaration est très importante pour moi, mais j'aimerais
8 dire qu'il y a une erreur importante dans le compte rendu d'audience. Elle
9 se trouve à la page 15, je crois, où il est dit : "Pour autant que ce soit
10 la République musulmane contre -- contre le fait d'être reconnu
11 internationalement," alors que vous nous avez dit qu'elle obtienne cette
12 reconnaissance de la part de la communauté internationale.
13 Bien sûr, vous voulez terminer dans les temps qui vous ont été
14 impartis, ce qui fait que vous parlez assez rapidement. Mais il est
15 important que le compte rendu d'audience reflète bien vos propos d'où mon
16 conseil qui est de ralentir un peu afin que vos propos soient bien
17 interprétés. Merci d'avance.
18 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Oui, j'ai dit que ces accords
19 permettaient à certaines républiques de partir et qu'ici, la reconnaissance
20 permettrait une république musulmane en Bosnie. Ceci a déjà été présenté.
21 Oui, mais il y a l'élément suivant. Et il est de loin le plus important. Il
22 est absolument le plus important dans tous les entretiens qu'il a eus et
23 c'était d'assurer la souveraineté territoriale et juridique de la Croatie
24 dans ces frontières internationalement reconnues et bien sûr la protection
25 de ces frontières.
26 En 1994, jusqu'à ce que le commandement commun ait été créé entre le HVO et
27 l'ABiH, et jusqu'à ce que dans la coopération avec l'armée croate
28 modernisée, n'ait été créée les conditions pour les accords de Dayton par
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1 la libération d'une grande partie de la Bosnie-Herzégovine dont j'ai été
2 témoin en direct en tant que ministre de la Défense de la République de
3 Bosnie-Herzégovine à l'époque. Ce sont mes impressions après avoir lu ces
4 transcriptions dont -- parleront, bien sûr, les témoins de la Défense parmi
5 lesquels sont Miomir Zuzul et Mile Akmadzic, président du gouvernement de
6 Bosnie-Herzégovine.
7 Dans l'entretien - et c'est la pièce de l'Accusation P 9078 - j'ai dit
8 qu'un nombre important de Croates et de Musulmans en Herzégovine étaient
9 émotionnellement pour que ces régions soient annexées en Croatie -- à la
10 Croatie après le démantèlement de la Yougoslavie. Jusqu'au jour
11 d'aujourd'hui, cela n'a pas changé les frontières d'état établies justement
12 par l'Herceg-Bosna, a séparé, a divisé les membres du même peuple après
13 plusieurs siècles de vie commune ou dans le même Etat. Entre-temps, il y
14 avait de plus en plus de différence pour ce qui est des conditions de vie
15 après le démantèlement et la dissolution de la Yougoslavie et là je pense à
16 un niveau plus élevé du développement économique de la Croatie.
17 Les événements survenus dans la première moitié de 1992 ont été
18 complètement omis lors de la présentation des moyens de preuve de
19 l'Accusation. Il faut dire que la Bosnie-Herzégovine a été reconnue en tant
20 qu'un état indépendant grâce avant tout au soutient apporté par le HDZ de
21 BiH et les Croates. Or, cela, les documents dont nous disposons montrent
22 que la communauté internationale avait principalement deux conditions pour
23 la reconnaissance internationale de la Bosnie-Herzégovine mis à part
24 l'organisation des référendums ce qui a été demandé par le comité de
25 Badinter -- la commission de Badinter, il y avait l'accord portant sur
26 l'organisation des relations internes en Bosnie-Herzégovine qui étaient
27 également une condition pour que la Bosnie-Herzégovine soit reconnue ce qui
28 montre la déclaration commune de SAB [phon] portant sur la reconnaissance
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1 des républiques yougoslaves du 10 mars 1992.
2 Cette Chambre connaît déjà la déclaration portant sur les principes de
3 l'organisation constitutionnelle de la Bosnie-Herzégovine du 18 mars 1991
4 adoptée par les trois parties. Les témoins parleront de ces principes
5 constitutionnels, à savoir que les unités constitutionnelles ont le droit,
6 je cite : "Adopter les règles et décider sur des commissions d'importance
7 pour les unités constitutionnelles telles que l'administration des services
8 et des fonctionnaires de ces unités, expropriation de certains biens pour
9 qu'ils soient utilisés aux fins publiques, le cadastre, la protection des
10 incendies, la Chambre des affaires, les institutions d'épargne, les
11 institutions financières de crédit, ensuite la protection sociale,
12 l'éducation, la police, le commerce."
13 Il a été reconnu qu'une unité constitutionnelle pouvait organiser --
14 pouvait établir ses institutions propres et établir des relations avec
15 d'autres républiques. C'est pour cela d'ailleurs qu'il y avait une série de
16 négociations sous l'égide de la Communauté européenne en engageant le
17 diplomate portugais, Jose Cutileiro, pour qu'avant la reconnaissance
18 internationale au début du mois d'avril, adopte les principes portant sur
19 l'organisation future de la Bosnie-Herzégovine.
20 Je veux dire puisque j'étais membre des organes du pouvoir avant cela qu'en
21 Bosnie-Herzégovine, en l'ancienne Yougoslavie, il n'existait aucun élément
22 pour ce qui est de la protection des droits de différents peuples, tout
23 simplement parce que ces soucis étaient les soucis ou les préoccupations
24 plutôt du parti communiste, et c'était le Parti communiste qui garantissait
25 les droits des différents peuples, et ce n'était pas défini dans des
26 articles de la constitution de la République socialiste de Bosnie-
27 Herzégovine.
28 Ces informations portant sur ces deux conditions pour la reconnaissance
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1 sont dans tous les documents, dans les déclarations de participants à ces
2 événements, mais ainsi ce que j'ai appris lors des contacts que j'ai eus
3 pendant que j'étais aux Etats-Unis d'Amérique. Toutes les propositions des
4 solutions constitutionnelles pour la Bosnie-Herzégovine, qui ont été
5 présentées lors des conférences internationales. Il partait de la
6 qualification de la Bosnie-Herzégovine en tant que communauté de peuple,
7 une communauté de peuple, et dans le contexte des accords de paix, il faut
8 que je dise que ma Défense présenterait les questions portant sur le
9 présumé accord de Graz, pour ce qui est de la division de la Bosnie-
10 Herzégovine entre les Serbes et les Croates que cette Chambre a mentionné
11 dans la décision 92 bis, à la page 27 215, la page du compte rendu -- 92
12 bis.
13 Les témoins et les preuves montreront que cette réunion a eu lieu selon la
14 recommandation des médiateurs internationaux et que lors de cette réunion,
15 il n'y avait aucun accord, et même le côté croate a proposé à ce que toutes
16 les questions contestables soient résolues par l'arbitrage international.
17 Une autre réunion de même nature a été tenue entre les Croates et les
18 Musulmans pendant la même semaine à Split.
19 Il y a beaucoup d'articles de presse là-dessus et je propose les
20 moyens de preuve de l'Accusation P 9526 et 1D 00525. Et j'utiliserais le
21 terme "musliman-musulman" et non pas "bosnien" dans mon exposé parce que
22 l'appellation du peuple bosnien n'a été adoptée que par la constitution de
23 la Fédération de Bosnie-Herzégovine mars 1994. Donc, en utilisant le terme
24 "musliman et musulman," donc, je ne veux pas faire autre chose.
25 Les documents disponibles montrent que les deux communautés croates qui ont
26 été créées l'Herceg-Bosna, la Posavina bosniaque -- en novembre 19 --
27 n'étaient pas actives et en quelque sorte jusqu'à l'attaque généralisée de
28 la JNA et les déformations serbes en mars 1992, et en particulier, au début
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1 du mois d'avril après la reconnaissance internationale de Bosnie-
2 Herzégovine.
3 La décision portant la formation du conseil croate de -- des forces croates
4 en tant qu'armée et de défense a été prise le 7 avril 1992. A l'époque,
5 comme l'experte de l'Accusation, M. Tomljanovich a dit il n'y avait pas
6 d'armée de Bosnie-Herzégovine. C'est à la page
7 6 818 du compte rendu.
8 Mate Boban signe cette décision en sa qualité de président du HVO et de la
9 HDZ HB. C'est lui-même qui a expliqué l'opinion, les raisons qui ont
10 présidé la création du HVO. Il a souligné que le processus de création des
11 cellules de Crise dans les différentes municipalités et également de leur
12 mise en relations sur le plan régional a entraîné la création de l'état-
13 major principal du HVO. En évoquant les relations avec les autres forces
14 armées qui défendaient le pays il ajoute : "Nous nous attendons à ce que
15 les négociations portant sur l'organisation constitutionnelle en Bosnie-
16 Herzégovine se poursuivent et soient menées à leur terme. A partir du
17 moment nous aurons eu la sensation que les principes de base de la
18 structure constitutionnelle auront été convenus et pourront être traduits
19 dans les faits. Et bien, à partir de ce moment-là, nous pourrons mettre en
20 accord nos forces avec les autres forces de Bosnie-Herzégovine." Pièce 157.
21 Et dans son livre, le témoin de l'Accusation, Cupina, page 460, souligne
22 qu'avant la création du HVO, Boban a proposé à Sarajevo de prendre une
23 décision portant sur la création d'un conseil de la Défense croate ou
24 musulman, c'est-à-dire musulman. Et de toute évidence, les autorités
25 sarajeviennes n'ont pas accepté cela et d'ailleurs elles le reconnaissent.
26 Nous avons entendu de la part de Stjepan Kljuic, qui était le commandant en
27 chef de l'ABiH, qu'elle ne pouvait pas faire grand-chose pour défendre le
28 pays.
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1 Avant la création formelle du HVO en tant qu'une armée donc création
2 intervenue le 8 avril 1992, de la part de la Bosnie-Herzégovine on a vu se
3 créer un réseau d'unités plus ou moins grandes qui se sont lancées dans des
4 activités de défense. Bien entendu, ce ne sont pas les informations que
5 j'avais à l'époque.
6 La création de la première armée qui défend la Bosnie-Herzégovine,
7 paragraphe 25 de notre acte d'accusation est appelé par le Procureur, acte
8 des auteurs de l'entreprise criminelle commune. Il s'agit de l'armée qui
9 faisait partie des forces armées de ce même pays et dont les membres ont
10 bénéficié d'un statut à l'identique avec les membres de l'autre composante
11 des forces armées de Bosnie-Herzégovine sur la partie libre du territoire
12 du pays. Ils reçoivent la même rémunération aujourd'hui de la part de ce
13 même Etat en tant qu'handicapé, invalide de guerre, en tant que personne
14 ayant reçu des médailles de courage, ou bien, ils ont les mêmes droits sur
15 le plan de la privatisation de la propriété sociale.
16 Donc, la présidence de la HZ HB a été l'organe principal de la HZ HB,
17 quelques mois après la création on constate qu'il y a une modification de
18 la décision portant création qui se voit compléter,
19 le 3 juillet 1992. La présidence devient l'organe législatif de la
20 HZ HB et il compte dans sa composition les présidents des HVO municipaux,
21 et le 14 juillet, j'en ai été témoin moi-même lors d'une réunion tenue.
22 Mais s'agissant pas seulement de cette décision-là mais d'autres décisions
23 publiées dans la première et la deuxième édition du journal officiel, la
24 première impression que j'ai eue a été celle de déception. Tout d'abord,
25 pour ce qui est de la qualité purement juridique de ces actes et des
26 solutions adoptées qui ressemblaient plutôt à une improvisation qu'a une
27 entreprise sérieuse qui s'annonçait.
28 Donc, l'amendement de l'article 8 de cette décision modifiée prévoie
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1 que la présidence pourra constituer des organes exécutifs du pouvoir. Mais
2 il faut considérer cette décision dans son contexte.
3 Que s'est-il passé en ces quelques mois ? Il s'est passé la chose
4 suivante : premièrement, on a gelé temporairement la guerre en Croatie.
5 Deuxièmement, il n'y avait pas d'accord clair portant sur l'avenir de
6 la Bosnie-Herzégovine de la manière dont elle sera organisée.
7 Troisièmement, une série d'entretiens ont eu lieu sous l'égide de la
8 Communauté européenne des principes du plan Cutileiro ont été adoptés en
9 date du 18 mars 1992, donc, plan portant sur l'organisation future de la
10 Bosnie-Herzégovine.
11 Quatrièmement, entre autres, grâce au soutien des Croates et du HDZ
12 lors du référendum tenu la Bosnie-Herzégovine a été reconnue
13 internationalement.
14 Cinquièmement, la guerre en Bosnie-Herzégovine sévissait sur la
15 totalité de son territoire de toutes les régions du pays et le 20 juin 1992
16 la présidence a pris la décision de déclarer l'état de guerre. 70 % du
17 territoire était déjà occupé par les Serbes et la population non-serbe
18 était dans sa majorité chassée.
19 Sixièmement, le parlement de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine
20 a cessé de se réunir, c'est au mois de juin qu'elle s'est réunie pour la
21 dernière fois lorsque la décision portant sur le référendum a été prise et
22 le gouvernement de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine ne
23 fonctionnait pas effectivement, c'est-à-dire n'avait plus pratiquement
24 aucune incidence sur les événements à l'extérieur de Sarajevo qui était
25 pratiquement, totalement encerclé et bloqué. Plusieurs témoins sont déjà
26 venus en parler.
27 Septièmement, les municipalités ont accepté la plupart des fonctions
28 exercées précédemment par la Fédération yougoslave et le gouvernement de la
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1 République ce qui leur a imposé la nécessité de coordonner leurs activités,
2 et je vais revenir à cela brièvement plus tard.
3 Les forces du HVO avaient déjà défendu avec succès des parties
4 considérables de Bosnie-Herzégovine, donc des parties où elles s'étaient
5 constituées ces forces, donc, en Herzégovine, au centre de la Bosnie, dans
6 la Posavina.
7 Et neuvièmement, on voyait de mieux en mieux que les dirigeants musulmans
8 n'étaient pas prêts à faire bénéficier le HVO d'un statut sur un pied
9 d'égalité en tant que forces armées au sein des forces armées de Bosnie-
10 Herzégovine. Des témoins et des preuves viendront étayer ce que je viens de
11 dire.
12 Le fait même de l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine a nécessité des
13 efforts considérables, il fallait se doter de nouveaux textes de loi, il
14 fallait commencer à exercer les fonctions qui avaient été précédemment au
15 sein de la Fédération yougoslave. Et comme cela n'était pas le cas, en
16 fait, cela ne s'est passé que formellement -- purement formellement, on
17 s'est doté d'un certain nombre de textes mais le système législatif ne
18 fonctionnait pas. En fait, le système a cessé de fonctionner dans tous ces
19 éléments clé. Et cela concerne en particulier le système financier, donc,
20 il n'y avait plus de monnaie, plus d'opération financière normale. Donc, à
21 partir du mois d'avril, on a cessé de financer tout ce qui avant était
22 couvert par le budget de la République.
23 La Communauté d'Herceg-Bosna jamais ne s'est dotée d'une constitution
24 formelle pour rompre ses liens avec la Bosnie-Herzégovine. Elle ne s'est
25 même pas dotée du statut et les statuts auraient constitué une condition
26 préalable pour son enregistrement, devant un tribunal pour s'enregistrer,
27 toute association de chasseurs ou de pécheurs ou quelle que association que
28 ce soit devait s'enregistrer pour être légitime. La Communauté d'Herceg-
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1 Bosna a toujours respecté l'existence de la Bosnie-Herzégovine. Nous avons
2 toujours souligné que nous étions partie de la République de Bosnie-
3 Herzégovine. Nous avons toujours souligné et cité le nom de cet Etat.
4 Donc, ce qui est essentiel, c'est de dire que le maintien du système
5 constitutionnel de la République de Bosnie-Herzégovine, ce n'était pas
6 quelque chose qui s'est passé dans haut en appliquant, en exerçant les
7 attributs de l'état verticalement, parce que cet état ne fonctionnait pas
8 mais c'était passé dans bas à travers l'affirmation, le fonctionnement de
9 ce qui existait encore à l'époque, à savoir tous les services communaux,
10 les institutions constitutionnelles, les attributions de différentes
11 municipalités faisant partie de la communauté croate d'Herceg-Bosna. Et
12 l'objectif était précisément de répondre à l'obligation constitutionnelle
13 qui était celle de tout citoyen et de toutes les municipalités de se placer
14 au service de la Défense du pays.
15 En été 1992, lorsque les municipalités s'étaient dotées du gros des
16 fonctions de l'état, le besoin s'est fait sentir de coordonner leur
17 travail. C'est ce qu'on nous a dit, c'est ainsi que j'ai interprété moi-
18 même la situation et c'est ce qui, à ce moment, a incité la HZ HB, a créé
19 des organes temporaires de l'exécutif.
20 Treizièmement, je vais expliquer de quoi il s'est agi, comment ces
21 organes ont fonctionné, qui a été membre de cet organe, ce qu'on a pu
22 faire, quelles ont été les attributions de cet organe, et ce qui n'a pas
23 relevé de ses attributions.
24 La première décision statutaire portant création de l'exécutif a été prise
25 dès le 15 mai 1992, mais la création de cet organe a pris plus d'un an.
26 C'est ce que l'on peut comprendre d'après le rythme des nominations
27 publiées dans le journal officiel. Nous avons dans les documents fournis
28 par le Procureur nombre de photocopies de cette décision statutaires du 15
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1 mai, mais, en fait, ce qui n'a pas été cité c'est l'article 2, je cite :
2 "Le président de la HZ HB est le président du HVO." Document ERN
3 006889378938.
4 Dans l'acte d'accusation le Procureur définit le HVO en disant qu'il s'agit
5 de l'organe de Défense et de l'exécutif suprême même s'il s'agit d'organe
6 et de termes qui sont complètement séparés. Il suffit de jeter un coup
7 d'œil sur les deux décisions statutaires, celle du 15 et celle du 3 juillet
8 pour voir que le HVO est défini, et je cite : "En tant qu'organe du pouvoir
9 exécutif et de l'administration sur le territoire de la HZ HB," ce qui
10 d'emblée nous dit qu'il s'agit d'un nouvel organe par rapport au HVO qui
11 est une formation armée, je l'ai déjà cité en citant la décision de créer
12 le HVO, décision en date du 8 avril 1992.
13 Décision statutaire dit que le HVO de la HZ HB est un organe temporaire qui
14 continuera d'exister jusqu'à ce que l'exécutif et l'administration ne
15 soient représentés par des organes réguliers. Donc, il s'agit d'un organe
16 ad hoc, et puis donc la décision définit clairement que les organes de
17 l'exécutif sont responsables de concert pour les décisions prises par le
18 HVO et en particulier ils assument la responsabilité pour leur domaine de
19 travail.
20 Et M. Ribicic a confirmé cela, page 14 333 du compte rendu d'audience
21 dans l'affaire Blaskic : "Le HVO en tant que tout et tout membre du HVO à
22 titre individuel réponde du travail de la présidence de la Communauté
23 croate de l'Herceg-Bosna."
24 Les différentes fonctions ont été adoptées afin de surmonter le chaos. Les
25 liens avec le gouvernement à Sarajevo étaient fictifs, ce sont des
26 représentants du HDZ dans ce gouvernement, donc, du parti qui a constitué
27 le HZ HB fournissait un élément de légitimité à ces organes, nécessaire,
28 indispensable pour que la Bosnie-Herzégovine puisse être un sujet de droit
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1 international sur le plan international.
2 Par la première décision statutaire, en réalité, ce qui est créé, c'est le
3 bureau de la HZ HB et avec les différents départements. Donc, nous avons le
4 président qui reste le président de la présidence de la HZ HB et qui
5 représente le pouvoir militaire et exécutif. Donc, c'est Mate Boban qui est
6 le président de la HZ HB, le président du HVO.
7 Cette concentration du pouvoir au niveau de la présidence de la HZ HB,
8 donc, c'est l'organe où vous avez les maires des différentes municipalités,
9 au fond cela est adopté pour rester au sein du cadre constitutionnel de la
10 République socialiste de Bosnie-Herzégovine.
11 Il n'y avait pas partition, de partage de pouvoir, et c'était ça la
12 caractéristique de l'ensemble du système yougoslave qui était basé sur
13 l'unité du pouvoir, et il s'agit là d'une forme rudimentaire de pouvoir. On
14 ne peut pas parler de partage de pouvoir, on peut parler uniquement de
15 distribution, d'un pouvoir supposé, et dans ce système improvisé et
16 provisoire, la présence de la HZ HB a joué le rôle de l'organe législatif,
17 et le HVO était l'organe temporaire du pouvoir civil pour devenir à partir
18 du 14 août 1992, l'organe civil opérationnel exécutif. La présidence de la
19 HZ HB est au sommet et depuis la présidence, le pouvoir descend vers les
20 municipalités qui coordonnent une partie des activités communes, et puis on
21 établit un lien direct entre les départements à la présidence où sont
22 représentés les présidents des HVO municipaux. C'est ainsi que j'interprète
23 ces différents actes qui étaient très rudimentaires encore une fois sur le
24 plan juridique mais qui nous montrent comment réellement ces organes ont
25 fonctionné. Nulle part, par exemple, on a défini ce que constituent la
26 mission et les attributions de l'organe temporaire de l'exécutif du HVO, ce
27 qui était le cas par exemple précédemment avec les comités exécutifs des
28 assemblées municipales, c'est-à-dire du comité exécutif de l'assemblée de
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1 Bosnie-Herzégovine.
2 C'est à la fin de mon exposé que je parlerai des différents actes de la
3 présidence et à la lumière du paragraphe 17 de l'acte d'accusation. Mais
4 d'emblée je souhaite dire que les textes de lois qui ont été adoptés nous
5 montrent que très peu de modifications ont été apportées par rapport au
6 système judiciaire existent, tout simplement pour pouvoir appliquer ces
7 textes. Donc, il s'agit de plus d'un millier de lois qui restent en vigueur
8 et les modifications ne sont apportées que sur certaines lois, certains
9 textes et ce tout simplement pour que ces modifications aient un sens.
10 Un exemple, prenons, par exemple, l'exemple des dispositions pénales
11 lorsque la monnaie nationale ne fonctionne pas ou n'existe pas. Ainsi la
12 présidence a pris la décision de créer des entreprises publiques, dès le 3
13 juillet 1992. Mais c'est plus tard que ces entreprises ont été créées
14 uniquement. Pour ce qui est donc des entreprises dans le domaine
15 ferroviaire, routier, 93, la radio a été créée en mars 1993 et puis dans
16 l'acte d'accusation il nous est dit que la présidence du HZ HB a pris deux
17 décisions sur la reprise des biens appartenant à la JNA et au SSNO, à
18 savoir le secrétariat fédéral à la Défense nationale.
19 Mais avant ces décisions, la majorité des municipalités avaient déjà
20 adopté ces décisions, des décisions comparables. Et s'agissant des biens et
21 en particulier pour ce qui est de l'attitude de différends réservés donc à
22 l'utilisation des logements abandonnés ou on a procédé d'une manière
23 discriminatoire, et c'est le gouvernement de la république qui l'a fait.
24 Donc, la municipalité de Jablanica, par exemple, a confisqué non seulement
25 l'argent des forces d'occupation mais aussi de tous -- à tous les
26 consommateurs du territoire de la municipalité. Et toutes les installations
27 de la JNA ont été prises par la municipalité de Tuzla, appartements de la
28 JNA, municipalité de Travnik et Mostar. Livno, trois mois après la décision
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1 de la présidence de la HZ HB, a pris une décision pratiquement à
2 l'identique de confisquer et de revoir l'attribution des biens des forces
3 d'occupation pour des besoins de la municipalité. Donc, de toute évidence,
4 les municipalités avaient une certaine force et la décision de la
5 présidence de la HZ HB était une tentative de les coordonner. Une petite
6 digression, si vous permettez, au sujet de ce que j'ai fait en 1992 jusqu'à
7 ce que je sois nommé président du HVO, de la HZ HB le 14 août.
8 Au début de la guerre en Croatie, dans notre vie économique nous
9 connaissions de plus en plus de problèmes. Avant tout les communications
10 n'étaient plus bonnes, étaient interrompues. Et la situation est devenue de
11 plus en plus difficile. Je ne connaissais pas les gens du HDZ à l'époque
12 mais j'ai maintenu des contacts avec le gouvernement de la république et
13 ceci faisait partie de mes fonctions en tant que directeur général d'une
14 corporation comptant
15 14 sociétés par actions et comptant environ 4 000 salariés. Je pense que
16 les membres de la Chambre recevront une brochure qui présente cette
17 corporation.
18 Comme je l'ai dit, en 1990, j'ai opté pour une Bosnie-Herzégovine
19 indépendante. Au début de 1992, je l'ai dit très clairement dans une
20 émission dans un programme spécial de la télé Sarajevo intitulé : je
21 souhaite dire. Pièce à conviction 1D 02074.
22 J'ai été très clair en exposant mon point de vue. La Bosnie-
23 Herzégovine à mon sens pour se maintenir devait restée à la fois proche et
24 éloignée de la Serbie et de la Croatie. Elle devait tisser des liens
25 symétriques avec les deux. Et j'ai eu cette occasion historique huit années
26 plus tard suite à une série d'accords bilatéraux avec la Croatie, j'ai eu
27 l'occasion de confirmer cela en apportant ma signature à Belgrade. Lorsque
28 les relations diplomatiques de la Bosnie-Herzégovine ont été établies avec
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1 la Yougoslavie et ce qui nous a permis de voir le rétablissement de l'ordre
2 international dans cette partie du monde.
3 Le chef du gouvernement, Jure Pelivan, je m'attends à ce qu'il vienne
4 déposer ici en tant que témoin, m'a demandé d'accepter qu'il me propose en
5 tant que candidat au poste du gouverneur de la Banque centrale de Bosnie-
6 Herzégovine. Finalement, au début 1992, j'ai fini par accepter mais ça ne
7 devait être qu'une solution provisoire tout simplement pour qu'on commence
8 à émettre la monnaie de Bosnie-Herzégovine car j'avais fini par comprendre
9 que, si on ne protégeait pas la souveraineté monétaire de l'Etat, toute vie
10 économique perdait son sens.
11 Donc, il a fallu que cette nomination passe par la procédure parlementaire.
12 Mais même avant cela, j'ai estimé qu'il fallait que j'agisse d'urgence. Je
13 me suis même rendu à la Banque centrale de Croatie pour prendre
14 connaissance de la procédure qu'ils ont, eux, adopté pour émettre leur
15 devise, et je dois dire donc que j'avais un projet prêt qui allait nous
16 permettre d'émettre notre monnaie. J'ai eu même des entretiens avec une
17 commission de parlementaires de Bosnie-Herzégovine mais, comme le président
18 de la commission,
19 M. Muharem Cero m'en a informé, peu avant les élections au parlement de
20 Bosnie-Herzégovine, un télégramme est arrivé, en me retirant l'aval pour
21 mon élection. Et par la suite, j'avais appris qu'au fond, c'est le HDZ de
22 Mostar qui n'approuvait pas mon élection. A l'époque, on n'a pas émis notre
23 monnaie. Le système économique, comme on le verra dans les mois qui vont
24 suivre, a connu un effondrement total.
25 Début mars --
26 Le moment serait peut-être bienvenu pour faire la pause.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison. Ça fait une heure et demie, donc,
28 on fait une pause de 20 minutes.
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1 --- L'audience est suspendue à 15 heures 42.
2 --- L'audience est reprise à 16 heures 11.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Monsieur Prlic, vous avez la
4 parole.
5 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs
6 les Juges de la Chambre.
7 Au début du mois de mars, juste après le référendum au moment où je ne
8 pensais pas du tout que tout aurait pu connaître une escalade, je suis
9 parti aux Etats-Unis à l'invitation du gouvernement américain et par le
10 biais de l'ambassadeur Warren Zimmermann, pour y être un mois pour faire
11 une étude s'appelant : "L'économie du marché, l'approche des Etats-Unis
12 d'Amérique." C'est là-bas où j'ai rencontré le premier ambassadeur des
13 Etats-Unis d'Amérique en Bosnie-Herzégovine. Et je suis rentré des Etats-
14 Unis d'Amérique pour me retrouver en plein milieu de la guerre. Je ne suis
15 pas resté et j'aurais pu et me retrouver dans un processus similaire comme
16 celui-ci et être expert à Washington. Ma place était dans mon pays, dans ma
17 ville. Je suis arrivé à Mostar vers le 10 avril 1992 après être -- après
18 avoir atterri à Belgrade de New York ensemble avec les joueurs du club de
19 football Velez de Mostar qui ont joué leur dernier match de championnat en
20 ex-Yougoslavie à Subotica.
21 Je suis arrivé du côté est de la ville et j'ai vu des batteries de canon
22 établies qui étaient en train de pilonner Mostar. Ma famille avait déjà
23 quitté la ville. Ma fille aînée bien sûr avait quitté l'école qui a cessé
24 de fonctionner. J'ai essayé de sauver ce qu'on pouvait sauver pour ce qui
25 est des lignes de production, donc, des entreprises du "holding."
26 Mostar a été complètement encerclée sous des obus constamment.
27 J'étais membre de l'état-major de la Défense territoriale municipale avant
28 la guerre. C'était mon affectation militaire, comme tous les autres --
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1 comme de toutes les autres recrues. Je me suis présenté au QG de la TO mais
2 la TO ne fonctionnait pas comme tous les autres institutions de l'Etat. La
3 TO s'est dissolue.
4 Neven Tomic m'a mis en relation avec le HVO qui avait déjà des unités
5 organisées et je suis devenu volontaire, on m'a donné un uniforme et un
6 fusil. Et nous étions déterminés à défendre la ville, la ville à laquelle
7 tout était à moi, mes amours, mes amis, ma famille, mon travail, ma
8 faculté. J'ai beaucoup apprécié les gens et je leur étais reconnaissant à
9 ceux qui ont pu reconnaître la situation qui aurait amené à la guerre et
10 qui se sont préparés pour cela. Quelqu'un a donné de l'argent pour que cet
11 uniforme et ce fusil soient achetés. Les uniformes et les fusils pour
12 lesquels nous contribuons en versant une partie de nos salaires pendant des
13 années ont été disposés par la JNA qui se trouvait déployée sur les
14 collines aux alentours.
15 Après cela, en tant que membre de l'armée du HVO j'ai été nommé en
16 tant que membre du conseil aux fins spéciales, c'était l'idée, une idée de
17 Puljic et Tomic. Il s'agissait d'un groupe de jeunes personnes, la plupart
18 d'entre eux travaillaient donc comme des directeurs de certaines
19 entreprises qui utilisaient les moyens restant dans leurs entreprises et
20 qui utilisaient des contacts d'affaires. Or, la Bosnie-Herzégovine pour
21 aider la défense et l'organisation de la ville. Il était évident que, dans
22 la ville, il n'y avait pas de pouvoir exécutif et nous nous attendions à ce
23 qu'une fois les autorités formées à ce que les choses avancent. Et c'était
24 le cas.
25 De nouveaux organes nous ont demandé des rapports, et en juin, quand
26 le HVO a libéré Mostar, j'ai soumis un rapport portant sur la situation
27 d'une des entreprises Apro Herzégovine. C'est le document 1D 02390. A
28 l'époque à Mostar, personne ne touchait de salaire. Dans certaines
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1 municipalités, nous avons entendu dire qu'il y avait des salaires qui ont
2 été versés particulièrement aux soldats.
3 Sur les frontières des municipalités, il y a des points de contrôle
4 établis et ces points de contrôle ont procédé non seulement au contrôle des
5 passagers mais aussi au contrôle de la circulation des marchandises et il y
6 avait également le versement direct de certaines des contributions
7 municipales. Et ce qui était vrai c'est que toutes les municipalités ont
8 repris des fonctions de pouvoir, des niveaux de pouvoir qui existaient en
9 ancienne Yougoslavie, de la Fédération et des République, ce qui a créé un
10 chaos encore plus grand.
11 Donc, il fallait coordonner le fonctionnement de tout cela parce que
12 le gouvernement en Sarajevo tout simplement n'avait aucune influence sur la
13 situation sur le terrain. Cela a été confirmé dans les contacts que j'ai
14 établis avec mes connaissances, à savoir membre du gouvernement de la
15 République de Bosnie-Herzégovine jusqu'au début du mois de mai à peu près
16 au moment où les lignes téléphoniques ont été coupées, les lignes
17 téléphoniques avec Sarajevo.
18 L'accord portant sur l'amitié et la coopération entre la Bosnie-
19 Herzégovine et la Croatie qui a été conclu le 21 juillet, qui a été rendu
20 public largement, pour moi ainsi que pour mes amis voulait dire qu'il n'y
21 avait plus de question de contestable entre les Musulmans et les Croates.
22 Le HVO a été accueilli et accepté en tant que force armée sur un pied
23 d'égalité et les autorités civiles devaient se conformer à l'organisation
24 intérieure de la Bosnie-Herzégovine conformément aux principes de trois
25 unités constitutives. C'est le document de l'Accusation P 339.
26 Comme je l'ai précisé dans mon entretien lors de la deuxième réunion
27 avec Boban, en été 1992, et d'ailleurs je ne le connaissais pas avant la
28 guerre, on m'a offert de faire ce qui a été -- pour lequel on a pensé que
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1 je pouvais faire au mieux, à savoir essayer d'établir la coordination avec
2 les municipalités et les gouvernements de la République pour surmonter le
3 chaos qui devenait de plus en plus grand dans l'organisation de la vie
4 civile et la vie sociale.
5 Ce que j'ai accepté, j'ai accepté d'aider pour ce qui est de la
6 coordination des mesures prises par les municipalités soit faite, pour que
7 l'espace économique uni soit établi et tout patriote l'aurait fait à
8 l'époque, parce qu'on a été éduqué dans le système de la Défense populaire
9 générale où chacun devait contribuer selon ses possibilités, selon la
10 législation en vigueur de 16 à 70 ans, et encore plus jeune en tant que
11 membre de l'organisation des éclaireurs; on a été éduqué également dans
12 cette association de faire cela pour la défense du pays. Boban m'a dit
13 clairement : "Fais ce que tu peux faire dans ce domaine civil." Mais comme
14 je l'ai dit lors de l'entretien, il m'a dit : "Tu n'as rien à voir avec
15 l'armée et avec la police." Et il tenait sa parole.
16 Dans le journal officiel ainsi que dans le procès verbal de la réunion de
17 la présidence du HZ HB du 14 août, il est mentionné mon nomination pour le
18 poste de chef du département des Finances du
19 15 mai 1990. Ce que j'ai dit dans l'entretien c'est que j'avais été informé
20 juste avant la tenue de cette réunion lors de laquelle j'ai été nommé le
21 président et je n'ai pas en fait agi en occupant ce poste. Les moyens de
22 preuve de la Défense confirmeront cela, mais en principe, lorsque j'accepte
23 certaine fonction, je laisse des traces de mon travail à cette fonction.
24 Donc, à partir du 14 août, on peut suivre le fonctionnement de l'organe
25 provisoire du pouvoir exécutif ainsi que mon rôle. La nature et le contenu
26 de l'organe provisoire que j'ai appelé provisoire dans mon entretien avec
27 le Procureur a été fonctionné dans le cadre du système de la République et
28 cela a été défini par quelques documents. D'abord la décision statutaire
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1 portant sur l'organisation provisoire du pouvoir exécutif et de
2 l'administration, le document MD 00156, du 3 juillet avec les modifications
3 apportées le 17 octobre. C'est le document de l'Accusation P 00684 avec une
4 référence particulière aux articles 20 et 22.
5 Le deuxième document est le décret portant sur l'organisation et
6 fonctionnement des départements et des commissions, le document
7 1D 0001, les articles 3 à 7 et 33.
8 Le troisième document est le règlement portant sur le fonctionnement
9 du HVO HZ HB, le document de l'Accusation P 09539 et en particulier le
10 fonctionnement même est montré dans les procès verbaux des réunions du HVO
11 HZ HB et tout cela déjà été versé au dossier, bien que malheureusement
12 aucun témoin ne se soit présenté pour en parler.
13 Et la cinquième référence ce sont des éditions du journal officiel du
14 HZ HB qui d'une façon tout à fait transparente montre ce que le HVO HZ HB
15 faisait mais aussi ce qu'il ne faisait pas.
16 Je veux dire que cet organe ni de jure ni de facto et qui était
17 organe collectif et qui était constitué huit mois après ma nomination ne
18 peut pas être constituée comme étant un cabinet, ce qui a été constamment
19 fait par les membres de l'équipe de l'Accusation, comme Tomljanovich.
20 Chez nous, sur nos territoires, le terme "gouvernement" apparaît
21 seulement dans les années 90, avant cette période, il s'agissait des
22 organes exécutifs, des conseils, ou des comités exécutifs au niveau des
23 républiques mais toujours l'organe principal du pouvoir était l'assemblée
24 dans le système de l'organisation du pouvoir et le principe d'unification.
25 Le mot "premier ministre" est apparu pour la première fois dans la
26 constitution de la Fédération en 1994, qui a été rédigée sous l'égide des
27 Etats-Unis d'Amérique. Donc, jamais sur mon territoire le système n'a été
28 constitué qui se serait appuyé sur la conception du premier ministre comme
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1 c'est le cas, par exemple, en Grande-Bretagne, et c'est pour cela insistait
2 constamment sur le terme "premier ministre" n'a aucune base ni formelle, ni
3 essentielle.
4 L'organe au sein duquel je travaillais fonctionnait exclusivement
5 lors des réunions ce qui a été souligné dans tous les documents, et le
6 travail de cet organe a été défini par le règlement et a été fondé sur la
7 décision statutaire. Dans l'article 16 de cette décision, cela a été dit,
8 je cite : "Le HVO travaille en réunion aux fonctions en réunion," et dans
9 l'alinéa 4 du même article, il est défini que le règlement s'occupe de
10 l'organisation interne ainsi que d'autres questions.
11 Je répète que la seule forme des activés du HVO HZ HB s'est déroulée
12 en réunion et c'est pour cela qu'il a été précisément en détail stipulé
13 comment il fallait préparer des documents très vite pour être présentés
14 lors des réunions ainsi que les modes de décision. Les témoins de la
15 Défense montreront que ce mode de fonctionnement de l'organe exécutif, au
16 sein des organes d'administration, a été repris du système d'administration
17 d'état de la République de Bosnie-Herzégovine et presque le même règlement
18 a été appliqué au niveau des municipalités de Tuzla, de Siroki Brijeg et
19 ces documents seront présentés en tant que moyens de preuve, à savoir le
20 conseil exécutif de l'assemblée de la municipalité de Mostar lorsque j'ai
21 été le président en 1998.
22 Il s'agit du règlement habituel et typique pour ce qui est du
23 fonctionnement de l'organe collectif, et cela est confirmé par le règlement
24 portant sur le fonctionnement de la présidence du HZ HB dans lequel il est
25 dit qu'il s'agit du fonctionnement identique. Pour ce qui est de l'organe
26 exécutif mais les mots "HVO" ont été remplacés par les mots, "la présidence
27 du HVO" et les "organes du HVO" par les "membres de la présidence du HZ
28 HB."
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1 En parlant du règlement, j'aimerais ajouter -- j'aimerais ajouter que
2 l'organe provisoire du pouvoir exécutif n'a jamais rédigé un programme de
3 travail qui aurait été obligatoire, appliqué par les départements et les
4 sous départements. On ne s'est occupé que des obligations qu'ils avaient
5 envers l'organe collectif et les organes avaient leur programme indépendant
6 des activités en conformité avec leurs compétences, donc, actes qui
7 auraient être -- appelés programme des activités, n'existaient pas. Il n'a
8 pas été adopté parce que dans les conditions dans lesquelles on travaillait
9 on ne faisait que réagir à des situations. Nous ne pouvions pas dominer les
10 situations.
11 Le premier programme de travail a été rédigé par le gouvernement de la
12 République croate d'Herceg-Bosna qui a été adopté par la chambre des
13 députés de cette république et cela pour ce qui est de l'année 194, ce qui
14 représente bien sûr un sujet tout à fait différent. Le rôle du président de
15 l'organe collectif est identique au rôle du président de n'importe quel
16 organe collectif du parlement; aussi il prépare pratiquement les réunions -
17 - il préside les réunions et il ne possède qu'une seule voix comme tous les
18 autres membres de cet organe. Dans des cas urgents et justifiés, on peut à
19 la proposition du président sans mener des débats en réunions, on peut
20 prendre des décisions en se basant sur les opinions individuelles du membre
21 du HVO mais par le règlement il a été défini que lors de la première
22 réunion populaire ou du parlement, il faut adopter l'ordre du jour à
23 l'unanimité. Il s'agit de l'article 26.
24 Les documents qui ont été publiés au journal officiel parlent du fait que
25 dans un premier temps Mate Boban avait le droit souverain et adoptait des
26 documents ou des règles même quand il n'avait pas de bases légales, claires
27 pour le faire. Et les décrets, il les signait en tant que, je cite :
28 "Président du -- ou président du HZ HB ou en tant que président du HVO et
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1 du HZ HB." Dans ces remarques, on peut voir qu'il est évident la chose
2 suivante : d'abord le HVO en tant que force armée créé le 8 avril 1992,
3 ayant pour tâches claires, pour je cite : "S'occuper de la défense du
4 peuple croate ainsi que d'autres peuples dans cette communauté qui seront
5 attaquées de n'importe qui ce qui veut dire qu'il s'agissait d'une
6 organisation militaire qui était exclusivement une organisation militaire."
7 Le deuxième musulman HVO qui par la décision statutaire du Kasemet [phon]
8 représentait un organe nouveau formellement et c'est pour cela que, dans
9 les décisions, le terme "on établit le HVO," est utilisé. Le HVO, pendant
10 cette période-là, et l'organe exécutif et administratif du HZ HB ayant une
11 compétence d'origine et le pouvoir du président a été renforcé.
12 Et le troisième HVO HZ HB, après le 14 août 1992, avec des pouvoirs
13 diminués et avec les compétences restreintes sans une influence
14 significatif du président, on est arrivé à cette conclusion en comparant
15 les décisions statutaires d'origine portant sur l'organisation provisoire
16 de l'exécutif avec les modifications ultérieures. Elle est complètement
17 ultérieure apportée par la décision portant sur les modifications et les
18 complémentaires de la décision statutaire. L'article 18. Ensuite, les
19 dispositions correspondantes du règlement portant sur le travail du HVO
20 ainsi que par rapport aux autres actes fondamentaux qui ont été adoptés
21 après le 14 août 1992.
22 Cette Chambre a été informée que, par la modification de la décision
23 statutaire, on a donné la possibilité d'adoption des documents relevant de
24 la compétence du HZ HB en tant que l'organe exécutif provisoire dans les
25 situations urgentes. Il s'agit d'une pratique habituelle par laquelle le
26 parlement donne le pouvoir à l'organe exécutif, ou délègue le pouvoir à
27 l'organe exécutif pour qu'il agisse dans l'état de guerre ou dans des
28 circonstances exceptionnelles d'adopter certains documents relevant de la
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1 compétence du parlement. Et cet organe, à la réunion suivante de l'organe
2 législatif, doit vérifier -- doit ratifier et Pr Ivetic en a parlé devant
3 cette Chambre. Bien sûr, toutes les décisions sur lesquelles toutes les
4 décisions, qui ont été adoptées en utilisant ce pouvoir par son -- par cet
5 organe provisoire, étayent les documents adoptés par la présidence du HZ
6 HB, c'est l'aspect de jure et de facto.
7 Après la réunion du 14 août, le chef du département de Finances
8 nouvellement nommé et moi-même, on a dans ma voiture qui m'a été prise pour
9 les besoins d'une brigade, nous sommes rentrés à Mostar. Nous n'avions pas
10 de locaux pour travailler. Nous n'avions pas d'équipement, nous n'avions
11 pas d'employés et nous n'avions pas non plus une base claire, un point de
12 départ clair pour brasser nos activités. Nous avons commencé à utiliser
13 deux ordinateurs et on a commencé à préparer des règles financières, et sur
14 la base de la législation qui était en vigueur en l'ancienne Yougoslavie
15 parce qu'à l'époque, j'ai considéré cela comme étant une activité la plus
16 importante pour surmonter le chaos qui s'est installé.
17 Et la source de revenus la plus habituelle, à l'époque au moment où
18 l'économie ne fonctionnait plus, était des virements des citoyens qui
19 travaillaient à l'étranger qui par le biais de leur municipalité respective
20 finançaient la défense pratiquement toute municipalité en Bosnie-
21 Herzégovine avait cela. Et c'est pour cela qu'on a préparé les premières
22 règles pour pouvoir travailler à une réunion pour le HVO et on a décidé que
23 ces moyens devaient être utilisés pour les besoins des forces armées
24 d'Herceg-Bosna ce qu'on a considéré comme étant logique et non pas de les
25 dissiper dans des différentes municipalités.
26 Les municipalités plus riches qui ne se trouvaient pas, par exemple,
27 à la ligne de front donnaient -- la solde à leurs municipalités à leurs
28 soldats, et les municipalités n'y avaient pas de citoyens qui travaillaient
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1 à l'étranger et qui se trouvaient sur la ligne de front active comme Mostar
2 ou Stolac, ou les municipalités en Bosnie centrale, vous pouvez en assurer
3 -- vous pouvez assurer --nous pouvons assurer des moyens de financement.
4 Pourtant lorsque ces règles ont été préparées, les municipalités qui
5 avaient plus de revenus -- de revenus significatifs se sont rebellées.
6 Boban m'a appelé et il m'a dit de retirer ce document. Nous l'avons adopté
7 seulement en mars 1993, et encore une fois, tous les revenus ont été versés
8 aux municipalités et non pas à l'Herceg-Bosna.
9 La seule chose qu'on ait réussi à faire était de définir la même -- la même
10 somme que les citoyens à travers l'étranger devaient verser. Au début, cela
11 m'a fait penser à des difficultés auxquelles nous allons être confrontés
12 pour coordonner les choses les plus évidentes, pour appliquer la stratégie.
13 Comme je l'ai déjà dit, nous avons adopté cette pratique de fonctionnement
14 à une réunion, ce qui a été déjà prévu. Il faut peut-être rajouter qu'il
15 n'y avait aucunes réunions lors desquels les documents de nature secrète
16 auraient été utilisés. Je considère cela comme un détail important quand on
17 sait qu'on a fonctionné dans des conditions de guerre.
18 Le local provisoire du pouvoir exécutif a essayé de résoudre des questions
19 dans nombreux domaines pour éviter à ce que le chaos ne se propage, et de
20 jure, cela confirme que l'organe exécutif provisoire n'avait pas de pouvoir
21 ou des attributions définies au début. La situation imposait donc de
22 nouvelles questions, il fallait les résoudre et il y avait des initiatives
23 de certaines institutions pour régler ces questions. Par exemple, de
24 l'institut chargé de l'éducation, du club auto et cetera. Les
25 transcriptions en tant que preuves de l'Accusation parlent de ce mode de
26 fonctionnement de travail. A la réunion qui a été tenue le 14 octobre 1992,
27 mes propos ont été enregistrés. En analysant le travail du HVO HZ HB
28 pendant ces deux mois, c'est-à-dire depuis sa formation, on peut voir que
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1 beaucoup de choses ont été faites.
2 Par la dissolution de la Yougoslavie et par le fait que les liens,
3 telles les communications des liens et d'autres liens avec les organes de
4 républiques, ont été interrompus ainsi que le fait que les jeunes gens se
5 sont auto organisés pour se défendre de l'agresseur, les municipalités ont
6 repris les fonctions de l'Etat pendant la période passée, et en particulier
7 pour ce qui est des finances. Et aujourd'hui, il arrive que les
8 municipalités se comportent en tant qu'Etat. Je vais abréger la citation :
9 "Il est nécessaire de nommer les gens indépendamment du fait s'il s'agit
10 d'un Croate ou d'un Musulman, et lors de leur nomination il faut souligner
11 que c'est provisoire.
12 "Les gens qui viennent des municipalités, on leur a rassuré les
13 vivres et le logement dans la maison des retraités où se trouvait mon
14 bureau." C'est le document de l'Accusation P 578.
15 Je savais que les municipalités étaient autonomes même dans le système
16 précédent, mais je n'arrivais pas à imaginer une activité aussi développée
17 parce que pour les besoins de ma défense on n'a pas réussi à se procurer
18 les journaux officiels d'un grand nombre de municipalités de Bosnie-
19 Herzégovine qui montrent que les municipalités ont déclaré l'agresseur et
20 ont mis sur pied la mobilisation, proclamé la mobilisation bien avant que
21 la présidence de la Bosnie-Herzégovine ne le fasse. Les municipalités ont
22 organisé les entreprises publiques dans le domaine des télécommunications,
23 dans le domaine de la distribution, approvisionnement en électricité. Elles
24 ont repris toutes les recettes de la Fédération yougoslave, de la
25 République de Bosnie-Herzégovine. Elles ont introduit de nouvelles devises
26 et elles se sont appropriées, ont conféré des attributions sur des banques
27 sur le système de la comptabilité sociale. Elles ont créé des organes dans
28 le domaine judiciaire. Elles ont défini les règles de mouvement de la
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1 population, la prise en charge, le statut des réfugiés.
2 Pratiquement, elles ont toutes pris des décisions interdisant la
3 prise en charge des personnes déplacées ou des réfugiés. Là, nous allons
4 adopter des dizaines de décisions qu'il s'agisse des municipalités à
5 majorité croate ou de celles à majorité musulmane : Mostar, Capljina,
6 Tuzla, Maglaj, Jablanica, Siroki Brijeg, Posusje, Gornji Vakuf, Uskoplje,
7 Livno, Posusje, Orasje, il s'agit de l'ensemble du territoire libre de
8 Bosnie-Herzégovine, donc, des territoires qui n'étaient pas occupés par la
9 JNA, en d'autres termes, par l'armée serbe.
10 Donc la question qui se pose, Monsieur le Président, Monsieur le Juge,
11 c'est de savoir si, en se dotant de ces mesures, les municipalités - et en
12 particulier dans le domaine de la défense - ont violé la constitution, à
13 savoir, oui, elles l'ont fait formellement toutes sans exception.
14 Mais l'obligation constitutionnelle des municipalités et l'esprit de
15 la constitution étaient qu'il fallait qu'elles organisent la défense. Et
16 c'est dans cet objectif-là que tout ce que je viens de mentionner a été
17 entrepris et avec les meilleures intentions, évidemment avec toutes les
18 improvisations, un manque de cohérence, et cetera. Donc, c'est la raison
19 pour laquelle les municipalités qui ont organisé la défense et qui ont pris
20 d'autres mesures ont respecté leur obligation constitutionnelle de défendre
21 le pays. Alors que celles qui n'ont rien entrepris, qui se sont contentées
22 d'attendre la République socialiste fédérative de Yougoslavie le fasse,
23 celle qui a attaqué la Bosnie-Herzégovine ou qui attendait que le
24 gouvernement central prenne des mesures. Mais ce gouvernement n'a proclamé
25 l'état de guerre que le 20 juin 1992, donc, ces municipalités-là ne se sont
26 pas acquittées de leur devoir constitutionnel. C'était en fait une mise en
27 œuvre de l'approche de la Défense populaire généralisée qui est
28 profondément ancrée dans la tradition de mon peuple.
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1 L'une des transcriptions présidentielles, P 7031, est consacrée à une
2 réception organisée à l'occasion de la commémoration de 125 ans des
3 "Domobrani". La Défense populaire généralisée d'un système où tout citoyen,
4 toute institution - je pense que M. le Juge Trechsel ne me reprochera pas
5 ce parallèle - donc, à l'image de la Suisse, a l'obligation de défendre le
6 pays, et personne n'avait le droit de signer la récapitulation. Et d'après
7 la loi, tous étaient tenus de préparer les preuves de la défense, sauf que
8 cette fois-ci l'agresseur n'était pas un pays membre de l'OTAN ou du pacte
9 de Varsovie. C'était à ça qu'on s'était préparé préalablement. Mais c'était
10 l'armée qui normalement était censée défendre ce pays.
11 Cependant, quel que soit le succès dans cette reprise des fonctions de la
12 part des municipalités, en fait, un nouveau chaos a vu jour. Les
13 municipalités qui se sont trouvées sur la ligne de front connaissaient plus
14 de difficultés et régulièrement moins de moyens, avaient moins de moyens.
15 Les postes de contrôle ont été placés. Il n'y avait pas de monnaie, pas de
16 système de paiement. Et c'est précisément cela qui a constitué le problème
17 principal auquel je me suis attaqué. On ne peut pas organiser une société
18 moderne où il n'y a pas de système de paiement, sans cela on ne peut pas
19 organiser une vie tant soit peu normale.
20 Et pour que ce système puisse fonctionner, par exemple, pour que les
21 membres de la Chambre de première instance puissent utiliser une carte de
22 paiement ou une carte de crédit pour payer n'importe quelle facture,
23 premièrement, il faut qu'il y ait une monnaie, une devise; B, il faut qu'il
24 y ait une banque où vous avez ouvert un compte, vous avez votre compte;
25 puis troisièmement, il faut que le système télécommunication fonctionne
26 pour que votre ordre de paiement puisse être pris en compte; aucun de ces
27 éléments n'a fonctionné à ce moment-là en Bosnie-Herzégovine.
28 Et maintenant, avant que je ne parle des différents domaines, chacun
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1 à part, je voudrais évoquer en quelques mots ma première rencontre avec le
2 président Tudjman, le 17 septembre 1992. Il s'agit du document 1D 02366;
3 c'est un PV qui a été entièrement traduit suite à une demande émanant de ma
4 Défense. Dans son ensemble, ces transcriptions nous permettent de prendre
5 connaissance de la complexité de la situation de l'époque, et on y voit la
6 détermination de la direction croate à défendre la Bosnie-Herzégovine, a
7 contribué à sa construction en tant qu'état moderne qui prendrait en compte
8 les intérêts des trois peuples constitutifs. L'on voit que l'objectif était
9 d'atteindre l'après le plus vite possible conformément à ce qui a été
10 demandé par la Conférence de Londres.
11 A cette occasion, j'évoque les objectifs de l'organisation du pouvoir
12 civil, je mentionne le journal officiel qui vient de paraître --
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Excusez-moi de vous interrompre. Vous venez de citer
14 le procès-verbal de votre première rencontre avec le président Tudjman.
15 Vous dites 1D 02366. Alors, je regarde dans les documents et je ne le
16 trouve pas ce document. Y a-t-il une erreur quelque part ?
17 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Oui, j'imagine qu'il y a une erreur
18 quelque part.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Parce que c'est important votre rencontre avec le
20 président Tudjman, et il serait bon qu'on ait ce document.
21 Maître Karnavas.
22 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je crois que
23 nous allons être en mesure de corriger cette erreur. Nous ne voulions pas
24 présenter un très grand nombre de documents mais il s'agit de la pièce 1D
25 02366. C'est ce que je crois savoir mais nous allons par le truchement d'un
26 autre témoin vous présenter le passage précis de ce transcript
27 présidentiel.
28 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] J'évoque donc l'existence du journal
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1 officiel mais aussi je dis que nous sommes ouverts et nous sommes prêts à
2 rassembler des représentants de tous les groupes nationaux qui rallieront,
3 et je cite : "A celui qui organisait et qui souhaite mettre sur pied
4 l'ordre et la paix dans tel ou tel territoire." Et puis je parle aussi de
5 l'objectif politique clairement défini des Croates, du moins tel que je
6 l'ai compris, je cite : "Il m'était clair à partir du moment où j'ai pris
7 part à cela, à partir du moment où j'ai commencé ces fonctions, il s'agit
8 de créer et d'organiser la Bosnie-Herzégovine conformément aux principes de
9 la Communauté européenne. Donc, il s'agit de constituer la Bosnie-
10 Herzégovine par l'entremise des trois unités nationales. J'estime que c'est
11 ce qui est acceptable aux Croates à ces différences près que le seul
12 critère ne doit pas être la composition nationale de la population."
13 Et ce que j'ai dit parle de la défense de l'agression serbe. Nous avons
14 pour l'essentiel défendu le territoire croate dans cette partie-là, mis à
15 part la Posavina bosniaque. Et nous sommes déterminés à ne pas avoir ce où
16 nous n'avons posé pied et : "Je pense que, dans ce cercle, je peux en
17 parler ouvertement. Je ne prône pas une politique de sphère élevée qui
18 démentirait ce que nos unités ont défendu. Nous ne sommes entrés dans aucun
19 village serbe et nous n'avons pas besoin d'un village serbe quel qu'il
20 soit."
21 Que ce soit à l'époque ou aujourd'hui, j'ai respecté le fait que la Bosnie-
22 Herzégovine est un état des trois peuples. Le peuple serbe constituait un
23 tiers de la population de Bosnie-Herzégovine. Quelle que soit l'option
24 retenue, quelle que ce soit la solution retenue leur droit doit être
25 protégé. Pourquoi il nous faut conquérir des villages serbes pour chasser
26 la population ? Ce qui est une conséquence habituelle des opérations de
27 guerre. Non, j'étais hostile à cela.
28 A l'époque, j'ai remis une lettre aux représentants du gouvernement croate,
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1 et là encore, je cite mes propres propos : "Nous devons parler de certaines
2 questions qui ont une importance particulière pour le fonctionnement des
3 pouvoirs civils, qu'il s'agisse des douanes qui empêchent pratiquement nos
4 entreprises de vendre leurs biens en Croatie, qu'il s'agisse de postes
5 frontières, des réserves, de la circulation des biens, du contrôle à la
6 frontière. Donc, il faudra parler de toutes ces questions qui sont
7 essentielles pour la vie de la population, la vie de la population qui
8 réside sur ce territoire."
9 Il s'agit de toute évidence de questions qui peuvent être résolues s'il y a
10 une coordination des pouvoirs civils, et qui doivent être résolus avec les
11 institutions de la République de Croatie et qui concernent avant tout le
12 fonctionnement de la frontière entre la République de Croatie et la Bosnie-
13 Herzégovine dans cette partie-là où se situent les municipalités qui ont
14 choisi de coordonner certaines fonctions au niveau de la communauté
15 d'Herceg-Bosna.
16 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, c'était en même temps le
17 premier poste frontière, la première frontière entre la Bosnie-Herzégovine
18 et un état voisin qui a fonctionné. La Bosnie-Herzégovine qui venait d'être
19 reconnue.
20 D'ailleurs, sans coopération, comment est-ce qu'on peut définir les
21 postes frontières ? Comment est-ce qu'on peut nommer des équipes qui vont
22 travailler d'un côté comme de l'autre ? Comment est-ce qu'on peut affecter
23 la police des frontières et les douanes ? Pendant
24 110 ans, on a vécu dans un seul et même état, et maintenant, on se trouve
25 partager -- diviser d'un côté ou de l'autre de la frontière de l'état.
26 Donc, nous traçons clairement la frontière entre la Croatie et la Bosnie-
27 Herzégovine et nous déployons des efforts pour qu'ils fonctionnent.
28 Alors, maintenant, si vous voulez bien, je voudrais me pencher sur
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1 plusieurs domaines importants de nos activités citées d'ailleurs par le
2 Procureur qui a estimé qu'il s'agissait là des instruments de l'entreprise
3 criminelle commune. Là encore, c'est le contexte qui est important. Je ne
4 vais pas y revenir à chaque fois.
5 Parlons des finances; comment peut-on parler de ce domaine-là sans
6 poser un certain nombre de questions ? Quelle était la devise qui existait
7 formellement et réellement et qui fonctionné ? Les impôts, les douanes,
8 est-ce qu'on les payait à qui ? Les banques fonctionnaient-elles ? Était-il
9 possible de faire des virements depuis la Bosnie-Herzégovine pour effectuer
10 des paiements à l'étranger et vice versa ? Versait-on les pensions de
11 retraite, les salaires dans l'éducation, les policiers, les militaires
12 recevaient-ils leurs salaires ou leurs soldes, qui leur versait leurs
13 rémunérations ? Qui versait leurs salaires aux employés du judiciaire,
14 juges, procureurs ?
15 Les textes de loi dans le domaine financier que nous avons préparé
16 dès que nous avons été nommés ont été adoptés lors de la réunion du HVO, de
17 la HZ HB le 28 août 1992. Et à ce titre, ce qui est intéressant c'est que
18 ça a été publié dans le numéro 3 du journal officiel où la mention du mois
19 qui figure est celle du mois d'août. Si le Président et les Juges de la
20 Chambre se penchent sur les numéros 1 et 2 du journal officiel, ils verront
21 qu'il y est question du mois de septembre 1992.
22 Donc, de toute évidence, on s'est penché tout d'abord sur la
23 publication des lois et des règlements portant sur le domaine financier et
24 ce n'est que par la suite qu'on a publié toutes les décisions fondamentales
25 portant sur la création, le fonctionnement de la HZ HB, ce qui nous dit
26 clairement quelles étaient les priorités, ce qui a constitué la priorité
27 pour le fonctionnement du HVO de la
28 HZ HB en tant qu'organe temporaire civil de l'exécutif.
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1 En cherchant à faire fonctionner le système des paiements sans qu'il y ait
2 une devise nationale, le fait de se servir de la devise croate était une
3 solution technique optimale, et là, je parle en l'enseignant. Compte tenu
4 du fait que le gros du commerce extérieur avait lieu avec le gros des
5 échanges a eu lieu avec la République de Croatie, et c'est un exemple pur -
6 - une solution optimale sur le plan monétaire.
7 C'est en Croatie que séjournaient la plupart des réfugiés qui eux aussi se
8 servaient de la monnaie croate. Il y a eu des modifications sur le plan des
9 textes de lois qui se sont limitées pour l'essentiel aux aspects pénaux
10 donc pour ce qui est des paiements en dinars croates par la suite marks
11 allemands pour que tout simplement ces textes aient un sens. Formellement,
12 à l'époque, la devise officielle en Bosnie-Herzégovine était le dinar
13 yougoslave, et cette même Yougoslavie a pris la décision de retirer cette
14 devise.
15 Croyez-moi, on peut difficilement imaginer une situation de plus absurde
16 dans l'histoire des politiques monétaires.
17 L'acte d'accusation à titre d'exemple des relations avec la Croatie cite
18 l'importation des biens à produit en République de Croatie avec le
19 certificat classique EU avec le paiement des frais d'enregistrements
20 douaniers uniquement. Mais pour définir précisément de quoi il s'agit, il
21 convient de tenir compte du PV de la réunion du HVO de la HZ HB, et je
22 cite, pièce P 5733 : "Proposition de la décision sur l'exportation des
23 biens en République de Croatie pour des entreprises et d'autres sujets
24 physiques ou moraux sur le territoire de la HZ HB."
25 Donc, de toute façon, de toute évidence, il s'agit d'une décision
26 réciproque et il s'agit de -- à tous la circulation -- la libre circulation
27 des biens. Et la situation est toujours la même, non seulement entre la
28 Croatie et la Bosnie-Herzégovine mais également dans l'ensemble de l'Europe
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1 du sud-est, mais aussi sur le territoire de l'Union européenne parmi les
2 pays membres de l'Union européenne.
3 Et c'est ce qui permet à la Bosnie-Herzégovine de connaître une
4 croissance économique pour pouvoir exporter leurs biens vers la République
5 de Croatie qui est leur marché le plus naturel en se servant du certificat
6 sur la base des certificats édictés et délivrés par la Chambre de commerce.
7 Au départ, les obligations pour ce qui est des impôts et des douanes
8 étaient payées sur la base des comptes non résidents en Croatie et qui
9 était possible qu'on pouvait ouvrir sur la base d'un accord entre les deux
10 -- passé entre les deux républiques donc portait sur les paiements entre la
11 République de Bosnie-Herzégovine et la République de Croatie, accord passé
12 en mars 1992. Le document 1D 02768.
13 Alors, il s'agit de comptes bancaires que nous avons déjà vus, ce sont les
14 mêmes comptes qu'avaient les organes du gouvernement de Bosnie-Herzégovine
15 ainsi que la plupart des protagonistes dans la vie économique puisque
16 c'était le seul moyen de fonctionner et de travailler. Tant qu'en Herceg-
17 Bosna au printemps 1993, on a créé les conditions permettant d'avoir un
18 système de paiements qui fonctionnait et c'est à partir de ce moment-là
19 qu'on a ordonné la clôture de ces comptes non résidents surtout en Croatie
20 mais en partie également en Slovénie.
21 Nous avons entendu le Procureur affirmer que le décret portant sur les
22 paiements en dinars croates sur le territoire de la Communauté croate
23 d'Herceg-Bosna, en fait, introduit le dinar croate en tant que monnaie
24 nationale. La Défense, par l'entremise de ses témoins, de ses preuves,
25 démontrera que ceci tout simplement n'est pas exact. Les articles 2 et 3 de
26 ce même décret précisent -- stipulent de manière tout à fait précise que le
27 système de la comptabilité sociale et l'instance où seront ouverts des sur
28 comptes "sub-accounts" et non pas des comptes au dinars croates qui seront
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1 enregistrés sous le chiffre 1 dans le premier registre à commencer par la
2 gauche du formulaire RIR. Le document de l'Accusation 447. Tous les comptes
3 des clients au sein de la comptabilité sociale, donc, de toutes les
4 entreprises -- corporations commençaient par zéro -- par un zéro, autrement
5 dit ces comptes de base étaient toujours nominés en monnaie nationale,
6 donc, avant c'était le dinar yougoslave; maintenant, c'était le dinar
7 bosnien et herzégovin. Donc, pendant toute cette période, la monnaie
8 officielle était le dinar de Bosnie-Herzégovine.
9 Le fait de permettre l'ouverture de ces sous comptes n'a été qu'un premier
10 pas pour qu'au sein de la Bosnie-Herzégovine, on puisse mettre sur pied un
11 système de paiements, et sans cela, on ne peut pas construire un système
12 financier voire même un état de droit quel qu'il soit. C'est d'avant déjà
13 que la plupart des municipalités avait adopté le dinar croate surtout en
14 tant que monnaie parallèle, un moyen de paiement qui est fiduciaire. Mais
15 nous présenterons des preuves à cet effet.
16 Nous avons accepté, en tant qu'organe temporaire du pouvoir exécutif, un
17 premier renvoi de dinars de Bosnie-Herzégovine. Nous avons essayé de nous
18 en servir en tant que monnaie légale. Le Procureur a cité des exemples
19 d'envoi d'aide à des municipalités en Bosnie centrale, dénominé [phon] en
20 nouveaux dinars de Bosnie-Herzégovine, ce qui a été décidé en novembre
21 1992. Pièce de l'Accusation 1063 ainsi que 1D 0227.
22 Cependant, le dinar de Bosnie-Herzégovine n'avait pas de base économique
23 qui lui aurait permis de devenir effectivement une monnaie acceptée dans
24 les échanges et c'était le cas sur le territoire -- sur la totalité du
25 territoire de Bosnie-Herzégovine.
26 Et comme je l'avais déjà mentionné, ces comptes non résidents on s'en est
27 servi tant qu'il n'a pas été possible de faire fonctionner les banques en
28 Bosnie-Herzégovine parce qu'il y en avait aucune qui a fonctionné. Mais les
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1 nouvelles banques ont vu le jour conformément aux règlements de la Banque
2 centrale de Bosnie-Herzégovine. On versait les montants nécessaires pour se
3 faire enregistrer en dinars de Bosnie-Herzégovine. On -- se sont vus
4 délivrer des licences en bonne et due forme comme c'est le cas dans tous
5 les Etats modernes que nous connaissons. Document 1D 01765.
6 Un câble optique a été posé, d'autres mesures ont été prises pour qu'on
7 remette sur pied le système des télécommunications ou du moins qui soient
8 remis sur pied dans ces bases et c'est ce qui a permis de faire fonctionner
9 les paiements. Un élément bien plus fort, un élément puissant qui révélait
10 l'amélioration de la situation économique indépendamment des conséquences
11 de la guerre sur les territoires placés sous le contrôle du HVO donc une
12 situation économique bien plus simple qu'ailleurs en Bosnie-Herzégovine. La
13 Banque mondiale et le FMI ont fait des études qui confirment ce que je
14 viens de dire très clairement.
15 Abordons maintenant la question de la défense en quelques mots. Le décret
16 portant sur les forces armées qui a été versé au dossier régit les
17 obligations de citoyens dans le domaine de la défense de la manière
18 pratique et identique à ce qui était prévu dans la loi yougoslave régissant
19 la Défense populaire généralisée. L'organe ad hoc du pouvoir exécutif ne
20 jouait pas de rôle dans le commandement des forces armées. C'est ce qui
21 nous montre le décret sur les forces armées mais également la décision sur
22 les bases sur lesquelles est assis le département de la Défense où l'on
23 voit très clairement défini la structure du département mais également les
24 responsabilités de toutes ces composantes ainsi que leur rôle qui est
25 appelé à jouer, le commandant suprême des forces armées, qui d'ailleurs est
26 à l'origine de cette décision, c'est lui qui l'a prise.
27 Il convient d'ajouter que nulle part dans cette décision, d'aucune manière,
28 on ne mentionne le HVO HZ HB qui dès ce moment-là et la première décision
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1 porte la date du 15 septembre 1992, constitue clairement l'organe civil du
2 pouvoir exécutif temporaire provisoire.
3 Nous avons déjà parlé ici du chapitre 9 de cette décision, qui porte sur
4 les responsabilités de l'état-major principal du HVO. On y définit ces
5 rapports par rapport au département de la Défense, pour l'essentiel pour ce
6 qui est des questions administratives, tandis que la question du
7 commandement et de l'emploi des forces est directement liée au commandant
8 suprême, à savoir le président de la HZ HB.
9 C'est dans ce paragraphe -- comme cela est tout à fait naturel et habituel,
10 c'est dans ce paragraphe qu'on définit clairement la chaîne de commandement
11 dans les forces armées. Et là, il convient de mentionner, et de remarquer
12 que le HVO n'y est mentionné d'aucune manière, le HVO de la HZ HB en tant
13 qu'organe temporaire du pouvoir exécutif. Document de l'Accusation P 589.
14 Les témoins de la Défense viendront évoquer la question des éléments
15 d'information qui recevaient portant sur la situation militaire sur le
16 terrain et diront de quelle manière ces informations parvenaient au HVO.
17 Des témoins de la Défense confirmeront ce que j'ai dit que le HVO n'avait
18 pas de rôle d'ordonnateur de commandant par rapport à l'aspect ou volet
19 militaire du HVO, donc, il s'agit des Unités du HVO ou éventuellement de la
20 police militaire. Le HVO de la HZ HB formellement n'a joué aucun rôle dans
21 les nominations au sein des forces armées, ce qui est défini par les
22 modifications du décret portant sur les forces armées en octobre 1992.
23 Même si on ne connaît aucun n'exemple dans les documents vus que ceci a eu
24 lieu avant ces modification, par des modifications de ce même décret, on
25 l'élimine également la possibilité que le commandant suprême des forces
26 armées puisse déléguer un certain nombre de fonctions au niveau du
27 commandement et de la direction des forces armées sur l'organe temporaire
28 du pouvoir exécutif. De toute évidence, en adoptant ces modifications, le
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1 HVO de la HZ HB perd ces compétences suite à ma nomination au poste de
2 président de l'organe temporaire de l'exécutif le 14 août. Ces
3 modifications d'ailleurs étaient conformes à la définition du HVO en tant
4 qu'organe temporaire du pouvoir exécutif compétent dans le domaine du
5 civil.
6 La décision portant sur la méthodologie, pour l'élaboration des plans de
7 défense dans ce même décret, en fait, la [imperceptible] de l'inertie du
8 système législatif précédent qui était lié à la constitution de la Défense
9 populaire généralisée et l'auto protection sociale. Où toute entité
10 politique et sociale donc tous sujets de la vie sociale ou juridique, qu'il
11 s'agisse d'entreprise de banque, de communauté locale, d'école, devait se
12 doter d'un plan de la défense qui, bien entendu, avait un caractère civil,
13 et qui n'avait pas pour conséquence le recours à des forces armées,
14 n'entraînait pas l'emploi des forces armées.
15 Et cette inertie se poursuit au niveau des textes de la république.
16 Articles 109 à 112 de la loi sur la Défense.
17 Si nous regardons le cadre des mesures prises au sein de la
18 HZ HB pour ce qui est de la sécurité et de la lutte contre la criminalité,
19 les éléments importants sont ceux qui concernent les affaires intérieures
20 et l'administration générale ainsi que l'appareil judiciaire.
21 S'agissant de l'appareil judiciaire, et ceci est confirmé par ce rapport,
22 l'objectif c'est de permettre le fonctionnement des tribunaux et d'établir
23 un système judiciaire militaire également, c'est pour ça que ces premières
24 dispositions ont été adoptées. Et dans l'ancien système, le système,
25 l'appareil judiciaire était tout à fait séparé du système judiciaire
26 militaire, lequel relevait du système de la Défense populaire généralisée
27 yougoslave.
28 Lorsqu'il y a une transition vers un système démocratique de façon
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1 traditionnelle, et il faut se souvenir qu'on a déclaré officiellement que
2 la JNA était un agresseur, il fallait des interventions.
3 Deuxième problème objectif qui nécessitait des changements et des
4 interventions au niveau de l'appareil judiciaire, c'est qu'il n'y avait pas
5 une seule procédure judiciaire qu'il était possible de mener à terme et qui
6 était valable s'il n'y avait pas une troisième instance -- ou plutôt,
7 l'instance d'appel. Compte tenu du fait que Sarajevo était coupée de tout,
8 les services de la Cour suprême ont été établis ainsi que ce service des
9 Organes de poursuite au niveau de la république, ce qui était pratique
10 courante qu'on a ensuite aussi utilisé au niveau des régions.
11 La Défense va vous montrer qu'il y avait un consensus politique en faveur
12 de ce système au sein de la HZ HB mais aussi entre le HDZ et le SDA et
13 qu'il était possible de pouvoir des postes dans l'appareil judiciaire de
14 cette façon.
15 Nous avons aussi essayé de mettre en œuvre des programmes opérationnels
16 destinés à lutter contre la criminalité, et ceci c'est important dans le
17 contexte de ce Tribunal-ci il a notamment été instauré un Tribunal de
18 guerre -- contre les crimes de guerre. Le Procureur vous a dit dans ces
19 documents que le 22 mars 1993, le vice-président Zubak parlait de
20 l'application de ce programme. Il a dit aussi que de nombreuses réussites
21 avaient été enregistrées -- avaient été obtenues dans cette campagne, et
22 que cette amélioration pouvait encore aller plus loin si nous engagions des
23 experts. Rappelez-vous, il s'agissait de la pièce de l'Accusation P 1703.
24 Il y eut une réunion spéciale, le 11 août 1993, au cours de laquelle 21
25 décisions ont été adoptées qui dressaient d'un cadre organisationnel et
26 juridique, nécessaire pour permettre de donner un socle légal à la HZ HB.
27 Pièce P 4111.
28 Une instance de coordination spéciale a été mise sur pied, dont je faisais
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1 partie. Instance qui a essayé de déclencher toute une série d'activités
2 illustrées par de nombreux documents. Les conclusions adoptées montrent les
3 intentions du HVO et de la HZ HB qui essayaient d'enrayer la criminalité et
4 de lutter contre elle, mais ces conclusions vous montrent aussi que les
5 forces objectives on les trouve dans la présidence de la HZ HB et dans les
6 municipalités. Il y avait une condition indispensable à tout ceci, c'est
7 qu'il fallait le soutien politique de la présidence de la HZ HB et du
8 comité exécutif du HDZ. Faute de quoi, il ne serait pas possible
9 d'appliquer ce programme.
10 Nous avons reçu des informations de la communauté internationale, et nous
11 avons inclus à l'ordre du jour de la séance du 18 août les points suivants
12 : en vue d'assurer la protection des biens et des personnes d'origine
13 musulmane à Ljubusko, il faut prendre des mesures pour mettre fin au
14 comportement répréhensible de certains individus et de certains groupes. Il
15 s'agit là de la pièce 4265.
16 Autre remarque intéressante que je vais citer : "Dans le domaine
17 judiciaire, il nous faut instaurer une politique destinée à prévoir des
18 sanctions plus sévères pour les auteurs d'infractions qualifiées."
19 Ces tâches ont été définis par des membres de cet organe temporaire de
20 pouvoir exécutif grâce aux rapports fournis par différentes instances de
21 poursuite par des représentants de l'appareil judiciaire aussi, et par les
22 députés, l'assemblée qui a été établie dix jours plus tard.
23 Ceci nous a permis d'avoir une position plus active dans ce type de
24 programme. Le document 1D 02371 et 1D 02368.
25 Par exemple, le gouvernement a rédigé un rapport sur la situation qui
26 prévalait en matière de criminalité, a fait le point sur la situation
27 envisagée, aussi l'effet des mesures qui avaient été prises, document
28 présenté à l'assemblée de la HR HB en décembre 1993. Document 1D 01977.
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1 Auparavant, le 18 décembre 1993, j'ai envoyé une lettre au commandant
2 suprême, aux représentants de cette assemblée, pour parler de ce qu'il
3 fallait faire pour essayer de surmonter les difficultés rencontrées à ce
4 moment-là. Les personnes qui faisaient partie de ce comité de coordination
5 ont eu la même position. Il s'agit là du document 1D 100813.
6 Nous avons établi une commission pour voir quelles étaient les crimes de
7 guerre éventuellement commis quels que soient les auteurs et quelles que
8 soient les victimes. Cette commission a coopéré avec les organes de
9 poursuite locaux, comme le prévoyait le document portant sur l'agression de
10 cette instance.
11 Ici, on a déjà une référence au Tribunal, avant même que celui-ci soit
12 établi, et ce document évoque la volonté animant le HVO, la HZ HB, pour que
13 ce Tribunal soit établi, montre que le HVO et la HZ HB sont prêts à
14 coopérer pour qu'il y ait poursuites, s'il y avait crimes de guerre, ce qui
15 a été corroboré par une lettre adressée à
16 M. Goldstone, premier procureur de ce Tribunal. Il s'agit du document 1D
17 02007.
18 Le gouvernement de la HR HB a lancé l'opération Araignée en juin 1994. Tous
19 les ministères compétents et certains des groupes qui avaient été créés en
20 République de Croatie ont œuvré ensemble pour poursuivre et arrêter tous
21 les auteurs des crimes commis jusqu'alors.
22 Les membres de cette Chambre de première instance ont déjà vu que les
23 instances compétentes avaient fait le décompte de tous les crimes commis
24 pendant la guerre, et qu'à la suite de ça, des procédures avaient été
25 engagées.
26 Je cite un document à cet égard : "L'objectif de cette action est qu'elle
27 soit durable, se poursuivre dans le temps et associer des mesures
28 opérationnelles préventives, répressives et policières pour que soient
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1 arrêtées toutes personnes dont il est raisonnable de soupçonner qu'elles
2 sont l'auteur de crimes." Lesquelles personnes doivent faire l'objet d'une
3 enquête d'instruction, et doivent être traduites en justice. Document 1D
4 01249.
5 Les témoins qui sont venus déposer devant vous ont déjà parlé de telles
6 actions, et vous en entendrez d'autres qui parleront des bons résultats
7 obtenus grâce à ces actions.
8 La responsabilité de la poursuite a été assumée plus tard par l'appareil
9 judiciaire de la fédération et plus tard de la Bosnie-Herzégovine dans le
10 cadre d'une division des pouvoirs tripartites. J'y ai participé en tant que
11 membre du gouvernement.
12 Je voudrais aussi parler de la Loi portant sur l'amnistie -- ne dispose pas
13 ou dispense pas de leurs responsabilités des personnes considérées
14 responsables des crimes. Mais ce que je voudrais dire c'est ceci : Le 18
15 février 1996, l'accord de Rome a été signé, j'en ai été témoin puisque je
16 me trouvais à Rome à l'époque, et c'est ainsi qu'un code de la route a été
17 établi, ou une feuille de route a été établi qui définissait de façon
18 précise de quelle façon les tribunaux de la Bosnie-Herzégovine allaient
19 œuvrer dans l'œuvre de justice, dans le respect de cette feuille de route,
20 ce qu'on a donc appelé ce code de la route. Cette feuille de route dit que
21 des tribunaux nationaux ne pourront juger ou connaître que d'affaires
22 concernant des crimes de guerre que s'il y a un accord préalable du
23 Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie.
24 Peut-être que le moment se prête bien à une pause, parce que je vais
25 aborder un nouveau sujet, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, nous allons faire une pause de 20
27 minutes, et nous reprendrons à 6 heures moins 20.
28 --- L'audience est suspendue à 17 heures 22.
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1 --- L'audience est reprise à 17 heures 45.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.
3 Monsieur Prlic, vous avez à nouveau la parole.
4 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il y a une
5 erreur au compte rendu d'audience, l'avocat de M. Pusic me l'a signalée.
6 Page 27, ligne 25, il faut lire Puljic, et pas Pusic. Moi, j'ai parlé de
7 Puljic, pas de Pusic.
8 Pendant la pause, j'ai essayé d'élaguer une partie de ma présentation.
9 Malheureusement, je ne pense pas que je pourrai terminer aujourd'hui,
10 Monsieur le Président.
11 Quelques mots à propos des réfugiés. Je pense que l'acte d'accusation
12 simplifie les problèmes d'ordre humanitaire qui se sont posés pour ce qui
13 est du statut, de soins apportés aux réfugiés, aux personnes déplacées. Une
14 décision les concernant a été adoptée fin 1992 par la HZ HB. Mais cette
15 décision c'était en fait une tentative visant à mettre en place un système
16 pour essayer de régler la question. Le texte de cette décision vous le
17 montre, il n'y a aucun caractère discriminatoire, même si est évoqué le
18 territoire très bien défini de la HZ HB.
19 Cette instance dont j'étais membre a interdit pendant la guerre tout
20 transfert de biens visant à empêcher les transactions faites sous
21 contrainte. Ce service de réfugiés était une toute petite organisation qui
22 ne comptait que 12 employés et n'avait pas de moyens financiers, nous
23 l'avons entendu dire qu'il y a eu plus de 100 000 réfugiés sur notre petit
24 territoire.
25 M. KARNAVAS : [interprétation] D'habitude je n'interromps pas, mais ma
26 consoeurr insiste parce qu'il y a une erreur grave dit-elle qui a été
27 répertoriée -- ce n'était "pas bien défini", "défini" et pas bien défini,
28 ça fait une grosse différence. Si vous ralentissez, Monsieur Prlic, les
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1 interprètes auront peut-être moins de difficulté, mais je signale cette
2 erreur qui est intervenue à la ligne 7 de la page 65.
3 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Merci, Maître Karnavas.
4 Nous parlons d'une toute petite structure. Vers la fin du mois de juin, cet
5 organe temporaire a mis en place une structure chargée des réfugiés. Et les
6 documents vous le montrent, ceci a été fait en raison de la gravité de la
7 situation humanitaire de cette crise humanitaire afin, je cite, "d'assurer
8 la coordination de toutes les instances qui s'occupent des réfugiés."
9 Alors que cette crise humanitaire était à son paroxysme en juillet 1993, le
10 HVO HZ HB a adopté les conclusions suivantes : il fallait prendre toutes
11 les mesures nécessaires de façon à assurer la protection de la population
12 civile dans les zones où il y avait la guerre ou des opérations de guerre,
13 et s'il y avait des nouveaux réfugiés qui arrivaient sur le territoire de
14 la HZ HB, il faudrait s'en occuper, disait une de ces décisions.
15 Le siège de cette organisation en charge de la coordination des activités
16 de ceux qui s'occupaient des personnes déplacées et des réfugiés, ce siège
17 a l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour permettre la sortie
18 de ces personnes vers les pays tiers. Le groupe de travail s'occupant des
19 réfugiés devrait contacté le gouvernement de la République de Croatie pour
20 trouver une solution efficace à ce problème, problème pour le logement ou
21 le passage, le transit des réfugiés qui vienne du territoire de la HZ HB,
22 d'établir des contacts avec le Haut-commissaire des réfugiés afin d'ouvrir
23 un centre de transit pour ces réfugiés sur le territoire de la HZ HB, donc
24 sous les auspices des organisations internationales. Et enfin, il faut
25 informer le ministère des Affaires étrangères dans la République de Croatie
26 de cette question.
27 Document P 3560.
28 Autant de décisions qui s'appliquent à tous les citoyens, à tous les
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1 civils, sans faire référence à tel ou tel groupe qui, lui, aurait la
2 liberté de quitter la zone où il y a des opérations de guerre. Uniquement
3 dans ce contexte qu'il fallait voir toutes les autres décisions.
4 De façon à permettre la protection des civils, c'est logique, il faut
5 établir des contacts avec le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations
6 Unies et le bureau chargé des réfugiés du seul pays où pouvait aller tous
7 ces réfugiés, en l'occurrence la République de Croatie.
8 Sur les 19 membres que comptait ma famille à Mostar, Messieurs les
9 Juges, il y en a que deux qui ont continué à vivre à Mostar.
10 Certains des témoins de la communauté internationale vous ont parlé
11 de cette question du centre de transit qui a été mis en place grâce à leur
12 aide. Le rapport sur le travail fait par le bureau chargé des réfugiés et
13 des personnes déplacées début 1994 nous dit qu'en octobre 1993 un centre de
14 transit avait été ouvert. Ceci a été mentionné par plusieurs témoins qui
15 ont travaillé dans des organisations internationales. Grâce à l'appui
16 apporté par ces personnes, ce centre a été ouvert, par exemple, dans le
17 plus grand hôtel de Ljubuski, et c'est une pièce à charge que celle-ci, la
18 pièce 6324, qui insiste sur ce point : plusieurs milliers de personnes y
19 ont été logées avant de partir à destination de pays tiers. Pour
20 l'essentiel, il s'agissait de Croates et non pas, comme on pourrait le
21 conclure après avoir entendu certains des témoins qui sont venus déposer
22 devant vous, l'initiative de l'ouverture de ce centre de transit aurait été
23 d'après ces témoins pour assurer l'épuration ethnique par le nettoyage des
24 Musulmans.
25 Quand on parle du passage de convois humanitaires, il est important de
26 citer ici dans ce contexte la question de la libre circulation, du libre
27 passage des convois, mais d'autres questions humanitaires. Ceci a été signé
28 après que nous en ayons lancé l'initiative par le HZ HB et par le
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1 gouvernement de la Bosnie-Herzégovine à Makarska, dans la République de
2 Croatie, le 8 juillet 1993. Cet accord prévoit un mécanisme permettant la
3 coopération et l'organisation de convois de secours humanitaire, bien sûr,
4 il y a eu des problèmes de mise en place parce qu'il a fallu adopter
5 certains protocoles. Ça plus ou moins bien marché, comme le dit le rapport
6 préparé par le bureau.
7 L'objectif ce des protocoles, c'était d'éviter toutes décisions
8 arbitraires, c'était aussi d'imposer des règles bien précises, et le droit
9 international dit clairement ce qu'est l'aide humanitaire. Par exemple, on
10 ne peut pas dire que des cigarettes sont de l'aide humanitaire si, par
11 exemple, elles sont taxées.
12 Il y avait une instance dans laquelle se retrouvait notamment des
13 représentants de la communauté internationale, qui ont insisté pour dire
14 que ce protocole avait apporté la solution à tous les problèmes à l'époque.
15 De cette façon, on avait défini la nature des produits qui étaient
16 acheminés par ces convois humanitaires, et ceci a permis également la
17 distribution de l'aide humanitaire. Il s'agit de la pièce de l'Accusation P
18 3346.
19 Il n'y a eu aucun exemple de convois transportant de l'aide humanitaire qui
20 seraient partis d'un point donné, puis qui aurait été stoppés ou de convois
21 qui n'auraient pas été approuvés par les instances d'Herceg-Bosna.
22 En ce qui concerne la transparence du travail effectué en ce qu'on a appelé
23 la "croatisation", je vais laisser ceci de côté. Je laisserai le soin aux
24 témoins d'en parler.
25 J'aimerais maintenant parler des rapports qui existaient entre le HVO
26 HZ HB et la présidence du HVO HZ HB.
27 Ces rapports sont très clairement définis grâce aux procédures et aux
28 règlements de procédure valant pour chacun d'entre eux. Nous étions des
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1 professionnels au sein du comité exécutif et nous voulions toute la
2 transparence nécessaire à de tels rapports. Nous avons un compte rendu --
3 d'ailleurs, Zoran Buntic, qui est chef ou qui était chef d'appareil
4 judiciaire et du service d'administration générale nous dira, je le cite,
5 il dit : "Cette proposition a été faite afin qu'il y ait davantage de
6 réunions de la présidence et que les compétences respectives du HVO et de
7 la présidence soient clairement définies par la présidence." Il s'agit là
8 de la pièce P 00534.
9 La 7e Séance de travail d'octobre 1992, je cite : "Il est nécessaire
10 d'apporter un soutien politique, plus exactement que la présidence apporte
11 de ce soutien politique afin que soit établi un système unifié de douanes
12 et de devis et de -- sur tout le territoire de la HZ HB." C'est la pièce P
13 00578.
14 Pour ce qui est du caractère de ces rapports, ils nous montrent qu'il est
15 nécessaire de faire rapport aux différents départements, aux instances
16 professionnelles ou plus exactement que ces différentes instances font
17 rapport à ceux qui les ont désignés. Par exemple, vous avez les présidents
18 des municipalités qui étaient membres de la présidence de la HZ HB.
19 Jetez un coup d'œil à tous ces rapports; vous verrez tout de suite
20 qu'on décrit le travail fait lors de ces séances HVO HZ HB. Là, nous
21 parlons des pièces P 04611, ainsi que de la pièce 4735.
22 Les rapports déposés par le HVO en tant qu'organe collectif et le
23 département qui est désigné pour la présidence le montre également car il
24 n'est pas nécessaire que les membres se fassent rapport entre eux et ceci
25 est souligné lors de la séance du HVO HZ HB, je cite : "Après tous les
26 rapports faits sur le travail du HVO HZ HB pour la période allant du 1er
27 janvier 93 au 30 juin 93, une fois ces rapports terminés, ils seront soumis
28 à la présidence." Il s'agit là de la pièce P 4220.
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1 Nos témoins vous expliqueront les conclusions tirées par le HVO,
2 conclusions envoyées le 13 juillet 1993 à la présidence. Il s'agit du
3 document P 03413. Et en raison de la situation portant à la connaissance du
4 HVO HZ HB, une autre proposition est faite à Mate Boban afin qu'il y ait
5 une réunion d'urgence de la présidence de
6 HZ HB, la présidence du HDZ et le président du comité municipal de HDZ pour
7 organiser la défense. Ces conclusions ont été adoptées un mois auparavant,
8 le 15 juin 93. C'est le document 1D 01668.
9 Après que l'organe temporaire ait été informé du fait que l'armée de
10 Bosnie-Herzégovine avait attaqué Travnik, Kiseljak, Vitez, Kakanj, et avait
11 persécuté les Croates à Zenica, Sarajevo, et dans d'autres lieux où ils se
12 trouvaient minoritaires.
13 Manifestement, les institutions qui disposaient d'un pouvoir ou qui
14 auraient pu faire quelque chose n'ont rien fait ou n'ont pas fait ce que
15 leur pouvoir leur accordait de faire. la situation n'a fait qu'empirer
16 surtout après une attaque de l'armée de Bosnie-Herzégovine dans les
17 environs de Mostar, le 30 juin 93 et après l'attaque de Fojnica, alors que
18 les combats se poursuivaient en Bosnie centrale. Et nous avons été poussé à
19 soumettre à nouveau les conclusions du
20 15 juin dans l'espoir que les institutions compétentes feraient ce que
21 nous, nous n'avions pas le pouvoir de décider.
22 Dans la transcription du président du 10 novembre 1993, dans laquelle
23 il est question de l'information du gouvernement futur, je parle de la
24 visite à Banja Luka, et je cite : "J'étais avec Komarica samedi soir. Cela
25 a été consolidé et la situation est meilleure pour les Croates. On ne
26 mobilise plus les Croates et encore quelques agences pas visibles mais on
27 leur assigne des obligations de travail mais on ne peut pas les empêcher de
28 faire cela. Ils récoltent les fruits, des pommes et c'est mieux que de les
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1 envoyer à l'armée." Le document de l'Accusation P 05581.
2 L'objectif de ma visite à Banja Luka, où je suis allé à l'invitation
3 de l'évêque Komarica, était de faire à ce que les Croates ne soient pas
4 mobilisés à l'armée serbe, ce qui à l'époque était la raison majeure pour
5 qu'ils quittent ce territoire. Donc, l'objectif de ma visite était
6 d'assurer la survie des Croates dans la région de Bosnie-Herzégovine qui ne
7 pouvait aucunement faire partie de la République croate d'Herceg-Bosna, ce
8 qui nuit directement les points de vue de l'Accusation pour ce qui est de
9 l'intérêt des Croates qui devraient peupler seulement les territoires qui
10 ont été définis comme étaient majoritairement croates.
11 Dans l'une des salles d'audience de ce Tribunal, un jugement a été
12 rendu pour ce qui est des événements qui étaient la cause de l'exil en
13 masse des Croates, plusieurs milles de Croates. Et le commandant militaire
14 de ce territoire, pour ces événements a été condamné aux sanctions de
15 prison de trois ans et demi. Et dans une autre salle d'audience, cet exil
16 en masse à l'inverse constituait le nettoyage ethnique et pour ça, les
17 Croates étaient responsables. D'après le même acte d'accusation, c'était
18 seulement l'objectif des responsables politiques croates mais il fallait
19 chasser de ces territoires tous ceux qui n'étaient pas croates. Où est la
20 logique
21 là ?
22 Pour ce qui est des journaux officiels, on peut voir là il y a
23 beaucoup de nominations, des gens proviennent de -- le caractère de ces
24 décisions, j'ai déjà expliqué, et à cette occasion-là, je veux dire que
25 l'organe dont je faisais partie et dont j'étais président venait d'établir
26 donc l'égalité nationale complète pour ce qui est du peuple musulman. S'il
27 y avait eu un accord, s'il y avait un accord politique entre le SDA et la
28 HDZ, cela montre la lettre du SDA envoyée à Electro d'Herceg-Bosna où il y
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1 a des propositions, des nominations, il y a des protocoles signés et il a
2 été souligné, je cite : "Les représentants nommés par le SDA ont le pouvoir
3 de s'occuper de certaines tâches et de coordonner le travail portant sur
4 l'organisation des activités dans le cadre de l'organisation temporaire
5 d'Electro HZ HB." Le document 1D 1560.
6 Voilà un autre exemple : la fiche de paie pour le mois de mai 1993,
7 pour la centrale hydroélectrique Rama, l'entreprise la plus grande à
8 Prozor, la municipalité à laquelle se rapportent les faits de crime de
9 cette affaire dit que d'après les noms de 49 employés, il y a au moins 20
10 Musulmans. Le document 1D 1991, ou bien, la citation du rapport portant sur
11 le fonctionnement du département judiciaire et de l'administration
12 publique.
13 Après avoir obtenu l'approbation du HVO municipal pour ce qui est des
14 candidats croates, et après avoir eu l'approbation du conseil régional du
15 SDA pour ce qui est des candidats musulmans, et par rapport à la conclusion
16 adoptée à la réunion de la présidence du
17 17 octobre 1992, on a procédé à la rédaction de la proposition pour ce qui
18 est et de la décision portant sur l'élection et la nomination, et dans la
19 suite il y a des noms énumérés. Donc, par rapport à cette citation, on peut
20 voir qu'il était évident que le SDA s'était mis d'accord avec ces
21 propositions.
22 Dans les documents de la Défense, vous allez voir, par exemple, que
23 par rapport à huit juges nommés dans un département de la Cour suprême à
24 Mostar les trois d'entre eux étaient musulmans. C'est le document 1D 2124.
25 Et de la même façon, huit des 13 juges au sein du tribunal de première
26 instance à Mostar étaient musulmans, à savoir plus de moitié d'employés.
27 C'est le document 1D 02381.
28 Les journaux officiels comprennent des décisions le directeur de
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1 l'entreprise Vodoprivreda, Dzemal Cosic; ensuite, le directeur adjoint du
2 service de la Comptabilité sociale, Jusuf Skaljic. C'est
3 P 00672. Ou bien, pour qu'on parle, par exemple, des réunions. C'est P
4 00824. Les membres de la commission : Aid Glavovic, Damjan Vlasic, Ante
5 Bijuk, Mahmet Jugo, en tant que membres, et les membres du conseil
6 d'administration de l'entreprise publique "posta" et télécommunicatik" --
7 et poste et télécommunications, Ilija Kozul, Enes Santic de Mostar, Verenko
8 Cubela de Livno, Branko Colak de Siroki Brijeg, et Enes Sehic de Novo
9 Travnik. Donc, par rapport aux cinq personnes, il y avait deux Musulmans.
10 En décembre 1992, les rapports de la -- dans le procès-verbal de la
11 réunion, mes propos ont été cités, et là, j'ai demandé à tous les chefs de
12 départements et de sous départements pour ce qui est de la réunion future
13 de rédiger des propositions portant sur les nominations des Musulmans. Le
14 document P 00921.
15 Vers le milieu du mois de janvier 1993, une nouvelle réunion du HVO
16 HZ HB, je cite : "Les organes et les services doivent envoyer le rapport
17 pour ce qui est de la composition des organes et des membres musulmans dans
18 des organes du HZ HB." Document 1D 818.
19 Permettez-moi de dire quelque chose pour ce qui est de nos relations
20 avec le gouvernement à Sarajevo. Je peux dire qu'on entretenait des
21 relations assez correctes. La plupart des membres de ce gouvernement se
22 trouvaient sur les territoires libres et souvent ils se rencontraient. Jure
23 Pelivan, le président du gouvernement, Zarko Primorac qui témoignera en
24 tant que ministre des Finances. Muhamed Logo, son adjoint, Tomislav
25 Krsticevic, ministre de la circulation; Alija Delimustafic, ministre de
26 l'Intérieur; ainsi que les autres membres du gouvernement, Valde Jahic,
27 Muratovic, Raguz, donc, je veux me rappeler seulement d'entre eux, ils
28 venaient nous rendre visite et nous parlions de nos activités communes.
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1 Nous avons participé à des émissions radio et télévision ensemble.
2 Avec Avdom Camparom, qui était secrétaire de l'assemblée de la République
3 de Bosnie-Herzégovine, j'ai parlé pour organiser une réunion de cette
4 assemblée à Mostar. L'organe temporaire du pouvoir exécutif au début de ces
5 activités a eu cette position, je cite : "Tous les documents adoptés par le
6 HVO HZ HB doivent être conformes aux règles au niveau de la république, à
7 savoir il faut respecter les règles adoptées par la république où cela est
8 possible, ce qui montre quel était -- que cet organe respectait les
9 institutions de la république." C'est le document P 00543.
10 D'ailleurs, par les décrets, on a très clairement défini les
11 responsabilités, et les niveaux de responsabilités ainsi que l'obligation
12 de coopérer avec les institutions au niveau de la république.
13 L'article 7 du décret sur l'organisation et le fonctionnement des
14 départements et des commissions dit que : "Ces organes --" je cite : "--
15 coopèrent avec les organes au niveau de la république pour préparer des
16 documents par lesquels on établit la politique de la République de Bosnie-
17 Herzégovine ainsi que pour préparer les lois et d'autres règles et
18 documents de portée générale lorsque ces documents s'occupent de la
19 légalité des peuples constitutifs en République de Bosnie-Herzégovine."
20 Au début, les activités, après avoir été nommées, j'ai envoyé en
21 s'appuyant sur la conclusion de l'organe, j'ai envoyé une lettre au
22 gouvernement à Sarajevo dans laquelle j'ai expliqué clairement qu'il était
23 nécessaire d'agir et j'ai parlé de la volonté également pour que la
24 situation se normalise. Je cite : "En annexe, je vous transmets les
25 documents qui ont été adoptés de la part de l'organe temporaire du pouvoir
26 exécutif HVO ayant pour objectif de normaliser la vie et le fonctionnement
27 du système juridique sur le territoire libéré."
28 Dans ces documents, il est évident qu'on a essayé d'être conforme le
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1 plus possible avec -- à des règles au niveau de la république dans des
2 conditions de guerre difficiles. Il y avait beaucoup de destructions de
3 guerre où tout a été bloqué au niveau de la circulation, des
4 communications, l'absence de toute aide et de soutien de la part des
5 organes de la république, il était nécessaire de faire des choses et
6 d'adopter des documents pour surmonter cette situation chaotique et
7 l'anarchie totale qui s'était installée après l'éclatement de la guerre.
8 C'est le document 1D 1558.
9 Donc, on a envoyé au gouvernement de la république tous les documents
10 qu'on a adoptés au début en tant que l'organe temporaire du pouvoir
11 exécutif.
12 En l'automne 1992, j'ai été autorisé par le gouvernement -- a
13 représenté le gouvernement de Bosnie-Herzégovine. C'est le document 1D
14 2147.
15 Quand il s'agissait de la coopération avec les organisations
16 internationales et en particulier pour ce qui était de l'aide humanitaire
17 et de son acheminement ainsi de coordonner toutes les mesures à prendre
18 entre le gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine et le HVO HZ
19 HB, à savoir, je cite une partie de la décision même : "A savoir de
20 participer à des arrangements financiers concernant les activités de la
21 défense."
22 Dans ce contexte, il faut voir les mesures pour ce qui est du bureau
23 chargé de la production militaire, par exemple. Et compte tenu de ce
24 pouvoir, de cette attribution qui était la mienne, j'ai essayé de faire de
25 mon mieux pour que les règles du HZ HB soient conformes à des règles et qui
26 avaient une signification provisoire, donc, j'ai essayé de faire que cela
27 reste dans le cadre du système juridique de la République de Bosnie-
28 Herzégovine.
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1 Dans l'essentiel, nous adoptions également des documents exécutoires, mais
2 nous nous sommes jamais occupés des questions qui auraient exigées une
3 légitimité démocratique supérieure, par exemple, les relations dans le
4 domaine de propriétés, l'organisation des élections et cetera, et bien sûr,
5 donc, j'ai essayé d'aider l'organisation de la vie civile et de rendre la
6 vie plus facile à tous les citoyens. Et malgré toutes mes obligations, je
7 me rendais à l'étranger, je coopérais avec le bureau chargé des réfugiés de
8 la République de Croatie pour essayer d'assurer l'aide humanitaire auprès
9 des donateurs les plus importants de la Bosnie-Herzégovine, et je crois que
10 les témoins en parleront.
11 Pour ce qui est du local temporaire de l'exécutif et sa volonté d'établir
12 des relations constructives avec le gouvernement à Sarajevo, nul autre - et
13 cela a été versé au dossier - cette lettre qui était à l'origine de la
14 réunion du 18 avril 1993, dont plusieurs témoins ont parlé. Il s'agit de la
15 lettre du 2 avril 1993, 1D 1594, qui a été envoyé au chef de la Mission des
16 observateurs de la communauté européenne qui a offert une forme de
17 coordination pour ce qui est des entretiens.
18 Dans cette lettre, j'ai proposé les sujets suivants à être discutés dans le
19 cadre de mes attributions : la production et la distribution de
20 l'électricité; l'entretien des routes sur le territoire libre; ensuite,
21 éviter toute forme d'activités illicites, de contrebande, y compris l'aide
22 humanitaire, la reconstruction des écoles et la reconstruction d'autres
23 formes d'enseignement; s'occuper des retraités; s'occuper des réfugiés et
24 de leurs logements et le retour des réfugiés. Le début des conflits à la
25 mi-avril, qu'on a pu entendre de plusieurs témoins, a modifié l'ordre du
26 jour de la réunion organisée par la Mission des observateurs de la
27 communauté européenne et les membres de la présidence, Stanjo Boras, Ejub
28 Ganic, et le général Petkovic sont arrivés pour assister à cette réunion.
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1 Je suis le chef du gouvernement transitoire de la République de Bosnie-
2 Herzégovine. J'essaie de faire démarrer une activité concrète, alors je
3 m'adresse au gouvernement précédent de la République de Bosnie-Herzégovine
4 en mai 1993, et je cite : "Puisque les délais prévus pour que l'on
5 s'acquitte de cette mission secrète, je pense qu'il serait utile que vous
6 prépariez, d'ores et déjà, tous les documents nécessaires pour procéder à
7 la passation de pouvoir." Document 1D 1598.
8 La continuité des activités se reflète également dans le PV de la première
9 réunion du gouvernement de l'Herceg-Bosna et du gouvernement de Sarajevo,
10 tenue dans mon bureau à Mostar le 6 avril 1994. En l'absence des
11 représentants de la communauté internationale, nous nous sommes mis
12 d'accord sur une série de mesures pratiques, très comparables à ce que
13 j'avais proposée en avril de l'année d'avant. Les représentants des deux
14 parties se sont mis d'accord sur le mode de fonctionnement des organes
15 douaniers, sur le retour des réfugiés, la reconstruction, le système de
16 distribution d'électricité, et également sur une partie des interventions à
17 faire sur le plan des infrastructures dans Mostar même. Document 1D 1953.
18 Nous nous sommes réunis à plusieurs reprises par la suite, y compris notre
19 départ à Sarajevo en mars et également en avril 1994. Bien entendu, ce sont
20 des questions auxquelles nous avons cherché des réponses ensemble par la
21 suite, compte tenu du fait que je suis devenu vice-premier ministre du
22 gouvernement de Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire adjoint du premier
23 ministre du gouvernement fédéral à partir du mois de juin 1994, et
24 également la plupart des ministres du gouvernement de l'Herceg-Bosna
25 étaient devenus membres du gouvernement de la fédération ou de la
26 république.
27 Je vais me pencher maintenant sur une question qui a été largement abordée
28 déjà et qui occupe une place de choix dans l'acte d'accusation également;
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1 il s'agit du soi-disant "ultimatum" en date du 15 janvier 1993. La Chambre
2 sait parfaitement de quel document je parle, et je tiens à dire d'emblée
3 que cette décision, de la manière dont je l'ai comprise à l'époque il y a
4 15 ans et de la manière dont je la comprends aujourd'hui - et je le
5 confirme - n'a pas constitué un ultimatum, on n'a pas discuté de cette
6 décision, on n'a pas songé à cette décision sous forme d'un ultimatum. Elle
7 n'a pas été rédigée ainsi et, certainement, elle ne devait pas non plus
8 être comprise comme un ultimatum. Cette décision en revanche, lorsqu'on
9 l'interprète, l'analyse, dans les circonstances du moment et à la lumière
10 des informations que nous avions ou qu'on nous a encouragés à accepter
11 comme fiable, elle avait pour objectif la création du commandement conjoint
12 de l'ABiH et du HVO. Et, effectivement, pour autant que je m'en souvienne,
13 l'opinion que nous partagions tous au début de l'année 1993, et compte tenu
14 de l'évolution de la situation à l'issue de la conférence internationale
15 sur l'ex-Yougoslavie, ainsi que compte tenu des informations
16 qu'apparemment, nous recevions, c'était que la guerre était terminée, même
17 si cela peut paraître naïf aujourd'hui. Je me rappelle, en effet, que
18 nombre d'entre nous, à la réunion de l'exécutif, disaient que la guerre
19 était terminée ou que très vite la guerre allait se terminer, et se sont
20 mis à se poser la question de la manière de faire refonctionner les
21 entreprises pour pouvoir trouver l'emploi pour des militaires démobilisés.
22 La décision a été rédigée et adoptée sur demande du chef de la délégation
23 croate en négociations internationales, à savoir M. Boban, qui était le
24 président de la HZ HB et qui était à la tête de l'équipe des négociateurs.
25 Parmi nous, personne n'avait raison de penser que la déclaration donnée par
26 M. Boban sur l'accord passé était soit mensongère soit inexacte. De même,
27 il n'y avait pas de raison de remettre en question les instructions données
28 par M. Boban disant qu'il nous fallait prendre une décision qui allait
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1 refléter la lettre et l'esprit de l'accord passé.
2 Pour quelles raisons allait-on remettre en question son honnêteté ou douter
3 de son intégrité ? Ses instructions, qu'en fin de compte, il était habilité
4 à nous donner -- exiger de notre part de concevoir, de formuler, de prendre
5 une décision qui, en réalité, signifiait la mise en œuvre de proposition de
6 paix, et, bien entendu, il invitait à ce qu'on évite toute forme de conflit
7 entre le HVO et l'ABiH sur les territoires libres.
8 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il me faut tenir, garder à
9 l'esprit le fait que l'ABiH et le HVO étaient composantes des forces armées
10 communes, et c'est ce que l'on trouve explicité de manière catégorique dans
11 l'ordre portant sur la levée de siège de la ville de Sarajevo comme ordre
12 émis par le président de la présidence de la République de Bosnie-
13 Herzégovine, Alija Izetbegovic, le 16 octobre 1992. Et le premier point de
14 cet ordre se lit comme suit, je cite : "Les forces armées de Bosnie-
15 Herzégovine, entre parenthèses, l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO,
16 entreprendront sur-le-champ des préparatifs devant mener à une action qui
17 sera lancée pour lever le siège de la ville de Sarajevo par des moyens
18 militaires." Pièce 1D 2432.
19 Malheureusement, les deux forces armées sur un seul territoire ont connu de
20 grandes tensions malgré des efforts déployés de bonne foi de part et
21 d'autre afin de trouver une solution acceptable et c'est la raison pour
22 laquelle comme nous avons eu l'occasion de le voir, pendant la présentation
23 des moyens de l'Accusation, pendant toute la durée de la guerre, bien avant
24 que n'éclate le conflit entre ces unités, des efforts ont été déployés de
25 manière continue pour identifier une manière d'organiser le commandement
26 conjoint du HVO et de l'ABiH, donc, un modèle acceptable pour les deux
27 parties. Et on est parvenu partiellement à l'automne 1992, juste à la
28 veille de la chute de Jajce et d'ailleurs c'est ce qui ressort de la
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1 conférence de presse.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Une petite interruption de ma part. Vous avez cité
3 ce document qui me paraît très important, le 1D 2432, qui est un ordre
4 signé d'Izetbegovic sur le siège de Sarajevo. J'ai le document sous les
5 yeux, qui n'a pas été traduit. Donc, je n'ai pas la version anglaise.
6 Alors, je vous le signale dans le classeur, il y a la version en B/C/S mais
7 il n'y a pas la traduction anglaise. Alors que ce document peut avoir une
8 importance considérable.
9 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que la
10 cote c'est 2422, mais je ne suis pas tout à fait sûr. Est-ce que j'ai dit
11 2432 ?
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Quoi qu'il en soit, Monsieur le Président,
13 par le truchement de témoins, vous aurez tous ces documents dans toutes les
14 langues qu'il faut et en temps utile. Je vous remercie d'avance.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien, attendons.
16 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Lors de cette conférence de presse, il y
17 a eu participation de l'officier, Jasmin Jaganac; du général Ante Prkacin;
18 du commandant de la 1ère Brigade de Mostar, Arif Pasalic; et également du
19 commandant du QG de la défense de Zenica, Dzemal Merdan; et ils étaient
20 tous membres de ce nouveau commandement. Pièce 1D 01424.
21 L'information sur la mise en œuvre partielle du plan de paix Vance-Owen est
22 arrivée dans les heures de l'après-midi du 15 janvier. Ce matin-là, nous
23 tenions une réunion régulière. Nous avons appris ce jour-là qu'il y a eu
24 une réunion tenue à Zagreb par Mate Boban, Alija Izetbegovic, le président
25 de la République de Croatie, Franjo Tudjman et les co-présidents de la
26 Conférence sur l'ex-Yougoslavie. Donc, logiquement, on allait chercher à
27 établir un lien entre ces événements. Pièce P 1158.
28 Le fait est qu'on a pensé que cette décision était basée sur les résultats
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1 de l'information disant que l'accord était passé et c'est ce qu'on lit dans
2 le préambule, je cite : "Conformément aux accords qui ont été signés de par
3 le passé et à ce qui a été déjà acquis par la Conférence internationale sur
4 l'ex-Yougoslavie, entre parenthèses, l'accord de Genève." Pièce P 1146.
5 Donc, même s'il est difficile d'être absolument certain lorsqu'on se
6 rappelle ces événements, lorsqu'on a rédigé la décision en question nous
7 avions à l'esprit toute une série de négociations internationales à
8 commencer par le plan Cutileiro sur la création de trois entités nationales
9 constitutives de Bosnie-Herzégovine, en passant par les conclusions de la
10 Conférence de Londres. La proposition conjointe du HDZ et du SDA sur
11 l'organisation de la Bosnie-Herzégovine et d'ailleurs c'est ce qui va
12 permettre de rédiger par la suite le plan de paix Vance-Owen. Donc, jusqu'à
13 la première proposition de paix globale exhaustive, le plan de paix Vance-
14 Owen - et n'oublions pas non plus le projet de la structure
15 constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine réalisée par le groupe de travail
16 de la Conférence de Genève pour l'ex-Yougoslavie - a été adopté par le
17 Conseil de sécurité des Nations Unies le 16 novembre 1992. Document P 752.
18 Donc, est-ce qu'à l'époque, c'était trop que de faire confiance aux
19 efforts de la communauté internationale, on s'est dit que finalement elle a
20 aidé à ce qu'on articule une proposition de paix et qu'un projet
21 constitutionnel qui peut être mis en œuvre est prêt. Je pense que non, en
22 particulier si on tient compte du fait que beaucoup de temps et d'énergie
23 se sont passés et prenons l'article 4 de cette décision je cite : "Il
24 s'agit d'une décision provisoire, temporaire qui sera en vigueur jusqu'à ce
25 que soit signé d'une manière définitive les accords de Genève sur la
26 structure à Bosnie-Herzégovine et la paix en Bosnie-Herzégovine." Donc,
27 jamais on ne s'attendait à ce que cette décision soit mise en œuvre en
28 ayant recours à la force.
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1 Quant à savoir ce que j'avais à l'esprit à l'époque, je mes permets
2 d'attirer votre attention sur mes propos tels qu'enregistrés par la MOCE,
3 je cite : "M. Prlic a déclaré que le HVO n'allait entreprendre rien pour
4 mettre en œuvre par la force la décision envoyée aux unités de Bosnie-
5 Herzégovine et dans le délai expiré le 20 janvier, entre parenthèses, voir
6 copie à l'annexe." Document
7 P 1912.
8 Donc, comme on peut le voir, cette décision a été transmise au
9 gouvernement de Bosnie-Herzégovine, département de la Défense, et on était
10 convaincu que c'était une question résolue et qui exigeait cette forme de
11 formulation pour montrer qu'il s'agissait d'une solution intégrale dont
12 l'objectif était de faire régner la paix. Et il ne faut pas oublier que le
13 plan de paix Vance-Owen prévoyait qu'un grand nombre de Croates résident
14 dans les provinces où les Croates n'étaient pas majoritaires et où à peu
15 près 20 000 militaires du HVO avaient combattu et que pendant cette même
16 période transitoire, ils étaient censés se trouver sous le commandement de
17 l'armée de Bosnie-Herzégovine et ils l'ont accepté.
18 Quant à la nature de la décision, comme on le lit dans le rapport de
19 la MOCE, issue de la réunion conjointe organisée, convoquée pour résoudre
20 tout malentendu, dissiper tout malentendu, je cite : "S'agissant de la
21 décision du HVO visant à prendre le contrôle direct sur l'ensemble des
22 militaires qui restent sur son territoire à la date du 20 janvier, lui, on
23 se réfère à Prlic, a regretté profondément que l'accord portant sur la
24 création du commandement conjoint de l'armée de Bosnie-Herzégovine et HVO
25 n'a pas été couronné de succès au bout de cinq ou six mois de négociations
26 --"
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Je demande aux avocats de M. Prlic de bien
28 vérifier la traduction des chiffres cités en anglais parce que dans
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1 l'interprétariat que j'ai en français, où manifestement l'interprète
2 traduit directement du B/C/S en français, j'ai bien souvent pas les mêmes
3 chiffres. Par exemple, à la ligne 25 de la page 82, j'ai entendu "1212" et
4 en anglais, je vois "1215." A la ligne 14 de la page 83, il y a "28
5 janvier" en anglais, et il a été traduit en français "20 janvier." Alors,
6 je vous demande de vérifier parce qu'après, on aura énormément de mal à
7 retrouver des documents.
8 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Tout
9 d'abord, il s'agit ainsi d'un texte écrit qui a été fourni au cabinet
10 d'interprétation en langue -- en croate, bien entendu, première chose.
11 Deuxième chose, il y a des dizaines, même des vingtaines d'erreurs
12 qui sont intervenues et nous n'avons pas interrompu les débats pour ne
13 corriger chacune d'entre elles. Nous allons, bien sûr, repasser tout ceci,
14 revoir le texte et nous insisterons pour que chacune des erreurs soient
15 commises et ceci vaut pour les chiffres aussi.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Continuez, Monsieur Prlic.
17 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] D'après ce qu'il a dit, donc, moi, en
18 principe : "Le commandement de BiH était d'accord avec cette décision et en
19 fait n'a souhaité rien d'autre que d'avoir une conséquence directe des
20 documents signés par Boban à Genève. En réalité, il a souligné qu'en fait,
21 ça n'avait pas entraîner des modifications plus importantes car, par
22 exemple, à Mostar, la
23 1ère Brigade BiH était déjà sous le commandement du HVO." Document
24 P 1215.
25 En l'espèce, les documents ont déjà démontrés et les témoins de la Défense
26 le confirmeront que le conflit de Gornji Vakuf avait éclaté bien avant le
27 15 janvier 1993. Je n'ai pas le temps de me pencher sur tous les détails
28 des événements qui allaient suivre mais il est clair que, dans son
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1 ensemble, cette situation a été surmontée dans un esprit de conciliation.
2 Et là encore, je voudrais attirer votre attention sur ce même document de
3 la MOCE du 19 janvier. Je cite :
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, il faudrait plutôt
5 qu'il soit dit ils -- on devrait dire ligne 19. En d'autres termes, c'est
6 décidé -- c'est certain et il est certain que cette situation a trouvé une
7 solution lorsqu'il s'agissait de trouver une solution dans l'esprit de paix
8 et de convention.
9 Je vous demande instamment, Monsieur Prlic, de ralentir, de bien prononcer
10 et de faire des pauses. Merci.
11 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je cite : "Suite à un malentendu mineur
12 et un échange de lettres voire copie à l'annexe entre le gouvernement
13 d'Herceg-Bosna, Prlic et la présidence de la Bosnie-Herzégovine, Prlic a
14 demandé que l'on convoque au plus vite une réunion réunissant M.
15 Izetbegovic et Boban à Split. Il est nécessaire d'organiser ce type de
16 rencontre car nombre de questions doivent être résolues en particulier
17 pendant cette période d'incertitude qui est dû à une nouvelle évolution des
18 événements à Genève."
19 Je souhaite que l'on aborde un autre point qui me paraît intéressant ici.
20 J'ai lu un ouvrage officiel, "Conférence internationale pour l'ex-
21 Yougoslavie," le document officiel qui comporte à peu près 1 630 pages, et
22 qui comporte des rapports au président du secrétaire général des Nations
23 Unies. J'ai lu également ce qu'on appelle des rapports carrières des
24 représentants de la communauté internationale qui ont été joints
25 initialement à la -- au livre et qui ont été retirés par la suite.
26 A aucun endroit je n'ai vu qu'on mentionne -- qu'on ait mentionné ce soi-
27 disant ultimatum de janvier 1993; cependant, ce que j'ai trouvé là-dedans,
28 entre autres, eu égard aux négociations qui ont eu lieu pendant ce mois-là,
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1 et je vais vous citer cela en anglais, je vais vous citer la page 727 : "A
2 cette époque, les Croates ont signé tous les éléments du plan de paix
3 proposé par les co-présidents," et là, je cite de nouveau : "Que la
4 communauté internationale continue de soutenir ce plan de paix et invite
5 les deux autres parties à signer la totalité de cette proposition de paix
6 de façon à ce qu'ils puissent commencer à s'appliquer le plus vite possible
7 de façon à mettre fin à la guerre."
8 Au final, je conclurais l'examen de cette question en disant que cette
9 décision portant sur le retrait de la décision du
10 15 janvier 1993 a été décidée au moment où il a été prouvé qu'il n'y avait
11 pas de volonté de la part des dirigeants musulmans de les mettre en œuvre.
12 Ainsi le président de la HZ HB, Boban, conformément à ces attributions, a
13 ordonné la suspension de cette décision comme il avait ordonné qu'elle soit
14 adoptée. Nous avons vu la décision signée de sa main sur le papier en-tête
15 de l'hôtel Intercontinental de Zagreb. Mate Boban a écrit, et je cite ce
16 qu'il a écrit : "Je vous ordonne d'organiser pendant la journée une réunion
17 du HVO de la HZ HB et je vous ordonne de modifier le point 5," document 1D
18 0820.
19 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre
20 indulgence, je demanderais à M. Prlic de relire ce dernier paragraphe
21 lentement. Par exemple, dans le texte, il n'y a pas le mot "exemple." Je le
22 sais parce que ma consoeur me l'indique et je connais bien ce texte, moi
23 aussi, parce que ce qui est important ici ce qu'il essaie de nous montrer,
24 Monsieur Prlic, c'est que tout comme Boban avait ordonné que l'on rédige
25 cette décision, qu'elle soit proclamée, et bien, M. Boban, de la même
26 matière, vu ses attributions, vu ses pouvoirs, ordonne que cette décision
27 soit mise de côté ou soit retirée, donc, je demanderais à mon client de
28 relire cette décision parce que ce que je dis ne constitue pas un moyen de
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1 preuve mais ce qu'il dit lui peut être considéré comme un moyen de preuve.
2 Bien entendu, il appartiendra à la Chambre de décider du poids à attribuer
3 à cet élément de preuve.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Permettez-moi d'ajouter quelque
5 chose. Je ne suis pas sûr que M. Prlic ait véritablement voulu parler d'une
6 direction croate musulmane, ligne 6, page 86. C'est un peu surprenant.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] En fait, ce qui se passe c'est que les
8 dirigeants des Croates et de Musulmans n'ont pas trouvé la volonté d'aller
9 de l'avant ensemble. C'est logique finalement. Les Croates avaient toujours
10 dans la poche un stylo pour signer ces accords. On les a vus signer des tas
11 d'accords alors qu'Izetbegovic lui il changeait d'avis en cours de journée.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc, en fait, vous nous dites qu'il
13 y a un trait d'union qui manque.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Sans aucun doute mais ce que nous essayons
15 de montrer ici, ce que nous essayons de mettre en exergue c'est que les
16 Croates ne cessaient de signer et les autres on essayait de les inciter à
17 signer. Et ce que nous dit M. Prlic c'est qu'il semble y avoir un manque de
18 volonté et ça c'est un euphémisme de la part des Musulmans qui ne veulent
19 pas avancer. Mais quoi qu'il en soit celui qui a émis cette décision,
20 Boban, et bien, c'est lui aussi qu'il ordonne que cette décision soit
21 retirée, c'est donc un élément qui nous indique qui a les pouvoirs, qui a
22 les responsabilités lui permettant de faire cela.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Je crois que le mieux, Monsieur Prlic, c'est que
24 vous relisiez lentement la phrase que vous avez cité. Par ailleurs, pour le
25 transcript, à la ligne 11, j'apparais, et pour une fois, je n'ai rien dit.
26 Alors, il faut marquer Juge Trechsel et non pas moi-même.
27 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je ne vois vraiment pas le problème. Me
28 Karnavas parle extrêmement vite et pourtant on traduit tout ce qu'il dit,
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1 alors que, moi, jamais je n'ai parlé aussi lentement que je le fais
2 aujourd'hui, et pourtant il y a des difficultés. Bon, enfin, je vais quand
3 même répéter.
4 Pour finir, j'aimerais dire que la décision d'annuler la décision du 15
5 janvier, cette décision elle a été prise pourquoi ? Parce qu'on s'est rendu
6 compte qu'il n'y avait pas de volonté de la part des Croates et des
7 Musulmans, de leur direction, de mettre en œuvre cette décision."
8 Si bien que le président de la HZ HB, M. Boban, conformément à ses
9 attributions, a ordonné que cette décision soit suspendue de la même
10 manière qu'il avait ordonné que cette décision soit prise. Nous avons vu
11 une lettre de sa main, une lettre écrite sur le papier a
12 en-tête de l'hôtel Intercontinental de Zagreb. Mate Boban, président de la
13 HZ HB, écrit, je cite : "Je vous ordonne d'organiser une réunion
14 intermédiaire ou extraordinaire de la HZ HB du HVO en cours de journée et
15 de modifier le point 5." Il s'agit du document
16 1D 00820.
17 Et comme nous l'avons déjà vu, le pouvoir exécutif faisait ou a fait
18 exactement ce que lui ordonnait de faire M. Boban et ce que voulait M.
19 Izetbegovic.
20 Tout de suite après, nous avons le document P 1329, on voit qu'il y a
21 eu signature de la déclaration relative à la cessation immédiate du
22 conflit. Il est notoirement connu, et la Chambre sait qu'en mars les
23 Musulmans ont signé la totalité du plan Vance-Owen, tous les documents qui
24 constituaient ce plan Vance-Owen. Au cours de ce mois-là, cependant, nous
25 avons reçu une demande de la part du gouvernement de Sarajevo afin
26 d'organiser ou de mettre en place des districts dans le territoire de
27 Mostar et Livno, ce qui ne ressemblait absolument pas aux accords existant
28 entre les Musulmans et les Croates dans le cadre du plan Vance-Owen.
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1 Ultérieurement, l'assemblée de Bosnie-Herzégovine a également adopté
2 une décision relative à la mise en œuvre de ce plan, nonobstant le fait
3 qu'une mise en œuvre bilatérale du plan avait été décidée. Malgré cela, sur
4 le terrain des décisions sont mises en œuvre ou on s'efforce de le faire,
5 pour mettre en place des districts, et en fait, c'est une politique
6 hypocrite qui est mise en œuvre. Au même moment, la HZ HB du HVO, lors de
7 sa réunion du 3 avril 1993, a adopté toute une série de mesures qui avaient
8 pour objectif la mise en œuvre du plan Vance-Owen. Il faut savoir que
9 c'était là une tâche extrêmement difficile, une véritable gageure.
10 Ultérieurement, la Fédération des Bosniaques et des Croates a été
11 mise en œuvre avec l'aide de la communauté internationale au cours d'une
12 période de quelque cinq ans. Ces conclusions nous montrent clairement que
13 la HZ HB du HVO et son président, Mate Boban, était présent lors de cette
14 réunion, étaient prêts à dissoudre l'Herceg-Bosna. Et s'agissant des
15 organes intérimaires exécutifs et temporaires, on était prêts à en faire
16 des provinces, comme c'était prévu au plan de paix. Donc ceux qui ont
17 essayé de créer des districts et parallèlement de signer des accords
18 relatifs à la mise en œuvre du plan Vance-Owen faisaient preuve
19 d'hypocrisie, tenaient un double langage.
20 L'Accusation essaie d'établir un lien entre la session de l'organe
21 intérimaire ou provisoire du gouvernement exécutif du 3 avril et le début
22 du conflit. Or, ce lien de cause à effet n'a strictement pas lieu d'être.
23 Quand on accepte un plan de paix, quand on est prêt à dissoudre les
24 institutions temporaires ou qui avaient été mises en œuvre, la partie en
25 présence dont les forces sont bien inférieures, sont plusieurs fois
26 inférieures en effectifs à celles de l'autre partie, cette partie ne va pas
27 bien entendu commencer un conflit.
28 Les témoins à décharge nous montreront qu'il n'y a pas de relation de
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1 cause à effet entre la réunion du 3 avril et le début du conflit au mois
2 d'avril également. Dans une certaine mesure, le communiqué conjoint relatif
3 aux relations croates ou musulmanes emmène une illustration. Ce communiqué
4 a été publié le 24 avril après des négociations à Zagreb entre Izetbegovic
5 et Mate Boban. Et ils y disent que tous les malentendus dans les relations
6 entre les Croates et les Musulmans, entre les peuples croates et musulmans,
7 doivent trouver une solution politique, et d'autre part, qu'il n'y a aucune
8 raison justifiant un conflit, et que toutes les unités ont reçu des ordres
9 aux fins de cesser les hostilités, de remettre en liberté les prisonniers
10 et d'établir leurs responsabilités et les intentions des formations et des
11 unités dans l'éclatement du conflit. Il s'agit de la pièce P 2088.
12 Je ne peux pas traiter de la totalité de la chronologie dans ce tableau que
13 je suis en train de dresser devant vous, mais selon moi, alors que nous
14 nous approchons de la fin de l'audience de ce jour, je dirais que les
15 derniers efforts qui ont été entrepris pour prévenir le conflit se
16 manifestent par la tentative de mettre en place ou de mettre à exécution
17 les conclusions de la réunion de Medjugorje qui a eu le 18 mai, à ce
18 moment-là on a fixé des dates butoir précises pour la mise en œuvre du plan
19 Vance-Owen. Et contrairement à ce qu'affirme l'Accusation, ce plan n'était
20 pas condamné au début du mois de mai.
21 En tant que premier ministre élu bénéficiant du soutien des deux parties,
22 j'ai vraiment tout fait ce qui était en mon pouvoir pour mettre en place un
23 gouvernement conjoint et un commandement conjoint qui auraient été
24 responsables -- ou plutôt, le vice-président Kresimir Zubak a pris la tête
25 de cet organe provisoire, et j'ai pris mes nouvelles fonctions. J'ai même
26 décidé où se trouverait le nouveau siège du gouvernement, un siège de
27 [inaudible] si je peux dire, au cas où Sarajevo ne puisse pas fonctionner
28 en tant que tel, mais mes efforts ont été en vain parce que l'ABiH a
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1 attaqué d'abord Travnik, puis ensuite Kakanj, ce qui a débouché sur
2 l'expulsion de 25 à 30 000 Croates de ces municipalités.
3 Dans sa décision relative à l'article 98 bis, la Chambre de première
4 instance a évoqué une déclaration faite par moi-même et par M. Stojic en
5 octobre 1993 au moment où l'ABiH a lancé son attaque contre Mostar. Il
6 s'agit de la pièce à charge, d'une pièce à charge, et je vais en citer un
7 extrait : "Ce matin, à 4 heures 45, une offensive musulmane a été lancée
8 pour prendre le contrôle dans la totalité de la zone urbaine. A cette
9 occasion, le discours du commandant du 4e Corps, Arif Pasalic, a été
10 diffusé à la radio locale, sous les ondes de la radio locale, radio Mostar,
11 et il a déclaré, je cite : "s'adressant aux citoyens de Mostar musulmans,
12 aux Croates honnêtes et Serbes loyaux." Voilà sans doute le genre de
13 Bosnie-Herzégovine que la partie musulmane prétendait vouloir se
14 manifester, la partie musulmane ou la Bosnie-Herzégovine, en s'adressant au
15 HVO, Pasalic évoque la défaite honteuse que vous avez subie ce matin. Il
16 dit, je cite : "Aux citoyens, aux habitants de Mostar, il faut que vous
17 sachiez que c'est le jour du jugement dernier, le jour où vous devez
18 commencer à vous battre. J'en appelle à tous les citoyens qui possèdent une
19 arme, je leur demande de jeter, de se servir de cailloux pour tuer les
20 Oustachi parce qu'on ne peut pas envisager une cohabitation avec les
21 oustachi, seuls les Musulmans peuvent vivre ici avec les Croates honnêtes
22 et les Serbes loyaux."
23 Cette diatribe, c'était quelque chose qui finalement est rare dans
24 l'histoire de la Bosnie-Herzégovine. C'est la première fois que j'ai
25 véritablement senti la peur, et il faut savoir que j'ai passé toute la
26 guerre dans les endroits les plus affectés à Mostar et Sarajevo assiégées.
27 Je suis allé à Sarajevo au moins à 30 reprises en passant par le tunnel
28 improvisé qui avait été creusé près de l'aéroport. Et quand on entrait,
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1 quand on sortait, systématiquement, pratiquement systématiquement on était
2 sous le feu de l'ennemi.
3 Le communiqué Prlic-Stojic était public et était publié dans les
4 médias. On appelait les Croates des municipalités d'Herzégovine à résister
5 à l'agression, et comme on peut le voir dans la déclaration du commandant
6 du 4e Corps d'armée, on voit quelles étaient les véritables intentions de
7 l'ABiH.
8 La Chambre de première instance a déjà constaté que le même jour, les
9 partis musulmanes ont réagi, ils ont condamné cette agression, et ceci
10 ressort d'un communiqué conjoint du Parti démocratique musulman et du SDA -
11 document 2D 82 et 1D 910 - et le président de la Bosnie-Herzégovine a
12 informé le secrétaire général des Nations Unies de cette attaque, qu'il l'a
13 imploré, lui demandant de prendre toutes les mesures nécessaires pour
14 empêcher une nouvelle agression contre le peuple croate et contre les zones
15 croates en Bosnie-Herzégovine. Il lui a demandé de faire en sorte que "les
16 négociations de paix se déroulant sous votre égide de poursuivent."
17 Dans ce mémo, le secrétaire général -- j'en ai pour 30 secondes. Dans
18 ce mémo, le secrétaire général dit, je cite : "Après l'agression qui a eu
19 lieu en Bosnie centrale, on voit une fois de plus que l'armée musulmane
20 essaie d'avoir recours à la force militaire pour occuper les provinces qui,
21 aux termes du plan Vance-Owen, sont considérées comme des territoires
22 croates." Il s'agit du document 1D 20309. J'en ai terminé pour aujourd'hui.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Prlic, il vous faudra combien de
24 temps encore pour terminer ?
25 L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je crois que j'aurais besoin du premier
26 volet d'audience. J'ai été très lent. Je fais de mon mieux.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été lent à cause de
28 Me Karnavas.
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1 Alors, nous allons suspendre donc l'audience. Comme vous le savez,
2 nous reprendrons donc demain à 14 heures 15. Je vous remercie.
3 --- L'audience est levée à 19 heures 04 et reprendra le mardi
4 6 mai 2008, à 14 heures 15.
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