Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 14 mai 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

  9   Messieurs les Juges. Bonjour à toutes et à tous. Affaire IT-04-74-T, le

 10   Procureur contre Prlic et consorts. Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce 14 mai 2008, je

 12   salue M. Scott et son collègue. Je salue M. le Témoin, Mmes et MM. les

 13   avocats, MM. les accusés ainsi que toutes les autres personnes qui nous

 14   assistent.

 15   L'interrogatoire principal va se poursuivre. Il semblerait qu'il vous

 16   reste, Maître Karnavas, une heure d'après les décomptes faits par M. le

 17   Greffier. Vous avez la parole.

 18   LE TÉMOIN : DAMIR ZORIC [Reprise]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

 21   Messieurs les Juges. Bonjour à toutes les personnes dans ce prétoire et

 22   autour de celui-ci.

 23   Interrogatoire principal par M. Karnavas : [Suite]

 24   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 25   R.  Bonjour.

 26   Q.  Fort bien. Hier, nous avons eu une assez longue discussion à propos

 27   d'un décret et d'une décision. La décision, c'est la pièce 1D 02638. Nous

 28   n'allons pas y revenir tout de suite mais c'est de celle-là qu'il s'agisse,

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  1   et nous avons parlé de la question, à savoir qui était réfugié ou ce qui

  2   était un réfugié. Hier, vous avez dit que c'est partant de cette décision-

  3   ci et du décret précédent que les réfugiés, qu'ils soient croates,

  4   musulmans ou autres recevaient protection en Croatie; est-ce exact ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Des questions ont été posées par les Juges de la Chambre. Je me suis

  7   dit, par conséquent, que ce serait peut-être illustratif d'examiner la

  8   pièce 1D 01581. Je pense que vous l'avez sous les yeux; c'est un document

  9   séparé qui n'est pas dans la liasse.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, c'est déjà versé au

 11   dossier. Je pense que ça a été versé au dossier lorsque Mme Krajsek est

 12   venue déposer. C'était sur notre liste jusqu'à lundi mais nous avions un

 13   peu élagué pour nous conformer à vos instructions et nous voulons essayer

 14   de terminer en trois heures.

 15   Q.  Quoi qu'il en soit, si nous examinons ce document 1D 01581 du 6 avril

 16   1994, je vais demander à tout le monde de se concentrer sur le tout premier

 17   paragraphe. Deuxième phrase de ce paragraphe : "Nous appliquons les mêmes

 18   principes que ce qu'eux que nous avons appliqué aux réfugiés en République

 19   de Croatie dès que les conditions permettant le retour en particulier de la

 20   sécurité sont en place quelque part le statut de réfugiés d'une personne de

 21   cette région est abolie et le retour est ainsi rendu possible ainsi que le

 22   retour des personnes qui avait décidé lui-même de rentrer." Et vous voyez,

 23   entre parenthèses : "(Voir comme faire la liste sur le Statut des personnes

 24   expulsées et réfugiés, article 9, paragraphes 1 et 2, journal officiel

 25   numéro 96/93.")

 26   Gardons ceci à l'esprit pour revenir à l'article 9 de la décision 1D 02638,

 27   je parle de la loi à proprement parler. Vous voyez l'article 9 de cette

 28   loi. Dites-nous, si vous le pouvez, si M. Rebic fait référence dans ce

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  1   texte à cet article-ci, paragraphes 1 et 2.

  2   Pendant que vous êtes en train d'examiner ceci, vous pouvez trouver cette

  3   loi sur internet au journal officiel et ce texte que nous avons ici est

  4   effectivement le document portant le numéro 96/93.

  5   Est-ce de ce document que vous parliez, Monsieur le Témoin ?

  6   R.  Je pense que cette décision -- ce mémo du Dr Rebic confirme ce que j'ai

  7   dit hier, à savoir que le décret et la loi s'appliquent d'une certaine

  8   manière -- ou plutôt, de manière conforme aux réfugiés venus de Bosnie-

  9   Herzégovine. Si je puis ajouter un point, quelque chose que nous n'avons

 10   pas pu évoquer hier. En sa qualité de membre des Nations Unies, la Croatie

 11   a appliqué la convention des Nations Unies sur les droits des réfugiés, la

 12   convention de 1951. La Croatie, par son adhésion aux Nations Unies, a

 13   accepté toutes les conventions des Nations Unies ainsi que le protocole

 14   portant application et d'application de la convention. D'après ce que je

 15   voie, ces documents n'ont jamais été présentés ici.

 16   Donc, il s'agit non seulement d'une application adéquate des textes

 17   internes mais aussi il s'agit de l'application du droit international sur

 18   les réfugiés qui se trouvent en Croatie.

 19   Q.  Merci. Bien, vous avez déjà devancé mes intentions au niveau de ma

 20   prochaine question. Mais je veux m'assurer que nous sommes tout à fait

 21   clairs. Ce que M. Rebic ici indique cette loi sur le statut des personnes

 22   expulsées et réfugiées, article 9, paragraphes 1 et 2, est-ce à cela qu'il

 23   est fait référence dans la décision qui porte le numéro 1D 02638 ?

 24   R.  Oui, c'est cela.

 25   Q.  Fort bien.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Si les Juges de la Chambre le souhaitent,

 27   j'ai le site internet du journal officiel on peut poser ce document sur le

 28   rétroprojecteur si on veut que ce soit versé officiellement au dossier.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je voudrais vous poser une

  2   question accessoire mais je profite de ce document pour

  3   aborder cette question.

  4   Dans le document 1D 1581, qui est donc signé par le Dr Rebic, à la page 2,

  5   l'avant-dernier paragraphe dans la version anglaise, il est dit que

  6   personne ne peut retourner parce que leurs maisons ont été détruites, et

  7   cetera, et cetera. Alors, la dernière fois, vous n'étiez pas là le Dr Prlic

  8   nous a fait une déclaration, et à un moment donné, il a dit ceci qui m'a

  9   posé problème et j'attendais qu'il y ait un témoin pour vérifier cela.

 10   Le Dr Prlic nous a indiqué qu'il y avait par rapport à la propriété des

 11   appartements un droit social, c'est-à-dire j'ai cru comprendre que la

 12   Yougoslavie, qui était au départ un pays à système communiste, il n'y avait

 13   pas un droit de propriété. Les appartements étaient donnés par la puissance

 14   publique aux individus qui occupaient un appartement et la propriété était

 15   une propriété sociale, et j'ai cru comprendre, au travers des propos du Dr

 16   Prlic qu'en Croatie dans la République de Croatie, il y avait un system un

 17   peu différent où j'ai cru comprendre que les Croates avaient la propriété

 18   de leurs appartements.

 19   Alors, pouvez-vous m'éclairer sur le système qui prévalait avant

 20   l'éclatement de l'ex-Yougoslavie ? Est-ce que vous, par exemple, étiez

 21   propriétaire de votre appartement car il y avait un acte de vente ou un

 22   acte de propriété authentifié par un auteur; ou bien, la propriété était

 23   collective, vous aviez un appartement qui vous était donné par la

 24   municipalité pour l'occuper, et puis la municipalité pouvait donner votre

 25   appartement à quelqu'un d'autre, et puis au moment de l'éclatement de l'ex-

 26   Yougoslavie, à ce moment-là, les Etats ont basculé dans un système

 27   d'économie libérale avec un droit de propriété sur les appartements ?

 28   Alors, pouvez-vous m'éclairer sur ce point très particulier de la propriété

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  1   de son appartement qui peut concerner évidemment les personnes déplacées ou

  2   réfugiées ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, pour autant que je

  4   comprenne cette question et dans la mesure où je connais les choses dans

  5   l'ex-Yougoslavie, y compris en Croatie, il a existé ce qu'on appelle la

  6   propriété sociale. Mais la propriété privée existait elle aussi, certes il

  7   y avait des limitations à la taille, à l'étendue de la propriété privée. On

  8   pouvait être propriétaire d'un appartement et également propriétaire d'une

  9   maison, tel était mon cas, c'est-à-dire mes parents ils avaient leur propre

 10   maison. Si l'appartement avait été mis à la disposition par la municipalité

 11   et par une entreprise ou par une institution, alors, l'appartement faisait

 12   partie de la société de la propriété sociale, comme on appelait, et

 13   l'individu et la famille, qui se sont vus attribuer ces appartements,

 14   pouvaient utiliser -- avaient le droit du fruit sur cet appartement et

 15   étaient tenus de se servir de l'appartement conformément à un système de

 16   conditions.

 17   En revanche, s'il ne respectait pas ces conditions, à ce moment-là, les

 18   instances du pouvoir ou ceux qui avaient initialement mis l'appartement à

 19   la disposition, pouvaient ré attribuer le logement en question à quelqu'un

 20   d'autre mais, pour autant que je le sache, la propriété sociale était

 21   pratiquement traitée comme la propriété privée. C'est comme ça que les gens

 22   l'entendaient.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, merci pour cette précision.

 24   Maître Karnavas.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Q.  Bien. Examinons le document suivant 1D 02606, il compte plusieurs

 27   documents. Examinons-le d'abord, examinez la version originale en croate.

 28   Première question : est-ce que vous reconnaissez ce document ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et pour qu'est-ce qu'il représente ?

  3   R.  C'est un tableau qui constitue un rapport ou une partie d'un rapport

  4   portant sur la manière et l'endroit où le bureau des réfugiés commandait et

  5   distribuait les poêles à combustible, poêles à chauffage. Il fallait

  6   s'approvisionner en poêles, face à la venue de l'hiver.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir une date parce que je

  8   ne suis pas parvenu à trouver une date ?

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Je n'ai pas terminé. Je n'ai pas encore posé

 10   les bases.

 11   M. SCOTT : [interprétation] Merci.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne veux pas ici lui rabattre le caquet,

 13   mais nous sommes professionnels.

 14   M. SCOTT : [interprétation] Lorsqu'on soumet un document à une partie en

 15   général, on donne aussi la date.

 16   M. KARNAVAS : [interprétation]

 17   Q.  Pour vous, qu'est-ce qu'il représente ce document, Monsieur le Témoin ?

 18   R.  Il m'est arrivé de recevoir ce type de rapports, donc, je le connais.

 19   Q.  Pour répondre à la question posée par M. le Procureur, est-ce que vous

 20   savez quand il a été établi ce document ? Je ne veux pas vous guider dans

 21   votre réponse mais vous verrez, à la fin des dates, donnant quelques

 22   indices à propos de certains incidents dont il est fait état ici.

 23   C'était la version européenne de donner les dates ici qui sème la

 24   confusion.

 25   R.  Je crois que c'est ce que nous avons fait avant l'arrivée de l'hiver

 26   1992 ou en hiver 1992.

 27   Q.  Bien. Prenons -- ah, en passant, si nous examinons un document, nous

 28   voyons la date, 1992, c'est assez clair. Nous avons une liste - je pense

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  1   que c'est à la quatrième page - on voit plusieurs hôtels qui sont

  2   mentionnées. Pourriez-vous nous dire où se trouvent ces endroits ?

  3   R.  Il s'agit toujours des choses situées sur la côte. Il s'agit de Split,

  4   Makarska, sauf un inter qui est dans les environs de Zagreb.

  5   Q.  Si vous passez à la page suivante --

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que je peux demander une

  7   précision ? Merci. Pour être précis, je pense qu'il y a une erreur au

  8   niveau de la traduction. En effet, au nom 9, pour Gortan, on dit 4 janvier

  9   1992. C'est assez surprenant parce que tout le reste parle de l'hiver 1992,

 10   1993, et si vous voyez la version croate, vous verrez qu'en fait, qu'il ne

 11   faut pas lire 1992 mais 1993. C'est une petite erreur, alors que nous

 12   voulons que tout soit précis, n'est-ce pas ?

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 14   Q.  Page suivante, où on parle : "Adaptation des installations, Haut-

 15   commissariat aux réfugiés;" est-ce que vous voyez ce passage ?

 16   R.  Je vois.

 17   Q.  Et vous voyez que toutes les dates concernent l'année 1992, n'est-ce

 18   pas ? Au regard du numéro 8, on voit "Gasinci;" est-ce qu'il s'agit de

 19   l'île de Gasinci ?

 20   R.  Non. Non, ce n'est pas une île Gasinci, c'est le centre de réfugiés

 21   près de Djakovo.

 22   Q.  D'accord --

 23   R.  Nous voyons ici que le HCR a adapté l'ex-centre militaire pour le

 24   stationnement des hauts officiers pour le transformer et en faire un centre

 25   de Réfugiés.

 26   Q.  C'est à propos de cet endroit que Mme Azra Krajsek disait qu'il y avait

 27   des canons qui étaient ou des armes qui étaient dirigées sur ce lieu ?

 28   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, je fais objection face à ce genre

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  1   de commentaire. Le témoin ne le sait pas et ne sait que ce que Me Karnavas

  2   lui dit, donc, il n'a pas d'information sur ce qui s'est passé ou ce qui ne

  3   s'est pas passé. Et j'insiste, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  4   c'est la raison pour laquelle je ne cesse d'intervenir à propos de

  5   commentaires, d'argumentations, de qualifications fournies par l'avocat de

  6   la Défense. Ce n'est pas ce qui se fait dans le système de "common law". On

  7   pose une question, parce qu'ici, nous sommes à l'interrogatoire principal,

  8   on ne peut pas poser de question directrice. On pose une question qui est

  9   générale, qui ne l'a pas suggéré une réponse. C'est cela que nous avons

 10   besoin de rien plus.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais retirer la question. Nous verrons ce

 12   document la semaine prochaine avec le témoin suivant; en effet, il y a des

 13   documents qui se trouvaient dans la liasse que nous avons prévue, que nous

 14   avions présentée ou préparée à l'attention de ce témoin nous allons voir

 15   des griefs de Krajsek et de Turkovic, qui disait qu'il y avait des armes

 16   qui étaient dirigées sur ces installations.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que ce n'est pas un peu

 18   étrange comme argumentaire ? Vous justifiez votre intervention par ce que

 19   vous allez faire la semaine prochaine, alors que vous parlez à ce témoin,

 20   et vous lui demandez de faire un commentaire sur ce qu'a dit un autre

 21   témoin. A mon avis, il n'était pas là lorsque cet autre témoin a déposé, je

 22   ne sais pas s'il en a vu le compte rendu. Je pense que l'objection était

 23   valable.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] Permettez-moi de répondre.

 25   Je ne faisais pas valoir de conclusion juridique ici, je réagissais

 26   simplement à ce que disait l'Accusation.

 27   Deuxièmement, nous avons discuté de cet incident hier. Hier, j'ai renvoyé

 28   le témoin à certaines parties de la déposition de ce témoin. Il avait

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  1   indiqué hier que dans ce camp qui avait un centre du Haut-commissariat;

  2   jamais quand il n'y est allé, il était là, il occupait ses fonctions

  3   jusqu'en 1993, que jamais il n'a vu d'arme qui était dirigée sur le

  4   bâtiment. C'est ce que je dis.

  5   Alors, ici, nous parlons de 1992 parce qu'on dit que ce sont deux camps qui

  6   ont fait l'objet de protestation alors qu'il en avait près de 600 : qui

  7   sont ces réfugiés, d'où ils viennent, qui sont-ils ce jour-là ? C'est ça

  8   que je fais valoir.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Une fois de plus, malheureusement, le problème

 10   perdure. Maintenant, Me Karnavas témoigne, il dit : il n'y a eu que deux

 11   griefs sur 600 camps. Nous ne savons pas. Il n'y a pas de preuve.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Hier, on a dit qu'il y en avait 596.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Le témoin n'était même pas là entre mars 1993

 14   et fin 1995, alors, à ma connaissance -- à sa connaissance, il ne s'est

 15   jamais rien passé en Croatie. Puisque j'y n'étais pas. Pour ce qui est de

 16   ce que je sais. Et le témoin ne sait rien de tout cela.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Je passerais à autre chose.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, une intervention de ma part sur

 19   cette question. Le problème que vous posez est le suivant : il y a pour des

 20   réfugiés un lieu qui va accueillir des réfugiés. Ce lieu apparemment

 21   recevait avant des officiers supérieurs, donc, c'était un lieu à

 22   connotation militaire. Partant de là, peut-être -- peut-être qu'il y avait

 23   dans ce lieu des armes, des canons. Je ne sais quoi. Et partant de là, vous

 24   essayez d'éclaircir ce qu'a pu dire un autre témoin. Alors, il y a deux

 25   systèmes en cause. Dans mon pays, par exemple, un avocat pourrait dire au

 26   témoin présent : Monsieur le Témoin, un autre témoin a dit que, dans ce

 27   lieu, il y avait des armes dirigées vers le camp de réfugiés. Vous êtes

 28   d'accord, vous contestez, et cetera, et ça serait possible de poser cette

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  1   question.

  2   Dans le système "common law", M. Scott nous dit : non, on ne doit pas

  3   le faire. Je lui en donne acte. Mais dans le système de ce Tribunal qui est

  4   un système mixte, parfois il y a les deux systèmes qui peuvent à ce moment-

  5   là se télescoper, d'où incident de procédure. Voilà ce que je voulais dire

  6   mais comme vous passez maintenant à un autre sujet, je vous redonne la

  7   parole. 

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, mais je

  9   ne suis pas d'accord avec ce que dit M. Scott, lorsqu'il a insinué que je

 10   ne mène pas bien cet interrogatoire principal. Enfin, moi, je ne sais pas

 11   ce qu'il en est pour lui mais chez moi, on peut parfaitement dire à un

 12   témoin ce qu'a dit à un autre témoin pour autant que la base ait été

 13   établie, s'il y a une connaissance factuelle qui permet au témoin de

 14   répondre à la question que je pose.

 15   Q.  Vous avez été à Gasinci, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, je suis allé souvent à Gasinci.

 17   Q.  Regardons la date, on voit ici 2 décembre 92. Alors, dites-moi : est-ce

 18   qu'à ce moment-là, il y avait des personnes déplacées, des réfugiés qui

 19   séjournaient à cet endroit ?

 20   M. SCOTT : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir la date de la visite du

 21   témoin parce qu'il a parlé des visites en 1991, 1992 -- non, non, c'est

 22   très sérieux, il faut avoir une date. Il faut savoir parce que ce qui s'est

 23   passé en 1991 peut être sans le moindre intérêt par rapport à ce qui s'est

 24   passé en 1993.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Nous l'avons déjà dit. Le témoin a exercé

 26   ses fonctions lorsqu'il se rendait à tel ou tel endroit. La date de cette

 27   visite n'a aucun intérêt. Ce qui est important c'est que : est-ce qu'il

 28   savait s'il y avait telle ou telle personne installée lorsqu'il y a

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  1   effectué cette visite ? C'est la base, alors, je ne vois pas pourquoi

  2   l'Accusation s'énerve. Franchement, je ne vois pas.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense qu'ici, vous avez raison et

  4   moi, je rejetterai l'objection.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation]

  6   Q.  Alors, regarde vos fonctions, est-ce que vous savez s'il y avait

  7   quelqu'un qui se trouvait dans ces lieux à ce moment-là ?

  8   L'INTERPRÈTE : M. Scott, apparemment, hors micro : à quel moment.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Mais regardez, je sais que c'est une date à

 10   l'européenne, on voit 2.12.92, et vous avez vos lunettes quand même, vous

 11   devez le voir.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Je m'oppose à ce genre de commentaire

 13   personnel, c'est vraiment hors de proto. C'est une attaque et je pense que

 14   la Chambre ne saurait l'autoriser. Il faudrait avertir -- admonester Me

 15   Karnavas.

 16   Oui, bien sûr que je peux lire la date; excusez-moi, Monsieur le Président,

 17   je voudrais que ceci soit inscrit au compte rendu. Si M. l'avocat dit qu'il

 18   fait référence qu'à cette date-ci, 2 décembre 1992, et ici, on ne parle de

 19   rien d'autre parce que ce n'est pas toujours clair, à ce moment-là, pas de

 20   problème.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais ici, c'était limpide parce que

 22   Me Karnavas a commencé sa question en faisant état de cette question.

 23   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, je ne suis pas parfait. Ce n'est

 24   pas comme ça que j'avais compris.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation]

 26   Q.  A votre avis, est-ce qu'il y avait quelqu'un qui se trouvait dans ces

 27   lieux à cette date ? Et s'il y avait quelqu'un, qui était ces personnes ?

 28   R.  Il y avait à la fois des personnes déplacées, des réfugiés à ce moment-

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  1   là.

  2   Q.  Combien de fois êtes-vous allé en visite vers cette période-là en ces

  3   lieux ?

  4   R.  A l'époque, je suis allé peut-être trois ou quatre fois. Je suis allé

  5   pour voir comment on était en train de mettre en service l'installation, ce

  6   qui se produisait. Ça faisait partie de mon travail, de faire le tour de

  7   ces endroits et de voir comment il fonctionnait. Encore une fois, il n'y

  8   avait pas d'armement là-bas. Il n'y en avait pas du tout. Certes, ce site

  9   avait été utilisé par l'ex-armée, mais cela ne signifiait pas qu'ils aient

 10   laissé des armes sur place quand ils se sont retirés. Cette armée n'a

 11   jamais laissé d'armes derrière elle, du moins c'est quelque chose qu'on

 12   sait.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, on risque

 14   de recevoir la critique de la Chambre, je reviens sur ce qu'il dit, il dit

 15   qu'il est allé trois ou quatre fois, mais quand, de quelle période parlons-

 16   nous ? Décembre 1992, c'est à ce moment-là, ou est-ce que c'est sur une

 17   période de trois ans ? Car je suis désolé mais je dois demander des dates.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous êtes interrogé sur ce qui

 19   s'est passé il y a 15 ans; moi-même, j'aurais des difficultés de dire tel

 20   mois j'étais là. Bon, mais vous avez peut-être une mémoire supérieure à la

 21   mienne. Pouvez-vous, si vous en êtes capable, dire à quelle date vous avez

 22   fait cette visite ou vous ne pouvez rien dire, parce que je comprendrais

 23   parfaitement ? 

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Il me serait très difficile de dire quelles

 25   sont les dates où je me suis rendu. Mais il est certain que j'y suis allé

 26   quand il y avait des choses importantes qui se produisaient. Des groupes

 27   importants arrivaient, nous faisions des interventions importantes ou des

 28   délégations du HCR se rendaient sur place, à ce moment-là, j'y allais, moi

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  1   aussi. Je pense qu'en tout c'était trois, quatre, voire cinq fois en 1992

  2   que je me sois rendu à Gasinci. Les dates exactes, je ne pourrai pas les

  3   retrouver sur-le-champ.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation]

  5   Q. Une dernière question à propos de ce document : tout en haut, on voit :

  6   "Transformation des installations au HCR des Nations Unies." Ces chiffres,

  7   que représentent-ils exactement ? Qu'est-ce que ça veut dire ? On pourrait

  8   peut-être regarder la page suivante pour le dire.

  9   R.  Ces chiffres montrent les dates de signatures de contrats et montrent

 10   aussi les montants des sommes dépensées en application de ces contrats-là,

 11   combien de moyens il reste et quels sont les délais d'achèvement ou de

 12   finalisation des travaux d'adaptation. Le financier de ce projet se

 13   trouvait être le HCR.

 14   Q.  Très bien. Hier, nous avons vu un document qui porte la cote 1D 2609,

 15   et il s'agissait d'un accord, d'une lettre visant un accord mutuel. Nous

 16   avons vu que le bureau du ODPR, bureau de l'office des personnes déplacées

 17   et des réfugiés, c'est un rapport d'état financier, des contributions

 18   reçues. Donc, oui, effectivement, cette lettre est quelque peu différente,

 19   mais j'aimerais vous demander les fonds qui ont été reçus par le HCR des

 20   Nations Unies. Dites-moi si votre bureau ait été -- avait la responsabilité

 21   de dire de quelle façon cet argent a été déplacé et où, de rendre des

 22   comptes quant à la dépense de cet argent ?

 23   R.  Oui, le bureau assumait des responsabilités à cet égard et pour ce qui

 24   est de savoir comment et où l'argent allait être dépensé, ce sont des

 25   instances conjointes qui en décidaient. Le bureau avait un département

 26   chargé de la coopération internationale qui coopérait avec le HCR, qui

 27   avait à son tour des personnes chargées de tout ceci et nous présentions

 28   des rapports concernant ce qui avait été fait, ce qui avait été dépensé.

Page 27936

  1   Q.  Fort bien. Prenons maintenant le document 1D 01294, c'est le document

  2   qui suit. Ce document fait référence au Dr Bisara Turkovic, qui est nommée

  3   ambassadeur de la République de Bosnie-Herzégovine pour la République de

  4   Croatie. Dites-nous si vous connaissez cette personne, qui est une femme,

  5   en fait ?

  6   R. Je l'ai rencontrée à plusieurs reprises à l'occasion de réceptions

  7   variées.

  8   Q.  Très bien. Est-ce que vous avez eu des contacts officiels avec elle

  9   alors qu'elle était ambassadeur - et maintenant je parle pour donner le

 10   cadre temporel - donc, à partir du moment -- jusqu'au moment -- enfin,

 11   pendant que vous étiez employé au sein du bureau du ODPR, c'est-à-dire en

 12   1993 ?

 13   R.  Non, j'ai eu très peu de contact avec l'ambassadrice.

 14   Q.  Très bien.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Pourquoi vous avez eu très peu de contact ? Je vois

 16   qu'elle est nommée en janvier 1993. Bon, je sais que vous étiez en poste

 17   jusqu'au mois de mars, donc, il y avait au moins tout le mois de février.

 18   S'il y avait à cette époque des réfugiés en provenance de Bosnie-

 19   Herzégovine, ne devait-elle pas prendre les contacts nécessaires pour

 20   régler les problèmes ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose que cela devait être le cas -- ou

 22   plutôt, ça faisait partie de son mandat que de prendre soin de ses

 23   citoyens. On s'adressait à moi fort peu. J'ai rencontré cette dame une fois

 24   ou deux fois. Nous avons eu des échanges décents, nous avons procédé à des

 25   échanges de propos courtois, quelques informations, mais sans plus.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation]

 27   Q.  Pour donner suite à quelque chose que vous avez dit hier, le Dr Rebic

 28   était votre supérieur, n'est-ce pas ?

Page 27937

  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  Eu égard à la position qu'il occupait, pourriez-vous nous dire s'il

  3   aurait été peut-être plus normal qu'elle-même ou son représentant le

  4   contact lui étant donné que vous étiez le numéro deux, si vous voulez, et

  5   que vous vous occupiez des affaires quotidiennes ?

  6   R.  Lui, il représentait le bureau et il est tout à fait naturel que les

  7   représentants des autres Etats viennent à le contacter en premier lieu.

  8   Mais qu'on lui ait montré quoi que ce soit concernant ce qu'il convient de

  9   faire, je l'aurais su parce qu'il m'aurait transmis le devoir à réaliser.

 10   Q.  Fort bien. Dites-nous : où était situé votre bureau par rapport au

 11   bureau du Dr Rebic ?

 12   R.  Nous étions dans le même bâtiment, lui était au premier étage, moi,

 13   j'étais au rez-de-chaussée.

 14   Q.  Fort bien. Fort bien. Merci.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Je souhaiterais que l'on prenne le document

 16   1D 06207 [comme interprété]. Je répète 1D 02607, un document qui porte la

 17   date du 3 février 1993.

 18   Q.  Et j'aimerais avoir une précision ici. On dit : "Une assistance, une

 19   aide financière donnée une fois pour les réfugiés de la BiH pour

 20   s'organiser." Pourriez-vous nous donner un commentaire rapide pour me dire

 21   ce que ceci veut dire exactement ? Je sais que vous en avez parlé hier mais

 22   nous avions parlé de la loi à savoir si des réfugiés effectivement

 23   s'occupaient ou si le gouvernement croate s'occupait des réfugiés, des

 24   réfugiés musulmans, et cetera, pourriez-vous nous dire ce que ce document

 25   veut dire exactement ?

 26   R.  Il s'agit d'instruction à l'intention de bureaux locaux et régionaux,

 27   centres chargés des activités sociales et qui s'occupaient de réfugiés

 28   notamment pour ce qui est de savoir comment distribuer l'aide financière

Page 27938

  1   destinée aux réfugiés originaires de la Bosnie-Herzégovine, et ce,

  2   notamment les réfugiés qui vivaient de façon autonome, qui étaient

  3   installés non pas dans des centres d'accueil mais qui étaient quand même

  4   recensés en Croatie comme était des réfugiés. Pour ce qui est de ceux qui

  5   étaient donc recensés et vivaient dans des centres d'accueil collectifs,

  6   les frais étaient pris en charge par nous-mêmes. Pour ceux des réfugiés qui

  7   vivaient de façon autonome, les frais étaient pris en charge ça et là au

  8   travers d'aide pécuniaire allouée de temps en temps et ceci et destinée aux

  9   réfugiés originaires de Bosnie-Herzégovine.

 10   Q.  Très bien. Maintenant, prenons le paragraphe numéro 4 dans votre

 11   déposition d'hier. Vous avez parlé des centres et des bureaux régionaux et

 12   de la façon dont on faisait des rapports, dont on gardait les gens au

 13   courant de ce qui se passait et des données du recensement; pourriez-vous

 14   me dire ce que ceci veut dire ?

 15   R.  Ce passage parle de la façon dont les renseignements devaient revenir

 16   vers l'administration depuis le terrain. Le

 17   Dr Kurent était chargé du département international de ce bureau et c'est

 18   elle qui coopérait de façon étroite avec le HCR. D'une certaine façon,

 19   c'était elle qui était notre "house" ministre, le ministre à domicile.

 20   Q.  Très bien. Donc, les données provenaient des centres et étaient

 21   envoyées aux bureaux régionaux, et par la suite, ils étaient envoyés ou

 22   transmis au bureau chef; est-ce que j'ai raison de dire cela ? Est-ce que

 23   c'est exact ?

 24   R.  [aucune interprétation]

 25   Q.  Très bien.

 26   Alors, prenons le document suivante 1D 02283, qui porte la date du 25

 27   février 1993.

 28   Nous pouvons voir ici qu'il s'agit d'un protocole sur la coopération entre

Page 27939

  1   le gouvernement de la République de Croatie et le gouvernement de la

  2   République de Bosnie-Herzégovine aux fins d'établir des centres de

  3   Logistique dans la République de Croatie pour la réception et la

  4   distribution d'aide humanitaire envoyée à la République de Bosnie-

  5   Herzégovine.

  6   Voici maintenant ma première question : j'aimerais savoir si vous étiez au

  7   courant de ce protocole.

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française corrige au sujet de

  9   "house minister," c'est "House Minister," ministre des Affaires étrangères.

 10   R.  J'étais au courant de son existence.

 11   Q.  Fort bien. Et maintenant, pour revenir à la page -- enfin, page 2, nous

 12   pouvons voir que le Dr Mate Granic c'est la personne qui a fait en sorte

 13   qu'au début, vous étiez impliqué -- en fait, vous travaillez avec lui ou

 14   pour lui ?

 15   R.  [imperceptible]

 16   Q.  Très bien. Maintenant, est-ce que -- d'une quelque façon que ce soit,

 17   est-ce que vous avez pris part à la mise en place de ce protocole ? On

 18   parle du 25 février, et vous n'étiez pas -- cela ne faisait pas très

 19   longtemps que vous étiez là, vous êtes en train de quitter le bureau du

 20   ODPR pour prendre votre place au parlement.

 21   R.  A l'époque, peu d'organisations souhaitant aider la Bosnie-Herzégovine

 22   se déplaçaient directement vers la Bosnie-Herzégovine. Nous avions -- il

 23   était plus facile pour nous d'amener -- d'acheminer cette aide jusqu'à la

 24   Croatie, et ensuite, en coopération avec les organisations croates ou -- et

 25   Bosno-Herzégoviennes ou gouvernement respectif, on transportait

 26   l'assistance vers la Bosnie-Herzégovine.

 27   Parce qu'à l'époque, la guerre faisait rage en Bosnie-Herzégovine et bon

 28   nombre de compagnies de transport ne voulaient pas y aller, exception faite

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  1   des militaires, à savoir de la FORPRONU, mais les compagnies civiles très

  2   rarement voulaient y aller ou alors dans des régions très limitées

  3   seulement. Donc, c'est pourquoi Sarajevo avait tant de besoin ce qui fait

  4   que Sarajevo avait besoin d'avoir des centres logistiques en Croatie qui

  5   étaient si essentiellement à Split et à Zagreb. Notre mission d'après les

  6   instructions du gouvernement consistait à les aider, à trouver des

  7   entrepôts et ces entrepôts là. On leur a -- on les a fournis à Zagreb du

  8   moins. J'ai pris part moi-même pour ce qui est de la foire de Zagreb. Il y

  9   a des halls énormes que nous avons transformés en entrepôts pour leur --

 10   les confier et c'est de là, de façon autonome et libre, qu'ils avaient

 11   organisé la distribution de produits là où ils avaient estimé ou jugé

 12   nécessaire que cela se fasse.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Pourrait-on maintenant prendre le document

 14   qui suit, 1D 027 --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi.

 16   Monsieur le Témoin, là, vous venez de dire quelque chose qui me paraît

 17   avoir beaucoup d'importance. A partir d'un document, vos coopérations entre

 18   la Bosnie-Herzégovine et la Croatie, il apparaît que des centres ont été

 19   mis en place pour recevoir des réfugiés en provenance de la Bosnie-

 20   Herzégovine. Partant de là, pourquoi ce système -- il semblerait que c'est

 21   lié à l'action des Serbes qui a pu amener des déplacements de personnes ce

 22   qui tomberait à dire au moins pendant une certaine période, il y avait un

 23   accord entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine pour que la Croatie

 24   reçoive chez elle des réfugiés et que c'est en bonne intelligence que le

 25   système fonctionnait.

 26   Est-ce que j'ai tort en tirant cette conclusion provisoire ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, si vous parlez de ce

 28   protocole-ci, celui-ci se rapporte à la logistique et nous avons eu

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  1   d'autres protocoles de signés concernant l'accueil et concernant le retour

  2   des réfugiés vers la Bosnie-Herzégovine, c'était des protocoles signés

  3   entre les deux Etats. Ce protocole-ci se rapporte à la mise en place de

  4   centres logistiques en Croatie mais centres qui seraient sous contrôle et

  5   administration de représentants du gouvernement de Sarajevo.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, si je comprends bien, il y avait un accord

  7   pour que le gouvernement de Sarajevo contrôle la mise en place de ces

  8   centres.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Juge.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et, alors, cette coopération, à votre

 11   connaissance, a duré jusqu'à quand ? Jusqu'à quand il y a eu une entente

 12   entre les deux pays pour que ça fonctionne le mieux possible ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Toute la durée de la guerre cet accord a été

 14   mis en œuvre. Et ces centres aidaient également au retour des gens. Sur un

 15   plan opérationnel, je crois que c'est intervenu jusqu'en 1997.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : -- pendant toute la durée de la guerre. Alors, moi,

 17   je ne sais pu quelle guerre parce que des guerres il y en a eu de

 18   nombreuses. Alors, pouvez-vous être précis ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux être plus précis, Monsieur le Juge. Du

 20   point de vue humanitaire, cette guerre n'a été qu'une seule guerre. Pour ce

 21   qui est de l'autre signification, on pourrait répartir cela sur plusieurs

 22   volets. La mise en place de ces centres logistiques va et court jusqu'à la

 23   fin des opérations de combat en 1995. C'est de cette guerre-là que je

 24   parle.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, pour essayer de bien comprendre, est-ce à

 26   dire que, pendant une offensive de la BiH dans la vallée de Lasva, par

 27   exemple, en Bosnie centrale, alors qu'il y avait donc des combats qui se

 28   déroulaient, cet accord entre la République de la Bosnie-Herzégovine et la

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  1   Croatie fonctionnait parfaitement ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Ça fait partie du

  3   paradoxe que nous avons connu, et c'était le côté amer de la pilule. Les

  4   gens ne faisaient des reproches parce que nous avions parfois des

  5   situations où les militaires passaient leurs vacances avec leurs familles

  6   respectives qui étaient réfugiées et à voir et écouter les informations, il

  7   y avait une partie qui fêtait, qui célébrait, et l'autre qui était en

  8   larmes ou en deuil. Et c'était là une chose -- ou un temps -- des temps

  9   très durs, très durs.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation]

 11   Q.  Très bien. Alors, pour enchérir, vous parlez de "soldats." D'où

 12   venaient ces soldats ? Où allaient-ils ? D'où provenaient-ils ? Je ne veux

 13   pas vous poser de question directrice; dites-le-nous simplement, s'il vous

 14   plaît. Donnez-nous un exemple pour illustrer cela, je vous prie.

 15   R.  Comme vous le savez, les soldats pouvaient avoir un week-end, une

 16   permission, des vacances, et prenez-le, comme vous voulez, mais ils

 17   venaient de la Bosnie centrale, essentiellement vers la Dalmatie, et s'ils

 18   passaient ce week-end de congés, ils le passaient avec leurs familles qui

 19   étaient probablement là au titre de réfugiés.

 20   Pendant lequel il était difficile de traverser les lignes du côté des

 21   positions des forces serbes, c'était plutôt rigide. Mais les lignes croates

 22   et bosniennes étaient comme ci comme ça, c'était rigide des fois et c'était

 23   plutôt souple. Il y avait des voies de passage ou lignes ou pas, mais on

 24   pouvait quand même passer. Et je passais de la sorte avec mes convois, cela

 25   fait que les soldats pouvaient quand même arriver. Et il y a eu des

 26   situations où véritablement et des rapports ont été faits à ce sujet, il y

 27   eu des situations émotionnelles lourdes d'affectifs parce que dans un même

 28   petit village ou une [imperceptible] localité; on avait souvent les uns et

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  1   les autres. Toutes les obligations qui étaient celles du gouvernement et

  2   qui étaient les nôtres, nous les avons réalisées, le protocole a été mis en

  3   œuvre. Tous les centres logistiques étaient en état de fonctionnement, les

  4   approvisionnements de la Bosnie-Herzégovine passaient par la Croatie, et ça

  5   se passait pratiquement en passant par ou en empruntant un pont -- un seul

  6   pont --

  7   Q.  En fait, je vous arrête ici. Je vous ai posé une question très concrète

  8   et pourriez-vous, je vous prie, nous donner une réponse concrète aussi ?

  9   La question est la suivante : vous avez parlé de "soldats." Et j'aimerais

 10   savoir si vous parlez de soldats musulmans qui tuaient les Croates en

 11   Bosnie-Herzégovine pendant les jours de la semaine et ensuite les week-ends

 12   et allaient rendre visite à leurs familles, par exemple, à Makarska pendant

 13   le week-end. Est-ce que vous parlez de cela ? Est-ce que vous voulez dire

 14   que c'est un exemple ?

 15   R.  Je ne sais pas si ceux qui avaient tué d'autres personnes venaient

 16   aussi - ils ne venaient sûrement pas en uniforme - mais c'était sûrement

 17   des soldats. Les militaires - parce qu'une fois revenus de permission ils

 18   reprenaient leurs fonctions - mais ils passaient en tant que citoyens,

 19   parce que la Croatie n'avait pas de régime de visa avec la Bosnie-

 20   Herzégovine, et en sa qualité de terre d'asile en application des

 21   conventions internationales, elle ne pouvait pas l'avoir non plus.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : -- détail qui peut avoir une importance, ces soldats

 23   qui venaient rendre visite sur le sol croate aux membres de leur famille,

 24   ils venaient en costume cravate, ou en jeans, ou bien, ils venaient avec

 25   leur tenue de camouflage, leur tenue militaire ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge, ils ne pouvaient pas

 27   venir en uniformes. Ils pouvaient venir en vêtements civils; cependant, il

 28   s'agit de gens originaires de petites localités où tout le monde se

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  1   connaît. Et les gens du cru les reconnaissent parce que la Bosnie centrale

  2   c'est une petite région. Les gens se connaissent et il n'était pas du tout

  3   difficile de reconnaître les gens qui venaient de la même localité.

  4   Mis à part ce fait, ces centres logistiques avaient en permanence des

  5   missions de représentation ou des personnalités officielles qui

  6   accueillaient ces convois de Bosnie-Herzégovine et il y avait également des

  7   militaires parmi eux.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation]

  9   Q.  Il y a une autre question sur le sujet. Lorsque nous parlons de

 10   soldats, nous parlons des soldats de quelle armée ?

 11   R.  Ça pouvait être les soldats de l'armée de la Bosnie-Herzégovine ou

 12   alors des soldats du Conseil croate de la Défense.

 13   Q.  En d'autres mots, un soldat de l'armée de l'ABiH pouvait enlever son

 14   uniforme et traverser la frontière, passer un week-end agréable, rendre une

 15   visite à sa famille, retourner en Bosnie; est-ce que c'est bien de cela que

 16   l'on parle, en Bosnie centrale ?

 17   R.  Certains pouvaient le faire -- pas tous, mais certains, oui.

 18   Q.  Très bien. Prenons, maintenant, le document 1D 02778. Je répète, 1D

 19   02778. Au bas de la page, nous voyons que ce document émanant du bureau du

 20   ODPR, du mois de février 1993, à Zagreb. Monsieur, reconnaissez-vous ce

 21   document ?

 22   R.  [aucune interprétation]

 23   Q.  Et que représente ce document, sans entrer dans les

 24   détails ?

 25   R.  Il s'agit d'une feuille détachée d'un appel, d'une information

 26   distribuée à l'intention de toute personne désireuse d'apporter de l'aide.

 27   Q.  Très bien. Je souhaiterais maintenant appeler l'attention des parties

 28   et des Juges de la Chambre sur le paragraphe 2, eu égard à la discussion

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  1   que nous avons eu hier et aujourd'hui concernant l'aide donnée aux réfugiés

  2   de Bosnie-Herzégovine. On peut le lire ici : "Donc, maintenant, en février,

  3   il y a environ 400 000 réfugiés de Bosnie-Herzégovine enregistrés en

  4   Croatie, et 250 000 personnes déplacées. Personnes provenant des zones

  5   occupées, ravagées par la guerre en Croatie, c'est-à-dire que la Croatie

  6   est responsable de l'accueil de plus de 650 000 personnes qui ont été

  7   accueillies dans les hôtels, dans les maisons privées, dans les écoles, les

  8   maisonnettes et même dans les wagons des trains."

  9   Maintenant, je vous pose la question : est-ce qu'il s'agit bien d'une

 10   déclaration précise ? 

 11   R.  Cette déclaration est tout à fait exacte.

 12   Q.  Quel était le but de ce dépliant ? Nous avons vu, bien sûr, que l'aide

 13   -- qu'on a demandé aux personnes de fournir l'aide, n'est-ce pas ?

 14   R.  On a demandé aux gens de faire des donations, de venir en aide à

 15   d'autres, et on cherchait à développer la conscience chez les gens sur la

 16   nécessité d'aider autrui parce qu'autrement, nous ne pourrions jamais

 17   assumer ou porter tout ce fardeau. Il fallait, pour cette raison-là,

 18   informer constamment le public et encourager chez les gens la conscience à

 19   inciter les gens à avoir conscience de la nécessité d'aider les réfugiés --

 20   ou plutôt, de nous aider nous-mêmes à survivre ensemble ces temps durs.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, le chiffre de

 22   650 000 personnes est un chiffre énorme, et on voit que ces personnes ont

 23   été réparties dans plusieurs endroits : hôtels, écoles, et cetera, et

 24   notamment résidences privées, maisons. A votre connaissance, avez-vous eu

 25   vent du fait que des Croates auraient reçu à leur propre domicile dans leur

 26   propre maison des Musulmans qu'ils auraient hébergés pendant ces temps dits

 27   de guerre ? Est-ce que vous avez quelques exemples à nous donner ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, il y a beaucoup

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  1   d'exemples de ce genre. Dans les villes et dans les villages, les gens

  2   accueillaient des réfugiés chez eux, plus de la moitié de ces réfugiés

  3   n'étaient pas accueillis dans des bâtiments organisés à cette fin mais ils

  4   ont été accueillis chez des gens, chez des particuliers. Ces particuliers

  5   les ayant reçus sans avoir l'obligation de le faire. Les gens les ont reçus

  6   parce qu'ils avaient envie de les recevoir. D'abord, il y a les membres de

  7   la famille, les amis recevaient leurs amis. Mais bon nombre de personnes,

  8   bon nombre dis-je était disposé à accueillir ces gens qui étaient tout

  9   simplement arrivés et qui étaient dans le besoin. Ce type d'exemple, il y

 10   en a eu vraiment beaucoup.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Sur le plan financier, si une famille croate

 12   recevait, par exemple, des réfugiés musulmans, qui étaient totalement

 13   démunis, qui n'avaient pas d'argent, rien, ils étaient arrivés avec leurs

 14   simples valises sur les lieux; est-ce que cette famille croate pouvait

 15   recevoir une aide financière de la part de la municipalité voire du

 16   gouvernement pour contribuer à nourrir ces réfugiés musulmans ? Est-ce

 17   qu'il y avait un système de protection sociale de mise à disposition de

 18   moyens financiers pour faire face à ce type de situation ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces familles pouvaient recevoir de l'aide s'il

 20   y avait des moyens disponibles. Cette aide n'était pas attribuée à titre

 21   régulier, donc, ce n'était pas des versements réguliers ou permanents mais

 22   c'était à titre ponctuel qu'on pouvait recevoir ce type d'assistance. Le

 23   système qui a relativement bien fonctionné est celui de la distribution

 24   d'aide humanitaire à ces familles. Pour l'essentiel, c'étaient des vivres

 25   et des produits de première nécessité pour des foyers.

 26   Il y avait des organisations humanitaires qui faisaient cela, Caritas,

 27   Merhamet, la Croix-Rouge, et d'autres organisations de moindre taille. À

 28   l'intention de ces familles qui avaient reçu des réfugiés sur leur toit,

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  1   ils leur distribuaient de l'aide. C'était l'aide financière qui était la

  2   moins fréquente ou la moins importante, évidemment avec le temps, ça

  3   constituait un fardeau pour ces familles d'accueil. Parce que vous savez

  4   que l'image enfin le tableau social en Croatie n'était pas rose à ce

  5   moment-là. Évidemment, il faut assumer les frais fixes, les frais de

  6   logement. Donc, occasionnellement, le gouvernement agit. Nous avons vu des

  7   exemples ici donc le bureau se voyait octroyer des moyens pour les

  8   distribuer dans ces familles d'accueil. Et parfois, il nous est arrivé de

  9   recevoir des aides financières, de la part du HCR, que nous avons

 10   distribuées à ces familles; cependant, ce n'était pas une aide permanente

 11   qui aurait été versée tous les mois, c'était ponctuel.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 14   Q.  Par contraste, si on voit ce que vous avez dit hier, si quelqu'un

 15   allait mettons en Allemagne, comme vous l'avez dit, là, cette personne

 16   pouvait recevoir jusqu'à 1 000 marks par mois; est-ce exact ?

 17   R.  Oui, sauf que l'Allemagne est un pays bien riche et il est toujours

 18   bien riche que la Croatie. Il y avait des états au sein de l'Allemagne où

 19   des réfugiés ont effectivement reçu ce montant d'aide.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi d'apporter une

 21   correction. Je pense que le témoin a dit jusqu'à 1 000 marks. Ça ne veut

 22   pas dire que tout le monde recevait automatiquement 1 000 marks. Vous

 23   avais-je bien compris, Monsieur le Témoin ?

 24   M. KARNAVAS : [interprétation]

 25   Q.  Oui, vous faites un signe affirmatif de le dire.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Document suivant, 1D 02626. 2626. Il porte la date du

 28   12 juin 1998. -- témoin à poser une question liminaire : est-ce que vous

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  1   reconnaissez ce document ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Avez-vous eu l'occasion de l'examiner ?

  4   R.  Oui. Il m'est arrivé de rédiger ce type de rapport.

  5   Q.  Parfait. On y trouve certaines données, en tout cas, en ce qui concerne

  6   la période où vous avez trouvée dans cette officie, et nous savons que vous

  7   l'avez réintégré en 1995; alors, d'où venaient ces données ?

  8   R.  Nous avons ici un aperçu résumé qui nous montre l'évolution de la

  9   situation sur plusieurs années. Les sources des informations sont

 10   différentes, sources propres du bureau des Réfugiés et des Personnes

 11   déplacées, le HCR et d'autres organisations qui, à l'époque, ont travaillé

 12   avec des réfugiés ou des personnes déplacées qui ont été présentes en

 13   Croatie. Ce document nous montre un tableau général et fournit également

 14   des statistiques, des chiffres précis pour montrer l'évolution de la

 15   situation pendant plusieurs années pour ce qui est des réfugiés des

 16   personnes déplacées en Croatie. 

 17   Q.  Intéressons-nous à deux choses dans ce document.

 18   Nous n'allons pas tout voir. Nous pouvons tous le lire.

 19   Mais première note, on parle des négociations qui ont été organisées

 20   en Bosnie-Herzégovine en 1996. Etes-vous en mesure de nous dire si l'ODPR a

 21   participé d'une façon ou d'une autre aux élections pour la Bosnie-

 22   Herzégovine ?

 23   R.  Oui. Les premières élections de l'après-guerre en Bosnie-Herzégovine

 24   ont eu lieu en septembre 1996. Ces élections ont été organisées et

 25   supervisées par l'OSCE. On a également décidé que ces élections allaient

 26   être organisées hors de Bosnie-Herzégovine, que les réfugiés de Bosnie-

 27   Herzégovine allaient pouvoir voter, donc, pour ce faire, on a décidé qu'en

 28   Croatie également les élections allaient avoir lieu pour que sur le plan

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  1   donc des élections parlementaires, les réfugiés de Bosnie-Herzégovine

  2   puissent voter. L'OSCE a confié cette tâche au bureau des réfugiés et des

  3   personnes déplacées et j'ai été nommé coordinateur. J'avais la charge de

  4   l'ensemble de ce processus d'enregistrement, à savoir tous les réfugiés de

  5   Bosnie-Herzégovine qui le souhaitaient, donc, qui souhaitaient voter, il

  6   fallait qu'ils s'enregistrent au préalable. Environ 120 000 réfugiés sont

  7   venus s'enregistrer.

  8   Et il me semble que 97 000 ont voté. D'après ce document, il y doit y

  9   avoir un chiffre précis, 93 546 - excusez-moi - c'est le nombre de

 10   personnes qui ont voté. Nous avons organisé ces élections en coopération

 11   avec des représentants de l'OSCE. L'OSCE avait dans notre bureau son

 12   représentant permanent et ils ont envoyé également des dizaines

 13   d'observateurs à tous les lieux de votes et également dans notre bureau. Un

 14   représentant de l'OSCE qui avait -- enfin, le représentant qui avait la

 15   charge de ce processus était un Suisse. Il s'appelait Tobias Werler, je

 16   l'ai vu à ce moment-là et je n'ai plus eu l'occasion de le revoir. Je pense

 17   qu'il était de Basel. C'est tout ce que je sais à son sujet.

 18   Pour ce qui est donc du déroulement de ces élections, il a fallu

 19   garantir d'une part des moyens financiers, et d'autre part, une aide

 20   technique, et c'est ce que nous avons fait, soit nous, soit l'OSCE. Nous

 21   sommes occupés de cela.

 22   L'INTERPRÈTE : Me Karnavas, parlant hors micro.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation]

 24   Q.  Du fait de votre participation, est-ce que vous avez eu l'occasion du

 25   fait de votre participation, la participation de votre office à ces

 26   élections -- est-ce que vous avez été félicité ou fait l'objet de

 27   commentaires ou de félicitations de la part de l'OSCE ?

 28   R.  Le représentant de l'OSCE pour la Bosnie-Herzégovine de l'époque,

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  1   l'ambassadeur Frowick, il a adressé une très belle lettre et nous avons été

  2   tous très fiers de la recevoir. Il a dit - je paraphrase - que ce processus

  3   a constitué une excellente contribution au développement de la démocratie

  4   en Bosnie-Herzégovine.

  5   Q.  Fort bien. Est-ce que ceci a été publié de façon à ce que le monde

  6   entier soit au courant de la participation de vos services à cet événement

  7   ?

  8   R.  Oui, c'est quelque chose qui a été diffusé par les médias. Je pense

  9   qu'il a adressé sa lettre au ministre des Affaires étrangères mais que les

 10   services d'information ont relayé cela à [imperceptible] média, et c'est

 11   quelque chose qui a été diffusé dans les bulletins d'information.

 12   Q.  Une toute petite question à ce propos. Pourquoi est-ce que l'ambassade

 13   de la Bosnie-Herzégovine à Zagreb ne s'est pas vue confier cette tâche ?

 14   Comment se fait-il qu'on se soit adressé à l'office chargé des Personnes

 15   déplacées et des Réfugiés ?

 16   R.  Peut-être faudrait-il adresser cette question à l'OSCE. Il serait mieux

 17   placé que moi pour répondre, mais je pense qu'à l'époque, l'ambassade

 18   n'avait pas véritablement une infrastructure qui lui aurait permis

 19   d'organiser cela.

 20   Q.  Je dois quand même vous demandez ceci : est-ce que vous avez reçu des

 21   griefs de la part de l'ambassade qui aurait dit que l'ODPR aurait fait

 22   preuve d'iniquité ou aurait des manques de soins ou de bons égards envers

 23   ses citoyens et ne devait dès lors pas se voir confier cette mission

 24   pourtant importante ?

 25   R.  Non, non, il n'y a pas eu ce type de reproches. D'ailleurs, l'ambassade

 26   a fait partie de ceux qui ont assuré le suivi du processus et des partis

 27   politiques de Bosnie-Herzégovine ont envoyé leurs représentants également

 28   pour suivre les élections parce qu'il s'agissait d'un nombre considérable

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  1   de voix, en particulier dans des municipalités qui des municipalités qui

  2   souhaitaient retrouver leur composition ethnique d'avant la guerre, et là,

  3   toutes les voix ont compté -- chaque voix d'un réfugié a compté. Donc, les

  4   partis politiques ont envoyé leurs dirigeants pour assurer la campagne au

  5   nom de leurs partis, des partis respectifs dans les endroits de séjours des

  6   réfugiés. Donc, c'était soit des partis représentants des Croates de

  7   Bosnie-Herzégovine, soit des Bosniens de Bosnie-Herzégovine, les uns comme

  8   les autres.

  9   Q.  Fort bien. Prenons la troisième page, quatrième paragraphe, dernier

 10   paragraphe de ce paragraphe où il est dit ceci : "Entre l'été de l'année

 11   1995 et mai 1996 en Croatie, quelques 20 000 réfugiés musulmans venant de

 12   Velika Kladusa et de Cazin sont restés à Krupljensko, République de

 13   Croatie. Le paragraphe dit ensuite : "Ces personnes ne sont pas comprises

 14   dans les chiffres repris ci-dessous le camp a été fermé au début du mois de

 15   mai 1996 lorsque le dernier groupe de réfugiés qui s'y trouvait est allé

 16   dans des lotissements réservés à des réfugiés à Gasinci et à Obonjan."

 17   J'arrête ma lecture. Est-ce que vous avez des informations sur ce passage-

 18   ci ?

 19   R.  Les réfugiés qui sont arrivés dans la localité de Krupljensko étaient

 20   originaires de Velika Kladusa et de Cazin. A deux reprises, ils ont tenté

 21   d'entrer en Croatie. Après que ces forces où ce qui s'est produit là-bas

 22   Abdic a perdu certains combats. Je ne rentre pas dans les événements de

 23   Velika Kladusa, mais à ce moment-là, la Croatie était encore occupée, et

 24   près de Karlovac, ils n'ont pas pu traverser -- franchir les lignes de

 25   front entre les forces serbes et les forces croates et ils ont été ramenés

 26   à Velika Kladusa. A partir du moment où il y a eu libération de ces

 27   territoires, lorsque l'action de l'ABiH a permis à celle-ci de prendre

 28   Velika Kladusa et Cazin, il y avait environ 20 000 partisans d'Abdic, qui

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  1   sont arrivés en Croatie dans une petite bourgade qui s'appelle Krupljensko.

  2   Et c'est là qu'ils se sont installés, et en fait, ils sont devenus à partir

  3   de ce moment-là un problème international. Ils ne souhaitaient pas

  4   retourner chez eux. Ils ne voulaient pas qu'on les place où que ce soit

  5   ailleurs.

  6   Les organisations internationales ainsi que notre bureau leur fournissaient

  7   de l'aide, des vivres et autres. Dans cette localité, il faut dire que les

  8   conditions qui prévalaient étaient vraiment très mauvaises. La République

  9   de Croatie et la Turquie de concert avec les autorités de la Fédération de

 10   Bosnie-Herzégovine qui venaient de se constituer ont créé des patrouilles

 11   policières mixtes donc ces patrouilles ont fonctionné à Cazin et à Velika

 12   Kladusa en Bosnie occidentale. Et d'une certaine manière, ceci a encouragé

 13   les réfugiés à retourner parce que, dans ce centre, à plusieurs reprises,

 14   ils ont entendu dire qu'il y a eu des passages à tabac, qu'il y a eu même

 15   des assassinats de ceux qui retournaient chez eux. Donc, c'était des actes

 16   de vengeance et ils avaient peur de rentrer. Donc, plusieurs mois plus

 17   tard, grâce à l'activité conjointe des forces de police de Turquie, de

 18   Croatie, et de Bosnie-Herzégovine, en Bosnie occidentale, on a vu retourner

 19   à peu près 16 000 personnes. Toutefois, 4 000 d'entre eux n'ont absolument

 20   pas souhaité revenir chez eux. Et ces

 21   4 000, nous avons fini par les accepter à Gasinci; c'est là que nous les

 22   avons pris en charge, que nous les avons installés. De là, certains ont

 23   demandé de partir dans des pays tiers -- l'asile dans des pays tiers. Mais

 24   la plupart ont fini quand même par retourner dans leurs foyers en Bosnie-

 25   Herzégovine.

 26   Q.  Permettez-moi de vous arrêter. Une première chose : l'endroit où ils

 27   ont été installés à leur arrivée, est-ce que c'était un camp accepté et

 28   administré par l'ODPR ?

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  1   R.  Non, là c'était un village ou tout simplement ils y sont installés

  2   spontanément. C'est là qu'ils se sont placés. Il n'y avait que quelques

  3   maisons dans ce village. En fait, c'était sous des tentes qui se sont mis -

  4   - des tentes qu'ils avaient apportées ou des camions. Ils se sont employés

  5   à construire des espèces de maisons de terre. Enfin ce n'était pas digne de

  6   séjour de l'être humain, c'était très improvisé.

  7   Q.  Est-ce qu'il y a eu des plaintes formulées à propos de ce camp; dans

  8   l'affirmatif, qui c'est plaint ? Essayez d'être bref.

  9   R.  Je pense que la solution de ce problème a été la dernière condition que

 10   la Croatie devait remplir pour devenir membre du Conseil de l'Europe. Comme

 11   vous le savez, elle est devenue membre du Conseil de l'Europe et nous avons

 12   résolu le problème de Krupljensko.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, votre réponse apporte un élément

 14   de complexité simplement aux questions dont nous sommes saisies. On a vu

 15   plusieurs documents avec des chiffres sur les réfugiés. Au départ, les

 16   réfugiés en provenance de Bosnie-Herzégovine il y a deux grandes

 17   catégories, les Croates et les Musulmans. Concernant les Musulmans, je

 18   découvre par la réponse que vous faites, qu'il y avait parmi eux des

 19   Musulmans favorables aux Croates, les troupes d'Abdic, par exemple. Donc,

 20   il y avait des Musulmans pro-croates, et ces Musulmans pro-croates sont

 21   accueillis comme réfugiés et rentrent maintenant dans les statistiques

 22   générales. Et ça, c'est un élément de complexité que les Juges auront

 23   évidemment à apprécier.

 24   Votre office, quand vous étiez saisi de l'arrivée de ces réfugiés

 25   musulmans, est-ce qu'il vous était arrivé de faire une distinction entre

 26   les uns et les autres ou bien pour vous c'était tous des réfugiés musulmans

 27   sans distinction ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, nous ne faisions pas ce

Page 27955

  1   type de distinction, d'ailleurs cela n'aurait pas été possible. Je ne pense

  2   pas que les Musulmans étaient pro-croates ou pas. Je pense que tout

  3   simplement ils étaient ce qu'ils étaient, et ceux de Bosnie occidentale. Il

  4   faut savoir que l'historique de ce conflit est quelque chose de très

  5   complexe. Je pense que ces forces ont combattu un petit peu du côté

  6   Milosevic --

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- ne rentrez pas là-dedans, nous le savons. C'est

  8   très complexe et tous les jours qui passent en apportent la preuve.

  9   Alors, moi, ce qui m'intéresse c'est : y avait-il des distinctions entre

 10   les Musulmans ? Et vous verrez pourquoi je vous pose la question parce que

 11   j'ai une autre question qui va suivre après.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président, il n'y avait pas

 13   de différence. Nous ne faisions pas la différence.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, pourquoi je vous pose cette question ? Parce

 15   que, dans le document, 1D 2637, première page dans la version en anglais,

 16   sur les chiffres, on voit qu'il y a

 17   1,8 millions de réfugiés, 900 000 en provenance de la BiH et les chiffres

 18   donc permettent d'y voir clair; mais au deuxième paragraphe qui suit, il

 19   est indiqué qu'il y a des personnes qui sont retournés en Bosnie-

 20   Herzégovine. Alors, le retour en Bosnie-Herzégovine c'est dans le

 21   paragraphe III de la page 2, au petit (1) qui commence en décembre 1992 en

 22   Croatie, il y avait 371 319 réfugiés. Et le paragraphe qui suit, on parle

 23   de la situation du mois de mai 1993 où on a enregistré 271 096 réfugiés en

 24   provenance de la Bosnie-Herzégovine qui eux ont eu le statut de réfugié, et

 25   alors, là, c'est là où ça devient intéressant pour moi. Il est indiqué que

 26   plusieurs sont partis dans des pays européens et un petit groupe, qui n'a

 27   pas eu apparemment le statut, est retourné en Bosnie-Herzégovine. Alors,

 28   c'est ça qui m'intéresse.

Page 27956

  1   D'après ce paragraphe, on pourrait avoir la preuve que des gens sont

  2   venus en Croatie pour avoir le statut de réfugié et puis ils sont repartis

  3   en Bosnie-Herzégovine. Alors, c'est écrit dans ce document que vous ne

  4   pouviez pas rédiger puisque lorsqu'il a été rédigé c'est en 1998. Peut-être

  5   que vous étiez au courant mais, moi, ce qui m'intéresse c'est cette

  6   situation du mois de mai où là, ce document dit que des Musulmans sont

  7   retournés en Bosnie-Herzégovine. Alors, avez-vous eu la connaissance même

  8   si vous, vous n'étiez plus à l'office au mois de mai, mais vous étiez

  9   parlementaire, donc, à priori étant parlementaire vous deviez être informé

 10   de certaines choses.

 11   Saviez-vous que des Musulmans en provenance de la Bosnie-Herzégovine

 12   sont arrivés en Croatie et puis sont repartis en Bosnie-Herzégovine, comme

 13   semble indiquer ce document ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, lorsque les

 15   rapports évoquent nombre de réfugiés placés en Croatie pendant telle ou

 16   telle période, on se réfère uniquement à ceux qui se trouvent en Croatie à

 17   ce moment-là. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en avait pas eu davantage,

 18   mais ils sont partis dans des pays tiers où ils sont retournés chez eux.

 19   Dans les registres du bureau, c'est de manière différente que nous avons

 20   connu pratiquement un million de personnes qui se sont passées par chez

 21   nous retourner chez eux, aller ailleurs, retourner ou pas retourner en

 22   Bosnie-Herzégovine.

 23   Mais peut-être à un moment donné il y en avait 200 ou 300 000.

 24   Certains arrivaient, d'autres repartaient. Il y en a eu qui rentraient en

 25   Bosnie-Herzégovine, puis retournaient encore une fois en Croatie, se

 26   voyaient octroyer le statut de nouveau. A partir de l'année 1993 jusqu'en

 27   95, même si cela peut sembler peu important, mais grâce à différentes

 28   initiatives prises par le bureau, différents individus, des humanitaires,

Page 27957

  1   des représentants, et cetera, 5 000 personnes ont pu reprendre le chemin de

  2   la Bosnie-Herzégovine. Peut-être que ça ne semble pas être significatif par

  3   rapport à la totalité des chiffres, mais pour nous, ça a été un succès

  4   considérable.

  5   A partir de 1993, on a établi une coopération intense avec les

  6   autorités allemandes pour assurer le retour de ces gens-là. Et pendant

  7   toute la durée du temps, si vous vous penchez sur les statistiques en

  8   Bosnie-Herzégovine, vous verrez pour les villes, par exemple, d'où nous

  9   avons connu en Croatie et puis ailleurs partout en Europe des réfugiés,

 10   comme Zenica. Ces mêmes villes ont dressé des listes pour montrer combien

 11   eux ils avaient de réfugiés chez eux. Donc, il y avait des fruits

 12   migratoires très importants. Mais en 1993 et surtout en 1995, ce retour est

 13   devenu plus intense.

 14   Et vers le mois de mars 1995, les gouvernements de Croatie et de

 15   Bosnie-Herzégovine ainsi que les bureaux respectifs, donc, le bureau des

 16   Réfugiés et aussi direction de Sarajevo et de Mostar ont signé un protocole

 17   également, un protocole portant sur le retour. Et il y avait également un

 18   accord tripartite international --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, vu l'importance de la question, je

 20   vais affiner ma question. Ce qui m'intéresse c'est 1993 et début 1994.

 21   Pendant cette période, vous venez de dire qu'entre 1993 et 1995, 5 000

 22   personnes sont retournées en Bosnie-Herzégovine, très bien. Mais je

 23   voudrais que vous essayiez d'affiner vos réponses; est-ce que, parmi les 5

 24   000, dans la période 1993, début 1994, il y en aurait qui seraient

 25   retournés dans l'Herzégovine, c'est-à-dire dans les zones contrôlées par le

 26   HVO ? Et ça, c'est très important de le savoir. Est-ce qu'à votre

 27   connaissance, il y a des Musulmans qui, pendant cette période 1993, 1994,

 28   sont retournés dans le territoire contrôlé par le HVO ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y avait aussi des Musulmans

  2   parmi ces gens.

  3   M. SCOTT : [interprétation] Pour que ce soit précis ici, vous me le

  4   permettez. Je regardais ces informations et pour qu'il n'y ait pas de

  5   confusion, ces chiffres ne font pas de différence entre Croates et

  6   Musulmans quand on dit 5 000 personnes de Bosnie-Herzégovine sont rentrées.

  7   On ne sait pas si c'était 5 000 Croate ou 5 000 autres personnes ou un

  8   mélange des deux.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : On va justement préciser cela. Ma question était

 10   ultra précise. Elle ne concernait uniquement que les Musulmans qui seraient

 11   revenus en Bosnie-Herzégovine dans des zones contrôlées par le HVO, et ce,

 12   dans la période 1993, début 1994.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y a eu des réfugiés musulmans qui sont

 14   retournés chez eux.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous en êtes certain ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, il reste quelques minutes avant la

 18   pause et il ne doit pas vous rester beaucoup de temps non plus.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai assez pour terminer mais il serait

 20   peut-être utile de faire une pause maintenant.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, vous préférez qu'on fasse une pause.

 22   Alors, on va faire la pause pendant ce temps-là. Le Greffier va travailler

 23   pour nous dire combien de minutes voire de secondes qu'il vous reste. Et

 24   après la reprise, je vous redonnerai la parole pour que vous terminiez

 25   votre temps. Voilà, donc, nous faisons 20 minutes de pause.

 26   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

 27   --- L'audience est reprise à 10 heures 52.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Maître Karnavas, il vous reste neuf minutes,

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  1   c'est-à-dire 450 secondes.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

  3   Q.  Je souhaiterais revenir maintenant au document que nous examinions il y

  4   a quelques instants et j'ai peut-être une question ou deux pour terminer.

  5   Le document 1D 02626.

  6   Pour reprendre le paragraphe 4 qui se trouve à la page 3, dans ce

  7   paragraphe, on dit que 4 000 personnes avaient refusé de revenir à la BiH

  8   et qu'il fallait qu'ils soient placés quelque part, ils sont allés à

  9   Gasinci et Obonjan. Donc, ma question est la suivante : qui étaient

 10   déplacés, et le bureau chargé des Personnes déplacées et des Réfugiés, qui

 11   les a déplacés ?

 12   Q.  Un peu plus tôt nous avons parlé d'élections. Est-ce qu'ils étaient

 13   encore là lorsque les élections ont eu lieu ?

 14   R.  Je pense que oui.

 15   Q.  Bien. Est-ce qu'il y avait également des centres où l'on pouvait se

 16   rendre pour voter ? Comment est-ce que c'était organisé ?

 17   R.  A Gasinci, il y avait un poste électoral parce qu'il y avait là des

 18   gens originaires de Bosnie-Herzégovine. Tous ceux qui s'étaient inscrits

 19   là-bas et souhaitaient voter pouvaient le faire.

 20   Q.  Très bien. Je souhaiterais maintenant aborder un autre sujet. Vous nous

 21   avez dit qu'en 1993, au mois de mars environ, vous êtes devenu membre du

 22   parlement et nous savons qu'à partir du mois de mars 1993 et, plus tard,

 23   jusqu'en 1994, il y a eu quelques conflits entre l'ABiH et le HVO et qu'il

 24   y avait des réfugiés des deux côtés qui se réfugiaient en Croatie.

 25   J'aimerais savoir la chose suivante : alors que vous étiez membre du

 26   parlement, vous souvenez-vous d'avoir eu des discussions lorsqu'il a été

 27   question de propositions au niveau parlementaire, à savoir qu'il fallait

 28   limiter l'entrée des réfugiés musulmans en Croatie ou peut-être de limiter

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  1   l'aide que ces derniers recevraient une fois rendus en Croatie ?

  2   R.  Le parlement n'a jamais pris ce type de décisions, ce que je sais c'est

  3   que le gouvernement s'est adressé à la communauté internationale en

  4   demandant de l'aide et bon nombre de gouvernements avaient répondu par

  5   l'affirmative en envoyant des quotas, pour ce qui est du nombre de réfugiés

  6   que ces gouvernements pouvaient accueillir. C'est surtout l'Allemagne qui

  7   en a beaucoup accueilli, certains gouvernements ne voulaient pas en

  8   accueillir du tout, bon nombre de pays islamiques avaient accueilli les

  9   gens, la Malaisie, le Soudan, l'Iran, la Turquie, avaient envoyé des

 10   représentants parmi les réfugiés en disant quel est le nombre que chacun de

 11   ces pays pouvaient accueillir.

 12   Q.  Reconnaissant les événements en Bosnie-Herzégovine, et en Bosnie

 13   centrale en particulier, où vous nous avez dit que les réfugiés d'origine

 14   croate et musulmane se trouvaient ou venaient, est-ce qu'il y a eu des

 15   efforts déployés pour discriminer les réfugiés musulmans qui entraient ?

 16   M. SCOTT : [interprétation] Désolé, Monsieur le Président --

 17   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 18   M. SCOTT : [interprétation] Le microphone ne marche -- merci.

 19   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 20   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je comprends très bien

 21   que Me Karnavas dit au témoin si vous le savez mais la question est

 22   beaucoup trop large. En tant que membre du parlement, est-ce qu'il a parlé

 23   de ces questions sur la base quotidienne ? Est-ce qu'il savait ce genre de

 24   chose ? C'est comme j'ai mentionné ce matin, c'est comme demander à

 25   quelqu'un si Joseph portait une chemise bleue hier, si elle le sait ? Il ne

 26   peut pas le savoir ou il peut le savoir mais, en fait, il faudrait peut-

 27   être être un peu plus précis. Il faudrait quand même démontrer que la

 28   personne -- que le témoin a quelque connaissance personnelle. Est-ce qu'il

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  1   était membre d'un comité ? Est-ce qu'en fait, on parle d'une période très

  2   longue ? Est-ce qu'il savait si quelque part quelqu'un --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais poser une série de questions

  5   préliminaires afin de poser cette dernière question.

  6   Q.  A partir du mois de mars 1993 jusqu'à ce que vous ne deviez membre du

  7   ODPR, est-ce que vous saviez si, en Croatie -- est-ce que vous saviez ce

  8   qui se passait en Croatie concernant les réfugiés et les personnes

  9   déplacées ?

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Nous allons y aller étape par étape, Maître

 11   Scott, ne vous énervez pas.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Je n'essaie pas d'être difficile, Monsieur le

 13   Président. Sérieusement, pas du tout. Mais pour le compte rendu d'audience,

 14   je souhaiterais dire, et je participe à ceci comme tout le monde. Qu'est-ce

 15   que ça veut dire : "Est-ce que vous saviez ce qui se passait en Croatie" ?

 16   Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça ne veut rien dire.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Il faut y aller étape par étape. Si le

 18   témoin nous dit, non.

 19   M. SCOTT : [interprétation] Bien sûr que le témoin va dire quelque chose.

 20   Chaque personne qui lisait le journal pourrait dire : j'avais quelques

 21   connaissances de ce qui se passait.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. D'accord. Très bien. Je vais reposer

 23   une question un peu plus précise.

 24   Q.  Y a-t-il eu des discussions au parlement concernant les réfugiés et les

 25   personnes déplacées tenant compte du fait que vous nous avez dit qu'il y

 26   avait des restrictions budgétaires et qu'il y avait également un budget

 27   réservé au financement des centres ? Est-ce que vous saviez, vous aviez

 28   connaissance de cela ?

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  1   R.  Il y a eu des débats au niveau du parlement à ce sujet. Il y a eu des

  2   débats publics, il y a eu des débats politiques et avec une participation

  3   selon les cas, j'y ai participé moi-même parfois. Nous avions tous souhait

  4   voir la situation se calmer, voir les conflits s'arrêter et créer les

  5   conditions propices au retour des gens chez eux. Ces positions ont été

  6   publiquement énoncées et confirmées de façon officielle.

  7   Q.  Fort bien. Au cours de ce procès, compte rendu d'audience est tenu, et

  8   je vais demander pour le compte rendu d'audience si le gouvernement de

  9   Croatie n'a pas donné une assistance adéquate aux réfugiés, si M. Rebic,

 10   qui était un membre de l'entreprise criminelle commune, en fait, peut

 11   devenir membre d'une entreprise concernant son occupation.

 12   M. Scott a dit à la page 20 010, à la ligne 6, il a dit : "Je vais répondre

 13   directement à cette question," qui se trouve à la page précédente. "Oui,

 14   ceci fait partie au nettoyage ethnique des Musulmans de Bosnie-Herzégovine

 15   et de la région d'Herceg-Bosna. Ceci faisait partie d'un système tel que

 16   décrit dans l'acte d'accusation pour déplacer les Musulmans à l'extérieur

 17   d'Herceg-Bosna et ceci a été fait de plusieurs façons. L'une des façons

 18   était de les déplacer au moins de façon temporaire en Croatie non pas pour

 19   les y abandonner ceux qui découlent du témoignage de ce témoin ou de les

 20   déplacer dans un pays tiers mais de ne jamais sans avoir l'objet ou le but

 21   de retourner en Bosnie-Herzégovine."

 22   Maintenant, sur la base de ceci, et sur la base de votre implication

 23   personnelle, alors que vous étiez membre du bureau jusqu'en 1993, donc,

 24   entre 1993 et 1994, ou plus particulièrement alors que vous étiez à

 25   l'extérieur du bureau, alors que vous étiez membre du parlement, est-ce

 26   que, d'après vous, il y avait un effort concerté déployé par l'Etat de

 27   Croatie ou les représentants de l'Etat de Croatie, tel M. Rebic, déployés

 28   pour faire en sorte ce que la Croatie devienne une sorte de centre de

Page 27963

  1   Transit dans le but de forcer les réfugiés musulmans de repartir dans un

  2   pays tiers, pour ne plus leur permettre de revenir dans leurs patries et de

  3   cette façon-là de nettoyer ethniquement la région. Pouvez-vous répondre à

  4   cette question ?

  5   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je ne sais

  6   pas si j'ai bien compris le Dr Zoric qui parle au nom de chaque personne,

  7   de chaque représentant officiel de la République de Croatie ?

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons une

  9   entreprise criminelle commune, et c'est le bureau qui est responsable de

 10   ces réfugiés. Vous avez Dr Rebic d'un côté qui se trouve au sommet. Cette

 11   personne était le second. D'après ce que j'ai compris, à la suite de toutes

 12   les objections, je ne peux que deviner mais l'Accusation sous-tend que,

 13   pendant cet homme - notre témoin - était à l'extérieur de son bureau,

 14   concernant les événements qui se sont déroulés en Bosnie centrale, que

 15   c'est à ce moment-là concernant l'ODPR -- que c'est à ce moment-là qu'ils

 16   sont devenus membres de l'entreprise criminelle commune et c'est ainsi que

 17   le Dr Rebic et d'autres ont soit aidé et encouragé à ce que les crimes

 18   soient commis ou étaient eux-mêmes les auteurs physiquement responsables de

 19   ces crimes. Donc, il y a l'une ou l'autre possibilité. Donc, l'Accusation

 20   sous-tend que la Croatie était transformée en centre de Transit.

 21   Donc je pose la question au témoin : si effectivement c'est un bureau

 22   du gouvernement de l'Etat de Bosnie-Herzégovine et si le témoin est un

 23   parlementaire, et si les budgets clairement existent, quelqu'un quelque

 24   part doit savoir, doit avoir des connaissances de ce qui se passait. Le Dr

 25   Rebic ne pouvait pas agir seul. Est-ce que, de toute façon, nous allons

 26   l'entendre -- mais, selon lui, selon ce témoin, est-ce que ce bureau fait

 27   partie de l'entreprise criminelle commune puisque c'était une agence de la

 28   République de Croatie ? Voilà le danger de cette entreprise criminelle

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  1   commune. Mais nous avons et c'est l'entreprise criminelle commune alléguée,

  2   bien sûr, et nous avons les paroles de M. Scott où je pose la question à ce

  3   témoin : est-ce qu'il était au courant de la situation ?

  4   Q.  Monsieur donc, pouvez-vous répondre à cette question ?

  5   R.  Je pense que je peux répondre. Je pense que tirer des conclusions sur

  6   le nettoyage ethnique et dire que le bureau chargé des Réfugiés et des

  7   Personnes déplacées y a pris part, est une conclusion erronée. Je vais vous

  8   dire plusieurs éléments qui me font le dire. D'abord, dans les documents

  9   tels que je les vois, il y a des plaintes en provenance de la Bosnie-

 10   Herzégovine disant que ce bureau n'a pas dans tous les cas de figure

 11   autorisé une entrée sur le territoire de la Croatie. Alors, ma question

 12   logique c'est : si vous nettoyez ethniquement une région, pourquoi ne

 13   laissez-vous pas venir à un endroit pour faciliter ce nettoyage ethnique,

 14   pourquoi le faire plutôt que de le garder chez lui, le Dr Rebic et le

 15   bureau chargé des Réfugiés ou quiconque d'autre en Croatie ?

 16   Q.  Un instant, s'il vous plaît.

 17   R.  -- et ne pouvait envoyer personne -- bon, je vais ralentir. Donc, le

 18   bureau ne pouvait envoyer personne vers un pays tiers sans l'approbation de

 19   l'intéressé et sans l'approbation du pays intéressé. En l'occurrence, cette

 20   conclusion-là serait plutôt discriminatoire vis-à-vis des gouvernements de

 21   l'Allemagne, du Danemark, de la Hollande, voire de pays tels que la

 22   Turquie, l'Egypte, le Soudan, l'Iran ou la Malaisie qui ont également

 23   accueilli ces réfugiés.

 24   Tous les passages, transports, départs de ces réfugiés étaient organisés à

 25   un échelon international et c'est la communauté internationale qui avait à

 26   l'époque travaillé au travers d'une organisation à Zagreb, organisation

 27   internationale des migrations, ainsi s'appelle-t-elle. Et les Etats-Unis

 28   d'Amérique, le Canada, l'Australie sont passés par cette organisation pour

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  1   procéder à l'accueil de personnes originaires de Bosnie-Herzégovine. Je ne

  2   vois pas comment le Dr Rebic aurait pu influer sur le gouvernement canadien

  3   pour délimiter un quota ou un autre gouvernement, quel qu'il soit, j'ai dit

  4   le Canada à titre d'exemple, désigner, donc, un quota pour ce qui est du

  5   nombre de personnes que ce pays-là allait accueillir. Cela n'était donc pas

  6   notre travail.

  7   Ce que je veux souligner c'est que, pendant toute cette période-là,

  8   les accueils de personnes en Croatie et leur départ vers des pays tiers, il

  9   y avait un canal à l'opposer pour le retour des gens vers la Bosnie-

 10   Herzégovine, chose qui s'est intensifiée en particulier à partir de 1995

 11   lorsque cinq pays européens se sont joints à l'accord allemand et croate

 12   pour ce qui est de faciliter le transit des réfugiés de la Bosnie-

 13   Herzégovine en passant par la Croatie vers la Bosnie-Herzégovine. Et à

 14   partir de ce mois de mars de l'année 1995, cela s'est fait en application

 15   de l'accord signé par le gouvernement à Sarajevo et le gouvernement à

 16   Zagreb.

 17   Moi, je n'étais pas de nouveau en mars au bureau, mais j'ai retrouvé

 18   sur mon bureau le texte de cet accord, une fois arrivée, et pendant deux

 19   ans, je l'ai mis en œuvre. C'est par le biais de ce bureau-là que les gens

 20   revenaient vers la Bosnie-Herzégovine, et ça ne peut en aucune façon être

 21   considéré comme du nettoyage ethnique.

 22   Q.  Très bien. Merci beaucoup, Monsieur.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Je me suis trompé à la page 41, Monsieur le

 24   Président, j'ai dit à la ligne 2 que le gouvernement de la BiH et, en fait,

 25   il aurait fallu lire le gouvernement de Croatie. Je souhaiterais me

 26   corriger. Bien.

 27   Q.  Monsieur, une dernière question : nous savons qu'au mois de mai, juin

 28   et juillet, plusieurs événements se sont déroulés en Bosnie centrale, et

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  1   vous avez répondu à une question posée par les Juges de la Chambre un peu

  2   plus tôt que la situation était difficile et qu'il y avait des griefs.

  3   Pourriez-vous nous dire quelle était la difficulté de la situation sachant

  4   que les Croates arrivaient comme c'est en tant que réfugiés, et que les

  5   Musulmans également y arrivaient en tant que réfugiés ? Pourriez-vous

  6   donner une indication aux Juges de la Chambre de ce qui se passait

  7   réellement sur le terrain ? Quelle était la difficulté de la situation car

  8   il nous faut avoir tous ces événements en contexte.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Karnavas, je crois que vous

 10   avez oublié de mentionner l'année. Vous avez donné le mois, mais vous avez

 11   omis l'année, c'est 1993, probablement.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, oui. Merci, Monsieur le Juge, 1993.

 13   M. SCOTT : [interprétation] J'allais poser la même question. Maintenant,

 14   vous venez de mentionner 1993, mais je crois que c'était en 1992 que cet

 15   homme -- que notre témoin occupait ce poste; en mai, juin, et juillet 1993,

 16   il n'occupait plus son poste. Moi, j'ai simplement présumé que Me Karnavas

 17   parlait de l'année 1992.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Encore une fois, Monsieur le Président,

 19   Messieurs les Juges, nous ne vivons pas dans une bulle. Le témoin se

 20   trouvait sur place. Il était en Croatie et je peux vous peindre une image.

 21   Imaginez, si --

 22   M. SCOTT : [interprétation] Nous ne voulons pas entendre un long discours.

 23   Me Karnavas veut faire -- prononcer un autre discours. S'il souhaite le

 24   faire, ce n'est pas le cas. Ce n'est pas ici qu'il faut le faire.

 25   L'Accusation est tout à fait claire quant au cadre temporel et il n'est pas

 26   juste de poser des questions à ce témoin, de lui demander de déposer sur

 27   des questions détaillées alors qu'il n'occupe plus le poste qu'il occupait.

 28   Ce n'est pas un secret. Mais je voulais simplement que les Juges de la

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  1   Chambre obtiennent des éléments de preuve très clairs. Le témoin nous

  2   parle, dépose sur le mois de mars 1993, et on lui revient avec 1994. Oui.

  3   Effectivement, il a peut-être eu certains liens de façon limitée, mais le

  4   témoin ne nous a jamais dit hier qu'il était impliqué de façon exhaustive

  5   vers la mi-1993, donc, objection.

  6   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Je souhaiterais dire quelque chose, Monsieur

  9   le Président, simplement pour répondre. Le témoin vivait en Croatie, il se

 10   trouvait là sur place. Il pouvait observer ce qui se trouvait autour de

 11   lui. Je lui pose une question en tant qu'être humain qui se trouvait sur

 12   place, qui vivait là-bas. En fait, avec votre permission, nous entendons

 13   des commentaires de galerie des cacahouètes. Si je puis faire un

 14   commentaire pour le compte rendu d'audience.

 15   Vous pouvez y attribuer le poids que vous voulez mais il se trouvait sur

 16   place. Je ne lui demande pas de nous parler des camps, mais je lui demande

 17   de nous parler de l'atmosphère de façon générale. Est-ce que cet homme

 18   n'est pas en mesure de nous dire, de façon générale, quelle était

 19   l'atmosphère en Croatie, le climat en Croatie en parlant de la politique,

 20   de la période de transition ? Bien sûr que oui. Nous parlons aussi de

 21   plusieurs mois où les réfugiés arrivaient des deux côtés. Je lui demande de

 22   nous donner son impression, l'impression de son vécu.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Reformulez la question et puis ça sera la dernière

 24   question puisque le temps est terminé.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.

 26   Q.  Pourriez-vous, je vous prie, nous décrire le climat en Croatie pendant

 27   les mois de mai, juin et juillet, et août aussi, les Croates étaient --

 28   partaient de la Bosnie centrale où les conflits avaient lieu en Croatie et

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  1   impliquaient les réfugiés croates et musulmans ?

  2   R.  Ce n'était pas chose simple que de vivre à l'époque en Croatie. En

  3   effet, nous recevions des rapports aussi portant sur des massacres survenus

  4   à l'égard de Croates, où les Croates étaient victimes et il était difficile

  5   de garder son sang froid. Bon nombre de personnes étaient -- bon nombre de

  6   députés au parlement croate, donc moi, ont essayé d'y aller. J'y suis allé

  7   moi-même à plusieurs reprises vers cette Bosnie centrale, et avec tout le

  8   respect qui est dû à ces gens qui ont beaucoup tempérament, j'y étais. Je

  9   n'ai rencontré aucun des deux, moi, j'y étais et nous nous sommes efforcés

 10   d'établir un lien, ouvrir des voies de communication, des filières de

 11   communication. Nous entrons en contact avec des députés des parlements de

 12   la Bosnie-Herzégovine. Une fois personnellement, j'ai réussi à le faire.

 13   J'avais conduit une mission de collègues du parlement à Nova Bila; c'est un

 14   village en Bosnie centrale où la Croatie avait offert des moyens pour la

 15   construction d'un hôpital. Cet hôpital a bel et bien été construit. J'étais

 16   censé -- en ma qualité de fonctionnaire le plus haut placé, j'étais censé

 17   poser la pierre de fondement -- de fondation. En plus, des représentants

 18   croates, on a invité des gens de Zenica, Doboj et autres localités qui

 19   étaient des localités sous contrôle bosnien à l'époque. Alors, j'ai convié

 20   nos collègues, je donne à titre d'exemple j'ai demandé à ces collègues de

 21   m'emmener vers Bugojno, parce que pratiquement il était impossible d'y

 22   accéder. Ce sont des Bosniens qui m'ont conduit à Bugojno, et ensuite, eux

 23   m'ont prié de les emmener à Kiseljak parce qu'eux n'avaient pas le moyen

 24   d'y aller. Ensuite, je leur ai demandé de nous emmener à Vares parce que

 25   nous, nous n'avions pas moyen d'y accéder puis, eux, ils m'ont demandé de

 26   les emmener dans une partie de Vitez où ils n'avaient pas eu accès à

 27   l'époque. On a fait donc tout ça, on s'est entretenu avec des gens et nous

 28   nous sommes efforcés d'établir des filières de communication.

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  1    Et pour finir, nous sommes allés à Mostar. Je leur ai fourni la

  2   possibilité de s'entretenir avec des gens du côté occidental et eux, M.

  3   Kosnik, l'administrateur international de l'époque nous a rendu possible un

  4   déplacement vers le côté est. J'étais convaincu que ce type d'action qui

  5   très souvent faisait traverser les lignes de combat et qui était donc

  6   dangereuse, était une chose d'après moi qui aidait à calmer -- à apaiser le

  7   jeu et faire stopper le conflit.

  8   C'est dans cette ambiance que nous avons vécue et que nous sommes

  9   efforcés de faire quelque chose pour calmer la situation, et pour faciliter

 10   le retour des gens chez eux.

 11   Q.  C'est à quelle époque, pour avoir un cadre temporel ? Plus

 12   particulièrement, lorsqu'on parle de Nova Bila, puisqu'il y a eu des

 13   allégations, à savoir qu'on a procédé à un nettoyage ethnique renversé par

 14   les Croates, et vous parlez maintenant de l'établissement d'un hôpital.

 15   R.  Ça se situe à la période de la signature des accords de Washington; de

 16   là, à vous donner des dates exactes, il me semble que c'était l'automne,

 17   mais je ne sais plus si c'était 1994 ou 1995. Je pense que c'était plutôt

 18   1994. Oui, pourquoi investirions-nous autant d'argent de notre état et

 19   pourquoi construirions-nous un hôpital à l'époque ? Parce que l'hôpital

 20   était en cours de construction et des gens ont été accueillis pour une

 21   formation, une spécialisation à Zagreb et Split. L'hôpital fonctionne de

 22   nos jours encore, il y a des médecins croates à l'intérieur, il y a des

 23   médecins musulmans voire bosniens et je crois que ça fait partie du système

 24   et cela fournit des prestations de service à l'intention des uns et des

 25   autres. Il y a plusieurs établissements médicaux spécialisés, ce qui fait

 26   que les uns font une chose, les autres font autre chose et en somme cet

 27   hôpital en Bosnie centrale est la meilleure des preuves solides montrant

 28   que les gens, la Croatie voulait que les gens restent là-bas et qu'ils y

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  1   vivent, qu'ils y restent.

  2   Cette pierre ou cette fondation étant une pierre de quelques tonnes qui a

  3   été prise au niveau de la cathédrale de Zagreb. On avait reconstruit à

  4   l'époque, on nous avait donné ce grand caillou, cette pierre et on a mis

  5   une inscription dessus disant que la volonté de la Croatie était de faire

  6   en sorte que les gens restent à vivre là où ils étaient nés et là où ils se

  7   trouvaient leur maison.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci beaucoup. Je vous suis reconnaissant

  9   de votre honnêteté, d'avoir été direct, d'avoir répondu à toutes mes

 10   questions. Je vous remercie, donc, et mes collègues maintenant vous

 11   poseront des questions ainsi que les Juges de la Chambre.  

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour le contre-interrogatoire, comment se présente

 13   la situation pour les autres accusés ?

 14   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, d'après les

 15   informations recueillies auprès de mes collègues, je vais avoir moi-même 15

 16   à 20 minutes des sujets à traiter. Je ne pense pas avoir besoin de plus que

 17   cela. La collègue Alaburic a peut-être un peu plus que cela, et je crois

 18   savoir que les autres Défenses n'ont pas témoigné d'intérêt pour contre-

 19   interroger ce témoin. Alors, je voudrais demander l'aide de l'Huissière

 20   afin qu'elle puisse distribuer des documents.

 21   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, compte tenu de vos lignes

 22   directrices dans la décision du 24 avril 2008, je tiens à préciser que mes

 23   questions peuvent être définies comme faisant partie du contre-

 24   interrogatoire. J'enchaînerai sur deux sujets qui ont été abordés d'une

 25   certaine manière, le témoin en a dit quelque chose, je pense qu'il y a

 26   encore des détails qu'il convient d'explorer, avec votre autorisation.

 27   Contre-interrogatoire par M. Kovacic :

 28   Q.  [interprétation] Monsieur Zoric, bonjour.

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  1   R.  Bonjour.

  2   Q.  Je suis Bozidar Kovacic. Je représente ici le général Praljak. Je vous

  3   remercie d'être venu déposer ici. Nous nous sommes déjà rencontrés et je

  4   vais vous poser ma question pour commencer : vous avez travaillé à partir

  5   de mars 1993 jusqu'à la fin de l'année de l'année 1995, vous avez été

  6   député au parlement croate; c'est ce que vous dites page du compte rendu

  7   d'audience d'hier, page 20, lignes 10 à 14. Pour commencer, je vais vous

  8   demander -- ou plutôt, pour accélérer un petit peu, vous voyez ces quelques

  9   documents qui vous ont été remis, le deuxième document; est-ce que vous

 10   pouvez le prendre, s'il vous plaît, numéro 3D 01092. L'avez-vous trouvé ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Si vous examinez ce document, vous pouvez facilement identifier de quoi

 13   il s'agit. C'est une note diplomatique; le ministre des affaires étrangères

 14   de Croatie, le 30 avril 1993, envoie cette note à l'ambassade de la

 15   République de Bosnie-Herzégovine -- l'ambassade de Bosnie-Herzégovine à

 16   Zagreb, les informe de l'intention d'une délégation de parlementaires

 17   croates de se rendre en Bosnie-Herzégovine.

 18   Et dans le deuxième paragraphe de ce document, l'on trouve un exposé des

 19   motifs de cette visite. Vous étiez au parlement à ce moment-là, puisque

 20   c'est le 30 avril 1993, donc, étiez-vous au courant de cette délégation de

 21   parlementaires ? Vous savez pour quelle raison cette délégation s'est

 22   constituée; quel a été l'objectif de sa visite ?

 23   R.  Je l'ai déjà dit un instant, s'agissant des événements en Bosnie, en

 24   particulier en Bosnie centrale, c'est quelque chose qui, à ce moment-là, a

 25   été présent dans la vie politique en Croatie et je suis au courant de cette

 26   initiative. Il me semble que c'est la première fois une délégation de

 27   députés à se rendre de cette manière-là là-bas dans ce pays voisin pour

 28   voir sur place de quoi il s'agissait.

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  1   Q.  Merci. Dites-moi, s'il vous plaît, Monsieur le Témoin : sauriez-vous

  2   nous dire est-ce que vous vous souvenez, est-ce que vous savez un détail

  3   quelconque au sujet de ce qui a précédé cette décision prise par le

  4   parlement de dépêcher une délégation, envoyer une délégation ? Est-ce que

  5   vous savez comment cela s'est fait ? Qu'est-ce qui a provoqué cela ?

  6   R.  Je pense que les causes ce sont les événements eux-mêmes, et la cause

  7   immédiate c'est : M. Praljak, un jour, il est venu se présenter devant le

  8   parlement et il a commencé à faire du lobbying parmi les députés. Je pense

  9   qu'il était accompagné à ce moment-là de quelques personnes mais il n'est

 10   pas difficile de le remarquer - enfin, on se souvient facilement - c'est

 11   quelqu'un de très expressif. Il a dominé ce groupe et ce qu'il disait dans

 12   le hall aux parlementaires.

 13   Si c'est bien beau de se trouver à Zagreb, de se parler, de discuter, on

 14   entend plein de choses et il y a beaucoup des informations et de choses

 15   contraires à la vérité qui sont dites. S'il vous plaît, rendez-vous sur

 16   place, voyez ce qui se passe, de quoi il s'agit, aidez-nous à mettre fin à

 17   cela. C'est à peu près ce qu'il a dit, c'est comme ça que j'ai compris son

 18   intervention.

 19   Et après par la suite, il y a eu une réunion de la chambre de

 20   représentants, et l'une des conclusions adoptée a été de constituer une

 21   délégation de parlementaire, une délégation mixte avec des représentants de

 22   différents partis. Cette délégation allait se rendre dans ces régions et, à

 23   son retour, allait présenter son rapport. Je pense que c'est effectivement

 24   ce qui a été fait, et je pense que, dans certaines de ces régions, ils se

 25   sont rendus même avec l'aide des forces internationales qui ont été

 26   informées de leur visite.

 27   Q.  Je vous remercie. Pour le compte rendu d'audience pour que ce soit tout

 28   à fait clair, vous avez dit que ce lobbying de Praljak consistait à

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  1   demander et il venait là-bas. Mais "là-bas," c'est la Bosnie-Herzégovine,

  2   j'imagine ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Merci. S'agissant de l'aide fournie par les forces internationales et

  5   compte tenu, bien sûr, de la situation sur le terrain, à savoir la guerre,

  6   les postes de contrôles placés sur les routes, je vous invite maintenant à

  7   examiner le document 3D 00566. Je pense que c'est le premier dans la série.

  8   C'est une lettre signée par le Dr Ivo Sanader; il était ministre adjoint

  9   des affaires étrangères. Là encore, nous avons le papier en-tête du

 10   ministère des Affaires étrangères. Il s'adresse au général Wahlgren, qui

 11   est le commandant de la FORPRONU à Zagreb à ce moment-là.

 12   Ce document, est-ce qu'il correspond à ce que vous savez au sujet du fait

 13   qu'on a demandé de l'aide des forces internationales ?

 14   R.  Oui, M. le général Wahlgren était le commandant, à ce moment-là, des

 15   forces internationales et le ministère des Affaires étrangères s'est

 16   adressé à eux pour leur demander de l'aide.

 17   Q.  Je vous remercie. Voyons maintenant ces deux documents à la fois. Dans

 18   les deux, l'on voit quelle est la composition de la délégation, il est

 19   question de sept personnes. Je ne vais pas donner lecture des noms. Et

 20   entre parenthèses, l'on voit à quel parti appartiennent ces personnes. Est-

 21   ce que c'est clair qu'il s'agisse d'une délégation mixte qui regroupe des

 22   représentants de plusieurs partis politiques, donc, il s'agit du

 23   représentant de tous les partis politiques ? La Chambre sait ce qu'est le

 24   HDZ, HSLS, HNSHSS, SDP; est-ce que vous pourriez préciser de qui il s'agit

 25   ?

 26   R.  Oui, c'est une délégation mixte. Nous avons trois membres du parti qui

 27   est au pouvoir, et puis les autres représentent des partis de l'opposition,

 28   donc, quatre représentants du parti de l'opposition.

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  1   Q.  Je vous remercie. Et à ce sujet, encore une question, le dernier

  2   document dans le classeur, s'il vous plaît, 3D 01091. 3D 0191.

  3   Il ressort donc du titre et du paragraphe d'introduction, donc, j'attire

  4   votre attention là-dessus pour le moment. C'est un rapport de cette

  5   délégation mixte du parlement croate, donc, rapport suite à sa mission en

  6   Bosnie-Herzégovine. Nous pouvons lire le premier paragraphe je ne veux pas

  7   la faire. C'est bien cette délégation que vous venez de mentionner ?

  8   R.  Oui, c'est cette délégation sauf qu'un membre de cette délégation qui

  9   est membre du parti au pouvoir c'est fait remplacer par quelqu'un d'autre,

 10   mais oui, il s'agit de cette même délégation.

 11   Q.  Je ne vais plus étudier ce rapport. Ils ont eu des rencontres, des

 12   entretiens sur place. Ils évoquent les détails de tout cela.

 13   M. KOVACIC : [interprétation] Je précise à l'attention de la Chambre que

 14   ces trois documents ont déjà été versés au dossier.

 15   Q.  Je vais revenir un instant au lobbying du général Praljak. Vous avez

 16   dit à peu près sur quoi cela a porté. Est-ce que vous vous souvenez si le

 17   général Praljak a eu le droit de s'adresser directement aux députés au

 18   parlement au moment de ce débat qui portait sur la situation en Bosnie-

 19   Herzégovine ?

 20   R.  Non, je ne sais pas. J'étais membre de l'autre chambre. Là, nous

 21   parlons de la chambre des représentants.

 22   Q.  Oui, tout à fait. Je voulais qu'on confirme ça. Si je ne me trompe pas,

 23   vous étiez membre de la chambre autre, la chambre des régions

 24   administratives ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et là, c'est l'autre, la chambre des représentants qui s'est chargé de

 27   ces débats ?

 28   R.  Oui.

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  1   Mais je me souviens de ce rôle que nous partagions et aussi je me

  2   souviens de ce qui était de la situation à la cantine du parlement, et

  3   Praljak c'est quelqu'un qu'on remarque facilement, on se souvient

  4   facilement vu son tempérament. Donc, je me souviens de lui. Et d'une

  5   certaine manière j'ai été étonné de le voir là où il est arrivé et c'est ce

  6   qu'il a exigé à sa manière --

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Parce qu'il y a un problème technique. Voilà.

  8   Recommencez à répondre.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] -- donc, je me souviens de

 10   M. Praljak. Je l'ai vu dans le hall du parlement dans la cantine, le

 11   restaurant du parlement et devant le bâtiment. Il est très facile de le

 12   remarquer, vu sa manière de communiquer, cette manière très directe qui

 13   s'exprime. Et pour moi, c'était un petit peu étonnant de voir qui soit là,

 14   qui soit en train de demander des choses, et il s'adressait aux gens très

 15   simplement, en disant : "Mais, enfin, rendez-vous là-bas, rendez-vous pour

 16   voir la situation." C'est à peu près ce qu'il disait en abrégé. Il était

 17   accompagné d'autres personnes mais je ne sais plus de qui. C'est

 18   certainement lui qui a joué le rôle principal dans ce groupe.

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie. Je pense que cela suffit.

 20   Je pense que cela suffit. Nous pouvons continuer.

 21   Q.  Un autre sujet que je souhaitais aborder avec vous. A plusieurs

 22   reprises pendant votre interrogatoire principal, vous en avez parlé. A

 23   partir de 1994 puis 1995, vous avez dit que vous êtes allé en Bosnie-

 24   Herzégovine avec des convois humanitaires. Il s'agit de la page 79, lignes

 25   19 à 22 du compte rendu d'audience d'hier.

 26   Et, aujourd'hui, de nouveau, vers la fin des réponses à vos questions, page

 27   35, vous avez évoqué votre visite en Bosnie en tant que groupe du parlement

 28   faisant partie d'une délégation du parlement. Donc, là, nous avons évoqué

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  1   la première visite des députés. Il y en a eu d'autres.

  2   R.  Oui. Pour autant que je sache, c'était la première et par la suite, il

  3   y en a eu d'autres.

  4   Q.  Je vous remercie.

  5   Pour le compte rendu d'audience, il nous faut attendre pour que nos voix ne

  6   se chevauchent pas.

  7   Très bien. Changeons de sujet. Alors, page 45, 21 et 22 également, vous

  8   avez mentionné des soldats de l'ABiH qui à certains moments ou pour

  9   certains se sont rendus ou se rendaient voir leurs proches qui étaient pris

 10   en charge en République de Croatie. Vous travaillez au bureau chargé des

 11   Réfugiés et des Personnes déplacées. Mais compte tenu également du fait que

 12   vous avez été député, vous cherchez à savoir ce qui en était, vous vous

 13   informiez -- teniez informer de ce sujet.

 14   Les militaires de l'ABiH, eux aussi, pour certains se sont trouvés placer

 15   dans différents centres médicaux des hôpitaux de centres de réhabilitation

 16   en Croatie également ?

 17   R.  Oui, pendant toute la durée de la guerre en particulier c'était

 18   l'hôpital de Split qui a reçu beaucoup de blessés -- blessés, membres de

 19   l'ABiH, et également l'hôpital de Zagreb, l'hôpital Rebro, et le nouvel

 20   hôpital. Et puis après avoir subi des interventions chirurgicales, et

 21   cetera, nombreux d'entre eux ont été dépêchés dans des centres de

 22   Rééducation. Je pense que nous pouvons imaginer les chiffres importants. Je

 23   ne me suis pas très concrètement penché sur cela mais je sais qu'il y en a

 24   eu beaucoup qui ont reçu ce type de soin en particulier à Split --

 25   l'hôpital de Split. Et je pense que des dossiers très importants, tous les

 26   protocoles médicaux, existent à cet hôpital au sujet de tous les patients

 27   qui ont été hospitalisés là-bas.

 28   Q.  Je dois patienter un petit peu pour le compte rendu d'audience, mais

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  1   c'est un autre aspect de ce phénomène qui m'intéresse.

  2   De toute évidence, ce sont des proches, des voisins, des gens de leur

  3   village également qui se rendent auprès de ces patients des les hôpitaux,

  4   des gens qui se sont trouvés eux aussi en Croatie à ce moment-là. Vous êtes

  5   au courant de cela ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Vous avez déjà mentionné le fait que ces réfugiés, également ces

  8   patients, ces militaires dans les hôpitaux, ils regardent la télévision,

  9   ils suivent les médias, ils étaient, pendant qu'ils étaient en Croatie. Et

 10   là, vous avez dit quelque chose allant dans ce sens. Ils voyaient à la

 11   télévision qu'il y avait, par exemple, une victoire, une défaite des leurs

 12   en Bosnie; c'est bien cela ?

 13   R.  Oui, nous avons eu des cas de ce genre. Effectivement, littéralement,

 14   des cas où en l'espace, au sein d'un même établissement, il y ait la fête

 15   et le deuil, et j'ai été particulièrement secoué et ému par un cas dont

 16   j'ai été témoin direct.

 17   Q.  Cette situation complexe. Le mieux serait peut-être de la présenter à

 18   l'aide d'un exemple. Vous venez de dire que, personnellement, vous avez été

 19   impliqué dans un cas de comparable. Est-ce que vous pouvez nous le relater

 20   ?

 21   R.  Il s'agit d'un centre dans les environs de Makarska, des réfugiés de

 22   Bosnie centrale ont été placés là-bas et il y avait les uns comme les

 23   autres. Il s'agit de la famille de l'un de mes amis de Vitez. Ses proches,

 24   ses parents ont été placés là et ils ont perdu plusieurs membres de la

 25   famille. Et d'autres personnes, qui, eux aussi, se sont trouvés placer au

 26   même endroit avec eux, ont reçu de bonnes nouvelles -- bonnes nouvelles

 27   pour eux ou d'après leur vision des choses. Ça été une situation très

 28   difficile parce qu'ils se sont adressés à moi me demandant qu'on les reloge

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  1   ailleurs.

  2   Dans ce type de situation, il est très difficile de demander aux gens de

  3   rester ensemble. Je suis intervenu. A ce moment-là, j'ai demandé que l'on

  4   déplace ces gens. En fait, j'ai demandé que les personnes déplacées croates

  5   ou les réfugiés croates soient déplacés.

  6   Q.  Vu votre éducation, est-ce qu'on pourrait dire que ce type d'événements

  7   ou d'incidents -- est-ce que c'est quelque chose qui crée non seulement des

  8   problèmes politiques, mais aussi des problèmes sociaux, des problèmes au

  9   niveau de la société, et les questions d'éthique et de comportement au sein

 10   de la société se posaient ? Est-ce exact ? 

 11   R.  Oui, c'est exact. Dans ce type de situation, il est très difficile de

 12   garder la tête froide mais c'est indispensable, il faut garder son calme.

 13   Q.  Je vous remercie. J'ai une information portant sur un incident qui

 14   s'est produit également dans un hôpital en Dalmatie. Suite à un cas comme

 15   vous venez de le mentionner la victoire pour les uns, la défaite pour

 16   d'autres, et des blessés, des militaires de l'ABiH, qui suivaient une

 17   rééducation là, ont chanté après avoir entendu une nouvelle qui était une

 18   bonne nouvelle pour eux. Est-ce que vous avez entendu parler de cet

 19   incident à l'été 1993 ? Est-ce que vous êtes au courant également de ce

 20   type d'incident ?

 21   R.  Je ne suis pas au courant de ce type, de celui-là en particulier mais,

 22   de manière générale, je sais qu'il y a eu des incidents de ce type-là.

 23   Mais, concrètement, celui-là, non je ne suis pas au courant.

 24   Q.  Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions pour vous. Je vous

 25   remercie de votre aide.

 26   R.  Je vous en prie.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak.

 28   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Juste une question, Monsieur le

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  1   Président.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Que, oui, qui est motivé pour quelle raison ?

  3   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Une explication de cette situation.

  4   Qu'on ne cherche pas à contourner la situation, à tourner autour du pot, je

  5   voudrais poser une question portant sur le même sujet.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais consulter mes collègues.

  7   [La Chambre de première instance se concerte]

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Je vous ai posé la question et vous n'avez pas

  9   répondu, et mes collègues demandent quelle raison qui peut motiver que vous

 10   posez une question en fonction des lignes directrices que nous avions

 11   rendues, à savoir que vous avez une connaissance technique personnelle du

 12   problème, le cas échéant, vous avez rencontré l'intéressé. Quelle est la

 13   raison qui vous permet de poser la question puisque la Chambre a décidé

 14   comme cela.

 15   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je souhaite uniquement que l'on tire au

 16   clair la situation. Donc, il y avait des réfugiés en Croatie à 596 endroits

 17   pour ce qui est du séjour organisé. Très souvent, c'étaient des Croates et

 18   des Bosniens, c'est-à-dire Musulmans, placés ensemble. Des incidents se

 19   sont produits; pour autant que je le sache, ces incidents étaient d'un

 20   certain type et je voudrais demander au témoin s'il le sait parce qu'il y a

 21   eu des célébrations des membres de l'ABiH qui célébraient leurs victoires

 22   de manière bruyante, et je voudrais donc en substance demander au témoin

 23   s'il y a eu des célébrations, des fêtes, suite à des victoires à Bugojno de

 24   l'ABiH dans des centres de Réfugiés sur le territoire de Croatie, et

 25   comment est-ce que cela a été accueilli par des Croates qui étaient

 26   originaires de même bourgade qu'eux.

 27   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, après cela, je demanderais à la

 28   Chambre la possibilité de m'adresser à la Chambre au sujet de mon droit de

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  1   poser des questions. Dans votre décision, l'on lit clairement que j'ai la

  2   possibilité de poser mes questions si j'ai des connaissances directes ou

  3   techniques. Donc, est-ce que je peux m'adresser à la Chambre par la suite

  4   pour demander jusqu'où s'étendront les restrictions quant à mes droits.

  5   Est-ce qu'à chaque fois, vous allez vous servir de votre droit

  6   discrétionnaire en réduisant mon droit à un jugement équitable, à un procès

  7   équitable ?

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a deux problèmes. Le premier problème, vous

  9   voulez poser une question, alors, je vais consulter mes collègues.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Praljak, sur le premier -- la

 12   question que vous vouliez poser, la Chambre estime que c'est une question

 13   sans objet parce que le témoin a déjà répondu. Il a dit qu'il y avait des

 14   incidents notamment liés à divers événements dont, par exemple, celui de

 15   Bugojno, à titre d'exemple. Donc, il a répondu. Votre question n'apporte

 16   rien. Alors, maintenant, donc, elle est sans objet et il n'y a pas lieu de

 17   poser la question.

 18   En revanche, maintenant, sur l'intervention que vous voulez faire devant la

 19   Chambre, je vais à nouveau consulter mes collègues pour savoir qu'est-ce

 20   qu'on décide.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Praljak, après consultation des

 23   Juges, la Chambre rappelle qu'elle a rendu une décision sur l'étendue des

 24   questions que vous avez le droit de poser. Cette décision a été confirmée

 25   par la Chambre d'appel. Cette décision a été rendue au moment de la phase

 26   de la présentation des éléments de preuve par l'Accusation. La Chambre

 27   considère que le même système doit prévaloir quand ce sont les éléments

 28   présentés par la Défense. Mais rien ne vous interdit à faire une requête

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  1   écrite, la Chambre pourra la traiter après observation du Procureur, et le

  2   cas échéant, vous pouvez faire une demande de certification d'appel. Voilà

  3   ce que je vous dis. C'est une décision de la Chambre qui a été confirmée

  4   par la Chambre d'appel. Donc, il n'y a pas de restriction de vos droits de

  5   poser des questions, d'autant que votre avocat peut poser la question que

  6   vous avez soulevée, il aurait très bien pu également la développer lui-

  7   même. Donc, voilà.

  8   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

  9   Juges, nulle part dans cette décision, il n'est fait mention de question

 10   technique. Tout d'abord, pourriez-vous me préciser, s'il vous plaît, de

 11   quoi il s'agit ? Ce qui signifient les mots que vous avez signés ? A savoir

 12   s'il a été appliqué personnellement, s'il peut témoigner personnellement,

 13   donc, si les questions relèvent --

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'ai pas la décision sous les yeux et je n'ai pas

 15   la traduction qui a été faite de notre décision dans votre langue. Si vous

 16   l'avez, relisez-la pour nous, ça a été très clair. Les questions

 17   techniques, par exemple, les tirs de fusil, la question liée à l'armée, et

 18   cetera, où vous avez une connaissance technique personnelle, oui. Donc, ça,

 19   vous pourrez poser une question. La connaissance particulière que vous avez

 20   par rapport au témoin, et justement je voulais poser une question et vous

 21   vous êtes levé, vous m'avez empêché de poser la question. Et selon la

 22   réponse du témoin, vous auriez pu à ce moment-là intervenir. Tout ceci est

 23   expliqué dans notre décision, ça a été contesté par vous-même. La Chambre

 24   d'appel a confirmé la position de la Chambre. Je rappelle et vous le savez

 25   mieux que quiconque qui a eu un débat au sein de la Chambre, moi, à titre

 26   personnel, j'étais pour ne pas limiter votre droit, mes collègues ont

 27   décidé autrement. Et donc, il y a une majorité de la Chambre qui a pris

 28   cette décision à laquelle je suis obligé de me conformer.

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  1   Et la Chambre d'appel a confirmé la décision majoritaire de la Chambre.

  2   Voilà, c'est tout ce que je peux vous dire. Je ne peux pas dire autre

  3   chose.

  4   Oui, Maître Kovacic.

  5   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas que le

  6   moment sera propice pour ce qui est d'entrer dans les détails. Votre

  7   décision est ce qu'elle est; je crois que nous nous sommes conformés de

  8   façon absolue à cette décision pendant la présentation des éléments de

  9   preuve de l'Accusation. Nous nous sommes conformés, il y a des définitions

 10   qui sont données on ne va pas rentrer dans les détails. Mais je ne puis ne

 11   pas dire qu'à la fin de la présentation des éléments à charge de

 12   l'Accusation, une interprétation de la part de la Chambre de cette décision

 13   a été faite, qui s'est faite quelque peu plus restrictive. La dernière fois

 14   que ça a été fait, les Juges de la Chambre ont dit strictement rien que les

 15   questions militaires. Or, ce n'était ni la lettre ni l'esprit de la

 16   décision du mois de mai 2007, prise par les Juges de la Chambre.

 17   Je propose qu'on n'en parle plus à présent pour ne pas donc perdre notre

 18   temps, mais je vais présenter une requête par écrit, chose que j'ai le

 19   droit de faire comme vous l'avez dit vous-même à savoir que la chose soit

 20   réexaminée.

 21   Parce que Messieurs les Juges, je me dois de dire une chose pour les

 22   besoins du compte rendu de cette audience. Compte tenu de l'évolution de

 23   cette question et d'un droit assez important attribué à l'accusé au début

 24   du procès pour ce qui est de sa participation active au contre-

 25   interrogatoire des témoins, jusqu'à la décision rendue par vos soins qui se

 26   trouve être quelque peu plus restrictive et qui a fait l'objet d'un appel

 27   de ma part et vous avez dit que la Chambre d'appel a rejeté cet appel et

 28   qu'on a même tenu la décision rendue par la Chambre. Dans la phase

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  1   ultérieure, cette décision à la fin de la présentation des éléments à

  2   charge a été réinterprétée et c'est la raison pour laquelle cela mérite

  3   d'être réexaminé.

  4   Mais, bien sûr, en ma qualité d'avocat, ce que j'appréhende à la fois - et

  5   je vais le dire franchement - c'est que cette décision ne soit rendue

  6   encore plus restrictive par la suite. J'estime que celle qui est en vigueur

  7   et qui date du mois de mai de l'an passé, bien que je ne sois pas tout à

  8   fait d'accord avec elle mais à mon avis au moins assure-t-elle un minimum

  9   de droit que l'accusé devrait avoir dans une procédure européenne

 10   coutumière. J'estime que cela a à être expliqué mais si on vient à

 11   interpréter de façon restrictive et je maintiens le qualificatif en disant

 12   que c'est bien le cas, nous allons avoir de plus en plus de problème parce

 13   que l'accusé devient de plus en plus l'objet de cette procédure au pénal.

 14   Or, en application de la théorie en matière de droit pénal, de nous autres

 15   continentaux, il devrait être sujet actif de la procédure.

 16   Alors, la question qui se pose c'est celle d'abuser du temps en

 17   répétant des questions, là je crois que les Juges de la Chambre ont un

 18   outil qui est celui d'interrompre et de l'empêcher de gaspiller le temps

 19   des Juges de la Chambre. Ça c'est incontestable. Donc, je propose qu'on

 20   mette un terme à ce débat. Nous avons présenté une requête par écrit pour

 21   re-soulever la question.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, votre avocat, qui parle d'or, nous

 23   a expliqué qu'il allait donc faire une requête pour relayer vos

 24   préoccupations et la Chambre rendra une décision. C'est ce que je vous ai

 25   dit tout à l'heure. Qu'est-ce que vous voulez rajouter ?

 26   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge, je veux juste ajouter

 27   le fait qu'en application de votre décision dont je connais bien le texte,

 28   il est dit que là où j'ai des connaissances particulières et où la j'ai été

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  1   impliqué, j'avais le droit de poser des questions, non pas seulement au

  2   sujet de l'armée, parce qu'une question prise tellement claire se rapporte

  3   de façon explicite à la possibilité de gérer ou de commander l'armée qui se

  4   trouve à 20 kilomètres de l'endroit où ce type de chose se passait, il

  5   s'agissait de prendre part aux activités.

  6   Et c'est là justement la substance de l'observation des choses. Je ne suis

  7   pas mis en accusation rien que pour des sujets militaires parce que, dans

  8   l'acte d'accusation, il est dit que je suis le lien entre la partie croate

  9   de l'entreprise criminelle commune et ce qui se passe en contrebas, et on

 10   ne le dit pas seulement militairement mais politiquement aussi. Je ne suis

 11   pas seulement un militaire, mais d'une certaine façon me trouvais-je être

 12   impliqué à demander à ce qu'une délégation du parlement aille là-bas pas

 13   peut-être par la force mais presque. Alors, il y est dit : s'il est

 14   impliqué dans les événements et s'il a des connaissances particulières à ce

 15   sujet. Mais mes connaissances particulières ne portent pas seulement sur

 16   l'armée, cela porte sur l'état de conscience social, la politique et la

 17   possibilité de gérer ou de conduire des activités.

 18   Et je voudrais que vous posiez vous la question au témoin pour qu'il nous

 19   réponde, de façon claire -- ou cristalement [comme interprété] claire :

 20   est-ce qu'il y a eu des éléments armés et comment cela s'est-il répercuté

 21   [imperceptible] ? Merci.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : -- l'intention de le faire.

 23   Monsieur le Témoin, je voulais vous poser la question suivante : vous nous

 24   avez dit qu'étant au parlement, et on a appris une précision vous êtes

 25   membre de la chambre haute alors qu'il y a la chambre des représentants.

 26   Vous avez vu ou entendu M. Praljak qui faisait du lobbying. Très bien.

 27   Après quoi, nous savons que, vous-même, vous avez été sur place. Nous

 28   savons par les documents que l'avocat a présentés qu'il y a également

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  1   d'autres parlementaires qui se sont rendus sur les lieux. Alors, voilà la

  2   question que je veux vous poser avant que M. Praljak intervienne.

  3   Vous-même, connaissiez-vous M. Praljak personnellement ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai connu. Il résidait à Zagreb et je

  5   l'ai connu en 1990, date à laquelle il a fait son apparition en public.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  7   Deuxièmement, quand vous avez été en Bosnie centrale - et on voit

  8   bien que vous aviez été pendant les moments où il y avait un état de

  9   belligérance entre les parties - pour y aller, vous avez été pris au départ

 10   en charge par qui, le HVO ou la BiH ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous ne sommes jamais allés là-bas au nom des

 12   uns ou des autres. Nous sommes allés là-bas en notre nom à nous. On avait

 13   besoin de l'aide des uns et des autres pour pouvoir passer par des régions.

 14   Nous n'avons pas eu de gros problèmes avec le HVO, mais une fois arrivée

 15   jusqu'à Prozor, par exemple, il a souvent fallu négocier et demander des

 16   contacts auprès de toutes les parties en présence pour qu'on nous laisse

 17   passer au-delà. Très souvent, on informait par écrit toutes les personnes

 18   qui étaient censées de notre avis nous aider et nous essayons de faire

 19   notre séjour public parce que cela garantissait en quelque sorte notre

 20   sécurité à nous aussi.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : -- les contacts que vous avez eus, est-ce que vous

 22   avez eu un contact avec M. Praljak, par écrit, par téléphone, oralement,

 23   par un intermédiaire ? Est-ce qu'il a joué un rôle pour que vous puissiez -

 24   vous et vos camarades parlementaires -vous rendre sur les lieux ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de mes déplacements à moi, je

 26   ne sais pas. Je ne sais pas s'il a -- il a peut-être eu un rôle dont je

 27   n'ai pas été au courant, mais je ne lui ai pas demandé moi.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, pendant votre séjour, vous n'avez eu aucuns

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  1   contacts avec M. Praljak ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Pendant qu'il assumait sa mission ou

  3   qu'il se trouvait à la tête du HVO, je ne sais pas trop ce qu'il faisait,

  4   je ne suis pas un expert en la matière. C'était une personnalité importante

  5   là-bas mais je n'ai pas eu de contacts avec lui sur ces sujets-là, non.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Et côté la BiH, qui était votre contact principal ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous n'avons, en réalité, jamais réussi à

  8   avoir accès jusqu'au haut gradé. Nous avons toujours négocié avec les

  9   commandants locaux, voire avec les militaires directement impliqués dans

 10   les postes de contrôle. Le plus souvent, il s'agissait de s'entretenir avec

 11   les commandants locaux qui étaient eux fort nombreux à chaque fois et avec

 12   ces soldats qui étaient eux-mêmes chargés des postes de contrôle pour

 13   qu'ils vous laissent passer. Parfois ils voulaient passer; parfois pas.

 14   Parfois ils nous disaient de rebrousser chemin. Ils nous disaient parfois :

 15   attendez un peu, patientez, attendez que ça se calme un peu.

 16   Et pour nous, c'étaient des commandants locaux, les petites légumes,

 17   les soldats ordinaires, leurs supérieurs immédiats. Je n'ai jamais contacté

 18   pour ma part des commandants haut placés.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Petite précision. Ceci était lié les

 20   questions qui vous ont été posées -- ont toutes trait à la mission des

 21   parlementaires mais vous avez parlé d'autres visites que vous avez faites

 22   en Bosnie car si je m'abuse d'après les documents, vous n'étiez pas membre

 23   de la délégation parlementaire, même si vous étiez parlementaire à l'époque

 24   ? Est-ce que vous pouvez nous confirmer cela ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas été membre de cette délégation-là

 26   mais, à ce moment-là, j'étais membre du parlement. Alors, s'agissant de cet

 27   événement, ça s'est fait de façon organisée avec l'aide des effectifs

 28   internationaux et cela a été consigné et on a également informé

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  1   l'ambassadeur en Bosnie-Herzégovine à Zagreb.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Merci pour vos réponses. Alors, on va passer

  4   maintenant à Me Alaburic.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  6   tous et à toutes dans le prétoire. 

  7   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Zoric.

  9   R.  Bonjour.

 10   Q.  Je m'appelle Alaburic, Vesna et je suis ici pour défendre le général

 11   Milivoj Petkovic. Dites-moi : avez-vous connu le général Petkovic ?

 12   R.  Oui, j'ai connu M. Petkovic.

 13   Q.  Pouvez-vous nous dire dans quelles circonstances vous avez fait sa

 14   connaissance ?

 15   R.  J'ai fait sa connaissance au travers de sa carrière. Parfois il

 16   intervenait dans le public. On pouvait voir ou entendre ses propos dans le

 17   public, je savais donc qui c'était, et à plusieurs reprises, j'ai eu

 18   l'occasion de le rencontrer et de lui dire bonjour. Ce n'est pas une

 19   connaissance importante que nous avons réalisée entre nous. Je sais qui

 20   c'est, je sais que c'était un militaire et je sais à peu près ce qu'il

 21   faisait.

 22   Q.  Je n'ai pas eu l'intention et probablement ne vais-je pas vous

 23   entretenir longuement sur bien des points, mais ce que je voudrais ici

 24   qu'on tire au clair certains détails. Vous nous avez expliqué ici que la

 25   Croatie se trouvait être signataire de la convention internationale

 26   relative au statut des réfugiés ainsi que des protocoles de 1967,

 27   concernant le statut des réfugiés. Vous en souvenez-vous ?

 28   R.  Oui, la Croatie a signé ces conventions. C'est des conventions de 1951

Page 27989

  1   et le protocole lui est de 1967.

  2   Q.  Essayons de définir quand est-ce que --

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Puis-je interrompre ? Je

  4   souhaiterais rappeler les parties d'attendre et de ménager des pauses afin

  5   que les interprètes puissent interpréter, avoir le temps d'interpréter car,

  6   encore une fois, il y a un chevauchement et nous n'arrivons pas à suivre

  7   même si nos interprètes sont excellents et je souhaiterais les féliciter et

  8   leur donner tout mon appui.

  9   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je souhaiterais confirmer que je

 10   partage l'opinion de mon collègue mais je voudrais également ajouter que

 11   les conventions de Genève ont été conclues en 1951 et non pas en 1957. Je

 12   souhaiterais cela pour le compte rendu d'audience.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Je remercie les Juges des instructions qui

 14   nous ont été données et, bien entendu, M. Zoric nous devons nous y

 15   confirmer tous les deux. Je remercie également le Juge Prandler de cette

 16   rectification. Le témoin a dit justement que cette convention datait de

 17   1951 et le protocole lui datait de 1967. 

 18   Q.  Essayons, Monsieur Zoric, de nous pencher sur le fait de savoir quand

 19   est-ce que la Croatie est devenue partie prenante à ces traités

 20   internationaux. Alors, est-ce que vous savez que la Croatie de part son

 21   notification portant succession dès la première journée de son indépendance

 22   le 8 octobre 1991, est devenue partie prenante à bon nombre de traités

 23   internationaux, y compris ce relatif au statut des réfugiés ?

 24   R.  Je sais cela mais à la demande de l'Union européenne, la Croatie a

 25   suspendu cette décision portant accession à l'indépendance et je pense que

 26   pour ce qui est de toutes les conventions internationales les Nations

 27   Unies, y compris celles qui ont été évoquées tout à l'heure, nous les avons

 28   adoptées après l'accession de la Croatie aux Nations Unies, c'est-à-dire

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  1   après notre affiliation aux Nations Unies.

  2   Q.  Je m'excuse, Monsieur Zoric, à toutes les personnes dans ce prétoire.

  3   Je pense que vous avez dû commettre une erreur non intentionnelle. Pouvons-

  4   nous tomber d'accord sur le fait que la Croatie a proclamé son indépendance

  5   en juillet 1991, et qu'il y a eu un moratoire de trois mois proclamé en

  6   juillet 1991 et le moratoire en question a pris fin en octobre 1991 et nous

  7   célébrons la fête de l'indépendance qui se situe au mois d'octobre 1991,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  C'est bien exact.

 10   Q.  Alors, pouvons-nous nous mettre d'accord sur le fait que de par sa

 11   notification portant succession à la république dès la première journée

 12   d'accession à l'indépendance est devenue partie prenante à ces traités

 13   internationaux ?

 14   R.  Oui, nous sommes d'accord.

 15   Q.  Bien, je voulais que nous tirions cela au clair. Veuillez nous

 16   indiquer, Monsieur Zoric, si vous avez connaissance du fait que les accords

 17   internationaux en application de la constitution croate font partie du

 18   système juridique croate, au cas où la Croatie accèderait à l'un quelconque

 19   de ces accords ou traités

 20   internationaux ?

 21   R.  Oui, j'ai connaissance de ce fait.

 22   Q.  Saviez-vous qu'en application de la constitution croate, ce type de

 23   traités internationaux ont plus de poids que la législation croate

 24   proprement dite ?

 25   R.  Oui, je n'ignore pas le fait que la législation internationale se

 26   trouve avoir plus de poids que la législation nationale.

 27   Q.  Bon. Je tiens à vous rappeler un document qui est fort important et

 28   dont vous avez longuement parlé avec mon confrère,

Page 27991

  1   M. Karnavas. Je ne vais vous donner des renseignements, vous n'avez pas de

  2   temps à perdre au niveau de la recherche. Il s'agit du

  3   1D 2626, qui se trouve dans le jeu de documents de M. Petkovic, dans la

  4   partie numéro 4, où il y est question de la dynamique ou de la décadence de

  5   la crise des réfugiés. On dit que la République de Croatie fait face à un

  6   grand nombre de réfugiés originaires de la Bosnie-Herzégovine à partir du

  7   mois d'avril 1992 et au-delà.

  8   Alors, pouvez-vous nous dire, Monsieur Zoric, si ce renseignement est exact

  9   ? Donc, à compter du mois d'avril et au-delà, la République de Croatie fait

 10   face à une vague de réfugiés en provenance de Bosnie-Herzégovine ?

 11   R.  Oui, et en trois ou quatre mois à peine, le chiffre est monté à plus de

 12   200 000.

 13   Q.  Dans la partie 4, on donne les renseignements sur la croissance de ce

 14   nombre en haut en avril, ils étaient plus de

 15   190 000; en août, ils étaient plus de 360 000; en décembre, ils étaient

 16   plus de 370 000, et cetera. Alors, ces chiffres, d'après vous, se trouvent

 17   être exacts ou pas ?

 18   R.  C'est exact.

 19   Q.  J'aimerais qu'on détermine ensemble maintenant quelle est la

 20   réglementation portant sur les réfugiés qui était en vigueur à l'époque où

 21   la Croatie a commencé à faire face à cette vague de réfugiés. Je vous prie

 22   de vous référer à mon jeu de documents. Le document qui porte le 4D 1232.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Alors, observation à l'intention des Juges

 24   de la Chambre. Cette loi portant sur le déplacement et le séjour des

 25   étrangers, je ne l'ai pas en version traduite de façon intégrale; la

 26   traduction va jusqu'à l'article 43 seulement. Aussi, estimais-je nécessaire

 27   que cette loi existe afin qu'ils puissent être vus de quelle façon la

 28   Croatie a ménagé le statut des réfugiés ? Je n'ai pas l'intention de

Page 27992

  1   parcourir les différentes dispositions de façon détaillée avec ce témoin.

  2   Q.  Monsieur Zoric, je vous demande de vous pencher rapidement sur

  3   l'article 22 qui parle du séjour des étrangers partant de la reconnaissance

  4   de leur statut de réfugiés. Puis ensuite, je vous réfère au chapitre 5

  5   entier qui porte sur les réfugiés, à savoir articles 31 à 38 inclus, puis

  6   toute une autre série d'articles. Et ma question à ce sujet est la suivante

  7   : serait-il exact de dire que, par l'acquisition de ce statut de réfugiés

  8   au sein de la République de Croatie, c'était un élément qui était prévu par

  9   les textes de lois relatifs à l'arrivée et au séjour des étrangers tel que

 10   je vous l'ai montré ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Si vous vous penchez maintenant sur la partie introductive de ce décret

 13   --

 14   M. SCOTT : [interprétation] Désolé, je souhaite m'excuser auprès de mon

 15   éminente consoeur. Est-ce que nous avons une traduction anglaise de ce

 16   document ? Non. Ah, bon. Très bien. Merci.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vais répéter. Je regrette beaucoup le

 18   fait que nous n'ayons pas cela d'intégralement traduit. J'ai pris hier la

 19   décision de me servir de cette loi pour mon contre-interrogatoire, et

 20   malheureusement, je n'ai --

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Encore, vous nous dites dans son

 22   ensemble. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire quelles sont les

 23   parties qui ont été traduites ?

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] J'ai dit jusqu'à l'article 43 compris,

 25   inclus.

 26   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, je voulais seulement

 27   venir en aide à Me Alaburic et dire qu'un très grand nombre de pages ont

 28   été traduites en anglais, et nous pouvons trouver ces passages dans la

Page 27993

  1   première partie du document, à savoir l'article 2, qui fait référence aux

  2   réfugiés et également que ceci a -- que cet état des réfugiés est basé sur

  3   les conventions de Genève de 1951 et le protocole de 1967, et ce protocole

  4   a été adopté à New York dans le cadre du travail des Nations Unies alors

  5   que la convention de 1951 a été adoptée à Genève par les Etats qui ont pris

  6   part à la conférence diplomatique. Merci.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Attendez, Maître Alaburic. Il semble qu'il y a

  8   un problème. Dans votre classeur, il y a le document 4D 1231, et j'ai

  9   l'impression que mon collègue vient de lire ce document et il y a le

 10   document 4D 1232, qui lui -- moi, je ne l'ai pas traduit. Je n'ai pas la

 11   traduction en anglais. Alors, quand vous parlez de l'article 22, c'est

 12   l'article 22 de quel document ? Et nous n'avons pas la traduction en

 13   anglais et le système e-court ne l'a pas non plus.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si je puis, ce que nous avons c'est

 15   la loi sur l'asile mais ce n'est pas la même chose, n'est-ce pas ? 

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, dans mon jeu de

 17   documents, il y a deux lois. Il y en a un qui porte asile et l'autre porte

 18   sur le déplacement et le séjour des étrangers. La loi portant sur le droit

 19   d'asile existe en version anglaise. Il s'agit d'une loi de 2003, et cette

 20   loi met hors vigueur ou hors validité certaines dispositions relatives à la

 21   loi de 1991 relatives au séjour et au déplacement des étrangers. Les

 22   dispositions mises hors vigueur se rapportent aux réfugiés. La loi que je

 23   n'ai pas en version traduite c'est la loi sur le séjour ou le déplacement

 24   des étrangers. Je voulais dire que je n'avais que la traduction de la

 25   première moitié du texte de cette loi. Au cas où vous souhaiteriez

 26   déterminer que le chapitre 5 aménage bel et bien le sujet des réfugiés, je

 27   pourrais faire placer ce document sur le rétroprojecteur. J'ai estimé que

 28   personnellement que cela n'a pas été si nécessaire que cela.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne sais pas qu'est-ce que vous vouliez mettre en

  2   évidence par vos questions au témoin. Mais si vos questions sont d'une

  3   importance capitale, à ce moment-là, il faut que les Juges aient la version

  4   anglaise du texte; sinon, comment voulez-vous qu'on puisse donner une

  5   valeur probante aux réponses qui vont être données à partir d'un texte dont

  6   nous n'avons pas la traduction et à partir de fragments que vous allez

  7   introduire. C'est ça que je ne comprends pas.

  8   Si vous préparez le contre-interrogatoire de ce témoin, il y a des éléments

  9   importants qui peuvent intéresser les Juges et avoir un impact; à ce

 10   moment-là, venez à l'audience avec les documents traduits car vous savez et

 11   vous nous avez vus les Juges, il y a un texte qu'est-ce qu'on fait nous; on

 12   regarde le texte de l'article 1 au dernier article. On ne se contente pas

 13   d'avoir les bras croisés et d'écouter ce que vous dites. On écoute ce que

 14   vous dites mais en plus, on regarde le document, et moi, j'ai le scanne de

 15   la première page à la fin pour voir s'il n'y a pas d'éléments qui vous ont

 16   échappé ou des éléments qui contredisent ce que vous dites. Mais si vous me

 17   présentez un document dans votre langue sans que je ne puisse faire ce

 18   travail, je n'ai plus qu'à me croiser les bras et attendre la question

 19   suivante.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, au tout début, j'ai

 21   indiqué que, s'agissant de ce témoin qui n'est pas un juriste, je n'avais

 22   nullement l'intention d'analyser des textes de loi. Je lui ai montré ce

 23   texte de loi-ci pour un élément tout à fait simple. Hier, il a été question

 24   d'une loi portant statut des personnes déplacées et des réfugiés et,

 25   Messieurs les Juges, on posait toute une série de questions qui ont

 26   clairement fait entendre qu'il ne comprenait pas partant de quoi les

 27   réfugiés originaires de Bosnie-Herzégovine recevaient un statut de réfugié,

 28   car la loi qu'on leur avait montrée se rapportait uniquement à des citoyens

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  1   de la République de Croatie et à des événements survenus sur le territoire

  2   de la République de Croatie.

  3   Aussi, je souhaitais montrer ou demander à ce témoin de nous dire si

  4   l'accession au statut de réfugié était aménagée par cette loi relative au

  5   séjour et déplacement des étrangers. Et j'ai indiqué que nous avions la

  6   moitié de ce texte de loi de traduit. Je n'ai pas l'intention de le faire

  7   verser au dossier parce que nous n'avons pas sa traduction. Mais nous

  8   aurons d'autres témoins d'ici à ce moment-là, le texte sera traduit, on

  9   vous le montrera. 

 10   Pour les besoins de mon contre-interrogatoire, il suffisait donc de

 11   demander à ce témoin de vous dire à vous, Messieurs les Juges, que cette

 12   accession au statut de réfugié s'agissant de personnes originaires de la

 13   Bosnie-Herzégovine, c'était un élément aménagé par la loi portant séjour et

 14   déplacement des étrangers.

 15   Ce qui est important pour les besoins de mon contre-interrogatoire, et

 16   j'estime pour vous aussi, c'est de déterminer que cette loi a été adoptée

 17   au mois de juin 1991, qu'elle est entrée en vigueur à la date de sa

 18   publication donc le 8 octobre 1991, donc, au moment de l'accession de la

 19   République de Croatie à son indépendance et la question que je voulais

 20   traiter avec ce témoin, c'est de savoir si l'ordre, l'adoption de cette

 21   réglementation on avait envisagé la possibilité de voir la Croatie de faire

 22   face à un tel problème d'afflux de réfugiés depuis la Bosnie-Herzégovine.

 23   Donc, je voulais qu'on précise quelle est la loi qui aménageait tel sujet

 24   ou telle autre matière et vous allez voir la traduction d'ici là pour vous

 25   référer à des parties de la législation en question si vous estimez

 26   nécessaire.

 27   Alors, pour vérifier que je dis bien la vérité, vous pouvez vous

 28   référer au 4(d) 1231, qui est une loi portant sur le droit d'asile qui se

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  1   trouve être traduite en anglais et dans ces dispositions finales, à savoir

  2   l'article 72. Il y est dit quelles sont les dispositions qui, dans la loi

  3   relative au séjour des déplacements des étrangers, se trouvent être mises

  4   hors vigueur alors que cela se rapporte aux questions relatives aux

  5   réfugiés.

  6   Et c'est tout ce que j'ai estimé nécessaire de dire à ce sujet et

  7   cette argumentation a été plutôt longue, or, la question voulait savoir

  8   seulement quelle est la loi qui aménage ce type de question aux concis.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

 10   Juges, je dois m'associer à l'Accusation -- je n'ai pas vu cela.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [hors micro]  

 12   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi ses propos.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 14   remercie Me Karnavas. Pour être tout à fait clair, je ne soulève aucune

 15   objection à ce que -- je sais très bien que mon éminente consœur avait

 16   toutes les bonnes intentions du monde. Ce n'est pas cela que je veux dire.

 17   Mais il y a un problème fondamental qui se pose de nouveau. Je crois,

 18   bien sûr, mon éminente consœur mais la loi, qui n'a pas été traduite, est

 19   la loi qui s'applique, et donc, pour les personnes qui sont présentes dans

 20   le prétoire et qui ne parlent pas croate, nous n'avons pas cette loi à

 21   notre disponibilité, je ne peux pas poser des questions. Je ne peux pas

 22   mener un contre-interrogatoire sur la base de cela. Je peux certainement

 23   relire ce que nous a dit mon éminente consœur. Tout ce dont nous avons

 24   parlé pendant déjà un jour et demi, le statut des réfugiés est régi par

 25   cette loi dont nous n'avons pas de traduction. Alors, voilà le grand

 26   problème. Je ne peux pas certainement poser des questions supplémentaires,

 27   je ne peux pas mener un contre-interrogatoire si je n'ai pas de document.

 28   Je sais qu'il est très difficile de se préparer, enfin de préparer

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  1   tous les documents mais l'Accusation est dans la même situation. Je ne peux

  2   certainement pas poursuivre sans avoir la traduction de ce document.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Je m'associe à l'objection soulevée par

  4   l'Accusation, car moi aussi j'ai le droit de poser des questions

  5   supplémentaires. Si j'ai bien compris ce qu'a dit

  6   Me Alaburic, elle a dit que nous ne savons pas ce que nous sommes en train

  7   de faire. Vous l'aurez remarqué, j'ai montré la lettre du

  8   Dr Rebic qui renvoie à la décision qui est apparue dans le journal

  9   officiel. En tout cas, j'ai parlé des paragraphes qui de l'avis du Dr Rebic

 10   étaient la loi en vigueur.

 11   Mais regardons aussi le moment auquel ceci intervient, car après nous

 12   aurons un décret, une décision et vous avez entendu dire pourquoi cette

 13   décision était nécessaire. Si Me Alaburic maintenant a l'intention de

 14   s'attaquer à nous, de contester ce que nous avons dit, et bien, elle doit

 15   fournir une traduction. L'idée de parler d'une loi croate mais en tant que

 16   juriste comme de loi, je suis tout à fait à même d'interpréter cette loi.

 17   Et je fais objection à ce qu'elle dit que c'était cette loi qui

 18   s'appliquait alors que nous, nous disions que c'était tant le décret que la

 19   décision qui s'appliquaient d'autant que M. Rebic fait référence à cette

 20   décision dans la lettre qu'il envoie à l'ambassadeur Turkovic pour ce qui

 21   est de la raison pour laquelle certaines personnes étaient envoyées en

 22   Bosnie-Herzégovine. Apparemment, d'après M. Rebic, ces personnes n'avaient

 23   plus le statut de réfugié, la situation s'était calmée, alors tant qu'on

 24   n'a pas de traduction, je fais objection.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, cette question du statut juridique

 26   des réfugiés n'est pas une question nouvelle. Il y a des mois de cela, si

 27   je ne me rappelle plus quel témoin était venu et j'avais dit moi-même en

 28   interrogeant la Défense : quels sont les textes qui régissent en République

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  1   de Croatie le statut des

  2   réfugiés ? J'avais posé moi-même la question, et de mémoire, j'avais fait

  3   référence au convention de Genève. Mais j'avais demandé : "Quel est le

  4   droit croate en la matière ?" Bon, j'avais posé cette question. Ça fait des

  5   mois, voire peut-être même plus d'une année. Vous arrivez aujourd'hui pour

  6   nous dire quelque chose, très bien, vous avez peut-être raison, moi, je ne

  7   dis pas que vous avez tort. A ce moment-là, il fallait venir avec le texte

  8   avec la traduction anglaise pour que justement nous soyons à même de poser

  9   les questions, le Procureur a fait une objection en disant que lui, pour

 10   qu'il contre-interroge, encore faut-il qu'il ait le texte; et

 11   Me Karnavas vient également de dire que lui aussi veut avoir dans sa

 12   langue, le texte. Alors, voilà la situation.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Et si je puis apporter juste une

 14   explication. Si j'avais eu l'intention de citer en tant que mon témoin, ce

 15   témoin pour qu'il parle des réfugiés, cette loi aurait certainement été

 16   traduite en langue anglaise. Hier, à l'occasion de votre question, j'ai

 17   pris la décision - et ce n'était pas seulement à cause de la question posée

 18   par M. le Président Antonetti, mais aussi à cause de la réponse apportée

 19   par M. Zoric qui a dit qu'il n'y avait pas seulement le décret qui était en

 20   vigueur sur le statut des personnes déplacées, des réfugiés, mais qu'il y

 21   avait aussi des textes de loi qui régissaient le statut des étrangers.

 22   Hier, en préparant mon contre-interrogatoire, j'ai décidé de poser

 23   cette question au témoin. Et j'ai estimé qu'il était correct de ma part de

 24   préparer le texte de cette loi. Mais je n'ai pas l'intention de m'occuper

 25   de cette loi maintenant; c'était juste une base me permettant d'aborder la

 26   question suivante, à savoir ma question suivante porte sur le décret

 27   portant au statut des réfugiés et des personnes déplacées en vigueur.

 28   Q.  Monsieur Zoric, pendant que vous étiez au bureau - document 1D2588,

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  1   c'est dans le jeu de documents de la Défense de M. Prlic - est-ce que vous

  2   pouvez, s'il vous plaît, jeter un coup d'œil sur ce document ?

  3   Et ma question sera la suivante : est-ce que nous pourrions être d'accord

  4   sur le fait que le fait que ce document était en vigueur jusqu'au mois

  5   d'octobre 1993 ? C'est à ce moment-là qu'on a adopté la loi au sujet de

  6   laquelle vous avez répondu aux questions de mon confrère Karnavas, hier ?

  7   2588.

  8   R.  Oui, nous pourrions nous mettre d'accord là-dessus.

  9   Q.  Article 26, s'il vous plaît. Me Karnavas a attiré votre attention là-

 10   dessus. Cet article important figure dans ce décret. Donc, il est dit ici

 11   que les dispositions des articles 13 à 19 du décret doivent s'appliquer aux

 12   réfugiés de manière appropriée. Donc, dans les articles 13 à 19 du décret,

 13   on régit la question d'aide aux personnes déplacées; c'est bien cela ?

 14   R.  Oui. Dans les articles 13 à 19, il est question d'aide qui revient aux

 15   personnes déplacées. A l'article 26, il est question du fait que de manière

 16   analogue, il convient de traiter les réfugiés.

 17   Q.  Donc, les réfugiés, est-ce que c'était le fondement qui permettait aux

 18   personnes déplacées de bénéficier des mêmes droits en Croatie que les

 19   réfugiés de Bosnie-Herzégovine ?

 20   R.  Oui, c'était ça le fondement juridique.

 21   Q.  Très bien. Alors, revenons maintenant à la pièce 1D 2626. Je vais vous

 22   donner lecture pour que vous ne perdiez pas votre temps en cherchant. Au

 23   chapitre 5 il est dit : "En Croatie, il existe, et a existé depuis le

 24   début, de la crise des personnes déplacées et des réfugiés un système

 25   unifié de soins qui s'adressait à la fois aux personnes déplacées en

 26   Croatie et aux réfugiés de Bosnie-Herzégovine qui ne faisaient aucune

 27   différence par rapport à l'appartenance ethnique des réfugiés et des

 28   personnes déplacées. Tous les réfugiés de Bosnie-Herzégovine indépendamment

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  1   de leur appartenance nationale bénéficiaient du même statut et recevaient

  2   le même traitement."

  3   Monsieur Zoric, est-ce que vous pouvez nous confirmer cette conclusion que

  4   je viens de lire ? Est-elle exacte ou pas ?

  5   R.  Cette conclusion est exacte. Et si vous me permettez, juste une phrase

  6   que je souhaite ajouter. Par rapport au contexte, souvent on ne parle que

  7   de réfugiés de Bosnie-Herzégovine qui sont soit des Croates, soit des

  8   Bosniens, des Musulmans; mais je dois dire aussi que peut-être que les

  9   statistiques ne montrent pas en Croatie, mais que nous avions également un

 10   certain pourcentage de réfugiés qui étaient des Serbes. Ils n'étaient pas

 11   très nombreux, mais il y en avait. Et de Sarajevo, nous avons eu des

 12   membres de la communauté juive de Sarajevo. Donc, pour ce qui me concerne,

 13   j'aimerais mieux qu'on parle de personnes qui se sont exilées, qui sont des

 14   réfugiées et s'il le faut absolument, j'accepte de parler de leur

 15   appartenance ethnique.

 16   Q.  Je serais tout à fait d'accord avec vous, Monsieur Zoric, si notre acte

 17   d'accusation ne reprochait pas aux Croates des actes commis contre des

 18   Musulmans. C'est la raison pour laquelle je suis obligée d'aborder la

 19   question d'appartenance nationale de la manière dont je le fais.

 20   Donc, nous avons dit que la dynamique de l'arrivée des réfugiés de Bosnie-

 21   Herzégovine en Croatie nous montre plus de 360.000 des personnes arrivées

 22   dès le mois d'août, n'est-ce pas ? Alors, dans notre jeu de documents, vous

 23   voyez cet accord d'amitié et de coopération du 21 juillet 1992 ? Il a été

 24   conclu entre Alija Izetbegovic et Franjo Tudjman. Si vous voulez bien,

 25   examinons le point 3 de cet accord. Il s'agit de la pièce P0039 dans le jeu

 26   de documents. C'est un document que nous avons souvent eu l'occasion

 27   d'examiner dans ce prétoire. Et au point 3, il est dit, je cite : "La

 28   délégation de l'Etat de la République de Bosnie-Herzégovine exprime sa

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  1   gratitude à la République de Croatie d'avoir accueilli et pris en charge

  2   des réfugiés de la République de Bosnie-Herzégovine au-dessus de ses

  3   possibilités."

  4   Dites-nous, Monsieur Zoric : les représentants des autorités de Bosnie-

  5   Herzégovine, est-ce qu'ils ont souvent exprimé leur gratitude à la

  6   République de Croatie pour les efforts déployés et la prise en charge des

  7   réfugiés ?

  8   R.  Oui. Je ne me souviens pas de rencontres avec le président Izetbegovic

  9   où il n'aurait pas réitéré ce type de phrase. Lors de chacune des

 10   rencontres, ceci a été l'un des sujets. On nous a toujours fait part de

 11   leur gratitude. Et c'était très encourageant.

 12   Q.  Et voyons maintenant la suite : "La République de Bosnie-Herzégovine et

 13   la République de Croatie face au problème virulent de persécutions en

 14   masse, en particulier de la population musulmane et croate de Bosnie-

 15   Herzégovine coopérant sur la prise en charge des réfugiés en République de

 16   Croatie et dans d'autres pays, sur la collecte d'aide humanitaire et

 17   financière. La construction de centres d'accueil pour réfugiés dans des

 18   secteurs sûrs de Bosnie-Herzégovine et également en travaillant sur le

 19   retour des réfugiés de République de Croatie en République de Bosnie-

 20   Herzégovine. A cette fin, un protocole particulier de coopération sera

 21   signé."

 22   Monsieur Zoric -- pourriez-vous nous dire, Monsieur Zoric, pour autant que

 23   vous le sachiez, ce protocole, est-ce qu'il a effectivement été signé --

 24   protocole de coopération ?

 25   R.  Oui. Il y a eu signature de ce protocole de coopération, et par la

 26   suite, d'autres protocoles ont été signés qui se consacraient davantage sur

 27   le retour. Le premier concernait l'aide et la prise en charge. Et puis je

 28   pense que c'est pendant la première moitié de l'année 1995 qu'ont été

Page 28003

  1   rédigés, signés les protocoles qui portent sur le retour des gens.

  2   Q.  Dans mon jeu de documents, document 3D2710, s'il vous plaît. C'est un

  3   document de la Défense du général Praljak, protocole de coopération entre

  4   les gouvernements de la République de Croatie et gouvernement de Bosnie-

  5   Herzégovine pour régler la question des réfugiés de Bosnie-Herzégovine.

  6   Signé le 22 juillet 1992. Les signataires sont les deux chefs de

  7   gouvernement, Franjo Greguric et Jure Pelivan.

  8   Vous pouvez examiner, s'il vous plaît, ce protocole. Dites-nous :

  9   est-ce que c'est bien de ce protocole-là que l'on a parlé à l'instant ?

 10   R.  Ici, nous avons le protocole que nous venons d'évoquer qui a été signé

 11   à l'issue de cet accord. Je précise que Franjo Greguric figure parmi les

 12   signataires - il était chef de gouvernement à l'époque - mais, en fait,

 13   c'est son vice-premier ministre, Mate Granic, qui a signé. Il est -- il

 14   avait la charge de cela à l'époque au sein du gouvernement croate.

 15   Q.  Au point 4 de ce protocole, s'il vous plaît, voyez-vous --

 16   M. SCOTT : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. Je regrette

 17   que ça retombe toujours sur mes épaules. Moi, je voudrais bien partager ce

 18   fardeau avec quelqu'un d'autre dans ce prétoire à moins que je sois le

 19   seul, mais je n'aie pas de traduction en anglais. Blague à part,

 20   effectivement, je ne voudrais pas être le seul à faire cette objection.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons vérifié

 22   dans les documents de la Défense du général Praljak et nous avons pu voir

 23   que c'est un des documents qui sont en cours de traduction. Donc, c'est un

 24   document qui n'a toujours pas été traduit, et c'est la raison pour laquelle

 25   ce document ne peut pas encore être proposé au versement. J'estime que ceci

 26   n'est pas une raison qui nous empêcherait de parler maintenant de ce

 27   document, nous pouvons le placer sur le rétroprojecteur, si cela est

 28   nécessaire pour traduire les -- les extraits que nous estimons utiles. Moi,

Page 28004

  1   c'est seulement le point 4 qui m'intéresse. Je -- je vais en donner

  2   lecture.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : -- donner lecture du point 4 et ça ira plus vite.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui, au point 4, je cite : "Le gouvernement

  5   de la République de Croatie et le gouvernement de la République de Bosnie-

  6   Herzégovine demanderont de la part de la communauté internationale

  7   d'augmenter l'aide humanitaire, et en particulier de l'aide destinée à la

  8   Bosnie-Herzégovine, ainsi que l'accueil de nouveaux réfugiés dans des pays

  9   européens voisins qui ne pourront pas être pris en charge en Bosnie-

 10   Herzégovine. Le gouvernement de la République de Croatie n'est pas en

 11   mesure de prendre à sa charge les frais de transfèrement de l'aide

 12   humanitaire internationale qui est destinée directement à la Bosnie-

 13   Herzégovine

 14   -- qui est acheminée directement à la Bosnie-Herzégovine."

 15   Q.  Monsieur Zoric, il en ressort que les représentants des deux

 16   gouvernements se mettaient d'accord de s'adresser aux pays européens pour

 17   que les réfugiés que la République de Croatie ne pouvait plus absorber

 18   soient adressés vers ces pays-là. Est-ce que j'ai bien compris ce protocole

 19   ?

 20   R.  Oui, je pense que vous le comprenez bien. Les gouvernements se sont

 21   réellement adressés -- le pays -- le gouvernement croate l'a fait, c'était

 22   d'ailleurs à l'ordre du jour de nombreux contacts internationaux, et les

 23   gouvernements des pays européens ont répondu à l'appel et ont déterminé des

 24   quotas pour l'accueil de ces personnes : la Hongrie, l'Autriche,

 25   l'Allemagne, l'Italie, le Danemark, les Pays-Bas. Mais il y a eu d'autres

 26   gouvernements -- d'autres pays que j'ai déjà mentionnés ici qui, par

 27   l'entremise des organisations internationales, se sont déclarés prêts à

 28   recevoir un certain nombre de personnes.

Page 28005

  1   Q.  Reprenons maintenant à la pièce de la Défense 1D 2626 de la Défense de

  2   M. Prlic. Prenons maintenant le sixième paragraphe de l'article 4, j'en

  3   donne lecture : "Suite à l'appel lancé par le gouvernement de la République

  4   de Croatie en juillet 1992 à l'adresse des pays de l'Europe occidentale

  5   leur demandant de recevoir des réfugiés de Bosnie-Herzégovine, une grande

  6   colonne de réfugiés de Bosnie-Herzégovine en passant par la Croatie

  7   s'achemine vers l'Europe occidentale."

  8   Cet -- cet appel, est-ce qu'il correspond à ce protocole signé par les

  9   représentants des deux états ?

 10   R.  Oui, cet appel correspond à ce protocole.

 11   Q.  C'est le mois de juillet, donc, c'est au milieu de l'année 1992.

 12   Monsieur Zoric, seriez-vous nous dire à l'année 1992, en Bosnie-

 13   Herzégovine, il n'y avait pas de conflits armés entre les Musulmans et les

 14   Croates, n'est-ce pas ?

 15   R.  A ce moment-là, pas encore. Du moins, pas pour autant que je le sache.

 16   Q.  Sommes-nous en droits de conclure que le départ des réfugiés de Bosnie-

 17   Herzégovine dans les pays tiers au milieu de l'année 1992 et par la suite

 18   ne pouvaient pas, par la nature des choses, être la conséquence d'un

 19   conflit armée entre -- opposant les Croates et les Musulmans ?

 20   R.  Oui, c'est une conclusion tout à fait logique.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie, je n'ai plus de

 22   questions. Je présente mes excuses, encore une fois, pour avoir présenté

 23   des documents pas encore traduits, mais j'ai -- je m'excuse, je n'avais pas

 24   d'autre solution. Merci.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, la Défense ayant terminé le contre-

 26   interrogatoire, puisque plus personne n'a de question à poser, après la --

 27   après la reprise, M. Scott commencera le contre-interrogatoire.

 28   Oui, Maître Nozica, c'est bien ça si je ne me trompe ?

Page 28006

  1   Mme NOZICA : [interprétation] Vous ne faites pas erreur, Monsieur le

  2   Président. Tout simplement, une intervention qui sera utile avant la pause.

  3   Le document qui a été utilisé pendant l'interrogatoire principal de Me

  4   Karnavas, document 1D 02626, c'est un document qui a déjà été versé au

  5   dossier, 2D 00486. Juste pour qu'il n'y ait pas de confusion sur le

  6   versement de ce document. On s'en servira souvent, je pense qu'il est

  7   important de le savoir. Merci.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Scott, vous vous étiez levé pour --

  9   L'INTERPRÈTE : Le micro n'est pas branché.

 10   M. SCOTT : [interprétation] J'attendais que le compte rendu soit complet.

 11   Je veux le dire pour qu'on ne se demande pas pourquoi ceci n'a pas été

 12   soulevé auparavant. Pour ce qui est de l'interrogatoire mené par Me

 13   Alaburic et des autres, nous maintenons notre opposition à ce que des

 14   questions directrices soient posées au niveau des questions supplémentaires

 15   -- ou plutôt, des questions posées par les autres équipes de la Défense.

 16   Nous allons déposer des écritures à cet effet et je ne voudrais pas que

 17   quelqu'un pense que je n'avais pas soulevé cette objection, c'est la raison

 18   pour laquelle je l'ai rappelé. Mais nous vous déposerons des écritures à

 19   cet effet.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, dans 20 minutes, nous reprendrons l'audience,

 21   et vous aurez 45 minutes pour débuter le contre-interrogatoire.

 22   --- L'audience est suspendue à 12 heures 40.

 23   --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.  Monsieur Scott, vous

 25   avez la parole.

 26   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 27   Juges. Bonjour à toutes et à tous, à la Défense.

 28   Contre-interrogatoire par M. Scott :

Page 28007

  1   Q.  [interprétation] A vous aussi, Monsieur Zoric.

  2   R.  Bonjour.

  3   Q.  Monsieur Zoric, entrons dans le vif du sujet dans la question du statut

  4   des réfugiés et je veux vous dire que je vais aussi revenir à votre

  5   audition lorsque nous avons appelé le procès Tuta-Stela,

  6   Maletilic/Martinovic. Est-ce que vous ne faites pas une différence entre

  7   quelqu'un qui est "un réfugié" et une personne qui est une "personne

  8   déplacée" ?

  9   R.  Oui, je pense que j'en ai parlé suffisamment hier.

 10   Q.  De plus, vous reconnaissez, et dans le procès Tuta, vous avez dit qu'il

 11   y avait, je vous cite : "Une grosse différence" entre quelqu'un qui a un

 12   "statut de réfugié" et quelqu'un qui est "un étranger," n'est-ce pas ?

 13   R.  Je ne sais pas dans quel sens vous entendez la différence.

 14   Q.  Est-il exact de dire que quelqu'un à qui on a donné un statut de

 15   réfugié bénéficie tout du moins en théorie de beaucoup de droits, plutôt

 16   que quelqu'un qu'on considère simplement comme un étranger dans un pays ?

 17   R.  Non, ils ont les mêmes droits, les différences peuvent porter sur autre

 18   chose, différence d'origine, de langue, d'appartenance ethnique. Mais pour

 19   ce qui est de leurs droits, ils ont les mêmes droits.

 20   Q.  Monsieur, lorsque vous étiez témoin dans le procès Tuta, vous avez dit,

 21   je vous cite que : "Il y avait une grosse différence" entre quelqu'un qui a

 22   un statut de réfugié et quelqu'un qui est étranger. Si quelqu'un est

 23   réfugié, le pays, je vous cite : "A l'obligation de lui fournir logements,

 24   scolarisation des enfants, soins médicaux, et tout ce qui est nécessaire de

 25   façon à ce que cette personne soit prise en charge à vie." Fin de votre

 26   déposition.

 27   Plutôt qu'un étranger, avez-vous dit : "C'est quelqu'un qui en

 28   Croatie n'a pas le statut de réfugié qu'il n'avait pas, il n'a pas ces

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  1   droits."

  2   Maintenant, vous répondez différemment de ce que vous avez dit dans

  3   le procès Tuta, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je n'ai pas sous les yeux cette réponse. Je ne vois pas ce texte. Il

  5   m'est difficile de l'apprécier maintenant. Un étranger ça peut être un

  6   touriste, un étudiant, un homme d'affaire. Un étranger c'est un

  7   ressortissant d'un pays autre qui vient dans ce pays-ci. Un réfugié vient

  8   également d'un autre pays et qui bénéficie d'un certain nombre de droits

  9   pas seulement ce statut de réfugié reconnu, donc, mais entre un touriste et

 10   un réfugié, il est évident qu'il y a de grandes différences.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai une précision, Monsieur le Président.

 12   Si M. Scott renvoie le témoin à son audition précédente, il faudrait peut-

 13   être donner le numéro de page de façon à ce que je puisse préparer mes

 14   questions supplémentaires. Je le remercie d'avance. Je suis sûr qu'il va

 15   faire mes citations exactes mais ceci me permettra de mieux suivre.

 16   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Maître Karnavas.

 17   Maintenant, je vous renvoie à l'audition du témoin, page 11 018 lors

 18   de sa déclaration sous serment.

 19   Q.  Et je vous ai cité, vous avez dit : "Qu'il y avait une grosse

 20   différence," et je suppose que maintenant vous modifiez votre réponse, vous

 21   dites : oui, il y a des différences, les réfugiés ont des droits, les

 22   étrangers n'en n'ont pas; est-ce exact ?

 23   R.  Les étrangers bénéficient de ces mêmes droits aussi, mais ce ne sont

 24   pas les mêmes droits que les droits des réfugiés. Mais je ne vois pas en

 25   quoi je devrais modifier ce que j'avais dit précédemment. Précédemment,

 26   j'avais dit les mêmes choses où j'ai parlé du même sujet qu'aujourd'hui.

 27   J'emploie -- je n'emploie pas un vocabulaire technique d'un juriste,

 28   j'emploie les termes de tous les jours et je me suis rendu compte que le

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  1   temps vous est précieux, donc, je réitérais aujourd'hui ce que j'ai dit à

  2   l'époque.

  3   Q.  Merci, Docteur Zoric. Je vais donc être très clair et j'essaie aussi de

  4   faire preuve d'équité envers vous, je pratique donc la plus grande

  5   transparence. A ces fins, je ne vais pas parler de façon générale,

  6   générique. Quand je dis "réfugié," aux fins de mon contre-interrogatoire,

  7   les autres conseils peuvent faire ce qu'ils veulent, mais, cet après-midi,

  8   sans doute demain, lorsque je vous parlerai de "réfugiés," je vous parlerai

  9   de quelqu'un qui a reçu le statut de réfugiés en vertu de la loi croate.

 10   Est-ce que nous pouvons nous mettre d'accord là-dessus, Monsieur Zoric ?

 11   R.  Oui.

 12   M. KHAN : [interprétation] Je ne sais pas si ceci va vous aider, Messieurs

 13   les Juges, mais peut-être allons-nous gagner du temps car cette ambiguïté

 14   ne semble pas peser sur le terme de réfugiés mais plutôt sur les droits

 15   bien sûr en vertu du code pénal, certains droits sont conférés, les droits

 16   des particuliers conférés par la convention de Genève sur les réfugiés. Il

 17   faudrait peut-être préciser quels sont ces droits dont nous parlons. Si

 18   nous sommes plus clairs là-dessus, peut-être allons-nous dissiper cette

 19   confusion. Je ne sais pas si ceci va aider, Monsieur Scott.

 20   M. SCOTT : [interprétation] Oui, ça pourrait être une source de confusion.

 21   Je vous remercie de votre intervention.

 22   Q.  Ici, je parle précisément dans ce contexte de réfugiés, et je vais

 23   reprendre vos propres paroles. A la page 11 017 de votre audition

 24   précédente, vous avez dit que si quelqu'un s'est vu octroyer le statut de

 25   réfugié, le pays qui lui donne ce statut est, je cite : "Obligé de lui

 26   fournir logement, assurer la scolarisation des enfants, les soins médicaux

 27   et tout le reste, à savoir tout ce qui est nécessaire de façon à ce que

 28   cette personne soit prise en charge à vie."

Page 28010

  1   C'est de ces droits que je parle maintenant. Si quelqu'un n'est pas

  2   réfugié, si quelqu'un n'a pas reçu le statut de réfugié, ça veut dire qu'il

  3   n'a pas ces droits; est-ce exact ?

  4   R.  Quelqu'un qui ne s'est pas vu accorder le statut de réfugié peut dans

  5   un autre Etat avoir le droit à la scolarité et d'autres droits de recevoir

  6   de l'aide. En Croatie il y a eu des personnes qui n'avaient pas le statut

  7   de réfugié mais qui ont bénéficié de différentes aides au niveau de la

  8   scolarité et des soins médicaux en particulier.

  9   Q.  Comme un de mes confrère a coutume et aime le dire, agissons avec

 10   méthode, pas à pas, il se peut qu'une brave âme en Croatie donne à manger,

 11   aider quelqu'un à l'école mais, moi, je parle de la loi en vigueur en

 12   République de Croatie. Il se peut bien qu'un individu ait accordé certains

 13   avantages à une autre personne. Mais si vous avez quelqu'un qui n'est pas

 14   du pays et qui se trouve en Croatie, et qui n'a pas le statut de réfugié

 15   n'est pas en vertu de la loi croate : "N'a pas le droit au logement, à la

 16   scolarité es enfants, soit médicaux et tous les autres besoins qui sont

 17   nécessaires pour que cette personne soit prise en charge à vie."

 18   R.  Une personne, un ressortissant étranger qui a pu se trouver en Croatie,

 19   s'il était réfugié en vertu de la loi et de tous les textes qui régissaient

 20   cela, et il recevait l'aide que vous venez de mentionner vous-même. C'est

 21   ainsi que ça été défini en Croatie. Il y a peut-être d'autres pays aussi

 22   définis d'une manière différente, parfois c'est la même chose parfois c'est

 23   plus, parfois c'est moins, mais on pense toujours à ce qui à couvrir les

 24   besoins élémentaires pour assurer la survie du [imperceptible].

 25   Q.  Excusez-moi de vous interrompre mais, effectivement, chaque minute

 26   compte, et si je ne suis pas suffisamment clair, je m'en excuse.

 27   Maintenant, je vous parle de la république de Croatie, et vous avez déjà

 28   répondu plusieurs fois pour dire qu'il vous était impossible de parler de

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  1   ce papier, mais pour le moment, sauf le respect [imperceptible], peu

  2   m'importe sur d'autres pays. Je parle de la République de Croatie.

  3   Mais vous tournez en rond parce qu'il y a quelques instants vous m'avez dit

  4   : "Si nous avons un étranger en Croatie et si ce réfugié est -- cet

  5   étranger est un réfugié, alors, est-ce qu'il est possible d'avoir des

  6   personnes qui sont présentes en Croatie et qu'à qui la loi n'a pas donné le

  7   statut de réfugié, n'est-ce pas ?

  8   R.  Quels sont les étrangers que vous avez à l'esprit ? Est-ce que vous

  9   pouvez me préciser cela ? Vous faites référence aux étrangers qui n'ont pas

 10   reçu le statut de réfugié après l'avoir demandé en Croatie ? Ou est-ce que

 11   vous pensez aux réfugiés qui sont venus passer leurs vacances d'été sur la

 12   côte ?

 13   Q.  Depuis hier, Monsieur Zoric, donc, depuis plusieurs heures, nous

 14   parlons de réfugiés et de personnes déplacées, nous ne parlons pas de

 15   touristes. Si vous avez quelqu'un de Bosnie-Herzégovine en temps de guerre

 16   qui est arrivé dans l'Etat de Croatie, et qui pour une raison lambda ne

 17   s'est pas vu accorder le statut de réfugié, n'a pas été considéré comme

 18   étant réfugié, quand je dis "réfugié," je parle de quelqu'un qui a reçu un

 19   droit et un statut juridique de réfugié en vertu de la loi croate. S'il ne

 20   reçoit pas ce statut, il ne bénéficie pas de ces avantages que vous avez

 21   déjà énumérés ?

 22   R.  Les personnes qui se sont vus garantir un statut de "réfugié," qui à

 23   cause de la guerre en Bosnie-Herzégovine se sont rendus en Croatie, avaient

 24   tous les mêmes droits en Croatie. A l'époque, il y a eu des personnes qui

 25   n'ont pas bénéficié de ce statut et, heureusement, la guerre ne s'est pas

 26   emparée de la totalité du territoire de Bosnie-Herzégovine, donc, il y a eu

 27   des régions d'où des personnes sont venues pour d'autres raisons et ils

 28   n'ont pas eu le statut de réfugié.

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  1   Q.  Nous allons poursuivre et voir plus tard si nous pouvons

  2   avoir une autre façon de sortir de cette impasse.

  3   Aidons la Chambre si vous le voulez bien en fournissant cette information

  4   générale. Puisque vous avez dit je crois comprendre qu'au début, quelque 70

  5   % des réfugiés - excusez-moi, je veux ici éviter toute confusion - qu'au

  6   début, 70 % des personnes venues de Bosnie-Herzégovine dans ces conditions

  7   étaient des Musulmans et que, plus tard, ça a changé et que ce pourcentage

  8   est descendu pour arriver à 50 % Croates et 50 % de Musulmans; est-ce exact

  9   ?

 10   R.  Oui, c'est exact. Les premiers réfugiés arrivaient en Croatie venaient

 11   de Bosnie orientale, et aussi des environs de Prijedor. L'arrivée des

 12   réfugiés correspondait à l'évolution des opérations militaires, c'était

 13   soit à la veille des actions et même  soit pendant ceci et puis surtout il

 14   y a eu des réfugiés qui sont arrivés à chaque fois qu'il y a eu signature

 15   d'un cessez-le-feu, à savoir ceux qui avaient survécu à des opérations

 16   militaires, les civils, et à ce moment-là, ils souhaitaient partir. Donc,

 17   la plupart des gens qui sont arrivés dans cette première vague de réfugiés

 18   en Croatie, donc, c'étaient des Musulmans et là, par la suite, il y a eu

 19   des évolutions en fonction des événements dans ce pays.

 20   Q.  N'est-il pas aussi exact de dire que, sur le nombre total des personnes

 21   venues de Bosnie-Herzégovine, à peu près la moitié venait de ce qu'on peut

 22   qualifier de zones contrôlées par les Serbes dans le pays; l'autre moitié

 23   venait de zones contrôlées à l'époque soit par ce qu'on appelle la partie

 24   croate ou la partie musulmane ?

 25   R.  Oui, il y a des éléments d'information précis là-dessus. Mais sur le

 26   plan militaire, il convient de voir qui a contrôlé quel territoire. Il est

 27   arrivé que les réfugiés arrivent par exemple d'un territoire sous le

 28   contrôle de l'ABiH mais ils pouvaient être des réfugiés. Je suis en train

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  1   de répondre à votre question, ils pouvaient être des réfugiés même si ce

  2   territoire était placé sous le contrôle de l'ABiH. Les gens, vu la

  3   difficulté de la situation parce qu'ils avaient peur des obus qui tombaient

  4   sous le territoire contrôlé par leur armée, avaient peur, donc, ils

  5   voulaient partir. C'est la raison pour laquelle ils étaient des réfugiés et

  6   on ne pouvait pas toujours savoir toute la précision, où étaient les

  7   frontières.

  8   Q.  Merci. Donc, ce que vous avez répondu c'est qu'à peu près la moitié

  9   venait de zones contrôlées par les Serbes, l'autre moitié venant de zones

 10   tenues par les Croates ou les Musulmans; oui ou non ?

 11   R.  Il y a eu des moments dont nous avons parlé, je ne sais pas quelles

 12   sont les années où c'était à peu près en grande ligne cela. Mais on a des

 13   statistiques précises dans les rapports et ces rapports ont été présentés

 14   ici.

 15   Q.  Mais je viens de citer ce que vous avez déclaré à la page 10 973 dans

 16   votre déposition dans le procès de Tuta-Stela. Je crois que nous sommes

 17   tous d'accord ici dans ce prétoire depuis deux jours, c'est que lorsque

 18   arrive la fin du printemps de 92, la situation des personnes qui arrivent

 19   en Bosnie-Herzégovine est telle que la Croatie était déjà à cours de

 20   logement pour les accueillir; est-ce exact ?

 21   R.  Oui, c'est exact. On a toujours eu ce problème de placement pour ces

 22   gens, parce que même des installations qu'on avait, perdaient de leur

 23   qualité, vu le séjour prolongé des gens dedans.

 24   Q.  N'est-il pas exact de dire qu'en partie, en raison de ces conditions de

 25   cette situation, vers le 13 juillet 1992, la Croatie a annoncé qu'elle

 26   n'accueillerait plus de réfugiés venant de Bosnie-Herzégovine, il

 27   n'accepterait plus de leur donner ce statut que je cite de "réfugié" ?

 28   R.  Oui, la Croatie, à l'époque, a publié ouvertement le fait que nos

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  1   ressources étaient épuisées. Le gouvernement a lancé un appel à l'intention

  2   des organisations internationales pour ce qui est de leur participation

  3   plus grande à la solution du problème. Une fois qu'on a reçu de l'aide et

  4   qu'on a pu mettre en place des nouvelles capacités, on a pu accorder ce

  5   statut à toute personne et partout là où les gens réunissaient les

  6   conditions pour bénéficier de ce statut.

  7   Q.  Je pense que vous avez reçu une liasse de documents ou un classeur avec

  8   des intercalaires, de la même façon que les documents que vous avez reçus.

  9   Est-ce que vous pourriez examiner le document qui porte le numéro P 10406.

 10   J'espère que les Juges auront reçu ce classeur également. Je vous cite la

 11   cote du document, P 10406. Et je pense que vous devriez trouver la version

 12   croate, si vous ne la trouvez pas, dites-le-moi tout de suite.

 13   Revenons sur ce sujet que j'évoquais, c'est un document en date du 13

 14   juillet de l'agence de presse Reuters, je parle du 13 juillet 1992, et qui

 15   commence par ceci, je cite : "La Croatie a dit lundi qu'elle n'accepterait

 16   plus de réfugiés venant de régions déchirées par la guerre en Bosnie-

 17   Herzégovine."

 18   Prenons la version en anglais, première ligne de la deuxième page, je

 19   ne sais pas ce qu'il en est de l'endroit en croate. Je pense qu'on trouve

 20   votre nom quelque part : "Damir Zoric, haut secrétaire du comité chargé des

 21   Réfugiés, dit que la situation est dramatique, qu'il n'y a plus

 22   d'approvisionnement. C'est une situation intenable. On ne sait pas où loger

 23   ces personnes. Nous n'avons plus de places."

 24   Et puis en fin d'article, on dit ceci : "C'est ce que dit le

 25   gouvernement, les camps de réfugiés ne serviront plus que de centre de

 26   transit, cette nouvelle décision sera appliquée par le ministère de

 27   l'Intérieur."

 28   Ce que dit cet article Reuters, reflète-t-il bien la situation qui

Page 28015

  1   prévalait à l'époque ?

  2   R. Je pense avoir bien dit que la situation était intenable, et si je

  3   comprends bien l'anglais, c'est ce qu'il dit, et qu'il ne s'agissait pas de

  4   notre bon vouloir ou non bon vouloir mais que nous n'avions plus de places

  5   pour installer ces gens-là. Toute intervention publique pour ce qui me

  6   concerne et nous tous ensemble était une chose bienvenue pour motiver des

  7   gens de par le monde à nous venir en aide. C'est une intervention de ce

  8   type et j'estime que cela nous a aidés. Il n'en demeure pas moins que suite

  9   à ce type de déclaration, nous avons accueilli des gens et nous leur avons

 10   accordé un statut de réfugié. C'est un fait, un élément qu'il est facile de

 11   vérifier.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Peut-on vous remettre les pièces de la Défense

 13   Prlic.

 14   Q.  Veuillez prendre le document 1D 02606. Si vous ne le trouvez pas,

 15   dites-le-moi. Excusez-moi, ce n'est pas le document que je cherchais. 2607

 16   -- nouvelle correction c'est le 2608. Je ne sais pas ce qui s'est passé.

 17   Docteur Zoric, je vous demanderais d'avoir un petit peu de patience, et de

 18   nous dire si vous avez trouvé la pièce 2608. C'est une lettre qui a été

 19   écrite ultérieurement, je crois que la Défense vous a peut-être montré

 20   cette lettre lors elle vous a peut-être posé des questions. C'est une

 21   lettre qui date du 29 octobre 1992, et c'est concernant une aide financière

 22   ponctuelle.

 23   Je souhaiterais attirer votre attention sur le paragraphe 1, qui dit : "De

 24   se plier strictement aux stipulations du gouvernement de la République de

 25   Croatie concernant l'approbation et la non approbation du statut de

 26   "réfugié" aux réfugiés qui sont arrivés en Croatie avant le 13 juillet 1982

 27   [comme interprété]." N'est-il pas exact, Monsieur, que cette date est une

 28   date importante -- très importante car les personnes -- toutes les

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  1   personnes, qui sont arrivées avant le 13 juillet 1992, pouvaient recevoir

  2   le statut de réfugiés, donc, pouvaient se voir octroyer le statut de

  3   réfugié, alors que les personnes arrivées après ne pouvaient pas recevoir

  4   de statut de réfugié ?

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, avant que le témoin

  6   ne réponde à cette question, je demanderais que le Procureur termine la

  7   lecture du paragraphe ou je peux le faire pour lui, si vous le souhaitez.

  8   Il se dit comme suit : "C'est parce qu'il y a eu quelques irrégularités."

  9   Je crois que, dans le contexte, il faudrait lire le tout. Maintenant, le

 10   témoin peut répondre à la question.

 11   M. SCOTT : [interprétation]

 12   Q.  Ma question, Docteur Zoric, demeure la même : n'est-il pas exact,

 13   Monsieur, que les personnes arrivées avant le 13 juillet 1992, bien sûr,

 14   toutes les personnes qui pouvaient rencontrer les critères nécessaires, que

 15   toutes les personnes arrivées à cette date pouvaient se voir octroyer le

 16   statut de réfugié, alors que toutes personnes arrivées après cette date ne

 17   pouvaient pas se voir octroyer le statut de réfugié ?

 18   R.  Les gens arrivés plus tard pouvaient aussi obtenir ce statut. Pour être

 19   concret, s'agissant des irrégularités, il m'est difficile d'en parler. Je

 20   sais qu'à l'époque, nous nous sommes efforcés d'empêcher les gens qui

 21   n'avaient pas eu ce statut de l'obtenir de façon alors qu'elles ne

 22   méritaient pas. Il y a des gens qui falsifiaient les papiers qui ne

 23   venaient pas du tout de régions mises en péril par la guerre et qui ne

 24   pouvaient pas bénéficier d'une aide internationale ou croate. Je crois

 25   qu'ici, le Dr Rebic parle de ce type-là d'irrégularités mais après la date

 26   butoir, la Croatie a continué à attribuer ce statut.

 27   Q.  Très bien. Donc, pour revenir à ce que vous avez dit il y a quelques

 28   instants tout du moins cela correspond avec l'article de Reuters, et on dit

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  1   : "A partir du 13 juillet 1992, la Croatie a annoncé qu'elle n'allait pas

  2   octroyer de statut de réfugié aux personnes." On ne parle pas ici

  3   d'irrégularités, on dit, simplement dans cet article que la Croatie

  4   n'accepterait plus des réfugiés, n'accorderait plus de statut de réfugiés.

  5   Donc, n'est-il pas exact de dire que toute personne ayant arrivée après le

  6   13 juillet 1992, c'est sont vue refuser le statut de réfugié ?

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, question

  8   posée et répondue. Le témoin a dû dire -- a répondu qu'on a octroyé le

  9   statut, on peut recevoir -- accepter la réponse ou non. Je n'ai aucune

 10   objection à ce que la question soit posée de nouveau mais notre témoin a

 11   répondu à la question.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Le témoin a donné une réponse mais il a changé

 13   sa réponse pour ce qui est des irrégularités. Il y a quelques instants, il

 14   a dit qu'il était d'accord avec moi pour dire que, le 13 juillet 1992, il

 15   n'y aura plus de réfugiés. Mais, maintenant il dit : "En fait, sur la base

 16   d'irrégularités," et ce n'est pas ce qu'il a dit auparavant, donc, c'est la

 17   raison pour laquelle je voulais revenir sur cette question.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 19   sur tout le respect que je dois à mon éminent confrère --

 20   M. SCOTT : [interprétation] Je ne veux pas de leçon de

 21   M. Karnavas.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Attendez. Non. On montre le document au

 23   témoin. Le témoin dit : "Oui, c'est ce que le document dit, mais nous avons

 24   néanmoins donné un statut de réfugié aux personnes." C'est ce que le témoin

 25   a dit, et c'est au compte rendu d'audience. Ensuite, on lui a posé la

 26   question de nouveau en lui montrant le document. Et j'ai demandé -- pour

 27   être tout à fait juste envers le témoin, j'ai demandé que les phrases

 28   citées soient placées dans le contexte -- enfin, qu'on terminer la lecture

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  1   du paragraphe.

  2   Je ne crois pas qu'il y a d'incohérence. Le compte rendu d'audience est

  3   très clair.

  4   M. SCOTT : [interprétation] Je ne croyais pas qu'il y avait quelque chose

  5   de non clair.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  7   M. SCOTT : [interprétation]

  8   Q.  Je vais vous reposer la question, Monsieur.

  9   Si je vous ai bien entendu, vous avez dit il y a quelques instants que le

 10   statut de réfugié a cessé d'être octroyé en date du 13 juillet 1992, mais à

 11   une étape ultérieure, on a quand même octroyé un statut de réfugié à des

 12   personnes plus tard.

 13   Je ne sais pas si c'est ce que vous avez répondu, mais, si oui, nous

 14   allons y revenir. Si c'est bien ce que vous avez répondu, pourriez-vous

 15   nous dire à quel moment le statut de réfugié était de nouveau octroyé aux

 16   personnes arrivant de Bosnie-Herzégovine ?

 17   R.  Il m'est difficile de vous apporter en ce moment une réponse, je pense

 18   qu'une documentation nombreuse et volumineuse existe à ce sujet.

 19   Q.  Monsieur, je vais vous demander de faire l'impossible. Vous avez

 20   répondu à un très grand nombre de questions posées par les conseils de la

 21   Défense et j'aimerais vous demander de nous dire à quelle date le statut de

 22   réfugié a été donné de nouveau; était-ce en 1995 ? Etait-ce en 1996 ?

 23   Essayez de répondre à la question, s'il vous plaît.

 24   R.  La même année à ce moment-là on a continué à approuver ou à accorder ce

 25   statut-là. De là, à vous donner la date exacte, le jour ou le mois. J'ai du

 26   mal. En ce moment-ci, j'ai du mal à le faire.

 27   Q.  Je voudrais demander au témoin de prendre la pièce P de l'Accusation

 28   10407. C'est la pièce de l'Accusation. Je vois que vous avez le bon

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  1   classeur sous les yeux. Monsieur, nous avons ici une lettre de

  2   communication signée par le M. Rebic nous avons parlé de lui au cours de

  3   ces deux jours. Est-ce qu'il vous est arrivé de voir des communiqués de la

  4   sorte ? Vous est-il arrivé à vous de rédiger des communiqués de ce type

  5   lorsque vous êtes devenu membre du parlement ?

  6   R.  Oui, j'ai vu des documents similaires à celui-ci. Il s'agit d'un

  7   document où le bureau donne son approbation pour ce qui est de l'entrée du

  8   séjour temporaire de quelqu'un en Croatie mais il ne s'agit pas là de

  9   quelqu'un qui aurait demandé un statut de réfugié.

 10   Q.  Ce document porte la date --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : -- on me dit que ce document n'est pas dans l'e-

 12   court.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Je ne le sais pas, Monsieur le Président,

 14   Messieurs les Juges. Je vais devoir demander à mon assistante. Oui, le

 15   document devrait exister sur e-court. Nos registres le disent. Si vous

 16   souhaitez avoir une copie papier, je pourrais le faire, et nous pourrions

 17   le placer sur le rétroprojecteur.

 18   M. STEWART : [interprétation] Je ne l'ai pas moi non plus, je n'arrive pas

 19   à le trouver.

 20   M. SCOTT : [interprétation] C'est la pièce 10407. Je n'ai pas de document

 21   non annoté. Mais voilà, mon collègue me fournit sur le rétroprojecteur.

 22   Monsieur, vous trouverez le document et vous me corrigerez, si je m'abuse,

 23   mais c'est une lettre qui porte la date du 9 avril 1993, et j'aimerais

 24   attirer votre attention sur la page numéro 2. La lettre fait référence très

 25   précisément à ceci alors que ces personnes auront la permission de venir au

 26   pays : "Conformément à une décision du gouvernement de la République de

 27   Croatie le

 28   13 juillet 1992, les personnes ci haut mentionnées ne peuvent ni demander

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  1   ni recevoir de statut de réfugiés de la République de Croatie."

  2   Q.  Donc, ces neuf ou dix mois après la décision, donc, et cette décision

  3   continue d'être en vigueur et on a toujours révisé le statut de réfugié aux

  4   personnes en Croatie pendant une très longue période de temps, car on parle

  5   ici du mois d'avril 1993, n'est-ce

  6   pas ?

  7   R.  Il faut garder à l'esprit que la Croatie a quelque 300 000 réfugiés --

  8   ou personnes déplacées à elle et encore 300 000 réfugiés, ce qui donne un

  9   total de 600 000.

 10   Q.  Excusez-moi, il n'est pas nécessaire de nous dire combien il y avait de

 11   personnes en Croatie. Nous avons déjà compris qu'il y avait un très grand

 12   nombre de personnes qui venaient de Bosnie-Herzégovine en Croatie. Je ne

 13   conteste pas cela. Il n'est pas nécessaire de nous le répéter. Mais ce

 14   document nous dit que ces deux personnes pouvaient venir au pays, mais la

 15   lettre est très précise et stipule clairement que conformément à la loi du

 16   13 juillet 1992, on ne leur octroiera pas le statut de réfugié, n'est-ce

 17   pas ?

 18   L'INTERPRÈTE : Nous n'avons pas non plus reçu de document.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, Monsieur le Procureur, pour autant que

 20   je puisse le voir, ce papier dit que ces gens-là -- ces personnes-là sont

 21   originaires de Jablanica et que, pour une raison indéterminée, elles

 22   voulaient venir à Zagreb, que quelqu'un de Zagreb leur aurait envoyé une

 23   lettre d'invitation. Et on donne le nom de cette personne avec son adresse.

 24   Pour autant que je sache, Jablanica c'était sous contrôle de l'ABiH pendant

 25   toute la durée de la guerre. Je ne vois donc pas de raison pourquoi

 26   quelqu'un serait considéré réfugié, alors qu'il vient d'un territoire

 27   contrôlé par sa propre armée. Donc, ce sont des Bosniens qui avaient

 28   demandé cette autorisation ici si je puis faire remarquer.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé, Monsieur Scott.

  2   Monsieur le Témoin, le Procureur vous a posé des questions que l'on appelle

  3   directrices. Il a le droit de poser ce genre de questions, mais ce sont des

  4   questions qui vous incite à répondre par oui ou par non. J'ai suivi les

  5   questions avec beaucoup d'attention qu'il a posées, et je ne crois pas que

  6   vous ayez répondu avec un oui ou non, à chaque fois que vous aviez commencé

  7   à répondre, vous nous fournissiez une explication très longue. Je comprends

  8   tout à fait que vous vous sentiez -- que vous aimeriez nous donner une

  9   explication longue, c'est la même chose avec moi, mais ces règlements sont

 10   très stricts. Nous perdons beaucoup de temps. Je vous comprends -- croyez-

 11   moi que je vous comprends lorsque vous répondez en donnant plus de

 12   précision, mais la tâche de la Chambre devient beaucoup plus difficile car

 13   il vous faut vous plier aux règlements de procédures et de preuves établis

 14   par le Tribunal.

 15   Donc, je vous demanderais de bien vouloir vous plier à ce règlement. Merci.

 16   M. SCOTT : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur, alors, pour préciser afin que nous puissions avancer plus

 18   rapidement, vous avez dit aux Juges de la Chambre sous serment que vous

 19   n'estimiez pas qu'en 1993, Jablanica fût une zone en guerre.

 20   M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Le

 21   Procureur déforme le propos du témoin. Il a dit que c'était contrôlé par

 22   l'ABiH, d'abord. Deuxièmement, rien ne nous fait croire que la demande a

 23   été refusée. Nous ne savons pas pourquoi ces derniers -- ces personnes

 24   voulaient aller en Croatie et non pas ailleurs, mais je crois que M. Scott

 25   parle de faits qui ne font pas partie des éléments de preuve. Ces personnes

 26   ont demandé un statut de réfugiés, on leur a refusé ce statut. On leur a

 27   donné néanmoins un permis pour passer.

 28   Donc, il faut d'abord établir les bases -- un fondement. On ne peut

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  1   pas conclure du deuxième paragraphe qu'une demande avait été faite et qu'un

  2   refus a été donné comme réponse. Je ne vois pas cela dans le fax.

  3   M. SCOTT : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur, pendant que vous étiez au courant de ces questions, est-ce

  5   que vous savez si quelqu'un avait demandé un permis -- un sorte de permis

  6   pour passer -- pour traverser la République de Croatie ? Ou est-ce que

  7   c'était quelque chose de tout à fait nouveau pour vous ?

  8   R.  J'ai eu à connaître de ce type de documents.

  9   Q.  Monsieur, est-ce que vous nous dites que, lorsqu'on lit à la première

 10   page de ce document tout juste sous l'objet, et cetera : "Le bureau des

 11   Réfugiés et des Personnes déplacées du gouvernement de Croatie permet de

 12   permettre l'entrée et d'accorder une résidence temporaire aux personnes

 13   suivantes…" On fait état des noms ici des personnes, des endroits d'où ils

 14   proviennent. On voit ici Mostar, et cetera : "Les personnes ci haut

 15   mentionnées obtiendront un soutien financier complet et seront hébergées."

 16   Et nous voyons que une personne a offert une garantie pour ces derniers. Et

 17   plus loin, la lettre de Rebic stipule très clairement qu'alors que ceci

 18   sera permis, nous voulons être très clairs et précis pour dire que ces

 19   personnes n'obtiendront pas de statut de réfugiés.

 20   N'est-ce pas cela que dit cette lettre ?

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je regarde attentivement cette

 22   lettre. D'ailleurs, M. Rebic viendra comme témoin, donc, nous avons bien ça

 23   en mémoire. Mais Karnavas - et je crois qu'il a raison - dit que rien ne

 24   dit dans cette lettre qu'ils ont demandé le statut de réfugiés.

 25   Apparemment, il n'y a pas la preuve que ces deux personnes ont demandé le

 26   statut de réfugiés, bien que la dernière phrase rappelle - on a

 27   l'impression que c'est un rappel général - qu'en application de la décision

 28   du 13 juillet 1992, les personnes mentionnées n'auront pas le statut.

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  1   Mais je constate dans ce document qu'il doit être présenté aux check

  2   points, et je me suis posé la question de la situation suivante : ces deux

  3   personnes qui vivent à Mostar, puisqu'elles viennent de Mostar, vont aller

  4   à Zagreb et il y a quelqu'un qui va les héberger, c'est celui dont le nom

  5   apparaît venant habiter pendant quelque temps à Zagreb. On ne sait pas

  6   d'ailleurs la durée. Est-ce qu'à ce moment-là, cet office avait une

  7   compétence pour donner ce type d'autorisation permettant le séjour

  8   temporaire en Croatie ? Parce que regardez l'objet du mémo. Il y a bien une

  9   référence à une résidence temporaire. Donc, ces gens-là n'allaient pas

 10   demeurer comme un réfugié, à vie, en Croatie. C'était temporaire.

 11   Alors, je me pose la question de savoir si cet office n'avait pas une

 12   compétence pour délivrer des autorisations temporaires à des étrangers qui

 13   voulaient venir à Zagreb pendant quelque temps, qui avaient un certificat

 14   d'hébergement tel que cela apparaît, mais que ces gens-là, en tout état de

 15   cause, n'auraient pas le statut de réfugiés, et que pour leur permettre de

 16   traverser la frontière, ils devaient exhiber ce document.

 17   Alors, est-ce cette situation, ou pour vous, c'est une autre

 18   situation ? 

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense, Monsieur le Juge, que vous avez tout

 20   à fait raison parce que le bureau dit ici qu'il a bien reçu une lettre de

 21   garantie en provenance d'une personne originaire de Zagreb qui est d'accord

 22   pour que telle personne vienne en Croatie. Mais le bureau dit aussi qu'on

 23   ne lui a pas demandé la chose et, partant de là, on ne peut pas requérir un

 24   statut de réfugié. Le bureau n'avait pas de compétence vis-à-vis de la

 25   police frontalière. Le bureau a indiqué qu'il n'avait rien contre le fait

 26   que ces personnes viennent, mais il a dit aussi que, de son avis, ces gens-

 27   là n'étaient pas à être considérés comme étant des réfugiés ou à le

 28   devenir, c'était de -- des compétences et des attributions du bureau.

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  1   Si on avait montré une autre documentation, le bureau aurait différemment

  2   répondu. Ici, j'ignore quelle est la compétence des gens en matière

  3   linguistique, parce que ici on parle au passif, et non pas à l'actif. Le

  4   bureau est d'accord que soit approuvé l'entrée, on ne dit pas : "Le bureau

  5   approuve ou autorise ou n'autorise pas," mais, d'une certaine façon, aux

  6   personnes compétentes, il est indiqué : "Bon, nous n'avons rien contre."

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- parce que c'est l'heure et après il y a une

  8   audience. Le -- la question sera certainement re-évoquée demain. Donc, nous

  9   nous retrouverons demain à -- à 9 heures du matin puisque nous sommes

 10   l'audience du matin.

 11   Donc, je vous souhaite un bon après-midi.

 12   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le jeudi 15 mai

 13   2008, à 9 heures 00.

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