Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 21 mai 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

  9   les Juges. Bonjour à toutes et à tous. Affaire IT-04-74-T, le Procureur

 10   contre Prlic et consorts. Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 12   En ce mercredi 21 mai 2008, je salue M. le Témoin, Mmes et MM. les avocats,

 13   MM. les accusés, tous ceux qui dans cette salle d'audience nous assistent,

 14   et le bureau du Procureur.

 15   Nous devons poursuivre le contre-interrogatoire par l'intervention des

 16   autres avocats de la Défense, je crois que

 17   Me Kovacic va être le premier à intervenir.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

 19   Messieurs les Juges. Bonjour à tous dans le prétoire.

 20   LE TÉMOIN : ADALBERT REBIC [Reprise]

 21   [Le témoin répond par l'interprète]

 22   Contre-interrogatoire par M. Kovacic :

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur Rebic.

 24   R.  Bonjour.

 25   Q.  Comme vous l'avez déjà dit hier, je vous poserais plusieurs questions.

 26   Toutes ces questions sont en corrélation avec les questions, voire sujets

 27   entamés lors de votre interrogatoire principal, il s'agit de trois sujets

 28   ou thèmes plutôt courts.

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  1   Dans votre témoignage - excusez-moi - est-ce que vous avez reçu ce document

  2   ? Vous allez le recevoir à l'instant.

  3   Au cours de votre témoignage, dans la première journée de votre témoignage,

  4   page du PV 95, ligne 7, et je le dis pour les besoins du compte rendu pour

  5   faciliter le travail des autres - vous avez mentionné une personne qui

  6   s'appelle Jakov Binenfeld. Vous avez dit que c'était le propriétaire de

  7   cette agence VIP qui pour les besoins de votre bureau a procédé à

  8   l'élaboration d'une liste de personnes déplacées et de réfugiés.

  9   Docteur Rebic, je tiens à vous rappeler le fait que la technique va être un

 10   peu différente. Nous parlons la même langue, et pour les besoins des

 11   interprètes, il faut que nous fassions une petite pause entre les questions

 12   et réponses pour leur faciliter la tâche parce que nous, nous nous

 13   comprenons directement.

 14   Ma première question est celle de savoir si vous avez eu l'occasion de

 15   connaître en personne M. Binenfeld ?

 16   R.  J'ai eu l'occasion de le connaître en personne.

 17   Q.  Merci. Docteur Rebic, veuillez me dire, de votre avis et d'après ce que

 18   vous en savez, est-ce que c'est quelqu'un d'intègre, est-ce que c'est une

 19   personne d'une notoriété -- de bonne notoriété, dirais-je, dans la société

 20   ?

 21   R.  D'après ce que j'en sais, c'est une personne qui répond à des critères

 22   de professionnalisme élevés, c'est quelqu'un qui est très apte en matière

 23   d'activités économiques, et c'est quelqu'un qui dès lors avait sa propre

 24   agence, qui s'appelait VIP. Et c'était la meilleure en République de

 25   Croatie et c'est la raison pour laquelle, moi-même, en concertation avec le

 26   HCR -- ou plutôt, sur incitation du HCR, je l'ai choisie. Parce que c'était

 27   une agence privée et le HCR préférait avoir à faire à une instance privée

 28   plutôt qu'à une instance gouvernementale.

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  1   Pour ce qui est de ses qualités morales, je ne voudrais pas en parler parce

  2   que je n'ai pas d'information à ce sujet. C'est un homme bon, un économiste

  3   qui semble être honnête et j'ai eu plusieurs rencontres avec lui pour ma

  4   part.

  5   Q.  Merci. Avez-vous appris, peut-être, de par le public ou de la part de

  6   M. Binenfeld ou d'une autre façon encore, que c'était quelqu'un de très

  7   actif et de haut placé en tant que responsable dans la municipalité juive

  8   de Zagreb ?

  9   R.  C'était quelqu'un d'actif dans cette municipalité juive. Je ne dirais

 10   pas que c'était quelqu'un de fort engagé, mais c'était quelqu'un qui avait

 11   un comportement exemplaire au sein de cette communauté juive et c'était un

 12   ami à moi parce que moi j'aime beaucoup les Juifs. Parce que comprends

 13   l'hébreux, je lis l'hébreux, je suis souvent en Israël. Et d'ailleurs,

 14   dimanche j'y vais et c'est la raison pour laquelle j'ai eu des rapports de

 15   camaraderie avec Binenfeld, mais ce n'est pas ce qui a influé sur le fait

 16   de lui demander d'élaborer cette liste, ou plutôt, de demander à sa

 17   société.

 18   Q.  Oui, certainement. Enfin, votre relation ne nous intéresse guère. C'est

 19   incontestable, vous aviez le droit de prendre une décision partant des

 20   informations dont vous disposiez.

 21   Alors, dites-nous : étant donné que vous avez précisé que vous avez

 22   eu plusieurs entretiens et que vous avez sympathisé, saviez-vous que ce

 23   monsieur, M. Binenfeld, avait été chargé de l'organisation de convois

 24   humanitaires en 1992 et même en 1993 ? A la différence des autres convois

 25   humanitaires, ces convois avaient deux fonctions. Ils faisaient sortir des

 26   gens de Sarajevo occupée d'un, et de deux, ils acheminaient de l'aide vers

 27   la ville de Sarajevo assiégée et autres formes d'aide humanitaire. Alors

 28   savez-vous nous dire, pour ce qui est de cette organisation de convois

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  1   humanitaires -- ou plutôt, vais-je poser une question de façon plus

  2   adéquate.

  3   Dites-nous d'abord, saviez-vous qu'il était impliqué dans ce type

  4   d'activités ?

  5   R.  Oui, je sais qu'il était impliqué et parfois il venait au bureau pour

  6   obtenir des renseignements du point de vue de la situation à Sarajevo et de

  7   manière générale, en Bosnie-Herzégovine. Comment y arriver, comment aider,

  8   comment acheminer les convois, et cetera. Donc il venait s'informer.

  9   Q.  Il en découle une deuxième question. Saviez-vous que c'était

 10   véritablement des convois qui fonctionnaient et s'il y a eu plusieurs

 11   convois de véritablement acheminés ?

 12   R.  Oui. Il y a eu plusieurs convois d'aide humanitaire et il y a eu

 13   libération d'un groupe de Juifs dans cette ville assiégée de Sarajevo qui

 14   s'est faite grâce à son aide.

 15   Q.  Merci. Le reste ne m'intéresse que peu.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, la Chambre a dit que lorsqu'un sujet

 17   n'avait pas été abordé lors de l'interrogatoire principal, la Défense, bien

 18   entendu, peut l'aborder, mais à ce moment-là, ce sera décompté dans le

 19   temps consacré aux interrogatoires principaux. La question des convois

 20   humanitaires n'ayant pas été abordée, la Chambre pourra estimer que le

 21   temps que vous avez passé à aborder cela vous sera décompté du temps qui

 22   vous a été alloué.

 23   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, bien entendu, il vous

 24   appartient d'en décider et je m'y conformerai. Mais si je puis dire deux

 25   phrases, à savoir le fait que le témoin a mentionné cette personne, M.

 26   Jakov Binenfeld. Dans l'interrogatoire principal, il a dit pourquoi il

 27   avait choisi cet agent. C'est, de mon avis, l'un des éléments, comme le

 28   témoin l'a confirmé aujourd'hui, avait été le statut moral et le sérieux en

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  1   matière d'affaires de cette personne. Et c'est cet aspect-là que j'avais

  2   voulu examiner. J'ai dû poser des questions au sujet des convois pour voir

  3   si cet homme avait les valeurs morales et le poids moral dont il a été

  4   question. Et je crois que cela est en corrélation avec les domaines abordés

  5   lors de l'interrogatoire et cela ferait partie du contre-interrogatoire,

  6   donc je ne pense pas que cela doit être déduit du temps ultérieur qui

  7   m'appartiendrait.

  8   Il y a une autre raison complémentaire pour laquelle j'ai posé des

  9   questions au sujet de ce convoi et c'est le dernier des segments de

 10   question parce que j'ai cette personne sur la liste des témoins 92 bis. Il

 11   s'agit aussi du rôle à Praljak qui est de l'aide apportée à l'organisation

 12   de ces convois. Alors si vous comptez cela sur mon temps à moi, il

 13   conviendrait juste de prendre en considération la toute dernière des

 14   questions relative aux convois, bien que je pense que cela doit et puisse

 15   être. Oui.

 16   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'entendent pas ce que

 17   M. Praljak a dit.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] On vient de me rappeler qu'il y a un document

 19   à ce sujet. Alors je ne veux pas vous priver de votre temps et, avec votre

 20   permission, j'aimerais aller de l'avant.

 21   Q.  Monsieur le Témoin, la Défense de M. Prlic, Monsieur Karnavas, vous a

 22   montré, entre autres, un document D 02610. Vous l'avez une fois de plus

 23   dans mon petit jeu de documents. Il n'y en a que deux, on ne va pas perdre

 24   davantage de temps. C'est votre courrier. Vous nous avez expliqué la chose,

 25   vous avez demandé au ministère de la Culture et de l'Education de vous

 26   fournir des renseignements concernant le nombre d'enfants, d'élèves, qui

 27   suivent des cours régulièrement parce que cela vous a été demandé par

 28   l'ambassade de la République de Bosnie-Herzégovine. Il en a été donc

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  1   question.

  2   Alors, s'il vous plaît, on voit ici à l'intitulé : "Classe" et un numéro,

  3   et on peut voir maintenant le document suivant, le

  4   3D 01036. Alors, identifions-le d'abord. Il s'agit d'un courrier du

  5   gouvernement de la République de Croatie qui est adressé à votre office,

  6   office des réfugiés. L'adresse est celle de votre office. La date est celle

  7   du 18 janvier. C'est signé par Vesna Giradi-Jurkic, maître en sciences.

  8   Dans la première ligne, on dit, partant de votre courrier, "classe 019-04,"

  9   et cetera, et cetera. Alors, si on se réfère au numéro du document qui vous

 10   a été montré hier, je me permets de vous poser la question suivante : êtes-

 11   vous d'accord pour dire que, de façon évidente, il s'agit d'une réponse

 12   portant sur votre requête du 12 janvier ?

 13   R.  Oui, je suis d'accord. Alors, c'est un document que je revois au bout

 14   de deux ans, mais je m'en souviens quand même bien. Je me souviens que les

 15   chiffre correspondent, à savoir 32 000 élèves et réfugiés de Bosnie-

 16   Herzégovine qui ont régulièrement suivi des cours dans notre système, dont

 17   25 000 dans les écoles élémentaires et 6 000 et quelques dans les écoles

 18   secondaires.

 19   R.  Il s'agit de chiffres qui sont englobés dans les rapports partant des

 20   enquêtes ou des recensements effectués au niveau des réfugiés.

 21   Q.  Fort bien. Ne perdons pas davantage de temps. Nous sommes maintenant au

 22   paragraphe 1 de ce courrier, de ce descriptif, raison pour laquelle j'ai

 23   abordé le document en question. Il est question de chiffres qui confirment

 24   ce que vous nous avez dit hier non seulement du point de vue du nombre,

 25   mais de la composition. Ce sont des enfants qui sont intégrés au programme

 26   scolaire régulier ?

 27   R.  Exact.

 28   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ceci est un document

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  1   authentique ?

  2   R.  Oui, c'est un document authentique.

  3   Q.  Merci. Je voudrais passer à un troisième sujet que vous avez évoqué. A

  4   deux reprises dans votre témoignage, à ce jour, vous avez mentionné, au

  5   sens large du terme, la coopération de votre office avec le MORH, à savoir

  6   l'installation qui était auparavant dans la propriété de la JNA, le MERH,

  7   étant le ministère de la Défense de la République de Croatie. Et vous avez

  8   installé les réfugiés là-bas, et puis vous avez parlé d'une occasion où

  9   vous avez reçu pour utilisation un avion du HV. C'est le HV qui vous a

 10   transféré à Split pour traiter de problèmes liés aux réfugiés.

 11   Ma question est la suivante : est-il exact de dire que votre office avait

 12   des formes de coopération variées avec le ministère de la Défense de la

 13   République de Croatie ?

 14   R.  Oui, Maître Kovacic. Notre office a eu plusieurs formes de coopération

 15   avec le ministère de la Défense, non seulement du point de vue de la prise

 16   en charge de casernes militaires dont nous avions besoin pour y loger des

 17   réfugiés, puisqu'il y avait les infrastructures qu'il fallait et l'armée

 18   croate n'en avait pas besoin. Mis à part ce fait, dans ces bâtiments-là

 19   très souvent, le personnel militaire, les civils, les cuisiniers, le

 20   personnel qui entretenait l'hygiène ont continué à y travailler. Donc, de

 21   ce point de vue-là, nous avons bénéficié d'un grand soutien du côté du

 22   ministère de la Défense.

 23   Je me souviens de M. Vukina qui m'a beaucoup aidé, notamment pour ce qui

 24   est de la logistique, à savoir de l'hébergement des réfugiés et de

 25   l'alimentation de ces derniers parce que l'armée, au début du mois, était

 26   plutôt bien organisée pour ce qui est des vivres et pour ce qui est de

 27   l'hébergement de nos réfugiés. Donc, c'est une grande assistance qui nous

 28   est venue de leur côté.

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  1   Q.  Bien. Dites-nous, Docteur Rebic : est-ce que c'étaient les seuls sujets

  2   abordés à l'occasion des contacts ? Laissez-moi vous demander aussi si le

  3   ministère de la Défense ou le HV venait aider dans des situations

  4   complexes, à l'occasion d'incidents où il s'agissait de résoudre des

  5   questions d'urgence. Vous n'aviez pas votre armée, vous n'aviez pas votre

  6   personnel; peut-être donc avez-vous dû demander de l'aide du ministère de

  7   la Défense qui avait ces effectifs et ces équipements ? Pouvez-vous nous

  8   étoffer vos propos ?

  9   R.  Il y a eu de l'aide, et notamment du point de vue de la logistique.

 10   Pour ce qui est des autres formes d'aide, mis à part la logistique, pour ce

 11   qui est donc de l'hébergement et de la mise en place de centre de réfugiés,

 12   non, il n'y en a pas eu. Ce serait tout ce dont je pourrais parler.

 13   Q.  Bien, merci. Est-ce qu'au sein du ministère de la Défense vous avez

 14   coopéré avec l'IPD, à savoir le département chargé des activités

 15   d'information et propagande ?

 16   R.  Non. Pour autant que je m'en souvienne, je n'ai pas eu de rencontres du

 17   tout avec ces gens-là. Ils pouvaient se procurer des renseignements de la

 18   part de notre office s'ils les avaient demandés, parce que nos

 19   renseignements, nos données étaient accessibles au public.

 20   Q.  Est-ce qu'à l'occasion de ces contacts avec le ministère de la Défense

 21   au sujet des activités dont on a parlé il vous a été donné l'occasion de

 22   rencontrer le général Praljak ?

 23   R.  J'ai rencontré M. Praljak assez tôt, je m'en souviens bien. Je ne me

 24   souviens pas, bien sûr, de la date, mais le mois devait être celui de

 25   février ou mars 1992, lorsque nous, à l'office des réfugiés et des

 26   personnes déplacées, nous avons eu des problèmes. Mais c'est aux côtés de

 27   Mme Rukavina - je pense que c'était son nom. Mme Rukavina était la

 28   directrice de l'office régional des Réfugiés et des Personnes déplacées à

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  1   Zagreb. Nous avons eu des problèmes du point de vue de l'hébergement et de

  2   l'attitude de certains jeunes gens à l'égard de l'armée, et lui nous a, de

  3   façon très décisive, aidés à résoudre nos problèmes. Je me souviens que Mme

  4   Rukavina et moi sommes allés dans un bureau modeste, et c'est là que j'ai

  5   fait la connaissance d'un homme modeste qui s'est complètement dédié, qui

  6   s'est complètement passé au service de la défense croate.

  7   Q.  Alors, pour les besoins du compte rendu d'audience, à qui faites-vous

  8   référence là ?

  9   R.  Je fais référence à M. Praljak. Mme Rukavina, qui est une femme tout à

 10   fait intègre, ne m'a dit que du bien. Parce qu'elle avait son fils qui se

 11   battait non loin de Sisak, et M. Praljak était à l'époque à la tête de

 12   cette défense-là. Elle a beaucoup vanté sa fermeté et son intégrité, son

 13   honnêteté vis-à-vis des gens qui combattaient.

 14   Q.  Bien. Alors, les dires de Mme Rukavina au sujet de ces positions non

 15   loin de Sisak, si je vous dis qu'il s'agit là de Sunja non loin de Sisak,

 16   est-ce que ça vous rafraîchit la mémoire ?

 17   R.  Oui, c'était Sunja. Sunja a été le théâtre de grands combats entre la

 18   JNA et les paramilitaires serbes d'une part et notre armée d'autre part.

 19   Nos gars se sont courageusement battus pour contenir les attaques de la JNA

 20   qui visaient à atteindre Zagreb, parce que Zagreb ce n'était pas très loin.

 21   Q.  Bien. Est-ce qu'à cet effet - et vous avez parlé de

 22   Mme Rukavina, vous nous avez dit qu'elle vous avait relaté l'aide apportée

 23   par l'armée et le général Praljak. Vous souviendriez-vous peut-être d'un

 24   événement en 1992, au tout début, lorsque Mate Granic,  en sa qualité de

 25   vice-premier ministre, avait promis à la mission d'observation de l'Union

 26   européenne qu'il leur serait donné à disposition un hôtel à Jankomir

 27   [phon], à Zagreb ?

 28   Je tiens à vous rappeler les éléments de la chose, et vous allez nous dire

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  1   si vous en savez quelque chose. C'est là qu'on avait logé les réfugiés de

  2   Vukovar, et lorsqu'on leur a dit qu'on voulait les déménager de là il y a

  3   eu une espèce d'insurrection. Ils ne voulaient pas s'en aller. Il y a eu

  4   même des bagarres, et on a même sorti des armes. Et si mes souvenirs sont

  5   bons partant des textes que j'ai pu lire, la maire de l'époque, Marina

  6   Matulovic Dropulic, est intervenue, et puis ça s'était compliqué parce que

  7   la ville, s'agissant de ces réfugiés venus de Vukovar, on leur avait

  8   proposé un hébergement au sept secrétaires du SKOJ, alors ça s'est

  9   compliqué, puis l'armée est ensuite venue proposer une partie des

 10   installations hospitalières à rue Vlaska à Zagreb. Alors, est-ce que ceci

 11   est bien l'événement que vous avez à l'esprit lorsque vous avez parlé de

 12   problèmes ?

 13   R.  Non, pas directement cela, mais je me souviens de cet événement.

 14   Malheureusement, ça s'est passé à Noël. C'est plutôt triste que de voir des

 15   réfugiés venus de Vukovar chassés par les Serbes de leurs foyers croates,

 16   et bon nombre ont été abattus, donc ces gens-là étaient fort exposés au

 17   stress. Ils se trouvaient déjà logés dans ce bâtiment avant la création de

 18   cet office parce qu'ils ont été chassés de Vukovar dans le courant des mois

 19   de septembre, octobre et novembre 1991. Et on avait besoin de ces bâtiments

 20   pour l'armée, donc, il fallait déplacer les réfugiés de là.

 21   Les personnes déplacées et les réfugiés, c'était quelqu'un de très sensible

 22   à la question du déménagement. Et Granic s'était impliqué parce que

 23   l'office, juste avant Noël, avait commencé à fonctionner, et Granic avait

 24   assumé un rôle plus important. Il s'est entretenu avec ces gens-là en

 25   personne et il y a eu un accord disant que ces gens finiraient par partir

 26   de là, qu'ils iraient dans la rue Vlaska, c'est l'ex-hôpital militaire, et

 27   une partie de ces gens, parce qu'ils étaient nombreux, est partie vers

 28   Kozhnice. Vous avez parlé des sept secrétaires du SKOJ. C'est cela. A

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  1   Kozhnice, ils avaient reçu un hébergement très bon.

  2   Je ne me souviens pas si c'étaient des installations militaires ou si

  3   c'étaient des bâtiments qui appartenaient à la ville de Zagreb. Je pense

  4   plutôt que c'était quelque chose qui appartenait à la ville de Zagreb. Mais

  5   c'est tout à fait décent, et il n'y a plus eu de problèmes avec les

  6   réfugiés. Ils ont été installés dans l'ex-hôpital de Vlaska, et Koznica,

  7   c'est la cité des sept secrétaires du SKOJ, qui est le nom de l'ex-

  8   Yougoslavie.

  9   Je leur ai rendu visite à Vlaska et à Koznica, et pour Noël j'ai

 10   célébré la messe avec eux. Ça a été donc la semaine d'après, en fait,

 11   d'après Noël; c'était pour le Nouvel an.

 12   Q.  Vous avez dit que c'était à Noël. C'était Noël 1992 ?

 13   R.  1991.

 14   Q.  1991 ?

 15   R.  Oui, 1991. Vukovar est tombé en 1991, le 21 novembre.

 16   Q.  Très bien. Et vous avez mentionné l'hôpital de la rue Vlaska, la rue

 17   Vlaska de Zagreb, c'est-à-dire une partie de cette enceinte. Avant la

 18   guerre, c'était la propriété de la JNA, puis suite au décret promulgué par

 19   le gouvernement c'est l'armée croate qui avait sous son contrôle ces

 20   installations ?

 21   R.  Oui. Les installations et les bâtiments qui avaient appartenu à la JNA

 22   du temps de l'ex-Yougoslavie, à l'indépendance de la République de Croatie,

 23   ces bâtiments ont été repris par l'armée croate, le HV, donc c'est tout à

 24   fait logique. Et il y a ce grand hôpital, qui n'était pas entièrement

 25   utilisé par l'armée croate, donc nous nous sommes mis d'accord sur le fait

 26   qu'une bonne partie de cette enceinte pouvait être mise à la disposition

 27   des personnes déplacées de Vukovar.

 28   Q.  Très bien. Résumons maintenant : compte tenu de l'ensemble de ces

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  1   contacts, de ces activités portant sur l'aide et sur la propriété, est-ce

  2   que vous pourriez en deux mots, s'il vous plaît, parce que nous n'avons pas

  3   beaucoup de temps, est-ce que vous pouvez nous dire si dans son ensemble

  4   votre coopération avec le ministère de la Défense portant sur les réfugiés

  5   et les personnes déplacées a été fructueuse ?

  6   R.  C'était une coopération correcte qui nous a été très utile, très utile

  7   à l'office et de manière générale très utile aux personnes déplacées et aux

  8   réfugiés. Si l'armée croate ne nous avait pas aidés comme elle l'a fait,

  9   nous aurions rencontré bien plus de difficultés sur la prise en charge des

 10   réfugiés et des personnes déplacées.

 11   Q.  Très bien. Juste une autre question. Vous avez parlé de cet incident eu

 12   égard aux personnes de Vukovar. C'est quelque chose qui a duré quelque

 13   temps, cette histoire des personnes déplacées de Vukovar. Le général

 14   Praljak, n'est-il pas intervenu directement en essayant de convaincre ces

 15   gens de Vukovar pour qu'ils coopèrent et pour qu'ils déménagent comme on

 16   leur a demandé ?

 17   R.  Non, non, je ne m'en souviens pas, car à cette occasion je n'étais pas

 18   à cet endroit dans ce bâtiment. C'était le vice-premier ministre Granic. Je

 19   n'étais pas présent, donc je ne m'en souviens pas.

 20   Q.  Je vous remercie, Docteur Rebic. C'est tout ce que je souhaitais vous

 21   demander.

 22   R.  Je vous en prie.

 23   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant des

 24   arguments que nous avons entendus au sujet du temps, hier pendant

 25   l'interrogatoire principal, il a été question des réfugiés de Sarajevo.

 26   Concrètement, on a présenté le document 2D 00454. En ce sens, j'étaye mes

 27   écritures. Je pense que dans son ensemble cette question et la question du

 28   convoi sont directement liées au contre-interrogatoire. Donc, je pense

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  1   qu'il convient de vérifier ce sujet. Telle est ma position.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Kovacic. La Chambre, on délibérera

  3   sur ce point particulier.

  4   Maître Alaburic, vous avez la parole.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour à toutes et

  6   à tous. 

  7   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

  8   Q.  [interprétation] Docteur Rebic, bonjour. 

  9   R.  Bonjour.

 10   Q.  Je suis Vesna Alaburic. Je suis avocate de Zagreb. Ici, je défends le

 11   général Milivoj Petkovic. Je vais vous poser une question très brève au

 12   sujet de la convention portant sur le statut des réfugiés, et par la suite

 13   je vous poserai quelques questions portant sur le document qui vous a été

 14   présenté par la Défense de M. Prlic, et MM. les Juges ont montré beaucoup

 15   d'intérêt au sujet de ce document.

 16   Ma première question, portant sur la convention régissant le statut des

 17   réfugiés, je vous invite à examiner mon document numéro 4D 01233. Dans ce

 18   document -- est-ce que vous êtes d'accord pour suivre le texte ? Il est dit

 19   que le gouvernement de la République de Croatie a pris une décision sur la

 20   publication des contraintes internationales pluripartites, et il est dit

 21   entre autres que, par des notifications sur la succession, la République de

 22   Croatie, à partir du 8 octobre 1991, est signataire des accords

 23   internationaux pluripartites comme suit. Et puis nous avons la convention

 24   sur le statut des réfugiés de 1951, et au point 37 le protocole sur le

 25   statut juridique des réfugiés datant de 1967.

 26   Alors, Docteur Rebic, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous confirmer

 27   -- ou plutôt, cette date du 8 octobre 1991, c'est la date à partir de

 28   laquelle la Croatie devient partie aux accords internationaux ?

Page 28338

  1   R.  Si je me souviens bien, c'est le jour où le parlement croate a confirmé

  2   -- en fait, je ne me souviens pas exactement. C'est une date qui a une

  3   certaine importance pour la République de Croatie. On a même souhaité à un

  4   moment que cela devienne la fête nationale. Je sais que c'est le parlement

  5   qui a pris une décision ce jour-là. Aidez-moi.

  6   Q.  Je vais vous aider. Est-ce que c'est ce jour-là que le parlement a pris

  7   la décision que la Croatie devenait un Etat indépendant ?

  8   R.  Oui, tout à fait.

  9   Q.  Et c'est notre fête nationale ?

 10   R.  Oui, oui, en fait c'était en octobre. Je me trompais de mois. Je

 11   pensais que c'était en juin.

 12   Q.  En juin, on a pris la décision, il y a eu un moratoire pendant une

 13   période de trois mois, et puis c'est le 8 octobre 1991 qu'on a proclamé

 14   l'indépendance. Docteur Rebic, dites-nous, s'il vous plaît, est-ce que cela

 15   signifie qu'à partir du premier jour de son indépendance, de son existence

 16   comme Etat indépendant, la Croatie a été partie à ces accords

 17   internationaux ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Le document dont nous avons parlé le plus hier, le document P 10048.

 20   Docteur Rebic, est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, jeter un coup

 21   d'œil sur l'écran. Je pense que cela suffira amplement pour mes questions.

 22   Vous, vous souvenez -- voilà nous allons voir ce document s'afficher. C'est

 23   le document sur la prise en charge de 500 personnes de Mostar. Vous, vous

 24   souviendrez, hier il y a eu des questions là-dessus ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Hier, pendant l'interrogatoire, il m'a semblé que vous ne compreniez

 27   pas ce que nos Juges ne comprenaient pas au sujet de ce document. Est-ce

 28   que d'une certaine manière vous ne voyiez pas clairement ?

Page 28339

  1   R.  Oui, c'est exact, je n'ai pas très bien vu ce qu'ils souhaitaient, quel

  2   genre d'éclaircissement. Il m'a semblé qu'ils ne connaissaient pas très

  3   bien la situation géographique entre la Bosnie-Herzégovine et les pays

  4   tiers. En fait, peut-être qu'ils n'ont pas à l'esprit très bien la

  5   géographie.

  6   Q.  Docteur Rebic, vous n'êtes pas un juriste, donc je ne vous poserai pas

  7   des questions sur ce document comme je le ferais si j'avais en face de moi

  8   un juriste, mais je pense que je peux vous poser quelques questions

  9   auxquelles vous serez à même de répondre. Dites-moi, à qui s'adresse, à qui

 10   a été envoyé ce document ?

 11   R.  Ce document, comme on peut le voir ici, a été envoyé au poste-frontière

 12   de Vrgorac, c'est la police des frontières, et à Banja Vrgorac, le lieu de

 13   passage, de traversée de frontières. C'était avant tout destiné à la police

 14   des frontières pour qu'elle puisse laisser passer, grâce à ce document,

 15   laisser passer des personnes qui souhaitaient passer de Bosnie-Herzégovine

 16   vers des pays tiers, et ils ne peuvent le faire autrement qu'en traversant

 17   le territoire de la République de Croatie. Ceci leur a permis --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Permettez-moi de vous interrompre. Suite à ce que

 19   vous avez dit, pour votre information, Monsieur le Témoin, je tiens à vous

 20   préciser que la Chambre s'est déplacée en Bosnie-Herzégovine, et qu'à titre

 21   personnel, j'y suis allé plusieurs fois. Voilà pour votre information.

 22   Continuez, Maître Alaburic.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. J'en

 24   tiendrai compte.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation]

 26   Q.  Il est dit ici en bas de page que le document a été communiqué

 27   également au ministère de l'Intérieur, service d'Immigration.

 28   R.  Oui, cela se comprend, puisque le document a été envoyé à la police des

Page 28340

  1   frontières.

  2   Q.  Dites-nous, s'il vous plaît : ce document a été adressé à la police en

  3   réalité; est-ce que cela signifie que la police s'était adressée à votre

  4   office et a demandé votre avis sur cette demande d'entrer en Croatie pour

  5   ces 500 personnes ? Donc, ma question est la suivante : est-ce que vous

  6   avez envoyé cela à la police parce que la police vous avait demandé votre

  7   avis initialement ?

  8   R.  De toute évidence, parce qu'autrement la police n'avait pas le droit de

  9   laisser ces personnes entrer en République de Croatie faute de ce papier.

 10   Q.  Il ressort également de ce document que votre office a donné son accord

 11   pour que ces personnes se voient autoriser l'entrée et un séjour temporaire

 12   en Croatie. Il en ressort que c'est un autre organe qui prenait la décision

 13   sur le fait d'autoriser l'entrée et le séjour en République de Croatie;

 14   est-ce exact ?

 15   R.  L'office chargé des Réfugiés et des Personnes déplacées a donné son

 16   accord et a donné également son accord pour que ces réfugiés restent

 17   pendant quelque temps chez nous tant qu'une troisième instance, de toute

 18   évidence c'était le HCR, ne les place dans un pays tiers, le pays où ils

 19   souhaitaient se rendre.

 20   Q.  Dites-nous : en fonction de la législation croate -- ou est-ce que vous

 21   pouvez le voir grâce à ce document ? Est-ce que l'autorisation d'entrée et

 22   de séjour temporaire pour ces personnes, est-ce que c'est le ministère de

 23   l'Intérieur qui prenait la décision, et que vous, vous avez donné votre

 24   accord ?

 25   R.  Non, non, ce n'est pas le ministère de l'Intérieur qui prenait la

 26   décision. C'est l'office qui prenait la décision et envoyait cela pour

 27   information au ministère, puisqu'il s'agit des réfugiés et les réfugiés

 28   étaient sous la tutelle de notre office et non pas du ministère des

Page 28341

  1   Affaires intérieures, comme cela est le cas dans d'autres pays.

  2   Q.  Monsieur Rebic, ces 500 personnes n'avaient pas le statut de réfugié en

  3   République de Croatie; c'est bien ça ?

  4   R.  Oui, parce qu'elles ne le souhaitaient -- ne souhaitaient pas obtenir

  5   ce statut.

  6   Q.  Oui, oui, on y viendra. Soyez bref, s'il vous plaît. Donc, à ce moment-

  7   là, ces gens n'ont pas un statut de réfugié; d'accord ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Il ressort de ce document que ces personnes avaient le statut de

 10   ressortissant étranger et qu'elles résident en Croatie en bénéficiant

 11   d'autorisation de séjour temporaire.

 12   R.  Oui, mais à partir du moment que ces gens venaient de Bosnie-

 13   Herzégovine, de fait on allait les prendre en charge même si de jure leur

 14   statut n'était pas reconnu. De fait, c'était reconnu parce que la

 15   République de Croatie devrait leur offrir tout ce qu'elle offrait

 16   normalement aux réfugiés. On ne pouvait pas les abandonner à la rue.

 17   Q.  Oui, ça je comprends. Donc, ce sont des ressortissants étrangers qui

 18   entrent en Croatie, qui ont l'autorisation de séjour temporaire. On les

 19   place au centre de Réfugiés Gasinci; c'est bien ça ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que nous sommes en droit d'en conclure que vous prenez part à la

 22   délivrance de ce document pour la raison qui est celle que ces gens seront

 23   installés dans un centre de réfugiés ?

 24   R.  Oui, et à Gasici il y avait le bureau du HCR des Nations Unies.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis vraiment désolé, mais les

 26   interprètes ont demandé à trois reprises que le conseil de Défense et le

 27   témoin ménagent une pause entre les questions et les réponses. Vous ne

 28   l'avez peut-être pas entendu, mais il est bien difficile pour les

Page 28342

  1   interprètes de vous suivre. Je vous prie, vous pouviez ménager ces pauses.

  2   Je sais que c'est difficile, mais j'espère que vous allez pouvoir les

  3   ménager. Merci.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie, mais dans notre langue,

  5   je n'ai pas entendu ce type d'intervention. Je vais faire très attention à

  6   l'avenir.

  7   Q.  Monsieur Rebic, je ne pars pas du principe que vous connaissez la

  8   législation croate, mais il va falloir que je vous interroge sur l'article

  9   22 - vous n'avez pas ce document - l'article 22 de la loi croate portant

 10   sur la circulation et le séjour des réfugiés. Cet article 22, j'ai demandé

 11   cette traduction à l'intention de la Chambre. Si MM. les Juges souhaitent

 12   consulter cet article en anglais, je peux leur distribuer le texte. Il me

 13   suffira de dire -- enfin, d'ailleurs, le document a été utilisé pendant

 14   l'interrogatoire principal, 4D 01232.

 15   Article 22, Monsieur Rebic, il suffit que vous me suiviez. La loi croate

 16   dit qu'un étranger peut séjourner en Croatie sur la base de cinq principes

 17   de loi, et je vais les énumérer. Premièrement, séjour temporaire;

 18   deuxièmement, séjour prolongé; troisièmement, séjour avec un visa

 19   d'affaire; quatrièmement, séjour pour résidence permanente autorisée; et

 20   cinquièmement, séjour en tant que réfugié ayant un statut de réfugié

 21   reconnu.

 22   Vous savez qu'il existe donc plusieurs principes juridiques permettant aux

 23   étrangers de s'installer en Croatie.

 24   R.  Ce que je savais avant tout c'est que tous ceux qui arrivaient de

 25   Bosnie-Herzégovine, de Vojvodine et de Serbie également, donc, tous ceux

 26   avaient le droit de séjourner en République de Croatie grâce à notre

 27   autorisation, l'autorisation de notre office, qui reconnaissait le statut

 28   de personnes déplacées et de réfugiés pour une durée de trois mois, de six

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  1   mois ou de 12 mois, ou à titre temporaire.

  2   Q.  Donc, c'est votre office qui se prononçait sur l'un de ces cinq

  3   principes de loi permettant aux étrangers de séjourner en Croatie ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  C'est sur la base d'un séjour temporaire que l'on pouvait également

  6   rester en Croatie, et c'est le ministère de l'Intérieur qui se prononçait

  7   là-dessus. 

  8   Est-ce que vous pouvez nous dire, Docteur Rebic, si vous savez

  9   éventuellement si le séjour en Croatie, selon l'un de ces principes

 10   juridiques, excluait que l'on évoque un autre principe juridique pour

 11   rester en Croatie ?

 12   R.  Non, ils ne s'excluaient pas.

 13   Q.  Vous en êtes certain ?

 14   R.  Je ne peux pas le dire avec certitude.

 15   Q.  Je vais vous inviter de nouveau à examiner le document P 10048, les 500

 16   personnes qui arrivent de Mostar. Nous aurons le document à l'écran. Il est

 17   dit dans l'introduction que ces personnes arrivent en Croatie et qu'on les

 18   autorise à bénéficier d'un séjour temporaire. Donc, c'est un des principes

 19   juridiques. C'est le MUP qui en décide. C'est dans le premier paragraphe.

 20   Et puis au troisième paragraphe, il est dit que : "Conformément à cela" --

 21   voyez la dernière ligne, et j'insiste là-dessus, donc je souligne :

 22   "Conformément à cela, ces personnes n'ont pas le droit de demander ou

 23   d'obtenir le statut de réfugié en Croatie." 

 24   Donc, c'est la raison pour laquelle je vous demande si ces principes

 25   juridiques ne s'excluent pas mutuellement. Est-ce que ce terme, "par

 26   conséquent," "sur la base de ce qui précède," donc, ces personnes n'ont pas

 27   le droit de demander un statut de réfugié ?

 28   Est-ce que cela signifie qu'ils n'ont pas droit au statut de réfugié,

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  1   parce que c'est selon le principe de séjour temporaire qu'ils se sont vus

  2   autoriser le séjour en Croatie ?

  3   R.  Oui.

  4   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, de nouveau, afin que le

  5   compte rendu d'audience soit limpide, encore une fois, nous venons d'avoir

  6   une illustration parfaite quant à ce problème. C'est un témoin qui est

  7   amical -- c'est un témoin amical pour ce qui est de Me Alaburic. Ce n'est

  8   pas un témoin hostile et la Défense a eu un avantage injuste en ayant le

  9   droit de poser des questions directrices. 

 10   Alors, je demanderais aux Juges de la Chambre de se pencher sur le

 11   transcript, de relire la question. C'est une question qui était clairement

 12   directrice, posée à un témoin qui n'est pas hostile, et l'Accusation

 13   continue de faire objection à ce genre de pratique. Et comme vous le savez,

 14   il y a même eu requête écrite qui a été faite, donc, ceci illustre

 15   parfaitement ce point.

 16   M. KHAN : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite dire que

 17   cette question a fait l'objet d'une requête qui a été déposée par

 18   l'Accusation, mais il faut dire que l'argument proposé par l'Accusation est

 19   tout à fait un nouvel argument et nouveau, si vous voulez, pour ce qui est

 20   de ce Tribunal.

 21   Monsieur le Président --

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis vraiment désolé de vous

 23   interrompre, mais c'est une question pendante et la Défense aura la

 24   possibilité de répondre -- d'y répondre. Je ne crois pas que le fait d'en

 25   parler maintenant ne pourra nous avancer. La Chambre prend note de

 26   l'objection, mais laissons-en à cela. Je crois qu'il ne faudrait pas

 27   dévouer plus de temps à une discussion qui pourrait s'étaler plus

 28   longuement. Je comprends tout à fait ce que vous nous dites, ce n'est pas

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  1   du tout erroné, mais je crois que ceci ne peut pas nous être utile à ce

  2   moment-ci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : -- j'indique à tout le monde que le témoin nous a

  4   dit qu'en fin de semaine, il partait en Israël et que, donc, pour éviter

  5   qu'il reste pour la semaine prochaine en continuation, évitons de perdre du

  6   temps. Comme l'a dit mon collègue, la question est pendante, les Juges vont

  7   rendre une décision, et j'invite Me Alaburic, dans la mesure du possible,

  8   de poser des questions neutres comme le font, en règle générale, les Juges

  9   quand ils posent des questions.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie de vos instructions, je

 11   tâcherai de poser des questions aussi neutres que possible. Si M. Rebic

 12   était juriste, je reformulerais mes questions, je les poserais complètement

 13   autrement, mais nous avons un profane dans le domaine du droit devant nous

 14   et j'estime qu'il convient de lui poser des questions autrement. C'est la

 15   raison pour laquelle --

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, est-ce que je peux dire quelque

 17   chose, Messieurs les Juges ? On ne peut pas me manipuler par des questions

 18   directrices, personne ne peut le faire contre moi.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Témoin, de votre réponse. Je l'ai

 20   déjà dit à propos d'autres témoins compte tenu de la qualité des témoins où

 21   il m'apparaîtrait difficile de manipuler des témoins. Bon, voilà.

 22   Continuez, Maître Alaburic.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Véritablement, je n'ai aucune intention de

 24   manipuler. Les réponses nous seront plus utiles si elles correspondront à

 25   la teneur de la législation croate.

 26   Q.  Donc, six personnes ne pouvaient pas demander un statut de réfugié

 27   parce qu'elles avaient reçu l'autorisation de séjourner en Croatie sur la

 28   base d'un autre principe juridique, à savoir celle du séjour prolongé.

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  1   La question du statut qui serait celui de quelqu'un : est-ce que c'est la

  2   République de Croatie qui en décide ou c'est la personne qui donc arrive en

  3   Croatie et qui présente telle ou telle demande ? C'est en fonction de ces

  4   demandes ?

  5   R.  C'est l'office des Réfugiés et des Personnes déplacées qui prenait la

  6   décision conformément à la situation dans laquelle se trouvait la personne

  7   qui se rendait en Croatie et conformément à la volonté de cette personne.

  8   Si cette personne demandait un statut de réfugié, elle le recevait. Si elle

  9   arrivait en Croatie avec une demande express de ne passer que très peu de

 10   temps -- que de rester temporairement en Croatie parce qu'elle avait un

 11   séjour garanti dans un pays tiers, alors, nous n'avions pas d'autres

 12   raisons que d'agir conformément au souhait de la personne, donc, on lui

 13   accordait un séjour temporaire; sinon, on l'aurait forcée à s'installer de

 14   manière permanente chez nous en tant que réfugié.

 15   Q.  Dr Rebic, est-ce que vous savez la chose suivante : imaginons la

 16   situation d'un réfugié de Bosnie-Herzégovine, un ressortissant de Bosnie-

 17   Herzégovine qui prend la fuite. Est-ce qu'il peut bénéficier d'un statut de

 18   réfugié dans plusieurs pays, en Croatie, Grande-Bretagne, France, ou bien,

 19   il y avait une autre

 20   règle ?

 21   R.  Pratiquement, celui qui bénéficiait du statut de réfugié en Croatie et

 22   qui se rendait en Allemagne et si, au moment de son départ de la République

 23   de Croatie, il ne s'était pas enregistré auprès du bureau régional, n'avait

 24   pas remis sa carte, pour la prendre -- s'il gardait sa carte de réfugié et

 25   obtenait un statut de réfugié en Allemagne, il pouvait avoir les deux. Mais

 26   ça ne lui était d'aucune utilité puisqu'en Allemagne il ne pouvait pas

 27   bénéficier des droits que lui accordait sa carte de réfugié en Croatie.

 28   Q.  Très bien. Bon, est-ce qu'il n'y avait pas une autre règle, à savoir

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  1   que le statut de réfugié ne pouvait être acquis que dans un seul pays ? Si,

  2   par exemple, on était réfugié en République de Croatie, c'est uniquement

  3   par voie de manipulations qu'on pouvait obtenir le statut de réfugié dans

  4   un pays tiers; est-ce exact ?

  5   R.  Oui, c'est exact.

  6   Q.  Très bien. Dites-nous, Dr Rebic, si quelqu'un passe par la République

  7   de Croatie avec l'intention de se rendre dans un pays tiers où il souhaite

  8   obtenir un statut de réfugié. Est-ce que le fait de bénéficier déjà du

  9   statut de réfugié en Croatie le gênerait dans ses intentions ?

 10   R.  Pour autant que je le sache, non, puisque le pays tiers pourrait

 11   difficilement savoir qu'il bénéficie déjà du statut de réfugié en Croatie.

 12   A l'époque, il n'y avait pas ce type de communications comme on le connaît

 13   aujourd'hui, le courriel, télécopies, et cetera. Et d'ailleurs, c'était la

 14   guerre et il y avait beaucoup, beaucoup de réfugiés. Il y avait des

 15   déplacements permanents d'un endroit à l'autre, d'un pays à l'autre,

 16   départs, retours, et cetera.

 17   Q.  Donc, supposons que les documents soient tenus correctement, est-ce

 18   qu'il est logique que les personnes qui partent dans un pays tiers pour

 19   obtenir le statut de réfugié là-bas se contentent de transiter par la

 20   Croatie parce que, sinon, ces personne ne pourraient pas obtenir le statut

 21   de réfugié dans ces pays tiers ?

 22   R.  Oui, tout à fait, c'est logique.

 23   Q.  Donc, est-ce que cela se comprend -- est-ce que c'est conforme à la loi

 24   que, pour ce qui est des personnes de transit, la Croatie reçoit les

 25   réfugiés de Bosnie-Herzégovine qui souhaitent devenir réfugiés dans un pays

 26   tiers ?

 27   R.  Oui.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

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  1   j'en ai terminé.

  2   Q.  Dr Rebic, je vous remercie.

  3   R.  C'est moi qui vous remercie.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de suivi, Monsieur le Témoin. Dans

  5   cette salle d'audience, plusieurs d'entre nous sont plus ou moins

  6   spécialisés en matière de statut des réfugiés. Les questions qui vous ont

  7   été posées permettent d'éclairer certaines facettes du statut des réfugiés.

  8   Mais la dernière question : quelqu'un qui a, par exemple, des assurances

  9   comme quoi le Danemark va lui donner le statut de réfugié de par la lettre

 10   de garantie possible, est-ce qu'à ce moment-là, votre office ou le

 11   gouvernement de la Croatie de l'époque se devait de faire le nécessaire

 12   pour permettre à ce réfugié d'aller au Danemark où on allait lui accorder

 13   le statut de réfugié ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dirais que le plus souvent les réfugiés

 15   eux-mêmes, avec l'aide du HCR, organisaient leurs départs dans des pays

 16   tiers, par exemple, au Danemark. La Croatie, pour sa part, si mes souvenirs

 17   sont bons, n'organisait pas ce type de départs dans les pays tiers, pour

 18   autant que je m'en souvienne.

 19   Parce que, sinon, cela aurait été très difficile -- enfin, là, je me lance

 20   dans une explication -- interprétation parce que la Croatie ne pouvait pas

 21   organiser un convoi par train ou par autocar pour que ces gens partent en

 22   Slovénie parce que c'était inconcevable à l'époque, tout simplement.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : -- la situation est complexe, mais imaginons

 24   quelqu'un qui vient de Mostar qui n'a plus de papiers pour des raisons

 25   diverses. Il arrive chez vous, pris en charge par votre office, mais il n'a

 26   pas de passeport, il n'a pas de passeport de la Bosnie-Herzégovine parce

 27   qu'il n'a plus de papiers. Comme il doit prendre un avion pour, par

 28   exemple, Zagreb, Londres, où il y aura des passages à la frontière avec des

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  1   contrôles, est-ce qu'à ce moment-là, votre office lui donnait un sauf

  2   conduit, un document lui permettant, par exemple, de rentrer au Royaume Uni

  3   ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, une personne de ce type en

  5   République de Croatie recevait de la part de l'office des réfugiés et

  6   personnes déplacées, voire de l'office l'un des offices régionaux, ils

  7   étaient 21 en Croatie, recevaient donc des papiers, des documents qu'on

  8   appelait visas transit; cette personne était accueillie par un pays tiers,

  9   par exemple, le Danemark, parce qu'il y avait une pièce d'identité de

 10   réfugié. Lequel document montrait que c'était une personne qui avait fui la

 11   République de Bosnie-Herzégovine, et qu'en Croatie, elle avait demandé "ce

 12   visa de transit." Il n'y avait aucun document pour ce qui est de cette

 13   personne en notre attention, donc, nous devions faire confiance à la

 14   personne et à ses dires, parce que cette personne n'est pas venue à nous

 15   avec une pièce d'identité, un passeport, il y en a eu qui ont eu tout

 16   brûlé, tout incendié, et qui n'avaient aucun document, aucune pièce

 17   d'identité, ils venaient donc en tant qu'individus à nous.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Monsieur Scott, vous avez quatre heures

 19   15 minutes, ou quatre heures 20, mais je crois que mon collègue a une autre

 20   question.

 21   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, dans la foulée de la question du

 22   Président j'ai deux petites questions à vous poser. Essayez d'être très

 23   bref et très précis.

 24   Quel était le ministère, le ministère de tutelle de votre office ? Etiez-

 25   vous directement subordonné à l'un ou l'autre ministère, par exemple, celui

 26   de l'Intérieur ou des Affaires étrangères, par exemple, ou bien, vous

 27   dépendiez directement du chef du gouvernement ? Ça c'est la première

 28   question.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, l'office chargé des Réfugiés

  2   et des Personnes déplacées a été créé par le gouvernement de la République

  3   de Croatie en guise de poste avancé ou d'instrument, ou de ministère

  4   nouveau, et cela n'était pas subordonné à un autre ministère quelconque. Ça

  5   répondait directement au gouvernement, à savoir au vice-premier dans le cas

  6   concret, à l'époque, c'était le Dr Mate Granic qui se trouvait être vice-

  7   premier ministre chargé des affaires sociales. Donc, l'office contactait

  8   directement le gouvernement.

  9   M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Merci beaucoup.

 10   Deuxième question : votre office avait le mandat d'hébergement et de

 11   prendre soin des réfugiés et des personnes déplacées. Aviez-vous le pouvoir

 12   d'octroyer le statut de réfugié pour des personnes qui étaient à

 13   l'extérieur de la Croatie, ou bien, votre pouvoir s'appliquait-il

 14   uniquement à ceux qui étaient déjà en Croatie ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, nos attributions portaient

 16   sur tous les individus, à savoir les individus qui se trouvaient déjà en

 17   République de Croatie et avaient réclamé déjà le statut de réfugié, tant

 18   que les individus qui venaient de Bosnie-Herzégovine nous voient en

 19   demandant un statut de réfugié. Nous étions l'office, l'établissement qui

 20   était seul habilité à accorder un statut de réfugié.

 21   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup. Merci à vous.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Scott, vous avez la parole

 23   pour le début du contre-interrogatoire.

 24   M. SCOTT : [interprétation] Nous allons distribuer un certain nombre de

 25   documents.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez la parole.

 27   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

 28   Messieurs les Juges. Bonjour au conseil de la Défense, bonjour à toutes et

Page 28352

  1   tous ici présents, et surtout bonjour, Monsieur Rebic.

  2   Contre-interrogatoire par M. Scott :

  3   Q.  [interprétation]

  4   R.  Bonjour à vous, Monsieur Scott.

  5   Q.  Au cours de ces deux dernières journées, je -- j'essaie de me souvenir

  6   si j'avais de contre-interroger un prêtre, et est-ce que j'ai besoin d'une

  7   sorte de dispense particulière pour ce faire. Je me posais cette question.

  8   R.  Non, ce n'est pas nécessaire.

  9   Q.  Bien.

 10   R.  Ce n'est pas une confession. Ce n'est pas une confession.

 11   Q.  Ah, on va voir. On va voir. Essayons de parler un peu plus de votre

 12   organisation, et de revenir sur certaines des questions qui vous ont été

 13   posées par M. le Juge Mindua, pour essayer de mettre en évidence des

 14   informations qui peuvent nous être utiles.

 15   Vous avez commencé à travailler au sein du bureau chargé des

 16   Personnes déplacées et des Réfugiés en Croatie; enfin, vous avez été en

 17   contact ou impliqué dans ces activités dès le début, n'est-ce

 18   pas ?

 19   R.  C'est exact.

 20   Q.  Vous avez évoqué les relations qui existaient entre votre office et le

 21   gouvernement croate. Est-ce que j'ai bien compris, celui qu'on pourrait

 22   considérer comme votre boss, votre chef, en employant un langage un petit

 23   familier, est-ce qu'on peut dire que c'était Mate Granic qui, à l'époque,

 24   était à la fois ministre des Affaires étrangères et vice-premier ministre

 25   de la République de Croatie ?

 26   R.  C'est exact, mais à ce moment, ou au tout début, il n'était pas encore

 27   ministre des affaires étrangères. Il était vice-premier ministre chargé des

 28   questions sociales. Et étant donné que notre office avait justement des

Page 28353

  1   questions sociales dans ses responsabilités, on est passé par lui pour

  2   avoir affaire au gouvernement. Donc il ne serait pas juste ou honnête à

  3   l'époque de présenter directement des problèmes directement au premier

  4   ministre, plutôt que de le faire d'abord auprès de ce vice-premier ministre

  5   M. Granic.

  6   Q.  Bien. Oui, vous avez tout à fait raison. Parce qu'ultérieurement M.

  7   Granic est devenu vice-premier ministre mais à ce moment-là, il était --

  8   vous étiez toujours au sein de l'ODPR, n'est-ce pas, de l'office --

  9   R.  Non, ça n'a pas bien été dit. Vous voulez dire : il est devenu ministre

 10   des Affaires étrangères, j'imagine. Donc, ultérieurement, vous vouliez

 11   dire, il est venu ministre des Affaires étrangères.

 12   Q.  Vous avez tout à fait raison. Quelle était la fréquence de vos contacts

 13   avec Mate Granic en tant que votre supérieur, votre

 14   chef ? Est-ce que vous le rencontriez une fois par semaine, est-ce que vous

 15   deviez lui rendre compte de votre travail, de vos

 16   activités ? Quel était le type de relation que vous aviez avec

 17   M. Granic ?

 18   R.  Monsieur Scott, l'office chargé des Réfugiés et des Personnes

 19   déplacées, voire moi-même en ma qualité de directeur, voire encore en

 20   compagnie de mon adjoint, d'un secrétaire ou d'une autre personne qui se

 21   trouverait chargée des questions dont il s'agissait de parler avec le Dr

 22   Granic, nous allions ensemble chez lui. Ces réunions ou ces briefings

 23   avaient lieu plusieurs fois par semaine. Il y a eu des occasions où on

 24   s'était vu tous les jours parce que la situation le requérait.

 25   Q.  Très bien. Et nous allons nous intéresser essentiellement à la période

 26   de 1992 et du début 1993. Pendant cette période à l'office, qui était votre

 27   bras droit ?

 28   R.  Il y avait M. Cepin.

Page 28354

  1   Q.  Quel était le poste occupé par M. Zoric, par le Dr Zoric, Damir Zoric ?

  2   R.  M. Damir Zoric était le secrétaire général.

  3   Q.  Est-ce que vous-même, Monsieur Rebic, M. Cepin et le

  4   Dr Zoric, est-ce que l'on peut dire avec exactitude que vous étiez les

  5   trois personnages principaux au sein de cette organisation ?

  6   R.  Oui, c'étaient les personnes les plus impliquées dans les activités de

  7   l'office. Je précise que l'adjoint à M. Cepin est venu plus tard lorsque

  8   les tâches se sont multipliées et lorsque le secrétaire général ne pouvait

  9   plus être en mesure ou à plein temps ou à part entière un adjoint pour moi,

 10   donc, il a accompli des tâches qui étaient liées à l'office, au personnel,

 11   aux activités de l'office et tout autres questions qui avaient trait aux

 12   réfugiés et personnes déplacées.

 13   Q.  Bien. Maintenant, à partir de ce que vous venez de nous dire s'agissant

 14   des autres bureaux, des autres offices, une question comme vous le savez,

 15   un bureau est chargé des Personnes déplacées et des Réfugiés, une

 16   organisation qui porte exactement le même nom a été mis en place en Herceg-

 17   Bosna qui au sein de votre bureau, c'est peut-être vous mais qui au sein de

 18   votre bureau était chargé d'entretenir des contacts avec l'ODPR d'Herceg-

 19   Bosna ? Qui avait le plus de contacts ?

 20   R.  Depuis le début de la guerre en Bosnie-Herzégovine, l'office des

 21   Réfugiés et des Personnes déplacées avait eu des contacts avec Sarajevo en

 22   passant par Mme Omersoftic. Mme Omersoftic est venue vers la mi-1992 à

 23   Zagreb et m'a demandé de lui montrer comment faire ou comment accomplir les

 24   tâches relatives à l'accueil des réfugiés et des personnes déplacées.

 25   Q.  Bien. Merci. Monsieur, tout comme l'a fait Me Karnavas, avec toutes mes

 26   excuses à l'avance, il va parfois falloir que je vous interrompe à cause

 27   des limites de temps qui sont les nôtres. Je vais reformuler ma question

 28   qui peut-être n'était pas suffisamment claire.

Page 28355

  1   Je ne parlais pas de l'organisation chargée des Personnes déplacées du

  2   gouvernement de Bosnie-Herzégovine. La question que je vous posais

  3   concernait l'office chargée des Personnes déplacées et des réfugiés qui a

  4   été mise en place par le HVO, par le Conseil de la Défense croate à Mostar,

  5   et la question que je vous posais c'était de savoir qui au sein de votre

  6   bureau, qui a à Zagreb avait le plus de contacts avec l'ODPR du HVO.

  7   R.  Cet office sur le territoire de la République de Bosnie-Herzégovine ou

  8   là où il y a eu création de la République d'Herceg-Bosna est intervenu un

  9   peu plus tard par rapport aux activités déployées par un office similaire à

 10   Sarajevo. Et conformément à l'accord réalisé entre la République de Croatie

 11   et la Bosnie-Herzégovine, il a été précisé que la République de Croatie

 12   vienne aider sur le plan logistique la Bosnie-Herzégovine, et notamment

 13   Sarajevo, à savoir la partie bosnienne musulmane et la partie croate de

 14   Bosnie. Il a été donc décidé que la République de Croatie aide à organiser

 15   ce type d'office sur le territoire placé sous le contrôle du HVO. C'est ce

 16   qui a été fait. Eux, tout comme Mme Omersoftic, sont venus à Zagreb pour

 17   récupérer l'essentiel des informations et des instructions sur la façon de

 18   fonctionner et ils se sont ensuite impliqués dans l'Herceg-Bosna.

 19   Q.  Excusez-moi. Excusez-moi, merci. Je vais reposer ma question pour une,

 20   pour la troisième fois. Qui, qui au sein de votre office, c'était peut-être

 21   vous, c'était peut-être M. Zoric, c'était peut-être M. Cepin, qui au sein

 22   de l'ODPR de Croatie avait le plus de contacts avec l'ODPR du HVO et qui

 23   était votre interlocuteur au sein de l'ODPR du HVO, la personne avec qui

 24   vous aviez des contacts ?

 25   R.  Nous avons participé tous les trois à ces activités surtout moi en ma

 26   qualité de directeur de l'office. Ils savaient venir à moi directement et

 27   m'informer de la situation tout comme Mme Omersoftic venait me voir pour

 28   m'informer de la situation à Sarajevo. Et si besoin était, c'était Zoric

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  1   qui contactait ou Cepin qui était contacté.

  2   Q.  [imperceptible]. Et le deuxième volet de ma question, c'était de savoir

  3   de l'autre côté qui était les personnes qui étaient les gens l'ODPR du HVO

  4   c'est-à-dire l'organisation d'Herceg-Bosna avec qui vous aviez des contacts

  5   ? Qui ?

  6   R.  La première des personnes avec qui nous avons coopéré était un dénommé

  7   Tadic, M. Tadic. Après la deuxième personne, qui était le responsable de

  8   cet office des Réfugiés et Personnes déplacées, était M. Raguz -- Martin

  9   Raguz. Je ne sais pas vous dire les dates auxquelles ou à laquelle -- la

 10   date à laquelle l'un a succédé à l'autre.

 11   Q.  Bien. Et M. Tadic c'était Darinko Tadic, et c'était, n'est-ce pas, lui

 12   qui était à la tête de l'ODPR du HVO avant M. Rebic ?

 13   R.  Oui, c'est exact.

 14   Q.  Bien. Question à type différent de celle que je viens de vous poser.

 15   Depuis le début de votre déposition, vous nous avez parlé de temps à autre

 16   de cette question, mais je souhaite y revenir. Pendant cette période,

 17   c'est-à-dire de la mi-1992, à partir de juillet 1992 jusqu'à peu près

 18   juillet 1994, donc, pendant cette période d'environ deux ans, à combien de

 19   reprises vous êtes-vous personnellement rendu au Herceg-Bosna ?

 20   R.  Etant donné que l'Herceg-Bosna ne tombait sous mes attributions en

 21   quelque point de vue que ce soit, c'est très rarement, et peut-être est-ce

 22   une fois seulement, où peut-être, si mes souvenirs sont bons, c'était-il

 23   plutôt agi de deux reprises où je suis allé dans cet office d'Herceg-Bosna.

 24   Il n'y avait aucune nécessité pour nous de se déplacer là-bas, parce que

 25   dans leurs activités ils étaient tout à fait autonomes. Ils n'étaient pas

 26   une espèce de bras prolongé à nous, et nous n'avions pas à nous déplacer

 27   là-bas, car nous n'avions aucune attribution vis-à-vis de cet office-là.

 28   Q.  Bien. J'aimerais qu'on vous remette un document qui se trouve dans un

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  1   des classeurs de la Défense. C'est un document qui vous a été présenté par

  2   Me Karnavas. Vous aurez peut-être besoin de l'aide de l'huissier. Il s'agit

  3   de la pièce 1D 02008.

  4   On me dit que c'est peut-être le douzième document dans le classeur.

  5   Vous avez trouvé le document ?

  6   R.  Non, je ne l'ai pas.

  7   Q.  On va vous le trouver. On va le trouver.

  8   R.  Je vais l'avoir à l'instant.

  9   Q.  Merci.

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   Q.  Voilà un document que nous avons déjà examiné. L'autre jour, vous

 12   l'avez consulté, ce document. D'après les informations qui nous ont été

 13   communiquées, Monsieur Rebic, il s'agit d'un document que vous connaissez.

 14   Vous nous aviez dit que le Dr Granic - vous nous avez expliqué que c'était

 15   votre chef - c'est lui qui vous a informé de ce document, qui vous en a

 16   parlé. Il y avait eu une réunion entre M. Granic et M. Prlic parce que M.

 17   Granic souhaitait définir les relations de la Croatie et de l'Herceg-Bosna,

 18   et le Dr Granic et

 19   M. Prlic ont convenu que l'ODPR croate devrait coopérer afin de mettre en

 20   place une instance semblable -- un office semblable à l'Herceg-Bosna, et il

 21   s'agissait donc de prendre les dispositions nécessaires pour mettre en

 22   place cette institution et pour qu'elle commence à fonctionner. Est-ce que

 23   c'est ce dont il retourne ici, que c'est ce qu'on nous a expliqué à ce

 24   sujet ?

 25   R.  C'est exact. Je précise qu'à l'époque nous n'avions pas le temps de

 26   faire en sorte que Granic et moi discutions dans le détail de toutes les

 27   formes de conclusions conjointes auxquelles on serait arrivé à d'autres

 28   personnes. Mais d'une manière générale, j'ai été mis au courant.

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  1   Q.  Il y a plusieurs éléments de ce document que nous allons étudier parce

  2   que je vais poser mes questions en examinant tour à tour différents sujets,

  3   si bien qu'il m'arrivera de revenir sur un document peut-être. En

  4   l'occurrence, j'aimerais qu'on examine le paragraphe 2, le paragraphe 5.

  5   Veuillez, s'il vous plaît, parcourir rapidement ces deux paragraphes.

  6   Tout ceci, ça cadre avec ce que vous nous avez dit précédemment, à savoir

  7   que l'ODPR de Croatie et l'ODPR du HVO déployaient des efforts pour mettre

  8   en place l'ODPR du HVO et pour qu'il y ait une coopération étroite entre

  9   ces deux organisations; est-ce bien exact ?

 10   R.  Oui, mais il n'y a pas que cela, Monsieur Scott. Il s'agissait, sur le

 11   territoire d'Herceg-Bosna, d'organiser l'accueil, les soins à l'intention

 12   des personnes déplacées à l'intérieur de ce territoire. C'est précisément

 13   ce que la République de Croatie avait demandé. Il ne fallait pas que tous

 14   viennent maintenant en Croatie. Il s'agissait, tant pour ce qui est de

 15   Sarajevo et de Mostar, et c'était l'une des conclusions de cet accord

 16   amical entre Tudjman et Izetbegovic, afin que l'une et l'autre partie, la

 17   partie musulmane et la partie croate, en coopération avec la Croatie, se

 18   charge des personnes déplacées. Et nous avons dit que nous aiderions là où

 19   ils ne pouvaient pas le faire, parce qu'au cas où ils venaient à être

 20   submergés par des nombres trop importants.

 21   Q.  Merci. Si on examine le point 7 de ce document, peut-être pourriez-vous

 22   nous aider à répondre à la question suivante puisque vous étiez à la tête

 23   de l'organisation croate et que vous aviez des relations de travail

 24   étroites avec M. Granic.

 25   Au point 7, on lit, je cite : "Dans le cadre des contacts avec le bureau du

 26   Haut-commissaire chargé des réfugiés des Nations Unies, faites en sorte que

 27   l'accès soit centralisé. Ces contacts doivent être réalisés uniquement au

 28   niveau du HVO, de la HZ et du HB, c'est-à-dire par l'intermédiaire d'un

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  1   bureau -- d'un office mis en place par le HVO."

  2   D'après l'expérience qui est la vôtre, pouvez-vous nous dire pourquoi on

  3   insistait sur l'aspect centralisé et limité à un niveau supérieur dans le

  4   cadre de ces contacts ?

  5   R.  Autant que je comprenne ce paragraphe 7, la partie croate insiste pour

  6   qu'en Herceg-Bosna aussi il soit mises en places des circonstances de ce

  7   genre, des soins de ce genre qui seraient ensuite aidées par le Haut-

  8   commissariat aux Réfugiés, et la Croatie, elle aussi aiderait. L'office

  9   croate des Réfugiés et des Personnes déplacées était en contact quotidien

 10   avec le HCR des Nations Unies, et certains renseignements, me semble-t-il,

 11   puisque le HCR n'avait pas de bureau à Mostar, donc, le contact passait par

 12   le HCR en passant par nous vers le sud. Mais ces contacts n'étaient pas si

 13   fréquents. Le HCR, parfois, s'impliquait directement dans la solution des

 14   problèmes, avec l'office des Réfugiés et des Personnes déplacées à Mostar.

 15   Q.  Bien. Nous allons peut-être nous pencher sur certains exemples que vous

 16   venez de nous dire, mais peut-être pourrais-je passer à un examen d'une

 17   autre partie de ce document avant qu'on fasse la pause.

 18   Le point 11, on constate qu'un autre sujet est évoqué lors de la réunion

 19   entre MM. Granic et Prlic. C'est l'assistance apportée par la Croatie dans

 20   le fonctionnement de l'université de Mostar.

 21   R.  C'est exact. La République de Croatie a, en effet, apporté un soutien

 22   logistique pour la création d'une université à Mostar aux fins de faire en

 23   sorte que les Croates et les Bosniens puissent devenir autonomes là aussi,

 24   et non pas aller à Zagreb, par exemple, ou à Sarajevo, mais rester chez eux

 25   dans leur propre ville et disposer d'une université de ce genre. Et de nos

 26   jours encore, l'université existe, et de nos jours encore des professeurs

 27   de Zagreb, notamment ceux de la faculté de médecine, vont enseigner à

 28   Mostar.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est peut-être le -

  2   - maintenant opportun pour prendre la pause.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Tout à fait. Nous allons faire une pause de 20

  4   minutes et nous reprendrons dans 20 minutes.

  5   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

  6   --- L'audience est reprise à 16 heures 08.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'Accusation a à nouveau la parole.

  8   M. SCOTT : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Rebic, s'agissant de l'un des accusés dans cette affaire, M.

 10   Prlic, pourriez-vous, je vous prie, confirmer ce que je crois comprendre,

 11   et encore une fois, c'est basé sur une information que l'on m'a donnée,

 12   pourrais-je confirmer avec vous, pour le compte rendu d'audience, croyez-

 13   vous que le Dr Prlic a rendu visite au

 14   Dr Granic environ un mois avant le début des combats dans la région de

 15   Posavina peu de temps après que la guerre ait commencé avec la JNA ? Est-ce

 16   que c'est bien cela ?

 17   R.  Oui, cela s'est produit lorsque j'ai rencontré pour la première fois M.

 18   Prlic. C'était au cabinet de M. Granic, qui était le vice-premier ministre.

 19   Q.  Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si - et je sais que ceci

 20   s'est passé il y a plusieurs années - mais pourriez-vous nous donner

 21   d'autres informations quant à la date approximative à laquelle vous avez

 22   rencontré pour la première fois M. Prlic ?

 23   R.  Je n'arrive pas à me souvenir de la date. Ça pouvait être en été 1992,

 24   voire même un peu plus -- plus tard vers l'automne. Et ce n'était pas mon

 25   entretien officiel avec M. Prlic, c'est par hasard que je -- que j'étais

 26   venu voir M. Granic, le vice-premier ministre. J'étais venu lui parler d'un

 27   besoin que j'avais, je ne me souviens plus de quoi il s'agissait. Et,

 28   pendant la pause, j'ai rencontré

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  1   M. Prlic et j'ai eu un bref entretien avec lui.

  2   Q.  Dans -- pour ne pas perdre du temps, permettez-moi de vous demander si

  3   vous -- si vous pouviez nous dire si, avant la guerre ou pendant la guerre

  4   -- je ne parle pas de la guerre de -- je ne parle pas de 1995, mais avant

  5   et pendant la guerre; pourriez-vous nous dire si vous vous souvenez d'avoir

  6   rencontré M. Prlic à deux reprises ? Est-ce bien exact ? C'est bien ce que

  7   vous nous avez dit ?

  8   R.  Une fois -- une fois certainement. Je l'ai rencontré une fois. Deux

  9   fois, je n'en suis pas tout à fait certain. Clairement, c'est parce que

 10   j'ai assisté à certaines réunions qui ont eu lieu entre les représentants

 11   du gouvernement de la République de Bosnie-Herzégovine et de Croatie. Prlic

 12   était là, mais il y avait plein d'autres personnes qui étaient présentes.

 13   Q.  Très bien. Et pour clore ce sujet, si je comprends bien, vous ne vous

 14   souvenez pas d'avoir eu des communications importantes ou des conversations

 15   très longues pendant la guerre -- et enfin, pour être plus précis, je parle

 16   de 1992, 1994, de cette période-là, n'est-ce pas ?

 17   R.  Avec M. Prlic, j'ai eu un contact par téléphone, ça je le sais. Cela a

 18   eu lieu au moment où on a trouvé à peu près 150 Musulmans de Bosnie-

 19   Herzégovine dans la mosquée où ils se sont trouvés dans la mosquée de

 20   Zagreb. J'ai reçu un appel de la part de M. Mouchet, il était extrêmement

 21   triste et il m'a demandé pourquoi on ne recevait pas davantage de

 22   Musulmans. Et j'ai dit à M. Mouchet que c'était la première fois que

 23   j'entendais cela puisque, tous les jours, on recevait -- on accueillait

 24   tous ceux qui arrivaient, qu'il s'agisse de Musulmans de Bosnie-Herzégovine

 25   ou de Croates de Bosnie-Herzégovine. Et puis il m'a dit à ce moment-là

 26   qu'il y avait 800 personnes dans la mosquée, mais il n'y en avait pas

 27   autant d'après mes souvenirs. J'ai envoyé Mme Bozena Les, qui était à la

 28   tête du bureau régional de Zagreb, je l'ai envoyée à la mosquée sur-le-

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  1   champ pour qu'elle voie ce qui en était.

  2   Q.  Je suis désolée, je vais vous interrompre.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, j'insiste pour que

  4   l'on permette au témoin de terminer sa réponse. La question lui a été posée

  5   et il faudrait lui permettre de pouvoir répondre à cette question, il en a

  6   le droit.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Non, Monsieur le Président. En fait, j'ai le

  8   droit d'obtenir une réponse plus courte. C'est le temps que j'ai et si la

  9   Chambre souhaite m'accorder plus de temps, la Chambre peut le faire. Mais

 10   ma question était très précise, je ne suis pas intéressé à entendre toute

 11   l'histoire, je voulais simplement savoir s'il pouvait me parler d'une

 12   conversation téléphonique avec

 13   M. Prlic. Il nous a dit qu'il y avait 150 Bosniaques de Zagreb qui se

 14   trouvaient à la mosquée, et c'est la raison pour laquelle je voulais lui

 15   poser cette question, alors, nous permettant directement de la conversation

 16   que le témoin a eue avec M. Prlic. Alors, Monsieur, vous nous avez dit vous

 17   être entretenu avec M. Prlic sur cette question; pourriez-vous nous dire de

 18   quoi elle en a été question relativement à ces Musulmans qui se trouvaient

 19   dans la mosquée de Zagreb ?

 20   R.  Je suis parti à la mosquée ensemble avec M. Mouchet et j'ai trouvé sur

 21   place ces gens. Je leur ai demandé ce qu'ils souhaitaient. Est-ce qu'ils

 22   souhaitaient revenir en Bosnie-Herzégovine, ou est-ce qu'ils souhaitaient

 23   demander un statut de réfugié. Parmi eux il y a eu des hésitations. Mouchet

 24   m'a dit de les accueillir tous et de leur donner à tous le statut de

 25   réfugié et c'est ce que j'ai fait. J'ai téléphoné à M. Prlic, je lui ai

 26   demandé ce qui s'était passé pour qu'on voit arriver 150 réfugiés de

 27   Bosnie-Herzégovine sans qu'on en ait été informé au préalable, que ces gens

 28   se sont trouvés à la mosquée pendant trois jours, ils n'ont même pas été

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  1   enregistrés auprès de nous, c'est le HCR qui a dû jouer les intermédiaires.

  2   M. Prlic m'a dit qu'il allait se renseigner, qu'il allait me répondre.

  3   Il m'a appelé rapidement il m'a dit qu'il s'était renseigné. Qu'avant

  4   il n'avait rien su à ce sujet et il m'a dit qu'il s'agissait de personnes

  5   qui de leur propre gré souhaitaient se rendre en République de Croatie pour

  6   se trouver là-bas en sécurité. Puisque c'étaient tous des gens qui avaient

  7   quitté le HVO, à savoir le conseil militaire croate d'Herceg-Bosna, et il

  8   m'a dit qu'on avait mis à leur disposition des transports et que c'est

  9   ainsi qu'ils sont partis en estimant qu'en Croatie ils allaient se trouver

 10   davantage en sécurité, que leur vie serait en sécurité. Ça a été mon

 11   contact avec lui. Voilà.

 12   Q.  Fort bien. Lors de cette conversation et ceci nous ramène à ce que l'on

 13   disait avant la pause. Le chef ou la personne qui se trouvait à la tête de

 14   l'ODPR était Darinko Tadic, n'est-ce pas ?

 15   Maintenant pourquoi est-ce que vous avez appelé M. Prlic ? Qu'est-ce qui

 16   vous a incité à le contacter et à vous faire croire que c'était la personne

 17   avec laquelle vous deviez parler pour ceci ?

 18   R.  J'ai pensé qu'il était mieux placé pour me donner la meilleure

 19   information plutôt lui que l'office chargé des réfugiés et des personnes

 20   déplacées. Et je dois dire aussi qu'on n'avait pas souvent des contacts par

 21   téléphone avec l'office.

 22   Q.  D'accord. Maintenant, je vais essayer d'élaborer un peu. Vous nous avez

 23   dit que vous pensiez qu'il vous donnerait la meilleure information

 24   possible, pourquoi croyez-vous cela ? Pourquoi aviez-vous pensé que ça

 25   serait M. Prlic qui serait en mesure de vous donner la meilleure

 26   information concernant la situation ?

 27   R.  Premièrement, parce que je l'avais déjà rencontré donc je le

 28   connaissais, et puis aussi parce qu'il occupait un poste très élevé au HVO.

Page 28365

  1   Donc, c'était la personne qui pouvait me fournir les meilleurs éléments

  2   d'information sur ces gens pour que je sache de quels individus il

  3   s'agissait et de quelle manière ces gens avaient quitté la Bosnie-

  4   Herzégovine.

  5   La première réponse qu'il m'a apportée c'était qu'il n'en savait

  6   rien, qu'il allait se renseigner. A partir du moment où il s'est renseigné

  7   il m'a fait savoir ce que je viens de vous dire.

  8   Q.  Très bien. Alors je voudrais préciser quelques dates, si je puis, vous

  9   avez évoqué dans le cadre de votre témoignage qu'entre 1993 et 1994 il y

 10   avait trois fois plus de personnes lorsqu'il y a eu un recensement mené,

 11   donc trois fois plus de personnes qui étaient venues en Croatie d'autres

 12   des pays tiers enfin d'autres pays pendant la guerre. On peut employer le

 13   terme de réfugiés ou de personnes déplacées et non pas dans un sens

 14   technique du mot mais les personnes qui s'étaient déplacées et qui étaient

 15   venue en Croatie. Vous nous avez dit qu'à un certain moment donné et le

 16   premier recensement a eu lieu au mois d'avril, mai, juin 1992 -- si je vous

 17   disais que c'était le deuxième recensement en 1993 et non pas en 1992;

 18   qu'est-ce que vous me diriez ?

 19   R.  C'est exact, c'est ce que j'ai dit. En 1992 il y a eu un premier

 20   recensement, c'étaient les personnes déplacées en Croatie qui étaient

 21   concernées, et puis en 1993 il y a eu un deuxième recensement, c'est-à-dire

 22   un premier recensement des réfugiés de Bosnie-Herzégovine. Tandis que le

 23   troisième pour les uns et pour les autres, pour les personnes déplacées et

 24   pour les réfugiés a eu lieu en 1994, si mes souvenirs sont bons c'était en

 25   juin ou juillet. Donc il s'agit de trois recensements l'un après l'autre.

 26   Q.  Si je comprends bien il y a eu un recensement au mois de février 1993,

 27   n'est-ce pas ? En fait, c'est le premier recensement, n'est-ce pas ?

 28   R.  C'est exact. Non, pas en février. C'était plus tard, le premier

Page 28366

  1   recensement de 1992 était en avril et mai. Il s'est terminé en juin.

  2   J'emploie les termes croates pour parler des mois. Je ne vérifie pas ce que

  3   l'interprète dit. Donc il s'agit des mois d'avril, mai et juin.

  4   Q.  Donc, les mois d'avril, mai et juin 1992, ça c'est le premier

  5   recensement et ensuite le deuxième recensement a eu lieu en février 1993 ?

  6   R.  C'est cela, à peu près en même temps. C'est les mêmes mois à peu près.

  7   Un peu plus tard. Je pense qu'il s'est terminé en juin. Comme la logistique

  8   était meilleure, comme les gens étaient plus versés dans la conduite du

  9   recensement, ça s'est passé plus rapidement.

 10   Q.  Monsieur, d'après les documents et d'après M. Zoric qui est venu

 11   déposer ici, il semblerait que ce recensement a eu lieu en février 1993;

 12   est-ce que vous croyez vous tromper peut-être ?

 13   R.  Je pense que non, mais on peut vérifier dans les documents. Je ne crois

 14   pas que je me trompe. En 1993 le recensement n'a pas pu se dérouler en

 15   février. En 1993 il a pu avoir lieu en avril, mai, juin. Avril, mai, juin,

 16   à peu près les mêmes mois que le premier recensement. Février -- le mois de

 17   février ça me semble un peu trop tôt, mais on peut vérifier dans les

 18   documents.

 19   Q.  Je souhaiterais passer maintenant à une autre date pour préciser. Vous

 20   avez également mentionné dans votre déposition de lundi dernier, que

 21   lorsque vous avez rencontré -- qu'il y a eu en fait une réunion entre Azra

 22   Krajsek, M. Tadic, et M. Raguz. Vous avez dit que cette réunion a eu lieu

 23   le 11 avril 1993 et que c'était relatif à un certain nombre de noms.

 24   J'aimerais vous demander si vous pensez que cette réunion ait pu se

 25   dérouler au mois d'avril 1994 ?

 26   R.  C'est exact. C'est ce que j'ai dit d'ailleurs, à moins que là encore il

 27   y ait une confusion.

 28   Q.  C'était peut-être une légère confusion dans le compte rendu d'audience.

Page 28367

  1   Bien. Donc au mois d'avril 1994. Je vous remercie.

  2   Permettez-moi de vous demander une question concernant vos rapports avec

  3   Franjo Tudjman, puisqu'on vous a posé un certain nombre de questions sur

  4   lui et je voudrais encore une fois appeler votre attention sur la période

  5   de 1991, 1994. 

  6   Pourriez-vous relater, je vous prie, aux Juges de la Chambre à

  7   combien de reprises avez-vous rencontré personnellement le président

  8   Tudjman ?

  9   R.  Ce n'était pas si fréquent que ça. Pas aussi fréquent qu'on pourrait

 10   imaginer. Parce que s'agissant de la situation concernant les réfugiés et

 11   les personnes déplacées, M. le président de la République de Croatie était

 12   directement informé par mon supérieur, par M. le Pr. Granic. Mais lors des

 13   réunions, disons -- j'ai été présent lors d'une réunion à laquelle ont

 14   assisté les représentants de la Bosnie-Herzégovine et de la Croatie

 15   lorsqu'il a été question des relations entres les deux états, lorsqu'on a

 16   signé l'accord d'amitié. J'ai serré la main de Tudjman à ce moment-là lors

 17   de cette réunion. Et puis une fois je me suis rendu chez le président avec

 18   les représentants de la communauté des réfugiés en République de Croatie,

 19   ils rencontraient des problèmes de logement, de vivres, c'étaient nos

 20   ressortissants.

 21   A ce moment-là, Monsieur le Président, on m'a fait venir. Il a

 22   souhaité que j'entende ces griefs et que je formule des commentaires à ce

 23   sujet. Ça été une réunion où je l'ai vu officiellement et puis j'ai eu un

 24   tête-à-tête officiel avec M. le président où j'ai mis en garde M. le

 25   président du fait que c'étaient des personnes qui n'allaient pas être tout

 26   à fait objectives lorsqu'elles présenteront leurs rapports sur leur

 27   hébergement et les vivres parce que c'étaient des gens sous le stress, et

 28   il m'a répondu qu'il était au courant de cela. Et aussi --

Page 28368

  1   Q.  Très bien. Merci. Comme il nous faut avancer, je suis désolé de vous

  2   interrompre de nouveau comme tout le monde le sait le temps nous est

  3   précieux et vous nous avez déjà parlé de votre engagement, et cetera, et

  4   cetera.

  5   Vous nous avez parlé de deux réunions. Une qui a eu lieu en 1991 et

  6   une autre -- en fait entre 1991 et 1994, vous avez rencontré le président

  7   Tudjman à deux reprises. 

  8   R.  Il y en a eu d'autres mais je n'ai pas pu poursuivre.

  9   Q.  D'accord. Alors, combien de rencontres, de conversations avez-vous eues

 10   ? Je vais devoir vous interrompre. Je suis désolé car vos réponses sont un

 11   peu longues donc je suis vraiment navré mais j'aimerais savoir combien de

 12   fois l'avez-vous rencontré, vu, parlé ? Deux, quatre, dix, combien de fois

 13   ?

 14   R.  Le président Tudjman en tête-à-tête, une seule fois je l'ai vu, deux

 15   fois, excusez-moi. Une fois au sujet des réfugiés, leur placement et puis

 16   la deuxième fois lorsque j'ai présenté ma démission, il m'a demandé de

 17   venir le voir et il m'a demandé de revenir sur ma décision et de rester à

 18   la tête de l'office mais je lui ai dit que je n'allais plus revenir sur ma

 19   décision.

 20   Est-ce que vous avez des questions au sujet de ces deux réunions ? Je suis

 21   prêt à vous répondre.

 22   Q.  Entre 1991 et 1992, avez-vous jamais rencontré M. Susak, le ministre de

 23   la Défense ?

 24   R.  Oui. Ce n'était pas en tête-à-tête. Il y avait d'autres personnes qui

 25   étaient présentes et cela portait sur la prise en charge des réfugiés. Une

 26   fois c'était en la compagnie du Dr Hebrang qui était le ministre de la

 27   Santé et également avec le vice-président, M. Dr Kostovic, et également

 28   avec Dr, comment il s'appelait, il était médecin également. Je ne retrouve

Page 28369

  1   pas son nom de famille. Et c'était au moment où on préparait la tempête.

  2   M. Susak qui était ministre de la Défense --

  3   Q.  Monsieur, j'aimerais savoir le nombre exact, à combien de reprises

  4   l'avez-vous rencontré ?

  5   R.  Une fois.

  6   M. KARNAVAS : [interprétation] Au compte rendu d'audience nous parlons de

  7   rencontres tête-à-tête, donc quatre yeux, quatre oreilles, donc deux paires

  8   d'yeux, deux paires d'oreilles pour ne pas être confus, donc ce n'est pas

  9   combien de fois est-ce que vous étiez présent dans une pièce alors que les

 10   discussions ont eu lieu. Donc c'est de cela qu'on parle simplement pour

 11   être tout à fait clair pour le compte rendu d'audience.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Non, non, non, mais je ne parle pas seulement

 13   de rencontres tête-à-tête, vous et M. Tudjman, vous et M. Susak, il y a

 14   peut-être eu d'autres personnes présentes, et c'est ceci que je vous

 15   demande en fait. Donc, il y a eu deux rencontres avec le président Tudjman

 16   et une fois vous avez rencontré M. Susak.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est incorrect encore une fois, mon éminent

 18   confrère parle des réunions en tête-à-tête et vous avez dit -- Monsieur le

 19   Juge Trechsel, attendez que je dise, que je termine. Lorsque le témoin

 20   parle de tête-à-tête il parle des contacts un à un et il n'y a personne

 21   d'autre dans la pièce.

 22   M. SCOTT : [interprétation] Comment est-ce que M. Karnavas peut le savoir ?

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Non, non, je le sais. Non permettez-moi de

 24   terminer maintenant la question était --

 25   M. STEWART : [interprétation] Michael, Michael, calme-toi.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, il peut reformuler la

 27   question. Lorsque l'on parle de réunions en tête-à-tête, ceci sème la

 28   confusion dans l'esprit du témoin.

Page 28370

  1   M. STEWART : [interprétation] Je suis vraiment désolé, Monsieur le

  2   Président. J'ai vraiment essayé de calmer les choses.

  3   M. SCOTT : [interprétation] Non, je n'ai pas besoin d'être calme. Il faut

  4   être précis et ce témoin a le droit d'obtenir des questions précises. Je

  5   comprends très bien que vous voulez nous venir en aide Maître Stewart, mais

  6   dans sa propre langue ce que tête-à-tête veut dire c'est autre chose. En

  7   anglais ce n'est peut-être pas la même chose qu'en croate. Donc nous

  8   parlons de réunions, il faut absolument nous assurer que nous parlons de la

  9   même chose.

 10   M. STEWART : [interprétation] Monsieur Karnavas, ne vous attaquez pas à

 11   moi.

 12   Mme Alaburic et moi-même avons parlé précisément de ce point et nous

 13   avons dit que nous essaierons de vous venir en aide dans ce sens-ci. Donc

 14   Me Alaburic nous a bien dit ce que le témoin a dit dans sa propre langue et

 15   en anglais "face to face", tête-à-tête est moins en croate, ne veut pas

 16   simplement dire deux personnes. En anglais, "face to face," ne veut pas

 17   dire seulement deux personnes. "Face to face," en anglais pourrait dire :

 18   être présent, personnellement sans se parler au téléphone par exemple. Je

 19   ne veux pas parler de problèmes d'interprétation du tout. Mais ce que Me

 20   Alaburic vient de m'expliquer c'est qu'il est peut-être mieux de dire en

 21   anglais "one to one," que de dire "face to face." Voilà, est-ce que cela a

 22   résolu le problème.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, c'est un problème de sémantique. Me Stewart

 24   propose "one to one," et les interprètes nous disaient "face to face."

 25   Alors, Monsieur Scott, essayez de préciser la question.

 26   M. SCOTT : [interprétation]

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour être tout à fait limpide, si

 28   vous prenez la page 45, ligne 6, le témoin répondant à la question posée

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  1   par M. Scott qui était, combien de fois il a rencontré M. Susak, le témoin

  2   a répondu : "J'ai rencontré M. Susak non pas en tête-à-tête ou

  3   personnellement seul, d'un à un de même mais il y avait d'autres personnes

  4   présentes dans la pièce." Donc, selon moi, c'était plus qu'une fois.

  5   M. STEWART : [interprétation] Oui, justement, Monsieur le Juge, vous avez

  6   tout à fait raison.

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Mais la question se rapporte également au

  8   président Tudjman et il faut consulter la page 44 et 45 et si vous relisez

  9   la question il n'y a aucune mauvaise intention de la part de l'Accusation

 10   mais je crois qu'on s'y perd un peu dans la traduction. Je comprends très

 11   bien la ligne de, enfin la façon dont les questions sont posées; vous ne

 12   l'avez pas rencontré, donc, vous ne pouvez pas savoir ce qu'il pensait.

 13   Voilà. Je comprends très bien la logique des questions qui lui sont posées.

 14   Mais il faut être juste envers le témoin car le témoin a dit qu'il était

 15   présent dans la pièce. Donc, la question de suivi pourrait être : combien

 16   de fois étiez-vous présent dans la pièce alors qu'on parlait de certaines

 17   choses ?

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : La cabine française peut peut-être venir au

 19   secours de problèmes de la langue anglaise. En français on aurait demandé

 20   au témoin : quand avez-vous vu individuellement M. Tudjman ou M. Susak ? Et

 21   le terme "individuellement," ça veut dire qu'il n'y a que deux personnes,

 22   c'est-à-dire ça rejoint ce que disait Me Stewart, "one to one." Voilà. Mais

 23   la langue française est très précise aussi.

 24   Alors, Monsieur Scott, reprenez cela.

 25   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne m'emporte

 26   pas du tout. Je comprends très bien qu'il y a peut-être soit une question

 27   culturelle, une question d'interprétation. On vient de m'informer des

 28   différences, et moi, tout comme le Juge Trechsel en répondant à ce que le

Page 28372

  1   témoin a dit, c'est qu'il avait tout à fait bien compris ce qui a été

  2   interprété, ce qui est apparu à l'écran, donc je crois qu'il avait très

  3   bien compris ma question.

  4   Q.  Mais voilà, Monsieur le Témoin, je vais élaborer peut-être un peu plus

  5   là-dessus puisque la Chambre nous le permet. Je vais donc insister pour

  6   être un peu plus précis et je vais vous reposer la même question.

  7   Alors, je ne vous demande pas de nous dire à combien de reprises avez-vous

  8   rencontré la personne individuellement, donc ça voudrait dire : à combien

  9   de reprises avez-vous rencontré la personne seule avec, combien de fois

 10   étiez-vous seul avec la personne ? Ce n'est pas ça que je vous demande.

 11   J'aimerais savoir combien de fois puisque vous étiez en présence de cette

 12   personne, donc, d'autres personnes auraient pu être présentes aussi.

 13   Sarinic aurait pu être là, Susak aurait pu être là. Donc, j'aimerais savoir

 14   combien de fois, entre 1991 et 1994, étiez-vous personnellement présent

 15   avec le président Tudjman de cette façon-là ? Je ne parle pas d'être

 16   présent dans une salle de conférence avec 5 000 autres personnes autour de

 17   vous. J'espère que vous me comprenez. 

 18   Enfin, vous êtes un homme très éduqué, vous parlez un très grand

 19   nombre de langues, y compris la langue anglaise, donc j'espère que vous

 20   avez compris ce que je vous demande. Est-ce que vous pourriez répondre à la

 21   question ? Est-ce que ceci changerait votre réponse ? Est-ce que c'était

 22   deux fois, ou aimeriez-vous peut-être modifier votre réponse ?

 23   R.  Je répète, peut-être cela vous sera-t-il utile. J'ai rencontré le

 24   président Tudjman deux fois seulement, face-à-face, donc en tête-à-tête, à

 25   titre individuel. Mais pour ce qui est des réunions conjointes, pour ce qui

 26   est de ce contrat ou traité d'amitié, là il y a eu cinq, peut-être,

 27   rencontres ou réunions où j'aurais été présent.

 28   Pour ce qui est de Susak, je ne l'ai jamais rencontré à titre individuel,

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  1   en tête-à-tête, mais toujours avec une ou deux autres personnes qui se

  2   trouvaient être chargées de résoudre des questions d'intérêt du moment.

  3   Q.  Donc, il n'y a pas eu de réunion personnelle, individuelle, avec M.

  4   Susak. Mais parlons maintenant du président Tudjman. J'espère que nous

  5   allons pouvoir passer à autre chose. Donc, à la suite de tout ce que vous

  6   avez entendu dans cette salle d'audience au cours des dernières 15 minutes,

  7   vous avez rencontré physiquement M. Tudjman, entre 1991 et 1994, cinq fois

  8   ?

  9   R.  J'ai dit qu'il y a eu des occasions de ce type, oui. Je ne me souviens

 10   pas de toutes ces opportunités. L'une de ces opportunités, c'est ce traité

 11   d'amitié.

 12   Q.  Nous avons un transcrit. Merci, Monsieur, nul besoin de le répéter.

 13   Nous le savons. Nous vous avons déjà entendu sur sujet.

 14   R.  Les autres rencontres, c'était quand il était venu aux sessions du

 15   gouvernement de la République de Croatie, mais c'était déjà en 1995,

 16   excusez-moi. Là, j'étais avec d'autres personnes en sa compagnie. J'étais

 17   avec lui lorsque j'ai été décoré, avec d'autres personnes à mes côtés

 18   aussi. Et je n'arrive plus à me souvenir d'autres opportunités en

 19   particulier.

 20   Q.  Très bien. Il nous faut passer à autre chose maintenant. Vous savez,

 21   Monsieur, n'est-ce pas, qu'il y avait une entité au sein du gouvernement

 22   croate à l'époque, et peut-être même aujourd'hui, un service qui s'appelait

 23   Conseil pour la défense et la sécurité nationale, et je crois qu'il y avait

 24   également une abréviation, VONS, pour désigner ce même corps; est-ce exact

 25   ?

 26   R.  V-O-S. Je n'ai jamais été présent à ces réunions du VOS.

 27   Q.  D'accord, merci beaucoup. Je vous remercie de m'avoir corrigé. J'avais

 28   reçu une information erronée. Vous avez répondu très clairement à ma

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  1   question, bien. Donc, vous n'avez jamais été présent à ces réunions. Et

  2   afin que les Juges puissent en prendre connaissance, c'était un service

  3   important au sein du gouvernement croate chargé de la défense et de la

  4   stratégie de la défense pour la Croatie au cours de cette période, n'est-ce

  5   pas ?

  6   R.  C'est exact. En ma qualité de chef de cet office chargé des réfugiés et

  7   des personnes déplacées, je n'allais pas vers ce type d'institutions. Il

  8   n'y avait nul besoin que j'y aille.

  9   Q.  Vous avez dit lundi dernier, Monsieur --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak.

 11   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je m'excuse, Messieurs les Juges, mais

 12   pour qu'il n'y ait pas par la suite confusion : l'abréviation VOS, à savoir

 13   services de renseignements militaires. Ce que M. le Procureur a mentionné,

 14   c'est le VONS. C'est le Conseil chargé de la sécurité militaire, et là, il

 15   s'agit d'un service de Renseignements dans le premier cas.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis d'accord, c'est exact.

 17   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Docteur Praljak. Là, on est d'accord.

 18   Donc, en fait, j'avais raison la première fois, ça s'appelle VONS, cet

 19   organe.

 20   Q.  Avançons maintenant. Nous savons, vous n'avez participé à aucune des

 21   réunions organisées au sein de cette instance. 

 22   Lundi, au cours de votre déposition, vous nous avez expliqué que

 23   Tudjman était occupé par l'idée d'insuffler un nouveau souffle de vie à

 24   l'ancien accord entre les Serbes et les Croates. Vous dites qu'il s'en

 25   occupait. Qu'est-ce que vous voulez dire par là exactement ? Premièrement,

 26   comment le savez-vous, et deuxièmement, comment savez-vous qu'il était très

 27   occupé à essayer de redonner un souffle de vie à cet accord ancien ?

 28   R.  Monsieur Scott, très occupé par cette idée de la Banovina croate.

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  1   D'abord, ce que j'ai à l'esprit, c'est qu'il est candidat du Parti

  2   démocratique croate en sa qualité d'homme politique et en sa qualité

  3   d'historien aussi, qui a connu fort bien non seulement les périodes de

  4   l'après-guerre -- enfin, de la Deuxième Guerre mondiale, mais avant la

  5   Deuxième Guerre mondiale aussi. Il était au courant de ce traité de 1939

  6   entre les Croates et les Serbes portant sur l'autonomie de la Croatie et

  7   qui, sous sa forme d'autonomie, englobait des parties de la République de

  8   Bosnie-Herzégovine actuelle. 

  9   En sa qualité de candidat politique, dans ses discours, et ça je m'en

 10   souviens en ma qualité de citoyen, il savait aussi faire référence à cette

 11   idée-là pour éventuellement rétablir cette Banovina croate dont il avait

 12   été question; cependant, à partir du moment où la Bosnie-Herzégovine a fait

 13   sécession vis-à-vis de la Yougoslavie pour devenir un Etat indépendant, la

 14   Croatie a été la première à reconnaître cet Etat indépendant. Et parmi les

 15   premiers Etats, la Croatie a établi des relations diplomatiques avec la

 16   Bosnie-Herzégovine. Et depuis lors, Tudjman n'a plus jamais insisté sur le

 17   rétablissement de la Banovina puisque du fait de la création de la Bosnie-

 18   Herzégovine, qui était donc une ex-république et qui était devenu un Etat

 19   indépendant, pour lui, à ses yeux, la question de la Banovina était

 20   révolue, c'était du passé.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Une précision à apporter me dit-on. On me

 22   dit que le témoin n'a pas dit que Tudjman avait arrêté d'insister, mais

 23   plutôt qu'il n'a jamais insisté. Je demanderais donc à ce que l'on invite

 24   le témoin à consulter l'écran et éventuellement à corriger le compte rendu

 25   d'audience. 

 26   Page 52, ligne 12, il est dit, je cite : "A ce moment-là, il a arrêté

 27   d'insister." Or, en fait, il a dit - c'est ma consoeur qui me le dit,

 28   quelqu'un qui parle le B/C/S - qu'en fait, le témoin a dit qu'il n'a jamais

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  1   insisté.

  2   M. SCOTT : [interprétation]

  3   Q.  Vous venez de passer ces dernières minutes à nous dire, Monsieur le

  4   Témoin, qu'en tant qu'homme politique du HDZ, Tudjman a bien parlé du

  5   rétablissement de la Banovina de 1939. Donc, il en a parlé à un certain

  6   moment. Alors, est-ce qu'à un moment donné il a cessé de promouvoir cette

  7   idée, et si oui quand et comment le savez-vous ?

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Je m'oppose à la forme de cette question. Il

  9   n'a jamais dit qu'il était favorable, qu'il se livrait à une promotion de

 10   cette idée. C'est différent. C'est la raison pour laquelle je vais faire

 11   preuve de beaucoup de ténacité et que je vais me lever pour objecter.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous qui connaissez plusieurs langues. D'abord vous

 13   parlez votre langue maternelle, ce qui permet à ce moment-là de bien vous

 14   exprimez, mais vous connaissez également la langue anglaise. Pouvez-vous

 15   redire ? Sur la Banovina, qu'est-ce qui s'est au juste passé avec Tudjman ?

 16   Parce que c'est important, c'est un sujet important qui, comme vous le

 17   voyez, soulève des passions de part et d'autre. Pouvez-vous nous dire ce

 18   que vous avez perçu de la part de Tudjman ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit, et je répéterai, en ma qualité de

 20   citoyen --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : -- pour que les interprètes puissent bien

 22   interpréter ce que vous dites.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] En ma qualité de citoyen, qui a été une

 24   oreille attentive aux dires des candidats du HDZ aux élections de 1990,

 25   j'ai pu l'entendre évoquer le fait de la Banovina croate qui avait été

 26   établie en 1939.

 27   Par la création de la République de Bosnie-Herzégovine et du fait de la

 28   reconnaissance de cet Etat par la Croatie, donc, par lui-même, par voie de

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  1   conséquence, et du fait de l'établissement de relations diplomatiques avec

  2   cet Etat, je ne l'ai plus entendu insister sur cette idée. Au contraire, du

  3   fait d'avoir reconnu les frontières de la Bosnie-Herzégovine dans les

  4   cadres qui sont ceux de la Bosnie-Herzégovine, pour lui, cette question

  5   c'était du passé. Mais en personne, je n'ai jamais débattu de la question

  6   avec lui.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, dans la langue française, il y a

  8   le terme "insister." En anglais, on voit également "insisting." Dans votre

  9   langue, vous avez bien employé le mot "insister" ou vous avez employé un

 10   autre mot ? Parce que, sur le plan sémantique, quand on veut dire on n'a

 11   plus "insisté," ça veut dire qu'on a déjà évoqué le problème, mais qu'à un

 12   moment donné, on arrête de parler du problème. Est-ce bien le terme

 13   "insister" que vous avez utilisé dans votre langue ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit il n'a plus insisté, à savoir qu'il

 15   n'a plus traité ou évoqué l'idée du rétablissement de la Banovina croate.

 16   Parce que - je répète - il comprenait parfaitement que du fait de la

 17   création de cet Etat de Bosnie-Herzégovine, qu'il avait reconnu au nom de

 18   la Croatie, le fait, qui était un fait historique, est revenu en histoire.

 19   Donc, il a pu en parler en sa qualité d'historien, mais en sa qualité

 20   d'homme politique, il ne pouvait parler que de ce qui avait été, mais qui

 21   n'était plus. Et il ne voulait plus que cela se réalise puisque possibilité

 22   de le faire il n'y avait plus.

 23   M. SCOTT : [interprétation]

 24   Q.  Vous avez dit il y a quelques instants que vous n'avez jamais évoqué

 25   cette question avec lui, et quand vous dites qu'il n'insistait plus, qu'il

 26   a cessé d'insister, en fait ce que vous dites à la Chambre c'est que vous

 27   ne l'avez plus entendu en parler en public et qu'il ne vous l'a pas dit, à

 28   vous-même, c'est-à-dire qu'il n'en parlait pas en public et qu'il ne vous a

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  1   rien dit à vous personnellement ? Voilà à quoi se résume ce que vous pouvez

  2   nous dire.

  3   R.  Je puis vous dire qu'il ne m'en a jamais parlé personnellement, et je

  4   ne l'ai plus, dans le public, entendu le président en parler.

  5   Q.  Bien, nous allons passer à un autre sujet. A un moment donné, vous et

  6   d'autres en Croatie à l'époque pensaient que les Serbes ou la JNA se

  7   servaient des réfugiés et des personnes déplacées comme une arme contre la

  8   Croatie, c'est-à-dire qu'on provoquait une sorte d'invasion de ces réfugiés

  9   en Croatie, ce qui risquait de peser beaucoup sur l'économie croate.

 10   R.  Vous m'avez bien compris; c'est exact.

 11   Q.  J'aimerais maintenant vous demander de consulter la pièce 1D 02277,

 12   02277, un document qui devrait se retrouver devant vous. 1D 2277.

 13   Je crois que c'est un document que vous a présenté M. Karnavas. C'est

 14   une lettre d'un groupe de réfugiés --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 16   M. SCOTT : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme il y a plusieurs classeurs, il y a le vôtre,

 18   il y a des pièces volantes, et il y a le classeur bleu, alors dites-nous

 19   exactement à quel classeur il faut aller.

 20   M. SCOTT : [interprétation] Je vais essayer de vous aider, mais le problème

 21   c'est --

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est le numéro un.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est notre classeur numéro un.

 25   M. SCOTT : [interprétation] Quand je vais me servir d'une pièce de la

 26   Défense, à de très rares exceptions il s'agira d'une pièce fournie par la

 27   Défense, qui se retrouvera donc dans son classeur. Parce qu'on n'a pas

 28   souhaité procéder à des photocopies supplémentaires, pour ne pas submerger

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  1   la Chambre de documents.

  2   Je crois que la plupart d'entre nous avons trouvé ce document.

  3   Q.  Veuillez vous pencher sur ce document qui vous a été présenté par Me

  4   Karnavas. C'est une lettre en date du 7 mars 1994 qui est adressée à

  5   Jadranko Prlic. Deux ou trois questions brèves, enfin, je l'espère.

  6   Vous avez eu des contacts nombreux et des activités nombreuses en rapport

  7   avec les réfugiés et les personnes déplacées et vous nous avez expliqué au

  8   cours de ces quelques jours que c'était une situation très regrettable pour

  9   tout le monde. Les gens se plaignaient souvent, n'est-ce pas ? Et on peut

 10   les comprendre. Mais au milieu de cette lettre - je ne sais pas si les

 11   paragraphes correspondent dans les deux versions, en B/C/S et en anglais.

 12   Mais en anglais, c'est un paragraphe qui commence par les mots : "One

 13   school year," "une année scolaire." Vous l'avez trouvé ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Bien. Merci. Nous allons revenir à un point qui est évoqué ici plus

 16   tard, mais dans cette lettre il est question de l'insécurité, d'un

 17   sentiment d'angoisse, de frustration, de névrose. Il est question de

 18   traumatisme, de choc. Vous conviendrez avec moi, n'est-ce pas, qu'il s'agit

 19   là de questions graves ?

 20   R.  Exact.

 21   Q.  Et ceci vaut aussi bien pour un réfugié croate, serbe ou musulman ?

 22   R.  Absolument.

 23   Q.  Bien. Si on revient au début du paragraphe, -- non, encore une fois je

 24   me suis trompé. En haut de la lettre -- ou plutôt, dans ce paragraphe, il

 25   est question du fait que les enfants ont perdu une année scolaire parce

 26   qu'ils n'ont pas pu suivre la classe dans "leur langue maternelle

 27   (croate)."

 28   Je suis sûr que vous en avez déjà parlé au cours de l'interrogatoire

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  1   principal. Pourriez-vous essayer d'assister les Juges ? A l'époque, quelle

  2   était la distinction qui était faite - et je parle de la période de 1993,

  3   1994 - distinction entre la langue parlée par les Croates et la langue

  4   parlée par les bosniens parce que, si j'ai bien compris, et n'hésitez à me

  5   corriger, si je me trompe, ils étaient en mesure de communiquer sans aucune

  6   difficulté pour l'essentiel; est-ce bien exact ?

  7   R.  Vous avez raison. Ils pouvaient se comprendre parfaitement bien. En

  8   Bosnie-Herzégovine on parle essentiellement du croate. Pour nous,

  9   l'Herzégovine pour la langue croate c'est l'étalon de mesure de la langue

 10   croate. C'est là que tire ses origines notre parler, notre langue. Je suis

 11   né dans une région où on parle le dialecte.

 12   Et quand je suis venu au lycée je ne comprenais pas mes professeurs.

 13   Mais lorsque ici il est question de Musulmans de Bosnie et de Croates, eux,

 14   ils se comprennent absolument. Les Croates - et là, je vais être très clair

 15   - les Croates en Bosnie-Herzégovine ont une variante de la langue croate.

 16   La langue croate officielle, la langue littéraire est quelque peu

 17   différente de la langue bosniaque qui se trouvait du temps de l'ex-

 18   Yougoslavie sous l'influence du serbe, donc, serbisée.

 19   Et quand il s'agit de personnes stressées un mot prononcé

 20   différemment en variante serbe, par exemple, et tous étaient à l'époque

 21   victimes de l'agression serbe, ça les énervait. Moi, ça ne m'énerverait

 22   pas, pas plus que mes amis ici, mais, eux, ils pouvaient fort bien être

 23   énervés et c'est de cela qu'ils parlent ici.

 24   Q.  Bien. Je vais vous poser la question suivante, il serait, bien entendu,

 25   d'avoir une plus longue discussion linguistique mais on n'a pas vraiment le

 26   temps, je vous ai interrogé au sujet de ces préoccupations qui sont

 27   exprimées ici dans cette lettre, frustration, angoisse, et cetera; est-ce

 28   que c'était grave cette chose le fait que ces enfants ne puissent être

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  1   scolarisés parce que l'enseignement n'était pas dispensé dans leur langue

  2   maternelle (le croate) ? Est-ce que c'était quelque chose de grave ou de

  3   trivial ?

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Objection. Comment le témoin peut-il se

  5   prononcer sur le caractère grave de cela pour les intéresser ou pas ? Ça

  6   peut être grave pour le Dr Rebic, peut-être non. Tout dépend des

  7   circonstances et tout dépend des personnes. Je ne pense pas que le témoin

  8   ait la compétence nécessaire pour répondre à cette question, qui n'a pas

  9   été formulée correctement. Je pense qu'il n'est pas juste de lui poser une

 10   question comme cela.

 11   M. SCOTT : [interprétation] Je vais reformuler.

 12   Q.  Dans le cadre de vos contacts, de vos activités en rapport avec les

 13   réfugiés et les personnes déplacées entre 1992 et 1994, est-ce que c'est un

 14   problème qui a été porté à votre attention une fois ou plusieurs fois ?

 15   Est-ce que ce genre de protestation de plaintes était manifesté

 16   régulièrement le fait de ne pas pouvoir recevoir un enseignement dans sa

 17   propre langue ? Ou est-ce que c'est quelque chose qui ne s'est produit

 18   qu'une seule et unique fois ?

 19   R.  On vient de comprendre le texte. Ici, cette année perdue et

 20   l'enseignement scolaire en langue bosniaque ça se rapporte à un séjour en

 21   Bosnie centrale, probablement à Vares ou Kakanj, sous compétence bosniaque.

 22   Quand ils venus à Pineta, ils ont eu des cours en langue littéraire croate,

 23   la langue de leur éducation en Bosnie centrale, dans la Posavina, et en

 24   Herzégovine, où les Croates étant donné que nous avons la télévision, les

 25   journaux, la radio, et les Croates en Bosnie-Herzégovine parlent la langue

 26   littéraire croate.

 27   Q.  Oui, j'attends bien, c'est comme pour l'anglais. Ce qu'on pourrait

 28   appeler plusieurs dialectes. M. Stewart, par exemple, pense que massacre la

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  1   langue anglaise, en ce qui me concerne, puisque je ne viens pas de la même

  2   région, mais là où j'en viens, c'est la chose suivante : ces enfants ils

  3   allaient à l'école mais l'enseignement était dispensé dans une langue

  4   qu'ils comprenaient parfaitement. Alors, qu'est-ce que ça pouvait faire

  5   comme différence le fait que ça n'ait pas été -- que l'enseignement n'ait

  6   pas été dispensé en "croate" ? Est-ce que c'était quelque chose monté de

  7   toutes pièces, ce problème ?

  8   R.  Il convient de lire ce que dans le texte ont dit que ces gens ont dit.

  9   Ils auraient perdu une année pour entrave délibéré de suivre des cours dans

 10   leur langue maternelle. Pour ce qui est des Musulmans, donc, à Kakanj et

 11   Vares, dont il est question, ils avaient demandé aux enfants qui parlaient

 12   le croate, une langue croate véritable où on leur a imposé une langue que

 13   nous, Croates en Bosnie-Herzégovine, avions estimé être une serbisation du

 14   croate. Et ça nous énervait en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, et ça nous

 15   énerve de nos jours encore si on parle de serbe ou croate. Il y a le serbe

 16   et il y a le croate.

 17   Il y a des régions en Bosnie-Herzégovine qui étaient plus sous influence du

 18   serbe et des régions qui étaient plus sous influence du croate et il y

 19   avait là des Croates et des Musulmans.

 20   Q.  Bien. Avançons. Je ne peux pas consacrer plus temps à cette question à

 21   moins que les Juges n'aient des questions à vous poser.

 22   Monsieur le Témoin, vous avez mentionné, à plusieurs reprises au cours de

 23   votre déposition, le fait que la frontière entre la Croatie et la Bosnie-

 24   Herzégovine n'a jamais été fermée en ce qui concerne les Musulmans pendant

 25   la guerre, pendant la période de 1992 à 1994. Mais vous avez également dit,

 26   à de nombreuses reprises, que des permis, visas de transit, autorisations,

 27   et cetera -- enfin, qu'il était nécessaire de disposer de ce genre de

 28   documents; sinon, la police des frontières ne permettait pas aux personnes

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  1   de passer la frontière.

  2   R.  L'un et l'autre sont exacts. Il est exact de dire que, lorsque les

  3   réfugiés passaient par des passages officiels de frontière entre la Bosnie-

  4   Herzégovine et la Croatie, ils avaient besoin de documents, de pièces

  5   d'identité. Là où la frontière n'était pas contrôlée, il y a eu des

  6   endroits de ce genre, ils étaient venus sans être arrêter ils se

  7   retrouvaient à Zagreb, et moi, j'ai été informé -- enfin, on m'a dit :

  8   "Attendez."

  9   Q.  Bien. D'accord. Nous comprenons bien que, dans tous les pays du monde,

 10   on peut très bien passer une frontière de manière illégale sans passer par

 11   les postes de frontière mais si quelqu'un entrait en Croatie au cours de

 12   cette période en empruntant un passage officielle, à ce moment-là, il avait

 13   besoin de montrer des papiers.

 14   R.  Je dirais plutôt -- il devait plutôt -- enfin, ils auraient dû plutôt

 15   qu'ils devaient avoir; vous comprenez ce que je veux dire.

 16   Q.  Bien. Deux ou trois autres questions avant de passer à un certain

 17   nombre de sujets bien définis, encore quelques questions.

 18   Me Karnavas vous a montré un document, il n'est pas forcément nécessaire

 19   que vous le consultiez. Vous pouvez si vous le souhaitez, bien entendu, il

 20   s'agit du document 1D 2634, c'est un document qui concerne le comité de

 21   pilotage de l'ODPR en Croatie, et j'ai une question à vous poser au sujet

 22   de ce document ou de cette question, est-ce qu'il y avait des Musulmans qui

 23   siégeaient au sein de ce comité; est-ce qu'il y avait des organisations

 24   humanitaires musulmanes qui étaient représentées -- ou des organisations

 25   musulmanes islamiques qui étaient représentées ?

 26   R.  Monsieur Scott, dans ce comité, il n'y avait pas de personne du groupe

 27   religieux musulman parce qu'en Croatie il n'y a pas un nombre considérable

 28   de Musulmans. Il me semble qu'ils sont 1, voire 1,5 %. Mais il y a eu des

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  1   relations très bonnes entre cet office des Réfugiés et Personnes déplacées

  2   et le Merhamet à Zagreb, et il y a eu des réunions fréquentes entre

  3   Aganovic, qui était à la tête de l'office Merhamet et qui était

  4   responsable, juridiquement parlant, de ses activités. Et nous nous sommes

  5   rencontrés souvent, tant à Merhamet que dans mes bureaux à moi, notamment

  6   lorsqu'il s'agissait de convois humanitaires et d'aide humanitaire à

  7   l'intention de Musulmans. Donc, nous avions de fort bonnes relations.

  8   Q.  S'agissant du financement de ces activités, je dirais tout d'abord que

  9   -- enfin, je ne veux pas parler pour -- au nom de tout le monde ici, mais

 10   en ce qui me concerne personnellement, je n'ai jamais mis en doute le fait

 11   que la République de Croatie ait dépensé beaucoup d'argent pour s'occuper

 12   des réfugiés et traiter des questions d'ordre humanitaire.

 13   Mais pour que les choses soient bien claires à partir des informations qui

 14   m'ont été fournies en rapport avec votre déposition, est-ce que vous pouvez

 15   confirmer, pour le compte rendu d'audience, que la mise en place des

 16   centres de réfugiés en Croatie, c'est-à-dire les centres gérés par la

 17   République de Croatie étaient financés à hauteur de 80 % par le

 18   gouvernement croate, et le reste du financement venait des Nations Unies ou

 19   de ce qu'on appelle maintenant l'Union européenne. Est-ce bien exact ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Parlons de Mme Turkovic. On a parlé de cette personne à plusieurs

 22   reprises. Si j'ai bien compris, vous l'avez rencontrée assez souvent, elle

 23   venait vous voir dans votre bureau, vous entreteniez de bonnes relations

 24   avec elle et lorsque se présentaient des problèmes, elle vous en parlait.

 25   Il est possible qu'elle ait parfois eu des problèmes avec les centres

 26   locaux lorsque ces derniers ne suivaient pas vos instructions; est-ce bien

 27   exact ?

 28   R.  Exact.

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  1   Q.  Pouvez-vous vous souvenir et communiquer aux Juges des exemples ou des

  2   cas où les personnes qui se trouvaient dans les centres locaux n'aient pas

  3   suivi vos instructions, c'est-à-dire que ceux qui étaient sur le terrain ne

  4   faisaient pas ce que vous leur disiez de faire. Pouvez-vous nous donner des

  5   exemples de ce type ?

  6   R.  Monsieur Scott, un exemple pourrait être le fait d'abroger le statut de

  7   réfugié. Même s'il y avait des instructions de l'office qui étaient

  8   diffusées à tous, tous n'en ont pas pris connaissance avec la même

  9   intention parce que cette décision était une décision générale, mais il y

 10   avait des conditions sous lesquelles certaines personnes se verraient non

 11   pas abroger, mais prolonger le statut de réfugié. Donc, j'ai déjà -- j'en

 12   ai déjà parlé. Les personnes qui ne pouvaient pas rentrer chez elles parce

 13   que leurs maisons avaient été détruites ou parce qu'ils sont malades ou

 14   parce que leurs enfants étaient scolarisés ou parce qu'elle se trouve vivre

 15   dans des régions où il y avait encore des tensions.

 16   Q.  Si je me permets de paraphraser les propos d'un témoin dont se

 17   souviendront les Juges de la Chambre, une chose consiste à donner des

 18   instructions, mais c'est autre chose encore que de faire en sorte que

 19   celles-ci soient respectées.

 20   R.  C'est exact et c'est la raison pour laquelle nous avons pris la

 21   décision que ces instructions, ces directives, devaient être respectées.

 22   Nous avons eu une relation -- un entretien avec Mme Bisa [phon] Turkovic,

 23   avec Krajsek, et Mme Hratokovic [phon], avec Darinko Tadic, avec Martin

 24   Raguz, parce qu'au moment de la révocation du statut, tout comme

 25   l'ambassade de Bosnie-Herzégovine s'est plaint,

 26   M. Prlic s'est plaint également, M. Prlic ne pouvait pas accepter un grand

 27   nombre -- accueillir un grand nombre de personnes qui seraient des

 28   [imperceptible] sociaux, et je suppose que c'était la même chose pour

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  1   l'ambassade de Bosnie-Herzégovine. Mais la question était de savoir comment

  2   -- comment renvoyer les Musulmans et où les renvoyer. Et là, l'ambassade de

  3   Bosnie-Herzégovine était particulièrement sensible.

  4   Q.  Une fois encore, vous parlez de M. Prlic. Est-ce qu'il s'agit de la

  5   conversation dont vous nous avez déjà parlé précédemment ou est-ce qu'il

  6   s'agit d'une autre conversation que vous auriez eue avec M. Prlic au sujet

  7   des réfugiés ?

  8   M. SCOTT : [interprétation] Il ne s'agit pas d'un entretien, il s'agit d'un

  9   document -- d'une lettre. Cette lettre a été envoyée par

 10   M. Prlic au gouvernement de la République de Croatie et au premier

 11   ministre, si je ne me trompe pas. Et c'est le premier ministre qui me l'a

 12   envoyé pour information, et il l'a envoyé à l'office, je suppose également.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien. Merci beaucoup.

 14   Q.  Monsieur, en examinant votre rapport, qui porte la cote

 15   1D 02921, intitulé : "Mon travail au bureau -- à l'office des Personnes

 16   déplacées et Réfugiées," j'aimerais vous poser quelques questions

 17   concernant votre ouvrage.

 18   Vous avez une entrée pour le 13 novembre et je vais devoir demander aux

 19   personnes de bien suivre la chronologie du document. Alors si vous prenez

 20   l'entrée pour le 13 novembre 1992, vous avez fait référence à un voyage à

 21   Belgrade où vous dites : "Pour une réunion secrète avec les représentants

 22   des autorités yougoslaves. Le président Granic était présent ainsi que

 23   d'autres ministres."

 24   Pourriez-vous, je vous prie, nous expliquer de quoi il s'agissait

 25   exactement ?

 26   R.  C'était une réunion secrète dont les médias en Croatie n'ont jamais été

 27   -- n'ont jamais eu vent. Il s'agissait d'une tentative de résoudre quelques

 28   questions urgentes. Pour ce qui me concerne, pour ce qui concerne mon

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  1   office des réfugiés et des personnes déplacées, c'était la question des

  2   réfugiés et des personnes déplacées. Puis d'autres, par exemple, évoquaient

  3   des questions économiques ou de -- d'éducation. Nous étions plusieurs à

  4   tenter, par ces moyens, d'atténuer les conséquences de l'agression et de

  5   faire quelques -- quelques pas en avant.

  6   Q.  Excusez-moi, je dois vous interrompre. Pourquoi était-ce une réunion

  7   secrète ?

  8   R.  Mais vous vous rendez compte, c'était la guerre. La guerre avait

  9   commencé, c'était l'agression. On ne pouvait pas publiquement évoquer cela.

 10   Ça aurait suscité des réactions négatives, des conséquences négatives à la

 11   fois en Serbie et en Croatie. Ça aurait empêché une telle réunion d'avoir

 12   lieu. C'est dans ce sens-là que cette réunion a été tenue secrète. Si je ne

 13   me trompe pas -- si je ne me trompe pas, c'est le premier ministre, à

 14   l'époque, était ce monsieur qui était arrivé des Etats-Unis d'Amérique. M.

 15   Praljak m'aidera. Tadic ? Ah, oui, Panic, Panic. Voilà, Panic.

 16   Q.  D'accord, merci.

 17   R.  Il a beaucoup parlé, beaucoup, à chaque fois qu'il y a eu des réunions.

 18   Q.  Vous connaissez un très grand nombre de personnes comme ça qui sont

 19   comme lui.

 20   Pour revenir à votre rapport, au début du mois d'avril -- ou plutôt,

 21   désolé, au début du mois de février 1993, vous évoquez le --

 22   l'enregistrement des réfugiés. Ici, on peut lire : "Au début du mois de

 23   février 1993, avec vous," - et donc, le HCR  - "nous avons commencé à

 24   enregistrer tous les réfugiés en Bosnie-Herzégovine et en Croatie." Et

 25   j'aimerais savoir si ceci rafraîchit votre mémoire, à savoir de répondre à

 26   une question qui vous a été posée un peu plus tôt cet après-midi. Est-ce

 27   qu'il s'agissait effectivement du recensement qui a eu lieu en février de

 28   1993 ? Et ceci figure dans votre rapport, bien sûr.

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  1   R.  Si c'est ce qui est écrit, c'est une erreur.

  2   Q.  -- rapport qui fait une erreur ?

  3   R.  Oui, c'est une erreur dans le rapport, car le recensement de 1993 s'est

  4   déroulé pendant les mois d'avril, mai, juin. Ces trois moi. Ce genre

  5   d'erreurs peut se glisser lorsqu'on rédige un rapport, c'est toujours

  6   possible. D'ailleurs, nous avons les documents qui portent là-dessus et des

  7   documents qui sont exacts.

  8   Q.  Vous dites dans votre rapport que : "Le HCR des Nations Unies couvrait

  9   les dépenses comme il a été le cas des personnes déplacées croates une

 10   année auparavant et que vous aviez une excellent expérience à la suite de

 11   ce projet."

 12   Est-ce exact ?

 13   R.  C'est exact.

 14   Q.  Sautons maintenant au mois de février 1994. Il y a une entrée qui parle

 15   -- en fait, je voudrais le 17.

 16   M. KARNAVAS : [interprétation] Pourrait-on avoir le numéro de page ? Il

 17   nous serait plus facile de suivre.

 18   M. SCOTT : [interprétation] Page 20. Page 20 en anglais de toute façon. Je

 19   ne peux pas faire mieux que ça, je ne peux vous donner que le numéro.

 20   Q.  Donc chronologiquement parlant, donc, il y a une entrée dans votre

 21   rapport pour ce qui est de la date du 7 février 1994 et on peut y lire :

 22   "Je suis allé voir le professeur Mate Granic et il m'a informé -- il m'a

 23   dit de quelle façon me comporter à Livno où j'allais me rendre le lendemain

 24   à l'assemblée croate des Croates de l'ABiH."

 25   D'abord, dites-nous de quoi s'agissait-il s'agissant de cette assemblée de

 26   tous les Croates à Livno en 1995 au mois de février ?

 27   R.  C'était un -- une réunion des Croates de Bosnie-Herzégovine. Cette

 28   réunion n'était pas de nature ou de connotation politique avant tout,

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  1   c'était surtout une réunion culturelle. Il s'agissait d'un rassemblement de

  2   tous les Croates -- ou plutôt, d'une réunion pour aborder différentes

  3   questions qui les intéressaient. Je ne me souviens plus en détail de

  4   quelles questions il s'est agit. Très précisément, je suppose que c'était

  5   la question de l'indépendance.

  6   Q.  Très bien. Monsieur, de nouveau, je sais que vous êtes un homme

  7   extrêmement -- avec énormément d'éducation, vous occupez votre poste depuis

  8   un très grand nombre d'années, comment est-ce que -- ou pourquoi est-ce que

  9   M. Granic devait vous donner des conseils, à savoir comment vous comporter

 10   lors de cette réunion à Livno ? Quel type d'instructions, quel genre de

 11   conseils a-t-il bien pu vous donner s'agissant de votre comportement à

 12   Livno ?

 13   R.  Il m'a donné des conseils. Il m'a dit si on me demandait de prendre la

 14   parole lors de cette réunion, de parler de telle sorte pour qu'il ne

 15   découle aucune conséquence, aucune implication politique pour l'office des

 16   réfugiés et des personnes déplacées.

 17   Q.  Le mois de février 1994 était le mois pendant lequel on parlait

 18   beaucoup des accords de Washington qui ont été signés ultérieurement au

 19   mois de mars. Est-ce que vous vous souvenez si

 20   M. Granic vous a donné des conseils ou des instructions, à savoir quelle

 21   position adopter quand au sujet de l'accord de Washington et si jamais le

 22   sujet avait été abordé lors de la réunion ?

 23   R.  Excusez-moi, je n'ai pas bien compris votre question. A quel sujet ?

 24   L'accord de Washington ?

 25   Q.  Certainement, je vais reformuler ma question, je n'ai pas été très

 26   clair.

 27   Les Juges de la Chambre ont entendu un très grand nombre de témoignages, à

 28   savoir qu'au début du mois de février 1994, on a commencé à mener des

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  1   pourparlers ou à parler de ce qui, plus tard, a été connu sous le nom de

  2   l'accord de Washington qui a été signé au mois de mars 1994. Vous souvenez-

  3   vous si le Dr Granic vous a donné des instructions, à savoir de quelle

  4   façon présenter ou quelle position adopter si l'on évoquait le sujet des

  5   accords de Washington.

  6   R.  Non, Monsieur le Juge.

  7   Q.  D'accord, très bien.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Je souhaiterais maintenant passer au sujet

  9   des réfugiés en Croatie. Bien sûr, on en a beaucoup parlé jusqu'à

 10   maintenant.

 11   Q.  Si j'ai bien compris, vers le 13 juillet 1992, une décision a été prise

 12   par le gouvernement croate pour ne pas accepter d'autres réfugiés venant de

 13   Bosnie-Herzégovine, car la Croatie était, si je puis dire, déjà bondée.

 14   Vous souvenez-vous de cela ?

 15   R.  Je me souviens de cela, mais c'était plus un appel à l'aide des pays

 16   tiers, c'était plus cela que -- qu'une menace.

 17   Q.  Vous souvenez-vous combien ou pendant combien de temps ceci a été le

 18   cas, jusqu'à quand est-ce qu'on ne recevait plus les réfugiés et à quel

 19   moment est-ce qu'on a rouvert les frontières aux réfugiés ? Si vous pouvez

 20   nous donner des dates ou un moment -- une époque approximative.

 21   R.  La Croatie n'a jamais arrêté de recevoir des réfugiés, tout simplement.

 22   Elle ne pouvait pas faire cela. D'après ce que vous dites, le gouvernement

 23   aurait pris une décision, mais je ne me souviens pas exactement de cette

 24   décision. Aujourd'hui, je l'interpréterais plutôt comme une expression des

 25   difficultés que connaissait l'Etat, à ce moment-là, et comme une

 26   possibilité que l'Etat arrête de recevoir les réfugiés de Bosnie-

 27   Herzégovine. Jamais, de fait, on a arrêté d'accueillir les réfugiés de

 28   Bosnie-Herzégovine. C'est tous les jours que nous avons continué d'en

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  1   recevoir.

  2   Q.  Très bien. Alors, nous allons revenir sur ce sujet un peu plus tard,

  3   mais pour l'instant, j'aimerais vous poser quelques questions générales

  4   quant aux réfugiés et personnes déplacées.

  5   Est-ce que vous seriez d'accord avec moi, Monsieur, pour dire qu'il y

  6   avait une différence, et d'autres témoins nous ont dit qu'il y avait

  7   effectivement une différence, entre une personne qui avait, dans un sens

  8   technique, un statut de réfugié, donc, qui est -- dont on avait -- à qui on

  9   avait octroyé le statut juridique de réfugié, que ceci avait -- était

 10   différent d'une personne qui n'avait pas encore un statut de réfugié.

 11   R.  Entre quelqu'un qui bénéficie du statut de réfugié et la personne qui

 12   n'est pas réfugiée, alors, soit cette deuxième personne n'est pas réfugiée

 13   de fait puisqu'elle n'a pas besoin de ce statut, puisqu'elle est bien

 14   hébergée et, tout simplement, ne souhaite pas être marquée socialement en

 15   tant que réfugiée, peut-être ne souhaite pas -- tout simplement ne souhaite

 16   pas, pour une raison qui la concerne, ne souhaite pas bénéficier du statut

 17   de réfugié. Ce serait la seule différence; sinon, naturellement, tous ceux

 18   qui bénéficiaient de ce statut de réfugié ou de personne déplacée

 19   jouissaient de tous les droits et étaient protégées.

 20   Si je puis expliquer, d'après nos études, d'après nos recensements, environ

 21   6 % des personnes étaient -- des personnes qui étaient arrivées de Bosnie-

 22   Herzégovine n'avaient pas demandé le statut de réfugié. Plus concrètement,

 23   c'étaient des intellectuels, des personnes aisées, ceux qui avaient leur

 24   propriété, maison de campagne, maison ou logement en Croatie. Environ 6 %.

 25   Q.  D'accord, bien. Maintenant, il y avait tout un système juridique,

 26   n'est-ce pas ? Il y avait des lois, des statuts, une législation en place,

 27   une bureaucratie à laquelle -- avec laquelle il fallait faire face pour

 28   octroyer à quelqu'un un statut de réfugié. Donc, soit qu'on pouvait obtenir

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  1   un statut de réfugié ou non. Et si la loi vous permettait d'avoir un statut

  2   de réfugié, ceci donnait certains droits aux personnes qui n'avaient pas le

  3   statut de réfugié, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact, mais tout simplement parce que ces personnes n'avaient pas

  5   besoin d'être prises en charge, d'être prises en charge comme cela est fait

  6   lorsque quelqu'un bénéficie du statut de réfugié.

  7   Q.  Je ne sais pas à quoi vous faites référence exactement, je ne parle pas

  8   de ces 6 % dont vous avez parlé tout à l'heure. Est-ce que vous est en

  9   train de dire aux Juges de la Chambre que les seules personnes qui

 10   n'avaient pas obtenu le statut de réfugié en Croatie étaient les personnes

 11   qui n'en avaient pas la demande.

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Ce n'est pas ce que le témoin a dit et je

 13   crois que M. Scott devrait reformuler ces questions car je crois que nous

 14   sommes en train de nous perdre -- nous sommes dans des eaux troubles. Je

 15   comprends -- enfin, je crois que ce que M. Scott essaie d'obtenir du témoin

 16   était la chose suivante : c'est que certaines personnes qui étaient des

 17   réfugiés avaient certains bénéficies -- un certain bénéfice ou quelles

 18   étaient -- enfin, qu'est-ce que les personnes qui n'avaient pas de statut

 19   de réfugié n'avaient pas. Donc, je crois qu'il est en train d'essayer de

 20   mettre des mots dans la bouche du témoin.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Essayez de reposer la question puisque ça

 22   soulève un problème, que je ne perçois pas directement mais s'il y a un

 23   problème essayons de le régler.

 24   M. SCOTT : [interprétation] Très bien. Je ne vois pas de problème non plus.

 25   Mais voilà je ne vais pas insister sur cette question. Je ne veux pas faire

 26   perdre enfin prendre plus de mon temps. Je crois que le témoin a compris et

 27   je crois que toutes les autres personnes dans ce prétoire ont bien compris

 28   également.

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  1   Q.  Maintenant passons à autre chose. J'aimerais que l'on aborde une loi,

  2   que l'on parle d'une loi. Prenez la pièce 1D 02588. C'est un document qui

  3   se trouve dans le classeur de la Défense.

  4   Le premier classeur on me dit à l'instant. Ou plutôt, je crois qu'on

  5   passera plus de temps à essayer de trouver le document que le temps que

  6   nous examinerons le document. Il s'agit d'un décret du 27 octobre 1992.

  7   M. Karnavas vous a montré ce document, si je ne m'abuse, et vous lui avez

  8   dit, je crois que selon vous c'était la loi qu'appliquait votre -- de la

  9   loi que suivait et qu'appliquait votre agence en relation avec les

 10   personnes déplacées et réfugiés, n'est-ce pas ?

 11   R.  C'est exact.

 12   Q.  Et malgré le fait que le décret ne s'applique qu'aux personnes

 13   déplacées à l'interne de la Croatie et ne porte pas sur les personnes

 14   venant de l'extérieur de la Croatie, vous êtes bien d'accord avec moi pour

 15   dire que c'est ce que le statut dit. On ne parle pas des personnes venant

 16   de l'extérieur, n'est-ce pas ?

 17   R.  Je n'ai pas trouvé directement d'article où il serait fait mention des

 18   réfugiés venus de Bosnie-Herzégovine; cependant, lorsqu'on regarde la

 19   définition du réfugié, elle englobe tout ce qui arrivait chasser de Bosnie-

 20   Herzégovine. Il faut savoir que c'est par ce décret qu'on a défini que

 21   "réfugié" signifie la personne qui a été chassée d'un pays voisin soit de

 22   Bosnie-Herzégovine ou soit de Serbie, Vojvodine, Kosovo, en Croatie. Et la

 23   personne déplacée --

 24   Q.  Désolé je dois vous interrompre de nouveau. Je n'essaie pas d'être

 25   impoli mais je n'ai pas le choix. Donc, vous dites que c'est votre

 26   interprétation mais ce n'est pas ce que dit la loi -- ce n'est pas ce que

 27   dit le décret. Tout le monde peut relire ce décret dix fois mais ce n'est

 28   pas ce que dit littéralement ce décret. Le décret dit autre chose. Prenez

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  1   la pièce 1D 02368 -- non, excusez-moi -- plutôt, 1D 02638. On m'apprend que

  2   c'est soit dans le deuxième ou le troisième classeur.

  3   Encore une fois, je n'ai pas abordé ce statut, cette décision, ou

  4   cette loi en détail, mais il s'agit d'une loi sur le statut des personnes

  5   déplacées et réfugiés qui est entrée en vigueur vers le

  6   18 octobre 1993. Comme nous pouvons le voir sur le document, et si j'ai

  7   bien compris, Monsieur, la position qu'avait adoptée l'office des personnes

  8   déplacées et réfugiés c'était également votre position, que lorsque cette

  9   loi est entrée en vigueur, votre agence a suivi et a appliqué cette loi

 10   concernant les personnes déplacées et réfugiés, n'est-ce pas ?

 11   R.  C'est exact. Mais nous, à l'office, conformément à la convention de

 12   Genève de 1951, nous estimions qu'étaient réfugiés toutes les personnes

 13   arrivaient d'un autre Etat, enfin, de l'ex-Yougoslavie, qui arrivaient sur

 14   le territoire de la République de Croatie. Je ne sais pas si ça ne se

 15   trouve pas dans la loi, je n'ai pas le temps maintenant de l'étudier. Mais

 16   c'était ça la pratique de l'office. La pratique de notre office était

 17   claire, donc, ce que nous faisions et la pratique selon laquelle le

 18   gouvernement acceptait mes rapports. La définition est claire. La

 19   définition de personnes déplacées, donc, c'est un ressortissant de la

 20   République de Croatie qui a été déplacé antérieurement et le réfugié est

 21   celui qui a été chassé de République de Bosnie-Herzégovine et reçu --

 22   accueilli en tant que réfugié en République de Croatie et s'est vu

 23   reconnaître le statut de réfugié. Dans tous mes rapports, on a ça, et

 24   jamais personne ne m'a objecté au sein du gouvernement. On m'a dit que je

 25   travaillais contrairement à la loi.

 26   Q.  Oui, Monsieur, je ne souhaite certainement pas vous critiquer votre

 27   travail --

 28   R.  Non, non, tout à fait. Mais j'essaie de vous expliquer comment on

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  1   travaillait, et d'ailleurs, cette législation, vous savez, quelle n'est pas

  2   parfaite, et en particulier pendant la guerre. Ils avaient d'autres soucis

  3   ces structures.

  4   Q.  Oui, oui, je comprends ce que vous me dites. Mais tout ce que je

  5   voudrais que vous me confirmiez que c'était la loi qu'en vertu de laquelle

  6   vous fonctionniez et que vous aviez appliqué. Et le statut -- la loi dit

  7   qu'on se limite que sur les personnes à l'intérieur de la République de

  8   Croatie ou des personnes qui sont allées à l'extérieur dans un pays tiers.

  9   Donc, on ne parle pas de personnes qui venaient dans la République de

 10   Croatie en tant que réfugiés de l'extérieur du pays. Donc, selon vous, vous

 11   dites que vous avez interprété le statut même si ce n'est pas littéralement

 12   ce que dit le statut, n'est-ce pas ?

 13   R.  Est-ce que je peux être encore plus précis ? Je travaillais avec des

 14   gens et pas avec des documents. Je travaillais avec des gens dans des

 15   situations concrètes et ces situations c'était des situations où ces gens

 16   étaient soit déplacés à l'intérieur de la République de Croatie soit

 17   chassés de la République de Bosnie-Herzégovine. Et à travers des contacts

 18   avec le HCR, à travers mon propre travail, je vais vous dire ainsi : nous

 19   avons mis sur pied une certaine pratique qui était claire et qui se lit

 20   dans tous nos documents, dans tous nos rapports. Si la loi, on dit quelque

 21   chose d'autre, je vous précise que c'est sur le plan humanitaire et de la

 22   manière humaine que je travaillais en ayant devant moi des êtres humains et

 23   non pas des papiers et des lois.

 24   Q.  Bien. Alors, je voudrais vous demander de prendre le document 4D 01232,

 25   01232, c'est le document que vous a montré

 26   Me Alaburic. Il s'agit de la loi sur le déplacement et la résidence

 27   accordée aux étrangers. Donc, je répète, il s'agit bien de la pièce 4D

 28   01232. Il y a également une copie papier car il y a eu une traduction faite

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  1   de ce document et de ces différents articles.

  2   C'est la loi, mais ce n'est pas la loi qui était appliquée aux

  3   réfugiés qui venaient de l'extérieur de la République de Croatie, et si

  4   j'ai bien compris, vous dites que vous n'estimiez pas que cette loi-ci

  5   s'appliquait, n'est-ce pas ?

  6   R.  C'est exact.

  7   Q.  Donc, ce que nous avons ici c'est que nous avons deux lois, une loi de

  8   1992 et une autre loi de 1993, et qui ne s'appliquent pas, mais vous dites

  9   que vous les avez appliquées. Ensuite, nous avons une autre loi sur les

 10   étrangers qui devrait être appliquée, et vous dites que ce n'est pas la loi

 11   que vous avez appliquée. Alors, pourriez-vous expliquer aux Juges de la

 12   Chambre pourquoi est-ce qu'il y a cet écart -- enfin, pourquoi est-ce que

 13   la loi sur les étrangers ne s'applique pas alors qu'à la lecture de cette

 14   loi, il semblerait qu'elle devrait s'appliquer ?

 15   R.  J'avais déjà dit à un moment donné que par la disparition de la

 16   Yougoslavie, de nouvelles circonstances sont créées. Avec l'accession à

 17   l'indépendance de la Croatie, de la Bosnie-Herzégovine, de la Serbie, aux

 18   yeux du ministère des Affaires intérieures, les circonstances nouvelles se

 19   sont créées et il a fallu qu'ils se décident, qu'ils déterminent quelle

 20   sera leur attitude à l'égard des étrangers arrivés d'autres pays, la

 21   Slovénie, la Hongrie, voire même l'Allemagne, pour ne pas énumérer tous les

 22   cas de figure.

 23   Donc j'ai la sensation que c'est une décision qui concerne ces

 24   ressortissants-là. Il y avait une loi en particulier qui régissait la

 25   circulation des réfugiés, car les réfugiés, tout simplement -- en fait, en

 26   réalité, on ne pouvait pas les englober par une telle loi parce que --

 27   Q.  Je vous arrête ici, Monsieur. Donc, nous avons la deuxième loi, la loi

 28   de 1993. Vous nous avez dit, et cela fait déjà plusieurs jours que vous

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  1   nous en parlez, et M. Zoric nous en a parlé pendant plusieurs jours, et

  2   vous avez dit que vers la mi-1993 il y avait un problème énorme quant aux

  3   réfugiés en Croatie. C'était sans doute une question qui devait être

  4   abordée par le parlement croate. Donc, la Chambre doit-elle comprendre que

  5   les hommes juridiques de la Croatie ne savait pas comment écrire la loi,

  6   qu'ils ont fait la même erreur pas une fois, mais deux fois en écrivant une

  7   loi pour traiter de cette question s'agissant des personnes qui venaient en

  8   Croatie ?

  9   R.  Je ne peux pas vous répondre à cette question, étant donné que je ne me

 10   suis pas du tout penché sur ces documents. A l'époque, l'office des

 11   Réfugiés et des Personnes déplacées veillait à caser les réfugiés et les

 12   personnes déplacées et non pas aux documents ou à la documentation, et dans

 13   notre office nous avions un service juridique.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Témoin, c'est exactement la

 15   question que j'allais vous poser, car le statut des réfugiés a des aspects

 16   juridiques fort complexes, et j'allais vous demander - parce que vous, vous

 17   n'êtes pas juriste - si vous aviez au sein de l'office, quelqu'un qui, un,

 18   avait porté à votre connaissance la convention de Genève de 1951, qui est

 19   quand même assez précise, qui vous portait à votre connaissance les

 20   différents textes de droit internes susceptibles de s'appliquer aux

 21   étrangers ou aux réfugiés, et cette personne ou ce service vous apportait-

 22   il une expertise juridique pour l'action que vous meniez à la tête de cet

 23   office ?

 24   LE TÉMOIN : interprétation] Monsieur le Juge, dans cet office chargé des

 25   Réfugiés, il y avait un service juridique -- ou plutôt, un département

 26   chargé du Droit, et ce service s'occupait de ces différents documents. Au

 27   début de nos activités dans l'office, nous avions des réunions conjointes

 28   où l'on décortiquait les conventions de Genève et la législation relative

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  1   aux personnes expulsées de chez elles et aux réfugiés.

  2   Et c'était -- et j'ai à l'esprit l'année 1992, une période où nous étions

  3   en train d'apprendre au sein de l'office ce que c'est que les réfugiés et

  4   ce que c'est que les personnes déplacées, et bon nombre de gens, même à

  5   Zagreb, ne savaient pas faire la différence. Nous avons donc dû apprendre,

  6   nous avons convié un juriste du HCR, je ne me souviens plus du nom de ce

  7   monsieur. Je ne sais pas si c'était Heinemann ou -- enfin, je ne sais plus.

  8   Et il y a eu un cours, une conférence sur ce que disait la convention de

  9   Genève au sujet de l'hébergement des réfugiés. Nous avons donc eu à

 10   apprendre à l'époque comment s'occuper, et ensuite, nous avons enseigné aux

 11   autres lorsque nous avons maîtrisé la matière, à savoir le droit

 12   international en la matière et leurs mises en œuvre. Et s'agissant de cette

 13   législation internationale qui a été héritée par la Croatie de la part de

 14   l'ancienne Yougoslavie, et nous avions ces textes en mains. Cette

 15   législation, ces lois, en particulier celles qui se rapportaient aux

 16   personnes déplacées et aux réfugiés, étaient le fondement au sein de

 17   l'office sur lequel nous étions appelés à fonctionner.

 18   Il est certain que des éléments ont découlé de la loi ou du décret, mais il

 19   en a découlé davantage encore de notre relation avec la réalité à laquelle

 20   nous faisons face et qui nous apportait d'un mois à l'autre, de nouveaux

 21   problèmes, de nouvelles questions d'actualité. Et c'est là qu'on a appris

 22   comment fonctionner, comment agir.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le greffier m'a dit qu'il va falloir faire la

 24   pause. On va faire donc une pause de 20 minutes. Le Procureur a utilisé une

 25   heure et 37 minutes.

 26   --- L'audience est suspendue à 17 heures 42.

 27   --- L'audience est reprise à 18 heures 04.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

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  1   M. SCOTT : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur, est-ce que vous avez toujours sous les yeux la pièce 4D

  3   10232, c'est la loi relative aux étrangers. Est-ce que vous avez toujours

  4   ce document sous les yeux ?

  5   R.  Je ne l'ai pas. J'ai le 233 moi ici. Le voilà.

  6   Q.  Très bien. Dernière question à ce sujet. Une dernière question avant

  7   que je ne passe à d'autres pièces. J'aimerais vous demander de vous

  8   reporter à l'article 31 de la loi relative aux étrangers, enfin plutôt la

  9   loi sur le déplacement et les étrangers, résidences des étrangers. Il est

 10   dit, je cite : "Un ressortissant étranger ayant quitté le pays dont il est

 11   ressortissant ou il résidait de manière permanente en tant qu'apatride afin

 12   de fuir ou d'éviter des persécutions en raison de ses opinions politiques,

 13   de son origine nationale, raciale ou de sa religion, peut se voir accorder

 14   le statut de réfugié."

 15   Vu les échanges que nous avons eues au cours de l'heure qui vient de

 16   s'écouler, étant donné que cette loi ne s'applique pas a priori, ne semble

 17   pas s'appliquer, est-ce que votre organisation, le gouvernement croate

 18   avait décidé de ne pas appliquer cette loi aux étrangers parce qu'à ce

 19   moment-là cela serait revenu à reconnaître que ces personnes souffraient ou

 20   étaient en but à une persécution religieuse, raciale ou politique ?

 21   R.  Cet article 31 en quelque sorte se rapporte aux réfugiés avec qui nous

 22   avons travaillé, mais je pense qu'en premier lieu ça se rapporte aux

 23   étrangers qui sont persécutés dans leurs pays respectifs du fait de leurs

 24   convictions raciales ou religieuses ou appartenances raciales ou

 25   religieuses. Mais dans l'Office chargé des réfugiés et des personnes

 26   déplacées, cette loi peut dans un certain sens constitué un cadre de loi,

 27   mais ce n'est pas la loi sur laquelle s'est fondée notre activité pour ce

 28   qui est de la reconnaissance du statut de réfugié à des personnes qui

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  1   auraient fui la République de Bosnie-Herzégovine.

  2   Q.  Excusez-moi. Excusez-moi, Monsieur. Pourquoi vous dites que ce n'était

  3   pas une loi sur laquelle pouvait s'appuyer notre travail, nos activités ?

  4   Mais c'est une loi, c'est une loi qui a été adoptée de manière tout à fait

  5   conforme par les autorités compétentes, le Sabor peut-être, en tout cas

  6   c'est une loi, c'est une loi qui figure dans les statuts, et votre

  7   obligation juridique dans le cadre de votre organisation c'est d'appliquer

  8   la législation croate. Vous nous dites que ce n'est pas une loi que nous

  9   pouvions mettre en application. Mais pourquoi pas ? Est-ce que votre

 10   organisation faisait son choix, décidait quelle loi elle allait appliquer

 11   ou pas ?

 12   R.  Il se peut que j'aie été mal compris. J'ai dit que cette loi était plus

 13   vaste, de plus grande envergure pour ce qui est du séjour des déplacements

 14   des étrangers en République de Croatie, c'est de cette loi-là que se

 15   servait le ministère de l'Intérieur. Cela n'est pas en conflit avec la loi

 16   et le décret dont disposait l'Office chargé des réfugiés et des personnes

 17   déplacées, qui avait en premier lieu pour fonction la reconnaissance de ce

 18   statut de réfugié et prenait soin des réfugiés. Donc cela n'était pas en

 19   collision, mais ça se rapportait en premier lieu au ministère de

 20   l'Intérieur.

 21   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, si je puis dire, je

 22   vois d'expérience où cela nous mène. Parce que dans le curriculum on a vu

 23   que le Dr Rebic n'était pas un juriste, et je ne vois pas partant de quoi

 24   le bureau du Procureur l'interroge sur ce point-là. Mais ce que je veux

 25   dire c'est qu'on a perdu plus de 15 minutes, me semble-t-il, suite aux

 26   questions posées par l'Accusation, en page 72, où la première fois il a été

 27   question de ce décret relatif aux personnes déplacées. Le 1D 0638.

 28   Alors, dans la première réponse du témoin, en page 72, ligne 8 du PV,

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  1   le témoin a commencé, je cite : "Exact. Mais nous autres à l'office,

  2   s'agissant du respect des conventions de Genève de 1951 au sujet des

  3   réfugiés et des personnes qui arrivaient des autres Etats," et cetera, et

  4   cetera. Le témoin a ensuite donné une différente façon de comprendre la

  5   loi. Il y a eu question/réponse, question/réponse. L'Accusation n'a pas

  6   pris soin du fait que ceci n'est pas la façon dont un juriste l'aurait

  7   fait, mais la phrase montre de façon claire, pour un profane en la matière,

  8   qu'il s'agit là d'une mise en œuvre d'une convention internationale.

  9   Alors, je peux parler en terme qualifié et de la loi et de la

 10   constitution croate, à l'époque, avant et aujourd'hui, parce qu'il y a eu

 11   plusieurs constitutions, comme en Europe, et aux Etats-Unis aussi il est

 12   dit que les conventions internationales ont force d'obligation et doivent

 13   être mises en œuvre indépendamment de la législation nationale. Etant donné

 14   que lui n'est pas juriste, il a des problèmes pour l'expliquer et il l'a

 15   mentionné. Et soit dit en passant, la seule chose qui est plus importante

 16   encore, compte tenu du fait que de la position de ce témoin, est de facto,

 17   non pas de jure, parce qu'il n'est pas juriste, mais de facto et la

 18   situation de facto il nous en a parlé, coopération avec le HCR, le HCR qui

 19   était dans ses bureaux et lui donnait des conseils et de façon évidente.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je me suis demandé quand M.

 21   Scott vous a posé une question qui était excellente, si vous comprenez le

 22   sens de la question qui est posée, et Me Kovacic a fait le même constat, et

 23   M. Scott vous a aussi posé une série de questions. Voilà.

 24   Sans que vous soyez juriste, vous savez il y a une convention de

 25   Genève en 1951, à laquelle d'ailleurs l'ex-Yougoslavie était partie

 26   prenante. Et la meilleure preuve en est c'est que dans le code pénal de

 27   l'ex-Yougoslavie, il y a des références explicites aux différentes

 28   conventions de Genève. La Croatie devient un Etat indépendant et elle

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  1   adhère aussi totalement à tout le corpus des textes internationaux. Ça,

  2   c'est en premier.

  3   En deuxième, il y a vos lois internes, les lois croates, dont le

  4   texte que M. Scott vous montre. Et l'article 31 est la réplique quasi

  5   identique de ce qui a dans la convention de 1951 qui dit qu'on peut

  6   accorder le statut de réfugié si quelqu'un est persécuté pour des raisons

  7   politiques, des raisons ethniques, des raisons raciales ou religieuses.

  8   Donc la loi, et M. Scott en vous posant la question, vous dit : Mais la loi

  9   elle s'applique à tout le monde, y compris à l'office, elle s'applique dans

 10   toute la Croatie. Et c'était ça le sens de la question. Et moi je me suis

 11   demandé : Mais est-ce que vous aviez bien compris la question qui vous

 12   était posée ?

 13   Alors ceci étant dit, est-ce que vous comprenez maintenant le sens

 14   des questions posées par M. Scott ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien que je ne sois pas juriste, j'ai compris

 16   de quoi il s'agissait. Et c'est ainsi que j'ai répondu, j'ai en effet dit

 17   que cette loi portant déplacement et séjour des étrangers en République de

 18   Croatie n'étaient pas en collision avec nos activités. Au contraire.

 19   L'article cité, il me semble, l'article 31 a été mis en œuvre dans notre

 20   office. Mais en sus, notre office se conformait aux conventions de Genève

 21   portant sur l'accueil, la reconnaissance du statut de réfugiés à toutes

 22   personnes venant d'un pays voisin. Et j'ai dit qu'à cette fin, nous

 23   prenions connaissance des conventions de Genève avec des gens du HCR, nous

 24   avons eu des states, et il y avait un service juridique dans notre office

 25   qui connaissait bien ces lois-là, et à l'occasion de nos réunions

 26   conjointes, lorsqu'il était question de problèmes en matière de droit, ils

 27   étaient là pour nous dispenser des conseils.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Je crois comprendre ce que vous dites. En plus

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  1   de l'application des conventions de Genève, vous dites que votre office

  2   prenait en charge les personnes, en anglais c'est "But on top of that," en

  3   sus, en plus.

  4   Donc si on comprend bien votre office, en plus du statut de réfugiés

  5   accordé aux uns et aux autres faisait dans l'assistance matérielle,

  6   médicale, de santé, de tous ces gens qui arrivaient. C'est bien comme ça

  7   qu'il faut comprendre vos réponses ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est comme cela qu'il convient de comprendre

  9   ma réponse, et je l'expliquerais davantage encore. Comme si c'était des

 10   réfugiés venus du Pakistan, ils ne tomeraient sous la compétence de mon

 11   office. 

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je comprends ce que vous dites. Bien.

 13   Alors, Monsieur Scott, je vous redonne la parole. Bon. On a essayé

 14   les uns et les autres de clarifier la situation.

 15   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, j'en  ai terminé

 16   de cette question. Je pense qu'il suffira de lire le compte rendu

 17   d'audience pour se faire une idée.Mais pour répondre très brièvement à Me

 18   Kovacic.

 19   Premièrement, je n'ai montré au témoin aucun document qui ne lui ait

 20   pas été montré par la Défense. Il s'agit systématiquement de documents qui

 21   ont été présentés au témoin par la Défense. Dans le cadre de mon

 22   interrogatoire, je me sers des mêmes documents.

 23   Bien entendu, nous pouvons tous convenir que M. Rebic n'est pas un

 24   juriste, mais c'est un homme qui a une grande culture, un homme qui a fait

 25   des études, et de 1991 à 1996, il était à la tête d'une institution dont le

 26   travail, dont la tâche consistait à appliquer le droit croate et le droit

 27   international dans le contexte des réfugiés et des personnes déplacées. Si

 28   bien que je lui accorde le bénéfice du doute. Je pense qu'il savait

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  1   parfaitement en quoi consistait son travail et quelles lois s'appliquaient

  2   à ses activités, y compris les lois croates et celles qui étaient

  3   réellement appliquées et celles qui ne l'étaient pas. Bien.

  4   Q.  Monsieur le Témoin, j'aimerais qu'on examine ensemble la pièce 10406,

  5   10406.

  6   M. SCOTT : [interprétation] C'est une pièce me semble-t-il de l'Accusation.

  7   Excusez-moi si j'ai donné la mauvaise cote, P 10406. J'aimerais qu'on

  8   présente cette pièce à l'écran grâce au système du prétoire électronique,

  9   si c'était possible. Bien.

 10   Q.  Afin de ne pas passer plus de temps sur cette question --

 11   M. KOVACIC : [interprétation] Je me trompe peut-être, mais je ne pense pas,

 12   ce n'est pas le fait que nous n'ayons pas cette pièce dans le classeur,

 13   c'est que cette pièce elle ne figure pas dans les tableaux qui nous ont été

 14   présentés. Il n'avait pas été prévu qu'on s'en serve.

 15   M. SCOTT : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur le Témoin, veuillez reporter les yeux sur l'écran. On voit

 17   qu'il s'agit d'un article de presse en date du 13 juillet 1992, et il

 18   s'agit là d'un thème que nous avons évoqué brièvement au début de l'après-

 19   midi. Il est indiqué qu'à partir du 13 juillet 1992, en tout cas à cette

 20   date, et là je vais lire la première phrase de cet article, je cite : "La

 21   Croatie a déclaré lundi qu'elle n'accepterait plus aucun réfugié de la

 22   Bosnie-Herzégovine ravagés par la guerre."

 23   Que pouvez-vous nous dire de cette décision, de la manière dont cette

 24   décision a été prise ? J'indique simplement qu'en haut de la deuxième page

 25   de la version en anglais du document, on cite M. Zoric sur ce point. Je

 26   cite : "C'est insupportable. Ce n'est pas une question de bonne volonté,

 27   mais nous n'avons nulle part pour héberger ces gens."

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] La question a déjà été posée et le témoin y

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  1   a répondu. On en a déjà parlé.

  2   M. SCOTT : [interprétation] Quand ?

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Déjà aujourd'hui, on a posé des questions au

  4   témoin au sujet de cette décision. Il a donné des explications. Il a

  5   expliqué que les frontières n'avaient jamais été fermées. C'était pendant

  6   le premier volet d'audience.

  7   On peut examiner encore ce sujet mais la question a été posée et la

  8   réponse a été donnée. On n'a pas vu ce document mais on a parlé de ce

  9   sujet.

 10   M. SCOTT : [interprétation] Oui, mais il y a quelque chose de précis qui

 11   m'intéresse dans ce document.

 12   Q.  Que pouvez-vous nous dire au sujet de cette décision prise le 13

 13   juillet 1992, consistant à ne plus accepter aucun réfugié en provenance de

 14   Bosnie-Herzégovine ?

 15   R.  Monsieur Scott, je ne me souviens vraiment pas les faits que la

 16   République de Croatie à quelque moment que ce soit ait pu être en position

 17   de décider de fermer ses frontières vis-à-vis de la Bosnie-Herzégovine et

 18   affirmer qu'elle n'accueillerait plus de réfugiés en provenance de ce pays.

 19   J'ai indiqué que cela avait probablement été une déclaration --

 20   Q.  Non, excusez-moi. Ce n'est pas la question que je suis en train de vous

 21   poser, je ne vous ai pas demandé et je n'ai pas dit que la Croatie voulait

 22   ou ne voulait pas le faire. C'est autre chose. Nous avons ici un article.

 23   Nous avons des témoins également qui nous ont dit qu'à l'époque la Croatie

 24   a cessé d'accepter l'arrivée de réfugiés en provenance de Bosnie-

 25   Herzégovine. Dites-moi en un peu plus à ce sujet, est-ce que c'est votre

 26   décision ? Qui l'a prise ? Qui au sein du gouvernement l'a prise ?

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] Je renvoie à ce qu'a dit le témoin

 28   précédemment. Il nous a dit que la frontière n'a jamais été fermée, qu'on

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  1   n'a jamais refusé l'entrée aux réfugiés. Il l'a dit très clairement en

  2   parlant de cette décision particulière. Or, maintenant, on lui présente un

  3   article --

  4   M. SCOTT : [interprétation] Oui, je conteste la réponse du témoin. Je ne

  5   suis pas tenu d'accepter sa première réponse. Je suis en train de mener un

  6   contre-interrogatoire. Voilà l'essence même du contre-interrogatoire.

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Mais il s'agit d'un article de presse. Voilà

  8   ce que je veux dire. C'est du ouï-dire. Nous ne pouvons pas demander à

  9   cette personne, à l'auteur, ce qu'il a fait, ce qu'il pensait en écrivant

 10   ce document.

 11   M. SCOTT : [interprétation] Est-ce qu'on est en train de changer le

 12   Règlement ? Ça fait deux ans qu'on utilise des articles de presse.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce qu'il faut comprendre que M. Scott

 14   est en train de dire au témoin que le témoin est un menteur ? Est-ce que

 15   c'est ce que fait M. Scott parce que le témoin a déjà répondu à cette

 16   question qui lui a déjà été posée.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : -- arrêtez de faire de la guérilla judiciaire. Il y

 18   a une dépêche de l'agence Reuters, mondialement connue, et vous savez

 19   qu'une agence de presse internationale ne se livre pas à dire et à écrire

 20   n'importe quoi.

 21   Cette dépêche fait référence à ce que le secrétaire général de

 22   l'office a déclaré. Et dans cette dépêche on voit que M. Zoric fait état de

 23   problèmes financiers. Alors c'est peut-être intéressant de savoir pourquoi

 24   il a dit ça, et ce n'est pas de nature à vous porter préjudice quelconque.

 25   Qui plus est, ça se passe en Croatie, ce n'est pas en Bosnie-Herzégovine.

 26   Alors, Monsieur Scott, continuez, si vous estimez qu'il y a lieu

 27   d'approfondir un point de ce document.

 28   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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  1   Q.  On doit avancer. Et si je peux vous poser des questions

  2   supplémentaires, vu ce qui a été dit, j'aimerais vous demander d'examiner à

  3   nouveau la pièce 1D 02008. C'est la première pièce que nous avons examinée

  4   ensemble dans le cadre de mon contre-interrogatoire. 1D 02008. Premier

  5   classeur des documents fournis par la Défense. Je n'ai pas les documents,

  6   je ne les ai pas organisés ou classés de la même manière que la Défense.

  7   Vous avez trouvé le document ?

  8   R.  C'est le deuxième.

  9   Q.  Bon. A ce moment-là, je vais vous demander de consulter le document à

 10   l'écran. C'est le document qu'on a déjà regardé, c'est une lettre qui est

 11   envoyée par le Dr Prlic à M. Granic en rapport avec une réunion qu'ils ont

 12   tenue le 20 novembre 1992. Et j'aimerais vous demander de regarder ce qui

 13   figure en annexe, au point 1 en particulier. Point 1. Il faut se souvenir

 14   que ceci a été rédigé en novembre 1992. Je cite : "S'agissant des réfugiés,

 15   on a insisté sur le fait que la Croatie ne disposait pas des installations

 16   ou de ressources physiques, sociales ou matérielles pour accueillir une

 17   nouvelle vague de réfugiés en provenance de Bosnie-Herzégovine, une

 18   nouvelle vague à laquelle on peut s'attendre. La seule possibilité c'est de

 19   les faire transiter par ici pour les envoyer dans d'autres pays."

 20   Vous voyez ce passage ?

 21   R.  Je le vois.

 22   Q.  Est-ce que c'est exact, est-ce que ça correspond à ce qui est décrit

 23   ici, à la situation telle qu'elle se présentait en novembre 1992 ?

 24   R.  C'est exact, c'est bien ce qui est dit. La République de Croatie à ce

 25   moment-là était exténuée et n'avait ni physiquement, ni socialement, ni

 26   matériellement, les possibilités d'accueillir un nouveau afflux de

 27   réfugiés. Mais en dépit de ce fait, on en a reçu, on s'est débrouillés. Je

 28   vous ai déjà dit à plusieurs reprises que le ministère de la Défense --

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  1   enfin, on avait saisi le ministère de la Défense pour les installations qui

  2   étaient celles de la JNA du temps de l'ex-Yougoslavie, et c'est dans ces

  3   installations que nous avons hébergé les réfugiés de Bosnie-Herzégovine.

  4   Alors, Messieurs les Juges, c'est une chose si quelqu'un parle au nom de la

  5   République de Croatie pour sensibiliser les autres vis-à-vis de

  6   l'impossibilité physique d'accueillir et d'installer des réfugiés et des

  7   personnes déplacées en provenance de Bosnie-Herzégovine, et c'est autre

  8   chose, de facto, que de voir ou de dire que nous n'avons jamais rejeté ou

  9   refusé des réfugiés qui venaient en République de Croatie en provenance de

 10   Bosnie-Herzégovine.

 11   Je ne me souviens pas d'un événement quelconque où l'Office chargé

 12   des réfugiés et des personnes déplacées aurait refusé d'apporter de l'aide

 13   à des réfugiés arrivant de la Bosnie-Herzégovine. Je ne m'en souviens tout

 14   simplement pas.Ceci, je le comprends comme un élément de sensibilisation de

 15   l'opinion publique pour aider afin que la Bosnie-Herzégovine, elle aussi,

 16   essaie de résoudre sur son territoire à elle le problème de l'hébergement

 17   des personnes déplacées.

 18   Q.  Monsieur, à supposer que l'on ait permis à de nouvelles personnes

 19   d'entrer en Croatie, de traverser la frontière, c'est une hypothèse, on

 20   pourra s'interroger plus tard si c'était effectivement le cas. Est-ce que,

 21   malgré tout, la position prise par le gouvernement croate c'est que ces

 22   gens, après le 13 juillet 1992, ne recevraient pas le statut de réfugié ?

 23   Donc, ces gens étaient peut-être là, en personne, il y a peut-être

 24   des gens pour les aider, mais en tout cas, il était hors de question qu'on

 25   leur accorde le statut de réfugié après le 13 juillet 1992. Est-ce que

 26   c'est ça le sens de cette décision ?

 27   R.  D'après moi, non. Cette décision -- enfin, d'après les entretiens qui

 28   ont eu lieu à Grude, si je vous ai bien compris, le 20 novembre 1992, ce

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  1   sont des entretiens, Granic y a souligné l'impossibilité, les difficultés -

  2   -

  3   Q.  Désolé, Monsieur, je voudrais vous demander de passer à la pièce 1D --

  4   c'est dans le classeur de l'Accusation. Donc je répète la cote, 1D 02608,

  5   2608.

  6   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, Messieurs

  7   les Juges, c'est dans le classeur de la Défense. Nous nous retrouvons dans

  8   la même situation que dans laquelle nous nous étions déjà retrouvés.

  9   Q.  J'aimerais vous demander de prendre le premier paragraphe, et nous

 10   verrons la date du 29 octobre 1992. Au point un : Obéir strictement aux

 11   stipulations du gouvernement de la République de Croatie concernant

 12   l'approbation et la non-approbation du statut de réfugié aux réfugiés qui

 13   sont arrivés en Croatie avant le mois de juillet 1992. Et ceci, car il y a

 14   eu quelques irrégularités."

 15   Vous avez rédigé ce document quelques mois plus tard, le 29 octobre 1992,

 16   mais vous faites néanmoins une référence à la date du 13 juillet 1992.

 17   C'est une date, n'est-ce pas, c'est une date qui a une certaine importance,

 18   n'est-ce pas ? Pourquoi ? Pourquoi en octobre 1992 vous faites référence au

 19   mois de juillet ? Pourquoi est-ce que c'était important que ces derniers

 20   arrivent avant le 13 juillet 1992 ?

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Si vous m'y autorisez, juste une

 22   intervention. Il me semble qu'il y a eu erreur de traduction dans ce

 23   document. Dans le texte croate, il est question des réfugiés arrivés en

 24   Croatie après le 13 juillet 1992, et si je comprends bien la traduction, il

 25   y est question "avant le 13 juillet 1992". Excusez-moi, est-ce que ça peut

 26   être utile ?

 27   M. SCOTT : [interprétation] Désolé, oui, excusez-moi.

 28   Monsieur le Président, les interprètes pourraient peut-être nous venir en

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  1   aide, je me remets entre leurs mains.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, le mieux c'est que vous lisiez le

  3   paragraphe 1 dans votre langue et, comme ça, les interprètes nous diront si

  4   c'est "after" ou "before." Allez-y.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Je commence la phrase, je cite : "Nous

  6   demandons aux bureaux régionaux de s'adresser à tous les centres

  7   d'assistance sociale afin de les prier de, comme suit :

  8   "Premièrement : de respecter strictement les instructions du

  9   gouvernement de la République de Croatie s'agissant le fait d'accorder ou

 10   de ne pas accorder le statut de réfugié aux réfugiés qui sont arrivés en

 11   Croatie après le 13 juillet 1992. Il faut savoir qu'un certain nombre

 12   d'irrégularités se sont manifestées."

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, traduction "après" et pas "avant."

 14   M. SCOTT : [interprétation] j'accepte tout à fait cette traduction et, pour

 15   le compte rendu d'audience, je souhaiterais dire qu'il s'agit d'une erreur.

 16   Mais en réalité, ce changement -- en fait, cette correction n'apporte pas

 17   un grand changement à ma question, à savoir qu'il s'agisse avant ou après

 18   pour --

 19   Q.  Enfin, je vous pose la question. C'est une date importante soit parce

 20   que quelque chose est arrivé avant cette date ou après cette date, mais

 21   néanmoins, il est de fait qu'au mois d'octobre vous écrivez une lettre et

 22   vous faites une référence au 13 juillet 1992 dans votre lettre. Pourquoi

 23   cette date ?

 24   R.  Vu le nombre d'années qui se sont écoulées, je n'arrive plus à me

 25   rappeler aujourd'hui cette date du 13 juillet. Cependant, je vois dans ce

 26   document que j'ai dû signer. D'ailleurs, je ne vois ma signature. Il s'agit

 27   de l'aide financière ponctuelle en famille -- autres familles d'accueil des

 28   réfugiés de Bosnie-Herzégovine. Donc, dans ce document, on demande aux

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  1   offices régionaux de faire parvenir à l'office la liste de toutes les

  2   familles d'accueil et des personnes, du nombre de réfugiés de Bosnie-

  3   Herzégovine qui sont accueillis pour que l'on puisse accorder cette aide

  4   ponctuelle de

  5   9 000 dinars croates par personne. Et également s'adressant aux familles

  6   d'accueil et s'adressant également aux réfugiés qui se sont organisés eux-

  7   mêmes de ne leur verser l'aide que lorsqu'une pièce d'identité est

  8   présentée ou la carte de réfugiés.

  9   Je souhaiterais passer à autre chose. Bien.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, avant de passer à autre chose, j'ai

 11   regardé à nouveau le paragraphe 1 et comme vous je me suis interrogé. Mais

 12   quand on traduit le paragraphe 1, on a l'impression que M. le Témoin envoie

 13   un ordre aux centres régionaux sur cette question en leur demandant d'obéir

 14   strictement aux stipulations, aux ordres du gouvernement de la République

 15   de Croatie en ce qui concerne l'approbation ou la non approbation du statut

 16   des réfugiés qui arriveraient donc après le 13 juillet. Donc, quand on voit

 17   cette phrase, on a l'impression qu'il n'y a pas de la part du gouvernement

 18   de la République de Croatie un refus total concernant le statut de ceux qui

 19   arrivent après le 13 juillet puisqu'il y a "approving or non-approving,"

 20   c'est-à-dire que les deux possibilités semblent exister.

 21   Alors, Monsieur le Témoin, est-ce bien la lecture qu'on doit faire de ce

 22   qui est, est censé émaner de votre propre officie ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je suis d'accord avec

 24   vous, c'est ainsi qu'il convient de comprendre le texte. A ce moment-là, il

 25   y a eu aussi des cartes mensongères, des cartes de réfugiés et également le

 26   même vaut pour les personnes déplacées. C'est la raison pour laquelle j'ai

 27   souligné à l'attention des offices régionaux de respecter strictement les

 28   dispositions, les instructions du gouvernement, à savoir de savoir

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  1   exactement à qui il convient de reconnaître le statut de réfugié et à qui

  2   on ne peut pas reconnaître ce statut. Qui sont ceux qui ont droit et qui

  3   n'ont pas le droit parce qu'il s'agissait d'aide financière qui n'était pas

  4   négligeable.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Et, Monsieur le Témoin, la fin de la phrase semble

  6   indiquer que vous aviez vu découvrir qu'il y avait des trafics où des "faux

  7   réfugiés," entre guillemets, et c'est pour ça que vous dites : "It's

  8   because," et cetera. C'est parce que justement vous signalez aux centres

  9   régionaux qu'il y a eu des irrégularités. Mais au fond, vous nous l'avez

 10   déjà dit en mais je vous demande la confirmation.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, il en est ainsi.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je voudrais, en fait, élaborer

 13   quelque peu sur ce point. Si l'on examine cette phrase, je crois qu'il est

 14   difficile de ne pas la comprendre de la façon selon laquelle on fait une

 15   distinction entre les réfugiés arrivant de quelque part, on ne dit pas

 16   d'où. Mais après le 13 juillet, il est tout à fait clair que le statut de

 17   certains réfugiés sera approuvé et d'autres et le statut d'autres réfugiés

 18   ne sera pas approuvé.

 19   Il n'est pas ici question de documents falsifiés. Il me serait bien

 20   difficile de comprendre ce paragraphe de cette façon-là. Il devrait y avoir

 21   un critère selon lequel certaines personnes, arrivant au pays, soient

 22   reconnues comme étant des réfugiés, et d'autres personnes arrivant au pays

 23   ne sont pas reconnues comme réfugiés.

 24   Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire, si vous vous en souvenez,

 25   quelle était la différence ? Quel est le critère selon lequel on attribuait

 26   le statut de réfugié à une personne ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une situation où en Herceg-Bosna, il y

 28   avait de nombreuses régions qui étaient tout à fait sûres, et les réfugiés

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  1   pouvaient y retourner. Mais il y a eu également des situations où certaines

  2   personnes avaient une carte de réfugié malgré le fait que leur retour était

  3   possible et partiellement déjà réalisé concrètement parce que je me

  4   souviens de ces cas. Il y avait des membres de la famille qui vivaient dans

  5   ces localités de Ljubuski, Capljina et puis le reste de la famille

  6   habitaient sur la côte.

  7   Et puis le gouvernement était assez strict parce qu'il s'agissait de

  8   finances, de ressources, donc, ceux qui avaient effectivement la

  9   possibilité de rentrer chez eux, donc, là, il est question d'Herceg-Bosna,

 10   donc, il s'agit de Croates, ceux qui pouvaient abandonner le statut de

 11   réfugié, qui pouvaient rentrer dans leurs foyers et ne plus être à la

 12   charge inutilement donc du budget de la République de Croatie. Je ne sais

 13   pas si j'ai été clair.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin --

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, tout à fait c'est également

 16   plausible. Merci.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'insiste sur cette question

 18   parce qu'elle a -- elle peut avoir des conséquences très importantes. Il

 19   semblerait que le 13 juillet 1992, il s'est passé un événement qui est

 20   peut-être, je dis peut-être au conditionnel, la découverte par le

 21   gouvernement croate qu'il y a des réfugiés munis de documents faux ou qui

 22   disent qu'ils sont réfugiés alors qu'ils ne le sont pas réfugiés.

 23   A partir de ce constat, le gouvernement croate prend des mesures nouvelles

 24   que vous mettez vous en œuvre. Ces mesures nouvelles ne touchent pas aux

 25   réfugiés arrivés avant le 13 juillet 1992, concernent ceux qui vont, qui

 26   sont arrivés après le 13 juillet 1992. Et, vous, vous adressez vos

 27   instructions le 29 octobre. Le premier paragraphe pose le problème, il y

 28   aurait des irrégularités mais personne n'a abordé le problème mais, moi, je

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  1   m'en rends compte au deuxième paragraphe. Vous demandez à vos centres

  2   régionaux d'envoyer à votre office donc des listes avec des renseignements

  3   très précis sur les familles, et cetera, parce que tout ça a des

  4   conséquences financières.

  5   Est-ce que le deuxième paragraphe ne vise pas justement à éliminer les

  6   irrégularités, les faux réfugiés par des demandes très précises sur la

  7   situation de ces réfugiés avec, je vois, par exemple, qu'on leur demande

  8   leur nom, le nom de famille, et cetera, et cetera, leur adresse; est-ce que

  9   le deuxième paragraphe ne vise pas en réalité à compléter les irrégularités

 10   relevées au premier

 11   paragraphe ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ça aussi, c'est un des

 13   aspects de ce que vous venez de mentionner. C'est une des manières pour

 14   nous d'essayer de vérifier, de contrôler les réfugiés pour savoir si c'est

 15   justifié qu'ils bénéficient du statut de réfugié ou si ce n'est pas

 16   justifié, parce qu'il y a eu des cas comme ça. Tout simplement, il y a eu

 17   des cas -- encore une fois, il y a eu des cas où de faits il y avait des

 18   gens qui en partie vivaient sur les territoires libres, mais ils n'avaient

 19   pas rendu leurs cartes de réfugiés. Ils s'en servaient pour pouvoir passer

 20   une partie de leur temps sur la côte. Et c'était ça par exemple le cas qui

 21   nous intéresse ici.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott.

 23   Oui, Maître Alaburic.

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, si vous

 25   m'y autorisez, une phrase en tant que juriste qui arrive du pays où ce

 26   document a été rédigé. Je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur

 27   quelque chose. Dans ce document, on lance un appel aux offices régionaux

 28   pour qu'ils respectent la législation qui existe pour qu'il n'y ait pas de

Page 28419

  1   nouveau des irrégularités, pour qu'elles ne se répètent pas, donc, on ne

  2   prend pas une nouvelle décision -- un nouveau texte. Tout simplement, on

  3   insiste sur le fait qu'il convient de respecter vigoureusement les lois qui

  4   existent déjà.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ça.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, Monsieur Scott.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Q.  Monsieur, je souhaiterais maintenant que l'on prenne la pièce P 10407,

  9   donc P 10407, pièce qui se trouve dans le classeur de l'Accusation. Je

 10   répète la cote, alors, c'est la pièce P 10407.

 11   Je voudrais vous demander si vous l'avez trouvée, et est-ce bien le

 12   document qui vient de votre agence et qui porte la date du

 13   9 avril 1993 ? Donc, de nouveau, après le mois de novembre, enfin quelques

 14   mois plus tard, concernant les entrées et les résidences temporaires pour

 15   les personnes ci-après mentionnées, et vers la fin de la lettre, en haut de

 16   la page, en fait, en anglais, on peut lire : "Conformément à une décision

 17   du gouvernement de la République de Croatie du 13 juillet 1992, les

 18   personnes ci haut mentionnées ne pourront pas faire une demande ou recevoir

 19   le statut de réfugié dans la République de Croatie."

 20   De nouveau, Monsieur, j'aimerais savoir pourquoi neuf ou dix mois après le

 21   mois de juillet 1992 vous vous -- vous faites encore référence à cette

 22   décision du mois de juillet 1992 pour expliquer pourquoi les personnes en

 23   question n'obtiendront pas de statut de réfugié. Dites-nous, s'il vous

 24   plaît, pourquoi, si c'était une décision qui ne voulait absolument rien

 25   dire, une lettre morte, si le jour venait quand même et qu'une décision

 26   [imperceptible] qui était complètement ignorée, vous semblez vous dire

 27   qu'il y avait une événement au mois de juillet -- en fait, que la date du

 28   mois de juillet ne veut rien dire de particulier, mais cette date revient

Page 28420

  1   de nouveau dans cette lettre que quelqu'un a écrit, vous-même ou peut-être

  2   en votre nom ?

  3   Le 9 avril 1993, vous citez ceci comme base de la décision. Vous

  4   dites : "Conformément à la décision du 13 juillet 1992, les personnes ci

  5   haut mentionnées ne peuvent pas demander et ne peuvent pas recevoir de

  6   statut de réfugié."

  7   Dites-nous, s'il vous plaît : pourquoi, au mois d'avril 1993, vous faites

  8   encore référence à la décision du 13 juillet 1992, décision sur la base de

  9   laquelle on peut rejeter le statut de réfugié d'une personne ?

 10   R.  Monsieur Scott, c'est parce que, dans cette loi, si je me souviens

 11   bien, il était dit que les personnes qui demandaient le transit, c'est-à-

 12   dire le droit de traverser la République de Croatie en se rendant dans un

 13   pays tiers, que ces personnes-là n'avaient pas le droit au statut de

 14   réfugié, mais uniquement le droit de recevoir ce qu'ils ont demandé.

 15   Ici, il s'agit d'Anja Puce et Ramiz Puce de Bosnie-Herzégovine qui se

 16   rendent dans un pays tiers. Ils demandent l'autorisation pour un séjour

 17   temporaire et l'entrée sur le territoire de la République de Croatie, mais

 18   ils vont au-delà, ils doivent traverser la République de Croatie, mais

 19   n'ont pas besoin de statut de réfugié. Quelle que soit leur raison, ils se

 20   rendent en Allemagne, Autriche, Slovénie, et l'office leur délivre cette

 21   autorisation pour qu'elle puisse transiter et que, pendant cette durée du

 22   transit par la République de Croatie, les frais seront pris en charge par

 23   Zlatko Fadljevic, la personne qui demande --

 24   Q.  Monsieur, nous avons le document sous les yeux, nous pouvons prendre

 25   connaissance du document en le lisant.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaiterais vous

 27   rappeler qu'il s'agit de Mostar et la date, avril 1993. Absolument rien ne

 28   se passait à Mostar pour que ces derniers deviennent réfugiés à moins que

Page 28421

  1   M. Scott n'ait absolument une connaissance de ce fait.

  2   M. SCOTT : [interprétation] Non, c'est complètement -- sujet.

  3   Q.  Bon alors, Monsieur Rebic, vous dites ils ne l'ont pas demandé et ils

  4   ont obtenu le permis qu'ils ont demandé. Mais la lettre dit : "Les

  5   personnes ci haut mentionnées ne peuvent pas demander et ne peuvent pas

  6   recevoir," donc, ils ne peuvent -- pouvaient pas faire une demande et, même

  7   s'ils avaient fait une demande de statut de réfugié, ils n'ont pas eu la

  8   possibilité de le recevoir.

  9   R.  C'est vrai puisqu'on cite ici la loi du 13 juillet 1992, c'est sur la

 10   base de cette loi. Et ces personnes ne souhaitent pas, d'ailleurs, demander

 11   le statut de réfugié. Tout simplement, elles poursuivent leur chemin et se

 12   rendent auprès de leurs parents, peut-être. Et cette close est citée ici

 13   pour qu'on respecte cette loi, pour qu'il n'arrive pas, par hasard, que

 14   quelqu'un enfreint aux lois. Donc, il s'agit de personnes qui sont de

 15   Mostar et qui, par l'entremise de Zlatko Fadljevic, se rendent en Allemagne

 16   ou dans un autre pays. Et ces personnes ont demandé l'autorisation de

 17   transiter par la République de Croatie, mais elles ne vont pas demander le

 18   statut de réfugié. Si ces personnes-là avaient déclaré qu'elles

 19   souhaitaient obtenir le statut de réfugié par l'entremise de Fadljevic,

 20   elles l'auraient reçu. Mais comme --

 21   Q.  Excusez-moi, Monsieur Rebic, ce n'est pas ce que dit la lettre, ce

 22   n'est pas du tout ce que dit la lettre, je suis désolé. Ici, on dit que ces

 23   personnes n'avaient pas le droit d'en faire une demande plutôt.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : -- problème.

 25   Maître Alaburic.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, véritablement, je ne

 27   sais pas si j'ai la légitimité dans cette phase de contre-interrogatoire de

 28   prendre la parole. Mais puisque, d'après sa nature juridique, ce document

Page 28422

  1   est tout à fait identique au document sur la base duquel j'ai contre-

  2   interrogé, à savoir le document P 10048.

  3   Et deuxièmement puisque nous savons que Dr Rebic n'est pas juriste,

  4   est-ce que je peux tout simplement l'attirer -- attirer l'attention sur le

  5   fait que dans la partie -- l'introduction de ce document, l'on voit qu'il

  6   s'agit d'individus qui se sont vu octroyé le statut d'étranger en

  7   République de Croatie. Il s'agit de séjour temporaire, c'est ça la

  8   catégorie, c'est l'un des cinq bases permettant aux étrangers de séjourner

  9   en République de Croatie. Et donc, comme l'un de ces principes juridiques

 10   exclu les autres vus en séjour temporaire, ces personnes ne peuvent pas

 11   devenir des réfugiés, ne -- n'ont pas le droit à ce statut. Je pense que la

 12   Chambre, aussi, pourra suivre plus facilement ces documents qui sont

 13   identiques.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie de votre aide.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, il s'agit d'un couple né en 36

 16   et 37 à Mostar. Mais imaginons que ça soit des Mexicains qui passeraient

 17   par la Croatie pour aller je ne sais où, au Danemark. Pourquoi des

 18   Mexicains ? Parce qu'ils viendraient peut-être de Belgrade, je ne sais où.

 19   Mais ces gens-là, pour rester temporairement chez vous, il faudrait qu'ils

 20   aient quelqu'un qui, sur le point financier, les prenne en charge et, pour

 21   passer la frontière, il faut que vous donnez un accord au transit tel que

 22   semble dire l'objet du document. Est-ce que ce type de documents s'applique

 23   à toute nationalité ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, puisque c'est le ministère des

 25   Affaires intérieures qui avait la compétence s'il s'agissait d'un Mexicain.

 26   J'ai mentionné le Pakistan précédemment. Ici, lorsqu'il s'agit de Mostar,

 27   c'est la Bosnie-Herzégovine. Ces gens-là s'adressaient à l'office des

 28   Réfugiés et des Personnes déplacées parce que souvent, lorsqu'ils

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  1   s'adressaient au ministère des Affaires intérieures, on leur répondait là-

  2   bas : "Veuillez-vous adresser à l'office, c'est lui qui va vous régler

  3   cela." Ce serait peut-être plus clair si je disais que l'office des

  4   réfugiés et des personnes déplacées, pour ce qui -- pour ce qui est de ce

  5   transit par [imperceptible], ils réservaient cela plus rapidement et plus

  6   facilement, uniquement que le ministère de l'Intérieur. Tout simplement

  7   parce que ces gens-là étaient originaires de Bosnie-Herzégovine.

  8   Ça nous mènerait trop loin si je vous citais toutes sortes d'exemples

  9   pour vous dire comment de Belgrade on s'est adressé à moi personnellement

 10   d'avoir le droit de transiter par la République de Croatie. Ils

 11   s'adressaient à l'office parce qu'ils pensaient et croyaient que c'était

 12   plus rapidement et plus facilement qu'ils allaient obtenir cette

 13   autorisation que s'ils s'adressaient au ministère de l'Intérieur. C'était

 14   ça la situation. C'était la guerre et puis dans toutes les guerres il y a

 15   des spécificités.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme je vois que, dans ce document, il y a des

 17   références, je présume qu'il y avait un dossier concernant la famille Puce

 18   puisqu'il y a des références 50407-0101893-2. Il devait y avoir un dossier.

 19   Nous on a qu'un élément du dossier. On a qu'un élément du dossier mais il y

 20   a peut-être un document que vous aviez qui était peut-être la garantie d'un

 21   pays tiers ou une lettre comme quoi ces gens-là demandaient à passer par

 22   chez vous parce qu'ils allaient ailleurs. Est-ce que [imperceptible] ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait. Tout à fait. Monsieur le

 24   Président, c'est possible. C'est absolument possible. Tout à fait, si ce

 25   n'est pas le seul cas. Il y a eu beaucoup de cas comparables et dans chacun

 26   de ces cas notre office a des archives et a toute la documentation qui

 27   était nécessaire.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : On a vu hier la photo là de l'office avec tous les

Page 28424

  1   classeurs. Je présume que dans ces classeurs si on allait regarder à partir

  2   du numéro qui est là on trouverait les documents que j'indique.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne vais pas faire ce travail qui aurait pu être

  5   fait par le Procureur et la Défense.

  6   Bien. Monsieur Scott.

  7   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Monsieur le Président, je me demande si je peux -- je cherche un document

  9   pour terminer. On a trois ou quatre minutes.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y jusqu'à 7 heures 05 et demain, on rattrapera

 11   et on s'arrêtera à 25.

 12   Alors, allez-y, pour terminer le sujet, là.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 14   Alors, pour rester sur ce même sujet, j'aimerais demander au témoin de

 15   prendre le classeur de l'Accusation et de prendre la pièce P 00757. C'est

 16   bien la pièce 757. C'est un rapport du rapporteur spécial, M. Mazowiecki,

 17   en date du 17 novembre 1992, rapport envoyé aux Nations Unies, et je

 18   souhaiterais appeler votre attention et l'attention des Juges de la Chambre

 19   sur le paragraphe 74. En anglais c'est à la page 24. Désolé, en B/C/S, je

 20   ne peux pas vous aider avec le numéro de page. Mais si vous lisez

 21   l'anglais, vous trouverez le texte sur la page que j'ai mentionnée; sinon,

 22   c'est le paragraphe 74.

 23   Le rapporteur spécial parle des réfugiés à Gorazde et c'est un sujet qui a

 24   déjà été abordé ici devant les Juges de la Chambre. C'est un autre centre

 25   de réfugiés en Croatie. Et au paragraphe 74 on peut lire : "Un très grand

 26   nombre de réfugiés se sont plaints qu'ils n'ont pas de statut de réfugié

 27   officiel. A cet égard, le HCR des Nations Unies a confirmé que les réfugiés

 28   se trouvant au centre tombent dans la catégorie des "personnes non

Page 28425

  1   inscrites" à la suite d'une décision prise par la Croatie du 13 juillet

  2   1992 selon laquelle les réfugiés de Bosnie-Herzégovine ne seraient pas

  3   enregistrés ou inscrits. Ceci a des implications du point de vue de

  4   l'assistance mais cette question également suscitait des préoccupations

  5   relatives à la protection."

  6   Q.  Le 13 juillet 1992 il y a une signification à -- ceci a une

  7   signification importante, en fait c'est le gouvernement croate qui avait

  8   décidé de ne pas donner de statut de réfugié à ces personnes. Ces personnes

  9   arrivaient peut-être au pays peut-être je ne sais pas. Mais toujours est-il

 10   qu'on ne leur accordait pas de statut de réfugié, n'est-ce pas ?

 11   R.  Monsieur Scott, c'est un fait que les réfugiés au centre de réfugiés

 12   auquel se réfère le rapport de M. Mazowiecki, et je connais ce centre. Il

 13   est exact de dire qu'il était plein de réfugiés. Il y en avait trop dedans.

 14   Il n'y avait pas d'infrastructure nécessaire pour l'hygiène comme cela

 15   devrait exister, comme d'autres centres en avaient. C'était une ex-caserne

 16   -- une ancienne caserne militaire; cependant, à ce moment-là, malgré les

 17   difficultés financières, matérielles, des impossibilités physiques, on leur

 18   a donné ce qu'on a pu. Ils sont placés dans un centre pour réfugiés.

 19   Je ne me souviens pas aujourd'hui exactement si cette personne

 20   effectivement n'était pas enregistrée ou peut-être qu'elle l'était. Peut-

 21   être ces [imperceptible] n'étaient pas enregistrées parce qu'elles n'y

 22   avaient pas le droit en application de la loi du 13 juillet 1992 mais j'ai

 23   du mal à y croire aujourd'hui, ou c'est le HCR qui souhaitait s'occuper

 24   directement de ces personnes. C'est le cas qui s'est produit parfois. Il

 25   les transportait. Il les aidait à se rendre dans des pays tiers.

 26   Si je puis parler de M. Mazowiecki que je connais personnellement, deux ou

 27   trois j'ai eu l'occasion de le rencontrer avant la guerre à Varsovie dans

 28   des fonctions tout à fait différentes et puis pendant la guerre. M.

Page 28426

  1   Mazowiecki est venu me voir à l'office des Réfugiés et des Personnes

  2   déplacées, je me souviens bien que nous avons évoqué la question des

  3   réfugiés mais il ne m'a pas cité ce problème. De même puisque M. Mazowiecki

  4   me connaissait d'avant, il m'a invité à le rejoindre à l'hôtel et à titre

  5   individuel, il a eu une conversation avec moi en tant que prêtre chrétien.

  6   Il m'a demandé ce qui en était des violations des droits de l'homme. Il m'a

  7   demandé ce que j'en savais en Croatie ou dans la République voisine de

  8   Bosnie-Herzégovine. Et, à ce moment-là. M. Mazowiecki --

  9   Je reviens à la chose suivante.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi. Moi, j'insiste pour que le

 11   témoin réponde. Voici un rapport qui a été établi par une personne que le

 12   témoin connaissait avant la guerre. On lui présente ce rapport. Pourquoi ?

 13   A cause de -- comme ils avaient ses relations, cette relation qui existait,

 14   il est sûr que M. Mazowiecki a dû en parler de toutes ces questions. La

 15   réunion -- leur rencontre a eu lieu à Zagreb. C'est pour ça que je n'ai pas

 16   fait d'objection.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] On a déjà entendu parler.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne me rappelle pas, M. le Juge Trechsel,

 19   que vous ayez empêché un témoin à charge de répondre totalement à une

 20   question. Nous avons enfin le témoin est en droit de donner une explication

 21   sur ce qu'il sait de la personne qui a établi ce rapport. Je ne comprends

 22   pas les réactions qui se manifestent ici.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est vous qui réagissez, Maître

 24   Karnavas. Je n'ai pas arrêté le témoin, mais vous semblez décider de vous

 25   en prendre systématiquement au Juge Trechsel. Ça c'est clair du moins.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Non. Pas du tout. Je m'excuse si vous avez

 27   cette impression --

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous connaissez

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  1   M. Mazowiecki. Vous avez eu une conversation sur les attentes au droit de

  2   l'homme. Donc, c'est intéressant. Alors que lui avez-vous dit -- mais

  3   synthétiser très vite parce qu'on va dépasser les 7 heures, qu'est-ce que

  4   vous lui avez dit ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Brièvement, je l'ai mis en garde au sujet de

  6   l'agression qui avait émanée par l'armée populaire yougoslave et la Serbie

  7   sur les territoires de la République de Croatie et de Bosnie-Herzégovine.

  8   Je l'ai averti et je lui ai fait part de nombreuses violations des droits

  9   de l'homme, du fait de chasser les gens de leurs foyers, du fait de tuer

 10   des pères, des frères sous les yeux de ces réfugiés et des cas comparables.

 11   S'agissant de la République de Croatie, il ne m'a pas posé de questions

 12   express quant à savoir si, en République de Croatie, il y avait des

 13   violations de certains droits de l'homme. Du moins, je ne m'en souviens

 14   pas. La conversation a porté davantage sur les questions relatives à

 15   l'armée populaire yougoslave et l'agression menée contre la Croatie et la

 16   Bosnie-Herzégovine.

 17   Ça ne m'étonne pas ce rapport qu'il a rédigé parce que, lui aussi, il a

 18   fallu qu'il rédige un rapport sur la situation de fait à Varazdin, dans

 19   cette ancienne caserne. Moi aussi, j'avais du mal à voir comment étaient

 20   placés ces gens-là, ils étaient mal hébergés, mais il y avait pas d'autre

 21   possibilité. C'est la raison pour laquelle il y a eu cette décision du

 22   gouvernement de respecter de manière plus rigoureuse le statut de réfugié

 23   pour que la République de Croatie ne se trouve pas dans une situation où

 24   elle se verrait obligée à offrir des hébergements misérables à des

 25   réfugiés. Nous voulions éviter cela.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors nous allons donc terminer l'audience

 27   aujourd'hui. Nous reprendrons donc demain à 14 heures 15. Normalement, s'il

 28   y a pas d'incident de procédure, nous devrions terminer donc demain. Si,

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  1   par malheur, nous ne pourrions terminer, et bien, il faudra, Monsieur le

  2   Témoin, revenir un autre jour. Mais pour le moment, gardons espoir que vous

  3   pourrez terminer demain.

  4   Voilà, donc, je vous souhaite à tous une bonne soirée et nous nous

  5   retrouverons demain.

  6   --- L'audience est levée à 19 heures 08 et reprendra le jeudi 22 mai 2008,

  7   à 14 heures 15.

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