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1 Le mardi 26 août 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président et
9 Messieurs les Juges. Bonjour à toutes les personnes dans le prétoire et
10 autour du prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre
11 Prlic et consorts. Merci beaucoup.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce mardi, salut à
13 MM. les accusés, Mmes et MM. les avocats, MM. du bureau du Procureur et
14 Mmes et MM. qui nous assistent dans nos travaux. Nous allons donc continuer
15 l'interrogatoire principal du témoin. Avant cela, tout d'abord, j'annonce
16 que nous pourrons donc siéger jeudi matin, ce qui permettra au témoin donc
17 de partir dans l'après-midi. Donc, Monsieur le Greffier, l'audience se
18 tiendra donc jeudi matin et non pas jeudi après-midi.
19 Deuxième élément, hier, il y a eu des observations de
20 Me Kovacic sur la pièce 1D 01410 sur une question de traduction, donc, le
21 mieux serait que le service de Traduction du Tribunal nous donne une
22 traduction de ce document, une nouvelle traduction en anglais. Donc,
23 Monsieur le Greffier, il conviendra donc de demander au CLSS de nous faire
24 une nouvelle traduction.
25 Comme je l'ai indiqué hier, il me semble qu'il reste à
26 Me Karnavas une heure 15, donc, Maître Karnavas, je vous donne la parole
27 puisque vous êtes prêt, le pupitre étant disposé devant vous.
28 M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
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1 Messieurs les Juges. Il est possible -- je dis bien qu'il est possible que
2 j'aie sous-estimé le temps dont j'ai besoin. Il se peut que j'aie besoin
3 d'un certain laps de temps supplémentaire. Peut-être ne sera-ce pas le cas.
4 En tout cas, nous allons nous efforcer d'avancer le plus rapidement
5 possible.
6 LE TÉMOIN : MARTIN RAGUZ [Reprise]
7 [Le témoin répond par l'interprète]
8 Interrogatoire principal par M. Karnavas : [Suite]
9 Q. [interprétation] Monsieur Raguz, j'appelle maintenant votre attention
10 sur la pièce P 05051. Nous avons déjà vu ce document dans ce prétoire
11 antérieurement, mais il y a un point sur lequel j'aimerais appeler votre
12 attention. Penchons-nous, si vous le voulez bien, sur le chapitre III, par
13 exemple, et nous voyons que sur la base de la déclaration conjointe du 14
14 septembre 1993, M. Franjo Tudjman a nommé --
15 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Selon le compte rendu
16 d'audience, vous avez dit pièce P 0501. Mais ne serait-ce pas plutôt la
17 pièce P 05051 car c'est le numéro qui figure sur la liste.
18 M. KARNAVAS : [interprétation] 5051.
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce qui a été était le 051. Donc
20 merci de cette précision.
21 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
22 Q. Donc, chapitre III de ce document. Nous voyons que, dans ce passage, M.
23 Franjo Tudjman nomme M. Mate Granic, vice-premier ministre et ministre des
24 Affaires étrangères de Croatie, et que le président Izetbegovic nomme M.
25 Haris Silajdzic au poste de ministre des Affaires étrangères. Je suppose
26 que vous pensiez, d'une façon ou d'une autre, que ces deux hommes
27 participaient à des activités liées à la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?
28 R. Exact.
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1 Q. D'accord. Passons maintenant au document suivant, 1D 01590. 1D 01590.
2 Il s'agit d'un protocole relatif à une réunion du groupe de travail chargée
3 de régler la situation humanitaire et d'autres problèmes. La réunion qui
4 fait l'objet de ce document s'est tenue à Split le 25 septembre, et nous
5 voyons que M. Zubak et M. Tadic étaient assis d'un côté de la table avec M.
6 Krajsek, Musan Agovic et avec MM. Azra Krajsek, Musan Agovic et Tarik
7 Jasarevic de l'autre côté de la table. Alors si nous nous penchons plus
8 précisément sur les points 2, 3 et 4 où il est question des groupes de
9 travail, en page 2, nous voyons qu'il est question de préparer le retour
10 volontaire des personnes déplacées ou relogées. Il est question de
11 nécessaire progrès dans les négociations liées au retour des réfugiés. Je
12 vous demande si vous étiez au courant de l'existence de ce protocole à
13 l'époque ?
14 R. Oui.
15 Q. D'accord. Merci. M. Zubak, comme vous l'avez indiqué, n'est-ce pas,
16 était président du QG, si je vous ai bien compris, ainsi que vice-président
17 du HVO de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, n'est-ce pas ?
18 R. Exact.
19 Q. Passons maintenant au document suivant, 1D 00928, qui date du 13
20 octobre 1993.
21 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, Maître Karnavas, mais
22 j'avais une question de précision à poser. Dans le texte du protocole que
23 nous venons d'examiner, dans la deuxième partie du texte, deuxième partie
24 de la page 1, nous trouvons le paragraphe suivant, je cite : "Conditions
25 définissant le territoire de la République de Bosnie-Herzégovine, ainsi que
26 les territoires sous le contrôle du HVO et les territoires sous le contrôle
27 de l'ABiH." Ma question est la suivante : je comprends ces définitions. Par
28 ailleurs, je me demandais s'il n'y avait personne qui serait arrivé en
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1 provenance des territoires de la Republika Srpska. Je me demandais si ces
2 personnes et ces territoires n'auraient pas dû être pris en compte dans le
3 cadre du travail mené à bien par les instances et les organisations dont
4 nous parlons, d'où ma question eu égard aux territoires relevant de la
5 responsabilité de la Republika Srpska et de l'armée de la Republika Srpska.
6 Pourquoi ces territoires et ces habitants ne sont-ils pas pris en compte
7 dans le texte du protocole ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce qu'ils n'étaient pas concernés par cet
9 accord. C'était le moment où la guerre était la plus féroce, et ils n'ont
10 donc pas participé à la signature de cet accord.
11 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Bien sûr, je comprends votre
12 explication qui consiste à indiquer que ces territoires n'étaient ni sous
13 le contrôle de l'ABiH ni sous le contrôle du HVO, mais ma question
14 concernait le fait qu'il était possible qu'il y ait eu des réfugiés ou des
15 personnes déplacées originaires de ce territoire. Mais enfin, quoi qu'il en
16 soit, je vous remercie de votre réponse.
17 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien.
18 Q. Passons au document suivant, le document 1D 00928. Nous voyons qu'il
19 s'agit d'un rapport adressé à M. Jadranko Prlic du bureau des personnes
20 déplacées et des réfugiés, datant du 13 octobre 1993. Et si nous nous
21 penchons sur le deuxième paragraphe, nous trouvons des chiffres, à savoir
22 il y est fait mention de 4 159 personnes déplacées au total.
23 Troisième paragraphe, nous trouvons le libellé suivant, je cite : "A savoir
24 qu'en raison de l'agression des Musulmans, un grand nombre de Croates ont
25 été déplacés avant tout à partir de Travnik, Novi Travnik, Konjic et
26 Bugojno, et que le résultat de cela a été que les municipalités situées
27 dans ces territoires organisent l'accueil d'un grand nombre de personnes
28 déplacées." Puis nous trouvons d'autres statistiques à ce niveau du texte.
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1 Et si nous passons à la page 2, deuxième paragraphe, nous lisons, je cite :
2 "Un convoi à destination de Vares est en cours d'organisation pour évacuer
3 4 000 personnes déplacées originaires de Kakanj et de Zenica," et cetera.
4 Donc, ma question, Monsieur Raguz, est la suivante : aviez-vous
5 connaissance de l'existence de ce rapport et, si oui, pourriez-vous, je
6 vous prie, nous dire en quoi ces chiffres, comment ces statistiques ont été
7 établies ? Très brièvement, je vous prie.
8 R. Oui, je connais ce texte, mais s'agissant du deuxième passage que vous
9 avez cité avec le chiffre de 4 000 personnes déplacées, il s'agit de
10 personnes déplacées installées dans des logements collectifs, uniquement et
11 exclusivement. Car à cette époque-là, il y avait déjà plus de 6 000
12 réfugiés dans les territoires placés sous le contrôle du HVO. Donc, ces
13 chiffres ont été établis sur la base des rapports indiquant les besoins
14 exprimés par les habitants originaires de Vares, de Kakanj et de leurs
15 représentants. Cette situation, nous la connaissions déjà bien à ce moment-
16 là, car j'ai déjà parlé de l'exode de 5 000 Croates originaires de Vares
17 qui étaient en train de se déplacer, et ce, depuis trois ou quatre mois,
18 c'est-à-dire pas mal de temps déjà.
19 Q. Et je crois comprendre qu'il était de notoriété publique pour vous,
20 ainsi que pour les représentants du HCR et d'autres de la communauté
21 internationale, que cette situation prévalait à l'époque.
22 M. STRINGER : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, question
23 directrice. Le conseil demande au témoin des présomptions au sujet de ce
24 que telle ou telle personne pouvait savoir.
25 M. KARNAVAS : [interprétation] Ce n'est pas une question directrice. Elle
26 appelle peut-être à des présomptions si nous nous exprimons uniquement d'un
27 point de vue technique.
28 M. STRINGER : [interprétation] Bien, les présomptions ou conjectures sont
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1 également sujettes à objection, Monsieur le Président, pour les deux
2 raisons.
3 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien, je vais reformuler.
4 Q. Savez-vous si la communauté internationale était au courant du fait que
5 toutes ces personnes étaient en train de se déplacer et, si oui, comment ?
6 R. A partir des rapports reçus de leurs bureaux, bureaux que ces
7 organisations avaient dans le secteur concerné, on constatait que ces
8 organisations étaient au courant.
9 Q. Très bien. Alors passons maintenant au document suivant, le document
10 1D 02373, qui pour l'essentiel est un document identique au précédent,
11 n'est-ce pas, mais adressé à M. Zubak ?
12 R. Exact.
13 Q. Très bien. Passons au document suivant, 1D 02183. Nous voyons que ce
14 document ne comporte aucune date et que votre nom figure au bas du
15 document. Ce document est adressé à M. Jadranko Prlic, et peut-être
16 pourriez-vous nous aider au sujet de ce document. Vous commencez par dire,
17 je cite : "Je souhaite vous informer que depuis la réunion conjointe tenue
18 à Medjugorje le 17 octobre, réunion à l'issue de laquelle une initiative
19 concernant les responsable du HCR, de la FORPRONU, du CICR et de la
20 Communauté européenne ont décidé de mettre en place une Commission chargée
21 de régler les Affaires pendantes." Et puis vous dites que : "Six réunions
22 de cette commission ont déjà eu lieu à intervalle régulier, tous les mardis
23 à 11 heures," et puis vous parlez de l'entreprise commune destinée à mettre
24 en place une méthode de fonctionnement.
25 Pourriez-vous brièvement commenter ce texte ? De quoi traite-il ?
26 R. J'étais coordinateur de la Commission conjointe et j'informais M.
27 Jadranko Prlic de la méthode de travail que cette Commission conjointe
28 avait décidé de mettre en place, qui consistait, entre autres, à sa propre
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1 initiative et en application du protocole de Makarska et en présence des
2 représentants des plus grandes organisations humanitaires internationales,
3 à savoir le HCR, le comité international de la Croix-Rouge, la FORPRONU et
4 la Communauté européenne de s'occuper de la situation.
5 Il importait à l'époque, par les moyens les plus importants qu'il
6 était possible de mettre en œuvre, d'apporter une aide au flux de réfugiés,
7 une aide humanitaire. Et vous voyez que plus de 120 convois ont traversé la
8 région placée sous le contrôle du HVO sans encombre. Donc c'était là l'un
9 des instruments les plus efficaces qui sont décrits dans des témoignages
10 écrits et oraux par un représentant de toutes ces organisations
11 internationales pour régler la situation. J'aimerais maintenant, Monsieur
12 le Président, Messieurs les Juges, ajouter quelques mots, si vous me le
13 permettez car je considère que c'est important. Pourquoi est-ce que cela
14 s'est passé ainsi ? Parce que le secteur que le HVO avait défendu avec
15 succès était un secteur qui avait été traversé par un grand nombre de
16 personnes et qui avait permis de sauver leur vie. C'était également un
17 secteur qui avait été traversé par un grand nombre de convois d'aide
18 humanitaire. Nous ne devons pas perdre de vue qu'il s'agissait là d'une
19 structure de défense tout à fait légitime à un moment où le système
20 socialiste était en cours de démantèlement et où les institutions les plus
21 importantes se montraient incapables de défendre la totalité de la Bosnie-
22 Herzégovine.
23 Chaque convoi était donc organisé avec enregistrement en bonne et due
24 forme, et dans ces documents d'enregistrement on trouvait sa destination,
25 son lieu de départ, la quantité d'aide humanitaire transportée par le
26 convoi, et donc, des documents en bonne et due forme étaient tenus au sujet
27 de chacun des convois.
28 Q. Je vous remercie, Monsieur Raguz. Nous y reviendrons en temps utile.
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1 J'aimerais que nous passions au document suivant,
2 1D 02300, nous voyons que vous vous adressez à M. Jadranko Prlic. Et si
3 nous nous penchons sur la page 2, nous voyons qu'à la date de ce document
4 qui est le 25 novembre 1993, vous dites que vous joignez au document une
5 appréciation officielle du haut chef du bureau du HCR de Medjugorje, Jerry
6 Hume, au sujet du travail de la Commission conjointe.
7 Malheureusement, nous n'avons pas le texte de cette appréciation
8 officielle, donc, si vous vous souvenez de cette appréciation, pourriez-
9 vous, je vous prie, nous dire quelques mots, commentaires au sujet de cette
10 appréciation officielle ?
11 R. Ce document existe certainement dans la documentation officielle, et
12 j'en ai un bon souvenir. Il s'agit d'une appréciation faite par le
13 représentant officiel du HCR dans la région, qui apprécie de façon
14 positive, autrement dit favorable, les actions entreprises, et qui
15 expriment sa gratitude par rapport au responsable de la coordination, et sa
16 volonté de poursuivre cette coordination, et nous avons effectivement mis
17 en place une communication quotidienne sur toutes ces questions à l'époque.
18 Q. Très bien. J'aimerais maintenant que nous passions au document suivant,
19 le document 1D 02179.
20 Nous voyons dans ce document qu'il constitue un procès-verbal établi
21 le 4 novembre 1993, et à l'ordre du jour de la réunion faisant l'objet de
22 ce procès-verbal, nous constatons que tout en haut de l'ordre du jour, on
23 trouvait la question de la situation prévalant à cette époque-là à Vares.
24 Bien entendu, nous constatons au grand A de ce document qu'un problème
25 d'évacuation des personnes se pose, ainsi qu'un problème d'accueil et de
26 logement de 1 000 [comme interprété] réfugiés qui devront finalement être
27 repartis dans les diverses localités des municipalités sous le contrôle du
28 Conseil croate de Défense, à savoir du HVO. Et, bien sûr, nous n'allons pas
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1 lire en détail l'intégralité du document, mais on peut présumer sans risque
2 de se tromper que vous avez participé à ce débat et que vous étiez au
3 courant de la situation prévalant à Vares, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Très bien.
6 R. Exact.
7 Q. Alors je vous pose encore une fois cette question parce qu'il a été dit
8 à de nombreuses reprises par les représentants du bureau du Procureur et
9 dans une certaine mesure par d'autres représentants de la communauté
10 internationale, que le HVO de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, avec
11 d'autres, avaient participé à une entreprise criminelle conjointe en se
12 rendant coupable d'un nettoyage ethnique à l'envers dans les régions de
13 Bosnie centrale et sur le territoire de la Communauté croate d'Herceg-Bosna
14 afin d'homogénéiser la présence croate dans ces régions. Donc j'aimerais
15 pour être tout à fait équitable vous poser encore une fois cette question
16 très directe.
17 Est-ce que vous-même et d'autres, tel que M. Zubak, M. Prlic et d'autres,
18 avez participé à un nettoyage ethnique à l'envers ?
19 R. Je l'ai déjà dit hier et je le répète, cela n'a absolument pas été le
20 cas, et devant cette Honorable Chambre de première instance, je nie toute
21 interprétation de l'assistance apportée à toutes ces personnes qui iraient
22 dans un tel sens.
23 Je dois dire aujourd'hui - je viens d'évoquer le HCR - mais il importe de
24 parler également des observateurs de la Communauté européenne qui suivait
25 l'évolution de la situation sur le terrain et j'ai vu des rapports émanant
26 de ces divers instances internationales, et à l'époque nous recevions de
27 nombreux documents dans lesquels il nous était demandé pourquoi un millier
28 de personnes qui avaient été logées à Kiseljak n'avaient pas été déplacées
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1 vers l'Herzégovine. Lorsque j'ai répondu en disant que nous souhaitions que
2 ces personnes restent sur place le plus longtemps possible, ces instances
3 internationales ont interprété la chose sur des raisons politiques. Il a
4 été confirmé à un certain moment que les conditions de maintien de ces
5 personnes dans la région n'existaient plus. Alors, nous avons apporté de
6 l'aide humanitaire à toutes ces personnes, nous leur avons apporté de
7 l'aide, et en dépit de cela, nous voyons que certains parmi les
8 représentants internationaux ont interprété les choses à l'inverse de ce
9 qu'elles étaient ou à l'inverse quand on voyait des gens se rendre en
10 République de Croatie. Et cela a été le cas aussi bien de Croates que de
11 Musulmans de Bosnie et de Serbes de Bosnie. Nous étions parfois mis en
12 accusation, car ce fait était interprété comme une volonté de notre part de
13 croatiser l'Istrie, par exemple. Puis lorsque nous exprimions le désir de
14 ramener ces personnes à leur lieu d'origine, cette action était interprétée
15 comme une volonté de notre part d'homogénéiser l'Herzégovine.
16 En fait, ce que nous faisions c'était nous occuper de souffrance humaine et
17 de répondre à une nécessité, à un besoin d'aide de la part de toutes ces
18 personnes, c'est la seule chose que nous avons faite, et c'était tout à
19 fait acceptable.
20 Q. D'accord. Je vous remercie, Monsieur Raguz. Alors pour reprendre sur ce
21 que vous venez de dire afin de m'assurer que j'ai tout à fait bien compris,
22 vous avez cité un exemple impliquant l'Istrie, c'est une région où les
23 Croates originaires de Bosnie-Herzégovine, étant devenus des personnes
24 déplacées et des réfugiés, ont été installé à Pineta, n'est-ce pas ?
25 R. Oui, à Pineta.
26 Q. J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur le document 07055
27 rapidement. Je ne crois pas qu'il a été traduit, mais pourriez-vous nous
28 dire après vérification du contenu de ce document si vous avez bien été
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1 officiellement nommé au poste de chef du bureau, n'est-ce pas ?
2 R. Oui.
3 Q. Pourriez-vous nous donner la date pour ceux qui ne lisent pas le croate
4 ?
5 R. J'ai été nommé au poste de chef du bureau chargé des Réfugiés et des
6 Personnes déplacées de la République croate d'Herceg-Bosna, puisque c'est
7 cet organe qui existait à l'époque à Mostar en date du 1er décembre 1993.
8 Q. Et si nous voyons ce qui figure dans la partie droite de cette page,
9 nous trouvons mention du nom de Darinko Tadic. Pourriez-vous nous dire, je
10 vous prie, à quel poste il a été nommé ?
11 R. Selon ce décret de nomination, il a été nommé au poste de représentant
12 du bureau sur le territoire de la République de Croatie.
13 Q. D'accord. Document suivant, 1D 01432, nous voyons que ce document émane
14 de Darinko Tadic et, bien sûr, vous faites partie des personnes auxquelles
15 ce document est destiné, ainsi que M. Jadranko Prlic, l'objet de ce
16 document est une demande visant à enregistrer un représentant officiel du
17 bureau des Personnes expulsées et des Réfugiés de la République croate
18 d'Herceg-Bosna, et nous y voyons une référence en date du 1er décembre 1993,
19 au fait que le gouvernement a adopté une décision portant nomination de cet
20 individu en tant que représentant du bureau sur le territoire de la
21 République de Croatie.
22 Alors ma question est la suivante : pourquoi y avait-il nécessité
23 d'avoir un représentant de votre bureau en Croatie alors qu'en fait la
24 Bosnie-Herzégovine avait une ambassade à Zagreb, et que l'on peut penser
25 que cette ambassade était là pour servir tous les habitants de Bosnie-
26 Herzégovine, qu'ils soient Serbes, Croates, Musulmans ou autres.
27 R. La raison de cette nomination résidait dans le grand nombre de réfugiés
28 présents en République de Croatie, c'est un fait dont nous avons parlé hier
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1 et que nous avons étayé par l'examen d'un certain nombre de documents, donc
2 nous avons vu que le bureau des Réfugiés attaché à l'ambassade de Bosnie-
3 Herzégovine avait adopté très souvent dans cette période des documents qui
4 ne couvraient pas toute la population de réfugiés originaires de Bosnie-
5 Herzégovine, donc un grand nombre de personnes, des réfugiés Croates,
6 notamment à Pineta, avaient besoin d'un contact plus sûr pour obtenir de
7 l'aide en vue de se loger après avoir renoncé au logement leur appartenant.
8 Q. Très bien. Merci. Document 1D 02170. Document suivant, qui date du 6
9 janvier 1994, qui vient de Spomenka Cek, et qui, comme nous le voyons, est
10 adressé à M. Prlic. Nous trouvons mention de votre nom dans ce document, et
11 nous voyons qu'il y est également fait mention de M. Granic et de M.
12 Silajdzic -- il faut lire Granic et non Gravanec. Et au troisième
13 paragraphe, nous voyons qu'il y est fait mention d'une Commission conjointe
14 chargée de traiter des Questions humanitaires qui se réunira le 7 janvier
15 1994 à Zagreb en présence de MM. Lang, Cek, Raguz, Turkovic, Hurtic et
16 Maric. Savez-vous si cette réunion a effectivement eu lieu et, si oui, quel
17 était l'objet de cette réunion conjointe ?
18 R. Exact. Cette réunion a bel et bien eu lieu. Son objet était
19 l'élaboration de l'accord entre Tudjman et Izetbegovic dont nous avons vu
20 les textes aujourd'hui, donc son objet était également la conclusion d'un
21 accord entre M. Granic et M. Silajdzic à Vienne.
22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Nous n'entendons pas
23 d'interprétation anglaise en ce moment, il n'y a donc pas non plus de
24 compte rendu d'audience en anglais.
25 M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne m'en était pas aperçu, je poursuivais
26 mon chemin.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je dois répéter ?
28 M. KARNAVAS : [interprétation]
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1 Q. Oui, je vous en prie.
2 R. Donc, j'ai assisté à cette réunion, qui a bel et bien eu lieu, réunion
3 de cette Commission chargée des Questions humanitaires et qui se composait
4 comme indiqué dans le texte. Et ceci est en rapport avec la mise en œuvre
5 de l'accord conclu entre MM. Tudjman et Izetbegovic, dont nous avons vu le
6 texte aujourd'hui, ainsi que de l'accord conclu entre MM. Granic et
7 Silajdzic à Vienne deux jours plus tôt, accord qui portait création de la
8 Commission conjointe à laquelle j'ai assisté en tant que représentant de la
9 Commission chargée des Affaires humanitaires. Étaient également présents
10 des représentants de l'ambassade de Bosnie-Herzégovine sur le territoire de
11 la République de Bosnie-Herzégovine, à savoir M. Turkovic,
12 Mme Hurtic et M. Maric.
13 Q. Je vous remercie. Passons au document suivant, 1D 02182, qui porte la
14 date du 31 janvier 1994 et qui est adressé à M. Valentin Coric, désormais
15 ministre de l'Intérieur. C'est un document dont vous êtes l'auteur, et il y
16 est fait référence au financement d'un hôpital de campagne par Wagful et
17 Wakifin. Pourriez-vous nous dire de quoi il est question ici exactement ?
18 R. Il est question d'un hôpital qui avait été transporté dans 38, sinon,
19 40 containers. C'était la première expérience de ce genre. Et comme vous
20 pouvez le constater, la destination de cet hôpital de campagne était la
21 partie orientale de Mostar.
22 Je suis signataire de ce texte autorisant le déplacement de cet hôpital de
23 campagne sans encombre.
24 Q. Merci. J'aimerais maintenant examiner trois documents l'un après
25 l'autre, parce qu'ils forment un tout. Vous trouverez donc ces trois
26 documents sous les cotes 1D 02024, ensuite nous allons examiner les
27 documents 1D 02025, puis ensuite le document 1D 01855. Commençons par le
28 premier document, c'est un protocole du 17 mars 1994. Voyez-vous ce
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1 document, Monsieur ?
2 R. Oui.
3 Q. C'est donc le document 1D 02024. Si nous regardons maintenant le
4 troisième document que j'ai évoqué, c'est-à-dire le document -- pardon,
5 non. Le document suivant qui est en fait le document 1D 02025, c'est en
6 fait le troisième. C'est le même protocole, simplement si nous regardons la
7 dernière page, la toute dernière page, nous voyons qu'il y a quelques
8 signatures et quelques dates, il y a votre signature notamment, et la date
9 du 9 avril 1994; c'est bien exact ?
10 R. Mon nom n'y figure pas, mais c'est comme s'il y était. C'est exact.
11 Q. Très bien. Vous avez examiné ces deux documents, ces deux protocoles
12 sont identiques, n'est-ce pas, pour l'essentiel ? L'un est le projet, le
13 protocole, et l'autre c'est le document qui a été signé ?
14 R. Oui, ils sont tout à fait équivalents.
15 Q. Très bien. Alors examinons maintenant le document 1D 01855, qui se
16 situe entre les deux dates puisqu'il porte la date du 24 mars 1994. C'est
17 un document qui est adressé à la sécurité, secteur 4, général de Brigade
18 Marijan Biskic. On nous dit dans ce document : "Veuillez trouver ci-joint
19 le protocole relatif au passage des convois humanitaires pour votre
20 information suite à la conclusion de la Commission chargée de coordonner
21 les Liens ou les rapports avec la FORPRONU, la Communauté européenne et les
22 organisations internationales du 23 mars 1994, il est nécessaire d'obtenir
23 l'avis du ministère de la Défense et du chef de l'état-major principal du
24 HVO de façon à ce que l'on puisse parachever et mettre en œuvre le
25 protocole."
26 Alors, ma question est la suivante : pourquoi était-il nécessaire que le
27 ministère de la Défense et le chef d'état-major principal s'intéressent à
28 ce protocole et donnent leur avis sur celui-ci ?
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1 R. Ces procédures, telles qu'elles ont été mises en place, si on les
2 examine, on voit que chaque procédure était un peu plus précise que la
3 précédente, les circonstances l'exigeaient. Comme vous pouvez le voir, vous
4 l'avez d'ailleurs vous-même mentionné, il est ici indiqué, et cela continue
5 du fait que les affrontements étaient toujours en cours et que les
6 officiers avaient les obligations que leur incombent en vertu des
7 conventions de Genève, il est indiqué donc que l'aide humanitaire devait
8 pouvoir circuler sans entrave.
9 Q. Très bien. Plus tard, nous allons examiner un certain nombre de
10 documents qui portent sur le contrôle de chacun de ces convois
11 humanitaires, mais j'aimerais vous poser la question suivante : y a-t-il eu
12 un moment où on a commencé à rencontrer certains problèmes liés au contenu,
13 à la nature des biens qui étaient transportés par ces convois, des produits
14 ou biens transportés à des fins humanitaires alors qu'ils auraient pu être
15 utilisés à d'autres fins ?
16 R. Oui, cela est exact. Il s'agissait là d'une époque à laquelle nous
17 disposions de rapports qui faisaient état de convois dits humanitaires,
18 mais qui avaient fait l'objet d'une utilisation abusive. Il y avait là deux
19 possibilités : ou bien, il s'agissait de transporter des armes sous couvert
20 de convois humanitaires ou alors il s'agissait de transport de marchandises
21 à un moment où celles-ci étaient très demandées en Bosnie-Herzégovine.
22 Q. Passons au document suivant 1D 01954. Nous avançons dans le temps. Nous
23 en sommes au 12 avril 1994. C'est un protocole découlant d'une réunion qui
24 s'est tenue à Mostar. Vous y étiez présent. Voici ici un extrait, je
25 suppose, signé par Kreso et Tomic, et si l'on examine le tout dernier
26 paragraphe de la première page, on voit qu'il est question des
27 organisations internationales qui sont soumises à la procédure douanière
28 pour tout type de marchandises, et ces marchandises sont à l'entière
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1 disposition des organisations humanitaires.
2 Sans rentrer dans le détail de ce texte, je vous demanderais sur quoi
3 a porté cette réunion, et je vous demanderais de nous décrire la situation
4 qui prévalait à l'époque, de cette réunion, ou autour de cette date.
5 R. Il s'agissait d'une réunion de groupes d'experts, dirigée par M. Sead
6 Kreso, et cela sur la demande du gouvernement et sous le contrôle de
7 l'ABiH. Ça procédait donc du gouvernement de la République de Bosnie. On
8 voit également le nom de M. Neven Tomic, au nom de la Herceg-Bosna.
9 On voit donc qu'il y avait ici une réelle coopération en matière de
10 mise en œuvre des accords qui ont été signés et que des mesures concrètes
11 ont été mises en œuvre afin d'apporter une réponse aux problèmes
12 humanitaires et autres. Les différents corps du HVO et de la HZ HB était
13 toujours disposés à parvenir à ce type d'accords.
14 Q. Très bien. Dans le premier paragraphe numéroté 1, on lit que :
15 "…conformément à la constitution fédérale adoptée." Est-ce que c'est avant
16 ou après les accords de Washington, qui ont marqué la naissance de la
17 fédération ?
18 R. Je pense que c'est après les accords de Washington. Je ne vois pas
19 exactement la date, mais, oui, c'est après.
20 Q. Très bien. Alors regardons le document suivant, 1D 01858, qui est lié
21 au document que nous venons d'examiner. On voit votre nom, chef du bureau,
22 en bas. Il y est question du protocole ayant découlé de la réunion qui
23 s'est tenue le 12 avril 1994. On voit que Smajkic y est évoqué. Vous y êtes
24 évoqué également. Et on voit ensuite qu'un certain nombre de conclusions
25 ont été adoptées où l'on prévoit l'établissement de commission, une
26 Commission conjointe notamment, l'harmonisation des textes juridiques
27 d'intérêt mutuel, la nécessité d'engager des travaux pour mettre en place
28 un programme de retour des réfugiés, et cetera.
Page 31343
1 Alors pouvez-vous nous en parler de tout ceci ? Est-ce que ceci
2 correspondait bien aux obligations visant à mettre en œuvre l'accord de
3 Washington ?
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'aimerais que vous répétiez la cote
5 de ce document parce qu'elle ne figure pas au compte rendu, Maître
6 Karnavas.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] 1D 01858.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] 1858. Merci beaucoup.
9 M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, 1858.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il s'agissait d'une réunion
11 particulièrement importante qui avait pour but la mise en œuvre des accords
12 de Washington. Comme l'on peut le voir ici, j'ai travaillé avec le ministre
13 compétent en la matière, M. Arif Smajkic, et nous nous sommes accordés sur
14 la mise en place d'une Commission conjointe qui travaillerait en permanence
15 à la mise en œuvre. Il y fait référence à la constitution et à la nécessité
16 de respecter cette dernière et que cette mise en œuvre soit conforme à la
17 constitution de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Il y est également
18 fait mention de la nécessité de rédiger un programme, un programme de
19 retour, et nous avons immédiatement commencé à travailler à la coopération
20 du côté bosniaque. Nous avions un programme de retour et de coordination de
21 toutes les tâches en matière humanitaire. C'était au début d'avril 1994.
22 Q. Merci. Et je suppose que cette coopération s'est poursuivie jusqu'aux
23 accords de Dayton ?
24 R. Oui, elle s'est poursuivie et cela également sous la forme de la
25 création d'un ministère fédéral conjoint pour ce type de question. J'ai été
26 élu en tant que ministre adjoint au sein de ce ministère fédéral avant les
27 accords de Dayton.
28 Q. Et où étiez-vous à ce moment-là ? Où était votre bureau ?
Page 31344
1 R. Comme c'était le cas au cours des 18 années précédentes, je me trouvais
2 entre Mostar et Sarajevo et je suis allé à Sarajevo, ainsi que M. Prlic et
3 d'autres qui avaient été élus au gouvernement fédéral. Nous avons passé le
4 mont Igman et la paix n'était pas encore en place. Nous nous trouvions au
5 niveau de l'aéroport de Sarajevo. Je crois que nous nous sommes trouvés à
6 au moins 40 occasions dans des circonstances où nos vies étaient en danger,
7 mais nous essayions de mettre en place une fédération de façon conjointe.
8 Cela en toute bonne foi.
9 Q. Je vous remercie.
10 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi. Une précision, Monsieur
11 Raguz. Dans votre réponse, dans la première phrase - c'est peut-être un
12 problème d'interprétation - vous avez dit : "Comme pendant les 18 années en
13 question entre Mostar et Sarajevo, nous sommes allés à Sarajevo," en tout
14 cas, c'est ce qui apparaît dans le compte rendu. Alors peut-être qu'il y a
15 une erreur de traduction. Vous pourriez peut-être répéter votre réponse de
16 façon à ce que nous entendions à nouveau la traduction. Je cite ici la
17 première partie de votre réponse dans l'anglais. C'est ce que je lis en
18 anglais : "As was the case for 18 years…" Ça n'a aucun sens, en tout cas,
19 pour moi. Merci.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] J'accepte tout à fait cette suggestion afin
21 d'être plus précis. Nous voyagions en direction de Sarajevo, et nous
22 repartions de Sarajevo jusqu'à ce que toutes les structures du ministère
23 soient mises en place.
24 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci.
25 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
26 Q. Le dernier document que j'aimerais examiner dans le cadre de cette
27 partie de mon interrogatoire principal, c'est le document 1D 02733. Nous
28 avançons encore dans le temps puisque nous en sommes au 13 mai 1995. Vous
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1 êtes cité ici et vous auriez dit que plus de 50 % des Croates avaient été
2 expulsés et vous dites que le recensement montre que 33 % des personnes
3 déplacées ne souhaitent pas rentrer chez elles même si les conditions
4 préalables sont réunies. D'abord, avez-vous eu la possibilité de prendre
5 connaissance de cet article et pouvez-vous nous dire si vous êtes disposé à
6 confirmer la teneur des informations qui y figurent ? Avec quelques
7 explications en sus éventuellement ?
8 R. Oui, je peux le confirmer. Il s'agissait d'une conférence de presse au
9 cours de laquelle j'ai fait la présentation d'un recensement, qu'il était
10 opéré auprès des personnes réfugiées et déplacées, recensement que nous
11 avons opéré dans le cadre du travail conjoint qui avait été mis en place
12 dans ce ministère fédéral. Il s'agit ici de données qui sont de notoriété
13 publique. Je parle ici du nombre des personnes réfugiées et déplacées au
14 sein de la Communauté croate, et il s'agit là d'une situation à laquelle
15 nous sommes confrontés aujourd'hui encore.
16 Quant à ce chiffre selon lequel 33 % des personnes réfugiées qui ont été
17 chassées ne souhaiteraient pas rentrer chez eux, on peut également
18 l'interpréter de la façon suivante, à savoir que 67 % de ces mêmes
19 personnes - soit plus des deux tiers - souhaitent rentrer chez eux. Et il
20 faut dire qu'immédiatement après la guerre, au moment où les traumatismes
21 sont les plus forts, nous savons, par ailleurs, sur la base de situations
22 tout à fait similaires, qu'il existe toujours un pourcentage d'au moins 40
23 % des personnes dans cette situation qui ne souhaitent pas rentrer chez
24 elles. Nous disposions en tout cas de données grâce à ce recensement que
25 nous avons réussi à mettre en œuvre et nous souhaitions disposer
26 d'informations aussi précises que possible en matière de retour de ces
27 personnes pour pouvoir travailler à cela.
28 Q. Merci. J'aimerais passer à autre chose, très brièvement. J'aimerais
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1 parler des municipalités. A la lumière de la déposition que vous avez faite
2 hier, nous aimerions simplement apporter quelques éléments d'information
3 supplémentaires à la Chambre de première instance à l'appui de votre
4 déposition. J'aimerais que nous examinions quatre documents, d'abord, 1D
5 02541, 1D 02534, 1D 02532 et 1D 02531. J'aimerais que vous y jetiez un œil.
6 Vous les avez dans votre classeur. Ils portent les dates respectives du 25
7 novembre 1992; du 1er février 1993; du 1er juin 1993; et du 29 juin 1993. Ces
8 documents portent sur la municipalité de Posusje que vous avez utilisée
9 comme exemple hier, si je ne m'abuse.
10 R. C'est exact.
11 Q. Avez-vous examiné ces documents, et leur teneur cadre-t-elle plus ou
12 moins bien avec votre compréhension de la situation à ce moment-là dans la
13 municipalité ?
14 R. Oui.
15 Q. Très bien. Regardons les trois documents suivants :
16 1D 00282, 1D 00300, 1D 0268, ce sont des documents qui traitent de la
17 municipalité de Livno. Ils portent les dates respectives du
18 29 juillet 19 --
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis d'accord avec un certain
20 nombre de mes collègues, ce n'est pas clair. De quoi parlez-vous ? Pourquoi
21 Posusje ? Je ne retrouve pas Posusje dans le document 1D 02141. Non, pardon
22 -- enfin, vous allez tellement vite et ces documents sont dans un tel ordre
23 qu'ils obligent les Juges à des allées et venues constantes dans ces lots
24 de documents. Il faut les examiner deux fois parce que d'abord il faut que
25 nous retrouvions la cote des documents, ensuite il faut retrouver la
26 version en anglais de ces documentsl qui parfois ne portent pas de numéros
27 d'enregistrement. Alors, véritablement, je vous invite à faire les efforts
28 nécessaires pour nous remettre les documents dans le même ordre que les
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1 documents qui sont remis au témoin, de façon à ce que nous puissions suivre
2 parce que nous sommes perdus et ce n'est pas dans votre intérêt. Vous ne le
3 voulez pas, nous ne le voulons pas.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais faire de mon mieux. Je vais
5 ralentir, mais je crois que c'est là un très bon exemple, Monsieur le Juge
6 Trechsel, du degré de frustration qui est le mien.
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]
8 L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont extrêmement de mal à entendre Me
9 Karnavas, qui est quasiment inaudible.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne voudrais pas insister, Monsieur le
11 Président, mais le système électronique a été introduit afin de gagner en
12 efficacité. Dans ce prétoire, nous utilisons les deux. Je crois que c'est
13 très utile de pouvoir effectivement recourir aux deux, mais nous n'avons
14 pas de moyens supplémentaires. J'ai des juristes à mes côtés avec des
15 diplômes universitaires supérieurs qui tâchent de préparer tous ces
16 dossiers. C'est extrêmement difficile de trouver des gens pour pouvoir le
17 faire. Nous travaillons jour et nuit. Je voudrais inviter la Chambre de
18 première instance à travailler avec nous pendant une semaine, une semaine
19 simplement, pour voir ce qu'il en est. J'espère que vous comprenez ma
20 frustration. Je comprends la vôtre. Nous allons essayer de nous améliorer
21 pour la prochaine fois. Je vais essayer de ralentir. Je m'excuse de la
22 situation, mais bien sûr, il faut davantage de temps pour pouvoir le faire.
23 Je pensais que c'était là une manière créative de faire les choses de
24 manière plus efficace mais, vraisemblablement, ce n'est pas le cas. J'en
25 suis responsable.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, écoutez, j'aimerais que vous
27 soyez conscient du problème et que vous soyez d'accord avec nous. Nous ne
28 le prenons pas personnellement. Nous avons un travail difficile nous aussi.
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1 C'est dans notre intérêt que les choses fonctionnent.
2 M. KARNAVAS : [interprétation] Je comprends, mais je maintiens mon
3 invitation.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
5 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien.
6 Q. Alors nous allons revenir à ces documents, les documents
7 1D 02541 et les autres, le document 1D 02541 portant la date du
8 25 novembre 1992. Il y est question de la consommation de carburant
9 nécessaire au chauffage des écoles et des élèves qui s'y trouvent,
10 notamment d'une aile de l'école et du gymnase de l'école qui est occupé par
11 les réfugiés.
12 Vous avez dit que Posusje était une petite municipalité, je crois que vous
13 avez parlé de 16 000 personnes.
14 R. C'est exact.
15 Q. Très bien. Regardons maintenant le deuxième document, qui porte la date
16 du 1er février 1993, il s'agit du document 1D 02534, au paragraphe 2, voici
17 ce qui est dit : "Du fait de la situation concrète, nous vous demandons de
18 nous attribuer 40 000 litres de carburant de façon à résoudre le problème
19 posé par le chauffage des pièces où se trouvent des personnes déplacées et
20 des réfugiés qui y sont hébergés." Ceci est adressé au bureau chargé des
21 Personnes déplacées, Darinko Tadic; n'est-ce pas ?
22 R. C'est exact. Et dans l'introduction, nous voyons des données concernant
23 cette municipalité signées par le vice-président du HVO de la municipalité.
24 Q. Si nous examinons le document suivant, 1D 02532, on constate ici qu'il
25 s'agit toujours de la municipalité de Posusje et qu'il y est question
26 notamment de restauration, tourisme, et cetera. C'est un document du 1er
27 juin 1993, et il y est question de l'hébergement des personnes déplacées et
28 des réfugiés depuis avril 1992, et que l'on y parle de la restauration, du
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1 linge, du vol de serviettes, des fractions [phon], de vols --
2 R. C'est exact.
3 Q. Très bien. Et regardons le dernier document, le tout dernier document,
4 1D 02531, vous voyez là encore qu'il s'agit du conseil municipal de
5 Posusje, que le document a été adopté le 29 juin 1993 et qu'il est question
6 de l'occupation d'une salle par les personnes déplacées, en tout cas, de
7 leur hébergement dans cette salle. Vous nous donnez l'exemple de Posusje,
8 ceci, n'est-ce pas, cadre bien avec ce que vous essayiez de nous expliquer
9 hier ? La teneur de ces documents.
10 R. Oui, c'est exact.
11 Q. Et n'hésitez pas à me corriger si j'ai tort mais, comme à Posusje,
12 d'autres municipalités faisaient cela, comme vous l'avez dit d'ailleurs, et
13 produisaient peut-être même -- le même type de document illustrant leur
14 contribution à la question des réfugiés et des personnes déplacées à la
15 solution à ces difficultés.
16 R. Oui, c'est exact. Il s'agissait de contribution mais également de
17 demandes de leur part.
18 Q. Alors nous allons passer au lot suivant de documents je vais passer à
19 Livno -- la municipalité de Livno, un autre exemple, là encore. Le premier
20 document c'est le document 1D 00282, qui porte la date du 29 juillet 1993.
21 Ici on constate qu'il y a une décision visant à établir une cellule au
22 niveau municipal chargée de l'Organisation et de la coordination de la mise
23 à disposition d'hébergement et de la prise en charge des personnes
24 déplacées et des réfugiés sur le territoire de la municipalité. Compte tenu
25 du poste que vous occupiez à l'époque, saviez-vous que Livno contribuait à
26 ces efforts par l'entremise de cette cellule constituée au niveau municipal
27 ?
28 R. Oui.
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1 Q. Dans le document suivant, 1D 00300, qui porte la date du lendemain, le
2 30 juillet 1992, on trouve une décision visant à constituer cette cellule
3 municipale chargée donc de l'organisation et de la coordination de la prise
4 en charge et du bien-être des personnes expulsées et des réfugiés sur le
5 territoire des municipalités. Et, là encore, ceci vient confirmer ce dont
6 vous avez parlé plus tôt, n'est-ce pas, à savoir que les municipalités
7 étaient effectivement chargées de mener à bien ces activités ?
8 R. C'est exact.
9 Q. Et passons maintenant au dernier document 1D 00268, qui porte la date
10 du 10 octobre 1994, on constate ici qu'il y a une décision qui a été prise
11 et qui porte sur l'annulation du statut de personnes déplacées pour les
12 citoyens de la municipalité de Livno, et le document motive cette décision.
13 Ce qui nous confirme ce que vous avez dit hier, à savoir qu'il appartenait
14 aux municipalités de prendre ce genre de décision et pas seulement la
15 communauté -- au niveau de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, mais au
16 titre de la législation, n'est-ce pas, pour la République de Bosnie-
17 Herzégovine ?
18 R. Oui. Cela est exact, à ceci près que c'est selon l'avis des membres du
19 conseil municipal que les circonstances étaient alors présentes, enfin
20 qu'une partie des personnes déplacées et réfugiés voient ce statut de
21 personnes réfugiées ou déplacées annulé.
22 Q. Très bien.
23 LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Bien sûr, nous savons que ceci ne
24 correspond pas à la période couverte par l'acte d'accusation. Alors peut-
25 être qu'il serait bon que vous nous expliquiez pourquoi il s'agit là
26 d'élément de preuve pertinent à votre avis.
27 M. KARNAVAS : [interprétation] La pertinence existe à plusieurs titres,
28 d'abord, parce qu'il y a ici une poursuite d'une situation donnée. Nous ne
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1 parlons pas seulement de 1992 à 1994 -- ou 1991 à 1994 de manière
2 abstraite. Si vous vous en souvenez, l'Accusation nous a renvoyé au Moyen
3 Age peut-être en nous disant qui vivait à quel endroit en Bosnie-
4 Herzégovine et ils ont remonté jusqu'à -- ils sont remontés donc loin et
5 ils ont allé jusqu'en 1997 avec le témoin expert Miller, je crois,
6 quelqu'un dont je dirais que ce n'est pas un expert, mais qui a néanmoins
7 parlé de l'entreprise criminelle conjointe en nous disant qu'elle s'était
8 poursuivie jusqu'en 1997, ou en 1998, parce que les Croates de Bosnie-
9 Herzégovine, surtout ceux de la Communauté croate et ceux au sein de la
10 Bosnie-Herzégovine étaient contre les accords de Paix de Dayton et contre
11 la constitution telle qu'elle avait été proposée au titre des accords de
12 Dayton. Alors nous essayons de montrer qu'il y a une continuité ici dans
13 les événements.
14 Nous avons indiqué que les municipalités avaient joué un certain rôle. Nous
15 sommes en train d'illustrer ce rôle. Et c'est un rôle là aussi qui perdure
16 dans le temps. Toute cette question liée aux personnes déplacées et
17 réfugiés est une question extrêmement complexe, et nous essayons de
18 démontrer en prenant ici et là des exemples des mesures prises par la
19 municipalité en coopération, en collaboration avec le HVO de la Communauté
20 croate d'Herceg-Bosna, nous essayons donc de montrer qu'il y a un effort
21 coordonné mais il n'y a pas de lien de subordination.
22 Nous avons beaucoup entendu parler les témoins de la communauté
23 internationale et d'autres experts et témoins également qu'il y avait eu
24 nettoyage ethnique inversé, alors nous essayons d'apporter suffisamment
25 d'éléments de preuve à la Chambre de première instance de façon à ce
26 qu'elle puisse examiner la question dans le bon contexte. Et c'est
27 extrêmement difficile. On ne peut pas isoler les choses d'un jour à
28 l'autre. Et c'est tout l'objectif qui est poursuivi ici.
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1 Je ne sais pas, si j'ai répondu à votre question.
2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si, si, vous avez répondu à la
3 question de manière utile qui plus est. Je vous remercie.
4 M. KARNAVAS : [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'ai une question accessoire à
6 partir de ce document concernant Livno. Où, au paragraphe 1, on parle des
7 citoyens de Livno, et on dit à la fin du paragraphe : "Le droit à une
8 occupation temporaire d'appartement et une assistance financière" ?
9 En lisant ce texte que je découvre à l'instant, je me suis posé la question
10 suivante, et j'aimerais que vous m'éclairiez : il apparaît de par ce
11 document qu'un réfugié ou une personne déplacée peut occuper un appartement
12 et peut avoir une assistance financière de la part d'une municipalité
13 quelconque. Dans ce contexte, y a-t-il eu des cas de personnes déplacées ou
14 réfugiés, notamment en Bosnie centrale, qui quittent leur village ou leur
15 ville, vont dans une autre ville ou village et, sans que l'autorité
16 municipale, ait le temps de faire quelque chose, occupent d'elles-mêmes un
17 appartement qui est libre ou qui n'est pas libre, en disant : "Bien, j'ai
18 le droit à un appartement parce que je suis une personne déplacée ou
19 réfugié ? Est-ce que vous avez été confronté à ce type de situation où des
20 populations en grand nombre ? Et je pense, par exemple, à Vares, puisque
21 tout à l'heure on a eu le chiffre de 100 000 personnes qui quittent Vares
22 et qui vont dans une autre région, et qui se mettent d'elles-mêmes à
23 occuper des appartements alors même que l'autorité municipale n'a même pas
24 eu le temps de faire quoi que ce soit ? Est-ce que vous avez rencontré ce
25 type de situations ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il y avait
27 effectivement des situations de ce type-là, mais de façon tout à fait
28 générale, elles étaient présentes dans toute la Bosnie-Herzégovine, et nous
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1 avons eu l'occasion d'observer la façon dont certaines municipalités
2 précises régissaient face à ces situations. Nous avons vu, par exemple,
3 hier, un document, une décision rendue par la municipalité de Mostar
4 concernant l'expulsion de personnes illégalement installées dans des
5 appartements abandonnés, et cela sur la base du fait que toute personne qui
6 n'avait eu explicitement l'autorisation de s'installer dans un tel
7 appartement; il était installé illégalement, et la municipalité avait le
8 devoir d'apporter une solution à ce type de situations.
9 Si ma réponse clarifie quelque peu votre demande.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
11 M. KARNAVAS : [interprétation] D'accord.
12 Q. Monsieur Raguz, nous allons maintenant passer à un autre sujet, à
13 savoir les convois, et nous examinons plusieurs documents en rapport avec
14 le sujet. Premier document c'est une pièce de l'Accusation que nous avons
15 déjà vue, pièce P 10264. Donc pas nécessité de nouveau commentaire car nous
16 l'avons déjà vu. Je vous demanderais de vous pencher sur ce document. Il
17 s'agit d'un accord concernant le passage des convois humanitaires, et ma
18 question est la suivante : aviez-vous connaissance de l'existence de ce
19 document ?
20 R. Oui.
21 Q. D'accord. Nous n'avons que ce passage à examiner dans ce document.
22 Ensuite viennent deux documents. D'abord, le 1D 01360, qui provient du
23 bureau des Personnes expulsées et des Réfugiés et qui date du 12 octobre
24 1993. Il est signé par Darinko Tadic. Nous voyons que l'objet de ce
25 document est l'autorisation de passage sans encombre. Pourriez-vous nous
26 dire, je vous prie, ce que contient exactement ce document ?
27 R. Il s'agit ici d'un document qui repose sur les accords de Makarska,
28 accords qui sont également confirmés par ce groupe de travail sur les
Page 31354
1 affaires humanitaires et il y est établie la procédure par laquelle le
2 bureau des Personnes réfugiées et déplacées avait compétence pour autoriser
3 le passage de convois, et cela en réponse à des demandes provenant des
4 organisations humanitaires locales aussi bien qu'internationales.
5 Il était nécessaire, dans ce type de demande, d'indiquer la date de
6 départ du convoi en question, la destination du convoi, la nature de l'aide
7 humanitaire qui était proposée ainsi que l'identité aussi bien du véhicule
8 que des conducteurs de ces véhicules et les quantités d'aide humanitaire
9 transportées. Il s'agissait d'aide humanitaire qui devait circuler sans
10 entrave. Et conformément à cette procédure, telle qu'elle apparaît ici,
11 nous avons obtenu des résultats tout à fait excellents, et chaque convoi
12 humanitaire a été ainsi enregistré, et vous pouvez le voir dans ce
13 document.
14 Q. D'accord. Passons maintenant au document suivant, le document
15 3D 00921.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Un Juge a une question. Moi aussi, j'avais une
17 question, mais je ne sais pas si le document suivant résoudra la question,
18 donc, je n'ai pas voulu poser la question. Mais je crois que mon collègue
19 veut poser une question.
20 M. LE JUGE MINDUA : Oui. Monsieur le Témoin, je vois que le document que
21 nous avons sous les yeux, le document 1D 01360, vient de l'office --
22 attendez, je vais chercher le -- de l'office des Réfugiés et des déplacées,
23 et il autorise le passage sans encombre du convoi. La question que je
24 voudrais vous poser c'est de savoir si c'est votre office qui autorisait
25 tous les convois humanitaires et si, en vue de cette autorisation, au
26 préalable, vos services ou vos agents procédaient à l'inspection de tous
27 les convois, et dans quelle mesure les autorités de police ou de l'armée
28 intervenaient dans les autorisations de convois.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Le bureau avait compétence pour autoriser les
2 convois, mais uniquement les convois humanitaires, et cela conformément aux
3 accords et aux protocoles que nous avons déjà examinés. Ce rôle du bureau y
4 est défini explicitement et avec l'assentiment des organisations
5 humanitaires internationales. Le présent document montre comment le bureau
6 procédait pour approuver ces convois. Lorsqu'un organisation humanitaire
7 obtenait l'approbation du bureau, il s'agissait avant tout de départs de
8 convois à partir de centre logistique de Ploce ou de celui de Split, situés
9 tous deux en République de Croatie, et sur place se trouvaient des
10 contrôleurs qui avaient été des inspecteurs qui étaient donc sur place
11 conformément au protocole prévu et qui étaient en mesure d'examiner le
12 contenu du -- le chargement qui était transporté par le convoi. Et si ce
13 chargement était en règle, les convois se mettaient en route. Et je puis
14 vous dire que cette procédure a été respectée dans la plus grande mesure
15 possible.
16 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup, Monsieur le Témoin. Alors ma dernière
17 question à ce sujet. Je pense que vous avez appris, et même dans certains
18 documents, nous avons vu que les parties, les unes et les autres,
19 redoutaient le transport d'armes au sein de ces convois humanitaires. Est-
20 ce que vous-même, vous avez eu connaissance de cas pareils de transports de
21 produits non autorisés de la part de l'une ou de l'autre partie au conflit
22 ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Il existe effectivement des indications où il
24 y a eu des cas tout à fait concrets dans lesquels certaines organisations
25 internationales, principalement de -- plutôt, des organisations
26 internationales de petite envergure qui oeuvraient également dans la
27 région, et se sont livrées à ce type de transport illégal ou se sont
28 livrées à des tentatives de transport de chargements illégaux sous couvert
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1 de convois humanitaires et d'aide humanitaire. Il s'agissait de marchandise
2 parfois d'armes.
3 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Une courte question, Monsieur le Témoin. Je reviens
5 au document que nous avons vu tout à l'heure, le 1D 1360. Ce document daté
6 du 12 octobre pour un convoi du 15 octobre. Mais mon attention est attirée
7 sur la destination de ce convoi humanitaire, Zenica. Apparemment, la route
8 c'est Metkovici, Mali Prolog -- je ne sais pas où c'est -- destination
9 Zenica. Sauf erreur de ma part, en octobre 1993, Zenica est sous le
10 contrôle de l'ABiH, ce qui veut donc dire que les autorités de l'Herceg-
11 Bosna autorisent un convoi humanitaire à destination de la zone sous
12 contrôle de l'ABiH; est-ce bien cela ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est tout à fait exact, et vous aurez
14 l'occasion de vous rendre compte que près des deux tiers -- plus de deux
15 tiers de l'aide qui a été approuvée par le bureau, par l'intermédiaire de
16 ces convois humanitaires, était destinée à des zones sous contrôle de
17 l'ABiH. C'est ce que vous aurez l'occasion de voir dans le rapport
18 d'ensemble.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question : à votre connaissance --
20 parce que les convois humanitaires, on en a entendu parler ici pendant plus
21 d'une centaine d'eux, donc, les Juges connaissaient parfaitement le
22 problème, et je voudrais savoir : à votre connaissance, avez-vous eu, dans
23 les fonctions que vous exerciez à l'époque, connaissance d'un convoi
24 humanitaire que vous n'auriez pas autorisé ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je peux ici dire avec
26 la plus grande certitude qu'aucun convoi humanitaire n'a transité qui n'ait
27 obtenu l'autorisation nécessaire en vertu du protocole qui a été adopté, et
28 cela pendant la période où j'ai été à la tête de ce bureau.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour votre réponse.
2 Maître Karnavas.
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si vous me le permettez, j'aimerais
4 ajouter une brève question. Quelle était l'importance des autres convois
5 qui n'ont pas reçu l'autorisation car en raison de l'appréciation faite par
6 votre bureau, ils ne remplissaient pas certaines conditions ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes les demandes qui parvenaient au bureau
8 de la part d'organisations humanitaires internationales obtenaient des
9 autorisations si -- si celles-ci -- si ces demandes étaient conformes. Mais
10 nous ne pouvions pas autoriser d'autres convois que des convois
11 humanitaires. Chaque convoi qui s'est ainsi présenté, et je souhaiterais
12 ici particulièrement insister sur le fait que le bureau n'a jamais pris
13 quelque décision que ce soit quant à la destination des convois en
14 question. Nous respections les programmes et les choix qui étaient ceux des
15 organisations humanitaires quant à la destination des convois qu'elles
16 souhaitaient faire transiter. Et c'est à ce sujet qu'un rapport écrit du
17 chef du HCR -- du chef du bureau compétent du HCR existe - mais dont nous
18 n'avons malheureusement pas copie - et qui confirme ce que je viens de
19 dire.
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'avais bien compris cela. Mais ma
21 question portait sur la partie moins brillante de la situation. Est-ce que
22 -- et je ne dis pas que quoi que ce soit ait été fait de façon irrégulière,
23 mais il y a eu pour -- sans doute pour une raison ou pour une autre, un
24 certain nombre de demandes qui ont été refusées. Je vous demande pour
25 quelles raisons.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que je pourrais peut-être vous en
27 dire plus à ce sujet sur la foi su document suivant. J'ai dit qu'il n'y
28 avait eu aucune requête qui ait été enregistrée de la part d'organisations
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1 humanitaires qui ait fait l'objet d'un refus. Aucune preuve concrète de
2 cela n'existe. Une telle preuve aurait fait son apparition aujourd'hui, si
3 elle existait. C'est une autre question que celle de savoir si certains
4 convois ont pu être arrêtés ou rencontrer des problèmes sur la route qui
5 était la leur.
6 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
7 M. KARNAVAS : [interprétation]
8 Q. Une précision, si vous voulez bien. Vous avez indiqué que pendant la
9 période où vous avez dirigé le bureau, à votre connaissance, pas un seul
10 convoi remplissant les critères fixés dans le texte du protocole ne s'est
11 vu refuser l'autorisation de passage. Mais que se passait-il dans la
12 période où vous étiez numéro deux du bureau ? Est-ce que vous vous
13 rappelleriez peut-être un cas de convoi qui tout en satisfaisant à tous les
14 critères, se serait vu refuser l'autorisation par votre prédécesseur ?
15 R. Non, je ne me rappelle pas du tout qu'il y ait eu un tel cas.
16 Q. Passons à l'examen du document suivant qui, si je ne me trompe, revient
17 sur une partie de votre réponse précédente. Il s'agit du document 3D 00921.
18 Je vous demanderais d'y jeter un coup d'œil rapidement pour nous dire
19 ensuite ce qu'est ce document.
20 R. Il s'agit ici d'un document qui donne une vue d'ensemble de tous les
21 convois humanitaires qui ont été autorisés par le bureau pour les Personnes
22 réfugiées et déplacées. Ils sont ici listés en fonction de la date à
23 laquelle a été délivrée l'autorisation, l'organisation humanitaire
24 demandeuse est également citée, ainsi que la destination du convoi et la
25 quantité d'aide humanitaire transportée par ce convoi. Et l'on peut voir
26 ici que dans la période qui s'étend entre le 1er juin et le 10 décembre,
27 vous pouvez voir donc le nombre de convois humanitaires, je pense qu'il
28 s'agit là de quelques centaines de convois humanitaires qui ont été
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1 enregistrés. Et on peut voir également que la quantité d'aide humanitaire
2 ainsi transportée pendant cette période dépasse 30 000 tonnes, et pour
3 revenir sur votre question, Monsieur le Président, nous avons ici une -- un
4 chiffre d'ensemble également qui nous indique quelle était la quantité
5 d'aide humanitaire destinée à chaque destination, comme Zenica, Tuzla,
6 Mostar Est, Konjic ou Jablanica. Et vous verrez que
7 25 000 tonnes d'aide humanitaire ont atteint la zone sous contrôle du HVO,
8 c'est-à-dire près de deux fois moins. Il n'y avait donc pas de tentatives
9 ni de pratiques visant à orienter cette aide humanitaire, de préférence
10 vers telle ou telle autre destination, mais c'était les organisations
11 humanitaires qui déterminaient elles-mêmes les destinations de l'aide. Je
12 parle du HCR, du CICR et d'autres qui estimaient elles-mêmes le besoin et
13 envoyaient l'aide humanitaire là où elles l'estimaient nécessaire.
14 Q. Encore quelques petites questions de suivi pour veiller à la bonne
15 rédaction du compte rendu d'audience. Si nous nous penchons sur la première
16 page, nous voyons que la période dont nous sommes en train de parler va du
17 1er juin au 10 décembre 1993; n'est-ce pas ?
18 R. C'est exact.
19 Q. Et si nous regardons ce qui est écrit au bas de la page, nous trouvons
20 deux signatures différentes. L'une de ces signatures est-elle la vôtre ?
21 R. Oui, celle de droite.
22 Q. Très bien. Et celle de gauche, la reconnaissez-vous ? Si ce n'est pas
23 le cas, cela n'a pas d'importance.
24 R. Il me semble que j'ai remis ce document lors de mon témoignage et que
25 je l'ai signé. Et MR, c'est moi. Ça c'est tout à fait sûr.
26 Q. Et vous avez donné ce document aux représentants du bureau du Procureur
27 ?
28 R. Oui.
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1 Q. C'était au moment où vous étiez interrogé en tant que suspect, n'est-ce
2 pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Vous venez de citer un certain nombre de chiffres. Alors, vous verrez
5 qu'en haut à droite des pages de ce document, il y a des numéros. Et la
6 page qui m'intéresse est celle qui porte le numéro ERN 03653938. On trouve
7 là un chiffre, 25 847.81, et ce chiffre illustre, n'est-ce pas, la partie
8 du territoire sous le contrôle de l'ABiH, n'est-ce pas ?
9 R. Exact -- exact.
10 Q. Ensuite, si -- et je le dis pour aider les Juges, donc si nous nous
11 rendons en dernière page de ce document -- ou plutôt, en avant-dernière
12 page de ce document, dont le numéro ERN est 03653942, nous trouvons le
13 chiffre de 2 315, et ce chiffre, n'est-ce pas, représente les quantités
14 destinées au territoire sous contrôle du
15 HVO ?
16 R. 12 315 [comme interprété].
17 Q. D'accord, d'accord. 12 000, effectivement. Toutes mes excuses. Très
18 bien. Voilà, je n'ai plus besoin d'autre chose s'agissant de ce document, à
19 moins qu'il n'y ait d'autres questions des Juges de la Chambre, j'aimerais
20 passer à autre chose.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question, Monsieur le Témoin.
22 En regardant ce document qu'on a déjà vu avec d'autres témoins, donc ce
23 document est très bien connu de la Chambre, je suis frappé par le constat
24 suivant qu'on peut faire à la lecture de ce document. On a l'impression, en
25 regardant les destinataires de tous ces convois, d'une part, c'est Zenica
26 et Sarajevo, avec d'autres destinations, Tuzla et Jablanica, mais que la
27 quasi-totalité - j'allais presque dire la totalité - de ces convois en fait
28 était à destination de zones contrôlées par l'ABiH, et donc, à destination
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1 de Musulmans et non pas des Croates. Et partant de ce constat, je me suis
2 demandé, mais les convois pour les Croates, où sont-ils ? Y a-t-il eu des
3 convois pour les Croates ? Et partant de ce constat, je regarde qui en fait
4 est à l'origine de ces convois. Alors, il y a le HCR, bien entendu, il y a
5 l'UNICEF, et puis je vois quelques ONG française, comme Handicap
6 international, Solidarité, Equilibre, Médecins du monde, et j'ai
7 l'impression que beaucoup d'organisations du type ONG faisaient des convois
8 humanitaires, non pas autant pour les Croates que pour les autres. Alors,
9 vous qui étiez dans ce secteur d'activités, sur 100 convois, combien
10 allaient vers les Croates et combien vers les Musulmans ? Est-ce que vous
11 pouvez nous faire une répartition ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, ce que l'on voit ici
13 c'est l'enregistrement des convois humanitaires, l'enregistrement des
14 organisations humanitaires et les quantités d'aide humanitaire qui, comme
15 nous l'avons déjà observé, étaient destinées à des zones contrôlées par
16 l'armija et à la zone contrôlée par le HVO. Il est visible ici que nous
17 avons affaire à des données tout à fait précises. Nous avons 12 500 tonnes
18 d'aide humanitaire, soit deux fois moins que la quantité d'aide humanitaire
19 qui était destinée aux territoires sous le contrôle de l'armija. Autrement
20 dit, nous avons ici des données tout à fait précises en provenant de ces
21 territoires. Par exemple, en ce qui concerne Zenica, Vitez et Novi Travnik
22 se trouvaient dans cette même zone. Il s'agissait d'endroits où vivaient
23 des Croates, et c'est à partir de cet entrepôt central de Zenica que l'aide
24 humanitaire devait être acheminée également vers ces autres villes. Et nous
25 n'avons ici pas de traces des quantités d'aide humanitaire qui pouvaient, à
26 partir de cet entrepôt central, être destinée également aux Croates en ces
27 autres localités voisines.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dernière question : à votre connaissance,
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1 avez-vous vent ou des informations comme quoi des Croates auraient eu moins
2 d'aide humanitaire que les autres, ou bien la même aide humanitaire ou plus
3 ? Y avait-il des discriminations parmi les destinataires finaux, ou bien il
4 est impossible de répondre à cela ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que nous avons été confrontés au deux
6 cas. Nous avions des enclaves à certains endroits qui recevaient beaucoup
7 plus difficilement de l'aide humanitaire, et des indicateurs existaient
8 montrant que les convois humanitaires arrivaient beaucoup plus rarement
9 dans ces zones qui étaient donc avant tous des enclaves, et de telles zones
10 existaient dans toutes les régions. Il est, par conséquent, difficile ici
11 de s'appuyer sur des données précises.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, il est 4 heures moins le quart. Normalement,
13 on doit faire une pause d'après le décompte de M. le Greffier. Maître
14 Karnavas, il vous resterait 12 minutes.
15 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Je suis
16 prêt à consacrer un peu plus de temps à l'audition de ce témoin, ce qui
17 n'influera en rien de façon négative sur le moment de son départ.
18 J'apprends qu'au moins trois de mes collègues n'auront pas de questions à
19 poser au témoin, mais M. le Juge Trechsel a fait une proposition tout à
20 l'heure et je crois qu'en raison de cette proposition, j'aurai besoin d'un
21 peu plus de temps. Je le répète, nous parviendrons à réduire le temps
22 d'audition d'un certain nombre d'autres témoins par la suite, mais je crois
23 que les sujets dont je souhaite traiter devant vous à partir de maintenant,
24 et je vais vous en donner une idée à l'avance. Il s'agit du nettoyage
25 ethnique inversé, un certain nombre de statistiques, des éléments relatifs
26 au centre de Ljubuski, et puis un certain nombre d'éléments divers, et nous
27 aimerions passer en revue des documents relatifs à toutes ces questions
28 ainsi qu'aux questions posées par les Juges de la Chambre, y compris la
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1 dernière, la vôtre, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : De la part de la Chambre, il y a aucune objection à
3 cela, mais comme vous savez, les autres avocats ont normalement deux
4 heures. Si certains ne poseront pas de questions, bien entendu, il y a
5 aucun problème pour que vous ayez du temps supplémentaire. Alors, je vais
6 faire un tour très rapide des autres avocats. J'ai cru comprendre qu'il y
7 en a trois qui n'auront pas de questions. Qui a des questions ? Madame
8 Nozica, vous aurez des questions ?
9 Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, il est trop tôt encore
10 pour affirmer si j'aurai ou non des questions. L'interrogatoire direct
11 n'est pas encore terminé. Mais c'est probablement tout à fait prématuré
12 pour que je puisse me décider.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Alaburic ou Maître Kovacic.
14 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, non, nous n'aurons pas
15 de questions. Il n'y a pas de nécessité pour cela.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
17 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons
18 l'intention de poser quelques questions très courtes et simples à ce
19 témoin, mais dans la mesure où la Défense Prlic aurait besoin davantage de
20 temps pour finir son interrogatoire direct, nous accorderons le temps qui
21 est nôtre au titre du temps commun.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
23 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Nous attendrons également,
24 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la fin de l'interrogatoire
25 direct et nous poserons éventuellement quelques questions très courtes.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
27 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, en l'état actuel
28 de l'interrogatoire, je n'aurai pas de questions pour ce témoin. Merci.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : A priori, il n'y a aucun problème. Alors nous allons
2 faire 20 minutes de pause.
3 --- L'audience est suspendue à 15 heures 49.
4 --- L'audience est reprise à 16 heures 14.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.
6 M. KARNAVAS : [interprétation]
7 Q. Monsieur Raguz, poursuivons en passant au document suivant. 1D 02282.
8 Nous allons passer en revue trois documents, l'un après l'autre, sur la
9 question qui nous intéresse maintenant. Alors, s'agissant de ce document-
10 ci, je vous demanderais de bien vouloir l'examiner. Vous voyez que tout en
11 haut de celui-ci, on voit que c'est une note -- une note du colonel Biskic
12 sur l'organisation humanitaire. Ce colonel dit : "Nous joignons à ce
13 courrier les renseignements obtenus par le service de service de
14 Renseignements du Grand état-major du HVO sur l'organisation humanitaire :
15 'Serious Road Trip HO'."
16 Bien, passons au document suivant. Je vais vous montrer trois
17 documents et je vais vous poser une question. 1D 02281. Donc,
18 1D 02281. Ante Roso, date du 14 décembre 1993, il y est dit : "Sur la base
19 de renseignements et de l'expérience que nous avons accumulés jusqu'à
20 présent, certaines des marchandises déclarées comme étant à caractère
21 humanitaire ont été utilisées de manière exclusive pour répondre aux
22 besoins militaires des forces armées musulmanes." Et ensuite il poursuit en
23 disant : "Conformément aux informations ci-dessous, retirez des convois les
24 marchandises correspondant aux numéros 1, 5, 6, 7 et 10 dans la liste
25 placée en annexe de ce mémo…" et on trouve en effet une liste. Et en
26 tournant la page, on voit que le sujet est une demande d'autorisation de
27 passage du convoi humanitaire, et on aperçoit votre nom en bas et les
28 numéros qui ont été mentionnés par le général Roso ont été entourés d'un
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1 cercle.
2 Et, enfin, examinons le dernier document avant que je vous pose ma
3 question, le document 1D 01856; 1D 01856, document de Marijan Biskic, qui
4 est général de brigade à ce stade. Ce document porte sur les convois
5 humanitaires, il précise ici que, je cite : "Nous avons reçu des
6 informations selon lesquelles un convoi humanitaire du HCR qui entre dans
7 la zone de responsabilité de l'ABiH transportera, outre 34 tonnes de
8 marchandises humanitaires, 95 000 détonateurs -- ou engins explosifs."
9 Les Juges de la Chambre vous ont posé une question tout à l'heure, à
10 savoir -- la question de savoir si vous disposiez d'informations
11 particulières. Pourriez-vous nous faire part de vos commentaires sur ces
12 trois documents ? De quoi parlent-ils ? Que se passe-t-il à ce moment-là ?
13 R. Dans la suite de ce que j'ai déjà déclaré à ce sujet, à savoir qu'il
14 existait des cas de ce type, et je vois, à partir des documents en -- que
15 nous avons sous les yeux, quand cela s'est passé et quelles étaient les
16 organisations humanitaires précises concernées ainsi que les données, donc,
17 qui nous sont présentées, qui sont des données en provenance du
18 renseignement. Ces données en provenance des services de Renseignements
19 montrent donc qu'il y a eu des abus dans la livraison de l'aide
20 humanitaire, abus commis par certaines organisations humanitaires.
21 Q. Très bien. Alors, à moins qu'il y ait des questions de la part des
22 Juges, je vais passer au document suivant. 1D 01854. C'est un protocole
23 découlant d'une réunion présidée par le Dr Jadranko Prlic, tenue à Posusje
24 le 16 décembre 1993. Il y est fait référence à la réunion conjointe du 17
25 octobre 1993 tenue à Medjugorje. On voit Granic -- le Dr Granic, qui était
26 présent, premier ministre de Croatie. Et on constate également qu'entre
27 autres, il a été convenu qu'une Commission conjointe chargée des Affaires
28 humanitaires serait formée. Si l'on examine la deuxième page de ce
Page 31366
1 document, on voit que sont expliqués le mandat et la composition de cette
2 commission, les personnes chargées de la mise en œuvre du protocole, et on
3 voit également que c'est le bureau pour les Personnes déplacées et les
4 Réfugiés qui est chargé donc de l'application de ce protocole.
5 Si l'on regarde la troisième page, au point 6, on voit que le bureau chargé
6 des Personnes déplacées et des Réfugiés convoquera des réunions de la
7 Commission conjointe, et au sous-paragraphe 1, on voit que vous êtes
8 désigné, on voit votre nom, donc que vous êtes désigné comme coordinateur
9 de la Commission conjointe. Alors, en termes très brefs, pourriez-vous nous
10 dire ce dont il s'agit ici ?
11 R. Je ne puis ici que confirmer encore une fois le fonctionnement de cette
12 Commission conjointe, le fait qu'elle s'acquittait correctement des devoirs
13 qui étaient les siens et qu'au cours des réunions hebdomadaires de la
14 commission, tous les signataires du protocole étaient présents et
15 participaient, et parmi eux, les représentants des organisations
16 humanitaires locales et internationales qui transportaient de l'aide
17 humanitaire. Et comme vous pouvez le voir, au -- dans les articles de ce
18 protocole, il est précisé de façon plus détaillée la procédure qui doit
19 être respectée afin que ce qui est transporté soit bien de l'aide
20 humanitaire et non pas autre chose.
21 Ce document nous montre en fait la continuité qui a été celle d'un travail
22 tout à fait sérieux dans ces affaires humanitaires et la coordination de
23 nos activités. Cela est visible par -- cela est visible au nombre de
24 convois humanitaires qui ont transité et à la quantité d'aide humanitaire
25 qui a été transportée, ce qu'on a vu précédemment.
26 Q. Merci. Le document suivant est le document 1D 01873. C'est une lettre
27 du Dr Jadranko Prlic adressée au général Cot -- général Cot, donc, qui
28 porte la date du 23 novembre 1993. J'attire votre attention sur le deuxième
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1 paragraphe de ce courrier. Le Dr Jadranko Prlic suggère que l'organisation
2 de Cot, c'est-à-dire la FORPRONU à l'époque, et je crois qu'il était chef,
3 d'ailleurs, de la FORPRONU, que cette organisation donc convoque une
4 réunion de manière urgente entre les plus hauts représentants des trois
5 factions belligérantes en Bosnie-Herzégovine de façon à ramener la paix
6 immédiatement dans tous les secteurs traversés par les convois d'aide
7 humanitaire, notamment Gornji Vakuf. Et il évoque sa volonté de coopérer à
8 la protection de tous les convois transportant de l'aide humanitaire.
9 Alors, à l'époque, aviez-vous connaissance des efforts consentis par le Dr
10 Jadranko Prlic à cet égard et pourriez-vous nous dire s'il se passait quoi
11 que ce soit de particulier dans le secteur de Gornji Vakuf à ce moment-là ?
12 R. Nous voyons ici une initiative tout à fait concrète visant à organiser
13 une réunion des trois parties belligérantes dans le but de parvenir aux
14 conditions de paix nécessaires pour le passage sans entrave des convois
15 humanitaires. La situation sur laquelle M. Prlic attire ici l'attention
16 était tout à fait alarmante dans les zones mentionnées. Mais,
17 malheureusement, il me semble qu'aucun résultat concret n'a été atteint à
18 cette époque précise, c'est-à-dire à la date du 23 novembre 1993. Il me
19 semble que -- qu'il n'y a pas eu -- que cet appel n'a pas rencontré -- n'a
20 pas eu d'écho particulièrement positif.
21 Q. Bien. Passons au document suivant, 1D 02142, nous voyons que c'est une
22 lettre qui porte la date du 7 décembre 1993, qui est adressée à Mate Boban
23 et qui provient du Dr Mate Granic. On y fait référence à un convoi appelé
24 "White Passage", "Passage blanc," et un autre convoi qui doit quitter
25 Maglaj. On y précise différents itinéraires proposés et approuvés, en tout
26 cas, pour le premier, je suppose, par M. Silajdzic.
27 Avez-vous eu connaissance de l'existence de ce convoi particulier ?
28 R. Oui, j'en avais connaissance.
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1 Q. Regardons le document suivant, 1D 02155. On trouve ici une lettre datée
2 du 23 décembre 1993 et qui provient du Dr Jadranko Prlic et que celui-ci
3 adresse à M. Briquemont, une lettre dans laquelle le Dr Jadranko Prlic fait
4 part de ses griefs sur les résultats tragiques de l'action humanitaire
5 appelée "White Passage", et il précise que : "Le défilé de vos chars et des
6 vos équipes chargées des transport devant les caméras de la télévision
7 pendant que le convoi traversait le territoire de la République croate
8 d'Herceg-Bosna a donné une image fausse au public, à la communauté
9 internationale qui connaît mal les activités menées à bien par les forces
10 du maintien de la paix des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine parce que
11 les journalistes et les caméras n'ont pas pu s'arrêter dans le territoire
12 contrôlé par les Musulmans."
13 Et ensuite, la lettre se poursuit, mais je laisserai aux Juges le soin de
14 prendre connaissance du reste tu texte. Peut-être auront-ils des questions
15 à vous poser. Mais vous souvenez-vous pourquoi le Dr Jadranko Prlic se
16 plaint de la conduite, du comportement et de l'attitude de la FORPRONU à ce
17 moment-là ?
18 R. Ici -- il s'agit ici d'un cas tout à fait concret, d'un convoi
19 humanitaire précis qui était en fait un convoi conjoint, un convoi
20 humanitaire conjoint et commun à plusieurs organisations humanitaires à la
21 fois croates et bosniennes. Il s'agissait d'un convoi qui avait été
22 organisé pour la première fois depuis une longue période de temps et qui
23 devait fournir en aide humanitaire notamment certaines enclaves croates qui
24 étaient restées pendant plus de trois mois sans aide humanitaire.
25 Et vous avez pu voir à l'occasion des précédents documents que le
26 gouvernement croate, lui aussi, faisait pression afin qu'un tel convoi
27 puisse être organisé et que la FORPRONU avait pour devoir de protéger ce
28 convoi. Or, il y a eu des incidents graves avec des morts, lors du passage
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1 de ce convoi, notamment lorsqu'il a quitté la zone sous contrôle du HVO, et
2 c'est ainsi que cette lettre également affirme ce qui suit, je cite : "Le
3 Bataillon de la FORPRONU qui avait pour devoir d'accompagner ce convoi n'a
4 pas été à la hauteur de l'engagement qui aurait dû être le sien." Et
5 reprise de citation : "Nous constatons qu'il existe ici deux poids, deux
6 mesures qui compromettent en fait les relations nécessaires à tous les
7 niveaux de coopération pour les actions humanitaires futures."
8 Q. Bien. Et d'après la compréhension que vous aviez des événements à
9 l'époque, le Dr Jadranko Prlic a-t-il fait une évaluation exacte dans ce
10 courrier adressé à M. Briquemont ?
11 R. Je pense que son évaluation est tout à fait exacte.
12 Q. Bien, passons à l'autre document, et c'est le dernier pour l'instant. A
13 moins qu'il y ait des questions des Juges sur le document précédent, je
14 vais passer donc au document suivant.
15 Si nous passons donc au document suivant, le document P 07669, on constate
16 qu'il porte la date du 26 janvier 1994. Je vous invite à examiner la
17 troisième page de ce document, vous verrez qu'y figurent votre nom et votre
18 signature en qualité de chef du bureau. Veuillez décrire ce dont parle ce
19 document : pourquoi vous vous adressez à ce Dr Miro Jakovljevic ? Je ne
20 sais pas si j'ai bien prononcé.
21 R. Oui, c'est exact. Ma signature figure ici, c'est bien moi qui ai signé
22 cette lettre. Elle est destinée au coordinateur de ces différents projets
23 concernant la Bosnie centrale et les enclaves les plus durement touchées.
24 Et l'un des convois qui -- dont l'organisation est -- l'un des convois dont
25 M. Jakovljevic avait la charge de l'or était celui que nous avons évoqué,
26 donc "White Passage". Ces individus étaient impliqués dans les activités
27 concernant Nova Bila et ils ont brisé le [imperceptible] qui touchait cette
28 localité, et c'est ici -- on exprime ici des remerciements à leur égard.
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1 Q. Et si l'on examine la deuxième page, le dernier paragraphe, vous
2 indiquez que les lieux présentant le plus haut degré d'urgence sont Vitez,
3 Busovac, Novi Travnik, Usora, Zepce et Kiseljak, n'est-ce pas ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Bien. Et puisque vous êtes l'auteur de ce document, je suppose que vous
6 connaissiez la situation qui prévalait dans ces localités. C'est la raison
7 pour laquelle vous les signalez à cette personne et c'est la raison pour
8 laquelle vous lui dites qu'il y a là un besoin urgent d'aide, n'est-ce pas
9 ?
10 R. C'est exact. Il s'agit d'une volonté de voir se poursuivre l'action
11 "White Passage," "Chemin blanc," car il s'agissait de la priorité dans les
12 localités mentionnées, Vitez, Busovac, Novi Travnik, Usora, Zepce,
13 Kiseljak. Il s'agissait de zones prioritaires sous le contrôle du HVO, mais
14 il y avait également d'autres zones qui étaient sous le contrôle de
15 l'armija à l'époque.
16 Q. Nous allons passer à un autre sujet.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il serait intéressant de savoir qui
18 est le Dr -- ou qui était le Dr Jakovljevic. On nous dit qu'il est
19 président ici, mais il y a eu beaucoup de présidents, et il y en a beaucoup
20 dans le monde.
21 M. KARNAVAS : [interprétation] En effet, oui. En effet.
22 Q. Alors pouvez-vous nous dire qui était cette personne ?
23 R. Il s'agit du Dr Miro Jakovljevic, employé -- enseignant à l'université,
24 sans aucune responsabilité militaire, et qui était en charge de
25 l'organisation de convois humanitaires dont le nom était "Chemins
26 humanitaires -- Voies humanitaires pour la paix et l'assistance à la
27 Bosnie-Herzégovine."
28 M. LE JUGE MINDUA : En complément avec la question du Juge Trechsel, peut-
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1 être vous pouvez m'expliquer aussi, dans le paragraphe premier de votre
2 lettre, à la fin, vous dites : "To various parts of Bosnia et Herzegovina
3 on the basis of parity." "Parity;" pourquoi "parity" avec le Dr Jakovljevic
4 ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait d'actions humanitaires -- il
6 s'agissait d'actions qui ont réussi à mettre un terme au blocus humanitaire
7 qui touchait la Bosnie centrale, et cela a pu être atteint grâce à
8 l'engagement conjoint des organisations humanitaires croates et bosniennes,
9 et c'est en ce sens que l'on se réfère à la parité.
10 M. LE JUGE MINDUA : Merci.
11 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, avez-vous une
12 question ? Bien.
13 Q. Passons à un autre sujet, ce nettoyage ethnique dit inversé. Je vais
14 aborder la question sous différents angles, en différentes parties.
15 D'abord, je parlerais de Zenica et de Kakanj.
16 Je vais vous demander de bien vouloir examiner quatre documents en
17 particulier dans un premier temps, et ensuite je vous poserai une question,
18 et je vais aller lentement.
19 Le premier document, c'est le document 1D 02303, du 15 mai 1993.
20 On me dit qu'il n'y a pas d'interprétation.
21 Bien. Le document suivant est le document 1D 02168 du 4 octobre 1993.
22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Vous avez annoncé 2303,
23 et ensuite on lit c'est le 15 mai 1993, et vous passez au document suivant.
24 Or, le précédent ne me paraît pas tellement illustratif. Vous dites le 15
25 mai 1993. Si vous voulez faire comme cela, très bien, je n'insiste pas.
26 Mais si vous souhaitez faire quelque chose avec ce document-là --
27 M. KARNAVAS : [interprétation] Je dois vous demander d'éteindre votre
28 micro. Bien. Alors, nous allons passer un peu plus de temps sur ce document
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1 en effet.
2 Q. Si nous regardons ce document, nous nous rendons compte qu'il est
3 adressé au HCR, à la MOCE et à la Croix-Rouge. Il s'agit d'information sur
4 la guerre à Zenica depuis le 15 avril 1993. Avez-vous eu la possibilité
5 d'examiner ce document ? Dites-nous --
6 R. Il s'agit ici d'un rapport concernant les pertes lors des affrontements
7 à Zenica, et nous avons ici une vue d'ensemble de toutes les pertes,
8 qu'elles soient humaines ou matérielles, qu'il s'agissent des bâtiments du
9 patrimoine culturelle, tout ce qui a été détruit ou endommagé. Et ce
10 rapport a été remis aux organisations internationales. Nous avons ici une
11 vue d'ensemble montrant ce qui s'est passé réellement à cette époque-là, à
12 Zenica.
13 Q. Très bien. Et sous certaines rubriques des activités qui sont décrites,
14 pillages et autres ?
15 R. On peut voir ici, en page 1, que c'est tout d'abord le [imperceptible]
16 Dom qui a été attaqué, qui était le siège des organisations culturelles et
17 religieuses croates : l'Organisation des prisonniers politiques, le
18 bâtiment de compagnie d'assurance, et cetera. Nous avons ensuite une liste
19 des personnes dont les maisons ont été pillées ou minées, et tout cela est
20 ventilé par nom de localités et nom de personnes. Il est visible que la
21 majorité de ces victimes sont des Croates.
22 Q. Et cette information vous parvenait-elle ? Etiez-vous au courant de
23 tout cela ?
24 R. Elle nous parvenait, oui. Bien qu'il s'agisse là d'une période dans
25 laquelle je n'ai pas encore officiellement fonction. Mais je peux vous dire
26 que je m'occupais alors de ces questions malgré tout et que ces
27 informations me parvenaient.
28 Q. Eu égard à la question du Juge Trechsel posée sur la pertinence de ces
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1 informations, nous allons revenir en arrière et nous allons voir que les
2 choses évoluent, et c'est la raison pour laquelle nous pensons qu'il n'y a
3 pas eu de nettoyage ethnique inversé, et ceci explique le fait que nous
4 souhaitions nous pencher sur cette période.
5 J'aimerais maintenant passer au document suivant, le document 1D 02168, du
6 4 octobre 1993. Avez-vous eu la possibilité d'examiner ce document ? C'est
7 un document qui est adressé au Dr Prlic par le vice-président du HVO
8 Kakanj.
9 R. Oui. J'ai eu l'occasion de voir ce document, qui était tout à fait
10 alarmant et qui a consisté la base pour qu'une action soit mise en œuvre
11 afin de venir en aide à ces personnes. Ce document ne fait que montrer à
12 quel point la situation était grave car, comme il est cité ici, il
13 s'agissait de 7 000 habitants qui ont été déplacés en quelques mois, ont
14 été chassés de leurs domiciles à Vares -- qui ont été placés à Vares et qui
15 se trouvent donc dans la situation de personnes réfugiées, déjà plusieurs
16 mois. Et la seule façon de venir en aide à ces personnes compte tenu de
17 l'intensité des affrontements dans cette zone était de les déplacer hors de
18 cette zone touchée par les affrontements les plus durs après tous les
19 traumatismes qu'ils avaient déjà dû traverser, et cela pouvait être atteint
20 au moyen de ces efforts conjoints.
21 Q. Bien. Très brièvement le document suivant est le document 1D 01355. Là
22 encore, il porte sur Kakanj et Zenica. C'est un rapport du bureau des
23 Personnes expulsées et des Réfugiés. Connaissez-vous ce rapport, Monsieur,
24 qui porte la date du 21 octobre 1993 ?
25 R. Oui, j'en ai connaissance. Et nous avons ici un rapport détaillant les
26 endroits où ces quelques milliers de personnes que nous venons juste
27 d'évoquer ont été hébergées, placées. Comme il est visible ici, on ne peut
28 pas parler ici de quelques plans que ce soit. Nous en avons reçu qu'en
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1 octobre les demandes d'aide concernant cette zone et il s'agissait ici en
2 fait de mesures visant à sauver ce qui pouvaient encore l'être. Donc il n'y
3 avait pas d'espace, pas de temps pour quelle planification que ce soit.
4 Q. Bien. Le document 1D 01799, qui porte la date du 30 janvier 1994, et
5 qui porte sur un secteur dont nous n'avons pas encore entendu parler, je
6 crois, Catici. Saviez-vous quelle situation régnait dans ce secteur ?
7 R. Oui. Il s'agit ici des personnes qui ont été chassées, qui ont été
8 placées dans la centrale thermique de Catici. Il se trouve à proximité de
9 Kakanj, et après qu'un grand nombre de personnes a été déplacé de Kakanj,
10 il a été décidé qu'en l'absence de soutien, et elles devaient être
11 déplacées hors de cette zone.
12 Q. Passons maintenant à un autre secteur, celui de Konjic,
13 1D 02202, pour commencer. C'est une liste de demandes exprimées par le HVO
14 de Konjic, qui porte la date du 19 juin 1993; regardez si vous le voulez
15 bien le tout dernier paragraphe, le paragraphe 7, il y est même demandé que
16 M. Tadeusz Mazowiecki vienne sur place et mène une enquête conformément à
17 la convention des Nations Unies sur les crimes de guerre et les crimes
18 contre l'humanité. Ceci est adressé au
19 Dr Jadranko Prlic, entre autres.
20 Connaissiez-vous la situation qui régnait à Konjic ?
21 R. Oui. Nous avons vu hier un rapport dans le cadre dans d'un des
22 documents que nous avons examiné, un rapport du chef de bureau qui s'était
23 rendu dans ces différentes zones et qui à l'occasion de ces visites s'était
24 rendu compte en personne de la situation qui régnait sur place, et cela
25 confirme à quel point la situation était difficile à Konjic.
26 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] J'aimerais apporter une correction
27 au texte. Me Karnavas a fait référence à la convention des Nations Unies
28 sur les crimes de guerre et crimes contre l'humanité; je suppose que vous
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1 faisiez référence aux conventions de Genève sur les crimes de guerre et
2 crimes contre l'humanité. Ce ne sont pas des conversations des Nations
3 Unies. Je voulais simplement corriger le compte rendu.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Prandler. Je suis
5 tout à fait d'accord avec vous. Je ne faisais que lire le texte. La
6 personne, qui a rédigé cette lettre, fait référence à ces conventions comme
7 étant des conventions des Nations Unies, mais une convention des Nations
8 Unies, mais je suis tout à fait d'accord avec vous.
9 Q. Passons au document suivant, le document 1D 01907, du
10 13 août 1993. Là encore, nous avons municipalité de Konjic, mais ce
11 document semble provenir de Ljubuski, les protestations qui y figurent sont
12 extrêmement vigoureuses, et on y dénonce la non-exécution de vos tâches
13 dans la municipalité de Konjic. Cela vient du responsable du bureau des
14 Affaires publiques de Konjic.
15 Les choses se sont-elles améliorées au 13 août 1993 ?
16 R. Je pense que cela n'a pas été le cas, et que jusqu'à la fin de l'année
17 -- ou plutôt, au cours des mois d'octobre et de novembre, la plus grande
18 partie des Croates présents à Konjic ont été obligés de quitter cette
19 localité pour sauver leur vie.
20 Q. Très bien. Examinons maintenant le document 1D 01829. C'est un rapport
21 sur l'expulsion de Croates, qui porte la date du 4 janvier 1994. On y
22 trouve plusieurs chiffres. Ceci émane du chef du service Zovko, Dragica
23 Zovko. Je voudrais savoir si vous connaissiez ces chiffres et si, d'après
24 votre expérience et la connaissance que vous aviez de la situation directe,
25 ces chiffres reflètent bien fidèlement la situation de l'époque.
26 R. Oui, elle les reflète -- elle montre combien de personnes ont été
27 accueillies et en quels endroits pour la période que nous avons évoquée.
28 Nous avons ici le tout début de l'année 1994, et l'on peut dire clairement
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1 à partir du présent document quelles sont les régions depuis lesquelles des
2 réfugiés ont été accueillis donc en provenance de Kakanj, Bugojno, Gornji
3 Vakuf, Novi Travnik, Vares. Il s'agit principalement d'une zone qui était
4 encerclée et qui se trouvait depuis plusieurs mois et jusqu'à ce moment-là
5 dans une situation humanitaire particulièrement difficile.
6 Q. S'agissant de Konjic, je vous demanderais de bien vouloir examiner P
7 07582. P 07582, du 14 janvier 1994, c'est une lettre adressée au Dr Rebic
8 qui est venu déposer ici très longuement, et que vous avez rédigée vous-
9 même. Après avoir examiné ce document et pour en être l'auteur, pourquoi
10 avoir souhaité communiquer avec le
11 Dr Rebic ?
12 R. Il s'agit ici d'une demande tout à fait directe en vue de l'accueil de
13 ces réfugiés, et vous avez vu à l'occasion du document que nous avons
14 examiné précédemment quelle était la situation. Il s'agit donc d'une
15 demande de soutien et une demande d'aide pour l'hébergement d'une partie de
16 ces personnes réfugiées qui se trouvaient dans une situation
17 particulièrement difficile et dont on ne pouvait plus assurer -- on ne
18 pouvait plus prendre en charge.
19 Q. On vous a demandé si l'aide humanitaire avait été distribuée
20 équitablement, je vous demanderais de bien vouloir examiner le document
21 suivant, 1D 02299. C'est une question qui vous a été adressée par les Juges
22 de la Chambre. C'est un document qui porte la date du 24 septembre 1993.
23 Examinez-là. C'est une lettre qui émane du Dr Jadranko Prlic qui est
24 adressée au HCR. Regardez le tout premier paragraphe, le Dr Jadranko Prlic
25 fait remarquer que -- je cite : "Nous avons fait preuve de notre volonté à
26 faciliter le transit et la distribution d'aide sans encombre, mais
27 parallèlement, nous vous informons de la nécessité de répartir, de
28 distribuer l'aide équitablement également à tous ceux qui en ont besoin,
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1 quel que soit le groupe ethnique ou religieux auxquelles les personnes
2 ayant besoin de cette aide appartiennent. "
3 Et ensuite plus loin, nous lisons : "Toutefois, les informations que nous
4 avons reçues, voire information (jointe), ces informations montrent que
5 récemment l'aide tel que le carburant, les vêtements, et cetera, est allé
6 dans les secteurs, les villes, et les localités placées sous le contrôle
7 des autorités musulmanes et que pas le moindre convoi n'avait été envoyé
8 vers Busovaca, Novi Travnik ou Vitez au cours des 25 derniers jours."
9 Puis plus loin au paragraphe 2, on nous -- on lit : "Nous avons été faits
10 savoir que les autorités musulmanes de Konjic ont expulsé les Croates du
11 secteur, de sorte qu'il y a environ 800 réfugiés civils (des femmes, des
12 enfants et des personnes âgées) qui ont besoin d'une évacuation urgente à
13 destination des régions libres d'Herzégovine."
14 Alors connaissiez-vous la situation suffisamment bien à l'époque pour nous
15 dire si oui ou non le Dr Jadranko Prlic fait là un récit fidèle de la
16 situation à M. Jerry Hume du HCR quant à la distribution inégale de l'aide
17 humanitaire ?
18 R. A l'époque qui est celle de ce document, l'enregistrement que nous
19 avons évoqué et examiné des convois humanitaires est déjà en place, et nous
20 avons déjà un certain nombre d'enclaves croates en Bosnie centrale,
21 Busovac, Novi Travnik, Vitez. Il s'agit de la période la plus difficile
22 pour ces enclaves, et je ne peux que confirmer qu'il s'agit là d'une
23 réaction tout à fait légitime et proportionnée adressée aux personnes
24 compétentes.
25 Q. Passons au document suivant, le document 1D 01523. C'est un appel à
26 l'aide -- au secours, qui émane de médecins. Ce document est signé par le
27 Dr Mihajlovic, Zvonko, en date du 20 août 1993. Quelle était la situation à
28 Bugojno, et cette lettre reflète-elle fidèlement la situation à l'époque ?
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1 R. A Bugojno, la situation était particulièrement difficile. D'une part,
2 plusieurs milliers - 10 000 personnes, je pense - ont été obligées de
3 quitter Bugojno. Et d'autre part, d'autres personnes étaient retenues
4 prisonnières. Il s'agit ici de personnalités, de médecins qui envoient un
5 signal d'alarme aux organisations et aux institutions internationales. Il
6 s'agit d'un appel à l'aide, comme il en existait non pas en provenance --
7 comme il en existait non pas uniquement en provenance de Bugojno, mais
8 également d'ailleurs. Et cela montre à quel point cette période était
9 particulièrement difficile et à quel point ces personnes avaient besoin
10 d'aide. Cela est visible dans les activités qui étaient entreprises, non
11 seulement par M. Jadranko Prlic, mais également par d'autres organisations
12 de la HZ HB, et toutes ces tentatives de venir en aide à ces personnes.
13 Q. Passons au document suivant, 1D 01354. Il concerne Vares. Il porte la
14 date du 3 novembre 1993. Il émane du bureau des Personnes déplacées et des
15 Réfugiés. Il est signé par Darinko Tadic. Ici, on voit qu'il est réaliste
16 de s'attendre à l'arrivée d'une importante nouvelle vague de Croates
17 expulsés des enclaves de Vares nouvellement occupées vers les territoires
18 libres et sûrs de la République croate d'Herceg-Bosna, et il lance un appel
19 à l'aide.
20 Alors, vous-même, vous avez été sur place, vous connaissiez la situation,
21 que se passait-il à Vares, et ces Croates expulsés, étaient-ils expulsés
22 par les Croates eux-mêmes, de façon à assurer le nettoyage de cette zone ?
23 R. Il s'agit ici de près de 15 000 civils croates qui étaient en fuite en
24 provenance de Kakanj et en direction de Vares. Ils ont été contraints
25 d'abandonner leurs domiciles en raison des attaques de l'armija sur ces
26 zones. Et ces civils se sont trouvés dans cette zone pendant plusieurs mois
27 dans cette situation de personnes qui ont été chassées.
28 Q. Passons au document suivant, le dernier en l'occurrence sur ce sujet.
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1 C'est le document 1D 02343. C'est un rapport qui porte la date du 16
2 novembre 1993, qui émane du service des Droits humains et des Affaires
3 humanitaires de la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Examinez-le. Nous
4 manquons de temps, mais concentrez-vous alors peut-être sur les deux
5 derniers paragraphes de la première page et le tout dernier paragraphe de
6 la deuxième page de ce rapport. Vous y trouverez un certain nombre de
7 chiffres. Alors pourriez-vous nous dire comment ces chiffres ont été
8 obtenus, ces chiffres présentant le nombre de personnes expulsées ?
9 R. Nous avons déjà évoqué cela, et ces indicateurs -- ces données
10 chiffrées, nous les avons élaborées sur la base des rapports que nous
11 recevions des municipalités et dans lesquels -- il s'agissait donc des
12 rapports des municipalités dans lesquelles ces personnes réfugiées et
13 déplacées avaient été hébergées. Nous recevions donc des informations de
14 Vares, de Kiseljak, de Novi Travnik, de Busovaca, de Zenica, de Konjic. Et
15 le document qui est ici présenté montre une vue d'ensemble de la situation
16 et du nombre de Croates tels qu'ils étaient présents avant la guerre, qui
17 donne également de l'information du nombre de Croates présents à cette date
18 et du nombre d'entre eux qui se trouvent en Bosnie centrale ainsi que le
19 nombre d'entre eux qui a dû fuir et fuir notamment en dehors de la Bosnie-
20 Herzégovine. C'étaient donc des informations qui provenaient des
21 représentants des personnes réfugiées et déplacées.
22 Q. Très bien. Je vous remercie. Maintenant, nous allons passer à un autre
23 sujet, à savoir les statistiques. Et à cet égard, je vais me servir de deux
24 séries de documents, et je commencerai, bien sûr, par le premier, en lisant
25 le numéro lentement, et nous prendrons ces documents un par un. Bien
26 entendu, vous avez déjà eu l'occasion de voir ces documents, mais je vais
27 vous demander de les commenter et ensuite peut-être viendront peut-être des
28 questions des Juges. Je commencerai par le document 1D 0168, qui vient du
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1 bureau des Personnes expulsées, des Réfugiés, et qui porte la date du 9
2 juin 1993. Pourriez-vous brièvement commenter ce document, après quoi nous
3 passerons en revue rapidement les autres documents ?
4 Reconnaissez-vous ce document et pourriez-vous nous dire quel est ce
5 document, si vous le reconnaissez ?
6 R. Je le reconnais. C'est une lettre adressée à l'organisation humanitaire
7 internationale AICF, qui s'occupait de l'aide aux réfugiés installés dans
8 des lieux de logement collectifs. Nous voyons ici un document qui énumère
9 les lieux de logements collectifs où ces personnes sont abritées dans
10 l'ensemble de la région. Il s'agit soit d'écoles maternelles, soit de
11 camions, soit de salles de sport. Et on voit dans ce document que ce sont
12 là que des Croates ont été installés sur le territoire de la Communauté
13 croate d'Herceg-Bosna et que s'agissant de ces lieux d'hébergement
14 collectifs, les conditions étaient particulièrement difficiles.
15 Q. Très bien. Je vais maintenant passer en revue ces documents rapidement.
16 Nous n'avons pas besoin de les commenter. Je vais simplement vous demander,
17 à la fin, si vous reconnaissez ces divers documents, ces divers rapports,
18 et si vous en garantissez toute l'authenticité et la fiabilité s'agissant
19 des statistiques qu'on y trouve.
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Une question, je vous prie. En ligne
21 17 de la présente page du compte rendu d'audience, je vois le mot "trucks"
22 en anglais, "camions." C'est peut-être possible, mais cela m'étonne un peu.
23 J'aimerais demander au témoin ce qu'il en pense.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'un lotissement de wagons, donc
25 cela dit bien ce que ça veut dire. Il s'agit d'une série d'anciens wagons
26 de chemin de fer, qui n'étaient plus utilisés à l'époque.
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci beaucoup. C'est plus
28 compréhensible maintenant. Je vous remercie.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation]
2 Q. D'accord. Alors je vis donner le numéro des documents que je vais
3 aborder maintenant. Un document est le 1D 01800. Vous pouvez y jeter un
4 coup d'œil, Monsieur. Il provient du bureau des Personnes déplacées.
5 Document suivant, 1D 01845, document suivant, 1D 00936, document suivant,
6 1D 01844. Ensuite le document 1D 01802, puis le document 1D 01828, puis le
7 document 1D 01846, puis le document
8 1D 01847, puis le document 1D 01843. Ensuite le document 1D 01801, suivi du
9 document 1D 02021. Ensuite le document 1D 02022, suivi du document 1D
10 02020, puis le document 1D 02462. Ensuite le document
11 1D 01842, le document 1D 01840, puis le document 1D 01841, ensuite le
12 document 1D 01839.
13 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Maître Karnavas, je ne voudrais pas
14 vraiment vous rendre la tâche plus difficile mais vous lisez le numéro d'un
15 nombre si important de documents; quelle valeur cela peut-il avoir si vous
16 vous contentez d'énumérer des numéros ?
17 M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Témoin, veuillez attendre
18 quelques instants. Voici l'objet de ce travail, Monsieur le Juge Prandler.
19 Manifestement, on ne peut pas passer en revue tous ces documents. Si
20 j'essaie de -- d'en demander le versement au dossier par requête, je risque
21 d'être accusé de ne pas avoir indiqué quel était le fondement de leur
22 utilisation. Alors je -- j'ai examiné le premier document. J'ai dit que
23 tous ces documents venaient du bureau des Réfugiés et des Personnes
24 déplacées. Le témoin connaît ces documents, il les a eus sous les yeux et
25 il peut les authentifier. Je ne peux guère faire davantage, vu les
26 circonstances. Si je n'agissais pas ainsi, je devrais procéder par voie de
27 requête.
28 Et, très franchement, avec tout le respect que je dois aux Juges de la
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1 Chambre, au vu des décisions rendues jusqu'à présent, je n'ai guère
2 confiance dans le fait que la Chambre admettra ces documents sans que le
3 fondement en ait été indiqué, donc voilà ce que j'essaie de faire. J'essaie
4 d'être le plus créatif possible, compte tenu des circonstances. J'ai une
5 pratique de plus de 25 ans de mon métier et je dois dire que c'est pour moi
6 le procès le plus étonnant auquel j'ai participé, étant donné la complexité
7 de l'affaire, les contraintes liées au temps et le grand nombre de
8 documents. Donc j'essaie de me montrer créatif pour découvrir la meilleure
9 façon de procéder afin d'arriver le plus rapidement possible à la fin du
10 procès, voilà tout ce que j'ai à dire.
11 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi
12 d'intervenir, mais j'aimerais dire une chose qui est la chose suivante : il
13 y a quelques mois, l'Accusation a également essayé de faire appel à toutes
14 ses ressources de créativité en vue de faire admettre un certain nombre de
15 documents au dossier. Je pense au témoin Christopher Beese en particulier
16 par le truchement duquel l'Accusation s'est efforcée de verser au dossier
17 un certain nombre de rapports de la MOCE au sujet desquels le témoin était
18 prêt à garantir leur authenticité. La Chambre de première instance a refusé
19 d'admettre les documents dans le cadre de l'application d'une telle
20 procédure, et l'Accusation a été ensuite contrainte de chercher d'autres
21 moyens pour obtenir le versement au dossier de tous ces documents.
22 Donc je comprends les difficultés auxquelles est confronté le conseil de la
23 Défense, mais je pense que du côté de l'Accusation, nous nous devons
24 d'insister pour que les procédures appliquées par les deux parties soient
25 les mêmes.
26 M. KARNAVAS : [interprétation] J'aimerais dire quelques mots. Je me
27 rappelle, j'étais ici. M. Skye était le seul membre de l'Accusation présent
28 à l'époque dans le prétoire. Je crois que je ne me trompe pas en disant que
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1 c'est M. Daryl Mundis qui menait l'interrogatoire principal, et bon nombre
2 de ces documents n'étaient pas le fruit du travail de la personne qui
3 témoignait à l'époque -- le témoin n'en était pas l'auteur. Et, bien
4 entendu, il y avait plusieurs bureaux répartis sur le territoire.
5 Alors, c'est là qu'il y a une différence, peut-être M. Stringer pourrait-il
6 calmer son inquiétude si je lui dis la chose qui suit : ces documents
7 viennent tous du bureau des Personnes expulsées. Le témoin était chef
8 adjoint à l'époque, et ensuite il en est devenu le chef. C'était un bureau
9 relativement peu important qui traitait de questions bien particulières, et
10 tous les rapports dont je suis en train de parler venaient de -- du bureau
11 dirigé par le témoin. Il était sur place à l'époque des faits. Il
12 connaissait la réalité de la situation, c'est la raison pour laquelle je
13 lui poser les questions que je lui pose et je l'interroge finalement pour
14 lui demander si ces documents rendent peu ou trop compte dans la situation
15 de l'époque, et cela correspond à ce qu'a dit le témoin qui a répondu par
16 l'affirmative à ce sujet. Donc voilà pourquoi je travaille comme je le
17 fais.
18 Et dans le cas où je ne pourrais pas travailler de cette façon, je suppose
19 que je pourrais procéder par voie de requête. Très franchement, je ne vois
20 pas où est le problème de passer ces documents en revue un par un. Cela ne
21 me pose pas problème. Mais, par ailleurs, je ne -- je n'ai pas suffisamment
22 de temps pour les examiner dans le détail, de la façon dont nous
23 travaillions dans le passé, donc il faut bien qu'une solution soit trouvée.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : -- Beese, qui étaient donc des documents qui
25 faisaient des dizaines, voire des centaines de pages, et vos documents, là,
26 il y a à peu près une dizaine de documents qui sont des chiffres
27 statistiques venant de l'office dont le témoin était un des responsables.
28 Et, moi, de mon point de vue, il n'y a aucun problème si vous procédiez de
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1 la façon suivante, qui consisterait à dire : voilà les documents qui sont
2 sous les cotes ID, et vous donnez les chiffres. Nous avons ensemble, lors
3 du "proofing," vu ces documents. Confirmez-vous que ces documents ont été
4 établis par votre office et dont vous avez eu connaissance ? Le témoin
5 répond : "Oui, je confirme, nous les avons vus un par un." Et, à ce moment-
6 là, vous posez votre question en disant : "Il résulte de l'ensemble de ces
7 documents tel et tel élément, est-ce que vous confirmez ou pas
8 cela ?"
9 Moi, ça me parait faire preuve de créativité d'une justice internationale
10 digne de ce nom, et nous évitons tous les problèmes. Alors, moi, c'est ma
11 position. Mes collègues ne sont peut-être pas de cet avis, mais je tenais à
12 ce que ce soit au transcript. Donc, comme apparemment, il n'y a pas
13 d'opposition de mes collègues, poursuivez.
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien.
15 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi, Maître. Pourrais-je, je vous
16 prie, faire consigner au compte rendu d'audience une objection, après quoi
17 je cesserai d'intervenir car je ne pense pas que nous ayons besoin de
18 consacrer davantage du temps de la Chambre sur ces questions ?
19 Les éléments de preuve seront versés au dossier la semaine prochaine à la
20 fin de l'audition du témoin, et je suis en mesure d'informer les Juges de
21 la Chambre que l'Accusation élèvera une objection par rapport à la demande
22 de versement sur les bases déjà indiquées. Nous estimons qu'il n'y a pas
23 vraiment de différence entre le rapport qu'entretient ce témoin avec les
24 documents qui nous sont présentés maintenant et le lien qu'entretenait M.
25 Beese avec les documents de la MOCE dont il lui était demandé de les
26 authentifier. Donc je ne m'étendrai pas, mais l'Accusation annonce d'ores
27 et déjà qu'elle élèvera une objection.
28 Monsieur le Président, compte tenu du commentaire que vous venez de
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1 formuler, l'Accusation estime que c'est une façon d'ouvrir la voie à un
2 moyen de demander le versement au dossier qui a été interdit à l'Accusation
3 pendant la présentation des charges -- moyen. Mais je me limiterai à cela.
4 Je n'en dirai pas plus pour moment. J'annonce simplement que nous élèverons
5 une objection la semaine prochaine lorsque la demande de versement sera
6 faite.
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour le compte rendu d'audience
8 également, je tiens à indiquer que si je ne me suis pas opposé aux propos
9 du Président il y a quelques instants, je réserve ma position jusqu'à ce
10 que nous ayons eu le temps de délibérer convenablement au sein de la
11 Chambre. Je vous remercie.
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
14 M. KARNAVAS : [interprétation] Document 1D 013 -- 1D 01836, document qui
15 émane également du bureau des Personnes déplacées et des Réfugiés. Document
16 1D 01837 ensuite, puis document 1D 01832, suivi du document 1D 01833,
17 auquel succède le document 1D 01834, puis le document 1D 01835, suivi par
18 le document 1D 01831.
19 Q. Monsieur Raguz, pendant les séances de récolement alors que vous vous
20 prépariez à entrer dans ce prétoire, avez-vous eu la possibilité d'examiner
21 ces documents qui émanent du bureau dont vous avez d'abord été le chef
22 adjoint puis le chef ?
23 R. Oui.
24 Q. Pourriez-vous, je vous prie, expliquer aux Juges de la Chambre dans
25 quelles conditions ces documents ont été élaborés, de façon générale ?
26 Quelle a été la méthodologie qui a présidé à leur élaboration ?
27 R. Dans ces documents - et je vais maintenant, moi aussi, me montrer
28 créatif - nous trouvons une énumération générale des réfugiés, de leur lieu
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1 d'origine, de leur lieu d'hébergement, municipalité par municipalité, donc
2 dans quelle municipalité ils ont été accueillis. On trouve également
3 mention des localités très précisément de -- en Bosnie centrale, Konjic,
4 Vares, Jablanica, et cetera, donc pas seulement les municipalités, mais
5 aussi les localités. Ensuite, il y a la mention des personnes hébergées en
6 lieux d'hébergement collectifs, et puis une mention du nombre total de
7 réfugiés par rapport à la population locale, et sur la base de tout cela,
8 on obtient une vision globale assez précise de la situation qui présidait
9 du point de vue des réfugiés aussi longtemps que le ministère n'a pas
10 confirmé officiellement le nombre total de ces derniers.
11 Q. Je crois comprendre que vous avez parlé de recensement officiel et non
12 d'enregistrements -- ou de registres officiels. Vous pensiez à un
13 recensement officiel du nombre de réfugiés, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, c'est exact.
15 Q. Vous nous avez dit pourquoi on tenait ce genre de registre. Je vous
16 demande pour ma part si les textes législatifs qui ont amené la création de
17 votre bureau exigeaient de vous que vous teniez une documentation
18 comparable à tous ces documents que nous venons d'énumérer ?
19 R. Nous étions tenus d'informer l'institution qui est à l'origine de notre
20 création, donc, d'abord, le Conseil croate de Défense, le HVO, puis le
21 gouvernement. Nous étions tenus de les informer de la situation des
22 réfugiés hébergés sur le territoire tenu par le HVO, et nous devions les
23 informer également de la situation humanitaire d'un point de vue général.
24 Nous ne pouvions le faire que si nous étions bien informés nous-mêmes,
25 c'est-à-dire si nous avions reçu un certain nombre de données chiffrées en
26 particulier, et nous avons accompli ce travail au mieux de nos capacités,
27 mais je puis vous dire que ces renseignements sont réellement de très bonne
28 qualité. Ils ont été établis sur la base de rapports très précis, provenant
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1 des personnes résidant en divers lieux.
2 Q. Très bien. Est-ce que ces renseignements étaient également fournis aux
3 organisations qui travaillaient sur le terrain à l'époque ?
4 R. Nous étions en contact constant avec ces organisations, et de manière
5 générale avec toutes les organisations humanitaires travaillant sur place.
6 Q. D'accord. Ces registres, étaient-ils établis dans le cadre de votre
7 travail quotidien, de votre travail normal ? Est-ce que pour vous c'était
8 une procédure normale que d'établir ce genre de rapports ou les élaboriez-
9 vous ponctuellement selon les besoins du moment ?
10 R. Ces renseignements étaient enregistrés et consignés dans des rapports
11 par le biais du département chargé des analyses. Ils étaient actualisés au
12 jour le jour en fonction des renseignements que nous recevions de divers
13 endroits.
14 Q. Les renseignements que vous receviez et que vous consigniez par écrit
15 dans ces rapports, d'où provenaient-ils ?
16 R. Ces renseignements provenaient de municipalités à partir desquelles les
17 personnes avaient été -- d'où les personnes en question avaient été
18 expulsées. Donc nous recevions des renseignements au sujet du nombre de
19 personnes qui étaient en danger d'expulsion, au sujet des municipalités qui
20 accueillaient ces personnes, au sujet des municipalités qui leur
21 accordaient finalement le statut de personne déplacée ou de personne
22 expulsée, et au sujet des municipalités qui parvenaient à les loger. Donc,
23 nous avons des éléments provenant de toutes ces municipalités, et nous
24 avons des éléments concernant les individus et concernant les groupes, et
25 on trouve tous ces éléments d'information dans les documents que vous venez
26 d'évoquer.
27 Ceci est très important parce que ces documents permettent au lecteur de se
28 faire une idée assez précise du nombre de personnes expulsées et du nombre
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1 de réfugiés. On voit d'où -- de quel secteur provenaient ces personnes et
2 dans quelles conditions elles étaient arrivées là où elles sont arrivées.
3 Ces documents sont la meilleure preuve de l'immense souffrance vécue par la
4 population ainsi que du grand nombre de victimes des événements.
5 Vous m'avez interrogé au sujet de l'expression nettoyage ethnique inversé.
6 Et bien, quand on prend la mesure de la catastrophe humanitaire qui s'est
7 déroulée dans ces régions, on constate que l'importance de cette
8 catastrophe est véritablement historique et qu'elle risque d'influer de
9 façon négative sur l'avenir de la Bosnie-Herzégovine dans l'ensemble. Donc
10 le travail principal était de savoir quelle était la réalité des événements
11 pour faire en sorte que les personnes souhaitant revenir à leur domicile
12 par la suite puissent le faire.
13 Q. D'accord. Etant donné que vous étiez le chef adjoint et plus tard le
14 chef de ce bureau, est-ce que vous étiez tenu, d'une façon ou d'une autre,
15 de vous tenir au courant de ce genre de renseignements et de les mettre par
16 écrit dans des rapports ? On me dit qu'il y a une erreur d'interprétation.
17 Je ne comprends pas le croate. Je n'entends pas l'interprétation.
18 R. Je n'ai pas bien -- à mon avis, la question n'était pas posée
19 clairement. Pourriez-vous la répéter ?
20 Q. Je vais faire une nouvelle tentative. En vous appuyant sur votre poste,
21 à savoir que vous étiez d'abord chef adjoint puis chef du bureau, je vous
22 demande si, dans le cadre de votre travail au quotidien, vous étiez tenu de
23 vous tenir informé du genre de renseignements que l'on trouve consignés par
24 écrit dans les rapports dont nous parlons ?
25 R. En dépit des circonstances, si vous recevez des renseignements et si
26 vous agissez en vue de prévenir une situation, vous pouvez établir ce genre
27 de rapport, mais vous ne pouvez pas établir ce genre de rapport si vous
28 n'avez aucun élément chiffré provenant du terrain.
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1 Q. Et j'en arrive à ma question suivante : est-ce que les renseignements
2 contenus dans ces rapports devaient ensuite être utilisés par vous et par
3 M. Tadic pour aboutir à un certain nombre de décisions relatives à des
4 questions liées à la situation qui évoluait instant après instant, semaine
5 après semaine, mois après mois ?
6 R. Ces éléments ont absolument été utilisés dans le cadre de l'action du
7 bureau et ils ont été utilisés pour satisfaire aux besoins de ces personnes
8 en termes d'habitations, de logements, de transport et d'autres domaines,
9 et ce, à un point tel que, comme vous avez constaté au début du mois
10 d'octobre, on nous a annoncé l'arrivée de 7 000 personnes originaires de
11 Kakanj à Vares. Et en 15 jours, nous avons obtenu les renseignements
12 relatifs à leurs lieux d'hébergement et aux endroits où ils avaient été
13 accueillis. Donc, nous étions tenus de gérer ces renseignements comme nous
14 le pouvions afin d'apporter de l'aide à toutes ces personnes, et c'est ce
15 que nous avons fait.
16 Si vous parlez du bureau et du rôle joué par moi au sein de ce bureau, vous
17 constaterez que nous avons obtenu des renseignements au sujet des convois
18 et que nous sommes parvenus à effectuer un travail responsable et efficace,
19 en dépit des circonstances.
20 Q. Deux questions, encore. Premièrement, nous voyons que vous avez
21 participé au travail de certaines commissions, que vous aviez des contacts
22 avec des représentants d'organisations internationales telles que le HCR.
23 Je me demande si vous utilisiez les renseignements émanant des rapports
24 dont nous sommes en train de parler lorsque vous aviez des contacts avec
25 ces responsables internationaux ou lorsque vous assistiez à ces réunions
26 avec des représentants internationaux ?
27 R. Oui.
28 Q. Enfin, pendant deux journées entières, vous avez été interrogé en
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1 qualité de suspect par le bureau du Procureur, qui avait à sa disposition
2 un certain nombre de documents. Et, bien sûr, vous avez également transmis
3 un certain nombre de documents au bureau du Procureur. Est-ce que des
4 questions liées à votre activité et en particulier aux activités évoquées,
5 décrites et analysées dans les documents dont nous sommes en train de
6 parler, est-ce que des questions de cette nature vous ont été posées
7 pendant ces deux journées ?
8 R. Oui, de telles questions m'ont été posées.
9 Q. Passons maintenant au document suivant, P 09851 --
10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] -- si vous pouvez m'aider à établir
11 le fondement, je vous en prie.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si vous nous aviez communiqué ces
13 documents dans une liasse de documents, peut-être aurions-nous pu les
14 examiner, et cela aurait peut-être été plus efficace, mais j'ai une
15 question à vous poser. Nous voyons qu'il est question d'un flux de réfugiés
16 et de personnes déplacées qui arrivent, et puis elles finissent leur voyage
17 dans diverses municipalités.
18 Qu'est-ce qui explique pourquoi tel ou tel réfugié ou personne déplacée se
19 retrouve dans telle ou telle municipalité plutôt qu'une autre ? Est-ce que
20 l'arrivée dans telle ou telle municipalité se faisait par hasard, ou est-ce
21 qu'il y avait une coordination à ce sujet ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait une coordination, et comme je l'ai
23 déjà expliqué, le bureau participait à cette coordination; en l'absence de
24 coordination, il n'aurait pas pu y avoir d'accueil honnête et sur un pied
25 d'égalité de ce nombre véritablement gigantesque de réfugiés qui ont -- qui
26 sont arrivés dans la région.
27 Et vous verrez à la lecture de tous ces éléments d'information que toutes
28 les municipalités ont accueilli un certain nombre de réfugiés. Il n'y a pas
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1 eu de réticence de la part de telle ou telle muni, chacune accueillait le
2 nombre maximum qu'elle pouvait accueillir.
3 Et puis j'ajouterais que les réfugiés ne sont pas arrivés uniquement dans
4 les municipalités; 200 000 réfugiés environ ont fini leur voyage en Croatie
5 ou dans des pays étrangers. C'était le cas en particuliers d'un grand
6 nombre de Musulmans de Bosnie. Plusieurs centaines de milliers d'entre eux
7 ont abouti en Croatie ou dans d'autres pays.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Et le bureau dont vous parlez est
9 bien votre bureau, le bureau chargé des Personnes déplacées et des Réfugiés
10 ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que les municipalités,
13 lorsque vous leur attribuiez un certain nombre de réfugiés, étaient en
14 droit de refuser de les accueillir ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, Monsieur le Juge, nous n'avons
16 jamais fait la moindre proposition à cet égard sans avoir obtenu au
17 préalable l'assentiment de la municipalité concernée. En l'absence de
18 solidarité, nous n'aurions absolument rien pu faire. Ce genre de travail ne
19 peut pas se retrouver simplement et sèchement dans un certain nombre de
20 paragraphes écrits. Ce dont nous parlons ici, c'est de l'expression d'une
21 solidarité qui laissera une marque durable et profonde de l'histoire.
22 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Votre réponse est tout à fait
23 plausible. Merci.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : -- courte question. Pendant que
25 Me Karnavas vous posait des questions et que vous répondiez, je vous ai
26 écouté et je regardais en même temps la dizaine de documents qui
27 permettaient à un Juge en quelques minutes de regarder le contenu de ces
28 documents, et en regardant ce document, mon attention a été appelée sur le
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1 document 1D 0100835 qui concerne Vares. Et nous savons que des réfugiés de
2 Kakanj étaient venus à Vares et ensuite, en raison de l'offensive de l'AbiH
3 et notamment des événements de Stupni Do, la population de Vares croate va
4 quitter Vares.
5 Et d'après ce document 1D 0100835, il est indiqué que 15 000 habitants ont
6 quitté Vares, ce qui est un chiffre très important. Mais dans d'autres
7 documents que nous avons vus au cours de la journée, j'ai constaté que
8 parfois, il y a des documents qui pour Vares disaient 5 000, et puis
9 d'autres 3 000, et donc je me suis dit tiens, il y a des chiffres
10 différents en fonction des documents. Alors Me Karnavas vous a posé des
11 questions techniques pour savoir comment étaient élaborés ces documents, ce
12 qu'un juge d'instruction dans un pays de "civil law" aurait fait de la même
13 façon, et vous avez répondu. Alors, dans ce document 1835, il y a le
14 chiffre de
15 15 000; alors c'est un chiffre approximatif ou bien étayé par des registres
16 très précis des localités ?
17 Et mon collègue le Juge Trechsel tout à l'heure vous a posé la
18 question de savoir mais comment étaient répartis ces réfugiés. Alors, est-
19 ce que ce chiffre de 15 000 est l'addition des registres dans les
20 municipalités où ils ont été par la suite, et notamment Kiseljak, Kresevo,
21 ou bien c'est une évaluation globale -- une évaluation empirique ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, d'avoir posé
23 cette question particulièrement pertinente car, dans ce document que vous
24 mentionnez, il est question de 15 000 Croates en tout qui ont été chassés
25 du territoire de la municipalité de Kakanj, or, ces personnes réfugiées
26 sont arrivées non pas tous en même temps, mais par vagues successives d'un
27 certain nombre de personnes à chaque fois, et à chaque fois placées à
28 certains endroits. Il y avait plusieurs convois de réfugiés, un convoi de 4
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1 000, un autre convoi de plusieurs milliers de personnes, d'autres convois
2 plus petits, et c'est la somme de tout cela qui permet d'aboutir à ce
3 chiffre total.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette précision.
5 M. KARNAVAS : [interprétation]
6 Q. Très bien. Très bien. Monsieur Raguz, examinons un dernier document sur
7 ce point, c'est le document P 09851. P 09851.
8 M. STRINGER : [interprétation] C'est un document qui est -- qui a été versé
9 sous pli scellé, Monsieur le Président.
10 M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien. Effectivement, si ce document est
11 sous pli scellé, je suppose qu'il ne faut pas qu'il soit diffusé à
12 l'extérieur, mais il faut l'examiner néanmoins.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc ou on ne le montre pas à l'exact, mais vous
14 pouvez poser des questions sur le document.
15 M. STRINGER : [interprétation] Peut-être qu'il faudrait passer en audience
16 à huis clos partiel, parce que le témoin par le biais duquel cette pièce a
17 été présentée a été entendu à huis clos partiel, ou en tout cas à huis
18 clos.
19 M. KARNAVAS : [interprétation] Je ne mentionnerai pas le nom du témoin,
20 mais je ne veux pas cacher la vérité au public. Voilà quel est le problème.
21 Je crois qu'il est important que le public sache ce qu'il est dit, parce
22 que il y a eu beaucoup de désinformation -- de désinformation et de
23 propagande, et c'est la raison pour laquelle je fais cette demande.
24 M. STRINGER : [interprétation] Attention, c'est un document qui a été versé
25 sous pli scellé au titre de l'article 70 du Règlement. Il n'est pas
26 possible de parler de ce document en public, sous quelle forme que ce soit.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Les Juges préfèrent qu'on aborde l'examen de ce
28 document à huis clos. Ce qui compte, c'est -- bon, le public, c'est vrai,
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1 mais également que les Juges aient une vision exacte de ce qui a pu se
2 passer, donc on passe à huis clos pendant quelques instants.
3 Monsieur le Greffier.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
5 Juges, nous sommes en audience à huis clos partiel.
6 [Audience à huis clos partiel]
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25 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
26 M. KARNAVAS : [interprétation]
27 Q. Alors regardons le document 1D 00669, c'est une décision qui porte sur
28 l'usage de biens immobiliers par des personnes physiques. La date est celle
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1 du 2 décembre 1992, ce document émane de la municipalité de Mostar, c'est
2 un document signé par Jadran Topic qui était président à l'époque.
3 Si nous regardons un autre document, le document 1D 01892, nous verrons que
4 c'est un document qui porte la date du 22 décembre 1993. C'est un décret
5 interdisant les transactions immobilières en temps de guerre alors qu'une
6 menace directe de guerre pèse. C'est un document qui est signé par le Dr
7 Jadranko Prlic.
8 Sont-ce là les instruments juridiques auxquels vous pensiez lorsque
9 vous avez répondu que le transfert de titres de propriétés était interdit
10 par la loi ?
11 R. Oui. Des textes de loi interdisent donc le transfert de titres de
12 propriétés entre personnes physiques pendant la durée de l'état de guerre
13 sur la municipalité -- le territoire de la municipalité de Mostar pour le
14 premier document.
15 Quant au deuxième document, il a trait à -- à la zone couverte par la HZ
16 HB.
17 Q. Merci. Nous allons changer de sujet un petit peu. Il reste deux petites
18 questions que j'aimerais aborder avec vous.
19 1D 02631, 1D 02631. Regardez ce document, vous verrez que c'était une
20 demande d'aide visant à obtenir un visa de transit pour pouvoir transiter
21 donc en République de Croatie. Nous n'en avons pas beaucoup parlé, mais
22 pensez-vous être suffisamment compétent en la matière pour nous parler de
23 ce genre de formulaire, de demande, et nous dire quels étaient les visas de
24 transit qui étaient utilisés à l'époque compte tenu des activités et des
25 fonctions que vous exerciez à l'époque ?
26 R. J'ai connaissance que, dans un certain nombre de cas, le bureau pour
27 les réfugiés de la République de Croatie a délivré des visas de transit. Il
28 s'agissait là d'une mesure prise par le gouvernement de la République de
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1 Croatie qui, face au nombre considérable de réfugiés auxquels il était
2 confronté, souhaitait avoir une estimation des possibilités d'hébergement
3 et avoir également la garantie que les personnes entrant sur le territoire
4 de la République de Croatie sont -- sont véritablement en partance vers un
5 pays tiers comme cela est indiqué dans leurs visas de transit. Les
6 municipalités -- ou plutôt, les centres -- les centres sociaux et les
7 bureaux du -- de la Croix-Rouge étaient les organismes qui offraient, en
8 quelque sorte, leurs services aux personnes souhaitant partir pour un pays
9 tiers. Et c'est le cas ici, dans ce document en particulier, on voit que
10 l'individu signe avec son nom et prénom et il était nécessaire d'obtenir
11 une garantie pour obtenir satisfaction d'une demande de ce type, il fallait
12 donc une garantie que la personne faisant la demande serait prise en charge
13 entièrement et donc -- tout particulièrement hébergée dans son pays de
14 destination. Il s'agissait de demandes individuelles dans le plus grand
15 nombre de cas. Et c'est ce que je puis dire à ces sujets principalement.
16 Je peux également dire que le bureau des Réfugiés à Zagreb, après avoir
17 assemblé les requêtes de ce type, les approuvait généralement dans la
18 mesure où elles satisfaisaient les critères requis, à savoir cette lettre
19 de garantie assurant la prise en charge de la personne dans son pays de
20 destination et la sécurité de la personne dans ce pays de destination. Et
21 les réponses étaient généralement positives.
22 Q. Bien. Une dernière question sur ces visas de transit. Y avait-il
23 collusion, quelle qu'en soit la forme, entre la Communauté croate d'Herceg-
24 Bosna et la République de Croatie consistant à utiliser ce type de visas de
25 transit à des fins de nettoyage ethnique de certaines parties de la Bosnie-
26 Herzégovine de sa population musulmane ?
27 R. Le simple fait qu'un très petit nombre de personnes par rapport au
28 nombre total de réfugiés ait recouru à ce type de moyen pour partir dans
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1 les pays -- dans des pays étrangers est un argument montrant que cela n'a
2 absolument pas pu être utilisé à des fins de nettoyage ethnique.
3 Deuxièmement, la procédure elle-même prévoyait une vérification du
4 fait que les personnes faisant ce type de demandes partaient effectivement
5 là où les conditions seraient les meilleures pour elles, là où elles
6 seraient en mesure de retrouver les membres de leurs familles ou de trouver
7 une situation sûre.
8 Q. Passons au tout dernier document --
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, j'aimerais poser une
10 question au témoin. Vous avez dit qu'un nombre très limité de personnes --
11 qu'entendez-vous par là, le savez-vous ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Selon ma propre estimation, il ne pourrait
13 s'agir tout au plus que de quelque milliers de personnes, au maximum, par
14 rapport aux millions de personnes -- un million de personnes qui se sont
15 retrouvées réparties dans un grand nombre de pays de par le monde. Mais je
16 pense qu'il n'y a pas eu plus de 1 000 ou 2 000 visas de ce type qui ont pu
17 être délivrés, et le bureau compétent, situé à Zagreb, dispose certainement
18 des informations en rapport avec cela.
19 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] J'aimerais vous poser une question.
20 Monsieur Raguz, vous avez fait une comparaison avec un million de personnes
21 qui s'est rendu dans un grand nombre de pays de par le monde, une centaine
22 peut-être. Si mon souvenir est bon - mais que l'on me corrige si j'ai tort
23 - d'après le recensement en Herceg-Bosna, il y avait entre 800 et 900 000
24 Croates. Je ne sais plus très bien quel est le chiffre exact. Alors ce
25 million semble être une exagération. Je me demande donc quel serait le
26 chiffre que vous pourriez nous donner maintenant.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce nombre représente le nombre total de
28 réfugiés provenant de la Bosnie-Herzégovine et non pas uniquement ceux
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1 provenant de la HZ HB. Il s'agit là des chiffres tout à fait officiels qui
2 rassemblent les réfugiés à la fois serbes, bosniens et croates qui ont
3 trouvé refuge en dehors de la Bosnie-Herzégovine.
4 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci. C'est clair. Il ne s'agit pas
5 seulement de Croates d'Herceg-Bosna, mais d'un chiffre qui prend en compte
6 toute la population de la Bosnie-Herzégovine. Très bien.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.
8 M. KARNAVAS : [interprétation]
9 Q. Pendant que nous parlons de cela, avant que les affrontements entre les
10 Croates et les Musulmans, et compte tenu de l'expérience qui était la vôtre
11 dans le cadre des fonctions que vous exerciez à ce moment-là, savez-vous si
12 les Musulmans et les Croates qui étaient devenus personnes déplacées ou
13 réfugiés étaient partis vers d'autres pays, c'est-à-dire au-delà donc de la
14 Croatie, avant les affrontements entre les Croates et les Musulmans. Nous
15 disposons d'éléments de preuve selon lesquels il y a eu des vagues
16 importantes de personnes déplacées suite à l'agression.
17 R. Absolument.
18 Q. Nous parlons donc de la période préalable à la date d'avril 1993 ?
19 R. Tout à fait. C'est-à-dire la période qui s'étend pratiquement à partir
20 du début et non pas uniquement à partir de 1992. N'oublions pas que
21 l'attaque qu'a subi Ravno a eu lieu en septembre 1991, et c'est à partir de
22 ce moment-là déjà et jusqu'à la période dont nous parlons, c'est-à-dire un
23 peu plus d'une année, nous avons déjà plus d'une centaine de milliers de
24 personnes qui ont été contraintes de quitter leur domicile.
25 Q. Très bien. Passons au tout dernier document, P 06324. P 06324. Et je
26 dirais, aux fins du compte rendu, que c'est un extrait tiré de P 06323. De
27 façon à ce qu'il n'y ait pas de doute, c'est un rapport sur le travail du
28 gouvernement de la République croate d'Herceg-Bosna pendant la période de
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1 novembre 1993 à mars 1994. C'est une partie seulement de ce rapport, je le
2 rappelle, qui porte surtout sur le bureau chargé des personnes déplacées et
3 des réfugiés.
4 Avez-vous eu la possibilité de prendre connaissance de ce document,
5 Monsieur ?
6 R. Oui.
7 Q. Bien. Le reconnaissez-vous ?
8 R. Je le reconnais.
9 Q. Bien. Cette partie du rapport, puisqu'elle fait référence à votre
10 bureau, m'amène à vous poser la question suivante. Qui aurait été chargé de
11 la rédiger, cette partie du rapport ?
12 R. Comme vous pouvez le voir, ici nous avons un rapport détaillant le
13 travail de chacune des sections du bureau. Vous avez donc la section
14 chargée de la Prise en charge des réfugiés, la section chargée du Travail
15 analytique, la section de l'Aide humanitaire, la section chargée de la
16 Reconstruction.
17 Q. [aucune interprétation]
18 R. Il s'agit donc d'un rapport d'ensemble pour toutes les sections.
19 Q. Bien. J'aimerais attirer votre attention sur la section et service
20 chargé des Personnes expulsées et des Réfugiés.
21 M. KARNAVAS : [interprétation] En page 3, Messieurs les Juges, de ce
22 document. A vos souhaits.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]
24 M. KARNAVAS : [interprétation]
25 Q. Tout en haut, donc le premier paragraphe, où on lit : "Malheureusement,
26 en octobre 1993, l'hôtel Bigeste à Ljubuski, qui était en cours de
27 rénovations par les organisations internationales humanitaires fonctionnait
28 en tant que lieu d'accueil pour plusieurs milliers de personnes déplacées
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1 qui y ont logé plus ou moins longtemps."
2 Dans le rapport d'origine, ceci figure à la page 128, donc 128 du rapport
3 complet.
4 Avez-vous trouvé ce passage, Monsieur ? L'avez-vous trouvée ?
5 R. Oui.
6 Q. Bien. Alors, s'agissant de Ljubuski, pourriez-vous, s'il vous plaît,
7 nous parler de ce lieu d'accueil -- de ce centre d'Accueil ?
8 R. Oui, je peux vous en parler. Ljubuski était l'une des municipalités qui
9 ont été touchées par certaines des vagues les plus importantes de réfugiés,
10 et cela pas uniquement durant cette période, mais pendant toute la durée de
11 la guerre. Et dans ce rapport, il est question du mois d'octobre 1993. Il y
12 est mentionné l'hôtel Bigeste, qui existait bien alors à Ljubuski, mais
13 n'offrait absolument pas les conditions nécessaires à l'hébergement de
14 réfugiés. Il est donc précisé qu'avec le concours des organisations
15 internationales -- les organisations humanitaires internationales, cet
16 hôtel a été transformé en centre d'accueil. Il est également précisé qu'au
17 cours de cette période que nous avons déjà évoquée au cours de laquelle on
18 très grand nombre de réfugiés arrivaient quotidiennement, un accueil de
19 qualité a été rendue possible dans le cadre de cet hôtel, un accueil et un
20 soutien pour personnes réfugiées.
21 L'INTERPRÈTE : Sans micro pour Me Karnavas.
22 M. KARNAVAS : [interprétation]
23 Q. Alors, pour que tout soit parfaitement clair, ce centre d'Accueil,
24 lorsqu'il a été établi, l'a-t-il été pour assurer le nettoyage ethnique des
25 Musulmans ? Etait-ce l'objet de ce lieu ? Devait-il servir de moyen de
26 nettoyage ethnique inversé des Croates ou a-t-il été mis en place pour
27 faire face à la crise humanitaire, et si tel est le cas, qui ont été les
28 premiers occupants de ce centre d'Accueil ?
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1 R. L'objectif était exclusivement humanitaire. C'est cet objectif qui a
2 conduit à la rénovation de cet hôtel, et d'ailleurs, cette rénovation
3 n'aurait pas été possible sans l'aide des organisations humanitaires
4 internationales. Il n'y avait absolument aucune forme de discrimination.
5 Tous ont pu y être accueillis, aussi bien Croate que Bosnien, et un grand
6 nombre de Croates ont pu être accueillis dans cet hôtel.
7 Q. Une dernière question, que je ne devrais peut-être même pas poser, mais
8 je vais le faire quand même. Nous voyons que c'est un centre d'Accueil.
9 Qu'est-ce qu'un centre d'Accueil ? En réalité, y a-t-il une distinction
10 particulière que l'on puisse établir entre un centre d'accueil et un autre
11 type de centre, par exemple ?
12 R. Il existe des différences, par exemple, au sens où il s'agit d'un type
13 de logement collectif, à savoir destiné à un certain nombre de personnes
14 réfugiées ou qui ont été chassées. C'est donc un centre collectif alors que
15 dans les documents précédents, et nous avons vu cela municipalités par
16 municipalités, nous avions également un certain nombre de centres
17 d'hébergement collectif les réfugiés arrivaient quotidiennement, et il y
18 avait également des centres d'Accueil dans lesquels ces réfugiés arrivant
19 quotidiennement en vague plus ou moins importante pouvaient être
20 accueillis. Et c'était donc un autre type de centre qui était nécessaire
21 pour pouvoir répondre au besoin et aux souffrances de ces personnes. Il y a
22 là rien de nouveau. Cet autre type de centre nous l'avons déjà vu existait
23 dans d'autres localités de Bosnie-Herzégovine.
24 Q. Je vous remercie infiniment, Monsieur Raguz. Je suis désolé que cet
25 interrogatoire ait été un petit plus long que prévu. Je vous remercie
26 d'avoir fait preuve d'ouverture et de sincérité dans vos réponses et je
27 vous invite à répondre de la même manière aux questions qui vous seront
28 posées par d'autres que moi. Merci.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors les autres avocats. Maître Nozica.
2 Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. La Défense
3 Stojic n'a pas de questions à poser à ce témoin.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est la journée des bonnes nouvelles.
5 Maître Kovacic.
6 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme je l'ai déclaré
7 précédemment, la Défense Praljak n'aura pas de questions à poser à ce
8 témoin. Merci.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
10 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense Petkovic
11 préférerait vous apporter la bonne nouvelle qu'elle n'a pas de questions,
12 toutefois, nous estimons que ce témoin pourrait nous aider à clarifier
13 certains aspects dans cette affaire.
14 Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :
15 Q. [interprétation] Nous saluons MM. les Juges. M. le Témoin, M. Raguz. Et
16 je voudrais, au nom de la Défense Petkovic, vous poser une ou plusieurs
17 questions lorsque vous avez répondu à la question de Me Karnavas dans
18 laquelle il a évoqué l'ouvrage de Lord Owen et la conversation entre ce
19 dernier et Alija Izetbegovic, concernant la question de savoir si les
20 enfants et les femmes devaient être ou non être évacués d'une ville soumise
21 à des attaques, et donc répondant à cette question, vous avez dit ne pas
22 souhaiter vous livrer à des spéculations, et qu'Alija Izetbegovic et son
23 gouvernement auraient retenu volontairement des femmes et des enfants dans
24 la ville de Sarajevo qui était alors bombardée.
25 Et qu'il était manifeste que le gouvernement de Bosnie-Herzégovine
26 souhaitait ainsi attirer l'attention de la communauté internationale sur le
27 fait que des femmes et des enfants se trouvaient parmi les victimes de ces
28 bombardements, et que certains buts politiques étaient ainsi atteints. Vous
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1 souvenez-vous de cette réponse qui était la vôtre, et qui est consignée en
2 pages 28 et 29 du compte rendu d'hier ?
3 R. J'aimerais bien revoir ce passage. Je pense que vous ne m'avez pas cité
4 exactement.
5 Q. Je vais donc procéder à la lecture. Vous avez affirmé ce qui suit, je
6 cite : "Il était nécessaire de retenir les femmes et les enfants à
7 Sarajevo" - et je saute ici un passage - "Cela était politiquement
8 nécessaire, je ne voudrais pas entrer en détail dans cette question. Mais
9 il est un fait que le gouvernement de Sarajevo souhaitait que l'intention
10 du public dans le local international souhaite attirer sur de telles
11 questions et cela pour des raisons d'ordre politique."
12 R. Cela est exact, mais cela diffère de ce que vous avez dit et cela de
13 façon tout à fait essentielle car je n'ai pas dit qu'ils ont sacrifié ces
14 personnes. J'ai dit que des femmes et des enfants ont été victimes de cette
15 situation.
16 Q. Oui, c'est exact.
17 R. Il faut clarifier cela.
18 Q. Ma question ne contenait à aucun moment la notion d'avoir "sacrifié,"
19 qui que ce soit et notamment les femmes et les enfants. Je voudrais à
20 présent que nous nous intéressions, et cela même si vous n'avez pas vécu
21 longtemps à Mostar, si séjourner longtemps là-bas, si vous avez
22 connaissance de la situation à Mostar Est dans la deuxième moitié du 1993,
23 j'aimerais savoir si la connaissance que vous avez de cette situation est
24 insuffisante et si elle vous permet de proposer un commentaire de cette
25 situation.
26 R. Oui, je peux commenter la situation telle qu'elle existait à cette
27 époque. Il y avait alors des affrontements féroces à Mostar, et la
28 situation humanitaire était particulièrement complexe.
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1 Q. Je vais vous poser un certain nombre de questions très concrètes
2 fondées sur des documents qui ont déjà été versés au dossier et sur la base
3 également de témoignage de représentants d'organisations internationales.
4 Ma première question a trait à la possibilité pour les habitants de Mostar
5 Est de quitter Mostar Est, les habitants qui au cours de la seconde moitié
6 de 1993 ou plus tard auraient souhaité quitter Mostar Est, mais qui ce
7 serait vu refuser cette possibilité par les autorités locales.
8 En avez-vous connaissance ?
9 R. Vous pensez aux autorités de Mostar Est ?
10 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi. C'est toujours le même
11 problème que je rencontre. Puis-je vous demander, s'il vous plaît, Maître
12 Alaburic ainsi que Monsieur le Témoin, de faire une pause entre question et
13 réponse et cela pour les interprètes, s'il vous plaît ?
14 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi. Monsieur le Juge, je voudrais
15 juste faire une objection à ce stade car je pense que l'interrogatoire de
16 Me Alaburic sort du cadre du contre-interrogatoire.
17 Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'estime qu'il s'agit
18 là, avec la situation humanitaire à Mostar Est, d'un sujet qui est tout à
19 fait dans le cadre de l'interrogatoire principal. Mais si vous estimez
20 qu'il en ait autrement, je suis tout à fait d'accord pour que le temps que
21 je vais passer à mon interrogatoire soit décompté de la Défense Petkovic.
22 Vous auriez ensuite le loisir de décider s'il s'agit d'un contre-
23 interrogatoire ou non.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, vous avez posé la base de la
26 question parce que, lors de l'interrogatoire principal,
27 Me Karnavas avait donc posé au témoin des questions sur Sarajevo, et le
28 témoin nous a dit qu'il y avait eu des victimes à Sarajevo, et cetera. Et
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1 je pense que vous voulez transposer la situation telle qu'elle s'est
2 déroulée à Sarajevo à Mostar. C'est ça votre objectif, bien que Me Karnavas
3 a abordé ça de façon très incidente. Ce n'était pas l'objet principal de
4 son interrogatoire.
5 Bon. Alors à ce stade, bon, les Juges là qui viennent de se concerter,
6 pensent qu'on devrait vous déduire tout le temps que vous avez passé là-
7 dessus, alors allez-y.
8 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je proposerais que
9 vous rendiez une décision définitive à ce sujet après que j'ai passé en
10 revue les documents que j'avais prévus d'examiner, et après j'adopterai une
11 autre façon de procéder.
12 Monsieur le Président, je vous demanderais que nous passions à huis clos
13 partiel, alors je vais maintenant m'occuper d'un document dont nous avons
14 parlé tout à l'heure à huis clos partiel également.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
17 Juges, nous sommes maintenant à huis clos partiel.
18 [Audience à huis clos partiel]
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9 [Audience publique]
10 Mme ALABURIC : [interprétation]
11 Q. Penchons-nous ensemble sur un document que vous connaissez peut-être,
12 c'est le livre d'Esad Sejtaonvic, qui constitue le document 4D 00545.
13 L'auteur en est Esad Sejtanovic, et il concerne l'Herzégovine. Nous avons
14 traduit un passage qui est pour nous important, je cite : "La situation à
15 l'intérieur de la ville et dans les environs devenait de plus en plus
16 difficile. La faim régnait de toutes parts, le peu de nourriture, qui
17 arrivait -- qui entrait à Mostar à partir de Jablanica en passant pas
18 Glogova, était distribuée à un grand nombre d'habitants qui souhaitaient
19 quitter Jablanica et aller plus loin en Bosnie en raison des mesures
20 répressives qui étaient en vigueur. Et, malheureusement, nous sommes
21 parvenus à empêcher ou à réduire le nombre de personnes qui se déplaçaient
22 et nous avons limité possibilités de circulation au minimum."
23 Mais, Monsieur Raguz, est-ce que vous avez lu cet ouvrage ?
24 R. Je connais cet ouvrage. Je ne l'ai pas lu, mais ce qui est dit ici est
25 clair à mes yeux.
26 Q. Mais cela correspond-il selon vous à la réalité de la situation, est-ce
27 que cette réalité était possible ?
28 R. Oui, c'est tout à fait possible.
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1 Q. Dans les documents que nous avons examinés jusqu'à présent, on trouve
2 des références aux habitants qui quittaient Mostar Est pour se diriger vers
3 Jablanica. Vous êtes au courant du fait qu'il existait un corridor qui
4 permettait des contacts entre Mostar Est et Jablanica, et il était possible
5 de passer d'un lieu à un autre sans encombre plus ou moins facilement
6 pendant toute la période, n'est-ce pas ?
7 R. Je connais l'existence de ce corridor.
8 Q. Est-ce que vous êtes au courant du fait que le corridor a été utilisé
9 par l'ABiH pour recevoir des armes et des munitions, et ce, régulièrement ?
10 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
11 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis
12 malheureusement pas Me Nozica; j'aurais beaucoup aimé être Me Nozica, mais
13 avec plaisir je satisferai à votre demande.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : -- mais, Maître Alaburic, excusez-moi, pourriez-vous
15 ralentir ?
16 Mme ALABURIC : [interprétation] Absolument, Monsieur le Président.
17 Q. Donc, Monsieur Raguz, ma question était la suivante : avez-vous, à
18 quelque moment que ce soit, entendu dire que l'armée de Bosnie-Herzégovine
19 se serait servi de ce corridor pendant toute la durée du conflit pour
20 recevoir des armes et des munitions, mais également des renforts par l'aide
21 apportée concrètement par d'autres unités de l'ABiH qui venaient d'autres
22 régions de la Bosnie ?
23 R. Je pense que moi.
24 Q. Monsieur Raguz, le Témoin M. Thornberry, je suppose que ce nom vous dit
25 quelque chose. Cedric Thornberry, vous le connaissez, n'est-ce pas ?
26 Pourriez-vous répondre ?
27 R. Son nom m'est connu. Oui, je connais son nom.
28 Q. Il nous a dit ici qu'à la fin du mois d'août et durant le mois de
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1 septembre, une campagne médiatique a eu lieu qui visait à sensibiliser la
2 population des pays occidentaux par rapport à la situation humanitaire très
3 difficile vécue par les habitants de Mostar Est. Les auteurs de cette
4 campagne s'attendaient à ce que les opinions publiques des pays occidentaux
5 fassent pression sur leurs gouvernements respectifs afin que des mesures
6 plus énergiques soient prises pour apporter de l'aide à Mostar. Pour ceux
7 qui souhaitent vérifier les propos de M. Thornberry, j'indique qu'ils
8 figurent aux pages 26 275, 26 276 et 26 277 du compte rendu d'audience.l
9 Dites-nous, Monsieur Raguz : avez-vous une quelconque information quant au
10 fait que les médias étrangers ont effectivement mené une campagne de presse
11 pour présenter la situation à l'intérieur de Mostar Est d'une façon que
12 l'on peut qualifier de -- d'unilatérale -- de partiale, et qu'ils ont
13 exagéré certaines difficultés vécues à Mostar Est pour obtenir un
14 changement radical de la politique de certains pays occidentaux par rapport
15 à Mostar ? Est-ce que vous avez des renseignements à ce sujet ?
16 R. Tout ce que je peux confirmer, c'est qu'une campagne médiatique très
17 intense a été menée. Il faudrait analyser les différents composants de
18 cette campagne pour être exhaustif, mais ce que vous venez d'évoquer a été
19 très certainement l'un des éléments composant cette campagne.
20 Q. Compte tenu de votre réponse, est-ce que je peux conclure qu'en
21 réalité, vous ne vous rappelez pas les différents éléments constitutifs de
22 cette campagne et que vous ne pourriez pas nous dire quelles étaient les
23 principales idées développées durant cette campagne ?
24 R. Dans le cas précis, vous avez raison; c'est exact.
25 Q. Dans ce cas, je n'ai pas d'autres questions à poser au témoin, et je
26 remercie la Chambre pour le temps qui m'a été alloué.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Alaburic. Je ne me suis pas trompé
28 cette fois-ci.
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1 Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. La
2 Défense du général Coric n'a pas de questions à poser à ce témoin.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Ibrisimovic.
4 M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, la Défense de M.
5 Pusic n'a pas de questions à poser au témoin.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il nous reste 25 minutes avant la fin.
7 Monsieur le Procureur, êtes-vous à même de commencer ? J'ai dit 25 minutes,
8 voilà. Il est 7 heures moins 20, donc 20 minutes.
9 M. STRINGER : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président, nous
10 pouvons commencer.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
12 M. STRINGER : [interprétation] Il me faudra toutefois une minute pour
13 mettre en place le pupitre et m'organiser du point de vue documentaire avec
14 mes collègues, et je le ferai avec l'aide de
15 M. l'Huissier auquel je demanderais de distribuer les documents.
16 Monsieur Raguz, je vous demande un instant pour que nous nous organisions.
17 Contre-interrogatoire par M. Stringer :
18 Q. [interprétation] Monsieur Raguz, pendant que nous attendons les
19 documents, je tire profit de ces quelques instants pour me présenter à
20 vous. Je m'appelle Douglas Stringer. Je suis l'un des représentants de
21 l'Accusation, et je vous interrogerai en tant que substitut du Procureur.
22 Je vais d'abord vous présenter un document qui est le document P 07500.
23 C'est donc l'une des pièces de l'Accusation.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Dites-nous s'il est dans le classeur 1 ou 2.
25 M. STRINGER : [interprétation] Il se trouve dans le classeur 1, Monsieur le
26 Président.
27 Q. Monsieur Raguz, nous prenons connaissance de ce document, mais je
28 tiens, avant de débuter, à vous rappeler une partie de votre déposition
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1 d'aujourd'hui lorsque vous parliez des statistiques et de la rédaction de
2 rapports. Si ma mémoire est bonne, vous avez dit, dans votre déposition,
3 Monsieur, qu'en fait les données statistiques obtenues par le bureau chargé
4 des Réfugiés et des Personnes déplacées, quant au nombre et à la
5 composition et aux autres éléments caractéristiques des populations de
6 personnes réfugiées et déplacées provenaient des diverses municipalités qui
7 abritaient ou hébergeaient ces réfugiés; c'est bien ça ?
8 R. Oui.
9 Q. Merci. Serait-il permis de dire, Monsieur, étant donné les nombres que
10 vous avez évoqués dans votre déposition et les difficultés de diverse
11 nature auxquelles toutes ces personnes étaient confrontées ? Serait-il
12 permis de dire qu'au sein de votre bureau, vous avez considéré comme très
13 important de tenir des registres statistiques aussi précis que possible,
14 étant donné, bien sûr, les circonstances de l'époque qui étaient
15 particulièrement difficiles et qui rendaient particulièrement difficile
16 l'obtention de chiffres très exacts ?
17 R. C'était en tout cas notre intention.
18 Q. Bien, penchons-nous sur le document que nous avons sous les yeux. Nous
19 voyons, à la fin du document, que figure la date de son élaboration, 6
20 janvier 1994, et cela semble être un rapport élaboré par le bureau chargé
21 des Personnes déplacées et des Réfugiés, les deux auteurs en étant Mirko
22 Alilovic et Ante Aleksic. Vous voyez tout cela dans le document ?
23 R. C'est la première fois que j'ai ce document sous les yeux, mais je le
24 vois, oui.
25 Q. M. Alilovic et M. Aleksic travaillaient-ils à vos côtés au sein du
26 bureau chargé des Personnes déplacées et Réfugiés en janvier 1994 ?
27 R. Ils travaillaient pour le centre d'aide sociale de Mostar. Par
28 ailleurs, si je ne me trompe, M. Alilovic était déjà retraité à cette
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1 époque-là. Je le connaissais personnellement.
2 Q. Mais voyez-vous sa signature au bas du document dont nous sommes en
3 train de parler ?
4 R. Je vois sa signature, oui.
5 Q. D'accord. Bien sûr, pour ma part, je travaille sur la base de la
6 version anglaise de ce document. Mais en tout cas, dans la page qui vient
7 après le plan de la ville de Mostar, il est indiqué que le rapport en
8 question provient du bureau chargé des personnes déplacées et des réfugiés
9 de Mostar. Est-ce que vous voyez cette mention ?
10 R. Je la vois, mais ce que je peux dire ici c'est que ce document n'est en
11 aucun cas un document officiel. Il n'a jamais été considéré comme un
12 document officiel du bureau et n'a donné lieu à aucune action de la part de
13 qui que ce soit. Ça, je peux vous le garantir. Car dans le cas contraire,
14 j'aurais connu la teneur de ce document. Il est possible que ce document ne
15 soit qu'une façon pour M. Alilovic de consigner par écrit ses réflexions
16 personnelles et ses opinions personnelles.
17 Q. Très bien. J'aimerais toutefois vous poser quelques questions au sujet
18 de ce document, Monsieur, étant donné que -- en tout cas en apparence, les
19 deux auteurs de ce texte semblent l'avoir écrit au nom du bureau chargé des
20 Personnes déplacées et des Réfugiés. Conviendriez-vous avec moi, Monsieur,
21 qu'étant donné le titre de ce rapport, ce dernier semble concerner
22 exclusivement la municipalité de Mostar ?
23 R. Bien, voyez-vous, ce document ne comporte le texte d'aucun protocole,
24 et donc en l'espèce ce n'était pas un document du bureau chargé des
25 Personnes déplacées et des Réfugiés que je dirigeais. C'est la première
26 fois que je vois ce document, et vraiment c'est tout ce que je peux dire
27 ici à son sujet. Il me faudrait davantage de temps pour le lire en détail
28 et l'analyser, mais du point de vue du bureau, c'est un document qui manque
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1 totalement de pertinence car ce n'est pas un document adopté par le bureau
2 -- entériné par le bureau.
3 Vous voyez vous-même, c'est un document assez volumineux et c'est presque
4 un livre, qui est fourni d'opinions personnelles. Vous vous rappellerez les
5 autres documents du bureau que vous avez eus sous les yeux, et cela ne
6 correspond pas du tout à notre manière de travailler.
7 Q. D'accord. Dans ces conditions, je vais vous poser quelques questions au
8 sujet de l'opinion de ces deux hommes qui figurent dans ce document. Je ne
9 vous interrogerai pas au sujet des statistiques ou des chiffres que l'on
10 trouve dans les tableaux, en tout cas pas dans les tableaux 3, 4 et 5. Je
11 commencerais par la question suivante, puisque vous connaissiez ces
12 messieurs, M. Alilovic et M. Aleksic. Veuillez me dire, encore une fois,
13 quels étaient leurs postes, leurs fonctions, si vous vous en souvenez ?
14 Quel était leur travail par rapport aux réfugiés ?
15 R. J'ai dit que c'étaient des hommes qui avaient plus de 70 ans et qui,
16 très concrètement, en tout cas s'agissant de M. Alilovic, parce que j'ai
17 dit que je me rappelle très bien cet homme, et bien, M. Alilovic avait plus
18 de 70 ans. Je crois que, par le passé, il avait travaillé dans le cadre du
19 centre d'Aide social de Mostar. Ce genre de centre s'occupait de
20 communications, de distribution, et de tenue d'un certain nombre de
21 rapports. Mais je dis en toute responsabilité qu'il n'a pas joué le moindre
22 rôle dans le travail de notre bureau et qu'il n'avait aucun poste de
23 responsabilité au sein de ce bureau chargé des Personnes déplacées et des
24 Réfugiés.
25 Q. Et qu'en est-il de M. Aleksic ? Pouvez-vous nous dire qui était M.
26 Aleksic et quel était son poste ?
27 R. En fait, je pensais à M. Aleksic, tout à l'heure.
28 Q. [aucune interprétation]
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1 R. Toutes mes excuses.
2 Q. Dans ce cas, je vous demande ce qui en était de
3 M. Alilovic ?
4 R. Je crois que sa situation était identique. Je crois que tous les deux
5 avaient un rapport avec ce centre dont j'ai parlé.
6 Q. Vous parlez d'un centre d'aide social de Mostar. Ce centre était-il une
7 instance autonome qui s'occupait, elle aussi, des problèmes de réfugiés et
8 de personnes déplacées ?
9 R. Les centres de Travail social étaient des instances municipales qui
10 s'occupaient des personnes expulsées et déplacées, au moment où cette
11 question était une question d'actualité, mais par ailleurs, c'était des
12 institutions qui s'occupaient des problèmes sociaux, et qui existaient dans
13 les municipalités déjà avant la guerre et qui ont continué à exister
14 pendant la guerre. C'était des institutions classiques.
15 Q. Donc en dehors du bureau chargé des personnes déplacées et des réfugiés
16 dans lequel vous travailliez, il existait d'autres instances, d'autres
17 organismes dans les municipalités, par exemple, qui s'occupaient également
18 des problèmes liés aux personnes déplacées et aux réfugiés, n'est-ce pas ?
19 C'est bien cela ?
20 R. Dans ma déposition j'ai déjà dit que les centres municipaux de travail
21 social ainsi que les centres de la Croix-Rouge au niveau municipal
22 s'occupaient de ces questions également.
23 Q. Très bien. Des organismes municipaux de cette nature, avaient-ils pour
24 habitude de coordonner leur travail ou de communiquer avec votre bureau
25 dans le cadre des activités menées à bien pour prendre en charge et assurer
26 le logement des réfugiés et des personnes déplacées ?
27 R. Oui. Comme je l'ai déjà dit, il existait une coordination de ce genre.
28 Q. Quoi qu'il en soit, il existait donc d'autres organismes où
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1 travaillaient d'autres personnes qui partageaient éventuellement ou ne
2 partageaient pas peut-être vos positions ou, en tout cas, la ligne
3 politique officielle de votre bureau eu égard aux Réfugiés et aux Personnes
4 déplacées, n'est-ce pas ?
5 R. Je ne peux pas dire que ce que vous venez d'affirmer est exact car, eu
6 égard aux questions qui étaient au cœur du travail de notre bureau, les
7 positions, les points de vue concernant la coordination du travail
8 nécessaire pour s'occuper des réfugiés et des personnes déplacées, ainsi
9 que la coordination nécessaire, ces points de vue étaient très clairs. Donc
10 tout se faisait en accord et conformément à la ligne politique du bureau.
11 Q. D'accord. Je vais vous poser d'autres questions au sujet de la
12 politique de votre bureau demain. Dans les quelques minutes qui nous
13 restent ce soir, j'aimerais aborder un autre point, vous ne semblez pas
14 manifester une grande volonté d'associer votre position avec le contenu du
15 document que nous avons sous les yeux en ce moment, mais je crois vous
16 avoir entendu dire, un peu plus tôt aujourd'hui, quelque chose qui était
17 pertinent par rapport à ce rapport.
18 R. Absolument pas.
19 Q. D'accord. Puisque ce rapport concerne les secteurs sous le contrôle du
20 HVO, vous avez dit lorsque vous commentiez il y a quelque temps les
21 rapports qui vous étaient soumis et vous l'avez fait à huis clos partiel,
22 et vous avez dit que les statistiques [imperceptible] sur toute la
23 population jusqu'au 9 mai 1993. Et qu'ensuite, si je vous ai bien compris,
24 donc à partir du 9 mai 1993, les registres tenus pour présenter des
25 statistiques relatifs aux réfugiés et aux personnes disparues n'ont plus
26 été tenus conjointement. Je suppose que cela signifie que du point de vue
27 des Croates de Bosnie, ces Croates de Bosnie tenaient leur propre registres
28 et statistiques, alors que les Musulmans de Bosnie tenaient les leurs
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1 séparément, et donc il n'y avait plus regroupement de l'ensemble des
2 statistiques concernant ces deux groupes, n'est-ce pas ?
3 R. Pour l'essentiel, cela a été le cas, mais nous avons également pu nous
4 convaincre que nous obtenions des chiffres différents au sujet des réfugiés
5 de Mostar Est. Notre travail, en tout cas, se distinguait de celui d'une
6 organisation comme le HCR, par exemple.
7 Q. Je suppose que ma question portait sur un aspect un peu différent. Dans
8 toutes ces statistiques et tous ces nombres dont a bénéficié votre bureau
9 s'agissant de déterminer le nombre de réfugiés et de personnes déplacées
10 ainsi que dans tous ces nombres que l'on trouve dans les documents élaborés
11 par votre bureau et dont vous avez déjà parlé aujourd'hui, notamment ces
12 rapports dont vous avez parlé on ne trouve aucun chiffre relatif au nombre
13 de personnes déplacées et de réfugiés présents sur le territoire tenu par
14 l'AbiH, et par exemple, présents sur le territoire de Mostar Est, n'est-ce
15 pas ?
16 R. Je vous ai dit quelle était la période concernée par ces rapports,
17 selon le HCR également, ces rapports concernent la période qui s'étend
18 jusqu'au début de la guerre à Mostar, mais il y a également des données
19 analytiques dont nous avons déjà parlé qui évoque la situation à Madame
20 est, et on trouve donc ces éléments chiffrés dans les statistiques fournies
21 par le bureau.
22 Q. Ma question était simple et celle que je vais maintenant vous poser
23 sera la dernière de l'audience d'aujourd'hui. À partir du 9 mai, est-il
24 vrai, Monsieur, qu'aucune des données chiffrées présentées par le bureau
25 chargé des Personnes déplacées et des Réfugiés, et concernant les réfugiés
26 et les personnes déplacées, ne tenaient compte de la population de Mostar
27 Est ? Cette population de Mostar Est était exclue des chiffres présentés
28 par votre bureau à partir du 9 mai, n'est-ce pas ?
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1 R. J'ai déjà dit que dans certains rapports cela était le cas mais que
2 dans d'autres rapports ultérieurs au 9 mai on trouve tout de même des
3 éléments chiffrés relatifs au nombre de réfugiés dans la partie est de
4 Mostar.
5 Q. Je vous remercie.
6 M. STRINGER : [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous avons dépassé 19 heures. Comme vous le savez,
8 nous nous retrouverons demain à 14 heures 15. Je vous souhaite une bonne
9 soirée.
10 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le mercredi 27 août
11 2008, à 14 heures 15.
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