Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 30 octobre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Pusic est absent]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs

  9   les Juges. Bonjour à tous et à toutes. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T,

 10   le Procureur contre Jadranko Prlic et consorts. Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 12   En ce jeudi 30 octobre 2008, je salue tout le monde, je salue MM. les

 13   accusés. Je vois que M. Pusic n'est pas là, et je lui souhaite un prompt

 14   rétablissement. Je salue Mme et MM. les avocats, je salue M. Scott et M.

 15   Kruger, son adjoint, et je salue également toutes les autres personnes qui

 16   nous assistent pour cette audience.

 17   Je vais rendre tout d'abord une décision orale formelle parce que nous

 18   avons déjà évoqué cela, mais il fallait néanmoins la préciser par une

 19   décision orale, alors je vais lire lentement.

 20   Décision orale relative à la demande de l'Accusation de radier M. Neven

 21   Tomic de la liste des témoins à décharge ou dans l'alternative de reporter

 22   cette comparution dans l'attente d'un résumé 65 ter plus complet et de la

 23   communication de ses entretiens avec M. Milan Cvikl.

 24   Le 15 octobre 2008, l'Accusation a déposé une requête demandant

 25   l'annulation ou le report à une date ultérieure de la comparution du témoin

 26   Neven Tomic dans l'attente d'un résumé 65 ter plus complet et de la

 27   communication de ses entretiens avec Milan Cvikl. La comparution du témoin

 28   Neven Tomic a débuté le 27 octobre 2008. Lors de l'audience du 20 octobre

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  1   2008, la Défense Prlic a informé la Chambre qu'elle n'était pas en

  2   possession des déclarations portant sur les entretiens entre Neven Tomic et

  3   Milan Cvikl.

  4   En premier lieu, la Chambre rappelle qu'elle a déjà déclaré sans objet la

  5   demande de l'Accusation relative à la communication d'un résumé 65 ter plus

  6   complet dans une décision orale du 20 octobre 2008.

  7   En second lieu, et au vu de la réponse de la Défense Prlic, la

  8   Chambre décide de rejeter la demande de l'Accusation relative à la

  9   communication des entretiens entre M. Neven Tomic et M. Milan Cvikl. Voilà.

 10   Comme il n'y avait pas de notes d'entretien, il n'y a pas lieu de les

 11   communiquer.

 12   Nous allons donc introduire le témoin.

 13   Oui, Maître Stewart.

 14   M. STEWART : [interprétation] Puisque l'on attend encore le témoin,

 15   Monsieur le Président, il y aurait peut-être une question que l'on pourrait

 16   aborder sans plus attendre. Vous vous souviendrez sans doute que quatre

 17   équipes de la Défense ont déposé une requête conjointe le 10 de ce mois-ci,

 18   je crois, s'agissant l'usage de pièces de l'Accusation et l'introduction de

 19   nouvelles pièces au cours du contre-interrogatoire. Il y a eu une réponse

 20   de l'Accusation.

 21   La réponse est de 4 000 mots à peu près. Cette réponse appelle une

 22   réplique. Nous souhaiterions obtenir l'autorisation de votre part pour

 23   pouvoir le faire.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Compte tenu évidemment de l'intérêt de la

 26   question, la Chambre fait droit à votre demande.

 27   M. STEWART : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président,

 28   Messieurs les Juges.

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  1   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur Tomic.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, le contre-interrogatoire va se poursuivre, et

  5   je donne la parole à Me Alaburic.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, bonjour à vous.

  7   Bonjour à toutes les personnes présentes dans le prétoire. Bonjour,

  8   Monsieur Tomic. Je pense qu'il me reste à peu près une vingtaine de minutes

  9   compte tenu du fait que la Défense avait eu à sa disposition un peu plus de

 10   quatre heures. Avant que de continuer avec mon contre-interrogatoire, je

 11   voudrais répondre à l'objection formulée hier par mon confrère M. Scott

 12   disant qu'il y aurait eu 63 questions directrices et où on aurait répondu

 13   63 fois par un oui.

 14   L'audition de M. Tomic et les réponses qu'il a apportées ont montré que les

 15   entretiens portant sur l'économie et sur les finances nous amèneront à

 16   conclure des centres du pouvoir qui existaient au sein de la HZ HB, et son

 17   audition a montré que ces centres du pouvoir se trouvaient situés en

 18   premier lieu au sein des municipalités dont les responsables en même temps

 19   se trouvaient être membres des instances législatives de la HZ HB.

 20   Je comprends parfaitement bien que les réponses de ce témoin ne sont pas

 21   pour plaire à l'Accusation, et les réactions de M. Scott, je les considère

 22   comme étant une tentative d'amenuiser la valeur et le poids du témoignage

 23   de M. Tomic. Donc je ne prends pas au sérieux l'observation formulée par M.

 24   Scott disant que toute réponse par oui ou par un non serait dénuée de

 25   valeur lorsqu'il s'agirait d'une question directrice --

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je croyais que vous aviez terminé. Continuez.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Juste quelques explications encore. Il me

 28   semble qu'il s'agit d'une question des plus importantes puisque M. Scott

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  1   répète ces objections et réitère ces observations à plusieurs reprises.

  2   De là à savoir si les Croates et les Musulmans ont conclu un accord de paix

  3   en 1993 et si le témoin nous dit oui, je ne pense pas que cela est dénué de

  4   tout poids pour ce qui est d'une question directrice de posée.

  5   Si l'un des Juges essaie de résumer le témoignage du témoin et s'il essaie

  6   de poser la question de savoir s'ils ont bien compris son témoignage, et si

  7   le témoin répond par exact, je ne pense pas que la réponse soit dénuée de

  8   poids et de valeur bien que la question ait été directrice et quelque soit

  9   l'origine de la question.

 10   Le témoin nous a répondu par l'affirmative à toute une série de faits qui

 11   dans cette affaire pourraient bénéficier d'un statut de faits admis, à

 12   savoir que les responsables des Croates de Bosnie-Herzégovine et des

 13   Musulmans de Bosnie-Herzégovine ont conclu un accord de Washington. Ces

 14   accords de Washington prévoyaient un gouvernement conjoint sur des bases

 15   paritaires. Les mêmes accords prévoyaient aussi un commandement conjoint

 16   des deux armées, de l'ABiH et du HVO. C'est également sur des bases

 17   paritaires que cela était censé se faire. Il n'est pas contestable non plus

 18   qu'Alija Izetbegovic, à un moment donné, avait signé le plan Vance-Owen. Il

 19   n'est pas à contester non plus que le HVO de la HZ HB, à un moment donné,

 20   est devenu le gouvernement de cette République croate d'Herceg-Bosna. On ne

 21   conteste pas les fonctions de Mate Boban, et je ne vais pas énumérer toute

 22   une autre série de faits que je considère étant notoirement connus.

 23   Une partie des réponses affirmatives avancées par ce témoin se rapportait

 24   aux explications de ses déclarations antérieures, et une partie se

 25   rapportait aux documents qui ont été montrés au témoin, et la teneur

 26   desdits documents a permis de soupeser la validité et le poids des réponses

 27   de ce témoin pour déterminer que ces réponses se trouvent entièrement en

 28   accord avec la teneur de documents qui ont été montrés à ce témoin.

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  1   Etant donné que ce que je viens d'avancer, il semble ne pas avoir été tout

  2   à fait clair, et peut-être cela a-t-il été le cas pour M. Scott et peut-

  3   être pour d'autres encore. Je me propose de montrer au témoin un document

  4   dont nous avons parlé à l'occasion de mon interrogatoire et dont il a

  5   également été question à l'occasion de l'interrogatoire principal.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder la suite, il faut d'abord qu'on

  7   réponde à ce que vous avez dit. D'abord, M. Scott va répondre, et la

  8   Chambre voudrait dire quelque chose.

  9   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Monsieur

 10   le Président, Messieurs les Juges. Bonjour à tous et à toutes. Bonjour au

 11   conseil de la Défense.

 12   Avec tout le respect dû à Mme Alaburic, ses commentaires sur le fond de

 13   l'affaire, sur la teneur des réponses, finalement n'a rien à voir avec une

 14   question de procédure, une question de procédure à laquelle nous accordons

 15   une grande importance. Mme Alaburic, de manière très apte, se lève et

 16   commence à présenter certains arguments sur le fond de l'affaire. Je vais

 17   prouver ceci, je vais démontrer ceci ou cela. Ceci n'a pas d'objet ici.

 18   La question est une question de procédure. C'est une question

 19   d'équité fondamentale et la manière dont les débats sont menés ici, avec

 20   tout le respect dû à la Chambre. L'Accusation a toujours considéré - et

 21   nous savons qu'il y a eu une décision - l'Accusation a toujours considéré

 22   ceci et continuera de le dire, à savoir que c'est là une procédure qui est

 23   injuste vis-à-vis de l'Accusation.

 24   Je l'ai dit, je l'ai dit à plusieurs reprises, je le répète peut-être

 25   encore une fois, mais la manière dont les co-accusés sont autorisés à poser

 26   des questions au témoin est là véritablement une machine productrice

 27   d'iniquité. Il est difficile d'imaginer d'ailleurs un processus moins

 28   inéquitable que celui-ci.

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  1   Un temps supplémentaire est donné à la Défense, qui n'est pas déduit

  2   de leur temps. L'Accusation, en revanche, ne reçoit pas de temps

  3   supplémentaire. En l'occurrence, l'Accusation va obtenir 12 heures pour ce

  4   témoin, dont quatre ne sont pas comptées contre le temps accordé à qui que

  5   ce soit. L'Accusation a donc quatre heures, puisque c'est 12 heures qui

  6   sont accordées pour ce témoin globalement. Donc l'Accusation n'a pas de

  7   temps supplémentaire à répondre aux questions qui sont posées

  8   supplémentaires, pas d'indication de la part des co-accusés quant à la

  9   nature des questions qui seront posées du témoignage qui pourrait être

 10   obtenu au fil de ces questions.

 11   Bon. Peut-être que pour des témoins à venir par exemple, il faudra

 12   que nous demandions à ce que l'on reporte le contre-interrogatoire

 13   entraînant ainsi un certain retard dans les débats, parce qu'il lui faudra

 14   suffisamment de temps pour répondre à des questions qui auront été

 15   soulevées pour la première fois sans que l'Accusation en ait été informée

 16   par le co-accusé. Je crois qu'il y a donc toute une gamme de choses ici qui

 17   sont soulevées, des questions qui sont soulevées par cette procédure; pas

 18   de temps, pas de questions directrices, un témoin amical si je puis dire,

 19   tout un tas de questions. Donc il est extrêmement difficile d'envisager un

 20   système qui pourrait être plus inéquitable que celui-ci.

 21   Alors les commentaires de Mme Alaburic sur le fond n'ont rien à voir avec

 22   ce débat, et ça n'a rien à voir avec le fait que nous soyons satisfaits ou

 23   non des réponses données par le témoin. C'est quasiment même insultant

 24   lorsque nous entendons ce genre de chose, ce genre de remarque faite par un

 25   avocat. Moi, je suis sûr que tout le monde se fiche dans ce prétoire de

 26   savoir si Ken Scott de l'Accusation est satisfait des réponses ou s'il ne

 27   l'est pas. Ce n'est pas du tout la question. La question ici est une

 28   question fondamentale, une question de procédure fondamentale et d'équité

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  1   vis-à-vis des parties et en l'occurrence vis-à-vis de l'Accusation et de sa

  2   capacité à participer à un procès équitable.

  3   Il y a une différence fondamentale, et le Juge Trechsel d'ailleurs l'a dit.

  4   Il y a une différence fondamentale entre des réponses narratives ouvertes

  5   d'un témoin dans lesquelles on trouve beaucoup d'éléments, des nuances

  6   particulières, des limites, des nuances donc comme je le disais, des

  7   détails supplémentaires. Peut-être que le témoin ne sait. Bien, e pourrais

  8   dire ceci, mais ceci, je ne saurai le dire, donc tout un tas de choses qui

  9   ressortent d'une réponse narrée par le témoin que l'on n'a pas lorsqu'une

 10   réponse se limite à un simple oui, oui, oui, oui.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ne le dites pas 63 fois.

 12   M. SCOTT : [interprétation] Je ne vais pas le faire 63 fois, je vais

 13   m'arrêter là, en effet. Mais c'est un processus complètement différent, et

 14   il suffit de comparer les réponses données avec qui que ce soit, pas

 15   seulement celles de M. Tomic qui dirait : Je ne pourrais pas dire ceci, je

 16   n'en suis pas tout à fait certain, ou peut-être que je pourrai aller

 17   jusque-là, mais pas aller plus avant. C'est un processus qui n'a rien à

 18   voir. C'est pourtant ce à quoi nous sommes confrontés ici. Avec tout le

 19   respect dû à la Chambre de première instance, c'est un processus qui n'est

 20   pas juste et qui n'est pas seulement injuste vis-à-vis de l'Accusation mais

 21   qui prive les Juges, qui prive la Chambre de première instance d'éléments

 22   de preuve précieux que l'on n'obtient pas lorsqu'on entend simplement des

 23   oui, des oui, des oui, et encore des oui.

 24   Alors voilà, voilà quelle est notre position. Je veux faire remarquer en

 25   passant, même si ce n'est pas l'argument de fond que nous défendons ici, je

 26   veux faire remarquer que la question posée maintenant, la question donc en

 27   suspens sur le plan Vance-Owen n'est pas une question qui a été abordée par

 28   M. Karnavas, si mon souvenir est bon. Nous avons parlé de l'accord de

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  1   Washington. Je crois qu'un petit peu nous avons parlé de l'accord de

  2   Dayton, mais je ne me souviens pas que la question du plan Vance-Owen ait

  3   été abordée, ce qui est là encore un exemple de questions de co-accusés qui

  4   portent sur des questions qui n'ont pas été soulevées, sur lesquelles nous

  5   ne sommes pas préparés du côté de l'Accusation. Au cours de la semaine

  6   passée, j'ai essayé de deviner, nous en sommes là à essayer de deviner ce

  7   que serait la déposition du témoin. Nous n'avions pas d'information sur les

  8   questions posées par les co-accusés. Maintenant, on nous parle du plan

  9   Vance-Owen. Je ne me suis pas préparé et je ne demande à personne de

 10   pleurer ou de verser une larme, simplement je ne me suis pas préparé à

 11   procéder à un contre-interrogatoire sur le plan Vance-Owen, sans quoi

 12   j'aurais placé dans notre lot de documents un certain nombre de documents

 13   sur le plan Vance-Owen. Je ne peux pas en dix minutes préparer des

 14   documents, des exemplaires suffisants comme ça, spontanément sur des

 15   questions qui sont soulevées de manière tout à fait spontanée.

 16   Donc ceci, effectivement, soulève un certain nombre de questions, et c'est

 17   vrai qu'il y a effectivement certains faits admis, c'est vrai, certains

 18   faits qui ne font pas l'objet de litige. Si c'est le cas, s'ils ne font pas

 19   effectivement l'objet de constatation, il n'est pas nécessaire de les

 20   soumettre au témoin en faisant appel à des questions directrices. Bien sûr,

 21   personne ici ne contestera le fait que Mate Boban était président de la

 22   Communauté croate d'Herceg-Bosna. Voilà un fait effectivement qui ne fait

 23   l'objet d'aucune contestation.

 24   Ce n'est pas la peine de dire je ne fais que traiter des questions qui ne

 25   sont pas contestées. Si c'est bien le cas, ce n'est même pas la peine d'en

 26   parler avec le témoin.

 27   Donc voilà nos préoccupations, voilà la position de l'Accusation sur

 28   ces différentes questions. Je vous remercie.

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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me donnez un

  2   instant simplement. Nous avons déjà passé 20 minutes de notre temps devant

  3   le témoin sur ce point. Il y a une objection permanente de l'Accusation sur

  4   ce point. Je crois qu'il n'est pas nécessaire de se lever tout le temps.

  5   Simplement ce que je propose, parce qu'il y a des éléments intéressants

  6   dans chacune des interventions qui ont été faites, je ne suis pas d'accord

  7   avec tout ce que tout le monde a dit, mais c'est une question de procédure

  8   qui doit peut-être être traitée dans le cadre d'une audience dédiée peut-

  9   être 65 ter, hors du prétoire, je ne sais pas, mais entendre ce genre

 10   d'objection sur des questions de procédure encore, et encore en la présence

 11   d'un témoin loin de ses parents, de sa famille, de chez lui, alors que nous

 12   essayons d'entendre sa déposition et de faire en sorte que le témoin puisse

 13   quitter La Haye le plus rapidement possible, je crois que nous perdons un

 14   temps précieux en audience. J'ai bien entendu les positions des uns et des

 15   autres, mais peut-être que nous pourrions consacrer une audience spéciale à

 16   cette question.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, permettez-moi, s'il

 18   vous plaît. Je pense avoir le droit de répondre à cette deuxième série

 19   d'objection de la part de mon confrère, M. Scott. Je pense que ce temps

 20   pourrait être déduit de mon temps de contre-interrogatoire parce que je

 21   respecte l'observation de Me Karnavas pour ce qui est de ne pas garder le

 22   témoin à La Haye plus longtemps que nécessaire.

 23   Alors pour ce qui est des questions directrices, à l'occasion du contre-

 24   interrogatoire, je pense que M. Scott de façon tout à fait injustifiée

 25   remet sur le tapis la même question, et une fois que les Juges de la

 26   Chambre sur cette même question ont rendu une décision et autorisé des

 27   questions directrices à l'occasion des contre-interrogatoires de la part de

 28   la Défense, je pense que le bureau du Procureur, en répétant ces

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  1   objections, offense les Juges de la Chambre et la décision rendue.

  2   Au cas où l'Accusation estimerait que la décision rendue par les Juges de

  3   la Chambre n'est pas en bonne et due forme ou n'est pas conforme au

  4   Règlement, ils n'ont qu'à redemander à la Chambre un réexamen pour qu'une

  5   décision autre soit rendue. Tant que cela ne sera pas fait, je propose aux

  6   Juges de la Chambre d'interdire au bureau du Procureur la présentation des

  7   mêmes objections réitérées s'agissant des questions suggestives posées à

  8   l'occasion du contre-interrogatoire de la part de la Défense. Et à ce

  9   sujet, je voudrais ajouter seulement une chose, à savoir que le bureau du

 10   Procureur de façon injustifiée confond les témoins amis ou les questions

 11   suggestives qu'on peut poser, chose que nous avons déjà commenté dans nos

 12   réponses apportées aux requêtes présentées par le bureau du Procureur. Je

 13   ne vais donc pas me répéter.

 14   Pour ce qui est du nombre d'heures à la disposition de l'Accusation et de

 15   la Défense, je proteste une fois de plus pour ce qui est de considérer, de

 16   voir l'Accusation considérer que six Défenses soient considérées comme un

 17   tout. J'exige que la Défense du général Petkovic soit considérée comme

 18   étant une Défense à part entière et sur pied d'égalité dans ce prétoire. Si

 19   l'on veut être sur pied d'égalité conformément au Règlement de ce Tribunal,

 20   étant donné que ses droits sont garantis comme s'il s'agissait d'un procès

 21   d'un seul individu, je tiens à dire que la Défense du général Petkovic se

 22   trouve privée de façon considérable du temps qui lui a été mis à

 23   disposition puisqu'elle ne dispose que du sixième du temps dont dispose le

 24   bureau du Procureur.

 25   Troisièmement, pour ce qui est de cette référence réitérée de l'Accusation

 26   pour ce qui est de leur droit à un procès équitable, je tiens à rappeler

 27   aux Juges qu'aucune convention internationale sur les droits de l'homme,

 28   aucune convention internationale de quelque nature que ce soit ne garantit

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  1   au bureau du Procureur un droit de l'homme à l'Accusation pour un droit

  2   équitable. Le droit équitable, le droit d'un procès sur pied d'égalité est

  3   celui des accusés. Cela est conforme au Règlement parce que le Règlement

  4   est adopté pour justement garantir les droits des accusés pour ce qui est

  5   de leur innocence tant qu'on n'aura pas prouvé le contraire.

  6   Pour ce qui est maintenant du souci de M. Scott pour savoir si les Juges

  7   vont être induits dans l'erreur pour ce qui est de certaines questions et

  8   réponses, je n'ai aucun doute pour ce qui est d'estimer que les Juges vont

  9   soupeser de façon valable et bonne toutes les réponses apportées, même aux

 10   questions directrices. Je crois savoir que les réponses aux questions

 11   directrices ont moins de poids que les réponses aux questions habituelles,

 12   mais je sais aussi pour sûr que si une réponse à une question directrice se

 13   trouve être appuyée par une série de documents et par des réponses d'autres

 14   témoins, alors cette réponse à une question directrice a une importance qui

 15   est de taille.

 16   Pour ce qui est maintenant des réactions à une partie de mon contre-

 17   interrogatoire qui se rapporte au plan Vance-Owen, je me dois de dire que

 18   je n'ai pas du tout posé de questions. Je n'ai pas posé une seule question

 19   à ce sujet. Je n'ai pas l'intention de poser des questions au sujet du plan

 20   Vance-Owen. Je vais demander au témoin quel est le programme des activités

 21   de ces municipalités au mois d'avril 1993. Et lorsque j'aurai terminé avec

 22   mes questions sur ce document, vous verrez avec clarté que je n'entame pas

 23   le sujet de la teneur du plan Vance-Owen, j'enchaîne sur le contre-

 24   interrogatoire où il a été dit que le témoin a visité le terrain et il a

 25   visité certaines municipalités de cette HZ HB et il avait eu connaissance

 26   de la situation sur le terrain.

 27   Pour le moment c'est ce que j'ai ressenti comme besoin pour ce qui est de

 28   mes réactions. Je remercie les Juges du temps qui m'a été accordé.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Sur ces multiples sujets qui viennent d'être évoqués

  2   et qui partent dans de nombreuses voies, la Chambre a déjà rendu, au

  3   travers de ces lignes directrices, des décisions. La Chambre a reconnu que

  4   les accusés, autre que celui qui mène l'interrogatoire principal, peuvent

  5   dans le cas du contre-interrogatoire poser des questions au témoin d'un

  6   autre accusé.

  7   Se pose maintenant la question de savoir faut-il poser des questions au

  8   travers des questions directrices, ou des questions neutres. Sur ce sujet,

  9   dans la mesure où c'est un contre-interrogatoire au sens anglo-saxon, les

 10   questions peuvent être directrices, mais si c'est un contre-interrogatoire

 11   dans le sens où c'est la suite d'un interrogatoire principal, à ce moment-

 12   là il vaudrait mieux que les questions ne soient pas directrices.

 13   Et, là, Maître Alaburic, vous avez tout à fait raison. Les Juges accordent

 14   du poids plus important quand la question n'est pas directrice et moins

 15   quand la question est directrice. Ça c'est un problème simplement de

 16   technique d'avocats.

 17   M. Scott a remarqué qu'à 63 reprises le témoin a répondu oui. Pour éviter

 18   cela il y a peut-être une autre façon de faire que moi j'emploie, c'est

 19   qu'après avoir écouté le témoin répondre aux questions, j'essaie de

 20   synthétiser la question et la réponse, et je pose une question ouverte de

 21   telle façon que le témoin puisse répondre oui, non, ou compléter ma

 22   question.

 23   En prenant un exemple avec le document 1D 02003. Vous auriez pu lui dire :

 24   Voilà, je vous présente ce document que Me Karnavas n'a pas présenté, qu'il

 25   avait prévu de présenter, c'est des visites dans les municipalités,

 26   regardez le document. Voyez-vous le document ? La réponse : Oui, je vois le

 27   document. Pouvez-vous indiquer aux Juges que veut dire ce document ? Donc

 28   le témoin répond : Bien, ce document c'est dix visites organisées par

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  1   plusieurs personnes dont moi-même, et cetera. Donc il raconte cela, vous

  2   lui dites : Bien, quel était l'objet de ces visites ? Et le témoin embraye

  3   en disant : Bien, voilà ce document fait partie des municipalités 3, 8, et

  4   10, dont on s'est réparti la tâche, et vous embrayez en disant : Mais ça

  5   veut dire quoi, 3, 8, et 10 ? Et il dit : C'est le plan Vance-Owen, et vous

  6   embrayez : Le plan Vance-Owen, c'est quoi pour vous ? Puis après quoi, vous

  7   terminez par votre question qui peut être là directrice en disant : Est-ce

  8   que ce n'est pas la preuve que ce document établit que dès le 9 mai vous

  9   avez mis en œuvre le plan Vance-Owen dans ces multiples composantes, et

 10   cetera ? Et il répond : Oui, c'est exactement cela ou ce n'est pas ça.

 11   C'est un problème de technique. Mon collègue va intervenir.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   J'aimerais revenir à la question des questions directrices, mais tout

 14   d'abord dans le transcript à la page 11, lignes 20 et suivante jusqu'à 25

 15   je vois ce qui est écrit, et je vous ai entendu le dire.

 16   Etes-vous vraiment sérieuse, Madame Alaburic, lorsque vous vous exprimez de

 17   cette manière ? Il n'y a pas d'équité à garantir pour l'Accusation mais

 18   seulement pour la Défense. Vous avez droit si vous faites référence aux

 19   conventions, mais nous avons un Statut, et j'ose espérer que vous le

 20   connaissez ce Statut, l'article 20 de celui-ci charge tout à fait

 21   clairement la Cour, la Chambre, de veiller à l'équité du procès. Et nous

 22   avons une certaine jurisprudence dont  certains éléments sont tout à fait

 23   clairs, jurisprudence établie par la Chambre d'appel de ce Tribunal qui

 24   indique qu'un procès ne peut être équitable si cette équité n'est assurée

 25   que pour la Défense.

 26   Alors vraiment, je suis très surpris de vous entendre dire quelque chose

 27   comme cela à la Chambre. Et si vous parlez d'un manque de respect vis-à-vis

 28   de la Chambre, je crois que finalement c'est plus proche ce que vous avez

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  1   dit là d'un manque de respect pour la Chambre que ce qu'a dit l'Accusation.

  2   Je dois dire que je suis un peu choqué par de tels mots.

  3   Maintenant pour revenir aux questions directrices, nous avons déjà décidé

  4   que des questions directrices ne devraient pas être posées dans le contre-

  5   interrogatoire lorsqu'il ne s'agit en réalité que de la suite de

  6   l'interrogatoire principal. Je crois qu'à un moment donné, et sur le

  7   document 1D 02003, vous avez dit que Me Karnavas n'avait pas eu

  8   suffisamment de temps pour en parler, et c'est moi qui vais en parler à sa

  9   place.

 10   Alors où y a-t-il équité si vous dites qu'en fait c'était à Me Karnavas de

 11   poser des questions directes pendant son interrogatoire principal, et que

 12   c'est maintenant vous qui allez aborder ce document à sa place en réalité

 13   et que vous allez en profiter finalement pour poser des questions

 14   directrices ? Ceci va à l'encontre de toute logique et de toute équité. En

 15   effet, l'Accusation a fondamentalement raison en disant que lorsque vous

 16   allez dans la même direction que le conseil qui a mené l'interrogatoire

 17   principal, que vous ne devriez pas changer les choses et poser des

 18   questions directrices parce que ceci violerait le principe d'équité.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Je remercie, Monsieur le Juge, pour ces

 20   explications et le point de vue qui a été exposé. Je voudrais vous demander

 21   la permission de répondre simplement à ce qui vient d'être exposé par M. le

 22   Juge Trechsel.

 23   En relation avec le document 1D 002003. Si vous passez en revue tous les

 24   documents qui vous ont été remis par la Défense Prlic en rapport avec le

 25   témoignage du présent témoin, vous verrez que ce document précis n'en fait

 26   pas partie, vous ne le trouvez pas.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pourriez-vous vous en tenir aux

 28   faits ? Je n'ai pas dit que ceci a été présenté. J'ai cité vos propres

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  1   paroles. C'est vous qui avez dit que Me Karnavas n'avait pas eu le temps

  2   d'aborder ce document. Veuillez vérifier.

  3   Mme ALABURIC : [interprétation] Non. J'ai fait véritablement attention à

  4   chaque mot que je prononce dans ce prétoire, et j'ai dit précisément la

  5   chose suivante que ce document avait été initialement préparé pour

  6   l'interrogatoire principal du présent témoin, mais qu'au dernier moment il

  7   avait été laissé de côté. Et dans la mesure où j'estime de mon côté que ce

  8   document contient des éléments tout à fait essentiels, je me suis proposée

  9   de présenter ce document. Et c'est exactement littéralement ce que j'ai

 10   dit, malheureusement ça n'a pas été versé correctement au compte rendu

 11   d'audience en anglais. Et je demanderais, j'ai l'intention de demander une

 12   correction de ce procès-verbal. 

 13   Quant à l'interrogatoire du témoin concernant ce document, je dois dire que

 14   mes questions n'avaient fait que commencer concernant ce document précis,

 15   ensuite nous sommes passés à d'autres sujets. Je n'avais pas terminé

 16   d'interroger le témoin au sujet de ce document.

 17   J'étais intéressée par la question de savoir si le témoin se souvenait de

 18   l'adoption de ce programme et de cette réunion du gouvernement lors de

 19   laquelle le document a été adopté, à savoir le programme de visites des

 20   différentes municipalités. Il s'agissait aussi de l'intention d'informer,

 21   de familiariser les personnes sur le terrain avec la nécessité de mettre en

 22   place une nouvelle organisation. J'estime qu'il ne s'agit pas du tout d'une

 23   simple question directrice.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, je crois que vous

 25   parlez maintenant de la décision des Juges de la Chambre, et vous ne

 26   devriez pas faire cela. Je sais ce que Me Karnavas a dit et il était tout à

 27   fait raisonnable, vous devriez poursuivre votre contre-interrogatoire.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, je respecte infiniment

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  1   votre opinion, et si vous affirmez que vous êtes choqué par quoi que ce

  2   soit et que vous souhaitez apporter des explications, c'est quelque chose

  3   pour quoi j'ai le plus profond respect.

  4   De mon point de vue, je dirais qu'il existe une différence entre le

  5   droit à un procès équitable, en tant que droit civil et droit de l'homme

  6   qui fait l'objet de toutes les garanties, et d'autre part, la notion d'un

  7   procès équitable au sens de l'organisation d'une procédure par un règlement

  8   donné.

  9   Lorsque l'on parle de droit à un procès équitable, c'est toujours au

 10   droit de l'homme et au droit civil que je pense, et ce type de droit, dans

 11   aucun Etat au monde, n'est garanti, n'est accordé à l'Accusation. Il est

 12   accordé et garanti pour les accusés.

 13   Quant à l'autre acception de cette notion, il s'agit de s'assurer que

 14   les droits qui sont accordés de part et d'autre sont les mêmes et que

 15   chacune des parties au procès reçoit les moyens d'apporter la preuve des

 16   thèses qui sont les siennes.

 17   Je ne remets en aucun cas en cause ce que vous avez dit, et je ne

 18   pense pas que nous soyons en désaccord autour de l'interprétation de ces

 19   notions. Nous-mêmes, nous ne serions évidemment pas satisfaits de la

 20   procédure si l'Accusation ne se voyait pas accorder le temps et les moyens

 21   nécessaires pour exposer ses propres moyens comme il se doit.

 22   Dans ce contexte, je souhaiterais rappeler que la Défense Petkovic a

 23   toujours apporté son soutien à l'Accusation lorsque celle-ci demandait du

 24   temps supplémentaire pour l'interrogatoire de l'un de ces témoins ou du

 25   temps supplémentaire pour de nouveaux témoins après que le temps qui lui

 26   avait été alloué avait été raccourci. Nous avons toujours réagi de cette

 27   manière-là.

 28   Voilà ce que je souhaitais dire. Je pense que nous pourrions peut-

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  1   être revenir à l'interrogatoire du témoin.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez, Maître Alaburic. Poursuivez votre contre-

  3   interrogatoire.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : -- préciser que si vous abordez un sujet nouveau,

  6   non abordé par Me Karnavas, posez des questions non directrices.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, oui, je procéderai

  8   de la sorte, mais lorsque je reviendrai à ce document, je préciserai qu'il

  9   s'agit d'un document lié à l'interrogatoire principal.

 10   LE TÉMOIN : NEVEN TOMIC [Reprise]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic : [Suite]

 13   Q.  [interprétation] Monsieur Tomic, hier, je me suis efforcée d'évaluer

 14   les réponses qui avaient été les vôtres à celles de mes questions qui

 15   étaient directrices et auxquelles vous avez principalement répondu par oui

 16   ou non. J'y ai donc réfléchi et j'ai estimé que je n'avais pas vraiment eu

 17   d'autres possibilités de procéder autrement. Toutefois, une de mes

 18   questions et votre réponse également sont restées en suspens, il s'agissait

 19   de la notion de défense comme priorité numéro un et il s'agissait de savoir

 20   s'il s'agissait de la défense de la Bosnie-Herzégovine ou de la partie de

 21   la Bosnie-Herzégovine qui s'appelait alors la HZ HB.

 22   Afin de préciser cette réponse qui a été la vôtre, réponse

 23   affirmative, je vous prie de vous reporter au document 1D 01934. Il s'agit

 24   d'un document relatif au fonctionnement du système financier émanant de

 25   vous et daté du 12 août 1993. Je vous prierais de bien vouloir nous lire,

 26   Monsieur, la fin de la dernière phrase du deuxième paragraphe.

 27   R.  "Puisque ce type de comportement est en recrudescence et conduit à

 28   l'effondrement du système établi, nous avons été contraints à travers des

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  1   conversations avec les représentants des HVO municipaux lors de la réunion

  2   tenue à Ljubuski le 4 août 1993, et conséquemment à cela également lors de

  3   la réunion tenue le 5 août à Ljubuski, d'adresser des avertissements à

  4   l'encontre de comportements de cette nature concernant la menace qu'elle

  5   ressent pour notre communauté et les conséquences dommageables qu'elle

  6   pourrait avoir sur la défense du peuple croate sur le territoire de la HZ

  7   HB."

  8   Q.  Monsieur Tomic, pourquoi parle-t-on ici de la République de Bosnie-

  9   Herzégovine, pour être plus précis, la défense du peuple croate en

 10   République de Bosnie-Herzégovine ?

 11   R.  A aucun moment dans nos activités nous ne minerions le fait que les

 12   espaces dans lesquels vivaient des Croates en Bosnie-Herzégovine étaient

 13   partie intégrante de l'Etat qui s'appelait Bosnie-Herzégovine.

 14   Q.  Je vous remercie. Revenons maintenant au document dans lequel mon

 15   contre-interrogatoire a été interrompu hier. Il s'agit du document 1D

 16   02003. Nous avons déjà dit qu'il s'agissait d'un programme de visites des

 17   différentes municipalités adopté le 9 avril 1993 par le HVO de la HZ HB.

 18   Monsieur Tomic, lors de votre interrogatoire principal, vous avez

 19   répondu à des questions relatives à l'élaboration d'un gouvernement

 20   conjoint à la tête duquel se trouvait M. Jadranko Prlic. Vous avez

 21   également parlé de la correspondance entre M. Prlic et M. Izetbegovic

 22   relative à la formation de ce gouvernement. Dites-nous, s'il vous plaît, si

 23   tout cela a trait aux dispositions du plan Vance-Owen ou à une autre façon

 24   d'organiser le territoire ?

 25   R.  Cela avait trait au plan Vance-Owen. 

 26   Q.  Par rapport à ce document, dites-nous s'il y est visible quels étaient

 27   les devoirs qui étaient les vôtres ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Pouvez-vous nous dire quels étaient les rôles qui étaient les vôtres ?

  2   R.  Notre mission était de nous rendre dans ces différentes provinces, dans

  3   les municipalités qui s'y trouvaient et tel qu'elles étaient listées dans

  4   le cadre du plan Vance-Owen, et il s'agissait pour nous de mettre en avant

  5   le plan Vance-Owen et de préparer les présidents des municipalités à la

  6   réorganisation du système en conformité avec le plan Vance-Owen.

  7   Q.  Dites-nous, Monsieur le Témoin, s'il vous plaît, avez-vous eu

  8   l'occasion de discuter de ce programme et du plan Vance-Owen avant de vous

  9   rendre sur le terrain et avant la réunion qui a adopté ce document ?

 10   R.  Oui. La réunion a été tenue le 3 avril, alors que le présent programme

 11   a été adopté le 9 avril, après consultation des représentants des

 12   différents départements et autres responsables qui participaient à ce même

 13   programme.

 14   Q.  En dehors de ce programme de visites dans les municipalités, est-ce que

 15   le HVO de la HZ HB avait l'intention d'entreprendre d'autres activités

 16   liées à la mise en œuvre du plan Vance-Owen ?

 17   R.  Il s'agissait ici d'un programme initial d'activité ayant pour but de

 18   mettre en œuvre l'accord en question. Bien entendu, les activités qui

 19   auraient été entreprises ultérieurement dépendaient de la question

 20   fondamentale qui était la suivante, à savoir la mise en œuvre de l'autorité

 21   de l'Etat et du gouvernement central à l'échelon de la république.

 22   Q.  Est-ce que vous souhaitiez sincèrement et réellement que ce plan Vance-

 23   Owen soit mis en œuvre puisque vous participiez à ces activités ?

 24   R.  J'ai déjà eu l'occasion de le dire. Nous avions les intentions les plus

 25   sincères quant à la mise en œuvre du plan Vance-Owen et de tout autre plan

 26   qui mettait fin aux hostilités et à la guerre, car nous savions tout à fait

 27   clairement que sur le long cours, nous n'avions pas la possibilité de

 28   maintenir l'organisation provisoire et le système provisoire qui avait été

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  1   mis sur place.

  2   J'ai déjà eu l'occasion de dire que pour 1993, nous avions 130 000

  3   personnes bénéficiaires, ou utilisatrices, du budget en termes de paiement

  4   des salaires. Nous estimions que toute sortie de ce type d'organisation

  5   était préférable. C'est pourquoi nous nous sommes engagés en faveur de la

  6   mise en œuvre du plan Vance-Owen.

  7   Q.  Je vous remercie. Il y a un autre sujet pour lequel j'estime que

  8   vous êtes, Monsieur Tomic, peut-être la personne la plus à même de nous

  9   apporter une clarification.

 10   Dans votre interrogatoire principal, vous avez affirmé que les

 11   dirigeants musulmans défendaient l'option d'un Etat centralisé basé sur le

 12   principe une personne, une voix. Est-ce cela que vous avez dit à la Défense

 13   Prlic ?

 14   R.  Oui.  

 15   Q.  Quelle était l'option qui était défendue par les Croates de Bosnie-

 16   Herzégovine dans ce cas ?

 17   R.  Le point de vue des Croates de Bosnie-Herzégovine avait déjà été

 18   exprimé au moment du référendum relatif à l'indépendance de la Bosnie-

 19   Herzégovine, au moment où les Croates ont soutenu cette indépendance. Les

 20   Croates s'attendaient alors à ce que la Bosnie-Herzégovine soit organisée

 21   comme l'Etat commun, et cela, sur des bases équitables de ces trois peuples

 22   constitutifs. C'était là notre ligne sur le long terme.

 23   Q.  Essayons de préciser cette notion de communauté de trois peuples

 24   constitutifs. Cela signifie-t-il que la --

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes passé à un autre sujet. Moi, je voudrais

 26   rester sur le document qu'on a vu tout à l'heure pour des questions de

 27   suivi avant d'aborder les peuples constitutifs.

 28   Dans le document, on voit que vous vous êtes répartis la tâche pour

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  1   aller à la rencontre des municipalités, et vous-même, vous étiez dans la

  2   municipalité 3. Et je vois que M. Prlic avait pour responsabilité d'aller à

  3   Mostar. Je constate que le programme de visite a été ramassé, puisque ça

  4   s'est passé en trois jours. Il y avait une urgence pour que les visites se

  5   passent très vite en trois jours. Est-ce qu'il y avait par la suite une

  6   réunion de débriefing qui a été prévue ?

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si je peux vous

  8   demander la permission d'apporter une correction au procès-verbal. En ligne

  9   9, il y est écrit que M. Tomic était chargé de se rendre dans les

 10   municipalités serbes --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Municipalité 3, la province 3, pas serbe, et j'ai

 12   dit débriefing, pas briefing.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Le programme que nous avons ici prévoit que

 14   toutes ces activités de visite sur le terrain soient terminées le 16 avril,

 15   et cela, pour une raison tout à fait simple, à savoir permettre de

 16   planifier les activités ultérieures du HVO de la HZ HB. En effet, ses

 17   membres devaient se rendre sur le terrain, et l'on s'efforçait d'organiser

 18   cela sur une période limitée de temps afin que la tenue des réunions du HVO

 19   de la HZ HB puisse continuer à se tenir. J'avais pour mission de me rendre

 20   dans la province numéro 3, dans les municipalités qui s'y trouvaient.

 21   Malheureusement, il ne s'y trouvait qu'une municipalité qui était sous le

 22   contrôle du HVO de la HZ HB, il s'agit de la municipalité d'Orasje dans la

 23   Bosanska Posavina, et avec M. Stipo Ivankovic, qui est par ailleurs

 24   originaire de cette région, je me suis rendu sur place et entretenu avec

 25   les personnes de la municipalité d'Orasje. J'ai profité de cette occasion

 26   pour vérifier sur place le bon fonctionnement du système financier, entre

 27   autres, et cela, tout particulièrement si l'on prend en compte la façon

 28   dont les choses fonctionnaient. Il s'agissait d'une région qui était isolée

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  1   et qui appliquait les réglementations de la HZ HB. En ce qui concerne cette

  2   partie du territoire, on peut dire que c'est là-bas que la mise en œuvre

  3   des dispositions du plan Vance-Owen était la plus simple à opérer.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Moi, ce qui m'importe c'est de savoir quel a été

  5   l'accueil à Orasje par la municipalité de ce plan ? Parce qu'ils ont dû

  6   vous poser des questions. Est-ce qu'on avait un avantage ? Ça servait à

  7   quoi ? Est-ce que ça allait permettre de résoudre tous les problèmes ? Quel

  8   va être notre avenir ?

  9   Est-ce que vous avez eu des interlocuteurs enthousiastes, réservés,

 10   sceptiques, réticents ? Quand vous avez exposé le plan, qu'est-ce qu'ils

 11   vous ont dit ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] La région de la Bosanska Posavina est connue

 13   par le niveau de coopération tout à fait excellent entre les Croates et les

 14   Musulmans en matière de défense dans la période considérée, et je peux

 15   véritablement dire qu'il n'y avait aucun obstacle à la mise en œuvre du

 16   plan Vance-Owen. Je peux dire cela en me fondant sur les réactions des

 17   personnes de la municipalité d'Orasje et celles des personnes qui avaient

 18   fui les autres municipalités qui faisaient partie de la province numéro 3

 19   et qui étaient restées sur le territoire de la municipalité d'Orasje.

 20   C'était ma conclusion suite à ma visite sur place.

 21   A titre d'exemple, je peux vous dire qu'à bord des embarcations qui nous

 22   ont fait franchir la Sava pour nous rendre sur place, nous avons trouvé les

 23   drapeaux de la Bosnie-Herzégovine et de la HZ HB, sur des embarcations qui

 24   nous ont transportés de Croatie en Bosnie-Herzégovine. Je dirais que nous

 25   avions beaucoup d'espoir quant à la mise en œuvre du plan Vance-Owen à ce

 26   moment-là et à la résolution des tensions qui existaient.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Il a dû y avoir une réunion, je présume, avez Zubak,

 28   Valenta, Buntic, Perkovic, Maric, Prlic, et autres. Est-ce qu'il y a eu une

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  1   impression d'ensemble qui s'est dégagée de ces réunions ? Est-ce que tout

  2   le monde était, comme à Orasje, très favorable, modéré, réticent ? Quelle a

  3   été l'impression générale du plan ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] De façon générale, l'impression était

  5   positive. Les remarques principales portaient sur la nécessité d'insister

  6   sur la base paritaire que prévoyait le plan Vance-Owen d'ailleurs.

  7   L'impression générale était que les Croates étaient prêts à la mise en

  8   œuvre du plan Vance-Owen.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation]

 10   Q.  Je vais poursuivre sur la voie qui a été ouverte par M. le Président.

 11   Quelle sorte d'organisation de la Bosnie-Herzégovine était celle souhaitée

 12   par les Croates de Bosnie-Herzégovine ? Je parle de la période 1992-993.

 13   R.  Il s'agissait d'une forme d'organisation qui accepterait le fait que

 14   les Croates, bien que numériquement les moins représentés en Bosnie-

 15   Herzégovine, se voient garanti un traitement équitable, au sens où ils

 16   seraient sur un pied d'égalité avec les deux autres peuples constitutifs de

 17   Bosnie-Herzégovine.

 18   Q.  En d'autres termes, qu'il ne soit pas mis en minorité ou que l'Etat ne

 19   soit pas organisé selon le principe d'une personne, une voix, afin qu'il ne

 20   soit pas mis en minorité. Est-ce que je vous comprends bien ?

 21   R.  Oui, c'est exactement cela. C'est pour cela également que j'ai cité

 22   l'aspect supplémentaire qui était lié au référendum portant sur

 23   l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. Oui, à l'indépendance de la

 24   Bosnie-Herzégovine, mais pas si cela nous amène à une situation où nous

 25   serions minoritaires et où il y aurait moins de droits pour les Croates.

 26   Q.  Monsieur Tomic, vous étiez un responsable de l'organisation de la

 27   jeunesse dans l'ancien système ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Pouvons-nous estimer que vous connaissiez bien le système politique de

  2   l'ancienne Yougoslavie ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Je voudrais vous demander qu'ensemble nous essayions d'expliquer aux

  5   Juges de la Chambre, et j'estime que cela est très important, la façon dont

  6   la Bosnie-Herzégovine, au sein de l'ex-Yougoslavie, pouvait bien

  7   fonctionner en tant qu'Etat unitaire et pourquoi cela, après l'effondrement

  8   de l'ex-Yougoslavie, n'était plus possible, du moins si l'on prend en

  9   considération les points de vue des représentants Croates ? Nous savons que

 10   les représentants des Serbes avaient des points de vue plus au moins

 11   similaires.

 12   Je pense que vous serez capable de répondre à la question suivante. Il

 13   existait une organisation, n'est-ce pas, en Yougoslavie socialiste qui

 14   était l'Alliance des Communistes yougoslaves, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que cette Ligue des Communistes de Yougoslavie était un facteur

 17   d'intégration au sein de l'Etat yougoslave ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Un facteur d'intégration de la communauté politique de l'ancienne

 20   Yougoslavie. Vous souvenez-vous ce congrès de la Ligue des Communistes

 21   yougoslaves au cours de laquelle la délégation slovène a quitté la salle et

 22   la délégation croate a quitté également la salle, mais est restée à

 23   Belgrade ?

 24   R.  Oui, je m'en souviens.

 25   Q.  Vous vous souvenez les commentaires de l'époque, qu'ils marquaient le

 26   début de la fin de la Ligue des Communistes yougoslaves ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Au moment où la Yougoslavie s'est effondrée et où la Bosnie-Herzégovine

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  1   est devenue un Etat indépendant, existait-il en Bosnie-Herzégovine des

  2   forces et des facteurs d'intégration similaires ou n'y avait-il aucun

  3   facteur d'intégration au sens politique ou institutionnel ? Peut-être avant

  4   cela je pourrais vous poser une question subsidiaire.

  5   Est-ce que la Ligues des Communistes en Bosnie-Herzégovine menait une

  6   politique qui s'efforçait de répartir de façon équitable les ressortissants

  7   des différentes nationalités aux différentes fonctions ?

  8   R.  Oui. C'est exact. Pour autant que je le sache, à Mostar, les postes

  9   étaient répartis selon ce principe, le président de la municipalité, le

 10   président du comité exécutif, le président du syndicat, le président de

 11   l'organisation de la jeunesse, le président de la Ligues des Communistes,

 12   le président des anciens combattants. Il s'agissait d'autant de postes pour

 13   lesquels la Ligue des Communistes attribuait des postes sur une base

 14   nationale avec un souci de répartition équitable. Si le président d'une

 15   municipalité était un Croate à un moment donné, l'on s'efforçait que son

 16   successeur soit un Musulman ou un Serbe et ainsi de suite. On procédait à

 17   ce type de rotation dans les différentes fonctions. En plus, on s'efforçait

 18   d'attribuer trois postes aux Musulmans, trois aux Croates, deux aux Serbes,

 19   donc le nombre de postes attribués était également réparti.

 20   Q.  Est-ce que cela était une disposition visant à assurer l'égalité des

 21   peuples constitutifs en Bosnie-Herzégovine ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  A l'issue des premières organisations multipartites en Bosnie-

 24   Herzégovine, ce sont des partis nationaux qui l'ont emporté, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Une question directrice à présent, mais vous pouvez répondre par non.

 27   Cela signifie-t-il qu'à ce moment-là, en Bosnie-Herzégovine, nous avons vu

 28   la disparition de ces facteurs d'intégration qui garantissaient l'égalité

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  1   entre les différents peuples constitutifs ?

  2   R.  A ce moment, les partis victorieux ont, pour ainsi dire, accordé la

  3   priorité à l'intérêt des peuples qu'ils représentaient.

  4   Q.  Vous souvenez-vous de l'amendement de la constitution de la Bosnie-

  5   Herzégovine à la fin de l'année 1991 lorsque la composition de la

  6   présidence de la Bosnie-Herzégovine a été modifiée ? Je n'en suis pas tout

  7   à fait sûre, peut-être que je ne m'en souviens pas bien, et je compte sur

  8   mes collègues pour me corriger si nécessaire. Est-ce qu'à cette époque-là

  9   était en vigueur cette disposition en vertu de laquelle il devait y avoir

 10   trois représentants musulmans, deux représentants serbes, un représentant

 11   de la Communauté croate et un représentant des autres groupes ethniques au

 12   sein de cette présidence ? Est-ce que vous vous souvenez de sa disposition

 13   ?

 14   R.  Oui, je me rappelle que la présidence était ainsi composée, mais je ne

 15   me souviens pas de ces changements. Je sais qu'il y avait deux

 16   représentants croates, deux représentants bosniens, deux représentants

 17   serbes et un représentant des autres groupes.

 18   Q.  Dites-moi, est-ce que les représentants des Croates souhaitaient que la

 19   Bosnie-Herzégovine soit organisée de façon ordonnée englobant un certain

 20   nombre d'unités constitutives et que chacune de ces unités constitutives

 21   soit composée de telle sorte que le critère de l'appartenance ethnique soit

 22   le critère directeur et que ces unités constitutives ensuite, sur la base

 23   du consensus, décident de toutes les questions liées aux intérêts

 24   fondamentaux de la nation afin d'éviter que le représentant d'un groupe

 25   ethnique puisse avoir plus d'importance que celui d'un autre groupe

 26   ethnique au sein de la nation ?

 27   R.  Oui, c'est à peu près ça.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, mon contre-

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  1   interrogatoire est terminé.

  2   Monsieur Tomic, je vous remercie.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Tomic, j'ai une question de suivi. J'ai été

  4   très intéressé par les questions posées sur la Ligue des Communistes, dont

  5   vous-même vous avez été membre, et sur le facteur de désintégration lié à

  6   l'élection de 1991. Et là, j'ai perçu au travers des questions et de vos

  7   réponses que les partis politiques qui s'étaient présentés aux élections de

  8   1991 étaient des partis à connotation ethnique et non pas des partis avec

  9   des programmes politiques, économiques ou autres.

 10   Alors le fait qu'il y a eu des partis qui se sont présentés sous des

 11   étiquettes ethniques, d'après vous, c'était lié à quoi ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Ma réflexion personnelle sur ce sujet me

 13   conduit à penser que le système communiste a pendant longtemps essayé de

 14   bâtir une nation artificielle, une nation yougoslave artificielle. Ce

 15   faisant, il a laissé de côté les autres nations, donc l'objectif était de

 16   réduire le nombre des Croates, des Serbes et des Musulmans en donnant la

 17   priorité et en mettant en avant les Yougoslaves dont le nombre devait

 18   s'accroître.

 19   Cette conception, bien sûr, a engendré un certain mécontentement,

 20   mais compte tenu du fait que le Parti communiste était puissant et que les

 21   mécanismes de coercition qu'il avait à sa disposition fonctionnaient, les

 22   choses se sont passées ainsi, mais cela a suscité un très fort

 23   mécontentement au sein de la population. Il importe d'ailleurs d'ajouter à

 24   ce que je viens de dire, la mention du fait que les communautés religieuses

 25   étaient exclues de toute forme de vie publique, ce qui a aussi engendré pas

 26   mal de frustrations au sein de la population. Je pense qu'au moment où ce

 27   système yougoslave dont je parle est arrivé à un état de délabrement

 28   important sur le plan économique, je pense qu'à ce moment-là toutes ces

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  1   forces qui avaient vécu tant de frustrations ont déployé toutes leurs

  2   forces pour détruire le système que la Yougoslavie s'était efforcé de

  3   construire pendant tant d'années.

  4   Pour vous donner un exemple plus précis, je vais maintenant parler de

  5   Mostar. Selon le recensement de 1991, Mostar comptait un pourcentage assez

  6   important de Yougoslaves. C'était une ville qui abritait cinq casernes de

  7   l'armée populaire yougoslave qui, dans le système développé par le Parti

  8   communiste yougoslave, devait être un élément d'intégration, un élément de

  9   développement de cette conception. Donc une caserne, c'était un élément-clé

 10   du développement de cette identité yougoslave.

 11   Il y avait à Mostar des usines d'armement, l'usine Soko, et cette

 12   usine employait des ouvriers qui venaient de toute la Yougoslavie qui

 13   étaient envoyés pour travailler dans cette usine.

 14   Lorsque la compagne électorale a démarré, un meeting a été organisé dans le

 15   stade de Mostar et on a vu arriver à ce meeting le même nombre de partisans

 16   de tous les partis, qu'il s'agisse du SDA, du HDZ ou du SDS. D'ailleurs, ce

 17   commentaire s'appliquait également aux Parti réformiste et au Parti SDP,

 18   qui était le successeur de l'ancienne Ligue des Communistes.

 19   C'est un phénomène particulier de Mostar qui m'a semblé indiquer qu'à

 20   Mostar la population ne savait pas encore très bien dans quel sens aller et

 21   quel choix effectuer, mais lorsque les résultats des élections ont été

 22   connus, on a pu constater une victoire écrasante des partis à base

 23   ethnique. Donc la question qui s'est posée pendant la quinzaine ou la

 24   vingtaine de jours qui ont séparé les meetings organisés respectivement par

 25   le SDP et par le Parti réformiste, c'était où étaient passés les

 26   Yougoslaves ? Puisque les partis à base ethnique n'incluaient pas l'idée

 27   yougoslave dans leur programme et ne votaient pas dans le sens yougoslave.

 28   Les gens, comme je viens de le dire, ont finalement voté pour les partis

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  1   ethniques, je parle de cette population frustrée que j'ai décrite tout à

  2   l'heure. Suite aux élections, la situation qui a vu le jour a donné des

  3   pouvoirs importants au SDA, au HDZ et au SDS pour mettre en place le

  4   gouvernement local, et les deux autres partis n'ont pas participé à ce

  5   gouvernement. La même chose s'est passée à peu près au niveau de toutes les

  6   municipalités en Bosnie-Herzégovine.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous voyez comment une question non

  8   directrice peut amener une longue réponse ?

  9   Qui continue ?

 10   Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 11   Messieurs les Juges. Bonjour à toutes les personnes présentes dans le

 12   prétoire.

 13   Contre-interrogatoire par Mme Nozica :

 14   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Tomic. Monsieur Tomic, vous pouvez

 15   le confirmer, n'est-ce pas, nous nous connaissons très bien puisque nous

 16   nous connaissons depuis des années, mais nous n'avons pas discuté ensemble

 17   des documents que je m'apprête à vous soumettre.

 18   R.  Exact.

 19   Q.  Il va me falloir un certain temps pour ce faire, mais puisque je vais

 20   me concentrer exclusivement sur les questions financières qui relèvent de

 21   votre domaine de spécialité, je pense que les choses avanceront assez bien.

 22   Avant d'aborder ces questions, toutefois, je voudrais finalement donner

 23   suite aux questions posées par Me Alaburic eu égard à la structure de la

 24   Bosnie-Herzégovine selon les souhaits et les positions défendues par les

 25   trois groupes ethniques.

 26   Vous avez dit quel était le souhait de la population croate. Nous savons

 27   que pendant toute la durée du conflit dont nous parlons ici, il a existé

 28   une différence entre les interprétations faites par les pouvoirs en place

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  1   en Croatie et les pouvoirs en place en Communauté croate d'Herceg-Bosna

  2   quant à l'avenir de la Bosnie-Herzégovine sur le plan de son organisation.

  3   Mais j'aimerais que vous disiez aux Juges de la Chambre si ce même problème

  4   subsiste aujourd'hui. Vous avez, en tout état de cause, participé à la vie

  5   politique, je sais qu'aujourd'hui vous êtes simple citoyen, mais je sais

  6   également que vous vous intéressez toujours à la politique puisque vous

  7   êtes un homme politique par nature. Ça, c'est certain.

  8   Pouvez-vous nous dire si ce problème qui se pose à la Bosnie, incapable de

  9   fonctionner précisément en raison de cette opposition entre diverses

 10   conceptions, est-ce que cette opposition entre les questions existe encore

 11   aujourd'hui en dépit de tous les accords conclus, en dépit de toutes les

 12   ententes obtenues sur la structuration de la Bosnie-Herzégovine ? Est-ce

 13   que la population croate n'a pas tout de même encore les mêmes problèmes

 14   que ceux qu'elle avait en 1992 pour faire valoir cette position ?

 15   R.  Je pense personnellement que la situation qui préside en Bosnie-

 16   Herzégovine aujourd'hui correspond tout à fait aux positions des plus hauts

 17   représentants de ce qu'on appelle la communauté internationale ainsi que de

 18   certaines personnes qui occupent des postes importants en Bosnie-

 19   Herzégovine. Aujourd'hui, je dirais que sur le plan politique, la situation

 20   en Bosnie-Herzégovine est la plus dure qui soit. Il est particulièrement

 21   difficile de plaire et de satisfaire les trois groupes ethniques, si je

 22   puis me permettre de les appeler ainsi, car à chaque élection on voit que

 23   l'élément le plus important est l'appartenance ethnique. Ceci vient du fait

 24   que le mécontentement par rapport à l'action du gouvernement dure toujours.

 25   On constate que l'on s'efforce toujours de chercher une forme de protection

 26   par le biais d'une organisation homogène plutôt que par l'intervention de

 27   personnalités compétentes et la mise en œuvre de programmes défendant une

 28   vision d'avenir qui pourraient permettre à la Bosnie-Herzégovine d'intégrer

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  1   la communauté que représente l'Union européenne ou même d'autres entités

  2   plus importantes.

  3   Si nous parlons de la constitution, elle ne cesse de subir des amendements,

  4   et la réalité c'est que les Croates sont marginalisés en Bosnie-

  5   Herzégovine, ils voient leur influence réduite. Aux termes des accords de

  6   Dayton, la Bosnie-Herzégovine a été organisée en tant qu'Etat recouvrant

  7   deux entités. La Fédération a subi quelques transformations par rapport aux

  8   dispositions contenues dans l'accord de Washington qui garantissaient

  9   parité et protection, mais ces pratiques ont été en réalité abandonnées au

 10   sein de la Fédération étant donné les exigences formulées par la partie

 11   musulmane de Bosnie qui défendait le principe selon lequel une population

 12   considérablement inférieure en nombre ne pouvait pas se permettre d'avoir

 13   le même nombre de ministres ou de ministères que la population musulmane.

 14   Donc c'est toujours la même histoire qui aboutit au même résultat, à savoir

 15   qu'en lieu et place de parité au niveau gouvernemental, on a aujourd'hui

 16   une absence de parité, et c'est une situation dans laquelle les Croates

 17   sont mis en minorité. C'est la raison pour laquelle la Chambre des peuples,

 18   au sein de la Fédération, abroge souvent des projets de loi pour essayer de

 19   défendre le principe de l'égalité des peuples constitutifs. Mais cela

 20   paralyse toute l'action du gouvernement.

 21   Au niveau de l'Etat, les Musulmans de Bosnie, comme je viens de le dire,

 22   étaient sur un pied d'égalité au moment de la création de la Fédération.

 23   J'étais membre du premier conseil des ministres après la signature des

 24   accords de Dayton, et suite à des débats prolongés, au moment où les Serbes

 25   de la Republika Srpska ont participé aux structures de l'Etat et après

 26   l'adoption d'une loi régissant la structure de la Bosnie-Herzégovine, loi

 27   qui prévoyait un compromis raisonnable, on a assisté à une certaine

 28   résistance à la mise en œuvre de cette loi et de toutes les autres lois

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  1   similaires, car immédiatement après la parution du texte de ces lois, les

  2   Musulmans de Bosnie ont demandé leur amendement en affirmant qu'il fallait

  3   progresser dans la vie de la société comme ils disaient, de l'action

  4   civique, comme il le disaient, et le résultat de tout cela a été la

  5   construction, au niveau de l'Etat, d'une entité serbe, et pour les Croates,

  6   le sentiment que c'était encore un pas qui les écartait de la parité prévue

  7   dans les accords de Dayton.

  8   Je vais vous donner un exemple. Lorsque le premier conseil des ministres a

  9   été mis en place, il y avait deux co-présidents, un Serbe et un Musulman,

 10   et le Croate était vice-président. Le Croate n'avait jamais le droit de

 11   présider une séance puisque les séances étaient présidées toutes les deux

 12   semaines, une fois par un Serbe et une fois par un Musulman.

 13   Il s'en est suivi une activité importante de la part des Musulmans de

 14   Bosnie pour modifier l'accord de Dayton et supprimer la Republika Srpska,

 15   qui a suscité une forte mobilisation sur la scène politique serbe, les

 16   Serbes s'élevant pour défendre l'accord de Dayton, et la situation actuelle

 17   est la suivante : les Musulmans souhaitent toujours un Etat centralisé

 18   respectant le principe d'un habitant, une voix. Les Serbes craignent la

 19   suppression de la Republika Srpska, ils refusent donc de participer aux

 20   actions politiques menées par le gouvernement, ils font obstruction par

 21   tous les moyens et développent une opposition politique avec ceux qui sont

 22   censés être leur partenaire au gouvernement. Ils agissent ainsi au

 23   parlement, car le pouvoir est censé être constitué de trois parties, de

 24   trois groupes. Les Croates, pour leur part, sont mécontents, car ils sont

 25   partie prenante d'une fédération dans laquelle ils estiment que toutes les

 26   questions doivent être résolues sur le principe de la parité. Or, ce n'est

 27   pas le cas, donc ils essaient d'intervenir au niveau de l'Etat où, bien

 28   sûr, ils se trouvent en opposition avec les Musulmans qui, eux, estiment

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  1   que toutes ces questions sont réglées grâce à leur position au sein de la

  2   Fédération.

  3   Donc la situation aujourd'hui est véritablement extrêmement complexe sur le

  4   plan politique, et il est permis de dire, je pense, que depuis Dayton,

  5   l'époque actuelle est celle qui pose le plus de problème sur le plan

  6   politique, car après l'adoption d'un grand nombre de lois, après

  7   l'obtention d'une aide financière importante de la communauté

  8   internationale, de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international et

  9   d'autres instances financières, ces problèmes subsistent néanmoins.

 10   Q.  Merci, Monsieur Tomic. Vous avez tracé à grand trait, à mon avis, et de

 11   très bonne manière, la situation police actuelle.

 12   Dans ces conditions, pouvons-nous dire que cette question liée à la

 13   position qu'occupe chaque peuple constitutif en Bosnie-Herzégovine pose

 14   toujours problème exactement comme cela posait problème en 1992, même si

 15   nous tenons compte de l'évolution des positions des Musulmans, des Croates

 16   et des Serbes de Bosnie ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Expliquons les choses aux Juges de la Chambre, si vous le voulez bien.

 19   Vous avez parlé du conseil des ministres à plusieurs reprises. Aux termes

 20   des accords de Dayton, ce conseil des ministres était fondamentalement la

 21   représentation du gouvernement, n'est-ce pas, c'était la seule institution

 22   qui exerçait des pouvoirs exécutifs ?

 23   R.  Oui, le conseil des ministres est devenu le gouvernement de l'Etat

 24   suite à la signature des accords de Dayton.

 25   Q.  D'accord. Poursuivons maintenant en abordant les questions liées au

 26   financement. Vous avez expliqué, en répondant aux questions qui vous ont

 27   été posées pendant l'interrogatoire principal, que les séances du

 28   gouvernement discutaient de ces questions financières et de ces questions

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  1   de contrôle financier par le SDK également. Alors voyons si les problèmes

  2   qui se posaient et dont vous avez parlé ont duré pendant toute l'année 1993

  3   et jusqu'à la fin de cette année-là. Le premier document que je vais vous

  4   soumettre est le document P 00950. Il s'agit du PV d'une séance du

  5   gouvernement tenue le 23, le 23 décembre 1992. Dans la traduction, on lit

  6   28, mais enfin ça n'a guère d'importance que ce soit le 23 ou le 28.

  7   Je vous renvoie à la page 4 de la version croate de ce texte, qui

  8   correspond à la page 7 du texte anglais. Le paragraphe qui m'intéresse est

  9   le premier paragraphe lisible qui indique quels étaient les moyens utilisés

 10   pour demander les sommes nécessaires et comment ces demandes étaient

 11   satisfaites.

 12   Alors nous lisons dans ce paragraphe, je cite : "Sur proposition du

 13   département de la défense du HVO de la Communauté croate d'Herceg-Bosna,

 14   une décision a été rendue à l'unanimité qui affecte la somme de 50 000

 15   dinars croates à telle fin.

 16   "La somme de 30 000 dinars croates, à l'aide aux handicapés."

 17   Ensuite, on voit la mention de la somme de 90 000 dinars croates qui doit

 18   être affectée en tant que provision à la défense et la somme de 15 millions

 19   de dinars croates qui doit être affectée au besoin du département de

 20   l'Intérieur, et à la fin du paragraphe, on voit que ces sommes doivent être

 21   intégrées au budget de la Communauté croate d'Herceg-Bosna avant la fin de

 22   l'année.

 23   Pourriez-vous expliquer si c'était bien selon ce principe qu'étaient

 24   répartis les financements en 1992 et si vous prévoyiez qu'à la fin de

 25   l'année vous auriez à votre disposition les fonds en question ?

 26   R.  Nous sommes en décembre, donc à la fin de l'année, date à laquelle nous

 27   avons commencé à recouvrir les droits de douane et une partie des impôts en

 28   raison du fait que le SDK n'avait pas fonctionné d'une façon très efficace.

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  1   C'est la raison pour laquelle je parle de partie des sommes en question, et

  2   à ce moment-là, nous nous sommes mis à affecter ces sommes aux différents

  3   besoins à l'issue des débats organisés durant les séances du HVO de la

  4   Communauté croate d'Herceg-Bosna, conformément aux moyens disponibles et

  5   aux estimations faites par nous quant aux sommes qu'il serait possible de

  6   recouvrir avant la fin de l'année. C'était important pour le département de

  7   la défense et pour le département de l'Intérieur en vue de planification

  8   ultérieure, car c'étaient les deux départements qui bénéficieraient le plus

  9   de ces droits de douane et de ces impôts. C'est la raison pour laquelle on

 10   trouve cette mention dans le texte, que les sommes doivent être versées

 11   avant la fin de l'année. Manifestement, nous ne les avions pas encore

 12   recouvrés au moment de la rédaction du texte.

 13   Il était encore trop tôt à ce moment-là pour commencer à réfléchir à

 14   l'établissement d'un budget classique pour l'année 1993, mais c'était une

 15   tentative de mettre en place un système normal avec des plans mensuels, des

 16   plans trimestriels pour les différents départements afin que les fonds

 17   soient répartis efficacement.

 18   Q.  J'ai un autre document, qui est un PV d'une autre séance du

 19   gouvernement qui traite du même point. Je crois qu'avant la pause, je

 20   pourrai vous le soumettre.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais rester sur ce document parce qu'il y a

 22   un point qui m'intéresse énormément.

 23   C'est que je m'aperçois qu'à un moment donné, M. Stojic intervient et

 24   dit que les cours militaires ne fonctionnent pas, et il explique qu'il y a

 25   1 000 rapports de police qui attendent et que de ce fait, ça crée un

 26   problème concernant les enquêtes et le fait également sur les détentions

 27   s'il n'y a pas des ordres de la justice.

 28   Je vois que suite à l'intervention de M. Stojic, qui s'alarme de ce

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  1   fait, on va nommer toute une série de juges et de procureurs, c'est à la

  2   fin du document, pour apparemment faire face à cette situation. Donc nommer

  3   des juges et des procureurs, ça entraîne évidemment des frais budgétaires,

  4   des fonctionnements, investissements, et cetera.

  5   Alors, nous sommes en décembre 1992. Le temps de mettre en place tout

  6   cela, ça va prendre du temps.

  7   A votre avis, est-ce que cette justice allait fonctionner, et notamment la

  8   justice militaire ? Est-ce que pendant l'année 1993, on n'a pas porté à

  9   votre attention qu'il y avait des problèmes liés au fait qu'il n'y avait

 10   pas de juges, il n'y avait pas de procureurs, il n'y avait pas

 11   d'enquêteurs, il n'y avait pas d'argent, et que tout cela posait problème ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] L'intervention du président du département de

 13   la défense a permis de nous informer des problèmes qui étaient liés aux

 14   efforts de mobilisation et à l'impossibilité de sanctionner les hommes qui

 15   avaient abandonné leurs unités ou les champs de bataille, en raison de

 16   l'absence de ces instances judiciaires.

 17   Durant le mois où ce document a été rédigé, nous avons affecté un

 18   certain nombre de moyens aux besoins du département de la justice, destinés

 19   notamment à permettre la reconstruction des bâtiments, parce que des

 20   tribunaux étaient physiquement endommagés ou détruits. Donc c'était un pas

 21   vers la reconstruction du système judiciaire.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous nous dites que vous avez fait des efforts, mais

 23   est-ce que finalement ça fonctionnait, ou ça n'a pas fonctionné, ou ça a

 24   mal fonctionné ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Selon moi, cela a mal fonctionné.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est 10 heures 30. Il faut qu'on fasse la pause.

 27   Nous allons faire une pause de 20 minutes.

 28   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

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  1   --- L'audience est reprise à 10 heures 53.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nociza.

  3   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Monsieur Tomic, s'agissant de cette question relative au fonctionnement

  5   de la justice ou conformément à la question posée par le Juge Antonetti,

  6   j'aimerais que vous me confirmiez si la raison du manque de fonctionnement

  7   adéquat, comme vous le pensez vous-même, la raison n'a-t-elle pas été le

  8   manque de fonds lorsqu'il s'agit de la justice ? Vous avez montré que cette

  9   pénurie de fonds avait été généralisée pour ce qui est du HVO tout entier,

 10   mais cette pénurie s'est-elle manifestée comme étant l'un des facteurs de

 11   cette déficience du fonctionnement au niveau de la justice ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je disais qu'une partie de ces attributions

 13   pour ce qui est du budget de la Bosnie-Herzégovine se voyait destinée aux

 14   financements du parquet et des tribunaux. Les tribunaux municipaux

 15   n'existaient dans toutes les municipalités, avant la guerre même. Mostar,

 16   dirais-je, se trouvait être un centre dans le contexte, et nous avons eu à

 17   Mostar tant un problème de bâtiments qu'il fallait restaurer, renouveler.

 18   Il fallait de l'argent, il fallait aussi du personnel parce que bon nombre

 19   de gens étaient partis. Il y a d'abord les Serbes qui sont partis, et eux

 20   aussi, avaient été employés dans la justice. La majeure partie de ces

 21   Serbes est partie. Ensuite les femmes sont parties avec leurs enfants et

 22   leurs familles pour devenir des personnes déplacées. Le fonds pour les

 23   salaires de ceux qui travaillaient a toujours été une question constamment

 24   en suspens pour ce qui est de la satisfaction des besoins destinés au

 25   fonctionnement de la justice.

 26   Q.  En sus des salaires, y avait-il des problèmes, un problème

 27   d'équipement, un problème d'immeuble, de construction appropriée pour le

 28   fonctionnement du système de la justice ?

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  1   R.  Je l'ai déjà mentionné, les dégâts subis par les bâtiments. La première

  2   des aides à l'attention de la justice de la part du HVO et de la HZ HB

  3   était justement destinée à la reconstruction de certaines bâtisses

  4   appartenant à la justice et pour les salaires, les achats de l'élémentaire,

  5   de papier, d'ordinateur, et cetera.

  6   Q.  Merci. Pouvons-nous continuer maintenant avec le sujet que nous avons

  7   déjà entamé. J'aimerais à ce sujet que vous vous penchiez sur le P 01137.

  8   Il s'agit du document qui suit celui dont on a discuté.

  9   Il s'agit d'un PV d'une session du HVO du 15 janvier 1993. Je vois

 10   que vous n'avez pas été présent vous-même à la session, mais je vous

 11   demande néanmoins de vous pencher sur la page 3, paragraphe 6. Dans la

 12   version anglaise c'est la page 4. Ici, il est question justement de ce que

 13   vous avez évoqué tout à l'heure en parlant de propositions trimestrielles.

 14   C'est justement de cela qu'il est question.

 15   Je vais vous en donner lecture, parce que vous avez probablement eu

 16   l'occasion de le voir. Ce que je voudrais maintenant vous demander, c'est

 17   si vous vous souvenez de cette évolution des événements ?

 18   Version croate, page 3 : "Projet de plan financier du département de la

 19   défense HVO HZ HB pour la période 1er janvier au 31 mars 1993, présenté par

 20   le département du HVO HZ HB.

 21   "Après débat relatif au projet présenté, il a été à l'unanimité

 22   adoptée la conclusion suivante :

 23   "Nous nous devons d'investir des efforts au maximum en vue d'assurer

 24   les revenus personnels des membres des forces armées de la HZ HB ainsi

 25   qu'en vue de satisfaire à leurs dépenses matérielles."

 26   Monsieur Tomic, cela confirme-t-il à part entière ce que vous avez dit au

 27   sujet des plannings financiers trimestriels, est-ce qu'il est donné de

 28   voir, partant de là, qu'il manque encore des ressources car il y a une

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  1   conclusion de prise visant à justement investir un maximum d'efforts pour

  2   assurer les ressources nécessaires ?

  3   R.  Cette conclusion a été prise conformément au décret relatif au budget

  4   pour ce qui est de la planification trimestrielle des ressources. Le

  5   département de la défense a présenté cette demande, et il est donné de

  6   constater que la requête ne pourra pas être satisfaite parce que dans ce

  7   contexte il y a une conclusion qui cherche, qui vise à encourager à faire

  8   des efforts pour assurer des recettes permettant de payer une partie des

  9   salaires et de couvrir une partie des dépenses matérielles du département

 10   des forces armées, comme on le dit dans cette conclusion.

 11   Q.  Je voudrais maintenant que nous voyons comment cela s'est passé par la

 12   suite, comment a évolué la situation financière du point de vue du

 13   département de la finance. P 01324. Il s'agit d'un PV d'une session du HVO

 14   du 7 janvier 1993. Vous étiez présent. Je me réfère ici à la page 2 de la

 15   version croate, et page 3 de la version anglaise, où on dit avant le début

 16   de l'article 1 : "Pour finir, le responsable du département de la défense,

 17   M. Stojic, demande au HVO HZ HB une aide en moyens matériels et techniques,

 18   notamment en matière de ressources à affectation spéciale, et ce, afin de

 19   placer l'organisation financière en état de fonctionner et aux fins de

 20   faire en sorte que l'assistance vienne à être réalisée."

 21   Monsieur Tomic, nous voyons ici que cela se passe à peine 13 jours plus

 22   tard, M. Stojic insiste une fois de plus sur la nécessité de placer le

 23   système financier en état de marche parce qu'il est évident qu'il y a des

 24   problèmes de financement de la défense. Etes-vous d'accord avec cela ?

 25   R.  Oui, exact.

 26   Q.  Penchons-nous maintenant sur le document suivant, il s'agit du 1D

 27   01183. 1183. Il s'agit d'un PV d'une session du HVO daté du 18 mars 1993.

 28   Monsieur Tomic, j'ai pris quelques exemples au hasard au fil de

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 12  Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la

 13  pagination anglaise et la pagination française.

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  1   l'année pour voir et pour montrer que le problème a existé tout au long de

  2   l'année. Je suis donc passée au mois de mars. On indique qui sont les

  3   personnes présentes à l'occasion de cette réunion.

  4   Ce que je vous demande c'est de nous pencher sur l'ordre du jour, au

  5   quatrièmement : "Projet de décret portant protection des invalides

  6   militaires de la guerre pendant le temps de guerre ou danger de guerre

  7   immédiat sur le territoire de la HZ HB."

  8   C'est un projet qui est débattu en page 2 de la version croate, et à la

  9   page 2 de la version croate également. Et sur ce projet, il nous sera donné

 10   de voir comment a fonctionné ce système de proposition formulée par les

 11   responsables des différents départements. Ici il y a donc un projet de

 12   protection, des mesures visant à protéger les invalides militaires de la

 13   guerre en temps de guerre ou en temps de danger de guerre imminent sur le

 14   territoire de la HZ HB. Le projet de décret porte sur une assistance

 15   ponctuelle.

 16   C'est présenté par Slobodan Bozic. Slobodan Bozic nous dit que

 17   conformément aux conclusions du HVO de la HZ HB, il a été formulé des

 18   propositions, comme on peut le voir ci-dessus, et il y a demande d'obtenir

 19   une opinion du département des finances du HVO de la HZ HB.

 20   On voit que M. Zubak, aux points A, B, C, demande certaines

 21   modifications. On dit au-delà : "Un décret portant protection des invalides

 22   de guerre et un portant assistance ponctuelle ont été adoptés comme suit :

 23   Le département de la défense et les départements juridiques doivent

 24   juridiquement rédiger les décrets conformément aux observations formulées

 25   de façon orale." On nous donne la date, et c'est le 1er avril 1993.

 26   Alors, on passe aux conclusions du HVO : "Organiser et regrouper les

 27   renseignements sur les tâches effectuées par les membres des forces

 28   armées," puis on dit au deuxième : Le décret sera mis en œuvre à partir du

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  1   1er avril et le versement des indemnités sera versé lors de la collecte des

  2   renseignements. Et au trois, on parle au paragraphe 1, qui est confié pour

  3   réalisation au département de la défense et au département chargé du

  4   travail des soins sociaux et de la famille.

  5   Monsieur Tomic, est-ce une bonne illustration pour ce qui est des modalités

  6   suivant lesquelles les responsables des différents départements sont venus

  7   proposer des textes de lois ou de décrets qui devaient être adoptés par le

  8   HVO ? Est-ce que c'était la façon de procéder ? On présente un projet, il y

  9   a débat, et s'il y a des propositions, elles sont adoptées sous forme de

 10   compléments ou de modifications, ensuite il est tiré des conclusions.

 11   Est-ce que nous pouvons déterminer que c'est là la méthodologie de

 12   travail pour ce qui est de l'adoption des propositions avancées par les

 13   différents responsables des départements à l'intention du HVO ?

 14   R.  Oui. Cela était la méthodologie dont j'avais déjà parlé auparavant.

 15   Q.  Monsieur Tomic, est-ce que nous pouvons tirer une conclusion de ceci, à

 16   savoir que les responsables, voire les départements, dépendaient du débat

 17   qui se tiendrait aux sessions du HVO, à savoir chacune de leurs

 18   propositions portant sur des décrets ou portant sur des solutions au niveau

 19   du personnel faisait l'objet d'un débat et qu'il y avait toujours

 20   possibilité de procéder à des modifications ou à ne pas adopter les choses

 21   telles que proposées ?

 22   R.  Cette possibilité existait, certes. Le responsable de département

 23   proposait un texte de décret, une nomination ou peu importe quoi d'autre,

 24   il présentait cela au HVO, le HVO en débattait de sa proposition, et au cas

 25   où, par exemple, l'on pouvait voir que la majorité était opposée au texte

 26   de projet, le proposant pouvait retirer son document, son projet, en

 27   rédiger un autre ou alors accepter les remarques formulées. Comme on peut

 28   le voir, M. Zubak ici, s'agissant de la partie liée aux questions

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  1   juridiques, a tenu à ce que cela soit intégré à la version finale de la

  2   décision. Et, après vote, ceci devient un document du HVO de la HZ HB.

  3   Q.  Le HVO a également eu la possibilité de formuler des suggestions pour

  4   ce qui est des postes à modifier et le préciser dans ses conclusions pour

  5   demander à ce que cela soit communiqué une fois de plus a posteriori ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Penchons-nous maintenant sur la dernière page pour avoir une

  8   confirmation s'agissant d'un document qui a fait l'objet d'une question de

  9   Me Karnavas. On voit qu'il s'agit là de la dernière page du PV où il est

 10   dit : Il est attribué des moyens à concurrence de cinq millions de dinars

 11   croates pour les besoins du HVO municipal de Sarajevo.

 12   Pour les besoins du compte rendu d'audience, je précise que c'est un

 13   document que nous avons vu, à savoir le 1D 12114, par lequel ces ressources

 14   sont attribuées au HVO de Sarajevo, et on voit maintenant que ça a été

 15   décidé à cette session du HVO.

 16   Je me propose de vous poser maintenant une petite question au sujet du HVO

 17   de Sarajevo. Le HVO Sarajevo, à l'époque, à savoir depuis le début de

 18   l'agression contre Sarajevo jusqu'à la fin 1993, a défendu de façon

 19   conjointe Sarajevo aux côtés de l'ABiH face à l'agression serbe contre la

 20   ville et contre la Bosnie, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, exact.

 22   Q.  Je vais maintenant vous demander, et là je viens de passer au mois

 23   d'octobre. Je vais vous montrer un document qui vous a été montré par Mme

 24   Alaburic. Il s'agit du P 05799. Voilà. Il s'agit d'un PV d'une session qui

 25   s'est tenue le 9 octobre. Vous étiez présent à cette réunion. Je vous

 26   montre ce document pour une raison. Qu'avons-nous voulu ? On vous a montré

 27   le 1D 1934, vous n'avez pas à le chercher dans le classeur, il n'y est pas.

 28   C'est votre lettre à vous, ou plutôt une information de votre part, portant

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  1   sur le fonctionnement du système financier que vous présentez le 12 août

  2   1993.Au sujet de cette lettre, M. le Juge Trechsel vous a demandé si après

  3   votre avertissement, les choses avaient changé, et vous avez dit que

  4   quelque chose avait en effet changé. Alors je vais vous demander dans

  5   quelle mesure ça a changé, parce qu'à cette session du 9 octobre, et je me

  6   réfère notamment à la page 2 de la version croate, soit page 3 de la

  7   version anglaise, conclusion numéro 3 où il y a une proposition adoptée par

  8   le HVO qui porte sur le financement unifié visant à verser des ressources

  9   au budget pour verser aux soldats des soldes suivant des critères unifiés,

 10   ce qui faisait qu'aucune entreprise n'était habilitée à verser des salaires

 11   à ces soldats.

 12   Alors, il faudra que vous nous disiez clairement dans quelle mesure les

 13   choses ont évolué après votre courrier, parce que s'agissant de ce document

 14   et des documents analogues qui ont suivi ultérieurement, il me semble qu'il

 15   n'y a pas eu véritablement de changements qualitativement importants.

 16   R.  Cela n'a été qu'encore un appel ou une pression exercée aux fins de

 17   faire fonctionner le système. Comme je vous l'ai déjà dit, au travers du

 18   budget pour 1994, il a été fait des démarches satisfaisantes. Jusque-là,

 19   c'étaient des improvisations, une tentative de surmonter les difficultés au

 20   niveau des municipalités, et il y a eu aussi, dans une grande mesure, une

 21   utilisation des ressources non conformes aux affectations qui avaient été

 22   décidées.

 23   Q.  Monsieur Tomic, vous venez de nous dire une chose intéressante, vous

 24   l'avez fait hier. Suite à des événements militaires désagréables ou peu

 25   agréables, les municipalités s'efforçaient de garder les ressources pour

 26   elles-mêmes sans les verser au HVO. Vous ai-je bien compris ?

 27   R.  Exact.

 28   Q.  Est-ce que cela a également porté gravement préjudice au potentiel de

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  1   la défense au sein du HVO ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Je voudrais maintenant que nous nous penchions sur un autre document

  4   pour conclure le sujet. Il s'agit du P 06689. Il s'agit ici d'un courrier

  5   du premier ministre à l'intention des présidents du HVO, on est au 16

  6   novembre. Le gouvernement de l'Herceg-Bosna est déjà nommé, et le premier

  7   ministre, M. Prlic, au premier paragraphe, lance un appel à l'intention des

  8   municipalités justement, ainsi qu'à l'intention des ministères, afin que le

  9   système financier soit mis en fonction, parce que cela constituait un grand

 10   problème pour le gouvernement qui venait d'être mis en place, n'est-ce pas

 11   ?

 12   R.  Oui, c'est tout à fait exact.

 13   Q.  Bien. Passons maintenant à un autre sujet, qui est le suivant. Et à ce

 14   titre, je vous demande de vous pencher sur le 2D 00891. Il s'agit d'une

 15   session du HVO datée du 9 avril 1993. Vous étiez présent lors de cette

 16   session, et je voudrais vérifier avec vous de quelle façon ça se passait et

 17   quelles étaient les attributions des différents responsables du HVO.

 18   Page 8, premier paragraphe. Anglais, page 6, paragraphe 3.

 19   "Suite à une proposition du département de la défense du HVO, il a

 20   été à l'unanimité décidé de signer un contrat avec une entreprise de

 21   traitement des métaux, chez Uzor à Siroki Brijeg, pour la fabrication de

 22   grenades dont les quantités et prix indiqués au contrat même."

 23   Vous souvenez-vous d'une conclusion de ce type qui avait à l'époque

 24   été adoptée ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Penchez-vous dessus, et je vais vous poser une question portant sur le

 27   2D 00980. Il s'agit d'une décision portant conclusion d'un contrat avec

 28   ladite entreprise autorisant le responsable du département de la défense à

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  1   signer ledit contrat. Monsieur Tomic, on peut voir ici que le HVO,

  2   lorsqu'il s'agissait de ce type de contrat, avait donné plein pouvoir aux

  3   responsables du HVO pour signer, n'est-ce pas ? 

  4   R.  Je pense ici qu'il s'agissait d'une exception venant d'une proposition

  5   du responsable du département de la défense. Il me semble qu'il s'agissait

  6   d'un tout premier contrat, parce que c'était une entreprise privée, c'est

  7   la raison pour laquelle, dirais-je, il y a eu cette proposition de décider

  8   au niveau du HVO de la HZ HB, parce qu'à l'époque il n'y avait pas

  9   d'organisation portant sur les acquisitions publiques ou autre modalité qui

 10   permettrait une transparence au niveau des acquisitions ou des achats,

 11   notamment lorsqu'il s'agissait, de l'autre côté, d'entreprises privées.

 12   Q.  Je tiens à rectifier ce qui a été inscrit à la ligne 18. Il s'agit du

 13   2D 00980. Là, je viens à la question qui est celle-ci : ce système d'achat

 14   public, quand est-ce qu'il s'est mis à fonctionner ?

 15   R.  Ça a été intégré comme obligation à l'année budgétaire 1994.

 16   Q.  Merci. Monsieur Tomic, à l'occasion de l'interrogatoire principal, on

 17   vous a montré une décision portant application de l'article 25 de la loi

 18   régissant le fonctionnement des douanes sur le territoire de la HZ HB à

 19   l'époque d'un danger de guerre imminent ou d'une situation de guerre. C'est

 20   un document que vous connaissez forcément. Je ne l'ai pas mis dans mon

 21   classeur. Il s'agit du 1D 00019.

 22   A l'article 4 de cette décision, il est prescrit ce qui suit : les forces

 23   armées de la HZ HB et de la RBiH se trouvent être exonérées de paiement de

 24   droits de douane pour les marchandises importées et qui servent aux besoins

 25   du développement desdits services. Donc cette exonération des douanes se

 26   rapporte tant au HVO qu'à l'ABiH, n'est-ce pas ?

 27   R.  C'est exact.

 28   Q.  Est-ce que cette décision se rapportait au pétrole, à savoir à

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  1   l'essence, au carburant ? Est-ce que c'était là des marchandises qu'on

  2   importait ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Est-ce que le HVO et l'ABiH étaient également exonérés de la TVA pour

  5   ce qui est de la mise en circulation de ces marchandises ?

  6   R.  La TVA découle de la loi régissant les douanes. Si c'est exonéré de

  7   douane, c'est exonéré de TVA.

  8   Q.  Est-ce qu'au HZ HB il y avait des stations d'essence où l'on

  9   fournissait du carburant pour les besoins de la défense tout en consignant

 10   les quantités qui ont été livrées ? Vous le savez ou pas ?

 11   R.  La plupart de ces stations d'essence ont été réquisitionnées par les

 12   municipalités. C'était pour l'essentiel des stations d'essence en propriété

 13   publique ou appartenant à des sociétés d'Etat. Bon nombre d'unités

 14   s'approvisionnaient là en remettant un document approprié, voire un ordre

 15   de livraison qui leur était fourni par leur service logistique.

 16   Q.  Est-ce qu'il était obligatoire de consigner exactement les quantités de

 17   carburant qui étaient livrées pour les besoins de la défense afin de

 18   pouvoir exonérer du paiement des droits de douane et de la taxe sur les

 19   ventes de ces quantités ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Est-ce que vous avez connaissance qu'il y ait eu des cas d'abus de la

 22   part de certaines stations d'essence qui livraient de grandes quantités de

 23   carburant au HVO, et cela, dans le but d'éviter de payer les droits de

 24   douane qu'ils devaient normalement payer ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Je voudrais que nous passions au document maintenant P --

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je remarque simplement, Maître

 28   Nozica, que vous posez des questions directrices, directrices, directrices

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  1   sans cesse. Il ne s'agit pas d'un sujet différent. Ceci est dans la même

  2   ligne que votre interrogatoire principal. Veuillez revenir peut-être à une

  3   approche plus ouverte.

  4   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Juge, il me semble que je donne

  5   au témoin la possibilité, même si la question est directrice, de donner des

  6   explications quant à ce dont il s'agit. Je dépends vraiment des réponses du

  7   témoin, je peux vous l'assurer. Je n'ai pas procédé à son récolement.

  8   Q.  Est-ce que vous avez trouvé le document P 00410 ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Il s'agit d'un ordre de M. Stojic où il est ordonné à un certain nombre

 11   de stations d'essence à Ljubuski, la station Peric, et dans la station

 12   Dodig à Citluk, et la station d'essence Bosnjak à Posusje, il est ordonné

 13   donc à M. Andabak de prendre possession de l'ensemble des documents qui ont

 14   été consignés dans ces stations d'essence afin de s'assurer du paiement de

 15   taxes sur les ventes et de la meilleure façon d'assurer des fonds pour les

 16   unités pour le département des finances du HVO.

 17   Ce document vous a été déjà montré. Est-ce que vous vous rappelez de la

 18   situation à laquelle cela correspond ?

 19   R.  Oui, je m'en souviens, car il s'agissait pratiquement d'une reprise au

 20   compte du département de la défense d'une compétence qui revenait au

 21   département des finances, qui avait compétence en matière de perception de

 22   taxe sur les ventes. Mais il s'agissait ici de trois sociétés privées de

 23   station d'essence, des stations privées qui n'avaient pas été assujetties à

 24   la mobilisation. Nous avions des informations selon lesquelles elles ne

 25   s'acquittaient pas de leurs taxes. Nous avions des informations qui

 26   n'avaient pas été fournies par les municipalités de Ljubuski, Citluk et

 27   Posusje. Ceci intervient à la période juste après que la brigade financière

 28   ait été mise en place.

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  1   A ce moment-là, ces réglementations venaient juste d'être adoptées et

  2   la brigade financière avait commencé à travailler au premier trimestre de

  3   l'année. Après que la documentation ait été versée, la brigade financière a

  4   agi conformément aux réglementations qui étaient en vigueur.

  5   Q.  Je voudrais vous poser un certain nombre de questions par rapport à

  6   cela. Est-ce que les informations consignées relatives au carburant délivré

  7   au HVO devaient arriver au département de la défense à la logistique ?

  8   Fallait-il enregistrer toutes ces quantités qui devaient être délivrées

  9   pour le compte du département de la défense ?

 10   R.  Lorsqu'il s'agissait d'ordres qui étaient émis par le département de la

 11   défense ou ses services, oui. En pratique, nous avions aussi certains

 12   ordres qui émanaient des municipalités qui émettaient aussi des ordres en

 13   vue de la livraison de carburant et les informations correspondant à ces

 14   quantités-là, la plupart du temps n'étaient pas fournies au département

 15   correspondant du HVO, au département de la défense.

 16   Q.  Si le département de la défense a reçu des informations selon

 17   lesquelles certaines stations d'essence délivraient plus de carburant que

 18   ce qui était ordonné, est-ce qu'il existait une obligation pour le

 19   département de la défense de mandater une enquête aux fins du paiement des

 20   contributions des taxes dues ?

 21   R.  Oui, c'est exact.

 22   Q.  Dans le cas qui nous intéresse, est-ce que le chef du département de la

 23   défense exerçait un contrôle uniquement dans le cas où il avait des

 24   informations selon lesquelles il y avait eu des abus ou alors uniquement

 25   dans les cas où il recevait des documents qui prouvaient qu'il y avait eu

 26   des abus ?

 27   R.  Les documents avaient été saisis et ils ont été analysés par la brigade

 28   financière de la HZ HB, et c'est à cela que cela revient finalement.

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  1   Q.  Entendu. Très bien. Voyons le document suivant 2D 01475. Ici ce qu'il

  2   contient est conforme à ce que vous venez de dire. Il s'agit d'un procès-

  3   verbal manuscrit. Je ne sais pas si vous en avez eu connaissance, mais on y

  4   voit mentionné Inopetrol Posusje. Est-ce qu'il s'agit de cette société

  5   bosniaque Posusje ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  La suivante est Circle Medjugorje. S'agit-il de la société Dodig à

  8   Medjugorje de la liste précédente ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Et nous avons ici Peric Ljubuski également. Alors on voit que ce qui

 11   aurait dû être versé, et ne l'a pas été, se montait à 1.184.798 deutsche

 12   marks. Alors est-ce que vous vous souvenez s'il s'agissait à peu près de ce

 13   montant, s'il a été réglé ultérieurement ?

 14   R.  Après que la brigade financière a instruit ce cas en tant qu'organe

 15   compétente, si vous regardez ce qui est porté dans ce document, dans le

 16   document précédent, on ne mentionne pas le véritable nom des sociétés mais

 17   le nom de leurs propriétaires. Ici nous avons le véritable nom officiel.

 18   Donc nous avons ici un avertissement selon lequel le montant mentionné

 19   n'est pas sûr. On n'est pas sûr de son exactitude et l'on demande une

 20   vérification relative à ce montant, montant donc de la taxe sur les ventes

 21   en gros. La brigade financière a adopté les décisions nécessaires et les

 22   sociétés concernées ont versé les contributions en question. Ce montant en

 23   question était inférieur à ce qui est mentionné ici, mais c'était un

 24   montant significatif.

 25   Q.  S'agissait-il de l'époque où le HVO a rencontré des  problèmes que nous

 26   pourrions qualifier de problèmes chroniques en matière de financement ? Je

 27   parle du début de l'année 1993.

 28   R.  Oui, c'est exact. Et cette réaction du département de la défense, et

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  1   c'est ainsi que je l'ai comprise, cet ordre donc représentait encore une

  2   fois une tentative tout à fait pratique de s'assurer des ressources

  3   supplémentaires d'une part; et d'autre part, d'apporter la preuve que l'on

  4   recherche de façon tout à fait intensive des ressources financières et

  5   qu'on utilisera tous les moyens disponibles de trouver ces ressources

  6   lorsqu'il s'agit du budget de la HZ HB.

  7   Q.  Merci. Je voudrais que nous passions aux deux derniers documents.

  8   Mme NOZICA : [interprétation] Je reconnais qu'il s'agit d'un sujet qui n'a

  9   pas été abordé précédemment et je m'en remets entièrement à l'appréciation

 10   de Messieurs les Juges pour savoir si le temps correspondant sera décompté

 11   de mon temps. Il s'agit de la fourniture d'armes pour les besoins de la

 12   défense de la Croatie, et il s'agit également des ventes d'armes de la part

 13   du HVO à la Croatie.

 14   Q.  Monsieur Tomic, je voudrais faire une très brève introduction quant à

 15   la raison pour laquelle je vous pose cette question. La raison en est que

 16   l'Accusation prétend que la Croatie a fourni une assistance matérielle au

 17   HVO de la HZ HB. Il y a des documents qui disent l'inverse.

 18   Monsieur Tomic, vous aviez connaissance qu'au début même de la guerre en

 19   1992, des citoyens de Bosnie-Herzégovine se trouvant à l'étranger auraient

 20   versé des sommes aux fins de la défense du territoire concerné et de

 21   défense de la Croatie ? Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre brièvement

 22   quels étaient les citoyens, quel était l'Etat dont les citoyens étaient les

 23   plus nombreux à l'étranger et quels étaient les citoyens croates ou de

 24   l'Etat de Bosnie-Herzégovine à l'étranger qui contribuaient le plus

 25   largement sous forme financière, et enfin sur quel compte ces sommes

 26   étaient versées ?

 27   R.  Nous avons pu voir également dans les décisions municipales que toutes

 28   ces municipalités ont recherché des moyens de financement auprès de nos

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  1   travailleurs à l'étranger. Toutes ces municipalités également au travers

  2   des associations de citoyens de leurs propres municipalités qui pouvaient

  3   agir sur le territoire de l'Europe ou des Etats-Unis ont demandé de l'aide.

  4   C'est ainsi que nous avons vu que la municipalité de Mostar, elle aussi,

  5   ainsi on voyait une demande d'aide de ce type-là. Mais lorsque nous avons

  6   commencé à élaborer le budget de la République d'Herceg-Bosna, nous

  7   pensions également que nous pourrions verser à ce budget les contributions

  8   et les donations de nos citoyens appartenant à la diaspora du monde entier,

  9   citoyens qui souhaitaient venir en aide au territoire où ils étaient nés.

 10   La plus grande partie de la diaspora croate est originaire de la Bosnie-

 11   Herzégovine. Cependant, il a alors été dit qu'un accord avait été obtenu,

 12   un accord avec la Croatie pour que ces différents fonds soient centralisés,

 13   et cela dans le but d'éviter que les différents échecs, qu'il s'agisse des

 14   municipalités, qu'il s'agisse de la HZ HB, ou de la République de Croatie,

 15   d'où en fin de compte émane également l'appartenance nationale de ces

 16   citoyens de diaspora, que toutes ces instances ne s'adressent simultanément

 17   ou successivement à tous ces citoyens de la diaspora. S'agissant de ces

 18   moyens, nous ne les provisionnons pas comme des donations en provenance de

 19   la diaspora. Il s'agissait de fonds qui étaient versés dans un compte

 20   spécifique. Alors il y avait plusieurs comptes qui étaient ouverts dans des

 21   Etats étrangers, comme par exemple, en Autriche ou ailleurs, et les

 22   personnes qui en avaient reçu l'autorisation, originaires de la République

 23   de Croatie utilisaient ces différents comptes.

 24   De par les contacts que j'avais, je sais que M. Jozo Martinovic qui était

 25   au début ministre des Finances de la République de Croatie, était l'un des

 26   signataires de cet accord, ainsi que M. Susak qui était le ministre chargé

 27   de la diaspora, et cela au moment où cet accord a été signé. Plus tard M.

 28   Susak est devenu ministre de la Défense de la République de Croatie.

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  1   Q.  Monsieur Tomic, même si ces citoyens à partir d'avril 1992 avaient

  2   souhaité verser des fonds sur des comptes de banques se trouvant sur le

  3   territoire de la HZ HB, est-ce que cela techniquement aurait été possible ?

  4   R.  Jusqu'à ce que la banque croate DD de Mostar ait été établie et que ces

  5   activités avec l'étranger aient commencé, il n'était pas possible de virer

  6   des fonds directement sur le territoire de la HZ HB. Il était nécessaire

  7   d'utiliser un compte domicilié soit en Croatie soit dans un autre Etat.

  8   Q.  Pouvez-vous nous dire, pour être plus précis, quand la banque croate de

  9   Mostar a été établie ?

 10   R.  Elle a débuté avec ses activités à la fin de l'année 1992. Quant aux

 11   opérations avec l'étranger, je crois que c'était vers la fin du premier

 12   trimestre de 1993.

 13   Q.  Est-ce que nous pouvons conclure de ce que vous dites, Monsieur Tomic,

 14   que les moyens qui venaient de Croatie étaient des moyens financiers que

 15   les citoyens originaires de Bosnie-Herzégovine versaient au titre de l'aide

 16   destinée au HVO ? Pouvons-nous conclure cela ?

 17   R.  Exact.

 18   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, je vais devoir faire objection par

 19   rapport à cette question. Quel est le fondement, comment ce témoin peut-il

 20   expliquer chaque dollar, chaque dinar, chaque "kuna" qui vient de Croatie.

 21   Je ne crois pas qu'il soit en mesure de le faire. Donc je fais objection

 22   pour conjecture.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre objection est inscrite. Continuez.

 24   Mme NOZICA : [interprétation]

 25   Q.  J'en ai terminé avec ce sujet, et sur la base de deux documents je vais

 26   maintenant vous poser des questions quant à la façon dont les choses

 27   fonctionnaient entre la Croatie et la HZ HB. Je voudrais que nous nous

 28   reportions au document P 01511, s'il vous plaît.

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  1   Il s'agit d'un procès-verbal de la 26e réunion du 18 février 1993 du HVO de

  2   la HZ HB. Il s'agit de la version croate qui est en page 1 et 2, et la

  3   version anglaise est en page 4. Je voudrais que nous regardions la décision

  4   numéro 9. Il est dit - je ne vois pas que vous ayez été présent à cette

  5   réunion mais vous avez probablement connaissance de cette décision, car

  6   elle a trait au département des finances, il est dit que : "Le département

  7   de la défense du HVO et de la HZ HB par l'intermédiaire du département des

  8   finances doit émettre une demande portant sur les marchandises nécessaires

  9   en provenance de la République de Croatie afin qu'il y puisse être procédé

 10   à une compensation à travers la société Elektroprivreda de la HZ HB et le

 11   HEP."

 12   Monsieur Tomic, sur la base de cette décision, il ressort que la HZ HB

 13   fournissait de l'électricité à la Croatie mais qu'il y avait une

 14   compensation sur la forme de marchandise, cela n'était pas gratuit, n'est-

 15   ce pas ?

 16   R.  Oui, c'est exact. Cela est intervenu dans une situation dans laquelle

 17   la société Elektroprivreda de la HZ HB facturait l'Elektroprivreda de

 18   Croatie, l'électricité qui avait été fournie à la Croatie en provenance des

 19   centrales de Busko Blato et de Capljina. Il y avait également d'autres

 20   dettes qui correspondaient à l'énergie fournie à partir du territoire de la

 21   HZ HB. Et les représentants de la société HEP --

 22   Q.  Dites-nous, ce qu'est le HEP, s'il vous plaît ?

 23   R.  C'est l'Elektroprivreda croate de Zagreb. Lors de contacts qui avaient

 24   été pris avec le gouvernement, il a été convenu qu'une partie de ces sommes

 25   dont il était demandé le recouvrement soit réglée sous la forme de

 26   marchandises produites en Croatie. Il s'agissait principalement de produits

 27   alimentaires par exemple produits par la société Pik Vrbovec.

 28   Le département des finances devait clore le recouvrement des sommes

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  1   concernées entre l'Elektroprivreda de la HZ HB et les sociétés

  2   contreparties. Le département de la défense devait donc fournir les

  3   documents nécessaires et il était également nécessaire que la documentation

  4   et des factures soient préparées afin que nous puissions procéder à ces

  5   compensations. 

  6   M. SCOTT : [interprétation] Pour ce que ça vaut, je ne sais pas si

  7   j'ai fait un lapsus ou quoi, ou si ça été mal traduit. Mais en page 55,

  8   lignes 24 et 25, lorsque j'ai fait part de mon objection, ce que je voulais

  9   dire, je ne sais pas si je l'ai dit ou pas, mais en tout cas j'ai parlé de

 10   "kuna" et de dinar -- Le transcript dit : "Venant vers la Croatie à partir

 11   de la Bosnie," or ce n'était pas ce que je voulais dire. Je disais "chaque

 12   'kuna' ou chaque dinar arrivant vers la Bosnie de Croatie," alors voilà. Je

 13   ne sais pas si j'ai fait un lapsus mais je voulais corriger au compte

 14   rendu.

 15   Mme NOZICA : [interprétation]

 16   Q.  Maintenant que le procès-verbal a été corrigé, nous pouvons passer au

 17   dernier document de ma liasse. Il s'agit du 2D 01476. Pouvez-vous vous

 18   rappeler de quoi que ce soit ayant trait à ce qui se trouve dans ce

 19   document, il s'agit d'une facture du 15 avril 1993 que le département de la

 20   défense et son responsable M. Stojic émettent à l'attention du département

 21   de la défense de la République de Croatie, secteur de l'approvisionnement,

 22   en faisant référence à un contrat du 10 décembre 1992. Il ressort de cette

 23   facture que le HVO de la HZ HB vend une unité de canon au département de la

 24   défense croate avec des pièces de rechange et tous les éléments annexes

 25   nécessaires. Un prix de 471460 deutsche marks a été fixé.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Nozica --

 27   Mme NOZICA : [interprétation] Merci.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce n'est pas extrêmement important

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  1   mais je crois que c'est trois canons et deux canons aériens et pas un

  2   canon, si vous regardez le document.

  3   Mme NOZICA : [interprétation] Oui, je suis tout à fait d'accord. Je viens

  4   juste d'en être avertie. Il s'agit de trois canons et de deux canons

  5   aériens.

  6   Q.  Est-ce que, Monsieur Tomic, vous avez souvenir de ce document ?

  7   R.  Le département de la défense, comme tous les bénéficiaires utilisateurs

  8   du budget, avait la possibilité dans le cadre des compétences qui étaient

  9   les siennes en matière de collecte de ressources publiques et de recettes

 10   de rechercher ses propres sources de recettes. Pour ce type de revenus, je

 11   dois dire qu'ils étaient partie intégrante du rapport qui était établi en

 12   fin d'année par le département de la défense. Le département des finances

 13   n'avait pas accès directement aux documents montrant la façon dont ces

 14   types de ressources avaient été collectés, sauf pour certaines sommes qui

 15   étaient détaillées dans des documents et dont le montant total était

 16   consigné dans le type de documents annuels que le département de la défense

 17   devait fournir.

 18   Q.  Monsieur Tomic, ce que je vous demande c'est si vous aviez connaissance

 19   que les événements dont il est ici question ont bien eu lieu, et cela pour

 20   deux raisons. Tout d'abord, on voit que le rapport qui existait entre le

 21   HVO de la HZ HB et la Croatie était un rapport d'affaire. Deuxièmement, on

 22   voit aussi que le HVO de la HZ HB cède ici au département de la défense

 23   croate une partie de ses équipements de défense.

 24   Par conséquent, nous pourrions en conclure qu'à ce moment précis le HVO de

 25   la HZ HB n'est pas en train de préparer des opérations offensives. Est-ce

 26   que l'on peut conclure comme je viens de le faire ?

 27   R.  Oui, c'est exact.

 28   Q.  Je vous remercie beaucoup. Cela conclut mon contre-interrogatoire. Je

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  1   remercie les Juges de la Chambre.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je peux ? Oui, j'aimerais vous poser

  3   une ou deux autres questions. Alors on vous a demandé si vous aviez

  4   connaissance de cette transaction et vous avez répondu de manière assez

  5   générale. Alors je vous repose la question : étiez-vous au courant de cette

  6   transaction-là de ces cinq canons ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me rappelle pas des transactions

  8   individuelles et concrètes au moment où elles ont été opérées, mais ces

  9   transactions ont été consignées au sein du rapport annuel du département de

 10   la défense pour l'année 1993, et cela au poste des ressources propres du

 11   département de la défense.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. J'aimerais savoir d'où

 13   venaient ces armes, de quelle sorte de canons il s'agit. Est-ce qu'ils

 14   étaient produits sur le territoire de la HZ HB ? Est-ce qu'ils étaient

 15   nouveaux ou s'agissait-il d'armes qui avaient déjà été utilisées ?

 16   Pourriez-vous nous en dire davantage ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Malheureusement, je ne peux pas vous en dire

 18   beaucoup sur ce sujet.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 20   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le permettez,

 21   nous aurons un témoin dans le cadre de la Défense Stojic qui pourra

 22   répondre quant à l'origine et à la nature des équipements concernés. Nous

 23   avons demandé à M. Tomic de préciser les aspects qu'il pouvait connaître.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais parfaitement, tout va bien.

 25   Merci.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Tomic, je vais poser une question d'ordre

 27   beaucoup plus général et ce document me permet de faire la transition. Ce

 28   document montre une relation entre le HVO et la République de Croatie. Mais

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  1   moi, je me base dans le sens inverse, République de Croatie vers le HVO,

  2   aux niveaux budgétaire et financier.

  3   A votre connaissance, est-ce que la République de Croatie avait accordé des

  4   prêts officiels ou clandestins à la HZ HB pendant cette époque, soit des

  5   prêts en forme régulière avec un contrat ? A titre d'exemple, je peux citer

  6   un prêt passé en 1998 entre la République islamique de Mauritanie et un

  7   fonds de développement africain. Donc ça existe en droit international, des

  8   prêts entre Etat et autres Etats ou entre Etat et institutions.

  9   Donc à votre connaissance, y avait-il des liens financiers entre la

 10   République de Croatie et la HZ HB ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y avait aucune forme de lien contractuel

 12   entre la République de Croatie et la HZ HB en la matière. Ce qui existait

 13   c'était une aide financière, aide financière qui procédait des moyens et

 14   des fonds collectés en provenance de la diaspora. Il s'agissait de comptes

 15   domiciliés en Autriche et dans d'autres Etats, comme je l'ai dit, dans les

 16   Etats où ces fonds étaient versés.

 17   D'un point de vue technique, les personnes qui avaient pouvoir pour

 18   utiliser ces comptes ne versaient pas les fonds correspondant à partir de

 19   ces comptes à destination de la HZ HB, mais ils utilisaient d'autres

 20   sources quant à ces fonds qui se trouvaient sur des comptes à l'étranger

 21   qui étaient libellés en devise convertible. Ils étaient utilisés aux fins

 22   de financement des besoins de défense de la République de Croatie. 

 23   C'est pour cela que j'ai mentionné qu'au moment où ces comptes ont été

 24   ouverts, M. Martinovic était ministre des Finances et M. Susak était

 25   ministre chargé de la diaspora en République de Croatie. C'était lui qui se

 26   rendait en visite à l'étranger pour demander une aide financière auprès de

 27   la diaspora.

 28   Ultérieurement, M. Susak était ministre de la Défense de la

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  1   République de Croatie. Mais en fait, il était le contact principal, et une

  2   partie de ses activités avait trait à tous ces comptes qui se trouvaient en

  3   Autriche ou dans d'autres Etats.

  4   M. Martinovic, après avoir été ministre des Finances, a occupé un

  5   poste dans la Banque économique de Zagreb, mais il était dans une situation

  6   dans laquelle il pouvait avoir signé précédemment des ordres selon lesquels

  7   une somme en dinars croates, par exemple, devait être versée sur un compte

  8   spécifique au titre d'intérêt passif d'un compte de la Banque économique de

  9   Zagreb. La banque en question avait le droit de disposer des devises

 10   convertibles qui se trouvaient sur le compte correspondant à Filah, par

 11   exemple, en Autriche.  Donc le fondement, la source principale de tous ces

 12   moyens se trouvait sur le type de comptes qui pouvaient être, par exemple,

 13   à Filah en Autriche.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Messieurs les Juges, est-ce que l'on

 15   pourrait répéter parce que la réponse était très claire, mais la traduction

 16   s'est arrêtée. Donc est-ce qu'on peut aller plus lentement, s'il vous

 17   plaît.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la partie de ce que j'ai dit lorsque

 19   j'ai dit que M. Martinovic avait rejoint la Privredna Banka, la banque

 20   commerciale de Zagreb, et qu'il était le signataire en même temps que M.

 21   Susak du compte tenu par cette banque. Les sommes qui arrivaient à quelque

 22   titre que ce soit, et la raison du versement doit être indiquée dans tout

 23   virement, n'est-ce pas, ces sommes étaient utilisées comme moyens

 24   disponibles comme sommes produisant intérêts à la Privredna Banka, à la

 25   banque commerciale. Ces sommes en dinars croates étaient alors envoyées au

 26   titre d'aide à la Communauté croate d'Herceg-Bosna et la banque

 27   commerciale, au lieu de racheter des devises étrangères sur le marché, se

 28   contentait de couvrir la somme en question sur le compte de Filah.

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  1   En d'autres termes, c'était une forme de compensation des sommes qui

  2   avaient été placées sur le compte à partir de la diaspora croate.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : En ce qui concerne le budget de la HZ HB, je présume

  4   qu'il y avait des documents budgétaires qui sont accessibles à tout le

  5   monde, et que dans ces documents, il doit y avoir des colonnes recettes et

  6   des colonnes dépenses --

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : -- et que s'il y avait des recettes extra

  9   budgétaires, il y aurait mention.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous pratiquez au sein de votre budget

 12   des transferts de chapitre à chapitre, d'une somme qui était initialement

 13   prévue sur tel chapitre pour des raisons X, Y ou Z, vous réaffectiez ces

 14   sommes sur d'autres chapitres de dépenses, et notamment sur le chapitre lié

 15   à la défense ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Il me faut souligner que pour les années 1992

 17   et 1993, il n'y avait pas de budget au sens classique du terme, au sens que

 18   vous l'entendez. Le budget en question a existé en 1994. Au cas où il était

 19   indispensable de réaffecter des sommes égales à plus de 10 % des montants

 20   planifiés, il fallait rééquilibrer le budget, en particulier lorsque les

 21   sommes prévues dans les provisions budgétaires n'étaient pas suffisantes

 22   pour couvrir les montants en question.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors je me tourne vers les autres avocats de

 24   la Défense. Etant précisé je ne sais pas combien vous avez dû utiliser

 25   jusqu'à présent, peut-être deux heures, je ne sais plus. Je vais vous dire,

 26   deux heures 26. 4D, une heure 17. 2D, une heure 09. Donc il reste encore du

 27   temps. L'idéal, bien entendu, ça serait qu'on termine aujourd'hui pour que

 28   l'Accusation puisse commencer son contre-interrogatoire la semaine

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  1   prochaine étant précisé que ça sera très, très juste. J'espère que ça ne

  2   débordera pas et qu'il n'y aura pas d'objections. Parce que,

  3   malheureusement, je pensais que peut-être on avait une audience le

  4   mercredi, mais vu le planning de la Chambre d'appel, nous n'aurons

  5   d'audience que lundi et mardi, donc ça risque d'être très court. Avec une

  6   petite précision, c'est que mardi à 13 heures 00, il y a une assemblée

  7   générale des Juges pour l'élection du Président et l'adoption éventuelle de

  8   deux articles modifiant le Règlement. J'espère qu'à 14 heures 15, ce sera

  9   terminé. Enfin, en ce qui me concerne, je serai à la porte à 14 heures 14.

 10   Voilà. Alors, pour la Défense ?

 11   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Si je suis bien

 12   informée, il ne reste à entendre que la Défense du général Praljak, donc je

 13   pense que nous allons en terminer dans la journée d'aujourd'hui. Le contre-

 14   interrogatoire qui sera mené par la Défense du général Praljak est lié aux

 15   questions qui ont été posées par le conseil de M. Prlic, questions qui se

 16   trouvent en page 33 707 du compte rendu d'audience, lignes 16 à 24; ainsi

 17   que page 33 708, lignes 18 à 25; page 33 709, lignes 22 à 25; page 33 713

 18   et page 33 714; ainsi que page 33 738 du compte rendu d'audience en date du

 19   27 octobre, c'est-à-dire le premier jour de l'audition de ce témoin.

 20   Contre-interrogatoire par Mme Pinter :

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Tomic. Je voudrais vous ramener à

 22   l'année 1992. Nous parlerons de Mostar et de la situation qui prévalait à

 23   Mostar jusqu'à la mi-1992, disons. Je vous prierais de vous pencher sur le

 24   document 1D 00909, qui se trouve dans le petit dossier que vous avez devant

 25   vous. Je vous demande si vous connaissiez un certain M. Slobodan Lang.

 26   R.  Oui, je le connaissais.

 27   Q.  Avez-vous eu l'occasion de rencontrer le Dr Lang ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Pouvez-vous nous dire quand ?

  2   R.  Je l'ai rencontré pour la première fois au mois de mai à Mostar dans ce

  3   qui était, si je ne me trompe, le centre logistique qui se trouvait au bas

  4   de l'immeuble qu'on appelle Lesnina, à Mostar. C'est à cet endroit que j'ai

  5   rencontré M. Lang qui nous a exposé ce qu'il avait vécu à Dubrovnik, de

  6   sorte que son passage à Mostar m'est resté en mémoire.

  7   Q.  Je vous remercie. J'aimerais maintenant que vous vous penchiez sur le

  8   document intitulé "Les drames de Mostar" qui date des 9 et 10 mai 1992, et

  9   est signé, entre autres, par M. Lang. Pourriez-vous nous dire si vous avez

 10   le souvenir et si vous pouvez confirmer l'affirmation selon laquelle la

 11   ville de Mostar était encerclée et que tous les canons étaient dirigés vers

 12   la ville en cette journée du 9 mai ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Vous avez dit, n'est-ce pas, je pense que vous en conviendrez, que 65 %

 15   environ des civils avaient quitté Mostar à ce moment-là ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Pourriez-vous confirmer que la structure de la vie civile héritée de

 18   l'ancien système n'existait plus ou ne fonctionnait plus, était démembrée,

 19   n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, c'est ce dont j'ai parlé déjà.

 21   Q.  Est-il exact que le 7 mai la ville était totalement coupée du reste du

 22   monde sur le plan des télécommunications ? Je parle, bien sûr, toujours de

 23   1992.

 24   R.  Je sais que cela s'est passé au début du mois de mai, et je suppose que

 25   la date indiquée par vous est exacte.

 26   Q.  En tout cas, dans cette période au mois de mai, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, au début du mois de mai, effectivement.

 28   Q.  Je vous demande à présent, au cas où vous vous en souviendriez

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  1   aujourd'hui, bien sûr, s'il est exact que dans l'après-midi du 9 une

  2   attaque d'artillerie a été lancée sur Mostar et qu'elle a duré environ 24

  3   heures avec plusieurs milliers d'obus qui ont été tirés. Vous rappelez-vous

  4   cela, vous rappelez-vous le climat, la situation dans la ville de Mostar,

  5   au moment de ces pilonnages ?

  6   R.  Oui, je me souviens de cette situation. Est-ce que cela s'est passé le

  7   9 ou le 10 ? Je ne saurais vous le dire aujourd'hui avec exactitude, mais

  8   je me souviens de cette action qui est décrite dans le texte que j'ai sous

  9   les yeux. Il s'agissait d'une tentative de lancer une attaque de chars à

 10   partir du sud de la ville. Et je me souviens que les membres du HVO ont

 11   repoussé cette tentative d'attaque. Je sais que c'était à ce moment-là,

 12   effectivement.

 13   Q.  Très bien. Merci. Puisque vous venez de jeter un coup d'œil au

 14   document, est-ce que vous avez réussi à lire les autres faits qui sont

 15   évoqués dans ce document, à savoir qu'on peut y lire que les ambulances ne

 16   circulaient plus, et que des enterrements avaient lieu dans le parc Liska,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui. Effectivement, un des membres de ma famille a dû être enterré dans

 19   le parc Liska car il était impossible de réaliser des funérailles normales.

 20   Q.  Donc vous confirmez, n'est-ce pas, que dans la lettre de M. Lang, ce

 21   qui est dit correspond à ce que vous avez vécu dans cette période ?

 22   R.  Excusez-moi, je n'ai pas lu le texte au complet. Mais je suis parvenu

 23   au milieu de la page 2, et ce qui est écrit jusqu'au milieu de la page 2

 24   rend bien compte du climat qui prévalait à Mostar. Mais si vous voulez, je

 25   peux lire le texte jusqu'au bout.

 26   Q.  Je vous en prie, faites-le.

 27   R.  Parce que c'est la première fois que je vois ce document. Oui.

 28   Q.  Donc vous le confirmez ?

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  1   R.  Oui, cela correspond bien à la situation qui prévalait à Mostar à ce

  2   moment-là.

  3   Q.  Merci beaucoup. J'ai encore pour ma part une seule question à vous

  4   poser, et après quoi avec l'autorisation des Juges de la Chambre le général

  5   Praljak vous parlera également de l'année 1992 ainsi que de la situation à

  6   Mostar à ce moment-là et des événements qui se passaient à Mostar et en

  7   Herzégovine à ce moment-là. Connaissez-vous un certain Radoslav Zovko, ou

  8   auriez-vous entendu parler de lui ?

  9   R.  S'agit-il de -- voyons, Radoslav Zovko. Je pense que c'était un des

 10   prêtres qui s'appelait Radoslav Zovko.

 11   Q.  Avez-vous entendu parler du livre intitulé "Le journal de Mostar ?"

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Je vous remercie.

 14   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre

 15   autorisation je propose que le général Praljak poursuive le contre-

 16   interrogatoire en évoquant la situation à Mostar et en Herzégovine en 1992,

 17   notamment en évoquant les événements qu'il a vécus lui-même et qu'il

 18   connaît très bien.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, avant de donner la parole au

 20   général Praljak, quelques questions à partir de ce document. Ce sont des

 21   événements du 9 et 10 mai 1992.

 22   On voit que 65 % de la population, d'après le document, 70 000 personnes

 23   ont quitté Mostar. Ces gens qui ont été quitté, et dans lesquels je présume

 24   il y a des Croates et des Musulmans, voire des Serbes, est-ce qu'il y en a

 25   qui sont revenus après ou ils ont quitté définitivement ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque ces départs ont eu lieu, ils ont

 27   concerné des personnes qui toutes avaient pour seule intention de protéger

 28   leurs familles. Les membres masculins des familles, une fois que leurs

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  1   familles étaient installées dans un hôtel sur les bords de l'Adriatique ou

  2   dans leurs familles en Herzégovine occidentale, en Croatie, ou encore plus

  3   loin, les hommes donc revenaient pour tenter de protéger leurs biens,

  4   appartements, maisons. Ils voulaient donc être sur place et participer à la

  5   défense de la ville. Et au fil du temps, une fois que Mostar s'est libérée

  6   des forces de la JNA et des réservistes de la JNA, certaines familles sont

  7   revenues mais ensuite elles sont reparties au moment des heurts entre les

  8   Croates et les Musulmans à Mostar.

  9   Aujourd'hui à Mostar, on constate finalement que les Croates surtout sont

 10   revenus et que certains Musulmans et certains Serbes sont également

 11   revenus.

 12   Quant à la population de la ville en tant que telle, les Musulmans qui

 13   habitaient à Mostar, ils sont rentrés pour la plupart à Sarajevo et non à

 14   Mostar car ils ne sont pas parvenus à s'adapter aux nouvelles conditions,

 15   si je puis m'exprimer ainsi.

 16   La plupart des Musulmans que je connais sont rentrés à Sarajevo et non à

 17   Mostar car Mostar a subi entre-temps une arrivée massive de populations des

 18   campagnes qui imposaient ses valeurs. Ces réfugiés arrivaient de toute la

 19   Bosnie mais des zones rurales, avec le statut de héros de guerre et

 20   manifestaient une attitude négative vis-à-vis du retour des anciens

 21   habitants de Mostar. C'est la raison pour laquelle la plupart d'entre eux

 22   ont décidé de ne pas rentrer à Mostar mais d'aller à Sarajevo.

 23   Quant aux Serbes, de nombreux Serbes de la ville de Mostar sont restés à

 24   Belgrade. Certains sont restés à Trebinje.

 25   Et quant aux Croates de la ville de Mostar, ils sont nombreux à être

 26   rentrés à Zagreb ou à Split.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Je m'aperçois qu'à partir des colline de Hum,

 28   Orlovac, puis un endroit "forteca," il y a eu donc des tirs, et d'après le

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  1   document des édifices religieux ont été touchés, couvents, diocèses,

  2   cathédrales, et cetera, et cetera. A votre connaissance, ces pilonnages de

  3   l'artillerie serbe, est-ce qu'ils ont endommagé des mosquées ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Toutes les mosquées ou certaines mosquées ? Parce

  6   que, comme vous avez été maire de Mostar en l'an 2000, vous êtes quelqu'un

  7   qui connaissait bien la ville. Donc vous pouvez peut-être me préciser si

  8   c'était toutes les mosquées ou quelques mosquées ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans les conditions de l'époque, j'ai

 10   participé avec des collègues de Mostar à la rédaction du livre intitulé

 11   "L'urbicide de Mostar," et aux efforts déployés à Split pour essayer de

 12   trouver de l'aide. Et dans le cadre de ce travail nous avons vu des images

 13   des dégâts qu'ont subi les bâtiments publics de Mostar, et je crois pouvoir

 14   dire que la plupart des mosquées ont été touchées, certaines ont vu leurs

 15   minarets détruits totalement ou en tout cas endommagés.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez participé à ce livre "Urbicide" ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est un livre qu'on a eu l'occasion de voir. Je

 19   vois également dans le texte qu'il est fait état du vieux pont, qui est un

 20   sujet central pour notre Chambre.

 21   Quand les Serbes ont tiré, est-ce qu'à votre connaissance, le vieux pont a

 22   été touché, endommagé, pas détruit parce qu'il n'est pas tombé en 1992,

 23   mais est-ce qu'il a été légèrement endommagé, moyennement endommagé,

 24   gravement endommagé ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y a eu des dégâts, et je sais que par

 26   la suite on a construit des éléments en bois et on a utilisé des pneus pour

 27   protéger le pont contre des tirs ultérieurs.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question, et je crois que mon collègue

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  1   va vous poser des questions également.

  2   Je vois que dans ce document que les auteurs de ce document, dont M.

  3   Slobodan Lang, parle de la presse et semble indiquer, que tout au moins en

  4   mai 1992 il n'y avait aucun reporter étranger, bosniaque ou croate, sur

  5   place, c'est au paragraphe 2 du 2, et que donc il semblerait que personne

  6   ne pouvait relater cela. C'était l'impression que vous avez, que la presse

  7   internationale ou même nationale n'était pas présente au moment de tous ces

  8   pilonnages ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est mon impression. Et l'un de nos

 10   premiers projets dans le cadre du travail effectué par le conseil des

 11   objectifs spéciaux a consisté à obtenir des équipements pour remettre en

 12   état la station de radio de Mostar. Nous avions reçu ces équipements par

 13   voie de dons d'une entreprise croate. Et une fois que cette station de

 14   radio a été rétablie, on pouvait au moins entendre des émissions de Mostar

 15   qui étaient rediffusées par d'autres, car à Mostar il n'y avait aucun moyen

 16   de communication, aucun média.

 17   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, ma question avait deux volets, mais

 18   le premier a déjà été évoqué par le Juge Président en ce qui concerne le

 19   vieux pont. Mais - excusez-moi - je voudrais revenir sur ces journées du 9

 20   et 10 mai. Le document dit que c'est vraiment un drame pour Mostar. En

 21   effet, si les événements se sont passés tel que décrits, c'est un vrai

 22   drame parce que l'artillerie a commencé le 9 et s'est terminé seulement

 23   quatre heures après.

 24   Mais nous savons, nous avons eu beaucoup de témoignages ici que la JNA

 25   était une des plus puissantes armées au monde avec des officiers très bien

 26   formés qui étaient au faîte du droit international humanitaire et des

 27   principes du droit de la guerre. Alors le document dit, si je comprends

 28   bien ce qui est marqué ici en anglais, que la JNA avait pour principale

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  1   cibles "main targets," les installations civiles, religieuses médicales et

  2   culturelles dont le vieux pont.

  3   Mon problème, il est au niveau de la terminologie, "principales

  4   cibles." Est-ce que vous confirmez ça ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce qui a été détruit a été proclamé comme

  6   étant une cible principale, parce que si on vise et qu'on détruit quelque

  7   chose, ce quelque chose était une cible, et puisque comme je l'ai déjà dit,

  8   pratiquement tous les bâtiments publics ont été touchés, la conclusion qui

  9   a été tirée a consisté à dire que c'était des cibles principales.

 10   M. LE JUGE MINDUA : Parce que pendant les guerres, il y a ce que l'on

 11   appelle aussi les effets collatéraux. Est-ce qu'on peut considérer que ces

 12   installations civiles pouvaient constituer des effets collatéraux ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour autant que je le sache, il n'y a eu

 14   aucune action militaire partant de la ville. Je veux parler de canons ou

 15   d'armes importantes qui auraient été tirés et qui auraient pu être la cause

 16   de dommages collatéraux. Il n'y a pas eu de résistance depuis la ville sous

 17   forme de tirs sur canon. Par exemple, la JNA qui aurait tiré au canon et

 18   qui aurait touché une église. L'action était systématique, bâtiment par

 19   bâtiment, on tirait sur ces bâtiments.

 20   On exerçait de cette façon une pression, en tout cas c'est mon avis,

 21   sur la population pour qu'elle quitte la ville en très grand nombre.

 22   M. LE JUGE MINDUA : Voilà, parce que je voulais seulement demander

 23   quel était alors le but de cette opération, là vous avez déjà répondu.

 24   Merci beaucoup.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Il semblerait que dans le document, c'est dans

 26   la partie du 9 et 10 mai, que les Serbes auraient perdu trois de leurs

 27   tanks; c'est-à-dire qu'il y a eu des combats entre les Serbes puis les

 28   forces qui s'opposaient aux Serbes, puisque là je vois qu'il y a trois

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  1   tanks.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'il est question ici de l'attaque

  3   dont j'ai parlé, attaque dont je sais quelle a eu lieu dans la période dont

  4   nous parlons. Durant cette attaque, des blindés sont partis du sud de la

  5   ville, ont emprunté le boulevard, donc cette voie de communication qui

  6   traversait la ville, et on les a arrêtés dans le sud. Ce sont des membres

  7   du HVO qui les ont arrêtés.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question et on fera la pause après,

  9   puis M. Praljak reprendra après la pause. Il aura le temps pour poser ses

 10   questions.

 11   La question que je voulais vous poser est liée à la presse. On voit qu'il

 12   n'y avait pas de reporter, et qu'il n'y avait pas de journaux. C'est ce

 13   qu'on dit.

 14   Dans les mois suivants, il y a la presse, à part la radio que vous nous

 15   avez indiquée, mais est-ce que la presse a pu reprendre, et si oui, qui

 16   écrivait ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans une phase ultérieure en dehors de la

 18   station de radio de Mostar, une autre station de radio a commencé à

 19   fonctionner dans la partie est de la ville. Là, je parle d'une période qui

 20   se situe après les affrontements entre les Musulmans et les Croates. Pour

 21   l'essentiel, ce qui était diffusé, c'étaient des bulletins destinés aux

 22   unités militaires. Donc, il n'y avait pas de parution de journaux ou de

 23   magazines dans le territoire de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Nous allons faire 20 minutes de pause.

 25   --- L'audience est suspendue à 12 heures 25.

 26   --- L'audience est reprise à 12 heures 46.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. La Chambre va donner la

 28   parole à M. Praljak, et la Chambre rappelle que M. Praljak peut poser des

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  1   questions qui entrent dans son domaine de compétence.

  2   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

  3   Contre-interrogatoire par l'accusé Praljak :

  4   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Tomic. Est-ce que vous me connaissez

  5   déjà ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je vous demande de vous pencher sur le 3D 03096. Il s'agit du "Journal

  8   de Mostar" de M. Radoslav Zovko. Je vais essayer, sans pour autant couvrir

  9   d'autres domaines qui ont déjà été couverts, j'essaierai d'aller plus vite.

 10   Je ne vais quand même pas parcourir toutes les pages, mais je dirais que ça

 11   se rapporte au début 1992 en Herzégovine et dans la ville de Mostar. A

 12   l'époque, vous étiez à Mostar, n'est-ce pas ?

 13   R.  Exact.

 14   Q.  En raison du peu de temps, je vais vous donner les pages de la version

 15   croate et vous verrez ensuite le numéro d'enregistrement. Je vous demande

 16   de vous pencher sur la page 36. Vendredi, 10 janvier 1992, attaque contre

 17   un train à Mostar. Il est dit que : "Les réservistes ont tiré sur un train

 18   de marchandises et ont blessé deux cheminots, deux Croates et un Serbe --

 19   un Musulman, un Croate et un Serbe."

 20   Est-ce que ce sont là des événements dont vous avez eu vent ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Penchons-nous maintenant sur la page 39 de la version croate du livre.

 23   On dit : Le 24 janvier 1992, il y a eu un référendum tenu en Bosnie-

 24   Herzégovine. C'est là qu'a siégé l'assemblée, le parlement de la Bosnie-

 25   Herzégovine, et le problème principal était de programmer la tenue d'un

 26   référendum pour ce qui est de la déclaration de l'indépendance. Il est dit

 27   que les Serbes ont boycotté le fonctionnement du parlement en le quittant,

 28   et ils le font en faisant traîner en longueur les sessions par des discours

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  1   stéréotypés de grande longueur.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, excusez-moi, nous

  3   avons un petit peu de mal. Nous avons pris du retard parce que vous ne

  4   donnez que le numéro des pages en croate, ce qui veut dire que nous devons

  5   regarder la page sur l'écran et ensuite essayer de retrouver le passage

  6   correspondant dans la version en anglais. Le premier passage que vous avez

  7   évoqué, le 9 janvier, on ne le trouve pas dans la traduction, alors nous

  8   sommes perdus. D'ailleurs, le deuxième non plus. Notre version commence au

  9   25 janvier -- ou plutôt, oui, il y a "Attaque contre un train," c'est vrai,

 10   mais il n'y a pas de date. Ensuite, le 24 janvier, nous ne l'avons pas.

 11   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je vais donner lecture de la date,

 12   indépendamment du fait que vous l'ayez ou pas. Je vais vous donner le

 13   titre, "Référendum en Bosnie-Herzégovine voté," et vous allez voir de

 14   quelle date il s'agit.

 15   Q.  Alors on dit : "Tout de même, après minuit, les délégués serbes se sont

 16   retirés et le parlement a continué à fonctionner normalement. Il a été

 17   décidé de la tenue d'un référendum."

 18   Est-ce que vous avez eu connaissance des faits de cette session

 19   interminable, des obstructions, et cetera ?

 20   R.  Oui, j'en ai eu connaissance.

 21   Q.  Maintenant l'intitulé "La famine interportas [phon]". Il s'agit de la

 22   date du 25 janvier 1992. On dit que le dinar yougoslave a encore dévalué de

 23   400 %. Puis on parle des salaires, et pour finir on dit : "Bon nombre de

 24   nos jeunes gens sont partis dans l'armée croate ou dans la police croate

 25   pour des raisons patriotiques, mais aussi pour des raisons pécuniaires,

 26   parce qu'on a du mal à vivre, à joindre les deux bouts ici."

 27   Est-ce que vous le saviez, cela ?

 28   R.  Oui, je le savais.

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  1   Q.  Nous allons voir plus tard ce que nous dit M. Zovko pour ce qui est de

  2   la valeur ou des équivalents de montant de, par exemple, 5 000 dinars. Est-

  3   ce que cela correspondait à peu près à 50 marks allemands, si vous vous en

  4   souvenez ?

  5   R.  Je pense qu'à l'époque cela devait être cela. Un mark valait 65 dinars,

  6   c'était donc à peu près cela.

  7   Q.  Merci. Page 41 maintenant, s'il vous plaît. Intitulé, "Caritas à

  8   l'œuvre." Il s'agit du 28 janvier 1992. On dit que le Caritas de l'évêché

  9   de Mostar fonctionne à pleine vapeur. Il y a beaucoup de pauvres et ceux

 10   qui sont à la limite de la pauvreté. Puis on dit : "Il y a peut-être de la

 11   simulation de pauvreté et de la contrebande, mais il est difficile de

 12   vérifier à chaque fois." Il indique qu'il y a des problèmes de distribution

 13   aussi, car certains prêtres ont des unités du Caritas à part, et on nous

 14   dit que tout cela devrait être réunifié pour que les choses se fassent

 15   bien. On dit aussi que la famine était déjà présente à Mostar et qu'il y a

 16   eu des problèmes de distribution de vivres parce que des hommes avaient des

 17   organisations appelées Caritas à titre privé.

 18   R.  Oui, il y avait des queues devant le Caritas. Il y avait des gens qui

 19   étaient à la recherche de nourriture.

 20   Q.  La date suivante c'est le 31 janvier. "Qui garde quoi" est le titre. Et

 21   on dit que les réservistes avaient tenu les deux casernes, les deux

 22   aéroports, et qu'ils avaient pris les bunkers autrichiens et les places

 23   fortes sur le mont Velez et sur les pentes de Hum et Orlovac et qu'ils sont

 24   dans les collines de Krivodol. Donc les réservistes s'étaient emparés de

 25   toutes les hauteurs surplombant Mostar ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Page 42, maintenant. On dit "Canon sur le mont Hum, le 3 février,

 28   1992"; on dit "Les réservistes ont fait monter des canons sur le mont Hum

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  1   et les collines environnantes. Leurs intentions sont claires du fait du

  2   sort connu par Ravno". Est-ce que vous confirmez ?

  3   R.  Oui. Il y a eu des canons qu'on avait montés sur le mont Hum et les

  4   collines environnantes, à Ravno.

  5   Q.  Passons au 4 février --

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, excusez-moi. J'ai

  7   l'impression d'entendre le témoignage de M. Zovko, or, notre témoin ici est

  8   un expert financier. Vous lui présentez le journal de quelqu'un à propos

  9   duquel on ne sait pas grand-chose, peut-être qu'il a une bonne mémoire,

 10   peut-être qu'il note ce qui se passe. Tout ceci est peut-être vrai, mais je

 11   ne vois pas très bien ce que gagne la Chambre à entendre ce témoin-ci dire

 12   "oui", "c'est bien" à ce que vous avez lu, "est exact".

 13   Monsieur Kovacic.

 14   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Attends, attends, s'il te plaît.

 15   Monsieur le Juge Trechsel, ici, nous avons quelqu'un qui a connu le sort de

 16   Mostar. Le fait que vous vouliez faire de lui un témoin rien que pour des

 17   questions de finance, ça peut être votre souhait à vous. Mon souhait à moi

 18   est de lui poser des questions parce que sa famille a vécu là-bas et qui

 19   sous la terreur a dû faire quitter Mostar à sa famille et qui y est

 20   retourné. Il a enterré un membre de sa famille à l'un des cimetières là-

 21   bas. Il n'est pas seulement un témoin à titre financier, c'est un témoin

 22   qui a été un homme ayant pris part à tous ces événements, qui a

 23   connaissance de ce que l'on évite de mentionner dans ce Tribunal, à savoir

 24   le fait que -- de quoi s'agit-il au niveau des finances et ailleurs ? Il

 25   s'agit d'une agression brutale qui ici se trouve être montrée de façon

 26   claire, évidente et dans son --

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ecoutez, ce sont les Juges qui

 28   décident de la tenue de la procédure; ni l'Accusation, ni la Défense, ni

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  1   les accusés, ni le témoin, les Juges exclusivement. Alors vous donnez

  2   lecture d'un livre et le témoin acquiesce. On a déjà entendu cela à

  3   plusieurs reprises, à nombreuses reprises, et pas seulement moi d'ailleurs,

  4   que nous ne gagnons pas grand-chose à tout ceci. Si vous voulez lui poser

  5   des questions, posez-lui des questions qui vont le pousser à parler de sa

  6   propre expérience, et non pas simplement à acquiescer devant l'expérience

  7   de quelqu'un d'autre, expérience consignée dans un journal personnel.

  8   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Juge, vous avez demandé à M.

  9   Praljak quelles sont les raisons pour lesquelles il énonce tout ceci. Il

 10   les a données les raisons. Je tiens également à avancer une raison en

 11   matière de procédure.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce n'est pas ce que j'ai demandé.

 13   M. KOVACIC : [interprétation] J'y reviendrai. Je tiens à avancer une raison

 14   liée à la procédure. En fonction des instructions et des positions adoptées

 15   par cette Chambre, il y a eu un mécanisme de mise en place ou de versement

 16   de pièces à conviction au dossier. Nous estimons que ce livre est un

 17   élément de preuve pertinent parce qu'il parle de la situation à Mostar en

 18   1992, le témoin en sait long puisqu'il était là-bas. Nous vérifions donc le

 19   document, nous déterminons son authenticité. Lorsque ce témoin aura fini

 20   demain ou après demain, dans la liste IC, on demandera le versement de ce

 21   livre au dossier. Pourquoi, parce que la Défense peut présenter des

 22   arguments dans ces écritures au final pour dire que les événements dont a

 23   parlé ce témoin et d'autres témoins sont des événements qui se situent dans

 24   un contexte de vie. Je vais être plus simple, la HZ HB s'est efforcée de

 25   mettre en place un ordre civique dans des temps où la ville a connu le

 26   chaos. Vous ne le savez pas, vous ne l'avez pas vu, vous en avez entendu

 27   parler par bribes, par segment, par élément. Nous essayons de synthétiser

 28   la thèse dans son ensemble et il n'y a pas de meilleurs éléments de preuve

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  1   que ce type de livres qui sont des journaux au jour au le jour. Nous avons

  2   un témoin qui a vécu là-bas à l'époque et qui peut confirmer si cela

  3   correspond à ce qu'il sait. Si cela correspond à ce qu'il sait, c'est un

  4   élément de preuve authentique. Et c'est là, la substantifique moelle. Nous

  5   estimons donc qu'il est pertinent de déterminer si la HZ HB ou plutôt le

  6   HVO de la HZ HB est intervenu dans des conditions de laboratoire, dans une

  7   ambiance aseptisée ou s'il était censé intervenir dans des conditions de

  8   vie réelles, à savoir de chaos de guerre.

  9   Et je vais finir pour dire, je vous demande de vous pencher sur l'acte

 10   d'accusation. On incrimine le comportement, les activités, les événements

 11   ou l'intervention dans les événements de ceux qui ont participé à une

 12   entreprise criminelle commune, à savoir la HZ HB, le HVO de la HZ HB à

 13   partir du 1er septembre 1992. Dans les éléments de preuve qui ont été

 14   présentés, nous avons pu clairement voir que rien ne s'est produit en 1992

 15   par rapport aux Musulmans qui sont présentés par l'Accusation comme des

 16   victimes. Il n'y en a pas. On n'a pas besoin de le prouver. L'année 1992

 17   n'est pas une année pertinente pour l'acte d'accusation tel que présenté à

 18   l'acte d'accusation. Vous pouvez estimer, penser ce que vous voulez, c'est

 19   à vous de tirer des conclusions. Mais nous, en notre qualité de conseil de

 20   la Défense, nous sommes tenus de présenter ces éléments de preuve. Merci.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors Monsieur Praljak, reprenez la parole, mais

 22   vous n'allez pas passer tous les points du document. Prenez quelques

 23   exemples, puis posez-lui une question et ça permettra au témoin de répondre

 24   plus longuement.

 25   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge, je comprends qu'une

 26   partie importante de cet organigramme juridique se fonde sur des questions

 27   de procédure, mais à plusieurs reprises jusqu'à présent avec les témoins,

 28   j'ai parlé de l'apparence de Mostar après destruction par l'armée de la

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  1   Republika Srpska ou l'armée yougoslave. Si l'on énumère les pages d'un

  2   journal auprès d'un homme, nous l'avons fait, vous avez rejeté cela. Alors

  3   moi, j'aimerais qu'on pose la question à ce témoin et qu'on gagne du temps.

  4   Est-ce qu'il a lu ces pages ? Est-ce qu'au meilleur de ses connaissances

  5   d'homme qui a vécu là-bas, il pourrait confirmer la véracité de ce qui y

  6   est dit ? Là, je pourrais m'asseoir et en terminer. Je suppose que cela

  7   pourrait être versé au dossier comme élément de preuve. Parce qu'ici, il

  8   s'agit d'éléments les plus importants dans toute cette guerre, et c'est ce

  9   qu'on évite de mentionner devant ce Tribunal. C'est un fait que j'ai évoqué

 10   à plusieurs reprises. Le désespoir, la peur, la faim, la fatigue, la

 11   misère, la désintégration de l'état, et c'est dans ces conditions que j'ai

 12   eu à intervenir, et ceux qui sont assis à côté de moi ont dû le faire

 13   aussi, tout comme les gens qui étaient là-bas. Donc c'est cette

 14   signification si importante que l'on évite de mentionner et on édifie le

 15   reste sur une hypothèse qui est celle de dire que c'est un état en temps de

 16   paix et qu'on prend les éléments à titre partiel un par un.

 17   Alors si vous le permettez, je peux citer encore cinq jours et finir

 18   en quatre minutes. Mais comment vais-je alors faire en sorte pour que ce

 19   document soit versé au dossier ? J'étais là-bas, je peux témoigner. Vous

 20   m'avez accordé 54 heures; or la guerre a duré trois ans et demi. Alors moi,

 21   en citant des témoins, je ne peux pas vous expliquer les faits et la vérité

 22   qui se fonde sur ces faits. Alors je vous demande, soit vous décidez que je

 23   peux poser des questions, quatre ou cinq éléments d'ici ou alors demandez

 24   au témoin combien d'avions ont survolé, combien d'avions on a utilisé pour

 25   détruire Citluk, Siroki Brijeg, combien de femmes et d'enfants on a tué,

 26   combien d'hommes on a tué.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous pouvez à partir du --

 28   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Donnez-moi des instructions --

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : -- attendez, Monsieur Praljak. Vous pouvez à partir

  2   du livre dire au témoin voilà, ce livre qui a été rédigé fait état de telle

  3   date à telle date d'une série d'événements. Je prends dans ces événements

  4   quatre ou cinq exemples frappants, et vous lui demandez de bien confirmer

  5   par exemple ce qui s'est passé le 8 avril 1992, tel problème, telle date,

  6   et cetera. Et puis après quoi, après qu'il ait confirmé, vous reprenez une

  7   question et vous lui dites ce que vous êtes en train de nous dire, est-ce

  8   qu'il partage ce point de vue.

  9   Allez-y.

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur le Témoin, on vous a présenté un livre. J'espère que vous

 12   l'avez déjà vu auparavant, où j'ai prélevé et où je vous ai proposé en

 13   guise d'éléments de preuve des parties qui se terminent au 19 juin 1992. Il

 14   s'agit de la page 94, la dernière page. Je vais vous poser maintenant

 15   quelques questions encore au sujet de l'année 1992. Tenez, par exemple, un

 16   élément qui n'a rien à voir avec des faits qui seraient juste couchés sur

 17   le papier.

 18   On est à la page 42, "Blocus à Balinovac", on dit : "La population en

 19   a déjà assez avec ces tensions au niveau des réservistes et ils s'en

 20   fichent que l'on commence à se faire la guerre, à condition que les

 21   tensions et l'incertitude connaissent un terme."

 22   Alors, avez-vous connu ce désespoir suite à tout ce qui s'est passé,

 23   cette impuissance, cette absence de toute aide, et la population en avait

 24   assez, elle ne savait plus quoi faire de soi-même, elle ne savait pas si on

 25   allait faire la guerre ou pas, si on allait mourir ou ne pas mourir ?

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Les interprètes n'arrivent plus à

 27   vous suivre parce qu'ils ne savent pas où vous êtes, et ils ont arrêté. Ils

 28   ont éteint leurs micros.

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  1   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Il s'agit de la page 42. La date est

  2   celle du 4 février 1992, et le titre se lit comme suit : "Blocus à

  3   Balinovac."

  4   Q.  Il dit : "La population en a déjà assez de ces tensions avec les

  5   réservistes et il leur est égal de voir si on va faire la guerre, à

  6   condition que les tensions et l'incertitude connaissent un terme."

  7   Alors dites, Monsieur le Témoin, aux Juges, comment se présentait la

  8   situation psychologique à Mostar vis-à-vis de ce que faisaient les

  9   réservistes de l'armée population yougoslave.

 10   R.  La situation était chaotique. La population était soumise à des

 11   pressions, parce que sur les collines environnantes, on avait fait monter

 12   des armes lourdes. Les réservistes allaient et venaient dans la ville à

 13   bord de leurs véhicules, et ils provoquaient des incidents dans les

 14   restaurants ou cafétérias en tirant des coups de feu. Les gens évitaient de

 15   sortir dans les rues. Ils se réunissaient dans leurs maisons. En termes

 16   simples, l'ambiance dans son ensemble était des plus tendues.

 17   Les prix avaient connu une ascension vertigineuse. Il y avait de

 18   moins en moins de marchandises en vente, de moins en moins de contacts avec

 19   d'autres entreprises, de moins en moins de possibilités d'encaisser son

 20   salaire. D'autre part, les réservistes touchaient leurs salaires de la part

 21   de l'armée population yougoslave, et c'est avec des billets fraîchement

 22   imprimés qu'ils achetaient les dernières quantités de marchandises à

 23   Mostar. Les commerçants, pour ces dinars yougoslaves, ne pouvaient plus se

 24   réapprovisionner.

 25   Donc, en termes simples, l'ambiance, au total, était dépressive et

 26   chargée d'incertitudes.

 27   Q.  Puis on dit, page 43, intitulée "Il n'y a pas d'essence, une fois de

 28   plus." Et on dit : "Une fois de plus, c'est la crise de l'essence. Pour la

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  1   population ordinaire, il n'y en a pas du tout, et d'autres s'en procurent

  2   par relations pistons." Et on dit : "Un mark allemand égale 85 dinars

  3   yougoslaves." Est-ce qu'il en a été ainsi ?

  4   R.  Oui. Le taux de change ne faisait que chuter et les dévaluations

  5   étaient quotidiennes.

  6   Q.  Ouvrez, je vous prie, la page 50 -- la page croate. Je me réfère au

  7   jeudi 5 mars, donc quelques jours après -- deux semaines après. "Apaisement

  8   de la situation." On dit maintenant : "Un mark égale 150 dinars

  9   yougoslaves." On se rend compte de l'inflation, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  En dessous, on dit : "Bozo Lasta tué à Tasovcici. A 22 heures, sur le

 12   pont de Capljina, à bord de son véhicule privé, Bozo Lasta a été tué sans

 13   aucune raison et aucun motif." Est-ce que vous avez eu connaissance du fait

 14   qu'il y a eu des cas similaires où on avait abattu des gens, où c'était des

 15   forces paramilitaires, des réservistes, qui avaient tué, ivres, sans raison

 16   aucune, des gens ? On avait donc le droit de tuer quelqu'un qui était

 17   membre d'un groupe ethnique ou d'une confession autre ?

 18   R.  Je vous ai dit qu'il y avait pas mal de coups de feu, de tirs, et il y

 19   a eu beaucoup de victimes. Et le problème était d'autant plus grand que les

 20   informations n'étaient pas adéquatement fournies, ce qui fait que les

 21   rumeurs n'ont fait que se démultiplier. Et cela a créé une psychose de

 22   malaise pour les citoyens.

 23   Q.  Ouvrez, je vous prie, la page 53, maintenant. On lit : "Vendredi, 20

 24   mars 1992. Les Chetniks sont stupéfaits. Les Chetniks ont appris en Croatie

 25   qu'il suffisait de tirer des coups de feu, que la population allait fuir et

 26   qu'ils pourraient piller. Mais de Jasenica, Rodoc, Krivodol, personne ne

 27   fuit. Donc, rien ne sert de tirer des coups de feu." Alors, vous comprenez

 28   que la population n'a pas aussi peur que cela et que la population, avec

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  1   des armes qu'elle s'était procurée, a résisté à l'agression ?

  2   R.  Oui, je le sais.

  3   Q.  En dessus, on dit "Provocations." Dans la nuit du 20 au 21, la JNA a

  4   tiré sur une chapelle au cimetière de Miljkovici et elle a tiré au canon et

  5   au mortier sur Hrasno, et ainsi de suite. Je crois que vous connaissez tous

  6   ces détails ? Si ce n'est pas le cas, dites-le-nous.

  7   R.  Oui, je suis au courant de l'incident à Miljkovici, c'est dans la

  8   municipalité de Mostar. Pour ce qui est du reste, je l'ai su par les

  9   informations qui ont circulé à l'époque.

 10   Q.  Ensuite, on dit : "Les Serbes ont continué à bombarder Hrasno et les

 11   environs. La population fuit vers Stolac et Capljina." Est-ce que cela

 12   signifiait qu'il arrivait constamment de nouveaux réfugiés ?

 13   R.  Oui, c'est exact.

 14   Q.  Penchez-vous maintenant sur la page 57 -- 57, disais-je. Alors, c'est

 15   le 4 avril, maintenant. On dit : "Non loin de Mostar, on a tué un

 16   boulanger, un Musulman, avec cinq balles tirées vers lui pour aucune

 17   raison." Est-ce que ça s'est bien passé ainsi ?

 18   R.  Oui, c'est exact.

 19   Q.  Nous avons ensuite le 7 avril.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'aimerais ajouter quelque chose,

 21   une question. Monsieur Tomic, vous avez assisté à ce meurtre d'un

 22   boulanger, ça veut dire quoi exactement ?

 23   M. KOVACIC : [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Kovacic, vous m'interdisez

 25   de poser une question ?

 26   M. KOVACIC : [interprétation] Non, je voudrais juste attirer l'attention

 27   sur le fait que la réponse du témoin n'a pas été correctement enregistrée

 28   dans le procès-verbal d'audience. Le témoin a dit qu'il avait été témoin

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  1   d'événements de ce type et non pas de cet événement particulier. Cela

  2   correspond, je crois, à la question que vous posez, Monsieur le Juge.

  3   Merci.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Très bien. Alors, Monsieur le

  5   Témoin, pourriez-vous nous parler d'un meurtre auquel vous auriez assisté,

  6   le meurtre de quelqu'un ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas affirmé avoir assisté à de tels

  8   assassinats, mais à cette époque, de tels événements avaient lieu. Nous

  9   étions tout simplement informés de ces événements-là, moi j'étais un

 10   habitant de Mostar et j'en avais connaissance. Mon bureau n'était éloigné

 11   que de 200 mètres de l'endroit où ce boulanger a été tué. De ce fait, je me

 12   rappelle qu'il y a eu un incident de ce type, mais je n'étais pas présent

 13   lors des événements, et je ne témoignais pas au sujet de cet événement

 14   précis.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais c'est un peu technique, n'est-

 16   ce pas, lorsque l'on utilise le terme de témoin, d'observer, de témoigner.

 17   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci.

 18   Q.  En dessous, nous avons le texte suivant : "Alija Izetbegovic a déclaré

 19   la mobilisation générale et l'Herceg-Bosna a procédé de même ce matin."

 20   Avez-vous connaissance que cela a eu lieu à ce moment-là, la déclaration

 21   d'une mobilisation générale, et que l'agresseur ait été désigné ?

 22   R.  Oui, cela était à ce moment-là.

 23   Q.  La nuit du 6 au 7 avril 1993, à Mostar. La JNA en provenance du sud

 24   s'est dirigée vers Mostar. La Croatie a reconnu la Bosnie-Herzégovine et,

 25   tôt le matin, deux MiG de la JNA ont attaqué Listica. Six personnes sont

 26   décédées. Citluk a fait l'objet d'attaques aériennes et nous ne savons pas

 27   s'il y a eu des victimes. Listica c'est Siroki Brijeg, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Avez-vous connaissance - et il y a toute une série de références dans

  2   le présent texte - avez-vous eu connaissance que des MiG de la JNA aient

  3   procédé à des bombardements réguliers de Siroki Brijeg, Ljubuski, Citluk,

  4   Livno, Grude, et ce, de telle sorte que des femmes, des enfants et des

  5   vieillards étaient tués dans des zones où ne se trouvaient aucune unité

  6   militaire et il n'y avait aucune résistance ?

  7   R.  Oui. Il y avait des opérations de ce type de la JNA. J'ai connaissance

  8   personnellement que, lorsque nous nous rendions à Makarska via

  9   l'Herzégovine, nous devions conduire phares éteints à cause des opérations

 10   toujours possibles de l'aviation de la JNA. C'était la recommandation qui

 11   prévalait.

 12   Q.  Passons à la page 60, le 9 avril. Il s'agit ici de quelque chose

 13   d'important au sujet de quoi je vous demanderais de témoigner. Il est de

 14   nouveau dit que la nuit s'est passée, qu'il y a eu des tirs pendant la nuit

 15   à Mostar, qu'il y a eu des tirs en provenance de l'aéroport. "Il y a eu un

 16   ordre émis ordonnant le retrait de nos unités. Les forces armées ont

 17   compris cela comme une trahison, cet ordre du commandant Perko ordonnant le

 18   retrait des troupes via Goranci."

 19   Est-ce que vous avez connaissance, Monsieur, que M. Perak était un

 20   ancien officier de la JNA qui ensuite s'est enfui en Serbie et qu'à un

 21   moment donné, il a été infiltré afin d'émettre cet ordre de retrait des

 22   forces armées et des civils de la ville de Mostar; est-ce que cela est

 23   exact ?

 24   R.  Oui, j'ai connaissance de ces événements, et tout particulièrement ce

 25   qui s'est passé après ce refus de procéder au retrait, et je peux confirmer

 26   que cela est exact.

 27   Q.  Je vous remercie. Voyez maintenant le 13 avril en page 62. C'est

 28   Capljina et Livno qui ont été attaquées. La JNA attaque Citluk, Slipcici,

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  1   Visegrad en Bosnie. A partir de 15 heures 25, des feux d'artillerie nourris

  2   ont visé Capljina. La ville est en feu. L'hôtel Mogorjelo, l'église, la

  3   mosquée et de nombreux bâtiments sont endommagés. C'est ce qui est écrit.

  4   Jasenica est en feu. L'armée arrête les gens et les tue dans la ville. Pavo

  5   Gagro a été retrouvé égorgé à Buna. Cela confirme les éléments que vous

  6   avez fournis précédemment, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui. Pavo Gagro était le père d'entrepreneur privé qui était connu à

  8   Mostar. Je le connaissais également de par mes fonctions au sein de

  9   l'administration fiscale. Je me rappelle cet événement, le moment où il a

 10   été retrouvé égorgé. Il avait été allégué que c'était son voisin serbe qui

 11   l'avait assassiné.

 12   Q.  Très bien. Voyons ce que nous allons encore regarder. Voilà. Pâques, en

 13   page 66. "Perisic détruit Mostar." C'est donc le 19 avril 1992. Prenez

 14   connaissance de ce passage, s'il vous plaît.

 15   "A 17 heures, un avocat de Sarajevo a donné les informations suivantes :

 16   Perisic attaque toujours de façon très intense Mostar qui est sa cible

 17   principale. A 17 heures, un pilote qui avait été enlevé a donné de ses

 18   nouvelles en provenance de Sarajevo comme quoi il s'était enfui de la JNA.

 19   Mais Perisic procède toujours à une attaque d'artillerie visant Mostar qui

 20   est sa cible. A partir du camp sud, il vise la ville. Il y a des victimes

 21   civiles. L'attaque s'est terminée à 20 heures 20, l'attaque de Perisic sur

 22   Mostar. Nous n'avons pas eu de messe de Pâques le soir, car personne ne s'y

 23   est rendu à cause des tirs."

 24   Monsieur le Témoin, est-ce que cela reflète l'état pendant les

 25   plusieurs mois que recouvre cette période ?

 26   R.  Oui, je me rappelle de la Pâques 1992. Comme je vous ai déjà dit,

 27   le jour où il y a eu cette explosion d'une citerne, j'ai pris les

 28   dispositions nécessaires pour que mes parents puissent mettre à l'abri ma

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  1   sœur et les enfants de cette dernière à Makarska. Deux semaines plus tard,

  2   ma femme, qui était restée à Mostar avec moi et moi-même, nous nous sommes

  3   rendus en visite auprès d'eux et c'était au moment de Pâques. A ce moment-

  4   là, nous avons emprunté la seule sortie qui était possible, c'était ce

  5   détour par Goranci, la route de Goranci, qui elle aussi était toujours sous

  6   le feu des canons disposés sur le mont Hum.

  7   Ces jours-là après Pâques, nous souhaitions revenir à Mostar et mon

  8   épouse souhaitait revenir à Mostar également. Nous sommes arrivés jusqu'à

  9   Goranci, ce village sur les hauteurs de Mostar, et à ce moment-là, ce

 10   dernier point de sortie et d'entrée de la ville de Mostar avait été fermé à

 11   cause des pilonnages. Nous sommes restés sur place presque toute la nuit en

 12   attendant que la situation se débloque éventuellement. J'ai finalement

 13   ramené mon épouse à Makarska où elle est restée avec les enfants, puis je

 14   suis rentré, toujours au cours de la nuit et par la route de Goranci, à

 15   Mostar à un moment où les tirs avaient cessé.

 16   Il s'agissait donc d'un climat qui était celui qui prévalait ces

 17   jours-là à Mostar et qui correspond à ce que je viens de décrire.

 18   Q.  Je vous remercie. A cette même page 66, en date du 28 [comme

 19   interprété] avril, "Huit heures de combat. Hum a été touché." Il est écrit

 20   : "A Mostar, ils procédaient à un nettoyage des snipers parmi lesquels se

 21   trouvent des Musulmans et des Croates qui s'acquittent de cette entreprise

 22   criminelle pour de l'argent."

 23   Il a eu des efforts considérables pour que ces personnes soient

 24   arrêtées, certaines d'entre elles ont été tuées. Elles percevaient 500

 25   deutsche marks par personne tuée. Est-ce que vous avez connaissance de ces

 26   événements ?

 27   R.  Oui. Je sais que dans la partie de la ville qui s'appelait le Centre

 28   numéro 2 où se trouvait un grand nombre d'appartements et de bâtiments

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  1   résidentiels, qu'il y avait là-bas également des snipers, et cela

  2   conformément à ce qui est écrit ici.

  3   Q.  Oui. Concernant cette route qui était restée la seule disponible et

  4   l'aspect de cette route, un extrait de la page 67, s'il vous plaît."Je suis

  5   sorti de Mostar. Je roule sur la route de Goranci. Personne ne tire. Je

  6   prie à plusieurs reprises et je me repens."

  7   "Je suis en seconde et je roule le plus vite possible, mais je

  8   m'attends plus à mourir qu'à rester en vie."

  9   Alors une telle phrase dans la bouche d'un prêtre nous dit assez clairement

 10   le climat psychologique qui régnait à Mostar ces jours-là ?

 11   R.  Alors cette route, j'ai fait référence tout à l'heure, je suis passé

 12   par cette route aussi. L'endroit dont il est fait question, le virage de

 13   Goranac, est un endroit qui est tout à fait particulier sur cette route,

 14   car il faut y ralentir. Il faut ralentir à 20 kilomètres-heure pour pouvoir

 15   passer ce virage. Ce virage particulier faisait l'objet de tirs constants,

 16   de tirs de canons en provenance de Hum. Cela revenait à un jeu de roulette

 17   russe que de passer par ce virage. Les personnes qui passaient par ce

 18   virage avaient tendance à rouler trop vite. Il y avait des accidents, des

 19   accidents mortels dus, pour certains d'entre eux, aux pilonnages. Le

 20   passage par cette route était véritablement une façon de mettre sa vie en

 21   jeu et de prendre de très grands risques. Ce que le prêtre dit, qu'il

 22   s'attend davantage à mourir qu'à rester en vie, correspond tout à fait à la

 23   réalité.

 24   Q.  En date du 27 avril maintenant, en page 69, il est question de la soi-

 25   disant nouvelle Yougoslavie. "A 14 heures, c'est Krusevo qui est" --

 26   "Il y a beaucoup de désordre autour de la mobilisation. Certains

 27   participent aux hostilités dès le début, d'autres se sont enfuis en Croatie

 28   ou en Allemagne, d'autres encore s'occupent de leurs affaires privées. Plus

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  1   personne n'est contraint d'obéir et de répondre à l'appel de mobilisation.

  2   Tout cela montre que le pouvoir militaire du HVO est encore très faible."

  3   Est-ce que cela, Monsieur le Témoin, est exact ? Dites-nous comment quelque

  4   pouvoir que ce soit dans une situation comme cela pourrait être fort ?

  5   R.  C'est une période où, dans la réalité, la cellule de Crise avait perdu

  6   toute réalité. Par ailleurs, le HVO municipal fonctionnait dans les

  7   conditions qui régnaient dans la ville. Il est donc tout à fait logique que

  8   la question de la mobilisation n'ait pas été traitée dans le respect des

  9   règlements en vigueur à l'époque.

 10   Q.  Penchons-nous maintenant sur la page 72 qui concerne le 1er mai 1992. Je

 11   cite : "Au cours des attaques de la nuit sur Capljina, deux défenseurs ont

 12   trouvé la mort. Les Chetniks ont fait sauter le pont sur le Neretva à

 13   Capljina, le pont à Capljina. L'enfer a encore éclaté à Mostar. La

 14   cathédrale et le monastère franciscain ont été touchés. Deux personnes ont

 15   été tuées."

 16   Puis voyons la page concernant le 2 mai 1992. C'est un sujet qui a été

 17   abondamment discuté pendant le présent procès. Le père Zovko évoque ici son

 18   point de vue quant à la gérance internationale et il parle de combats

 19   féroces à Sarajevo. "Les observateurs européens avertissent l'armée

 20   yougoslave qu'ils rendront compte de tout ce qui se passe à la Communauté

 21   européenne au Portugal, mais l'armée yougoslave ne craint pas cela. Les

 22   Chetniks s'efforcent de prendre le contrôle de l'émetteur de télévision de

 23   Vlasic. Trois défenseurs ont été tués et un certain nombre d'entre eux

 24   blessés. La télévision de Sarajevo ne couvre que Sarajevo en ce moment

 25   parce que tous les émetteurs situés en Bosnie sont tournés vers Belgrade.

 26   Toutes les télécommunications avec le monde ont été interrompues en Bosnie

 27   et en Herzégovine." Est-ce que cela est vrai ?

 28   R.  Oui, l'émetteur du mont Velez, qui permettait à Mostar de recevoir les

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  1   signaux de la télévision de Bosnie-Herzégovine, était coupé. Tous les

  2   équipements étaient coupés face à la JNA.

  3   Q.  Voyons maintenant ce que pense le père Zovko un peu plus loin. Ce soir-

  4   là, étant rentré de Lisbon, Alija Izetbegovic a été fait prisonnier par

  5   l'armée populaire yougoslave à Sarajevo. Il dit un peu plus loin, je cite :

  6   "Une armée étrangère dans un pays étranger a fait prisonnier le président

  7   du pays. Ceci est sans précédent. Les Etats-Unis, l'Allemagne et l'Autriche

  8   ont répliqué avec des mots très faibles, mais les Serbes ne craignent pas

  9   ces mots. La réaction à la mort d'un observateur belge n'a, pour l'instant,

 10   fait l'objet d'aucune réaction de la part de l'Europe et des Etats-Unis,

 11   qui sont totalement impuissants ou ne veulent rien faire."

 12   A votre connaissance, est-ce que c'était le sentiment qui prévalait dans la

 13   population au sujet des négociations et des promesses qui étaient faites,

 14   ce sentiment d'une ingérence et ce sentiment qu'en fait personne ne voulait

 15   rien faire ou ne pouvait rien faire contre les actions de la JNA ? Que

 16   pourriez-vous dire sur la base de ce que vous savez à partir de Dubrovnik,

 17   Vukovar, et cetera ?

 18   R.  Le sentiment de malaise, d'être victime de pression et d'être

 19   impuissant existait. Ces sentiments étaient tous présents, et il semblait

 20   qu'aucune aide ne venait et que tous les pourparlers de l'époque, tous les

 21   accords qui étaient conclus pendant que la Yougoslavie existait encore ne

 22   donnaient aucun résultat. La population n'attendait aucune aide de nulle

 23   part, car aucun effort ne semblait être fait pour défendre la population,

 24   lui fournir logement, travail ou vivres.

 25   Q.  Penchons-nous maintenant sur la page 73, journée du 3 mai 1992. "Les

 26   observateurs européens sont en train de quitter Mostar." On lit dans cette

 27   page : "Une personne a été tuée et 13 personnes ont été blessées au cours

 28   des combats de Mostar la nuit dernière," et un peu plus loin il est

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  1   question de Slavonski Brod qui souffre entre les mains des mêmes

  2   agresseurs. Et puis, un peu plus loin, on lit que "des substances chimiques

  3   ont été lancées sur Siroki Brijeg et que l'évêché ainsi que l'hôpital de

  4   Mostar ont été pris pour cibles par des tirs, l'évêché étant pratiquement

  5   rasé." Est-ce que vous voyez cela ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et le 4 mai 1992 : "Après l'attaque aérienne sur Ljubuski hier, deux

  8   personnes ont été blessées et cinq personnes tuées."

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vous reste dix minutes.

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bon. Enfin, tout est très important ici

 11   dans ce document. Il faudrait passer en revue ce document jour après jour

 12   pour voir comment la situation a évolué et nous pourrions alors parler de

 13   la reconstruction de façon complète.

 14   Q.  Mais je vous prie maintenant de vous rendre en page concernant le 6 mai

 15   1992. Il y a encore un point que j'aimerais examiner avec vous. "L'évêché

 16   est en feu." Est-ce que vous avez su qu'à l'époque l'évêché a été rasé, et

 17   puis nous lisons ici que "le général Perisic a demandé au HVO de Mostar et

 18   à la Défense territoriale de se retirer sur la rive droite de la Neretva à

 19   défaut de quoi il enverrait l'aviation attaquer Mostar." Est-ce que vous

 20   avez eu connaissance de ce chantage exercé par lui sur la population au

 21   cours des négociations ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Le 9 mai 1992 maintenant, page 77. "L'église St-Pierre et St-Paul est

 24   en feu." Est-ce que vous avez su que cette église avait été incendiée et

 25   calcinée, qu'il n'en est rien resté ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Je cite : "Des gens quittent Mostar et deviennent réfugiés à bord

 28   d'autobus." Est-il vrai que des femmes et des enfants, quittaient la ville,

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  1   notamment des femmes qui souhaitaient désespérément mettre leurs enfants à

  2   l'abri ?

  3   R.  Selon moi, c'était l'une des raisons pour laquelle Mostar a été prise

  4   pour cible par les obus et les tirs de canons, le but étant de faire partir

  5   la population. Ceci n'a cessé de s'intensifier, notamment après la

  6   destruction par le feu de l'évêché et de l'église St-Pierre et St-Paul dont

  7   il n'est rien resté.

  8   Q.  Pourriez-vous maintenant vous pencher sur la page 80 où nous lisons que

  9   "les Chetniks tirent à Krusevo," et puis un peu plus loin, nous lisons que

 10   "la paix règne à Mostar, qu'on chasse les tireurs embusqués et que trois

 11   d'entre eux ont déjà été tués."

 12   R.  Oui. J'ai déjà dit que dans le quartier centre de la ville, il y a eu

 13   des cas de ce genre, une chasse aux tireurs embusqués, et que certains ont

 14   été découverts et tués.

 15   Q.  Est-ce qu'en général les "snipers" étaient découverts des appartements

 16   qui appartenaient à des militaires ?

 17   R.  Selon la rumeur qui circulait à l'époque, la plupart de ces tireurs

 18   embusqués opéraient à partir d'appartements qui appartenaient à des

 19   militaires. En effet, on y a trouvé des armes dans les casiers enfermant

 20   les volets roulants au-dessus des fenêtres, semble-t-il. Enfin, c'était la

 21   rumeur.

 22   Q.  J'aimerais maintenant lire la page concernant le 19 mai 1992 pour

 23   terminer, où il est question du conflit entre le HOS et la Défense

 24   territoriale.

 25   Savez-vous que Bijelo Polje a été libéré à l'issue de ces

 26   affrontements ?

 27   R.  Oui, je le sais.

 28   Q.  On lit ici que "le HOS d'Herzégovine comptait dans ses rangs

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  1   principalement des Musulmans, même si les Croates exerçaient les fonctions

  2   de commandants." On lit également que "les Musulmans sont en train de

  3   régler leurs comptes, que les Musulmans le font en mettant le feu et en

  4   pillant les maisons serbes." Et il est également indiqué que "ce

  5   renseignement concernant le HOS devrait être vérifié pour voir s'il s'agit

  6   de vérité ou s'il s'agit simplement de rumeurs qui circulent dans la

  7   population." Est-ce que vous savez qu'à l'époque dont nous parlons le HOS

  8   comptait déjà de nombreux Musulmans dans ses rangs et qu'il échappait donc

  9   pratiquement au contrôle du HVO et fonctionnait sans contrôle ?

 10   R.  Oui, je sais qu'il y avait de nombreux Musulmans au sein du HOS et que

 11   le HOS était une formation dont tout le monde avait peur. Ces forces armées

 12   suscitaient une grande peur et provoquaient beaucoup de désordre en ville.

 13   Q.  Monsieur Tomic, est-ce que vous savez encore une chose, et ce sera ma

 14   dernière question, est-ce que vous savez que la nuit du 12 au 13 juin, les

 15   forces serbes, quelque soit le sens à donner à cette expression, ont tué

 16   114 Croates et Musulmans à Uborak et Sutina, 26 à Sutina et 88 à Uborak ?

 17   R.  Oui, je suis au courant de cela. Je connais ces deux localités.

 18   Q.  Est-ce que vous auriez appris qu'à quelque endroit dans le monde, à ce

 19   moment-là ou même un an plus tard, quelqu'un aurait écrit quelque chose

 20   pour rendre public ces faits ?

 21   R.  Je ne suis pas au courant.

 22   Q.  Est-ce que vous savez qu'au mois de juin, c'est d'abord la rive droite

 23   de la Neretva qui a été libérée à Mostar à partir du sud et du nord et

 24   qu'ensuite la rive gauche de la Neretva a été libérée également, ce qui a

 25   permis de soustraire la ville aux réservistes ?

 26   R.  Oui. On appelle cette période les aurores du mois de juin. C'est sous

 27   cette dénomination qu'on fête l'événement.

 28   Q.  Est-ce que vous savez qu'à partir des positions tenues par les Serbes

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  1   face à Nevesinje on pouvait pilonner Mostar chaque fois qu'on le voulait,

  2   chaque fois que ces hommes s'enivraient suffisamment ils pouvaient tirer

  3   sur Mostar ?

  4   R.  Oui. Il y avait des pilonnages ponctuels à partir de ces positions, et

  5   quand on ne les voyait plus à Podvelezje, cela signifiait que le secteur de

  6   Podvelezje avait été libéré.

  7   Q.  Est-ce que vous savez qu'à l'époque je commandais cette zone du Conseil

  8   croate de Défense, et est-ce que vous savez que j'étais donc au

  9   commandement des opérations destinées à libérer les rives droite et gauche

 10   de la Neretva ?

 11   R.  Oui, je le sais.

 12   Q.  Merci beaucoup.

 13   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, j'espère que ce

 14   document sera versé au dossier et admis. Si vous ne l'admettez pas

 15   maintenant, je l'utiliserai lorsque je témoignerai.

 16   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, en page 68 du compte

 17   rendu de l'audience d'aujourd'hui, vous avez interrogé le témoin au sujet

 18   des destructions de mosquées à Mostar. Il vous a répondu comme il l'a fait,

 19   mais dès le début de sa réponse, il a évoqué l'ouvrage intitulé "Urbicide."

 20   J'aimerais, pour l'avenir des débats, à titre de référence, indiquer que

 21   nous avons vu ce document ici qui constitue la pièce 3D 00785, mais il est

 22   également enregistré sous le numéro 1D 02951 dans le cadre de l'audition du

 23   témoin Puljic. D'ailleurs, à l'époque, nous n'avons pas cité les numéros de

 24   page et nous avons fait savoir par la suite que c'était peut-être une

 25   erreur de notre part, le fait de ne pas avoir mentionné les numéros de

 26   page, mais que notre intention était de demander le versement au dossier de

 27   l'intégralité de ce livre. Donc en fait, ce ne sont pas des pages dont nous

 28   demandons le versement, mais le livre entier. D'ailleurs le témoin

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  1   d'aujourd'hui évoque également cet ouvrage "Urbicide." Il dit qu'il a

  2   participé à sa rédaction, donc je pense que cela vient à l'appui de ma

  3   requête, qui n'a pas encore fait l'objet d'une décision d'ailleurs.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. 

  5   Il est l'heure passée. Comme vous le savez, nous nous retrouverons

  6   donc la semaine prochaine puisque nous commencerons lundi à 14 heures 15.

  7   Donc, Monsieur le Témoin, vous allez rester quelques jours. J'espère que

  8   vous profiterez de ces quelques jours pour visiter la région.

  9   Donc, je vous souhaite une bonne fin de semaine, et nous nous

 10   retrouverons donc lundi à 14 heures 15.

 11   --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le lundi

 12   3 novembre 2008, à 14 heures 15.

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