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1 Le mardi 25 novembre 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Huissier, appelez le numéro de l'affaire,
6 s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, bonjour à
8 toutes et à tous.
9 Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.
10 Merci, Messieurs les Juges.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
12 En ce mardi 25 novembre 2008, je salue les quatre accusés présents, il y en
13 a deux qui sont malades. Je salue Mmes et MM. les Avocats, je salue M.
14 Stringer et Mme West et je salue également leurs collaboratrices et toutes
15 les personnes présentes.
16 Je vais d'abord donner la parole à M. Le Greffier qui a un numéro IC à nous
17 donner.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
19 La Défense Prlic a formulé son objection à la demande de versement de
20 l'Accusation par le truchement du témoin Neven Tomic. Ce sera désormais la
21 pièce IC 00894.
22 Merci.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
24 Bien. Je vais lire une décision orale qui est un peu longue, mais je vais
25 d'abord redonner la parole à M. Le Greffier, parce que le numéro n'a pas
26 été bien inscrit sur le transcript.
27 Monsieur le Greffier.
28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai dit que la
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1 Défense Prlic avait formulé une objection à la demande de versement pour le
2 témoin Nevic et que ce serait la pièce IC 00894. Merci. IC 00894.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà; c'est correct.
4 La position de la Chambre concernant le champ d'application ratione
5 temporis du deuxième acte d'accusation modifié.
6 A l'audience du 4 novembre 2008, Me Kovacic et Me Karnavas ont soulevé une
7 question portant sur l'interprétation du champ temporel du deuxième acte
8 d'accusation modifié et à cette occasion, solliciter la tenue d'une
9 audience sur ce point. Cette demande qui n'a pas été formulée en des termes
10 précis est intervenue à l'occasion du contre-interrogatoire du témoin Neven
11 Tomic par le Procureur sur des faits portant sur la période postérieure aux
12 accords de Washington. La Chambre de première instance comprend que la
13 demande de Me Kovacic et Me Karnavas porte simultanément sur le champ
14 d'application ratione temporis du deuxième acte d'accusation modifié, ainsi
15 que sur l'admissibilité des éléments de preuves se rapportant à des faits
16 postérieurs à la période infractionnelle alléguée dans le deuxième acte
17 d'accusation modifié.
18 S'agissant du champ d'application ratione temporis du deuxième acte
19 d'accusation modifié, la Chambre de première instance rappelle que la
20 partie pertinente du paragraphe 15 du deuxième acte d'accusation modifié se
21 lit comme suit, je cite :
22 "Entre le 18 novembre 1991 ou avant et avril 1994 environ, et après,
23 diverses personnes ont mis sur pied une entreprise criminelle commune et y
24 ont participé en vue de soumettre politiquement et militairement les
25 Musulmans de Bosnie et autres non-Croates qui vivaient dans des régions du
26 territoire de la République de Bosnie-Herzégovine, revendiquées comme
27 faisant partie de la communauté croate (future république d'Herceg-Bosna),
28 de les chasser définitivement, de procéder à un nettoyage ethnique de ces
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1 régions et de réunir à court ou à long terme ces dernières au sein d'une
2 Grande Croatie, soit par attachement à la République de Croatie, soit en
3 étroite association avec elle, et ce, par la force, l'intimidation ou la
4 menace du recours à la force, la persécution, l'emprisonnement et la
5 détention, le transfert forcé et l'expulsion, l'appropriation et la
6 destruction des biens et par d'autres moyens consistant à commettre des
7 crimes sanctionnés par les articles 2, 3 et 5 du Statut du Tribunal ou
8 impliquant la commission de tels crimes."
9 La Chambre de première instance comprend que la période
10 infractionnelle alléguée dans le deuxième acte d'accusation modifié s'étend
11 du 18 novembre 1991 à avril 1994 et que les accusés sont poursuivis pour
12 les crimes allégués dans le deuxième acte d'accusation modifié, qui
13 auraient été commis durant cette période de temps. Par conséquent, le
14 deuxième acte d'accusation modifié n'entend pas, aux yeux de la Chambre de
15 première instance, tenir les accusés responsables de crimes qui auraient
16 été commis avant ou au-delà de cette période de temps.
17 S'agissant à présent de l'admissibilité d'éléments de preuve se
18 rapportant à des faits antérieurs ou postérieurs à cette période de temps,
19 si de tels éléments sont pertinents, ont une valeur probante et répondent
20 aux exigences d'admissibilité des documents telles que requises par les
21 décisions de la Chambre en la matière, la Chambre de première instance peut
22 les admettre s'ils visent à établir les éléments qui ne se rapportent pas à
23 un comportement punissable des accusés, mais à une condition générale de
24 leur responsabilité, notamment l'existence d'une entreprise criminelle
25 commune qui ne constitue pas en tant que tel un crime.
26 Eu égard à ce qui précède, la Chambre n'estime pas nécessaire de
27 tenir une audience sur ces questions. La Chambre a rendu une décision sur
28 le champ d'application ratione temporis de l'acte d'accusation.
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1 Je vous invite à relire à tête reposée cette longue décision orale
2 qui est très claire pour la Chambre.
3 Nous allons introduire le témoin pour la suite du contre-
4 interrogatoire. Je crois que c'est M. Praljak qui est prêt et qui va
5 commencer.
6 Maître Kovacic, M. Praljak va intervenir, parce qu'il s'agit
7 d'éléments liés à des questions militaires.
8 M. KOVACIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
9 Je tiens à vous rappeler aussi que par une décision unanime de la Chambre à
10 l'époque, avant qu'il y ait eu interjection d'appel pour ce qui est de
11 l'élargissement des droits des accusés quant au contre-interrogatoire, les
12 Juges de la Chambre avaient, à l'unanimité, décidé que Praljak pouvait
13 contre-interroger et interroger le témoin expert de l'Accusation, Mme Ewa
14 Tabeau. Etant donné que ce témoignage est en corrélation directe, je crois
15 que la situation est tout à fait claire, point n'est nécessaire d'en dire
16 plus.
17 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Madame.
20 Le général Praljak va vous poser des questions dans le cadre du contre. Je
21 lui donne la parole.
22 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.
23 LE TÉMOIN : SVETLANA RADOVANOVIC [Reprise]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 Contre-interrogatoire par M. Praljak :
26 Q. [interprétation] Bonjour, Madame, Professeur Radovanovic.
27 R. Bonjour.
28 Q. Comme il vous est donné de le comprendre d'après la place que j'occupe
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1 ici, je me trouve être accusé dans ce procès. Mais pour l'interrogatoire
2 que je me propose d'effectuer, je tiens à vous préciser que je suis
3 professeur de sociologie. Donc je me sens apte et avoir l'éducation
4 nécessaire pour ce qui est de vous faire parcourir un certain nombre de
5 questions que vous avez évoquées hier dans vos réponses.
6 Pour le moment, étant donné que je vais vous conduire au travers d'un
7 processus, je vous demanderai de ne pas vous servir de termes scientifiques
8 tels que clés, corrélation, correspondance, et cetera, afin que nous
9 puissions nous concentrer sur des fragments d'éléments qui m'intéressent.
10 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je demanderais aux Juges de
11 m'interrompre à tout moment, si nécessaire, et de tirer au clair des
12 notions et autres éléments. Bien entendu, pas au détriment du temps qui
13 m'est imparti.
14 Nous sommes en 1991, je m'excuse auprès de M. Karnavas pour avoir à répéter
15 des éléments de ce qu'il a dit hier, à l'occasion de son interrogatoire.
16 Q. Madame, en 1991, il y a eu un recensement. Vous avez établi un
17 planning, il a été adopté des décisions, une méthodologie, et cetera, puis
18 on rassemble les effectifs que vous formez.
19 Ce sont des recenseurs. Est-ce bien comme cela que ça se
20 passe ?
21 R. Oui.
22 Q. Etant donné que ce recensement doit être effectué dans un délai de
23 temps relativement court et qu'il y a beaucoup de personnes de recensées,
24 les recenseurs sont nombreux; est-ce exact ?
25 R. Oui.
26 Q. Les recenseurs ce sont des hommes, des êtres humains. Dès le
27 recensement, est-ce qu'il y a, dès le départ, des erreurs que les gens
28 commettent pour ce qui est des questions posées, des suggestions qu'on fait
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1 dans le non-accomplissement de certaines tâches ?
2 Est-ce que vous supposez ou vous savez que dès lors, il y a un certain
3 nombre d'erreurs, voire de données erronées ?
4 R. C'est une question complexe que vous me posez. Tous les instructeurs
5 qui forment les recenseurs s'efforcent de former ces recenseurs dans une
6 méthodologie qui est la bonne. Les recenseurs obtiennent des instructions,
7 toute une série d'instructions qu'ils sont censés respecter. Alors, s'ils
8 ne peuvent pas retenir toutes les informations, il y a toute une série
9 d'instructions qui les aident à garder les choses en mémoire.
10 En sus, il y a un instructeur qui contrôle les recenseurs, mais les
11 recenseurs sont contrôlés pour voir s'il y a eu des erreurs systématiques
12 de commises; par exemple, si une question est posée de façon erronée, si
13 elle est sautée ou si elle est mal interprétée, si elle est interprétée à
14 tort et à travers. Mais le fait est que l'influence du recenseur est
15 présente à chaque fois dans une mesure plus ou moins grande.
16 Q. Merci.
17 R. Si vous le permettez, j'aimerais ajouter --
18 Q. Madame Radovanovic, malheureusement je n'ai pas trois ou quatre heures,
19 chose que j'estimerais nécessaire pour parcourir tous les éléments avec
20 précision et clarté, mais comme mon temps est limité et qu'il y a des
21 problèmes qui sont bien plus importants, excusez-moi d'aborder des
22 problèmes qui sont plus grands.
23 Alors, il peut y avoir, bien sûr, des erreurs, des contrôles, des
24 rectifications, des échantillonnages pour les contrôles -- enfin vous, vous
25 le savez et j'imagine que les autres s'en doutent aussi. Allons de l'avant.
26 Quand on rassemble tous ces papiers à un endroit, à l'institut des
27 statistiques, c'est bien comme ça que ça se passe, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Certes.
2 R. Mais avant l'institut des statistiques, ça part dans les commissions
3 municipales, commissions électorales au niveau municipal, et c'est ensuite
4 que cela est rebalancé [phon], retransmis vers l'institut des statistiques.
5 Q. Certes. Voyons maintenant ce qu'on recense et pourquoi. Ce que l'on
6 cherche à savoir c'est le nom, le prénom d'un homme, une femme. On souhaite
7 savoir combien il y a d'hommes et de femmes, puis on souhaite savoir quelle
8 est l'appartenance ethnique qui est une chose que chacun et chacune décide
9 de dire ou de ne pas dire, puis on essaye de savoir quelles sont les
10 catégories d'âge, combien d'enfants, combien de vieillards, et cetera. Puis
11 on souhaite savoir combien de bétails il y a, combien de moutons, combien
12 de vaches. Puis on souhaite aussi savoir quels sont les biens immobiliers
13 en propriété privée et quels sont les biens immobiliers en propriété
14 publique, voire sociale. Puis combien de salles de réfrigération ou de
15 réfrigérateurs il y a.
16 R. Pour l'essentiel, la statistique n'est pas intéressée par le nom et
17 prénom, ça ne l'intéresse pas du tout.
18 Q. Justement. Si, par exemple, on constate qu'il y a un recensement en
19 France, on aura peut-être beaucoup plus de personnes âgées. Le chef de
20 l'Etat, par exemple, peut trouver une utilité pour ce qui est de savoir qui
21 est-ce qui va nourrir ces personnes puisqu'il n'y a pas assez de jeunes. Et
22 lorsqu'on prend des décisions dans la gestion des affaires de l'Etat, ça
23 nous aide à aider pour ce qui est de déterminer l'âge du départ à la
24 retraite, par exemple ?
25 R. A peu près, oui.
26 Q. Certes. Alors on constate quelles sont les formations scolaires,
27 combien il y en a avec une formation secondaire, une formation supérieure
28 universitaire, et cetera.
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1 R. C'est exact.
2 Q. Maintenant on vient à l'élément important. Tous ces renseignements-là,
3 on va les dissocier du nom et du prénom ?
4 R. Oui.
5 Q. Et c'est là l'important. Toutes ces données, combien de terres, combien
6 de frigos, quel âge, et cetera, et cetera, tout ça ce sont des ensembles de
7 données qui, une fois traitées, n'ont plus rien à voir avec le nom et le
8 prénom de l'individu concerné ?
9 R. Exact.
10 Q. Ces documents arrivant à Sarajevo sont envoyés vers un lecteur optique,
11 n'est-ce pas ?
12 R. En 1991, oui. Avant cela, jamais, non.
13 Q. Nous parlons de 1991. Alors on a des lecteurs optiques, et il y a
14 lecture des données croates, "1." Je vais simplifier. Je simplifie pour que
15 ce soit limpide. Yougoslave 1 Croate, 1. Puis Serbe 1, puis à la fin on
16 fait l'addition. Albanais, Tanzanien, que sais-je ?
17 R. Je vais vous apporter une petite explication quand même ici. Toutes les
18 questions qui sont posées à l'occasion du recensement dans les imprimés de
19 recensement sont transmises en information numérique. Par exemple, pour ce
20 qui est de l'appartenance ethnique, on est censé inscrire "Croate, Serbe,
21 Musulman, Turc," et cetera. Mais avant que de traiter ces données
22 statistiques, il convient de coder, parce qu'il y a des index de codes qui
23 vous disent exactement. Si c'est un Croate il faut mettre 1, si c'est un
24 Serbe il faut mettre un 2. Si c'est un Monténégrin, il faut mettre un 3, si
25 c'est un Anglais il faut mettre 9, si c'est un Français il faut mettre 10,
26 si c'est un Yougoslave il faut mettre tel chiffre, et ainsi de suite.
27 Q. Merci. C'est justement ce que je voulais vous entendre dire.
28 Alors, les recenseurs inscrivent à la main, les écritures peuvent
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1 être très variées. Et là aussi, pour autant que je le sache, il peut y
2 avoir des erreurs pour ce qui est de comprendre ce que le recenseur a bien
3 voulu marquer; est-ce exact ?
4 R. Exact.
5 Q. Merci.
6 R. Je vais vous donner un exemple.
7 Q. Allez-y.
8 R. Ce lecteur optique, en 1991, non seulement en Bosnie, mais dans bon
9 nombre de républiques, s'est avéré comme étant peu pratique. Cela nécessite
10 une inscription très précise d'un chiffre donné. J'ai conduit ces activités
11 de recensement en 1991 et il nous est arrivé après le passage au scanner
12 dans une cité ou une agglomération qui s'appelle Velika Drenova, c'était
13 tous des Anglais avec pour langue maternelle le danois.
14 C'est un tout petit bled. Or, le problème résidait justement dans une
15 mauvaise lecture. Parce que le "6" était lu comme un "0", le "0" était lu
16 comme un "9", et cetera. J'ai écrit un article à ce sujet, je l'ai publié
17 cet article, et il a porté sur les problèmes rencontrés à l'occasion du
18 recensement de 1991.
19 Q. Justement, c'est ce que j'avais souhaité entendre. Alors, il est normal
20 que lorsque l'on voie qu'il y a eu erreur de la part de ce lecteur, on
21 prend des échantillons, une centaine d'échantillons, et on compare avec ce
22 que le recenseur a marqué pour, par exemple, pour voir quel est le taux
23 d'erreurs ?
24 R. Non, non, ce n'est pas comme ça qu'on fait.
25 Q. Dites-nous comment on fait.
26 R. A l'occasion de l'élaboration, lorsque vous apportez, par exemple, ce
27 lecteur optique, qu'il y a des données qui vous semblent quand même
28 louches, suspectes, alors on va avoir le papier même et on vérifie la
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1 donnée douteuse. Ça c'est le tout premier des contrôles, c'est effectué par
2 des gens qui sont chargés de l'inscription des données.
3 Ensuite il y a des contrôles, une série de contrôles tels que
4 contrôle logique, et ainsi de suite.
5 Q. Maintenant ce qui est important, dans une localité A, municipalité A,
6 disons, il y a le Juge Trechsel qui se déplace et il rencontre Praljak, on
7 discute, on prend un verre de vin, et M. Le Juge Trechsel se trouve être
8 intéressé par mon appartenance ethnique. S'il lui est permis de demander à
9 le savoir, et comme les traitements statistiques ne sont faits ni pour le
10 fisc ni pour les services secrets, pour autant que je sache, il ne peut
11 obtenir la base de données pour apprendre dans la base de données si je
12 suis Croate, Musulman ou Serbe; est-ce bien exact ?
13 R. C'est exact. Les renseignements individuels ne seraient être
14 communiqués. Et j'ajoute, puisque c'est le Juge Trechsel, il se peut qu'on
15 fasse une exception.
16 Q. Fort bien. Cela me paraît fort important. Nous avons donc dissocié ces
17 groupes d'ensemble. Et nous savons pour cette localité qu'il y a tant de
18 Croates, tant de Musulmans, de Bosniens, tant de Serbes, tant de
19 Yougoslaves, et qu'il y a tant de biens immobiliers en propriété privée,
20 tant en propriété publique, et cetera. Mais nous ne savons pas quelle est
21 la corrélation entre les noms et prénoms et ce type-là de données; est-ce
22 bien exact ?
23 R. Exact.
24 Q. Merci.
25 Nous allons terminer pour ce qui est de cet aspect-là. Nous continuons.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Suite à ce que vient de dire le général Praljak et
27 votre réponse, j'en reviens au codage.
28 Puisque d'après ce que je comprends, Madame, les fiches sont remplies
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1 par ceux qui se déclarent au recensement, et ensuite il y a quelqu'un qui
2 va coder, qui va donc donner un chiffre. Par exemple, si l'ethnie est
3 musulmane, il va donner un chiffre. Alors, moi, je m'interroge sur ceux qui
4 vont coder.
5 Peut-il y avoir à leur niveau des engagements politiques tels qu'ils
6 vont, par exemple, avoir tendance à dire qu'il y a plus de Musulmans que de
7 Croates ?
8 Puisque vous, vous avez participé, est-ce qu'il y avait un contrôle
9 de ces codeurs ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit du codage et non pas du décodage. Il
11 existe des codeurs par domaine, s'agissant de la profession, éducation,
12 état civil, sexe, et ainsi de suite. Donc le tout est numérotisé [phon]
13 avec les codes particuliers. Et les codeurs, ce sont des professionnels. Et
14 compte tenu du fait qu'il s'agit d'un travail de grande ampleur, encore une
15 fois, un concours est lancé et l'on choisit les personnes éduquées qui sont
16 considérées comme personnes capables de ce faire. Donc ces personnes
17 reçoivent des instructions, et sont contrôlées.
18 Personnellement, je pense qu'ils font leur travail au mieux, et qu'il
19 n'est pas possible d'établir un lien entre ce travail et la politique. Car
20 un seul homme ne peut jamais se retrouver en position de coder tout ce qui
21 concerne une localité. Car il s'agit des conscriptions qui font partie des
22 agglomérations. Donc à Mostar il peut en avoir des centaines, et c'est
23 seulement en regroupant toutes les données que vous aurez les résultats
24 pour Mostar.
25 Je pense que chez les codeurs, théoriquement, c'est possible, mais
26 que jusqu'à maintenant il n'y a pas eu de tels abus. Cela dit, ça n'a
27 jamais fait l'objet d'une étude, donc je ne peux vraiment pas dire s'il y a
28 eu des moments où ceci était le cas ou pas.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
2 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]
3 Q. Madame Radovanovic, maintenant c'est la guerre qui éclate. Nous
4 n'allons pas entrer les causes du conflit, ça ne nous intéresse pas en ce
5 moment. Beaucoup de choses arrivent aux gens. Il y en a qui perdent leur
6 travail, il y en a qui déménagent, qui partent. Quant à la question de
7 savoir si ce sont des réfugiés ou des personnes déplacées, s'ils ont été
8 esquissés, c'est une question juridique, non pas une question
9 démographique; est-ce exact ?
10 R. C'est exact. Et si vous examinez, par exemple, les instructions portant
11 sur l'inscription des électeurs, d'après la définition de l'OSCE, il est
12 dit que les personnes déplacées ce sont toutes les personnes qui ont changé
13 de lieu de résidence de façon volontaire ou sous la contrainte. Donc la
14 définition juridique est différente de la définition démographique. Or,
15 dans la statistique il n'y a pas de définition. Et si on a besoin de
16 définition, on s'appuie sur la définition juridique.
17 Q. Bon. C'est une question tout à fait différente.
18 En 1997, 1998, en Bosnie-Herzégovine et dans les organes de l'Etat, "Vous
19 n'aurez rien à voir avec les élections, n'est-ce pas ? C'est notre
20 travail."
21 R. Je ne sais pas.
22 Q. D'accord. Passons à autre chose.
23 Pourtant, en 1997, 1998, d'après vous et d'après les données que vous
24 connaissez, combien de personnes de toute orientation possible ont changé
25 de lieu de résidence ? Qu'il s'agisse de l'Allemagne, de la Hongrie, de la
26 Finlande, de la Croatie, Serbie, ainsi de suite ? Est-ce que d'après les
27 données dont vous disposiez, ce nombre dépassait les deux millions ?
28 R. J'ai lu des textes rédigés par des auteurs différents, venant des Etats
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1 différents. Aujourd'hui, le chiffre est différent, mais il s'agit toujours
2 de millions de gens.
3 Q. Ça commençait toujours par deux millions et parfois d'autres
4 proposaient des chiffres plus élevés. Nous allons passer maintenant à la
5 question des élections. L'OSCE dit : "Vous allez voter maintenant. D'abord
6 vous devez vous inscrire pour voter." Cela dit, vous pouvez vous inscrire
7 où que ce soit, l'endroit où vous vivez. Vous pouvez voter où que vous
8 vouliez en Bosnie; est-ce
9 exact ?
10 R. Pas tout à fait, mais il existe une telle possibilité. Dans les
11 instructions de l'OSCE, il est dit que : Tous les citoyens de la Bosnie-
12 Herzégovine peuvent s'inscrire à partir du moment où ils sont âgés de plus
13 de 18 ans. Et ceux qui ont fait partie du recensement de 1991. Cependant,
14 il y a un précédent. Disons, si vous n'avez pas participé au recensement de
15 1991, il faut prouver la citoyenneté. Si vous n'avez pas de document
16 prouvant votre citoyenneté, vous pouvez, en présence d'un juge, en présence
17 d'un dirigeant religieux, ou en présence de deux témoins qui ont été
18 enregistrés lors du recensement et qui vont témoigner du fait que vous êtes
19 citoyen de la Bosnie-Herzégovine, bien, dans ce cas-là, vous aurez la
20 possibilité de voter en Bosnie-Herzégovine car vous êtes citoyen de la
21 Bosnie-Herzégovine.
22 Q. Supposons que nous, dans cette salle, nous étions habitants de cette
23 municipalité A, comme j'ai mentionnée; et pour des raisons différentes qui
24 concernent plus la politologie et la science politique et la sociologie,
25 bien, nous sommes partis de notre lieu de résidence. Et par exemple, le
26 Juge Trechsel, il est en train de vivre très loin et faire autre chose; et
27 le Juge Antonetti, par exemple, il est en train d'admirer les sculptures de
28 Rodin à Paris; et l'honorable Juge Prandler est en train de boire le Tokaj
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1 sur le lac de Balaton. Ils avaient tous été citoyens de cette municipalité;
2 et dans les Etats respectifs ils obtiennent le formulaire des bureaux de
3 représentation de Bosnie-Herzégovine pour pouvoir voter. Est-ce possible ?
4 R. S'ils sont citoyens de la Bosnie-Herzégovine, c'est possible.
5 Q. Et ils disent tous, "Nous allons voter dans la municipalité A dont il
6 est question." N'est-ce pas ? Ils peuvent le faire ?
7 R. Il est recommandé qu'ils votent dans la municipalité dans laquelle ils
8 résidaient en 1991. Mais il existe un autre précédent où il est dit,
9 s'agissant du grand nombre de personnes déplacées, quelle que soit la
10 raison de cela, il est possible que ces personnes votent à leur lieu de
11 résidence actuel s'il est possible de prouver que ces personnes y sont
12 arrivées avant avril 1996. Je ne peux pas vous donner la date exacte. Il
13 est même possible de voter dans la municipalité dans laquelle vous
14 souhaitez voter, si vous résidez à l'étranger, si vous pouvez prouver que
15 vous vivez là-bas. Autrement dit, il existe des précédents.
16 Q. Je comprends, mais nous allons parler maintenant du point le plus
17 important, qui est le suivant : il existe un volontarisme. Tous ceux qui
18 ont le droit de vote peuvent choisir où ils vont le faire ?
19 R. Oui.
20 Q. Et après cela, nous arrivons à une addition des personnes qui ont voté,
21 et il s'agit là d'un chiffre tout à fait arbitraire ?
22 R. Oui, par rapport au recensement ce serait le cas.
23 Q. Oui, par rapport au recensement. Et ça dépend de la manière dont les
24 gens réfléchissent. Par exemple, certains diront, "J'en ai marre de cet
25 Etat, de la guerre et de la politique, et je ne veux pas voter" ?
26 R. Oui, encore aujourd'hui, en temps de paix, vous avez des gens qui ne
27 veulent pas voter; c'est une position politique.
28 Q. Et d'après les données dont vous disposez s'agissant des élections
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1 récentes en Bosnie-Herzégovine qui ont eu lieu il y a quelques mois, sur
2 les 800 000 à un million de personnes de citoyens qui résident à
3 l'extérieur de la Bosnie-Herzégovine et qui sont encore citoyens de la
4 Bosnie-Herzégovine, seulement 30 000 se sont enregistrés pour les élections
5 locales ?
6 R. Je ne saurais pas vous dire le chiffre exact, mais je sais que le
7 chiffre est peu important. Je le sais.
8 Q. D'accord, le chiffre est peu important. Donc nous arrivons à un chiffre
9 qui porte sur la réponse des électeurs, mais nous ne pouvons pas en tirer
10 d'autres éléments, sur le plan scientifique ?
11 R. Oui, plus ou moins.
12 Q. Nous allons passer à autre chose maintenant.
13 Mme Tabeau dit, "Je n'ai pas d'argent. Il n'y avait pas d'argent à l'époque
14 pour organiser un nouveau recensement. Nous ne pouvons pas aller à la même
15 municipalité et faire l'exercice de nouveau car il n'y a pas d'argent." Et
16 elle dit comme suit: "Je vais maintenant me pencher sur le numéro que j'ai
17 obtenu et je vais essayer de voir ce qui s'est passé sur le plan des
18 migrations." Elle dit : "Tout d'abord, il faut dire, d'après les gens qui
19 se sont enregistrés, qui appartient à quel groupe ethnique, car il ne doit
20 pas déclarer cela au moment du vote. Ils ne vont pas dire, 'Je vais
21 m'inscrire en tant que Croate,' n'est-ce pas ?"
22 R. Oui.
23 Q. Bien. Nous allons poursuivre. Maintenant, elle se penche sur la liste
24 électorale dans la municipalité A et elle trouve le nom de "Karnavas," elle
25 ne sait pas que faire avec ce nom de famille, elle ne sait pas si c'est un
26 Américain, un Grec ou autre chose. Elle, elle va se pencher sur la base des
27 données concernant le recensement de la population, mais là, elle ne peut
28 que vérifier si "Karnavas" avait été enregistré dans cette municipalité. Il
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1 n'est pas écrit comment il s'est déclaré.
2 R. Si, dans le recensement de la population, c'est inscrit; le recensement
3 qui a été fait en Bosnie, c'est le cas car ils ont les noms et les prénoms.
4 Le Dr Tabeau possède les noms et les prénoms s'agissant de l'ensemble de la
5 Bosnie-Herzégovine, s'agissant du recensement de l'ensemble de la Bosnie-
6 Herzégovine. Donc il y a le nom, le prénom, les dates, la municipalité,
7 s'il s'agit d'un homme ou d'une femme, et ainsi de suite. Quant à la
8 question de savoir si le nom a été retranscrit de manière exacte, c'est une
9 autre chose.
10 Q. Vous voulez dire qu'elle a les papiers et non pas les séries ?
11 R. Non. Le Dr Tabeau, sous forme électronique a l'ensemble des données du
12 recensement de la population de la Bosnie-Herzégovine et elle a les données
13 individuelles. Tout a été scanné et elle a les noms et les prénoms et tout
14 simplement, ceci a été présenté sous forme électronique. Par exemple, vous
15 pouvez avoir "Svetlana Radovanovic," ça peut être en bas de la liste et
16 maintenant, elle peut déplacer cela en haut de la liste. Il y a les codes
17 1, 2, 8, 7, mais on sait très exactement ce que ça veut dire et ce
18 qu'indique l'appartenance ethnique, et ainsi de suite. Elle possède cela
19 sous forme électronique, mais le nombre d'erreurs quant à ces noms et ces
20 prénoms est incroyable.
21 Q. Bien. Voyons pourquoi. Si vous souhaitez, par le biais des noms et de
22 la fréquence des noms, si vous souhaitez obtenir le résultat concernant
23 l'appartenance ethnique, prenons Petkovic, combien de Petkovic y a-t-il en
24 Serbie ?
25 R. Je ne sais pas, mais je sais combien de Kovacevic il y a en Croatie car
26 ça faisait partie récemment d'un quiz.
27 Q. Les noms de famille serbe et croate sont très fréquents et il est
28 impossible de déterminer l'appartenance ethnique seulement à cause du nom
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1 de famille ?
2 R. Oui.
3 Q. Par exemple, Slobodan Praljak, si on essaie d'évaluer la Situation,
4 Slobodan Praljak, ça peut être à la fois serbe et croate et plutôt serbe
5 que croate, n'est-ce pas ?
6 R. Si vous souhaitez utiliser cette méthodologie-là, la réponse -- je
7 serais tenté de dire "oui."
8 Q. Bien. Cette dame, elle a ainsi obtenu un certain nombre de données, à
9 la fois portant sur les personnes qui ont choisi volontairement de
10 s'inscrire sur la liste électorale, mais ce nombre n'est pas élevé, elle
11 souhaite augmenter le nombre. Est-ce qu'elle va ajouter à une personne les
12 membres de sa famille ?
13 R. Je ne sais pas, elle n'a pas écrit cela dans son repère. Mais je peux
14 vous dire ce que je pense.
15 S'agissant des cas dont il est question, nous parlons du recensement
16 et des listes électorales, elle n'est pas obligée d'ajouter les membres de
17 la famille si elle est sûre du prénom. Mais le Dr Tabeau affirme autre
18 chose dans sa déposition lors de son interrogatoire principal que j'ai
19 écouté. Elle dit : "Lorsque je ne suis pas sûre d'un prénom ou d'un nom,
20 j'utilise la méthode du foyer." Or, cette méthode n'existait pas dans la
21 statistique. Cependant, dans les combinaisons, vous pouvez avoir des pairs
22 complexes; au sein d'un foyer, vous pouvez avoir des pairs complexes, des
23 membres complexes de ce foyer. "Un foyer," c'est une catégorie économique.
24 Ça peut être une famille ou pas. "Un foyer" peut être constitué de
25 personnes qui ont des liens de parenté entre eux ou pas. Si vous avez un
26 foyer, ça ne veut pas dire nécessairement que toutes les personnes, tous
27 les membres ont le même nom de famille.
28 Nous savons, chez nous, par exemple, que souvent vous avez plusieurs
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1 générations qui font partie du même foyer. Par exemple, vous aurez les
2 parents et la fille qui s'est mariée, avec son mari et ses enfants; et là,
3 automatiquement, vous avez deux noms de famille. Par exemple, je peux vivre
4 avec ma belle-sœur et avec mon beau-fils et avec ma sœur. Nous, nous sommes
5 un foyer, mais ma fille et ma belle-fille n'ont pas le même nom de famille
6 que moi, elles ne s'appellent pas Radovanovic.
7 Q. Or, Mme Tabeau, à défaut de meilleurs éléments, elle a appliqué ce que
8 vous appelez la "clé," elle a appliqué cette clé sur les données de base
9 pour dire telle personne est un Croate, telle personne est un Serbe ou un
10 Musulman sans parler de la question des langages mixtes, et cetera, n'est-
11 ce pas ?
12 R. Non, ce n'est pas cas. Lorsque vous dites "clé," il s'agit de la
13 manière de trouver les corrélations. La clé, ça peut être le nom de
14 famille, le prénom, et ainsi de suite, ou la date de naissance. On essaie,
15 en appliquant cette clé, de trouver les correspondances. A chaque fois
16 qu'on trouve les corrélations, je peux dire, "Voilà, maintenant, j'ai
17 Svetlana Radovanovic, j'ai trouvé les correspondances et dans le
18 recensement, il y en a trois." Si la liste des électeurs, l'expert va
19 trouver trois Svetlana Radovanovic dans ses listes et elle va dire, "Voilà,
20 ici, j'ai les correspondances; les deux autres noms, je ne vais pas les
21 prendre." Ou bien elle peut dire, "Si je peux prendre toutes les trois."
22 Mais je pense que justement le fait que vous n'êtes pas sûr à 100 % doit
23 influencer l'augmentation du nombre de corrélations trouvées.
24 Q. Bien. Je vais bientôt terminer pour ce qui est de ce sujet-là. Mais je
25 vous pose la question suivante : supposons qu'on a la municipalité A qui
26 contient un certain nombre de Croates et un certain nombre de Serbes, mais
27 plus de Musulmans. Il y en avait avant, mais plus maintenant.
28 R. Quand ?
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1 Q. En 1997. Je parle du recensement, il y avait les Croates, les
2 Musulmans, les Serbes dans une certaine proportion. Et peu importe les
3 raisons, mais les Musulmans sont partis, les Serbes et les Croates y sont
4 restés. Mais pour une certaine raison, les Serbes et les Croates disent,
5 "Peu nous importe la politique, peu nous importe les partis politiques,
6 nous n'allons pas nous inscrire, on s'en fiche," et les Musulmans qui
7 vivent à l'extérieur, ils s'inscrivent pour voter. Quel sera le résultat
8 suivant l'approche de Mme Tabeau ?
9 R. Ceux qui ne se sont pas inscrits, vous ne trouverez jamais de
10 corrélation car ils n'existent pas dans l'autre base de données. Si dans
11 une base de données vous n'avez pas les personnes qui se sont inscrites,
12 vous ne les trouverez jamais dans l'autre base de données. Or, s'ils
13 existent dans la première série de données, vous les trouverez dans la
14 deuxième série.
15 Q. J'ai posé une question précise. Donc les Serbes et les Croates ne se
16 sont pas inscrits pour voter. Est-ce que le résultat, si on applique la
17 méthode de Mme Tabeau, le résultat sera qu'à cet endroit, il n'y a pas du
18 tout de Croates car ils ne se sont pas inscrits pour les élections ?
19 R. C'est exact.
20 Q. C'est ce que je voulais entendre --
21 R. Mais s'il vous plaît, excusez-moi, mais je n'ai pas répondu avec
22 précision.
23 Ils vont exister en tant qu'existant en 1991, mais non pas en 1997,
24 pour être tout à fait précise. Donc on pourra voir que d'après le
25 recensement de la population, il y avait tel et tel nombre de Croates à
26 l'époque; cependant, s'ils ne se sont pas inscrits pour voter, ils
27 n'existent pas dans les listes électorales. S'ils n'existent pas dans les
28 listes électorales, vous ne pouvez pas les trouver dans le recensement pour
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1 dire, lui, c'est un Croate; donc il n'y a pas de corrélation. En 1997, vous
2 allez voir, "Je n'ai pas trouvé ou j'en ai trouvé trois, ou cinq." Dans ces
3 cas-là, ces personnes-là ne peuvent pas apparaître si vous n'avez pas
4 d'indice selon lequel ils s'étaient inscrits.
5 Q. Madame Radovanovic, c'est justement ce que je souhaitais entendre. Il
6 est possible, ceci est possible, il est possible de créer une série de
7 données de cette façon-là, alors qu'en réalité, à un endroit, il n'y a que
8 les Croates et que les Serbes; mais ces personnes-là, disons, décident de
9 ne pas s'inscrire pour les élections et ils vont disparaître des tableaux
10 de Mme Tabeau, n'est-ce pas ? Est-ce possible ?
11 R. S'agissant de l'année 1997, c'est possible.
12 Q. Bien. Maintenant, on peut inverser cela.
13 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je voudrais poser une question. Je
14 vous demanderais de ne pas torturer les interprètes. C'est vraiment très
15 difficile de vous suivre, Madame. Vous êtes extrêmement rapide. Vous
16 parlez, bien sûr, votre langue maternelle, mais n'oubliez pas, s'il vous
17 plaît, de ménager des pauses après chaque question et chaque réponse.
18 Merci. Je vous demande de bien vouloir prendre en compte les interprètes.
19 Merci beaucoup.
20 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, croyez-moi,
21 nous faisons de notre mieux. Mais malheureusement, chaque fois, c'est ce
22 qui nous arrive. Je m'excuse auprès de vous et auprès des interprètes.
23 Q. C'est ce que je 'ai essayé de conclure, s'agissant de ce sujet-là.
24 En appliquant cette méthode que nous venons de démontrer, ce que Mme Tabeau
25 a obtenu, il s'agit d'un monde virtuel et peu fiable qui, par hasard, peut,
26 mais ne doit pas avoir quoi que ce soit à voir avec la réalité sur le
27 terrain en 1997 et peu importe le pourcentage des erreurs; est-ce exact ?
28 R. C'est exact.
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1 Q. Donc lorsque le Président Antonetti, en se penchant sur le tableau
2 hier, fait le calcul - et M. le Juge Antonetti fait de bons calculs - est-
3 ce qu'il est exact de dire qu'il fait un calcul à partir des données
4 mathématiques virtuelles, que ces données-là peuvent être réelles, mais
5 compte tenu de la méthode appliquée, le plus probablement le taux d'erreurs
6 est de 60 % par rapport à la situation réelle sur le terrain en 1997; est-
7 ce exact ?
8 R. Je ne pourrais pas dire "oui" car il faut tenir compte de la chose
9 suivante. Les chiffres du Dr Tabeau, ce sont les chiffres concernant les
10 personnes dont elle dit, "Moi, j'affirme qu'il s'agit d'effectivement tels
11 cas," mais nous ne connaissons pas la fiabilité de ces chiffres. Nous
12 savons qu'ils ne sont pas complets, car il existe tout un nombre de
13 personnes qui ne se sont pas inscrites. Nous savons aussi qu'il y a eu des
14 modifications de la méthode de corrélation. Mais nous ne savons pas dans
15 quelle mesure.
16 S'agissant des chiffres qu'elle avance, certainement, il existe un certain
17 nombre de personnes qui existent certainement bel et bien. Mais nous ne
18 pouvons pas savoir quelle est la proportion des personnes concernant
19 lesquelles nous ne pouvons pas être sûrs qu'elles existent bel et bien,
20 mais il existe un haut degré de doute. Ça, vraiment, je ne peux pas dire
21 quel est le degré de doute. C'est ce dont j'ai parlé hier, si Mme Tabeau
22 avait donné la statistique de la corrélation en disant, "Cette clé de
23 corrélation n'est pas fiable, mais m'a servi à trouver 50 % des
24 correspondances. Il y a un haut degré de fiabilité pour dire qu'il s'agit
25 de la même personne. Ici, j'ai appliqué cette clé-là et la probabilité
26 qu'il s'agit là de la même personne est moindre."
27 Ça, c'est très important, ce serait très important. Mais moi, par
28 conséquent, je ne peux pas dire ce qui est exact et ce qui n'est pas exact
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1 dans ces données. Mais ce que je peux affirmer, c'est que les données ne
2 sont pas fiables.
3 Q. Madame Radovanovic, c'est justement ce que je voulais demander. Nous
4 allons approfondir cela quelque peu et après, nous allons nous arrêter.
5 Si vous donniez quelque chose comme ça à un de vos étudiants pour qu'il
6 fasse un exercice, est-ce que vous auriez demandé à votre étudiant,
7 s'agissant de chaque pas [inaudible] de corrélation, de faire le calcul de
8 l'erreur; est-ce exact, de l'erreur ?
9 R. Oui.
10 Q. Ou du taux d'erreurs ?
11 R. Non. Pas de l'erreur, il ne peut pas calculer l'erreur. Il peut
12 simplement dire quel est le taux de fiabilité. Il peut dire compte tenu de
13 la clé, ce taux est élevé ou pas.
14 Q. Je me suis mal exprimé. Taux de fiabilité.
15 Maintenant, je vous pose une autre question -- pardon -- hier, vous nous
16 avez dit que le taux du manque de fiabilité de ces données était d'environ
17 30 à 60 %; est-ce exact ?
18 R. Compte tenu des sources de données qui contiennent une erreur de 30 à
19 60 %, je ne veux pas dire que le taux de fiabilité est plus élevé. En
20 m'appuyant sur les sources, je peux affirmer que c'est le minimum du taux
21 du manque de fiabilité. Je souligne, du point de vue de la statistique et
22 de la démographie, l'erreur réside dans le fait de créer un fait qui
23 n'existe pas, alors que la donnée n'existe pas.
24 Q. Vous créez cela d'une manière qui n'est pas acceptable scientifiquement
25 parlant ?
26 R. Absolument.
27 Q. Maintenant, s'il vous plaît, conformément à la question de M. Karnavas,
28 est-ce qu'elle, elle a appliqué à chaque fois la même méthode dans tout le
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1 reste ?
2 R. Dites-moi d'abord ce qu'est "tout le reste" ?
3 Q. Lorsqu'elle parle des personnes tuées, des personnes blessées, et ainsi
4 de suite, dans d'autres municipalités. Est-ce que la création des groupes
5 ou de séries qu'elle a créés se faisait suivant la même méthode peu fiable,
6 à savoir qu'on ne sait pas quel est l'espace englobé et qu'elle passe d'une
7 série pour appliquer les données sur une série beaucoup plus élevée, comme
8 vous le disiez
9 hier ?
10 R. Nous ne pouvons pas simplifier les choses ainsi. A l'occasion d'une
11 expertise pour ce qui est des groupes ethniques et des réfugiés, on sait de
12 façon fiable quel est le territoire étudié par Mme Tabeau. C'est huit
13 municipalités. Donc le territoire nous est connu. Mais les méthodes
14 utilisées pour soustraire la structure ethnique et pour en tirer le nombre
15 des personnes déplacées se trouvent être absolument erronées et de façon
16 professionnelle et scientifique, c'est inacceptable.
17 Vous me demandez si c'est la même chose. Dans les deux autres analyses, on
18 ne connaît pas le territoire. Il n'y a pas de définition du territoire
19 donné. Il y a Mostar est, mais on ne sait pas ce qu'on entend par Mostar
20 est, à gauche de la Neretva.
21 Mais ce qui est intéressant, c'est qu'il n'y a pas de méthodologie
22 identique pour l'évaluation de la structure ethnique. Donc Mme Tabeau n'a
23 pas pris le nom, le prénom et la date de naissance dans les registres de
24 naissance pour mettre cela dans la liste et dire, c'est la structure
25 ethnique, mais elle a dit ce qui suit, "Je vais prendre le nom et le prénom
26 et en fonction de la fréquence de l'apparition d'un certain nombre de
27 noms."
28 Donc il n'y a pas eu de corrélation. On prend la fréquence de certains noms
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1 pour déterminer ce qu'est un tel ou un tel comme, enfin, un ressortissant.
2 Alors on a plus Svetlana, Radanovic [phon] pour dire ceci : "On a pris la
3 méthode de la fréquence des noms. On prend le cas de figure où il y a des
4 experts, qui partant du nom et du prénom, nous font déterminer leur
5 appartenance ethnique.
6 Donc il y a deux méthodes : la méthodologie donc de la fréquence
7 d'apparition et l'étude des noms et prénoms. Donc cette méthode est une
8 nouveauté vis-à-vis de la prise en considération de la déclaration ethnique
9 des uns et des autres dans le recensement de la population.
10 Q. Mais est-ce que cela est admissible sur le plan science où que ce soit
11 au monde ?
12 R. Je n'ai jamais rencontré cela nulle part. Mais ce qui est plus
13 intéressant à mes yeux, c'est de savoir pourquoi cette même méthode que Dr
14 Tabeau affirme avoir été bonne, à savoir les correspondances, pourquoi ce
15 n'est pas utilisé dans les deux rapports; également le nom, prénom dans les
16 deux endroits, la date de naissance ou la date du décès, et cetera.
17 Je pense --
18 Q. Attendez, Madame Radovanovic.
19 Lorsqu'il s'agit de Musulmans et de Serbes, et même les Croates, un prénom
20 très fréquent est celui de Zoran ?
21 R. Enfin, je n'ai pas étudié la fréquence des prénoms, mais j'ai connu des
22 Musulmans, des Croates et des Serbes ayant le même prénom, Zoran. Je ne
23 sais pas quelle est la fréquence chez les uns ou les autres.
24 Q. Ou alors "Jasmin," enfin, peu importe. On peut estimer que cette
25 méthode est peu fiable dans un grand pourcentage de cas pour pouvoir tirer
26 des conclusions, n'est-ce pas ?
27 R. Mais attendez, ce n'est pas une méthode scientifique, ce n'est pas une
28 méthode de professionnels; c'est une façon de faire de cabaret ou de
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1 cafétéria.
2 Q. Bon. Ouvrez, s'il vous plaît la pièce 3D 03259.
3 R. Je ne sais pas me débrouiller ici, parce que je crois que la
4 numérotation n'est pas la même chez moi.
5 Q. 3259, on vous aidera, ne vous inquiétez pas.
6 R. C'est celui-là, excusez-moi.
7 Q. Je vous demande de vous pencher sur la page 446. Il s'agit d'un
8 tableau.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Dites-nous, qui est l'auteur de ce document ?
10 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] L'auteur de ce document est le général
11 Drekovic. Ça été photocopié, et le général Drekovic, après le général
12 Pasalic, il est devenu commandant du 4e Corps à Mostar. Dans son livre, il
13 a fourni des tableaux. Et je voudrais qu'on se penche brièvement sur
14 quelques-uns de ces tableaux.
15 Il s'agit donc de données fournies par le général Drekovic, qui est
16 devenu commandant du 4e Corps. C'est le Corps de l'ABiH qui a défendu
17 Mostar, et il est devenu commandant en 1993.
18 Q. Les Juges le savent, vous ne savez pas, Madame, mais il existe un 6e
19 Corps. Les Juges savent où il se trouvait.
20 Je vous demande de vous pencher notamment sur la page 475. L'avez-
21 vous retrouvée ?
22 R. Oui.
23 Q. Je vous prie de retenir les chiffres qu'on y donne. M. Drekovic dit que
24 dans ce corps - et j'aurai à l'expliquer ultérieurement cela - jusqu'au 19
25 janvier 1994, il parle donc de 1993 et de 19 journées dans l'année 1994
26 pour dire que dans son corps il y a eu 579 soldats de tués et qu'il a eu 1
27 168 blessés.
28 On peut constater la chose, c'est tout.
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1 R. C'est ce qu'il dit ici.
2 Q. Bien. Ce que je vous demanderais, si pour des raisons, peu importe
3 lesquelles, nous venions à accepter les renseignements fournis par Mme Ewa
4 Tabeau concernant les 500 personnes tuées à Mostar entre mai 1993 et avril
5 1994, pourrions-nous dire, "Ce ne sont que des soldats qui ont été tués,"
6 parce que Drekovic dit qu'il y a 579 morts, 539 -- enfin, non, 579, j'ai
7 bien dit.
8 Et il n'y a pas eu de civils de tués, tout est net et précis. Il y a plus
9 de soldats de tués qu'elle n'en a fait figurer dans le recensement effectué
10 par l'hôpital militaire ou au niveau de livres de décès ou les deux
11 réunis. Alors, pour jouer à son jeu ?
12 Excusez-moi d'aller très vite. Ralentis, Praljak.
13 Donc si on voulait jouer à ce jeu de correspondance, on pourrait dire,
14 "Messieurs les Juges, Ewa Tabeau affirme qu'il y a eu là-bas 500 personnes
15 de tuées, M. Drekovic, lui, dit : "J'ai eu 579 soldats de tués." Donc tous
16 les décédés étaient des soldats" ?
17 R. Avec tout le respect que j'ai pour M. Praljak, je ne jouerai pas ce
18 jeu. C'est se perdre en conjecture là.
19 Q. Justement, nous n'allons pas faire cela, parce que nous savons pour sûr
20 qu'il y a eu également des victimes parmi les civils. Mais alors, on ne
21 calcule pas, comme le fait Mme Tabeau. Vous serez donc d'accord avec moi
22 pour dire qu'il y a une documentation juridique médico-légale qui doit
23 servir de fondement pour déterminer la vérité et savoir où a été tué, où
24 est-ce qu'est décédé un tel ou un tel autre ?
25 R. Ça, je suis d'accord avec vous, et je peux contester du point de vue de
26 professionnels et de scientifiques, ce chiffre de 539 ou je ne sais, ça n'a
27 rien à voir avec ce document. J'attire votre attention sur un élément qui
28 est le suivant :
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1 Le Dr Tabeau, comme vous avez pu le voir dans votre rapport,
2 mentionne les causes des décès, les causes des décès ne sont pas indiquées
3 dans les registres de l'état civil, ce n'est pas indiqué à l'état civil. Il
4 y a autre chose, il y a un certificat de décès. Le certificat de décès est
5 délivré par le médecin légiste. Ce certificat de décès est porté à l'état
6 civil et est conservé de façon durable. Mais le renseignement en question
7 pour ce qui est de la cause de décès n'est pas porté au registre des
8 personnes décédées.
9 Le Dr Tabeau ne mentionne pas la source de ces renseignement pour ce qui
10 est -- elle ne dit pas que c'est le certificat de décès qu'elle a consulté,
11 elle dit que c'est l'état civil qu'elle a consulté.
12 Q. Merci. Alors procédons rapidement. Vous vous êtes déjà prononcé sur la
13 notion de "siège utilisé" par Mme Tabeau. Avez-vous eu à lire un passage
14 donné, un descriptif au sujet de ce qu'elle entend par "siège" ?
15 R. Non, je l'ai déjà dit, il n'y a pas de définition de "siège."
16 Q. Allons de l'avant. Vous a-t-on donné une carte militaire pour indiquer
17 dans Mostar et dans la vallée de Mostar que l'on avait déployé les unités
18 du HVO, l'armée de la RS et l'ABiH. Où est-ce que vous l'avez vu ?
19 R. J'ai obtenu plusieurs cartes, en effet. Je ne peux pas dire que ce sont
20 des cartes militaires, j'ai vu que la rivière Neretva partage Mostar en
21 Mostar est et ouest, mais moi je n'ai pas demandé de carte militaire, on ne
22 m'en a pas donné. Et il est probable que je n'ai pas pu m'y débrouiller. Si
23 le Dr Tabeau s'en était servi elle même, je les aurais étudiées de façon
24 très attentive.
25 Q. Je vais vous demander, Madame, de prendre à présent - où est-ce que
26 j'ai mis cette référence - le P -- enfin, ce sont ces deux rapports à elle.
27 Je vais juste parcourir le tout premier, P 09837. Il s'agit des rapports de
28 Mme Tabeau.
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1 R. J'ai besoin d'un coup de main. Je ne m'y retrouve pas.
2 Q. P 09837.
3 R. De quel rapport parlez-vous ?
4 Q. Sur les personnes tuées. Dites-nous, cette notion dans la langue serbe,
5 "tué" et "mort" est-ce que c'est la même chose ? Est-il exact de dire qu'un
6 soldat vient à être tué mais l'assassinat c'est tout à fait autre chose ?
7 Q. Oui, mais attendez, vous pouvez tuer dans un accident de la circulation
8 aussi. Donc quand on parle de causes de décès, il y a causes violentes, et
9 on fait la distinction, donc suite à violence, suite à accident, suite à
10 assassinat, et cetera. Donc il y a une délimitation. Parce que toute mort
11 violente ne sous-entend pas mort au combat. Vous avez dans les situations
12 de guerre des gens qui sont morts dans des accidents.
13 Q. Dites-nous, est-ce que dans la partie qui parle des décès dans Mostar
14 est, vous auriez trouvé s'il y a eu suicides, s'il y a eu morts dans un
15 accident de la circulation, s'il y a eu décès suite à mauvaise manipulation
16 d'armes ?
17 R. Le Dr Tabeau a établi un tableau avec 497 personnes. Je ne sais pas
18 exactement, si vous le permettez je vais bien consulter le rapport --
19 Q. Allez-y, allez-y.
20 Il s'agit du tableau numéro 16. En B/C/S, c'est la page 26 sur un total de
21 32, et le tableau est le numéro 16.
22 R. Non, je ne parle pas du tableau dans le rapport. Je vous parle de la
23 liste des personnes qui sont annotées comme étant décédées à l'état civil
24 et il y a une liste de personnes qui ont été recensées dans le registre de
25 l'hôpital de guerre. Dans l'hôpital de guerre, il y en a 474 de ces
26 personnes; et selon l'état civil, je vais vous le dire tout de suite, 472.
27 Quand vous vous pencher sur cette liste, vous pouvez tomber sur plusieurs
28 individus tués du fait d'un accident de la circulation ou autre, et il y a
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1 eu une personne à s'être suicidée. Je vous dis ça de mémoire. Je vais
2 essayer de retrouver ici l'endroit où c'est écrit et je vais exactement
3 vous dire de quelles personnes il est question.
4 Q. Madame Radovanovic, l'identité de cet individu m'importe peu
5 maintenant.
6 R. Je viens de le retrouver. On dit, "Handzo, Gemmal, il est né en 1959,
7 et il a péri à côté de Tekija dans un accident de la circulation," et il y
8 a quelques individus dans ce cas de figure.
9 Q. Ouvrez, je vous prie, la page avec le tableau numéro 3, page 10 sur 32
10 du rapport de Mme Tabeau portant sur les décès dans Mostar est.
11 R. J'ai retrouvé le tableau.
12 Q. Voilà ce que nous dit Mme Tabeau. On voit le tableau, et on voit pour
13 Mostar : "Inconnu 135," on voit "389," "524"; puis on dit "Chiffre total…"
14 --
15 Ceci est un aperçu des cas par municipalités et en fonction de la
16 pertinence pour le siège de Mostar est. Mme Tabeau nous dit, C'est
17 pertinent pour le siège de Mostar est.
18 Puis, en bas, on dit ce qui suit : "Le chiffre total pour la municipalité
19 de Mostar se solde à 524 cas, et on voit les tableaux 3 et 4, dont," dit-
20 elle, "seuls 373 cas répondent à l'exigence stricte de la pertinence vis-à-
21 vis du siège de Mostar." Entre parenthèses : "C'est-à-dire, les cas de
22 décès survenus dans Mostar est dans la période allant de mai 1993 à juin
23 1994."
24 Madame Radovanovic, quand quelqu'un vous dit de façon scientifique que
25 c'est là un chiffre qui répond ou qui correspond à un principe scientifique
26 strict, comment iriez-vous augmenter davantage le chiffre en question ? Et
27 est-ce que l'augmentation de ce chiffre serait en réalité un jeu où on
28 additionnerait des pommes, des poires, des souris, et que sais-je encore de
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1 plus ?
2 R. Je n'irais pas augmenter, gonfler ce chiffre. L'explication elle-même
3 nous dit qu'il y a toutes sortes de combinaisons et de spéculations en jeu.
4 Parce que le fait que cela corresponde aux exigences strictes de la
5 pertinence pour Mostar est, pour le siège de Mostar est, mais on ne sait
6 pas ce que c'est que Mostar est, là j'ai l'impression que ce n'est
7 déterminé qu'en fonction de la référence années prises en considération.
8 Q. Madame, prenez la page d'après, s'il vous plaît. Vous allez voir un
9 tableau numéro 4 qui répète tout ceci, et Mme Tabeau répète encore : on
10 voit 373 cas, je cite, notés dans Mostar est pendant l'état de siège, est
11 considéré comme étant pertinent et valide pour les besoins de l'analyse des
12 victimes du siège.
13 Je vous prie de commenter.
14 R. Je n'ai pas de commentaire, Monsieur. Comment dirais-je ? C'est une
15 position prise par Mme Tabeau, qui n'est pas basée sur la fiabilité des
16 renseignements qu'on a. Si vous ne savez pas quel est le territoire que
17 vous prenez en considération, si vous ne savez pas, enfin, comment voulez-
18 vous que je commente ? C'est là aussi une spéculation, une spéculation
19 statistique.
20 Q. Ça c'est un problème. Le deuxième des problèmes c'est celui-ci :
21 lorsqu'elle a déterminé ce chiffre de 373, sans parler de soldats aux fins
22 militaires ou quoi que ce soit d'autre, et quand on dit de ce chiffre que
23 c'est pertinent et valide, comment viendriez-vous à l'idée de le gonfler,
24 ce chiffre, et qu'advient-il de cette augmentation-là ?
25 R. On dit pertinent et valide, mais le Dr Tabeau a deux sources. L'une des
26 sources c'est les registres de l'état civil, elle se penche dessus. L'autre
27 source c'est l'hôpital militaire, l'hôpital de guerre. Elle combine les
28 deux, Elle prend ceci de l'état civil et elle ajoute ceci de l'hôpital de
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1 guerre. J'ai vu telle chose dans le document intitulé, "ABiH," et dans un
2 autre document, Armée de Croatie. On additionne le tout et on obtient 529."
3 Alors, quand vous vous penchez sur tous ces tableaux que vous avez ici, et
4 quand vous vous penchez sur le tableau qui vous donne la somme totale qui
5 se rapporte à la totalité des victimes, et où on dit que c'est 539, vous
6 pouvez voir quelles sont les combinaisons auxquelles on a eu recours.
7 Laissez-moi un instant que je retrouve le tableau, je vous prie. Il me
8 semble que c'est le tableau numéro 1 mais je n'en suis pas trop sûre. Je
9 l'ai annoté justement. Un instant, je vous prie, pour que je puisse vous
10 montrer quelles sont les sources utilisées et que je vous dise aussi à quel
11 point ces sources sont contradictoires.
12 Voilà, c'est le tableau numéro 13. Il s'agit des constatations
13 qui additionnent la totalité des renseignements. On voit un aperçu des
14 décès par source, elle s'est penchée sur les registres d'état civil,
15 l'hôpital de guerre. Sans entrer maintenant dans les considérations comme
16 elle a fait pour prendre cela en considération. Elle fait la somme et elle
17 dit 539 cas dont j'ai identifié 370 dans les registres d'état civil, et je
18 les ai pris en considération. 134 que j'ai ajoutés du registre de l'hôpital
19 de guerre, parce qu'il y en a 130 qui proviennent de ce registre de
20 l'hôpital de guerre.
21 Mais dans l'armée, au sein du document intitulé "Soldats qui ont péri dans
22 les rangs de l'ABiH," et qui englobe tous les soldats de 1992 à 1995, elle
23 en a trouvé 39. Elle ne les a pas trouvés dans les autres sources, mais les
24 a trouvés en fonction des dates de décès, entre avril et mai, et elle les a
25 additionnés en prenant cette source-là. Elle fait la somme.
26 S'agissant de tous les tableaux qui sont donnés précédemment, avec tout le
27 respect que je dois au Dr Tabeau, c'est en réalité une analyse de sources
28 qu'elle décrit s'il advenait avec des "si", ça nous donne ce résultat qui
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1 est la somme de toute une série de spéculations statistiques dans les
2 parties antérieures.
3 Q. Merci. Madame Radovanovic, penchez-vous maintenant, je vous prie, sur
4 le tableau numéro 5. On nous y dit : "Nombre de décès survenus suite à cet
5 état de siège, recensés au registre de l'hôpital de Mostar." Dans votre
6 science à vous, et notamment dans la sociologie et ce qu'on appelle la
7 psychologie sociologique, il y a une catégorie qu'on nomme de corrélation.
8 On établit une correspondance entre deux éléments. Vous connaissez cela ?
9 R. Bien sûr.
10 Q. D'après ce que vous en savez, Madame, l'existence d'une corrélation,
11 est-ce qu'on peut, en parlant de corrélation, établir une relation de cause
12 à effet entre l'un et l'autre ?
13 R. Vous, vous élevez cela à un niveau scientifique. Il n'y a rien de tout
14 ceci ici. Il n'y a aucune corrélation. On dit : "J'ai additionné ici tant,
15 ici j'ai trouvé tant, et je vais vous montrer ce que j'ai trouvé dans ces
16 sources." Mais on n'étudie pas.
17 Q. Je vais faire une supposition en plus. Partons d'une hypothèse,
18 imaginons que nous acceptions ce type de chiffres avancés par Mme Tabeau,
19 est-il admissible de dire que c'est là la conséquence d'un état de siège ?
20 C'est une donnée variable. Où se trouve la corrélation, si corrélation il y
21 a ? Peut-on qualifier cela de cause sans pour autant analyser chacun des
22 cas de figure à titre
23 individuel ?
24 R. Aucune corrélation, si on ne connaît pas la cause, ne saurait être
25 qualifiée de cause. Si vous ne le savez pas, je ne sais pas ce que l'on
26 entend par état de siège. Peut-être le Dr Tabeau le sait-elle, mais elle ne
27 nous donne pas de définition. Peut-être aurait-elle dû argumenter les
28 degrés de corrélation qu'il y aurait eu avec cet état de siège.
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1 Q. Dans ce cas de figure, on devrait savoir - chose qu'on ne sait pas -
2 qui est-ce qui a tiré, de quel côté a-t-on tiré, vers quoi a-t-on tiré,
3 est-ce que ce qu'on avait ciblé était une cible militaire ou civile. Est-ce
4 qu'on a photographié, documenté, soumis à une procédure pour déterminer la
5 cause suivant une méthodologie générale de la recherche des causes pour
6 établir une corrélation possible ?
7 R. Je vous ai parlé des trois démarches méthodologiques où le Dr Tabeau a
8 commis des erreurs. La troisième de ces démarches, c'est le principe de
9 causalité, de cause à effet. Parce que si l'on cherche à déterminer les
10 causes, il faut chercher quelles sont les causes et quels sont les effets.
11 Si vous ne connaissez pas l'un, vous ne pouvez pas connaître l'autre non
12 plus.
13 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge, combien de temps ai-
14 je encore à ma disposition ?
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dû utiliser une heure et six minutes, donc
16 il doit vous rester quatre minutes maximum, puisque hier vous nous avez dit
17 que vous aviez besoin d'une heure et dix minutes.
18 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bien.
19 Q. J'aimerais revenir une fois de plus à ce tableau que vous avez examiné
20 hier, Madame Radovanovic. Il s'agit du tableau - juste un instant. Où l'ai-
21 je mis ? Tableau 16. C'est celui-là qu'on avait examiné. C'est là encore
22 que j'aimerais que nous revenions en quelque temps. Pardon ? C'est le même
23 document, tableau 16, page 26 sur 32 dans votre --
24 R. J'ai retrouvé.
25 Q. Une fois de plus, au point 4, on dit causes de décès des victimes du
26 siège, donc il n'y a aucune contestation sur le fait d'affirmer que toutes
27 ces victimes sont les victimes d'un état de siège. On dit répartition des
28 victimes par cause de décès, et vous avez constaté vous-même hier, Madame,
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1 que suite à pilonnage, il y en a eu 76; qu'il y en a 34 de tués, on ne sait
2 pas comment ils ont été tués; par armes à feu, 18; blessures, 6;
3 assassinée, une personne.
4 Parce que "tués" et "assassinés," il y a -- ici, c'est un assassiné et là
5 où ils ont été tués, enfin --
6 R. Je ne sais pas ce que l'on avait voulu dire par cela. Dans notre
7 langue, tuer, c'est tuer. Je ne sais pas ce qu'on entend par "assassiner"
8 et "tuer", quelle est la distinction. Mais --
9 Q. On a fait la somme hier, et on a vu qu'il y a 135 au total, en lettres
10 et en chiffres, ensuite, Mme Tabeau nous dit, je cite :
11 "Il est clair qu'un grand nombre de cas de décès a été enregistré de façon
12 à ce qu'il n'y ait pas eu d'indiquer quelle est la cause du décès (404)."
13 J'ajouterais que les médecins n'ont rien mentionné parce que ce sont des
14 ignorants qui n'ont pas su nous dire qui est mort suite au pilonnage ou à
15 autre chose.
16 "Alors cela nous signifie que les causes inconnues n'étaient pas en
17 corrélation avec l'état de siège."
18 Mais pour l'amour du ciel, Madame Radovanovic, mon cerveau est allé au
19 champ, au pâturage avec Mme Tabeau. Est-ce que vous comprenez ce qu'elle
20 écrit ici et ce qu'elle veut dire ?
21 R. Mme Tabeau est en train d'essayer de se perdre en conjectures.
22 Mme WEST : [interprétation] Il s'agit de spéculations. Cela n'est pas
23 acceptable.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez terminé ?
25 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Presque.
26 Q. Maintenant, Mme Tabeau dit : "J'ai une somme de 135. Ça ne me suffit
27 pas." Puis elle dit, probablement, c'est le cas, ça ne veut pas dire que ce
28 n'est pas le cas. Si ça ne veut pas dire que ce n'est pas le cas, alors
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1 peut-être c'est le cas. Puis après, elle dit : "Sur la base de la
2 supposition" selon laquelle les causes inconnues seraient réparties de la
3 même manière que les causes bien déterminées, l'on a procédé aux
4 évaluations plus complètes qui sont présentées dans le tableau numéro 6.
5 Maintenant, Madame Radovanovic, dites-nous, quelles sont les suppositions
6 qui doivent exister dans la science pour vous permettre de passer d'une
7 somme moindre à une somme plus élevée, en disant que votre procédé est
8 approprié sur le plan scientifique ?
9 R. Je ne sais pas quelles sont de telles suppositions dans la
10 science.
11 Q. Je vais vous dire, dans la physique, dans cette science-là, nous
12 pouvons dire que l'univers est amorphe. Ensuite, on peut dire si, dans un
13 espace, nous avons la matière qui prend un tel espace alors que l'univers
14 est amorphe, ça veut dire que nos calculs effectués sur un espace plus
15 restreint, nous pouvons le transférer à l'univers de façon qu'il est
16 amorphe. Etes-vous d'accord ?
17 R. Oui, je suis d'accord, même si je ne m'y connais pas tellement en
18 physique.
19 Q. Mais ici, est-ce qu'on peut parler ainsi ?
20 R. Non.
21 Q. Merci, Madame Radovanovic.
22 L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] J'ai terminé.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire la pause de 20 minutes, et après
24 la pause, Me Alaburic aura la parole pour le contre-interrogatoire.
25 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.
26 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Je crois que
28 M. Stringer voulait intervenir.
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1 M. STRINGER : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
2 Bonjour, Messieurs les Juges et Maîtres.
3 Une petite requête, si vous me le permettez. On m'a dit que nous avons
4 quelque 138 documents, pièces, que les différentes équipes de la Défense
5 souhaitent verser au dossier par le truchement du précédent témoin, M.
6 Tomic et dans les listes IC qui ont été déposées, les différentes listes.
7 Il y a une liste qui a été versée hier après-midi, au début du procès,
8 comme cela est requis, mais puisqu'il y a un grand volume de documents et
9 que les choses bougent très vite, nous demandons d'avoir un peu plus de
10 temps jusqu'à demain matin afin que le Procureur dépose sa réponse aux
11 documents qui ont été versés par la Défense.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre qui vient de délibérer fait droit à
14 votre demande dans la mesure où il y aurait 138 documents; ça nécessite un
15 examen et nous vous accordons donc jusqu'à demain le délai de réponse.
16 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, je vous donne la parole.
18 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame Radovanovic
19 et toutes les autres personnes présentes, je vous salue. Je vais tout
20 d'abord me présenter.
21 Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :
22 Q. [interprétation] Je suis Vesna Alaburic, avocate de Zagreb et je
23 représente dans cette affaire le général Milivoj Petkovic. Je ne vais pas
24 vous poser de problèmes lors de cet interrogatoire, car comme on le sait
25 que pour la plupart des juristes en ex-Yougoslavie, on avait toujours du
26 mal à passer l'examen de la statistique, on a du mal à se retrouver dans
27 les chiffres, mais j'espère que vous pourrez m'aider à clarifier un certain
28 nombre de détails.
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1 Tout d'abord, je souhaite vous poser une question concernant les causes de
2 décès telles qu'elles ont été présentées dans le registre de l'hôpital de
3 guerre. Je vais vous rappeler la constatation de Mme Tabeau qui dit que
4 s'agissant des registres de l'hôpital, s'agissant de 44, 4 % des cas, la
5 cause du décès n'est pas connue. Il s'agissait au total de 209 sur 472
6 personnes. Mme Tabeau a conclu que les causes inconnues de l'hôpital de
7 guerre portent surtout sur des personnes tuées.
8 Sur la base de cette constatation du rapport d'expert, M. Le Président
9 Antonetti a demandé au témoin expert sur la base de quoi elle est arrivée à
10 la conclusion indiquant que les causes de décès inconnues pourraient être
11 traitées comme morts violentes. Mme Tabeau a répondu en disant que
12 l'hôpital de guerre n'était pas un hôpital régulier dans lequel les
13 personnes malades d'autres maladies étaient soignées aussi, qu'il
14 s'agissait par contre de l'hôpital de guerre où l'on soignait les victimes
15 des opérations de combat.
16 Ensuite, le Juge Antonetti a posé une question concernant le traitement des
17 civils car nous étions déjà au courant d'une femme enceinte qui avait été
18 amenée à l'hôpital, le 9 mai 1993. Ewa Tabeau a dit que s'agissant de la
19 plupart des causes de décès, ces causes-là n'ont pas été énoncées, mais
20 qu'elle avait des raisons justifiées de considérer qu'il s'agissait de
21 morts violentes et de victimes du siège. Tout ce que j'ai cité se trouve à
22 la page 21 872 et 21 873 du compte rendu d'audience.
23 Dites-moi, Madame Radovanovic, en analysant le rapport d'expert de Mme
24 Tabeau, avez-vous remarqué que s'agissant de toutes les causes de décès
25 énoncées dans les registres de l'hôpital de guerre à Mostar Est, elle les
26 traite comme morts violentes ?
27 R. Oui. Elle le souligne même en disant qu'il s'agit exclusivement de
28 morts violentes et que ces morts ont été exclusivement provoquées par les
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1 opérations de guerre. Même si j'ai essayé de démontrer par le biais d'un
2 certain nombre d'exemples de tableaux et la liste des personnes présentée
3 par Mme Tabeau et que j'ai retrouvée moi-même dans le département
4 démographique, vous pouvez trouver plusieurs décès qui n'ont rien à voir,
5 accident de voiture, suicide par exemple. J'ai cité certains de ces
6 exemples dans mon rapport. Donc, je ne vois pas quelle est la raison
7 justifiée de la part de Mme Tabeau pour qu'elle dise dans son rapport qu'il
8 s'agit de toutes les causes de décès qui étaient liées au siège, elle ne le
9 précise pas dans son rapport.
10 Q. Je vais maintenant faire référence au Dr Rajko qui a déposé. Et pendant
11 la guerre il travaillait en tant que médecin à l'hôpital de guerre à Mostar
12 est. Or, il a dit que dans l'hôpital de guerre, on traitait de tous les cas
13 chirurgicaux, qu'il s'agisse des inflammations intestinales ou des hernies
14 ou d'autres problèmes. Ceci figure à la page 12 911 du compte rendu
15 d'audience.
16 Une autre déclaration importante porte sur le registre même de
17 l'hôpital de guerre. Il est dit que jusqu'au 15 juin 1993, il y avait un
18 registre unique des malades à la fois de guerre et d'autres, et que ce
19 jour-là un nouveau registre a été créé pour les victimes des opérations de
20 guerre et que dans les anciens registres, on a continué à enregistrer les
21 cas dits de temps de paix. Ceci est enregistré à la page 12 934 du compte
22 rendu d'audience.
23 Dites-moi, Madame le Professeur Radovanovic, est-ce que sur la base d'une
24 telle déclaration d'un docteur qui travaille à l'hôpital, un expert tel que
25 vous aurait pu conclure que les registres de l'hôpital de guerre comportent
26 des données à la fois sur des cas de temps de guerre et de temps de paix,
27 pour ainsi dire, ou est-ce que les conclusions seraient différentes ?
28 R. Si la personne avait eu accès à cette déclaration, certainement, elle
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1 aurait conclu qu'il s'agit de deux types de situations différentes.
2 Q. Est-ce qu'il serait justifié de conclure que si Mme Tabeau avait
3 disposé de cette information concernant le contenu du registre de l'hôpital
4 de guerre, qu'il serait difficile d'imaginer qu'elle aurait négligé ces
5 données concernant les cas de temps de paix et qu'elle aurait traité tous
6 les cas comme provoqués par des causes violentes ?
7 R. Je ne sais pas quelles sont les autres sources qu'elle a utilisées car
8 Mme Tabeau ne l'indique pas dans son rapport, mais elle note qu'elle
9 considère qu'elle a pris en considération seulement les cas de l'hôpital de
10 guerre qui étaient le résultat du siège. Donc j'assume que peut-être elle a
11 pu examiner tous ces documents et que si elle avait pu le faire, que son
12 opinion aurait été différente. Mais c'est simplement mon opinion. Je ne
13 peux pas savoir exactement ce que Mme Tabeau avait fait.
14 Q. Je vais maintenant vous poser une question au sujet de la répartition
15 des causes de décès inconnues. Vous avez déjà déposé à ce sujet, c'était
16 tout à fait clair. Mais dans ce contexte, je souhaite attirer votre
17 attention sur le fait suivant : dans le rapport d'expert de Mme Ewa Tabeau,
18 il s'agit du document P 9837 - ça fait partie des documents de la Défense
19 Prlic - au paragraphe 23, il est question des registres de décès et il y
20 est noté que sur les 1 387 cas de décès, on connaît la cause de décès
21 s'agissant de 132.
22 Donc sur les 1 383 cas, 132 cas de décès sont connus dont 89 sont des
23 décès violents et 37 décès naturels. Si ces chiffres se transforment en
24 pourcentage, nous pouvons conclure que 28 % de causes de décès connues
25 étaient les causes naturelles.
26 Dites-nous, Madame le Professeur Radovanovic, est-ce que le pourcentage de
27 28 % est une valeur pertinente statistiquement ?
28 R. Par rapport à quoi ?
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1 Q. Par rapport à 100 %.
2 R. Je ne saurais vous répondre avec précision. Il s'agit ici de 1 383 cas
3 tirés de dix registres de décès concernant certains territoires. Dans ces
4 registres de l'état civil, il est question aussi de personnes qui ont
5 trouvé la mort à Vienne, mais elles sont enregistrées dans la région dont
6 elles étaient issues. Maintenant, quant à la question de savoir si 28 % par
7 rapport à ces dix registres est un pourcentage pertinent, je ne saurais
8 vraiment pas le dire car il faut prendre en considération la totalité de
9 quelque chose.
10 Q. Je vais vous reposer cette question. Mais avant, je vais vous poser une
11 autre question. Nous allons -- enfin, Mme Tabeau continue à analyser les
12 causes du décès et elle décide de faire en sorte que toutes les causes
13 naturelles des décès provoqués par des accidents ou des suicides, elle
14 décide de les exclure du reste de ses données et elle ne s'est plus penchée
15 là-dessus. Autrement dit, elle a négligé au moins 28 % de causes de décès
16 connues comme quelque chose qui aurait pu être pertinent pour son analyse.
17 Or, il s'agissait de causes de décès connues.
18 Ainsi, en éliminant les causes naturelles du décès, elle a élevé le
19 pourcentage de causes de décès violents dans les cas dans lesquels les
20 causes de décès sont connues, n'est-ce pas ?
21 R. La position de Mme Tabeau est que pendant le siège de Mostar, il n'y a
22 pas eu de causes de décès naturelles et elle s'est penchée exclusivement
23 sur les causes violentes. Bien sûr, il ne s'agit pas d'une approche
24 compréhensive, ni professionnellement appropriée.
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Peut-être vouliez-vous dire la même
26 chose, Maître Alaburic. Mais je vois, au paragraphe 2.3, à la page 5 de la
27 version anglaise du rapport de Mme Tabeau, qu'elle parle des causes
28 naturelles, "(37)," et qui est la deuxième cause. Manifestement, elle avait
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1 conscience du fait qu'il s'agissait de causes naturelles de décès. Me
2 Alaburic a présenté sa question en laissant entendre que ces morts-là ont
3 été mises de côté, mais elle en prend bien note, elle en a conscience. Quel
4 est l'effet de cela, je pense que c'était le sens de votre question,
5 Madame, si je vous ai bien interprété.
6 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, avec votre permission, je
7 vais poser juste une autre question et on comprendra pourquoi il m'importe
8 de traiter de l'élimination des causes naturelles de décès.
9 Q. Il ne fait aucun doute que Mme Tabeau a été au courant des cas de décès
10 pour causes naturelles. Nous voyons qu'elle a éliminé de tels cas dans la
11 suite de son analyse et se penchait seulement sur les causes de décès
12 violentes. Ainsi le pourcentage des causes de décès violentes a été
13 augmenté puisqu'elle a éliminé les causes naturelles.
14 Maintenant, voyons ce qui se passe lorsque s'agissant de 404 cas de décès
15 dont les causes sont inconnues sont répartis de façon proportionnelle aux
16 causes connues.
17 Dites-nous, est-ce que parmi les critères de la répartition, nous avons --
18 si on avait, par exemple, dans cette répartition, pris en compte aussi
19 environ 30 % de causes connues, est-ce que si on élimine les causes
20 naturelles de décès, le pourcentage changerait ?
21 R. Je dois d'abord écarter une mauvaise conception, une confusion ici.
22 Le Dr Tabeau dit que sur la base des dix registres de décès, il existe des
23 causes naturelles et violentes. Elle dit : "Mais je ne vais pas me pencher
24 sur les causes naturelles, mais seulement sur les causes violentes," et
25 ainsi les causes violentes commencent à faire 100 %. Or, ce n'est pas une
26 approche complète. Elle pourrait donner le nombre total des décès en
27 disant, voilà le nombre de causes naturelles et de causes violentes. Or, un
28 expert a le droit de le faire. Peut-être ce n'est pas tout à fait
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1 approprié, mais elle peut le faire.
2 Justement, dans le tableau 16, elle indique un tableau portant
3 seulement sur les causes violentes de décès, cependant je ne sais pas quel
4 est le critère qu'elle applique s'agissant de toutes les causes de décès
5 inconnues, elle les considère comme causes violentes. Je suppose que c'est
6 en raison du fait que c'est la guerre et tout ce qui est inconnu, elle
7 considère que ça doit être violent. Lorsqu'elle extrait de la totalité des
8 décès seulement les décès violents, elle crée un autre groupe dont la base
9 numérique est moindre. Bien sûr, sur cette base numérique moindre, vous
10 allez tirer un certain nombre de pourcentages.
11 Or, si dans ce groupe elle avait inclus les 137, ou je ne sais pas
12 exactement combien, 137 des autres, le total n'aurait plus été 539 mais 639
13 ou plus. Dans ce cas-là, elle aurait dit, sur ces 600 et quelques, 50 %
14 sont morts de causes inconnues, 10 % de causes naturelles, 3 % de
15 pilonnage, et cetera. Lorsqu'elle divise ce groupe et lorsqu'elle classifie
16 les causes inconnues comme morts violentes, nous avons alors une autre
17 série de suppositions, et un groupe différent que le Dr Tabeau déclare être
18 le groupe de décès violents.
19 Pourquoi est-ce qu'elle le dit ? Je ne sais pas, elle ne l'indique pas,
20 mais je souhaite souligner qu'elle a le droit de créer un groupe séparé si
21 elle souhaite l'étudier, mais je pense qu'il serait approprié de présenter
22 les chiffres portant sur la mortalité totale sur la base du registre de
23 décès et la mortalité attribuée aux causes violentes.
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]
25 Mme ALABURIC : [interprétation]
26 Q. Professeur Radovanovic, je souhaite que l'on corrige une erreur de
27 compte rendu d'audience. Il s'agit de la page 44, lignes 13 à 14, il est
28 écrit, Madame Radovanovic, que vous avez dit : "Je ne vais pas me pencher
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1 sur les décès violents," or je pense que vous avez dit sous forme
2 affirmative : "Je vais me pencher uniquement sur les décès violents."
3 N'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Ce que vous venez de nous dire de façon détaillée - et je pense que
6 tout le monde a compris, et c'est d'ailleurs la réponse à ma question, je
7 m'attendais à une telle réponse de votre part - mais si maintenant nous
8 souhaitions dire quelque chose de façon très simple, à savoir si les causes
9 naturelles faisaient partie du tableau 16, dans ce cas-là, à la catégorie
10 des causes naturelles, dans ce cas-là, le nombre total des décès aurait été
11 plus élevé, mais aussi la proportion des causes inconnues aurait diminué ?
12 R. Toutes les proportions auraient été différentes.
13 Q. [aucune interprétation]
14 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi.
15 Madame Radovanovic, vous doutez de l'hypothèse de l'expert, le Pr Tabeau,
16 du fait que ces morts inconnues signifient nécessairement des morts
17 violentes. Est-ce que vous prenez en compte le fait qu'au départ elle avait
18 37 cas qu'elle estimait être des cas de morts naturelles, j'imagine les cas
19 de maladie, de septicémie, qui s'étaient produites lors d'opérations
20 chirurgicales, et cetera. Ne pensez-vous pas qu'il est naturel de conclure
21 que puisque cela a déjà été éliminé, les autres décès sont des morts
22 violentes ou, pour le moins, des décès non naturels, sans évidemment entrer
23 dans les causes du décès qui peuvent être imputables à des accidents par
24 ailleurs, suicides ou autres ?
25 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, avec votre permission, je
26 souhaite attirer mon attention sur le chiffre 37. Mme Tabeau dispose d'une
27 donnée tout à fait précise, indiquant que 89 personnes sont mortes de façon
28 violente. Donc elle connaît les causes de décès pour 132 personnes. Ceci
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1 figure au paragraphe 23 de son rapport d'expert. S'agissant de 132 cas,
2 elle connaît les causes de décès; 89 morts violentes, donc 67 %; et morts
3 naturelles, 37, autrement dit 28 %.
4 Nous ne pouvons pas tirer la conclusion qu'entre le chiffre de 37 et le
5 nombre total de 1330 -- 1383 personnes décédées, nous pouvons dire que dans
6 tous ces cas-là il s'agit d'une mort violente. Il s'agit du chiffre 1383,
7 et non pas de 1330. Les données connues sont 37 et 89.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je dois répondre au Juge Trechsel ?
9 Mme ALABURIC : [interprétation] Si vous avez besoin des explications,
10 allez-y.
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, en effet, je crois.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Cause de décès inconnue, comme le dit son nom,
13 ça veut dire qu'on ne sait pas quelle est la cause. Si vous ne savez pas
14 quelle est la cause d'un décès, vous ne savez pas s'il s'agit d'une mort
15 naturelle ou d'une mort violente. En d'autres termes, il y a deux
16 possibilités pour ce qui est de parler d'une cause inconnue d'un décès.
17 D'un, c'est d'abord qu'il n'y ait pas de renseignement, on laisse un blanc,
18 il n'y a pas de diagnostic, il n'y a rien. Deuxièmement, c'est quand vous
19 avez dans la statistique ou la démographie statistique quelle est la chose
20 que l'on pratique. Vous pouvez souffrir d'une maladie, si je puis le dire,
21 mais que la cause du décès soit une autre maladie, une maladie tout autre.
22 A Dieu ne plaise, je peux aller à l'hôpital pour le fait d'avoir un
23 carcinome, et je peux mourir dans le courant de la nuit parce que j'ai eu
24 un infarctus. Dans les causes du décès, on dira que la cause du décès c'est
25 "l'infarctus du myocarde," et que ce qui a aidé à la cause, c'est tout à
26 fait autre chose. Donc pour ce qui est des causes de décès, il y a un
27 certificat de décès qui est délivré par un médecin légiste qui ne fait que
28 ça. Il se renseigne pour savoir de quoi il a souffert, le patient, dans
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1 quelles mesures ça a pu influer sur la cause, et, au final, il inscrit
2 quelle est la cause véritable du décès.
3 Mais dans des situations normales, un médecin, et j'imagine qu'en cas de
4 guerre on n'est pas encore tout à fait certain, on a pu être blessé, on a
5 pu être opéré, et que l'opération soit réussie ou pas, mais si on n'est pas
6 sûr de la cause du décès, très souvent on dit "cause inconnue." S'agissant
7 de la catégorie causes de décès inconnue, on ne peut pas supposer qu'il
8 s'agit seulement d'une cause de décès morts violentes.
9 Il peut y avoir des causes très variées. Il peut y avoir conséquence d'une
10 situation déterminée. Il peut y avoir, par exemple, une blessure qui s'est
11 infectée parce que les conditions à l'hôpital sont mauvaises. Donc la cause
12 ce n'est pas la blessure à l'épaule ou à la jambe. Mais s'il y a infection
13 et qu'il y a infection et septicémie, c'est ça la cause.
14 Etant donné que nous avons un registre de cet hôpital de guerre, je ne sais
15 pas qui est-ce qui a, là-bas, inscrit les causes de décès au niveau de cet
16 hôpital de guerre.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'en suis parfaitement conscient.
18 Peut-être que ce qui se pose ici comme problème, c'est un problème de
19 terminologie. Tout ce que vous venez de dire, vous venez de parler d'arrêt
20 cardiaque, pour moi, tout ça, ça relève de "causes naturelles," de morts
21 naturelles, et nous n'avons aucun moyen de déterminer quels étaient les
22 critères. Etes-vous d'accord pour dire qu'au fond tout ceci est bien vague
23 ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, notamment pour ce qui est de ce registre
25 de l'hôpital de guerre.
26 Mme ALABURIC : [interprétation]
27 Q. Professeur Radovanovic, vous avez essayé de nous expliquer de quelle
28 façon l'expertise d'Ewa Tabeau n'est pas en réalité une expertise, mais la
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1 présentation de ses propres bases de données et de ses propres conclusions.
2 Si je vous ai bien comprise, vous estimez qu'il ne s'agit pas là d'une
3 analyse, parce qu'il n'a pas été donné de comparaison avec autre chose, par
4 exemple, le renseignement concernant le nombre total de victimes, à savoir
5 539, ça ne signifie pas grand-chose si on ne sait pas quel est le
6 pourcentage que cela constitue vis-à-vis de la population sur le territoire
7 de Mostar est.
8 Vous ai-je bien comprise, pour ce qui est de l'appréciation générale que
9 vous avez énoncée au sujet du travail effectué par l'expert du bureau du
10 Procureur ?
11 R. Oui, vous avez bien compris. Je tiens à souligner le fait aussi que le
12 Dr Tabeau, dans sa deuxième expertise, ça n'est pas qualifié d'analyse
13 statistique ou démographique de la mortalité suite au siège de Mostar, quoi
14 que cela veuille bien vouloir nous dire. On dit qu'il s'agit là d'une
15 analyse des registres de l'état civil des décès et de ce registre de
16 l'hôpital de guerre.
17 Q. Bien. Pour ce qui est de cette deuxième analyse de faite par l'expert
18 Tabeau, on constate que parmi les victimes de ce siège, on ne va pas parler
19 de la notion de "siège" maintenant, mais on dit qu'il y a eu 49,5 % de
20 civils et 50,5 % de militaires.
21 Nous savons tous comment Ewa Tabeau a déterminé le statut de militaire.
22 Mais j'attire votre attention sur le fait que pendant l'audition de Mme
23 Tabeau, le Juge Antonetti a posé une question qui, de l'avis de la Défense
24 du général Petkovic, se trouve être très importante, à savoir le fait de
25 savoir s'il a été procédé à une analyse des données disponibles en
26 application du critère de l'âge de la population masculine, parce que l'on
27 sait que la réglementation régissant la défense en ex-Yougoslavie et dans
28 tous les pays de cette ex-Yougoslavie prescrivait ou disait que les hommes
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1 aptes au combat étaient des hommes de 16 à 60 ans et qui, dans cette zone
2 d'âge, avaient des obligations déterminées pour ce qui est de savoir s'ils
3 étaient présents ou s'ils avaient quitté le territoire du pays ou s'ils
4 étaient actifs sur le plan militaire.
5 Ce renseignement concernant l'âge des hommes, cet éventail de 16 à 60 ans,
6 est-ce que c'est une chose dont vous avez connaissance en votre qualité de
7 citoyen de cette ex-Yougoslavie ?
8 R. Le renseignement qui peut être sorti ou tiré du recensement de la
9 population peut vous indiquer combien d'hommes il y a d'âge untel à âge
10 untel. On peut parler de cette catégorie d'âge d'hommes aptes à être
11 emmenés au combat. Mais vous n'avez pas la définition de Mostar est, vous
12 ne savez pas combien d'habitants cela sous-entend, vous n'avez pas le
13 nombre d'hommes, vous ne savez pas combien il y en a en âge d'aller au
14 combat.
15 Donc ça pose une série de problèmes. Ce n'est pas une analyse.
16 Q. Je suis bien d'accord avec vous. Je vous propose, indépendamment de
17 toutes ces lacunes, lacunes au niveau de l'analyse effectuée par l'expert
18 Tabeau, pour ce qui est de cette donnée de 539 victimes, acceptons-la,
19 acceptons ses renseignements concernant les âges et le sexe des victimes,
20 pour ce qui est indiqué dans ce tableau numéro 18. Je vous demanderais de
21 procéder ensemble, partant des documents qui sont déjà versés au dossier
22 dans cette affaire en guise d'éléments de preuve, de procéder à une
23 simulation pour ce qui est de la part des victimes dans la population,
24 s'agissant du même sexe, du même âge, pour tenter de voir dans quelle
25 proportion on se situerait pour ce qui est des victimes.
26 Mme ALABURIC : [interprétation] Je vais me référer à un document qui figure
27 dans mon jeu de documents. C'est un document qui est sous pli scellé. Je ne
28 sais pas, Monsieur le Juge Antonetti, si pour cette raison-là il nous
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1 faudrait passer à huis clos partiel ou si on ne va pas diffuser la teneur
2 de ce document à l'extérieur. Bien. On ne va pas le diffuser au niveau de
3 l'affichage électronique.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Faites vite, parce que vous avez déjà utilisé votre
5 temps.
6 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous demanderais
7 de me permettre de procéder à ces petites simulations et tout le temps
8 excédentaire n'a qu'à être pris sur le décompte du temps de Défense du
9 général Petkovic dans l'ensemble.
10 Cette simulation figure dans mon classeur, qui est le tout dernier document
11 sans annotation aucune, sans numéro aucun, car il ne s'agit pas d'un
12 élément de preuve, d'une pièce à conviction. Mais je demanderais à ce que
13 l'huissier place ceci sur le rétroprojecteur afin que tous les autres dans
14 le prétoire puissent suivre ce que je voudrais dire.
15 J'ai dit qu'il s'agissait d'un document sous pli scellé --
16 Mme WEST : [interprétation] Désolée de faire objection.
17 Je comprends que ce document était sous pli scellé, et je m'interroge, est-
18 ce qu'il n'est pas préférable de passer à huis clos.
19 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant que vous ne
20 décidiez, je tiens à dire que s'agissant de ce document, je ne voudrais
21 utiliser qu'une seule page, qui se trouve être la
22 page 7.
23 Donnez-moi un instant, je vous prie. Page 7 --
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Alaburic, il suffit de dire qu'à la page 7
25 d'un document dont vous n'indiquez pas la provenance, il est mentionné tel
26 et tel chiffre statistique, et à ce moment-là vous posez voter question.
27 Par ailleurs, ce document, le greffe ne le met pas sur le système vidéo
28 extérieur, donc on ne le verra pas.
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1 Mme ALABURIC : [interprétation] Il s'agit du P 09851. La page que je me
2 propose d'utiliser en version B/C/S est la page 7; et en version anglaise,
3 je vous donne le numéro ERN qui se trouve en haut à droite, 137 344. Je
4 vais me servir uniquement de ce tableau-là.
5 On y voit un autre document qui porte le 4D 01277, avec des renseignements
6 sur la structure par sexe et par âge de la population de la Bosnie-
7 Herzégovine en application de ce recensement de 1991. Nous allons nous
8 servir de ces données-là, et je répète le numéro du document pour ce qui
9 est de la version anglaise. Je rectifie le 4D. Il s'agit du 1277, avais-je
10 dit. Toutes les données pertinentes figurent dans ce document qui nous est
11 placé sur notre rétroprojecteur.
12 Pour ce qui est de ce document, page 7, avec le numéro ERN que j'ai
13 indiqué, il y a certaines agglomérations de la municipalité de Mostar. Pour
14 les besoins de l'analyse que nous allons effectuer, je vais exclure les
15 agglomérations 8, 9, 10, 11 et 12 parce qu'il ne s'agit pas de Mostar est
16 dans le sens restreint du terme, à savoir de la ville de Mostar est.
17 Et je me propose de me référer aux données qui nous seront données
18 par la somme des agglomérations 1 à 7. Si nous additionnons la population
19 autochtone et les personnes déplacées, on verra que dans Mostar est, il y a
20 eu 10 161 personnes du cru et 17 066 personnes déplacées. Ce qui donne un
21 total de 27 227 personnes. Le chiffre de 55 000 se rapporte à la
22 municipalité de Mostar en entier.
23 Pour ce qui est des personnes déplacées, je me propose d'utiliser des
24 affirmations figurant dans ce même document, paragraphe 2.10, disant que
25 dans la plupart des cas, il s'agissait de familles de prisonniers ou de
26 petits groupes de prisonniers relâchés des tensions, à savoir des personnes
27 notamment âgées et en état physique ou condition physique plutôt mauvaise.
28 Partant de cette constatation, je vais prendre 17 066 personnes déplacées
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1 comme étant une donnée se rapportant aux femmes, enfants et personnes âgées
2 de plus de 65 ans.
3 Au document 4D 1277, on peut voir quelle est la structure de la
4 population BH, et ce, en fonction des âges et des sexes. Et sur la
5 population totale de 4 377 033, les hommes en âge de combattre sont
6 4 377 033 au total.
7 Et les hommes en âge de combattre entre 15 et 64 ans au nombre de 1
8 500 373, 500 333, disais-je, 1 500 373, ce qui nous donne 34 %. Lorsque
9 vous prenez ces 34 % et lorsque vous les transposez sur les données et vers
10 les données de la population de Mostar est, lorsque l'on va chercher 34 %
11 sur 10 161, il découle le fait qu'à Mostar est, il y avait 3 455 hommes en
12 âge de combattre et que le reste de la population du cru aux côtés des
13 personnes déplacées fait 23 772 personnes.
14 Si ces chiffres absolus on les transpose en pourcentage, ils nous
15 donnent ce qui suit : hommes en âge de combattre, 12, 69 % et le reste de
16 la population était au nombre de 87, 31 %.
17 Si cette structure-là de la population est placée en corrélation avec
18 les victimes, et les victimes ont été au nombre de 539, d'après les donnée
19 de l'expert Tabeau, parmi ces victimes, les hommes en âge de combattre
20 seraient au nombre de 375, alors que les autres seraient au nombre de 164;
21 375, disais-je, c'était ces hommes en âge de combattre et les autres
22 étaient au nombre 164.
23 Si nous essayons de déterminer la part des victimes dans la
24 population du même type, à savoir la part des victimes hommes en âge de
25 combattre dans la population totale des hommes en âge de combattre, il
26 découle que 10, 85 % de cette population se trouvait être des victimes et
27 que dans le reste de cette population, 0,69 % étaient des victimes.
28 Si maintenant nous établissons une corrélation entre ces
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1 pourcentages-là pour ce qui est du ratio relatif, il découle que les hommes
2 en âge de combattre ont été victimes pendant le siège de Mostar, 15 fois
3 plus que le reste de la population.
4 Q. Professeur Radovanovic, je suppose que pour vous cela était plutôt
5 simple de suivre. Je me suis efforcé de le présenter de façon correcte et
6 simple. Partant de ce type de données - et ceci est une illustration de
7 l'importance de l'analytique et de la détermination des données - partant
8 donc de ces informations, les calculs seraient-ils bons et est-ce que ce
9 calcul des ratios dans la population se trouverait être pertinent pour
10 procéder à une analyse qui était censée être celle du témoin expert Tabeau
11 et au final de votre analyse à vous ?
12 R. Le calcul de tous les ratios et de toutes les parts dans la population
13 est certainement une chose pertinente. Mais avec tout le respect que je
14 vous dois, je tiens à dire que vous avez procédé à ces calculs en
15 application de la méthodologie de Dr Tabeau, parce que vous avez pris la
16 méthodologie de la répartition parce que vous avez pris telle catégorie,
17 telle autre catégorie.
18 Mais on suppose que si dans toute la Bosnie c'est le ratio qui est vigueur,
19 le même serait à Mostar. Donc la méthodologie que vous avez utilisée n'est
20 pas fiable. C'est une chose qui est facilement calculable, ça donne un
21 chiffre qui peut vous donner une idée, mais moi, personnellement, je
22 n'aurais jamais recours à ce type de méthodologie.
23 Q. Justement, j'ai juste au début dit que je voulais vous le montrer en
24 guise d'illustration. Je suis tout à fait consciente du fait que cela
25 constituerait la même méthodologie et je suis consciente du fait que ces
26 distributions ou répartitions de la population masculine de tel âge à
27 Mostar et en Bosnie-Herzégovine, et cetera.
28 Mais je vous ai dit que c'était un document qui a déjà été versé au
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1 dossier dans cette affaire. Et si partant de là nous essayions d'illustrer
2 la pertinence de ces données, donc c'était à titre d'illustration, non pas
3 pour illustrer l'exactitude des choses, est-ce que statistiquement cela
4 serait un indice pertinent ?
5 R. En guise d'illustration c'est important, parce que ça peut
6 montrer quels sont les indices démographiques statistiques qui nous sont
7 donnés pour ceux qui s'y connaissent en statistiques et ceux qui ne s'y
8 connaissent pas. Parce que cela nous fournit une appréciation qualitative
9 de la population à un moment donné et dans une population donnée.
10 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, c'était justement l'objectif
11 poursuivi, Professeur Radovanovic.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, parce
13 que j'ai une question à vous poser.
14 En haut de ce document à gauche, nous avons P 09851. C'est un numéro qui
15 semble laisser entendre que ceci fait partie de documents déjà versés au
16 dossier. Mais en fait, Maître, j'ai l'impression - et dites-moi si j'ai
17 tord ou pas - j'ai l'impression que l'expert qui a établi ces chiffres,
18 c'est Me Alaburic; est-ce exact, pour votre équipe de la Défense ?
19 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, si vous vous penchez sur
20 la partie supérieure, vous verrez qu'il s'agit de renseignements émanant ou
21 sortis de ce document qui est le P --
22 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi le numéro --
23 Mme ALABURIC : [interprétation] -- 9851, page 7 de la version en B/C/S, et
24 je vous ai déjà donné le numéro ERN.
25 Si on se penche sur le document qui se trouve sur le rétroprojecteur, il
26 nous parle des personnes déplacées, expulsées. Pour ce qui est maintenant
27 de la conclusion relative à l'identité de ces personnes chassées de chez
28 elles, cela est sorti ou est tiré du 2.10 du même document, à savoir le
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1 P 9851.
2 Monsieur le Juge Trechsel, ceci est, bien sûr, une chose que j'ai créée
3 partant des données qui nous sont connues, parce que j'ai estimé nécessaire
4 d'illustrer le fait que les conclusions d'Ewa Tabeau étaient celles de dire
5 que les civils et les soldats ont péri dans des proportions identiques, à
6 savoir 49,5 % et 50,5 % de militaires. C'est une donnée qui, en réalité,
7 est substantiellement de peu d'importance, parce que cela déforme la
8 situation telle qu'elle se présentait à Mostar est.
9 Je n'ai pas l'intention d'affirmer que cela est précisément exact, mais
10 j'ai voulu le dire que c'est une façon de bien montrer que c'est dans cette
11 filière-là qu'il faut s'aventurer ou qu'il faut suivre pour aboutir à la
12 vérité des victimes dans Mostar est.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est ce que j'avais supposé, mais
14 je me suis dit qu'il fallait que ce soit dit clairement au procès-verbal,
15 car vous avez repris des chiffres qui se trouvent dans l'annexe 4 du
16 document et vous avez procédé à des calculs partant d'une sélection que
17 vous aviez faite des quartiers de Mostar qui vous intéressaient.
18 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, pour ce qui est des
19 agglomérations pertinentes dans Mostar, il n'y a aucun doute à se faire.
20 Nous savons tous où se trouve Blagaj et que ce n'est pas dans Mostar est.
21 Q. Madame Radovanovic, je vous remercie.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant le temps, il y aura 15 minutes qui vous
23 sera défalqué de votre temps global, puisque vous avez utilisé 15 minutes
24 en plus du contre-interrogatoire. Ceci est donc au transcript.
25 Bien. Alors, il y a deux solutions : ou on fait la pause maintenant ou bien
26 vous commencez. Comme vous voulez.
27 Mme WEST : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
28 Nous sommes prêts à commencer.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.
2 Contre-interrogatoire par Mme West :
3 Q. [interprétation] Bonjour, Professeur.
4 R. Bonjour.
5 Q. Je m'appelle Kim West. Je fais partie du bureau du Procureur.
6 C'est bien votre rapport que vous avez sous les yeux ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous avez aussi le rapport du bureau du Procureur ?
9 R. Oui.
10 Q. Parfait. Nous avons trois classeurs dans lesquels je trouve des
11 documents que nous allons examiner. Remarquez qu'il y a des petits onglets
12 rouges qui montrent les pages en B/C/S.
13 Madame, je pense qu'il est sans doute préférable de garder votre rapport à
14 portée de main.
15 Je constate dans votre curriculum vitae qu'en moins de 20 ans, vous avez
16 publié quelque 20 rapports scientifiques dont celui que vous avez préparé
17 pour le TPIY. Nous avons une liste d'œuvres choisies. Est-ce que vous avez
18 publié autre chose que ce qui se trouve dans votre CV ?
19 R. La liste n'est pas épuisée. On n'inclut pas du tout les rapports qui
20 sont liés au tribunal. On a pris un certain nombre de travaux qui ont été
21 publiés dans des revues scientifiques. Aucune des études qui est citée dans
22 ma bibliographie n'est pas un rapport quelconque fait pour un tribunal. Il
23 y a une étude faite pour Srebrenica. Cela a été publié dans un recueil de
24 travaux de la faculté de géographie qui est considéré comme étant une revue
25 scientifique d'importance et d'envergure nationale.
26 Q. Merci. Vous venez de dire que les publications qu'on trouve dans votre
27 CV sont des publications dans les revues scientifiques ?
28 R. Oui.
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1 Q. Je suppose que vous connaissez le concept de l'examen par des pairs ?
2 R. Absolument. Aucune étude publiée dans une revue professionnelle ou
3 scientifique sur le territoire où je réside ne saurait être publiée sans
4 pour autant avoir bénéficié d'une supervision positive qui permet sa
5 publication.
6 Q. Merci de cette réponse. Un des éléments importants dans cette idée de
7 l'examen de la critique par des pairs, c'est l'idée de l'objectivité, de
8 l'absence de parti pris ?
9 R. Mais chaque personne, chaque superviseur qui procède à une supervision
10 pour ce qui est d'une publication éventuelle dans une revue scientifique,
11 il est certain que derrière cette supervision il y a une autorité que l'on
12 met en jeu, que l'intéressé met en jeu pour ne pas autoriser la publication
13 d'une chose qui ne serait pas scientifiquement et objectivement
14 justifiable.
15 Q. Quand vous dites "exacte et précise," vous conviendrez qu'il faut aussi
16 que ce soit objectif et que ce soit neutre, sans parti pris ?
17 R. Chaque œuvre scientifique devrait être objective et impartiale, car la
18 science essaie d'arriver à la vérité objective. Bien sûr, je n'affirme pas
19 que chaque rapport est objectif, mais c'est la tendance, c'est l'idée, et
20 c'est justement pour cela qu'on a des surveillants objectifs qui
21 l'évaluent.
22 Q. J'assume que vous-même, vous êtes examinateur ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vos travaux ont fait l'objet d'examen par des pairs à
25 l'échelle internationale ?
26 R. Non. Aucun n'a fait l'objet d'un examen international, car tous les
27 journaux que j'ai énumérés ont été publiés en Serbie et dans des revues
28 d'importance scientifique nationale. Donc l'examen s'est fait non pas sur
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1 le plan international, mais de la part des personnes pertinentes qui vivent
2 dans la région qui est la mienne.
3 Excusez-moi. Je souhaite aussi dire que l'auteur ne demande jamais lui-même
4 un examen. Il y a toute une série de revues spécialisées et scientifiques.
5 Voici la procédure : j'écris un article et je le soumets à une revue, et
6 c'est la revue qui cherche à avoir un examen.
7 Q. Donc vous êtes d'accord avec moi pour dire que vous n'avez jamais
8 publié dans un journal international et que vous n'avez que publié que dans
9 des journaux serbes ?
10 R. Non, pas seulement serbes, mais veuillez définir le terme
11 "international." Est-ce que ceci se réfère à l'ex-Yougoslavie aussi ou vous
12 parlez du monde entier ?
13 Q. Globalement, un journal qui est publié à l'extérieur du territoire de
14 l'ex-Yougoslavie, à l'échelle internationale.
15 R. J'ai travaillé pour le Centre européen de paix auprès des Nations
16 Unies. Il y avait toute une série d'études de publiées. Je ne suis pas
17 vraiment sûre. Je ne me suis pas renseignée. Mais je pense que ceci a été
18 publié au niveau international, car le président était, je pense, --
19 Q. Je vous remercie. Allons de l'avant. Je pars du principe, Madame le
20 Professeur, que vous connaissez le concept d'urgences humanitaires
21 complexes.
22 R. Est-ce que vous pourriez me définir ce que vous voulez dire par
23 l'affirmation que je connais le complexe des urgences
24 humanitaires ?
25 Q. Regardez dans votre classeur numéro 2 que je vous demande de bien
26 vouloir prendre, c'est à votre gauche. Je vous demande de bien vouloir vous
27 reporter au P 10729. En B/C/S, c'est l'intercalaire rouge. Est-ce que vous
28 le voyez ?
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1 R. Oui.
2 Q. Je pense que c'est encore une page plus loin. C'est cela.
3 Je vais vous lire un extrait de cette pièce et vous pourrez me donner une
4 réponse pour me dire si vous connaissez ou pas ce concept.
5 Il s'agit de "Migration forcée et de mortalité," qui dit :
6 "Le terme 'urgence humanitaire complexe' est largement utilisé pour décrire
7 …" --
8 L'INTERPRÈTE : Pourrions-nous avoir la page, s'il vous plaît ?
9 Mme WEST : [interprétation] Merci. Nous reprenons. C'est la page 1 de
10 l'anglais :
11 "Le terme 'urgence humanitaire complexe' est utilisé très largement pour
12 décrire un type de catastrophe : Une situation dans laquelle une grande …"
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'arrive pas à vous suivre en serbe, ce
14 n'est pas la même chose. Peut-être que je n'ai pas le bon document devant
15 moi. Est-ce qu'il s'agit --
16 Mme WEST : [interprétation]
17 Q. Professeur Radovanovic, est-ce que vous voulez bien, s'il vous plaît,
18 écouter l'interprétation, je pense que c'est la solution la plus aisée.
19 R. L'interprète m'interprète quelque chose différemment et la
20 signification du mot est tout à fait différente. Si j'écoute
21 l'interprétation et si je lis le texte, il s'agit de deux choses tout à
22 fait différentes.
23 Si j'examine le bon document, ici, il est dit l'expression -- écoutez, il
24 faut qu'on se mette d'accord pour que je puisse vous suivre. Est-ce que je
25 peux vous lire à vous ce qui est écrit et ensuite, vous dire si je suis
26 d'accord ou pas; ou veuillez me soumettre une traduction qui correspond, au
27 niveau des concepts.
28 Q. Professeur Radovanovic, je vous propose de procéder comme suit : je
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1 vais le lire en anglais. Ensuite, vous allez écouter l'interprétation. Si
2 ensuite vous n'êtes pas d'accord avec l'interprétation, vous pourrez
3 reprendre.
4 M. KARNAVAS : [interprétation] Il ne s'agit pas de ne pas être d'accord. Je
5 n'ai qu'une page, d'abord. Je n'ai pas l'ensemble du document. Je ne veux
6 pas être polémique. Mon collègue devrait savoir cela. Je n'ai pas
7 l'ensemble du document.
8 Deuxièmement, le temps d'interprétation -- enfin, il faut que le témoin ait
9 le temps de le lire. Manifestement, elle a deux versions différentes. On
10 lui demande de donner son avis et on l'oblige à voir une version par
11 rapport à une autre.
12 Elle peut choisir; mais à mon sens, le témoin indiquait qu'elle
13 souhaiterait pouvoir lire la version qui a été traduite pour elle. Elle
14 peut en prendre connaissance, ensuite entendre la version qui en sera
15 traduite. Mais je pense qu'il faut être juste avec le témoin.
16 Mme WEST : [interprétation] Oui, Me Karnavas a raison. Elle devrait
17 pouvoir lire --
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Le mieux serait qu'elle lise dans sa langue le
19 texte, à voix haute, les interprètes vont traduire. Comme ça, on va
20 vérifier la traduction anglaise et s'il y a des divergences, on va s'en
21 rendre compte tout de suite.
22 Bien Madame le Témoin, lisez à voix haute le premier paragraphe.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] "Le terme 'urgences humanitaires complexes'
24 est utilisé souvent afin de décrire certains accidents à grande échelle,
25 une situation dans laquelle une grande partie de la population est menacée
26 en raison d'une combinaison de guerre civile ou internationale ou des
27 efforts visant à réaménager l'Etat ou la société comme, par exemple, le
28 génocide, ce qui peut provoquer des déplacements massifs de la population
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1 avec la détérioration des conditions de la vie; par exemple, en matière de
2 la nourriture, de l'eau qu'on peut apporter avec soi, de l'abri et des
3 soins médicaux, ce qui crée des conditions qui peuvent augmenter de façon
4 importante le taux de mortalité pendant une période limité, mais parfois
5 aussi pendant des périodes plus longues."
6 En note en bas de page, il est écrit que cette définition est issue de Tool
7 et Waldman, 1997. Ceci a été modifié dans une certaine mesure afin de
8 pouvoir englober plusieurs types d'urgences humanitaires complexes.
9 Ensuite, il est écrit :
10 "Les gens créent toujours des dangers humanitaires complexes. Un exemple
11 simple et arbitraire serait l'attaque des Romains sur Carthage, l'attaque
12 des Goths sur Rome et la conquête du monde islamique contre les forces des
13 Croisés. Le complexe dans le XXe siècle englobe l'Holocauste dans les
14 années 30 et 40 en Europe, la famine à Bengale en 1943, les meurtres et
15 expulsions des Chinois de l'Indonésie dans les années 60. Les exemples de
16 dangers humanitaires complexes au cours de ces quelques dernières années
17 englobent les purifications ethniques, les migrations forcées, les
18 génocides tels qu'en Somalie, Bosnie, Kosovo, Sierra Leone et Timor de
19 l'Est."
20 Mme WEST : [interprétation]
21 Q. Professeur, est-ce que vous connaissez ce concept ?
22 R. Si vous me demandez si je connais ce concept de Tool et Waldman, non.
23 C'est la première fois que je tombe sur des définitions de ce genre. Mais
24 si vous me demandez si je suis au courant du contexte de crise humanitaire
25 ou danger humanitaire, je sais ce que c'est.
26 Q. Je voudrais revenir au procès Galic où vous avez déposé en mars 2003.
27 Je voudrais citer des extraits.
28 Je voudrais savoir si vous avez connaissance, à la page suivante, vous avez
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1 dit que vous participez à un projet en Serbie sur les mêmes sujets. Et vous
2 avez entendu parler de cela, comme vous l'avez dit.
3 Ma question est de savoir si c'est un concept qui vous est familier et sur
4 la base duquel vous avez travaillé.
5 Q. Le problème, Madame, c'est justement le fait que je demande de lire
6 cela, moi-même, sans qu'on me le lise. A vrai dire, peut-être l'Accusation
7 m'a lu un certain concept en me demandant si j'étais au courant de cela,
8 mais je ne me souviens pas avoir dit que j'avais travaillé à base de ce
9 concept. Mais j'ai travaillé dans de nombreuses situations qu'on peut
10 considérer comme des dangers ou urgences humanitaires. Ce que vous me citez
11 de l'affaire Galic, quelqu'un m'a lu quelque chose et j'ai dit que j'étais
12 d'accord.
13 Ca doit être dans le compte rendu d'audience. Il faut le relire. Je ne sais
14 pas si quelqu'un a cité le nom de l'auteur; si mes souvenirs sont bons, on
15 a donné le nom d'un auteur qui n'a rien à voir avec cela --
16 Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, et je
17 m'excuse auprès de ma collègue mais il faut clarifier un problème
18 linguistique.
19 Moi aussi, je ne connais pas le terme "danger humanitaire complexe." Sur
20 internet, dans nos langues, j'ai essayé de trouver ce terme, et en tant que
21 tel, il n'existe pas. Nous, nous utilisons le terme de "la crise,"
22 justement, comme l'a dit Mme le Professeur Radovanovic. Peut-être nous
23 avons un problème de communication car le terme que nous utilisons, nous,
24 est différent à celui qui est utilisé dans cette traduction littérale. Donc
25 peut-être les questions pourraient porter sur des crises humanitaires et
26 peut-être ainsi on obtiendra de bonnes réponses.
27 Excusez-moi de cette intervention, mais elle était utile.
28 Mme WEST : [interprétation]
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1 Q. Professeur, est-ce que vous estimez que la guerre dans l'ex-Yougoslavie
2 est un scénario qui s'intègre dans le champ d'application d'un danger ou
3 d'une crise humanitaire grave ?
4 R. Vous me posez maintenant une question qui ne relève pas du domaine de
5 la démographie. Mais ce que je pense, c'est que chaque guerre et chaque
6 événement à grande échelle qui peut influencer la population, à la fois un
7 tremblement de terre, un tsunami, une guerre, certainement, il est possible
8 de considérer cela comme une crise ou un danger humanitaire.
9 Q. Alors, ma question est tout à fait exacte : est-ce que vous estimez que
10 la guerre dans l'ex-Yougoslavie peut être considérée comme une crise
11 humanitaire complexe ?
12 R. Vous devez me dire ce qu'est une crise humanitaire complexe. Si vous
13 considérez que cette définition correspond à la crise humanitaire complexe,
14 je dirais oui. Mais tout est complexe. Une crise humanitaire complexe, vous
15 avez des zones, théâtre de guerres où la situation est très complexe et où
16 elle est bien moins complexe. Si vous voulez généraliser, certainement on
17 peut parler d'une crise.
18 Q. Je voudrais attirer votre attention à nouveau à la déposition de Galic,
19 page 21 392, où on vous demande, dans ce cas, si vous estimiez que les
20 circonstances entre 1992 et 1994, à Sarajevo, constituaient une situation
21 de crise humanitaire complexe et à ce moment-là, vous avez dit : "Oui, on
22 peut dire cela."
23 Donc, à la lumière de cela, je voudrais vous reposer la question : est-ce
24 que vous estimez que la situation en Bosnie occidentale avoir été une
25 situation de crise humanitaire complexe en Herzégovine ?
26 R. Est-ce que vous pourriez me définir l'ensemble de l'Herzégovine de
27 l'Ouest ? Certainement certaines parties de l'Herzégovine de l'Ouest
28 avaient une crise complexe, comme Sarajevo. Mais il y avait certainement
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1 des parties de l'Herzégovine de l'Ouest où la situation n'était pas si
2 complexe que cela. Mais il y avait une crise. Vous ne pouvez pas
3 généraliser les choses ainsi; ou plutôt, je n'accepte pas de telles
4 généralisations car il s'agit de choses très sérieuses et graves.
5 Alors, si vous me donnez la localité --
6 Q. Merci, Professeur. Les huit municipalités qui ont fait l'objet du
7 rapport du bureau du Procureur, est-ce que vous estimez que ces
8 municipalités constituent un exemple de crise humanitaire complexe ?
9 R. Au cours de quelle période, Madame ?
10 Q. Dans la période qui a fait l'objet de l'étude, à savoir
11 particulièrement à Mostar pour 1993.
12 R. Je n'ai pas pu étudier cela, car du point de vue démographique il n'y a
13 pas de données pertinentes. Je n'ai pas pu le faire du point de vue
14 démographique et je ne me penchais pas sur le plan politique ou historique,
15 et cetera. Il n'y a pas de sources qui permettraient de telles études.
16 Q. Merci, Professeur. Je voudrais maintenant passer au rapport Popovic --
17 le rapport Beara, P 1024. Dans le premier dossier, il s'agit de l'autre
18 classeur. 10724, c'est à la page 10 de la version anglaise, 9 en B/C/S.
19 R. Le classeur 10724, vous dites et page 10 ?
20 Q. C'est à la page 9 de la version en B/C/S.
21 R. Neuf.
22 Q. Est-ce que vous avez ce document sous les yeux, Madame ? C'est à
23 l'intercalaire rouge.
24 R. Oui.
25 Q. Il s'agit du rapport que vous avez rédigé dans cette affaire, exact,
26 l'affaire Beara ?
27 R. Je le suppose. Je ne vois pas l'ensemble du rapport. Je vois la page 9,
28 mais je suppose qu'elle est tirée de mon rapport.
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1 M. KARNAVAS : [interprétation] Je n'ai pas la version anglaise qui n'a pas
2 été transmise à la Défense. Je ne sais pas si les Juges en disposent. Nous
3 aimerions pouvoir suivre sur les documents.
4 Mme WEST : [interprétation] Je vais vous lire le deuxième paragraphe et
5 vous poser une question. Vous avez écrit :
6 "Le fait, néanmoins, est que dans des situations anormales comme la guerre,
7 en règle générale, il n'y a pas de données statistiques officielles
8 vérifiées pour des périodes ou des situations données; et donc, certaines
9 organisations internationales recommandent le recours des sources de
10 données qui ne répondent pas aux normes standards et aux procédures
11 statistiques de base. Si nous acceptons le recours à ces sources, il faut
12 souligner la nécessité d'être extrêmement prudent, objectif et très agile
13 dans le recours à ces sources de données."
14 Lorsque vous parlez d'une "situation complexe comme la guerre, une
15 situation anormale," vous parlez d'une situation humanitaire complexe,
16 n'est-ce pas ?
17 R. En réalité, je soutiens Mme Tabeau, car vous pouvez voir en note en bas
18 de page où je dis que dans son rapport, le Dr Tabeau mentionne le fait que
19 certaines sources ont été créées lors d'une crise humanitaire.
20 Certainement, si vous lisez l'ensemble du texte, j'indique ce qu'un
21 démographe doit faire en utilisant de telles sources et je donne l'exemple
22 de la Croix-Rouge. Je ne conteste pas la Croix-Rouge en tant que source,
23 mais c'est une organisation humanitaire qui recueillait les données
24 concernant les personnes disparues.
25 Q. Ce n'est pas --
26 R. [aucune interprétation]
27 Q. Professeur, je vous posais une question. Vous avez répondu et ce
28 n'était pas ma question. La question est de maintenant passer au troisième
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1 paragraphe. A peu près au milieu, vous écrivez :
2 "Ceci ne signifie pas que ces sources ne peuvent pas, au moins en partie,
3 être traitées par des spécialistes de la statistique et traitées de manière
4 à pouvoir être exploitables de la manière la plus objective qui soit."
5 Professeur, est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il est
6 possible d'avoir recours à ces sources, les sources auxquelles vous faites
7 référence au paragraphe 2 et qui ne répondent pas forcément à ce que vous
8 appelez "les standards ou les normes statistiques et procédure de base ?"
9 Est-ce que cela est possible ?
10 R. Seulement si, en tant que démographe et spécialiste en statistique,
11 vous le faites de façon professionnelle et de façon vous permettant
12 d'obtenir une donnée fiable. Mais si vous utilisez toutes sortes de
13 méthodologies nouvelles, si vous ne les présentez pas pour dire de quelle
14 manière vous avez abordé cette source, je ne peux pas l'accepter. Il n'y a
15 pas de source de données qui ne peut pas être utile à un bon expert en
16 démographie ou statistique. C'est quelque chose de généralement connu.
17 Q. Merci. Nous allons parlons de méthodologie, mais mettons pour l'instant
18 l'accent sur les sources. Je vais vous demander de prendre le P 10730 qui
19 figure dans le deuxième classeur que vous avez sous les yeux.
20 Le premier; donc, c'est dans l'autre.
21 R. Je souhaite simplement souligner que le premier classeur est en pleine
22 décomposition. Est-ce que quelqu'un peut m'aider, car on risque de perdre
23 des feuilles.
24 Q. Celui-ci ? Bien. Vous êtes dans le deuxième classeur, il s'agit du P
25 10730.
26 Professeur, est-ce que vous connaissez le camp des comptes des cadavres en
27 Irak ?
28 R. Non.
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1 Q. La première page nous dit que :
2 "Ce projet IBC tient un registre des morts violentes civiles qui découlent
3 de l'intervention militaire en Irak en 2003. Une base de données publique
4 comprend les morts causées par les forces de la coalition menées par les
5 Américains.
6 "Il s'agit d'éléments de documentation qui découle des registres et
7 des documents qui ont été vérifiés, d'événements aboutissant à la mort
8 d'individus, de civils, qui découlent d'ONG," et cetera.
9 Professeur, vous avez dit que vous ne connaissiez pas ce document, mais je
10 voudrais que vous vous reportiez sur la base de ce qui a été lu, à moins
11 qu'il y ait des liens entre la manière dont ce décompte est fait, qui est
12 tout à fait polémique -- si vous demandez à l'administration Bush, c'est
13 une version qui est différente. Si on se penche sur une autre source, le
14 nombre de morts est plus important. Mais je parle des Irakiens, pas de
15 Bush.
16 Si on voit comment ça a été préparé, compilé, il n'y a pas de lien
17 entre cette méthodologie et celle qui a été utilisée en Bosnie-Herzégovine
18 à l'époque, et en particulier à Mostar. Par conséquent, je pense qu'avoir
19 recours à ce document pour essayer de comparer et transférer une question
20 qui est un petit peu un piège pour essayer de valider la méthode d'Ewa
21 Tabeau, cela n'est pas du tout convenable. Il faut qu'il y ait une base, et
22 cela n'a pas été mené par Mme Tabeau elle-même, et donc pas compatible.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, faites confiance aux Juges qui
24 apprécieront tous les éléments.
25 Madame West, continuez.
26 Mme WEST : [interprétation] Je vous remercie.
27 Q. Professeur, comme on l'a dit tout à l'heure, nous allons mettre
28 l'accent maintenant sur les sources, et pas la méthodologie.
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1 Si vous voulez bien vous reporter à la partie suivante en B/C/S, en anglais
2 c'est le numéro 5, titre : "Rapports médiatiques de source et --
3 R. Je ne peux pas vous suivre. Bien. J'ai trouvé.
4 Quelle est votre question ?
5 Q. Merci. Je vais vous lire cette petite partie concernant les rapports
6 des médias :
7 "Les rapports de la presse et des médias constituent une source trop riche
8 et trop valable pour ne pas en prendre compte. Les couvertures dans les
9 médias et les informations sur les morts et les blessées, cette couverture
10 a été largement améliorée par l'évolution de la technologie. Le projet IBC
11 exploite cette évolution et souligne la manière dont elles peuvent encore
12 évoluer, puisque l'on peut intégrer les informations."
13 Ma question, Professeur, est la suivante : comme vous l'avez indiqué dans
14 le rapport de l'affaire Popovic, est-ce que vous estimez que les sources de
15 médias peuvent être "traitées par des spécialistes de la statistique et
16 triées de manière à pouvoir être exploitées d'une manière qui soit
17 objective, sans parti pris" ?
18 R. Si ça doit être présenté devant un tribunal, et si devant un tribunal
19 il faut avoir un minimum de fiabilité scientifique et professionnelle dans
20 le cadre d'une déposition, je dirais dans ce cas-là que les journaux ne
21 sont pas une source de données. Je ne peux pas dire que ça ne peut pas me
22 servir d'illustration. Mais si les journaux, ce qui est dit à la télévision
23 peut être une source de données qui peut être réarrangée par quelqu'un,
24 vous savez ce sont des situations très délicates. Car vous savez, il ne
25 s'agit pas ici d'une table ronde et d'un débat concernant ce qui aurait pu
26 se passer. Ici, concrètement parlant, on essaye d'arriver à la vérité
27 scientifique afin de clarifier un certain nombre de choses.
28 Or, les journaux ne sont pas une source scientifique ni les discours
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1 médiatisés.
2 Q. Bien. Vous avez dit qu'il ne s'agit pas de sources scientifiques, mais
3 reportons-nous à la page suivante en anglais, en bas en B/C/S, pour voir
4 comment cela a été exploité par d'autres.
5 Le titre, c'est : "Comment l'IBC a pu être utilisé par d'autres."
6 Vous voyez en bas il y a le B/C/S, et vous voyez un différent nombre de
7 catégories, gouvernements, agences intergouvernementales, ONG, avocats. En
8 particulier aux Etats-Unis, le rapport CRS
9 de l'Union européenne, de la CPI, l'ONS et l'institution de Brookings.
10 Professeur, est-ce que vous estimez que dans certaines crises humanitaires
11 complexes, ce dont nous parlons maintenant, c'est la norme que d'avoir
12 recours à des sources qui ne sont pas des sources habituelles ?
13 R. Tout d'abord, je n'arrive pas à vous suivre. Je ne trouve pas cet
14 institut Brookings. Je vois les médias, les gouvernements et les ministères
15 du gouvernement, les organisations intergouvernementales, et ainsi de
16 suite. Vous savez, j'ai du mal à vous suivre, car vous lisez une chose, je
17 reçois une autre interprétation, et le texte dit une troisième chose.
18 Entre-temps, excusez-moi, mais j'ai oublié votre question.
19 Veuillez la répéter. Excusez-moi.
20 Q. Ma question est en référence au rapport Popovic, où vous dites il y a
21 des cas de figure où on peut utiliser des sources inhabituelles, et ma
22 question était : Est-ce que vous pensez, maintenant que vous avez regardé
23 cette information sur l'IBC et voir des organisations qui utilisent ces
24 informations, que dans la situation de l'Irak, ce peut être exactement ce
25 dont vous parlez dans le cas de Popovic ?
26 R. Je ne suis pas d'accord. Vous me posez une question qui ne correspond
27 absolument pas à ce que j'ai dit dans l'affaire Popovic; je n'ai pas dit,
28 mais écrit. Je dis que dans certaines situations il est possible d'utiliser
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1 les sources de données créées dans des crises humanitaires, et je cite les
2 sources de données indiquées par le Dr Tabeau en tant que sources créées en
3 temps de crises humanitaires, et elle fait référence à certains auteurs.
4 Le Dr Tabeau - et ceci était le cas de Srebrenica - ici je parle
5 aussi de la Croix-Rouge, et du respect pour cette organisation, et de la
6 manière dont ces sources doivent être utilisées, et dont un statisticien
7 peut les adapter. Ceci portait surtout sur l'organisation de la Croix-Rouge
8 internationale.
9 S'agissant du rapport dont il est question ici qui porte sur l'Herceg-
10 Bosna, le Dr Tabeau utilise le recensement qui n'est pas une source de
11 crise humanitaire.
12 Je souhaite terminer.
13 Q. [aucune interprétation]
14 R. Les listes électorales -- vous me posiez des questions comme si j'avais
15 écrit de quelle façon il faut utiliser les sources de crises humanitaires.
16 Non.
17 Je reconnais que Mme Tabeau a raison, que l'on peut les utiliser,
18 mais en tant que démographe, vous êtes tenu de les adapter. Ici, dans ce
19 rapport, il n'y a pas de sources créées lors d'une crise humanitaire. Cela
20 dit, les registres de l'hôpital de guerre pourraient être considérés comme
21 tels.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame le Témoin, hier, ignorant de ce qu'allait
23 vous demander le Procureur, je vous avais demandé quelle était la situation
24 idéale pour que Mme Tabeau puisse donner des chiffres en toute
25 indépendance, et des chiffres certains. Je vous avais cité quelques
26 fichiers qu'elle aurait pu consulter et que, manifestement, elle n'a pas
27 fait. On découvre qu'une organisation fait le compte des morts en Irak
28 depuis 2003. Pour information, hier il y a eu 30 morts en Iraq, dont 23 à
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1 Bagdad. Cette organisation fait des vérifications croisées partant des
2 médias, de l'hôpital, des listes dans les morgues, des ONG et des chiffres
3 officiels.
4 Est-ce que la technique de vérification croisée n'est pas une technique
5 qu'un démographe doit utiliser avant d'aboutir à des conclusions certaines
6 et irréfutables ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] La technique est celle de vérifier, voir et
8 comparer tout ce qu'on peut comparer. Ce n'est pas la technologie, c'est
9 une obligation, c'est un devoir. Quand vous avez un travail de démographe à
10 faire, vous êtes tenu de voir le rapport, de voir quelles sont ses
11 carences, vérifier tout ce qu'on peut vérifier, et l'amener dans une
12 situation qui vous garantirait un minimum de fiabilité des données que vous
13 allez utiliser partant de cette source.
14 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 Q. Nous allons poursuivre l'examen de la question des sources. Dans ce
16 rapport, le bureau du Procureur a utilisé la liste électorale ainsi que le
17 recensement de 1991. Est-ce que vous déclarez ici que les listes
18 électorales de l'OSCE n'étaient pas dignes de foi ?
19 R. Oui.
20 Q. Inutile de regarder votre rapport, mais est-ce que vous ne vous
21 inquiétez pas du fait que dans sa liste il n'y avait pas le nom du père ?
22 R. Non, non, ce n'est pas ce qui me préoccupe. Je suis démographe, moi, et
23 je sais quelles sont les méthodologies utilisées par le Dr Tabeau pour
24 prendre, dans les listes électorales, les éléments qui prouvent que ces
25 gens existent dans le recensement de la population. Elle a repris à partir
26 de là leur structure ethnique. Ce n'est pas moi --
27 Q. Je comprends, Professeur. Mais écoutez la question que je vous pose et
28 répondez-y, ce serait utile. On parle ici, de nouveau, de sources, et pas
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1 de méthodologie -- les méthodes de travail. Restons-en aux sources.
2 A maintes reprises dans votre rapport, mais vous l'avez dit encore
3 clairement hier, souvent d'ailleurs, que nulle part au monde, un expert, un
4 chercheur, un scientifique ne va utiliser ce genre d'analyse, par exemple,
5 pour des listes électorales.
6 R. Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que je n'avais pas connaissance
7 de quelqu'endroit au monde dans des recherches scientifiques et techniques
8 où l'on se serait servi de listes électorales, notamment lorsque vous
9 établissez la structure ethnique qui n'y figure pas.
10 Q. D'accord. Merci. Soyons plus exacts, je prends pour cela votre rapport.
11 Page 15, 14 en B/C/S. Vous dites :
12 "Nulle part au monde, un expert en recherche scientifique ne va prendre
13 cette liste électorale pour point de départ pour calculer le nombre de
14 réfugiés."
15 C'est bien ce que vous avez écrit dans votre rapport, n'est-ce pas ?
16 R. Si vous le permettez, j'aimerais vérifier ce que j'ai écrit, parce que
17 c'est sorti du contexte. Quelle page, avez-vous
18 dit ?
19 Q. Quatorze en B/C/S, dans votre rapport.
20 R. Le premier ou le deuxième de mes rapports ?
21 Q. Le rapport qui s'intitule : "Analyse critique des rapports d'experts du
22 bureau du Procureur," le préambule s'intitule : "Analyse des rapports de la
23 composition ethnique, des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur
24 du pays."
25 R. C'est le titre. Vous avez cité quelle page, s'il, vous, plaît ?
26 Q. Je vous disais qu'il s'agissait de la page 14 en B/C/S, et c'est la
27 page 15 en anglais.
28 R. En page 14 de cette version B/C/S, je ne le vois pas. Alors veuillez
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1 m'aider, je vous prie. La page commence par --
2 Mme WEST : [interprétation] Un exemplaire, Monsieur le Président. Est-ce
3 que je peux montrer au témoin avec l'aide de M. l'Huissier, parce que le
4 témoin semble un peu perdu.
5 Q. Vous voyez, vers le milieu de la page 14 ?
6 R. C'est la page 13 chez moi, et vous m'excuserez.
7 Q. Vous avez en caractères gras un passage, là.
8 Mme WEST : [interprétation] Attendez. Je reprends mon exemplaire.
9 Q. Vous avez ce passage que vous avez inscrit en gras. Vous le voyez ? Je
10 vais vous demander de lire la phrase en B/C/S qui commence par les mots
11 suivants : "Nulle part dans le monde."
12 R. Je n'arrive pas à le retrouver. Ça, cette "confusion du point de vue
13 des notions et des terminologies…" ? Mais je ne vois pas ce que vous avez
14 cité, vous-même.
15 Q. Professeur --
16 R. Donnez-moi votre texte, que je le lise, parce que je n'arrive pas à le
17 retrouver. Je demande à ce qu'on m'aide, parce que ce qui est surligné en
18 rouge, c'est ici.
19 Q. Je vais vous demander de donner lecture de cette phrase en caractères
20 gras.
21 R. "Ce n'est pas nulle part, mais il est inacceptable que des migrants
22 économiques soient déclarés comme étant des réfugiés, comme il est
23 inadmissible que des évaluations au niveau des réfugiés soient effectuées
24 partant de listes électorales. Les listes électorales, nulle part au monde,
25 dans les recherches professionnelles et scientifiques, ne constituent un
26 point de départ pour l'élaboration d'évaluations du nombre de réfugiés."
27 Q. Merci. C'est précisément le passage qui m'intéressait.
28 Mme WEST : [interprétation] Est-ce que le moment se prête bien à la pause,
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1 Monsieur le Président ?
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Parfaitement. Nous allons faire une pause de 20
3 minutes.
4 --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.
5 --- L'audience est reprise à 12 heures 52.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame West, vous avez la parole.
7 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : M. Scott, qui vient d'arriver. Il y a longtemps
9 qu'on ne l'avait pas vu. Donc on le salue.
10 Bien. Madame West.
11 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Q. Avant la pause, Professeur, nous parlions des sources, et vous aviez lu
13 des parties de votre rapport là où vous disiez que : "Nulle part dans le
14 monde un expert, un chercheur scientifique, ne prend des listes électorales
15 comme point de départ pour établir le nombre exact du nombre de réfugiés."
16 Nous parlons encore des sources. Pour ce faire, voyons la pièce P
17 10731. Deuxième classeur. Je répète le numéro de la pièce. P 10731. Ce sera
18 pour la version B/C/S à l'intercalaire 3.
19 C'est un article qui concerne les études de population à propos des
20 personnes qui ont trouvé la mort au Cambodge sous le régime de Khmer Rouge.
21 Nous allons voir le résumé, parce que nous parlons de la période de 1975 à
22 1979.
23 Résumé :
24 "Estimation des personnes décédées pendant le régime de Khmer Rouge
25 au Cambodge de 1971 [phon] à 1975 [phon]. Ça va entre 20 000 morts,
26 d'après d'anciennes sources de Khmer Rouge, et cela monte à plus de 3 000
27 000 de victimes d'après des sources gouvernementales vietnamiennes. Ici
28 nous utilisons une source inhabituelle, à savoir la liste électorale de
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1 1992 établie par les Nations Unies pour voir quelle était la taille de la
2 population après le régime de Khmer Rouge, et combien il y a eu de morts
3 excessifs dans les années 1970. Ici vous avez aussi la première ventilation
4 par âge, par année unique, qui permet l'analyse de la structure des
5 mortalités excessives et pour voir l'importance relative qu'avait la
6 violence comme cause de décès au cours de cette période. Cette estimation
7 est plus comparable avec les estimations plus élevées faites dans le passé.
8 "De plus, l'analyse des causes probables de décès montre qu'il y au
9 ne contribution plus importante des morts causées de façon directe ou
10 violente que ce qui avait été reconnue jusqu'à présent."
11 Je viens uniquement de lire le résumé. Je comprends que vous n'avez pas lu
12 tout l'article, mais conviendriez-vous avec moi que la source mentionnée
13 ici, ce sont des listes électorales, et qu'ici ces listes peuvent nous
14 donner une bonne idée de la structure de la population ?
15 R. Tout d'abord, je tiens à dire que je n'ai pas lu l'article entier.
16 Deuxièmement, je ne sais pas qui a rédigé l'article. Je ne connais pas les
17 qualifications de la personne qui a rédigé. Est-ce un démographe, est-ce un
18 journaliste, ou quelque chose d'autre.
19 Deuxièmement, ici on compare la mortalité vis-à-vis des listes électorales.
20 Moi, j'ai dit que je n'ai jamais entendu dire que les listes électorales
21 aient pu servir dans des rapports d'expert et des rapports scientifiques en
22 guise de point de départ pour l'évaluation du nombre de réfugiés. Je
23 souligne une fois de plus l'évaluation du nombre de réfugiés.
24 Peut-être si j'avais pu examiner l'article entier et si je pouvais
25 voir quelle est la valeur de ces listes électorales, c'est de savoir
26 quelles sont les données qu'on a pris en comparaison, quelles sont les
27 bases de la mortalité, peut-être pourrais-je formuler une opinion
28 définitive. De la sorte, je ne peux ni accepter ni rejeter.
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1 Le fait est qu'ils l'ont fait. Maintenant, de là à savoir quel est le taux
2 de fiabilité de ces données telles que présentées, ça je ne peux pas vous
3 apporter un jugement. Je vous affirme que je ne sais pas que quiconque ait
4 jamais fait le calcul des réfugiés partant d'un nombre -- ou partant des
5 listes électorales.
6 Q. Cet article a apparu dans une revue scientifique qui parle "d'études de
7 population," "d'études démographiques." Avez-vous entendu parler de cette
8 revue scientifique ?
9 R. J'ai entendu parler de plusieurs revues portant ce nom, mais j'aimerais
10 que vous me disiez le nom de l'auteur. Peut-être est-ce quelqu'un que je
11 connaisse. Ça peut être, par exemple, un sociologue qui explique les
12 choses, et ça vous donne un aspect. Un historien rédigeant la même chose a
13 une autre approche. Dans la science, chacun a le droit de choisir sa source
14 de données, mais dans la démographie qui est une science pure et
15 disciplinaire, je dois aussi rechercher mes sources. Mais du point de vue
16 d'un démographe il faut que je sache ce qui est et ce qui ne l'est pas,
17 pour ce qui est de l'acceptabilité du minimum de fiabilité.
18 Q. Merci. L'auteur, c'est Patrick Heuveline. C'était un démographe du
19 Centre des études démographiques de Pennsylvanie à l'époque. Aujourd'hui,
20 il travaille à l'Université de Chicago.
21 Avez-vous entendu parler de lui ?
22 R. Non, je n'ai pas entendu parler de ce monsieur.
23 Q. Merci. Poursuivons l'examen de la question des listes électorales
24 utilisées ou de l'OSCE utilisées comme sources.
25 Ici, vous avez déclaré en ce Tribunal en juin 2004, vous avez été
26 témoin dans l'affaire Blagojevic. Vous vous en souvenez ?
27 R. Oui, je m'en souviens.
28 Q. C'était un procès qui concernait les événements de Srebrenica, n'est-ce
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1 pas ?
2 R. Exact.
3 Q. Si, par exemple -- prenons ce que vous avez déclaré, compte rendu
4 d'audience, page 109 990 [comme interprété].
5 Ce jour-là, Me Karnavas vous avait demandé si, vu la situation de
6 Srebrenica, quelle serait la source idéale. Vous avez dit qu'idéalement, ce
7 serait pendant le recensement. Et n vous avait demandé s'il n'y avait pas
8 possibilité de faire un recensement, qu'est-ce que vous feriez ?
9 Je reprends la question : "Supposons qu'il n'était pas possible pour une
10 raison précise d'avoir un recensement; manque d'argent, manque d'intérêt,
11 manque de volonté politique, quelle que soit la situation, quelle serait, à
12 votre avis, la deuxième solution après cela ?
13 Page suivante, page 10 991, vous répondez ceci :
14 "Tout d'abord, il faut puiser dans toutes les sources d'information qu'on a
15 à sa disposition. Parmi les sources existantes, on peut tirer un très bon
16 parti notamment des listes électorales de l'OSCE utilisées ici en 1997 et
17 1998. Ce sont aussi des listes établies en 2000. On peut également utiliser
18 comme base ou comme ligne directrice le recensement de 1991."
19 Vous vous souvenez de vos dires dans ce procès ?
20 R. Si vous êtes en train de donner lecture de la chose que j'ai dite, je
21 l'ai probablement dite. Il se peut que j'aie dit que pouviez l'utiliser,
22 notamment bien en l'occurrence du cas de Srebrenica. Mais je ne pense pas,
23 et ne pense pas maintenant non plus, que cette source-là de données est une
24 bonne source de données. Elle peut être utilisée en cas de crise
25 humanitaire.
26 Mais ça était dit dans le sens suivant, à savoir que la détermination
27 du nombre de survivants, parce que l'expert de l'Accusation avait travaillé
28 sur une liste des personnes ayant droit de voter en 1997, mais il y avait
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1 déjà une liste de l'an 2000. L'objectif là-bas avait consisté à chercher à
2 vérifier si une personne figurant sur une liste de disparus s'était
3 présentée pour faire partie d'une liste électorale. L'expert a constaté
4 qu'il y en avait eu neuf de ce genre.
5 Et j'ai dit là-bas que la méthodologie n'était pas bonne. Mais la
6 bonne chose à faire [inaudible] excusez-moi. Il serait bon de faire en
7 sorte qu'en sus de la liste électorale 1997, 1998, il se soit servi aussi
8 de listes électorales de l'an 2000. C'est de cela qu'il s'agit. Je n'ai pas
9 dit que la liste électorale dans ce cas de figure était idéale. J'ai dit
10 qu'il eut été bon de s'être servi en sus de ce qu'on avait eu en 1997, 1998
11 des listes de l'an 2000, pour vérifier dans l'autre liste aussi.
12 Q. Fort bien. Donc ce qui vous inquiète ici, ce qui vous embête, ce
13 n'est pas qu'on a utilisé des listes électorales de l'OSCE et qu'elles
14 seraient peu crédibles. Vous dites plutôt qu'il faudra en utiliser
15 d'autres; c'est cela ?
16 Q. Non, Madame. Il s'agit de choses tout à fait différentes. Dans la
17 situation qui était celle de l'époque, vous êtes en train de vérifier si
18 quelqu'un est vivant. Ce n'est pas fiable, mais par correspondance, vous
19 cherchez à savoir s'il y en a qui sont vivants encore. Vous ne faites pas
20 de calculs partant d'une liste électorale pour savoir s'il a fui, s'il
21 s'est réfugié, si c'est une personne déplacée. Vous cherchez à savoir si,
22 dans une liste électorale aussi limitée que celle-là, vous retrouvez un
23 survivant. Donc c'est une approche tout à fait différente pour des fins
24 tout à fait différentes qu'on utilise cette liste électorale.
25 Q. D'accord --
26 M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que je peux faire un commentaire ?
27 Il serait bon de ne pas interrompre le témoin. Soit mieux
28 circonscrire la question -- mais si on essaie de citer un procès précédent
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1 pour en retirer quelque chose, il faudrait permettre au témoin de replacer
2 ceci dans son contexte parce qu'il se peut que la Chambre ne connaisse pas
3 les événements de Srebrenica. Je saurais gré à la Chambre de donner une
4 certaine marge de manœuvre au témoin en lui donnant le contexte ou le temps
5 de le faire ou alors de mieux circonscrire la question.
6 Mme WEST : [interprétation]
7 Q. [aucune interprétation]
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Par définition, la Chambre n'est pas au courant des
9 quatre affaires où le témoin a apporté sa contribution à la manifestation
10 de la vérité. A ce moment-là, rappelez néanmoins dans votre question
11 introductive le contexte.
12 Mme WEST : [interprétation]
13 Q. Professeur, dans Blagojevic, ceci c'était à propos de Srebrenica et là,
14 on essayait de partir à la recherche des personnes portées disparues, des
15 morts. Là, dans ce procès-ci, vous aviez fait comme vous le proposez là,
16 les listes électorales et les recensements, vous auriez comparé les noms
17 qu'on a dans le recensement et ceux avec les listes d'inscription et si
18 quelqu'un ne s'était pas inscrit en 1997 ou vous avez dit mieux encore,
19 plus tard, soit que ces personnes étaient portées disparues ou mortes. Ça,
20 c'est le procès Srebrenica.
21 Mais ici --
22 M. KARNAVAS : [interprétation] Ce n'est pas ce qu'elle a dit. Ce n'est pas
23 ce que dit le rapport. On dénature les faits. On peut le faire tant qu'on
24 veut, mais ce n'est pas ce que le témoin a dit. Ce n'est pas ce qu'elle a
25 écrit dans le procès Blagojevic, je devrais le savoir parce que c'était
26 quand même mon témoin et c'est moi qui plaidais. Donc, soit on cite le
27 rapport directement, soit on cite tout le passage pertinent.
28 Mais soyons justes envers le témoin.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame West, comme vous avez eu accès au transcript
2 du procès Blagojevic, il aurait été plus simple de lui dire : "Madame, en
3 répondant à Me Karnavas à la page untel, vous avez dit cela. Aujourd'hui,
4 qu'est-ce que vous me dites de plus, de
5 moins ?" et cetera, pour qu'on ait une référence précise au transcript
6 Blagojevic.
7 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mais
8 effectivement, j'ai fait une référence exacte au compte rendu, mais je
9 pense que nous pouvons passer à notre procès.
10 Q. Ici, dans ce procès, Professeur, si vous utilisiez, par exemple, le
11 recensement 1991 ou les listes électorales, vous allez voir qui a été
12 inscrit dans le recensement et -- plutôt qui a été repris dans le
13 recensement et la personne, pour voir si cette personne s'est inscrite en
14 1997. L'idée, c'est de voir si cette personne se trouve encore, à cette
15 date-là, en Bosnie-Herzégovine.
16 Ici, en l'occurrence, nous avons fait un pas de plus. Nous essayons de
17 trouver leur adresse, non ?
18 R. C'est la première fois que j'entends parler de la recherche de
19 l'adresse. Mais avant que je réponde à votre question qui me semble être du
20 type "que se passerait-il si et si," je tiens à préciser que dans le
21 rapport Blagojevic, j'ai tout un chapitre de critiques formulées à l'égard
22 des sources de données pour ce qui est des listes électorales. En répondant
23 à la question : "Si vous n'avez rien, que feriez-vous en sus des listes
24 électorales ? Qu'utiliseriez-vous ?" Moi, si vous me posez la question de
25 savoir si vous m'aviez confié le travail, si j'étais l'expert de
26 l'Accusation et si je devais me servir de sources de données en me référant
27 aux listes électorales et au recensement de la population, comme l'a fait
28 Mme Tabeau, j'aurais dit "non," si vous me posez la question. Je vais vous
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1 dire la raison. Si je m'étais servie de cela, mon rapport aurait contenu
2 avec précision quelle est la donnée acceptable et quelle est la donnée non
3 acceptable.
4 Parce que pour ce qui est de procéder à des corrélations ou des
5 correspondances entre deux sources d'information du point de vue
6 méthodologique non compatibles, ça ne peut pas vous donner, en guise de
7 résultats, une garantie pour ce qui est d'affirmer que par ces
8 correspondances-là, vous avez obtenu des sources d'information fiables.
9 Mais je répète que le démographe a le droit de vérifier ces sources, de les
10 aménager, de procéder à toutes les démarches et phases de travail
11 scientifiquement reconnues comme telles et émettre des réserves et dire,
12 par exemple, cette source d'information est douteuse. Mais partant de la
13 source d'information douteuse que j'ai utilisée parce que je n'en avais pas
14 d'autres, je peux dire avec une fiabilité de tant de pour cent ce que je
15 dis.
16 De là à savoir -- excusez-moi, je n'ai pas fini.
17 Q. Professeur --
18 R. Ici, il est important -- il est très important, il est très important
19 de mon point de vue --
20 Q. Faisons une pause. Ma question était de savoir si nous avons examiné
21 les adresses et vous n'avez pas répondu à ma question.
22 Je vais vous demander, une fois de plus, de bien écouter ma question et
23 essayer d'y répondre.
24 Parce que maintenant, on parle de méthodes de travail. Voyons ce que
25 vous dites dans votre rapport sur les méthodes de travail.
26 Page 22 en anglais, page 20 en B/C/S.
27 R. Excusez-moi, je ne vous ai pas bien compris. Quand vous dites -- non,
28 non -- non, non, il faut que je puisse vous comprendre pour pouvoir vous
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1 répondre. Quand vous dites, est-ce qu'on a cherché l'adresse, vous voulez
2 dire que pour procéder aux correspondances, le bureau du Procureur est allé
3 chercher l'adresse ? Est-ce que c'est ce que vous aviez à l'esprit ?
4 Je n'ai pas compris ce que vous m'avez demandé.
5 Q. Nous allons passer à autre chose. Pour ce faire, prenez la page 20 de
6 votre rapport en B/C/S et je vais vous donner lecture de ce que vous avez
7 écrit en matière de corrélation. Vous dites :
8 "La méthode de corrélation cherche à identifier des unités présentant une
9 correspondance parfaite de plusieurs jeux; ici, nous avons le recensement
10 et les listes électorales. La comparaison se fait de la façon suivante : il
11 y a une première identification qui permet de corréler une source à une
12 autre pour trouver l'équivalent parfait. Cette méthode ne pose pas de
13 problème si on a une seule clé exacte d'identification qui peut se composer
14 de plusieurs chiffres, de plusieurs numéros et le niveau d'exactitude de la
15 concordance et fonction de l'exactitude de chacun de ces éléments.
16 "Par exemple, si on a un numéro d'identification personnelle, c'est une
17 bonne clé pour autant que ce numéro soit exact. On y trouve 13 chiffres,
18 chacun de ces chiffres étant un élément nécessaire pour permettre
19 l'identification précise d'un individu. Elle a l'avantage, cette méthode,
20 d'être unique. Ça veut dire qu'il n'est pas possible que deux ou plus de
21 personnes aient le même numéro d'identification. Il est impossible d'avoir
22 des doublons. La corrélation avec le bon numéro d'identification personnel
23 permet d'éliminer toute influence subjective sur les résultats définitifs."
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Allez moins vite parce que les interprètes ont du
25 mal à vous suivre, comme vous parlez très vite.
26 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
27 Q. Professeur, je vais vous demander ceci : d'après vous, en matière de
28 corrélation ou de concordance, le fait d'avoir une concordance avec le
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1 numéro d'identification personnelle, est-ce que ce serait la méthode idéale
2 ?
3 R. La meilleure des méthodes, c'est la plus fiable, à condition que le
4 JMBG, le numéro d'identification personnelle soit unique, donc qu'il ne se
5 répète pas à deux reprises et il faut qu'il soit consigné de façon exacte.
6 C'est la façon la plus fiable, la clé la plus fiable pour ce qui est de
7 procéder à des correspondances. Dans ce cas, comme vous avez, par exemple,
8 le cas de la carte bancaire, vous avez un code numérique qui est d'un autre
9 type, certes.
10 Q. Si le bureau du Procureur s'était servi de cette clé que constitue le
11 numéro d'immatriculation et si c'était là, la seule méthode utilisée, est-
12 ce que vous seriez en désaccord avec les résultats qui auraient été obtenus
13 uniquement avec cet élément-là ? R. Cette méthodologie de correspondance,
14 avec cette utilisation des clés, si vous aviez utilisé le JMBG comme clé de
15 correspondance et si on avait disposé des JMBG exacts et fiables, les
16 données auraient certainement été beaucoup plus fiables.
17 Q. Merci. Pourtant, vous dites, ceci est plus loin, page 21 en B/C/S, que
18 la clé d'identification doit être immuable pendant tout le processus
19 d'identification. Est-ce que d'autres statisticiens sont de votre avis ?
20 R. Ce n'est pas une question d'opinion. Il y a des services entiers, des
21 processus entiers où on procède de la sorte. Le recensement de la
22 population, la personne recensée, vous la faites correspondre à une
23 famille, à un foyer; il y a personnes recensées et famille et ça vous
24 permet de savoir combien, dans une famille, vous avez de membres de cette
25 famille. La population d'un pays qui dispose d'un registre d'état civil
26 passe par un numéro d'identification unique pour faire correspondre
27 différents éléments. Donc ces instances ou ces pays, voire leurs
28 institutions, disposent d'un système opérationnel pour procéder à ces
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1 correspondances. Je ne peux pas dire qu'il n'y a pas d'erreur à survenir,
2 mais c'est la façon la plus fiable de procéder. Il faut que vous disposiez
3 d'un système opérationnel édifié.
4 Q. Merci. Examinons certains de ces états et des ces institutions. Prenons
5 la pièce P 10734, dans le deuxième classeur.
6 R. P 10734 ?
7 Q. Correct.
8 R. Bien.
9 Q. Il s'agit d'un article qui a été publié par le bureau américain du
10 recensement qui s'intitule "Qualité de bases de données extrêmement
11 vastes."
12 M. KARNAVAS : [interprétation] Une objection, l'utilisation de ce document.
13 Cela n'a rien à voir avec la Bosnie-Herzégovine, n'a rien à voir avec la
14 ligne de questionnement qui avait trait aux
15 13 chiffres du numéro d'immatriculation personnelle, quant à savoir
16 pourquoi ces numéros doivent être immuables et ne pas changer des numéros
17 qui sont donnés aux individus. Qu'est-ce que ce document a à y voir et
18 qu'est-ce que le bureau national de la statistique américain a à voir avec
19 ce qui se passe en Bosnie-Herzégovine ?
20 Donc, j'ai une objection, à moins qu'il n'y ait une base.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense que la Chambre la rejette.
22 C'est prématuré, je crois, que de rejeter cela.
23 Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
24 Q. Nous parlons de méthodologie; vous avez dit, Professeur, qu'une
25 méthodologie qui utilise un numéro d'immatriculation qui est immuable
26 constitue la meilleure solution. Il s'agit d'un article du bureau de
27 recensement américain, je vais vous lire un extrait et vous poser une
28 question. L'extrait nous parle :
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1 "De l'analyse et de l'étude de grandes quantités d'informations qui
2 figurent dans des fichiers pour des grands registres importants et pour des
3 fichiers qui sont…" --
4 Mme WEST : [interprétation] Je pense maintenant que nous l'avons à l'écran,
5 nous pouvons reprendre peut-être.
6 Q. "Analyse et extraction de données de grands fichiers informatiques qui
7 sont affectés par la qualité de l'information dans ces fichiers. Pour des
8 grands registres de population, pour des fichiers qui sont créés par la
9 fusion de deux ou plusieurs fichiers, il faut qu'il y ait l'identification
10 de l'entrée double. Une identification double peut être faite sur la base
11 de logiciels de liaison qui peuvent corréler des noms, des adresses, des
12 dates de naissance et qui peuvent contenir aussi un grand nombre d'erreurs
13 typographiques.
14 "Il faut faire une étude quantitative et qualitative pour assurer que les
15 éléments manquants puissent être traités rapidement. Ce document décrit les
16 méthodes informatiques et les logiciels existants pour ces groupes de
17 fichiers là où ces fichiers contiennent un million à quatre milliards de
18 documents."
19 Professeur, le recensement de 1991 a dit qu'il y avait quelques 4,4
20 millions d'habitants en Bosnie-Herzégovine ?
21 R. Oui.
22 Q. Et l'OSCE en 1997, 1998 nous indique 2,5 millions de personnes dans les
23 registres d'électeurs; est-ce exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Ce que je viens de lire dans ce résumé, est-ce que vous êtes d'accord
26 avec moi pour dire que des logiciels qui peuvent calculer et faire des
27 liens entre des bases de données qui sont énormes que c'est quelque chose,
28 en tout cas, qui est préconisé par le bureau national de la statistique ou
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1 du recensement aux
2 Etats-Unis ?
3 R. Tout d'abord, je ne m'y connais pas du tout en logiciels, mais les
4 Etats-Unis font un registre unique en reliant deux ou plus ou 50 bases de
5 données. Donc ils prennent les bases de données des états différents et
6 certainement, il y a des doubles.
7 Mais je ne peux pas être sûre, c'est ce qui est fait certainement
8 aussi en Serbie, mais elle essaie de créer une base de données, mais il
9 n'est pas possible de vérifier le dupliqua [phon] car ça se fait sur un
10 seul recensement. Elle ne peut pas vérifier; or,
11 Mme Tabeau peut le vérifier partiellement. Pourquoi ? Car si elle prenait
12 les JMBG du recensement et des listes d'électeurs --
13 Q. Professeur, je suis désolée de vous interrompre, mais je ne vous
14 demande pas cette réponse-là. Je vous parle de lien existant entre les
15 logiciels de données et le bureau américain. Vous me parlez du rapport
16 Tabeau, maintenant. Vous pouvez reprendre la version B/C/S et poursuivre et
17 nous lire --
18 R. S'il vous plaît, je parle du fait de relier. Ici, il est question de
19 "relier les logiciels…" --
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame le Témoin, excusez-moi, vous
21 êtes dans une situation un petit peu délicate. Nous le savons et vous
22 n'êtes ni la première, ni la dernière. Mais la règle du jeu, c'est que dans
23 le cadre du contre-interrogatoire, on peut vous poser des questions qui
24 demandent une réponse "oui," "non," "je ne me souviens pas" ou "je ne sais
25 pas."
26 Il est tout à fait compréhensible que souvent, vous ayez l'envie
27 d'expliciter les choses. Mais nous savons tous, et tout le monde dans le
28 prétoire vous le confirmera, que nous avons un temps qui est limité. Par
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1 conséquent, nous vous demandons de vous en tenir dans la mesure du possible
2 à la question posée par le Procureur. Vous n'avez pas de liberté de parole
3 finalement, ici. Peut-être que cela est regrettable. Néanmoins, il s'agit
4 de la Règle du Règlement des procédures, il faut que nous nous y tenions.
5 Merci.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, avec votre permission,
7 puis-je dire quelque chose.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, malheureusement, je
9 serai impoli, je ne peux pas vous l'autoriser. Il y a beaucoup de témoins
10 qui nous ont déjà posé la question et la réponse est toujours la même.
11 Allez-y, Madame West.
12 Mme WEST : [interprétation]
13 Q. Professeur, nous allons avancer dans cet article, il s'agit de la
14 deuxième page dans la version B/C/S. En anglais, c'est la partie qui est
15 intitulée "Numéro 4," deux pages avant la fin, "Liaison de données pour des
16 fichiers qui sont exceptionnellement gros."
17 "Beaucoup d'individus estiment que le fait d'identifier des doublons
18 constitue sans doute la question la plus épineuse en matière de qualité des
19 données. Pour des situations de grandes corrélations, par exemple, les
20 fichiers de sécurité sociale, il y a plus de sept millions de registres,
21 300 millions parfois, et ceci peut comprendre des comparaisons extrêmement
22 détaillées avec plusieurs trilliards [phon] de données. Donc, la
23 corrélation ou la correspondance doit se faire faire en utilisant le nom,
24 l'adresse, la date de naissance, si le fichier du recensement ne comprend
25 pas le numéro de sécurité sociale. Cela se fait par des machines qui sont
26 sûres avec plusieurs pare-feux, et ils sont faits par des grands
27 ordinateurs protégés.
28 "Pour avoir une bonne corrélation, ces fichiers sont corrélés avec un
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1 certain nombre de blocs, que l'on appelle des "blocking pass." Et seules
2 les paires qui donnent les mêmes caractéristiques sont prises en compte.
3 Par exemple, sur un ensemble ou un "blocking pass," on acceptera les paires
4 qui donnent une corrélation entre le prénom et le nom de famille. Pour
5 d'autres caractéristiques, on prendra l'adresse. Pour une autre, seules les
6 paires qui donnent une correspondance sur la date de naissance pourront
7 être prises en compte."
8 M. KARNAVAS : [interprétation] Avant même d'entre la question, sauf à
9 pouvoir établir le fait que c'était la procédure utilisée en Bosnie à
10 l'époque, -ce qui n'était pas le cas - bien, essayer de comparer ce
11 processus qui a été utilisé aux Etats-Unis d'une manière extrêmement
12 sophistiquée pour les numéros de sécurité sociale, et cetera, par rapport à
13 ce qui a été utilisé en 1991, bien, il s'agit de deux choses complètement
14 différentes. Comment peut-elle demander une réponse à cette question ?
15 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais la question n'a pas encore été
16 posée.
17 M. KARNAVAS : [interprétation] Mais justement, j'ai une objection
18 précisément sur ce point-là. Ce document n'est pas pertinent pour faire une
19 comparaison. Nous savons déjà ce qu'elle essaie de faire. Parce qu'on a
20 déjà entendu la question précédente, et je n'ai pas posé d'objection. Mais
21 là, c'est très clair. Je n'ai même pas besoin d'entendre la question. Je
22 pourrais la poser moi-même.
23 Elle essaie d'établir une comparaison. Et ce que j'essaie de dire,
24 justement, c'est peut-être une procédure acceptable aux Etats-Unis mais ça
25 ne veut pas dire que c'est acceptable ici, parce qu'il n'y a pas de base
26 concernant ce qui se passait en 1991. Voilà ce que je souhaite dire.
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est une question concernant la
28 méthodologie, et nous écoutons la question que le Procureur souhaite poser.
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1 Mme WEST : [interprétation] Merci.
2 Q. Professeur, ma question est la suivante : ce que je viens de lire,
3 cette méthode, est-ce qu'elle vous est connue, familière ? Est-ce la
4 méthode qui est utilités par le bureau du Procureur dans son rapport ?
5 R. Je ne saurais vous le dire. Il n'est pas question ici de la corrélation
6 des types différents de sources de données. Il est question de la façon
7 dont on fusionne des parties d'une seule source, c'est-à-dire le
8 recensement de la population, et ainsi, on peut aboutir au dupliqua, et il
9 question aussi de la façon dont on les écarte, ces dupliquas. Mais ceci n'a
10 rien à voir avec l'utilisation de deux sources totalement différentes.
11 Ici, il s'agit d'une technique qui permet de nettoyer les documents afin
12 d'aboutir à la fiabilité des données du recensement accompli aux Etats-
13 Unis. Or, ce n'est pas la méthode permettant de retrouver Svetlana
14 Radovanovic dans deux sources différentes. C'est ainsi que je comprends ce
15 qui a été lu ici.
16 Q. J'aimerais vous relire la deuxième phrase, qui nous dit
17 que :
18 "Pour une situation de grande corrélation, c'est-à-dire la corrélation des
19 dossiers de sécurité sociale, les 600 milliards [comme interprété]
20 d'enregistrements par rapport au recensement décennal de 2000, bien, il
21 peut y avoir 300 millions d'enregistrements, il faudrait comparer 600
22 trilliards de données."
23 Il s'agit, en effet, de comparer des sources qui sont différentes, n'est-ce
24 pas ? Il ne s'agit pas d'un document visant à faire du nettoyage de
25 documents --
26 R. Non, Madame, ce n'est pas le cas. Si vous revenez au début, où il est
27 dit "bref aperçu," s'agissant de gros registres de la population, et les
28 bases de données créées en fusionnant deux ou plusieurs bases de données,
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1 il est nécessaire d'arriver à un certain nombre de dupliquas. Donc s'il y
2 en a deux ou plusieurs bases de données du recensement de la population, on
3 arrive à cela. Et si vous comparez deux ou plusieurs bases de données
4 concernant la population, bien, vous pouvez identifier les dupliquas.
5 Q. Néanmoins, Professeur, ma question, c'est de savoir si vous connaissez
6 ce processus. Et je vous demanderais de voir P 09836, qui est dans le
7 dossier numéro 1.
8 R. P 09836.
9 Q. P 09836. Rapport du bureau du Procureur, il y a un intercalaire rouge,
10 l'intercalaire rouge. La page 108 du B/C/S, je crois que vous y êtes.
11 J'aimerais vous lire ce paragraphe et vous poser une question. On parle de
12 "liaison entre données." La page 98 [comme interprété] de l'anglais,
13 deuxième paragraphe :
14 "Pour lier les ensembles de données, nous utilisons une procédure à
15 multiples étapes. Chaque étape consiste à plusieurs comparaisons entre deux
16 ensembles de registres de données qui sont liés. Un registre qui décrit
17 l'individu et qui est le résumé de ses caractéristiques et d'autres
18 informations, par exemple le prénom, le nom de famille…" --
19 R. Vous êtes en train de lire la page 108, premier
20 paragraphe ?
21 Q. Il s'agit du deuxième paragraphe.
22 R. Deuxième, d'accord.
23 Q. Et vous êtes sur l'annexe C, c'est exact ? Vous voulez bien reprendre ?
24 "Pour effectuer la liaison des ensembles de données, nous avons une
25 procédure à plusieurs étapes. Chacune de ces étapes consiste en plusieurs
26 comparaisons entre deux ensembles de registres d'informations
27 individuelles. Un registre décrit toujours l'individu et l'ensemble de ses
28 caractéristiques sur un certain nombre de points, par exemple, son prénom,
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1 son nom de famille, le nom du père, la date de naissance, et cetera. Toutes
2 les étapes suivent la même logique (voir plus bas).
3 "Les différences entre les étapes sont les critères un petit peu différents
4 qui sont utilisés pour corréler les registres et le fait que la population
5 disponible pour les corrélations suivantes diminue au fil de chaque étape.
6 Autrement dit, une fois qu'un nombre de registres ont été corrélés dans
7 deux ensembles, bien, ces registres sont exclus pour la fois suivante, la
8 corrélation suivante. Et dans l'étape suivante, le critère de corrélation
9 appliqué a été modifié par rapport au précédent pour pouvoir obtenir de
10 nouvelles correspondances ou des nouvelles corrélations."
11 Professeur, ma question est la suivante : cette méthode qui est décrite par
12 le rapport du Procureur, n'est-ce pas exactement ce que l'on parle de le
13 recensement américain, pas dans l'abstract [phon] mais dans la partie qui
14 s'intitule "Liens entre les différents registres" ?
15 R. Ce n'est pas la même chose. Les Etats-Unis établissent le lien au sein
16 d'une base de données, donc ils font un lien entre les parties différentes
17 pour créer un registre. Alors qu'ici, il y a des sources différentes, des
18 bases de données différentes pour établir une corrélation s'agissant d'une
19 seule personne ou plusieurs personnes individuelles pour ainsi créer un
20 troisième base de données. Donc dans le recensement des Etats-Unis,
21 personne ne crée une deuxième, troisième ou septième base de données. Mais
22 l'on est en train de créer une seule base de données qui constitue
23 plusieurs éléments et qui est censée être faite de manière à être fiable et
24 nettoyée de toutes les défaillances.
25 Ce processus contient deux étapes différentes; et l'on crée la troisième
26 étape par le biais de la corrélation. Il y a plusieurs pas à faire pour
27 cette troisième phase. La première c'est, O.K. j'ai bien fait ma
28 corrélation. Maintenant, je fais la corrélation et j'ajoute au premier
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1 élément. Ça c'est la statistique de la corrélation.
2 Si l'expert de l'Accusation avait dit dans le premier pas, j'ai fait la
3 corrélation de 20 % en appliquant le critère tel que nom, prénom, prénom du
4 père, date de naissance, lors du deuxième pas ou étape, j'ai fait la
5 corrélation de 40 %. Or, elle ne l'a pas fait, et c'est justement là le
6 problème.
7 Q. Ceci dit, Professeur, n'êtes-vous pas d'accord pour dire que le bureau
8 de recensement américain recommande une méthode qui est extrêmement
9 différente par rapport à l'identification, la méthode de la clé
10 d'identification personnelle que vous avez préconisée ?
11 R. Ici, il y a une confusion terminologique. Ou bien peut-être je n'arrive
12 pas bien à m'expliquer ou peut-être il y a un problème d'interprétation ou
13 un troisième problème.
14 Les Etats-Unis créent une base de données sur la base de plusieurs
15 éléments. Ils la créent en déterminant les dupliquas, en faisant des
16 cercles, ils essaient d'établir une base de données avec des données
17 fiables concernant chaque individu sans duplicités [phon].
18 Or, votre expert ne le fait pas. Il utilise deux bases de données pour en
19 créer une troisième. Si votre expert avait dit, "Sur la base du recensement
20 de la population, je veux créer une base de données fiable dont les numéros
21 d'immatriculation personnels sont exacts," ça, ça va être mon premier pas,
22 ma première étape. Deuxième étape, "En utilisant le recensement de la
23 population, je vais prendre les données concernant ceux pour qui les
24 numéros d'identification sont partiels." Le troisième, il s'agirait des
25 numéros d'identification erronés. Puis quatrième étape, ceux qui n'ont pas
26 du tout de numéro d'identification.
27 Elle aurait pu trouver un système opérationnel qui réduirait cette base à
28 une seule clé qui pourrait être utilisée pour des comparaisons. C'est ça
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1 qui est fait dans les Etats-Unis.
2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Peut-être ai-je un problème de
3 compréhension.
4 Vous soulignez envi [phon] le fait que les Etats-Unis utilisent une
5 base de données, la même. Moi, ce que je lis dans le rapport où nous nous
6 trouvions tout à l'heure, c'est que d'un côté il y a les fichiers de la
7 sécurité sociale d'un côté, et de l'autre côté, les documents du
8 recensement. Selon vous, s'agit-il de la même chose ou s'agit-il de deux
9 bases qui sont séparées, différentes et distinctes l'une de l'autre ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur la base desquels ils forment une
11 base de données, et il peut leur arriver une situation où, à la fois au
12 sein du service de couverture sociale et au sein du recensement, ils
13 trouveront une même personne. C'est la manière dont je lis cette page.
14 J'essaye d'établir une seule base de données qui éviterait d'avoir des
15 duplications.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame l'Expert, je quitte les Etats-Unis pour
17 revenir dans l'ex-Yougoslavie.
18 Le système JMBG qui semble, enfin, qui est la résultante d'une loi
19 qui avait été prise à l'époque en 1976, si je ne me trompe, est un système
20 à 13 identifiants; la date de naissance, le lieu de naissance, la question
21 du sexe et une dernière clé qui est la clé "K," qui est établie après un
22 calcul savant.
23 Mais quand je regarde ce système yougoslave, il semble, sauf erreur
24 de ma part, qu'il n'avait absolument pas prévu l'identifiant ethnique dans
25 ces 13 identifiants. A savoir si on est Serbe, Croate, Musulman, ça n'avait
26 pas été pris en compte ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà. Alors pour Mostar, par exemple, l'identifiant
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1 qui est le chiffre 15 - puisque toutes les villes ont eu un chiffre - pour
2 Mostar, enfin pour ceux que ça intéresse, c'est le chiffre 15 - est-ce
3 qu'un démographe, voyant que la personne est née à Mostar, chiffre 15
4 obtenu de la composition ethnique de Mostar, a une chance sur deux de se
5 tromper en disant il est Musulman ou Croate ?
6 Donc le système JMBG est imparfait au point de vue ethnique parce qu'il n'y
7 a aucune référence ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors ce qui explique qu'il faut croiser, si je
10 comprends bien, avec une autre source qui est, comme le soutient
11 l'Accusation, les listes électorales où, dans les listes électorales, il
12 peut y avoir l'appartenance ethnique ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. L'Accusation sait très bien que dans les
14 listes électorales il n'y a pas d'appartenance ethnique, tout comme elle le
15 sait que ceci fait partie du recensement. Ils ont besoin de la corrélation
16 pour reprendre cette donnée portant sur l'appartenance ethnique et
17 l'installer dans les listes électorales, créer un nouvel ensemble et dire,
18 voilà l'ensemble qui m'intéresse concernant 1997.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour un scientifique, comme peut l'être un
20 démographe ou un sociologue qui a fait des études statistiques, la seule
21 base dans ce domaine où il résulte que du recensement où le citoyen a ou
22 n'a pas, puisqu'il était libre, indiqué s'il était Serbe, Croate ou
23 Musulman. C'est le seul instrument ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Cela dit, il faut tenir compte du
25 fait que cette déclaration ethnique est valable pour le moment en question.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc vous confirmez bien que la seule base
27 fiable - et encore à prendre avec des pincettes - c'est le recensement,
28 parce que tout le reste il n'y a aucune référence ethnique ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà. Je pense avoir tout dit.
3 Mme WEST : [interprétation] Est-ce que vous voulez que je poursuive ou est-
4 ce que je dois m'arrêter parce que je veux passer à un autre sujet ?
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Il reste deux minutes et 48 secondes, alors il vaut
6 peut-être mieux arrêter, d'autant plus que moi, dans 30 minutes, j'ai un
7 autre procès. Bien. Alors on continuera demain, Madame West.
8 On va calculer le temps que vous avez utilisé et il y a de fortes
9 chances qu'on termine demain, y compris avec les questions supplémentaires.
10 Vous avez utilisé une heure et 15 minutes, donc il vous reste une heure et
11 45 minutes. Voilà.
12 Madame le Témoin, à nouveau mes consignes : vous n'avez aucun contact
13 avec Me Karnavas ni avec l'Accusation ni avec les Juges, cela va de soi.
14 Nous aurons le plaisir de vous retrouver demain à 9 heures ainsi que tout
15 le monde.
16 --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le mercredi 26
17 novembre à 9 heures 00.
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