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1 Le lundi 11 mai 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Les accusés Prlic et Coric sont absents]
5 [Le témoin vient à la barre]
6 --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
8 l'affaire, s'il vous plaît.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
10 toutes et à tous dans ce prétoire et autour de celui-ci. Affaire IT-04-74-
11 T, le Procureur contre Prlic et consorts.
12 Merci, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
14 En ce lundi, 11 mai 2009, je salue M. Stojic, M. Petkovic et M. Pusic. Je
15 salue également notre témoin, M. Praljak, et j'associe également Mmes et
16 MM. les avocats. Je salue M. Stringer et ses collaborateurs et
17 collaboratrices, et je n'oublie pas également toutes les personnes qui nous
18 assistent.
19 Alors, tout d'abord, Monsieur Praljak, au nom des interprètes, je vous
20 demande, lorsque vous lisez un document, de le lire lentement parce que
21 comme les interprètes n'ont pas le document sous les yeux, ils ont du mal à
22 suivre. Donc, si vous avez à lire un document, lisez-le lentement afin que
23 les interprètes puissent traduire, parce qu'il leur est très difficile de
24 traduire une quinzaine de lignes qui sont lues très rapidement sans avoir
25 le texte sous les yeux. Voilà ce que je voulais vous dire, c'est purement
26 technique.
27 Pendant quelques instants, je vais demander un bref huis clos partiel,
28 Monsieur le Greffier.
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1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes désormais à huis clos
2 partiel, Monsieur le Président.
3 [Audience à huis clos partiel]
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24 [Audience publique]
25 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, tout d'abord, vous
26 allez peut-être voir un nouveau visage ici. Il s'agit de Mme Laura Morris
27 qui est stagiaire et qui travaille au bureau du Procureur. Vous allez peut-
28 être la voir de temps à autre au cours des prochains mois dans le prétoire.
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1 Deuxièmement, vous le savez, Messieurs les Juges, la Défense Stojic a
2 déposé une série de requêtes concernant des documents la semaine dernière.
3 Au nom de l'Accusation, je me permets de demander un délai un peu plus long
4 pour permettre à l'Accusation de déposer des réponses à toutes ces requêtes
5 concernant les documents. J'en ai parlé à un des conseils de M. Stojic au
6 préalable. Nous demandons un délai qui courra jusqu'au 29 mai pour déposer
7 notre réponse à toutes ces requêtes concernant ces documents. Je remercie
8 la Défense Stojic de ne pas s'opposer à notre demande.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais consulter mes collègues.
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre, après en avoir délibéré, fait
12 droit à votre requête et vous accorde donc un délai pour répondre auxdites
13 requêtes qui concernent beaucoup de documents, la date étant donc fixée au
14 29 mai 2009.
15 Oui, Maître Kovacic.
16 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais peut-être
17 ajouter qu'on pourrait plus aisément surmonter la situation concernant la
18 demande présentée par mon confrère. Nous n'avons pas à passer à huis clos
19 partiel, je m'exprimerai à faire en sorte à ce que cela ne soit pas
20 nécessaire.
21 Pour ce qui est de cette courte interruption du 9 au 11 juin, peut-
22 être certaines présentes ont-elles oublié que ces dates-là, d'après
23 l'agenda que nous avons, c'est les autres Défenses qui doivent contre-
24 interroger. Par conséquent, la chose est facilement surmontable par la
25 lecture d'un PV, du PV d'audience, et je ne voudrais pas que nous sautions,
26 pour cette raison-là, ces trois journées de débat. Merci.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous prendrons en compte cet élément, étant précisé
28 que nous avions pensé que ça tomberait au moment même du contre-
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1 interrogatoire mené par l'Accusation. Très bien. Merci, pour cette donnée.
2 Je salue également donc Mme Laura Morris qui est stagiaire au bureau du
3 Procureur, et je lui souhaite la bienvenue dans cette salle d'audience.
4 Nous allons donc poursuivre l'interrogatoire principal de M. Praljak qui va
5 être mené par Me Kovacic.
6 Je crois que Me Kovacic a utilisé jusqu'à présent sept heures et 19
7 minutes, je vous fais cadeau des secondes.
8 LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]
9 [Le témoin répond par l'interprète]
10 M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
11 Interrogatoire principal par M. Kovacic : [Suite]
12 Q. [interprétation] Bonjour, Mon Général. Est-ce que vous avez pu vous
13 reposer ?
14 R. Bonjour, Maître Kovacic. Bonjour à tous et à toutes dans le prétoire.
15 Q. Je propose que nous allions de l'avant pour parcourir plusieurs
16 documents en provenance du ministère de la Défense, chose qui nous
17 permettra en quelque sorte d'expliquer bon nombre de thèses dont vous avez
18 déjà parlé, notamment pour ce qui est des positions adoptées par la Croatie
19 et ses représentants durant ces journées de 1992 et 1993.
20 Nous avons terminé jeudi le 3D00482. Est-ce que vous voulez choisir vous-
21 même le document suivant ou --
22 R. Le 3D00641, c'est un document qui n'a pas une importance très
23 particulière, exception faite du fait, justement, que l'on y dit que Mato
24 Kukuljica a eu un entretien le 23 juillet 1993 avec moi lorsque je me
25 trouvais encore à Zagreb, pour ce qui est de la remise de film pour la
26 cinémathèque de la Croatie, et rien d'autre au sujet du document en
27 question à ajouter.
28 Alors, Le document d'après, le 00642. Comme je l'ai déjà dit à plusieurs
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1 reprises depuis le tout début, lorsqu'il y a eu création ou plutôt lorsque
2 je suis arrivé moi pour être ministre adjoint chargé du IPD, ça veut dire
3 tout de suite - quand je dis "tout de suite" c'est dans un délai de dix à
4 15 jours, le temps que vous retrouviez et que vous preniez bien les
5 ficelles en main - nous avons commencé à faire cela, et nous avons
6 constamment œuvré en faveur de l'éducation de l'armée croate, sur ce qu'est
7 le droit de l'aide humanitaire internationale et le droit de guerre
8 international, et à cet effet, nous avons coopéré avec le CICR. Et c'est de
9 façon régulière que nous avons tenu des séminaires à tous les niveaux de
10 l'armée croate. Je me souviens aussi qu'au tout début, en 1962, dès qu'il y
11 a eu mise en place de relations, nous avons imprimé 100 000 exemplaires,
12 les fondements du droit de guerre international, qui ont été distribués aux
13 commandements, aux soldats afin que tout un chacun sache comment il doit se
14 comporter par temps de guerre.
15 Dans ce document-là, il y a une approbation -- non, non, non, non, sautons,
16 sautons ce document. C'est un document tout à fait dénué d'importance.
17 J'étais dans l'erreur. Passons au document suivant.
18 Q. Le 3D00683. C'est un document qui est assez parlant pour ce qui est de
19 certaines choses. Il porte une date, pour ce qui est du cachet de
20 réception. Il n'y en a pas sur le document même.
21 R. C'est le 6 juin 1992. Et c'est la date à laquelle il y a eu une
22 démobilisation des effectifs, une diminution des effectifs en matière, donc
23 d'hommes, parce qu'en 1992, il y a eu signature à Sarajevo d'un cessez-le-
24 feu et il y a eu signature d'un accord concernant l'arrivée de la FORPRONU
25 en Croatie, une FORPRONU qui était censée prendre en charge, d'une certaine
26 façon, le rétablissement de l'ordre et de la paix, notamment entre les
27 lignes de contact au niveau des lignes paramilitaires serbes et l'armée
28 croate. Il fallait donc qu'ils prennent soin de l'ordre et de la paix sur
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1 ces territoires occupés. Or, il est survenu des problèmes. Il fallait déjà
2 distribuer des grades, et comme cela concernait un nombre assez important
3 de militaires et cela concernait une administration du personnel qui venait
4 d'être mise sur pied -- et je rappelle que ça s'était mis à fonctionner en
5 mars 1992, lorsque la guerre a été interrompue et lorsqu'il était évident
6 que la FORPRONU allait servir de modérateur entre l'armée croate et les
7 Serbes insurgés. Et l'administration du personnel au niveau du ministère
8 cherchait à savoir combien de militaires et volontaires il y avait dans ces
9 unités. Donc l'administration n'avait pas ces listes-là. Et les deux
10 premiers ordinateurs et de personnes individus sachant s'en servir, je les
11 ai trouvés pour mettre sur pied cette administration du personnel.
12 Or, ce document nous parle des problèmes survenus. Il paraît qu'il y a des
13 renseignements qui sont inexacts, incomplets, que des équipes se seraient
14 déplacées vers le terrain pour tout remettre en ordre, et pour déterminer
15 la responsabilité de tout un chacun pour ce qui est de l'inexactitude des
16 données fournies, il s'agissait de s'occuper des lacunes, parce que
17 l'attribution des grades ça génère de gros mécontentements si cela ne
18 s'effectue pas en application des règles. Il fallait qu'il y ait une
19 formation scolaire, le temps passé au sein des rangs de l'armée croate, la
20 façon dont les commandements ont été effectués et le caractère moral.
21 C'était les quatre éléments principaux pour ce qui est de l'attribution des
22 grades. C'était un problème majeur à l'époque, et nous avons dû investir
23 bon nombre d'efforts afin d'éviter du mécontentement au niveau des
24 personnes qui avaient fait la guerre jusque-là.
25 Q. Bien. Penchez-vous un peu plus loin, sur le 3D00897.
26 R. Non, 3D003685. C'est important, non pas pour ce qui est des activités
27 de propagande où je m'adresse au général Janko Bobetko pour ce qui est de
28 lui demander d'autoriser mon employé, un dénommé Dosen, à faire ceci ou
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1 cela. Il s'agit du sud de Dubrovnik, et M. Jevren Brkovic est l'un des plus
2 connus ou des plus célèbres des poètes monténégrins, et en compagnie de
3 Dosen, il devait aller dans les rangs de l'armée croate pour parler, pour
4 dire que ce n'était pas la faute aux Monténégrins s'il y a eu attaque de
5 Dubrovnik; que cela faisait partie d'une politique où les gens avaient été
6 mobilisés, où s'étaient présentés en tant que volontaires, mais qu'on ne
7 pouvait pas faire ou culpabiliser le peuple tout entier. M. Jevren Brkovic
8 qui se trouvait à l'époque en Croatie voulait en sa qualité de Monténégrin
9 s'adresser à ces gens, et leur dire qu'il était contre ce type de
10 politiques.
11 Autre chose, M. Brkovic Jevren, c'est soit dit en passant une personne que
12 je connaissais bien longtemps avant la guerre. Il avait créé une
13 association de l'amitié monténégrino-croate bien avant la guerre. Voilà ce
14 que je voulais dire.
15 Q. Je crois que maintenant le 3D00897 devient intéressant.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme on a le document sous les yeux, je voudrais
17 vous poser une question d'ordre technique sur le cachet. Vous voyez, il y a
18 votre signature et il y a un cachet. Il y a donc assistant du ministre de
19 la Défense, major général Slobodan Praljak. Je vois sur le cachet le numéro
20 25. Alors là, je suis un peu étonné, comment se fait-il qu'il y a ce numéro
21 25 sur ce cachet ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, pour ce qui est des
23 cachets et des numéros, je n'en sais rien. Je ne prêtais tellement pas
24 attention à la chose, que je ne connais pas du tout les cachets. C'est
25 probablement Dosen qui a apposé ce cachet, il était chargé de l'une des
26 parties, l'un des segments du IPD, mais pas le IPD entier. Il devait y
27 avoir pas mal d'intervenants au niveau du IPD. Pendant toute cette durée de
28 temps, je ne me suis jamais penché sur le numéro du cachet. Pour moi, ça
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1 n'avait pas aucune importance. Tout ce que je pourrais vous répondre serait
2 dénué de connaissance en la matière.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous signez, c'est très difficile à vous
4 rappeler ce que vous avez fait il y a 15 ans, moi-même, j'en serais
5 incapable, mais peut-être que votre mémoire est supérieure à la mienne.
6 Quand vous signez, est-ce que le cachet est apposé avant la signature ou il
7 est apposé après par votre secrétaire ou votre adjoint ? Quand on vous
8 présente le document à signer, est-ce qu'il y a déjà le cachet ou le cachet
9 est mis après ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Il est certain que le cachet a été mis après.
11 Je signais les documents, je prenais lecture de la teneur pour savoir de
12 quoi il s'agissait. Ce sont des choses convenues déjà. Je signais, et après
13 je ne prenais plus soin de tout ce qui se passait par la suite au niveau
14 des formalités. J'étais un peu à l'extérieur de tout cela, avant la guerre
15 et pendant la guerre aussi. Je n'aurais jamais été un bon employé parce que
16 de ce point de vue, je n'étais pas bon et consciencieux du tout.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
18 Maître Kovacic.
19 M. KOVACIC : [interprétation]
20 Q. Alors le document que j'ai évoqué tout à l'heure, le 00897, c'est daté
21 du 11 juin 1993, cela nous parle d'éléments caractéristiques au niveau du
22 travail effectué.
23 R. Vous avez dit 897 ?
24 Q. Oui. C'est trois ou quatre documents après celui qu'on vient de voir.
25 R. Peut-être ici, Monsieur Kovacic, pourrions-nous ou plutôt je
26 préférerais sauter par moi-même si vous n'y voyez pas d'inconvénients.
27 Q. Faites. On veut montrer les tâches caractéristiques ou les choses
28 intéressantes qui s'étaient produites, vous pouvez les choisir vous-même.
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1 R. Le 3D00875 maintenant. C'est une demande -- c'est vous qui allez le
2 faire ?
3 Q. Oui, on l'a mis de côté, Mon Général. C'est ma consoeur qui vous posera
4 des questions à ce sujet.
5 R. Alors je m'excuse. Passons donc comme vous l'avez dit au 3D00897. Il y
6 a une université militaire croate qui a demandé à ce qu'une émission soit
7 faite en studio de la télévision. Je n'étais pas d'accord parce que le
8 studio de la télévision avait déjà été mis en place pour les besoins de
9 l'armée croate. On ne pouvait pas en avoir deux parce qu'on n'avait pas les
10 moyens. Il fallait donc utiliser celui qui existait déjà.
11 Q. Fort bien. Passons au document suivant juste après, le 3D00903. C'est
12 un sujet tout à fait autre. Pourquoi est-ce que vous en occupez vous-même ?
13 R. Ces activités psychologiques et informatives ultérieurement politiques,
14 telles que qualifiées par certains par la suite, c'était à un niveau où des
15 gens au niveau gouvernemental venaient s'adresser. Il y avait des gens de
16 l'ambassade qui demandaient à ce qu'on se concentre sur des thèmes
17 politiques, pour voir un peu ce que la Croatie pensait. On venait
18 s'adresser, c'était par exemple le gouvernement qui nous faisait parvenir,
19 à notre équipe et à moi-même, tous ces aspects-là. J'étais censé résoudre
20 avec M. Kirin un problème évoqué par le vice-premier ministre, M. Vladimir
21 Seks.
22 Q. Peut-être est-ce une bonne démonstration pour ce qui est de ce que vous
23 avez dit tout à l'heure, à savoir ce 3D00904. Il y a l'Organisation mère
24 des émigrés croates qui vous convie à assister à une réunion --
25 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi.
26 Général Praljak, le document précédent, d'après ce dont je dispose dans mon
27 dossier, est une lettre d'accompagnement qui ne comprend pas le corps même
28 du courrier. Quelle est l'information qui est transmise ici par ce courrier
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1 ? Je ne vois pas du tout quelle pertinence ceci présente.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ce n'est pas si pertinent
3 que cela, à ceci près que le document montre à quel point des tâches
4 diverses aboutissent à cette section du ministère. Si je devais amener
5 l'ensemble des documents, cela représentera à peu près le volume d'un
6 camion, j'imagine. C'est juste à titre informatif pour vous montrer quelle
7 est la diversité des problèmes qui nous incombent et à quel point le
8 système n'est pas bien organisé, car M. Kirin, par l'intermédiaire de
9 relations, s'est adressé au premier ministre, et ce dernier s'est ensuite
10 adressé au ministre du gouvernement, ensuite la secrétaire de M. Susak
11 s'adresse à moi pour que je m'en acquitte, et cetera. Cela montre la façon
12 dont ce système est désorganisé, il faut passer par des liens transversaux
13 pour arriver à quelque chose.
14 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Juge, j'essayais de gagner un
15 petit peu de temps en posant ma question initialement, mais nous venons d'y
16 passer quelques minutes. Le but est de montrer que le général Praljak, à
17 cette époque-là à Zagreb, s'acquitte de ces tâches en tant qu'assistant du
18 ministre, et qu'il lui incombe toutes sortes de tâches. Ce qui est
19 essentiel c'est qu'à cette époque-là au sein du ministère de la Défense à
20 Zagreb, il n'a pas pour responsabilité de maintenir un lien permanent entre
21 le HVO et le ministère de la Défense, comme l'affirme l'Accusation. On
22 pourrait imaginer comme l'affirme l'Accusation que même dans cette période
23 où il séjourne à Zagreb, il se livre en fait à des activités de
24 coordination entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. Nous allons
25 démontrer que ce n'est pas vrai, et qu'il lui incombe toutes sortes de
26 tâches.
27 En passant, nous pouvons voir deux autres éléments à partir de ces
28 documents; le général Praljak passe un certain nombre de journées à Zagreb,
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1 pendant cette période-là il n'est pas sur le terrain, nous le montrerons,
2 et ensuite certaines affaires au sein de ce secteur de l'IPD sont traitées
3 en tant qu'affaires qui n'ont absolument aucun rapport ni avec l'armée ni
4 avec son état-major principal, comme cela a été le cas plus tard lorsqu'il
5 s'agissait des négociations avec l'ABiH. Ce modèle n'a en rien été
6 transposé.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce document, vous me confirmez qu'il est bien
8 daté du 23 juin 1993 ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, quand je vous interrogerai au
11 fond, comme je vous l'ai indiqué, pour moi vous êtes un grand mystère pour
12 la période antérieure au mois de juillet. Nous savons que vous avez pris
13 vos fonctions de commandant du HVO au mois de juillet jusqu'au 8 novembre
14 1993. Le grand mystère c'est qui êtes-vous avant le mois de juillet, là, je
15 découvre ce document 24 juin 1993. Ce document est envoyé à l'assistant du
16 ministre de la Défense. Donc le 24 juin 1993, vous êtes juridiquement
17 ministre adjoint de la Défense. Mais nous le savons parce que vous nous
18 l'avez dit, vous étiez également sur le champ de bataille en Bosnie-
19 Herzégovine. Voilà, vous voyez ce document, on essaie de comprendre que
20 faisiez-vous exactement dans l'une ou l'autre des fonctions.
21 Sans conteste, cette lettre qui vous est envoyée par le chef de
22 cabinet du ministre, le Pr Zoric, établit que vous aviez une fonction
23 officielle au ministère de la Défense de la République de Croatie. Au mois
24 de juin nous savons également que vous étiez sur le théâtre d'opérations en
25 République de Bosnie-Herzégovine. Voilà un mystère qu'il faudra éclaircir.
26 Ce document me permet de vous poser la problématique mais on aura
27 l'occasion d'y revenir. Je ne vous demande pas de répondre dès maintenant
28 parce que nous aurons largement le temps de préciser tout cela.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, nous aurons le temps,
2 mais je voudrais le dire de façon très simple. Nous avons ici le mois de
3 juin, et c'est le 24 juillet que j'ai pris mes fonctions, bien que juste
4 après ce 23 juin, peut-être le jour même ou le lendemain, je me rappelle
5 qu'à la fin de ce mois j'étais à Boksevica, mais je n'avais aucune fonction
6 à l'exception de deux occasions où le Dr Franjo Tudjman et Alija
7 Izetbegovic m'ont prié de me rendre sur place afin d'œuvrer à l'apaisement.
8 Il n'y a pas de mystère. Ce que je faisais c'était simplement la
9 chose suivante. Je montais en voiture pendant une dizaine d'heures pour me
10 rendre en Bosnie apporter mon aide de quelque façon que ce soit, et vous
11 verrez les différents endroits que cela représentait, et comment je suis
12 venu en aide. Ça pouvait durer cinq jours, dix jours, et dans ces occasions
13 je ne demandais pas de permission. Le ministre était au courant de mon
14 départ. D'une certaine façon je partais et c'était une forme de fuite.
15 Pourquoi étais-je en position de le faire ? Les employés de l'IPD
16 représentaient une excellente équipe, des gens d'un très haut niveau, il
17 s'agissait d'un secteur très bien organisé au sein duquel se trouvaient des
18 personnes qui étaient en majorité détentrices de diplômes, qui avaient des
19 titres. Je me suis toujours tenu à ce principe simple, à savoir que si l'on
20 souhaite que quelque chose marche bien, il faut que les personnes qu'on
21 choisit pour faire partie de son équipe doivent être autant que possible
22 meilleures que nous-mêmes, afin qu'on puisse leur confier un certain nombre
23 de tâches pour ne pas avoir à se mêler de toutes ces différentes tâches. On
24 les confie à des gens qui connaissent bien leur métier.
25 Alors je ne nie -- je ne nie rien en la matière et vous verrez combien de
26 fois je suis allé en Herceg-Bosna sur le théâtre des opérations. Mais ce
27 qui pouvait se passer c'est que je passais une journée à conduire pendant
28 dix heures, être quelques jours -- être deux jours sur place, repartir,
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1 signer des documents, participer à des réunions, repartir à nouveau, et
2 cela des dizaines de fois.
3 C'est cela la réponse à ce mystère qui vous semble exister ici. A
4 travers les documents nous verrons quelle était l'intention subjacente, à
5 savoir faire en sorte qu'il n'y ait pas d'affrontement et que soit mis sur
6 pied un commandement conjoint entre le HVO et l'ABiH, intervenir de mon
7 propre chef mais avec l'accord du général Petkovic qui était au courant, et
8 cela de l'échelon du soldat jusqu'à celui de la personne qui pourrait être
9 un échelon plus élevé et qui était en mesure de résoudre les problèmes qui
10 se posaient.
11 M. KOVACIC : [interprétation]
12 Q. Général, si vous n'avez pas d'autre propositions, je voudrais que nous
13 passions au 3D00907, s'il vous plaît.
14 R. Mais nous n'avons pas terminé avec le 3D00904 ou -- c'est l'assemblée
15 de l'Association de la diaspora croate, l'assemblée mondiale, il faut dire
16 que la diaspora croate est aussi importante que la diaspora polonaise,
17 irlandaise, ou macédonienne en nombre de personnes, et aussi bien la
18 première que la seconde génération de Croates dans de nombreux Etats du
19 monde, ont procédé à l'organisation de ce congrès. Ils voulaient apporter
20 une aide financière et humanitaire à la patrie sous forme d'investissements
21 également et soutenir le retour d'émigrés en Croatie, tout comme promouvoir
22 la vérité. J'étais très attaché à cela, j'estimais que c'était une tâche
23 particulièrement importante.
24 Q. Le 3D00904, c'est une invitation qui vous est adressée pour vous rendre
25 à ce congrès. Vous rappelez-vous y avoir assisté ?
26 R. Il me semble que non.
27 Q. Selon ce que nous avons sous les yeux, ce congrès aurait dû se tenir du
28 2 au 4 juillet 1993, mais vous ne vous en rappelez pas bien, n'est-ce pas ?
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1 R. Non.
2 Q. Très bien. Sautez maintenant un document, je pense qu'il n'est pas
3 important, et passons maintenant au 3D00907, en page 2 directement. C'est
4 le 12 juillet 1993, c'est un communiqué officiel qui est signé par vous.
5 Est-ce que vous pourriez très brièvement dire pour les Juges de la Chambre
6 ce dont il s'agit ici ?
7 R. J'ai adressé un communiqué officiel à toutes les chaînes de télévision,
8 de radio, aux médias, et je leur ai fait état d'une information que nous
9 avions reçue en provenance des services de renseignements militaires, à
10 savoir l'existence d'une organisation sous le nom de Stit, ou "bouclier,"
11 qui représentait une tentative de former des unités de volontaires venant
12 de l'armée serbe. Il est dit ici également qu'au sein du camp Alpha [phon],
13 à Benkovac en Croatie, selon le capitaine Dragan, des actions terroristes
14 étaient prévues et seraient dirigées contre la République de Croatie. Je
15 peux témoigner qu'en effet, il y a eu des opérations de cette nature.
16 Q. Très bien. Passez maintenant au document suivant, le 3D01222. Ce
17 document ne porte pas de date, mais le numéro qui figure dans le cachet de
18 réception du ministère nous montre qu'il s'agit en tout état de cause du
19 mois de mai ou du mois de juin 1992. De quels problèmes ou difficultés
20 s'agit-il ici une nouvelle fois en République de Croatie ?
21 R. Je ne sais pas, je ne vois pas la date, mais je pense que cela devra
22 même être plutôt du côté du mois de juillet 1992. Une des tâches dont je
23 m'acquittais était la suivante, il était strictement interdit de donner une
24 orientation politique aux choses au sein de l'armée croate. Nous avons
25 simplement adopté ce modèle fréquent en Occident au terme duquel les
26 soldats étaient des citoyens en uniforme qui devaient accomplir son devoir
27 conformément aux lois qui en disposaient. L'un de nos principes était que
28 ni les soldats ni les officiers n'avaient le droit de se montrer en public
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1 lors de réunions portant leur uniforme. Cependant, cela est malgré tout
2 arrivé. Au premier point, je dis qu'il s'agit d'une infraction, une
3 infraction disciplinaire contre laquelle une procédure sera engagée. Au
4 point 2, je parle du départ de volontaires en Bosnie-Herzégovine et des
5 problèmes qui s'y rapportent. Bien entendu, nous souhaitions qu'un grand
6 nombre de Croates en Bosnie-Herzégovine et un bon nombre de Musulmans aussi
7 qui se battaient au sein de l'armée croate, dans cette situation où
8 Sarajevo était encerclé, où 60 % et même plus du territoire était occupé et
9 où il existait un danger imminent de constater l'incapacité à défendre le
10 reste du territoire. J'explique ici que c'est notre devoir que de venir en
11 aide à ces personnes qui souhaitent défendre et protéger la Croatie. Cela -
12 -
13 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, excusez-moi de
14 cette interruption. J'aimerais simplement revenir à l'une de vos
15 déclarations ici. Vous avez dit il y a quelques minutes que "lorsque la
16 Bosnie-Herzégovine s'est retrouvée menacée et qu'elle a perdu son statut
17 d'Etat," c'est ce que vous dites. Je voulais simplement mentionner le fait
18 que vous exagérez quelque peu en disant que la Bosnie-Herzégovine avait
19 perdu son statut d'Etat, parce que malgré les circonstances bien connues
20 par ailleurs, l'Etat de Bosnie-Herzégovine avait été reconnu en tant
21 qu'Etat au titre de la charte des Nations Unies par la communauté
22 internationale. C'est la seule chose que je souhaitais dire. Cela étant,
23 votre déclaration couvre un point important.
24 Merci.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, demandez aux
26 interprètes, mais je n'ai pas dit cela. J'ai dit qu'à ce moment-là la
27 Bosnie-Herzégovine a presque perdu sa qualité d'Etat, car Sarajevo était
28 encerclé et 70 % du territoire était déjà occupé. Je n'ai pas dit que la
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1 Bosnie avait perdu sa qualité d'Etat. Je sais très bien que ce n'était pas
2 le cas et qu'elle s'est maintenue, la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat.
3 Donc, ce que j'ai dit c'est qu'à ce moment-là, c'est parce que les forces
4 présentes sur place étaient faibles et non organisées que se présentait un
5 danger imminent de voir les Serbes occuper l'ensemble de la Bosnie-
6 Herzégovine, d'où la volonté de la Croatie d'apporter son aide par
7 l'intermédiaire de volontaires et de tous les moyens matériels disponibles
8 pour apporter une aide sur place. Il n'y avait pas de protestations autour
9 de ces volontaires, mais les parents protestaient, car à cette même période
10 à peu près, le ministre Susak --
11 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, votre réponse me
12 convient tout à fait. Merci, merci.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je suis toujours dans les mystères.
14 Je viens de regarder avec intérêt ce document où il est question des
15 volontaires, et en lisant ce document, je me pose la question suivante à
16 laquelle vous allez certainement pouvoir apporter une réponse.
17 A l'époque où cette lettre est rédigée, sans conteste la République a
18 à faire face à un ennemi qui est les agissements de la République de
19 Serbie. Donc il y a une situation conflictuelle assez importante, et la
20 semaine dernière vous nous avez, à partir d'une carte, montré tous les
21 mouvements de troupes. C'était assez impressionnant, et nous avons bien
22 compris comment ça se passait sur le terrain.
23 Sans prendre un cas particulier - je pourrai, mais je préfère rester
24 au niveau général - imaginons que dans une localité X il y a les forces
25 croates face aux Serbes, il y a une ligne de front peut-être mouvante, mais
26 il y a une ligne de front. Voilà que parmi les forces croates des
27 volontaires décident, en application du document qu'on a sous les yeux, de
28 partir aider leurs frères croates en Herzégovine, et décident d'être
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1 volontaires et d'aller rejoindre le HVO.
2 En termes militaires, comment le ministère de la Défense arrivait à
3 résoudre la situation où une partie des forces combattantes décidait du
4 jour au lendemain de quitter les lieux pour aller en Herzégovine ? Est-ce
5 que ça ne vous posait pas des problèmes au niveau logistique, des problèmes
6 au niveau de la défense ? Sinon, c'est le chaos. Chacun décide de combattre
7 où il veut, et du jour au lendemain quitte le front où il est assigné pour
8 aller rejoindre une autre troupe. Alors comment vous avez résolu ce
9 problème ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
11 Juges, il faut garder à l'esprit un fait essentiel. Le 3 janvier 1992, la
12 Croatie a signé un accord de cessez-le-feu, et la FORPRONU arrive et se
13 place sur la ligne de démarcation entre les Croates et les Serbes insurgés.
14 A ce moment-là, le besoin pour l'armée croate de se trouver sur les lignes
15 de front est devenu particulièrement moindre. De plus, par l'arrivée de la
16 FORPRONU le 15 février, tous les pays de l'Union européenne reconnaissent
17 la Croatie dans ses frontières existantes, ce par quoi la Croatie entre
18 dans une seconde phase. C'est un fait que les Serbes n'ont pas réalisé le
19 maximum de leur objectif. Des jeux politiques sont encore possibles là où
20 ils sont présents. Toutefois, la Croatie est alors reconnue dans ses
21 frontières internationalement établies en vertu du rapport Badinter.
22 Cependant, si la Bosnie-Herzégovine devait tomber aux mains des Serbes, on
23 ignorait quelle pourrait être la suite.
24 Donc si la Croatie, et nous verrons d'autres documents, laissait les
25 Croates et les Musulmans qui étaient payés au sein de l'armée croate aller
26 se battre en Bosnie-Herzégovine, cela aurait été conforme au but politique
27 de la Croatie et était également tout à fait compréhensible du point de vue
28 militaire. Si même, les 30 % restants de la Bosnie-Herzégovine qui
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1 n'étaient pas encore occupés, ou Sarajevo, devaient être finalement occupés
2 par les Serbes, dans ce cas-là, est faute d'une intervention de l'OTAN.
3 Mais ça, c'était une autre histoire et nous n'avions aucune garantie qu'il
4 y aurait un règlement de la part de la communauté internationale. En
5 d'autres termes, c'était dans l'intérêt de la Croatie que ces quelque 13
6 000 Croates de Bosnie-Herzégovine qui étaient au sein de l'armée croate, et
7 je vous ai présenté ces documents, que ces Musulmans puissent revenir se
8 battre dans les localités à partir desquelles ils étaient venus en Croatie.
9 C'est ma réponse à cette question.
10 Mais bien entendu, comme vous dites, il y a eu de nombreux problèmes
11 logistiques que nous avons eus à résoudre, que ce soit l'approvisionnement
12 en armes, en uniformes, le financement, et cetera, avec ce qui était à
13 notre disposition.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette longue réponse qui permet
15 d'éclairer certaines facettes du problème.
16 Maître Kovacic.
17 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais juste encore souligner une chose.
19 Cela c'est sans même envisagé le sort qui aurait été celui des
20 réfugiés en provenance de ce restant de la Bosnie-Herzégovine. Si les
21 Serbes en avaient pris possession, en plus des 500 000 réfugiés qui
22 représentaient déjà un fardeau énorme, nous aurions probablement dû
23 accueillir encore un afflux considérable de réfugiés supplémentaires.
24 M. KOVACIC : [interprétation]
25 Q. Très bien. Reportez-vous au 3D01676. C'est un des documents que j'ai
26 choisi. C'est encore un communiqué officiel signé par vous le 1er avril
27 1992.
28 R. Non, ce n'est pas ma signature ici. C'est quelqu'un qui a signé à ma
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1 place, mais manifestement nous étions en liaison. Un pays qui n'était pas
2 préparé à la guerre et dans lequel les gens souhaitaient tout simplement la
3 démocratie, et c'est l'inverse qui s'est produit, alors voilà ce qui s'est
4 produit, des hommes qui étaient sur telle ou telle ligne de front
5 s'adressaient à Radio Zagreb qui ensuite émettait telle ou telle chanson
6 pour eux. Ensuite, il y avait un salut, des souhaits qui étaient émis.
7 Donc, c'était le soldat un tel un tel dans telle unité, à telle position,
8 souhaite saluer ses parents et que l'on passe telle ou telle chanson.
9 Il faudrait avoir le registre, le programme complet de Radio Zagreb
10 et vous verriez la façon dont les unités croates étaient réparties. Donc
11 c'était suffisant d'écouter la radio de Zagreb. Nous ne nous imaginions pas
12 exercer un contrôle strict de tout cela. Il est écrit ici que certaines
13 informations étaient révélées ainsi par des soldats qui avaient été relevés
14 par d'autres, mais ces informations pouvaient mettre en danger la vie de
15 ceux qui étaient restés sur les positions en question. Donc, je leur
16 demande ici de réfléchir à la portée de leurs paroles et aux dangers que ça
17 peut représenter pour les soldats qui sont restés sur le front afin de ne
18 pas causer encore plus de dégâts.
19 Q. Très bien. Je pense que c'est le document suivant, le 3D01699. Il
20 s'agit d'une --
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Un autre mystère à éclaircir. C'est peut-être la
22 journée des mystères.
23 Ce document que vous ne signiez pas, vous nous l'avez dit, est envoyé
24 au ministre de l'Information, avec la mention à être envoyée aux médias.
25 C'est qui le ministre de l'Information en avril 1992 ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le sais, mais je ne me rappelle pas le nom.
27 Salaj. C'est M. Salaj, n'est-ce pas ?
28 M. LE JUGE ANTONETTI : M. Salaj. Bien. Comment se fait-il que, s'agissant
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1 d'un domaine militaire, vous ayez pris le soin d'adresser ce document au
2 ministre de l'Information pour que lui relaie votre position auprès des
3 médias ? Vous ne pouviez pas saisir, vous, directement les médias ? Il
4 fallait passer par le ministre de l'Information ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans tout Etat normalement constitué, non,
6 cela n'aurait pas été nécessaire, mais c'est là que nous retrouvons ce que
7 je dis régulièrement, à savoir qu'il faut connaître la mentalité qui
8 résulte de certaines circonstances historiques. La JNA était une
9 corporation à part dans l'ex-Yougoslavie, une entité à part qui avait ses
10 propres commissaires politiques, son propre comité exécutif. En termes
11 simples, l'armée était honnie. Nous devions faire attention et nous
12 efforcer de ne ressembler en rien à cette armée-là. Donc, j'évitais de
13 convoquer tel ou tel rédacteur pour leur dire : voilà, messieurs, les
14 exemples de choses qu'il ne faut pas faire et voici comment il faut
15 procéder, car notre souhait de nous distancier de cette façon dont était
16 organisée la JNA était si grande que je me suis adressé au ministre Salaj,
17 et c'est ensuite lui qui le relayait pour que l'on ne dise pas : voilà,
18 vous, maintenant vous comportez comme l'armée précédente, vous procédez de
19 la même manière, d'où la tonalité aussi de mon courrier qui est très douce.
20 Autrement, dans l'armée française, par exemple, cela aurait été un délit au
21 pénal que de révéler les positions d'une unité de l'armée croate en
22 l'espèce, pour autant que je le sache.
23 M. KOVACIC : [interprétation]
24 Q. Le document 3D01699, s'il vous plaît, à présent, c'est le document
25 suivant. La date est celle du 30 octobre 1992. C'est le chef du Grand état-
26 major, Anton Tus, qui s'exprime. C'est l'armée croate, donc c'est le Grand
27 état-major de l'armée croate, et il s'adresse directement au président de
28 l'Etat. En pièce jointe, une note qui, elle, porte sur certains des
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1 événements qui se sont produits dans la Posavina bosnienne. J'attire votre
2 attention encore une fois sur la date, c'est celle du 29 octobre 1992. Là,
3 le général Tus confirme un certain nombre de choses que vous avez abordées.
4 Ça nous permet de synthétiser un certain nombre de choses. Est-ce que vous
5 pouvez dire à la Chambre pour quelle raison le général Tus estimait que
6 ceci avait une importance telle que cela méritait d'être porté à
7 l'attention du président de l'Etat ?
8 R. Le général Tus, à ce moment-là il occupe le poste du chef du Grand
9 état-major de l'armée croate, et par conséquent, ce qui lui importe au
10 premier chef c'est le sort de la Bosanska Posavina, donc Derventa, Odzak,
11 toutes ces localités dont nous en avons parlé et qui sont menacées de
12 tomber de manière imminente. On essaie de sauver les meubles, car les
13 Serbes, ils vont atteindre la rivière Sava, et ils ont déjà pu tuer 500 ou
14 600 personnes à Djakovo, des enfants, et cetera, grâce à des tirs
15 d'artillerie.
16 Ce qu'on voit ici, c'est un exposé des problèmes comme il les voit. Il
17 demande en réalité qu'on définisse le rôle joué par le commandement du
18 théâtre d'opération en Slavonie, qui viendra à l'appui et de quelle manière
19 qu'au niveau de l'état-major ils se mettent d'accord sur toutes les actions
20 et les attributions du HVO d'Herceg-Bosna et de passer des accords avec le
21 HVO. Cela montre que le HVO ne commande pas, parce que pourquoi est-ce
22 qu'il y aurait des accords si ce sont eux qui ont le pouvoir d'agir ou de
23 décider ? Il veut savoir exactement comment il peut venir en aide au HVO.
24 Il demande que l'on définisse précisément l'appui sur le plan logistique,
25 donc, qu'est-ce qui passe par le truchement du ministère de la Défense de
26 la République de Croatie et quelle est la partie qui passe par le
27 représentant des forces armées de l'armée de Bosnie-Herzégovine. En fait,
28 ces représentants étaient nombreux et on les aidait par tous les moyens.
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1 Mais quand vous avez cette situation où vous avez trois ou cinq organismes
2 différents qui s'attèlent à la même chose, là, c'est le chaos qui
3 s'installe.
4 Et le général Tus est un représentant-type d'un système organisé en
5 bonne et due forme, qui était celui de la JNA. De toute évidence, il a du
6 mal à se repérer dans cette situation. Ça l'agace, et il exige que, d'une
7 certaine manière, qu'on lui donne des instructions précises et qu'on
8 définisse précisément ce qui se passe, comment il convient de procéder.
9 Donc, il demande que la coordination des opérations de combat soit réglée
10 au niveau du groupe de coordination des deux Etats, donc, bilatérale entre
11 la Croatie et la Bosnie-Herzégovine, et qu'on ne passe pas à des échelons
12 locaux, donc des représentants de l'armée BH et de l'armée croate. Donc, il
13 n'arrête pas de demander que l'ABiH, dans le cadre des accords signés par
14 Izetbegovic et Tudjman, et conformément à la logique qui voulait que l'on
15 agisse de manière conjointe, donc qu'on ait un commandement conjoint et des
16 représentants conjoints, qu'on puisse combattre ensemble l'ennemi commun de
17 la manière dont cela convient à l'armée croate. Et en particulier, à
18 Bosanska Posavina, il y a eu toutes sortes de messies et de petits chefs
19 autoproclamés. Il y avait beaucoup de désordre et tout simplement, c'est la
20 raison pour laquelle cette région est tombée.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, ce document est important parce
22 qu'il nous permet d'entrer dans le conflit armé international. Alors, ce
23 document, il y a deux lectures.
24 Il y a une première lecture qui est la suivante : La République de
25 Croatie agit directement au niveau de la République de Bosnie-Herzégovine
26 dans la zone Posavina dans laquelle se trouve, comme l'indique le document,
27 la 101e, 102e, 103e, 105e Brigades du HVO. Et ça, ça rentre dans la logique
28 du conflit armé international.
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1 Deuxième lecture qu'on peut avoir avec ce document : On découvre dans
2 ce document qu'il y a un coordinateur. Le coordinateur, son nom figure dans
3 le document, c'est Ivan Kovic, qui est président de l'assemblée de la
4 municipalité d'Odzak. Et apparemment, c'est lui qui fait le "go-between"
5 entre les uns et les autres. Mais alors, dans cette seconde lecture,
6 l'appui que la République de Croatie pourrait donner aux forces du HVO en
7 Posavina, est-ce que ce serait une collaboration, un soutien logistique qui
8 n'aurait rien à voir avec le conflit armé international, mais un
9 partenariat entre deux armées amies, d'un côté la République de Croatie
10 avec le général Tus, et de l'autre, le HVO Posavina ? Alors, quelle lecture
11 vous faites, vous, de ce document ? J'espère que vous avez compris ma
12 question.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Entièrement, Monsieur le Président. Je vous ai
14 entièrement compris, Monsieur le Juge Antonetti. Vous me corrigerez, mais
15 dans tout ce que j'ai lu, tout ce que j'ai eu entre les mains pour rédiger
16 ces documents que nous adressions à l'armée, portant sur le droit de la
17 guerre, le droit international, il y a quelque chose qui est appelé "champ
18 de bataille" ou "théâtre d'opérations" dans les documents. Si quelqu'un
19 vous attaque -- et les Serbes, quand ils attaquent, ils n'attaquent pas la
20 Bosnie-Herzégovine en particulier, et après la Croatie aussi en
21 particulier. Ce qu'ils veulent, c'est créer un territoire unique,
22 ininterrompu, pour eux. Mais s'il y avait une autre politique qui aurait
23 été menée, on aurait dû mettre sur pied un commandement conjoint
24 immédiatement entre l'armée croate et les forces armées de Bosnie-
25 Herzégovine. Cependant, M. Alija Izetbegovic, il a manqué de courage pour
26 ce faire. Il s'est dit que peut-être, de telle ou telle façon, finalement,
27 les Serbes reviendraient à la raison. Donc, il a signé un accord du mois de
28 juin, le seul accord entre Franjo Tudjman et Alija Izetbegovic sur la
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1 coopération frontalière, donc, de juin 1992. Et au terme de cet accord, il
2 est dit que l'armée croate se voit autorisée, même si elle ne le faisait
3 pas, d'agir dans des zones frontalières de Bosnie-Herzégovine, donc
4 d'intervenir, d'une certaine manière, dans ces zones-là.
5 Et ici, vous avez un autre point, en plus. Si vous avez une
6 artillerie qui tire sur vos civils dans les villes frontalières, Slavonski
7 Brod, Djakovo, et cetera, alors, d'après ce que j'en sais, vous êtes en
8 droit d'intervenir par rapport à la profondeur tactique, à savoir vous
9 devez chasser cette artillerie. Vous êtes en droit de chasser cette
10 artillerie pour qu'elle arrête de tuer vos civils. Mais ce n'était pas ça,
11 ce cas de figure, c'est autre chose encore. L'armée croate, en passant par
12 le coordinateur qui a été élu en Bosanska Posavina, elle agit par tous les
13 moyens sur le plan logistique. Et donc, elle permet aussi aux volontaires
14 de se rendre là-bas pour apporter leur assistance, aider le HVO à se
15 maintenir. Lorsque je dis le HVO, vous avez eu l'occasion de voir quel
16 était le nombre de Musulmans dans les unités du HVO sur ce territoire.
17 Donc, en fait, c'est une armée commune qui réunit les Croates et les
18 Musulmans -- et de leur apporter un soutien sur le plan de l'artillerie.
19 Donc, si vous avez l'armée de la Republika Srpska qui agit, et si un appui
20 artillerie est demandé depuis la République de Croatie, on était autorisé à
21 le faire, à accorder cet appui feu, mais rien de plus que cela. Et là, vous
22 avez une situation très claire et nette. Donc, vous avez le champ de
23 bataille qui est défini, vous avez les objectifs serbes qui sont définis,
24 le droit à la profondeur tactique si l'ennemi vise nos civils; et puis, il
25 y avait l'accord signé entre Alija Izetbegovic et Franjo Tudjman sur le
26 droit à des actions menées conjointement dans la zone frontalière avec la
27 République de Croatie qui a été attaquée dans cette zone-là.
28 M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
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1 M. Praljak, la première fois qu'il a parlé de ce document, il a mentionné
2 quelque chose que l'on lit expressément dans la ligne 4 en croate, et il me
3 semble que c'est le cas également dans la version anglaise. Vous avez ce
4 premier paragraphe, ligne 3 ou 4, 3D30-0190. C'est le numéro du prétoire
5 électronique. Et de manière explicite, il est dit ici que s'agissant de
6 cette réunion, vous avez la présence des représentants de la direction de
7 l'ABiH en plus du HVO.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi de dire autre chose.
9 Tout de suite après la perte d'une partie de la Bosnie-Herzégovine, à
10 l'exception de la toute petite partie qui est restée, M. Alija Izetbegovic
11 s'est rendu à Slavonski Brod, accompagné de tous ses collaborateurs. Il a
12 rencontré l'un des commandants et un certain nombre de personnalités de
13 Bosanska Posavina. Il leur a demandé pendant combien de temps encore ils
14 pouvaient résister à ces attaques serbes. Et là, il a fait une promesse. Il
15 a dit qu'il allait s'adresser à Sefer Halilovic pour lui demander d'envoyer
16 de l'aide, des effectifs, une brigade. Franchement, il était difficile de
17 comprendre cela, pour ne pas m'exprimer autrement. L'ABiH, si elle avait eu
18 la force, je ne dirais rien d'autre, mais depuis Tuzla, aurait pu agir et
19 contre-attaquer et alléger la tâche pour la Bosanska Posavina. Et puis,
20 j'aurais l'occasion de démontrer que Alija Izetbegovic pensait qu'un
21 certain nombre de brigades, je ne sais pas quelles brigades de Tuzla, de
22 Zenica allaient passer vers la Croatie en passant par la Bosanska Posavina.
23 Même à l'époque, je ne comprenais pas, je ne comprends pas encore
24 aujourd'hui.
25 Mais, toujours est-il qu'Alija Izetbegovic s'est rendu là peu avant
26 la chute et il s'est entretenu avec des représentants de l'ensemble des
27 forces du HVO. Je pense que là, on se réfère aux représentants du plus haut
28 commandement de l'ABiH, même si je ne sais pas exactement qui c'est.
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1 Q. Pour qu'on puisse suivre cet échange un peu mieux, est-ce que vous
2 pourriez, s'il vous plaît, Mon Général, nous situer un petit peu la date, à
3 quel moment est-ce que M. Izetbegovic s'est rendu à Slavonski Brod ?
4 R. Je pense que c'est quatre jours avant la chute définitive. Je ne me
5 rappelle pas exactement. Pardon -- je n'ai pas la date exacte. Mais la
6 date, c'est le début du mois de novembre, à peu près.
7 Q. Et l'année ?
8 R. C'est 1992.
9 Q. Voilà. Très bien. Alors, Mon Général, prenons à présent le document,
10 sept ou huit documents plus loin, 3D02593, 2593. Je pense que ce document
11 se prête bien à ce qu'on explique quelque chose, une situation inverse, en
12 fait, aux Juges de la Chambre. C'est un certain nombre d'équipements qui
13 arrivent en Croatie depuis la Bosnie-Herzégovine. C'est un document du 15
14 avril qui porte sur une réunion du 13 avril. Vous l'avez signé même si
15 votre signature n'est pas apposée sur le document. Pourriez-vous nous
16 expliquer plus en détail de quoi il s'agit ?
17 R. Oui. Vous avez à l'époque deux usines d'armement en Bosnie centrale
18 dont l'une se trouvait à Novi Travnik. Elles pouvaient produire des
19 mortiers, un certain nombre d'armes, pas beaucoup, mais ces réserves
20 anciennes avaient déjà été distribuées au HVO, des canons de 130-
21 millimètres, des systèmes de tir Oganj, et cetera. Et puis, lorsque je me
22 suis rendu en Bosnie centrale à plusieurs reprises, j'ai essayé de passer
23 un accord qu'il y ait un échange que lorsqu'ils ont un certain nombre de
24 choses, que ce soit donné à l'armée croate et qu'en échange, nous, on leur
25 donne autre chose, nitrocellulose, et cetera. Enfin, je ne voulais pas trop
26 rentrer dans les questions de produits chimiques, parce que je ne m'y
27 connais pas. Mais je sais qu'à Novi Travnik, il y avait un appareil très
28 cher qui servait au calibrage des tubes de canons. Donc, pendant que les
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1 tubes sont encore neufs, il permettait de l'amener à l'état de bien
2 fonctionner. Et vous avez là, Zagorec qui était notre chargé de logistique,
3 Gambiroza qui était chimiste, et puis, vous avez ce Nikola Krizanovic
4 [phon] qui était à l'époque directeur.
5 Q. De quoi ?
6 R. Directeur de Vitezit [phon].
7 Q. Donc c'est l'autre installation de production ?
8 R. Oui, oui, oui. Et là, ils ont passé des accords. Moi, j'ai joué le rôle
9 de médiateur. Je les ai mis en contact. Je sais qu'il y a eu des choses qui
10 ont été faites, mais à partir du moment où ils étaient réunis, je me
11 retirais parce que je n'avais plus vraiment de rôle à jouer, je n'aurais
12 rien pu apporter de plus. Mes connaissances ne me permettaient pas d'en
13 parler ni des substances ni des prix, et cetera.
14 Q. Mais indépendamment de cela, nous avons là ce document de 1993, je vais
15 vous poser une question de suivi. La Chambre sait pertinemment qu'en 1992
16 la situation est profondément différente par rapport à la guerre en
17 Croatie, en Bosnie, en particulier pour ce qui est de 1991, ceci est très
18 différent en Croatie et en Bosnie. Mais dès 1991, est-ce que vous savez si
19 la Croatie s'est procurée des produits, des explosives dans cette usine
20 Vitezit ?
21 R. Je ne sais pas, je ne suis pas au courant.
22 Q. Très bien.
23 R. Mais un document, 3D02505. Est-ce qu'on peut revenir un instant à ce
24 document. Je vois qu'il n'y a pas de date, mais peu m'importe. Juste pour
25 montrer l'intention qui était celle de l'armée croate, donc pour qu'un
26 certain nombre de dates importantes soit marqué de manière officielle,
27 militaire dans le cadre des programmes officiels mais sans débordement,
28 dans le cadre de célébrations. Et deuxièmement, on n'autorise pas le
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1 sponsoring pour ce type de manifestation. Donc ça, c'est un autre phénomène
2 qui s'était répandu à l'époque. Vous aviez des gens qui étaient un petit
3 peu d'humeur festive et ils se mettaient à célébrer, alors que la guerre
4 allait durer encore plusieurs années avant de se terminer. Donc, je leur ai
5 interdit de faire cela.
6 Q. Puisque vous étiez à cet exemple --
7 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre.
8 Est-ce qu'on pourrait avoir une idée de la date ? Si le général le sait,
9 quelle serait la date approximative de ce document ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Sans aucun doute, il s'agit de l'année 1992,
11 disons qu'il s'agit de l'automne où ça avait pris l'ampleur un petit peu,
12 ça a connu une escalade, ce phénomène de célébration. Juillet, août,
13 septembre, je ne sais pas exactement, plutôt août, septembre 1992.
14 M. KOVACIC : [interprétation]
15 Q. Mon Général, puisque nous venons de soulever cette question, 3D02860,
16 peut-être une situation comparable. Plusieurs documents plus loin.
17 R. Là, nous avons la date du 23 mars --
18 Q. 1992 ?
19 R. Oui, 1992. Donc, disons que je sois arrivé vers le 10 décembre et j'ai
20 été nommé assistant. Une dizaine de jours plus tard, j'envoie Pr Jurcevic
21 et je demande qu'il fasse une enquête sur tout comportement inacceptable
22 dans les rangs des soldats et des officiers. Et je demande qu'en l'espace
23 de 48 heures, on me fournisse un rapport officiel sur la nature et la
24 portée de ces événements. Et, je demande quelles sont les mesures qui ont
25 déjà été prises pour que je puisse moi, prendre la suite.
26 Q. Cela fait peu de temps que vous êtes nommé à ce poste, est-ce que cela
27 veut dire qu'en fait vous voulez prendre connaissance de la situation ?
28 R. Non, non, je sais quelle est la situation qui prévaut. Le rapport que
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1 j'ai reçu me dit que la situation n'est pas bonne. Et là, je demande des
2 compléments d'information et un certain nombre de mesures ont déjà été
3 prises, et je dis que je prendrais des mesures qui s'imposent, en plus, à
4 partir du moment où j'aurais eu ces compléments.
5 Q. Très bien. Plusieurs documents plus loin, 3D02 --
6 R. 878, qu'en est-il ?
7 Q. Oui, vous pouvez en parler si vous voulez. Mais j'essaie de ne pas
8 aller trop lentement.
9 R. Oui, d'accord mais vous avez vu.
10 Q. Quel est le document qui vous intéresse ?
11 R. C'est le document 3D02878.
12 Q. Très bien.
13 R. Nous avons eu ici un témoin et aussi des documents à l'appui, le
14 général Petkovic, Bruno Stojic et moi-même avions donné un camion
15 d'armement pour Sarajevo, pas mal d'armes. Ça ne suffisait jamais, mais
16 nous avons donné ce que nous pouvions. Là, c'est à peu près à un moment
17 comparable avec M. Vikic, nous nous étions remis en contact et là il est
18 question de M. Dragan Vikic, qui commandait les unités spéciales de l'ABiH
19 à Sarajevo -- j'ai écrit ici HVO parce que cela m'est plus facile, mais il
20 était le commandant des unités spéciales de la police de l'AbiH, et je
21 m'adressais au général Cermak, chargé de logistique à l'époque, de mettre
22 cela à ma disposition, et nous nous débrouillions pour faire suivre à
23 Sarajevo, s'il parvenait à envoyer un homme pour faire entrer cela dans
24 Sarajevo.
25 Q. Je pense qu'avant la pause nous pourrions examiner encore un document.
26 Prenez 3D02 --
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Il s'agit d'un document important qui appelle de ma
28 part une question. Ce document établit de manière formelle que vous
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1 adressez à Dragan Vikic, qui est chargé au sein de la République de Bosnie-
2 Herzégovine d'un secteur d'activités militaires, et vous fournissez des
3 RPG, des obus, de la nitroglycérine, et cetera.
4 Au moment où vous faites cet apport à la partie musulmane, est-ce que vous
5 aviez dans l'esprit qu'éventuellement les RPG, la nitroglycérine pourrait
6 un jour servir contre vous ou bien ça ne vous a absolument jamais venu à
7 l'idée ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Avec une très grande certitude de mes
9 connaissances de l'évolution probable des événements, je savais qu'une
10 partie de ces armes serait utilisées contre nous. En fait, dans des choses
11 qui ne sont pas des mathématiques et qui relèvent des phénomènes sociaux,
12 on ne peut pas quantifier mais dans la mesure où cela est possible, ce que
13 je savais c'était que des armes que nous remettions à l'ABiH allaient en
14 partie être utilisées contre nous. De même, nous savions que les armes que
15 nous leur donnions allaient être utilisées pour défendre Sarajevo, Tuzla,
16 et nous pensions que la Bosnie orientale allait pouvoir se défendre, en
17 particulier Gorazde, Foca et Srebrenica, finalement comme je vous l'ai déjà
18 dit c'était des décisions très difficiles à prendre, mais notre orientation
19 de fond était d'essayer de faire en sorte que ces gens comprennent que si
20 on leur donne des armes on ne peut pas être leur ennemi, que ce soit sur
21 papier ou en réalité.
22 Il n'est pas vrai, Messieurs les Juges, que l'ABiH était l'ennemie, comme
23 l'a dit ici un témoin de Tuzla. Nous n'avons pas fait la guerre sur la
24 totalité du territoire les uns contre les autres. Là où nous avons pu
25 calmer cela, comme c'était le cas en Posavina, à Tuzla, nous avons calmé
26 les esprits. Mais il y avait une partie de l'ABiH qui nous a attaqué et là
27 les choses se sont produites au sein du Corps de Zenica et cette partie de
28 Konjic où là ça s'est étendu sur Mostar, et ça a duré moins longtemps que
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1 prévu, et nous avons tout fait pour l'empêcher. Nous n'avons pas lancé
2 d'offensive. Nous nous sommes défendus, avec énormément d'efforts déployés
3 par moi-même et tous mes collègues, dès 1992. Moi-même, dans des entretiens
4 avec M. Alija Izetbegovic, j'ai dit il nous faut mettre sur pied un
5 commandement conjoint parce qu'avec ces deux armées nous n'allons pas
6 pouvoir préserver la paix sur la totalité du territoire.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : J'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet, à partir
8 des transcripts présidentiels de toutes les réunions auxquelles vous avez
9 participées avec feu Tudjman, sur ces aspects, mis vous allez peut-être
10 pouvoir me répondre. Vous étiez ministre adjoint à un niveau très élevé de
11 la Défense de la République de Croatie. Est-ce qu'au sein du département de
12 la Défense, vous aviez des réunions dont nous n'avons pas les documents,
13 mais est-ce qu'il y avait des réunions d'évaluation sur les risques
14 encourus d'aller donner des armes à l'ABiH avec la possibilité qu'un jour
15 ils se retournent contre vous, et vous l'avez dit via Zenica et le 3e
16 Corps ? Est-ce que vous avez évalué cela de manière sérieuse, est-ce que
17 tout a été bien réfléchi, car on a l'impression que vous étiez devant la
18 triple alternative; faire face un, à l'offensive des Serbes qui
19 encerclaient Sarajevo; deux, vous aviez à défendre vos compatriotes croates
20 qui étaient dans Sarajevo et dont nous savons qu'il y en avait un certain
21 nombre; et troisièmement, vous aviez la question plus compliquée des
22 rapports au sein de la République de Bosnie-Herzégovine entre les Croates,
23 les Serbes et les Musulmans. Au niveau militaire, est-ce que tout ça a été
24 évalué, j'allais dire de manière scientifique ou bien, tous ces faits à la
25 va-vite dans l'improvisation ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, je ne sais pas exactement
27 parce que je n'ai pas été souvent à ces réunions du Grand état-major de
28 l'armée de Croatie, mais ce que je sais pour sûr c'est que le chef de
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1 l'Etat, Franjo Tudjman et le gouvernement, les ministres que je contactais,
2 le ministère de l'Intérieur, le ministère des armées, Gojko Susak, moi-même
3 en particulier et le président Tudjman ainsi que le ministre Susak étions
4 au courant de chaque partie des armes -- enfin en global pour savoir où ça
5 allait, être chargé, et moi j'y ai participé par l'attribution
6 d'autorisation. Après on voit Praljak, Susak, le général Zagorec aussi qui
7 avait le droit de signer. On en a parlé de façon tout à fait sérieuse, et
8 nous étions conscients de toutes les séquelles possibles.
9 Vous verrez que dans un transcript présidentiel, Gojko dit au
10 président Alija, nous avons ici des armes et des avions, et Praljak est en
11 train de pisser du sang là-bas pour qu'on signe un traité de paix avec le
12 commandement. Si tu ne veux pas, je ne laisserai pas partir les armes.
13 Enfin la situation pour sûr était très frustrante. Il y avait des moments
14 où les gens disaient, vous n'allez quand même pas nous tuer avec nos
15 propres armes, cette situation émotionnelle durait 15 minutes, une demi-
16 heure et puis après vous reveniez à la réflexion rationnelle,
17 indépendamment de la difficulté qu'on pouvait avoir à voir des soldats se
18 faire tuer sous nos ordres par des armes que vous aviez laissées passer à
19 la partie adverse. Ça a été une chose des plus difficile, très difficile.
20 Mme TOMANOVIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président,
21 une rectification importante, ligne 24 à ligne 25. On dit qu'il s'est
22 adressé au président de l'Albanie. Or il fallait entendre au président
23 Alija, page 35. Alija Izetbegovic, page 34, lignes 24 à 25.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement je l'avais noté. Nous allons faire la
25 pause de 20 minutes.
26 L'INTERPRÈTE : De la cabine française à 15 heures 35, 48, correspondant à
27 la page 31 lignes 14, 15 du compte rendu anglais, remplacer "certains
28 étaient d'humeur festive" par "il y avait des personnes dont on aurait pu
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1 dire que la gloire leur était montée à la tête.
2 --- L'audience est suspendue à 15 heures 49.
3 --- L'audience est reprise à 16 heures 11.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.
5 Maître Kovacic.
6 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Q. Général Praljak, ouvrez, s'il vous plaît maintenant, le document
8 suivant qui est le 3D02884. Il s'agit d'un document daté du 12 avril. Ce
9 qui importe ici, c'est non pas la première page, mais les pages suivantes.
10 C'est votre lettre du 5 avril dont il s'agit.
11 R. Oui, je me suis trompé lorsque j'ai commencé à en parler plus tôt. La
12 section à la tête de laquelle je me trouvais, et ce, depuis mon arrivée,
13 peut-être lors des 20 premiers jours, a commencé à travailler à la
14 formation des soldats croates en matière de droit international. Nous avons
15 ici un document de 4 avril 1993. A cette date-là, nous avons déjà signé un
16 accord avec le CICR afin que l'armée croate puisse bénéficier d'une
17 formation continue en la matière. Il est dit ici à quels endroits les
18 séminaires seront tenus : à Osijek, Zagreb, Gospic et Split. Il s'agissait
19 des centres des zones opérationnelles. Ensuite, à cette université
20 militaire croate, puis un séminaire pour les officiers hauts gradés aux
21 dates du 26 et 27 mai, et là je demande à ce que l'on procède à
22 l'organisation de ces séminaires.
23 Comme bon nombre de témoins l'ont dit, je me suis efforcé -- et on l'a
24 fait, cela. Une partie de ces livrets qu'on a fait imprimés était envoyée
25 régulièrement au HVO par le biais de M. Bruno Stojic et Milivoj Petkovic;
26 plus par M. Stojic, parce que lui était chargé. Il avait un IPD dans son
27 segment, dans son secteur, et on s'est efforcé à faire en sorte qu'ils
28 soient mis au courant. Donc, je mettais 10 000 exemplaires pour les envoyer
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1 là-bas, afin qu'ils mettent au courant les effectifs autant que faire se
2 pouvait et autant que je disposais de ces tracts, livrets, manuels et du
3 reste.
4 Q. Pour le besoin du compte rendu, je voudrais dire que ces livrets de
5 propagande que vient de mentionner M. Praljak, il y a un 3D00840 qui s'y
6 réfère. En outre, il y en a un autre, IC 00473. On n'a pas à revenir
7 dessus, mais ce sont ces livrets-là que le général mentionne. C'est l'un
8 des exemples. C'est déjà une pièce à conviction. Je ne veux pas m'y
9 attarder outre mesure. On peut le voir en affichage électronique si
10 nécessaire, mais j'estime que point n'est nécessaire d'y aller maintenant.
11 Mon Général, ouvrez donc le document suivant, 3D02886. Il s'agit d'un
12 document daté du 14 janvier. Vous l'avez signé vous-même. Il s'agit d'un
13 exemple de tâches variées que vous avez effectuées pour ce qui est de
14 contacts avec l'étranger. Dites-nous, je vous prie, de quoi il s'agit au
15 juste ?
16 R. Des entretiens de ce genre au niveau des organisations internationales,
17 des ambassades qui avaient des représentations en Croatie et des attachés
18 militaires, il y en a eu vraiment beaucoup, et tous venaient s'informer,
19 apprendre, à voir, et cetera. Je dois dire que bon nombre d'entre eux
20 étaient fort mal informés, chose qui est tout à fait compréhensible pour ce
21 qui est de la façon dont les circonstances se présentaient en Yougoslavie
22 et de quoi il s'agissait dans cette guerre. Mais voilà dans ce document,
23 j'informe le ministre Gojko Susak, ainsi que le chef du SIS, M. Miroslav
24 Medjimorec, de la teneur de mes entretiens avec cette fondation suédoise
25 transnationale, plutôt. J'indique qu'ils se sont intéressés à la non-
26 réalisation du plan Owen notamment, puis ils se sont intéressés aux
27 perspectives de l'intervention suivie de la FORPRONU, pour voir comment les
28 autorités en Croatie voyaient les éclaircissements apportés au sujet de la
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1 situation militaire et politique. On posait aussi la question de
2 l'utilisation des unités militaires de la Croatie en Bosnie-Herzégovine, et
3 ainsi de suite. Je leur donnais des informations sur tous ces sujets en
4 expliquant les causes, la nature des choses. Bien entendu, ces entretiens
5 ont été plutôt longs et étoffés. Je suis ici en train de résumer leurs
6 teneurs.
7 Q. Bien.
8 M. KOVACIC : [interprétation] Mes collègues attirent mon attention sur les
9 problèmes de l'affichage électronique sur mon moniteur ici. Oui, M. Chuka
10 me fait signe.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, il y a un problème technique. Peut-être qu'à ce
12 moment-là on pourrait mettre le document sous l'ELMO.
13 M. KOVACIC : [interprétation] Oui. Le problème c'est que l'accusé ne voit
14 pas le document tel que montré, et je pense que c'est le cas pour vous
15 aussi.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : -- l'ELMO, on verra.
17 M. KOVACIC : [interprétation] Nous n'avons pas d'autres exemplaires à
18 disposition.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais moi, je vais mettre mon exemplaire sur le
20 rétroprojecteur.
21 M. KOVACIC : [interprétation] Peut-être que le général pourrait placer son
22 exemplaire sur l'ELMO.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour plus de précision, Monsieur le
24 Président, tout le système a cessé de fonctionner pour l'instant.
25 Voilà, ça y est, ça y est. Ça marche. Merci.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Un mystère de plus. Ça marche.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Si on n'avait pas posé la question, ça se
28 serait remis à marcher tout seul.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, est-ce que dois lire maintenant ce
2 document ?
3 M. KOVACIC : [interprétation] Les Juges disposent de ce document.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Bon.
5 M. KOVACIC : [interprétation]
6 Q. Document suivant, soit D08888 -- 28888. Il s'agit d'un communiqué qui
7 vous a été envoyé pour autorisation et vous l'avez renvoyé. En fait, de
8 quoi il s'agit ?
9 R. En effet, HINA, c'est l'agence de presse croate comme la TASS ou les
10 autres agences, ce sont des agences de l'Etat qui sont chargées de
11 l'information. Et là, j'informe du fait d'avoir reçu l'adjoint du ministre
12 polonais à la Défense, M. Grudzinski et les questions sont plus ou moins
13 les mêmes. J'indique que j'ai informé qui de droit au sujet de la situation
14 en Croatie et sur les points de vue relatifs à la mise en place de
15 l'autorité croate sur le territoire entier de la République de Croatie.
16 J'ai également indiqué qu'il n'y aurait pas de paix sur ces territoires-là
17 tant que la Serbie ne renoncerait pas à ses illusions portant sur la
18 création d'une Grande-Serbie sur les territoires des Etats voisins. Donc à
19 chaque fois, toujours en tout endroit, la Bosnie-Herzégovine est indiquée
20 comme étant un Etat à part et la Croatie comme Etat à part. Et M.
21 Grudzinski fait preuve de compréhension. Il comprend la sensibilisation de
22 la Croatie pour ce qui est de la mise en place ou l'établissement de sa
23 souveraineté sur le territoire entier de son Etat, et il ne s'agit que de
24 cela.
25 Q. Oui, merci.
26 M. KOVACIC : [interprétation] Je voudrais qu'on rectifie ici au compte
27 rendu 3D02888.
28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai une question, si vous le
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1 permettez.
2 Au milieu de ce paragraphe, il est dit que vous, M. Praljak, avez
3 informé M. Grudzinski sur, je cite : "Le rôle des forces de protection des
4 Nations Unies dans la mise en œuvre du plan Vance-Owen." Avez-vous vraiment
5 informé M. Grudzinski et avez-vous parlé du fait que ce plan n'avait pas
6 été ratifié et qu'il était dépourvu de force juridique ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout le monde le savait, cela. Moi, je n'avais
8 personne de particulier et tous savaient qu'il s'agissait là d'un processus
9 où rien n'était achevé. Enfin, rien n'était achevé, mais toujours est-il
10 que j'ai indiqué, au tout début du procès, la partie croate en Bosnie-
11 Herzégovine ou en Croatie a toujours été la première à signer toute
12 proposition de la communauté internationale.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, ça, nous l'avons déjà entendu.
14 Merci.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, le document que nous avons sous les
16 yeux témoigne du fait que le 14 avril 1993, vous avez reçu une personnalité
17 à Zagreb. Tout à l'heure, on a vu également un document où il y avait un
18 programme de rencontres dans le cadre d'une formation, les 13, 14, 15
19 avril. Donc sans conteste, à la mi-avril, vous êtes à Zagreb pris par des
20 contingences liées à votre fonction de ministre adjoint. Partant de là, je
21 me posais la question par rapport à l'opération alléguée de Sovici et
22 Doljani. Je me posais la question de savoir si le HVO avait entrepris une
23 opération militaire d'envergure, est-ce que M. Praljak ne devrait-il pas
24 être sur place ? Et comment se fait-il qu'il est à Zagreb à ce moment-là ?
25 Alors, qu'est-ce que vous pouvez nous dire ? Votre activité principale
26 était-elle à Zagreb ou en Bosnie-Herzégovine ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, mes activités
28 principales en Herzégovine se sont étirées du 10 avril 1992 jusqu'au --
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1 enfin, officiellement j'entends, officiellement où j'exerçais des fonctions
2 là-bas -- donc du 10 avril 1992 à, peut-être, au 15 mai 1992 pour une
3 première fois. Et ma deuxième activité officielle en Herceg-Bosna a pris
4 place entre le 24 juillet 1993 et le 9 novembre 1993 dans la matinée. Ce
5 sont les deux missions officielles que j'ai effectuées sur le territoire de
6 l'Herceg-Bosna.
7 Tout le reste, c'était des déplacements de moi-même en guise
8 d'assistant, en guise de personne qui, pour des motifs qui l'animaient lui-
9 même dans le désir de la direction croate d'éviter les conflits entre le
10 HVO et l'AbiH, Et je passais du temps là-bas. Donc, dès après cette date du
11 14 avril ou au lendemain, ou au surlendemain, j'ai couru à Mostar, et je
12 crois que Sefko Omerbasic était venu aussi pour essayer de calmer les
13 choses. C'est à un moment où on a pu voir que j'étais passé du côté gauche
14 et je me suis fait prendre en photo avec Arif Pasalic, parce qu'il y a eu
15 un incident, l'ABiH est venu au rond-point et que je suis venu par la
16 suite. Mais j'en reparlerai. Donc, je cavalais là-bas à chaque fois qu'on
17 demandait de l'aide ou lorsque je sentais que je pouvais faire quelque
18 chose de ce point de vue.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Doit-on comprendre que la période de janvier
20 1993, "période ultimatum," la période d'avril, grande offensive, on ne sait
21 pas qui, mais il y a une offensive, période de mai, 9 mai; période de juin,
22 fin juin, vous n'étiez pas impliqué personnellement dans les opérations
23 militaires ? Réfléchissez bien avant de répondre parce que ma question est
24 très précise et elle appelle une réponse précise.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends parfaitement bien votre
26 question, Monsieur le Juge Antonetti, et je sais cela de façon très
27 précise.
28 S'agissant de la période dont on parle, jamais et d'aucune façon je
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1 n'ai participé à ces opérations-là. J'ai pris part fin juin 1993 à Uskoplje
2 en tant qu'assistant, puisque je m'étais trouvé là-bas. Du point de vue de
3 certaines activités visant à interdire aux Musulmans toute percée, j'étais
4 donc là pour aider. Puis après dix, 11 jours, j'ai passé dix, 11 jours en
5 tant que soldat bien que le général Petkovic m'ait autorisé à tenir
6 Boksevica afin que les gens qu'on a pu entendre ici du point de vue de
7 Konjic qui étaient partis à Kostajnica, parce que de Kostajnica, il fallait
8 sortir, extraire 250 hommes qui étaient donc à côté de Konjic et il y avait
9 des hommes, des femmes et des enfants. La seule façon de procéder, c'était
10 de tenir une petite partie de cette montagne où je montais la garde et où
11 j'ai combattu comme un soldat. Et à la fin, nous avons réussi à faire
12 sortir ces gens, et pour finir, moi je portais dans mes bras deux enfants
13 qui avaient six jours et je suis resté donc dix ou 11 jours sur cette
14 colline jusqu'à mon retour à Zagreb où j'ai été nommé le 24 juillet 1993,
15 chef d'état-major. Donc, je n'ai rien à voir du tout avec Sovici.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.
17 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
18 Q. Général Praljak, restez un instant encore sur ce document, 02888. Quand
19 on se penche sur sa teneur, est-ce qu'on peut dire que dans cet entretien
20 il est question, en réalité, de forces de protection des Nations Unies pour
21 ce qui est de la mise en œuvre du plan Vance-Owen, Mais lequel du plan
22 Vance-Owen, relatif à la Croatie ou relatif à la Bosnie ?
23 R. A la Croatie.
24 Q. Merci. Je propose que le document suivant, on le saute. C'est de façon
25 évidente, c'est une des tâches régulières. Vous pensez devoir dire quelque
26 chose, allez-y.
27 R. Oui. 3D02889. Là, je conviais directement les rédacteurs en chef de
28 tous les médias, parce qu'on a continué à rapporter de façon inappropriée
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1 les activités de l'armée en temps de guerre, et là, j'informe tout un
2 chacun de la coordination et de la coopération qui ont eu lieu jusque-là,
3 et je parle des missions qui sont les nôtres. Aussi, les priais-je
4 aimablement de faire en sorte que eux ou leurs représentants se déplacent.
5 Donc, je choisis mes mots pour parler de coopération, pour dire qu'on
6 n'avait rien à leur interdire et qu'il n'y aura pas de censure classique
7 des rapports militaires pour ce qui est des informations en provenance du
8 théâtre de guerre. Et ça, il n'y en a jamais eu.
9 Q. Bien. Alors, brièvement, le document suivant, 3D02890. Quelle était la
10 finalité de cette réunion-là ? Il s'agit du 13 avril 1993.
11 R. Ecoutez, la mission de mes assistants chargés du IPD était importante
12 compte tenu de la quantité de problèmes, des blessures, les parents qui
13 venaient, les réfugiés, enfin, toute cette organisation était mal mise sur
14 pied comme cela devrait l'être dans d'autres états, et il y avait un
15 sentiment qui disait qu'il fallait tirer au clair certain nombre de points.
16 Je fixe un rendez-vous pour le 19 avril, à 19 heures, à l'intention de tous
17 les assistants chargés des activités politiques.
18 Q. Merci. Document suivant, 3D02891. Aujourd'hui, vous avez, d'une
19 certaine façon, mentionné les intentions visant à faire en sorte que
20 l'armée croate soit organisée et se comporte en tant qu'armée de façon
21 analogue aux pays des démocraties occidentales. Qu'entendez-vous par ce que
22 vous dites au 30 avril 1993 ?
23 R. Comme dans le document précédent, ce document nous parle une fois de
24 plus, il est simple de mettre sur papier un organigramme ou rédiger un
25 ordre. C'est chose simple, quand on est lettré, on peut en donner une
26 centaine d'ordres. Mais en termes simples, dans l'état que nous avions été,
27 il y avait une grande majorité de ceux qui cherchaient à la défendre, qui
28 étaient des volontaires qui ont pris conscience sur le plan politique. Ils
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1 ont déposé des candidatures, ils sont allés parler à des assemblées
2 différentes, et puis, ils venaient en uniforme parce qu'ils voulaient faire
3 figure de vainqueurs. Chose qui était contraire à la décision du
4 commandement Suprême de la Croatie et de nous autres, parce que l'armée et
5 la politique devaient être séparées l'une de l'autre. Enfin, les soldats
6 peuvent déposer des candidatures, les militaires peuvent le faire, mais ils
7 ne doivent pas porter un uniforme militaire ce faisant. Et, s'ils
8 l'emportent à des élections, ils doivent quitter leur fonction militaire.
9 Ils ne peuvent pas accomplir les deux, c'était incompatible pour ce qui est
10 de l'organisation politique que nous voulions mettre en place, d'avoir donc
11 un militaire élu dans un organe représentatif au niveau de l'état qui
12 n'avait rien à voir avec l'armée.
13 Q. Alors, le document suivant, c'est le 2896, 2896. 31 août 1992, vous
14 signez. Peut-être cela porte-t-il chez vous, le 3D0225, mais ça devrait
15 être le même numéro, le 2896. Le 31 août 1992, c'est vous qui avez signé ce
16 document.
17 R. Mais c'est à quel sujet ? Je ne le trouve pas.
18 Q. Ecoutez, ça n'a rien de si important, on peut y revenir à la fin.
19 Je vous renvoie au suivant, 3D2898. C'est daté du 17 mai 1993, c'est
20 vous qui avez signé. Il s'agit une fois de plus d'un séminaire dont
21 l'envergure, d'après le programme, semblait être plus grande. Que diriez-
22 vous ?
23 R. Rien de nouveau. Il s'agit une fois de plus de l'administration
24 politique du ministère de la Défense et la Croix-Rouge internationale qui
25 organisent un séminaire de deux jours sur le sujet du droit humanitaire
26 international. Ici, on voit le programme entier, qui est-ce qui doit y
27 assister, on a des sujets qui sont avancés. Point n'est nécessaire de les
28 énumérer. On voit l'objectif de tout ceci.
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1 Q. Mon Général, je voudrais vous poser une question étant donné que nous
2 sommes bien sûrs du fait que tout est bien visible. A la page suivante,
3 0093 et 00094, 0095 à 0097, on voit les détails du programme, les sujets à
4 aborder, à quel moment, les sites, et cetera, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Merci. Alors maintenant, j'aimerais que vous vous référiez au 3D03066.
7 Il s'agit d'un document au-delà de celui qu'on vient de voir, 3D 03066.
8 C'est daté du 21 septembre 1992. Une fois de plus, c'est signé par vous.
9 L'objet porte sur une visite à la base aérienne 102 à Dijon en France.
10 L'avez-vous retrouvé ?
11 R. Oui.
12 Q. Alors, de quoi s'agit-il ici ? Je précise qu'il s'agit du 21 septembre
13 1992.
14 R. De toutes les façons possibles et imaginables, nous nous sommes
15 efforcés d'établir des liens avec des membres de l'OTAN. Et là, on a été
16 invité pour effectuer une visite à une base aérienne à Dijon. Moyennant
17 consultation, j'ai défini qui est-ce qui irait là-bas.
18 Ça peut paraître bizarre pour cette Chambre, mais comme on a constamment
19 accusé la Croatie d'être nationaliste et ainsi de suite, lorsqu'il s'est
20 agi des appartenances ethniques que j'ai indiquées, je voulais indiquer que
21 cela n'était tout simplement pas vrai. On voit M. Vladimir Sumanovic, un
22 brigadier, c'était un Serbe, membre de la JNA. Suite à invitation de Franjo
23 Tudjman pour ceux qui voulaient participer à la défense de la Croatie et
24 qui étaient du rang de la JNA, M. Sumanovic est venu parce que c'était un
25 pilote. Il a donc été choisi pour aller à Dijon en France, pour voir
26 comment ces contacts allaient être établis.
27 Q. Merci.
28 R. Et il y a avant cela, Cologne.
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1 Q. Vous disiez ?
2 R. Il y a Cologne aussi, le 3D02992. Il s'agit du 13 juillet 1992. On a
3 été invités par l'Allemagne pour participer à des manœuvres militaires, et
4 sur le sujet de ces manœuvres il y avait M. Vladimir Sumanovic et moi,
5 c'était une première visite de représentants de l'armée croate à des
6 manœuvres internationales qui avaient lieu en Allemagne. On est allés
7 jusqu'à Francfort puis on a été accueillis à différents endroits. Ça duré
8 plusieurs jours. Les manœuvres avaient lieu non loin de Nuremberg. C'était
9 une démonstration d'atterrissage de l'avion Tornade sur une piste
10 d'atterrissage réduite au strict minimum.
11 Q. Mon Général, j'ai rangé trois documents se rapportant à ce voyage dans
12 l'ordre chronologique. Comme vous avez évoqué ce document, on y voit le
13 programme, dans l'autre document on voit la commande de votre bureau pour
14 ce qui est des billets d'avion. Le troisième document c'est votre rapport
15 relatif à ce voyage. Le 0251, d'après ce que je vois.
16 R. Je n'ai pas ce rapport. C'est le 9 juillet 1992, il s'agit d'un contact
17 avec la mission de représentation à Cologne.
18 Q. Pour organiser le tout, on voit qu'il s'agit de cette visite. Je
19 propose maintenant que nous passions à un autre document qui est le
20 3D03086.
21 R. Oui.
22 Q. Il y a d'abord un intitulé pour ce qui est de la télécopie, c'est signé
23 par vous, c'est daté du 21 octobre 1992, et puis il y un communiqué. Qui
24 l'a rédigé ?
25 R. Ce communiqué a été rédigé par le général Tus, et on voit sa lettre
26 ainsi que tous les échanges de correspondance au sujet du problème en
27 question : le tout vient du fait que le général de division Cranston a
28 envoyé au chef d'état-major de l'armée croate un courrier qui est joint. M.
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1 Tus conteste la véracité de ce qui est dit dans le rapport de la Mission
2 d'observation concernant un événement qui se serait produit à Softat
3 [phon].
4 Q. Est-ce que ce type d'événement était chose fréquente ? Est-ce que
5 c'était important ou pas ?
6 R. C'était chose fréquente, ces violations de cessez-le-feu. Pendant un
7 certain temps j'ai été chargé au nom de la Croatie de coopération avec la
8 FORPRONU. Comme je l'ai déjà dit, c'était chose difficile à faire car les
9 cessez-le-feu ont été enfreints; je ne dirais pas qu'il y n'en a pas eu du
10 côté croate. Je dirais que la disproportion était énorme pour ce qui est
11 des cessez-le-feu violés par les Serbes insurgés, et puis il y a eu des
12 événements qui se sont produits, on le sait.
13 Il y a eu une excellente coopération avec certaines unités, et de
14 très mauvaises avec d'autres. Je ne vais pas énumérer les pays, ce ne
15 serait pas tout à fait correct. Il y en a eu qui ont effectué leurs tâches
16 de façon exemplaire, par exemple la FORPRONU vendait à Knin un million de
17 tonnes de pétrole aux Serbes par mois. On a vu dans le procès Gotovina que
18 l'on a témoigné, les gens faisaient toutes sortes de choses. Il y avait du
19 commerce, de la revente, de la contrebande de cigarettes et de tout ce qui
20 était déficitaire sur les marchés, il y a eu aussi des informations
21 erronées, des désinformations délibérées, et il fallait constamment rester
22 sur le qui-vive. Mais on ne pouvait prêter oreille à toutes sortes de
23 mensonges qui circulaient. On essayait de nager autant que cela se pouvait,
24 et je crois qu'on n'a pas été trop mauvais pour ce qui est d'indiquer les
25 contrevérités, nous prononcer et dire aussi qu'on comprenait les problèmes
26 rencontrés par la FORPRONU.
27 Q. Merci. J'attire votre attention sur le document 3D03088. Il s'agit d'un
28 document daté du 7 juin 1993, signé par vous, vous informant d'un dîner
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1 avec l'attaché militaire allemand. Je pense que vous avez parlé de bon
2 nombre de rencontres de ce type. Pourriez-vous nous en dire plus ?
3 R. Pas grand-chose. Il s'agissait encore d'un entretien relatif aux
4 problèmes de la Bosnie-Herzégovine, à la Croatie, et on indiquait à chacun
5 de ces pays ce qu'ils s'attendaient à voir arriver de la part des autres
6 puissances mondiales, et on les voyait changer leurs positions au fil du
7 temps. Il était difficile de s'y débrouiller pour comprendre quel était
8 l'objectif final de ce qu'il est convenu d'appeler la communauté
9 internationale. On dit au sujet du Dr Ellner et de M. Salas [phon] qu'il
10 semblaient avoir été bien informés, et que les deux autres n'étaient pas
11 excessivement intéressés de la situation, qu'ils ont suivie avec légèreté
12 depuis leur perspective européenne.
13 Q. Merci. Document suivant, le 3D03089, vous l'avez signé le 16 septembre
14 1992. Le document en premier n'est pas si important que cela, c'est plutôt
15 le contexte dans son ensemble qui compte, et il ressort de l'annexe qui se
16 trouve joint aux sept ou huit pages suivantes. Est-ce que vous pouvez dire
17 rapidement de quels problèmes il s'agit ici, de ce même sujet de la
18 Posavina, n'est-ce pas ?
19 R. S'il y avait des commandants qui sont sortis des clous pour ainsi dire,
20 qui outrepassaient leur attribution, et je recevais des éléments de
21 diverses personnes qui m'envoyaient leurs explications en la matière, je
22 procédais à des consultations avec les ministres pour voir, par exemple, ce
23 qu'il en était de cet ordre émis par le commandant de la 124e Brigade de
24 l'armée croate dans telle ou telle espèce particulière. J'ai dit qu'ils ne
25 pouvaient pas envoyer des gens sur le champ de bataille de la Posavina. Ils
26 pouvaient y aller s'il s'agissait de volontaires.
27 Messieurs les Juges, vous verrez qu'il s'agissait d'un ordre écrit et que
28 des hommes étaient envoyés à titre de volontaires, c'est une chose. Mais
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1 que se passe-t-il si cette personne est tuée, que se passe-t-il pour ses
2 parents pour sa famille, si la personne est partie en tant que volontaire,
3 la famille ne veut pas s'adresser à l'armée croate pour la personne qui a
4 été tuée.
5 Pourtant nous avons la contradiction suivante, à savoir qu'il y a eu
6 un ordre portant sur des volontaires. Par exemple, on a eu le cas d'un
7 général qui a fait l'objet d'une procédure d'instruction dans un tribunal
8 parce qu'il a émis un ordre et il a été mis en accusation à cause de cet
9 ordre où il a dit que son unité devait franchir la rivière Sava.
10 Q. Très bien. Je pense que c'était un lapsus, vous avez dit que Tus a
11 écrit un ordre, n'est-ce pas, il y avait -- que cette personne a écrit un
12 ordre ?
13 R. Oui.
14 Q. Cela nous amène aux deux documents suivants, le 3D03091.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Le document qu'on voit qui est daté du 16 septembre
16 1992 interdit à la 124e Brigade de l'armée croate d'aller sur le champ de
17 bataille de la Posavina. Bon. Document clair.
18 A votre connaissance, parce que ma question est très importante, comme
19 d'ailleurs toutes les questions que je pose, donc à votre connaissance,
20 est-ce qu'il y avait des unités de l'armée croate qui se sont trouvées en
21 République de Bosnie-Herzégovine avec armes et bagages ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, je vais vous répondre
23 avec précision à cette question.
24 Sur les territoires de la Bosnie-Herzégovine, c'est sur ordre que
25 certaines unités de l'armée croate sont venues sur place, et ce, uniquement
26 dans la région de Dubrovnik, car c'était la seule façon de défendre
27 Dubrovnik. Il s'agit d'une bande de terre trop étroite, et si vous n'aviez
28 eu la possibilité de vous rendre que jusqu'à la frontière, ce que vous ne
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1 pouvez pas car la frontière passe par le sommet d'une montagne, dans cette
2 hypothèse-là il aurait été possible pour l'ennemi de continuer à pilonner
3 et à tirer sur Dubrovnik.
4 D'un certain point on peut même tirer au pistolet sur Dubrovnik.
5 C'est un exemple où on a eu franchissement et passage vers l'intérieur.
6 Pour autant que je sois familier de cette question, cela a été convenu.
7 La deuxième fois, le 10 avril 1992, c'est le même jour que celui où j'ai
8 été nommé commandant pour l'Herzégovine du sud-ouest, une unité qui était
9 le 4e Bataillon de la 4e Brigade de la Garde nationale qui comptait 160
10 hommes, et qui a franchi également la ligne afin de couvrir un territoire
11 qui s'était trouvé vide entre Citluk et Mostar, afin d'empêcher une percée
12 prévisible de la JNA en direction de Split, cette unité de 160 personnes
13 représente un effectif tout à fait négligeable, elle est restée sur place
14 un certain temps, et dès que j'ai été en mesure de rassembler les forces
15 qui étaient là-bas, ces hommes sont partis.
16 Pendant la période où j'étais sur place et pour autant que je le sache, à
17 aucun moment l'armée croate n'a franchi la ligne de partage avec la Bosnie-
18 Herzégovine sur ordre. Les volontaires l'ont fait, et cela concernait un
19 nombre d'homme tout à fait négligeable. Je pense que ça n'a jamais concerné
20 plus de 500 ou 600 hommes dispersés sur différentes positions.
21 Même lorsque j'y suis arrivé au titre de commandant sur place, et
22 vous le verrez dans un document, c'était le 24 juillet 1993, j'ai demandé
23 au ministre Susak et au président Tudjman, en raison de la situation
24 extrêmement difficile après la percée des Musulmans à Bugojno, qu'ils
25 mettent à ma disposition au moins deux bataillons de l'armée croate.
26 Evidemment ils ne m'ont rien donné. En tant que soldat j'avais émis cette
27 demande, et je savais bien qu'elle allait se voir opposer un refus.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : A votre connaissance, si une unité de l'armée croate
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1 s'était retrouvée en République de Bosnie-Herzégovine, est-ce que dans les
2 documents internes de cette unité on aurait trouvé trace de ce transport de
3 la République de Croatie vers la République de Bosnie-Herzégovine ? Pour
4 être encore plus clair, parce que maintenant on n'est plus à perdre du
5 temps, il faut aller au cœur des questions, pour être encore plus clair.
6 Nous avons entendu des témoins qui nous ont parlé de l'Heliodrom, et
7 il a été évoqué la présence d'unités de l'armée croate. Sous la foi du
8 serment, est-ce que vous me dites qu'à votre connaissance il n'y a jamais
9 eu aucune unité de la République de Croatie qui a passé la frontière pour
10 se trouver sur le champ de bataille en République de Bosnie-Herzégovine ?
11 On ne peut pas être plus clair.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
13 j'ai répondu avec précision. A part cette unité qui comptait 160 hommes en
14 cette date du 10 avril 1992 qui est venue couvrir cette lacune qui a existé
15 à un moment donné, il n'y a jamais eu d'unités de l'armée croate venues sur
16 ordre à l'Heliodrom et dans les environs de l'Heliodrom.
17 Dans la situation où je me trouvais, j'ai demandé et j'ai prié mes
18 commandants en Croatie, une quarantaine de personnes sont venues en
19 provenance de la 1ère Brigade, parmi eux les gars avec qui je m'étais battu
20 à Sunja; 500 d'entre eux allaient venir. J'ai œuvré afin que des
21 volontaires viennent mais je n'ai jamais reçu ni demandé qu'une unité de
22 l'armée croate nous rejoigne.
23 Il est exact que les volontaires, lorsqu'ils arrivaient, semblaient
24 en apparence répondre à un ordre, et c'est là la source de la confusion.
25 Dans la tête de la personne c'était O.K. -- je vais là-bas en tant que
26 volontaire mais donne-moi un papier l'attestant. Les personnes qui
27 intervenaient au titre de volontaires étaient prêts à le faire, mais se
28 demandaient ce qui leur arriverait s'ils venaient à périr sur le champ de
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1 bataille, qu'arriverait-il à leurs femmes, à leurs enfants, ils demandaient
2 un papier qui attesterait de cela.
3 Le gouvernement croate et le ministère croate de la Défense estimait et
4 avaient fait savoir que les volontaires devaient recevoir le même
5 traitement et les mêmes avantages en Croatie que les Croates de l'ABiH et
6 les Croates du HVO, à ceci près qu'ils continueraient à être considérés
7 comme des volontaires.
8 Mme TOMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, mais il y a de nouveau une
9 erreur au compte rendu. En page 53, lignes 24 et 25, le général Praljak a
10 dit que cela concernait aussi bien les Croates que les Musulmans de l'armée
11 croate.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ils avaient les mêmes droits les uns
13 comme les autres.
14 M. KOVACIC : [interprétation] Un peu avant cela.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, dans les milliers de documents que
16 nous avons, il me semble qu'il y en a un mais dont je n'ai pas le numéro,
17 et vous me pardonnerez parce que je ne peux avoir tous les numéros des
18 documents, surtout que je n'avais pas prévu de vous poser la question, et
19 c'est votre réponse qui m'y amène. Il me semble, je dis ça de mémoire, je
20 peux me tromper mais en réalité je ne me trompe jamais.
21 Il me semble qu'il y a un observateur international qui aurait dit
22 qu'il a vu passer une unité de l'armée croate. Aurait-il fait une confusion
23 ? Etait-ce des volontaires qui passaient ? Comment vous pouvez expliquer
24 cela ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, il y a eu des observateurs mal
26 renseignés, mal formés qui voyant deux ou trois personnes portant des
27 insignes de l'armée croate déclaraient ensuite avoir vu passer toute une
28 unité. Deuxièmement, vous avez vu, Messieurs les Juges, ici dans ce
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1 prétoire, déposer un témoin qui a dit avoir vu passer une division dans
2 l'armée croate. Quand je lui ai demandé combien de somme d'hommes cela
3 faisait, il a dit une cinquantaine. Donc, c'était vers Metkovic, vers la
4 frontière croate.
5 Troisièmement, nous aurons ici la déposition, ou plutôt la
6 déclaration d'un témoin dont je ne peux citer le nom, un témoin américain
7 qui dit avec précision de quelles personnes il s'agit, combien il y avait
8 de personnes et pourquoi ils se trompent lorsqu'ils disent qu'ils ont vu
9 passer des unités de l'armée croate.
10 Ce qui est important ici c'est que bien qu'il y ait eu des
11 instructions très claires émanant de moi-même et du général Petkovic,
12 disant que de par l'arrivée des volontaires sur place en provenance de
13 Croatie ces derniers doivent enlever leur insigne et mettre à la place les
14 insignes du HVO, il est arrivé que cela ne soit pas respecté, parce qu'un
15 tel ou un tel qui appartenait à une unité qui s'était illustré sur le
16 terrain, qui guerroyait depuis longtemps, voulait bénéficier et continuait
17 à bénéficier de ce prestige.
18 De plus, Messieurs les Juges, j'avais deux uniformes. L'un d'entre
19 eux pouvait être au lavage pendant que je portais l'autre. Moi aussi,
20 parfois je portais les insignes de l'armée croate, et cela tout simplement
21 parce que je n'avais rien d'autre que je puisse porter. Je portais des
22 grandes tailles, et il était difficile pour moi de trouver un uniforme.
23 Donc, il n'y a pas eu d'unité de l'armée croate qui soit passée en
24 Bosnie-Herzégovine sur ordre, à l'exception du cas que j'ai décrit avec
25 précision.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question de suivi, mais on aura
27 certainement l'occasion d'y revenir. Vous nous avez dit en début d'après-
28 midi, et vous voyez que j'ai une bonne mémoire, qu'il y avait eu 13 000
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1 volontaires, 13 000. Vous avez précisé que c'étaient des volontaires qui,
2 en réalité, venaient de la République de Bosnie-Herzégovine, qui étaient
3 partis en Croatie, puis y revenaient sur les lieux. Donc j'ai bien pris
4 note de ce que vous avez dit. Mais y avait-il, à l'exclusion des
5 ressortissants de la République de Bosnie-Herzégovine, des Croates de pure
6 souche, par exemple, qui étaient nés à Zagreb, qui n'avaient jamais été en
7 Bosnie-Herzégovine, mais ils se sont portés volontaires pour aller dans le
8 HVO ? Est-ce qu'à votre avis il y a eu ce type de cas ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, et cela a été le cas fréquemment.
10 Par exemple, à l'automne 1992, sont venus me voir en provenance d'une
11 compagnie de la 2e Brigade de la Garde nationale que j'avais commandée à
12 Sunja, un grand nombre d'hommes à qui j'avais commandé. Je les ai renvoyés
13 à l'ABiH, en leur demandant de venir en aide avec toute l'expérience qui
14 était la leur, et je les ai transférés vers la rive gauche de la Neretva à
15 Mahala, et j'en ai attribué d'autres au HVO.
16 Dans l'opération de libération de Capljina et les combats qui ont
17 entouré Capljina, j'avais quelques volontaires en provenance de Zagreb. Il
18 n'y en avait qu'une quinzaine. L'un de mes volontaires était même le petit-
19 fils du président Tudjman. A Capljina, il y avait des volontaires qui
20 étaient tout simplement arrivés de Croatie.
21 Quant au 13 000 hommes, Messieurs les Juges, je pense que vous vous
22 souviendrez ce document que je vous ai fourni, c'est un grand nombre de
23 personnes. Aujourd'hui même, nous avons un cimetière à Zagreb où il est
24 indiqué combien de Musulmans ont péri dans l'armée croate, mais il ne
25 s'agissait pas uniquement de personnes qui vivaient à l'époque en Croatie,
26 il s'agissait aussi de personnes originaires de la Bosnie-Herzégovine qui
27 sont venues en Croatie au moment où la guerre a commencé, et ce, pour
28 différentes raisons dont le détail desquelles je ne peux pas rentrer. Par
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1 exemple, pour la défense de Dubrovnik, lorsque la situation était critique
2 et que la question se posait de savoir si Dubrovnik allait tomber, il y a
3 eu la participation d'un certain nombre de volontaires venus d'Herzégovine,
4 l'un d'eux a péri. Ensemble avec les citoyens de Dubrovnik, ils ont réussi
5 à défendre la ville.
6 Comme je l'ai déjà dit, il s'agissait d'une guerre dirigée contre les
7 non-Serbes, indépendamment du territoire de la République dont il
8 s'agissait. On ne peut pas tout simplement composer à une sorte de
9 vivisection comme cela a pu être le cas dans des exemples classiques et de
10 conflit interétatique.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de citer l'exemple du petit-fils du
12 président Tudjman, qui a été volontaire. Quand les personnes apprenaient
13 que le petit-fils du président Tudjman se trouvait comme volontaire, est-ce
14 qu'ils pouvaient en déduire qu'en réalité c'est toute l'armée de la
15 République de Croatie qui s'était transportée en République de Bosnie-
16 Herzégovine ? Est-ce que certains n'ont pas tiré ce type de conclusion ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Le petit-fils du président Tudjman était
18 un de mes hommes à Sunja. Il était déjà volontaire à l'époque, lorsqu'il
19 était sous mon commandement à Sunja. C'était un combattant extraordinaire
20 et il s'est rendu sur place en Bosnie-Herzégovine avec son commandant.
21 Quant aux interprétations de cette guerre, elles sont de toutes sortes et
22 pour la plupart inexactes. Mais le fait est qu'on en trouve de toutes
23 sortes. En dehors des faits en tant que tels, il est impossible de
24 reconstituer ce qu'un tel ou un tel pensait. Il n'y a que les faits en la
25 matière qui peuvent nous aider à comprendre ce que la Croatie voulait, ce
26 qu'elle a fait et quels ont été les comportements adoptés.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Avant de poursuivre, pour ce qui est de votre première question, en
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1 page 53, ligne 9, je pense que cela a été bien interprété, mais cela n'a
2 pas été bien versé au compte rendu d'audience, car selon ce dernier, il
3 figure que le général Praljak aurait répondu, je cite : "Monsieur le
4 Président, en dehors de cette unité de 160 hommes en 1992, le 10 avril, qui
5 se sont rendus sur place afin de combler cette lacune", et ensuite le
6 compte rendu poursuit en disant, "à l'Heliodrom." Or, il faudrait lire,
7 "qui sont allés sur place pour combler cette lacune," et ensuite le général
8 continue, "à l'Heliodrom."
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas à l'Heliodrom.
10 M. KOVACIC : [interprétation]
11 Q. Pouvez-vous répéter cette phrase, Général Praljak ?
12 R. C'était cette unité qui allait de Citluk, Tepcici et Slipcici vers
13 Mostar. Il n'y avait absolument aucun rapport avec l'Heliodrom. Donc ils
14 sont partis de Medjugorje vers Mostar.
15 Q. Très bien. Le document suivant, qui est le 3D03091, parle d'un officier
16 de l'armée croate qui a souvent été mentionné ici. Donc, je pense que MM.
17 les Juges s'en souviendront parfaitement. Je voudrais que vous nous en
18 disiez plus dans le contexte de ce que nous venons d'examiner.
19 R. M. Jasmin Jaganjac, je le connais très bien, nous avons beaucoup
20 coopéré. C'est un Musulman qui a rejoint l'armée croate au tout début de
21 l'attaque visant la Croatie. Je crois qu'à un certain moment il avait pour
22 tâche de rédiger un manuel d'instruction pour l'armée croate, car il venait
23 de la JNA lui-même. C'est pourquoi je l'ai renvoyé à l'unité qui s'appelait
24 le Centre des officiers. Quant à lui, il voulait se rendre à Mostar, où les
25 Musulmans étaient dans une position peu avantageuse, et conformément à
26 notre accord, il a été nommé commandant de la défense de Mostar.
27 Il était donc officiellement à la tête des opérations à Mostar, et
28 moi, j'étais de façon officieuse. En 1992, c'était la libération de la rive
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1 droite de la Neretva, puis de la rive gauche. Ensuite, je suis retourné à
2 mes obligations alors que lui est resté sur place jusqu'à ce que, pour une
3 raison que j'ignore, il m'ait dit qu'il voulait retourner à son unité
4 d'origine, donc le Centre des officiers.
5 A cette époque, Jasmin Jaganjac, après être revenu dans cette unité,
6 Centre des officiers, il est devenu conseiller militaire de M. Alija
7 Izetbegovic. C'est lui qui l'a pris à ses côtés dans cette fonction. A
8 cette époque-là, nous remportions des succès, militairement parlant, dans
9 cette zone sud. Je dis "nous", je parle ici également de Petkovic. N'allez
10 surtout pas penser que je ne parle que de moi. C'est une organisation
11 entière dont il s'agit et, avant toute chose, ceux qui sont décisifs dans
12 les combats sont ceux qui combattent sur la ligne de front elle-même. Il
13 est resté dans cette fonction de conseiller du président Izetbegovic, me
14 semble-t-il, jusqu'à la fin avril 1993, et nous avons travaillé ensemble
15 pendant des mois. Nous nous sommes efforcés de mettre sur pied un
16 commandement conjoint de l'ABiH et du HVO.
17 Q. Général Praljak, pour ce qui est du début de votre explication sur
18 Jasmin Jaganjac, je voudrais juste y revenir avec quelques questions, en
19 partie à cause du compte rendu d'audience, en partie à cause de la vitesse
20 de votre réponse.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Un moment.
22 Pouvons-nous passer en audience à huis clos.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
24 le Président.
25 [Audience à huis clos partiel]
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16 [Audience publique]
17 M. KOVACIC : [interprétation]
18 Q. Général Praljak, à quelle armée cet officier a-t-il rejoint en 1991
19 pour se défendre contre la JNA ?
20 R. Jasmin Jaganjac a rejoint l'armée croate. Entre autres choses, il a
21 travaillé au centre du Centre des officiers.
22 Q. Ralentissez, s'il vous plaît.
23 R. Ensuite, il est parti en tant que volontaire et il est devenu
24 commandant de la défense de Mostar.
25 Puis, conformément aux souhaits qui étaient exprimés par lui, le 22
26 octobre, il a rejoint son unité d'origine au Centre des officiers. Ensuite,
27 je ne sais pas à quelle date exactement, il devient conseiller militaire du
28 président de la présidence de Bosnie-Herzégovine, M. Alija Izetbegovic.
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1 Q. Qu'en est-il de ses droits, en tant que membre de l'armée croate, et
2 ce, entre le moment où il est parti, puis le moment de son retour ? Est-ce
3 que ses droits sont suspendus en attendant qu'il redevienne actif dans
4 l'armée croate ?
5 R. Non, Maître, il jouit pleinement de ses droits. S'il meurt, s'il est
6 blessé ou s'il est tué, il sera traité comme un soldat croate. Nous verrons
7 à partir des documents tout ce qui s'est passé en 1992. Il a quitté l'armée
8 croate pour rejoindre le HVO, et ensuite il est revenu, il est retourné à
9 l'armée croate.
10 Q. Très bien. Alors, je pense que tout est clair maintenant.
11 R. Nous pouvons peut-être passer les documents suivants.
12 Q. Reportez-vous maintenant au 3D02218. Il me semble que c'est un document
13 assez caractéristique et qui en dit long, daté du 14 septembre 1992. Le
14 3D02218, c'est vous qui signez, et s'est adressé au président de la
15 république. De quoi s'agit-il ici ?
16 R. Il s'agit là d'un grand problème, le problème que pose les réfugiés, un
17 nombre très important de réfugiés et de soldats qui sont dans les rangs de
18 l'armée croate et qui sont en fait des réfugiés. Ça commence à Vukovar --
19 non, c'est même avant Vukovar. Le problème très important que cela pose ce
20 sont les biens de la JNA. La propriété de la JNA qui était colossale, et
21 même sur le territoire de la République de Croatie, c'étaient des avoirs
22 colossaux. Ces biens sont devenus la propriété de l'Etat croate, mais le
23 ministère de la Défense gérait ces biens. J'ai reçu nombre de maires, et
24 cetera, d'autres qui souhaitaient qu'on remette à leur disposition telles
25 ou telles choses, tels ou tels terrains, ou autres. Il y a eu des tensions,
26 parce que je m'étais à leur expliquer que nous étions des gestionnaires,
27 que le ministère de la Défense était gestionnaire, et que c'est le
28 gouvernement, l'Etat, qui est propriétaire et que la décision lui revient
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1 sur comment distribuer ou répartir cela.
2 Puis il faut savoir aussi comment je n'avais pas tendance à accepter que
3 cela soit distribué ou réparti de cette manière-là, surtout parce qu'ils
4 n'avaient aucun projet sur la manière dont ils allaient s'en servir. Ils
5 voulaient prendre ces biens très importants, et après je disais, mais
6 l'armée, comment allait-elle faire pour s'en sortir et elle allait devoir
7 mendier. Imaginons des bâtiments, des installations de l'ex-JNA, 100
8 hectares près de la côte. Surtout s'ils n'ont aucun projet, s'ils ne savent
9 pas comment s'en servir, alors je me disais qu'on pouvait le revendre
10 plutôt, que ce serait mieux. Donc ça, c'était un problème.
11 L'autre c'était lorsque les gens s'appropriaient illicitement des
12 logements. Vous avez des gens qui ont été expulsés, des maisons incendiées,
13 et en fin de compte ils se sont battus, ces gens-là, et ils s'attendaient à
14 ce que ce nombre phénoménal de logements, d'appartements à la JNA allaient
15 être mis à leur disposition, allaient leur revenir, et il y avait du retard
16 du côté du gouvernement sur ce plan. Nous avons eu des discussions âpres.
17 J'en ai eues avec le chef du gouvernement. Vous savez que j'accepte
18 facilement des discussions houleuses. J'ai la répartie vive. Quand vous
19 n'avez pas de solution juridique, ou même quand il y a une solution
20 juridique, il y a des problèmes. Mais surtout quand vous avez un vide
21 juridique, les problèmes sont d'autant plus importants.
22 Donc, je vous dis là il y a arrangements illicites, puis des actes au
23 pénal. La police expulse le HVO, des civils, et cetera, puis il s'adresse
24 directement au président, car Mme Turic, qui s'occupe de cela aussi.
25 Le 14 septembre 1992, le problème a connu une escalade. Il y a
26 énormément de travail pour chaque ministre, mais là en particulier ça
27 devient une question particulièrement brûlante, et ça commence à entraver
28 l'autorité de l'Etat, du chef du gouvernement, du Parlement, parce qu'il y
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1 a des gens qui ont été expulsés de chez eux, ils ont été démobilisés, ils
2 rentraient par infraction dans ces appartements. Il fallait résoudre cela,
3 parce qu'il y avait toute une série de problèmes en suspens. Je dis dans le
4 post-scriptum que c'est au niveau de la coordination de la politique
5 intérieure, avec l'aide du vice-président M. Milas qu'on a pu résoudre le
6 problème.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Petkovic.
8 L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
9 Juges, si vous permettez, juste une erreur technique. Ce n'est pas le HVO,
10 c'est la HV. Merci.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait la HV.
12 M. KOVACIC : [interprétation] Page 63, ligne 5, remplacer le "HVO" par la
13 "HV". Mais c'est ce qui ressort de la teneur. On voit qu'il s'agit de la
14 Croatie et de la HV.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je confirme, c'est la HV.
16 Puisque vous voyez cette phrase qui dit que j'ai indirectement j'ai
17 pris part au problème, parce que je ne sais pour quelle raison on vient se
18 plaindre à moi. Bien que cela relevait de la compétence d'autres personnes,
19 j'étais celui à qui on venait présenter ces problèmes. Les gars savaient
20 que s'ils me présentaient un problème pour lequel j'étais convaincu qu'il
21 convenait de le résoudre, que j'allais me battre et ne pas mettre ça au
22 placard. J'étais prêt à affronter quiconque, le gouvernement s'il le faut,
23 si je considère qu'il faut s'en occuper.
24 M. KOVACIC : [interprétation]
25 Q. Continuons en prenant le document suivant. Vous vouliez ajouter quelque
26 chose au sujet du document précédent, non ?
27 Très bien. Passons au 3D02504. Est-ce que nous avons là un exemple
28 qui vient dire ce que vous veniez de dire à l'instant, à savoir le plus
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1 facile c'est de rédiger un ordre mais c'en est une autre après de vérifier
2 si l'ordre a été bien exécuté ?
3 R. Oui. Justement, il faut beaucoup de temps pour structurer une
4 organisation aussi complexe qu'une armée, et on peut lire cela dans tous
5 les manuels même si c'est en situation de paix, non pas en situation de
6 guerre. Je co-signe ici avec mon chef, à toutes les zones opérationnelles
7 et unités de la HV, ainsi qu'aux commandements de l'armée croate, de la
8 marine, de l'aviation de guerre croate et vous voyez que nous dressons là
9 un inventaire de tous les problèmes que nous rencontrons, ça commence par
10 l'IPD et on voit des rapports réguliers, quels sont les délais pour le
11 renvoi, l'aptitude au combat, les manquements à la discipline,
12 l'homogénéité, les relations entre les hommes, les problèmes d'actualités,
13 réactions des militaires, des causes de mécontentement des militaires.
14 Dans la suite, au petit D en partie la section psychologique -- le
15 IPD se consacrait pendant un certain temps sur l'étude de l'état d'aptitude
16 au combat. Au petit D, dans certaines unités, l'aptitude au combat est très
17 faible, les commandants sont responsables pour bien de ces choses-là, les
18 assistants des commandants, il y a du mauvais commandement dans les unités,
19 le surmenage des hommes sans les préparer; un manque de contact permanent
20 avec les hommes, et cetera. Je ne sais pas si les Juges souhaitent me poser
21 d'autres questions. Je suis prêt à expliquer chacun de ces points mais nous
22 nous acquittions de nos tâches --
23 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi. Je voudrais poser une question
24 parce que la traduction que j'examine ne semble pas porter de date, que ce
25 soit dans l'en-tête ou en bas de document, même si dans le corps du texte
26 vers le milieu de la première page on fait référence à la nécessité
27 d'envoyer un rapport avant le 24 juillet 1992. Est-ce que le général
28 pourrait nous donner une date approximativement et nous dire si ce document
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1 date d'avant le 24 juillet 1992 ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Certainement cela se situe en septembre 1992,
3 à un jour près, je ne suis pas sûr. C'est en 1992, en juillet. Probablement
4 un ou deux jours avant cela. Si j'avais décidé qu'il fallait me faire
5 rapport dans un délai de 48 heures, généralement je donnais 48 heures, donc
6 c'est peut-être deux jours avant.
7 M. KOVACIC : [interprétation] Très bien.
8 Page 64, ligne 23, on lit "HVO" et il faut remplacer par la "HV." On lit
9 "unités du HVO," il faut remplacer cela par "unités de la HV."
10 Q. Un document qui rejoint celui-ci, 3D02859. C'est le document suivant,
11 le 25 mars 1992, là encore c'est vous qui signez. On trouve à l'annexe deux
12 rapports. Pourriez-vous brièvement nous expliquer cela ?
13 R. C'est le 25 mars 1992, je viens d'arriver à peine et d'être nommé au
14 poste de l'assistant du ministre chargé de cela. J'annonce la
15 démobilisation qui est déjà là un grand problème, qui démobiliser, qui
16 souhaite rester, et cetera. Ensuite les promotions et les "réaffectations"
17 en fait tous ceux qui étaient venus de la JNA à qui on a promu le même
18 grade que ceux qu'ils avaient auparavant, donc des généraux normalement
19 devaient rester généraux, et là il y a eu de légers malentendus puisqu'il y
20 avait des hommes qui se sont dit que ces grades étaient trop importants,
21 qu'il fallait qu'ils fassent leurs preuves de nouveau sur le champ de
22 bataille, et cetera. Vous avez le problème de la formation des soldats, des
23 officiers et il fallait s'y mettre sur le champ. Il y a des problèmes puis
24 des mentions, des médailles. Mais là je dis qu'il y a eu quelques entraves
25 parce que la loi n'est pas suffisamment articulée et on a renvoyé les
26 textes de lois pour qu'ils soient retravaillés. Je ne sais pas à qui on a
27 destiné cela, qui est le destinataire. Franjo Tudjman, je ne sais pas.
28 Q. Cela n'est pas visible dans le document, mais j'attire votre attention
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1 sur autre chose, le rapport du 24 mars qui figure à l'annexe. Après avoir
2 étudié la situation sur le terrain, on attire l'attention sur un certain
3 nombre de déficiences. Est-ce qu'on peut interpréter cela comme étant des
4 efforts déployés afin de structurer l'armée ?
5 R. Il me semble que la chose la plus importante c'est que nous ne
6 cherchions à ne rien cacher du tout. Tous les défauts, toutes les
7 expropriations des appartements, des entrées par effraction, des suicides,
8 des meurtres, des poursuites engagées, le Procureur militaire, et cetera,
9 j'affirme que dans les documents qui sont sortis de chez nous on n'a rien
10 caché. Le dernier des journalistes ou tout attaché militaire se voyait
11 offrir de se rendre sur le terrain. Les problèmes, nous cherchions à les
12 résoudre en déployant tous les efforts que nous pouvions, mais nous n'avons
13 jamais cherché à cacher des problèmes, des manquements à quelque règle que
14 ce soit, sur quelque principe que ce soit.
15 On a toujours fait état de cela. On a toujours engagé des poursuites
16 si on a pu. On n'a pas cherché à cacher, à dissimuler aux yeux des
17 observateurs ou de la communauté internationale. On a vu quand j'étais en
18 Herceg-Bosna, j'ai toujours proposé à tout journaliste de se rendre où il
19 voulait, quand il voulait, je vous l'affirme avec une certitude absolue
20 parce que c'est comme cela que je faisais.
21 Q. Mon Général, ce que vous venez de dire à l'instant, est-ce que c'était
22 ça votre principe de conduite de comportement ? Est-ce que c'est ainsi que
23 vous vous êtes comporté par la suite en Bosnie-Herzégovine ?
24 R. Je suis trop vieux pour changer. A l'époque j'étais déjà trop vieux. Je
25 pense qu'à partir du début, j'ai toujours gardé le même comportement à
26 l'identique. Je n'ai pas changé d'un pouce.
27 M. KOVACIC : [interprétation] Je vous remercie. Messieurs les Juges, je
28 voudrais aborder le sujet suivant. Mais il me semble que dans une minute ou
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1 deux on ferait une suspension, si vous le souhaitez ?
2 M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la suspension puisque vous allez aborder
3 un sujet autre.
4 Bien. On va faire 20 minutes et on reprendra à 6 heures moins dix.
5 --- L'audience est suspendue à 17 heures 30.
6 --- L'audience est reprise à 17 heures 55.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic.
8 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Q. Général Praljak, hier, me semble-t-il, nous avons abordé cela très
10 brièvement, mais à l'attention des Juges, je tiens à préciser, vous aviez
11 déjà mentionné qu'entre autres, dans votre service, vous deviez aussi
12 éditer le journal, "Soldat croate," dans votre service au sein du ministère
13 de la Défense. Un nombre de positions prises par la politique croate de
14 l'époque s'y reflète et nombre de positions des personnalités de la vie
15 politique croate. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, lorsque vous
16 nous citerez différents articles, différentes pages, est-ce que vous
17 pourriez nous dire aussi en plus de la pagination, le numéro dans le
18 prétoire électronique pour qu'on puisse plus facilement vous suivre.
19 Bien entendu, tout cela a à voir également avec les événements qui
20 vont suivre en Bosnie-Herzégovine et on voit également l'expression de leur
21 position, 3D01278 pour commencer. C'est "Le Soldat croate" du 15 janvier
22 1993.
23 R. 279 plutôt.
24 Q. Oui, d'accord. 279.
25 R. C'était la publication du ministère de la Défense de la République de
26 Croatie qui s'appelait ainsi, "Le Soldat croate." Si Messieurs les Juges
27 souhaitent le voir de plus près, je pourrais leur donner à feuilleter la
28 publication pour qu'ils voient la mise en page et le reste. Donc dans "Le
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1 Soldat croate," on retrouve une synthèse de l'ensemble des problèmes que
2 nous avons eus à combattre, donc tous les problèmes qui touchent l'armée
3 croate, quelles sont les positions du ministère de la Défense, du
4 commandant suprême, M. Franjo Tudjman, du commandement. En fait, on y
5 retrouve la synthèse aussi des positions des milieux les plus hauts placés
6 militaires et politiques de l'époque sur les événements d'actualité. Donc
7 c'est un numéro du 15 janvier 1993 que nous avons ici. C'est la réunion des
8 éditeurs en chefs de l'ensemble de la presse écrite croate qui rencontrent
9 le président croate, Franjo Tudjman.
10 Q. Mon Général, page 3D29-0512.
11 R. Oui, tout à fait. Dans le deuxième paragraphe, le président parle de
12 l'année 1992. Il dit que dans l'année passée 1992, la Croatie s'est
13 affirmée en tant qu'un facteur de paix sur le territoire de l'ex-
14 Yougoslavie, que les protagonistes internationaux comptaient sur elle. Et
15 il dit qu'au sens plus large, l'opinion publique croate s'intéressait
16 plutôt à l'attitude de la politique officielle croate envers la Bosnie-
17 Herzégovine, et ce, en particulier parce que dans un certain nombre de
18 pays, on a entendu des accusations qui n'étaient pas fondées. Et le
19 président s'exprime brièvement sur les menaces qui existent encore d'après
20 lui. Il évoque les Moudjahiddines. Il dit qu'un certain nombre de pays
21 islamiques ont certaines intentions.
22 Et puis dans la dernière partie sur la droite, il dit qu'aucune des
23 tentatives d'imposer des sanctions à la Croatie n'a été couronnée de succès
24 parce qu'un certain pays islamique déclare que la Croatie est le seul pays
25 européen à avoir reconnu la Bosnie-Herzégovine, à avoir accueilli plus de
26 500 000 réfugiés. La résolution des Nations Unies en parle. Et puis, il
27 poursuit en disant que la politique croate s'intéressait vivement à la
28 Bosnie-Herzégovine, et ce, parce que l'évolution de la situation en Bosnie-
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1 Herzégovine, si ça prenait le cours que j'avais évoqué, toute la Croatie
2 méridionale de Split à Dubrovnik s'en trouverait affectée.
3 Par conséquent, la politique croate se souciait effectivement des intérêts
4 du peuple croate en Bosnie-Herzégovine. Il dit : "C'est la politique et la
5 défense que nous avons pu mener. Ça a permis à la Bosnie-Herzégovine de ne
6 pas se retrouver aujourd'hui en Grande-Serbie, et la Croatie a fait en
7 sorte que le peuple croate s'organise pour opposer une résistance et pour
8 faire en sorte que toute la Bosnie-Herzégovine ne soit pas intégrée à la
9 Grande-Serbie. La Croatie était favorable à un référendum sur une Bosnie-
10 Herzégovine en tant qu'Etat de trois peuples."
11 Q. Ce n'est pas le bon document dans le prétoire électronique. 3D01278,
12 page 3D290512.
13 R. Oui, tout à fait. Il dit à la fin, il faut souligner que le président a
14 dit que la Croatie à elle seule et les Musulmans seuls ne peuvent pas
15 remporter une victoire militaire dans cette guerre, vue la suprématie de
16 l'armée yougoslave. Donc une poursuite de la guerre entraînerait des
17 complications sur le plan européen et international au-delà et une solution
18 politique qui a été acceptée pour les Croates, ce sont des solutions qui
19 correspondent à la situation réelle en Bosnie-Herzégovine. Franjo Tudjman
20 ne souhaitait pas la guerre, n'a pas souhaité la guerre et pendant toute
21 cette période, à chaque occasion, il a cherché à trouver une solution
22 pacifique aux problèmes.
23 Le document suivant 3D, donc page 3D290513. Je me contenterai de donner
24 lecture du titre : "Au meilleur, les académies militaires occidentales."
25 Donc il est dit ici qu'au centre des officiers, l'enseignement a commencé,
26 réservé aux officiers supérieurs qui s'étaient distingués pendant la guerre
27 pour la patrie. Donc, c'est a posteriori, hélas, qu'il a fallu former les
28 officiers. Mais on a pris la décision, et on le voit dans tous les
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1 documents, que nos meilleurs officiers doivent être envoyés suivre une
2 formation aux académies militaires occidentales, puisque c'était ça
3 l'orientation qui était la nôtre, se réintégrer ou trouver notre place dans
4 le monde occidental. Et puis, ce sera aussi finalement notre place que nous
5 allons trouver dans l'Union européenne.
6 Q. 3D01279 et le numéro suivant du "Soldat croate" du 19 au 28 août 1992.
7 C'est l'édition qui nous intéresse.
8 R. Oui.
9 Q. C'est la page 3D290515. Voilà, c'est l'automne 1992. La Croatie
10 commence à mobiliser de manière systématique certaines promotions. Et là,
11 au deuxième paragraphe, il est important de voir qu'à 95 %, les jeunes
12 conscrits répondent à l'appel de mobilisation et ceux qui doivent être
13 dispensés, exemptés, ils vont pouvoir exercer toute une série de tâches
14 dans le cadre du service civil. Et il est dit qu'à tout conscrit,
15 indépendamment de l'appréciation de la commission, s'agissant de son
16 aptitude au service, il peut se plaindre de la décision dans un délai de 15
17 jours.
18 Et au deuxième paragraphe, la colonne de droite, il est dit que le service
19 civil n'intéressait pas les conscrits même si chaque conscrit avait le
20 droit de demander cela. Donc tout conscrit avait droit à l'objection de
21 conscience. En fait, il n'était pas obligé de prendre le fusil. Donc, on a
22 créé cinq centres de formation où cela allait se dérouler.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Une nouvelle question.
24 Qu'est-ce que ceci a à voir avec notre procès ? On parle maintenant de
25 recrutement en Croatie. Le fait que les Croates peuvent échapper au
26 recrutement et une possibilité d'appel. Mais quel est le rapport de cela
27 avec notre procès ? Je ne vois rien, même l'ombre d'une trace, qui mène à
28 une entreprise criminelle commune pour ne pas parler du reste.
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1 J'ai quelques appréhensions quand je vois ce dossier volumineux. Nous
2 sommes supposés entendre énormément de choses pour lesquelles je ne vois
3 aucun lien, mais si vous parvenez à me convaincre, tant mieux.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, c'est M. Franjo
5 Tudjman qui se trouve le premier sur la liste des personnes accusées
6 d'avoir participé à l'entreprise criminelle commune, donc, de ses
7 intentions face à la Bosnie-Herzégovine et de la manière dont il a mené la
8 politique de la République de Croatie de manière nationaliste, et cetera.
9 Il se voit ici accuser de bien des choses et il me semble indispensable,
10 peut-être que cela prendra deux heures en l'espèce, mais je pense qu'il est
11 juste de démontrer que la première personne accusée sur cette liste
12 d'entreprise criminelle commune envers la Bosnie-Herzégovine et également
13 le long des axes que nous avons déjà entendues, à savoir qu'il y avait là
14 du nationalisme et de toutes sortes de choses, qu'il convient de mettre en
15 perspective, dans son ensemble, l'approche intellectuelle qui a été celle
16 qui a présidé au développement et à la mise sur pied de la République de
17 Croatie.
18 Comment dans cet état, d'emblée, on a suivi comme inspiration et
19 comme intention les meilleurs principes de ce que nous qualifions du monde
20 occidental civilisé ? Donc je pense que même s'il y a des choses qui ne
21 touchent pas directement l'acte d'accusation, que ce que nous disons nous
22 permet de comprendre quelle était la vision du monde des acteurs qui s'en
23 trouvent accusés ici, à savoir Tudjman, Susak, Bobetko, et qui sont
24 mentionnés dans les textes. Et on verra dans ces textes ce qui les
25 préoccupait, quels étaient les problèmes qu'ils rencontraient. Et si on ne
26 prend pas connaissance des problèmes auxquels nous étions confrontés, il
27 semblerait que tout aurait pu être arrangé facilement.
28 C'est vrai, certes, pendant peu de temps -- enfin, il y a peut-être
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1 des choses qu'on peut passer, mais il m'est difficile de voir lesquelles.
2 Je souhaitais présenter dans son ensemble ce que nous avons fait comme
3 activités, comment nous avons mené nos activités, quelles étaient nos
4 aspirations, nos souhaits, quels étaient nos problèmes et quels étaient les
5 efforts que nous avons déployés pour mettre fin aux problèmes et pour mener
6 à bien nos actions.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] En raison de l'entreprise criminelle
8 commune, je voudrais pouvoir m'exprimer pour que ceci soit saisi au compte
9 rendu d'audience. En effet, je le pense et j'ai attendu ce que disait le
10 général Praljak, il faut comprendre une chose, on parle de la Bosnie-
11 Herzégovine, c'est vrai, mais la Croatie au fond est accusée d'entreprise
12 criminelle commune. Il nous faut comprendre la situation telle qu'elle se
13 présentait à l'époque.
14 La Croatie est occupée et menait sa guerre. La Croatie voulait la
15 reconnaissance. Elle voulait de l'assistance, et elle voulait récupérer
16 sont territoire. Ce que montre le général Praljak ici c'est que la Croatie
17 a ses propres problèmes, qu'elle essaie de résoudre par une voie légale et
18 légitime, et parallèlement elle travaille et coopère avec les autorités de
19 Bosnie-Herzégovine car en fin de compte ce sont les mêmes problèmes qu'ils
20 doivent affronter. C'est une partie de l'entreprise criminelle commune.
21 Je comprends votre frustration, Messieurs les Juges, surtout quand on
22 aborde ceci à un tel degré de détail. Mais si on parle d'égalité d'armes,
23 si vous me permettez l'expression, la Chambre a permis au Dr Miller,
24 professeur américain, qui jamais n'a mis le pied en Bosnie-Herzégovine
25 manifestement, de parler de 1996, 1997, 1998, de 2000 alors que ça ne fait
26 pas partie de l'acte d'accusation. La Chambre a dit ce sont les
27 informations intéressantes parce que ceci s'inscrit dans le terme
28 d'entreprise criminelle commune.
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1 Ici nous avons le général Praljak qui parle de Croatie, la Croatie
2 étant membre de l'entreprise criminelle commune, du moins c'est ce que dit
3 l'Accusation. C'est ça le problème. Le problème c'est que vous avez
4 autorisé un acte d'accusation si vaste que nous avons la responsabilité de
5 répondre à tout.
6 Permettez-moi d'ajouter ceci. Pensez au dernier témoin de la Défense
7 Stojic, il y a eu un commentaire intéressant formulé par un des Juges de la
8 Chambre, qui a dit que la Défense n'a pas contré cela, par conséquent la
9 Chambre accepte ce principe ou la position de l'Accusation. C'était en
10 rapport avec des cartes, des frontières, et nous n'avions pas fourni une
11 carte donnant les frontières de l'Herceg-Bosna, parce que nous avons dit
12 que ce n'était pas -- ça n'existait pas. C'était simplement des régions ou
13 peut-être dans certaines municipalités y avait-il une présence, c'était
14 peut-être une petite idée. J'ai compris que du moins dans l'esprit de
15 certains des Juges je dois apporter la preuve de ce qu'allègue
16 l'Accusation, apporter une preuve contraire quoi que l'on ai dit parce que
17 sinon on accepte la parole de l'Accusation comme l'Evangile. J'exagère un
18 peu, mais c'est comme nous voyons les choses.
19 Ce qui veut dire que maintenant nous sommes forcés à entrer dans ce
20 degré de détail en raison de la profondeur de l'acte d'accusation, parce
21 que si nous ne le faisons pas, vous allez peut-être dire, alors, vous
22 n'avez pas contesté ce qui a été affirmé, par conséquent; ça devait être
23 vrai. C'est là une partie du problème.
24 Je n'accuse personne ici, mais c'est une crainte omniprésente dans la
25 Défense et qu'on ne prouve pas tout. Je comprends bien que l'Accusation a
26 récemment déposé une requête à laquelle on va répondre, qui dit que si elle
27 ne répond pas à quelque chose qui est évoqué par le général Praljak ça ne
28 veut pas dire que la Chambre doit comprendre que l'Accusation accepte ce
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1 qui a été dit par M. Praljak. Ça me semble légitime. Parce que si quelqu'un
2 dit quelque chose et ce n'est pas contesté par l'autre ça ne veut pas dire
3 que forcément la Chambre va accepter ce qui est dit. Elle va déterminer la
4 valeur probante.
5 Mais si un des Juges dit, ce n'est pas contesté; par conséquent,
6 l'Accusation a apporté la preuve. C'est en tout cas la perception qu'on a
7 eue, et ceci nous force à contester chacun des détails les plus minutieux,
8 c'est pour ça qu'il faudra quatre ans de procès.
9 On pourrait accélérer les choses, il serait peut-être préférable qu'il y
10 ait des déclarations un peu de transitions pour mettre l'accent sur ce qui
11 est essentiel pour que tout le monde suive, que certains comprennent. Je
12 comprends aussi que pour les Juges ce n'est pas toujours simple. Peut-être
13 mon confrère pourrait-il motiver ces passages en donnant une déclaration
14 qui assure la transition, ce sera peut-être ainsi grâce aux commentaires de
15 M. Praljak plus facile à suivre et moins frustrant, mais je comprends la
16 frustration des Juges.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : On ne va pas partir sur des problèmes de cette
18 nature, je ne pense pas que l'intention de mon collègue était de développer
19 tout un débat sur l'entreprise criminelle. Me Karnavas s'est exprimé, mais
20 ce qu'il nous dit il l'a déjà dit. Il n'y a rien de nouveau.
21 Maître Alaburic.
22 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais dire
23 quelque chose non seulement pour que ce soit noté au compte rendu, mais
24 parce que de mon avis ça contribuera à mieux expliquer les choses.
25 Je comprends l'observation faite par M. le Juge Trechsel, et je dois
26 reconnaître que cela a été ma toute première pensée lorsque j'ai reçu ce
27 jeu de documents avec les exemplaires du "Soldat croate." Après avoir lu le
28 jeu de documents préparé par le général Praljak, j'ai compris pourquoi
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1 ceux-ci sont des documents importants pour ce procès et importants
2 notamment pour ce qui est de ce sujet de l'entreprise criminelle commune.
3 Dans ce "Soldat croate" dont on parle, il y a une analyse faite par
4 un analyste géostratégique croate qui nous dit dans quelle mesure il serait
5 souhaitable d'avoir une intervention militaire de la communauté
6 internationale pour résoudre le problème de l'agression serbe. Je pense que
7 cette position démontre de façon évidente que l'on n'aspire pas au
8 territoire d'un autre Etat, parce que si l'on avait aspiré au territoire
9 d'autrui, personne n'aurait souhaité que des soldats de la communauté
10 internationale viennent sur le territoire de la Croatie et de la Bosnie-
11 Herzégovine.
12 Ensuite, il y a un texte en provenance d'un analyste croate éminent, juste
13 une phrase, Monsieur le Président, --
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Ne témoignez pas. Ce que vous dites, vous allez
15 pouvoir l'amener le cas échéant dans le cadre du contre-interrogatoire,
16 parce que là vous faites toute une théorie qui équivaut à un témoignage. Il
17 vaut mieux par une question posée à M. Praljak, que celui-ci vous réponde.
18 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais juste
19 vous signaler qu'il y a un texte qui indubitablement indique que la Bosnie-
20 Herzégovine dans ses frontières d'AVNOJ, c'est-à-dire du conseil
21 antifasciste, n'a pas été remis en question mais c'est l'aménagement
22 antérieur qui est remis en question. Ces deux sujets illustrent bien le
23 fait qu'il s'agit de choses importantes pour ce qui est de l'entreprise
24 criminelle commune. Peut-être la Défense du général Praljak pourrait-elle
25 continuer avec l'analyse de ce soldat croate et on comprendra.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a M. Stringer qui intervient.
27 M. STRINGER : [interprétation] Merci de me donner la parole, je serai très
28 bref. Je ne vais pas vous présenter ici de réquisition.
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1 La semaine dernière à un moment donné j'ai dit que l'Accusation estimait
2 que certains éléments de preuve ou témoignage pouvaient être sans
3 pertinence. J'ai dit que j'allais vraiment essayer de ne pas toujours faire
4 objection. Cela dépendra du degré de latitude que la Chambre souhaite
5 donner au général au moment il dépose, car c'est un témoin mais aussi un
6 accusé. Pour ce qui est du témoignage à ce stade, l'Accusation ne va pas
7 objecter aux motifs de l'absence de pertinence, mais nous avons des raisons
8 de le faire parce que je pense que finalement ça ne fait perdre que du
9 temps, mais il y a une question distincte, c'est celle des documents des
10 pièces.
11 Pour ne pas perdre de temps et pour que le dossier soit clair,
12 l'Accusation ne va pas faire objection à chacun des documents qui, à notre
13 avis, manquent de pertinence. Mais pour que tout le monde le sache, nous
14 avons le droit de faire objection à ces documents dont la Défense Praljak
15 demande le versement lorsque la Défense déposera sa liste IC. Nous restons
16 cois, nous ne soulèverons pas trop d'objection pour que les choses
17 avancent, mais nous avons le droit je pense de réserver l'objection.
18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, je ne voulais pas
19 prendre de temps, mais permettez-moi de réagir en quelques mots à ce qu'a
20 dit Me Karnavas. Je suis tout à fait d'accord avec vous, je suis d'accord
21 avec chacun des mots que vous avez prononcés, pas d'objection. Si je
22 m'écarte sans doute un peu de ce que vous avez dit, c'est au moment là
23 comme on se peut éloigner, comme ici. En principe, la Croatie n'est pas
24 accusée ici, ça ne fait pas l'ombre d'un doute, en tout cas pas
25 officiellement, formellement. M. Tudjman n'est pas accusé. Ils sont
26 mentionnés en tant que membres de l'entreprise criminelle commune, mais ces
27 personnes ne sont pas ici au banc des accusés. Si vous pensez qu'un état ou
28 la politique d'un état est mise en cause, et je le reconnais c'est ici dit,
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1 et c'est le cas, mais ce n'est pas nécessairement efficace si on essaie de
2 contredire cela en montrant que beaucoup des choses marchaient, parce que
3 ça, ce n'est pas contesté.
4 Personne ne dit que tout était mauvais en Croatie. Personne ne dit
5 que la Croatie n'était pas un Etat qui voulait parvenir à une véritable
6 démocratie et a fait respecter le droit. Donc, si on présente des éléments
7 de preuve dans ce sens, ça ne sert à rien. On tourne vraiment dans le vide
8 parce qu'il n'y a pas d'obstacle.
9 C'est pour ça que j'avais fait cette observation. J'espère qu'ainsi
10 nous sommes au fond d'accord, même si nous ne sommes pas nécessairement
11 d'accord sur les détails.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, quand il y a un document, je le
13 regarde et j'essaie de poser une question qui permet d'y voir un peu plus
14 clair. Dans le document qu'on a sous les yeux, il y a un petit détail qui
15 peut avoir son importance, surtout au regard de la jurisprudence de la
16 Chambre d'appel dans l'affaire Kordic/Cerkez, qui a reconnu que la
17 République de Croatie avait le contrôle du HVO. Donc vous voyez quand moi
18 je pose une question, il y a toujours un arrière-plan juridique, et je me
19 projette dans le futur.
20 Dans le document que nous avons, il est indiqué que les conscrits,
21 ils sont 95 %, ont un livret militaire, un nouveau livret militaire. C'est
22 la dernière ligne du document en anglais. Alors, si vous permettez, on va
23 s'intéresser à ce livret militaire.
24 Prenons le cas du petit-fils de feu Tudjman, qui est d'abord conscrit
25 et incorporé dans une unité croate. Donc, je présume que son livret
26 militaire va marquer sa date d'incorporation. Alors peut-être que ce n'est
27 pas le cas, mais vous allez nous le dire. Mais s'il a un livret militaire,
28 et qu'après il dit : Je pars comme volontaire en République de Bosnie-
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1 Herzégovine, qu'est-ce qui va être marqué sur son livret militaire ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge
3 Antonetti, il s'agit du mois d'août 1992, date à laquelle l'on reçoit les
4 tout premiers soldats qui feront huit mois avant que de le devenir. Le
5 petit-fils du président Tudjman, c'était un volontaire tout comme moi. Il
6 est venu de son propre gré à Sunja. Il n'avait aucun livret militaire de ce
7 type. Donc, c'est de son plein gré qu'il est allé pendant un certain temps
8 à Capljina puis qu'il est revenu. Donc, nous en sommes au début du
9 recrutement de nouveaux soldats qui ont par la suite participé aux
10 événements de combat, parce qu'entre-temps ils n'ont pas eu à le faire
11 parce que les fonctions de la défense le long de la ligne de démarcation,
12 s'agissant des Serbes insurgés, c'était la tâche des brigades
13 professionnelles, à savoir les volontaires qui sont restés faire partie des
14 rangs de l'armée croate pour être payés au final. Le petit-fils de Tudjman
15 n'a rien à voir avec ce livret militaire. Moi, à aucun moment je n'ai eu de
16 livret militaire de ce type. Ça n'a été mis en place que pour les recrues
17 qui allaient faire d'abord huit ou dix mois au début; dix mois, me semble-
18 t-il plutôt.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'avez pas répondu à mes questions, mais
20 je reviens sur le sujet. Je prends le cas d'un conscrit. Le 28 août 1992,
21 il fait ses huit mois de service militaire, puis il va être affecté dans
22 une unité, la 124e Brigade de l'armée croate, par exemple. Voilà que vers
23 le mois d'avril 1993, ou juillet - comme on veut - il va dire : je vais
24 rejoindre le général Praljak qui est maintenant commandant, au mois de
25 juillet, du HVO. Il informe son commandement qu'il s'en va. Ce que je veux
26 savoir sur son livret militaire : qu'est-ce qui va être marqué ? Parce que
27 ma question n'est pas innocente. Elle est fondée en droit sur la notion de
28 contrôle global. Alors, raison plus pour répondre précisément.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, j'apporte
2 une réponse concrète dans la limite de mes connaissances. Je ne peux pas
3 répondre à votre question, parce que je ne sais pas si, parmi ceux qui sont
4 venus, quiconque disposait de ce type de livret, alors j'ai dit ce que je
5 savais.
6 Un volontaire, ou plusieurs d'entre eux, recevait un papier, un
7 document disant qu'il pouvait partir au champ de bataille au sud, donc on
8 appelait cela ainsi. Ça lui servait de couverture en cas de décès. Je le
9 sais et je l'affirme. Mais pour répondre entièrement à votre question, je
10 ne sais pas le faire. Je n'ai jamais vu ce type de livret, je ne sais même
11 pas ce qu'on mettait dedans, et je ne sais pas si l'un quelconque de ceux
12 qui ont fait leur service militaire avait été affecté à une brigade
13 quelconque. Ces brigades existaient et leurs rangs ont été complétés par
14 des volontaires qui étaient des volontaires avant, jusqu'à Eclair et
15 Tempête. Notre problème, cela a été la démobilisation, parce qu'il y avait
16 beaucoup plus de gens qui, en tant que volontaires, voulaient faire partie
17 des rangs de l'armée que nous ne pouvions en prendre en temps de paix.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Excusez-moi. Je vous pose une question de
19 suivi sous le contrôle de votre avocat, qui était dans l'affaire
20 Kordic/Cerkez, et qu'il la connaît très bien.
21 Vous savez, on a eu ici des éléments de preuve, qu'on a trouvé des
22 soldats de la HV décédés et ils avaient une carte d'identité militaire ou
23 un livret militaire. Simplement, c'est mentionné dans l'affaire Kordic.
24 Mais moi, je n'ai pas le livret militaire sous les yeux. Ce soldat de la
25 HV, mort au combat en République de Bosnie-Herzégovine, apparemment,
26 d'après vous, comme volontaire, il avait un livret, celui-là. Qu'est-ce qui
27 pouvait être inscrit sur son livret pour justifier qu'il n'était plus dans
28 l'armée croate mais qu'il était au HVO ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ça n'a jamais été marqué,
2 c'est sûr. Il pouvait porter, et je ne sais pas si c'est ce type de livret,
3 mais plus petit tel que celui que j'avais. Lorsqu'il partait, il portait ce
4 type de document, et il est certain qu'il pouvait se faire tuer en tant que
5 volontaire, et au cas où on retrouvait ce livret, mais jamais on indiquait
6 : "Envoyé au HVO en Bosnie-Herzégovine." Personne ne pouvait lui inscrire
7 cela, je le sais pour sûr. Il devait porter cela sur soi. Il est parti, et
8 on lui a reconnu le droit du soldat militaire, à savoir droit à être
9 enterré, et après par la suite, s'il était blessé, il se faisait soigner ou
10 alors il touchait une retraite. Mais je parle de droit, je ne parle pas du
11 droit d'être envoyé là-bas. Personne n'avait ce droit et personne ne
12 pouvait lui inscrire : Tu vas en Bosnie-Herzégovine pour te battre du côté
13 de l'ABiH ou du HVO.
14 Les officiers de l'ABiH, aussi, on recevait des demandes par exemple
15 : envoyez-nous un tel, un tel de Rijeka, laissez-les partir vers l'ABiH. On
16 a approuvé qu'ils pouvaient s'en aller, et ils se gardaient leurs droits.
17 Ils sont partis et ils sont revenus, mais nulle part on a inscrit qu'ils
18 étaient en Bosnie-Herzégovine. Enfin, c'est simple. C'est comme s'ils
19 n'avaient pas bougé du tout de là où ils étaient du point de vue de la
20 droits. Voilà.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. C'est au transcript.
22 Maître Kovacic.
23 M. KOVACIC : [interprétation]
24 Q. Alors, peut-être, oui, je sais que vous n'aviez pas de raisons d'aller
25 voir à quoi ressemblaient les livrets militaires. Mais peut-être pour
26 éclaircir une chose, pour toutes les personnes ici présentes. Je pense
27 qu'il s'agit de deux choses ici. On parle de la carte d'identité d'une part
28 et du livret militaire d'autre part où sont indiqués les formations, les
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1 différents services effectués, le niveau de préparation. Donc il s'agit,
2 dans le deuxième cas, d'un livret qui a un certain nombre de pages et qui
3 est tenu par un registre, un secrétariat spécial. Mais le premier document
4 est juste une carte d'identité, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, c'est exact. J'avais une carte d'identité militaire.
6 Q. Mais il n'y a même pas de rubrique dans ce document. C'est juste une
7 petite carte d'identité, n'est-ce pas ?
8 R. Oui, c'est une pièce d'identité de petite taille qui ne comporte aucune
9 rubrique supplémentaire. Et quand j'ai terminé mon service en 1995 et 1996
10 et que je me suis présenté à la section militaire, j'ai vu à ce moment-là,
11 pour la première fois, qu'il existait un livret militaire. J'étais encore
12 conscrit et on a inscrit dans le mien la chose suivante : "Général colonel
13 Slobodan Praljak de l'armée croate, inapte au service." Et ils ont recopié
14 cette qualification d'inapte à partir des documents dont ils disposaient
15 émanant de la JNA. Donc à la fin de la guerre et juste après un ou deux
16 mois après, on a inscrit dans mon livret militaire : "Général colonel de
17 l'armée croate, Slobodan Praljak, inapte au service militaire."
18 M. KOVACIC : [interprétation] Alors, Messieurs les Juges, j'espère
19 que j'ai aidé à éclaircir un peu cela et je ne veux pas ici témoigner, mais
20 vous avez mentionné ces soldats dans l'affaire Cerkez. Il s'agissait là de
21 documents d'identification, de pièces d'identité et c'était la seule pièce
22 d'identité dont il disposait, c'était celle de l'armée croate du HV car
23 personne d'autre ne lui en aurait délivré.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai ici, dans ma cellule, la carte d'identité
25 de la HV, une pièce d'identité du HVO et une pièce d'identité de la Bosnie-
26 Herzégovine également car on m'en a délivré une aussi. Arif Pasalic m'a
27 délivré un document au terme duquel je suis membre de l'ABiH.
28 M. KOVACIC : [interprétation]
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1 Q. Très bien. Je vous remercie.
2 R. Et je le montrerai évidemment. Je peux l'amener demain si vous le
3 souhaitez.
4 M. KOVACIC : [interprétation] Messieurs les Juges, ce livret de l'ABiH a
5 été mis sur la liste de nos pièces à conviction. Nous la présenterons tôt
6 ou tard. Quant à cette pièce d'identité de la HV, nous n'avons pas estimé
7 nécessaire de la présenter. Mais il s'agissait pour nous d'un fait notoire
8 qui n'avait pas besoin d'être démontré. Mais aux fins d'une meilleure
9 démonstration, nous pouvons évidemment vous présenter cette pièce
10 d'identité de la HV demain. Je vous remercie.
11 Q. Alors, Général Praljak, je vous propose de continuer.
12 R. Je voudrais maintenant que nous sautions un certain nombre de
13 documents. En effet, M. le Juge Trechsel, il est un fait qu'il se trouve
14 ici plus d'éléments que ce que vous auriez peut-être estimé utile en tant
15 que Juge et c'est peut-être en raison de la peur qui est la millième que
16 l'on ne prenne pas assez en compte un certain nombre d'éléments pertinents.
17 Et la crainte qui est la mienne de me voir contraint d'écarter toute une
18 série d'éléments qui sont pertinents.
19 Donc, nous allons passer au 3D290517 qui parle de la défense civile -
20 -
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais que soit mentionné ce que je vais dire
22 suite à l'intervention de mon collègue sur l'entreprise criminelle.
23 Il est exact que M. Tudjman n'est pas accusé puisqu'il est mort, donc
24 il ne peut pas être là. Mais s'il était vivant, il serait là, il serait
25 dans le banc des accusés. Le général Bobetko, s'il était vivant, il serait
26 dans le banc des accusés.
27 Voilà. Donc il faut bien avoir cela à l'esprit concernant
28 l'entreprise criminelle commune.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, il est dit simplement ici que la
2 défense civile a participé dans l'accueil de 900 000 réfugiés et personnes
3 déplacées. Et dans l'avant-dernier paragraphe, il est dit : "Il faut
4 souligner que l'accomplissement de ces tâches, notamment lorsqu'il s'agit
5 de l'évacuation de la population des zones touchées était impossible sans
6 l'aide et la coordination fournies par l'armée croate." Donc c'est à
7 Slavonski Brod, à Pozega, et cetera. Alors, je souhaite simplement
8 souligner qu'il y avait 900 000 réfugiés et tout ce que l'armée croate a
9 fait en la matière est absolument incroyable. Et ce chiffre lui-même est
10 tout à fait extraordinaire pour un pays aussi petit. Cela représente
11 pratiquement un cinquième, un quart de la population totale.
12 Je vais sauter la suite et passer à la page 3D290518. Il est de nouveau
13 question du système d'instruction de l'armée croate qui sera donc conforme
14 et compatible avec celui des pays occidentaux, qu'il n'y aura pas besoin de
15 suivre les cours d'une académie militaire en sus, mais qu'il s'agira de
16 cours dispensés dans les universités.
17 Alors, on va sauter la partie consacrée aux prisonniers. Je voudrais que
18 l'on passe maintenant à la page 3D290521 puis 522. On dit ici que la guerre
19 dans l'Etat voisin a montré au monde entier ce sur quoi la Croatie a attiré
20 l'attention au cours des années précédentes, à savoir que dans l'intérêt de
21 la sécurité de toute la région il est nécessaire de s'attaquer au problème
22 du nationalisme serbe. Là encore, on parle de l'Etat voisin, la Bosnie-
23 Herzégovine.
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Une simple question technique.
25 Ne pourriez-vous pas nous parler des pages indiquées en bas de page
26 parce que lorsque vous nous donnez la cote 3D361553, vous nous parlez de la
27 version en B/C/S. Alors, nous essayons d'abord de retrouver ça pour voir de
28 quoi vous parlez et ensuite nous devons passer à l'anglais et nous sommes
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1 sur le point de trouver le passage en question au moment où vous pouvez
2 passer à la page suivante. Et nous devons recommencer le même exercice
3 encore et encore. Donc il serait utile de trouver une solution à ce
4 problème.
5 M. KOVACIC : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est le 3D361564 dans
6 la version anglaise; pour la version croate, c'est 3D01279 et c'est la page
7 e-court 3D290521.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Et c'est toujours dans le
9 document 3D01279, et non pas dans le document 3D1280 qui a déjà été affiché
10 à l'écran. C'est pour cela que je m'étais un petit peu perdu. Je vous
11 remercie beaucoup.
12 M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit ici de l'un des journalistes civils
14 qui ont suivi ce sujet. La page suivante, je voudrais revenir sur cette
15 visite du président français, François Mitterrand qui, lorsqu'il est venu à
16 Sarajevo.
17 M. KOVACIC : [interprétation]
18 Q. La page suivante est le numéro 3D290522 et en version anglaise, c'est
19 la page suivante par rapport à celle que j'ai donnée à l'instant.
20 R. Je regrette d'avoir à dire cela, Monsieur le Juge Antonetti, mais
21 François Mitterrand était plus que largement favorable aux Serbes. Il est
22 ici écrit : Il a atterri à Split comme s'il arrivait dans un pays
23 absolument non reconnu. Il n'a demandé à rencontrer personne. Il a tout
24 simplement prolongé sa route jusqu'à Sarajevo et a, là-bas, donné aux
25 Serbes la possibilité de s'en sortir, de se séparer, bien que la Croatie
26 ait déjà été reconnue à ce moment-là. Je n'accuse ici personne mais cela
27 montre dans quel jeu nous étions encore et dans quelle zone nous devions
28 nous débattre à ce moment-là encore. Chaque pays a, bien entendu, son
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1 propre intérêt mais c'est là une bonne illustration de la situation à
2 l'époque.
3 Q. Général Praljak, peut-être juste un ou deux mots au sujet de cet
4 auteur, ce journaliste. Vous le connaissiez. Est-ce qu'il s'agissait d'un
5 simple journaliste ou était-il un peu plus que cela ? Il s'appelle Gjenero,
6 n'est-ce pas ?
7 R. C'est juste. C'est un analyste politique et militaire.
8 Q. Il est reconnu en cette qualité aujourd'hui en Croatie, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous, vous lui reconnaissez cette qualité de personne
11 qualifiée en matière de questions militaires et politiques ?
12 R. Oui, tout à fait, c'est un analyste militaire.
13 Q. Merci beaucoup.
14 R. Alors ensuite, on parle du revirement de CNN à l'égard de la Croatie,
15 lorsque les premiers avions de transport ont commencé à assurer des vols
16 via Split et Zagreb pour apporter de l'aide à Sarajevo. Ils ont commencé à
17 demander l'approbation des autorités croates pour assurer ce pont aérien.
18 Avant cela, les choses ne se passaient pas tout à fait comme ça. C'était un
19 peu qui ils voulaient, qui atterrissait, et ce, bien qu'il y ait eu
20 antérieurement déjà des corridors qui passaient par la Croatie, sauf que
21 personne ne nous demandait vraiment s'il était permis d'atterrir, personne
22 ne nous indiquait ce qui était transporté, ni les quantités transportées, à
23 destination de qui. Et ensuite, je voudrais que l'on passe à la page
24 3D290523. C'est le même document toujours. Donc 3D --
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Le document où vous parliez du président français
26 qui s'est rendu à Sarajevo, il a atterri à Split, mais c'est à quelle date
27 exactement ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était en 1992, à l'automne. Maintenant, je
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1 ne me souviens pas de la date exacte. Mais c'était en 1992. Monsieur le
2 Président, en fait, à ce moment-là, on avait déjà vu apparaître des
3 souhaits clairs et explicites de la part de certains Etats visant à ce que
4 les Serbes se retirent et que leurs positions soient bombardées. Selon tous
5 les analystes, si bien les nôtres que les analystes étrangers, François
6 Mitterand, en atterrissant à Sarajevo, a fourni une nouvelle occasion aux
7 Serbes pour faire ce qu'ils souhaitaient. Alors, pour autant que je me
8 souvienne, ce qui a été publié c'est qu'il aurait dit à Izetbegovic que
9 l'Occident n'interviendrait pas, que les Serbes n'allaient pas nous
10 bombarder, et que vous, M. Izetbegovic, vous deviez vous mettre d'accord
11 avec Karadzic. Et alors, Izetbegovic aurait demandé : Mais comment puis-je
12 me mettre d'accord avec Karadzic puisque lui, il nous pilonne et nous tue ?
13 Et la fin, on la connaît.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, ce que je n'ai pas compris, il a atterri à
15 Split ou à Sarajevo ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] A Split puis à Sarajevo.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. En automne 1992, la République de Croatie a
18 été reconnue internationalement ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais c'est après la date d'expiration du
20 moratoire imposé par la Communauté européenne. Elle avait demandé à la
21 Croatie d'accepter ce moratoire, de respecter ce moratoire sur
22 l'indépendance. Je ne sais pas exactement, était-ce au début de l'année
23 1993. Mais dans tous les cas, je pourrais peut-être lire --
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais, pour atterrir à l'aéroport de Split, il y
25 avait un contrôle aérien ? Est-ce que la République de Croatie avait des
26 contrôles aériens ? Et quand un avion atterri, il faut demander
27 l'autorisation pour atterrir et il y a un plan de vol au départ. Donc la
28 République de Croatie était informée qu'il y avait une personnalité qui
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1 allait atterrir à Split. Oui ou non ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il y avait des contrôles aériens et
3 l'avion s'est posé à Split. Je ne sais pas qu'on ait su qui était à bord de
4 cet avion, peut-être pour des raisons de sécurité. Mais, je sais que les
5 autorités croates se sont trouvées offusquées par le fait que, vous savez
6 comme généralement quand on survole un pays, que M. le Président Mitterand
7 ait dit : Monsieur le Président, je vais me poser à Split, en route pour
8 Sarajevo. Je vous envoie mon bonjour. Mais ils ont trouvé que ce n'était
9 pas bien qu'on ne leur dise pas bonjour.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Je comprends mieux.
11 Maître Kovacic.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Quelque chose m'a peut-être échappé.
13 Excusez-moi si je vous demande de répéter ce que vous avez déjà dit.
14 Monsieur Praljak, qui est le rédacteur en chef de "Hrvatski Vojnik" ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Le rédacteur du "Soldat Croate," c'était Ivan
16 Tolj. A la fin de la guerre, il était général de l'armée croate. En fait,
17 c'était un écrivain, un poète. Jusqu'à la guerre, il n'avait rien à voir
18 avec les militaires ni l'armée. C'était un homme de lettres.
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Et pendant la guerre, faisait-il
20 partie de votre département, faisait-il partie du groupe dont vous faisiez
21 partie vous-même en tant que ministre adjoint de la défense dirigeant
22 l'armée ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Il était dans notre service, Monsieur le Juge,
24 mais c'était une rédaction indépendante. Elle était officielle, mais elle
25 était indépendante. Nous avions des consultations permanentes qui portaient
26 sur tous les points et sur tout un tas de points techniques, finances,
27 impressions, et cetera. Il faisait partie de ma section, de mon service,
28 mais pour ce qui est de la rédaction des textes, ils étaient indépendants,
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1 après consultations, y compris avec le ministre, le président Tudjman et
2 moi-même.
3 La ligne directrice, éditoriale, comme toujours, a existé là-bas, et puis
4 ils ont une certaine latitude. Au niveau de la rédaction, il y a un certain
5 nombre de faits portant sur l'armement, les appareils de l'armée de l'air,
6 et cetera; tous ces faits, je les faisais barrer. Ça ne figure pas ici. Ce
7 sont des questions purement militaires et techniques.
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, Merci.
9 M. KOVACIC : [interprétation] Juste pour replacer les choses dans leur
10 contexte, par rapport aux dates, non pas pour témoigner, mes confrères
11 viennent de m'aider. Le déplacement du président français se situe à la
12 date du 29 juin 1992. Il s'est posé à Split et c'est de Split qu'il a pris
13 un hélicoptère pour se rendre à Sarajevo. Je ne dis pas pour témoigner,
14 c'est juste pour replacer les choses dans leur contexte historique. Donc
15 c'était un déplacement à bord d'un hélicoptère.
16 Q. Il me semble, Mon Général, que nous avons atteint l'opération Bouclier,
17 page 3D290523, traduction anglaise dans le prétoire électronique 3D361547.
18 Pièce 3D01279.
19 R. Monsieur le Président, Monsieur les Juges, je ne souhaite pas
20 m'attarder sur ce texte véritablement.
21 Ce que je souhaite montrer, voilà, "l'Herceg-Bosnie" Dans une large partie
22 pour ce qui est des commentateurs. Ce n'est pas l'Herceg-Bosna que nous
23 mentionnons ici devant ce Tribunal. C'est la Bosnie-Herzégovine en fait,
24 une des appellations historiques qui concerne la Bosnie-Herzégovine. Un bon
25 nombre de Croates et d'historiens l'appelaient ainsi, on trouve cela dans
26 des livres d'histoire, à savoir "l'Herceg-Bosna" que vous voyez ici, ce
27 n'est pas l'Herceg-Bosna de notre acte d'accusation en l'espèce, c'est la
28 Bosnie-Herzégovine plutôt, c'est une première chose.
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1 Une deuxième chose, M. Vlatko Cvrtila est le meilleur commentateur et
2 sociologue de la guerre en Croatie, du moins à mon sens. Dans ce texte,
3 tout simplement, il mène une analyse, il cherche à présenter ce qu'il
4 convient de faire, quel est le piège serbe, quel est le jeu des services
5 secrets, services de renseignement, quel est le nombre de soldats qu'il
6 faudrait éventuellement envoyer, déployer pour calmer la Bosnie comme
7 l'entend la communauté internationale. C'est un texte d'analyse d'une
8 excellente qualité. A un endroit le texte dit que d'après les recherches
9 menées par "Newsweek," une intervention en Bosnie-Herzégovine serait
10 soutenue par 53 % des interviewés. Et puis il est expliqué quels sont les
11 dilemmes auxquels fait face la communauté internationale, il en ressort que
12 la Croatie aurait souhaité vivement que quelqu'un intervienne.
13 Franchement, nous espérions vivement que cette intervention se
14 produise pour que quelqu'un nous aide à mettre fin à l'avancée de cette
15 force très puissante. Que quelqu'un se déploie le long des frontières entre
16 la Croatie et la Serbie, la Croatie et la Bosnie-Herzégovine et que d'après
17 ce qu'on a entendu pendant le début des négociations, que quelqu'un force -
18 -
19 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Général Praljak, j'aimerais
20 vous interrompre une minute, sachant que nous allons bientôt lever
21 l'audience pour aujourd'hui.
22 Je ne suis pas sûr d'être d'accord avec vous sur la base des
23 connaissances que j'aie de l'Herceg-Bosna, lorsque vous dites et c'est en
24 ligne 50, que le terme "d'Herceg-Bosna" aurait pu tout aussi bien faire
25 référence à l'intégralité de la Bosnie-Herzégovine. Si mon souvenir est
26 bon, l'Herceg-Bosna désigne principalement cette partie de la Bosnie-
27 Herzégovine qui correspond à l'Herzégovine, si je ne m'abuse, c'est en tout
28 cas ce que j'ai appris à Hongrie, en étudiant l'histoire de la Bosnie-
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1 Herzégovine ainsi que son occupation et son annexion. Mais bien sûr c'est
2 une question de fait, et je suis tout à fait disposé à accepter quelque
3 chose pour autant qu'elle ait été démontrée. Pour être tout à fait honnête
4 avec vous, ceci ne préjuge en rien du jugement sur l'acte d'accusation. Je
5 tenais à le préciser. Nous pourrions poursuivre sans qu'il y ait
6 controverse, bien sûr.
7 M. KARNAVAS : [interprétation] Non, bien sûr sans en arriver à une
8 quelconque polémique, il me semble que nous avons présenté des éléments de
9 preuve par l'intermédiaire de Borislav Puljic, l'un de nos témoins qui a
10 apporté avec lui un ouvrage signé de la main d'un Musulman, un Bosnien,
11 comme on dit, antérieur aux événements, dont le titre était "Herceg-Bosna."
12 Le terme doit donc être remis dans un contexte historique. C'est tout ce
13 que je voulais ajouter, ceci figure aux éléments de preuve.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, ce qui est évoqué à
15 l'acte d'accusation c'est l'Herceg-Bosna comme il l'affirme, mais moi
16 j'affirme autre chose. Mais ce qui est certain c'est que dans des livres
17 d'histoire, c'était un Herceg qui gouvernait la Bosnie, donc le nom Bosnie-
18 Herzégovine ça vient du titre de celui qui gouverne et qui vient de
19 l'empire austro-hongrois, donc un Herceg.
20 Mais souvent vous avez le même territoire sous Bosnie et puis sans
21 Herzégovine, pour la totalité du territoire. Même souvent encore
22 aujourd'hui, et je le déplore, on parle de la totalité du territoire en
23 l'appelant Bosnie, mais c'est Bosnie-Herzégovine. Dans l'autre texte, vous
24 avez aussi cette appellation comme étant un autre nom pour l'état de
25 Bosnie-Herzégovine en tant que tel, l'Herceg-Bosna, pour le même
26 territoire. Bon nombre de publications c'est une appellation géographique
27 identique, l'Herceg-Bosna ou Bosnie-Herzégovine.
28 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci, Général Praljak de cette
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1 explication. En fait, le terme "Herceg" H-e-r-c-e-g est un terme hongrois,
2 qui vient de l'allemand, bien sûr, "Herzog," avec un z au milieu. Mais
3 enfin, peu importe, c'est aux historiens de me convaincre et de me
4 corriger, si j'ai tort.
5 M. KOVACIC : [interprétation]
6 Q. Il nous reste cinq minutes, Mon Général. Sur la base de cet article,
7 est-ce que vous pourriez nous relever les points les plus intéressants ?
8 R. Je ne souhaite ajouter quelque chose ni extraire des éléments de ce
9 texte. C'est une analyse qui d'après moi est très intéressante dans son
10 ensemble.
11 Une dernière citation, 3D290527, toujours du "Soldat croate." Là
12 encore, l'Herceg-Bosna sous-entend le territoire de la Bosnie, sans
13 connaître l'histoire des communautés qui composent ce territoire on ne peut
14 pas comprendre ce qui se passe aujourd'hui. Gjenero, l'auteur du texte,
15 dans un rappel historique essaie de présenter les éléments les plus
16 importants de l'histoire de la Bosnie-Herzégovine qui permettent de
17 comprendre les événements tragiques qui se situent en 1992. A commencer par
18 Benjamin Kalaj, ministre des finances qui a exercé le contrôle en Bosnie à
19 un moment donné, et Benjamin Kalaj était Hongrois --
20 M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi. Pourrait-on obtenir une
21 référence des pages en anglais ?
22 M. KOVACIC : [interprétation] 3D361553, justement j'allais le lire. 1553.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour terminer, Davor Gjenero dit que les
24 Serbes font tout pour empêcher de nombreuses années toute possibilité de
25 cohabitation avec les deux autres communautés ethniques, le nettoyage
26 ethnique du territoire, et on tente de le représenter comme étant une
27 solution qui simplifiera le tableau complexe. Il convient de faire cela sur
28 la plus grande partie du territoire. La communauté croate jusqu'à présent
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1 par aucun de ses gestes, n'a fait preuve de manque de loyauté face à l'état
2 de Bosnie-Herzégovine. Le HVO pour sa part, sur le territoire où les
3 Croates vivent en nombre considérable, offre une résistance efficace aux
4 tentatives de l'agresseur. La communauté croate ne tente pas de profiter de
5 la situation de guerre, ne préjuge pas de solution politique pour une
6 entité future en Bosnie-Herzégovine ou pour la Bosnie-Herzégovine de
7 l'avenir. Mais au contraire, elle coopère dans le cadre des négociations
8 menées sous l'égide de la Communauté européenne.
9 M. KOVACIC : [interprétation] 3D290528, en anglais 3D361554, et cela
10 déborde sur la page 55.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, on poursuivra demain parce que c'est
12 19 heures passées déjà. Vous savez que nous sommes du matin, donc nous nous
13 retrouverons tous demain à 9 heures.
14 Je vous souhaite une bonne soirée.
15 --- L'audience est levée à 19 heures 01 et reprendra le mardi 12 mai 2009,
16 à 9 heures 00.
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