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2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Les accusés Prlic et Coric sont absents]
5 [Le témoin vient à la barre]
6 --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
8 l'affaire, s'il vous plaît.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
10 toutes les personnes présentes dans le prétoire.
11 Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.
12 Je vous remercie, Monsieur le Juge.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
14 En ce jeudi 21 mai, je salue toutes les personnes présentes. Je salue M.
15 Praljak, je salue M. Stojic, M. Petkovic, et M. Pusic, ainsi que tous les
16 avocats, Mmes et MM. les avocats. Je salue également M. Stringer et ses
17 collaborateurs et collaboratrices, ainsi que toutes les personnes qui nous
18 assistent.
19 Avant de donner la parole à Me Pinter pour la suite de son interrogatoire,
20 je tiens à indiquer ceci : hier vous avez constaté qu'à quelques reprises,
21 les avocats se sont levés pour dire qu'il y avait quelques problèmes au
22 niveau de la traduction. Alors j'invite M. Praljak et Me Pinter à ralentir
23 le débit parce qu'en parlant très vite, les interprètes, qui font des
24 exploits, peuvent manquer quelques mots. Ça peut arriver. Vous le savez, on
25 vous l'a déjà dit.
26 Nous sommes dans le procès où, en une journée d'audience, il y a à chaque
27 fois le plus grand nombre de pages de transcript, tout ceci en raison de la
28 vitesse des uns et des autres, et lorsque l'on parle vite - et moi-même, je
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1 me confesse, parfois je vais trop vitre - on risque de ne pas voir dans le
2 transcript tout ce qu'on a dit.
3 Alors je profite de cela pour renouveler notre entière confiance dans tous
4 nos interprètes, qui font un travail fantastique, et qui essaient de mieux
5 possible de faire leur travail pour que nous ayons le maximum de la
6 traduction au mieux de ce qu'ils ont entendu.
7 Je salue aussi M. le sténotypiste qui, comme vous le savez, grâce à lui,
8 nous voyons défiler sur l'écran tout ce que les uns et les autres puissent
9 dire.
10 Ça aussi, c'est un travail exceptionnel qu'ils font les uns et les
11 autres. Donc pour éviter quelques erreurs, il faut que tout le monde se
12 discipline et parle de manière lente, afin que tous nos propos soient
13 enregistrés.
14 Donc je renouvelle, à nouveau, notre entière confiance dans nos
15 interprètes, quel qu'il soit ceux qui traduisent du B/C/S en français, ou
16 du B/C/S en anglais, ou de l'anglais en français, ou du B/C/S en anglais
17 qui est retraduit en français, et cetera. Ce travail est remarquable et il
18 faut l'indiquer. Voilà.
19 Alors, Maître Pinter, je vous donne la parole et tenez compte de ce
20 que je viens de dire.
21 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Bonjour à vous et à toutes les personnes présentes dans le prétoire. Je
23 m'efforcerai véritablement de parler le plus lentement possible dans mon
24 propos. Mais c'est contre nature, croyez-moi, je vais donc m'efforcer de
25 faire en sorte que tout soit consigné.
26 Donc je vais essayer de contrôler ma nature.
27 J'aimerais que nous passions à huis clos partiel pour quelques minutes tout
28 au début.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Juge, nous sommes maintenant
3 à huis clos partiel.
4 [Audience à huis clos partiel]
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6 [Audience publique]
7 LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]
8 [Le témoin répond par l'interprète]
9 Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre
10 autorisation, je demanderais à M. l'Huissier, de remettre une carte au
11 général.
12 Interrogatoire principal par Mme Pinter : [Suite]
13 Q. [interprétation] Mon Général, vous vouliez dire quelque chose, vous
14 vouliez ajouter quelque chose, me semble-t-il ?
15 R. Je vous remercie.
16 Q. Il s'agit du 3D03545.
17 R. Le 3544 aussi. Alors hier, j'ai cogité la chose et j'ai voulu compléter
18 la réponse apportée à la question posée par M. le Juge Mindua. La question
19 portait sur le fait de savoir si j'avais conscience de la menace que
20 j'avais adressée au directeur de cette paternité ou ce qu'on appelle la
21 fraternité pouvait constituer exemple pour les combattants afin qu'eux
22 aussi se mettent à proférer des menaces. Alors je voudrais dire que j'avais
23 pleinement conscience de ce type de possibilité parce que pendant une
24 grande partie de ma vie, j'ai eu à m'occuper du problème des méthodes et de
25 l'objectif, et ce, non seulement pour ce qui est de la méthodologie à
26 étudier en matière de science mais aussi de la méthodologie et des
27 objectifs pour ce qui est des structures politiques et celles de l'Etat.
28 J'ai étudié donc Platon, Machiavel, Savonarole, Hegel et ce qui s'est passé
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1 dans l'Etat de Prusse puis Karl Popper et la société ouverte.
2 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi. Il s'agit d'un
3 avertissement que je lance. Nous entendons un son qui vient de la cabine
4 française qui n'est pas le son habituel. Peut-être qu'il y a un petit
5 souci, il y a un microphone qui aurait dû être éteint, quelque chose comme
6 cela. Je vous prie de bien vouloir vérifier.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] On n'a pas consigné : "Platon, Aristote,
8 Machiavel, Savonarole, Karl Popper, la société ouverte."
9 Donc je savais pertinemment bien à quel point le problème est grave pour ce
10 qui est de ne pas faire en sorte que la fin vienne à justifier les moyens.
11 Alors, Messieurs les Juges, dans une situation où Jajce est tombé, et
12 lorsque vous voyez le nombre de réfugiés, de blessés, de morts et tous ces
13 gens qui passent par Travnik pour aller au-delà, et lorsque vous avez
14 conscience du fait que cette offensive, en passant par Travnik et en se
15 dirigeant vers la Bosnie centrale, je parle de l'offensive serbe dirigée
16 vers Sarajevo; donc susceptible du point de vue humanitaire et militaire et
17 quand je parle de l'élément humanitaire, j'entends par là des centaines de
18 milliers de réfugiés en plus. Lorsque je me réfère à ce segment militaire,
19 j'entends en réalité la possibilité de voir la Bosnie-Herzégovine couper en
20 deux depuis Banja Luka en passant par Travnik, la vallée de Lasva et
21 Sarajevo. Chose qui, dans la situation telle que qui se présentait,
22 constituerait une catastrophe militaire véritable tant pour l'ABiH que pour
23 le HVO et aussi bien pour les deux peuples en présence.
24 Alors ce que je voudrais c'est le dessiné ici. S'il y a cette carte
25 dans le prétoire électronique, peut-être serait-il préférable de tracer ce
26 que j'entends tracer sur l'écran et cela nous permettra de garder la carte
27 sur papier intacte.
28 Q. Oui, nous avons ça.
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1 Mme PINTER : [interprétation] Je vais demander à M. l'Huissier de donner le
2 matériel qu'il faut au témoin.
3 Q. Dites-nous quel est le numéro de la référence, une fois de plus, pour
4 ce qui est de la carte ?
5 R. 3D 03544. Alors, pour ce qui est de cette partie centrale non loin de
6 Sarajevo, j'aimerais qu'on zoom.
7 Q. Mon Général, c'est le 545 qu'on a sur l'écran.
8 R. Oui, justement il nous faut l'Herzégovine pas la Yougoslavie. On a
9 besoin donc de la Bosnie-Herzégovine. C'est le 3D 05044; c'est le bon
10 numéro.
11 Q. Vous avez une autre carte de préparer, n'est-ce pas ?
12 R. Oui, c'est autre chose, c'est la carte de la Yougoslavie, mais d'abord
13 penchons-nous sur celle-ci.
14 Voilà, on y est. Agrandissez la partie non loin de Sarajevo. Voilà.
15 Je n'y vois plus comme avant. Un instant.
16 Voilà. Ici se trouve Travnik.
17 [Le témoin s'exécute]
18 Voici la vallée de la Lasva en direction de Sarajevo.
19 [Le témoin s'exécute]
20 Ici on a Jajce.
21 [Le témoin s'exécute]
22 Une fois Jajce tombée, par cette route-ci que sont passés les
23 réfugiés qui étaient au nombre de dizaines de milliers, et il n'y avait
24 plus aucune défense de poids avant Travnik sur ce cheminement lorsque je
25 suis arrivé et le péril s'était de voir couper la Bosnie-Herzégovine sur
26 cet axe ici.
27 [Le témoin s'exécute]
28 Alors le sentiment de la catastrophe humanitaire immédiat que cela
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1 risquerait de susciter a ce qui a -- c'est ce qui a motivé mon
2 comportement.
3 Je voudrais que nous passions à présent pour quelques instants à huis
4 clos partiel.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
6 M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, nous sommes
7 actuellement à huis clos partiel.
8 [Audience à huis clos partiel]
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
2 Maître Pinter, continuez.
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi. Votre dernière
4 réponse, Monsieur Praljak, est un petit peu énigmatique à mon sens. On vous
5 a demandé combien de réfugiés il y avait et vous avez répondu "ensemble
6 avec les hommes des troupes." Est-ce que cela signifiait que les troupes
7 fuyaient ? Qu'est-ce que cela veut dire exactement ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Les soldats fuyaient aussi, tous fuyaient. En
9 termes simples, ça vous donne une masse qui se déplace et l'armée, les
10 militaires sont en débandades complètes. Les soldats de l'ABiH, en partie
11 avec leur peuple, les Musulmans, se déplaçaient et ensuite ils sont arrivés
12 à Gornji Vakuf voire Uskoplje; et comme on l'a déjà montré à plusieurs
13 reprises, il a été créé cette Brigade de Jajce par l'ABiH, et les Croates
14 du HVO sont passés en vitesse par l'Herzégovine au galop, et ils se sont
15 installés sur le territoire de la Croatie. D'une certaine façon, j'ai dû --
16 j'ai réussi à me procurer de l'argent pour leur faire distribuer des
17 salaires. Certaines parties de ces effectifs sont par la suite retournées
18 en Bosnie-Herzégovine, des petits segments ont également pris part --
19 INTERVENANT NON IDENTIFIÉ : Je vous remercie.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je connais la ville de Travnik, je
21 connais la mosquée. Nous savons que Travnik est une localité encaissée, il
22 y a des montagnes. Dans cette fuite, comment se fait-il que l'armée n'ait
23 pas déployé quelques mortiers, artillerie pour, le cas échéant, endiguer
24 les Serbes ? C'était impossible ? Car comme vous l'avez dit hier, Travnik
25 il y a une entrée une sortie, il y a une seule voie d'accès, et en termes
26 militaires, il était impossible d'éviter cette débandade et déroute ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, non, pour une raison simple.
28 Vous verrez plus tard, j'ai préparé une carte à cet effet. Je me trouvais à
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1 la tête d'une opération. Voilà de quoi il s'agit, Jajce. Enfin, j'aimerais
2 qu'on me donne la même carte pour que je puisse tracer la chose sur une
3 carte vierge, aux fins d'indiquer. Est-ce qu'on peut me remettre la carte
4 non -- ?
5 Voilà.
6 Alors Jajce, c'était encerclé comme ceci, et là, il y a une route qui passe
7 par Turbe, et c'est là que se trouvaient les dernières Unités du HVO et de
8 l'ABiH, en direction de Travnik. Toutes les positions comme Vlasic, au
9 numéro 1 et, au numéro 2, Komar, Komar c'est une montagne qui se trouve --
10 [Le témoin s'exécute]
11 -- enfin, ce n'est pas indiqué ici, mais sur une carte plus grande,
12 on peut voir -- alors le voilà c'est ici; c'est le numéro 2, alors Komar,
13 tout ceci. Donji Vakuf compris était tenu par les Serbes, et depuis ces
14 montagnes, ils tiraient vers la vallée étroite que vous avez vue, et c'est
15 pour cela qu'on avait envoyé cet autocar blindé. Sans disposer de Vlasic et
16 de Komar, c'était illusoire que de s'attendre à ce que Jajce puisse tenir
17 longtemps, parce que la route d'approvisionnement pour arriver à Jajce et
18 pour se frayer un passage jusqu'à Jajce était tellement exposée aux tirs de
19 l'artillerie de la VRS, que tout un chacun comprenait parfaitement bien que
20 Jajce ne tiendrait pas longtemps, et que cette position militaire ne serait
21 être défendue. C'est pour cela qu'il était impossible de stopper cette
22 armée et la population une fois qu'ils ont commencé à se retirer parce
23 qu'ils étaient constamment exposés à des tirs depuis Vlasic et depuis
24 Komar, et ceci par donc les bons soins de la VRS.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- on va donner un numéro. Mettez vos
26 initiales, et on va mettre un nouveau numéro.
27 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Et la date.
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1 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
2 Mme PINTER : [interprétation] Et la date.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
4 Mme PINTER : [interprétation] Le numéro 5, non pas 6.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] La deuxième version de cette carte
6 recevra le numéro IC 1013.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, votre avocate a dit que ce n'est
8 pas un 6, c'est un 5 qu'il faut mettre. On est au mois de mai.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai indiqué un 5.
10 [Le témoin s'exécute]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est un "5." Très bien.
12 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Q. Alors, Général, juste pour éclaircir cette question des réfugiés de
14 Jajce, dont vous avez fait mention, est-ce qu'ils allaient à Sarajevo ?
15 R. Non, Madame Nika. On ne pouvait plus entrer à Sarajevo. Dans
16 l'ensemble, les réfugiés musulmans sont restés en Bosnie centrale, donc à
17 Travnik, Novi Travnik, à Gornji Vakuf. Quant aux Croates, une partie en est
18 restée sur place, alors de l'autre la majeure partie est partie en
19 Herzégovine, et en fait la majorité a poursuivi son chemin jusqu'à la
20 Croatie.
21 Q. Et les soldats ?
22 R. Je l'ai dit, les soldats, eux aussi.
23 Q. Merci. Alors, Général, vous avez dit qu'il y avait une autre carte sur
24 laquelle vous souhaitiez formuler un commentaire ?
25 R. Oui, je voudrais de nouveau avoir cette même carte, mais avec la partie
26 concernant Mostar.
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous êtes à nouveau en train de
28 parler en même temps, M. Praljak commence à parler bien avant que la
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1 question posée par Mme Pinter soit terminée, qu'elle soit surtout
2 interprétée, ce qui nous donne une situation de chaos, je vous rappelle ce
3 que nous a dit le Président de cette Chambre ce matin.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] M. le Juge Antonetti m'a demandé hier comment
5 s'était passé l'exode des réfugiés à partir de la Bosnie orientale.
6 Alors, Monsieur le Président, c'est déjà au début de l'année 1992, et avec
7 le début des opérations des forces serbes, que nous avons dans toute cette
8 partie -- la carte a disparu. Est-ce qu'on peut zoomer ? Merci. Donc à
9 partir de Borici, Glavaticevo, Nevesinje --
10 [Le témoin s'exécute]
11 Si l'on descend un petit peu, si l'on fait remonter un peu la carte
12 pour voir la partie qui est en bas, s'il vous plaît, on verra Trebinje.
13 Alors ici Kalinovik.
14 [Le témoin s'exécute]
15 Si l'on peut juste descendre un peu plus au sud.
16 Mme PINTER : [interprétation]
17 Q. Peut-on remonter un peu la carte ? Ah, on ne peut pas.
18 R. Pardon. Glasko [phon] aussi, et donc en bas, on a Trebinje.
19 [Le témoin s'exécute].
20 Alors au début, avant la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine, c'est en
21 provenance de toutes ces localités et de Trebinje qui se trouve plus bas --
22 [Le témoin s'exécute]
23 -- de tous ces endroits donc d'Herzégovine orientale, les Musulmans -
24 -
25 [Le témoin s'exécute]
26 -- de toutes ces localités ont été chassées en direction de Mostar.
27 C'était la première vague de réfugiés, et en direction de Capljina aussi.
28 Nous en avons déjà beaucoup parlé quant au nombre de personnes qui sont
Page 8509
1 arrivées à Mostar.
2 La deuxième vague de réfugiés arrive lorsque les Serbes se livrent à leurs
3 attaques. Alors il serait bon peut-être de passer à une deuxième carte
4 maintenant. J'indique un chiffre romain I sur celle-ci, et c'est peut-être
5 sur une nouvelle carte que je pourrais indiquer la suite.
6 Alors je souhaite indiquer que cela correspond à la période s'étendant
7 jusqu'au 10 avril 1992. Comment dit-on ça en anglais --
8 Q. Pouvons-nous avoir un numéro IC pour cette carte ?
9 Général, indiquez la date également, s'il vous plaît.
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. La troisième version de la carte
13 annotée recevra la cote IC 1014. Je vous remercie.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors si l'on peut afficher la même partie de
15 cette carte, s'il vous plaît.
16 Voilà que nous avons donc à faire maintenant.
17 Mme PINTER : [interprétation]
18 Q. De quelle partie avez-vous besoin, Général ?
19 R. De cette partie-ci. Voilà. Merci.
20 Alors nous avons maintenant la situation militaire au 15 mai 1992.
21 [Le témoin s'exécute]
22 A ce moment-là, les Serbes ont déjà chassé tous les Croates qui
23 restaient, qui étaient restés et tous les Musulmans également qui étaient
24 restés à Mostar Est.
25 [Le témoin s'exécute]
26 Ils les ont chassé VRS la partie ouest de la ville.
27 S'il vous plaît, est-ce que l'on peut remonter -- faire remonter la carte,
28 voire sa partie inférieure ?
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1 Q. Non, on ne peut pas mais on peut vous afficher l'ensemble de la carte,
2 si vous voulez.
3 R. Entendu. Si on peut voir la carte dans son ensemble ?
4 Très bien. Donc à partir de la partie est de Mostar vers la partie ouest --
5 [Le témoin s'exécute]
6 -- et ceux qui étaient restés à Bijelo Polje également; Bijelo Polje
7 se trouve au nord de Mostar --
8 [Le témoin s'exécute]
9 -- et également tous ceux qui étaient restés derrière cette ligne,
10 donc par la prise de Stolac, ils ont chassé tout le monde vers la rive
11 gauche de la Neretva, ils ont pris possession de cette même rive gauche --
12 [Le témoin s'exécute]
13 -- de la Neretva. Voilà comment se présentait la ligne et c'était à
14 cette date du 15 mai 1992.
15 [Le témoin s'exécute]
16 Ensuite, au mois de juin, lorsque Stolac a été libéré, lorsque Mostar et
17 Bijelo Polje aussi ont été libérés, "tous" les réfugiés -- ou du moins tous
18 ceux qui le souhaitaient puisque, bien entendu, une partie d'entre eux est
19 aussi restée en Croatie, puisque dans l'ensemble les gens s'efforçaient de
20 mettre à l'abri femmes et enfants, et tous les réfugiés, aussi bien
21 Musulmans que Croates, sont revenus.
22 Or s'il y a peut-être une autre couleur disponible ? Peut-être qu'il serait
23 bon que je l'utilise autrement ça risque de ne pas être clair.
24 Donc le HVO --
25 [Le témoin s'exécute]
26 -- libère. Le HVO prend -- ou plutôt, libère Mostar, et c'est donc le
27 mois de juin, fin juin --
28 [Le témoin s'exécute]
Page 8511
1 -- de l'année 1992, et à ce moment-là, tous les réfugiés reviennent
2 chez eux. Comme je l'ai dit, ce sont tout d'abord les unités qui
3 reviennent, les unités militaires et ensuite les civils, aussi bien les
4 Croates que les Musulmans, et les Unités de l'ABiH que nous avions
5 entraînées à Medjugorje, qui avaient déjà commencé à être organisées alors
6 que nous procédions à ces entraînements. Alors c'était sur une base
7 volontaire évidemment. Il n'y avait pas d'adresse. On ne savait pas qui se
8 trouvait où et c'était finalement ceux qui se sont présentés, ceux qui
9 voulaient le faire, pouvaient se présenter. C'était comme ça cela
10 fonctionnait.
11 Donc tous les volontaires du peuples musulmans, qui le souhaitaient
12 étaient entraînés, armés, et ils sont repartis, ils sont revenus à Stolac,
13 comme vous avez pu le voir dans les documents. Concernant ces unités, deux
14 ou trois mois plus tard, on a formé à partir d'elles la Brigade de Bregava
15 de l'ABiH.
16 Voilà ce qui serait ma réponse si cela peut vous satisfaire, Monsieur
17 le Président.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- marquez la date, vos initiales et
19 j'ai deux questions de suivi à vous poser.
20 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Première question : si je comprends bien, les Serbes
22 chassent les Musulmans de Mostar Est et ils vont à Mostar Ouest; c'est bien
23 ce que vous avez dit ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, le 15 mai 1992.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le 15 mai 1992. La conséquence c'est que les
26 Musulmans vont -- qui habitaient Mostar Est se retrouvent à Mostar Ouest,
27 et ils vont occuper des appartements -- je présume, ils vont occuper des
28 appartements.
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1 Deuxième question : au mois de juin, vous indiquez que le HVO reprend des
2 positions, ce qui va permettre aux soldats et aux civils de revenir. Là, il
3 est important. Quand les civils reviennent, à votre connaissance, est-ce
4 que c'est 100 % de civils musulmans qui reviennent, ou finalement il y en a
5 qui ont été en Croatie et puis qui se disent : c'est pas mal la Croatie, on
6 va y rester en attendant que tout se calme ? Le retour est assuré de
7 manière approximative d'après vous à quel pourcentage ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je sais avec certitude c'est qu'un
9 grand nombre d'entre eux est resté en Croatie en tenant précisément ce
10 raisonnement, à savoir laissons faire la guerre par d'autres, nous, nous
11 sommes des réfugiés, ce n'est pas si mal que cela au bord de la mer. Il y a
12 assez de nourriture, et cetera. Personne n'avait faim là-bas. Je ne
13 pourrais pas vous donner le pourcentage exact, Monsieur le Président, mais
14 je pense que, pour ce qui concerne Stolac, nous n'avons même pas 50 % de la
15 population qui est revenue. Mais je vous dis cela avec des réserves; c'est
16 vraiment une estimation très approximative.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc Stolac, 50 %; et Mostar, à votre avis, combien
18 sont revenus exactement à Mostar Est ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai un document du
20 mois d'avril que nous pourrons voir ultérieurement. Il y a eu beaucoup plus
21 de réfugiés de la première vague de réfugiés à Mostar à ce moment-là qu'il
22 n'y avait de population locale, tant Croates que Musulmanes, donc de
23 population domicilier à Mostar. Donc pour parler, par exemple, de ceux qui
24 étaient un peu plus aisé, qui avaient une résidence secondaire ou des amis
25 ayant une résidence secondaire, avaient quitté Mostar. Je ne crois pas non
26 plus qu'il y ait eu plus de 50 % de la population domiciliée à Mostar qui
27 soit retournée à ce moment-là, je pense que c'était moins que cela. Je le
28 répète, je parle de la population qui vivait était domiciliée à Mostar
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1 avant le début de la guerre à ceci près, et nous en avons déjà parlé
2 également à ceci près donc qu'au moment des pilonnages et des bombardements
3 de Mostar, déjà on procédait à l'évacuation des femmes, des enfants avec
4 toute l'aide qui était disponible et chacun s'efforçait de mettre à l'abri
5 les femmes et les enfants autant que possible, autant que faire se
6 pourrait.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, donnez un numéro pour la
8 quatrième carte qui a été marquée dont on n'a pas donné de numéro IC.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, la quatrième version du document 3D
10 00544 avec ces nouvelles annotations recevra la cote 1015. Je vous
11 remercie.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Pinter.
13 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
14 Q. Alors, Général, je vois que vous êtes en train d'essayer d'ouvrir une -
15 - de déployer une carte. Que souhaiteriez-vous montrer ?
16 R. Seulement si quelqu'un peut peut-être m'aider à tenir l'autre partie de
17 la carte pour que je puisse le montrer.
18 Q. Que représente cette carte ?
19 R. Messieurs les Juges, il s'agit d'une carte qui montre avec exactitude
20 l'attaque -- qui montre avec exactitude la répartition des forces de la JNA
21 au 1e octobre 1992. Cette carte a été faite en Croatie par M. Milan
22 Perkovic, général de brigade. On voit donc l'attaque des Serbes. On voit
23 exactement où se trouve la frontière de la République de Croatie. On voit
24 également la frontière de la Bosnie-Herzégovine.
25 A l'endroit que j'ai montré précédemment, c'est à peine un kilomètre
26 de la frontière de la Croatie. Or, plus haut, nous avions donc la sortie de
27 la Bosnie-Herzégovine sur la mer. Les force serbes ont pris position
28 jusqu'à la côte et ont coupé l'accès au sud. Autour de cette zone que je
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1 suis en train de montrer, nous avions les questions et les problèmes qui se
2 posaient quant à savoir qui allait maintenir telle ou telle position, et
3 quelle était la tâche qui incombait au HVO, quelles étaient celles qui
4 incombaient en revanche à l'armée croate.
5 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, au compte rendu,
6 nous avons comme date le 1er octobre 1991; est-ce correct ou s'agit-il d'une
7 erreur ? Est-ce que ça devrait être 1992 ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge, cette guerre a commencé
9 là en 1991. En 1991, elle durait déjà quatre ou cinq mois.
10 Je vous en prie et je souhaiterais que l'on donne un numéro à cette carte.
11 Je suis désolé, moi aussi, je suis limité dans les conditions que je
12 dispose pour ce qui est de montrer les cartes.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro IC pour la dernière
14 carte.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui. Cette carte recevra la cote IC 1016.
16 Je vous remercie.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, deux questions d'ordre technique,
18 qui m'apparaissent importantes et à vous poser à ce stade.
19 Normalement un général qui a fait l'école militaire, l'école des officiers
20 et lui, il est capable sur une carte d'état-major de positionner les unités
21 combattantes de son propre camp, des belligérants et également de
22 positionner les civils et les réfugiés.
23 Bien, parce qu'il a appris cela à l'école des officiers pendant son cursus.
24 Vous, vous n'avez pas fait l'école des officiers. Donc vous êtes quelqu'un
25 qui s'est retrouvé général quasiment du jour au lendemain. D'où avez-vous
26 appris la connaissance pour positionner sur une carte des forces militaires
27 ou des réfugiés ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Il me semble que je l'ai déjà dit une fois,
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1 mais je vais le répéter, Monsieur le Président. Tous ceux qui se qualifient
2 eux-mêmes d'humanistes, pour la très grande majeure partie d'entre eux
3 fuient, évitent d'aborder le problème de la guerre. Les sociologues font
4 ainsi car c'est une question difficile. Par ailleurs, c'est un aspect assez
5 terrible et puisque c'est quelque chose de terrible, on peut l'éliminer en
6 faisant l'autruche.
7 Des années déjà avant la guerre, je m'intéressais à la question de sa
8 survenue. Comment en arrive-t-on à l'éclatement d'une guerre ? Comment
9 certaines opérations militaires se déroulent-elles ? A cet égard, j'ai lu
10 des dizaines et des dizaines d'ouvrages concernant Napoléon et ses
11 batailles. J'ai lu pratiquement tout à ce sujet. Je me suis intéressé aux
12 raisons qui avaient fait qu'il avait remporté ses batailles et comment. Je
13 me suis également intéressé à la question de savoir comment l'état de la
14 société française, à un moment donné, avait permis à une armée relativement
15 peu organisée de vaincre les Prussiens, les Anglais et les Autrichiens dans
16 des dizaines et des dizaines de batailles. J'ai voulu savoir pourquoi la
17 chance avait tourné de cette façon pour eux. Combien de soldats il avait
18 perdu à telle ou telle occasion, avec combien de soldats il était venu se
19 présenter devant Moscou ? Puis je me suis intéressé à cette bataille
20 célèbre contre Kutusov et à la question de savoir pourquoi Kutusov a
21 incendié Moscou et ce que cela signifiait pour Napoléon. J'avais lu un
22 certain nombre de choses au sujet des groupes qui ont existé à cette
23 occasion. Juste pour finir, je me suis intéressé à Iwo Jima, la Seconde
24 Guerre mondiale, à Okinawa, et cetera.
25 Ça, c'est une chose. Deuxièmement, j'ai fait le scout aussi et nous nous
26 servions de cartes, nous nous servions de boussoles. J'étais vraiment très,
27 très bon dans ces exercices-là. Il fallait s'y retrouver sur le terrain.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez répondu à ma première question.
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1 Ma deuxième question, tout à l'heure en parlant des réfugiés, et vous nous
2 parlez de Travnik ou les réfugiés sont passés par Travnik; en vous
3 écoutant, je me suis posé la question du commandement militaire. Dans une
4 situation de cette sorte, de déroute, de fuite, le commandement militaire
5 doit-il appréhender en premier la situation des militaires ou la situation
6 des civils ou la situation des deux ? Y a-t-il un ordre de priorité ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, dans les Etats bien
8 organisés, et plus précisément dans le cas des Etats qui sont bien
9 organisés et qui mènent une guerre, bien entendu, nous avons des sections
10 qui sont chargées des civils à différents égards, et les militaires de leur
11 côté s'occupent de questions militaires et de l'armée.
12 Mais, ici, nous avons des civils et des militaires qui fuient mais
13 qui sont liés les uns avec les autres. Ils sont frères et sœurs, père et
14 fils, et nous ne pouvons pas procéder à la séparation de l'un et de
15 l'autre. Si l'armée commence à fuir, tous les civils, qui sont originaires
16 de cette région et qui sont liés d'un point de vue familial ou ethnique,
17 commencent à fuir aussi. C'est ce qui s'est passé pendant la guerre. Dans
18 plusieurs guerres, ce sont des éléments de la guerre civile, comme ça s'est
19 passé en Espagne ou aux Etats-Unis également. Ce n'est pas le genre de
20 guerre que vous aviez pendant la Seconde Guerre mondiale, où une armée
21 entre dans une zone et où la population n'a absolument aucun rapport avec
22 elle. On peut leur imposer, dans ce cas-là, des impôts ou des taxes
23 supplémentaires, et cetera. Mais lors de la Seconde Guerre mondiale, par
24 exemple, lors de l'occupation d'une partie de la France et des Pays-Bas, il
25 y a eu combat entre deux armées. L'une a perdu, l'autre a vaincu. Les
26 civils sont restés. Il y a eu des répercussions sur les civils, bien
27 entendu, mais pas des conséquences telles que celles qu'on a vues dans la
28 guerre qui s'est déroulée en Bosnie-Herzégovine.
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1 Cette dernière avait certaines caractéristiques d'une guerre civile,
2 à savoir que la population, si les militaires fuyaient, ne restait pas sur
3 place. Inversement, si la population fuyait d'un territoire donné, alors
4 l'armée militaire, l'armée n'avait plus de raison non plus d'y rester. Ils
5 fuyaient, eux aussi.
6 Pour finir, les Serbes, dans la tactique qui était la leur,
7 s'appuyaient tout particulièrement sur ces faits. Je vous donnerais
8 l'exemple particulier de Sunja où je me trouvais. Ils pilonnaient tellement
9 l'endroit qui était visé que les civils fuyaient. Puis, après cela,
10 l'armée, donc ce qui devrait être fait, c'était parvenir à arrêter les uns
11 et les autres d'une façon ou d'une autre pour que les civils puissent
12 revenir et que l'armée puisse avoir quelqu'un à défendre, pour que les gens
13 puissent avoir leurs pères, leurs sœurs ou leur frères à défendre.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
15 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 Q. Général, hier nous avons parlé de Jajce. Nous avons commencé à en
17 parler -- ou plutôt, de ce document de M. Prkacin, avant de revenir à ce
18 document, je voudrais que vous vous reportiez au P 00717. Il a été mis dans
19 ce classeur ultérieurement car nous avions initialement l'intention de le
20 fournir dans une autre annexe.
21 Mme PINTER : [interprétation] Il a été fourni à M. Les Juges à part ce
22 matin. Voilà comment il se présente, il est indiqué document
23 supplémentaire, "additional document," avec le numéro, et ce document est
24 lié à ce que nous avons examiné et commenté hier concernant M. Jasmin
25 Jaganjac et sa nomination, pour ainsi dire, en tant que conseiller de M.
26 Izetbegovic ainsi que ses activités et ses travaux suite à cela dans les
27 tentatives conjointes visant à apaiser la situation.
28 Q. Alors, Général, que pouvez-vous dire concernant ce document ?
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1 R. Ce que j'ai déjà dit. Moi, je n'ai pas été nommé officiellement pour
2 jouer le rôle qui a été le mien, mais les personnes qui avaient été nommées
3 officiellement aussi bien par le HVO que l'ABiH me reconnaissaient comme
4 une personne qui coordonnait les choses, qui établissait des liens, qui
5 mettait de l'ordre. Ici, il a été convenu avec M. Boban et Stojic, qu'on
6 allait former un commandement conjoint, et c'est au nom de l'ABiH que M.
7 Jasmin Jaganjac qui y a participé. C'est pourquoi les documents - nous le
8 verrons ultérieurement - portent la signature de Jasmin Jaganjac et la
9 mienne, et ces documents me donnaient d'une certaine façon une forme de
10 légitimité, de reconnaissance. Vous verrez l'exemple d'une opération
11 militaire où on a, et Jasmin Jaganjac et Pasalic, et Merdan, qui au moins
12 d'un point de vue formel, ont reconnu que je jouais le rôle qui était
13 effectivement le mien.
14 Q. Alors, il pourrait ressortir de ce document, Général, que cela ne
15 concernait que la Défense de Jajce ainsi que c'est ici formulé ?
16 R. Oui, c'est ce qu'ils ont limité car d'une certaine manière, ils
17 n'étaient pas prêts. Ma détermination - et là, je ne pas être tout à fait
18 modeste - ma capacité, ma force, tout ceci me permettait de gérer au mieux
19 une telle situation de crise, une situation chaotique. Il s'agissait là
20 d'un nombre de soldats qui avaient du mal à se retrouver dans de telles
21 situations. Bien sûr, ils avaient une expérience de l'armée et d'ordre
22 ainsi de suite, mais ici personne -- le tout devait être obtenu par la
23 force des arguments, par les conversations, par une certaine véhémence, il
24 fallait savoir s'imposer. Même à supposition de faire certaines choses que
25 vous n'auriez jamais fait car la situation était telle, ça changeait
26 d'heure en heure. Donc je créé une certaine autorité.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce document, qui est daté du mois de novembre 1992,
28 atteste, sans aucune ambiguïté, qu'à partir du mois de novembre 1992,
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1 Izetbegovic et Halilovic reconnaissaient qu'il y avait un commandement
2 conjoint des deux armées. Je relis ce document, un autre document qu'on a
3 déjà vu, qui est une déclaration de l'ambassadeur de Bosnie-Herzégovine au
4 Conseil de sécurité en mars 1993, où il indique que les armées de la
5 République de Bosnie-Herzégovine sont le HVO et l'ABiH.
6 Donc ce document, signé par Halilovic, reconnaît qu'il y a une
7 composante armée, constituée de deux branches. Les destinataires, je vois
8 que c'est à Dzemo et à Djed. Dzemo, est-ce que ce ne serait pas, d'après
9 vous, M. Merdan ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Dzemo Merdan.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Et le Djed, c'est qui Djed ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas, Monsieur le Président; en ce
13 moment, je ne sais pas. Je peux me renseigner pour savoir qui se cacher
14 derrière ce surnom, mais en ce moment je ne sais pas qui se faisait appeler
15 Djed.
16 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Général, vous avez commencé à parler hier, nous n'avons pas entièrement
18 terminé pour ce qui est du document 3D 00484. Il s'agit d'un rapport de M.
19 Prkacin.
20 R. Vous avez dit ?
21 Q. 3D 00484. Ça devrait faire partie du classeur "Jajce." Si vous ne
22 l'avez pas, je vais vous le fournir.
23 R. Quel numéro encore ?
24 Q. 3D 00484.
25 R. Oui, 484, je vais le trouver.
26 Q. Jajce était à part, non pas dans le classeur. Pas dans le classeur,
27 c'est un dossier qui ressemble à celui-ci, que vous avez reçu hier.
28 R. Je ne sais pas, peut-être que je l'ai oublié. Mais je connais par cœur
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1 le document en question.
2 Q. Vous pouvez le suivre à l'écran.
3 R. Pardon, je connais très bien ce document, je sais exactement comment
4 les choses se sont déroulées --
5 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le document est trop long et
6 contient énormément de détails concernant la manière dont ils sont partis.
7 Comment on les arrêtés ? Comment on les arrêtés pour une deuxième fois ?
8 Comment on a pointé les fusils sur eux, qui étaient les personnes que M.
9 Prkacin a appelées à Sarajevo ? Pour clarifier cette situation incroyable,
10 comment se faisait-il qu'alors qu'il allait fournir l'aide à la Bosnie
11 centrale, on l'ait arrêté sur la route ? Il essaie de comprendre qui
12 faisait tout ceci, surtout étant donné que plus de 60 % des membres de
13 l'unité à la tête de laquelle ils étaient des Musulmans.
14 Je ne souhaite pas passer trop de temps s'agissant de ce document-là
15 puisque le document est tout à fait clair et détaillé, et parle des mêmes
16 choses que celles dont je parle moi-même.
17 Il s'agissait d'un double jeu, et ce que l'on peut dire en toute
18 certitude, est que sous la pression d'une situation de guerre, et du fait
19 que Sefer Halilovic savait que toutes les armes venaient de la Croatie.
20 Parfois, il devait accepter de signer un document indiquant que le HVO et
21 l'armée de Bosnie-Herzégovine constituaient une seule armée, et parfois il
22 devait reconnaître le général Petkovic en tant que son égal. Mais j'ai déjà
23 démontré hier, et je démontrerai par la suite, que dans sa tête, nous
24 étions tous des Oustachi, et c'est lui qui minait tout le monde. Le
25 président de la présidence,
26 président Izetbegovic, et à chaque fois il y avait des choses incroyables
27 qui se déroulaient.
28 Il n'y avait pas encore de conflits, et ils ne laissaient pas passer une
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1 unité dans la Bosnie centrale. Par la suite, des thèses ont circulé
2 indiquant qu'en Bosnie centrale il y avait cinq à six brigades de l'armée
3 croate. C'est une thèse que l'on imposait pendant des mois, indiquant que,
4 dans la Bosnie centrale, alors qu'une unité comme celle-ci ne pouvait pas y
5 passer, on disait qu'il y avait cinq à six brigades de l'armée croate qui
6 s'y battaient.
7 Q. S'il vous plaît, M. Glasnovic mentionné dans le document, c'est qui ?
8 R. M. Glasnovic était de Tomislavgrad et il était le commandant de la
9 Brigade du HVO de là-bas.
10 Q. Et M. Dautovic ?
11 R. M. Senad Dautovic était le commandant des Unités de l'armée de Bosnie-
12 Herzégovine à Bugojno, et avec cet homme, jusqu'à ce que l'armée de Bosnie-
13 Herzégovine n'a attaqué à Bugojno, on avait une bonne coopération. C'était
14 quelqu'un de raisonnable et de bien, et j'ai toute une série de
15 conversations avec lui, mais j'en parlerai tout à l'heure.
16 Q. Qui est M. Lendo ? Attendez, je chevauche. C'est de ma faute.
17 R. Refik Lendo était le commandant de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Pour
18 autant que je le sache, moi, je l'ai retrouvé à Novi Travnik mais, à ce
19 moment-là, il avait d'autres fonctions aussi, et c'était l'une des
20 personnes qui me dupaient sans cesse et qui me faisaient passer sans cesse
21 pour un idiot.
22 Q. Est-ce que vous diriez la même chose de Dautovic ?
23 R. Non.
24 Q. Merci. Car apparemment c'est ce qui est écrit dans le compte rendu
25 d'audience. Un autre document, 3D 01669. C'est un document qui comporte
26 votre signature, la date est le 28 octobre 1992. 3D 01669.
27 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi quelques instants,
28 mais je suis un petit peu perdu. Nous venons d'avoir un document qui est
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1 assez long et le témoin a cité un nombre important de détails, mais on ne
2 nous a pas vraiment dit de quoi il s'agissait. Il s'agit d'un rapport; ai-
3 je raison de dire cela ? Moi, j'ai l'impression que l'objectif principal de
4 tout ceci était de dénigrer M. Prkacin, pour dire que c'était une personne
5 mauvaise, mais je ne suis pas sûr d'avoir bien compris.
6 Il y a beaucoup de noms qui sont cités. Personne ne dit qui sont ces
7 personnes. Je crains malheureusement que, d'après la façon dont je perçois
8 tout ceci, ceci est tellement présenté dans le désordre que je ne peux pas
9 m'en servir.
10 Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, hier nous avons parlé
11 de ce document et hier lors de l'audience nous avons présenté une
12 introduction. Nous avons parlé de M. Prkacin, qui était parti de Bosnie-
13 Herzégovine, plus exactement de Capljina, avec un groupe de soldats vers
14 Jajce, afin de venir en aide pour libérer Jajce.
15 Le général dira la suite.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, hier, en expliquant
17 ce document, j'ai parlé en détail au sujet de la question de savoir qui M.
18 Prkacin était. Il n'était pas du tout dénigré; bien au contraire. Dans ce
19 document et dans ce que je disais moi-même, on ne disait que du bien de M.
20 Prkacin.
21 Donc il s'agissait de 400 personnes membres du HOS, qui sont venues de la
22 Croatie sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, après qu'il a été
23 réalisé que Jajce était en train de tomber et que la Bosnie centrale était
24 menacée. Ces hommes-là sont venus à Capljina, où Bruno Stojic a dit qu'il
25 fallait leur distribuer des armes, des vêtements, et tout ce qui est
26 nécessaire pour qu'ils partent avec M. Prkacin afin de venir en aide à ce
27 qui à Jajce se défendait, et afin d'aider la Bosnie centrale. Suite à leur
28 départ, il s'est passé ce dont M. Prkacin parle ici.
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1 Dans ce groupe, il y avait plus de 70 % de Musulmans, et d'après ce
2 document, il ressort clairement que dans certaines parties des unités
3 musulmanes, il n'y avait pas de souhait de lutter ensemble, et dès à ce
4 moment-là ils considéraient que ce territoire de la Bosnie-Herzégovine --
5 de la Bosnie centrale était le leur, c'est la seule explication qu'on peut
6 donner à ce document. Ils n'ont pas pu passer. Ils ont été renvoyés, et
7 d'ailleurs le passage d'une autre unité plus petite de la police militaire
8 de l'armée de Bosnie-Herzégovine de Mostar a été bloqué aussi. Cette unité
9 elle aussi a été renvoyée, tout comme c'était le cas d'une unité de la
10 police militaire du HVO, et certains groupes de volontaires qui étaient
11 prêts à se battre pour Jajce et la Bosnie centrale.
12 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Donc une
13 caractéristique importante que montre ce document c'est qu'il y avait des
14 tensions entre les Croates et les Musulmans à ce moment-là également
15 lorsqu'ils étaient censés se battre ensemble contre les Serbes ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec cela, Monsieur le
17 Juge Trechsel. Il n'y a pas eu de tensions entre les Croates et les
18 Musulmans. Mais il y avait des -- il y avait des arrêts incroyables
19 militaires et des blocus incroyables des unités régulières. Donc il
20 s'agissait du fait que l'armée de Bosnie-Herzégovine bloquait le passage de
21 l'unité qui allait venir en aide à la défense de Jajce. Il s'agissait d'un
22 sabotage de la lutte commune, de la manière la pire qui existe.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, j'ai bien compris ce que vous
24 voulez me dire, et je vous remercie pour votre explication. Ce fut fort
25 utile. Je vous remercie.
26 Mme PINTER : [interprétation]
27 Q. Général, s'il vous plaît, s'agissant du document 3D01669.
28 R. Voilà, c'est justement ce que je viens de dire. Ceci émane de la 1ère
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1 Brigade de Mostar, M. Stojic et moi-même, nous disons - permettez le
2 passage - nous disons que le commandant Suad Muharemovic est le commandant,
3 mais même cette unité-là a été arrêtée et renvoyée. Même s'agissant d'eux,
4 ces parties de l'armée de Bosnie-Herzégovine qui envisageaient déjà, je
5 l'affirme, déjà à ce moment-là, un conflit avec le HVO ne l'a -- ne leur a
6 pas permis d'avancer là-bas car c'était les personnes qui, à cette époque-
7 là, voyaient la lutte des Croates et des Musulmans comme une lutte commune.
8 Q. En ce qui me concerne et en ce qui concerne les documents, nous en
9 avons terminé pour ce qui est de Jajce. Est-ce que vous souhaitez ajouter
10 quelque chose au sujet de Jajce ?
11 R. Non. Je vais terminer brièvement ce sujet-là, j'ai une autre carte que
12 j'ai préparée ici, et justement elle constitue une réponse à la question du
13 Président de la Chambre Antonetti, qui a demandé : pourquoi il n'était pas
14 possible d'arrêter cela ? Est-ce que l'huissier pourrait m'aider ?
15 A ce moment-là, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il était assez
16 clair que Turbe - est-ce qu'on voit Turbe -
17 voilà Turbe, et l'entrée de Travnik, que ni Travnik ni Novi Travnik,
18 qu'il se trouverait dans une mauvaise situation si Komar, qui était
19 entièrement contrôlé par les Serbes le long de cet axe ici
20 [Le témoin s'exécute]
21 jusqu'en haut, au-dessus de Donji Vakuf, vers Bugojno,
22 n'était pas libéré. M. Lendo et M. Arif Pasalic ont constitué un plan,
23 suite aux conversations qu'ils ont eues entre eux, quant à la manière dont
24 il fallait effecteur cela. Les Unités de l'ABiH étaient censées lancer une
25 attaque de ce côté-là.
26 [Le témoin s'exécute]
27 Q. Pour le compte rendu d'audience, est-ce que vous pouvez nous dire
28 quelle est la page que vous montrez sur la carte ?
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1 R. Je vais expliquer cela.
2 Q. Dites-le alors.
3 R. Bien. Donc l'ABiH devait lancer une attaque depuis l'endroit au-dessus
4 de Gornji Vakuf, et c'était censé être fait par les Unités de Bosnie-
5 Herzégovine de Bugojno, commandées par Senad Dautovic; ici les Unités de
6 l'ABiH, commandées par Refik Lendo, étaient censées lancer une attaque. Le
7 HVO, conformément à cette proposition, s'agissant des -- tout d'abord,
8 s'agissant des unités ici devant Turbe --
9 [Le témoin s'exécute]
10 -- elles étaient censées être gardées par les Unités de l'ABiH et du
11 HVO. C'est pour cela que la ligne est à la fois bleue et verte.
12 Le HVO de Travnik était censé lancer une attaque, pour couper cette zone.
13 Il devait déjà détenir cette position --
14 [Le témoin s'exécute]
15 -- afin d'empêcher ou d'entrer en bataille avec les unités ou à
16 l'encontre des unités qui allaient venir en tant que renfort pour leurs
17 positions sur les lignes de front, car les lignes de front de l'ABiH
18 étaient relativement faibles.
19 Lorsque le plan a été élaboré, ils me l'ont soumis pour signature. Je l'ai
20 examiné, il y a eu quelques petites corrections, et ensuite je l'ai signé.
21 Mais j'ai dit, avant cela -- enfin, il faut savoir qu'avant cela, les
22 commandants du HVO - M. Juric - m'ont convaincu du fait que Lendo tendait
23 un piège que c'était du blaff, et que rien de tout cela n'allait être
24 réalisé. Moi, j'ai dit que tout ceci ne m'intéressait pas et qu'on allait
25 faire ce qu'on avait prévu de faire.
26 Mais alors qu'ils n'avaient pas l'habitude que je fasse cela, eux ils
27 pensaient que comme d'habitude j'allais signer cela, et continuer à vaquer
28 à mes affaires, moi, j'ai dit : d'accord, Lendo, mais je veux diriger
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1 l'attaque, je vais être aux positions. Bien sûr, il a fallu trouver un
2 accord là-dessus.
3 Donc cette nuit-là - je ne me souviens pas maintenant de la date - nous
4 avons traversé une route dans des conditions très difficiles nous avons
5 pris nos positions, il était 5 heures du matin, et les groupes du HVO
6 étaient déjà entrés en profondeur du territoire derrière les premières
7 lignes de front de l'ABiH, ils nous ont dit qu'elles étaient prêtes, et
8 l'attaque était censée être lancée.
9 Aucune balle n'a encore été tirée, aucune balle n'a été tirée. Lendo me
10 faisait passer pour un idiot, et même M. Dautovic, lui, il était désigné
11 comme "komsija" 1, voisin 1, et l'autre comme "komsija" 2, voisin 2. Bien
12 sûr, nous avions des noms de code.
13 J'ai attendu jusqu'à 9 heures du matin, j'ai vu que rien n'allait se
14 passer. Ensuite j'ai pris un bout de papier et j'ai arrêté l'attaque, et
15 par le biais des moyens de communications, j'ai donné l'ordre que les
16 groupes du HVO se retirent en toute sécurité.
17 Je vais ajouter une autre chose. Lorsque l'on avançait vers les positions
18 depuis lesquelles l'attaque était censée commencer, cet homme, Juric, est
19 allé avec moi de même que la personne chargée des transmissions. M. Lendo
20 était à la tête de sept à huit hommes, dont deux d'entre eux étaient des
21 gardes du corps, et ils avaient des armes Hecklers, et ils étaient toujours
22 derrière moi, avec leur canon de fusil. A chaque fois que je m'arrêtais,
23 eux, ils s'arrêtaient aussi avec leurs armes derrière mon dos. Ça c'est un
24 sentiment horrible lorsque, vous savez -- lorsque vous sentez que cet homme
25 a des arrières pensées qu'il ne souhaite pas réellement une lutte commune.
26 Au bout d'un ou deux jours, il a disparu de la région, et lorsque
27 j'ai posé la question de savoir où il était, et ça, je ne peux pas en être
28 sûr, mais on m'a dit que sa famille vivait en Serbie et qu'il est allé en
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1 Serbie afin de se faire opérer d'appendicite. Je ne peux pas affirmer cela,
2 mais ça c'était la position officielle de ces personnes-là du HVO, et des
3 personnes chargées des renseignements qui m'ont fourni cette information.
4 Donc maintenant je vais signer --
5 [Le témoin s'exécute]
6 -- cette carte, qui porte sur mon expérience personnelle, et je vais
7 mettre la date d'aujourd'hui, le 21 mai 2009.
8 [Le témoin s'exécute]
9 A ce moment-là --
10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- un numéro.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Cette carte aura
12 le numéro IC 1017. Je vous remercie, Monsieur le Juge.
13 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : dans la déclaration, la
14 réponse précédente du général Praljak remplacer à 5 heures du matin, des
15 groupes du HVO avaient déjà pénétré loin en profondeur derrière les
16 premières lignes de la VRS et non de l'ABiH.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] La carte 1992 est l'année. Je suppose que
18 c'était en novembre ou en décembre.
19 [Le témoin s'exécute]
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous nous avez montré la carte sur
21 cette opération militaire, qui en définitive n'a pas eu lieu, et vous avez
22 expliqué qu'il y avait eu une préparation. Alors ma question est importante
23 par rapport au 9 mai 1993, et par rapport à ce qui s'est passé à Stupni Do.
24 Quand il y a une opération militaire, donc ma question est d'ordre général,
25 mais elle a pour retomber le 9 mai, et Stupni Do. Quand il y a une
26 opération militaire, est-ce qu'il est classique que le commandement
27 militaire prépare avant l'opération à partir de carte de positionnements
28 des uns et des autres ? Est-ce qu'il y a une préparation avant une
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1 opération militaire ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, tous éléments se
3 préparent; une carte, tout ce que l'on sait au sujet des positions de
4 l'ennemi, de l'infanterie, des blocoses [phon], la question de savoir où
5 leur artillerie se trouve, quel est le nombre de troupes. Puis l'on évolue
6 le profil psychologique de l'ennemi. L'on détermine le moment du début de
7 l'attaque, les axes de l'attaque, les unités qui doivent participer, le
8 nombre de troupes au sein de ces unités. L'on élabore le système des
9 transmissions et des communications. L'on établit des noms de code, pour
10 éviter de parler directement, et ainsi de suite.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : On aura l'occasion de revenir sur cela mais j'en
12 profite tout de suite pour vous poser la question suivante qui est d'une
13 importance cruciale à mes yeux.
14 Le 9 mai, s'il y a une attaque du HVO ou une attaque de l'ABiH. J'emploie
15 le terme "ou." En théorie, doit-on avoir des documents des éléments
16 provenant soit du HVO, soit de l'ABiH qui ont préparé l'attaque ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Une telle attaque est difficilement imaginable
18 sans les documents dont vous êtes en train de parler.
19 Nous avons présenté ici des documents par le biais desquels l'ABiH avait
20 préparé l'attaque contre le HVO. A Mostar on a montré clairement tous ces
21 ordres et les axes de l'attaque, et nous avons dessiné sur la carte de
22 Mostar comment ceci allait se dérouler. Je ne suis au courant d'aucuns
23 documents du HVO de quelque niveau que ce soit portant sur l'opération et
24 la réalisation de l'attaque contre l'ABiH à Mostar, le 9 mai 1993.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Je termine par cette ultime question avant la pause.
26 Si le HVO a organisé l'attaque du 9 mai, est-ce que normalement on aurait
27 dû retrouver des documents des différentes unités qui étaient sur le
28 terrain ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président Antonetti, et mis à
2 part cela, une telle opération telle que l'attaque contre une ville et de
3 telles opérations sont extrêmement complexes, ceci ne peut pas avoir lieu
4 sans la signature de M. Petkovic, le chef d'état-major principal du HVO,
5 qui pendant cette époque-là n'était même pas à Mostar. Pour autant que je
6 le sache, il était ailleurs en train de participer aux négociations.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est l'heure du -- vous voulez poser une question ?
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai l'impression que nous arrivons
9 à la fin de cet épisode sur Jajce, et je souhaite vous poser une question.
10 Ce que vous nous dites, Monsieur Praljak, c'est le récit d'une trahison. La
11 personne, qui aurait dû être du côté de l'ABiH pour attaquer avec vous les
12 positions serbes, vous a fait défaut. Il est parti, il s'en est allé et il
13 s'agit d'une question très sérieuse en cas de guerre. En général, quelqu'un
14 comme ça serait jugé devant un tribunal militaire, peut-être que même voire
15 même exécuté pour ne pas avoir obéi aux ordres. Ce qui m'intéresse c'est
16 quelles conséquences y a-t-il pour autant qu'il y en ait ou quelles mesures
17 ont été prises contre ce M. Lendo suite à l'événement que vous venez de
18 nous décrire.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas du tout, Monsieur le Juge Trechsel,
20 aucune. Tout ce qu'on m'a dit puisqu'il n'était pas là c'est qu'il était
21 parti en Serbie pour se faire opérer de l'appendicite.
22 Deuxièmement, je ne sais même pas si ces unités-là étaient sur les
23 positions, car de 5 heures à 9 heures du matin, malgré les questions
24 répétées par le biais des moyens de communications, qu'est-ce qui se passe
25 ? Pourquoi on ne part pas ? Ils n'ont tiré aucune balle, pas une seule.
26 Cela dit, ses deux "bodyguards" tenaient leur Hecklers pointés sur moi. Ils
27 étaient à côté de moi.
28 J'étais là. J'étais armé d'un pistolet. Il y avait Juric, le commandant du
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1 HVO de Travnik, et puis un homme chargé des transmissions qui était en
2 communication avec le HVO au sujet des positions. Je ne sais plus même si
3 ces unités-là étaient sur les positions ou pas.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, mais suite à cela, vous n'avez
5 pas évoqué cette question avec les Musulmans ? Vous étiez en train de
6 mettre en place un commandement conjoint. Vous avez dit que vous souhaitiez
7 cela et cela devait fonctionner. Ceci a complètement échoué et de manière
8 très grave. Je suppose que ceci doit faire l'objet de remontrances très
9 sérieuses, remontrances faites au côté serbe. Ce n'est pas une question que
10 vous avez reprise avec eux ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge Trechsel. Je l'ai fait
12 de façon violente, rude. Je ne vais pas répéter le type de mots que
13 j'utilise dans ce type de situation pour que cette réunion à Plave Vode,
14 qui est-ce qu'il est en train de charrier ? Jusqu'à quand il va nous
15 emmerder, et où sont ces bataillons qu'il avait affirmés avoir en réserve ?
16 Là, il avait dit qu'il en avait trois, et est-ce que tu prépares ces
17 bataillons pour t'attaquer au HVO ?
18 Oui, oui, Monsieur le Juge Trechsel, ce type de questions, je l'ai posées
19 même en pire variante. Enfin ce n'est pas l'armée que vous imaginez parce
20 que tout risque de sauter. Ils risquent de se taire un instant et puis de
21 continuer comme si de rien n'était.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous avez signalé cela à M. Halilovic ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Halilovic, moi, je ne suis pas arrivé jusqu'à
24 Halilovic, Monsieur le Juge Antonetti. Celui-là, il ne venait pas. Lendo,
25 là-bas, était la personnalité la plus haute placée que j'ai eu à voir, et
26 c'est la personne que je pouvais contacter. Moi, je ne suis pas arrivé pas
27 même au commandant du 3e Corps dans la zone C [phon], Hadzihasanovic --
28 voilà, Hadzihasanovic, vous savez, il y avait toutes sortes de jeux là.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais comme l'a dit mon collègue ce Lendo quitte
2 le champ de bataille, donc il commet un acte grave par rapport à l'armée.
3 Il aurait pu être sanctionné et qui peut le sanctionner; sinon, le
4 commandant du 3e Corps -- sinon, l'autorité supérieure ? Mais si vous, à
5 part de crier dans le micro sur place dans votre Motorola, ou je ne sais
6 quoi, et que vous ne faites rien, comment voulez-vous que ça avance ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge, je ne criais pas dans
8 un porte-voix et pas de Motorola. On était ensemble. Je parle d'une réunion
9 ici au sein du commandement de l'ABiH dont le siège se trouvait à Travnik
10 dans une maison appelée Plave Vode, les eaux bleues. Parce que juste un
11 jour après, il est arrivé un groupe de Musulmans qui avait perdu les
12 positions tenues jusque-là à l'endroit que je vous ai indiqué parce que les
13 Serbes leur avaient tiré dessus à l'artillerie depuis deux collines plus
14 loin. Enfin, ces deux collines -- cet endroit de collines où le Pic Noir
15 [phon] -- enfin, il y avait une espèce de mont noir dans cette espèce de
16 pic ou de pointe ou de mont.
17 Ils m'ont demandé à ce que le HVO vienne leur apporter leur soutien
18 en matière d'artillerie pour qu'ils puissent récupérer leur position parce
19 que de ces positions prises par les Serbes, ils étaient en train de leur
20 taper dessus, de leur tirer dessus dans le village en bas, et moi, je leur
21 ai promis la chose et j'ai tenu promesse. On leur a apporté un soutien
22 puissant, une fois que l'action a été concertée et ils ont récupéré leur
23 position.
24 Mais à l'occasion de cette réunion élargie et des réunions comme ça,
25 j'en ai eu pas mal. Si bien qu'à cette réunion, j'ai demandé à ces gars-là
26 où est donc passé Lendo, et où donc que ces trios bataillons, qu'il avait
27 affirmé avoir en réserve, ils ne sont nulle part sur les positions. Pour
28 qui garde-t-il ces trois bataillons-là ? Est-ce qu'il les gardait pour
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1 pouvoir s'attaquer aux Croates ?
2 Parce que, là, je le répète, comme il y avait ces gens venus de plusieurs
3 villages, il y avait aussi dans l'ABiH des gens qui voulaient bien se
4 battre à nos côtés et qui étaient formidables de ce point de vue là. Comme,
5 par exemple, celui que j'ai mentionné, ce monsieur Leko, originaire de
6 Turbe, qui s'était vaillamment battu dans le secteur avec -- ils ont subi
7 pas mal de pertes. Mais Lendo, lui, non. Lendo, c'était la tête. En bas,
8 plus bas, c'étaient des gens plus normaux qui avaient le sentiment
9 d'appartenance qui différait du sien.
10 L'INTERPRÈTE : Veuillez remplacer en français, s'il vous plaît, du côté
11 serbe pas du côté musulman. Merci.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause de 20 minutes.
13 --- L'audience est suspendue à 10 heures 38.
14 --- L'audience est reprise à 11 heures 06.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Mais il y a un Juge qui a
16 une question complémentaire à poser.
17 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, Monsieur Praljak,
18 j'espère que vous m'entendez; très bien allons-y.
19 Nous parlions de cette attaque avortée, si je puis dire, et vous nous
20 avez expliqué comment on doit planifier toute attaque, on doit donner
21 l'ordre d'attaque, ordre qui doit être donné par écrit à un certain niveau.
22 Donc j'aimerais savoir où se trouve l'ordre qui a été donné pour cette
23 attaque.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne l'ai pas, Monsieur le Juge. Je l'ai
25 cosigné, mais c'est resté soit chez M. Pasalic soit chez M. Lendo.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il n'y avait eu qu'un seul
27 exemplaire ? Etant donné qu'il y avait plusieurs destinataires, normalement
28 il y a plusieurs exemplaires pour l'artillerie, l'autre pour l'appui feu,
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1 des autres pour les différentes unités qui vont être déployées, n'est-ce
2 pas ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, dans cette attaque, il n'y a pas
4 prévision de participation de l'artillerie, parce que ce n'est pas un
5 espace très grand. Il n'y avait aucune cible à viser à l'artillerie. Il y a
6 des éléments d'ordre qui ont été communiqués à Travnik mais, moi, je n'ai
7 pas pris de copie avec moi, je n'y ai pas pensé. Mais il y aura un témoin,
8 il est prévu de faire témoigner M. Juric qui a participé à la chose, et on
9 peut lui poser la question pour savoir s'il a gardé cela quelque part. Mais
10 ces archives n'ont pas été bien tenues à jour, et nous avons eu du mal à
11 collecter ou à rassembler tous les documents qu'on a déjà. Mais la carte
12 avec l'ordre existait, bel et bien.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Maître.
15 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 Q. Mon Général, dans la fin de nos débats d'hier, nous avons annoncé un
17 film. C'est au numéro 3D 03114. Il s'agit d'une partie qui se rapporte à
18 Travnik. Mais avant que de passer la vidéo, j'aimerais que vous expliquiez
19 : de quoi il s'agit aux Juges ?
20 R. Le film que vous allez voir a été tourné à Zagreb. A l'occasion des
21 préparatifs en vue de ce procès, j'ai voulu rapprocher des Juges
22 l'apparence des choses sur le terrain et alors l'événement vrai de la
23 chute, enfin de Travnik après la chute de Jajce, je l'ai tourné dans les
24 studios de Jadran Film. Bien sûr, j'ai pris un caméraman et des jeunes, et
25 je leur ai dit quel a été l'événement, et je me suis efforcé de reproduire
26 l'événement de façon fidèle afin que les Juges et le Procureur puissent
27 voir de quoi a l'air la fuite des lignes, l'abandon des lignes et mon
28 comportement. Mais là aussi, il y aura un témoin qui viendra nous en
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1 parler, un témoin qui était là-bas.
2 Mme PINTER : [interprétation] Pour les Juges, il s'agit de la transcription
3 numéro 2, page 3D 41-1091, pour ce qui est du texte de cette stimulation.
4 Maintenant j'aimerais qu'on nous passe le film.
5 [Diffusion de la cassette vidéo]
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit ici des jeunes qui ont fui les
7 lignes de combat et que j'ai interceptés.
8 [Diffusion de la cassette vidéo]
9 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
10 "Intervenant non identifié : Vous avez foutu le camp ? Et qui -- c'est qui
11 va défendre ici ? Qui sont les officiers ? Les officiers, un pas en avant.
12 Mettez en prison, allez en taule. Allez, mets-toi là-bas. Qui c'est qui
13 veut aller en taule encore.
14 Un soldat qui dit : Moi, je veux aller en taule.
15 Intervenant non identifié : En taule. Ça vous va la taule. Allez ça,
16 déshabille-toi, ça a été payé par le peuple croate. Dépose tes armes,
17 déshabille-toi. Tu iras nu en prison. Allez, à poil. A poils j'ai dit, plus
18 vite que ça. En culotte, la culotte, c'est à toi. Il fait froid, hein ?
19 Bien froid. Déshabillez-vous.
20 Intervenant non identifié : On va se battre ? Ou on va --"
21 Les soldats : Oui, on se battra."
22 Intervenant non identifié : Bon, allez. Rhabillez-vous. Ils vont vous tuer
23 vos parents, vos femmes, vos enfants, vos frères. Qui c'est qui va les
24 arrêter ? Nous, on est une armée, on peut les combattre. Nom de Dieu, mais
25 qu'est-ce que c'est ces combattants-là ? On peut le faire les gars. Allez,
26 de quoi on a l'air ? On y va. Allez, allez les gars, on y va. On leur
27 niquera leur mère, allez, on peut le faire. Alors on peut y aller."
28 Les soldats : Oui.
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1 Intervenant non identifié : Reprenez vos fusils, allez, vous vous
2 arrangerez plus tard, allez. Vous avez vu ce qu'ils ont fait à Jajce, vous
3 voulez que vos blessés soient tués, vous voulez que vos maisons soient
4 incendiées ? Où est-ce que tu vas habiter après ? Allez les officiers,
5 reprenez en main vos soldats. Alignez-vous, allez, suivez-moi."
6 Mme PINTER : [interprétation] Arrêtez ici, je vous prie.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, enfin, moi aussi, j'ai du mal à suivre
8 tout ceci depuis le point de vue qui est le mien maintenant. Mais c'est de
9 cela que ça avait l'air. Ça avait l'air, enfin c'était pire que ça.
10 Moi, je n'avais pas de prison du tout, j'ai improvisé. J'ai montré
11 vers des caves, ce n'est pas une prison véritablement.
12 C'est l'image telle qu'elle se présentait. Ces jeunes avaient pris peur.
13 Ils avaient fui les lignes de front et c'est à peu près ou littéralement
14 comme ça que ça avait l'air. Les menaces étaient fictives. J'ai improvisé
15 et les faire déshabiller -- se déshabiller, ça m'est venu à l'esprit à
16 l'instant. Je ne savais trop que faire, il n'y avait pas de prison. Puis il
17 a fait froid. Quand ils ont senti qu'ils faisaient froid, là, oui, après il
18 faut leur remonter le moral, les ramener à leurs positions, et ça a duré
19 comme ça à l'infini.
20 Donc pour en terminer, et on épuisera le sujet bientôt, jusqu'à Noël
21 1992, et le soir -- la veille de Noël, j'étais venu à Mostar, j'ai tenu
22 jusque-là ou avant cela des dizaines et des dizains de réunions dans le
23 secteur : Kiseljak, Vitez, Busovaca, Travnik, Novi Travnik, Bugojno,
24 Uskoplje, qu'on appelle aussi Gornji Vakuf, Konjic. Enfin j'ai inspecté
25 toutes les positions tenues par le HVO et l'ABiH dans le secteur au moins
26 deux fois. Je me suis entretenu, je me suis disputé. Enfin c'est
27 inénarrable.
28 Là, vous avez vu certains détails. Tout à l'heure vous allez voir un
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1 film concernant la création d'une Brigade du HVO à Zenica. Ce que je puis
2 dire c'est que la façon de procéder que je vous ai montrée ici pour ce qui
3 est de ce mont Komar, une opération similaire à l'époque avait été préparée
4 par mes soins avec la participation du HVO et de l'ABiH non loin de Konjic.
5 Pour ce qui est de s'attaquer aux positions de la VRS au village de Bjela
6 et tout autour de Bjela, un site à partir duquel il tirait vers Konjic de
7 façon nourrie, et ensuite j'ai inspecté les positions en compagnie des
8 chefs de QG du HVO et de Konjic et des gens de l'ABiH de Konjic. On a vu un
9 document à ce sujet. Il me semble qu'il y en a un autre. Je pense l'avoir
10 vu quelque part, mais je ne suis plus capable de le retrouver moi-même.
11 Lorsque tout a été convenu, lorsque au lendemain il s'agissait de
12 conduire à son terme cette opération, l'ABiH a tout simplement dit qu'elle
13 ne voulait pas.
14 D'où était venue cette information ou cet ordre, voire injonction de
15 ne pas aller ensemble réaliser l'opération en question, je ne le sais pas.
16 Mais le jour d'avant, on avait convenu d'y aller au lendemain, et ils ont
17 dit, Non, au début par contre ils étaient forts intéressés par
18 l'éventualité de chasser la VRS de ce secteur de Bjela parce qu'ils leur
19 tapaient dessus de façon nourrie, extrêmement nourrie depuis ce site-là.
20 A cette époque-là, Monsieur le Juge, en compagnie de centaines de
21 personnes avec qui je me suis entretenu, il y a eu quelque chose de très
22 inhabituel. Avec votre autorisation, je vais me lever, je vais vous le
23 montrer. Alors quand on sert la main à quelqu'un --
24 [Le témoin s'exécute]
25 -- on lui tend la main, et c'était normal; à un moment donné, un
26 certain nombre d'officiers de l'ABiH faisaient comme ceci
27 [Le témoin s'exécute]
28 -- ce geste donc un peu la main vers l'arrière pour tendre la main en
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1 avant par la suite. Bien sûr, j'ai trouvé ça inhabituel comme gestuel, et
2 on m'a expliqué que cela démontrait, qu'en réalité, ils faisaient ainsi
3 savoir qu'ils prenaient en considération cinq fondements de l'Islam -- cinq
4 piliers de l'Islam, et on m'a expliqué cela par la suite à Bihac. Je ne
5 sais pas quels sont ces cinq piliers de l'Islam, mais ce mouvement de la
6 main c'était déjà devenu habituel, ils commençaient à se reconnaître l'un
7 et l'autre de la sorte.
8 Q. Est-ce que vous pouvez décrire ce geste de la main pour que ce soit
9 consigné ?
10 R. On retire un peu la main vers l'arrière, les cinq doigts écartés l'un
11 de l'autre, et d'après l'explication qu'on m'a apportée ça aurait les cinq
12 piliers de l'Islam. Enfin ils ne le faisaient pas tous, mais un certain
13 nombre d'officier de l'ABiH saluait de la sorte, chose que j'ai trouvée
14 inhabituelle.
15 Je sais que le 23 décembre 1993, à Travnik, dans l'organisation du HVO nous
16 avons eu une réception pour une fête catholique, la fête de Noël, et je me
17 souviens qu'à cette réception il y avait de présent Hadzihasanovic. J'avais
18 même une photo quelque part en sa compagnie et d'autres officiers de
19 l'ABiH.
20 Le 24, donc à la veille de Noël, je pense m'être trouvé à Usora, et là-bas,
21 on avait pris une photo. Dans l'après-midi ensuite, j'ai pris ma voiture,
22 et je suis allé à Mostar, j'ai rencontre là-bas MM. Stojic et Petkovic, et
23 c'est la qu'il y a eu ces deux ordres de générés afin que les hommes
24 politiques passent Noël et le Nouvel An aux positions de combat en
25 compagnie des soldats, parce qu'on avait déjà commencé à faire la
26 distinction d'entre les rangs. Les soldats étaient censés -- aient été se
27 battre, les hommes politiques et les dirigeants prenaient leurs voitures
28 pour aller en bord de mer, alors comme si on était deux mondes différents.
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1 Ça générait du mécontentement, donc nous avons conclu la nécessité de faire
2 en sorte que toutes les structures HVO, HZ HB, et cetera, aillent les gens,
3 aillent de là passer la nuit -- au moins une nuit avec les hommes aux
4 positions de combat pour qu'ils voient de quoi a l'air la nuit, quand elle
5 est passée dans un bunker, et voir combien la nuit est longue.
6 C'est pour cela que MM. Coric et Stojic, et moi-même avons adressé cet
7 ordre pour ce qui est donc du comportement qui étaient censés adopter les
8 membres de la police militaire au poste de contrôle, parce qu'en passant
9 par des centaines de postes de contrôle, il y avait souvent des
10 méconnaissances concernant la façon de se comporter. Alors il fallait dire
11 bonjour, demander les papiers, dire : merci, bon voyage, et ainsi de suite.
12 Donc l'ordre en question a été signé par M. Stojic, M. Valentin Coric et
13 moi-même, pour qu'il y ait plus de poids à l'ordre. Ça relève des
14 compétences de M. Coric mais, là, on a procédé de la sorte pour ce qui est
15 des structures normales et pour les armées normales, il n'est pas -- on
16 n'est pas censé signer tous les trois, mais on l'a fait pour donner plus de
17 poids à cet ordre ou à ces instructions concernant le comportement des
18 membres de la police militaire sur les voies de communication.
19 Après le Nouvel An, j'ai été avec -- enfin, j'étais pour le Nouvel An avec
20 les gars sur la ligne de front, et juste après, je suis allé à Zagreb.
21 Q. Merci. Pour cerner le récit, je vous renvoie au 05622.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- j'ai une question à vous poser sur
23 la vidéo. Si j'ai bien compris, vous avez donc tourné cette vidéo
24 ultérieurement à Zagreb pour montrer ce qui s'était passé en automne 1992,
25 quand vous vous êtes adressé aux soldats qui avaient fui. Vos propos ont
26 été traduits, et la version anglaise, nous l'avons. Mais il se trouve,
27 Monsieur Praljak, que la cabine, qui a traduit vos propos en français, à un
28 moment donné, vous dites ceci qui n'est pas dans la version anglaise. Vous
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1 dites : "On niquera leurs mères." Est-ce que vous avez dit ça ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'est neutre. "Qu'on leur nique la mère à
3 quelqu'un." A quelqu'un, c'est neutre, comme injure c'est neutre pour
4 autant que je m'en souvienne.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Parce que dire ça à des jeunes soldats, qui ont
6 entre 18 et 25 ans, de la part d'un commandant, est-ce normal, ou bien est-
7 ce une expression qui était en usage chez vous et qui n'a pas de
8 connotation sexuelle incitative ou autre ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, je pense que je
10 n'ai pas dit cela. Je l'ai dit de façon neutre. Et même quand bien même je
11 l'aurais dit, si vous vous penchez sur n'importe quel film réellement
12 tourné concernant l'armée et quelque soit la guerre en question, les
13 expressions utilisées sont incomparablement plus lourdes s'agissant de
14 quelque armée que ce soit et de quelque guerre que ce soit. J'ai étudié
15 tout ce qu'on a pu dire au sujet de l'ennemi, des Allemands, puis ensuite
16 des Russes, en les qualifiant d'ours et dans les autres guerres, la
17 Deuxième Guerre mondiale notamment. Ce que j'ai dit est assez atténué pour
18 la situation de guerre. La rhétorique en temps de guerre en termes simples
19 c'est quelque chose de tout à fait différent de la rhétorique que l'on a
20 dans le civil. Et si vous le voulez, je peux vous apportez tout ce que
21 Hemingway a dit au sujet des Allemands ou ce que plus de 95 % d'Américains
22 avaient dit dans le souhait de faire jeter des bombes sur Hiroshima et
23 Nagasaki. C'est une autre optique en temps de guerre. Je pense quand même
24 avoir dit la chose de façon neutre et quand bien même l'aurais-je dit ça ne
25 veut rien dire d'autre que d'aller se battre et de vaincre militairement
26 parlant. Ça n'a pas de signification.
27 Mme PINTER : [interprétation]
28 Q. Dans notre parlé au quotidien non pas de façon officielle, est-ce qu'on
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1 se sert d'injures ?
2 R. Oui, on se sert d'injures au-delà de la mesure normale. Oui, on se sert
3 beaucoup.
4 Q. Merci. J'aimerais que vous ouvriez un document P 016122. Le document se
5 trouve dans le classeur qui est intitulé : "Bosnie centrale," il s'agit
6 d'un compte rendu ou transcript présidentiel.
7 Pour préciser les choses, la version anglaise, c'est la page 18 sur un
8 total de 60.
9 Je peux vous donner le ERN, le numéro ERN 132-2353.
10 Alors que sauriez-vous nous dire au sujet de ce document concernant donc le
11 document et les circonstances de sa rédaction ?
12 R. Je vais enchaîner. Pour ce qui est de l'injure et le fait de mentionner
13 la "mère d'autrui," c'est dans la façon idiomatique de parler en croate; ça
14 n'a aucune connotation sexuelle. Ça veut dire : on les battra, on est
15 meilleur, on vaincra. Voilà ce genre de chose. Je crois que les avocats en
16 ont parfaitement conscience, il n'y a aucune connotation autre.
17 Alors ici nous avons un PV d'entretien tel que consigné entre Franjo
18 Tudjman et les représentants des municipalités de la Bosnie centrale à la
19 date du 8 mars 1993. Compte tenu de la situation telle quelle se
20 présentait, on énumère ici : Gvero, Krizanac, Dominik Sakic, originaire de
21 Zenica, ce sont donc des gens qui sont venus se plaindre et parler de
22 problèmes qu'ils avaient là-bas avec des préparatifs très clairs de
23 l'agression lancée par l'ABiH contre les Croates de la région. En termes
24 simples, je n'ai guère besoin d'en dire plus, ils ont présenté la chose de
25 façon tout à fait précise dans leur propos et on voit qu'ils sont venus se
26 plaindre et demander conseil concernant ce qu'il convenait de faire parce
27 que la Croatie continuait de toutes ses forces à poser son soutien à une
28 lutte conjointe, et les gens ont du mal à comprendre. C'est normal. Il
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1 serait difficile pour tout un chacun de comprendre parce qu'ils étaient
2 exposés à une agression de la part de l'ABiH qui en Croatie bénéficient du
3 statut d'un ami à part entière. On l'a vu cela. Ce que je voudrais
4 cependant indiquer, j'espère que vous allez à prendre lecture, mais là ce
5 que je voudrais mentionner c'est la page où --
6 Q. 0132-2353, 0132-2353. Version anglaise, c'est la page 18 sur un total
7 de 60.
8 R. Donc ici nous avons Zoran Maric qui fait état de l'existence d'une aile
9 extrémiste du SDA, il continue sur ce sujet et il dit que dans le cadre du
10 territoire de Busovaca, ils n'ont pas de cadres bien formés, et je cite :
11 "Lorsque M. Praljak était à Travnik, les choses se passaient plus ou moins
12 bien plutôt."
13 Mais dès qu'il est parti, les choses ont commencé à empirer. Il n'y a
14 pas de discipline militaire. Les activités criminelles ont commencé à se
15 développer et certains commandants militaires commencent à prendre à leur
16 compte l'autorité civile et je sais qu'il y a eu aussi l'inverse. Je le
17 note au passage, les civils ont commencé à se mêler des affaires
18 militaires. Je continue la situation et c'est pourquoi je vous demande si
19 cela est possible de faire revenir M. Praljak.
20 Alors lorsqu'il est question de cela, je pense que j'ai bien
21 travaillé et cela que nous avons sous les yeux confirme qu'avec toute
22 l'énergie que j'ai mise en œuvre là-bas je parvenais à maintenir la
23 situation plus ou moins sous contrôle pour autant -- dans toute la mesure
24 où cela était possible. Nous voyons ici qu'après mon départ, les choses ont
25 empiré.
26 Q. Passer maintenant au P 01852 qui est déjà une pièce à conviction. Nous
27 avons déjà eu l'occasion de le voir; cependant, j'estime qu'il est
28 important que vous disiez vous aussi personnellement quelques mots à ce
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1 sujet.
2 R. Alors c'est un document qui correspond à une date un peu plus tardive,
3 le 12 avril 1993, et nous voyons que le HVO de Travnik aborde ici les
4 affrontements autour de Pâques de cette année-là et ils s'adressent encore
5 une fois au président Tudjman. Ils décrivent de façon exhaustive quels sont
6 les problèmes rencontrés. Je n'ai rien à y ajouter. C'est déjà une pièce à
7 conviction, sauf pour ce qui concerne la dernière page. Dans cette dernière
8 page, là encore, nous avons une lettre où ils demandent qu'on leur viennent
9 en aide si cela est possible. On leur envoie des officies de l'armée croate
10 qui pourraient leur venir en aide, et ils demandent également mon retour
11 sur place. Je n'ai rien à rajouter à cela. Voilà les destinataires à qui
12 cela a été envoyé : au président de la République, M. Tudjman; à Mate
13 Boban; et à Jadranko Prlic.
14 J'estime que ceci représente une confirmation du travail que j'ai accompli,
15 de la sorte de travail que j'ai accompli et dont j'ai parlé ici de façon
16 uniquement partielle car je n'ai pas le temps de vous montrer les dizaines
17 et les dizaines d'exemples dans lesquels il s'est avéré nécessaire
18 d'intervenir de cette façon, à savoir de s'opposer à untel ou untel, de
19 menacer de piquer une crise et puis ensuite. Tout simplement il n'est pas
20 possible de rentrer dans tous les détails de ces différentes situations.
21 Q. Général, est-ce que cette demande d'aide demandant des officiers
22 croates était demandée en raison des opérations offensives auxquelles le
23 HVO s'apprêtait à procéder ?
24 R. En Bosnie centrale, le HVO n'avait absolument aucune possibilité avec
25 les forces dont il disposait et dans les conditions d'encerclement par
26 l'ABiH qui l'entourait, aucune possibilité donc de seulement imaginer la
27 moindre action offensive. C'était tout simplement impossible. Car le
28 rapport de force était tel que même le plus cinglé des commandants n'aurait
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1 pas osé imaginer une chose pareille.
2 Q. Merci. Je vous prie maintenant de prendre le document numéro 3D 02638.
3 Il s'agit des souvenirs de guerre du général Alagic. En version anglaise
4 c'est le document situé en page 3D020832, et le texte commence à la page 3D
5 34-1053.
6 R. Madame Nika, quel est le numéro que vous avez donné ? J'ai un peu
7 mélangé tout.
8 Q. 3D 02-2638, c'est dans le classeur : "Bosnie centrale."
9 M. STRINGER : [interprétation] Pourrions-nous avoir une référence pour la
10 page en anglais, s'il vous plaît ?
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] 3D 02832.
12 M. STRINGER : [interprétation] En ce qui concerne le prétoire électronique,
13 ma traduction en anglais commence à la page 3D -- patientez, 3D 41-0087,
14 document qui fait dix pages. Donc la page que l'on m'a donnée ne correspond
15 pas à la version anglaise que nous avons dans notre prétoire électronique,
16 dans notre e-court. Ce n'est que dix pages, donc si le général veut
17 commencer à commenter, je pense que j'arriverai à retrouver la page.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà je vais commencer avec la page 8, dans
19 la version bosniaque.
20 Mme PINTER : [interprétation] C'est la page 3D 41-0089, en anglais.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc M. Alagic était général de l'ABiH, dans
22 son livre : "La guerre en Bosnie centrale," il décrit évidemment son point
23 de vue concernant ces événements.
24 Dans le premier paragraphe, il parle d'une chose qui donne la confirmation
25 de ce que nous n'avons cessé de répéter ici. Alagic était toutefois
26 précédemment à cela, un officier de la JNA. Il dit que les premières
27 cocardes sont apparues dans les casernes.
28 Pour information, pour les Juges de la Chambre, les cocardes étaient des
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1 insignes portées par les Chetniks. Il s'agissait d'insigne que les Chetniks
2 portaient sur leur subara, sur leur toc. Il dit que cela s'est produit déjà
3 en 1990, on les a vus apparaître.
4 Ensuite, il dit qu'il a été à Belgrade lorsqu'on a activé ce plan secret,
5 "Navala I," c'est-à-dire attaque 1. Ensuite il parle de cet exercice où
6 Alagic avait le rôle de commandant d'une division russe. Il s'agit des
7 fameux plans S1 et S2 que j'ai déjà présentés à la Chambre, donc attaque
8 par le plan de Varsovie ou une attaque possible par l'OTAN et les réponses
9 correspondantes de la JNA. Donc ces différentes cartes ont déjà été
10 montrées et versées.
11 Ensuite il dit qu'à l'époque déjà, il a compris qu'ils faisaient cela en
12 ayant à l'esprit cette ligne dont a déjà parlé, Karlobag-Karlovac-
13 Virovitica, et que déjà à cette époque-là, l'armija n'avait pas de
14 plan précis pour la défense de la Slovénie. Il dit que lorsque cela
15 est devenu, il dit quand cela est devenu clair pour lui. Ensuite il
16 dit qu'il y a eu ce plan Avala et non pas Navala; Avala-2,
17 correspondait à des attaques contre Psunj, Papuk et en direction de
18 Zagreb. Tout ça c'est donc la Croatie, en termes de localités, et que
19 le sujet de son mémoire de fin d'études pour ses études d'officier
20 était l'attaque par une brigade de blindé via Karlovac pour percer
21 sur les rivières Kupa [phon] et Korana, et en passant par Bihac
22 également à l'origine. Il s'agit de deux rivières qui sont en
23 direction de la Slovénie.
24 Q. 3D 41-0090 en version anglaise, et 3D 33-0343 en version croate.
25 R. Dans cette partie, Alagic dit qu'il a alors décidé de ne plus faire
26 partie de la JNA. Il s'est occupé de commerce, mais il utilisait son livret
27 militaire afin de voyager à travers la Krajina. Cela nous donne aussi une
28 information quant à la nature même de cette période, à savoir que lui avait
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1 la possibilité de quitter la JNA et de conserver malgré tout son livret
2 militaire et de voyager à travers la Krajina que les Serbes tenaient sur
3 leur contrôle.
4 Il dit qu'il n'a pas été en mesure de rejoindre l'organisation militaire
5 des Croates et des Bosniens à Banja Luka. Mais tout cela est un peu étrange
6 parce qu'il n'y avait pas là-bas d'organisation militaire des Croates et
7 des Bosniens. Cela indique plutôt le parcours assez étrange qui a été celui
8 de cet homme. J'en parlerais après.
9 Il dit que son adresse officielle se trouvait en Vojvodine, son domicile
10 officiel et qu'à Banja Luka, il ne pouvait pas le retrouver. Il dit avoir
11 été arrêté au mois d'août 1992.
12 Alors cela n'est pas très important. Il parle de Sanski Most. Il dit avoir
13 été accusé mais que le général Uzelac, commandant du corps d'armée de Banja
14 Luka de la JNA serait intervenu pour qu'on le relâche. Donc Uzelac savait
15 où il se trouvait. Il serait donc intervenu pour qu'on le laisse repartir
16 sans papier. Ce qui signifiait qu'il ne pouvait pas quitter la ville et
17 cela est tout simplement faux.
18 Alors je ne sais pas si la suite a été traduite. Mais si cela n'a pas
19 traduit, je peux en donner lecture. Tout ce qui est ici est assez bizarre.
20 Il dit avoir été arrêté en août 1992, mais qu'il a passé 15 jours en ville,
21 et que ce n'est que juste avant l'attaque contre la municipalité survenue
22 le 12 mai, qu'il s'est entretenu avec Sabic et Kljucanin ainsi
23 qu'Osmancevic concernant la défense. Alors, le 19 mai, c'est certainement
24 avant le mois d'août 1992, cela n'est pas controversé, mais il avait donc
25 rencontré les Musulmans à ce moment-là déjà, il était à Banja Luka. Mais il
26 me semble que, d'un point de vue temporel, c'est tout simplement
27 impossible.
28 Pourquoi dis-je cela ? Parce que nous allons voir pourquoi dans le
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1 paragraphe suivant, le paragraphe 13.
2 Q. Général, vous devrez lire parce que nous n'avons pas de traduction.
3 R. Alors il dit, je cite :
4 "Cela signifiait que j'étais libre, ça été traduit, mais que je
5 pouvais pas quitter la ville."
6 Ensuite, je continue, je cite :
7 "Je suis resté 15 jours en ville, et ce n'est qu'avant l'attaque
8 contre la municipalité qui est survenue le 19 mai 1992."
9 Or nous savons que la guerre fait déjà rage en Bosnie-Herzégovine, je
10 poursuis la citation :
11 "J'ai eu un entretien avec Sabic, Kljucanin, et Osmancevic,
12 concernant la Défense. Je ne savais pas si quoi que ce soit avait été
13 organisé, combien d'hommes ils avaient à leur disposition, où ils se
14 trouvaient."
15 Il dit que cette discussion a été tenue deux jours avant l'attaque
16 des Chetniks contre la ville. Alors, moi, je ne comprends pas comment il a
17 pu arriver que les Chetniks attaquent Banja Luka, tout comme je ne
18 comprends pas comment il a pu être arrêté en août 1992 pour avoir ensuite
19 passé encore 15 en ville, et cetera.
20 Passons à la suite et puis vous allez voir de quoi il s'agit, ce qui
21 se passe.
22 Donc l'arrivée à Travnik c'est la page 13 du texte en bosnien.
23 Q. 3D 41-0090 en version anglaise, et 3D 33-0344 en version croate.
24 R. Voilà, alors, ce monsieur qui se trouve à Banja Luka et qui discute
25 dans une organisation de la Défense, fait son apparition le 13 janvier 1993
26 à Travnik. Il s'est présent à l'officier chargé du personnel dans la
27 caserne. Mais, à ce moment-là, la caserne Travnik a été abandonnée par la
28 JNA et on n'y avait installé des soldats du HVO et des soldats de l'ABiH.
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1 Lui s'est présenté en tant que volontaire, et il dit qu'il peut être --
2 peut jouer n'importe quel rôle de soldat ou commandement. Il dit qu'il
3 avait le -- qu'il avait le grade de sous colonel, et que l'ensemble de ses
4 papiers se trouvait dans sa besace.
5 Il est allé à Visoko, il y a fait la connaissance de Cuskic,
6 Mahmuljin et Hadzihasanovic. Il dit que la caserne n'était pas -- il ne se
7 trouvait pas de soldat; il dit que sa première tâche a été de préparer et
8 d'équiper trois bataillons; et il dit y avoir répondu lorsqu'on lui a
9 demandé pourquoi il était venu, que ce soldat ne pouvait pas être à sa
10 place, mais qu'Alagic, lui, le pouvait.
11 Messieurs les Juges, c'est complètement incompréhensible pour moi,
12 que de voir qu'entre août 1992 et janvier 1993, nous avons une période
13 pendant laquelle on ne sait pas, tout simplement, où est M. Alagic et ce
14 qu'il fait. Alors, évidemment, il ne l'écrira pas, mais quand quelqu'un
15 passe six moi pendant lesquels on a des attaques violentes de la JNA et des
16 Chetniks contre son peuple, de cette façon, ça veut dire qu'il se cache
17 quelque part à moins qu'une fois relâché par Uzelac, il n'ait commencé à
18 travailler pour le compte de la JNA et vous verrez pourquoi.
19 Donc le 13 janvier, il s'est présenté pour défendre la Bosnie-
20 Herzégovine, il dit qu'avant cela il ne pouvait pas quitter la ville. Mais
21 si en mai 1992, il ne pouvait pas quitter la ville, il n'était pas libre,
22 alors je ne comprends pas comment en janvier 1993 il peut encore être en
23 vie.
24 Alors, passons à la page 14.
25 Q. Page 3D 41-0091, en version anglaise, et 3D 33-0345 en version
26 croate.
27 R. Alors regardez comment cela fonctionnait. Donc il dit que lorsque
28 lui est arrivé, cela reconstituait les premiers véritables préparatifs pour
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1 une guerre contre les Chetniks. Donc avant cela, ça signifie qu'il ne se
2 battait pas contre les Chetniks.
3 Ensuite il est dit que Cuskic reviendra de ses vacances à Rijeka, ce
4 commandant était donc en train de passer ses vacances en Croatie à Rijeka.
5 Alors, ils se sont mis d'accord pour former le groupe opération Bosanska
6 Krajina, groupe opération qui a incorporé quatre brigades : la 7e, la 17e,
7 la 27e et la 37e. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'ils établissent quelle
8 brigade faisait quoi et qui défendait le territoire contre les Chetniks,
9 mais c'est les Juges apprécieront.
10 Ensuite nous avons la chose suivante : l'ordre portant formation de
11 ce Groupe opérationnel Bosanska Krajina a été émis le 27 février -- le 27
12 février 1993 donc -- pardon, 1993, oui.
13 Rasim Imamovic était arrivé de Zagreb avec une espèce d'ordre visant
14 à la formation d'une brigade motorisée de Banja Luka qui aurait eu son
15 siège et son commandement à Zagreb. Donc ces réfugiés de Banja Luka qui
16 avaient fui pour sauver leur peau, ces réfugiés musulmans avaient leur
17 siège et leur commandement à Zagreb, et ils émettaient un ordre pour que
18 l'on forme avec ces hommes une Brigade motorisée, et c'est ainsi qu'ils ont
19 formé le 27e Brigade avec des réfugiés de Kotor Varos, et ce n'est qu'à
20 lors, alors il n'y avait qu'un ordre, mais la mise en œuvre était assez
21 déficiente, ce n'est qu'à lors que commence l'organisation de l'ABiH qui,
22 dans ce territoire-là, testera sa puissance exclusivement en la tournant
23 contre le HVO.
24 Q. Juste un détail. Vous avez parlé de Mehurici. Où cela se trouve
25 t-il ?
26 R. C'était en Bosnie-Herzégovine centrale, c'était la base centrale
27 des Moudjahidines.
28 Q. La page à laquelle vous venez de vous référer est la page numéro -- je
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1 ne la vois pas indiquée. C'est la page 3D 33-0346 en croate ? Pour la
2 version anglaise, 3D 41-0091.
3 R. Il dit ici qu'il existait un syndrome de Jajce, qu'il fallait ré-
4 instiller [phon] dans l'esprit des gens la notion qu'ils allaient voir
5 revenir chez eux car toute la Krajina, Messieurs les Juges, au nord et à
6 l'ouest de la Bosnie-Herzégovine, c'est-à-dire de Banja Luka vers la
7 Croatie. Il dit que les gens fuient via la Croatie en direction de
8 l'Europe. Alors ils réfléchissent au transfert éventuel de certaines Unités
9 à Bihac. Le HVO imprimait des documents d'identité permettant de voyager.
10 Il dit que c'est un officier du HVO qui à l'époque coopérait encore
11 avec nous, dit-il. On dit qu'on lui reprochait de mener incitant la
12 mobilisation, mais cette dernière avait été décrétée par le président
13 Izetbegovic. Il dit avoir amené la 305e Brigade, la Brigade de Jajce, et
14 qu'il a concentré ses unités à Travnik. La Brigade de Jajce c'était celle
15 qui avait été formée par des réfugiés musulmans de Jajce.
16 Ensuite il dit qu'il a reçu la visite de l'ambassadeur Thébault, et je
17 cite; voilà ce qu'il a dit donc à M. Thébault, je cite :
18 "C'est ici que ce plan Vance-Owen échouera, Monsieur Thébault. C'est ici
19 que l'Herceg-Bosna tombera."
20 Il dit que cette caserne conjointe à Travnik, il ne veut pas la partager
21 avec le HVO, et il dit avec détermination : deux armées ne peuvent pas se
22 trouver dans la même caserne tout comme deux drapeaux ne le peuvent pas non
23 plus. Cela il l'a dit à Gasso [phon], le commandant du HVO. Il lui dit
24 encore : toi, tu vas quitter la caserne. Alors tout ce qui s'est passé
25 ensuite avec les gens qui ont été prisonniers dans cette caserne de Travnik
26 et c'est dit très clairement.
27 Le commandant de cette zone, lui aussi, continue; il dit qu'il était
28 inconnu que ses succès qu'il avait obtenus étaient une inconnue pour
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1 Tudjman et Milosevic. Imaginez le niveau de prétention qui est celui d'un
2 officier de la JNA qui se cache dans la ville de Banja Luka et conclut des
3 accords inimaginables avec Uzelac et que Tudjman ou Milosevic aient à
4 connaître de lui. C'est pourquoi il a été -- il a remporté tant de succès
5 dans ces attaques contre le HVO en les privant de leurs droits même à
6 l'existence à moins, bien sûr, que comme il l'a découvert, l'aurait soi-
7 disant découvert ensuite ou que Tudjman et Milosevic n'aient partagé la
8 Bosnie-Herzégovine. Alors Alagic, lui, il ne le connaisse pas, et c'est
9 pourquoi il avait l'intention de faire les choses de façon différente et de
10 mettre en échec leur plan.
11 L'INTERPRÈTE : note de la cabine française : les commentaires de M. Praljak
12 sont extrêmement confus.
13 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous, vous êtes peut-être mal
14 exprimé ou peut-être qu'il y a eu une erreur au niveau de la traduction, à
15 la ligne 11. Vous avez expliqué que c'est la raison pour laquelle il a
16 réussi à attaquer la HV. Est-ce que cela ne devrait pas plutôt être le
17 "HVO" ?
18 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
20 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
21 Q. Général, vous avez mentionné Uzelac pour la deuxième fois. C'était qui
22 ?
23 R. Uzelac était le commandant du Corps de Banja Luka. Il était donc le
24 commandant du Corps d'armée de Banja Luka de la JNA. Et par la suite, je
25 pense de la VRS. Je ne connais pas l'ensemble de son parcours professionnel
26 mais il était du côté des Serbes, le commandant le plus important de cette
27 région.
28 Il avait été libéré de la prison pendant six mois au moins on ne savait pas
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1 ce qu'il fabriquait, et ensuite au moment de Travnik, vous voyez ce qu'il
2 dit. Bien sûr, nous n'avons pas de preuves, Monsieur le Président,
3 Messieurs les Juges, mais on peut voir que les Serbes infiltraient dans les
4 rangs de l'ABiH des gens qui travaillaient pour eux pendant cette période
5 et qui, entre autres, ont été à la cause de l'attaque lancée par l'ABiH
6 contre le HVO, non seulement en Bosnie centrale mais aussi à Vakuf, Konjic
7 et Mostar.
8 Passons maintenant à la page 18 où il élabore cela.
9 Mme PINTER : [interprétation]
10 Q. En croate, il s'agit de la page 3D 33-0348; et en anglais, 3D 41-0092.
11 R. Voilà il donne une explication pour justifier ce qu'il fait et puis il
12 dit que les Chetnik avaient pris leurs positions stratégiques et que les
13 Croates par le biais des structures politiques se sont emparés du
14 territoire qui aurait dû être croate.
15 Mais, bon Dieu, il y avait beaucoup plus de Croates et de Musulmans
16 sur ce territoire et ceci ressort clairement de la part de ceux qui sont
17 venus voir Tudjman. Ces gens-là étaient déjà dans une situation bien
18 inférieure. Ensuite il dit aussi que le président du HDZ est devenu le
19 commandant du HVO et c'est ça, parle de lui-même, et puis ensuite il dit
20 qu'à son avis la situation stratégique en Bosnie-Herzégovine est tel que
21 "leur étreinte" est tellement serrée que c'était seulement avec un couteau
22 qu'il aurait été possible de les séparer.
23 Lorsqu'il parle de l'étreinte, il parle des Croates et du HVO. Donc
24 s'agissant de l'ensemble de la situation en Bosnie-Herzégovine, d'après les
25 idées du commandant Alagic qui commande quatre brigades extrêmement
26 puissantes de l'ABiH, à son avis, la situation en Bosnie-Herzégovine va se
27 clarifier, non pas après l'attaque contre les Chetnik, l'attaque de l'ABiH
28 mais c'est lui qui va séparer avec un couteau l'étreinte du HVO. C'est ça
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1 son plan.
2 Mme TOMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, mais je dois procéder à une
3 correction du compte rendu d'audience. Le général a vraiment ralenti.
4 Mais à la page 40, ligne 11, le général n'a pas dit l'Herzégovine
5 allait devenir claire ou clarifiée mais que la situation allait être
6 résolue, donc non pas "clarifiée," mais "résolue."
7 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
8 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je crois qu'il faut corriger la
9 correction. Ceci n'était pas la page 40 mais à la page 60 que vous vouliez
10 nous indiquer.
11 Mme TOMANOVIC : [interprétation] Absolument. Merci. J'ai dit "60."
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas Praljak qui le dit mais Alagic.
13 Encore une fois, il faut relire cela très lentement. A, s'agissant de
14 l'ensemble de la situation stratégique en Bosnie-Herzégovine, il va
15 résoudre cela en brisant l'étreinte du HVO. Il dit que c'est très important
16 et il dit par la suite : on a réussi à faire cela. Au moment où il écrit
17 son livre, il veut dire que, dans des parties dans lesquelles avait attaqué
18 le HVO et où il avait réalisé ses objectifs en partie, bien sûr, il dit que
19 le partage définitif de la Bosnie-Herzégovine a été empêché donc ce ne sont
20 pas les Serbes qui l'intéressent ni les 70 % du territoire tenu par les
21 Serbes. Il s'intéresse seulement au HVO et il a empêché le partage de la
22 Bosnie-Herzégovine en imposant une défaite au HVO en Bosnie centrale.
23 C'est le concept des officiers hauts placés de l'ABiH à l'époque, que
24 ceci a été écrit ici tout à fait contrairement à -- on voit clairement qui
25 a attaqué qui en Bosnie centrale, qui avec quelles intentions et qui
26 pensait quoi.
27 Ensuite on voit que le Groupe opérationnel de Bosanka Krajina
28 constitue un embryon des meilleures troupes de la Bosnie-Herzégovine,
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1 ensuite il parle de deux brigades, la 7e Brigade musulmane et la 17e Brigade
2 de Krajina. Il dit que, pendant une courte période, ces deux brigades
3 agissaient ensemble à Travnik, Zenica, et Kacuni.
4 Ensuite il parle de l'ennemi, et par là, il veut dire que le HVO
5 souhaite maîtriser la vallée de la Lasva, donc Vitez, Busovaca, et le
6 reste, et puis il dit que ceci a été empêché et puis, regardez, maintenant,
7 il dit que le Bataillon de Sebesic -- et Sebesic est une région qui se
8 trouve entre --
9 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, s'il vous plaît,
10 les interprètes vous demandent de parler dans le microphone et, bien sûr,
11 c'est très difficile à comprendre. Le micro n'étant pas allumé et également
12 de ralentir, je suppose. Merci.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge Prandler.
14 Donc ils ont attaqué à Sebesic, et vous avez pu voir qu'ils avaient des
15 centaines d'ordres d'attaque. Or le HVO n'a pas d'ordre d'attaque, si ce
16 n'est des mouvements de moindre importance ou ce que l'on appelle la
17 défense tactique. Il dit qu'ils ont gagné là-bas, et dit notre tactique
18 allait d'entrer à Bjela pour ce qui est de la partie arrière et la création
19 des conditions pour les attaques d'une base circulaire.
20 Or les hommes de Sebesic se sont battus par la suite dans la région de
21 Prozor. Je les connais. Sebesic est un endroit en profondeur derrière la
22 ligne. C'est entre Vakuf et Travnik, et mis à part l'idée de nettoyer et
23 attaquer cette route, il n'y a aucun sens là-dedans, si ce n'est de battre
24 le HVO.
25 Nous allons passer à la page 21.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous nous avez dit qu'il y avait des
27 centaines, ou que nous avions -- nous pouvions voir des centaines d'ordres
28 d'attaques de l'ABiH. Je ne les vois pas. Pourriez-vous nous expliquer cela
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1 ? Pourriez-vous nous dire où nous pouvons les voir ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans cette affaire, Monsieur le Juge, au moins
3 cent ordres de l'ABiH en tant d'attaques ont été montrés, allant de Mostar,
4 Konjic, Vares - et ceci a été versé au dossier dans cette affaire - où il
5 est écrit explicitement ordre d'attaque. S'agissant de l'offensive Neretva
6 93, il y a eu des dizaines et des dizaines de tels ordres.
7 Mme PINTER : [interprétation]
8 Q. Excusez-moi. S'agissant de Sebesic, quelle était son importance ?
9 R. Le contrôle des routes est un point dominant.
10 Q. Merci. Page 3D 41-0092, en anglais; et 3D 33-0349, en croate.
11 R. Donc cette décision, selon laquelle ils devaient prendre le contrôle du
12 Groupe opérationnel, a été prise à Travnik lors d'une réunion. C'était leur
13 commandement auquel je me rendais souvent, on sait très bien où c'était.
14 Hadzihasanovic a encore mis à la disposition les unités suivantes, les 306e,
15 325e, 312e et 308e, et ainsi de suite. Je ne vais pas énumérer le tout.
16 Ensuite la 27e Brigade, qui était en cours de constitution, va se joindre à
17 eux, de même que la 755e Brigade de Jajce.
18 Puis, maintenant, regardez, c'est là que ça devient cynique.
19 Donc en attendant l'attaque du HVO contre Travnik, alors qu'il les a
20 chassés de la caserne, et alors que les unités dont il dispose sont au
21 moins sept fois plus nombreuses par rapport à la Brigade de Travnik, mais
22 peu importe, il dit : en attendant l'attaque, nous avons déjà en secret
23 déployé de manière planifier les forces non pas seulement à l'intérieur de
24 la ville mais sur l'ensemble du territoire. Par exemple, à Vilenica, nous
25 avions nos forces derrière le dos du HVO alors qu'il ne le savait pas.
26 Puis il dit qu'ils étaient prêts à prendre les lignes vers les Chetniks
27 tenues, bien sûr, par le HVO, mais lorsqu'ils auront attaque le HVO, le HVO
28 allait quitter la ligne vers les Chetniks pour se défendre, et c'est à ce
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1 moment-là qu'ils se sont emparés de ces lignes.
2 Ensuite il dit : c'est la raison pour laquelle lorsque la ville est devenue
3 vide vers 13 heures, j'ai pris un cheval blanc, et ça c'est le symbole de
4 vainqueur, et ainsi de suite.
5 Donc ils ont planifié l'attaque en secret. Ils ont déployé les unités
6 derrière le dos du HVO. Ils ne tenaient pas les lignes face aux Chetniks.
7 Ils ont vidé la ville, ils ont chassé la population. Ils ont capturé et tué
8 un certain nombre de personnes. Ceci est écrit de manière explicite par le
9 participant et le dirigeant dans le cadre de ces événements, le général de
10 l'ABiH, Alagic.
11 Nous passons maintenant à la page 3D -- à la page 26.
12 Q. [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Avant que vous ne vous reportiez à
14 d'autres pages, je souhaite vous poser une question à propos de la page 7
15 en anglais, et qui en réalité est la page 30, du texte original, 3-0; il
16 s'agit en fait d'une question que je souhaite soulever.
17 Page 30 du texte original, et la page 7 ici, le titre qui dit ceci, et je
18 cite : "La Croatie a envoyé 13 - 1-3 - 13, de ces brigades à Gornji Vakuf,
19 Prozor et Jablanica." Lorsque j'ai lu ceci, j'ai tout d'abord pensé qu'il
20 s'agissait d'une erreur, et je pensais que l'auteur voulait parler du 13,
21 et non pas de 13 brigades. Ensuite j'ai vérifié l'original, et ceci est dit
22 ici, et je cite, veuillez m'excuser pour ma prononciation : "La Croatie a
23 envoyé à Gornji Vakuf, Prozor, et Jablanica, ces 13 brigades." Donc, de
24 toute façon, il parle de 13 brigades de Croatie.
25 Il y a quelques jours, vous vous en souviendrez, il y a eu une discussion
26 et un échange de point de vue sur ces faits allégués, à savoir s'il y avait
27 des unités croates officiellement en Bosnie-Herzégovine et, bien entendu,
28 vous avez évoqué cette question. Donc comment pourriez-vous nous expliquer
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1 cette affirmation, à savoir que la Croatie avait 13 de ces propres
2 bataillons dans cette région, à savoir Gornji Vakuf, Prozor, et Jablanica ?
3 Je vous remercie.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est très simple, Monsieur le Juge Prandler.
5 Tout simplement il s'agit d'un mensonge fou. Un mensonge fou; 13 Brigades
6 de l'armée croate ont libéré et je voulais y venir, je n'allais pas omettre
7 d'en parler. Ici, il s'agit de 1994, car il est question de Here et ainsi
8 de suite.
9 Moi, comme je vous l'ai dit, j'y étais en 1994, même si l'Accusation ne l'a
10 pas mentionné. Justement autour de Here - et je l'avoue - ils peuvent noter
11 cela et me poser des questions : 13 brigades de l'armée croate ont vaincu
12 l'armée de Martic et ont libéré la Krajina. Lorsqu'ils ont libéré la
13 Krajina, ils ont libéré Bihac aussi. Lorsque l'avancée a commencé vers
14 Banja Luka, c'est seulement lorsque les Américains ont donné un ordre très
15 virulent à Franjo Tudjman. C'est seulement suite à cet ordre que cette
16 armée a été arrêtée avant d'infliger une défaite décisive aux Serbes de
17 Bosnie.
18 13 brigades de l'armée croates auraient traversé Tuzla, auraient passé
19 jusqu'à Tuzla en trois jours. Mais avec de telles rumeurs, l'on se glorifie
20 soi-même. Il avait face à lui, 13 brigades de l'armée croate, mais voilà,
21 il les a vaincues. Lui, Alagic, il dit, en parlant de lui-même : il est
22 tellement rusé que ni Milosevic ni Tudjman n'ont réussi à percer ces
23 secrets.
24 Est-ce que vous pouvez imaginer la conscience de cet homme qui se cache à
25 Banja Luka, et qui pense que Tudjman et Milosevic tiennent compte de lui,
26 mais puisqu'il a réussi à leur échapper, c'est lui qui va réussir à
27 empêcher le partage de la Bosnie-Herzégovine en vainquant le HVO en Bosnie
28 centrale. Il ne mentionne aucune action des Chetniks dans son livre. Vous
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1 allez le voir vous-même. Ça ne l'intéresse pas.
2 Son groupe le 7e --
3 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Pardonnez-moi de vous interrompre,
4 mais j'ai ma réponse. Merci.
5 Si on part de l'hypothèse où le feu général Alagic dit la vérité, à savoir
6 qu'il y avait 13 brigades de l'armée croate, c'est donc une force armée
7 importante avec 13 brigades. En théorie, ces brigades, qui se seraient
8 déplacées, il doit y avoir des éléments de preuve, des ordres, parce qu'on
9 ne déplace pas 13 brigades sans ordre, sans logistique, sans médecin, et
10 cetera. Donc s'il dit la vérité, il doit y avoir dans les archives ou dans
11 les documents de l'armée croate la preuve de cela.
12 Alors comme vous avez exercé des hautes fonctions dans l'armée croate,
13 qu'est-ce que vous me dites ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la même chose,
15 que l'Accusation montre n'importe quel ordre de n'importe quelle brigade
16 croate à l'époque dans cette région-là. 13 brigades de l'armée croate se
17 constituent presque 30 000 soldats; 30 000 soldats, mis à part tous ceux
18 qui étaient déjà là-bas. Ce sont des colonnes de centaines de kilomètres.
19 Chaque brigade est longue de 40 kilomètres. Ce n'est pas une petite folie
20 ou un petit mensonge que de dire cela, mais c'est un mensonge stupide. Un
21 mensonge peut être intelligent, mais s'il avait parlé d'une seule brigade,
22 peut-être, mais quand quelqu'un dit des bêtises et ment, si en plus il est
23 stupide, il dit 13 brigades, or il s'agit de 30 000 soldats de l'armée
24 croate qui auraient fait partie de 13 brigades.
25 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons une partie
26 du livre que le général compte verser, qu'il dit n'être que des mensonges.
27 Donc nous voudrions revenir à un autre passage du livre. Evidemment, il
28 veut que la Chambre de première instance accepte ce qu'il dit parce que ça
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1 va avec sa thèse. Mais il faut une référence temporelle. Regardez à la page
2 6 de la traduction en anglais; page 21 du livre en français.
3 Le général, là, parlait de cet incident. Il parlait donc d'un passage où
4 l'on parle de la 306e, la 325e, la 312e Brigades, et cetera, et cetera, et
5 la décision de prendre la zone opérationnelle de Bosanska Krajina. Donc
6 c'est un sujet que le général a abordé, il y a quelques minutes, et là,
7 Alagic visiblement a redéployé les Unités de l'ABiH loin des points serbes
8 pour les déployer face à la HVO. Pouvez-vous nous donner une référence
9 temporelle pour qu'on sache quand cela s'est passé ? Nous aimerions savoir
10 à quel moment tout cela s'est passé ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Ces attaques contre Sebesic ont eu lieu
12 au printemps, je pense, au mois de février ou de mars 1993. Travnik, ça a
13 été fini et on le sait exactement. Monsieur Petkovic, levez-vous, dites-le-
14 nous, je ne me souviens pas de la date exacte. Si vous vous souvenez, le
15 mieux serait que vous le disiez. Je suppose que les Juges le permettront.
16 Non, ça ne va pas.
17 Mme PINTER : [interprétation] Pas sans l'autorisation des Juges.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, avec l'autorisation des Juges
19 seulement. Mais on a la date exacte, c'est en 1993, en mai ou juin, ça
20 c'est exact.
21 Ce dont le Juge Prandler a parlé, porte sur 1994, c'étaient les combats qui
22 ont eu lieu en janvier 1994 lorsqu'ils ont commencé, lorsqu'ils ont essayé
23 encore une fois à une percée à Vakuf. Monsieur le Président, Messieurs les
24 Juges, Messieurs de l'Accusation, je vous dis, j'y étais de nouveau, j'y ai
25 participé en tant que volontaire. Il n'y a pas eu de forces croates du tout
26 à l'époque là-bas. Nous avons réalisé certaines avancées tactiques là-bas.
27 A ce moment-là, j'y ai participé et je peux énumérer, c'était Ciganske
28 Livade, Zavisce, Skadine [comme interprété] Glava, Here, et peut-être
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1 encore un point qui m'échappe momentanément.
2 Je suis venu dire la vérité ici et je dirai la vérité.
3 Donc il a nettoyé Travnik, au mois de mai, juin 1993. Mais il est possible
4 de le constater sur la base d'une centaine de documents qu'on a.
5 Maintenant, je demanderais que l'on présente la page 26.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : La page 26, on la verra après la pause, parce qu'il
7 est temps de faire la pause. Nous allons donc faire une pause de 20
8 minutes.
9 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais je suis absolument désolé. Je
10 m'excuse auprès de tous. Je dois, malheureusement, partir après la pause
11 car je suis attendu dans un autre pays. Bien sûr, je lirais le compte
12 rendu.
13 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : à 12 heures 30, page 66 du
14 compte rendu, lignes 9 et 10, ajoutez : il n'a pas emmené la 7e, la 17e et
15 ces autres brigades en direction de Banja Luka.
16 C'était une réponse du général Praljak.
17 --- L'audience est suspendue à 12 heures 26.
18 --- L'audience est reprise à 12 heures 50.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.
20 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Q. Mon Général, avant de continuer, j'aimerais que nous rectifiions ce qui
22 figure au compte rendu page 67, ligne 5. Lorsque vous avez parlé de cette
23 distance sur laquelle se déploie une brigade ou 13 brigades, et au compte
24 rendu il dit qu'une brigade se déploie sur 100 kilomètres ou se déplace sur
25 des centaines de kilomètres.
26 R. Non, non, non. Nous avons déjà -- il y a longtemps eu ce problème pour
27 parler d'une Brigade de l'Infanterie ou de blindé lorsqu'il se déplace par
28 échelon, quelle est la distance ou la longueur de route que cela prend.
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1 Alors très souvent une brigade ça ne se déplace pas en un seul échelon, il
2 y a deux échelons. J'ai dessiné et j'ai fourni aux Juges de la Chambre --
3 le détonner -- disant que ça faisait 45 à 50 kilomètres de véhicules et de
4 tout ce qui constitue une brigade, quand une brigade se déplace. Donc 13
5 brigades, on ne peut pas parler de ce genre de bêtise à Vakuf notamment du
6 fait du rapport qui émane de moi que j'ai envoyé de Rama et Uskoplje à mon
7 intention à moi-même donc.
8 En 1993, où je demandais aux autres, combien d'hommes nous avions du tout
9 sur la ligne de front, et pour ce qui est de ce document qui est déjà versé
10 au dossier, et ça a été rédigé en temps de guerre, il apparaît avec clarté
11 quels sont les effectifs avec lesquels j'ai dû conduire la défense
12 d'Uskoplje et de Rama face aux attaques de l'ABiH, donc les effectifs dont
13 je disposais. Donc il n'est pas logique ni digne de foi de parler de 13
14 brigades de l'armée croate dans ce secteur; cela ferait 13 000 soldats.
15 Q. Alors ça c'était pour les besoins du compte rendu.
16 Pour autant que je le sache, on s'était arrêté à la page 26, 3D 41-0093 en
17 anglais; et 3D 33-0350, en version croate.
18 R. Alors il est expliqué de la façon dont se déroule la guerre en Bosnie
19 centrale et on dit que la percée opérée à Krizancevo Selo était décisive;
20 on parle du 22, 23 décembre 1993.
21 Il convient ici de mentionner le fait qu'ils ont alors tué pas au combat
22 hors combat et que 70 personnes à Krizancevo Selo, et il y a des rapports à
23 cet effet en provenance des officiers du renseignement anglais, et il y a
24 une documentation autre à cet effet, donc il indique que suite à cela les
25 Croates ont été contraints à signer une trêve. Le général Petkovic le sait
26 mieux que moi, il a dû en signer au moins une dizaine de trêves de ce genre
27 que nous avons respectées de notre côté.
28 Voici comment il explique pourquoi il n'a pas libéré Vitez. Il indique que
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1 ça avait été laissé en guise de soupape stratégique car si l'on venait à
2 s'emparer de Vitez, il y aurait coupure d'arrivée d'armes depuis la
3 Croatie, puis du reste. On sait quelles étaient les pénuries de toutes
4 sortes qu'il y avait : vivres, et le reste, donc c'était un problème
5 stratégique, laissant entendre que la Croatie risquait de changer
6 d'opinion. Moi, je peux dire que, malheureusement, la Croatie n'a pas
7 changé ses positions après toutes ces opérations et suite à cette agression
8 non dissimulée.
9 Il dit qu'il redoutait l'éventualité de ne pas pouvoir contrôler l'armée
10 suite à ce qui s'était produit à Ahmici et à Stupni Do.
11 Mais Krizancevo Selo, Uzdol, Grabovica et tout le reste, là où l'ABiH a tué
12 plus de 1 100 et quelques Croates non pas dans des combats, là, il n'en
13 n'est pas dit un seul mot. Voilà c'est ce que j'aurais à dire.
14 Q. Merci. Page suivante, page 30 --
15 R. En effet, mais j'ai déjà répondu à la question. On sait que le HVO
16 était commandé à l'époque par le général Roso, et j'ai indiqué que, suite à
17 mon départ des fonctions de chef d'état-major du HVO, en raison de la
18 continuation des attaques, puisqu'il y a eu des trêves de signer, il y a eu
19 cette trêve du mois d'octobre 1993 qui a suivi à l'arrêt de cette offensive
20 de l'ABiH appelé Neretva 93. Ils n'ont toujours pas renoncé aux attaques
21 contre le HVO, pour opérer des percées en direction de l'Occident et du
22 littéral.
23 J'indique, une fois de plus, que nulle part -- mais vraiment nulle
24 part, d'après ce que j'ai pu voir, il n'est fait état de combats contre les
25 Serbes donc ver Banja Luka, le corridor, en direction de Bihac, et ainsi de
26 suite.
27 Il a dit aussi auparavant que s'il venait à s'emparer de Vitez, la Croatie
28 risquait de cesser d'approvisionner Bihac, chose qu'en Croatie personne
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1 n'envisageait de faire, indépendamment de ce comportement tout à fait
2 incompréhensible de la part de l'ABiH ainsi que des crimes commis par elle,
3 à partir de Trusina et ainsi de suite.
4 Alors maintenant on peut aller à la page 31.
5 Q. En version croate, 3D 33-0352; et en version anglaise, 3D 41-0094.
6 R. Pour ce qui est d'une question posée par le journaliste, ou que sais-
7 je, pour savoir quel était le rôle d'Alagic dans les opérations non loin de
8 Vares, il dit de façon tout à fait claire que c'est lui qui a rédigé
9 l'ordre relatif aux opérations de Vares et qu'on lui avait confié la
10 mission de faire en sorte que la 7e Brigade musulmane libère Vares de ce
11 côté-ci, il s'entend.
12 Ce qu'il convient de comprendre c'est que cette attaque lancée contre le
13 HVO à Vares, où c'était tout à fait paisible jusque-là, et lorsqu'il y a eu
14 cette attaque de Vares, ils ont qualifié cela de libération, pour ce qui
15 est de ce type de commandants au sein de l'ABiH, nous faisions figure
16 d'armées ennemis et de peuple ennemi. A la page d'après, il dit que la
17 bataille avait une issue certaine; ils ne redoutaient pas du tout à un
18 échec.
19 Il parle de la logistique du 3e Corps. Il indique qu'il y a eu plusieurs
20 centres logistiques. Il dit aussi que le marché noir florissait et des
21 munitions et des vivres, qui faisaient l'objet de toute une contrebande, et
22 une fois en coopération avec le MUP, il a essayé de trancher la chose, et
23 il a eu des conflits. Il enchaîne pour dire que la situation était sans
24 issue, et aussi a-t-il décidé de faire du commerce avec les Chetniks sur le
25 territoire de Meokrnje ? Alors pour libérer la Bosnie-Herzégovine de ces
26 Croates et du HVO, il a même donc coopéré avec les Chetniks.
27 En page 34 --
28 Q. 3D 41-0095, version anglaise; et 3D 33-0354, version originale.
Page 8568
1 R. Il parle de la visite de M. Izetbegovic.
2 Q. Un instant. Un instant. Il convient de rectifier le numéro de la page.
3 3D 33-0354.
4 R. Alors il est question de l'arrivée d'Izetbegovic dans la 7e Brigade
5 musulmane et il s'agit de cette distribution de drapeau de guerre. Il est
6 question d'une mise en scène d'incident, mise en scène de leur part
7 d'ailleurs, et il indique que, dans une partie des autorités de Zenica, il
8 y avait des éléments qui étaient contre Alagic, donc on ne peut pas dire
9 que tous les Musulmans ou tous les hommes politiques, comme cela a été le
10 cas à Tuzla ou ailleurs, étaient d'accord avec cette attitude vis-à-vis des
11 Croates et vis-à-vis du HVO. Mais il leur adresse des reproches, et dit
12 qu'ils étaient contre lui parce que ces gens de Zenica faisaient de la
13 contrebande avec les Chetniks en passant par Bukovica.
14 Il précise avec qui il s'était trouvé en bons termes. Il a demandé à ce que
15 des fonds soient réservés ou prélevés pour l'armée et que sais-je encore.
16 On peut passer à la page suivante.
17 Q. Page originale 3D 33-0355; et version anglaise, 3D 41-0095.
18 R. Il dit qu'il a fait la connaissance de M. Izetbegovic à la fin de l'été
19 1993. Il dit qu'il ne savait rien des officiers de l'ABiH à Sarajevo. Il
20 aurait précisé à Izetbegovic que, lui, Alagic, avait des contacts avec les
21 Bosniens de Zagreb, et il lui a transmis le bonjour de Hasan Cengic. C'est
22 le même Hasan Cengic qui s'est opposé à Izetbegovic dans le livre rédigé
23 par M. Filipovic, lorsqu'il est question de la façon dont Izetbegovic ne
24 pouvait pas gérer Hasan Cengic son père et autres jeunes Musulmans.
25 Donc Hasan Cengic à Zagreb, en Croatie, organise par le biais des centres
26 logistiques dont dispos l'ABiH, avec le soutien du gouvernement croate et
27 de l'armée de Croatie, à Split, Zagreb, Samobor, afin que soit réalisé le
28 planning de feu M. Alagic. Ce qu'il importe de dire c'est qu'il aurait
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1 indiqué à Izetbegovic qu'il fallait passer à une guerre offensive. Quand il
2 parle d'offensive, ce que j'affirme, c'est qu'il a à l'esprit le HVO. Nous
3 sommes en septembre 1993, là, date à laquelle Sefer Halilovic poursuit
4 l'offensive entamée, dès le mois de juin, contre le HVO le long de la
5 vallée de la Neretva, pour déboucher sur les frontières occidentales de la
6 Bosnie-Herzégovine et résoudre de la sorte le problème des Croates en
7 Bosnie-Herzégovine.
8 Or, au mois de septembre, leurs directions politiques et militaires signent
9 un accord à part avec les Serbes portant aménagement de la Bosnie-
10 Herzégovine et cessation d'opération de combat entre l'ABiH et l'ARSK, au
11 mois de sept 1993, disais-je.
12 Voilà. Merci, c'est ce que j'avais à dire au sujet de ce livre.
13 Q. Mon Général, on en a terminé avec les mois de l'hiver 1992, et on passe
14 à janvier 1993.
15 A l'attention des Juges et des autres dans le prétoire, j'indique qu'il
16 s'agit de ce petit classeur qui porte l'intitulé : "15 janvier 1993."
17 Voulez-vous dire quelque chose de façon générale ou est-ce que vous voulez
18 qu'on se penche sur le document tout de suite ?
19 R. Oui, je peux donner des éléments généraux.
20 Ici, le bureau du Procureur, présent en guise d'élément crucial quant au
21 comportement du HVO, c'est-à-dire de la direction politique de la HZ HB, et
22 parle d'un document qualifié de chantage ou d'ultimatum, adressé par le HVO
23 à l'intention de l'ABiH de l'Herzégovine, et date du 15 janvier 1993. Cela
24 n'est pas vrai. Je déclare ici que le texte de ce soi-disant ultimatum a
25 été harmonisé à Zagreb, aux dates du 13 et 14 janvier 1993, en compagnie de
26 M. Alija Izetbegovic, à l'hôtel Esplanade de Zagreb lors d'entretien où
27 j'ai pris part moi-même. S'agissant de la rédaction du texte de ce prétendu
28 ultimatum, j'y ai participé également; ont participé en outre à celle-ci,
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1 M. Alija Izetbegovic, M. Gojko Susak.
2 Je pense d'ailleurs qu'une fois, en compagnie de Gojko Susak lors
3 desdits entretiens, il y avait de présent Lord Owen et Cyrus Vance. Je
4 pense donc que ce document a été créé partant de ce qui a été convenu à
5 Genève, j'imagine que ça s'est passé entre le 1er janvier et le retour des
6 délégations à Zagreb.
7 Pour ce qui est donc de la rédaction de ce prétendu ultimatum, j'ai pris
8 part à celle-ci aux côtés de membres de la délégation musulmane dans la
9 présence ou avec la présence de M. Alija Izetbegovic. Le document en
10 question, le 15 janvier au matin, je l'ai emporté avec moi à Mostar pour le
11 remettre à MM. Stojic, Petkovic et Prlic, et eux l'ont signé et diffusé,
12 eux n'ont rien à voir du tout avec le document en tant que tel. Car la
13 seule petite erreur possible de survenu c'est dû au fait qu'il avait été
14 convenu avec M. Izetbegovic que le document serait d'abord rendu public par
15 le ministre de la Défense de Bosnie-Herzégovine, le ministre de la Défense
16 de M. Izetbegovic, en d'autres termes.
17 Q. Vous voulez dire Bozo Rajic ?
18 R. Bozo Rajic, oui, étant donné que les combats auprès de Gornji Vakuf ont
19 déjà commencé à ce moment-là, au matin du 15 janvier 1993 --
20 Q. [aucune interprétation]
21 R. 1993, 1993.
22 J'ai été convié au bureau du président Franjo Tudjman et c'est avec 95 % de
23 certitude que je crois pouvoir affirmé que M. Izetbegovic y était aussi. On
24 m'a prié, et quand je dis "prié," ça s'appelle prier mais c'est plus que
25 prier, c'est plutôt un ordre mais ce n'est pas un vrai ordre du tout non
26 plus. Donc on m'a demandé d'aller à Uskoplje pour calmer la situation là-
27 bas.
28 Alors le texte de l'ordre je l'ai pris avec moi et une fois arrivé là-bas,
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1 en début de soirée ou en soirée - je ne sais plus maintenant vous le dire -
2 quand je suis arrivé à Mostar, je veux dire le 15 janvier 1993, c'est MM.
3 Prlic, Stojic et Petkovic. Je les ai informés de l'accord auquel nous
4 avions abouti avec M. Izetbegovic et je leur ai donné le texte. Je pense
5 que ce texte-là, un jour après, c'est M. Bozo Rajic qui l'a publié en tant
6 que document officiel parce que, lui aussi, il l'avait obtenu et cela
7 émanait donc du ministre de la Défense de Bosnie-Herzégovine qui est le
8 ministre de la Défense tant de l'ABiH que du HVO.
9 Le 16, je me suis rendu à Uskoplje et j'en parlerai à part.
10 M. Izetbegovic a alors changé d'avis concernant ce document, et le 20
11 janvier 1993 toujours il a émis un ordre --
12 Q. 1993 ?
13 R. Oui, excusez-moi, le 20 janvier 1993.
14 Donc M. Izetbegovic a émis un ordre en vertu duquel il annulait l'ordre
15 précédent émis par son propre ministre de la Défense et qui avait aussi été
16 signé par les personnes que l'on a citées.
17 Au sein du HVO existait alors un désir considérable de voir s'arrêter les
18 conflits que l'on connaissait depuis déjà fort longtemps, et c'est par ce
19 fait que l'on peut expliquer la précipitation qui a conduit à la
20 publication de ce document à Mostar, peut-être un jour plus tôt que ce qui
21 aurait dû se passer, et peut-être que je n'ai pas transmis des instructions
22 tout à fait exactes concernant le fait qu'il aurait fallu attendre que le
23 ministre du gouvernement de la Bosnie-Herzégovine, le ministre de la
24 Défense Bozo Rajic, procède en premier à la publication de ce texte avant
25 que nous ne le fassions nous-même.
26 Il ne s'agissait absolument pas d'un ultimatum. Je le répète, ce document a
27 été rédigé en se fondant sur un accord. Il avait pour objet de réaliser ce
28 que l'on souhaitait dès le départ à savoir que l'on mette en place un
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1 certain ordre dans cette armée afin d'empêcher que n'apparaissent des
2 problèmes sans cesse plus importants sur le terrain.
3 Ce document n'a causé absolument aucun dommage puisqu'il a été purement et
4 simplement annulé le 20 janvier, à ceci près que l'on a pu voir une fois
5 encore qu'avec M. Izetbegovic qui a fait volte face des dizaines de fois
6 concernant ce sur quoi il s'était précédemment mis d'accord. On a pu voir,
7 une fois encore, qu'il était dirigé par quelqu'un de plus puissant que lui,
8 et selon les informations dont je dispose en l'espèce, il s'agissait de
9 Haris Silajdzic. Quant à la façon dont Silajdzic faisait cela lors de la
10 réunion qui s'était tenue à l'époque, Haris Silajdzic a écrit une
11 déclaration à l'attention de ce Tribunal concernant ce point. Je n'ai plus
12 rien à dire à ce sujet.
13 Nous pouvons peut-être maintenant voir le procès-verbal.
14 Pour ce qui est de cet accord et à sa mise en œuvre conformément aux
15 accords passés à Genève il y a eu la participation, ou en tout cas ils ont
16 été mis au courant tous les deux, aussi bien de Lord Owen que de Cyrus
17 Vance.
18 Q. Général, alors selon le compte rendu d'audience il apparaîtrait que ces
19 Haris Siladjzic qui a donné cette déclaration.
20 R. Non. C'est M. Antun Vrdoljak qui a donné cette déclaration, qui a été
21 présent à cette réunion tenue lorsque M. Silajdzic est revenu des Etats-
22 Unis, et qu'il a fait pression sur Alija Izetbegovic pour qu'il ne signe
23 pas un tel accord.
24 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : les deux cabines n'ont --
25 aucune cabine n'a entendu le nom d'Antun Vrdoljak à aucun moment que ce
26 soit.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose que c'est ainsi qu'il a changé
28 d'avis ultérieurement, avec évidemment avec une grande résistance de la
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1 part de tous ses généraux, de Halilovic et de tous les autres.
2 Q. Simplement aux fins du compte rendu d'audience, je voudrais donner les
3 numéros des documents dont vous avez parlé. L'un est le P 01155, c'est la
4 décision du Dr Jadranko Prlic; le second est le P 01140, et c'est l'ordre
5 émis par le responsable du département de la Défense de la HZ HB, M. Bruno
6 Stojic; et enfin le troisième est le P 01139, qui est l'ordre du général de
7 brigade Milivoj Petkovic. Il faut que je répète le premier numéro, P 01155.
8 Et enfin concernant le dernier document que nous avions --
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, vous avez abordé la question de l'ultimatum
10 du 15 janvier 1993. On a des documents sous les yeux, et je remercie votre
11 Défense de nous avoir préparé ce petit classeur, qui nous permet de voir la
12 suite de tous ces documents.
13 Quand on lit ce document, on se rend compte qu'on met en application les
14 provinces 3, 8 et 10, en termes militaires. Ces documents visent à
15 instituer des commandements militaires, soit de l'ABiH soit du HVO, en
16 fonction des régions qui avaient été déterminées lors de la Conférence de
17 Genève. Bien, pourquoi pas, mais il y a une Conférence internationale. On a
18 compris que vous avez participé de très près à tout cela.
19 Pour éviter des problèmes, n'y avait-il pas une autre solution qui aurait
20 été de soumettre aux participants à la Conférence internationale ce type de
21 document, à titre de projet, pour voir : (1) si tout le monde était
22 d'accord; (2) si les Etats qui y participaient, et notamment les diplomates
23 comme Cyrus Vance ou Lord Owen étaient d'accord; et (3) si la partie
24 adverse était aussi d'accord ? Une fois que vous auriez eu l'imprimature
25 [phon] de tout le monde, vous auriez pu diffuser ces documents. Alors
26 pourquoi ça n'a pas été fait, et pourquoi il a été décidé de sortir tout de
27 suite ces documents et ces ordres ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, cela a été
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1 convenu à Genève, et on l'a rendu opérationnel à Zagreb avec l'accord de
2 tous. Quand je dis "tous," je parle du HVO, d'une part; de M. Izetbegovic,
3 d'autre part; et aussi de Lord Owen et de Cyrus Vance, par ailleurs, et je
4 voudrais que l'on donne lecture pour que cela soit parfaitement clair, du
5 procès-verbal.
6 Mme PINTER : [interprétation] C'est le P 01158.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est donc le 15 janvier, à Zagreb, à 15
8 heures 50. La réunion se tient chez le président Tudjman; à cette réunion
9 sont présents M. Cyrus Vance, Lord Owen, Alija Izetbegovic, Mate Boban, et
10 leurs collaborateurs.
11 Voyez les mots qui sont ceux de Gojko Susak, il faut les lire
12 tranquillement, voilà ce que dit Susak :
13 "Encore une fois, je voudrais poser une question tout à fait pratique pour
14 laquelle je pensais que nous nous étions mis d'accord depuis longtemps
15 déjà.
16 "M. Izetbegovic, nous avons discuté de cela ici à Zagreb, et nous en avons
17 parlé aussi devant les présidents de la Conférence à Genève," donc devant
18 Vance et Owen.
19 "Aux fins de l'efficacité des opérations de guerre et compte tenu du fait
20 que nous sommes de toute façon dans une position désavantageuse, il est
21 nécessaire que là où se trouvent de façon majoritaire des forces musulmanes
22 --"
23 On dit que cela a été partagé à Genève, ou conformément aux provinces qui
24 ont été décidées, et donc il est nécessaire que le commandement de l'ABiH
25 soit là où se trouvent en majorité des Unités de l'ABiH, et là, où se
26 trouvent en majorité des forces du HVO, doivent se trouver les
27 commandements du HVO.
28 Mais puisque en raison de la réunion qu'il avait eue avec Silajdzic la
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1 veille au soir, puisqu'il a changé d'avis de façon manifeste, nous avons sa
2 réponse où il dit la chose suivante :
3 "Gojko Susak, je ne peux pas comprendre ce qui fait ici l'objet
4 controverse, après tous les accords auxquels nous sommes parvenus à Genève,
5 parce qu'il s'agit de combattre un ennemi commun."
6 Il continue, en disant :
7 "Ce n'est pas quelque chose que nous avons déjà obtenu.
8 "J'étais assis avec vous dans cette même pièce à l'hôtel Esplanade, lorsque
9 nous avons convenu de cet accord entre nous afin que nous travaillions à
10 cela.
11 "Et je ne vois pas ici ce qui prête à controverse, pour ce qui est de
12 la venue à Gornji Vakuf, et indépendamment du fait qu'il puisse y avoir là-
13 bas plus ou moins de Croates ou de Musulmans en raison de la situation des
14 réfugiés, qu'ils y viennent, donc contrôlés par le HVO, qu'ils viennent des
15 ordres en provenance de Sarajevo et qui seraient contradictoires avec les
16 ordres venant de Mostar."
17 Puis il dit :
18 "Mais alors, vous vous entretuez vous-mêmes. Les Serbes n'ont n'ont
19 plus du tout besoin de faire la guerre contre vous."
20 Alors je déclare devant les Juges de façon tout à fait responsable qu'il y
21 a eu un accord de passé concernant tout cela, mais il est certain qu'on en
22 a parlé aussi à Genève.
23 Ces pourparlers de Genève, bien entendu, vont se poursuivre, et c'est à
24 plusieurs reprises que nous demandons que, L'armée au moins soit placée
25 sous une ou une autre -- sous une forme ou une autre de contrôle jusqu'à ce
26 que l'on parvienne à une solution politique, car avec de tels généraux,
27 comme le général Alagic et d'autres, sans un commandement conjoint et sans
28 -- Messieurs les Juges, ce n'est pas -- ce qu'on ne demandait ce n'était
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1 pas que le commandement du HVO soit monolithique d'un point de vue
2 ethnique. Mais le premier, le numéro 1, qui émettait les ordres aurait dû
3 être un Croate, et son numéro 2 devait déjà être un Musulman, c'était ça la
4 notion de commandement conjoint, alors que parallèlement l'armée de Bosnie-
5 Herzégovine restait organisée comme elle était. Ce n'était que pour
6 introduire un minimum d'ordre. Il ne s'agissait pas de subordonner une
7 armée à l'autre. Il s'agissait de pouvoir prendre en compte des problèmes
8 tels que la politique de gestion du personnel, les mis à pied, les
9 nominations, de combien de soldats on disposait et ainsi de suite.
10 Lorsque vous avez deux commandements, on a des unités qui sont l'une
11 à côté de l'autre, qui se regardent en chien de faïence, on ne sait pas qui
12 dispose de combien de force. Ce que l'on a c'est une situation de défiance.
13 Ce qui est ici est proposé c'est une forme classique de
14 fonctionnement qui est celle par exemple de l'OTAN. Les troupes
15 britanniques en Irak sont toujours des troupes britanniques. Mais il y a un
16 commandement qui se place sur la coordination aussi bien des soldats
17 birmans que polonais que britanniques. Mais l'armée en elle-même conserve
18 sa pleine et entière intégrité. Il s'agit simplement de savoir qui fait
19 quoi.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous interromps pour qu'on aille à l'essentiel.
21 Vous nous avez donné donc il y a deux pages, le compte rendu de la réunion
22 fait 55 pages. Moi et mes collègues, on lira les 53 pages qui manquent.
23 Mais je ne sais pas ce qui s'est dit après. Mais Mate Boban, qui était
24 présent, n'aurait-il pas pu en présence de M. Vance et M. Owen dire, voilà,
25 mes militaires ont préparé des ordres aux termes desquels à compter de
26 demain ou à compter de telle heure, il y aura des re-subordinations des
27 Unités HVO, ABiH, et nous vous les remettons solennellement, voilà les
28 ordres qui vont partir dans quelques heures, si tout le monde est d'accord.
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1 Pourquoi ça n'a pas été fait comme cela ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, c'est ce qui
3 a été fait. Nous avons préparé cela. M. Izetbegovic a dit : O.K., c'est
4 cela. Je vais donner cela à Bozo Rajic, pour qu'il le publie. Moi, j'ai
5 apporté ça à Mostar, et ces trois hommes l'avaient publié la veille, car on
6 était pressé, on voulait empêcher la suite des conflits.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc si je comprends bien, tous les documents qu'on
8 a qui sont signés par M. Stojic, par M. Petkovic, et cetera ont été signés
9 et délivrés en plein accord avec M. Izetbegovic ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement. La seule erreur c'est que c'était
11 censé être d'abord publié par Bozo Rajic, et Bozo Rajic, en tant que
12 ministre de la Défense, il l'a publié. Ceci aurait dû être présenté ici
13 comme pièce à conviction, mais ça n'a pas été fait. Le 20 janvier, M.
14 Izetbegovic a annulé l'ordre donné par son propre ministre de la Défense,
15 Bozo Rajic.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors si tout le monde est d'accord, jusqu'à 20
17 janvier, ça veut dire que ce n'est pas un ultimatum, tout le monde étant
18 d'accord, il n'y a pas d'ultimatum; est-ce que c'est la conséquence logique
19 ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il n'y a pas
21 d'ultimatum. Un accord n'est pas un ultimatum, c'est un accord qui a été
22 passé avec le commandant suprême, M. Izetbegovic. Ceci a été publié par son
23 ministre de la Défense, Bozo Rajic. Pour des raisons que j'ai citées,
24 probablement en raison des protestations de ces généraux qui refusaient de
25 le faire, M. Izetbegovic a annulé cela, le 20 janvier 1993, sans aucune
26 conséquence pour qui que ce soit.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
28 Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Q. Général, lorsque vous veniez de Zagreb, est-ce que vous portiez sur
2 vous des ordres déjà écrits ou c'était juste le contenu que vous aviez pour
3 ainsi dire, ce qui avait été convenu ?
4 R. Ceci figurait par écrit. Donc l'accord passé là-bas selon les points,
5 oui, ça existait par écrit, bien sûr.
6 Q. C'est justement de ça que je parlais. Donc l'ordre lui-même n'avait pas
7 été écrit.
8 Vous avez dit que vous alliez parler de Vakuf un peu plus tard, lors que
9 vous avez parlé du 15 janvier. Dites maintenant s'il vous plaît, à la
10 Chambre de première instance à quoi ressemblait la suite de votre séjour
11 après le 15 janvier 1993 ?
12 R. Je suis resté à Mostar, j'y ai passé la nuit. Le lendemain, nous avons
13 encore eu des discussions pour trouver un accord concernant la situation
14 qui se passait là-bas. Le 16 au soir, je suis venu à Rama, c'était le 16
15 janvier 1993. C'est là que j'ai rencontré bien sûr, M. Siljeg qui était le
16 commandant de cette zone opérationnelle de même qu'avec M. Miro Andric, qui
17 était l'adjoint de M. Petkovic. Ici, il convient de souligner que le
18 problème à Vakuf avait commencé bien avant, qu'à plusieurs reprises, il
19 avait escalé et puis a été calmé ainsi de suite.
20 Au mois de décembre 1992, l'ABiH avait déjà creusé toutes les positions,
21 sur toutes les collines autour de la ville de Vakuf, et dans la ville même
22 de Vakuf. J'ai déjà montré cela sur une carte, et ceci m'a été confirmé par
23 ce soldat anglais qui était là-bas, à Gornji Vakuf.
24 Cela dit, et M. Andric et M. Siljeg, suite à mon ordre et requête, au mois
25 de décembre 1992, se sont rendus à toute une série de réunions avec le
26 commandement de l'ABiH, à Gornji Vakuf, afin de trouver une solution à ce
27 problème. Car les lignes face aux Serbes conformément à ce que j'ai montré
28 sur la carte étaient à 10, 15 kilomètres vers Raducki Kamen, à vol
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1 d'oiseau. Ils tenaient cette ligne sur un territoire extrêmement limité.
2 Alors qu'ils avaient deux brigades à Vakuf, ceci a escalé à un tel degré
3 que le commandant du HVO de Vakuf, Vinko Tokic, qui déposera ici ne pouvait
4 plus se rendre à son quartier général. Par exemple, il est allé à Rama pour
5 assister à une réunion, ensuite, il est allé à son quartier général à
6 Vakuf, et pour ce faire, c'était la FORPRONU qui devait l'escorter. Donc
7 clairement, la situation était insoutenable du point de vue militaire, car
8 les routes étaient bloquées, la route principale traversant Vakuf et les
9 routes marginales. La même chose, enfin il y avait une petite route à
10 travers Pidris.
11 Q. Lorsque vous parlez d'"ils," vous parlez de l'ABiH ?
12 R. Oui, l'ABiH avait coupé toutes les routes et lorsque les opportunités
13 de se parler étaient épuisées, ils pensaient, et ils avaient raison que la
14 menace était que -- que la menace posée par le fait que l'ABiH avait ainsi
15 creusé les tranchées faisait que le HVO s'est retrouvé dans une situation
16 de clair danger militaire et devait lancer une action militaire afin de se
17 défendre à l'encontre de ce danger, de cette menace. Ceci a été lancé vers
18 le 11 janvier pour calmer la situation.
19 Q. Quand ?
20 R. C'était le 16 juin, Je ne vois pas pourquoi il faut répéter. C'était le
21 16 janvier 1993 au soir, j'ai entendu tout le monde, l'information, les
22 arguments des officiers du HVO et j'ai demandé un deuxième tour de
23 discussion avec l'ABiH en présence des officiers anglais de la FORPRONU qui
24 étaient déployés là-bas et il y a tous les documents qu'on a vu tellement
25 de fois où l'on demande que A, les tranchées soient comblées, que les
26 unités de la ville se retirent, et cetera.
27 Il est clair, sur la base de tout cela, que l'ABiH considérait quel était
28 en position de pouvoir et il faisait partie de son plan de couper les
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1 routes vers Bugojno et la Bosnie centrale car ils entravaient le passage à
2 travers la ville sur toutes les routes; et puisque les discussions
3 n'avaient pas abouti, ils ont pris la décision de faire en sorte que les
4 cibles militaires donc je souligne bien seulement les cibles militaires, ce
5 qu'on appelle dans la terminologie militaire "la défense active," que ces
6 cibles-là soient déplacées. Moi, je n'étais pas en désaccord avec cela, je
7 n'avais pas d'arguments pour leur dire de ne pas faire cela. Il n'y avait
8 aucun argument logique que j'aurais pu leur présenter pour leur contester
9 un tel droit. Même si je n'étais pas d'accord avec eux.
10 Mme TOMANOVIC : [interprétation] A la page 86, ligne 17, le général a dit :
11 "J'étais d'accord avec eux," alors qu'au compte rendu d'audience, il est
12 écrit : "Je n'étais pas d'accord."
13 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, je n'avais pas d'argument me
14 permettant de m'opposer à leur logique tout à fait claire la logique selon
15 laquelle l'armée de HVO aurait dû être complètement bloquée à Vakuf, avec
16 le passage vers Bugojno alors que de l'autre côté, il y avait des Chetniks
17 car l'ABiH avait déjà quitté les lignes en face -- face aux Chetniks.
18 C'était inadmissible.
19 Donc les discussions se sont poursuivies, les discussions tripartites entre
20 l'ABiH, le HVO et les anglais qui ont participé à cela eux aussi. L'action
21 a commencé. C'était une action purement militaire, et cela faisant j'ai
22 contacté c'était dès le 18 ou le 19 parce que les délégations qui avaient
23 été à Zagreb sont rentrées à Genève encore une fois. A ce moment-là, le
24 général Petkovic est allé à Genève, lui aussi, et bien sûr, je ne pouvais
25 pas établir le contact avec lui. Je pense que j'ai appelé Susak pour qu'il
26 me mette en relation avec Boban ou Petkovic, et je ne sais plus avec qui je
27 parlais, c'était des communications, communiquées que j'ai utilisées pour
28 leur dire de quoi il s'agissait. Je demandais que les commandants qui
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1 étaient à Genève, donc le général Petkovic et le général Halilovic, je
2 pense qu'eux aussi, ils étaient à Genève, à ce moment-là, mais je n'en suis
3 pas sûr. J'ai demandé que l'on donne des ordres pour que l'on mette fin au
4 conflit mais j'ai dit qu'il y avait encore d'autres points et qu'il fallait
5 qu'ils se déplacent de la colline et que l'armée doive partir --
6 M. LE JUGE ANTONETTI : On va arrêter là parce qu'il reste que quelques
7 minutes. Comme c'est un point important et vous allez certainement continué
8 la semaine prochaine. Puisqu'on est arrivé aux environs du 18 et 19 janvier
9 1993, comme vous témoignez en fonction du calendrier, donc on aura
10 l'occasion de revenir sur cette question la semaine prochaine.
11 Grosso modo, il doit vous rester une dizaine d'heures mais je n'ai pas le
12 décompte officiel à vous donner. Mais si jamais il faudrait continuer
13 l'autre semaine, bien, si pourquoi pas, si vous n'avez pas terminé la
14 semaine prochaine. Mais, en tout cas, nous tablons sur les 36 heures qui
15 vous ont été allouées, et là, jusqu'à présent, vous en avez utilisées 26
16 heures, donc il vous reste une dizaine d'heures. Voilà.
17 Donc nous nous retrouverons lundi à 14 heures 15. Je vous remercie.
18 --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le lundi 25 mai 2009,
19 à 14 heures 15.
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