Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 8 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, toutes les

 10   personnes présentes dans le prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le

 11   Procureur contre Prlic et consorts. Merci, Messieurs les Juges.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 13   En ce lundi 8 juin 2009, je salue M. Pusic, M. Petkovic et M. Stojic, je

 14   salue M. Praljak qui témoigne, je salue Mmes et MM. les avocats, je salue

 15   M. Stringer et ses collaborateurs et collaboratrices, sans oublier toutes

 16   les personnes qui nous assistent.

 17   Je vais d'abord donner la parole en premier à M. le Greffier, qui a un

 18   numéro IC à nous donner.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Le quatrième lot de la Défense D3 des documents versés par le truchement du

 21   témoin Slobodan Praljak aura le numéro IC 1025. Merci, Monsieur le Juge.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 23   Comme vous le savez, aujourd'hui l'audition de M. Praljak va se terminer

 24   avec la présentation de ses différents arguments et documents, je voudrais

 25   apporter une petite précision, vous avez noté que lorsque je pose une

 26   question, parfois la question est longue. Pourquoi je pose des questions

 27   très longues ? C'est parce qu'en tant que Juge impartial, je ne dois pas

 28   témoigner d'un parti pris quelconque. De ce fait, je m'impose la discipline

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  1   avant de poser une question, de restituer le sujet dans un contexte plus

  2   général, de faire référence aux documents ou aux documents déjà versés, et

  3   de faire référence aux dires du témoin ou à d'autres témoins, pour

  4   apparaître le plus neutre possible. Ce qui explique que mes questions

  5   peuvent être longues.

  6   Afin que le témoin sache qu'il a face à lui un Juge qui n'a aucun parti

  7   pris, et qui essaie d'aller vers la manifestation de la vérité. Voilà ce

  8   que je voulais vous dire, Monsieur Praljak, parce que vous avez dû, vous,

  9   comme d'autres s'étonner un peu de la longueur de mes questions, mais c'est

 10   par souci d'être totalement impartial que mes questions sont parfois

 11   malheureusement trop longues. Voilà.

 12   Ceci étant dit, je vais donner la parole à Me Pinter qui va continuer.

 13   Mme PINTER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : La juriste de la Chambre me rappelle que j'ai une

 15   décision orale à rendre. J'avais oublié parce que j'étais préoccupé par la

 16   question de la longueur de mes questions. Et j'ai oublié cela. Alors elle

 17   est très courte.

 18   Décision orale relative au délai de réponse à la requête de la Défense

 19   Prlic de réouverture de sa cause.

 20   Le 2 juin 2009, la Défense Prlic a déposé une requête demandant la

 21   réouverture de sa cause afin de présenter le témoin expert Schindler.

 22   Le 4 juin 2009, la Défense Praljak s'est jointe à la requête de la Défense

 23   Prlic. La Chambre tient à attirer l'attention des parties sur le délai de

 24   réponse applicable à cette requête. S'agissant d'une demande de réouverture

 25   de la cause, la Chambre attend les réponses des parties au plus tard dans

 26   un délai de 14 jours après le dépôt de la requête Prlic, soit le 16 juin

 27   2009.

 28   La Chambre rappelle qu'il ne serait être fait application en l'espèce de

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  1   l'article 94 bis (B) du Règlement de procédure et de preuve.

  2   En outre, la Chambre rappelle également aux parties souhaitant répondre,

  3   qu'à ce stade leurs lectures ne devront pas concerner la qualité du témoin,

  4   mais uniquement la demande de réouverture de sa cause par la Défense Prlic.

  5   Bien, donc vous avez jusqu'au 16 juin 2009 au plus tard pour adresser vos

  6   écritures sur la demande de réouverture de la cause de la Défense Prlic.

  7   Bien, Maître Pinter, ceci ayant été lu, je vous donne la parole.

  8   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à vous,

 11   bonjour à tous et à toutes dans le prétoire.

 12   Interrogatoire principal par Mme Pinter : [Suite]

 13   Q.  [interprétation] Bonjour Général. Je vais vous demander d'être

 14   efficace.

 15   Mme PINTER : [interprétation] Est-ce que maintenant ça marche ?

 16   Q.  Je vais vous demander de vous référer au document P 00524, nous sommes

 17   toujours au classeur des "Documents qu'il convient d'expliquer." Alors nous

 18   avons un PV du bureau du président daté du 26 septembre 1992, président de

 19   la République de Croatie.

 20   Est-ce que vous étiez présent à l'occasion de cette réunion ? Alors page

 21   numéro 1, que pouvez-vous nous dire au sujet des sujets qui ont été évoqués

 22   ? Que pouvez-vous nous dire quant aux problèmes qui se sont manifestés au

 23   niveau du HOS et en République de Croatie, parce qu'on a jusque-là parlé de

 24   ce qui s'est passé en République de Bosnie-Herzégovine ?

 25   R.  Oui, j'étais présent à cette réunion. Et compte tenu du peu de temps

 26   qu'il nous reste, je vais parcourir rapidement le paragraphe 1, parce que

 27   c'est important, le Dr Franjo Tudjman parle d'un avenant à l'accord de

 28   coopération avec l'ABiH et de sa mise en œuvre, et il résume la totalité

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  1   des problèmes qui apparaissent entre les deux Etats. D'abord, le Dr Tudjman

  2   dit qu'Izetbegovic, à l'occasion de cette session des Nations Unie, avait

  3   demandé à rencontrer le Dr Tudjman pour proposer une coordination des

  4   actions, il s'entend, des actions militaires. Qui plus est, il a demandé à

  5   ce que des ordres soient donnés aux forces armées, au HVO, de rendre

  6   possible l'approvisionnement de toutes les unités de l'ABiH. Il est dit que

  7   le HVO entravait la chose, ce qui n'est pas exact, mais il serait exact de

  8   dire qu'il n'y avait suffisamment d'armes, même au niveau du HV. Ensuite il

  9   est affirmé qu'au cas où les approvisionnements se feraient davantage

 10   encore par le biais de l'Herzégovine, l'armija pourrait débloquer Sarajevo.

 11   Le Dr Tudjman dit qu'ils sont favorables à la coopération pour ce qui est

 12   de la Croatie, et pour ce qui est du HVO, c'était un problème qu'il y avait

 13   au niveau des relations avec la population croate en Bosnie-Herzégovine.

 14   Puis il a précisé qu'au début Franjo Tudjman avait proposé des clauses

 15   militaires dans les accords entre les Etats, et M. Izetbegovic avait refusé

 16   au départ, ce qui est tout à fait exact

 17   Deuxièmement, il a dit que la Croatie ne devrait pas conduire une guerre à

 18   long terme, mais rechercher une solution politique, et M. Izetbegovic lui

 19   ne serait pas disposé à la chose. Et il a dit qu'il a signé un projet

 20   d'accord rien que pour signer, aux fins d'obtenir la possibilité de faire

 21   approvisionner par le biais de la Croatie.

 22   Puis il est dit très clairement que nous sommes tous conscients de

 23   l'intérêt conjoint des deux pays et il s'agit de [inaudible] entre deux

 24   présidents. Il est question de la protection, de la défense de la

 25   souveraineté et de l'intégrité territoriale de deux Etats, à savoir la

 26   Croatie et la Bosnie-Herzégovine. Il est constaté que les forces serbes

 27   attaquent le territoire de la Croatie depuis le territoire de la Bosnie-

 28   Herzégovine, et cetera.

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  1   A la page d'après, il est question de la nécessité d'accélérer les

  2   démarches diplomatiques et politiques aux fins de trouver une solution

  3   politique. Il est question aussi de la disponibilité à se défendre soi-même

  4   et de se défendre en commun pour ce qui est des deux Etats, et il est créé

  5   un comité pour coordonner les efforts de part et d'autre. Du côté croate,

  6   il y avait moi, et ensuite il y avait le général Bobetko et Ivica Vukojevic

  7   [phon]. Il est question du respect des droits de l'homme, de punir les

  8   criminels.

  9   On parle de toute une série de considérations pour ce qui est de

 10   comprendre ce que la communauté internationale souhaite avoir. Le Dr

 11   Tudjman comprend qu'il n'y aura pas de levée d'embargo. Il considère que le

 12   discours de Izetbegovic aux Nations Unies était plutôt tourné à faire durer

 13   la guerre. C'est ainsi que les gens l'ont compris.

 14   Il est question de coordination entre Bosnie-Herzégovine et Croatie

 15   d'une part, et là, on comprend qu'il y a des phénomènes inquiétants qui

 16   consistent à vouloir exercer le contrôle à l'égard de territoires que le

 17   HVO a libérés. Donc il y a une volonté de mettre en minorité autrui. Et il

 18   dit encore qu'il n'est pas d'accord pour ce qui est de résoudre les

 19   problèmes de la Bosnie-Herzégovine après la guerre, parce qu'il considère

 20   que dès à présent, il convient de parler organisation interne de la Bosnie-

 21   Herzégovine; et c'est ce que j'ai dit, à savoir que M. Izetbegovic m'avait

 22   dit lors d'une réunion à Mostar qu'il fallait d'abord vaincre et puis qu'on

 23   se mettrait d'accord ensuite. Je lui ai dit que dans la guerre, il faut

 24   d'abord se mettre d'accord sur l'organisation interne de la Bosnie-

 25   Herzégovine afin que les gens qui se battent sachent pourquoi ils se

 26   battent et pourquoi ils vont se faire tuer.

 27   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Les interprètes viennent de me

 28   demander de demander à M. Praljak de ralentir. C'est la première demande

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  1   que je lui fais. La seconde c'est que je n'ai pas saisi le numéro de la

  2   page qu'il a citée. Veuillez nous dire de quelle page il s'agit maintenant,

  3   s'il vous plaît, s'il y a une page en particulier ou plusieurs pages en

  4   particulier que vous souhaiteriez que nous regardions.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça part de 01862841, et ensuite 842 --

  6   Mme PINTER : [interprétation]

  7   Q.  Général, il n'y a pas de traduction de certaines pages que vous avez

  8   évoquées, il n'y a pas de version anglaise. Je vous ai interrompu pour la

  9   chose, pour vous le dire et je voudrais vous poser des questions notamment

 10   au sujet de parties qui ont déjà été traduites.

 11   R.  Moi, je n'en sais rien.

 12   Q.  Mais vous n'avez pas à lire le PV puisque vous pouvez en parler, vous

 13   étiez présent là-bas.

 14   R.  Enfin, je ne donne pas lecture, mais je vais juste ralentir.

 15   En somme, on répète ici que Izetbegovic n'entend pas préciser quel va

 16   être l'avenir de la Bosnie-Herzégovine. Il a parlé ouvertement du fait de

 17   disposer déjà de 50 %, il a dit que ce serait un Etat civique, qu'il

 18   accorderait des droits des autres, mais il n'est pas question qu'eux

 19   accordent des droits aux autres. Parce que ces droits sont acquis par le

 20   peuple croate en application de la constitution puisqu'il s'agit d'un

 21   peuple souverain constitutif.

 22   Il est question de ce problème d'embargo. On est conscient de

 23   l'absence de la levée de cet embargo. Les facteurs internationaux ne font

 24   que le répéter. On dit qu'il n'y aura pas intervention extérieure,

 25   étrangère.

 26   Pendant tout ce temps, en réalité, il est fait mention de deux Etats,

 27   de l'organisation interne de la Bosnie-Herzégovine et de ce terrible

 28   souhait de la Croatie qui consistait à vouloir aider, mais non pas pour

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  1   prolonger la guerre mais pour essayer de trouver une solution pacifique.

  2   Voilà, ce serait en somme tout ce que je pourrais dire brièvement. Je

  3   ne sais pas vous donner les pages puisque c'est assez long. Il me semble

  4   toutefois qu'il s'agit d'une transcription importante qui parle de façon

  5   très claire des positions de la totalité de la direction politique croate.

  6   Il y a le gouvernement, le Parlement, le chef de l'Etat, le Conseil de la

  7   sécurité nationale, et cetera.

  8   Mme PINTER : [interprétation] Je tiens à indiquer pour les Juges de la

  9   Chambre que cette partie-là a été traduite, parce qu'ici il n'a été

 10   question que de l'article numéro 1 de l'ordre du jour.

 11   Q.  Il s'agit d'un accord complémentaire entre la République de Croatie et

 12   la République de Bosnie-Herzégovine. Cette partie a été traduite. Il s'agit

 13   du point 1 de l'ordre du jour.

 14   Mon Général, vous avez été présent à cette réunion, on voit le texte de

 15   votre intervention. Peut-être pourrions-nous expliquer à l'intention des

 16   Juges de la Chambre la teneur de vos propos et les raisons de ces propos,

 17   les circonstances dans lesquelles ça a été tenu. Pour vous faciliter les

 18   choses, c'est le 01862856. 01862856, et version anglaise, 17 sur 71, et ça

 19   va jusqu'à la page 19.

 20   R.  Je prends la parole pour la première fois ici et je dis ce que tout un

 21   chacun sait, à savoir dans toutes les informations à notre disposition

 22   concernant les centres d'accueil de réfugiés et au niveau de toutes les

 23   bases logistiques en République de Croatie, parce qu'on parle de la liberté

 24   de mouvement, de l'achat d'armes au marché noir, enfin c'est inadéquat

 25   comme comportement à l'intérieur d'un autre Etat qu'ils considèrent comme

 26   étant une base où ils peuvent faire tout ce que bon leur semble. Et là

 27   j'indique que ces QG ils nient tout entretien quel qu'il soit qui porterait

 28   sur l'Herceg-Bosna, à Baskavoda, et Brela. Ils parlent de ces réunions

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  1   auxquelles le peuple croate était présent, soit ils étaient en minorité ou

  2   légèrement en majorité, et il faudrait donc autoriser tout un chacun

  3   d'accéder au territoire de la République de Croatie afin qu'ils puissent

  4   continuer vers l'étranger.

  5   Moi, j'ai dit que ce problème devait être internationalisé aux

  6   maximum, parce que pendant que nous étions, nous, en train de le résoudre,

  7   personne ne nous a demandé si on avait suffisamment d'argent, si on avait

  8   le carburant pour les transports, si on avait les véhicules pour

  9   transporter les blessés, mais tous venaient, voyaient une petite chose, une

 10   bricole, et n'est pas allé se pencher sur le gros des problèmes auxquels

 11   devait faire face la Croatie tant sur le plan matériel et militaire. Je dis

 12   que cette population qui a constitué une espèce d'occupation ethnique une

 13   fois que les Serbes ont expulsé les Musulmans, et j'ai indiqué que si l'on

 14   ne résolvait pas la chose de façon politique, cela ferait en sorte qu'il

 15   n'y aurait plus de Croates sur ces territoires ou que ceux-ci se verraient

 16   dépossédés de leurs droits politiques. Et j'ai indiqué que ce sont des

 17   problèmes qui se présentent tels quels.

 18   J'indique qu'il est question déjà d'une transversale verte en

 19   direction de la mer, en 1992, c'était déjà clair et apparent. Konjic,

 20   Jablanica, Mostar, c'étaient les choses qui avaient été évoquées de façon

 21   tout à fait publique. Ils s'attendaient à ce qu'on se bagarre avec les

 22   Serbes pour qu'on se fasse exterminer puis ensuite militairement ils

 23   feraient le nécessaire. M. Izetbegovic a vu de façon claire que la

 24   communauté internationale, après le plan Cutileiro, avait reconnu la

 25   situation sur le terrain. Si ça marchait, personne ne viendrait mettre son

 26   nez dans les principes du droit des peuples à la constitutivité et à la

 27   souveraineté, et cetera.

 28   Voilà, c'est à peu près sur ces points-là qu'il y a eu un discours

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  1   qui disait que Bobetko et Praljak devaient éviter Koljevic et faire partie

  2   de ce comité.

  3   Q.  Merci, Général. Tout le reste est déjà versé au dossier et il n'est

  4   point nécessaire d'en reparler. Je vous renvoie à un document, le P 0 --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Praljak, je reviens au tout début du document.

  6   C'est une réunion à laquelle vous participez. Vous êtes un des rares

  7   survivants présents encore puisque plusieurs participants sont décédés.

  8   Vous êtes un témoin de cette réunion qui a eu lieu le 26 septembre 1992.

  9   Quelque chose qui a attiré mon attention, c'est l'intervention du président

 10   Tudjman, dès le départ, qui dit qu'aux Nations Unies, le président de la

 11   République de Bosnie-Herzégovine lui a parlé de la nécessité de coordonner

 12   leurs actions, et qu'il y a un problème avec le HVO, et il dit que le

 13   premier des problèmes, c'est la relation qu'ils ont avec la population

 14   croate. C'est pour ça que ma question est longue, parce que je suis obligé

 15   de recaler ma question par rapport à l'acte d'accusation.

 16   Quand je lis ça, je me dis, mais dans l'acte d'accusation, on dit que c'est

 17   Tudjman avec d'autres qui ont créé l'entreprise criminelle dans laquelle le

 18   HVO a joué un rôle. Dans ce document, on voit que Tudjman s'écarte du HVO

 19   parce qu'il reconnaît qu'il y a un problème avec le HVO. Vous qui étiez

 20   présent à cette réunion, qu'est-ce que vous me dites sur les propos de M.

 21   Tudjman par rapport au

 22   HVO ? Etait-ce un propos critique ou non ? Comment avez-vous perçu cela ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, Tudjman n'a pas

 24   créé le HVO. Le HVO a été la création spontanée et organisée d'une

 25   population qui voulait résister à l'armée de la Republika Srpska et à la

 26   JNA. Tudjman parle ici des relations entre deux Etats, la Croatie et la

 27   Bosnie-Herzégovine, et il dit

 28   M. Izetbegovic, vous n'avez d'abord pas signé l'accord militaire que je

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  1   vous proposais entre deux Etats, mais vous voulez juste quelque chose de

  2   limitrophe pour ne pas offenser les Serbes.

  3   Deuxièmement, on vous fournit des armes, la Croatie fournit des armes, en

  4   dépit de l'embargo, et ça génère des problèmes graves. Mais, M.

  5   Izetbegovic, le problème c'est l'organisation interne au sein de la Bosnie-

  6   Herzégovine. Vous avez le HVO et une population croate. Présentez-leur une

  7   plateforme politique au niveau de la Bosnie-Herzégovine. Arrêtez les choses

  8   avec le HVO. Le HVO fait partie des forces armées de la Bosnie-Herzégovine

  9   et cela constitue la volonté d'un peuple, et ça s'est défendu. Alors que M.

 10   Izetbegovic racontait des histoires au sujet de la JNA, qui était le

 11   prétendu gardien de la Bosnie-Herzégovine, nous avons défendu nous-mêmes

 12   les Musulmans ainsi que la Bosnie-Herzégovine.

 13   Lui dit qu'il n'avait rien avec. Mettez-vous d'accord, au nom du ciel, au

 14   sujet de cette organisation interne.

 15   Excusez-moi de parler vite.

 16   Présentez une plateforme politique que jamais M. Izetbegovic n'a présentée.

 17   Dans tous les milieux, il était question d'un Etat civil. Comme les

 18   Musulmans avaient la majorité, avec 50 %, ils disaient, on vous accordera

 19   des droits.

 20   Monsieur le Juge, je ne veux pas que quelqu'un en Bosnie-Herzégovine

 21   m'accorde des droits. J'ai des droits en l'application de la constitution

 22   et personne ne saurait me les donner et personne ne saurait m'en

 23   déposséder, à moins de recourir à la force, bien sûr. C'est ma réponse.

 24   Franjo Tudjman a à voir avec le HVO autant qu'avec l'ABiH.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord. Merci.

 26   Mme PINTER : [interprétation] 

 27   Q.  Mon Général, je vous prie de vous référer maintenant au document P

 28   03821. Il s'agit du 30 juillet 1993. Il est question d'un rapport présenté

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  1   par Goran Vucica à l'intention de la Brigade Petar Kresimir IV, et le tout

  2   se rapporte à Uskoplje, Gornji Vakuf et Prozor. Vous avez connaissance du

  3   document et je vous demanderais de nous dire ce qu'il y a d'important dans

  4   ce document, ce qu'il faut que nous sachions, mis à part le déploiement des

  5   forces de l'ABiH. Que doit-on savoir et quel est l'élément sur lequel vous

  6   indiquerez ?

  7   R.  Deux ou trois choses seulement. D'abord, le rapport de M. Vucica est

  8   faux. Il ment.

  9   Deuxièmement, il se trouve à la tête d'une petite unité, d'une petite unité

 10   professionnelle du HVO.

 11   Troisièmement, il refuse d'exécuter des ordres. Pour ce qui est des raisons

 12   de non-exécution des ordres, il avance des bêtises, il dit qu'il avait

 13   obtenu de ma part certaines informations, et à Rama, au poste de

 14   commandement avancé qui était le mien, on lui a expliqué autre chose, alors

 15   je crois qu'un menteur seulement peut dire des choses pareilles.

 16   Troisièmement, son rapport -- enfin, je précise qu'il a refusé d'exécuter

 17   des ordres. Il a pris ses hommes et il est rentré à la maison, puis le

 18   commandant de la brigade reçoit un rapport de sa part où il est dit, voilà,

 19   tout simplement on en a décidé ainsi et mes gars ont été d'accord pour dire

 20   que j'avais raison.

 21   Alors, Messieurs les Juges, c'est ce que je vous disais au sujet de

 22   la double filière. Qui est-ce qui donne des ordres à cet homme ? Je ne le

 23   sais pas, mais je ne pouvais pas lui donner d'ordres, moi. Il a ramassé ses

 24   affaires et s'en est allé. Compte tenu du fait que c'était la guerre, je

 25   n'avais pas le temps, j'ai mis un mois pour le révoquer de ses fonctions

 26   parce que tout ce mois-là il y avait des tirs de toutes parts, donc

 27   s'agissant d'un problème de cette nature, on n'a pas le temps de rédiger un

 28   ordre et demander à ce qu'il soit révoqué de ses fonctions suivant la

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  1   procédure habituelle, ça risquait de durer. J'ai réussi à la fin, mais ça

  2   vous donne une preuve de l'existence d'une deuxième filière de

  3   subordination ou de circulation d'ordres. Il n'y en avait pas qu'un seul.

  4   C'est l'un des exemples les plus clairs.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, ce document que je découvre, comme tout le

  6   monde, semble établir que dans cette brigade, certains des officiers

  7   contestaient votre leadership. C'est évident puisque là il dit qu'ils

  8   étaient plusieurs à être d'accord avec lui et vous nous avez dit qu'il

  9   était reparti chez lui. Ça peut montrer les difficultés que vous aviez à

 10   exercer votre commandement.

 11   Mais dans une situation comme celle-là, et je suis très prudent dans

 12   ma question, il vous était impossible de l'appréhender et de le faire juger

 13   immédiatement devant un tribunal militaire pour insubordination, c'était

 14   pour vous totalement impossible ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était absolument impossible, Monsieur

 16   le Président. Absolument impossible vu les circonstances, totalement

 17   impossible.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 19   Mme PINTER : [interprétation]

 20   Q.  Mais Goran Vucica a été démis de ses fonctions. Nous avons vu un

 21   document à l'appui.

 22   R.  Oui, mais ça a pris un mois.

 23   Q.  D'accord. Prenez maintenant le P 03971. C'est un rapport établi par

 24   Luka Markesic adressé à la présidence du HVO, le 5 août 1993, et également

 25   au commandement de la Brigade de Rama. A ce moment-là vous êtes en Herceg-

 26   Bosna car vous êtes commandant du HVO. Qu'avez-vous à nous dire au sujet de

 27   ce document ? Est-ce que vous savez quel est le niveau supérieur qui a

 28   ordonné que l'on interpelle des Musulmans ?

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  1   R.  Non, je n'en sais rien. C'est la première fois que je vois ce document.

  2   Ce document est adressé à la présidence du HVO et au commandement de la

  3   brigade. Pourquoi est-ce que cela est adressé à la présidence du HVO ?

  4   Peut-être la présidence du HVO à Rama. C'est ce que je suppose, mais je ne

  5   saurais rien dire de plus de ce document, je ne sais pas de quelle instance

  6   supérieure il s'agit.

  7   Q.  Ce n'était pas vous-même ?

  8   R.  Non, ce n'était pas moi.

  9   Q.  Je vous remercie. A présent, le document P 06203. Examinez ce document,

 10   s'il vous plaît. Il porte la date du 28 octobre 1993. Le colonel Zeljko

 11   Siljeg s'adresse à l'adjoint du chef du département à la Défense, sous

 12   direction de la santé. Est-ce que vous connaissez ce document ? Pourriez-

 13   vous nous formuler quelque commentaire à son sujet ?

 14   R.  Je ne connais pas la teneur de ce document, cependant je sais que ce

 15   document a été généré, puisque j'étais en contact avec Siljeg et je n'ai

 16   pas de commentaire à apporter. Siljeg s'exprime de manière tout à fait

 17   claire et il précise que l'ordre du 28 sur les personnes se trouvant dans

 18   les centres de détention, et cetera, que lorsqu'il s'agit de la zone

 19   opérationnelle qu'il commande, cela n'a rien à voir avec. Il ne fait pas

 20   partie de la structure de commandement, du secteur chargé de la santé, et

 21   en tant que commandant à la zone opérationnelle, il n'a pas ces

 22   institutions ni ces individus tels que nommés. Il dit que c'est uniquement

 23   au commandant de la région militaire qu'ils sont tenus de rendre compte et

 24   qu'il n'est pas le destinataire voulu.

 25   Q.  Le colonel Siljeg parle également de compétences s'agissant de ces

 26   centres de détention. Il évoque la question de compétence.

 27   R.  Oui. Il dit tout à fait clairement que ceci ne relève pas de la

 28   compétence de la zone opérationnelle ni du HVO en tant que composante

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  1   militaire.

  2   Q.  Je vous remercie. Prenez le document P 06937, à présent. Ce document

  3   porte la date du 8 novembre 1993. C'est un ordre signé par Zlatan Mijo

  4   Jelic, et nous trouvons également votre signature avec un cachet au-

  5   dessous.

  6   Mme PINTER : [interprétation] A l'intention de la Chambre, je précise que

  7   la Défense du général Praljak a présenté une requête au sujet de ce

  8   document, et on nous a répondu qu'il fallait le présenter pendant notre

  9   présentation des moyens de la Défense.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'aimerais poser une question sur le

 11   document précédent qui faisait référence à un ordre qui était lui aussi du

 12   28 octobre, mais apparemment pas bien rédigé.

 13   Monsieur Praljak, savez-vous de quel ordre Siljeg parle ici ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est cette sous-direction chargée de la santé

 15   qui s'adresse à lui, et de toute évidence, ils lui posent des questions sur

 16   ces centres de détention. Ils lui posent des questions, et Siljeg répond,

 17   d'une part, nous n'avons pas ce type de centre, d'autre part, nous ne

 18   sommes pas au courant de leur existence. Vous ne pouvez pas non plus vous

 19   adresser à nous avec ce type de question car juridiquement vous ne pouvez

 20   pas nous donner d'ordres, puisque nous ne faisons pas partie de votre

 21   structure de commandement. Pour ce qui est de la teneur, nous n'avons rien

 22   à vous dire à ce sujet, car les institutions de ce type-là ne relèvent pas

 23   de la compétence du commandant de la zone opérationnelle ou du Grand état-

 24   major, tout simplement.

 25   Mme PINTER : [interprétation]

 26   Q.  Mais c'est vous qui ajoutez "ni du Grand état-major".

 27   R.  Oui, c'est moi qui ajoute, puisque si vous avez quelque chose qui

 28   relève de la compétence de la zone opérationnelle, cela relève également du

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  1   Grand état-major, j'aurais été au courant.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que nous avons cet ordre du

  3   département médical ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

  6   Mme PINTER : [interprétation] La Défense n'a pas pu se procurer cela

  7   puisque le numéro d'enregistrement ne figure pas -- rien qui permettrait de

  8   retrouver ce document dans les archives ou dans le système électronique. Le

  9   seul élément que nous ayons c'est la date du 28 octobre.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Maître Pinter.

 11   Mme PINTER : [interprétation] Je vous en prie.

 12   Q.  Général, reprenons le document P 06937, s'il vous plaît. C'est une

 13   pièce à conviction déjà versée au dossier, nous avons présenté des requêtes

 14   au sujet de ce document, mais je vous en prie, je vous laisse la parole.

 15   R.  Le 7 novembre 1993, j'ai eu une réunion à Tomislavgrad. C'est là que

 16   j'ai passé la nuit. Dans la matinée du 8, je me suis trouvé dans ce secteur

 17   en attendant M. Roso. J'ai passé avec lui l'après-midi et la soirée ce

 18   jour-là car il devait y avoir une passation de fonctions. Il devait entrer

 19   en fonction dans le secteur de Livno et de Tomislavgrad.

 20   Au QG du Grand état-major, je suis arrivé après 10 heures 30 et j'ai

 21   fini deux documents. Un portant sur l'accélération de la procédure pour ce

 22   qui est des enquêtes menées au sujet de Stupni Do, c'est M. Petkovic qui

 23   l'avait préparé, mais j'ai demandé que les délais soient rapprochés,

 24   puisqu'à ce moment-là M. Petkovic est à Split, il rend visite à sa famille

 25   et prend quelques jours de repos. Le deuxième document, c'est

 26   l'autorisation donnée à la FORPRONU portant sur les blessés de Mostar est.

 27   Nous avons un faux ici. Pour quelle raison on a créé ce faux et un

 28   autre faux, je ne sais pas. Peut-être pour m'amener devant ce Tribunal.

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  1   Par ailleurs, ce jour-là, je n'étais pas -- c'est-à-dire que c'est

  2   uniquement après 10 heures 30 que je suis arrivé au Grand état-major au QG

  3   dans la journée du 8. Que je ne signe que par "Général Slobodan Praljak"

  4   après "Zlatan Mijojelic", ce n'est pas possible. Ceci n'a rien à voir avec

  5   moi, Messieurs les Juges. Ce faux a été préparé dans les cuisines qui

  6   entourent ce Tribunal. Vous savez qu'il y a eu des cas divers. Je refuse

  7   tout lien avec ce document.

  8   Q.  La 2e Brigade du HVO, où était-elle déployée ?

  9   R.  Dans le secteur de Mostar, je pense.

 10   Q.  Très bien.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous avez effectivement adressé la

 12   liste des documents argués de faux, et je vous poserai des questions quand

 13   je commencerai dans 15 jours mes questions, et j'ai l'intention de revenir

 14   longuement sur ce document ainsi que les autres. Donc c'est pour cela que

 15   je ne vous pose pas de questions à ce stade, mais vous vous en doutez, j'ai

 16   toute une batterie de questions à partir de ce document.

 17   Mme PINTER : [interprétation] Merci.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je répondrai à toutes les questions que vous

 19   me poserez, Monsieur le Président. Mais il est intéressant de noter que ces

 20   coups de feu sur le vieux pont de Mostar le 8, et tout cela et ce type de

 21   documents voient le jour le dernier jour de mon séjour dans ce secteur.

 22   Mais bon, je n'ai pas de preuve, je sais qu'il y a des conspirations, ça

 23   existe, et j'affirme que ceci ne m'appartient pas.

 24   Je n'ai jamais signé un tel document et que je signe ainsi après

 25   quelqu'un même sans mention à "donner son aval", ou en plus, non, je ne

 26   sais pas. Normalement, dans les documents on lit généralement quelque chose

 27   qui a été dactylographié, "le général Slobodan Praljak", ici, c'est

 28   manuscrit sous la fonction, "commandant du Grand état-major", donc ça a été

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  1   ajouté par la suite, mais c'est limpide, c'est clair.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vaut mieux garder ça pour plus tard, parce que

  3   pour le moment le temps vous est décompté. Donc tout ce que vous dites vous

  4   est imputé. Il vaut mieux que vous réserviez ça quand je vous poserai des

  5   questions.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, très bien.

  7   Mme PINTER : [interprétation] Le Général vient de m'indiquer que nous en

  8   avons terminé avec ce classeur.

  9   Q.  Puisque nous avons mentionné Mostar, parlons tout de suite du vieux

 10   pont de Mostar. Mais nous pouvons aussi parler des tireurs embusqués.

 11   R.  Non, on peut parler du vieux pont.

 12   Mme PINTER : [interprétation] Nous avons préparé à l'attention de la

 13   Chambre des documents que nous avons remis au greffe. Il s'agit de

 14   documents qui portent sur le vieux pont. Dans le livre "Comment a été

 15   détruit le vieux pont", nous avons une lettre que nous avons préparée à

 16   l'attention de la Chambre, 3D 01469, et j'aimerais que M. le Greffier

 17   remette ces documents à la Chambre. J'ai remis cela, c'est la lettre elle-

 18   même, mais nous avons également le livre "Comment a été détruit le vieux

 19   pont", 3D 00374. Merci.

 20   Q.  Général, vous avez à la fois le livre et la lettre. Avant d'aborder la

 21   lettre, nous avons déjà entendu parler du vieux pont à de nombreuses

 22   reprises. Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter à ce sujet ?

 23   R.  Oui. J'affirme sous serment, comme aime parfois le dire M. le Juge, M.

 24   le Président Antonetti, j'affirme que j'ai protégé le vieux pont en 1992.

 25   Pendant que j'étais commandant du Grand état-major, je l'ai protégé pour

 26   qu'on ne tire pas sur ce pont, qu'il n'y ait pas éventuellement de tirs,

 27   même si c'était une cible, nous le savions tous. J'affirme que j'ai appris

 28   à Zagreb ou juste au port de Zagreb en écoutant la radio dans la voiture,

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  1   après avoir remis mes fonctions dans la matinée du 9, c'est là que j'ai

  2   appris que le vieux pont avait été détruit. Sur le char qui tirait

  3   éventuellement sur le vieux pont, je n'avais aucune idée puisque le 8 je

  4   n'étais pas là, et puis je n'ai lu aucun rapport dans la soirée, la veille,

  5   puisque j'en avais terminé de mon travail.

  6   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'ai été victime d'une

  7   avalanche de commentaires de l'opinion nationale et internationale disant

  8   que c'est Slobodan Praljak qui a détruit le vieux pont. Touts mes

  9   tentatives normales d'homme ordinaire disant que je n'avais rien à voir

 10   avec cela, tout cela est tombé à l'eau.

 11   Tout simplement, il y a eu une avalanche de mensonges qui n'a pas arrêté

 12   d'avancer sur moi, jusqu'à ce que j'entende que même le président de la

 13   république, M. Franjo Tudjman, a fini par prêter foi à cela. Donc je

 14   m'adresse à lui, je ne lui dis pas Monsieur le président de la république

 15   avec tous mes respects, et cetera, mais je lui dis dans le détail que je

 16   n'ai rien à voir avec cela. Je lui demande d'accepter de me voir, mais lui

 17   de toute évidence, face à cette avalanche de mensonges, il semble y prêter

 18   foi. Vous avez des individus qui s'occupaient du service secret, pour les

 19   appeler ainsi, et je leur demande de lui rendre compte et qu'il y ait

 20   continuation d'une enquête qui avait été amorcée sur la destruction du

 21   vieux pont. Donc c'est une condamnation, c'est un jugement hors la loi sans

 22   qu'il n'y ait aucune enquête sauf des pamphlets.

 23   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, comme cela ne s'arrête

 24   pas, de mon propre chef je lance une enquête parce que je ne souhaite pas

 25   qu'il y ait un lien d'établi entre moi et cet événement ni entre le HVO et

 26   cet événement, donc j'ai réuni des documents vidéo qui étaient publiquement

 27   disponibles, et j'affirme qu'il y a eu des jeux en sous-main, et j'affirme

 28   que ni Praljak ni le HVO ne sont l'auteur de cela.

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  1   J'ai pris trois experts dans le domaine des engins explosifs en

  2   Croatie et puis quelques professeurs allemands, et je leur ai demandé

  3   d'examiner le cas et de nous dire exactement comment a été détruit le vieux

  4   pont. Et vous avez aussi la femme témoin qui est venue déposer ici, qui a

  5   dit qu'elle se trouvait près du vieux pont, qu'elle était présente à une

  6   réunion au moment où il a été détruit. Elle a dit qu'elle a entendu une

  7   détonation très importante et elle a même souligné cela, une explosion très

  8   importante, donc ce n'est de toute évidence pas un projectile de canon,

  9   c'est un canon de char, donc c'est un explosif qui a été placé dans la

 10   structure du pont et c'est ce qui a été confirmé par les experts. Donc je

 11   refuse, je rejette toute accusation pour la destruction du vieux pont au

 12   moyen d'un tir de char également. Ce sont des cuisines, des mensonges.

 13   Mme PINTER : [interprétation] A l'attention de la Chambre et de

 14   l'Accusation, je précise qu'il s'agit d'un témoin BD (expurgé)

 15   (expurgé)

 16   (expurgé)

 17   (expurgé).

 18   R.  Oui, et l'Ecossait ou l'Anglais, le militaire qui a filmé cette

 19   destruction qui après est allé à Sarajevo, qui a fait diffusé cela, je

 20   pense que MM. les Juges pourraient s'adresser au gouvernement anglais pour

 21   qu'il précise qui est cet homme, comment a-t-il pu embarquer dans cet

 22   avion, comment a-t-il pu se rendre là-bas, et quel est le rôle qu'il a joué

 23   dans tout cela, et avec qui. Et d'ailleurs pourquoi jamais personne n'a

 24   mené à son terme l'enquête amorcée ? Les intérêts de qui sont servis ainsi

 25   ? Mais moi, je n'y peux plus guère quelque chose. Cela dépasse mes

 26   capacités et mes pouvoirs.

 27   Q.  Général, vous parlez d'enquête. Page 39 du livre, voulez-vous bien

 28   prendre cette page. Dans le prétoire électronique, 3D 16-0040, en anglais

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  1   3D 16-0119. Il est question ici de cette demande aux fins d'enquête, et

  2   c'est ce que vous avez mentionné, vous avez dit que ça a été lancé.

  3   R.  Oui. Dès le 23 novembre 1993. Cependant, Madame Nika, de mon propre

  4   chef, moi aussi, j'ai rédigé des lettres. J'ai demandé que la communauté

  5   internationale, qui d'une certaine manière s'était chargée du contrôle de

  6   Bosnie-Herzégovine - vous aviez leurs juges, les médiateurs, les hauts

  7   représentants qui se chargent de cette enquête, qui la poursuivent. Mais

  8   personne ne s'y intéressait, ils ont trouvé un coupable du nom de Slobodan

  9   Praljak, et moi j'affirme, non, ce n'est pas Slobodan Praljak. Encore une

 10   fois, ce n'est pas Slobodan Praljak. Je ne sais pas ce qui en est de ce

 11   char qui a tiré. Mais le HVO n'a pas la responsabilité de la destruction du

 12   vieux pont. Comme d'habitude, on l'apprendra dans 40 ou 50 ans.

 13   Q.  Pendant que vous étiez commandant du HVO, est-ce que vous avez jamais

 14   ordonné que l'on tire dans ce secteur ou sur le vieux pont ?

 15   R.  Non, Madame Nika Pinter, non. Le vieux pont depuis Hum aurait pu être

 16   détruit en l'espace d'une minute à l'aide de trois projectiles, si je

 17   l'avais souhaité, pour que ce soit tout à fait clair, avec trois obus au

 18   maximum depuis la colline de Hum. J'étais commandant à partir du 24

 19   jusqu'au 8, et pendant l'attaque, pendant les offensives très importantes,

 20   au moment où il y a eu des militaires et des armes qui ont traversé le

 21   pont, on n'a pas tiré sur le vieux pont, parce que je ne permettais pas que

 22   l'on tire sur le vieux pont. Et puis, le 9, à 10 heures, ils l'ont détruit.

 23   A 7 heures 30, j'avais déjà quitté les positions et mon poste, mais qui

 24   s'en soucie.

 25   Q.  Je vais répéter ma question, mais vous n'avez pas à répéter votre

 26   réponse. Ma question n'a pas été consignée au compte rendu d'audience. Je

 27   vous avais demandé si pendant la période où le général était commandant du

 28   HVO, s'il y a eu des ordres demandant que l'on tire sur le vieux pont.

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  1   R.  Non, et j'ai expliqué pourquoi.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, pourriez-vous dire

  3   aux Juges de la Chambre de quel genre de projectile vous parlez, d'obus.

  4   Vous dites "trois", vous parlez de trois obus ayant fait mouche ou bien de

  5   trois obus tirés. Et de quel genre d'obus s'agissait-il, avec quel genre

  6   d'arme ont-ils été tirés ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Un canon de 130-milimètres qui était déployé

  8   au mont Hum, Monsieur le Juge Trechsel. Vous avez des obus qui n'ont pas

  9   une détonation immédiate. Le vieux pont est creux, et si vous rendez l'obus

 10   légèrement en retardement, vous allez toucher la voûte, vous avez l'obus

 11   qui va rentrer à l'intérieur, il va exploser à l'intérieur. Si le pont est

 12   touché ainsi, un seul obus permettra de le détruire. Mais trois, sans aucun

 13   doute, permettront de le détruire.

 14   Vous avez vu que l'on voit parfaitement bien le vieux pont depuis la

 15   colline de Hum. Lorsque nos activités offensives à la mi-septembre jusqu'à

 16   la mi-octobre, lorsqu'elles étaient à leur comble, s'ils se sont servis du

 17   vieux pont comme étant un moyen militaire principal pour avancer vers Hum

 18   et vers Mostar ouest; à ce moment-là, non seulement je n'ai pas tiré mais

 19   j'ai interdit que l'on tire sur le vieux pont. Lorsque c'était sans aucun

 20   doute, sans aucune ambiguïté une cible militaire et toute armée l'aurait

 21   détruit, y compris l'armée américaine, par exemple, si à ce moment-là j'ai

 22   interdit qu'on tire dessus, alors le 9 - le 8 je n'étais pas là - le 9, ça

 23   n'avait pas de sens. Donc ça a été organisé.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, est-ce qu'il

 25   s'agissait d'un ordre écrit qui interdisait tout tir ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non écrit. La thèse c'était que vous

 28   auriez touché ce pont avec un obus d'artillerie. Mais en termes de

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  1   balistique, combien de tirs faut-il tirer pour être sûr qu'on va

  2   effectivement toucher, atteindre une cible d'une telle taille ? Est-ce que

  3   vous avez fait ce genre de calcul ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, vu ce mont, vous

  5   avez une photographie, page -- je vais vous retrouver ça. Mais vous avez

  6   une visibilité directe, vous pouvez faire un tir tendu. Vous ne pouvez pas

  7   rater votre cible depuis cette distance vu la visibilité que vous avez, la

  8   vue que vous avez sur ce pont, vous ne pouvez pas le rater.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il faudrait peut-être un expert en

 10   artillerie qui viendrait nous dire quel serait le degré de dispersion,

 11   parce que dispersion, il y a toujours. Vous le savez aussi bien que moi.

 12   Merci.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je vais essayer de gagner du temps

 14   parce que cette question du vieux pont, on en a énormément parlé pendant

 15   des heures et des heures - je le signale pour tout le monde - dans le

 16   mémoire préalable, il n'y a même pas une phrase sur la destruction du vieux

 17   pont alors que ce pont représente quelque chose de très important pour

 18   toutes les communautés de Mostar.

 19   Je vais prendre le problème d'une manière différente, de la manière la plus

 20   juridique et scientifique.

 21   Il y avait un tank, et nous savons que dans ce tank il y avait trois

 22   soldats, Tomo Topic, Dragan Resic, Senaid Cavcic. Ces trois soldats ont été

 23   auditionnés par le SIS, ils ont fait des déclarations  - que nous n'avons

 24   pas malheureusement, que moi, je n'ai pas au moment où je vous parle - mais

 25   nous avons, et c'est dans votre livre, la note du procureur militaire. Donc

 26   moi je fais toujours confiance aux institutions judiciaires même si ce sont

 27   des institutions militaires. Le procureur militaire dans sa note du 22

 28   novembre, cite ces trois soldats et écrit, c'est noir sur blanc, qu'ils ont

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  1   agi de leur propre initiative, sans aucun ordre. Et le procureur militaire,

  2   qui s'appelle Mladen Jurisic, va faire une requête pour une enquête

  3   approfondie. Il indique également que ces trois soldats ont agi de leur

  4   propre initiative et demande leur mise en accusation.

  5   En regardant cela de près, Monsieur Praljak, et j'en viens à ma question,

  6   vous m'excuserez si mes questions sont toujours très longues, mais je suis

  7   extrêmement prudent et très technique, je découvre que ces trois soldats

  8   sont membres du Bataillon pénal qui vient de Siroki Brijeg. Dans votre

  9   souvenir, qui avait donné des ordres à ce bataillon d'être positionné avec

 10   ce tank, et qui était le responsable de ce bataillon ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, le Bataillon des

 12   condamnés n'était pas là. Ce char, il est arrivé, je ne sais d'où et je ne

 13   sais pas vous répondre à cette question. Je sais que le Bataillon des

 14   condamnés n'était pas là. Ce char, ces hommes, je ne sais pas comment, je

 15   ne --

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour vous, le Bataillon des condamnés n'était pas

 17   là, mais comment expliquer que trois soldats de ce bataillon étaient là,

 18   eux, et en plus, dans un tank ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux que faire

 20   des conjectures. Il a été question d'argent qui aurait été donné par

 21   quelqu'un, mais ce ne sont que des conjectures, je ne veux pas me lancer

 22   dans ce type de conjectures ici, car je ne sais pas. Je sais ce que

 23   j'affirme ici, à savoir --

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Quel était le nom du commandant de ce Bataillon des

 25   condamnés ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant quelques temps, ce Bataillon des

 27   condamnés, une partie s'appelait antiterroriste, une bonne partie de cette

 28   unité était dirigée par Andabak, pas celui que nous avons mentionné mais un

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  1   autre Andabak. C'était un militaire correct, et c'était une unité correcte,

  2   et c'est Tuta Naletilic qui avait à voir avec cette unité.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Je découvre le document 3D 10469 à l'instant. Si je

  4   l'avais su, j'aurais amené avec moi le transcript présidentiel. De mémoire

  5   - faites-moi confiance parce que j'ai une bonne mémoire - au courant de

  6   novembre, mais après le 9 novembre, M. Tudjman est dans une réunion avec

  7   quelques personnalités, je pense qu'il y a Susak présent, et le président

  8   Tudjman demande des renseignements sur cette histoire du vieux pont.

  9   Manifestement, mais j'aurai l'occasion de vous mettre le transcript sur

 10   l'écran, le président Tudjman découvre le problème et pose la question

 11   suivante, que je cite de mémoire. Qui a ordonné la destruction du vieux

 12   pont ? Voilà la question qu'il pose aux gens qui sont autour de lui. De

 13   manière curieuse, il n'y a pas la réponse à sa question. Vous verrez dans

 14   le transcript, il y a un trou et quelqu'un dit qu'il y a un bruit de

 15   feuille.

 16   Vous voyez que j'ai une mémoire excellente puisque je vous signale

 17   cela. Dans le transcript, il y a marqué qu'il y a un bruit de feuille.

 18   Quelqu'un a dû dire qui avait ordonné, mais ce n'est pas dans le

 19   transcript. Il aurait été intéressant de savoir est-ce qu'on a

 20   volontairement enlevé le nom, pourquoi il y a le bruit de feuille qui

 21   empêche la réponse. Mais comme on n'a pas la bande audio et on ne l'aura

 22   jamais, puisqu'elles ont disparu, on ne le saura jamais.

 23   Général Praljak, quand en 1997 vous écrivez à M. Tudjman, est-ce

 24   qu'il répond à votre lettre ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, il a fait

 26   venir ces trois hommes parce qu'il a compris -- en fait, je ne sais pas ce

 27   que c'est que ce bruit de feuille, mais je vous dis que l'on m'a déclaré

 28   moi, le destructeur. C'était un secret de polichinelle. Dans tous les

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  1   journaux on disait, c'est Praljak qui a détruit le vieux pont. Mais moi,

  2   j'éprouvais du ressentiment, de l'amertume, de la rage, je ne sais pas trop

  3   quoi, comment vous dire.

  4   Il a fait venir ces trois hommes qui se sont plaints à moi plus tard en

  5   disant qu'il y a eu beaucoup de colère et de cris. Personne n'a terminé

  6   l'enquête. Il n'y a que des rumeurs, des histoires. Tous les journalistes

  7   ont leur propre interprétation, tout un chacun, c'est --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous saviez que vous alliez témoigner et vous nous

  9   l'avez annoncé il y a très longtemps. Depuis que vous nous l'avez annoncé,

 10   il y a plusieurs années qui se sont passées. Comment se fait-il qu'avec les

 11   moyens dont vous disposez, même s'ils sont limités, mais vous avez quelques

 12   moyens, vous n'avez pas été rechercher les trois soldats ? Pourquoi vous ne

 13   leur avez pas demandé qui leur avait donné l'ordre d'être présents sur

 14   place, et comment se fait-il que vous n'avez pas remonté toute la chaîne ?

 15   C'était facile. En une ou deux journées vous pouviez faire cela. Pourquoi

 16   ça n'a pas été fait ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il y en avait deux qui

 18   étaient déjà morts depuis bien longtemps, et le troisième, je n'ai pas pu

 19   retrouver sa trace. Voilà, c'est la raison pour laquelle je vous dis, c'est

 20   une histoire qui est bien noire.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous étiez détenu avec Tuta, vous n'avez pas discuté

 22   avec lui de ce problème ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas eu beaucoup d'entretiens avec

 24   M. Naletilic, très peu, et pas là-dessus, tout simplement parce que même

 25   s'il sait des choses, il ne m'aurait rien dit. Deuxièmement, nous ne sommes

 26   pas en bons termes, et mis à part des échanges courtois de bonjours, il n'y

 27   a pas eu de conversation.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

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  1   Mme STRINGER : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président. Avant

  2   que nous ne commencions, je souhaite demander à ce que nous retournions à

  3   la page 25 du compte rendu d'audience, s'il vous plaît. C'est le numéro de

  4   page -- le Juge Trechsel a posé une question au général Praljak, si un

  5   ordre écrit avait été donné pour interdire à ce que des coups soient tirés.

  6   C'est à la ligne 7, page 25. Ensuite, le général Praljak répond, et ceci

  7   est enregistré au compte rendu d'audience, mais ceci n'est pas attribué au

  8   général Praljak. Cela fait partie encore de la question de M. le Juge

  9   Trechsel, et je pense que c'est une erreur au niveau du compte rendu, et si

 10   tel est le cas, je souhaite que ceci soit précisé ou corrigé. Merci.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je peux dire sous serment que je

 12   n'ai pas répondu cela à ma propre question.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai répondu en disant que non. Pour ce type

 14   de choses, on ne donne pas d'ordres écrits. On a des entretiens plutôt avec

 15   les hommes, on leur dit qu'il ne faut pas faire ce genre de choses et on

 16   leur explique pourquoi. C'est ainsi que l'on procède dans ce type de

 17   situation.

 18   Pourquoi vouliez-vous que je donne l'ordre que l'on ne tire pas sur

 19   le vieux pont ? Le droit de la guerre me donnait le droit de tirer sur le

 20   vieux pont et de le détruire puisque c'est une cible militaire. 64 ponts

 21   ont été détruits par les Américains en Serbie à cause du Kosovo. Je vous

 22   parle d'une vérité factuelle, le droit, c'est une autre chose. Je ne l'ai

 23   pas détruit. Je ne permettais pas qu'on le pilonne, et ça n'a rien à voir

 24   avec moi. Mais le droit de tirer sur une installation militaire dont on se

 25   sert dans le cadre d'une offensive, les Juges sont là pour en discuter et

 26   pour en décider en dernière instance.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, étant donné que

 28   nous sommes sur le sujet, pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre à

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  1   quelle occasion et à qui vous avez donné cet ordre oral, à savoir que

  2   personne ne devait tirer sur Stari Most ?

  3   Mme PINTER : [interprétation] Nous recevions du français sur le canal

  4   B/C/S.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que nous avons l'interprétation

  6   maintenant ?

  7   Normalement, ce sont des questions qui incombent aux commandants de

  8   l'artillerie. Ils voient depuis leurs positions en hauteur que l'ABiH

  9   utilise à des fins militaires ce pont, et dans ces cas-là, ils posent la

 10   question, M. le Général, pouvons-nous tirer sur ce pont ? A ce moment-là,

 11   je leur dis non, non et définitivement non. Je l'ai répété au moins quatre

 12   ou cinq fois et je leur expliquais que ce n'était pas une cible militaire à

 13   ce point importante pour que l'on détruise une installation qui avait une

 14   telle valeur culturelle et architecturale.

 15   Ensuite le 20 et le 21, il y a eu une attaque terrible qui a visé la

 16   partie ouest et des bombardements par la partie serbe. Même là, on n'a pas

 17   tiré sur le vieux pont. Tout autre soldat aurait dit, faites en sorte

 18   d'empêcher l'arrivée de nouvelles forces par ce pont. J'ai interdit cela.

 19   J'ai empêché que l'on tire sur le pont.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous vous en rappelez, le Procureur avait demandé

 21   l'admission au titre du 92 bis de deux déclarations de ressortissants

 22   d'Allemagne de l'est qui étaient des mercenaires du HVO. La Défense avait

 23   demandé le contre-interrogatoire des deux témoins et la Chambre avait rendu

 24   une décision disant que ces deux témoins pouvaient venir à la condition

 25   qu'ils soient contre-interrogés. Le Procureur, pour des raisons qui lui

 26   appartiennent à lui seul, n'a pas jugé utile de faire venir ces deux

 27   ressortissants allemands, qui étaient à l'époque toujours détenus.

 28   Mais je me souviens que l'un des deux, je ne sais pas lequel des

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  1   deux, avait indiqué qu'à un moment donné il avait été envisagé au niveau du

  2   HVO, au niveau de l'unité dont il faisait partie, de remonter le fleuve

  3   pour déposer une charge explosive, et puis le projet avait été abandonné

  4   compte tenu de la difficulté de l'exercice. Donc un juge raisonnable, et je

  5   dis bien un juge raisonnable, pourrait en tirer la conclusion qu'il y avait

  6   eu un projet de faire sauter ce pont.

  7   A votre connaissance, ces mercenaires allemands, avaient-ils eu des ordres

  8   pour miner les ponts ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge

 10   Antonetti, je n'ai pas la moindre idée de quoi ils parlent, quel peut-être

 11   cet ordre qui leur a été donné de miner le pont. Il y avait 1 800 mètres

 12   qui séparaient les 100 hommes du HVO le long de la Neretva du pont, et de

 13   l'autre côté, nous avions l'ABiH. Seul des imbéciles peuvent faire de telle

 14   déclaration. Il faut disposer de forces spéciales et d'élites françaises ou

 15   américaines qui vont pouvoir se déplacer à contre-courant de la Neretva,

 16   courant très rapide, jusqu'au pont pour ensuite placer des charges

 17   explosives et faire sauter le pont. Il y avait de vieux loups de guerre à

 18   qui ce genre d'idée a peut-être traversée l'esprit, mais pour ce qui est du

 19   Grand état-major et de moi-même, nous n'avons pas laissé tirer sur le pont,

 20   nous n'avons pas laissé faire de pilonnages jusqu'au 9 au matin, lorsque

 21   quelqu'un a posé une caméra et a allumé ces mèches après avoir au préalable

 22   posé des explosifs sur la rive gauche de la Neretva. Je n'ai rien à voir

 23   avec cela.

 24   Que six milliards de personnes et tous les juges du monde viennent

 25   s'asseoir en face de moi, je continuerais à affirmer que je n'ai rien à

 26   voir avec ce tir de char visant le vieux pont. J'affirme que le HVO non

 27   plus n'a rien à voir avec cela. Les gens qui ont inventé cette histoire

 28   l'on fait à des fins de sabotage, dans le cadre d'un jeu purement

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  1   politique, et encore une fois pour porter préjudice aux relations entre les

  2   Croates et les Musulmans, et me porter préjudice à moi-même personnellement

  3   ainsi qu'au HVO pour des raisons politiques. Mais là je spécule --

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Si on suit votre théorie du fait que le pont aurait

  5   été détruit par une explosion sous-marine, telle que vous l'avez

  6   reconstituée avec vos propres experts avec ce fameux mur d'eau qui est

  7   perpendiculaire au pont - d'ailleurs nous attendons toujours les

  8   conclusions dudit expert - comment les Musulmans auraient pu eux miner ce

  9   pont ? Ils auraient été obligés de descendre dans l'eau. Comment vous

 10   expliquez cela en termes techniques ? Et ce de nuit, parce que de jour tout

 11   le monde les aurait vus. Comment vous expliquez ça, techniquement ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge

 13   Antonetti, tout d'abord, je ne souhaite pas parler des Musulmans en tant

 14   que groupe. Qui a participé à cette opération à ce complot, je l'ignore.

 15   Mais premièrement, ils n'ont pas placé de charges explosives sous l'eau,

 16   mais dans un creux du pont dans la partie qui étayait ce dernier, il

 17   existait des parties creuses là-bas où on pouvait placer ces charges.

 18   Deuxièmement, ils ont utilisé un câble qui permet d'activer, de faire

 19   détoner l'explosif, et ce câble ils l'ont laissé courir le long de la

 20   Neretva peut-être sur une longueur d'environ 150 mètres pour le connecter à

 21   un détonateur électrique, un courant d'induction qui a ensuite sans doute

 22   fait détoner les charges. Tout cela on peut le faire en plein jour, car les

 23   rives de la Neretva sont très abruptes et l'on ne peut rien voir. On ne

 24   voit rien sauf par pur hasard, ça n'avait donc pas besoin de se produire

 25   pendant la nuit.

 26   Une fois que tout cela avait été préparé, un soldat anglais posait sa

 27   caméra et filmait cela. Il a été escorté, selon leurs propres dires par

 28   écrit d'ailleurs, par les forces de l'ABiH, escorté jusqu'à Sarajevo où il

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  1   était censé remettre cet enregistrement vidéo à la télévision de Sarajevo,

  2   et ensuite il s'est assis sans rencontrer la même difficulté dans un avion

  3   de la FORPRONU, a remis ce même document à la BBC.

  4   Je laisse à chacun le soin de tirer ses propres conclusions, à ceci près de

  5   dire que le HVO et Slobodan Praljak n'ont absolument rien à voir avec cela,

  6   vous tirerez vous-même vos propres conclusions.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Sans tirer à ce stade quelque conclusion que ce

  8   soit, vous indiquez néanmoins que tout ça était organisé, que le caméraman

  9   avait été amené là. Il a filmé tout cela après quoi il a été escorté. On

 10   l'a mis dans un avion de la FORPRONU et il a remis la bande à la télévision

 11   de Sarajevo. Il y a toute une opération d'intoxication et de manipulation,

 12   si je comprends bien ce que vous dites ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'affirme qu'il

 14   s'agit d'une manipulation de grande envergure. En fait, il n'a jamais remis

 15   cela à la télévision de Sarajevo. Tout ce que nous avons eu l'occasion de

 16   voir, il s'agit d'enregistrement qui émane de la BBC. Aussi bien

 17   l'enregistrement de la télévision autrichienne de L'ORF que de la

 18   télévision de Sarajevo, ces courts extraits qu'il a enlevés du document, je

 19   ne sais pas pour quelle raison il a procédé à cette opération, il a retiré

 20   ces courts extraits. Ce n'est pas en raison de ces interventions s'il y

 21   avait eu une ou deux explosions ou seulement une seule. Personne ne dispose

 22   plus de ces originaux. Cela a simplement été repris. Il n'a jamais remis

 23   directement à la télévision de Sarajevo. Cette émission a eu lieu le soir

 24   même, le 9 novembre; non pas en provenance de Sarajevo, mais par la BBC.

 25   Mme PINTER : [interprétation] Au compte rendu d'audience, ligne 6, de la

 26   page 35, c'est la "BBC" et non pas "B/C/S". Page 35, ligne 6, mais

 27   également page 34, ligne 25. Ce n'est pas "B/C/S" qu'il faut lire mais

 28   "BBC".

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, le fameux Scott, ce n'est pas le

  2   Scott qu'on a l'habitude de voir ici. Ce n'est pas M. Scott, c'est le Scott

  3   que vous écrivez. Comment saviez-vous qu'il s'appelait Scott ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, dans cet ouvrage

  5   que j'ai publié, je me suis adressé à un journaliste allemand qui enquêtait

  6   sur cette question et j'ai essayé d'entrer en contact avec lui et essayé

  7   d'apprendre quelque chose à ce sujet. Ce monsieur qui a réalisé un film

  8   consacré à la destruction du vieux pont, film qui a été diffusé à plusieurs

  9   reprises en Allemagne, en Autriche, aux Pays-Bas, et ainsi de suite, n'a

 10   pas réussi à prendre quoi que ce soit de cet homme. Je connais son nom. Il

 11   s'appelait "Schotte", donc l'Écossais. Non pas Scott, mais il portait ce

 12   surnom de l'Ecossais. Un soldat anglais mais qui était appelé l'Ecossais.

 13   Cela est écrit de façon tout à fait explicite par des journaux

 14   musulmans. C'est une page particulière du livre, je vais vous la montrer.

 15   Je vais vous montrer exactement où cela est cité. Un instant, s'il vous

 16   plaît. Voilà, c'est le journal "Oslobodjenje" en 1997, jeudi 19 juin, la

 17   page en croate est la page 34. On y voit qu'il y est question de cela. Il

 18   est dit la chose suivante : La caméra a été pointée sur le pont par un

 19   Ecossais qui se trouvait dans cette ville en tant que membre des forces

 20   armées britanniques. Messieurs les Juges, il n'y avait pas de Britanniques

 21   là-bas. Je ne comprends pas ce qu'un membre des forces armées britanniques

 22   faisait à Mostar alors qu'il y avait été déployé des Espagnols. Il est dit

 23   que cet homme, conformément à un ordre de Darkovic - or il s'agissait de

 24   l'adjoint du commandant du 4e Corps d'armée - s'est mis en route pour se

 25   rendre à Sarajevo escorté par des membres de la sécurité militaire du 4e

 26   Corps d'armée. Il est écrit explicitement. Mais au lieu de remettre le

 27   précieux document comme cela a été convenu au directeur de la

 28   radiotélévision de Bosnie-Herzégovine de l'époque, il est monté à bord du

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  1   premier avion de la FORPRONU et a quitté la Bosnie.

  2   Ce sont les Musulmans et non pas Praljak qui écrivent cela.

  3   Ce sont leurs déclarations, elles sont tout à fait significatives. Elles

  4   interviennent un certain temps après les événements. Je ne peux rien y

  5   ajouter. Alors quel a été son rôle sur place, je pourrais vous donner le

  6   nom éventuellement, mais il n'y a rien à ajouter.

  7   Mme PINTER : [interprétation] La page anglaise est au numéro e-court 3D16-

  8   0112 et suivantes.

  9   Mais avant de poursuivre, je voudrais remercier mon confrère, M. Stringer,

 10   en raison de la correction portée au compte rendu d'audience à laquelle que

 11   je souhaitais également procéder, en ligne 25.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, avant cela, il me semble

 13   que le 5 novembre, nous avions eu une réunion du HVO, donc Jadranko Prlic,

 14   Mate Boban, moi-même, le général Petkovic, le Dr Franjo Tudjman et ainsi de

 15   suite. Il y avait été question tout particulièrement, et cela faisait

 16   l'objet d'une requête du président Tudjman demandant à ce que l'on

 17   s'efforce au maximum d'apaiser la situation avec l'ABiH et que l'on essaie

 18   une fois de plus d'avancer en direction d'une solution pacifique.

 19   Alors qui a miné le pont et qui s'est opposé à cette politique et à

 20   cette conclusion générale qui était la nôtre, cela sort du cadre des

 21   éléments dont je dispose. Je peux me livrer à des spéculations, élaborer

 22   des constructions dont j'estime qu'elles sont plutôt fondées, mais je

 23   répète une nouvelle fois, cela n'a aucun rapport avec le commandement ni

 24   celui de Petkovic ni le mien ni avec aucun échelon, que ce soit d'une

 25   brigade ou d'une zone opérationnelle. Quant au reste, cela sort de ce

 26   cadre.

 27   Il faudrait revenir à l'enquête, à ceci près que deux des personnes

 28   concernées sont déjà mortes depuis longtemps, les personnes qui étaient à

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  1   bord de ce char. Quant au troisième homme, je ne sais pas s'il est encore

  2   en vie.

  3   Mme PINTER : [interprétation] Aux fins du compte rendu d'audience, je

  4   souhaite dire que M. Mladen Jurisic, donc la personne qui a pris la

  5   décision diligentant une enquête, est à présent président du tribunal de

  6   Mostar et membre du haut conseil juridique de la Bosnie-Herzégovine.

  7   Conformément aux éléments dont la Défense dispose, la décision est toujours

  8   entre les mains du procureur de Mostar. L'affaire en question fait toujours

  9   l'objet d'investigation. Puisque je ne parviens pas à retrouver le

 10   troisième accusé, et on ne parvient pas non plus à établir ce qu'il en est

 11   de lui, il m'est impossible de déterminer avec certitude ce qu'il en était

 12   de la cause de la destruction du vieux pont.

 13   Puisque nous sommes arrivés quasiment à la pause, je préférerais ne pas

 14   aborder maintenant la question des tireurs embusqués à Mostar. Il faudrait

 15   un peu plus de temps.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous faisons une pause de 20 minutes.

 17   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

 18   --- L'audience est reprise à 16 heures 09.  

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 20   La Chambre va rendre une décision à huis clos. Monsieur le Greffier,

 21   nous passons à huis clos.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

 23   le Président.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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 22   [Audience publique]

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Pinter, vous avez la parole.

 24   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  Général, nous avons annoncé que le sujet suivant de votre déposition

 26   serait celui des tireurs embusqués à Mostar et des différents cas qui se

 27   sont présentés. Vous souhaitez ajouter quelque chose à tout ce que nous

 28   avons déjà vu à présent, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Lorsque cet expert en matière de tireur embusqué a été présent ici,

  2   j'ai passé en revue et analysé chacun des cas qui ont été présentés et je

  3   souhaiterais simplement revenir sur certains des cas que nous avons eus ici

  4   aussi brièvement que possible.

  5   L'incident numéro 1, j'ai répondu à cela et je me réfère à la pièce 3D

  6   00771. Pour des raisons de temps, je ne peux pas en faire la démonstration.

  7   Tout cela a déjà par ailleurs été versé. Mais j'affirme que l'homme qui a

  8   été blessé à la jambe a montré dans quelle position il se trouvait, debout,

  9   et j'affirme qu'il est impossible qu'une telle blessure ait été la

 10   conséquence d'un tir auquel il aurait été procédé depuis la position de

 11   Stotina. C'est purement mathématique. Mathématiquement, c'est impossible.

 12   J'affirme ensuite que malheureusement nous n'avons pu voir aucun document

 13   de nature médicale ou médicolégale qui aurait étayé cela.

 14   Ensuite, incident numéro 2 que j'ai contesté et qui figure en la pièce 3D

 15   00756, où l'on trouve la description suivante : on aurait ouvert le feu sur

 16   un garçon de 9 ans pendant que ces personnes étaient assises à l'intérieur

 17   d'un camion-citerne qui ravitaillait en eau. L'expert s'est trompé dans le

 18   positionnement auquel il a procédé. Il s'est trompé d'une trentaine de

 19   kilomètres. Il s'est trompé dans le schéma aussi où il indique la position

 20   où se serait trouvé le camion-citerne. Il est également plus que douteux

 21   que la balle, ayant traversé la paroi de ce camion-citerne, ait pu se

 22   fragmenter, entraîner des éclats de verre ainsi qu'il est allégué.

 23   J'affirme qu'à partir de la position de Stotina, il est impossible de voir

 24   la position qui a été prise en photo. J'ai pris par ailleurs des photos

 25   avec beaucoup de précision.

 26   Incident numéro 3, qui se réfère à l'incident décrit dans le document 3D

 27   00776. Il s'agit d'une femme qui a été tuée d'une balle qui l'a touchée à

 28   la tête lorsqu'elle était sur la terrasse de sa maison à Tekija [phon]. Il

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  1   n'y avait même pas de désaccord entre l'expert, d'une part, et une autre

  2   déclaration où l'on essayait de distinguer si elle avait été blessée à

  3   l'arrière de l'oreille gauche ou de l'oreille droite. On a retrouvé son

  4   corps à terre et je ne vois vraiment pas comment on peut affirmer non

  5   seulement en dehors de tout doute raisonnable, mais même du point de vue du

  6   pur bon sens, que la balle soit venue de la position de Stotina, celle

  7   balle qui -- Alors l'enquête n'a pas été menée à son terme. En fait,

  8   n'importe qui aurait pu la tuer, y compris son propre mari.

  9   Pour ce qui est de l'incident numéro 4, dans la rue du Maréchal Tito,

 10   j'ai passé cela car il n'y a absolument aucun élément ici qui nous indique

 11   quoi que ce soit, à part si l'on imagine qu'il se soit agi peut-être d'une

 12   balle perdue.

 13   L'incident numéro 5, l'expert lui-même affirme que les victimes se

 14   trouvaient dans un appartement et par conséquent elles étaient invisibles,

 15   alors que le bâtiment se trouve juste à côté des positions militaires du

 16   camp nord, dans l'axe de cette position militaire. Il indique qu'il s'agit

 17   là probablement de balles perdues car le camp nord se trouve tout près et

 18   dans le même axe, c'est là que se trouvaient les positions de l'ABiH,

 19   positions à partir desquelles un feu était nourri constamment en direction

 20   du HVO.

 21   Pour ce qui est de l'incident numéro 6, que j'ai étudié dans le

 22   document 3D 00 --

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé, Monsieur Praljak, je

 24   dois vous rappeler, comme je l'ai déjà fait, que vous êtes ici en tant que

 25   témoin. Or, vous êtes en train de présenter des conclusions. Vous commencez

 26   à plaider depuis le début, mais le temps des plaidoiries viendra, ce n'est

 27   pas maintenant. Maintenant ce sont des témoins qui doivent s'exprimer. Vous

 28   n'étiez pas sur place, vous n'êtes pas expert, en tout cas vous ne

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  1   témoignez pas en qualité d'expert, ne poursuivez pas sur votre lancée.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, je vais

  3   accepter ce que vous venez de dire. Mais pour ce qui est des experts qu'on

  4   a entendus ici, je suis un super expert. En cette qualité, par exemple,

  5   regardez le témoin qui a témoigné sur l'événement, le numéro 6, par exemple

  6   où il a filmé ou photographié le mauvais bâtiment, il a dit que c'est la

  7   banque en verre, par exemple. Je ne parle pas de l'incident numéro 6, mais

  8   d'un autre incident, attendez, je vais vous le trouver.

  9   En ma qualité de témoin, je puis dire ce qui suit. Je ne vais pas

 10   continuer à témoigner comme tout à l'heure, mais je puis dire en qualité de

 11   témoin que pour ce qui est de l'incident numéro 7, depuis cette usine à

 12   glace, on peut blesser quelqu'un et le toucher à la nuque alors que la

 13   balle serait censée arriver sous un angle de 90 degrés et non pas 180

 14   degrés.

 15   En ma qualité de témoin aussi, je puis dire que pour ce qui est des

 16   victimes 8 et 14, il n'y a pas de visibilité optique à partir d'aucune

 17   position tenue par le HVO et ce vis-à-vis des endroits où ils ont été

 18   blessés.

 19   Mme PINTER : [interprétation]

 20   Q.  Général, peut-être pourriez-vous donner l'emplacement pour le compte

 21   rendu ou alors donnez-nous la page du constat ?

 22   R.  Il s'agit des victimes 8 et 14 de la rue Brkic, non loin de la maison

 23   des sapeurs-pompiers. Je témoigne ici pour dire qu'il n'y a pas de

 24   visibilité optique ni depuis le bâtiment de la banque en verre ni depuis

 25   quelque autre position que ce soit s'agissant de l'endroit où ces hommes

 26   ont été blessés.

 27   Pour ce qui est de l'incident numéro 9, il faudrait que j'argumente et là,

 28   je vais le sauter plutôt.

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  1   Mais pour ce qui est du numéro 10, là aussi je vais sauter, parce que je ne

  2   dois pas présenter d'argument pour ce qui est de ne pas pouvoir toucher

  3   quelqu'un à 45 degrés d'inclinaison.

  4   J'affirme, Messieurs les Juges, que l'expert a indiqué sur la photo et il a

  5   dit la "banque à façade en verre," mais ce n'est pas ce bâtiment là, et

  6   c'est ici, sous serment que j'ai dit que ce n'est pas la banque en verre.

  7   C'est un bâtiment qui se trouve à 300 mètres au moins de cette banque,

  8   peut-être même plus.

  9   Q.  Général, est-ce que vous pourriez mettre cette photo sur le

 10   rétroprojecteur, ce bâtiment que vous affirmez ne pas être la banque en

 11   verre ?

 12   R.  Certes. Il faut tourner --

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je crois qu'il faut orienter le

 14   document en le déplaçant de 90 degrés, c'est mieux, Merci.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, l'expert ici a indiqué

 16   que cette maison est la banque, ou la maison en verre, comme on l'a

 17   appelée. J'affirme que ce n'est pas exact. La banque à façade de verre se

 18   trouve dans cette direction-là, vers le sud. Et ça, c'est l'un des

 19   bâtiments qui se trouve dans le secteur que nous appelons Sintar 2 [comme

 20   interprété]. Cela a été agrandi mais ce n'est pas du tout ce qu'il a dit

 21   que c'était. C'est tout à fait inexact comme information.

 22   Mme PINTER : [interprétation]

 23   Q.  Général, pour les besoins du compte rendu, veuillez nous indiquer dans

 24   quelle direction c'est. Est-ce que vous pouvez nous l'indiquer par rapport

 25   à la photo, à gauche, à droite, en bas en

 26   haut ?

 27   R.  La banque en verre, c'est ici. Ça ce n'est pas ce qu'il a dit. Je vais

 28   signer, tenez, on est le 8 aujourd'hui, voilà je mets "le 8 juin 2009." [Le

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  1   témoin s'exécute]

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, on va donner un numéro.

  3   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, ce document

  4   que vient de donner le témoin portera la cote IC 1026.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, j'ai préparé des questions sur sept

  6   victimes. Je ne prendrai que des questions à partir des victimes qui ont eu

  7   lieu sous votre commandement de juillet à novembre 1993. Je ne vais pas

  8   vous poser des questions maintenant, je vous les poserai ultérieurement. A

  9   ce stade, j'ai quand même une question à vous poser.

 10   On est dans une procédure où chacune des parties fait son enquête. Le

 11   Procureur fait son enquête, vous-même vous faites votre enquête. C'est

 12   comme cela que ça se passe. Dans le cadre et pour faire vos enquêtes, vous

 13   avez des moyens puisque le greffe alloue de l'argent aux équipes de la

 14   Défense. Comment se fait-il que vous n'ayez pas eu l'idée à Mostar, de

 15   nuit, de refaire des reconstitutions avec fusil à laser pour déterminer

 16   l'hypothèse de départ du bureau du Procureur et le point d'arrivée.

 17   Moi-même quand j'étais procureur, j'ai fait X enquêtes en la matière avec

 18   des reconstitutions. C'est très simple à faire. Encore faut-il en avoir

 19   fait au moins une fois dans sa vie. Mais même si vous, vous n'aviez pas

 20   l'habitude, vous pouviez très bien demander à des avocats ou à des experts

 21   de vous faire ce type de reconstitution pour faire la démonstration que ça

 22   ne venait pas d'où l'a indiqué le Procureur ou son expert. Vous ne l'avez

 23   pas fait. Nous, on prend compte de ce que vous dites, mais il aurait mieux

 24   valu que ça soit fait dans les règles de l'art. Voilà, qu'est-ce que vous

 25   pourrez me répondre ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, je l'ai fait sans

 27   erreur possible sur le plan technique. Mathématiquement parlant,

 28   géométriquement parlant, distance, visibilité, enfin toutes les règles qui

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  1   gèrent la façon de procéder en la matière. J'ai mis quelqu'un à Mostar à

  2   l'endroit de l'événement et il était censé zoomer les photos en direction

  3   de l'endroit à partir duquel l'expert affirme que l'on a tiré. Puis on a

  4   placé quelqu'un à l'endroit d'où la balle est venue. Pour zoomer avec un

  5   appareil photo, c'est-à-dire on a visé à réduire l'angle de l'objectif pour

  6   nous diriger visuellement vers l'endroit où l'homme a été touché. Partant

  7   du dessin et de ce que l'expert nous a dit, parce qu'il a dit que cet homme

  8   était debout, l'expert a dit comment tel homme était debout, placé vers où

  9   il était tourné et d'où la balle est venue pour ce qui est du garçon qui a

 10   couru pour traverser la rue. Pour chaque cas, de façon précise et

 11   mathématique et de façon précise sur un point d'un point de vue optique,

 12   j'ai dit que cela n'avait rien à voir avec la raison.

 13   Ce n'est pas une expertise. J'ai demandé à cet homme s'il avait

 14   honte, il a dit non, mais moi, j'ai honte du travail qu'il a fait.

 15   Vous avez tout cela ici dans la documentation. J'ai été très précis.

 16   Je pense que pour l'un des sujets, j'ai épuisé le temps attribué, mais à

 17   vous de me poser des questions et je vais vous montrer de façon

 18   mathématiquement claire pour indiquer que l'analyse de l'expert ne tient

 19   pas debout, mis à part la rue du maréchal Tito où on peut se perdre en

 20   conjectures. Là, on n'en sait vraiment rien. Mais pour le reste, j'ai été

 21   précis jusqu'au bout.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 23   Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas le

 24   faire maintenant, mais je vais retrouver les photos que nous avons jointes

 25   lors du témoignage de l'expert, nous avons donc avancé les photos pour ce

 26   qui est des emplacements à partir desquels on affirme qu'il y a eu des

 27   tirs, et des emplacements où les personnes touchées se trouvaient. Je n'ai

 28   pas tout cela sur moi, mais ce sont des photos qui ont été utilisées lors

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  1   de l'interrogatoire de l'expert.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je les ai toutes ici, mais on n'a pas le

  3   temps. Si M. le Juge Antonetti me pose des questions à ce sujet, je lui

  4   montrerai de façon exacte et mathématique pour indiquer que cet expert a

  5   fait son travail - comment dirais-je - j'ai l'impression que ça lui était

  6   égal de ce qu'il allait faire. Ce qu'il allait pondre.

  7   Mme PINTER : [interprétation]

  8   Q.  Avez-vous autre chose ?

  9   R.  Non, parce que là je ne peux pas, enfin je comprends, Monsieur le Juge

 10   Trechsel, ce que vous avez dit, je ne peux pas aller au-delà, mais

 11   j'affirme qu'il a même erronément marqué le bâtiment en question. Ça lui

 12   est égal de mettre à 300 mètres plus à droite l'immeuble en question.

 13   L'angle lui est égal, la visibilité optique ça lui est égal, et cetera.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] N'ayez crainte, Monsieur Praljak.

 15   J'ai une question tout à fait élémentaire et pratique.

 16   On n'a pas déjà présenté ces photos à la Chambre ? Si elles ne sont pas

 17   versées au dossier, je pense que nous avons vu beaucoup d'éléments. Il ne

 18   sera pas nécessaire de nous les envoyer une fois de plus parce que je suis

 19   sûr que tous ces éléments ne sont pas perdus. Ça c'est certain.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 21   Madame, nous pouvons continuer.

 22   Mme PINTER : [interprétation] Oui. Je demanderais à M. l'Huissier de

 23   remettre aux Juges de la Chambre un document, le 3D 03566.

 24   Oui, pendant le week-end, le général a apposé des indications sur une

 25   carte qu'il souhaite montrer.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, vous m'avez demandé

 27   pourquoi on n'avait pas tracé une carte en application du 3D 00929 pour ce

 28   qui est des positions occupées par l'ABiH.

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  1   Pendant le week-end passé, j'ai tracé les emplacements sur cette carte et

  2   je vous la joints ainsi que les explications déjà apportées. J'aimerais --

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, il y a un petit

  4   problème parce que quand vous regardez la carte vous vous éloignez des

  5   micros, ce qui fait que les interprètes ont peine à vous entendre.

  6   Mme PINTER : [interprétation] Je vous prie de répéter le numéro du document

  7   auquel cette carte se rapporte, Général.

  8   C'est le 3D --

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] 3D 00929.

 10   Mme PINTER : [interprétation] Merci.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais on ne verra rien de cette distance. Je

 12   voudrais que ceci soit remis à M. le Procureur et aux Juges.

 13   Mme PINTER : [interprétation]

 14   Q.  On doit essayer, Mon Général. A moins que vous ne nous indiquiez le

 15   tout, parce qu'on n'a que cet exemplaire, enfin on ne peut rien savoir

 16   avant vos explications.

 17   R.  Messieurs les Juges, Monsieur le Procureur, d'après ce document qu'on

 18   vient d'indiquer, vous avez ici les numéros de ce qui  se trouve à tel et

 19   tel endroit. C'est traduit en anglais et j'ai signé [Le témoin s'exécute].

 20   Messieurs les Juges, même les interprètes ont remarqué, il y a eu

 21   confusion. Il y a un numéro en anglais ou un décalage de numérotation,

 22   parce que les numéros en croate et en anglais ne coïncidaient pas. Il y a

 23   un décalage d'un chiffre qui est intervenu.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je propose ceci à la régie. Est-ce

 25   qu'on ne peut pas faire un plan rapproché de la carte, ce qui nous

 26   permettrait d'en voir davantage ?

 27   Mme PINTER : [interprétation]

 28   Q.  Mon Général, ça se rapporte à des emplacements dans

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  1   Mostar ?

  2   R.  Oui, c'est Mostar [Le témoin s'exécute]. On voit le campement nord [Le

  3   témoin s'exécute], la caserne Tihomir Misic, le numéro 1, puis on a indiqué

  4   une fois de plus les lignes tenues par l'ABiH et le HVO [Le témoin

  5   s'exécute]. A l'intérieur, parce que c'est assez dense compte tenu des

  6   positions, on voit les positions autour de la rue Santiceva et de la place

  7   de l'Espagne, ici on voit les environs du vieux pont, Cernica [Le témoin

  8   s'exécute], et autres sites qu'on a indiqués dans le document. Ici, Stotina

  9   et la fameuse mitrailleuse qui se trouvait juste en face [Le témoin

 10   s'exécute].

 11   L'INTERPRÈTE : Me Pinter est hors micro.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, pour qu'on essaie de comprendre,

 13   nous sommes à au moins 20 mètres de la carte.

 14   Les petits carrés blancs ça signifie quoi ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Les petits carrés blancs indiquent ici, enfin

 16   vous avez ici le descriptif de ce que signifie chacun des petits carrés,

 17   numéro 1, 1 ici 2 [Le témoin s'exécute], ça correspond au texte. Il y a la

 18   traduction en anglais pour ce qui est de ce qui est indiqué au document.

 19   Mme PINTER : [interprétation]

 20   Q.  Mon Général, dites-nous ce que c'est que ce numéro 1 pour le compte

 21   rendu ? Ce sont les positions de l'ABiH dans la rue, dans la ville, dans

 22   une maison ?

 23   R.  Ecoutez, Madame Pinter, on l'a déjà dessiné 30 fois. C'est le campement

 24   nord de la caserne Tihomir Misic où se trouvait l'ABiH. On a tracé ici les

 25   différentes lignes, et cetera [Le témoin s'exécute].

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : M. Praljak, avec votre baguette, montrez exactement

 27   où se trouve le campement nord. Vous bougez sans arrêt avec la baguette et

 28   on a du mal à suivre.

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  1   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, dites le numéro 1 c'est le campement nord.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. 

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors dites --

  5   Mme PINTER : [interprétation] Pour le compte rendu --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Le numéro 1 c'est le campement nord. Le numéro

  8   2, et les autres qui suivent jusqu'à 23. Chaque petit carré correspond au

  9   numéro de la liste, et il y a une version anglaise pour ce qui est de ce

 10   que constitue chacun des sites.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors dites-nous rapidement c'est quoi les 23 sites.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Les 23 sites ce sont les positions des

 13   snipers, des unités, des nids de mitrailleuses de l'ABiH aux lignes de

 14   démarcation face au HVO. Il n'y a que le numéro 3, Monsieur le Juge, qui

 15   est l'emplacement Stotina, c'est une position tenue par le HVO à Stotina et

 16   on en a parlé une centaine de fois déjà.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Comment savez-vous que c'était l'emplacement de

 18   l'ABiH ? Qu'est-ce qui vous permet de l'affirmer ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est partant des documents que l'on a vus la

 20   semaine passée. Je sais d'abord que c'étaient les positions tenues par

 21   l'ABiH parce que je ne le savais que trop bien cela, mais ça a été dessiné

 22   partant des documents ou du document au sujet duquel vous m'avez interrogé.

 23   Et vous m'avez demandé aussi pourquoi je n'ai pas tracé une carte, parce

 24   que la carte que l'auteur du document avait jointe est perdue, elle n'y est

 25   plus, et moi j'ai repris le document pour redessiner la carte. Il ne fait

 26   de doute le fait que c'est conforme à la vérité, je le sais parce que je

 27   suis témoin oculaire des événements; pas avec la précision totale pour

 28   chaque emplacement, mais --

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  1   Mme PINTER : [interprétation] Il s'agit du 3D 00929. Il s'agit d'un rapport

  2   du renseignement daté du 11 septembre 1993, et on en a parlé la semaine

  3   passée.

  4   Merci. Me Kovacic attire mon attention sur la nécessité de demander un

  5   numéro IC pour la carte.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Greffier, donnez un numéro IC pour

  7   la carte.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce

  9   IC 1027.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, quand on voit, mais vous nous

 11   surprenez parce qu'on ne pensait pas que vous alliez faire ce travail, mais

 12   quand je vois les positionnements des unités de l'ABiH, comme ça à brûle-

 13   pourpoint, j'ai l'impression que de l'endroit où se trouvait un quelconque

 14   sniper de l'ABiH, il pouvait quasiment toucher n'importe quelle cible dans

 15   Mostar. Est-ce exact ou est-ce faux ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas n'importe quelle cible parce qu'il y avait

 17   des immeubles, mais ils pouvaient tirer en direction de toutes les

 18   positions du HVO. Chacune des positions du HVO était exposée à part entière

 19   aux tirs de la part de l'ABiH, et tous ces bâtiments qu'on peut voir

 20   devant, donc tout ce qui est optiquement parlant visible.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour les besoins du transcript, mais j'y reviendrai,

 22   mais au moins que tout soit clair. Si j'ai bien compris, votre thèse est de

 23   dire que parmi ceux qui ont été blessés ou tués, qu'on impute au HVO, en

 24   réalité c'est le Procureur qui vous impute cela, d'après vous, ces victimes

 25   ont pu l'être par l'ABiH.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, c'est exact, mais

 27   ce que j'affirme, cependant, j'affirme seulement une chose avec certitude,

 28   c'est de dire que : l'explication apportée par l'expert, au terme de quoi

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  1   l'homme qu'il dit avoir été tué par le HVO, avec ce type de blessures et à

  2   partir d'un tel poste de tirs, ça c'est inexact. Ça j'en suis à 100 %

  3   certain. Les explications qui disent que depuis cet emplacement, dans la

  4   rue Brkica, il y a eu deux hommes de touchés, ce n'est pas exact. Il n'y a

  5   pas de visibilité optique depuis quelque position que ce soit tenue par le

  6   HVO vis-à-vis de cet emplacement-là.

  7   Si vous vous en souvenez, Monsieur le Juge, j'ai demandé au témoin qui

  8   était la victime ici dans le prétoire, je lui ai dit, Monsieur, vous posez-

  9   vous de nos jours encore la question de savoir qui est-ce qui vous a tiré

 10   dessus ? Il dit, Oui, Général. Il est originaire de Mostar et il sait que

 11   quand on lui a dit qu'on lui avait tiré dessus depuis les positions du HVO,

 12   il savait que ce n'était pas exact. Donc la banque avec la façade en verre,

 13   il sait que de l'endroit où il se trouvait, on ne pouvait pas le voir. Donc

 14   l'expert dit, Mais il se peut qu'il y ait eu une position de sniper mobile.

 15   Mais enfin ça il faut vraiment avoir le toupet de l'écrire. Un poste de

 16   tireur d'élite mobile, alors on voit que c'est à 50 mètres de distance l'un

 17   de l'autre, et qu'on puisse déplacer cela comme bon nous semble, c'est une

 18   injure pour la logique. C'est vraiment offensant pour la logique humaine la

 19   plus basique.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Pinter.

 21   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Q.  Général, je voudrais maintenant que vous vous penchiez sur le 3D 03566.

 23   Il s'agit d'un livre, "Gouvernement de l'unité démocratique du gouvernement

 24   de Croatie." J'aimerais que vous expliquiez quelle était sa fonction,

 25   qu'est-ce que c'est que ce gouvernement de l'unité nationale, et ensuite on

 26   pourra expliciter aux Juges.

 27   R.  Le livre, en réalité, c'est d'une certaine façon compilé par un

 28   journaliste qui s'appelle Milovan Baletic, et le rédacteur en chef qui a

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  1   travaillé dessus c'était le première ministre de la République de Croatie

  2   en 1991-1992, à savoir M. Franjo Greguric. Ce gouvernement de l'unité

  3   nationale a été constitué suite à la proposition du Dr Franjo Tudjman, non

  4   pas pour être un gouvernement créé par le parti qui l'a emporté aux

  5   élections, mais un gouvernement qui dans ces temps difficiles où la Croatie

  6   était censée ne pas subsister ou disparaître, a fait en sorte que l'on

  7   mette dans ce gouvernement les meilleurs de tous les partis, indépendamment

  8   des résultats électoraux, et c'est la raison pour laquelle on appelait cela

  9   le gouvernement de l'unité démocratique de Croatie.

 10   Et à l'intérieur de ce livre, il y a des éléments que je voudrais montrer

 11   aux Juges et indiquer que la même politique à l'égard de la Bosnie-

 12   Herzégovine, les traités internationaux, le respect de la totalité des

 13   droits, et ainsi de suite, la défense des intérêts des Croates aux

 14   conférences internationales -- premier ministre, ministre des Affaires

 15   étrangères, et cetera, donc cette politique entérinée par le Parlement de

 16   la Croatie et par le gouvernement et confirmée par le chef de l'Etat était

 17   consistante, à savoir que la Bosnie-Herzégovine était un Etat autonome qui

 18   devait être aidé afin qu'il puisse subsister, et ce, sur le plan militaire

 19   aussi. On verra qu'il y a eu des propositions portant sur les relations

 20   économiques, et il y a constamment eu une façon de dire que conformément

 21   aux propositions de la communauté internationale, il fallait que

 22   l'aménagement intérieur puisse répondre aux besoins des trois peuples

 23   constitutifs en présence afin que tout le monde puisse y vivre sans pour

 24   autant se sentir subordonner aux autres. C'est-à-dire il fallait établir

 25   une symétrie analogue à celle qu'on peut voir dans un miroir, voilà.

 26   Q.  Pour les besoins du compte rendu d'audience, quand vous parlez de

 27   "l'Etat", il y a juste au compte rendu la République de Croatie.

 28   R.  Non, l'Etat de Bosnie-Herzégovine, c'est à cela que je me référais.

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  1   Q.  Merci. Quelle est la page ?

  2   R.  Page 107 dans le texte croate.

  3   Q.  Dans le prétoire électronique, page 3D41-1285. Version anglaise, 3D41-

  4   0379, ainsi que 3D41-0380.

  5   R.  Le vice chef du gouvernement, M. Zdravko Tomac, qui était du Parti

  6   social démocrate, il informe le gouvernement de la République de Croatie

  7   des entretiens menés entre la délégation de Croatie et le gouvernement de

  8   la Bosnie-Herzégovine portant sur la nécessité de mettre fin aux activités

  9   des forces armées de Bosnie-Herzégovine contre la République de Croatie.

 10   Puisque l'agression est déjà très importante, de très grande envergure, et

 11   la Bosnie-Herzégovine, non pas du fait de son gouvernement, mais du fait de

 12   l'impuissance de son gouvernement et de son président, mais je précise en

 13   passant que le président de la présidence, M. Izetbegovic ne s'oppose pas à

 14   la JNA, donc il y a une agression qui est menée contre la Croatie.

 15   Donc cet Etat attaque la République de Croatie, qui l'attaque ? Soit

 16   c'est un Etat qui attaque un autre Etat, soit c'est une agression menée par

 17   la JNA. Mais dans ce cas-là, nous n'avons plus d'Etat, nous ne sommes pas

 18   face à des Etats. Donc ils attaquent là où ils conçoivent qu'il y a des

 19   territoires qui doivent revenir à la Serbie, à la Grande-Serbie.

 20   Donc soit les Etats n'existent pas sous cette forme-là, donc

 21   l'agresseur est la JNA et la Grande-Serbie.

 22   Dans la suite du texte, il est dit que la situation est difficile à

 23   Kostajnica, Dubica, Petrinja, Sisak, je me suis trouvé à proximité de Sisak

 24   à ce moment-là, Sunja, à deux doigts de Sisak, j'étais commandant là, donc

 25   je suis témoin.

 26   Q.  Quelle est la période ?

 27   R.  Au mois de septembre 1991.

 28   Q.  Merci.

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  1   R.  Prenons la page 151, s'il vous plaît, avançons un peu plus rapidement.

  2   Le 30 septembre 1991, page 151.

  3   Q.  3D41-1288, version anglaise 3D41-0380.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, on va regarder cela selon votre bon

  5   vouloir, mais j'avais une question préliminaire à vous poser. J'y ai pensé

  6   ce week-end et je me suis dit que c'était important.

  7   Là vous venez de nous dire qu'il y avait un gouvernement d'unité nationale,

  8   très bien. Mais je voudrais savoir : est-ce qu'à l'époque il y avait une

  9   opposition ? Est-ce que tout le monde était à 100 % dans le soutien à M.

 10   Tudjman ou bien il y avait quand même des opposants, et si oui, c'était qui

 11   ces opposants ? Je vous pose cette question parce que contrairement à ce

 12   que j'ai pu penser au départ en me disant, M. Praljak c'est un militaire,

 13   il ne connaît pas grand-chose dans la connaissance politique. En réalité,

 14   je me suis rendu compte au fil du temps que vous aviez été aussi un acteur

 15   à envergure politique. Donc ma question est totalement politique et je vous

 16   pose cette question. Y avait-il une opposition au gouvernement d'unité

 17   nationale de M. Tudjman ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] La réponse exacte serait la suivante, il n'y a

 19   qu'un seul parti politique qui faisait partie de l'opposition, c'était le

 20   Parti du droit croate, il s'est doté du HOS. Vous avez pu voir dans des

 21   documents que le HOS, ça posait de grands problèmes, il était difficile de

 22   les désarmer, et cetera. Mais c'était un petit parti de petite envergure,

 23   6, 7 % du corps électoral. Ils ont eu du mal à franchir le seuil aux

 24   élections pour pouvoir se qualifier. Tous les autres partis faisaient

 25   partie du gouvernement de l'unité démocratique et il n'y a pas eu de

 26   problème à traduire dans les faits la politique puisqu'elle se faisait

 27   partie du consensus national, du Parlement, du gouvernement du président de

 28   la République sur tous les points essentiels : l'indépendance de l'Etat, la

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  1   défense contre l'agression, et vous avez pu voir les droits de l'homme, au

  2   maximum tous les droits aux Serbes, l'autonomie culturelle aux Serbes en

  3   Croatie, s'ils le souhaitaient, la reconnaissance des frontières des

  4   républiques issues de l'ex-Etat, une tentative de passer un accord

  5   militaire avec la Bosnie-Herzégovine afin de mettre sur pied une défense

  6   commune, et cetera, et cetera. Simplement, purement une démocratie, un Etat

  7   de droit, et tous ceux qui enfreignent aux règles, à la loi pendant la

  8   guerre, il faudra qu'ils soient mis face à leur responsabilité. Je vous

  9   montrerai un document que j'ai rédigé à l'époque. Donc c'était un consensus

 10   national des citoyens et des partis politiques.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc il y a un consensus national mais il y

 12   avait le Parti croate des droits, le HOS qui lui représentait, d'après ce

 13   que vous dites, je regarde au transcript, 6 à 7 % du corps électoral. Bien.

 14   J'ai une dernière question, mais je ne vous demande pas de répondre

 15   maintenant car vous aurez quelques jours, au moins une semaine pour y

 16   réfléchir. Dans le cadre des questions que je vais vous poser sur

 17   l'entreprise criminelle commune et sur la Banovina, j'aimerais savoir quand

 18   dans la constitution croate il y a eu la référence à la Banovina, est-ce

 19   qu'en Croatie il y a eu des auteurs qui ont critiqué cela ?

 20   Dans mon pays, si je jugeais ce type d'affaire j'aurais tout lu et je

 21   saurais tout. Mais là, malheureusement, je ne lis pas le croate et je ne

 22   sais pas s'il y a eu des articles qui ont pu critiquer cette référence

 23   constitutionnelle à la Banovina. Quand je vous interrogerai là-dessus, si

 24   vous êtes en mesure de me dire il y a eu tel ou tel article, ça sera

 25   intéressant pour les réponses aux questions posées.

 26   Voilà. Donc réfléchissez à cette demande, mais ne répondez pas

 27   maintenant, ce n'est pas le moment.

 28   Maître Pinter, je vous redonne la parole.

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  1   Mme PINTER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  2   Général, juste pour corriger le numéro de la page. En anglais 3D41-0380,

  3   donc c'est pour la page anglaise. Dans le prétoire électronique en croate,

  4   3D41-1288.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Brièvement, il est question ici du fait que

  6   Dubrovnik ait attaqué de Trebinje, qui se situe bien entendu en Bosnie-

  7   Herzégovine, et l'on dit qu'on attaque depuis le Monténégro en passant

  8   également par le territoire de la Bosnie-Herzégovine -- donc ils tirent sur

  9   Dubrovnik, la Bosnie-Herzégovine tout simplement est un territoire qui est

 10   utilisé pour attaquer Dubrovnik, il n'y a rien à ajouter. On revient à la

 11   question qui est de savoir ce qui se passera dans la partie méridionale,

 12   est-ce que la HV sera obligée d'entrer en profondeur dans le territoire de

 13   Bosnie-Herzégovine ? Autrement, on ne peut pas libérer Dubrovnik face à

 14   l'artillerie. Il s'agit de profondeur tactique. C'est ainsi qu'on appelle

 15   cela, une doctrine militaire, le droit de rentrer pour le pays frontalier

 16   dans cette profondeur tactique.

 17   Mais prenons la page 157, à présent.

 18   Q.  3D41-1289, 3D41-0381, et ce dernier numéro concerne la date qui viendra

 19   par la suite pour la version anglaise.

 20   R.  Nous avons le chef du gouvernement qui s'exprime. Il dit qu'ils ont

 21   pris une décision, ils ont décidé de s'adresser au gouvernement de Bosnie-

 22   Herzégovine. On parle toujours du "gouvernement de Bosnie-Herzégovine". Il

 23   n'y a pas de Banovina, Monsieur le Président. Je répondrai à votre

 24   question.

 25   Il est dit ici ce qui fera l'objet de la demande, à savoir que le

 26   gouvernement de Bosnie-Herzégovine entreprenne tout ce qui est en ses

 27   moyens afin de mettre fin à ce qu'on se serve contrairement à la loi du

 28   territoire de l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Donc la Bosnie-Herzégovine est

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  1   mentionnée ici comme étant dotée d'un territoire de l'Etat, c'est le chef

  2   du gouvernement qui s'exprime, ce territoire de l'Etat de Bosnie-

  3   Herzégovine doit cesser d'être utilisé afin de mener des attaques contre la

  4   République de Croatie et afin d'arrêter de dépêcher des militaires ennemis

  5   contre la République de Croatie. Il n'y a pas lieu de continuer là. Prenons

  6   la page 171

  7   Q.  Est-ce 3D41-12 --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, l'attaque de Dubrovnik, je ne la

  9   connais pas très bien, à part le jugement dans l'affaire Strugar. Je ne

 10   suis pas un spécialiste, je vous demande donc par avance de m'excuser de

 11   l'innocence de ma question. Mais en vous écoutant bien, vous venez de dire

 12   en quelques minutes deux choses importantes : premièrement, il y a

 13   l'artillerie qui était autour de Dubrovnik et qui pilonnait; mais

 14   deuxièmement, vous avez dit que vous n'êtes pas passé par la République de

 15   Bosnie-Herzégovine pour aller au secours à Dubrovnik. Ce sont les deux

 16   éléments que vous me dites. Mais à l'époque, la République de Croatie, est-

 17   ce que vous aviez une aviation capable de bombarder l'artillerie serbe ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. A ce moment-là, la

 19   Croatie n'avait pas d'aviation.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que vous aviez une marine capable, à partir

 21   de la mer, de tirer sur les positions serbes ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Toute la marine de la JNA avait été emmenée au

 23   Monténégro par la JNA. A ce moment-là, nous n'avions pas un seul navire de

 24   guerre d'aucune sorte. Dans les parages de Dubrovnik, ils avaient des hors-

 25   bords assez rapides, et en dépit des torpilleurs de la JNA qui agissaient

 26   de nuit, ils ont réussi quand même à percer et à ravitailler les défenseurs

 27   de Dubrovnik, mais il y a eu des pertes.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Au moment de l'attaque de Dubrovnik par les Serbes,

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  1   la République de Croatie disposait de combien de brigades opérationnelles ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1991 ? Monsieur le Président, je pense à

  3   peu près, à ce moment-là, sur le champ de bataille, pas plus de 40 000

  4   volontaires, quatre brigades de la Garde nationale, et il y a eu quelques

  5   brigades, mais pas plus de 40 000 hommes, à ce moment-là, si on fait

  6   l'addition de tous les champs de bataille.

  7   Mme PINTER : [interprétation]

  8   Q.  Page 3D41-1294 en croate, 3D41-0385 en anglais, ou page 10 de la

  9   traduction. Peut-être qu'il sera plus facile de la retrouver ainsi.

 10   R.  Nous sommes au 6 octobre. C'est le moment où la Croatie est tout

 11   simplement en flammes. Nous voyons ici un aperçu des endroits où la Croatie

 12   subit des attaques. Il n'y a pas lieu de le revoir en détail. La communauté

 13   internationale aurait menacé la Yougoslavie d'imposer un embargo économique

 14   si les parties belligérantes continuaient à ne pas tenir compte de l'accord

 15   de paix de La Haye. Ce qui était aussi très difficile d'écouter à ce

 16   moment-là, c'était le terme "parties belligérantes". Nous n'étions pas une

 17   partie belligérante, nous étions victimes d'une agression, et on n'arrête

 18   pas de nous appeler "partie belligérante", comme si à partir du moment où

 19   on s'arrêterait, la JNA s'arrêterait. Mais la JNA nous attaquait. Ces

 20   notions diplomatiques, c'était quelque chose d'insultant pour ceux qui

 21   étaient en train de combattre à ce moment-là.

 22   On évoque Dubrovnik ici, les attaques qui sont lancées depuis le ciel

 23   de Dubrovnik, et cetera. Mais passons à la page 191.

 24   Q.  3D41-1295 pour la version croate.

 25   R.  Non, non. Non, je ne pense pas que ce soit 191.

 26   Q.  201.

 27   R.  Oui, 201. Excusez-moi.

 28   Mme PINTER : [interprétation] 3D41-1298. Je m'excuse auprès des

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  1   interprètes. 3D41-0386, page 11, pour la version anglaise.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de continuer, Général Praljak, vous avez fait

  3   tout à l'heure une observation sur le fait que la communauté internationale

  4   parlait de parties belligérantes. Ce sont vos propres termes. Vous dites,

  5   nous étions victimes. C'est votre version à vous, mais vous savez que les

  6   Serbes disent le contraire, que c'était eux les victimes car c'était vous

  7   les agresseurs. Il y a un débat sur la question.

  8   Je prendrai un seul exemple. Borovo Celo, chacune des parties dit que

  9   c'est l'autre. Vous êtes d'accord ou pas ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne suis pas d'accord, Monsieur le

 11   Président, ni avec vous ni avec la partie serbe. Borovo Celo se situe sur

 12   le territoire de la République de Croatie, on a capturé des gens, et la

 13   police de la République de Croatie est en droit d'intervenir à Borovo Celo.

 14   D'après la constitution socialiste et la JNA,  on n'en a pas le droit.

 15   Ce que nous avons vu à Dubrovnik, à Vukovar, à Sisak, ce que j'ai

 16   prouvé moi, il n'y a pas de parties belligérantes. Il y avait un agresseur

 17   d'une part et une victime d'autre part. Nous pouvons entamer des

 18   discussions et les conversations que vous voudrez, mais la Croatie n'a

 19   attaqué ni la Serbie ni la Bosnie-Herzégovine ni le Monténégro. Je ne suis

 20   pas allé faire la guerre contre Belgrade. Je ne suis pas allé attaquer

 21   Tuzla, Bihac, ou Sarajevo. Je me suis défendu. Partout où je me suis

 22   trouvé, je n'ai fait que me défendre, partout. Le HVO s'est défendu, la

 23   Croatie s'est défendue.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, peut-être que vous

 25   mélangez deux termes. L'un est le terme "d'agresseur" et l'autre est celui

 26   de "partie belligérante". D'après la façon dont je le comprends, une partie

 27   belligérante est une partie qui est partie prenante à la guerre quelque

 28   soit son rôle que ce soit d'une défense ou une attaque. "Agresseur" est

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  1   sans doute le terme que vous vouliez utiliser. Je pense que c'est le terme

  2   que vous utilisez. Je me demande si votre critique est tout à fait

  3   justifiée dans ce cas.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, je vous entends, je

  5   vous comprends entièrement, il est exact que dans une situation de guerre,

  6   il y a deux parties et qu'on peut les appeler "parties belligérantes". Mais

  7   lorsque Hitler avance contre la France, vous ne pouvez pas lancer un appel

  8   aux deux parties belligérantes pour mettre fin à cela, puisque la

  9   résistance française n'a rien à terminer et Manstein et Rommel, il a des

 10   choses à arrêter. Là il est dit, Arrêtez, mais qui voulez-vous arrêter,

 11   celui qui a 1 000 chars ou moi à Sunja avec deux mortiers ? C'est de cela

 12   que je parle. Je suis prêt à tout moment à mettre fin à cela, mais que ceux

 13   qui ont adopté sur le plan du droit international, c'est vrai que la

 14   Croatie est un Etat doté de ses frontières, de sa constitution, alors

 15   qu'ils partent et on mettra fin à tout.

 16   Ni Franjo Tudjman ni qui ce soit d'autre n'a demandé rien de plus,

 17   rien d'autre. C'est de cela qu'il s'agit, qui peut mettre fin à cette

 18   guerre ? Il y a des parties belligérantes, d'accord. Mais lorsqu'on parle

 19   de parties belligérantes, mais à partir de ce moment-là déjà on a un

 20   agresseur. Vous avez l'Allemagne qui est agresseur et la Pologne qui ne

 21   l'est pas pendant la Seconde Guerre mondiale. Il n'appartient pas à la

 22   Pologne de mettre fin à quoi que ce soit. Pendant un mois elle a été partie

 23   belligérante, après elle ne l'a plus été. Elle n'a plus été parce qu'elle a

 24   été écrasée, tout comme la France. Ceux qui ont combattu, il y a eu la

 25   résistance française qui a constitué partie belligérante, mais qui

 26   attendait que les autres entrent là d'où ils étaient venus.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Mme PINTER : [interprétation]

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  1   Q.  Général, cette page que nous avons appelée, je suppose que cela a à

  2   voir avec l'initiative rejetée de l'assemblée du Monténégro ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Parce qu'il est question des frontières desquelles il peut être

  5   question ?

  6   R.  Oui, l'initiative du Parlement de la République du Monténégro dit,

  7   Agissons par accords et déterminons les frontières entre la République de

  8   Croatie et le Monténégro. Et cela parce qu'ils ont tout conquis jusqu'à

  9   Dubrovnik et c'est par accords qu'ils veulent procéder. Ils ne

 10   reconnaissent pas les frontières des républiques comme étant les frontières

 11   de nouveaux Etats, et par conséquent ils disent, nous avons conquis d'ici,

 12   Messieurs les Juges, je vais vous montrer sur la carte. Là, vous avez la

 13   frontière de la République de la Croatie à Prevlaka [Le témoin s'exécute],

 14   ils ont conquis la totalité de ce territoire jusqu'à Dubrovnik, jusqu'ici,

 15   et maintenant ils disent que le Parlement propose que l'on procède par

 16   accords pour déterminer le tracé des frontières. Bien entendu, la

 17   présidence et le Sabor croate ont refusé cela, puisque ce n'est pas par

 18   accords qu'on va accepter les frontières qui ont été conquises par

 19   l'agression.

 20   Q.  Mais cela évoque également la position adoptée par le gouvernement sur

 21   le changement du tracé des frontières ?

 22   R.  Oui. C'est de manière déterminée que le gouvernement insiste qu'il

 23   n'ait pas de modification de tracé des frontières intérieures et refuse

 24   toute éventualité d'entretien portant là-dessus, c'est le gouvernement qui

 25   rejette toute éventualité de discussions portant sur les changements des

 26   frontières des républiques issues de l'ex-Etat; il n'y a pas de Banovina ou

 27   je ne sais quoi, rien ne peut être changé.

 28   Mais il y a un mode de changement. A partir du moment où la guerre aurait

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  1   été terminée, lorsque tout sera terminé, quelqu'un dira, modifions les

  2   choses par voie pacifique. Oui, les modifications sont possibles en Europe,

  3   par exemple, de manière pacifique, c'est ce qui est d'ailleurs prévu par

  4   l'OSCE. Mais il n'y a pas de recours à la force pour modifier les

  5   frontières, or c'était ça qui se produisait ici, changement des frontières

  6   par la force, et non pas du gouvernement croate, qui partageait cette

  7   attitude. Il était hors de question d'évoquer la question des frontières.

  8   Q.  285, à présent, en anglais page 13 de la traduction, 3D41-1305, 3D41-

  9   0388 dans le prétoire électronique.

 10   R.  Je ne sais pas si cela a été traduit. Plusieurs petites choses.

 11   Ce jour-là, je cite :

 12   "L'assemblée serbe a rejeté la déclaration de Bruxelles."

 13   Q.  Quelle est la date ?

 14   R.  Le 18 novembre 1991.

 15   Q.  Quoi d'autre s'est passé ce jour-là ?

 16   R.  La chute de Vukovar. Je cite :

 17   "L'assemblée de Serbie a rejeté la déclaration de Bruxelles sur la

 18   reconnaissance de la souveraineté à toutes les républiques de l'ex-

 19   Yougoslavie qui le souhaitent."

 20   La déclaration de Bruxelles a été rejetée à la fois par la Serbie et par le

 21   Monténégro, mais la Croatie l'a acceptée; il n'y a pas de modification de

 22   frontières. Je le répéterai à l'infini. Ce sont des projets politiques qui

 23   datent des années 1970 ou 1980. Pas de modifications de frontières.

 24   Il est dit ici également que l'on a créé la Communauté croate

 25   d'Herceg-Bosna et que la substance de cette entité de respecter les

 26   autorités démocratiquement élues de Bosnie-Herzégovine tant que

 27   l'indépendance de l'Etat de Bosnie-Herzégovine sera maintenue par rapport à

 28   l'ex-Yougoslavie ou toute Yougoslavie qu'elle soit ex ou future. C'était la

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  1   position de cette communauté et du peuple croate.

  2   On reconnaissait la Bosnie-Herzégovine et ses pouvoirs

  3   démocratiquement élus à moins que ces autorités, sans poser la question au

  4   peuple croate, décident de faire partie de la Yougoslavie. A partir de ce

  5   moment-là j'aurais refusé. C'est mon droit légitime en tant que membre d'un

  6   peuple souverain. Je ne sais pas ce que d'autres auraient fait, "oui" à la

  7   Bosnie-Herzégovine, et à ces autorités, mais "non" à un pouvoir qui se

  8   serait vendu à la JNA et à la Serbie pour satisfaire les intérêts qui ne

  9   correspondent qu'à un seul peuple, Musulmans ou éventuellement Serbes.

 10   C'est le fondement pour comprendre les aspirations de la HZ HB et du peuple

 11   croate dans son ensemble.

 12   Ne tournons pas autour du pot, j'ai répété cela 100 fois, "oui" à une

 13   Bosnie-Herzégovine, Etat souverain et démocratique et indépendant, mais

 14   personne n'a le droit de nous vendre.

 15   Continuons, Madame Nika.

 16   Q.  L'adoption de la résolution 724, page 341, nous avons la date de cette

 17   adoption.

 18   Page 14 de la traduction anglaise, dans le prétoire électronique,

 19   3D41-0389. En croate, 3D41-01308.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, excusez-moi d'interrompre. Parce

 21   que je viens de m'en rendre compte d'une chose en regardant ce livre.

 22   Dans la version en B/C/S, il y a des parties qui ne sont pas

 23   complètes, donc vous avez fait un choix et il y a des pages en B/C/S que

 24   nous n'avons pas. Et puis deuxièmement, vous avez traduit selon votre

 25   conception certaines pages. Pourquoi je vous pose cette question, parce que

 26   j'étais intéressé sur ce que disait M. Greguric lors de la constitution de

 27   la Communauté croate d'Herceg-Bosna, le 18 novembre à Grude. Je voulais

 28   essayer de comprendre comment du point de vue gouvernemental, on avait en

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  1   Croatie assisté à cela.

  2   Je vois dans la page, c'est à la page 13 dans la version anglaise,

  3   vous dites que cette communauté a été établie, enfin c'est M. Greguric qui

  4   le dit. Mais on ne sait pas quel est le contexte. Il aurait été très

  5   intéressant de savoir s'il y avait eu des discussions au niveau du

  6   gouvernement en Croatie, est-ce qu'ils ont été mis devant le fait accompli

  7   ? Est-ce eux qui ont téléguidé tout ça comme semble l'indiquer le

  8   Procureur, et cetera, et cetera.

  9   Or, vous extrayez un petit morceau, mais ça ne nous renseigne pas sur

 10   l'intérêt vu du gouvernement croate de la constitution de communauté

 11   croate. Est-ce que vous vous êtes rendu compte qu'en faisant un tri

 12   sélectif, vous risquez de vous exposer à quelques critiques ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur le Juge

 14   Antonetti, j'en suis bien conscient, mais croyez-moi, je serais extrêmement

 15   heureux et j'ai envisagé cela, si l'on pouvait prendre cet ouvrage dans son

 16   intégralité édité par ces deux co-auteurs, et si on pouvait en faire une

 17   traduction intégrale. Vous auriez eu une vision d'ensemble, et je serais

 18   très heureux si M. le Procureur ou si quiconque d'autre souhaitait faire

 19   cela. Mais ce n'est qu'en raison de moyens limités que j'ai été amené à

 20   faire un choix. Et ce que j'ai choisi, retenu, nous parle de la cohérence

 21   d'une certaine politique croate, à savoir l'Etat et ainsi de suite. Par

 22   ailleurs, il n'y a pas eu d'accord entre le gouvernement d'unité nationale

 23   et la HZ HB. Nous sur place, étions un peuple, nous n'étions les pions de

 24   personne. Nous avons demandé une certaine aide en armement, tout comme

 25   l'ABiH avait également demandé de l'aide dans des proportions encore plus

 26   grandes, Alija Izetbegovic l'a fait aussi d'ailleurs. Mais nous étions dans

 27   un autre Etat et nous avions à nous défendre, à nous débrouiller pour nous

 28   défendre.

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  1   Alors moi je n'en serais que très heureux si quiconque peut trouver

  2   dans cet ouvrage dans sa totalité le moindre détail montrant que j'aurais

  3   souhaité cacher quelque chose, j'invite quiconque à le faire.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Le 18 novembre, quand la communauté croate se

  5   crée à Grude, je présume que dans la presse croate à Zagreb, il a dû y

  6   avoir des articles. Pour vous, c'était très facile d'éplucher la presse

  7   croate pour justement prouver que cette création n'a rien à voir avec la

  8   République de Croatie, que c'est une création ex nihilo, une création qui a

  9   été faite par les municipalités de l'Herzégovine et non pas par la

 10   République de Croatie. Et ça, vous auriez pu amener comme élément de preuve

 11   des articles dans ce sens.

 12   De même, vous auriez pu rechercher au niveau des services secrets de

 13   renseignements de l'époque, des documents portés à la connaissance du

 14   gouvernement sur le fait que dans la république voisine certaines

 15   municipalités s'étaient entendues pour créer une communauté croate et que

 16   ça, ça pouvait créer des problèmes politiques ultérieurs. Ce type de

 17   document, ça doit exister, ce n'était pas le Moyen-âge en 1991. Or, tout ça

 18   vous ne nous montrez peu d'éléments sauf un article tiré d'un livre dont

 19   nous n'avons pas toute l'intégralité du livre. 

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 21   me suis tellement efforcé ici de montrer mon innocence devant cette Chambre

 22   que cela dépasse déjà toutes les limites, quelles sont les obligations qui

 23   incombent au Procureur de son côté.

 24   Il n'y a eu absolument aucune opération de conquête visant la Bosnie-

 25   Herzégovine, avec les journaux ou sans eux, avec le gouvernement ou sans

 26   lui, avec Franjo Tudjman ou sans Franjo Tudjman.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Je suis d'accord avec vous, la charge de la preuve,

 28   c'est le bureau du Procureur, très bien. Mais on est dans une procédure à

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  1   deux temps. Le bureau du Procureur présente ses moyens, et vous, dans le

  2   même temps, vous présentez vos moyens. Donc même si en théorie vous pouvez

  3   vous croiser les bras et ne rien dire, vous avez un rôle à jouer. Et dans

  4   ce rôle, il convient peut-être, malheureusement c'est comme ça, de prouver

  5   son innocence. Et prouver son innocence, ça peut être fait à partir par

  6   exemple des articles de presse à Zagreb au moment de la création du HVO ou

  7   bien des éléments provenant des services de renseignements qui expliquaient

  8   que tout ceci avait été fait en Herzégovine et il n'y avait aucun contact

  9   avec la République de Croatie.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, j'étais au sein du

 11   Conseil de Guerre, au sein du Conseil pour la défense et la sécurité

 12   nationale, j'étais l'adjoint du ministre, je recevais des rapports

 13   confidentiels. Pourquoi est-ce qu'en plus de ces cinq déclarations du

 14   gouvernement et de ces cinquantaines de déclarations de Franjo Tudjman, je

 15   devrais chercher en plus des articles de journaux ? Je sais ce que nous

 16   faisions, ce que nous déclarions, et il faudrait qu'en plus j'aille

 17   chercher dans les journaux ce que l'un des meilleurs réalisateurs de

 18   théâtre de l'ex-Yougoslavie, Miroslav Medjimorec, le chef du SIS, était en

 19   train de faire alors que nous étions des amis depuis des années et des

 20   années. Moi, je le sais tout cela.

 21   Je le sais ne serait-ce qu'à partir du texte précédent que nous avons

 22   vu où Franjo Tudjman dit, N'allez pas vers Trebinje pour que nous libérions

 23   le sud de la Croatie. On ne parle pas de conquête de la Bosnie-Herzégovine.

 24   Cela non plus, même cela il ne le permet pas. Il ne veut pas qu'on entre

 25   sur le territoire.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne suis pas en désaccord avec ce que vous dites.

 27   Mais la difficulté, vous dites, Moi, j'étais dans ce Conseil de la Défense

 28   nationale, mais le problème, vous êtes accusé, Général, même si la

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  1   présomption d'innocence joue totalement, vous êtes dans la situation d'un

  2   accusé. Feu Tudjman, il est décédé, malheureusement, mais Tudjman est dans

  3   l'entreprise criminelle commune.

  4   Donc si vous aviez des éléments de preuve autres qui venaient de

  5   sources indépendantes entre guillemets, rapports des services secrets qui

  6   informent l'autorité politique de tel problème politique dans un autre

  7   pays, ça, on peut penser que ceux qui font ce type de rapport, ils font

  8   leur travail sans parti pris et ceci peut être tenu en compte. Parce qu'il

  9   y a votre parole, bien entendu, vous le dites sous le serment, mais

 10   n'oubliez pas que vous êtes accusé.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, il s'agit là, je

 12   vous en prie, d'un gouvernement qui est composé de tous les partis en

 13   Croatie, tous les partis, ce gouvernement, alors les journaux ne peuvent

 14   rapporter que les déclarations du premier ministre, du président de tel ou

 15   tel parti, du SDP ou des libéraux. C'est ce gouvernement-là qui prend des

 16   positions et qui représente la politique de la République de Croatie.

 17   Franjo Tudjman représente aussi la politique de la République de Croatie.

 18   Mes propres prises de position en sont également, dans une certaine

 19   mesure, représentatives. Et en quoi devrais-je alors maintenant m'aventurer

 20   sur le terrain de ce que les journalistes ont pu avoir à débattre ?

 21   J'aurais pu le faire, et nous avons vu ces numéros du soldat croate, nous

 22   avons vu qu'il y a été fait état des positions officielles et de la

 23   politique officielle de la République de Croatie. Il y avait des

 24   journalistes qui écrivaient également dans d'autres journaux, le Pr

 25   Butkovic et d'autres qui étaient des spécialistes en sociologie et des

 26   spécialistes de la guerre. Nous avons ici une légitimité de type urbi,

 27   comme nous disons, c'est-à-dire que c'est la politique de la République de

 28   Croatie à tous les échelons du gouvernement.

Page 41323

  1   Donc il n'y a pas de changement possible des frontières, et ici vous

  2   verrez que les Serbes déclarent qu'ils ne reconnaissent pas la déclaration

  3   de Bruxelles. Et franchement, je ne vois pas ce qu'il serait possible ici

  4   de faire de plus. Ne nous comprenons pas mal, il y avait évidemment le

  5   Parti croate du droit, le HSP, il était le seul à affirmer que les

  6   Musulmans étaient des Croates et qu'il y avait des Musulmans qui

  7   affirmaient la même chose et qu'il fallait qu'il y ait un seul Etat, la

  8   Croatie et la Bosnie-Herzégovine au sein d'un seul et même Etat. Ils ont

  9   reçu 6 % des voix des électeurs, et ils ne représentaient vraiment rien ni

 10   personne. Ils n'étaient pas au sein du gouvernement. Bien entendu, les

 11   positions divergentes doivent être représentées, mais là, nous avons les

 12   positions des trois organes-clés de l'Etat, le gouvernement, les partis et

 13   le président. Et je ne vois pas en quoi il serait nécessaire de se pencher

 14   en plus sur les journaux et la presse pour voir qui a pu déclarer ou

 15   objecter quoi que ce soit.

 16   Lorsque je passais en Bosnie-Herzégovine, je devenais un Croate né en

 17   Bosnie-Herzégovine et j'en défendais les intérêts. A ce moment-là, ce que

 18   M. Greguric avait pu déclarer, cela était devenu tout à fait immatériel

 19   pour moi. Nous étions tout de même assez intelligents pour dire oui à la

 20   Bosnie-Herzégovine, nous n'attaquerons personne, mais nous avons des droits

 21   en tant que peuple constitutif.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien, le but pour vous de présenter

 23   ce livre, c'est de dire que ce livre illustre la politique gouvernementale

 24   croate et que sur les événements des années 1991, 1992, 1993, on a la

 25   vision du gouvernement croate, qui est, vous l'avez rappelé, un

 26   gouvernement d'union nationale. C'est bien ça ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 28   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

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  1   Permettez-moi un bref commentaire. Page 68 du compte rendu

  2   d'audience, vers la ligne 10, où le Président indiquait, tout du moins dans

  3   le compte rendu d'audience, que le général a un rôle à jouer, qu'il doit

  4   prouver qu'il est innocent. Je ne sais pas si vous vouliez dire cela de

  5   cette façon-là ou pas. Je ne suis pas tout à fait à l'aise si ceci reste

  6   dans le compte rendu sans qu'il y ait de précision.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais préciser ce que j'ai dit. J'ai dit que dans

  8   la procédure devant ce Tribunal, il y a les deux parties qui jouent un

  9   rôle. La Défense joue un rôle, le Procureur joue un rôle. Le Procureur

 10   accuse, la Défense se défend. Voilà, c'est ça le rôle. Et que dans le cadre

 11   de ce rôle, l'accusé peut jouer un rôle, voilà ce que j'ai dit, mais il

 12   peut ne rien faire. C'est son choix.

 13   C'est clair, Monsieur Stringer ?

 14   M. STRINGER : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Je

 15   vous remercie.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 17   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous aussi

 18   souhaitions réagir à cette page du compte rendu d'audience, car il nous a

 19   semblé qu'il devait s'agir d'une erreur dans l'interprétation à cause de la

 20   rapidité avec laquelle nous avons avancé et nous sommes passés d'un texte à

 21   l'autre. Mais maintenant allons-nous faire la pause ou poursuivre ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] La pause.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : On peut faire la pause de 20 minutes. On fait la

 24   pause.

 25   --- L'audience est suspendue à 17 heures 34.

 26   --- L'audience est reprise à 17 heures 57.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, vous vouliez prendre la parole.

 28   M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Effectivement,

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  1   mais très brièvement, j'espère.

  2   Je ne sais pas si l'interrogatoire principal sera terminé aujourd'hui, mais

  3   nous allons opérer une transition pour passer de son interrogatoire

  4   principal aux questions du Président, et puis il y aura en contre-

  5   interrogatoire les questions des autres équipes de la Défense, puis celles

  6   de l'Accusation. Ça fait pas mal de temps qui s'est écoulé, mais le 5

  7   septembre 2008, la Chambre d'appel a rendu une décision qui confirmait une

  8   décision de la présente Chambre de première instance laquelle accordait à

  9   la Défense Praljak la possibilité de continuer les contacts, la

 10   communication avec le général Praljak pendant toute la durée de sa

 11   déposition. Cette question a été soulevée il y a longtemps de cela. La

 12   Chambre de première instance avait décidé que les contacts, la

 13   communication pouvaient effectivement se maintenir avec les avocats du

 14   général Praljak pendant toute la déposition de ce dernier.

 15   Je souhaitais vous demander une précision, parce que maintenant nous

 16   allons bientôt terminer l'interrogatoire principal. Est-ce que le général

 17   pourra toujours communiquer avec ses avocats ? Pourra-t-il, par exemple,

 18   examiner les documents qui vont être communiqués à l'avance à la Défense

 19   avant le contre-interrogatoire ? Il serait utile de savoir si c'est là

 20   quelque chose qui va se passer ou pas. Des documents vont être communiqués

 21   à la Défense Praljak qui seront utilisés dans les prochains contre-

 22   interrogatoires, or je ne sais pas, Monsieur le Président, si vous avez

 23   l'intention vous-même d'utiliser des documents et de les communiquer aux

 24   parties à l'avance, est-ce que les avocats pourront étudier ces documents

 25   avant les contre-interrogatoires avec M. Praljak ?

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans votre intervention, il y a deux choses.

 27   Il y a la question des entretiens du général Praljak avec ses avocats et

 28   puis il y a la question des documents.

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  1   En ce qui me concerne, je vais vous envoyer dès demain par courriel aux uns

  2   et aux autres la liste des documents que je compte présenter au général

  3   Praljak. Ces documents sont tous déjà admis, donc ce n'est pas une

  4   révélation ni un mystère.

  5   Ces documents sont constitués de deux séries. La première série,

  6   c'est des documents qui sont mentionnés dans le mémoire préalable du

  7   Procureur, donc vous les connaissez puisque ce sont des documents qui sont

  8   en notes de bas de page, donc vous les avez, et là il n'y a pas de mystère

  9   et j'en ferai la liste. Et la deuxième partie des documents, ce sont les

 10   documents que le général Praljak a cités dans ses écritures diverses, et il

 11   y aura également la liste de ces documents.

 12   Avant cela, il y aura quatre ou cinq documents que j'examinerai avec

 13   lui. C'est les documents qui sont relatifs aux faux argués. Donc on en a vu

 14   un tout à l'heure, mais il y en a d'autres, donc j'aborderai avec lui

 15   l'examen de ces documents dits faux. J'aborderai également les transcripts

 16   présidentiels où il a participé lui-même dans les réunions. A ce moment-là,

 17   vous avez la liste des transcripts où il a participé, et, mais ce sera en

 18   fonction du temps, j'aborderai également des transcripts présidentiels dans

 19   lesquels il n'était pas là lui.

 20   Mais dont nous avons des éléments permettant de penser que M. Tudjman

 21   se tenait au courant en temps réel de tous les événements qui se

 22   déroulaient en République de Bosnie-Herzégovine; notamment les événements

 23   de nature militaire, et ce qui a un intérêt au niveau du conflit armé

 24   international ou au niveau de l'entreprise criminelle commune. Donc vous

 25   allez avoir la liste de ces documents, mais qui sont déjà connus de tous

 26   puisqu'ils ont déjà été discutés, débattus et admis.

 27   Maintenant, pour la deuxième partie sur la communication de l'avocat et de

 28   M. Praljak, il faut qu'entre Juges on en discute parce que je n'ai pas la

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  1   réponse au niveau de la Chambre. Je ne peux pas vous répondre tout de

  2   suite, mais comme on a huit jours devant nous, vous aurez la position de la

  3   Chambre en la matière.

  4   Est-ce que ma réponse vous satisfait ?

  5   M. STRINGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous

  6   remercie.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour l'heure qui reste, on va essayer de terminer,

  8   Maître Pinter, donc essayez de terminer. Il nous reste juste une heure, et

  9   terminez avec les quelques documents qui restent.

 10   Mme PINTER : [interprétation] En effet, Monsieur le Président, et je crois

 11   savoir que nous allons terminer avant la fin de l'audience d'aujourd'hui et

 12   que je serai en mesure de dire que nous en avons terminé avec

 13   l'interrogatoire principal.

 14   Q.  Général, finissons-en avec le document qui nous occupait avant la pause

 15   afin de pouvoir passer à d'autres sujets.

 16   R.  En page 341, nous avons juste une phrase, à savoir que le Dr Franjo

 17   Tudjman a envoyé un message de paix aux Nations Unies et aux chefs d'Etats

 18   du monde entier, en rappelant que la Croatie se consacre à la bonne entente

 19   et à la paix. Donc c'est là un document parmi des dizaines et des dizaines

 20   de documents de cette nature qui ont été envoyés.

 21   Q.  C'est cette page que nous avons mentionnée avant la pause, n'est-ce pas

 22   ?

 23   R.  Oui. Avançons, nous pouvons passer à la page 419.

 24   Q.  C'est la page 15 de la traduction anglaise. Dans le prétoire

 25   électronique, c'est 3D41-0390, et en version croate 3D41-1317.

 26   R.  En bref, la Croatie a reconnu la Slovénie et la Macédoine. La Croatie,

 27   le 15 février 1992, suit avec une attention toute particulière l'évolution

 28   de la situation en Bosnie-Herzégovine, à laquelle elle a proposé un accord

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  1   de coopération économique afin d'avancer dans ce domaine. La Croatie

  2   soutient le référendum et un accord entre les trois peuples. Et en cas de

  3   résultat positif à ce référendum, elle reconnaîtra la Bosnie-Herzégovine.

  4   Passons maintenant à la page 460 -- 435, pardon. Ah non, nous n'avons pas

  5   traduit cela. Alors 460, s'il vous plaît.

  6   Q.  C'est la page 3D41-0393 en anglais, et 3D41-1348 en version croate.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Une partie de la page a été

  8   traduite. Nous avons un passage à la page 3D-0391.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Voilà de quoi il s'agit : Greguric

 10   a informé le gouvernement des événements en République socialiste de

 11   Bosnie-Herzégovine concernant le référendum portant sur l'indépendance, il

 12   est important ici de mentionner le fait que la présidence de la Bosnie-

 13   Herzégovine a accepté la majorité des exigences du SDS, du Parti

 14   démocratique serbe, et que cette même présidence de la Bosnie-Herzégovine a

 15   fait la déclaration suivante, à savoir que le référendum qui s'est tenu ne

 16   préjuge pas de l'organisation interne ultérieure qui serait celle de la

 17   Bosnie-Herzégovine. Voilà jusqu'où on a été. On parle toujours de cette

 18   organisation interne de la Bosnie-Herzégovine, à ceci près que le SDS a

 19   réussi à obtenir cet état de fait, à savoir qu'au référendum, on ne parle

 20   toujours pas de ce que sera cette organisation interne de la Bosnie-

 21   Herzégovine, et quant à savoir quels sont leurs souhaits, on sait de quoi

 22   il s'agit.

 23   Passons à la page 460.

 24   Mme PINTER : [interprétation] Juste pour expliquer au Juge Trechsel, c'est

 25   ma faute, c'est moi qui ai sauté une page. Quant à la page 460, c'est la

 26   page 3D41-1348 en version croate et en anglais, 3D41-0393.

 27   Q.  C'est la page 18 de la traduction en anglais.

 28   R.  C'est toujours la même histoire, on répète comme des perroquets.

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  1   Greguric fait état que la Croatie a toujours pris position pour une Bosnie-

  2   Herzégovine unitaire, car elle considérait que c'était la seule solution

  3   pour cette république, ce qui ne signifiait pas qu'il n'y avait pas matière

  4   à se préoccuper du sort des Croates en Bosnie-Herzégovine.

  5   Pour ce qui est de cette histoire avec le HSP, le Parti croate du

  6   droit, il dit que ce sont des bêtises et que cela n'a rien à voir avec la

  7   politique officielle de l'Etat croate, que le gouvernement va proposer que

  8   la Croatie reconnaisse la Bosnie-Herzégovine. Il dit que ce que font les

  9   Serbes là-bas, cela entachera la conscience de la communauté internationale

 10   et il ne faudrait pas permettre que se répète le scénario croate, à savoir

 11   que l'on fragmente le pays.

 12   Passons en page 469, 17 mars 1992.

 13   Q.  C'est la page 18 de la traduction anglaise, dans le système du prétoire

 14   électronique, page 3D41-1351, et 3D41-0393.

 15   R.  La Croatie, la Slovénie et la Géorgie ont été admises comme membres à

 16   l'OSCE, et l'ordre, la session de l'OSCE à Helsinski, le vice-premier

 17   ministre Mato Granic a appelé la communauté européenne à reconnaître la

 18   Bosnie-Herzégovine et la Macédoine comme Etats indépendants et souverains.

 19   Voilà la politique menée. La Croatie appelle les Etats membres de l'OSCE à

 20   reconnaître la Bosnie-Herzégovine et la Macédoine.

 21   Passons ensuite à la page 507.

 22   Q.  C'est la page 3D41-1365 en version croate, et D41-0398 en version

 23   anglaise.

 24   R.  C'est le 8 avril 1992. Une déclaration du gouvernement par rapport à la

 25   situation en Bosnie-Herzégovine.

 26   Q.  Général, excusez-moi, il faut que je donne les numéros. Donc 3D41-1365,

 27   c'est le texte en croate, et en anglais, 3D41-0398. C'est la page numéro 23

 28   de la traduction anglaise.

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  1   R.  Il y a eu une déclaration préliminaire du gouvernement concernant la

  2   situation en Bosnie-Herzégovine et ensuite un débat auquel ont participé

  3   tous les ministres ou presque. Un texte d'une déclaration du gouvernement

  4   de la République de Croatie a été adopté concernant cette situation en

  5   Bosnie-Herzégovine, mais n'a pas été traduit. Est-ce qu'on peut peut-être

  6   fournir cela ultérieurement ?

  7   Q.  On le peut.

  8   R.  Il s'agit d'une déclaration à huit points absolument limpide, qui

  9   définit la position du gouvernement de la République de Croatie pour ce qui

 10   est de la situation en Bosnie-Herzégovine; qu'est-ce que l'on reconnaît,

 11   qu'est-ce que l'on souhaite, quelles sont les positions de principe, ce

 12   sont huit points qui en cette date du 8 avril sont adoptés; on reconnaît

 13   une Bosnie-Herzégovine souveraine et indépendante; on parle déjà d'un

 14   génocide.

 15   On parle des conclusions du Sabor, de l'assemblée parlementaire, au

 16   point 2, de la République de Croatie. Il est question ici des conclusions

 17   qui ont été adoptées lors des sessions de tous les organes du Sabor, le 27

 18   mars 1992. On a proposé au président de la République de reconnaître l'Etat

 19   de Bosnie-Herzégovine, ce que ce dernier a fait le 7 avril 1992.

 20   Au point 3, il est question de la reconnaissance mutuelle de la Bosnie-

 21   Herzégovine ou de la reconnaissance internationale de la Bosnie-

 22   Herzégovine. Le gouvernement de la République de Croatie salue la

 23   reconnaissance qui a été celle de la communauté européenne, des Etats-Unis

 24   et d'autres Etats.

 25   Au point 5, le gouvernement soutient une nouvelle fois l'intégrité

 26   territoriale de la Bosnie-Herzégovine et condamne les tentatives d'y porter

 27   atteinte et les attaques visant cette dernière. Il soutient également la

 28   souveraineté de la Bosnie-Herzégovine.

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  1   Je vous prie de bien vouloir faire traduire ce texte, ce n'est qu'un

  2   exemple parmi des dizaines d'autres textes similaires. Mais si nous

  3   pouvions en avoir la traduction, peut-être que cela pouvait être versé.

  4   Alors passons à la page 542. Il n'y a pas de traduction ici. C'est la date

  5   du 7 mai.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : A la page 542, vous me permettrez de rester sur la

  7   page 506 et 507. A la page 506, M. Greguric dit que la République de

  8   Croatie a reconnu unilatéralement la Bosnie-Herzégovine comme état

  9   souverain et indépendant. C'est mentionné. Le 8 avril, il dit ceci

 10   également, et je pense que c'est intéressant. Il dit que le HVO a été

 11   établi comme la seule institution de défense des Croates en Bosnie-

 12   Herzégovine, laquelle comprend un certain nombre de Musulmans. Il parle du

 13   HVO, il ne dit pas que c'est la République de Croatie qui a créé le HVO. Il

 14   dit là, enfin si ce qu'il dit est vrai, et je n'en sais rien, il parle du

 15   HOS. Il semble également lier le rôle du HOS dans ce qui va se passer en

 16   République de Bosnie-Herzégovine.

 17   Qu'est-ce que vous dites, vous avez vu ça. Je n'ai pas toute la page 507

 18   traduite, mais vous l'avez lu, vous. Qu'est-ce qu'il veut dire, M. Greguric

 19   ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] 506 -- 507.

 21   Mme PINTER : [interprétation]

 22   Q.  507 en croate, c'est le 8 avril.

 23   R.  Monsieur le Président, s'agissant de printemps 1992, on en a longuement

 24   parlé. Le HVO s'est auto-organisé d'abord pour la défense. Il n'y avait pas

 25   que des Croates, il y avait aussi les Musulmans résidants sur les

 26   territoires où nous avions réussi à créer des unités pour résister à

 27   l'agression, et Greguric en informe tout simplement le gouvernement. Il y a

 28   là des forces armées qui défendent la Bosnie-Herzégovine, tant les

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  1   Musulmans que les Croates.

  2   Il y a le problème du HOS qui était en Croatie considérable, en

  3   attendant que l'autorité ne se consolide dans cette guerre destructrice

  4   qu'on a eu nous aussi, on a essayé de résoudre tout cela pendant la durée

  5   totale de 1992, jusqu'à ce que le problème ne soit surmonté. Le HOS était

  6   une armée parallèle, on a réussi avec l'aide de M. Prkacin qui faisait

  7   partie du HOS, il a compris qu'on avait déjà pas mal de problème avec une

  8   armée, maintenant on en avait deux tout à coup --

  9   Q.  Qu'est-ce qu'on dit au 8 avril, a demandé M. le Président, puisque ce

 10   n'est pas traduit en anglais, mis à part la création du Conseil croate de

 11   la Défense ?

 12   R.  Quel paragraphe ?

 13   Q.  Dans le livre, 8 avril, page 507.

 14   R.  D'abord, il dit que la Croatie a convié l'Union européenne, l'OSCE et

 15   les Nations Unies à faire stopper l'agression contre la Croatie et la

 16   Bosnie-Herzégovine. On dit qu'il y la création du HVO qui est la seule

 17   formation institutionnelle de la défense des Croates en Bosnie-Herzégovine,

 18   qui englobe un certain nombre de Musulmans. La résistance devient plus

 19   organisée. Le Parti du droit organise le HOS, cette alliance de la défense

 20   croate, alors ce n'est pas eux qui le disent, c'est moi. On dit qu'on a

 21   pilonné Siroki Brijeg et Citluk et que les Chetniks et la JNA s'attaquent à

 22   Kupres. On en a déjà parlé. A Sarajevo, suite au bombardement grand serbe,

 23   il y a eu 30 hommes de tués en l'espace d'une semaine; les Etats-Unis

 24   condamnent la Serbie pour la propagation de la guerre en Bosnie-

 25   Herzégovine. On dit que le ministère de la Défense de la République de

 26   Croatie convie les pilotes de l'armée croate à rejoindre les rangs des

 27   unités militaires croates. C'est ce qui est dit au sujet du 8 avril. Après,

 28   il y a un long texte qui parle des positions prises par le gouvernement.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, merci. On peut revenir -- oui.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous estimez

  3   utile cette partie-là du livre, et je pense que ce serait utile aussi, la

  4   fin de la page commence avec la déclaration du gouvernement pour ce qui est

  5   de la situation en Bosnie-Herzégovine, et la page d'après parle des

  6   positions du gouvernement de la République de Croatie vis-à-vis de l'ABiH,

  7   en sa qualité d'Etat autonome indépendant.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je demande à ce que ce soit traduit. C'est un

  9   document important. Je pensais que c'était déjà fait, et j'aimerais que

 10   cela soit communiqué aux Juges de la Chambre. Il y a huit paragraphes qui

 11   de façon claire reprennent le tout depuis le début.

 12   Je pense qu'on a encore un document à étudier. C'est la page 542.

 13   Non, on ne l'a pas, le 542.

 14   Mme PINTER : [interprétation]

 15   Q.  Vous parlez du 7 mai ou --

 16   R.  Non, ce n'est pas la peine. C'est toujours la même chose. Est-ce que

 17   vous avez le 552, pour finir ?

 18   Q.  Page 29 version anglaise, et dans le e-court, c'est le 3D41-0404.

 19   Version croate, 3D41-1386. La date est celle du 14 mai 1992.

 20   R.  Oui. Le gouvernement, une fois de plus, suite à un débat, a fait un

 21   communiqué pour l'opinion publique, et c'est important parce qu'au

 22   paragraphe 1 on parle des droits de l'homme et des droits ethniques, et il

 23   est dit que le gouvernement apporterait son soutien aux positions adoptées

 24   par la Communauté européenne vis-à-vis de la Serbie et demande aux

 25   autorités de Belgrade de respecter l'intégrité territoriale de la Croatie.

 26   Au point 2, il est question de la Bosnie-Herzégovine, et on dit que

 27   la Croatie a été parmi les premiers Etats à avoir reconnu l'autonomie et la

 28   souveraineté de la Bosnie-Herzégovine dans ses frontières existantes.

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  1   On dit ce que la Croatie a fait, puis on reparle de l'intégralité de

  2   la souveraineté territoriale de la Bosnie-Herzégovine, et il est dit que le

  3   gouvernement de la République de Croatie s'emploierait en faveur d'une

  4   autonomie et d'une souveraineté des trois peuples égaux en droits dans les

  5   frontières reconnues par la communauté internationale.

  6   C'est à l'infini la répétition des mêmes positions, et je crois qu'à

  7   tous les niveaux des autorités en Croatie, il a été urbi et orbi aux

  8   Nations Unies, aux Etats-Unis, à la CSCE, à l'Union européenne. Il a été

  9   répété à l'envie que la Bosnie-Herzégovine était un pays souverain,

 10   autonome et indépendant, et on apporte notre soutien à une concertation --

 11   un accord entre les trois peuples constitutifs, et cetera.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Sur ce thème, j'essaie de trouver une logique

 13   dans toute chose. Les spéculations, ce n'est pas mon fort. J'essaie d'être

 14   logique.

 15   Regardez à la page 500, c'est à la page 20 de la traduction anglaise,

 16   le 2 avril 1992. M. Greguric dit ceci :

 17   "La guerre semble s'étendre en Bosnie-Herzégovine."

 18   Après il ajoute ceci, je lis ce qui est écrit, et si c'est vrai, j'en

 19   tiendrai compte. Je ne peux pas mettre cela de côté. Il dit ceci, la

 20   diplomatie et les représentants de la République de Croatie plaident pour

 21   la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine dans toutes les conférences. Il

 22   affirme que le gouvernement croate plaide dans toutes les instances pour la

 23   reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine.

 24   Alors je me dis, est-ce logique d'une part de dire partout dans le

 25   monde entier qu'il y a une république qu'il faut reconnaître, tout en ayant

 26   des idées d'annexion dans le cadre de l'entreprise criminelle commune ?

 27   J'essaie de comprendre une logique là-dessus.

 28   Général, est-ce qu'à votre connaissance, au mois d'avril 1992, le

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  1   gouvernement croate, dont vous étiez, je le rappelle, ministre adjoint à un

  2   moment donné, se déployait dans le monde en faveur de la reconnaissance par

  3   tout le monde de la République de Bosnie-Herzégovine ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Partout, à tout endroit et à toute heure,

  5   auprès de l'Union européenne, auprès de la CSCE, -- enfin, Messieurs les

  6   Juges, j'aimerais que ce livre entier puisse être traduit, mais cela

  7   donnerait des piles de documents. Alors partout et quelques jours à peine

  8   après ceci, la Croatie a reconnu l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine.

  9   Il n'y a pas de logique, bien sûr, Messieurs les Juges, de voir quelqu'un

 10   penser que tout ceci se fait et qu'on croise les doigts pour tromper la

 11   CSCE, l'Amérique et l'Union européenne, ce gouvernement et Franjo Tudjman,

 12   le Parlement et Praljak, entre guillemets, sont si stupides pour

 13   s'aventurer à dire une chose au monde entier et passer sous table pour

 14   faire autre chose. Est-ce que j'ai vraiment l'air d'un crétin quand je

 15   parle de Tudjman et des autres ? Il n'y a aucune logique à tout cela. Ce

 16   n'est pas vrai.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : De mémoire, on a vu un élément de preuve, qui a été

 18   admis, d'ailleurs, qui est le compte rendu d'une réunion que vous avez eue

 19   avec des diplomates français et des militaires de haut niveau à Zagreb.

 20   Voyant les noms de ceux qui participaient à cette réunion, vous aviez là la

 21   fine fleur de la diplomatie française et de l'armée française. Lors de

 22   cette réunion à laquelle vous étiez présent, est-ce qu'il y a eu des

 23   discussions sur le double jeu de la République de Croatie à l'égard de la

 24   République de Bosnie-Herzégovine ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais on nous a posé la question, et on a dit

 26   de façon cristalement claire. Je l'ai fait auprès de M. le Général et de

 27   cette délégation de haut niveau française. Notre intérêt, au niveau de

 28   cette Bosnie-Herzégovine indépendante, c'est d'avoir une espèce

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  1   d'autonomie. J'ai affirmé -- je le savais, les Serbes, pas plus que les

  2   Musulmans, mais je ne blâme personne de ne pas avoir été prêt pour la

  3   guerre, mais le fait est qu'ils n'étaient pas prêts. Ils ne voulaient pas

  4   voir ce que même les aveugles voyaient, à savoir que les Serbes se

  5   préparaient depuis des années et des siècles à le faire, et ils ont perdu

  6   beaucoup de territoire. Alors l'armée de Bosnie-Herzégovine s'efforçait de

  7   nous prendre nos territoires à nous, et c'est ce qui s'est passé.

  8   Monsieur le Juge Antonetti, et je lui ai dit cela. Je l'ai dit, là-

  9   bas. J'ai dit ce qui se faisait. J'ai œuvré en faveur de la paix jusqu'à

 10   mai -- juin -- enfin, jusqu'au 30 avril, plutôt. On peut œuvrer en faveur

 11   de la paix, mais vous pouvez voir dans ce document, page 500.

 12   Ajanovic a dit en public en avril que -- et il était, je le précise,

 13   un haut responsable du SDA. Ajanovic estime que l'armija n'est pas une

 14   force d'occupation. Il a dit que l'armée populaire yougoslave était une

 15   force d'occupation. Or, M. Izetbegovic dit, Je ne pense pas cette armée

 16   soit une force d'occupation. Et si Ajanovic a déclaré telle chose, il a

 17   outrepassé ses compétences parce qu'il n'a pas présenté les opinions

 18   défendues par le SDA.

 19   Donc on ne saurait lire rien de pire, déjà M. Izetbegovic, le 2

 20   avril, affirme que cette armée, la JNA, n'est pas une force d'occupation en

 21   Bosnie-Herzégovine. Alors qu'elle a bombardé Mostar et vous aviez des morts

 22   autant que vous en vouliez. Et là, vous faites de la politique avec et vous

 23   vous demandez ce qui sera fait. Oui, je vais ralentir. Je vais ralentir.

 24   Ayez un peu d'imagination, mettez-vous à la place de ces gens-là, on

 25   est en train de vous tuer, votre famille, votre peuple, les Musulmans et

 26   tout le reste, et Ajanovic, qui est ce qu'il est, a dit, C'est des

 27   agresseurs. Et Izetbegovic dit, Non, il n'a pas le droit de le dire.

 28   M. KHAN : [interprétation] Messieurs les Juges, ceci a été souvent

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  1   dit. On peut peut-être le rappeler à M. Praljak, s'il veut que ses propos

  2   soient consignés, il doit parler plus lentement. C'est vraiment difficile

  3   de suivre la cadence qu'il mène.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous parlez très vite et quand les

  5   interprètes ne prennent pas ce que vous dites, vous avez un accent

  6   circonflexe. Alors essayez de ralentir. Moi aussi parfois je parle trop

  7   vite et je m'en excuse auprès de tout le monde. Mais essayez aussi de

  8   ralentir.

  9   Et je remercie Me Khan de son intervention.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je répèterai encore une fois.

 11   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Vu la vitesse, on a omis un mot très

 12   important au compte rendu d'audience. Page 84, ligne 15, au tout début, le

 13   général a dit, "On nous a posé la question," et dans le compte rendu

 14   d'audience, on ne voit pas les mots "On nous a demandé."

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie tous et toutes. Je souhaite

 16   terminer aujourd'hui.

 17   Donc le 2 avril 1992, un haut responsable, donc le porte-parole du parti

 18   qui s'appelle le SDA, Irfan Ajanovic déclare que la JNA représente une

 19   force d'occupation en Bosnie-Herzégovine. Or le président de son parti et

 20   le président de la présidence de la Bosnie-Herzégovine, en même temps,

 21   Alija Izetbegovic, fait une déclaration publique et il rejette la

 22   déclaration d'Ajanovic en affirmant, je cite : "Je ne pense pas que cette

 23   armée est une armée d'occupation." Et si Ajanovic a déclaré ceci, il a

 24   outrepassé ces attributions, car cela ne correspond pas à la position du

 25   Parti de l'Action démocratique.

 26   Je m'adresse à toutes et à tous présents dans ce prétoire, en tant

 27   qu'individu et en tant que membre de peuple, est-ce que vous auriez suivi

 28   cette position politique au moment où la JNA vous tue depuis des mois sur

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  1   la totalité du territoire de la Bosnie-Herzégovine ? Et s'agissant de mes

  2   informations, Mostar, la totalité des villes sont bombardées, pilonnées,

  3   attaquées avec des avions, et cetera. Donc ce n'est pas compréhensible. On

  4   ne peut forcer aucun peuple de l'accepter, d'accepter que cette armée qui

  5   le tue soit acceptée comme le dit M. Izetbegovic, à savoir, Non, cela n'est

  6   pas exact, ce n'est pas une armée d'occupation.

  7   Voilà, je n'ai plus rien à ajouter à ce sujet.

  8   Mme PINTER : [interprétation]

  9   Q.  Nous pouvons en terminer avec le livre.

 10   R.  Juste la dernière partie.

 11   Q.  Le 8 juin ?

 12   R.  Non, le 17. Attendez un instant, il me semble que c'est la fin.

 13   Q.  Le 8 juin c'est la fin ?

 14   R.  Oui, la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui en Bosnie-

 15   Herzégovine.

 16   Q.  3D41-0408, 3D41-1398 en version croate, page 33 de la traduction. 3D41-

 17   1398, en croate, 1398, page 33 de la traduction anglaise.

 18   Je vous en prie, Général.

 19   R.  Puisqu'il ne nous reste plus beaucoup de temps pour terminer, il n'y a

 20   plus grand-chose à ajouter. J'invite toutes et tous à prendre connaissance

 21   de ce texte. Après la résolution 758, le gouvernement s'adresse à toutes

 22   les institutions, à toutes les organisations sous menace d'intervention

 23   militaire de demander que l'on mette fin sur le champ à l'agression contre

 24   la République de Croatie. Ils disent, En dépit des sanctions économiques,

 25   il est dit, A plusieurs reprises pendant l'année passée, le gouvernement de

 26   la République de Croatie a souligné qu'il était indispensable que les armes

 27   lourdes de l'ex-JNA soient placées sous le contrôle international, que les

 28   exigences présentées sous forme d'ultimatum de la communauté internationale

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  1   demandant que la Croatie accepte que des armes lourdes soient emportées

  2   depuis les casernes assiégées de la JNA vers la Bosnie-Herzégovine. Mais

  3   ils disent, Mais nous vous disions que ceci allait nécessairement entraîner

  4   une guerre dans ce pays en Bosnie-Herzégovine. Mais tout un chacun le

  5   savait. Indépendamment de tout cela, les protagonistes et médiateurs

  6   internationaux s'aveuglent. Je ne sais pas ce qui leur prend. Ils demandent

  7   à ce que ces armes de la JNA partent vers la Bosnie-Herzégovine.

  8   Et dans la suite du texte il est dit en l'espace de deux mois combien de

  9   réfugiés ont été pris en charge. Il est dit que de nouveau depuis le

 10   territoire de la Bosnie-Herzégovine on attaque Dubrovnik, Slavonski Brod,

 11   et cetera. Il n'y a rien à ajouter à cela.

 12   Je vous présente mes excuses, Monsieur le Juge Trechsel. C'est par souci de

 13   terminer aujourd'hui, j'essaie d'en terminer avant la fin de l'audience

 14   d'aujourd'hui.

 15   Nous allons communiquer le livre dans son intégralité aux Juges de la

 16   Chambre et vous pourrez voir si j'ai bien choisi les textes. Je vous

 17   remercie.

 18   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin Praljak, j'ai juste une petite

 19   question de terminologie, de vocabulaire, parce que j'attache beaucoup

 20   d'importance à la terminologie.

 21   Le livre est très intéressant que vous nous présentez, je trouve dans

 22   cette page qui concerne la date du 8 juin, l'auteur qui parle de "all the

 23   killing instruments of the former JNA," tous les instruments meurtriers de

 24   l'ex-JNA. Alors vous-même en tant que général, c'est ça la terminologie

 25   pour les armes que possèdent les forces armées ? N'est-ce pas à travers ce

 26   langage quelque témoignage de la façon biaisée de cet auteur de présenter

 27   le problème ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'arrive pas à retrouver cet endroit

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  1   exactement.

  2   M. LE JUGE MINDUA : Evidemment, c'est la page 582. Date, 8 juin : "La

  3   situation actuelle en Bosnie-Herzégovine." Troisième paragraphe.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais au troisième paragraphe, il est question

  5   des réfugiés. Il est dit que depuis deux mois, 270 000 réfugiés sont

  6   arrivés de Bosnie-Herzégovine. Le gouvernement dit que l'aide de la

  7   communauté internationale est insuffisante et que la Croatie n'est pas en

  8   mesure de continuer de résoudre ces problèmes.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est le paragraphe précédent,

 10   Monsieur Praljak. Je m'excuse de vous interrompre. 

 11   M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

 12   Je ne sais pas si la question du Juge Mindua a bien été complètement

 13   traduite, parce que je sais que la question qu'il a posée ne se retrouve

 14   pas entièrement dans le compte rendu en anglais. Peut-être que le témoin

 15   n'a pas bien saisi, surtout pour ce qui est des instruments de torture. Je

 16   ne pense pas que ceci se retrouve dans le texte ou dans le compte rendu.

 17   C'est peut-être pour ça qu'il y a une certaine confusion.

 18   M. LE JUGE MINDUA : Je vais reprendre la question pour le témoin.

 19   Monsieur le Témoin, nous avons le paragraphe qui parle de la situation

 20   actuelle en Bosnie-Herzégovine, en anglais, "the current situation in

 21   Bosnia and Herzegovina," à la date du 8 juin. Alors nous avons le

 22   paragraphe numéro 3 qui commencent avec "le gouvernement de la République

 23   de Croatie." Dans ce paragraphe, l'auteur utilise le terme que je trouve

 24   assez dur, "killing instrument of the former JNA." Les forces armées

 25   doivent avoir des armes et les armes en soi n'ont pas ces qualificatifs,

 26   vous m'entendez, Général. La question que je me pose c'est de savoir si

 27   cette terminologie n'est pas, comment dirais-je, le signe que l'auteur a

 28   une vue assez biaisée. Qu'est-ce que vous en pensez ? Une vue assez

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  1   partisane, en somme, biaisée.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Mindua, ce n'est pas ainsi

  3   que cela est rédigé dans ce texte, de la manière dont j'ai entendu vos

  4   propos interprétés. Il s'agit de conclusion adoptée par le gouvernement. Il

  5   y est dit que c'est adressé à la communauté internationale. Il est dit

  6   qu'il n'y a plus de justification pour la communauté internationale de

  7   s'atermoyer.

  8   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur Praljak, est-ce que je peux

  9   intervenir ? Est-ce que je peux aider pour qu'on termine cela plus vite.

 10   Vous voyez le deuxième paragraphe, M. le Juge Mindua essaie d'attirer votre

 11   attention là-dessus. Il commence par "le gouvernement de la République de

 12   Croatie a demandé à plusieurs reprises, comme l'année passée, à souligner

 13   que des armes lourdes et d'autres moyens de destruction de l'ex JNA soient

 14   placés sous le contrôle international." M. le Juge Mindua vous pose cette

 15   question qui porte sur le terme "moyens de destruction". Il vous demande

 16   est-ce que c'est quelque chose qui vient de l'auteur lui-même, est-ce que

 17   c'est une interprétation.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait, je vois.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 20   juste pour dire qu'il s'agit d'un problème de traduction. C'est une erreur

 21   de traduction. Me Nozica vient de nous le lire, et nos interprètes ici ont

 22   traduit comme "lethal weapons", et je pense que c'est exact. Or, le texte

 23   que lit le Juge Mindua et les autres Juges parle de "killing instruments",

 24   "killing weapons", c'est de là que vient le problème.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Mindua, ce sont des moyens de

 26   destruction. Toutes les armes qui peuvent tuer un homme si on les utilise.

 27   C'est l'arsenal militaire tout simplement. C'est ainsi qu'on le nomme, "des

 28   moyens de destruction".

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  1   M. LE JUGE MINDUA : C'est ça justement que je trouve curieux. Parce que

  2   nous le savons, les armes sont des moyens de destruction. Mais est-ce que

  3   c'est une façon honorable de qualifier les armes d'une armée, est-ce que

  4   cela ne signifie pas que l'auteur a un parti pris sur les intentions et le

  5   comportement d'une armée déterminée ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas du tout.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, il vaudrait peut-être mieux que vous lisiez

  8   dans votre langue le texte pour qu'on ait la traduction précise.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux le faire, Messieurs les Juges, mais

 10   lorsque l'on écrit, lorsqu'on rédige un texte de cette nature, moi,

 11   j'aurais écrit exactement "les moyens de destruction de l'armée française,

 12   de l'armée américaine," c'est comme ça que l'on exprime cela.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] "Le gouvernement de la République de Croatie à

 15   plusieurs reprises au cours de l'année écoulée a insisté pour que les armes

 16   lourdes et autres moyens de destruction de l'ex-armée populaire yougoslave

 17   soient placés sous contrôle international."

 18   M. LE JUGE MINDUA : Je pense qu'en B/C/S c'est beaucoup mieux qu'en

 19   anglais, parce que l'expression anglaise est plus dure, à mon avis.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, il s'agit de moyens

 21   militaires tout à fait classiques, que nous parlions des moyens de

 22   destruction de la 6e Flotte ou de toute armée quelle qu'elle soit. Nous

 23   parlons toujours de moyens de destruction. Il n'y a là aucune connotation

 24   ou aucun type de biais politique, c'est ainsi que l'on qualifie les moyens

 25   de destruction dont dispose une armée, un pistolet, est aussi un moyen de

 26   destruction, un fusil également.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que ce n'est pas simplement

 28   que le texte est mal rédigé, parce que moi, je ne vois pas de différence

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  1   entre "armement" et "armes mortifères", ou je ne sais pas, un pléonasme.

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je me suis occupé du désarmement aux

  3   Nations Unies pendant de nombreuses années. Quand on parle d'armes

  4   mortelles, ça ne peut pas simplement être mis en équation avec des

  5   armements. Parce qu'il y a des armes, par exemple des armes chimiques, qui

  6   sont considérées comme des armes mortelles. Ce n'est pas la même chose une

  7   arme chimique qu'un fusil ou qu'un canon ou une autre arme qu'on connaît

  8   bien dans l'histoire. Par conséquent, il pourrait y avoir une distinction à

  9   faire entre les deux.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que le chef du gouvernement de l'époque ne

 11   faisait pas référence à d'autres armes que fusils, chars ou autres, en

 12   ayant à l'esprit des armes de destruction de nature chimique,

 13   bactériologique, et cetera ? Est-ce que ce n'est pas cela qu'il avait en

 14   tête ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Messieurs les Juges.

 16   C'est avec une très grande certitude que je puis dire ici que

 17   l'interprétation de M. le Juge Trechsel est tout à fait exacte. Il s'agit

 18   ici d'une accumulation de sens au sein d'une phrase, mais cela ne recouvre

 19   rien de plus. On pourrait parler simplement "d'armes" mais on ajoute "armes

 20   de destruction". C'est absurde, mais c'est une formulation tout à fait

 21   habituelle, et en tant que telle, en tant que formulation habituelle, elle

 22   a tout à fait sa place.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est peut-être plus complexe que cela,

 24   Monsieur Praljak. N'oubliez pas que l'intervention américaine en Iraq était

 25   liée à la présence d'armes de destruction massive, donc vous voyez, c'est

 26   peut-être plus compliqué.

 27   On va continuer, Maître Pinter. Il nous reste dix minutes.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] J'en reste à ce que j'ai dit, à savoir que je

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  1   sais avec exactitude comment ces formulations étaient utilisées dans des

  2   discours politiques. Ici, on ne pense à rien d'autre qu'au fait que ces

  3   armes on devait en être disposé comme on le proposait.

  4   Mme PINTER : [interprétation]

  5   Q.  Les armes de qui ?

  6   R.  Ce n'est pas la peine de le préciser, c'était les armes de la JNA. La

  7   JNA était celle qui avait les armes, et la Croatie demandait tout

  8   simplement la chose suivante, une chose très simple, à savoir que la

  9   communauté internationale vienne sur place, qu'elle mette sous scellé les

 10   armes en question au sein des casernes où elles se trouvaient en République

 11   de Croatie, et que cette même communauté internationale dispose sur place

 12   ses propres soldats afin qu'un contrôle soit exercé et que les conscrits

 13   puissent rentrer chez eux. Les Serbes ne voulaient pas cela, la JNA ne le

 14   voulait pas, et la communauté internationale a cédé, a imposé un ultimatum

 15   à la Croatie, lui imposant de ne pas attaquer les casernes. La communauté

 16   internationale a décidé de ne pas mettre sous scellé les armes se trouvant

 17   dans les casernes afin que ces dernières y restent. Au contraire, la

 18   communauté internationale a demandé que l'on laisse partir ces armes à

 19   destination de la Bosnie-Herzégovine, et cela a entraîné des conséquences

 20   catastrophiques. Quant à moi, je ne voyais pas à l'époque et je ne

 21   comprends toujours pas aujourd'hui qui sont ces personnes qui ont exigé

 22   cela de nous et qu'est-ce qui leur est passé par la tête.

 23   Q.  Très bien. Nous en avons fini avec ce livre.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Vous avez déjà mentionné plusieurs fois la chose suivante, c'est la

 26   question que je vais maintenant vous poser, mais vous avez dit aujourd'hui

 27   aussi qu'au mois de novembre, vous étiez à Sunja. A partir de quel moment

 28   êtes-vous à Sunja et que pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre

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  1   concernant votre présence à Sunja, la situation que vous avez trouvée sur

  2   place et l'année concernée ?

  3   R.  En tant que soldat de l'infanterie volontaire, je suis arrivé à Sunja

  4   le 3 septembre 1991. J'en suis reparti vers le 10 ou le 12 mars 1992. Je

  5   voudrais que l'on puisse montrer le schéma que j'ai amené, qui montre ici

  6   une position se trouvant sur la rive droite de la Sava. Nous détenions la

  7   tête du pont.

  8   Après sept à huit jours, en raison de mon engagement mais également

  9   parce que -- alors, un peu plus haut, s'il vous plaît -- parce que ce

 10   monsieur qui était venu sur place devait repartir, j'ai été nommé

 11   commandant, et j'y ai été commandant pendant ces quelque six mois et dix

 12   jours, disons. Il est impossible de raconter en ce peu de temps qu'il me

 13   reste tout ce qui concerne les événements de Sunja, mais je vais dire

 14   quelques phrases seulement à ce sujet.

 15    En dehors d'une compagnie appartenant à la 2e Brigade de la Garde

 16   nationale, il n'y avait là-bas que des paysans. Il s'agit des positions que

 17   nous tenions. A l'arrière-plan, nous avons la rivière -- le fleuve Sava. La

 18   longueur de nos lignes représentait environ une trentaine de kilomètres. A

 19   vol d'oiseau, cela fait une vingtaine de kilomètres. Ici, nous voyons les

 20   villages autour de Sunja et ceci c'est Sunja. Y vivaient des Croates et des

 21   Serbes et conformément au scénario classique, un grand nombre de Serbes ont

 22   quitté Sunja, et le jour suivant, on a vu une attaque de grande envergure

 23   viser Sunja et les Croates qui s'y trouvaient ainsi que les Serbes qui

 24   étaient restés.

 25   Les amitiés et les liens s'étaient tissés pendant des années et les

 26   Serbes et les Croates n'avaient pas pour autant permis que ceux qui étaient

 27   restés soient avertis par ceux qui étaient partis de ce qui allait se

 28   passer. Cela a entraîné une destruction absolument terrifiante du tissu

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  1   social.

  2   Lorsque vous vous trouvez dans une telle situation où vous avez une

  3   dizaine d'unités, vous pouvez tous trouver en présence de toutes les lois

  4   que vous voulez qui sont en vigueur, mais pour autant que je sache, dans

  5   tout Etat, les lois n'ont que la force que leurs propres citoyens leur

  6   accordent, dans les limites où les citoyens eux-mêmes croient à la force de

  7   ces lois. J'ai lu cela dans les écrits, il y a longtemps, d'un juge de la

  8   Cour suprême des Etats-Unis. Les lois ne sont bonnes que dans la mesure où

  9   les gens croient en elles, et cela est important, Messieurs les Juges,

 10   parce qu'il s'agit là d'un moment où je dois essayer d'aboutir à une

 11   cristallisation de cette situation pour que les lois soient acceptées,

 12   alors qu'on est dans une situation où le tissu social et l'état

 13   psychologique des gens ont connu une destruction totale. On doit mettre en

 14   avant le dialogue, la loi, la nécessité de punir tout comme celle de

 15   pardonner, et tout ce dont cela peut dépendre.

 16   Je pourrais parler pendant des jours et des jours de tout ce qui

 17   s'est présenté là-bas et de la façon dont cela a été concrétisé. J'ai

 18   réussi, en à peu près un mois à un mois et demi à remettre en ordre la vie

 19   civile aussi bien que les aspects militaires. Dans une très large mesure

 20   là-bas, j'étais aussi bien commandant militaire qu'officier de l'Etat

 21   civil. Je mariais les gens à l'église, je distribuais des vivres, et aussi

 22   bien les Croates que les Serbes s'approvisionnaient. De cette façon, aucune

 23   maison n'a été endommagée, et j'avais même une communication téléphonique

 24   avec la partie adverse. J'ai même vidé les radiateurs de la maison d'un

 25   Serbe qui m'avait demandé qu'avant l'hiver on fasse cela pour que ces

 26   derniers n'éclatent pas, et qu'il n'y ait pas d'inondation dans sa maison.

 27   C'est quelque chose que j'ai fait pour cet homme.

 28    J'ai des déclarations de témoins à tous les échelons, Messieurs les

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  1   Juges, qui se sont trouvés là-bas, de Dusko Ljustina, Branko Vuksic et

  2   d'Enes Sadikovic, ainsi que Ranko Radovic, Armin Bajramovic, tout comme de

  3   Benkovic, d'Ivica Cuk. Tous ces hommes, ainsi qu'Eid, un Palestinien qui

  4   était médecin là-bas.

  5   J'en fais la demande, que l'on considère cela comme un exemple de la

  6   façon dont on organise une structure et dont on fait la démonstration du

  7   comportement d'un commandant. J'espère que vous pourrez, lorsque nous

  8   reviendrons à cela, que vous pourrez m'interroger à nouveau et me demander

  9   de parcourir et de lire ces documents pour que je puisse vous montrer une

 10   nouvelle fois comment je me suis comporté du début à la fin de la guerre.

 11   En fin de compte, j'avais la ligne de front la mieux organisée, et

 12   aussi bien des Serbes que des Croates et des Musulmans en sont témoins, qui

 13   ont combattu sur place. J'avais deux Serbes qui sont restés seuls alors

 14   qu'ils avaient des amis et des parents qui se trouvaient de l'autre côté,

 15   ils sont restés pour participer aux efforts de communication. Je peux vous

 16   dire que j'avais confiance en eux au-delà de toute considération aux

 17   distinctions ethniques. Je peux ici aussi affirmer qu'aucun commandant

 18   d'une armée occidentale n'aurait agi de la même manière, parce que cela

 19   aurait été considéré comme trop risqué. Mais je croyais en ces deux frères,

 20   j'avais confiance en eux.

 21   Vous pouvez du reste lire cela, tout cela et ces déclarations vous

 22   pouvez les lire vous-même. Si vous avez la moindre critique à cet égard,

 23   prenez votre décision en accord avec cela.

 24   Q.  Avant de conclure, Général, nous avons le document 3D 03567, je

 25   voudrais demander le versement de cette pièce, cela porte le titre

 26   "Hemingway". Je voudrais, Général, que vous nous disiez qui est Miro

 27   Medjimorec et qui est Hemingway ?

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Faites vite, parce que c'est déjà 19 heures,

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  1   Général, en deux mots dites-nous qui c'est ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, ce n'est pas "Medjimurec" mais

  3   "Medjimorec", c'est l'un des meilleurs metteurs en scène de l'ex-

  4   Yougoslavie. C'est un ami à moi depuis des années 1970. Et en sa qualité de

  5   volontaire, quelques jours après moi, il est venu à Sunja au côté d'un

  6   autre acteur de théâtre, Sven Lasta. On a fait ensemble ce travail. Il a

  7   rédigé un livre sur Hemingway. On m'avait appelé ainsi à cause de ma barbe

  8   et de mon style et on m'avait surnommé Hemingway. C'est ainsi qu'on

  9   m'appelait pendant toute la guerre à Sunja. C'est ce surnom que je portais.

 10   Voilà.

 11   Q.  Alors les faits qu'ils décrivent dans cet ouvrage correspondent-il à ce

 12   que vous avez véritablement eu à connaître là-bas ?

 13   R.  Tous les faits, toutes les déclarations correspondent à la situation à

 14   Sunja, et une fois de plus, je demande au Procureur et aux Juges de la

 15   Chambre d'en prendre lecture et de me poser des questions complémentaires

 16   pour que je puisse apporter des éclaircissements pour ce qui est de la

 17   structuration et l'organisation de certains territoires.

 18   J'aimerais demander à un numéro IC pour ceci.

 19   Mme PINTER : [interprétation]  Oui, mais attendez. Sunja on peut dire

 20   Vukovar, e-court 3D 02994. C'est dans cette partie-là qu'on peut voir la

 21   page de garde du livre, l'éditeur du livre et toutes les données

 22   pertinentes pour qu'on puisse parler de ce livre. Pour ce qui est de la

 23   Défense --

 24   R.  On a omis.

 25   Q.  Oui, le numéro IC pour la carte, s'il vous plaît.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le numéro IC pour la carte.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] La carte portera le numéro IC 1028,

 28   Monsieur le Président.

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, j'avais souhaité obtenir

  2   encore 15 minutes pour parler des Moudjahidines. Il me semble qu'on devra

  3   l'omettre. Il y a des détails intéressants qui sont collectés dans trois

  4   livres, mais je ne pense pas qu'on puisse vous faire prendre davantage de

  5   temps. Ce sont des livres qui ont été publiés par des Musulmans. Peut-être

  6   faudrait-il se pencher dessus et me poser des questions au sujet de la

  7   présence des Moudjahidines et à quel point cela a été destructeur pour ce

  8   qui est des relations entre Croates et Musulmans en Bosnie-Herzégovine.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Sur la question des Moudjahidines vous en avez déjà

 10   beaucoup parlé, mais compte tenu du fait qu'on a une requête pendante de M.

 11   Prlic, il n'est pas exclu que nous vous accordions les 15 minutes que vous

 12   demandez, mais on va en débattre avec mes collègues. Pour ma part, je ne

 13   vois aucun inconvénient à ce que lors de notre audience de lundi en 8, nous

 14   parlions des Moudjahidines et puis après j'embrayerais sur mes questions.

 15   Mais je verrai ça avec mes collègues s'ils sont d'accord ou pas.

 16   Pour l'information de tous j'indique que vous avez utilisé 40 heures et

 17   trois minutes, ce qui fait que le Procureur aura 40 heures pour son contre-

 18   interrogatoire. La Défense des autres défenseurs auront 20 heures. Voilà.

 19   Je ferai parvenir à tout le monde demain la liste des documents que je

 20   compte examiner. Vous aurez ça par courriel. J'invite tout le monde à bien

 21   lire le courriel pour bien constater que j'ai envoyé la liste et qu'il n'y

 22   ait pas de problème lors de l'audience de lundi prochain. Voilà.

 23   Sur ce, je vous souhaite une bonne fin de soirée et à lundi.

 24   [Le témoin quitte la barre]

 25   L'INTERPRÈTE : A 16 heures 19, incident numéro 4, remplacé "Sauf à dire

 26   qu'il ne serait agi d'une balle perdue," par "Sauf a déclaré de façon

 27   arbitraire que la balle serait venue de telle ou telle direction."

 28   --- L'audience est levée à 19 heures 04 et reprendra le lundi 15 juin 

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  1   2009, à 14 heures 15.

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