Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 41991

  1   Le jeudi 25 juin 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour,

 10   Messieurs les Juges. Bonjour à toutes et à tous.

 11   Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Jadranko Prlic et consorts.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 13   En ce jeudi, je salue M. Stojic, M. Petkovic, ainsi que M. Praljak, ainsi

 14   que les trois autres accusés qui ne sont pas présents pour des raisons

 15   liées principalement pour deux d'entre eux à leur état de santé.

 16   Je salue Mmes et MM. les avocats. Je salue M. Stringer, je salue toutes les

 17   personnes qui nous assistent.

 18   Maître Karnavas, le Greffier m'a dit que vous avez utilisé une heure 33

 19   minutes. La Chambre souhaiterait savoir combien de temps il va vous falloir

 20   pour terminer, de manière approximative.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 22   Monsieur les Juges. Bonjour à toutes les personnes ici présentes.

 23   Je veux vous dire que je n'aurais pas assez de temps. Mais je ferai

 24   l'impossible pour terminer en espace des quatre heures qui m'ont été

 25   données par la Chambre de première instance.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 27   LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]

 28   [Le témoin répond par l'interprète]


Page 41992

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, essayez d'être aussi très concis

  2   dans vos réponses parce que, moi-même, j'ai eu ce problème. Je pensais en

  3   deux ou trois jours réussir à terminer mes questions, et en réalité vous

  4   avez vu j'ai quasiment passé six jours avec vous. Donc je pense que Me

  5   Karnavas peut aussi se trouver devant cette difficulté. Donc faites un

  6   effort pour synthétiser vos réponses, d'autant plus, Monsieur Praljak, vous

  7   savez que les Juges, mais le Procureur et puis tous les avocats ont une

  8   bonne vision pas aussi grande que la vôtre de l'affaire, mais nous avons

  9   déjà beaucoup d'éléments. Ce qui vous permet, à ce moment-là, vous, dans

 10   vos réponses, d'aller à l'essentiel et ce qui peut permettre, à ce moment-

 11   là, aux avocats, aux Juges, de poser des questions qu'ils n'auraient pas

 12   posées en raison du fait que vos réponses précédentes étaient très longues.

 13   Voilà, bon, mais je sais que vous faites le maximum.

 14   Mais essayons d'être tous efficaces.

 15   Maître Karnavas, vous avez la parole.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai fait des efforts, j'en ferai, Monsieur le

 17   Président.

 18   Contre-interrogatoire par M. Karnavas : [Suite]

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Général Praljak. Reprenons le fil de notre

 20   discussion, quelques questions sur ce document --

 21   R.  [aucune interprétation]

 22   Q.  -- 1D 03 -- 1D 03141, c'était le document en question; pour vous, la

 23   page ce sera 1815; est-ce que vous avez trouvé ce document ?

 24   Je répète. Il s'agit du document 1D 03141.

 25   La page qui vous intéresse, en bas, vous voyez "D51-1815."Ce qui

 26   m'intéresse, c'est la page 4; plus exactement, pour ceux qui lisent le

 27   texte en anglais, ce sera la page 4.

 28   Ici, il est question de ceci : Lorsque Izetbegovic était président de la


Page 41993

  1   Présidence, à ce moment-là, on s'est efforcé de faire en sorte que certains

  2   individus qui avaient été arrêtés se voient poursuivis après avoir été

  3   détenus. On voit un nom, Bakir Alispahic, qui aurait refusé; est-ce que

  4   vous savez qui était ce Bakir Alispahic ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Qui était-ce ? Quelles étaient ses fonctions à l'époque ?

  7   R.  Il occupait la fonction de directeur des services de renseignements

  8   musulmans, à l'époque.

  9   M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi. C'est pour avoir une date. Est-

 10   ce que c'est 1996, ici, parce que c'est la date de l'article, ou est-ce que

 11   ça fait référence à une période antérieure ?

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Il faudrait peut-être faire preuve d'un peu

 13   de patience parce que j'y arrivais.

 14   Q.  Pourriez-vous nous dire de quelle période il s'agit ?

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pourquoi retarder cette réponse ? Je

 16   ne comprends pas, Maître Karnavas.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] D'abord, vous posez une question, on vous

 18   répond. Une question, réponse. D'abord, c'était l'identité qui était

 19   demandée. Puis je n'ai pas eu le temps d'apporter une question de suivi.

 20   Même maintenant, je suis un petit peu mis sous pression par l'Accusation

 21   comme par vous. J'ai demandé qui était le général. Logiquement, la question

 22   suivante, c'était le temps. Si tout le monde faisait preuve d'un tantinet

 23   de patience, je pense que tout serait réglé, et j'apprécierais qu'on fasse

 24   preuve de courtoisie dans ce prétoire à mon égard.

 25   Q.  [aucune interprétation]

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense que vous n'êtes pas

 27   nettement bien placé pour demander la courtoisie. Je pense que ce serait

 28   courtois de répondre à une question tout à fait innocente, dirais-je. Je ne


Page 41994

  1   comprends -- enfin, mais ça suffit. Nous avons suffisamment perdu de temps.

  2   Poursuivez.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Vous compromettez, vous mettez en question

  4   mon intégrité, vues vos remarques. Moi, j'ai demandé qui était ce monsieur.

  5   Je n'ai pas eu le temps de demander à quelle période ça se passe parce que

  6   ce monsieur a occupé plusieurs postes, et nous avons vu son nom avant. Nous

  7   voulons savoir, maintenant, à quelle période ce document fait référence.

  8   Ayons un peu de patience. C'est tout ce que je demande.

  9   Je comprends qu'il y a beaucoup d'animosité à mon égard, je le comprends

 10   parfaitement, Monsieur le Juge. Mais, moi, j'essaie de faire mon métier du

 11   mieux que je peux. Peut-être que ça ne vous plaît pas, mais c'est ce que

 12   j'essaie de faire.

 13   Q.  Pourriez-vous nous dire à quelle période ce général a exercé ses

 14   fonctions ?

 15   R.  Il me semble qu'il est arrivé pour occuper cette fonction en tant que

 16   chef de la ID, donc du service de Renseignements musulman, après le meurtre

 17   de Nedzad Ugljen, c'est-à-dire en 1998, 1994, et qu'il y est resté jusque

 18   vers 1996, au moment où il a été relevé de ses fonctions. Donc c'est en

 19   1996 qu'il a été relevé de ses fonctions, il est arrivé deux ou trois

 20   années avant. Alors, je ne sais pas exactement quand il a été mis en poste

 21   mais, pour autant que je sache, c'est après le meurtre de Nedzad Ugljen.

 22   Q.  Nous allons retrouver son nom.

 23   Poursuivons la lecture. En bas de page, on dit que quelqu'un aurait dit

 24   ceci : "Je ne sais pas." C'est un certain Munir Alibabic, qui disait :

 25   "Je ne sais pas pourquoi les Américains agissent de façon aussi innocente,

 26   comme ça, naïve. Ils auraient dû voir ce qui nous arrivait."

 27   Donc ça, c'est en novembre 1997. Il dit qu'il a dû donner sa démission, et

 28   je cite :


Page 41995

  1   "… parce qu'il résistait à l'influence iranienne qui se faisait sentir dans

  2   l'agence bosnienne."

  3   L'article dit que son avis était aussi celui de Nedzad Ugljen et de Nedzad

  4   Herenda, mais il y a aussi le fait que l'auteur de ce texte a parlé à plus

  5   de cinq autres agents du service AID. Est-ce que vous connaissez ce Nedzad

  6   Herenda ?

  7   R.  Oui, j'ai déjà pu entendre ce nom, ainsi que celui de Nedzad Ugljen,

  8   que vous avez cité aussi et qui a été tué afin que ne soit pas révélé tout

  9   ce qu'il avait découvert à Sarajevo. Nedzad Herenda avait été à la tête des

 10   services secrets du SDA, des services secrets de Bosnie-Herzégovine et,

 11   plus précisément, le SDA.

 12   Q.  A un moment donné, la présidence, à ce que nous dit le texte,

 13   présidence dans laquelle il y avait Kljuic, Komsic, Ganic. Cette présidence

 14   a été informée de certaines activités de Alibabic, qui les accusait

 15   d'activités illégales au service, de népotisme, de trafic de drogues,

 16   d'interception ou d'avoir intercepté des membres de la présidence,

 17   d'espionnage pour des services secrets étrangers, d'un manque de

 18   professionnalisme. C'est à la page suivante, qui sera pour vous le numéro

 19   1816.   

 20   Puis, tout à la fin du paragraphe, on dit :

 21   "La partie la plus intéressante pour le public c'était ce qui concernait

 22   les conversations interceptées pour que la vérité se manifeste, et le

 23   président d'alors a trouvé cette partie la partie la plus importante, la

 24   plus intéressante parce qu'on a découvert à l'époque que quand Alibabic

 25   était chef du secteur de Sarajevo de la SDB, avec l'assentiment d'Alija

 26   Izetbegovic, ce service interceptait, mettait sur écoute ce que disaient

 27   Fikret Abdic et Miro Lasic."

 28   Pourquoi est-ce que Izetbegovic voudrait entendre ce que se disent Fikret


Page 41996

  1   Abdic et Miro Lasic ?

  2   M. STRINGER : [interprétation] Excusez-moi. Je le dirai une seule fois pour

  3   que ce soit consigné au compte rendu d'audience. Je prends mon objection

  4   d'hier sur ce type de question. Ici, on semble présumer que cet article dit

  5   la vérité. Or, ce n'est peut-être pas le cas. Mais on reprend des

  6   affirmations, des allégations et on part du principe quelles sont exactes

  7   et on demande un commentaire au témoin. Là, je crois qu'on saute une étape,

  8   ce qui diminue la valeur probante, pour ne pas dire la pertinence.

  9   Ceci étant dit, Monsieur le Président, je vais essayer de m'abstenir

 10   pour faire des objections aux motifs de la pertinence.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Hier, nous avons entendu dire que Miro Lasic

 12   était un des individus que Izetbegovic ne voulait pas aux négociations de

 13   Genève. Fikret Abdic, je pense que le Président lui-même a posé des

 14   questions sur ce monsieur. Non, ce n'est pas un secret. Il avait été élu,

 15   il faisait partie de la Présidence. M. Franjo Boris nous a parlé de M.

 16   Abdic. Il y a des raisons précises qui me poussent à poser ces questions,

 17   nous le verrons aujourd'hui.

 18   Q.  Mais, vous, pour autant que ce qui est dit ici soit exact, pourquoi

 19   est-ce que M. Izetbegovic voudrait intercepter des conversations qu'ont des

 20   membres de la Présidence ? Qu'en pensez-vous ?

 21   R.  Je suis en position de connaître très précisément les raisons de cela,

 22   notamment pour ce qui concerne Fikret Abdic, qui était l'homme politique le

 23   plus populaire parmi les Musulmans en Bosnie-Herzégovine à l'occasion des

 24   premières élections. C'est lui qui avait reçu le plus grand nombre de voix,

 25   et cela de très loin.

 26   Toutefois il est tout à fait clair et cela je le sais pertinemment que

 27   toute cette équipe de Jeunes Musulmans qui ont fait leur entrée au SDA

 28   considéraient comme extrêmement important le fiat de mettre à l'écart


Page 41997

  1   Fikret Abdic de la vie politique, car ce dernier défendait des positions

  2   politiques opposées. Il était Musulman, mais il défendait l'idée d'un état

  3   séculaire où les différentes composantes auraient été sur un pied d'égalité

  4   ainsi qu'une société démocratique. Et cela ne convenait pas à Lasic, il est

  5   plus probable qu'il y a eu des écoutes pour cette raison.

  6   Q.  Bas de la page 5, toute dernière phrase qui se poursuit à la page

  7   suivante, c'est peut-être un peu plus loin pour vous :

  8   "D'après les dernières conclusions de l'enquête, l'identité de tous

  9   les Bosniens arrêtés pendant largage aérien de l'IFOR ont été poursuivis et

 10   les stagiaires ne se préparaient pas à attraper des criminels de guerre

 11   seulement mais à savoir comment poursuivre et à liquider l'opposition et à

 12   désobéir à des hommes politiques dont Muhamed Filipovic, Sefer Halilovic,

 13   Alija Delimustafic, Miro Lazovic et Adil Zulfikarpasic."

 14   Nous avons parlé de M. Halilovic hier, puis il y a eu une objection.

 15   Savez-vous si M. Halilovic a été attaqué et s'il y a des membres de sa

 16   famille qui ont été tués ?

 17   R.  Oui, oui, je suis au courant de cela, et je sais qu'on utilisait

 18   également une unité spéciale sous le contrôle des plus hauts dirigeants du

 19   SDA qui se livraient à des tueries dans Sarajevo, donc c'était l'Unité

 20   nommée Seva, ils tuaient aussi bien des Musulmans, ceux qui ne le

 21   convenaient pas que des Croates et des Serbes. Il y avait -- ils

 22   recourraient principalement à des tireurs embusqués, c'était leur mode

 23   d'action principale et leur groupe comprenait également quatre membres qui

 24   constituaient un groupe, quatre membres de l'ancienne équipe yougoslave de

 25   tir qui étaient sous la direction de Nedzad Ugljen. C'est ce groupe qui a

 26   effectué une tentative de meurtre de Sefer Halilovic, mais ils ont commis

 27   une erreur, ils n'ont pas tué le bon homme, la bonne personne, puisqu'ils

 28   ont pris son beau-frère pour lui. C'est lui qu'ils ont tué à la place de


Page 41998

  1   Sefer Halilovic.

  2   Q.  Nous allons y revenir, nous en verrons encore mieux la preuve après.

  3   Mais voici ce que disait Izetbegovic lorsqu'on lui a présenté

  4   l'information. Il a dit :

  5   "Oui, je sais Alispahic a eu des contacts avec des Iraniens. Alispahic, il

  6   contactait non seulement les Iraniens mais aussi à ma connaissance,

  7   l'Amérique ou plutôt les services secrets américains, britanniques et

  8   français. Il a été ministre de l'Intérieur pendant longtemps et chef de

  9   l'AID pendant plusieurs années."

 10   Quand est-ce qu'Alispahic était ministre de l'Intérieur ? Le savez-vous ?

 11   Or, si vous ne le savez pas, inutile de nous le deviner.

 12   R.  Je l'ignore. Je ne sais pas avec exactitude. Il était déjà avant la

 13   guerre et puis pendant une période que -- non, je ne peux pas préciser

 14   exactement.

 15   Q.  Tout à la fin du document, on pose une question, en fait on lui pose

 16   plusieurs questions, voici ce qu'il répond, je cite :

 17   "Je n'avais pas connaissance du camp de Pogorelica. J'en ai entendu parler

 18   à Rome, parce que les médias ont fait état de l'entrée de la SFOR dans ce

 19   camp."

 20   Comment est-il possible que ce camp fonctionne avec toutes ces activités,

 21   ces services, avec des agences contrôlées par Izetbegovic, et comment se

 22   fait, comment est-il possible qu'il n'ait pas connaissance de l'existence

 23   de ce camp ?

 24   R.  C'est impossible, tout à fait impossible. Il y avait 50 % de la

 25   population de la Bosnie-Herzégovine qui étaient au courant de l'existence

 26   de ce camp. C'était un secret de polichinelle.

 27   Q.  Revenons à autre chose. Nous avions commencé hier car il y avait du

 28   côté de la Défense quelques préoccupations à propos de la Communauté croate


Page 41999

  1   d'Herceg-Bosna. Nous allons examiner une carte, 1D 02843. Page 86, c'était

  2   la page d'hier, parce que le Juge Trechsel avait posé une question. La

  3   voici, ligne 8 :

  4   "Je sais quelle était la complexité des questions ethniques. Mais quand on

  5   voit la liste des municipalités formant la HZ HB on ne les trouve pas dans

  6   la liste du 18 novembre 1991.

  7   Bon, je ne veux pas consacrer, d'y perdre trop de ce temps à l'examen de

  8   cette question, mais nous allons rapidement examiner certains documents.

  9   Peut-être pourrez-vous répondre à certains de ces questions, même si je

 10   crois que nous y avons déjà répondu auparavant ? 

 11   Regardons la carte, d'abord regardez là, puis prenons la pièce 1D 02255, 1D

 12   02255. Vous avez ce document, je vais lire et aussi nous pouvons regarder

 13   les dates, ce sera peut-être utile. On voit "20 août 1992." C'est la date

 14   et ceci concerne Usora, on dit ceci :

 15   "Vu l'initiative de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, pour que toute les

 16   Communauté croates rejoignent la Communauté unique d'Herceg-Bosna en

 17   Bosnie-Herzégovine, tout en exprimant la volonté du peuple croate lors

 18   d'une réunion tenue le 20 août 1992, l'assemblée HZ d'Usora a adopté la

 19   décision suivante :"

 20   Et, vous voyez la décision adoptée :

 21   "Une décision est par la présente adoptée, pour qu'Usora rejoigne la HZ

 22   d'Herceg-Bosna en Bosnie-Herzégovine."

 23   Nous avons examiné la carte hier, car ceci concerne toute la problématique

 24   de la Banovina et l'intention ou l'Accusation qui insiste pour dire qu'il y

 25   a des frontières, un tracé de frontière autour de l'Herceg-Bosna. Prenons

 26   vite la carte pour regarder où se trouve Usora. Vous avez dit que c'était

 27   un tout petit endroit.

 28   Est-ce qu'on peut nous remontrer la carte, s'il vous plaît, 1D 02843 ?


Page 42000

  1   C'est le numéro de la carte, la voici.

  2   Prenons le temps qu'il faut pour régler, espérons-le une fois pour toute

  3   cette question. Où se trouve Usora ? Vous l'avez montré.

  4   R.  [Le témoin s'exécute]

  5   Voilà, je l'ai marqué.

  6   Q.  Parfait. Cette Communauté croate d'Usora, est-ce qu'il établissait des

  7   frontières, des frontières géographiques, on s'entend, est-ce qu'il y avait

  8   un mur qui séparait les Croates des Serbes, des Musulmans, comme on le fait

  9   dans certains pays, on érige un mur sur la frontière pour que ce soit entre

 10   les Etats-Unis ou le Mexique, par exemple; est-ce qu'il y a là une

 11   frontière en tant que telle ?

 12   R.  Non, il n'y a aucune frontière.

 13   Q.  Document suivant, 1D 02252, 1D 02252.

 14   Gardez la carte. Est-ce que vous avez le document papier.

 15   R.  [aucune interprétation]

 16   Q.  Qu'avons-nous ici, la date du 19 août 1992, 19 août 1992 :

 17   "Conformément à l'article 5 de la décision réglementaire portant

 18   l'établissement temporaire de l'exécutif de la présidence du Conseil croate

 19   de la Défense de la Bosnie centrale à la réunion du 19 août 1992 a adopté

 20   la décision suivante…"

 21   Je vais en lire une partie :

 22   "Partant de et conformément à la volonté des représentants du peuple croate

 23   de la Communauté croate de la Bosnie centrale, la région des municipalités

 24   de Zepce, Zadivocici, Maglaj, et Teslic décident par la présente de

 25   rejoindre la Communauté croate d'Herceg-Bosna, actes d'adhésion à la

 26   Communauté croate d'Herceg-Bosna ceci est organisé tous les règlements

 27   adoptés au niveau de la Communauté croate d'Herceg-Bosna seront maintenant

 28   en vigueur dans les territoires qui ont rejoint la communauté."


Page 42001

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42002

  1   Est-ce qu'en prenant cette décision, on établit des frontières qui relient

  2   toutes ces municipalités ? Est-ce qu'on va pour ainsi dire découper toute

  3   cette région pour quelle soit une partie annexée à la Croatie pour faire le

  4   nettoyage ethnique des Musulmans de la région ?

  5   R.  Non, en aucun cas.

  6   Q.  Pourriez-vous indiquer quelles sont ces municipalités, ces régions sur

  7   la carte, et donnez-nous les parties précises dans ces municipalités de

  8   Zepce, Zadivocici, Maglaj, Teslic, où se trouvaient les Croates, parce que

  9   quelque part l'impression qui règne ici, même après trois ans de procès,

 10   c'est qu'ils ont pris toutes les municipalités, chaque fois ils ont pris

 11   toute la municipalité.

 12   R.  [Le témoin s'exécute]

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Pourrais-je avoir un numéro IC, Monsieur le

 14   Président ?

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : S'il vous plaît, Monsieur le Greffier. 

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce IC 01033.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation]

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   R.  Dans ces municipalités, les Croates constituent une minorité. Ils

 20   vivent dans certaines zones de la municipalité en question et font face à

 21   une agression qui est tout à fait manifeste ainsi qu'a la préparation du

 22   gouvernement central pour ce qui est d'assurer leur défense. C'est pourquoi

 23   qu'ils s'organisent en conformité avec les lois qui sont alors en vigueur.

 24   Donc des parties de la municipalité ou des communautés locales ont la

 25   possibilité de s'associer au sein d'une organisation plus large aux fins

 26   d'assurer la défense et c'est le sens de ce qui se passe sur place.

 27   Q.  Merci. Passons à un autre sujet, nous allons surtout nous concentrer

 28   sur Izetbegovic, pour se faire nous allons examiner certains documents.


Page 42003

  1   Cependant, tout d'abord, revenons à ce que vous avez dit à la page 40 260

  2   du compte rendu d'audience. Quelques questions vous étaient posées, c'est

  3   pendant votre déposition et vous avez dit la chose suivante. C'est pour

  4   dresser le contexte :

  5   "Parlant d'Izetbegovic, vous dites, j'ai bonne impression enfin j'ai

  6   beaucoup d'estime pour lui en tant qu'être humain mais j'affirme et j'étais

  7   d'accord avec ce que M. Filipovic a dit dans son livre. Et c'est ce que dit

  8   Filipovic dans son livre, Izetbegovic ce n'était pas lui le chef, c'était

  9   Cengic Senior et Cengic Junior et c'était les gens autour de lui, Omer

 10   Begovic. Et s'ils n'aimaient pas quelque chose, et bien ils changeaient et

 11   s'ils n'aimaient quelque chose que lui avait décidé, la décision était

 12   modifiée."

 13   Voilà ce dont parle M. Filipovic, et vous semblez être d'accord avec M.

 14   Filipovic. Maintenant, nous allons examiner plusieurs documents -- ou

 15   partie du document, et je vous poserai cette question pour savoir si vous

 16   pensez toujours que M. Filipovic avait raison. Est-ce qu'Izetbegovic était

 17   bien le leader, le chef ? Est-ce que c'était lui qui avait le contrôle

 18   global qui prenait toutes les décisions ? Est-ce que c'est lui qui

 19   poursuivait l'objectif de cette "Déclaration islamique" qui voulait créer

 20   un pays islamique en Bosnie-Herzégovine en partie ou en tout ? Puis nous

 21   allons voir quelques documents.

 22   Le livre s'intitule en anglais : "Unholy Terror" Terreur --

 23   R.  Simplement c'est --

 24   L'INTERPRÈTE : les interprètes recherchent une meilleure traduction.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation]

 26   Q.  Le numéro du document est 1D 03137. Puis nous reviendrons à la

 27   "Déclaration islamique."

 28   L'INTERPRÈTE : "Terreur diabolique," c'est la traduction que propose les


Page 42004

  1   interprètes. 

  2   M. KARNAVAS : [interprétation]

  3   Vous avez un classeur réservé à ce document. Vous en avez l'intégralité.

  4   Nous, nous allons voir la page 72. Vous pourrez utiliser lorsque je vais

  5   citer telle ou telle page.

  6   Q.  Pour vous, Monsieur Praljak, ce sera 1872 et 73, les deux pages

  7   concernées. Je vous donne chaque fois les quatre derniers chiffres du

  8   numéro, 1872 et 1873. Ici je parle de la personnalité d'Izetbegovic. C'est

  9   ça que je veux éclairer.

 10   Donc nous voyons à la page 72, ce qui suit :

 11   "Comme la plupart des généraux de JNA, Kukanjic n'aimait pas trop

 12   Izetbegovic, et il pensait que c'était un caméléon tout à fait désagréable

 13   qui avait des points de vue très dangereux mais il ne pouvait faire autre

 14   chose que de traiter avec lui. La perception par les militaires du

 15   dirigeant du SDA était bien résumée par un ex officier de la JNA, il était

 16   considéré comme un extrémiste qui était connu déjà du temps de Tito. Il

 17   n'était pas pris au sérieux pourtant il avait été en prison pour activités

 18   nationalistes. Il a pris des mesures qui selon les dirigeants militaires

 19   étaient inconstitutionnelles et illégales. Ensuite il s'est -- il n'y a

 20   plus penser. Il était évident que la seule chose dont avait peur Alija

 21   Izetbegovic c'était la JNA."

 22   Ensuite passons à la page 203, je vais vous donner la référence -- pour

 23   vous, Général Praljak, quand ce livre a été publié récemment en croate,

 24   donc j'ai la page 1 898 pour vous. Pour nous, c'est la page 203.

 25   Ici il est écrit, et je cite :

 26   "Un grand nombre de Musulmans étaient tout à fait d'accord avec le verdict

 27   d'Adil Zulfikarpasic : 'Izetbegovic qui est bien pire que le pire ennemi

 28   des Musulman.' La paix en tant que tel ne plaisait tant que ça à la


Page 42005

  1   direction du SDA. Ils avaient désiré une guerre civile par le biais de leur

  2   islam politique agressif et refusait de donner des droits aux non

  3   Musulmans."

  4   Ensuite :

  5   "Même certains des confidents les plus proches du président avaient

  6   des doutes sur sa capacité politique. Izetbegovic avait défini son image

  7   extrêmement astucieusement, elle était très efficace auprès des médias de

  8   l'Occident, mais cela gênait un grand nombre d'officiels du SDA qui

  9   trouvaient que lorsqu'ils partaient se retirer pour prier, contempler, tout

 10   à fait étonnant. 'Alija ne sait absolument pas ce qu'est un Etat,"

 11   déclarait Nazif Sacirbegovic, qui était le partenaire en Islam le plus

 12   ancien du président. 'Il devrait plutôt être à la mosquée, bien plus qu'au

 13   gouvernement,' avait-il dit en 1993.

 14   "Les opposants politiques d'Izetbegovic faisaient remarquer surtout

 15   l'irrépressible Fikret Abdic, qui avait dénoncé le président, 'comme étant

 16   un imposteur astucieux et le plus grand assassin de son propre peuple. Tout

 17   le monde comprend maintenant que le véritable but d'Izetbegovic c'est

 18   l'établissement d'un Etat musulman,' a-t-il expliqué au milieu des années

 19   93, en ajoutant un petit dessin -- en parlant de cet homme en se basant sur

 20   son expérience personnelle, 'Alija essaie de rester un gentil vieil homme,

 21   bien humble, le perdant éternel, mais en coulisses il a un amour du pouvoir

 22   et le rêve de sa vie est de créer un Etat mais il n'y a que lui qu'il sait,

 23   et c'est un dessin qu'il a conçu dans son esprit lorsqu'il était en prison

 24   à Foca et qu'il écrivait sa "Déclaration islamique," à laquelle il n'a

 25   jamais renoncée'."

 26   J'aimerais vous poser une première question. Nous savons qui est M. Abdic.

 27   Quant à Adil Zulfikarpasic, je ne sais pas si vous l'avez vraiment

 28   rencontré, mais le connaissez-vous ?


Page 42006

  1   R.  Si je le connais, non, nous ne nous connaissions pas personnellement,

  2   mais je connais déjà depuis avant la guerre le travail et l'activité de M.

  3   Adil Zulfikarpasic, si cela vous intéresse; est-ce que ça vous intéresse ?

  4   Q.  Je voulais juste savoir si vous le connaissiez. N'était-il pas là l'un

  5   des pères fondateurs du SDA ?

  6   R.  Je crois que oui.

  7   Q.  Ensuite la personne appelée : Sacirbegovic, savez-vous que son fils,

  8   qui a changé son nom pour s'appeler Sacirbey, était aussi ambassadeur

  9   auprès des Etats-Unis pour la Bosnie-Herzégovine ?

 10   R.  Oui, oui, il était ambassadeur aux Etats-Unis, et c'est un citoyen

 11   américain, de même que Zulfikarpasic était citoyen helvétique.

 12   Mais un détail. Lorsqu'on a parlé -- dénombré les collaborateurs

 13   d'Izetbegovic, il a été prononcé le nom d'Omerbegovic, mais c'est une

 14   erreur, il s'agit d'Omer Behmen.

 15   Q.  Bien. Je veux passer maintenant à la "Déclaration islamique," un

 16   certain passage de cette déclaration, car nous allons voir -- nous allons

 17   étudier ce document.

 18   Donc cette "Déclaration islamique," Messieurs les Juges, se trouve dans un

 19   dossier séparé. Il s'agit de la pièce 1D 00431, dès le départ :

 20   "Notre but est : l'Islamisation des Musulmans. Notre slogan : croire et

 21   lutter."

 22   Ensuite nous allons étudier certains passages, tout d'abord, la page 2.

 23   Nous voyons ici :

 24   "Nous annonçons donc à nos amis et à nos ennemis que les Musulmans sont

 25   déterminés à prendre en main leur destin dans le monde islamique et

 26   d'arranger le monde sans leur propre vision."

 27   Ensuite il poursuit :

 28   "La nouveauté c'est que nous cherchons à promouvoir les idées et à


Page 42007

  1   organiser nos actions. La lutte vers de nouveaux -- vers ces buts n'est pas

  2   nouvelle. Il y a une grande expérience du Jihad dans l'histoire et

  3   l'histoire contient des pages et des pages des souffrances de ces victimes.

  4   Mais c'est le sacrifice personnel d'individu exceptionnel ou de groupes

  5   courageux, en collision avec les forces puissantes du jihalija."

  6   Ensuite :

  7   "L'envergure du problème et ces difficultés demande que l'on organise

  8   l'action de millions de personnes."

  9   Ensuite passons à la page 38 --

 10   R.  Une correction d'un mot que j'ai entendu de la bouche des interprètes

 11   croates. Les interprètes ont dit que les Musulmans sont déterminés par

 12   rapport au destin.

 13   Or, la bonne interprétation c'est : les Musulmans ont décidé de prendre

 14   entre leurs mains leur propre destin.

 15   Puis, deuxièmement, il faut dire clairement que l'on passe des idées et des

 16   plans à l'action organisée; là, il y a aussi une erreur d'interprétation.

 17   Donc je demande à ce que cela soit corrigé.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien.

 19   Q.  Je vais passer à autre chose maintenant, un autre passage de votre

 20   témoignage. Vous affirmez certaines choses à propos d'Alija Izetbegovic, et

 21   vous dites à la page 39 740, ce qui suit :

 22   "Alija a peut-être cru qu'il ne pourrait être atteint à son poste. On peut

 23   le comprendre. Il était sans doute impression. Il craignait pour son propre

 24   peuple, mais il est certain que tous ceux qui étaient attaqués dans son

 25   territoire ont vu les choses autrement. Nous lui avons demandé, Pourquoi

 26   n'avez-vous rien fait pour lutter contre cela, comme les citoyens de Zagreb

 27   l'ont fait, pour lutter contre ce qu'ils ne leur plaisaient pas."

 28   Vous avez répondu ça à une question qui vous avait été posée, et j'aimerais


Page 42008

  1   vous poser d'autres questions sur Izetbegovic, parce que vous semblez lui

  2   donner le bénéfice du doute, par la suite vous poursuivez, à la page 40 258

  3   du compte rendu, et Filipovic encore, vous dites, et je cite :

  4   "Alija Izetbegovic ne prenait pas ses décisions de façon indépendante. Il

  5   prenait une décision, et voici ce qui se passait ensuite les dirigeants du

  6   parti, qui comprenait ces individus, ces Jeunes Musulmans, modifiaient la

  7   décision. Donc ce qu'il faut bien comprendre, et ce que les Juges doivent

  8   bien comprendre, que c'est pour cela qu'il changeait d'avis aussi souvent,

  9   il changeait sa décision aussi souvent."

 10   Vous parlez un petit peu des Jeunes Musulmans. Mais Izetbegovic était lui-

 11   même un jeune Musulman, il faisait partie du Mouvement des Jeunes Musulmans

 12   pendant la Deuxième Guerre mondiale, n'est-ce pas ?

 13   R.  Exact. Il a été jugé à deux reprises en raison de son appartenance aux

 14   Jeunes Musulmans et au fait qu'il partageait leurs idées. Une fois, juste

 15   après la Seconde Guerre mondiale, et une deuxième fois en 1983. Ce procès-

 16   là je l'ai bien suivi. J'ai également étudié de près la "Déclaration

 17   islamique," qui a été imprimée à 2 0000 exemplaires lors de sa première

 18   édition, et qui bien sûr était disponible à tous. Donc je connaissais tout

 19   cela très bien.

 20   Maître Karnavas, voyez-vous, moi, ce que je dis c'est fondé sur le fait

 21   qu'à l'époque lorsque j'ai rencontré et fait la connaissance de M.

 22   Izetbegovic, je savais bien que lorsqu'une décision était prise par lui, et

 23   bien, je ne connais pas une seule décision prise par lui qui n'ait pas été

 24   modifiée par la suite. Donc il était logique pour moi de penser que

 25   quelqu'un avait un contrôle sur lui, avait une influence sur lui. Il était

 26   difficile de regarder quelqu'un dans les yeux en pensant qu'il ne cessait

 27   de mentir.

 28   Q.  Certes, mais dans la région musulmane enfin c'est ce que disent


Page 42009

  1   certains universitaires, on dit qu'en ce qui concerne la promotion de

  2   l'islam ou lorsqu'on attaque l'islam un individu est non seulement autorisé

  3   mais encouragé à mentir ? Cela fait partie en fait de leur formation

  4   religieuse ? Nous allons y revenir plus tard d'ailleurs. Il y a un terme

  5   pour cela, cela s'appelle le "takia."

  6   R.  Maître Karnavas, je connais relativement bien, je dis bien relativement

  7   bien le Coran et toutes les autres religions donc le Coran qui est lié à

  8   l'islam a toutes sortes d'interprétations diverses.

  9   Le Coran et tous ces livres, voyez-vous j'ai passé une grande partie

 10   de ma vie à Mostar et par la suite au milieu des Musulmans et à Mostar et

 11   de façon générale en Bosnie-Herzégovine avant la guerre dont nous parlons

 12   autrement dit avant l'imposition des versions dures de l'islam venues de

 13   l'étranger, les Musulmans étaient de tendance très souples. J'avais de

 14   nombreux amis musulmans et eux n'interprétaient pas le Coran de la même

 15   façon qu'il est interprété dans ces autres versions qui viennent

 16   aujourd'hui d'Iran, d'Arabie Saoudite, et cetera, et cetera. Mais il est

 17   exact que les jeunes musulmans interprétaient le Coran d'une façon qui

 18   excluait toute co-existence possible entre les Musulmans et les chrétiens;

 19   et la vraie interprétation du Coran c'était une identité qui affectait tous

 20   les aspects de la vie que ce soit la vie citoyenne, ou autres aspects.

 21   Q.  Bien. Regardons les -- poursuivons dans la "Déclaration islamique," la

 22   page 25 de la version anglaise de ce document, donc le 1D 00431. Nous

 23   allons sans cesse passer en revue ces deux documents, donc d'abord la page

 24   25 ensuite la page 30. Donc en bas de la page 25, il est écrit je cite,

 25   dernière partie du paragraphe :

 26   "Il n'y a qu'une solution, la formation et le regroupement d'une nouvelle

 27   intelligentsia qui croit et qui pense islam. Cette intelligentsia va donc

 28   hisser la bannière de l'ordre islamique et avec les autres masses


Page 42010

  1   musulmanes va faire en sorte par l'action de réaliser son but."

  2   Ensuite page 30, je ne sais pas si on va pouvoir lire tous les passages,

  3   mais maintenant à la page 30 de cette même "Déclaration islamique," je vais

  4   vous donner la cote pour vous, c'est la page 12, au milieu de la page il

  5   est écrit :

  6   "La première de ces conclusions c'est très certainement que l'islam n'est

  7   pas compatible avec les systèmes non islamiques. Il ne peut y avoir ni paix

  8   ni co-existence entre la religion islamique et les institutions politiques

  9   et sociales non islamiques. Ces institutions ne peuvent fonctionner, et

 10   l'échec du fonctionnement de ces institutions, et l'instabilité des régimes

 11   dans les pays musulmans se manifestent en changements fréquents et en coups

 12   d'Etat, et c'est la conséquence de leur position a priori à l'islam qui est

 13   la première impression des pays -- des personnes de ces pays en déclarant -

 14   - en se donnant le droit d'ordonner son propre monde, l'islam exclut le

 15   droit ou la possibilité d'action venant d'une idéologie étrangère sur ce

 16   terrain. Donc il n'y a aucun principe de laïcité et l'Etat doit refléter et

 17   soutenir les concepts moraux religieux."

 18   Je ne veux pas poursuivre ma lecture mais n'est-il pas vrai qu'Izetbegovic,

 19   lorsqu'il est sorti de prison, tout de suite après a publié des exemplaires

 20   de sa "Déclaration islamique," et les a diffusés lors de la session de

 21   création du SDA, et les copies ensuite ont été imprimées et diffusées dans

 22   toute la Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

 23   R.  -- et ce texte est vraiment terrible. Il n'y a pas de doute là-dessus.

 24   Je l'ai répété déjà à plusieurs reprises, il développe une conception

 25   politique et je parle d'Alija Izetbegovic et des gens qui l'entourent, et

 26   cette position est certainement la version la plus dure, la plus rigide de

 27   l'interprétation du Coran, donc de l'islam.

 28   Puis troisième point important, M. Alija Izetbegovic n'a jamais -- ne s'est


Page 42011

  1   jamais écarté de sa "Déclaration islamique," ce qui est en général assez

  2   normal quand on est l'auteur d'un ouvrage, mais enfin même à la fin de sa

  3   vie lorsqu'il était âgé, parce qu'en 1993, M. Izetbegovic avait déjà un âge

  4   assez avancé. Ce n'était pas un enfant qui racontait n'importe quoi, il

  5   s'en est donc tenu à cette Déclaration islamique jusqu'au bout. Mais ce

  6   texte est vraiment terrible et il a eu une influence énorme aussi bien chez

  7   les Serbes que chez les Croates. On ne peut pas ignorer ce texte. C'est

  8   comme une formule mathématique, soit lui existe, soit j'existe. Les deux ne

  9   peuvent pas exister ensemble, donc c'est une interprétation du Coran qui

 10   est exclusive et qui implique qu'on ne peut pas vivre ensemble.

 11   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Excusez-moi. Je dois corriger une faute au

 12   compte rendu d'audience. Page 22 de l'audience d'aujourd'hui, ligne 21, les

 13   interprètes croates ont dit que le général Praljak aurait déclaré : "Vous

 14   ne pouvez pas vivre avec des gens comme cela." Le général a dit en fait :

 15   "Vous ne pouvez pas vivre avec cela." Il ne parlait pas d'êtres humains. Ce

 16   qu'il voulait dire, c'était qu'on ne pouvait pas vivre avec une telle

 17   idéologie.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais préciser encore une fois.

 19   Quand ce livre ou cette brochure a paru, il était clair que ce livre

 20   défendait une position selon laquelle à l'avenir il ne serait pas possible

 21   de vivre ensemble. C'est ce que livre affirme, le livre affirmait que

 22   lorsque nous, nous arriverons, vous, vous ne serez plus là parce que chacun

 23   vivra sous les lois d'un Etat totalement religieux, la Sharia, et cetera.

 24   Bien sûr, ceci a provoqué des remous terribles sur le plan politique, et

 25   ensuite il y a une spirale et les pourparlers sont allés dans l'autre sens,

 26   à savoir si eux veulent un Etat musulman, nous, nous ne pouvons pas

 27   l'accepter et c'est ça qui entre aussi dans l'idée des Serbes qui voulaient

 28   avoir un Etat leur appartenant et c'est une des causes de la guerre.


Page 42012

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28   


Page 42013

  1   C'est un peu comme au jeu d'échec voyez-vous. Quand vous faites vos deux

  2   premiers coups fondamentaux, les 15 coups qui suivent sont la conséquence

  3   des deux coups initiaux et ne peuvent pas être joués autrement que d'une

  4   seule et même façon, donc c'est ce qu'on appelle les coups initiateurs, si

  5   je puis dire.

  6   Q.  Très bien.

  7   R.  C'est ensuite le cours de la loi naturelle qui prend là-dessus.

  8   Q.  Nous avons bien entendu votre réponse. Maintenant revenons à la

  9   "Déclaration islamique," qui va peut-être nous permettre d'y voir plus

 10   clair, donc matière à avancer de toute façon.

 11   Page 24 maintenant, il est écrit, et je cite, donc pour vous, c'est la page

 12   0009 dans votre document :

 13   "Par leurs actions, les modernistes ont créé un état de conflit

 14   éternel et de confusion au sein duquel tout programme, qu'il soit musulman

 15   ou étranger, devient totalement impossible à mettre en œuvre. Les masses

 16   veulent une action musulmane, mais ils ne peuvent pas le faire sans l'aide

 17   de l'intelligentsia. Et --"

 18   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Les interprètes ont les versions, en effet.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez dit 34 et c'est pour ça

 21   que les interprètes ne s'y retrouvaient pas.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Bon. Il s'agit donc bien de la page 24 et

 23   non de la page 34. J'ai une copie.

 24   Bien. Je reprends donc ma lecture :

 25   "De par leurs actions, les modernistes ont créé un état de conflit et de

 26   confusion interne au sein duquel tout programme, qu'il soit islamique ou

 27   étranger, devient impossible à mettre en œuvre. Les masses veulent une

 28   action islamique, mais ne peuvent pas la réaliser sans l'aide de


Page 42014

  1   l'intelligentsia. Une intelligentsia aliénée impose un programme mais ne

  2   peut pas trouver suffisamment de gens bien préparés à donner leur sang, à

  3   donner leur enthousiasme et leurs efforts pour cet idéal, qui reste un

  4   idéal sur le papier uniquement. Les forces d'opposition s'annulent les unes

  5   les autres et il en résulte une paralysie totale du système."

  6   Nous pouvons revenir à ce que nous disions. Il y a référence dans la

  7   "Déclaration islamique," je pense que vous la connaissez bien, où on parle

  8   de la création d'une grande fédération islamique allant du Maroc à

  9   l'Indonésie, de l'Afrique tropicale à l'Asie centrale et ensuite, à la page

 10   61, donc dans votre document, cela correspondra à la page -- désolé de ne

 11   vous donner que de petits passages de cette déclaration, mais on n'a pas

 12   vraiment le temps de la regarder en entier. Pour vous, il s'agit du

 13   document qui s'arrête par 0024. Il est écrit, donc :

 14   "Par exemple, nous trouvons qu'il est parfaitement inacceptable et

 15   irréaliste qu'aujourd'hui, en cette ère de concentration et d'association,

 16   qu'un peuple, les Arabes, soient découpés en 13 unités, 13 Etats, et les

 17   Etats musulmans, de ce fait, ont parfois des idées parfaitement opposées

 18   sur certaines questions internationales importantes. L'Egypte musulmane ne

 19   se préoccupe absolument pas des souffrances des Musulmans en Ethiopie ou au

 20   Cachemire. On est d'ailleurs dans la confrontation entre les pays arabes et

 21   Israël. La Perse musulmane a conservé des relations tout à fait amicales

 22   avec l'agresseur, et cetera. Donc, ce qui n'est pas réel, ce n'est pas

 23   l'unité des Musulmans, c'est qu'il n'y a pas d'unité des Musulmans parce

 24   qu'il y a un état de division et de discordance. C'est ce que nous voyons

 25   aujourd'hui."

 26   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je suis désolé. Il faut un petit peu

 27   laisser du temps avant de reprendre vos questions.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation]


Page 42015

  1   Q.  Ici, on parlait de l'intelligentsia des Jeunes Musulmans avec qui se

  2   trouve Izetbegovic. Lorsqu'il forme le SDA, est-ce que ce n'était pas des

  3   adultes ? Pas tous les intellectuels, bien sûr, mais est-ce que ce n'était

  4   pas une partie de ce qu'on appelle l'intelligentsia qui a créé le SDA ?

  5   R.  Oui, en effet.

  6   Q.  Ici, dans ce deuxième passage que je vous ai lu, il vilipende le fait

  7   que l'Egypte ne se préoccupe pas de la souffrance des Musulmans en Ethiopie

  8   et au Cachemire, à l'époque où il écrivait ce texte, mais c'est vrai

  9   aujourd'hui encore. Ce conflit existait. N'est-il pas vrai que les

 10   Moudjahidines, ces combattants musulmans, sont originaires de ces pays-là,

 11   qu'ils sont venus de ces pays-là pour prêter main-forte à leurs frères

 12   musulmans en Bosnie-Herzégovine ou pour servir, pour soutenir la cause

 13   musulmane ?

 14    R.  C'est pour cette raison qu'ils sont venus.

 15   Q.  Bien. Revenons à ce que disait M. Schindler dans son livre, "La terreur

 16   diabolique," 1D 03137, page 36.  Je vais vous donner le numéro en croate où

 17   les quatre derniers chiffres, 1842 et 1843.

 18   Tout en haut, que voyons-nous ?

 19   "Les Jeunes Musulmans étaient des collaborateurs des nazis depuis le début

 20   de l'occupation de la Bosnie par les nazis en 1941. Ils ont donné à la

 21   Gestapo les listes d'étudiants 'progressistes, de l'Université de Belgrade,

 22   dont beaucoup ont été arrêtés et même tués parce qu'on les soupçonnait

 23   d'être favorables aux idées communistes."

 24   Puis, nous voyons la fin de cette page, le dernier paragraphe :

 25   "En dépit de ses capacités de combat tout à fait modestes, la Division

 26   Handschar avait réussi à remettre, à ternir la réputation des Musulmans de

 27   Bosnie qui devenaient des collaborateurs de l'occupant et surtout, qui

 28   étaient accusés d'une coopération enthousiaste avec les SS. Même s'il n'est


Page 42016

  1   pas juste d'accuser les Musulmans de tout cela, on peut dire qu'il y a

  2   quand même parmi les Musulmans des liens avec ces idées-là, notamment les

  3   Jeunes Musulmans, et alors que la vague de la guerre se retournait contre

  4   les Allemands en 1944, et que la Wehrmacht commençait à se retirer peu à

  5   peu des Balkans, ceux qui avaient collaboré avec les nazis et les Oustachi

  6   faisaient face ou devaient s'attendre à un triste avenir. C'est seulement

  7   au cours des derniers mois de la guerre que les Musulmans ont rejoint les

  8   partisans de Tito en grand nombre, et c'est surtout parce que les

  9   communistes avaient imposé la conscription dans les zones libérées qui, à

 10   la fin de l'année 1944, incluait l'essentiel de la Bosnie-Herzégovine."

 11   Entre parenthèses :

 12   "(Parmi les soldats qui étaient les plus récalcitrants parmi les partisans

 13   en uniforme dans les derniers mois de la guerre, on trouvait les activistes

 14   Jeunes Musulmans Izetbegovic et Nedzib Sacirbegovic.)"

 15   C'était bien un jeune Musulman, Alija en personne ?

 16    R.  Oui, c'est exact.

 17   Q.  Fort bien. Vous avez dit qu'il avait été mis en prison pour cette

 18   raison. Voyons maintenant la page 39 du document 1D0 -- Je rappelle le

 19   numéro. 1D 03141. Nous avons pour vous les quatre derniers chiffres, 1846.

 20   Pour nous, ce sera la page 39. Voici ce qui est dit :

 21   "Les Jeunes Musulmans trouvaient la vie pas très agréable sous le

 22   communisme, notamment parce que certains de ses membres se trouvaient en

 23   prison parce qu'on les avait accusé d'être des collaborateurs des nazis.

 24   Mais ils ont continué à travailler de façon clandestine. Une de leur plus

 25   grandes réussites, ça a été la publication de leur journal, 'El Mujahid (Le

 26   guerrier de la guerre sainte),' dans le premier numéro, a montré des signes

 27   infaillibles du radicalisme panislamique. Ils prenaient la Jihad, faisaient

 28   des citations du Coran, récitaient le 'tekbir,' condamner les habitudes,


Page 42017

  1   les moeurs occidentales."

  2   On dit ceci :

  3   "Grâce au travail d'Izetbegovic en tant qu'éditeur qui était arrêté peu de

  4   temps après avec son ami qui complotait avec lui, Nedzib Sakhir Begovic."

  5   Plus loin, là, je saute quelques lignes on dit ceci :

  6   "Izetbegovic admit qu'il était membre des Jeunes Musulmans. Il a

  7   admis certaines de ses activités de complot même s'il nie avoir jamais

  8   participé aux activités de collaboration avec les Allemands, les SS."

  9   Mais il a été condamné à trois ans de prison. C'était la première

 10   fois qu'il a été en prison, non ?

 11   R.  Oui, c'est exact, puisqu'il a préservé de condamnation ultérieure plus

 12   lourde. Mais j'ai déjà présenté tout cela et tous ces documents à la

 13   Chambre en me basant sur ouvrage publié, écrit par un Musulman, projet de

 14   l'organisation justement des Jeunes Musulmans.

 15   Q.  Il fut écroué une deuxième fois, en fait il a été jugé par un des

 16   avocats qui plaide ici, quand elle était Procureur. Il a été condamné, il a

 17   purgé une peine, n'est-ce pas, dans les années 1980 ?

 18   R.  En 1983, à partir de 1983, me semble-t-il.

 19   Q.  Exact, de 1983 à 1988, à peu près. Page 40, ce sera sans doute pour

 20   vous aussi la page suivante, troisième paragraphe --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, c'est peut-être une erreur au

 22   transcript, à la ligne 9 de la page 28, vous dites il a été emprisonné et

 23   il a été jugé. Non, il a été défendu par un avocat.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] Non, non, un avocat qui est ici avocat de la

 25   Défense, elle était Procureur à l'époque, et c'est elle qui l'a poursuivi,

 26   qui était responsable des poursuites. Comme elle a bien travaillé, qui

 27   avait beaucoup de preuve, il a été jugé coupable et il a purgé une peine de

 28   cinq ans. Ce n'est pas un secret, vous savez, quelquefois des substituts du


Page 42018

  1   procureur deviennent des avocats de la Défense ou vice-versa.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. C'était qui, cet avocat ?

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Mais je préférerais qu'on en parle à huis

  4   clos partiel, c'est pour ça que je n'ai pas donné de nom, Monsieur le

  5   Président. Mais si vous voulez son nom, je peux le faire.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Continuer en public. Ce n'est pas la peine de donner

  7   le nom.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation]

  9   Q.   [aucune interprétation]

 10   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation] 

 11   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 12   M. KARNAVAS : [interprétation] Vous m'entendez maintenant ? Le micro est

 13   branché. Parfait, excusez-moi. Apparemment, il y avait un problème avec le

 14   petit voyant lumineux.

 15   Q.  Page 40, pour vous, ce sera la page avec les chiffres 1847 :

 16   "A partir du milieu des années 1950, les Jeunes Musulmans ont recommencé à

 17   faire de nouvelles recrues qui venaient de prison et ont rétabli des liens

 18   avec la communauté musulmane d'Egypte. Les deux sociétés secrètes

 19   partageaient une même idéologie et un milieu de complot. Les Bosniens

 20   n'avaient que de l'admiration pour la confrérie qui était passée dans le

 21   marquis pratiquement dans toute la société égyptienne avec pour devise :

 22   'Le Koran, c'est notre constitution; le prophète est notre guide, mort pour

 23   la gloire d'Allah, c'est là notre plus grande ambition.' Les Jeunes

 24   Musulmans avaient une même devise, 'le chemin, notre chemin c'est la

 25   Jihad.' Sous la tutelle d'Izetbegovic, le groupe de Sarajevo a maintenu des

 26   liens avec la confrérie en ayant des réunions secrètes dans plusieurs pays,

 27   et a fait de la contrebande de littérature islamique qui est ainsi arrivée

 28   en Bosnie."


Page 42019

  1   Le Saviez-vous, Général Praljak, saviez qu'Izetbegovic pendant cette

  2   période n'avait pas changé et qu'il avait toujours cette plateforme

  3   politique de sa jeunesse qu'il appliquait ?

  4   R.  Maître Karnavas, j'ai lu et étudié la "Déclaration islamique" au moment

  5   où il a été publié. C'est ce que je voulais dire, tout d'abord.

  6   Deuxièmement, je sais que ni M. Izetbegovic ni aucun de ses collaborateurs

  7   n'ont renié cette déclaration, ni se sont revenus sur elle. Troisièmement,

  8   au cours de la guerre, j'ai eu l'occasion de constater personnellement le

  9   fait que quotidiennement, avançait un processus d'islamisation de l'armée

 10   et de la population. C'était visible au jour le jour que cette vision du

 11   monde en fait, était de plus en plus apparente et qu'elle était un facteur

 12   de plus en plus déterminant pour l'évolution de la situation en Bosnie-

 13   Herzégovine. J'ai eu l'occasion d'aborder aussi ce sujet, pour ce qui est

 14   de la façon de se saluer, par exemple et ainsi de suite.

 15   Q.  Prenons la page 44 du document, c'est toujours la pièce 1D 00431. Pour

 16   vous, ce sera le tout dernier paragraphe de la page se terminant par 1850.

 17   Nous avons dans l'histoire, il dit :

 18   "Mais il dit le coup final a montré les liens qui visaient entre les Jeunes

 19   Musulmans et le régime révolutionnaire de l'Iran."

 20   Je pense que l'auteur ici parle du régime qu'on voit aujourd'hui sur

 21   l'écran de nos télévisions aujourd'hui :

 22   "Au cours de l'été 1982, Alija Izetbegovic et celui qui était depuis

 23   longtemps son associé, Omer Behmen, qui lui avait purgé 11 ans dans les

 24   prisons communistes, parce qu'il avait servi la cause islamique a commencé

 25   a prendre contact avec Tehran en passant par l'ambassade de l'Iran, à

 26   Viennes, en se servant d'un troisième Jeune Musulman, qui s'appelle Teufik

 27   Velagic, qui servait d'estafette, et Velagic devait transmettre une copie

 28   de la "Déclaration islamique" d'Izetbegovic, manifeste qui n'avait pas


Page 42020

  1   publié du mouvement et qui avait circulé, a été diffusé dans la

  2   clandestinité, à la façon des "samizdat." Apparemment, les Iraniens ont

  3   bien aimé ce texte, car ils ont accepté que les dirigeants des Jeunes

  4   Musulmans aillent rendre visite en Iran; ils ont prévu aussi une rencontre

  5   avec les Islamistes de Bosnie à Abu Dhabi, un pays tiers tout à fait sûr

  6   pour eux pour parler de leurs intérêts mutuels."

  7   Puis on dit :

  8   "Le meilleur témoin à charge c'était la "Déclaration islamique" qui

  9   commence par deux maximes, qui dit, c'est Schindler qui dit ceci :

 10   "Le livre qui n'avait pas été publié invoquait ou prenait je cite :

 11   'La révolution politique et le disait sans réserve.' Il n'y a pas de paix

 12   ni d'harmonie entre guillemets la religion islamique et les institutions

 13   politiques et sociales non islamiques."

 14   Je poursuis sur ce sujet, nous sommes maintenant à la page 48, voici

 15   ce que dit M. Schindler et vous nous avez dit que vous aviez déjà lu le

 16   document. Nous sommes ici au document ou à la page 1853. Le Dr Schindler

 17   dit ceci :

 18   "Izetbegovic était un Islamiste ceci personne ne pouvait en douter,

 19   si on avait lu sans a priori ce qu'il écrivait. L'indication la plus

 20   parlante de son état d'esprit c'était la 'Déclaration islamique' qui avait

 21   beaucoup intéressé la police secrète. Apparemment ceci avait pris des

 22   années à être écrit ça avait commencé en 1969, mais le texte c'est

 23   seulement au début des années 80 qu'il a été terminé; il n'a pas été publié

 24   avant qu'il ne soit publié à Sarajevo en 1990, ce qui a déclenché une

 25   tempête, une polémique incroyable, c'est un manifeste très singulier, cette

 26   'Déclaration islamique' c'est un document décousu qui ne mentionne jamais

 27   la Bosnie (parce que, sinon, il était sûr d'être arrêté sur le champ par la

 28   sécurité d'Etat), s'il l'avait mentionné, mais ceci montre et ceci place la


Page 42021

  1   philosophie politique ou religieuse d'Izetbegovic dans le courant des idées

  2   principales islamistes."

  3   Maintenant nous prenons la page 49, pour vous ce sera la page 1 854 :

  4   "La réaction" - dit-il - "des Chrétiens de Bosnie à cette rhétorique était

  5   immodérée, c'est compréhensible. Ces Chrétiens voyaient dans les écrits

  6   d'Izetbegovic une espèce de 'Mein Kampf islamique.' En Amérique, ce serait

  7   comme si un homme politique blanc du sud m'était en exergue publiquement

  8   ces ancêtres esclavagistes alors qu'il se pose en candidat à un poste

  9   public et qu'il met en valeur ses valeurs tout à fait dépassées. Comment

 10   réagiraient les Noirs américains face à ceci c'est facile à imaginer, et ce

 11   serait un peu comme ont réagi ceux qui n'étaient pas Musulmans lorsqu'on a

 12   vu la montée en puissance d'Izetbegovic en Bosnie."

 13   Vous nous avez dit que vous aviez lu et étudié ce document. Ici vous avez

 14   ce que dit M. Schindler, je reprends ses termes quand il parle des

 15   Chrétiens de Bosnie - c'est lui qui le dit, pas moi, donc je suppose que,

 16   là, il parle des Croates de Bosnie-Herzégovine et des Serbes de Bosnie-

 17   Herzégovine - est-ce que vous auriez un commentaire à faire sur ce que dit

 18   ici le Dr Schindler ?

 19   R.  Je puis. Ce que M. Schindler écrit dans son ouvrage, si je lui avais

 20   dit cela à M. Schindler en 1991, il m'aurait traité de nationaliste croate

 21   comme tous les autres l'ont fait, c'est cela le problème que je rencontre.

 22   Les Américains eux aussi avait la possibilité, les Français aussi de lire

 23   la "Déclaration islamique." Mais au début personne ne sait rien, et ne veut

 24   rien savoir, car on défend des idées qui n'ont rien à voir avec la réalité.

 25   Personne n'a bien lu "Mein Kampf," en vérité, ne l'a vraiment compris et

 26   c'est pour cela que Hitler a progressé. Ici, personne n'a vu ce texte comme

 27   il aurait fallu le faire. Alors, bien sûr, les Américains, qui avec les

 28   autres ont mis en place l'embargo, nous ont poussé nous aussi vers l'Iran


Page 42022

  1   et ont amené cette situation ou des armes venaient de l'Iran.

  2   Moi, une fois j'ai un entretien avec l'ambassadeur Viran Galat [phon],

  3   l'ambassadeur iranien, et pourquoi a-t-on cela ? Parce que : personne ne

  4   veut faire l'effort de lire ce qui est nécessaire, personne ne veut faire

  5   l'effort de comprendre quelle est la situation réelle. Tout le monde se

  6   présente comme s'il connaissait la chose parfaitement après 15 minutes, et

  7   c'est dans ces circonstances-là que l'on prend des décisions à la va-vite

  8   qui nous précipitent dans l'abîme, et ensuite dix ans plus tard a

  9   posteriori tout le monde est tout d'un coup très sage. Malheureusement

 10   c'est déjà l'histoire.

 11   Q.  Voyons ce qu'en dit le Dr Schindler pour enchaîner sur ce que vous

 12   venez de dire. Puis je reviendrai au tout début du livre pour voir si ceci

 13   peut nous être utile.

 14   Page 201, du livre du document 1D 03137, page 1 979 pour vous :

 15   "Izetbegovic et son parti ont réussi à présenter cette lutte comme étant

 16   une lutte laïque démocratique et occidentale, alors qu'en fait c'était un

 17   combat à l'oriental, islamique et autoritaire. Beaucoup de Musulmans de

 18   Bosnie ont trouvé la vision que donnait le SDA acceptable en tout cas

 19   meilleur que les autres options, et ce que Sarajevo disait de la Jihad ne

 20   les a pas trop préoccupés. Beaucoup d'entre eux trouvaient que c'était leur

 21   combat à eux aussi, le combat du SDA, et ils ont fait une confusion entre

 22   la défense des Musulmans et une guerre sainte que voulait précisément

 23   Izetbegovic.

 24   "Dans une interview révélatrice, Hase Tiric, le commandant des Cygnes

 25   noirs, qui était une Unité de force spéciale musulmane, on lui pose une

 26   question, et il dit à la question : 'est-ce que vous combattez pour la

 27   Bosnie ou pour un Etat musulman ?'"

 28   D'après cette citation, voici ce qu'il répond :


Page 42023

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18   

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42024

  1   "Quelle est la différence entre les deux ?"

  2   Est-ce que vous connaissiez ce général qu'on cite ici, Tiric ? Aviez-vous

  3   entendu parler de lui ? Aviez-vous entendu parler des Cygnes noirs ?

  4   R.  J'ai entendu parler des Cygnes noirs, et je suis au courant de tout ce

  5   qu'ils ont commis. J'ai entendu parler de lui, aussi de Hase Tiric, bien

  6   que je ne le connaisse pas, quant aux Cygnes noirs, oui, nous disposions

  7   d'informations tout à fait complètes les concernant les actions qui étaient

  8   les leurs.

  9   Q.  Vous avez dit que les médias occidentaux et certains des gouvernements

 10   occidentaux ont fait preuve d'une certaine naïveté dans leur comportement.

 11   Ici nous avons un extrait, qui nous montre la façon qu'a Izetbegovic de

 12   présenter son parti. Maintenant nous allons revenir à la page 15 du livre

 13   de M. Schindler, 1D 03137, je le rappelle. Page 15 en anglais, et je vais

 14   vous donner la page pour vous, c'est la toute première page du premier

 15   chapitre du livre. 18; 19, pour vous, nous dit-on.

 16   Voici les premiers mots :

 17   "Il réalisait ainsi un rêve de toujours. Quand Adil Zulfikarpasic est

 18   arrivé à Velika Kladusa, dans le nord-ouest de la Bosnie --"

 19   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 20   Q.  C'est page 1 825.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que ça marche maintenant, Monsieur le

 22   sténotypiste ?

 23   LE STENOTYPISTE : Oui.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation]

 25   Q.  Je recommence. Page 15 pour nous, 1 825 pour vous, document 1D 03437

 26   [comme interprété] :

 27   "C'était ainsi son rêve de toujours qui se réalisait. Adil Zulfikarpasic

 28   lorsqu'il est arrivé à Velika Kladusa dans le nord-ouest de la Bosnie vers


Page 42025

  1   la mi-septembre 1990, il a ressenti une fierté et un espoir qu'il n'avait

  2   jamais connu en tout cas pas depuis sa jeunesse.

  3   "Musulman convaincu, il était quand même un fervent d'adepte de la

  4   politique laïque, et il savait la nécessité qu'il y avait pour les

  5   Chrétiens et les Musulmans de Bosnie de coexister pacifiquement.

  6   "Il a donc été choqué lorsqu'il a vu cette foule qui s'était amassée, il y

  7   avait au moins 300 000 personnes - certains ont dit qu'il y avait 500 000

  8   personnes réunies à cet endroit. En tout cas, jamais on n'avait vu autant

  9   de Musulmans rassemblés en Bosnie. Il était choqué de voir parmi les

 10   drapeaux du parti des signes tout à fait inquiétants de jihadisme. Il y

 11   avait des banderoles de grande taille en vert clair, la couleur de l'islam,

 12   des hommes en turban et des gens qui criaient : 'Longue vie à Saddam

 13   Hussein.' Et pire encore, il y avait des banderoles qui faisaient l'éloge

 14   de l'Iran.

 15   "Zulfikarpasic s'est tourné vers Alija Izetbegovic, le nouveau dirigeant du

 16   parti, qui avait été mis en prison, qui avait été un prisonniers politique

 17   parce qu'il défendait l'idée d'un islam radical, et il a essayé de le

 18   ramener à la raison : 'Grand Dieu, Alija, pourquoi est-ce que tu fais ceci

 19   ? Est-ce que tu ne sais pas que dans une demi-heure, le monde entier va

 20   voir ces images ?" Zulfikarpasic était terrifié à l'idée de donner des

 21   munitions aux ennemis, d'alimenter ainsi les ennemis des Musulmans de

 22   Bosnie. Mais Izetbegovic n'a pas répondu, même quand Zulfikarpasic, qui

 23   était un de ceux qui levait des fonds pour le parti, un des trois vice-

 24   présidents aussi, lorsqu'il l'a admonesté : "Et je ne veux pas participer

 25   au massacre des Musulmans. Pourquoi est-ce que tu n'a pas l'image de

 26   Khomeini ?'"

 27   L'ancien, pas celui d'aujourd'hui. Et le fait qu'il n'a pas répondu :

 28   "Izetbegovic, a vraiment attristé le vieil homme, qui a vite conclu que le


Page 42026

  1   nouveau parti menait son peuple à la catastrophe. Deux jours plus tard, il

  2   a donné sa démission des postes qu'il occupait dans le parti et il a pris

  3   ses distances par rapport à Izetbegovic et au parti qu'il avait contribué à

  4   créer. Il a dit qu'il avait trouvé 'des preuves certaines et nombreuses

  5   d'intolérance, d'exclusion religieuse, de trafic ou dans l'administration

  6   et de tromperie.' Adil Zulfikarpasic avait commencé une campagne qui

  7   essayait de mettre en garde les Musulmans de Bosnie de ce que voulait faire

  8   le parti et ses dirigeants les menaient à la ruine. Mais personne n'a prêté

  9   l'oreille."

 10   Voici ce que je vous demande maintenant, Général Praljak : comment se fait-

 11   il que personne n'ait compris ce que voulait faire Izetbegovic ? Parce

 12   qu'ici, vous avez un grand rassemblement, vous avez tout ce qui se passe et

 13   l'Occident ne comprend pas, ne saisit pas. Est-ce que vous avez une

 14   explication à cela ?

 15   R.  Oui, j'en ai. Tout d'abord, vous ne pouvez pas dire que personne

 16   n'avait compris. Moi, j'avais compris. Donc, ne me comptez pas parmi ceux

 17   qui n'avaient pas compris. Un de mes amis académicien, un Musulman dont je

 18   tairai le nom, c'est avant les élections que je lui ai dit qu'en Bosnie-

 19   Herzégovine, ça n'allait pas être des élections au sens politique, mais que

 20   ces élections reviendraient, en fait, à faire un recensement. Donc le SDA

 21   recenserait les Musulmans, le HDZ les Croates et le SDS donnerait le

 22   résultat d'un recensement pour les Serbes. Toutes les pré conditions d'une

 23   catastrophe étaient présentes Toute guerre déjà en préparation dix ans

 24   avant et tout observateur ou chercheur sérieux est capable de déceler déjà

 25   ces signes; cependant, de tels observateurs et chercheurs sérieux, il n'y

 26   en avait déjà plus.

 27   Les Américains ont même créé al Qaeda en Afghanistan pour lutter contre

 28   l'Union soviétique. Moi, je peux dire, par exemple, je ne comprends pas la


Page 42027

  1   politique américaine. Ils se comportent comme s'ils étaient à la tête d'une

  2   entreprise de taille moyenne en envoyant des gens qui, au bout de 15

  3   minutes de présence sur le terrain sont censés en savoir plus que moi, par

  4   exemple, qui suis présent là-bas depuis 40 ans et ce, pour la seule raison

  5   qu'il s'agit d'Américains, que les Américains sont les plus puissants.

  6   Donc, cet homme qui est venu sur le terrain qui est un Américain, pour

  7   cette seule raison est censé être le plus intelligent et saisir la

  8   situation en 15 minutes. Bien entendu, quand on n'a rien compris et quand

  9   on prend des décisions, on créé des catastrophes. La guerre était en

 10   préparation, évidemment que la guerre allait contribuer à une islamisation

 11   plus poussée et à la progression de l'extrémisme.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous ne répondez tout pas à fait à

 13   la question de Me Karnavas, et vous prenez beaucoup de temps, de son temps.

 14   Mais, moi, j'ai une question de suivi à vous poser. J'ai, comme tout

 15   le monde, regardé ce livre qui est écrit par quelqu'un qui semble faire

 16   autorité, puisqu'il donne des conférences à l'académie navale américaine.

 17   C'est un livre qui a beaucoup de sources dont, notamment, des experts du

 18   bureau du Procureur, M. Donia, et des anciens analystes du bureau du

 19   Procureur, un dénommé Atila Ohare [phon], qui a écrit plusieurs articles,

 20   dont des articles concernant les documents adressés par la Serbie au bureau

 21   du Procureur. Il se fonde également sur des sources émanant de la CIA, et

 22   cetera. Donc, il dit beaucoup de choses qui sont intéressantes.

 23   Vous venez de dire à Me Karnavas que vous, vous étiez un de ceux qui

 24   avaient compris. Mais alors, si vous aviez compris que M. Izetbegovic, par

 25   la 2Déclaration islamique," par ses troupes, les "Moudjahidines," menaient

 26   en réalité une guerre sainte, comment se fait-il que vous leur avez procuré

 27   des armes ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Avez-vous vu la condamnation qui a pesé sur la


Page 42028

  1   Croatie pour tout ? Si on avait empêché l'obtention des  armes par les

  2   Musulmans, on aurait été traité de fascistes super fascistes, d'Oustachi

  3   super Oustachi. Donc une fois que le monde a admis que les Musulmans

  4   étaient victimes en raison de tout ce qui s'était passé à Sarajevo, si

  5   quelqu'un venait des Etats-Unis, de France et circulait dans la région, et

  6   si vous lui dites quelque chose contre la victime, si vous essayez de dire

  7   un mot contre la victime, du genre, la victime n'est pas aussi innocente

  8   qu'elle en a l'air, Monsieur le Président, vous auriez immédiatement été

  9   traité de criminel. De l'avis de ces personnes, les victimes étaient sans

 10   armes, n'avaient rien à leur disposition et n'étaient pas des

 11   Moudjahidines.

 12   Voilà les vérités qu'on ne peut pas ne pas dire. Il faut une quinzaine

 13   d'années, en général, pour que la vérité éclate, les vérités que moi, je

 14   connaissais déjà à l'époque.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez d'évoquer Sarajevo. Dans le livre,

 16   l'auteur du livre fait une référence aux gangs qui sévissaient à Sarajevo,

 17   notamment le célèbre Juka Prazina, et puis, un dénommé Caco qui faisait de

 18   l'épuration ethnique ayant pour victimes des Serbes. Au poste où vous étiez

 19   de ministère adjoint de la Défense, puis au poste où vous étiez de

 20   commandant du HVO, vous saviez cela ou vous ne le saviez pas, et notamment

 21   les agissements de Juka Prazina ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Nous savions tous. Nous étions au courant

 23   des exécutions. Mais, écoutez, des centaines de personnes ont été tuées,

 24   des dizaines de milliers ont été expulsées. Tout cela, c'étaient des choses

 25   qui étaient des secrets de Polichinelle, sauf pour un grand nombre de

 26   journalistes des Etats-Unis, d'Angleterre en particulier et ne me parlez

 27   pas, je vous prie, de journalisme objectif. Ça, ça n'existe pas.

 28    M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Maître Karnavas, vous allez continuer mais il


Page 42029

  1   est peut-être temps de faire la pause à moins que vous aviez une question

  2   urgente à poser. Non, on fait la pause. Bien.

  3   Alors on va faire la pause et on reprendra après la pause, 20 minutes.

  4   --- L'audience est suspendue à 10 heures 36.

  5   --- L'audience est reprise à 10 heures 57.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va reprendre l'audience.

  7   Je crois que Me Ibrisimovic voulait avoir la parole.

  8   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Quand Me Karnavas s'est lancé dans la thèse qui était le sujet défendu par

 10   le Procureur dans l'affaire contre M. Izetbegovic, je dois dire que j'ai

 11   été impliqué dans cette affaire, j'étais l'avocat qui défendait les

 12   intérêts des trois accusés dans cette affaire en 1983. Ce groupe de trois

 13   hommes a été condamné pour délit de pensée et d'expression. M. Izetbegovic

 14   a été condamné à neuf ans par un tribunal de Belgrade. Je crois que M.

 15   Praljak connaît la réaction des intellectuels de Zagreb et de Belgrade par

 16   rapport à ce procès à l'époque. Voilà. C'est tout ce que je voulais dire.

 17   Merci.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact, je le sais.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci, Maître Ibrisimovic.

 20   Bien. Maître Karnavas, le greffier a dit "time left," vous avez une heure

 21   sept minutes.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 23   ne savais que Me Ibrisimovic était impliqué. Je savais que c'était Mme

 24   Residovic qui était Procureur en l'espèce, je n'en savais pas plus, enfin

 25   nous vous remercions de nous avoir donné ces informations.

 26   Q.  Je vais reprendre là où nous en étions, tout du moins la question du

 27   Président de la Chambre, la question était la suivante : comment se fait-il

 28   que les Croates équipaient les Musulmans en arme ?


Page 42030

  1   Lorsque l'on se penche sur le livre de M. Schindler, on voit que les

  2   Slovènes aussi étaient impliqués et qu'il y avait aussi des armes qui

  3   venaient de Hongrie, par le biais de la Hongrie. On sait que les Américains

  4   aussi étaient impliqués, vous nous l'avez dit.

  5   Pourriez-vous donc nous expliquer comment il se fait que ces pays-là, ces

  6   pays voisins, se sont impliqués pour briser l'embargo des armes et pour

  7   envoyer des armes aux Musulmans de Bosnie-Herzégovine. Comment se fait-il

  8   qu'ils ne se sont pas rendus compte en fait qu'en faisant cela ils

  9   collaboraient avec les organisations islamistes radicales ?

 10   R.  Pour deux raisons : première raison, un grand nombre de ces gens-là

 11   croyaient que les Musulmans se battaient contre l'agression. Et deuxième

 12   raison, des sommes très importantes étaient en cause et tout le monde avait

 13   à y gagner.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Je tiens à vous dire pour le compte rendu

 15   que je fais référence ici à la page 155 du livre de M. Schindler où il

 16   parle de cette organisation bien connue dont nous avons entendu parler de

 17   cas de TWRA, et dans cette page, il fait référence à la contrebande d'armes

 18   et il déclare qu'à l'été 1992, Sarajevo avait ouvert un corridor pour les

 19   armes au travers de Slovénie en utilisant des avions de l'ex-bloc

 20   soviétique, des transporteurs 11-76 et des hélicoptères Mig-26, pour amener

 21   des armes du Pacte de Varsovie de Hongrie en Bosnie par le biais des

 22   aéroport slovènes. Donc on voit que les pays voisins sont aussi --

 23   participent aussi à cette violation de l'embargo et envoient des armes par

 24   le biais de la Croatie.

 25   Q.  Est-ce que vous le saviez à l'époque ?

 26   R.  Totalement.

 27   Q.  Donc pour être parfaitement exhaustif, j'aimerais que nous nous

 28   penchions sur un document le 1D 03145, qui vient d'être distribué. C'est un


Page 42031

  1   document qui nous vient du Herald Tribune International, Herald Tribune

  2   d'hier, donc le 24 juin 2009. J'ai lu cela ce matin au passage, mais je

  3   pense que cela a une incidence -- on parle aussi, on a parlé du Juge

  4   Antonetti et des réponses et questions.

  5   Donc voici le titre : "Les familles des victimes du 11 septembre veulent un

  6   procès."

  7   "Les documents obtenus par les conseils des victimes des familles du 11

  8   septembre donnent de nouveaux éléments de preuve portant sur un soutien

  9   financier important pour al-Qaeda et pour d'autres groupes extrémistes

 10   effectués par les membres de la famille royale saoudienne mais ces éléments

 11   de preuve ne pourront peut-être jamais se retrouver -- présenter en

 12   prétoire à cause d'obstacles légaux et diplomatiques."

 13   On ajoute :

 14   "Pour ajouter à l'intrigue, des documents secrets des services

 15   secrets américains portant sur les finances saoudiennes ont été donnés, de

 16   façon anonyme, aux conseils des familles des victimes."

 17   Ensuite un peu plus tard, il est écrit :

 18   "Les Saoudiens ont toujours niés tous liens avec des groupes

 19   terroristes, et jusqu'à présent, ils ont lancé une campagne très agressive

 20   et très réussi pour repousser toutes les allégations portées dans les

 21   tribunaux fédéraux en se basant sur leur immunité souveraine."

 22   "Les liens des Saoudiens au terrorisme ont été l'objet d'enquêteurs

 23   gouvernementales depuis des années et de discussions importantes."

 24   Ensuite dernier paragraphe :

 25   "Un agent -- une personne se décrivant comme un agent d'al-Qaeda en

 26   Bosnie a déclaré dans une interview avec les conseils dans ce procès qu'une

 27   autre association caritative contrôlée principalement par les membres de la

 28   famille royale, la Haute commission saoudienne pour l'aide à la Bosnie a


Page 42032

  1   donné de l'argent et de l'équipement à des groupes terroristes dans les

  2   années 1990 et ont engagé des agents militants comme lui-même."

  3   Ensuite un autre passage qui m'intéresse parce que tout l'article est

  4   très intéressant. Mais j'ai un autre passage à vous lire, il est écrit :

  5   "Dans un rapport secret des services secrets allemands, on donnait

  6   une description très précise des dizaines de millions de dollars qui sont

  7   passés de banque en banque dans les années 90 avec les dates et les

  8   montants en dollars, transferts effectués par le prince Salman bin Abdul-

  9   Aziz et d'autres membres de la famille royale saoudienne transfert vers une

 10   autre organisation caritative qui soi-disant devait -- finançait des

 11   activités militantes au Pakistan et en Bosnie."

 12   Etiez-vous au courant de ces activités ? Ça c'est ma première question.

 13   Deuxièmement, étant donné qu'Alija Izetbegovic est dépeint comme le

 14   président de la présidence, donc c'est le président de tout le pays entier,

 15   il est censé s'occuper de tous les habitants de Bosnie-Herzégovine, y

 16   compris les Croates, pourriez-vous nous dire si d'après ce que vous saviez,

 17   si sur ces millions et millions de dollars qui ont été envoyés par les

 18   Saoudiens et d'autres, combien de cet argent s'est retrouvé dans les poches

 19   de Croates de Bosnie-Herzégovine qui quand même à l'époque travaillaient en

 20   coopération avec les forces musulmanes dans leur lutte contre l'agresseur

 21   serbe ?

 22   R.  Selon les renseignements dont nous disposions à l'époque, il était

 23   question de centaines de millions de dollars, et même de plus d'un milliard

 24   de dollars qui venaient de diverses sources, nous n'avions aucun moyen

 25   d'exercer un quelconque contrôle ou de vérifier si les Croates recevaient

 26   quelque chose de ces sommes importantes.

 27   Q.  Avant de poursuivre, j'ai un petit problème logistique en ce qui

 28   concerne la "Déclaration islamique", nous allons demander le versement de


Page 42033

  1   cette pièce, bien que jusqu'à présent on nous ait dit qu'elle ne soit pas

  2   pertinente en l'espèce.

  3   Pourrions-nous, s'il vous plaît, regarder la pièce 1D 03142 ? Il s'agit de

  4   l'extrait d'un livre qui s'est retrouvé dans une note de pied de page par

  5   M. Tomjanovic qui est un employé du bureau du Procureur, et qui d'ailleurs

  6   témoignait ici en tant qu'expert -- enfin nous savons qu'il travaille pour

  7   l'Accusation bien qu'il soit expert.

  8   Dans ce livre de M. Suad Arnautovic : "Elections en Bosnie-Herzégovine",

  9   est-ce que vous connaissiez ce livre déjà ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Connaissez-vous la personne, ce M. Arnautovic ?

 12   R.  Oui. Ah, non, c'est Suad Arnautovic, non, non.

 13   Q.  Dans ce livre, en anglais ce sera la cote -- on trouve en bas du 1 832,

 14   il est écrit :

 15   "Le Parti pour l'Action démocratique ne publiait pas de livres bien précis,

 16   mais l'éditeur du "Bosna" de Sarajevo a republié le livre 'Déclaration

 17   islamique' écrit par Alija Izetbegovic. Cette nouvelle édition a fait

 18   l'objet d'une campagne de presse et a été distribuée lors des

 19   rassemblements du parti et dans d'autres événements au cours de la campagne

 20   électorale du SDA.

 21   "Au cours de cette campagne, le livre de Fikret Abdic, 'Ma Réponse', a

 22   aussi été préparé et a aussi fait l'objet de promotion au cours de cette

 23   campagne, et en 1991, un livre appelé : 'Le SDA peut le faire et sait

 24   comment le faire' livre écrit par le même auteur, a été publié."

 25   J'aimerais pour le compte rendu m'assurer que vous saviez que cette

 26   "Déclaration islamique", que ce livre avait été republié, vous le saviez,

 27   mais est-ce que vous saviez qu'il était aussi diffusé dans le cadre des

 28   rassemblements du SDA, distribué par tout simplement le président du SDA à


Page 42034

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42035

  1   ce moment, et ce, juste avant le conflit ?

  2   R.  Je sais que ce livre a été édité, je sais qu'il a été diffusé. Mais ce

  3   que je ne sais pas c'est que c'est M. Izetbegovic qui se chargeait de sa

  4   diffusion.

  5   Q.  Je vous remercie. Nous pouvons maintenant reprendre nos travaux là où

  6   nous en étions.

  7   Le livre : "La terreur diabolique".

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai besoin d'une petite

  9   information. Dans le passage que vous nous avez lu, je ne vois pas qu'il

 10   est écrit que ce livre a été distribué par M. Izetbegovic.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, enfin ce n'est pas ce que j'ai dit,

 12   mais il a été distribué.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] D'abord il le fait republier et ensuite il

 15   le diffuse, il le fait distribuer. Comment se fait-il qu'on l'a retrouvé,

 16   on a trouvé des exemplaires dans les rassemblements du parti ?

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, je fais référence à la page 44,

 18   lignes 22 et suite, vous demandez à M. Praljak s'il savait que ce livre

 19   était diffusé par tout simplement le président du SDA ?

 20   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc vous avez impliqué que c'était

 22   le président lui-même qui diffusait son livre, et j'aimerais savoir d'où

 23   vous tenez cette information ?

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] Ecoutez, il s'agit d'un rassemblement du

 25   parti. Nous avons vu les bannières représentant Khomeini déjà. Il vient de

 26   sortir de prison, il fait republier son livre. Alors comment est-ce que les

 27   exemplaires se retrouvent dans les rassemblements du parti ? C'est une

 28   hypothèse, je ne peux pas la faire, certes. On peut la rejeter, mais il n'a


Page 42036

  1   jamais renoncé à sa "Déclaration islamique". Il en fait la promotion. Nous

  2   avons Fikret Abdic qui est un Musulman tout à fait dévot, mais qui n'est

  3   pas d'accord avec les politiques d'Alija Izetbegovic, on ne sait pas

  4   exactement si c'était Izetbegovic lui-même qui distribuait le livre, mais

  5   vous pouvez en tirer les conclusions que vous voulez.

  6   Q.  Mais je vais reposer la question : d'après vous, Monsieur Praljak, est-

  7   ce qu'Alija Izetbegovic est revenu sur sa "Déclaration islamique", a-t-il

  8   renoncé à un moment ou à un autre, l'a-t-il répudiée cette "Déclaration

  9   islamique", sachant comment il la promouvait auprès de l'Ayatollah et

 10   d'autres pour obtenir des financements de la part de l'Iran, donc savez-

 11   vous si à un moment ou à un autre Alija Izetbegovic a répudié ce qu'il

 12   avait déclaré dans sa "Déclaration islamique" ?

 13   R.  Ma réponse précise sera la suivante, je n'ai pas connaissance que M.

 14   Izetbegovic ait en quelque lieu que ce soit, autrement dit en public, pris

 15   ses distances par rapport à la "Déclaration islamique".

 16   Q.  A-t-il dénoncé une personne à un moment ou à un autre pour avoir

 17   diffusé ce livre, a-t-il reproché à cette personne ou à une autre de

 18   distribuer ce livre dans des partis, ou lui en tant que président de ce

 19   parti, essayé de galvaniser ses membres, les membres de son parti pour

 20   qu'ils adhèrent à sa plateforme ?

 21   R.  Je n'ai pas connaissance d'un seul cas de ce genre.

 22   Q.  Maintenant passons à la page 52 de la pièce 1D 03137. Il s'agit de la

 23   page 1 856 en B/C/S. Premier paragraphe il est écrit :

 24   "Abdic a rapidement quitté le SDA, considérant qu'il s'agissait d'un nid de

 25   radicaux et d'extrémistes islamistes, et Zulfikarpasic et Filipovic ont

 26   aussi quitté le parti totalement dégoûtés après le rassemblement de Velika

 27   Kladusa, qui avait révélé le côté déplaisant de la vision qu'avait

 28   Izetbegovic en ce qui concerne la Bosnie, Izetbegovic les a chassés, les a


Page 42037

  1   purgés du parti après avoir obtenu tout l'argent et toute la respectabilité

  2   qu'ils lui donnaient et dont il n'avait plus besoin. Abdic a décidé de se

  3   présenter contre Izetbegovic dans l'élection présidentielle bosnienne à

  4   venir, alors que Zulfikarpasic et Filipovic ont souhaité fonder leur propre

  5   parti, l'Organisation des Musulmans bosniens, qui devait représenter les

  6   intérêts laïcs."

  7   Il s'agit du même Abdic à propos duquel on vous a posé des questions

  8   précédemment. Il me semble que c'est M. le Juge Antonetti qui vous a posé

  9   des questions sur cette personne, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, c'est exact s'agissant d'Abdic. Et ce qui est exact aussi c'est

 11   que la politique d'Abdic, de Zulfikarpasic et de Filipovic était différente

 12   de celle qui était menée par M. Izetbegovic.

 13   Q.  Si on descend plus bas, à moins que M. Schindler ne se trompe, il est

 14   écrit au paragraphe suivant, à peu près au milieu :

 15   "Les Bosniens ont été rapidement trompés par les déclarations du SDA

 16   portant sur la défense des droits musulmans."

 17   "Comme l'a dit un électeur : 'Le SDA, c'est le seul parti. Mais je ne sais

 18   toujours pas quel est son programme, ça, c'est vrai. En fait, ils ne disent

 19   rien.' Sur les 40 fondateurs du SDA, il n'y en avait que huit qui avaient

 20   été des Jeunes Musulmans, mais il s'agissait des vétérans, des affidés

 21   d'Izetbegovic qui dirigeaient le parti depuis sa fondation. Ils avaient

 22   tous les postes-clés, ils les avaient en coulisses et ils étaient l'essence

 23   même du mouvement, mais ils ne pouvaient pas être attaqués."

 24   Un peu plus loin maintenant :

 25   "Dans la 'Déclaration islamique', il était expliqué à quoi allait

 26   ressembler le parti : 'La lutte pour un système islamique et une

 27   reconstruction complète de la société musulmane ne peut se réaliser que si

 28   elle est dirigée par des personnalités fortes rassemblées dans une


Page 42038

  1   organisation solide et homogène. Cette organisation n'est pas un parti

  2   politique comme on en voit dans l'arsenal de la démocratie occidentale. Il

  3   s'agit d'un mouvement qui est fondé sur la théologie islamique.' Dans un

  4   moment de candeur assez rare, Izetbegovic a admis que le rôle des Jeunes

  5   Musulmans était absolument essentiel : 'Il faut tout simplement dire qu'un

  6   grand nombre de ces personnes, la plupart d'entre eux d'ailleurs, ont

  7   participé à la création du SDA en 1990'."

  8   Ce Omer Behmen, était-il un Jeune Musulman, lui aussi ? Si vous le savez,

  9   bien sûr.

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Passons maintenant à la page 54.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Page 54. Je voudrais rester à la page 53.

 13   Monsieur Praljak, tout à l'heure, Me Karnavas avait dit quelque chose, il

 14   avait dit que M. Abdic avait eu plus de voies que M. Izetbegovic. Cela

 15   m'avait vivement intéressé parce que je me suis dit, si Abdic a plus de

 16   voix, comment ça se fait que ce n'est pas lui qui a été à la tête de la

 17   présidence ? Et à la page 53, on a les résultats lors du vote de novembre

 18   1990. On sait que les Musulmans ont eu 43,7 % des voix, soit 1 905 829

 19   personnes qui ont voté pour eux; les Serbes, 31,4 %; et les Croates, 17,3

 20   %. C'est des chiffres que tout le monde a maintenant depuis très longtemps.

 21   Puis, ça continue et il dit - et c'est là où j'ai du mal à comprendre - il

 22   dit qu'Izetbegovic avait eu 874 213 voix, et Abdic, 1 040 307. Il y a une

 23   erreur au transcript, ce n'est pas 1 400 000, mais c'est 1 040 000. C'est

 24   un détail.

 25   Monsieur Praljak, vous qui êtes un fin connaisseur des arcanes politiques,

 26   vous pouvez m'expliquer comment se fait-il que si Abdic a plus de voix, ce

 27   n'est pas lui qui s'est trouvé à la tête de la République de Bosnie-

 28   Herzégovine ?


Page 42039

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Abdic a obtenu plus de voix, et c'était le

  2   tribun populaire, alors que M. Izetbegovic avait derrière lui un appareil

  3   de parti qui était puissant et c'est la raison pour laquelle il est devenu

  4   président de la présidence.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est donc l'appareil du parti qui l'a propulsé

  6   comme président de la présidence, c'est ce que vous nous expliquez. Malgré

  7   le fait que le suffrage populaire avait donné plus de voix à Abdic ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact. L'appareil du parti est la force qui

  9   vient de ce qu'on peut appeler les deuxième et troisième lignes de prises

 10   de décisions. Donc il a demandé expressément à Abdic de renoncer, et à un

 11   certain moment, Abdic a volontairement accepté cette solution en pensant

 12   qu'il allait conserver le pouvoir. Mais le pouvoir s'est trouvé par la

 13   suite investi dans une organisation, l'organisation est de toute façon plus

 14   puissante que les individus.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 16   Passons maintenant à la page 54. Enfin, non, c'est le bas de la page 53 et

 17   le haut de la page 54. Je vais lire en pointillé.

 18   Q.  Ici, c'est la page 1 857, pour vous, Monsieur Praljak, en bas de la

 19   page :

 20   "En faisant peur à la sécurité d'Etat, Izetbegovic a passé tous les

 21   premiers mois de l'année 1991 à rendre visite aux pays voisins musulmans

 22   amicaux en essayant d'obtenir des faveurs politiques et financières pour

 23   les Musulmans de Bosnie."

 24   Ensuite, il est écrit :

 25   "Et c'est la visite d'Izetbegovic et de son aréopage d'officiels du SDA en

 26   Iran qui a été le plus mal vu à la maison. Lorsque la délégation est

 27   arrivée à Téhéran au début mai, ils ont déclaré qu'il fallait ouvrir un

 28   consulat iranien à Sarajevo, il y a eu des discussions à propos d'aide


Page 42040

  1   financière…"

  2   Il est écrit que :

  3   "Izetbegovic a demandé au dirigeant iranien Rafsanjani ce que les services

  4   secrets iraniens pensaient de la situation en Bosnie en ce qui concerne les

  5   risques de guerre."

  6   "…et il a explicitement demandé aux Iraniens d'apporter de l'aide." C'est à

  7   la page suivante, Général Praljak.

  8   "…il a explicitement demandé aux Iraniens de leur apporter de l'aide s'il y

  9   avait hostilités. Les Bosniaques ont été très contents de savoir qu'ils

 10   pouvaient compter sur le soutien plein et entier de l'Iran. Ils ont reçu

 11   des chèques en blanc." On leur a dit la chose suivante, 'A partir de

 12   maintenant, dans le budget de l'Iran, nous considérerons que l'Iran a 2

 13   millions d'habitants de plus que ce qu'elle a à l'heure actuelle'."

 14   Saviez-vous ce que faisait Izetbegovic en 1991, lorsque visiblement il

 15   était en train de se préparer à l'éventualité d'une guerre, il était en

 16   train d'essayer d'obtenir le soutien financier de l'Iran ? Est-ce que

 17   c'était de notoriété publique ?

 18   M. STRINGER : [interprétation] Non, est-ce que quelqu'un savait cela dans

 19   la presse ? Ce n'est pas assez précis.

 20   M. KARNAVAS : [interprétation] Très bien. Je vais reformuler ma question.

 21   Q.  Nous avons entendu plusieurs témoignages ici et vous nous avez dit qu'à

 22   un moment Izetbegovic ne se préparait pas vraiment à la guerre. Nous avons

 23   dit qu'il était manipulé, en tout cas c'est que dit Filipovic et vous avez

 24   tendance à le croire, mais ici il est écrit qu'Izetbegovic dès 1991 rend

 25   visite à l'Iran en prévoyant la guerre et en essayant de se préparer au cas

 26   où la guerre aurait lieu.

 27   Izetbegovic qui est président de la présidence, donc à un moment ou à un

 28   autre a-t-il annoncé aux autres membres de la présidence ou aux Croates,


Page 42041

  1   aux membres croates où aux habitants de la Bosnie-Herzégovine, la chose

  2   suivante : ne craignez rien, si jamais il y a guerre en Bosnie-Herzégovine

  3   nous aurons l'aide pleine et entière de l'Iran ?

  4   R.  Maître Karnavas, l'un et l'autre ne s'exclut pas mutuellement, les

  5   déclarations publiques de M. Izetbegovic allaient dans le sens qu'il n'y

  6   aurait pas de guerre. C'est ce qu'il disait publiquement. A cet égard, en

  7   dehors de ce qui correspondait à la Ligue patriotique c'est avant tout d'un

  8   point de vue psychologique qu'il n'a pas préparé son peuple à la guerre.

  9   Il est également exact qu'il s'est rendu en Iran et nous étions au courant

 10   de cela, mais je vous en prie les Américains aussi le savaient. Nous

 11   recevions via la Croatie des armes en provenance de l'Iran et cela était

 12   accompagné d'un accord tacite mais très clair des Américains. Des avions

 13   atterrissaient. Velayati y venait. 

 14   Q.  Ça je le savais, j'ai bien compris, mais vous ne répondez pas à ma

 15   question. Veuillez, s'il vous plaît, répondre à ma question. Je voudrais

 16   savoir : si Izetbegovic a annoncé à un moment ou à un autre de façon

 17   publique la chose suivante : je suis allé en Iran, je suis allé à Téhéran,

 18   j'ai rencontré les mollahs et sachez que si nous sommes en guerre, ils nous

 19   aideront -- si une personne, si quiconque attaque la Bosnie-Herzégovine,

 20   les Iraniens sont prêts à nous aider ? A-t-il fait cette annonce publique,

 21   oui ou non ?

 22   R.  Non, il ne l'a pas fait.

 23   Q.  Très bien.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous avez dit que vous aviez

 25   rencontré le ministre des Affaires étrangères iranien, Velayati. Qu'est-ce

 26   qu'il vous a dit ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été présent lors d'une réunion, non pas

 28   moi seul mais il y avait là plusieurs d'entre nous, c'était en Croatie et


Page 42042

  1   nous étions venus pour nous mettre d'accord sur les envois d'armes en

  2   provenance d'Iran. Nous étions soumis à un embargo, l'occident nous avait

  3   tout simplement trahi et livré au massacre. C'est ce qu'a fait la

  4   civilisation occidentale. Lorsque vous êtes en train de vous noyer et que

  5   quelqu'un vous tend la main, ce que vous faites c'est que vous saisissez la

  6   main en question sans vous poser la question de savoir à qui elle

  7   appartient et ce qui se trouve derrière. De plus l'occident était au

  8   courant et au courant de chaque avion qui atterrissait et de ce qu'il

  9   pouvait bien traverser. Donc à cet égard, nous avons accepté l'aide aussi

 10   bien de la Hongrie que de l'Argentine et ainsi de suite parce que l'embargo

 11   était une chose proprement incompréhensible.

 12   Lorsqu'une décision aussi catastrophique avait été prise, tout le monde

 13   faisait la politique de l'autruche en disant : maintenant, on ne peut pas

 14   revenir en arrière sur cet embargo, débrouillez-vous. Alors certaines armes

 15   nous les recevions gratuitement et nous les envoyons en Bosnie-Herzégovine

 16   bien que nous prélevions une partie pour nous-mêmes. Quant à ce que nous

 17   acquérions sur le marché, c'était à des tarifs sept à huit fois supérieurs

 18   à ce que l'on pouvait acheter normalement. Evidemment cela a entraîné une

 19   catastrophe d'un point de vue financier et lorsque ensuite la guerre se

 20   termine, ce qui se passe c'est que tout simplement vous vous retrouvez avec

 21   les plus grandes entreprises de votre pays qui sont rachetées ou achetées.

 22   Mais je pense qu'on connaît très bien la situation dont je parle tout un

 23   chacun qui s'intéresse à la situation politique la connaît.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Ligne 2, page 52, ce n'est pas le ministre des

 25   affaires étrangères israélien mais iranien. Voilà, c'est corrigé.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci. Page 64 du document, 1D 03137. Nous


Page 42043

  1   avons une référence à la page 1 866 pour vous une référence disais-je :

  2   "Pour le Dr Schindler note qu'en juillet 1991, alors qu'il était en

  3   visite en Turquie, Izetbegovic a exigé que la Bosnie rejoigne

  4   l'organisation de la Conférence islamique, une organisation soutenue par

  5   l'Arabie Saoudite qui avait la réputation de faire la propagande de formes

  6   extrémistes ou extrêmes de l'islam."

  7   Fin de citation.

  8   Q.  Saviez-vous qu'Izetbegovic avait formulé cette demande ?

  9   R.  Je l'ignorais.

 10   Q.  Bien. Page 95 du document. C'est le document 3137, page 95, nous y

 11   trouvons quelques références. Pour vous, ce sera la page

 12   1 893. Il est question d'un manifeste du SDA, l'Etat musulman vertueux,"

 13   écrit par Ednan Jahic, chef du parti du SDA à Tuzla. On dit de Tuzla pour

 14   ce qui est de la population musulmane, c'est la deuxième en importance;

 15   est-ce vrai ?

 16   Est-ce la deuxième ville musulmane la plus importante en Bosnie-

 17   Herzégovine, ou est-ce qu'elle l'était à l'époque du moins ?

 18   R.  Il y a eu un certain nombre de livrets, d'ouvrages que nous avons reçus

 19   à diverses occasions. Je ne peux pas me rappeler exactement cet ouvrage-là.

 20   Mais pour certains d'entre eux, oui, je les connais et je connais aussi

 21   certaines personnes concernées.

 22   Q.  Oui, mais je vous demandais autre chose. Il dit de Tuzla : qu'en

 23   matière d'importance démographique, c'est la deuxième ville musulmane de la

 24   ville; est-ce vrai ou est-ce que c'est la troisième en importance ou la

 25   quatrième, d'après vous ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Nous avons cette publication. Cet article paraît le 17 septembre 1993,

 28   17 septembre 1993. Il est question de cet Etat musulman virtuel :


Page 42044

  1   "Le territoire contrôlé par l'armée de Bosnie après la guerre deviendra ou

  2   deviendrait un Etat musulman. C'est ce que veux le peuple musulman, et

  3   après tout notre chef laïc, Alija Izetbegovic, et notre chef religieux,

  4   Mustafa Ceric, le veulent."

  5   A ce moment-là de l'histoire, nous commençons en juillet, en août, ici

  6   c'est le mois de septembre, n'est-ce pas un fait, l'armée de Bosnie-

  7   Herzégovine, l'ABiH, n'essayait tel pas de capturer le plus de territoires

  8   possibles tout en jouant une politique dilatoire à la table des

  9   négociations ? N'est-ce pas là un fait ?

 10   R.  C'est exact.

 11   Q.  Je poursuis le texte au point suivant :

 12   "L'Etat musulman se sera l'Etat national des Musulmans de Bosnie, des

 13   musliens [comme interprété] ou Bosniens (avec des droits civiques réservés

 14   aux minorités). Tous les citoyens seront assurés d'une égalité de droits

 15   alors qu'au niveau de la prospérité personnelle outre l'initiative

 16   individuel ce niveau de prospérité sera largement en fonction de la mesure

 17   dans laquelle cet individu accepte et applique les principes et l'esprit de

 18   l'idéologie islamique."

 19   Vous avez étudié l'histoire. Ce monsieur, est-ce qu'il n'y prône pas

 20   quelque part ce qu'ont fait les Ottomans lorsqu'ils sont arrivés sur la

 21   zone ? Est-ce qu'il ne prône pas la même forme de gouvernement ?

 22   R.  Oui, on peut l'interpréter ainsi du moins toute interprétation aussi

 23   radicale de l'Islam, comme j'ai déjà dit conduite à une inégalité entre les

 24   citoyens au sein de l'Etat. Donc il y  a un premier niveau, un premier

 25   degré de citoyenneté, ce sont ceux qui appartiennent à la communauté

 26   musulmane, à l'Islam, et il y a les autres qui ne peuvent pas être égaux,

 27   qui sont en dehors. C'est ça, cette interprétation radicale de l'Islam, et

 28   lorsqu'on la met en œuvre ainsi, c'est effectivement ce que l'on obtient.


Page 42045

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7   

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42046

  1   Q.  Ce chef du SDA à Tuzla, lorsqu'il parle des minorités, est-ce qu'il ne

  2   parle pas des Serbes et des Croates de Bosnie, qui sont des peuples

  3   constitutifs en Bosnie-Herzégovine, qu'ils l'étaient encore à l'époque et

  4   le sont toujours ?

  5   R.  C'est exact, aussi bien les Serbes que les Croates, que les Juifs et

  6   les autres.

  7   Q.  Le plan de paix ou le processus Vance-Owen que vous connaissez,

  8   lorsqu'il prévoyait plusieurs provinces ou ce plan Cutileiro, est-ce que

  9   ces plans n'ont jamais envisagé une majorité qui serait donnée à un groupe

 10   ethnique particulier ou est-ce que lorsqu'on parle de gouverner telle ou

 11   telle province de zone, est-ce que n'a jamais envisagé dans ces plans de

 12   faire des autres groupes démographiques des minorités nationales ?

 13   R.  Non, cela n'a jamais été aux termes de quel que plan de délimitation à

 14   l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine que ce soit. Tout devait être obéi à

 15   un principe d'égalité quasiment spéculaire comme dans un miroir.

 16   Q.  Parfait. Point suivant du texte.

 17   "L'état musulman va avoir une idéologie islamique fondée sur l'Islam, la

 18   religion islamique et les principes juridiques, éthiques et sociaux de

 19   l'Islam."

 20   Est-ce que le processus de paix Vance-Owen ou le plan Cutileiro ou le

 21   plan Stoltenberg, Owen, est-ce que c'est ça qu'il prônait ?

 22   R.  Non, ce n'est pas admissible sous cet angle, ce n'était pas prévu

 23   ainsi.

 24   Q.  Point suivant :

 25   "Aucun état n'a jamais aidé sur nos positions, pas plus qu'il n'a

 26   volontairement permis la promotion des opposés au régime d'intérêt

 27   politique opposé.

 28   Ensuite on dit :


Page 42047

  1   "Ceux qui prouvent qu'ils sont de vrais Musulmans, qu'ils sont de

  2   bons nationalistes bien conscients et de bons croyants auront plus de

  3   privilèges sociaux que ceux qui insistent à faire partie ou persistent à

  4   faire partie de l'opposition."

  5   Est-ce qu'on a ici le type d'idéo qu'on préconise ou que proposent

  6   les plans de paix dont il était question, dont on discutait de 1992 à 1994

  7   ?

  8   R.  Non, ce n'est pas le cas. Tout cela est à l'opposé de tout ce qui est

  9   connu en Occident comme une démocratie parlementaire, une économie de

 10   marché.

 11   Q.  Ensuite on dit ceci :

 12   "L'idéologie islamique a pour objectif d'abolir peu à peu le dualisme entre

 13   le sacré et le séculaire, le religieux et le politique, dualisme, dualité,

 14   qui a été imposé par une Europe chrétienne laïcisée contre notre volonté."

 15   Arrêtons-nous un instant. Revenons à la "Déclaration islamique" qu'on n'a

 16   toujours pas réussi à faire verser au dossier, en dépit de nos efforts

 17   multiples; est-ce qu'on a pas là un petit air de similitude ? Est-ce que ce

 18   n'est pas la même idéologie qu'on défend ici ? Est-ce que ce n'est pas ce

 19   pour quoi a combattu Izetbegovic, ce qu'il a écrit ?

 20   L'INTERPRÈTE : La cabine française : Réponse précédente de Slobodan Praljak

 21   : une société laïque.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Maître Karnavas, chaque interprétation du

 23   Coran de ce type mène toujours à ce type de conclusion, qu'il s'agisse de

 24   la "Déclaration islamique" ou d'une interprétation similaire, à savoir que

 25   c'est toujours cette même logique qui est à l'œuvre qui aboutit à la façon

 26   dont l'état des Musulmans est censé être organisé, devrait être organisé.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation]

 28   Q.  Merci. Page 97, je vais vous lire la page suivante. Pour vous, ce sera


Page 42048

  1   la page 1893, je lis seulement une partie.

  2   "En ce faisant, Izetbegovic avait réussi à obtenir les faveurs de libéraux

  3   ou de progressistes occidentaux parce qu'ils prônaient, ils affichaient un

  4   multiculturalisme tout en acceptant la récompense du gouvernement saoudite

  5   pour la contribution qu'il avait apporté à l'Islam et à Jihad. Même si le

  6   SDA affichait une volonté sincère de rejoindre l'Europe et de créer une

  7   société civique et laïque, fondée sur le modèle européen occidental,

  8   c'était l'opposé que son parti voulait. Comme Izetbegovic l'a dit je cite :

  9   'Ma tolérance, ce n'est pas une tolérance qui a sa source en Europe, mais

 10   dans le monde musulman. Je suis d'abord tolérant parce que je suis

 11   Musulman, et c'est seulement en second lieu que je suis tolérant parce que

 12   je suis Européen.' Effectivement, d'après ce que dit Dzemaludin Latic, un

 13   des principaux idéologues du SDA, il avait très peur de devenir comme

 14   l'Europe. C'est lui qui annonçait un avertissement, je cite --"

 15   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Ça fait multiple fois que je vous

 16   demande de ralentir. Les interprètes nous l'ont demandé, à nous les Juges,

 17   nous ont demandé de rappeler que quand vous lisez, vous devez faire un

 18   petit effort pour ralentir.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Excusez-moi.

 20   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci d'avance.

 21   M. KARNAVAS : [interprétation]

 22   Q.  Voici ce que dit M. Latic dans cet avertissement :

 23   "Mon Dieu --

 24   R.  Latic.

 25   Q.  Oui, Latic :

 26   "Mon Dieu, les Musulmans de Bosnie vont donner une image déformée de ce

 27   qu'est culturellement aussi une nation européenne. Ils vont prendre le mode

 28   de vie de l'Europe. Ils vont comme l'Europe abandonner Dieu et devenir


Page 42049

  1   indifférents, par conséquent, dans leur moralité."

  2   Nous allons regarder ces mots à l'esprit et revenir à ce que disait

  3   le chef du parti du SDA, à Tuzla, en nous rappelant les mots de M. Latic.

  4   Ce genre de personnalité qui faisait ce genre d'annonce publique un peu

  5   partout dans la presse et ailleurs, ces personnes pouvaient-elles le faire

  6   en faisant fi de la volonté d'Izetbegovic ou à son insu; est-ce qu'il ne

  7   savait pas à Tuzla se publiait ce genre d'annonce ?

  8   R.  Je ne pense pas que cela soit possible.

  9   Q.  Revenons à la "Déclaration islamique," revenons à ce que dit ici M.

 10   Latic; est-ce qu'il ne dit pas au fond ce que disait Izetbegovic dans la

 11   "Déclaration islamique" ? Il dit, par exemple -- il critique la Turquie qui

 12   est trop moderne, trop laïque. En fait il jette le blâme sur Ataturk, parce

 13   que ce dernier n'a pas conçu une Turquie moderne qui serait, comme l'est

 14   plus ou moins l'Iran, de nature islamique.

 15   R.  C'est exact dans une telle lecture du Coran, et c'est une

 16   interprétation de l'Islam; la Turquie ne représente pas un modèle qui leur

 17   convient. Moi, je sais qu'à titre personnel, que M. Izetbegovic ne

 18   souhaitait pas rendre officiellement en Turquie, et déposer une gerbe sur

 19   la tombe de Kemal Ataturk  car - et c'était pour une raison tout à fait

 20   simple - c'était qu'il s'agissait là d'un homme qui avait fondé un état

 21   laïque; cependant, M. Izetbegovic savait qu'il n'y avait pas ici d'unités

 22   du point de vue civilisationnel [phon], et que les Etats-Unis avaient

 23   depuis des décennies déjà des liens étroits avec la famille royale d'Arabie

 24   Saoudite. C'est ainsi que va la politique dans le monde; elle ne respecte

 25   aucun principe, et ne poursuit que la protection de ses propres intérêts.

 26   Q.  Est-ce ainsi que vous expliqueriez, par exemple, la page 141 de ce

 27   document, M. Schindler relève à cette page qu'il y a eu un incident en juin

 28   - pour vous, ce sera la page 1 931 - c'est un incident bien connu,


Page 42050

  1   intervenu en juin 1993. 1 931.

  2   "Début juin 1993, les représentants du SDA se sont retrouvés à la mosquée

  3   de Zagreb, ce qui était en liens étroits avec Izetbegovic, c'était une fête

  4   pour honorer l'Ayatollah Khomeini."

  5   Il y avait un représentant d'Izetbegovic, Salim Sabic, qui a dit ceci :

  6   "Les Musulmans de Bosnie sont le meilleur exemple de l'iman, de Khomeini,

  7   pour les mots prophétiques que celui-ci a tenu, qui a dit que : 'S'ils ne

  8   sont pas unis, les Musulmans dans le monde entier vont souffrir dans des

  9   régimes américains et sionistes'."

 10   Moi, je ne suis pas simplement un Américain, je suis un avocat de la

 11   Défense, parce qu'on voulait souvent des Américains. Moi, je ne suis pas

 12   vexé si vous parlez de la sorte, parce qu'ici je suis avocat. Peut-on

 13   comment expliquer en Croatie, il y a une mosquée en plein milieu de la

 14   ville, si j'ai bien compris, et la Croatie autorise un rassemblement du SDA

 15   pour célébrer l'Ayatollah Khomeini, or, tout le monde savait à ce moment-là

 16   ce que cet homme représentait et comment il traitait quiconque s'opposait à

 17   sa conception islamique ou islamiste radicale ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela fonctionne. Voilà, l'un des micros

 19   marche, l'autre non.

 20   R.  Maître Karnavas, pour un grand nombre de Musulmans en Bosnie-

 21   Herzégovine, l'Ayatollah Khomeini est quelqu'un qui, selon eux, a rendu au

 22   peuple iranien sa dignité, après les dizaines d'années de règne sous le

 23   joug des Américains. La plus grande partie des Musulmans, par ailleurs, ne

 24   soutenaient pas l'Ayatollah Khomeini. Deuxièmement, la Croatie était un

 25   pays moderne, dotée d'une diplomatie moderne ayant des relations avec

 26   l'Iran.

 27   Il y avait une liberté d'opinions et d'associations, ainsi que de réunions

 28   publiques en Croatie.


Page 42051

  1   Enfin, troisièmement, en Croatie le rassemblement au sein de rassemblements

  2   sur une base religieuse était permis, n'était soumis à aucune forme de

  3   contrôle.

  4   Enfin, quatrièmement, les Etats-Unis avaient des relations diplomatiques

  5   avec l'Iran, ainsi que l'Allemagne en avait, la France, et d'autres, et ils

  6   effectuaient des ventes non seulement à Khomeini mais également à toutes

  7   autres personnes qui étaient disposées à être en relation avec eux.

  8   Donc, Maître Karnavas, je pense que nous nous engageons sur une voie sans

  9   issue ici.

 10   Q.  Désolé si j'ai voulu essayer de faire entrer la logique dans la

 11   politique.

 12   Page 72, je reviens à ce que vous laissiez entendre, à savoir

 13   qu'Izetbegovic ne préparait pas son peuple à ce qui allait se passer,

 14   c'était peut-être par naïveté ou parce que, disons, il est optimiste et

 15   attentiste ou il a été pris par surprise.

 16   Page 1873 pour vous, page 72 en anglais, avant-dernier paragraphe :

 17   "Arrivé le début de l'année 1992 --"

 18   J'attends que vous y ayez trouvé la page. C'est bien 1873 pour vous; 72 et

 19   73, donc. Voici les premiers mots :

 20   "Arrivé le début de l'année 1992, les services de Contre-espionnage

 21   militaires se sont vues face à une situation difficile. Ils savaient qu'il

 22   y avait des préparations d'envergure en vue de la guerre de la part des

 23   dirigeants musulmans; pourtant, il ne savait pas du tout que faire pour

 24   contrer ces préparatifs. Une attaque de grande échelle préventive de la

 25   part des paramilitaires du SDA était exclue, pour des raisons politiques.

 26   Le chef du KOS, Aleksandar Vasiljevic, ne sachant trop que faire, a demandé

 27   à rencontrer Izetbegovic…

 28   "Et Vasiljevic a dit à Izetbegovic qu'il voulait l'informer de


Page 42052

  1   'l'organisation secrète militaire,' il voulait l'informer de ces

  2   organisations militaires secrètes qui opéraient en Bosnie, ce que devait

  3   savoir le président. Izetbegovic, feignant la surprise, a répondu que

  4   c'était une idée 'ridicule.' Le chef du KOS a riposté en lui donnant des

  5   informations concrètes sur la Ligue patriotique, mais Izetbegovic a

  6   persisté à dire qu'il trouvait incroyable et inconcevable que cela soit

  7   vrai. Vasiljevic lui a alors présenté des documents du SDA à destination à

  8   usage interne. Certains de ces documents étaient encodés et chiffrés, et

  9   ils parlaient de l'organisation et du dispositif de la Ligue patriotique.

 10   Manifestement, c'étaient des agents doubles du KOS, de haut niveau, des

 11   taupes, qui avaient obtenu ces documents. Izetbegovic a alors répliqué que

 12   cette force n'était pas illégale, qu'elle avait pour seule intention de

 13   défendre les Musulmans, non pas des citoyens de Bosnie-Herzégovine, mais

 14   des Musulmans.

 15   "Puis, il a changé d'avis et il a dit que ces documents n'avaient pas l'air

 16   authentique, que sans doute le KOS avait été dupé. Ceci a frustré

 17   Vasiljevic, qui a reconnu que son opposant dans ce jeu 'était excellent au

 18   fond'. Puis, il a sorti son atout principal, c'était un enregistrement

 19   vidéo obtenu par des moyens secrets qui montrait une réunion de la Ligue

 20   patriotique, quelque chose qu'il était impossible de discréditer. Pourtant,

 21   Izetbegovic a persisté dans sa dénégation, il a nié qu'il y aurait quoi que

 22   ce soit de louche, qui se passe au sein du SDA. Vasiljevic a vécu cela

 23   comme une expérience exaspérante, qui l'a convaincu qu'il était impossible

 24   d'avoir un dialogue positif avec les dirigeants musulmans, mais c'était une

 25   performance excellente de grand cru d'Izetbegovic."

 26   Vous avez dit qu'il n'avait pas préparé son peuple, mais comment se fait-il

 27   que dès 1992, le SDA établisse une faction ou une aile militaire chargée de

 28   défendre les Musulmans ? C'est ce que dit Izetbegovic ici. En tout cas, ce


Page 42053

  1   sont les propos qu'on lui attribue. C'est la première chose. Deuxième

  2   chose, si Izetbegovic est aussi à ce moment-là président de la présidence,

  3   pourquoi est-ce qu'il n'agit pas pour tous ceux qui vivent en Bosnie-

  4   Herzégovine, aussi pour les Croates, car apparemment les Croates avaient

  5   lancé l'alerte et avaient dit à la présidence qu'il fallait se préparer à

  6   ce qui se passait, vu ce qui se passait à ce moment-là en Croatie ? Ce qui

  7   à son tour a entraîné la création du HVO pour les Croates de Bosnie-

  8   Herzégovine pour qu'eux se protègent. Comment concluez-vous qu'Izetbegovic

  9   espérait que tout s'arrangerait sans préparer vraiment son peuple, alors

 10   qu'ici on a une image qui est vraiment aux antipodes de cela. Il va en

 11   Iran, on lui promet des fonds, il fait de la publicité, il essaie de

 12   promouvoir la "Déclaration islamique". Les Jeunes Musulmans sont encouragés

 13   dans leurs efforts et maintenant il est en train de réunir des éléments

 14   prêts à intervenir en cas de guerre.

 15   R.  Ces deux choses ne sont pas contradictoires, Maître Karnavas. Je suis

 16   le premier à avoir versé au dossier un document relatif à la création de la

 17   Ligue patriotique devant ce Tribunal, la date de sa formation, les hommes

 18   qui l'ont formée, à quoi servait cette Ligue patriotique et quels étaient

 19   ses mots d'ordre. Donc le mot d'ordre, le serment prononcé pour entrer à la

 20   Ligue patriotique était de nature religieuse. C'est un point.

 21   Et je peux vous dire une deuxième chose, et je vous l'affirme que M.

 22   Alija Izetbegovic était le représentant du peuple musulman et que son

 23   objectif élémentaire et fondamental était de défendre le peuple musulman

 24   si, ce que j'appellerais les conditions religieuses, le lui permettaient,

 25   il voulait d'abord faire de la Bosnie-Herzégovine,un Etat où il aurait la

 26   majorité, à savoir plus de 50 % de la population, avec un homme à la tête

 27   de cet Etat qui mettrait en place une espèce d'Etat islamiste.

 28   En deuxième lieu, s'il ne parvenait pas à s'emparer de la plus grande


Page 42054

  1   partie de la Bosnie-Herzégovine sur ce territoire - et je l'ai démontré

  2   avec pas mal de documents également - créer un Etat islamiste sur une

  3   partie plus réduite, il le ferait.

  4   Troisième possibilité, avec les Serbes et les Croates, mais surtout

  5   avec les Croates, il a coopéré pour autant que cette coopération lui serve

  6   à la réalisation de son objectif. C'est de cette façon, en utilisant cette

  7   rhétorique, qu'il est parvenu à mettre de son côté "l'establishment" des

  8   Etats-Unis et de bien d'autres pays.

  9   Pour qui, malheureusement, les seuls renseignements qu'ils recevaient

 10   au sujet de la situation de l'ex-Yougoslavie avant et après reposaient sur

 11   la malheureuse politique de Tito, un livre, bien sûr, le livre de Rebecca

 12   West a été publié. C'est un livre désastreusement négatif et véritablement

 13   pathétique qui est intitulé : Le faucon gris et la terre noire" ou quelque

 14   chose comme ça, et ce livre évoque les tribus des Balkans, des groupes

 15   ethniques divers qui sont présentés comme des sauvages, et cetera, et

 16   cetera. Quand vous mettez tout ça dans un même pot, vous en tirez ce que

 17   nous avons vu pendant quatre ans. Et maintenant, nous sommes nous tous ici

 18   assis dans ce prétoire à essayer de fondamentalement déterminer les

 19   culpabilités et autres.

 20   Q.  Votre réponse était un peu longue. Vous êtes allé un peu au-delà de ma

 21   question. Passons à la page 158 et 159 de ce document, et nous poursuivrons

 22   ensuite sur d'autres pages. Mais penchons-nous d'abord sur la 158 et la 159

 23   qui correspondent aux pages 1 943 et 1 944 dans votre version. Je voudrais

 24   parler de Muslimovic. Connaissez-vous ce Muslimovic ?

 25   R.  Oui. Dix secondes, s'il vous plaît, je ne vais pas m'étendre.

 26   Le KOS avait des agents pendant toute cette période au sein de la direction

 27   du SDA un peu partout en Bosnie-Herzégovine et dans l'armée de Bosnie-

 28   Herzégovine.


Page 42055

  1   Q.  A la page 158, il est fait référence à cette organisation, c'est TWRA.

  2   On nous en a déjà parlé d'ailleurs. On parle d'une force de l'ombre, dont

  3   on ne parle qu'à mots couverts, et c'est le Service secret musulman, le

  4   MOS. Il y avait une cavale portant sur un complot qui aurait été créé à

  5   Vienne en 1991, avant la guerre, sur recommandation de Fatih al-Hassanein,

  6   qui recherchait un mécanisme clandestin qui permettrait à des islamistes

  7   loyaux de prendre le contrôle du gouvernement musulman de Bosnie.

  8   Connaissez-vous cette personne ou ce Fatih al-Hassanein ?

  9   R.  J'en ai entendu parler et j'ai eu de bons renseignements au sujet de ce

 10   qui se passait, à savoir qu'ils se réunissaient, ils se rencontraient à

 11   Zagreb dans des hôtels, et cetera.

 12   Q.  Page 159, maintenant. Nous voyons ce Muslimovic qui a donné des

 13   services de renseignements secrets qui étaient nécessaires afin d'obtenir

 14   des financements et des armes pour le jihad de Bosnie. Nous avons ensuite

 15   certains noms qui sont cités, notamment Bakir Alispahic, dont on a déjà

 16   parlé, et on voit qu'il y a aussi le fils du président, Bakir Izetbegovic,

 17   qui fait partie de ce comité.

 18   La vision idéologique, un peu plus loin : 

 19   "La vision idéologique était celle de la clique d'Izetbegovic, les anciens

 20   Jeunes Musulmans qui contrôlaient le SDA et qui voulaient un Etat musulman

 21   en Bosnie. Un Etat pan musulman en Bosnie. Ce qui était parfaitement

 22   contraire à la Bosnie multiculturelle, que soi-disant Izetbegovic et son

 23   gouvernement voulaient absolument pousser. En fait, le SDA était toujours

 24   prêt à accepter la séparation, du moment que les territoires obtenus par

 25   Sarajevo ne seraient composés que de Musulmans."

 26   Ensuite, il est écrit :

 27   "Evidemment, le diable, comme d'habitude, se trouvait dans la

 28   quantité de territoire que les Musulmans accepteraient pour s'assurer que


Page 42056

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42057

  1   leurs points de vue extrêmement durs obtiendraient le dessus. Les

  2   diplomates bosniens qui avaient été envoyés vers les ambassades des pays

  3   islamiques, ce qui était absolument essentiel pour obtenir des finances. En

  4   fait, les équipes des ambassades musulmanes servaient plutôt de passeurs

  5   pour le jihad que de diplomates. Il était important d'avoir des personnes

  6   de confiance à la tête des ambassades parce que le SDA, par le biais du

  7   MOS, distribuait ainsi des documents."

  8   On voit que ce M. Akmadzic nous dit que tout consulat ou toute ambassade

  9   ouverte par Izetbegovic était tenue par des Musulmans. Et ça c'était

 10   lorsque cette personne, M. Akmadzic, était premier ministre. Aviez-vous

 11   entendu parler de cette organisation et saviez-vous dont elle s'occupait à

 12   l'époque ?

 13   R.  Oui, j'ai entendu parler de cette organisation - les ambassadeurs

 14   étaient bien entendu musulmans - parce que si le SDA n'avait pas reçu

 15   d'argent des pays islamistes, les Croates auraient été incapables de payer

 16   les salaires de ces ambassadeurs parce que la Bosnie-Herzégovine n'avait

 17   pas de budget, et je sais pas mal de choses sur Muslimovic.

 18   Q.  On parlait d'un Nedzad Ugljen précédemment, et à la page 172, il est

 19   fait référence à une organisation appelée : "Les Alouettes". Page 172 et je

 20   vais donner le numéro en croate tout de suite. Il s'agit de la page 1 954 :

 21   "Les Alouettes étaient dirigées pendant toute la guerre par Nedzad Herenda,

 22   qui était un officier de métier dans les services de Sécurité, mais il

 23   semble que l'idée de cette unité venait d'un cadre du KOS qui travaillait

 24   autour de Fikret Muslimovic.

 25   "Et ces Alouettes étaient censées faire leur sale travail principalement

 26   dans Sarajevo, ensuite page suivante, un membre fondateur de l'unité et

 27   l'un de ses tueurs les plus actifs, impliquait ce groupe dans un grand

 28   nombre de crimes, y compris le meurtre de civils serbes et croates, afin


Page 42058

  1   d'essayer de chasser les non-Musulmans hors de Sarajevo."

  2   Ensuite il est écrit que les snipeurs des Alouettes s'exerçaient pour ne

  3   pas perdre la main en tirant sur des civils à Sarajevo, et ils

  4   recherchaient souvent les personnes habillées en noir car les personnes

  5   âgées chrétiennes avaient tendance à s'habiller souvent en noir.

  6   Page suivante, on voit que Sefer Halilovic était visé et on voit que l'un

  7   des membres de sa famille a été tué.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est aux pages 173 et 174.

  9   Q.  Voici ma question : aviez-vous entendu parler de cette personne, ce

 10   Nedzad Herenda, tout d'abord, c'est ma première question ? Ensuite,

 11   j'aimerais savoir si vous aviez entendu parler aussi de ce groupe d'hommes

 12   de main du SDA appelé les Alouettes, et se pourrait-il que ces Alouettes

 13   opèrent à l'insu même d'Izetbegovic ? Donc j'ai trois questions qui vous

 14   sont posées.

 15   R.  Il était impossible de ne pas savoir que les Alouettes existaient

 16   puisqu'on savait ce que faisaient les Alouettes, et il y avait au sein des

 17   Alouettes une trentaine de personnes qui faisaient partie de l'élite. On

 18   savait ce que ces Alouettes faisaient. On savait qui était responsable de

 19   l'attentat contre Izetbegovic. On savait que leur chef a été tué, le chef

 20   des Alouettes, au moment où il s'apprêtait à donner un certain nombre de

 21   renseignements aux instances chargées des investigations au TPIY en disant

 22   notamment de qui il recevait ses ordres, et il a été liquidé. Donc il n'y

 23   avait pas de secrets à ce sujet. Tout cela on en parlait et il y avait des

 24   articles qui paraissaient, et pas mal de choses ont été sues pendant la

 25   guerre. Les renseignements passaient.

 26   Q.  Je vais maintenant passer à la page 51. Donc page 51, d'après le Dr

 27   Schindler -- je ne vais pas lire quoi que ce soit là tout de suite. Mais à

 28   la page 51, le Dr Schindler nous dit qu'Izetbegovic a menti à de nombreuses


Page 42059

  1   reprises à propos de la relation unissant son parti et l'islam. Etes-vous

  2   d'accord avec ce qu'affirme M. Schindler ?

  3   R.  Oui, absolument.

  4   Q.  Très bien.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, c'est toujours désagréable pour moi

  6   d'interrompre un avocat et de lui rappeler qu'il y a l'horloge

  7   malheureusement qui tourne. Vous avez épuisé vos quatre heures, ce qui veut

  8   dire que tout le temps maintenant que vous prenez ne peut être que concédé

  9   par une autre Défense dans le cadre des 20 heures globales accordées aux

 10   Défenses.

 11   Comme je sais que Me Nozica nous a dit qu'elle avait besoin de quatre

 12   heures; Me Alaburic, de quatre heures; pour Coric on ne savait pas trop, ni

 13   pour Ibrisimovic, donc vous ne pouvez avoir du temps qu'à partir de M.

 14   Coric ou de M. Pusic. Je ne sais pas ce qu'ils vous donnent.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Avec votre permission, s'il vous plaît --

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Peut-être qu'elle va nous dire une bonne nouvelle.

 17   Oui.

 18   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Malheureusement, Monsieur le

 19   Président, je ne vais pas vous donner une bonne nouvelle, parce que hier

 20   vous m'avez comprise de toute façon tout à fait erronée. Ce que j'ai dit

 21   c'est que j'allais m'efforcer d'en finir dans les quatre heures qui me sont

 22   imparties, mais que s'il restait du temps ici ou là, comme tous les autres,

 23   je demandais par le bénéfice de la réciprocité en bénéficier.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Alaburic.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens simplement

 26   à rappeler qu'hier j'ai exprimé le souhait de disposer de six heures.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Ibrisimovic, est-ce que vous donnez du temps

 28   à Me Karnavas ?


Page 42060

  1   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je relance la

  2   balle vers la Chambre de première instance, je m'en tiendrais à votre

  3   décision. Nous avons dit que si nous posions des questions, il nous

  4   faudrait environ une partie d'audience, c'est-à-dire une heure et demie.

  5   Merci.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas.

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Je comprends bien que certains de mes

  8   collègues voulaient aussi du temps supplémentaire, donc pour être juste, il

  9   faudrait qu'on prenne le temps qui reste et nous diviser entre nous qui

 10   avons besoin de temps supplémentaire, ce serait équitable.

 11   Si je pouvais avoir 15 minutes, si vous me permettez 15 minutes. J'aimerais

 12   demander à mes collègues s'ils sont d'accord.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous acceptiez de

 14   me donner les deux heures que j'ai demandées, je serais prête à prendre 15

 15   minutes pour les donner à Me Karnavas sur ces deux heures.

 16   M. KARNAVAS : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, "extra time", vous avez 15 minutes.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, je suis très

 19   reconnaissant à tout le monde. Merci beaucoup.

 20   Q.  Pouvons-nous maintenant passer à la page 69 de notre document, nous

 21   avons abordé brièvement la Ligue patriotique, mais j'aimerais rentrer dans

 22   les détails - donc page 1 871 pour votre version - on voit au deuxième

 23   semestre de 1991, contrairement aux annonces publiques d'Izetbegovic à

 24   propos d'un avenir pacifique, le SDA se préparait de façon active à la

 25   guerre en Bosnie car les dirigeants du parti savaient que cette guerre

 26   était imminente :

 27   "Dès le mois de juin, même avant que la Slovénie et la Croatie ne déclarent

 28   leur indépendance, et dix mois avant que les hostilités ouvertes n'éclatent


Page 42061

  1   en Bosnie, la hiérarchie du SDA s'est mise d'accord pour établir ou créer

  2   ses propres unités paramilitaires, et d'une façon clandestine certains

  3   dirigeants des partis disaient tout simplement que la guerre était

  4   inévitable.

  5   "La Ligue patriotique a été mise sous la direction de Hasan Cengic, qui

  6   était un religieux de 34 ans qui était l'un des dirigeants musulmans les

  7   plus importants et qui avait été connu comme étant l'imam volant parce

  8   qu'il se rendait très souvent dans les pays islamiques."

  9   Un peu plus loin il est écrit :

 10   "La fondation de la Ligue patriotique était une priorité pour Izetbegovic."

 11   Donc si vous vous en souvenez bien, nous savons qu'à un moment, Izetbegovic

 12   a dû parler aux forces de sécurité, a déclaré qu'il ne savait pas ce qui se

 13   passait, que tout ceci était parfaitement ridicule. Ici on voit en revanche

 14   que sa première priorité était de fonder la Ligue patriotique : 

 15   "Les paramilitaires qui s'appuyaient sur la structure des Unités de la

 16   Défense territoriale bosnienne dans les endroits musulmans, il leur fallait

 17   des armes, des munitions, des équipements et des uniformes. Hasan Cengic a

 18   été envoyé rendre visite à des pays islamiques amicaux afin de lever des

 19   fonds. Il a dit à des personnes qui l'écoutaient qu'il fallait tout cet

 20   argent pour obtenir un Etat entièrement musulman en Bosnie. Edhem Bicakcic,

 21   qui était un vétéran du groupe d'Izetbegovic et qui était un des accusés

 22   dans le procès de 1983, a défini quels étaient les 'intérêts essentiels' du

 23   SDA, 'il nous faut un Etat musulman qui nous permettra de survivre et nous

 24   ne voulons pas d'une vie partagée avec d'autres nations. Nous ne sommes pas

 25   intéressés par cela.' Sous peu, le KOS a reçu des rapports selon lesquels

 26   le SDA se préparait à équiper une force de 30 000 hommes instruits et

 27   équipés par des finances venant de l'Iran et de l'Arabie Saoudite."

 28   Un peu plus loin :


Page 42062

  1   "Alors que Cengic et les autres se préparaient à la guerre, Izetbegovic a

  2   continué à jouer son double jeu qui rendait ses amis et ses ennemis

  3   parfaitement -- qui les exaspérait totalement. Adil Zulfikarpasic, qui

  4   restait à écarter sa réticence envers le SDA pour essayer de favoriser la

  5   paix, a rencontré Izetbegovic à la mi-juillet 1991 pour essayer de discuter

  6   d'un système où le pouvoir pourrait être partagé avec les Serbes afin

  7   d'éviter la guerre."

  8   Nous en avons parlé d'ailleurs :

  9   "Izetbegovic a été d'accord avec cela en disant que c'est un effort tout à

 10   fait louable, mais lorsque Zulfikarpasic est revenu avec son propre plan

 11   pour partager le pouvoir avec les Serbes de Bosnie, et pour ainsi obtenir

 12   la paix, le SDA l'a balayé d'un revers de main. Les détails de cet incident

 13   sont tout à fait éclairants d'ailleurs. Lorsque Izetbegovic est revenu de

 14   Washington, D.C., le 23 juillet après avoir parlé avec des représentants de

 15   l'administration Bush sur des moyens pour éviter la guerre en Bosnie, il a

 16   participé à une séance avec Zulfikarpasic et Mohammed Filipovic du côté

 17   musulman, et Radovan Karadzic et deux autres officiels du SDA, Nikolic

 18   Koljevic entre autres et Momcilo Krajisnik qui représentaient les Serbes de

 19   Bosnie."

 20   On voit bien qu'il n'y avait pas de Croates qui étaient invités d'ailleurs

 21   :

 22   "Dans ce groupe, Izetbegovic s'est montré très positif et très optimiste en

 23   disant : 'Je crois que nos positions sont maintenant très proches, nous

 24   sommes très près de conclure un accord.' Il a demandé à Filipovic et à

 25   Koljevic de préparer un projet d'accord entre les Serbes et les Musulmans.

 26   Mais dès qu'Izetbegovic avait quitté la pièce, il a abandonné tout cela, et

 27   pour faire empirer les choses, il a décidé tout simplement de venir à la

 28   télévision pour annoncer cela en direct, qu'il n'y aurait plus de


Page 42063

  1   négociations."

  2   Donc ce n'est pas un grand cru du grand Izetbegovic ce que vous avez vécu,

  3   puisque avec Izetbegovic qui est d'accord pour quelque chose et puis tout

  4   d'un coup qui retourne sa veste et décide de faire autre chose ? Ce n'est

  5   pas du grand Izetbegovic, est-ce que cela n'explique pas quelle était la

  6   nature même de sa personnalité ?

  7   R.  Maître Karnavas, l'académicien Muhamed Filipovic est l'auteur d'un

  8   livre qui exprime cela encore mieux. Lui a témoigné ici. La Ligue

  9   patriotique a été créée dans les conditions que nous avons expliquées, mais

 10   la Ligue patriotique et plus tard l'ABiH a été armée par les Croates, Bruno

 11   Stojic, Slobodan Praljak de Croatie, et cetera. M. Izetbegovic a reçu un

 12   appui plein et entier du gouvernement américain, un appui encore supérieur

 13   à celui dont il a bénéficié de la part des pays islamiques. Tout le monde

 14   savait exactement ce qu'il en était.

 15   Maintenant, pourquoi ils ont fait ce qu'ils ont fait, ce Tribunal

 16   n'est pas l'endroit le plus approprié pour une telle analyse qui prendrait

 17   beaucoup de temps.

 18   Q.  Très bien. Nous allons maintenant nous pencher sur le document 3D

 19   00920, très rapidement. Je tiens à remercier l'équipe Stojic qui nous a

 20   fourni ce document.

 21   J'ai une question supplémentaire après celle-ci donc il faudra être

 22   extrêmement bref. Il s'agit de la pièce 3D 00920.

 23   J'aimerais que vous regardiez les noms, nous allons voir des noms et la

 24   région dont ces personnes viennent aussi. Pourriez-vous tout d'abord nous

 25   dire quel est ce document ?

 26   R.  Oui, je peux le faire. Il s'agit d'un document que j'ai demandé et

 27   reçu, je le connais. C'est mon équipe de la Défense qui est à l'origine de

 28   la demande de ce document.


Page 42064

  1   Q.  Qui a rédigé ce document ?

  2   R.  L'auteur de ce document est le département pour la coopération avec le

  3   TPIY, donc c'est l'Etat de Bosnie-Herzégovine tel qu'il existe depuis la

  4   fin de la guerre.

  5   Q.  Et quelle est la teneur de ce document ? On voit des noms. On voit

  6   l'Irak, l'Egypte, le Yémen, la Libye, l'Arabie Saoudite, toutes sortes de

  7   points très chauds. Qu'est-ce que cela veut dire ?

  8   R.  Le présent document nous montre qu'au sein du 3e Corps d'armée se

  9   trouvait enregistrés à leur pleine connaissance 715 combattants qui étaient

 10   des ressortissants étrangers.

 11   Q.  Très bien. Donc ce sont des combattants étrangers qui sont arrivés pour

 12   aider le SDA et pour aider Alija Izetbegovic dans le cadre de sa lutte ?

 13   M. STRINGER : [interprétation] Objection.

 14   C'est un document que connaît le général, d'ailleurs, il l'a demandé.

 15   Nous considérons que la question est assez directrice. Je suis sûr que le

 16   général peut nous parler de ce document, mais c'est quand même un document

 17   qui fait partie de sa propre défense donc il ne faut pas poser de

 18   questions.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Ecoutez, je dois répondre. C'est son

 20   document, certes, et c'est moi qui l'utilise, mais ça ne signifie pas que

 21   je suis en interrogatoire principal, absolument pas. Ensuite, c'est juste

 22   une question de suivi dans le cadre de mon contre-interrogatoire, donc je

 23   soulève une objection. Bien sûr, je peux reformuler ma question s'il le

 24   faut, mais je n'ai pas beaucoup de temps. Ce n'est pas parce que j'utilise

 25   le document de quelqu'un d'autre que je passe en interrogatoire principal,

 26   absolument pas, c'est ridicule.

 27   Q.  Monsieur Praljak, expliquez-nous ce document mais soyez, s'il

 28   vous plaît, extrêmement bref.


Page 42065

  1   R.  Ne serait-ce qu'au sein du 3e Corps d'armée, sans même parler des

  2   autres unités, il y avait donc 715 combattants originaires de différentes

  3   pays, pays islamiques et non islamiques. Il y avait également des

  4   ressortissants de pays occidentaux mais qui s'étaient convertis à l'Islam.

  5   Deuxième document, on parle de l'Unité El Moudjahidine où il y avait 1 774

  6   combattants, ils étaient des combattants du cru et des combattants

  7   étrangers qui étaient mélangés.

  8   Q.  Nous allons passer à autre chose.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai une question à vous poser sur

 10   ce document.

 11   Monsieur Praljak, un certain nombre de noms, pas tous, mais un

 12   certain nombre de noms ne sont pas associés à un pays d'origine. Pouvez-

 13   vous nous expliquer cela ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. J'ai une explication. Un bon combattant

 15   de l'Islam cache son pays d'origine et endosse même souvent un autre nom

 16   afin qu'on ne puisse pas remonter à ce pays. Après tout, c'est également

 17   ainsi que fonctionne une organisation secrète, on ne révèle pas ce genre

 18   d'information aussi facilement que cela.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation]

 20   Q.  Maintenant, je vais rapidement aborder deux documents. Le 1D 03139 et

 21   le 1D 03138. Je pense qu'ils sont dans votre classeur.

 22   C'est William Montgomery.

 23   R.  Oui, je le sais.

 24   Q.  A un moment, c'était l'ambassadeur en Croatie, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, en Croatie et ensuite en Serbie.

 26   Q.  Très récemment, le 5 juin 2009, il a écrit un article sur le problème

 27   balkanique et il a dit qu'il faudrait peut-être mieux que les Serbes en

 28   Republika Srpska puissent voter pour savoir s'ils veulent ou non quitter la


Page 42066

  1   Bosnie-Herzégovine. Et il semble être d'accord avec ça.

  2   R.  J'ai lu ce qu'il a écrit dans "The New York Times" et certaines des

  3   réponses qu'il a ensuite fournies. Ce que M. Montgomery défend représente

  4   en fait une partie de l'acte d'accusation qui a été dressé contre moi et

  5   les autres dans ce Tribunal.

  6   Q.  Le document suivant, le 1D 03138. Cette personne, visiblement, a été

  7   interviewée en Croatie, et à la page 2 de ce document, on lui a posé la

  8   question suivante :

  9   "Qu'arriverait-il aux Croates s'il y avait une division de la BiH ?"

 10   Montgomery a déclaré que :

 11   "La création de la Fédération de la BiH, finalement, avait été une erreur

 12   parce que cela ne fonctionne pas. Si la Bosnie-Herzégovine survit, les

 13   Croates auront besoin d'obtenir leur propre entité avec les mêmes pouvoirs

 14   que ceux dont bénéficie la Republika Srpska."

 15   J'imagine que c'est ce que voulaient les Croates à ce moment-là, ils

 16   voulaient avoir leur propre entité, comme la Republika Srpska, et puis il y

 17   aurait les Musulmans qui auraient leur fédération.

 18   R.  Oui, c'est un fait, à ceci près que Montgomery n'est pas un Croate,

 19   donc il ne peut pas être traîné en justice et venir en ce Tribunal à cause

 20   des positions de ce type.

 21   Q.  Laissons ceci en touche, il poursuit et il parle du gouvernement Obama.

 22   Il dit : 

 23   "Le gouvernement d'Obama compte des personnes qui ont eu beaucoup

 24   d'activités dans la zone, Hillary Clinton, Joe Biden, Richard Holbrooke, et

 25   ils s'intéresseront plus que l'administration Bush aux Balkans.

 26   Puis, il dit :

 27   "…mais ces personnes vont insister pour que soit appliquée la même ancienne

 28   politique qu'on peut voir dans ce que dit Biden, quelque chose qui est tout


Page 42067

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42068

  1   à fait opposé à ce que je dis."

  2   Nous avons entendu des témoins, nous avons examiné des transcripts

  3   présidentiels, ceux-ci nous ont montré que Tudjman subissait une pression

  4   américaine, notamment par un homme tel que Redman, pour que soit formée une

  5   fédération, une entité avec Musulmans et Croates. Vu ce qui s'est passé, vu

  6   ce qui se passe, avez-vous un avis sur ce que dit Montgomery ? A-t-il

  7   raison de dire que les choses ne marchent pas et que les Croates devraient

  8   avoir leur propre entité en Bosnie-Herzégovine ?

  9   R.  Les choses fonctionnent, mais elles sont pires qu'en temps de guerre, à

 10   mon avis. Les Croates ont un droit auquel moi, personnellement, je ne

 11   renonce pas, même au Tribunal, et je pense que depuis le Congrès de Berlin

 12   au moins, les Balkans sont un terrain d'expérimentation pour les

 13   différentes puissances, qui chacune se livre à des essais concernant leurs

 14   propres idées sans souci de la réalité et des conséquences. Cela a duré

 15   déjà longtemps, et je pense que malheureusement cela est appelé à durer

 16   encore. Nous ne sommes rien de plus qu'un terrain de laboratoire, une

 17   éprouvette pour y mener des expériences.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vous remercie, Général. Je n'ai pas

 19   d'autres questions à vous poser.

 20   Merci de m'avoir donné ce supplément de temps.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, j'ai une question de suivi à vous

 22   poser, mais je vais demander le huis clos.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

 24   le Président.

 25   [Audience à huis clos partiel]

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


Page 42069

  1 

  2 

  3 

  4 

  5 

  6 

  7 

  8 

  9 

 10 

 11 

 12 

 13  Page 42069 expurgée. Audience à huis clos partiel.

 14 

 15 

 16 

 17 

 18 

 19 

 20 

 21 

 22 

 23 

 24 

 25 

 26 

 27 

 28 


Page 42070

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15   [Audience publique]

 16    M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous avez noté, comme moi, qu'à

 17   plusieurs reprises, la Chambre avait été, entre guillemets, un peu

 18   interpellé par Me Karnavas, sur le fait que nous n'avions pas admis la

 19   "Déclaration islamique." Alors j'ai vérifié, et effectivement Me Karnavas

 20   avait demandé, à l'époque, l'admission de la "Déclaration islamique" quand

 21   le Témoin Kljuic était venu, et la Chambre à l'unanimité avait non admis

 22   cette déclaration par manque de pertinence ou de valeur probante. Alors,

 23   moi, j'ai écouté attentive les questions qui ont été posées et comme on

 24   aura à délibérer à nouveau sur l'admission de la "Déclaration islamique,"

 25   car je présume que Me Karnavas dans sa liste IC va réintégrer cette

 26   "Déclaration islamique."

 27   Je voudrais vous demander ceci : si je comprends bien, la Communauté

 28   croate, quand elle s'était crée à Grude, en 1991, c'était parce qu'il y


Page 42071

  1   avait eu l'agression des Serbes, et que donc cette Communauté croate

  2   n'avait qu'un objectif c'était se répondre à l'agression des Serbes ? Il

  3   apparaît qu'en cours de route, postérieurement, l'ABiH va entrer en conflit

  4   avec le HVO, et une des raisons du conflit, si je comprends bien la théorie

  5   de Me Karnavas, serait que la "Déclaration islamique" en fait indiquerait

  6   que la République de Bosnie-Herzégovine doit être une République islamique

  7   où le religieux et le politique doivent être mélangés et que faisant fi des

  8   minorités serbes ou croates, on voulait installer une république islamique,

  9   et que de ce fait-là, les Croates de la République de Bosnie-Herzégovine et

 10   notamment de l'Herzégovine, à ce moment-là, se seraient aussi rebellés mais

 11   je mets ça entre guillemets, et seraient rentrés en conflit face à cette

 12   république islamique. Donc le HVO aurait eu en réalité deux adversaires,

 13   les Serbes dans un premier temps et après les Musulmans dans un second

 14   temps, parce qu'ils voulaient mettre en place une république islamique où,

 15   eux, les Croates n'auraient pas existé.

 16   Est-ce bien ces raisons qui ont motivé que des gens comme vous ou d'autres

 17   se sont rassemblés au sein du HVO ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans l'ensemble, oui. Mais ce qui importe

 19   toujours c'est d'observer la dynamique de l'évolution sociale. Il est

 20   impossible de comprendre la situation sans tenir compte de la "Déclaration

 21   islamique." Comme il n'est pas possible de faire abstraction du mémorandum

 22   de l'académie des Arts et des Sciences.

 23   Au début, l'ennemi principal, ce sont les Serbes. Par exemple,

 24   Messieurs les Juges, si vous avez eu l'occasion d'observer une inondation,

 25   et vous voyez sur un îlot dans un arbre des gens qui s'y sont réfugiés. Et

 26   bien, à l'époque, les Croates et les Musulmans étaient ensemble parce qu'il

 27   y avait une inondation, l'ennemi était puissant. Lors de cette réunion à

 28   Velika Kladusa, il y avait beaucoup de drapeaux croates et musulmans qui


Page 42072

  1   étaient assemblés, liés l'un à l'autre. Donc à l'époque, l'ennemi était

  2   puissant et le germe du conflit entre les Croates et les Musulmans ne

  3   s'était pas développé. C'est alors que le HZ HB s'est constitué aux fins de

  4   la défense contre les Serbes, parce que nous étions complètement exclus par

  5   M. Izetbegovic. Deuxièmement, également aux fins de défense

  6   d'une organisation interne de la Bosnie-Herzégovine. Puisque

  7   les Serbes dominaient, avant conquis 70 % du territoire, qu'un embargo

  8   était en place, et puisque l'occident tolérait leur avancée, les Musulmans,

  9   eux, ont trouvé une marge pour compenser les territoires qu'ils ont perdu

 10   face aux Serbes à notre détriment. Donc vers le sud et l'ouest, ils se

 11   lancent dans des offensives. C'est aussi simple que cela.

 12   Malheureusement, ce que Clinton et son administration et le monde

 13   entier considéraient, c'était que les Musulmans étaient les malheureux dans

 14   la situation, qu'ils étaient en mauvaise posture, bloqués à Sarajevo, en

 15   revanche, ils ne faisaient rien pour lever l'embargo et pour contrer les

 16   Serbes. Lorsque nous avons lancé une contre-attaque, tout le monde pensait

 17   en fait que c'était dans une attaque que nous nous lancions.

 18   Je pense que vous-même, vous êtes arrivé à ce Tribunal, avec toute

 19   une série de conceptions erronées. Ils n'arrivaient pas à comprendre non

 20   plus Tudjman, pour les mêmes raisons. Parce que Tudjman essayait

 21   d'expliquer les raisons de la genèse de ce conflit. Il se lançait dans des

 22   explications longues à ce sujet. Mais les gens qui venaient n'avaient que

 23   15 minutes à leur disposition, et c'est ainsi qu'ils prenaient des

 24   mauvaises décisions sur des bases insuffisantes et quelqu'un doit

 25   finalement être tenu pour responsable de tout cela.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous vous êtes levé, vous vouliez dire quelque

 27   chose, parce que je --

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] Je voulais simplement dire, Monsieur


Page 42073

  1   le Président, que le monsieur dont on parlé à huis clos partiel est aussi

  2   concerné par un passage qui dit très clairement dans ce livre de Schindler

  3   mais ailleurs aussi, que c'est cet ambassadeur précisément qui a convaincu

  4   Izetbegovic qu'il devait rejeter le plan Cutileiro après avoir marqué son

  5   accord dans un premier temps. Donc sans ce monsieur, en plus de ce qu'on a

  6   vu aujourd'hui, peut-être que le plan Cutileiro aurait été retenu. Mais si

  7   j'ai montré ceci, c'est uniquement parce que ça montre la naïveté.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, mon collègue dit que vous

  9   témoigniez. Donc --

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] Je me contente d'indiquer que c'était dans

 11   le livre, c'était mentionné. Si vous me donnez du temps supplémentaire pour

 12   examiner ce passage, je suis prêt à vous le montrer.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous aurez certainement l'occasion avec d'autres

 14   témoins de revenir là-dessus, sans aucun problème. Bien, mais je l'avais

 15   noté, rassurez-vous.

 16   Monsieur Praljak, vous avez dit quelque chose : vous dites, vous les Juges,

 17   quand vous êtes arrivés ici, vous aviez des idées préconçues. Sachez en ce

 18   qui me concerne, Monsieur Praljak, je n'avais aucune idée, car je dois vous

 19   dire qu'à part de connaissance très lointaine, je n'ai jamais su ce qui

 20   s'était passé. Meilleure preuve en est, dans mon pays, j'avais eu à juger

 21   M. Ante Gotovina, et je ne savais absolument pas ce qu'il faisait en

 22   Croatie, donc moi, en ce qui me concerne je suis arrivé ici totalement

 23   neutre, sans aucune idée.

 24   Voilà, j'espère que ça vous a rassuré.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] On a omis le mot, "peut-être" je parle de

 26   façon très précise. Je n'ai pas dit que vous êtes venus avec des idées

 27   préconçues. Mais ce que j'ai dit c'est que peut-être vous aussi, êtes-vous

 28   arrivés avec des idées préconçues. Mais je n'ai pas dit que vous, Messieurs


Page 42074

  1   les Juges, en particulier, êtes venus avec des idées préconçues, dans ce

  2   Tribunal.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors nous allons faire la pause de 20 minutes, et

  4   puis après on reprendra avec la suite.

  5   --- L'audience est suspendue à 12 heures 45.

  6   --- L'audience est reprise à 13 heures 07.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc l'audience est reprise. Il nous reste 40

  8   minutes.

  9   Donc, Maître Nozica, je vous cède la parole et je salue également M. Scott

 10   qui est présent.

 11   Maître Nozica.

 12   Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 13   Juges. Bonjour à toutes les personnes présentes dans le prétoire.

 14   Contre-interrogatoire par Mme Nozica :

 15   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Praljak.

 16   R.  Bonjour, Maître Nozica.

 17   Mme NOZICA : [interprétation] Nous allons commencer - je voudrais juste

 18   prier M. l'Huissier de bien vouloir remettre la documentation à MM. les

 19   Juges. Nous ne l'avons pas fait pendant l'interruption pour qu'il n'y ait

 20   pas de confusion entre les différents classeurs que Messieurs les Juges ont

 21   sur leur table. Donc nous allons simplement attendre quelques instants que

 22   ces documents puissent être distribués.

 23   Merci, aux interprètes, pour leur indication, je vais essayer de régler le

 24   microphone pour que l'on entende mieux, si jamais il y a d'autres

 25   difficultés, je vous prie, de bien vouloir me les indiquer.

 26   Monsieur le Juge, je suis désolée si cela semble un peu compliqué

 27   aujourd'hui avec mes classeurs. Nous allons commencer avec le classeur

 28   numéro 1 que M. Praljak a déjà devant lui.


Page 42075

  1   Je voudrais simplement vous informer que nous avons donc deux

  2   classeurs de documents, un grand procès-verbal, bien que nous n'ayons

  3   l'intention que de nous référer à une phrase qui y figure. Dans l'autre

  4   classeur, on a rajouté a posteriori trois ou quatre documents ces derniers

  5   jours et j'attirerais toujours votre attention sur le fait que j'utilise le

  6   deuxième classeur lorsque cela se produira.

  7   Je vous remercie.

  8   Je pense que d'un point de vue nous sommes prêts.

  9   Q.  Donc, Monsieur Praljak, je voudrais vous demander de vous reporter à

 10   deux documents qui nous parlent des fonctions de M. Bruno Stojic et de son

 11   intervention.

 12   Première question : puisque vous avez travaillé au sein du ministère de la

 13   Défense de la République de Croatie, et que vous avez également travaillé

 14   au sein du HVO, alors vous nous avez dit depuis quand vous connaissez M.

 15   Bruno Stojic. Donc ma première question serait la suivante : est-ce qu'à

 16   votre connaissance M. Stojic n'a jamais été employé ou engagé au sein de

 17   l'armée croate ou au sein du ministère de la Défense de la République de

 18   Croatie ?

 19   R.  A ma connaissance, jamais, il n'a été employé au sein de ces deux

 20   organes. Donc ni au sein du ministère ni au sein de l'armée croate.

 21   Mme NOZICA : [interprétation] Alors reportez-vous, s'il vous plaît, au

 22   document 2D 03000. Il s'agit du premier document dans le classeur numéro 1

 23   qui se trouve en face de vous, devant vous et qui nous confirme précisément

 24   cela.

 25   Q.  Vous avez déjà vu ce document, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Nous nous sommes adressés au ministère de la Justice, à la direction

 28   pour la coopération internationale et la coopération avec les tribunaux


Page 42076

  1   pénaux internationaux, nous avons donc demandé à ces organes de bien

  2   vouloir nous fournir ces données en les demandant auprès du ministère de la

  3   Défense de la République de Croatie.

  4   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine française : les interprètes n'ont pas les

  5   documents qui s'affichent à l'écran.

  6   Mme NOZICA : [interprétation]

  7   Q.  Au deuxième paragraphe du document, nous voyons que les choses sont

  8   précisément telles que vous venez de nous le dire. Elles sont donc

  9   confirmées par le ministère compétent, à savoir le ministère de la Défense

 10   de la République de Croatie; est-ce bien le cas, Monsieur Praljak ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Monsieur Praljak, je vais maintenant vous prier de passer au document

 13   suivant qui est le 2D 03001. C'est donc le document suivant, au sein du

 14   même classeur. Il s'agit d'un certificat émis par la HR HB et son ministère

 15   de la Défense, en date du 21 décembre 1995. Certificat qui atteste de

 16   l'engagement de M. Stojic pendant la période qui est ici citée, à savoir du

 17   27 mars 1992, et ce qui est dit au dernier paragraphe : "Jusqu'à nouvel

 18   ordre," c'est ce qui est écrit. Jusqu'au jour de la remise de ce

 19   certificat.

 20   Alors je vais rappeler à votre attention dont vous vous souvenez. Vous nous

 21   avez parlé de votre bonne mémoire à plusieurs reprises. En page 41 663 du

 22   compte rendu d'audience, en ligne 13, M. le Président, le Juge Antonetti,

 23   vous a posé une question portant sur M. Stojic, dans sa qualité de ministre

 24   de la Défense de la HZ HB ou du HVO, et vous avez répondu en ligne 21 de

 25   cette même page qu'à cette époque du 21 juillet --

 26   R.  Le 24 ?

 27   Q.  Oui, le 24. En fait dans la ligne en question, votre réponse est le 21.

 28   C'est toute ma confusion, à savoir que donc vous avez répondu que dans


Page 42077

  1   cette période du 24 juillet 1993, au 9 novembre de la même année, M. Bruno

  2   Stojic était chef du département de la Défense, et non ministre. Ici nous

  3   voyons qu'il a tout d'abord été assistant du chef de l'état-major principal

  4   chargé de la logistique et cela pendant la période s'étendant du 27 mars

  5   1992 au 12 juillet de la même année; il a été chef du département de la

  6   Défense du 12 juillet 1992 au 10 novembre 1993, et cela correspond

  7   également, Monsieur Praljak, avec la période pendant laquelle vous avez été

  8   commandant au sein du HVO, n'est-ce pas ? Enfin, il y a ces deux derniers

  9   paragraphes que je ne vais pas lire. Il a été chef du secteur chargé de la

 10   Production de matériel militaire et de l'armement et il a été assistant

 11   chargé du personnel auprès du ministre de la Défense de la HR HB.

 12   Alors est-ce qu'à votre connaissance, ces informations sont exactes,

 13   Monsieur Praljak, et est-ce que vous avez eu à être en contacts avec M.

 14   Stojic en ses qualités qui sont ici énumérées ?

 15   R.  Je n'ai pas de raison de douter de ce qui est écrit dans ce document,

 16   donc c'est à 100 % sûr, ici nous avons des choses qui le sont certaines à

 17   99,9 %. Ceci près que je ne pourrais pas vous dire pour les dates que je

 18   mettrais ma main à couper.

 19   Q.  Puisque vous avez dit 99 %, ce 1 % vous le mettez sur le compte d'une

 20   incertitude éventuelle sur les dates, n'est-ce pas, que vous ne pouvez pas

 21   confirmer avec une certitude absolue ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Très bien. Alors les interprètes nous demandent une nouvelle fois de ne

 24   pas chevaucher dans nos questions et réponses.

 25   Je voudrais passer à un autre sujet, Monsieur Praljak, qui vous est très

 26   familier. Alors tout d'abord passez au document P 5235, s'il vous plaît.

 27   Vous l'avez dans la suite du classeur. C'est le troisième document. Il

 28   s'agit d'un de vos ordres.


Page 42078

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42079

  1   R.  Oui.

  2   Q.  On va passer sur cet ordre et sur ce qui l'a précédé. Je voudrais

  3   simplement remarquer que ce document a déjà été versé qu'il est une pièce à

  4   conviction et que c'est également le cas de la pièce P 04125. Il s'agit du

  5   même document en réalité.

  6   Alors, Monsieur Praljak, au cours de votre interrogatoire principal, vous

  7   avez déclaré avoir émis cet ordre, vous avez dit qu'il s'agissait de

  8   circonstances exceptionnelles et que vous étiez en contact avec M. Stojic

  9   pour ce qui concernait cet ordre. Est-ce que cela est bien exact et pouvez-

 10   vous également ajouter, selon le souvenir que vous en avez, pouvez-vous

 11   nous dire de quel type d'incursion de groupes terroristes il s'agissait à

 12   l'époque ?

 13   R.  Il s'agissait à l'époque d'une situation dans laquelle l'offensive de

 14   l'ABiH était extrêmement intense au mois de septembre. Ils ont réussi à

 15   infiltrer en profondeur dans notre territoire des groupes qui à un certain

 16   moment ont commis des crimes contre notre population, on en a parlé. Il y a

 17   eu des rapports faisant état de l'infiltration de cinq ou six groupes qui

 18   avaient été infiltrés jusqu'à une dizaine de kilomètres en profondeur ou

 19   même plusieurs dizaines de kilomètres en profondeur. Comme on connaissait

 20   déjà les conséquences de ce type de phénomène, l'ordre en question était

 21   tout à fait clair, était une conséquence normale de cela. Je ne vois pas ce

 22   que je pourrais ajouter.

 23   Q.  Alors je pense qu'il serait bon aux fins du compte rendu d'audience de

 24   dire que la date de cet ordre est celle du 20 septembre 1993.

 25   Alors document suivant, c'est le P 05350. Il s'agit également d'un de

 26   vos ordres qui parle de cette incursion d'un groupe terroriste et des

 27   activités entreprises par le HVO relativement à cet événement. Ai-je raison

 28   de dire cela ?


Page 42080

  1   R.  Oui, mais partiellement. Il ne s'agit pas seulement de cela mais

  2   également d'une offensive extrêmement intense, aussi bien l'incursion du

  3   groupe terroriste que l'offensive qui à l'époque était extrêmement intense.

  4   On parle ici d'artillerie et ainsi de suite sont ici en cause.

  5   Q.  Je vous demanderais maintenant de vous pencher sur le document suivant

  6   qui est la pièce P 5232. C'est un ordre signé par M. Stojic.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Il concerne la même situation, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Dans cet ordre, nous lisons au premier paragraphe, je cite :

 11   "Engager tous les potentiels humains et matériels avec tous les organes de

 12   la police militaire et de la police."

 13   Ensuite on parle d'autres organisations. Mais pour ma part j'aimerais me

 14   concentrer maintenant sur ces instances policières et lorsqu'on dit polices

 15   ici il est tout à fait clair qu'il s'agit de la police civile. Je sais que

 16   lorsque la demande de versement au dossier de ce document a été faite, M.

 17   le Juge Antonetti a demandé avec quelle autorisation ou sur la base de quel

 18   pouvoir il avait été possible d'engager la police dans ces conditions.

 19   Pour répondre à cette question, j'aimerais que vous vous penchiez sur

 20   le document suivant car je suis sûr que vous l'avez déjà vu même si je n'en

 21   suis pas tout à fait sûre.

 22   R.  De quel document dites-vous que je l'ai déjà vu ?

 23   Q.  Je vais donner le numéro 2D 30 --

 24   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Excusez-moi, désolé de vous

 25   interrompre, Maître Nozica, mais j'aimerais poser une question à M. Praljak

 26   concernant les ordres ici donnés.

 27   Voici ce qui m'interpelle. Nous avons vu deux ou trois ordres délivrés par

 28   le général Praljak, à l'époque, et ici nous sommes à la date du 20


Page 42081

  1   septembre, et vous venez de présenter, Maître, un ordre signé et délivré

  2   lui par M. Stojic, le chef du département de la Défense. Voici ma question

  3   : ces deux ordres sont donnés le même jour, et ils ne se mentionnent pas

  4   mutuellement; y a-t-il une explication à cela ? Comment se fait-il que des

  5   ordres aient été délivrés séparément le même jour et sans faire référence à

  6   l'autre ?

  7   C'est simplement une question de coordination que je pose ici ? Puis-je

  8   demander une explication à M. Praljak. Merci.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, l'explication est

 10   très simple.

 11   Dans une telle situation, il ne m'est pas venu à l'esprit de m'occuper de

 12   citations, de numéros ou de choses de ce genre. La situation était très

 13   grave et tout ce que j'avais en tête à ce moment-là c'était comment

 14   empêcher ce qui était en train de se passer avec ces massacres, avec le

 15   fait que je ne savais pas où étaient les intrus ennemis dans nos lignes. M.

 16   Stojic ne le savait pas non plus. Donc très franchement, il n'était pas

 17   question d'appeler par téléphone de se réunir, de discuter les uns avec les

 18   autres car tout se faisait à la minute ou à l'heure près.

 19   Maintenant si je puis vous aider un peu plus, voyez-vous ici dans ce

 20   document, j'ai apporté une correction, j'ai remplacé Mostar par Ljubuski,

 21   dans le texte de M. Stojic et j'ai ajouté également le nom de M. Praljak.

 22   Vous ne l'avez pas vu ? Vous l'avez vu, Maître Nozica ?

 23   Mme NOZICA : [interprétation]

 24   Q.  J'ai vu dans le texte original qu'il y avait eu des corrections, et

 25   dans le prétoire, je n'ai pas osé dire que vous étiez l'auteur de ces

 26   corrections.

 27   R.  Mais pourquoi, pas de problèmes. Il fallait écrire "Ljubuski" et donc

 28   j'ai constaté cela et j'ai inscrit Ljubuski. J'ai transformé "Mostar" en


Page 42082

  1   "Ljubuski," et j'ai ajouté Praljak. Voilà.

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci.

  3   Mme NOZICA : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Praljak, je vous demanderais de vous pencher sur le document

  5   suivant qui est un rapport avec la police civile. Il s'agit du document 2D

  6   3002.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai quand même une question à

  8   propos du document précédent.

  9   Monsieur Praljak, vous avez parlé comme si c'était votre document alors que

 10   ce document est signé par Bruno Stojic. Est-ce vous qui l'avez écrit et

 11   est-ce que c'est lui qui l'a signé ? C'est comme ça ou comment faut-il

 12   comprendre la situation ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge Trechsel. C'est M.

 14   Stojic qui a élaboré ce texte et qui l'a signé, mais quand je l'ai reçu et

 15   qu'immédiatement suite à cela j'ai rédigé mon propre ordre, j'ai remplacé

 16   "Mostar" par "Ljubuski" dans son ordre à lui parce que Ljubuski était plus

 17   important et n'avait pas été mentionné. Voilà, c'est tout. Et puis j'ai mis

 18   ma signature pour que chacun puisse savoir que la correction venait de moi.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Juge, vous voyez cela dans le

 21   dernier paragraphe du document, au bas du document, vous voyez que "Mostar"

 22   est rayé à la main et que le nom de M. Praljak est inscrit, et il vient de

 23   confirmer dans quelle condition il a inscrit son nom.

 24   Q.  Alors, Monsieur Praljak, est-ce que vous avez trouvé le document 2D

 25   3002 ? Bien. Monsieur Praljak, il est sans aucun doute le même ordre que

 26   celui que nous avons vu tout à l'heure, mais celui-ci est signé par le

 27   représentant du département du département de l'Intérieur, M. Branko

 28   Kvesic. Alors, Monsieur Praljak, selon ce que vous savez, est-ce que cela


Page 42083

  1   signifie que par cet ordre, M. Kvesic confirme la possibilité d'engager

  2   aussi la police civile ainsi que les autres organisations qui relevaient de

  3   la société civile ?

  4   R.  Oui. Dans une telle situation, enfin on ne parle pas ici de

  5   gouvernement qui est assis dans une pièce qui a des moyens de transmission,

  6   et cetera, et cetera. La maison est en feu, vous donnez un ordre aux

  7   pompiers et ensuite vous demandez au chef des pompiers de confirmer tout

  8   cela. Pour ce qui s'est fait, il n'est pas nécessaire d'entrer dans les

  9   détails.

 10   Q.  Monsieur Praljak, je suis certaine que pour vous tout est clair, mais

 11   nous devons préciser sur quelle base l'ordre de M. Stojic avait été émis,

 12   ordre dans lequel il est fait mention de la police civile.

 13   R.  Il est de ma responsabilité de démontrer qu'il existait aussi un ordre

 14   venant du représentant du département du ministère de l'Intérieur puisque

 15   nous parlons ici de police civile.

 16   Q.  Monsieur Praljak, toutes les questions que l'on voit dans ces documents

 17   ont un rapport avec les difficultés dont vous avez parlé, difficultés dans

 18   la mobilisation, difficultés liées au nombre insuffisant d'hommes

 19   disponibles. Cela relevait du travail de M. Stojic, mais les conséquences

 20   des difficultés de la mobilisation et de toutes ces difficultés, vous, vous

 21   avez eu à traiter des répercussions de tout cela, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, et même au-delà de cela. Il fallait aussi s'occuper des problèmes

 23   de transmission, il fallait savoir qui était à quel endroit, qui était en

 24   déplacement, parce que quand les structures ne fonctionnent pas - et en

 25   guerre, c'est une situation type du moment où les structures en place ne

 26   fonctionnent pas - vous devez créer des by-pass. Vous devez contourner les

 27   structures et prendre des mesures qui ne relèvent pas fonctionnellement de

 28   votre poste. Parce que si vous ne le faisiez pas, cela aurait des


Page 42084

  1   conséquences très graves du point de vue de pertes subies.

  2   Q.  Monsieur Praljak, ce document démontre également, n'est-ce pas, que la

  3   mobilisation de facto a été une activité permanente. Ce n'est pas une

  4   activité qui a été ponctuelle et ensuite terminée un certain jour. C'est

  5   une mobilisation qui n'a jamais cessé, n'est-ce pas, qui a duré tout le

  6   temps ?

  7   R.  C'est exact. C'était d'ailleurs l'un des problèmes les plus graves, les

  8   plus difficiles, aussi bien du point de vue de la nécessité de faire venir

  9   les gens, de réaliser la mobilisation, de relever le moral des hommes qui

 10   étaient en guerre. Parce que nous étions impuissants. En fait, tout le

 11   monde était impuissant à amener sur place de force les hommes qui avaient

 12   pris la fuite.

 13   Q.  Monsieur Praljak, je vous demanderais maintenant de vous pencher sur la

 14   pièce P 5769, document suivant. C'est le dernier document qui s'occupe de

 15   la question de la mobilisation. P 5769. Très bien, c'est consigné au compte

 16   rendu d'audience.

 17   Il s'agit d'un procès-verbal de réunion du HVO en date du 9 octobre 1993,

 18   et à la lecture des personnes présentes, nous voyons que vous avez assisté

 19   à cette réunion. Le paragraphe qui m'intéresse plus particulièrement est le

 20   paragraphe 4 où il est question d'un sujet que vous avez déjà traité, à

 21   savoir la mobilisation des étudiants. Vous rappelez-vous cette période ?

 22   Nous vous avons entendu parler assez longuement du fait que c'était

 23   l'époque où se menait une offensive à grande échelle de l'ABiH, n'est-ce

 24   pas ?

 25    R.  Oui. J'en reste à ce que j'ai dit, et notamment à ce qui est écrit

 26   dans le premier paragraphe de ce texte, s'agissant du fonctionnement de la

 27   société civile, du pouvoir civil et de la façon dont le fonctionnement de

 28   ce pouvoir civil influait sur l'armée.


Page 42085

  1   Q.  Je voulais simplement vous poser la question suivante : puisque nous

  2   parlons de mobilisation, c'était un sujet si sérieux, si grave qu'y compris

  3   le HVO et la HZ HB, parce que nous voyons votre nom mentionné comme

  4   participant à plusieurs réunions dans cette période, donc aussi bien le HVO

  5   que la Communauté croate d'Herceg-Bosna ont dû s'affronter à ce problème ?

  6   R.  Oui. C'était un immense problème pendant tout le temps.

  7   Q.  J'aimerais maintenant passer à un autre sujet dont vous avez parlé

  8   également longuement, à savoir la façon dont on nomme à leurs postes, dont

  9   on révoque les commandants et tous les autres membres du sommet de la

 10   hiérarchie du HVO. Vous en avez parlé. J'y reviendrai brièvement. Vous avez

 11   évoqué l'influence des pouvoirs municipaux, vous avez évoqué les

 12   propositions de noms faites pour certains postes avant votre arrivée sur

 13   les lieux et avant le début du fonctionnement du département de la Défense.

 14   A présent, j'aimerais vous demander de regarder avec moi le document 2D

 15   3003 qui, en grande partie, confirme ce que vous avez déjà dit. Avez-vous

 16   trouvé ce document ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Il est question de la municipalité de Rama, ici. Monsieur Praljak, le

 19   12 novembre 1993, au moment où on aurait pu s'attendre à ce que les

 20   structures fonctionnent déjà de façon satisfaisante, nous avons une

 21   proposition de noms pour le poste de chef de commandant de la Brigade de

 22   Rama. Je suppose que vous saviez bien, étant donné vos attributions,

 23   comment les choses fonctionnaient dans ce secteur.

 24   Dans la première phrase, nous lisons, en présence d'un nombre élargi de

 25   représentants, le chef du HVO de la Brigade de Rama, les commandants des

 26   bataillons et autres, la réunion se tient le 12 août 1993 et prend, à

 27   l'unanimité, la décision de nommer M. Ante Pavlovic au poste de commandant

 28   de la Brigade de Rama. Donc la demande est présentée de remplacement de


Page 42086

  1   l'ancien commandant par Ante Pavlovic. A la fin du texte, il est indiqué

  2   que M. Pavlovic a déjà pris ses fonctions en tant que commandant. Ce dont

  3   il est question ici, c'est l'état-major principal, département de la

  4   Défense et présidence.

  5   Monsieur Praljak, est-ce que ceci illustre l'influence des pouvoirs civils

  6   sur le choix des structures de commandement au sein du HVO à l'époque ?

  7   R.  Pas seulement cela, Maître Nozica. Permettez-moi de m'exprimer une

  8   minute.

  9   Dans une armée normale, je dis bien une armée normale, tous les membres de

 10   cette armée souhaitent avancer dans les rangs de l'armée en question. C'est

 11   le cas de tout être humain. Le soldat de deuxième classe souhaite devenir

 12   soldat de première classe, le soldat de première classe souhaite devenir

 13   lieutenant, et cetera. Mais au HVO, c'était l'inverse. Personne ne

 14   souhaitait exercer le commandement. La majorité de ces hommes qui avaient

 15   accepté certaines responsabilités, il fallait les convaincre qu'ils étaient

 16   bons, qu'ils pouvaient avancer. La plupart du temps, on avait pour réponse,

 17   Je suis peut-être un bon combattant, mais il y en a sans doute qui sont

 18   meilleurs que moi. Les hommes n'étaient pas sûrs d'être à la hauteur du

 19   travail qu'on leur demandait de faire.

 20   Regardez, là, c'est le 11e commandant de la Brigade de Rama dont il est

 21   question dans ce texte. Le 11e, si je me souviens bien. Il y en a trois qui

 22   ont été tués, les autres ont été remplacés à leurs postes. Donc vous ne

 23   disposez pas d'un réservoir d'effectifs humains avec des documents qui vous

 24   disent, Celui-là, c'est un homme qui est très compétent, qui a fait du très

 25   bon travail. A ce moment-là, évidemment, c'est la personne qui connaît tel

 26   ou tel et qui connaît ses qualités qui va le proposer. Stojic et, moi, en

 27   tout cas, je parle de moi personnellement, il m'a fallu convaincre certains

 28   hommes.


Page 42087

  1   Regardez le cas de celui-ci, ce Pavlovic, parce que la brigade, là-bas

  2   était en démantèlement de facto. Donc j'ai demandé, parce que je savais

  3  qu'il était le chef de la 1ère Brigade des Gardes de Rama, j'ai demandé à ce

  4   qu'on le retrouve et à ce qu'on le persuade. Et il a accepté avec

  5   difficulté, mais après quelques mois, il a dit qu'il en avait assez et

  6   qu'il voulait retourner à ses anciennes fonctions.

  7   Voilà. Je ne vais pas m'étendre, mais enfin, vous voyez. Ce n'est pas

  8   seulement qu'il était difficile de les convaincre, mais c'était aussi qu'il

  9   fallait savoir qui allait parler à qui pour le convaincre.

 10   Q.  Monsieur Praljak, je souhaitais évoquer ce problème dont vous avez déjà

 11   longuement parlé, sans entrer dans les détails. Et à cet égard, je voulais

 12   soumettre à la Chambre un certain nombre de documents pour démontrer

 13   l'évolution de la situation s'agissant de tous ces problèmes. Ici, dans ce

 14   document-ci, nous voyons évoqué un problème très important en particulier,

 15   à savoir que -- mes confrères me font savoir qu'il y a peut-être un

 16   problème de nom au compte rendu d'audience. L'homme dont nous parlons

 17   s'appelle Pavlovic et pas Pavelic.

 18   Mais ce M. Pavlovic, il était originaire de Rama, né à Rama, Monsieur

 19   Praljak ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Ensuite nous reviendrons sur les conditions dans lesquelles la

 22   municipalité de Rama a pris sur elle la proposition de ce nom. Monsieur

 23   Praljak, était-ce un peu logique finalement dans la mesure où vous avez

 24   déjà dit, n'est-ce pas, que le HVO ne disposait pas d'un grand nombre

 25   d'hommes formés à l'art militaire, d'hommes qui auraient fait partie de la

 26   JNA précédemment ? Donc ces hommes n'avaient pas été entraînés et la peur

 27   qu'ils manifestaient ne découlait-elle pas de cela ?

 28   R.  Ce n'était pas qu'ils n'étaient pas nombreux, c'est qu'ils étaient


Page 42088

  1   extraordinairement rares ceux qui avaient un entraînement. Même quand on

  2   trouvait exceptionnellement un homme qui était un bon combattant, qui

  3   n'avait pas tendance à trop boire, il fallait encore le persuader, le

  4   convaincre, parce qu'il n'était pas sûr de lui.

  5   Q.  Monsieur Praljak, je vous demanderais, pour éviter de donner

  6   l'impression que personne ne voulait prendre ses responsabilités, je vous

  7   demande si cette espèce de crainte ne découlait pas d'un entraînement

  8   insuffisant.

  9   R.  Mais c'est bien ce que j'ai dit. Ces gens-là voulaient devenir

 10   combattants, mais ils rechignaient devant la responsabilité. Ils n'étaient

 11   pas sûrs d'avoir la capacité pour exercer le commandement. Maintenant la

 12   suite démontrait ce qu'elle démontrait.

 13   Q.  Monsieur Praljak, ce qui a été dit l'a déjà été à plusieurs reprises.

 14   Je voudrais simplement l'appuyer par des documents.

 15   Je vais maintenant vous soumettre une série de documents qui montrent

 16   quels sont les principes appliqués en termes de proposition de noms pour

 17   tel pou tel poste à partir d'exemples provenant d'une brigade. Puis

 18   également des documents qui montreront comment l'agrément était censé être

 19   accordé par l'état-major principal, et finalement une fois la nomination

 20   entérinée, comment le commandement était exercé.

 21   Je ne voudrais pas poser de questions directrices, mais je vous

 22   demande la chose suivante : s'agissant des commandants de brigade, qui

 23   était responsable de leur nomination ?

 24   R.  Le responsable, pour autant que je le sache, c'était Mate Boban.

 25   Q.  Qu'en est-il des autres unités ?

 26   R.  Au dessus des brigades, c'était Mate Boban, en dessous du niveau de la

 27   brigade, c'était Bruno Stojic.

 28   Q.  D'accord. Ce point est précisé. Il a déjà été répété à plusieurs


Page 42089

  1   reprises, mais tout de même la question est encore posée s'agissant de

  2   certains commandants de brigade, si M. Stojic qui l'a nommé à son poste,

  3   donc je suis heureuse d'avoir entendu votre réponse.

  4   Passons maintenant au document P 02685. C'est une proposition qui date du 9

  5   juin 1993, proposition qui vient du commandant de la zone opérationnelle du

  6   sud-est, M. Lasic. Comme dans mes questions précédentes, je voudrais vous

  7   demander simplement des précisions. Nous voyons ici que la proposition de

  8   nomination pour le commandement du 4e Bataillon du HVO est en cause et que

  9   c'est le commandant adjoint responsable de l'IPD qui est mentionné. La

 10   proposition vient du commandant de bataillon, on a aussi donc une

 11   proposition pour l'assistant au paragraphe 4, chargé de la propagande de

 12   l'information, et puis on a un autre assistant du ministre qui est proposé

 13   au paragraphe 6.

 14   Monsieur Praljak, c'est l'aspect que présentaient les propositions dans

 15   votre souvenir ? Tout ce qui concernait la période avant votre arrivée,

 16   mais je vous demande si c'était bien le principe qui était suivi en général

 17   dans ce cas.

 18   R.  Honnêtement, je ne sais pas si c'était dans le respect du principe ou

 19   en violation du principe que cette proposition de nomination pour le

 20   service de l'information et de la propagande est faite ici, ou pour le

 21   service du Renseignement, le SIS. Il faudrait que ce soit confirmé par le

 22   chef du SIS.

 23   Mais s'agissant des commandants de brigade, le commandant de la zone

 24   opérationnelle avait le droit de proposer un nom pour le service du

 25   Renseignement. Je ne peux pas vous l'affirmer en toute certitude, mais je

 26   pense que c'est vrai. Il y a eu plusieurs propositions de ce genre.

 27   Q. Monsieur Praljak, je vous ai entendu et je tiens compte de ce que vous

 28   avez dit. Vous demandez toujours à ne pas être interrogé sur des aspects


Page 42090

  1   juridiques pour ne pas être pris au mot d'un point de vue juridique. Mais

  2   je vais vous montrer un certain nombre de documents qui m'intéressent. Nous

  3   voyons une proposition de documents, ça nous venons de le voir, et j'essaie

  4   de suivre la chaîne en passant au stade de la nomination dans le cadre

  5   hiérarchique.

  6   Document suivant, 2D 3004. C'est une proposition de déploiement des troupes

  7   et donc 2D 3004. Bien.

  8   Dans ce document, on propose la nomination du commandant de la 2e

  9   Compagnie, Ivica Jelcic de Vitez, n'est-ce pas, c'est bien ça ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Donc c'est bien la proposition qui le concerne ?

 12   R.  Oui.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : On va arrêter. On continuera la semaine prochaine

 14   puisqu'il y aura toute la série des documents. Je remercie Me Nozica de les

 15   avoir mis dans l'ordre, ce qui permet très facilement de suivre l'ordre

 16   plutôt que d'aller d'une page à l'autre, et essayer à l'avenir de respecter

 17   l'ordre des pièces comme cela, ça permet aux Juges de suivre très

 18   facilement.

 19   Le greffier décomptera le temps que vous avez utilisé, mais vous n'en avez

 20   pas utilisé beaucoup. Donc nous continuerons la semaine prochaine avec vous

 21   puisque nous aurons lundi, mardi, mercredi et jeudi.

 22   Monsieur Stringer, si vous avez quelque chose à dire, dites-le vite avant

 23   qu'on termine ?

 24   M. STRINGER : [interprétation] Oui, très rapidement.

 25   J'ai une petite demande, s'il vous plaît, Monsieur le Président. L'un des

 26   documents auquel a fait référence le conseil lors de son contre-

 27   interrogatoire n'était pas dans le système électronique, c'est sans doute

 28   une négligence, mais ce serait très utile si nous l'avions. Parce que en ce


Page 42091

  1   qui concerne la Défense Prlic, tout était à la fois dans les dossiers et

  2   dans le système électronique, c'était très pratique. Donc s'ils pouvaient

  3   juste vérifier pendant le week-end que tous leurs documents papier sont

  4   aussi dans le système électronique. Ce serait très pratique.

  5   Merci.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Nozica, vérifiez.

  7   Mme NOZICA : [interprétation] Oui, merci à mon collègue de l'Accusation

  8   pour cette observation. Nous avons donné à l'Accusation des copies papier.

  9   Je vais voir d'où vient le problème, ne vous inquiétez pas, je vais le

 10   régler.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pour terminer, Maître Nozica, vous avez

 12   utilisé 32 minutes.

 13   Je souhaite à tout le monde une bonne fin de journée. Nous nous

 14   retrouverons lundi à 14 heures 15.

 15   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le lundi 29 juin 2009,

 16   à 14 heures 15.

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28