Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 42498

  1   Le lundi 6 juillet 2009

  2    [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Prlic et Coric sont absents]

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour

 10   tout le monde. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic

 11   et consorts. Je vous remercie.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 13   En ce lundi 6 juillet 2009, je salue en premier M. Praljak et je m'excuse

 14   auprès de lui de l'avoir oublié la semaine dernière. Je devais avoir les

 15   idées fixées sur les autres accusés. Donc je salue également M. Pusic, M.

 16   Petkovic et M. Stojic. Je salue également Mmes et MM. les Avocats. Je salue

 17   M. Stringer, M. Scott ainsi que leurs collaboratrices. Je n'oublie pas non

 18   plus de saluer M. le Greffier, M. l'Huissier, M. le Sténotypiste, ainsi que

 19   les interprètes et les officiers de sécurité. Voilà. Je pense que je n'ai

 20   oublié personne. Si j'ai oublié quelqu'un, qu'il lève la main. Comme

 21   personne ne lève la main, tout le monde a été salué.

 22   Je vais lire une courte décision orale.

 23   Décision orale du 6 juillet 2009 relative à la lettre adressée par

 24   l'accusé Jadranko Prlic aux Juges de la Chambre. Le 1er juillet 2009,

 25   l'accusé Prlic a adressé aux Juges de la Chambre une -- il semble leur

 26   demander de reconsidérer la décision de la Chambre du 29 juin 2009,

 27   intitulée je cite : "Décision relative à la demande de la Défense Prlic en

 28   vue du réexamen de la décision portant sur l'admission d'éléments de preuve


Page 42499

  1   documentés."

  2   La Chambre ne peut que rappeler à l'accusé Prlic et à ses conseils que la

  3   seule voie ouverte pour contester, le cas échéant, une telle décision est

  4   une demande en certification d'appel introduite en bonne et due forme par

  5   l'intermédiaire des conseils de l'accusé.

  6   Voilà donc la décision orale.

  7   Par ailleurs, nous avons été informés par le greffe que M. Prlic a décidé

  8   de venir à l'audience, donc la Chambre ne peut que se réjouir de cette

  9   nouvelle et M. Prlic sera introduit dans la salle d'audience après la

 10   première pause puisqu'il est en cours de route, et sa décision de venir a

 11   été portée à notre connaissance qu'il y a une dizaine de minutes. Donc il

 12   nous rejoindra après la première pause.

 13   J'ai cru comprendre également que Me Karnavas avait quelque chose à nous

 14   dire.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 16   Messieurs les Juges. Bonjour à tout le monde dans ce prétoire.

 17   Oui, M. Prlic a pris sa décision de venir suite à la conversation que j'ai

 18   eue avec lui vendredi en me basant sur la décision que vous aviez prise à

 19   propos de l'ADC. La décision est restée une ordonnance, il me semble, qui a

 20   été déposée de façon confidentielle, mais il me semble que pour être

 21   transparent, ce type de questions doit se faire en public. Mais pour toutes

 22   ces raisons-là, M. Prlic compte venir et à un moment ou un autre, je compte

 23   demander la parole avant que M. Prlic ne parle lui-même pour nous dire

 24   qu'elle est sa position. A moins que vous vouliez que je ne m'exprime tout

 25   de suite, mais je préférerais que le Dr Prlic soit présent lorsque je

 26   prendrai la parole afin qu'il puisse m'entendre.

 27   Je tiens aussi à dire qu'en arrivant au bâtiment, je me suis arrêté au

 28   bâtiment du conseil de la Défense pour voir s'il avait reçu quoi que ce


Page 42500

  1   soit. Il semble qu'il n'ait rien reçu à l'ADC jusqu'à présent. Donc après

  2   que j'ai été l'ex-président de l'ADC, il se peut très certainement que

  3   l'ordonnance -- ce n'était pas une ordonnance qu'il aurait fallu, il

  4   faudrait plutôt que cet ordre ne soit envoyé au comité des amicus, mais

  5   plutôt qu'il faudrait une opinion venant du conseil disciplinaire.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : On attend donc l'arrivée de M. Prlic. Vous vous

  7   exprimerez en sa présence.

  8   Maître Alaburic, je crois qu'il vous reste encore quelques minutes, donc je

  9   vous donne la parole pour terminer les questions à M. Praljak.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 11   bonjour. Bonjour à tous et toutes dans le prétoire.

 12   Il me semble que je dispose d'une dizaine de minutes.

 13   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic : [Suite]

 14   Q.  [interprétation] Alors, Général Praljak, je voudrais qu'on se penche

 15   sur le sujet de Mostar dans la mesure où cela nous sera possible pour les

 16   dix minutes qui nous restent.

 17   Bonjour, Monsieur Praljak.

 18   R.  Bonjour à tous et à toutes dans le prétoire. Bonjour, Madame Alaburic.

 19   Q.  Jeudi passé on a terminé notre entretien par les pilonnages de Mostar

 20   et activités de combat dans Mostar. Alors je voudrais en conclure avec ce

 21   sujet en vous posant la question suivante : est-ce que le HVO avait des

 22   observateurs qui étaient là pour surveiller les tirs d'obus de mortiers ou

 23   autres pièces d'artillerie similaires ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Veuillez nous indiquer si, selon les informations communiquées par ces

 26   observateurs, il y a toujours eu correction de tirs appropriés ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et est-ce qu'on s'est comporté conformément aux règlements en la


Page 42501

  1   matière pour ce qui est des activités de combat dans les agglomérations ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Le sujet suivant que je voudrais aborder au sujet de Mostar, c'est ce

  4   qui est dit à l'acte d'accusation, à savoir que les lignes de démarcation

  5   dont on a longuement parlé dans ce prétoire, pour ce qui est de la ligne

  6   qu'on connaît tous, j'imagine, c'est le résultat des conflits du 9 mai

  7   1993. Général Praljak, dites-nous, s'il vous plaît, s'il en est ainsi ou si

  8   ces lignes de démarcation ont été établies à une autre date ?

  9   R.  La ligne de démarcation a été mise en place avant, lorsqu'il y a eu

 10   médiation du général Pellnas.

 11   Q.  Le général Pellnas, dans son témoignage devant cette Chambre, a indiqué

 12   que cette ligne de démarcation a été placée là d'après un accord pour ce

 13   qui est de la nuit du 20 au 21 avril 1993. Cela se trouve être concilié au

 14   compte rendu, page 19 760. Veuillez m'indiquer, Général Praljak, d'après

 15   vos souvenirs, est-ce que c'est bien la date de l'établissement de la ligne

 16   de démarcation --

 17   R.  Oui, et c'est moi qui ai participé avec le général Pellnas aux

 18   négociations en question.

 19   Q.  Bien. Général Praljak, je voudrais vous poser des questions au sujet de

 20   trois documents qui se trouvent au bout du classeur numéro 2 dans le

 21   chapitre intitulé "Mostar." Vous pourrez vous concentrer sur ce qu'on nous

 22   montrera à l'affichage électronique. J'imagine que c'est deux documents que

 23   vous avez déjà vus. Le premier, c'est le 4D 1344.

 24   En attendant qu'on nous le montre sur l'écran, Général, dites-nous, avez-

 25   vous mentionné ou pas un accord musulmano-serbe qui aurait été établi avant

 26   les conflits de Mostar dont on a parlé le 9 mai ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  De quoi s'agit-il ?


Page 42502

  1   R.  D'après mes informations, il y a eu signature d'un accord --

  2   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je suis désolé d'avoir à nouveau

  3   reprendre la parole. Mais veuillez, s'il vous plaît, ménager une pause

  4   entre les questions et les réponses. Ce n'est pas si difficile à comprendre

  5   et à faire quand même. Je vous remercie.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Général, vous avez commencé à répondre. Veuillez terminer votre

  8   réponse, s'il vous plaît.

  9   Vous avez dit --

 10   R.  J'attends que sur l'écran on ait fini de défiler.

 11   Alors, d'après mes informations, j'ai appris - et c'était publié de

 12   façon tout à fait ouverte - à savoir qu'il y a eu un accord entre Ratko

 13   Mladic et Sefer Halilovic daté du 8 mai 1993. Il s'agissait d'une cessation

 14   d'hostilité momentanée sur le territoire entier de la Bosnie-Herzégovine

 15   entre l'ABiH et l'ARSK. Et le témoin, c'était le général, justement,

 16   Philipe Morillon.

 17   Q.  Général, voilà ce document que j'ai demandé, 4D 1344 --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, le document qu'on a sous les yeux

 19   où le général Morillon est témoin - il est souvent témoin - il s'agit d'un

 20   cessez-le-feu entre Halilovic et Mladic, donc entre les Serbes et les

 21   Musulmans. Je regarde la date et je vois 8 mai 1993. Comme vous le savez,

 22   le 8 mai 1993, c'est un jour avant le 9 mai. Partant de là, je me pose la

 23   question suivante : si l'attaque à Mostar est le fait de l'ABiH et non pas

 24   du HVO - c'est la thèse que vous défendez depuis le début du procès - je me

 25   dis à ce moment-là, si l'ABiH fait une attaque d'envergure contre le HVO,

 26   autant être tranquille avec les Serbes. De ce fait, on se met d'accord pour

 27   qu'il y ait un cessez-le-feu avec un témoin qu'on manipule, le général

 28   Morillon. Du coup, les Serbes n'agissent plus et on a carte blanche pour


Page 42503

  1   attaquer les Croates. Est-ce possible ou cela relève-t-il de la spéculation

  2   ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, ce ne sont pas des

  4   hypothèses, parce qu'il y a eu signature de ce cessez-le-feu avec les

  5   Serbes, et je vous affirme que le 9 ils ont attaqué le HVO à Mostar. De

  6   même, au mois de septembre, ils ont signé un cessez-le-feu total avec les

  7   Serbes, ensuite leur offensive la plus forte, Neretva-93, a été lancée

  8   contre le HVO. Donc ce n'était pas la première fois, ce n'était pas la

  9   seule fois que ça s'est passé, ils voulaient sécuriser leur plan et signer

 10   avec une partie sans pour autant poser de question à M. Petkovic pour, par

 11   exemple, faire participer le HVO à la chose parce que c'est une armée

 12   régulière. Ces signatures unilatérales de cessation d'hostilité se sont

 13   tout simplement faites à chaque fois au détriment de la partie tierce.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation]

 16   Q.  Général Praljak, je tire de cette réponse pour ce qui est de ce

 17   document, je crois conclure que le document qu'on est en train de voir sur

 18   nos écrans, c'est bien le texte de l'accord entre Mladic et Halilovic,

 19   n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Penchons-nous maintenant sur le document d'après, le 4D 1345. Il s'agit

 22   d'un document qui constitue l'opérationnalisation [phon] de l'accord passé

 23   entre Mladic et Halilovic. Le document est délivré ici par Enver

 24   Hadzihasanovic, c'est lui qui en est auteur, il est commandant du 3e Corps.

 25   Il parle de la zone de responsabilité et de ce qui découle de l'accord

 26   entre Mladic et Halilovic et il donne ordre de cesser toute activité de

 27   combat à l'égard de l'ARSK.

 28   Alors, Général, saviez-vous que partant de cet accord entre Mladic et


Page 42504

  1   Halilovic, il y a eu des ordres de donnés pour ce qui est de certaines

  2   zones de responsabilité de corps d'armée pour ce qui est de cessation de

  3   combat à l'égard des Serbes ?

  4   R.  Oui, je peux vous apporter une réponse. C'est ainsi que ça s'est fait

  5   et j'ai été au courant de la chose.

  6   Q.  Fort bien. Nous allons sauter une période maintenant et nous allons

  7   nous pencher --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, comme j'ai un esprit d'escalier,

  9   j'essaie d'intégrer tous les documents que l'on voit à la problématique du

 10   9 mai. Sans conteste, on voit que le document qui émane du 3e Corps met en

 11   œuvre le document précédent, sans ambiguïté. Mais il peut y avoir aussi une

 12   autre hypothèse qui serait la suivante - et je vais vous la livrer - c'est

 13   pour cela que j'aimerais que vous me donniez votre position. Imaginons,

 14   dans le cas inverse, que la thèse du bureau du Procureur est la bonne, à

 15   savoir que c'est le HVO qui a attaqué l'ABiH, mais que les renseignements

 16   des Serbes et des Musulmans apprennent la préparation de l'offensive du

 17   HVO. Parce qu'à cette époque-là, il y a quand même le renseignement

 18   militaire qui est une constante et qu'à ce moment-là apprenant que le HVO a

 19   l'intention d'attaquer, l'ABiH se dit : Il vaut mieux qu'on mobilise toutes

 20   nos forces contre le HVO et pas les Serbes, et qu'à ce moment-là ils font

 21   un accord de cessez-le-feu le 8 mai, parce que les renseignements qu'ils

 22   ont eus sont de quelques jours avant. Alors mon hypothèse est-elle farfelue

 23   ou pas conforme avec les éléments du terrain ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas un seul élément, Monsieur Juge

 25   Antonetti, pour ce qui est de confirmer cette thèse. C'est le contraire.

 26   Vous avez vu les documents datés du mois d'avril 1993 où l'ABiH, de façon

 27   tout à fait élaborée sur le plan militaire, envisage des attaques contre le

 28   HVO à Mostar. Ce plan ne s'est pas concrétisé en partie du fait de


Page 42505

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42506

  1   l'engagement du général Pellnas, entre autres, qui a investi beaucoup

  2   d'énergie et de force pour qu'il n'y ait pas à ce moment-là d'attaque de la

  3   part de l'ABiH, parce que devant lui ils n'auraient pas été en mesure, eux,

  4   de lancer et de réaliser cet acte. Et deuxièmement, de par mon engagement

  5   et de par mon passage du côté est de Mostar, chose qui à l'époque n'était

  6   pas un geste tout à fait logique puisque les tensions étaient si grandes,

  7   et le fait d'être allé prendre un café avec M. Pasalic, de m'être déplacé

  8   vers le SDA pour demander à ce que les gens qui n'étaient pas favorables au

  9   conflit aillent en ville pour apaiser les esprits. Mais il est évidemment

 10   que le segment militaire, avec Sefer Halilovic à sa tête, a mis en œuvre

 11   son plan à la date du 9 mai.

 12   Hypothétiquement parlant, votre hypothèse pourrait être prise en

 13   considération, mais il n'y a pas un seul élément, pas un seul, pas le

 14   moindre planning du côté du HVO pour s'attaquer le 9 mars, où il n'y avait

 15   pas eu d'ordre, d'action d'envisagée, de déploiement d'unité sur papier,

 16   donc du point de vue des documents, ou du point de vue des témoins qui

 17   auraient pu fort bien voir que quelque chose était en train de se

 18   concocter.

 19   Et je vous affirme que le 9 mai, suite à ces accords passés avec les

 20   Serbes, c'est l'ABiH qui a lancé l'attaque, d'après toutes les informations

 21   accessibles à moi tant avant qu'après la date en question.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question qui me paraît importante.

 23   L'accord qui est signé entre Halilovic et Mladic, le 8 mai, tout ça

 24   sous le regard de la communauté internationale représentée par le célèbre

 25   général Morillon, si l'ABiH attaque le HVO, à ce moment-là, est-ce que la

 26   communauté internationale n'est pas flouée, n'est pas manipulée par l'ABiH

 27   qui, d'un côté joue le jeu du cessez-le-feu, et de l'autre côté va attaquer

 28   le HVO ? Qu'est-ce que vous en pensez ?


Page 42507

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à plusieurs reprises que je l'ai dit, et

  2   je vais le redire. Malheureusement, la communauté internationale, compte

  3   tenu de la situation qui prévalait à Sarajevo en premier lieu, de façon non

  4   critique, de façon tout à fait non critique, a accepté toute information

  5   communiquée par l'ABiH sans pour autant vouloir faire l'effort de constater

  6   les faits. Et ce n'est que pour ces raisons-là qu'il y a eu constatation

  7   erronée, transmission d'information erronée, et accusation du HVO.

  8   Vous avez dans le livre de M. Drekovic, qui indique que les lignes

  9   face aux Serbes à Mostar ou au nord et au sud de Mostar étaient en réalité

 10   des postes de garde ordinaires, des espèces de guérites de garde, et si

 11   c'était l'ennemi principal, et la logique l'imposait, et le HVO, d'après

 12   les documents et les raisons avancées, la logique et le comportement

 13   étaient censés être le partenaire, ce qu'on ne s'explique pas c'est que

 14   face à l'armée de la Republika Srpska, ils avaient des espèces de guérites

 15   de garde et ils n'ont jamais entrepris d'opérations vis-à-vis de cette

 16   partie-là, pas seulement là, mais ils n'ont entrepris aucune opération

 17   pertinente ni au niveau du corridor ni au niveau de Srebrenica, et ainsi de

 18   suite. Je pense l'avoir dit à plusieurs reprises cela. Et j'aimerais bien

 19   que quelqu'un vienne me démentir.

 20   M. Halilovic dit, dans son livre que l'opération Neretva-93 était la

 21   seule véritable offensive de l'ABiH contre son partenaire. Qu'a-t-il fait

 22   avec ses 200 000 hommes face à l'armée de la Republika Srpska, c'est ça la

 23   question qu'on devrait se poser.

 24   Mme ALABURIC : [interprétation]

 25   Q.  Général, penchons-nous sur le document suivant qui se rapporte au 30

 26   juin 1993. Il s'agit du 2D 1389. 2D 1389.

 27   R.  Où est-ce que ça se trouve ?

 28   Q.  Dans la suite, dans le même chapitre un peu plus loin. Je me dois de


Page 42508

  1   sauter quelques documents parce que j'ai réorganisé mes sujets.

  2   R.  Dans la suite, Madame, c'est tous des "4D."

  3   Q.  Il doit y avoir le 2D 1389, mais c'est sur les écrans maintenant. On

  4   peut se pencher sur la page 2 de la version croate, et sur la page 2 de la

  5   version anglaise. La dernière partie de la page 2.

  6   Il s'agit de quoi. Dans la version anglaise, disais-je, c'est encore la

  7   deuxième page, dernière partie : "Information concernant l'évolution des

  8   activités de combat pour la date du 30 juin," rédigé par l'état-major du

  9   commandement Suprême des forces armées à Sarajevo. Dans la partie relative

 10   à la "Zone de responsabilité du 4e Corps." Il est dit ce qui suit. Et pour

 11   l'importance de ce texte, je vais vous en donner lecture intégralement. Je

 12   cite :

 13   "L'attaque d'hier de la part des unités oustachi a été repoussée par nos

 14   forces avec succès, et en contre-attaquant elles se sont emparées de places

 15   -- de fortes [phon] très importantes, à savoir le campement nord, Rastane,

 16   Vrapce, Bijelo Polje, Salakovci et Rosci. En sus, nous avons pris la

 17   totalité des centrales hydroélectriques sur la Neretva, exception faite de

 18   la centrale électrique de Capljina. Environ 100 soldats se sont rendus à

 19   nos forces, il a été libéré plusieurs centaines de civils emprisonnés. Au

 20   campement nord, l'ABiH s'est emparée d'un butin très riche du point de vue

 21   d'armes et de munitions.

 22   "D'après les rapports du commandement du 4e Corps, les unités dudit corps

 23   ont rejoint hier les effectifs du 6e Corps, ce qui ne manquera pas

 24   d'influer de façon positive sur l'évolution à venir des activités de

 25   combat. "

 26   Général Praljak, pouvez-vous nous confirmer l'exactitude de ce rapport,

 27   pour commencer ?

 28   R.  Je ne peux pas le faire.


Page 42509

  1   Q.  Dites-nous ce qui n'est pas exact ici ?

  2   R.  D'après tous les rapports de l'ABiH, et d'après les témoignages de ce

  3   journaliste qui a suivi l'action Neretva-93, tous ces rapports comportent

  4   une première phrase mensongère. Les Oustachi nous ont attaqués, et nous, on

  5   est engagés dans une contre-attaque. Donc il y a cette première phrase

  6   évoquant des Oustacha - et c'est ce que nous sommes à leurs yeux - ils ont

  7   dit : N'hésitent pas à nous désigner ainsi - donc c'était de manière

  8   sournoise et de manière surprenante, c'était une trahison, un acte de haute

  9   trahison mené non seulement par l'ABiH, mais également par les Musulmans au

 10   sein du HVO. C'était synchronisé.

 11   Q.  Général Praljak, essayons de préciser cette dernière phrase à

 12   l'attention des Juges de la Chambre. Le 6e Corps d'armée, quelle est la

 13   zone de responsabilité qui correspond à ce corps d'armée ?

 14   R.  Jablanica-Konjic, puis les parages, les environs, bien entendu.

 15   Q.  Et le 4e Corps d'armée, quelle est la zone qui lui correspond ?

 16   R.  C'est le secteur de Mostar. Ces deux corps, après cette action, ont

 17   opéré une jonction en passant par le pont Bijelok [phon]  en empruntant la

 18   fameuse route. Donc à partir de ce moment-là ils contrôlaient ce pont. Donc

 19   dire que Mostar était encerclée, ça n'a absolument aucun fondement dans les

 20   faits.

 21   Q.  Dites-nous, Général, pour autant que vous le sachiez, à partir de ce

 22   jour-là, l'ABiH dans le secteur de Mostar recevait-elle sans aucune

 23   encombre des renforts sur le plan des effectifs de l'armement depuis

 24   Jablanica, puis depuis l'intérieur de Bosnie-Herzégovine ?

 25   R.  Oui, depuis l'entrepôt de Visoko. Nous envoyions des fournitures là-bas

 26   et eux, ils y prenaient sans aucun problème des armements à l'attention du

 27   6e et du 4e Corps.

 28   Q.  Deux questions brèves au sujet de mon client, le général Petkovic.


Page 42510

  1   Vous nous avez dit, Général Praljak, qu'à l'époque où vous étiez le numéro

  2   un du Grand état-major qu'il y avait une distribution de tâches, un partage

  3   de tâches entre vous et le général Petkovic. Lui, il avait la charge de la

  4   Bosnie centrale, des contacts avec les représentants à la communauté

  5   internationale et avec les commandants du côté de l'armée musulmane et du

  6   côté de l'armée serbe. Ai-je raison de résumer ainsi ce que vous nous avez

  7   dit ?

  8   R.  Oui. Oui, c'est exact. Bien entendu, à l'époque où il était sur place,

  9   il avait des missions, mais son devoir spécifique était de continuer des

 10   pourparlers, des négociations. Parce que c'est ce qu'il avait fait de par

 11   le passé et il le faisait brillamment et en particulier il était chargé de

 12   s'occuper de la Bosnie centrale. Donc il devait focaliser son travail, ses

 13   efforts sur la Bosnie centrale. Et dans toute la mesure du possible, il

 14   fallait qu'il parvienne à maintenir Kiseljak, puis essayer d'opérer une

 15   jonction avec Busovaca.

 16   Q.  Vous nous avez dit pour ce qui est du secteur de Mostar que c'était un

 17   secteur qui relevait des activités de M. Tole qui était à la tête du Grand

 18   état-major, il était le chef du Grand état-major ?

 19   R.  Oui, c'est exact. Militairement, il n'y avait pas de logique que l'ABiH

 20   enregistre des succès à Mostar, mais au sud ils ne parvenaient pas à

 21   prendre Uskoplje et Rama, Gornji Vakuf et Prozor précisément, puis qu'elle

 22   poursuive vers le sud vers Vrda, puis qu'elle arrive derrière le dos de

 23   Mostar. Et c'est moi qui me suis chargé de cela, parce que militairement

 24   parlant c'était la tâche la plus difficile, et M. Tole est resté chargé

 25   tout particulièrement de s'occuper de Mostar et du sud. Et entre nous c'est

 26   ainsi que nous nous sommes répartis les tâches. Et là je parle de ce qui a

 27   été de manière prioritaire notre tâche. Bien entendu, je pouvais moi aussi,

 28   si j'étais sur place, à Vrda ou ailleurs, prendre des décisions qui


Page 42511

  1   s'imposaient.

  2   Q.  Monsieur Praljak, mon temps est quasiment expiré. Une question pour

  3   terminer, vous --

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : -- expiré d'au moins cinq minutes, donc tout le

  5   temps que l'on passe vous sera décompté.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Question pour terminer, dernière question, Général

  8   Praljak : vous nous avez dit que le 30 juin 1993, une guerre totale a été

  9   déclarée entre le HVO et l'ABiH, et je voudrais que l'on précise une chose.

 10   Peut-on dire que cette guerre totale a éclaté parce qu'il y a eu cette

 11  jonction entre les 6e et 4e Corps, parce qu'il y a eu la possibilité que des

 12   forces très importantes de l'ABiH de Bosnie centrale soient versées dans

 13   des actions d'offensive vers Mostar et vers la côte adriatique ?

 14   R.  D'un point de vue militaire, cela est exact. A partir de ce moment-là,

 15   on a pu faire venir des unités du 1er Corps, les ajouter au renfort. Mais

 16   Maître Alaburic, le problème principal s'est posé sur le plan psychologique

 17   pour ce qui est du HVO. Parce que jusqu'à ce moment-là il y avait un

 18   espoir, l'espoir malgré les réalités, un espoir que ce genre de conflit

 19   ouvert, total, ne se produirait pas, qu'il n'y aurait pas réalisation d'un

 20   de ces souhaits.

 21   Même s'il y avait des avis contraires, il y avait encore une lueur

 22   d'espoir et après cela, après cette trahison menée par leurs hommes au sein

 23   du HVO, bien, la chose la plus importante qui a disparu c'était la

 24   composante morale dans la tête des gens. Les gens se sont sentis trompés,

 25   trahis, non seulement par l'ABiH mais en partie par les hommes qui les

 26   dirigeaient eux. Parce que sans arrêt malgré leurs reproches et leurs

 27   arguments raisonnés, disons, que l'ABiH était en train de préparer quelque

 28   chose, ce que nous savions, nous voyions aussi, bien, nous continuions de


Page 42512

  1   souligner qu'il fallait agir d'une manière amicale, qu'il fallait leur

  2   fournir des armes, qu'il ne fallait pas qu'il y ait un conflit, qu'il

  3   n'allait pas y avoir un conflit. Donc c'était encore pire, cette

  4   conséquence psychologique était encore pire que l'effet militaire qui a

  5   effectivement permis à l'ABiH pendant trois ou quatre mois, à commencer de

  6   Bugojno de lancer une offensive qui lui a permis d'atteindre la côte et

  7   cela a permis de résoudre le problème entre les Serbes et les Musulmans en

  8   Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Je vous remercie de m'avoir répondue, Général Praljak.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Si vous m'y autorisez, Monsieur le

 11   Président, page 14, ligne 23, c'est la ligne qui disparaît en ce moment. Je

 12   parlais d'offensive par l'ABiH en direction de Mostar et au-delà vers le

 13   sud, puis c'est de défensive que parle le compte rendu d'audience. Il se

 14   peut qu'il s'agisse d'un lapsus de ma part. Dans ce cas-là, je vous

 15   présente mes excuses.

 16   Je vous remercie de m'avoir alloué le temps.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi. Comme les Juges sont

 18   confrontés à deux thèses, celle de l'Accusation et celle de la Défense,

 19   chaque fois que j'ai un document d'origine militaire, j'essaye de

 20   confronter ce document soit à votre thèse, soit à la thèse de l'Accusation

 21   pour essayer de comprendre et d'atteindre la vérité.

 22   Dans le document qu'on a sous les yeux, qui émane de l'ABiH, ils disent que

 23   l'agresseur, c'est-à-dire vous, les Chetniks et les Oustacha, c'est ce

 24   qu'ils disent, vous avez utilisé sept tanks et un nombre d'engins blindés

 25   pour attaquer la ville de Zepce. Alors si ce que dit ce document est vrai,

 26   là vous n'êtes pas dans des opérations défensives, puisque vous nous avez

 27   toujours dit : Le HVO, nous, nous nous défendions, nous n'attaquions pas.

 28   Or là, ce que dit le document, c'est vous qui attaquez et vous attaquez de


Page 42513

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42514

  1   manière conséquente avec sept tanks et des engins blindés. De ce fait, vous

  2   n'êtes pas en défensive, d'autant moins que d'après le document vous avez

  3   demandé à Zepce de se rendre.

  4   Alors dans votre souvenir, y a-t-il eu une attaque à Zepce avec sept tanks,

  5   puis des effectifs suffisants, ou bien ce document fait état d'une

  6   situation fausse pour justifier leur propre comportement ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est dit dans ce texte des choses qui sont

  8   tout à fait erronées, des faits tout à fait erronés puisque Zepce est

  9   entièrement encerclée par l'ABiH. La 111e Brigade de Zepce n'a pas sept

 10   chars. Tout simplement, ce sont des mensonges éhontés. Ce n'est pas rare

 11   dans une situation de guerre, mais Zepce est encerclée sans aucun point de

 12   contact avec quelque unité autre que ce soit, si ce n'est cette brigade

 13   qui, pendant tout le temps, s'est trouvée dans un encerclement de l'ABiH,

 14   loin de tout autre appui qui aurait pu lui venir du HVO. Zepce, c'est sans

 15   arrêt qu'ils l'ont attaquée, et sans arrêt. Ils disent : Après l'attaque du

 16   HVO, nous allons lancer une contre-attaque, et cetera. Zepce est dans

 17   l'encerclement. Il y a eu des pertes très importantes. Tout simplement,

 18   rien - je ne parle même pas de pratique - théoriquement, rien n'était

 19   possible, aucune percée n'était possible. C'est trop loin de toute

 20   possibilité de jonction.

 21   Je peux vous le montrer sur une carte, mais je pense que vous avez

 22   déjà tout ça en tête.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Est-ce que vous m'autorisez que ce soit

 25   décompté de mon temps. Juste une question. Je pense que ça nous permettra

 26   de préciser cette réponse.

 27   Q.  Ma question est la suivante : Général Praljak, le secteur de Zepce,

 28   était-ce une enclave croate en Bosnie centrale ?


Page 42515

  1   R.  Oui, ces gens se sont défendus pour ne pas se laisser effacer comme

  2   Kakanj, comme Vares. Sur un tout petit territoire contigu, ils ont réussi à

  3   se défendre. Enfin, je ne vois pas d'où on parle de ces sept chars, ce sont

  4   des contes de fée. Ce n'est pas possible. Je ne vois pas d'où cela vient.

  5   Ils étaient très peu nombreux et nous avons réussi à leur envoyer un petit

  6   peu d'armement d'infanterie et des RPG pour qu'ils puissent se défendre.

  7   Encore une fois, en passant par le territoire serbe - et il fallait qu'on

  8   rémunère les Serbes pour cela - bien entendu, il était dans l'intérêt de

  9   l'ARSK que le HVO et l'ABiH soient en conflit. C'est la raison pour

 10   laquelle ils nous ont autorisé cela, puis on les rémunérait également en

 11   carburant.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donc donner la parole à l'avocate de M.

 13   Coric. Mais avant de donner la parole à l'avocate de M. Coric, j'indique

 14   que le greffe nous a informés du fait que M. Prlic est arrivé. Donc il nous

 15   rejoindra après la pause.

 16   J'informe également Me Karnavas, qui va intervenir tout à l'heure,

 17   pour lui éviter toute erreur, parce que j'ai cru comprendre qu'il parlait

 18   de procédure disciplinaire, je rappelle à Me Karnavas, puisque c'est vous

 19   qui avez voulu publiquement aborder le sujet, que dans la décision que la

 20   Chambre avait rendue, il était dit dans un attendu que je vous indique tout

 21   de suite pour vous éviter toute erreur :

 22   "Attendu que la Chambre s'interroge sur la comptabilité d'un tel

 23   comportement de la Défense Prlic, avec le Règlement de procédure et de

 24   preuve et le code de déontologie, attendu que la Chambre estime nécessaire

 25   d'avoir l'avis d'un Amicus Curiae…"

 26   Voilà. Donc la Chambre est dans un état de réflexion. Et pour que sa

 27   réflexion prospère, on a demandé l'opinion d'un ami de la Cour. Il n'y a

 28   aucune procédure disciplinaire en cours.


Page 42516

  1   Nous allons donc passer maintenant à la Défense de M. Coric.

  2   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

  3   Bonjour, Monsieur Praljak. Bonjour à tous et à toutes.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  5   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] En attendant que le Greffier et M.

  6   l'Huissier puissent distribuer les classeurs, deux points techniques si

  7   vous m'y autorisez.

  8   J'ai à ma disposition quatre heures et 45 minutes. Toutefois, pour qu'il

  9   n'y ait pas de problème de temps et sur demande de la part de mon client,

 10   M. Coric, je souhaitais m'adresser aux Juges de la Chambre pour avoir la

 11   même possibilité que celle qui a été donnée à la Défense du général

 12   Petkovic, à savoir si je n'ai pas réussi à terminer en temps voulu, est-ce

 13   que je peux utiliser en plus le temps qui est à la disposition de la

 14   Défense de M. Coric. Je pense que j'aurais besoin de quatre heures 45

 15   minutes et que ça me suffira, mais je voudrais m'assurer que je n'aurai pas

 16   un problème de temps.

 17   Puis nous avons trois classeurs qui ont été distribués à toutes les parties

 18   présentes ou le seront. Et nous commençons par une petite liasse. Je vous

 19   montre comment cela se présente. J'attends que cela ait été distribué à

 20   toutes les personnes présentes.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Le greffier nous distribue les classeurs. Y a-t-il

 22   trois classeurs; le premier, c'est un petit, puis deux rouges; c'est bien

 23   cela ?

 24   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le

 25   Président. Nous allons commencer par le petit, parce qu'après je vais

 26   aborder un sujet un peu plus étendu et nous aurons juste le temps qu'il

 27   nous faut pour terminer avec la petite liasse de documents avant la pause.  

 28   Contre-interrogatoire par Mme Tomasegovic Tomic :


Page 42517

  1   Q.  [interprétation] Monsieur Praljak, ma première question ne concerne pas

  2   les classeurs ni les documents. Ma première question concerne quelque chose

  3   que vous avez dit en répondant aux questions de Me Alaburic pendant ses

  4   questions. Par rapport à tout ce que vous avez dit pendant l'interrogatoire

  5   principal, il m'a semblé que c'était un malentendu. Donc je vous cite votre

  6   propos et vous me direz si c'est effectivement ce que vous aviez

  7   l'intention de dire ou bien s'il y a un malentendu.

  8   Me Alaburic - pages 42 427 et 42 428 également du compte rendu d'audience -

  9   vous a demandé si le SIS, la police militaire et l'IPD ont été créés en

 10   tant que systèmes parallèles afin d'exercer un contrôle politique, et je

 11   souligne, politique sur l'armée. Vous avez répondu par l'affirmative. Donc

 12   je vous repose cette question : Est-ce qu'il y a eu un malentendu ou, est-

 13   ce qu'au contraire, vous affirmez que la police militaire a été établie

 14   pour exercer un contrôle politique sur l'armée ?

 15   R.  La police militaire n'a pas exercé un contrôle politique sur l'armée.

 16   Le contrôle politique n'a pas non plus été exercé par le SIS, pas plus que

 17   par l'IPD. Pour ce qui est des systèmes parallèles, je pense avoir expliqué

 18   de manière tout à fait précise ce que cela entendait. Je ne pense pas que

 19   cela puisse porter à confusion. Il n'y avait pas de contrôle politique

 20   exercé par le chef de la direction, donc la police militaire n'exerçait pas

 21   ni sa direction le contrôle politique sur l'armée.

 22   Q.  Très bien, Général Praljak. Le document suivant vous a été présenté par

 23   le Président Antonetti. Je pense qu'il a été prévu également pour

 24   l'interrogatoire principal. P 01350, c'est le premier document dans votre

 25   jeu.

 26   Je souhaite vous donner lecture du quatrième paragraphe, à partir du

 27   début. Cela commence par : "Sur cette proposition du chef…" et je vous

 28   donne lecture d'une phrase :


Page 42518

  1   "A Gornji Vakuf, la police militaire avait pour tâche de protéger la

  2   police militaire de ce secteur et la population et de faire en sorte que la

  3   circulation puisse se faire. Cette mission a rapidement été étendue en

  4   l'absence du chef, mais tous reconnaissent que c'est la police militaire

  5   qui a assumé la partie la plus importante de la tâche et des sacrifices."

  6   Je pense que vous étiez présent, ne serait-ce que pendant une partie

  7   de cette réunion où cela a été dit. J'aimerais savoir si ce que je viens de

  8   lire reflète la réalité de la chose. Est-ce que vous en avez connaissance ?

  9   R.  J'ai été présent pendant une partie de cette réunion et j'ai répondu

 10   portant sur nombre de questions. Il est exact de dire que la police

 11   militaire a pris part aux combats d'Uskoplje pour autant que je le sache,

 12   mais je n'étais pas commandant de cette action. Par conséquent je ne peux

 13   pas connaître les détails. Je n'étais pas là au début. J'étais là pour

 14   mener cette action à son terme. Et comme je l'ai déjà dit, je ne sais pas

 15   si ça aurait été possible ou non, mais je n'avais aucun moyen de contester

 16   les arguments du commandant de cette action quant au fait que cette action

 17   était indispensable à partir du moment où l'ABiH avait entièrement bloqué

 18   le HVO à Uskoplje.

 19   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que vous vous souvenez avoir entendu

 20   ce que je viens de vous dire lors de cette réunion ? Si vous ne vous en

 21   souvenez pas, dites-le.

 22   R.  Non, bien entendu, je sais que je ne suis pas forcé de me rappeler.

 23   Croyez-moi bien, je ne m'en souviens pas. Il est possible que je sois parti

 24   tout de suite après mon laïus.

 25   Q.  Très bien. 5D 0054 à présent --

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand j'ai un document militaire je le regarde et je

 27   l'analyse par rapport à l'ensemble du dossier. Parfois le document donne

 28   des indications intéressantes.


Page 42519

  1   A la page 4 dans la version anglaise, il y a un Petrovic qui

  2   intervient, puisqu'il y en a plusieurs qui interviennent, et lui met en

  3   exergue l'importance de l'équipe de l'officier de permanence et il dit que

  4   celui-ci doit connaître la situation complète sur le champ d'opérations en

  5   tout temps. Alors pouvez-vous me confirmer que quand il y avait une

  6   opération militaire, obligatoirement il y a un officier de permanence ou un

  7   officier qui suit l'opération militaire qui doit être informé en temps réel

  8   de tout ce qui se passe sur le terrain ?

  9   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Sur le plan terminologique, si je

 10   puis vous aider, je suppose que l'interprète n'avait pas la version croate

 11   sous les yeux. Il s'agit de l'officier de permanence.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : L'officier de permanence. Alors, Général Praljak, y

 13   avait-il toujours un officier de permanence qui rendait compte en temps

 14   réel de la situation. On l'informait, puis lui, il faisait remonter

 15   l'opération ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'on parle d'actions militaires plus

 17   importantes, oui, il y avait un officier de permanence au QG. Hélas, les

 18   éléments d'information qu'il recevait en temps réel étaient très limités.

 19   Souvent, c'était très modeste, de mauvaise qualité ou rien du tout. Et la

 20   raison en est qu'il y avait de très mauvaises transmissions : un niveau de

 21   communication catastrophique sur le terrain entre les différentes unités,

 22   les commandants de l'opération et les axes selon lesquels se déployait

 23   l'opération. En fait, si vous voulez que je vous l'explique, je peux vous

 24   dire comment on agissait et pourquoi ça ne fonctionnait pas.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien non, ce n'est pas ça qui m'intéresse. Je vais

 26   me translater [phon] au 9 mai. Imaginons la thèse du Procureur : c'est

 27   vous, le HVO, qui attaque. S'il y a une attaque du HVO qui est la prise du

 28   quartier général de l'ABiH, ce qui n'est pas rien, est-ce qu'il devait y


Page 42520

  1   avoir dans cette hypothèse au quartier général un officier de permanence

  2   qui aurait consigné sur son registre : 5 heures du matin, tirs

  3   d'artillerie; 5 heures 10, actions, et cetera ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Lorsqu'il s'agit d'une opération

  5   de cette importance, oui. Là, il était nécessaire que lui parviennent à la

  6   fois le plan dans sa totalité, le début de l'action, le signal déclenchant

  7   l'attaque, l'activité de l'artillerie et à quel moment telle ou telle chose

  8   a été conquise, et cetera. Vous avez vu, Monsieur le Président, Messieurs

  9   les Juges, en juin 1992, vous avez vu les deux documents que j'ai donnés.

 10   Quand ces informations arrivent, c'est toutes les deux ou trois minutes.

 11   Ici telle ou telle chose s'est produite, Praljak a dit, a commandé, et

 12   cetera. Donc c'est très dense le journal à ce moment-là. C'est toutes les

 13   minutes quand les grandes actions sont en cours.

 14   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le

 15   Président.

 16   Q.  Monsieur Praljak, si vous voulez bien, 5D 00548 à présent. Nous avons

 17   là un document qui a déjà été versé au dossier. Nous l'avons vu à plusieurs

 18   reprises dans ce prétoire. Il est signé par M. Coric. Il s'intitule

 19   "Demande aux fins de réexamen de l'engagement des unités de la police

 20   militaire aux premières lignes de front."

 21   Il n'y a pas lieu de donner lecture de la totalité du document. Je me

 22   propose de donner lecture du premier paragraphe et des trois derniers. Le

 23   document se lit comme suit :

 24   "A plusieurs reprises, nous avons mis en garde, et c'est ce que nous

 25   faisons par la présente également, à savoir la direction de la police

 26   militaire à cause de l'engagement intense et sans interruption des unités

 27   de la police militaire au front, et dans un même temps, vu l'impossibilité

 28   de procéder au recomplètement [phon] des unités en envoyant de nouveaux


Page 42521

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42522

  1   combattants, la police militaire n'est plus en mesure de s'acquitter des

  2   missions qui relèvent de sa compétence et qui correspondent à ces

  3   attributions."

  4   Voyons maintenant les trois derniers paragraphes :

  5   "La terreur et les activités criminelles de toutes sortes connaissaient une

  6   recrudescence inquiétante et représentent une menace de voir l'anarchie et

  7   l'absence de toute autorité s'installer sur le territoire de la HR HB.

  8   "Je déclare en toute responsabilité que nous ne sommes plus en

  9   mesure, avec les forces de la police militaire qui restent à notre

 10   disposition après le déploiement d'unités de la police militaire sur les

 11   premières du front, de nous acquitter des tâches les plus ordinaires

 12   incombant à la police militaire sans même parler d'interventions plus

 13   complexes ou d'autres tâches parmi les plus importantes qui sont également

 14   de la responsabilité de la police militaire.

 15   En raison de ce que je viens d'exposer, nous demandons un réexamen de

 16   l'engagement de la police militaire sur les premières lignes du front

 17   auquel il a été procédé. Et de l'ampleur de cet engagement, nous proposons

 18   que l'on procède au retrait des unités de la police militaire des lignes du

 19   front aux fins de l'accomplissement des tâches incombant à la police

 20   militaire et nous proposons également que les unités de la police militaire

 21   ne soient dépêchées au front que dans des situations exceptionnelles pour y

 22   intervenir."

 23   Alors, Monsieur Praljak, je me souviens que dans votre interrogatoire

 24   principal déjà, vous avez donné confirmation que vous aviez connaissance du

 25   problème que nous voyons là. Ai-je raison de dire cela ?

 26   R.  Oui, vous avez tout à fait raison, Maître. J'étais au courant de ce

 27   problème et j'aurais pu signer exactement la même chose à la place de M.

 28   Coric. Ce document nous dit, en fait, la même chose que ce que j'ai essayé


Page 42523

  1   de souligner ici à plusieurs reprises, à savoir qu'après l'attaque du 9

  2   mai, notamment après la date du 30 juin, si l'on se place d'un point de vue

  3   militaire mais également dans une très large mesure du point de vue du

  4   moral des hommes, le système du HVO s'était effondré. Je pense ici aux

  5   personnes en général, à la population dans son ensemble, si bien que M.

  6   Coric a tout à fait raison de dire que le fait de faire intervenir les

  7   unités de la police militaire ainsi a réduit de façon très significative sa

  8   capacité à s'acquitter des tâches qui lui incombent normalement. La seule

  9   chose, c'est que peut-être j'abordais les choses selon une logique

 10   différente --

 11   Q.  Nous y reviendrons. Vous vous souvenez qu'ici nous avons entendu la

 12   déposition de M. Biskic. Aux pages --

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, avant d'aborder la déposition de

 14   Biskic, je reviens au document que je découvre à l'instant pour tout vous

 15   dire, puisque c'est 5D 00548.

 16   Rappelez-vous, Général Praljak, il y a déjà plusieurs mois, voire

 17   même plusieurs années, je m'étais interrogé sur le nombre très élevé de

 18   victimes parmi la police militaire. On a vu déjà des documents où ils ont

 19   eu beaucoup de blessés et beaucoup de tués et je m'en étais étonné à

 20   l'époque. Rappelez-vous. Là, ce document, qui émane de M. Coric lui-même,

 21   évoque ce problème en disant qu'en mettant sur la ligne de front la police

 22   militaire, évidemment on s'expose à ce que la police militaire ait des

 23   victimes et c'est pour ça qu'il les cite, mais il dit également quelque

 24   chose de très important concernant sa responsabilité au titre de l'article

 25   7(3) du Statut. Il dit, le fait même de mettre ces policiers militaires au

 26   combat, ça fait que la terreur et les crimes augmentent et c'est

 27   l'anarchie. Donc il est en train d'activer les alarmes.

 28   Alors vous n'avez peut-être pas lu toute la jurisprudence du tribunal


Page 42524

  1   de Nuremberg. Il y a une jurisprudence mais qui ne concerne que la

  2   responsabilité des généraux en territoires occupés. Malheureusement, la

  3   jurisprudence n'a pas été jusqu'à parler que ça pourrait s'appliquer

  4   également en zone de combat. Mais dans cette jurisprudence tirée de

  5   Nuremberg, le général qui commande en territoires occupés, il est

  6   responsable de tout, t-o-u-t, de tout. Donc y compris de l'ordre public, y

  7   compris des crimes qui peuvent se dérouler. Et là, M. Coric porte ceci à

  8   votre connaissance, car vous êtes destinataire de la lettre au même titre

  9   que M. Stojic et M. Tole.

 10   Alors face à ce type de rapport militaire, qu'est-ce que vous avez

 11   fait pour donner satisfaction à M. Coric et replacer la police militaire

 12   dans sa fonction traditionnelle ? Ou bien vous ne pouviez pas faire ce

 13   qu'il demandait, car vous n'aviez pas de combattants aguerris et que vous

 14   n'aviez que sous la main les policiers militaires qui, eux, savaient

 15   utiliser les armes, obéissaient aux ordres et au moins permettaient des

 16   actions de défense.

 17   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le

 18   Président, mais pour ne pas entraîner une confusion chez le témoin.

 19   Le mauvais numéro de document s'est affiché. Vous avez demandé le

 20   document 5D 00548, alors que dans le compte rendu ce qui s'affiche c'est

 21   "148" Donc le général ne sait absolument pas quel document il doit

 22   regarder. C'est le 4D 00548.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Le bon document c'est celui que vous avez évoqué

 24   tout à l'heure, le 5D 00548. Bien.

 25   Général Praljak, est-ce que vous pouvez répondre ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux répondre. Non seulement j'ai pu

 27   lire il y a une trentaine d'années de nombreux ouvrages et des textes tout

 28   à fait significatifs portant sur le procès de Nuremberg, mais de façon


Page 42525

  1   générale, j'ai eu l'occasion, pour différentes raisons, de me pencher sur

  2   les situations chaotiques que peut connaître la société, et ce, à de

  3   nombreuses reprises et pendant de longues périodes de temps. Pour ce qui

  4   concerne la responsabilité des généraux sur des territoires occupés, je

  5   n'avais pas de territoire occupé, mais une ligne de front.

  6   Deuxièmement, même dans le cas des territoires occupés, des

  7   différences très importantes existent entre une occupation à laquelle il

  8   est procédé aux moyens d'une armée organisée et aux moyens de forces

  9   suffisantes pour tenir ces territoires occupés; et d'autre part, le chaos

 10   qui s'installe lorsqu'on perd une grande bataille ou l'on perd la guerre.

 11   C'était le cas à Moscou, au moment de l'attaque de Napoléon ou lors de la

 12   Seconde Guerre mondiale lorsque tous fuyaient, lorsqu'il y avait des

 13   pillages, et ainsi de suite. C'était la même situation après l'ouragan

 14   Katrina, et ainsi de suite.

 15   J'étais au courant, Messieurs les Juges, de l'existence de ce problème et

 16   il y avait deux possibilités. La première aurait consisté à rendre les

 17   unités de la police militaire à M. Coric et à permettre à l'ABiH d'opérer

 18   une percée jusqu'à la mer. Il n'y avait que deux possibilités.

 19   C'étaient des combattants exceptionnels. Vous voyez les chiffres, 39

 20   morts, 141 blessés. Ils tenaient les lignes, ils assuraient la défense

 21   contre les offensives, et ce, dans les moments les plus durs que nous ayons

 22   connus.

 23   C'est alors que je prends cette décision que j'assume aujourd'hui

 24   encore et qui est la suivante : c'est-à-dire que j'ai demandé à pouvoir

 25   bénéficier de ces renforts et on me les a accordés par signature de Mate

 26   Boban. On m'a accordé le droit de recourir à des unités de la police

 27   militaire pour des missions opérationnelles, car la situation militaire

 28   l'exigeait. Dès que la situation a été réglée, les hommes de la police


Page 42526

  1   militaire sont repartis.

  2   J'affirme, Messieurs les Juges, que tout ce qui figure dans l'acte

  3   d'accusation n'y figure pas en raison des justifications qui sont avancées

  4   dans l'acte d'accusation, mais parce que l'offensive menée par l'ABiH était

  5   absolument terrible, également en raison de la très longue durée des

  6   processus de négociations et de la trahison des Musulmans sur ce

  7   territoire. En raison de ces éléments, il y a eu un phénomène de

  8   décompensation morale chez de nombreux hommes. D'une certaine façon, nous

  9   les trompions et nous nous efforcions de les convaincre. Ensuite, ceux qui

 10   avaient passé leur temps à dire que cela finirait par se passer disaient :

 11   Voyez, ils nous ont attaqués, ils mènent un double jeu. C'est comme en

 12   1944, maintenant ils vont réécrire l'histoire.

 13   Dans une telle situation avec de très nombreux acteurs indépendants et

 14   soumis à une telle pression militaire de la part de l'ABiH, il était

 15   nécessaire à faire intervenir aussi bien des éléments de la police

 16   militaire que de la police civile, aussi bien que chaque homme disponible.

 17   Et j'en reste à cette décision qui était la mienne, je l'assume, car

 18   c'est ainsi que l'on procède dans situation de guerre. Quant à ceux qui ont

 19   commis des crimes, quelque crime que ce soit, dans cette situation-là,

 20   après on dispose du temps nécessaire pour les poursuivre et rendre justice.

 21   Si je n'avais pas requis la participation de la police militaire à ces

 22   fins-là, cette dernière n'aurait plus eu aucune tâche à accomplir, car elle

 23   n'aurait plus eu de territoire vers lequel revenir.

 24   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est

 25   précisément ce que je souhaitais dire, ce que nous a dit également le

 26   témoin Biskic dans sa déposition. Afin que nous ne perdions pas maintenant

 27   trop de temps, je ne vais pas énumérer toutes les pages du compte rendu

 28   dont il s'agit, tout le monde peut en prendre connaissance. Il s'agit de la


Page 42527

  1   déposition du témoin Biskic qui nous a dit que la défense du territoire

  2   était une priorité et qu'il était tout à fait normal et indispensable que

  3   la police militaire intervienne de la façon qui vient d'être exposée par le

  4   général Praljak. Il a dit également que lui-même, après sa prise de

  5   fonction, a demandé auprès du chef d'état-major de l'époque, le général

  6   Roso, que ce dernier donne un ordre demandant le retrait de la ligne de

  7   front pour ses unités. Et le général Praljak a confirmé que cela a bien été

  8   fait, mais que cela a été fait à la mi-décembre 1993 lorsque les conditions

  9   pour cela ont été réunies.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est vous qui témoignez. C'est pour ça que M.

 11   Stringer se lève. Dites plutôt : M. Biskic a dit cela et, Général Praljak,

 12   est-ce que vous confirmez ou pas ?

 13   Monsieur Stringer, c'est ce que vous alliez dire.

 14   M. STRINGER : [interprétation] Plus ou moins. J'ai cru comprendre que le

 15   conseil répétait ce qui, selon elle, est le témoignage de M. Biskic. Je ne

 16   la remets pas en doute, mais j'aurais voulu au moins avoir la référence

 17   dans le compte rendu, la page pour que je puisse ensuite le lire à tête

 18   reposée.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître, vous pouvez indiquer pour tout le monde les

 20   pages.

 21   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Oui, je vais vous donner les

 22   numéros de page. Mais en fait, la question que je voulais poser était

 23   encore pendante. Je voulais demander au général Praljak s'il se souvenait

 24   des déclarations de M. Biskic et s'il était d'accord avec ses propos.

 25   Voilà. Je voudrais donc demander cela au général Praljak, ensuite je

 26   donnerai les numéros de page.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact et je m'en souviens.

 28   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Les numéros de page sont 15 181 du


Page 42528

  1   compte rendu d'audience, pages 15 186, 15 242, 15 261, 15 265, 15 267, 15

  2   274, 15 279, 15 282, et enfin 15 309.

  3   Q.  Général, je voudrais maintenant que nous examinions les deux derniers

  4   documents de ce classeur. Le premier porte le numéro

  5   P 03117.

  6   Il s'agit d'un ordre émis par le commandant de la zone opérationnelle

  7   de l'Herzégovine du sud-est, le général de brigade Miljenko Lasic. L'ordre

  8   en question porte la date du 2 juillet 1993. Il est adressé à deux brigades

  9   du HVO, à un bataillon de la police militaire, à la logistique de la zone

 10   opérationnelle, aux commandants de secteur et il y a encore un

 11   destinataire, mais je ne suis pas tout à fait sûre de ce que représente cet

 12   acronyme ONO. Alors vous pourrez peut-être nous le confirmer, mais à cet

 13   instant ça n'est pas particulièrement important.

 14   Il est dit également dans l'ordre et je vais lire simplement la

 15   dernière phrase qui précède le titre "Ordre," je cite :

 16   "Compte tenu de l'accomplissement des devoirs dans la zone de

 17   responsabilité médiane, la zone de défense de la ville de Mostar, je donne

 18   l'ordre que…"

 19   Ce qui m'intéresse, c'est le point 2, je cite :

 20   "La zone de responsabilité est partagée en trois secteurs."

 21   Ici on énumère les différents secteurs et nous avons cette deuxième zone de

 22   responsabilité. Au numéro 2, je cite, donc deuxième zone de responsabilité

 23   :

 24   "Je nomme en tant que commandant de secteur M. Milo Jelic, commandant de la

 25   police militaire."

 26   Au point 4, il est dit, je cite :

 27   "Des rapports quotidiens et écrits, précisant l'état de la situation à 18

 28   heures seront remis par les commandants de secteur sur une base


Page 42529

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42530

  1   journalière, et ce, au plus tard à 20 heures. Un rapport sur la situation

  2   sera fourni par téléphone à 7 heures 30 et à 17 heures et des rapports

  3   exceptionnels pourront être fournis selon les besoins."

  4   Général, j'ai juste une question concernant ce document : avez-vous

  5   connaissance du fait que c'est ainsi que M. Mijo Jelic a été nommé

  6   commandant de la deuxième zone de responsabilité à Mostar ?

  7   R.  Non, Maître, je n'étais pas là-bas le 2 juillet. Je sais que M. Mijo

  8   Jelic a été nommé commandant pour la ville de Mostar par une décision du

  9   chef d'état-major, M. Tole, mais ce document, je l'ai vu après coup.

 10   Q.  Alors nous passons à ce document ultérieur. C'est le document P 03983.

 11   Il remonte au 6 août 1993.

 12   Vous nous avez déjà dit qu'il s'agissait de la nomination de M. Jelic à la

 13   fonction de commandant de la défense de la ville de Mostar. Au point 2, il

 14   est dit que :

 15   "Toutes les unités dans la ville de Mostar sont placées sous le

 16   commandement de M. Mijo Jelic."

 17   Ensuite il est dit la façon dont des rapports devront être fournis pour

 18   l'exécution des ordres, la remise qui sert d'une proposition pour la

 19   formation d'un quartier général, donc vous avez déjà eu connaissance de ce

 20   document préalablement, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Merci, Monsieur Praljak.

 23   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je suis

 24   l'horloge et je pense que j'aurai besoin d'un peu de temps pour préparer le

 25   thème suivant qui est plus volumineux.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire 20 minutes de pause.

 27   --- L'audience est suspendue à 15 heures 37.

 28   [L'accusé Prlic est introduit dans le prétoire]


Page 42531

  1   --- L'audience est reprise à 16 heures 02.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. La Chambre salue M.

  3   Prlic et je crois que Me Karnavas a quelque chose à nous dire.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui. Bonjour à tous à nouveau.

  5   Vendredi dernier, nous avons reçu je crois que c'est appelé une ordonnance,

  6   envoyée à l'Association des Conseils de Défense, donc celle qui est en

  7   existence au TPIY, l'ADC, notre association professionnelle et il y avait

  8   aussi une demande de l'amicus curiae. Et il semblerait que la Chambre

  9   voudrait obtenir un conseil de la part de cet amicus curiae. Mais un

 10   conseil à propos des faits qui à mon avis sont exposés de façon erronée.

 11   En effet, tous les faits ne sont pas exposés correctement tels que nous

 12   avons présentés. Donc il y a des problèmes de faits à la base. Cela dit,

 13   d'après ce que nous avons réussi à obtenir et je parle aussi de moi et de

 14   Mme Tomanovic, nous sommes rendus compte que la Chambre de première

 15   instance semble penser que ces deux conseils n'utilisent pas -- n'ont pas

 16   un comportement professionnel, ni éthique et veulent tromper la Chambre de

 17   première instance. Or, nous considérons que ces allégations sont absolument

 18   fausses. Elle semble cela dit être implicite dans les questions posées par

 19   la Chambre. Nous avons toujours été professionnel et consciencieux. Nous

 20   avons toujours essayé à consulter notre client. Nous avons toujours essayé

 21   de faire du mieux de notre possible au vu des circonstances.

 22   Et comme je l'ai déjà dit, dans mes -- 7,06s -- supplémentaires, on nous a

 23   donné des documents sur la base que nous respections les demandes des

 24   sources. Donc je vais demander à l'ADC de demander à la Chambre de première

 25   instance de faire ses propres conclusions, de trouver ses propres

 26   conclusions en se basant sur tout le transcript, le transcript entier. Ou

 27   autre option, demander au président du Tribunal de choisir un panel de

 28   trois Juges impartiaux qui pourront déterminer les faits afin de savoir si


Page 42532

  1   oui ou non cette équipe de Défense a agi de façon inappropriée mais je vais

  2   surtout demander à l'ADC de prendre langue avec les experts les meilleurs

  3   experts dans le domaine de la déontologie et de la conduite

  4   professionnelle. Venant bien sûr du système contradictoire puisque nous

  5   travaillons dans le cadre d'un système contradictoire et ces experts bien

  6   sûr devraient au moins nous apprendre -- de savoir quelles sont les

  7   responsabilités des conseils de la Défense dans le cadre des enquêtes

  8   qu'ils doivent diligentées pour leurs clients bien sûr. Bien sûr dans ce

  9   cadre d'un procès contradictoire.

 10   En nous basant sur ce que nous avons lu, j'étais assez inquiet et Mme

 11   Tomanovic aussi d'ailleurs. C'est pour ça que j'ai été voir le Dr Prlic

 12   vendredi entre 18 et 20 heures et ce qui nous inquiétait c'est qu'après

 13   avoir lu ce document, ce document bon qui a été traduit de façon officieuse

 14   mais nous avons de bons traducteurs, de bons interprètes, il semblerait que

 15   si tant est que nous ayons jamais eu la moindre crédibilité, maintenant

 16   nous n'avons plus en tout cas. C'est ce qu'on semble dire au travers de

 17   cette lettre. Et donc j'en ai informé le Dr Prlic. Je lui ai dit que dans

 18   son intérêt, si je devais venir au procès et demander à ce qu'on ajourne le

 19   procès jusqu'à ce qu'au moins jusqu'à ce que lumière soit faite et qu'il

 20   n'y ait pu cette menace qui pèse au-dessus de nos têtes, Mme Tomanovic et

 21   moi-même nous sommes persuadés, nous le savons bien, nous n'avons jamais

 22   agi de façon non éthique. Mais nous sommes très inquiets parce que nous

 23   avons peur qu'au vu des conclusions que la Chambre a tiré à propos de ce

 24   qu'elle a trouvé, elle nous considère que nous soyons des avocats non

 25   professionnels et qui trompent leurs clients. Donc nous ne pouvons pas

 26   plaider notre cause dans l'intérêt de notre client. 

 27   En fait j'ai suggéré que l'on ajourne, que l'on suspende la procédure ou

 28   alors demander au greffier de nommer un conseil indépendant qui pourrait le


Page 42533

  1   représenter pendant l'intérim et nous pourrions, de ce fait, nous retirer

  2   jusqu'à ce que les choses s'éclaircissent une bonne fois pour toutes.

  3   Mais le Dr Prlic considère que le procès doit se poursuivre. Il

  4   considère aussi - et je ne suis pas tout à fait d'accord avec lui - mais il

  5   considère, en tout cas, qu'il est parfaitement capable d'assurer

  6   l'interrogatoire au cours de la procédure, comme le général Praljak l'a

  7   fait d'ailleurs. Si j'ai bien compris, il va bientôt prendre la parole,

  8   mais sachez que nous bénéficions de tout son soutien, de toute sa

  9   confiance. Il voudrait que nous poursuivions à le représenter en tant que

 10   ses avocats et que nous continuions à l'assister, à l'aider, mais cela dit,

 11   jusqu'à ce que cette affaire soit résolue. Mais cette épée de Damoclès qui

 12   pèse sur notre tête, jusqu'à ce qu'elle soit enlevée, M. Prlic suggérait

 13   qu'il voudrait être son propre conseil, en fait, qu'il soit autorisé à

 14   poser des questions et nous pourrions poursuivre les travaux en coulisse,

 15   en écrivant les requêtes, et cetera, à faire tout ce que nous ferions

 16   d'habitude, sans être en prétoire, donc sans soulever d'objection ou sans

 17   présenter d'argument.

 18   Alors au vu du calendrier de la Chambre et au vu des vacances judiciaires

 19   qui approchent, étant donné que nous avons déjà procédé au contre-

 20   interrogatoire du général Praljak, il semblerait qu'au cours de cette

 21   période intérimaire, il y aurait peu d'intervention de notre part pour

 22   représenter le Dr Prlic.

 23   Toujours est-il que c'était ça qui me préoccupait le plus. Un moment,

 24   j'ai tout simplement dit que j'allais me retirer, parce que c'est dans son

 25   intérêt, non le mien, mais je lui ai présenté les choses de façon très

 26   franche. Je lui ai dit : J'ai l'impression que la Chambre de première

 27   instance considère que vos avocats sont véreux. Véreux, voilà ce que je lui

 28   ai dit. La Chambre de première instance semble penser que nous ne sommes


Page 42534

  1   pas honnêtes. C'est la première fois, je dois dire, qu'une Chambre de

  2   première instance me demande de répondre à ce type d'allégations qui sont

  3   ici, dans ce document que je montre. Je trouve que tout ceci est

  4   extrêmement regrettable. Ces allégations sont très sérieuses.

  5   Mais notre position est la suivante : nous préférerions nous retirer

  6   jusqu'à ce que toute lumière soit faite. Le Dr Prlic a un autre avis, bien

  7   sûr, c'est son procès, mais je lui ai conseillé de ne pas assurer sa propre

  8   Défense même pendant une période intérimaire. Cela dit, je suis entre vos

  9   mains, d'ailleurs lui aussi est entre vos mains et je pense qu'il est prêt

 10   à prendre la parole. Je vous remercie.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais donner la parole à M. Prlic, mais il

 12   me semble qu'il y a une petite erreur que vous faites, Maître Karnavas.

 13   Il n'y a pas l'ADC et un Amicus Curiae. La Chambre, dans sa décision,

 14   a demandé à l'ADC de remplir le rôle d'ami de la Cour. Donc c'est une

 15   entité unique. Il n'y en a pas deux, il n'y en a qu'une; première chose.

 16   Deuxièmement, la Chambre, constatant un problème potentiel d'ordre

 17   technique, sollicite l'avis éclairé de l'ADC. Et dans la décision, nous

 18   avons fixé un délai d'un mois à l'ADC pour qu'elle nous rende son avis

 19   technique à partir de trois questions. Il est quasiment certain, je ne

 20   connais pas les façons de travailler de l'ADC, mais si je me réfère aux

 21   pratiques dans d'autres Etats, l'ADC va examiner le problème, va peut-être

 22   nommer un rapporteur et va demander vos explications, puis après elle nous

 23   rendra un avis éclairé à partir des trois questions. Voilà.

 24   Donc on est au stade où la Chambre s'interroge, demande un avis, fait

 25   confiance à l'ADC, car on aurait très bien pu demander à quelqu'un d'autre,

 26   mais on a préféré que ça soit les meilleurs spécialistes qui nous

 27   répondent, et ils vont nous donner leur avis en disant : Voilà, il n'y a

 28   pas de problème, il y a un problème, je n'en sais rien.


Page 42535

  1   Pour le moment, nous n'en savons strictement rien. On attend l'avis

  2   éclairé de cette instance que nous consultons.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je comprends

  4   bien. Mais la façon dont on voit les faits tels qu'ils sont présentés dans

  5   la lettre, les faits sur lesquels se basent les questions, sont, d'après

  6   nous, incomplets. De ce fait, nous interprétons tout ça de façon différente

  7   de vous.

  8   Si je peux vous aider, cela dit, vous demandez une opinion éclairée à

  9   propos d'un comportement déontologique. Au sein de l'ADC, dans tous ses

 10   comités, nous avons un conseil disciplinaire et, par le passé, ils ont déjà

 11   donné leurs opinions et informé des conseils à propos de ce type de

 12   problèmes, surtout quand il y avait des conflits d'intérêt. Donc vous

 13   pouvez peut-être rediriger votre document vers ce comité disciplinaire.

 14   Cela dit, aujourd'hui l'ADC n'a pas encore reçu votre requête. Peut-

 15   être que quelqu'un du côté du greffe pourrait se pencher là-dessus pour que

 16   l'ADC puisse avoir le document et puisse traiter de cela rapidement. Enfin

 17   nous, c'est notre interprétation de la lettre, en tout cas, et je dois dire

 18   que dans ce qui a été écrit dans cette lettre, il y a énormément de choses

 19   qui me choquent énormément. C'est pour ça qu'il y a eu des problèmes à

 20   propos des faits, uniquement des faits. Ce qui nous inquiète, c'est que

 21   nous ne pensons plus pouvoir faire notre travail et représenter le Dr

 22   Prlic. Nous sommes là pour lui, nous ne sommes pas là pour nous. On a

 23   l'impression qu'on est maintenant un obstacle plutôt qu'autre chose. De ce

 24   fait, nous pensons qu'il est temps de nous écarter. Enfin moi, c'est la

 25   façon dont j'interprète ma responsabilité. Ce n'est pas l'argent qui

 26   m'intéresse ni ma réputation ni mon ego; c'est mon client qui m'intéresse.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 28   Monsieur Prlic, tout d'abord, je vais vous donner la parole. Sachez


Page 42536

  1   qu'à titre personnel, je me réjouis de vous revoir présent et j'espère que

  2   vous allez rester présent. Vous connaissez donc les éléments du débat.

  3   La Chambre a rendu une décision qui a du être traduite en anglais,

  4   pour le moins, et j'espère dans votre langue, comme quoi la Chambre a

  5   demandé un avis à l'Association des conseils de la Défense en posant trois

  6   questions de nature technique et nous attendons, dans un délai d'un mois,

  7   la réponse de l'ADC pour savoir ce que la Chambre fera.

  8   Sur ce, Me Karnavas nous a annoncé ce matin que vous seriez là cet après-

  9   midi. Me Karnavas nous a dit son point de vue et nous a dit que vous

 10   vouliez intervenir. Alors je vous laisse la parole.

 11   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Merci. On ne s'était pas vu depuis un

 12   moment.

 13   J'ai préparé ce que je souhaite dire. Donc si vous voulez peut-être donner

 14   ce document aux interprètes, ça rendra leur tâche plus facile.

 15   Je suis ici pour des raisons de situation nouvellement créée, ceci, du fait

 16   de mon conseil de la Défense et de ma Défense d'une manière générale. Nous

 17   sommes en train d'essayer de trouver une variante pour que le procès ne

 18   souffre pas. Je ne veux pas que dans ma Défense il y ait quelque tache ou

 19   souillure que ce soit, si ce n'est des choses ou des éléments qui se basent

 20   sur des critères éthiques les plus élevés.

 21   Comme M. le Juge Antonetti a évoqué plusieurs questions, le Juge

 22   Prandler lui aussi a pris la parole pour évoquer des points, donc

 23   permettez-moi d'abord de répondre à cela.

 24   Ma requête au tout départ a été simple, c'était d'avoir un procès correct.

 25   Je l'ai déjà indiqué à plusieurs reprises, du reste. Quand ma présentation

 26   des éléments à décharge a été terminée et quand j'ai vu que dans ce procès

 27   je ne jouerais aucun rôle, j'ai tout simplement cessé de me déplacer pour

 28   être présent. Pas en prononçant des propos lourds de signification, mais


Page 42537

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42538

  1   sans prononcer quelque propos que ce soit, sans entraver le procès qui se

  2   déroule, même dans mon absence, sans des problèmes majeurs.

  3   Alors comme je n'ai pu rien faire d'autre, j'ai choisi de me taire.

  4   Et la prison à laquelle j'ai été condamné sans qu'il y ait encore eu de

  5   jugement de rendu. Au début de la présentation des éléments à décharge,

  6   j'ai demandé à être remis en liberté provisoire en entendant le jugement à

  7   la place d'attendre pendant deux ans encore sans jugement en prison. Deux

  8   ans rien que pour les raisons procédures, ce n'est pas rien. Avant cela, je

  9   n'ai perdu aucune seconde du procès pour ce qui est des éléments présentés

 10   par l'Accusation ni pour ce qui est de la présentation des éléments à

 11   décharge par mes conseils. Donc j'ai fait preuve de respect à l'égard de la

 12   Chambre et je pense avoir le droit de parler de ce Tribunal plus que

 13   quelconque d'autre dans ce prétoire, indépendamment de la position qui est

 14   la mienne en ce moment-ci. Je ne vis pas de ce Tribunal, comme les autres

 15   qui sont présents dans ce prétoire, exception faite aussi des coaccusés,

 16   bien entendu. Mon intérêt, c'est de voir ce Tribunal fonctionner comme il

 17   se doit.

 18   Vous avez vos registres et vous savez que j'ai appuyé l'idée de la

 19   création de ce Tribunal depuis le tout début en 1993 déjà, jusqu'à la

 20   réception d'un acte d'accusation. Je l'ai soutenu même lorsque cela était

 21   fort dangereux, lorsque cela était considéré comme étant un acte de

 22   trahison. Mais il est clair depuis longtemps que ce Tribunal ne joue pas

 23   son rôle.

 24   J'ai paraphé les accords de Dayton, dont fait partie également la

 25   coopération avec ce Tribunal, et j'étais membre de la délégation de l'Etat

 26   de Bosnie-Herzégovine. J'ai représenté ce pays ainsi que ces victimes

 27   pendant plus cinq années. J'ai pendant six ans été présent à des sessions

 28   de l'assemblée générale des Etats-Unis et, pour l'essentiel, je suis


Page 42539

  1   intervenu pour ce qui est de la signification qu'avait ce Tribunal. J'ai

  2   participé à la conférence diplomatique de Rome portant création d'un

  3   Tribunal pénal permanent sur le plan international.

  4   Des dizaines de fois, pendant des interviews, j'ai affirmé que je

  5   répondrais présent à chaque fois que le Tribunal me le demanderait. Et le

  6   même jour de l'arrivée de l'acte d'accusation, et cet acte d'accusation, on

  7   me l'a remis en main propre à Zagreb et non pas à Sarajevo - où c'est

  8   arrivé aussi, mais là-bas délibérément on ne l'a pas remis en main propre

  9   alors que je me trouvais à Sarajevo aussi - donc je me suis tout de suite

 10   rendu et je suis arrivé ici. Et c'est la raison pour laquelle je souhaite

 11   que ce Tribunal réussisse dans sa mission. Il n'y a pas un seul procès qui

 12   pourrait s'avérer non digne de confiance. Et j'ai l'assurance de voir que

 13   dans ce procès il y aura des dégâts collatéraux et je suis en train d'en

 14   assumer certains.

 15   Je me propose donc de répondre à plusieurs questions évoquées par le

 16   Juge Antonetti.

 17   Le Juge Antonetti dit que j'estimerais peut-être que ce procès est

 18   une moquerie. Compte tenu du caractère de l'acte d'accusation, compte tenu

 19   de la façon dont le procès est organisé, à la place d'avoir une réponse

 20   directe en ce moment, je me servirais plutôt d'une phrase dont s'est servi,

 21   à l'occasion de notre dernier entretien à Bruxelles avant que d'être tué,

 22   Zoran Zigic, le premier ministre serbe, je cite :

 23   "Quand on monte dans le mauvais train, chaque gare est forcément une

 24   mauvaise gare."

 25   Du reste, j'ai déjà présenté les positions qui sont les miennes de

 26   par le passé. Le 21 mars 2007, par exemple, j'ai dit que je ne voulais pas

 27   participer de façon active à ce procès, parce que j'estimais que l'acte

 28   d'accusation était injustifié et je me sentais misérable de devoir me


Page 42540

  1   défendre contre de telles allégations. Le fait d'avoir dressé un tel acte

  2   d'accusation est une grosse erreur de la part de l'Accusation.

  3   J'avais déjà obtenu des informations disant que je serais accusé, et

  4   cela a été fait à Téhéran, en Iran, en 1994. J'ai demandé à savoir d'où

  5   venait l'information en question. On m'a dit : C'est sous notre contrôle à

  6   nous.

  7   A chaque fois que j'ai demandé quelque chose à cette Chambre, on a

  8   rejeté ma requête, et ce, à commencer par l'ordinateur portable, et le

  9   représentant du greffe a même été d'accord pour dire qu'il n'y avait pas de

 10   problème pour ce qui était de m'en servir, mais seulement pendant le

 11   procès.

 12   Je suis intervenu dans ce prétoire à plusieurs reprises et rien ne

 13   s'est produit. Par exemple, quand j'ai demandé du temps complémentaire pour

 14   interroger plusieurs témoins de l'Accusation, Tomljanovich, Manolic, Okun,

 15   Galbraight et plusieurs autres encore en provenance d'organisations placées

 16   sous protection.

 17   Le 16 mars 2007, j'ai demandé à ce que vous ne nous preniez pas en tant que

 18   groupe en considération. Le Juge Antonetti, jeudi, a dit - et je me réfère

 19   à la page 42 304 - que vous avez été très généreux pour ce qui est

 20   d'approbation du temps accordé pour le contre-interrogatoire et que dans

 21   l'affaire Karadzic cela ne constituerait que 60 % du temps accordé. Je suis

 22   d'accord. Si j'avais eu 60 % et, bien entendu, si l'Accusation aussi, pour

 23   ces contre-interrogatoires, avait bénéficié de 60 % du temps. Chose qui,

 24   bien entendu, n'est pas le cas ici. Le Procureur dispose de 100 % et je

 25   n'ai rien contre. Ma Défense dispose du sixième.

 26   J'ai demandé à ce qu'il y ait eu dissociation des procédures. Ça a

 27   été refusé. J'ai parlé de ces faits admis problématiques qui remettent en

 28   question la crédibilité même du procès. Pour ce qui est de ces faits admis,


Page 42541

  1   "agreed facts," j'en ai parlé déjà dans cette phase pour ce qui est des

  2   problèmes relatifs aux éléments de preuve documentaires de l'Accusation.

  3   J'ai parlé aussi du procès même et j'ai demandé à ce que mon conseil mette

  4   à profit rien que 10 % de ce que je lui aurais proposé comme questions à

  5   l'attention des témoins de l'Accusation, entre autres, pour démontrer de

  6   qui a-t-on vu se dérouler l'entreprise criminelle commune et de qui cette

  7   entreprise a-t-elle bénéficié le soutien de nos jours encore.

  8   Je vous rappelle que j'ai demandé, pour ce qui est d'un calcul de temps

  9   attribué au Procureur, l'attribution d'une cote IC. Une fois j'ai dit que

 10   la session ne devrait pas être placée sous pli scellé. Rien de tout cela

 11   n'a été approuvé, pas une seule fois, et même pour des choses les plus

 12   banales. Alors cet avenant à ma déclaration, suite à quoi j'ai quitté le

 13   procès, et ce, bien que nous ayons même avant le refus décider de demander

 14   une mise en liberté provisoire en attendant le fini du procès.

 15   Et comme je l'ai déjà dit, la décision relative à cette déclaration de ma

 16   part a été prise à une dizaine de jours avant le début de la phase de la

 17   présentation des éléments à décharge, compte tenu de votre décision pour ce

 18   qui est des temps impartis à la Défense, décision datée du 25 avril 2008.

 19   Vous n'ignorez pas que j'ai il y a longtemps renoncé à mon droit à avoir un

 20   procès rapide, et ce, aux fins de confier à l'Accusation un temps suffisant

 21   pour tout ce dont ils ont besoin. Mais cela sous-entendait aussi le temps

 22   nécessaire à ma Défense. Et en retour je n'ai obtenu presque rien. Et le

 23   temps relatif à la présentation des éléments à décharge a été relativement

 24   approuvé, C'est passé, on n'a pas interjeté appel, parce que nous avions

 25   conscience du fait que la Chambre d'appel ne changerait rien. Et c'est

 26   justement ce qui s'est passé.

 27   Donc j'ai décidé de présenter un discours liminaire que j'ai préparé

 28   pendant les sept jours de liberté provisoire que vous n'avez accordés l'an


Page 42542

  1   passé. Et non pas par mon témoignage pour, par exemple, dans le temps

  2   imparti où l'on pourrait voir ou entendre les témoignages des autres

  3   témoins qui s'étaient déjà préparés. Donc on a dépensé tout le temps qu'il

  4   nous a été imparti, chose qui n'a pas été aisée à planifier, du reste. Et

  5   vous avez pu le voir, Monsieur le Juge Antonetti, à l'occasion du contre-

  6   interrogatoire du général Praljak.

  7   Oui, c'est moi qui ai rédigé la réponse relative à l'expertise de

  8   Tomanovic, comme je l'ai déjà dit au mois de juin de l'année passée, et il

  9   s'agit de plusieurs centaines de pages avec 1 500 notes de bas de pages.

 10   Tous les accusés m'ont regardé faire pendant des jours et des jours. J'ai

 11   rédigé une réponse similaire à l'expertise portant sur les transcriptions

 12   présidentielles. Il y avait aussi à peu près 1 500 notes de bas de page.

 13   Mais cette expertise, vous ne l'avez pas acceptée, ce qui fait que cette

 14   partie-là je n'ai même pas pu demander son versement au dossier. J'ajoute

 15   que j'ai aussi rédigé une réponse à l'expertise présentée par le Pr

 16   Ribicic. Ce sont trois livres que j'ai la ferme intention de faire publier,

 17   du reste.

 18   Et je le dis pour indiquer que mon intention était celle de

 19   participer au procès de façon indirecte et non pas de façon directe pour

 20   poser des questions et ce genre de choses. C'est la raison pour laquelle

 21   j'ai des avocats.

 22   Cet avenant à ma déclaration que vous avez rejeté, j'aurais pu en

 23   donner lecture, prendre une semaine de vacances, mais ça n'aurait pas été

 24   une semaine, ça aurait constitué un million de dollars. Donc j'ai décidé de

 25   faire économiser aux Nations Unies ce million de dollars à la différence de

 26   vous autres, qui avez pour un enfant qui est diplômé de l'un des membres du

 27   bureau du Procureur, décider de dépenser ce même million et de prolonger

 28   notre séjour en prison pour ces journées-là.


Page 42543

  1   Je n'ai pas demandé à ce que ma réponse à l'expertise se voit accorder une

  2   pertinence déterminée. J'ai voulu que vous la lisiez plutôt que de

  3   m'écouter et plutôt que d'écouter aussi mon discours liminaire. Et à vous

  4   d'en évaluer la valeur. Vous avez dit que vous ne vouliez pas le lire. J'ai

  5   cru comprendre, en d'autres termes, que cela ne vous regardait pas. Je

  6   crois que vous avez fait passer avant la forme plutôt que la substance. Et

  7   vous avez accepté comme élément de preuve, vous l'utilisez dans vos

  8   décisions, la teneur de ces entretiens agressifs que le même dénommé

  9   Tomljanovic a eu avec moi.

 10   Alors je suis aujourd'hui ici, parce que mon conseil de la Défense

 11   m'a présenté votre demande du point de vue de sa prétendue façon peu

 12   éthique de se comporter. Il veut tirer les choses au clair sur le principe,

 13   et il a mon soutien. Il m'a informé de la chose, je suis conscient du fait

 14   qu'il y a une appréhension sur le terrain de la part des gens vis-à-vis de

 15   cette institution et certains veulent éviter à tout prix d'avoir quoi que

 16   ce soit à voir avec le Tribunal, ce Tribunal. Il faut respecter aussi leurs

 17   exigences du point de vue de l'anonymat. Alors dans la présentation des

 18   éléments de preuve à titre documentaire dans l'affaire, j'ai dit que cela

 19   n'avait pas beaucoup d'importance étant donné que la totalité des documents

 20   pour ce qui est de la demande de prise en reconsidération ont été certifiés

 21   authentiques de la part de ceux qui étaient disposés à le faire de façon

 22   publique. Et étant donné que j'ai parcouru ces documents, je puis vous dire

 23   qu'il s'agit de documents plutôt de nature triviale, du type dont on en a

 24   déjà fait verser au dossier des centaines ici.

 25   Ma Défense ne dispose d'aucun agenda caché si ce n'est l'intention de

 26   rendre ce procès équitable. Et comme mon avocat l'a dit, il a proposé deux

 27   variantes : interrompre le procès en attendant que ceci ne soit tranché

 28   parce qu'il estime, comme il l'a dit, qu'entre-temps et pas entre-temps


Page 42544

  1   seulement mais d'ici à la fin du procès compte tenu de vos exigences, est

  2   en train de perdre une partie de sa crédibilité, ou alors de procéder à une

  3   nomination provisoire d'un conseil. Mais aucune de ces variantes n'est

  4   acceptable à mes yeux. Je l'ai dit. Je ne veux pas qu'il y ait une

  5   interruption dans le procès et je veux être une partie de la solution, non

  6   pas une partie du problème.

  7   Et un nouveau conseil de la Défense, je crois que ce serait

  8   irréaliste. Dans toutes les variantes que j'ai énumérées, quoi qu'il

  9   advienne, c'est moi qui paie les pots cassés. J'ai proposé moi-même cette

 10   variante, oui, peut-être de façon analogue à Praljak je pose les questions

 11   et participe à ce procès sur des bases provisoires d'ici à début octobre

 12   dans l'attente de voir d'une façon ou d'une autre cette requête résolue. Et

 13   entre-temps on aura les vacances d'été et on aura le contre-interrogatoire

 14   du général Praljak, ce qui fait que de façon sincère je ne m'attends pas à

 15   avoir un rôle de taille ou d'importance dans l'équipe de ma Défense. Bien

 16   entendu, cette équipe s'efforce de fonctionner. Et je me proposerais

 17   d'intervenir dans le procès le cas échéant. Je crois sincèrement que je

 18   n'aurai pas besoin de le faire à quelque moment que ce soit puisque ma

 19   Défense est déjà terminée.

 20   Je propose ceci, et je pense que vous allez l'accepter, et je ne veux

 21   pas à quelque moment que ce soit que soit remise en question la crédibilité

 22   de mon équipe de la Défense, je répète, à aucun moment.

 23   Je reviens à une question évoquée par M. le Juge Antonetti. J'estime

 24   que ce procès est une farce. Que pensez de ceci : si après sept ans, depuis

 25   l'entrée en prison, on s'attend encore à recevoir un jugement de première

 26   instance. Et le problème principal dans tout le procès c'est le manque de

 27   temps. Alors croyez-moi bien que je ne peux pas l'expliquer à personne.

 28   Vous avez des éléments indiquant tout ce que j'ai fait et à quoi j'ai pris


Page 42545

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42546

  1   part dans ma carrière. Donc j'ai certaines connaissances et j'ai une

  2   certaine expérience. Et croyez-moi bien que tout ceci pouvait être effectué

  3   en quelques mois dans une procédure logique de nature interdisciplinaire.

  4   Mais des questions complexes de nature sociale, économique,

  5   démographique, politique, financière, juridique, sur le plan international,

  6   sociologique, national et historique ne sauraient être tranchées dans une

  7   procédure prévue pour un cas au pénal quelle que soit la bonne façon de

  8   procéder à la conduite de cette procédure. Je suis tout à fait d'accord

  9   avec un commentaire prononcé par M. le Juge Trechsel à la page 17 110. Il a

 10   dit : "Justement parce qu'il n'est pas possible d'établir la vérité, je ne

 11   suis pas en train de participer au procès."

 12   Le Juge Prandler démontre une bonne connaissance de la région. Alors

 13   pour ce qui est du fonctionnement de la Bosnie-Herzégovine, il convient

 14   d'indiquer ou de citer rien qu'un exemple, la visite de votre chef, enfin,

 15   je ne sais pas si à l'époque vous étiez au ministère, le ministre des

 16   Affaires étrangères, Laslo Kovac à Sarajevo en 1994 ou 1995. La Hongrie

 17   était en train de présider à l'OSCE. Et par la suite c'était le tour de la

 18   Suisse de le faire. C'était Flavio Koti qui est intervenu. Je ne suis plus

 19   certain de l'année. Ça devait être 1994 ou 1995. Et le dénommé Kovac, à la

 20   fin de cette réunion dans cette ville de Sarajevo occupée, en guise d'aide

 21   de son gouvernement, nous a remis un paquet où il y avait

 22   60 000 marks en espèce, en billets. Alors ceci démontre clairement, d'un

 23   qu'il n'y a pas de monnaie nationale et que les banques ne fonctionnent

 24   pas, et qu'il n'y a pas de moyen de communication en quoi que ce soit.

 25   Voilà, cette explication n'a pas duré plus d'une minute et on a

 26   tranché la chose. On peut aller de l'avant. Ça aurait été le style ou la

 27   façon de procéder qui aurait été la mienne.

 28   Et je vais dire aussi que pour d'autres points notoirement connus,


Page 42547

  1   économie, monnaie, système de paiement, on a perdu des mois de travail, du

  2   temps qui est le mien en prison et le vôtre.

  3   Alors quelques mots à propos de ces éléments de preuve documentaires,

  4   ce qui constitue un sujet crucial.

  5   Le Juge Antonetti, au début du contre-interrogatoire de Praljak, a expliqué

  6   qu'il avait accepté le texte de l'acte d'accusation en début mars 2004 lors

  7   de la confirmation de cet acte de façon très formelle. Vous l'avez dit - et

  8   je ne suis pas au procès mais je lis les comptes rendus - vous l'avez dit à

  9   la page 41 359 et cela va jusqu'à la page 41 360. Ensuite on a rejeté mes

 10   éléments de preuve documentaires, me semble-t-il, pour des raisons de mon

 11   avis purement formelles.

 12   Pour ce qui est de la présentation des éléments de preuve de l'Accusation,

 13   il convient constamment de garder à l'esprit le fait que la charge de la

 14   preuve tombe sur l'Accusation. On nous a dit, Vous allez présenter vos

 15   éléments à décharge dans la phase de la Défense. Ensuite on a modifié

 16   l'article 98 bis, à savoir que l'on a pris en considération que des

 17   éléments de l'Accusation et non pas ceux de la Défense. Chose qui, de mon

 18   avis, est complètement dénuée de sens. Et c'est la raison pour laquelle

 19   nous n'avons pas présenté de requête en application du 98 bis. Et il va

 20   s'en dire que si on avait eu suffisamment de temps pour ce qui est du

 21   contre-interrogatoire pendant la phase de présentation des éléments à

 22   charge, et si la demande d'un jugement de mise en liberté avait été prévue

 23   suite à l'examen de cette phase avec les éléments de preuve présentés, je

 24   suis convaincu que la phase de la Défense n'aurait même pas été nécessaire

 25   et nous, on n'aurait pas demandé, du reste.

 26   Ensuite on a limité le temps de la Défense. Bien entendu, nous avons

 27   présenté notre requête aux fins de preuves documentaires. Toutes ces

 28   preuves figurant sur la liste 65 ter, la plupart prévues pour mon


Page 42548

  1   témoignage, et voici la semaine dernière nous avons reçu votre décision. Le

  2   fait de refuser pratiquement 1 000 documents venus de ma part - et je me

  3   permets de vous rappeler la plupart des procès devant ce procès, bien, en

  4   prenant le tout, ensemble, il n'y a pas eu autant de documents de la part

  5   de l'Accusation et de la Défense, indépendamment de ce qui est

  6   d'éventuelles erreurs commises par les conseils.

  7   Ça c'est une question à part. Pour moi, il s'agit d'une injustice

  8   profonde. Permettez-moi de dire quelque chose et vous m'avez demandé de

  9   m'exprimer sincèrement. Si j'avais pris ce type de décision injuste - et

 10   vous les avez toutes, les procès-verbaux, les décisions, vous avez tous

 11   dans les documents qui vous ont été soumis et je souscris à tout ce que j'y

 12   ai dit, à toutes les décisions que j'ai prises - bien, ça me rendrait très

 13   inquiet, mais heureusement, je n'ai pas à m'inquiéter. Je n'ai pas pris de

 14   telles décisions, aucune ayant des conséquences aussi injustes. Et c'est la

 15   raison pour laquelle c'est avec sérénité que j'attends votre jugement. Et

 16   c'est la raison pour laquelle j'ai rédigé la lettre de la semaine dernière,

 17   qui ne respectait pas la procédure et la procédure est importante. Je suis

 18   d'accord avec vous.

 19   J'ai vu des extraits de votre livre, Monsieur le Juge Trechsel, et je

 20   n'aurais rien contre ce que vous y dites si on appliquait ici ce que vous

 21   avez écrit, et en particulier pour ce qui est du respect des droits des

 22   accusés. Vous avez refusé tous les enregistrements vidéo de mes entretiens,

 23   des enregistrements diffusés officiellement par la télévision de l'Etat et

 24   qui ont été suivis par des millions d'auditeurs. Alors c'est intéressant de

 25   savoir que c'est sur la base de ces enregistrements vidéo aux fins du

 26   compte rendu que vous avez la même personne qui les a faits est celle qui a

 27   fait les transcriptions dans le bureau du président Tudjman. Et

 28   aujourd'hui, elle travaille au bureau du président Mesic.


Page 42549

  1   Et toutes les transcriptions présidentielles pour lesquelles il n'y a

  2   pas d'enregistrement audio ont été acceptées. Or, il ne s'agit pas

  3   d'enregistrements vidéo qui sont sans aucune contestation possible et qui

  4   sont confirmés par la télévision de l'Etat -- pas seulement audio mais

  5   aussi vidéo -- comparés aux enregistrements de vidéo du Procureur que vous

  6   avez admis. Quelle est la forme sous laquelle se présente ? Et ces

  7   enregistrements parlent de ce que je disais publiquement au moment où on

  8   dresse l'acte d'accusation.

  9   Il semblerait que ça ne vous intéresse pas ce qui a constitué le sujet de

 10   mes propos au moment de l'acte d'accusation. Mais enfin, comment est-ce que

 11   vous pensez souscrire à la décision que vous allez prendre. J'ai du mal à

 12   le concevoir. Vous avez refusé en tant que manquant d'authenticité, les

 13   règlements qui ont été publiés dans le journal officiel de Bosnie-

 14   Herzégovine, pays membre des Nations Unies, tandis que ce Tribunal a pour

 15   mission de rétablir la paix et la stabilité dans la région. Vous n'avez pas

 16   admis des documents, qui constituent également des journaux officiels des

 17   municipalités et qui démontrent que toutes les municipalités ont adopté

 18   pratiquement le même comportement. Ces documents sont importants pour

 19   comprendre le contexte général.

 20   Alors je me demande, qu'est-ce qui peut constituer une preuve documentaire,

 21   sinon par définition, les documents qui sont extraits des publications

 22   officielles ou du journal officiel ? Et c'est ce que j'ai dit en avril 2007

 23   dans ce prétoire, lorsque je me dressé contre le principe même des preuves

 24   documentaires, si ce n'est sous une forme très limitée. Mais vous avez

 25   permis au Procureur de le faire. Donc j'exige d'avoir droit à la même

 26   approche. Je demande même que vous appliquiez des critères plus sévères à

 27   mon égard.

 28   Ou bien, vous n'avez pas admis un certain nombre de procès-verbaux des


Page 42550

  1   réunions du HVO, qui sont confirmés par les participants à ces réunions,

  2   tandis que vous avez admis des PV sans qu'il y ait eu de témoin qui vienne

  3   témoigner à l'appui, et ce, sous proposition du Procureur. Donc l'objectif

  4   de ma Défense est de vous présenter tous les PV des organes à la tête

  5   desquels je me suis trouvé, toutes les décisions adoptées par ces organes.

  6   Parce que c'est uniquement ainsi que l'on peut jeter des bases d'une

  7   décision de qualité.

  8   Une digression, si vous me le permettez. Je ne comprends pas sur la base de

  9   quoi des documents qui comportent un soi-disant sceau des archives de

 10   l'Etat croate sont pris sans aucune vérification et on les accepte en tant

 11   qu'authentiques, tandis qu'on n'accepte pas ceux qui sont présentés par ma

 12   Défense, qu'ils proviennent du HVO, du gouvernement de l'Herceg-Bosnie, ces

 13   instances n'avaient rien à voir avec ces institutions dans un autre Etat.

 14   Et pour ce qui est de leur teneur, pour ce qui est de l'ensemble de la

 15   teneur des archives dont il est question, bien, nulle part on ne voit

 16   apparaître le syntagme, "le gouvernement d'Herceg-Bosna." Donc vous n'avez

 17   pas accepté des documents pour lesquels les participants aux événements, de

 18   par leurs signatures vérifiées confirment leur authenticité. Prenons, par

 19   exemple, le vice-président de la Republika Srpska, le directeur de la

 20   télévision d'un Etat, son ministre de la sécurité. Là, ce ne sont pas des

 21   documents qui vont déterminer le cours de ce procès. Il s'agit de documents

 22   tout à fait usuels, des centaines du même genre ont déjà été admis en

 23   l'espèce.

 24   Et ces documents, à titre individuel, n'existent pas dans ce type de

 25   procès. Dans ce type de procès il n'y a pas de document pris en tant que

 26   document isolé pour lequel la crédibilité dominante des différents

 27   scénarios ne serait pas vérifiable grâce à des faits comparables.

 28   Donc je répète encore une fois, je vous demande une seule chose, à


Page 42551

  1   savoir que des documents authentiques soient versés au dossier qui vont

  2   vous permettre de prendre une décision raisonnable. C'est dans l'intérêt de

  3   tous, comme j'ai dit dans ma lettre. C'est dans l'intérêt du Procureur,

  4   mais de la communauté internationale, mais aussi des victimes, car les

  5   victimes ne souhaitent pas que l'on punisse quelqu'un qui n'est pas

  6   coupable.

  7   Donc la Chambre a besoin de documents authentiques pour pouvoir établir la

  8   vérité. Il convient de rejeter tous les documents pour lesquels vous ne

  9   pensez pas qu'ils sont authentiques, pour lesquels vous pensez qu'ils sont

 10   inutiles, parce que c'est quelque chose qui a été, par exemple,

 11   suffisamment argumenté déjà. Et là je ne remettrai pas cela en question.

 12   Mais on a refusé à ce stade pour des raisons formelles ou pour des

 13   raisons inconnues, donc pour des raisons qui ne sont pas substantielles,

 14   c'est pour ces raisons-là qu'on a refusé des documents. Ces raisons

 15   formelles, en passant par une procédure spécifique, vous permettent

 16   maintenant d'avoir une marge de manœuvre pour faire des choses qui sont

 17   tout à fait logiques. Mais en principe, le moment n'est pas venu maintenant

 18   de décider de leur pertinence, puisque de toute façon, à la fin du procès,

 19   vous serez tout à fait libre de les rejeter tous.

 20   M. le Juge Antonetti dit de bonne foi qu'il comprend que je suis peut-être

 21   désespéré, que psychologiquement la situation est difficile et que c'est la

 22   raison de mon absence dans ce prétoire. Vous ne saurez pas me mettre dans

 23   une telle situation. Quelqu'un qui a la foi ne saurait pas être désespéré.

 24   Bien entendu, personne ne souhaite se trouver en prison.

 25   Certes, je suis déçu même si je sais comment fonctionne ce bas monde,

 26   mais cela ne m'étonne pas. Ce n'est rien de nouveau pour moi. Je n'ai peur

 27   de rien. L'histoire européenne du XIXe, du XXe siècle, tout cela je l'ai

 28   vécu en l'espace de dix ans.


Page 42552

  1   Et comme avait l'habitude de le dire mon ministre des Affaires

  2   intérieures au gouvernement de Bosnie-Herzégovine, Jozo Leotar, qui a été

  3   tué à Sarajevo et on n'a pas su qui était l'auteur de l'acte, je cite :

  4   "Après tout ce que j'ai vécu, il n'y a plus de place pour la peur en

  5   moi."

  6   Je ne vous demande ni la compréhension ni de me faire l'aumône, je

  7   vous demande uniquement les choses qui sont logiques et justes.

  8   Je commente que ce n'est pas facile. Dans ce procès, compte tenu de

  9   cet acte d'accusation, 126 000 décisions alléguées que vous avez besoin de

 10   prendre, compte tenu de la responsabilité que vous avez, je choisirais

 11   toujours plutôt d'être l'accusé que d'être un Juge. Puisque la plupart

 12   n'ont pas cette expérience, croyez qu'il n'y a rien de plus agréable et de

 13   plus belle sensation d'indifférence que de ne pas se sentir coupable tandis

 14   qu'on est en prison.

 15   En ces cinq mois, en plus d'avoir lu les transcriptions des procès et

 16   de tout ce qui est lié au procès, je me suis trouvé à avoir plus de temps

 17   qu'avant, puisque je ne passe pas par tous ces contrôles, les transports,

 18   les fouilles, vérifications. Tous les jours, quatre hommes en uniforme de

 19   ceux qui sont là m'examinent, regardent ce que j'ai en bouche, et cetera.

 20   Donc je suis en train de terminer deux manuscrits pour deux nouveaux

 21   livres. J'ai fait une nouvelle exposition de produits en terre cuite, puis

 22   je me suis remis à jouer de la musique après 35 ans. Je suis même en train

 23   de constituer un groupe de musique avec les gardiens. Donc je ne suis pas

 24   psychologiquement troublé, je ne suis pas désespéré, je n'ai pas pris une

 25   seule pilule en cinq ans. Et je vous dis, parce que nous ne nous sommes pas

 26   vus depuis longtemps, la Chambre doit tenir compte de l'ensemble des

 27   éléments pertinents pour la situation qui a à voir avec les accusés.

 28   Et puisque j'en parle, permettez-moi de vous dire ce qui me dérange.


Page 42553

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42554

  1   Ce qui me dérange, c'est si vous avez la sensation que je suis un criminel

  2   qui prendra la fuite à partir du moment où vous lui accorderez une remise

  3   en liberté provisoire. Quand vous me laissez partir pour quelques jours

  4   pour des raisons humanitaires, il faut me garder en résidence surveillée,

  5   indépendamment des garanties fournies par un pays membre du Conseil de

  6   sécurité des Nations Unies, un pays qui est membre de l'OTAN. Vous ne

  7   pouvez pas estimer que je suis un criminel tant que vous ne m'aurez pas

  8   déclaré coupable et condamné. Vous n'avez pas le droit de faire cela. Peu

  9   importe, quelle que soit la jurisprudence de quelque Chambre d'arrêt que ce

 10   soit de ce Tribunal, ceci ne figure pas dans les actes fondamentaux de ce

 11   Tribunal. C'est plus fort que tous vos bis, ter et quater.

 12   De l'avis de l'Accusation, je suis dangereux. Il se peut que je

 13   prenne la fuite et les raisons humanitaires ne suffisent pas. A titre

 14   d'exemple, je n'ai pas pu prendre une semaine de mise en liberté provisoire

 15   pendant les vacances judiciaires d'hiver. Comme vous le savez, mon père est

 16   décédé par la suite. Je remercie tout un chacun pour la compassion dont on

 17   m'a fait preuve. Excusez-moi, je vais passer une partie.

 18   Ma Défense est terminée. Il n'y a là rien que l'on puisse changer et

 19   je ne le souhaite pas d'ailleurs. Encore une fois, je ne conditionne rien,

 20   je ne demande rien. Mon absence ne constitue pas une forme de pression sur

 21   qui que ce soit. Comme je l'ai dit, examinez toutes les preuves

 22   documentaires une à une, je les ai toutes passées en revue ce week-end et

 23   je n'y vois rien de contestable, rien qui n'ait pas été argumenté

 24   suffisamment conformément à vos remarques sur 1 000 pages de manière tout à

 25   fait détaillée avec la date, avec le paragraphe correspondant de l'acte

 26   d'accusation, les raisons de l'importance du document, les arguments

 27   présidant à la demande de réexamen et quel est le lien entre le document et

 28   l'acte d'accusation, en particulier dans l'annexe, à part quelle est


Page 42555

  1   l'importance par rapport au paragraphe de l'acte d'accusation. Et je vous

  2   demande de relire mon annexe à la déclaration.

  3   De la manière dont je l'ai proposé, je suis tout à fait prêt à faire

  4   en sorte que ce procès se poursuive et d'aider de cette manière-là la

  5   Chambre.

  6   Je vous demande uniquement la possibilité de faire verser au dossier

  7   les preuves pertinentes d'après les critères même plus sévères que ceux de

  8   l'Accusation. Je ne comprends pas pourquoi vous vous privez de documents

  9   qui peuvent contribuer à ce qu'on établisse la vérité. Si cela n'est pas

 10   possible, alors ma réponse à votre question sur la nature du procès est

 11   très explicite. Ne permettez pas qu'au moins je ne perde pas l'illusion

 12   qu'il n'en n'est pas ainsi.

 13   Je m'excuse de ma réaction.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Prlic, de deux choses l'une.

 15   Je peux très bien dire : La Chambre va en délibérer, puis on vous

 16   donnera la position de la Chambre. Mais j'ai plutôt l'habitude d'assumer ma

 17   propre responsabilité pour me permettre de vous répondre.

 18   Tout d'abord, comme je vous l'ai dit en préambule, je me réjouis de vous

 19   voir à nouveau ici. Votre départ il y a plusieurs mois, je l'avais dit,

 20   m'apparaissait totalement disproportionné par rapport au problème posé.

 21   Même si vous suiviez le procès de votre cellule, il n'en demeure pas moins

 22   que votre présence pouvait être utile pour vous-même et pour vos camarades

 23   qui sont en même temps que vous, coaccusés.

 24   Deuxièmement, votre déclaration montre principalement le problème posé par

 25   l'admission des documents. Sur ce point, vous savez qu'elle a été, moi, ma

 26   position personnelle. J'ai eu à l'exprimer à plusieurs reprises. J'ai fait

 27   des opinions dissidentes. Je voulais même que la Chambre d'appel statue au

 28   fond sur la question de


Page 42556

  1   savoir : quand un Juge veut qu'un document soit dans la procédure, est-ce

  2   qu'une majorité peut s'y opposer ? La Chambre d'appel a évité de répondre à

  3   cette question par une argumentation en disant que les décisions des

  4   Chambres sont prises dans leur intégralité. Donc la question que j'ai

  5   soulevée n'a pas été réglée. De ce fait, la Chambre a admis de manière

  6   unanime des documents, puis a rejeté parfois à la majorité des documents,

  7   et ceci ça été une constante.

  8   Est arrivée la question de votre travail, est-ce qu'on pouvait

  9   admettre ce document. La Chambre - et là, j'ai été unanime avec mes

 10   collègues - nous ne pouvions pas pour des raisons techniques admettre ce

 11   document, et néanmoins ce document pouvait être facilement réintroduit.

 12   Ce qui me permet d'aborder la question du temps. Vous et votre avocat à

 13   plusieurs reprises vous vous êtes plaints de ne pas avoir assez de temps.

 14   Je vous rappelle, Monsieur Prlic, que la Chambre vous avait accordé pour la

 15   présentation de vos moyens de Défense 95 heures. Et à l'époque, et croyez-

 16   moi, ça avait été de la part de la Chambre un "challenge." Car il fallait

 17   pour déterminer exactement votre temps prendre en compte toute une série de

 18   paramètres. Et il y a un paramètre que nous avions pris en compte, c'était

 19   le fait que vous alliez déposer. Nous pensions que vous alliez déposer. Et

 20   dans ces conditions qu'on vous a donné 95 heures, alors qu'on avait donné

 21   aux autres 55 heures. On avait estimé que vous deviez avoir 40 heures de

 22   plus que les autres. Alors que je rappelle votre responsabilité identique

 23   avec celle de vos autres compagnons et coaccusés. Néanmoins pensant que

 24   vous alliez témoigner, nous vous avons accordé 95 heures. Puis à ma grande

 25   surprise on a constaté que vous ne témoigniez pas et qu'à la place vous

 26   avez fait venir d'autres témoins. C'était votre stratégie de défense, c'est

 27   vous qui l'avez assumée. Mais si vous aviez témoigné, comme vous avez pu

 28   vous en rendre compte, pour l'audition de M. Praljak, je vous aurais posé


Page 42557

  1   des questions, comme je lui ai posé. Et ça aurait permis de balayer

  2   l'ensemble du champ des questions qui se posent et je n'aurais peut-être

  3   pas passé six jours d'audience avec vous, mais peut-être le double, au

  4   moins 12 jours d'audience. Bon, vous n'avez pas témoigné, je n'ai pas pu

  5   vous poser les questions.

  6   Alors vous dites que vous aviez demandé la disjonction. Vous savez bien que

  7   la Chambre a rendu une décision confirmée par la Chambre d'appel, il était

  8   quasiment techniquement impossible de disjoindre un cas d'un coaccusé qui

  9   fait partie d'une prétendue entreprise criminelle commune. Donc de ce fait,

 10   techniquement, c'était impossible, donc la Chambre qui avait rendu cette

 11   décision a été confirmée par la Chambre d'appel. Mais vous reévoquez [phon]

 12   cela pour nous dire que de votre point de vue il y avait un problème, oui,

 13   mais ce problème a été tranché. La question du temps ça été également

 14   tranché.

 15   Alors vous estimez que vous n'avez pas assez de temps. Vous avez donné

 16   quelques exemples. Très bien, je ne conteste pas les exemples choisis.

 17   Maintenant vient se greffer là-dessus la question liée à vos avocats et

 18   vous proposez une solution que la Chambre va, bien entendu, examiner. Et

 19   moi, je ne peux pas prendre position sur la solution préconisée. Car il

 20   faudra que la Chambre statue en la matière. Donc là-dessus je ne

 21   m'autoriserai pas à dire quoi que ce soit dans l'attente du point de vue de

 22   mes collègues. Mais indépendamment de cela, vous savez bien que j'ai

 23   toujours été, moi, favorable au fait qu'un accusé puisse poser des

 24   questions. Donc dans ce que vous avez dit, ça rejoint un certain nombre de

 25   mes préoccupations.

 26   Se pose également la question - et je l'ai bien compris - tout le travail

 27   que vous avez fait de milliers de pages, et vous avez l'impression que les

 28   Juges ne l'ont pas lu, et l'ont rejeté pour des raisons techniques. Oui, ça


Page 42558

  1   a été rejeté pour la raison technique, mais bien entendu, tout ceci a été

  2   lu, et il est toujours techniquement encore possible de réintroduire ledit

  3   document lors de l'audition d'un témoin. Donc pour le moment rien n'a été

  4   définitivement décidé en la matière. Et Dieu sait que l'interrogatoire de

  5   M. Praljak, puis de son contre-interrogatoire peut permettre à tout moment

  6   de réaborder les éléments contenus dans votre document.

  7   Donc moi, pour mon résumé, je pense que c'est une bonne chose que vous

  8   soyez là aujourd'hui, que vous nous dites ce que vous avez sur le cœur.

  9   J'enregistre avec une grande satisfaction, car ça m'avait effleuré l'esprit

 10   que sur le plan psychologique vous êtes en mesure de continuer le procès.

 11   Donc ça c'est une bonne nouvelle.

 12   Vous avez abordé la question des mises en liberté. Alors là soyons clairs.

 13   La demande de mise en liberté dans l'attente de la fin du procès a été

 14   rejetée par une décision unanime de la Chambre, et la Chambre d'appel a

 15   confirmé cela. Vous avez abordé la demande qui est en cours, dans laquelle

 16   vous savez que la Chambre a rendu une décision favorable, mais le Procureur

 17   fait appel, c'est la Chambre d'appel qui dira ce qu'il y a lieu de faire.

 18   Donc de ce point de vue attendons sereinement les décisions à intervenir,

 19   mais le fait même que la Chambre a répondu favorablement à votre requête,

 20   montre que la Chambre fait totalement jouer à votre bénéfice la présomption

 21   d'innocence, même si vous ne pouvez avoir un autre point de vue. Mais

 22   croyez-moi, ceci est bien présent dans mon esprit et dans l'esprit

 23   également de mes collègues. Sinon, on n'aurait certainement pas accordé une

 24   suite favorable à votre demande.

 25   Concernant l'article 98 bis du Règlement de preuve et de procédure, vous

 26   avez fait part de votre incompréhension, mais vous le savez, votre avocat à

 27   dû vous le dire c'est une procédure typiquement anglo-saxonne qui fait qu'à

 28   un stade du procès, on ne regarde uniquement que les pièces de l'Accusation


Page 42559

  1   sans prendre en compte les pièces de la Défense. Donc c'était dans notre

  2   décision, donc malheureusement votre argumentation ou celle de vos

  3   camarades n'a pas été prise en compte dans la décision 98 bis. La Chambre

  4   s'est contentée uniquement de regarder les pièces de l'Accusation, ça c'est

  5   conforme à l'esprit et à la lettre de cet article. Et je vous rappelle que

  6   la Chambre avait pris le soin d'indiquer dans sa décision - je vous le dis

  7   de mémoire - que cette décision ne préjugeait absolument pas de votre

  8   culpabilité future. Donc pas de souci à avoir au regard de la question de

  9   l'article 98 bis.

 10   Donc le point fondamental pour le moment est celui de votre intervention

 11   future dans le cadre des témoins qui restent, à savoir M. Praljak, puis

 12   après les témoins de M. Praljak. Mais comme vous le savez l'ADC va rendre

 13   sa décision dans un délai que nous avons fixé à un mois, donc nous avons

 14   largement le temps de rendre une décision à cet égard.

 15   Voilà ce que je voulais vous dire, Monsieur Prlic, de prime abord. Je n'ai

 16   pas eu le temps de réfléchir au mot près à ce que j'allais vous dire ni à

 17   la virgule, j'ai réagi spontanément à vos propos. Je ne sais pas si ces

 18   propos vous rassurent ou vous inquiètent. Mais sachez qu'il m'apparaît très

 19   important que vous soyez présent pour écouter, entendre et donner des

 20   instructions à vos avocats sur les dires d'un tel ou d'un tel, notamment

 21   quand il y a des témoins qui déposent et qui peuvent donner des éléments à

 22   charge ou à décharge. Donc il est utile que vous apportiez votre

 23   contribution à la manifestation de la vérité.

 24   Puisque vous nous avez rappelé que vous étiez un fervent partisan de

 25   l'institution de ce Tribunal, vous avez participé aux travaux de la

 26   conférence de Rome et que votre ligne a été continuelle en la matière que

 27   vous apportez tout votre soutien à ce Tribunal. Malheureusement pour vous,

 28   vous êtes dans la situation d'un accusé et c'est pour cela que la Chambre


Page 42560

  1   devra, à partir de l'acte d'accusation et à partir des éléments présentés

  2   par la Défense, délibérer et prendre des décisions sur votre innocence ou

  3   culpabilité. Mais nous ne sommes pas encore là, puisqu'il nous reste

  4   quasiment encore un an avant la clôture du procès, enfin, la clôture des

  5   témoins à venir. Après, il y aura quelques mois certainement pour la

  6   rédaction du jugement.

  7   Donc voilà ce que je voulais vous dire, Monsieur Prlic.

  8   Si Me Karnavas n'a rien à dire, nous allons continuer maintenant les

  9   questions.

 10   M. KARNAVAS : [interprétation] J'ai quand même deux petits points à

 11   rajouter pour que les choses soient claires. Je ne voudrais surtout pas --

 12   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] J'aimerais vous interrompre, parce

 13   que j'aimerais moi aussi prendre la parole. Ensuite, bien sûr, vous pourrez

 14   nous donner vos deux points de clarification.

 15   Comme l'a dit le Juge Président au début de sa déclaration, tout d'abord la

 16   Chambre de première instance va devoir délibérer et étudier la déclaration

 17   de M. Karnavas, la déclaration de M. Prlic, mais comme le disait le

 18   Président, en tant que Juge raisonnable, nous devons étudier de façon très

 19   sérieuse tout ce qui nous a été présenté aujourd'hui.

 20   Mais je voulais prendre la parole, parce que M. Prlic a mentionné mon nom

 21   et aussi parce que Me Karnavas a aussi fait référence à la façon dont la

 22   Chambre de première instance traite les travaux de la Défense. Ici

 23   j'aimerais vraiment être extrêmement catégorique et extrêmement précis. La

 24   Chambre de première instance - et je parle, je suis certain, au nom de mes

 25   collègues, bien sûr, ils peuvent faire des commentaires sur ce que je viens

 26   de dire - mais en tout cas je tiens à vous dire que cette Chambre de

 27   première instance applique la procédure à la lettre, c'est-à-dire les

 28   principes de base permettant d'avoir un procès équitable. Nous faisons de


Page 42561

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42562

  1   notre mieux pour nous en tenir aux articles du Règlement qui sont, entre

  2   autres, compris dans le livre du Juge Trechsel dont a parlé Me Karnavas

  3   d'ailleurs. Sachez que ce sont des principes gravés dans le marbre et nous

  4   ne comptons absolument pas nous en écarter à l'avenir. Bien.

  5   Deuxièmement, Monsieur Prlic, vous avez [comme interprété] dit que

  6   vous ne voulez absolument pas que l'on jette l'opprobre sur votre équipe de

  7   Défense. Et je ne sais pas si je comprends très bien ce qu'il veut dire et

  8   je réitère que cette Chambre de première instance ne veut jeter l'opprobre

  9   sur rien, sur personne, sur aucune équipe ni sur Me Karnavas ni, bien sûr,

 10   sur son co-conseil. Donc sachez que nous ne considérons absolument pas

 11   qu'au sein de cette équipe de Défense il n'y ait, comme dit M. Karnavas,

 12   que "des avocats marrons" et je recite à nouveau les propos mêmes de Me

 13   Karnavas : "Nous ne considérons absolument pas qu'ils soient véreux en

 14   aucun cas." Il n'y pas d'épée de Damoclès au-dessus de votre tête, Maître

 15   Karnavas ni au-dessus de la tête de votre équipe.

 16   Soyez certain que ce procès va se poursuivre en suivant les principes

 17   bien acceptés du droit pénal international. Nous sommes là pour nous

 18   assurer que ce procès se termine dans ce même esprit.

 19   Je vous remercie.

 20   M. KARNAVAS : [interprétation] Deux points de clarification. Je veux que le

 21   compte rendu soit extrêmement clair.

 22   Lorsqu'on nous a donné un nombre d'heures qui nous serait donné, à ce

 23   moment-là la décision qui a été prise par M. Prlic, la décision de ne pas

 24   témoigner, nous n'avons pas décidé d'appeler d'autres témoins au lieu du

 25   témoignage de M. Prlic, sinon on aurait pu avoir le beurre et l'argent du

 26   beurre, ce n'est pas possible. On aurait pu avoir tous les témoins

 27   nécessaires, puis le Dr Prlic. On aurait pu demander au Dr Prlic de

 28   témoigner et décider de ne pas citer la moitié de nos témoins. Nous


Page 42563

  1   considérons que tous ces témoins étaient essentiels pour bien présenter

  2   notre cause. Ça, je voulais absolument que ce soit dit. Ce n'est pas comme

  3   si, faute de grive, on aurait mangé des merles. Absolument pas.

  4   Et nous avions bien compris que la Chambre d'appel n'allait très

  5   certainement pas revenir sur la décision de la Chambre de première instance

  6   en ce qui concerne le temps. Donc soit d'autres personnes ont fait appel,

  7   nous ne l'avons pas fait, parce qu'on pouvait le faire ou ne pas le faire

  8   et nous avons préféré gérer le temps tel qu'il nous avait été donné, puis

  9   faire les ajustements nécessaires. C'est ce que nous avons fait. Comme dans

 10   tout procès d'ailleurs, c'est une situation qui évolue sans cesse. C'est

 11   fluctuant, on s'adapte. Nous avons fait les adaptations qui nous semblaient

 12   nécessaires à l'époque. L'un des problèmes, bien sûr, c'était les travaux

 13   de M. Prlic à propos de Tomanovic n'ont pas pu vous être présentés.

 14   Ensuite, pour ce qui est de l'article 98 bis pour l'acquittement, il

 15   est vrai que c'est une procédure anglo-saxonne, je suis d'accord avec vous.

 16   Dans l'esprit, en tout cas, de départ c'était comme ça, mais avec la

 17   modification du Règlement, ce n'est, à mon avis, rien de plus qu'une

 18   récapitulation de l'acte d'accusation. Et ça ne sert pas à grand-chose, à

 19   dire vrai. A mon avis, ça ne sert à rien d'avoir ce 98. Je l'aurais

 20   carrément annulé. C'est une perte du temps de ce Tribunal. Cela dit, la

 21   Chambre de première instance aussi revient sur ses décisions et dit :

 22   Maintenant qu'on a eu le jugement d'acquittement 98 bis, il n'a pas eu

 23   d'acquittement, dans ce cas-là, vous posez un véritable risque en matière

 24   de sécurité. On relève encore le seuil en ce qui concerne d'autres points

 25   comme la liberté provisoire pour raisons humanitaires, et cetera.

 26   Donc je tiens juste à dire que l'article 98 bis, tel qu'il est à

 27   l'heure actuelle n'est plus anglo-saxon, il n'est plus rien du tout. Je ne

 28   sais pas ce qu'il est. Et s'il n'y avait que moi, je dois dire que l'on


Page 42564

  1   jetterait par la fenêtre, parce que c'est une perte de temps et on ferait

  2   mieux de passer de la présentation des moyens à charge à la présentation

  3   des moyens à la Défense sans perdre son temps avec le 98 bis. Au départ,

  4   certes, il fallait prendre en compte tous les moyens de preuve, si un

  5   jugement, comme dans l'affaire Blagojevic, il n'y a pas eu d'appel, et

  6   cetera. Enfin, nous devrions clarifier tout cela.

  7   Nous avons apprécié les commentaires, la courtoisie, et la grande

  8   considération montrée par tout le monde au sein des Juges.

  9   Merci.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, est-ce que vous voulez intervenir

 11   sur le fait que M. Prlic voudrait poser des questions pendant cette phase

 12   qui va suivre l'audition de M. Praljak, peut-être jusqu'au mois d'octobre,

 13   dans l'attente de la décision de la Chambre concernant l'avis qu'elle a

 14   demandé à l'ADC.

 15   M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'en ce qui

 16   concerne ce point, je voudrais m'entretenir avec mon collègue, M. Scott, et

 17   d'autres membres du bureau du Procureur pour voir quelle est la position du

 18   bureau. Ce n'est pas quelque chose qui est tellement urgent et je pense que

 19   nous pourrions vous fournir une réponse ultérieurement.

 20   Cependant, ce que je souhaiterais rajouter et ce que je suis en mesure de

 21   dire dès maintenant, c'est que l'Accusation s'opposerait à une suspension

 22   de ce procès. Je sais que Me Karnavas a mentionné cette possibilité et je

 23   sais qu'il y a des désaccords au sein des équipes de la Défense. Mais à

 24   l'heure actuelle, l'Accusation pense que pour ce qui est des questions

 25   procédurales, étant donné qu'il y a une équipe de la Défense qui procède à

 26   un contre-interrogatoire, il y aura peut-être un deuxième contre-

 27   interrogatoire, ensuite nous passerons au contre-interrogatoire de

 28   l'Accusation, puis vous aurez, bien sûr, les vacances judiciaires qui


Page 42565

  1   commencent dans un peu plus de 15 jours, donc nous sommes, du point de vue

  2   procédural, dans une zone assez confortable et je pense que ceci nous

  3   permettra d'avoir suffisamment de temps pour envisager les différentes

  4   possibilités.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Pour être clair, je confirme ce que j'ai

  6   dit. Cependant, c'est mon client qui me donne les instructions et mon

  7   client ne m'a pas donné la permission d'insister et, par conséquent, je me

  8   retourne vers cette Chambre d'instance pour savoir si vous décidez de

  9   suspendre ce procès ou si vous acceptez la demande de M. Prlic. Peut-être

 10   que je ne me suis pas aussi bien exprimé que j'aurais pu en exprimant cette

 11   position. Je n'insiste pas là-dessus en tant que conseil. C'est ma

 12   position. Je pense que personne ne devrait se représenter personnellement

 13   devant un prétoire. C'est un vieil adage, un avocat qui se représente

 14   devant un prétoire n'est pas bien avisé. C'est un adage que nous avons.

 15   Je n'irais, bien sûr, jamais à l'encontre des souhaits de mon client

 16   et, par conséquent, je m'en remets à vous pour savoir quel sera le résultat

 17   de cette décision.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc la Chambre rendra une décision en la matière.

 19   Oui, Monsieur Prlic.

 20   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je voulais rajouter que je n'ai pas

 21   proposé de me représenter personnellement. Ce n'était pas mon idée et ce

 22   n'est pas nécessaire d'avoir une grande procédure juridique à ce sujet. Ma

 23   proposition était la suivante : que je sois le visage public de ma Défense

 24   pendant cette période jusqu'à ce qu'une solution soit trouvée, pendant la

 25   période transitoire. Donc je ne vais pas saisir cette possibilité de me

 26   représenter, c'était une solution intérimaire que je proposais.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Prlic, dans votre proposition, pour être

 28   très clair, j'ai compris que le cas échéant vous poserez des questions,


Page 42566

  1   mais est-ce que vos avocats ont aussi la possibilité de poser des questions

  2   ou bien vous dites : Non, pendant cette période, il n'y a que moi qui

  3   poserai des questions.

  4   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Je poserais des questions et si je le

  5   souhaite quelqu'un de mon équipe pourra poser ses questions, si je les

  6   autorise à le faire. Donc ce n'est pas vraiment très important. Mais je

  7   dois être honnête, je ne pense pas que des questions devront être posées,

  8   mais nous verrons. Je ne veux pas prendre des décisions avant que la

  9   situation ne se produise.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Prlic, imaginons que dans quelques

 11   instants, l'avocate de M. Coric est amenée à parler du gouvernement du HVO

 12   et de vous-même, puis M. Praljak va répondre et qu'à ce moment-là vous

 13   estimez que vous avez à demander une précision à  M. Praljak. Dans le même

 14   temps, il y a Me Karnavas qui se dit : Tiens, il faut que je pose telle

 15   question. Est-ce qu'à ce moment-là Me Karnavas doit vous demander

 16   l'autorisation avant que lui-même pose la question ?

 17   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Vous savez, je ne suis pas un juriste. Je

 18   suis diplomate de profession. Il y a une règle en diplomatie, ne jamais

 19   poser des questions hypothétiques. Donc je ne sais pas vraiment comment

 20   répondre à cette question hypothétique. Tout ce que je peux dire, c'est que

 21   je poserais des questions. Je ne suis pas en mesure de prévoir l'avenir. La

 22   seule chose que je voudrais préciser, c'est que je comprends tout à fait la

 23   position de mon avocat. Il ne veut pas prendre une place publique tant que

 24   la solution n'a pas été trouvée. Donc je voudrais faire partie de la

 25   solution et je ne voudrais pas qu'on crée un problème qui n'a pas raison

 26   d'être. Essayons de ne pas envisager une solution qui ne se produira peut-

 27   être jamais. J'essaie d'être constructif. 

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Monsieur Prlic, nous vous


Page 42567

  1   remercions pour votre attitude coopérative, mais je pense que la question

  2   n'est peut-être pas très claire.

  3   Est-ce que cela signifie que Me Karnavas et Me Tomanovic vont cesser de

  4   représenter votre client ? Est-ce que c'est ce que vous nous dites ici ?

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Ce que je souhaitais dire, c'est que tant

  6   que la question n'est pas résolue, le Dr Prlic posera lui-même les

  7   questions afin de s'assurer que si le Dr Prlic avance certains éléments, ce

  8   sera accepté. Comme je l'ai dit précédemment, compte tenu de ce que nous

  9   avons lu et de la manière dont nous l'avons lu et l'avons analysé - et nous

 10   avons vraiment décortiqué tout cela - nous avons vu la forme des questions,

 11   nous avons eu certains éléments où il y avait certaines insinuations et

 12   nous pensons que, si vous voulez, nous irions à l'encontre de sa cause

 13   plutôt que d'aller dans son sens. C'est notre préoccupation. A partir du

 14   moment où j'avance quelque chose et que la Chambre d'instance n'a pas

 15   l'impression que j'avance dans la cause, c'est à ce moment-là que je pense

 16   que je ne sers plus cette cause. A l'heure actuelle, il y a des allégations

 17   consistant à dire que je serais faux ou qu'il y aurait des problèmes liés à

 18   mon honnêteté. Donc c'est la raison pour laquelle nous proposons ceci,

 19   parce que nous pensons que nous n'avons rien fait de mal, que nous avons

 20   suivi les instructions qui nous avaient été données, que nous avons

 21   consulté au préalable notre client, que nous avons fourni à cette Chambre

 22   d'instance ce que nous pensions être toute la vérité. La Chambre d'instance

 23   a l'impression de dire que nous nous sommes contentés de donner des

 24   réponses vagues.  Lorsque vous regardez ceci, ce que la Chambre d'instance

 25   nous dit, c'est que nous avons menti, pour être très clair. Donc si tel est

 26   le cas, ce qui m'inquiète, c'est que lorsque je soulève une objection ou

 27   lorsque j'avance quoi que ce soit, la Chambre d'instance ne me fera peut-

 28   être pas aussi confiance qu'avant.


Page 42568

  1   Si vous vous souvenez, Monsieur le Juge Trechsel, lorsqu'un autre accusé a

  2   fait des références à mon encontre, il n'y a pas eu de réaction. J'ai

  3   répondu publiquement de manière très agressive. Pourquoi ? Parce que

  4   j'avais l'impression qu'à ce moment-là, soit la personne aurait dû

  5   présenter des preuves ou se taire, soit il aurait dû trouver des preuves,

  6   soit il aurait dû être réprimandé. Et c'est la raison pour laquelle la

  7   manière dont j'ai réagi signifiait que si je n'avais pas réagi, on aurait

  8   donné l'impression que les allégations qui étaient présentées par la

  9   personne concernée, l'accusé dans votre affaire, étaient totalement vraies

 10   et totalement complètes.

 11   Nous prenons ceci, par conséquent, très au sérieux. Je peux vous assurer de

 12   cela. J'ai consacré tout mon week-end à consulter des avocats et je suis

 13   prêt à faire venir des experts pour résoudre cette question, parce que je

 14   considère que ma responsabilité professionnelle en tant qu'avocat est très

 15   importante.

 16   Je peux faire preuve de beaucoup d'agressivité, ce n'est peut-être pas le

 17   style que tout le monde apprécie, mais pour ce qui est de la déontologie,

 18   je sais très bien quelle est la ligne que je ne dois pas traverser.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ce n'est pas ce que je voulais

 20   aborder. Je ne souhaite pas du tout aborder ceci, parce que je pense que ce

 21   ne serait pas du tout approprié. Mais j'aimerais savoir quelle sera votre

 22   attitude dans le prétoire jusqu'à ce cette affaire soit résolue. Est-ce que

 23   vous continuerez à être dans ce prétoire, est-ce que vous allez continuer,

 24   le cas échéant, à soulever des objections qui est, en fait, une activité

 25   classique d'un conseil ? M. Prlic a bien dit qu'il n'était pas juriste de

 26   profession. Ou est-ce que vous allez de facto vous retirer, vous ne serez

 27   plus présent dans le prétoire ? Nous aimerions savoir ce que nous pourrons

 28   attendre de vous ?


Page 42569

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42570

  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Personne ne se retire de cette affaire. Je

  2   ne peux pas me retirer sans la permission de cette Chambre de première

  3   instance, et deuxièmement, du greffe, ce qui est encore le plus important.

  4   Il y a une pratique qui a été établie au sein de ce Tribunal. Il y a eu le

  5   cas dans une autre affaire où un client a insisté pour que je me retire, et

  6   Mme Tomanovic et moi-même sommes restés sur l'affaire jusqu'à la fin. Donc

  7   nous ne nous retirons.

  8   Est-ce que cela signifie que nous serons tous les deux présents dans

  9   le prétoire pour la totalité du temps ? La réponse est non. La raison pour

 10   cela est la suivante : étant donné que cette affaire est assez compliquée,

 11   nous avons également d'autres tâches a nous acquitter et nous devons

 12   travailler sur d'autres éléments qui ne sont pas liés au prétoire mais qui

 13   sont liés à cette affaire. Lorsque nous sommes tous les deux ici, nous

 14   pensons que nous ne pourrons pas avancer dans d'autres domaines. Nous

 15   pensons que ce n'est pas toujours nécessaire, parce que nous sommes dans un

 16   processus, je pense que ce n'est pas un secret pour qui que ce soit, nous

 17   sommes dans des phases préliminaires pour nous organiser afin de présenter

 18   notre mémoire de clôture. Nous ne nous retirons pas, par conséquent, le Dr

 19   Prlic ne va pas rester en suspens sans une protection juridique digne de ce

 20   nom. Donc pour les besoins de ce procès, le Dr Prlic avait une proposition.

 21   Je pense que c'est une manière d'aider ses conseils à un moment où ils ont

 22   besoin de lui, parce que nous pensons que nous allons peut-être à

 23   l'encontre de sa cause et, par conséquent, il prend ses responsabilités

 24   afin de poser des questions le cas échéant devant ce prétoire, et nous

 25   continuerons, bien sûr, à lui prêter main-forte en pleine qualité de

 26   conseil et de co-conseil.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis peut-être très naïf, mais

 28   Maître Karnavas, ma question est en fait très simple. Je  ne pensais pas du


Page 42571

  1   tout à un retrait de l'affaire, parce que ce que vous nous avez dit n'est

  2   pas du tout nouveau pour moi. Mais la question est de savoir si vous allez

  3   être présent dans ce prétoire ?

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Et vous allez soulever une objection

  6   lorsque vous jugez nécessaire pour le compte de M. Prlic ?

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, je crois que tout le monde est là au

  8   niveau de l'équipe de la Défense pour aider l'accusé. Je pense toujours

  9   qu'un accusé a besoin d'aide, et s'il a besoin d'aide je suis prêt à prêter

 10   main-forte. Ceci dit, nous ne pensons pas qu'à ce stade dans le procès et

 11   compte tenu de ce qui se passe dans le prétoire, que nous avons besoin

 12   d'être nécessairement actif.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Par conséquent, vous allez continuer

 14   à représenter quelque peu M. Prlic mais pas dans le cadre d'interrogatoire

 15   ?

 16   M. KARNAVAS : [interprétation] Ce n'est pas quelque peu, nous travaillons

 17   six ou sept jours par semaine. Nous allons continuer au sein de ce

 18   prétoire, si le Dr Prlic souhaite un protagoniste plus actif, ce sera le

 19   cas. Je pense que c'est une bonne chose. Par conséquent, si cela devient

 20   nécessaire, le cas échéant nous interviendrons également.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Et de ce qui va se passer en

 22   pratique, c'est que 1D deviendra l'affaire Praljak, être praljakisé [phon].

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] En fait, si vous vous souvenez, nous étions

 24   l'équipe qui a soumis cette requête pour permettre à l'accusé de poser des

 25   questions en plus de ses conseils. Ma réaction pour être honnête,

 26   j'aimerais que le procès soit suspendu, parce que je pensais qu'il faut

 27   lever cette zone d'ombre, et mon client ne veut pas que le procès s'arrête,

 28   quelles que soient les circonstances. Il propose d'intervenir et de nous


Page 42572

  1   aider pendant ce procès. Bien sûr, c'est son procès, et il est tout à fait

  2   habilité à prêter main-forte à sa Défense. Il pourra donc être un

  3   participant plus actif.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Cette question a été soumise à cette

  5   Chambre d'instance, nous allons donc délibérer. Je pense que nous voyons

  6   plus clair.

  7   M. KARNAVAS : [interprétation] Je m'excuse de ne pas avoir été aussi clair

  8   que j'aurais pu l'être.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense que vous avez fait de votre

 10   mieux. Je vous remercie.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Karnavas, pour que je comprenne bien, pour

 12   que je comprenne bien, donc vous allez continuer à assister M. Prlic, puis

 13   si M. Prlic estime qu'il est dans son devoir de poser des questions, il

 14   posera des questions. Si vous, vous estimez dans votre devoir à un moment

 15   donné de faire une objection ou je ne sais quoi, vous interviendrez parce

 16   que vous êtes avocat. Bon. Donc pour nous c'est très clair. Enfin, pour

 17   moi, c'est très clair.

 18   Monsieur Scott.

 19   M. SCOTT : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Juge, je suis Ken Scott et

 20   je représente l'Accusation.

 21   Ce que l'on a très clairement ici avec tout le respect que je vous dois, ce

 22   procès maintenant c'est quelque chose que tout le monde décide de réfléchir

 23   à haute voix, rien de plus. On a dit beaucoup de choses, les choses

 24   évoluent sans cesse en réponse aux questions du Juge Trechsel, on a encore

 25   d'autres évolutions, les choses sont claires ou moins claires, donc on ne

 26   sait pas très bien ce qu'il va se passer. On ne sait pas très bien quelle

 27   va être la décision de la Chambre. Il y aura peut-être appel d'une partie

 28   ou d'une autre. Donc je pense qu'on ne peut décider quoi que ce soit de


Page 42573

  1   façon spontanée avec ce type de problème.

  2   Comme vous avez dit, Monsieur le Président, il y a quelques minutes,

  3   tout le monde dans cette affaire, mis à part M. Prlic et Me Karnavas, ont

  4   énormément réfléchi à tout cela. Mais la Chambre n'a pas été avertie. Donc

  5   maintenant nous sommes en train de faire des commentaires extrêmement

  6   spontanés mis à part M. Prlic et Me Karnavas, qui eux, ont bien réfléchi à

  7   cela, en revanche.

  8   Donc la Chambre a dit à plusieurs reprises qu'elle allait rendre une

  9   décision, mais nous ne voudrions pas que la Chambre ne rende sa décision

 10   avant que l'Accusation ait eu le droit de bien envisager tous les tenants

 11   et les aboutissants de cette affaire et préparer sa réponse par écrit. Et

 12   étant donné l'importance des problèmes soulevés, étant donné de

 13   l'importance aussi d'avoir un compte rendu correct en vue d'un appel

 14   éventuel, Me Karnavas et M. Prlic, le cas échéant, devraient écrire comment

 15   ils comptent continuer, poursuivre ce procès et le faire par écrit. Parce

 16   que là, pour l'instant, on a une cible mouvante, rien de plus, puisque les

 17   choses changent sans cesse. Tout évolue. Alors ce n'est pas simple dans un

 18   prétoire, quand même. Dans un prétoire, on n'est pas en train d'inventer

 19   les règles au fur et à mesure. On a des règles, les règles qui sont les

 20   mêmes pour tout le monde, des règles qui sont les mêmes pour tout le monde,

 21   et comme ça tout le monde peut bien s'y préparer.

 22   Donc la position de l'Accusation est simple. Avant que toute décision

 23   soit prise, il convient d'avoir des écritures de Me Karnavas et peut-être

 24   aussi de M. Prlic qui définiraient bien leur position par écrit.

 25   L'Accusation ainsi pourra répondre à ces écritures par écrit aussi, ensuite

 26   la Chambre, à mon avis, sera en bien meilleure position pour rendre une

 27   décision informée.

 28   Je vous remercie.


Page 42574

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre, bien entendu, va délibérer sur

  2   votre demande.

  3   Une petite correction au transcript, page 75, ligne 2, ce n'est plus à

  4   l'écran. Je ne suis pas encore le président Putin. Alors il faudrait

  5   modifier et enlever Putin.

  6   Voilà nous allons maintenant faire la pause de 20 minutes et nous

  7   reprendrons dans 20 minutes.

  8   --- L'audience est suspendue à 17 heures 37.

  9   --- L'audience est reprise à 18 heures 01.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. La Chambre va rendre

 11   une décision orale sur la question des écritures.

 12   La Chambre demande aux parties d'adresser à la Chambre des écritures. La

 13   Chambre impose donc à la Défense Prlic de nous remettre ses écritures au

 14   plus tard pour mercredi et demande à M. le Procureur et aux autres Défenses

 15   de nous faire part également par écrit de leurs positions éventuellement

 16   pour lundi 9 heures au plus tard. Donc Me Karnavas nous adressera ses

 17   écritures d'ici à mercredi, après quoi les autres Défenses et M. le

 18   Procureur auront jusqu'à lundi 9 heures pour nous faire part de leurs

 19   positions par écrit.

 20   Bien. Donc tout est clair. Nous allons maintenant continuer. Je vais

 21   redonner la parole à Me Tomic.

 22   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

 23   Nous allons passer maintenant au deuxième classeur, c'est l'un des deux

 24   grands classeurs rouges. Il y est dit qu'il s'agit du classeur numéro 2.

 25   C'est inscrit dessus "Classeur numéro 2." Donc il n'est guère difficile de

 26   le trouver. On va commencer avec un document qui est le P 00309.

 27   Q.  Monsieur Praljak, ici nous avons un document qui est déjà versé au

 28   dossier, comme l'a déjà dit ma consoeur, Mme Alaburic, et elle vous l'a


Page 42575

  1   d'ailleurs montré ce document pendant son contre-interrogatoire. Il s'agit

  2   d'instructions ayant force d'obligation et portant sur la mise en œuvre de

  3   la réglementation en vigueur et les possibilités du prononcé de sanctions

  4   au pénal pour délits commis à l'encontre des forces armées de la HZ HB.

  5   Cela a été adopté par le responsable du département à la défense, suite à

  6   la proposition du département de la justice, et il s'agit de délits qui

  7   sont énumérés et qui se rapportent aux forces armées.

  8   Parmi ces délits, le premier des délits est celui de : "Non-exécution

  9   des ordres ou refus d'exécuter les ordres reçus." Et s'agissant de ce

 10   délit-là, il y a une peine de prison qui est prévue allant de trois mois à

 11   dix ans d'incération. Le voyez-vous, Monsieur Praljak ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Avant de poursuivre avec mes questions, je voudrais préciser afin qu'il

 14   n'y ait pas de confusion. Dans cette partie de mon contre-interrogatoire je

 15   me servirai du mot "commandant." Quand je dis "commandant," je pense à un

 16   commandant particulier, pas le commandant suprême de l'armée, mais je parle

 17   de commandant à partir du niveau de la section du peloton, puis au-delà,

 18   suivant la hiérarchie des structures.

 19   Monsieur Praljak, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que l'exécution

 20   d'un ordre, c'est le fondement même de l'ordre et de la discipline dans

 21   toute armée ?

 22   R.  Oui.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je me permets de revenir sur le

 24   document. Je voulais poser la question la dernière fois qu'on a vu ce

 25   document, puis pris par le temps, j'ai différé ma réponse. Mais comme Me

 26   Tomic revient dessus, autant en profiter.

 27   Sans conteste - et si je fais une erreur, n'hésitez pas à me corriger - ce

 28   document fait référence aux articles de l'ancien code pénal de l'ex-


Page 42576

  1   Yougoslavie. Ce sont les articles de l'ex-Yougoslavie. Et vous remarquerez,

  2   ça n'a pas dû vous échapper, qu'à l'article 226, il y a un petit

  3   commentaire où on dit qu'en temps de paix, la peine de prison peut être

  4   prononcée, mais en temps de guerre, ça doit être plus sévèrement réprimé et

  5   ça peut aller jusqu'à la peine de mort. Donc ça c'est très bien, il n'y a

  6   rien à dire.

  7   Simplement, il me semble qu'il y a quelque chose qui manque. C'est

  8   que quand on lit le texte, on a l'impression que ça s'applique uniquement

  9   aux actes commis contre les forces armées de la HZ HB. Alors je me mets à

 10   la place d'un officier qui n'a pas fait beaucoup d'études de droit, qui

 11   sait lire et il dit : Tiens, ça s'applique si on commet un acte contre moi

 12   ou mes camarades, par contre pour les actes commis contre l'ABiH, là il n'y

 13   a rien.

 14   Alors que vous en pensez ? Est-ce que c'est une erreur de plume ou ça

 15   a été fait intentionnellement ou un manque de vigilance du rédacteur

 16   juriste de l'époque ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une omission, Monsieur le Juge

 18   Antonetti. Hélas, tout cet ensemble -- et on a pris, par exemple, la loi

 19   fédérale. On dit, par exemple, c'est la loi fédérale qui était en vigueur

 20   pour l'armée populaire yougoslave. Exception faite du désir véritable de M.

 21   Stojic, qui a signé ces instructions, et des opinions du juriste qui lui

 22   est venu en aide pour tout ceci, ceci est potentiellement applicable au

 23   niveau de la JNA ou à une autre armée qui existe lorsque l'Etat existe au

 24   plein sens de ce terme, c'est-à-dire législatif, exécutif et autre. Donc

 25   non seulement pour le HVO et l'ABiH, mais ceci n'était pas applicable, pas

 26   même au sein de l'armée populaire yougoslave depuis deux ans, car deux

 27   années avant de le confirmer, c'est-à-dire avant l'attaque de la JNA contre

 28   la Croatie, il y a eu beaucoup de gens qui ont fui la JNA, des officiers


Page 42577

 1  

 2  

 3  

 4   

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42578

  1   hauts placés et des soldats. Et au fil du temps, il y a eu beaucoup de

  2   Musulmans qui ont fui et beaucoup de Serbes. Très nombreux étaient les

  3   Serbes de Serbie qui étaient des conscrits militaires et qui ont fui à

  4   l'étranger. Tous ceux qui avaient de l'argent ou des relations, et ainsi de

  5   suite, ont fui, donc tout le système. Il n'y avait pas que le HZ HB et la

  6   Yougoslavie, tout était en démantèlement. Mis à part cette bonne volonté

  7   qu'on a eue de le faire, et pour être sincère, depuis le début à la fin,

  8   ceci était tout à fait inapplicable, absolument.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 10   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Q.  Ma dernière question, et vous avez répondu par l'affirmative, à savoir

 12   que l'exécution des ordres, c'était le fondement même de l'ordre et de

 13   discipline au sein de tout armée. Alors ma question suivante est celle-ci :

 14   le commandant qui a donné un ordre est la personne qui sait si son

 15   subalterne a refusé d'exécuter l'ordre ou s'il a tout simplement ignoré cet

 16   ordre, comme si de rien n'était. Ai-je raison ?

 17   R.  Oui, vous avez raison.

 18   Q.  Je voudrais maintenant qu'on se penche sur le 00293. Il s'agit d'un

 19   règlement portant service militaire, qui est déjà versé au dossier. On l'a

 20   vu à maintes reprises dans ce prétoire. J'aimerais qu'on se penche sur

 21   l'article numéro 3.

 22   Il s'agit donc d'un règlement portant discipline militaire. Alors

 23   quelles sont les enfreintes à la discipline militaire. On définit donc ce

 24   qu'est une entorse à la discipline. Et au numéro 7 dans l'article, on voit

 25   :

 26   "Perpétration d'un délit au pénal où il est prévu une procédure

 27   d'office.

 28   Alors, Monsieur Praljak, est-ce que vous êtes au courant de cette


Page 42579

  1   disposition ?

  2   R.  Non, la commission d'un délit au pénal, ça ne tournerait pas sous la

  3   coupe de la discipline militaire. Ça, je ne comprends pas comment. Pour

  4   être sincère, je n'arrive pas à comprendre cela.

  5   Q.  Monsieur Praljak, je vais mentionner à titre complémentaire - je crois

  6   qu'il y a un Juge qui a un micro qui est branché, j'entends des pages

  7   tourner et ça génère du bruit dans nos écouteurs.

  8   Alors, Monsieur Praljak, je vais être franche. Jusqu'aux questions posées

  9   par Mme Alaburic, je n'ai pas eu l'intention de vous interroger au sujet de

 10   la réglementation, parce que dans votre interrogatoire principal, si j'ai

 11   bien compris, vous avez bien précisé que la réglementation, vous n'avez pas

 12   eu le temps de la lire et vous ne les avez pas lues, ces dispositions. Vous

 13   n'étiez pas au courant.

 14   R.  En partie, pas intégralement. L'essentiel de ce qui concernait le

 15   fonctionnement, oui, j'ai pris connaissance, mais je n'ai pas étudié le

 16   détail à l'époque.

 17   Q.  Mais j'ai pu constater que vous avez commenté avec Mme Alaburic

 18   certaines dispositions et je vais vous poser des questions au sujet de

 19   certaines dispositions que vous avez examinées avec elle. Et il y a

 20   justement ce règlement de discipline militaire. Je ne vais pas aller au-

 21   delà.

 22   Je vous renvoie maintenant à l'article numéro 8. On l'a déjà vu celui-là.

 23   On a vu que ce délit au pénal fait partie des infractions à la discipline

 24   militaire et l'article 8, lui, nous dit ce qui suit. On se penche dessus

 25   ensemble si vous le voulez bien. Les deux dernières phrases disent :

 26   "Si un délit au pénal," là on dit un terme en croate, mais il n'y a

 27   pas de confusion possible, donc "s'il y a commission d'un délit au pénal,

 28   infraction à la discipline, l'auteur peut répondre devant un tribunal


Page 42580

  1   militaire pour ce qui est d'une entorse à la discipline, aussi au cas où

  2   les intérêts du service le requéraient. La procédure devant ce tribunal de

  3   discipline militaire doit être conduite indépendamment du cours et de

  4   l'issue de la procédure au pénal."

  5   Avez-vous eu connaissance de ceci ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  Je vous renvoie maintenant à l'article 14.

  8   R.  Mais si je puis ajouter, je ne comprends pas, pour être tout à fait

  9   sincère, ce qui est dit ici. Comment un acte au pénal peut-il faire l'objet

 10   d'une procédure en matière de discipline militaire ? Enfin, je n'étais pas

 11   au courant de l'existence de ceci, mais vous pouvez aller de l'avant.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous ne comprenez pas.

 13   Effectivement la matière est très complexe, mais elle peut avoir des

 14   conséquences sur la mise en œuvre de l'article 7(3) du Statut. 

 15   Comme vous avez été commandant du HVO, vous savez que les officiers ont le

 16   droit de prononcer des peines disciplinaires. Par exemple, le commandant de

 17   la brigade peut dire à son soldat : Vous allez faire 15 jours de prison

 18   disciplinaire, parce que vous vous êtes mal comporté, vous avez été

 19   insolent, et cetera. Donc au sein même de l'unité, il va rester 15 jours

 20   "en prison," entre guillemets, militaire pour purger sa peine

 21   disciplinaire. Puis, comme le dit le texte, Général Praljak, il y a aussi

 22   des sanctions disciplinaires qui ne relèvent plus du commandant de brigade,

 23   mais de l'instance disciplinaire, par le tribunal disciplinaire et d'où

 24   votre interrogation. Vous dites : Mais s'il y a un crime, pourquoi il y

 25   aurait une sanction disciplinaire ? Là vous avez tout à fait raison, parce

 26   qu'en matière de crime dire à un soldat : Vous avez tué un civil et vous

 27   allez faire 15 jours de prison, ça serait un scandale, et à ce moment-là il

 28   faut que le procureur soit saisi, d'où la difficulté pour un commandant de


Page 42581

  1   brigade de savoir qu'est-ce qui relève de sa propre compétence et qu'est-ce

  2   qui relève de la compétence du procureur militaire.

  3   Alors vous, en tant que commandant du HVO, est-ce que vous avez été

  4   placé devant cette situation où vous ne saviez pas s'il fallait sanctionner

  5   un soldat qui s'était mal comporté qui, par exemple, avait volé une

  6   voiture, est-ce que ça relève du domaine disciplinaire ou est-ce que ça

  7   relève du procureur militaire ? Est-ce que vous avez été confronté à ce

  8   type de situation; et si oui, comment vous avez résolu le problème ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce type de situations, Messieurs les

 10   Juges, je me suis retrouvé dans ce type de situations. Pour moi, c'était

 11   clair. Les mesures disciplinaires c'étaient les entorses. Quand, par

 12   exemple, il y avait un soldat qui s'était saoulé, qui avait fait une

 13   infraction pas trop grave, où je l'aurais trouvé à ne pas accomplir sa

 14   mission ou ses devoirs dans la tranchée comme prévu, et il était clair que

 15   les vols et tous ce qui étaient plus graves que les vols, c'étaient des

 16   délits au pénal et que cela était censé être rapporté à qui de droit, à

 17   savoir de façon à ce qu'il y ait une procédure au pénal de diligentée.

 18   A une occasion, si vous le permettez de dire, à Sunja, on a chopé un

 19   soldat en train de voler et je l'ai fait passer à la prison de Sisak. Puis

 20   sur mon argent, j'ai payé un avocat pour sa défense. Je ne suis pas un

 21   profane, je connais quand même la façon de procéder. Je ne suis pas un

 22   expert, mais je ne suis pas le plus complet des profanes. Je l'ai donc fait

 23   passer vers une prison, je l'ai remis entre les mains d'un procureur et

 24   j'ai payé un avocat pour sa défense.

 25   Donc tout ce qui est délit au pénal doit être renvoyé au tribunal.

 26   Aucun commandant à quelque niveau que ce soit, et encore moins un

 27   commandant d'état-major principal, ne saurait interféré dans ce qui est

 28   prévu par la loi comme étant un délit au pénal, à commencer par le vol ou


Page 42582

  1   une rixe où il y aurait séquelles pour l'une des parties ou si, par

  2   exemple, dans une auberge, ils se seraient un peu bousculés l'un, l'autre

  3   et s'il n'y avait pas de séquelles, là oui, on pouvait considérer qu'une

  4   mesure disciplinaire pourrait être suffisante.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Un autre exemple qui va peut-être permettre de vous

  6   éclairer.

  7   Imaginons que vous constatez qu'un soldat d'une des unités a, à son

  8   poignet, une montre suisse, il a dans sa poche un saucisson hongrois et il

  9   a une veste d'un grand couturier français. Vous lui demandez d'où ça vient

 10   et ce soldat dit : Butin de guerre. Qu'est-ce que vous décidez ? Sanction

 11   disciplinaire ou procureur militaire ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le procureur militaire. Il ne peut pas

 13   avoir un butin de guerre qu'il se soit approprié. Donc il a commis l'acte

 14   pénal de vol, et comme j'ai fait pour le policier de Ljubuski, j'aurais

 15   porté plainte. Je l'aurais dénoncé. J'aurais dit : Un tel ou tel a fait,

 16   donc à commencer par le policier jusqu'à qui que ce soit. J'irais porter

 17   plainte. Il ne s'agit pas là d'une mesure disciplinaire, c'est une

 18   infraction pénale. Il a volé quelque chose. Il n'y a pas de butin de

 19   guerre. Si ce sont des armes ou autres, il faut déclarer, il faut faire

 20   enregistrer. Donc si on arrive à trouver quelque chose dans une maison, il

 21   faut le faire répertorier à la brigade, la police militaire, le SIS, le

 22   commandant, le supérieur, qui après doit faire enregistrer dûment. Donc un

 23   butin de guerre, ça ne relève pas de tout un chacun de choisir ce qui lui

 24   appartient.

 25   Mme PINTER : [interprétation] Excusez-moi, consoeur. Page 81 du compte

 26   rendu d'audience, la réponse du général Praljak n'a pas été consignée. Il

 27   parle des tribunaux disciplinaires. La dernière chose qui a été

 28   enregistrée, c'est qu'il ne comprend pas, mais il a dit, entre autres : "Je


Page 42583

  1   ne sais même pas si une telle chose a existé." On peut vérifier cela sur

  2   l'enregistrement audio. Je ne voulais pas que cela reste sans traces dans

  3   le compte rendu d'audience. On peut reprendre la question éventuellement.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je sais, c'est qu'il n'y avait

  5   absolument pas de juristes, donc les tribunaux disciplinaires militaires

  6   n'ont pas fonctionné. Je ne sais pas s'il y a eu décision ou pas, peu

  7   importe, mais il n'y avait pas de personnel qualifié, pas de juristes. Vous

  8   pouvez prendre toutes les décisions que vous voulez, mais il était

  9   difficile même d'avoir les autres, je ne sais pas comment ils s'appellent

 10   les autres tribunaux militaires pénaux.

 11   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Très bien.

 12   Q.  Monsieur Praljak, je poursuis. Il s'agit toujours du même sujet.

 13   La question est de savoir, que se passe-t-il à partir du moment où

 14   nous avons en même temps une infraction disciplinaire et commission d'un

 15   acte pénal ? L'article 14, c'est ce que j'ai proposé d'examiner. Prenons

 16   l'alinéa 4 où il est dit :

 17   "La prescription pour engager des poursuites lorsqu'il y a eu une

 18   infraction disciplinaire qui constitue en même temps un acte au pénal

 19   commence à partir du moment où commence la prescription également pour

 20   l'acte au pénal."

 21   Etes-vous au courant de ces dispositions ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Prenons l'article 29, si vous voulez bien maintenant. A l'article 29,

 24   il est disposé :

 25   "A partir du moment où l'officier autorisé apprécie que l'infraction

 26   à la discipline militaire a constitué en même temps un acte au pénal,

 27   l'affaire est référée selon la procédure réglementaire au procureur

 28   compétent. S'il estime que cela est dans l'intérêt du service, il prend les


Page 42584

  1   mesures afin que cette infraction à la discipline militaire soit tranchée

  2   dans le cadre d'une procédure disciplinaire également."

  3   Est-ce que vous étiez au courant de cela ?

  4   R.  Non, Madame. Pendant tout le temps, j'ai estimé que la procédure

  5   disciplinaire était une chose et que si on a commis un acte au pénal,

  6   c'était référé au tribunal et il n'y avait plus de procédure disciplinaire.

  7   C'est ce que je pensais. Indépendamment de la disposition que je vois là,

  8   je pense qu'il en est ainsi encore aujourd'hui.

  9   Q.  Prenons l'alinéa suivant, le même article :

 10   "Lorsque l'infraction à la discipline militaire revêt un caractère d'acte

 11   au pénal commis contre les forces armées où, conformément aux dispositions

 12   du code pénal, il est possible de décider dans le cadre d'une procédure

 13   disciplinaire, l'officier supérieur transfert l'affaire à l'officier

 14   compétent afin de prendre la décision sur cette infraction disciplinaire."

 15   R.  Je ne comprends pas. S'il s'agissait d'une infraction disciplinaire qui

 16   est un acte au pénal, c'est un acte au pénal. Ce n'est plus une affaire

 17   disciplinaire, donc il faut traduire cela devant les tribunaux. Je n'arrive

 18   pas à comprendre que l'infraction disciplinaire puisse revêtir les

 19   caractéristiques d'un acte au pénal et que cela soit, néanmoins, traité

 20   comme une infraction disciplinaire. Ça me semble --

 21   Q.  Monsieur Praljak, il n'est pas mon rôle d'expliquer quoi que ce soit

 22   ici ou d'élucider des choses. Je peux uniquement vous soumettre les textes

 23   qui étaient en vigueur à l'époque et vérifier avec vous si vous étiez au

 24   courant de cela ou non. Est-ce que vous étiez mal informé sur certaines

 25   choses et est-ce que si vous aviez été bien informé, vous auriez agi

 26   autrement ? Mais c'est là que se termine le rôle que j'ai à jouer peu

 27   importe si on trouve ces dispositions logiques ou pas.

 28   R.  Je n'aurais pas agi autrement même si j'avais été pleinement informé de


Page 42585

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9   

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42586

  1   cela. Si j'avais intégralement connu ce texte. Pour moi, des gestes

  2   disciplinaires auraient été disciplinaires et les actes au pénal, actes au

  3   pénal.

  4   Q.  Très bien. Prenons maintenant l'article 69 --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant l'article 69, il y a l'article 63 qui peut,

  6   Général Praljak, permettre de répondre à vos interrogations. Vous voyez

  7   l'article 63 qui dit que si, en quelque sorte, l'enquête aboutit à ce

  8   qu'une autre procédure soit établie, à ce moment-là, l'officier doit

  9   décider d'envoyer cette enquête à l'autorité compétente. Donc il se peut

 10   qu'à l'origine un officier se trompe, fait une enquête à caractère

 11   disciplinaire, puis se rend compte qu'à ce moment-là c'est un crime de la

 12   compétence du Procureur militaire. Donc est-ce que l'article 63 peut régler

 13   ce problème ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, justement je suis en

 15   train d'affirmer tout à fait clair ce que je disais à mes officiers. La

 16   discipline, c'est une chose et on sanctionnera. Tout ce qui constitue un

 17   acte au pénal sera dénoncé et il va y avoir des poursuites au pénal.

 18   Alors je ne sais pas si cet article l'éclaircit ou pas. Je peux vous

 19   dire quelle était ma position sur le plan juridique, comment est-ce que

 20   j'ai dirigé mes hommes et qu'est-ce que je disais à mes hommes. Donc je

 21   disais : Il y a la discipline, dans la mesure du possible, bien sûr, parce

 22   que j'ai dit qu'elles étaient mes intentions. Puis d'autre part, il y a des

 23   actes au pénal et tout ça doit être traduit devant les tribunaux, parce que

 24   les officiers ne sont pas appelés à décider de la culpabilité de quelqu'un

 25   lorsqu'il s'agit d'un acte au pénal.

 26   D'ailleurs le droit international, il faut savoir que j'ai cherché à le

 27   rendre tout à fait clair à mes hommes dans la HV et HVO. Donc ils savaient

 28   qu'il y a toute une série de dispositions et qu'à partir du moment où on se


Page 42587

  1   retrouve devant les tribunaux, il faut savoir qu'il y a 16 ou 17 points qui

  2   doivent être satisfaits pour qu'il y ait un procès équitable, la publicité

  3   des débats, et ainsi de suite.

  4   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Donc l'article 69, c'est le dernier article que je vais vous soumettre

  6   pour en terminer avec ce sujet. Il se lit comme suit :

  7   "A partir du moment où l'infraction disciplinaire a été commise par le même

  8   acte par lequel il y a eu commission de l'acte au pénal, l'officier qui est

  9   autorisé à transférer devant le tribunal disciplinaire militaire décide si

 10   les intérêts spécifiques du service exige que l'auteur réponde également

 11   devant le tribunal disciplinaire militaire pour infraction disciplinaire.

 12   A partir du moment où il a jugé que les intérêts du service n'exigent pas

 13   que l'auteur réponde devant un tribunal militaire disciplinaire, l'officier

 14   visé à l'alinéa premier de cet article met fin à la procédure disciplinaire

 15   et porte plainte au pénal devant le Procureur compétent."

 16   Etiez-vous au courant ?

 17   R.  Non, je n'étais pas au courant et je ne comprends pas cela. Cela sort

 18   du champ des choses que je comprends.

 19   Q.  Très bien. Alors prenons le document suivant, 3D 03027. Ici nous avons

 20   un document du colonel Blaskic en date du 31 août 1993. Le document est

 21   adressé au Grand état-major du HVO, au IZM, poste de commandement avancé de

 22   Citluk et qu'on a intitulé le document : "Rapport." Je vous propose de

 23   donner lecture de quelques extraits. Je ne donnerai pas lecture de tous les

 24   noms parce que ça prendrait trop de temps. Le document se lit comme suit :

 25   "En date du 13 août 1993, j'ai engagé la procédure afin d'établir un

 26   constat disciplinaire contre," et les noms, "qui, le 10 août 1993, ont fait

 27   irruption dans les locaux de la police civile, ont désarmé les policiers,

 28   leur ont confisqué leurs armes et leurs véhicules.


Page 42588

  1   Le constat a été dressé par la suite et on l'a entrepris comme suit :

  2   "Contre," puis nous avons la liste des auteurs de leurs noms, "on a

  3   présenté des plaintes au pénal pour comportement violent tel que visé à

  4   l'article 204, alinéa 2, repris du code pénal de la République socialiste

  5   de Bosnie-Herzégovine."

  6   Et au point 2, il est dit :

  7   "Ranko Milicevic, qui est commandant adjoint, a été relevé de ses

  8   fonctions."

  9   Monsieur Praljak, je souhaite vous poser la question suivante, en fait, je

 10   suis un petit peu troublée suite aux réponses que vous m'avez apportées

 11   disant que vous ne saviez pas que les infractions disciplinaires peuvent

 12   constituer des actes au pénal -- enfin, ce que cela entraîne, mais

 13   j'aimerais savoir si ce document n'illustre pas précisément le cas de

 14   figure que je vous ai décrit. Donc nous voyons que de toute évidence, il y

 15   a eu infraction disciplinaire et nous voyons qu'en même temps il y a eu un

 16   comportement violent, à savoir il y a eu un acte pénal. Donc nous voyons

 17   qu'il y a une plainte au pénal et nous voyons que le supérieur compétent a

 18   décidé de sanctionner parce qu'il a relevé l'auteur de ses fonctions. Est-

 19   ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que c'est un bon exemple ?

 20   R.  Oui, c'est exact, Madame. Il a été relevé de ses fonctions, des

 21   poursuites au pénal sont engagées contre lui, donc il ne peut plus garder

 22   ses fonctions, mais je pensais qu'en plus il y aurait 30 jours de détention

 23   à cause de cet acte. C'est ainsi que j'ai interprété les dispositions que

 24   vous m'avez présentées. Bien sûr, à partir du moment où la procédure pénale

 25   a été engagée, il ne peut plus être adjoint du commandant ni membre du HVO

 26   militaire.

 27   Q.  Oui, je comprends.

 28   Maintenant reprenons --


Page 42589

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, l'exemple choisi illustre peut-être

  2   la difficulté. Le colonel Blaskic fait un rapport au quartier général

  3   relatif au comportement d'un individu qui a désarmé la police militaire.

  4   Vous remarquerez que c'est l'article 204 qui est visé. Mais quand vous

  5   regardez l'article 204, c'est la désobéissance à un ordre. Peut-être que ce

  6   soldat a eu l'ordre de ne pas s'occuper de la police civile. Or, là on voit

  7   qu'on va désarmer la police civile et on va prendre leurs véhicules. Ça

  8   peut être une action militaire concernant la police civile ou ça peut être

  9   une action de droit commun où on vole le véhicule et les armes. Donc c'est

 10   assez compliqué. Il peut y avoir deux lectures. Si c'est une désobéissance

 11   à l'ordre, à ce moment-là, ça peut relever du disciplinaire, parce que le

 12   soldat a eu un ordre de ne pas s'occuper de la police civile et lui va s'en

 13   occuper ou bien, si c'est pour voler l'arme et la voiture, ça c'est

 14   criminel.

 15   Alors est-ce que vous-même avez-vous été confronté à ce type de situations

 16   où il peut y avoir deux lectures ?

 17   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Un instant, Monsieur Praljak.

 18   Il me semble qu'il y ait eu une confusion. Monsieur le Président Antonetti,

 19   l'article 204 ne vient pas du règlement disciplinaire, il vient du code

 20   pénal. L'article que j'ai cité sur le comportement violent --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : -- 204, c'est le code pénal qui est au

 22   P 00309 et c'est désobéissance --

 23   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Non, c'est le code pénal de la

 24   République socialiste fédérative de Yougoslavie.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Ecoutez ce que je dis, en règle générale, je ne

 26   commets pas d'erreur quand je parle. Je dis que l'article 204 est l'article

 27   qui est au P 00309 et que dans l'article 204, c'est la désobéissance à un

 28   ordre et c'est puni par une peine de prison qui peut aller jusqu'à trois


Page 42590

  1   ans.

  2   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce que vous

  3   êtes en train de lire dans le document P 00309, c'est l'extrait du code

  4   pénal de la République socialiste fédérative de Yougoslavie qui était en

  5   vigueur sur ce territoire. Ce que j'ai lu du document du colonel Blaskic,

  6   c'est le code pénal de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine qui

  7   était également en vigueur. En ex-Yougoslavie, il y avait le code pénal de

  8   la RSFY qui était en vigueur dans toutes les républiques et c'est ce code

  9   qui régissait un certain nombre de questions. Puis il y avait d'autres

 10   questions qui étaient régies par une autre loi, des lois qui variaient

 11   d'une république à une autre. En Bosnie-Herzégovine, les deux codes étaient

 12   en vigueur avant la guerre et pendant la guerre. Celui que j'ai lu,

 13   l'article 204, vient du code pénal de la République de Bosnie-Herzégovine.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Je suis d'accord avec vous, Maître, mais je suis

 15   convaincu que l'article 204 de la République socialiste de Bosnie-

 16   Herzégovine, c'est le même que l'article 204 de la République fédérale de

 17   l'ex-Yougoslavie. C'est le même article, mais le problème n'est pas là.

 18   Monsieur Praljak, quand un commandant militaire est confronté à ce type de

 19   situation, il ne sait pas si c'est l'exécution d'un ordre qui n'a pas été

 20   respectée ou un comportement délictueux, est-ce qu'à ce moment-là il n'y a

 21   pas un doute sur la sanction à prononcer, disciplinaire ou saisie du

 22   procureur militaire ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Le colonel Blaskic

 24   sait parfaitement bien que ces cinq individus ont fait irruption dans un

 25   local de la police civile, qu'ils ont désarmé les officiers de police et se

 26   sont emparés d'armes et de véhicules. Alors je ne sais pas en se basant sur

 27   quelle raison, parce qu'il y a eu obstruction à une action militaire ou

 28   autre chose, pour quelle raison il a déferré cela à ces hommes de la police


Page 42591

  1   militaire, il les a déferrés au procureur.

  2   Cependant, ils ont agi de leur propre chef, manifestement, et le

  3   commandant adjoint de la 3e Bataillon les relève de leurs fonctions et les

  4   remet au procureur militaire. La seule chose, c'est que de mon point de

  5   vue, il ne serait pas complètement illogique pour lui de dire que, par

  6   exemple, que Ranko Milicevic, il est puni à plus de 20 jours de prison à

  7   titre disciplinaire -- je trouvais ça complètement illogique, car cela ne

  8   signifierait rien dans ce cadre. Il doit être poursuivi pour comportement

  9   violent, c'est une infraction au pénal grave. Aujourd'hui encore, cela

 10   manque de clarté pour moi pour ce qui est de savoir ce qui pourrait

 11   constituer une procédure à la fois disciplinaire et au pénal. Ce n'était

 12   pas clair. Mais ce que nous avons ici sous les yeux est tout à fait

 13   limpide. On fait état qu'il est déferré à l'état-major. Il n'y a rien à

 14   ajouter à cela.

 15   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Monsieur le Président,

 16   merci.

 17   Q.  Alors conviendrez-vous, Monsieur Praljak, avec moi pour dire que

 18   ce rapport montre que le colonel Blaskic faisait tout ce qui était en son

 19   pouvoir pour appliquer les mesures qui étaient nécessaires.

 20   R.  Oui.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé. Ça a été totalement

 22   perdu. Il faut revenir en arrière et reprendre, parce que les interprètes

 23   n'ont pas réussi à saisir vos propos.

 24   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation]

 25   Q.  Général, ça n'a pas été versé au compte rendu d'audience. Il semblerait

 26   qu'on n'ait pas bien entendu. Alors répéter simplement votre réponse. Je

 27   voulais vous demander, pour qu'on dise tout à fait clairement quelle était

 28   la motivation du colonel Blaskic, pour ce qui était de l'initiation de ces


Page 42592

  1   procédures telles qu'on peut les voir dans le présent rapport.

  2   R.  Blaskic agit ici de façon correcte d'un point de vue juridique, du

  3   point de vue de la logique militaire et conformément au comportement qui

  4   doit être celui d'un commandant.

  5   Q.  Je voudrais maintenant que nous nous penchions juste pour un instant

  6   sur encore un code de discipline militaire.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mme Tomasegovic Tomic a demandé

  8   quels étaient les motifs du général Blaskic. La réponse, c'est : "Il avait

  9   agi correctement," mais ce n'est pas la réponse qu'on attendait. C'était

 10   une question qui demandait des spéculations, certes, de votre part. Vous

 11   pourriez répondre : Mais comment puis-je savoir quelle était la portée de

 12   ce qu'a fait M. Blaskic ? Cela dit, j'aimerais que vous répondiez à la

 13   question.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le document lui-même qui montre quel est

 15   le motif, à savoir de punir celui qui a enfreint la loi.

 16   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, M. le Juge Trechsel a

 17   tout à fait raison. J'ai tout d'abord posé ma question d'une façon, ensuite

 18   j'ai été interrompue, puis j'ai reposé ma question d'une autre façon. Donc

 19   pour des raisons techniques, c'est moi qui suis fautive, j'aurais pu poser

 20   différemment ma question.

 21   Revenons juste un instant sur le P 00293, qui est le code de discipline

 22   militaire. Nous allons nous reporter à l'article 24. Il y est dit : "Les

 23   commandants des unités respectivement des organes compétents -- les

 24   commandants de garnison - et on cite entre guillemets de qui il s'agit -

 25   prononcent des mesures disciplinaires, y compris à l'encontre de ceux qui

 26   ne se trouvent pas au sein de leur organigramme au sens strict, si ces

 27   mesures sont nécessaires au maintien de l'ordre et de la discipline."

 28   Q.  Alors est-ce que vous aviez connaissance de cette possibilité aussi,


Page 42593

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22   

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 42594

  1   Général Praljak ? Je vais vous dire tout de suite que mon interprétation

  2   est la suivante : A savoir qu'un commandant, lorsqu'il assure le

  3   commandement opérationnel de certaines unités qui, par ailleurs, ne sont

  4   pas placées sous sa responsabilité, aux termes de la loi et de l'ordre de

  5   la discipline, par exemple, sur le front, a l'autorité nécessaire pour

  6   prendre des mesures disciplinaires contre ces hommes. Est-ce que c'est ce

  7   que vous comprenez là aussi ?

  8   R.  Oui, vous connaissez peut-être mieux la chose que moi.

  9   Q.  Aviez-vous connaissance de cet article particulier ?

 10   R.  Non.

 11   Q.  Je voudrais maintenant que nous avancions de quelques documents. C'est

 12   le document 5D 04039. Il s'agit d'un document émanant du commandant du 4e

 13   Bataillon de la Police militaire, de M. Pasko Ljubicic. C'est avant le 8

 14   juillet 1993 où vous êtes entré en fonction, mais je vais quand même vous

 15   le montrez. Ce document est adressé à la brigade du HVO de Vares, la

 16   Brigade de Bobovac, à remettre en main propre au commandant, Emil Harah.

 17   Pasko Ljubicic dit ici la chose suivante :

 18   "Les membres de la police militaire, conformément aux ordres émis jusqu'à

 19   ce jour, sont placés exclusivement sous la responsabilité des commandants

 20   de brigades dans les zones de responsabilité qui sont les leurs. Pour ce

 21   qui est du commandement, les unités de la police militaire ont l'obligation

 22   de respecter l'ordre en question. Tout membre d'une unité de la police

 23   militaire qui s'oppose à l'ordre que vous avez émis ou qui ne l'exécute pas

 24   devra être sanctionné par vous, tout comme peuvent l'être les autres

 25   soldats de votre unité. Il vous appartient de juger si un homme doit être

 26   exclu d'une unité de la police militaire si vous estimez qu'il exerce une

 27   influence négative."

 28   Général, est-ce que vous avez connaissance de l'existence de situations de


Page 42595

  1   ce type et est-ce que ce document correspond à ce que nous avons vu dans

  2   l'article 24 que nous avons examiné il y a quelques instants concernant la

  3   composition des unités et le commandant ?

  4   R.  Oui, en partie. Alors il faut que je vous explique cela.

  5   J'ai été en Bosnie centrale au mois de mars, et à l'époque, M. Blaskic

  6   avait déjà supposé de façon très claire, comme l'avaient fait également ses

  7   différentes services, qu'on en viendrait à une recrudescence des tensions

  8   avec l'ABiH et qu'il y aurait un conflit, ou plutôt, que l'ABiH lancerait

  9   une attaque. Deuxièmement, à l'époque, se rendre en Bosnie centrale

 10   représentait un risque considérable pour tout membre du HVO. En effet, en

 11   dehors des points de contrôle, disons, réguliers de l'ABiH qu'il fallait

 12   traverser, se trouvaient également les points de contrôle mis en place par

 13   Paraga, par exemple, où vous pouviez vous faire tuer juste comme ça.

 14   Lorsque je me suis rendu sur place au mois de mars, Blaskic m'a demandé de

 15   m'entretenir à mon retour avec Mate Boban, en raison du cours prévisible

 16   des événements, que j'en discute avec Mate Boban et avec les autres, et il

 17   m'a demandé également, en raison de la position particulière dans laquelle

 18   se trouvait la Bosnie centrale, notamment Vares mais d'autres localités

 19   aussi, il m'a demandé qu'on lui autorise deux choses, à savoir qu'il ait la

 20   possibilité de nommer des commandants, ce qui, normalement, n'aurait pas dû

 21   être le cas car il n'avait pas de bon moyen de communication. Il ne pouvait

 22   s'entretenir correctement ni avec Petkovic, ni avec Stojic, ni avec

 23   personne d'autre; et deuxièmement, qu'on lui permette un recours

 24   opérationnel à la police militaire, car encore une fois, en cas d'attaque

 25   il n'était pas en mesure de respecter toute la procédure très longue dans

 26   laquelle il était censé demander des autorisations, il y aura là le risque

 27   de perdre les positions menacées.

 28   Alors j'ai fait état de cela, et j'en suis tout à fait certain, à Mate


Page 42596

  1   Boban. Je considérais que c'était une bonne idée. J'en ai également fait

  2   état su général Petkovic, qui considérait que c'était une bonne idée. Je ne

  3   sais pas si j'en ai parlé avec M. Stojic. Je ne veux pas ici spéculer --

  4   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, j'aimerais vous

  5   interrompre. Nous allons terminer dans dix minutes. Nous avons des

  6   questions à vous poser. Nous sommes deux Juges à vouloir vous poser des

  7   questions. Si vous avez quelque chose d'essentiel à dire, soyez rapide,

  8   s'il vous plaît, ensuite nous poserons nos questions.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Là il s'agit de la Bosnie centrale et il y a

 10   une impossibilité pour Pasko Ljubicic de communiquer avec Vares. C'est la

 11   cause de cette lettre. Je ne peux pas m'acquitter de ces obligations, donc

 12   je te donne la permission de faire le nécessaire à toi, commandant de

 13   brigade, d'entreprendre les mesures nécessaires à l'encontre de la police

 14   militaire qui se comporte mal.

 15   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie.

 16   J'ai donc une question à vous poser, ensuite mon collègue, le Juge Mindua,

 17   voudrait aussi en poser une. Voici ma question : dans ce document, au

 18   dernier paragraphe, il est fait référence à certains actes non honorables.

 19   Je donne lecture :

 20   "…attirer l'attention de tous les membres de la police militaire qui sont

 21   membres d'une unité professionnelle et qu'un nombre de mesures strictes

 22   seront prises contre eux s'ils ont commis tout acte déshonorable tel que

 23   celui qui avait été planifié par M. Vlado Knezevic."

 24   Donc je voulais savoir si vous saviez ce qu'avait commis ce fameux Vlado

 25   Knezevic et quels étaient ces plans.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Prandler, le 8 juillet, je

 27   n'étais pas le commandant en chef de l'état-major du HVO et je n'ai pas

 28   connaissance de ces aspects-là. Mais il faut toujours garder à l'esprit la


Page 42597

  1   carte. Pasko Ljubicic se trouve très loin de Vares. Il ne dispose pas de

  2   moyens de communication avec Vares et il dit : Voilà, maintenant même si

  3   nous ne sommes pas en mesure de collecter toutes les informations et

  4   d'entreprendre les poursuites au pénal, n'oubliez pas que le temps viendra

  5   où vous devrez répondre de vos infractions au pénal. C'est un avertissement

  6   qui met en avant deux éléments. Petit a, nous n'avons, en raison de la

  7   situation militaire, la possibilité de prendre des sanctions de la manière

  8   dont nous souhaiterions pouvoir le faire; petit b, vous ne vous en sortirez

  9   pas sans être punis car cette situation purement militaire n'aura qu'un

 10   temps.

 11   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Désolé, Monsieur Praljak, de vous

 12   interrompre, mais dans votre première phrase vous avez dit : "Je ne sais

 13   rien de cet événement." Cela me suffit. Donc je donne la parole à mon

 14   collègue, le Juge Mindua, pour sa question.

 15   M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin Praljak, j'ai juste une courte

 16   question. Excusez-moi de la poser en retard, parce que Me Tomasegovic Tomic

 17   est allée un peu trop vite.

 18   Je voudrais revenir sur le transcrit à la page 95. Lorsqu'il vous a été

 19   posée la question au sujet de l'article 24 des règles sur la discipline

 20   militaire. A la question de savoir : "Si vous étiez au courant de l'article

 21   24 ?" Et il me semble que la réponse était : "Je n'étais pas informé de

 22   ceci."

 23   Alors je ne comprends pas bien. Vous n'étiez pas informé de l'article 24

 24   des règles sous la discipline militaire qui ont été dictées par le

 25   président Mate Boban. C'est ce que je dois comprendre, vous étiez ignorant

 26   du règlement militaire peut-être ? Corrigez-moi si je me trompe.

 27   R.  Monsieur le Juge Mindua, je vous ai dit que j'étais au courant de la

 28   plupart des dispositions et de leur essence. Donc on ne peut pas dire que


Page 42598

  1   je n'étais pas au courant. J'étais au courant à la limite même de ceci même

  2   si je n'avais pas eu l'occasion de le lire, à savoir que si une unité

  3   militaire donnée qui a été adjointe à une autre unité ou s'il s'agit de la

  4   police militaire, par exemple, qui m'est resubordonnée à moi, se trouve

  5   dans une situation où un policier militaire commette une infraction

  6   disciplinaire, bien, c'est moi qui vais le punir indépendamment de la

  7   question de savoir si j'ai eu l'occasion de lire précisément cette

  8   disposition-là, ce texte, j'étais au courant de tous les éléments

  9   juridiques absolument nécessaires pour un bon fonctionnement, cela, c'est

 10   sûr au-delà de tout doute et je ne cherche absolument pas à contourner

 11   cela.

 12   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Général Praljak, nous sommes à quelques

 14   secondes de 19 heures donc il faut arrêter.

 15   Nous continuerons donc demain après ce break de quelques heures puisque

 16   demain nous sommes de matin, donc nous commencerons à 9 heures.

 17   Donc je souhaite à tout le monde une bonne fin de soirée et à demain

 18   à 9 heures.

 19   [Le témoin quitte la barre]

 20   --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 7

 21   juillet 2009, à 9 heures 00.

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28