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1 Le mardi 25 août 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [L'accusé Coric est absent]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour à
9 toutes et à tous. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et
10 consorts.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce jour, je salue en
12 premier M. Praljak, je salue MM. les accusés, je salue Mmes et MM. les
13 avocats, M. Stringer et sa collaboratrice, ainsi que toutes les personnes
14 qui nous assistent. Nous allons continuer le contre-interrogatoire mené par
15 M. Stringer, et je lui laisse la parole.
16 M. STRINGER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je vous
17 remercie. Bonjour, Messieurs les Juges, conseils de la Défense. Bonjour à
18 toutes et à tous.
19 LE TÉMOIN : SLOBODAN PRALJAK [Reprise]
20 [Le témoin répond par l'interprète]
21 Contre-interrogatoire par M. Stringer : [Suite]
22 Q. [interprétation] Général, Bonjour.
23 R. Bonjour, Monsieur Stringer.
24 Q. Général, vous pouvez voir s'afficher cette pièce à l'écran devant vous.
25 Je ne sais pas si c'est dans vos classeurs. Nous étions en train de parler
26 d'un article extrait de la publication Soldat croate, Hrvatski Vonja. Il
27 s'agit de la pièce 3D 01281. Nous n'allons plus aborder cette pièce. Nous
28 allons voir à présent les quelques documents qui nous restent dans ce
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1 classeur avant de terminer cette série de questions.
2 Document suivant, P 00191. Normalement, c'est ce document que vous
3 devriez avoir. L'avez-vous ? Le 7 juillet 1992, c'est la date qui figure
4 sur ce document. L'avez-vous ?
5 R. J'ai ce document du 7 mai. Du moins, c'est la date que j'ai sur le
6 document qui est devant moi, le 7 mai.
7 Q. Oui, tout à fait, c'est exact. Je m'excuse si j'ai fait un lapsus. Donc
8 il s'agit du 7 mai 1992. Reconnaissez-vous ce document, Général ? Il
9 semblerait que c'est Janko Bobetko qui est le signataire du document et il
10 est question de la passation du commandement. C'est vous qui êtes relevé et
11 c'est Zdravko Andabak qui reprend sur le front sud. Le voyez-vous ?
12 R. Oui, je vois le document.
13 Q. Très bien. Au paragraphe 2 de ce document, le général Bobetko émet un
14 ordre, à savoir il vous appartient à vous d'informer le général de brigade
15 Andabak de la situation qui prévaut dans ce secteur que vous avez commandé
16 jusqu'à ce moment-là. Puis au paragraphe suivant, le texte se poursuit :
17 "La passation de fonction se passera à 17 [comme interprété] heures le 8
18 mai 1992, en ma présence, conformément à la Loi sur les forces armées de la
19 République de Croatie."
20 Et le texte se lit comme suit :
21 "Le général Praljak remettra un rapport exhaustif sur la situation et sur
22 les problèmes qui se posent dans le secteur."
23 Général, la question que je vous pose est la suivante : cette procédure de
24 passation de commandement entre vous et le général de brigade Andabak, est-
25 ce qu'on s'attendait normalement de votre part à ce que vous informiez
26 celui qui venait prendre votre place de la situation qui prévalait dans
27 votre zone de responsabilité ? Est-ce que c'était la procédure normale ?
28 R. Oui, c'est exact, et c'est ce que j'ai fait. En réalité, c'est moi qui
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1 ai trouvé mon successeur. Je lui ai demandé de bien vouloir accepter de
2 venir prendre ce poste, et il a un petit peu hésité. Il était un petit peu
3 réticent parce qu'il a estimé qu'il n'était pas suffisamment compétent pour
4 se placer à la tête d'un secteur, parce qu'avant cela, il n'a pas occupé un
5 poste aussi important, mais il est originaire de cette région, je pense
6 qu'il est né là, mais ce document, je ne l'ai vu que lorsque j'ai commencé
7 à prendre connaissance des documents parvenus au Tribunal. Donc je ne
8 l'avais pas fait à Grude, et il fallait que je reprenne mon travail, c'est
9 ça.
10 Q. Est-ce que vous avez informé pleinement le général de brigade Andabak
11 de la situation qui prévalait dans votre zone de responsabilité avant qu'il
12 ne prenne le commandement ?
13 R. Au mieux de mes connaissances, oui, je lui ai tout expliqué.
14 Q. Et c'est d'une importance tout à fait substantielle, n'est-ce pas,
15 parce qu'à partir du moment où quelqu'un prend le commandement en main, il
16 faut qu'il connaisse parfaitement la situation qui prévaut sur le terrain
17 pour pouvoir commander véritablement ?
18 R. Oui. Il faut avoir tous les éléments en main, enfin, tous les éléments
19 qui sont disponibles à ce moment-là, parce qu'il n'y avait pas là quelque
20 chose de particulier. Ces informations étaient en fait des choses très
21 simples.
22 Q. Très bien. Je vais passer à présent à la date du 8 ou du 9 novembre
23 1993, et vous passez de nouveau vos fonctions à votre successeur le 9
24 novembre 1993. C'est Ante Roso qui vient prendre votre place à la tête du
25 commandement de l'état-major principal du HVO. Général, je dirais qu'à ce
26 moment-là la situation était bien plus complexe qu'elle l'a été
27 probablement en mai 1992, lorsque vous avez cédé votre poste au général de
28 brigade Andabak; est-ce vrai ?
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1 R. Non. Non, la situation en mai 1992 c'était une situation très complexe
2 car il faut savoir que l'armée de la Republika Srpska, c'est-à-dire à
3 l'époque en bonne partie la JNA -- en fait, le 10 avril ils se sont emparés
4 de Kupres, ils avaient une brigade de blindés, de chars, et après ils ont
5 attaqué Livno, ils étaient en route pour Split, Makarska Ploce et cela
6 faisait partie de leur plan stratégique plus large. Pour ce qui est de la
7 Bosnie-Herzégovine, elle était dans une situation très, très difficile. Et
8 la Croatie elle aussi, bien entendu.
9 Q. Au 6 mai de cette année, à savoir juste quelques jours après avoir
10 commencé votre témoignage, voici ce que vous nous avez dit au sujet de
11 cette passation de fonction au général Roso. Le Juge Antonetti vous a posé
12 une question de cette passation de fonction en novembre 1993. C'est le
13 document suivant P 06556, le document suivant dans votre classeur. Le Juge
14 Antonetti vous pose la question, 39 665, le numéro de la page du compte
15 rendu d'audience. Le Juge Antonetti dit :
16 "Pour autant que vous vous en souvenez, êtes-vous certain de lui
17 avoir tout dit ? Est-ce que vous lui avez présenté entièrement la
18 situation, les événements sur le terrain ? Est-ce que vous lui avez donné
19 un aperçu détaillé des positions du HVO sur le terrain, et cetera ?"
20 Puis le Juge Antonetti dit :
21 "Quand il y a eu cette passation de fonction, est-ce que vous l'avez
22 fait conformément aux règles du jeu, en bonne et due forme ?"
23 Et vous dites :
24 "Monsieur le Président, toutes les informations, tous les éléments,
25 j'ai tout donné au général Roso, et ce n'était pas difficile parce qu'il
26 avait été dans le HVO avant. Il a commandé Livno."
27 Et là je passe une phrase et vous dites :
28 "C'est quelqu'un qui connaissait la situation relativement bien. Les
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1 événements ne lui étaient pas étrangers."
2 Donc, Général, juste pour ce qui est de cette passation de fonction très
3 concrète entre vous et le général Roso, je suppose que vous accepterez que
4 c'était très important à l'époque qu'il connaisse complètement la situation
5 sur le terrain, le général Roso, j'entends, au moment où il se place à la
6 tête du HVO le 9 novembre 1993 ?
7 R. Vous me posez une question là ?
8 Q. Oui. J'aimerais savoir si vous pourriez accepter ce que j'affirme, à
9 savoir qu'il était d'une importance capitale, qu'il est absolument
10 nécessaire qu'il connaisse très bien la situation dans sa zone de
11 responsabilité ?
12 R. Je ne sais pas comment on peut graduer ici les degrés d'importance. Il
13 y a un certain nombre d'éléments d'information militaires, des cartes
14 doivent être portées à la connaissance d'un nouveau commandant. Puis il y a
15 les hommes de l'état-major, donc c'est l'essentiel qu'on lui communique. On
16 ne peut pas rentrer dans les détails les plus menus. Les informations les
17 plus importantes, les positions, l'état des unités, les combats qu'ils
18 avaient menés précédemment, enfin toutes les choses les plus importantes.
19 Q. Très bien. Si on avançait un petit peu à la pièce P 02902, et il me
20 semble que nous avons là un des rapports que nous avons déjà examinés,
21 rapports du Bataillon Espagnol.
22 M. STRINGER : [interprétation] Un rapport de la FORPRONU, je ne voudrais
23 pas ce soit diffusé à l'extérieur du prétoire, Monsieur le Président.
24 Q. Je vous ai déjà montré cela, Général. Je ne pense pas que ce soit
25 contesté. Page 4 de la version anglaise, il y a un paragraphe dans ce
26 rapport du Bataillon Espagnol qui porte sur Jablanica et Konjic. Est-ce que
27 vous voyez bien cette partie du texte ?
28 R. Oui.
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1 Q. Et il y a là trois ou quatre paragraphes, puis nous avons une phrase
2 qui commence par le numéro 1 qui la précède, et on voit :
3 "Les combats intenses dans la zone de Boksevica se poursuivent. Les forces
4 du HVO sont placées sous le commandement du général Praljak et du colonel
5 Miro Andric."
6 Je vous ai déjà posé cette question, Général. Pendant cette période-là, et
7 c'est le 22 juin 1993, en réalité, à ce moment-là vous étiez sur place dans
8 le secteur de Jablanica, de Boksevica, et vous avez pris part aux combats
9 en tant que commandant des forces du HVO; est-ce vrai ?
10 R. Non. Je ne me suis pas trouvé à proximité de Jablanica, ni à proximité
11 de Boksevica. J'étais au mont de Boksevica, très précisément et pendant un
12 nombre de jours aussi très précis. C'est une petite portion, la toute
13 dernière portion de cette colline ou de cette montagne que nous avons pu
14 préserver pour que la population civile et une partie des hommes du HVO
15 puissent s'évacuer de Kostenica [phon], et finalement on y est parvenu.
16 Mais c'est tout, rien d'autre que cela.
17 Q. Donc vous étiez au mont Boksevica vers le 22 juin 1993. Et la pièce
18 suivante, si vous voulez bien --
19 R. Non, non. C'est ce qui est écrit ici. Leurs informations sont souvent
20 des généralités et très souvent, bien sûr --
21 Q. Excusez-moi, Général --
22 R. Que le HVO possède les armes les plus modernes, surtout des armes
23 américaines, et tout ça --
24 Q. Non, non. Ce n'est pas ce que je vous demande. Je ne vous demande pas
25 si vous êtes d'accord avec le rapport. Vous m'avez répondu en disant que
26 vous êtes resté au mont Boksevica pendant un nombre précis de jours; est-ce
27 que cela est exact ?
28 R. Oui, c'est exact, mais ce n'était pas le 22, c'était un peu plus tard.
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1 Q. Donnez-nous la date.
2 R. Je pense que nous nous sommes repliés le 8 ou le 9 juillet, et j'y suis
3 resté peut-être pendant 12 jours, à peu près. Un jour de plus ou de moins,
4 vraiment, sur cette montagne. Vu le temps qui s'est écoulé depuis, je ne
5 peux pas --
6 Q. Très bien. Alors je passe à un document et maintenant P 03516,
7 s'il vous plaît. La date est celle du 17 juillet 1993.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, avant de continuer, je vais
9 revenir au premier document pour une question annexe, mais qui m'apparaît
10 importante. C'est le P 191.
11 Général Praljak, vous avez le document dans votre langue sous les yeux. Tel
12 que je lis ce document, le général Bobetko, qui commande le front du sud de
13 la Croatie au mois de mai 1992, la date est importante, il est à Ploce, qui
14 est un petit port ravissant, pas loin du Dubrovnik, et c'est là où se
15 trouve le poste de commandement avancé. Et il décide suite à une suggestion
16 et une requête de Susak de faire un changement et de nommer Andabak à votre
17 place pour le poste de commandant du secteur Mostar, Siroki Brijeg, Citluk,
18 Capljina.
19 Alors, le mois de mai, c'est important puisque la République de Bosnie-
20 Herzégovine est déjà dans les tuyaux, c'est un Etat. Voilà qu'un Etat
21 autre, la Croatie, nomme un commandant, Andabak, à votre place dans un
22 secteur qui juridiquement n'appartient pas à la République de Croatie. En
23 regardant ce document, je me disais qu'un Juge raisonnable pourrait en
24 tirer la conclusion que ce document établit la preuve de l'implication de
25 la République de Croatie dans le déroulement des événements en Bosnie-
26 Herzégovine, puisque là Andabak vous remplace dans une zone territoriale
27 qui, en droit international, est sous la compétence d'une autorité légitime
28 qui est celle de la République de Bosnie-Herzégovine. Donc ça c'est une
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1 approche.
2 Mais en réfléchissant, je me suis demandé s'il n'y a pas une seconde
3 approche qu'il convient que vous précisiez. Nous sommes au mois de mai, il
4 y a la question des Serbes. Il y a l'agression des Serbes vis-à-vis de la
5 Croatie, et la République de Croatie essaie tant bien que mal de se
6 protéger et décide dans un plan de défense général de nommer des
7 commandants qui auront des vocations géographiques pour le cas où il y
8 aurait une nécessité. Ça, dans le monde contemporain, on le voit puisque
9 certains Etats comme les Etats-Unis nomment des généraux à l'extérieur des
10 Etats-Unis qui ont des compétences territoriales sur certaines zones sans
11 pour autant empiéter sur la souveraineté des Etats.
12 Alors comment vous expliquez que vous, vous exerciez un commandement
13 avant le mois de mai et puis Andabak vous remplace, alors même il y a un
14 Etat souverain ? Est-ce que c'est la première hypothèse ou la seconde
15 hypothèse ?
16 J'espère que vous avez compris, parce que ma question était très
17 longue, mais le sujet est très compliqué, donc il fallait que je développe
18 ma question pour que vous me répondiez, parce que ce document est un
19 élément sur l'implication de la République de Croatie, si on le lit tel
20 quel. Mais il y a peut-être une autre explication. Alors c'est
21 l'explication que je vous demande.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, Messieurs les
23 Juges, votre première hypothèse est exacte sur le plan juridique. Donc
24 lorsqu'il n'y a pas de guerre et lorsque l'autorité centrale fonctionne,
25 est préparée et prête à la guerre et lorsqu'il y a une agression menée de
26 l'extérieur, tout ce que comporte votre première hypothèse se défend. Mais
27 le pouvoir central se trouve encerclé à Sarajevo, isolé. Deuxièmement, le
28 pouvoir central n'a rien prévu, n'est absolument pas prêt, n'a aucun
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1 représentant sur la totalité de ce territoire, dans toute cette zone de
2 Livno, passant par Kupres jusqu'à Bugojno; donc par aucun moyen, par rien
3 ils ne sont prêts à organiser quoi que ce soit. Nous n'avons que la JNA et
4 l'armée de la Republika Srpska.
5 Et à ce moment-là, la population se dresse pour se défendre de son propre
6 chef. Tout un chacun se met à creuser autour de sa municipalité, on se
7 débrouille comme on peut. Et à ce moment-là, tout simplement, ce qui se
8 passe premièrement il y a un acte de haute trahison du commandant de
9 Mostar. Il donne l'ordre de quitter Mostar. Celui qui est en train
10 d'exercer ce poste par intérim, il n'était absolument pas capable, ce
11 Mikulic, absolument pas capable de commander le HVO, il ne s'y connaissait
12 pas du tout. Et à la fin du mois de mars, Monsieur le Président, je me suis
13 trouvé dans le secteur, et à mon retour à Zagreb je me suis adressé au
14 ministre Susak et au président Tudjman et je leur ai demandé ce qui se
15 passe précisément, ce qu'on voit écrit dans ce texte, car sinon cette zone
16 allait être complètement occupée, cette partie-là de Bosnie-Herzégovine et
17 il allait y avoir une partie de la Croatie au sud de Split qui serait
18 complètement coupée, parce qu'ils ont eu cette brigade de chars qui leur a
19 permis de battre le HVO de Kupres puis ils ont attaqué Livno. Ante Gotovina
20 commandait Livno à ce moment-là. Et ils ont lancé des attaques, ils ont
21 pris Stolac et puis Mostar. Vous connaissez tout sur cela. Et puis si la
22 Croatie n'allait pas aider sur le plan des effectifs et sur le plan de
23 l'organisation, c'était chose faite. Donc le général Bobetko, qui avait
24 travaillé dans l'éducation avant à l'état-major principal, c'est lui qui a
25 été nommé à ce poste et il s'est chargé d'apporter une aide pour organiser
26 l'état-major principal du HVO, et c'est le général Petkovic qui est venu à
27 la tête de l'état-major principal, mais il l'a commandé jusqu'à ce que le
28 HVO ne soit apte à le faire tout seul.
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1 Et moi, c'est de mon propre chef, bien sûr, que je suis allé là-bas, je me
2 suis occupé du commandement de la zone opérationnelle. Et puis à partir du
3 moment où j'ai stabilisé la situation, il a fallu que je retrouve mon poste
4 à Zagreb, mon travail. Mais sans arrêt je me suis rendu sur place pour
5 mener des opérations.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc si je comprends bien, en un mot, vous
7 dites du fait que le gouvernement central à Sarajevo ne pouvait faire face
8 à la situation, la République de Croatie estimait qu'il était nécessaire,
9 compte tenu de l'offensive des Serbes, de couvrir ce territoire parce qu'il
10 y avait un danger pour la République de Croatie. Est-ce comme ça qu'il faut
11 comprendre ?
12 Et pour bien enfoncer le clou, imaginons, par exemple, c'est une hypothèse
13 d'école, qu'il a un ennemi X qui attaque les Etats-Unis, et qu'au Canada,
14 il n'y a plus de gouvernement au Canada, et qu'à ce moment-là les Etats-
15 Unis mettraient un général quelconque à Montréal pour occuper l'espace
16 compte tenu du fait qu'il n'y aurait plus de gouvernement. Ça se passait
17 comme ça ?
18 Est-ce que mon exemple Canada/Amérique --
19 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Car sinon ce sont eux qui vont
20 attaquer jusqu'à l'Amérique. Dubrovnik est tout à fait encerclée, le sud de
21 la Croatie est coupé. Tout cela est occupé. Donc s'ils continuent jusqu'à
22 Split, ils se retrouvent à Split, vous savez, le fait qu'on ait reconnu
23 l'Etat, Monsieur le Président, c'est très important, mais c'est
24 insignifiant. Chypre, regardez, ça fait 50 ans qu'il est divisé en dépit de
25 la reconnaissance. Il y a des statu quo qu'on reconnaît et après vous avez
26 des années pour rechercher la justice.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors on continue avec l'autre document.
28 M. STRINGER : [interprétation]
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1 Q. Général, P 02516, c'est la cote du document, 3516, c'est le document
2 que je vous invitais à examiner. Est-ce que vous l'avez ?
3 R. Oui.
4 Q. Très bien. C'est un rapport, rapport de Siljeg du 17 juillet 1993. Il y
5 a là beaucoup d'informations mais la seule chose qui m'intéresse à ce stade
6 se trouve à la page 5 de la version anglaise, vers la fin du document.
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi de vous interrompre,
8 Monsieur Stringer. Peut-être que je devrais m'abstenir de faire cela, mais
9 il est mon devoir d'essayer de voir clair. Le témoin a cité Chypre, page
10 11, ligne 5, et je ne comprends vraiment pas quel lien il a établi. Est-ce
11 que vous pouvez expliquer ce que vous aviez à l'esprit ou peut-être que
12 vous n'aviez pas parlé de Chypre ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parlais bien de Chypre. Il n'y a pas de
14 malentendu.
15 En dépit du fait que Chypre en tant qu'Etat était reconnu en tant que part
16 entière de la communauté internationale, Chypre est resté divisé en deux
17 dans les faits, et c'est ce qui aurait pu arriver à la Croatie. La JNA
18 aurait pu s'emparer de la partie sud de la Croatie, la Croatie aurait pu
19 demeurer un Etat centralisé, mais une grande partie de cet Etat aurait pu
20 être entre les mains de quelqu'un d'autre et nous aurions pu passer plus de
21 50 ans à chercher des appuis un peu partout dans le monde pour réunir les
22 différentes parties de cet Etat.
23 Nous n'avions pas de garantie, Monsieur le Juge Trechsel. En dépit du
24 fait que nous avons été reconnus, personne n'a apporté des garanties à cet
25 état en disant, Maintenant vous êtes protégés, vos frontières seront
26 défendues, il n'y aura pas d'agression, et cetera. Jusqu'en 1995, les
27 choses sont restées en l'état jusqu'au moment où une nouvelle action
28 militaire a eu lieu pour libérer la République de Croatie. Malheureusement,
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1 c'est comme ça que les choses se sont passées, j'aurais été beaucoup plus
2 heureux si les choses avaient pu se passer autrement.
3 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je ne tiens pas à poursuivre
4 le débat sur Chypre, mais je me dois de dire très clairement que le cas de
5 Chypre n'a rien à voir avec la situation de la Croatie et avec ce qui s'est
6 passé en Croatie entre 1990 et aujourd'hui. Chypre a été reconnu par tous
7 les Etats concernés. Et les Nations Unies, disons-le au passage, n'ont
8 jamais reconnu un Etat. Les Nations Unies admettent un Etat en leur sein.
9 Mais il ne s'agit pas de reconnaissance en tant que telle. Ça, c'est le
10 premier point.
11 Et puis le deuxième point, c'est que Chypre ne s'est divisé que plus
12 tard, pas dans les premiers jours qui ont suivi l'indépendance, mais dans
13 une période ultérieure sous l'effet d'un certain nombre d'événements dans
14 lesquels je ne souhaite pas rentrer dans l'immédiat. L'Etat turc a
15 contribué à la sécession des habitants turcs résidant à Chypre. Donc le
16 problème est tout à fait différent et je crois que cette comparaison est
17 vraiment exagérée. Mais bien entendu, vous avez le droit de citer quelque
18 exemple que vous jugez approprié. Cela étant, eu égard à cet exemple de
19 Chypre, je pense qu'il est un peu exagéré.
20 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si vous me permettez,
21 j'ajouterais qu'à mon avis, vous n'avez sans doute pas tiré un parallèle
22 direct entre les deux situations, mais vous avez extrapolé une hypothèse en
23 partant d'une évolution historique et en extrapolant pour déterminer ce
24 qu'elle aurait pu devenir s'il n'y avait pas eu intervention militaire. Je
25 crois que c'est ce qui s'est passé, je crois que vous en conviendrez;
26 n'est-ce pas ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Exact. Mon parallèle résidait dans la
28 chose suivante : Chypre est un Etat, un autre Etat est l'agresseur. Nous,
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1 personne ne nous a garanti que l'armée populaire yougoslave n'allait pas
2 demeurer 40 ans sur les terres dont elle s'était emparée. Personne ne nous
3 a garanti cela.
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous avez bien précisé la situation.
5 Excusez-moi, Monsieur Stringer, je ne suis pas très content de moi de vous
6 avoir interrompu aussi brutalement. Mais j'espère que vous ne ressentirez
7 pas cela comme une division aussi violente que celle qu'a subi Chypre.
8 M. STRINGER : [interprétation] Non, Monsieur le Juge, je n'ai ressenti
9 aucune violence, peut-être une légère occupation verbale.
10 Q. La pièce P 03516, Mon Général, est le document que vous êtes en train
11 d'examiner. J'aimerais appeler votre attention sur le paragraphe 10 qui se
12 trouve vers la fin de ce document, qui est un rapport du général Siljeg.
13 Dans ce rapport, Siljeg déclare que "Brada" ou "Beardie" a visité le
14 secteur pendant plus longtemps et qu'il connaît bien la situation de façon
15 détaillée : "Nous connaissons tous également très bien la situation. Peut-
16 être certains individus se mettent-ils la tête dans le sable et ne
17 souhaitent-ils pas savoir ce qu'il en est afin d'échapper à leur
18 responsabilité tout en sachant que cette façon d'ignorer les choses ne les
19 exonérera pas de cette responsabilité."
20 Alors nous parlerons de ce document plus en détail lorsque nous aborderons
21 la situation de Prozor, Mon Général, mais dans l'immédiat ce qui
22 m'intéresse c'est que même si vous étiez commandant de l'état-major
23 principal du HVO à l'époque, vous aviez une très bonne maîtrise, une très
24 bonne connaissance de la situation telle qu'elle s'est développée dans
25 toute la zone opérationnelle du nord-ouest de l'Herzégovine, s'agissant du
26 HVO; n'est-ce pas ? Ma déclaration est-elle acceptable ?
27 R. En partie, oui. Je connaissais bien sûr cette situation puisque
28 j'allais sur place, je suis allé dans les environs de Prozor, de Vakuf. Je
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1 suis allé également en Bosnie centrale pendant ces deux mois ou plutôt
2 pendant le mois et demi où je m'y suis trouvé pour être plus précis. Et le
3 17, j'étais déjà parti lorsque Siljeg a rédigé ce rapport. Donc il est
4 permis de dire que je connaissais plutôt bien la situation. Sur le plan
5 militaire, je connaissais également les interventions de l'armée de la
6 Republika Srpska et je connaissais les évolutions de la situation pour
7 l'armée de Bosnie-Herzégovine. Peut-être ne connaissais-je pas tout cela
8 dans le plus parfait détail, mais d'une façon générale, je connaissais les
9 problèmes.
10 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Stringer, je crois avoir
11 compris que Beardie était le surnom du général et je pense qu'il est utile
12 de le dire et qu'il est utile que ce soit consigné au compte rendu
13 d'audience, car c'est la première fois que ce nom est prononcé.
14 M. STRINGER : [interprétation]
15 Q. Oui, Mon Général, pouvons-nous nous mettre d'accord sur le fait que les
16 surnoms de Brada ou de Beardie évoqués dans ce rapport ont un rapport avec
17 vous ?
18 R. Dans ce rapport, c'est probable. Ce surnom me concerne très
19 probablement, mais je n'étais pas le seul qui était désigné par ce surnom.
20 Il y avait d'autres personnes qui portaient des barbes et que l'on évoquait
21 sous le surnom de Brada, mais dans ce document précis, en tout cas, il est
22 certain que ce surnom me concerne.
23 Q. Très bien. Je vous remercie. Maintenant, Mon Général, j'aimerais que
24 nous consacrions une ou deux minutes à discuter de la transition qui a eu
25 lieu entre Petkovic et vous-même aux environs du 24 juillet 1993, parce que
26 je n'ai vu aucun document officiel relatif à cette passation de pouvoir,
27 contrairement au document que nous avons examiné il y a quelques minutes.
28 Alors, à l'époque -- mais je sais qu'il existe des documents officiels qui
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1 émanent de Mate Boban, mais voici ma question précise : avez-vous été
2 informé officiellement par le général Petkovic, le 24 ou aux environs du 24
3 juillet, quant à la situation au moment où vous avez accepté le
4 commandement officiel de l'état-major principal du HVO ?
5 R. Il n'était pas nécessaire qu'il se produise une passation de pouvoir
6 parce que le général Petkovic est resté dans ses fonctions, à la différence
7 de ce qui m'est arrivé moi, puisque lorsque la passation de fonction me
8 concernant a eu lieu, j'ai quitté mes fonctions. Le général Petkovic est
9 demeuré à son poste, il était mon premier adjoint. Bien entendu, nous avons
10 discuté de tous les événements, de la situation, mais le débat n'avait pas
11 besoin d'être très long, car pour dire les choses clairement. J'étais bien
12 informé de pratiquement tous les éléments de la situation. Nous savions
13 pratiquement quels étaient tous les problèmes. Quand je dis problèmes, je
14 parle de problèmes militaires évidemment. Et étant donné que Bugojno --
15 pardon ?
16 Mme PINTER : [interprétation] Intervention pour le compte rendu d'audience
17 afin que tout soit compréhensible. Le général n'a pas dit qu'il n'y avait
18 pas eu de réunion d'information officielle, mais qu'il n'y avait pas eu de
19 passation de pouvoir officielle.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il n'y a pas eu de passation de pouvoir.
21 Mme PINTER : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas une réunion
22 d'information dont vous parliez, mais une passation de pouvoir. Une réunion
23 d'information c'est une réunion où on apporte des éléments d'information.
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Je crois qu'en ce
25 moment c'est M. Stringer qui est censé poser les questions.
26 M. STRINGER : [interprétation] J'allais faire préciser, parce que peut-être
27 y a-t-il un problème d'interprétation.
28 Q. Il existait un document qui évoque la passation de commandement
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1 officiel de votre part à destination du général Petkovic, n'est-ce pas, Mon
2 Général ?
3 R. Non. M. Mate Boban m'a nommé au poste de commandant. Le général
4 Petkovic, pour sa part, est resté commandant de la zone opérationnelle, et
5 il a donc informé de cela les unités, à savoir qu'à cette date-là, le
6 commandant de l'état-major principal du Conseil croate de Défense devenait
7 Slobodan Praljak. Nous n'avons signé aucun document officiel parce que le
8 général Petkovic est resté dans le secteur.
9 Deuxième point, il n'y avait pas beaucoup de temps à consacrer à des
10 discussions parce que Bugojno était déjà tombée et il fallait que nous
11 commencions à sauver ce qui pouvait être sauvé.
12 Q. Je vous remercie, mais ma question portait sur le fait de savoir si
13 vous avez été informé dans le cadre d'une rencontre informative entre vous
14 et le général Petkovic, et votre réponse est non, n'est-ce pas ?
15 R. Mais qu'est-ce que vous entendez par "rencontre informative officielle"
16 ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Parce que d'un côté il y a officielle, d'un
17 côté il y a briefing, information. Qu'est-ce qui se passe ? Il y a deux
18 généraux qui s'assoient l'un face à l'autre pour discuter, parce que l'un
19 d'entre eux vient d'être nommé à des fonctions qui sont nouvelles pour lui,
20 et il parle donc à celui qui est son adjoint. Si vous pensez à cette
21 situation comme étant une situation officielle, d'accord, mais je ne vois
22 pas ce qu'il y a d'officiel à cela. Il n'y a pas de troupes ou d'unités qui
23 suivent.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : -- des questions que vous pose M. Stringer, voire
25 les Juges, voire moi-même qui vais vous poser des questions.
26 Avant le 24 juillet, c'est M. Petkovic ici présent qui était le
27 commandant du HVO. M. Petkovic, nous l'avons vu dans d'autres documents,
28 participait également à des réunions avec la communauté internationale et
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1 avec Halilovic sur la question de la mise en œuvre du plan Vance-Owen. Les
2 médias qui suivaient cela n'avaient peut-être pas bien dans l'esprit de
3 savoir qui commandait quoi. Les documents que nous avons des bataillons,
4 Bataillon espagnol ou autres, parfois, ils ne savent pas qui fait quoi au
5 juste. Mais voilà que vous prenez la dimension de ce poste le 24 juillet,
6 et à ce moment-là, il est tout à fait naturel que les personnes soient au
7 courant que c'est vous maintenant le commandant militaire et que la
8 communauté internationale sache que le HVO a à sa tête un nouveau
9 responsable, Slobodan Praljak, en l'occurrence. Et que pour cette
10 passation, il faut qu'il y ait au moins des actes, s'il n'y a que des
11 paroles, ça peut ne pas être suffisant. Alors M. Stringer a dit, Moi, j'ai
12 cherché des documents, je n'en ai pas vu. Alors même qu'il y en a d'autres
13 pour Andabak, qui vous succède. On essaie de comprendre comment cela a pu
14 se faire, parce qu'il y a derrière tout ça un autre enjeu, mais comme vous
15 êtes un être cultivé et intelligent, vous l'avez certainement perçu. Il y a
16 dans la théorie du Procureur le fait que vous pouviez exercer aussi un
17 commandement de facto. Donc, avant le 24 juillet, en réalité, c'était peut-
18 être vous le numéro un, et que Petkovic pouvait être une marionnette, et
19 que le 24 juillet, la marionnette, on la remplace officiellement par vous.
20 Donc ça peut être ça aussi l'explication, ce qui pourrait expliquer qu'il
21 n'y a pas de document.
22 Donc les questions ne sont pas si innocentes que cela, parce que
23 derrière cela il y a la question du commandement de facto. Donc essayez de
24 nous éclairer, essayez de nous faire comprendre pourquoi il n'y avait pas
25 un passage officiel, car comme vous le savez, mais vous le savez mieux que
26 quiconque, en tant que commandant on exerce la responsabilité suprême du
27 supérieur hiérarchique. Donc le fait même que Petkovic vous laisse la
28 place, lui, au niveau de l'article 7 (3), c'est vous maintenant le
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1 responsable numéro un, pas lui. Donc c'est pour ça que -- enfin, tout le
2 monde -- M. Stringer vous pose des questions, mais que les Juges aussi
3 aimeraient savoir pourquoi il n'y a pas eu de passage officiel concrétisé
4 par un document, par un acte, comme quoi il y a eu passation des pouvoirs.
5 Est-ce que vous comprenez mieux pourquoi on vous pose ces questions ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends, je comprends. Vous savez,
7 Messieurs les Juges, là-bas dans cette région se jouaient des pièces de
8 théâtre. Le Bataillon espagnol avait sa propre pièce de théâtre, la
9 FORPRONU avait la sienne. Il y avait pas mal de monde qui jouait sa propre
10 pièce de théâtre et qui écrivait toutes sortes de choses, organisait des
11 réunions, il y avait des accords qui étaient conclus, on organisait des
12 pourparlers, il y avait Genève. A côté de tout cela, il y avait pas mal
13 d'équipement et de matériel qui circulait. Il y en avait qui faisaient de
14 la contrebande, et cetera.
15 Mais le seul fait indubitable c'est que l'ABiH attaquait, c'était un
16 fait. Et que le général Petkovic et d'autres commandants passaient leurs
17 journées à passer d'une réunion à l'autre, signaient des trêves et des
18 cessez-le-feu, chacun jouant des cils les uns face aux autres pour se
19 charmer en ne disant pas la vérité et en ne voyant pas le fond du problème.
20 Donc c'était toutes sortes de mots qui étaient utilisés pour dépeindre sous
21 un jour autre que la réalité une situation de guerre. Pendant ce temps-là,
22 la situation était très dure.
23 Moi, je suis ami avec Petkovic, c'est aussi mon collègue. Donc sans
24 le moindre heurt entre nous, sans le moindre différend intellectuel, nous
25 avons réglé la situation, lui et moi, en dix minutes. Je devais aller à
26 Vakuf parce qu'après la chute de Bugojno, on risquait la défaite complète.
27 Alors moi je vais là-bas, toi tu restes ici, on va demander à Tole de venir
28 lui aussi, essayez de voir ce que vous pouvez faire, parce que commander à
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1 partir de plusieurs endroits, c'est impossible. En dehors de tous ces
2 aspects théâtraux, et moi je suis metteur en scène de théâtre, mais en
3 dehors des grands gestes de manche de la FORPRONU, je n'avais pas la
4 nécessité et je n'avais pas le temps non plus pour me mettre à informer à
5 l'avance en disant, Je vais aller participer à une réunion au Bataillon
6 espagnol, ensuite il y a la réception, le déjeuner, les "drinks", et on
7 passe à autre chose.
8 On était face à une agression violente, Messieurs les Juges. Il y a
9 eu un moment, lorsque la situation s'est un peu calmée, où j'ai organisé
10 une réunion à Tomislavgrad et j'ai invité à cette réunion tous les
11 représentants de la communauté internationale. Et à cette réunion --
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc votre réponse doit se comprendre comme le fait
13 que la situation était telle qu'en dix minutes, avec le général Petkovic,
14 vous avez fait la passation et chacun a continué à occuper ses fonctions,
15 vous Gornji Vakuf, Petkovic ailleurs, Tole ailleurs. Donc c'est ce que vous
16 nous dites. Tout le monde comprend.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Quant à cette question des marionnettes,
18 imaginez un général qui passe 12 jours sur le mont Boksevica à la tête d'un
19 groupe de 50 hommes pour conserver la maîtrise d'un petit endroit et qui
20 reçoit des ordres de Petkovic. Petkovic devrait être un pantin et moi je
21 devrais être son commandant. Non, jusqu'à ce moment-là, de ma propre
22 initiative, je me suis mis sur le mont Boksevica à la disposition des
23 hommes parce que la situation était critique et qu'elle l'exigeait. Je suis
24 resté sur le terrain le fusil à la main et je me suis battu tant que notre
25 objectif n'a pas été atteint. Je l'ai fait comme un simple membre de
26 l'infanterie.
27 Le dernier jour, nous avons quitté le mont Boksevica parce que
28 Petkovic m'avait nommé au poste de commandant, mais il était déjà trop
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1 tard.
2 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 Q. Pièce suivante, pièce P 04699. Nous avons déjà vu ce document. C'est un
4 document qui fait partie d'un rapport plus vaste qui concerne le
5 département de la Défense du HVO. Et je vous invite à vous rendre en page
6 25 de la version du texte dans votre langue qui correspond à la page 16 de
7 la version en langue anglaise. Je m'apprête à vous interroger au sujet de
8 ce que vous saviez d'une situation bien particulière, à savoir celle qui
9 prévalait au moment où vous avez pris le commandement de l'état-major
10 principal du HVO. Page 25 en B/C/S, page 16 en anglais.
11 Ce rapport concerne la période allant du mois de janvier au mois de juin
12 1993. Nous lisons :
13 "Dans la période en question, 6 000 prisonniers de guerre étaient
14 stationnés dans différents centres sur le territoire de l'Herceg-Bosna. En
15 ce moment, il y a plus de 4 00 détenus."
16 R. Non, non. Vous pourriez me répéter le numéro de la page. Je ne trouve
17 pas cela en croate à la page 25. Pourriez-vous me donner le numéro ERN, je
18 vous prie.
19 Q. Je vous ai donné le numéro de la page, c'est la page 25. Je n'ai pas le
20 numéro ERN.
21 R. Monsieur Stringer, dans ma page 25 que j'ai sous les yeux en ce moment,
22 rien de ce que vous avez cité n'est écrit.
23 Q. Laissons le document de côté, je me contenterai de vous poser une
24 question.
25 R. Ah oui, excusez-moi, excusez-moi. Vous avez raison, deuxième
26 paragraphe.
27 Q. Merci.
28 M. STRINGER : [interprétation] Merci au conseil.
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Stringer, il serait bon que
2 nous sachions qui est l'auteur de ce rapport.
3 M. STRINGER : [interprétation] Je croyais l'avoir fait, Monsieur le Juge.
4 C'est un rapport qui émane du département de la Défense du HVO et qui
5 concerne un certain nombre d'activités de différents secteurs du
6 département de la Défense du HVO dans la période de janvier à juin 1993.
7 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.
8 M. STRINGER : [interprétation]
9 Q. Mon Général, il est fait référence ici à plusieurs milliers de
10 personnes qui sont détenues en tant que captifs ou prisonniers sur le
11 territoire de la Communauté croate d'Herceg-Bosna au moment de la rédaction
12 de ce rapport, à savoir le 7 août 1993.
13 Nous lisons :
14 "En ce moment, il y a plus de 4 000 captifs dont plusieurs centaines font
15 partie de l'armée serbe, alors qu'une énorme majorité d'entre eux font
16 partie de ce qu'il est convenu d'appeler l'ABiH."
17 Mon Général, je voulais m'appuyer sur ce passage pour vous poser la
18 question suivante : au moment où vous avez pris le commandement de l'état-
19 major principal du HVO le 24 juillet 1993, vous saviez que des centaines,
20 sinon des milliers d'individus musulmans étaient détenus dans des centres
21 du HVO en Herceg-Bosna. Vous le saviez ?
22 R. Non. Non. Après Boksevica, j'ai quitté la Bosnie-Herzégovine, puis je
23 suis revenu et le reste vous savez exactement au jour le jour quelle a été
24 ma vie. Je n'avais pas le temps d'obtenir des renseignements sur ce sujet.
25 D'ailleurs, c'est écrit ici.
26 Q. Mon Général, vous savez que dans les premiers jours qui ont suivi le 30
27 juin 1993, un ordre a été rédigé qui ordonnait l'arrestation et la mise en
28 détention de tous les hommes musulmans en âge de porter les armes dans tous
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1 les secteurs situés au sud-est et au nord-ouest de l'Herzégovine, donc dans
2 ces deux zones opérationnelles. Vous êtes au courant de cela, n'est-ce pas
3 ?
4 R. J'ai vu cela dans un document que je n'avais pas vu avant de le voir
5 ici au Tribunal.
6 Q. Mais ma question concerne la période où vous étiez sur le territoire de
7 l'Herceg-Bosna, donc les mois de juillet, août 1993. Est-ce que pendant ces
8 deux mois vous saviez ce qui se passait, à savoir que tous les hommes
9 musulmans en âge de porter les armes ont été arrêtés et placés en détention
10 ?
11 R. Non, Monsieur. A partir du 24 et jusqu'à une date ultérieure, j'ai
12 séjourné à l'endroit où je séjournais et j'ai travaillé dans le plein
13 respect des procédures comme je vous l'ai expliqué au jour le jour. On peut
14 vérifier ce que j'ai fait et on sait qu'elles étaient les informations à ma
15 disposition. Je n'avais pas le temps et je n'avais pas non plus le moindre
16 renseignement au sujet de l'endroit où se trouvait telle et telle personne.
17 Q. Mon Général.
18 R. Bon, posez votre question.
19 Q. Je crois que ma question mérite une réponse par oui ou par non. Est-ce
20 que vous étiez au courant ? Est-ce que vous saviez ?
21 R. Non.
22 Q. Vous ne saviez pas ?
23 R. Non. Je savais qu'il existait des prisons. Donc je savais qu'il
24 existait des prisons, mais moi, bien entendu, comme vous avez pu le lire
25 dans le document, j'ai envoyé en prison des auteurs d'infractions, et ça
26 s'arrête là.
27 Q. Etiez-vous au courant de l'existence d'un ordre visant à désarmer et
28 déplacer des Musulmans membres du HVO, ultérieurement à l'attaque du 30
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1 juin 1993 ?
2 R. Non.
3 Q. Et au moment où vous avez pris le commandement de l'état-major
4 principal du HVO, le 24 juillet 1993, le général Petkovic ne vous a rien
5 dit de tout cela ?
6 R. Non. Nous n'avons pas eu le temps de discuter de cela, car avec la
7 chute de Bugojno et avec les déplacements --
8 Q. Non, excusez-moi, Mon Général. Mais je vais contester votre propos sur
9 ce point. Vous êtes ici dans ce prétoire depuis longtemps et vous savez que
10 le jour où vous avez pris le commandement de l'état-major principal du HVO,
11 vous-même et votre HVO avait des milliers d'hommes musulmans qui étaient
12 maintenus prisonniers dans divers centres de détention du HVO. Vous aviez à
13 vous en occuper. Ceci n'est-il pas vrai ? En tout cas, vous savez
14 maintenant au moins que tel était le cas.
15 R. Vous me demandez ce que je savais à l'époque, et je vous dits qu'à
16 l'époque je ne le savais pas. Si vous me demandez ce que j'ai appris par la
17 suite au sujet de l'existence de prisons dans lesquelles se trouvait un
18 certain nombre de prisonniers, alors je peux vous dire que j'en ai
19 connaissance après la publication du texte dans Globus. Donc après ce
20 moment où je me suis entretenu avec trois journalistes, nous avons déjà
21 parlé de cela. Le 1er septembre je leur ai accordé --
22 Q. Donc vous avez entendu parler de l'existence de ces prisonniers de la
23 bouche d'un journaliste. Vous n'aviez pas entendu parler de ces prisonniers
24 de la bouche du général Petkovic à l'époque où il vous a remis le
25 commandement. C'est bien ce que vous nous dites ?
26 R. Je n'ai pas entendu parler de cela et je ne sais vraiment pas pourquoi
27 le général Petkovic aurait dû m'en parler, qu'est-ce qu'il pouvait avoir à
28 faire avec les prisons. Les prisons n'avaient rien à voir avec l'état-major
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1 principal du Conseil croate de Défense.
2 Q. Même si les membres de diverses zones opérationnelles ont participé à
3 l'arrestation et au placement en détention de toutes ces personnes ? Vous
4 continuez à dire que le HVO n'avait aucune responsabilité par rapport à ces
5 hommes ?
6 R. On ne peut pas répondre à cette question, parce que différents
7 commandants de différentes zones opérationnelles, pour moi ça n'a aucun
8 sens, quel commandant, de quelle zone opérationnelle, à quel moment, dans
9 quelle période. Quant au fait que moi j'ai été commandant et que j'ai
10 participé à ce dont vous êtes en train de parler, si c'était le cas, je
11 pourrais vous répondre en vous disant si j'étais au courant, si j'étais
12 informé, pourquoi je n'ai pas été informé, et cetera.
13 Mais parler de choses présentées comme diverses et multiples ne me
14 permettent pas d'apporter à votre thèse une réponse précise.
15 Q. Vous avez indiqué que le temps manquait pour parler des prisonniers à
16 l'époque où vous avez pris en main le commandement du HVO. Vous avez évoqué
17 Bugojno.
18 Donc est-il vrai, Mon Général, que les événements qui survenaient sur
19 le terrain, autrement dit les opérations militaires, étaient la seule chose
20 qui vous préoccupait, et que le fait que vous aviez sur les bras tous ces
21 prisonniers à ce moment-là n'a jamais été quelque chose qui vous a
22 préoccupé au moment où vous exerciez vos fonctions de commandant de l'état-
23 major principal du HVO ?
24 R. Ce n'est pas seulement que le temps manquait pour cela, mais c'est que
25 la discussion relative à la passation des fonctions ne doit en aucun cas
26 porter sur la situation des prisonniers, car les prisonniers n'ont aucun
27 rapport avec l'état-major principal. Je ne sais pas comment répondre à
28 votre question, parce que vous semblez impliquer que les prisonniers
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1 étaient sous la responsabilité de l'état-major principal, ce qui est
2 inexact. Donc ma réponse est oui, jusqu'à la date du 1er septembre, tant que
3 Mme Ivanisevic ne m'a pas appelé pour me dire que quelque chose existait
4 dans ce genre de chose. D'ailleurs, à ce moment-là, j'ai même signé --
5 Q. Mon Général Praljak, je vous en prie. Nous allons revenir à ces aspects
6 plus tard. Juste pour finir avec ce que vous avez commencé à dire, je
7 voudrais poser une question de suivi. Vous avez dit que les prisonniers
8 n'étaient pas sous l'autorité de l'état-major principal. Est-ce que vous
9 êtes en train de nous dire que les prisonniers dans ce cas-là étaient sous
10 l'autorité du département de la Défense ?
11 R. Ce que je vous dis c'est que dans tout cas où il y avait eu des
12 prisonniers de faits, le devoir qui se présentait était de remettre les
13 prisonniers en question à la police militaire. Vous avez pu entendre des
14 témoins ici concernant la question de savoir qui en avait la responsabilité
15 et je n'ai pas à me mêler de cela ni ne suis bien informé de tout cela.
16 Tout ça est parfaitement clair. A l'époque où j'étais sur place, je
17 n'avais aucun rapport avec tout cela et je n'avais pas à avoir le moindre
18 lien avec tout cela. Ça ne figure pas dans la liste des tâches qui
19 m'incombaient à l'époque. Pas du tout.
20 Q. Très bien. Nous y reviendrons plus tard. Général, la pièce suivante est
21 la pièce P 04719.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, je voudrais terminer sur ce document. Il y
23 a une passation de pouvoir et vous nous dites que le général Petkovic ne
24 vous a pas dit qu'il y avait des prisonniers, et cetera. Bon. Pourquoi pas
25 ? Mais vous reconnaîtrez avec moi que ça peut paraître surprenant pour
26 quelqu'un de l'extérieur. Imaginons qu'à Bagdad le général américain est
27 remplacé par un autre général, je suppose que le général américain dira à
28 celui qui le succède : Nous avons tant de détenus dans nos prisons, puis il
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1 lui fera le point de la situation militaire. Mais vous nous dites non, on
2 n'a pas évoqué ce problème.
3 En vous écoutant, je me suis dit pour quelle raison. Etait-ce la
4 situation, était-ce le fait qu'il combattait et à ce moment-là il y a eu
5 une passation très rapide, chacun pensant que l'autre était parfaitement
6 informé ? C'est peut-être vrai. Je n'ai pas d'éléments me permettant à tout
7 coup de dire que vous ne dites pas la vérité. Je ne sais pas. J'essaie
8 d'analyser sereinement la situation.
9 Et ce qui peut être surprenant aussi, vous dites : Je ne savais pas
10 que les Musulmans avaient été désarmés et incarcérés. Ça peut être
11 surprenant aussi, mais ça peut être vrai parce que vous étiez peut-être
12 dans une zone où vous n'aviez pas ce type de problème et qu'à ce moment-là
13 vous n'avez pas été informé.
14 Alors cette passation avec Petkovic, matériellement elle a eu lieu où
15 ? Par téléphone ? Physiquement ? A quel endroit ? Elle a duré combien de
16 temps, à votre connaissance ?
17 Parce qu'il peut y avoir une autre explication que vous ne voulez peut-être
18 pas dire. Tous ceux qui ont été dans l'administration dans l'armée savent
19 que parfois il y a des successions très difficiles parce que celui qui s'en
20 va n'est pas content, et finalement il n'a aucun contact avec celui qui le
21 remplace, ou bien il y a une poignée de mains et on s'en va. Il y a peut-
22 être aussi cette explication. C'est pour ça qu'il faut nous dire exactement
23 ce qui s'est passé.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a beaucoup de questions, donc je vais
25 commencer par la toute dernière.
26 Tout d'abord, il est exact de dire que les fonctions qui rapportent un
27 certain prestige et un certain confort, de bonnes conditions de vie, les
28 gens se battent pour les obtenir, ces fonctions-là. 90 % de ceux qui
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1 étaient en poste au sein du HVO se seraient estimés heureux d'avoir pu
2 passer la main à quelqu'un d'autre, car qu'est-ce que cela signifiait être
3 commandant du HVO au moment non seulement où Bugojno était tombé et où
4 toute cette avalanche se poursuivait sans qu'on puisse voir où cela
5 s'arrêterait, et au moment où c'était 20 heures par jour qu'avec plus de 2
6 000 hommes je menais les combats quotidiennement. Vous verrez sur la base
7 de rapports que je prenais le risque plusieurs fois par jour de perdre la
8 vie. Il était plus probable pour moi de mourir que de survivre.
9 Messieurs les Juges, nous nous référons sans arrêt à des généraux
10 américains, mais cela n'a rien à voir. Il n'y a pas de relèves. Il n'y a
11 pas de soldes. Les unités sont toutes petites, dispersées. Les hommes sont
12 si épuisés que cette fatigue, parfois, en vient à inhiber complètement leur
13 capacité aussi bien physique que psychologique. Vous êtes à la fois père et
14 commandant pour eux et vous les priez, vous les punissez 20 heures par jour
15 d'une colline ou d'un mont à l'autre, et tout cela avec 15 000 réfugiés,
16 avec plusieurs milliers de soldats. Une partie de ces hommes perd la tête.
17 Ça, c'est un élément.
18 Deuxièmement, je ne suis pas sûr qu'un général américain ferait état du
19 nombre de prisonniers ou si cette compétence incombait à une autre partie
20 de l'armée. C'est ainsi qu'on a, par exemple, à Guantanamo, un centre où
21 des prisonniers sont détenus, mais ce centre est sous la responsabilité de
22 la CIA et non pas de l'état-major. Donc c'est une question d'organisation
23 que de savoir qui a la charge de ces aspects-là. Cela était le cas
24 également à Mostar. Je ne sais pas ce que je peux dire d'autre. Cela a duré
25 pendant 85 à 90 jours, sans interruption. Ma conversation avec le général
26 Petkovic à Grude n'a pas duré plus de 30 à 45 minutes tout au plus. S'il y
27 avait eu qui que ce soit d'autre pour accomplir ces fonctions, nous aurions
28 tous les deux été très heureux d'aller faire trempette à Makarska, mais la
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1 réponse était invariablement : Non, moi, je ne suis pas capable de faire
2 cela. Donne ce poste à quelqu'un d'autre. Ceux qui sont restés étaient ceux
3 qui voulaient combattre. Quant à accomplir ces tâches, c'était difficile au
4 mois de juin car ce que vous avez vu dans le rapport de Siljeg est tout à
5 fait clair. Je me serais estimé heureux de pouvoir être assis dans un
6 bureau, dans mon état-major, de pouvoir émettre des ordres, d'envoyer des
7 appareils. Mais malheureusement, ce n'était pas le cas. Nous ne pouvons pas
8 transposer maintenant la situation en envisageant ce que nous aurions aimé
9 que cette situation soit.
10 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, il me semble que
11 vous persistez à vous lancer dans des déclarations qui, à mon avis, ne sont
12 pas constructives et ne permettent pas d'aller dans le sens que vous
13 semblez vouloir poursuivre. Donc essayez de répondre brièvement aux
14 questions de M. Stringer afin que ce dernier puisse continuer avec ses
15 questions.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Juge Prandler a parfaitement raison.
17 Vous avez donné des explications, puis vous allez sur d'autres points. Donc
18 pour résumer ce que vous dites, pour bien comprendre ce que vous venez de
19 me dire, et je ne veux pas faire d'erreur parce que tout ça est très
20 important, vous rencontrez Petkovic à Grude. L'entretien, d'après votre
21 souvenir, a lieu pendant 30 à 45 minutes. La situation était sur le plan
22 militaire très compliquée et vous n'avez pas parlé des prisonniers.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non, c'était à Citluk, Citluk.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est à Citluk. Vous aviez dit Grude, donc vous vous
25 corrigez. C'est Citluk. Très bien. Je vous en remercie.
26 M. le général Petkovic ne vous parlait pas des prisonniers parce que ces
27 prisonniers ne relèvent pas de l'état-major principal du HVO, et de ce
28 fait, il n'y avait pas lieu à parler de cela. Voilà. Ai-je bien résumé les
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1 raisons qui ont fait que cette passation était rapide et que la question
2 des prisonniers n'a pas été abordée ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Essayez d'être aussi synthétique que je
5 peux l'être, et on gagnera du temps.
6 Monsieur Stringer.
7 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Q. Général, juste pour être extrêmement précis encore une fois sur ce
9 point, et nous y reviendrons ultérieurement, nous passerons un certain
10 temps sur la question des camps, le 24 juillet 1993, vous nous dites que
11 vous n'étiez pas au courant du fait que le HVO détenait des hommes dans la
12 prison militaire de l'Heliodrom au sud de Mostar ?
13 R. Je savais que l'Heliodrom était une prison, mais qui s'y trouvait,
14 cela, je l'ignorais.
15 Q. Très bien. Alors même question concernant la prison militaire de
16 Ljubuski. Saviez-vous que le HVO détenait des centaines de prisonniers dans
17 cette prison à l'époque où vous avez pris le commandement le 24 juillet
18 1993 ?
19 R. Je l'ignorais.
20 Q. Le général Petkovic ne vous en a jamais parlé ?
21 R. Non, jamais.
22 Q. Connaissiez-vous l'existence de prisonniers musulmans détenus à
23 Dretelj, dans la municipalité de Capljina ?
24 R. Je connaissais l'existence de Dretelj ou de Gabela, mais je ne l'ai
25 appris que suite à mon entretien téléphonique avec Mme Ivanisevic, le 1er
26 septembre, Mme Ivanisevic qui a abordé la question du ZDF. J'avais entendu
27 parler de l'existence de quelque chose là-bas. Mais quoi que j'aie pu
28 faire, quoi qu'il en soit, je l'ai autorisée à se rendre sur les lieux,
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1 bien que d'un point de vue strictement formel, je n'avais pas autorité pour
2 le faire. Je l'ai aidée à se rendre sur place et à filmer la situation. Je
3 lui ai donné l'autorisation.
4 Q. Donc le 24 juillet 1993, lorsque vous prenez en charge le commandement
5 de l'état-major principal, le général Petkovic ne vous parle pas de
6 Dretelj, ne vous dit rien concernant le camp de Dretelj ?
7 R. Non.
8 Q. Il ne vous a pas parlé non plus de la prison de Gabela ?
9 R. Non.
10 Q. Très bien. Général, comme je l'ai dit, nous reviendrons à la question
11 des camps de détention. La pièce suivante dans votre classeur devrait
12 porter le numéro P 04719. Nous atteignons la fin de cette partie du contre-
13 interrogatoire.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, sans spéculer, mais un juge pénal,
15 il aime bien positionner les situations en fonction d'hypothèses. Je vais
16 vous formuler une hypothèse.
17 Imaginons que le général Petkovic vous dise : Le HVO détient X
18 détenus. Qu'est-ce que vous auriez fait ou qu'est-ce que vous auriez dit,
19 parce que là, sous la foi du serment, vous dites, Le général Petkovic ne
20 m'a jamais rien dit. Donc vous dites ça, vous avez prêté serment, donc ça a
21 du poids ce que vous dites. Alors je pars du fait que ce que vous dites est
22 vrai, et si le général Petkovic vous avait dit : Voilà, nous avons des
23 prisonniers, qu'est-ce que vous auriez dit et qu'est-ce que vous auriez
24 fait ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Rien. Je serais allé me battre, car c'était la
26 raison de ma venue et je n'aurais assumé aucune responsabilité ni ne me
27 serais livré à aucune ingérence dans la question des prisons. Je n'avais
28 aucune compétence en la matière. Mon devoir était d'envoyer en prison ceux
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1 des membres du HVO qui avaient commis une infraction disciplinaire -- ou
2 plutôt, au titre de mesures disciplinaires. Ce qui relevait du pénal, en
3 revanche, était fait conformément à une procédure dont vous avez entendu de
4 témoins bien plus qualifiés que moi la nature qui était la sienne.
5 Donc dans la situation telle qu'elle se présentait, même si j'avais
6 appris l'existence de ces prisonniers, je n'aurais rien fait. Je me serais
7 rendu à Rama et je me serais battu, car je n'avais rien à voir avec les
8 prisons. Quel lien devrais-je avoir avec elles ?
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, tout au début du procès, et ça
10 remonte déjà à plusieurs années, le temps passe très vite, nous avons
11 appris, et j'ai appris à cette occasion que vous aviez donné des
12 autorisations pour visiter des prisons. Comme moi, dans mes fonctions
13 antérieures, je m'étais occupé de plus de 50 000 prisonniers et que j'avais
14 donné aussi des autorisations, je me suis dit s'il donne des autorisations,
15 est-ce qu'il connaît vraiment la situation ou il ne la connaît pas ? S'il
16 ne connaît pas la situation à ce moment-là, il peut donner une autorisation
17 sans voir les conséquences. Donc ça m'avait vraiment posé un véritable
18 problème de voir que vous aviez donné des autorisations et que quelqu'un
19 qui fait un reportage, le reportage ensuite est diffusé dans les médias, et
20 cetera, et que lorsqu'on a caché quelque chose, évidemment, on ne donne pas
21 l'autorisation, cela va de soi. Voilà. Donc le fait même que vous aviez
22 donné cette autorisation, je la mets en corrélation, à l'époque, il y a
23 plusieurs années, au début du procès, avec le fait que vous aviez ou pas
24 une connaissance de la situation. C'est comme si vous reprochez des
25 exemples américains, mais moi, je prends cet exemple parce qu'il y a des
26 événements actuels et que tout le monde comprend. C'est pour ça que
27 j'essaie de prendre des exemples où tout le monde peut percevoir. C'est
28 comme si un général américain qui avait sous son contrôle cette fameuse
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1 prison où s'étaient déroulés des mauvais traitements donne une autorisation
2 à la CNN, qui va sur place, qui fait un reportage, qui interviewe les
3 prisonniers qui racontent : Bien, voilà, on nous mettait des sacs sur la
4 tête. On nous battait, et cetera. Et immédiatement la CNN fait sortir le
5 reportage. Donc dans cette situation, le général américain qui aurait donné
6 l'autorisation, manifestement, il ne savait pas ce qui se passait. Donc
7 voilà.
8 Apparemment, le général Petkovic témoignera, c'est ce qu'on a cru
9 comprendre. Il sera à votre place. Il prêtera serment et il confirmera ou
10 il infirmera ce que vous dites. Donc au jour d'aujourd'hui, vous nous dites
11 : "Moi j'ignorais qu'il y avait des prisonniers. Je savais qu'il y avait
12 des prisons militaires dans lesquelles on envoyait des soldats, et j'ai
13 donné des autorisations, parce que c'était vous-même tout à l'heure qui
14 l'avez dit, pour faire des reportages." Et j'ai cru comprendre sans savoir
15 si vous aviez le pouvoir ou pas d'ordonner l'autorisation. Ceci est
16 important. Une fois de plus, vous nous dites : "Moi, j'ignorais l'existence
17 de ces centaines, voire milliers de prisonniers."
18 Et je complète. Et si vous saviez qu'il y avait eu des prisonniers,
19 est-ce que vous auriez donné l'autorisation ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, il est précisé ici
21 qu'il y avait 6 000 hommes prisonniers, et cetera. Mais s'il y a des
22 prisons, s'il est question de ces prisons, j'ai sans doute présumé qu'il y
23 avait des prisonniers qui s'y trouvaient. Cependant, ma position en Croatie
24 là où je me trouvais, au poste où je me trouvais, tous les journalistes qui
25 se sont présentés, et pas seulement les journalistes, mais également les
26 attachés militaires et tous les autres, je leur ai permis à tous et donné
27 les approbations nécessaires pour qu'ils puissent se rendre sur place et
28 collecter toutes les informations qu'ils souhaitaient.
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1 Donc lorsque Vulliamy est venu me voir après que quelqu'un d'autre
2 lui ait refusé l'accès, il est venu me voir en me demandant si je voulais
3 lui accorder un laissez-passer. Je lui ai dit : Vas-y et va voir par toi-
4 même. Vous allez avoir la déclaration d'un journaliste de Zagreb à qui j'ai
5 donné un laissez-passer et qu'ils ont renvoyé. Ils ne l'ont pas laissé
6 entrer car ils ont dit : Praljak n'a rien à voir avec cela, rebroussez
7 chemin. La télévision allemande et le ZDF également avec son équipe se sont
8 vus accorder l'autorisation de venir. Ma position était qu'il ne fallait
9 rien cacher et qu'il n'y avait rien à cacher.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous savons, car vous nous l'aviez dit, vous aviez
11 un contact à haut niveau avec un attaché militaire de l'ambassade des
12 Etats-Unis à Zagreb que vous voyiez souvent qui faisait le point avec vous.
13 Sous la foi du serment, à aucun moment cet attaché militaire vous aurait
14 dit ceci: "Nous savons par nos services de renseignements que vous détenez
15 des milliers de prisonniers musulmans. Nous savons que certains sont
16 maltraités et il faut arrêter cela." Jamais il ne vous a dit cela ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] J'affirme sous serment qu'à aucun moment ni
18 lui-même ni personne d'autre ne m'a rien dit de cette nature. Par ailleurs,
19 vous pouvez l'inviter à déposer. Vous disposez de sa déclaration et il
20 pouvait se rendre sur place. Et d'ailleurs, il est allé à Rama et il s'est
21 rendu partout où il souhaitait se rendre. Dès le début, au moment où il est
22 arrivé, au moment où le représentant du CICR est venu, et nous savions très
23 bien que c'était un jeu de masque auquel nous avions affaire là. Et
24 ultérieurement aussi, il est resté jusqu'à l'opération Tempête. Et pour
25 autant que je le sache, il avait accès à tout, et non seulement lui avait
26 accès à tout, mais également les Allemands, les Espagnols, du moins là où
27 moi je pouvais prendre la décision de leur donner accès.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Il nous reste quelques minutes avant la pause,
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1 Monsieur Stringer.
2 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 Q. Général, je vais essayer de remettre en question quelque chose que vous
4 venez de dire il y a quelques minutes. M. le Président vous a demandé ce
5 que vous auriez fait si vous aviez connu l'existence de prisonniers. Et
6 vous avez dit : "Je n'aurais rien fait. J'aurais continué à me battre.
7 C'était la raison de ma présence sur place." Et vous avez dit : "Je n'avais
8 aucune responsabilité concernant les prisons."
9 Mais, Général, je souhaite avancer que c'est là une position absurde que
10 vous prenez car lorsque vous étiez commandant de l'état-major principal du
11 HVO, soutiendriez-vous que vous n'aviez dans cette position-là aucune
12 responsabilité concernant les prisonniers de guerre ?
13 R. Oui. Les prisonniers de guerre existent, il n'y a aucune raison qu'il
14 n'en n'existe pas. La question c'est de savoir comment on procède à leur
15 égard. Evidemment, un prisonnier de guerre c'est un phénomène qui existe
16 dans toute guerre. Et un prisonnier de guerre --
17 Q. Merci. Vous avez répondu à ma question.
18 Je voudrais essayer d'en terminer avec cette section, Monsieur le
19 Président, avant la pause.
20 La pièce suivante est celle qui porte la cote P 04719, Général.
21 Reconnaissez-vous ce document comme étant un ordre que vous avez émis
22 en date du 1er septembre 1993 ou autour de cette date ?
23 R. Oui, c'est moi qui ai signé cela.
24 Q. Et ce que vous faites ici c'est d'exposer l'organisation de la
25 structure de commandement et des opérations offensives et défensives dans
26 la zone opérationnelle d'Herzégovine du sud-est; n'est-ce pas ?
27 R. Oui, je connais ce document. J'ai émis l'ordre à la zone opérationnelle
28 de se préparer, et pas uniquement aux fins de la défense. Je voulais les
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1 secouer un petit peu. C'est un document qui n'est jamais parvenu jusqu'à
2 l'échelon de la zone opérationnelle. Mais ce que je voulais c'était les
3 secouer un peu pour qu'ils ne soient pas uniquement sur la défensive. Je
4 voulais voir s'ils seraient prêts également à prendre part à des actions
5 offensives. Cependant, nous avons là un document en papier qui est plutôt -
6 -
7 Q. Très bien, Général. Alors, je voudrais attirer votre attention sur le
8 paragraphe numéro 1, et certaines des unités sur lesquelles vous affirmez
9 votre autorité tel que cela figure ici. Il y a des références à un certain
10 nombre d'unités et la plupart d'entre elles sont désignées par des
11 acronymes. Mais je voudrais juste clarifier qu'il n'y a pas de malentendus
12 sur la signification de ces acronymes.
13 Par exemple, vous commencez par la zone opérationnelle d'Herzégovine du
14 sud-est, et vous parlez de la 1ère KD. Est-ce que c'est la Brigade Knez
15 Domagoj ?
16 R. Probablement, oui.
17 Q. Très bien. Ensuite je passe à la ligne suivante. MHC
18 la Brigade Mario Hrkac Cikota ?
19 R. Probablement, oui.
20 Q. Alors ensuite nous avons KB. Est-ce que c'est le Bataillon des
21 Condamnés ?
22 R. Je l'ignore. Veuillez me croire, je l'ignore.
23 Q. En fait, c'est bien le Bataillon des Condamnés, n'est-ce pas, Général ?
24 Je pense que vous le savez. Vous refusez juste de le reconnaître.
25 R. Monsieur Stringer, si je le savais, je vous le dirais, mais je
26 l'ignore. Cette liste d'unités, unités de ce niveau particulier, vous
27 pouvez voir également dans la partie manuscrite que cette liste a été
28 dressée par quelqu'un de la zone opérationnelle. Moi, évidemment j'ai
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1 signé, j'ai apposé par principe ma signature, mais cela ne signifie pas que
2 je connais en détail la composition de chacune des unités.
3 Q. Avant d'en finir avec cette partie, je voudrais essayer de clarifier le
4 statut qui était celui du Bataillon des Condamnés au sein du HVO. Je sais
5 que je vous ai déjà posé au début un certain nombre de questions sur ce
6 sujet, mais je ne crois pas que cela ait été suffisamment clair à ce jour,
7 du moins dans le compte rendu d'audience.
8 Alors, Général, pouvons-nous convenir que le Bataillon des Condamnés
9 faisait partie du HVO ?
10 R. Monsieur Stringer, quelles que soient les dénominations qui ont circulé
11 et dont j'ignorais une bonne part, je vous répète qu'à l'époque où j'étais
12 sur place, je n'avais rien à voir avec M. Naletilic et avec l'unité qui
13 était sous son autorité. Moi, je n'exerçais aucune autorité sur les parties
14 sur lesquelles s'exerçait son autorité à lui. Et ça, je vous le répèterai
15 cent fois sous serment. Donc je ne commandais pas.
16 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Monsieur Praljak, la question
17 n'était pas de savoir si vous étiez à la tête, si vous aviez l'autorité sur
18 le Bataillon des Condamnés, mais elle était la suivante, et je cite :
19 "Général, pouvons-nous convenir que le Bataillon des Condamnés faisait
20 partie du HVO ?"
21 Alors, s'il vous plaît, répondez à cette question. Pensez-vous que le
22 Bataillon des Condamnés faisait partie du HVO ou êtes-vous en désaccord
23 avec cette affirmation ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Le Bataillon des Condamnés, selon tous les
25 éléments dont je dispose, ne faisait pas partie du HVO, au niveau où je me
26 trouvais, avec les informations dont je disposais. Je l'ai dit à plusieurs
27 reprises. Donc les unités auxquelles commandait Mladen Naletilic Tuta, je
28 n'avais pas d'autorité sur elles. Ce qu'il en était exactement, je
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1 l'ignore.
2 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que
3 j'aurais besoin de revenir sur cette question après la pause.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement, il est l'heure de faire la pause.
5 Nous allons faire 20 minutes de pause.
6 --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.
7 --- L'audience est reprise à 16 heures 07.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, l'audience étant reprise.
9 Oui, Monsieur Praljak.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
11 Monsieur Stringer, ce KB, malheureusement on n'a pas assez de temps. Vous
12 ne m'accordez pas suffisamment de temps. C'est écrit Brigade KB, puis si
13 vous tournez la page, au point 2.1, il est écrit Brigade Knez Branimir,
14 Citluk. Donc ce n'est pas le Bataillon des Condamnés, c'est la Brigade
15 Branimir de Citluk. P 04719, c'est ça la cote du document qu'on est en
16 train d'examiner. Vous avez demandé si c'était le Bataillon des Condamnés.
17 Non, c'est la Brigade KB, et puis au point 2.1 c'est écrit Knez Branimir
18 Citluk.
19 M. STRINGER : [interprétation]
20 Q. Je vous remercie pour avoir apporté cet éclaircissement. Je voudrais
21 qu'on reprenne votre déposition de la fin de l'audience avant la pause. Le
22 Juge Prandler vous a posé une question en page 37, ligne 17, alors que le
23 Bataillon des Condamnés, à en juger d'après tous les éléments d'information
24 que j'avais à ma disposition, ne faisait pas partie du HVO, et vous avez
25 dit : "Je n'ai pas commandé l'unité qui était placée sous le commandement
26 de Mladen Naletilic."
27 Général, prenons un petit peu de temps pour parler du Bataillon des
28 Condamnés, s'il vous plaît, et je voudrais que l'on parle de cette unité.
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1 Je ne vais pas vous interrompre. Je sais qu'il y a des questions qui se
2 posent sur le plan du commandement, à savoir qui avait le commandement de
3 cette unité, mais je voudrais reprendre cette question, la question qui
4 porte sur le Bataillon des Condamnés. En fait, ce n'était pas le Bataillon
5 des Condamnés dont nous avons parlé à ce moment-là. Au début du contre-
6 interrogatoire, je vous ai montré un tableau, P 09324, et c'était un témoin
7 de Défense dans l'affaire de Naletilic qui a annoté ce document.
8 M. STRINGER : [interprétation] Je pense que nous allons prendre juste
9 la partie où il y a des annotations.
10 Q. Général, je voudrais vous référer à votre témoignage dans
11 l'affaire Naletilic.
12 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous pouvons afficher
13 cela.
14 Q. Je vais vous donner lecture d'une partie des questions qui se situent
15 pendant le contre-interrogatoire. C'est M. Scott qui posait des questions à
16 ce moment-là, mon confrère, qui est assis derrière moi. Page 9 690 du
17 compte rendu d'audience dans l'affaire Naletilic. La question que l'on vous
18 pose est la suivante :
19 "Question : Monsieur, vous nous avez dit à plusieurs reprises, me
20 semble-t-il, depuis quelques jours, que le Bataillon des Condamnés faisait
21 partie du HVO. Est-ce que vous êtes en train de changer votre réponse ?"
22 Puis vous répondez, Général, et je vous cite :
23 "Réponse : Non, Monsieur. Mais le Bataillon des Condamnés, sous la
24 forme sous laquelle je l'ai connu, si ce n'est pour le premier cas que j'ai
25 mentionné puis le site d'Orlovac, c'est M. Mario Hrkac et M. Andabak qui
26 étaient ses commandants, et c'est quelque chose que j'ai répété à plusieurs
27 reprises. M. Mladen Naletilic ne faisait pas partie de la structure
28 militaire et je ne l'ai pas non plus connu en tant que commandant de cette
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1 unité dans la partie militaire.
2 "Question : Très bien, Monsieur. Mais juste pour que le compte rendu
3 d'audience soit clair - et je ne voudrais pas que l'on ait terminé avant
4 que ce soit clair - vous n'êtes pas en désaccord, vous n'avez pas modifié
5 votre réponse que le Bataillon des Condamnés était commandé par qui que ce
6 soit, mais vous confirmez encore une fois que le Bataillon des Condamnés
7 faisait partie du HVO dans son volet militaire ?
8 "Réponse : Exact, pour ce qui est de la structure du HVO que vous m'avez
9 montrée et j'ai indiqué où était le Bataillon des Condamnés, et je
10 maintiens ce que j'y ai fait."
11 Donc, Général, dans cette déposition, vers la fin lorsque vous vous référez
12 à la structure où vous avez apporté des annotations, vous vous référez à
13 cet organigramme que nous sommes en train de regarder, 9234; c'est cela ?
14 C'est une question à laquelle vous pourrez répondre par un oui ou un non,
15 Général. Lorsque vous vous référez aux annotations, ce sont les annotations
16 sur cet organigramme-ci ?
17 R. C'est vous qui affirmez que l'on peut répondre par un oui ou un non,
18 mais moi, je vous dis que ce n'est pas possible. Vous avez omis la partie
19 la plus importante. Je parlais de l'année 1992 et je parlais d'Orlovac, et
20 à ce moment-là j'ai dit que le Bataillon des Condamnés, c'est-à-dire le
21 commandant Andabak s'est trouvé à Orlovac faisant partie de la structure du
22 HVO. De 1992, c'est le mois de mai, début juin, et 1993, il y a une grande
23 différence, et on ne peut pas répondre par un oui ou un non, et je
24 maintiens ce que j'ai dit à l'époque dans ma réponse et ce que je vous dis
25 maintenant. Je ne sais pas la réponse exacte, Monsieur Stringer, et la
26 suivante, je ne le sais pas. Je sais --
27 Q. Général --
28 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mais vous n'êtes pas en train de
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1 répondre à la question du tout. Vous n'avez même pas remarqué de quoi il
2 s'agit dans la question. Je vais vous en donner lecture : Est-ce que vous
3 vous référiez à cet organigramme lorsque vous vous référiez à vos mentions,
4 à vos annotations ? C'était ça la question et non pas de savoir si vous
5 confirmez que le Bataillon des Condamnés faisait partie du HVO ou autre
6 chose. La question était de savoir si à ce moment-là vous vous êtes référé
7 à cet organigramme avec les annotations ? Je pense qu'on peut répondre par
8 un oui ou un non.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, à ce moment-là,
10 j'ai répondu au mieux de ce que je savais. Toutes les dépositions, si elles
11 ne sont pas à 100 % vraies, ne signifie pas nécessairement qu'elles sont
12 mensongères. Je suis venu en tant que témoin de la Défense, totalement sans
13 aucune préparation. Le temps s'est écoulé. Je vous dis, je ne sais pas. Je
14 vous dis en ce moment-ci je ne sais pas qui commandait Mladen Naletilic
15 Tuta.
16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Peut-être que j'ai mal repris les
17 propos de M. Stringer. Il vaut mieux qu'il vous pose sa question. J'ai la
18 sensation que vous ne m'avez pas compris. Peut-être que je ne m'exprime pas
19 bien.
20 Monsieur Stringer, je vous en prie, vous avez la parole.
21 M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.
22 Q. Général, la question est la suivante : le HVO -- je reprends. Le
23 Bataillon des Condamnés faisait-il partie du HVO ? La question est simple.
24 R. A quel moment ?
25 Q. Lorsque vous étiez commandant de l'état-major principal du HVO, le 27
26 ou le 24 juillet 1993, la date que vous avez écrit sur l'organigramme. Le
27 Bataillon des Condamnés faisait-il partie du HVO à ce moment-là ?
28 R. Non.
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1 Q. Alors, je vous soumets, Général, que vous ne nous dites pas la vérité
2 puisque le fait est que vous étiez assis là à la place des témoins devant
3 ce Tribunal, vous vous êtes exprimé sous serment dans l'affaire Naletilic,
4 vous avez écrit cette date, vous avez fait ces annotations sur cet
5 organigramme, vous avez écrit KB à côté de cette case avec les unités
6 professionnelles. Est-ce que cela n'est pas vrai ?
7 R. Il est vrai.
8 Q. Alors je vous soumets, Général, que vous ne nous dites pas la vérité
9 aujourd'hui. Le KB faisait partie de la structure du HVO, précisément comme
10 vous l'avez indiqué sur cet organigramme qui est versé au dossier dans
11 l'affaire Naletilic. Est-ce que cela n'est pas vrai ?
12 R. Monsieur Stringer, nous parlons de deux choses différentes pour ce qui
13 est du HVO. Moi, je parle des unités qui relèvent du commandement de
14 l'état-major principal, et vous, à votre tour, vous me dites que le HVO,
15 bien entendu, c'est aussi la police militaire. Mais je --
16 Q. Mais vous n'arrêtez pas de modifier ma question de la manière où cela
17 vous arrange. Arrêtez de faire cela et répondez à ma question.
18 Nous avons ici un organigramme qui nous représente le HVO. Nous avons
19 l'état-major principal, le département de la Défense. Donc je vous pose ma
20 question au sujet du HVO. Général, sous serment dans l'affaire Naletilic,
21 je vous ai donné lecture de votre déposition, vous avez témoigné tout à
22 fait clairement, sans ambiguïté, en disant que le Bataillon des Condamnés
23 faisait partie du volet militaire du HVO, et c'est exactement comme cela
24 que les choses étaient, n'est-ce pas vrai ? Le Bataillon des Condamnés
25 faisait partie de la partie militaire du HVO ?
26 R. Si vous voulez que quelque chose rentre dans le compte rendu
27 d'audience, vous pouvez le déclarer vous-même et qui que ce soit d'autre
28 peut le faire. Mais je me souviens très clairement que, et je sais, je n'ai
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1 pas commandé le Bataillon des Condamnés. Quant à savoir est-ce qu'il a fait
2 partie de --
3 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander à la
4 Chambre d'instruire le témoin à répondre aux questions. Il modifie la
5 question et ainsi il évite de répondre.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, la question de M. Stringer est très
7 claire, d'autant qu'il vous la pose, avec M. Scott qui est derrière lui,
8 puisque c'était M. Scott qui, à l'époque, vous avait posé la question.
9 On a sur l'écran, vous voyez, le document de votre blanche main à
10 l'époque. Vous indiquez Gospodin Mate Boban, c'est le commandant des
11 armées. Vous écrivez Bruno Stojic, lui, à la tête du département de la
12 Défense. Vous encadrez l'état-major principal, vous faites un carré et vous
13 marquez 27 juillet 1993 où là on comprend que c'est vous qui êtes le
14 commandant du HVO à compter du 27 juillet.
15 Plus délicat c'est ce qui est à droite. Vous marquez ATG
16 entourez avec une flèche, donc on peut en tirer la conclusion que l'ATG
17 dépend de l'état-major au titre des unités professionnelles, puisque
18 c'était tout le débat. Et sur la droite vous marquez KB, Bataillon des
19 Condamnés.
20 M. Scott, à l'époque quand il vous interroge, il vous demande de bien
21 confirmer si le Bataillon des Condamnés fait partie du HVO, et à l'époque,
22 vous répondez oui, mais là vous venez de donner une explication en disant
23 qu'à l'époque à Orlovac, mais ça c'est 1992, ce n'est pas 1993, celui qui
24 commandait le Bataillon des Condamnés ce n'est pas Naletilic, et qu'à votre
25 connaissance, Naletilic était dans une structure autre. Donc moi je peux en
26 tirer la conclusion qu'en 1992, effectivement, le Bataillon des Condamnés
27 participe à une opération militaire sous commandement du HVO, mais en 1993
28 quid.
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1 Tout à l'heure, juste avant la pause, grâce à l'intervention, et j'en
2 remercie mon collègue le Juge Prandler, il essaie de faire préciser tout
3 cela, et là, sous la foi du serment, vous dites que le Bataillon des
4 Condamnés ne relevait pas du HVO, étant précisé que vous, vous étiez le
5 commandant du HVO.
6 Donc voilà la situation. M. Stringer en tire la conclusion que vous
7 mentez. C'est ce qu'il vous dit en disant que vous ne dites pas la vérité.
8 Vous, vous dites que le Bataillon des Condamnés n'appartenait pas au HVO.
9 Il appartenait en 1992, et c'est ce que vous avez déclaré dans
10 l'affaire Naletilic. Alors il faut que vous nous expliquiez pourquoi vous
11 avez marqué de votre main KB comme vous l'avez fait en présence de M. Scott
12 et devant M. Naletilic. Qu'est-ce que ça voulait dire exactement ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous prie, peut-on définir le terme, le
14 HVO, de quoi parle-t-on ? Donc toute la confusion provient de là. Le HVO,
15 est-ce le SIS ? Le HVO est-ce l'IPD ? Ou le HVO est-ce -- je ne sais pas,
16 les médecins ? Tout cela, la police militaire, tout ça c'est le HVO.
17 Mais, Monsieur Trechsel, s'il vous plaît.
18 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, je dois dire quelque chose.
19 Monsieur Praljak, c'est une réaction, ce n'est pas une réponse, et ça
20 manque de sérieux, je dois dire. Nous n'avons pas eu de problèmes sur la
21 définition du HVO jusqu'à présent. Vous cherchez à fuir, à éviter de
22 répondre. S'il vous plaît, répondez aux questions que M. Stringer vous
23 pose. Cela semble vous être très difficile et à de nombreuses reprises on a
24 dû vous le préciser et cela vous semble très difficile de vous conformer à
25 cette règle. Donc c'est ça la règle du jeu ici. Vous dites toujours que
26 vous voulez un procès juste. C'est le rôle que vous avez à jouer dans le
27 cadre d'un procès juste en tant que témoin. Répondez aux questions qu'on
28 vous pose.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, s'il vous plaît,
2 évitez de caractériser sur le plan psychologique du genre sérieux ou manque
3 de sérieux. Moi, j'ai une approche très sérieuse et je vous prie de ne pas
4 qualifier mes réponses sur le plan psychologique. Je terminerais ma réponse
5 en disant le Bataillon des Condamnés ne faisait pas partie de la structure
6 du commandement de l'état-major principal. Nous n'avons pas défini le
7 terme, le HVO, peut-être que vous, vous l'avez fait. Mais au sein du HVO,
8 qui est une notion plus large, vous avez le Bataillon des Condamnés avec
9 ses unités. Mais dans le cadre du HVO que j'ai commandé, il n'y avait pas
10 de Bataillon des Condamnés. Vous pouvez me l'imputer autant que vous
11 voulez, mais je n'accepterai pas que cela se fasse, sur le plan
12 psychologique par des caractérisations ou autres.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, je crois comprendre que quand le
14 Procureur dit le HVO, le Procureur dit dans le sens large, et dans le sens
15 large, Naletilic fait partie du HVO. Mais quand vous dites le HVO, je crois
16 comprendre à ce moment-là que dans votre esprit, c'est le HVO composante
17 militaire dont vous étiez le commandant. Et dans cette composante
18 militaire, le Bataillon des Condamnés n'entre pas dans la chaîne de
19 commandement. Le Bataillon des Condamnés peut être ailleurs au sein du HVO
20 général, mais pas dans la structure militaire dont vous assuriez, à partir
21 du 27 juillet, le commandement.
22 C'est ça qu'il faut comprendre ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, entièrement exact. Dans la
24 totalité, donc ce que j'en sais c'est que cela ne fait pas partie de la
25 structure de mon commandement. Je ne sais pas exactement dans quelle
26 structure cela se trouve, mais je suppose qu'il se trouve dans le HVO.
27 C'est la réponse précise par rapport à mes connaissances.
28 Et, Monsieur le Juge Trechsel, s'il vous plaît, ne me demandez pas de
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1 témoigner, moi, il y a des domaines où je connais totalement des choses. Je
2 vous dis là où je sors de ce domaine. Donc il ne faisait pas partie de mon
3 état-major.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Laissez le Juge Trechsel de côté, parce que ce n'est
5 pas un débat. Le Juge, comme moi, nous, on essaie de comprendre ce que vous
6 dites. Donc on essaie de comprendre.
7 Et je crois comprendre maintenant que quand vous avez dit dans
8 l'affaire Naletilic que le Bataillon des Condamnés faisait partie du HVO,
9 il faut en tirer la conclusion que c'était au sens large, mais
10 qu'aujourd'hui vous dites en termes de structure militaire dont vous
11 assuriez le commandement, il n'était pas dans cette structure.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Exact, exact.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors à partir de là, Monsieur Stringer, reprenez
14 les commandes et développez votre argumentation, mais vous pouvez ne pas
15 être d'accord avec ce qu'il dit, ce qui est parfaitement possible aussi.
16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je tiens à ajouter, Monsieur
17 Praljak, il ne vous appartient pas de me donner de leçon sur la manière
18 dont je dois poser des questions. Donc le terme "sérieux" n'a pas été
19 utilisé dans un sens psychologique, mais c'était une appréciation objective
20 plutôt de votre réponse.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, Monsieur le Juge Trechsel, qu'entendez-
22 vous par objective ? Vous représentez l'objectivité générale, sur le plan
23 psychologique, non. Je vous respecte mais --
24 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, nous n'allons pas rentrer dans
25 mon usage des mots.
26 Monsieur Stringer.
27 M. STRINGER : [interprétation]
28 Q. Général, reprenons cet organigramme, P 9324, et en haut à droite on a
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1 l'année 1993; le voyez-vous ?
2 R. Oui, je le vois, Monsieur Stringer.
3 Q. Le 27 juillet 1993, c'est la date qui est écrite. C'est vous qui avez
4 écrit cela ?
5 R. Oui, c'est exact, mais si ça ne m'était pas venu à l'esprit que ce
6 n'est pas le Bataillon des Condamnés, pour le document précédent, ce serait
7 resté dans le compte rendu d'audience. En l'espace de quelques secondes, on
8 me met sur le nez un document, il faut que je me rappelle qu'il s'agit de
9 la Brigade de Branimir. Mais il est possible de manquer de précision, à ce
10 moment-là, dans ces conditions. Et on manque de préparatif, je n'avais pas
11 le document pour le parcourir et pour me préparer par avance.
12 Q. Général, --
13 R. [inaudible]
14 Q. Non, ce n'est pas à vous de mener le débat ici. Le fait est qu'en l'an
15 2000, au moment où vous avez déposé, ou 2002, vos souvenirs étaient
16 meilleurs, vous vous souveniez mieux. Et c'est de manière véridique que
17 vous avez répondu à la question posée par M. Scott, et vous avez dit que le
18 Bataillon des Condamnés faisait partie du HVO, de son volet militaire. Est-
19 ce que nous pouvons nous mettre d'accord sur le fait que c'est ce que vous
20 avez dit sous serment pendant l'affaire Tuta en 2002 ?
21 R. Je ne pourrai plus être d'accord avec vous sur rien. Je suis venu ici
22 sans aucune préparation à ce moment-là, pendant ce procès-là, alors que je
23 me suis rafraîchi la mémoire sur un nombre de choses que j'avais
24 complètement oubliées entre-temps pour préparer mon procès.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, je n'ai pas sous les yeux la
26 déclaration de la réponse de M. Praljak à M. Scott, mais je n'ai pas le
27 souvenir qu'il avait dit HVO, structure militaire. Dans le texte, c'est
28 HVO, il n'y avait pas structure militaire. Vous pouvez le vérifier.
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1 M. STRINGER : [interprétation] Sur le bon bouton, vous trouverez le compte
2 rendu d'audience de l'affaire Naletilic, sous Sanction, on parle de la
3 structure militaire.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Ligne 14, c'est très important du document, en
5 anglais il est dit : "M. Mladen Naletilic n'était pas une partie de la
6 structure militaire." Là, c'est écrit.
7 M. STRINGER : [interprétation] Je lui pose ma question au sujet du
8 Bataillon des Condamnés. Donc par rapport au débat que nous avons
9 maintenant, je ne tiens pas compte du commandant, peu importe. Je lui pose
10 la question sur l'unité dont le nom apparaît dans de nombreux documents et
11 il s'agit du Bataillon des Condamnés. Donc je demande tout simplement au
12 général de confirmer ce qu'il a dit à l'époque sous serment, en 2002, à
13 savoir que le Bataillon des Condamnés faisait partie de la structure
14 militaire du HVO.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] En 1992, à Orlovac.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai le texte sous les yeux. Effectivement, M. Scott
17 lui demande - c'est à la ligne 20, et je parle sous le contrôle de tous les
18 anglophones - il lui demande s'il peut confirmer à nouveau que le Bataillon
19 des Condamnés était une partie du HVO militaire. Et il rajoute "Correct."
20 Praljak répond :
21 "Correct," mais il rajoute "comme structure du HVO…" Il ne dit pas
22 structure militaire. Voilà. Je n'ai pas la version française pour comparer,
23 mais dans la version anglaise, il y a M. Scott qui lui dit "structure
24 militaire," et lui il répond "structure du HVO" à la ligne 22.
25 M. STRINGER : [interprétation] Je vais donner lecture en anglais du reste
26 de la réponse pour que l'on puisse interpréter cela dans les autres
27 langues.
28 Ligne 22, le Général dit :
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1 "Correct, pour ce qui est de la structure du HVO que vous m'avez montrée et
2 j'ai tracé avec un surligneur où était situé le Bataillon des Condamnés et
3 je le maintiens."
4 Et là encore nous avons un organigramme de la structure du HVO en 1993.
5 Donc je soumets au général --
6 Q. Une dernière fois, Général, parce que je pense que nous avons épuisé le
7 sujet. Donc pendant que vous commandiez l'état-major du HVO, le Bataillon
8 des Condamnés faisait partie de la structure militaire du HVO; exact ?
9 R. Je ne le sais pas. Il n'était pas placé sous le commandement de l'état-
10 major principal. Où il était placé ? Je ne le sais pas.
11 Q. Très bien.
12 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas qu'il
13 convient de continuer sur ce sujet. Je vais passer à autre chose.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci.
15 M. STRINGER : [interprétation]
16 Q. Général, vous avez ce classeur, le classeur suivant, je pense. Parlons
17 des événements qui ont précédé octobre 1992 et ce qui a suivi, et ce qui
18 s'est passé à Prozor.
19 M. STRINGER : [interprétation] Je précise c'est la liste numéro 6, je
20 précise à l'attention des conseils de la Défense.
21 Q. Général, pour commencer, remontons un petit peu dans le temps, le 21
22 juillet 1992, donc pour situer cela dans le contexte.
23 Il s'agit d'une transcription présidentielle. Nous nous y sommes
24 référés à de nombreuses reprises pendant ce procès. Il s'agit d'une
25 conversation qui se déroule sur une durée de temps de 12 heures au palais
26 présidentiel et c'est le jour où la République de Croatie et la République
27 de Bosnie-Herzégovine signent un accord portant sur l'amitié et la
28 coopération.
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1 Et je vais citer juste un petit extrait de cette transcription. Le
2 président Izetbegovic s'exprime, ça commence page 35 en bas. Le président
3 Izetbegovic prend la parole -- Excusez-moi, P 00336. 336 pour le compte
4 rendu d'audience.
5 Le président Izetbegovic commence à s'exprimer en bas de la page 35
6 et dit que la guerre a commencé au moment où ils n'avaient pas une armée.
7 Il parle de l'évolution de la situation. Puis la page suivante, au milieu
8 de la page, il dit :
9 "Donc il y a une résistance spontanée à l'agresseur et les gens se
10 sont débrouillés comme ils ont pu, comme ils ont su. Donc cela a donné lieu
11 à la création de deux structures différentes, le HVO a été créé surtout
12 dans les zones peuplées par les Croates, et la Défense territoriale a
13 continué de fonctionner."
14 Et puis il dit : "Nous allons --
15 Et donc un peu plus bas, nous lisons :
16 "Dans les secteurs purement croates, le HVO a une coloration
17 politique différente de celle qu'il a dans les zones plus diversifiées.
18 "Dans certains secteurs, nous avons par exemple une coopération
19 excellente entre le HVO et la Défense territoriale jusqu'à présent, à
20 savoir que nous avons des commandements conjoints d'une sorte ou d'une
21 autre. Et dans d'autres secteurs, nous avons des problèmes même sur ce plan
22 car certains objectifs politiques apparaissent liés à la puissance du HVO,
23 objectifs consistant à obtenir la création d'un canon ou selon ce que
24 pensent certaines personnes, quelque chose qui ressemblerait à un Etat dans
25 l'Etat de Bosnie-Herzégovine."
26 Là je saute un paragraphe et puis nous lisons :
27 "C'est très simple, nous avons au sein du HVO des tendances
28 différentes dont certaines, pouvons-nous dire, sont plus loyales à la
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1 Bosnie-Herzégovine et cela va jusqu'aux tendances radicales qui sont à la
2 limite de la loyauté, et il est permis de se demander si dans cette
3 tendance il y a la moindre loyauté à l'égard de la Bosnie-Herzégovine."
4 Et puis il poursuit, il continue de parler. Il parle de la police
5 croate par rapport à la Bosnie-Herzégovine. Et en page suivante, c'est la
6 partie qui m'intéresse le plus, page 38, en haut de page, nous lisons :
7 "Nous avons des cas où les autorités civiles qui ont été légalement
8 élues à l'issue d'élections démocratiques sont rejetées par le HVO et de
9 nouveaux départements militaires sont créés que, bien sûr, nous ne pouvons
10 pas accepter."
11 Est-ce que vous pouvez suivre ?
12 R. Partiellement. Il serait bon que vous me donniez le numéro ERN
13 des pages. Je ne cesse de vous le demander et vous ne cessez de parler et
14 de parler et de parler et à la fin vous allez me poser une question, mais
15 je n'ai pas trouvé de quelle page vous avez tiré le passage que vous avez
16 cité. Pas encore.
17 Q. Page 38. Dans ces transcriptions, les versions en croate et en anglais
18 sont présentées de façon identique. Donc je vais relire la dernière partie.
19 C'est Izetbegovic qui parle et qui dit :
20 "Nous avons des cas où les autorités civiles qui ont été légalement élues à
21 l'issue d'élections démocratiques…"
22 Vous avez trouvé ce passage ?
23 R. Oui, oui.
24 Q. "…ces autorités sont rejetées par le HVO et de nouveaux départements
25 militaires sont créés que nous ne pouvons, bien sûr, pas admettre."
26 Et puis il continue de parler. Il évoque Doboj où le HVO et la Défense
27 territoriale se sont unis et travaillent dans le cadre d'un commandement
28 conjoint. Et puis dans le dernier paragraphe, il dit :
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1 "Il y a également des cas contraires, par exemple, à Busovaca ou récemment
2 à Kiseljak où des personnes exerçant un certain pouvoir localement ont eu
3 l'idée de créer un bureau de douanes comme s'il s'agissait d'un pays
4 étranger, et cetera, et un peu plus loin nous lisons, et ceci crée
5 d'énormes problèmes politiques."
6 Alors, Mon Général, vous n'étiez pas présent à cette réunion du 21 juillet
7 1992 et votre participation aux événements en Bosnie-Herzégovine jusqu'à ce
8 moment-là, si je vous ai bien compris, s'est fait en rapport avec la
9 libération de Mostar dans le courant du mois de juin 1992, c'est bien ça ?
10 R. Exact.
11 Q. Donc à ce moment dont je suis en train de parler, Mon Général, est-il
12 permis de dire que vous ne connaissiez pas ou, en tout cas, que vous
13 n'étiez pas impliqué dans les actions ou les évolutions de la situation qui
14 faisaient que des HVO municipaux étaient en train de prendre le contrôle
15 politique de certaines municipalités de la Communauté croate d'Herceg-Bosna
16 ?
17 R. Vous considérez cela comme un fait. Moi, je ne vois nulle part que vous
18 ayez présenté ce fait. M. Izetbegovic s'exprime en disant : Nous sommes en
19 présence de certains cas, et cetera. Mais la seule phrase importante
20 prononcée par Izetbegovic ici consiste à dire que la guerre a commencé et
21 qu'il n'avait aucune armée à sa disposition. Donc cela impliquait sans
22 arrêt des pourparlers avec les Serbes.
23 Q. Bien, bien. Passons à la pièce suivante, P 00382. Ce document porte la
24 date du 12 août 1992. C'est une décision qui porte sur la nomination des
25 membres du HVO municipal de Prozor, et dans ce document, nous voyons que
26 Dario Kordic signe au nom de Mate Boban, au bas d'une décision dont le but
27 est de nommer les membres d'un HVO municipal composé des individus dont les
28 noms figurent dans la décision. Donc, Mon Général, voici ma question :
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1 étiez-vous au courant du fait que dans cette période, donc disons durant
2 l'été 1992, le HVO était en train de prendre le contrôle politique de
3 certaines municipalités en créant ces HVO municipaux ?
4 R. J'étais un peu au courant. Mais pour autant que je le sache, à Prozor,
5 le pouvoir était divisé entre le SDA et le HDZ, pas sur la base de la
6 victoire électorale, mais sur la base de la réciprocité des voix octroyées
7 pendant les élections. Donc personne n'était censé prendre le pouvoir pour
8 s'opposer à l'armée de la Republika Srpska, pour autant que je le sache.
9 Q. Mon Général, je vous en prie, je vous demande simplement si vous étiez
10 au courant de cela, et vous dites que vous étiez un peu au courant. Etiez-
11 vous au courant du fait que ces HVO municipaux n'étaient pas loyaux, ne
12 respectaient pas la constitution de la République de Bosnie-Herzégovine
13 dans la mesure où ils remplaçaient les présidences de guerre ?
14 R. Pour autant que je le sache, ceci s'est fait dans le respect de la
15 constitution de Bosnie-Herzégovine; le principe fondamental étant qu'un
16 individu, une municipalité et une communauté locale doivent s'organiser
17 pour participer à la défense. Le gouvernement central n'avait rien fait. Il
18 n'était pas prêt à la guerre. Il a abandonné le pays. Mais je n'ai pas
19 besoin de répéter, vous avez déjà entendu cela une centaine de fois.
20 Q. Effectivement, j'ai entendu cela une centaine de fois. Vous n'êtes pas
21 en train d'affirmer, n'est-ce pas, Mon Général, que Dario Kordic et Mate
22 Boban avaient un pouvoir légitime en vertu de la constitution pour nommer
23 des individus à différents postes au sein de HVO municipaux; ce n'est pas
24 ça que vous dites ?
25 R. Je ne sais pas cela avec certitude, mais je pense qu'ils avaient
26 compétence pour agir ainsi. Je crois que Mate Boban avait compétence pour
27 organiser la défense là où personne d'autre n'aurait pu l'organiser à sa
28 place.
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1 Q. Et vous dites que son pouvoir découlait de la constitution de la
2 République de Bosnie-Herzégovine ?
3 R. Monsieur Stringer, c'est ce que je pense, mais je ne l'affirme pas.
4 Q. Très bien. Passons à la pièce suivante, P 00385. Ce document porte la
5 même date que la pièce précédente, à savoir la date du 12 août 1992. Donc
6 le jour où Dario Kordic, au nom de Mate Boban, nommait les membres du HVO
7 municipal de Prozor, nous voyons que Valentin Coric, qui était le chef de
8 la direction de la police militaire, émet l'ordre que vous avez sous les
9 yeux conformément au besoin, comme il l'appelle, de contrôler les
10 déplacements des formations paramilitaires en Herzégovine menés à bien par
11 le Conseil de Défense croate, et il ordonne que les commandants des postes
12 de polices militaires des diverses municipalités d'Herzégovine, sous le
13 contrôle du HVO, à quelques exceptions près, accordent des permis de
14 déplacement à l'intention de certains véhicules, comme par exemple les
15 véhicules des membres de la Défense territoriale sur le territoire de la
16 Communauté croate d'Herceg-Bosna en s'appuyant sur leurs propres
17 justifications de l'utilité ou non de tel déplacement. Les membres de la
18 Défense territoriale à bord de ces véhicules sont empêchés de poursuivre
19 leur trajet s'ils ne possèdent pas le permis en question, et on leur donne
20 consigne de se procurer un tel permis.
21 Alors, Mon Général, étiez-vous au courant du fait qu'à partir du mois
22 d'août 1992, certains éléments au sein du HVO prétendaient ou affirmaient
23 que la Défense territoriale de la Bosnie-Herzégovine était une formation
24 paramilitaire lorsque cette Défense territoriale se trouvait sur le
25 territoire de la Communauté croate d'Herceg-Bosna ?
26 R. Ce que vous venez de dire n'est pas écrit dans le texte que j'ai sous
27 les yeux. Ça, c'est une interprétation personnelle de votre part. Ce qui
28 est écrit ici, et cela vaut également pour le HVO, comme vous le savez,
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1 c'est que les membres de la Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine
2 doivent, à partir de leur municipalité, car il existait des polices
3 militaires de leur municipalité, donc ils doivent s'adresser à la police
4 militaire de leur municipalité pour obtenir ce document qui leur permet de
5 se déplacer. Il n'est pas écrit ici que c'est le HVO qui doit leur délivrer
6 ce document, mais qu'ils doivent se le procurer auprès de la municipalité
7 d'où ils proviennent. Donc c'est l'organe de la municipalité responsable de
8 la délivrance de tels documents, ce qui est tout à fait logique en temps de
9 guerre, qui doit le leur délivrer. Et ceci s'applique également aux membres
10 du Conseil croate de Défense, le HVO, qui devait l'obtenir également, ce
11 document.
12 Q. Mais en fait, ce qu'exige cet ordre, c'est que la police militaire du
13 HVO délivre des permis et que les véhicules de la Défense territoriale
14 soient dans l'obligation de se procurer un tel permis auprès de la police
15 militaire du HVO. Est-ce que ce n'est pas ça qui est exigé ?
16 R. Où est-ce que vous voyez les mots "police militaire du HVO" ? Moi, je
17 ne le vois pas dans le document. Il faut que vous me citiez la ligne où ces
18 mots figurent.
19 Q. D'accord. Je vais vous lire le texte. Coric ordonne :
20 "Que les commandants de la police militaire des municipalités de
21 l'Herzégovine qui sont sous le contrôle du HVO, à l'exception de Mostar et
22 de Konjic, de Jablanica, de Gornji Vakuf, émettent des permis pour tout
23 véhicule qui se déplace, à savoir aux membres de la Défense territoriale de
24 Bosnie-Herzégovine sur le territoire de la Communauté croate d'Herceg-
25 Bosna."
26 Je saute quelques lignes et je poursuis la lecture :
27 "Les véhicules de la Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine, c'est-à-
28 dire les membres de la Défense territoriale doivent être stoppés dans leurs
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1 déplacements s'ils ne sont pas en possession du permis requis."
2 Donc Coric, en fait, donne l'ordre que le personnel de la Défense
3 territoriale présent dans différents secteurs de la Communauté croate
4 d'Herceg-Bosna soit en possession d'un permis délivré par la police
5 militaire du HVO; est-ce que ce n'est pas ceci qui est écrit dans ce texte
6 ?
7 R. La police militaire de certaines municipalités, mais ceci ne concerne
8 ni Mostar, ni Konjic, ni Jablanica, ni Gornji Vakuf, parce que les
9 compositions sont mixtes. Ce qui est en cause ici c'est le désir de
10 prévenir les trafics en tous genres et autres types d'actions criminelles
11 qui avaient commencé à faire leur apparition à cette époque-là. Et la même
12 remarque concerne tous les membres du HVO qui souhaitaient se déplacer,
13 pour autant que je le sache.
14 Q. Mais il ne s'agit pas uniquement des trafics. Nous savons ce qui est en
15 cause ici. C'est écrit tout en haut du document. Ce qui est en cause c'est
16 la nécessité de contrôler le déplacement des formations paramilitaires en
17 Herzégovine.
18 R. Mais où est-ce qu'on voit le mot paramilitaire, Monsieur ?Mme
19 TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Excusez-moi, il y a un problème de
20 l'interprétation anglaise, et c'est là que le problème commence, Monsieur
21 Stringer. Parce que dans l'interprétation anglaise, il est écrit formations
22 paramilitaires dans le titre du document, alors que dans l'original il
23 s'agit de formations militaires et non de formations paramilitaires. M.
24 Praljak peut lire la phrase dans sa langue, je parle du titre, je crois que
25 c'est de là que découlent tout le problème et le malentendu.
26 L'interprétation anglaise est erronée. Je pense que c'est une erreur
27 importante et je pense qu'il importe au plus haut point de corriger cette
28 erreur. M. Praljak peut permettre de corriger cette erreur en lisant
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1 l'intitulé qui sera interprété par les interprètes, et tout ceci figure sur
2 les écrans.
3 M. STRINGER : [interprétation]
4 Q. Je ne veux pas contester ce que vient de dire le conseil de la Défense,
5 mais je lis les deux premières lignes du document du corps du texte qui
6 commence par les mots anglais "In keeping with," "conformément à."
7 R. Je lis :
8 "Conformément à la nécessité de contrôler les déplacements des formations
9 militaires, "Vojni formatia", [phon] sur les territoires de l'Herzégovine
10 qui sont contrôlés par le Conseil croate de Défense, j'ordonne."
11 Donc il est question de toutes les formations militaires et de la nécessité
12 de rétablir l'ordre. Il n'est question nulle part dans ce document de
13 paramilitaires. Et d'ailleurs, si je me souviens bien, un ordre identique à
14 celui-ci a été émis à l'intention du HVO et de ses membres.
15 Q. Donc, Monsieur, au sein de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, c'est
16 la police militaire du HVO. Sauf pour les quatre municipalités déjà citées,
17 donc c'est la police militaire du HVO qui va octroyer les permis de
18 déplacement et qui se faisant va assurer le contrôle des endroits où se
19 rendent les membres de la Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine,
20 n'est-ce pas ?
21 R. Monsieur, vous ne cessez d'ajouter des choses. Ici, il n'est question
22 que des territoires de l'Herzégovine dans le texte, et ce, uniquement dans
23 les municipalités contrôlées par le HVO. Car les municipalités où il y a
24 des Croates et des Musulmans sont exclues du texte, comme par exemple,
25 Konjic, Jablanica. Dans ces municipalités, les permis en question étaient
26 émis soit par la Défense territoriale soit par l'ABiH. Il y a eu plus de 10
27 000 personnes qui ont utilisé de tel permis de se déplacer sur plusieurs
28 millions de personnes.
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1 Q. J'aimerais maintenant vous ramener au document précédent, à savoir la
2 pièce P 00382, en date du 12 août 1992, car nous savons, Mon Général, qu'à
3 partir du mois d'octobre 1992 et pendant tout le reste de la période, vous
4 étiez associé au HVO, jusqu'au mois de novembre 1993. En effet, vous avez
5 passé beaucoup de temps dans la région de Prozor. Les individus qui sont
6 nommés à divers postes par M. Boban grâce à ce document, donc nommés par
7 Boban ou par Kordic qui agit au nom de Boban, est-ce que vous avez su à
8 quelque moment que ce soit qu'ils avaient affaire à Ilija Petrovic au début
9 du mois d'octobre 1992 ? Et je vous poserai la même question pour Ilija
10 Franic, commandant de l'état-major municipal du HVO.
11 R. D'abord, Monsieur Stringer, je rejette l'intégralité de vos
12 affirmations et de votre constatation pour défaut de pertinence, car il n'y
13 a rien dans toutes vos affirmations, ma réponse à votre question n'est
14 fondée sur rien, savoir si je connaissais Ilija Petrovic ou si je
15 connaissais Ilija Franic.
16 Q. Vous le connaissiez en octobre 1992 ?
17 R. J'ai fait sa connaissance au moment où je suis arrivé à Rama ou Prozor
18 après les affrontements qui ont éclaté dans cette localité. J'ai rencontré
19 ces deux hommes après ces affrontements.
20 Q. Ces deux individus ont-ils conservé leurs fonctions au sein du HVO,
21 d'après ce que vous savez, jusqu'au 9 novembre 1993 ?
22 R. Je ne sais pas.
23 Q. D'accord. Point suivant, Mon Général, que j'aimerais vous soumettre,
24 c'est une déposition que nous avons entendue en l'espèce il y a déjà pas
25 mal de temps, je veux parler du témoignage de M. Omer Hujdur, qui a déposé
26 le 20 juin 2006. Sa photo va apparaître sur les écrans grâce au système
27 Sanction. Et si tout va bien, vous la verrez apparaître sur l'écran que
28 vous avez devant vous, ce qui vous aidera peut-être à le reconnaître.
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1 Encore une fois, tout ceci est en rapport à certaines actions politiques du
2 HVO dans la région de Prozor avant et après les affrontements qui ont
3 éclaté.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Stringer, je regarde la photo et je vois
5 qu'il y a les rideaux baissés derrière lui. Alors je n'ai pas -- je ne sais
6 pas s'il y avait des mesures de protection ou pas. Est-ce que vous pouvez
7 me vérifier cela ?
8 M. STRINGER : [interprétation] J'ai vérifié, Monsieur le Président, il a
9 témoigné en public. Sa déposition n'est pas protégée. Je ne sais pas
10 pourquoi les stores sont baissés dans son dos.
11 En fait, il a demandé des mesures de protection mais elles n'ont pas été
12 accordées.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Très bien. On a l'explication.
14 M. STRINGER : [interprétation]
15 Q. Mon Général, le 6 juin, et je m'apprête à vous lire un passage de sa
16 déposition qui porte sur les programmes d'enseignement à Prozor. Vous avez
17 passé pas mal de temps dans cette région durant votre jeunesse, et
18 j'aimerais savoir si vous avez des renseignements dans ce domaine
19 s'agissant de Prozor. Donc c'est une page du compte rendu d'audience qui
20 peut être affichée sur les écrans pour que chacun puisse suivre.
21 Page 12, ligne 12, je cite :
22 "Question : Quand est-ce que la nouvelle année scolaire a commencé ou
23 était censée commencer ?
24 "Réponse : Si je me souviens bien, elle était censée commencer le 7
25 septembre, mais l'année scolaire n'a pas repris avant l'attaque de Prozor,
26 et elle s'est poursuivie en l'absence des Musulmans de Bosnie mais beaucoup
27 plus tard. Donc l'année scolaire a été tout simplement interrompue.
28 "Question : Pour continuer sur le sujet des programmes scolaires,
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1 lorsque les cours ont repris après l'attaque de Prozor, est-ce qu'à ce
2 moment-là les cours ont repris sur la base de programmes d'enseignement
3 croate ?
4 "Réponse : Oui.
5 "Question : A ce moment-là, et nous parlons de novembre ou décembre 1992,
6 l'un ou l'autre de vos enfants a-t-il été soumis à ce nouveau programme
7 scolaire ?
8 "Réponse : Oui."
9 Et puis je saute quelques lignes où il est question de ce qui s'est passé à
10 Prozor. Je passe à la page suivante.
11 Il déclare en ligne 5 de la page suivante :
12 "Des actions importantes ont été menées pour que les gens qui avaient
13 quitté Prozor puissent revenir. Malheureusement, des gens sont revenus,
14 mais lorsque ces personnes sont revenues, j'espère que nous aurons
15 suffisamment de temps pour discuter également de cela, les cours étaient
16 organisés."
17 Un peu plus loin, il dit :
18 "Mon épouse est revenue également. Elle était enceinte à ce moment-là de
19 quatre mois et nous avions déjà deux enfants, ou plutôt elle est rentrée
20 accompagnée de deux enfants dont l'un était censé entrer en première année
21 de primaire. Et le jour de la rentrée scolaire, après la présentation des
22 uns et des autres, on lui a dit, une fois qu'il a prononcé son prénom et
23 son nom de famille, qu'il aurait dû rester dans sa patrie qui est l'Herceg-
24 Bosna et que la capitale de sa patrie était Mostar. Bien entendu, cet
25 enfant n'a pas pu admettre cela. Et sa réponse a consisté à dire que sa
26 patrie était la Bosnie-Herzégovine et que la capitale de sa partie était
27 Sarajevo. Lorsqu'il a prononcé ces mots et qu'il a un peu insisté, il y a
28 eu une réaction négative dont je préfère ne pas parler."
Page 43822
1 Alors, Mon Général, est-ce que vous étiez au courant de
2 l'introduction de programmes scolaires exclusivement croates dans les
3 écoles à Prozor après les événements survenus à Prozor en octobre 1992 ?
4 R. Je ne sais rien de cela. Mais je sais qu'un énorme nombre de personnes
5 est rentré grâce à mes actions, Monsieur Stringer --
6 Q. Merci, Général.
7 R. -- à ce que j'ai fait.
8 Q. Merci. Pièce suivante pour situer les choses dans le temps, P 00570.
9 Comme nous le verrons dans ce document, la date du 10 octobre 1992 est
10 citée, c'est-à-dire une date qui précède de peu votre arrivée à Prozor.
11 Donc comme nous nous en souvenons tous, Mon Général, c'est à peu près à ce
12 moment-là que vous avez été nommé par le président Tudjman au poste
13 d'assistant du ministre de la Défense de la République de Croatie, n'est-ce
14 pas ?
15 R. Cela s'était passé beaucoup plus tôt, Monsieur. Sur la base d'un autre
16 document ou peut-être que quelque chose s'est passée entre-temps et qu'il a
17 fallu rédiger ce nouveau document, mais enfin, moi je suis devenu assistant
18 du ministre de la Défense au mois de mars 1992. Là, je ne sais pas
19 exactement pour quelle raison le document que j'ai maintenant sous les yeux
20 a dû être rédigé. Y a-t-il eu une modification quelconque, je ne sais pas.
21 Q. Etes-vous arrivé à Prozor en octobre 1992 et à ce moment-là occupiez-
22 vous le poste d'assistant du ministre de la Défense; c'est bien ça ?
23 R. Exact.
24 Q. Pièce suivante, P 00608. C'est un rapport du SIS, le service
25 d'information et de sécurité du HVO de Tomislavgrad. C'est Luka Markesic,
26 chef des services de Sécurité qui est l'auteur de ce rapport. Nous avons
27 déjà eu pas mal de rapports émanant de lui sous les yeux, Mon Général, et
28 ici il évoque la situation qui prévaut dans la ville.
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1 Nous parlons bien de Prozor à la date du 20 octobre. Il dit :
2 "La situation se dégrade en ville depuis que le drapeau croate a été
3 hissé sur le poste de police, ce qui a créé la possibilité que des
4 affrontements à grande échelle éclatent en ville."
5 Donc, Mon Général, ma première question sera la suivante de façon à ce que
6 nous nous souvenions bien des faits. A quel moment exactement êtes-vous
7 arrivé à Prozor ?
8 R. Dans un document il était écrit qu'il est arrivé le 26, 27, 28. Je ne
9 parviens pas à me rappeler, Monsieur Stringer, peut-être le 27.
10 Q. Nous reviendrons sur ce point. Vous avez été envoyé par le président
11 Tudjman à Prozor, si j'ai bien compris, avec le mandat de prévenir la
12 guerre ou d'empêcher que n'éclate un conflit à Prozor. Est-ce que c'était
13 cela votre mandat de façon générale ?
14 R. Non, Monsieur Stringer. Le conflit avait déjà éclaté. Franjo Tudjman et
15 Alija Izetbegovic s'étaient entendus sur mon arrivée et j'ai été envoyé, on
16 m'a demandé d'aller là-bas pour résoudre la situation dans la mesure du
17 possible et rétablir une situation supportable. Et c'est ce que j'ai fait.
18 Q. Mais saviez-vous ou avez-vous appris qu'avant votre arrivée, un HVO
19 municipal avait été mis en place par Dario Kordic au nom de Mate Boban, que
20 le drapeau croate avait été hissé sur le poste de police et que la
21 situation à Prozor était très tendue suite à ces deux actions ?
22 R. Non. A mon arrivée là-bas, je ne disposais pas, bien sûr, de ces
23 éléments d'information, mais plus tard évidemment, je me suis efforcé de
24 savoir quelles étaient les causes des affrontements. Quant à vous, bien
25 sûr, selon votre habitude, vous n'avez cité que deux documents et pas la
26 vingtaine de documents environ dont Luka Markesic est l'auteur et qui
27 traitent de la question de savoir qui était à l'origine des affrontements,
28 comment ils ont évolué, comment ils se sont développés et qui a allumé la
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1 mèche.
2 Q. Mon Général, lorsqu'on écoute votre version des événements dès lors que
3 l'on parle de tensions dans les secteurs de Prozor, Gornji Vakuf ou
4 ailleurs, si l'on vous écoute sur ce point, c'est simplement d'après vous
5 parce que l'ABiH, dans ces localités, a créé des tensions et que le HVO,
6 lui, n'avait rien fait pour que se développent ces tensions. C'est ce que
7 vous dites. Or, le fait est que par sa prise de contrôle politique, le HVO,
8 comme nous le voyons ici à Prozor, puisqu'il a hissé le drapeau croate sur
9 le poste de police et qu'il a mis en œuvre un certain nombre d'autres
10 actions, c'est pour cette raison que les tensions étaient si fortes dans
11 des secteurs tels que Prozor en octobre 1992. Ceci n'est-il pas vrai ?
12 R. Non.
13 Q. Je prends acte de votre réponse. Et je vais poursuivre. Il y avait un
14 objectif politique, n'est-ce pas, de la part du HVO visant à prendre le
15 contrôle de ces municipalités au sein de la HZ HB. Et bien entendu, vous-
16 même, Tudjman et tous ceux qui étaient du côté du HVO souhaitaient éviter
17 une guerre avec les Musulmans. Mais il n'en demeure pas moins que la guerre
18 a résulté de cela et qu'on a recouru à la guerre du côté du HVO parce qu'on
19 a compris qu'il était impossible d'atteindre ces objectifs sans recourir à
20 la guerre. N'est-ce pas ce qui s'est réellement passé à Prozor au début ?
21 R. Non. Rien de tout cela n'est exact. Tout cela ne représente que votre
22 propre désir de dépeindre les choses ainsi. Or cela n'apparaît ainsi dans
23 aucun des documents. Le HVO, le HDZ n'avaient rien à conquérir à Rama. Nous
24 avons remporté les élections, Monsieur Stringer. Là-bas, les gens
25 appartenaient à un peuple qui était un peuple constitutif. Mais Izetbegovic
26 dit : Pas même les cantons, nous n'accepterons d'en avoir. Si vous acceptez
27 d'avoir des cantons au sein d'un Etat unitaire, vous êtes un traître, vous
28 êtes un perdant. Alors, je vous en prie, Monsieur Stringer.
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1 Q. Vous affirmez que parce qu'ils avaient remporté les élections à Prozor,
2 ils avaient le droit de rejeter la constitution, d'en faire fi et de mettre
3 sur pied un quartier général municipal du HVO en tant que présidence de
4 guerre au terme de la constitution ?
5 R. C'est inexact, Monsieur Stringer. Tout cela a fait l'objet
6 d'éclaircissements à plusieurs reprises. Nous avons donné lecture de la
7 constitution. Nous avons essayé de continuer à accomplir les tâches qui
8 étaient les nôtres. M. Tudjman accomplissait ses devoirs d'une façon non-
9 conforme à la constitution, à l'exception de ce qui était son impréparation
10 à la guerre. Mais tout cela ne vous intéresse pas, Monsieur Stringer. Moi,
11 j'ai fait le travail qui était le mien suite aux tueries qui se sont
12 produites et au conflit qui a éclaté. J'ai fait ma part du travail au mieux
13 que je pouvais, et je pense que j'ai eu un certain succès.
14 Q. Je crois qu'il y a une correction que l'on doit faire au compte rendu
15 d'audience, Monsieur le Président, bien que je ne sois pas sûr d'où vienne
16 l'erreur, est-ce qu'elle provient du témoin ou des interprètes. En
17 commençant à la page 18 de la page précédente, le général dit: "Cela a été
18 expliqué à plusieurs reprises, et mis à part le fait de ne pas se préparer
19 à la guerre, M. Tudjman accomplissait les tâches qui étaient les siennes
20 d'une façon non-conforme à la constitution." Donc il a élaboré une
21 constitution d'une façon qui n'était pas conforme à la constitution. Mais
22 je pense que le général ne se référait pas ici au président Tudjman, n'est-
23 ce pas ?
24 R. En effet, c'était de M. Izetbegovic que je parlais.
25 Q. Passons à la pièce suivante, Général. C'est la pièce P 00602.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a une question qui était très importante et qui
27 mérite une explication complémentaire.
28 M. Stringer vous dit que l'objectif politique était de prendre le
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1 contrôle des municipalités. Et pour y arriver, il fallait recourir à la
2 guerre. Donc c'est ce qu'il pense, c'est sa thèse. Alors arrive l'événement
3 de Prozor et nous savons que vous avez été là-bas. Alors j'essaie de
4 comprendre votre venue avec la théorie du Procureur. Si le Procureur a
5 raison, c'est qu'il y a quelqu'un qui a décidé du contrôle politique, soit
6 Mate Boban, soit d'autres, soit à Zagreb. Le contrôle politique tel que le
7 Procureur vous l'a montré par ce fameux document où il y a des nominations,
8 on peut considérer que ce document va dans le sens de cette thèse. Et puis,
9 on vient de voir un document intéressant qui montre que la question du
10 drapeau a entraîné des problèmes. Donc le scénario d'après le Procureur,
11 moi, c'est le scénario du Procureur : décision de prise de contrôle
12 politique, mise en œuvre par le document qu'on a vu des nominations, puis
13 action par ce drapeau et événement. Et à ce moment-là, vous, vous allez
14 arriver après où vous nous l'avez expliqué pour calmer le jeu, libérer les
15 gens, et cetera. Partant de là, un juge raisonnable peut se dire : dans
16 quel contexte M. Praljak vient, s'il y a ce projet politique, et quelle est
17 la logique de sa venue dans le cadre de ce projet ? Voilà. Sur la thèse de
18 M. Stringer que vous avez contestée, mais il y a des documents et il faut
19 expliquer les documents, parce que les documents vont dans le sens où M.
20 Stringer vous explique : voilà ce qui s'est passé.
21 Alors, comment, à votre niveau, vous expliquez qu'on a décidé de
22 nommer des individus dans les municipalités alors que théoriquement, la
23 voie naturelle c'est l'élection ? Comment vous expliquez cela ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, cette affaire est très
25 volumineuse et je comprends cela. Mais nous avons versé 40 documents
26 pertinents sur cet aspect précis quant à la question de savoir qui fuit les
27 lignes, comment ils s'arment clandestinement, comment ils refusent de
28 reconnaître les autorités. Ici, nous avons, si vous voulez, une nomination
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1 à caractère militaire.
2 Pour autant que j'en aie été mis au courant et que je l'aie su, il y
3 avait là-bas une autorité qui ne respectait même pas les règles
4 fondamentales de la démocratie telles qu'elles prévalent en Occident. En
5 Occident, lorsqu'un parti remporte les élections, il procède à la formation
6 des autorités au pouvoir, mais cela ne valait pas là-bas. Par exemple, on
7 avait le parti croate du HDZ et le parti musulman du SDA qui se
8 partageaient le pouvoir proportionnellement au nombre de voix remportées au
9 cours des élections, et c'est ainsi qu'ils procédaient. Il y avait deux
10 options politiques, Messieurs les Juges : soit la politique unitaire, la
11 politique d'une Bosnie-Herzégovine unitaire d'une part, soit d'autre part
12 la politique visant à la défense des droits du peuple croate qui consistait
13 à donner une voix à ce dernier, au peuple croate, pour ce qui était des
14 décisions prises concernant l'aménagement intérieur de la Bosnie-
15 Herzégovine.
16 Alija Izetbegovic, lui, avait obtenu des frontières pour cet Etat,
17 mais un peuple souverain constitutif devait participer aux discussions pour
18 ce qui était de l'aménagement intérieur, premièrement. Deuxièmement --
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Je dois vous interrompre parce que vous commencez à
20 répondre, et puis vous allez dans une autre dimension. Vous venez de donner
21 une réponse qui peut être satisfaisante. Sur le document, vous dites, on a
22 nommé des individus pour des raisons militaires, parce que la municipalité
23 de Prozor, si je comprends bien, ne jouait pas le jeu, et donc vous
24 intervenez. C'est suffisant comme réponse. Pourquoi aller après à déborder
25 sur les frontières ? Essayez de vous limiter à des réponses très précises,
26 parce que sinon, la réponse que vous apportez, qui peut avoir une valeur
27 probante, elle est totalement noyée par d'autres arguments qui sont
28 beaucoup plus éloignés. Donc moi je vous pose une question : pourquoi ce
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1 document qui semble correspondre à la thèse du Procureur sur la prise de
2 contrôle politique; vous, vous répondez : Non, c'est des nominations
3 militaires, et vous expliquez pourquoi. Voilà. Et puis vous arrêtez là
4 parce que sinon vous allez noyer votre réponse dans des considérations où
5 tout le monde va se dire : c'est difficile à comprendre, ce qu'il dit.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] J'accepte cela tout à fait, je le comprends.
7 Je comprends que parfois je m'aventure un peu trop loin, et je fais cela
8 car j'ai beaucoup de mal à accepter cette approche partielle, comme j'ai
9 déjà dit. Et pour répondre à cette deuxième partie de votre question, on
10 m'a prié de me rendre sur place, comme vous préférerez, de cette façon que
11 j'ai décrite. Tudjman tapait du poing sur la table après son entretien avec
12 Izetbegovic. Il m'a dit : Va là-bas, rends-toi sur place, nous ne voulons
13 pas de guerre avec les Musulmans. Alors essayons de prendre en compte un
14 petit peu les choses de façon pragmatique. En un mois et demi j'ai réussi à
15 obtenir ce dont nous avons parlé là-bas sur place.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, en quatre lignes, vous pouvez
17 répondre à mes questions. Un, c'est Tudjman qui m'envoie en disant : Nous
18 ne voulons pas la guerre avec les Musulmans. Ça, ça fait une ligne. Et
19 deux, ce document, c'était des nominations à caractère militaire parce que
20 les autres ne voulaient pas jouer le jeu. Terminé. Voilà.
21 Oui, Maître Alaburic.
22 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre
23 permission, je pense qu'il serait important, pour éviter d'éventuels
24 malentendus, de préciser une chose : le général Praljak n'a pas dit que ce
25 document, signé par M. Kordic au nom de Mate Boban, représentait une
26 nomination de commandant militaire. Je voudrais juste qu'on évite des
27 malentendus à l'avenir. Si on observe ce document avec précision, qui est
28 la pièce P 382, on verra qu'il s'agit d'une nomination de membres de la
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1 branche civile du HVO à Prozor, et que l'avant-dernière personne qui est
2 ici citée est le commandant du HVO municipal dans son aile militaire. Donc
3 je voudrais juste qu'on évite des malentendus ultérieurs en clarifiant
4 cela.
5 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 Q. Alors nous venons d'examiner la pièce P 00608, qui est le rapport de
7 Luka Markesic concernant les conséquences qui ont suivi le moment où le
8 drapeau croate a été hissé. Et en cette même journée, un autre événement a
9 eu lieu à Prozor qui pourrait avoir eu des conséquences du point de vue des
10 tensions. C'est notre pièce suivante, la pièce P 00602. Ce que vous voyez,
11 Général, c'est qu'en cette date, le général de brigade Milivoj Petkovic a
12 émis un ordre demandant de bloquer immédiatement toutes les routes, cela
13 est adressé au HVO de Prozor, de Gornji Vakuf, ainsi que des autres
14 municipalités qui sont ici précisées. Il est dit :
15 "Utiliser tous les effectifs disponibles afin d'arrêter les unités de la
16 Défense territoriale dans leur mouvement en direction de Travnik."
17 Et rédiger un rapport concernant la situation sur votre territoire.
18 Nous connaissons qu'il y a eu des conflits, un certain nombre d'événements
19 entre le HVO et la Défense territoriale ou l'ABiH en Bosnie centrale, à ce
20 moment-là ou à peu près à ce moment-là. Alors Général, à Prozor, encore une
21 fois avant votre venue, nous avons vu que le HVO prend le contrôle
22 politique de la municipalité du point de vue civil. Nous avons vu ces
23 tentatives de hisser le drapeau croate à Prozor, et nous voyons maintenant
24 que le HVO s'efforce de bloquer les mouvements des unités de la Défense
25 territoriale dans ces municipalités, qui incluent Prozor, afin de les
26 empêcher d'avancer vers Travnik.
27 Mais encore une fois, nous avons une nouvelle situation dans laquelle
28 le HVO s'efforce d'établir son contrôle sur la municipalité de Prozor; est-
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1 ce exact ?
2 R. Monsieur Stringer, vous faites encore une fois état d'un très grand
3 nombre d'affirmations et je vais essayer de vous répondre en vous disant ce
4 qu'il en est de ces différentes thèses que vous avancez, que je remets en
5 question à 100 %. J'estime que c'est un interrogatoire qui n'est pas
6 convenable.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, excusez-moi de vous couper la
8 parole. La réponse peut être très simple. On a un document du général
9 Petkovic qui dit : Bloquer toutes les forces qui font mouvement vers
10 Travnik. C'est un document militaire qui émane de l'autorité militaire qui
11 ici se trouve n'a rien à voir avec la question d'objectif politique et qui,
12 a priori, appelle une réponse militaire. Et voilà qu'au lieu de répondre en
13 termes militaires, vous vous avancez à nouveau dans d'autres terrains.
14 Parfois je me demande est-ce que vous comprenez la question que le
15 Procureur pose, parce que là la question est ultra simple.
16 Dans sa thèse, il vous dit : Voilà, il y a ce document qui montre que
17 beaucoup de documents ont été pris pour le contrôle politique, alors même
18 que c'est un document de nature militaire. Vous, vous pouviez dire : Non,
19 vous vous trompez, parce qu'à Travnik, il y a déjà les forces de l'AbiH.
20 Nous, nous ne voulions pas qu'il y ait à ce moment-là la consistance d'une
21 unité plus importante, donc on gèle les uns et les autres sur place, d'où
22 l'ordre. Moi, je pensais que vous alliez dire ça. Et voilà que vous partez
23 sur d'autres voies. Alors avant de répondre à une question, essayez de
24 comprendre la question qui est posée, et puis après vous répondez. Je sais
25 bien que vous êtes accusé, vous vous dites la question, elle est pour me
26 coincer. Parfois peut-être, mais peut-être parfois non. C'est pour
27 expliquer un document.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président, je répondrai très
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1 clairement à une question comme celle-là en disant que j'ignore tout ce
2 dont il est question dans ce document, et je n'avais aucun autre rôle à ce
3 moment-là, en dehors de l'apaisement de la situation. Ceci dit, reportez-
4 vous à l'exposé auquel s'est livré M. Stringer. Vous avez hissé le drapeau
5 croate. Autrement dit, vous êtes coupable si vous hissez le drapeau croate.
6 Il faut vous tuer, vous avez commis un crime. Mais ce n'est pas un crime
7 que de hisser le drapeau croate, donc revenez à cette introduction de M.
8 Stringer où il introduit trois éléments. Et puis ensuite dans la quatrième
9 thèse qu'il avance, il ne me pose pas en fait une question sur le document
10 à proprement parler. Quant à ce document, ma réponse est tout à fait claire
11 : j'ignore tout de ce dont il est question ici et le drapeau croate peut
12 être hissé là où il est un peuple constitutif.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ignore tout de ce document et puis c'était ce
14 qu'il fallait dire.
15 Monsieur Stringer.
16 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Alors en fait, à ce stade, Général, une bonne partie des événements qui
18 ont eu lieu à Prozor avant votre arrivée vous étaient inconnus, semble-t-
19 il. Vous ne saviez pas, vous ne connaissiez pas cet incident du drapeau,
20 n'est-ce pas, vous ne connaissez pas cette tentative de blocage des routes
21 ?
22 R. Non.
23 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Stringer, mais
24 vous posez deux questions, l'une sur le drapeau, l'autre sur le blocage des
25 routes. La réponse était non, mais nous ne savons pas si la réponse était
26 non aux deux questions ou à l'une des deux seulement. Donc je vous prierais
27 de bien vouloir séparer ces deux éléments.
28 M. STRINGER : [interprétation] Entendu.
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1 Q. Etiez-vous au courant de cet incident avec le drapeau dont Luka
2 Markesic fait état ?
3 R. Non, je n'étais pas au courant et je ne suis pas d'accord avec cette
4 qualification "d'incident."
5 Q. Donc s'il y a un niveau de tension élevé à Prozor, à un niveau
6 tellement élevé qu'il en résulte un conflit, comme vous l'avez dit, et
7 quelle que soit la raison sous-jacente de ces conflits, vous ne savez pas
8 dans quelle mesure c'est le comportement du HVO qui a pu y contribuer,
9 parce que vous n'étiez pas sur place à ce moment-là, n'est-ce pas ?
10 R. A l'époque où je suis arrivé, au moment où je suis arrivé, je ne le
11 savais pas. Ensuite, j'ai appris à peu près tout ce qu'il y avait à savoir
12 sur ce sujet.
13 Q. La pièce suivante est la pièce P 00628.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, sur la question du drapeau, vous
15 avez pris position tout à l'heure. Je vous ai écouté et je suis obligé de
16 vous poser la question suivante : vous connaissez l'importance des drapeaux
17 sur les mortalités. Vous savez que parfois quand X met un drapeau qui ne
18 plait pas à Y, ça entraîne tout un enchaînement.
19 Rappelez-vous Borovo Selo. Alors ce qui serait intéressant de savoir, est-
20 ce qu'au niveau du HVO, mais composante militaire, il y a eu des ordres
21 très précis dans un sens ou dans l'autre sur la question de ce fameux
22 drapeau ? Est-ce qu'il avait été encouragé aux Croates de mettre le drapeau
23 sur les bâtiments municipaux, aux fenêtres de leurs maisons, je ne sais
24 pas, ou bien il n'y a eu aucun ordre en ce sens, et ce sont les individus
25 locaux qui ont décidé de se dire : Tiens, on va mettre le drapeau parce que
26 ça nous caractérise. Alors qu'est-ce que vous pouvez nous dire en la
27 matière. Parce que le drapeau est parfois l'élément qui va déclencher toute
28 une série d'événements.
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1 Alors y a-t-il eu des ordres ou bien ce sont des individus qui ont décidé
2 de mettre le drapeau ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a eu aucun ordre, pour autant que je
4 sache. Moi, en tout cas, je n'ai donné aucun ordre à cet effet. Pour autant
5 que je sache, il n'y a eu aucun ordre à cet effet. Je pense simplement
6 qu'il ne fallait empêcher personne de le faire si cette personne le
7 souhaitait. Il faut respecter cela.
8 En 1992, aussi, personnellement, j'ai fait cela, et Luburic l'a fait
9 également, vous avez pu le voir dans le document pertinent. Nous avons
10 distribué l'emblème de la fleur de lys aux membres de l'ABiH afin qu'ils
11 puissent les porter, afin qu'ils puissent se sentir sur un pied d'égalité,
12 et cela a été respecté pendant toute l'année 1992. Le principe était de
13 respecter l'autre autant que l'on s'aimait soi-même. Mais ici, l'autre
14 partie n'avait pas ce type de respect.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, vous avez répondu en disant qu'il n'y a pas eu
16 d'ordre en la matière. Très bien. C'est au transcript.
17 Il est l'heure de faire la pause et M. Stringer continuera bien entendu
18 après.
19 --- L'audience est suspendue à 17 heures 35.
20 --- L'audience est reprise à 17 heures 56.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. Monsieur Stringer.
22 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Q. Général, le document suivant que je souhaiterais vous présenter est la
24 pièce P 00628. Je vois que vous l'avez, très bien. Ce document est daté du
25 23 octobre 1992. Ce document émane de la présidence du HVO de Prozor. Le
26 document porte un certain nombre de signatures. Je ne peux pas identifier
27 chacune d'entre elles. En tout cas, cela s'adresse aux représentants civils
28 et militaires des Musulmans dans la municipalité de Prozor, et l'objet est
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1 "Nos propositions pour venir à bout de la situation politique et
2 sécuritaire telle qu'elle a été nouvellement créée."
3 Et il y a ici cinq points au terme desquels la présidence du HVO
4 municipal et le commandement du HVO formulent les exigences qui sont les
5 leurs, ou leurs demandes, si je puis présenter les choses ainsi, adressées
6 aux représentants militaires et civils des Musulmans. Cela comprend un
7 arrêt urgent et sans condition de toutes les activités de combat,
8 l'insistance également pour ce qui est de voir des soldats du HVO déployés
9 sur la ligne de front afin qu'ils puissent se battre contre les Serbes. Au
10 numéro 3 --
11 R. Non, non, non. Il est écrit "Déploiement de vos soldats," donc de
12 soldats de l'ABiH.
13 Q. Oui, vous avez raison. Donc le HVO demande que l'ABiH envoie des
14 soldats, ses propres soldats sur la ligne de front.
15 Ensuite, au point 3, il s'agit de retirer toutes les unités armées de
16 l'ABiH de la ville. Au point 4 : "Qu'il soit octroyé libre passage aux
17 unités de la police militaire qui ne sont pas de notre municipalité afin
18 qu'elles puissent se rendre à leur destination finale conformément à leur
19 ordre de mission."
20 Et enfin, au point 5 : "Insistance pour voir acceptée de façon
21 urgente et sans délai l'organisation civile et militaire du HVO de la HZ HB
22 au sein de laquelle participeront également et de façon proportionnelle les
23 représentants du peuple musulman.
24 Alors, Général --
25 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, je dois dire qu'il y
26 a beaucoup de bavardage dans le prétoire et je dois dire que cela est
27 quelque peu perturbant pour moi, et je pense que notre tâche est déjà assez
28 difficile sans que nous ne soyons distraits de surcroît.
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1 Q. Première question, Général, est-ce que vous étiez familier avec ce
2 document à l'époque ?
3 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il me semble que M. Petkovic voulait
4 prendre la parole.
5 Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi. Je voudrais juste dire que le
6 général Petkovic a essayé d'attirer mon attention sur une erreur qui s'est
7 glissée, me semble-t-il, dans l'interprétation qui a été faite des propos
8 de M. Stringer en page 75, ligne 8. Il s'agit du point 3 du présent
9 document. Dans ce point 3, il ne s'agit pas des unités de l'ABiH, ni dans
10 l'original en croate, ni dans la traduction anglaise. Il y est question, en
11 revanche, de la nécessité de retirer de la ville toutes les unités armées.
12 Donc la traduction anglaise de ce document est correcte, mais en ligne 8 de
13 la page précédente du compte rendu d'audience, M. Stringer mentionne le
14 retrait des unités de l'ABiH, ce qui n'est pas une interprétation correcte
15 du document que nous avons sous les yeux. C'est ce sur quoi mon client
16 essaie d'attirer mon attention, et je voudrais m'excuser pour
17 l'interruption que cela occasionne dans le contre-interrogatoire.
18 M. STRINGER : [interprétation] C'est exact, en effet, et je vous prie de
19 bien vouloir m'en excuser. Il est simplement indiqué ici : "Retirer toutes
20 les unités armées de la ville." Il n'est pas indiqué la moindre
21 appartenance de ces unités armées.
22 Q. Général, ma première question consistait à vous demander si vous aviez
23 connaissance de ce document, si vous en avez pris connaissance au moment où
24 vous êtes arrivé à Prozor ?
25 R. J'en ai pris connaissance a posteriori. Donc j'ai pris connaissance de
26 toutes les propositions qui avaient été les leurs ainsi que des événements
27 qui s'étaient produits et des faits. Pour autant que je m'en souvienne, il
28 me semble que j'étais au courant de ceci également que nous avons sous les
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1 yeux, mais cela s'est produit plus tard, lorsque la situation s'est
2 apaisée.
3 Q. Conviendrez-vous avec moi pour dire qu'en réalité il y a eu une
4 recrudescence du conflit ultérieurement à la date où ce document a été
5 émis, à savoir le 23 octobre 1992, le conflit s'est intensifié, n'est-ce
6 pas ?
7 R. Non, non. On demande déjà ici un arrêt des activités de combat, donc le
8 conflit a déjà commencé. Cette date ne correspond pas à une date antérieure
9 au conflit, mais c'est probablement en soirée du 23 octobre, à un moment où
10 le conflit a déjà commencé. Je ne peux pas le dire avec exactitude, mais
11 ici on dit que le conflit est déjà commencé, et ils envoient un appel aux
12 représentants civils et militaires des Musulmans de la municipalité de
13 Prozor, bien entendu, parce qu'ils avaient aussi bien une organisation
14 civile que militaire, tout comme le HVO avait une organisation civile et
15 militaire.
16 Q. Dans ce document ils insistent pour que la structure civile et la
17 structure militaire du HVO soient reconnues, acceptées par les
18 représentants militaires et civils des Musulmans, n'est-ce pas ?
19 R. C'est ce qui est écrit ici, mais il est important de dire aussi que les
20 Musulmans sont censés participer de façon importante à la structure, ce qui
21 montre que l'on essayait de mettre en place un Etat multiethnique où les
22 différents représentants étaient censés participer de façon
23 proportionnelle.
24 Q. Mais participer à la structure du HVO, n'est-ce pas ?
25 R. C'est ce qui est écrit ici. C'est ainsi que le HVO a procédé. Il y
26 avait des unités également à Mostar, et c'est de la même façon de façon
27 symétrique que le HVO acceptait la situation qui prévalait à Tuzla, à Brcko
28 et ailleurs. C'est ainsi que l'on procédait en temps de guerre, et c'est
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1 ainsi qu'il était possible de mettre sur pied une bonne organisation.
2 Q. A votre connaissance, Général, est-ce que les représentants civils et
3 militaires des Musulmans à Prozor ont accepté ces conditions, ces
4 exigences, ou les ont-ils rejetées ?
5 R. Pour autant que je m'en souvienne, nombre de ces propositions ont
6 ultérieurement été acceptées, et ce, jusqu'en 1993. Il a existé deux
7 structures séparées qui ont coopéré. On a de nouveau été sur la ligne de
8 front ensemble.
9 Q. Nous reviendrons sur ce qui s'est passé lors des mois ultérieurs.
10 La pièce suivante est le document P 00642. Nous avons ici la date du
11 24 octobre 1992, C'est un ordre émanant du colonel Siljeg concernant le
12 contrôle exercé sur le territoire. Je soutiens ici, Général, qu'il s'agit
13 d'un ordre d'attaque adressé au HVO, demandant que la Brigade de Rama
14 engage toutes ses forces présentes dans la municipalité de Prozor et à
15 Prozor même sous le commandement de la Brigade de Rama, de cette partie des
16 forces du HVO. Il s'agit de mettre un terme à toutes les activités de
17 combat dirigées contre les forces du HVO. Ensuite, le document poursuit.
18 Nous pouvons tous en prendre connaissance.
19 Général, en réalité, cela nous montre que les représentants civils et
20 militaires des Musulmans n'ont pas accepté les exigences ou les demandes du
21 HVO municipal telles qu'elles étaient exprimées dans le document précédent
22 que nous avons examiné, la pièce P 00628, n'est-ce pas ?
23 R. Je l'ignore. Ici, selon moi, il s'agit déjà d'une question complètement
24 différente, à savoir que le conflit existait. A partir des documents dont
25 j'ai disposé qui ont été présentés dans ce prétoire, on a vu que l'"armija"
26 avait déjà un plan qui avait été élaboré pour attaquer Prozor. Ces
27 documents ont déjà été présentés et les Juges prendront leur décision à cet
28 égard.
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1 Q. Général, vous dites donc que vous ne savez pas si ceci est un résultat,
2 une conséquence de l'acceptation ou du refus par les autorités musulmanes
3 de ces conditions qui avaient été avancées précédemment ?
4 R. Je ne vois pas de lien entre ces deux documents. Personnellement, je ne
5 vois pas ce lien.
6 Q. Très bien. Le document suivant porte la cote P 00647. Il s'agit d'un
7 rapport adressé au colonel Siljeg concernant la situation sur le terrain à
8 la date et l'heure indiquée, 18 heures 10, 24 octobre 1992. Cela émane du
9 commandant Jure Smidt, et il est dit, je cite :
10 "Les activités de combat incessantes sur les villes de Prozor et du
11 lac de Rama sont sous le contrôle du HVO de Prozor" --
12 R. Le HVO.
13 Q. -- oui. Nous avons ici dans la traduction la mention de HV, qui est
14 incorrecte. C'est le HVO. Je continue, je cite : Ces deux zones sont
15 éthiquement pures. La population musulmane a été emprisonnée ou s'est
16 enfuie.
17 Alors, Général, cela suggère, pour le moins clairement, que des activités
18 de combat se déroulaient à Prozor et dans les zones du lac de Rama pendant
19 cette journée du 24 octobre 1992 et au moins jusqu'à 18 heures 10 ce jour-
20 là, n'est-ce pas ?
21 R. Je ne sais pas, Monsieur Stringer. Il est écrit ici ce qui est écrit.
22 Je ne comprends pas de quoi il s'agit.
23 Q. Vous n'avez aucune raison de remettre en question ce qui figure ici,
24 n'est-ce pas ?
25 R. Si j'ignore tout de quelque chose, évidemment je n'ai aucune raison de
26 le remettre en question. Si je l'ignore, je l'ignore.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites : j'ignore tout du document. Très bien.
28 Mais quand on ignore un document, ce n'est pas pour autant que vous ne
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1 pouvez pas apporter votre point de vue sur le document. Vous, vous refusez
2 à cela. Très bien, mais vous êtes là pour la manifestation de la vérité.
3 C'est ce que vous nous avez dit. Raison de plus de dire, raison de plus. Il
4 y a une phrase terrible dans le document.
5 Comprenez-moi. Je reste les bras croisés. J'écoute le Procureur vous
6 poser la question. Vous dites : je ne connais pas le document, et le
7 Procureur, il passe à autre chose. Puis quand les Juges vont délibérer,
8 qu'est-ce qu'ils vont dire ? "Tiens, à la ligne 3, voilà ce qu'il y a écrit
9 : il y a deux zones qui sont éthiquement pures. La population musulmane a
10 fui ou est détenue." Donc, un Juge raisonnable, qui ne va pas au bout des
11 choses, qui se contente de ce qu'il a sous les yeux, il peut arriver à une
12 conclusion.
13 Essayez d'expliquer pourquoi il y a cette phrase qui est dedans,
14 pourquoi l'auteur de ce document fait référence à des zones qui sont pures,
15 parce qu'on est au cœur de l'entreprise criminelle. Or vous, vous dites :
16 "Je ne connais pas ce document," et ne dis rien. Très bien, mais voyez que
17 ça peut avoir un effet boomerang. Moi, en tant que Juge, je suis obligé
18 d'appeler votre attention en disant : attention, je fais un warning. Je
19 vous dis, voilà, il y a une phrase incriminante. Il vaudrait peut-être
20 mieux que vous donniez une réponse, alors. C'est à vous de nous répondre.
21 D'abord, qui est l'auteur de ce document ? Vous ne le savez peut-être
22 pas, et cetera. Vous avez peut-être quelque chose à dire, puisque vous êtes
23 là pour la manifestation de la vérité.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Si on
25 m'avait posé la question ainsi, j'aurais fourni une explication. Lorsque de
26 ma propre initiative j'essaie d'expliquer les choses, on m'interrompt.
27 Jure Smidt est un Allemand. Il a la citoyenneté allemande et il
28 parlait à peine la langue. Il est décédé ultérieurement, mais lorsque j'ai
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1 fait brièvement sa connaissance, il parlait à peine le croate. Comment il a
2 réussi à rédiger cela, je l'ignore. Mais moi, ce que j'affirme, c'est qu'il
3 n'a absolument pas la moindre idée de ce que c'est que le nettoyage
4 ethnique. Il a probablement voulu dire ici ce qui est écrit, à savoir que
5 cette population qui s'est retrouvée coincer lors de ces combats soit a été
6 emprisonnée, soit s'est enfuie. Moi ensuite, j'ai libéré tous ces
7 prisonniers. En plus, il ne parle pas ici de prisons, mais de garde à vue,
8 et les autres se sont enfuis. On voit ici d'où les personnes se sont
9 enfuies et qui attaque qui. Quatre-vingt-dix pour cent de ceux qui ont fui
10 à l'époque devant les combats, évidemment, sont ensuite revenus. Tous ceux
11 qui étaient emprisonnés ont été libérés de prison.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, vous voyez le document, comme moi
13 je le vois. Vous constatez qu'il adresse, ce document, au colonel Siljeg.
14 C'est rajouté en personne. Donc, on peut, peut-être, penser qu'il y a un
15 lien entre ce Smidt et le colonel Siljeg. Il lui fait un rapport sur la
16 situation à 18 heures 10, et il rajoute une appréciation sur la question
17 ethnique. Peut-être c'est une hypothèse, qu'avant il y a eu un contact
18 entre Siljeg et celui-là pour régler ce problème, et lui, il en rend compte
19 fidèlement, un soldat qui exécute les ordres. C'est peut-être faux, mais
20 quelqu'un peut se dire : Tiens, il répond peut-être à une demande de son
21 supérieur hiérarchique, puisqu'il lui envoie en personne un compte rendu,
22 et à l'origine il avait peut-être reçu l'ordre, et là il faut apporter une
23 réponse.
24 Vous dites il était allemand. Il ne maniait pas la langue. Il a peut-
25 être fait une erreur. Peut-être. Simplement, vous remarquerez que le
26 document, j'ai l'impression que c'est une transmission par paquets, et que
27 si ça se trouve, c'est un autre soldat croate, peut-être, qui a fait le
28 texte, lui ayant donné les ordres. Mais c'est peut-être le soldat qui en a
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1 rajouté. Tout est possible, parce qu'en face de combat les chefs, ils sont
2 en première ligne. Ils ne sont pas derrière le téléscripteur pour vérifier
3 tout ce qui est écrit. Si ça se trouve, c'est peut-être un soldat qui en a
4 rajouté. Je ne sais pas. Je n'étais pas là. Mais si vous vous contentez,
5 Général Praljak, de dire à M. Stringer, ce document, je ne le connais pas
6 sans aborder les questions de fond, je dis attention.
7 Donc, votre réponse est de dire c'est un Allemand qui ne connaît pas
8 la langue, d'où cette mention. Mais là aussi, si le colonel Siljeg était
9 devant moi, j'aurais pu lui dire : Colonel, vous recevez cela d'un
10 subordonné. Il parle dépuration ethnique. Il répondait à une demande de
11 vous ou pas ? Si le colonel Siljeg dit : "Mais moi, je ne lui ai jamais dit
12 quoi que ce soit," alors je lui dirais : "Mais comment se fait-il que vous
13 n'avez pas ensuite convoqué l'intéressé pour lui demander des explications
14 ?"
15 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Avant que l'on ne réponde, j'aurais
16 une question technique, mais puisque le Président Antonetti a mentionné
17 quelque chose, il a dit que Smidt ne savait pas parler croate, et je
18 souhaite attirer votre attention sur l'écriture manuscrite, apparemment
19 l'original en croate. Il me semble que c'est Jure Smidt qui a écrit cela,
20 et ce n'est pas tout à fait bien écrit en croate. Il y a des erreurs, mais
21 je laisse l'appréciation à ceux qui parlent croate. Mais de toute évidence,
22 il me semble que c'est quelqu'un qui est revenu d'Allemagne et qui est venu
23 combattre dans les rangs du HVO.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai bien dit qu'il
25 maîtrisait le croate. Une fois j'ai parlé avec lui, il dit ethniquement
26 pur. Il ne dit pas nous avons ethniquement quelque chose, donc. Il dit que
27 dans ces zones que c'est quelque chose qui est arrivé aux Musulmans. Mais
28 regardez ce qu'il dit en bas : "Toute conversation avec des représentants
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1 de la TO est impossible," dit-il "vu la situation nouvellement créée."
2 Puis il dit :
3 "Nous allons tenter pendant la nuit opérer une percée ou atteindre
4 Bugojno à cause de la conversation, c'est-à-dire établir un contact
5 physique avec des représentants de la TO."
6 Donc, pendant ce conflit il y a eu un contact interrompu brièvement.
7 Ce qu'il veut c'est se rendre à Bugojno pour s'entretenir avec la TO, parce
8 qu'à Bugojno la situation entre le HVO et la TO est excellente en ce
9 moment-là. C'est la raison pour laquelle j'ai dit qu'il faut bien prendre
10 connaissance de la totalité du document. Je pense qu'il ne sait pas ce qui
11 signifie cette notion de "nettoyage ethnique." C'est pour ça qu'il le dit
12 dans ce texte, parce qu'il ne connaît pas bien. C'est mon interprétation de
13 ce document. Quant à savoir s'il est exact ou pas, bien sûr je ne peux pas
14 le savoir. Mais il est décédé, Jure Smidt. Il a perdu la vie.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. On va arrêter là.
16 Monsieur Stringer.
17 M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
18 Q. Général, le 1er novembre 2006, vous avez contre-interrogé Fahrudin Agic,
19 un témoin, et pendant ce contre-interrogatoire que vous avez mené, page 9
20 396 du compte rendu d'audience, vous lui soumettez comme suit, je cite :
21 "Savez-vous que tout de suite après le conflit à Prozor je me suis rendu
22 là-bas sur ce territoire ?"
23 Et il dit :
24 "Non."
25 Puis vous continuez :
26 "Savez-vous qu'après cet événement je suis resté jusqu'au 24 décembre 1992
27 dans le secteur de Rama et de Gornji Vakuf, Bugojno, Novi Travnik et
28 Travnik ?"
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1 Puis il dit :
2 "Oui, puisque le 4 décembre vous avez assisté à une réunion à Gornji Vakuf
3 avec Bozo Rajic."
4 Donc, il en ressort de vos propres mots, Général, que vous êtes arrivé à
5 Prozor immédiatement -- que vous êtes allé à Prozor immédiatement après le
6 conflit là-bas, puis vous êtes resté dans le secteur que je viens de vous
7 préciser, jusqu'au 24 décembre. Vous vous en souvenez ? Vous vous souvenez
8 d'avoir déclaré cela ?
9 R. C'est exact. Mais que signifie "tout de suite après le conflit" ? Tout
10 d'abord, je suis allé à Mostar --
11 Q. Je vous remercie, Général.
12 R. Mais, je vous en prie. Que signifie "tout de suite après" ? Non, mais
13 c'est -- qu'est-ce que c'est ? C'est combien de jours à votre -- vous
14 affirmez que je suis arrivé combien de jours après le conflit ?
15 Q. Mais je ne veux pas engager ici un duel.
16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis étonné de vous entendre
17 poser cette question, Monsieur Praljak, parce que c'est vous qui avez
18 employé ce terme "tout de suite après." Vous devez savoir ce que vous aviez
19 à l'esprit au moment où vous l'avez dit. Je sais qu'habituellement vous
20 n'aimez pas que d'autres interprètent vos pensées. Donc est-ce que vous
21 savez ce que vous aviez à l'esprit au moment où vous l'avez dit ?
22 M. STRINGER : [interprétation]
23 Q. Général, nous avons ces documents du 24 octobre 1992, ces deux derniers
24 documents, l'ordre de Siljeg sur le contrôle du territoire, puis le rapport
25 de Smidt, qui est émis le 24 à 18 heures 10.
26 Général, le 24 octobre, c'est le jour où le HVO entreprend des
27 opérations militaires très importantes, et le résultat en est que les
28 Musulmans, comme cela est indiqué, à Prozor, Rama --
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1 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Est-ce que vous
2 pourriez, s'il vous plaît, laisser le témoin répondre à la question que
3 j'avais posée. J'ai demandé au témoin s'il sait ce qu'il avait à l'esprit
4 au moment où il a dit qu'il est parti immédiatement pour Prozor. Et donc je
5 vous prie de laisser le témoin répondre à ma question.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 27 ou le 28 ou le 29 octobre 1993 --
7 pardon, 1992, je n'arrive pas à me rappeler exactement, mais nous avons un
8 document ici. Nous avons vu un document où il est dit, Praljak est arrivé
9 et je me suis trouvé avec les Musulmans là-bas. Nous avons plusieurs
10 documents. Et en fait, si on m'annonçait ces questions, il me serait
11 possible de trouver la date exacte dans ce document pour qu'on ne tourne
12 pas autour du pot.
13 Etait-ce telle date ou telle autre date ? Le 25, ce n'est pas exact.
14 Le 24, ce n'est pas exact. J'aimerais qu'on soit précis dans toute la
15 mesure du possible, mais apparemment nous n'y parviendrons pas.
16 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
17 Je vous en prie, excusez-moi, Monsieur Stringer. Je vous ai
18 interrompu.
19 M. STRINGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.
20 Q. La pièce suivante, P 00653. 653. La date sur le document est celle du
21 26 octobre 1992. C'est un rapport du service de Renseignements militaire,
22 Zarko Keza, et c'est adressé au département de la Défense, directement à
23 Bruno Stojic et au général Bobetko en personne, au général de brigade
24 Petkovic et à Beralic [phon] en personne, ainsi qu'à Rajic. Et c'est un
25 rapport sur le secteur de Prozor, et il est dit que nous parlons désormais
26 du lendemain, donc de la date du 25 octobre.
27 "Pendant la journée, il y a eu des combats avec les forces
28 extrémistes musulmanes dans le secteur de Prozor. Et vers 15 heures, le HVO
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1 a pris le contrôle de la tour près de la ville, donc toute la ville est
2 placée sous le contrôle du HVO. Les pertes de notre côté comprennent deux
3 morts, sept blessés. Il n'y a pas eu de prisonniers de capturés. Et du côté
4 musulman, on n'a pas encore évalué les pertes, mais elles sont estimées à
5 100.
6 "Le HVO contrôle tout le secteur autour du lac Rama, la ville de
7 Prozor, le barrage et le lac, la centrale hydroélectrique et la route pour
8 Jablanica jusqu'à la localité de Jasen."
9 Alors, est-ce que vous seriez d'accord avec moi, j'essaie juste de
10 replacer les choses dans leur contexte, donc votre arrivée dans le
11 contexte. Nous voyons qu'il y a eu des combats le 24 octobre. Est-ce que
12 vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'effectivement, dans ce rapport,
13 nous voyons qu'il y a eu des combats qui se sont poursuivis le 25 octobre
14 et que le résultat en a été que le HVO s'empare de toute la ville et des
15 endroits qui sont indiqués, donc il exerce le contrôle sur ces endroits ?
16 Est-ce que nous pouvons convenir qu'il s'agit de la situation après la date
17 du 25 octobre 1992 ?
18 Est-ce que vous le savez ou vous ne le savez pas ?
19 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas ça. Je ne sais pas quelle a été la
20 situation le 25, Monsieur, car je n'étais pas là-bas. Je ne pourrais ni
21 vous le confirmer, ni vous l'infirmer. Je ne peux dire que pour ce qui est
22 du nombre de Musulmans qui ont péri, que c'est deux fois plus que de
23 Croates, mais vous avez un document qui a été signé par les deux parties et
24 qui vous donne ce chiffre.
25 Q. A votre arrivée à Prozor, le HVO contrôlait-il toute la ville de
26 Prozor, comme on le dit dans ce document, le 26 ou le 25 ?
27 R. Oui.
28 Q. Et quand vous y êtes arrivé, le HVO contrôlait-il également tout ce
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1 secteur autour du lac Rama également, comme on le lit dans ce rapport du 25
2 ?
3 R. Oui, il y a également ce secteur, mais d'après les informations que
4 j'ai reçues par la suite, c'est surtout une région peuplée à 90 % de
5 Croates. Je crois qu'il n'y a que deux villages de moindre envergure où il
6 y a des Musulmans.
7 Q. Et quand vous êtes arrivé, est-ce que le HVO contrôlait le secteur du
8 barrage et de la centrale électrique de Marina Pecina ?
9 R. Le barrage, oui, absolument, parce qu'il y avait un chemin qui passait
10 par là, donc on pouvait l'emprunter. Et puis, pour ce qui est de la
11 centrale, je ne sais pas. Je ne pourrais pas vous le dire exactement.
12 Q. Et quand vous êtes arrivé, est-ce que vous avez pu constater que le HVO
13 contrôlait la route qui mène à Jablanica jusqu'à la localité de Jasen ?
14 R. Je ne sais pas jusqu'à quelle localité, mais la première fois que j'ai
15 tenté de rentrer dans Prozor, je l'ai fait depuis Jablanica. C'est là que
16 j'ai eu ma première rencontre ou première réunion avec une partie des
17 représentants des dirigeants musulmans qui ont pris la fuite de Prozor avec
18 Arif Pasalic. Et c'est là que j'ai tenté de prendre la route pour Rama.
19 Malheureusement, il y a eu des tirs, je ne sais pas d'où ça venait, pour ne
20 pas dire ils m'ont pris pour cible, et il a fallu que je contourne, il a
21 fallu qu'on rebrousse chemin, Pasalic et moi-même, même s'il ne voulait pas
22 aller à Prozor. Donc j'ai dit : J'y vais seul. On est revenus à Mostar et
23 c'est la raison pour laquelle plus tard, il a fallu qu'on passe par
24 Tomislavgrad, finalement par la voie du Salut.
25 Q. Ce document vient des services de Renseignements militaires et rend
26 compte aux personnes dont les noms figurent au dos du document.
27 Mon Général, en octobre 1992, lorsque vous êtes allé à Prozor et avez
28 été impliqué ou, pour le moins, avez observé ce qui s'y passait, saviez-
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1 vous que les services de Renseignements militaires du HVO rendaient compte
2 directement au général Bobetko, en tout cas, au sujet de cet incident ?
3 R. Monsieur Stringer, je ne suis pas allé observer ce qui se passait là-
4 bas, mais j'ai remis de l'ordre dans la situation.
5 Et puis, deuxième point, à la lecture de ce document, il ne ressort
6 absolument pas que le service de Renseignements militaire est responsable
7 devant Bobetko. Il est simplement indiqué que des informations sont
8 fournies à cette personne dans le cadre de la collaboration entre des
9 armées participant à un conflit, ce qui, je crois, est logique. Il était
10 logique pour le commandant du front sud, c'est-à-dire de la région
11 s'étendant dans la direction de Dubrovnik, d'éviter les affrontements entre
12 l'ABiH et le HVO qui pourraient avoir une incidence négative à l'avenir.
13 Q. Ces services de Renseignements militaires, savez-vous si en octobre
14 1992 ils dépendaient de l'état-major principal du HVO ou du département au
15 ministère de la Défense, voire s'ils faisaient partie, s'ils étaient situés
16 ailleurs dans l'organigramme ?
17 R. Le service de Renseignements militaire figure dans la structure de
18 l'état-major principal du HVO, c'était le cas en tout cas au moment où j'y
19 exerçais les fonctions qui étaient les miennes. Ici, en tout cas, nous
20 voyons le mot "état-major principal", et nous lisons "service de
21 Renseignements militaire." Je ne peux pas faire plus que lire la même chose
22 que ce que vous lisez. Les services de Renseignements militaires sont
23 indiqués ici comme faisant partie de la structure de l'état-major principal
24 du HVO, en tout cas, pendant la période où j'étais là-bas.
25 Q. D'accord.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, j'ai une question de suivi. Ce
27 document pour moi est un document important, comme ceux que nous avons vus
28 tout à l'heure, et vous avez compris depuis très longtemps, moi, j'essaie
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1 de déterminer qui a commencé, parce qu'en fonction de celui qui a commencé,
2 on peut avoir une explication ou pas sur l'entreprise criminelle. Donc pour
3 être clair, je vais reprendre votre expression favorite, pour être clair
4 comme l'eau de roche, s'il y a la mise en œuvre de cette entreprise
5 criminelle par une épuration ethnique, on peut comprendre qu'en octobre
6 1992, le HVO lance une opération, capture les Musulmans, et cetera.
7 Ça, c'est une vision que l'on peut avoir par les documents. Et puis, il
8 peut y avoir une autre vision, nous avons des documents qui émanent des
9 services de Renseignements militaires. Je ne connais pas la valeur des
10 services de Renseignements militaires du HVO, mais je présume, comme tout
11 service de Renseignements, qu'ils essayaient de faire bien leur travail et
12 de porter à la connaissance des autorités des renseignements précis. Donc
13 les auteurs de ce document, s'il y a une opération militaire programmée,
14 j'imagine mal dans le cas d'une opération militaire programmée qu'on mette
15 à l'écart les services de Renseignements, car après il va falloir qu'ils
16 donnent des données d'exploitation de ce qui a pu se passer.
17 Quand on regarde ce document de manière attentive, comme je l'ai fait
18 pendant ces dix dernières minutes, qu'est-ce que je constate ? Je constate
19 qu'on fait un rapport sur les événements, et on dit, c'est dans le texte,
20 que les Musulmans avaient en réalité planifié une attaque.
21 "Nous avons été informés que les forces musulmanes avaient planifié de
22 lancer une attaque sur Prozor dans l'après-midi du 24 octobre."
23 Donc c'est ce qu'ils écrivent. Et puis, le meurtre d'un soldat du HVO
24 entraînait donc toute une série de conséquences. Le document détaille
25 géographiquement la situation. L'auteur du document fait une distinction
26 entre des villages où il y a des extrémistes musulmans et des villages sous
27 contrôle musulman, mais où il ne se passe rien.
28 Les villages extrémistes, vous les avez listés, Voljavica, Here, Scipe, et
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1 ils disent que ces forces ont attaqué en direction de Borova Ravan,
2 Pridvorci. Donc ce document émanant des services de Renseignements
3 militaires, sauf s'ils disent des mensonges, peut accréditer l'idée que
4 l'attaque en fait à Prozor, ce sont des Musulmans et que le HVO a répliqué
5 après.
6 Alors moi, ce que je veux savoir : vous, en tant que commandant du HVO, pas
7 à ce moment-là parce que vous êtes arrivé ultérieurement, vous n'étiez
8 rien, mais quand vous avez été commandant du HVO, est-ce que vous aviez des
9 informations de la part des services de Renseignements, et faisaient-ils
10 leur travail de manière classique, ou bien répondaient-ils à des commandes
11 très précises ? Quel est votre souvenir de ces services de Renseignements ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Le service de Renseignements militaire avait
13 l'obligation de fournir des informations précises, neutres, exactes. Car
14 des informations inexactes ne pouvaient que nous entraîner dans un combat
15 perdu à l'avance. Je recevais des informations dont eux disposaient. Ces
16 informations étaient collectées de différentes façons, et donc j'en prenais
17 connaissance, je m'informais. Il me semble qu'en me fondant sur tous les
18 éléments dont je disposais, M. Zarko Keso faisait ce travail correctement.
19 C'est mon premier élément de réponse.
20 Deuxièmement, après mon arrivée sur place, j'ai pris connaissance avec
21 précision de ce dont il s'agissait. Il existait un plan - et vous disposiez
22 ici de documents allant dans ce sens - où il était dit : Prendre le centre
23 de Prozor, le reprendre à l'ABiH en provenance de Konjic. Il y avait un
24 plan qui concernait les Chetniks, Messieurs les Juges, et les choses se
25 sont mises en place peu à peu. Tout d'abord, ils ont pris des soldes du
26 HVO, ils n'ont pas combattu les Chetniks. Puis il y avait des protestations
27 en ce sens. Ensuite ils ont exigé des armes qui, à l'époque, se trouvaient
28 entreposer dans certains dépôts. Je le sais avec précision.
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1 Il y a eu un entretien entre des représentants de l'ABiH et du HVO qui
2 aurait dû résoudre les questions pendantes, mais il y a eu des tireurs
3 embusqués de l'ABiH qui ont été disposés, visant les membres prenant part à
4 cette réunion. Il y a eu un meurtre, et tout a été éclaté le 23. Ensuite,
5 il y a eu le meurtre de ce jeune homme du HVO, puis la situation qui
6 couvait déjà pendant des mois avec des dizaines de problèmes a éclaté, et
7 cela s'est terminé comme on le sait.
8 Ces localités de Here, Kute, et ainsi de suite, vous voyez qu'en provenance
9 de ces localités, un an après, il y a eu une attaque lancée contre Uzdol et
10 qu'il y a eu une quarantaine de morts. C'est une opération qui a été
11 motivée par une volonté de revanche. J'ai essayé de m'y opposer. Mais vous
12 voyez qu'il est impossible de simplifier à outrance.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Pour le cas où il y aurait eu un plan du HVO, je dis
14 pour le cas où, sur le plan technique, c'est une question technique qui
15 n'appelle pas de votre part un engagement personnel, mais c'est technique.
16 Pour le cas où le HVO aurait organisé une attaque, est-ce qu'à votre
17 connaissance le service de Renseignements dans son rapport doit faire une
18 référence explicite au plan qui a été préparé ? Est-ce qu'ils doivent
19 commencer un rapport en disant : En exécution du plan, et cetera, tel
20 numéro, nous vous adressons les informations recueillies. Ou bien, car vous
21 avez dit tout à l'heure, d'après vous les renseignements doivent être
22 neutres, à ce moment-là ils ne font référence à rien et ils donnent le fait
23 brut aux autorités. Alors, comment ça se passe ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] La réponse est la suivante : s'il y avait eu
25 le moindre plan d'attaque venant du HVO, exempt l'ABiH, il y aurait eu un
26 rapport préliminaire concernant les forces en présence, leur localisation,
27 il y aurait eu une carte militaire précisant le déploiement des unités, le
28 début de l'attaque et son développement. Et moi, personnellement, je n'ai
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1 jamais rien vu allant dans ce sens.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Le soldat qui a été tué, là, dont c'est peut-être en
3 réalité le meurtre qui va tout déclencher, il a été tué par un sniper, il
4 est mort comment, ce soldat qui est mentionné dans le document ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il a été tué à un poste de contrôle à
6 Makljen, sur le mont Makljen, tout simplement sans la moindre raison.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : La mort de ce soldat a eu un effet sur
8 l'enchaînement des actions militaires après ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était l'étincelle et a tout déclenché sur un
10 terrain qui était déjà plutôt miné.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites Iskra. Donc on doit comprendre c'est
12 l'étincelle.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait déjà une défiance certaine entre
14 les parties en présence. Ni l'une ni l'autre partie n'a plus confiance en
15 l'autre et croit que l'autre partie se prépare à l'attaquer. Il y a donc de
16 moins en moins de confiance. On propose des pourparlers, mais lorsqu'un tel
17 meurtre survient, voilà, il n'y avait aucun plan préalable du HVO, pour
18 autant que je le sache, qui aurait consisté en une attaque.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dernière question, enfin je pourrais y passer
20 pendant des heures sur ce document, mais je vois qu'il y a une phrase sur
21 l'usage des armes par les forces musulmanes qui consistait en deux
22 mortiers. Quand ils écrivent ça, c'est qu'ils ont le renseignement fiable
23 comme quoi les forces musulmanes ont utilisé des mortiers ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ils disposaient d'une information fiable.
25 J'en ai pris lecture et j'ai eu des entretiens. Ils utilisaient des
26 mortiers, également des Maljutka. Ils étaient très bien armés, comme on le
27 dit ici, des armes tout à fait significatives, et cela dans les maisons
28 avec une action, un plan très précis quant à savoir qui tirerait sur qui et
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1 quand.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a un petit détail qui apparaît aussi dans le
3 document. Ils auraient utilisé un missile antitank Sagger. Bon, je ne sais
4 pas ce que c'est. Si c'est mentionné dans le rapport, c'est que ça a été
5 utilisé.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'ignore, mais je sais qu'ils avaient des
7 Maljutka. C'est une arme russe, une arme antichar. Et je sais que le HVO a
8 utilisé un char lors de ces combats. J'ignore si ce char a été touché,
9 j'ignore ce qui s'est passé, mais il n'y a pas de raison de supposer que --
10 M. STRINGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Mon Général, j'aimerais vous ramener un peu en arrière dans le temps
12 puisque apparemment vous semblez plus enclin à présent à parler de
13 certaines des questions liées à ce qui se passait sur place avant votre
14 arrivée.
15 Vous dites qu'il n'y avait aucun plan d'attaque de Prozor de la part du
16 HVO. Vous ajoutez également que le meurtre du soldat du HVO a servi de
17 détonateur, mais aujourd'hui nous avons eu sous les yeux l'ordre de Boban
18 ou de Kordic qui nommait les membres du HVO municipal de Prozor. Nous nous
19 sommes penchés sur le rapport de Markesic au sujet des tensions dues au
20 fait que le drapeau croate avait été hissé dans la ville. Nous avons eu
21 sous les yeux l'ordre du général Petkovic qui ordonnait de bloquer les
22 forces de la Défense territoriale le 20 octobre 1992, et puis nous avons eu
23 sous les yeux cette demande du HVO adressée aux Musulmans les invitant à
24 accepter les structures civiles et militaires du HVO à Prozor.
25 Alors, nous pouvons discuter pour savoir si l'ABiH avait peut-être un plan
26 d'attaque du HVO, mais ce qui est un fait, c'est qu'à la date du 23 ou du
27 24 octobre 1992, le HVO s'apprêtait à asseoir son autorité, tant civile que
28 militaire, sur la ville de Prozor, et n'est-il pas vrai que finalement le
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1 HVO s'apprêtait à prendre le contrôle de cette municipalité par des moyens
2 civils et militaires, et que le conflit qui a éclaté a été le résultat de
3 cette volonté finale du HVO ?
4 R. Monsieur Stringer, je ne suis pas d'accord avec vous. J'ai lu des
5 centaines de documents qui ont été versés en tant que pièces à conviction
6 dans ce procès, et il y a aussi tout ce que je suis parvenu à savoir dans
7 le cadre de mes fonctions, il y a également tout ce qui a été écrit dans
8 les documents relatifs à la proportionnalité numérique de la population et
9 à la nécessité d'organiser le pouvoir militaire et civil.
10 J'ai eu sous les yeux des plans qui abordent la question des personnes
11 capturées dans le conflit, des plans de l'ABiH, le plan A des Chetniks, le
12 plan B pour le HVO. Je parle de documents que je connais bien.
13 Q. Vous parlez de ce plan d'attaque de Prozor de la part de l'ABiH. Le
14 fait est que si l'ABiH, autrement dit les Musulmans, ne faisait rien, alors
15 ils n'avaient pas d'autres solutions que d'admettre, une bonne fois pour
16 toute, le contrôle militaire et civil du HVO sur la municipalité de Prozor.
17 N'est-ce pas ainsi que la situation se présentait ? N'est-ce pas encore une
18 fois la raison pour laquelle le conflit a éclaté ?
19 R. Pour ma part, je n'ai pas la même définition du mot "proportionnalité"
20 que la vôtre. Pour moi, proportionnalité, cela signifie répartition,
21 partage des tâches militaires et civiles, et à mon avis, c'est la meilleure
22 façon d'aboutir à un accord, le fait qu'il y ait proportionnalité.
23 Q. Voyez-vous, un certain nombre de fois dans votre déposition, Mon
24 Général, vous avez dit : "Ils ne peuvent pas nous faire cadeau de ce qui
25 nous appartient", parlant des droits du peuple croate en Bosnie-
26 Herzégovine. "Ils ne peuvent pas nous donner ce qui est nôtre, donc nous le
27 possédons déjà. Il ne leur appartient pas de nous le donner." Mais en
28 réalité, vous proposez la même chose exactement, n'est-ce pas ? Ce que vous
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1 dites aux Musulmans, c'est que s'ils disent aux Musulmans dans Prozor
2 plutôt c'est : "Nous avons créé ici un pouvoir différent, distinct. Il
3 s'appelle HVO municipal et nous allons vous accorder une représentation
4 proportionnelle au sein de notre structure, mais nous insistons pour que
5 vous acceptiez notre structure." Les Musulmans n'ont pas accepté cette
6 structure à Prozor et c'est la raison pour laquelle le conflit a éclaté,
7 n'est-ce pas; ce n'est pas la vérité ?
8 R. Je vous ai dit pourquoi le conflit a éclaté, mais, Monsieur, je ne
9 pense pas que lorsque nous avons proposé un commandement conjoint, il y
10 avait proportionnalité, je le répète. Et puisqu'il y avait davantage de
11 Musulmans, ils allaient obtenir davantage de sièges.
12 La proportionnalité que nous proposions ne consistait pas d'offrir quelque
13 chose de particulier à quelqu'un de particulier. Nous voulions qu'il y ait
14 proportionnalité au sein de toutes les structures existantes en Bosnie-
15 Herzégovine. Malheureusement, ce que nous avons proposé n'a jamais été
16 accordé, octroyé. Les unités du HVO, qui étaient sous le commandant de
17 l'AbiH, n'ont pas vu leurs représentants siéger dans les instances de
18 commandement de l'ABiH à de très rares exceptions près, et s'agissant des
19 autorités, ça a été encore moins le cas.
20 Q. Mon Général, je vais maintenant aborder la dernière pièce que je
21 voulais vous soumettre, et nous en terminerons sans doute pour la journée
22 d'aujourd'hui. Il s'agit de la pièce P 00640.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de regarder la pièce P 00640, M. Stringer vous
24 a posé une question qui était très intéressante et qui permet peut-être de
25 résoudre la question de savoir s'il y avait eu un plan ou pas. Il est parti
26 de l'idée que le HVO a voulu prendre le contrôle de la municipalité de
27 Prozor et que face à cela, l'ABiH aurait pu - j'emploie toujours le
28 conditionnel - aurait pu réagir en planifiant une attaque du HVO. Ce qui
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1 pourrait peut-être expliquer beaucoup de choses. Mais dans l'hypothèse que
2 M. Stringer souligne c'est que lui part de l'hypothèse que le HVO voulait
3 prendre le contrôle politique de Prozor, et ça, là-dessus, ça mérite de
4 votre part quand même des explications.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, le HVO a mis
6 Prozor sous son contrôle après le conflit, mais dans ces affrontements, une
7 fois que ce contrôle a été établi, le HVO a dit : "Nous ne voulons pas de
8 conflit. Nous allons appliquer la proportionnalité." Et Jure Smidt déclare
9 : "Nous ne pouvons pas parvenir à un accord avec les gens de Rama. Allons à
10 Bugojno et nous obtiendrons un accord auprès des structures de haut
11 niveau." Voilà à mon avis ce qui ne peut pas être interprété autrement que
12 comme étant le reflet d'une réflexion du désir constant d'organiser des
13 pourparlers et un fondement commun sur la base du principe d'égalité pour
14 l'application des droits, donc la proportionnalité.
15 Je vous dis que telle n'était pas l'idée d'Alija Izetbegovic, pas plus que
16 de la grande majorité des Musulmans de Bosnie-Herzégovine, à l'exclusion
17 peut-être de ceux de Tuzla et de quelques autres. Ils croyaient que la
18 Bosnie-Herzégovine leur appartenait et que s'ils ne pouvaient pas la
19 prendre aux Serbes, ils voulaient l'avoir de nous, l'obtenir de nous.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous nous dites que le HVO a pris le contrôle
21 de Prozor, mais vous dites après le conflit, ce qui veut dire qu'avant les
22 événements du 24 octobre, il n'y avait pas de contrôle politique du HVO.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ils faisaient partie du pouvoir en
24 proportionnalité et ils discutaient les uns avec les autres. Et quand le
25 conflit a éclaté et quand ils ont pris le contrôle de Rama, encore une
26 fois, ils disent : Et d'ailleurs, qu'est-ce que j'ai fait d'autre là-bas
27 que de refaire ce qui avait déjà été tenté, c'est-à-dire d'essayer de
28 recréer un pouvoir commun qui avait fonctionné pendant au moins un an
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1 avant.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Je redonne la parole à M. Stringer pour qu'il
3 termine.
4 M. STRINGER : [interprétation] Monsieur le Président, il est sans doute
5 préférable de laisser l'examen du document suivant à la journée de demain
6 plutôt que de commencer aujourd'hui et d'arrêter tout de suite.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez parfaitement raison. Bien. Donc nous nous
8 retrouverons, comme vous le savez, demain à 14 heures 15. D'ici là, je
9 souhaite comme d'habitude à tout le monde une bonne fin de journée.
10 --- L'audience est levée à 18 heures 57 et reprendra le mercredi 26 août
11 2009, à 14 heures 15.
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