Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 15 septembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Coric est absent]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire, s'il vous plaît.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges et toutes

  9   les personnes présentes dans le prétoire.

 10   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et

 11   consorts. Merci, Messieurs les Juges.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci, Monsieur le Greffier.

 13   En ce mardi, 15 septembre 2009, je salue M. Prlic, M. Stojic, M. Praljak,

 14   M. Petkovic, et M. Pusic; je n'oublie pas également d'associer M. Coric.

 15   [Le témoin vient à la barre]

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Je salue Mmes et MM. les avocats, je salue M. Scott

 17   et sa collaboratrice, et je n'oublie pas également de saluer toutes les

 18   personnes qui nous assistent.

 19   Je salue également notre témoin qui vient d'arriver, et je lui souhaite

 20   donc la bienvenue pour cette journée.

 21   Nous allons donc entamer le contre-interrogatoire. Le 7 mai 2009, la

 22   Chambre avait rendu une décision relative à la demande de réexamen ou de

 23   certification d'appel d'un ordonnance du 22 avril 2009, et aux termes de

 24   cette décision, nous avions dit que les Défenses Stojic, Prlic et Petkovic

 25   disposent de deux heures dans leur ensemble pour contre-interroger le

 26   témoin.

 27   Bien, on a appris hier que la Défense de Stojic n'aurait pas des questions,

 28   ce qui fait que M. Prlic et M. Petkovic se répartissant les deux heures. Il

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  1   nous a été annoncé que Me Alaburic utiliserait une heure 45 et Me Karnavas

  2   45 minutes conformément à notre décision. Oui, enfin il nous a dit 15 à 20

  3   minutes mais deux heures c'est deux heures c'est pas deux heures cinq.

  4   Bien.

  5   Donc il faudra respecter le temps sinon c'est des dérapages incontrôlés qui

  6   posent après toute une série de problèmes.

  7   Maître Alaburic, je vous donne la parole. Vous nous avez donné donc votre

  8   classeur que nous avons.

  9   LE TÉMOIN : JOSIP JURCEVIC [Reprise]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 12   tous et à toutes dans le prétoire.

 13   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

 14   Q.  [interprétation] Docteur Jurcevic, bonjour à vous aussi.

 15   L'INTERPRÈTE : Le témoin hoche de la tête.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation]

 17   Q.  Docteur Jurcevic, j'avais l'intention de vous poser des questions sur

 18   trois groupes de sujets : armée HVO, direction bosnienne tant politique que

 19   militaire, et des sujets de nature politique en premier lieu portant sur

 20   des frontières. Mais je vais d'abord me pencher sur un autre sujet parce

 21   que M. le Juge Antonetti, dans le courant de la journée d'hier, vous a

 22   interrogé sur votre mémoire de troisième cycle : "Le Mythe de Jasenovac,"

 23   et le Juge Trechsel vous a demandé si, en votre qualité d'homme de science,

 24   vous vous êtes penché sur les crimes que les Croates ont commis à l'égard

 25   de citoyens d'autres groupes ethniques. Il m'a semblé que quelque chose

 26   était resté en l'air et j'ai l'impression qu'il faudrait tirer les choses

 27   au clair, je me propose à cet effet de vous poser des questions sur

 28   Jasenovac et sur vos positions relatives à Jasenovac. Docteur Jurcevic,

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  1   dites-nous si, à vos yeux, Jasenovac était un camp de concentration dirigé

  2   ou géré par l'Etat croate indépendant.

  3   R.  Il serait plus précis de dire que c'était une combinaison de camps de

  4   travail et de concentration. J'en ai parlé à plusieurs reprises en public

  5   et j'ai écrit à plusieurs reprises à ce sujet, et c'était géré à part

  6   entière par les autorités de la République indépendante de Croatie.

  7   Q.  Docteur, est-il contesté par vous le fait que les Juifs aient été

  8   victimes de ce camp de concentration à Jasenovac ? Si vous préférez les

  9   Juifs aussi ? 

 10   R.  Oui, bien sûr, les Juifs, les Serbes, les Croates et d'autres encore,

 11   comme je l'ai précisé dans le détail, ils ont tous été victimes d'un crime

 12   ou des pires des crimes qui ont été commis dans ce camp de Jasenovac, et

 13   jamais je n'ai remis la chose en question de façon directe ou indirecte.

 14   Q.  Oui, c'est ce que je voulais tirer au clair à l'intention des Juges.

 15   R.  Excusez-moi, peut-être pourrais-je dire qu'il ne s'agit pas seulement

 16   de Jasenovac. Lorsque j'ai parlé de la NDH, de l'Etat indépendant de

 17   Croatie, j'ai toujours précisé que c'était un Etat totalitaire et j'ai dit

 18   que c'était un régime criminel, donc une personne qui ferait des recherches

 19   de façon objective et humaniste ne serait remettre en question la façon

 20   dont j'ai valorisé les choses et présenté les choses.

 21   Q.  Si j'ai bien suivi vos interventions publiques que je connais mieux que

 22   vos écrits, il me semble que vous avez condamné les lois racistes de l'Etat

 23   indépendant de Croatie.

 24   R.  Oui, absolument. C'est l'un des principaux reproches à ce régime de la

 25   NDH et j'ai dit que cela a été adopté ou promulgué sous des pressions de

 26   l'Allemagne Nazie mais cela ne justifie pas le régime qui a quand même

 27   promulgué ces lois-là.

 28   Q.  Je voulais que l'on tire les choses au clair pour qu'il n'y ait pas de

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  1   dilemme pour ce qui est de vos opinions concernant Jasenovac. Dites-moi,

  2   Monsieur Jurcevic : saviez-vous que, dans les partisans, il y avait

  3   proportionnellement parlant le plus de Croates ? Quand je parle de

  4   "proportionnalité," je parle de partisans croates compte tenu de la

  5   population croate dans son ensemble; le saviez-vous cela ?

  6   R.  Oui. Quand on se penche sur le Mouvement des partisans sur le

  7   territoire de l'ex-Yougoslavie, je ne mettrai pas à part les Croates parce

  8   que les unités se sont déplacées d'une région à l'autre, notamment en

  9   Bosnie-Herzégovine, mais si on se penche sur les années de début 1943

 10   jusqu'à 1943, non seulement en Croatie mais sur le territoire de l'ex-

 11   Yougoslavie, compte tenu de la situation dans son ensemble, il y avait le

 12   plus de Croates parmi les partisans et dans ce mouvement communiste.

 13   Q.  Bien. Je me propose maintenant de passer au sujet que j'ai préparé pour

 14   votre interrogatoire ou contre-interrogatoire. Je pense que vous avez un

 15   jeu de documents qu'on a préparés à votre intention. Or, si ce n'est pas le

 16   cas, je vais demander à M. l'Huissier de vous le remettre.

 17   Penchez-vous sur ces documents dans le classeur. Le document qui a été

 18   préparé à part c'est une transcription en provenance de l'audition de la Pr

 19   Smilja Abramov dans l'affaire contre Slobodan Milosevic qui a été

 20   diligentée devant ce Tribunal.

 21   R.  Je m'excuse mais j'ai reçu la version anglaise.

 22   Q.  Derrière la version anglaise, vous avez à chaque fois la version

 23   croate.

 24   L'INTERPRÈTE : La cabine française demande à ce qu'il soit fait des pauses

 25   entre les questions et les réponses. Merci.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation]

 27   Q.  Le premier document dans le cadre des premiers documents relatifs à

 28   l'armée du HVO, c'est le 4D 1355, 1355 ?

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  1   R.  Vous avez dit 4D quoi ? C'est le tout premier document, avez-vous dit ?

  2   Q.  Oui, c'est le premier document du classeur.

  3   R.  Vous parlez en version croate.

  4   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande à ce que les intervenants ne se

  5   chevauchent pas. Ce serait très aimable. Ils parlent en même temps.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Penchez-vous sur les feuillets jaunes de côté 41 -- 4D 1355 ? Vous

  8   allez arriver au texte croate original. Je vais vous le dire tout de suite

  9   qu'il s'agit d'une interview accordée par le général Milivoj Petkovic au

 10   journal du soir, août 1994, en août 1994, disais-je, lorsqu'il quittait la

 11   Herceg-Bosna. Alors ce qui m'intéresse c'est plusieurs appréciations

 12   avancées par le général Petkovic au sujet de votre rapport d'expert,

 13   Docteur Jurcevic.

 14   Si vous vous penchez sur la fin de la première colonne, et les questions et

 15   réponses sont là.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Je précise à l'intention des Juges que

 17   c'est au D à la fin de la première et début de la deuxième page de la

 18   version anglaise.

 19   Q.  Pour ce qui est de ce qui s'est produit au niveau du HVO pendant ces 28

 20   mois où le général Petkovic s'était trouvé en Herceg-Bosna, le général a

 21   répondu, je cite :

 22   "Nous ne sommes pas partis d'une armée organisée. Il s'agissait seulement

 23   de groupes armés. Quelque part ils étaient de taille plutôt grande et

 24   ailleurs ils étaient plutôt petits, et il y avait derrière   moi un état-

 25   major. Je pensais que l'armée allait être organisée mais dès les combats de

 26   Kupres on a pu voir ce qu'on avait à notre disposition. Les formations

 27   n'étaient ni suffisamment fortes ni suffisamment organisées, ni

 28   suffisamment rattachées les unes aux autres. Chaque municipalité disposait

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  1   d'une armée à elle. C'est là qu'on a entamé une réorganisation en procédant

  2   à la mise en place de brigades, il y a eu des résistances. Nous avons mis

  3   en place des zones opérationnelles parce que l'état-major comptant une

  4   quinzaine d'hommes en son sein ne pouvait pas tout maîtriser. Le plus gros

  5   des problèmes c'était la qualité des gens, des hommes. Parce que le

  6   territoire était connu par le fait au terme duquel la population ne prêtait

  7   pas beaucoup d'attention et d'intérêt à l'armée."

  8   Alors Docteur, est-ce que cela correspond à ce que vous nous avez dit

  9   concernant les caractéristiques de l'organisation de cette armée du HVO ?

 10   R.  Jusqu'à présent, je n'ai pas eu l'occasion de voir ce document, mais

 11   tout ce que vous nous avez lu, et ce que vous avez dit ici, correspond tout

 12   à fait à mes conclusions dans la partie de l'expertise se rapportant au

 13   HVO. Je précise que j'ai ajouté dans l'expertise en sus de ces points

 14   faibles, certains autres éléments qui se trouvent être importants. Cette

 15   carence, au niveau de la qualité du personnel et cette absence de

 16   préparation et d'entraînement des effectifs au sein des unités dont il est

 17   question, en plus le problème qui s'est posé aussi, c'était des phénomènes

 18   népotistes ou un familiarisme [phon] incongru qui l'emportait sur ce

 19   territoire, ce qui fait que les autorités civiles du HVO et les unités

 20   étaient liées les unes aux autres par des liens familiaux mais de façon

 21   amorale. Ce qui n'était pas bon pour le comportement des uns et des autres.

 22   Q.  Merci. Alors je vais revenir sur certains documents.

 23   Mais je tiens à attirer votre attention sur une déclaration faite par

 24   le général Petkovic. Je précise que cela figure en page 2 de la traduction,

 25   et pour vous, Docteur Jurcevic, c'est le milieu de la deuxième colonne.

 26   Alors on lui demande comment se présente le HVO de nos jours, on

 27   parle du mois d'août 1994; est-ce que c'est une armée ou est-ce que c'est

 28   un peuple armé ?

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  1   Le général Petkovic répond, je cite :

  2   "Le HVO est entre les deux. Il en faut beaucoup pour créer une armée.

  3   Nous oeuvrons en faveur du fait de voir le HVO devenir une armée, au moins

  4   pour ce qui est du meilleur de ses éléments, à savoir ses brigades de la

  5   garde. Ce sera une armée lorsque nous disposerons d'un certain contingent

  6   présent même en temps de paix, et lorsqu'on saura ce qu'il convient de

  7   faire et comment. Le reste constituera la composante territoriale."

  8   Docteur Jurcevic, comment commenteriez-vous cette affirmation faite

  9   par le général Petkovic, disant que dès le mois d'août 1994, le HVO, enfin

 10   qu'au mois d'août 1994 aussi le HVO n'est pas une armée mais c'est encore

 11   en processus de développement ?

 12   R.  C'est exact. J'ajouterais un fait important du point de vue militaire

 13   que j'ai omis de mentionner tout à l'heure, mais qui figure dans mon

 14   expertise. C'est que c'était un grand problème du HVO puisque les gens

 15   étaient très attachés aux différentes localités, parce qu'il y avait des

 16   problèmes lorsqu'on leur donnait des ordres de bouger de leur propre

 17   territoire, donc il y avait de grosses résistances de la part de l'unité

 18   toute entière ou de groupe, et ce, du fait du manque de respect vis-à-vis

 19   de ce commandement ou de cette chaîne hiérarchique.

 20   Q.  Est-ce que vous voulez dire, Docteur Jurcevic, que ces unités

 21   municipales avaient estimé que leur devoir était de défendre les

 22   municipalités et qu'elles avaient du mal d'accepter d'aller défendre le

 23   territoire de la Bosnie-Herzégovine dans une autre municipalité ?

 24   M. SCOTT : [interprétation] Comme on m'a conseillé, je m'oppose au

 25   caractère de cette question, qui sous-entend la réponse du témoin.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, le Dr Jurcevic a

 27   déjà répondu à ma question. Ma question de tout à l'heure était un résumé

 28   des réponses aux questions précédentes, ça, c'est d'un.

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  1   De deux, je suis en train de contre-interroger le Dr Jurcevic, par

  2   conséquent, j'ai le droit de poser des questions directrices aussi. Je suis

  3   consciente du fait que les Juges de la Chambre dans le contexte de la

  4   totalité des questions et réponses finira par valoriser les réponses à

  5   juste titre du Dr Jurcevic, même si ces questions sont directrices.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Je me demandais si je ne devais pas avant l'audience

  7   faire une déclaration personnelle sur cette question qui revient sans

  8   arrêt, question directrice ou pas, et après avoir réfléchi, je me suis dit

  9   : bon, je ne dis rien, puis voilà que revient sur la table le problème.

 10   Il est exact que vous êtes dans la phase du contre-interrogatoire. De mon

 11   analyse, le contre-interrogatoire c'est qu'on pratique le contre-

 12   interrogatoire parce que, lors de l'interrogatoire principal, le témoin a

 13   répondu sur certains sujets de telle façon que celui qui va contre-

 14   interroger va essayer de remettre les choses de son point de vue dans la

 15   bonne ligne, d'où le contre-interrogatoire; sinon, à ce moment-là, il ne

 16   faut pas poser de questions directrices.

 17   J'ai déjà dit à plusieurs reprises que les Juges qui sont des Juges

 18   professionnels apprécient une réponse en fonction de la qualité de la

 19   question. Si la question est très directrice et que la réponse était

 20   induite dans la question, la valeur probante sera évidemment moindre qu'une

 21   question tout à fait neutre où le témoin va, à ce moment-là, répondre et la

 22   valeur probante sera supérieure à celle d'une réponse téléguidée.

 23   Ça, ce sont des règles pratiques. Etant rappelé que dans le Règlement, rien

 24   n'est dit sur les questions directrices. Donc c'est à la pratique de

 25   déterminer exactement ce qui relève d'une question directrice ou pas.

 26   Donc si vous voulez que votre question soit appréciée à sa juste

 27   valeur par les Juges, essayez de faire en sorte de ne pas induire la

 28   réponse. Voilà, c'est ça qui vous est demandé et que M. Scott rappelle à

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  1   juste titre. Votre grand professionnalisme peut très facilement y arriver

  2   dans la mesure où ça fait des années que vous pratiquez, donc je n'ai aucun

  3   souci à cet égard.

  4   Il est exact que hier, il y a eu un problème au moment où Me Kovacic

  5   posait des questions. Mais je me souviens qu'il avait au départ dit, qu'il

  6   allait être amené à poser des questions directrices. Donc j'ai pensé

  7   innocemment qu'il voulait poser des questions pour gagner du temps mais

  8   sans interférer, sans la réponse, ça peut arriver. Mais là, c'est très

  9   difficile après coup de s'en rendre compte puisqu'on ne sait pas à l'avance

 10   quelle est la question qu'il va poser.

 11   Donc voilà ce que je voulais dire. Essayons d'éviter des objections

 12   qui nous font perdre du temps, parce que ce qui compte c'est qu'est-ce qu'a

 13   dit le général Petkovic lors de cette interview, dans quel sens il faut

 14   l'interpréter, et là, le témoin peut peut-être, je dis bien peut-être nous

 15   éclairer.

 16   Je vous donne la parole.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président, de

 18   ces instructions. Je retire ma question parce que le Dr Jurcevic au fond a

 19   répondu à ma question, et ce, en répondant à la question précédente. Je

 20   voulais juste faire un résumé et mette l'accent sur la chose, mais si vous

 21   estimez que ce n'est pas nécessaire, je vais aller de l'avant.

 22   Q.  Le troisième élément de cette interview que je voulais présenter à

 23   votre attention, ainsi qu'à celle des Juges de la Chambre se trouve au

 24   début de la quatrième colonne, dans la version anglaise, c'est à la page 3,

 25   et la question est celle de savoir quelles étaient les raisons de mauvais

 26   résultats de la guerre contre les Musulmans.

 27   Le général Petkovic dit que c'est exact les résultats étaient mauvais, et

 28   le journaliste lui demande :

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  1   "N'était-il pas à l'adversaire plus faible ces Musulmans ?"

  2   Le général Petkovic en réponse dit, je cite :

  3   "Non. La disposition de la population croate est telle que partout nous

  4   nous trouvons dans des enclaves. Le rapport des forces était défavorable,

  5   et nous ne nous étions pas préparés à leur faire la guerre à eux. Chacun au

  6   niveau local avait raisonné suivant un principe qui était celui de se dire

  7   : 'Ça n'aura pas lieu chez nous.' Nous avons de bonnes relations. On a

  8   donné des instructions à Bugojno et à Vares, mais nous n'avons souhaité

  9   entamer les conflits nulle part."

 10   Alors deux questions à ce sujet, Docteur Jurcevic. Dans cette interview, le

 11   général Petkovic affirme que les Croates ne s'étaient pas préparer à faire

 12   la guerre aux Musulmans en Bosnie-Herzégovine; est-ce que cette affirmation

 13   est exacte ou pas selon les connaissances qui sont les vôtres ?

 14   R.  D'après tous les documents que j'ai utilisés dans mes recherches et qui

 15   sont indiqués ici, ainsi qu'un grand nombre de documents cités en

 16   référence, ils confirment à part entière la thèse avancée par le général

 17   Petkovic, dans cette interview de 1994, tant du point de vue politique que

 18   sur ou compte tenu d'un niveau lié à la mentalité de la population, et

 19   comme on le voit ici, on a donné des instructions à Bugojno et à Vares. Ça

 20   voulait dire que : "Ça ne se passera pas chez nous, nous avons de bonnes

 21   relations avec eux."

 22   Je voulais peut-être rajouter quelque chose à titre personnel parce que

 23   j'ai une expérience qui est la mienne, qui est propre à ma personne.

 24   Q.  Allez-y.

 25   R.  Feu mon oncle et sa famille résidaient à l'époque à Bugojno - ils y

 26   habitaient tout le temps - et en 1991 en automne, lorsqu'il y a eu une

 27   guerre totale en République de Croatie et lorsque ce que j'apprenais me

 28   disait qu'il y aurait une agression serbe contre la Bosnie-Herzégovine,

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  1   aussi je suis allé chez mon oncle pour le prévenir et lui dire qu'il

  2   fallait qu'il prépare. Je suis allé en personne le lui dire parce que

  3   c'était mon oncle, et lui, il m'a répondu ou expliqué de façon similaire,

  4   en me disant :

  5   "Mais mon cher Josip, chez vous c'est une situation que, une, et chez

  6   nous c'est une situation autre. Nous, on n'aura jamais de guerre."

  7   Ça c'est donc mon témoignage personnel concernant la mentalité qui

  8   l'emportait au niveau de ces territoires à ce sujet.

  9   Q.  Il y a une autre affirmation du général Petkovic qui me semble être

 10   importante dans le procès qui nous intéresse, à savoir que tout un chacun à

 11   son niveau local évaluait s'il y aurait guerre et contre qui il y aurait

 12   guerre et on parle d'une situation au sujet d'un milieu local. Est-ce que

 13   ça correspond à l'expérience qui est la vôtre concernant les événements qui

 14   se sont produits sur le terrain ?

 15   R.  En quelque sorte, ceci -- enfin c'est exact, mais cela découle des

 16   réponses que je vous ai déjà apportées, et j'ai élaboré sur la matière dans

 17   mon rapport d'expert, et bon nombre d'acteurs, Jovan Divjak et autres, qui

 18   faisaient partie des rangs de l'ABiH, ont confirmé la thèse en question, à

 19   savoir qu'il y avait une continuité dans certains secteurs où les relations

 20   sont restées presque idéales sans qu'il y ait la moindre tension et encore

 21   moins de conflit entre les Unités de l'ABiH et des Unités du HVO.

 22   Q.  Penchons-nous sur le document suivant, Docteur, 4D 16 --

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder le document, je voulais revenir sur

 24   une question qui avait été posée à titre liminaire par Me Alaburic et votre

 25   réponse a induit chez moi toute une réflexion, et je me demande s'il n'y a

 26   pas un problème.

 27   Elle vous a posé des questions sur les partisans, et vous avez répondu en

 28   disant qu'à votre connaissance, les partisans étaient presque totalité

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  1   Croate ou quelque chose comme ça. Il semblerait mais j'emploie le

  2   conditionnel, je n'ai pas l'écrit sous les yeux, mais il semblerait qu'en

  3   1942, le maréchal Tito aurait dit que les partisans étaient majoritairement

  4   Serbes. Il semblerait, qu'à cette époque, les partisans étaient à 90 %

  5   constitués de Serbes de Croatie et de Serbes de Bosnie.

  6   Donc, là, il pourrait y avoir une contradiction entre ce que vous avez dit

  7   tout à l'heure et ce que certains peuvent soutenir. Alors ma question elle

  8   est très simple pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté.

  9   Confirmez-vous, d'après vous, que les partisans étaient formés par des

 10   Croates ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que j'ai présenté de façon résumée est

 12   facile à vérifier dans les renseignements statistiques portant sur le

 13   nombre des Unités de Partisans et leurs structures respectives. Ils sont

 14   publiés dans le détail dans la littérature imprimée durant l'existence de

 15   l'ex-Yougoslavie, y compris les statistiques totales. Donc ce que j'ai dit

 16   est exact, il y a une explication à cela.

 17   Courant jusqu'en 1943, et là, les rangs des partisans deviennent grandement

 18   massifs sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, et il y a progression de la

 19   part de leur succès, donc c'est confirmé jusqu'à 1943 au niveau de la

 20   Yougoslavie, et pour ce qui est du Mouvement des partisans jusqu'en 1943,

 21   ça se trouvait notamment situé sur le territoire de l'Etat croate

 22   indépendant, donc là, les Croates étaient en majorité. Vers la fin de la

 23   guerre, en 1944 et 1945, d'après les renseignements qui ne sont pas les

 24   miens, mais d'après les renseignements publiés par la Yougoslavie et la

 25   science de ces dernières, pour des séries de raisons que je ne vais pas

 26   énumérer ici, le rapport a évolué.

 27   Je n'ai pas dit qu'ils étaient à 80 ou 90 %, mais quand on regarde la liste

 28   d'après les nombres, ils étaient des plus nombreux, il y avait beaucoup

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  1   d'autres Serbes de Croatie. Il y avait des Musulmans aussi, mais jusqu'en

  2   1943 -- jusqu'à la capitulation de l'Italie, en septembre 1943, le 8

  3   septembre 1943, jusque-là donc, la part la plus importante était celle des

  4   Croates, et c'est sur le territoire de la MDH qu'il y a eu une guerre

  5   civile très cruelle qui avait aussi des éléments idéologiques et autres.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Docteur Jurcevic, pouvons-nous clarifier une chose ? Est-ce que l'on

  8   parle, dans certains cas, de chiffres absolus, et dans d'autres cas, de

  9   chiffres relatifs -- ou plutôt, de proportion par rapport à la population

 10   totale ? Il me semble que M. le Président a parlé d'une donnée qui était

 11   exprimée en chiffres absolus, et dans ce cas-là, cela signifierait qu'il y

 12   aurait eu en chiffres absolus davantage de Serbes; cependant, si l'on

 13   observe la part exprimée par rapport à la proportion dans la population

 14   totale, la part des Croates aurait été plus importante. Alors, est-ce que

 15   l'on peut essayer de clarifier cela ?

 16   R.  L'explication que vous venez de donner est exacte, pour que nous ne

 17   perdions maintenant pas de temps, et tout ça est très facile à vérifier, y

 18   compris dans des ouvrages encyclopédiques, dans l'encyclopédie militaire,

 19   par exemple, ou dans d'autres encyclopédies éditées à l'époque de la

 20   Yougoslavie. On a consacré beaucoup de recherches à l'époque à ce sujet.

 21   Alors, maintenant, quant à savoir si ces données, ces chiffres et ces

 22   recherches conduites du temps de la Yougoslavie sont exactes, je ne

 23   m'aventurerai pas sur ce terrain. Moi, j'ai repris certains de ces chiffres

 24   en exprimant les réserves que j'ai évoquées en vous répondant, en indiquant

 25   donc que j'ai repris certains de ces chiffres sans nécessairement toujours

 26   les remettre en question. Par rapport à ce rapport, ces rapports

 27   numériques, il est probable que les proportions des uns et des autres aient

 28   été, il en ait été rendu compte correctement, mais il est également tout à

Page 44812

  1   fait probable que l'historiographie yougoslave est quelque peu gonflée, les

  2   chiffres globaux, le nombre de partisans lors de la Seconde Guerre

  3   mondiale.

  4   Q.  Très bien. Passons alors au document suivant

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] qui est la pièce, le document 4D 1674.

  6   Q.  Il s'agit d'un rapport émanant du commandant de la Brigade de Livno,

  7   rapport qui est entre autres adressé à la zone opérationnelle, à l'état-

  8   major principal au département de la Défense. Au tout début, le commandant

  9   dit, je cite :

 10   "Nous ne sommes pas en mesure d'exécuter l'ordre de la zone opérationnelle

 11   de l'Herzégovine du nord-ouest concernant l'envoi des unités de la Brigade

 12   à Donji Vakuf, car si nous faisions cela, nous continuerions à alimenter la

 13   déstabilisation du théâtre des opérations de Livno."

 14   Alors, Docteur, est-ce que cette partie du rapport abonde dans le sens de

 15   ce que vous nous disiez à l'instant, à savoir qu'une partie des unités

 16   refusait de quitter le territoire de sa propre municipalité pour se rendre

 17   dans une autre ? Est-ce que c'est ce document en fait qui nous confirme ce

 18   que vous disiez à l'instant ?

 19   R.  Oui. Ce document est assez typique à cet égard, c'est-à-dire que

 20   certaines unités locales se comportaient ainsi et non pas pour les raisons

 21   qui sont avancées dans le document que nous avons sous les yeux où l'on

 22   parle d'une forme de déstabilisation. Donc, c'étaient d'autres raisons qui

 23   intervenaient, la possibilité de commander de façon centralisée les forces

 24   armées, le manque d'une hiérarchie qui fonctionnait bien et c'était

 25   notamment le cas lorsque nous nous sommes penchés sur la situation telle

 26   qu'elle prévalait localement, les autorités locales et leur état de

 27   fonctionnement, les autorités du HVO. Ce problème de centralisation de

 28   l'administration et de l'organisation du point de vue militaire, du point

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  1   de vue du commandement, était un problème considérable. A cet égard, il y a

  2   un document que j'ai cité dans mon rapport, en page 114 de mon rapport.

  3   J'ignore à quelle page anglaise cela correspond. Ce document est un rapport

  4   du ministère de la Défense de la HRHB. Il s'intitule en fait : "Comptes

  5   finaux pour l'année 1993," et il énumère un certain nombre de facteurs

  6   aggravants et de circonstances qui ont entraîné des limitations et des

  7   difficultés pendant toute l'année 1993. On a affaire à une liste de 18

  8   problèmes parmi lesquels en fait, la majorité d'entre eux confirme ce que

  9   nous avons dans ce document, cette affirmation.

 10   Donc, il s'agit ici d'un rapport officiel qui parle de

 11   l'autofinancement des Unités du HVO par l'intermédiaire des organes

 12   municipaux, du manque d'un système de financement unifié, de l'inexistence

 13   d'un système militaire unifié, du remaniement incessant des unités

 14   militaires et ainsi de suite. Donc, on a 18 remarques dans ce rapport tout

 15   à fait officiel qui confirme le fait qu'en 1993, il était absolument

 16   impossible d'obtenir une armée qu'on aurait pu considérer comme unifiée,

 17   que ce soit du point de vue de sa hiérarchie, de son financement ou à

 18   d'autres égards.   

 19   Q. Monsieur Jurcevic, reportez-vous maintenant au quatrième paragraphe qui

 20   aborde la question de l'intervention de la Brigade de Livno sur le

 21   territoire de Vakuf. Il est alors dit qu'était alors pendant un conflit

 22   croato-musulman qui aurait pu avoir des conséquences négatives insondables.

 23   Il est dit également que la population musulmane de Livno était mécontente

 24   de l'intervention du HVO dans le secteur de Vakuf, tout comme les

 25   interventions précédentes de nos hommes à Prozor, mais que l'on a réussi à

 26   éviter un conflit à Livno même.

 27   Alors, comment comprenez-vous cet extrait par rapport aux souhaits de la

 28   Brigade de Livno d'intervenir sur le territoire d'autres municipalités

Page 44814

  1   contre l'ABiH ?

  2   R.  J'interprète cela avant tout dans le contexte que nous avons évoqué.

  3   C'est cela qui prévaut, à savoir le caractère avant tout local de ces

  4   phénomènes et tout ce que cela implique.

  5   Deuxièmement, cela nous montre et en fait, l'histoire précédente le montre

  6   également, qu'il n'y avait pas eu d'animosité dans l'expérience que les

  7   Croates et les Musulmans avaient eu précédemment de leurs interactions, au

  8   début des années 1990, et notamment en Bosnie centrale. Nous avions affaire

  9   à d'excellents exemples de vie commune, de bon voisinage et à vrai dire, y

 10   compris dans les conditions particulièrement dures de la Seconde Guerre

 11   mondiale et pendant la seconde Yougoslavie, cela avait également été le

 12   cas.

 13   Malheureusement, les événements qui se sont déroulés pendant les années de

 14   guerre en Bosnie-Herzégovine ont mis un terme à cette longue tradition et

 15   j'en parle dans les dernières parties de mon expertise.

 16   Q.  Deux paragraphes plus loin, il est dit dans ce même rapport, je cite --

 17   R.  Excusez-moi. De quel document s'agit-il ?

 18   Q.  C'est le même document, le document 4D 1674. C'est le deuxième document

 19   dans l'ordre qui vous est présenté. C'est donc le quatrième -- deux

 20   paragraphes plus bas par rapport au quatrième paragraphe, et je cite :

 21   "Une insatisfaction particulière est causée auprès de la population de

 22   Livno par le fait que les autres municipalités des zones opérationnelles

 23   d'Herzégovine du nord-ouest, et plus largement de la HZ HB ne participent

 24   pas à cette guerre patriotique de façon adéquate en faisant intervenir

 25   leurs capacités, tant matérielles qu'humaines. C'est pourquoi Livno doit

 26   porter la plus grande charge dans cette guerre."

 27   Alors, Docteur Jurcevic, quel serait votre commentaire par rapport à ce qui

 28   est affirmé ici, par rapport au mécontentement à Livno ?

Page 44815

  1   R.  Cela est tout à fait typique, et je cite un autre document dans mon

  2   rapport d'expert qui émane de Tomislavgrad et qui parle également de cette

  3   perception locale, de cette mentalité qui reviendrait presque à dire que

  4   l'on se considère comme étant le centre du monde, si je peux paraphraser

  5   peut-être les choses en simplifiant un peu d'un point de vue psychologique.

  6   Les gens estimaient donc que c'étaient eux qui portaient le plus grand

  7   poids et que personne d'autre ne faisait rien, et cela est également lié au

  8   manque de hiérarchie, au manque d'informations et d'interconnexions. Il n'y

  9   avait pas suffisamment d'informations qui circulaient, également une

 10   relation qui prévalait entre les différentes communautés et localités.

 11   Q.  Passons maintenant au document 4D 1298, s'il vous plaît. --

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Professeur, le document qu'on a sous les

 13   yeux, qui a été rédigé le 13 février 1993 par le commandant de la brigade,

 14   il s'appelle Stanko Vrgoc, quand il a écrit ce document, il ne savait

 15   certainement pas qu'un jour des Juges internationaux se pencheraient sur ce

 16   document. Partant de là, à  priori, ce document retrace une certaine

 17   vérité. Quand on se plonge dans ce document, l'impression qu'un juge

 18   raisonnable peut en tirer mais chacun peut en tirer des conclusions

 19   différentes. Mais quand on lit le document, on a le sentiment que lui

 20   restitue ce que les Croates de Livno pensent, à savoir qu'il y a un

 21   problème avec le fait qu'il y a beaucoup de Musulmans qui sont arrivés à

 22   Livno. Il dit qu'il y en a 7 500. Il indique que, dans les unités, il y a

 23   quasiment 33 % de Musulmans. Il explique, dans ce document, qu'il y a une

 24   ligne de front et que donc il ne convient pas d'envoyer des unités

 25   ailleurs. Puis il fait peut-être de l'humour puisqu'à la fin, vous avez vu

 26   qu'il a mis un salut militaire avec des points d'exclamation.

 27   Manifestement on peut peut-être penser que ce commandant de Livno, mais

 28   dans ce conflit musulman-croate, d'ailleurs il l'écrit à plusieurs

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  1   reprises, il y a un conflit mais il ne parle pas d'agression des Musulmans;

  2   il met en avant l'intérêt local et notamment la situation de Livno.

  3   Alors ce document, peut-être l'aviez-vous vu - je n'en sais rien - mais

  4   avez-vous vu d'autres documents qui tendraient à montrer ou à démontrer

  5   qu'en République de Bosnie-Herzégovine, il y avait peut-être la défense de

  6   l'intérêt local communal, plutôt qu'une défense patriotique à première vue.

  7   On s'occupait de son village, de sa ville, et puis le reste pouvait être

  8   secondaire.

  9   Alors qu'est-ce que vous en pensez, d'autant que vous nous avez dit tout à

 10   l'heure que vous aviez été à Bugojno voir votre oncle ? Donc vous avez un

 11   point de vue; pouvez-vous me répondre ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que vous avez

 13   formulé de façon particulièrement exacte la situation qui prévalait, à

 14   savoir qu'il y avait une sorte d'inversion dans la hiérarchie des valeurs

 15   entre l'importance que pouvait avoir le contexte global et l'importance que

 16   pouvait avoir les facteurs locaux. Donc j'estime qu'est-ce que vous venez

 17   de dire est tout à fait en accord avec ce qui est l'ensemble de l'analyse

 18   et des documents auxquels j'ai eu accès.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Deuxième question parce que, comme ce document sera

 20   exploité par les Juges dans toutes ses composantes, au deuxième paragraphe,

 21   il y a une petite mention qui peut poser problème. Il semble qu'il y ait

 22   une coordination de l'armée croate et du HVO. Livno est en bordure de la

 23   Croatie; est-ce que c'est cette situation géographique qui fait que là, il

 24   y a la mention de cette coordination, et si cette coordination existait,

 25   d'après vous, sous quelle forme ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Selon toute une série de documents, j'en ai

 27   cité à titre illustratif certains dans mon rapport, et conformément au plan

 28   et à la mise en œuvre opérationnelle de l'agression de l'Etat serbe contre

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  1   la Croatie et la Bosnie-Herzégovine sur le territoire de ces deux Etats

  2   indépendamment de leurs frontières, y compris avant leur reconnaissance

  3   internationale, tant de la Croatie que de la Bosnie-Herzégovine, cette

  4   dernière était et leur territoire était considéré comme un seul et même

  5   théâtre des opérations. Donc certains de ces documents figurent dans mon

  6   rapport d'expert, si bien que l'auto organisation de la défense sur le

  7   territoire de la HZ HB et de la HR Herceg-Bosna, et précédemment à cela,

  8   sur bien des parties du territoire croate, dépendait largement de la

  9   situation locale. Le territoire de Livno, et en général, les régions

 10   méridionales de la Croatie étaient d'une importance cruciale pour

 11   l'agression opérée par l'Etat serbe, et l'un des faits qui ressorte tout

 12   particulièrement de l'analyse de cette période, est que l'un des objectifs

 13   principaux sinon principal de l'agression de l'Etat serbe était de prendre

 14   possession d'autant du territoire côtier de la Croatie que possible, en

 15   République de Croatie. Donc les axes d'attaque traduisent cela puisqu'ils

 16   visaient l'arrière-pays de Zadar, les territoires entourant Ston et

 17   d'autres zones se situant autour de la vallée de la Neretva, allant du

 18   territoire de la Bosnie-Herzégovine vers le territoire de la République de

 19   Croatie. Donc ce type de coopération stratégique et militaire entre le HVO

 20   et la HV était tout à fait logique, et d'une certaine façon était imposé

 21   par l'agresseur.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation]

 23   Q.  Docteur Jurcevic, pouvez-vous nous dire si la municipalité de Livno est

 24   frontalière de la République de Croatie ?

 25   R.  La zone de Livno au sens large, oui.

 26   Q.  Alors si la VRS ou tout autre agresseur avait souhaité --

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, pouvez-vous

 28   répondre avec précision aux questions ? On vous a demandé : quelles étaient

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  1   les municipalités qui étaient contiguës avec Livno ? Donc pouvez-vous

  2   répondre à la question ? On vous demande si la municipalité a une frontière

  3   commune avec la Croatie, c'est la seule question qu'on vous a posée.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.  

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, j'avais compris que le

  6   témoin parlait de la ville de Livno au sens large, sans se référer

  7   nécessairement ou sans être au courant de tous les détails de la frontière.

  8   Q.  Alors, Docteur, si la VRS ou quiconque quelle qu'autre force avait

  9   souhaité mener une attaque dirigée contre les territoires de la République

 10   de Bosnie-Herzégovine ou de la République de Croatie, dans la zone de la

 11   Dalmatie centrale, quel aurait été le cheminement logique, par où serait-il

 12   passé ? Aurait-il logique de passer par la municipalité de Livno ?

 13   R.  Cela est indubitable et certains des plans de l'armée de l'Etat serbe

 14   ou plutôt des parties de la JNA qui étaient des forces armées de l'Etat

 15   serbe, je les ai examinés et ce sont des plans qui ont été mis en œuvre au

 16   moment de l'agression. J'ai souligné le fait que pour eux, de leur point de

 17   vue, tout ça constituait un seul et même théâtre des opérations pour

 18   différentes raisons.

 19   Q.  Est-il alors logique de conclure, Docteur que la Brigade de Livno en

 20   défendant le territoire de la municipalité de Livno défend par là même une

 21   partie du territoire de la République de Croatie ?

 22   M. SCOTT : [interprétation] Je soulève une objection à cette directive.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je préfère en rester à

 24   cette question directrice en vous laissant le soin d'en apprécier la valeur

 25   pertinente ou non.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, il était plus simple sans éviter le

 27   problème de la question directrice, lui dire, lui poser la question

 28   suivante :

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  1   Monsieur le Professeur, vous nous avez dit que vous avez regardé des plans

  2   d'attaque des Serbes. Quel était l'objectif stratégique poursuivi par les

  3   Serbes ?

  4   Réponse : Il aurait l'objectif était d'attaquer la République de

  5   Croatie via Livno pour occuper la Dalmatie et que ça mettait en péril la

  6   République de Croatie.

  7   Vous seriez arrivé à la même réponse.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Je

  9   voudrais juste dire une chose. Si je posais une telle question, en

 10   attendant cette réponse, selon moi, cette question présupposerait que la

 11   Brigade de Livno a défendu le territoire de Livno aux fins de défendre le

 12   territoire de la République de Croatie contre une agression potentielle de

 13   l'Etat serbe.

 14   Cependant, cela n'est pas ma question. Ma question est directement liée à

 15   l'extrait auquel vous vous êtes référé au sein de ce document où il est

 16   question de la défense de la Herceg-Bosna sur ces frontières occidentales,

 17   et partant de là, des territoires de la Croatie se situant au sud de la

 18   chaîne de la Dinara. Donc c'est le cheminement que je suis et c'est pour

 19   cela que j'estimais que c'était pertinent.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 21   M. SCOTT : [interprétation] Oui, ceci a à voir avec ce que j'avais dû

 22   soulever hier et vous savez qu'on m'a plus ou moins reproché de ne pas

 23   faire des objections individuelles. Or maintenant je vais en faire l'une

 24   après l'autre.

 25   Lorsqu'on pose une question ouverte à un témoin, le témoin doit donner une

 26   réponse et -- il paraît qu'il ne peut pas répondre que par oui ou par non.

 27   Il y a plusieurs questions directrices qui a été posées hier, ont été

 28   posées hier où le témoin a répondu par oui uniquement. Il a dit oui, je

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  1   suis d'accord. Donc cela ne sert à rien en fait, cela dit -- la Chambre dit

  2   l'Accusation ne sait pas exactement sur quelle base il se fonde pour donner

  3   ses réponses. Donc je poursuis mon objection et, comme hier, j'ai toujours

  4   la même opinion et je demanderais à la Chambre de première instance aussi

  5   de se pencher là-dessus. Lorsque le témoin dit quelque chose, il faut

  6   savoir sur quoi il se base pour le dire. Est-ce que c'est son opinion

  7   uniquement, ou est-ce qu'il s'est basé sur des faits ?

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Je tiens à dire quelque chose pour le compte

  9   rendu parce que je suis extrêmement perturbé par la façon dont cette

 10   Chambre de première instance considère que la Défense finalement n'est

 11   qu'un grand ensemble monolithique. On est tous mis dans le même sac, si je

 12   puis dire, en tout cas, si j'ai bien compris le commentaire du président.

 13   C'est ce que j'ai l'impression de comprendre, il semble nous dire que nous

 14   devrions tous faire les contre-interrogatoires pour la Défense de quelqu'un

 15   d'autre. Mais ce n'est pas correct. J'ai l'impression en fait que M. Scott

 16   se trompe parce que M. Scott semble vouloir traiter la Défense comme s'ils

 17   faisaient tous des interrogatoires principaux, et donc posez, posez des

 18   questions ouvertes.

 19   Je suis d'accord avec ce qu'a dit M. Scott. Il est vrai qu'hier certaines

 20   questions ont été directrices. Mais, moi, je ne veux pas être associé à ces

 21   questions directrices, ce n'est pas moi qui les ai posées, certainement

 22   pas. Cela dit, lorsque je ferai mon contre-interrogatoire, j'ai droit à des

 23   questions directrices, j'ai droit à poser des questions qui suggèrent la

 24   réponse et si j'ai besoin d'explications supplémentaires, je le ferai. Mais

 25   je ne veux pas que l'on m'oblige à poser des questions ouvertes dans le

 26   cadre de mon contre-interrogatoire. Il se peut que, par moment, je vais au-

 27   delà de ce qui a été dit dans l'interrogatoire principal et que je veux

 28   obtenir certaines informations positives. Dans ces cas-là, on en a déjà

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  1   parlé d'ailleurs mais, dans ces cas-là, en se basant sur un article du

  2   Règlement inspiré de ce qui se passe aux Etats-Unis, je pourrais peut-être

  3   poser des questions ouvertes. Mais dans le cadre de mon contre-

  4   interrogatoire, j'ai le droit de poser des questions directrices. Donc je

  5   ne considère pas que M. Scott ait posé une objection qui soit bien fondée.

  6   Cela dit, il a droit d'objecter, il a tous les droits d'objecter. Lorsqu'il

  7   objecte, lorsque nous objectons, il a droit à obtenir une décision de la

  8   part de la Chambre.

  9   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 10   avec votre permission, je serai très bref. Mon confrère ne cesse de

 11   soulever des questions par rapport à ce qui s'est passé hier. Je ne

 12   souhaitais pas en parler hier, j'estimais que c'était sans fondement mais

 13   il m'a rappelé à présent une chose. Nous ne sommes pas ici dans une

 14   procédure anglo-saxonne, et comme vous l'avez souligné à l'instant,

 15   Monsieur le Juge, notre Règlement de procédure et de preuve en vigueur ici

 16   n'a absolument aucune limitation supplémentaire qui s'appliquerait au

 17   contre-interrogatoire, si bien que tout repose sur la pratique, sur la

 18   jurisprudence qui nous fournit un cadre.

 19   Si bien que lorsque mon estimé confrère parle de cela, Me Karnavas,

 20   il n'y a pas ici d'applicabilité de ce que l'on nome les "Federal Rules of

 21   Evidence" les Règles fédérales de procédure et de preuve -- le Règlement

 22   fédéral de procédures et de preuves, nous n'appliquons pas. Si nous

 23   n'appliquons pas ces règles, nous ne pouvons pas non plus en appliquer

 24   d'autres.

 25   Ce que j'essaie de dire simplement, c'est qu'il y a un ensemble de

 26   règles qui s'appliquent à l'interrogatoire principal d'un témoin expert et

 27   c'est ce qui a été fait lorsque donc il s'agit d'un témoin expert qui a

 28   produit un rapport que tout le monde a pu lire, et cela diffère du type de

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  1   questions qui peuvent être posées à un témoin des faits; c'est ce qu'il en

  2   est en droit continental du moins.

  3   Ce qui a été dit hier, donc si mon confrère avait malgré tout des

  4   objections sans tenir compte du fait qu'il s'agit d'un témoin expert, s'il

  5   avait des objections du fait qu'il se serait agi de questions directrices,

  6   il aurait dû se lever immédiatement. Or, il s'en tient à la pratique anglo-

  7   saxonne alors que ce prétoire n'y est pas soumis.

  8   Merci.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de vous donner la parole, je tiens à

 10   rappeler que la Chambre a rendu des lignes directrices sur la question

 11   parce que vous imaginez bien que les Juges s'étaient posés tous ces

 12   problèmes que l'on vie réapparaître. Je rappelle que dans la décision du 24

 13   avril 2008, nous avions dit ceci :

 14   "Lorsqu'un sujet a déjà été abordé lors de l'interrogatoire

 15   principal, les questions directrices sont permises."

 16   Lorsqu'il s'agit d'un sujet nouveau qui n'a pas été abordé lors de

 17   l'interrogatoire principal, la Chambre a dit qu'il s'agit, à ce moment-là,

 18   d'un interrogatoire principal et non pas d'un contre-interrogatoire et que

 19   donc les questions directrices ne sont pas permises.

 20   Voilà. C'est dans la ligne directrice 3, paragraphe 8. Tout ceci est

 21   dans les lignes directrices. Donc le seul problème est de savoir : quand la

 22   question est posée, est-ce qu'il s'agit d'un sujet nouveau ou pas ? Tout le

 23   reste n'est que du bla-bla-bla.

 24   Monsieur Scott.

 25   M. SCOTT : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Me

 26   Karnavas et moi-même nous sommes en partie d'accord sur certains points ce

 27   matin. Il a dit quelque chose qui est très important à savoir, et je suis

 28   d'accord avec lui, dans un exemple classique de contre-interrogatoire

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  1   lorsqu'on conteste la déposition d'un témoin, s'il s'agit là d'un cas

  2   classique. Ça c'est une première chose, les questions directrices sont tout

  3   à fait appropriées dans ce cas-là.

  4   Encore une fois, je fais valoir que ce qui se passe ici n'est pas

  5   autre chose que l'audition d'un témoin tout à fait ordinaire. Me Alaburic

  6   n'est pas en train de remettre en doute le témoignage de ce témoin. Elle ne

  7   conteste pas ce que dit ce témoin; et c'est comme si c'était un

  8   interrogatoire principal, qui n'a une incidence sur l'Accusation parce que

  9   la Chambre ne me donne pas un temps supplémentaire pour poser ces questions

 10   et je ne lui en veux pas pour cela, il s'agit simplement de l'extension ou

 11   la poursuite de l'examen principal, et à proprement parler, parce que si

 12   elle avait dit au témoin ce que vous -- la question que je vous pose -- si

 13   elle avait posé cette question au témoin en disant : je vous pose cette

 14   question, et un autre témoin a dit autre chose et ce qui mettrait en doute,

 15   ce qui récuserait votre déposition, mais elle ne fait rien de la sorte.

 16   C'est une question qui correspond simplement à la suite de l'interrogatoire

 17   principal dans lequel on pose des questions directrices qui ne sont pas

 18   appropriées et l'Accusation devrait avoir le temps d'y répondre. Voilà

 19   notre position. Je vous remercie.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Je ne vais pas répondre et répliquer à ce

 21   qui vient d'être dit parce que nous avons que M. Scott ne réagit à chaque

 22   fois qu'il y a un contre-interrogatoire.

 23   Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de commencer à faire -- à commenter

 24   ce que M. Scot a dit.

 25   Je dirais que nous avons des contre-interrogatoires et nous avons le droit

 26   de poser des questions en contre-interrogatoire à toutes les parties du

 27   rapport d'expert du Dr Jurcevic, indépendamment du fait de savoir si les

 28   autres conseils de la Défense ont eu des questions à poser ou pas. Donc mon

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  1   contre-interrogatoire, je peux le fonder sur des parties du rapport que Me

  2   Kovacic n'a pas mentionné du tout. Cela ne signifie pas que je sors du

  3   sujet de l'interrogatoire principal.

  4   Deuxième élément que je voulais souligner, au sujet des nouveaux sujets

  5   évoqués lors du contre-interrogatoire, je dirais que la Défense du général

  6   Petkovic estime que tout sujet entamé par les questions des Juges, ça

  7   devient un sujet pertinent pour un contre-interrogatoire, et ça ne peut pas

  8   être considéré comme étant un nouveau sujet.

  9   Etant donné que le Juge Antonetti a posé la question d'évocation de l'armée

 10   croate dans la deuxième partie du document que nous avons mentionné, j'ai

 11   estimé nécessaire de poser des questions complémentaires pour parachever

 12   l'étude du sujet pour qu'on voit bien qu'il ne s'agit pas d'une armée

 13   croate sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine mais qu'il s'agit d'une

 14   arme croate évoquée dans un contexte tout à fait autre.

 15   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demanderaient à Mme Alaburic de ralentir son

 16   débit, de grâce.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation]

 18   Q.  Passons au sujet suivant, 4D 1298. Il s'agit d'un document que

 19   l'adjoint du responsable du département à la Défense, en septembre 1993,

 20   communique au responsable de ce département. Il s'agit d'une information et

 21   de réflexion liées au comportement des gens de Livno, pour ce qui est donc

 22   du rapport Herceg-Bosna et municipalité, donc habitants de Livno pour ce

 23   qui est des relations entre l'Herceg-Bosna et les municipalités. Alors il y

 24   a quelques avertissements. L'Herceg-Bosna n'intéresse pas beaucoup les gens

 25   de Livno et ils prennent de façon accentuée soin de leur municipalité.

 26   Leur patriotisme ne va pas plus loin que les frontières de leurs

 27   municipalités et ils ne ressentent pas la nécessité d'aller se battre.

 28   Ensuite ils disent qu'ils ne sont pas d'accord avec les ordres donnés par

Page 44826

  1   l'état-major principal pour ce qui est du déplacement des pièces

  2   d'artillerie vers les champs de bataille.

  3   Puis ils protestent aussi du fait des mobilisation et de la prise de leurs

  4   unités pour la construction de routes, et au final, il est dit que toutes

  5   les armes et toutes les pièces de l'artillerie sont considérées comme étant

  6   la propriété de Livno et que les ordres de l'état-major principal ne

  7   seraient les faire transférer vers d'autres théâtres de combat.

  8   Alors, Docteur Jurcevic, est-ce que vous pouvez commenter ce document.

  9   R.  C'est encore l'un de ces documents typique qui confirme ce qu'on a déjà

 10   étudié sur des aspects divers et dont je parle dans mon expertise.

 11   Autrement dit, c'est précisément ce que les Juges, en posant leurs

 12   questions à ce sujet, ont constaté et ces documents le confirment, à savoir

 13   ces communautés locales qu'il s'agisse, de Livno ou autres, importent le

 14   plus aux yeux de ces gens, du point de vue militaire et autre. Ici c'est un

 15   rapport émanant d'une autorité centrale, qui confirme sans équivoque ce qui

 16   se passait à tous les niveaux, comme l'a constaté M. le Juge; c'est une

 17   espèce de patriotisme qui est perçu comme étant un dû vis-à-vis de la

 18   communauté locale, et il découle clairement de ce qui vient d'être dit,

 19   c'est perçu comme étant tout à fait normal que de refuser les ordres

 20   arrivant de l'état-major principal, chose qui est impensable d'envisager et

 21   encore moins de rédiger dans quelques structures que ce soit du moins

 22   organisé et aménagé.

 23   Q.  Docteur, penchons-nous sur le document suivant, 4D 1328. Je répète le

 24   numéro 1328. Oui, maintenant c'est bon.

 25   Il s'agit d'une démission présentée auprès du chef de l'état-major Anto

 26   Roso. C'est daté du mois de décembre 1993, et dans l'exposé de motifs, on

 27   dit que la démission est présentée en raison de vos positions des autorités

 28   locales et d'un groupe informel de personnes puissantes qui ont pris racine

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  1   dans le dos du commandement de la brigade et c'est la raison pour laquelle

  2   il est procédé à sa démission. Ces gens donc ce groupe de personnalités

  3   puissantes estiment que tout est plus important. Je pense que la traduction

  4   n'est pas bonne. Donc je vais répéter ma dernière phrase :

  5   "Ces gens et ce groupe de personnalités puissantes estiment que tout

  6   est plus important. Le profil de guerre et la rivalité locale que la

  7   défense de la patrie."

  8   Docteur Jurcevic, est-ce que vous pouvez commenter ce document, je vous

  9   prie ?

 10   R.  C'est un document typique qui ne fait que confirmer ce qu'on a dit

 11   jusqu'à présent, en quelque sorte, ceci définit exactement la situation du

 12   point de vue politique et sociologique, la situation est celle dans la

 13   décomposition d'un système et de l'absence de la mise en place d'un nouveau

 14   système. Donc c'est une crise institutionnelle où tous les éléments

 15   négatifs dans les agissements, les égoïsmes notamment, les délits au pénal,

 16   la corruption, le népotisme, la moralité, l'absence de moralité, et tout ce

 17   que j'ai dit au sujet de cette Communauté croate et de ses carences, il en

 18   va de même pour ce qui est de la partie finale où il est question de la

 19   République croate d'Herceg-Bosna. J'ai pris la somme de mes conclusions par

 20   rapport à ce type de document pour tirer des conclusions et j'ai qualifié

 21   la chose de carence ou d'absence de qualité d'élément qualitatif. Cela

 22   témoigne de la situation réelle sur le territoire de la Communauté croate

 23   d'Herceg-Bosna tant du point de vue civil que du point de vue du secteur

 24   militaire de la vie, donc il s'agit de la disparition d'une forme

 25   d'institution au niveau de l'ABiH, où on essaie de mettre en place de

 26   nouvelles institutions, mais je ne dirais pas qu'on ne réussit pas du tout,

 27   mais on réussit dans une très faible mesure. Comme vous l'avez dit vous-

 28   même, nous sommes là en décembre 1993, donc il s'est passé beaucoup de

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  1   temps il s'est passé plus de deux ans depuis la décision de créer la

  2   Communauté croate, et maintenant on a affaire à la République croate

  3   d'Herceg-Bosna, donc même les problèmes initiaux de la mise en place des

  4   systèmes civils et militaires ne fonctionnent pas indépendamment du fait

  5   que la gazette populaire présente bien les choses, ça sonne bien, et on ne

  6   pourrait croire qu'il s'agit d'une organisation définie, déterminée avec

  7   une chaîne hiérarchique. Mais on voit que la caractéristique principale

  8   c'est la déroute et ceci constitue la conséquence de la situation générale

  9   qui se présente sur ce territoire.

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètes redemandent à ce qu'il soit ralenti, que les

 11   intervenants ralentissent.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Jurcevic, vous parlez de la doctrine de la défense populaire

 14   généralisée et de l'autoprotection civile; ça se trouve dans le chapitre 1,

 15   paragraphe 312.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder cela, Monsieur le Professeur, tout à

 17   l'heure quand je vous ai posé la question, j'ignorais les deux derniers

 18   documents qu'on vient de voir. J'ignorais totalement parce que je ne les

 19   avais pas regardés. Je regarde document par document, et donc ma question

 20   n'avait pas pris en compte ce document. Ayant maintenant pris en compte ce

 21   document, j'aurais été amené à vous poser la même question mais, là, je

 22   vous demande un complément.

 23   Vous dites -- vous avez dit là, il y a quelques instants, "c'est la

 24   déroute." Qu'est-ce que vous voulez dire en disant cela ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Enfin, je ne sais pas comment on vous a

 26   traduit la chose. J'ai dit : c'était une situation typique où un type

 27   d'institution cesse d'exister sur un territoire et les autres formes

 28   d'institutions essayent de se mettre en place mais elles ne sont pas encore

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  1   mises sur pied et c'est une situation chaotique. Mais scientifiquement

  2   parlant, on parle d'absence de structures d'un système et ceci constitue la

  3   conséquence, la séquelle de cette situation; et bien que vous ayez précisé

  4   que vous n'aviez pas vous ces documents mais partant d'autres documents que

  5   vous avez probablement eu l'occasion de voir dans ce procès, vous avez tiré

  6   la conclusion que j'ai confirmé à part entière en disant qu'elle était tout

  7   à fait exacte et j'ai tiré les mêmes conclusions partant de mes propres

  8   recherches.

  9   Je suis donc d'accord avec vous pour dire que ceci est la conséquence de la

 10   façon dont on perçoit la communauté locale comme la fin de l'intérêt porté

 11   de tout un chacun par rapport à ce qui se trouve, ce qui se produit sur le

 12   territoire et à l'horizon du reste.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation]

 14   Q.  Docteur Jurcevic, je me proposais de vous poser plusieurs questions au

 15   sujet de la doctrine de la défense population généralisée de

 16   l'autoprotection civile. Vous avez dit, dans votre rapport d'expert, que

 17   c'est une doctrine développée pendant la période allant de 1969 à 1974.

 18   Est-ce que vous savez nous dire suite à quels événements il a été mis sur

 19   pied cette doctrine de défense population généralisée ? Que s'est-il passé

 20   un an avant cela, donc au niveau mondial ? Nous parlons de 1968.

 21   R.  Il n'y a pas que les événements de la Tchécoslovaquie où l'Union

 22   soviétique est intervenue militairement, mais il y a aussi des raisons

 23   internationales qui ont fait adopter cette conception de défense population

 24   généralisée d'autoprotection civile en Yougoslavie. Il est certain que cela

 25   a été l'une des causes, mais il y a eu d'autres causes qui sont celles de

 26   la crise interne de la deuxième Yougoslavie et qui étaient présentes avant

 27   même, donc depuis cinq ou six ans déjà. Depuis 1965 et au-delà du fait de

 28   la crise économique, la Yougoslavie a ouvert ses frontières et un grand

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  1   nombre de citoyens yougoslaves sont partis travailler à l'étranger.

  2   En 1966, il y a eu un grand règlement de comptes interne qui est connu

  3   symboliquement parlant entre -- enfin, comme étant un règlement de comptes

  4   entre Tito et Rankovic. Rankovic ayant été le chef de la police et des

  5   services secrets. Puis, en 1967, lorsqu'il s'agit de la Croatie, il y a eu

  6   cette déclaration relative à la langue littéraire croate. Ça a soulevé

  7   toute une tempête et cela a été déclaré comme étant une contre-révolution

  8   et une activité hostile au pays. Puis si l'on ajoute les événements de la

  9   Tchécoslovaquie, il y a eu cet élément international, la peur de voir

 10   l'Union soviétique pour des raisons X ou Y intervenir en Yougoslavie aussi.

 11   Tout ceci a donc été autant de raisons pour ce qui est de l'adoption de

 12   cette conception de la défense population généralisée d'autoprotection

 13   civile. J'ai cité ici des experts yougoslaves qui ont rédigé l'histoire de

 14   la Yougoslavie et l'histoire de la Ligue des Communistes de Yougoslavie qui

 15   ont dit eux-mêmes que :

 16   "Cette conception avait été promulguée dans l'esprit de la conception

 17   marxiste du peuple armé. Et toute partie de la Yougoslavie devait être un

 18   front et chaque habitant devait devenir un combattant."  

 19   Donc, j'ai cité ce qui a été dit dans la constitution de 1974. Donc, le

 20   concept que j'ai mentionné a commencé à être mis sur pied en 1969, mais ça

 21   a été formulé qu'au final, dans la constitution de 1974.

 22   Q.  Dites-nous, Docteur Jurcevic, si vous vous en souvenez pour ce qui est

 23   de l'ex-Yougoslavie, à quel âge a-t-on commencé à être formé tout un chacun

 24   d'entre nous pour être prêt à défendre le pays ?

 25   R.  En termes pratiques, je dirais à titre symbolique que c'est depuis la

 26   naissance, c'est-à-dire dès l'école primaire et à l'école secondaire, à

 27   l'université, il y avait ce qu'on appelait la formation préalable au

 28   service militaire. C'était enseigné par des experts qui ont fait des études

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  1   de défense ou d'autoprotection civile. Puis il y a eu des actions de

  2   protection civile, puis il y a eu des entraînements à l'autoprotection

  3   civile qu'on appelait NMNI [phon], à savoir rien ne saurait nous

  4   surprendre. C'est là que les citoyens étaient censés de façon massive

  5   participer à des activités, je dirais, dénuées de sens. A titre d'exemple,

  6   pour vous illustrer l'absurdité de ce type d'activités qui se sont

  7   déroulées, par exemple, à Split et ça a été annoncé pendant des mois, ça a

  8   été médiatisé par toute la presse, et lorsque l'action devait être, enfin,

  9   devait avoir lieu, rien ne saurait nous surprendre, eh bien, les journaux

 10   ont dit que ça a été reporté à plus tard du fait de la pluie.

 11   Q.  Docteur, vous nous avez dit, enfin, vous avez parlé de cette formation.

 12   Mais est-ce que dans toutes les entreprises, dans tous les établissements

 13   de l'Etat, il y avait également des gens formés pour la défense populaire

 14   généralisée et qui préparaient des plannings pour temps ou situation de

 15   guerre ? Donc, savez-vous nous dire s'il y avait des plans de ce type dans

 16   les entreprises de l'Etat, dans les établissements, dans les différents

 17   services et départements ?

 18   R.  La partie principale du concept s'appuyait sur la Défense territoriale,

 19   qui constituait une espèce d'armée au niveau de la République pour ce qui

 20   est de la coordination et pour ce qui est de la filière de commandement. Je

 21   vais cite la constitution. La citation est brève et vous comprendrez de

 22   quoi il s'agit. Donc, on fait participer la totalité du système économique

 23   et administratif à la chose, la constitution yougoslave de 1974 dit :

 24   "Il relève du droit et des obligations des municipalités des provinces

 25   autonomes des républiques, ainsi que des autres communautés sociopolitiques

 26   de faire en sorte que sur chaque territoire concerné, il soit procédé à

 27   l'aménagement et à l'organisation de la défense populaire, ainsi qu'à

 28   l'administration de la défense populaire, de l'autoprotection civile et

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  1   autres préparatifs à effectuer en vue de la défense du pays."

  2   Q.  Docteur Jurcevic, pouvez-vous nous parler de Zagreb ? A quelle faculté

  3   a-t-on organisé ces études de défense populaire généralisée ?

  4   R.  A la faculté des sciences politiques de Zagreb, il y avait une filière

  5   à part qui s'appelait le ONODSZ [phon], à savoir défense populaire

  6   généralisée, autoprotection civile. A l'époque, je faisais des études de

  7   sciences po et je suis parfaitement au courant de la façon dont ça se

  8   passait.

  9   Q.  Est-ce que vous savez nous dire pendant quelle année on a procédé à une

 10   première inscription des partants, des étudiants en première année de la

 11   défense populaire généralisée, autoprotection civile ? 

 12   R.  Non, je ne sais pas vous le dire.

 13   Q.  Peu importe. Penchez-vous sur le 4D 1603.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] 4D 1603.

 15   Il s'agit d'un document émanant de l'ABiH, des instructions pour ce qui est

 16   de l'édification et du renforcement du moral au combat de l'ABiH. A cet

 17   effet, dans ce contexte, Docteur, je voudrais que nous nous entretenions

 18   quelque peu au sujet de la conception qui était celle de la Bosnie-

 19   Herzégovine en matière de la défense.

 20   Au paragraphe 1 de ce document, donc chapitre 1, paragraphe 1, on parle de

 21   l'immunité de toutes les composantes de la lutte armée, de la résistance

 22   armée. Il est question de l'unité de la totalité des composantes de la

 23   lutte armée et d'autre part de la résistance armée. Donc il y a deux

 24   éléments de la défense en présence. Dans la parti numéro 2, il est question

 25   de ce qui suit; je vais citer et je crois que ce sera plus simple.

 26   "Une importance particulière est revêtue pour ce qui est de l'édification

 27   et du renforcement du moral au combat ainsi que pour l'Unité de l'armée et

 28   de la population sur la base des traditions de la Bosnie-Herzégovine et de

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  1   sa population. Cette tradition est développée et consolidée au travers de

  2   préparatifs conjoints du peuple et d'armée en vue de la défense du pays."

  3   J'enchaîne :

  4   "Par le biais d'efforts généraux, l'assistance de la population à

  5   l'égard de l'armée pour ce qui est de la sécuriser sur le plan matériel,

  6   pour ce qui est de recevoir et soigner les blessés et les malades, pour ce

  7   qui est de la collecte d'information portant sur l'ennemi, pour ce qui est

  8   de déceler et d'entraver les activités des agents ennemis, des provocateurs

  9   et des saboteurs sur le terrain, sur les différents terrains."

 10   J'ai dit provocateurs et saboteurs sur le terrain.

 11   "Pour ce qui est aussi de sécuriser les installations importantes,

 12   les sources d'approvisionnement, pour ce qui est de la participation à la

 13   fortification et construction, fortification dans le territoire et autres

 14   activités."

 15   Or, Docteur Jurcevic, dites-nous : la lutte ainsi définie au niveau

 16   de l'armée et du peuple, constitue-t-elle la concrétisation de la défense

 17   populaire généralisée ?

 18   R.  C'est exact. C'est l'une des formes de ce système de la défense

 19   populaire généralisée d'autoprotection civile. Il y avait toute une série

 20   d'éléments constituant.

 21   Q.  Maintenant je voudrais passer au fait de savoir si la direction

 22   politique et militaire  musulmane avait appuyé le plan Vance-Owen ainsi que

 23   les autres initiatives de paix proposées par la communauté internationale.

 24   Sautons un document donc et penchons-nous sur le 4D 1235, 4D 1235. Il

 25   s'agit d'un document daté du 10 janvier 1993. Il est envoyé par le

 26   commandant du 3e Corps de l'ABiH -- ou plutôt, il s'agit d'un communiqué à

 27   l'occasion des négociations qui ont eu lieu à Genève. Ici, le commandant de

 28   ce 3e Corps dit :

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  1   "A l'occasion de la poursuite des négociations politiques à Genève, et

  2   suite à des demandes formulées par un nombre énorme d'unités de combattants

  3   du 3e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine, nous vous apportons notre

  4   soutien sans réserve aux efforts déployés en vue d'empêcher tout partage de

  5   la Bosnie-Herzégovine sur des bases ethniques ou autres."

  6   Docteur Jurcevic, est-ce que vous pouvez commenter ce document dans le

  7   contexte des négociations de paix à Genève ? Ça fait partie de votre

  8   rapport d'expert et pouvez-vous nous dire quelle était la proposition

  9   d'actualité à l'époque, à savoir que la Bosnie-Herzégovine devrait être

 10   partagée en dix cantons pour être primordialement, pour traduire

 11   primordialement et non pas uniquement les critères ethniques de la

 12   population de ces cantons ?

 13   R.  Le plan Vance-Owen, avant que son concept ne soit publié en début 1993,

 14   est un plan qui a été élaboré pendant des mois. L'opinion publique savait

 15   qu'il s'agissait d'une espèce de partage de la Bosnie-Herzégovine en sept

 16   ou dix provinces ou régions. Ceci constitue une réaction à ce type de

 17   document.

 18   Alors de là à savoir si c'était spontané ou organisé, s'agissant de

 19   ce document, je ne sais pas vous le dire, moi. Mais toujours est-il que

 20   tous les plans de paix ont suscité de grosses réactions à tous les niveaux

 21   du pouvoir et de la population. Parce que ces différentes initiatives

 22   modifiaient dramatiquement l'approche qu'on avait au système d'organisation

 23   de la Bosnie-Herzégovine.

 24   Q.  Penchons-nous maintenant sur le 4D 76. Il s'agit d'un document daté du

 25   mois de février 1993. Il s'agit d'une information émanant du IPD du 4e

 26   Corps et communiquée à l'intention des brigades faisant partie du corps en

 27   question, et il y est procédé à l'interprétation des négociations qui se

 28   sont déroulées à Genève et à New York.

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  1   Au paragraphe 1, il est dit, je cite :

  2   "La participation active de Etats-Unis d'Amérique aux négociations Vance-

  3   Owen constitue une qualité, une amélioration qualitative pour ce qui est du

  4   renforcement des pressions à l'égard de l'agresseur."

  5   Au paragraphe 2, il est dit :

  6   "Les pays de l'Europe et des Etats-Unis d'Amérique n'ont pas l'intention de

  7   participer militairement au théâtre de combat en Bosnie-Herzégovine dans un

  8   avenir proche, c'est-à-dire jusqu'au moment où, d'après eux, il y aurait

  9   des chances de voir la guerre en Bosnie-Herzégovine prendre fin par des

 10   moyens diplomatiques."

 11   Au paragraphe 4, on dit :

 12   "S'attendre à une solution apportée de l'extérieur, pourrait influer de

 13   façon négative sur le moral au combat des membres de l'armée de Bosnie-

 14   Herzégovine. Raison pour laquelle il est indispensable de procéder dans

 15   l'accomplissement des missions au quotidien par les soins de tous les

 16   membres du commandement et des états-majors de l'ABiH une mise au service

 17   de façon active pour répondre aux obligations du combat armé, et les

 18   suspensions éventuelles des activités de combat seront utilisées pour des

 19   préparatifs en vue des activités à venir."

 20   Alors on dit qu'ici l'Europe et les Etats-Unis n'ont pas l'intention de

 21   s'immiscer militairement dans les combats en Bosnie-Herzégovine tant qu'il

 22   y a des chances de trouver des solutions diplomatiques.

 23   Comment interprétez-vous cette observation émanant des instances de

 24   l'ABiH ?

 25   R.  Ceci découle des expériences qui ont été les leurs jusque-là, et, de

 26   façon évidente, comme on l'a dit hier, tout plan de paix international ne

 27   saurait être mis en œuvre, sans qu'il y ait imposition d'une façon ou d'une

 28   autre.

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  1   D'autre part, les événements en 1992, notamment de la deuxième moitié de

  2   1992, n'a fait que confirmer cette situation. Il y a toute une série de

  3   conférences internationales, bien des documents avec des promesses et de

  4   gros discours. Mais en termes pratiques rien ne se passait. L'agression

  5   serbe ne faisait que croître contre la Bosnie-Herzégovine. Donc ceci est un

  6   document qui se réfère à l'expérience acquise jusque-là.

  7   Q.  Docteur Jurcevic, d'après vous, la direction politique et militaire

  8   musulmane avait-elle souhaité une intervention armée de la part de l'Europe

  9   et des Etats-Unis d'Amérique ?

 10   R.  Oui, cela découle de leur revendication. Dès 1991, je l'ai déjà dit,

 11   Alija Izetbegovic et son gouvernement, gouvernement de Bosnie-Herzégovine,

 12   avait lancé des appels en vue de l'envoi d'observateurs militaires. En

 13   1992, il y a eu toute une série d'appels ou de demandes ou similaires pour

 14   que cela se passe. Donc c'est une continuité, et la partie la plus faible,

 15   et en tout état de cause, c'était les autorités centrales de la Bosnie-

 16   Herzégovine ou plutôt les structures bosno-Herzégoviennes et musulmanes

 17   avaient souhaité demander et réclamer une intervention internationale.

 18   Q.  Docteur, dans le contexte de ce paragraphe 2, où il est question

 19   d'intervention armée et de moyens diplomatiques, quelle est votre

 20   conclusion ? A quel moment serait-il réaliste de s'attendre à une

 21   intervention de la part de l'Europe et des Etats-Unis compte tenu du

 22   paragraphe 2, que découle-t-il de ce paragraphe 2 ? Quand serait-il

 23   réaliste de s'attendre à une intervention militaire ?

 24   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'en peuvent plus de cette vitesse. Ils

 25   demandent que l'on ralentisse.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Je ne vous demande pas personnellement.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, ralentissez, parce que les

 28   interprètes lèvent le carton jaune. Vous allez trop vite.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation]

  2   Q.  Donc Docteur, je ne vous demande pas votre opinion personnelle, mais ce

  3   que vous pensez de ce qu'il découle de ce point 2, qu'avait à l'esprit la

  4   personne qui a rédigé ce point 2 dans ce document ?

  5   R.  Il ressort du document ce qui est écrit explicitement à savoir c'est

  6   écrit au milieu que l'on ne s'attend pas à ce que cela se produise

  7   prochainement, et tant qu'il existe une possibilité donc d'une résolution

  8   diplomatique c'est une notion très mal définie, cela peut durer

  9   indéfiniment.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, il me semble qu'il est

 11   temps de faire la pause.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Il doit vous rester 45 à 50 minutes. Bien. On fait

 13   une pause de 20 minutes.

 14   --- L'audience est suspendue à 10 heures 33.

 15   --- L'audience est reprise à 10 heures 56.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation]

 18   Q.  Docteur Jurcevic, nous allons encore nous attarder un petit peu sur les

 19   documents émanant de la partie bosnienne musulmane dans les affrontements.

 20   Je pense que cela nous permettra de mieux comprendre également les

 21   agissements de la partie croate.

 22   Reportons-nous au document 4D 766, s'il vous plaît. Il s'agit d'une

 23   proposition de mesures visant à organiser la guerre de libération populaire

 24   généralisée, préparée par le commandement Suprême des forces armées de

 25   l'ABiH, en mai 1993.

 26   Je voudrais attirer votre attention sur certaines parties de ces

 27   propositions, je vous demanderais de commenter.

 28   Au second paragraphe, il est dit, je cite :

Page 44839

  1   "On voit un tournant décisif dans la position prise par les grandes

  2   puissances concernant l'agression commisse à l'encontre de la République de

  3   Bosnie-Herzégovine cela montre qu'il faut organiser la défense de l'Etat et

  4   la défense du peuple et la conduire en s'appuyant sur nos propres forces.

  5   Par rapport à la situation telle qu'elle existait jusqu'à présent et au

  6   comportement jusqu'à aujourd'hui, cela sous-entend que l'on combatte avec

  7   détermination toute illusion concernant une éventuelle intervention

  8   militaire extérieure en tant que facteur décisif de l'arrêt de cette

  9   agression contre la République de Bosnie-Herzégovine et il y a nécessité de

 10   passer à un modèle qui serait un modèle de guerre tout comme il faut passer

 11   à une mobilisation maximale de tous les segments et potentiels de l'Etat en

 12   raison de sa propre survie."

 13   Monsieur Jurcevic, pouvez-vous commenter cela dans le contexte de certaines

 14   décisions stratégiques prises par la partie bosnienne musulmane aux

 15   affrontements ?

 16   Branchez votre micro.

 17   R.  Il ressort de ceci que l'on a cessé de croire et de s'attendre à une

 18   intervention militaire de la communauté internationale, cela montre que les

 19   structures des Bosniens Musulmans qui étaient au pouvoir ont décidé

 20   qu'elles devaient désormais passer à un modèle de guerre, et se concentrer

 21   sur cet aspect.

 22   Q.  Passons maintenant le premier court alinéa de la première page. C'est

 23   en page 2 de la version anglaise. Donc que propose-t-on. Je cite :

 24   "Il faut en ce moment décisif mobiliser et unifier toutes les forces

 25   politiques, les parties, les associations, les mouvements et les citoyens

 26   au sein d'un front patriotique, et en lieu et place de la stratégie qui a

 27   prévalu jusqu'à présent stratégie de victimisation et de demande d'aide sur

 28   cette base, il faut sur la base précédemment citée construire un esprit

Page 44840

  1   combatif fort appuyé sur nos propres forces et assurer un soutien à l'ABiH

  2   dans son combat pour la défense de la souveraineté et de l'intégrité

  3   territoriale de notre pays et la défense du peuple contre de nouveaux

  4   programmes."

  5   Docteur, je voudrais vous demander de commenter cette partie de cette

  6   citation par rapport à la stratégie qui avait été suivie jusqu'alors, qui

  7   consistait à construire l'image d'une victime demandant une aide externe,

  8   la direction bosnienne musulmane; vous êtes donc [inaudible] cette

  9   stratégie par rapport à ses relations avec la communauté internationale et

 10   les autres parties au conflit, n'est-ce pas ?

 11   R.  Cette stratégie de victimisation est lisible à partir de la perception

 12   médiatique et la perception en général des Bosniens musulmans au sein de la

 13   communauté internationale au cours des périodes précédentes, donc seconde

 14   période de l'année 1992 et notamment aussi la première partie de l'année

 15   1993; on a vu alors surgir un grand nombre d'informations concernant

 16   l'existence de camps et d'atrocités dans les médias. Les Bosniens musulmans

 17   faisaient alors l'objet de la plus grande attention; ils étaient au centre

 18   de l'attention diplomatique et de l'attention des médias. Il faut peut-être

 19   aussi souligner que ce document a été élaboré immédiatement après que l'on

 20   a définitivement renoncé au plan Vance-Owen, après l'échec de celui-ci,

 21   après que la partie serbe le 19 mai a déclaré ouvertement qu'elle le

 22   rejetait en tant que décision finale.

 23   Q.  Docteur, alors dans le contexte de cette stratégie de victimisation,

 24   reportons-nous à la seconde page à ce paragraphe qui est le plus long. Cela

 25   correspond à la page 3 en version anglaise et c'est cette section qui a

 26   trait au ministère de l'information, donc on propose ici un certain nombre

 27   d'activités qui seraient à la charge du ministère de l'Information de la

 28   Bosnie-Herzégovine, y compris les activités de la radio et de la

Page 44841

  1   télévision, et c'est vers le milieu du paragraphe que l'on dit, je cite : 

  2   "Il est indispensable de procéder à une action auprès des auteurs de

  3   programmes et il faut qu'ils prennent conscience de la nécessité de

  4   renoncer à un certain nombre de clichés revenant à décrire des victimes --

  5   décrire les victimes et les souffrances, et d'éviter cette -- la

  6   présentation de notre propre armée en se sens et de notre propre combat

  7   pour la liberté sous ce seul angle."

  8   Alors, Monsieur Jurcevic, pouvez-vous commenter cette qualification qui est

  9   faite du programme de la télévision et de la radio de l'Etat, au sens où

 10   ils auraient montré des souffrances dans le cadre de la stratégie

 11   précédemment citée de victimisation ?

 12   R.  Etant donné que les institutions sont sous le contrôle de la majorité

 13   musulmane bosnienne qui assurent le pouvoir, la direction, la stratégie en

 14   œuvre était de procéder à une guerre psychologique au sein de cette

 15   stratégie il s'agissait de s'affirmer en tant que victime.

 16   Peut-être est-il intéressant de faire état d'un fait dans ce contexte qui

 17   est le suivant : à l'époque on assiste à des conflits à l'intérieur de la

 18   direction musulmane bosnienne en raison de ce que nous appelons

 19   l'islamisation de l'armée dans le cadre de laquelle on assiste à des

 20   changements de certains -- des mises à pied de certains cadres et certaines

 21   personnalités éminentes de la vie politique, par exemple, Rusmir Ahmet

 22   Cehajic ne souhaite plus participé à cela.

 23   Q.  Très bien. Je voudrais, Docteur Jurcevic, que nous examinions certains

 24   plans qui étaient ceux de la direction politique bosnienne musulmane, et

 25   ceci avant tout au travers des procès-verbaux des réunions de la présidence

 26   de la Bosnie-Herzégovine. Reportez-vous donc, s'il vous plaît, au document

 27   numéro 4D 1118. Nous allons commencer avec la page 7 de la version B/C/S

 28   croate ou bosniaque peu importe, cela correspond en version anglaise à la

Page 44842

  1   page qui se termine avec le numéro e-court 1446. Donc le numéro de cette

  2   page dans le système e-court se termine par les chiffres 1446, et c'est le

  3   dernier paragraphe qui figure dans cette page.

  4   Stjepan Kljuic dit ici, je cite :

  5   "Manifestement alors excusez-moi, je dois encore préciser quelle est la

  6   date de cette réunion. C'est la date du 26 novembre 1993, et Stjepan Kljuic

  7   dit ici, je cite :

  8   "Il est évident que Genève -- c'est à Genève que l'on doit trouver la

  9   solution à la question, une solution à la question de la survie d'un point

 10   de vue humanitaire et non seulement et non pas uniquement pour cet hiver

 11   car les négociations concernant la Bosnie-Herzégovine pourraient bien durer

 12   cinq ans. Il faut également trouver une solution définitive et ce par la

 13   force, nous devons insister et nous avons en la matière le soutien

 14   d'Europe."

 15   Je saute quelques lignes et je poursuis la citation. Je cite :

 16   "Nous devons --

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] S'il vous plaît, pourriez-vous nous

 18   dire exactement où est le passage dont vous avez donné lecture car je ne

 19   l'ai pas trouvé ?

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, voilà nous avons établi

 21   dans l'intervalle que je me suis trompée de page. La page e-court ne se

 22   termine pas par 1 446 dans son numéro mais 1 447. C'est donc la page

 23   suivante.

 24   C'est en milieu de page. Ce sont les propos tenus par Stjepan Kljuic.

 25   1447 c'est donc la fin du numéro de page dans le prétoire électronique en

 26   version anglaise.

 27   Alors si nous avons bien tous retrouvé le passage exact, je continue

 28   de citer les propos de Stjepan Kljuic, je cite :

Page 44843

  1   "Nous devons entreprendre une action de préparation dans une solution

  2   globale, la position formelle est que la Conférence de Genève n'a pas été

  3   couronnée de succès. Une nouvelle conférence est en préparation suite à

  4   cela et en principe les médiateurs devront eux aussi se retirer."

  5   Alors, Docteur, à votre connaissance, y a-t-il réellement eu des tentatives

  6   visant à écarter M. Stoltenberg et Lord Owen des négociations ? Avez-vous

  7   quelques éléments d'information à ce sujet que ce soit ?

  8   R.  Aujourd'hui, cela est évident sur la base des documents fondamentaux et

  9   du sort qui a été celui du plan Owen-Stoltenberg; c'était le plan de paix

 10   qui avait fait l'objet du plus grand nombre de variantes proposées et les

 11   événements eux-mêmes le montrent. Lorsque la Conférence internationale sur

 12   l'ex-Yougoslavie a connu un épuisement, c'est complètement arrêté jusqu'à

 13   ce qui a constitué sa mort naturelle. Après à Washington, c'était ce

 14   processus qui s'est remis en route avec le groupe de contacts qui a été mis

 15   en place sous la direction des Etats-Unis.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   M. SCOTT : [interprétation] Avant de poursuivre, j'aimerais que nous ayons

 18   quand même les bases permettant au témoin d'expliquer -- d'affirmer tout

 19   ça. Nous avons en effet que tout ceci est terminé, mais nous aimerions

 20   savoir sur quelle base il se pose. Donc nous pourrions savoir si c'est

 21   comment ces hommes ont été obligés partir s'il y avait eu bel et bien une

 22   campagne. Pour l'instant, la question n'a pas eu de réponse.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Ceci pourrait être une question de contre-

 24   interrogatoire.

 25   Monsieur le Témoin, peut-être vous pouvez pour gagner du temps, nous dire

 26   sur quelle base vous répondez à la question posée par Me Alaburic, qu'est-

 27   ce qui vous permet d'y répondre ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appuie sur les événements dont nous avons

Page 44844

  1   aujourd'hui connaissance, nous savons qu'ils se sont déroulés. Donc il est

  2   absolument certain qu'au mois d'avril, le 25 avril 1994, le Groupe de

  3   contact a été mis sur pied, avant cela les Etats-Unis avaient commencé à

  4   prendre part de façon de plus en plus intensive au processus en cours en

  5   Bosnie-Herzégovine, si bien que d'une certaine façon la Conférence

  6   internationale sur l'ex-Yougoslavie a connu une fin, une mort naturelle, et

  7   le plan de paix, qui était connu sous l'appellation de plan Owen-

  8   Stoltenberg, a connu d'innombrables fructuations [phon], il y a eu de très

  9   nombreuses versions différentes, ce qui signifie en réalité que Owen et

 10   Stoltenberg n'avaient pas été acceptés. C'est pourquoi il a fallu procédé à

 11   de très fréquents changements et de nombreuses versions différentes

 12   conformément aux différents intérêts qui étaient en présence au sein de la

 13   communauté internationale.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation]

 15   Q.  Docteur Jurcevic, avez-vous connaissance que certains participants à

 16   ces négociations internationales aient publié des ouvrages concernant le

 17   cours de ces différentes négociations ?

 18   R.  Lord Owen, par exemple, oui, a publié un ouvrage.

 19   Q.  Avez-vous lu cet ouvrage ?

 20   Q.  Oui. Il y a longtemps de cela, mais pour ce qui est de ce type

 21   d'ouvrage qui sont des mémoires, en fait, je prends toujours avec une

 22   certaine réserve les données qui y sont énoncées, puisque ce type d'acteurs

 23   lorsqu'ils rédigent un ouvrage au sujet des actions ou des pourparlers

 24   auxquels ils ont participé essaient toujours de présenter les choses sous

 25   un angle qui leur met de se justifier, de défendre le rôle qui a été le

 26   leur ou de présenter certains faits sous un angle plus positif.

 27   Q.  Je voudrais maintenant attirer votre attention sur une partie de ce

 28   procès-verbal où le président de la présidence, Alija Izetbegovic, fait une

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  1   synthèse des accords auquel il a été parvenu et résume la position qui sera

  2   celle de sa délégation.

  3   En page 19 du texte en B/C/S, ce qui correspond à la page anglaise dont le

  4   numéro se termine par les chiffres 1 459, Alija Izetbegovic dit, je cite :

  5   "Nous pouvons parvenir à la conclusion suivante jusqu'à ce jour, à savoir

  6   que notre délégation se rendra sur place. Elle sait approximativement ce

  7   qui constitue notre plateforme, à quoi s'ajoute les tentatives visant à

  8   l'élargissement des fonctions et le territoire, ainsi que le fait de ne pas

  9   signer."

 10   Ensuite en page 21, qui correspond à la page dont le numéro se

 11   termine par 1 461 en version anglais, au début du second paragraphe, il est

 12   dit, je cite :

 13   "Essayons en tant que c'est possible de procéder à un sauvetage. Nous avons

 14   l'occasion d'élargir quelque peu les territoires sur lesquels nous avons la

 15   possibilité de faire émerger une volonté démocratique."

 16   Je poursuis un peu plus loin, je cite : 

 17   "Que la délégation se rende avec cette plateforme à Genève et qu'elle

 18   essaie de sauver ce qui peut être sauvé."

 19   Donc dans ces différents extraits, il est dit que l'une des indications

 20   fournies par la présidence de la Bosnie-Herzégovine est de ne pas signer --

 21   de ne signer aucun document.

 22   Docteur Jurcevic, avez-vous connaissance d'une telle façon de procéder de

 23   la part de la partie bosnienne musulmane, à savoir participer aux

 24   négociations mais ne pas signer de documents ?

 25   R.  Pour être tout à fait concret, à la fin du mois de septembre, la

 26   majorité bosnienne musulmane à l'assemblée a rejeté définitivement le plan

 27   Owen-Stoltenberg, ce qui a également entraîné une crise au sein de cette

 28   même structure, crise qui a été la plus importante à ce jour-là, et qui

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  1   s'est traduite par le départ du membre bosnien de la présidence, qui était

  2   Fikret Abdic. Il est donc parti pour se rendre dans la partie occidentale

  3   de l'Etat où il a fondé la province -- la région autonome de la Bosnie

  4   occidentale avec toutes les conséquences que l'on connaît.

  5   Q.  Très bien. Malheureusement, je n'ai pas le temps de vous poser une sous

  6   question car je souhaiterais que nous puissions examiner également d'autres

  7   documents. Le document suivant porte le numéro 4D 1052. Il s'agit d'un

  8   procès-verbal ou plutôt d'une transcription de la réunion de la présidence

  9   de la Bosnie-Herzégovine du 29 décembre 1993.

 10   Reportez-vous, Docteur, à la page qui porte en haut à droite l'indication

 11   8/2, cela correspond en version anglaise à la page dont le numéro se

 12   termine par le chiffre 0753.

 13   R.  Je n'arrive pas à trouver cette page.

 14   Q.  Dans le coin supérieur droit vous avez l'indication 8/2.

 15   R.  C'est ici une copie. Alors quelle est cette page plus précisément ?

 16   Est-ce que c'est loin du début ?

 17   Q.  C'est peut-être la quarantième page à peu près.

 18   R.  Ça y est, j'ai trouvé. Merci.

 19   Q.  Juste pour préciser le contexte de l'échange qui a lieu à ce moment. Il

 20   est question de l'offensive de l'ABiH dans le territoire la Bosnie

 21   centrale, on commence par Vitez. Voyons ce qui est dit à ce sujet.

 22   Alija Izetbegovic dit, je cite :

 23   "Mais dans la conversation qui a été tenue la nuit précédente avec moi, il

 24   a dit," - Il parle ici de Tudjman - "j'ai entendu dire que vous avez une

 25   offensive dirigée contre la Bosnie centrale. Je vous prie, d'arrêter cette

 26   offensive, et cetera, et cetera, ce qu'il a écrit dans cette lettre : 'Moi,

 27   j'ai dit à Vesnija [phon] qu'il n'y a aucune offensive. Il y a là-bas un

 28   conflit les armées s'affrontent et se battent à Vitez, et ainsi de suite'."

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  1   A la page suivante, c'est, pour vous, celle qui porte l'indication 8/3. En

  2   version anglaise, cela se trouve sur la même page. Izetbegovic dit, je cite

  3   :

  4   "Je n'ai rien promis au sens où nous arrêterions cela à ceci près que cette

  5   exigence d'un cessez-le-feu de Noël est arrivé ultérieurement et nous avons

  6   accepté cela, mais nous ne pouvons parler de violation de cessez-le-feu que

  7   s'il y a quelque chose de notre côté. Par ailleurs, il n'y a pas d'autre

  8   obligation."

  9   En bas de cette même page, Ejup Ganic commence, tient des propos --

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Pour MM. les Juges, cela se trouve en page

 11   suivante donc la page dont le numéro se terminer par le nombre 54.

 12   Q.  Ejup Ganic, je vais ici résumer ce qu'il dit. Il dit qu'il serait peut-

 13   être possible de ménager une porte de sortie pour Vitez et que la

 14   population peut-être s'échapper ainsi pour quitter cette zone.

 15   Alors je voudrais maintenant juste encore citer un extrait avant de vous

 16   demander de commenter; c'est en page 9/3 pour vous, et en version anglaise

 17   la page ERN se termine par le nombre 56. Alors Kljuic essaie de défendre

 18   l'idée qu'il ne faudrait peut-être pas conquérir Vitez et nous allons donc

 19   citer un peu plus précisément. Il dit, je cite :

 20   "Puisqu'ils nous ont accusé auprès des Nations Unies, puisque nous devons

 21   répondre à quelque chose à cela, il faudrait que toi" - donc Alija

 22   Izetbegovic - "tu te présentes à la télévision et que tu dises que l'ABiH

 23   ne procède pas à une attaque de Vitez. Alors soit dit entre nous, nous ne

 24   sommes pas des enfants de cœur, ce qu'il faut dire certains ont plus

 25   d'expérience de la vie, certains travaillent plus qu'ils ne parlent, et il

 26   est clair pour nous tous que d'un point de vue stratégique, pour l'ABiH

 27   c'est Vitez qui est le plus important tout comme Novi Travnik, parce que

 28   les capacités là-bas sont les plus importantes pour les 20 années à venir."

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  1   Alors je cite maintenant une autre partie et je continue avec ce que

  2   propose Kljuic, je cite :

  3   "Donc tout d'abord, déclarer à la communauté internationale, donc en raison

  4   de la communauté internationale, je veux que tu dises qu'il n'y a pas

  5   d'offensive de notre part à Vitez. Deuxièmement, arrêtons l'offensive

  6   jusqu'au 18, voyons s'il y en a un accord. Tu vas te rendre sur place et

  7   nous verrons. Ensuite, pour ce qui est de cette enclave, si nous chassons

  8   le peu de Croates qui subsistent dans cette enclave, alors nous sommes tous

  9   des Croates, parce que nous tous qui sommes pour la Bosnie-Herzégovine,

 10   nous sommes des Croates car nous serons vaincus si nous n'avons pas de

 11   peuple."

 12   Docteur Jurcevic, savez-vous s'il y a eu une divergence, conflit à un

 13   moment donné entre l'ABiH et le HVO en Bosnie centrale, et notamment dans

 14   la zone de Vitez ?

 15   R. Oui, c'était une partie des conflits entre les Unités de l'ABiH et le

 16   HVO.

 17   Q.  Est-ce que ce que nous venons de citer maintenant, comme étant les

 18   plans de la direction bosnienne musulmane, correspond à la connaissance que

 19   vous avez des événements réels sur le terrain ?

 20   R.  Oui. Il ressort de ce qui a été lu de ce procès-verbal de la réunion de

 21   la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine, que Novi Travnik et

 22   Vitez étaient d'une importance toute particulière en raison des capacités

 23   des moyens de guerre qui s'y trouvaient, et aussi que les Croates dans ces

 24   zones du point de vue de la structure bosnienne musulmane étaient

 25   considérés alors non seulement pour ce qui concerne le HVO, mais également

 26   pour les civils, qu'ils étaient considérés comme indésirables. C'est la

 27   raison pour laquelle on proposait comme une des variantes possibles

 28   l'ouverture d'un corridor pour qu'ils puissent quitter cette zone.

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  1   Q.  Passons, Docteur, au document suivant qui est le 4D 930. C'est un

  2   procès-verbal de la réunion du 14 janvier 1994, de la présidence de la

  3   Bosnie-Herzégovine. Il s'agit d'un procès-verbal qui a déjà été utilisé, me

  4   semble-t-il, par la Défense Prlic et la Défense Petkovic, mais essayons de

  5   nous pencher en cette occasion aussi sur une partie, me semble-t-il, n'a

  6   pas encore été abordée. C'est la page qui porte l'indication 3/3 en version

  7   B/C/S, dans la version anglaise, c'est la page dont le numéro se termine

  8   par les chiffres 272.

  9   Il s'agit encore une fois d'une partie des propos tenus par Alija

 10   Izetbegovic qui commencent à la page précédente. Mais, moi, je m'en

 11   tiendrai à ce qui figure sur cette page, et je cite :

 12   "Pour nous, ces solutions avec trois républiques sont imposées par la

 13   présence d'une armée puissante qui ne veut accepter rien d'autre et que la

 14   communauté internationale n'est pas disposée à écarter de ces territoires.

 15   Quant à nous, nous estimons que nous ne sommes pas en mesure de l'écarter

 16   non plus."

 17   Alors, Docteur Jurcevic, pouvez-vous nous dire à quelle armée, M.

 18   Izetbegovic se réfère ici ?

 19   R.  Il est extrêmement probable qu'il s'agit du HVO, s'il s'agit de ce

 20   territoire que nous avons évoqué, mais ce n'est pas clair pour moi sur la

 21   base de ce document.

 22   Q.  Ce document a trait à ce plan de voir la Bosnie-Herzégovine aménagée en

 23   tant que trois républiques. Ici, donc il est dit que cette solution à base

 24   de trois républiques est imposée en raison de la présence d'une armée

 25   puissante qui ne souhaite rien accepter d'autre; vous pensez qu'il s'agit

 26   du HVO ?

 27   R.  Quelle est la date ?

 28   Q.  C'est au mois de janvier 1994.

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  1   R.  C'est donc juste avant, c'est dans le cadre des préparatifs pour les

  2   accords de Washington, au moment où les Etats-Unis prennent part et

  3   agissent déjà d'une façon intensive. Mais cela correspond à quel territoire

  4   ?

  5   Q.  Nous allons arriver jusqu'au bout. Donc je continue de citer, je cite :

  6   "Aujourd'hui, je suis allé vers le mont Kosevo, et on me dit que dans ces

  7   maisons se trouvent des Chetniks."

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ralentissez, s'il vous plaît. On

  9   devrait le répéter toutes les dix minutes. Visiblement personne n'obéit à

 10   cette demande.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, je m'efforce de

 12   suivre également le compte rendu d'audience, et j'essaierais de faire mieux

 13   à l'avenir.

 14   Q.  Donc je continue de citer. On parle donc de Chetniks et je continue, je

 15   cite :

 16   "Il n'y a même pas de 200 mètres, ils sont là déjà depuis un an et demi.

 17   "Ou alors si on va vers l'aéroport, on est amené à passer par un

 18   point de contrôle chetnik. Nous ne pouvons pas écarter ce poste de

 19   contrôle. Pouvons-nous écarter cette armée, c'est ça le problème. La

 20   présence de cette armée avec 600 ou 700 chars avec 2 000 pièces

 21   d'artillerie et environ 100 à 150 000 soldats sur le terrain, armés qui ne

 22   souhaitent accepter aucune autre solution nous impose la nécessité de

 23   réfléchir si nous souhaitons envisager quelque chose d'autre ou non," et

 24   ainsi de suite.

 25   Je termine la citation.

 26   Pouvez-vous maintenant, Docteur Jurcevic, dire à quelle armée se

 27   réfère Alija Izetbegovic ?

 28   R.  Il est tout à fait clair à partir de ces chiffres, ces données

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  1   techniques, il parle des forces serbes de la VRS.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé, je me demande si vous

  3   écoutez les remarques des Juges. Vous êtes en train de vous chevaucher,

  4   vous ne ménagez pas de pause entre les questions et les réponses. Vous

  5   devez absolument attendre que la traduction soit terminée avant de

  6   répondre, Monsieur le Témoin, et, Madame Alaburic, vous devez absolument

  7   attendre que la réponse soit consignée au compte rendu avant de prendre la

  8   parole. Je sais que c'est difficile, que vous êtes un peu animée - sans

  9   doute si j'étais à votre place, j'irai trop vite aussi - mais essayez de

 10   ralentir parce que si tout n'est pas consigné au transcript, c'est vous qui

 11   êtes perdant dans l'affaire.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation] Fort bien, Monsieur le Juge Trechsel.

 13   Q.  Essayons, Monsieur le Témoin, d'être très sage.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic me signale que le témoin est bon, et

 15   que c'est moi qui ne suis pas sage. Donc c'est à moi de faire des efforts.

 16   Q.  Donc maintenant vous avez compris de quelle armée on parlait. Alors ma

 17   question est la suivante Docteur : dans le contexte de cette déclaration

 18   faite par Alija Izetbegovic, pouvez-vous commenter ? Comment se fait-il que

 19   cette direction bosnienne-musulmane avait envisagé d'accepter une solution

 20   qui verrait la Bosnie-Herzégovine organisée en société composite ? Alors

 21   quelle est la raison de tout ceci ?

 22   R.  La conception fondamentale de la structure la plus puissante au sein

 23   des rangs des Musulmans de Bosnie c'était d'avoir une Bosnie-Herzégovine

 24   unitariste; cependant, les circonstances qui prévalaient et si je puis me

 25   servir du terme, les contraignaient à entrer en négociation et compte tenu

 26   de la situation réelle sur le terrain, ils -- c'est bien -- que c'était des

 27   solutions autres, chose qui découle de la lecture qu'on vient de faire ici.

 28   Q.  Vous avez parlé d'un Etat unitariste, Docteur; alors je me propose de

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  1   vous poser plusieurs questions au sujet du concept d'Etat unitariste qui

  2   est à l'antipode --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder ce sujet, Monsieur le Professeur,

  4   plus on avance dans ce procès, plus on prend connaissance de divers

  5   documents et plus je me rends compte de la complexité de tout cela. Tout à

  6   l'heure, on a vu un document du 4e Corps qui était très clair, qui

  7   expliquait que ce n'est pas par la diplomatie qu'on arrivera à résoudre les

  8   problèmes et que la solution est d'ordre militaire. Ce document semblait

  9   dire cela. Voilà que, là, M. Izetbegovic dresse un tableau de la situation

 10   militaire. Il dit :

 11   "Les Serbes ils ont 600 à 700 tanks, 2 000 pièces d'artillerie, 100 à

 12   150 000 hommes sur le terrain."

 13   Donc la conclusion pour lui c'est qu'on ne peut pas gagner la bataille,

 14   donc au sein de la partie musulmane, on voit qu'il y a des différences

 15   d'appréciation.

 16   Il y a quelques semaines, le général Praljak était à votre place, nous a

 17   longuement expliqué les positions d'Izetbegovic et d'Halilovic qui parfois

 18   n'étaient pas sur le même plan.

 19   Compte tenu du rapport de force que nous voyons et que M. Izetbegovic se

 20   complait à exposer, y avait-il, de votre point de vue, une possibilité de

 21   résoudre le problème par la force, ou bien c'est la diplomatie qui devait

 22   régler le problème ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, si je puis synthétiser et je

 24   m'efforcerai d'être le plus bref possible pour expliquer.

 25   Avec le démantèlement de la Yougoslavie sur le territoire de la Bosnie-

 26   Herzégovine, il y avait un problème crucial qui consistait à dire comment

 27   préserver la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat entier. Les structures

 28   dominantes dans cette partie musulmane bosnienne étaient favorables à la

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  1   sauvegarde de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat. Mais au sein de la

  2   solution préconisée par cette instance-là, ils s'efforçaient d'assurer les

  3   avantages les plus grands pour leur nation à eux. Aussi se sont-ils

  4   employés en faveur d'un Etat unitariste pour une raison simple parce que

  5   c'était, c'est la nation la plus nombreuse et la seule des nations ayant

  6   connu une croissance démographique. De la sorte avec un Etat unitariste,

  7   l'on annulerait les mécanismes constitutifs qui existaient jusqu'en 1990.

  8   Une partie de cette structure musulmane bosnienne n'était pas d'accord et

  9   s'est éloignée du SDA et de cette structure de direction.

 10   Un autre peuple au sein de la Bosnie-Herzégovine, les Croates étaient

 11   favorables au maintien de la Bosnie-Herzégovine mais au sein de la Bosnie-

 12   Herzégovine ils voulaient en faire un Etat composite qui conformément à

 13   leurs propres intérêts puisque c'était la population la moins nombreuse et

 14   qui avait connu un recul démographique, sur certaines parties une ou

 15   plusieurs, ils auraient donc le droit à gérer les choses de façon

 16   subsidiaire.

 17   Le troisième peuple constitutif, les Serbes de la Bosnie-Herzégovine donc

 18   leurs structures majoritaires ont tout à fait ouvertement, sans choisir les

 19   moyens, ont dit ne pas vouloir ce qui s'était produit par la suite et qui

 20   s'est créé au fur et à mesure je parle de la Republika Srpska, alors ils ne

 21   voulaient pas que cette partie-là fasse partie de l'Etat de Bosnie-

 22   Herzégovine. Ils voulaient que ce soit une partie intégrante de l'Etat de

 23   Serbie.

 24   Ce sont les concepts fondamentaux de base et c'est là que gît le

 25   problème fondamental. On sait par la suite ce qui s'est passé dans tout ce

 26   contexte. On m'a demandé mon opinion. Alors pouvait-on aboutir à une

 27   solution diplomatique ? Théoriquement bien sûr que oui et en termes

 28   pratiques c'était possible aussi dans le cas où il y aurait eu recours au

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  1   mécanisme à la disposition de la communauté internationale. Au fur et à

  2   mesure que le temps s'est passé, après 1991 ou à partir de printemps 1992

  3   plutôt, il y a eu escalade des conflits et croissance de la complexité du

  4   problème, y compris des conflits entre Musulmans de Bosnie, chose qui s'est

  5   d'ailleurs avérée être vraie avec le dénouement de 1995, la possibilité

  6   d'aboutir à une solution diplomatique se faisait de plus en plus retreinte.

  7   Si vous êtes satisfait de ma réponse, Monsieur le Juge, je veux bien

  8   m'arrêter mais si ce n'est pas le cas, posez la question -- une question

  9   complémentaire que j'ai essayé de synthétiser le plus possible.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette synthèse. Je vais redonner la

 11   parole à Me Alaburic tout en lui signalant qu'il lui reste 13 minutes. J'ai

 12   dit 13 minutes, pas 30.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant d'enchaîner,

 14   je voudrais poser une question. Au cas où j'aurais besoin d'une dizaine de

 15   minutes.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ça marche.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Dans le cas où

 18   il s'avérerait nécessaire pour moi de mettre à disposition une dizaine de

 19   minutes de plus pour terminer ce que j'avais l'intention de finir avec M.

 20   Jurcevic, m'accorderiez-vous ces dix minutes complémentaires sur le temps

 21   attribué à la Défense du général Petkovic ?

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais poser la question à mes collègues.

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors on vous donne dix minutes de plus mais

 25   ça sera déduit du temps global accordé à la Défense Petkovic. Donc il vous

 26   reste 23 minutes. Alors essayez de terminer vers midi, ce serait bien.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Grand merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Alors, Monsieur le Témoin, en répondant à la question de M. le Juge

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  1   Antonetti, vous venez de dire une chose qui se trouve être très

  2   intéressante à mes yeux, à savoir que les Musulmans en leur qualité de

  3   population majoritaire en Bosnie-Herzégovine bien que n'ayant pas la

  4   majorité absolue, n'est-ce pas, préférerait un aménagement unitariste de la

  5   Bosnie-Herzégovine. Vous ai-je bien compris ?

  6   R.  Oui, c'est exact. J'ai expliqué pourquoi dans l'essentiel.

  7   Q.  Alors si maintenant on se penche sur le sujet de l'aménagement

  8   unitariste et de cet aménagement composite, par exemple, en comparant avec

  9   l'ex-Yougoslavie; pouvez-vous me dire, Docteur, quels sont les peuples qui,

 10   en ex-Yougoslavie, est le peuple qui était plus porté à cet aménagement

 11   centralise plutôt unitariste ?

 12   R.  Si vous parlez de la Yougoslavie toute entière, alors ce serait une

 13   fois de plus, chose logique, le peuple serbe, qui en Yougoslavie était le

 14   plus nombreux.

 15   Q.  Dites-moi : d'après les connaissances qui sont les vôtres, tous les

 16   autres peuples de l'ex-Yougoslavie, préféraient-ils un aménagement

 17   unitariste ou un aménagement complexe ou composite fédéraliste ?

 18   R.  Non, seulement en Yougoslavie mais d'une manière générale. Dans les

 19   Etats composites ou dans les communautés composites, terme qui est

 20   préférable, ceux qui sont minoritaires souhaitent recourir à un mécanisme

 21   de protection qui est celui de cet Etat composite. Ils veulent protéger

 22   leurs intérêts qui ne sont pas forcément des intérêts minoritaires. Mais

 23   c'est quand même leurs intérêts. Si c'est un Etat unitariste de par la

 24   logique des choses, et de part l'expérience qui n'est pas seulement

 25   yougoslave mais celle des autres Etats composites, prenez l'Union

 26   soviétique, comme exemple, il s'est avéré évident que tous les autres

 27   mécanismes de nature unitariste mettraient enfin permettraient la mise en

 28   minorité des autres peuples par rapport au peuple majoritaire.

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  1   Q.  Est-ce qu'on peut estimer que quelqu'un qui est favorable à un

  2   aménagement unitariste d'une communauté d'Etat est plus patriote que celui

  3   qui s'emploie en faveur d'une organisation fédérative de la même communauté

  4   ou du même Etat ?

  5   R.  Il n'y a pas que mon opinion là-dessus. Je dirais que c'est une opinion

  6   qui l'emporte, et c'est qui plus est une valeur notoirement admise qui est

  7   le principe de subsidiarité, cela n'est pas valable du cas d'Etats mais

  8   aussi des différents cas de relations au niveau de la société, ce principe

  9   de subsidiarité, qui se traduit par la rétrocession de certains éléments à

 10   la communauté pour traduire sa complexité, c'est ce qui constitue, dirais-

 11   je, un élément démocratique qui traduit l'évolution de la civilisation du

 12   point de vue des droits de l'homme.

 13   Q.  Docteur Jurcevic, vous nous avez parlé de la Ligue des Communistes de

 14   Yougoslavie pour indiquer que c'était un élément intégrateur au sein de

 15   l'ex-Yougoslavie. Je me propose de vous demander au sujet dudit facteur

 16   intégrateur : qu'est-ce que ça a été au niveau de la Bosnie-Herzégovine ?

 17   Etes-vous d'avis que la Ligue des Communistes en Bosnie-Herzégovine avait

 18   constitué un facteur intégrateur ?

 19   R.  Bien sûr. De façon analogue au cas de la Yougoslavie en sa qualité de

 20   communauté composite, cela a cessé d'être après 1990 notamment après ces

 21   élections ça cessé d'être le facteur que ça avait été.

 22   Q.  Pouvez-vous nous expliquer quel est le mécanisme fondamental au niveau

 23   de la Ligue des Communistes qui avait la qualité d'être un facteur

 24   d'intégration ? Qu'est-ce qui était l'élément important ?

 25   R.  La constitutivité [phon] de trois peuples, si vous vous référez, par

 26   exemple, au territoire de la Bosnie-Herzégovine, ou si vous vous référez au

 27   fédéralisme du niveau yougoslave.

 28   Q.  Mais la politique des cadres en Bosnie-Herzégovine et dans les autres

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  1   républiques, avait-elle été placée sous le contrôle de la Ligue des

  2   Communistes ?

  3   R.  Absolument.

  4   Q.  Veuillez nous indiquer si la Ligue des Communistes en Bosnie-

  5   Herzégovine, avait veillé à ce qu'aux différentes fonctions il y ait

  6   représentativité sur pied d'égalité de tous les peuples, non pas seulement

  7   les trois peuples majoritaires mais les autres minorités nationales

  8   présentes sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ?

  9   R.  Oui, c'était l'un des préalables pour le maintien de la stabilité telle

 10   quelle sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine.

 11   Q.  Avec la disparition ou démantèlement de cette Ligue des Communistes et

 12   de la Bosnie-Herzégovine par voie de conséquence, fallait-il trouver des

 13   éléments d'intégration nouveaux en Bosnie-Herzégovine ou pas ?

 14   R.  Bien sûr, et on les trouvés, enfin, c'est des éléments qui le sont

 15   devenus, c'est ceux qui ont obtenu leur légitimité suite aux résultats de

 16   ces élections pluripartites en Bosnie-Herzégovine vers la fin de 1990.

 17   Q.  Est-ce que la direction croate de la Bosnie-Herzégovine, voulait

 18   aménager la Bosnie-Herzégovine de façon analogue à ce qu'on avait en ex-

 19   Yougoslavie, donc en faire un Etat fédéral, d'après ce que vous en savez ?

 20   M. SCOTT : [interprétation] De qui parle-t-on ? De quel dirigeant croate,

 21   s'il vous plaît ? Le témoin, dans son rapport, évoque dans le détail les

 22   positions hétérogènes des Croates de Bosnie, des Croates, de quel dirigeant

 23   croate s'agit-il, s'il vous plaît, au niveau de cette dernière question ?

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, pouvez-vous faire préciser la

 25   question ?

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vais préciser, bien entendu, mais je me

 27   propose de poser une question avant cela.

 28   Q.  Docteur Jurcevic, savez-vous nous dire quelle était la population de la

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  1   Bosnie-Herzégovine appartenant au groupe ethnique croate qui aux premières

  2   élections en 1990 avait voté en faveur du HDZ ?

  3   R.  C'était une grande majorité, et c'est partant de cela que le HDZ avait

  4   obtenu, me semble-t-il, 44 sièges au parlement de l'Etat de Bosnie-

  5   Herzégovine.

  6   Q.  Bon. Je vais maintenant rendre ma question plus précise. Docteur, quand

  7   je parle de la "direction croate," je parle de la direction qui à ses

  8   premières élections pluripartites, avait obtenu le mandat lui permettant de

  9   mettre en place des autorités locales et centrales. Est-ce que vous pouvez

 10   donc nous dire --

 11   M. SCOTT : [interprétation] Est-ce qu'il parle des dirigeants du HDZ sous

 12   Stjepan Kljuic qui dirigeait le parti ? De quel dirigeant croate parlons-

 13   nous ?

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Précisez, Maître Alaburic, parce que les dirigeants

 15   croates il y en a une quantité importante. Donc il vaudrait mieux savoir de

 16   qui il s'agit au juste.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais vous

 18   rappeler le fait que la Communauté croate d'Herceg-Bosna a été créée à

 19   l'époque où M. Kljuic était président du HDZ. Donc il était président du

 20   HDZ, lui, par conséquent, nous ne pouvons pas parler de divergences pour ce

 21   qui est des hommes politiques du groupe ethnique croate occupant des

 22   positions importantes --

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : -- et peut-être que le témoin, il a un autre point

 24   de vue. Vous dites : on ne peut pas parler divergences; ça c'est votre

 25   point de vue, mais lui, le témoin, le professeur, il peut penser

 26   différemment. Vous anticipez sur une réponse. Donc demandez-lui : quels

 27   sont, d'après lui, les noms des dirigeants croates importants, ceux du HDZ

 28   ? Puis affinez votre question; sinon, M. Scott va se lever à nouveau et on

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  1   en -- [hors micro]. 

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, aux lignes 5 et 6,

  3   on a consigné votre question à mon intention, disant qu'il convient de

  4   savoir à quoi je me réfère en parlant de la direction croate, donc je ne

  5   voulais rien suggérer du tout au niveau de la réponse, mais je voulais

  6   apporter une précision pour répondre notamment à M. Scott pour ce qui est

  7   de la mention qu'il a faite de M. Stjepan Kljuic.

  8   Q.  Alors, Docteur Jurcevic, pour que les choses soient claires, est-ce que

  9   ma question est suffisamment claire pour vous, ou ressentez-vous la

 10   nécessité de l'entendre poser de façon précise pour dire de quelle personne

 11   et de quelle structure je suis en train de parler ?

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi, Maître Alaburic, mais

 13   je pense que la question ne porte pas ici sur le fait que la question soit

 14   claire à M. Jurcevic. Je crois que la question importante c'est de savoir

 15   si c'est clair pour les Juges de la Chambre. Moi, je m'associe à la

 16   question posée par le Président de la Chambre et je suis surpris de

 17   constater que vous avez répondu à cette question de façon aussi évasive. Il

 18   s'agit de quels dirigeants, dirigeants sous M. Kljuic ou d'autres

 19   dirigeants. Je pense qu'il n'est pas difficile de répondre à cette question

 20   clairement.

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, moi, j'estime, pour ma

 22   part, qu'au cas où il y aurait des divergences, cet expert est tout à fait

 23   en mesure de nous dire si, à l'époque de Stjepan Kljuic, il en était de

 24   telle et telle sorte lorsque c'était Mate Boban, c'était -- enfin ça se

 25   présentait de façon tel et tel, donc l'expert qui nous a expliqué les

 26   événements par période et qui nous a apporté des qualifications très

 27   nuancées, je n'ai pas besoin d'être aussi précise pour ce qui est de ma

 28   question. Il s'agit d'un témoin expert; s'il s'agissait d'un témoin qui ne

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  1   connaissait pas les événements politiques de la Bosnie-Herzégovine,

  2   j'aurais estimé qu'il se trouverait nécessaire de parler de la direction du

  3   HDZ de 1991, de 1992, ou d'une autre année postérieure. Mais étant donné

  4   tout ce que ce témoin nous a dit ici, je ne pense pas que j'ai à être plus

  5   précise pour ce qu'il concerne, et s'il estime qu'il y existerait des

  6   divergences ou des différences, il peut nous les indiquer -- nous dire quel

  7   type de différence il y a.

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   M. SCOTT : [interprétation] Je ne peux pas être d'accord. Je ne peux pas

 10   prétendre que le témoin n'a pas donné un rapport de 190 pages et le témoin

 11   a parlé du HDZ, BiH et étant hétérogène, divers de membres qui n'avaient

 12   pas les mêmes points de vue et qu'une faction en particulier à la fin de

 13   l'année 1992 est devenue plus importante et prépondérante, ce qui est

 14   différent des dirigeants de 1990. C'est ce qui est contenu dans son

 15   rapport. Dans quelle direction est celle qui est évoquée par Me Alaburic,

 16   on parle de 1990 ou de 1992, quel que soit les dates qu'elle évoque ici ?

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense que Me Alaburic a précisé

 18   quelque peu. Elle a dit qu'elle souhaitait que le témoin donne une réponse

 19   différenciée et nous entendons sa réponse.

 20   M. SCOTT : [interprétation] Mon dernier commentaire serait de dire : alors

 21   est-ce que nous pouvons préciser le cadre temporel, de quelle date, de quel

 22   moment parlons-nous, s'il vous plaît ?

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vais reformuler ma question, Messieurs

 24   les Juges.

 25   Q.  Docteur Jurcevic, allez-vous comprendre à qui je fais référence si,

 26   sous la notion de direction politique croate, je me réfère aux gens qui en

 27   leur qualité de représentants du peuple croate en Bosnie-Herzégovine ont

 28   participé à des négociations internationales portant sur l'avenir de cette

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  1   Bosnie-Herzégovine ?

  2   R.  Oui. Indépendamment des noms dont il s'agit quand on parle d'autorité

  3   on se réfère à une structure. La structure bien sûr c'est quelque chose de

  4   dynamique à chaque fois. Mais la structure existe et elle dispose du

  5   pouvoir indépendamment de l'hétérogénéité en place et je ne pense pas que

  6   nous ayons, à notre temps, une disposition pour élaborer plus en détail,

  7   mais est-il clair qu'il y a toujours eu une structure indépendamment de ces

  8   modifications ? Donc c'était la structure dominante et l'attribut de la

  9   prédominance c'est le fait d'avoir participé à des négociations

 10   internationales, entre autres.

 11   Q.  Je vais vous rappeler que nous nous sommes référés, enfin que nous nous

 12   sommes entretenus sur un Etat unitariste et composite, alors je vais vous

 13   demander en faveur de quel type de Bosnie-Herzégovine se sont donc employés

 14   les représentants des Croates de la Bosnie-Herzégovine à l'occasion des

 15   négociations internationales ?

 16   M. SCOTT : [interprétation] Pourquoi est-ce que c'est tellement difficile

 17   de demander de qui il parle ? Cet homme nous parle depuis deux jours

 18   maintenant. Il prétend avoir une connaissance approfondie de ces

 19   événements. Il a écrit beaucoup de choses dessus, pourquoi ne peut-il pas

 20   nous répondre et pourquoi le conseil de la Défense ne peut pas être un peu

 21   plus clair. De quelle direction croate parlons-nous ? Nous tournons autour

 22   du pot et je propose aux Juges de la Chambre que ceci n'est pas par hasard.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez une connaissance des

 24   événements. Il suffit de lire votre rapport, les notes de bas de page. Tous

 25   les articles que vous avez lus, vous avez suivi les procès ici, donc vous

 26   êtes au courant de beaucoup de choses. Etant au courant de beaucoup de

 27   choses, vous savez qu'au sein des Croates, il y a eu des divergences entre

 28   les individus. Il y a eu des divergences, et le Procureur, le dit -- le

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  1   redit à chaque fois. Bon. Donc nous le savons. Ce qui serait utile de votre

  2   part c'est que vous, vous dites : non, les Croates ils étaient unitaires,

  3   ils étaient tous d'accord de Boban à Kljuic ou bien vous nous dites : non,

  4   il y avait des divergences entre eux. A ce moment-là, vous dites qui et

  5   qui. C'est ça que le Procureur veut et que les Juges évidemment souhaitent

  6   connaître parce que nous, nous ne sommes pas aussi spécialiste que vous en

  7   la matière, même si on est depuis quatre ans dans ce procès, on a vu des

  8   millions de pages. On a entendu des centaines de témoins, mais je n'ose pas

  9   prétendre avoir la même connaissance que vous, donc essayez de nous

 10   préciser les noms. C'est ça qu'on veut savoir. Est-ce possible ou pas ?

 11   R.  Cela se peut, mais je pense qu'avec les explications à apporter, ça

 12   nous prendrait bien beaucoup de temps. Alors est-ce qu'il y a eu des

 13   structures qui ont représenté la partie croate aux négociations

 14   internationales ? La question est claire et la réponse est tout à fait

 15   simple. Alors pour ce qui est maintenant de l'hétérogénéité existant au

 16   sein du corpus ethnique croate, ça se sont des questions tout à fait

 17   autres, et je pense que nous sommes en train de parler ici d'une question

 18   de principe du moins c'est la façon dont j'ai compris la chose. S'il en va,

 19   s'il en est autrement qu'on me le dise, mais s'agissant des négociations,

 20   il y a, par exemple, en matière politique autre de Bosnie-Herzégovine, et

 21   ce, notamment les segments qui sont sous surveillance internationale, il y

 22   a une continuité pour ce qui est de la représentativité de cette question

 23   par les soins de l'ensemble qui avait la prédominance et qui était la plus

 24   présente dans les différentes institutions, et il y a eu des changements

 25   d'opinion compte tenu des circonstances, des motifs ou autres intérêts.

 26   Mais, moi, j'ai compris qu'on m'avait posé une question de principe --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur le Professeur --

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons abordé la question de

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  1   --

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est exact que Me Alaburic a abordé la question de

  3   la représentation des Croates aux négociations internationales, et vous

  4   dites : ils étaient, à ce moment-là, soudés et ils représentaient un point

  5   de vue. Mais cette représentation avait-elle exclus une partie de la pensée

  6   politique des Croates de la République de Bosnie-Herzégovine, et quelles

  7   sont les Croates qui étaient hors des négociations politiques et à quelle

  8   date ?

  9   Bon, on sait que M. Kljuic au départ est le président du HDZ et

 10   ensuite il va y avoir un problème. Alors c'est ça qu'on essaie de grâce à

 11   vous d'essayer de comprendre, parce que nous savons qu'à Genève, il va y

 12   avoir M. Boban. Mais est-ce que Boban représente de votre point de vue 100

 13   % de la pensée politique croate de la République de Bosnie-Herzégovine, ou

 14   bien 70 %, 60 %. J'en sais rien. C'est ça qu'on veut savoir.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] La structure croate au sein de la Bosnie-

 16   Herzégovine était représentée par différentes personnes, mais pour ce qui

 17   concernait l'aménagement intérieure de la Bosnie-Herzégovine, la position

 18   dominance aussi bien dans la structure au pouvoir que dans les autres était

 19   que la Bosnie-Herzégovine devait être un Etat composite complexe.

 20   Par exemple, lorsque la structure de la Herceg-Bosna défendait une

 21   certaine unité d'où les Croates de Bosnie centrale ou de Posavina avaient

 22   été retirés, exclus, ces derniers étaient contre cela justement, parce

 23   qu'ils avaient été exclus de ces structures et qu'ils n'avaient pas

 24   participé à cette entité croate au sens où cela aurait constitué une

 25   protection pour eux aussi. En fait, ils avaient peur, car ils n'auraient

 26   pas été sous la protection de cette entité. C'est quelque part à cette

 27   échelle-là, à ce niveau-là, que se trouverait l'explication. Donc il est

 28   indubitable que même autour des questions qui se sont présentées par

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  1   rapport à la question posée au referendum et autour de toutes les questions

  2   liées aux plans de paix internationaux, il y a une continuité des intérêts

  3   croates malgré toutes les hétérogénéités qui peuvent exister à d'autres

  4   égards.

  5   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation]  Désolé, mais le Président de la

  6   Chambre vous a posé une question, et vous répondez de façon trop générale.

  7   On vous a demandé quelle était votre opinion à propos de tout cela, à

  8   propos de la position de M. Boban ou de la position d'autres personnes. On

  9   vous a demandé si M. Boban représentait 70 % des Croates en Bosnie-

 10   Herzégovine ou 40 % ou moins ou plus, c'est tout ce qu'on vous a demandé.

 11   Donc essayez de répondre à la question, s'il vous plaît. Je vous remercie.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est de cette question précise et

 13   concrète, et notamment si on à l'esprit certains détails concrets, il est

 14   impossible d'y répondre, car à ce moment-là, lorsque la situation ne cesse

 15   de changer, d'évoluer en Bosnie-Herzégovine, il n'y a pas eu d'enquête

 16   d'opinion qui ait été conduite. On n'a pas non plus tenu le moindre

 17   referendum au cours duquel les Croates, en tant qu'individus, en tant

 18   qu'appartenant à une population auraient pu s'exprimer concernant ces

 19   questions.

 20   Le seul indicateur pertinent ce sont les élections de 1990, qui ont donné à

 21   ces structures dominantes sa légitimité pour qu'elles puissent représenter

 22   certains intérêts. La conclusion que j'ai tirée c'est que c'est cette

 23   structure qui a représenté ces intérêts, qu'elle ne l'a pas bien fait. J'ai

 24   énoncé les raisons de cela, et j'ai également fait état du caractère

 25   particulièrement instable de cette structure et du fait que c'était

 26   uniquement au sein de cette structure croate que l'on voyait se produire

 27   des ruptures profondes au sein de la direction et des cadres qui avaient

 28   été nommés. J'ai également fait état que c'était uniquement au sein de

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  1   cette structure croate et à la tête du HDZ qu'on a assisté à des

  2   changements de personnel très fréquents, ce qui n'était pas le cas au sein

  3   des autres structures, et du point de vue de l'expertise à laquelle j'ai

  4   procédé, c'est un indicateur assez significatif. Il est bien connu que

  5   quelques semaines après la fondation du HDZ et avant les élections, le

  6   premier président a été démis de ses fonctions, le président Perinovic.

  7   Ensuite, est venu Kljuic, et puis à la fin en 1994, cela s'est terminé avec

  8   Kresimir Zubak.

  9   Dans des circonstances aussi dramatiques, des changements de direction

 10   aussi fréquents à la tête du parti qui, conformément aux résultats de 1990,

 11   était le seul à disposer d'une légitimité, témoignaient de l'instabilité et

 12   du caractère hétérogène de ces structures, ce qui était certainement

 13   dommageable pour les Croates en Bosnie-Herzégovine et pour les intérêts

 14   nationaux croates en Bosnie-Herzégovine. Car lorsque l'on établit un lien

 15   entre cette instabilité spécifique et l'instabilité générale en Bosnie-

 16   Herzégovine, avec les contradiction dont faisait preuve la communauté

 17   internationale, et tous les problèmes et les distinctions qui ont eu lieu

 18   également au sein de la partie musulmane, on obtient une image assez claire

 19   dont il s'agissait. Par ailleurs, il serait assez difficile compte tenu de

 20   la complexité de la situation en Bosnie-Herzégovine de distinguer ce qui

 21   aurait pu constituer les intérêts individuels ou particuliers de certains

 22   individus ou de certains groupes d'individus, qui assez souvent pouvaient

 23   s'identifier à d'autres intérêts particuliers ayant trait à la sécurité.

 24   Tout comme il serait difficile de distinguer pourquoi ils changeaient leur

 25   fusil d'épaule.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- qu'au niveau de la structure, au

 27   niveau du HDZ, c'était un HDZ assez hétérogène comme peut en témoigner des

 28   changements de direction. Vous avez cité trois noms en disant que le

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  1   dernier, par exemple, Zubak, ça avait été aussi dramatique.

  2   Ça, on comprend bien, qu'au niveau du HDZ, d'après vous, c'était un

  3   parti hétérogène, mais ce n'est pas le HDZ qui était seul partie prenante

  4   aux négociations de Genève. Je crois comprendre qu'il y avait une

  5   Communauté croate de l'Herceg-Bosna, qu'il y avait aussi un certain Mate

  6   Boban. Alors au niveau de l'autre structure, la structure du Conseil croate

  7   de l'Herceg-Bosna, dont le texte fondateur a été à Grude, dans cette

  8   structure; est-ce qu'il y avait d'après vous une structure militaire

  9   monolithique ou était-elle aussi hétérogène ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] La structure au sein de la HZ HB et de la HR

 11   HB, comme vous l'avez dit, vous-même, Monsieur le Président, était, elle

 12   aussi, bien entendu, hétérogène. Aujourd'hui, en nous penchant sur certains

 13   documents bien précis, des documents de nature militaire, nous l'avons vu

 14   également. Cela vaut par ailleurs aussi pour ce qui est de la vie civile et

 15   des relations civiles. On ne peut y retrouver cette même hétérogénéité et

 16   le fait que les mécanismes constitutifs de l'autorité n'ont pas été mis sur

 17   pied.

 18   On le voit dans la prédominance des autorités locales et d'autres aspects

 19   également ayant les mêmes effets, étaient dominant au sein de la HZ HB et

 20   de la HRT HB. Cette hétérogénéité était omniprésente à tous les échelons et

 21   aujourd'hui, en nous penchant sur ces documents où l'on voit, par exemple,

 22   qu'une unité donnée refuse tout simplement de mettre en œuvre un ordre

 23   d'exécuter un ordre de l'état-major principal, nous l'avons vu aussi. Alors

 24   si l'on s'intéresse à ce qui a été ces structures dans le cadre des

 25   négociations internationales, il est tout à fait clair qu'ils ont toujours

 26   été les premiers à signer les accords internationaux, qu'ils ne posaient

 27   pas de condition ni ne refusaient de signer les documents proposés. A la

 28   différence des autres parties, la partie bosnienne musulmane ou la partie

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  1   serbe, qui présentait une cohésion interne beaucoup plus forte et qui dans

  2   toute situation, y compris dans le cadre des négociations internationales,

  3   et pour ce qui était de signer les propositions de paix avancées, avait des

  4   positions complètement différentes, avançait des exigences, signait puis

  5   revenait en arrière, ou refusait de signer à certaines occasions et parfois

  6   refusait définitivement les plans.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- le décompte avec les dix minutes

  8   supplémentaire fait qu'il vous reste 13 minutes. Alors on pourrait terminer

  9   à 12 heures 30, à la pause, ce qui serait bien, s'il n'y a pas d'autres

 10   objections.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 12   Q.  Docteur Jurcevic, ce sujet que nous avons abordé essayons de l'aborder

 13   sous une autre approche, et répondez brièvement, s'il vous plaît.

 14   Est-ce qu'à ce moment-là, la Bosnie-Herzégovine est un Etat unitaire,

 15   unitariste ou un Etat composite ? Non pas à l'époque mais aujourd'hui.

 16   Aujourd'hui, donc je corrige. Est-ce qu'aujourd'hui, la Bosnie-Herzégovine

 17   est un Etat unitaire ou composite, complexe ?

 18   R.  Elle représente une forme spécifique d'Etat complexe ou composite.

 19   Q.  Est-ce qu'une telle organisation de la Bosnie-Herzégovine en tant

 20   qu'Etat composite, a été proposée par la communauté internationale à Dayton

 21   ?

 22   R.  La communauté internationale a proposé cela et l'a imposé.

 23   Q.  Dites-nous : si la communauté internationale n'a jamais lors des

 24   affrontements en Bosnie-Herzégovine proposait un plan d'aménagement

 25   antérieur de la Bosnie-Herzégovine future qui n'aurait pas été celui d'un

 26   Etat composite ?

 27   R.  Toutes les propositions de la communauté internationale, et je pense

 28   qu'elles sont toutes publiquement connues, allaient dans le sens d'une

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  1   Bosnie-Herzégovine qui serait un Etat composite.

  2   Q.  Très bien. Est-ce qu'à votre connaissance, Alija Izetbegovic, au nom de

  3   la partie musulmane dans les négociations, n'a jamais rejeté une

  4   proposition de la communauté internationale en avançant la justification

  5   que lui aurait souhaité une Bosnie-Herzégovine unitaire ?

  6   R.  Par exemple ?

  7   Q.  De façon tout à fait explicite et claire pas à titre de conclusion que

  8   l'on pourrait tirer et d'autre chose, explicitement et avec cette

  9   justification avancée de façon ouverte.

 10   R.  Pour autant que je le sache, non.

 11   Q.  Très bien.

 12   R.  Bien que l'on puise, bien entendu, avoir différentes interprétations

 13   des événements.

 14   Q.  Malheureusement, nous n'avons pas le temps de procéder à des

 15   interprétations. Je vais maintenant vous poser une autre question. Dites-

 16   nous, les noms de personnalités politiques éminentes croates en Bosnie-

 17   Herzégovine qui défendaient une solution unitaire pour l'Etat de Bosnie-

 18   Herzégovine. Pourriez-vous nous citer de tels noms ? En connaissez-vous ?

 19   R.  C'est fort difficile. On pourrait encore avancer des interprétations,

 20   en se fondant sur certaines déclarations à certain moment particulier, on

 21   pourrait se livrer à des spéculations sur de telle base peut-être.

 22   Q.  Je vais maintenant passer au sujet suivant qui est celui des frontières

 23   de la Bosnie-Herzégovine. Je vous prie de vous reporter --

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Votre dernière réponse n'est pas

 25   très claire. On dit on peut se lancer dans des spéculations. A ce propos,

 26   cela veut dire que vous ne pouvez rien nous affirmer; c'est cela ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet. Je ne pourrais pas affirmer

 28   catégoriquement que quelque homme politique croate éminent ait défendu

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  1   cette vision.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  3   L'INTERPRÈTE : Me Alaburic hors micro.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation]

  5   Q.  Reportons-nous au document 4D 1349, Docteur Jurcevic, s'il vous plaît.

  6   Il s'agit de la première proposition émanant de la Conférence de paix sur

  7   l'ex-Yougoslavie. On y voit comment la Communauté européenne propose une

  8   résolution de la crise yougoslave. Avez-vous connaissance de ce document ?

  9   R.  Oui, je l'ai déjà vu précédemment.

 10   Q.  Au point 1.1(a), il est dit que l'on résoudra la crise yougoslave par

 11   la création de républiques souveraines et indépendantes ayant le statut de

 12   sujet international pour celles dont ils le souhaiteront, et au point (e)

 13   il est dit que, dans le cadre de l'accord général, la reconnaissance de

 14   l'indépendance à l'intérieur des frontières existantes des républiques qui

 15   le souhaitent, à moins qu'il n'en soit décidé ou convenu autrement.

 16   Pouvez-vous nous dire en vous fondant sur ce document quelles étaient les

 17   positions fondamentales de la communauté internationale concernant la

 18   création d'Etats indépendants émanant de l'ancienne Yougoslavie ?

 19   R.  Il y a eu deux critères fondamentaux qui ont été avancés de façon tout

 20   à fait cohérente et systématique par la communauté internationale, à savoir

 21   pour le premier critère il était exclu de procéder à quelques modifications

 22   de frontières que ce soit par la force, et le deuxième critique il fallait

 23   défendre les droits de l'homme.

 24   Q.  Docteur Jurcevic, selon vous, est-ce que Franjo Tudjman et la direction

 25   politique de la République de Croatie étaient conscients du fait qu'au

 26   moment où la Bosnie-Herzégovine deviendrait un Etat indépendant et

 27   internationalement connu, elle le serait dans les frontières qui avaient

 28   été celles de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine telle qu'elle

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  1   faisait partie de la RSFY ?

  2   R.  Oui. Cela était clair tant pour Tudjman que pour les autres personnes

  3   qui avaient participé à cela, et je dirais que, Tudjman avait également des

  4   raisons supplémentaires de ne pas toucher aux frontières telles qu'elles

  5   ressortaient de l'AVNOJ, et notamment en Bosnie-Herzégovine, car dans le

  6   cas contraire on aurait introduit pour ce qui concerne la Yougoslavie la

  7   possibilité de voir reconnaître l'indépendance de parties déjà occupées

  8   alors de la République de Croatie. De plus, une autre chose était tout à

  9   fait clair, et cela a été avancé plusieurs fois par la communauté

 10   internationale, qu'en aucun cas cela ne serait accepté.

 11   Q.  Cela était ma seconde question. Donc la direction de la République de

 12   Croatie était consciente, ou plutôt je voulais vous demander si vous aviez

 13   connaissance que cette direction ait eu conscience de l'impossibilité de

 14   modifier par la force quelques frontières que ce soit et de l'impossibilité

 15   de modifier quelques frontières que ce soit autrement que par accord ?

 16   R.  Absolument. D'un point de vue tout à fait pragmatique, la Croatie ne

 17   disposait pas de force lui permettant de modifier la situation sur le

 18   terrain militairement parlant, et ce que nous montre également les faits, à

 19   savoir que ce n'est qu'en 1995, que la Croatie a été en mesure

 20   d'entreprendre une action de libération de la partie de son territoire qui

 21   avait été occupée, et en 1998, en raison d'un manque de force tant sur le

 22   plan politique que militaire elle a accepté un processus de réintégration

 23   pacifique particulièrement problématique pour ce qui est de la Slavonie

 24   orientale.

 25   Q.  Très bien. Je voudrais que nous passions au document suivant qui est le

 26   numéro 4D 1453. Nous n'avons pas le temps d'aborder la question des

 27   frontières plus avant. Il s'agit du procès-verbal de la déposition de Mme

 28   Smilja Avramov, qui enseigne le droit international à l'Université de

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  1   Belgrade. Elle a été l'une des conseillères les plus importantes de feu

  2   président serbe Slobodan Milosevic. Il s'agit d'un document à part, qui ne

  3   fait pas partie de votre classeur. Il a été ajouté à part car il est assez

  4   volumineux. Je voudrais simplement attirer l'attention des Juges de la

  5   Chambre aux pages pertinentes, quant à vous, Docteur Jurcevic, je vais vous

  6   faire un résumé de ce que ce témoin a avancé.

  7   Alors les pages sont 32 412 à 32 414, tout d'abord, ensuite 32 428 et 32

  8   436, et nous allons faire un commentaire global de ces pages.

  9   Alors au cours de ces premières pages, Smilja Avramov, pour ce qui est du

 10   témoignage de Stjepan Mesic, concernant Karadjordjevo, affirme qu'il s'agit

 11   de mensonge éhonté, car lors de cette réunion entre Tudjman et Milosevic,

 12   on n'aurait dessiné aucune frontière de la Bosnie-Herzégovine. Elle

 13   justifie ensuite, en disant que les scientifiques serbes estimaient que les

 14   frontières de l'AVNOJ étaient des frontières révolutionnaires qui ne

 15   bénéficiaient d'aucune espèce de reconnaissance internationale, et qu'en

 16   cas décomposition de la Yougoslavie, ces frontières ne pouvaient en aucun

 17   cas être internationalement reconnues.

 18   Alors on me dit que le compte rendu d'audience s'est arrêté, non, tant pis.

 19   Ce qui importe c'est ce que le transcript du milieu fonctionne bien.

 20   Alors je vais maintenant vous citer une des phrases de Mme Avramov

 21   qui est importante, car on y parle de la Croatie. C'est en page 32 413,

 22   c'est la fin de l'avant-dernier paragraphe. Il y est dit :

 23   "Ma position était que seuls ces traités internationaux pouvaient

 24   représenter une base pour les frontières futures avec lesquelles la partie

 25   croate n'était pas d'accord."

 26   Et il s'agit des accords remontant à après la fin de la Première

 27   Guerre mondiale, donc concluant en 1919 et 1923.

 28   Ensuite en page 32 428, elle dit :

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  1   "Les frontières restent ouvertes si la Croatie et la Slovénie

  2   insistent pour faire sécession; dans ce cas, il y a la possibilité pour la

  3   Serbie d'accepter cela mais à une condition, à savoir que nous recourrions

  4   à des moyens pacifiques pour résoudre la question des frontières."

  5   Enfin à la dernière page que j'ai citée, Smilja Avramov dit la chose

  6   suivante, c'est vers le milieu du dernier paragraphe :

  7   "Le 18 octobre, sans la moindre préparation, sans avoir reçu aucune

  8   information préalable, j'ai été informée avec un délai de 24 heures

  9   auparavant, nous avons reçu  le soi-disant plan Carrington qui nous mettait

 10   devant le fait accompli de la décomposition de la Yougoslavie sans proposer

 11   la moindre alternative."

 12   Je saute quelques lignes et je continue, la citation :

 13   "Ils ont accepté comme vous le voyez les principes révolutionnaires.

 14   Ils ont accepté des états à l'intérieur des frontières qui avaient été

 15   mises en place pendant la révolution, les frontières de l'AVNOJ ce qui a

 16   été inacceptable pour nous."

 17   Alors si nous gardons en mémoire que nous avons vu précédemment, ce

 18   serait donc du plan Carrington émis le 18 octobre, qu'il s'agissait, n'est-

 19   ce pas ?

 20   Monsieur Jurcevic, pourriez-vous nous dire, dans ce contexte, ce

 21   qu'il en était de la relation ou du rapport du point de vue qu'avait la

 22   direction serbe, ou plutôt Slobodan Milosevic, concernant ces frontières de

 23   l'AVNOJ d'une part, et quel était le point de vue de Franjo Tudjman sur

 24   cette même question ?

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Donc il me semble que cela n'est pas rentré

 26   au compte rendu, non, ça y est - excusez-moi, et mes excuses aux

 27   interprètes, cela a été bien interprété.

 28   Q.  Donc je voulais vous poser la question de leur position respective par

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  1   rapport aux frontières de l'AVNOJ.

  2   R.  Les différences étaient si importantes que l'on peut

  3   véritablement parler de contradiction ou d'opposition. La partie serbe avec

  4   Slobodan Milosevic à sa tête et l'ensemble de l'appareil défendait l'idée

  5   d'une modification des frontières, alors que l'Etat croate dans son

  6   ensemble avec Franjo Tudjman à sa tête insistait sur les frontières de

  7   l'AVNOJ. Chacun le faisait pour la défense de ses propres intérêts.

  8   Q.  Monsieur Jurcevic, je vais vous interrompre car je n'ai plus que

  9   très peu de temps. J'en ai malheureusement terminé avec le sujet des

 10   frontières car, Monsieur le Président --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 12   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais

 13   simplement dire ce que nous avons préparé. Ma consoeur, Me Nozica, et moi-

 14   même avons préparé trois documents à partir desquels vous pourriez voir

 15   plus précisément la façon dont on utilise les tailles de caractère,

 16   aujourd'hui en Bosnie-Herzégovine. Vous pouvez voir que, dans ces documents

 17   officiels, la dénomination de l'Etat de Bosnie-Herzégovine figure en

 18   caractère de taille plus petite que la suite du texte figurant dans ces

 19   documents.

 20   Puisque Monsieur le Président, hier, vous avez manifesté un certain

 21   intérêt concernant ce sujet de la taille des caractères et la question de

 22   savoir si cela porte à conséquence et si la taille de ces caractères peut

 23   avoir une certaine signification, je souhaiterais attirer votre attention

 24   sur ces documents supplémentaires afin que vous puissiez peut-être estimer

 25   plus avant l'importance et la conséquence de ces tailles de caractère.

 26   Alors, avec votre permission, je souhaiterais demander que l'on puisse

 27   passer à huis clos partiel, car les documents qui m'ont été fournis par ma

 28   consoeur, Me Nozica, et je la remercie sont de nature privée et par

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  1   conséquent, il conviendrait de protéger l'identité des personnes qui y sont

  2   mentionnées. Je vous remercie.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  4   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

  5   [Audience à huis clos partiel]

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 22   [Audience publique]

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais vous

 24   remercie d'avoir réglé avec d'autant d'efficacité la question de ces trois

 25   documents. Je vous adresse tous me remerciements.

 26   Q.  Malheureusement, mon contre-interrogatoire est terminé. Docteur

 27   Jurcevic, je vous remercie pour vos réponses.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour le compte rendu, je tiens à dire que

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  1   nous sommes maintenant en audience publique.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors nous allons faire maintenant la

  3   pause de 20 minutes, et puis Me Karnavas reprendra après la pause.

  4   --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.

  5   --- L'audience est reprise à 12 heures 54.

  6    M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

  7   Maître Karnavas, vous avez la parole.

  8    M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président et bonjour à

  9   tous dans le prétoire et à l'extérieur.

 10   Contre-interrogatoire par M. Karnavas :

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Professeur. Je souhaite

 12   maintenant aborder votre rapport.

 13   M. KARNAVAS : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu d'audience,

 14   il s'agit de la pièce 3D 03720.

 15   Q.  Je vais vous demander maintenant de regarder la page 129 de votre

 16   langue.

 17   M. KARNAVAS : [interprétation] Pour nous, ce sera la pièce 109. Ce sera la

 18   page 109 de la version anglaise.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez dit quelle page ?

 20   M. KARNAVAS : [interprétation]

 21   Q.  Lorsque vous l'aurez, dites-le-moi.

 22   R.  129 mais de quoi ?

 23   Q.  Nous allons vous le remettre.

 24   M. KARNAVAS : [interprétation] Si je peux demander à l'huissier de prêter

 25   main-forte, s'il vous plaît.

 26   Q.  Je vais vous demander de vous concentrer sur un paragraphe en

 27   particulier.

 28   M. KARNAVAS : [interprétation] C'est le deuxième paragraphe pour nous dans

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  1   la version anglaise.

  2   Q.  Qui commence par :

  3   "Avant ceci, le 22 mai 1993" - et entre parenthèses - "(Trois jours

  4   seulement après l'échec du plan de paix Vance-Owen,) cinq membres du

  5   Conseil de sécurité des Nations Unies (la France, la Fédération russe,

  6   l'Espagne, le Royaume-Uni et les Etats-Unis) ont fait une déclaration

  7   conjointe sur le BH en exprimant leur préoccupation sérieuse sur la

  8   poursuite des affrontements en Bosnie-Herzégovine…"

  9   Le texte se poursuit. Ce que je souhaite faire, Monsieur le Professeur,

 10   c'est me concentrer sur la première partie de ce paragraphe, la première

 11   phase en réalité, où vous dites :

 12   "Le 22 mai 1993, seulement trois jours après l'échec du plan de paix Vance-

 13   Owen."

 14   Bien. Pendant le week-end, nous avons eu l'occasion de nous voir, n'est-ce

 15   pas ?

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   Q.  A ce moment-là, je vous ai demandé si vous étiez au courant de

 18   quelconques négociations ou accords à Medjugorje à ces dates-là ou autour

 19   de ces dates-là; vous souvenez-vous de cela ?

 20   R. [aucune interprétation] 

 21    Q.  Je souhaite maintenant voir avec vous la pièce 1D 02404.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Chacun devrait avoir ce document dans son

 23   classeur. 1D 02404. Nous avons déjà vu ce document ou une variante de ce

 24   document. C'est une pièce qui a une cote.

 25   Q.  Etiez-vous au courant de l'existence de ce document-ci à l'époque où

 26   vous prépariez votre rapport et que vous avez affirmé ceci sur le décès ou

 27   la fin du plan Vance-Owen ?

 28   R.  Non, je ne m'en suis pas servi pour mon expertise.

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  1   Q.  Ayant regardé cette pièce 1D 02404, est-ce que vous souhaitez saisir

  2   cette opportunité soit pour modifier votre évaluation, soit pour faire un

  3   commentaire ?

  4   R.  Oui, je peux commenter. En effet, comme cela est indiqué dans l'avant-

  5   propos, et dans les parties relatives à la méthodologie de mon rapport

  6   d'expert, j'ai procédé à une synthèse qui s'est trouvée à suivre un niveau

  7   lorsqu'il s'agissait de la communauté internationale et de la Bosnie-

  8   Herzégovine. Quand il s'agit des traités de paix, j'ai suivi le tout

  9   jusqu'à l'échec de ces initiatives pour ce qui est des solutions à apporter

 10   aux problèmes de la Bosnie-Herzégovine.

 11   Je suis pas entré dans les négociations bilatérales entre deux

 12   parties concrètes parce que ça aurait rendu le rapport plus volumineux.

 13   Donc, si je puis commenter cet accord-là se rapporte à deux parties en

 14   présence au sein de la Bosnie-Herzégovine, à savoir la partie croate et

 15   bosnienne, musulmane. Ce document nous montre qu'en dépit du fait que la

 16   solution intégrale pour la Bosnie-Herzégovine est tombée à l'eau le 19 mai,

 17   19 juin, une fois rejeté l'accord en application du référendum qui s'est

 18   tenu parmi les Serbes, il y a eu cet accord particulier de conclu et on a

 19   travaillé dessus pendant un certain temps par la suite. Donc, bien que le

 20   plan ait échoué, on a continué à travailler dessus. On a essayé de le

 21   mettre en œuvre avec la participation de certaines structures de la Bosnie-

 22   Herzégovine, y compris donc la partie croate et la partie bosno musulmane

 23   qui s'étaient conformées aux demandes formulées par la communauté

 24   internationale.

 25   Q.  Pour m'assurer que ceci soit tout à fait clair, est-il exact, si nous

 26   comprenons, d'après ce que vous venez de dire et d'après votre évaluation

 27   de la situation qu'en ce qui concerne ces personnes qui ont pris part à cet

 28   accord et ceux qui les représentaient, que le plan de paix Vance-Owen

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  1   n'avait pas échoué à ce moment-là, et qu'en réalité, il faisait des efforts

  2   pour le mettre en œuvre dans la mesure où ceci est indiqué aux termes de

  3   cet accord que nous venons de voir ?

  4   R.  Oui. Ils ont continué à se conformer à un plan refusé par -- rejeté par

  5   la partie serbe. Quand je dis que "c'est tombé à l'eau comme plan," c'est

  6   tombé à l'eau en tant que solution intégrale pour la Bosnie-Herzégovine

  7   parce qu'il y a une partie qui l'a refusé dans le cas concret; c'est la

  8   partie serbe qui l'a fait, donc c'est tombé à l'eau. Mais aux yeux des deux

  9   autres parties, ce n'était pas tombé à l'eau, ce n'était pas mon opinion à

 10   moi seul, mais celle de la communauté internationale qui a pris part à la

 11   tentative de la mise en œuvre de cet accord.

 12   Q.  Ce sera mon dernier thème. Je souhaite passer à un autre document, s'il

 13   vous plaît.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Il s'agit de la pièce 1D 02961, 1D 02961.

 15   C'est un document qui en premier lieu a été abordé avec un autre témoin et

 16   je peux fournir les éléments d'information pour le compte rendu d'audience,

 17   si vous le souhaitez. 

 18   Q.  Veuillez regarder ce document en premier lieu, s'il vous plaît. Encore

 19   une fois pendant le week-end, lorsque nous nous sommes rencontrés, je vous

 20   ai remontré ce document et vous avez pu le parcourir, n'est-ce pas ?

 21   R.  C'est tout à fait exact.

 22   Q.  Nous allons parler de ce texte dans quelques instants mais tout d'abord

 23   veuillez regarder ce document. A la fin du document, nous voyons qu'il y a

 24   des symboles.

 25   M. KARNAVAS : [interprétation] En B/C/S, ceci se trouve -- c'est le à la

 26   fin du document 1D 580046.

 27   Q.  Mais si vous regardez les symboles c'est quelque chose qui a été

 28   quelque peu contesté au cours de ce procès. Reconnaissez-vous ces symboles

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  1   et si tel est le cas, veuillez nous dire : de quoi il s'agit ?

  2   R.  Ça vient de faire son apparition sur l'écran. Il s'agit du sigle et du

  3   drapeau utilisé sur le territoire de la Communauté croate d'Herceg-Bosna.

  4   Q.  S'agit-il des mêmes si nous savons l'utiliser pour la République de

  5   Croatie ?

  6   R.  Non. Ça se ressemble.

  7   Q.  Bien. D'après ce document, nous constatons que ce document a été créé

  8   en 1997. Avez-vous eu l'occasion de regarder une partie de ce document

  9   surtout la partie qui concerne le contexte historique, et pour vous cela se

 10   trouve en bas de la page du document 1D 580047.

 11   R.  Oui. Il s'agit d'une étude relative à la Communauté croate d'Herceg-

 12   Bosna. C'est un résumé et je me suis penché sur le texte, oui.

 13   Q.  Compte tenu de votre parcours, je le suppose, que vous êtes quelqu'un

 14   qui est qualifié, vous pouvez nous donner un avis d'expert sur l'exactitude

 15   de ce résumé, et si tel est le cas, je vous demande de bien vouloir nous en

 16   faire part ?

 17   R.  Pour être bref, il s'agit d'une œuvre de profane qui, dans des

 18   circonstances similaires, était souvent utilisé dans la vie sociale de la

 19   Croatie pas seulement dans cette période-là mais même avant dans des

 20   documents similaires de statut d'association, d'organisation et autres du

 21   même genre, on avait coutume de mettre un contexte historique pour

 22   attribuer au tout une espèce de signification solennelle, mais tout ça

 23   c'est un amateur qui l'a fait.

 24   Q.  Dans les grandes lignes, pouvez-vous nous donner un avis dessus sur la

 25   qualité de ce texte ? Je sais que vous avez dit que c'était un texte rédigé

 26   par un amateur. Est-ce que vous trouvez qu'il a des choses qui sont plus ou

 27   moins exactes ? Est-ce qu'il y a des choses qui paraissent manifestement

 28   inexactes d'un point de vue historique, bien sûr, compte tenu de votre

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  1   formation ?

  2   R.  Rien de particulier, vous savez. On a pris -- on a repris des fragments

  3   déterminés et il s'agit de trois pages de texte relatives à l'histoire tout

  4   entière. Donc a pris dans fragments de différentes périodes de l'histoire

  5   et ce n'est pas structuré de façon scientifique, il s'en est pas

  6   approfondi, donc c'est un travail superficiel effectué par un profane.

  7   Q.  Bien. Donc nous regardons le début de ce document, nous constatons

  8   qu'il y a un statut qui est celui de la Communauté croate d'Herceg-Bosna,

  9   et comme je l'ai indiqué, on constate que ceci est daté, la date est celle

 10   du 24 mai 1997, lorsque ceci a été adopté. Bien sûr, étant donné que vous

 11   êtes historien et que vous êtes de la région et que vous connaissez les

 12   événements, est-il exact de dire qu'à cette époque-ci, ce statut a été

 13   adopté par les personnes qui l'ont adopté, et la Bosnie-Herzégovine était

 14   placé sous les auspices de la communauté internationale, si je puis le dire

 15   ainsi ? C'est une autre façon de dire que c'était régi par le bureau des

 16   Hauts représentants à l'OHR, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   A l'époque, la Bosnie-Herzégovine, et de nos jours encore en quelque sorte,

 19   se trouve sous la surveillance prédominante et déterminante de la

 20   communauté internationale.

 21   Q.  En réalité, l'OHR, le Haut représentant, comme cela se dit n'a pas

 22   hésité par le passé à soi rejeter les personnalités politiques qui après

 23   avoir été élus si ces personnes violaient l'esprit ou à la lettre des

 24   accords de paix Dayton; vous connaissez cela, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui. Je dirais même que c'est assez inhabituel pour l'Europe, c'est

 26   plutôt radical sans argumentation et exposé de motifs, sans qu'il y ait

 27   d'un procès ou une procédure, on a dépossédé certaines personnes de leurs

 28   droits civiques, et je dirais que la communauté internationale a procédé de

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  1   façon plutôt radicale notamment pour ce qui est donc de ce haut

  2   représentant de la communauté internationale en Bosnie-Herzégovine.

  3   Q.  Le dernier document que je vais voir avec vous, le 1D 03148, 1D 03148.

  4   M. KARNAVAS : [interprétation] Pour vous, Messieurs les Juges, nous venons

  5   de faire traduire -- nous n'avons fait que traduire les éléments pertinents

  6   et non pas l'ensemble du document. Ce document nous l'avons reçu du bureau

  7   du Procureur, donc c'est leur document.

  8   Q.  Veuillez regarder ceci rapidement et regarder la première partie du

  9   document. Il semble, n'est-ce pas, que la création de la Communauté croate

 10   d'Herceg-Bosna en 1997, comme l'indique les statuts, y compris les drapeaux

 11   et les armoiries qui sont en annexe, ont été enregistrés de façon

 12   officielle et approuvés par les pouvoirs en place en Bosnie-Herzégovine, ce

 13   qui comprend également le bureau des hauts représentants, n'est-ce pas ?

 14   Est-ce que ceci -- le document n'illustre pas ce point, Monsieur ?

 15   R.  Oui. Je pense que c'est sans ambiguïté aucune. On peut spéculer, bien

 16   sûr, mais les instances compétentes de l'autorité de l'Etat ont fait leur

 17   travail.

 18   Q.  Une dernière question Ces drapeaux et ces armoiries ne constituent pas

 19   des symboles qui sont nés au cours des cinq, dix ou 15 dernières années,

 20   mais qui remontent à des temps beaucoup plus éloignés de l'histoire,

 21   remontent à plusieurs siècles même peut-être ?

 22   R.  Oui. L'emblème et le drapeau sont des symboles qui ont été utilisés, et

 23   ça existait au fil du temps dans une forme similaire. Ça a été utilisé à

 24   partir des années 1990 et ça représente une partie intégrante de ce qu'on

 25   pourrait qualifier de folklore, les symboles dus à affectation générale. On

 26   les utilise lorsqu'on créé des associations ou organisations qui s'en

 27   servent aussi dans la vie quotidienne.

 28   Q.  Mais vous voulez parler de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine.

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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Je souhaite simplement que ceci soit

  2   consigné correctement au compte rendu d'audience.

  3   Q.  Pour le territoire de la Bosnie-Herzégovine, ces symboles qu'on voit

  4   sur l'écran. Vous parlez de l'emblème et du drapeau. Je vous ai dit que ça

  5   ressemblait à ce qui existait sur le territoire de la République de Croatie

  6   au fil de l'histoire. Donc, c'est graphiquement similaire. Mais ce sont les

  7   symboles qui ont été utilisés sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine,

  8   ceux-là.

  9   Q.  Je vous remercie beaucoup, Monsieur le Professeur. Je n'ai pas d'autres

 10   questions à vous poser. Je vous remercie beaucoup d'être venu témoigner.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai terminé mon

 12   contre-interrogatoire. Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Karnavas.

 14   Monsieur Scott, il nous reste une demi-heure. Est-ce que vous pouvez

 15   commencer le contre-interrogatoire ?

 16   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je serais ravi de

 17   pouvoir le faire. Il faut juste que nous puissions nous organiser un petit

 18   peu et sortir les classeurs.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Scott, je vois que les interprètes disent

 20   qu'ils n'ont pas reçu les documents. Je sais que, pour vous, ça a été un

 21   travail colossal de préparer tous ces classeurs et je vous en remercie

 22   parce qu'ils sont bien préparés, comme vous le faites d'habitude. Mais

 23   c'est vrai que si vous aviez les moyens également de donner aux cabines un

 24   classeur, ça leur permettrait plus facilement de suivre quand il y a des

 25   problèmes de traduction. Mais, bon. C'est un vœu, ce n'est pas une

 26   obligation.

 27   M. SCOTT : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne suis pas en

 28   mesure de mettre à disposition des documents supplémentaires. Maintenant,

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  1   depuis trois ans et demi, ceci n'a pas été la pratique. Je comprends fort

  2   bien que ceci puisse être utile pour les interprètes. Je les remercie

  3   vivement pour l'excellent travail qu'ils font, mais nous n'avons pas

  4   préparé des documents par le passé de cette façon et c'est ainsi que nous

  5   avons agi au cours des trois dernières années, mais j'espère que nous

  6   pourrons leur venir en aide si cela s'avère nécessaire.

  7   Contre-interrogatoire par M. Scott :

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

  9   R.  Bonjour. Bonjour, Monsieur.

 10   Q.  Peut-être que nous pourrions commencer par ceci.

 11   M. SCOTT : [interprétation] Je demande à l'huissier de m'aider au niveau de

 12   l'écran, s'il vous plaît. Nous avons besoin de déplacer des documents qui

 13   sont sur le rétroprojecteur. Peut-être qu'on peut les mettre sur le petit

 14   chariot à côté. Merci.

 15   Je voudrais demander à l'huissier de m'aider, s'il vous plaît. Peut-être

 16   que nous pourrions commencer par ceci.

 17   Q.  Reconnaître que vous avez été dans la campagne électorale. Vous vous

 18   êtes présenté. C'est quelque chose qui a été, une affiche qui a été

 19   présentée lorsque vous avez posé votre candidature à l'élection

 20   présidentielle de la République de Croatie.

 21   R.  Monsieur le Procureur, je vous remercie de faire ma promotion de ma

 22   candidature. C'est exact. Ceci est l'une des affiches habituelles qui sont

 23   propres à la vie politique de la Croatie.

 24   Q.  Peut-être que ce qui est écrit en bleu où la ligne rouge… Est-ce que

 25   vous pourriez nous dire ce que, pour ceux qui ne parlent pas le croate,

 26   est-ce que vous pouvez nous dire ce qu'on peut y lire, s'il vous plaît.

 27   R.  Ce qui est dit en haut, vous le voyez, mon nom et prénom, Josip

 28   Jurcevic. Juste en dessous, vous avez sur la bande rouge "Président

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  1   croate," et juste en dessous, en bleu, il est dit : "Quand si ce n'est pas

  2   maintenant."

  3   Q.  Simplement pour parler de vous et de votre formation, nous allons, bien

  4   sûr, continuer demain. D'après ce que j'ai compris, vous avez d'après votre

  5   CV.

  6   M. SCOTT : [interprétation] Qui est le 3D 03725, cela se trouve dans le

  7   premier classeur pour ceux qui souhaitent le regarder, je crois.

  8   Q.  Monsieur, vous nous avez précisé que vous avez été diplômé en histoire

  9   et philosophie --

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Je vais -- je crois qu'il est préférable que

 11   vous indiquiez au témoin que le numéro auquel correspond son curriculum

 12   vitae, en fait.

 13   M. SCOTT : [interprétation] Le 3D 03725. C'est un exemplaire qui nous a été

 14   remis par le conseil de M. Praljak.

 15   Q.  Vous nous avez dit que vous avez obtenu un diplôme d'histoire et de

 16   philosophie au cours du premier cycle. Ensuite, voilà, sur la deuxième

 17   page, je ne souhaite pas ne pas être aimable à votre égard, mais simplement

 18   pour placer l'ensemble de votre témoignage dans son contexte. Vous dites

 19   vous-même qu'à partir, entre 1975 et 1991, vous n'aviez pas de poste fixe;

 20   c'est exact ?

 21   R.  C'est exact. Mais pas avant cela car j'étais étudiant, avant, et la

 22   première fois que j'ai eu un emploi fixe, c'était en 1994, vers la fin de

 23   l'année.

 24   Q.  Très bien. Je vous remercie. Donc, en 1991, d'après votre CV toujours,

 25   vous avez eu un poste auprès du ministère de la Défense de la République de

 26   Croatie en tant que fondateur et directeur des archives centrales du

 27   ministère de la Défense de la République de Croatie; c'est bien cela ?

 28   R. Le premier jour, j'ai répondu plus précisément et plus largement à la

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  1   question qui m'a été posée par M. le Juge concernant cela.

  2   En 1991, donc, j'ai été volontaire --

  3   Q.  Je m'excuse. Je n'ai pas beaucoup de temps. Donc, s'il vous plaît,

  4   j'aimerais que vous répondiez rapidement. Je vais essayer d'être courtois

  5   mais je vous demande vraiment me donner des réponses très courtes, si

  6   possible, par oui ou par non, car j'ai très peu de temps. Si vous commencez

  7   à partir dans des diversions, je vais vous interrompre.

  8   Donc vous avez travaillé en tant que ministre de la défense auprès du

  9   ministère de la Défense en tant que fondateur et directeur des archives

 10   centrales, et ce, en 1991; c'est vrai ?

 11   R.  Il est impossible de répondre à certaines questions par oui ou non, car

 12   dans ce cas, la Chambre aura un sentiment se fondant sur une réponse simple

 13   mais erronée que vous m'aurez arrachée.

 14   Q.  Je vous interromps. Il faudrait que ce contre-interrogatoire se passe

 15   bien, donc répondez à ma question, s'il vous plaît.

 16   Dans votre CV, il est écrit et je cite :

 17   "1991 et 1992, ministère de la Défense de la République de Croatie,

 18   fondateur et directeur des archives centrales du ministère croate de la

 19   République de Croatie."

 20   C'est bien ce qui est écrit, oui ou non ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Très bien. Au vu de votre parcours au fait que n'aviez pas eu de poste

 23   fixe au cours de ces années précédentes, comment avez-vous fait pour avoir

 24   un poste tout d'un coup au ministère ?

 25   R.  Je l'ai partiellement décrit déjà en répondant à M. Le Juge hier, mais

 26   si c'est nécessaire, je peux vous le dire à vous aussi en détail. J'étais

 27   donc l'un des fondateurs --

 28   Q.  Qui vous a engagé ? Quel est le nom de la personne qui vous a engagé ?

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  1   R.  Ce n'était pas un emploi permanent, tout d'abord.

  2   Q.  Répondez à ma question. Je ne vous ai pas demandé si c'était un poste

  3   fixe ou non. Je vous ai demandé quel était le nom de la personne qui vous

  4   avait engagé. Je n'ai pas beaucoup de temps, donc veuillez écoutez mes

  5   questions et répondre de façon très précise, s'il vous plaît.

  6   Qui vous a engagé ?

  7   R.  C'est l'état-major du ministère de la Défense qui m'a permis d'exercer

  8   cette fonction. L'état-major de l'armée croate.

  9   Q.  --  s'agit-il exactement, le nom de la personne, s'il vous plaît, qui

 10   vous a engagé, qui --

 11   R.  Il ne s'agit pas de personne mais d'une institution. Mon unité était la

 12   seule unité qui vaquait à la collecte d'information et de matériaux, et

 13   quand on a essayé de mettre sur pied des archives, ils m'ont choisi moi

 14   pour être commandant pour être à la tête de cela et toute l'unité pour

 15   représenter une forme d'archive centralisé. II s'agissait d'archives qui

 16   n'avaient pas été enregistrées officiellement en tant que telles et il y a

 17   une déclaration très détaillée à cet effet devant ce Tribunal dans

 18   l'affaire Gotovina où j'ai déposé concernant la genèse de ces archives.

 19   J'ai fourni également une déclaration détaillée devant ce Tribunal qui est

 20   enregistrée.

 21   Q.  Merci. Mais ce n'était pas ma question -- répondez à ma question, s'il

 22   vous plaît.

 23   R.  C'est donc une institution qui m'a employé et non pas une personne

 24   particulière.

 25   Q.  Hier vous avez dit qu'il y avait une personne, enfin, il y avait un

 26   intermédiaire entre vous et M. Slobodan Praljak en ce qui concerne la ligne

 27   hiérarchique. Pourriez-vous nous dire qui était cette personne qui était

 28   l'intermédiaire entre vous et M. Praljak ?

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  1   R.  Lorsque l'on parle de l'administration de l'IPD, c'était le responsable

  2   le chef qui était à la tête de cette section. Mais il a changé, il s'est

  3   agi de plusieurs personnes successivement dans le temps. Au moment où j'ai

  4   commencé à occuper cette fonction au moment d'en arriver dans les archives,

  5   M. Praljak n'était pas encore assistant du ministre et n'avait pas encore

  6   ces responsabilités. Par ailleurs, cette personne est décédée, c'était le

  7   responsable Anton Mijatovic pour l'un d'entre eux, et l'autre responsable

  8   était Ante "Mulacic [phon] qui est encore vivant, et il y a eu Ivan Tolj

  9   également qui a été -- ensuite Ivan Tole qui était responsable de cette

 10   section particulière.

 11   Q.  Vous avez aussi dit qu'à cette période vous travailliez aussi au

 12   département de l'Information et des Opérations psychologiques; est-ce vrai

 13   ?

 14   R.  Dans le cadre de l'IPD, oui, de la section des Activités informatives

 15   et psychologiques, il y avait des sous sections dont l'une était les

 16   archives centrales dont j'étais le directeur et le fondateur.

 17   Q.  D'après ce que vous avez dit hier, vous ne travailliez pas uniquement

 18   aux archives, d'ailleurs vous n'avez pas dit grand-chose à propos de ce que

 19   vous faisiez au niveau des archives. Vous nous avez donné l'impression en

 20   fait que vous étiez plutôt engagé à d'autres activités que de s'occuper des

 21   archives.

 22   R.  Non, c'est inexact. Je ne sais pas comment vous en êtes venu avoir

 23   cette impression.

 24   Q.  Ce service des Opérations psychologiques et d'opérations d'Information,

 25   est-ce la même chose que ce que l'on appelle parfois l'IPD ?

 26   R.  C'est l'acronyme qui est utilisé.

 27   Q.  Très bien. Je vois dans votre CV qu'il semble avoir un trou dans votre

 28   carrière. Donc on n'a rien pour l'année 1993. Que faisiez-vous donc entre

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  1   1992 et 1994 ?

  2   R.  J'ai été sans emploi.

  3   Q.  Vous avez rejoint l'institution de Science Evopilar [phon]  en 1997 et

  4   depuis ce temps vous avez été employé constamment dans cette institution;

  5   c'est bien cela ?

  6   R.  J'y suis employé de façon permanente depuis cette année-là.

  7   Q.  Avez-vous un poste à l'heure actuelle ou un titre dans le cadre de

  8   votre emploi dans cette institution ?

  9   R.  Oui. Je suis à la tête du centre de recherche sur la paix, la guerre et

 10   le terrorisme. Mais mon titre officiel est collaborateur scientifique

 11   associé.

 12   Q.  Qui était votre supérieur à l'institut ? Pourriez-vous nous dire qui

 13   est votre supérieur hiérarchique, la personne qui donne donc des ordres ?

 14   R.  Du point de vue scientifique je n'ai pas d'autre responsable au-dessus

 15   de moi, que le ministère de l'Education et des Sciences, qui approuve les

 16   différents projets, du point de vue administratif, c'est le directeur de

 17   l'institut Vlado Sakic.

 18   Q.  M. Sakic sera aussi un témoin expert pour M. Praljak, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. Il est docteur en psychologie, et spécialisé en psychologie

 20   sociale.

 21   Q.  Lorsque vous avez fait référence au ministère des Sciences, il s'agit

 22   du ministère des Sciences de la République de Croatie, n'est-ce pas ?

 23   R.  C'est exact.

 24   Q.  Donc de façon directe ou indirecte vous travaillez pour le gouvernement

 25   de la Croatie, n'est-ce pas ?

 26   R.  C'est un institut à caractère public, une institution publique qui se

 27   trouve dans le cadre du ministère de l'Education et des Sciences de la

 28   République de Croatie. Cela signifie donc qu'il entre dans le cadre du

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  1   système étatique mais au même titre que toutes les écoles, établissements

  2   d'enseignement, universités et ainsi de suite, et le ministère des Sciences

  3   joue le rôle d'intermédiaire entre l'ensemble de ce système et le ministère

  4   du Budget, par exemple.

  5   Q.  Vous nous avez dit qu'en plus de votre parcours universitaires, vous

  6   avez été aussi un militant assez actif au cours des vingt dernières années

  7   dans le domaine à la fois sociale et politique, n'est-ce pas ?

  8   R.  C'est partiellement exact. J'ai mentionné le fait que j'étais très

  9   actif non pas d'un point de vue politique non pas dans la vie politique,

 10   mais dans la société civile, notamment dans les domaines des droits de

 11   l'homme et de la cohésion sociale.

 12   Q.  Peut-on dire donc qu'au cours de ces vingt ans de militantisme, vous

 13   avez souvent été présenté comme quelqu'un qui était plutôt à droite en ce

 14   qui concerne l'échiquier politique ?

 15   R.  Cela dépend de qui vous parlez. Il y a eu un certain nombre de clichés

 16   qui ont été attribués par les uns et par les autres mais il y a également

 17   d'autres opinions, des opinions différentes. Malheureusement, en Croatie,

 18   il est coutumier de tout ramener à la politique et de décrire les choses en

 19   noir et blanc, à gauche ou à droite. C'est encore un réflexe qui subsiste

 20   de la Yougoslavie communiste. Mais, personnellement, si vous --

 21   Q.  Vous êtes aussi membre ou officier enfin vous êtes actif au sein de

 22   l'association des anciens combattants de la guerre patriotique, quelque

 23   chose qui est souvent mentionné comme étant le UHDDR ?

 24   R.  C'est une association non gouvernementale -- ou plutôt, des

 25   associations non gouvernementales. Cela appartient à la société civile. Il

 26   s'agit d'associations qui sont issues qui émanent de la guerre patriotique

 27   croate. Alors je souhaiterais demander que l'on veuille bien m'afficher en

 28   fait la version en croate à côté de la version anglaise, sur la même page

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  1   pour qu'elle soit côte à côte et corresponde à la même page, si c'est

  2   possible pour que j'aie la version en croate également du document.

  3   M. KOVACIC : [interprétation] S'il n'y a pas le document dans le classeur

  4   en anglais, je peux peut-être tout simplement prêter mon exemplaire.

  5   M. SCOTT : [interprétation]

  6   Q.  Ça devrait être dans le premier dossier de toute façon, dans le premier

  7   classeur. Vous devriez le trouver.

  8   R.  Très bien. Je regardais l'écran. Très bien. Merci. Je l'ai trouvé.

  9   Q.  Nous allons aussi essayer de vous aider à l'écran mais normalement vous

 10   devez le retrouver sur le document papier aussi.

 11   Maintenant au titre des organisations dont vous êtes membre, donc je ne

 12   voudrais pas remettre en question la valeur d'une association ou d'une

 13   autre, mais au vu des circonstances qui prévalent en Croatie et vos

 14   commentaires que vous avez faits à propos de tout ce qui serait politique

 15   en Croatie, je remarque quand même que toutes ces associations sont des

 16   associations de droite ?

 17   R.  Non. Cette association ne peut être considérée comme étant une

 18   association de droite ni du point de vue de ces dispositions statutaires ni

 19   si l'on s'intéresse à mon activité au sein de ces différentes associations.

 20   C'est un fait connu et reconnu en Croatie que je défends les intérêts des

 21   victimes et de toutes les personnes qui ont eu à souffrir de la guerre

 22   patriotique qui comprennent les volontaires. Je défends âprement leurs

 23   droits et je suis fréquemment en conflit avec les autorités au pouvoir en

 24   Croatie, y compris le pouvoir actuel du HDZ qui procède à des

 25   discriminations lourdes à l'encontre des volontaires -- des hommes -- des

 26   personnes qui ont participé à la guerre patriotique croate.

 27   Donc vous pourrez vous reporter à un certain nombre de discours et autres

 28   apparitions que j'ai faites ne public qui vont en ce sens. Donc quand vous

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  1   parlez de moi comme étant -- comme en me situant à droite  du spectre

  2   politique, ça n'a rien à voir avec mes origines familiales et sociales ni

  3   avec mon activité au sein de la société et mon activité publique, et cela

  4   n'a surtout n'a pas le moindre rapport avec tout interprétation que l'on

  5   pourrait faire de mes travaux scientifiques qui se fondent sur un paradigme

  6   humaniste.

  7   Q.  Je vais revenir à l'institut où vous avez travaillé avec M. Sakic. Donc

  8   M. Sakic, si j'ai bien compris, est à la tête de cet institut. J'aimerais

  9   savoir depuis combien de temps vous travaillez à cet institut tous les deux

 10   ?

 11   R.  Il est l'un des fondateurs de cet institut en 1991. Je suis employé par

 12   cet institut à partir de 1997, mais j'avais déjà collaboré à un certain

 13   projet précédemment, projet lié à la guerre patriotique croate. J'avais

 14   toutefois participé non pas en tant qu'employé, mais en tant que

 15   collaborateur externe et de manière générale tous les projets de l'institut

 16   font intervenir un assez grand nombre de collaborateurs extérieurs.

 17   Q.  Donc mis à part dans cette affaire, nous reviendrons bien sûr aux

 18   travaux que vous avez accomplis pour cette affaire et aussi les travaux de

 19   M. Sakic. Donc à part cette affaire, M. Sakic et vous-même ont-ils

 20   travaillé ensemble de façon étroite ? Avez-vous déjà publié ensemble, par

 21   exemple, des livres ? Etes-vous des collègues proches ?

 22   R.  Cela dépend des projets considérés. Actuellement au sein de l'institut,

 23   il y a 17 projets extrêmement différents et pluridisciplinaires qui ont été

 24   approuvés par le ministère des Sciences car on trouve employer au sein de

 25   cet institut aussi bien des psychologues, des sociologues, des démographes,

 26   des politologues, des spécialistes en démographie, et cetera.

 27   Q.  Veuillez répondre à ma question. Je voulais juste savoir si vous avez

 28   travaillé de façon étroite avec M. Sakic, si vous avez publié ensemble, par

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  1   exemple, des articles ou des livres ?

  2   R.  Nous avons coopéré lorsque certains projets particuliers l'exigeaient

  3   de façon similaire à la coopération que nous pouvions avoir avec d'autres

  4   scientifiques que ce soit au sein de l'institut ou à l'extérieur de celui-

  5   ci.

  6   Q.  Très bien. Une dernière question sur votre parcours avant de passer à

  7   autre chose. Lorsque vous étiez vous travaillez au sein de l'IPD au

  8   ministère de la Défense croate, avez-vous à un moment ou à un autre

  9   travaillé en même temps que M. Zuzul ?

 10   R.  Il y a eu au début sept ou huit fondateurs de l'IPD.

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   R.  L'un deux était M. Zuzul; l'autre était Miroslav Tudjman, le deuxième

 13   donc; le troisième c'était Ivan Tole puis il y a eu le Dr Knezovic, le Dr

 14   Rogic, Marinko Lozancic. Peut-être ai-je omis quelqu'un, c'était il y a

 15   longtemps.

 16   Q.  Merci. Donc au moins trois des fondateurs était M. Zuzul qui a déjà

 17   témoigné en l'espèce, M. Sakic que nous allons bientôt entendre, et

 18   Miroslav Tudjman qui était le fils de feu Franjo Tudjman; c'est bien cela ?

 19   Il s'agit de ces -- donc trois des fondateurs de cet IPD.

 20   R.  Non, M. Sakic n'a pas été un fondateur de l'IPD.

 21   Q.  En effet, c'était un fondateur de l'institut. C'était mon erreur. Donc,

 22   M. Zuzul et M. Miroslav Tudjman faisaient partie des membres fondateurs de

 23   cette organisation IPD ?

 24   R.  C'est exact.

 25   Q.  Très bien.

 26   M. SCOTT : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais utiliser le

 27   temps de façon la plus efficace mais je vais commencer un nouveau sujet; je

 28   ne pense pas que je pourrai en terminer en cinq minutes. Peut-être

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  1   pourrions-nous reprendre demain ?

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez raison. Il vaudrait mieux que vous

  3   continuiez demain avec les autres sujets. Alors j'indique tout d'abord,

  4   vous avez déjà utilisé 24 minutes. Nous siégeons pour une raison

  5   incompréhensible dans la salle I étant précisé que c'est l'affaire Popovic

  6   qui siégera là. Je ne comprends pas pourquoi ils ne l'ont pas fait siéger

  7   dans la salle numéro I, ce qui fait que les Juges vont être amenés à

  8   transporter leur classeur qui font plusieurs kilos, mais on va se faire

  9   aider, j'ose espérer; sinon, on risque une hernie discale donc on va faire

 10   très attention à portant ces classeurs.

 11   Alors nous nous retrouverons demain à 9 heures dans la salle I.

 12   Alors, Monsieur le Professeur, je renouvelle mes conseils comme maintenant,

 13   nous avons confirmation que vous êtes une personnalité importante, pas

 14   d'entretiens avec les médias. Ça vous nous l'avez dit et je vous le redis à

 15   nouveau, voilà.

 16   Donc je souhaite à tout le monde une bonne fin d'après-midi, et à

 17   demain.

 18   --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le mercredi 16

 19   septembre 2009, à 9 heures 00.

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