Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 28 septembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Coric est absent]

  5   [Le témoin vient à barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges; bonjour à

 10   toutes les personnes présentes dans le prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-

 11   04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci, Messieurs les Juges.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : En ce lundi, je salue en premier le témoin. Je salue

 13   MM. les accusés, Mmes et MM. les avocats. Je salue les représentants du

 14   bureau du Procureur, ainsi que toutes les personnes qui nous assistent.

 15   Tout d'abord, je vais donner la parole à M. le Greffier, qui a un numéro IC

 16   à nous donner.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. La Défense

 18   Petkovic a fourni sa réponse aux objections de l'Accusation au document

 19   versé par le truchement du témoin expert, Josip Jurcevic. Cette liste aura

 20   le numéro IC 1051. Merci, Messieurs les Juges.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais, au nom de la Chambre, lire une décision

 22   orale.

 23   Décision orale proprio motu concernant le dépôt des requêtes de la Défense

 24   Praljak en vertu de la ligne directrice 9 de la décision de la Chambre du

 25   24 avril 2008.

 26   La Chambre rappelle sa décision portant adoption des lignes directrices

 27   pour la présentation des éléments de preuve à décharge rendue le 24 avril

 28   2008, et notamment le paragraphe 35 relatif à la ligne directrice 9, aux

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  1   termes duquel toute requête demandant l'admission d'éléments de preuve

  2   documentaires doit être présentée dans les plus brefs délais après la fin

  3   de la présentation de l'ensemble des éléments de preuve relatifs à une

  4   municipalité ou à un sujet déterminé.

  5   La Chambre constate qu'à ce jour la Défense Praljak n'a pas déposé de

  6   requête écrite en admission d'éléments de preuve au titre de la ligne

  7   directrice numéro 9, et la Chambre ignore quelle est son intention en la

  8   matière. La Chambre rappelle que les Défenses ne doivent pas attendre la

  9   fin de la présentation de leur cause pour déposer de telles requêtes. La

 10   Chambre demande donc à la Défense Praljak de bien vouloir lui faire part,

 11   avant le 1er octobre 2009 à midi, de ses intentions concernant le dépôt

 12   éventuel d'une ou de plusieurs requêtes en vertu de la ligne directrice 9,

 13   et si oui, sur quels sujets et dans quels délais. Bien. Donc en un mot, la

 14   Chambre demande à la Défense du général Praljak de nous dire si elle va

 15   déposer des requêtes aux fins d'admission d'éléments de preuve

 16   documentaires. Et nous demandons à ce que ce soit fait avant le 1er octobre

 17   2009, à midi. Bien.

 18   Maître Kovacic, vous avez bien compris ?

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie de

 20   votre question et du rappel que vous venez d'effectuer. J'ai l'honneur de

 21   vous informer qu'il y a une heure à peu près, nous avons présenté une

 22   notification avec une information générale. Ça n'a pas encore été

 23   réceptionné, mais j'ai vu sur mon moniteur que ça a été envoyé au Greffe,

 24   donc dans une demi-heure ou une heure ce sera reçu, et on pourra, à titre

 25   supplémentaire, informer les Juges de la Chambre de certains aspects. Mais

 26   j'ai saisi l'opportunité puisque vous avez demandé l'autre jour d'informer

 27   la Chambre pour ce qui est des plannings et pour ce qui est du 3DA, et nous

 28   avons saisi l'opportunité pour informer qui de droit au sujet des lignes

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  1   directrices. Mais vous allez voir le texte dans la journée, et si besoin

  2   est, on va compléter.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Deuxièmement, vous nous avez fait savoir

  4   le 28 septembre, c'est-à-dire aujourd'hui même, que le témoin 3DA ne

  5   viendra pas, ce qui fait que votre dernier témoin, d'après le calendrier

  6   que vous nous avez donné, viendra le mardi 13 octobre, et puis nous

  7   n'aurons pas de témoin le 14, 15 octobre, puis, la semaine d'après, et nous

  8   reprendrons le 26 octobre avec le témoin de la Défense Petkovic. 

  9   C'est bien cela, Maître Kovacic, qui est prévu ?

 10   M. KOVACIC : [interprétation] C'est tout à fait cela, Monsieur le Juge. Je

 11   viens de me souvenir du fait que nous avons envoyé des copies à vos

 12   collaborateurs pour des raisons de courtoisie en attendant que vous le

 13   réceptionniez. Mais je vois que vous avez déjà reçu cela. Et on l'a dit

 14   dans le dernier paragraphe, télégraphiquement, intentions du point de vue

 15   de la requête pour ce qui est des pièces à conviction conformément à la

 16   directive numéro 9.

 17   Merci.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, nous, nous reprendrons donc le 26 octobre.

 19   Mais il y a un problème d'horaire. Le 26 octobre, c'est le lundi, 14 heures

 20   15, mais il se trouve que le 26 octobre, c'est la date également de

 21   l'élection du président de ce Tribunal. Cette élection est prévue à compter

 22   de 2 heures de l'après-midi. Ça peut aller vite comme ça peut ne pas aller

 23   vite. Ça dépend s'il y a un, deux ou trois candidats. Donc il y a tout lieu

 24   de penser que nous commencerons l'audience le 26 octobre à 16 heures. A 16

 25   heures, normalement l'élection sera terminée, en principe. Voilà. Donc vous

 26   mettez cela bien en mémoire pour que nous puissions prendre nos

 27   dispositions.

 28   Au départ, j'avais pensé, en tant que Juge permanent, puisque je dois

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  1   voter, je m'étais dit c'est pas la peine d'y aller. Puis mes collègues

  2   m'ont fait savoir qu'ils voulaient assister à cette phase, donc nous

  3   commencerons a priori à 16 heures. Donc il y aura un petit décalage, mais

  4   on ne peut pas faire autrement.

  5   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je

  6   souhaite simplement dire qu'il y a une erreur, lorsque vous avez évoqué le

  7   fait que nous ne terminerions ce jour, le 26 octobre. Il est écrit ici, à

  8   16 heures, en principe, les élections devraient être terminées. Mais vous

  9   avez ajouté également que nous terminerions à 18 heures, donc il faudrait

 10   insérer 18 heures à ce moment-là, si j'ai bien compris.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Non. Au transcript en anglais, 18 heures n'a jamais

 12   été mentionné et, dans ma langue, je n'ai pas parlé de 18 heures. Je

 13   rappelle que l'élection du président commence à 2 heures de l'après-midi,

 14   c'est-à-dire 14 heures. Ça devrait prendre deux heures, donc ça devrait

 15   nous amener à 4 heures de l'après-midi, et nous commencerions l'audition du

 16   témoin expert à 4 heures de l'après-midi. Voilà, tout est clair.

 17   LE TÉMOIN : ZVONIMIR SKENDER [Reprise]

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors maintenant, il restait les questions de Me

 19   Alaburic, puisque vous avez le pupitre, et d'après le timing, il doit vous

 20   rester 15 minutes, pas plus. Mais avant de vous donner la parole, Monsieur

 21   le Témoin, grâce à ces quelques jours qui nous séparent de la dernière

 22   audience et aujourd'hui, la réflexion m'amène à vous poser deux questions

 23   d'ordre technique, parce qu'avec le recul on se rend compte qu'il y a

 24   nécessité de repréciser certaines données.

 25   Dans la langue française, à plusieurs reprises, vous avez parlé de

 26   "région militaire." Dans les textes dans votre langue, nous avions les

 27   termes de "zone opérationnelle," pas de "région militaire," "zone

 28   opérationnelle." Alors quand, en français, vous dites "région militaire,"

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  1   est-ce qu'on doit comprendre que c'est la même chose que "zone

  2   opérationnelle" ou c'est différent ?

  3   LE TÉMOIN : C'est la zone opérationnelle. La région militaire, pour moi,

  4   c'est, par exemple, le Tomislavgrad.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc c'est la même chose. En regardant

  6   plusieurs documents, je me suis rendu compte que dans les ordres il y avait

  7   parfois mention de zones opérationnelles, en abréviation dans votre langue

  8   OZ, et parfois, l'appellation de "district militaire," et en abréviation

  9   ZP.

 10   Alors OZ et ZP, est-ce que c'est pareil ?

 11   LE TÉMOIN : Je ne me rappelle pas ce que ça veut dire ZP.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Ça devrait dire district militaire.

 13   LE TÉMOIN : Je suppose que "Zborno podrucje" ça veut dire la région

 14   militaire.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc c'est la même chose.

 16   LE TÉMOIN : C'est la même chose.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Deuxième question de nature technique.

 18   Concernant la police militaire, la semaine dernière vous nous avez dit : Il

 19   y a la police militaire, la vraie, et puis il y a la police militaire dans

 20   les brigades. J'ai réfléchi à ce que vous avez dit. Est-ce que ça veut dire

 21   ceci : il y a la police militaire qui relève de l'administration de la

 22   police militaire dans une chaîne de commandement et ça serait la vraie

 23   police militaire, et puis il y a des policiers militaires au niveau des

 24   brigades qui, comme vous le dites, sont des soldats qui sont qualifiés de

 25   police militaire dans les brigades; est-ce bien cela ?

 26   LE TÉMOIN : C'est bien cela, votre Honneur.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors dernière question d'ordre technique. Mon

 28   Général, saviez-vous que pendant les combats, parfois des unités de la

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  1   vraie police militaire, celle qui était dans la chaîne de commandement hors

  2   brigade, a été subordonnée à des brigades et a participé à des combats ? Le

  3   saviez-vous ?

  4   LE TÉMOIN : La vraie police militaire n'a jamais été subordonnée aux

  5   brigades, mais ils ont participé au combat.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Mon Général, ce que vous dites est important,

  7   parce que le général Praljak nous a dit le contraire. Je vais vous

  8   expliquer. Le général Praljak nous a dit ceci : pour des opérations de

  9   combat, un commandant de brigade ou un commandant de zone opérationnelle

 10   peut demander à l'administration de la police militaire de subordonner des

 11   effectifs qui, à ce moment-là, sont placés sous le contrôle exclusif du

 12   commandant de la brigade. Voilà ce qu'il nous a dit, et là vous venez de me

 13   dire le contraire. Est-ce que vous pouvez nous préciser pourquoi il y a une

 14   différence ?

 15   LE TÉMOIN : Je pense que lorsque la police militaire a été ramenée dans une

 16   zone de combat, ils dépendaient de deux commandements, de celle de

 17   commandant de brigade, mais plutôt de région militaire, et directement, de

 18   police militaire.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous dites qu'ils dépendaient de deux

 20   commandements. Au point de vue opérationnel, ou bien au point de vue

 21   compétence résiduelle en matière d'enquête ?

 22   LE TÉMOIN : Au point de vue opérationnel.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors ce que vous dites est au transcript,

 24   mais nous avons, jusqu'à présent, compris le contraire. Nous avions

 25   compris, enfin moi j'ai compris, mais peut-être que mes collègues peuvent

 26   intervenir. Moi, j'ai compris ceci : quand une unité de police militaire

 27   est détachée dans une brigade X et va mener des opérations militaires,

 28   c'est le commandant de la brigade qui exerce l'autorité pleine et entière

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  1   sur ses effectifs en leur disant : Vous allez prendre position, vous allez

  2   faire ci, vous allez faire ça, et ces polices militaires n'ont, à ce

  3   moment-là, qu'un seul chef, le commandant de la brigade.

  4   LE TÉMOIN : Le commandant de brigade donnait les ordres sur le terrain,

  5   mais je répète, malgré ça, la police militaire prenait également les ordres

  6   du chef de la police militaire.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : Monsieur le Témoin, je pense qu'il n'est pas possible

  8   de ne pas préciser un peu. Parce que s'il y a deux commandants qui peuvent

  9   donner des ordres sans distinction, ça va faire le désordre, si les ordres

 10   ne sont pas coordonnés. Est-ce qu'il n'y a pas lieu de préciser que sur le

 11   point de vue administratif, les policiers militaires restent dans

 12   l'administration de la police militaire, alors que pour ce qui est de leurs

 13   activités sur le terrain, pendant le temps qu'ils sont attribués à la

 14   brigade, ce n'est que le commandant de brigade qui leur dit ce qu'ils

 15   doivent faire dans le champ de bataille.

 16   LE TÉMOIN : Oui, c'est bientôt ça.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : Merci. Je crois que ça clarifie et ça élimine les

 18   différences qu'on avait pu deviner. Merci.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour les réponses aux questions qui me

 20   paraissaient nécessaires.

 21   Dernière question qui touche votre personnalité et votre crédibilité.

 22   En début de la semaine dernière, vous m'avez dit que c'est Filipovic qui

 23   vous avait demandé de venir rejoindre le HVO. J'ai cru comprendre que

 24   Filipovic était un ancien légionnaire, comme était ancien légionnaire

 25   Kapular, comme étant ancien légionnaire Gotovina, comme était ancien

 26   légionnaire Roso, et il y en a d'autres.

 27   Est-ce qu'au sein du HVO vous ne formiez pas un conglomérat d'anciens

 28   légionnaires ?

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  1   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur. Filipovic était un sergent à la Légion

  2   étrangère. Kapular n'a jamais été à la Légion étrangère. Et Filipovic m'a

  3   téléphoné en Corse pour savoir si j'étais disponible de venir en Croatie,

  4   et je suis venu.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Et Ante Roso ?

  6   LE TÉMOIN : Ante Roso, il était également sous-officier à la Légion

  7   étrangère que je n'ai pas connu pendant mon service à la Légion, étant

  8   donné qu'on a jamais servi dans les mêmes régiments.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Alaburic.

 10   Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à tous

 11   et à toutes dans le prétoire. Je salue également le témoin. Alors pour que

 12   le PV soit bien formulé, je tiens à préciser qu'à l'occasion de mon contre-

 13   interrogatoire à la date du 24, il a été dit que je poursuivrais ce contre-

 14   interrogatoire. Or, je tiens à remercier le témoin et à informer les Juges

 15   de la Chambre que je n'ai plus de questions pour ce témoin-ci.

 16   Merci.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 18   Maître Alaburic.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, bonjour à vous.

 20   Bonjour, Monsieur Skender. Bonjour à tous et à toutes dans le prétoire.

 21   Contre-interrogatoire par Mme Alaburic :

 22   Q.  [interprétation] Avant que je ne pose mes questions, M. Skender --

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je tiens à tirer

 24   quelque chose au clair pour ce qui est du temps mis à ma disposition. Si

 25   vous vous en rappelez, il me semble que c'était mercredi dernier, Mme Senka

 26   Nozica, au nom de nous deux, vous a informé qu'il y avait deux Défenses

 27   d'intéressées pour ce qui est du contre-interrogatoire du général Skender,

 28   et que nous allions partager le temps qui nous a été imparti, à savoir 45

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  1   minutes. Or, d'après les consultations que nous avons effectuées, il est

  2   tout à fait certain que nous allons avoir besoin d'un peu plus de temps

  3   pour tirer au clair la totalité des questions que nous pensons être

  4   intéressantes et précieuses pour ce qui est du témoignage du général

  5   Skender.

  6   De ce point de vue-là, Mme Nozica et moi avions partagé les 45

  7   minutes de façon à ce que chacune d'entre nous ait 22 minutes et demie, si

  8   mes calculs sont bons, et le temps qui excéderait les 22 minutes et demie

  9   serait mis à la charge de la Défense de M. Stojic, voire du général

 10   Petkovic, respectivement.

 11   Alors, je vous demanderais l'autorisation de procéder en conformité avec

 12   cet accord, et si j'ai besoin de quelques minutes de plus par rapport à ce

 13   qui a été mis à ma disposition, je veux bien que ce soit pris sur mon temps

 14   total, mais je vous demande l'autorisation de prendre ces quelques minutes

 15   supplémentaires. Je crois que ce sera au bénéfice de tout un chacun dans ce

 16   prétoire, et je crois bien que le général Skender sera un témoin précieux.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, normalement, on a, comme vous

 18   l'avez dit, donné 45 minutes à Mme Nozica et à vous-même. Me Nozica a

 19   utilisé 31 minutes, ce qui fait que normalement il doit vous rester 14

 20   minutes. Le temps que vous allez prendre au-delà des 14 minutes vous sera

 21   retiré de votre crédit global.

 22   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais apporter

 23   mon soutien à ce que ma consoeur vient de dire, et je vois que ça ne serait

 24   pas correct, bien que dix minutes, ça ne devrait pas être un problème.

 25   C'est moi qui aie demandé à ce que tout ce qui dépasserait 22 minutes et

 26   demie soit pris sur mon temps à moi. Et pour ce qui est du temps de Mme

 27   Alaburic, au-delà des 22 minutes et demie, ce sera pris sur son temps à

 28   elle. C'est moi qui aie fait cette proposition, et je vois qu'il faudrait

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  1   qu'on s'en tienne là.

  2   Merci.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on va prendre la calculette. Comme vous avez

  4   utilisé 31 minutes et que vous aviez 22 minutes et 30 secondes, donc vous

  5   avez 9 heures -- 9 minutes et 30 secondes qui seront déduites de votre

  6   temps. Et bien entendu, Me Alaburic aura 22 minutes et 30 secondes, et si

  7   jamais elle dépasse, ça lui sera retiré.

  8   Avant de venir à l'audience, il faut réviser ces tables de soustraction et

  9   d'addition pour ne pas se tromper.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Je remercie ma consoeur, Mme Nozica. Je

 11   vous remercie également, Messieurs les Juges.

 12   Q.  Alors, Général, avant que je ne vous pose les quelques questions que

 13   j'ai pour vous, je tiens à informer les Juges de la Chambre et les

 14   collègues de l'Accusation et autres personnes dans le prétoire d'une chose.

 15   Avons-nous eu l'occasion de nous rencontrer lors des préparatifs en vue de

 16   votre témoignage ?

 17   R.  Affirmatif.

 18   Q.  Est-ce que je vous ai informé des sujets que je souhaiterais aborder

 19   avec vous dans ce prétoire ?

 20   R.  Affirmatif.

 21   Q.  Avant que de vous poser mes questions au sujet de ce dont je vous ai

 22   informé et de ce qui fera l'objet de mes questions, grâce aux questions

 23   posées par les Juges aujourd'hui, je me propose de commencer par quelques

 24   autres questions. La première va porter sur la différence entre le

 25   témoignage du général Praljak concernant la police militaire et ce que vous

 26   nous avez dit au sujet de la police militaire vous-même jeudi passé.

 27   Général Skender, saviez-vous que fin décembre 1993, il y a eu

 28   réorganisation de la police militaire et qu'il y a eu suppression de

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  1   pelotons de brigade, que cette police militaire de la brigade a été, au

  2   niveau des pelotons, intégrée à celle de la brigade et que les bataillons

  3   d'assaut léger de la police militaire qui étaient destinés à des activités

  4   de combat ont été supprimés en tant qu'unités de la police militaire, et

  5   les effectifs ont été transférés vers les brigades de la garde, donc

  6   saviez-vous qu'une telle réorganisation de la police militaire a eu lieu ou

  7   pas ?

  8   R.  Affirmatif.

  9   Q.  Bien. Etant donné que vous êtes arrivé sur le territoire de l'Herceg-

 10   Bosna au mois de juillet 1993, est-ce que vous vous souvenez du moment où

 11   l'appellation zone opérationnelle d'Herzégovine du nord-ouest a été

 12   modifiée pour être énoncée district militaire pour devenir donc district

 13   militaire de Tomislavgrad ? Est-ce que ça s'est passé dans la deuxième

 14   moitié de l'année 1993 ?

 15   R.  Je ne sais pas. Je pense que c'est la deuxième moitié.

 16   Q.  Bien. Encore une petite question au sujet de votre témoignage de jeudi.

 17   Ce que je vais vous demander est consigné aux pages 45 216 du compte rendu

 18   d'audience et 45 217.

 19   En répondant à une question de M. le Juge Antonetti, vous avez parlé de ce

 20   qu'un commandant militaire devrait faire pour ce qui est d'avoir ouï-dire

 21   qu'un soldat à lui aurait commis un délit au pénal. Alors, le Juge

 22   Antonetti vous a demandé est-ce que le commandant militaire, une fois qu'il

 23   a remis l'affaire au SIS ou à la police militaire, a des obligations pour

 24   ce qui est de continuer à veiller et à suivre ce qui s'est produit au

 25   niveau du sanctionnement de l'homme qui faisait partie de son unité. Et

 26   vous avez dit qu'il devrait être, pour le moins, informé de ce qui se passe

 27   du point de vue de la sanction prononcée à l'égard de son soldat.

 28   Ma question, Général Skender, est celle-ci : qui est-ce qui est censé

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  1   informer le commandant militaire de ce qui se passe au niveau de l'enquête

  2   visant le soldat appartenant à son unité ?

  3   R.  J'ai dit effectivement qu'il devait, le commandant de secteur, être

  4   informé, mais je ne sais pas qui devait l'informer, car une fois l'affaire

  5   entre la juridiction militaire ou civile, le commandant de la zone n'était

  6   plus responsable.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Un petit rectificatif. La semaine dernière, à mon

  8   grand étonnement, sans que je vous avais posé la question, vous avez dit

  9   que quand le commandant de la brigade a saisi l'autorité compétente, il

 10   doit quand même contrôler l'exécution. J'étais étonné de ce que vous avez

 11   dit. Ce n'est pas moi qui vous ai posé cette question. C'est vous-même qui

 12   l'avez dit. Et là Me Alaburic renverse en disant que c'est moi qui vous

 13   avais demandé. Donc je rectifie. C'est vous qui avez répondu cela. Puis là,

 14   en revenant sur la question, vous remodifiez votre réponse.

 15   Vous dites que du moment que l'autorité est saisie, c'est fini pour le

 16   commandant de la brigade. Est-on bien d'accord maintenant ?

 17   LE TÉMOIN : Exact. C'est fini lorsque les autorités étaient saisies. Ce

 18   commandant de militaire n'a plus rien à voir avec ça.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : Monsieur le Témoin, vous déposez ici sous serment.

 20   LE TÉMOIN : Oui, Votre Honneur.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : Lorsque vous dites une chose le jeudi, et le lundi

 22   suivant, vous dites autre chose, on aimerait avoir des explications. Je

 23   partage la surprise dont a fait état le Président de la Chambre. Moi aussi

 24   je me souviens que vous aviez dit que si, il devait quand même suivre et

 25   s'informer.

 26   LE TÉMOIN : Il devait s'informer pour voir si cet ordre a été

 27   exécuté. Enfin, quand il a transmis à l'autorité de la police militaire ou

 28   d'autre, pour lui, théoriquement, c'est fini.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : Il y a une contradiction là. Ou bien il doit

  2   voir s'il y a eu des suites, ce qui en a été si, vous avez dit, si l'ordre

  3   était exécuté, je crois. Ce n'est pas complètement dans le transcript.

  4   Peut-être je me suis trompé. J'ai cru que vous aviez dit que le commandant

  5   doit s'assurer que cet ordre a été exécuté. Qu'est-ce que vous vouliez dire

  6   par ceci ?

  7   LE TÉMOIN : Je voulais dire que, par exemple, un commandant

  8   militaire, dont un ordre pour une affaire criminelle ou je ne sais pas,

  9   pour un type à la police militaire, il doit s'assurer que ce type-là était

 10   transmis à la police militaire.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : Et qui le lui dit ? Où est-ce qu'il prend ses

 12   renseignements ?

 13   LE TÉMOIN : Dans son commandement, pour savoir s'il était parti ou non.

 14   Sinon, je ne vois pas d'autre.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : Merci.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation]

 17   Q.  Général Skender, je vais quand même consacrer une partie de mon temps

 18   pour essayer de montrer à MM. les Juges qu'aujourd'hui vous êtes en train

 19   de nous expliquer exactement la même chose que ce que vous disiez jeudi.

 20   Mais la compréhension que j'en ai, est qu'il y a peut-être un certain

 21   malentendu. En page 45 216, il a été consigné, Général Skender, donc page

 22   45 216, il a été consigné, Général, que vous auriez dit que le commandant

 23   militaire a l'obligation de réagir immédiatement afin de mettre un terme

 24   aux activités indésirables. Il a l'obligation d'avoir recours à la police

 25   militaire et de remettre à la charge de cette dernière l'affaire en

 26   question. A la page 45 217, il est consigné, je vais citer en langue

 27   anglaise. Cela concerne les obligations du commandant militaire. Le général

 28   a dit, je cite :

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  1   "Il devrait au moins être informé de ce qui se passe ensuite."

  2   Voilà. Je pense que nous avons maintenant clarifié cela, Général.

  3   Je voudrais maintenant poursuivre l'interrogatoire tel que je l'avais

  4   prévu.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Je remercie Me Alaburic d'avoir essayé de clarifier

  6   en rappelant ce que vous avez dit, mais ça ne résout pas tout. Le

  7   commandant de brigade saisit le procureur militaire, puis voilà que le

  8   procureur militaire ne fait rien pour des raisons X, Y ou Z, alors même

  9   qu'il y a eu crime.

 10   D'après vous, est-ce qu'à ce moment-là le commandant de la brigade se doit

 11   d'agir ou bien, comme le procureur militaire ne fait rien, lui fait plus

 12   rien, pour lui s'est terminé.

 13   LE TÉMOIN : D'après moi, il doit agir.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Et il doit agir en faisant quoi ?

 15   LE TÉMOIN : En arrêtant l'individu qui a commis, par exemple, un crime, et

 16   avec la police militaire pour aider sa brigade, le mettre à la prison

 17   militaire.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, votre réponse complique énormément la

 19   compréhension. Mais je vais essayer de la synthétiser. Imaginons un crime

 20   est commis quelque part. Le commandant de la brigade demande à la police

 21   militaire de faire l'enquête. La police militaire fait son enquête, fait

 22   son rapport et adresse ce rapport au procureur militaire, et il apparaît

 23   que c'est X, Y ou Z qui sont les auteurs du crime. Voilà que le procureur

 24   militaire se croise les bras, ne fait rien.

 25   Alors, vous dites à ce moment-là que le commandant de la brigade qui a

 26   suivi tout ça constate que le procureur militaire n'a rien fait, que le

 27   juge d'instruction n'a pas été saisi ou n'a rien fait et, d'après ce que

 28   j'ai compris, le commandant de la brigade doit arrêter l'auteur du crime à

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  1   ce moment-là. Est-ce bien cela que vous nous dites ?

  2   LE TÉMOIN : Je n'ai jamais eu le cas pareil que l'autorité militaire

  3   compétente n'a pas réagi. Egalement, j'ai dit le commandant de brigade

  4   devait, mais je n'ai jamais eu des cas non plus que ça se passait.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc vous n'avez pas de cas, mais si jamais ce

  6   cas s'était passé, c'est comme ça que ça doit marcher.

  7   LE TÉMOIN : D'après moi, c'est comme ça que ça devait marcher.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour le compte rendu, je voudrais

 10   rajouter quelque chose pour être bien sûr. En ce qui me concerne, ces

 11   questions de droit entraient au droit qui s'applique sur le champ de

 12   bataille en Herceg-Bosna. Le Tribunal ne demande pas au témoin d'expliquer

 13   ce qui se passe en droit international et de nous dire quelle est la

 14   responsabilité du commandant au titre de l'article 3, paragraphe 7 [comme

 15   interprété] du Statut. Absolument pas, ce n'est absolument pas ce qui nous

 16   intéresse. En effet, jura novit curia, normalement, nous sommes censés

 17   connaître le droit; je l'espère.

 18   J'aspire juste à ce que cela soit parfaitement clair pour qu'il n'y

 19   ait pas de malentendu lorsqu'on lira ce compte rendu plus tard. Je vous

 20   remercie.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais Général, quand vous avez répondu à mes

 22   questions, votre réponse était celle d'un -- où était placé un commandant

 23   de brigade, quel qu'il soit, qu'il soit en Herceg-Bosna, en Croatie, à

 24   Pékin ou n'importe où. Est-ce que c'est votre réponse, c'est ce que doit

 25   faire un commandant militaire quel que soit son pays, ou bien la réponse

 26   que vous avez donnée est une réponse applicable uniquement à l'Herceg-Bosna

 27   ?

 28   LE TÉMOIN : Ce qu'il devait faire, votre Honneur.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce qu'il devait faire nonobstant le pays où il se

  2   trouve.

  3   LE TÉMOIN : Exactement, votre Honneur.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Moi, c'est ce que j'ai compris dans vos réponses.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation]

  6   Q.  Général Skender, sur ce même thème, je voudrais encore vous poser

  7   quelques questions. Vous avez dit n'avoir pas rencontré un tel cas dans la

  8   pratique en Herceg-Bosna et n'êtes pas en mesure de dire exactement comment

  9   on aurait procédé en vous fondant sur la connaissance que vous avez de la

 10   pratique. Est-ce que j'ai bien compris ce que vous nous avez dit ?

 11   R.  C'est bien cela.

 12   Q.  Général Skender, lors des trois ou quatre mois, approximativement, qu'a

 13   duré votre commandement à la tête de la région militaire de Tomislavgrad,

 14   avez-vous seulement pris connaissance du code de procédure pénale et des

 15   autres dispositions légales qui étaient en vigueur en Herceg-Bosna ?

 16   R.  Non, négative. Je n'ai pas pris les connaissances de ces notes en

 17   vigueur, car tout simplement je n'avais pas de temps. J'étais sur le

 18   terrain jour et nuit.

 19   Q.  Très bien. Est-ce que cela pourrait donc signifier que ce que vous nous

 20   avez expliqué comme étant les règles applicables au comportement d'un

 21   commandant militaire correspond à votre propre expérience de ce que devrait

 22   être un tel comportement, et est-ce que cela résulte également de votre

 23   expérience personnelle tant au sein de l'armée française qu'au sein des

 24   forces armées en Bosnie-Herzégovine après votre arrivée, indépendamment des

 25   dispositions légales d'ailleurs et des règlements en vigueur ?

 26   R.  Affirmatif, c'est mon expérience personnelle.

 27   Q.  Quand vous parlez d'"expérience personnelle," vous pensez à votre

 28   expérience de nombreuses années au sein de l'armée française ?

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  1   R.  On n'avait pas de problème à l'armée française de ce genre-là. Dès

  2   qu'il y avait quelque chose qui se passait, c'était réglé automatiquement

  3   entre le commandement et la gendarmerie.

  4   Q.  Très bien. Nous allons maintenant poursuivre comme je l'avais prévu

  5   pour mon contre-interrogatoire, Général Skender. Tout d'abord, je

  6   souhaitais vous demander, en votre qualité de soldat professionnel, ce que

  7   vous pensez de la relation entre des militaires de métier d'une part, et

  8   l'autorité civile d'autre part. Est-ce que l'armée a l'obligation

  9   d'accomplir certaines tâches indépendamment de la question de savoir quel

 10   parti politique est peut-être momentanément au pouvoir dans le pays où

 11   cette armée exerce ses activités ?

 12   R.  L'armée doit obéissance à la politique. Donc elle devait obéir dans les

 13   décisions politiques.

 14   Q.  Selon vous, Général, toujours en votre qualité de militaire de métier,

 15   y a-t-il une limite à cette obéissance qui doit être celle du soldat

 16   professionnel à l'égard de l'autorité civile ? Est-ce que vous exécuterez

 17   toujours sans la moindre réserve tout ordre émanant de l'autorité civile ?

 18   R.  Non. Comme dans toutes les armées, quand il y a un ordre qui pouvait

 19   signifier exaction contre les populations civiles, on n'est pas obligé

 20   d'exécuter ces ordres.

 21   Q.  Mais, Général Skender, s'agit-il uniquement d'exaction contre des

 22   civils ou bien plus généralement de tout acte punissable au pénal contre

 23   des civils ?

 24   R.  Contre tout acte punissable, c'est-à-dire tout ce qui, d'après les

 25   conventions de Genève, sont interdits.

 26   Q.  Très bien. Donc si jamais vous receviez un ordre vous enjoignant de

 27   commettre un acte punissable au pénal, vous en tant que soldat

 28   professionnel, vous auriez l'obligation de dire : "Non, je ne vais pas

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  1   faire cela." C'est illégal, c'est un crime, cela est contraire à la loi.

  2   Est-ce que je vous ai bien compris ?

  3   R.  Affirmatif, c'est bien cela.

  4   Q.  Général Skender, à l'époque où vous étiez en Herceg-Bosna, avez-vous

  5   jamais reçu de quiconque un ordre vous intimant de commettre un acte qui

  6   aurait pu être assimilé à un crime ou à un acte punissable au pénal ?

  7   R.  Négatif, jamais.

  8   Q.  Très bien. Je vais maintenant vous poser quelques questions portant sur

  9   des documents.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vais prier M. le Greffier de bien

 11   vouloir remettre au témoin la petite liasse de documents que nous avons

 12   préparée.

 13   Q.  Le premier de ces documents est un document de l'Accusation portant la

 14   cote P 11033. 11033. Je répète, c'est la cote P 11033, c'est maintenant

 15   correctement consigné.

 16   Il s'agit du document avec lequel l'Accusation a conclu son contre-

 17   interrogatoire du général Praljak. Comme nous pouvons nous en rendre

 18   compte, il s'agit d'un ordre émanant d'Ivan Kapular en novembre 1993. On y

 19   ordonne que soient punis certains soldats parce qu'ils ont refusé de se

 20   rendre sur le théâtre des opérations sur le front sud.

 21   Alors si vous avez pu vous y reporter, sachez, Général, que je ne

 22   vais rien vous demander concrètement sur ce document, mais je vais vous

 23   interroger plus généralement sur le front sud en m'appuyant sur les

 24   documents suivants. Pouvez-vous passer au document suivant, qui est le

 25   4D1293, au point numéro 2.1. Alors il faut dire qu'il s'agit d'un document

 26   signé par Gojko Susak, le ministre croate de la Défense, et ce, en mars

 27   1996. Il s'agit ici de l'évolution du processus de mobilisation et de

 28   déploiement des forces armées de la République de Croatie.

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  1   Au point numéro 2.1, le ministre croate ordonne que soit démantelé le

  2   commandement du front sud en tant que partie de ce processus général de

  3   mobilisation.

  4   Alors, il ressort, Général, de ce document que ce front sud se

  5   trouvait en Croatie et qu'il existait un commandement de ce front sud au

  6   sein du plan de mobilisation qui était celui de l'état-major de l'armée

  7   croate.  

  8   Pouvez-vous nous dire, Général Skender, ce que vous savez de l'existence de

  9   ce front sud sur le territoire de la Croatie ?

 10   R.  Affirmatif. Le front du sud, je crois qu'il était de Split jusqu'à

 11   Dubrovnik.

 12   Q.  Très bien. C'est ce que je souhaitais que vous clarifiiez à l'intention

 13   de la Chambre.

 14   Je vais maintenant vous poser une question qui sera liée aux réponses que

 15   vous avez données concernant les lignes de responsabilité concernant ce qui

 16   se passait sur les lignes de front. Je voudrais vous montrer un document

 17   émanant de la région militaire de Tomislavgrad.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : Je m'excuse de vous interrompre, Maître. Je suis un

 19   peu perplexe. Vous avez invoqué un document P 11033, et puis vous avez dit,

 20   il n'y a pas de questions au sujet de ce document. Alors pourquoi

 21   l'invoquez-vous ? Ça ne peut pas assister l'admission certainement, parce

 22   que le témoin ne s'est pas prononcé. J'ai l'impression que c'est une perte

 23   de temps, mais je me rends bien compte du fait que puisque je pose une

 24   question, cela augmente la perte du temps. Mais peut-être pour l'avenir et

 25   pour que je comprenne mieux ce que font les avocats, normalement il y a une

 26   raison, je vous saurais gré si vous vouliez bien me l'expliquer.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai l'intention

 28   justement d'économiser un peu de temps, et c'est pour cela que j'ai laissé

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  1   de côté certaines informations qui sont peut-être importantes.

  2   Le dernier document que nous avons utilisé est celui avec lequel

  3   l'Accusation a conclu son contre-interrogatoire du général Praljak.

  4   L'Accusation souhaitait, au moyen de ce document, prouver que le front sud

  5   se trouvait en Herceg-Bosna et que les soldats de l'armée croate qui

  6   avaient refusé de se rendre sur ce front sud avaient fait l'objet de

  7   sanctions disciplinaires. C'est ma faute si je n'ai pas expliqué la portée

  8   et le contenu de cette partie du contre-interrogatoire. Nous estimions

  9   qu'il s'agit d'une question très importante, à savoir celle de savoir si

 10   l'armée croate a bien été présente sur le territoire de la Bosnie-

 11   Herzégovine et, si oui, dans quelles circonstances.

 12   A présent, avec ce nouveau document, je souhaitais apporter la

 13   démonstration que ce front sud se trouvait sur le territoire de la Croatie.

 14   C'était du moins mon intention, et je souhaite présenter mes excuses si je

 15   n'ai pas été suffisamment claire.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : Merci. Vous avez ultimement clarifié, maintenant.

 17   Merci.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Je prie M. le Greffier de bien vouloir

 19   aider le témoin pour que l'on puisse placer cette carte que j'ai en main

 20   sur le rétroprojecteur, et ceci, afin que le témoin puisse nous montrer de

 21   quoi il s'agit en répondant à mes questions.

 22   Pouvons-nous relever un peu la carte. Parfait.

 23   Q.  Essayons maintenant, Général Skender, de montrer, à l'intention des

 24   Juges de la Chambre, ce que cela signifiait en prenant l'exemple de la

 25   municipalité de Tomislavgrad. Puis ensuite, on continuera avec Siroki

 26   Brijeg. Dites-nous, pour commencer, si une brigade du HVO existait ou non à

 27   Tomislavgrad ?

 28   R.  Affirmatif, elle existait.

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  1   Q.  Pouvez-vous nous indiquer, sur le territoire de la municipalité de

  2   Tomislavgrad, où passait la ligne de front le long, de laquelle la Brigade

  3   de Tomislavgrad était active. Je parle de 1992 et 1993.

  4   R.  Je n'y étais pas en 1992. Je suis arrivé qu'à la fin 1993. Mais la

  5   Brigade Tomislavgrad était dirigée vers la partie contre les forces serbes,

  6   vers Kupres, et elle arrivait régulièrement en renfort vers le Prozor, en

  7   face de Gornji Vakuf.

  8   Q.  Pouvez-vous nous montrer et nous dessiner avec ce feutre que vous avez

  9   en main où passait cette ligne de front à l'intérieur de la municipalité de

 10   Tomislavgrad, s'il vous plaît.

 11   R.  C'était à peu près comme ça, dans mon souvenir.

 12   Q.  Très bien. Pouvez-vous nous indiquer, au moins approximativement, où se

 13   trouvait dans cette municipalité la ville de Tomislavgrad elle-même ?

 14   R.  C'était à cet endroit, à peu près là.

 15   Q.  Est-ce que la ville de Tomislavgrad se trouvait sur le territoire où la

 16   Brigade de Tomislavgrad était déployée et active ?

 17   Je vais répéter ma question parce qu'il me semble qu'il faudrait peut-être

 18   traduire cela différemment. Est-ce que Tomislavgrad se trouvait dans la

 19   zone couverte par les activités de combat de la Brigade du HVO de

 20   Tomislavgrad ?

 21   R.  Il n'y avait pas les combats dans Tomislavgrad même, mais sous la

 22   frontière nord et vers le Prozor.

 23   Q.  Très bien. Général, à présent, penchez-vous sur la municipalité de

 24   Siroki Brijeg. Est-ce que vous pourriez nous dire si, sur son territoire,

 25   il y avait quelque activité de combat que ce soit, et y avait-il une ligne

 26   de contact avec un ennemi quel qu'il soit ?

 27   R.  Il avait, au nord de Siroki Brijeg, une ligne qui passait par Mostar et

 28   vers le sud.

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  1   Q.  Et pour ce qui concerne le territoire même de la municipalité de Siroki

  2   Brijeg, Général, qu'en était-il ?

  3   R.  Il n'y avait pas de combat même dans la région de Siroki Brijeg.

  4   Q.  Est-ce qu'il serait alors correct de dire, Général, que par exemple,

  5   sur le territoire de la municipalité de Siroki Brijeg, la Brigade du HVO

  6   locale n'avait à sa charge aucune activité ayant trait à la défense

  7   puisqu'il n'y avait pas, pour ainsi dire, de ligne de front sur le

  8   territoire de la municipalité, il n'y avait pas de conflits avec l'ennemi ?

  9   Est-ce que ce serait une description exacte de ce qui incombait à la

 10   brigade municipale de Siroki Brijeg, dans la zone de cette municipalité ?

 11   R.  Non. Au nord de Siroki Brijeg, il y avait la ligne de front contre les

 12   Musulmans, et ils tenaient ces lignes, certainement. Je ne sais pas

 13   exactement combien de gens il y avait, mais ils tenaient cette ligne

 14   jusqu'à Mostar.

 15   Q.  Etait-ce une ligne qui se trouvait sur le territoire de la municipalité

 16   de Mostar ?

 17   R.  C'était la ligne qui menait tout le long sur la rivière de Neretva.

 18   Q.  Très bien. Je vous remercie, Général Skender. Je pense que la question

 19   de la ligne de front est claire pour nous maintenant, mais je vais vous

 20   prier de bien vouloir indiquer la date de ce jour sur cette carte, le 28

 21   septembre 2009, de façon manuscrite et d'y apposer votre paraphe également,

 22   vos initiales. Et je vais demander à

 23   M. le Greffier s'il est possible d'obtenir un numéro IC pour cette carte.

 24   R.  [Le témoin s'exécute]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro IC.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation]

 27   Q.  Quelle date ?

 28   R.  Quel jour on est ? Je ne sais pas la date. 28.

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  1   M. LAWS : [interprétation] Pourrions-nous avoir aussi une date sur la carte

  2   pour savoir quelle est la date à laquelle ces lignes de front font

  3   référence au cours du conflit.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation]

  5   Q.  Donc, Général Skender, puisque mon estimé confrère de l'Accusation a

  6   posé la question de la période de temps à laquelle se rapporte les réponses

  7   que vous avez données.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pour le compte rendu, je tiens à dire que

  9   le document que le témoin vient de marquer recevra la cote IC 1052. Je vous

 10   remercie.

 11   LE TÉMOIN : Il s'agit de dates d'août à décembre 1993.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation]

 13   Q.  Merci, Général Skender.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : Monsieur le Témoin, à cette époque-là vous n'étiez

 15   pas dans le terrain, n'est-ce pas ?

 16   LE TÉMOIN : A cette époque, j'étais au sud de Mostar comme observateur.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : Bien.

 18   LE TÉMOIN : J'ai déclaré cela.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : Mais vous n'étiez pas encore commandant ? Vous avez

 20   raison. Merci.

 21   LE TÉMOIN : Non, non, je n'avais aucun commandement.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : Merci.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation]

 24   Q.  Essayons maintenant, au moyen de deux documents, Général, de montrer à

 25   MM. les Juges ce qu'était cette ligne d'affrontement et à quoi

 26   correspondait la zone où les forces armées étaient actives. Reportez-vous

 27   au document suivant dans cette liasse, qui porte le code 4D1364. 4D1364.

 28   Il s'agit d'un rapport signé par le commandant du secteur de la

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  1   défense de Mostar, Zlatan Mijo Jelic. Essayons de voir ensemble ce que

  2   signifie cette ligne d'affrontement à Mostar, dans la partie médiane. On

  3   parle de ligne d'affrontement autour de la banque, qui est dans un bâtiment

  4   de verre, tenue par des membres du poste de police de Mostar. Cette ligne

  5   est tenue par 12 policiers, qui sont des policiers. On trouve encore une

  6   autre douzaine d'hommes de la police qui se tiennent prêts sur une seconde

  7   ligne.

  8   Alors, Général Skender, cette seconde ligne dont il est question,

  9   est-ce qu'il s'agit de la première position de réserve ou bien cela

 10   signifie-t-il autre chose ? Est-ce que vous pouvez clarifier pour nous,

 11   s'il vous plaît ?

 12   R.  D'après moi, ça ne peut être qu'une position de réserve.

 13   Q.  Bien. La ligne suivante se trouve tout près du lycée et est tenue par

 14   les membres du 1er Bataillon de la Police militaire. Puis la troisième ligne

 15   se trouve entre le vieux lycée et l'établissement de santé, qui est tenue

 16   par un bataillon du HVO. Puis la ligne suivante, c'est autour de

 17   l'établissement de santé et c'est tenu par les membres du groupe

 18   antiterroriste Mrmak. Et l'autre ligne, c'est entre Aleksica Kuca et Zahum,

 19   et c'est encore un bataillon du HVO qui est tenu, et chaque ligne a des

 20   lignes de réserves.

 21   Général Skender, d'après ce que vous en savez, est-ce que cette

 22   description, pour ce qui est de la zone centrale de la défense de Mostar,

 23   ça correspond, oui ou non, à ce que vous nous avez décrit dans ce prétoire

 24   comme étant la ligne d'affrontement ?

 25   R.  C'est bien cela.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, quand il y a un document d'ordre

 27   militaire, évidemment je le lis, j'écoute la question de l'avocat, j'écoute

 28   votre réponse, puis je positionne ce document par rapport à l'ensemble de

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  1   l'affaire. C'est un document que je vois pour la première fois. Ça ne

  2   m'avait pas fait impression jusqu'à présent.

  3   Si je comprends bien, ce document émane du HVO, du commandement du 1er

  4   Bataillon de la Police militaire de Mostar, 14 juillet. Et il explique

  5   qu'il y a une première ligne avec 12 policiers et une seconde ligne. Mais

  6   ce qui m'intéresse, c'est ce qui est après.

  7   Il semble, dans ce document, qu'il y a un sniper qui est dans un

  8   bâtiment, le magasin Optika. En termes militaires, s'il y a un sniper

  9   ennemi, militairement, qu'est-ce que l'autre partie doit mettre en place

 10   pour annihiler ce sniper, en termes militaires, sans spéculer, bien

 11   entendu.

 12   LE TÉMOIN : Le parti contraire doit mettre un autre sniper qui le

 13   neutraliserait, théoriquement.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc le commandant du HVO, s'il est compétent, il

 15   doit mettre en place un sniper pour neutraliser l'autre sniper. On est bien

 16   d'accord ?

 17   LE TÉMOIN : C'est bien cela, Votre Honneur.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse est claire pour moi.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation]

 20   Q.  Général Skender, penchons-nous sur le document suivant, c'est le 1363.

 21   Non, je m'excuse, 1364. J'ai confondu les pièces. Alors, 4D1363. Je me suis

 22   corrigée, 1363. Il s'agit d'un document émanant du même auteur. Je répète

 23   le numéro du document, 4D1363. Maintenant, c'est bien consigné. 1363. C'est

 24   daté du 13 juillet, c'est le jour d'avant. L'auteur est le même, Zlatan

 25   Miojelic, commandant de secteur, et nous avons un descriptif tout à fait

 26   identique de la ligne d'affrontement à Mostar.

 27   Je vous prie, Général, de vous pencher sur la description des lignes

 28   d'affrontement et de nous dire si ça correspond à ce que nous avons entendu

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  1   dans ce prétoire, dire de votre part pour ce qui est de la description des

  2   lignes de confrontation.

  3   R.  Oui. Les lignes de combat passaient en plein centre-ville.

  4   Q.  Merci. Je vais maintenant vous poser plusieurs questions sur Prozor,

  5   Général, à l'époque vous avez été commandant de la zone militaire de

  6   Tomislavgrad. Alors, 4D1357. C'est le document suivant, 4D1357.Il s'agit

  7   d'un document signé par Luka Markesic, chef au centre SIS de Rama, et on y

  8   décrit la situation dans Rama. On décrit aussi un incident survenu le 25

  9   février 1994.

 10   Général, avez-vous été mis au courant de cet incident ?

 11   R.  Affirmatif, parce que la Brigade de Rama a entouré mon point de

 12   commandement.

 13   Q.  On y viendra à cet incident tout à l'heure, mais le document suivant

 14   maintenant, 1358, je vous prie. 4D1358. Il s'agit d'un document émanant de

 15   vous, Général Skender, pour ce qui est de l'interdiction de porter des

 16   armes à canon long dans Prozor. Est-ce que vous pouvez nous dire que c'est

 17   bel et bien un document que vous avez rédigé, l'ordre que vous avez donné

 18   vous-même ?

 19   R.  Affirmatif.

 20   Q.  Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez donné ce type d'ordre ?

 21   R.  C'est très simple. Les gens qui quittaient les fronts, ils allaient à

 22   la maison à Prozor, car c'était généralement la Brigade de Rama, et je leur

 23   ai interdit de ressortir en ville portant les revolvers ou d'autres

 24   armements vu les incidents qui se sont déroulés couramment dans les bars.

 25   Q.  Penchez-vous, je vous prie, sur le document suivant,

 26   4D1456. Dites-nous, Général Skender, est-ce que ce document, je vous l'ai

 27   laissé pour que vous puissiez le lire suite à notre entretien de mercredi

 28   passé, me semble-t-il ?

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  1   R.  Affirmatif.

  2   Q.  Fort bien. Il s'agit d'un planning d'activités émanant de

  3   l'administration du SIS et de la police militaire du HVO pour ce qui est du

  4   rétablissement de l'ordre public et de la paix publique pour ce qui est de

  5   ce secteur Uskoplje Rama. Le document est daté du mois de mars 1994. Il

  6   émane du ministre adjoint à la Défense, M. Marjan Biskic, que nous avons

  7   déjà eu l'occasion de voir dans ce prétoire.

  8   Général, penchons-nous sur plusieurs éléments de ce plan d'activités

  9   émanant de l'administration du SIS et de la police militaire.

 10   Dans le troisième passage de ce document, il est question, et je vais

 11   paraphraser, il est dit qu'il est relativement difficile de rétablir

 12   l'ordre et la paix publics à un moment où on est en train de combattre les

 13   forces de l'ennemi.

 14   Alors est-ce que votre expérience est de nature à nous dire qu'il est

 15   difficile de rétablir la paix et l'ordre publics et de contrôler la

 16   situation en ville, alors que vous avez, d'autre part, des activités et des

 17   combats avec l'ennemi ?

 18   R.  C'est exact. C'est très difficile de maintenir l'ordre en même temps

 19   que combattre.

 20   Q.  Dans le passage d'après, on parle d'un élément négatif pour ce qui est

 21   de cette mauvaise situation, à savoir l'existence d'un grand nombre de

 22   toutes petites unités avec des commandants qui se sont nommées eux-mêmes et

 23   qui, pendant toute cette période-là, de facto ne sont subordonnées à

 24   personne, mais ont participé aux combats uniquement parce qu'ils l'ont

 25   voulu eux-mêmes.

 26   Donc, Général Skender, est-ce que ce descriptif de la situation dans

 27   cette partie-là de l'Herceg-Bosna est exact ? Y avait-t-il véritablement

 28   ces mini-unités avec des commandants qui se sont nommés eux-mêmes et qui

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  1   n'étaient subordonnés à personne ?

  2   R.  C'est exact. Ce sont des petits chefs, ce que je parlais, qui

  3   organisaient les petits groupes de combattants et qui obéissaient

  4   pratiquement qu'à leurs lois.

  5   Q.  A la page suivante, Mon Général, et je vous renvoie à la quatrième

  6   partie de la page 2, il est fait état d'un incident où vous êtes impliqué.

  7   Les agissements d'Anto Bradic à Banja Luka qui, sous la menace d'une arme,

  8   prend le colonel Skender pour l'emmener ailleurs. Alors est-ce que c'est

  9   l'événement que vous nous avez décrit dans ce prétoire, Général, comme

 10   étant une espèce de mise en arrestation de vous-même par ce soldat ?

 11   R.  C'est bien cela. Je crois que c'était vendredi qu'on a parlé de cela.

 12   Q.  C'était jeudi, mais peu importe.

 13   R.  Pardon, jeudi.

 14   Q.  Non, mais c'est bon. C'est égal.

 15   Général, je vais maintenant vous demander quelque chose au sujet de

 16   votre déclaration à l'attention de la Défense du général Praljak. Si je

 17   vous ai bien compris, dans cette déclaration, vous avez essayé d'expliquer

 18   qu'il était difficile d'aboutir à des finalités véritables de

 19   sanctionnement de soldat au moment où des combats battent leur plein, et

 20   qu'il y a des situations où il est plus important d'avoir un soldat qui

 21   devrait être puni et de l'avoir pour l'utiliser dans des activités de

 22   combat plutôt que de le sanctionner tout de suite et lui faire quitter les

 23   rangs des unités au combat.

 24   Alors vous ai-je bien compris pour commencer dans cette partie de cette

 25   déclaration ou êtes-vous d'avis que j'ai mal compris quelque chose ?

 26   R.  Vous avez très bien compris. Il est très difficile de sortir les gens

 27   de l'unité combattante, même pour les punir. Lorsqu'il vous manque un ou

 28   deux hommes, c'est d'office pratiquement impossible de les punir tout de

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  1   suite.

  2   Q.  Penchez-vous maintenant sur le document suivant, Général. Il s'agit du

  3   P 293.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce document que nous avons sous les yeux est un

  5   document du mois de mars 1994. Votre commandement à Tomislavgrad s'est

  6   exercé jusqu'à quelle date ?

  7   LE TÉMOIN : J'ai pris le commandement autour du 20 décembre 1993 et je suis

  8   parti, début mars 1994, en permission en France, en Corse. Rentrant de

  9   permission, j'ai été rappelé par le ministre de la Défense de Croatie,

 10   Susak, me signifiant que je suis rappelé à Zagreb pour prendre le

 11   commandant second du 1er Corps des Gardes croates.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans votre commandement de décembre au mois de mars,

 13   est-ce que vous aviez Prozor dans votre zone de commandement ?

 14   LE TÉMOIN : Affirmatif.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous avons eu des témoins qui sont venus de Prozor

 16   qui nous ont raconté plusieurs choses. Nous avons eu un nombre considérable

 17   de documents qui montrent que dans cette Brigade de Rama, il y avait des

 18   problèmes. Et le document que vous avez sous les yeux montre qu'il y avait

 19   ce fameux "Kinder platoon," qui s'est livré à des tas de faits, notamment

 20   sur des civils.

 21   Quand vous avez exercé votre commandement, vous saviez cela ou pas ?

 22   LE TÉMOIN : Votre Honneur, on m'avait dit que ça s'est passé de la manière

 23   que vous venez de dire, mais jamais, jamais personne n'avait ni posé aucune

 24   plainte du côté des civils ou militaires à ce sujet-là chez moi.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, je ne veux pas vous mettre en

 26   difficulté, ce n'est pas mon intention, mais je dois faire mon travail et

 27   je dois mettre en perspective certains faits qui relèvent de l'acte

 28   d'accusation pour vous demander votre positionnement.

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  1   Dans l'acte d'accusation, il est indiqué qu'en décembre 1993, à Prozor, il

  2   restait 500 à 600 civils musulmans. Et dans l'acte d'accusation, il est

  3   également indiqué qu'à la fin de décembre, ces civils avaient été détenus

  4   ou envoyés dans les zones contrôlées par l'ABiH ou étaient partis à

  5   l'étranger.

  6   Quand on lit l'acte d'accusation, on a l'impression qu'à Prozor, il y

  7   avait quasiment plus aucun Musulman et que les rares Musulmans qui étaient

  8   encore dans les lieux, ils étaient emprisonnés. C'est ce que dit le

  9   Procureur dans ses écritures.

 10   Alors vous, vis-à-vis des civils musulmans, qu'est-ce que vous nous dites ?

 11   LE TÉMOIN : Je savais qu'il y avait un nombre de civils musulmans à Prozor,

 12   mais j'ignorais la quantité et combien ils étaient, encore moins s'ils

 13   partaient vers l'étranger ou dans d'autres destinations.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais vous-même, vous avez été à Prozor, vous avez

 15   visité la ville ou vous n'y avez jamais été ?

 16   LE TÉMOIN : J'étais tout le temps à Prozor, Votre Honneur.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Et vous rencontriez des Musulmans ou pas ?

 18   LE TÉMOIN : Dans la rue, très peu.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Et ça ne vous posait pas problème de voir qu'il y

 20   avait quasiment pas de Musulmans ?

 21   LE TÉMOIN : J'ai supposé qu'avant mon arrivée soit qu'ils étaient partis,

 22   mais ça ne me surprenait pas de pas voir beaucoup de Musulmans.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Très bien.

 24   Maître Alaburic.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation]

 26   Q.  Général Skender, dites-nous si à l'époque -- et j'aimerais qu'à cet

 27   effet vous illustriez un peu la situation de Prozor. Est-ce que Prozor

 28   c'était archibondée de soldats ou est-ce qu'il y avait sur pied d'égalité

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  1   des militaires et des civils, beaucoup de civils du groupe ethnique croate

  2   ? Enfin, qui est-ce que l'on pouvait voir dans les rues de la ville de

  3   Prozor à l'époque ?

  4   R.  On pouvait voir particulièrement les soldats, très, très nombreux

  5   soldats.

  6   Q.  Et dans les rues, avez-vous vu des civils du groupe ethnique croate ?

  7   R.  Très peu.

  8   Q.  Penchons-nous maintenant sur ce document, le dernier du jeu que j'ai

  9   préparé, le P 293. Il s'agit d'un règlement portant discipline militaire

 10   que, malheureusement, nous n'avons pas tellement eu le temps d'élaborer

 11   dans ce prétoire.

 12   Général Skender, vous nous avez dit que vous n'avez pas eu le temps de vous

 13   pencher sur la réglementation. Alors tirons au clair la chose. J'imagine

 14   que vous n'avez pas eu le temps non plus de lire ce règlement relatif à la

 15   discipline militaire, n'est-ce pas ?

 16   R.  C'est bien cela.

 17   Q.  Penchons-nous quand même sur le chapitre 7 de ce règlement. Il porte

 18   sur les décisions relatives à la responsabilité disciplinaire en état de

 19   guerre. C'est l'avant-dernière page de ce document, et je tiens à évoquer

 20   ici quelques articles seulement.

 21   Au 102 il est dit, je cite :

 22   "En temps de guerre, il n'est pas prononcé des mesures et des sanctions

 23   disciplinaires dont la mise en œuvre, compte tenu des conditions et

 24   circonstances dans lesquelles cela est censé être mis en œuvre, n'ont pas

 25   de finalité ou se trouve impossibles."

 26   Puis on passe à l'article 105, alinéa 3, où il est dit, je cite :

 27   "L'exécution d'une mesure disciplinaire d'arrestation d'un soldat ou

 28   sanction disciplinaire de mise en détention est interrompue, voire reportée

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  1   à plus tard, dans le cas où cela est nécessité par les missions de l'unité,

  2   voire de l'établissement ou encore pour des raisons de sécurité et de

  3   protection des personnes énoncées à l'alinéa 2 du présent article". Ce sont

  4   les personnes qui s'y trouvent être sanctionnées.

  5   Et une autre disposition encore que je voudrais citer, c'est l'article 109,

  6   alinéa 1 :

  7   "Une personne faisant l'objet d'une sanction disciplinaire et qui aurait

  8   fait preuve de courage ou qui se serait distinguée de façon particulière

  9   dans l'accomplissement de ses tâches, peut faire l'objet d'une atténuation

 10   ou d'un pardon pour ce qui est de la sanction prononcée à son égard."

 11   Alors, étant donné que les mesures et les sanctions en application du

 12   présent règlement pouvaient être prononcées par un responsable militaire ou

 13   par des tribunaux militaires, est-ce que ce qu'on vient de lire comme étant

 14   le règlement correspond bel et bien à ce que vous nous avez dit au sujet

 15   des priorités du point de vue du sanctionnement à des moments où il y a des

 16   activités de combat contre l'ennemi ?

 17   R.  Sans connaître ces règlements, je l'avais appliqué exactement comme

 18   prévoie ce règlement avec, par exemple, Banja Luka, c'est-à-dire la

 19   rapporter, sa punition, ultérieurement.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, pour lever toute confusion, les

 21   sanctions disciplinaires sont prononcées généralement par le commandant de

 22   la brigade. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 23   LE TÉMOIN : Pour les petites sanctions, oui, Votre Honneur.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Et pour les sanctions disciplinaires d'une gravité

 25   plus importante, qui les prononce ?

 26   LE TÉMOIN : L'affaire est donnée au rôle de la police militaire pour qu'ils

 27   fassent l'analyse et faire le point exactement de quoi s'agit-il.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je prends un cas théorique. Un soldat qui

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  1   brûle une maison, par exemple, alors qu'il n'a pas eu l'ordre de brûler la

  2   maison, un soldat qui tue un civil, un soldat qui viole une femme, un

  3   soldat qui dérobe la voiture, le téléviseur, le frigidaire, et cetera,

  4   d'après vous, ce type de comportement, est-ce qu'il relève d'une sanction

  5   disciplinaire prononcée par le commandant de la brigade, ou bien ce type de

  6   comportement relève d'une autre autorité que le commandant de la brigade ?

  7   LE TÉMOIN : Ce type de comportement relève de la police militaire, c'est-à-

  8   dire, c'est elle qui l'éclaircie.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Et alors, compte tenu de la gravité de la situation

 10   militaire, est-ce que la police militaire, de votre point de vue, ne doit

 11   pas arrêter l'auteur des infractions, ou malgré la situation militaire,

 12   elle doit arrêter l'auteur de l'infraction ?

 13   LE TÉMOIN : Elle devait arrêter l'auteur de l'infraction, mais vu ce

 14   règlement, ça peut se différer.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : L'interprétation que vous donnez des textes que nous

 16   avons sous les yeux, dans certains cas, d'après vous, la police militaire

 17   peut différer l'arrestation en tenant compte du paramètre militaire, qui

 18   fait qu'il y a lieu à différer l'arrestation.

 19   LE TÉMOIN : Je pense que oui, mais elle continue l'investigation de

 20   l'affaire.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 22   Mme ALABURIC : Monsieur le Président, je viens d'en finir avec mon contre-

 23   interrogatoire. Je tiens encore à remercier le général Skender de ses

 24   réponses. Merci, Messieurs les Juges, de m'avoir accordé un temps

 25   supplémentaire.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il est 4 heures moins le quart -- enfin, moins

 27   20, moins le quart. Nous allons faire donc notre pause, et puis après la

 28   pause, le Procureur commencera son contre-interrogatoire.

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  1   --- L'audience est suspendue à 15 heures 43.

  2   --- L'audience est reprise à 16 heures 11.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, vous avez la parole.

  4   M. LAWS : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à tous

  5   dans le prétoire. Bonjour, Général Skender.

  6   Contre-interrogatoire par M. Laws :

  7   Q.  [interprétation] Tout d'abord, j'aimerais savoir comment vous vous êtes

  8   retrouvé en Herzégovine à l'été 1993. C'est ma première question.

  9   R.  Arrivant à Zagreb --

 10   Q.  Non, non. J'ai présenté le sujet. J'ai présenté le sujet. Ce n'était

 11   pas encore ma question. Je voulais être certain que nous nous comprenions

 12   bien. Non, je n'ai pas été suffisamment précis.

 13   Je vais d'abord aborder la chose sous deux volets : votre arrivée en

 14   Croatie tout d'abord; ensuite lorsque vous vous êtes rendu à Citluk, en

 15   Herzégovine. D'abord, votre arrivée en Croatie, c'est mon premier sujet.

 16   R.  Je suis arrivé en Croatie fin juin, à Zagreb.

 17   Q.  Très bien. Je vous interromps, parce que je présente le sujet là. Je ne

 18   vous demande pas de répondre. Il faut juste que vous me disiez que vous

 19   aviez bien compris. Donc il y avait un officier croate que vous connaissiez

 20   depuis la Légion étrangère qui vous aurait contacté et qui vous a demandé

 21   si vous vouliez venir prêter main-forte aux Croates pour défendre leur

 22   patrie; c'est bien cela ?

 23   R.  C'est bien cela.

 24   Q.  Je vous remercie. C'était donc un dénommé Filipovic, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est bien cela.

 26   Q.  Je vous remercie. Lorsque vous êtes arrivé en Croatie, une personne du

 27   ministère de la Défense vous a ensuite demandé si vous étiez volontaire

 28   pour vous rendre en Bosnie-Herzégovine; c'est bien cela ?

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  1   R.  Quelqu'un du ministre de la Défense. Ce n'est pas lui-même, mais

  2   quelqu'un de son entourage, je suppose. Et j'ai répondu affirmatif.

  3   Q.  Très bien. C'était bel et bien ma question. C'est donc quelqu'un venant

  4   du ministère de la Défense qui vous a demandé si vous étiez prêt à venir

  5   prêter main-forte aux Croates; c'est bien cela ?

  6   R.  C'est bien cela. Je suppose que c'était auprès du ministère.

  7   Q.  Etiez-vous en contact avec le général Praljak avant de vous rendre en

  8   Croatie ou de vous rendre en Bosnie ?

  9   R.  Négatif.

 10   Q.  Il n'a donc pas du tout participé à votre déploiement en Bosnie, il

 11   n'était pas impliqué ?

 12   R.  Négatif.

 13   Q.  Je vous remercie. Maintenant, je vais vous donner lecture d'un passage

 14   de la déposition du général Praljak du 18 juin de cette année lorsqu'il

 15   était dans le siège des témoins. Page 41 645, ligne 14, on posait des

 16   questions au général Praljak, il s'agit des questions posées par le Juge

 17   Antonetti à propos des membres des forces armées de Croatie qui étaient

 18   venues se battre en Bosnie. Voici une des choses qu'a dites le général

 19   Praljak à ce propos, et d'ailleurs ça portait sur vous. Il a dit -- je

 20   pense qu'il serait bon de l'avoir à l'écran.

 21   Il s'agit donc d'une question qui est posée à la ligne 11 et qui

 22   porte sur les officiers de l'armée de Croatie qui font partie du HVO et qui

 23   se sont portés volontaires, mais qui restaient, du point de vue militaire,

 24   partie de la Croatie. Il a dit :

 25   "Je suis certain que M. Skender… C'est un citoyen français, il habite en

 26   Corse. Je l'ai contacté et il a demandé expressément à se rendre sur le

 27   front de bataille à rejoindre les rangs du HVO en tant que volontaire pour

 28   aller en Bosnie-Herzégovine."

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  1   R.  Je ne me rappelle pas que --

  2   Q.  Une minute, parce que je vais vous poser la question maintenant que

  3   j'ai donné lecture du texte.

  4   Ces deux versions sur votre arrivée en Bosnie semblent bien différentes,

  5   l'une et l'autre ?

  6   R.  Je ne me rappelle pas que le général Praljak m'a contacté, car, je

  7   répète, il y a quelqu'un du ministre de la Défense en Croatie qui me

  8   contactait demandant si j'étais volontaire de partir.

  9   Q.  Très bien. Vous l'avez déjà dit, mais je vous repose ma question. Les

 10   deux versions sont très différentes ? L'une des versions, c'est Filipovic

 11   qui vous appelle, ensuite quelqu'un du ministère de la Défense; et la

 12   deuxième version qu'on a ici à l'écran, c'est le général Praljak qui vous

 13   aurait contacté et vous seriez volontaire pour aller en Bosnie-Herzégovine.

 14   Donc attendez, j'aimerais bien que le témoin réponde à ma question.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Kovacic, ne faites une objection pour

 16   casser le rythme. Le Procureur fait son travail. Il constate qu'il y a une

 17   divergence, donc il demande au témoin d'expliquer. Vous intervenez pour

 18   dire quoi ?

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, avant

 20   d'envisager toute objection compte tenu de la remarque qui a été la vôtre,

 21   je pense, et pour ne pas maintenant entrer dans les détails ni donner des

 22   instructions au témoin, je pense que le témoin et le Procureur ne parlent

 23   pas de la même chose. Nous avons peut-être ici affaire à une tentative de

 24   créer un malentendu ou une certaine confusion.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, on verra plus clair quand le Procureur aura

 26   terminé. Continuez.

 27   M. LAWS : [interprétation] Oui. Je n'essaie de tromper personne, absolument

 28   pas. Je n'essaie pas de leurrer qui que ce soit, surtout pas le général.

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  1   Q.  Je vous ai donné lecture d'une citation du compte rendu qui semble

  2   suggérer que c'est le général Praljak qui vous aurait appelé, que c'est le

  3   général Praljak qui vous a demandé si vous étiez prêt à venir, et c'est

  4   ainsi que vous vous êtes porté volontaire pour aller en Bosnie-Herzégovine.

  5   En tout cas, au transcript, c'est ce que nous a dit M. Praljak.Donc

  6   j'aimerais savoir, Monsieur Skender, si vous vous souvenez que les choses

  7   se sont passées ainsi ou si, d'après vous, c'est faux, puisque les deux

  8   versions ne peuvent pas être correctes car elles sont contradictoires ?

  9   R.  C'est faux. Je répète que c'est M. Filipovic qui m'a téléphoné en

 10   Corse. Je suis arrivé en Croatie et, à ce moment-là, Bugojno a tombé et

 11   quelqu'un de l'entourage du ministre m'a demandé, je ne sais pas parce que

 12   je ne connaissais pas son nom, si j'étais volontaire pour partir en

 13   Herzégovine.

 14   Q.  Très bien.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si je puis interrompre et poser une

 16   question supplémentaire. Se pourrait-il que la personne du ministère soit

 17   M. Praljak ?

 18   LE TÉMOIN : Non, je ne l'ai pas dit de toute manière, mais je ne pense pas

 19   que c'était Praljak. Je ne sais pas.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : Merci.

 21   M. LAWS : [interprétation]

 22   Q.  Vous vous en souviendrez si c'était M. Praljak qui vous avait appelé du

 23   ministère. Donc je ne veux absolument pas tromper qui que ce soit, mais je

 24   pense qu'en fait, vous ne pouvez pas nous aider vraiment à propos de ces

 25   deux versions différentes. Vous ne savez pas pourquoi il y a deux versions

 26   différentes portant sur votre arrivée en Bosnie.

 27   R.  Je l'ignore, mais ma version, c'est ce qui s'est passé.

 28   Q.  Très bien. Très bien. Veuillez maintenant, s'il vous plaît, aborder la

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  1   déclaration que vous avez fournie à la Défense Praljak. A la page 2 de ce

  2   document en anglais, page 4 en B/C/S.

  3   La page 4 -- je pense que vous avez besoin d'aide. En tout cas, la

  4   déclaration se trouve juste après le document Praljak.

  5   M. LAWS : [interprétation] Peut-être M. l'Huissier pourrait venir vous

  6   aider. C'est devant.

  7   Q.  Donc il s'agit de la déclaration que vous avez fournie à la Défense

  8   Praljak. Pourriez-vous passer à la page numéro 4 de ce document en croate

  9   et trouver le paragraphe qui parle de votre décision de venir défendre et

 10   prêter assistance à l'Etat autonome croate. En haut de la page 4 en ce qui

 11   concerne la version croate. Le paragraphe commence par :

 12   "Etant donné un Croate de naissance étant officier retraité de

 13   l'armée française…" Est-ce que vous l'avez trouvé ? Le paragraphe suivant

 14   commence par : "A l'été 1993…"

 15   Avez-vous trouvé ces deux paragraphes, le premier commençant par

 16   "Etant Croate de naissance" ?

 17   R.  Oui, "Etant Croate de naissance." J'ai trouvé, oui.

 18   Q.  Très bien. Dans ce paragraphe "Etant Croate de naissance," voici les

 19   mots qui terminent ce paragraphe :

 20   "J'ai décidé de revenir en Croatie pour aider à défendre et à créer un Etat

 21   croate indépendant."

 22   Avez-vous trouvé ces mots ?

 23   R.  Affirmatif.

 24   Q.  Ensuite, ligne suivante : "A l'été 1993, je me suis rendu en

 25   Herzégovine où le conflit entre les Musulmans et les Croates était en

 26   cours."Le voyez-vous ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  A l'été 1993, la Croatie avait déclaré son indépendance et était

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  1   reconnue par les Nations Unies, n'est-ce pas ?

  2   R.  Affirmatif.

  3   Q.  Et la Bosnie-Herzégovine avait fait de même, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je pense, affirmatif.

  5   Q.  Vous vous êtes rendu en Bosnie pour vous battre contre la République de

  6   Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non, je ne voyais pas cela comme ça. Je voyais tout simplement d'aider

  8   le peuple croate qui était à ce moment-là en conflit avec les Musulmans.

  9   Pas du tout aucune arrière-pensée de quelle qu'elle soit.

 10   Q.  Général Skender, on ne peut quand même pas voir ça sous plusieurs

 11   angles. Vous aidiez les troupes qui avaient été mis sur le terrain par le

 12   HVO, dont le but était de combattre les troupes qui étaient mis sur le

 13   terrain par la République de Bosnie-Herzégovine. Peut-on voir les choses

 14   sous un autre angle ?

 15   R.  Je ne le voyais pas sous cet angle. Je voyais simplement de défendre le

 16   peuple croate qui a été en conflit avec les Musulmans.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, quand vous avez rencontré -- d'abord,

 18   ça m'a échappé, et je remercie le Procureur de mettre l'accent. Il y a une

 19   phrase terrible qui est sur ce document. Vous dites que vous êtes venu pour

 20   créer un Etat croate indépendant. Bon. Donc cette phrase, elle est très

 21   importante. Quand vous avez écrit votre déclaration, vous l'avez rédigée

 22   dans votre langue croate ou en français ?

 23   LE TÉMOIN : En langue croate.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, en langue croate. La langue croate, vous la

 25   maniez très bien.

 26   LE TÉMOIN : Affirmative, Votre Honneur.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dans la langue croate, quand vous écrivez "de

 28   créer un Etat croate indépendant," qu'est-ce que ça veut dire ?

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  1   LE TÉMOIN : En Croatie tout simplement. Mais je vois que je me suis trompé,

  2   étant donné que la Croatie a été déjà reconnue.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Parce que la phrase telle qu'on l'a lit, un juge

  4   raisonnable pourrait dire il vient pour créer au sein de la République de

  5   Bosnie-Herzégovine un Etat croate indépendant. Voyez la lecture qui peut

  6   être faite.

  7   LE TÉMOIN : Oui, je vois que ça peut être interprété comme ça, mais ce

  8   n'était pas du tout mon intention.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes sûr de ça ? Vous le dites sous la foi du

 10   serment ?

 11   LE TÉMOIN : Sous la foi du serment, je suis sûr.

 12   M. LAWS : [interprétation] :

 13   Q.  Bien, voici ce que je vous affirme. La situation dans laquelle

 14   vous vous trouviez était la suivante : vous saviez que c'était en Bosnie-

 15   Herzégovine que l'on allait décider les frontières de la Croatie. C'était

 16   cela en fait, la situation.

 17   R.  Absolument pas. Je répète, je suis descendu en Herzégovine pour aider

 18   le peuple croate, mais sans aucune idée de je ne sais pas quoi comme

 19   séparation ou d'autre chose.

 20   Q.  Très bien. Passons à autre chose. Passons à votre déposition, votre

 21   témoignage en ce qui concerne les problèmes de discipline au sein du HVO.

 22   C'est le sujet que nous allons aborder, d'accord ?

 23   R.  D'accord.

 24   Q.  Si je vous ai bien compris, vous avez dit qu'il y avait des problèmes

 25   de discipline terribles au sein du HVO. Je pense que vous l'avez dit lors

 26   de votre témoignage, n'est-ce pas ?

 27   R.  Affirmative.

 28   Q.  Ensuite, il était très difficile de gérer la situation parce que la

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  1   priorité c'est d'avoir suffisamment d'hommes pour le combat.

  2   R.  C'est bien cela.

  3   Q.  Si on les mettait en prison, on réduisait le nombre d'hommes

  4   disponibles pour le combat, et aussi, ça fait partie de votre déposition,

  5   et aussi on risque de gêner leurs camarades qui ne voudront plus se battre

  6   non plus. Vous l'avez dit, n'est-ce pas ?

  7   R.  Affirmative. Car je répète, tous ces gens-là, ils étaient volontaires,

  8   et seulement volontaires. Donc si on mettait quelqu'un en prison, il y

  9   avait toujours un certain nombre de ses amis qui ne venaient plus sur la

 10   ligne de combat.

 11   Q.  Très bien. Nous en reviendrons à ces volontaires, mais le contexte, ce

 12   problème, c'est qu'il y avait une pénurie d'hommes en fait, une pénurie de

 13   troupes. Il n'y avait pas assez d'hommes, de troupes, à déployer sur la

 14   ligne de front. C'était ça, le problème.

 15   R.  C'était bien cela.

 16   Q.  S'il était inévitable que l'ordre ne régnait pas vraiment, on a quand

 17   même pris la décision de ne pas sanctionner les débordements.

 18   R.  Ça n'était pas toujours le cas, mais en plupart des temps, ça a été

 19   comme ça. Par exemple, les déserteurs qui ne se présentaient pas à l'appel

 20   pour monter aux contacts, c'est-à-dire sur la ligne de front, tout

 21   simplement ils n'ont pas été punis, mais dirigés une fois pris, mais

 22   dirigés sur la ligne de front.

 23   Q.  Oui, je vais vous parler des déserteurs en tant que catégorie bien

 24   précise de personnes perpétrant des crimes. Enfin, normalement, si on ne

 25   punit pas le criminel, le criminel va continuer à commettre ces crimes

 26   d'habitude; c'est comme ça que ça se passe. Est-ce une affirmation avec

 27   laquelle vous êtes d'accord ?

 28   R.  Quand je parle de déserteurs, c'est les gens qui n'ont pas --

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  1   Q.  Je vous interromps. J'interromps, parce que là je ne parle pas de

  2   déserteurs. Je vous parle de principe. Toute personne qui commet un crime

  3   contre un civil, personnes qui commettent des viols, par exemple -

  4   puisqu'on va en venir là, aux viols - personnes qui commettent des

  5   meurtres, tous ces crimes commis contre des civils. Je tiens pour vrai ce

  6   que je vous affirme : en principe, si on laisse ces auteurs de crime en

  7   liberté, ils vont recommencer.

  8   R.  A l'époque de mon commandement à Tomislavgrad, je n'ai jamais eu les

  9   cas comme ça.

 10   Q.  Très bien. Nous y viendrons. Maintenant, l'armée de volontaires, vous

 11   nous avez dit depuis un moment que cette armée du HV était une armée de

 12   volontaires mal entraînés --

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de suivi. Le Procureur vous a posé des

 14   questions que je vous ai déjà posées, mais le Procureur a approfondi la

 15   situation.

 16   Parmi tous les officiers qui viennent devant ce Tribunal, vous êtes

 17   un des rares qui ont eu une double expérience. Vous avez fait déjà une

 18   guerre en Algérie, et puis une deuxième "guerre" en République de Bosnie-

 19   Herzégovine. Et donc, vous êtes un officier qui a cette double expérience,

 20   et il n'y en a pas beaucoup qui ont eu votre expérience.

 21   Partant de là, vous avez été militaire pendant plusieurs années dans

 22   un conflit -- dans le conflit algérien, et dans ce conflit algérien, vous

 23   avez dû rencontrer un certain nombre d'événements que vous avez retrouvés

 24   en République de Bosnie-Herzégovine, notamment les déserteurs.

 25   Il semble que dans le domaine public, on dit que la Légion étrangère

 26   en Algérie, qui venait pour partie également d'Indochine, il y a eu un

 27   nombre de déserteurs assez important. Donc la question des désertions, vous

 28   la connaissiez.

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  1   Dans votre souvenir, en Algérie, quand un déserteur était repris,

  2   est-ce qu'on le mettait en prison ou on le mettait au combat ?

  3   LE TÉMOIN : A la Légion étrangère, la plupart des désertions, ça s'est

  4   passé pendant l'instruction, et quand le déserteur a été repris, il était

  5   mis en prison.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous n'avez jamais eu la situation où un

  7   déserteur, à titre de sanction, on l'incorpore dans l'unité qui va au

  8   combat ? Ça, vous ne l'avez jamais connu ?

  9   LE TÉMOIN : A l'armée française, non.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette précision.

 11   Monsieur le Procureur.

 12   M. LAWS : [interprétation]

 13   Q.  J'allais en parler plus tard, mais nous allons parler des déserteurs

 14   tout de suite. Dans le classeur qu'on vient de vous donner, le nouveau

 15   classeur, il y a un document 4D01655. Je pense qu'il s'agit du dernier

 16   document de ce classeur, tout à fait à la fin du classeur. Il s'agit d'un

 17   document en date du 11 octobre 1993, signé par Bruno Stojic. Je ne voudrais

 18   pas passer trop de temps sur ce document, mais on voit au premier

 19   paragraphe de cet ordre qu'il est demandé aux tribunaux militaires et aux

 20   procureurs militaires d'accorder toute la priorité aux affaires ayant trait

 21   à des personnes n'ayant pas répondu à l'appel de mobilisation générale ou

 22   personnes ayant abandonné leur poste délibérément.

 23   Avez-vous vu cela ? C'est le premier paragraphe de ce document.

 24   R.  Je lis devant moi, oui.

 25   Q.  Pas besoin de lire la totalité du document. Est-ce que cela correspond

 26   à ce dont vous vous souvenez, le fait que les tribunaux militaires et les

 27   bureaux des procureurs militaires ont reçu l'ordre précis de traiter toutes

 28   les affaires de personnes n'ayant pas répondu à l'appel de mobilisation et

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  1   toutes les personnes ayant abandonné leur poste, en priorité, il fallait

  2   traiter ces affaires en priorité ?

  3   R.  Je n'ai pas vu ce document, mais tous les déserteurs, c'est-à-dire les

  4   militaires qui ne se présentaient pas à l'appel, ils étaient récupérés par

  5   la police militaire.

  6   Q.  Certes. Mais voici ce que je vous affirme : cela montre qu'en ce qui

  7   concerne les intérêts vitaux du HVO, il était possible d'établir des

  8   priorités.

  9   R.  Je ne vois pas la priorité. Je dis seulement que les soldats qui ne se

 10   présentaient pas à l'appel, ils étaient récupérés par la police militaire.

 11   Q.  Si vous passez au document précédent, donc le 4D02798, qui se trouve

 12   juste avant dans le classeur, on voit un document qui date aussi du mois

 13   d'octobre 1993. Ce sont des ordres à propos de personnes ayant abandonné

 14   leur poste sur la ligne de défense. Le voyez-vous ?

 15    R.  Oui.

 16   Q.  C'est écrit que la sanction soit que l'on tire sur l'unité, 1(a).

 17   "Commandants des unités seront proclamés traîtres du peuple et seront donc

 18   condamnés à une sanction extrêmement sévère, c'est-à-dire qu'ils seront

 19   passés devant le peloton d'exécution." C'est ce qui est écrit au 1(b) ?

 20   R.  Oui, je vois, c'est écrit.

 21   Q.  Donc dans ce document, cet adjoint d'un commandant semble dire que

 22   lorsqu'il y a un abandon de poste, la sanction c'est tout simplement le

 23   peloton d'exécution. C'est ce qui semble être écrit en tout cas.

 24   R.  Ça semble être écrit, exact.

 25   Q.  Donc pour en revenir aux crimes et à l'ordre qui est censé régner, il y

 26   aura des sanctions extrêmement sévères en ce qui concerne certains

 27   comportements des soldats. C'est ce qui semble être prévu.

 28   R. C'est écrit, mais c'était pas prévu comme ça en général.

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  1   Q.  Oui, en général. Bien. En revanche, on ne voit pas ce type de réaction

  2   en ce qui concerne le Kinder Vod ou Ante Bradic, tout ce qu'ils ont fait à

  3   Banja Luka. Les crimes qu'ils auraient commis ne sont pas sanctionnés de la

  4   sorte, absolument pas.

  5   R.  Pour le Kinder Vod, je ne sais pas, mais pour le Banja Luka, il a été

  6   puni avec quelques mois de retard par le tribunal militaire.

  7   Q.  Vous nous avez dit jeudi que l'on vous l'a dit après votre retour à

  8   Zagreb. On vous a dit que Banjaluka avait été bel et bien sanctionné pour

  9   ce crime. Vous nous avez dit cela, n'est-ce pas, jeudi, vous vous en

 10   souvenez ?

 11   R.  C'est bien cela. On m'a même demandé si je voulais retirer la plainte,

 12   et j'ai refusé, donc la plainte a continué sa route.

 13   Q.  A quel moment vous êtes-vous rendu à Zagreb, pour savoir quand

 14   Banjaluka a été poursuivi ? C'est pour replacer cela dans l'ordre

 15   chronologique. Donnez-nous la date à laquelle vous êtes revenu à Zagreb ?

 16   R.  Je suis parti en France début mars et en entrant à Zagreb -- j'étais

 17   rappelé à Zagreb et réaffecté dans une unité, dans une autre unité de

 18   l'armée croate.

 19   Q.  Bien. Nous allons aborder certains documents. Mais revenons à ce jour-

 20   là. Ante Bradic, qui était surnommé Banjaluka, et on voit au document

 21   3D00415 [comme interprété] que la date est le 12 janvier 1994. Il est

 22   important d'avoir cette date en tête. Donc si vous pouviez retrouver la

 23   pièce 3D00414, qui se trouve à quelques quatre onglets en arrière. C'est le

 24   12 janvier 1994. Nous avons la date.

 25   Comme vous nous l'avez dit dans votre déclaration -- si vous voulez voir

 26   cela dans votre déclaration, il s'agit du dernier paragraphe de la page 3.

 27   Cette personne avait tiré avec son pistolet dans le plafond de la cafétéria

 28   où vous vous trouviez. Vous pensiez qu'il était drogué à ce moment-là, et

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  1   il vous a visé avec son pistolet. C'est ça qui s'est passé, n'est-ce pas,

  2   le 12 janvier 1994 ?

  3   R.  Affirmatif, sauf il avait un fusil d'assaut.

  4   Q.  Très bien, c'était un fusil d'assaut. C'était quand même un

  5   comportement extrêmement grave, et c'était très dangereux quand même, ce

  6   qu'il était en train de faire, ce Banjaluka ?

  7   R.  Oui, très dangereux. Il pouvait y avoir des morts.

  8   Q.  Quelle serait la sanction pour ce type de comportement, pour avoir

  9   ouvert le feu dans un mess et pour avoir kidnappé un officier et l'avoir

 10   emmené ? Quelle aurait été la sanction dans la Légion étrangère pour ce

 11   type de comportement ?

 12   R.  Il serait traduit devant le tribunal militaire et arrêté immédiatement

 13   par la gendarmerie.

 14   Q.  Bien. Voyons ce qui s'est passé en ce qui concerne cette personne. Si

 15   vous pouviez maintenant regarder la pièce P 11015. C'est deux onglets plus

 16   loin à partir des documents que nous compulsions. C'est le document

 17   P 11015. C'est un document extrêmement court qui porte votre signature,

 18   d'ailleurs. On ne l'a pas encore vu dans le cadre de votre témoignage.

 19   A partir du document où vous étiez dans le classeur, c'est le dernier

 20   document sous l'onglet qui porte un P, un peu plus loin que ce que vous

 21   regardiez.

 22   M. LAWS : [interprétation] Peut-être l'huissier pourrait aider le

 23   témoin. Le dernier document annoté d'un P.

 24   Q.  C'est un document très court, il n'y a que deux lignes, et vous

 25   convenez tout simplement de retarder l'arrestation de M. Bradic, appelé

 26   Banjaluka, jusqu'à l'opération de combat soit terminée, opération de combat

 27   qui était en cours.

 28   R.  C'est bien cela.

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  1   Q.  Il s'agissait d'une opération -- dites-nous, si elle était offensive ou

  2   défensive cette opération Tvigi 94 ?

  3   R.  Cette opération était offensive.

  4   Q.  D'ailleurs, elle a échoué, si je ne m'abuse, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non, elle n'était jamais commencée, par manque des effectifs.

  6   Q.  Absolument. Il y avait une pénurie d'effectifs et, de ce fait,

  7   l'opération n'a jamais pu être déclenchée. Mais pour essayer de la mettre

  8   sur pied, vous étiez prêt à autoriser que l'on libère ce dénommé Banjaluka

  9   ?

 10   R.  Affirmatif, car libérant Banjaluka ou alors enfermant Banjaluka, j'ai

 11   évité au moins une vingtaine d'hommes qui quitteront les unités.

 12   Q.  Veuillez passer au document suivant maintenant de votre classeur, s'il

 13   vous plaît, qui est le document -- pardonnez-moi.

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que vous l'intention de

 15   continuer à parler de Banjaluka ?

 16   M. LAWS : [interprétation] Oui, tout à fait.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] D'accord.

 18   M. LAWS : [interprétation] Nous allons évoquer Banjaluka en rapport avec

 19   quelques documents.

 20   Q.  Le document que je vous demande de regarder, c'est le document suivant.

 21   C'est le 3D00414, en rapport à la page où vous vous trouvez maintenant.

 22   3D00414.

 23   R.  [hors micro]

 24   Q.  Pardonnez-moi, c'est mon erreur. C'est le document qui est le 3D00113,

 25   daté du 20 juin 1994 de Tomislavgrad. C'est le document qui précède celui

 26   que nous venons de citer, 113.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est le document 01098, pour le

 28   besoin du compte rendu.

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  1   Est-ce exact, Monsieur Laws ?

  2   M. LAWS : [interprétation] Pardonnez-moi. Le compte rendu n'a pas repris ce

  3   que vous nous avez dit.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est le 3D01098.

  5   M. LAWS : [interprétation] Non, c'est le 3D00113.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  7   M. LAWS : [interprétation]

  8   Q.  Si nous regardons le bas de cette page, je crois que nous pouvons voir

  9   qu'Ante Bradic, également connu sous le nom de Banjaluka, décrit la façon

 10   dont il vous a fait prisonnier, qu'il a tiré des coups au-dessus de votre

 11   tête et qu'il n'a toujours pas été placé en garde à vue jusqu'à

 12   aujourd'hui. Est-ce que vous voyez ce

 13   passage ? Il s'agit du mois de juin 1994, quelque cinq mois après cet

 14   incident et après que vous vous soyez rendu à Zagreb, comme vous nous

 15   l'avez dit.

 16   R.  Je ne connaissais pas ces documents, mais je suis sûr que Banjaluka, au

 17   moins ce qu'on m'avait dit, a été puni.

 18   Q.  Quoi qu'il en soit, l'auteur de ce document semble avoir un autre point

 19   de vue au mois de juin 1994, à savoir que rien n'a été fait à ce sujet.

 20   C'est encore un homme libre et il est libre de semer le désordre qu'il

 21   souhaite.

 22   R.  Je l'ignore.

 23   Q.  Saviez-vous qu'il avait déjà eu des soucis une fois auparavant et qu'il

 24   avait réussi à échapper à toute sanction ?

 25   R.  Non, je ne le savais pas.

 26   M. KOVACIC : [interprétation] Pardonnez-moi si je vous interromps, cher

 27   confrère, pourriez-vous éclairer notre lanterne, s'il vous plaît. Le

 28   passage que vous venez de citer se trouve à quel endroit du document ?

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  1   C'est un document de plusieurs pages, je ne sais pas comment le témoin a

  2   réussi à trouver l'endroit en question. Vous n'avez jamais cité la

  3   référence exacte.

  4   M. LAWS : [interprétation] Ceci se trouve en bas de la page 1 en anglais et

  5   au paragraphe qui commence par :

  6   "Ante Bradic, aka Banjaluka, a fait prisonnier le commandant de

  7   Tomislavgrad ZP, le colonel Zvonimir Skender, et l'a emmené au bout de son

  8   fusil à la Brigade de Rama."

  9   M. KOVACIC : [interprétation] Merci.

 10   M. LAWS : [interprétation] Cela est un document de Praljak que j'aurais dû

 11   vous signaler.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pourriez-vous nous donner la source

 13   de Banjaluka que vous avez citée ?

 14   M. LAWS : [interprétation] Pardonnez-moi, je vais vous montrer de quoi il

 15   s'agit. C'est le P 04836. Et je vais le placer sur le rétroprojecteur tout

 16   de suite. Je crois que ça serait préférable que l'on vienne en aide au

 17   général. C'est la pièce P 04836.

 18   Q.  Ceci se serait passé peu de temps après votre arrivée en Bosnie-

 19   Herzégovine, Général. On constate qu'il s'agit d'un rapport au pénal à

 20   propos du même nom, Ante Bradic, également connu sous le nom de Banjaluka.

 21   Est-ce que vous voyez cela ?

 22   R.  Oui, je vois ce document.

 23   Q.  Et sous le titre rapport au pénal, il y a un paragraphe qui évoque son

 24   parcours, ce qui ne nous intéresse pas ici. Le paragraphe suivant dit

 25   qu'aux mois de mai et juin de l'année 1993, à des dates inconnues, il a

 26   fait deux choses. Nous allons les regarder séparément. Il a transporté des

 27   personnes de confession musulmane de Prozor à Gornji Vakuf et Bugojno sans

 28   l'autorisation des organes compétents afin d'obtenir des équipements ou des

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  1   avantages en nature illégaux. Regardez cela également. Et il se livrait au

  2   commerce des armes qui étaient en sa possession de façon illégale. Est-ce

  3   que vous voyez cela ?

  4   R.  Non. Sur ce document que j'ai, il n'y a pas de question de ça.

  5   Q.  P 04836, je crois que c'est le document qui évoque ces termes.

  6   R.  O.K.

  7   Q.  Voyez-vous, au milieu de la page, les mots "Rapport au pénal" ? En gros

  8   caractères, "Rapport au pénal."

  9   R.  Je pense, oui.

 10   Q.  Il y a un paragraphe qui commence par : "Ante Bradic, alias Banjaluka…"

 11   Ne vous préoccupez pas de ce paragraphe-là. Relisez le paragraphe suivant

 12   qui vous indique pourquoi il a des soucis.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Ensuite, si vous descendez deux paragraphes plus loin à partir de

 15   celui-ci, on constate que c'est un peu plus détaillé. On précise qui sont

 16   ces personnes qui sont transportées. La personne susmentionnée a transporté

 17   les femmes musulmanes de Prozor à Gornji Vakuf et, leur demandant 100 marks

 18   allemands, il a fait six voyages. Ensuite, le dernier paragraphe nous

 19   indique qu'il a également fait le commerce d'armes illégal, de fusils, de

 20   pistolets et autres armes de point, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, je vois et ce ne m'étonne pas.

 22   Q.  Et cela ne vous surprend pas, parce que d'après votre expérience de

 23   Banjaluka courte, mais qui vous a permis de comprendre beaucoup de choses,

 24   c'était un homme extrêmement dangereux, n'est-ce pas ?

 25   R.  Je n'ai pas compris la question, s'il vous plaît.

 26   Q.  Bien, ne nous en préoccupons pas trop. Pourriez-vous nous aider, s'il

 27   vous plaît, avec cette question-ci : les femmes qui étaient transportées

 28   par lui, saviez-vous qu'il y avait des limites qui avaient été imposées à

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  1   aucun moment en 1993, des restrictions sur le déplacement des Musulmans

  2   dans ce secteur ?

  3   R.  Je ne connaissais pas cela.

  4   Q.  Vous n'étiez pas au courant de telles restrictions et que les personnes

  5   devaient se livrer au trafic d'êtres humains pour pouvoir se débrouiller

  6   dans la situation dans laquelle ils se trouvaient pour gagner de l'argent ?

  7   R.  Je ne connaissais pas, car j'étais au sud de Mostar à ce moment-là, pas

  8   à Prozor.

  9   Q.  Je crois que vous nous avez dit que vous êtes allé sur la ligne de

 10   front, me semble-t-il ?

 11   R.  A ce moment-là, au sud de Mostar, oui.

 12   Q.  Très bien. Donc poursuivez. Je sais que dans ce classeur, on ne suit

 13   pas de façon chronologique. Donc faites en même temps que moi, 4838.

 14   Maintenant, passez au P 05889. Trois onglets plus loin et vous aurez cette

 15   pièce P 05889. D'accord ? Je vais vous laisser quelques minutes pour vous

 16   permette de lire ce document, la partie où on peut lire "Déclaration," et

 17   ensuite nous allons voir ceci ensemble. Vous pouvez le lire à voix basse.

 18   Nous l'avons tous sous les yeux. On parle de son récit et du fait qu'il a

 19   été remis en liberté par rapport au chef d'inculpation qui pesait sur lui,

 20   autrement dit le trafic d'armes et d'êtres humains.

 21   R.  Oui, je vois qu'il était emprisonné à l'Heliodrom et qu'on lui a pris

 22   beaucoup d'argent.

 23   Q.  Il a été remis en liberté après avoir accepté de se joindre au

 24   Bataillon des Condamnés, et il s'est battu à Rastani le 22 septembre 1993.

 25   Cela, vous l'avez vu également, n'est-ce pas ?

 26   R.  Je connais où sont les Rastani, et j'ai entendu parler de Kazinicka

 27   Vojna [phon], mais je ne sais absolument pas dans quelles conditions ils

 28   ont travaillé.

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  1   Q.  L'homme qui vous a enlevé en janvier 1994 - je vais utiliser une phrase

  2   un petit peu familière - il avait une ardoise propre au mois de septembre,

  3   parce qu'il avait accepté de rejoindre le Bataillon des Condamnés et il

  4   s'est battu le lendemain avec le HVO.

  5   R.  Oui, j'ai lu ces documents.

  6   Q.  Si vous vous reportez à deux documents, le P 05303 devrais-je dire.

  7   Donc vous vous reportez un petit peu en arrière dans votre classeur. Deux

  8   documents plus haut. Est-ce que vous y êtes, Général ?

  9   R.  Le document du 23 septembre ?

 10   Q.  C'est celui-là. Nous constatons que Bruno Stojic cite, pour leur valeur

 11   extraordinaire, le Bataillon des Condamnés pour s'être battu à Rastani.

 12   Est-ce que vous voyez cela ?

 13   R.  Oui, je vois ça, Monsieur le Procureur.

 14   Q.  Donc si nous mettons tous ces éléments ensemble, la politique de

 15   tolérance eu égard aux crimes --

 16   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 17   L'INTERPRÈTE : Le micro de Mme Nozica, s'il vous plaît.

 18   Mme NOZICA : [interprétation] Je laissais mon confrère obtenir une réponse

 19   à la question qu'il a posée. Je n'ai pas voulu interrompre, mais je dois

 20   faire objection à cette façon d'interroger. Mon confrère essaie de parler

 21   de cette situation relative au dénommé Ante Bradic, surnommé Banjaluka, et

 22   sa sortie de prison pour placer le tout en corrélation avec des louanges de

 23   la part de M. Bruno Stojic, et c'est absolument inacceptable. A la lecture

 24   même des documents on le voit. Et je vais être très précise : P 5889, le

 25   dénommé Banjaluka dit, que s'agissant de la prison Heliodrom, il en est

 26   sorti le 21 septembre 1993 et que ce jour-là, il est entré dans les rangs

 27   de ce Bataillon des Condamnés.

 28   Or, les louanges de M. Bruno Stojic portent la date du 23 septembre

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  1   1993, et se rapportent à une opération d'attaque réalisée par l'ABiH contre

  2   Rastani, Vrda et Mostar, chose que nous avons déjà montrée à l'occasion du

  3   contre-interrogatoire de M. Praljak en application des ordres d'attaquer

  4   reçus par l'ABiH, document P 5079, et en application d'un rapport émanant

  5   du chef de la PUPD du HVO, M. Ciro Grubesic, portant le numéro 2D338, quand

  6   bien même il n'y en aurait pas au numéro 2 -- j'ai dit 2D338. Quand bien

  7   même on ne se référait pas à ces documents, il apparaît clairement que la

  8   question doit être posée de savoir comment M. Bruno Stojic pouvait-il

  9   savoir que quelqu'un, deux jours avant cela, avant les louanges qu'il a

 10   formulées, aurait rejoint les rangs d'une unité ?

 11   Si le Procureur souhaite démontrer ceci, il aurait dû placer en

 12   corrélation les deux documents dont je parle, parce que là on fait

 13   impression sur les Juges de la Chambre pour laisser entendre que M. Bruno

 14   Stojic savait que le dénommé Banjaluka avait rejoint les rangs de ce

 15   Bataillon des Condamnés pour participer à ces événements.

 16   Merci.

 17   M. LAWS : [interprétation] Ce n'est pas une impression que j'ai créée moi-

 18   même, sauf que sur votre respect. Je démontre simplement que Banjaluka a

 19   pris part à une attaque qui a eu lieu le 23 septembre, qui est invoquée

 20   dans ce document P 05889, et cet incident-là, à ce moment-là que M. Stojic

 21   évoque la bravoure de l'homme en question. Je ne suis pas en train de dire

 22   que M. Stojic connaissait Banjaluka personnellement, mais qu'on reconnaît

 23   que le Bataillon des Condamnés est une unité, et par conséquent, c'est une

 24   unité reconnue. Et par voie de conséquence, comme je vais poser la question

 25   au témoin, qu'il y a en fait des portes d'entrée et de sortie au niveau de

 26   la prison. On entre et on sort. C'est là où je veux en venir. L'objection

 27   que vous nous indiquez, à savoir que j'ai créé une impression particulière,

 28   il ne s'agit pas de cela du tout, qu'il y ait des craintes à cet égard, du

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  1   tout.

  2   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Juge, excusez-moi, mais il me

  3   semble que M. le Procureur essaie, de façon identique, de placer en

  4   corrélation les choses telles que je viens de les énoncer. Banjaluka était

  5   membre de ce Bataillon des Condamnés. Or, le document P 5889, qui est un PV

  6   d'interrogatoire. Derrière le mot déclaration au deuxième paragraphe, il

  7   dit qu'il a rejoint les rangs de ce Bataillon des Condamnés le 21

  8   septembre. Et c'est cela la matière à objection. Ça se passe deux jours

  9   avant le courrier où M. Bruno Stojic vente le mérite de ce bataillon.

 10   Donc M. Bruno Stojic, quand bien même il aurait connu chacun des

 11   combattants de ce Bataillon des Condamnés, il ne pouvait pas savoir qui

 12   est-ce qui avait rejoint les rangs de cette unité deux jours avant la

 13   rédaction de ce document.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne vais pas rentrer dans la question de M.

 15   Stojic, qui est annexe pour le moment.

 16   Voilà la situation. On a un soldat qui est emprisonné le 21 juin 1993, à

 17   l'Heliodrom. Voilà que le 21 septembre un officier dont il donne le nom,

 18   Bozo, qui lui appartient au Bataillon des Condamnés, vient le voir à la

 19   prison et lui dit : "Si vous nous rejoignez, il n'y aura pas des sanctions

 20   disciplinaires, voire les peines seront annulées." Et il est d'accord, mais

 21   il n'est pas le seul à être d'accord, car au paragraphe suivant, on voit

 22   qu'ils sont une vingtaine à rentrer dans le Bataillon des Condamnés. Il va

 23   au combat immédiatement, et ensuite on va, le 23 septembre, le remercier

 24   par le document que nous avons sous les yeux.

 25   Alors quand je vois cela, puis je vois ce qui vous est arrivé à vous,

 26   où ce fameux Banjaluka, à la cantine, vous menace, prend votre revolver et

 27   vous amène à la Brigade de Rama pour on ne sait quelle raison, peut-être

 28   que vous allez nous dire quelle était la raison de fond.

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  1   Ce soldat, Banjaluka, qui jouit d'une impunité totale, puisque déjà

  2   on lui a dit : Rejoins le Bataillon des Condamnés et on mettra de côté tout

  3   ce qui arrive. Est-ce que vous pensez, à votre niveau, que c'est normal ?

  4   LE TÉMOIN : Absolument pas normal. J'ignorais tout de son passé.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pour quelle raison il vous a pris en

  6   otage et vous a emmené à la Brigade de Rama ? Qu'est-ce qu'il vous a dit ?

  7   LE TÉMOIN : Une fois dans la Brigade de Rama, il m'a dit qu'en ville

  8   quelqu'un lui a pris son pistolet, par la suite on lui a dit que c'était

  9   l'ordre émanant du commandant de la région, c'est-à-dire moi.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais après un incident de cette nature où le

 11   numéro un de la région est, je l'ai dit, ridiculisé par un simple soldat et

 12   qu'il n'y a aucune sanction, est-ce que ce n'est pas de nature à porter un

 13   discrédit sur l'institution militaire et affaiblir la notion de

 14   commandement ?

 15   LE TÉMOIN : Vous avez raison, Votre Honneur. C'est effectivement une

 16   discréditation d'un commandement. Mais vu la situation, j'avais besoin de

 17   tous les soldats à ce moment-là, car on préparait une offensive.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous dites que vous avez préféré ne pas

 19   le sanctionner tout de suite, parce que vous aviez besoin de lui.

 20   LE TÉMOIN : Affirmatif, Votre Honneur. N'empêche que l'affaire a été donnée

 21   entre les mains de la police militaire qui le procès suivra après.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous ignorez tout son passé au sein du

 23   Bataillon des Condamnés. Ça vous ne le saviez pas.

 24   LE TÉMOIN : Non, absolument pas. J'ai su la première nouvelle en lisant

 25   aujourd'hui ça.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : Deux questions, Monsieur le Témoin. D'abord, avez-

 28   vous pris plus tard des nouvelles quant à l'issue des procédures entamées,

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  1   peut-être, contre ces personnages ?

  2   LE TÉMOIN : On m'avait, je ne sais pas exactement quand, demandé si je

  3   voulais retirer la plainte. J'ai refusé, et on m'avait dit, par la suite,

  4   qu'il a passé au jugement et qu'il a été puni. C'est tout ce que je sais.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : Pouvez-vous dire quand c'était, cette information ?

  6   LE TÉMOIN : Je pense que c'est autour du mois de juin 1994.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : Une autre question. Quand ce Banjaluka a fait

  8   irruption dans le mess, est-ce que vous étiez seul là ?

  9   LE TÉMOIN : Non, il y avait plein de monde, et tout le monde était armé.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : Avez-vous pris des mesures contre tous les autres

 11   qui, lâchement, ont permis ça au lieu d'abattre tout de suite cet

 12   agresseur, ce qui serait la chose normale à faire ?

 13   LE TÉMOIN : C'est moi qui a donné l'ordre de personne ne tire, étant donné

 14   que si on commence à tirer, il y aurait beaucoup de morts.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : Je crois me souvenir que vous l'avez déjà dit. Merci.

 16   M. LAWS : [interprétation]

 17   Q.  En tout cas, d'après la façon dont je comprends votre témoignage qu'on

 18   vous a demandé de faire ici, vous devez nous dire qu'il était très

 19   difficile d'imposer l'ordre, parce que tout le secteur était truffé de

 20   criminels.

 21   R.  C'est bien cela.

 22   Q.  Mais si la politique voulait que ces hommes-là ne soient pas poursuivis

 23   ou qu'ils soient remis en liberté dès qu'ils étaient capturés, inutile de

 24   nous dire ça, n'est-ce pas, parce que c'est un problème qui est dû

 25   entièrement au HVO, n'est-ce pas ?

 26   R.  Je ne sais pas si c'était le problème général, mais en tout cas, dans

 27   la région de Prozor, c'était pratiquement comme ça. Beaucoup de corruption.

 28   Beaucoup d'un tas de choses.

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  1   Q.  Très bien. L'autre incident dont on vous a demandé de parler est un

  2   incident qui a démarré dans un café, et auquel ont participé deux unités

  3   qui ont fini par se taper dessus, et des personnes sur lesquelles on a tiré

  4   au mois de février 1994. Vous vous souvenez de cela ? Vous nous en avez

  5   parlé jeudi.

  6   R.  Oui, je me souviens.

  7   Q.  Si nous regardons le 3D00113 ensemble. C'est le document que nous avons

  8   déjà regardé et qui est daté du mois de juin 1994, où nous avons appris que

  9   Banjaluka n'avait pas été poursuivi au mois de juin. Mais ce document parle

 10   également de cet incident-ci du mois de février.

 11   M. LAWS : [interprétation] Je crois que le général Praljak souhaite attirer

 12   l'attention des Juges de la Chambre.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier --

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons pas

 15   d'interprétation.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : "It's okay ?"

 17   Continuez.

 18   M. LAWS : [interprétation]

 19   Q.  Au deuxième paragraphe de ce document, nous avons une description de ce

 20   qu'on appelle l'événement connu du 25 février 1994, qui évoque ce même

 21   incident, l'affrontement dans la ville de Prozor entre les unités de Garavo

 22   de Bugojno et le Kinder peleton, le groupe des enfants, au cours duquel

 23   deux membres ont été tués. Et à ce moment-là, le Peloton des enfants a

 24   également arrêté un ministre du gouvernement de la République croate

 25   d'Herceg-Bosna, M. Zuljevic. Et c'est l'incident dont vous parlez, qui a

 26   donné lieu à l'encerclement de votre caserne et le fait que vous ayez

 27   déployé la police militaire, n'est-ce pas ?

 28   R.  Affirmatif. Il est resté dans mon local de commandement et il avait

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  1   très peur.

  2   Q.  C'est le mois suivant, après que vous avez été fait prisonnier, et moi,

  3   je vais vous suggérer qu'il y a des analogies. Les gens tirent, et il

  4   semble que quelqu'un ait été enlevé dans ce cas-ci également, n'est-ce pas

  5   ?

  6   R.  Je l'ignore qu'on l'appelle comme ça.

  7   Q.  Vous n'en savez rien ? Vous ne savez rien à propos de cette personne

  8   qui aurait été kidnappée, c'est ça, ou arrêtée ?

  9   R.  Je connais aucune connaissance que personne ait été --quelqu'un

 10   kidnappé.

 11   Q.  Très bien. En revanche, vous êtes au courant de la façon dont un groupe

 12   d'hommes indisciplinés sont venus dans votre QG. Ils étaient armés et ils

 13   vous ont encerclé. Ça, vous avez connaissance de cela ?

 14   R.  Affirmatif, oui.

 15   Q.  Et vous avez quand même pu appeler la police militaire pour qu'elle

 16   gère la situation, et vous avez aussi pu obtenir l'aide du général Praljak,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Affirmatif, et la police militaire est arrivée relativement rapidement,

 19   comme le général.

 20   Q.  L'une des unités impliquées dans cette situation était la section des

 21   enfants, le Kinder Platoon, mais vous nous avez dit que vous ne connaissiez

 22   pas le nom de cette section d'enfants, ce Kinder Vod.

 23   R.  Je n'ai jamais dit que je connaissais pas le nom de ce Kinder Vod.

 24   Q.  Le Kinder Vod était un groupe de jeunes très indisciplinés qui

 25   combattaient pour le HVO, mais qui se livraient aussi à toutes sortes

 26   d'exactions contre les civils. Mais vous avez dit que vous ne connaissiez

 27   pas l'existence de ces personnes ?

 28   R.  Kinder Vod, je savais qu'il existait. Je savais qu'il combattait pour

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  1   la VO. Mais qu'ils se sont livrés à des tas de choses irrégulières, je

  2   savais pas.

  3   Q.  Nous avons entendu des témoignages dans ce prétoire même à propos de

  4   ces personnes, ce groupe de jeunes hommes qui, par exemple, violaient des

  5   femmes musulmanes dans des maisons à Prozor où les femmes musulmanes

  6   avaient justement été isolées, à Duge.

  7   Avez-vous, à un moment ou à un autre, eu connaissance du fait que des

  8   femmes musulmanes avaient été détenues dans des maisons isolées, loin de

  9   leurs hommes ?

 10   R.  Jamais.

 11   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, vous tourner sur le document P 04307.

 12   Au classeur, c'est le septième document à partir du début du classeur, le

 13   septième. C'est un document sous pli scellé. Je tiens à le dire tout de

 14   suite. Le document suivant aussi sera sous pli scellé.

 15   Veuillez, s'il vous plaît, essayer de trouver le paragraphe qui commence

 16   par les mots : "On nous a aussi informés que tous les Musulmans de Prozor

 17   ont été déplacés."

 18   Il s'agit du septième paragraphe.

 19   M. KOVACIC : [interprétation] Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire

 20   quel est le paragraphe ? Il y a plusieurs chapitres. Pourrions-nous savoir

 21   exactement de quel paragraphe il s'agit ?

 22   M. LAWS : [interprétation]

 23   Q.  C'est le dernier paragraphe, "Activité humanitaire," au point numéro 4.

 24   Ensuite, il n'y a plus de numérotation, donc on compte les paragraphes.

 25   Est-ce que vous voyez déjà le paragraphe intitulé "Activité humanitaire" ?

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Si je peux apporter mon concours, le

 27   paragraphe auquel se réfère mon estimé confrère se trouve, Général, en page

 28   2 du texte en B/C/S.

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  1   M. LAWS : [interprétation] C'est exact.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] C'est le quatrième paragraphe à partir du

  3   haut de la page.

  4   M. LAWS : [interprétation] Je remercie Mme Alaburic.

  5   Q.  C'est en effet le quatrième paragraphe à partir du haut, comme à partir

  6   du bas d'ailleurs. Je ne vais pas vous donner lecture de la totalité de ce

  7   paragraphe. Vous pouvez le lire vous-même. Mais vous voyez la dernière

  8   phrase de ce paragraphe, on donne des indications selon lesquelles les

  9   hommes du HVO sont arrivés dans la zone pendant la nuit et se sont ensuite

 10   livrés à des viols. Tous les hommes entre 16 et 60 ans sont partis. Ils ont

 11   extrêmement peur.

 12   Voyez-vous ce passage ?

 13   M. KOVACIC : [interprétation] Je pense qu'il serait plus équitable pour le

 14   témoin si on lui demandait d'abord s'il était présent sur place.

 15   M. LAWS : [interprétation] Non, je lui demande d'abord de lire le document,

 16   et ensuite je poursuivrai mon interrogatoire.

 17   M. KOVACIC : [interprétation] Mais alors, il faut faire attention quand

 18   même à la date de ce document. Je pense que c'est la procédure à suivre

 19   quand même. Il faut d'abord --

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez quatre Juges professionnels qui constatent

 21   tout ça, donc c'est pas la peine de se lever pour le dire. On n'est pas des

 22   abrutis. On comprend qu'au mois d'août, il n'était pas au commandement.

 23   Donc laissez le Procureur faire son travail, et puis on verra.

 24   Bien, Monsieur le Procureur, continuez.

 25   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 26   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 27   j'ai peut-être parlé trop rapidement. Ce que j'ai voulu dire c'est qu'il

 28   serait peut-être plus approprié de présenter au témoin le paragraphe en

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  1   question, pas à MM. les Juges, puisqu'ils ont ce document, ils l'ont déjà

  2   vu. Il serait peut-être également plus adapté de demander d'abord au témoin

  3   s'il était présent dans un premier lieu.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Laws.

  5   M. LAWS : [interprétation]

  6   Q.  En août 1993, des femmes musulmanes avaient été détenues dans

  7   certaines maisons dans des villages de la municipalité de Prozor et elles

  8   étaient violées dans ces maisons. Les deux unités qui ont participé à ces

  9   viols étaient justement le Kinder Vod. Un témoin qui est venu dans ce

 10   prétoire, Témoin BN, nous en a parlé d'ailleurs. Je vous donne des

 11   informations de contexte, Monsieur le Témoin.

 12   Le Kinder Vod, vous nous avez dit que vous saviez qu'il s'agissait de

 13   troupes qui combattaient pour le HVO, mais ils se livraient à toutes sortes

 14   de choses en toute impunité dans cette région, n'est-ce pas ?

 15   R.  C'est possible, mais je ne suis pas au courant.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, il y a une question que j'aurais dû vous

 17   poser, mais elle ne m'était pas venue à l'esprit, mais j'aurais dû vous la

 18   poser. En décembre, quand vous avez pris votre commandement de cette zone

 19   opérationnelle, vous remplaciez qui ?

 20   LE TÉMOIN : J'ai remplacé le Siljeg.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le colonel Siljeg, est-ce qu'il a fait une

 22   passation de sa fonction ? Est-ce que vous vous êtes rencontrés et il vous

 23   avait fait un exposé de la situation, ou bien il était parti et vous êtes

 24   arrivé ?

 25   LE TÉMOIN : Il n'a fait aucun exposé. Il est parti à une nouvelle fonction,

 26   me laissant comme ça.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le colonel Siljeg, il devait avoir des

 28   adjoints. Est-ce que vous avez demandé aux adjoints de vous faire un

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  1   panorama de la situation ?

  2   LE TÉMOIN : J'ai demandé aux adjoints de me faire le panorama de ce qui se

  3   passe sur la ligne de front.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Et personne, à ce moment-là, vous a dit qu'à Prozor

  5   il y avait des gros problèmes ?

  6   LE TÉMOIN : Non. Mais moi, j'étais au courant déjà parce que je me suis

  7   aperçu dès le début qu'il y avait des gros problèmes de commandement.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais ces viols, vous n'étiez pas au courant ?

  9   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, ce document qui est sous pli scellé,

 11   donc je ne vais pas dire d'où il vient, mais j'ai cru comprendre que les

 12   internationaux avaient mis des officiers de liaison, et qu'au niveau de

 13   l'information, les internationaux disaient à l'officier de liaison : Voilà,

 14   il se passe telle ou telle chose, et l'officier de liaison devait faire

 15   remonter l'information. Ça se passait comme ça ou pas ?

 16   LE TÉMOIN : Dans ma zone, il y en avait un Bataillon anglais.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dans votre zone, il y avait un Bataillon

 18   anglais. Ils avaient un officier de liaison croate auprès de ce bataillon.

 19   LE TÉMOIN : Affirmatif. Je ne me rappelle pas comment il s'appelait, non,

 20   mais il avait.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le document qu'on a sous les yeux, qui est

 22   antérieur à votre arrivée, donc je ne vais pas vous dire qu'est-ce que vous

 23   auriez dû faire, mais c'est théorique.

 24   Au mois d'août, on fait le rapport de cette situation. Je présume que

 25   normalement, dans toute armée bien -- qui fonctionne normalement, le

 26   commandement étranger aurait dû dire à l'officier de liaison, "Voilà, il y

 27   a une situation grave."

 28   LE TÉMOIN : Affirmatif. Je suppose qu'ils l'ont dit.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous, vous avez pris votre commandement, le

  2   commandant britannique est venu vous voir pour faire le point de la

  3   situation avec vous ou pas ?

  4   LE TÉMOIN : Il est venu faire ma connaissance, et rien d'autre.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Et à aucun moment il vous a dit : "Voilà, nous

  6   savons, par des renseignements, qu'il s'est passé cela, cela, cela" ? Il ne

  7   vous a rien dit ?

  8   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

 10   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Q.  Il n'y avait pas que les internationaux qui étaient au courant. Le SIS

 12   aussi était très au courant. Regardez un rapport du SIS, le P 04177.

 13   Cinquième onglet à partir du début du classeur. Si vous reprenez le

 14   classeur au début et vous comptez cinq onglets, vous trouverez cette pièce.

 15   Page 2 de la version en anglais. Page 1 de la version en B/C/S. En la

 16   version croate, c'est le dernier paragraphe de la première page, et on

 17   arrive exactement aux mêmes conclusions que celles auxquelles sont arrivés

 18   les internationaux. Vous voyez, chaque jour, les femmes et les jeunes

 19   filles étaient emmenées depuis les centres de rassemblement de Podgrade,

 20   Lapsunj et Duge, qui ne sont pas sécurisés, et emmenées dans des maisons où

 21   on les viole. Le voyez-vous ? Et on parle aussi d'autres humiliations que

 22   ces femmes auraient subi, mais je ne vais pas en donner lecture.

 23   Voyez-vous ce qui est a été rédigé par cet officier du SIS, par M. Markesic

 24   ?

 25   R.  Je n'ai pas eu le temps de le lire complètement.

 26   Q.  Vous n'avez pas besoin de le lire en entier. Il n'y a qu'un paragraphe

 27   qui m'intéresse, le paragraphe qui dit bien clairement que l'officier du

 28   SIS, en août 1993, était parfaitement au courant de ce qui se passait. On

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  1   le voit dans ce rapport d'août 1993. Il explique exactement ce qui se passe

  2   et ce qui arrive à ces femmes qui se trouvaient dans ces centres de

  3   rassemblement. C'est tout ce qui nous intéresse dans ce document.

  4   Vous êtes en train de nous dire que vous n'avez jamais entendu parler de

  5   cela lorsque vous avez repris votre poste après Siljeg ? Personne ne vous

  6   en a parlé ?

  7   R.  Personne ne m'en avait parlé.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, quand vous avez pris votre poste au

  9   commandement de la zone opérationnelle, est-ce qu'au commandant de la zone

 10   opérationnelle il y avait quelqu'un du SIS ?

 11   LE TÉMOIN : Affirmatif.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Et il ne vous a pas fait de rapport en disant :

 13   Voilà au mois d'août il y a eu un rapport, il se passe rien ? Vous arrivez,

 14   nous espérons que vous allez faire quelque chose. Il ne vous a rien dit ?

 15   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur, absolument pas.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Et s'il vous l'avait dit, qu'est-ce que vous auriez

 17   fait ?

 18   LE TÉMOIN : J'essaierais de résoudre le problème comme je puis, avec le peu

 19   de moyens qu'on a à la disposition. Mais comme je répète, je n'étais

 20   absolument pas au courant de ces affaires-là.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 22   Monsieur Laws.

 23   M. LAWS : [interprétation]

 24   Q.  Mais ce n'est pas quand même des maigres ressources que vous aviez.

 25   Bon, je ne parle pas de vous là. Mais toute personne en poste de commandant

 26   dans cette région aurait pu faire ce que vous avez fait lorsqu'il y a un

 27   problème au café, qui s'est terminé dans votre caserne. Appelez la police

 28   militaire. Faire encercler l'endroit. Vous l'avez fait vous-même dans

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  1   l'exemple du café, vous l'avez fait ?

  2   R.  Affirmatif.

  3   Q.  Voici ce que je vous affirme, ce que je vous suggère : lorsque les

  4   intérêts vitaux du HVO étaient en jeu, on arrivait toujours à faire en

  5   sorte que les choses qui devaient être faites soient faites. Que ce soit

  6   ces femmes musulmanes qui étaient dans des maisons et qui étaient violées,

  7   tout le monde le savait. Personne ne s'en est occupé.

  8   M. KARNAVAS : [interprétation] Par qui ? Je ne comprends pas.

  9   M. LAWS : [interprétation] Les viols dans ces maisons, les viols de ces

 10   femmes par les Kinder Vod, on le sait quand même.

 11   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, mais là on a l'impression que c'est

 12   tout le HVO qui est impliqué dans ces viols. C'est un peu large.

 13   M. LAWS : [interprétation] Je pense que le témoin peut répondre parce que

 14   c'est suffisamment précis. Il sait de quoi je parle.

 15   M. KARNAVAS : [interprétation] Donc je pense que l'allégation qui est

 16   impliquée dans la question porte aussi sur le témoin. On l'accuse de ça,

 17   puisqu'il faisait partie du HVO, il est membre du HVO, et on vient juste

 18   d'accuser tout le HVO d'autoriser les viols pendant qu'il était commandant.

 19   M. LAWS : [interprétation] Non, pas du tout.

 20   M. KARNAVAS : [interprétation] Dans ce cas-là, je pense qu'il faudrait

 21   reformuler la question et retirer le commentaire.

 22   M. LAWS : [interprétation] Non. J'ai dit que je ne vous prends pas en

 23   compte. J'ai dit : "Toute personne en poste de commandement aurait pu faire

 24   ce que vous avez fait lorsque vous avez fait dans le café." Je l'ai bien

 25   dit. J'ai bien dit que je ne prenais pas en compte le témoin. Je comprends

 26   bien que M. Karnavas est assez sensible à ce propos, mais j'ai quand même

 27   posé ma question parfaitement correcte.

 28   Q.  Il était possible, n'est-ce pas, de faire quelque chose ?

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  1   M. LAWS : [interprétation] Je suis désolé. Maintenant, on ne veut pas que

  2   ce témoin réponde à ma question, qui est pourtant parfaitement juste et

  3   équitable.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Le témoin a répondu à toutes les questions. Il va

  5   répondre, mais avant qu'il réponde, Maître Pinter, vous êtes debout.

  6   Mme PINTER : [interprétation] Je souhaiterais simplement rappeler aux Juges

  7   de la Chambre que, justement en ce qui concerne ce témoin auquel se réfère

  8   le Procureur, la Défense du général Praljak a avancé un document montrant

  9   que ces personnes ont été poursuivies. Je remercie ma consoeur de m'avoir

 10   si rapidement fourni la référence de ce document qui est le 3D0422. Par

 11   conséquent, les affirmations du Procureur ne trouvent aucun appui dans les

 12   éléments du dossier à ce jour, c'est même l'inverse que l'on peut dire. Par

 13   conséquent, si l'on souhaite ici affirmer que le HVO réagissait lorsque ses

 14   intérêts étaient en jeu et laissait faire lorsque c'était des femmes

 15   musulmanes qui avaient à subir de mauvais traitements, je pense que c'est

 16   une mauvaise représentation de la réalité.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maintenant, ces propos sont

 18   attribués au Juge Antonetti dans le compte rendu, parce que vous avez parlé

 19   beaucoup trop vite. Vous avez pris la parole beaucoup trop vite. Je pense

 20   qu'une grande partie de vos propos n'ont pas été correctement retranscrits.

 21   Vous devriez recommencer en parlant à une vitesse normale.

 22   Mme PINTER : [interprétation] Oui, je vais tenter d'être un peu moins

 23   rapide. C'est un exercice assez exigeant pour moi. Excusez-moi. Donc je

 24   souhaite soulever une objection à l'encontre des questions formulées par

 25   mon confrère, le Procureur, et à l'encontre de la représentation erronée

 26   des faits qui est avancée au témoin.

 27   Parce que c'est devant cette même Chambre qu'un témoin, une femme à

 28   laquelle le Procureur fait d'ailleurs référence, qui a déposé le 21

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  1   septembre 2006. A ce moment-là, c'est le document portant la cote 3D00422

  2   qui lui a été présenté à partir duquel il apparaît manifestement que deux

  3   personnes ont été poursuivies en raison des actes qu'elles avaient commis.

  4   Par conséquent, ce qui est exact, c'est précisément l'inverse de ce que mon

  5   confrère, M. le Procureur, a présenté au témoin.

  6   Mon objection concerne donc cette représentation erronée des faits,

  7   car on ne peut pas affirmer, comme l'a dit mon confrère, Me Karnavas, que

  8   tout le HVO ne se préoccupait que de ses intérêts propres, et qu'ils aient

  9   fermé les yeux sur tout le reste.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est au transcript. Monsieur le Procureur,

 11   vous voulez reprendre la question ou bien vous demandez à ce qu'il réponde.

 12   M. LAWS : [interprétation] Puis-je répondre très brièvement tout

 13   d'abord pour dire que les Juges de la Chambre ont aussi admis la

 14   déclaration du Témoin BN, et là il est très clair qu'elle parle d'une série

 15   d'événements qui ont eu lieu l'un après les autres. Bon, le fait que

 16   certaines personnes ont été poursuivies par la suite n'a pas aidé

 17   énormément ces pauvres femmes dans ces maisons lorsqu'elles étaient la

 18   proie de ces violeurs quand même. Donc je pense que ce que j'ai dit est

 19   parfaitement équitable, et j'avais tout à fait le droit de le dire.

 20   Je vais passer à autre chose --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais reposez la question sur le HVO, parce que Me

 22   Karnavas a fait une objection, à moins que vous retiriez votre question,

 23   mais --

 24   M. LAWS : [interprétation] Non, non, je ne retire absolument pas ma

 25   question.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : -- puis la question, et on attend que le général

 27   réponde.

 28   M. LAWS : [interprétation]

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  1   Q.  Voici ma question, Général : le HVO était parfaitement en mesure de

  2   déployer la police militaire ou de prendre toute mesure nécessaire qui

  3   aurait pu aider, mais ils le faisaient lorsque leurs intérêts vitaux

  4   étaient en jeu. Et en ce qui concerne les crimes commis contre des civils,

  5   là leur attitude était parfaitement différente. Etes-vous d'accord avec ce

  6   que je viens de dire, puisque vous étiez sur la ligne de front ? Vous avez

  7   été en Bosnie-Herzégovine en 1993, donc êtes-vous d'accord avec ce que je

  8   viens d'avancer ?

  9   R.  Je suis absolument contre chaque viol ou attaque des civils, et je suis

 10   également au courant que la police militaire a pu intervenir si elle a eu

 11   connaissance de ces choses-là.

 12   Q.  Après que je vous ai montré ce document où il est bien écrit : Chaque

 13   jour, les femmes et les jeunes filles étaient emmenées de ces centres de

 14   rassemblement pour être violées dans des maisons. Ça avait lieu de façon

 15   continue, permanente, et personne n'a rien fait. Je vous avance que c'est

 16   tout simplement parce que ce n'était pas une priorité à l'époque.

 17   R.  Je ne sais pas. Je ne sais même pas s'il a été porté plainte ou quelque

 18   chose comme ça. J'ignore tous les faits de cette affaire.

 19   M. LAWS : [interprétation] Peut-être serait-il opportun de faire la pause.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement, c'est 6 heures moins 20. Nous allons

 21   faire donc la pause et on reprendra à 18 heures.

 22   --- L'audience est suspendue à 17 heures 40.

 23   --- L'audience est reprise à 18 heures 02.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors l'audience est reprise.

 25   Tout d'abord, pour la liste IC demain pour la Défense Petkovic, vous pouvez

 26   nous déposer la liste IC en cours de matinée, parce que comme on reprend

 27   demain à 9 heures, vous n'aurez peut-être pas le temps. Donc la Chambre

 28   fait droit à votre demande de vous permettre de déposer cette liste en

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  1   cours d'audience.

  2   Deuxième chose. Il reste à M. le Procureur 34 minutes, donc on va lui

  3   donner la parole.

  4   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  5   Q.  Général, en 1994, avez-vous jamais entendu dire que le HVO utilisait,

  6   pour faire des travaux forcés, des ouvriers pour accomplir des travaux

  7   militaires ?

  8   R.  Non, Monsieur le Procureur.

  9   Q.  Si vous vous reportez au document qui est ouvert devant vous, je

 10   l'espère, parce que j'ai demandé à ce que ceci soit fait pendant la pause.

 11   Je vous demande de regarder la pièce P 08104 [comme interprété]. Nous

 12   voyons qu'il s'agit d'une lettre envoyée par la Croix-Rouge qui évoque la

 13   question des prisonniers que l'on contraint à accomplir des tâches

 14   militaires. Est-ce que vous avez cette lettre, Général ?

 15   R.  Affirmatif.

 16   Q.  Au cours de la récente visite à Prozor, il a été noté que malgré des

 17   interventions écrites et orales, et la lettre se poursuit. C'est une lettre

 18   qui se plaint du fait que des personnes sont utilisées pour des travaux

 19   forcés. Il y a une liste de noms, ensuite le paragraphe en dessous de la

 20   liste de noms :

 21   "D'après les informations reçues, plusieurs groupes de civils de la

 22   minorité musulmane ont été emmenés par la force sur la ligne de front et

 23   ont dû y travailler pendant plusieurs jours."

 24   Voyez-vous cela ?

 25   R.  Je vois cette note, Monsieur le Procureur.

 26   Q.  Une des personnes à qui ceci a été envoyé en copie, Général, c'était

 27   vous, étant donné que vous étiez colonel Skender à l'époque, commandant de

 28   la zone opérationnelle du sud, Tomislavgrad Prozor. Vous souvenez-vous

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  1   avoir reçu cette lettre ?

  2   R.  Non, mais cette note est certainement arrivée au commandement de zone

  3   militaire, mais à Tomislavgrad. Je n'étais jamais à Tomislavgrad, car

  4   j'étais jour et nuit sur le front.

  5   Q.  Ceci vous a été adressé ainsi qu'à d'autres personnes dont les noms

  6   sont cités. Vous dites simplement que vous ne l'avez jamais reçu; c'est

  7   cela ?

  8   R.  J'ai dit que je ne l'ai jamais lu, car si elle est arrivée, cette note,

  9   elle a dû arriver à Tomislavgrad.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse est surprenante. Vous êtes au front.

 11   Très bien. Personne ne le conteste. Voilà que la Croix-Rouge internationale

 12   vous envoie un courrier, parce qu'il y a votre nom. Le courrier est ouvert

 13   à Tomislavgrad, donc il y a bien un officier qui a dû lire la lettre.

 14   Ils ne vous ont pas appelé en disant : Voilà, il y a un problème. Il

 15   y a la Croix-Rouge qui nous dit cela ?

 16   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur, car Tomislavgrad est à pas mal de

 17   kilomètres de Prozor, et aucune liaison administrative n'a été jamais

 18   prévue de Tomislavgrad vers Prozor.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais quand vous étiez sur le front, vous n'aviez pas

 20   une communication avec votre quartier général à Tomislavgrad avec

 21   l'officier de permanence ? Vous n'étiez pas en contact avec lui ?

 22   LE TÉMOIN : Par téléphone ?

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, par téléphone, il ne vous a pas dit : Voilà,

 24   il y a une lettre qui vient de nous arriver ?

 25   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur. C'était aussi la période où je me

 26   préparais, j'étais peut-être même parti vers la France.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 28   Monsieur le Procureur.

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  1   M. LAWS : [interprétation]

  2   Q.  Si vous prenez l'autre cas l'intercalaire, ce n'est pas la seule fois

  3   que la Croix-Rouge internationale vous a écrit quelque chose. Mais la

  4   lettre suivante vous a été adressée, mais ne nous intéresse pas pour

  5   l'instant. P 08089 est une autre lettre qui vous est envoyée pendant le

  6   courant du même mois. Avez-vous jamais reçu des lettres de la Croix-Rouge

  7   internationale ?

  8   R.  Non, jamais.

  9   Q.  Donc ils ne le savaient pas, mais ils perdaient leurs temps en tentant

 10   d'entrer en communication avec vous de cette façon-là ? Cela revient à dire

 11   cela, n'est-ce pas ?

 12   R.  J'avoue de ne pas avoir eu le temps de m'occuper, même si les problèmes

 13   étaient graves, de l'administration, car je ne suis resté qu'à peine plus

 14   de deux mois et j'étais obligé de m'occuper que du front.

 15   Q.  Est-ce que d'autres personnes qui se trouvaient là ou qui sont cités

 16   ici, Skender -- pardonnez-moi, je veux parler du document précédent.

 17   Skender, Roso ou Biskic, est-ce que ces autres personnes sont entrées en

 18   contact avec vous ? Pardonnez-moi. Roso, Siljeg et Biskic, est-ce qu'aucun

 19   de ces hommes a été contacté pour vous dire : Nous avons reçu une lettre de

 20   la Croix-Rouge qui se plaint de travaux forcés ? Est-ce que vous êtes au

 21   courant de cela ?

 22   R.  Jamais personne.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, je veux bien admettre que vous n'ayez

 24   pas eu connaissance, mais le général Ante Roso, lui, Roso a la lettre et

 25   c'est le commandant du HVO. Il aurait pu vous appeler en disant : Skender,

 26   qu'est-ce qui se passe ? Il ne vous a pas appelé.

 27   LE TÉMOIN : Il aurait pu, mais il ne m'a pas appelé.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

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  1   M. LAWS : [interprétation]

  2   Q.  Si vous repartez deux documents en arrière, le P 07812 est un ordre du

  3   général Roso dans lequel il demande que l'on fasse appel à des travaux

  4   forcés. Il s'agit du mois de février 1994. Il s'agit d'un ordre. Cent

  5   personnes ont été emmenées à la fourmilière pour aller travailler. Ils sont

  6   retournés à la fourmilière, si on peut comprendre ce que signifie la

  7   fourmilière et nous avons sur l'autre page le mot "Heliodrom."

  8   R.  J'ignore que veut dire la fourmilière. Heliodrom, c'est l'ancien

  9   Heliodrom à côté de Mostar.

 10   Q.  La vraie situation se présentait comme suit, n'est-ce pas : Roso était

 11   quelqu'un qui, d'après vous, vous connaissait de réputation dans la Légion

 12   étrangère. Vous ne le connaissiez pas, mais vous aviez tous les deux servis

 13   dans la Légion étrangère, n'est-ce pas ?

 14   R.  C'est exact.

 15   Q.  Et il ne vous a jamais parlé de l'emploi de travailleurs forcés ?

 16   R.  Jamais.

 17   Q.  Et Siljeg. Je ne vais pas regarder les documents le concernant, mais de

 18   même, Siljeg ne vous a jamais parlé de travaux forcés ?

 19   R.  Siljeg non plus ne m'a jamais parlé de travaux forcés.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pour m'assurer que le compte rendu

 21   est exact, il y a un numéro qui est inexact par rapport au dernier

 22   document. Je crois que vous vous avez mal exprimé. Il s'agit du 7, P 07812,

 23   alors que ce qui est cité ici est le P 02712. Je demande à chacun de faire

 24   particulièrement attention au document, parce que le document erroné ne

 25   nous permet pas de retrouver le document en question, donc nous ne pouvons

 26   pas suivre comme il faut. Je vous remercie.

 27   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie. Pardonnez-moi. Q.  Donc,

 28   la situation, Général, était, d'après moi, que c'était de notoriété

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  1   publique. Tout un chacun était au courant. Tout un chacun savait. Toute

  2   personne qui se trouvait en position de commandement, on savait que le HVO

  3   employait des travailleurs forcés. C'était de notoriété publique. Qu'avez-

  4   vous à dire à cela ?

  5   R.  Peut-être, mais je n'étais pas au courant. Mais jamais je n'ai vu qu'il

  6   y a quelqu'un qui travaillait dans les travaux forcés sur le front ou

  7   ailleurs.

  8   Q.  Regardons maintenant un document Siljeg, P 04877. C'est une autre des

  9   personnes qui, comme nous pouvons le voir, a reçu une lettre de la Croix-

 10   Rouge. Est-ce que vous avez ce document ?

 11   M. LAWS : [interprétation] Peut-être que --

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas vu le numéro.

 13   M. LAWS : [interprétation]

 14   Q.  4877. Vous n'avez pas eu l'occasion de voir ce document, donc je vous

 15   demande de bien vouloir le regarder. C'est un ordre de votre prédécesseur.

 16   Avez-vous pu voir ou lire ce document, Mon Général ?

 17   R.  Je viens de le lire actuellement.

 18   Q.  On nous dit ici, au niveau de ce document, qu'au point 3, tout en

 19   accomplissant ces travaux forcés, un terme péjoratif est utilisé à l'égard

 20   de ces travailleurs musulmans :

 21   "…ils ne devraient pas être maltraités en accomplissant leurs

 22   travaux, mais des rapports doivent être préparés eu égard au nombre de

 23   blessés ou de tués de ces prisonniers."

 24   Pour les archives, il s'agit d'un programme de travaux forcés qui contient,

 25   en effet, des pertes en vies humaines.

 26   Je crois que vous attendiez ma question et j'attendais une réponse.

 27   Si vous avez vu Siljeg qui était là et qui a dit : Ne les maltraitez pas,

 28   mais s'ils sont blessés ou s'ils sont tués, établissez un rapport.

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  1   Il traitait ce programme de travaux forcés qui indiquait que les pertes en

  2   vies humaines étaient inévitables. C'est quelque chose qu'on peut déduire

  3   du document, n'est-ce pas ?

  4    R.  Effectivement, c'était mon prédécesseur qui a donné cet ordre. Je ne

  5   suis pas du tout au courant de cela, car effectivement, à l'époque, je

  6   n'étais pas là. Et lorsque je suis arrivé en prenant le commandement, je

  7   l'ignorais s'il y avait des prisonniers.

  8   Q.  Mais la question que je vous pose, c'est que c'était une question de

  9   routine que les commandants savaient tous. Et nous allons regarder un autre

 10   document. Regardons le P 04119.

 11   Il s'agit du quatrième document à partir du début du classeur,

 12   Général. P 04119. Veuillez retrouver le paragraphe 6, s'il vous plaît. Là

 13   nous pouvons lire qu'un autre collègue, M. Primorac, évoque également

 14   l'emploi des prisonniers de guerre musulmans pour qu'ils travaillent sur la

 15   ligne de front. Est-ce que vous voyez cela ?

 16   R.  Oui, je vois le document. Là, je suis en train de le lire.

 17   Q.  C'est un document qui est daté du 12 août 1993. Vous étiez avec lui

 18   quatre jours plus tôt, le 8 août.

 19   Si vous allez deux intercalaires en arrière, P 04062, vous étiez là avec

 20   lui et vous visitiez. C'est le premier paragraphe de ce document. Vous

 21   visitiez et vous inspectiez la ligne de front et les troupes. C'est le

 22   troisième document à partir du début. On y précise que le 8 août, vous et

 23   lui, vous êtes allés sur les lieux et vous inspectiez cet endroit.

 24   R.  Oui, affirmatif. Je vois le document.

 25   Q.  Et vous dites à ce sujet qu'il avait donné des ordres précisant que les

 26   prisonniers de guerre devaient être utilisés sur la ligne de front et que

 27   c'est lui qui ait donné cet ordre. Cela, vous n'étiez pas au courant de

 28   cela non plus ?

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  1   Général, vous n'avez pas besoin de lire le document davantage. La question

  2   que je vous pose est très simple par rapport à cet homme-là avec lequel

  3   vous êtes allé faire un tour d'inspection sur la ligne de front. C'est lui

  4   qui rédige un ordre, quatre jours plus tard, qui porte sur l'emploi des

  5   prisonniers de guerre à des travaux forcés. Si vous avez appris cela de

  6   lui, c'est ça ma question.

  7   R.  Si vous lisez dans ce compte rendu, c'est écrit problèmes militaires.

  8   Je n'ai jamais vu un prisonnier là-bas.

  9   Q.  Je ne suis pas en train de dire que vous avez vu un prisonnier. Ce que

 10   je vous demande, c'est que les personnes avec lesquelles vous passez le

 11   plus clair de votre temps, tous les gens autour de vous, sont des gens qui

 12   autorisent les travaux forcés, et vous êtes quelqu'un à qui la Croix-Rouge

 13   internationale envoie une lettre à ce propos. Donc je vous suggère que

 14   c'était de notoriété publique, que les gens qui se trouvaient à votre

 15   niveau et les gens autour de vous étaient tous au courant, n'est-ce pas ?

 16   R.  C'est possible, mais je ne le savais pas.

 17   Q.  Bien. Nous avons vos réponses. Pour finir, je vous soumets cette idée-

 18   ci : l'emploi des travaux forcés, en fait, nous ramène à la même question,

 19   problème qu'avait le HVO, qui a mené à sa politique qui ne voulait pas

 20   faire respecter la discipline, l'ordre public, manque de troupes. La

 21   meilleure façon de procéder, c'est d'utiliser les prisonniers de guerre ou

 22   les combattants qui auront été faits prisonniers pour vous aider, n'est-ce

 23   pas ? C'est exactement ce qui se passait ici, n'est-ce pas ?

 24   R.  Je ne sais pas. Je répète ce que j'ai dit. Je n'ai jamais vu un

 25   prisonnier travailler sur la ligne de front, dans ma connaissance. Il se

 26   peut qu'il y en avait. C'est tout ce que je peux dire.

 27   Q.  Est-ce que vous manquiez d'hommes pour une raison en particulier ?

 28    R.  On manquait d'hommes, bien entendu. Les combattants, ils manquaient

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  1   toujours.

  2   Q.  Est-ce que les soldats étaient parfois très heureux de défendre leurs

  3   villages, mais ils ne voulaient pas être envoyés plus loin pour aller se

  4   battre contre les Musulmans en Herceg-Bosna ?

  5   R.  C'est bien cela.

  6   Q.  Et ils ne partageaient pas l'enthousiasme des autres personnes en

  7   Herceg-Bosna par rapport à cette guerre, n'est-ce pas ?

  8   R.  Ça, je ne sais pas.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Objection. Qui sont ces autres personnes qui

 10   ne partageaient pas ce sentiment ? Il s'agit là de quelque chose d'assez

 11   vague, me semble-t-il.

 12   M. LAWS : [interprétation] En fait, il y a des hommes qui sont au banc des

 13   accusés.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Je m'oppose à cela. Et je crois que, bon, à

 15   mon sens, c'est répugnant dans un prétoire. Le procès est encore en cours.

 16   Il laisse entendre que la personne qui est au banc des accusés est

 17   responsable des meurtres illégaux, de viols, et cetera.

 18   M. LAWS : [interprétation] Non. Je présente les éléments de l'Accusation de

 19   façon assez franche et claire. Le général a déjà répondu.

 20   Q.  Certaines des personnes du HVO, qui étaient des soldats qui sont partis

 21   combattre, ne souhaitaient pas aller combattre, n'est-ce pas ?

 22   R.  Ne souhaitaient pas aller combattre trop loin de leurs villages.

 23   Q.  Et leur moral est tombé au plus bas lorsqu'ils étaient déployés de la

 24   sorte, n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est bien ça.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, une question de suivi. Vous nous avez

 27   dit que vous étiez sur le front assez souvent. Je pense que vous discutiez

 28   avec les soldats qui étaient là.

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  1   LE TÉMOIN : Bien sûr, Votre Honneur.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, vous discutiez avec eux. Est-ce qu'ils vous

  3   disaient pourquoi ils étaient là, dans votre souvenir ?

  4   LE TÉMOIN : Non, non. Tout simplement, ils disaient qu'on les a mobilisés

  5   et que la brigade a monté au front, les éléments de brigade.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais ils ne disaient pas là qu'ils étaient là pour

  7   défendre la patrie, les Croates de l'Herceg-Bosna, je ne sais qui ?

  8   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'aviez pas de discussion sur les motivations ?

 10   LE TÉMOIN : Je ne discutais pas sur les motivations. J'ai discuté

 11   simplement de faits, ce qui s'est passé, comment ça s'est passé sur le

 12   front, qu'est-ce qu'ils ont fait, qu'est-ce qu'ils ont vu, et cetera.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Et ces soldats, ils ne vous demandaient pas : "Mais,

 14   Colonel, qu'est-ce qu'on fait là ?" Vous n'aviez pas ce type de question ?

 15   LE TÉMOIN : Non, Votre Honneur. On ne m'a jamais demandé, "Qu'est-ce qu'on

 16   fait là ?"

 17   M. LAWS : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

 18   Président. Je vous remercie.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic, des questions supplémentaires ?

 20   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 21   Nouvel interrogatoire par Mme Pinter :

 22   Q.  [interprétation] Général, quelques questions encore et ce sera fini. Je

 23   vous prie d'ouvrir le document P 5889. C'est ce que vous avez sous les

 24   yeux, et vous avez des inscriptions à côté qui vous permettent de vous y

 25   retrouver plus facilement. P 5889. Vous avez du mal ?

 26   Mme PINTER : [interprétation] Peut-être pourrait-on demander à M.

 27   l'Huissier de vous donner un coup de main, donner un coup au témoin pour

 28   que ça y aille plus vite et pour qu'on finisse aujourd'hui. C'est au feutre

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  1   que c'est écrit.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Quel numéro ?

  3   Mme PINTER : [interprétation]

  4   Q.  P 5889.

  5   A qui ce document a-t-il été communiqué ? Penchez-vous sur le cachet en

  6   haut.

  7   R.  Ça a été donné à la police militaire et au centre SIS.

  8   Q.  Je ne sais pas où est-ce que vous voyez la "police militaire," vous,

  9   mais je veux bien.

 10   R.  Octobre 1993.

 11   M. LAWS : [interprétation] Je ne m'oppose pas à ce que mon confrère lise ce

 12   qui -- en fait, il peut le lire. Je crois que c'est assez évident. Ça c'est

 13   clair.

 14   Mme PINTER : [interprétation] Non, je ne veux pas poser de question

 15   directrice.

 16   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Si je peux vous aider, il y a

 17   confusion. Au compte rendu page 85, ligne 19, il y a deux numéros de

 18   document qui sont consignés, et on ne sait pas lequel on est en train

 19   d'examiner, donc est-ce que notre consoeur peut répéter.

 20   Mme PINTER : [interprétation]

 21   Q.  P 5889. Est-ce que c'est un document qui a été communiqué à l'état-

 22   major principal du HVO ?

 23   R.  P 05889. Moi, je vois que la police militaire.

 24   Q.  Bien. Mais est-ce qu'on dit que c'est communiqué à l'état-major

 25   principal du HVO ?

 26   R.  C'est moi qui lis. C'est Vojna Tjna peut-être, pas la police. Je vois

 27   la "policija." C'est possible. "Centre SIS." Je vois pas à qu'il a été

 28   donné là.

Page 45323

  1   Q.  Ma question était celle de savoir si c'était envoyé à l'état-major.

  2   R.  [aucune interprétation]

  3   Q.  Je vous demande maintenant de vous pencher sur un autre document,

  4   P 4177.

  5   R.  P 4177 ?

  6   Q.  Oui. Est-ce que ce document a été remis à l'état-major principal du HVO

  7   ?

  8   R.  A priori, je ne vois pas, non.

  9   Q.  Le cachet de réception, reportez-vous-y. Est-ce qu'il y a une

 10   indication selon laquelle ce document aurait été réceptionné par l'état-

 11   major ou par la zone opérationnelle ?

 12   R.  SIS, sinon état-major, je vois pas.

 13   Q.  Très bien. Merci. Excusez-moi. Je vais maintenant vous poser la

 14   question suivante : prenons le cas d'un commandant de bataillon, de

 15   brigade, de zone opérationnelle, jusqu'au commandant de l'état-major

 16   principal. Pour qu'un commandant puisse entreprendre quelque poursuite ou

 17   procédure que ce soit relatif à des actes non autorisés, quels sont les

 18   éléments d'information dont il doit disposer ? Que doit-il savoir ?

 19   R.  Mais il faut d'abord qui -- quelqu'un qui dit, qui le donne -- au

 20   courant qu'il y a un problème.

 21   Q.  Très bien. Donc il apprend qu'il existe un problème. Que doit-il savoir

 22   d'autre ?

 23   R.  Dès qu'il a appris qu'il y a un problème, il le donne dans la foulée au

 24   travail à la police militaire.

 25   Q.  Très bien. Mais que va-t-il faire suivre à la police militaire ? Parce

 26   qu'il doit savoir ce qui s'est passé, où, quand, comment.

 27   R.  Indiquer les affaires qui lui ont été données, par exemple, une

 28   bagarre, allumer le feu quelque part, tuer quelqu'un. Si le commandant

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  1   unité, il a reçu ça, il convoque la police militaire et il lui explique

  2   cela.

  3   Q.  Très bien. Merci. Alors, Général, reportez-vous, s'il vous plaît, au

  4   document numéro 3D0113, s'il vous plaît. Il s'agit - attendez que je le

  5   retrouve - c'est vers le milieu, peut-être dans la seconde moitié du

  6   classeur.

  7   Est-ce que ce document vous a été remis, Général ?

  8   R.  Je ne pense pas, car à cette époque-là j'étais déjà commandant second

  9   du 1er Corps de Gardes croates à Zagreb.

 10   Q.  Très bien. Merci. A partir de ce document, nous allons poursuivre, mon

 11   confrère le Procureur vous avait interrogé concernant le deuxième

 12   paragraphe qui parle d'un règlement de compte dans la ville de Prozor,

 13   entre le Kinder Vod et l'unité Garavi de Bugojno.

 14   Aussi bien dans votre déclaration que lors de votre interrogatoire

 15   principal et également aujourd'hui lors du contre-interrogatoire conduit

 16   par le Procureur, vous avez parlé de cet événement.

 17   Au cours de cet incident de ce règlement de compte entre deux unités, l'une

 18   originaire de Bugojno, l'autre de Rama, y a-t-il des tirs ? Y a-t-il eu des

 19   blessés, des morts ? Et la situation était-elle dangereuse ?

 20   R.  Il y a eu, à grands regrets, un mort et plusieurs blessés. La situation

 21   était tellement dangereuse, étant donné que certaines parties de brigades

 22   quittaient le front pour se diriger vers Prozor.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, excusez-moi d'intervenir. Mais j'aurais dû

 24   intervenir tout à l'heure, mais il fallait que je réfléchisse avant de vous

 25   poser la question.

 26  Vous avez dit que vous étiez l'adjoint au commandant du 1er Corps des Gardes

 27   à Zagreb. C'est à la ligne 1 et 2 de la page 88. Jusqu'à présent, on a

 28   compris que le HVO avait un déficit en soldats de métier. Voilà que vous-

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  1   même, qui êtes un soldat de métier, vous quittez le HVO pour aller à

  2   Zagreb. Comment vous expliquez cette logique ?

  3   LE TÉMOIN : C'est tout simplement que le président Tudjman a décidé de

  4   créer un corps spécial qui englobait sa sécurité, y compris, et il

  5   s'appelait 1er HGZ. Le commandant de cette unité n'était pas un militaire,

  6   et je suppose que pour ce motif, le ministre de la Défense m'a adjoint à

  7   lui de façon de pouvoir faire fonctionner cette unité comme il faut.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

  9   Maître Pinter.

 10   Mme PINTER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 11   Q. Général, nous allons revenir sur ce règlement de compte entre la Garavi

 12   et le Kinder Vod. Avant que M. le Président le Juge Antonetti ne pose sa

 13   question, vous avez dit que la situation était particulièrement grave et

 14   très sérieuse. Dans une telle situation, vous avez fait appel au général

 15   Praljak; est-ce exact ?

 16   R.  C'est cela.

 17   Q.  Pouvez-vous maintenant décrire ce que le général Praljak a fait ? Y

 18   avait-il des tirs lorsqu'il est arrivé, et comment l'ensemble de ce conflit

 19   s'est-il terminé ? Comment les choses en sont-elles venues à s'apaiser ?

 20   R.  Il a répondu qu'il venait tout de suite et il est arrivé, je ne sais

 21   pas dans quel délai, mais assez rapidement. La police militaire est

 22   également arrivée assez rapidement.

 23   Il n'y avait pas de tirs à ce moment-là, mais mon commandement a été

 24   enfermé, c'est-à-dire encerclé par les gens de Brigade de Rama. Avec le

 25   général Praljak, il me semble qu'il y avait aussi un ministre. Je ne me

 26   rappelle plus comment il s'appelait.

 27   Par la suite, on a commencé pour parler entre la Brigade, c'est-à-dire les

 28   gens qui sont venus pour que je leur donne l'homme qui était présumé

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  1   responsable du meurtre. Je savais dans ces cas-là que ça signifiait sa mort

  2   directement. J'ai refusé et au bout de plusieurs heures, on a réussi de

  3   calmer les affaires en leur spécifiant que cet homme-là sera mis à la

  4   justice militaire, car il y avait même un juge militaire qui est arrivé. Et

  5   ça s'est terminé comme cela. Je sais simplement que le responsable présumé

  6   a été condamné, mais je ne sais pas à combien de temps.

  7   Q.  Est-ce que c'est la police militaire qui l'a emmené ou bien l'a-t-on

  8   relâché ?

  9   R.  Non, il est parti. Il a été ramené par la police militaire à la prison

 10   militaire, quelque part ailleurs, je ne sais pas où.

 11   Q.  Très bien. Est-ce qu'à cette occasion le général Praljak s'est lui-même

 12   mis en danger afin de s'opposer à ces deux groupes et d'apaiser la

 13   situation, alors même que la police militaire s'était avérée incapable de

 14   le faire ? Est-ce que vous disposez d'éléments à ce sujet ?

 15   R.  Effectivement, le général Praljak a parlementé avec eux. Il s'est

 16   opposé à ce qu'on donne ce type-là. Il y avait également un type, un homme

 17   de ma sécurité personnelle, qui était là. Et ça s'est passé dans l'ordre,

 18   si on peut dire. Le type est resté dans le commandement, chez moi.

 19   Q.  Général, à votre connaissance, est-ce que pendant la période de temps

 20   où vous étiez au sein du HVO, il est jamais advenu qu'un perpétrateur d'un

 21   meurtre, d'un viol, d'un incendie volontaire dont l'identité aurait été

 22   connue ait été relâché, à ceci près qu'on aurait reporté à plus tard des

 23   poursuites contre lui,ou bien a-t-il été relâché avec une procédure déjà en

 24   cours à son encontre ?

 25   R.  Pour les meurtres, ces gens-là, certainement pas. Il n'y avait

 26   que l'exemple de Banjaluka qui a été reporté, simplement.

 27   Q.  Banjaluka, cela vous concernait directement. C'est vous qu'il a fait

 28   prisonnier. C'est la façon dont il vous a traité, n'est-ce pas ?

Page 45327

  1   R.  Exactement, oui.

  2   Q.  Et pendant toute cette période que vous avez passée là-bas en

  3   Herzégovine, ces trois ou quatre mois, c'était le seul homme pour lequel

  4   vous ayez eu connaissance qu'on ait reporté les procédures à son encontre,

  5   n'est-ce pas ?

  6   R.  Affirmatif. Et je répète, je ne connaissais pas son curriculum.

  7   Q.  Très bien. Lors de l'une de ces questions, le Procureur essayait de

  8   faire passer une affirmation, et je vais donc revenir sur cette question.

  9   Le Procureur a affirmé que la politique du HVO n'était pas de rétablir la

 10   loi et l'ordre public, mais d'encourager certains types de comportements

 11   qui étaient interdits.

 12   Pendant les six mois que vous avez passé au sein de la HZ HB, avez-

 13   vous remarqué quoi que ce soit qui aurait permis d'indiquer que cela ait

 14   été le cas, que le HVO aurait fait tout son possible pour encourager des

 15   comportements de nature criminelle et que cela aurait pu constituer une

 16   politique ?

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais ce n'est pas ce

 18   qui a été dit, Madame Pinter. Ce qui a été dit - je vais maintenant vous

 19   dire où c'était - qu'en ne poursuivant pas les criminels, c'était un effet

 20   qui était créé du fait de la non-poursuite des criminels. Je vais regarder

 21   le transcript. Si vous pensez que je me suis trompé, et je m'en excuserai à

 22   l'avance.

 23   Mme PINTER : [interprétation] J'écoutais et j'ai noté immédiatement la

 24   question parce que cela m'a marqué très fortement sur le moment, et c'est

 25   pour cela que j'estimais qu'il était nécessaire de demander au général si

 26   le HVO menait une politique de soutien aux actes criminels. Alors, en ce

 27   moment précis, je ne retrouve pas cette question précise, mais voilà, mon

 28   confrère, Me Kovacic, va retrouver la question. Cela concernait la pièce P

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  1   78 --

  2   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la fin de la référence.

  3   M. LAWS : [interprétation] Mais comme c'est ma question, en effet, je ne

  4   suis pas tout à fait d'accord avec ce que vous avez dit, Monsieur le Juge

  5   Trechsel. En effet, j'ai dit qu'il y avait une politique qui avait été

  6   adoptée qui produisait ce résultat, mais ce n'était pas l'intention, en

  7   fait, mais que la priorité, c'était de garder les gens pour le front et que

  8   tout le reste était plutôt en deuxième priorité, voire traité comme n'étant

  9   pas une priorité.

 10   Mme PINTER : [interprétation] Très bien. Je vais m'efforcer de retrouver

 11   cela dans le compte rendu d'audience. De toute façon, je peux également

 12   reformuler ma question, mais je sais que c'est ainsi que je l'ai entendue

 13   et vue au compte rendu d'audience au moment où ça s'est présenté.

 14   Q.  Général, puisque vous avez été sur place en HZ HB, vous avez observé

 15   les lignes de front, le comportement du HVO, pouvez-vous confirmer et

 16   étayer cette affirmation selon laquelle le HVO aurait sciemment et

 17   délibérément mené une politique consistant à ne pas punir et ne pas

 18   sanctionner du point de vue disciplinaire les hommes qui auraient été

 19   passibles de sanction dans les rangs des forces armées ?

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur a dit à tout le monde quelle était la

 21   question qu'il avait posée, et la question que vous posez à M. Skender,

 22   c'est pas tout à fait ça. Le Procureur nous a dit que, de son point de vue

 23   à lui, la priorité du HVO, c'était la ligne de front, et tout le reste, ce

 24   n'était pas sa priorité. Il ne s'en occupait pas. Moi, c'est ça que j'ai

 25   compris du Procureur. Or, la question que vous posez n'est pas du même

 26   niveau.

 27   Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 28   il est très difficile de rechercher un passage précis dans le compte rendu

Page 45329

  1   tout en conduisant un interrogatoire. C'est ma faute que de ne pas avoir

  2   noté immédiatement le numéro de page, mais cette affirmation a été avancée

  3   dans le cadre d'une question qui est assez longue. Je voulais poser la

  4   question au général, mais je vais donc y renoncer.

  5   Je vais poursuivre. Je vais avancer.

  6   Q.  Général, je ne vais pas vous le présenter parce que vous n'avez pas ce

  7   document devant vous en ce moment, ma consœur, Me Nozica, vous a présenté

  8   le document qui porte la cote P 01077. C'était ce moment où vous répondiez

  9   à la question de savoir si on avait nommé des hommes à des postes de

 10   commandant ou de commandant second qui n'étaient pas à la hauteur des

 11   responsabilités en question ou qui n'avaient pas les qualifications

 12   requises. C'est donc la pièce P 01077.

 13   Je m'y réfère uniquement pour me rattacher aux sujets qui ont été

 14   abordés lors du contre-interrogatoire.

 15   Vous avez alors dit que s'étaient produites des situations dans lesquelles

 16   on avait nommé à des postes de responsabilité certaines personnes, parce

 17   qu'il n'y avait personne d'autre de disponible ou alors parce que ces

 18   personnes avaient fait jouer leurs relations.

 19   Mais selon l'expérience que vous en avez, est-ce que des personnes

 20   qui ne disposent pas des qualifications nécessaires pour exercer les

 21   fonctions de commandant ou de commandant adjoint, lorsque l'on a donc

 22   affaire à des personnes qui sont dans cette situation, est-ce que le seul

 23   critère qui s'appliquait, c'était de savoir s'ils avaient terminé ou non

 24   leur éducation secondaire ?

 25   R.  Non, c'était un type de guerre où l'intelligence prédominait tout du

 26   même. Certaines opérations étaient compliquées qu'on peut voir dans les

 27   armées entraînées.

 28   Q.  Général, est-ce que vous considérez que le général Praljak n'était pas

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  1   un commandant capable et qu'il n'était pas en mesure de diriger le HVO

  2   parce qu'il n'avait pas terminé d'académie militaire ?

  3   R.  Non, je pense qu'il était capable.

  4   Q.  Merci.

  5   Mme PINTER : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Messieurs les

  6   Juges. Merci.

  7   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, avec votre permission,

  8   je voudrais simplement émettre une objection, ou une remarque plutôt,

  9   concernant le compte rendu d'audience. Je n'ai pas le droit de poser

 10   d'autres questions. Il s'agit du document P 04177. Ma consœur est revenue

 11   sur ce document lors du contre-interrogatoire en insistant sur la question

 12   de savoir qui avait reçu le rapport de Luka Markesic portant sur les

 13   événements au sujet desquels le Procureur a posé des questions dans son

 14   contre-interrogatoire. Ce document a été rédigé par l'adjoint du commandant

 15   de la Brigade de Rama chargé du SIS, et je souhaite simplement - c'est déjà

 16   la troisième fois que je le fais dans ce prétoire; la dernière fois,

 17   c'était lors du contre-interrogatoire du général Praljak - je souhaiterais

 18   donc attirer votre attention sur la page 2 en B/C/S et la page 3 en

 19   anglais, où il est indiqué explicitement :

 20   "Indépendamment de la question de savoir qui a réceptionné ce document, il

 21   est indiqué que le commandant de brigade lui aussi a été informé de tous

 22   ces événements."

 23   Je ne crois pas que mon estimée consoeur ait délibérément omis de remarquer

 24   cela, mais je souhaitais simplement attirer l'attention de tous sur ce

 25   passage particulier. Merci.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre remarque est inscrite au transcript. Les Juges

 27   l'examineront.

 28   Mon Général, votre témoignage vient de prendre fin. Au nom de mes

Page 45331

  1   collègues, je vous remercie d'être venu, à la demande de la Défense du

  2   général Praljak, apporter votre concours à la justice. Je vous souhaite un

  3   bon retour, et je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous

  4   raccompagner à la porte de la salle d'audience.

  5   LE TÉMOIN : Merci, Votre Honneur.

  6   [Le témoin se retire]

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors pour les quelques minutes qui nous restent.

  8   Tout d'abord, Maître Kovacic, tout à l'heure, vous nous avez répondu en

  9   disant que vous avez envoyé aujourd'hui même une écriture concernant la

 10   question que je vous ai posé tout à l'heure sur vos intentions concernant

 11   l'admission d'éléments de preuve documentaires.

 12   Il s'avère qu'après avoir examiné vos écritures, vous ne répondez pas à la

 13   demande. Nous voulons savoir quels sont les sujets que vous allez aborder

 14   et quand vous allez le faire. Or, vous ne dites rien dans vos écritures.

 15   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 16   j'ai envoyé ce document avant que vous ne posiez la question aujourd'hui.

 17   Comme je l'ai dit, j'ai répondu à certaines des questions que vous avez

 18   soulevées aujourd'hui. Quant au reste, je peux y répondre dans le cours de

 19   la journée de demain pour vous fournir une réponse de façon organisée et

 20   sereinement, afin que rien ne reste dans l'ombre.

 21   De toute façon, comme vous l'avez déjà vu à partir du document qui

 22   vous a déjà été envoyé, nous avons estimé que nous ne pouvons pas procéder

 23   en suivant les lieux qui ont été suggérés, en nous basant sur la ligne

 24   directrice numéro 9. Mais demain, nous ferons cela de façon tout à fait

 25   systématique.

 26   Je voudrais dire que nous souhaiterons faciliter la tâche de tout un

 27   chacun en la matière. Ce que nous prévoyons, c'est de déposer une seule

 28   écriture et non pas plusieurs, et cette requête écrite sera dotée d'annexes

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  1   qui seront des annexes par thème. Il y en aura plusieurs. En cet instant

  2   précis, si je ne me trompe pas, il y en a huit ou neuf. C'est l'ordre de

  3   grandeur. Et pour chacun de ces thèmes, on indiquera sa pertinence,

  4   pourquoi les documents en question seront utilisés, quelle est la

  5   pertinence du document. Certains des thèmes pourront être subdivisés

  6   éventuellement en deux parties selon leur importance, et on énumèrera

  7   ensuite les documents, en plus de tout le reste de ce que vous avez

  8   demandé, à savoir les sources des documents, le lien avec l'acte

  9   d'accusation et ainsi de suite.

 10   Si vous le souhaitez, je peux vous fournir une description brève

 11   demain pour ce qui est de ce planning. Cela ne pose absolument aucun

 12   problème.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous pensez nous donner ce document quand à peu près

 14   ?

 15   M. KOVACIC : [interprétation] Nous sommes sûrs de pouvoir le fournir avant

 16   la date du 26 octobre que vous avez déterminée comme étant le début de la

 17   présentation des moyens de la prochaine Défense. Nous espérons

 18   véritablement que nous pourrons le fournir plus tôt. Toutefois, nous ne

 19   souhaiterions pas faire des promesses en l'air que nous ne serions pas sûrs

 20   de pouvoir respecter.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour ces précisions.

 22   Alors, comme vous le savez, demain nous commençons à 9 heures. Et nous

 23   savons que le témoin est déjà prêt, donc nous aurons le plaisir de le voir

 24   demain. Sur ce, je souhaite à tout le monde une bonne fin de journée

 25   puisqu'il est quasiment 19 heures, à moins que Me Pinter veut nous dire

 26   quelque chose de plus.

 27   Mme PINTER : [interprétation] Juste une seconde. En page 82 du compte rendu

 28   d'audience, ligne 25, et en page 83, lignes 1 à 3 se trouve consigner la

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  1   question à laquelle je me suis référée et l'affirmation, la présentation

  2   des faits telle qu'elle a été formulée par le Procureur. Je n'ai pas

  3   inventé cette question. Je cite :

  4   "Pour finir, je vous suggère que le recours au travail forcé allait dans la

  5   même direction que ce que poursuivait le HVO en conduisant la politique qui

  6   était la sienne et qui consistait à ne pas maintenir la loi et l'ordre

  7   public et ne pas appliquer des sanctions disciplinaires."

  8   Donc c'est bien ce que je disais, à ceci près, que ça figurait dans une

  9   question très longue.

 10   Je voulais juste le citer aux fins du compte rendu d'audience.

 11   M. LAWS : [interprétation] Est-ce que je peux répondre, s'il vous plaît. Le

 12   compte rendu montrera que cela n'a rien à voir avec la question que j'avais

 13   posée. Je voulais juste que ce soit bien clair.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vais donc lever l'audience et je vous

 15   dis à demain à 9 heures.

 16   --- L'audience est levée à 18 heures 57 et reprendra le mardi 29 septembre

 17   2009, à 9 heures 00.

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