Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 27 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Pusic est absent]

  5   --- L'audience est ouverte à 8 heures 58.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, appelez le numéro de l'affaire,

  7   s'il vous plaît.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour.

  9   IT-04-74-T, le Procureur contre Jadranko Prlic et consorts.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : En ce mardi, je salue toutes les personnes

 11   présentes. Je salue MM. les accusés, Mmes et MM. les avocats. Je salue

 12   également les membres éminents du bureau du Procureur ainsi que toutes les

 13   personnes qui nous assistent.

 14   Est-ce que l'avocat de M. Pusic veut prendre la parole ?

 15   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, mais

 16   j'aimerais qu'on passe à huis clos partiel, s'il vous plaît.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation] 

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 14   [Audience publique]

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, nous allons introduire --[hors micro]

 16   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur.

 18   Pouvez-vous me donner votre nom, prénom et date de naissance ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Milan Gorjanc, 15 mars 1943.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession ou qualité actuelle ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] En ce moment-ci, je suis à la retraite,

 22   officier de l'armée yougoslave à la retraite.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous êtes officier de l'armée yougoslave à la

 24   retraite. Vous êtes à la retraite avec quel grade ?

 25   L'INTERPRÈTE : L'interprète se corrige, il a mal entendu : l'armée slovène.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je dois répéter. Je

 27   suis colonel à la retraite de l'armée slovène, mais j'ai  fait mon service

 28   dans l'armée yougoslave, et j'avais un grade de colonel.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Avez-vous déjà témoigné devant un tribunal ou

  2   bien c'est la première fois que vous témoignez ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois que je viens.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment que va vous

  5   présenter M. l'Huissier.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  7   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  8   LE TÉMOIN : MILAN GORJANC [Assermenté]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Vous pourrez vous asseoir.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, mon Colonel, vous êtes témoin expert de

 13   la Défense du général Petkovic. Vous allez donc témoigner pendant ces deux

 14   semaines. Comme vous venez de prêter serment, vous n'avez plus maintenant à

 15   avoir de contact avec la Défense du général Petkovic. Donc de ce fait, vous

 16   ne direz à personne ce qui se passe à l'intérieur de la salle d'audience,

 17   et vous n'avez donc pas à rencontrer maintenant Me Alaburic, ni les autres

 18   avocats. Elle a dû vous expliquer que vous allez répondre à des questions

 19   qu'elle va vous poser, et elle va vous présenter des documents qui sont des

 20   classeurs, classeurs qui sont situés à vos pieds, que M. l'Huissier vous

 21   donnera tout à l'heure. Une fois qu'elle aura terminé ses questions, les

 22   autres avocats des autres accusés pourront également vous poser des

 23   questions. Les quatre Juges qui sont devant vous, vous poseront

 24   certainement aussi des questions, et à la fin de toutes ces questions, le

 25   bureau du Procureur, qui se trouve à votre droite, vous posera également

 26   des questions dans le cadre de leur contre-interrogatoire. Vous verrez que

 27   parfois la forme des questions est un peu différente de celles qui vous ont

 28   été posées par la Défense du général Petkovic ou par les Juges, parce que

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  1   le Procureur a le droit de procéder à un contre-interrogatoire en posant

  2   des questions directrices, et vous devriez à ce moment-là répondre par oui

  3   ou par non, ou par je ne sais pas, et puis vous attendez que le bureau du

  4   Procureur vous formule d'autres questions s'ils veulent avoir un

  5   développement.

  6   Donc je vous dis ça pour éviter tous les problèmes, car nous avons eu

  7   parfois des problèmes avec des témoins qui s'étonnaient du fait que le

  8   Procureur voulait limiter à oui ou à non, mais c'est comme ça, c'est la

  9   règle du jeu qui est imposé par le Règlement et par la pratique. Chacun

 10   peut en penser ce qu'il veut mais c'est comme ça. Donc je préfère vous dire

 11   cela avant pour éviter tout problème. Essayez d'être très précis dans les

 12   réponses que vous donnerez aux questions posées. Si vous ne comprenez pas

 13   une question, n'hésitez pas à demander à celui qui vous pose la question de

 14   la reformuler.

 15   Nous faisons des pauses toutes les heures et demies, mais si jamais

 16   en cours d'audience vous ne vous sentez pas bien, n'hésitez pas à lever la

 17   main pour qu'on arrête immédiatement.

 18   Voilà ce que je voulais vous dire afin que cette audience se passe le mieux

 19   possible, dans l'intérêt même de la justice.

 20   Sur ce, je vais maintenant donner la parole à Me Alaburic, que je salue à

 21   nouveau.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour,

 23   Monsieur Gorjanc. Bonjour à nos confrères et consoeurs de l'Accusation,

 24   confrères et consoeurs de la Défense, et à toutes les personnes dans ce

 25   prétoire.

 26   Interrogatoire principal par Mme Alaburic :

 27   Q.  [interprétation] Monsieur Gorjanc, sur le plan linguistique, il

 28   convient d'indiquer des éléments pour que les Juges de la Chambre sachent

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  1   comment vous vous débrouillez pour ce qui est des langues de l'ex-

  2   Yougoslavie. Alors quelle est votre langue maternelle ?

  3   R.  Ma langue maternelle, c'est le slovène.

  4   Q.  Pour ce qui est des langues de l'ex-Yougoslavie, quelle est la langue

  5   où vous vous trouvez très à l'aise ?

  6   R.  Plus ou moins toutes les langues, en particulier le bosniaque et le

  7   serbe.

  8   Q.  Alors je tiens à vous informer que nos interprètes se débrouillent très

  9   bien dans toutes les variantes, c'est-à-dire dans toutes les langues de

 10   l'ex-Yougoslavie. Je crois que si vous ajoutez un mot slovène, ça et là, si

 11   ça vous échappe les interprètes comprendront sans difficulté aucune. Si

 12   difficulté il y a, nous allons faire tous ensemble l'effort de transmettre

 13   aux Juges votre pensée exacte.

 14   Messieurs les Juges, je crois que ces quelques dix jours à venir, on

 15   parlera une langue que nous allons qualifier ou je qualifierais B/C/S S,

 16   puisque le dernier S serait le "slovène." Je crois qu'on se débrouillera

 17   tous dans cette combinaison.

 18   Monsieur Gorjanc, si vous voulez dire quelque chose en slovène, faites-le

 19   sans vous gêner.

 20   Messieurs les Juges, nous tenons à vous informer ou à informer les Juges de

 21   l'éducation qui a été la vôtre, le curriculum que vous avez suivi. Alors je

 22   vais poser des questions suggestives, bien sûr, mais j'espère qu'il n'y

 23   aura pas d'objection pour ce qui est de votre carrière. Alors je vais

 24   donner lecture de ce que vous avez indiqué dans votre CV pour ce qui est de

 25   l'éducation que vous avez ou du cursus que vous avez eu et rectifiez, je

 26   vous prie, s'il y a erreur.

 27   Alors, vous avez fait l'Académie militaire à Belgrade ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Par la suite, vous avez fait une école en matière de commandement

  2   d'états-majors ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Ensuite, vous avez fait une école politique de la JNA ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Suite à cela, vous avez fait une école de guerre. C'est l'Ecole de la

  7   Défense nationale.

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Puis ensuite vous avez fait un stage à la Grande école de la Défense

 10   populaire généralisée.

 11    R.  Oui.

 12   Q.  Puis, vous avez fait plusieurs stages assez brefs en matière de

 13   sécurité de l'Etat, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Autant que je sache, c'est votre cursus militaire en tout et pour tout,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Monsieur Gorjanc, veuillez nous indiquer si en ex-Yougoslavie, la JNA -

 19   - au sein de la JNA, il y avait la possibilité de faire en sorte qu'un

 20   officier ait une formation complémentaire dans des aspects revêtant de

 21   l'importance pour ce qui est du fonctionnement de l'armée et de la défense

 22   du pays ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Alors, dans votre formation dans le civil, qu'avez-vous fait et non

 25   achevé ?

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   Q.  Vous avez interrompu vos études de sciences politiques en troisième

 28   année, parce que vous avez commencé à suivre ces cours dans l'école de

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  1   commandement de l'état-major, à Sarajevo ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Puis, vous avez suivi des cours de sciences politiques à Belgrade puis,

  4   vous avez dû interrompre ces études puisqu'on vous a transféré à Postojna,

  5   en Slovénie, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Quelques mots maintenant au sujet de votre carrière, essentiels, je

  8   dirais. En qualité d'officier de la JNA, vous avez été de service dans les

  9   localités suivantes : Knin, Benkovac. Je répète : Benkovac, Sarajevo, puis

 10   en Slovénie, dans plusieurs localités, et pour finir, à Uzice, en Serbie.

 11   Est-ce que j'ai bien tout énuméré, M. Gorjanc ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Les fonctions les plus éminentes que vous ayez occupé au sein de la

 14   JNA, c'était celui de chef d'état-major de corps d'armée, chef d'état-major

 15   de corps d'armée à Uzice entre 1988 et 1991, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  En août 1991, vous avez quitté la JNA et vous êtes parti en Slovénie,

 18   n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Compte tenu du fait que la guerre en Slovénie est survenue en juin

 21   1991, cela signifierait, M. Gorjanc, que pendant la durée de cette guerre,

 22   vous avez fait partie des rangs de l'armée populaire yougoslave à Uzice, en

 23   Serbie; est-ce exact ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Dites-nous, Monsieur Gorjanc : étiez-vous satisfait de votre travail au

 26   sein de la JNA et de la vie que vous aviez eu en ex-Yougoslavie ?

 27   R.  Oui, tout à fait.

 28   Q.  Pourquoi alors avez-vous quitté l'armée populaire yougoslave ?

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  1   R.  Etat donné que la Slovénie était devenue indépendante et que l'armée

  2   populaire yougoslave, par une décision de la présidence de la RSFY s'était

  3   retirée du territoire de la Slovénie, j'ai considéré que mon obligation en

  4   ma qualité de Slovène était d'aller rejoindre le territoire de la Slovénie,

  5   et c'est la raison pour laquelle j'ai quitté la JNA.

  6   Q.  Dites-nous, est-ce que jusqu'à ce moment-là, la JNA était-elle restée

  7   l'armée des peuples et des minorités nationales yougoslaves, ou est-ce que

  8   ça avait changé ?

  9   R.  Jusqu'au conflit armé en Slovénie, c'était une armée yougoslave à

 10   caractère yougoslave.

 11   Q.  Que s'est-il passé ensuite ?

 12   M. LE JUGE PRANDLER : [aucune interprétation]

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Je m'excuse, Messieurs les Juges.

 14   Q.  Revenons à ma question. Est-ce que cette armée yougoslave -- cette

 15   armée populaire yougoslave était restée au moment où il y a eu la guerre en

 16   Slovénie une armée de toutes les nations et minorités nationales

 17   yougoslaves, ou est-ce que ça avait changé ? Je vous prie maintenant de

 18   répondre.

 19   R.  Après les conflits en Slovénie, l'armée populaire yougoslave a changé

 20   de caractère. Elle est devenue non plus l'armée de tous les peuples, mais

 21   de certains peuples.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous étiez dans l'armée yougoslave, est-ce que

 23   vous étiez membre du Parti communiste ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Pourquoi vous l'avez pas indiqué dans votre CV ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est indiqué. J'ai indiqué que

 27   j'étais membre du comité central de la Ligue des Communistes de

 28   Yougoslavie.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Très bien. Merci.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Gorjanc, vous nous avez dit que la JNA s'était muée en armée

  4   de certains peuples. Pouvez-vous nous dire lesquels ?

  5   R.  Les officiers de l'armée étaient composés, à plus de 60 %, d'officiers

  6   d'active ou sous-officiers qui étaient d'origine serbe et monténégrine.

  7   Lors du début des conflits armés en Slovénie, les ressortissants du peuple

  8   slovène ont quitté l'armée. La plupart de ces officiers et sous-officiers

  9   du groupe ethnique croate a quitté les rangs de l'armée. Les Musulmans de

 10   même. Il en va de même pour ce qui est de ceux qui faisaient partie du

 11   groupe ethnique albanais.

 12   Q.  Dans les documents que vous nous avez rédigés, et notamment au

 13   paragraphe 5 de notre rapport d'expert, vous soulignez que vous n'avez pas

 14   déserté pour ce qui est de la JNA. Alors, pouvez-vous nous dire pourquoi

 15   est-ce que vous avez formulé la chose ainsi ?

 16   R.  La présidence de la Slovénie a convié à ce moment-là la totalité des

 17   officiers à ne pas participer à l'agression contre la Slovénie. Plus tard,

 18   certains ont compris que c'était un appel à la désertion et à l'abandon des

 19   rangs de la JNA de leur propre gré. Moi, je n'ai pas accepté. J'ai demandé

 20   une autorisation, c'est-à-dire lorsque j'ai eu la possibilité de m'en aller

 21   de mon plein gré, j'ai quitté la JNA de façon tout à fait consciente.

 22   Q.  Alors, quand vous avez parlé d'"obligation," est-ce que vous parlez du

 23   serment que vous avez prêté ?

 24   R.  Oui. Je parle du serment que j'ai prêté lorsque j'ai accédé à

 25   l'académie militaire.

 26   Q.  Monsieur Gorjanc, après cela, après votre retour en Slovénie, est-ce

 27   que vous avez commencé à travailler dans l'armée slovène ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Dans votre CV, il est dit que vous avez été chef du département chargé

  2   de la Formation et de l'Entraînement au QG républicain de la Défense

  3   territoriale, puis vous avez travaillé au centre des Etudes stratégiques,

  4   d'abord en qualité de conseiller puis, brièvement, en qualité de directeur.

  5   Puis, on dit que vous avez été directeur au centre des Ecoles militaires de

  6   l'armée slovène. Vous avez enseigné la tactique et les opérations à l'école

  7   de commandement de l'état-major slovène et vous avez été mis à la retraite

  8   au mois de mai 1999; est-ce bien exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Alors, ma question va se rapporter à vos activités politiques. M. le

 11   Juge Antonetti vous a déjà posé une question à ce sujet. Donc, pour ce qui

 12   est de votre qualité de membre du comité central de la Ligue des

 13   Communistes entre 1986 et 1990, là, j'aurais à vous poser une question qui

 14   concerne notre génération du moins. Le Congrès de la Ligue des Communistes

 15   le plus connu qui a été abandonné, ou les délégués de la Slovénie sont

 16   partis, est-ce que vous aviez été présent à ce congrès vous-même ?

 17   R.  Oui, j'étais présent au congrès.

 18   Q.  Est-ce que vous êtes parti ou est-ce que vous êtes resté après le

 19   départ de la délégation slovène ?

 20   R.  Je suis resté parce que j'étais membre de la délégation de la Ligue des

 21   Communistes de l'armée population yougoslave.

 22   Q.  Monsieur Gorjanc, étiez-vous actif au comité d'Helsinki de la Slovénie

 23   ?

 24   R.  Oui, c'est le cas.

 25   Q.  Dites-nous, c'est bien le comité qui ce -- vous -- ou qui a consacré

 26   ces activités à la défense des droits de l'homme ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire quand est-ce que vous avez été membre

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  1   de ce comité d'Helsinki ?

  2   R.  J'ai été membre de sa présidence mais je ne suis plus désormais si

  3   actif -- je le suis encore mais je ne suis pas aussi actif qu'auparavant.

  4   Q.  Depuis quand avez-vous été actif au comité d'Helsinsi ?

  5   R.  Je suis devenu membre en 2001.

  6   Q.  Pour ce qui est de votre CV, vous avez été commentateur militaire,

  7   analyste. Vous avez publié toute une série d'articles et de travaux en

  8   matière de recherche; est-ce bien exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Vous avez également rectifié des données pour ce qui est des projets de

 11   rapports d'expert pour ce qui est de deux rapports dans des affaires

 12   diligentées par ce Tribunal, parce que vous avez d'abord dit que c'était

 13   des travaux qui ont été présentés en public; puis ensuite vous avez

 14   clarifié que le fait que c'était des projets de rapports qui n'ont jamais

 15   été finalisés, et qui n'ont jamais été présentés au public; est-ce bien

 16   cela ?

 17   R.  Oui. C'est là que j'ai fait une erreur.

 18   Q.  Alors de quelles affaires s'agissait-il pour qui est de ce Tribunal là

 19   où vous avez rédigé des projets de rapports d'expert ?

 20   R.  Il s'agissait de l'affaire Kordic et de l'affaire Kolundzija.

 21   R.  Pouvez-vous répéter le nom du deuxième procès ?

 22   R.  Kolundzija, Prijedor. K-o-l-u-n-d-z-i-j-a.

 23   Q.  On rectifiera tout à l'heure. Le nom est mal consigné mais on mettra à

 24   profit la pause pour le faire.

 25   Alors, Monsieur Gorjanc, comment c'est terminé votre engagement dans

 26   l'affaire Kolundzija ?

 27   R.  Dans cette affaire Kolundzija on ne m'a pas cité à comparaître étant

 28   donné qu'il y ait eu un accord de conclu entre la Défense et l'Accusation.

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  1   C'est du moins ce qu'on m'a donné comme information.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, si vous le permettez,

  3   j'aimerais que nous passions à huis clos partiel. Parce que j'aimerais

  4   poser des questions pour ce qui est de son engagement dans l'affaire

  5   Kordic.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, huis clos.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation]

  8   Q.  Alors avec qui avez-vous --

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 10   [Audience à huis clos partiel]

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 22   [Audience publique]

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vais répéter ma question.

 24   Q.  Avez-vous connu le général Petkovic en personne, Monsieur Gorjanc ?

 25   R.  Oui, on s'est rencontrés à Postojna, il y a 35 ans de cela.

 26   Q.  L'avez-vous rencontré ou avez-vous travaillé ensemble ?

 27   R.  On a travaillé pendant six ans dans la même caserne.

 28   Q.  Quelles sont les impressions qui sont les vôtres concernant le général

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  1   Petkovic ? Comment -- enfin, comment était-il il y a 35 ans, mis à part le

  2   fait qu'il devait probablement avoir plus de cheveux ?

  3   R.  Non, il n'avait pas beaucoup plus de cheveux. C'était un jeune

  4   lieutenant puis un jeune capitaine, commandant d'une unité d'élite de la

  5   division, c'est-à-dire une batterie anti-blindée de missiles. C'était l'une

  6   des meilleures unités de la division toute entière et c'était le fer de

  7   lance pour ce qui est des luttes anti-chars dans cette division de blindés.

  8   C'est donc quelqu'un que j'ai connu et je pense que c'est quelqu'un de tout

  9   à fait posé, calme et c'est un officier qui assume ses responsabilités. Je

 10   n'ai pas travaillé directement avec lui, mais j'ai eu des contacts avec et

 11   à l'époque, j'étais adjoint du commandant de la caserne et en cette

 12   qualité-là, je recevais des rapports de la part des officiers de

 13   permanence, et à l'époque, il y avait aussi ceux du capitaine Petkovic.

 14   Q.  Compte tenu du fait que vous êtes aussi un témoin expert de la Défense

 15   de M. le général Praljak, je vais vous poser la question également de

 16   savoir si vous connaissiez personnellement le général Praljak ?

 17   R.  Non. Je le connais seulement d'après les médias.

 18   Q.  Monsieur Gorjanc, je vais à présent vous poser quelques questions au

 19   sujet de la manière dont vous avez préparé votre rapport.

 20   Tout d'abord, dites-nous : qui a dactylographié le texte que nous avons

 21   reçu dans sa forme imprimée ?

 22   R.  Moi, personnellement.

 23   Q.  Vous savez dactylographier les textes ?

 24   R.  Oui, je sais taper à la machine ou en utilisant l'ordinateur.

 25   Q.  Dites-nous : à quel moment avez-vous appris à utiliser l'ordinateur ?

 26   R.  Pendant que j'étais à Uzice en tant que chef de l'état-major du corps

 27   d'armée.

 28   Q.  Pendant votre carrière, vous n'aviez jamais sur vous de papier, mais

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  1   vous aviez toujours votre propre ordinateur pendant nos réunions; est-ce

  2   que vous pourriez nous dire comment vous avez organisé tous ces papiers

  3   pour pouvoir vous débrouiller dans ce tas de papiers ?

  4   R.  J'ai un système personnel que j'applique afin de recueillir les

  5   documents pertinents et en ce qui concerne tous les documents écrits, je

  6   les transforme en forme digitale, que ce soit en forme d'images ou PDF.

  7   Ensuite je sors les extraits importants d'un certain nombre de documents.

  8   Q.  Monsieur Gorjanc, avec votre rapport, vous nous avez également envoyé

  9   des cartes, visiblement élaborées sur ordinateur. Qui les a élaborées ?

 10   R.  Moi-même.

 11   Q.  Bien. Dites-nous brièvement de quelle manière est-ce que vous avez été

 12   contacté par la Défense Praljak et Petkovic ? Qui était le premier à vous

 13   appeler ?

 14   R.  C'était d'abord Me Kovacic. Ensuite, nous avons eu une brève rencontre

 15   pas loin de ma résidence secondaire. Il m'a simplement demandé si je

 16   souhaitais collaborer avec votre équipe.

 17   Q.  Ensuite vous avez été en communication avec qui ?

 18    R.  Avec vous, seulement, par la suite.

 19   Q.  Dites-nous, Monsieur Gorjanc : est-ce que vous pouvez nous dire

 20   approximativement en quelle année est-ce que vous avez été contacté, en

 21   quelle année est-ce que nous avons commencé à coopérer ?

 22   R.  Je pense que c'était autour de Pâques 2007, et ensuite nous nous

 23   rencontrions à des intervalles réguliers pendant les quelques mois qui ont

 24   suivi. La première fois, c'était au bout d'un mois, je pense que c'était

 25   pendant les vacances judiciaires de l'été.

 26   Q.  Depuis notre première réunion, est-ce que vous pouvez nous dire s'il y

 27   avait quelque chose qui était clairement le sujet principal de votre

 28   expertise ?

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  1   R.  Tout d'abord, c'était l'importance de la Bosnie centrale et de

  2   l'Herzégovine du nord pendant la guerre, de même que la Défense populaire

  3   généralisée, telle qu'elle s'appliquait dans l'Etat qui existait avant et

  4   pendant la guerre en Bosnie-Herzégovine.

  5   Q.  Pendant nos réunions, tout d'abord, où est-ce qu'on se rencontrait ?

  6   R.  Une fois, je pense que c'était à l'hôtel Holiday à Zagreb. Mais je ne

  7   connais pas bien le centre-ville de Zagreb, donc j'ai demandé que l'on se

  8   rencontre à l'entrée de la ville. Je pense qu'ensuite je venais dans votre

  9   bureau à Zagreb, je crois que ça a eu lieu trois fois.

 10   Q.  En général, les rencontres duraient combien de temps ?

 11   R.  La première fois, ceci a duré, je crois, une heure, et par la suite je

 12   pense que nous avions eu des discussions de deux ou trois heures.

 13   Q.  Dites-nous : quelles étaient vos impressions au sujet de ces rencontres

 14   ? Est-ce que je souhaitais obtenir votre opinion d'expert au sujet de

 15   certains documents et au sujet de certains événements importants sur le

 16   plan militaire, dans le cadre de cette affaire ? Est-ce que nous avons

 17   parlé de manière générale de cette affaire ?

 18   R.  Nous avons plutôt parlé; d'après mon impression, j'avais l'impression

 19   que vous souhaitiez principalement évaluer à quel point je suis au courant

 20   de tout cela, quel était le niveau de mes connaissances en la matière,

 21   plutôt que de parler des détails.

 22   Q.  Monsieur Gorjanc, lorsque je vous ai expliqué quelle était votre tâche

 23   pour ce qui est de votre rapport d'expert, est-ce que vous avez produit ce

 24   rapport dans le cadre d'un travail indépendant, ou bien est-ce que

 25   quelqu'un a essayé de vous mettre sous pression ou de vous influencer d'une

 26   manière ou d'une autre ?

 27   R.  Je l'ai fait de manière entièrement indépendant et personne n'a essayé

 28   de m'influencer.

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  1   Q.  Est-ce qu'on vous a demandé - je veux dire par là l'équipe de la

  2   Défense que je représente - est-ce qu'on vous a demandé de changer quelque

  3   chose, de changer vos opinions ?

  4   R.  Non, pas du tout.

  5   Q.  Dans votre rapport d'expert se trouvent des chapitres ou des

  6   paragraphes qui sont numérotés. Est-ce que vous pouvez nous expliquer la

  7   raison de cela ?

  8   R.  J'ai abordé cela comme on aborde un travail de thèse, et lorsque je

  9   vous ai envoyé cela, vous m'avez dit qu'il faut systématiser cela pour

 10   suivre plus facilement et alors, j'ai numéroté les chapitres et les

 11   paragraphes.

 12   Q.  Bien. Est-ce que vous pouvez nous dire, lors de la rédaction de votre

 13   rapport d'expert, quels étaient les documents que vous avez utilisés ?

 14   R.  Au début, j'utilisais les documents que j'avais pendant l'affaire

 15   Kordic-Blaskic et ensuite, je me suis adressé à vous pour avoir des

 16   documents supplémentaires, même si j'avais trouvé la plupart de ces

 17   documents sur le site internet de M. Praljak.

 18   Q.  En ce qui concerne les livres tels que les mémoires ?

 19   R.  C'étaient surtout les livres que j'avais déjà obtenus auparavant.

 20   Q.   Lorsque vous avez rédigé le texte portant sur la Défense populaire

 21   généralisée, vous avez fait référence aux règlements. Nous, les juristes,

 22   nous trouvons toujours cela intéressant que quelqu'un qui n'est pas juriste

 23   se réfère aux lois et règlements.

 24   Donc je vais vous poser la question suivante : est-ce que vous

 25   connaissiez les lois relatives au domaine de la défense ?

 26   R.  Certainement. Lorsque je commandais des unités et lorsque j'exerçais

 27   mes fonctions au sein de l'armée, il était nécessaire de bien connaître les

 28   lois.

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  1   Q.  Dites-moi : est-ce qu'en Slovénie aussi, vous avez  participé de

  2   manière active à l'élaboration des lois et règlements et relatifs à la

  3   défense ?

  4   R.  Oui, j'étais consulté en Slovénie aussi et j'ai fourni certaines

  5   opinions concernant le premier projet de loi relatif à la défense, qui a

  6   été adopté en 1995.

  7   Q.  Dites-nous : votre opinion en matière de la question suivante aussi,

  8   c'est-à-dire la méthodologie, afin de comprendre la loi relative à la

  9   défense, à votre avis, est-ce qu'il n'est pas nécessaire de connaître la

 10   matière en question elle-même, c'est-à-dire la défense ?

 11   R.  Si, car les lois se fondent sur la pratique, donc pour changer la

 12   pratique, il faut la connaître.

 13   Q.  Nous allons maintenant traiter de votre rapport.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Je souhaite demander à l'Huissier de

 15   remettre au témoin le rapport d'expert et tous les documents qui ont été

 16   préparés pour le témoin.

 17   Q.  Nous allons commencer par le chapitre 4, il s'agit du chapitre portant

 18   sur le "Temps de guerre," et vous décrivez, dans ce chapitre, le fait qu'il

 19   existe deux types d'armée de guerre, d'un côté, armée qui existe en temps

 20   de paix, et d'autre part, celle qui est une armée de guerre ad hoc. Est-ce

 21   que vous pourrez nous dire en quelques phrases ce qu'est l'armée de guerre

 22   ad hoc ?

 23   R.  L'armée de guerre ad hoc se développe lorsque l'Etat n'existe pas

 24   réellement ni le système de la défense de l'Etat en temps de paix. Ceci est

 25   créé dans des conditions de conflit civil, de libération interethnique,

 26   interconfessionnel, interracial, et cetera, et c'est un processus

 27   chaotique. Au début, l'objectif principal est de résister à la force

 28   d'occupation, et au début, il s'agit des unités qui sont petites, qui

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  1   mènent surtout des actions de guérilla et de terrorisme, et avec le temps,

  2   ces unités obtiennent de plus de plus de soutien au sein de la population,

  3   et progressivement deviennent des groupes plus importants avec pour

  4   résultat définitif la création d'une armée avec son propre système de

  5   commandement.

  6   Q.  Monsieur Gorjanc, Andrew Pringle, l'expert militaire de l'Accusation,

  7   dit devant ce Tribunal qu'il est nécessaire de compter sur plusieurs années

  8   pour qu'une armée au sens propre du terme soit créée - et ceci figure à la

  9   page 24 246 du compte rendu d'audience. - est-ce que vous êtes d'accord

 10   avec cette assertion de M. Pringle ?

 11   R.  Pour la plupart, oui, en fonction du niveau de trouble au sein du pays,

 12   en fonction du niveau de préparation, et en fonction du niveau d'unité au

 13   sein de la population, pour ce qui est du soutien d'une telle armée.

 14   Q.  Dites-nous : à quoi ressemble l'organisation d'une telle armée ad hoc,

 15   à partir d'un centre ?

 16   R.  Si ceci se fait de manière unitaire, c'est bien plus facile, car l'Etat

 17   qui fonctionne existe, les conditions existent, le corps des officiers

 18   existe, ensuite, il est nécessaire simplement de créer les commandements.

 19   Si l'on a grand nombre de force de réserve qui existait déjà pendant le

 20   système qui était en place auparavant, il est facilement possible de créer

 21   des unités plus importantes encore.

 22   Q.  Dites-nous : si l'armée de guerre se crée de manière décentralisée, à

 23   quoi est-ce que les choses ressemblent ?

 24   R.  Dans ce cas-là, comme je l'ai dit, il s'agit de la création de petits

 25   groupes sans lien mutuel, sans système de commandement, sans système de

 26   communication unitaire entre eux. Ils sont simplement reliés par un

 27   élément, à savoir la résistance face à l'ennemi, donc c'est un lien

 28   idéologique. Il est bien plus difficile de créer une armée de guerre ainsi.

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  1   Q.  Monsieur Gorjanc, si vous deviez comparer une armée de guerre

  2   centralisée et décentralisée, que diriez-vous ? Dans quel cas est-ce que la

  3   chaîne de commandement est établie plus facilement et de manière plus

  4   complète ?

  5   R.  Certainement s'agissant de l'armée organisée de façon centralisée,

  6   cette chaîne de commandement est établie avant, avant l'établissement des

  7   commandements. Alors que s'agissant d'une armée décentralisée, d'abord, on

  8   crée les unités ensuite les commandements à des niveaux inférieurs et

  9   ensuite on remonte l'échelle.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi si j'interromps.

 11   A la ligne -- non, à la page 21, les premières lignes, vous avez dit,

 12   Monsieur Gorjanc, que je cite :

 13   "Ça dépend du niveau de menace auquel ce pays aurait à faire face, le pays

 14   avait à faire face, le niveau des préparatifs et la population pour appuyer

 15   une telle armée."

 16   Alors je vous serais reconnaissant si vous pouviez expliquer de quelle

 17   manière cela dépend. Plus la menace était grande, et quoi, quel était le

 18   rapport ou le lien entre ces mécanismes que vous évoquez ? J'espère que

 19   vous m'avez bien compris.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Si la menace est plus importante, autrement

 21   dit, l'ennemi est plus important, plus puissant et nombreux, dans ce cas-

 22   là, l'établissement d'une telle armée est plus difficile. Surtout étant

 23   donné que le soutien de la population peut être absent en raison des

 24   mesures de représailles appliquées par l'ennemi. Cela dit, les mesures de

 25   représailles peuvent à un certain moment inciter la population à fournir

 26   son soutien et à rejoindre les rangs de ces unités.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Gorjanc, je pense que la question était quelque peu différente

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  1   et qu'elle portait sur la période nécessaire afin d'organiser une armée de

  2   guerre. Car effectivement --

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais je crois que le

  4   témoin m'a très bien compris. Il a donné une réponse que je considère comme

  5   étant une réponse tout à fait exacte et utile.

  6   Si je peux résumer les choses, vous avez dit que plus grande était la

  7   menace, plus grandes étaient les difficultés, mais plus grande pouvait

  8   aussi être une menace qui allait déclencher une disponibilité plus grande,

  9   une volonté plus grande d'un peuple, d'une population de s'unir et de faire

 10   les efforts nécessaires, qui faciliteraient les choses à une armée. Donc

 11   d'une certaine manière, il y a une certaine ambivalence, si je vous ai bien

 12   compris.

 13   LE TÉMOIN : [inaudible] [aucune interprétation]

 14   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

 15   Mme ALABURIC : [interprétation]

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE MINDUA : Maître Alaburic, excusez-moi. Je profite de l'occasion

 18   de ce petit arrêt pour reposer ma question aussi à M. le Témoin.

 19   Monsieur le Témoin, vous citez l'expert du Procureur, Andrew Pringle, au

 20   sujet du nombre d'années nécessaires pour la mise en place d'une armée.

 21   Est-ce que vous pouvez préciser, selon vous, ce nombre d'années, et si

 22   c'est dans tous les cas pareil ? Parce que je suis en train de penser aux

 23   différentes armées de l'ex-Yougoslavie, c'est-à-dire l'armée slovène,

 24   l'armée croate, et les autres. Ce sont des armées qui ont récupéré des

 25   officiers et des soldats formés par la JNA; est-ce que c'est pareil comme

 26   pour une armée qui commencerait avec rien du tout ? Je parle de la

 27   formation des officiers et des soldats, par exemple.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] La création des armées sur le sol de l'ex-

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  1   Yougoslavie est différente. Je peux dire s'agissant du HVO, et de l'ABiH,

  2   elles étaient les seules deux armées de libération qui donc avaient

  3   certaines caractéristiques en commun. S'agissant de toutes ces armées crées

  4   sur le sol de l'ex-Yougoslavie ce qu'ils ont en commun; c'est que pour la

  5   plupart des hauts officiers, ils avaient été formés au sein de l'ex-

  6   Yougoslavie de l'ex-JNA en tant que recrus et pendant les manœuvres en tant

  7   que membres des forces de réserve. Puis ceci s'applique à tous les membres

  8   et s'agissant de certains des officiers, ils avaient été formés au sein de

  9   la JNA, à la fois à travers une formation régulière, et puis en tant que

 10   officiers de réserve formés dans des écoles appropriées.

 11   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

 12   Mais justement parce que ces officiers ont été très bien formés, et un bon

 13   nombre de membres du personnel également, alors je voudrais mettre en

 14   parallèle avec l'armée d'un jeune Etat, par exemple, qui commencerait à

 15   partir de rien. Quel est le nombre d'années, selon vous, pour arriver à une

 16   armée normale ? Le cas des anciennes républiques de l'ex-Yougoslavie et le

 17   cas, par exemple, d'une armée africaine, d'un pays nouvellement

 18   indépendant, ou il n'a pas de différence en le nombre d'années ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] S'agissant d'un tel cas de figure lorsqu'un

 20   nouvel Etat est créé, alors qu'il n'existe pas de personnel et de corps

 21   d'officier existant, ce processus est bien plus long. L'histoire est

 22   récente, surtout s'agissant des mouvements de libération en Afrique, on

 23   peut voir que parfois il a fallu que dix ans passent dans le cadre des

 24   activités de ces mouvements avant qu'une armée ne soit créée capable de

 25   leur fournir l'indépendance.

 26   M. LE JUGE MINDUA : Pour l'instant, je m'arrête là, on verra plus tard.

 27   Merci beaucoup.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'écoute attentivement tout ce

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  1   que vous dites, et parfois quand vous employez un mot, je me pose une

  2   question.

  3   Tout à l'heure, vous avez dit en parlant de l'armée du HVO et de l'ABiH,

  4   que c'était des armées de libération, et quand vous avez dit ça, je me suis

  5   demandé : qu'est-ce qui veut dire ? Est-ce qu'il veut dire que la JNA

  6   occupait la République de Bosnie-Herzégovine, la Slovénie, la Croatie, et

  7   que quand il y a eu le démantèlement de l'ex-Yougoslavie, il y a eu une

  8   libération ? C'est ça que vous voulez dire ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. La JNA n'était pas l'occupant où que ce

 10   soit, même si les politiciens le disaient. C'était une armée de l'Etat

 11   pendant que l'Etat existait.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors pourquoi vous caractérisez le HVO et l'ABiH,

 13   d'armée de libération ? C'est ça que je ne comprends pas.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne me souviens pas

 15   avoir employé ce terme; mais si je le fais, c'est un lapsus.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aurais dû

 17   intervenir immédiatement pour corriger le compte rendu d'audience, car

 18   c'est ce qui a provoqué les problèmes.

 19   Voyons la ligne 21, à la page 23, il est indiqué que le témoin parle du HVO

 20   et de l'ABiH, qui étaient les armées de libération. Le témoin parlait du

 21   HVO et de l'armée de libération du Kosovo. Le témoin n'avait pas du tout

 22   mentionné l'ABiH. J'avais l'intention de corriger cela, mais je ne pensais

 23   pas que ceci allait provoquer des questions de la part des Juges.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme vous voyez, j'écoute tout. Donc il y avait un

 25   problème de traduction. Merci.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Toutefois, s'agissant de la question posée

 27   par M. le Juge Trechsel. J'aimerais que l'on arrive à une réponse très

 28   simple, et si l'Accusation me le permet, je vais poser une question

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  1   directrice.

  2   Q.  Est-ce qu'il est possible qu'en raison des conditions de guerre et des

  3   besoins extraordinaires le temps nécessaire pour créer une armée soit plus

  4   court que nécessaire donc par rapport à ce qu'on disait, par rapport à la

  5   durée de quelques années ?

  6   R.  Oui, mais il faut compter sur un an minimum.

  7   Q.  Bien. Continuons avec notre comparaison des armées de guerre ad hoc

  8   créées dans des conditions centralisées et décentralisées. Que diriez-vous,

  9   Monsieur Gorjanc, au sujet de l'influence des autorités locales sur l'armée

 10   s'agissant de telles armées de guerre ?

 11   R.  S'agissant d'une armée créée dans des conditions centralisées, vous

 12   avez l'Etat, vous avez le commandement Suprême qui est primaire, et là, des

 13   lois et d'autres textes fondamentaux existent, qui régulent ce domaine, et

 14   puis il existe un système en allant du niveau le moins jusqu'au niveau le

 15   plus élevé, et dans ce cas-là, l'armée est entièrement en fonction des

 16   actions de ces autorités civiles -- ou plutôt, de la défense du pays de

 17   manière concertée avec les autorités civiles.

 18   Q.  Est-ce que vous pourriez vous concentrer sur l'influence des autorités

 19   locales ?

 20   R.  Les autorités locales, en principe, s'agissant de ces armées

 21   centralisées, n'ont pratiquement aucune influence sur les unités

 22   militaires, même s'agissant du niveau le plus inférieur.

 23   Q.  Alors pour ce qui est de l'armée décentralisée, qu'en est-il ?

 24   R.  Les armées de guerre décentralisées voient se créer leurs premières

 25   unités toutes petites unités au niveau local, et très souvent, c'est

 26   assisté ou créé et approvisionné du point de vue logistique par des

 27   communautés locales. Ces communautés locales, ces forces de maintenir une

 28   influence le plus longtemps que possible à l'égard de cesdites unités

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  1   locales.

  2   Q.  Monsieur Gorjanc, étant donné votre expérience militaire et les

  3   connaissances militaires que vous avez, si une municipalité finance une

  4   unité militaire, est-ce qu'en votre qualité de commandant militaire, vous

  5   pourriez évaluer le fait de savoir si cette autorité municipale risque ou

  6   pas d'influer sur cette unité locale ?

  7   R.  A tous points de vue, puisque ceux qui donnent les sous ne renoncent

  8   pas à l'influence qu'ils peuvent exercer.

  9   Q.  Dites-nous, je vous prie : étant données les connaissances,

 10   l'expérience, la connaissance des événements en ex-Yougoslavie aussi qui

 11   sont les vôtres, est-ce que l'opinion publique dans un milieu risque

 12   d'influer sur les positions et comportements des militaires au sein des

 13   unités dans ce même milieu ?

 14   R.  Certainement.

 15   Q.  Dans cette partie-là de votre rapport d'expert, vous avez exposé les

 16   composantes de l'armée en temps de guerre et vous avez parlé des

 17   composantes territoriales et en matière de manœuvres.

 18   R.  Quand on parle de ce segment "manœuvres," c'est destiné à la conduite

 19   d'activités de combat sur le territoire entier de l'Etat et même à

 20   l'extérieur de ce territoire sur le territoire de l'ennemi. Alors que la

 21   Défense territoriale, elle, est destinée pour l'essentiel à la défense et à

 22   la protection des environs, de l'immédiat, du site où c'est créé. Elle est

 23   chargée aussi de la surveillance du territoire, et c'est à titre

 24   exceptionnel qu'on lui confie des activités de combat contre l'ennemi sur

 25   une ligne de front.

 26   Q.  Monsieur Gorjanc, je vous prie de vous pencher sur le tout premier

 27   document du jeu de documents qui vous sont donnés, pas dans la partie

 28   expertise, mais dans le classeur numéro 1, le recueil de documents.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Il s'agira du P907. 907. Le document a déjà

  2   le statut d'une pièce à conviction. Il s'agit d'un rapport daté du mois de

  3   décembre 1992, présenté par le chef d'état-major.

  4   Q.  En ce moment-ci, ce qui m'intéresse, c'est la page 3, Monsieur Gorjanc.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Pour les Juges de la Chambre, c'est la

  6   dernière partie du paragraphe 3 du rapport.

  7   Q.  Là, on parle des unités du HVO et on dit qu'à ce moment-là, le HVO

  8   disposait de 45 000 hommes, et dans les unités de l'armée professionnelle,

  9   il y a 855 membres. Alors, Monsieur Gorjanc, si l'on part d'une

 10   supposition, à savoir que ces 85 officiers dans les unités qui sont

 11   chargées de manœuvres et pour ce qui est des 45 000, ça fait partie,

 12   disons, des unités territoriales. Que diriez-vous du caractère de cette

 13   armée du HVO ?

 14   R.  Au vu du fait que les brigades portent les noms des localités où elles

 15   sont été formées, c'est avec certitude qu'on peut tirer une conclusion qui

 16   est celle d'affirmer qu'il s'agit, pour l'essentiel, d'unités

 17   territoriales.

 18   Q.  Compte tenu des fonctions qui sont celles des unités territoriales,

 19   partant de ce document, qu'est-ce que vous pourriez tirer comme conclusions

 20   au sujet du caractère de cette armée du HVO ? A-t-elle été créée dans

 21   l'objectif de conquérir des territoires ou de défendre des territoires, ou

 22   est-ce que c'est une organisation à caractère neutre ?

 23   R.  Pour l'essentiel, ici, on voit, puisque ça a été pour l'essentiel sur

 24   un principe territorial, j'imagine que la mission principale était celle de

 25   défendre son propre territoire, celui de la municipalité où l'unité

 26   concernée a été créée.

 27   Q.  Fort bien. Au paragraphe 24 de votre expertise, alinéa 5, vous parlez

 28   d'une notion, du théâtre de combat direct. Alors, il s'agit des activités

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  1   de l'armée sur la ligne de front et un théâtre de combats directs. Alors,

  2   qu'est-ce que c'est que ce théâtre de batailles ou de combats directs ?

  3   R.  Ce terrain de combats directs englobe un territoire où l'on a déployé

  4   des unités qui sont directement impliquées dans les combats. Ça veut dire

  5   que ce sont là des unités destinées à une utilisation rapide sur la ligne

  6   de front, sur le théâtre de combats. En termes simples, dans les

  7   circonstances de combats en Bosnie-Herzégovine, ça englobe un territoire

  8   allant de trois à cinq kilomètres en profondeur pour ce qui est de la ligne

  9   de contact avec l'ennemi et ce, en profondeur de son propre territoire.

 10   Q.  Alors, la disposition de cette ligne de trois à cinq kilomètres

 11   arrières, que se passe-t-il au juste, là ?

 12   R.  Sur une ligne de combats englobant trois à cinq kilomètres à

 13   l'intérieur, on déploie des unités de la taille d'un bataillon et on y

 14   inclut un soutien à l'artillerie directe, c'est-à-dire des mortiers et du

 15   80 millimètres et du 120 millimètres, et pour la plupart du temps, vous

 16   avez des soldats qui sont là à se reposer et à constituer une réserve

 17   opérationnelle.

 18   Q.  Dernier alinéa du paragraphe 25, vous tirez les conclusions disant que

 19   des opérations de grande échelle ne peuvent être identifiées à cette

 20   composante territoriale, sans pour autant qu'il y ait une formation

 21   approfondie des individus pour ce qui est de l'unité au niveau

 22   opérationnel. Est-ce que vous pouvez être plus clair, Monsieur Gorjanc ?

 23   R.  Quand il s'agit d'opérations, il y a participation de plusieurs unités

 24   tactiques associées, deux ou trois brigades au moins, avec un soutien

 25   approprié de l'artillerie, et ces unités-là se doivent d'être formées pour

 26   agir en tant qu'ensemble. Il serait même bon de les voir intervenir en tant

 27   qu'ensemble ou entité au sein d'une composition opérationnelle parce que

 28   vous ne pouvez pas battre une brigade de l'ennemi avec une brigade à vous.

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  1   Le principe essentiel, c'est qu'il faut que vous ayez un rapport de force 1

  2   pour 3 en faveur de l'attaquant et dans certaines circonstances, il faut

  3   que l'attaquant soit plus nombreux encore.

  4   Q.  Dans ce contexte, vous, Monsieur Gorjanc, vous réagissez à une décision

  5   émanant d'Enver Hadzihasanovic, commandant du 3e Corps.  Il s'agit du

  6   4D1473, 1473. Il s'agit du deuxième des documents dans votre classeur.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Je reviens sur une question qui vous a été posée par

  8   Me Alaburic, et puis elle n'a pas développé sa question et je pense que

  9   c'est une question fondamentale pour l'affaire. Enfin, il y a un certain

 10   nombre de questions fondamentales mais celle-là, elle me semble

 11   particulièrement fondamentale.

 12   Me Alaburic vous fait mettre en évidence le fait que le HVO est une armée

 13   territoriale. Vous l'avez indiqué, d'ailleurs, les brigades portaient des

 14   noms des localités, et on a vu un document où il y a 45 000 soldats dans le

 15   HVO et une branche professionnelle de 855 membres, dont 85 officiers.

 16   Alors, vous le savez aussi bien que moi, il y avait, dans le HVO, des

 17   unités professionnelles; peut-on, avec une entité de 800 individus, mener

 18   dans un territoire comme la République de Bosnie-Herzégovine des opérations

 19   militaires d'envergure, afin de prendre le contrôle de ces territoires ou

 20   de les annexer militairement ? Est-ce possible ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces unités professionnelles ne sont

 22   certainement pas en mesure de prendre le contrôle. Mais je parlais d'une

 23   armée territoriale, je disais que leur objectif fondamental était celui de

 24   surveiller les territoires, de contrôler. Etant donné que toutes ces

 25   brigades sont créées sur des principes territoriaux, ces brigades exercent

 26   un contrôle sur le territoire de leurs municipalités ou municipalités

 27   respectives, celles où elles ont été créées. C'est dans ce contexte-là que

 28   l'on peut dire que le HVO a exercé une surveillance à l'égard de ces

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  1   territoires, une partie de ces territoires. Alors pour ce qui est

  2   d'intervenir sur le territoire entier, non, ça ne pouvait pas se faire.

  3   Mme ALABURIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Gorjanc, quand vous parlez de surveillance à l'égard du

  5   territoire de municipalités, que voulez-vous dire au juste ?

  6   R.  Surveillance de la circulation, des déplacements de la population,

  7   protection des installations qui revêtent une importance particulière, et

  8   contrôle pour ce qui est d'intrusion éventuelle de l'ennemi. Il s'agit de

  9   repousser l'ennemi pour ce qui est donc d'une incursion possible.

 10   Q.  Si je vous ai bien compris, il s'agit de fonctions qui sont importantes

 11   pour défendre le territoire d'une municipalité, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Quand vous parlez de "surveillance;" est-ce que vous entendiez des

 14   fonctions du type, maintien de l'ordre public, de la paix ?

 15   R.  Non, non. Du point de vue militaire, "surveillance" c'est militaire.

 16   Q.  Est-ce que vous pouvez répéter ? Non, c'est bon, c'est bien consigné.

 17   Alors dans ce contexte où l'on dit que les actions offensives ne peuvent

 18   pas être conduites avec des unités à composante territoriale, on fait

 19   allusion à une décision du commandement du 3e Corps. On m'a dit que c'était

 20   le 4D 1473, 1473.

 21   Alors à cet effet, Monsieur Gorjanc, je vous prie de jeter de la lumière

 22   sur la signification de ce document.

 23   R.  Dans les mémoires du commandant du Groupe opérationnel Lasva, le

 24   général Alagic, j'ai constaté une chose que je n'ai pas retrouvé ici, à

 25   savoir qu'en utilisant la 305e Brigade de Jajce, en direction de Visoko, il

 26   s'est avéré que cet ensemble-là est intervenu de façon très réussie. Puis

 27   j'ai cherché les documents, je les ai trouvés sur le site du général

 28   Praljak, à savoir notamment la décision du commandant du 3e Corps pour ce

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  1   qui est de faire camper les unités, où il fait sortir toutes les unités sur

  2   un territoire donné en Bosnie centrale pour une formation conjointe, et

  3   pour qu'il y ait --

  4   M. LE JUGE PRANDLER : [aucune interprétation] -- 

  5   Je vais vous arrêter brièvement. Est-ce que vous pourriez nous dire dans

  6   quel classeur retrouver ce document, 4D 1473. Merci.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai omis d'expliquer les

  8   modalités d'organisation de nos classeurs. Vous avez un petit classeur avec

  9   le rapport d'expert, il y a trois classeurs avec des documents dont nous

 10   avons l'intention d'aborder avec le témoin. C'est rangé par sous-groupe du

 11   rapport d'expert, et c'est dissocié par des intercalaires bleus. Il y a un

 12   intitulé pour chacun ensemble, et les documents sont rangés dans l'ordre

 13   qui est l'ordre dont j'ai l'intention de me servir avec ce témoin. Si je

 14   viens du fait de manque de temps à sauter des choses, je vous le dirai en

 15   temps utile. Nous en sommes au premier classeur, et c'est le deuxième des

 16   documents dans l'ordre établi.

 17   Q.  Alors, Monsieur Gorjanc, pouvez-vous expliquer ou continuer à expliquer

 18   la signification ou l'importance de ce document-ci ?

 19   R.  Le commandement du 3e Corps a décidé d'utiliser toutes ses forces, y

 20   compris les QG municipaux et leurs unités respectives pour les envoyer

 21   camper à proximité de l'emplacement où il y a utilisation de leurs unités,

 22   en partie sur les théâtres de combat. L'objectif poursuivi est de les

 23   rendre aptes à faire leur tâche, renforcer leur aptitude et établir une

 24   coopération, une confiance mutuelle entre les commandements, les membres de

 25   ces unités et augmenter leur aptitude au combat en général. Alors on dit

 26   avant cela, qu'il s'agit de cette façon-là à induire l'ennemi dans l'erreur

 27   pour dissimuler les intentions qui sont les nôtres et préparer les

 28   effectifs à la conduite d'activités offensives. L'objectif est donc de les

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  1   rendre aptes, ces unités, de la taille d'une brigade pour ce qui est

  2   d'entreprendre des activités offensives de grande échelle.

  3   Q.  Alors s'agissant de ce que vous venez de nous dire, j'ai deux questions

  4   à vous poser qui découlent de ce que vous venez de dire.

  5   Vous avez dit "le 3e Corps dans son ensemble;" qu'est-ce que cela veut dire

  6   ? Est-ce qu'il y a un lien avec les relèves et équipes et la façon de

  7   fonctionner de l'ABiH ? Qu'avez-vous entendu par là au juste ?

  8   R.  Cette conception nous laisse voir que les unités qui étaient sur la

  9   ligne de front resteront là et défendront la ligne de front de façon

 10   décisive. Mais les autres unités qui étaient restées à la maison, donc qui

 11   sont de relève et qui ne sont pas sur le théâtre de combat, elles viennent

 12   se rendre à ce campement, et il y a un entraînement commun.

 13   Q.  Donc si je vous ai bien compris, pour une première fois l'armée

 14   n'intervient pas par relève mais tous ensemble se trouve au campement pour

 15   un entraînement, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  A la lecture d'une partie de cette décision, lorsque vous avez indiqué

 18   qu'il y avait une volonté de dissimuler les intentions véritables, est-ce

 19   que vous pouvez dire ce que cela signifie en réalité ? Comment avez-vous

 20   interprété cette position, cette attitude ?

 21   R.  Il me sera difficile de l'affirmer. Mais le commandant dans une partie

 22   dit qu'il s'agit d'entreprendre des activités pour porter des pertes aux

 23   Chetniks, pour ce qui est des effectifs et de ses moyens de combat. Mais

 24   lorsque je me suis penché sur le déploiement de ces forces, sur la carte et

 25   la disposition des campements, en ma qualité de soldat, je n'ai pas compris

 26   comment la majeure partie de ces forces-là se trouvaient telles éloignées

 27   du théâtre de combat contre les Serbes. C'est donc sur un front très large

 28   ça se trouve face aux Serbes, en direction de Vlasic, en direction de

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  1   Tesanj, en direction de Tuzla et ainsi de suite. Or des activités

  2   offensives de grande échelle, comme on le dit ici, ça nécessite une

  3   participation conjointe de ces effectifs sur un front en direction d'un

  4   site déterminé.

  5   Q.  Quelle est votre conclusion, d'après la carte que vous avez étudiée,

  6   face à qui le gros de ces effectifs du 3e Corps était-il tourné ?

  7   R.  Compte tenu de leur déploiement, je pourrais dire que l'objectif était

  8   celui de couper les voies de communication dans la vallée de la Lasva et la

  9   vallée de la Lepanica, entre Travnik et Vitez donc et Vitez et Kiseljak.

 10   Q.  Bon. Pouvez-vous nous dire, Monsieur Gorjanc, quelque chose au sujet de

 11   cette armée composée de relèves ? Je pense que vous l'avez quand même bien

 12   indiqué. Vous avez dit les avantages et les défauts pour ce qui est de

 13   l'organisation d'une armée dans un fonctionnement parallèle : d'après vos

 14   connaissances, votre expérience, cette armée qui fonctionne par système de

 15   relèves, est-elle plus forte, ou est-ce que cela faiblit la discipline

 16   militaire ?

 17   R.  Ça faiblit à tout point de vue cette capacité.

 18   Q.  Pouvez-vous nous dire pourquoi ?

 19   R.  Je parle du principe. On peut parler de proportions différentes mais il

 20   y a au moins un tiers sur la ligne de front, en contact avec l'ennemi. Un

 21   tiers qui est à proximité immédiate et prête à intervenir, et installer

 22   dans des installations ou autres types de campement, et un tiers se trouve

 23   à la maison, en vacances, ou en repos, dans les localités avoisinantes,

 24   c'est particulièrement caractéristique pour les armées organisées sur le

 25   principe territorial. S'agissant de ce tiers qui se trouve à la maison, le

 26   commandant de l'unité ne peut effectuer aucune surveillance effective pour

 27   ce qui est de leur comportement en qualité de soldats, ou voire en leur

 28   qualité de citoyens, tout court.

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  1   Q.  Monsieur Gorjanc, essayez maintenant, compte tenu de votre expérience

  2   et vos connaissances militaires de nous dire ce qui suit, si l'on sait quel

  3   est le rendement de ces unités qui se relèvent pour ce qui est de la

  4   discipline militaire pourquoi opter en faveur d'une organisation de son

  5   armée par relèves ?

  6   R.  C'est particulier, lorsque l'adversaire a le même système de conduite

  7   de combat lorsque les circonstances climatiques, lorsque les conditions

  8   d'hébergement des unités, lorsque le niveau d'aptitude au combat n'est pas

  9   très élevé, lorsqu'il n'y a pas de danger imminent d'avoir des offensives

 10   de l'ennemi se produire tantôt, et c'est positif pour le moral des

 11   combattants et pour celui de la population. Troisièmement, il y a nettement

 12   moins de frais pour ce qui est de l'approvisionnement, de l'hébergement des

 13   soldats, en même temps en restant chez eux ils peuvent faire quelque chose

 14   pour approvisionner leurs foyers, c'est-à-dire leurs familles, et la

 15   communauté locale au sens restreint du terme aussi.

 16   Q.  Parce que vous avez un système qui n'est pas organisé suivant ce

 17   système de relèves, est-ce que vous devez avoir forcément des casernes ou

 18   d'autres types d'installations pour loger vos soldats pour qu'ils puissent

 19   y dormir ?

 20   R.  Oui, ce serait très souhaitable que d'avoir des casernes militaires,

 21   des installations ou non seulement il y a la possibilité de loger ou faire

 22   dormir, mais il faut aussi qu'il y ait des installations pour l'hygiène

 23   personnelle, il faut qu'il y ait aussi de quoi meubler le loisir de ces

 24   gens.

 25   Q.  Compte tenu de votre bonne connaissance des installations militaires de

 26   la JNA sur le territoire de l'ABiH, où y avait-il des casernes pour ce qui

 27   est de loger l'armée sur le territoire de l'Herzégovine du nord ?

 28   R.  Sur le territoire de l'Herzégovine du nord, il y avait deux

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  1   installations, celle de Mostar et celle de Capljina.

  2   Q.  Bien. Au paragraphe 37 de votre expertise, de votre rapport d'expert,

  3   vous essayez de nous expliquer la différence qu'il y a entre le fait de

  4   faire la guerre sur son propre territoire et faire la guerre sur le

  5   territoire d'un autre Etat. Je voudrais que brièvement vous nous expliquiez

  6   en quoi consiste la différence.

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder le paragraphe 37, une question de

  9   suivi. J'étais particulièrement intéressé par ce que vous avez dit sur un

 10   tiers face à la ligne de front, un tiers en réserve, ou en profondeur, et

 11   un tiers à la maison.

 12   Donc j'ai bien ces trois chiffres en tête.

 13   Partant de l'idée qu'il y aurait, c'est une hypothèse, une opération

 14   offensive; je dis bien "offensive," sachant qu'il y a un tiers qui est face

 15   aux Serbes sur la ligne de front. Comment le HVO peut faire une opération

 16   offensive s'il y a un tiers qui est à la maison et un tiers en réserve ?

 17   Comment peut-il régler ce problème ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est très difficile notamment pour ce qui est

 19   d'organiser des opérations offensives à la grande échelle. On peut

 20   organiser une attaque avec prélèvement d'une partie des unités de la

 21   réserve pour ce qui est donc de l'emprise des théâtres de combat, mais ceux

 22   qui sont à la maison il est très difficile de les rassembler à l'extérieur

 23   du délai nécessaire pour les rassembler lorsqu'ils sont partis ou sur le

 24   point de partir chez eux.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce à dire qu'avec "ce système d'armée

 26   territoriale" - entre guillemets - il est impossible, en terme militaire de

 27   mener des actions offensives d'envergure ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que c'est impossible, je parle de

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  1   grande envergure, c'est-à-dire engager une brigade entière, ou voire même

  2   plus qu'une brigade.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. On aura certainement l'occasion de revenir là-

  4   dessus.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation]

  6   Q.  Une question finale, pour en terminer avec ce chapitre.

  7   Au paragraphe 37, vous essayez de nous indiquer, Monsieur Gorjanc, quelle

  8   est la différence pour ce qui est le fait de combattre sur le territoire

  9   propre et le territoire d'un autre Etat; expliquez-vous où en quoi consiste

 10   la différence ?

 11   R.  Cette différence pour l'essentiel consiste en ce qu'on qualifie

 12   d'attitude des autorités civiles. Sur votre propre territoire, lorsque vous

 13   avez des instances civiles mises en place convenues et aménagées par une

 14   réglementation juridique, les unités militaires et les officiers sont tenus

 15   de respecter la réglementation et d'avoir ce type d'attitude à l'égard des

 16   autorités civiles, une attitude de confiance mutuelle, et de coopération

 17   mutuelle, et de respect mutuel également. Alors dans le cas où vous êtes en

 18   train de vous emparer de territoire ou de libérer des territoires à vous,

 19   mais qui au préalable étaient placés sous la juridiction ou sur l'autorité

 20   de la partie adverse donc on l'appelle aussi occupation, le commandant

 21   militaire a alors toutes les compétences qui lui font prendre les

 22   attributions des autorités civiles. On appelle ça gouverneur militaire.

 23   Mais même dans ces cas de figure-là, il est obligé de coopérer avec les

 24   autorités mises en place auparavant, si tant est que ces autorités sont

 25   disposées à coopérer avec lui. Si elles veulent bien à lui venir en aide,

 26   si ces autorités sont hostiles à son égard, il a le droit de les relever de

 27   leurs fonctions et d'amener les siennes. En cas de libération d'un

 28   territoire qui vous avait appartenu, il a ce type d'autorisation ou de

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  1   compétence, mais il doit aussitôt après abandonner le pouvoir aux autorités

  2   qui étaient mises en place avant l'occupation ou ramener des instances à

  3   ses côtés pour ce qui est de ce que l'autorité légalement élue de l'Etat-

  4   mère avait mis en place.

  5   Q.  Monsieur Gorjanc, est-ce que vous pouvez nous dire comment fait l'armée

  6   américaine lorsqu'elle va occuper ou libérer l'Irak ou un autre pays ?

  7   R. Dans la composition de toute division américaine, il y a une brigade

  8   spéciale pour les affaires civiles. Cette brigade a pour mission de créer

  9   des autorités civiles sur le territoire pris par l'armée américaine. Ces

 10   autorités ou ces effectifs comportent des experts différents, variés : des

 11   juristes, des administrateurs, des économistes, et cetera.

 12   Q.  Ce que vous venez de nous dire, Monsieur Gorjanc, est-ce que c'est

 13   quelque chose qui est valable pour ce qui est de la doctrine militaire en

 14   guise de règles pour tout type de situation, ou est-ce que c'est quelque

 15   chose de spécifique pour l'Herceg-Bosna ?

 16   R.  Non. Non. C'est habituel. C'est la façon habituelle de se comporter

 17   pour toutes les armées. L'armée américaine, elle, elle a des Unités

 18   spéciales à cet effet.

 19   Q.  Je vous remercie.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme on vient d'en

 21   terminer avec ce chapitre, peut-être pourrions-nous faire la pause ?

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause. On va faire 20 minutes de

 23   pause.

 24   [Le témoin quitte la barre]

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 26   --- L'audience est reprise à 10 heures 52.

 27   [Le témoin vient à la barre]

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience étant reprise, Maitre Alaburic, vous avez

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  1   la parole.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur Gorjanc, nous allons maintenant

  3   traiter de la doctrine de la Défense populaire généralisée. Mais tout

  4   d'abord nous allons nous pencher sur la législation relative à la JNA. Mais

  5   pour que votre réponse à la question de savoir si la JNA, à un moment

  6   donné, est devenue agresseur dans l'une des parties de l'ex-Yougoslavie, je

  7   souhaite apporter une clarification. Si j'ai bien compris, vous avez

  8   déclaré que la JNA ne pouvait pas être agresseur sur le territoire de l'ex-

  9   Yougoslavie tant que le pays de l'ex-Yougoslavie existait; est-ce exact ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Est-ce que ça veut dire que, suite au démantèlement de l'ex-

 12   Yougoslavie, la JNA pouvait être agresseur sur un certain territoire ?

 13     R.  Après son retrait de la Slovénie, elle pouvait simplement avoir le

 14   nom de l'armée yougoslave, mais pratiquement ce n'était plus l'armée

 15   yougoslave ni l'armée de la RFY qui a été constituée par la suite. Cette

 16   [imperceptible] de l'armée de la JNA, qui se retirait de la Slovénie, se

 17   comportait certainement en tant qu'occupant en Bosnie-Herzégovine. Ceci est

 18   un fait.

 19   Q.  Dites-nous : à quel moment est-ce que la JNA s'est retirée de la

 20   Slovénie ?

 21   R.  Le début du retrait de la Slovénie a eu lieu le 18 juillet, et ce

 22   processus s'est terminé le 26 octobre 1991.

 23   Q.  Est-ce que vous pouvez répéter l'année ?

 24   R.  1991.

 25   Q.  Est-ce qu'on peut considérer qu'après les dates que vous avez

 26   indiquées, la JNA n'existait plus, et que les restes de la JNA pouvaient

 27   être une force d'occupation dans une ou autre partie de l'ex-Yougoslavie ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Merci de cette clarification.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous allons à

  3   présent présenter une séquence vidéo.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je crois peut-être que c'était peut-

  5   être un peu rapide ceci.

  6   La Slovénie, en tant que partie de l'ex-Yougoslavie, est-ce que ceci veut

  7   dire que le reste n'a pas été et n'existe pas en tant qu'une partie mutilée

  8   de la RSFY ? Vous avez l'air de dire que la Slovénie qui a rompu avec une

  9   Yougoslavie qui est brisée n'existe plus, disloquée, n'existe plus. Je me

 10   demande si c'est correct ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne suis pas juriste et

 12   surtout pas expert en matière de droit international. Mais en ce qui

 13   concerne mon opinion personnelle, la JNA n'existait plus, et la Yougoslavie

 14   sans la Slovénie n'existait plus non plus, et la Croatie avait déclaré son

 15   indépendance au même moment aussi. Ce qui restait c'était ce que l'on

 16   appelait la Yougoslavie tronquée, mais ce n'était plus la Yougoslavie

 17   constituée de six républiques.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ça c'est différent. Si vous dites

 19   que c'est un croupion de Yougoslavie, je peux comprendre. La question, bien

 20   entendu, à ce moment-là, se pose de savoir si ceci veut encore dire qu'une

 21   agression est possible ou une agression n'est pas possible. Mais vous, en

 22   tant qu'Etat, vous n'êtes pas un juriste et ceci essentiellement est une

 23   question juridique. Bon, je ne vais pas insister du tout là-dessus, mais je

 24   pense que vous avez fait aussi bien qu'on pouvait s'attendre à ce que vous

 25   fassiez.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Je suis entière d'accord avec vous, bien

 27   sûr, j'ai sollicité l'opinion du témoin à ce sujet-là alors que nous savons

 28   exactement à quelle date la Yougoslavie s'est dissolue, et quels étaient

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  1   les événements qui entouraient cela. Il n'y aura pas de problèmes à mon

  2   avis.

  3   Nous allons maintenant présenter une séquence vidéo, et avec votre

  4   permission, je n'indiquerai pas qui figure sur ce film car je souhaite

  5   demander au témoin de ce faire. Ensuite nous allons vous expliquer de quoi

  6   il s'agit.

  7   [Diffusion de la cassette vidéo]

  8   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  9   "Nous faisons tout pour qu'il n'y ait pas de troubles en Yougoslavie car

 10   tous ceux qui pensent que suite à mon départ la Yougoslavie peut être

 11   affaiblie de l'intérieur et que maintenant il existe un danger d'invasion

 12   soviétique, je ne le crois pas. La Yougoslavie est fortement unie malgré

 13   plusieurs groupes ethniques. Et aujourd'hui on peut dire que l'armée

 14   yougoslave est l'une des plus fortes. Dans le système de la Défense

 15   populaire généralisée, d'après la loi, nous devons faire en sorte que tous

 16   les hommes en âge de combattre doivent être apte à comprendre. Nous avons

 17   huit millions de personnes que l'on peut déployer en Yougoslavie, et ce

 18   n'est pas peu. Surtout sachant que c'est un peuple qui a beaucoup fait la

 19   guerre."

 20   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, mon assistant

 22   m'indique que l'interprétation en anglais n'avait pas commencé dès le

 23   début, mais je pense qu'il n'est pas nécessaire de re visionner le film,

 24   mais je souhaite simplement indiquer que l'ensemble de cette séquence

 25   existe sous forme électronique sous le numéro 4D1733.

 26   Q.  Monsieur Gorjanc, j'ai une question à vous poser; est-ce que vous

 27   reconnaissez cet homme ?

 28   R.  Sur mon écran, je n'ai pas vu d'image mais j'ai reconnu à sa voix.

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  1   C'était Josip Broz, Tito, qui était mon commandant suprême pendant de

  2   longues années.

  3   Je souhaite simplement clarifier quelque chose. Il a parlé de 8

  4   millions de personnes qui peuvent porter les armes. A cette époque-là, au

  5   sein de la JNA et de la Défense territoriale de toutes les républiques, il

  6   y avait environ 2 200 000 personnes et le chiffre de 8 millions porte sur

  7   l'ensemble de la population masculine âgée d'entre 16 et 60 ans,

  8   approximativement.

  9   Q.  Josip Broz, Tito, dans cette déclaration faite en 1978, avant sa visite

 10   aux Etats-Unis, donc il a fait cette déclaration à un journaliste

 11   américain, et il mentionne la doctrine de la Défense populaire généralisée.

 12   Est-ce que ce chiffre de 8 millions est lié à cette doctrine-là ?

 13   R.  Certainement. Et d'ailleurs, d'après la constitution, l'ensemble de la

 14   population masculine apte à participer à la résistance s'élevait à un

 15   chiffre bien supérieur.

 16   Q.  Car les femmes sont comprises aussi ?

 17   R.  Oui. Les femmes aussi.

 18   Q.  Merci.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Je souhaite que l'on bénéficie de l'aide de

 20   l'huissier pour déclencher, pour allumer l'écran de M. Gorjanc car il n'a

 21   pas pu suivre jusqu'à présent.

 22   Q.  A quel moment a-t-on commencé à parler de la doctrine de la Défense

 23   populaire autogénéralisée ?

 24   R.  Ceci a commencé en 1968, suite à l'irruption des forces du pacte de

 25   Varsovie en Tchécoslovaquie. La Yougoslavie, à l'époque, a compris le

 26   risque qu'elle se voit envahie elle-même de la part des mêmes forces et

 27   face à une telle puissance et dans un tel environnement, la Yougoslavie ne

 28   pouvait pas faire face avec une armée classique, avec la JNA. A ce moment-

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  1   là, cette doctrine a été adoptée et intégrée dans la constitution. Ensuite

  2   ceci a été élaboré de manière supplémentaire, donc ceci a fait partie de la

  3   constitution de 1974 puis élaborée de manière systématique. Les premiers

  4   documents au sujet de cette doctrine ont été diffusés en 1973 et la

  5   doctrine a été complétée pour ce qui est de sa théorie en 1976.

  6   Q.  Monsieur Gorjanc, est-ce que vous avez participé à cette création et à

  7   sa mise en oeuvre ?

  8   R.  Certainement, s'agissant de sa mise en œuvre et s'agissant de sa

  9   création, j'ai participé à un niveau inférieur, au niveau de mon

 10   commandement, à commencer par le niveau du bataillon et de compagnie ou

 11   peloton.

 12   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire, en bref, quel est donc l'essentiel de

 13   cette doctrine de la Défense populaire généralisée ?

 14   R.  La doctrine de la Défense populaire généralisée au fond, constitue le

 15   fait de solliciter toutes les ressources d'un pays - ici, il s'agit de la

 16   Yougoslavie - afin de défendre sa souveraineté et son intégrité. Autrement

 17   dit, les forces armées et tous les autres acteurs impliqués dans le cadre

 18   d'une résistance armée et non armée d'autres activités de soutien à la

 19   résistance, quel que soit l'âge ou le sexe des personnes impliquées.

 20   Q.  Nous allons expliquer cela plus en détail par la suite lorsque l'on

 21   traitera de la législation.

 22   Au paragraphe 44, vous parlez des comités chargés de ONO et DSZ, cette

 23   abréviation porte sur la Défense populaire généralisée, ONO, et

 24   l'autoprotection sociale, DSZ, l'autoprotection sociale.

 25   Q.  Dites-nous, Monsieur Gorjanc, en bref : de quoi s'agit-il lorsque l'on

 26   parle des comités chargés de ces deux domaines-là, et qui était à la tête

 27   de tels comités ?

 28   R.  Les comités chargés de la Défense populaire généralisée et de

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  1   l'autoprotection sociale étaient une forme du contrôle politique exercé par

  2   le Parti communiste sur le système de la Défense généralisée, ils étaient

  3   constitués des représentants ou des dirigeants des organisations politiques

  4   et sociales à un certain niveau. Les présidents des municipalités, les

  5   présidents du conseil exécutif de la municipalité, le commandant de la

  6   Défense territoriale, le chef du secrétariat chargé des affaires internes

  7   et aussi d'office, le dirigeant de l'Unité de la JNA qui était dans la zone

  8   en question, ces comités étaient chargés de l'organisation de la défense

  9   dans une certaine zone et si la défense ne fonctionnait pas, ils étaient

 10   tenus de prendre certaines mesures afin d'organiser une telle résistance.

 11   Si ceci non plus n'était pas possible, ils commençaient à être en charge du

 12   commandement de la défense de cette zone, et d'habitude, la personne qui

 13   présidait ce comité était le président ou le secrétaire de la Ligue des

 14   Communistes dans la zone en question.

 15   Q.  Lorsque l'on parle de ces comités chargés de l'ONO et de DSZ, si vous

 16   essayez de les comparer aux organes qui ont commencé à exister début 1990

 17   dans certaines parties de l'ex-Yougoslavie, y compris, je crois, en

 18   Slovénie, quel est le segment avec lequel vous pourriez comparer cela ?

 19   R.  En Slovénie, on appelait cela la coordination, à partir de la commune

 20   locale, en passant par la municipalité jusqu'à la république, et c'était le

 21   président du gouvernement et le président en même temps du parti au pouvoir

 22   qui était en charge de cet organe de coordination. En Bosnie-Herzégovine et

 23   en Croatie, il s'agissait des cellules de Crise au niveau municipal ou au

 24   niveau des districts, je ne suis plus sûr.

 25   Q.  Vous nous avez dit que ces comités ont été organisés également au

 26   niveau des communes locales ou des municipalités; est-ce exact ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  D'après vos connaissances, est-ce que de telles cellules de Crise,

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  1   créées au début des années 1990 en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, est-ce

  2   qu'elles aussi étaient organisées au niveau municipal ?

  3   R.  Pour autant que je le sache, elles étaient organisées au niveau

  4   municipal et présidées, en termes généraux, soit par le président du parti

  5   au pouvoir ou le maire.

  6   Q.  Maintenant, une question hypothétique. Si quelqu'un vous disait que de

  7   tels états-majors de crise, sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine,

  8   avaient eu une influence sur les unités militaires sur le territoire de ces

  9   municipalités, est-ce que vous auriez conclu que ceci a un lien avec la

 10   manière dont les comités chargés de l'ONO et DSZ avaient fonctionné

 11   auparavant ?

 12   R.  Le fonctionnement était pratiquement identique.

 13   Q.  Voyons maintenant, Monsieur Gorjanc, le premier document après le

 14   papier bleu.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Il s'agit de 1D 2976.

 16   Q.  Il s'agit là de la constitution de la RSFY. En ce moment, nous allons

 17   nous pencher sur l'article 240, paragraphe 3; est-ce que vous pourriez lire

 18   cela, Monsieur Gorjanc ?

 19   R.  "Tout citoyen qui avec les armes ou autrement participe à la résistance

 20   contre l'ennemi, est considéré comme membre des forces armées de l'armée

 21   populaire yougoslave."

 22   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire maintenant, Monsieur Gorjanc, en

 23   tant que citoyen -- un membre des forces armées de la RSFY -- est-ce que

 24   vous pourrez nous dire, en tant que citoyen, qui en ex-Yougoslavie était

 25   considéré comme membre des forces armées de la RSFY ?

 26   R.  Toute personne ayant résister l'agresseur de quelle que manière que ce

 27   soit, de façon armée ou autre.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez répéter votre réponse, avec les armes ?

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  1   R.  Ou en utilisant d'autres moyens non armés.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai une question de suivi, en lisant le paragraphe

  3   3, de l'article 240. Je me place dans la doctrine de la Défense populaire

  4   généralisée. Vous avez été ancien officier de la JNA, et vous nous avez dit

  5   que pendant plusieurs années, vous étiez dans la même caserne avec le

  6   capitaine Petkovic. Je voudrais savoir : dans votre souvenir, est-ce qu'au

  7   niveau de la JNA, il y avait des ordres, des circulaires, des instructions

  8   écrites ou verbales, sur des troubles éventuels dans les Républiques de

  9   l'ex-Yougoslavie et dans le cadre de ces troubles, la JNA serait intervenu

 10   ? Est-ce que cette hypothèse a été envisagée, oui ou non ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant des

 12   instructions particulières à ce sujet-là, elles n'existaient pas;

 13   cependant, la JNA, pendant son existence, était intervenu plusieurs fois,

 14   surtout au Kosovo pendant des troubles, des émeutes. La dernière fois, il y

 15   a eu une telle intervention, le 9 mars 1991, à Belgrade, lors des

 16   manifestations importantes nationalistes à Belgrade; cependant, il n'y a

 17   pas eu d'instructions particulières à ce sujet-là. En 1988, au printemps,

 18   je ne me souviens pas de la date exacte, car je n'avais pas participé à

 19   cela, un document avait été élaboré, document portant sur l'ensemble du

 20   territoire au sujet de l'intervention des Unités de la JNA, en cas

 21   d'émeute. S'agissant de la Slovénie, ce document a été élaboré, et sur la

 22   base de ce document, un procès a eu lieu à l'époque, à l'encontre de la

 23   personne qui a rendu public ce document, car il s'agissait d'un document

 24   hautement confidentiel, un secret d'Etat.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Témoin, il va sans dire que ce

 26   document m'aurait intéressé au plus haut degré. Mais comme nous n'avons pas

 27   ce document, peut-être qu'on l'aura, on ne sait jamais.

 28   En cas de trouble, alors vous nous avez cité l'intervention de la JNA

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  1   au Kosovo. Quand il y a des troubles, est-ce qu'on peut considérer qu'un

  2   civil peut être potentiellement un combattant si on applique l'article 240

  3   que nous avons sous les yeux, et si potentiellement il est un combattant ?

  4   Est-ce qu'à ce moment-là, la JNA pouvait l'arrêter ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] La doctrine de la Défense populaire

  6   généralisée ne concernait pas la population de souche, mais seulement

  7   l'ennemi venant de l'extérieur. S'agissant des ennemis internes, ceci

  8   relevait exclusivement du domaine de la police civile.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci pour cette réponse.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation]

 11   Q.  Lorsque vous parlez de l'ennemi externe, Monsieur Gorjanc, vous parlez

 12   de qui ? Vous pensez à qui exactement ?

 13   R.  A l'un des Etats qui risquaient d'effectuer une agression contre la

 14   Yougoslavie, à l'époque, et potentiellement parlant nous étions préparés à

 15   faire face à l'agression lancée par n'importe quel des Etats qui nous

 16   entouraient.

 17   Q.  Merci. Nous allons terminer pour ce qui est de l'article 240,

 18   paragraphe 3. D'après cette disposition, on peut considérer qu'une

 19   personne, qui défend le pays avec les armes, et qui le défend d'une autre

 20   manière sans les armes, bénéficie du même statut; est-ce exact, en vertu de

 21   cette doctrine de la Défense populaire généralisée, pratiquement parlant ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Penchons-nous sur l'article 237, où il est dit que la défense du pays

 24   constitue le droit et le devoir inaliénable des peuples et des populations

 25   de la Yougoslavie, et de ses citoyens, voyons maintenant qui étaient les

 26   citoyens du pays.

 27   Compte tenu de vos connaissances militaires et connaissances en

 28   matière de la législation, qu'est-ce que ceci veut dire, "droit inviolable

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  1   et inaliénable" ?

  2   R.  "Inviolable et inaliénable" veut dire qu'il n'est possible de

  3   nier le droit à la résistance de qui que ce soit, et aucun règlement

  4   ultérieur, qui serait en contradiction de la constitution s'agissant de

  5   cette question-là, ne pouvait être appliqué, donc il n'était pas possible

  6   d'empêcher quelqu'un de résister.

  7   Q.  Bien. Nous allons maintenant passer au document suivant; c'est la

  8   loi relative à la Défense populaire généralisée. Il s'agit de 4D 1470. Vous

  9   parlez de cela au paragraphe 54 de votre expertise. Nous allons nous

 10   pencher sur quelques textes législatifs clé, afin de comprendre la doctrine

 11   de la Défense population généralisée.

 12   Examinons l'article 91, où il est dit que les forces armées sont une

 13   entité unifiée, constituée de la JNA et de la Défense territoriale.

 14   Ensuite, au paragraphe 2, il est indiqué qu'un membre des forces armées et

 15   tout citoyen qui participe avec les armes ou autrement à la résistance

 16   contre l'ennemi.

 17   Monsieur Gorjanc, s'agit-il de la même disposition de la loi, que

 18   celle dont il a été question tout à l'heure ?

 19   R.  Oui, c'est l'application de cette disposition de la constitution

 20   sous forme d'une loi.

 21   Q.  Penchons-nous sur l'article 3, où l'on définit la notion de la défense

 22   du peuple généralisée. Veuillez vous pencher notamment sur le terme,

 23   "résistance populaire généralisée." A l'alinéa 7, donc l'on parle des

 24   acteurs de la résistance populaire généralisée; est-ce que vous pouvez nous

 25   dire, au sein de la doctrine de la Défense populaire généralisée, quelle

 26   est la place de la résistance populaire généralisée ?

 27   R.  La résistance, dirais-je, c'est la partie fondamentale de la Défense

 28   populaire généralisée.

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  1   Q.  Bien. Penchons-nous sur cet article 17 de la loi. Dans cet article-là,

  2   il est procédé à la définition des formes principales ou à savoir les

  3   droits et devoirs fondamentaux en matière de Défense populaire généralisée.

  4   Alors, Monsieur Gorjanc, qu'est-ce que c'était que ces droits et

  5   obligations fondamentales en matière de Défense populaire généralisée ?

  6   R.  Les droits et obligations fondamentales constituent une contrainte

  7   militaire. Puis il y a des obligations en matière de protection civile,

  8   qu'il y a des obligations en matière de travail, de prestation de travail.

  9   Il y a des obligations en matière de formation des obligations de travail à

 10   satisfaire et il y a également nécessité de contribuer matériellement.

 11   Q.  Penchez-vous maintenant sur l'article 118 de cette loi, qui aménage la

 12   façon de compléter les forces armées, et là, il est dit que les Unités de

 13   la Défense populaire généralisée sont à compléter, et je cite :

 14   "Par des effectifs de composition permanente et de la réserve."

 15   Alors qui est-ce qui constitue la composition permanente des forces armées

 16   et qui est-ce qui constitue les effectifs de réserve ?

 17   R.  Les effectifs permanents se sont les officiers d'active, les militaires

 18   donc d'active, puis les étudiants dans les écoles militaires et les civils

 19   au service des forces armées. Les soldats, qui sont en train de faire leur

 20   service militaire, sont englobés aussi.

 21   Q.  Bon. L'armée de réserve ou les effectifs de réserve, c'est qui ?

 22   R.  Les effectifs de réserve sont composés par les conscrits qui ont déjà

 23   fait leur service militaire, les conscrits qui ont réglementé ou réglé

 24   leurs obligations militaires autrement et les conscrits militaires du sexe

 25   féminin.

 26   Q.  Bon. On va sauter la loi sur --

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre, Monsieur

 28   Gorjanc. Il y a quelque chose que je ne comprends pas. Le titre, c'est :

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  1   "Renforcement des forces armées." Or -- et ensuite les forces armées seront

  2   renforcées par du personnel des forces armées régulières. Pour moi, c'est

  3   tout à fait otologique logique parce que les forces armées régulières sont

  4   les forces armées. Comment les forces armées peuvent-elles renforcer les

  5   forces armées ? Je vous serai gré de me l'expliquer.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation] Je pense qu'il s'agit d'un problème

  7   d'interprétation et je crois que M. Gorjanc n'a, en réalité, pas compris

  8   votre question.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que M. le Juge a dit, c'est

 10   otologique, oui. Mais je ne pense pas que cela ait trait à ce qu'il a dit.

 11   Il ne s'agit pas de renforcement, et il s'agit en fait de la notion de

 12   constituer ces effectifs.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci. Ce n'est pas la première fois

 14   ni la dernière d'ailleurs que nous nous [imperceptible] à de telles

 15   subtilités de traduction. Est-ce que vous pourriez peut-être relire le

 16   terme "renforcement" dans la langue originale ? Peut-être l'interprète

 17   pourrait-il trouver un autre terme que "renforcement," ou le titre du

 18   numéro 5.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Peut-être le mieux ce serait de demander à

 20   M. Gorjanc de donner lecture de l'article 118 en totalité.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] "Les unités et les établissements de l'armée

 22   populaire yougoslave --"

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pense que l'intention était bonne

 24   mais l'artillerie est long et le témoin a juste manqué de lire le passage

 25   qui m'intéressait. Le titre du numéro 5 qui précède l'article 180,

 26   simplement lire ce titre, s'il vous plaît.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] "Le complètement des forces armées."

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, je pense avoir compris

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  1   maintenant. Cela met fin à l'interruption, Maître Alaburic. Merci.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge.

  3   Q.  Donc dans cet article 118, il est déterminé ou précisé que ces Unités

  4   de la JNA sont à compléter par des effectifs de la composition permanente

  5   et de la composition de réserve; est-ce que c'est ce qu'il est bien de

  6   comprendre ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Donc les choses sont clairement réglées pour ce qui est du règlement de

  9   service dans les forces armées. Mais ce document il ne figure pas sur notre

 10   liste donc on va le sauter, et penchons-nous sur le suivant, le 4D --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'ai une question de suivi à

 12   partir de ce document. J'ai été frappé par le contenu de l'article 12 sur

 13   le rôle que joue la Ligue des Communistes en cas de temps de guerre. Cet

 14   article 12 lui fait jouer un rôle principal, un rôle moteur. Vous qui avez

 15   bien connu le système yougoslave, et puis dans votre pays la Slovénie,

 16   pouvez-vous me dire dans un pays X, la Slovénie, par exemple, quand il y a

 17   un événement de guerre, est-ce que, dans la mentalité des habitants, c'est

 18   le parti politique en place qui fédère, coordonne, impulse la Défense

 19   populaire ? Partant de là, dans l'Herceg-Bosna, était-ce au Parti HDZ HB de

 20   jouer ce rôle qui était joué avant par la Ligue des Communistes, mais comme

 21   elle n'existe plus, c'est un parti qui doit jouer ce rôle ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'aurais beaucoup de mal à

 23   l'affirmer. La Ligue des Communistes dans son programme avait un énoncé qui

 24   disait que c'était la force idéologique et politique motrice de la société

 25   yougoslave. Pour autant que je le sache, dans le programme du HDZ, il n'y

 26   avait pas de disposition analogue disant que c'est la force idéologique et

 27   politique motrice de la Bosnie-Herzégovine, parce que, pour autant que je

 28   le sache, il y avait d'autres partis encore dans le peuple croate, et il y

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  1   avait aussi des gens qui étaient appuyés à d'autres partis en Bosnie-

  2   Herzégovine. Ce qui fait qu'il aurait été difficile d'établir ce parallèle

  3   entre la Ligue des Communistes d'une part et le HDZ d'autre part. Mais je

  4   n'exclus pas la possibilité que dans certains milieux et à certain niveau

  5   il y ait eu des tentatives de faire en sorte.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation]

  8   Q.  Penchons-nous maintenant sur la loi relative à l'obligation militaire.

  9   Il s'agit du 4D 1471, et le premier article dont nous avons besoin c'est le

 10   numéro 47. Bien, là, le chapitre entier de la loi qui réglemente

 11   l'obligation de faire partie des effectifs de réserve dans les forces

 12   armées, alors, Monsieur Gorjanc, qui était soumis à obligation de faire son

 13   service dans les effectifs de leur réserve des forces armées ?

 14   R.  Ecoutez, excusez-moi, je n'ai pas ce document ici.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- le classeur, ce document.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, je suis en train de

 17   procéder dans l'ordre.

 18   L'INTERPRÈTE : La cabine française précise qu'elle a le classeur numéro 2.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Je dois vérifier s'il y a confusion ou pas

 20   mais, moi, je suis en train de suivre l'ordre de rangement des documents,

 21   l'ordre de classification. On vient de nous dire qu'on en est déjà au

 22   numéro 2. Premier document dans le classeur numéro 2.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Dans mon deuxième classeur, le

 24   premier document porte la cote 4D 1472. Or, vous parlez du 4D 1471. Alors,

 25   qu'est-ce que l'on doit faire ? Est-ce que c'est le premier document dans

 26   la liste ou est-ce qu'il faut se fier à la cote ? Donc, le premier document

 27   est intitulé : "Décret sur la déclaration de la loi sur le service armé" ou

 28   le service dans les forces armées, daté de février 1985. L'autre, le

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  1   deuxième, est daté Belgrade 1996, et est intitulé : "Lois sur le service

  2   militaire obligatoire."

  3   [Le conseil de la Défense se concerte]

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, le document 4D 1472 est

  5   sauté. Je l'ai sauté parce que vous ne nous avez pas autorisé à le placer

  6   sur notre liste 65 ter. J'en suis maintenant au 4D 1471, qui est le

  7   deuxième dans l'ordre dans le deuxième classeur.

  8   Je demanderais à présent au témoin --

  9     M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Je m'excuse de n'avoir pas su qu'on était

 11   déjà passé au classeur suivant. Je pensais qu'on était au classeur numéro

 12   1, et là, l'erreur est la mienne.

 13   Alors, au 47, la loi prévoit qui est-ce qui est tenu de faire son service

 14   dans les effectifs de réserve des forces armées.

 15   Q.  Alors, Monsieur Gorjanc, dites-nous : de qui était-ce l'obligation ?

 16   R.  Il y avait là tous les citoyens de la Yougoslavie qui avaient fait leur

 17   service militaire auparavant. Puis il y avait ceux qui, s'agissant du

 18   service militaire, et ils l'avaient effectué d'une autre façon. Et il y a

 19   aussi les conscrits militaires du sexe féminin.

 20   Q.  A l'article 48, il est dit à partir de quand jusqu'à quand il y a

 21   obligation de faire son service dans les effectifs de réserve. Alors,

 22   Monsieur Gorjanc, je vous prie de nous indiquer de quand à quand, de quel

 23   âge à quel âge y avait-il obligation ?

 24   R.  A partir de la date où on a été relâché du service et jusqu'à l'âge de

 25   60 ans pour les hommes; et pour les femmes, à compter de l'âge de 19 ans

 26   jusqu'à l'âge de 50 ans.

 27   Q.  A l'article 69, il est question du registre militaire des conscrits

 28   militaires et je vous prie d'expliquer comment on a tenu à jour ce

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  1   registre.

  2   R.  C'était sur le principe territorial au niveau des municipalités, c'est-

  3   à-dire des départements chargés de défense au niveau des municipalités. Je

  4   précise qu'en 1990, il y a eu un décret de promulgué portant création de

  5   districts militaires et avec des commandements militaires territoriaux. Les

  6   registres ont été repris au niveau du niveau des municipalités pour être

  7   portés vers le niveau de district, placés donc sous la juridiction directe

  8   de la JNA.

  9   Q.  Vous êtes en train de parler ici de mobilisation. Alors, quelles sont

 10   les formes de mobilisation qui existent ?

 11   R.  La mobilisation peut être - excusez-moi d'aller aussi vite - la

 12   mobilisation peut être publique ou secrète, peut être générale ou

 13   individuelle, et là, je parle d'une mobilisation en réalité partielle.

 14   Q.  Alors, dans cette partie à la fin du chapitre où vous faites référence

 15   à un livre de Gavro Perazic, qui est intitulé : "Statut constitutionnel et

 16   juridique de la défense et des forces armées. Statut constitutionnel

 17   juridique et politique."

 18   Alors, Monsieur Gorjanc, est-ce que - je crois que vous faites référence à

 19   cela au paragraphe 62 de votre rapport - qui était Gavro Perazic ?

 20   R.  Le Pr Dr Gavro Perazic, colonel de la JNA. C'était l'un des plus grands

 21   experts en matière de droits de guerre internationale en ex-Yougoslavie. Il

 22   a rédigé plusieurs ouvrages dans cette matière.

 23   Q.  Si j'ai bien compris ses positions, compte tenu de la doctrine de la

 24   Défense populaire généralisée, il considère que les participants à la

 25   résistance ne sont pas seulement ceux qui sont avec l'arme à la main en

 26   train de combattre, mais aussi ceux qui ne portent pas d'arme à la main

 27   mais qui, potentiellement, peuvent être des combattants, c'est-à-dire des

 28   gens qui font partie de la réserve. En cas d'emprisonnement, il convient de

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  1   les considérer comme étant des prisonniers de guerre; ai-je bien compris la

  2   chose ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Monsieur Gorjanc, d'après les informations qui sont les vôtres et la

  5   façon dont vous avez compris la règlement de l'époque, c'est-à-dire celle

  6   de l'ex-Yougoslavie, est-ce que vous estimiez véritablement que c'était de

  7   la sorte qu'il fallait mettre en œuvre la doctrine de la Défense populaire

  8   généralisée ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Penchons-nous à présent sur --

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, le paragraphe 62 de votre rapport est

 12   un paragraphe intéressant et j'essaie de comprendre ce que vous avez voulu

 13   dire exactement.

 14   En prenant le cas d'un civil qui a 30 ans, qui n'est pas dans une force

 15   armée mais qui est capable d'avoir un jour un fusil dans les mains, est-ce

 16   qu'à ce moment-là, on peut l'arrêter ou on doit l'arrêter parce qu'il est

 17   un ennemi potentiel ? Si on l'arrête, quel statut a-t-il ? Est-ce un

 18   prisonnier de guerre, ou est-ce un combattant qui bénéficie du statut de

 19   prisonnier de guerre, ou bien est-ce un civil, potentiellement combattant,

 20   mais dont on doit assurer des garanties par le recours possible pour lui à

 21   un juge ou à une autorité ? Est-ce que vous pouvez répondre à ma question

 22   qui est complexe, mais qui est au cœur de notre sujet ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après la constitution et la loi, tous ceux

 24   qui résistent, qu'ils soient armés ou pas, sont membres des forces armées.

 25   Tous ceux qui ont fait leur service militaire sont des conscrits

 26   militaires, indépendamment du fait d'avoir été affecté à des unités dans

 27   les forces armées ou pas.

 28   Par conséquent, au cas où il y aurait des indices montrant que des

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  1   individus ne portant pas l'arme à la main et qui auraient l'apparence de

  2   civils, s'il y a des indices disant qu'ils risquent d'être ou de porter

  3   atteinte à autrui, il convient de les placer en isolement. Mais s'il est

  4   prouvé qu'ils ont l'intention de porter des dommages ou affecter la partie

  5   adverse, ils auraient à être arrêtés et à se voir attribuer un statut de

  6   prisonniers de guerre.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse est très précise, mais elle mérite un

  8   éclaircissement.

  9   Vous avez dit, ces personnes, s'il y a des indices, elles peuvent être

 10   isolées; ce sont vos propres mots. Alors, pour vous, qu'est-ce que ça veut

 11   dire, "vous isolez" ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] "Les isoler," ça signifie empêcher leurs

 13   allers et venus, sur un territoire déterminé, ou alors à l'intérieur de

 14   leur de résidence, les classer en garde-à-vue, dans leur maison ou alors

 15   dans un site qui est surveillé. Ce n'est pas un camp de détention de

 16   prisonniers de guerre classique.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après vous, d'après -- en vertu de mener au sein

 18   de la JNA ou dans les cours que vous avez pu suivre à l'Académie militaire,

 19   ces personnes isolées, est-ce qu'elles ont des droits, ou bien le seul

 20   droit c'est de se taire ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces personnes ont des droits, ceux d'un

 22   prisonnier de guerre.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Gorjanc, au paragraphe 62,

 24   cette dernière phrase n'est pas très claire à mes yeux. En effet, vous

 25   dites d'abord que si cette personne, en âge de porter des armes est

 26   trouvée, l'ennemi doit considérer ces personnes -- doivent considérer ces

 27   personnes comme aptes au service militaire; est-ce que c'est ça que vous

 28   dites, "doivent," ce n'était pas dans le devoir pour l'ennemi plutôt qu'à

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  1   mon sens, en tout cas, ça aurait été plus simple, plutôt que pouvaient,

  2   peuvent ou pourraient ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, dans ce cas concret, je vais

  4   citer, je cite littéralement le colonel Perazic; cependant, j'estime

  5   personnellement que ceci est avancé comme étant une possibilité non pas

  6   comme étant une obligation.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] D'accord. Donc la formulation n'est

  8   pas très claire.

  9   Par ailleurs, vous dites la chose suivante :

 10   "Parce que dans une situation autre, ils auraient pu être trouvés

 11   portant des armes."

 12   Vous établissiez là un lien de cause à effet. Je dois dire que je

 13   n'en vois pas vraiment la logique.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Tous les hommes en état de combattre et autres

 15   citoyens ont l'obligation de résister; donc lorsqu'ils se procurent des

 16   armes, ils doivent se servir de ces armes.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je ne vais pas insister là-dessus,

 18   étant entendu que vous n'êtes pas juriste, vous ne suivez le type de

 19   raisonnement auquel s'attendrait un juriste.

 20   Pour le compte rendu, plutôt "qu'attendrait un juriste," donc la dernière

 21   phrase, "ce qu'on attendrait d'un juriste," vous ne formulez pas les choses

 22   de la manière d'un juriste.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été confronté à ce problème, où vous avez

 24   isolé des ennemis potentiels, ou bien vous n'avez jamais eu ce cas de

 25   figure sur le terrain ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Personnellement, Monsieur le Juge, je n'ai pas

 27   eu à rencontrer de situation analogue en Slovénie, parce que là-bas, les

 28   conflits armés n'ont duré que dix jours; néanmoins, les autorités slovènes

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  1   et l'armée, c'est-à-dire la Défense territoriale et la police, ont arrêté

  2   les officiers de la JNA, et les ont emmenés dans des camps de détention.

  3   Certains ont été mis aux arrêts dans leur propre appartement, enfin, dans

  4   leurs familles respectives. Il y en a qui ont été emmenés dans des camps,

  5   il y en a un même qui a été dans une mine de charbon, à Hrasnik.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous donnez un exemple, le conflit a duré dix

  7   jours. Mais à votre connaissance, est-ce que l'armée slovène a arrêté des

  8   Serbes qui n'ont pas été officiers de la JNA mais qui étaient Serbes, et

  9   qui pouvaient, le cas échéant, être une menace ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, d'après ce que j'en sais, ça n'a pas été

 11   fait. Mais elle a placé sous surveillance la plupart des citoyens venus des

 12   autres républiques, pour qui on considérait qu'ils ne seraient pas loyaux

 13   vis-à-vis des nouvelles autorités slovènes en place, et on a par la suite

 14   gommé ces gens-là du registre des citoyens. Ces gens ont dû quitter la

 15   Slovénie par la suite.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Gorjanc, revenons sur ce document, c'est extrait du livre de

 19   Gavro Perazic, 4D 1492.

 20   En répondant à la question de M. le Juge Trechsel, vous avez dit que vous

 21   avez, en réalité, cité M. Perazic, au paragraphe 62 de votre rapport

 22   d'expert. Je vous demanderais de prêter attention à la phrase suivante dont

 23   je vais donner lecture, elle se trouve en bas de la page 200, je cite :

 24   "Au cas où on ne les trouverait pas en combat armé ouvert, on peut les

 25   considérer comme étant des combattants potentiels, aussi à leur égard,

 26   sera-t-il agi de la sorte, car dans une situation autre, ils pourraient

 27   être trouvés au combat, l'arme à la main ?"

 28   L'INTERPRÈTE : Les interprètes précisent qu'ils n'ont pas retrouvé le

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  1   passage.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation]

  3   Q.  Alors en citant Perazic, vous avez estimé qu'il s'agissait donc de

  4   combattants potentiels et qu'il s'agissait de se comporter à leur égard en

  5   qualité, en leur qualité de combattants potentiels d'une armée ennemie,

  6   n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui. 

  8   Q.  Alors ceci met un terme à ces segments et on en vient à la Défense

  9   populaire généralisée, en Bosnie-Herzégovine.

 10   Penchons-nous donc sur la façon dont cela a été résolu en matière de

 11   constitution de Bosnie-Herzégovine. Il s'agit d'un ensemble, Messieurs les

 12   Juges. C'est le classeur numéro 2, il s'agit du 1D 1236. Vous faites

 13   référence à ceci à votre paragraphe 64 du rapport d'expert, et il y a --

 14   là, il est question de l'article 162, l'article 162, alinéa 3 dit :

 15   "Tout citoyen qui l'arme à la main ou d'une façon autre participerait

 16   à une résistance contre l'agresseur se trouve être membre des forces armées

 17   de la république."

 18   Alors, Monsieur Gorjanc, dites-nous : vous pouvez vous pencher sur

 19   l'écran.

 20   R.  Messieurs les Juges, juste une petite intervention sur le moniteur. Je

 21   n'ai pas le texte, donc je n'ai pas le compte rendu et je ne sais pas quand

 22   est-ce que je peux répondre, je ne peux pas suivre.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] J'aimerais qu'on mette le prétoire d'un

 24   côté et le compte rendu de l'autre.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai les deux, j'ai les deux écrans qui

 26   montrent le même texte.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation]

 28   Q.  Alors article 162, alinéa 3, je l'ai lu, je ne vais pas la répéter.

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  1   Alors, Monsieur Gorjanc, est-ce que vous voyez une différence quelconque

  2   entre cette définition figurant dans la constitution de la Bosnie-

  3   Herzégovine, et ce, qu'on a vu comme réglementation en ex-Yougoslavie ?

  4   R.  Aucune.

  5   Q.  Alors d'après la façon vous comprenez ces dispositions, est-ce qu'il y

  6   a un signe d'égalité pour ce qui est des formes de résistance armée et de

  7   la résistance non armée à l'agresseur ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Bon. Penchons-nous maintenant sur le document suivant, un décret

 10   relatif à la Défense, il s'agit du 4D 408. C'est déjà une pièce à

 11   conviction dans notre dossier. On ne va pas trop s'attarder. Ce que je

 12   voudrais mettre en exergue ce sont les parties qui pourraient être

 13   importantes pour ce qui est de la Défense populaire généralisée.

 14   A l'article 5, alinéa 3, il est question de la Défense populaire en

 15   temps de guerre. Dans la législation yougoslave il est question de Défense

 16   populaire généralisée. De vous avis, Monsieur Gorjanc, du point de vue

 17   militaire, y a-t-il une différence quelle quel soit entre ces deux notions-

 18   là ?

 19   R.  Non, c'est une juste différence terminologique.

 20   Q.  Bon. Article 46, je vous prie, il est question des droits et devoirs de

 21   citoyens en matière de défense. Alors, Monsieur Gorjanc, veuillez nous

 22   dire, on a vu dans la législation yougoslave que la Défense populaire

 23   généralisée c'était un droit et un devoir des citoyens; en est-il de même

 24   pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine ?

 25   R.  C'est tout à fait identique.

 26   Q.  Article 48, je vous prie. Est-ce que vous pouvez nous l'indiquer cet

 27   article 48 fait état de l'obligation de travail ? Dites-nous : cette

 28   obligation de travail constituait-elle l'une des formes de résistance non

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  1   armée ?

  2   R.  Oui, c'est ainsi qu'on pourrait le comprendre. Parce que les unités

  3   soumises à obligation de travail étaient engagées très souvent directement

  4   sur la ligne de front.

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire pour quelle zone ou âge en vigueur, il

  6   y avait obligation ?

  7   R.  Ça allait de 15 à 60 ans. Toutefois, pour ce qui est de la

  8   mobilisation, on élargissait la zone d'âge pour la faire aller jusqu'à 65

  9   ans.

 10   Q.  Penchons-nous sur l'article 66. Là aussi, Monsieur Gorjanc, veuillez

 11   nous aider à bien comprendre cet article. Je vais être brève. Il est

 12   question du déploiement des ressources et du personnel au sein des forces

 13   armées de façon à utiliser de manière la plus efficace les ressources

 14   humaines et matérielles des républiques dans le cadre de la défense. Est-ce

 15   que vous pouvez nous donner un exemple d'un ingénieur chimique qui est un

 16   expert en matière des explosives ? Comment est-ce que cette personne devait

 17   être utilisée dans la défense du pays ?

 18   R.  Certainement il devait être engagé dans la production des explosifs ou

 19   des matières premières pour la production des explosifs ou dans des

 20   instituts chargés du développement de nouveaux explosifs, ou des dépôts

 21   d'explosifs ou des matériels explosifs.

 22   Q.  S'agissant d'un tel ingénieur, s'il travaille dans une usine de

 23   l'ennemi, de l'armée ennemie, est-ce que vous auriez considéré qu'une telle

 24   personne est plus dangereuse qu'un soldat d'infanterie sur la ligne de

 25   front ?

 26   R.  Certainement.

 27   Q.  Penchons sur l'article 70 maintenant. L'ensemble de cette partie porte

 28   le titre : "Le champ d'action et l'organisation de la Défense civile." Or

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  1   la partie précédente porte sur la défense militaire. Je conclus sur la base

  2   de cela, Monsieur Gorjanc, qu'il existe deux volets principaux de la

  3   défense, civile et militaire, n'est-ce pas ?

  4   R.  C'est exact.

  5   Q.  Dites-nous : dans l'article 71, nous voyons --

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Je suis encore un peu

  7   dans le doute en ce qui concerne ce chimiste. Vous avez dit, Monsieur

  8   Gorjanc, qu'il était obligé de travailler avec des explosifs. Or vous

  9   disiez qu'il s'occupe de travailler sur des fertilisants ou un autre

 10   produit essentiel pour l'agriculture. Qui décide s'il doit faire cela ou

 11   s'il va devoir aller dans un autre département de l'usine pour travailler

 12   sur les explosifs ? Qui prend la décision en question ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette décision est prise par les organes

 14   exécutifs qui évaluent à quel endroit il peut être mieux utilisé. Peut-être

 15   il peut être utilisé aussi au sein de la production agricole, car ce

 16   domaine est très important pour les forces armées aussi et pour la

 17   résistance, donc ce ne sont pas les autorités militaires qui décident.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui, c'est tout à fait logique, mais

 19   ça n'est pas lui d'en décider ce quelle sera sa tâche. Vous avez dit :

 20   "Non," ou en tous les cas, vous avez fait un signe de la tête qui veut dire

 21   : "Non, je vous remercie."

 22   Maître Alaburic.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge --

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, pour enlever une confusion que

 25   j'ai dans l'esprit, je reviens au chimiste qui travaille dans une usine.

 26   Tout le monde sait que parfois les produits agricoles permettent de

 27   fabriquer des bombes, mais indépendamment de cela, si la partie

 28   belligérante considère que cet ingénieur chimiste représente un danger

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  1   potentiel, en raison de ses connaissances de son savoir-faire, est-ce qu'à

  2   ce moment-là, il peut être isolé, mis à l'isolement ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que oui.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une demande.

  6   Nous savons que vous avez pris la décision selon laquelle c'est la Défense

  7   du général Petkovic a le droit d'examiner M. Gorjanc. Mais, compte tenu du

  8   fait que M. Gorjanc est le témoin à la fois de la Défense Petkovic et

  9   Praljak, nous souhaitons vous demander de faire en sorte que la Défense de

 10   M. Praljak pose quelques questions aussi, si elle les considère comme

 11   utiles, et avec votre permission, M. Praljak souhaite poser une question.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut que je consulte mes collègues.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre ne voit pas d'inconvénient, mais à deux

 15   conditions. Premièrement, que le temps qui va être passé et déduit de votre

 16   temps, mais que deuxièmement, il faut que le général Praljak nous dit quel

 17   est l'objet de la question.

 18   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Simplement une question de clarification, s'agissant de la question de

 20   savoir quelles sont les personnes qui sont les prisonniers de guerre. A la

 21   fois aujourd'hui, et après la Deuxième Guerre mondiale, est-ce que c'était

 22   des physiciens ou des chimistes, comme Heisenberg et d'autres, qui ont été

 23   emmenés en Allemagne; ou en Russie, il s'agissait des ingénieurs que l'on a

 24   emmené de [imperceptible]; c'est certainement une question de clarification

 25   que je souhaitais poser à M. Gorjanc. Donc qui sont les prisonniers de

 26   guerre, aussi pendant la guerre de Vietnam ou la Deuxième Guerre mondiale

 27   et ainsi de suite ? Merci.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] S'agissant de cette catégorie de personnes,

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  1   des chimistes, j'ai un seul exemple à vous donner de la Deuxième Guerre

  2   mondiale. De hauts ingénieurs de Slovène, qui étaient des civils, ont été

  3   arrêtés par des Allemands, ont été emmenés dans des camps, et ils ont dû y

  4   travailler en tant qu'ingénieur dans des implantations, institutions

  5   uniques, et après la guerre, en 1948, ils avaient été condamnés en tant que

  6   traîtres. C'étaient les autorités slovènes qui les ont condamnés.

  7   Or, dans d'autres armées, dans d'autres guerres, étaient considérés comme

  8   prisonniers de guerre tous ceux qui ont été retrouvés les armes à la main

  9   mais aussi sans arme à la main, donc des critère différents s'appliquaient

 10   pendant des guerres différentes. Par exemple, pendant la Deuxième Guerre

 11   mondiale, après que l'armée impériale japonaise a attaqué Pearl Harbour,

 12   l'on a interpellé pratiquement tous les citoyens, quel que soit leur âge ou

 13   leur sexe, alors qu'il s'agissait des citoyens américains.

 14   Je ne sais pas si ceci fournit une clarification suffisante pour le

 15   général.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation]

 17   Q.  Je propose que l'on termine pour ce qui est de ce domaine-là.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Comment est-ce que vous savez cela ?

 19   Est-ce que c'est les Japonais qui étaient arrêtés aux Etats-Unis après

 20   Pearl Harbour, étaient-ils des prisonniers de guerre selon votre point de

 21   vue et au sens des conventions de Genève ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça, je ne le sais pas.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] -- car je tire ces informations seulement des

 25   films.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Je ne veux pas

 27   insister sur ce point. Je pense que c'est tout à fait dénué de pertinence

 28   et vous n'êtes pas censé être un expert du droit et du droit de la guerre,

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  1   en particulier.

  2   Merci.

  3   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

  4   Je vais simplement revenir à l'article 66 de la loi suite à la question du

  5   Juge Trechsel, question de savoir qui prenait des décisions à ce sujet-là,

  6   c'est-à-dire s'agissant de la question de savoir où notre ingénieur

  7   chimiste hypothétique serait déployé.

  8   Q.  Penchons-nous, Monsieur Gorjanc, sur l'article 66.

  9   Qu'est-ce qui est dit dans cet article ? Qui va prendre la décision sur le

 10   déploiement, qu'avez-vous dit ?

 11   R.  Ce sont les autorités civiles qui décident suite à la demande, par

 12   exemple, de l'entreprise à laquelle la personne devrait être déployée.

 13   Q.  Quel est le critère principal selon cette disposition ?

 14   R.  Selon cette disposition, l'expertise est la possibilité de contribuer

 15   au maximum à la défense.

 16   Q.  Bien. Penchons-nous à présent sur l'article 47, paragraphe 3 de

 17   l'article 47, qui oblige les citoyens à fournir les informations

 18   importantes pour la défense qu'ils apprennent ou remarquent, et qu'ils les

 19   fournissent de manière la plus urgente au centre de renseignements ou aux

 20   organes d'Etat; est-ce qu'il s'agit là des activités de renseignements de

 21   la part de citoyens ?

 22    R.  Il s'agit des activités de renseignements sur le territoire concerné.

 23   Q.  Penchons-nous sur l'article 4D 1475. Sinon, ça va être le document

 24   suivant, 4D 1475. C'est un ordre émanant du commandant du 3e Corps d'armée

 25   de Bosnie-Herzégovine en date du mois de mars 1993. A la fin, il est dit

 26   qu'une mission spéciale est de maintenir les liens avec nos structures et

 27   nos sympathisants sur le territoire temporairement occupé.

 28   Est-ce que vous pouvez nous dire, Monsieur Gorjanc, si ceci faisait partie

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  1   de l'exercice du service de Renseignements -- ou plutôt, des activités de

  2   renseignements de la part des citoyens ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Nous allons nous pencher maintenant sur le document 4D 409. Il s'agit

  5   d'un décret où la force de la loi portant sur les forces armées de la

  6   République de Bosnie-Herzégovine.

  7   Dans l'article 4, il est question au paragraphe 3 du recomplètement des

  8   unités de guerre ou des institutions de guerre. Comment est-ce que les

  9   unités de guerre étaient recomplétées en Bosnie-Herzégovine ?  

 10   R.  Les unités de guerre étaient recomplétées sur la base des recrues

 11   militaires qui faisaient leur service militaire ou avec d'autres hommes

 12   aptes à combattre, qui s'occupaient de leurs obligations à terme de service

 13   militaire d'une autre manière, qui sont --

 14   Q.  Ceci porte sur les réservistes ?

 15   R.  Oui. Il est question des forces de réserve, sauf les recrues, qui

 16   étaient actives à l'époque.

 17   Q.  S'agissant de réservistes, ce sont des combattants potentiels aussi ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Quand est-ce que ces personnes deviennent des combattants réels ?

 20   R.  Au moment où ils sont déployés dans les unités et où ils commencent à

 21   porter les armes.

 22   Q.  Veuillez vous pencher maintenant sur le document suivant : 4D 412.

 23   C'est un décret portant sur le service au sein de l'ABiH. Nous allons nous

 24   pencher sur le paragraphe 3, paragraphe 1, où l'on définit la notion des

 25   militaires au service militaire. Dans le paragraphe 2, il est question des

 26   soldats et des réservistes qui commencent à être de service au sein de

 27   l'armée.

 28   Monsieur Gorjanc, dites-nous : les personnes qui font partie des forces de

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  1   réserve, sur la base de quoi est-ce qu'elles entrent dans l'armée -- dans

  2   le service de l'armée ? Sur la base de leurs obligations vis-à-vis de

  3   l'armée, ou d'une autre question ?

  4   R.  Sur la base de leurs obligations vis-à-vis de l'armée suite à un appel

  5   de mobilisation.

  6   Q.  Penchons-nous sur l'article 60 qui porte sur la couverture sociale ou

  7   plutôt médicale. Mais ceci est important pour nous pour voir comment le

  8   législateur fait la différence entre des catégories différentes.

  9   Dites-nous : est-ce qu'il y a une différence entre les membres de l'armée

 10   et les membres des forces armées, en termes de guerre ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Bien. Maintenant, nous avons sous les yeux le document 1D 1238. 1D

 13   1238. Il s'agit là des modifications du décret portant sur la défense.

 14   Veuillez vous pencher sur l'article 4. En fait, je vais passer outre

 15   ce document. Il n'est pas si important. Je souhaitais attirer votre

 16   attention sur les activités d'estafettes, de coursiers et autres, et il

 17   définit ici que ces personnes également sont des membres des forces armées.

 18   Est-ce que vous pouvez nous dire de quoi s'agit-il lorsque l'on parle des

 19   personnes chargées d'être des estafettes ou chargées des appels ?

 20   R.  Au sein du département militaire, il y avait un service d'Estafettes.

 21   Il s'agissait de personnes qui étaient chargées d'apporter des papiers

 22   d'appel à la mobilisation ou d'autres informations à recrues militaires,

 23   c'est-à-dire pas des personnes qui étaient membres de l'état-major du

 24   département de la Défense, ni qui ne faisaient pas partie d'unités

 25   spécifiques, mais qui étaient quand même sur le territoire en question.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce que le témoin

 27   vient de dire est régulé par le biais de l'article 126(C) de cette loi.

 28   Q.  Au paragraphe 114 de votre rapport, nous voyons la conclusion

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  1   concernant la question de savoir si, en vertu de la législation de la

  2   Bosnie-Herzégovine, la doctrine de la Défense populaire généralisée était

  3   effectivement réalisée, était effectivement appliquée. Quelle était votre

  4   conclusion ? Pouvez-vous nous le dire brièvement ?

  5   R.  Compte tenu de la totalité des lois et des règlements en vigueur en

  6   Bosnie-Herzégovine, tous les citoyens avaient le droit et l'obligation de

  7   participer à la défense du pays et de contribuer directement à son succès

  8   de manière différente quelle que soit la tranche d'âge, le sexe ou le

  9   statut social. Pratiquement par l'ensemble de la population était concernée

 10   par la Défense populaire généralisée.

 11   Q.  Nous avons examiné la législation, maintenant nous allons nous pencher

 12   sur les décisions, ordres individuels.

 13   Le premier document dont je souhaite parler avec vous est le document

 14   4D 403. C'est la défense portant sur l'organisation des forces armées de la

 15   République de Bosnie-Herzégovine. Est-ce que vous pourriez nous expliquer,

 16   Monsieur Gorjanc, dans cet article, de ce point 1, on fait la différence

 17   entre les états-majors et les commandements ? Est-ce que vous pourriez nous

 18   dire de quoi il est question ?

 19   R.  Ceci a été transféré de l'organisation de la Défense territoriale de la

 20   Yougoslavie où il y avait les états-majors à des niveaux différents et des

 21   commandements des unités au sein de la Défense territoriale.

 22   Q.  S'il fallait faire une différence entre les états-majors et les

 23   commandements en fonction de leurs activités; que diriez-vous quelle était

 24   la différence entre elles ?

 25   R.  S'agissant des commandements et les états-majors, il faut savoir que

 26   les états-majors au sein de la Défense territoriale à l'époque étaient de

 27   fait des commandements avec une autre appellation. Il s'appelait simplement

 28   les états-majors, et je suppose que ceci a été formulé ainsi ici en raison

Page 46096

  1   de l'ancienne doctrine. Je ne sais pas quelle est la date de ce document.

  2   Q.  1992.

  3   R.  Ça veut dire ils suivaient en terme factuel ce qu'était auparavant la

  4   structure de la Défense territoriale de la Bosnie-Herzégovine.

  5   Q.  Examinons maintenant le point 2 où il est stipulé que l'état-major

  6   principal des forces armées est classifié comme état-major et non pas comme

  7   commandement. Qu'avez-vous à dire à ce sujet-là ?

  8   R.  Il s'agit là d'un transfert direct de la formulation de la structure

  9   existante précédemment. Les états-majors étaient en réalité les

 10   commandements des unités. Les unités c'était des condamnés disant de

 11   brigades, des régiments, et s'agissant des corps d'armée, je ne pense pas

 12   qu'on pouvait parler de cela à cette époque-là -- dès cette époque-là en

 13   Bosnie-Herzégovine.

 14   Q.  Vous nous avez dit qu'en réalité, les états-majors exerçaient les

 15   fonctions de commandement; est-ce exact ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Dans ce cas-là, pourquoi est-ce que nous voyons ici les commandements

 18   en tant que structure spéciale séparée ici ?

 19   R.  Je ne saurais vous répondre à cela. Je pense que cette formation a tout

 20   simplement été reprise du système précédent de la Défense populaire

 21   généralisée.

 22   Q.  Nous allons maintenant passer à la pièce P 274, c'est une décision

 23   portant sur la proclamation de l'état de guerre. Au paragraphe 2, l'on

 24   définit entre autres la manière dans toutes les ressources humaines et

 25   matérielles allaient être utilisées et au paragraphe 3, il est question de

 26   l'organisation de la résistance populaire généralisée. A votre avis,

 27   Monsieur Gorjanc, est-ce que ceci est lié à la défense, à la doctrine de la

 28   Défense populaire généralisée ?

Page 46097

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Nous allons maintenant nous pencher sur le document suivant, 4D 1164.

  3   Il s'agit là d'un ordre portant sur la proclamation d'une mobilisation

  4   générale et publique sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Dites-nous

  5   : sur la base du paragraphe 1 de ce document, quelles étaient les personnes

  6   mobilisées en vertu de cet ordre ?

  7   R.  En vertu de cet ordre on a mobilisé tous les hommes âgés entre 18 et 55

  8   ans, ensuite tous les citoyens hommes âgés jusqu'à 65 ans -- ou plutôt,

  9   entre 18 et 65, et les femmes entre 18 et 55, conformément à leur

 10   déploiement de guerre respectif. Donc il s'agissait de la protection civile

 11   et d'autres activités liées à la défense.

 12   Q.  S'agissant de la deuxième catégorie mentionnée, il s'agit des hommes

 13   aptes à combattre, y compris les réservistes ?

 14   R.  Toutes les personnes aptes à combattre car il n'y avait pas de

 15   structure conformément à l'organisation préétablie. On était en train

 16   d'établir le système et il était nécessaire de créer des archives

 17   militaires. Pour ce faire, la plupart des archives avaient été reprises de

 18   la JNA par le bais des districts militaires, et il était nécessaire

 19   d'établir de nouvelles archives militaires.

 20   Q.  Au paragraphe 7, il est dit que, si une personne refusait d'adhérer à

 21   cela, ceci entraînait des suites au pénal et d'autres responsabilités. Sur

 22   la base de vos connaissances au sujet de la législation en vigueur en ex-

 23   Yougoslavie à l'époque et en Bosnie-Herzégovine, quelles étaient les

 24   sanctions envisagées ?

 25   R.  Il s'agissait là d'un délit qui est décrit de manière plus détaillée

 26   dans les dispositions qui suivent, et puis il y avait certaines sanctions

 27   qui étaient imposées en vertu du code pénal.

 28   Q.  Nous avons ensuite le document 4D 1727. C'est une directive sur la

Page 46098

  1   défense sur l'indépendance et la souveraineté de la République de Bosnie-

  2   Herzégovine --

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Document 4D 1164, où on voit que les femmes peuvent

  4   être également donc considérées comme participant à la défense du

  5   territoire, je voudrais que vous m'indiquiez votre point de vue sur la

  6   situation suivante : une femme revêtue d'un uniforme de camouflage qui fait

  7   la cuisine soit dans une caserne pour les soldats soit sur le terrain;

  8   d'après vous, cette femme, est-elle un soldat ou un civil ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Si elle est dans la caserne et qu'elle fait la

 10   cuisine pour les soldats, cela signifie qu'elle effectue une mission

 11   militaire, donc c'est un soldat.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Si elle est sur le terrain avec une unité, elle fait

 13   une mission militaire, ou est-elle civile ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Elle est dans une mission militaire.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Gorjanc, penchons-nous sur le 4D 1727, au paragraphe 2, il est

 18   dit qu'il convient de placer sous un commandement unifié les forces de la

 19   Défense territoriale et la population armée. Alors dites-nous : ce

 20   rassemblement et le fait de placer sous un commandement la population

 21   armée, est-ce que cela à avoir avec la doctrine de la Défense populaire

 22   généralisée ?

 23   R.  C'est tout à fait conforme à ces doctrines.

 24   Q.  Article 4, quand on parle d'une première étape, il est question d'une

 25   résistance massive et armée de la part des citoyens; est-ce que cela à

 26   avoir avec la Défense populaire généralisée ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Au point 5, il est question de création d'Unité de la TO, composée des

Page 46099

  1   Unités de Volontaires, Ligue patriotique, Unités de la TO et autres forces

  2   patriotiques sur le territoire de la municipalité; est-ce que ceci à avoir

  3   avec la doctrine de la Défense populaire généralisée ?

  4   R.  Oui.

  5   Mme WEST : [interprétation] Toutes mes excuses d'interrompre. Bonjour, Kim

  6   West du bureau du Procureur. Bonjour à tous.

  7   Mme Alaburic était très claire dans ses questions qui ont toujours été des

  8   questions ouvertes. Mais ces dernières minutes, il y a eu pas mal de

  9   questions directrices. Or, je voudrais demander à ce que les questions

 10   restent ouvertes. Je comprends bien qu'elle cherche à amener des documents.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Je remercie ma consoeur. Je suis tout à

 12   fait d'accord avec son observation et son objection. J'ai fait une erreur,

 13   je n'ai pas tout de suite indiqué de quelle façon j'allais interroger le

 14   témoin sur ce sujet. Je me propose de lui poser plusieurs questions suivant

 15   les documents et à la fin de cet examen, je lui poserais une question

 16   ouverte, pour savoir si cela est conforme à la doctrine de la Défense

 17   populaire généralisée. Si oui, pourquoi et en quoi ? Si ce n'est pas le

 18   cas, pourquoi ce n'est pas le cas ?

 19   Alors je demanderais à ce que nous parcourions ce document avec des

 20   questions brèves et simples, et à la fin, nous allons tirer tous les

 21   segments au clair.

 22   Alors je vous renvoie au point 6.2, Monsieur Gorjanc. Il est question de

 23   collecte de renseignements, et il est question d'engager ces propres forces

 24   au moyen du MUP, les citoyens loyaux et la population. Alors est-ce qu'il

 25   s'agit des activités du renseignement qui font partie de la doctrine de la

 26   Défense populaire généralisée ou pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Penchez-vous donc sur le 6.4 --

Page 46100

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voulais vous poser tout à l'heure une question,

  2   et puis, je ne l'ai pas posée, et là je profite de ce 6.2 pour vous poser

  3   la question suivante.

  4   J'ai vu dans votre CV que vous avez été officier de renseignements, pendant

  5   une brève période de temps de votre vie à la JNA. En tant qu'officier de

  6   renseignements, est-ce qu'à l'époque, dans l'exercice de votre travail,

  7   vous exercez votre mission en civil ou en militaire ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Au QG de la division, j'étais chargé de la

  9   reconnaissance des Unités de la Reconnaissance appartenant à la division,

 10   donc formation et utilisation de ces unités en cas de guerre, et j'ai donc

 11   travaillé en tant que militaire non pas en tant que civil.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais vous étiez toujours habillé en militaire

 13   ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Toujours, du premier au dernier jour.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous pose cette question parce que des fois des

 16   militaires se déguisent en civil pour leur propre travail de

 17   renseignements.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certes. Cela est tout à fait possible,

 19   notamment lorsqu'on va vers le territoire de la partie adverse.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Gorjanc, je crois qu'il faut que vous tiriez une chose au

 22   clair. Avez-vous fait partie des services de sécurité dans l'armée ou est-

 23   ce que vous étiez dans le renseignement militaire, comme on pourrait - donc

 24   "military informative service" en anglais -  donc quel était le service

 25   dont vous faisiez partie au juste ?

 26   R.  J'étais dans le service du Renseignement, c'est-à-dire dans la collecte

 27   --

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, les interprètes

Page 46101

  1   n'ont pas compris votre question, même si le témoin, lui, il l'a comprise.

  2   Je vous serai gré de la répéter avant d'entendre la réponse du témoin.

  3   Merci.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vais me servir de la terminologie en

  5   Herceg-Bosna. C'est à ces termes que nous sommes utilisés, je pense, ces

  6   termes que vous les connaissez.

  7   Q.  Si le SIS et le service de Sécurité --

  8   L'INTERPRÈTE : Mme Alaburic se sert de l'anglais pour dire "Security

  9   Intelligence Service."

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] -- et si le VOS et le service de

 11   Renseignements militaire - "Military Informative Service," en anglais - SIS

 12   et VOS donc; est-ce que vous avez travaillé dans ce qui en Yougoslavie

 13   était similaire au SIS ou VOS ?

 14   R.  J'ai travaillé dans le renseignement, et là, vous avez parlé du service

 15   de Sécurité. C'est ce qu'on appelait populairement le KOS et j'étais chargé

 16   du traitement informatique.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je sais que maintenant

 18   vous êtes dans le flou, mais je crois que véritablement il faut faire de la

 19   lumière sur la chose.

 20   Q.  Si le KOS - le KOS était ce qu'était le SIS - est-ce que cela signifie

 21   que vous travaillez dans un service qui s'appelait en Herceg-Bosna le VOS ?

 22   R.  Oui.

 23   L'INTERPRÈTE : Les interprètes seraient gré à Mme Alaburic de leur laisser

 24   faire leur travail plutôt que d'interpréter à leur place.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, j'ai convenu et j'ai

 26   débattu avec nos interprètes pour ce qui est de la façon dont on pourrait

 27   éviter les confusions. Parce qu'eux, ils disent "Intelligence," pour ce qui

 28   est de la totalité de ce que nous avons dit au sujet de ces services-là.

Page 46102

  1   Nous avons conclu de la nécessité de nous servir des abréviations SIS, VOS.

  2   Le SIS, on sait ce que c'était le VOS, c'était le service de Renseignements

  3   militaires dans le cadre de l'état-major principal. Je crois que, là, le

  4   problème ne se posera plus pour ce qui est de la compréhension.

  5   Si j'ai bien compris, c'est l'heure de la pause ?

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais donner d'abord la parole à Mme la Greffière,

  7   qui a un numéro IC à nous donner, c'était urgent.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Merci. La Défense Stojic a émis une

  9   objection à la liste des documents du Témoin Curcic, le document recevra la

 10   cote IC 1086.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. C'est un IC 1086, très bien.

 12   Nous allons donc faire 20 minutes de pause.

 13   [Le témoin quitte la barre]

 14   --- L'audience est suspendue à 12 heures 29.

 15   --- L'audience est reprise à 12 heures 50.

 16   [Le témoin vient à la barre]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise, Maître Alaburic.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Gorjanc, étant donné que même chez vous en Slovénie, c'est une

 20   question très sensible que le fait de savoir si on a travaillé pour le KOS

 21   ou si on a collaboré avec le KOS, suite à cette confusion terminologique,

 22   dites-nous si vous avez travaillé au KOS.

 23   R.  Non, jamais. Je n'ai pas non plus été collaborateur clandestin.

 24   Q.  Bon, on a tiré la chose au clair.

 25   Revenons à un autre document. J'ai décidé d'abréger mon

 26   interrogatoire pour ce qui est de ce document et je vais donc vous montrer

 27   le point 6.4, et il est toujours question du 4D 1727. 4D 1727.

 28   M. LE JUGE MINDUA : Excusez-moi. Excusez-moi, Maître Alaburic. Justement

Page 46103

  1   parce que vous avez voulu tirer la chose au clair à propos du passage ou

  2   pas de M. le Témoin au KOS. Sachant que le KOS est le service de

  3   Renseignements militaire au sein de l'état-major principal; c'est bien ça,

  4   Monsieur le Témoin ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cependant, ce KOS avait ses officiers à

  6   partir du niveau de bataillon et au-delà. Dans toute unité, il y avait un

  7   officier du KOS ou un département du KOS. Dans une division, il y avait un

  8   département incluant aux officiers en son sein.

  9   M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Mais, vous, vous avez dit que vous n'aviez

 10   pas travaillé au KOS; c'est bien ça ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] -- je n'y ai pas travaillé.

 12   M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Merci beaucoup.

 13   Alors donc vous avez travaillé à l'équivalent du SIS mais en uniforme --

 14   mais --

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'était pas l'équivalent du SIS.

 16   C'était l'équivalent du service de Renseignements militaire, donc le VOS.

 17   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, c'est très compliqué pour nous.

 19   Le service dans lequel vous avez travaillé, vous nous dites : c'était un

 20   équivalent du VOS, mais le KOS était-ce un équivalent du VOS ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était deux services tout à fait différents.

 22   Le KOS avait, dans son domaine d'intervention, la sécurité interne au sein

 23   des unités sur le territoire où les unités séjournaient. Le VOS, ou le

 24   service de Renseignements, intervenait pour collecter des renseignements

 25   pour ce qui est d'un adversaire ou d'un ennemi potentiel. Alors que le KOS

 26   collectait du renseignement sur ses propres effectifs, sur ses propres

 27   officiers et sur son propre territoire.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Je comprends mieux.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation]

  2   Q.  Partant de ce que vous venez de nous dire, Monsieur Gorjanc, il ressort

  3   qu'au sein de la JNA, le KOS c'était lié à l'état-major de la JNA ?

  4   R.  Il y avait un rôle double, tant qu'il y avait le KOS jusqu'en 1952,

  5   donc c'était uniquement lié au ministère, c'est-à-dire au secrétariat de

  6   l'Etat chargé de la défense. Plus tard, c'était lié pendant un certain

  7   temps à l'état-major notamment à l'administration de la sécurité. Pendant

  8   les dix dernières années - et là, je ne peux pas vous dire plus précisément

  9   jusqu'à quand - une fois de plus, c'est l'administration de la sécurité

 10   était soumise aux compétences du secrétariat fédéral à la défense, c'est-à-

 11   dire placée sous les administres de la défense.

 12   Alors si vous me permettez de simplifier, au sein de l'armée, c'était un

 13   Etat dans l'Etat.

 14   Q.  Est-ce que le KOS était chargé de veiller à la loyauté et la convenance

 15   morale et politique des officiers et leur comportement à titre privé ?

 16   R.  Oui, c'était la mission principale de ce service.

 17   Q.  Vous nous avez dit que vous avez également fait l'objet d'un traitement

 18   par le bon soin du KOS, n'est-ce pas ?

 19   R.  Ça et là.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] "Object of KOS activities," je suis en

 21   train de rectifier l'interprétation pour ce qui est de la page présente,

 22   ligne 6. Ma question était celle de savoir si le témoin a fait l'objet des

 23   activités ou des bons soins du KOS. Peut-être que l'interprétation était-

 24   elle bonne mais je ne le sais pas, et je m'excuse si la traduction était

 25   bonne.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je proposerais le mot "sigle."

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Je vois que ce serait la chose la meilleure

 28   à faire, mais je crois qu'on s'est compris.

Page 46105

  1   Q.  Revenons à nos moutons, Monsieur Gorjanc, c'est-à-dire nos documents.

  2   J'attire votre attention sur le 6.4 de cette directive où il est fait

  3   référence à la totalité des autres intervenants sur le territoire, si c'est

  4   censé contribuer à la sécurisation en matière de génie des installations.

  5   Alors est-ce que ceci a à voir avec la Défense populaire généralisée ou pas

  6   ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  S'agissant de ce document, dans son ensemble, pouvez-vous le commenter

  9   du point de vue de la Défense populaire généralisée ? Est-ce que cela a à

 10   voir avec Défense populaire généralisée ou pas ?

 11   R.  C'est un exemple de l'opérationnalisation de ladite doctrine pour en

 12   faire une directive ou un ordre militaire, à savoir pour ce qui est donc du

 13   comportement à faire suivre par les forces armées.

 14   Q.  Je vous renvoie maintenant au 1D 942, 942, disais-je. Il s'agit d'une

 15   plate-forme pour les activités par la présidence de la Bosnie-Herzégovine

 16   en temps de guerre. Alors je vous renvoie au paragraphe 5 de ce document

 17   qui parle du fondement politique d'une guerre de Défense généralisée - et

 18   on parle d'un combat généralisé en matière de défense de la part de tous

 19   les citoyens - de tous les peuples pour la libération de la Bosnie-

 20   Herzégovine. Veuillez nous indiquer si, d'après la façon dont vous

 21   comprenez la doctrine de Défense populaire généralisée, cela a à voir avec

 22   cette doctrine ou pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Penchez-vous donc sur le point 6. On a donc appel à l'intention de tous

 25   les citoyens et de tous les peuples en Bosnie-Herzégovine pour prendre une

 26   part active au front patriotique. Est-ce que ceci a à voir avec la doctrine

 27   de Défense populaire généralisée ou pas ?

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Bien. Penchons-nous maintenant sur le document d'après 4D 1240. 4D

  2   1240. Je répète le numéro 1240. Il s'agit d'une directive de l'état-major

  3   du commandement Suprême des forces armées de la République de Bosnie-

  4   Herzégovine. C'est daté du mois de septembre 1992. Le document comporte

  5   plusieurs affirmations importantes, et indépendamment du sujet que nous

  6   sommes en train d'aborder, j'aimerais que l'on penche sur le document dans

  7   son intégralité. Je vous renvoie à la page 1, Monsieur Gorjanc. L'agresseur

  8   ici c'est défini comme une combinaison des forces armées de la Serbie, du

  9   Monténégro, des restes de l'ex-JNA, et cetera. On dit que l'agresseur

 10   prépare des activités, souhaitant dissocier la République de Bosnie-

 11   Herzégovine de la République de Croatie.

 12   Alors est-ce que vos informations, pour ce qui est des plannings d'activité

 13   de la JNA dans ce secteur, montrent ou pas que véritablement il y a eu ce

 14   type d'objectif du temps où la JNA fonctionnait ?

 15   R.  Oui, il y avait ce type d'objectif.

 16   Q.  Et ce, en cas d'attaque de l'occident ?

 17   R.  En cas d'agression depuis l'occident ou pour être plus précis, en cas

 18   de débarquement des forces de l'OTAN sur le territoire de la Dalmatie

 19   centrale.

 20   Q.  Est-ce que, s'agissant de l'une des cartes que vous nous avez

 21   dessinées, vous avez indiqué ce type d'activité telle que planifiée ?

 22   R.  Je vous ai montré un plan d'engagement potentiel des forces de mon

 23   corps d'armée à moi, que nous avions élaboré en février 1991.

 24   Q.  Il s'agit d'un corps de la JNA ?

 25   R.  Oui, corps de la JNA, d'Uzice, en Serbie.

 26   Q.  Dans le secteur numéro 3, page 3, Monsieur Gorjanc, voilà comment on

 27   définit les voisins des forces armées de la Bosnie-Herzégovine, je cite :

 28   "Les forces armées de la République de Croatie, par la conduite d'activités

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  1   offensives visant à libérer le territoire de la Croatie, par des parties

  2   d'effectifs engagés de Dubrovnik, collaborent de la façon la plus directe

  3   possible avec nos effectifs à nous, à la libération de l'Herzégovine de

  4   l'est, en particulier des villes de Trebinje et de Stolac."

  5   Alors si ce document est signé par M. Sefer Halilovic, commandant de

  6   l'ABiH, que diriez-vous en guise de conclusion ? Est-ce qu'il s'agit

  7   d'activités communes, synchronisées des armées de deux états ?

  8   R.  Ce document nous montre qu'il s'agit d'activités conjointes mais qui

  9   étaient le moins possible au service d'une alliance.

 10   Q.  Au service d'une alliance, est-ce que vous pouvez répéter votre

 11   réponse, parce que la fin de la phrase n'a pas été traduite ? Vous nous

 12   avez dit que cela montrait le moins possible --

 13   R.  C'est le moins possible au service d'une alliance. Je ne peux pas

 14   affirmer partant de ce document qu'il y a eu des activités coordonnées et

 15   conjointes. Parce que en tout état de cause, il eut fallu créer un état-

 16   major ou un QG à part pour coordonner ce type d'activité.

 17   Q.  Bon. Indépendamment du degré de coopération, il s'agit d'une

 18   coopération ?

 19   R.  D'activité conjointe.

 20   Q.  Au paragraphe 4, passage numéro 2, il est question de gros des

 21   effectifs destinés au déblocage de Sarajevo, pour la défense de territoire

 22   libre et qui était offensif.

 23   Ma question pour vous, Monsieur Gorjanc, est celle-ci : si l'ABiH envisage

 24   des activités de déblocage de Sarajevo, d'après ce que vous savez au sujet

 25   du territoire de la Bosnie-Herzégovine, quel est le territoire que doit

 26   maîtriser à part entière cette armée de la Bosnie-Herzégovine ?

 27   R.  Pour débloquer Sarajevo, l'ABiH -- excusez-moi, l'ABiH devrait

 28   maîtriser le territoire du mont Igman, le territoire de Konjic, et le nord

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  1   de l'Herzégovine.

  2   Q.  Penchons-nous à présent sur le grand 5, mission des effectifs

  3   opérationnels. Là, je vous renvoie à la page 4 -- 4e Corps. Il est envisagé

  4   des activités coordonnées avec la participation d'effectifs en provenance

  5   de la République de Croatie. Est-ce que vous pouvez parler de ces activités

  6   coordonnées avec les effectifs de la République de Croatie ? Est-ce que

  7   vous pouvez nous parler du degré de coopération ?

  8   R.  Activités et coordonnées, c'est une coopération à un niveau plus élevé.

  9   C'est donc une coopération directe et activités de combat concertées vers

 10   une cible ou un objectif commun.

 11   Q.  Penchez-vous sur la teneur des combats armés. Là, on parle de combat,

 12   je vous renvoie donc à la page 7 de la version en croate, "lutte sabotage

 13   et anti-sabotage," et on parle d'activité de sabotage massif dans les

 14   arrières lignes de l'agresseur. Alors pour commencer, Monsieur Gorjanc,

 15   est-ce que vous pouvez nous expliquer la notion, les arrières lignes de

 16   l'agresseur, c'est quel secteur ça ?

 17   R.  Les arrières lignes, ça dépend des unités ou de la taille des unités

 18   qui sont utilisées sur la ligne de front, parce que différentes armées ont

 19   des différents points de vue à cet effet. Mais pour ce qui est de la

 20   Bosnie, les arrières -- l'arrière ligne, c'est le territoire juste derrière

 21   la première ligne de la défense, et on en parlait à ce sujet de trois à

 22   cinq kilomètres en profondeur par rapport à la ligne de contact avec

 23   l'ennemi.

 24   Q.  Veuillez m'indiquer -- nous indiquer, Monsieur Gorjanc, si ce type de

 25   planification de combat en matière de sabotage en guise de type de combat;

 26   est-ce que ça à voir avec la Défense populaire généralisée ou pas ?

 27   R.  C'est tout à fait dans l'esprit de la Défense populaire généralisée.

 28   Q.  Je vous renvoie à la partie 7 : "Sécurisation en matière de

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  1   renseignement." Là, c'est pour vous la page 8, la deuxième partie qui dit :

  2   "S'agissant des tâches de sécurisation en matière de renseignement,

  3   utilisez les instances du Renseignement et les Unités de Reconnaissance,

  4   les forces du MUP et la population."

  5   Alors, Monsieur Gorjanc, est-ce que vous pouvez commenter l'utilisation de

  6   la population dans ce contexte-là ?

  7   R.  La population est répartie sur le territoire entier, et elle est

  8   chargée de suivre, d'observer de façon ininterrompue ce qui se passe sur

  9   leur territoire. Alors la question qui se pose c'est de savoir dans quelle

 10   mesure elle est organisée pour transmettre les résultats de son suivi ou de

 11   ses observations au niveau du territoire. Dans l'ex-Etat, pour ce qui est

 12   du concept de la Défense populaire généralisée et du département relatif à

 13   la Collecte d'information et de renseignement sur l'ennemi, il y avait été

 14   créé un service à part, un service qu'on appelait, service de

 15   Renseignements et de Reconnaissance locale. Les agents du renseignement

 16   militaire avaient recours des gens fiables dans la population pour ce qui

 17   est de cette collecte d'information et ces derniers, eux, se chargeaient de

 18   ramifier leur propre réseau.

 19   Q.  Fort bien. Penchons-nous maintenant sur le département : "Sécurisation

 20   dans les arrières." Au B, on parle d'intendance de la sécurisation en cette

 21   matière-là. Ça, je vous renvoie dans votre texte à la page 9. Pouvez-vous

 22   nous dire ce qui suit, du point de vue de l'alimentation, de l'hébergement,

 23   des possibilités de veiller à l'hygiène ? Est-ce que ceci a à voir avec la

 24   doctrine de la Défense populaire généralisée ?

 25   R.  Oui, parce qu'on s'appuie complètement sur la population.

 26   Q.  Si je vous demandais maintenant au sujet de la totalité du document,

 27   est-ce que ce document a été élaboré en corrélation ou pas avec la doctrine

 28   de la Défense populaire généralisée, que pourriez-vous nous dire en guise

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  1   de qualification de nature générale ?

  2   R.  C'est un exemple scolaire de l'opérationnalisation de cette doctrine de

  3   la Défense populaire généralisée sous forme d'ordre militaire.

  4   Q.  Penchons-nous maintenant sur le document suivant, Monsieur Gorjanc. 4D

  5   1603. 1603.

  6   Dans la partie en page 1 au 1.1, on parle de l'unité de toutes les formes

  7   de la lutte armée, de la résistance armée.

  8   Au paragraphe 2, il est question de l'unité de l'armée et du peuple, et il

  9   est dit qu'il convient de développer et de raffermir toutes les formes de

 10   préparatifs conjoints entre le peuple, enfin, la population et l'armée, à

 11   des fins de défense de pays, du pays.

 12   On parle ensuite des efforts déployés de toutes parts pour aider

 13   l'armée, et cela porte sur sa sécurisation sur le plan matériel, sur les

 14   soins à apporter aux blessés, la collecte d'informations relatives à

 15   l'ennemi. Il s'agit également de découvrir et d'entraver les activités des

 16   agents de l'ennemi. Il s'agit donc de sécuriser les installations qui sont

 17   importantes, prendre part à l'aménagement du territoire sous forme de

 18   constructions, de fortifications, et activités autres.

 19   Alors, Monsieur Gorjanc, est-ce que les missions définies de la sorte ont à

 20   voir avec la doctrine de la Défense populaire généralisée ou pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Bien. Dernier document pour ce qui est de ce sous-groupe, 4D 766. Il

 23   s'agit de propositions, de mesures relatives à l'organisation d'une guerre

 24   de libération populaire généralisée. Je vous renvoie à la partie 2, alinéa

 25   1 du cinquième passage.

 26   On parle de mobilisation maximum de la totalité des segments et des

 27   potentiels de l'Etat pour sa survie.

 28   A l'alinéa que j'ai indiqué, il est question d'un moment décisif où

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  1   il convient de mobiliser toutes les forces politiques, les partis, les

  2   associations, les mouvements, et les citoyens pour en faire un front

  3   patriotique.

  4   Est-ce que vous pouvez commenter ce document du point de vue de la doctrine

  5   de la Défense populaire généralisée ?

  6   R.  C'est également élaboré conformément à l'esprit de cette doctrine.

  7   Q.  Bon. Dans le 6.3 de votre rapport d'expert, vous parlez des activités

  8   dans les arrières de l'ennemi, et vous faites référence à la population, et

  9   c'est l'un des éléments de cette doctrine de la Défense populaire

 10   généralisée. Vous nous avez expliqué ce qu'étaient "les arrières".

 11   Maintenant, je vous demanderais de nous expliquer pourquoi on considère

 12   cela faire partie intégrante de la doctrine en question ?

 13   R.  Parce que ces activités dans les arrières de l'ennemi étaient très

 14   importantes du point de vue suivant, il s'agissait de lui porter des

 15   pertes, de lui porter des dégâts. Il fallait donc détourner son attention

 16   et diminuer la pression sur le champ de bataille. Il s'agissait de relever

 17   le moral de ses propres forces, et ce, pour ce qui est donc de la

 18   population de part et d'autre du front.

 19   Q.  4D, maintenant, 1476. Il s'agit là d'un ordre de la 306e Brigade de

 20   Montagne du 3e Corps de l'ABiH, délivré en janvier 1993, portant sur la

 21   sécurisation des zones rurales. Il est dit au deuxième paragraphe :

 22   "-- des résidences afin de sécuriser les villages, il faut engager toute la

 23   population capable, que ce soient des personnes ayant une obligation de

 24   travail ou étant membres de bataillons, bien sûr, s'ils sont libres."

 25   Est-ce que vous pouvez faire un commentaire sur cette population, sur cette

 26   perspective impliquant la population qui n'est pas directement sur les

 27   lignes de front ?

 28   R.  En vertu de la doctrine, l'ensemble de la population était tenu

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  1   d'établir un niveau de sécurité afin de s'assurer que les unités

  2   participant aux actions militaires pouvaient se reposer suffisamment.  Q. 

  3   A la base de ce document, on peut conclure que le commandant de l'ABiH

  4   déterminait les tâches des conscrits militaires ?

  5   R.  Non.

  6   Mme WEST : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, soyez prudente.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Madame, Monsieur le Président, il

  9   s'agissait là seulement d'une introduction à ma question. Je n'ai pas

 10   encore posé ma question. Je constate simplement qu'il s'agit là d'un ordre

 11   donné par un commandant de l'ABiH établissant les tâches et les missions

 12   des personnes aptes à combattre.

 13   Q.  Veuillez faire un commentaire sur la question de savoir comment il est

 14   possible qu'un commandant de l'armée décide de la manière dont il faut

 15   engager les recrues militaires à des endroits différents et s'agissant des

 16   activités différentes dans des villages et des villes ?

 17   R.  Je suppose que le système des autorités civiles ne fonctionnait pas,

 18   qu'il n'y avait pas la police, non plus, capable d'exercer ces fonctions-

 19   là, et que ces personnes devaient le faire elles-mêmes. Il se trouve que je

 20   sais que cet endroit est à proximité immédiate des lignes de front le long

 21   de la partie orientale du mont Vlasic, et près des forces serbes qui s'y

 22   trouvaient. Donc, logiquement, en vertu de la doctrine, cette personne

 23   avait le droit de prendre ces mesures.

 24   Q.  Lorsque vous dites que la doctrine lui permettait cela, que voulez-vous

 25   dire ?  

 26   R.  Je veux dire par là que toutes les recrues militaires, quels que soient

 27   leur déploiements au sein des unités militaires, étaient tenues de répondre

 28   à tout appel de mobilisation afin d'exercer leurs devoirs militaires. Ici,

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  1   il est question de la sécurité et de la sécurisation de la zone.  

  2   Q.  J'ai préparé un autre document pour vous. Il s'agit d'une série de

  3   trois documents qui constituent des exemples des actes de sabotage qui ont

  4   été effectués. Bien sûr, vous ne pouvez pas en parler du point de vue des

  5   faits en ce qui concerne une façon détaillée d'en parler, mais peut-être

  6   vous pouvez faire un commentaire sur 4D 462, portant sur un interrogatoire,

  7   l'interrogatoire de Salko Alihodzic, qui décrit les actions de la

  8   population, donc les actions organisées par l'ABiH au plateau de Dubravska

  9   à la mi-juillet 1993. Veuillez examiner ce document, Monsieur Gorjanc, et

 10   nous dire s'il s'agissait là d'un document qui a un quelconque lien avec

 11   les actes de sabotage effectués en vertu de la doctrine de la Défense

 12   populaire généralisée.

 13   R.  Compte tenu du fait que je connais ce territoire et que je sais qu'à

 14   cette époque-là, ce territoire a été surveillé par le HVO, je sais qu'il

 15   n'y a pas eu d'unités de l'armée du HVO sur ce territoire. Il ne s'agit pas

 16   d'une action de sabotage classique, c'est-à-dire le fait de faire infiltrer

 17   des troupes en arrière des lignes de l'ennemi afin d'effectuer un acte de

 18   sabotage. A mon avis, ce monsieur avait probablement un fusil chez lui, et

 19   ensuite quelqu'un l'a simplement appelé et il s'est joint aux autres dans

 20   le cadre de cette action. Mais il ne s'agissait pas d'une unité organisée

 21   afin d'effecteur cela.

 22   Q.  Nous avons le document suivant, 4D 910, un autre compte rendu de

 23   l'interrogatoire, cette fois-ci de Musair Klaric, il décrit le même

 24   événement. Au deuxième paragraphe, il dit que ceci s'est déroulé

 25   conformément au scénario préparé par l'ABiH dans la région de Dubrava. Est-

 26   ce que vous pourriez faire un commentaire là-dessus, Monsieur Gorjanc,

 27   compte tenu de ce document et de ce que vous savez ?

 28   R.  Je pourrais dire qu'il s'agit là d'une constitution ad hoc d'une unité

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  1   de l'ABiH en réaction de l'appel de quelqu'un. Car il est dit que : Au

  2   début, ils étaient peu nombreux, et par la suite un groupe d'environ 120

  3   personnes a été constitué, par la suite les armes ont été distribuées, et

  4   ainsi de suite. Donc ça veut dire que les armes étaient cachées quelque

  5   part, car il n'était pas possible de transporter en traversant les lignes

  6   de front de telles quantités d'armes, sans que ceci ne soit remarqué.

  7   Q.  Nous allons maintenant examiner la pièce 4D 1730. Je souhaite attirer

  8   votre attention simplement sur le point 14, qui figure à la page 4 en ce

  9   qui vous concerne, Monsieur Gorjanc. Je vais vous le lire, c'est simple :

 10   "Il faut continuer à faire infiltrer les groupes de sabotage en arrière

 11   ligne ennemie afin d'effectuer des actions de sabotage."

 12   Est-ce que vous pouvez faire un commentaire de cela compte tenu de la

 13   doctrine de la Défense populaire généralisée ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce qu'il y a un lien quelconque entre les deux ?

 16   R.  Oui, ceci est entièrement conforme aux thèses principales de cette

 17   doctrine.

 18   Q.  Bien. Nous allons passer maintenant au document suivant. Juste un

 19   moment pour que je classifie les documents.

 20   Le chapitre suivant de votre rapport d'expert porte sur les soldats

 21   musulmans en tant que problème de sécurité éventuelle.

 22   Tout d'abord, Monsieur Gorjanc, nous allons présenter trois cartes à

 23   l'écran. La première carte porte la cote 4D 1216, c'est la carte de Mostar

 24   pendant la période allant jusqu'au 30 juin 1993. Voici, Monsieur Gorjanc,

 25   dites-nous, s'il vous plaît, est-ce que vous vous voyez la région de Mostar

 26   orientale ?

 27   R.  Oui, je vois.

 28   Q.  Dites-nous si la couleur bleue marque les forces du HVO ? Que diriez-

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  1   vous ? Jusqu'au 30 juin 1993, qui contrôlait le territoire au sud et au

  2   nord de Mostar orientale ?

  3   R.  C'était les Unités du HVO.

  4   Q.  Bien. Examinons maintenant la carte, 4D 561, s'il vous plaît. En fait,

  5   je n'ai pas de question portant sur cette carte-là.

  6   Nous allons passer donc immédiatement à la carte suivante, 4D 562, examinez

  7   ces deux cartes pour voir ce qui se passait un peu plus au nord dans la

  8   région de la Bosnie centrale. Après nous allons relier tout cela. Vous avez

  9   déjà vu ces cartes, donc nous ne devons pas perdre beaucoup de temps là-

 10   dessus.

 11   Tout d'abord, veuillez nous dire si le HVO -- essayons de voir si le HVO

 12   avait une idée quelconque concernant le fait que l'ABiH planifiait de

 13   s'emparer de la vallée de la Neretva. Tout d'abord, nous allons nous

 14   pencher sur le document 4D 948.

 15   Dites-nous, Monsieur Gorjanc, s'il s'agit là d'un ordre donné par le chef

 16   d'état-major, en date du 7 juin 1993. Est-ce que sur la base de cet ordre

 17   il est possible de conclure que le HVO savait quoi que ce soit au sujet du

 18   fait que l'ABiH était sur le point de lancer une offensive sur les zones de

 19   Jablanica, Bijelo Polje, et Mostar ?

 20   R.  Il ressort de ce document que le HVO avait pris des mesures de

 21   prévention puisque l'on s'entendait à ce que l'ABiH lance une offensive à

 22   travers cette région.

 23   Q.  Bien. Nous allons maintenant nous pencher sur le document suivant 4D

 24   702, il s'agit là d'une lettre envoyée par le chef de l'état-major du HVO,

 25   le 30 juin 1993, après que l'ABiH a conquis le territoire au nord de Mostar

 26   orientale. Je corrige le compte rendu en anglais, la date est le 30 juin.

 27   La lettre a été adressée à M. Wahlgren et M. Morillon. Il est écrit :

 28   "Nous souhaitons vous rappeler que notre partie lors de la rencontre avec

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  1   le général Morillon à Medjugorje, qui a eu lieu le 26 juin 1993, avait

  2   averti de la possibilité d'une attaque frontale planifiée lancée par les

  3   forces musulmanes contre la ville de Mostar, et les positions du HVO, aux

  4   alentours."

  5   Au paragraphe suivant, il est dit qu'il était facile de prévoir cela et que

  6   ceci était une continuation logique de l'offensive menée par les forces

  7   musulmanes, offensive qui avait commencé en Bosnie centrale, et qui s'est

  8   par la suite poursuivie en Herzégovine nord, et il est dit que :

  9   "La vallée de Neretva et la cuvette de Mostar ne constituent qu'une partie

 10   de la même entité stratégique par le biais de laquelle ils essaient

 11   d'obtenir l'accès à la mer."

 12   Tout d'abord, Monsieur Gorjanc, puisque vous connaissez la géographie de

 13   l'Herzégovine, est-ce qu'il est exact de dire que la cuvette de Mostar et

 14   l'ensemble de la vallée de Neretva sont la continuation d'une même entité

 15   stratégique ?

 16   R.  Tout à fait.

 17   Q.  Si vous vous penchez sur ce document, est-ce que vous pouvez, vous

 18   aussi, conclure que le HVO était au courant des opérations offensives qui

 19   étaient planifiées ?

 20   R.  Oui, ils étaient au courant certainement. Ils faisaient cela car la

 21   FORPRONU -- ou plutôt, le coordonnateur de la FORPRONU pour la Bosnie les

 22   avaient avertis.

 23   Q.  Monsieur Gorjanc, imaginons la situation suivante : tout d'abord les

 24   Unités du HVO dans la zone, dans la région en question, contenaient un

 25   grand pourcentage de Musulmans.

 26   Deuxièmement, jusqu'à ce moment-là, s'agissant de ces soldats

 27   musulmans au sein du HVO, aucune mesure n'avait été prise à leur encontre,

 28   aucune mesure de protection, c'est-à-dire pour ce qui est de leur

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  1   désarmement ou mis en isolement. Compte tenu de votre expérience et de vos

  2   connaissances, quelle serait votre conclusion concernant les relations

  3   entre les commandants militaires du HVO et leur soldats musulmans ?

  4   R.  Il y a deux possibilités, soit il y avait un manque de prudence, et

  5   j'en doute fortement, car ils avertissaient les acteurs internationaux de

  6   cette possibilité et du fait que compte tenu de leurs unités, donc

  7   constitution de leurs unités, il fallait tout faire pour mettre une fin à

  8   cela. Je pense que ceci prouve une intention générale de maintenir de

  9   bonnes relations, un bon niveau de coopération et de continuer à travailler

 10   en tant qu'alliés.

 11   Q.  Ma question portait sur les soldats musulmans au sein du HVO, qui

 12   étaient membres donc du HVO ?

 13   R.  Je pense que les commandants du HVO faisaient quand même confiance à

 14   ces personnes-là, ils les connaissaient souvent personnellement et

 15   plusieurs d'entre eux avaient combattu pendant six ans déjà, côte à côte,

 16   avec les soldats croates au sein des mêmes unités.

 17   Q.  Monsieur Gorjanc, à ce moment-là, c'est-à-dire fin juin, si vous-même

 18   vous aviez été commandant du HVO dans cette région-là, si vous aviez été au

 19   courant de telles actions planifiées de la part de l'ABiH, et si vous aviez

 20   un certain nombre doute selon lequel il y avait un risque que les soldats

 21   musulmans ne soient pas tout à fait loyaux, est-ce que vous auriez pris

 22   certaines mesures ? Si oui, lesquelles ?

 23   R.  La première mesure aurait été la mesure de surveillance, notamment pour

 24   ce qui est des officiers au sein des commandements haut placés et au sein

 25   des unités dans lesquelles le pourcentage des Musulmans était

 26   particulièrement élevé.

 27   Deuxièmement, la partie opérationnelle, c'est-à-dire le transfert

 28   d'une telle unité qui ne bénéficie pas d'un niveau de confiance aussi élevé

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  1   aux côtés d'une unité plus sûre, donc sans transfert à une autre partie de

  2   la ligne de front où les dégâts, dans le pire scénario, auraient été bien

  3   plus limités.

  4   Q.  Monsieur Gorjanc, imaginons la situation suivante. Vous, en tant que

  5   commandant du HVO, vous perdez le contrôle sur une partie du territoire, et

  6   ensuite l'ABiH procède à la conquête de ce territoire, et ce, en

  7   coopération avec vos propres soldats musulmans, et si ceci confirme tous

  8   vos doutes en tant que danger réel et présent, qu'auriez-vous fait dans une

  9   telle situation, en tant que commandant ?

 10   R.  Par le biais des mesures de surveillance, j'aurais laissé tous les

 11   soldats qui étaient encore au sein de mes unités, et là où le danger était

 12   plus élevé, surtout près des lignes de front, j'aurais isolé de tels

 13   soldats. Je n'aurais pas eu d'autre choix.

 14   Q.  Monsieur Gorjanc, voyons maintenant ce qui s'est passé après le 30

 15   juin, pour ce qui est du territoire. Veuillez maintenant vous penchez sur

 16   le document 4D 622.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Nous allons maintenant aborder le troisième

 18   classeur, Monsieur le Président, il s'agit là du premier document contenu

 19   dans le troisième classeur.

 20   Q.  Monsieur Gorjanc, compte tenu du fait que vous n'êtes pas un témoin de

 21   faits, tous les faits que j'expose ont un caractère hypothétique. Si donc

 22   le 30 juin l'ABiH a pris le contrôle d'un territoire allant jusqu'à 26

 23   kilomètres de Mostar oriental, et au bout de quelques jours, elle a pris le

 24   contrôle de la partie sud de Mostar vers Hum et Blagoje, est-ce que vous

 25   auriez considéré que toutes ces gains territoriaux autour de Mostar

 26   oriental étaient importants, des zones importantes sur le plan militaire ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Compte tenu de vos connaissances et votre compréhension de la Bosnie-

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  1   Herzégovine, dites-nous si la route menant vers le nord est ouverte. Donc

  2   la route vers Jablanica et la Bosnie centrale, dans une telle situation,

  3   est-ce qu'il serait possible que les unités du 1er et du 3e Corps d'armée

  4   viennent de la Bosnie centrale se battre à Mostar et plus vers le sud ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Je vais maintenant vous montrer plusieurs documents montrant que les

  7   services --

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Il reste peu de minutes et, Monsieur le Témoin,

  9   cette carte est pour moi fondamentale, et donc ça mérite qu'on s'attarde

 10   quelques minutes.

 11   D'après la carte, on voit que le HVO contrôle une zone dans Mostar, une

 12   partie. En bleu, on a l'ABiH, en vert -- excusez-moi, en vert, en bleu,

 13   c'est le HVO. En vert c'est l'ABiH. L'ABiH contrôle Mostar Est, et puis on

 14   a les Serbes qui sont à la droite du document. Alors, la question qui est

 15   de mon de point de vue très importante, d'après l'état de vos

 16   connaissances, un habitant de Mostar Est, peut-il avec cette carte

 17   militaire quitter Mostar Est soit par le nord, soit par le sud, dans la

 18   mesure où on voit que la bande contrôlée par l'ABiH fait une certaine

 19   distance. Alors on n'a pas la distance, mais il y a au moins quelques

 20   kilomètres.

 21   Donc je me résume, est-ce qu'un habitant de Mostar Est peut quitter

 22   Mostar Est en passant par la zone contrôlée par l'ABiH, soit par le nord

 23   soit par le sud ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, il peut passer.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, il peut passer. Nous avons le HVO à gauche, et

 26   les Serbes à droite, d'après ce plan. Je présume que le HVO avait des

 27   pièces d'artillerie, et je présume que les Serbes avaient des pièces

 28   d'artillerie. Nonobstant le fait qu'il y avait des pièces d'artillerie de

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  1   part et d'autre, est-ce qu'un habitant de Mostar Est pouvait, peut-être en

  2   prenant des précautions, je ne sais, partir par le nord ou partir par le

  3   sud ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils pouvaient partir, surtout pendant la nuit.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Avec les connaissances techniques que vous

  6   avez, qui sont certainement cent fois supérieures aux miennes, pouvez-vous

  7   me dire quel est le minimum, la bande contrôlée par l'ABiH telle qu'on la

  8   voit au point de vue distance ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans quel sens ? Vous parlez de la largeur du

 10   couloir ?

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : La largeur du couloir, oui, la largeur du couloir.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Le couloir est large de sept, huit kilomètres;

 13   cependant, sur les pentes de Valic, il est pratiquement impossible de

 14   prendre l'axe sud, nord, donc on est limité à Donje Polje, la ville de

 15   Mostar orientale, et puis ensuite il y avait un élargissement. Donc, en

 16   réalité, il était possible de se déplacer en prenant quelques routes qui

 17   traversaient la ville, et ensuite vers Bijelo Polje où il y avait juste

 18   deux routes, le long de la rivière de Neretva et puis la route principale.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous êtes affirmatif ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question avant la fin, parce qu'il y a un

 22   procès après. Les habitants de Mostar Est, compte tenu du fait qu'il

 23   pouvait y avoir des tirs de l'artillerie, est-ce que la nuit, de nuit il

 24   était plus facile d'emprunter les routes pour partir vers le nord et le sud

 25   ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant la nuit, il était plus simple de

 27   partir de la ville et vers Buna et vers Bijelo Polje; cependant, il était

 28   plus difficile en empruntant le massif montagneux à l'ouest vers Jablanica,

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  1   la pente ouest de Prenj.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Il est quasiment l'heure de terminer, parce que

  3   je ne veux pas faire tirer les oreilles par les Juges qui vont nous suivre.

  4   Donc on va arrêter là. Demain, on continuera.

  5   La Greffière va nous dire combien de temps il reste à la Défense du général

  6   Petkovic. Je ne sais pas, on verra ça demain. Mais, apparemment, il nous

  7   reste donc le classeur à terminer.

  8   Voilà, sur ce, donc je vais souhaiter une bonne fin de journée à tout le

  9   monde, et nous aurons, Monsieur le Témoin, le plaisir de vous revoir demain

 10   matin à l'audience, qui débutera à 9 heures du matin.

 11   Je vous remercie.

 12   [Le témoin quitte la barre]

 13   --- L'audience est levée à 13 heures 44 et reprendra le mercredi 28 octobre

 14   2009, à 9 heures 00.

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