Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 28 octobre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [L'accusé Pusic est absent]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 8 heures 59.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame la Greffière, appelez le numéro de l'affaire.

  8   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] L'affaire IT-04-74-T, le Procureur

  9   contre Prlic -- 

 10   On m'entend bien, maintenant.

 11   L'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Madame la Greffière.

 13   En ce mercredi 28 octobre 2009, je salue en premier MM. les accusés, je

 14   salue Mmes et MM. les avocats. Je salue M. le témoin, je salue les

 15   représentants du bureau du Procureur, ainsi que toutes les personnes qui

 16   nous assistent.

 17   J'indique à Me Alaburic qui lui reste une heure et sept minutes. Donc je

 18   lui cède la parole.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 20   Messieurs les Juges. Bonjour, collègues de l'Accusation. Bonjour à mes

 21   confrères de la Défense. Bonjour à M. le témoin. Bonjour à toutes les

 22   personnes présentes dans le prétoire.

 23   LE TÉMOIN : MILAN GORJANC [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Interrogatoire principal par Mme Alaburic : [Suite]

 26   Q.  [interprétation] Hier, Monsieur Gorjanc, nous avons terminé l'audience

 27   au moment où M. le Juge, Président de la Chambre, M. Antonetti, vous posait

 28   une question sur les façons de traverser Mostar Est, en passant par

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  1   Jablanica. Mais je ne vais pas immédiatement à ce sujet pour le moment, car

  2   nous devons parler d'un sujet particulier dans le détail, et nous y

  3   reviendrons lorsque nous parlerons du siège de Mostar.

  4   Passons maintenant, si vous le voulez bien, au thème qui consiste à évoquer

  5   les soldats musulmans du HVO, dans le cadre de la situation sur le plan de

  6   la sécurité.

  7   Monsieur Gorjanc, j'aimerais vous montrer au total cinq documents au sujet

  8   desquels je vous interrogerais. Le premier, c'est la pièce P 1438, c'est un

  9   rapport qui émane du commandant du secteur sud, de l'armée croate qui avait

 10   la responsabilité des unités de la 1ère  Brigade du HVO. Dans ce rapport,

 11   en conclusion donc tout à fait à la fin du rapport, deuxième paragraphe à

 12   partir du bas, il déclare, je cite :

 13   "La sécurité de la défense est réduite en raison d'un nombre important de

 14   Musulmans au sein de l'unité, à savoir plus de 50 %."

 15   Ce document date de février 1993.

 16   Autre document à présent, la pièce P 2223, un rapport relatif à la

 17   situation de la sécurité du chef du SIS, au sein de la Brigade de Ljubuski,

 18   du HVO. Dans la deuxième partie de la première page de ce rapport, nous

 19   lisons, je cite :

 20   "Par le biais du commandement de la brigade, j'ai proposé de désarmer les

 21   membres de l'unité d'appartenance ethnique musulmane, au moment où ils

 22   reviennent du front."

 23   Le document suivant est dans votre classeur également, je le saute, cela

 24   dit, parce que nous n'allons pas l'utiliser. Mais je vous demanderais de

 25   vous pencher sur la pièce 4D 290, 4D excusez-moi, pas de 290, mais 920, 4D

 26   920. Ce document est un rapport du SIS de la 3e Brigade du HVO. Il y a

 27   plusieurs passages de ce document qui nous intéressent. En première page,

 28   il est question de Hajro Jakirovic, qui n'est pas venu remplir sa mission

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  1   depuis le 9 mai, il a été convoqué par le chef du SIS, en raison de cela,

  2   car il doit rendre son Motorola, en particulier.

  3   Puis page 2, on lit, je cite :

  4   "Les Musulmans ont quitté l'unité, ce qui explique pourquoi les

  5   effectifs étaient insuffisants."

  6   Puis à la page de votre document qui se termine par la page 6,

  7   Monsieur Gorjanc, je vous demanderais de vous concentrer sur ce que je suis

  8   en train de vous dire. Il est écrit que les armes ont été prises aux

  9   membres de l'unité d'appartenance ethnique musulmane, et ce de la 3e

 10   Brigade, parce qu'ils avaient refusé de participer à l'effort de défense.

 11   Puis un peu plus loin, nous lisons que tous les Croates ont fui Blagaj,

 12   mais que certains éléments semblaient indiquer qu'il y avait deux courants

 13   parmi la population musulmane, un courant favorable au HVO, et un autre

 14   favorable à l'ABiH.

 15   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Puis maintenant nous passons à un autre

 17   document, la pièce P 2562, et j'indique aux interprètes que le micro est le

 18   seul qui est allumé à la table où je me trouve -- non, toutes mes excuses.

 19   En fait, il était éteint.

 20   Q.  Donc la pièce P 2562, c'est un rapport du commandant de la 2e Brigade

 21   du 3e Bataillon du HVO, qui date du mois de mai 1993, d'après ce que je

 22   vais évoquer pour commencer la deuxième phrase du premier paragraphe, je

 23   cite :

 24   "Sur un total de 56 membres de l'unité d'appartenance ethnique, 39 vont sur

 25   le front, sur les positions, deux participent à toutes les actions, et

 26   d'après ce que nous savons, aucun d'entre eux n'a déserté l'unité pour se

 27   rendre au sein de l'ABiH."

 28   Puis ensuite ce qui m'intéresse également, c'est le paragraphe 2, dernière

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  1   phrase, je cite :

  2   "S'agissant des activités de notre service, l'IPD, depuis qu'une bonne

  3   partie des Musulmans ont été envoyés sur les positions, nous sommes en

  4   contact permanent avec ces hommes. Nous essayons de leur expliquer notre

  5   situation et la nécessité de coexister. Les Musulmans se sont protégés par

  6   nous, même si ce n'est pas en totalité. Nous croyons que ces personnes

  7   demeureront dans notre unité, mais davantage parce qu'ils habitent dans la

  8   région, dans cette région qui est véritablement peuplée de Croates."

  9   Autre rapport, la pièce 2D 1379, c'est un rapport du SIS de 1993, juillet

 10   1993. On peut y lire vers la fin du document, je cite :

 11   "Les problèmes particuliers des unités résident dans le nombre

 12   important de soldats qui ne sont pas d'appartenance ethnique croate, en

 13   particulier qui sont Musulmans. L'importance de ce problème s'est exprimé

 14   récemment, au moment de l'attaque de Bijelo Polje, menée par l'ABiH contre

 15   le HVO, attaque pendant laquelle les soldas musulmans du HVO, membres de

 16   l'unité sont passés de l'autre côté pour rejoindre l'ABiH et ont constitué

 17   une unité distincte, comme cela a pu être constaté au moment de l'attaque

 18   de Dubravica et [imperceptible]".

 19   Sur la base de ce document, Monsieur Gorjanc, je vous demande si vous

 20   considérez que les unités musulmanes du HVO pouvaient à l'époque constituer

 21   un problème, au moins potentiellement.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  J'aimerais à présent que nous nous penchions sur des documents qui

 24   traitent de l'action de la Bosnie-Herzégovine par rapport aux soldats

 25   musulmans du HVO.

 26   Pratiquement, tous ces documents ont déjà le statut de pièce à conviction,

 27   donc je me contenterai de les passer en revue rapidement après quoi, je

 28   vous poserai des questions, comme je l'ai fait tout à l'heure.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] D'abord, 4D 1461.

  2   Q.  Jetez un coup d'œil à ce document, Monsieur Gorjanc, car ce document

  3   n'est pas encore versé au dossier. Je vous interrogerai donc peut-être un

  4   peu plus en détail. Il est question d'un PV établi suite à une conversation

  5   informative menée par le SIS qui date de septembre 1992.

  6   Au milieu du paragraphe 3, nous lisons :

  7   "Selon les sources disponibles, nous apprenons que le 18 septembre 1992,

  8   entre 13 heures 50 et 14 heures 30, dans les premières heures de la soirée,

  9   Muharem Dizdar, commandant du HVO, et Ragib Dizdar ont fait le tour des

 10   membres musulmans du HVO, en leur disant de ne pas quitter l'unité du HVO

 11   et plus précisément, de ne pas passer du côté de l'ABiH avant que l'heure

 12   ne sonne et qu'ils en seraient informés en temps utile."

 13   Alors, Monsieur Gorjanc, est-ce que vous diriez que cette note a une

 14   quelconque pertinence du point de vue de la sécurité ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Si vous aviez reçu un document comme celui-ci, qu'auriez-vous fait ?

 17   R.  Il est certain que j'aurais pris des mesures préventives, des

 18   précautions particulières. J'aurais observé de plus près le comportement

 19   des soldats musulmans. Il est possible également que je les aurait

 20   transférés sur une autre ligne où leur refus d'obtempérer ou d'obéir aux

 21   ordres n'aurait pas pu provoquer tant de dégâts pour le HVO.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, il est possible que

 23   j'aie mal compris quelque chose, ce qui peut arriver, mais j'aimerais

 24   savoir ce que valent ces documents du point de vue de leur poids.

 25   Normalement, lorsqu'un témoin s'exprime au sujet d'un document, sa tâche

 26   est de dire que le document est authentique, qu'il est exact, et cetera.

 27   C'est possible, éventuellement aussi, qu'il dise, Oui, je suis au courant

 28   des faits évoqués dans le document.

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  1   Ici, le document ne s'exprime absolument pas sur les faits. Il ne dit rien

  2   sur le contenu du document et vous vous contentez de lui poser des

  3   questions hypothétiques. Donc, tout ce que les Juges ont à leur

  4   disposition, c'est une appréciation hypothétique de la part du témoin quant

  5   à ce qu'il aurait pu faire s'il s'était trouvé dans certaines situations

  6   particulières. Je me demandais si vous avez un commentaire à faire.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Vous voudriez -- 

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] -- par ce que je viens de dire. 

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Sans aucun problème, Monsieur le Juge.

 10   M. Gorjanc n'est pas un témoin sur les faits. Nous n'avons même pas évoqué

 11   cette possibilité et ça n'aurait pas pu être sa mission. Donc, il n'est pas

 12   là pour nous dire si ce qui est écrit dans le document est exact, il ne

 13   peut pas le faire. Il ne peut pas non plus nous dire si le document est

 14   authentique ou pas, et ce n'est pas ce que nous attendons de lui. Ce que

 15   nous attendons de lui, c'est qu'il nous dise sur la base des faits qui lui

 16   sont présentés par nous ce qu'en sa qualité d'expert militaire et donc, en

 17   s'appuyant sur sa connaissance et sur son expérience, lui aurait fait dans

 18   cette situation bien particulière. Donc, ce qu'il pense de ce qu'il aurait

 19   pu faire.

 20   Plus tard, nous discuterons avec un autre témoin de tous ces

 21   documents sur le plan de la réalité des faits. Mais avec M. Gorjanc, nous

 22   souhaitions discuter de tous ces documents pour apprendre de lui si, au cas

 23   où tout ce qui est écrit dans ces documents est exact, comment il se serait

 24   comporté dans cette situation, et plus tard, d'autres témoins nous

 25   permettront de confirmer que ce qui est écrit dans ces documents est exact.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Maître Alaburic.

 27   Je considère que c'est une réponse très satisfaisante. Merci.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci beaucoup.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai suivi le problème et je voudrais que vous me

  2   précisiez ceci. Comme le dit Me Alaburic, vous êtes ici un témoin expert

  3   qui, à partir d'une situation donnée, va éclairer les Juges par la

  4   connaissance que vous avez des problèmes. Alors, je vais prendre un autre

  5   exemple.

  6   Quand vous vous étiez dans la JNA au temps de la "Guerre froide," imaginons

  7   que des officiers de votre régiment auraient été en contact avec une

  8   puissance occidentale, et ce, pendant la Guerre froide et que quelqu'un

  9   serait venu leur dire : "Attendez le signal, le cas échéant, pour rejoindre

 10   la puissance occidentale." Dans cette hypothèse, qu'auriez-vous fait, vous,

 11   si vous étiez le commandant du régiment ? Qu'est-ce que vous auriez fait ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Mon devoir, dans un cas comme celui-ci, était

 13   de dénoncer ce fait aux instances responsables de la sécurité, et rien de

 14   plus, et puis d'empêcher cette personne suspectée par moi d'avoir accès à

 15   des documents et à des renseignements pertinents.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Gorjanc, pourriez-vous, avec une précision relativement

 19   importante, nous dire ce qu'il serait advenu d'un tel soldat ou d'un tel

 20   officier si le service de Sécurité Kosovo venait à s'occuper de son action

 21   par rapport à un pays étranger, un pays occidental ?

 22   R.  Hier, nous avons confirmé que je n'avais pas travaillé pour le Kosovo,

 23   que je ne connaissais pas particulièrement bien ses méthodes de travail.

 24   Mais je suppose que le KOS l'aurait fait suivre, l'aurait mis sur écoute et

 25   en cas de découverte d'indices valables, l'aurait mis en examen, comme il

 26   se doit. Il y a eu des cas comme celui-là, d'ailleurs.

 27   Q.  Très bien. Passons maintenant au document suivant, et contentez-vous de

 28   m'écouter, Monsieur Gorjanc, s'il vous plaît. Il s'agit de la pièce 4D 469.

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  1   Dans ce document, deuxième paragraphe, nous lisons :

  2   "Des pressions sont exercées sur les Musulmans qui se trouvent au sein des

  3   Unités du HVO et du MUP en vue de leur faire quitter ces unités et au cas

  4   où ils refusent de le faire, ils sont menacé de liquidation physique ou

  5   d'incident de leur maison."

  6   Le document suivant que je voudrais vous soumettre est un document de

  7   l'ABiH. La pièce 4D 33. 4D 33. C'est donc un document de l'ABiH dans lequel

  8   nous lisons :

  9   "…convoquer tous les Musulmans membres du HVO pour qu'ils se mettent de

 10   côté par rapport à leur peuple."

 11   Document suivant, 4D 34, pièce 4D 34, c'est également un document de l'ABiH

 12   où nous lisons, au troisième paragraphe à partir du bas, je cite :

 13   "…établir une coopération avec nos combattants au sein du HVO et leur faire

 14   valoir la gravité de la situation."

 15   Document suivant, pièce 4D 35, c'est également un document de l'ABiH.

 16   Dans la dernière phrase du point 3, il est question de l'organisation du

 17   moral des troupes, donc l'IPD, chargée également des questions religieuses

 18   au sus général des troupes, doit

 19   "…établir un plan en rapport entre autres avec la présence musulmane

 20   au sein des Unités du HVO dans les municipalités de Capljina et de Stolac."

 21   Document suivant, pièce 4D 36 qui est également un document de l'ABiH et

 22   qui date du début du mois de mai 1993. Au paragraphe 3, deuxième partie,

 23   nous disons :

 24   "Le lien a été établi avec les hommes au sein du HVO."

 25   Un peu plus loin, nous lisons, je cite :

 26   "Les effectifs du HVO ont même pour devoir de s'emparer du village de

 27   Tasovcici et du pont à Capljina, le but étant d'interdire l'arrivée de

 28   troupes venant de Metkovic."

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  1   Un peu plus loin, nous lisons :

  2   "…s'emparer de la ville de Stolac à l'aide de nos hommes au sein du HVO."

  3   Document suivant, il s'agit de la pièce 2D 288, 288. C'est encore une fois

  4   un document de l'ABiH. Ce document est signé par Fikret Muslimovic;

  5   Monsieur Gorjanc, connaissiez-vous ce M. Fikret Muslimovic ?

  6   R.  Oui, je l'ai rencontré pour la première fois en 1988. C'est un homme

  7   qui bénéficiait d'une très grande confiance de la part du défunt Alija

  8   Izetbegovic.

  9   Q.  M. Muslimovic, dans ce document, dit en conclusion du texte qu'il est

 10   réaliste de penser qu'une aggravation de la tension dans les rapports entre

 11   les deux groupes va augmenter et qu'il est important de pacifier au maximum

 12   les Musulmans au sein du HVO en influant sur eux pour qu'ils quittent le

 13   HVO et rejoignent l'ABiH.

 14   Monsieur Gorjanc, connaissant l'auteur de ce document, est-ce que vous

 15   auriez accordé une quelconque importance à ce document ?

 16   R.  Une importance extrême, car il était chef du service de Sécurité

 17   militaire de l'ABiH.

 18   Q.  Document suivant, pièce 4D 473. A la fin du paragraphe 2, nous lisons -

 19   - et j'indique que l'auteur du document est un commandant d'une Unité de

 20   l'ABiH, et ce document est adressé au commandement de la 1ère Brigade du

 21   HVO. Le commandant de l'ABiH de cette unité dit, je cite :

 22   "Je vous indique, et vous savez très bien, qu'un nombre très important de

 23   Musulmans se trouve dans vos unités. Alors ce sont des Musulmans et ils

 24   font partie de ce peuple-ci. Il ne serait donc pas bon que l'organisation

 25   et la formation de vos unités soient démolies."

 26   Comment est-ce que vous comprenez cette phrase, Monsieur Gorjanc ? Combien

 27   vous interpréteriez cette phrase si vous l'aviez entendue, si ce document

 28   vous avait été adressé à vous ?

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  1   R.  Comme une menace de retirer les hommes de la même appartenance ethnique

  2   que lui, c'est-à-dire les Musulmans de ces unités, qui auraient pu mettre

  3   gravement en danger l'aptitude au combat de ma propre unité.

  4   Q.  Nous n'avons pas beaucoup de temps malheureusement, donc je vais sauter

  5   le document suivant qui portait sur le même sujet, mais je vais essayer de

  6   vous poser une question de conclusion synthétique.Monsieur Gorjanc, si vous

  7   aviez été averti par vos propres services de sécurité, c'est-à-dire par le

  8   SIS, du fait que des soldats musulmans constituaient potentiellement un

  9   danger, et si vous aviez pu constater que ces avertissements reposaient sur

 10   des documents en bonne et due forme de l'ABiH comme ceux que nous venons de

 11   voir et de discuter, et que, par ailleurs, cela aurait sans doute été le

 12   cas, a reçu des renseignements venant d'autres sources, des renseignements

 13   écrits, par exemple; est-ce que vous auriez considéré ces Musulmans comme

 14   une menace pour votre sécurité ou pas ?

 15   R.  En tout état de cause, comme une menace.

 16   Q.  Monsieur Gorjanc, laissons de côté cette menace pour la sécurité et

 17   parlons de ce qui s'est effectivement passé. Vous étiez commandant du HVO

 18   vous perdez le contrôle d'une partie importante de votre territoire

 19   simplement parce que vous subissez la trahison de soldats appartenant à un

 20   autre groupe ethnique que le vôtre. Quel aurait pu être votre réaction ?

 21   R.  J'aurais considéré de tels actes comme des actes de trahison, et

 22   j'aurais pris toutes les mesures possibles de ma part, y compris la

 23   traduction en justice de ces déserteurs.

 24   Q.  Qu'est-ce que vous auriez fait au sujet des soldats musulmans qui

 25   restaient au sein du HVO ?

 26   R.  Dans une situation comme celle-ci j'aurais dans les plus brefs délais,

 27   c'est vraisemblable désarmé ces soldats et je les aurais isolés.

 28   Q.  Monsieur Gorjanc, deux questions très semblables à celles que je viens

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  1   de vous poser. L'expert militaire de l'Accusation, M. Pringle, a répondu,

  2   ce que vous pouvez voir en page 24 265 du compte rendu d'audience, 24 165.

  3   Il a répondu par l'affirmative à la question de savoir si un commandant

  4   musulman aurait pu considérer un soldat musulman comme un danger possible

  5   pour [imperceptible]. Il a donc répondu par l'affirmative, il a dit :

  6   "Oui." Est-ce que vous diriez que vous êtes d'accord avec cet expert du

  7   bureau du Procureur sur cette question ?

  8   R.  Oui, absolument.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 10   dans le troisième classeur, je vais sauter un certain nombre de sujets

 11   relatifs à -- le sujet de nature militaire et relatif à la Bosnie centrale

 12   parce que j'aimerais consacrer plus de temps au siège de Mostar. Par

 13   conséquent, le sujet que je vais maintenant aborder c'est le siège de

 14   Mostar; est-ce que, oui ou non, il a eu lieu ?

 15   Q.  Monsieur Gorjanc, dans cette partie de mes questions vous avez reçu des

 16   documents de la Défense --

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant d'aborder la question du siège de Mostar,

 18   Monsieur le Témoin, dans la suite des questions qui viennent de vous être

 19   posées, je voudrais vous en poser une.

 20   Nous avons, depuis quatre ans, eu un nombre d'éléments venant autant du

 21   Procureur que de la Défense, et au terme des éléments que nous avons nous

 22   savons qu'il y a des unités du HVO qui étaient constituées en nombre non

 23   négligeable de soldats musulmans. Il y a parfois des unités où la majorité

 24   des soldats étaient Musulmans, donc ceci il faut bien l'avoir à l'esprit.

 25   Par ailleurs, à l'époque, les documents nous savons qu'il y avait des

 26   négociations à Genève où il semblait se dessiner la constitution d'une

 27   armée unique, constituer autant de soldats du HVO que de soldats musulmans,

 28   voire à ce moment-là de l'absorption des uns par les autres sous un

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  1   commandement soit croate soit bosniaque. Donc tout ceci, à l'époque,

  2   semblait être bien présent dans l'esprit de tous.

  3   Un commandant de brigade dans cette situation très complexe sur le plan

  4   politique et également complexe sur le plan militaire, car désarmer ses

  5   propres soldats, alors même qu'il y a un conflit avec les Serbes, pouvait

  6   aussi avoir certaines conséquences.

  7   Alors vous, qui est témoin expert. Dans une situation aussi complexe, que

  8   deviez-vous faire ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'un

 10   commandant de brigade ne pouvait pas avoir à sa disposition tous les

 11   éléments d'information relatifs aux pourparlers de Genève, donc il agissait

 12   sur la base de la situation très concrète qui existait dans sa zone de

 13   responsabilité. Donc dans un tel contexte, si, moi-même, je me trouvais

 14   dans une situation de ce genre, j'aurais aussi pris les mesures dont j'ai

 15   déjà parlé tout à l'heure, à savoir prendre des mesures de précaution,

 16   faire observer le soldat de l'autre groupe ethnique de très près, le

 17   déplacer sur des positions où il n'aurait pas eu la possibilité de nuire à

 18   mon état, et en dernière mesure, reprise des armes, donc désarmement et

 19   isolement, mise à l'isolement.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais terminer par un complément à ma

 21   question.

 22   Nous savons que, dans les différentes armées à l'époque, qu'elles

 23   soient serbes, bosniaques ou croates, il y avait dans l'appareil militaire

 24   des ethnies différentes, des officiers qui appartenaient à un autre groupe

 25   ethnique. A titre d'exemple, dans l'ABiH, on avait, par exemple, le colonel

 26   Merdan qui était Croate, et je peux vous citer un certain nombre

 27   d'exemples. Dans une situation pareille ou à l'échelon supérieur, il y a

 28   dans des fonctions de responsabilité des officiers de l'ethnie autre, et

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  1   que sur le terrain, il y avait également des soldats de l'ethnie autre. Le

  2   commandant de brigade devait-il, en ayant tous ces éléments, faire ce que

  3   vous nous avez dit, et est-ce que mon complément à ma question ne change

  4   pas votre réponse ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agissait des

  6   individus qui ne pouvaient pas influencer de manière importante la

  7   situation dans la zone de combat ou sur les lignes de front. Deuxièmement,

  8   ces individus étaient le plus souvent des hauts officiels politiques, pour

  9   des raisons politiques. Donc, il fallait quand même, d'une certaine

 10   manière, montrer au public qu'au sein de leur armée, il y avait aussi des

 11   soldats d'autres appartenances ethniques.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est la réponse que vous donnez.

 13   Maître Alaburic.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation]

 15   Q.  Dites-moi, Monsieur Gorjanc --

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendons pendant quelques minutes. On va faire

 17   venir donc des personnes de l'ONU qui sont des officiels qui, au point de

 18   vue administratif, doivent se mettre à côté de la greffière.

 19   Donc, Monsieur l'Huissier, faites introduire les personnes qui assistent à

 20   l'audience.

 21   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Ok. Donc, on va faire d'abord sortir le témoin parce

 23   qu'il doit rencontrer quelqu'un de la Section des Témoins et Victimes qui

 24   doit lui donner quelque chose. Alors, on va attendre quelques minutes.

 25   Monsieur l'Huissier, accompagnez le témoin et il va revenir dans quelques

 26   instants.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 28   [Le témoin quitte la barre]

Page 46137

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Praljak.

  2   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti,

  3   veuillez vérifier avec le témoin ce que vous venez de dire, c'est-à-dire

  4   que M. Merdan est un Croate - il s'appelle Dzemal - et veuillez lui poser

  5   la question. Je pense qu'ils se connaissent depuis la JNA, et donc posez-

  6   lui la question de savoir quelle est l'appartenance de ce monsieur, ce

  7   monsieur qui était hautement placé au sein du 3e Corps d'armée. Merci.

  8   [Le témoin vient à la barre]

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, tout à l'heure, je vous ai posé

 10   une question. Pour moi, elle était apparemment claire, mais il semblerait

 11   qu'il y aurait nécessité de vous faire préciser.

 12   Le colonel Merdan, est-ce que vous le connaissiez, vous ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'avez jamais été en poste avec lui dans la JNA

 15   ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Jamais.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dans le rapport que vous avez préparé à partir

 18   des documents lorsque vous avez vu qu'il y a un Dzemal Merdan qui était

 19   dans l'ABiH à un poste de responsabilité ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que j'ai trouvé lorsque j'étais en

 21   Bosnie centrale. J'ai trouvé ce nom.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais vous avez vu ce nom mais vous n'avez

 23   jamais été en fonction avec lui ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce Dzemal Merdan, il était Croate ou Musulman ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, d'après son prénom, je

 27   dirais que c'est un Musulman, Dzemal, Dzemail, Dzemo.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. On va continuer.

Page 46138

  1   Mme ALABURIC : [interprétation]

  2   Q.  Dites-nous, Monsieur Gorjanc : d'après les documents que nous avons

  3   examinés, est-ce qu'il ressort que l'ABiH incitait à la coopération avec le

  4   HVO, ou bien est-ce qu'elle créait une autre ambiance par rapport au HVO ?

  5   R.  D'après les documents qui étaient disponibles, l'ABiH, tout au long de

  6   cette période, avait ses propres calculs, ses propres idées au sujet de

  7   l'engagement des Musulmans au sein des Unités du HVO.

  8   Q.  Nous allons traiter maintenant du siège de Mostar.

  9   Je vais vous faire une remarque méthodologique. J'espère que l'Accusation

 10   n'aura pas d'objection si je pose la question suivante. Est-ce que, sur la

 11   base des documents que la Défense vous a fournis, vous pouvez dire votre

 12   opinion sur la question de savoir si Mostar était assiégé ou pas ?

 13   R.  Oui. Alors, cette question m'a déjà été posée.

 14   Q.  Nous allons maintenant examiner le document, ensuite arriver à la

 15   conclusion. Tout d'abord, nous allons examiner le territoire autour de

 16   Mostar orientale contrôlé par les autorités musulmanes après le 30 juin

 17   1993.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] J'indique aux Juges que nous allons parler

 19   exclusivement de la période après le 30 juin 1993 car, avant cette période,

 20   l'ABiH pouvait être en communication avec ses unités à Jablanica. Cela

 21   étant dit, il fallait traverser le territoire contrôlé par les autorités

 22   croates.

 23   Examinons maintenant la pièce 4D 625. Il s'agit d'une carte de la région de

 24   Mostar qui représente la situation à la mi-juillet 1993. Ici, nous voyons

 25   la partie en allant de Mostar oriental vers le nord et le sud.

 26   Q.  Dites-nous, combien de kilomètres y a-t-il entre Mostar et Jablanica ?

 27   R.  Au moins 50.

 28   Q.  Et vers Blagaj et Buna ?

Page 46139

  1   R.  Dix à 12.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Je souhaite rappeler aux Juges que cette

  3   situation a été représentée de manière quelque peu différente par la

  4   Défense du général Praljak. Ce sont des documents versés au dossier en tant

  5   que IC 1005 et IC 1006.

  6   Maintenant nous allons traiter des documents qui portent sur le lien de

  7   communication entre Jablanica et Mostar orientale. Je vais traiter de cela

  8   avec vous au plus vite, ensuite nous allons parler des possibilités de

  9   communication dans le sens physique du terme.

 10   Q.  Le premier document est 2D 1389. Dans ce document, dans la partie qui

 11   porte sur la zone de responsabilité du 4e Corps d'armée, on établit les

 12   régions au nord de Mostar orientale ont été prises par le 4e Corps d'armée,

 13   il est constaté que les forces du 4e Corps ont renoué celles du 6e Corps.

 14   Est-ce que vous savez nous dire tout d'abord où se trouvait le quartier

 15   général du 4e Corps d'armée et du 6e Corps d'armée ?

 16   R.  Le 4e Corps d'armée se trouvait à Mostar, alors que le poste de

 17   commandement du 6e Corps d'armée était à Konjic.

 18   Q.  Ces constats portant sur l'enquête, effectués par ces deux corps

 19   d'armée, comment -- quel serait votre commentaire du point de vue de la

 20   possibilité de passage entre Jablanica et Mostar ?

 21   R.  Ça veut dire que la zone opérationnelle du 6e et du 4e Corps d'armée,

 22   ces deux zones opérationnelles étaient reliées et il n'avait pas de

 23   problème de passage entre les deux.

 24   Q.  4D 768 est un document émanant de Rasim Delic. Au point 3, nous

 25   trouvons la référence au transport entre Igman et Mostar.

 26   Monsieur Gorjanc, du point de vue de route de communication de Mostar,

 27   c'est-à-dire au nord de Mostar, vers Jablanica, est-ce qu'il était possible

 28   de le pratiquer ou pas ?

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  1   R.  D'après ce document, la route était praticable.

  2   Q.  Le document suivant est placé sous pli scellé donc je demanderais

  3   gentiment au greffe de ne pas le diffuser publiquement. Il s'agit de la

  4   pièce P 3878. Il s'agit d'un communiqué de presse où il est dit que :

  5   "Le commandant de l'ABiH, un commandant de l'ABiH, Sulejman

  6   Budakovic, indique que la présidence acceptera le cessez-le-feu mais qu'il

  7   est nécessaire de garder le couloir dans la direction de Jablanica."

  8   D'après ce document, quelle est votre conclusion ? Est-ce qu'il existe une

  9   possibilité de passer vers Jablanica, entre Mostar et Jablanica ou pas ?

 10   R.  S'il souhaite maintenir cela, ça veut dire qu'il l'avait.

 11   Q.  Le document suivant a été placé sous pli scellé également, c'est le

 12   document P 4447. Dans ce document, au point 1, environ au milieu, il est

 13   indiqué que :

 14   "Les réfugiés musulmans de Capljina était arrivés à Mostar, côte

 15   orientale, et se sont dirigés vers Jablanica."

 16   Dites-nous, Monsieur Gorjanc, ce document confirme ou nie la possibilité de

 17   passage ?

 18   R.  Ça le confirme.

 19   Q.  Le document suivant, 4D 708.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Le document qu'on a sous les yeux, Monsieur le

 21   Témoin expert, montre que les réfugiés de Capljina sont arrivés à Mostar.

 22   Bien. Si les réfugiés circulent et ils arrivent à Mostar, c'est que le HVO

 23   ne les a pas empêchés de passer, parce qu'ils devaient circuler sur des

 24   routes sous contrôle de l'ABiH, oui ou non ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant la question est de savoir de quels

 26   réfugiés il s'agit. S'il s'agit de la côte droite ou gauche de la Neretva -

 27   - du côté gauche, il n'était pas possible pour le HVO d'empêcher leur

 28   arrivée. Alors que s'agissant de la rive droite, il aurait fallu prendre

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  1   l'un des ponts que ce soit à Capljina ou ailleurs. Donc de fait, le HVO ne

  2   les empêchait nullement quelle que soit la rive du côté de laquelle ils se

  3   trouvaient.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation]

  5   Q.  Si j'ai bien compris, Monsieur Gorjanc, vous venez de dire que s'ils

  6   étaient du côté de la rive gauche, le HVO n'aurait pas pu les empêcher.

  7   R.  Ceci montre -- ils n'y étaient pas.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Vous allez trop vite, Maître

  9   Alaburic, on ne peut quasiment pas vous suivre. Lorsqu'on a un document,

 10   vous dites trois mots; le témoin a dit : oui, non, ou ne dit rien, et on

 11   passe au document suivant. Nous, on ne suit pas le rythme, c'est peut-être

 12   dû à notre grand âge. Veuillez avoir quelque considération à notre endroit.

 13   Merci.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais montrer

 15   beaucoup d'égard vis-à-vis de vous, car moi-même je suis plutôt âgée et il

 16   m'est difficile de courir.

 17   Q.  Donc excusez-moi, si j'ai bien compris votre réponse à la question

 18   posée par M. le Président Antonetti, si les réfugiés prenaient la rive

 19   gauche pour venir à Mostar orientale, ils se déplaçaient sur un territoire

 20   qui n'était pas contrôlé par le HVO; est-ce exact ?

 21   R.  C'est exact.

 22   Q.  Le document suivant est 4D 780. Je vais répéter ma question. Ma

 23   question n'a pas été consignée au compte rendu d'audience, je vais répéter.

 24   Il ne s'agit pas de soldat, il s'agit des réfugiés. Je parle des réfugiés.

 25   Si les réfugiés viennent à Mostar orientale, en venant du sud le long de la

 26   rive sud, est-ce qu'ils traversent le territoire contrôlé par les autorités

 27   croates ?

 28   R.  Monsieur le Président, Mme Alaburic parlait de la rive sud mais elle

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  1   pensait à la rive orientale à mon avis. Dans ce cas-là, le HVO n'aurait pas

  2   pu les empêcher sauf en utilisant l'artillerie mais ceci ne se produisait

  3   pas.

  4   Q.  Dites-nous : s'agissant du contrôle physique sur ce territoire, qui

  5   l'avait ?

  6   R.  S'agissant de ce territoire-là c'était l'ABiH qui le contrôlait.

  7   Q.  Maintenant je vais sauter un certain nombre de documents car nous

  8   n'aurons pas le temps pour les examiner tous. Vous, Monsieur Gorjanc, vous

  9   les avez vus tous. Examinons maintenant le document 3D 939. Dans ce

 10   document, il est question de l'engagement d'une Brigade de l'ABiH le long

 11   de l'axe Vrdi-Goranci, vers Mostar. Dites-nous : s'agit-il d'une route au

 12   nord de Mostar orientale ou ailleurs ?

 13   R.  Ceci se trouve au nord du côté de la rive ouest de Neretva et c'est la

 14   seule route qui mène directement à Mostar depuis la direction de Dreznica.

 15   Q.  Examinez maintenant le document 3D 932. Dans ce document point 2, il

 16   est dit :

 17   "Dans la zone de responsabilité de l'ABiH -- du 4e Corps d'armée de

 18   Bosnie-Herzégovine, il faut envoyer une ou deux compagnies de la 7e Brigade

 19   musulmane du 3e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine. D'après ce texte,

 20   qu'est-ce que cela veut dire ? Comment se fait-il qu'une Unité de l'ABiH

 21   vienne sur le territoire de Mostar, soudainement ?

 22   R.  Le quartier général de la 7e Brigade musulmane se trouvait à Zenica, en

 23   Bosnie centrale, et il s'agissait là d'une Unité de Manœuvre du 3e Corps

 24   d'armée. Unité de Manœuvre, compte tenu de l'explication fournie hier, je

 25   dirais qu'elle était capable de mener des opérations sur tout le territoire

 26   de la zone opérationnelle du 3e Corps d'armée, autrement dit, cette unité y

 27   a été envoyée pour renforcer le 4e Corps d'armée dans le cadre de ces

 28   opérations.

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  1   Q.  L'Unité de la Bosnie centrale maintenant devait arriver dans la zone de

  2   Mostar; c'est exact ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Veuillez examiner maintenant le document suivant, 4D 719. Je vais --

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, comme on est sur un sujet

  6   important, on a ce document que je vois là, 3D 00932. Ce document, qui

  7   émane du 4e Corps et qui est signé Pasalic, établit, semble-t-il, que la 7e

  8   Brigade -- une ou deux compagnies de la 7e Brigade, qui relèvent du 3e

  9   Corps, comme tout le monde le sait, va rejoindre la zone sous contrôle du

 10   4e Corps. Tout le monde sait que le 4e Corps c'est Mostar.

 11   Est-ce à dire que ce document, pour vous, en termes militaires,

 12   montre que les Unités de l'ABiH, venant de Zenica, pouvaient aller jusqu'à

 13   Mostar sans aucun problème ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas dans la

 15   situation concrète s'il y a eu des problèmes, mais à quel point, mais

 16   c'était possible.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Partant de là, est-ce que, pour vous qui est

 18   un expert militaire, on peut dire que Mostar est une ville assiégée comme

 19   Sarajevo, ou bien Mostar est dans une autre situation ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Mostar se trouvait dans une situation très

 21   différente.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Différente en quoi ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Vers le nord, là où il y avait le plus grand

 24   contingent de forces de l'ABiH, il y avait deux routes à sa disposition,

 25   l'une suivait la rivière de Neretva qui le plus probablement essuyait les

 26   tirs d'artillerie du HVO, et l'autre traversait le massif de la montagne de

 27   Knin, vers Jablanica. Celle-là n'était pas exposée aux tirs du HVO.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous me dites que la situation de Mostar était

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  1   différente de Sarajevo, vous le dites parce que la situation de Sarajevo,

  2   vous la connaissez ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je la connaissais

  4   plutôt bien, car j'ai un lien émotionnel avec Sarajevo aussi. Pendant

  5   longtemps, je suivais de près tous les événements qui se déroulaient autour

  6   de Sarajevo.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, j'ai une d'autres

  9   questions sur ce document et sur les conclusions auxquelles il permet

 10   d'aboutir.

 11   D'après vous, de quel type de document s'agit-il ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce document qui informe, c'est le commandement

 13   du 4e Corps d'armée qui informe le poste de commandement avancé du

 14   commandement suprême à Jablanica.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc à ce moment-là, pourquoi est-il

 16   intitulé : "Ordre" ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vois nulle part

 18   le titre, Ordre, car il serait impossible que le 4e Corps d'armée donne

 19   l'ordre à une partie du commandement suprême qui se trouve au poste de

 20   commandement avancé.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] En ce moment-là, il doit y avoir une

 22   difficulté de traduction.

 23   M. STEWART : [interprétation] Nous ne voyons pas le terme Ordre, est-ce que

 24   vous pourriez nous dire où il se trouve ?

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, je pense que je me suis

 26   trompé de document, toutes mes excuses. Je regardais le document précédent.

 27   Il s'agissait d'un ordre, d'accord, merci.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic.

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Il est humain de se tromper, nous avons

  2   beaucoup de compréhension pour cela.

  3   Q.  Dites-nous, Monsieur Gorjanc : d'après vos connaissances, est-ce qu'une

  4   seule Unité de l'ABiH pouvait entrer à Sarajevo, pendant que Sarajevo était

  5   assiégé ?

  6   R.  Je n'ai pas de connaissance indiquant qu'une unité y serait entrée,

  7   mais je sais qu'il y en a celles qui sont sorties vers Igman, vers Cemerno,

  8   vers Vares aussi et vers Treskavica.

  9   Q.  Examinons maintenant le document 4D 719. Monsieur Gorjanc, veuillez

 10   vous concentrer sur ce que je vais lire, car j'avais cité certaines parties

 11   de ce document qui est du mois d'octobre 1993, et c'est un document qui 4e

 12   Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine.

 13   A la fin du deuxième paragraphe, il est dit :

 14   "Il a été établi qu'il est nécessaire d'arrêter la circulation sur la route

 15   nationale, lors de la relève des membres de cette compagnie, en raison des

 16   actions plus poussées de l'ennemi contre les hommes et les véhicules."

 17   Monsieur Gorjanc, est-ce que cela veut dire que de manière générale, les

 18   Unités de l'ABiH utilisaient cette route ?

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Madame.

 20   Mme WEST : [interprétation] Je comprends que Me Alaburic veuille utiliser

 21   ce document, mais cette dernière question, je dois dire que c'était une

 22   question directive.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- de faire preuve de prudence et de

 24   procéder pas à pas, en lui présentant le document disant, voilà, ce

 25   document indique ceci à tel paragraphe. Voilà le deuxième document, et puis

 26   après, vous lui posez la question.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis tout à fait

 28   d'accord avec ma collègue. Je m'excuse de poser une question directrice,

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  1   mais tout simplement dans une telle phrase, pour moi, c'est une phrase très

  2   claire, donc je ne voulais pas poser une question directe, mais je vais la

  3   poser maintenant.

  4   Q.  D'après cette phrase, Monsieur Gorjanc, qu'est-ce qui en découle ?

  5   Quels étaient les axes de communication utilisés par les unités du 4e Corps

  6   d'armée de Bosnie-Herzégovine ?

  7   R.  Dans ce cas, il s'agissait d'une unité qui était à proximité immédiate

  8   de la route Mostar-Jablanica, et c'est la raison pour laquelle plus

  9   probablement des problèmes surgissaient lorsque l'on utilisait cette route,

 10   le relais était plus difficile car, à ce moment-là, le HVO pouvait ouvrir

 11   le feu à travers la Neretva.

 12   Q.  Ecoutez, maintenant la constatation suivante qui se trouve à la page 3

 13   du texte en croate. Bientôt, on va vous indiquer la page en anglais.

 14   "Un grand problème pour les groupes opérationnels réside dans le

 15   transport de la population civile et des autres qui marchent dans la

 16   direction du nord et du sud."

 17   Donc, voici ma question, Monsieur Gorjanc, et rappelez-vous, s'il vous

 18   plaît, la carte que nous avons examinée au début de la discussion à ce

 19   sujet.

 20   Comment est-ce que vous expliqueriez ces déplacements importants de

 21   population civile vers le nord et le sud ?

 22   R.  Ces personnes se sont sans doute déplacées en utilisant les routes de

 23   montagne des flancs ouest du mont Prenj, ce qui veut dire que la liberté de

 24   circulation était tout de même assez bonne et qu'ils pouvaient, sans trop

 25   de problèmes, se déplacer vers le nord et le sud.

 26   Q.  Pouvez-vous nous dire quelles sont les villes que l'on traverse pour

 27   aller vers le nord et le sud ?

 28   R.  Vers le nord, on se dirige vers Jablanica, puis vous Konjic et ensuite,

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  1   vers Sarajevo, en fait, vers le mont Igman parce qu'on ne pouvait pas

  2   atteindre directement Sarajevo.

  3   Q.  Et vers le sud ?

  4   R.  Vers le sud, c'est vers Mostar. De Jablanica vers Mostar. Puis, plus

  5   loin, on arrive à Buna.

  6   Q.  Si vous allez au sud de Mostar ?

  7   R.  On va vers Buna et Blagaj, et ensuite on arrive à la mer, évidemment.

  8   Q.  Un peu plus loin dans ce texte, nous lisons, je cite :

  9   "Des problèmes importants sont posés par le transport des blessés et

 10   d'autres personnes. C'est un problème grave pour la ville et il y a

 11   nécessité de souligner que des blindés au transport des troupes doivent

 12   être réparés afin de pouvoir être utilisés à ces fins de transport pendant

 13   la nuit."

 14   Monsieur Gorjanc, si vous lisez cette phrase, qu'est-ce qu'elle vous permet

 15   de conclure ? Est-ce qu'il y avait des blessés qui finalement ont été

 16   emmenés à Mostar ou pas ? Quelle est l'aide qu'on leur a fournie ?

 17   R.  Dans ce texte, il apparaît parfaitement clairement qu'ils ont été

 18   emmenés à l'hôpital de Mostar.

 19   Q.  Phrase suivante :

 20   "L'alimentation en denrées, en vivres de cette unité pose des problèmes

 21   importants car l faut fournir du pain à cette unité et le bois nécessaire

 22   au fonctionnement de la boulangerie de Mostar doit être apporté d'abord à

 23   Mostar puis à Bijelo Polje."

 24   Q.  Monsieur Gorjanc, est-ce qu'il y avait une route qui reliait Mostar à

 25   Bijelo Polje, à ce moment-là ?

 26   R.  Oui, il y en avait une.

 27   Q.  Nous lisons dans ce document qu'il est fait référence à un détachement

 28   de cargaison. Qu'est-ce que c'est, exactement ?

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  1   R.  Un détachement de Cargaison, normalement, en principe, se compose de 20

  2   à 30 chevaux qui assurent le transport de différents articles en passant

  3   par les routes de montagne à dos de cheval.

  4   Q.  Il est écrit également que, lorsqu'on transporte de l'essence qui fuit

  5   des récipients placés sur le dos des chevaux, ceci pose des problèmes

  6   importants, car des blessures apparaissent sur le dos des chevaux et les

  7   chevaux sont réduits à l'inaction en raison de ces blessures.

  8   Alors, en fonction de cette phrase, qu'est-ce que l'ABiH faisait entrer à

  9   Mostar, exactement ?

 10   R.  Manifestement, l'ABiH utilisait des chevaux pour faire entrer dans la

 11   ville différents articles, et notamment de l'essence.

 12   Q.  Sujet suivant, ce sont les combattants sur les lignes de front qui

 13   protestent massivement entre autres choses, en raison du départ de civils

 14   ou de soldats vers le nord.

 15   Monsieur Gorjanc, que diriez-vous de cela eu égard aux possibilités de se

 16   déplacer à partir de Mostar ? Est-ce que vers le nord et vers le sud, par

 17   exemple vers Blagaj ?

 18   R.  La possibilité de déplacement existait.

 19   Q.  Je vais maintenant sauter deux documents.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] J'appelle voter attention sur la pièce 4D

 21   798, 798.

 22   Q.  C'est un document adressé par Sefer Halilovic à Rasim Delic au mois de

 23   septembre 1993. Au deuxième paragraphe, nous lisons qu'il est question d'un

 24   hélicoptère envoyé parce qu'il y a des blessés graves et qu'il faut

 25   transporter une compagnie dans le secteur de Bijelo Polje pour finalement

 26   que cet hélicoptère arrive à Mostar.

 27   Alors, Monsieur Gorjanc, sur la base de ce document, que pouvons-nous

 28   conclure des possibilités de communication entre Jablanica et Mostar ?

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  1   R.  Le transport aérien, par hélicoptère en particulier, était illimité. Le

  2   HVO n'avait absolument pas la moindre possibilité d'entraver les vols des

  3   hélicoptères de l'ABiH.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Document suivant. C'est un document

  5   confidentiel également. Il s'agit de la pièce P 9851.

  6   Q.  On peut lire la conclusion qui figure au point 2 de ce document dans

  7   les termes suivants, je cite :

  8   "Il apparaît qu'à la mi-août, des déplacements de population ont eu lieu

  9   sur les rives est et ouest et à Jablanica."

 10   Un peu plus loin, nous lisons :

 11   "Il s'agit de personnes qui désirent retrouver des membres de leurs

 12   familles. C'est ce qui provoque ces déplacements de population qui voyagent

 13   par la route, et pour partir, il faut obtenir une autorisation de l'ABiH,

 14   ce qui serait particulièrement difficile."

 15   Maintenant, nous allons examiner un autre document qui évoque plus ou moins

 16   le même sujet, et les commentaires que je vous demanderais concerneront ces

 17   deux documents ensemble. Mais je saute le document suivant dans le classeur

 18   pour arriver directement au document 4D 545. C'est un document, un extrait

 19   du livre d'Esad Sejtanic. Nous lisons dans ce texte --

 20   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent confirmation de la référence du

 21   document.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation] Je n'entends pas les interprètes. Je suis

 23   branchée sur un autre canal.

 24   Q.  Mais je répète ce que j'ai dit une nouvelle fois :

 25   "Un certain nombre d'habitants voulait partir vers Jablanica et vers la

 26   Bosnie. Ensuite, des mesures répressives ont malheureusement dû être prises

 27   par nous pour empêcher des départs massifs de ces habitants et nous avons,

 28   dans la mesure du possible, limité le droit de circulation."

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  1   C'est le seul passage qui a été traduit en anglais et c'est la raison pour

  2   laquelle je ne vais pas vous soumettre d'autres détails de ce document.

  3   Mais, Monsieur Gorjanc, en cet instant, j'aimerais que nous

  4   commentions ces observations de l'ABiH.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] -- ne correspond pas

  6   exactement au texte; moi, je lis :

  7   "Par des mesures de répression, regrettablement nous avons empêché la

  8   sortie de la population et réduit tous les membres de population au

  9   minimum."

 10   Toutefois vous avez lu :

 11   "Regrettablement nous avons eu -- des mesures ont dû être prises," et

 12   ce n'est pas la même chose. Parce que dans le texte ici sans aucun

 13   commentaire, nous avons pris regrettablement ces mesures; est-ce que vous

 14   lisez : "Nous avons été forcés de prendre ces mesures," si c'est cela la

 15   traduction correcte, ce qui est, bien entendu, intéressant de savoir si le

 16   livre quelque part donne une explication de la raison pour laquelle c'était

 17   considéré comme nécessaire.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai lu l'extrait en

 19   langue bosniaque, et manifestement la traduction en anglais,

 20   l'interprétation en anglais a été erronée. La traduction exacte est celle

 21   qui figure sur les papiers. Donc il n'est pas question de qui que ce soit

 22   qui aurait été forcé, mais je relis la dernière phrase, je cite :

 23   "Malheureusement, par des mesures répressives nous avons empêché le

 24   départ de la population, en réduisant autant que faire se peut, les

 25   possibilités de circulation."

 26   Q.  Donc, Monsieur Gorjanc, si vous ne pouvez pas expliquer cette

 27   situation, -- pourriez-vous expliquer cette situation ?

 28   Mme WEST : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais si

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  1   nous pouvions revenir sur un point un instant.

  2   Je comprends que, précédemment, la question de Me Alaburic était à ce

  3   stade, souhaiterait examiner les observations concernant le fait que

  4   l'armée BiH avait essayé d'empêcher le départ de la population civile de

  5   Mostar, à Jablanica; est-ce que vous pourriez expliquer comment une telle

  6   chose aurait été possible ?

  7   J'interromps maintenant parce que j'objecte à cette question.

  8   M. Gorjanc, comme nous le savons et comme cela a été expliqué, n'est

  9   pas un témoin du fait. Donc il est clair que nous ne pouvons pas attendre à

 10   une réponse concernant les faits.

 11   Deuxièmement, ce qui concerne sa qualité d'expert, ceci -- une

 12   question stratégique qui attend une réponse stratégique. Je ne suis pas

 13   sûre que M. Gorjanc ait la possibilité de répondre à cette question

 14   puisqu'il n'était pas là à ce moment-là.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Mais je considère ma question comme ayant

 16   également une importance stratégique, et c'est aussi une question théorique

 17   que je pose au témoin. J'ai posé la question au témoin de façon

 18   hypothétique, c'est-à-dire en partant du principe que les contenus de ce

 19   document étaient exacts, et j'aimerais qu'en sa qualité d'expert, le témoin

 20   nous explique comment il est possible pour l'ABiH, à ce moment-là,

 21   d'empêcher la population civile de quitter Mostar Est pour aller vers le

 22   nord. Nous considérons cette question comme stratégique parce que certaines

 23   personnes peuvent parfois se servir de leur population civile pour obtenir

 24   un objectif déterminé, qui peut faire partie d'une doctrine militaire, ou

 25   en tout cas d'une pratique militaire. Donc voilà la raison pour laquelle je

 26   vous pose cette question, Monsieur Gorjanc.

 27   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation]

 28   Mme ALABURIC : [interprétation]

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  1   Q.  Monsieur Gorjanc, en partant du principe que l'ABiH a effectivement

  2   empêché les civils de Mostar Est de quitter cette partie de la ville,

  3   pouvez-vous nous expliquer en vous appuyant si vous en connaissez sur des

  4   doctrines et des pratiques militaires, comment il est possible, si nous

  5   parlons d'une ville qui subit les tirs de l'artillerie ennemie, encerclée,

  6   dans laquelle la population vit dans de très mauvaises conditions ? Comment

  7   ces départs auraient-ils pu être possibles ?

  8   R.  Dans une ville qui se défend, et dans laquelle il y a aussi des

  9   habitants civils, le moral des combattants est beaucoup plus élevé, s'il a

 10   conscience de défendre son propre peuple. Donc dans un contexte comme

 11   celui-ci, nous avons vu, il y a deux ou trois documents que les soldats de

 12   l'ABiH n'appréciaient pas beaucoup la population près de la route du nord.

 13   Donc cette mesure a sans doute été prise pour soutenir le moral des hommes

 14   de l'ABiH.

 15   Q.  Mais dites-moi : ceci est-il un moyen légal, légitime de collaborer

 16   avec les civils et d'utiliser, de se servir de civils ?

 17   R.  En principe, oui. Mais le principe en vigueur c'est que lorsqu'une

 18   ville est en train de se défendre, les personnes vulnérables au sein de la

 19   population, les femmes, les enfants, les personnes âgées doivent être

 20   transférées à l'extérieur de la ville.

 21   Q.  Bon. Encore un seul document lié à ce sujet. C'est encore un document

 22   confidentiel, et il s'agit de la pièce P 3547, 3547. Dans le paragraphe 6,

 23   qui concerne Mostar, au deuxième alinéa, au petit 2, nous lisons :

 24   "Le HCR à Metkovic a annulé tous les convois d'aide humanitaire, parce que

 25   le HVO insiste pour qu'on lui fasse connaître le pourcentage de l'aide

 26   humanitaire qui est livré à chacune des deux parties de la population."

 27   Alors si quelqu'un devait vous dire que dans une certaine période, période

 28   à laquelle le document que nous lisons en ce moment est lié, il n'y a pas

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  1   eu d'aide humanitaire, donc pas de convoi dans la région de Mostar, qu'est-

  2   ce que vous estimeriez comme pouvant être la cause de cela ?

  3   R.  A partir des mots qui sont utilisés dans ce document, je conclus que le

  4   HCR a annulé ces convois parce qu'il n'était pas prêt à approvisionner

  5   Mostar, puisque le HVO avait demandé des informations sur les parties de

  6   l'aide délivrées à la partie adverse.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [aucune interprétation]

  8     Témoin, savez-vous s'il est légitime ou non de mettre une telle condition

  9   ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne peux pas affirmer que

 11   je le sais à 100 %, mais il serait logique puisque cette aide humanitaire

 12   traverse le territoire tenu par le HVO, il est logique que le HVO demande

 13   quelle est la partie de cette aide qui va être livrée aux uns et aux

 14   autres, car les deux sont encerclés.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Je posais

 16   seulement une question concernant la situation juridique, non pas sur ce

 17   que vous pensiez être logique. Donc la réponse, c'est je ne sais pas, comme

 18   je l'ai prévu. Je vous remercie.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, tous les documents que Me

 20   Alaburic vous a présentés dans la demi-heure qui vient de s'écouler, je

 21   vérifiais que ces documents vous les aviez référenciés dans votre rapport.

 22   Donc ces documents, vous les avez vus et ils ont permis d'arriver à vos

 23   conclusions. Ceci est important pour que ça soit bien au transcript.

 24   Dans les documents que nous avons sous les yeux, il apparaît que le HCR a

 25   annulé des convois, et la raison officielle serait qu'ils voulaient être

 26   informés des pourcentages d'aide devant être livrés aux populations, c'est-

 27   à-dire aux Croates, aux Musulmans, voire aux Serbes, car il en restait

 28   quelques-uns à Mostar. Quand vous êtes -- avez lu cette mention, comment

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  1   vous avez analysé cela en termes militaires ? Ça rejoint la question de mon

  2   collègue. Est-ce qu'en termes militaires, une autorité militaire peut dire

  3   : "Stop," à un convoi ? Dites-nous : à qui est destinée l'aide alimentaire

  4   et pour qui ? Est-ce qu'un militaire peut poser ou pas cette question ?

  5   Parce que la cause réelle, c'est que le HVO voulait connaître la

  6   répartition de l'aide humanitaire.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que l'armée,

  8   en sa qualité d'armée, n'a pas le droit de poser une question comme celle-

  9   ci. Mais je pense aussi que dans le contexte en question, le HVO était

 10   concrètement le pouvoir en Herceg-Bosna et il représentait le pouvoir

 11   civil, qui coopérait de très près avec le HCR. C'est comme ça que j'ai

 12   compris les choses.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Témoin, une question connexe.

 14   Vous nous avez expliqué que l'axe pour Mostar Est par la route était libre.

 15   Pourquoi avait-on besoin d'un document lorsque le HCR avait dit clairement,

 16   avait clairement donné l'impression qu'il avait besoin de l'approbation du

 17   HVO pour pouvoir aller à Mostar ? Il me semble qu'il y a là une

 18   contradiction en quelque sorte.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, lorsque j'ai parlé de la

 20   liberté de circulation sur la route, je parlais de la portion de route

 21   entre Buna et Jablanica, mais pas de la partie entre Buna et Metkovic,

 22   parce que ça, c'était une portion de la route qui était tenue par les

 23   forces du HVO jusqu'à la frontière de Doljani.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, pour que ce soit clair, parce

 26   que tout ça est extrêmement complexe, et quelqu'un de l'extérieur qui suit

 27   ça peut être totalement désemparé.

 28   Ce que vous venez de nous dire, c'est que si le HVO donne son autorisation,

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  1   c'est parce qu'il contrôle une partie de la route qui est sous son

  2   contrôle, mais qu'à partir d'un moment donné, c'est l'ABiH qui, elle,

  3   contrôle la route. C'est bien cela que vous venez de nous dire ? Parce que

  4   j'essaie de bien comprendre.

  5   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  6    M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Maître Alaburic, mais

  7   il semble qu'une question en appelle une autre et la suite est différente.

  8   Mme ALABURIC : [aucune interprétation]

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je voudrais simplement dire que je

 10   n'ai pas contesté, je n'ai pas l'intention de contester la réponse que vous

 11   m'avez faite sur cette question, la réponse qui m'a été donnée par le

 12   témoin. Mais faites-moi signe pour me dire si vous pensez que je peux poser

 13   ma question.

 14   Mme ALABURIC : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Stop. Je signale à la cabine d'interprètes française

 16   que je n'ai pas la traduction de Me Alaburic. Vous avez dû oublier

 17   d'appuyer sur le bouton.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président.

 19   J'avais changé de canal par erreur.

 20    Donc, Messieurs les Juges, nous avons cette carte qui s'affiche et qui

 21   nous montre les principales routes importantes autour de Mostar. On voit

 22   comment on arrive depuis la Croatie à Mostar par le sud. A droite, on a la

 23   grande route qui vient de Nevesinje vers Mostar, Nevesinje étant dans un

 24   territoire contrôlé par les Serbes. Au nord, on a la grande route qui passe

 25   par Bijelo Polje pour aller à Jablanica. Je crois que cette carte devrait

 26   aider chacun à mieux comprendre ce que dit le témoin.

 27   J'ai cru comprendre que M. le Juge Trechsel avait une question.

 28   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

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  1   Vous avez dit que le HVO contrôlait un secteur. Qui était-ce ? Le HVO, qui,

  2   en l'occurrence ? La zone d'opération, la police militaire, qui ? Qu'est-ce

  3   que ça recouvre précisément ? Qu'est-ce que ça veut dire ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne peux pas vous répondre

  5   très précisément mais disons, de cette unité, c'était, si je ne me trompe,

  6   la zone opérationnelle du sud-est du HVO qui avait la responsabilité de ce

  7   territoire. Mais qui, précisément, assumait cette responsabilité, je ne

  8   peux pas vous le dire parce que je n'ai jamais eu sous les yeux des

  9   documents portant sur cette question. La seule chose que je peux faire

 10   c'est, sur la carte, vous montrer quelle était la partie de la carte qui

 11   était tenue par le HVO et quelle était la partie de la route qui était

 12   tenue par l'ABiH, si vous me le permettez.

 13   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc, cette zone contrôle un certain

 14   secteur, une certaine surface, une aire du terrain; c'est bien cela ? C'est

 15   exact ?

 16    LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Si j'interviens, c'est parce que c'est important.

 19   On a la carte sur l'ELMO. Pouvez-vous, avec un bâton ou un crayon, montrer

 20   d'où partent les convois humanitaires, par où ils passent, par quels

 21   contrôles du HVO ? Est-ce que vous pourriez le faire très rapidement, tout

 22   de suite, pour qu'il n'y ait pas d'erreur d'interprétation ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas un seul

 24   stylo sous la main.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- pouvez donner le bâton, là ? Voilà.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est à peu près ici que se trouve Metkovic.

 27   [Le témoin s'exécute]

 28   C'est à peu près là que se trouve la frontière entre la Bosnie et la

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  1   Croatie.

  2   [Le témoin s'exécute].

  3   Par ici se trouve Buna.

  4   [Le témoin s'exécute]

  5   Puis depuis cet endroit jusqu'à cet endroit-là --

  6   [Le témoin s'exécute]

  7   -- on avait une zone qui était sous le contrôle de l'ABiH alors que

  8   le secteur que je vous montre ici --

  9   [Le témoin s'exécute]

 10   -- était sous le contrôle du HVO.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il faut donner un numéro IC à cette carte

 12   parce qu'elle est très importante. Bien.

 13   Madame la Greffière, donnez un numéro IC à la carte.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Madame, Monsieur le Président, c'est IC

 15   1087.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, il reste une minute

 17   avant la pause. Peut-être serait-il bon de vous demander une précision ?

 18   Q.  Monsieur Gorjanc, c'est en répondant à une question de M. le Juge

 19   Trechsel, qui vous demandait si la zone opérationnelle contrôlait la

 20   totalité du territoire, votre réponse peut-être sujette à malentendu.

 21   Alors, dites-nous, je vous prie : si vous le savez, comment le territoire

 22   de l'Herceg-Bosna était-il divisé du point de vue militaire, du point de

 23   vue opérationnel ?

 24   R.  Du point de vue militaire, il était divisé en un certain nombre de

 25   zones opérationnelles. Une de ces zones opérationnelles était la zone du

 26   sud-est qui couvrait le sud et l'est de l'Herzégovine. La deuxième c'était

 27   la zone du nord-ouest qui recouvrait donc le nord et l'ouest de

 28   l'Herzégovine. Puis il y avait la zone opérationnelle de Bosnie centrale,

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  1   au centre de la Bosnie, et la zone opérationnelle de la Posavina qui se

  2   situait au nord vers la Save.

  3   Q.  Monsieur Gorjanc, quand nous parlons de "zone opérationnelle" et

  4   notamment de "la zone opérationnelle du sud-est," est-ce que cela désigne

  5   une partie du territoire de l'Herceg-Bosna ?

  6   R.  Cela désigne une partie du territoire de l'Herceg-Bosna, oui.

  7   Q.  Si, sur le territoire d'une zone opérationnelle, il y a des contacts

  8   avec l'ennemi et des combats avec l'ennemi, et que dans une autre partie de

  9   la zone opérationnelle il ne se déroulait aucun combat, pouvez-vous nous

 10   dire où l'armée se trouvait ce qu'elle va faire ?

 11   R.  L'armée, en principe, envoie une partie de ces forces sur les lieux des

 12   combats, c'est-à-dire au niveau du contact avec l'ennemi. Nous l'avons

 13   établi hier; dans un rayon de trois à cinq kilomètres. Les autres troupes

 14   sont ailleurs donc dans d'autres parties de la zone opérationnelle, ou bien

 15   en permission, ou bien en train de se reposer, donc ils ne participent pas

 16   au combat.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble que

 19   l'heure de la pause est arrivée.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- la pause et il doit vous rester

 21   environ 20 minutes pour terminer.

 22   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

 23   --- L'audience est reprise à 10 heures 54.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Maître Alaburic.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il nous reste

 26   20 minutes. Donc nous aimerions, avec votre autorisation, les répartir de

 27   la façon suivante, je me servirais de 30 minutes, et le général Praljak

 28   pourrait peut-être, si vous lui autoriserez, disposer de sept minutes.

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  1   Q.  Monsieur Gorjanc, ce sujet, les voies de communication, est important.

  2   Donc encore un document tout de même, que nous allons examiner en rapport

  3   avec ce sujet. La pièce 4D 780.

  4   Je vous demande de m'écouter attentivement. Aucune nécessité de lire,

  5   il s'agit d'un ordre qui vient de Stjepan Siber --

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Mes excuses. Je voulais

  7   changer le compte rendu d'audience, parce que la règle n'était pas

  8   convaincante, parce que sur vos 20 minutes, vous voulez prendre 30 minutes,

  9   vous avez "13," pas "30"; c'est cela ? C'est 13 minutes, donc c'est une

 10   correction à apporter au compte rendu.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, 13 minutes,

 12   vous avez raison. Je suis désolée que vous ayez vu cette erreur, parce que

 13   si vous ne l'aviez pas vue, j'aurais peut-être disposé de 30 minutes.

 14   Q.  Monsieur Gorjanc, vous avez le document sur l'écran, devant vous

 15   maintenant, donc c'est l'adjoint du commandant de l'ABiH qui parle, voyons

 16   ce qu'il dit, je cite :

 17   "L'objectif principal de l'agresseur" - et là, il s'agit du HVO et de

 18   l'armée de Croatie, selon sa définition, je reprends la citation -

 19   "consiste à couper les voies de communication entre Prozor et Jablanica,

 20   puis à bloquer la route Mostar-Jablanica-Sarajevo."

 21   Alors, Monsieur Gorjanc, veuillez nous dire je vous prie, à la lecture de

 22   ce document ce que vous diriez au sujet de la possibilité de se déplacer

 23   entre Jablanica-Mostar et Sarajevo ?

 24   R.  A en juger par ce document, les voies de communication étaient

 25   accessibles à l'ABiH.

 26   Q.  J'avais envie de vous demander si la population civile pouvait

 27   également emprunter ces routes ou seulement l'armija, enfin, nous y

 28   reviendrons plus tard.

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  1   Dans votre rapport, Monsieur Gorjanc, au paragraphe 215, vous proposez

  2   votre conclusion quant à l'existence ou non d'un siège à Mostar, et sur la

  3   base des documents que vous avez pu étudier, vous vous prononcez donc sur

  4   ce point. J'aimerais que vous nous fassiez connaître votre conclusion; est-

  5   ce, à votre avis, le siège de Mostar a existé ou pas ?

  6   R.  Sur la base de tous les documents qui ont été mis à ma disposition,

  7   ainsi que sur la base de la théorie militaire, ma conclusion c'est que

  8   Mostar, en tant que ville, n'a pas été assiégé au sens classique du terme,

  9   c'est-à-dire une ville d'où toute sortie serait interdite.

 10   Q.  Très bien, Monsieur Gorjanc. J'aurais maintenant quelques très brèves

 11   questions à vous poser au sujet du huitième chapitre de votre rapport, à

 12   savoir l'importance militaire de la Bosnie centrale et du nord de

 13   l'Herzégovine.

 14   Vous nous avez soumis un certain nombre de cartes, qui a dessiné ces cartes

 15   ?

 16   R.  C'est moi qui ai dessiné personnellement ces cartes, grâce au programme

 17   "CorelDRAW."

 18   Q.  Je vais énumérer les documents qui reprennent ces cartes. Donc il

 19   s'agit des pièces 4D 1486, 4D -- des documents, 4D 1486, 4D 1485, 4D 1484,

 20   4D 1491, et 4D 1483.

 21   Au paragraphe 201 de votre rapport, Monsieur Gorjanc, vous avez P41

 22   présenté vos conclusions, quant aux raisons pour lesquelles d'un point de

 23   vue militaire, il aurait été souhaitable pour une armée présente dans le

 24   secteur de conquérir et de s'assurer le contrôle du territoire de Konjic.

 25   Pouvez-vous nous dire en quelques mots pourquoi Konjic a une telle

 26   importance ?

 27   R.  J'aimerais qu'on me montre sur l'écran devant moi le compte rendu

 28   d'audience parce que j'ai les documents du prétoire électronique sur les

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  1   deux écrans que j'ai devant moi.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Peut-on bénéficier de l'aide de M.

  3   l'Huissier. M. Gorjanc est très discipliné et il tient beaucoup à suivre le

  4   compte rendu d'audience.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  6   Mme ALABURIC : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Gorjanc, en une phrase pouvez-vous nous dire pourquoi Konjic

  8   était si important ?

  9   R.  Konjic s'est trouvée à mi-chemin entre Sarajevo et Mostar, et à partir

 10   de Konjic ou plutôt à partir du secteur général de Konjic et de Jablanica,

 11   on pouvait utiliser trois routes qui partaient dans différentes directions.

 12   Première route, Makljen vers Bugojno. Ensuite, deuxième, de Kiseljak à

 13   Dusina, et ensuite, une troisième, autre qui allait vers Konjic et plus

 14   haut vers Mostar. En même temps, à partir de Mostar, on pouvait lancer des

 15   opérations militaires dans la direction du mont Igman dans le but de lever

 16   le siège à Sarajevo.

 17   Q.  Monsieur Gorjanc, vous avez dit "à partir de Mostar en passant par

 18   Igman" ?

 19   R.  Non, toutes mes excuses. A partir de Konjic en passant par le mont

 20   Igman vers Sarajevo, et puis à partir de Konjic en longeant la rive droite

 21   ou plutôt la partie centrale de la Neretva, on peut aller vers Prozor et

 22   Gornji Vakuf, et enfin à partir de Konjic, on pouvait se rendre à Mostar.

 23   A Konjic, par ailleurs, il y avait aussi une usine de munition qui

 24   était l'usine Igman qui fabriquait les armes allant du calibre 4,16 au

 25   calibre 14,5 millimètres, et les anciennes parties composantes de l'ex-

 26   Yougoslavie s'approvisionnaient à partir de cette usine qui fabriquait

 27   aussi des munitions pour l'ABiH. A Konjic, il y avait en outre un

 28   commandement militaire très important, la RC, comme on l'appelait, qui

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  1   était le commandement de guerre en cas de guerre atomique de l'armée. Donc

  2   en cas de menace d'une guerre nucléaire, ces lieux auraient été le QG du

  3   commandement militaire de l'ex-Etat.

  4   Q.  Je vous remercie, Monsieur Gorjanc.

  5   Qu'en était-il de Vitez ?

  6   Quelle importance avait Vitez ?

  7   R.  Vitez était une importance extrême car Vitez abritait la seule usine

  8   d'explosif de l'ex-Yougoslavie. Egalement, la seule usine fabriquant des

  9   poudres à canon à base de nitrate.

 10   Q.  Les villes de Bugojno, Travnik, et Novi Travnik, quelle était la raison

 11   de leur importance ?

 12   R.  Bugojno avait une usine, qui s'appelait Slavko Rodic, pour fabriquer

 13   des bombes, des munitions contre les blindés légers et des détonateurs pour

 14   allumage de divers types de munition. A Travnik, il y avait l'atelier de

 15   réparation électrotechnique qui pouvait réparer les moyens de transmission

 16   et autres, et il y avait aussi une usine qui fabriquait du matériel

 17   militaire. A Novi Travnik, il y avait la plus grande usine d'artillerie

 18   lourde du pays, de notre ancien pays. C'est dans cette usine qu'on

 19   fabriquait des canons, des tubes pour les pièces d'artillerie lourdes, de

 20   lance-roquettes multiples, et cetera.

 21   Q.  Monsieur Gorjanc, lorsque nous parlons de routes traversant la vallée

 22   de la Neretva pour aller vers la côte adriatique, pourquoi est-ce que ces

 23   routes portent une telle importance ?

 24   R.  Parce qu'elles sont les principaux axes de communication de l'ancien

 25   Etat entre, reliant le nord et le sud du pays à partir de la Posavina vers

 26   la côte adriatique.

 27   Q.  Monsieur Gorjanc, je vais maintenant vous poser rapidement quelques

 28   questions au sujet du reste de votre rapport d'expert. Au chapitre 11, vous

Page 46165

  1   parlez du nettoyage du terrain. J'aimerais vous interroger au sujet de ces

  2   actes de ratissage du terrain, qui, en anglais, sont traduits par des mots

  3   "a mop-up," et qui vise à supprimer les traces de l'ennemi.

  4   Monsieur Gorjanc, c'est ce que ces opérations de nettoyage ou de ratissage

  5   de terrain peuvent, à votre avis, être considérées comme des opérations de

  6   nettoyage ethnique ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Au chapitre 12 de votre rapport, Monsieur Gorjanc, vous analysez le

  9   sujet du rattachement ou de la resubordination des unités militaires. Alors

 10   deux questions seulement. Est-ce qu'il existe une notion impliquant le

 11   rattachement automatique d'une unité militaire à une autre ?

 12   R.  Non. Dès lors qu'il y a resubordination ou rattachement d'une unité

 13   militaire elle doit être précédée par une décision et un ordre émanant des

 14   deux unités, militaire et subordonnée et l'unité à laquelle cette première

 15   unité est rattachée.

 16   Q.  Dans le chapitre suivant de votre rapport, vous analysez le terme de

 17   "missions confiées à l'état-major," et au paragraphe 258, vous dites que,

 18   dans toute les armes, l'état-major général n'a pas des attributions de

 19   commandement direct sur les unités opérationnelles et sur les objectifs

 20   stratégiques, mais que pour des missions moins importantes, le commandement

 21   Suprême peut transmettre ces responsabilités à l'état-major général.

 22   Alors je me remémore la déposition du général Praljak, qui a dit comment il

 23   interprétait ce pouvoir et il l'a dit dans des termes tout à fait

 24   identiques aux vôtres.

 25   Alors pourriez-vous nous dire quel est le lien existant entre les

 26   attributions d'état-major de l'état-major général et la possibilité pour un

 27   état-major général d'assumer un certain nombre de responsabilités concrètes

 28   dans des conditions particulières ?

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  1   R.  Cette responsabilité de commandement de l'état-major général peut

  2   s'appliquer à l'entraînement des unités, aux commandements des états-majors

  3   subordonnés, à l'organisation interne de certaines unités, au fait de

  4   donner des consignes en vue de prendre certaines décisions, par

  5   l'appréciation concrète de certaines situations, par le suivi de la

  6   situation sur le terrain où se mènent les combats, et cetera, et cetera.

  7   Mais cela n'a rien à voir avec un commandement direct d'une unité de

  8   l'armée globalement.

  9   Q.  Mais, en fin, dernière disposition, dernière question que j'aimerais

 10   aborder, Monsieur Gorjanc, si des troupes sont isolées, mises en état

 11   d'arrestation ou placées en isolement, enfin un soldat d'une armée

 12   déterminée, est-ce que lorsqu'il est appréhendé, arrêté ou placé en

 13   isolement un tel soldat perd son statut de soldat ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Monsieur Gorjanc, je vous soumets une situation hypothétique. Si vous

 16   aviez exercé le pouvoir militaire en Herceg-Bosna, si vous l'aviez incarné,

 17   et si vous aviez prévu un affrontement avec les Musulmans en Bosnie-

 18   Herzégovine, et je fais appel à la connaissance que vous aviez des peuples

 19   de l'ex-Yougoslavie, de leurs habitudes, de leurs coutumes, de leur

 20   religion, et de leur histoire, est-ce que vous auriez établi le HVO en tant

 21   qu'armée abritant dans ses rangs un grand nombre de soldats musulmans ?

 22   R.  En aucun cas.

 23   Q.  Dernière question, également hypothétique. Si, début les années 90,

 24   vous avez été président de la République de Croatie, et si vous aviez prévu

 25   de diviser la Bosnie-Herzégovine, et de rattacher quelques régions de

 26   Bosnie-Herzégovine avec la Croatie, en sachant parfaitement bien que cela

 27   serait synonyme de conflit avec les Musulmans en Bosnie-Herzégovine, donc

 28   vous avez également dû prévoir en même temps l'éclatement d'un conflit;

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  1   est-ce que vous auriez armée l'ABiH ? Est-ce que vous auriez contribué à

  2   l'entraînement de ces soldats et officiers ? Est-ce que vous auriez aidé

  3   les autorités de Bosnie-Herzégovine, les autorités musulmanes de Bosnie-

  4   Herzégovine ?

  5   R.  Si telle avait été mon intention, je n'aurais certainement rien fait de

  6   ce que vous venez de dire. Je n'aurais pas apporté mon aide dans ces

  7   conditions.

  8   Q.  Je vous remercie, Monsieur Gorjanc, merci pour votre compréhension et

  9   vos réponses.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, vous avez sept minutes pour les

 12   questions militaires.

 13   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Cela me

 14   suffira.

 15   Interrogatoire principal par l'accusé Praljak :

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Colonel Gorjanc.

 17   R.  Bonjour.

 18   Q.  Des questions vous ont été posées qui d'ailleurs, avaient déjà été

 19   posées ici. La question du genre combien de temps faut-il pour créer une

 20   armée.

 21   Voici maintenant ma question : peut-on créer une armée organisée s'il n'y a

 22   pas d'Etat organisé, Etat démocratique, Etat civilisé, et cetera ?

 23   R.  Je crois avec déjà dit hier que l'état d'organisation d'une armée

 24   dépend de l'état d'organisation du pays.

 25   Q.  Donc, si nous prenons l'exemple de l'armée irakienne, si elle devait

 26   envoyer 300 instructeurs américains dans l'armée irakienne, est-ce que cela

 27   aurait voulu dire que quatre ou six mois plus tard, cette armée aurait été

 28   identique à celle des Etats-Unis ?

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  1   R.  Non. Dans les faits, tout indique que les choses ne se passent pas

  2   ainsi. Il est certain que les choses ne peuvent pas se passer ainsi.

  3   Q.  Je vous remercie. Lorsque vous-même, en tant qu'officier de l'armée

  4   populaire yougoslave, souhaitiez aller à l'étranger, à Triest, par exemple,

  5   est-ce que vous aviez besoin de demander une autorisation ?

  6   R.  Assurément. En 1988, c'est le commandement de division qui a désormais

  7   été habilité à décerner les autorisations de voyage à l'étranger.

  8   Lorsque je suis allé pour la première fois à l'étranger, en 1977,

  9   j'ai dû demander une autorisation, à l'époque, à Belgrade.

 10   Q.  A votre retour, qu'est-ce que vous deviez, quels documents deviez-vous

 11   rédiger, écrire ?

 12   R. A mon retour, j'étais tenu de rédiger un rapport détaillé pour dire ce

 13   que j'avais vu là-bas à l'étranger sur le plan pertinent pour l'armée et

 14   avec qui je m'étais entretenu.

 15   Mais dans la dernière période, cette obligation de rédiger de tels

 16   rapports, elle est disparue, elle n'était plus valable que si nous avions

 17   quelque chose de tout à fait pertinent à dire.   

 18   Q.  Monsieur Gorjanc, dans une armée comme celle-là et d'ailleurs, dans

 19   n'importe quelle armée, alors, prenez l'hypothèse : si, dans une telle

 20   armée, on constatait qu'un certain nombre de soldats et officiers - quel

 21   que soit, d'ailleurs, leur pourcentage - s'apprêtent à organiser une

 22   rébellion armée au sein de l'armée, comment est-ce qu'on qualifierait un

 23   tel acte ?

 24   R.  On qualifierait un tel acte de trahison.

 25   Q.  Merci bien. Troisièmement, vous avez dit après avoir examiné des

 26   documents, que l'ABiH avait attaqué le HVO sur les collines; ceci est-il

 27   exact ?

 28   R.  Je ne peux pas affirmer qu'elle attaquait. Mais il ressort très

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  1   clairement des documents qu'elle en avait l'intention et qu'elle émettait

  2   des ordres allant dans ce sens.

  3   Q.  Veuillez me dire, je vous prie, la route nationale entre Mostar-

  4   Jablanica-Konjic-Tarcin-Visoko-Zenica, est-ce que, d'après vos informations

  5   et l'étude de la Bosnie centrale que vous avez effectuée, cette route-là,

  6   cette route nationale était-elle praticable ?

  7   R.  Oui. Jusqu'à Bilalovac.

  8   Q.  Alors allons de l'avant. Merci.

  9   Vous nous avez dit que le HVO pouvait utiliser l'artillerie à Bijelo Polje

 10   pour contrôler la route, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Alors qu'en est-il la nuit, lorsqu'il fait nuit ? Que peut voir

 13   l'artillerie, et est-ce qu'on peut passer par cette route quand on veut, en

 14   nombre indéterminé et ainsi de suite ?

 15   R.  Ecoutez, je ne sais pas quels étaient les systèmes d'observation

 16   nocturne que vous aviez. Mais pour le moment, je dirais que ces équipements

 17   venaient d'être introduits dans la JNA et il y avait une portée de 2 000

 18   mètres, la nuit lorsqu'il faisait beau. Donc vous pouviez observer, mais la

 19   question qui se posait, c'était de pouvoir toucher la cible.

 20   Q.  Mais imaginons qu'on vous attaque sur les collines. Est-ce que c'est un

 21   peu plus que les deux kilomètres, sans compter la pluie, l'obscurité

 22   profonde ?

 23   R.  Alors, dans ce cas-là, c'est bien moins. Mais je ne vous ai pas bien

 24   compris.

 25   Q.  Des ce cas de figure, si quelqu'un est en train d'attaquer dans les

 26   collines et si vous êtes à plus de deux kilomètres par rapport à cette

 27   route ?

 28   R.  Oui, dans les collines, certainement.

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  1   L'INTERPRÈTE : Les interprète précisent que les intervenants parlent en

  2   même temps.

  3   M. KARNAVAS : [interprétation] Nous n'avons pas entendu la dernière réponse

  4   et j'aimerais que vous fassiez des pauses parce que nous aimerions, nous

  5   aussi, entendre la réponse. Nous n'avons pas entendu la dernière réponse;

  6   est-ce que vous pourriez attendre parce que nous voulons connaître la

  7   réponse.

  8   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

  9   Q.  Alors, on a vu que l'ABiH attaquait en direction des collines depuis

 10   Dreznica. Alors l'artillerie du HVO se trouvant à plus de 2 000 mètres,

 11   c'est-à-dire deux kilomètres; était-il possible d'observer la distance et

 12   ce qui se passait au niveau de ces troupes ? Alors est-ce qu'il y avait une

 13   distance plus grande que deux kilomètres de là à l'endroit observé ?

 14   R.  Oui, ça devait faire plus.

 15   Q.  Alors, Monsieur Gorjanc, s'il est exact que le HVO se trouve d'un côté

 16   en allant du nord vers le sud, et que l'ABiH se trouvait en face - oublions

 17   l'armée de la Republika Srpska - en quelque cas de figure que ce soit,

 18   peut-on parler de l'encerclement de cette ville, compte tenu de cette route

 19   qui va jusqu'à Zenica, et au-delà ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Ma dernière question sera celle-ci : M. le Juge Trechsel vous a demandé

 22   ce qui suit; y a-t-il une zone ou un contrôle à l'égard d'une région ou

 23   d'une zone de la part du HVO ?

 24   Alors, d'abord, on ne sait pas ce que l'on entend par "région" et on ne

 25   sait pas ce que l'on entend par "contrôle." Vous nous avez précisé qu'une

 26   armée normale avait le tiers de ses effectifs sur la ligne de front, un

 27   tiers à proximité et un tiers un peu plus en profondeur selon l'évolution

 28   de la situation. Est-ce que c'est bien ce que vous avez dit ?

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  1   R.  Oui. Mais je vous ai dit que le dernier tiers est dans leurs maisons,

  2   donc avec leurs familles respectives.

  3   Q.  Bon. Mais vous vous souvenez que vous avez dit, partant des documents,

  4   que le HVO avait un tiers de ses hommes sur la ligne de front et rien

  5   d'autre ?

  6   R.  Ça, je ne peux pas vous le dire parce que ces documents ne m'ont pas

  7   été rendus accessibles pour ce qui est du HVO. Mais d'après des

  8   observations qui sont les miennes, je pense qu'il en a été ainsi. Mais je

  9   n'ai pas de documents pour illustrer et étayer la chose. Donc, c'est une

 10   impression que je me suis faite.

 11   Q.  Bon. Imaginons qu'il en a été ainsi. Vous êtes l'expert. Le HVO avait

 12   un tiers d'une brigade de mobilisée sur une ligne de front. Est-ce qu'il y

 13   a une deuxième ligne, donc des effectifs dans les arrières, et dites-moi :

 14   suite à cela, que contrôle donc l'armée ?

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Praljak, le Greffier nous dit que vous avez

 16   utilisé neuf minutes alors que vous avez sept minutes. Donc, vous êtes

 17   hors-temps. Donc, il faut terminer. Terminez la question et c'est fini

 18   après.

 19   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] C'est ma toute dernière question,

 20   Messieurs les Juges.

 21   Q.  Alors cette armée qui tient une première ligne, que contre-t-elle, que

 22   peut-elle contrôler et de deux, quelle est la véritable taille du

 23   territoire contrôlé ? Qu'entendez-vous aussi par cette notion de contrôle ?

 24   Voilà.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a trois questions, on vous a dit une seule

 26   question.

 27   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Messieurs les Juges, on a problématisé.

 28   Monsieur le Juge Trechsel, c'est vous qui avez problématisé ce qui est

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  1   contrôlé et qu'est-ce qui est le territoire. Mais voyez donc ce que c'est

  2   que ce contrôle et ce que c'est que ce territoire, définition et les

  3   notions.

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, vous aurez

  5   l'occasion plus tard. Vous avez eu un certain temps qui vous a été accordé,

  6   vous en avez utilisé davantage, cela suffira pour aujourd'hui.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : On va arrêter là, Monsieur Praljak.

  8   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Je vous en prie, Messieurs les Juges,

  9   permettez-moi, à chaque fois, vous n'êtes pas aussi stricts à l'égard du

 10   Procureur, à 30 secondes près, croyez-moi bien. Moi, on m'en mesure mon

 11   temps à 30 secondes près. Alors, moi, je voudrais savoir ce qu'on contrôle

 12   et ce qu'est le territoire.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Praljak, sur le fond, le témoin a déjà

 14   répondu. On aura certainement l'occasion de revenir lors du contre-

 15   interrogatoire. J'ai bien ça en mémoire, s'il y a encore des doutes, on

 16   reviendra. Donc mon collègue vous dit, c'est terminé donc la Chambre vous

 17   dit, c'est terminé.

 18   Alors, Monsieur le Témoin, j'ai une question d'ordre technique qui ne

 19   touche pas au fond. Pouvez-vous me confirmer que vous avez fait un rapport

 20   qui dans votre version fait 271 paragraphes ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous me confirmer que dans votre rapport, il

 23   y a des notes de bas de page et dans la version en B/C/S, il y a 158 notes

 24   de bas de page ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à Mme la Greffière d'afficher la

 27   page 82 en B/C/S, le numéro c'est 4D28-1062.

 28   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je répète, la page du rapport c'est 82 en B/C/S, la

  2   page 82, et le numéro il y a 4D28-1062.

  3   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une erreur de

  4   ma part, j'aurais dû le dire. Le numéro de versement de ce rapport au

  5   dossier ou proposition de versement est le 4D 1731. Mes excuses.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, moi, ce que je veux c'est la page

  7   82 en B/C/S. C'est la page 82, la page 82 du rapport en B/C/S, voilà. Donc

  8   n'intervenez pas, je sais ce que je fais.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, il faut retrouver la

 10   page, parce que, dans la version croate que j'ai avec moi, je l'ai partagée

 11   en sous-ensemble, alors que je retrouve, je demanderais à l'un quelconque

 12   de mes confrères de --

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Moi, j'ai la page -- on l'a à l'écran.

 14   Madame la Greffière, ce que je voudrais voir c'est les notes de bas de

 15   page, donc montez le texte, voilà.

 16   Monsieur, regardez, c'est la page 82 de votre rapport; il y a des notes de

 17   bas de page. Vous citez donc des documents, la note de bas de page c'est

 18   133, 134, 135, 136, 137. Je vois que les notes de bas de page sont en

 19   anglais.

 20   Est-ce que vous connaissez la langue anglaise ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président, mais la

 22   terminologie militaire, je la comprends relativement bien, à la lecture

 23   seulement.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Les documents que vous citez en notes de bas de

 25   page, le P 04447, le 4D 00780, et cetera; est-ce que tous ces documents

 26   vous les avez lus avant de les intégrer dans votre rapport ?

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour que ça soit bien compréhensible pour tout le

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  1   monde, la note de bas de page 133, elle figure dans votre -- je n'ai pas la

  2   note de bas de page que l'on voit, parce qu'il peut y avoir un problème. La

  3   note de bas de page 134, qui est le 4D 00780, et qui figure donc dans le

  4   premier paragraphe de la page 82; est-ce à dire que vous avez lu

  5   entièrement le 4D 00780 pour faire la conclusion qui est au petit V, que

  6   l'on voie dans le texte ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. C'est tout ce que j'avais à vous

  9   demander.

 10   M. KOVACIC : [interprétation] Le compte rendu, j'aimerais intervenir sur le

 11   compte rendu, s'il vous plaît. Est-ce que je peux dire quelque chose au

 12   sujet du problème de compte rendu que nous avons pour le moment ? C'est à

 13   la page qui figure à l'écran, ligne 14, la réponse du témoin n'a pas été

 14   enregistrée, mais il est indiqué "pas d'interprétation." Il était clair que

 15   le témoin avait répondu "oui," mais peut-être faudra-t-il répéter la

 16   question.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous aviez dit "oui," mais ça n'a pas été repris. Je

 18   vous avais demandé si la note de bas de page, P 4747, qui figure en note de

 19   bas de page, vous l'aviez lue et est-ce que vous l'avez utilisée pour votre

 20   rapport ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci, il manquait le "da."

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'ai une autre question d'ordre

 24   technique, Monsieur le Témoin. C'est peut-être quelque chose qui m'a

 25   échappé, mais pourriez-vous nous expliquer pourquoi votre version

 26   originale, comme vous l'avez confirmé comporte 271 paragraphes, alors que

 27   la traduction anglaise que nous avons devant nous en comporte 281 ?

 28   M. STEWART : [interprétation] Je pense que tous les deux en ont 281. Je ne

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  1   sais pas d'où vient ce chiffre "271." C'est une question technique, je me

  2   permets d'intervenir, mais je pense que les deux versions ont cela --

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] C'est une fausse déclaration, parce

  4   que le témoin a confirmé qu'il y en avait 271, peut-être c'est une erreur

  5   dans la traduction, mais nous n'allons pas entamer des poursuites.

  6   M. STEWART : [interprétation] Lorsqu'un Juge avance un chiffre, le témoin

  7   ne le contredit pas en général, avec tout mon respect, sauf votre respect.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je comprends bien votre réponse. Je

  9   ne pense pas que -- pouvez-vous approfondir la chose ?

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Y a-t-il le moment des questions pour la Défense au

 11   niveau du contre-interrogatoire, autant précisé que la Chambre avait alloué

 12   deux heures aux autres avocats ? Alors on va commencer par Me Karnavas, que

 13   je salue à nouveau.

 14   M. KARNAVAS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

 15   Monsieur les Juges. Bonjour à tout le monde dans le prétoire.

 16   Contre-interrogatoire par M. Karnavas :

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 18   Je ne pense pas avoir énormément de questions. L'on m'a accordé 40 minutes

 19   - ce sont mes collègues qui l'on fait - mais je ne pense pas que

 20   j'utiliserai la totalité de ces 40 minutes.

 21   L'INTERPRÈTE : Me Karnavas pourrait-il parler dans son micro ?

 22   M. KARNAVAS : [interprétation]

 23   Q.  Je vais distribuer des documents. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire

 24   de s'y référer. Mais au cas où, ils sont là.

 25   Je voudrais reprendre les questions du général Praljak là où elles ont pris

 26   fin.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] Je vais attendre la distribution des

 28   documents, je conseille à l'huissier de faire deux voyages plutôt qu'un

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  1   seul. Excusez-moi pour ce retard.

  2   Q.  Alors revenons sur vos antécédents. J'ai eu la possibilité de lire

  3   votre curriculum vitae. Il semblerait que vous avez assisté pratiquement à

  4   tous les cours qui étaient offerts, qui étaient possible pour un officier

  5   de façon à parvenir au grade le plus élevé de la JNA; est-ce exact ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Outre le fait que vous avez assisté à tous ces cours, vous avez suivi

  8   tous ces cours, vous avez aussi d'expérience pratique en tant que militaire

  9   dans l'ensemble de votre carrière, donc en fait vous connaissez bien votre

 10   métier, en américain, on dit vous avez bien vos bottes sur la terre, vous

 11   avez de l'expérience ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  En plus de cela, vous avez également enseigné, ce qui veut dire qu'en

 14   plus de l'expérience pratique que vous avez, vous avez également

 15   l'expérience théorique que vous avez été en mesure d'enseigner à des

 16   étudiants qui essayaient de devenir des officiers comme vous-même sur le

 17   terrain, qui soient prêts dans l'éventualité d'un conflit ou d'une guerre

 18   qui éclaterait; c'est bien cela ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Revenons maintenant à cette zone ou à ce secteur de responsabilité, je

 21   suis sûr que vous avez déjà entendu, employé ces mots, ces termes. Ce sont

 22   -- ils ne vous sont pas inconnus ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Hier, on vous a demande je crois de regarder le paragraphe 24 de votre

 25   propre rapport. Vous n'avez pas besoin de regarder. Mais à ce sujet par

 26   rapport à la question qui avait trait au paragraphe 24, vous avez indiqué

 27   qu'il s'agirait d'une zone de trois ou cinq kilomètres ou secteur de

 28   responsabilité, pour ce qui est en profondeur. C'est cela du moins ce que

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  1   j'ai compris; ai-je que j'ai raison ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Puis il y a eu d'autres questions, et une question en particulier, je

  4   crois que c'était du Président Antonetti, qui vous a posé une question

  5   concernant des brigades et le nom de ces brigades, parce qu'à ce qui

  6   semble, et je crois que vous-même vous l'avez confirmé, ces brigades avait

  7   un lien avec les municipalités, c'est la raison pour laquelle ils portaient

  8   des noms qui représentaient les municipalités qui étaient originaires;

  9   c'est bien ça ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Maintenant, personnellement, je n'ai jamais été militaire, je n'ai

 12   jamais fait de service, mais j'ai passé pas mal de temps à lire les

 13   documents de la JNA, pour ce procès et pour d'autres procès. Donc lorsqu'on

 14   en vient maintenant aux règlements applicables aux brigades, il semblerait

 15   que la documentation, qui a été utilisée par la JNA, les documents que vous

 16   avez utilisés pour former, entraîner, fournissaient des éléments

 17   schématique de ce qui concernait les personnes sur le terrain, et vous

 18   sauriez exactement quelle serait la profondeur du secteur, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Bien. Maintenant si nous examinons les règlements relatifs aux

 21   brigades, tout au moins, il semblerait que nous parlons de 15 à 20

 22   kilomètres, bien que ceci soit susceptible de changer compte tenu du

 23   terrain, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Tel que je comprends les choses - et vous me corrigez si je me trompe -

 26   en ce qui concerne l'air ou la zone de responsabilité d'une brigade, ceci

 27   était également confié au commandant de la brigade par le commandant du

 28   corps d'armée ou son supérieur, bien que si on ne lui en fournit pas une,

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  1   on ne lui indique pas une, le commandant de brigade est à la fois à même et

  2   obligé de désigner sa propre zone de responsabilité, y compris la

  3   profondeur en arrière de la ligne de confrontation des affrontements; c'est

  4   bien ça ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Bien. Je ne vais pas rentrer dans les détails du schéma, à moins que la

  7   Chambre ne le souhaite, mais dans cette question de profondeur, vous auriez

  8   -- par exemple, vous pourriez désigner où situer un poste de commandement

  9   avancé ou selon les réserves, ou certaines pièces d'artillerie peuvent être

 10   situées, et ainsi de suite, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Bien. Alors, maintenant, je voudrais qu'on envisage une zone urbaine,

 13   une zone urbaine où il y a confrontation où il y a conflit dans cette zone

 14   urbaine, n'est-ce pas ? Vous me suivez, Colonel ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Disons, par exemple, à titre d'exemple, Mostar serait un bon exemple.

 17   Je pense que vous n'avez été à Mostar.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Je suppose que, dans votre participation à cette affaire, vous avez

 20   appris plus ou moins au centre de Mostar au milieu de la ville, il y a cet

 21   endroit, cette route qu'on appelle le boulevard, et c'était la ligne de

 22   confrontation qui séparait les deux adversaires, n'est-ce pas, les deux

 23   forces ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Vous n'avez pas de problème jusque-là. Il faut que vous répondiez. Il

 26   n'y a pas de problème.

 27   R.  Oui, oui.

 28   Q.  Alors maintenant nous parlons de cette ligne de confrontation, ce

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  1   secteur de responsabilité à Mostar n'est pas simplement ce boulevard, mais

  2   ça s'étend vers l'arrière, et en profondeur, ça pourrait être de 15 a 20

  3   kilomètres ou même encore plus loin sur l'arrière, ça dépendra un peu de

  4   savoir ce qui se passe sur le terrain, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Bien sûr, lorsque nous parlons du secteur de responsabilité, vous avez

  7   un char qui est placé à un certain endroit, des pièces d'artillerie placées

  8   ailleurs, tout ceci étant dans les limites ou à l'intérieur de cette zone

  9   de responsabilité, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  En qualité de commandant, vous étiez responsable, et en charge, vous

 12   seriez responsable pas seulement de ce qui se passe devant vous et au-delà,

 13   mais également ce qui se passe derrière vous, sur l'arrière, dans cette

 14   zone en profondeur dont nous parlons, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Donc si des soldats dans cette zone qui se trouve en profondeur sont en

 17   train de faire quelque chose qui est contraire à ce qu'ils devaient être en

 18   train de faire, il est nécessaire, à ce moment-là, d'enquêter ou peut-être

 19   même de punir, si nécessaire, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Alors, là, il y a eu une pause importante -- peut-être pourrez-vous

 22   m'aider ? Vous avez également eu la possibilité de regarder d'autres règles

 23   ou de règlements traitant des questions de droit de la guerre. Vous

 24   comprenez, d'après ce que je comprends les choses, les officiers de la JNA

 25   étaient responsables et devaient comprendre les instruments juridiques

 26   nécessaires, notamment traités internationaux, les conventions, et le

 27   reste, qui s'applique aux situations de guerre, et sur la façon de traiter

 28   les civils, comment traiter les prisonniers de guerre, et le reste, n'est-

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  1   ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Un commandant donc est responsable, d'après ce que je comprends, vous

  4   le savez, il soit tenu pour responsable -- "savait" ou "aurait pu savoir,"

  5   ce sont les termes qu'ils ont employé dans les règlements, et ici, nous

  6   employons "aurait eu connaissance", mais "aurait pu avoir connaissance" ou

  7   "aurait pu savoir". Il serait, à ce moment-là, responsable s'il n'avait

  8   rien fait pour empêcher, pour prévenir ou même ne pas punir, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Bien. Alors, je mentionne ceci parce que cette pause révélatrice que

 11   vous avez faite, parce que je voudrais être, bien sûr, que nous sommes

 12   d'accord sur le fait que tout ce qui se passe à l'intérieur de la zone de

 13   responsabilité, le commandant est responsable ou si vous seriez d'accord,

 14   au moins ? Nous savions qu'un commandant n'est pas omnipotent et il peut

 15   faire quelque chose, n'est-ce pas ?

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais que nous

 17   précisions la question de la responsabilité pour ce qui est de la notion,

 18   même parce que si nous ne précisons pas la chose, le commandant sera tenu

 19   responsable pour tout ce qui se passe dans une zone d'intervention ou une

 20   zone d'activité.

 21   Je vais donc demander à mon confrère, M. Karnavas, de nous dire ce qu'il

 22   entend sous la notion de responsabilité. Merci.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Pas d'ambiguïté. Pouvez-vous faire préciser au

 24   témoin la notion de responsabilité qu'il peut comprendre d'après vos

 25   questions.

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Oui, Messieurs

 27   les Juges.

 28   Mais comme vous le savez, ma pratique consiste à partir de la notion

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  1   générale pour aller au particulier. Nous avons pour le moment parlé d'un

  2   certain nombre de choses à caractère général, nous allons maintenant entrer

  3   dans les détails.

  4   Q.  Disons, Monsieur le Témoin, qu'un soldat, un soldat donné commet un

  5   meurtre. Il tue un civil, enfin, peu importe de savoir qui est ce civil, ou

  6   bien il vole un civil, ou bien il la viole, la civile. Alors, le commandant

  7   doit être responsable, à supposer qu'il en soit capable dans les

  8   circonstances d'empêcher, s'il était au courant, de prévenir ou de punir;

  9   est-ce que je me trompe ?

 10   R. Je pense que, dans ce cas de figure, le commandant ne peut être

 11   considéré comme étant responsable du point de vue de la responsabilité. Il

 12   peut l'être s'il n'a pas pris les mesures appropriées lorsqu'il a appris

 13   que délit il y a eu. Cela signifie qu'il s'agit de rapporter la chose pour

 14   mettre en détention l'auteur, s'il est capable de le faire, et confier

 15   l'affaire au dossier, aux autorités civiles, voire aux autorités militaires

 16   pour qu'une procédure soit entamée comme il se doit.

 17   Q.  Bien. Avant l'objection qui a été élevée, j'avais indiqué que le

 18   commandant ne peut pas être omniscient, omniprésent, de façon à savoir ce

 19   qui va se passer ou empêcher quoi que ce soit. Tout ceci dépend des

 20   circonstances, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Bien. Alors, je voulais parvenir jusqu'à ce stade. Et puisque nous

 23   sommes sur ce point, nous savons que les soldats sont parfois en première

 24   ligne, parfois, comme vous l'avez dit, rentrent chez eux en permission

 25   parce que tout au moins dans ce type de cas, il n'y a pas de caserne,

 26   n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Donc, lorsqu'on donne la relève à un soldat, il est relevé de son poste

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  1   au front et qui rentre chez lui, que ce soit en ville ou que ce soit dans

  2   un village, quel qu'il soit, je voudrais que vous suiviez clairement de

  3   très très près le scénario. Vous avez ce soldat qui porte son arme, qui a

  4   également des munitions, et si en route, dans son trajet vers chez lui, ou

  5   lorsqu'il est déjà rentré chez lui, s'il ou elle - s'il s'agit d'une femme

  6   dans les forces armées - commet un crime ou un délit, si le commandant

  7   vient à l'apprendre, il sera responsable de prendre les mesures nécessaires

  8   parce que cette personne est encore membre des forces armées, est encore un

  9   soldat, un militaire et donc, le commandant demeure responsable du

 10   comportement de son militaire, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui. Oui, disais-je, alors; cependant, il ne va peut-être pas

 12   l'apprendre directement, il va l'apprendre par les autorités civiles qui,

 13   au préalable, sont tenues de prendre les mesures et informer le commandant

 14   et la police militaire afin qu'ils interviennent de concert.

 15   Q. Je suis d'accord. Mais vous allez être d'accord avec moi aussi, je

 16   pense, je ne voudrais pas trop m'attarder sur cette idée, mais qu'un

 17   commandant ne peut pas volontairement fermer les yeux, être aveugle. En

 18   d'autres termes, un commandant ne peut pas prendre certaines mesures pour

 19   s'assurer qu'aucun renseignement ne viendra de son côté, sur lequel il

 20   aurait à réagir. Vous serez d'accord avec moi qu'un commandant ne doit pas

 21   faire cela, n'est-ce pas, ne peut pas faire ça ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Bien. Alors, maintenant, je voudrais revenir à une autre idée. Mais

 24   juste encore un point sur cette question de la zone de responsabilité.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais poser une question pour approfondir

 26   votre question.

 27   Monsieur le Témoin, vous nous avez dit que, d'après votre rapport d'expert,

 28   un tiers des soldats était sur la ligne de front, un tiers en réserve, et

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  1   un tiers retournés chez eux. Alors, moi, je prends la situation de ceux qui

  2   sont retournés dans leur maison. On a donc un soldat X qui est revenu dans

  3   son village, dans sa ferme et qui, pour une raison inconnue, va aller

  4   violer sa voisine, et que l'information remonte au commandant de la

  5   brigade. D'après vous, qui est compétent ? Le procureur militaire ou le

  6   procureur civil ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Le procureur militaire s'il existe, ou si le

  8   tribunal militaire et le bureau du procureur militaire existent; à

  9   l'époque, en ex-Yougoslavie, dans les armées au moins au début, les

 10   tribunaux militaires n'existaient pas. En Slavonie, c'est le cas encore

 11   aujourd'hui. La question, Monsieur le Président, est de savoir de quelle

 12   manière le commandant a été informé du délit. Est-ce que ceci a eu lieu

 13   directement, par le biais de son système de renseignements ou par le biais

 14   du système de renseignements civil ? Si tel est le cas, si les soldats sont

 15   de repos chez eux, c'est plutôt la police civile et les organes civils qui

 16   apprennent que les organes militaires. Je suppose que d'une certaine

 17   manière, les autorités civiles devaient déjà traiter du dossier concernant

 18   le délit en coopération avec les organes militaires sur ce territoire.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Q.  Alors, est-ce que vous savez si, dans ce cas, dans cet exemple, dans

 21   cette situation où on vous a demandé de fournir un rapport d'expert, si un

 22   procureur militaire était là et s'il en existait un ?

 23   R.  Je ne sais pas. Je ne me suis pas penché sur le document en profondeur.

 24   Q.  Bien. Alors, je ne vais pas trop m'attarder sur ce point, mais je pense

 25   que nous pouvons maintenant passer au sujet suivant qui a à voir avec les

 26   questions de contrôle ou de direction parce que cet aspect, enfin, je

 27   vieillis moi-même, comme l'un des Juges de la Chambre l'ai dit tout à

 28   l'heure, en ce qui concernait l'âge.

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  1   Je voudrais vous poser des questions concernant les zones ou secteurs de

  2   responsabilité parce qu'hier, vous avez limité cela, la vôtre, à trois ou

  3   cinq kilomètres et ça m'a paru étrange. Maintenant, nous avons la

  4   possibilité d'aller jusqu'à 15 ou 20 kilomètres, tout au moins en ce qui

  5   concerne les brigades. Mais alors lorsqu'il s'agit des corps d'armée, nous

  6   parlons de n'importe où. Je pense qu'il peut s'agir, à ce moment-là,

  7   environ de 60 à 100 kilomètres ou dans ces environs. Donc est-ce que je

  8   cite bien le manuel ? Est-ce que ça peut pas avoir lieu sur, enfin, je ne

  9   dis pas ce qui se passe sur le terrain.

 10   R.  Moi, je dois compléter ce que vous venez de dire. Lorsqu'il est

 11   question de la zone de responsabilité, de la profondeur de cette zone de la

 12   Brigade de la JNA de 15 à 20 kilomètres, on parle du déploiement complet de

 13   toutes les unités. Autrement dit, tous les bataillons, y compris les

 14   Bataillons de Réserve, sont fortifiés et prêts à se battre. Quant aux

 15   activités de combat, elles se déroulent sur les premières positions, c'est-

 16   à-dire, ceci correspond à une étendue de trois à cinq kilomètres, les

 17   positions sur les lignes de front même. Pour autant que je le sache, aucune

 18   Brigade du HVO ne figurait sur les positions classiques du déploiement pour

 19   la défense, conformément à ce qui est requis par le règlement, non

 20   seulement de la JNA, mais de toutes les autres armées du monde, ce qui

 21   aurait été de 15 à 20 kilomètres. Donc je voulais corriger cela.

 22   Puis dans les zones urbaines, la profondeur est bien plus petite et

 23   n'excède pas quelques kilomètres. Par exemple, s'agissant de l'armée

 24   soviétique et de la défense de Stalingrad, plusieurs divisions défendaient

 25   Stalingrad dans une profondeur d'environ entre 1 500 et 1 700 mètres.

 26   Q.  Continuellement de trois à cinq kilomètres, et étant entendu que nous

 27   ne sommes pas en train de parler de la JNA, nous ne sommes pas en train de

 28   parler de la JNA qui opérait en parallèle avec la Défense territoriale.

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  1   Nous ne parlons pas de la manière dont les choses auraient dû être, dont

  2   elles auraient dû être planifiées avant le démantèlement de l'ex-

  3   Yougoslavie. Donc je comprends que -- maintenant, en fait, combien de

  4   documents avez-vous en fait concernant ces différents endroits de façon à

  5   être en mesure en fait de donner une opinion aux Juges de la Chambre de

  6   première instance pour dire que la zone de profondeur aurait dû se situer

  7   entre trois à cinq kilomètres, parce que c'est ce à quoi vous êtes limité

  8   sur ce point ? Ce que j'essaie de dire c'est ceci : une brigade ou qu'elle

  9   soit établie comme il se doit ou si elles ont les effectifs qui devraient,

 10   étant donné le fait qu'un très grand nombre de comptait les officiers de la

 11   JNA, des soldats de carrière, ils devraient savoir tout au moins et je me

 12   serai attendu à ce que vous-même puissiez dire aux membres de la Chambre,

 13   que la profondeur aurait dû être de l'ordre de 15 à 20 kilomètres derrière

 14   la ligne de confrontation.

 15   R.  Oui, si toute la brigade était alignée et utilisée au combat, mais ceci

 16   n'était le cas, jamais.

 17   Q.  Bien, donc hier lorsque vous parliez, vous étiez en train de parler en

 18   théorie, c'est de la théorie s'opposant à ce qui se passait véritablement

 19   R.  [aucune interprétation]

 20   Q.  -- et la tête, cela veut dire -- est-ce que ça veut dire oui ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Bien. Alors je dois avoir cela au compte rendu. Passons au sujet

 23   suivant, à savoir le contrôle ou la direction, parce que vous avez dit hier

 24   encore cette question, du contrôle et de la direction, a été évoquée,

 25   c'était dans votre déposition. Je crois que je l'ai là, à la page 31 du

 26   compte rendu d'hier, il s'agissait d'un sujet qui s'est posé concernant la

 27   direction. Vous avez parlé, vous avez dit, c'est à la ligne 22 :

 28   "Le contrôle ou la direction dans le sens militaire."

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  1   Je voudrais vous parler d'un lieu tel que Mostar.

  2   Lorsque vous avez dit, "contrôle ou direction dans un sens militaire," plus

  3   ou moins, vous avez indiqué que Mostar était la zone de responsabilité du

  4   commandant de Mostar, n'est-ce pas ? Est-ce que je me suis trompé ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Bien. Maintenant alors, vous avez indiqué que si quelqu'un commettait

  7   un crime ou un délit, à ce moment-là, vous vous attendriez à ce que la

  8   police civile agisse en premier, peut-être pour informer le commandant ou

  9   peut-être pour que ça suivre jusqu'à lui, en tous les cas, vous avez vu

 10   quelque chose et le document, ainsi de suite; pourriez-vous nous donner un

 11   chiffre en gros du nombre de ce qui se passait exactement à Mostar

 12   concrètement ?

 13   R.  Je ne peux pas vous le dire car je n'ai pas vu ce genre de document.

 14   J'ai vu surtout les documents de nature juridique et formelle des ordres,

 15   ce genre de chose.

 16   Q.  Il serait juste, juste, je veux dire à votre égard, parce que je ne

 17   veux pas que vous pensiez que je me montre injuste à votre égard, vous avez

 18   donc examiné le document, ceux qui vous ont été fournis ou ceux dans

 19   lesquels vous avez fait des recherches, ceux que vous avez estimé

 20   nécessaires pour le but limité qui vous a été demandé, qui était de rendre

 21   une opinion, n'est-ce pas, basée sur votre mandat ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Maintenant, bien. Je voudrais maintenant vous parler d'un document,

 24   parce que je voudrais qu'on revienne et qu'on établisse un lien avec un

 25   aspect que vous avez évoqué, peut-être que vous pourriez nous aider. Il

 26   s'agit des documents 1D 02006.

 27   M. KARNAVAS : [interprétation] Document de deux ou trois pages -- deux

 28   pages, deux pages, Monsieur le Président. Je crois que tout le monde a une

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  1   copie papier, 1D 002006. Le témoin a besoin d'aide, Monsieur l'Huissier.

  2   Nous allons vous en fournir, 1D 02006.

  3   Q.  Copie papier, c'était dans une langue que vous pouvez comprendre et

  4   c'est dans l'un des classeurs que nous vous avons donnés.

  5   Bien. Jetez un coup d'œil à cela. Je souhaiterais que tout le monde

  6   passe un moment à l'examiner. C'est un document daté du 2 septembre 1993, à

  7   la deuxième page, on voit la signature de Branko Kvesic. Il est le chef ou

  8   semble être le chef de ce qui serait le département de l'Intérieur, tout au

  9   moins d'après l'en-tête, c'est cela qu'on arrive à saisir. Donc c'est le

 10   document que vous n'avez pas vu, n'est-ce pas ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Bien. Alors maintenant si nous le parcourons, je vais prendre un peu de

 13   temps, en commençant par le premier paragraphe, on lit, citation :

 14   "Immédiatement après que les combats aient éclaté contre les forces

 15   armées musulmanes de la ville de Mostar, le 9 mai 1993, et l'ordre" - je

 16   souligne ce mot pour tout le monde - "ordre de l'opération zone sud-est

 17   d'Herzégovine, un certain nombre de membres de la police civile ont été

 18   engagés à la ligne de front."

 19   Alors je m'arrête un instant, je pose la question.

 20   Il semblerait, d'après ce document, quiconque aurait été au

 21   commandement des opérations de cette zone, avait les capacités, les

 22   possibilités à ce moment-là, à cet endroit-là, de donner un ordre pour que

 23   la police civile soit mobilisée et qu'elle soit envoyée à la ligne de

 24   front.

 25   Mme ALABURIC : [interprétation] Une objection, Monsieur le Président.

 26   D'après ce que mon collègue vient de lire, il ne découle pas que le

 27   commandant de la zone opérationnelle pouvait donner l'ordre portant sur la

 28   mobilisation. Mais si la police civile lui était resubordonnée, alors il

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  1   pouvait donner des ordres.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, je ne veux pas

  3   pinailler sur des questions techniques. Mais ceci peut se faire au stade du

  4   contre-interrogatoire ou des questions supplémentaires. Je suis en droit de

  5   mener mon contre-interrogatoire même si c'est dépourvu de sens, du point de

  6   vue de ma consoeur.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  8   M. KARNAVAS : [interprétation]

  9   Q.  Maintenant, à partir du moment où cet ordre est donné, et c'est un

 10   ordre concernant la zone opérationnelle sud-est d'Herzégovine, je vous pose

 11   la question : savez-vous, et vous pourriez dire par oui ou par non, savez-

 12   vous concrètement si le commandant de la zone opérationnelle ou quelqu'un

 13   de la zone opérationnelle avait la capacité, le pouvoir, le droit de donner

 14   un ordre formel à la police civile de se trouver à la ligne de front ? Oui,

 15   non, peut-être, je ne sais pas, ce sont des réponses que vous pourriez me

 16   donner.

 17   R.  Je ne sais pas, je ne saurai vous le dire.

 18   Q.  Bien. Alors poursuivons. Nous allons sauter quelques paragraphes. Nous

 19   voyons quelques paragraphes plus loin, on lit :

 20   "Le 10 juin 1993, nous avons donné un ordre de constituer deux Compagnies

 21  de Police, la 1ère Compagnie, consistant en membres de la police de Mostar -

 22   - du poste de police de Mostar, et la 2e Compagnie étant formée des membres

 23   du poste de police de Capljina, Citluk, Ljubuski, Grude, Posusje, Siroki

 24   Brijeg, Neum, Ravno."

 25   Nous sautons un paragraphe, et ensuite ça dit :

 26   "La 1ère Compagnie de Police, avec un total de 120 membres du poste de

 27   police de Mostar, a été également rejointe par 60 membres qui avaient déjà

 28   été au combat pendant un mois, et ils ont repris la frontière avancé au

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  1   lieu de Ricina, de la rue Ricina, du bâtiment Hit, le bâtiment de verre et

  2   le Park Mali."

  3   On poursuit :

  4  "Le 2e Compagnie de Police a été mobilisée le 30 juin 1993, a été engagée au

  5   combat actif à plusieurs sections du front."

  6   On poursuit au paragraphe suivant :

  7   "En plus d'une compagnie au complet, le poste de police de Mostar a engagé

  8   encore 56 membres aux trois lieux ci-après."

  9   Il les liste :

 10   "Ensuite 18 membres depuis le 10 juillet 1993."

 11   Le texte se poursuit :

 12   "L'Unité de Police spéciale du MUP de Mostar l'administration de la police,

 13   qui comporte actuellement 23 membres, a été placée à l'hôtel Ero, le 9 mai

 14   1993, et tient la ligne de front en accomplissant des tâches de combat à

 15   cet endroit."

 16   Nous sautons encore un paragraphe et nous arrivons à un paragraphe, où il

 17   est dit :

 18   "Gardons à l'esprit que certaines des unités ont été engagées depuis que

 19   les combats ont éclaté dans la ville de Mostar et que nous n'avons pas nos

 20   propres forces ou la capacité de résoudre ce problème, nous-mêmes; il est

 21   compréhensible que le problème concernant la relève des unités doit être

 22   organisée de façon différente et elle doit trouver une solution à long

 23   terme. Nous voulons suggérer que vous demandiez un rapport détaillé du

 24   commandement de la défense de la ville de Mostar concernant ces problèmes

 25   de façon à déterminer quel serait le nombre de soldats et d'unités

 26   nécessaires à la ligne de défense avancée de la ville et de décider d'un

 27   roulement."

 28   On va encore un peu plus haut. Il est dit :

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  1   "L'ensemble de la situation est rendue encore plus difficile par le fait

  2   que plus de 200 policiers sont en train d'assurer matériellement

  3   physiquement la sécurité d'installations dans la seule ville de Mostar,

  4   nous vous avons déjà informé dans notre document numéro tant" - puis il

  5   donne les numéros - "le 19 août 1993. Il est bien connu que le droit public

  6   et l'ordre, et la situation, au point de vue infraction dans notre secteur,

  7   est extrêmement complexe. Des meurtres mystérieux ont lieu, des biens

  8   privés sont volés, le couvre-feu n'est pas respecté. Le droit et l'ordre

  9   public sont violés, et la police civile plus particulièrement est

 10   responsable de tout cela, est en charge de tout cela. Ces problèmes ont été

 11   discutés lors de la session du gouvernement HZ HB, et il a été décidé que

 12   ces tendances doivent être très fortement limités. Avec ce rapport, nous

 13   voulons seulement appeler votre attention sur le fait qu'un certain nombre

 14   de nos policiers sont actuellement engagées dans d'autres tâches et que

 15   nous n'avons pas les forces nécessaires pour entreprendre des tâches

 16   sérieuses dans le domaine de la sécurité."

 17   Le texte se poursuit :

 18   "Et l'ordre de l'état-major général" - donne un numéro - "le 7 août 1993,

 19   nous avons également constitué la 3e Compagnie de Police composée de nos

 20   employés du secteur de PU Travnik, PU et Derventa PU. La compagnie est

 21   engagée dans le secteur de Blidinje, où il effectue toutes les tâches qui

 22   ont été ordonnés. La durée pour laquelle cette unité va être engagée n'est

 23   pas donné dans l'ordre de l'état-major principal du HVO."

 24   Alors, Colonel, ayant examiné ce document avec vous, il semblerait tout au

 25   moins, d'après ce document -- il semblerait,  d'après ce document - moi, je

 26   sais que vous n'étiez pas là et que n'étais pas là moi-même - tout au moins

 27   en se basant sur ce document il semblerait que le militaire est en train de

 28   réquisitionner ou de prendre des ressources importantes pour les autorités

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  1   civiles telle que la police civile. Vous savez, je suis sûr qu'il y avait

  2   bon motif pour cela, mais néanmoins on les prenait on les mettait à la

  3   ligne de front, on les plaçait dans des secteurs qui concernaient les

  4   militaires et non pas pour des objectifs civils. Vous serez d'accord avec

  5   moi sur cela ?

  6   R.  Ma réponse nécessite une certaine explication, à savoir d'après ce que

  7   j'ai vu dans ce document, 200 policiers avaient été engagés dans le cadre

  8   de la sécurisation de ce bâtiment. Ça aussi c'est la tâche de la police

  9   civile. Ensuite, le 3e Compagnie était engagée en profondeur à Blidinje, et

 10   pour autant que je le sache, il n'y avait pas d'Unités du HVO dans cette

 11   région, et c'était eux qui étaient responsables de sécuriser la circulation

 12   dans cette région. Le fait est que la police militaire ne peut être

 13   subordonnée à l'armée dans des conditions normales, et ici, j'ai

 14   l'impression qu'un document manque, document par le biais duquel le

 15   ministère de l'Intérieur, qui est en charge de la police, confie la tâche à

 16   la police, et le commandant militaire, lui-même, n'avait pas le droit à

 17   faire cela.

 18   M. KARNAVAS : [interprétation] On m'a dit qu'il y a une erreur au compte

 19   rendu.

 20   Q.  Vous dites que le fait de marque la police civile ne peut pas être

 21   subordonnée à l'armée. C'est cela que vous nous dites, n'est-ce pas ? C'est

 22   ce que vous avez dit ? Je veux m'assurer du caractère exact de la

 23   transcription.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Vous dites "dans des circonstances normales;" est-ce que l'on pourrait

 26   dire, parce que vous n'avez pas regardé le document, on nous a même pas

 27   invité à le regarder, vous n'avez pas passé le temps là-bas, vous n'êtes

 28   pas vraiment le mieux placé à ce stade pour nous dire s'il s'agissait des

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  1   circonstances normales ou non ? Est-ce que cela n'est pas vrai ?

  2   R.  Je ne saurais pas le dire si les circonstances étaient normales ou

  3   extraordinaires. Je suppose que compte tenu du fait que les combats se

  4   déroulaient à Mostar, les circonstances étaient extraordinaires.

  5   Q.  Très bien. Donc vous ne pouvez pas nous dire avec certitude que les

  6   militaires n'ont pas ordonné à la police civile de se subordonner à eux et

  7   d'aller sur le front; vous ne pouvez pas nous le dire ?

  8   Mme ALABURIC : [aucune interprétation]

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai droit à avoir

 10   une réponse à ma question et j'ai une objection, à ce stade, à ce qui est

 11   des interruptions. Je sais bien que cela fait mal.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite

 13   simplement attirer l'attention sur le fait que Me Karnavas a interprété les

 14   propos de M. Gorjanc comme s'il était un témoin de fait; alors que M.

 15   Gorjanc n'était pas du tout à l'époque en Bosnie, pour nous, ce n'est pas

 16   un témoin de fait.

 17   Il nous donnait son opinion théorique s'agissant des situations

 18   concrètes en Bosnie centrale uniquement sur la base des documents que nous

 19   avons présentés, et je pense qu'il n'est pas acceptable d'essayer de

 20   déstabiliser M. Gorjanc car il n'est pas au courant de certaines choses qui

 21   s'est déroulé en Bosnie centrale, alors là qu'il n'est pas du tout témoin

 22   de fait.

 23   M. KARNAVAS : [interprétation] Est-ce que je peux me permettre de

 24   réagir très rapidement ?

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 26   M. KARNAVAS : [interprétation] On peut dire les deux choses et inverser

 27   l'argument, et dire que lorsque ça nous convient, c'est un expert, et puis

 28   il y a quelques instants lui me donnait des réponses comme s'il était un

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  1   témoin de fait. Regardez les dernières réponses. C'est la raison pour

  2   laquelle je reviendrai mais j'ai dit qu'étant donné qu'il n'y a pas étudié

  3   la situation, pas lu les documents, n'a pas parlé de cela à quiconque, il

  4   ne veut pas, avec une certitude de [imperceptible], nous dire si, à ce

  5   moment-là, les militaires subordonnaient et privaient les autorités civiles

  6   de la police militaire pour l'affecter à des tâches militaires.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Un à la fois. Un à la fois. Il faudrait mettre

  8   l'ordre, ici.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que Me

 10   Karnavas ne devrait pas faire ce genre de remarque car ça fait trois ans et

 11   demi que nous sommes ici et nous nous connaissons bien. Le témoin n'a pas

 12   dit ce genre de chose.

 13   Le témoin n'a jamais, dans aucune partie de son rapport, n'a dit que

 14   quelque chose se passait ou ne se passait pas en Herceg-Bosna. Lorsqu'il

 15   parlait de sujets relatifs à l'Herceg-Bosna, il a été dit très clairement

 16   et nous faisons très attention à cela, pour insister que l'opinion est

 17   fournie sur la base d'un certain nombre de documents. Si quelqu'un dit que

 18   la route n'était pas praticable entre Jablanica et Mostar indiquant un

 19   autre document, le témoin peut donner une autre opinion.

 20   Je souhaite simplement dire que nous avons souhaité que notre témoin

 21   militaire, expert militaire, soit dans la même position que M. Andrew

 22   Pringle, l'expert militaire de l'accusé, c'est-à-dire clairement cette

 23   personne n'était pas en Herceg-Bosna à l'époque, mais il pouvait fournir

 24   ses opinions sur la base des documents et du contexte et théories

 25   militaires.

 26   M. STEWART : [interprétation] Alors, excusez-moi, nous voulions compléter

 27   ce qui a été dit. M. Karnavas, Me Karnavas a dit que le témoin répond comme

 28   s'il était un témoin factuel. Nous invitons Me Karnavas à nous dire

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  1   exactement dans quelles réponses.

  2   M. KARNAVAS : [interprétation] Page 69, lignes 8 à 16. Il a regardé le

  3   document et a donné des réponses factuelles.

  4   M. STEWART : [interprétation] Oui, effectivement, mais cela rapidement.

  5   M. KARNAVAS : [interprétation] Oui, je veux dire à Me Stewart --

  6   M. STEWART : [interprétation] Oui, excusez-moi. Laissez-moi dire quelque

  7   chose. C'est mon objection pour le moment alors asseyez-vous pendant que

  8   j'exprime mon objection. Ensuite je m'assoirai pour que vous répondiez. Je

  9   pense que c'est les règles élémentaires de la courtoisie qui dicte cette

 10   conduite.

 11   J'ai examiné ce document et il est évident que le témoin puise des

 12   informations dans le document et ne donne pas des informations comme un

 13   témoin de fait, il ne dit pas qu'il était là, il ne dit pas qu'il a des

 14   connaissances de première main. Il fait exactement ce que fait tout témoin

 15   expert, après que Me Karnavas lui a lu ce document et lui a fourni des

 16   informations qu'il exprime dans sa réponse. Non, ce n'est pas un témoin des

 17   faits et nous ne disons pas, il n'a pas d'ailleurs passé la limite.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais intervenir et je n'aborde pas le fond,

 19   mais je voulais dire ceci.

 20   Me Karnavas mène son contre-interrogatoire. Donc, il développe par ses

 21   questions ce qu'il pense, lui, et ce que pense M. Prlic du problème police

 22   civile, police militaire, Mostar. Donc, à partir d'un document qui est la

 23   1D 02006, Me Karnavas pose des questions au témoin expert qui n'est pas un

 24   témoin de fait, tout le monde le sait. Laissons faire Me Karnavas.

 25   La procédure permet après à la partie qui fait venir ce témoin de poser des

 26   questions supplémentaires. Attendez tranquillement qu'il ait fini pour

 27   ensuite contre-attaquer, parce que vous faites des objections devant le

 28   témoin qui, lui, peut ou ne peut pas comprendre le problème, et s'il

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  1   comprend, à ce moment-là, comme c'est votre témoin, il va basculer de votre

  2   côté.

  3   Or, je rappelle que c'est le témoin de la justice, maintenant, donc je l'ai

  4   toujours dit. Laissez parler celui qui pose les questions, et

  5   tranquillement après, vous revenez quand il y a des questions

  6   supplémentaires pour corriger ou modifier légèrement ce qu'il a dit en

  7   fonction de la réponse. Là, c'est un problème théorique sur la question de

  8   la police civile, de la police militaire. C'est un sujet que depuis quatre

  9   ans, au minimum, on doit connaître. Donc, il est intéressant de connaître

 10   le point de vue de M. Prlic et de son avocat sur cette question. Laissez-

 11   les faire et puis après, vous verrez. Parce que vous faites des objections,

 12   on perd du temps, alors que ce qui intéresse les Juges et tout le monde,

 13   c'est de savoir, est-ce que la police civile dans une opération militaire

 14   peut être subordonnée ou pas; si elle ne l'est pas, quels sont les pouvoirs

 15   respectifs des uns et des autres.

 16   Voilà. C'est ça qui nous intéresse. On n'est pas dans un conflit, dans un

 17   débat où les uns et les autres sont en train de s'étriper sur un problème

 18   assez élémentaire, qui est de savoir quelle est la compétence de la police

 19   civile ou de la police militaire et peut-être que le témoin peut nous

 20   aider, peut-être.    

 21    Bien. Maître Karnavas, continuez.

 22   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci.

 23   Q.  Colonel --

 24    R.  Monsieur le Président, avec votre permission, je souhaite faire une

 25   petite digression de mon côté.

 26   Je ne me suis pas penché sur les relations à l'intérieur du HVO -- ou

 27   plutôt, entre le HVO et les autorités. C'est la raison pour laquelle je ne

 28   peux pas donner des réponses directes et sur les relations entre la police

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  1   civile et la police militaire. Mais je peux répondre en principe à la

  2   question que vous avez posée, Monsieur le Président, la question de savoir

  3   si l'armée a une juridiction formelle ou autre sur la police civile.

  4   D'après toutes les règles militaires internationales et autres, la réponse

  5   est non; cependant, si quelqu'un dans la chaîne de commandement de la

  6   police donne cet ordre à l'armée, dans ce cas-là, c'est possible, c'est-à-

  7   dire le supérieur dans la chaîne de commandement.

  8   Je vais ajouter quelque chose d'autre. Selon la doctrine de la Défense

  9   populaire généralisée, les forces armées comprenaient toutes les personnes

 10   qui portaient les armes et les policiers étaient, la police était la force

 11   la mieux formée et ils étaient toujours les premiers à se joindre aux rangs

 12   de l'armée, et je parle là de la police civile.

 13   Mais je ne peux pas parler de ce rapport car je ne l'ai jamais vu et

 14   je ne peux pas juger de sa régularité et de sa légalité.

 15   Merci.

 16   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite

 17   simplement indiquer que, tout au long de ce que vous disiez, nous recevions

 18   en croate des propos différents par rapport à ce qui est écrit en anglais

 19   dans le transcript, et le témoin est dans la même situation. S'il écoutait

 20   en croate, il entendait les choses différentes par rapport à l'anglais, car

 21   vous avez dit d'après le compte rendu en anglais que Me Karnavas traitait

 22   de la police civile et militaire et de leurs relations, alors qu'en croate,

 23   il a été dit qu'il était question des relations entre la police civile et

 24   militaire. Or, nous savons que jusqu'à maintenant, ceci n'a pas fait

 25   l'objet du contre-interrogatoire de Me Karnavas.

 26   C'est la raison pour laquelle le témoin a fait la digression qu'il a faite

 27   car il a entendu la même chose que moi.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI :[aucune interprétation]

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  1   M. KARNAVAS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Q.  Monsieur, merci pour cette explication parce que cela me permet de

  3   faire passer mon argument.

  4   Lorsque vous parlez de la Défense généralisée, vous dites qu'en principe,

  5   ce dont vous parlez, vous présentez la manière dont vous avez appris les

  6   choses, comme elles devraient être en ce qui concerne le rapport entre

  7   autorités civiles et militaires en cas d'éclatement d'un conflit; est-ce

  8   que c'est exact ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Lorsque la Yougoslavie a éclaté, lorsque la Slovénie a été

 11   indépendante, vous n'avez pas cessé de réfléchir le lendemain en tant que

 12   colonel slovène avec une doctrine slovène. Vous continuez à réfléchir comme

 13   officier yougoslave, même si vous étiez sous les forces armées slovènes,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Non. Je dois vous dire que j'ai été l'un des auteurs de la doctrine

 16   slovène et j'ai tout de suite commencé --

 17   Q.  Donc dès le lendemain, vous n'aviez plus du tout la mentalité de la

 18   doctrine, tout à coup, vous suiviez la doctrine militaire slovène; est-ce

 19   que c'est cela que vous nous dites ? Parce que mon propos est le suivant,

 20   c'est basé sur vos propres dires. Il aurait été plus facile d'une certaine

 21   manière pour des armées d'être créées, parce qu'ils avaient déjà une série

 22   d'officiers qui étaient déjà formés, un cadre d'officiers qui étaient déjà

 23   formés, des officiers de la JNA. Je vous soumets la chose suivante, lors de

 24   l'éclatement de la Yougoslavie, ils n'ont pas tout à coup, du jour au

 25   lendemain cessé de penser comme officiers de la JNA. Peut-être ont-ils

 26   d'une certaine mesure improviser au vu de la situation, mais c'est la

 27   doctrine que vous nous avez présentée depuis deux jours, qu'ils

 28   utilisaient, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Je peux vous répondre comme ceci, nous avons envisagé les choses

  2   conformément aux règles internationales de la guerre. La doctrine c'est une

  3   chose, mais des règles englobent la doctrine, lorsqu'il s'agit d'utiliser

  4   l'armée.

  5   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes : peut-on demander à Me Karnavas de

  6   parler en direction de son micro, dans son micro ?

  7   M. KARNAVAS : [interprétation]

  8   Q.  Je vais conclure ici, lorsqu'on vous a demandé de faire ce rapport, et

  9   il s'agit surtout de théorie basée sur la JNA et défense généralisée, on ne

 10   vous a pas demandé de passer en revue des documents susceptibles d'être

 11   importants pour comprendre ce qui s'est passé sur le terrain; est-ce que ce

 12   n'est pas un fait ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Lorsque vous dites que, dans des circonstances normales dans votre

 15   réponse précédente, vous dites, lorsque vous dites des circonstances

 16   normales, vous dites que c'est ainsi que les choses devront être, parce que

 17   c'est ainsi qu'on vous l'a enseigné, et c'est de jure tout au moins la

 18   manière dont les militaires sont censés se conduire vis-à-vis des civils,

 19   des autorités civiles, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Or, je pense que l'on peut dire, sans crainte de se tromper, qu'il ne

 22   s'agit pas de circonstances normales, il s'agit d'une guerre civile dans

 23   l'une des Républiques de l'ancienne Yougoslavie, toute sorte de choses se

 24   produisent, que les différentes ou auxquelles les différentes parties

 25   n'étaient pas nécessairement préparées; est-ce que ce n'est pas exact ?

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   Q.  Très bien. Ici et maintenant, vous ne pouvez donc pas nous dire avec

 28   une certitude en tant qu'expert militaire, si parfois les militaires selon

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  1   les circonstances, selon les endroits, ont pu agir en deçà de leur autorité

  2   juridique, et s'être arrogés des pouvoirs ou des moyens ou ressources qui

  3   auraient dû être placés sous le contrôle des autorités civiles, n'est-ce

  4   pas ?

  5   R.  Je ne peux pas vous le dire, cela.

  6   Q.  Au même titre que vous ne saviez pas qu'il y avait un procureur

  7   militaire ou un parquet militaire qui travaille à l'époque ?

  8   R.  Je ne le savais pas.

  9   M. KARNAVAS : [interprétation] Sur ce, je vous remercie d'être venu ici

 10   pour déposer. Je n'ai plus de questions, Messieurs les Juges.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Mais il serait peut-être temps de faire la

 12   pause, puisqu'on est arrivé à l'heure. Donc nous allons faire une pause de

 13   20 minutes, et puis après, l'on continuera avec les autres Défenses.

 14   --- L'audience est suspendue à 12 heures 24.

 15   --- L'audience est reprise à 12 heures 49.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors l'audience est reprise.

 17   On avait terminé avec D1. On va passer à D2, Maître Nozica.

 18   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à

 19   tous dans le prétoire.

 20   La Défense de M. Stojic n'a pas de contre-interrogatoire pour ce témoin

 21   expert.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors le cas de D3 était réglé, D4.

 23   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Nous sommes D5, en réalité, mais

 24   nous n'avons pas de questions.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : D4 est intervenu, D5. Alors, D6.

 26   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Pas de questions, Monsieur le Président.

 27   Je vous remercie.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors c'est le tour de l'Accusation mais,

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  1   avant ça, je voudrais poser une question au témoin. Mais peut-être mon

  2   collègue a --

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Non, ma question est tout à fait

  4   technique.

  5   La question de M. Ibrisimovic n'a pas été été consignée au compte rendu

  6   d'audience. Je pense que ce que vous avez dit, c'est que vous n'aviez pas

  7   de questions, Maître Ibrisimovic ?

  8   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] C'est exact. Je n'ai pas de questions. Je

  9   vous remercie.

 10   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une question par rapport à un

 12   moment donné, vous aviez parlé de Stalingrad. Est-ce que, dans les études

 13   militaires que vous avez faites, dans les cours que vous avez reçus ou

 14   peut-être dans les cours que vous donniez, la question de Stalingrad, vous

 15   la connaissez plus ou moins bien ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que je connais la chose.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous connaissez la chose. Vous savez qu'à

 18   Stalingrad, en 1942, il y avait trois lignes de défense et puis aux

 19   environs du 17 juillet 1942 - pourquoi je vous dis le 17 juillet, parce que

 20   c'est quatre jours après ma date de naissance, donc c'est une date que je

 21   connais - le 17 juillet 1942, il y a eu une quatrième ligne de défense, et

 22   Stalingrad était tenue par les Russes, par la 57e et 58e armée soviétique.

 23   Pour cette quatrième ligne de défense, ils avaient utilisé 160 000 civils,

 24   qui avaient travaillé pour renforcer les défenses, avant que l'armée

 25   allemande, dirigée par von Paulus, attaque ces deux armées soviétiques. 

 26   Alors, j'en viens à notre cas. Nous avons appris que parfois, on renforçait

 27   les lignes, on faisait travailler des personnes pour creuser des tranchées

 28   ou pour s'activer dans la ligne de défense. Alors, d'après l'enseignement

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  1   que vous avez eu, est-il possible d'utiliser des civils comme l'ont fait

  2   les Soviétiques à Stalingrad, pour renforcer les lignes de défense ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après les points de vue qui étaient ceux de

  4   l'ex-Yougoslavie, cela était la tâche des unités ayant une obligation de

  5   travail et qui ont été affectés à des missions particulières; cependant,

  6   jamais on avait prévu leur utilisation pendant les activités de combat.

  7   Pour autant que je le sache, à Stalingrad, on les avait utilisées, parfois

  8   même lors des combats.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, vous dites qu'on peut utiliser des

 10   civils hors activités de combat. Très bien. Je note ce que vous venez de

 11   dire.

 12   Mais quand vous avez une ligne de front où il ne se passe rien, sauf de

 13   temps et temps où il y a des tirs, on ne sait pas d'où ça vient; est-ce

 14   que, pour vous en termes militaires, c'est une zone de combat interdisant

 15   l'emploi de civils, ou bien si le front est calme, on peut renforcer la

 16   défense en utilisant des personnes non militaires pour creuser, déblayer,

 17   je ne sais quoi ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] En principe, on ne devrait pas le faire pour

 19   ce qui est de la première ligne de front.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors vous dites : pour la première ligne, on

 21   ne peut pas, mais est-ce à dire que, pour les lignes plus en retrait, c'est

 22   possible ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Plus en profondeur, oui, notamment si les

 24   lignes en question ne sont pas occupées par des unités et si les unités

 25   sont censées arriver plus tard, là, on peut utiliser une main-d'œuvre de

 26   civils et des machines du génie appartenant à des civils.

 27   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Je voulais simplement dire, aux fins du compte rendu, que lors de la

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  1   Deuxième Guerre mondiale, l'Union soviétique n'était pas signataire de

  2   certaines des conventions de Genève, notamment la convention numéro 1.

  3   Deuxièmement, la quatrième convention de Genève sur la population civile

  4   n'avait pas encore été adoptée. Comme vous le savez, et nous le savons

  5   tous, elle n'a été adoptée qu'en 1949. Merci.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Kovacic.

  7   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai l'impression

  8   qu'il y a une erreur assez sérieuse, assez grave, ligne 23 du compte rendu.

  9   Donc, c'est encore sur notre écran.

 10   En répondant à votre question, le témoin a répondu :

 11   "Plus en retrait, oui, à moins que les lignes ne soient prises par des

 12   unités ou occupées par des unités ou des lignes ou des unités étaient

 13   censées arriver."

 14   Il n'a pas dit "unless;" il a dit "en particulier." Donc, il faudrait

 15   utiliser le mot "especially" en langue anglaise, si ces lignes ne sont pas

 16   employées ou occupées par des unités. Ça change complètement le sens.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, dans la formation que vous avez

 18   eue ou peut-être dans les cours que vous donnez actuellement, concernant

 19   les prisonniers de guerre, d'après vous, d'après l'enseignement que vous

 20   avez eu, d'après les textes en vigueur à l'époque en Yougoslavie, voire les

 21   textes en vigueur en Slovénie, peut-on utiliser un prisonnier de guerre

 22   pour des travaux ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Les prisonniers de guerre, dans un rang de

 24   soldats, peuvent être utilisés pour des travaux mais non pas sur le théâtre

 25   des combats. Les prisonniers de guerre du rang d'officier ne peuvent pas

 26   être utilisés pour faire des travaux, à moins qu'ils ne se portent

 27   volontaires.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, vous nous dites que des -- pour de

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  1   guerre qui sont simples soldats peuvent être utilisés à des travaux, mais

  2   pas sur la ligne de front; en revanche, on ne peut pas utiliser des

  3   officiers, à moins qu'ils soient volontaires. Doit-on déduire de ce que

  4   vous nous dites, Monsieur le Témoin expert, que l'emploi de prisonniers de

  5   guerre est possible, mais à la condition qu'ils ne soient pas sur la ligne

  6   de front et qu'ils ne soient pas exposés à un danger ? Est-ce cela que vous

  7   voulez nous dire ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Ceci était enseigné dans les Académies militaires en

 10   Yougoslavie ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que c'est toujours enseigné, actuellement ? 

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça, je ne pourrais pas vous le dire parce que

 14   j'ai quitté l'enseignement dans l'armée depuis dix ans.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais --

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] M. le Président parle en anglais.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Est-ce que ça marche ? Bien, ça marche

 18   maintenant.

 19   Alors, je répète.

 20   Monsieur le Témoin expert, ce que je voulais avoir c'est ce qui était

 21   enseigné dans les Académies militaires en Yougoslavie, notamment sur

 22   certains sujets dont l'emploi des prisonniers de guerre ? Je vais terminer

 23   ma question. Tout à l'heure, c'est Me Karnavas qui vous a posé la question

 24   et puis ceci est revenu à plusieurs reprises. Il semblerait que, d'après la

 25   formation que vous aviez eue, vous étiez vous-même destiné à occuper les

 26   grades les plus élevés de l'armée yougoslave, voire terminer général, s'il

 27   n'y avait pas eu tous ces événements; est-ce vrai ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

Page 46208

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc si je comprends bien, vous avez eu la

  2   meilleure formation militaire possible dans un pays qui n'était pas dans le

  3   pacte de Varsovie, mais qui d'après certains experts militaires, était

  4   peut-être la deuxième force armée au monde.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que j'en sais, à un moment donné,

  6   c'était la quatrième armée en Europe, d'après le nombre des conscrits

  7   consignés pour ce qui est de leur déploiement dans les unités mais pas de

  8   par la puissance de feu actuel.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

 10   L'INTERPRÈTE : Votre micro, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse est donc au transcript.

 12   Bien, Madame le Procureur, je vous salue également à nouveau et je vais

 13   donc vous céder la parole pour le début de votre contre-interrogatoire,

 14   étant précisé que la Chambre a donné au bureau du Procureur six heures.

 15   Mme WEST : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs les

 16   Juges, Maître Alaburic.

 17   Contre-interrogatoire par Mme West :

 18   Q.  [interprétation] Avant de poursuivre, je voudrais avant que nous

 19   regardions votre rapport, je voudrais être sûre qu'on puisse savoir quelle

 20   était la méthode que vous avez suivie pour rédiger votre rapport. Avez-vous

 21   votre rapport devant vous ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Dans le paragraphe premier de votre rapport vous avez écrit qu'on vous

 24   avait dit que vous n'étiez pas censé produire un rapport d'expert de

 25   caractère factuel, mais une opinion d'expert vous serait demandé concernant

 26   certains événements :

 27   "En partant de l'hypothèse que les renseignements qui étaient

 28   contenus dans les documents qui vous seraient montrés, qui me serait

Page 46209

  1   montré" - dites-vous - "seraient exacts."

  2   Alors ma question c'est : dans votre rapport, est-ce que vous relevé dans

  3   le corps de votre rapport, quels étaient les documents qui vous ont été

  4   présentés, montrés ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  La raison pour laquelle je demande, c'est que si on regarde depuis la

  7   première page jusqu'à environ la page 25, et il s'agit d'une partie de

  8   votre rapport dans lequel vous parlez d'une armée de temps de guerre, en

  9   temps de guerre, cette partie de ce rapport que je n'ai vu que deux ou

 10   trois notes de bas de page; est-ce que c'est parce que vous vous êtes

 11   seulement référé à trois sources ?

 12   R.  Là, je fais référence pour l'essentiel à mes connaissances qui

 13   découlent de ma formation ayant duré de longues années durant justement

 14   dans les écoles militaires. Pas sur les documents particuliers. C'est une

 15   partie qui est de caractère générale.

 16   Q.  Bien. Nous devons donc comprendre que à tout endroit dans ce rapport où

 17   il n'y a pas de note de bas de page, la source de vos connaissances est

 18   tirée de votre expérience et de votre formation ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Serait-il également exact de dire que l'un quelconque des documents sur

 21   lesquels vous avez fondé votre rapport, font tous l'objet de notes de bas

 22   de page dans votre rapport ?

 23   R.  [aucune interprétation]

 24   Q.  Très bien. Au nombre de questions que je vais vous poser aujourd'hui ou

 25   demain, se fondent sur le même système, la même technique, je vais vous

 26   montrer un document, je veux que vous supposiez qu'il est véridique, il est

 27   exact, et il serait très probablement que vous n'avez jamais vu ce document

 28   précédemment. Je voudrais que vous supposiez qu'il est exact, et je ferai

Page 46210

  1   suivre ça par une question à ce sujet. Mais avant qu'on en soit là, je vais

  2   vous poser quelques questions de caractère général maintenant.

  3   Maintenant, je comprends qu'au cours de ces événements, tout au moins en

  4   1991, vous aviez rejoint l'armée slovène, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Mais néanmoins, de 1991 à 1995, vous étiez au courant des événements

  7   qui se déroulaient dans l'ex-Yougoslavie, en d'autres lieux que la

  8   Slovénie, n'est-ce pas ?

  9   R.  J'ai suivi cela pour des raisons personnelles.

 10   Q.  Donc, par exemple, est-ce que vous étiez au courant du fait que la

 11   République de Bosnie-Herzégovine avait été reconnu par le Communauté

 12   européenne comme un Etat indépendant en avril 1992 ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Etiez-vous également au courant du fait qu'on avait admis -- que ce

 15   pays avait été admis comme membre des Nations Unies en mai 1992 ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Etiez-vous au courant du fait qu'en novembre 1991, la Communauté croate

 18   d'Herceg-Bosna a proclamé son existence ?

 19   Là, je cite :

 20   "En tant qu'ensemble, politique, culturel, économique, et territorial sur

 21   le territoire de la Bosnie-Herzégovine" ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Plus tard, peut-être moins d'un an plus tard, au mois d'août 1993, que

 24   cette entité ensuite s'est déclarée être la République croate d'Herceg-

 25   Bosna ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Monsieur Gorjanc, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que ni la

 28   Communauté croate d'Herceg-Bosna ni la République de l'Herceg-Bosna n'a

Page 46211

  1   jamais été reconnue par la République de Bosnie-Herzégovine ou par la

  2   communauté internationale en tant qu'Etat ?

  3   R.  [aucune interprétation]

  4   Q.  Etes-vous d'accord qu'à compter d'avril 1992, l'armée -- l'ABiH, de

  5   l'armée de Bosnie-Herzégovine, était l'armée, les forces armées de la

  6   République de Bosnie-Herzégovine ?

  7   R.  Une partie seulement de la République de Bosnie-Herzégovine. Parce que

  8   les Serbes eux avaient leur armée, celle de la Republika Srpska.

  9   Q.  Nous allons y venir. Je vais vous demander de regarder le deuxième

 10   classeur. Vous avez deux classeurs devant vous. Le premier c'est le plus

 11   gros. Les deux -- le premier. Le deuxième c'est celui qui est moins épais.

 12   Vous l'avez. C'est le bon classeur. Donc allez-y, vous pouvez l'ouvrir.

 13   Regardez, s'il vous plaît, P 09276, et je crois que c'est le tout premier

 14   document devant vous, C'est une carte.

 15   Bien. Etes-vous d'accord avec moi qu'en décembre 1990, à la suite des

 16   élections, la zone que vous voyez sur cette carte, zone qui a une ligne --

 17   un périmètre en rouge a été nommé "Bosnie-Herzégovine," et que toute cette

 18   partie de ce secteur appartenait à la République de la Bosnie-Herzégovine ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Maintenant parlons d'un an plus tard, en décembre 1991, cette zone est

 21   bien restée la même, cette zone en rouge était restée exactement la même,

 22   n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Allons un peu plus loin maintenant, mai 1992, ceci c'est après que

 25   l'Herzégovine soit devenue un état indépendant, et également un membre,

 26   état membre des Nations Unies, cette ligne rouge que l'on peut voir est la

 27   frontière reconnue au niveau international de l'ABiH ?

 28   R.  Oui.

Page 46212

  1   Q.  Très bien. Ensuite à partir de cette période jusqu'à environ la mi-mai

  2   1994, la moitié de l'année, ce secteur à l'intérieur de la partie rouge

  3   devient le territoire souverain de l'état de Bosnie-Herzégovine ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Maintenant, de même, à l'époque où elle est devenue un état membre,

  6   reconnue au niveau international, en même temps; est-ce que vous seriez

  7   d'accord avec moi que le gouvernement de la Bosnie-Herzégovine était basé

  8   tout au moins essentiellement à Sarajevo ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Je voudrais maintenant que vous regardiez le document P 00--

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Je voudrais rester sur la carte, mais pour une

 12   autre.

 13   Monsieur le Témoin, vous avez la carte sous les yeux, je vois sur cette

 14   carte votre pays, la Slovénie. Je vois qu'entre la Bosnie et la Slavonie,

 15   il y a la Croatie et Zagreb. Dans les années 1990, 1980, 1990, les

 16   étudiants slovènes qui étaient à proximité de la frontière; est-ce qu'ils

 17   faisaient leurs études à Zagreb ou à Ljubljana ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour l'essentiel à Ljubljana, mais il y a eu

 19   des cas d'étudiants faisant leurs études à Zagreb.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Ceux qui habitaient près de la frontière, je

 21   parle dans l'ex-Yougoslavie, avant les années 1990, quelle était la

 22   tendance naturelle, à faire des études dans une grande ville, Zagreb, par

 23   exemple, ou bien faire des études en raison de critères républicains, à

 24   savoir on a la République socialiste de la Slovénie, donc on reste en

 25   Slovénie, ou bien on ne se posait pas ce problème et on faisait des études

 26   soit Zagreb, soit Belgrade, soit Sarajevo; est-ce qu'il y avait dans le

 27   choix des étudiants, une connotation ethnique ou bien on faisait des études

 28   où il était intéressant de faire des études ?

Page 46213

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Les étudiants pour l'essentiel faisaient leurs

  2   études à Ljubljana, du fait de cette barrière linguistique qu'il y avait

  3   entre la Slovénie et la Croatie. Etant donné que la totalité de ces

  4   étudiants en ont fait des études secondaires en Slovénie, en langue

  5   slovène. On faisait ces études à Zagreb ou à Belgrade pour ce qui est de

  6   Sarajevo, je n'ai pas eu connaissance de Slovène ayant fait leurs études

  7   là-bas. Ils allaient à des facultés notamment celles qui n'existaient pas

  8   en Slovénie, pour certains profils, pour certains types de cadre.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors pourquoi je vous pose cette question. Parce

 10   qu'on nous a dit, c'est le général Praljak, qui nous avait dit cela, que

 11   des étudiants qui étaient à Mostar, ils allaient faire des études en

 12   Croatie et c'était plus naturel d'aller faire des études en Croatie qu'à

 13   Sarajevo. Alors, moi, j'essayais de vérifier ce qu'il m'a dit au travers de

 14   votre exemple slovène. Donc, si je comprends bien, vous, vous me dites que

 15   le facteur langue était important, et que donc du fait que certains

 16   utilisaient la langue slovène, ils avaient peut-être plus de difficulté à

 17   aller ailleurs, d'où la raison pour laquelle ils allaient faire leurs

 18   études à Ljubljana. C'est ça que je dois comprendre ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci pour cette précision, une question qui pouvait

 21   échapper à beaucoup, mais j'ai expliqué pourquoi j'ai posé la question.

 22   Mme WEST : [interprétation]

 23   Q.  Pourriez-vous regarder maintenant le deuxième classeur, Monsieur le

 24   Témoin, le P 00476, c'est le troisième document. Je crois que vous l'avez

 25   là.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous vous trompez, Madame le Procureur, c'est le

 27   document, c'est dans le classeur numéro 1, c'est le troisième document du

 28   classeur numéro 1, bien.

Page 46214

  1   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Si tout le monde a trouvé, c'est le P 00476, document qui correspond à la

  3   même période, septembre 1992, décision de la cour constitutionnelle de

  4   l'ABiH.

  5   Q.  Dans ce document, on analyse un événement sur lequel vous avez déjà

  6   fait des commentaires, à savoir la création de la Communauté croate de la

  7   Herceg-Bosna, en novembre 1991. Si vous pouvez le voir, c'est le chiffre 1,

  8   et on a examiné également, si on regarde le chiffre 5, le décrit relatif

  9   aux forces armées de la Communauté croate d'Herceg-Bosna, entre autres

 10   documents. A la toute dernière page de ce document, la cour

 11   constitutionnelle rend un avis, et cet avis c'est que les documents

 12   contestés ne sont pas conformes à la constitution et au droit.

 13   Alors, Monsieur Gorjanc, est-ce qu'il s'ensuit qu'ici la cour

 14   constitutionnelle a déclaré que l'Herceg-Bosna et son armée étaient

 15   illégales ?

 16   R.  Ce qui découle de ceci, oui, c'est le cas.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si possible je

 18   voudrais qu'il soit consigné une objection quant à cette question.

 19   Parce que le fait d'avoir annulé le décret régissant les forces armées ne

 20   permet pas de tirer une conclusion qui serait celle de supprimer

 21   l'existence ou de supprimer cette armée du HVO. Enfin je voudrais que ce

 22   soit consigné, j'espère que ma consoeur en tiendra compte.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame le Procureur, continuez.

 24   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 25   Q.  Monsieur Gorjanc, vous êtes d'accord avec moi que s'agissant de la

 26   doctrine militaire, c'était bien la doctrine de la défense généralisée de

 27   tous les peuples, ceci était pour l'essentiel dans l'esprit des

 28   belligérants de la guerre croate-musulmane.

Page 46215

  1   R.  Oui.

  2   Q.  En l'occurrence, c'est bien la conclusion à laquelle vous parvenez dans

  3   cette partie de votre rapport ?

  4   R. [aucune interprétation]

  5   Q.  Au paragraphe 40 de votre rapport, ce n'est pas la peine de vous y

  6   reporter, vous pouvez juste me dire si c'est exact, vous avez écrit :

  7   "De façon à mieux comprendre d'une façon plus complète les événements de la

  8   guerre en ex-Yougoslavie, tout particulièrement en Bosnie-Herzégovine, il

  9   est nécessaire de bien connaître les lois et autres règlements," - ou, plus

 10   directement - "a pratique des forces armées de la SFR de la Yougoslavie,

 11   sur laquelle elles sont fondées."

 12   Donc en ce qui nous concerne, vous seriez d'accord qu'une grande partie de

 13   leur propre doctrine - vous le savez, nous allons l'appliquer ici aux faits

 14   - le HVO et l'ABiH, à votre avis, basaient une grande partie de leur propre

 15   pratique sur la doctrine de la SFEY  ? Par exemple, au paragraphe 104 de

 16   votre rapport, il s'agit de cette partie de votre rapport où vous parlez de

 17   l'application de la Défense généralisée de tous les peuples, vous citez en

 18   l'occurrence la constitution BiH et notez que cette partie de la

 19   constitution BiH a en fait été reprise de la constitution de la RSFY,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Dans votre rapport, vous notez un certain nombre de points concernant

 23   la mise en œuvre par l'ABiH de la doctrine de la RSFY, qu'il s'agisse de la

 24   Défense généralisée ou d'une autre doctrine. Donc, est-ce qu'à votre avis

 25   et pour être bien au clair, vous pensez que le HVO aussi a adopté la

 26   doctrine de la RSFY ?

 27   R.  En bonne partie.

 28   Q.  Il y a certains domaines dans lesquels le HVO n'a pas adopté cette

Page 46216

  1   doctrine de l'ancienne Yougoslavie.

  2   R.  Oui, il y en a. Il y a des parties, oui.

  3   Q.  Mais plus précisément, nous parlons de la doctrine militaire. Est-ce

  4   que vous pourriez nous dire en termes généraux quels sont ces domaines ?

  5   R.  Voyez-vous, je n'ai pas étudié dans ce détail-là la doctrine du HVO.

  6   J'aurais du mal à vous le dire en ce moment-ci. Toutefois, ce que j'en sais

  7   et ce, de façon générale, les rapports au sein du HVO n'étaient pas tout à

  8   fait conformes, ils n'ont pas été repris de la doctrine yougoslave, en

  9   particulier pour ce qui est du relationnel entre le commandement Suprême,

 10   le ministère de la Défense et l'état-major.

 11   Q.  Seriez-vous d'accord avec moi que le HVO a adopté la doctrine du fait

 12   qu'il fallait respecter et appliquer les lois au niveau international sur

 13   la guerre des conventions de Genève et ses protocoles additionnels ?

 14   R.  [aucune interprétation]

 15   Q.  Merci.

 16   M. STEWART : [interprétation] Si nous regardons maintenant le document P0

 17   5496, je crois que c'est dans le classeur que vous êtes en train de

 18   regarder maintenant. Donc, le P0 5496. Oui. Allons-y. C'est un document du

 19   HVO. C'est le journal officiel de la Communauté croate d'Herceg-Bosna et

 20   c'est la déclaration relative à l'adoption de documents concernant la

 21   protection et l'exercice de libertés et des droits humains. Plus

 22   particulièrement, je vais vous prier de vous intéresser au point 3, où il y

 23   a la liste des conventions de Genève I à IV et les protocoles additionnels

 24   de 1977.

 25   Monsieur Gorjanc, ceci ne vous surprend, n'est-ce pas, que le HVO ait

 26   adopté ces règlements en temps de guerre ?

 27   R.  [aucune interprétation]

 28   M. STEWART : [interprétation] Pourrait-on maintenant voir le deuxième

Page 46217

  1   classeur, 1D 02447. 1D 02447. Je vous remercie.

  2   Q.  Jetons donc un coup d'œil à ce document. Il est daté du 22 mai 1992. Il

  3   s'agit d'un accord qui a été signé par certains contractants, certaines

  4   parties. C'était à l'invitation de la Croix-Rouge et à l'intérieur, ici,

  5   les parties ont discuté de l'application du droit international

  6   humanitaire. Si vous avez parcouru ces documents, vous regardez la page 2,

  7   il est question de principes généraux et tout en haut de la page, on dit,

  8   on parle des conventions de Genève. Si nous allons à la troisième page,

  9   elle parle également au point 2.3 d'une population civile et de la

 10   convention qui sera appliquée. Si vous allez à la page suivante, 2.4, il

 11   est question de la troisième convention de Genève et ainsi de suite. Mais

 12   la toute dernière page montre les signatures des différentes parties qui

 13   étaient présentes, donc ils représentaient la communauté démocratique

 14   croate.

 15   Vous serez d'accord avec moi que ceci serait un exemple de ce dont nous

 16   avons déjà parlé et de cela, vous n'êtes pas surpris que des parties aient

 17   adopté des conventions concernant les lois de la guerre, le droit

 18   international ?

 19   R.  Non, effectivement.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin expert, depuis que vous

 21   témoignez, bien souvent on a parlé de conventions de Genève, et puis on a

 22   vu des documents et Mme la Procureur vous montre également des documents.

 23   Je voudrais savoir, compte tenu de votre expérience, dans le souvenir que

 24   vous pouvez avoir, dans la JNA, est-ce qu'aux soldats, on leur expliquait

 25   les conventions de Genève ? Parce que je vous pose cette question à partir

 26   de mon cas personnel quand j'ai fait mon service militaire dans l'armée

 27   française, je me souviens pas qu'on nous ait parlé des conventions de

 28   Genève.

Page 46218

  1   Alors je voulais savoir si dans votre pays, quand les soldats arrivaient,

  2   est-ce qu'on leur parlait de conventions de Genève ? On leur disait, Voilà

  3   ce qu'il y a ou bien, on leur disait simplement, Quand on fait un

  4   prisonnier, on ne le tue pas. Pouvez-vous nous expliquer comment ça se

  5   passait concrètement ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le cadre du plan d'enseignement ou

  7   l'entraînement des recrues, des soldats qui font leur service militaire et

  8   dans le cadre des règlements militaires, une heure a été consacrée aux

  9   conventions de Genève. C'était d'habitude le commandant du peloton ou de la

 10   compagnie qui tenait cette conférence, et c'était seulement par la suite,

 11   au mi des années 1980 que des livres, des petits livres ont été distribués

 12   aux soldats avec les principes de base de l'application des conventions de

 13   Genève.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, vous nous dites qu'il y avait dans la

 15   formation du soldat de base une heure de conférence et puis après, on leur

 16   donnait un petit livret. Bien.

 17   D'après la documentation que vous avez eue, est-ce que vous avez vérifié

 18   qu'au niveau du HVO, on faisait pareil ou pas ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais vous le dire car je n'ai pas eu

 20   accès au plan d'enseignement et de formation de recrues.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous-même, vous avez rejoint l'armée slovène

 22   de la jeune république, en gestation; est-ce qu'immédiatement, on

 23   enseignait aux soldats slovènes ? Une heure ou plus sur les conventions de

 24   Genève ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Et tant que chef du département chargé de la

 26   Formation et de l'Entraînement auprès du quartier général principal de la

 27   république, j'étais l'un des auteurs du programme qui prévoyait trois

 28   heures de formation dans ce contexte-là. C'est seulement par la suite, en

Page 46219

  1   1994 je crois, que ces genres de livrets ont été distribués à tous les

  2   soldats qui faisaient leur service militaire, et aujourd'hui quant aux

  3   soldats professionnels pour autant que je le sache ils reçoivent cela

  4   directement et ils sont tenus de lire d'autres publications internationaux

  5   à ce sujet-là.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour quelle raison en République de Slovénie vous

  7   avez triplé le temps de la formation ? Vous m'avez dit, dans la JNA,

  8   c'était une heure. Mais pourquoi vous, vous avez estimé nécessaire de

  9   passer à trois heures de formation sur les conventions de Genève ? Vous

 10   avez une raison ou bien c'est parce que vous estimez que c'était très

 11   important ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] L'une des raisons de base résidait dans le

 13   fait que nous souhaitions, dès le début, nous rallier aux intégrations

 14   internationo-militaires avant tout, le Partenariat pour la paix et l'OTAN,

 15   et c'est la raison pour laquelle, même avant d'avoir intégré formellement

 16   ces organisations, nous avons repris les mêmes normes.

 17   Deuxièmement, compte tenu du fait que nos soldats savaient ce qui

 18   s'était déroulé en ex-Yougoslavie nous avons consacré plus d'attention à ce

 19   sujet-là.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 21   Mme WEST : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Gorjanc, examinons votre rapport, notamment la question vous

 23   parliez de la Défense généralisée. Paragraphes 40 à 130.

 24   La conclusion la plus brève, se trouve au paragraphe 113, vous indiquez que

 25   :

 26   "Dans la pratique, la totalité de la population servait aux fins du combat

 27   armé."

 28   Donc, Monsieur Gorjanc, à la lumière de votre analyse du conflit en ex-

Page 46220

  1   Yougoslavie, et personne n'était un civil vu sous l'angle de la Défense

  2   généralisée; est-ce que c'est exact ?

  3   R.  Plus ou moins, c'est exact. Seul les enfants n'étaient pas les soldats.

  4   Q.  Exception ce sont les enfants, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que vous pouvez me dire l'âge à partir duquel ou auquel on les

  7   considérait comme un enfant ?

  8   R.  Du point de vue juridique, ce sont les enfants allant jusqu'à 16 ans,

  9   d'après donc la législation. Mais, à travers la pratique et la propagande,

 10   parfois les enfants plus jeunes âgés de 12 à 16 ans étaient englobés aussi.

 11   Dans une certaine forme de leur résistance pas la résistance armée mais

 12   dans le sens d'infliger les dégâts à la partie adverse.

 13   Q.  Donc par application, lorsque le HVO arrêtait et détenait les

 14   personnes, les isolait, qu'il s'agisse d'un soldat sur le terrain avec un

 15   son fusil ou, une femme de 20 ans dans son domicile, à votre sens

 16   l'arrestation était justifiée au titre de la Défense généralisée ?

 17   R.  C'était justifié.

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je voulais compléter votre question

 20   et obtenir réponse à la question suivante le -- des personnes âgées. N'a-t-

 21   il pas une limite d'âge pour lequel même les hommes qui dépassent cette

 22   limite ne sont plus considérés comme des militaires, donc pourraient

 23   devenir des civils ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Les personnes âgées de plus de 65 ans,

 25   sur le plan formel et juridique, étaient considérées comme des civils;

 26   cependant, certains d'entre eux participaient à la résistance.

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin expert, dans mon souvenir il me semble qu'ici

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  1   à un moment donné il y a eu un témoin où une question a été posée, qui

  2   concernait l'école. J'ai cru comprendre que du temps de l'ex-Yougoslavie,

  3   pendant les cours à l'école, l'école primaire, ou voire l'école secondaire,

  4   il y avait de temps en temps des cours de nature militaire; ou sensibiliser

  5   les écoliers ou les étudiants à la chose militaire. Est-ce que vous nous

  6   confirmez cela ? Dans ce que vous avez, vous, connu en Slovénie, est-ce que

  7   pendant quand vous étiez enfant, est-ce que de temps en temps il y avait

  8   des réunions où on vous parlait de l'armée, on vous donnait un fusil en

  9   bois, on vous faisait défiler ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant que j'étais au lycée, pendant la

 11   septième et la huitième classe du lycée, j'avais entre le sujet appelé :

 12   "La formation prémilitaire," et entre autres choses, on étudiait

 13   l'utilisation des armes. Par la suite, le programme a changé, et le sujet

 14   s'appelait la "Défense et la Protection." Ceci englobait de sujet plus

 15   général théorique. S'agissant de toutes les facultés, il était nécessaire

 16   de suivre aussi les cours en matière du sujet, portant le nom de : "La

 17   Défense et de la Protection," mais il n'y avait pas de formation pratique,

 18   d'entraînement pratique.

 19   Ensuite, vers le milieu des années 70, nous avons remarqué -- ou plutôt, il

 20   était remarqué au plus haut niveau que nos jeunes qui partaient faire leurs

 21   études qui durent environ cinq à six ans, ne sont pas formés pour mener des

 22   combats, c'est la raison pour laquelle nous avons organisé des camps

 23   d'entraînement pendant deux semaines pour tous les étudiants après la

 24   premier années d'étude, et c'est là qu'ils ont reçu une formation de base

 25   approfondie à titre individuel.

 26   Ensuite, une fois par an au niveau de l'organisation du travail, de

 27   l'école, de la commune locale, de la municipalité, et même au niveau de la

 28   république, mais pas l'ensemble de la république, on a organisé un exercice

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  1   appelé : "Rien ne doit nous surprendre," dont le but était tout d'abord la

  2   protection de la population en cas d'attaque, et en même temps, il

  3   s'agissait d'une vérification des Unités de la Protection civile, des

  4   unités ayant l'obligation de travail; cependant, les unités militaires de

  5   la JNA ne participaient pas à de tels exercices.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien, il y avait donc dans le

  7   programme, rien ne doit nous surprendre, une fois par an, un exercice. Dans

  8   l'université dès la première année, il y avait une formation de deux

  9   semaines pour tous les étudiants; mais là, je présume, dans les

 10   universités, ces étudiants, ils ont 18 ans, ils sont déjà majeurs.

 11   Alors en revanche, ce qui m'intéresse c'est le mineur, à l'école. Là,

 12   vous me dites qu'à l'école, il y avait un programme de défense et

 13   protection, qui existait. Donc doit-on tirer la conclusion d'après ce que

 14   vous nous dites, que les mineurs avaient à l'école à un moment donné un

 15   programme qui les sensibilisait à la question militaire ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, non. En ce qui concerne

 17   les mineurs, ils obtenaient simplement certaines connaissances au sujet de

 18   la protection en cas d'attaque aérienne ou à partir du sol, des

 19   bombardements ainsi de suite. Tout d'abord, concernant la protection.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous nous dites que les mineurs, ils avaient un

 21   semblant de formation mais simplement des conseils en cas d'attaque

 22   aérienne, et cetera, mais ils ne participaient pas à des exercices

 23   militaires, d'entraînement ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, c'est important.

 26   Bien. Il nous reste quelques minutes avant de terminer. Il reste deux

 27   minutes et demie. Alors je ne sais pas si, en deux minutes et demie, vous

 28   pouvez poser une question, ou bien vous préférez continuer demain. On a du

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  1   temps devant nous, pour une fois.

  2   Mme WEST : [interprétation] Je préférais poursuivre demain, Monsieur

  3   le Président.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. C'est une sage position.

  5   Alors, Monsieur le Témoin expert, comme vous le savez, vous

  6   reviendrez donc demain matin, à 9 heures. D'ici là, vous n'avez aucune

  7   attaque avec quiconque. Je souhaite donc à tout le monde une bonne fin de

  8   journée et j'aurais le plaisir de vous revoir demain matin.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le jeudi 29 octobre

 11   2009, à 9 heures 00.

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  1   temps devant nous, pour une fois.

  2   Mme WEST : [interprétation] Je préférais poursuivre demain, Monsieur

  3   le Président.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. C'est une sage position.

  5   Alors, Monsieur le Témoin expert, comme vous le savez, vous

  6   reviendrez donc demain matin, à 9 heures. D'ici là, vous n'avez aucune

  7   attaque avec quiconque. Je souhaite donc à tout le monde une bonne fin de

  8   journée et j'aurais le plaisir de vous revoir demain matin.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le jeudi 29 octobre

 11   2009, à 9 heures 00.

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