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1 Le lundi 9 novembre 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 17.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
6 l'affaire, s'il vous plaît.
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges, toutes les
8 personnes présentes dans le prétoire. Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le
9 Procureur contre Prlic et consorts. Merci, Messieurs les Juges.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. En ce lundi, 9 novembre
11 2009, je salue en premier MM. les accusés qui sont tous présents. Je salue
12 Mmes et MM. les avocats. Je salue tous les membres du bureau du Procureur
13 présents ainsi que les personnes qui nous assistent.
14 Je vais donner la parole à M. le Greffier qui a trois numéros IC.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
16 Différentes parties ont soumis une liste de documents à être versée par le
17 truchement du témoin Milan Gorjanc. La D4 aura le numéro IC 1093. La liste
18 -- 1092, 1093 [comme interprété] pour les différentes équipes de la
19 Défense. Je vous remercie, Messieurs les Juges.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier. Je vais demander à M.
21 l'Huissier d'aller chercher notre témoin, M. Beneta.
22 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Pouvez-vous nous donner votre
24 nom, prénom et date de naissance, s'il vous plaît.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Ivan Beneta, je suis né le 14
26 mars 1955.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci. Quelle est votre profession ou qualité
28 actuelle ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis officier d'active et j'ai un grade de
2 général de brigade, et j'exerce les fonctions d'inspecteur principal
3 adjoint pour la formation militaire en République de Croatie.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, est-ce que vous avez déjà témoigné
5 devant un tribunal ou bien c'est la première fois que vous témoignez ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois que je témoigne.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous demande de lire le serment.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
9 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
10 LE TÉMOIN : IVAN BENETA [Assermenté]
11 [Le témoin répond par l'interprète]
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Mon Général. Vous pouvez vous asseoir.
13 Quelques brèves informations de ma part. Comme vous le savez, vous allez
14 devoir répondre à des questions que Me Alaburic va vous poser. Me Alaburic
15 est l'avocate du général Petkovic. A l'issue de cette phase, les autres
16 avocats qui représentent les autres accusés pourront également vous poser
17 des questions. Les représentants du Procureur qui sont à votre droite vous
18 poseront également des questions dans le cadre du contre-interrogatoire.
19 Les quatre Juges qui sont devant vous pourront aussi vous poser des
20 questions, notamment à partir des documents que nous avons sous les yeux.
21 Essayez d'être précis dans vos réponses. Si vous ne comprenez pas une
22 question, n'hésitez pas à demander à celui qui vous la pose de la
23 reformuler.
24 Par ailleurs, vous venez de prêter serment, ce qui veut dire que vous êtes
25 maintenant témoin de la justice donc, vous n'avez plus de contact à avoir
26 avec quiconque. Et comme votre audition va se prolonger pendant plusieurs
27 jours, vous ne verrez donc personne à l'exception des membres de votre
28 famille et évitez de donner des interviews ou de dire ce qui se passe à
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1 l'intérieur de la salle d'audience.
2 Je voudrais également rajouter quelque chose que je n'indiquais au témoin
3 jusqu'à présent parce que ça me paraissait tellement évident que ce n'était
4 pas nécessaire. Mais la semaine dernière, Me Stewart a appelé l'attention
5 des Juges sur une particularité, et je me dois de vous dire ceci.
6 Quand un Juge vous pose une question, si vous, vous estimez que le
7 Juge fait une erreur dans la question, et si vous n'êtes pas d'accord avec
8 la prémisse de la question, n'hésitez pas à ce moment-là dire aux Juges :
9 Je ne suis pas d'accord, vous avez fait une erreur. Donc ce n'est pas parce
10 que le Juge se tromperait que vous devez donner le quitus au Juge. A titre
11 d'exemple, si à partir d'un document où il y a marqué quatre véhicules, et
12 que le Juge dise : "Dans ce document, il y a trois véhicules," là, vous
13 dites : "Non, Monsieur le Juge, vous faites une erreur, c'est écrit quatre
14 et pas trois." Donc n'hésitez pas, et je ne demande que ça pour que tout
15 soit clair. Voilà. Donc vous répondez librement aux questions qui vous sont
16 posées et essayez d'être vous-même précis dans les réponses que vous allez
17 donner aux questions posées.
18 Si par extraordinaire vous vous sentiez mal en cours d'audience, levez la
19 main pour qu'on arrête parce qu'on ne sait jamais. Une audience, c'est très
20 fatiguant et ceux qui n'ont pas l'habitude peuvent parfois éprouver des
21 malaises. Donc levez la main et à ce moment-là on fera une courte pause.
22 Voilà ce que je voulais vous dire afin que l'audience se déroule dans les
23 meilleures conditions possibles.
24 Maître Alaburic, je vous salue à nouveau et je vous cède la parole.
25 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
26 bonjour. Bonjour confrères et consoeurs de l'Accusation, confrères et
27 consoeurs de la Défense. Et Général Beneta, je vous dis bonjour; je dis
28 bonjour à tous ceux qui nous assistent.
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1 Interrogatoire principal par Mme Alaburic :
2 Q. [interprétation] Général Beneta, d'abord, nous allons nous pencher sur
3 votre CV, et ensuite au sujet de certaines parties de votre vie et de vos
4 activités, nous allons élargir nos thèmes vers des sujets militaires que
5 nous estimons pertinent pour la défense du général Petkovic dans cette
6 affaire.
7 Alors, vous nous avez dit votre date de naissance. Dites-nous où est-ce que
8 vous êtes né.
9 R. Je suis né à Dubravica non loin de Skradin, municipalité de Sibenik en
10 Dalmatie.
11 Q. Quel Etat est-ce ?
12 R. L'Etat, c'est la Croatie.
13 Q. Je vais maintenant donner quelques données sur votre formation.
14 Ecoutez-moi bien, et si quelque chose n'est pas exact, rectifiez le tir, et
15 si c'est exact, veuillez dire, oui.
16 Alors, vous avez été diplômé à l'Académie militaire de l'armée de terre,
17 que vous avez fréquentée pendant trois ans à Belgrade et pendant un an à
18 Zadar. Vous êtes arrivé à presque la maîtrise en sociologie et pédagogie,
19 mais vous n'avez pas eu celle-ci à la faculté. Après la guerre, vous avez
20 fait l'école de guerre de l'armée croate, puis vous avez suivi des stages
21 de formation pour ce qui est du fonctionnement d'état-major organisés par
22 l'OTAN. Puis vous avez fait une école de management en matière de défense
23 organisée en Angleterre. Et en ce moment-ci, vous êtes en train de faire
24 votre troisième cycle à la Faculté de sciences politique de Zagreb. Et les
25 études sont intitulées "Union européenne, droits politiques, et économie."
26 Droit, politiques, et économie, disais-je, et vous êtes en train de rédiger
27 votre thèse sur le thème du "Ministère de la Défense de la République de
28 Croatie pour ce qui est de la transformation de l'Etat se dirigeant vers
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1 l'affiliation à l'Union européenne."
2 Alors, Général, est-ce que j'ai bien consigné tous les éléments de votre
3 cursus ?
4 R. Oui. Tout est exact.
5 Q. Quelques mots au sujet du service que vous avez effectué. Jusqu'en
6 1991, vous avez été dans les rangs de la JNA en service à Zadar. Et
7 d'abord, c'était à l'école secondaire de l'armée, vous y avez passé sept
8 ans, puis vous avez été commandant à Bitnisa [phon] dans une petite
9 localité non loin de Zadar. Et en 1989, vous êtes de nouveau enseignant
10 dans un centre de formation scolaire destiné à des officiers de réserve.
11 J'ai dit que vous étiez enseignant en 1989. Je rectifie l'année pour ce qui
12 est du compte rendu. J'ai dit 89, centre de formation scolaire destiné à
13 des officiers de réserve.
14 Ai-je bien indiqué quel était le début de votre carrière ?
15 R. Oui, exception faite que je tiens à mentionner que j'ai suivi une
16 formation à l'école secondaire de l'armée. J'ai été chef de l'enseignement
17 dans cette école.
18 Q. Bon, Général. Je vais maintenant vous demander de nous expliquer ce qui
19 suit. Ce centre scolaire à l'intention des officiers de réserve, qu'était-
20 ce donc ces officiers de la réserve ?
21 R. C'était l'une des formes de scolarisation qui a été développée au
22 travers de ce concept de Défense populaire généralisée et d'autoprotection
23 civile; et s'agissant duquel on y envoyait des hommes en âge de combattre,
24 plutôt que de leur faire faire leur service militaire habituel, qui était
25 obligatoire. Alors, ils faisaient un petit stage de formation pour devenir
26 soldat, donc il y a tous ceux qui faisaient la formation de soldats, puis
27 ensuite il y avait un programme de formation et d'éducation qui les rendait
28 aptes à devenir officiers de réserve. Ce grade d'officier, ils l'obtenaient
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1 une fois que les bureaux territoriaux chargés de la défense les affectaient
2 dans l'une quelconque des unités, et c'était le plus souvent des unités de
3 réserve, et une fois qu'ils avaient effectué les premiers manœuvres ou
4 exercices militaires, qu'ils obtenaient pour de bon un grade d'officier de
5 réserve.
6 Mme ALABURIC : [interprétation] Avant que de continuer, je voudrais
7 rectifier le compte rendu. Dans la page présente, ligne 9, ici il y a le
8 mot "officiers." Il fallait ajouter l'adjectif "de réserve," "officiers de
9 réserve."
10 Q. Alors Général, si vous vouliez parler à quelqu'un qui ne vient pas du
11 territoire de l'ex-Yougoslavie et qui est étranger à ce concept de la
12 Défense populaire généralisée, comment lui expliqueriez-vous la différence
13 entre officier d'active et officier de réserve ? Comment le feriez-vous de
14 la façon la plus simple qui soit ?
15 R. Un officier d'active, c'est quelqu'un de former au fil d'une carrière
16 militaire, et c'est sa profession principale, il est payé pour. Un officier
17 de réserve, une fois qu'il a fait son service militaire, où il était donc
18 formé pendant le service, il retourne à la vie civile, dans le civil, mais
19 conformément à ce concept de la Défense populaire généralisée et de
20 l'autoprotection civile, ou plutôt, conformément au concept du peuple armé,
21 aux côtés ou en plus du travail qu'il effectue dans une société dans le
22 civil, il fait des exercices militaires, il a des manœuvres, il rejoint les
23 rangs d'une unité qui est très souvent une unité de réserve également, et
24 il prépare celle-ci pour des situations de guerre, et il se trouve être
25 conscrit jusqu'à l'âge de 60 ans.
26 Q. Vous nous avez dit, Général, si j'ai bien compris, qu'après cette école
27 des officiers de réserve, il retourne à la vie civile ?
28 R. Oui.
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1 Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, pour ce qui est de
2 cette explication, je voudrais relever une erreur, ligne 22, page 6, où
3 l'on a noté que le témoin aurait dit qu'il vit comme un civil, or il vit
4 une vie de civil mais il reste officier de réserve.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.
6 Mme ALABURIC : [interprétation]
7 Q. Général, en application de ce concept de la Défense populaire
8 généralisée, les hommes qui étaient aptes à combattre, avaient-ils des
9 obligations à l'égard de l'armée, et si c'est le cas, étaient-ce des
10 obligations de certains d'entre eux ou est-ce que tout un chacun avait des
11 obligations déterminées ?
12 R. Pratiquement tous les hommes en âge de combattre avaient une
13 affectation militaire qui était inscrite dans un document que l'on appelait
14 le fichier ou le carton individuel, et les départements chargés de la
15 défense avaient pour mission de déployer ces conscrits dans les rangs des
16 différentes unités. Alors il se peut, qu'en matière d'affectation de
17 guerre, c'étaient des réservistes que l'on était susceptible de mobiliser,
18 ou alors l'on complétait les effectifs de guerre dans les unités qui
19 avaient un noyau d'existant même en temps de paix. En sus, on pouvait les
20 affecter à l'exercice de ce qu'on appelait obligation de travail, notamment
21 lorsqu'il s'agissait d'intervenants qui avaient un métier intéressant en
22 matière de défense du pays, et ces gens-là étaient activés en cas de
23 guerre.
24 Q. Pouvez-vous nous dire, Mon Général, quel était le critère fondamental
25 pour ce qui était de décider d'affecter un individu dans une unité
26 militaire ou dans la protection civile, voire dans une entreprise où
27 institution quelconque pour qu'il y effectue une obligation de travail ?
28 Quel était le critère principal de cette affectation ?
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1 R. Le critère principal c'étaient ses propres aptitudes, aux fins de
2 l'exploiter au mieux ses connaissances, ses aptitudes.
3 Q. Mais en guise d'exemple, la semaine passée on a parlé d'un ingénieur en
4 chimie, expert en matière d'explosifs, et si vous étiez, vous, à travailler
5 dans un bureau du département de la Défense, quel serait le raisonnement
6 que vous suivriez pour ce qui est d'affecter cet homme, ingénieur en chimie
7 et expert en matière d'explosifs ?
8 R. Il pourrait être affecté en guise de personnel d'appoint dans une unité
9 logistique, qui viendrait à être complété en cas de guerre. Donc en cas de
10 guerre, ce serait un militaire qui poursuivrait sa propre carrière pendant
11 la guerre. Il pourrait être activé s'il a fait des classes militaires
12 pendant le service, mais il pourrait être utilisé notamment dans une unité
13 à caractère logistique. En sus, il pourrait être utilisé dans une
14 entreprise qui fabriquerait des explosifs, et ce, en application de
15 l'obligation de travail qu'on pourrait lui imposer dans les circonstances
16 appropriées. Donc il est affecté de la sorte pour le cas où il y aurait un
17 état de guerre.
18 Q. Bon. Je pense que maintenant nous avons suffisamment expliqué ce
19 concept de la Défense populaire généralisée, des officiers de réserve. Ma
20 question suivante va porter sur vos activités dans ce centre scolaire de
21 Zadar, de l'armée.
22 Y avait-il dans ce centre scolaire Milivoj Petkovic, qui y travaillait à
23 l'époque aussi ?
24 M. LE JUGE MINDUA : Excusez-moi, Maître Alaburic.
25 Juste une petite question, Monsieur le Témoin. L'officier de réserve
26 qui reste conscrit jusqu'à l'âge de 60 ans, monte-t-il de grade pendant
27 cette période, et cela en quel critère ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cet officier progresse pour ce qui est
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1 des grades. Il progresse le plus souvent en corrélation avec les exercices
2 pratiques qui ont eu lieu avec cette unité dont il fait partie et dont il
3 est également l'une des personnalités principales. Ça se fait une fois ou
4 deux fois l'an. Cette progression se faisait un peu plus lentement que cela
5 n'était le cas chez les officiers professionnels, mais il y avait un
6 avancement.
7 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup.
8 Mme ALABURIC : [interprétation]
9 Q. Mon Général, j'étais en train de vous demander si dans un centre
10 scolaire quelconque à Zadar à l'époque il y avait Milivoj Petkovic à être
11 employé aussi ?
12 R. Oui. M. Petkovic a travaillé dans un centre scolaire voisin. Celui-là
13 formait des officiers d'active et des officiers de réserve dans
14 l'artillerie.
15 Q. Connaissiez-vous à l'époque M. Petkovic ?
16 R. Oui, je l'ai connu. Je ne peux pas dire qu'on était ami, mais je savais
17 qu'il travaillait là-bas, que c'était l'un des officiers à être employé
18 dans ce centre scolaire.
19 Q. Avez-vous reçu des informations, des qualificatifs pour ce qui est de
20 la façon dont il faisait son travail ?
21 R. Non, rien de particulier, je n'ai notamment pas entendu parler de
22 problèmes dans l'exercice de ses fonctions. Je pense que c'était un
23 officier qui faisait bien son travail.
24 Q. Bon. Je vais vous réinterroger à son sujet lorsqu'on parlera de l'armée
25 croate. Mais j'ai maintenant quelques questions à poser pour ce qui est de
26 l'armée et de la politique.
27 Est-ce que dans l'armée populaire yougoslave on avait une Ligue des
28 Communistes d'organiser en son sein ?
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1 R. Oui, dans l'armée populaire yougoslave, le seul parti qui pouvait
2 exister était la Ligue des Communistes. Cette Ligue des Communistes était
3 organisée depuis la base comme depuis les unités jusqu'au sommet même de
4 l'armée qui se trouvait à Belgrade.
5 Q. Alors, Général, début 1990, lorsque dans toutes les républiques de
6 l'ex-Yougoslavie il y a création d'autre partis politiques, et lorsque
7 l'autorité civile met en place un système pluripartite alors que l'on
8 prépare des premières élections pluripartites, qu'advient-il à ce moment-là
9 de cette organisation de la Ligue des Communistes au sein de la JNA ?
10 R. L'on a conservé l'organisation de la Ligue des Communistes en son sein,
11 bien que les temps aient déjà montré qu'il n'y avait aucune raison de
12 perpétuer cet état des choses, et sur le terrain on arrivait à des
13 situations absurdes.
14 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner brièvement quelques exemples de
15 situations absurdes ?
16 R. On n'avait pas apporté de réponses aux questions qui étaient celles de
17 savoir "si on allait à recevoir dans les académies militaires rien que ceux
18 qui étaient moralement appropriés ou proches de la Ligue des Communistes ?"
19 Et un autre segment aussi, puisque les soldats qui faisaient leur service,
20 il y en avait aussi qui faisaient partie des rangs de la Ligue des
21 Communistes et ils faisaient partie des cellules de partis, alors que dira-
22 t-on s'il y a 20 soldats qui viendraient à vouloir organiser une cellule du
23 Parti libéral dans l'armée, allions-nous donc autoriser la chose ou pas ?
24 Q. Quelle était votre position à vous, Général ?
25 R. A l'époque, vers la fin de 1990, j'étais membre de l'organisation
26 élémentaire de la Ligue des Communistes qui était celle des enseignants au
27 sein de ce centre scolaire. Vers le mois de novembre de cette année, compte
28 tenu de la situation telle que je viens de vous l'exposer à l'instant, j'ai
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1 demandé à ce que l'on mette à l'ordre du jour l'autosuppression de cette
2 organisation du parti pour donner l'exemple pour ce qui est de ce qu'il
3 convient le mieux de faire.
4 Malgré l'opposition du chef de cette structure de base de la Ligue des
5 Communistes, je veux parler de son président, la Ligue des Communistes a
6 continué à exister. Nous avons voté à main levée, et ce vote à main levée a
7 donné une majorité qui était favorable à ce que cette question soit placée
8 à l'ordre du jour des discussions. Lorsque le débat en est arrivé à ce
9 point, la majorité des membres les plus jeunes de l'état-major ont voté
10 pour le démantèlement de cette structure. Etant donné que la proposition
11 venait de moi, j'ai par la suite subi quelques problèmes dans les semaines
12 et mois qui ont suivi.
13 Q. Général, dites-moi maintenant quelle est votre position en tant que
14 soldat de métier. Estimez-vous qu'un soldat est tenu d'accomplir les tâches
15 qui sont les siennes en toute conscience et indépendamment du fait qu'il
16 peut appartenir à un parti politique ?
17 R. Oui. Je pense absolument que les soldats ont des missions à remplir
18 qui doivent rester distinctes de son appartenance politique, c'est-à-dire
19 du parti auquel il appartient éventuellement.
20 Q. Général, dites-nous, je vous prie, dans un pays bien organisé, qui est-
21 ce qui dirige l'armée ?
22 R. L'armée est dirigée par le président de l'Etat, et dans certains
23 aspects de cette direction par le parlement, ainsi que pour d'autres
24 aspects de la direction par le gouvernement.
25 Q. Général, à votre avis un soldat de métier doit-il être obéi sans la
26 moindre faille lorsqu'il donne un ordre ou une consigne, ou existe-t-il
27 tout de même certaines limites à cette obéissance ?
28 R. Même si les futurs soldats sont formés au respect de l'obéissance en
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1 général, les situations concrètes sont bien précisées, situations dans
2 lesquelles ces soldats ont tout de même le droit de ne pas exécuter un
3 ordre.
4 Q. Veuillez nous dire, je vous prie, quelles sont ces situations.
5 R. Ces situations sont en rapport avec l'éventualité qu'un crime a été
6 commis ou que les dispositions du droit international de la guerre ont été
7 enfreintes.
8 Q. Très bien, Général. Revenons, si vous le voulez bien, à la description
9 de votre vie et de votre carrière.
10 En juillet 1991, vous aviez bien rejoint les rangs de l'armée croate,
11 n'est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. Pouvez-vous nous dire, si vous le savez, quelle était la position du
14 président de l'époque, le défunt Franjo Tudjman, par rapport aux officiers
15 de la JNA ? Est-ce que ces officiers de l'ancienne JNA étaient bienvenus au
16 sein de l'armée croate ou pas ?
17 R. Je pense qu'étant donné le caractère assez spécifique de la situation,
18 puisque nous étions à la veille de la guerre ou dans les toutes premières
19 phases de la guerre, le président Tudjman était conscient de la nécessité
20 d'adjoindre à l'armée des militaires qui avaient certaine connaissance et
21 une certaine expérience pour que ces personnes participent à la guerre, et
22 je crois qu'il recherchait un certain équilibre entre le nombre de
23 personnes répondant à la définition que je viens de donner et le nombre de
24 personnes qui n'avaient peut-être pas les mêmes connaissances ou la même
25 expérience mais dont la présence au sein de l'armée était tout de même
26 indispensable pour d'autres raisons.
27 Q. Général, vous avez surtout participé à la défense de Zadar, n'est-ce
28 pas, après quoi vous avez participé à la défense de l'intérieur du
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1 territoire dans la région de Split, et peu après encore, vous avez été
2 engagé plus au sud, n'est-ce pas ? Est-ce que j'ai bien résumé la série de
3 vos affectations ?
4 R. Oui.
5 Q. Les fonctions que vous occupiez à l'époque étaient bien celles de chef
6 d'état-major de la 4e Brigade des Gardes de l'armée croate, n'est-ce pas ?
7 R. Oui.
8 Q. Pourriez-vous nous expliquer quelles étaient les missions que vous avez
9 remplies à l'état-major ?
10 R. Les missions dont j'étais chargé portaient sur la planification, de
11 concert avec le commandant, donc planification des actions à mener, travail
12 de supervision consistant à vérifier si les décisions du commandant avaient
13 bien été appliquées, et j'avais également une partie de mon travail qui
14 portait sur l'assistance professionnelle et technique qu'il fallait
15 apporter pour veiller à ce que les missions et les tâches soient exécutées
16 le mieux possible.
17 Q. En général, quel était le rapport entre le chef d'état-major d'une
18 brigade et le commandant de la brigade ?
19 R. Le chef d'état-major d'une brigade est un professionnel qui veille à
20 l'exécution des ordres du commandant, et il peut également remplacer le
21 commandant en cas d'absence de ce commandant. Le chef d'état-major est
22 également chargé de planifier au niveau de l'état-major qu'il dirige, donc
23 d'étudier la situation en vigueur et de planifier, mettre en œuvre les
24 idées du commandant par rapport à l'avenir.
25 Q. Lorsque vous dites qu'il pouvait remplacer le commandant, est-ce que
26 cela signifie qu'il pouvait également exercer les fonctions de suppléant du
27 commandant de brigade ?
28 R. Au cas où il n'existait pas en bonne et due forme un adjoint du
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1 commandant au sein de l'unité en question, dans un cas comme celui-ci,
2 c'est le chef d'état-major qui remplissait les fonctions d'adjoint ou de
3 suppléant du commandant.
4 Q. L'adjoint du commandant de brigade fait-il officiellement partie de la
5 hiérarchie, de la filière de commandement ?
6 R. Non, car si nous nous penchons sur l'organigramme qui illustre la
7 filière de commandement, nous voyons que le commandant est directement lié
8 aux commandants des unités subalternes. Il y a aussi d'autre part l'état-
9 major, l'adjoint ou le groupe constitué par les différents adjoints qui
10 sont liés au commandant, mais hors de la filière de commandement.
11 Q. Général, il me semble que votre réponse n'a pas été consignée au compte
12 rendu exactement comme vous l'avez prononcée, car il est écrit que le
13 commandant est lié aux commandants des unités subordonnées ainsi qu'à
14 l'état-major, et cetera. Donc peut-être serait-il préférable que vous nous
15 décriviez une nouvelle fois la filière de commandement, la hiérarchie,
16 comme vous venez de le faire de façon à ce que tout soit consigné
17 correctement au compte rendu d'audience.
18 R. Le commandant, et ce, étant donné l'existence du principe de
19 commandement unique, exerce son commandement sur les commandants des unités
20 subordonnées. C'est cela qui constitue la filière de commandement. Mais il
21 n'y a pas de place pour un quelconque adjoint du commandant ou pour un
22 quelconque état-major dans cette filière de commandement, dans cette
23 hiérarchie. Mais le commandant exerce également son commandement sur
24 l'adjoint et sur l'état-major. Cela dit, l'adjoint du commandant et l'état-
25 major ne donnent pas d'ordre aux unités subalternes.
26 Q. Bon. A présent, il me semble que les choses sont tout à fait claires.
27 Si les Juges n'ont pas de questions à poser sur ce sujet, nous pouvons
28 passer à autre chose.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Une question d'ordre technique.
2 D'après ce que vous dites, le chef d'état-major ou l'adjoint du
3 commandant n'ont pas d'autorité sur la chaîne de commandement, car vous
4 dites que c'est le commandant qui a autorité sur les unités inférieures. Et
5 donc, le chef d'état-major ou l'adjoint au commandant n'est pas stricto
6 sensu dans la chaîne de commandement. Très bien. Mais je vais vous prendre
7 un cas d'école. Imaginons que le commandant a la grippe et qu'il est passé
8 en réanimation, donc il est hors d'état de commander. Qui à ce moment-là va
9 exercer le commandement sur les unités inférieures ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] En cas d'absence du commandant, c'est
11 l'adjoint du commandant qui exerce le commandement sur les unités, voire le
12 chef d'état-major, s'il n'y a pas d'adjoint au commandant nommé en place,
13 mais ceci seulement si un supérieur du commandant dans la hiérarchie n'en
14 n'a pas décidé autrement.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc vous dites que si le commandant est
16 absent, à ce moment-là c'est l'adjoint qui prend le commandement.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.
19 Mme ALABURIC : [interprétation]
20 Q. Général, peut-être serait-il bon à présent de définir très précisément
21 le mot "absent," de façon à éviter un quelconque malentendu. Si le
22 commandant n'est pas à son poste de commandement mais qu'il se trouve
23 ailleurs, est-ce que cela signifie qu'il est absent ? Quel est le sens
24 exact à donner au mot "absent" s'agissant du commandant ?
25 R. Le mot "absent", dans le sens où nous l'entendons, implique que le
26 commandant n'est pas en capacité d'exercer son commandement sur les unités.
27 Lorsque j'ai utilisé le mot absent, je n'avais pas en tête l'idée que le
28 commandant ne se trouvait pas au poste de commandement mais dans un lieu où
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1 les actions se déroulaient, voire qu'il serait allé voir quelqu'un d'autre
2 dans un autre lieu. Ces circonstances-là ne justifient pas que le
3 commandement soit transféré du commandant à l'adjoint ou au chef d'état-
4 major.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, je vais prendre un autre exemple, hypothèse
6 d'école toujours. Imaginons que le commandant est à l'étranger parce qu'il
7 participe à une négociation internationale et donc, il doit être à
8 l'étranger. Qui à ce moment-là sur le terrain exerce le commandement ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] La pratique convenable dans une telle
10 situation consisterait à ce que le commandant ait défini très précisément
11 qu'elles sont les domaines, les formes de commandement qu'il transfère sur
12 son adjoint par autorisation précise.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Et doit-il, dans cette hypothèse, y avoir un ordre
14 écrit ou bien un ordre verbal suffit où le commandant dit à son adjoint :
15 "Voilà, je vais être à Genève au mois de janvier, donc vous prenez ma
16 succession," ou bien il faut un ordre écrit très précis ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut un ordre écrit, car beaucoup de choses
18 dépendent, entre autres, de la solde à laquelle cette personne a droit.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Et dans l'hypothèse où il n'y a pas d'ordre écrit,
20 qu'est-ce que vous dites ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans un cas comme celui-là, ma seule
22 conclusion peut consister à dire qu'apparemment le commandant est parti
23 quelque part sans réussir à accomplir la partie du travail qu'il avait à
24 accomplir. L'adjoint peut se trouver dans une situation assez déplaisante
25 au cas où il aurait à prendre des décisions draconiennes. S'acquitter des
26 affaires courantes et exercer le commandement au quotidien sur la base de
27 décisions prises antérieurement, ça, cela composerait un champ d'action
28 dans lequel l'adjoint peut se mouvoir sans trop de difficulté, mais tout ce
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1 qui sort de cela poserait certainement des problèmes.
2 M. LE JUGE MINDUA : Monsieur le Témoin, cette question de la chaîne de
3 commandement est assurément très, très importante, et je voudrais juste
4 avoir une précision. Le commandant transmet-il ses ordres, comme l'a dit le
5 Président, toujours par écrit ou peut-il le faire verbalement ? Je vais
6 poser la deuxième question immédiatement. S'il peut transmettre ses ordres
7 verbalement, qu'en serait-il des grandes unités comme les brigades ou les
8 divisions ? Ou n'y a-t-il pas risque que le commandant adjoint ou les
9 membres de l'état-major puissent aussi donner des ordres verbaux,
10 prétextant que les ordres viennent du commandant ? Et pour terminer, les
11 soldats qui vont exécuter ces ordres, ont-ils un moyen de vérifier que les
12 ordres oraux proviennent effectivement du commandant qui est en tête de la
13 chaîne de commandement ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est précisément de cela que je parlais
15 lorsque j'ai dit que l'ordre devrait être écrit s'agissant du transfert de
16 responsabilité entre le commandant et le commandant adjoint, car il ne
17 s'agit pas uniquement dans ce cas-là, du rapport qui existe entre le
18 commandant et son adjoint. Il s'agit du fait que l'adjoint est, par cet
19 ordre écrit, autorisé à faire exécuter les ordres que le commandant
20 souhaite voir exécuter, car le commandant lui aussi, lorsqu'il écrit un
21 ordre destiné aux subordonnés, va faire figurer en en-tête de cet ordre ou
22 du document dont il est l'auteur, il va écrire :
23 "Sur la base de l'article tel et tel du règlement général afférant au
24 commandement."
25 Et ensuite, sera indiquée la décision qu'il a prise de se faire
26 remplacer dans son travail par le commandant adjoint. Et ensuite, on trouve
27 les mots "Je donne l'ordre suivant."
28 Donc les choses sont tout à fait claires pour les subordonnés, ils
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1 savent qu'il n'exerce plus ses fonctions de commandant.
2 M. LE JUGE MINDUA : Et si par fraude, un chef d'état-major ou un membre de
3 l'état-major donnait un ordre verbal aux unités, celles-ci, les unités,
4 peuvent-elles exercer cet ordre ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Les unités doivent exécuter cet ordre, et le
6 commandant de l'unité, s'il a le moindre doute, peut demander une
7 vérification des attributions de l'homme qui a donné l'ordre, notamment
8 lorsqu'il est question d'ordres qui ne sont pas liés à la réalisation de
9 tâches qui auraient déjà été données antérieurement.
10 M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup, Monsieur le Témoin. Vous avez
11 parfaitement répondu à ma question.
12 Mme ALABURIC : [interprétation]
13 Q. Revenons à la description de votre carrière, Général, et peu à peu nous
14 en arriverons à parler de la Bosnie-Herzégovine. Le 4 juin 1992, vous
15 devenez commandant de la 116e Brigade de l'armée croate, stationnée à
16 Metkovic.
17 Vous assurez la défense, tout d'abord, de la partie orientale de
18 l'Herzégovine. Plus particulièrement, vous défendez la rive orientale de la
19 Neretva, après quoi vous participez à la libération de Stolac. Au mois
20 d'août 1992, vous vous retirez de Stolac. Vous réorganisez votre brigade,
21 et au mois de septembre 1992, vous reprenez le commandement de l'unité
22 stationnée à Popovo Polje dans un territoire qui longe la frontière croate
23 vers Dubrovnik.
24 Est-ce que j'ai bien résumé votre carrière, Général ?
25 R. Oui, mais je dois ajouter que l'unité que je commandais était
26 stationnée dans la région de Zavala et que c'était toujours la 116e Brigade
27 dont les effectifs avaient été réduits en raison d'une démobilisation
28 partielle.
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1 Q. Très bien. Nous reviendrons sur les détails, mais pour le moment
2 j'aimerais que nous en terminions de votre carrière.
3 Au mois de mars 1993, vous quittez le territoire de la Bosnie-Herzégovine
4 pour vous rendre au commandement de la région militaire de Split, n'est-ce
5 pas, Général ?
6 R. Oui.
7 Q. Je vous prierais maintenant de bien vouloir préciser à notre intention
8 le sens exact à donner aux mots "région militaire". Quel était le nom de
9 cette division territoriale de l'armée croate par le passé ?
10 R. Cela s'appelait une zone opérationnelle.
11 Q. Donc les expressions zone opérationnelle et région militaire sont des
12 synonymes, n'est-ce pas, leur sens est le même, identique; c'est bien cela
13 ?
14 R. Exact.
15 Q. Pourriez-vous, Général, nous expliquer à présent à quoi correspond une
16 zone de responsabilité, et nous dire si on peut dire de la région militaire
17 de Split que le commandant de cette région militaire avait une zone de
18 responsabilité ?
19 R. La zone opérationnelle est un concept qui définit la forme d'un
20 territoire où se mènent des combats. C'est donc une zone d'opération. Cette
21 zone, lorsqu'un commandant se voit confier ses missions, cette zone est
22 définie à partir d'un critère territorial, c'est-à-dire qu'on définit très
23 précisément la frontière gauche et la frontière droite de cette zone, et on
24 définit le territoire couvert par cette zone aussi bien en profondeur sur
25 le territoire tenu par l'ennemi que sur la partie du territoire tenue par
26 le commandant.
27 Est-ce que vous m'avez demandé ce que voulait dire également "région
28 militaire" ?
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1 Q. Non, la zone opérationnelle. Est-ce que l'intégralité de la zone
2 opérationnelle correspond à la zone de responsabilité du commandant de
3 cette zone, autrement dit de cette région militaire ?
4 M. LAWS : [interprétation] Avant la réponse, j'aimerais juste faire une
5 petite intervention. Tout d'abord, je souhaite à tous un bon après-midi.
6 Nous avons parlé du CV de ce témoin depuis une heure maintenant, or la
7 seule chose qui est portée sur les deux résumés donnés à l'Accusation c'est
8 un fait non contesté qui a eu lieu à Stolac en 1992. Nous avons déjà parlé
9 de la Défense populaire de Zadar, du rôle de Milivoj Petkovic qu'il a joué
10 là, nous avons parlé de la Ligue des Communistes, la JNA, les travaux du
11 chef d'état-major et les chaînes de commandement, et maintenant nous allons
12 parler des régions militaires. J'ai été assez patient jusqu'à présent, mais
13 il me semble qu'il s'agit de points marginaux dont vous n'avez pas besoin
14 d'être averti, certes, mais je tiens quand même à dire que j'ai demandé un
15 résumé supplémentaire de ce témoin, mais on nous a absolument pas parlé
16 dans ce résumé supplémentaire de tous ces points qui ont été abordés depuis
17 une heure par Mme Alaburic. Donc je vais soulever une objection si l'on
18 continue à poser des questions, pour entrer dans les détails de tout cela,
19 des détails qui -- si ça porte sur des points essentiels en l'espèce,
20 l'Accusation jusqu'à présent n'a pas été préparée puisque ce n'est pas dans
21 le résumé. J'aimerais vraiment que l'on en revienne aux points qui sont
22 abordés dans les résumés et uniquement dans les résumés qui nous ont été
23 donnés. Je vous remercie.
24 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
25 avec votre permission je vais répondre à mon confrère.
26 Je considère que l'une des règles de base si le témoin nous dit qu'il
27 était chef de l'état-major d'une brigade, que l'on demande ce que cela
28 implique, quelles étaient ses fonctions, ses missions et son rôle au sein
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1 de la chaîne de commandement. Si ses réponses sont bien appréciées par la
2 Chambre de première instance, ceci nous permettra de déterminer la position
3 de chaque autre chef d'état-major au sein de la chaîne de commandement.
4 Ensuite s'il dit qu'il avait travaillé dans une école des officiers
5 de réserve, nous devrions clarifier cette notion d'autant qu'il en a été
6 question déjà par le passé, et ceci ne devrait pas poser de problème. Nous
7 allons traiter de cela avec tous nos autres témoins, car il s'agit là des
8 questions cruciales pour la défense de M. Petkovic. Ce que le témoin est en
9 train de nous expliquer, c'est le fonctionnement du mécanisme entier de la
10 défense par le biais des notions de base.
11 Le sujet de la zone de responsabilité correspond à un thème qui était
12 prononcé par tout le monde dans ce prétoire à un nombre de reprises, et
13 maintenant enfin, nous avons un témoin habilité de nous expliquer ce qu'est
14 une zone de responsabilité aussi en fonction des critères de l'OTAN. Quels
15 sont les critères, par exemple, de l'OTAN qui définissent ou ne définissent
16 pas une région comme zone de responsabilité.
17 Donc avec votre permission, c'est la dernière question à ce sujet que
18 je poserais au général Beneta, et ensuite nous allons traiter de la
19 question des soldats croates sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine.
20 Mais veuillez, s'il vous plaît, permettre au témoin de nous dire ce qu'est
21 une zone de responsabilité et quel est le lien entre le terme zone de
22 responsabilité et les opérations militaires concrètes.
23 M. LAWS : [interprétation] Puis-je répondre brièvement, s'il vous plaît,
24 pour dire simplement que personne ne conteste que ce monsieur est bien
25 placé pour dire certaines choses qui pourraient être importantes. Mon
26 objection n'invoque pas cela. Mon objection consiste à dire que si c'est
27 important, il aurait fallu fournir les éléments à l'Accusation au
28 préalable, comme l'indique du reste le Règlement de procédure et de preuve
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1 et les règles édictées par cette Chambre.
2 Mme ALABURIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, j'ai informé
3 mes collègues de l'Accusation et de toutes les autres Défenses des faits
4 qui vont être présentés par ce témoin, relatifs à l'acte d'accusation.
5 Maintenant, l'on définit simplement les catégories de la guerre, car
6 lorsque le témoin nous dira où il était en Bosnie-Herzégovine avec la 116e
7 Brigade, nous allons traiter de sa zone de responsabilité. Je pensais qu'il
8 était judicieux de clarifier ce terme dès cette introduction. Nous pouvons
9 le clarifier par la suite aussi, mais avec votre permission je souhaite le
10 faire maintenant.
11 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, je ne souhaite pas
12 aborder la question de savoir si c'était une bonne idée ou pas, mais vous
13 nous avez indiqué ce sur quoi le témoin allait faire sa déposition. Les
14 questions qui portent sur les zones de responsabilité sont des domaines qui
15 ont été abordés dans le détail avec un autre expert militaire qui a
16 témoigné pendant les deux derniers quinze jours. Je crois que l'objection
17 est tout à fait justifiée et devrait être retenue. Donc, veuillez aborder
18 les questions que vous avez prévues d'aborder.
19 Mme ALABURIC : [interprétation] Bien.
20 Q. Général Beneta, veuillez nous dire, s'il vous plaît, la chose
21 suivante, lorsque, avec la 116e Brigade, vous avez repris les positions
22 auprès de Popovo Polje, c'est-à-dire près de la frontière entre la
23 République de Croatie et la Bosnie-Herzégovine, quelle était votre zone de
24 responsabilité ?
25 R. Ma zone de responsabilité était une partie de la ligne de front,
26 limitée du côté gauche et du côté droit. En ce qui concerne ma profondeur,
27 il s'agissait de la zone dans laquelle je déployais mes forces, et en ce
28 qui concerne la profondeur du côté de l'ennemi, ceci correspondait aux
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1 limites de mes possibles actions.
2 Q. Je vous remercie. Lorsque nous montrerons les cartes, vous pourrez nous
3 l'illustrer. Terminons pour ce qui est de votre biographie.
4 En été 1993, vous avez de nouveau été engagé pendant environ un mois
5 dans le cadre d'une action du HVO en Herzégovine, et suite à cela vous
6 retournez dans la région militaire de Split, où vous reprenez les fonctions
7 du commandant du Groupe opérationnel de Sibenik pendant 22 mois; est-ce
8 exact ?
9 R. C'est exact.
10 Q. Et maintenant pour terminer, vous étiez à la tête de la défense
11 antiaérienne dans la marine croate, ensuite l'adjoint du chef du Groupe
12 opérationnel de l'armée croate chargée de la modernisation. Ensuite, vous
13 étiez commandant du centre chargé des opérations internationales. Ensuite,
14 vous étiez commandant de l'école de guerre. En ce moment, comme vous l'avez
15 déjà indiqué à la Chambre de première instance, en répondant à la question
16 du Président Antonetti, à présent vous exercez les fonctions de l'adjoint
17 du chef inspecteur dans l'inspectorat de la Défense; est-ce exact ?
18 R. C'est exact.
19 Q. Bien. Nous allons maintenant aborder un autre sujet concernant le
20 "Départ des soldats de l'armée croate en Bosnie-Herzégovine."
21 Mme ALABURIC : [interprétation] Je souhaite que l'on présente au témoin la
22 série de documents qui a été préparée.
23 Q. Je crois que vous avez le document sous les yeux. Si tel est le cas,
24 veuillez vous pencher sur le document et ensuite nous allons entamer notre
25 discussion à ce sujet-là.
26 Veuillez vous pencher sur le document 3D443, s'il vous plaît. L'avez-vous
27 trouvé, Général ?
28 Il s'agit là d'une lettre signée par Petar Stipetic.
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1 Mme ALABURIC : [interprétation] Le document présenté sous forme
2 électronique n'est pas le bon.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Ne s'agit-il pas de 3D443 ?
4 Mme ALABURIC : [interprétation]
5 Q. C'est exact. C'est moi qui me suis mal prononcée. Il s'agit de 3D443.
6 C'est une lettre adressée par le général Petar Stipetic, en date du 8 avril
7 1992.
8 Je vais vous poser des questions bien concrètes, et dites-nous la chose
9 suivante. Sur la base du contenu de ce document, pouvez-vous nous dire à
10 qui cette lettre a été envoyée ?
11 R. Cette lettre a été envoyée à la zone opérationnelle de Split.
12 Q. A cette époque-là, étiez-vous dans cette zone opérationnelle ?
13 R. Oui, à l'époque j'étais le chef de l'état-major de la 4e Brigade des
14 Gardes dans cette zone opérationnelle.
15 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer le début de cette lettre, où il
16 est dit : "Référence : votre document." Qu'est-ce que cela veut dire ?
17 R. Ça veut dire que quelqu'un de la zone opérationnelle, donc le
18 commandant de la zone opérationnelle, avait envoyé un document à l'état-
19 major principal, en posant une question, et ici, en réponse, la réponse est
20 fournie à la question posée.
21 Q. Sur la base du contenu de ce document qui entérine le départ des
22 volontaires de l'armée croate en Bosnie-Herzégovine, que pouvez-vous
23 conclure pour ce qui est du contenu de la première lettre contenant la
24 question qui a été envoyée à l'état-major principal ?
25 R. Le contenu de la lettre concernerait un résumé des demandes émanant des
26 unités, dont la mienne, la 4e Brigade des Gardes, puisque nous avons
27 demandé qu'une position soit adoptée d'urgence concernant la situation que
28 nous rencontrions à ce moment-là au sein de nos unités, à savoir, une
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1 partie des combattants qui faisaient partie de mon unité, et je crois que
2 c'était le cas des autres aussi, de la plupart des autres, c'étaient de
3 jeunes hommes qui vivaient en Croatie ou en Herzégovine, dans les deux cas,
4 il s'agissait des jeunes hommes originaires de l'Herzégovine qui s'étaient
5 joints aux rangs de ceux qui défendaient la Croatie contre l'agresseur
6 serbe et la JNA. Lorsque les circonstances ont visiblement changé là où
7 leurs parents vivaient, ils exerçaient une forte pression en demandant
8 d'être autorisé à se rendre en Bosnie-Herzégovine.
9 Q. Dites-nous, Général, si l'on n'avait pas permis à ces hommes, ces
10 soldats de se rendre en Bosnie-Herzégovine, qu'est-ce qu'il se serait
11 produit ?
12 R. Je crois qu'ils seraient partis même sans autorisation.
13 Q. Dites-nous, est-ce que d'une certaine manière, ou plutôt si tous vos
14 soldats originaires de la Bosnie-Herzégovine à ce moment-là, début avril
15 1992 étaient partis défendre leurs lieux d'origine, qu'elle aurait été la
16 situation au sein des unités de l'armée croate ?
17 R. Nous aurions eu un nombre nettement diminué de troupes sans aucune
18 possibilité de recompléter les unités dans une période relativement brève.
19 Q. Peut-on préciser la période ? S'agit-il du mois d'avril 1992, car nous
20 avons une erreur dans le compte rendu d'audience.
21 R. Oui. Il est question du mois d'avril 1992.
22 Q. Pourriez-vous nous expliquer maintenant si vraiment les unités de
23 l'armée croate risquaient de se faire diminuer ainsi en raison du départ
24 des soldats d'origine de la Bosnie-Herzégovine, est-ce que vous aviez un
25 intérêt de coordonner et d'organiser ces départs de manière différente ?
26 R. Oui. Il était dans notre intérêt que ceci se déroule de manière
27 organisée pour plusieurs raisons. Je vais les expliquer ?
28 Q. Dites-nous qu'elles étaient les raisons ?
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1 R. A ce moment-là, depuis huit mois déjà, nous avions mené des opérations
2 de guerre. Nous avions construit ce qu'il était très difficile de
3 construire, à savoir une collectivité ferme militaire qui a été formée
4 pendant la guerre. Si l'on allait laisser partir ces hommes de manière non
5 organisée, ceci impliquait que ces jeunes hommes allaient tous partir dans
6 leur place d'origine et qu'ils auraient essayé de s'organiser eux-mêmes
7 afin d'opposer une sorte de résistance ou afin de sauver leurs parents,
8 quelque chose comme cela. Et s'ils étaient partis ainsi, en faisant
9 désertion, nous aurions eu un problème de statut par la suite. La situation
10 en Bosnie-Herzégovine n'était pas vraiment prévisible à cette époque-là, et
11 nous n'aurions pas pu les réintégrer dans l'unité au bout d'un mois ou un
12 peu plus si nécessaire. Et mis à part cela, s'agissant de ceux qui avaient
13 leurs familles en Croatie, des femmes et des enfants, ces familles auraient
14 été privées de leurs soldes.
15 Q. Bien, Général. Examinons maintenant le document suivant. Il s'agit du
16 document P 153. Il s'agit encore une fois d'une lettre envoyée par le
17 général Petar Stipetic. Pouvez-vous nous dire à qui ce document a-t-il été
18 adressé ?
19 R. A l'adjoint de la zone opérationnelle de Rijeka.
20 Q. Ici dans le premier paragraphe, l'on mentionne à la fois les Croates et
21 les Musulmans qui souhaitent partir en tant que volontaires afin de
22 défendre la Bosnie-Herzégovine.
23 Général, dites-nous s'il vous plaît, d'après votre propre expérience, est-
24 ce que vous traitiez de la même manière les soldats croates et les soldats
25 musulmans qui souhaitaient partir en Bosnie-Herzégovine, ou bien est-ce que
26 vous faisiez une distinction entre les deux ?
27 R. Dans mon unité, j'avais environ 20 à 30 % de Croates originaires de la
28 Bosnie-Herzégovine, et j'avais des Musulmans aussi, Musulmans qui avaient
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1 vécu soit en Croatie, soit venant de la région de la Bosnie-Herzégovine, et
2 je ne faisais aucune distinction pour ce qui est de ma position à l'égard
3 de cette approbation.
4 Q. Examinons le document suivant traitant du même sujet. Il s'agit de
5 3D299.
6 Il s'agit d'un document émanant du colonel Hasan Efendic émanant d'un
7 bureau de la République de Bosnie-Herzégovine, ceci a été envoyé au
8 ministère de la Défense de la Croatie.
9 Il y est demandé de permettre d'engager trois officiers dont les noms sont
10 énoncés, officiers de l'armée croate, afin de participer à la défense de la
11 Bosnie-Herzégovine, même s'il est difficile de tirer des conclusions sur la
12 base des noms de personnes concernant l'appartenance ethnique des
13 personnes, que nous diriez-vous sur la base des noms, qu'elle serait
14 l'appartenance ethnique de ces personnes à votre avis ?
15 R. Ces trois personnes sont pratiquement certainement d'appartenance
16 ethnique musulmane.
17 Q. Dans le dernier paragraphe, il est dit que :
18 "On demande de régler le statut de ces officiers de la même manière que
19 jusqu'à présent, en les gelant et en leur permettant d'être réengagé au
20 sein de l'armée croate après que la mission aura été accomplie."
21 Dites-nous, Général, si vous deviez interpréter ces propos-là, qu'auriez-
22 vous dit sur la base du fait que les soldats originaires enfin les soldats
23 d'origine musulmane demandaient eux aussi permission de partir afin de
24 participer à la défense de la Bosnie-Herzégovine ?
25 R. Compte tenu de la date, il s'agissait d'une période, d'un moment où la
26 Croatie permettait depuis plusieurs mois déjà le départ des hommes en
27 Bosnie-Herzégovine, puisque visiblement ils y étaient nécessaire, l'on
28 avait besoin d'eux là-bas, et visiblement ce document fait référence à
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1 cette pratique et demande que les mêmes conditions s'appliquent, à savoir
2 que le statut au sein de l'armée croate reste, afin de permettre à ces
3 personnes de poursuivre leur carrière au sein de l'armée croate, une fois
4 la mission accomplie.
5 Q. Pour terminer, Général, au cours de cette période en 1992, est-ce que
6 vous avez eu des connaissances ou des observations vous indiquant qu'il y
7 aurait une discrimination vis-à-vis des soldats musulmans au sein de
8 l'armée croate qui souhaitaient rejoindre les rangs de la Défense
9 territoriale et plus tard de l'ABiH ?
10 R. Absolument pas. J'avais un adjoint ou plutôt le chef du génie militaire
11 au sein de la brigade qui avait demandé, au bout de huit mois passés dans
12 mon unité, de partir à Sarajevo. Il a reçu la permission. Il n'a même pas
13 demandé que l'on gèle son statut, il a simplement dit qu'il allait passer
14 du côté de l'ABiH, et il a obtenu permission avec tous les certificats
15 concernant son statut au sein de l'armée croate jusqu'à ce moment-là. Donc
16 il est parti avec toutes les autorisations nécessaires, il n'y a pas eu de
17 problème.
18 Q. Bien. Nous allons traiter maintenant d'un autre sujet --
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Je reste sur ce document. Ce document est daté du 4
20 janvier 1993. La date est importante. Il est signé par le colonel Hasan
21 Efendic. Si je ne m'abuse, le colonel Hasan Efendic a été le commandant de
22 la Défense territoriale de la République de Bosnie-Herzégovine avant d'être
23 remplacé par Halilovic. Est-ce bien le même à votre connaissance ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je ne suis pas au courant des détails
25 liés à leurs fonctions. Je ne suivais pas cela de près, donc je ne sais
26 pas.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne savez pas. Bien. Ce document établit que la
28 République de Bosnie-Herzégovine avait un bureau à Zagreb, dont on a
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1 l'adresse, Savska Cesta, numéro 41, un numéro de téléphone. Et ce document
2 établit qu'il y a une demande d'assistance formée auprès du ministère de la
3 Défense croate pour que celui-ci détache trois personnes qui vont garder
4 leur statut au sein de l'armée croate.
5 A votre connaissance, fin 1992, début janvier 1993, l'armée croate
6 fournissait-elle à la demande de la République de Bosnie-Herzégovine des
7 soldats et des officiers, ou bien, à votre connaissance, fin 1992, début
8 1993 - il y a une erreur au transcript, j'avais dit fin 1992 et début 1993
9 - est-ce que l'armée croate en réalité envoyait des soldats et des
10 officiers uniquement pour renforcer le HVO contre l'ABiH ? Quelle est pour
11 vous la situation ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] A cette époque-là, j'étais engagé aussi avec
13 la 4e Brigade des Gardes, et par la suite aussi avec la 116e Brigade dans la
14 région de l'Herzégovine orientale. Donc avec mon unité, j'ai été sur le
15 territoire de la République de Bosnie-Herzégovine. En profondeur, je suis
16 allé d'après mes estimations jusqu'à environ 20 à 25 kilomètres.
17 Je continue. Je suppose que vous souhaitez savoir à quoi ressemblait la
18 situation, non pas dans cette zone --
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne comprends pas qu'il y ait des erreurs. Vous
20 avez dit 20 à 25 kilomètres. Et là, il y a "20 à 25 mètres." Il faut faire
21 plus attention. Tout ce que dit un témoin c'est important. C'est 20 à 25
22 kilomètre ou 20 à 25 mètres ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Kilomètres.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut faire très attention. Bien. Alors continuez.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose que votre question ne porte pas
26 dans l'essentiel à cela mais qu'elle concerne la question de savoir si l'on
27 permettait aux membres de l'armée croate de partir plus en profondeur de
28 manière organisée ou individuelle sans égard au maintien de la ligne de
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1 front dans cette partie frontalière avec la Croatie. Oui, je sais qu'il y a
2 eu un certain nombre de départs, c'est-à-dire que l'on laissait les
3 personnes partir suite aux pressions exercées par ces personnes-là, car les
4 personnes en question nous présentaient des arguments, et je ne sais pas si
5 j'ai eu tort ou pas, à vous de juger, mais je considérais que je n'avais
6 pas d'autres issues que de laisser partir ces personnes-là. Parfois même de
7 manière organisée, car je considérais qu'ils avaient plus de chance de
8 survivre ainsi et aussi de nous aider à résoudre la situation. Je vous
9 parle sur la base de mon expérience.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : -- parce que vous développez alors qu'il y a des
11 points essentiels qui doivent apparaître.
12 Quand vous êtes 20 à 25 kilomètres en profondeur, c'est quelle date
13 exactement ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle de la période allant du début,
15 première moitié de 1992 jusqu'à pratiquement jusqu'à la fin de la guerre
16 lorsqu'il est question du front sud, sachant que cette profondeur s'est
17 réduite à une profondeur de 2 à 4 kilomètres à certains endroits.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites "jusqu'à la fin de la guerre," quelle
19 date ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Jusqu'à la fin de 1995, je parle du mois de
21 septembre, octobre.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, vous nous dites sous la foi du serment, que
23 votre unité était en profondeur sur le territoire de la République de
24 Bosnie-Herzégovine. Vous nous dites sous la foi du serment, vous étiez 20 à
25 25 kilomètres et ça s'est réduit jusqu'à 4 kilomètres.
26 Alors, ma question est la suivante : Quand vous avez eu l'ordre d'aller là-
27 bas, d'aller dans un autre pays qui n'est pas la République de Croatie,
28 qu'est-ce qu'on vous a dit ? Vous allez là-bas pour faire face aux Serbes,
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1 ou bien pour attaquer les Musulmans ? Quel était l'ordre militaire précis
2 que vous aviez pour vous trouver dans un pays étranger en profondeur ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] L'ordre était celui de défendre le territoire
4 de la République de Croatie, et d'après les cartes géographiques qui font
5 partie intégrante des ordres, il apparaissait avec évidence que l'intention
6 était celle d'occuper des positions partant desquelles il est possible de
7 manœuvrer suffisamment en profondeur pour défendre un territoire
8 relativement étroit du territoire de la Croatie se trouvant entre la
9 frontière de l'Etat et le littoral.
10 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous le
11 permettez, je voudrais dire ce qui suit. Tout ceci, on l'a dessiné sur des
12 cartes, on va vous le montrer. On va vous montrer des documents et on
13 s'efforcera de vous expliquer les raisons et la légitimité de cette façon
14 de penser.
15 Mais je crois que l'heure est venue de faire la pause.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Effectivement, l'heure est venue. Donc on va faire
17 20 minutes de pause.
18 --- L'audience est suspendue à 15 heures 51.
19 --- L'audience est reprise à 16 heures 12.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.
21 Mon Général, avant de donner la parole à Me Alaburic, j'aurais une question
22 de suivi. Vous nous dites que vous étiez à 20, 25 kilomètres en profondeur.
23 Dans la zone où vous étiez, est-ce que dans cette surface il y avait des
24 civils ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Sur ce territoire, il y avait des civils
26 aussi.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il y avait des civils qui n'avaient pas la
28 nationalité croate. C'étaient des civils de la République de Bosnie-
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1 Herzégovine.
2 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, peut-être le savez-vous ou ne le savez-vous
4 pas. Si vous le savez, tant mieux, ça sera plus simple; si vous ne le savez
5 pas, je vais vous l'apprendre. Il y a un règlement de La Haye qui date du
6 début du XXe siècle, de 1907, l'article 42 de ce Règlement dit ceci, je
7 vais le citer lentement :
8 "Un territoire est considéré comme occupé lorsqu'il est placé de fait sous
9 l'autorité de l'armée ennemie. L'occupation ne s'étend qu'au territoire où
10 cette autorité est établie et en mesure de s'exercer."
11 Est-ce que quand vous, vous occupiez en profondeur ces 20 ou 25 kilomètres,
12 vous aviez le sentiment d'exercer l'autorité ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans une partie, en ma qualité de commandant
14 d'unités, je me suis trouvé dans des situations où j'étais censé trancher
15 des questions que l'on pourrait qualifier d'être liées à l'autorité ou au
16 pouvoir, tout en m'efforçant de faire en sorte de laisser la chose ou de
17 confier la chose le plus tôt possible aux autorités civiles, si
18 l'organisation était perturbée.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, je continue ma question. Il y a un
20 autre article de ce règlement de 1907, l'article 43, que je vais vous lire
21 :
22 "L'autorité du pouvoir légal ayant passé de fait entre les mains de
23 l'occupant, celui-ci prendra toutes les mesures qui dépendent de lui en vue
24 de rétablir et d'assurer autant qu'il est possible l'ordre et la vie
25 publique en respectant, sauf empêchement absolu, les lois en vigueur dans
26 le pays."
27 Donc quand vous, vous étiez en profondeur, est-ce que vous avez pris des
28 mesures pour rétablir l'ordre et la vie publique dans cette zone ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors je termine. Comme vous le savez, des
3 officiers de l'armée allemande ont été jugés par des tribunaux américains
4 et il y a un célèbre arrêt, US contre Paul, qui dit ceci, je vais en citer
5 un petit bout, et vous allez comprendre :
6 "Le droit de la guerre impose à tout officier militaire occupant une
7 position de commandement l'obligation positive de prendre toutes les
8 mesures qui sont en son pouvoir et appropriées aux circonstances afin de
9 contrôler ceux qui sont sous son commandement ainsi que prévenir les actes
10 susceptibles d'entraîner les violations du droit de la guerre."
11 Alors vous-même, quand vous étiez en territoire étranger, en profondeur,
12 est-ce que vous avez pris des mesures à l'égard de vos propres soldats pour
13 que ceux-ci ne commettent pas des actes contraires au droit de la guerre ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Pour toutes situations prévisibles, j'ai
15 entrepris ce type de mesures, et je n'ai pas eu besoin de prendre des
16 mesures à titre complémentaire parce que je n'ai pas eu de cas de
17 violations disciplinaires de nature à faire souffrir qui que ce soit, et
18 encore moins les civils.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Vos réponses sont précises. Je vais
20 terminer par une simple question. Quand vous, vous occupiez ce territoire
21 de 20, 25 kilomètres, est-ce que dans cette zone il y a eu des combats ?
22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, je vous pose cette question de savoir
24 s'il y a eu des combats parce que, quand la Belgique a été occupée par
25 l'Allemagne, les zones de responsabilité ont été divisées en trois : les
26 zones où il y avait des combats et là, l'autorité était l'autorité
27 militaire à 100 %; puis une seconde zone qui était une zone de réserve, où
28 l'autorité s'exerçait conjointement avec l'autorité militaire et des
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1 autorités civiles; et puis, une troisième zone qui était le reste de la
2 Belgique, où là, c'était une autorité civile occupante qui gérait tous ces
3 problèmes. Donc moi, c'est pour ça que je vous demande dans votre zone, y
4 avait-il des combats, vous m'avez dit oui. Et, dans cette zone où il y
5 avait des combats, est-ce que vous estimez à votre niveau que vous étiez le
6 seul responsable à l'exclusion d'une autorité civile autre que la vôtre ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Mes opérations et mes activités de combat,
8 celles que j'ai eues à entreprendre là-bas, se sont déroulées en
9 coopération avec la population locale, et je n'ai pas eu la totalité des
10 éléments d'une autorité d'occupation, et je n'ai d'ailleurs pas eu à
11 exercer ce type d'autorité.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Maître Alaburic.
13 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je dois vous dire
14 que vous venez de toucher absolument la totalité des sujets que je voulais
15 aborder à l'occasion de mon interrogatoire principal. Alors, je vais
16 demander aux Juges de nous faire confiance. Nos témoins, nous allons les
17 interroger en application des conventions de La Haye, régissant les
18 principes d'occupation et nous allons nous efforcer, de façon honorable et
19 franche, d'indiquer la totalité des circonstances que nous trouvons
20 pertinentes.
21 Et avant que je n'entame une autre ligne de questions, je voudrais
22 intervenir au niveau du compte rendu d'audience. La question de M. le Juge
23 Antonetti, page 29, elle s'est rapportée au fait de voir la Croatie envoyer
24 des soldats et des officiers en Bosnie-Herzégovine. Le témoin a commencé à
25 répondre à la page 29, lignes 12, 13 et 14, mais on n'a pas consigné une
26 partie de sa réponse, à savoir que la Croatie, s'agissant de ces soldats et
27 de ces officiers, avait donné une approbation pour ce qui est d'aller en
28 Bosnie-Herzégovine. Alors, nous allons réaménager le compte rendu, mais je
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1 crois qu'il était important de le dire pour bien comprendre le contexte.
2 Q. Alors M. le Juge Antonetti vous a fait parcourir tous les sujets
3 cruciaux, mais en recourant aux documents et aux cartes, nous allons
4 essayer de démontrer ce que vous venez de nous indiquer.
5 Alors, Monsieur Beneta, nous avons eu un expert militaire en matière de
6 défense, pour ce qui est de la Défense de M. Praljak et M. Petkovic, et
7 dans son expertise, 4D1731, il nous a indiqué que dans certaines
8 circonstances, un état a le droit d'entrer sur le territoire d'un autre
9 état, si l'état en question est attaqué à partir du territoire de cet autre
10 état.
11 Alors, dans la filière de ce principe, je vais vous poser une
12 question concrète. Supposons que la République de Croatie est ciblée depuis
13 le territoire de la Bosnie-Herzégovine, par exemple depuis les environs de
14 Trebinje - il s'agit de l'armée de la Republika Srpska, nous allons définir
15 les choses de façon précise pour avoir plus de facilité de compréhension -
16 et celle-ci s'attaque à la République de Croatie.
17 Alors dites-nous, en application d'une chose normale, à quoi doit-on
18 s'attendre de la part de la République de Croatie pour que soient
19 interrompues les attaques depuis le territoire de la Bosnie-Herzégovine
20 vers le territoire de la Croatie ?
21 R. Il convient de faire justement ce que j'ai eu comme mission par voie de
22 conséquence, à savoir repousser toute menace et l'étouffer dans la racine,
23 c'est-à-dire entrer dans le territoire depuis lequel on attaque jusqu'au
24 point où l'on peut s'assurer que les attaques ne se feraient plus. Donc il
25 s'agit d'éliminer les sources du danger, ou l'origine du péril.
26 Q. Général, veuillez nous indiquer ce qui suit : en application du droit
27 international, du moins tel que présenté dans les manuels de l'armée
28 populaire yougoslave, que considère-t-on être le théâtre des combats ?
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1 R. Le théâtre des combats, c'est le territoire entier couvert par les
2 parties belligérantes. Donc ce sont les territoires de l'état A et de
3 l'état B, si l'état A et l'état B sont en guerre.
4 Q. Si maintenant nous prenions le territoire de la Bosnie-Herzégovine, des
5 environs de Trebinje, à partir desquels on attaque depuis la Bosnie-
6 Herzégovine pour le définir comme étant théâtre de combat, serait-il juste
7 de dire que le territoire de la République de Croatie, qui est le
8 territoire attaqué ainsi que le territoire de la Bosnie-Herzégovine à
9 partir duquel on attaque, doit-il être considéré oui ou non comme étant un
10 théâtre de combat unique ?
11 R. Oui, parce que le territoire de la Bosnie-Herzégovine et celui de la
12 République de Croatie constitue un théâtre de combat.
13 Q. Bon. Penchons-nous sur le tout premier document que vous avez dans le
14 4D1483. Il s'agit d'une carte avec présentation des plannings de l'armée
15 populaire yougoslave, datée de mai 1991. C'est M. Milan Gorjanc qui a
16 établi cette carte, l'expert militaire. Et on voit là que le plan était à
17 partir du nord en passant par Livno et allait en direction de Split; et
18 dans le secteur de Split, coupait le territoire de la République de Croatie
19 pour isoler complètement les territoires plus au sud par rapport à Split.
20 Le plan était aussi d'aller du côté sud pour emprunter l'axe Stolac et le
21 reste de l'Herzégovine pour aller vers la mer, et faire en sorte que se
22 rejoignent les forces de la JNA depuis le nord et depuis le sud pour isoler
23 complètement la Bosnie-Herzégovine par rapport à la République de Croatie.
24 Alors, Général Beneta, ma question est la suivante : Avez-vous eu des
25 informations disant que l'armée populaire yougoslave, mi-1991, avait eu des
26 plans d'activité de combat de cette nature pour ce qui est de cette partie-
27 là de la Bosnie-Herzégovine et de la Croatie ?
28 R. Oui. J'ai eu ces informations, car l'un de mes assistants, l'actuel
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1 général Mirko Sundov, avait travaillé au sein de la Défense territoriale
2 avant le début de la guerre, et il parlé de ce plan comme étant le plan S2,
3 établi avec pour motif qui est le suivant, dans le cas où il y aurait eu
4 attaque de la Yougoslavie à partir de là. Mais il est clair que là, il
5 s'agit d'un plan militaire visant à accéder aux territoires de la
6 République de Croatie.
7 Q. Si on retourne maintenant au mois d'avril 1992, date à laquelle
8 beaucoup de soldats de la République de Croatie, originaires de la
9 République de Bosnie-Herzégovine voulaient aller là-bas pour défendre leur
10 pays d'origine, est-ce que les activités déployées par l'armée de la
11 Republika Srpska se sont déroulées de façon très similaires à ce qu'on a
12 montré pour la partie nord de cette carte, donc pour ce qui s'est de ces
13 axes Kupres, Livno ?
14 R. Pour ce qui est de cette partie plus haut, je n'y ai pas participé en
15 personne. Ce que je sais, cependant, c'est qu'il y a eu des manœuvres des
16 effectifs de la JNA qui ont eu lieu aux fins de concentrer les effectifs
17 dans le secteur de Kupres. Et on s'est efforcé de faire en sorte qu'il y
18 ait le plus possible d'effectifs à acheminer vers ce secteur dans l'attente
19 de ce qui se passerait.
20 Q. Maintenant je voudrais que vous vous penchiez sur le 4D1351 --
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, j'ai la carte sous les yeux, comme tout le
22 monde, et on peut la voir. Me Alaburic nous a dit que c'est une carte qui
23 était un plan d'intervention, mai 1991. Et puis elle vous a demandé si, en
24 avril 1992, la Republika Srpska avait le même plan. Vous avez dit que vous
25 n'en savez rien, mais que j'ai cru comprendre que ça aurait été normal que
26 la Republika Srpska fasse la même action Kupres, Livno.
27 Alors, quand je vois cette carte, j'ai écouté tout à l'heure ce que vous
28 avez dit sur le champ de bataille unique en disant République de Croatie et
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1 Bosnie-Herzégovine, c'est un champ de bataille. Est-ce à dire à ce moment-
2 là que pour la République de Croatie puisse se défendre, elle était dans
3 l'obligation militaire - j'insiste sur le mot - de pénétrer dans la
4 République de Bosnie-Herzégovine en profondeur, sinon, elle allait être en
5 difficulté et peut-être, comme on le voit sur la carte, être prise en
6 tenailles ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais attirer l'attention des Juges sur
8 le fait qu'une partie de ce planning, on en a pris connaissance au travers
9 des étapes de la JNA, à savoir la flèche qui est en bas au sud montrant la
10 localité de Slano, ça, c'est déjà produit au mois d'octobre 1991, et ce
11 n'est que par la suite que les forces croates qui étaient en état d'être
12 mises sur pied sont devenues à même de grandir et de stopper la percée.
13 L'intervention des unités où j'étais chef d'état-major, voire commandant
14 d'une brigade, ça s'est produit après qu'il y ait eu occupation du sud de
15 la Croatie du point de vue de la réalisation de ce plan, en particulier du
16 fait que l'on avait coupé Dubrovnik. Et moi, je me suis trouvé dans une
17 situation où le sud de la Croatie était occupé, exception faite de la ville
18 de Dubrovnik même, qui s'est défendue jusqu'à dans ces banlieues.
19 Pour ce qui est de la partie nord dans le secteur de Kupres, il y a
20 tout un corps d'armée et on pouvait le voir, on ne pouvait pas dissimuler
21 autrement, on a pu voir le déplacement d'une brigade blindée en direction
22 de Kupres, qui plus haut, n'avait aucune installation d'hébergement sous
23 forme de caserne. Mais c'est ad hoc qu'on a transféré ces effectifs pour
24 créer des conditions propices à la conduite de quelque chose de tout à fait
25 similaire au planning qui est celui de la JNA, et ce, avant le début même
26 de la guerre en tant que telle.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pour terminer, en vous écoutant, si les forces
28 serbes étaient arrivées jusqu'à Split, doit-on en déduire que sur le plan
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1 militaire la République de Croatie aurait été alors là en péril ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela signifierait l'occupation, et là, je vais
3 faire une estimation grossière, 12 ou 15 à 20 % du territoire de la
4 République de Croatie. On avait eu une situation analogue en Slavonie dans
5 le secteur de Vukovar, en particulier. Tout ceci mettait en péril l'intérêt
6 national principal de la République de Croatie, à savoir son intégrité
7 territoriale et sa souveraineté.
8 Mme ALABURIC : [interprétation]
9 Q. Veuillez nous indiquer à présent, Mon Général, ce qui suit. Quelle
10 était la seule façon de procéder pour la Croatie aux fins de libérer cette
11 partie sud occupée, les environs de Dubrovnik et plus au sud encore, aux
12 fins de se protéger vis-à-vis d'une agression éventuelle pour ce qui est du
13 territoire allant de Split et vers le sud de Split ? Alors, comment
14 pouvait-on faire pour protéger la République de Croatie ?
15 R. La seule façon possible était celui de l'intervention militaire. Et je
16 dois souligner que dans ce secteur plus bas, donc plus bas que Ston et
17 Slano en allant vers le sud, cette intervention militaire était telle à la
18 limite de l'impossible, si l'on ne devait se restreindre qu'aux territoires
19 qui se trouvent entre le littoral d'une part et la frontière de l'Etat
20 d'autre part.
21 Q. Mon Général, quelle est la largeur de ce territoire ?
22 R. Dans cette partie-là du territoire, la largeur est de 5 kilomètres,
23 mais en moyenne; enfin, il y a des fois 15 kilomètres mais des fois 800
24 mètres seulement.
25 Q. Dites-moi, Général, s'agit-il d'un territoire montagneux ou d'un
26 territoire plat ?
27 R. Il s'agit d'un territoire vallonné ou montagneux qui n'a qu'un seul axe
28 de communication, une seule route dont toute la surface se trouve sur le
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1 territoire de la République de Croatie, plus une route couverte de macadam
2 et qui passe par la montagne dont une partie se trouve sur le territoire de
3 la République de Croatie et l'autre sur le territoire de la Bosnie-
4 Herzégovine.
5 Q. Si je vous ai bien compris, la Croatie n'avait pas d'autre moyen de se
6 défendre que d'ordonner à son armée de pénétrer sur le territoire de la
7 Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas, c'est bien ça ?
8 R. C'est exactement ça.
9 Q. Je vous prierais maintenant de vous pencher sur la carte 4D1351. Vous
10 devriez l'avoir sur votre écran.
11 Mme ALABURIC : [interprétation] Et je demanderais que l'on remettre au
12 témoin un marqueur ou un stylet.
13 Q. Général, cette carte, si tout va bien, montre le déploiement des forces
14 du HVO, puis le déploiement des forces de l'armée croate qui s'opposaient à
15 l'armée de la Republika Srpska et à l'armée populaire yougoslave, et ce, en
16 date du 30 avril 1992.
17 Lorsque nous nous sommes rencontrés pour la préparation de votre
18 témoignage, nous avons regardé cette carte. Donc vous la connaissez. Alors
19 Général, veuillez me dire pour commencer si, d'après ce que vous savez,
20 cette carte correspond bien à la réalité du déploiement des unités de
21 l'armée croate ce jour-là dans le territoire ?
22 R. Excusez-moi, quelle est la date que vous avez citée ?
23 Q. Le 30 avril 1992.
24 R. Oui, cette carte rend bien compte de ce déploiement.
25 Q. Pourriez-vous, sur cette carte à présent, annoter l'endroit exact où se
26 trouvait votre commandement. Si je ne m'abuse, vous faisiez encore partie
27 de la 4e Brigade des Gardes à ce moment-là, n'est-ce pas ?
28 R. Oui. Le commandement de la brigade était stationné à Hutovo que
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1 j'indique sur la carte.
2 Q. Veuillez apposer le chiffre 1 à côté de votre annotation, je vous prie.
3 R. [Le témoin s'exécute]
4 Mme ALABURIC : [interprétation] Vous avez inscrit le numéro 1 à côté de la
5 localité dont le nom est Hutovo qui abritait le poste de commandement de la
6 4e Brigade des Gardes, ce jour-là, dont le témoin était le commandant. Je
7 demanderais qu'un numéro IC soit donné à cette carte.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Numéro IC, s'il vous plaît.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] La carte annotée du document 4D 1351
10 recevra la cote IC 1096. Je vous remercie.
11 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci bien. A présent, je prierais M.
12 l'Huissier de bien vouloir remettre la carte que j'ai entre les mains au
13 témoin avant de la placer sur le rétroprojecteur.
14 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le témoin a élaboré cette carte
15 à votre intention pendant la préparation de sa déposition. Nous avons agi
16 ainsi pour raccourcir le taux des débats dans le prétoire. Cette carte est
17 identique à celle que nous examinions il y a un instant, et à présent nous
18 allons voir quels ont été les combats qui se sont déroulés dans ce
19 territoire jusqu'à la mi-1992.
20 Q. Général, vous voyez les lettres A, B et C qui désignent certains
21 territoires sur cette carte.
22 Mme ALABURIC : [interprétation] Apparemment nous avons un problème avec le
23 rétroprojecteur. Dans ces conditions, nous allons poursuivre et si le
24 problème se règle, nous reviendrons sur ce sujet plus tard.
25 Q. Bien. Les Juges de la Chambre ont cette carte sous les yeux et
26 d'ailleurs le rétroprojecteur a peut-être commencé à fonctionner entre-
27 temps; Général, je vous pose la question suivante : Que souhaitiez-vous
28 indiquer par cette carte ? Quel est le sens à donner aux lettres A, B et C
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1 ?
2 R. La lettre A au sud désigne le territoire que les 4e et 1ère Brigades de
3 l'armée de Croatie ont libéré fin mai, début juin --
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, nous n'avons pas la
5 carte. Nous ne la voyons pas, je pense. Donc, il est très difficile de
6 suivre.
7 Mme ALABURIC : [interprétation] Dans ces conditions, nous allons revenir
8 sur ce sujet plus tard, après réparation du rétroprojecteur. Mais en tout
9 cas, ce que je souhaitais indiquer à l'intention des Juges, c'est que cette
10 carte montre les territoires qui ont été libérés au sud des territoires de
11 la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine dans une partie; puis dans une autre
12 partie de la carte, on voit les territoires libérés à l'issue de
13 l'opération menée par le témoin à Stolac. C'est un territoire qui couvre 25
14 kilomètres en profondeur.
15 Mais nous reviendrons sur ce sujet plus tard et j'espère que le
16 rétroprojecteur sera réparé.
17 Q. Général, la dernière opération qui est désignée sur cette carte est
18 l'opération qui a permis la libération de Stolac. Général, quand vous
19 parliez d'un territoire dont la superficie couvrait 20 à 25 kilomètres en
20 profondeur et dans laquelle étaient engagées les forces de l'armée de
21 Croatie, pensiez-vous à ces opérations précisément, à savoir les opérations
22 qui ont permis la libération de Visoravan et Bravka Dubrovnik [phon] et
23 Stolac ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que vous avez mené ces opérations en coopération avec la Défense
26 territoriale ?
27 R. Oui.
28 Q. J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur le document suivant
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1 qui est la pièce P 339. Il s'agit d'un accord d'amitié et de coordination
2 signé par Alija Izetbegovic et Franjo Tudjman le 21 juillet 1991. Général,
3 est-ce que cette date est ultérieure à toutes les opérations de libération
4 dont nous venons de parler ?
5 R. Oui.
6 Q. Revenons à présent à la carte que nous pouvons voir maintenant sur le
7 rétroprojecteur.
8 Mme ALABURIC : [interprétation] Remontons un peu la carte sur l'écran pour
9 la voir entièrement.
10 Q. Dites-moi, Général, vous avez désigné un territoire à la lettre A,
11 l'initiale A.
12 R. Le territoire que vous voyez ici et le territoire qui se trouve là ont
13 été libérés à l'issue de la même opération par les forces de l'armée de
14 Croatie qui faisaient mouvement vers Dubrovnik. Cette libération a eu lieu
15 dans la période allant du 28, 29 mai au 4 juin 1992.
16 Q. Très bien. Qu'en est-il du territoire désigné par l'initiale B ?
17 R. Le territoire désigné par B est un territoire qui a été libéré aux
18 environs du 6 juin 1992, à un jour près, donc très peu de temps après la
19 libération des territoires désignés par la lettre A. Cette libération s'est
20 faite également dans le cadre d'une coopération entre les forces de l'armée
21 de Croatie et le HVO.
22 Q. Les soldats musulmans et les habitants, la population musulmane, ont-
23 ils coopéré avec vous ou pas ?
24 R. Dans le territoire désigné par A, il n'y avait guère de population
25 musulmane. Dans le territoire désigné par B, je ne saurais répondre
26 personnellement à votre question car je ne suis pas intervenu dans ces
27 opérations-là.
28 Q. Veuillez nous dire maintenant ce qu'il en est du territoire désigné par
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1 C.
2 R. Ce qui s'est passé, les combats qui ont eu lieu dans le territoire
3 désigné par C, c'est moi qui les ai dirigés. Je l'ai fait grâce à un
4 bataillon qui était composé d'habitants de Stolac et de la région, en tout
5 cas de représentants de la population locale.
6 Q. Quelle était leur appartenance ethnique ?
7 R. Ces personnes étaient principalement d'appartenance ethnique croate car
8 lorsque les Serbes ont pénétré dans les territoires où ils habitaient,
9 notamment à Stolac et Domanovici, toutes ces personnes ont été expulsées et
10 ont fini par constituer une formation militaire dont les effectifs étaient
11 ceux d'un bataillon. Ce bataillon était désormais prêt à se battre pour la
12 libération des localités où tous ces hommes habitaient afin de les libérer.
13 Q. Est-ce que des habitants de Stolac d'appartenance ethnique musulmane
14 ont rejoint ce bataillon ?
15 R. L'opération s'est menée dans les conditions suivantes : au cours de la
16 nuit du 11 juin 1992, 200 hommes ont reçu l'autorisation de pénétrer dans
17 Stolac grâce à l'aide de la population musulmane qui était restée à Stolac
18 et qui était désormais sous occupation serbe.
19 Q. Nous allons revenir sur les détails plus tard. Pour le moment, ce qui
20 m'importe, c'est de parler des opérations menées conjointement par les
21 Croates et les Musulmans.
22 Sur le territoire désigné par C, ce territoire a bien été libéré
23 également en juin 1992, n'est-ce pas, Général ?
24 R. Oui, entre le 13 et le 15 juin, à peu près.
25 Q. Je demande que vous inscriviez la date sur la carte et que vous la
26 signiez, et je demande un numéro IC.
27 R. [Le témoin s'exécute]
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur l'Huissier, pourrions-nous avoir un numéro,
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1 s'il vous plaît.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Messieurs les Juges. La deuxième
3 version annotée aura la cote numéro IC 1097. Merci, Messieurs les Juges.
4 Mme ALABURIC : [interprétation]
5 Q. Général, nous allons maintenant revenir sur la pièce P 339 dont j'avais
6 parlé tout à l'heure, cet accord d'amitié et de coopération signé par
7 Izetbegovic et Tudjman le 21 juillet 1992.
8 Autrement dit, à peu près un mois après toutes les opérations de
9 libération dont nous venons de parler. C'est le point 8 de ce document qui
10 m'intéresse et que j'aimerais que nous examinions ensemble, Général. Au
11 point 8, il est constaté que l'agression des forces armées serbes et
12 monténégrines se poursuit contre la République de Bosnie-Herzégovine, mais
13 également en grande partie contre la République de Croatie, dans les
14 territoires de la République de Croatie qui sont frontaliers avec la
15 Bosnie-Herzégovine.
16 Voici ma question à présent, Général : A ce moment-là, est-ce que les
17 autorités qui étaient sous la direction d'Izetbegovic avaient la
18 possibilité d'intervenir dans les zones à partir desquelles la République
19 de Croatie était attaquée ?
20 R. Non. Dans cette période, et notamment lorsqu'on analyse tous les
21 événements de cette période, on constate qu'ils n'en avaient pas le pouvoir
22 à ce moment-là.
23 Q. Dites-moi, à ce moment-là, y a-t-il eu quelque opposition que ce soit
24 portant sur des combats menés conjointement par la République de Croatie,
25 le HVO, la Défense territoriale qui existait encore en Bosnie-Herzégovine,
26 sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ?
27 R. Non. Il n'y a eu aucune opposition à de telles interventions.
28 Q. Dites-moi, Général, du côté du gouvernement d'Alija Izetbegovic, la
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1 population musulmane dans ces régions ou de l'armée de Bosnie-Herzégovine,
2 y a-t-il eu quiconque qui ait considéré l'armée de Croatie à ce moment-là
3 comme un agresseur ?
4 R. Je peux dire que non, bien au contraire. La seule chose dont je me
5 souviens c'est de l'excellente coopération qui a eu lieu de la part de la
6 population musulmane comme de la part des autorités au pouvoir appartenant
7 aux deux groupes ethniques.
8 Q. Document 4D 1240. Il s'agit d'une directive venant de l'état-major du
9 commandement Suprême des forces armées de la Bosnie-Herzégovine, signée par
10 Sefer Halilovic.
11 Ce qui nous intéresse en cet instant dans ce document, Général, c'est le
12 paragraphe III, dans lequel sont définis les voisins, à savoir les forces
13 armées de la République de Croatie. Et ensuite, il est écrit que :
14 "Ces forces armées ont mené des actions offensives en vue de libérer
15 le territoire de certains secteurs en Croatie grâce à leurs forces qui
16 étaient engagées principalement dans les régions de Dubrovnik et qui ont
17 fait jonction avec nos forces dans la zone de Trebinje et Stolac en
18 particulier." C'est là que le texte qui m'intéresse s'arrête.
19 Général, je voudrais vous demander votre commentaire sur les
20 effectifs dépendant de l'état-major du commandement Suprême de l'ABiH.
21 R. Pour l'essentiel, ce qui est dit dans ce passage de texte est exact,
22 même si je relèverais peut-être personnellement, dire de façon un peu plus
23 précise. Dans ce paragraphe, on met l'accent sur un point un peu différent,
24 à savoir quand on lit ce paragraphe, on comprend que le vecteur principal
25 de ces actions était l'ABiH, alors qu'en fait je dirais que c'était
26 davantage l'armée de Croatie qui a fait un travail plus important.
27 Q. Mais il n'est pas contesté qu'il s'agissait d'une action conjointe
28 entre les Croates et les Musulmans, n'est-ce pas ?
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1 R. Absolument pas contesté.
2 Q. Je vous demanderais maintenant de vous pencher sur le document 4D 1353.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai remarqué un paragraphe qui peut être
4 intéressant. C'est à la page 4, III
5 "Les forces armées de la République de Croatie conduisent des
6 opérations offensives pour libérer leur territoire …"
7 Mon Général, ce document qui émane du commandement Suprême des forces
8 armées à Sarajevo semble reconnaître que la République de Croatie conduit
9 une opération militaire pour libérer son territoire. C'est écrit, oui ou
10 non ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exactement ce qui est écrit,
12 Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Puis, on voit qu'il y a une référence aux
14 villes de Trebinje et Stolac, puis la question du secteur de Dubrovnik.
15 Maître Alaburic.
16 Mme ALABURIC : [interprétation]
17 Q. Général, le Président M. le Juge Antonetti vient d'appeler votre
18 attention sur un certain nombre de localités, si nous voulions définir ces
19 localités d'après leur situation dans la guerre ou d'après leur situation
20 militaire, pourrait-on parler non seulement d'un théâtre d'opérations
21 unique, mais même d'un champ de bataille unique ?
22 R. Oui. C'est ce qui a été décrété comme étant le théâtre de guerre
23 méridional par le commandement croate et ce territoire couvre toutes ces
24 zones.
25 Q. Penchons-nous à présent sur le document annoncé tout à l'heure, à
26 savoir 4D 1353. C'est une carte qui a été élaborée sur la base de ce que
27 l'on peut lire dans le document signé par Sefer Halilovic, dont nous venons
28 de discuter. C'est le général Petkovic qui est à l'origine de l'élaboration
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1 de cette carte.
2 Général, je vous prierais à présent de bien vouloir, grâce au stylet,
3 comme tout à l'heure et donc, sur l'écran, de nous indiquer sur cette carte
4 ce qu'il en est de la situation à ce moment-là, à savoir au mois de
5 septembre 1992, où se trouvait votre armée, à savoir les unités de l'armée
6 de la République de Croatie à ce moment-là ?
7 R. Septembre 1992, à ce moment-là, l'armée de Croatie se trouvait dans ce
8 territoire-ci.
9 Q. Très bien. Pouvez-vous apposer les initiales HV et votre signature.
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Mme ALABURIC : [interprétation] Je demande un numéro IC pour cette carte.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro IC pour la carte.
13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. La version
14 annotée du document 4D 1353 aura la cote IC 1098. Merci, Monsieur le Juge.
15 Mme ALABURIC : [interprétation]
16 Q. Général, nous allons maintenant nous pencher sur deux documents. Nous
17 sautons un document dans le dossier et nous en examinons deux qui indiquent
18 quel était le sort que vivait votre unité à ce moment-là. D'abord, la pièce
19 P 326 qui est un ordre émis le 13 juillet 1992 et signé par Janko Bobetko
20 adressé au TG-2, "Colonel Beneta."
21 Quel est le contenu de cet ordre, Général ?
22 R. Dans cet ordre, il m'était ordonné de remettre les positions de la
23 défense au Conseil croate de Défense, les positions entourant Stolac. En
24 réalité, je devais transférer entre les mains du Conseil croate de Défense,
25 y compris l'unité qui occupait ces positions de défense autour de Stolac.
26 Q. Suite à la question de M. le Juge Antonetti, nous avons vu qu'en
27 partant du principe que vous seriez entré à Stolac en tant que représentant
28 des forces d'occupation, au sens juridique du terme, étant donné vos
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1 attributions de commandant, pouvez-vous nous dire dans ces conditions dans
2 le même ordre d'idée ce qu'il est advenu de vos attributions de commandant,
3 une fois que ce transfert a été effectué ?
4 R. Je n'ai plus eu aucune de ces attributions. J'ai transféré entre les
5 mains de la 1ère Brigade du HVO les positions que nous occupions
6 précédemment ainsi que l'unité qui occupait ces positions.
7 Q. Très bien. Document suivant, 4D 1406. C'est un ordre émanant de Milivoj
8 Petkovic qui date du 1er août 1992 et dans cet ordre, au paragraphe 1, nous
9 lisons qu'avant le 7 août 1992, les secteurs de défense correspondant aux
10 116e et 114e Brigades de l'armée de Croatie seront reprises par les unités
11 de Grude, de Ljubuski et de Citluk.
12 Que s'est-il passé suite à cet ordre ?
13 R. Oui, en effet, je connais cet ordre et en exécution de cet ordre, j'ai
14 remis également le secteur que je tenais au sud de Stolac qui est indiqué
15 sur la première carte par le "A" au nord. Ce territoire, je l'ai remis
16 aussi entre les mains du HVO et ce, jusqu'à Slano, donc, tous les
17 territoires à gauche et à droite de Zalava, quand on se dirige vers Popovo
18 Polje. C'est également un secteur que j'ai remis à la responsabilité du
19 HVO.
20 Q. Vous venez de parler de Slano. Cette localité se trouve sur le
21 territoire de quel état ?
22 R. C'est une localité voisine de la mer qui se trouve sur le territoire de
23 Croatie.
24 Mme ALABURIC : [interprétation] Je demanderais maintenant à M. l'Huissier
25 de montrer au témoin une autre avant de la placer sur le rétroprojecteur.
26 J'espère qu'il fonctionnera cette fois-ci.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous nous dites que vous avez remis au HVO
28 l'étendue de vos pouvoirs. Très bien. Le document est explicite. Mais la
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1 zone que vous occupez, c'est une partie de la République de Bosnie-
2 Herzégovine. Pourquoi vous ne remettez pas votre autorité dans les mains de
3 l'ABiH ? Pourquoi dans les mains du HVO ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] A cette époque-là, dans ce secteur, il n'y
5 avait absolument aucune présence de l'ABiH. Seules étaient présentes, là-
6 bas, les forces du Conseil croate de Défense.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : -- hypothèse d'école. Si l'ABiH avait été présente,
8 je dis bien "si," qu'auriez-vous fait ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je, avant de vous
10 répondre, vous relater une situation vécue par moi; après quoi, j'aimerais
11 vous répondre.
12 Au moment où j'étais en train de planifier l'opération destinée à libérer
13 Stolac, des gens d'appartenance ethnique musulmane qui étaient restés à
14 Stolac sous occupation serbe m'ont apporté leur aide et au moment où nous
15 étions en train d'établir notre défense, les Musulmans ont rejoint le
16 Conseil croate de Défense et ont défendu leur foyer. A un certain moment,
17 Mahmutcehajic, je connais son nom, a manifesté le désir de créer une unité
18 de l'ABiH à Stolac. Je lui ai facilité les choses à cette fin et j'ai
19 demandé qu'il prenne en charge une partie du front, une partie
20 correspondant aux effectifs humains composant l'unité qu'il s'apprêtait à
21 créer parce que je pensais que c'était juste.
22 Trois ou quatre jours plus tard, une trentaine de jeunes gens en
23 majorité musulmane sont arrivés dans le secteur de commandement que j'étais
24 en train de mettre en place pour demander à être versés dans les rangs de
25 cette unité que j'avais déployée sur les lignes de défense. Ils m'ont dit
26 qu'ils ne voulaient pas qu'une formation militaire soit créée par volonté
27 d'un individu et qu'ils se retrouvent sans armes, sans équipement, sans
28 uniformes, sans rien. Après les avoir entendus, j'ai convoqué l'homme dont
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1 j'ai parlé tout à l'heure et je lui ai demandé s'il exprimait toujours le
2 même désir qu'au départ ou s'il acceptait, lui aussi, de rejoindre les
3 forces qui assuraient la défense. Il a accepté de le faire et il est devenu
4 commandant adjoint chargé de la logistique dans le secteur de Stolac.
5 Personne n'aurait pu être plus heureux que moi si des forces
6 s'étaient constituées, des forces de l'ABiH à cet endroit, des forces bien
7 équipées, avec des effectifs suffisants pour se joindre à la défense parce
8 que mes hommes mourraient tous les jours.
9 Mais cette idée n'a pas réussi pas parce que je n'ai pas fait ce
10 qu'il fallait, mais parce que chacun souhaitait que l'armée qui s'occupe de
11 ce secteur soit la mieux formée, la plus entraînée et la mieux habillée et
12 la mieux équipée possible.
13 Mme ALABURIC : [interprétation]
14 Q. Merci, Général. Maintenant, nous pouvons nous pencher sur la
15 carte qui est sur le rétroprojecteur.
16 Dites-nous, Général, est-ce que c'est vous qui avez dessiné cette
17 carte, annoté cette carte pendant les préparations ces derniers jours ?
18 R. Oui.
19 Q. Pourriez-vous dire aux Juges ce que représente cette carte ?
20 R. Oui. La carte reflète la situation qui prévalait au mois de septembre
21 1992 et par la suite. Je l'ai divisée en deux parties ici. La première
22 partie, avec ces lignes, montre la région dans laquelle une unité de
23 l'armée croate avait encore ses positions. Très peu de temps après, au bout
24 d'un mois environ, cette unité-là aussi a remis cette zone de
25 responsabilité à une unité du HVO. Je pense qu'il s'agissait du Bataillon
26 Ravno, alors que l'unité de la HV s'est retirée dans cette partie avec les
27 lignes croisées. Ici, j'ai simplement marqué les parties frontalières qui
28 font partie de la Bosnie-Herzégovine. On longeait la frontière suivant les
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1 endroits d'importance stratégique des deux côtés et la défense se déroulait
2 pratiquement sans grand changement de cette manière-là jusqu'à la fin de la
3 guerre.
4 Q. Dites-nous, Général, la frontière entre la République de Croatie et la
5 Bosnie-Herzégovine est représentée par cette ligne noire, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Pourriez-vous nous dire également qu'elle est la largeur de ce
8 territoire en ce qui concerne le début de cette partie avec les lignes
9 croisées ?
10 R. De Slano, il fallait prendre une route en macadam pour monter une
11 colline. Il s'agit d'une distance d'environ un kilomètre et c'est là que la
12 frontière se trouve. Ensuite, nous avons un périmètre entre 4 kilomètres à
13 800 mètres jusqu'à Dubrovnik.
14 Q. Général, est-ce que vous pouvez répéter quel était le périmètre -- mais
15 je vois que l'erreur a été corrigée dans le compte rendu d'audience. Donc,
16 c'est 800 mètres.
17 Dites-nous, s'il vous plaît, le territoire dont vous parlez se trouve entre
18 la mer et la frontière avec la Bosnie-Herzégovine ?
19 R. Oui, je parle du territoire entre la mer et la frontière avec la
20 Bosnie-Herzégovine; or, les positions des forces croates étaient soit un
21 peu plus retirées au sud vers le territoire croate ou un peu plus avancées
22 d'une distance de 1 à 1,5 kilomètres. Ça dépendait de la topographie plus
23 que de la frontière physique car les soldats suivent leurs propres règles
24 d'action et ne peuvent pas prendre des positions dans une dépression,
25 simplement en raison du fait que la frontière la traverse.
26 Q. Peut-on définir pour les Juges, Général, la largeur de cette région à
27 l'intérieur du territoire bosniaque ? Quel est l'endroit le plus étroit et
28 quel est l'endroit le plus large ?
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1 R. L'endroit le plus large serait justement de Slano vers Zavala, autour
2 de 8 kilomètres, alors que la partie étroite serait de 100 mètres environ
3 de la frontière. Puis, il y avait des parties qu'on ne voit pas sur la
4 carte, des parties où la ligne de front allait à l'intérieur du territoire
5 croate, mais la raison en était liée à la topographie.
6 Q. [aucune interprétation]
7 R. [Le témoin s'exécute]
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Une question technique parce que je n'ai pas l'acte
9 d'accusation de Strugar sous les yeux quand il a bombardé Dubrovnik. Là, ce
10 que vous avez mentionné, c'était avant ou après le bombardement de
11 Dubrovnik ?
12 Vous avez compris ma question ? La carte que nous voyons où on voit
13 Dubrovnik avec la ligne de front, je veux savoir si c'est avant ou après le
14 bombardement de Dubrovnik.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, le bombardement de
16 Dubrovnik a duré pendant une période un peu plus longue. Par conséquent, je
17 ne pourrais pas vous donner la date exacte. Ici, nous voyons la situation
18 après que les forces croates ont débloqué Dubrovnik, levé le blocus de
19 Dubrovnik. Nous voyons à partir de Slano ou plutôt à partir de Ston, une
20 percée a été effectuée vers Slano ensuite vers Dubrovnik et ensuite, au
21 bout d'un certain temps, les conditions ont été réunies afin de pouvoir
22 reprendre les positions sans combat plus loin dans le sud avec un petit
23 accrochage et nous avons ici la situation suite à tout cela. C'est la
24 situation lors de laquelle les forces croates sont arrivées jusqu'à
25 l'endroit appelé Potovo Polje et ont pu contrôler, de manière efficace non
26 pas seulement, les forces d'infanterie et les repousser, mais aussi
27 contrôler l'artillerie de l'ennemi et l'empêcher de tirer sur Dubrovnik.
28 Or, ils ont continué à le faire en utilisant les calibres les plus gros,
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1 mais nous n'avons pas riposté de manière offensive.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous avez répondu à la question que
3 j'allais vous poser : Si l'armée croate n'avait pas été positionnée telle
4 qu'on la voit là, au-dessus de Dubrovnik, à ce moment-là, les forces serbes
5 auraient été à proximité de Dubrovnik et auraient pu mettre en péril
6 Dubrovnik. Vous avez dit que c'est la raison pour laquelle ils ont utilisé
7 de l'artillerie, mais de calibre plus important, pour bombarder Dubrovnik.
8 C'est ça que vous nous avez dit ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Ils ont continué l'artillerie lourde pour
10 pilonner Dubrovnik avant d'avoir libéré cette région, même en tirant
11 directement sur Dubrovnik car ils voyaient Dubrovnik. Ils utilisaient aussi
12 des calibres de moindre importance et ils ont réduit leurs tirs au gros
13 calibre seulement lorsque nous les avons repoussés plus loin de Dubrovnik
14 et d'autres zones urbaines de la région.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien - parce que c'est la première
16 fois que je m'intéresse à la situation de Dubrovnik - si l'armée croate
17 n'avait pas été là, à ce moment-là, Dubrovnik aurait été en péril parce que
18 les forces serbes auraient envahi le territoire de la République de Bosnie-
19 Herzégovine où il n'y avait pas l'ABiH et auraient pu, à ce moment-là, plus
20 facilement bombarder et attaquer Dubrovnik d'où la nécessité de la présence
21 de l'armée croate dans cette zone. Est-ce que c'est cela que vous voulez
22 nous dire ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est justement
24 l'essentiel de l'ensemble de la situation militaire. Non pas de ce que je
25 suis en train de dire, mais de la situation qui prévalait sur le terrain.
26 Dubrovnik était suspendu à un fil, littéralement. Le seul lien que nous
27 avions avec Dubrovnik, qui était une vieille ville croate, un monument de
28 la culture, c'était la nuit, par la mer, en utilisant des petits bateaux
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1 rapides, qui étaient plus rapides que les bateaux de la JNA qui bloquaient
2 Dubrovnik, même du côté de la mer.
3 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre,
4 Madame Alaburic, mais j'ai une petite question à poser, une question de
5 suivi. Nous avons ici sous les yeux une carte qui date du mois d'août 1992.
6 J'aimerais savoir - je ne connais pas très bien la situation de Dubrovnik -
7 la chose suivante. Lorsque le siège de Dubrovnik a été levé grâce à l'armée
8 croate, était-ce avant août 1992 ou était-ce après août 1992 que le siège
9 de Dubrovnik a été levé ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] L'opération offensive sur le front sud visant
11 à libérer Dubrovnik a commencé le 30 ou le 31 mai 1992. Elle a duré trois à
12 quatre jours, et une percée a été effectuée à travers les positions de
13 l'ennemi des deux côtés de la frontière que j'ai indiquée déjà, donc à
14 partir de la côte jusqu'à Popovo Polje, et dans cette partie-là, les forces
15 de l'adversaire ont été arrêtées en raison des actions en partie de l'armée
16 croate et aussi de la communauté internationale. Au bout de quelques mois
17 d'âpres négociations, à une date que je ne saurais pas vous indiquer
18 exactement, un accord a été signé sur un bateau des forces internationales
19 entre le général Bobetko et les forces serbes, les forces serbes
20 s'engageant de quitter l'ensemble de la zone jusqu'à Prevlaka, mais cet
21 accord est resté vague, puisque l'on mentionnait le retrait des forces de
22 la JNA. Cependant, s'agissant des forces de la Republika Srpska, du côté de
23 la Bosnie-Herzégovine, il était possible que ces forces-là fassent
24 irruption soudainement sur ce même territoire, ce qui respecterait les
25 termes de l'accord, mais la Croatie n'aurait pas été libérée.
26 C'est la raison pour laquelle, suite à la signature de l'accord, les
27 forces croates ont utilisé leurs bateaux pour procéder à une descente dans
28 cette zone afin de prendre les forces de la Republika Srpska de court, et
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1 afin de pouvoir maintenir le contrôle de ce territoire-là, et ceci est
2 resté le cas jusqu'à la fin de la guerre.
3 M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut donner un numéro IC à la carte.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Tout à fait. La carte annotée par le
6 témoin recevra la cote IC 1099. Je vous remercie.
7 Mme ALABURIC : [interprétation]
8 Q. Afin de pouvoir comprendre la carte, peut-on clarifier quelque chose.
9 Vous savez, nous, parfois, lorsqu'on dessine une frontière, l'on suppose
10 que tout le monde sait ce que c'est. La ligne noire que vous avez dressée
11 correspond à la frontière entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. Peut-
12 être que nous pourrons replacer la carte à l'écran.
13 Mon confrère Me Stewart m'a expliqué que ceci n'était pas tout à fait
14 clair.
15 Mme ALABURIC : [interprétation] Peut-on afficher de nouveau la carte
16 à l'écran. Je m'adresse à l'Huissier, et je demanderais à mon confrère Me
17 Stewart de suivre afin de voir si tout est clair de nouveau.
18 Q. Général, pourriez-vous apposer avec le chiffre 1, le territoire de la
19 République de Croatie.
20 R. [Le témoin s'exécute]
21 Q. Peut-on trouver un marker un peu plus épais pour nous permettre de
22 mieux voir.
23 R. [Le témoin s'exécute]
24 Q. Le chiffre 1 correspond au territoire de la République de Croatie.
25 Maintenant, s'il vous plaît, écrivez en majuscules, BiH, pour que l'on
26 comprenne ce qui correspond au territoire de la Bosnie-Herzégovine.
27 R. [Le témoin s'exécute]
28 Q. Merci. Veuillez nous indiquer maintenant le territoire qui était
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1 contrôlé par les autorités serbes, y compris par l'armée de la Republika
2 Srpska.
3 R. [Le témoin s'exécute]
4 Q. Maintenant nous voyons bien toutes les couleurs, ceci correspond à la
5 ligne rouge ?
6 R. La région à l'est et de la ligne interrompue rouge est contrôlée par
7 les forces de la Republika Srpska en Bosnie-Herzégovine.
8 Q. Veuillez écrire le chiffre 2 sur ce territoire contrôlé par l'armée de
9 la Republika Srpska.
10 R. [Le témoin s'exécute]
11 Q. Maintenant, nous allons traiter de la partie de la Bosnie-Herzégovine
12 contrôlée par les autorités musulmanes et croates.
13 R. Les autorités musulmanes et croates contrôlent cette partie-là de la
14 Bosnie-Herzégovine, et je vais y apposer le chiffre 3.
15 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais je regarde la
16 carte, Monsieur le Témoin, et il me semble que le H de l'Herzégovine, vous
17 l'avez dessiné sur un territoire qui est contrôlé par les Serbes. Le H de
18 la BiH se trouve maintenant sur un territoire qui est contrôlé par les
19 Serbes, sur la carte que vous venez d'annoter.
20 Mme ALABURIC : [interprétation] Nous avons voulu indiquer que c'est l'Etat
21 de la Bosnie-Herzégovine, et peu importe qui contrôle les régions
22 différentes. Ensuite, le chiffre 2 correspond aux Serbes, et le chiffre 3
23 correspond aux Croates et aux Musulmans. Je pense que c'est clair
24 maintenant.
25 Q. Oui, merci beaucoup, Général.
26 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé. J'ai bien compris.
27 Mme ALABURIC : [interprétation] Il n'y a aucun problème. Maintenant
28 s'agissant du même sujet, nous avons un autre document. Nous pouvons le
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1 traiter avant la pause, je pense. Il s'agit de 4D475. C'est un document que
2 nous avons déjà vu dans ce prétoire. Il s'agit d'un ordre de Miljenko
3 Lasic, commandant de la zone opérationnelle du HVO pour l'Herzégovine
4 orientale. Ici, au point 3, Général, c'est à la page 3 dans votre texte, il
5 décrit ses voisins, et dit :
6 "Au sud de nous, la défense est organisée par la 116e Brigade de l'armée
7 croate."
8 Dites-nous, Général, est-ce que ceci définit ainsi de manière générale la
9 position de votre brigade, et est-ce que ceci correspond justement à ce que
10 vous avez dessiné sur la carte tout à l'heure ?
11 R. Oui, en bref, ceci correspond à cette situation-là, mais il ne faut pas
12 se confondre lorsqu'il dit "au sud" et "à droite," car ceci correspond en
13 fait à mes positions qui étaient au sud-est, donc c'est ça qu'il voulait
14 dire, le sud-est plutôt qu'à droite.
15 Q. Bien, c'est clair maintenant. Vous, Général, si nous nous
16 souvenons de votre biographie, vous y êtes resté jusqu'à mars 1993 sur ces
17 mêmes positions, et ensuite vous retourniez en Croatie; est-ce exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Pour autant que vous le sachez, est-ce que cette brigade ou l'armée
20 croate est restée justement sur ce territoire jusqu'à la fin de la guerre ?
21 R. Oui, l'armée croate y est restée. Il n'y a pas eu de grand changement
22 mis à part ce que j'ai déjà expliqué s'agissant de la manière dont
23 l'ensemble de l'armée croate est arrivé au sud.
24 Q. Merci, Général.
25 Mme ALABURIC : [interprétation] Nous allons maintenant traiter de la
26 question suivante liée à la libération de Stolac. Peut-être le moment est
27 opportun pour prendre une pause.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien, vous avez raison. C'est l'heure de la
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1 pause. Donc on va faire 20 minutes de pause.
2 --- L'audience est suspendue à 17 heures 32.
3 --- L'audience est reprise à 17 heures 54.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise. Maître Stewart, vous
5 avez la parole.
6 M. STEWART : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
7 L'Accusation a présenté une liste avec un seul élément, liste de pièces qui
8 ont été versées par le truchement du témoin expert Gorjanc. Nous avons
9 présenté notre liste IC de façon normale, en demandant un numéro; il y en
10 avait seulement un peu plus que d'habitude, et j'en ai parlé avec M.
11 Stringer. Mais nous aimerions avoir un peu plus de temps, avoir jusqu'à
12 jeudi pour répondre aux demandes. Si nous pouvons avoir donc une extension
13 de délai.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La Chambre vous donne jusqu'à jeudi.
15 Maître Alaburic.
16 Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Général, maintenant nous allons traiter du sujet concernant la
18 libération de Stolac, même si vous avez mentionné déjà ce sujet. Mais
19 maintenant, nous allons traiter de manière systématique les points
20 importants du point de vue de la Défense du général Petkovic.
21 Dites-nous la chose suivante, s'il vous plaît. L'Accusation nous a suggéré
22 dans cette affaire à plusieurs reprises qu'il n'y a pas vraiment eu de
23 combats pour Stolac, que les Serbes avaient tout simplement quitté Stolac
24 en marchant de leur propre gré et que finalement, il s'agissait d'un accord
25 passé entre les Serbes et les Croates.
26 Vous qui étiez témoin oculaire, pouvez-vous nous dire ce qui s'est
27 passé pour ce qui est de la libération de Stolac ? Est-ce qu'il y a eu des
28 combats ?
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1 R. Des combats se sont déroulés pour Stolac. De mon côté, j'ai eu trois
2 soldats morts et plusieurs dizaines de blessés. Le commandant de la défense
3 de Stolac a été tué lui aussi. C'était un commandant du côté de la VRS.
4 Cette personne a été tuée de même que l'un de ses officiers de l'état-
5 major, alors que trois autres membres de l'état-major ont été capturés.
6 Il y a eu des combats s'agissant de chaque position à Stolac et
7 autour de Stolac, et je dois dire que je suis étonné d'entendre une telle
8 interprétation. Nous avons commencé l'opération lorsque l'organe de
9 renseignement de la 116e Brigade avait convenu d'héberger un nombre de mes
10 combattants et les cacher avant l'attaque auprès de la population musulmane
11 de Stolac. Je ne m'y attendais pas, mais ce qui s'est passé c'est que les
12 représentants musulmans des autorités qui anticipaient l'attaque ont envoyé
13 un nombre important de civils de mon côté de la ligne de confrontation,
14 donc nous avons demandé auprès de notre commandement d'organiser et de nous
15 fournir les autocars pour pouvoir transporter cette population qui avait
16 fui Stolac pour qu'elle soit en dehors de ma zone de responsabilité et hors
17 de la portée de l'artillerie.
18 Ensuite, le lendemain après-midi, l'attaque a été lancée. Elle a
19 échouée et a été renouvelée le surlendemain au matin, cette fois-ci avec
20 succès. Et c'est à ce moment-là que les pertes que j'ai mentionnées ont
21 survenu. Et tout a été réglé avant midi, tout sauf une position à l'est de
22 Stolac, position pour laquelle je n'avais pas suffisamment de forces,
23 suffisamment de troupes. Et à ce moment-là, l'unité du HVO, commandée par
24 Dragan Curcic, m'est venue à l'aide et c'est lui qui a capturé cette
25 colline qui représentait un véritable risque pour la ville de Stolac. Et
26 lorsque mes commandants sont entrés à Stolac afin de faire un constat de la
27 situation, un haut officier du commandement de la zone d'opération a failli
28 être tué.
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1 Donc je ne suis pas du tout d'accord avec la remarque selon laquelle
2 les Serbes étaient partis de leur propre gré. Et si l'on sait que le
3 commandant de la défense de Stolac a été tué lors de cette opération, ceci
4 corrobore mon point de vue.
5 Q. Donc, Général, avec votre armée vous êtes entré à Stolac. Est-ce
6 qu'à ce moment-là l'autorité civile fonctionne, celle qui, jusqu'au moment
7 de l'attaque, avait veillé à la vie de la population civile à Stolac ?
8 R. Non. Lorsque nous sommes entrés dans Stolac, j'ai déjà dit que la
9 première attaque n'était pas couronnée de succès, donc la deuxième vague de
10 gens qui ont fui Stolac a fait son apparition après cette première soirée,
11 parce qu'il était devenu clair qu'il y aurait une fois de plus une attaque
12 déterminée de la JNA. Donc j'ai accueilli une autre vague de réfugiés, et
13 les Serbes, eux, avaient déjà quitté les lieux avec l'armée et la
14 population au bout de deux journées de combat. Elle s'en était allée avec
15 l'armée, cette population serbe, je veux dire. A Stolac, ils étaient
16 minoritaires, mais toujours est-il que nous n'avons trouvé presque
17 personne. Donc il fallait créer les conditions requises pour le retour des
18 gens à Stolac.
19 Q. Nous avons certaines difficultés avec le compte rendu. Général, je vais
20 vous demander de répéter la partie relative à cette deuxième vague de
21 réfugiés. Que s'est-il passé donc après cette première attaque infructueuse
22 ?
23 R. Après cette première attaque infructueuse, les représentants de
24 l'autorité locale musulmane ont organisé les gens, les civils pour qu'ils
25 s'en aillent de Stolac en passant par le champ de bataille vers la partie
26 que je contrôlais moi. Et cette deuxième vague, nous l'avons transportée à
27 bord d'autocars vers les arrières pour la sortir de la zone de combat.
28 Le lendemain matin -- ça, c'était passé la nuit. Et le matin, on a
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1 lancé une attaque une fois de plus mais cette fois-ci, ça a été couronné de
2 succès. Nous avons maîtrisé la totalité des postes cruciaux autour de
3 Stolac, exception faite d'une seule position, et c'est vers midi que j'ai
4 bénéficié d'une aide de quelqu'un qui a lancé l'attaque pour prendre
5 position de cet emplacement. C'est un détachement Bozan dont le commandant
6 était un dénommé Dragan Curcic, et ceci a mis en place les conditions
7 nécessaires pour défendre avec succès les positions de défense et pour
8 résister à la contre-attaque dont les préparatifs étaient en cours.
9 Donc Stolac était une ville vide, et autour de Stolac, les effectifs
10 de l'armée croate et du Conseil croate de la Défense avaient leurs
11 positions. La création ou la mise en place d'une autorité civile --
12 Q. Non. Je voulais justement vous poser une question au sujet de la mise
13 en place de cette autorité civile. Vous entrez à Stolac, il n'y a personne.
14 La seule force organisée, c'est l'armée et c'est vous le numéro un dans
15 cette armée. Alors, Général, est-ce que vous entreprenez quelque mesure que
16 ce soit aux fins de faire mettre en place une autorité civile dans Stolac ?
17 R. Cela a été un effort conjoint de la part des autres et de la part de
18 moi-même, parce que tout laissait entendre que les gens voulaient revenir à
19 Stolac et dans la banlieue, parce qu'ils avaient des biens immobiliers là.
20 Et d'autre part, il y avait le souhait des gens qui avaient été parties
21 intégrantes des autorités musulmanes ou croates au niveau local, ils
22 voulaient s'organiser pour faire revenir Stolac à une vie normale.
23 Q. Est-ce que vous vous souvenez à peu près du temps qui s'est écoulé
24 entre votre entrée à Stolac et la création d'une instance quelconque de
25 l'autorité civile ?
26 R. Plusieurs jours encore, il y a eu des tirs d'artillerie entre les
27 parties belligérantes. Ça s'est fait de façon intense. Et en parallèle, il
28 y a eu des négociations avec la partie serbe pour ce qui est de rendre les
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1 corps des personnes tuées, et on avait échangé les dépouilles de part et
2 d'autre. Et les conditions requises pour une vie civile n'étaient pas
3 encore là, mais au bout de sept jours à peu près, après cette attaque
4 couronnée de succès, je veux dire, il y a eu emploi de la part des civils
5 de cette réunion et de ma part aussi, des initiatives de ce type pour
6 mettre en place les conditions requises aux fins d'un retour des civils. Et
7 c'est vers la fin du mois de juin, voire vers le 1er juillet, que l'on a
8 organisé une réunion entre représentants des communautés musulmanes et
9 croates respectivement, où j'ai présenté la situation sécuritaire du point
10 de vue militaire. Et j'ai également avancé des revendications pour qu'eux
11 aussi assument leurs responsabilités, parce qu'il y avait des pressions
12 croissantes de la part de la population aux fins d'un retour, et il fallait
13 rendre possible le retour de cette population.
14 Q. Général, je me propose maintenant de vous montrer la teneur du
15 témoignage d'un témoin de l'Accusation.
16 Mme ALABURIC : [interprétation] Comme c'était un témoin protégé, je
17 voudrais que nous passions à huis clos partiel.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
19 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos
20 partiel.
21 [Audience à huis clos partiel]
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11 [Audience publique]
12 Mme ALABURIC : [interprétation]
13 Q. Général, est-il exact de dire que lors de cette réunion, le 1er juillet,
14 il a déjà été convenu de créer une cellule de Crise qui serait constituée à
15 50 % de Croates et à 50 % de Musulmans et que cela, cette instance se
16 chargeait des tâches civiles ?
17 R. C'est exact. Je crois bien que le témoin a précisément décrit la
18 réunion que j'ai évoquée moi-même.
19 Q. Le nom de Zeljko Raguz, pour ce qui est de la présidence de cette
20 cellule de Crise, est-ce qu'il vous dit quelque chose ?
21 R. Oui, ça me dit quelque chose. Il était président de la cellule de
22 Crise, lui.
23 Q. Fin 1992, en tant que titulaire de l'autorité civile à Stolac, on
24 mentionne M. Andjelko Markovic. Dites-nous, avez-vous des informations à ce
25 sujet ou est-ce que ça s'est passé bien après votre séjour à Stolac ?
26 R. Quand j'ai quitté ce territoire, début août et ça, ça s'est passé après
27 mon départ et là, je n'ai pas d'information à vous fournir.
28 Q. Général, je voudrais maintenant vous demander d'essayer d'expliquer à
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1 l'intention des Juges s'il y a eu création d'une unité militaire à partir
2 de gens du cru à Stolac et si oui, que s'est-il passé ? Avez-vous eu un
3 rôle à jouer à cet effet ?
4 R. Oui. En entrant à Stolac, j'avais placé un bataillon pour la défense de
5 Stolac. Ce bataillon était constitué pour un pourcentage important de
6 Croates de la région. Ils ont fait une formation et ils ont lancé cette
7 attaque et ils l'ont fait en coopération avec les responsables musulmans
8 locaux. Au travers des entretiens que j'ai eus ce jour-là, j'ai proposé,
9 parce qu'à ce moment-là ça m'avait semblé plutôt logique comme chose à
10 faire, j'ai proposé aux autorités musulmanes du coin de faire en sorte que
11 la population musulmane jeune prenne part à la défense aux côtés des hommes
12 du groupe ethnique croate.
13 Ils ont accepté cela. Ils ont convié les hommes jeunes à venir à un
14 endroit qu'on avait convenu pour être à l'abri notamment des observateurs
15 du côté serbe et on s'est réunis dans le canyon de la rivière Bregava. On a
16 rassemblé là-bas un peu plus de 400 hommes. Le bataillon qui existait
17 jusque-là, je l'ai subdivisé en deux segments, et dans chaque groupe de dix
18 hommes, dans chaque section de dix hommes, j'avais partagé en deux. Il y
19 avait cinq des nôtres et cinq hommes du groupe ethnique musulman avec et
20 ainsi j'ai créé deux bataillons comptant 400 hommes chacun et à peu près 50
21 % des effectifs était du groupe ethnique croate, voire du groupe ethnique
22 musulman.
23 Q. Général, dites-nous, les cadres de commandement, qu'en a-il été ?
24 R. Avec l'acceptation de cette direction locale musulmane, j'ai mis deux
25 Croates parce qu'ils avaient déjà une expérience en matière de combat. Mais
26 ce même jour, au poste de commandant adjoint d'un bataillon, on a nommé un
27 certain Edin Obradovic qui avait déjà un peu d'expérience. Il avait des
28 connaissances militaires puisqu'il se trouvait être officier dans les rangs
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1 de l'ex-JNA. On a trouvé quelques autres hommes à posséder des
2 connaissances militaires et on les a placés à des fonctions au sein de ces
3 deux bataillons nouvellement créés.
4 Q. Général, veuillez nous indiquer ce qui suit : comment ont donc réagi
5 les soldats croates, les soldats du groupe ethnique croate, pour ce qui est
6 de vos efforts visant à intégrer des gens du groupe ethnique musulman dans
7 ces unités militaires ?
8 R. La plupart de ces hommes l'ont accepté. Il y a eu des gens qui ont
9 maugréé et il y en a eu quelques-uns qui étaient tout à fait contre. J'ai
10 réussi à convaincre la plupart de ceux-là, du point de vue militaire, du
11 point de vue humain, du point de vue moral des choses que cela était la
12 seule bonne solution. Les deux qui ne voulaient en aucune façon rester dans
13 les rangs dans ces unités, je leur ai dit d'enlever leurs uniformes, je les
14 ai renvoyés du bataillon et ils n'en ont plus fait partie.
15 Q. Ces deux que vous avez renvoyés, ils étaient contre donc, contre la
16 création d'une armée conjointe entre Musulmans et Croates, n'est-ce pas ?
17 R. C'est exact.
18 Q. Général, dites-moi, je vous prie, à cette époque-là, c'est-à-dire vers
19 la fin du mois de juin, après que toutes ces actions étaient terminées, y
20 a-t-il eu une réunion entre les commandants destinée à vous permettre à
21 tous d'échanger vos expériences ?
22 R. Oui. Une réunion a eu lieu à Grude, si je ne me trompe, une réunion de
23 haut niveau. Je ne suis pas sûr que c'était à Grude, mais je crois. Mate
24 Boban assistait à cette réunion ainsi que plusieurs autres représentants du
25 gouvernement de la Communauté croate d'Herceg-Bosna; y assistait également
26 M. Petkovic et je ne me rappelle plus qui d'autre. Mais en tout cas, les
27 noms que je viens de mentionner, il est certain qu'ils y ont assisté.
28 Q. M. Petkovic a-t-il prononcé une quelconque allocution à cette réunion ?
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1 R. Oui, M. Petkovic a fait le bilan de la situation du point de vue
2 militaire et il a parlé très ouvertement des problèmes auxquels il s'était
3 trouvé confronté. J'ai même été assez surpris de l'entendre parler de
4 certains de ces problèmes. En tout cas, ce que je peux dire, c'est qu'il
5 s'est exprimé avec beaucoup de compréhension et je l'ai attentivement
6 écouté.
7 Q. J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur le document suivant
8 qui est la pièce P --
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, je reviens sur ce que vous avez
10 dit parce que c'est important. Vous nous avez expliqué qu'il y a eu des
11 combats à Stolac et qu'au mois d'août 1992, les Musulmans avaient été mis,
12 pour les protéger, dans des bus pour leur faire quitter la ville et
13 qu'ensuite, vous avez pris le contrôle de la ville parce que les Serbes
14 avaient été défaits. Donc, au moment où vous mettez les pieds dans Stolac,
15 il n'y a plus de Serbes, il n'y a plus de Musulmans; il n'y a que les
16 soldats que vous dirigez. Etait-ce bien cela la situation ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous étions les seuls présents dans ce
18 territoire. Il n'y avait pas de civils là-bas. La ville était déserte. Qui
19 aurait-on pu diriger dans une ville déserte ?
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Au recensement de 1991, la ville de Stolac -- je dis
21 la ville, je ne parle pas de la municipalité, il y avait plus de 5 000
22 habitants. Quand vous rentrez dans Stolac, il n'y a plus de civils
23 musulmans. Est-ce qu'à ce moment-là, des Croates du HVO vous auraient dit :
24 Il ne faut pas qu'ils reviennent, les Musulmans, il n'y a qu'à mettre une
25 municipalité uniquement avec des Croates et constituer une brigade croate.
26 Est-ce qu'on vous a tenu ce discours ou on ne vous a rien dit et c'est vous
27 tout seul qui avez décidé de constituer ces deux bataillons, l'un croate,
28 l'autre musulman ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si quelqu'un m'avait
2 dit cela avant ou à ce moment-là, il est tout à fait clair que je n'aurais
3 pas exécuté l'ordre ou la suggestion en question parce que ce que j'ai fait
4 là-bas, je suis obligé maintenant de mettre l'accent sur ce que j'ai fait,
5 je n'ai pas créé un bataillon croate d'un côté, un bataillon musulman de
6 l'autre. Ce que j'ai créé, c'était une armée conjointe et ces bataillons,
7 les deux bataillons étaient constitués à raison de 50 % dans la hiérarchie
8 pyramidale qui est celle d'une armée normale, c'est-à-dire groupe,
9 compagnie, section et bataillon. A tous ces niveaux hiérarchiques, les
10 effectifs étaient composés à 50 % de Musulmans, à 50 % de Croates. Le
11 commandement, je l'ai appelé commandement du secteur de Stolac, il a reçu
12 un nom.
13 Et puis, encore un point qu'il faut que je mette en exergue. A ce
14 moment-là, j'ai déjà parlé de la tentative que j'avais faite de créer les
15 choses conjointement avec l'ABiH, ma proposition a été bien comprise, mais
16 la tentative a échoué, les gens qui étaient concernés par cette première
17 tentative infructueuse ont eux aussi été intégrés dans ces bataillons de
18 Stolac.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : A votre niveau, qu'avez-vous fait pour faire
20 revenir la population musulmane qui était partie en bus. Est-ce que vous
21 avez demandé à ce qu'ils reviennent ? Qu'est-ce que vous avez fait ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Dès que les combats se sont calmés, j'ai
23 demandé à ce qu'une cellule de Crise soit mise en place car c'était
24 l'expression qui était la plus facile d'utiliser dans les circonstances de
25 l'époque, étant donné que les gens, en entendant cette expression, savaient
26 exactement ce qu'elle voulait dire et quelles seraient leurs attributions.
27 J'ai demandé la mise en place d'une cellule de Crise et la communauté
28 ethnique croate, d'une part, la communauté bosnienne, d'autre part, dans ce
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1 territoire, ont accepté la proposition avec composition numérique
2 proportionnelle à 50 % pour chacune des deux communautés.
3 C'est ce qui a été fait et très rapidement, c'est cette cellule de
4 Crise qui a pris en main le pouvoir civil, qui a organisé le retour des
5 civils, qui a organisé la protection des biens immobiliers, les transports,
6 réglé les problèmes sanitaires, réglé les problèmes de santé et fait
7 revenir la vie quotidienne à une situation relativement normale.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- à propos, vous avez dit tout à
9 l'heure que vous aviez capturé des Serbes. Qu'est-ce qu'ils sont devenus
10 ces Serbes ? Vous les avez mis en prison ? Ils ont été échangés ? Qu'est-ce
11 qu'ils sont devenus ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Mon obligation en tant que commandant
13 consistait à remettre les prisonniers entre les mains de la police
14 militaire et une fois que ceci avait été fait, mes obligations n'allaient
15 pas plus loin. Je ne peux vraiment pas vous dire quel a été leur sort par
16 la suite. Je ne le sais vraiment pas.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous les avez remis dans les mains de la police
18 militaire. La police militaire du HVO ou la police militaire de l'armée
19 croate ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agissait de la
21 police militaire de l'armée de Croatie parce que le HVO, à ce moment-là,
22 dans ce territoire n'avait pas une police militaire active.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Les hommes politiques croates dans la cellule de
24 Crise, est-ce qu'ils étaient réticents de voir des Musulmans avec eux ou
25 ils étaient très contents et ils trouvaient ça normal qu'il y ait 50 % d'un
26 côté, 50 % de l'autre ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Les gens qui avaient été pris en compte pour
28 faire partie de cette cellule de Crise avaient tous une personnalité telle
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1 qu'on estimait qu'ils allaient accepter. Mais par ailleurs, il s'agissait
2 de personnes qui avaient une certaine autorité sur la population locale.
3 J'insiste que du côté musulman également, il y avait tout l'éventail des
4 façons de voir et des points de vue, mais là encore les personnes qui
5 étaient recherchées pour la cellule de Crise étaient les personnes qui
6 pourraient avoir de la compréhension par rapport à cette proposition. A
7 l'issue de la réunion dont nous avons parlé, ma conclusion consistait à
8 penser que nous avions fait du bon travail, que les personnes choisies pour
9 la cellule de Crise étaient les meilleures possibles et que cette
10 initiative avait de bonnes chances de bien fonctionner.
11 Mme ALABURIC : [interprétation]
12 Q. Dites, Mon Général, selon ce que vous savez, est-ce qu'à ce moment-là
13 les réfugiés croates et musulmans de Stolac sont revenus à Stolac ou pas ?
14 R. Oui. Pendant la durée de mon séjour là-bas, une dizaine de jours plus
15 tard, à un ou deux jours près, j'ai commencé à voir arriver les premiers
16 groupes assez importants sur le plan numérique, composés de civils revenant
17 à Stolac et dans les localités environnantes. Lorsque je dis groupes, je
18 parle de groupes composés aussi bien de Musulmans que de Croates;
19 d'ailleurs les Musulmans qui sont revenus étaient mêmes plus nombreux que
20 les Croates car ils étaient partis plus tard et n'avaient pas réussi à
21 trouver leur place en Croatie, alors que les Croates étaient émigrés depuis
22 plus longtemps et pour toutes sortes de raisons, il leur a fallu un peu
23 plus longtemps pour se décider à revenir.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, on va passer à huis clos parce
25 que je dois dire quelque chose.
26 M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, nous sommes
27 actuellement à huis clos partiel.
28 [Audience à huis clos partiel]
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12 [Audience publique]
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame Alaburic.
14 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais
15 simplement dire que je me suis comportée comme nous l'avons toujours fait
16 lorsque nous souhaitions citer le nom d'un témoin protégé, c'est-à-dire
17 demander un huis clos partiel, et nous pouvons prononcer aussi bien le
18 prénom que le nom de famille. Mais si nous tenions à rester en audience
19 publique, alors nous ne prononcions que les initiales des prénoms et noms.
20 Voilà. Si j'ai fait une erreur, j'en suis désolée.
21 Q. Nous étions en train de parler du retour de réfugiés. Vous nous avez
22 dit que les Musulmans étaient rentrés en plus grand nombre que les Croates,
23 et arrive maintenant ma question suivante.
24 Est-ce que dans cette période vous avez jamais pensé que qui que ce soit,
25 je veux parler de membres de l'armée croate ou de la cellule de Crise,
26 aurait pu prendre quelque initiative que ce soit pour empêcher le retour de
27 tous les réfugiés qui souhaitaient rentrer ?
28 R. Non. Ce genre de réflexion ou ce genre d'action, je n'en ai pas été
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1 témoin. Les retours dont je parlais se sont déroulés dans une dynamique
2 déterminée et qui dépendait avant tout de la décision prise par ces
3 personnes de rentrer, mais il n'y a pas eu quelque réflexion négative par
4 rapport au retour de toutes ces personnes.
5 Q. Très bien. Reparlons maintenant de la réunion que nous évoquions tout à
6 l'heure pendant laquelle vous avez déclaré que le général Petkovic, qui
7 n'était pas encore général à l'époque, avait prononcé une allocution.
8 Mme ALABURIC : [interprétation] A cette fin, j'aimerais que nous nous
9 penchions sur la pièce P 279.
10 Q. Ce document, Général, nous a été présenté comme un discours d'ouverture
11 prononcé par le général Petkovic. Nous ne savons pas à quelle réunion
12 exactement, et nous ne savons pas si les mots qui sont écrits noir sur
13 blanc dans ce document auront été prononcés à haute voix à quelque moment
14 que ce soit. C'est la raison, Général, pour laquelle je vous interroge au
15 sujet de vos souvenirs. Est-ce qu'à la réunion dont vous parliez tout à
16 l'heure le général Petkovic a lu ce discours ou pas ?
17 R. Le général Petkovic s'est exprimé, et il a parlé en regardant le
18 public. D'après moi, il a parlé en cherchant ses mots dans son âme. Il a
19 parlé à cœur complètement ouvert et a dit ce que je pensais moi-même, à
20 savoir que sur ce territoire de Bosnie-Herzégovine où j'étais avec mon
21 unité de l'armée croate, les problèmes qu'il a décrits, les problèmes
22 auxquels lui-même a été confronté, dont il a parlé pendant cette
23 allocution, moi, j'avais vécu les mêmes.
24 Q. Général Beneta, à cette réunion qui s'est tenue en juin 1992, était-il
25 clairement établi qui était l'ennemi, est-ce que c'était une chose
26 clairement comprise ?
27 R. Oui, c'était clair.
28 Q. Qui était l'ennemi ?
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1 R. L'ennemi, c'était l'armée populaire yougoslave ainsi que les forces
2 armées de la Republika Srpska.
3 Q. Dites-nous, Général --
4 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Puis-je poser une question, s'il
5 vous plaît, surtout en ce qui concerne ceci.
6 M. Petkovic énonce les tâches en quatre points. Le premier point
7 consiste à placer sous le contrôle les zones restantes des municipalités
8 croates, et au point 4, d'établir le contrôle croate sur toutes les
9 municipalités.
10 Je ne vois pas en quoi ceci ait un lien avec l'ennemi serbe. Est-ce
11 que cela ne semble pas indiquer qu'il y avait un problème également avec
12 les Musulmans, les non-Croates de façon générale ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne sais pas d'où vous
14 tirez cette conclusion quand on dit, comme cela figure dans ce texte :
15 "Mettre sous son contrôle les territoires restants dans les
16 municipalités croates."
17 A l'époque comme aujourd'hui, encore j'ai compris cette phrase comme
18 désignant les zones habitées par des Croates en pourcentage absolument
19 important. Je ne pense pas que ce qu'il avait à l'esprit c'était de parler
20 d'une majorité absolue de Croates dirigés contre autrui.
21 M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.
22 Mme ALABURIC : [interprétation]
23 Q. Général, en ce moment une question qui est importante pour nous est la
24 suivante : ce qui est écrit dans ce document a-t-il été prononcé à haute
25 voix lors de cette réunion ? C'est la question que je vous pose. Mais si
26 j'ai bien compris ce que vous avez dit tout à l'heure, le général Petkovic
27 n'a pas lu un texte lorsqu'il s'est exprimé à cette réunion. Il a regardé
28 le public et a parlé, a dit certaines choses, si je vous ai bien compris.
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1 Vous ai-je bien compris ?
2 R. Oui. Je ne peux pas vous dire quel est le pourcentage de ce qui est
3 écrit ici qui a été prononcé, mais ce que je peux vous dire c'est qu'il a
4 parlé les yeux fixés sur nous, et qu'à plusieurs reprises j'ai même hoché
5 du chef car j'avais l'impression qu'il devinait mes pensées au moment où il
6 parlait. Maintenant, ce qu'il a dit est-ce que ça correspond, oui ou non,
7 au texte que nous avons ici, je ne saurais pas répondre à cette question.
8 Q. Général, est-ce que de façon implicite ou explicite, ou de quelque
9 façon que ce soit, il a été suggéré à cette réunion que les Musulmans
10 étaient aussi les ennemis des Croates ou que les Musulmans pourraient
11 devenir un jour les ennemis des Croates ?
12 R. Non. Ceci n'a pas été prononcé lors de cette réunion. Si tel avait été
13 le cas, ceci serait allé à l'encontre de la situation sur le terrain, car
14 justement ces jours-ci j'avais formé les forces conjointes des Musulmans et
15 des Croates à Stolac.
16 Q. Général, dites-nous, s'il vous plaît, à qui avez-vous remis vos
17 obligations militaires à Stolac avant votre départ ?
18 R. Pour ce qui est du secteur Stolac avec sa zone de responsabilité et les
19 forces qui défendent cette zone, je l'ai remis à la 1ère Brigade du HVO.
20 Q. Bien, Général. Notre témoin suivant enchaînera sur ce sujet concernant
21 Stolac, et maintenant nous allons passer au dernier sujet, opération Sud.
22 C'est le dernier sujet.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Général, je reste sur ce document où le 26 juin 1992
24 - c'est donc avant la prise de Stolac par vous-même - le général Petkovic
25 fait, semble-t-il, un discours.
26 Dans ce document, à aucun moment il est indiqué que l'ennemi, ce sont
27 les Musulmans. En revanche, il y a une phrase un peu troublante.
28 C'est le point 4 où il dit qu'il faut établir la règle croate sur les
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1 municipalités, les municipalités qui ne sont pas sous le contrôle du HVO, à
2 savoir Mostar et Stolac.
3 Alors, qu'est-ce que ça veut dire d'établir la règle croate sur ces
4 municipalités ? Qu'est-ce qu'il avait en ligne de mire ou dans l'esprit en
5 disant cela ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais
7 quelles sont les phrases auxquelles vous faites référence ?
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Aux paragraphes 1, 2, 3, 4, regardez au paragraphe
9 4, il y a après 1, 2, 3, 4. Moi c'est le 4.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Le point où il est dit :
11 "Etablir l'autorité croate dans toutes les municipalités."
12 Ceci se déroulait dans la pratique, conformément à la manière que
13 j'ai déjà expliquée, c'est-à-dire ceci a eu lieu une semaine après que ceci
14 a été formulé. Le 1er juillet, un état-major conjoint des Croates et des
15 Musulmans a été créé à Stolac, et ceci a eu lieu, entre autres, sur mon
16 initiative. Moi, à l'époque, je comprenais ces mots comme l'établissement
17 de l'autorité. Et cette autorité à Stolac s'appuyait dans tous les segments
18 de son fonctionnement à la République de Croatie, non pas parce que ceci
19 aurait été une décision politique, mais car il n'y avait pas d'autres
20 moyens. C'était les seules voies de passage des camions transportant les
21 médicaments, les vivres ou quoi que ce soit d'autre dont la population
22 avait besoin. Donc, c'est ainsi que j'ai compris ces phrases-là et c'est
23 ainsi que je les ai mises en œuvre sur le terrain. Et à mon avis, je ne me
24 suis pas trompé en ce qui concerne l'interprétation de ce texte.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Merci.
26 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour ce qui est de
27 ce document, je souhaite simplement que l'on constate pour le compte rendu
28 d'audience que l'Accusation n'a pas versé une seule preuve indiquant que
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1 cette allocution d'introduction qui figure dans ce document aurait jamais
2 été prononcée lors d'une quelconque rencontre. Et le général Petkovic, qui
3 a signé le document, peut certainement expliquer la signification de toutes
4 les parties de ce texte, suite à vos questions.
5 Q. Maintenant nous allons passer à l'opération Sud. Dites-nous tout
6 d'abord à quel moment cette opération a eu lieu ?
7 R. L'opération Sud a eu lieu à la mi-juillet 1993.
8 Q. Dites-nous, s'agissait-il réellement d'une opération conformément à ce
9 qui a été défini dans le cadre de la doctrine de la JNA, car nous avons
10 entendu dire qu'il y avait une différence entre cette opération-là et
11 l'opération selon les critères de l'OTAN ?
12 R. Oui, il existe de telles différences, et ces actions ne peuvent pas
13 être considérées comme une opération selon la doctrine qui était en place
14 déjà à l'époque, mais plutôt comme une bataille puisqu'un petit nombre de
15 forces y a participé. Donc d'après la définition en vigueur à l'époque
16 concernant l'opération, il ne s'agissait pas d'une opération mais d'une
17 bataille seulement.
18 Q. Dites-nous, Général, où étiez-vous à ce moment-là en juillet 1993 ?
19 R. A partir du mois de mars de cette année-là, j'ai été transféré au
20 commandement de la Région militaire de Split, et à l'époque, j'exerçais les
21 fonctions du chef de la défense antiaérienne au sein de ce commandement. Et
22 tous les jours, j'étais actif dans le cadre de la défense du pont suspendu
23 près de Zadar, car ce pont constituait le seul lien entre le sud et le nord
24 de la Croatie à l'époque.
25 Q. Dites-nous, Général, qui vous a engagé dans le cadre de l'opération Sud
26 ?
27 R. C'était M. Dzanko qui m'a demandé d'y aller avec lui. A l'époque, il
28 avait le grade du colonel au sein de l'armée croate et il était l'adjoint
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1 du commandant de la région militaire.
2 Q. Nous n'avons pas le verbe dans le compte rendu d'audience. Qu'est-ce
3 qu'il a fait, M. Dzanko, il vous a demandé, il vous a ordonné de participer
4 ?
5 R. Il m'a ordonné de participer.
6 Q. Est-ce que vous pouvez répéter votre réponse, Général ?
7 R. Le colonel Dzanko est venu à mon poste d'observation et il m'a demandé
8 si j'étais prêt à aller avec lui dans la région de l'Herzégovine du sud-
9 est, car une opération allait avoir lieu là-bas. J'aurais pu refuser ou
10 bien accepter d'y aller avec lui. Je l'ai accepté.
11 Q. Nous avons répété cela, car d'après le compte rendu d'audience, "Dzanko
12 vous a ordonné de se faire."
13 Et si vous aviez refusé d'exécuter cet ordre, est-ce que vous auriez
14 subi des conséquences nuisibles ?
15 R. Non, je n'aurais pas subi de conséquences nuisibles si j'avais refusé à
16 exécuter cet ordre.
17 Q. Dites-nous, qui avait défini votre mission dans le cadre de ces
18 opérations ?
19 R. Ma mission était définie par M. Dzanko lors d'une action de
20 reconnaissance que nous avons menée à bien dans la région dans laquelle
21 l'opération allait se dérouler.
22 Q. Dites-nous, s'il vous plaît, de quelle manière est-ce que Dzanko avait
23 défini votre mission ?
24 R. Dans l'introduction, lorsqu'il m'a exposé la situation sur le plan
25 militaire, il m'a dit que les forces musulmanes se préparaient pour une
26 attaque dans la direction de la vallée de Neretva. Là, il est question de
27 la delta de la Neretva. Donc c'est un territoire croate où l'on sort au
28 niveau de Ploce, une ville qui se trouve à la côte. Il a dit qu'il fallait
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1 planifier une opération offensive dans laquelle allaient participer la 1ere
2 et la 3e Brigade du HVO dans cette région au sud de Mostar.
3 Q. Dites-nous, est-ce qu'une partie de l'unité spéciale du HVO Ludvig
4 Pavlovic était censée participer à cette opération ?
5 R. Oui, cette unité-là aussi était censée y participer.
6 Q. Dites-nous, quelle était la région qu'il fallait libérer par le biais
7 de cette action ?
8 R. D'après les termes de la mission, il fallait faire en sorte que
9 l'espace allant de la banlieue sud de Mostar jusqu'à Buna, partie contrôlée
10 par les forces musulmanes, soit coupé. Et ainsi il fallait couper les
11 forces qui étaient plus au sud, dans cette même région, dans la région de
12 Blagaj, ainsi les forçant à se rendre.
13 Q. Général, d'après les plans, à quel moment est-ce que l'opération était
14 censée commencer ?
15 R. Elle était censée commencer le 13 juillet.
16 Q. Et l'opération a-t-elle commencé ce jour-là ?
17 R. Non, elle n'a pas commencé, car au cours de la nuit du 12 au 13, donc
18 la nuit à la veille de l'opération qui avait été planifiée pour l'aube du
19 13, il s'est passé la chose suivante : des forces importantes des membres
20 de l'ABiH sont passées à travers les positions de déploiement de la 1ere et
21 de la 3e Brigade du HVO et ils ont attaqué leur --
22 Q. Excusez-moi, Général. Veuillez répéter la partie où vous avez dit que
23 les forces de l'ABiH avaient effectué une percée à travers ?
24 R. Enfin, pas une percée, mais ils s'étaient infiltrés sans combat en
25 profitant de la nuit. Elles ont traversé les lignes de déploiement des
26 défenseurs à l'insu des défenseurs.
27 Q. Lorsque vous dites "les défenseurs", vous parlez de qui ?
28 R. Je parle des forces de la 1ere et de la 3e Brigade du HVO.
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1 Q. Bien. Donc ces forces se sont infiltrées. Que s'est-il passé ensuite ?
2 R. Des combats ont éclaté en arrière de ces brigades, et il y a eu des
3 morts et des blessés des deux côtés. Ceci a duré cette nuit-là, le
4 lendemain et la nuit d'après. C'est seulement le lendemain que l'on a pu
5 avoir les premiers rapports et procéder aux premières analyses. Du point de
6 vue militaire, la situation était extrêmement complexe.
7 Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, mes questions
8 suivantes portent sur les dépositions des témoins de l'Accusation
9 concernant ces actions de sabotage, puis je présenterai quelques documents
10 à ce sujet. Tout ceci fait partie d'un ensemble. Il est vrai qu'il est 6
11 heures 50, mais je pense qu'avec votre permission, il serait plus judicieux
12 d'aborder ce sujet demain. Merci.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors au point de vue du temps, il doit vous
14 rester une demi-heure, quelque chose comme cela. Le greffier va vérifier
15 puisque vous aviez trois heures au départ. J'ai dit il doit rester une
16 demi-heure, pas 13 minutes.
17 Monsieur le Témoin, comme vous le savez, vous reviendrez demain matin,
18 parce que nous sommes d'audience le matin. Donc vous serez là pour
19 l'audience qui débutera à 9 heures du matin, prenez note de cela.
20 Bien, Maître Alaburic, le greffier me dit que vous avez utilisé deux heures
21 et 24 minutes, donc il vous reste 36 minutes. C'est que j'avais dit.
22 Sur ce, je souhaite à tout le monde une bonne fin de soirée et à demain
23 matin.
24 --- L'audience est levée à 18 heures 58 et reprendra le mardi 10 novembre
25 2009, à 9 heures 00.
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