Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 10 novembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

  9   tous dans le prétoire.

 10   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et

 11   consorts. Je vous remercie.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 13   En ce 10 novembre 2009, je salue toutes les personnes présentes. Je salue

 14   MM. les accusés, Mmes et MM. les avocats. Je salue le général Beneta. Je

 15   salue Mmes et MM. du bureau du Procureur ainsi que toutes les personnes qui

 16   nous assistent.

 17   Maître Alaburic, je vous rappelle qu'il vous reste 24 minutes. Donc je vous

 18   donne la parole. Excusez-moi c'est 36 minutes -- 36 minutes.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 20   Bonjour à vous. Bonjour à MM. les Juges. Bonjour aux collègues de

 21   l'Accusation. Bonjour aux consœurs et confrères de la Défense. Bonjour,

 22   Général Beneta. Bonjour à tous ceux qui sont avec nous.

 23   LE TÉMOIN : IVAN BENETA [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Interrogatoire principal par Mme Alaburic : [Suite]

 26   Q.  [interprétation] Général, hier nous nous sommes arrêtés au moment où

 27   vous décriviez les renseignements que vous receviez au sujet des actions de

 28   sabotage à la veille de l'opération "Jug," et je vais maintenant vous

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  1   montrer une série de documents vous priant de les commenter pour nous dire

  2   si les descriptions contenues dans ces documents au sujet des événements

  3   correspondent à ce que vous saviez de ce qui se passait à l'époque.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Le premier document P 10145, P 10145. Je

  5   répète le numéro 10145. Voilà. Nous avons maintenant le bon numéro au

  6   compte rendu d'audience. Alors ce document est une déclaration d'un témoin

  7   à charge dont j'ai l'intention de lire un extrait qui se trouve en page 6

  8   de la version anglaise et qui en version B/C/S commence au paragraphe 38 de

  9   la page 6. J'indiquerais également les paragraphes que je ne cite pas. 

 10   Dans cette déclaration, le témoin déclare qu'il était soldat du HVO, qu'il

 11   se trouvait isoler au début du mois de juillet 1993 et qu'ensuite il a fui

 12   Dretelj. Il dit, je cite :

 13   "Nous sommes parvenus à parvenir jusqu'à mon village où nous avons

 14   découvert une partie de la population du village qui avait fui le village

 15   juste avant l'attaque. Nous vivions dans la forêt et nous bénéficions de

 16   l'aide de nos familles, qui nous apportaient ce dont nous avions besoin

 17   pour survivre. Nous suivions les déplacements des Croates sur ce

 18   territoire."

 19   Je ne citerai pas le paragraphe suivant, et je poursuis ma citation, je

 20   cite :

 21   "Nous avons pris contact avec des membres de l'ABiH de Blagaj car dans

 22   notre groupe et nous étions 24 se trouvait un homme qui était un soldat

 23   d'active, se trouvait un homme qui était soldat d'active et qui a réussi à

 24   se procurer un poste de radio qui lui a permis d'établir le contact avec

 25   l'armée de Bosnie. Nous autres, au nombre de 20, avions des fusils et nous

 26   sommes allés chercher d'autres fusils à Blagaj. Notre groupe ne cessait de

 27   croître grâce à l'arrivée de personnes venues de Blagaj et de Gubavica, de

 28   Gubavica."

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  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Je corrige le compte rendu, ce n'est pas

  2   "Dubravica," mais "Gubavica."

  3   "…de sorte qu'à un certain moment, nous nous sommes trouvés au nombre de

  4   70. Le 12 juillet 1993, nous avons reçu par radio un ordre venu du

  5   commandement de Mostar qui nous ordonnait de couper la route entre Stolac

  6   et Capljina -- entre Stolac et Capljina.

  7   Je corrige le compte rendu d'audience entre Stolac et Capljina, pas Mostar.

  8   "Nous avons décidé de lancer une action non loin de Domanovici juste à côté

  9   de Potkos" - nous avons décidé de lancer une action non loin de Domanovici

 10   tout près de Potkos - "en compagnie d'hommes venus de Prenja et de

 11   Bregava."

 12   De Prenja et de Bregava.

 13   "Nous savions qu'une action similaire était lancée à côté de Buna,

 14   Gubavica, ainsi qu'au poste de contrôle installé juste à côté de Pijesci" -

 15   le village de Pijesci - "Nous nous sommes emparés de cette position à

 16   l'aube du 13 juillet 1993. Nous avons fait prisonniers tous les membres des

 17   Unités de Bivolje Brdo, et pour ce faire, nous n'avons tiré -- nous n'avons

 18   pas tiré une seule balle et personne n'a été blessée. Trois soldats ont été

 19   enfermés à clé dans le garage de Mujo Sose à Kremenac, dans le garage de

 20   Mujo Sose. Ils étaient sous la garde de Hasan Sose.

 21   "Je me trouvais moi-même sur la ligne de front à Strmac dans un autre

 22   hameau. Nous attendions des renforts qui nous avaient été promis par le

 23   commandement de Mostar. A 15 heures, nous avons reçu l'ordre de nous

 24   replier sur Blagaj, et notre action bien que victorieuse n'a pas été

 25   reconnue comme telle et nous n'avons reçu aucun soutien, nous avons dû nous

 26   replier, nous sommes donc partis à pied vers Blagaj en abandonnant à son

 27   sort la population civile."

 28   Q.  Général Beneta, nous venons d'entendre la description de cet événement

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  1   avec indication des lieux et des dates; est-ce que ceci correspond à ce que

  2   vous saviez à l'époque des actions menées par l'ABiH sur le plateau de

  3   Dubravica ?

  4   R.  Oui.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] J'aimerais maintenant nous nous penchions

  6   sur le document suivant qui est la pièce P 9935, page 4 de la version

  7   croate du texte, qui correspond au paragraphe 26 du texte anglais.

  8   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, Madame Alaburic, mais

  9   je remarque quand que votre question était extrêmement directive. Vous avez

 10   raconté toute l'histoire au témoin et ensuite vous lui avez demandé s'il

 11   pouvait confirmer que ceci correspondait bien à ce qu'il avait vécu, alors

 12   je ne comprends pas très bien ce que ça signifie.

 13   Monsieur Beneta, saviez-vous que trois personnes ont été enfermées dans le

 14   garage de Sose ? Etiez-vous au courant de cela ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne suis pas au courant de cela. J'ai

 16   répondu par l'affirmative et ma réponse concernait le nom des localités qui

 17   étaient évoquées dans cet extrait, elles concernaient également le

 18   déroulement général de l'action, et est-ce que nous avons fini par

 19   apprendre, à savoir que l'ABiH avait finalement traversé les lignes et pris

 20   contact avec Blagaj, qui était entre les mains de l'ABiH.

 21   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Connaissez-vous cette personne qui

 22   était témoin en l'espèce ? Je ne sais pas si vous avez mentionné son nom,

 23   Madame Alaburic. Je ne pense pas qu'il soit protégé. Il s'agirait d'un

 24   dénommé Vilogorac; connaissez-vous un dénommé Vilogorac ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 26   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Donc vos connaissances à propos de

 27   tout cet incident est extrêmement vague, sont extrêmement vagues. Vous ne

 28   pouvez pas confirmer grand-chose -- vous ne pouvez pas confirmer les propos

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  1   du témoin ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux confirmer que ce que dit ce témoin

  3   s'appuie sur l'aspect général de la situation que j'ai connue à l'époque,

  4   je ne parle pas des détails qu'il évoque, mais tout le reste correspond

  5   bien du point de vue des événements, des dates et des lieux.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Madame Alaburic, c'est à vous.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous m'y

  9   autorisez --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous ne connaissiez pas

 11   l'événement. Très bien, c'était évident pour moi. Mais sur le plan

 12   militaire, ce que dit le témoin dont Mme Alaburic a lu quelques extraits

 13   mais elle n'a pas lu ce qui me semblait plus important. Après je vais vous

 14   le lire; là, vous avez peut-être un avis de militaire à nous donner.

 15   Quelle est la situation ? On voit que, le 13 juillet, il y a donc une

 16   action militaire menée par des soldats de l'ABiH qui ont eu l'ordre de

 17   Mostar de mener cette opération, et cette opération est couronnée de

 18   succès, c'est ce que dit le témoin, puisque sans tirer un coup de feu ils

 19   ont capturé des soldats du HVO. Mais il nous dit : "Ils ont, à 15 heures,

 20   un ordre de repli, donc ils repartent," et c'est la suite qui m'apparaît

 21   important, et là, vous allez pouvoir nous donner certainement votre point

 22   de vue. Il dit ceci :

 23   "A la suite de notre action, les Croates ont lancé une offensive, et ce

 24   sont les populations civiles qui ont souffert."

 25   Il va dire quelle est la souffrance, c'est la phrase suivante :

 26   "Tous les habitants musulmans de la région, quel que soit leur âge ou leur

 27   condition, ont été arrêtés, détenus, puis expulsés."

 28   Il va dire que 800 a 900 personnes ont trouvé refuge dans les bois, et

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  1   qu'une partie de la population a été conduite dans l'usine de biscottes de

  2   Capljina puis a été expulsée.

  3   Donc qu'est-ce qui se passe ? Il y a une attaque de l'ABiH qui se retire,

  4   et le HVO fait une action. L'action va consister à expulser des civils.

  5   Alors en terme militaire, est-ce normal ou anormal ? Est-ce qu'après une

  6   action de l'ennemi, on a la possibilité, à ce moment-là, de s'en prendre à

  7   la population civile pour les expulser ? C'est ce qui dit lui. Alors même

  8   si vous, vous ne connaissez pas l'événement sur un plan général, est-ce que

  9   c'est une conduite militaire classique ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne peux pas

 11   témoigner, en tant que témoin oculaire, au sujet de détail, mais étant

 12   donné ce que j'ai pu suivre, au poste de commandement où je me trouvais,

 13   qui était le poste de commandement du Groupe opérationnel numéro 1, la

 14  situation, dans le secteur tenu par la 1ère Brigade du HVO était, d'un point

 15   de vue militaire, très problématique. Au poste de commandement de la

 16   brigade, ils recevaient de minute en minute des renseignements qui leur

 17   indiquaient que pratiquement tous les éléments de la structure de

 18   déploiement en profondeur étaient attaqués, ce qui a rendu le commandement

 19   très nerveux, et ce, à juste titre, d'ailleurs le commandement en a été

 20   assez surpris. Les actions qui ont été mises en place pour remédier à cette

 21   situation et prévenir des conséquences négatives ultérieures ont --

 22   manifestement, étaient telles que le commandement, qui n'avait pas la

 23   possibilité de déterminer exactement d'où venaient tous les dangers, alors

 24   que les actions se développaient sur l'intégralité du front et aussi en

 25   profondeur, et dans ces conditions, le commandement a retiré toute la

 26   population qui vivait sur ce territoire et l'a mise sous bonne garde.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors si on doit bien comprendre votre réponse,

 28   parce que c'est important, et moi, je ne veux pas faire d'erreur dans

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  1   l'appréciation que je serai amené à apporter à ce que vous dites, si je

  2   comprends bien, vous dites que compte tenu de la situation militaire, qui

  3   était problématique, le HVO en termes militaires n'avait eu alors, à ce

  4   moment-là, que la possibilité de déplacer la population civile pour la

  5   mettre à l'abri; c'est que vous dites ? C'est bien ça qu'on doit comprendre

  6   ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que je dis, mais pour que toute

  8   la vérité soit établie, j'indique également qu'en agissant ainsi, sa

  9   population aussi était protégée par rapport aux événements à venir.

 10    Parce que à entendre ce qui est dit dans cette déclaration et

 11   d'après ce que je savais de la vérité des événements à l'époque, il est

 12   tout à fait clair que ces gens qui agissaient en profondeur pour le HVO

 13   n'avaient pas tous les éléments d'une armée. La majorité de ces personnes

 14   ne portaient pas d'uniforme et manquaient d'armes. Donc c'est de ce point

 15   de vue que je justifie l'action du commandement.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Le témoin va apporter une autre précision que

 17   l'avocate n'a pas lue, mais je vais vous lire. Voilà ce qu'il dit :

 18   "Les gens ont été conduits en camion par les soldats du HVO à Podpetak pour

 19   être expulsés."

 20    Alors, écoutez, la suite c'est important ce qu'il dit :

 21   "Ils étaient débarqués à 300 mètres de la ligne de front, et depuis

 22   les bunkers où j'étais en fonction, nous avions une visibilité de 50 mètres

 23   environ. Nous entendions les tirs des soldats du HVO en direction des

 24   personnes expulsées qui marchaient vers nos lignes. Nous étions chargés

 25   avec mes camarades de porter secours aux personnes qui arrivaient."

 26   Alors le témoin raconte que le HVO a laissé les "personnes expulsées" -

 27   entre guillemets - à 300 mètres des lignes de front et a dû leur dire :

 28   allez vers les lignes de front. Mais le HVO a, semble-t-il, tiré sur ces

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  1   gens-là, et lui-même va dire que, le 15 juillet, il est allé récupérer le

  2   corps de sa cousine, Remza, qui était âgée de 75 à 80 ans.

  3   Alors en termes militaires, est-ce que c'est normal de tirer sur des gens

  4   que l'on invite à regagner les lignes amies entre guillemets ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, en tant que commandant, je n'aurais pas

  6   justifié un tel comportement, sauf si cela avait été entendu à l'avance par

  7   téléphone, c'est-à-dire par contact avec la partie adverse ou qu'un accord

  8   avait été conclu pour que cette population soit dirigée vers eux.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Parce que et je termine, parce que le témoin a

 10   dit, d'après lui. Mais c'est le point de vue du témoin et vous n'étiez pas

 11   là, ni moi non plus. Voilà ce qu'il dit :

 12   "Au début des expulsions de Buna à Blagaj, il y avait des victimes chaque

 13   jour. Mais par la suite, les soldats du HVO ont cessé de tirer

 14   systématiquement sur les exilés. Je pense qu'entre le 13 et le 16 juillet

 15   1993, au moins 50 personnes ont été tuées, piétinées ou sont mortes

 16   d'épuisement, et nombreuses autres ont disparu."

 17   Donc d'après lui, il y aurait une cinquantaine de personnes qu'on aurait

 18   expulsées dans ces conditions, mais il y aurait eu 50 morts. Bon, en termes

 19   militaires dans une opération de ce type où on veut protéger les

 20   populations civiles, comment vous expliquez qu'il y a pu y avoir des tirs

 21   sur une partie de la population civile ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux parler que d'après mon point de vue

 23   et sur la base de ce que je connaissais de la situation qui a eu lieu dans

 24   ces régions à cette époque, et je ne l'ai connue que par les rapports. Je

 25   suppose que le témoin dans sa déclaration parle de population musulmane, et

 26   d'après ce que j'ai appris, il n'y a pas eu beaucoup de morts. Je sais que

 27   plus de 20 membres de cette brigade ainsi que des civils qui se sont

 28   trouvés sur ce territoire ont trouvé la mort, en raison de cette attaque

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  1   des forces musulmanes. Mais ce que je tiens à souligner ici, et je ne parle

  2   pas de la véracité des propos du témoin, mais ce que je voudrais souligner

  3   simplement c'est que la question de savoir ce qu'il est permis de définir

  4   comme un civil dès lors qu'il s'agit d'un homme qui a entre 18 et 60 ans;

  5   puisque selon la conception de la Défense populaire généralisée, il avait

  6   pour devoir de prendre les armes et de combattre. Donc la définition n'est

  7   pas dépourvue d'ambiguïté, et je crois que dans une situation comme celle-

  8   ci, les hommes de la 1ere Brigade ont peut-être été trop sensibles, trop

  9   nerveux par rapport à l'éventualité d'un danger venu de quelque part.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Je voudrais corriger un détail au compte

 11   rendu d'audience.

 12   Page 7, ligne 12, il est écrit que le témoin aurait dit qu'il

 13   s'agissait de civils, ou plutôt qu'il ne s'agissait pas de soldats à

 14   proprement parler, mais de civils armés. Alors que le témoin a dit qu'il

 15   s'agissait d'hommes armés portant des vêtements civils. Cela fait une

 16   différence.

 17   Q.  Général Beneta, est-ce que vous pouvez confirmer que ma

 18   correction est justifiée, ma demande de correction du compte rendu ?

 19   R.  Exact.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] J'aimerais maintenant expliquer à M. le

 21   Juge Trechsel, que ma question qui figure en page 4, en lignes 1 à 4 du

 22   compte rendu était très précise. Parce que je sais que le témoin ne peut

 23   pas connaître de détail comme celui de l'enfermement dans le garage, et

 24   cetera. Je tiens simplement à dire qu'à mon avis, la question n'était pas

 25   directrice, et je vais expliquer pourquoi. J'ai interrogé le témoin sur les

 26   faits qui ont caractérisé la situation, sur les dates, 12 et 13 juillet,

 27   ainsi que sur les localités mentionnées dans la déclaration de ce témoin

 28   antérieur. Le témoin présent ici nous a dit hier, que ces événements se

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  1   sont déroulés entre le 12 et le 13 juillet, lorsque je dis d'événements, je

  2   parle d'action de sabotage, et c'est bien la date qui figure dans ce

  3   document. Puis nous avons dans ce document des localités telles que

  4   Domanovici, Gubavica, Bivolje Brdo, et d'autres lieux qui se trouvent bien

  5   sûr le plateau de Dubrava et qui permettent au témoin présent devant vous,

  6   de vous confirmer que ces lieux se trouvent bien sur le plateau de

  7   Dubravica. Donc c'est sur la base de ce qu'a dit le témoin présent devant

  8   vous hier, que j'ai considéré que je pouvais me permettre de lui demander

  9   de confirmer les extraits de la déclaration d'un autre témoin, et je parle

 10   bien des extraits que j'ai cités.

 11   Maintenant je voudrais expliquer aussi pourquoi je n'ai pas donné lecture

 12   de l'intégralité de cette déclaration de l'autre témoin, car ma décision

 13   pourrait être interprétée comme une volonté de dissimuler une partie de

 14   cette autre déclaration. J'ai bien dit aux Juges de la Chambre que nous

 15   allions nous servir de cette déclaration et la verser au dossier de façon à

 16   ce que les Juges puissent en lire l'intégralité. Mais le sujet qui

 17   m'intéresse en ce moment, ce sont les actions de sabotage de l'ABiH, donc

 18   je voulais éviter de surcharger le récit par d'autres descriptions

 19   d'événements de ce qu'a fait le HVO. Le témoin n'était pas présent dans le

 20   prétoire, nous n'avons pas pu l'interroger sur ce qu'il a dit, donc nous

 21   considérons que les questions de M. le Président de la Chambre, M. le Juge

 22   Antonetti sont fondées sur la nécessité d'un commentaire relatif au reste

 23   de la déclaration de ce témoin antérieur.

 24   Q.  Général Beneta, votre réponse à la question que je vous ai posée, en

 25   vous demandant si la correction que j'ai demandée au compte rendu, à savoir

 26   que vous n'avez pas dit que ce n'était pas les civils, mais que c'était des

 27   hommes en armes habillés en civil. Est-ce que cette correction était

 28   justifiée ? Votre réponse n'a pas été consignée au compte rendu.

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  1   R.  Oui, j'ai dit qu'il s'agissait bien d'hommes qui portaient des

  2   vêtements civils et qui étaient armés, et donc constituaient un danger pour

  3   les membres du Conseil croate de la Défense.

  4   Q.  Général, puisque, entre le Procureur et la Défense, la position quant à

  5   réalité du déroulement des événements est opposée, je vais poursuivre en

  6   parlant de ces actions menées pour montrer qu'elles ont bien existé ces

  7   actions de sabotage.

  8   Donc j'aimerais que nous passions au document P 9935, page 4 du texte

  9   croate, page 4 du texte anglais. Egalement, je vais donner lecture du

 10   passage, je cite :

 11   "Selon les mots, les propos de mon frère Mirsad, dans la nuit du 13 juillet

 12   1993, de jeunes gens originaires du hameau avaient prévu de mener une

 13   action destinée à libérer ce territoire de façon à mettre un terme aux

 14   crimes commis par les Croates contre nous. Je ne sais pas si cette

 15   opération était coordonnée avec l'opération de grande envergure qui était

 16   menée par l'armée de Bosnie. Je pense que les jeunes gens du village qui se

 17   cachaient dans les environs collaboraient avec l'armée de Bosnie, mais je

 18   ne sais pas s'ils ont entrepris cette opération planifiée de leur propre

 19   initiative, ou si c'est une armée de l'extérieur du village qui la

 20   dirigeait. Ce que je sais c'est que le but de cette opération était

 21   d'attaquer les Croates, mais elle a échoué par la suite, mes frères n'en

 22   ont plus parlé."

 23   Alors, Général, dans les autres parties du texte, il est question des

 24   localités telle que Domanovici et d'autres localités situées sur le plateau

 25   de Dubravica.

 26   Alors d'après la date et les lieux indiqués dans ce texte, pouvez-vous nous

 27   dire si cela correspond à la réalité des actions de sabotage menées par la

 28   BH à cette époque-là ?

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  1   R.  Oui, ceci correspond à cette image que je recevais dans les

  2   informations sur ce qui se passait à cet endroit.

  3   Q.  Bien. Passons au document suivant, il s'agira d'un document du HVO dont

  4   la cote est 4D 1101. Il s'agit là d'un procès-verbal de l'audition

  5   constitué sur la base d'une conversation avec M. Becir Suta. Je vais

  6   maintenant résumer brièvement la déclaration qui est brève. Il y est

  7   question du fait que sur le plateau de Dubrava, une unité a été créée, il y

  8   est dit :

  9   "Mon groupe avait pour tâche de sortir à Masline d'y constituer une ligne."

 10   Ensuite il cite les membres de son groupe dont Salko Alihodzic, et à

 11   la fin,il indique qu'ils avaient refusé de tirer, qu'ils étaient à une

 12   localité, et c'est sur cette colline que l'armée du HVO les a trouvés et

 13   les a capturés pour les emmener à la caserne.

 14   Dites-nous : cet emplacement de Masline, est-ce que cela se trouve

 15   sur le plateau de Dubravica, pour autant que vous le sachiez ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Penchons-nous sur le document suivant, 4D 1096. Il s'agit là d'une note

 18   officielle rédigée sur la base d'une conversation avec M. Admir Cevra, et

 19   ici au paragraphe 2, il est dit :

 20   "Lors de l'action commencée par l'armée de Bosnie-Herzégovine, j'étais

 21   également dans le hameau, et Ahmet et Mithad Cevra, qui venaient de ce même

 22   village, ont activement participé au combat contre le HVO."

 23   Il donne les noms d'autres personnes, et il dit que ces personnes ont

 24   participé au conflit avec le HVO. Pour Mithad Cevra, il dit qu'il avait été

 25   membre des Unités du HVO à Mostar, mais ne participait pas à l'action. Il

 26   donnait son soutien actif au HVO afin de découvrir les membres de l'armée

 27   de Bosnie-Herzégovine qui se cachaient aux alentours du village.

 28   Général, est-ce que ceci est conforme à ce que vous avez au sujet des

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  1   membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine qui étaient aux alentours, ou bien

  2   est-ce que ceci va à l'encontre lorsqu'il est question des alentours du

  3   plateau de Dubrava ?

  4   R.  Oui, ceci est conforme à mes connaissances générales également.

  5   Q.  Penchons-nous sur le document suivant, 4D 1042. Il s'agit là maintenant

  6   d'une information, d'un résumé qui a été constitué, le plus probablement

  7   sur la base de toutes ces notes portant sur les conversations avec tous les

  8   membres de l'action. Je vais lire certaines parties.

  9   Il est question d'un groupe de 70 personnes, ensuite de 50 personnes

 10   environ. Puis s'agissant d'une réunion de Gubavica, il est dit que leur

 11   mission était de capturer la caserne à Gubavica.

 12   Dites-nous, Général : qui avait entre ses mains la caserne de Gubavica ?

 13   R.  La caserne de Gubavica était une petite soudure utilisée par la JNA

 14   comme un centre de transmission, et d'après mes informations, une attaque

 15   avait été lancée contre cette caserne, une attaque abrupte. Ceux qui

 16   étaient à l'intérieur ont survécu grâce au hasard car l'attaque a été menée

 17   à bien avec des équipement qui auraient détruit une maison, mais comme un

 18   barbelé entourait cette structure, ces barbelés ont arrêté les anti-blindés

 19   utilisés par les agresseurs, par conséquent, ceux qui étaient à l'intérieur

 20   ont pu riposter à l'attaque.

 21   Q.  Dites-nous : quels étaient les soldats attaqués qui étaient à ce

 22   moment-là dans cette structure ?

 23   R.  A ce moment-là, à l'intérieur de la structure se trouvait l'Unité de la

 24   1ère Brigade du HVO.

 25   Q.  Ensuite dans le texte, l'on mentionne les localités de Dubrava où un

 26   groupe de 15 soldats était constitué; ensuite Oplicici où un groupe de 50

 27   soldats était créé, qui a eu pour tâche de neutraliser une partie du HVO

 28   qui était déployée dans la région de Satorova Gomila. Ensuite il est dit

Page 46627

  1   qu'à Lokve, un Groupe opérationnel a été créé, constitué de 25 à 30

  2   personnes qui avaient pour tâche de couper les lignes de communication, les

  3   axes de communication entre Domanovic et Stolac. Ensuite on mentionne un

  4   groupe de 15 à 20 personnes dont la tâche était de couper l'axe de

  5   communication entre Domanovici et Bivolje Brdo. Compte tenu de la taille de

  6   ces groupes et le but de leurs engagements, est-ce que ceci est conforme à

  7   ce que vous saviez par rapport à la situation sur le terrain, à l'époque ?

  8   R.  Oui, ceci est conforme aux rapports qu'on recevait du terrain, à ce

  9   moment-là, et je sais particulièrement qu'il y a eu des combats longs et

 10   violents à Satorova Gomila.

 11   Q.  Ensuite, dans le texte, il est dit que d'après les déclarations des

 12   personnes capturées, suite à la fin de la mission de la région large de

 13   Gubavica et de la direction de Mostar, ils étaient censés recevoir un

 14   renfort d'environ 700 soldats dont le but était de maintenir le territoire

 15   capturé, de fortifier les lignes établies et de créer un commandement vers

 16   Stolac et Capljina en contrôlant entièrement le plateau de Dubrava.

 17   Général, dites-nous : est-ce que vous saviez cela à l'époque ou s'agit-il

 18   d'un élément de nouveau que ce document contient ?

 19   R.  Ceci correspondait à notre estimation de leurs intentions, lorsque nous

 20   avons reçu les premières informations du terrain.

 21   Q.  Bien. Je vais passer outre les deux documents suivants, car je pense

 22   qu'il n'est pas important de nous pencher sur les cinq.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- sur le document 4D 1042. C'est un

 24   document qui vient du service d'information militaire et par curiosité,

 25   j'ai regardé les destinataires. Il y en a trois : il y a le département de

 26   la Défense, M. Stojic; le commandant du Groupe opérationnel, le groupe 2,

 27   Matic; et puis, le chef du service, Zarko Keza. Ce service reçoit des

 28   informations de première main de soldats qui ont été capturés, qui

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  1   racontent tout cela et qu'il y aurait un ordre d'Arif Pasalic et que ce

  2   plan va continuer, puisqu'il le dit en conclusion, qu'il va continuer dans

  3   la nuit et dans les prochains jours.

  4   Une information militaire de cette nature, d'après vous, mais peut-être

  5   vous ne pouvez pas répondre. Si vous ne pouvez pas répondre, vous me le

  6   dites. Comment se fait-il qu'on ne l'envoie pas au commandant du HVO en

  7   personne, voire au commandant suprême, commandant des armées, Mate Boban,

  8   alors même qu'on envoie cela au département de la Défense et puis, au

  9   commandant du Groupe opérationnel 2 ? Est-ce que ça vous semble logique en

 10   termes militaires ? Dans une situation pareille, qu'est-ce que vous auriez

 11   fait, vous ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dois avouer, Monsieur le Président, que je

 13   ne sais pas et à l'époque, je ne connaissais pas non plus la structure

 14   exacte et l'organisation exacte du Conseil croate de la Défense et je ne

 15   saurais vous répondre à cette question avec exactitude.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, imaginons - mais hypothèse d'école - que votre

 17   unité capture des soldats ennemis qui révèlent qu'il y a tout un plan, et

 18   cetera. Vous auriez informé qui, vous ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Si je me place dans la position de celui qui a

 20   signé le document, il était censé informer son supérieur hiérarchique.

 21   Quant à la question de savoir qui, parmi ces personnes, était son supérieur

 22   hiérarchique, pour le savoir, il faudrait voir l'organigramme

 23   organisationnel. Peut-être, d'après le déploiement, quelqu'un était sur le

 24   terrain et quelqu'un était dans l'état-major et donc, peut-être il a voulu

 25   informer les personnes qui pouvaient bénéficier de cette information. Mais,

 26   là, je ne lance que des suppositions. Je n'ai pas une réponse exacte à

 27   cette question.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

Page 46629

  1   Mme ALABURIC : [interprétation]

  2   Q.  Revenons à l'opération Jug, Général. Dites-nous : quelle était la

  3   position du commandant de la 1ère et de la 3e Brigades concernant l'état de

  4   préparation du HVO, pour ce qui est des opérations de grande envergure,

  5   même avant ces actions de sabotage ?

  6   R.  D'après mes premières connaissances concernant leurs capacités et

  7   l'état de préparation pour lancer une offensive, se fonder sur une action

  8   de reconnaissance menée par M. Dzanko et moi-même et nous avons parlé avec

  9   le commandant de la 3e Brigade du HVO, M. Primorac, pour ce faire. Il nous

 10   a exposé une opinion ferme selon laquelle son unité n'était pas capable de

 11   tenir entièrement la ligne qu'elle contrôlait déjà, la ligne de défense, et

 12   mener des opérations offensives à côté.

 13   Q.  Général, d'après vos connaissances, malgré une telle position, qui a

 14   approuvé l'exécution d'une telle opération ?

 15   R.  Personnellement, je n'ai pas participé à de telles discussions. J'étais

 16   chargé du travail au sein de l'état-major du Groupe opérationnel 1. Je ne

 17   saurais vous répondre avec exactitude.

 18   Q.  Avez-vous des connaissances indiquant que Luka Dzanko serait allé

 19   quelque part afin d'y avoir des réunions ou des négociations ?

 20   R.  Oui. Le commandant du Groupe opérationnel, M. Dzanko, s'est rendu

 21   plusieurs fois à Grude.

 22   Q.  Savez-vous, Général, qui avait son bureau à Grude ?

 23   R.  Oui. Je pense qu'à cette époque-là, M. Boban avait son bureau à Grude.

 24   Q.  Dites-nous, Général, est-ce que le chef de l'état-major du HVO, Milivoj

 25   Petkovic, avait participé à la planification de cette action, d'une

 26   quelconque manière, pour autant que vous le sachiez ?

 27   R.  Non. Je n'ai pas vu de document corroborant cette thèse et je ne l'ai

 28   pas rencontré non plus là-bas, aux endroits où je me trouvais moi-même.

Page 46630

  1   Q.  Hier, vous avez dit que l'opération a été reportée jusqu'au 15 juillet

  2   1993. Dites-nous : est-ce que cette action a réellement été exécutée ce

  3   jour-là ?

  4   R.  Oui, cette action a commencé le 15 et elle s'est terminée peu de temps

  5   après, elle s'est soldée par un échec.

  6   Q.  Dites-nous : est-ce que près du poste de commandement, avant le début

  7   de l'opération, un haut officier ou officiel de l'armée du HVO est venu ?

  8   R.  Oui. A l'aube du jour auquel l'opération a débuté, près du commandement

  9   du Groupe opérationnel 1, M. Boban est venu aux positions de l'artillerie.

 10   Il était accompagné de plusieurs autres personnes dont je ne me souviens

 11   pas, des personnes du HVO. C'est eux qui y sont venus.

 12   Q.  Dites-nous : est-ce qu'à cet endroit ou à proximité, se trouvait le

 13   chef de l'état-major du HVO, Milivoj Petkovic ?

 14   R.  Non, à cette époque-là non plus, il n'était pas là.

 15   Q.  Pour terminer, penchons-nous sur deux documents. Tout d'abord, 4D 1695,

 16   1695; ici, nous avons la liste des membres du commandement du Groupe

 17   opérationnel 1. Dites-moi, Général : de quel commandement s'agit-il ?

 18   R.  Ici, nous avons la liste des personnes du commandement et d'autres

 19   personnes concernant lesquelles on considérait qu'elles pouvaient venir au

 20   bâtiment du commandement du Groupe opérationnel. Ceci a été fourni aux

 21   membres du service de sécurité, visiblement pour leur permettre le passage

 22   dans le bâtiment.

 23   Q.  Dites-nous : est-ce que ceci correspond au commandement de l'opération

 24   Sud ?

 25   R.  Oui. Cette liste des membres du commandement concernait l'opération et

 26   ceux qui venaient souvent dans le commandement.

 27   Q.  Bien.

 28   Penchons-nous maintenant sur le dernier document, P 3048.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi.

  2   Monsieur Beneta, avez-vous déjà vu cette liste, auparavant ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne cette liste, je l'ai vue

  4   lors des préparatifs. Ceci m'a été présenté au cours de cette dernière

  5   journée.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce que vous avez une idée sur la

  7   date où ce document a été établi ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce document, d'après la constitution des

  9   personnes, a été constitué avant le début, c'est-à-dire pendant la phase de

 10   la planification de l'opération. C'était autour du 8, 9 ou peut-être 10

 11   juillet 1993.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge Trechsel.

 14   Effectivement, cette donnée manquait dans le document.

 15   Q.  Voyons le document suivant qui ne porte pas de date non plus. Est-ce

 16   que vous pouvez nous dire, s'agissant de ce document-ci, si vous savez à

 17   quel moment approximativement il a été créé ? Donc, il s'agit de la pièce P

 18   3048. Il s'agit d'un ordre d'attaque. En haut, à droite, il est écrit, "Jug

 19   [phon]," "sud."

 20   Dites-nous, Général Beneta, est-ce que vous connaissez ce document déjà ?

 21   Est-ce que vous le connaissiez déjà ? 

 22   R.  Oui, je connaissais déjà ce document. Il s'agit d'un ordre rédigé après

 23   que la décision a été prise et élaboré par le service opérationnel de

 24   l'état-major à la tête duquel je me trouvais.

 25   Q.  Général, est-ce que vous pouvez nous dire une date un peu plus précise

 26   de ce document ?

 27   R.  C'était le 10 ou le 11 juillet 1993.

 28   Q.  Je vous remercie, Général Beneta.

Page 46632

  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, ainsi se termine mon

  2   interrogatoire principal. Merci beaucoup.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, une question technique de suivi, à partir

  4   du dernier document.

  5   On voit que le Groupe opérationnel 1 va être aidé par des unités du HVO qui

  6   sont mentionnées. Dans ce contexte, le commandement est exercé par le

  7   commandant de l'armée croate et les Unités du HVO sont-elles, à ce moment-

  8   là, resubordonnées au commandement de l'armée croate ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'était M. Dzanko qui

 10   commandait cette bataille, lors de cette bataille. Sur le plan formel, il

 11   était membre de l'armée croate. Cependant, je crois que cette mission lui a

 12   été confiée dans les mêmes conditions que s'agissant de moi, c'est-à-dire

 13   que quelqu'un lui avait demandé de leur venir en aide.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais prendre maintenant un autre cas

 15   d'école. Imaginons que le HVO, dans une zone donnée, a besoin du soutien de

 16   l'armée croate. Le commandant du HVO demande à l'armée croate de lui amener

 17   des hommes, voire même une unité entière. Dans ce cas précis, qui, sur le

 18   terrain, va exercer le commandement opérationnel sur l'unité de l'armée

 19   croate qui serait prêtée, détachée, mise à disposition ? Qui exerce sur le

 20   terrain l'autorité ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si les membres de

 22   l'armée croate sont venus aider, ceci sous-entend que quelqu'un du HVO

 23   commandait.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, vous dites -- ça sous-entend que c'est

 25   quelqu'un du HVO qui commande dans le cas d'école.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va faire la pause. Après, on va reprendre

 28   avec les autres avocats. Mais j'ai d'autres questions. Mais peut-être que

Page 46633

  1   la Défense veut se préparer. Normalement, on fait la pause à 10 heures 30,

  2   mais il n'y a pas de règle. C'est les Juges qui décident en fonction de

  3   l'intérêt de la justice et l'intérêt du procès.

  4   Maître Alaburic.

  5   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, je vous

  6   remercie d'avoir posé ces questions. Avec votre permission, je souhaite

  7   poser une question supplémentaire, question de suivi qui enchaîne sur ce

  8   que vous venez de dire. J'aurais peut-être dû la poser avant.

  9   Q.  Si on suppose, Général Beneta, que Mate Boban en tant que commandant

 10   suprême du HVO, a décidé de la question de savoir si l'opération allait

 11   être menée à bien ou non, qu'est-ce que ceci veut dire à qui Luka Dzanko

 12   était-il subordonné en tant que commandant de cette opération ?

 13   R.  Dans ce cas-là, il serait subordonné à M. Boban.

 14   Q.  Merci beaucoup, Général.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président,

 16   Messieurs les Juges.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Votre réponse est intéressante. Mais pour illustrer

 18   votre réponse, je vais prendre un cas autre.

 19   Vous vous rappelez ce qui s'était passé au Koweït quand l'Irak avait

 20   envahi le Koweït, et vous vous rappelez que l'armée américaine était venue

 21   aider le Koweït. Alors, imaginons, pour faire suite à la question de Me

 22   Alaburic, qu'il y a le commandant de l'armée américaine qui est là présent

 23   à Koweït City, mais qu'il y a également le commandant de l'armée du Koweït

 24   qui est présent. Dans cette hypothèse d'après vous, qui commande

 25   l'opération militaire ? Le commandant américain ou le commandant koweitien

 26   ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Si l'armée américaine est venue aider, c'est

 28   le commandant de Koweït qui commande. Quelles que soient les actions

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  1   précédentes, ça devrait être lui.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc c'est pour ça que vous avez dit que

  3   normalement, c'est Mate Boban qui commande.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que j'ai dit aussi en fonction de ma

  5   connaissance de la situation qui prévalait à l'époque là-bas.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de nature technique. Quand vous, vous

  7   étiez sur le terrain puisque hier on a vu les cartes, on a vu où vous étiez

  8   positionné au-delà de Dubrovnik. Ce que je voudrais savoir, quand vous êtes

  9   dans cette situation, est-ce qu'avec votre commandement qui est à Zagreb,

 10   vous étiez en relation permanente et constante par les moyens radio, par

 11   les télex, fax, ou bien il y avait des ruptures dans la chaîne de

 12   communication ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, moi en tant que

 14   commandant de la brigade, à l'époque, j'ai été subordonné au commandant du

 15   front sud qui faisait partie du front qui se trouvait au sud de la Croatie,

 16   et j'étais en communication avec eux, communication qui parfois était

 17   interrompue après que les positions et notamment les positions du poste de

 18   commandement changeaient, car l'infrastructure était très mauvaise et nous

 19   n'avions pas suffisamment de radios; et une partie de nos équipements ne

 20   pouvait pas être utilisée en raison du terrain montagneux et des

 21   caractéristiques de nos équipements.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc votre réponse, c'est de dire que vous,

 23   vous étiez en communication avec le commandement du front sud, donc vous

 24   n'étiez pas directement en relation avec Zagreb ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Autre question. Dans ces situations très complexes

 27   au point de vue militaire, notamment quand une armée X apporte son soutien

 28   à une armée Y, pour éviter les problèmes et les dégâts collatéraux, est-ce

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  1   qu'il doit y avoir entre l'armée X et l'armée Y qui sont par définition des

  2   armées amies, des commandements conjoints ou pour le moins un système de

  3   communication très performant pour éviter qu'on se tire dessus ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce problème se manifestait plutôt sur le

  5   terrain qu'au niveau des commandements, et il était réglé en assignant des

  6   missions particulières aux hommes qui se trouvaient sur les flancs gauche

  7   et droit et en améliorant la coordination selon la nature de la mission,

  8   selon la date et selon le lieu. Les commandements pouvaient avoir des

  9   niveaux de collaboration divers mais ce qui était capital, c'était que

 10   cette coopération, cette collaboration soit bien exprimée sur le terrain.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Une dernière question. Entre vous qui exercez le

 12   commandement au niveau de la brigade et une unité qui est sur le terrain,

 13   une petite unité, qui fait une opération déterminée à l'avance, est-ce que

 14   vous devez avoir en permanence le contact avec cette unité pour qu'elle

 15   vous informe en temps réel des difficultés qu'elle rencontre, des succès

 16   qu'elle a, des déconvenues qu'elle pourra également subir ? Est-ce qu'il

 17   doit y avoir une communication permanente, minute par minute, entre l'unité

 18   qui est sur le terrain et le commandant de la brigade ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, vous pensez sans doute

 20   à un endroit qui ne faisait pas partie sur le plan structurel du territoire

 21   correspondant à ma brigade. Dans un cas comme celui-ci, il est tout à fait

 22   aisé de répondre par l'affirmative car cela permet au commandant qui est

 23   responsable d'éviter de très nombreux problèmes. La vie dans les lieux où

 24   se mènent des combats est beaucoup plus complexe que ce qui vient d'être

 25   dit. Parfois ce sont les équipements qui manquent et c'était

 26   particulièrement le cas dans cette période de la guerre. Parfois vous

 27   perdez la liaison. Parfois les équipements qu'ils ont et que vous avez

 28   n'ont pas les mêmes caractéristiques techniques, et ceci était un problème

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  1   très important s'agissant d'unifier et de coordonner les combats dirigés à

  2   partir de lieux divers.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- réponse, puis ce sera la dernière

  4   question.

  5   Vous nous avez dit tout à l'heure qu'à un moment donné, vous aviez eu dans

  6   une opération des tués; vous aviez eu donc des tués et des blessés. Quand

  7   un commandant de brigade a des tués, est-ce qu'il va demander aux échelons

  8   inférieurs, à ses officiers, un rapport sur les circonstances qui ont

  9   entraîné la mort ou les blessures de ces soldats ? Est-ce que ça se fait en

 10   termes militaires ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la partie du corps du rapport qui doit

 12   traiter de ces pertes humaines, et je dois dire que souvent dans les

 13   rapports, il n'était pas dit si les tués étaient morts par éclats d'obus ou

 14   par balles, ou à bord d'une automobile sur la route parce qu'un obus avait

 15   explosé à côté de la voiture. On trouvait dans les rapports le nombre des

 16   tués, on trouvait la description de la situation qui avait provoqué ces

 17   morts sur le plan militaire.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Et quand l'ennemi a des tués, est-ce que vous

 19   demandez à vos propres troupes d'expliquer dans quelle circonstance ont été

 20   tués les soldats ennemis ? Ça se fait ou ça ne se fait pas ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] De la même façon que lors de pertes

 22   d'effectifs relevant de vous, on cite le nombre des morts et les

 23   circonstances, mais sans apporter des détails permettant d'expliquer

 24   comment les choses se sont passées, sauf si le commandant de l'unité qui se

 25   trouvait sur le terrain ne constate pas que certains hommes relevant de lui

 26   ont commis un acte qui est contraire à certaines dispositions relatives à

 27   l'action des militaires, comme par exemple le droit de la guerre.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- on poursuit pendant 20 minutes ou si

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  1   on fait la pause. On continue. Alors, on va continuer jusqu'à 10 heures 30.

  2   Je vais interroger maintenant les autres Défense pour l'heure 30 que

  3   vous avez pour contre interroger.

  4   Alors, on va commencer par D1.

  5   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le prétoire.

  6   La Défense de M. Prlic n'a pas de question à poser à ce témoin.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, pour D2, Maître Nozica.

  8   Mme NOZICA : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

  9   Messieurs les Juges. Bonjour à tous dans le prétoire.

 10   Etant donné l'accord conclu en un terme, je dois dire que la Défense

 11   des deux a été la première à s'exprimer dans le contre-interrogatoire de ce

 12   témoin. Quant à nous, nous n'avons pas de questions à poser à ce témoin.

 13   Merci.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : D3.

 15   Mme PINTER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. La Défense 3D

 16   a des questions à poser à ce témoin. Très précisément, c'est le général

 17   Praljak qui aurait des questions militaires à poser à ce témoin. Il a

 18   préparé une carte de grande taille qui peut être présentée à tous ici. Nous

 19   ne sommes pas encore parvenus à la photocopier dans la nuit, donc nous

 20   demandons à pouvoir l'utiliser aujourd'hui et à remettre la copie de cette

 21   carte demain, car techniquement nous n'avons pas eu le temps de tout

 22   préparer.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Le général Praljak va utiliser combien de minutes ?

 24   Mme PINTER : [interprétation] D'après l'ordre de prise de parole, nous

 25   savons qu'une heure et demi et prévue pour les équipes de Défense. Si nous

 26   divisons cela par cinq équipes de Défense, cela devrait normalement nous

 27   donner 17 minutes. Mais étant donné que ma consoeur Suzanne n'a pas de

 28   questions, nous avons prévu d'en terminer en 30 minutes, sinon moins.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Trent minutes. Très bien.

  2   Alors, Général Praljak, votre avocate a dit vous avez 30 minutes.

  3   Mme PINTER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je

  4   demanderais à M. l'Huissier de bien vouloir distribuer les documents que

  5   j'ai entre les mains.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour éviter les problèmes qu'on a eu la semaine

  7   dernière, ayez néanmoins l'œil sur la pendule pour ne pas dépasser le

  8   temps, parce que vous avez vu à quoi aboutit le dépassement de temps.

  9   Deuxième conseil que je peux vous donner, allez toujours d'abord au

 10   principal et puis, s'il vous reste du temps, allez à l'accessoire; parce

 11   que si vous faites l'inverse, vous allez d'abord à l'accessoire et puis

 12   après quand vous voulez aborder le principal, il ne reste pas de temps.

 13   Donc il vaut mieux aborder tout de suite le principal et s'il vous reste du

 14   temps, à ce moment-là, vous pouvez aller sur d'autres terrains.

 15   Bien. Donc vous avez la parole.

 16   Mme PINTER : [interprétation] Excusez-moi, Général.

 17   Monsieur le Président, nous n'avons pas pu nous rencontrer pendant la

 18   pause avec mon client. Donc je voudrais indiquer qu'une partie du contre-

 19   interrogatoire du général Praljak concernera les questions posées hier qui

 20   figurent aux pages 13 à 16 du compte rendu d'audience d'hier. De cette

 21   façon, je vous indique quelles seront les parties qui seront abordées par

 22   le général Praljak.

 23   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président,

 24   Messieurs les Juges. Apparemment, je n'ai jamais eu le temps de m'exprimer

 25   longuement. Cinq minutes par-ci, cinq minutes par-là. Enfin.

 26   Contre-interrogatoire par l'accusé Praljak :

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, Général.

 28   R.  Bonjour.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne peux pas vous laisser dire ça. Parfois vous

  2   voyez, en 15 secondes on peut poser une question qui résume tout. Parfois

  3   il n'y a pas besoin de passer une heure en 15 secondes. Donc ne dites pas

  4   qu'on ne vous donne pas assez de temps. Moi, ce que je vous dis, dans le

  5   temps que vous avez, faites un choix sélectif des questions. Voilà c'est

  6   tout. Tout le monde sera content, vous le premier.

  7   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bon, merci, Monsieur le Président;

  8   enfin, je ne voulais pas être trop critique. Enfin.

  9   Q.  Général Beneta --

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] S'il vous plaît, pendant que je pose la

 11   question, je demanderais à M. l'Huissier d'exposer la carte que je lui ai

 12   remise.

 13   Q.  Général, le Président Antonetti vous a posé des questions au sujet de

 14   la coopération entre le HVO et le HV au sein de l'armée. Alors dites-moi :

 15   au moment de votre premier engagement dans la région de Stolac, est-ce que

 16   vous étiez présent sur les lieux en tant qu'officier de l'armée croate ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Pour la deuxième opération, l'opération Sud, avez-vous demandé à votre

 19   commandant de zone ou au commandant de la région sud ou à quelqu'un à

 20   Zagreb si vous aviez le droit d'aller -- alors, voici ma question : est-ce

 21   que vous êtes allé là-bas à titre personnel ou en tant qu'officier de

 22   l'armée croate ?

 23   R.  Je suis allé là-bas en tant qu'officier de l'armée croate qui a accepté

 24   volontairement d'apporter son aide à l'opération sous le contrôle de

 25   l'armée de Croatie.

 26   Q.  Avez-vous demandé à Zagreb une autorisation pour vous y rendre ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Merci. En dehors de cette jonction dont vous avez parlée hier en vous

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  1   appuyant sur la carte, jonction entre le HVO et l'armée croate non loin de

  2   Croate, est-ce que vous auriez connaissance d'une autre situation dans

  3   laquelle l'armée de Croatie était adjointe au HVO pour mener une opération

  4   quelconque ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Merci. Le problème, commandement conjoint. Alors, est-ce que l'armée

  7   populaire yougoslave a attaqué la Croatie, d'une part la Bosnie-

  8   Herzégovine, d'autre part ou est-ce qu'elle s'emparait des territoires sur

  9   lesquels elle avait jeté son dévolu ?

 10   R.  Elle opérait en fonction d'un plan centralisé quelque soit la

 11   République de l'ex-Yougoslavie qui était concernée par cette opération.

 12   Q.  Merci. A partir de quel endroit a été attaqué Vukovar ?

 13   R.  Vukovar a été attaqué par les forces de l'armée populaire yougoslave, à

 14   partir -- enfin ils étaient stationnés sur le territoire de ce qui

 15   aujourd'hui est la Serbie; donc Vukovar a été attaqué à partir des lieux

 16   qui étaient occupés à l'époque en République de Croatie.

 17   Q.  A partir de quel endroit Okucani et Pakrac ont été attaqués ? Donc

 18   l'ouest de la Slavonie, cette partie du territoire croate que nous appelons

 19   la Slavonie occidentale ?

 20   R.  Les forces qui ont attaqué ce territoire provenaient de ce qui est

 21   aujourd'hui un territoire situé en Bosnie-Herzégovine.

 22   Q.  Je vais raccourcir. Est-ce que ceci concerne les territoires de Knin,

 23   Zadar, Sibenik, Dubrovnik ? Regardez la carte.

 24   R.  Oui. Dans tous ces endroits, l'armée est arrivée et une fois qu'elle

 25   est entrée dans ces localités, elle a reçu un soutien et elle a attaqué

 26   l'armée de Croatie avec le soutien de la BiH.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- permet d'intervenir parce que M.

 28   Praljak descend dans le détail; moi, je voudrais rester au plan général. Ce

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  1   qui est très important, il vous a posé la question puis il ne l'a pas

  2   approfondie.

  3   Pouvez-vous nous dire : d'après vous, la Serbie, est-ce qu'ils avaient un

  4   plan d'attaque général qui englobait la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, et

  5   cetera, ou bien ils avaient un plan d'attaque spécifique d'abord la

  6   Croatie, ou après la Bosnie-Herzégovine, ou d'abord la Bosnie-Herzégovine

  7   et après la Croatie ? Quel est, d'après vous, le plan d'attaque des Serbes

  8   ? Etait-il général ou spécifique, par républiques ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, au niveau stratégique,

 10   les Serbes, en accord avec le sommet de l'armée populaire yougoslave,

 11   avaient pour but final d'arriver jusqu'aux lignes dont ils estimaient

 12   qu'elles leur permettraient de réaliser leur objectif, à savoir la création

 13   de la Grande-Serbie. Toute une série d'opérations qui avaient vraiment une

 14   grande valeur sur le plan opérationnel, donc qui servaient à réaliser cette

 15   conception stratégique ont été menées en contradiction avec les conclusions

 16   tirées de la situation sur le terrain. Mais ce qu'ils avaient toujours à

 17   l'esprit c'était leur but ultime.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Parce que vous ne répondez pas directement à la

 19   question, pour moi la question était simple. Ou c'est un plan général ou un

 20   plan par des républiques spécifiques. C'est ça que je veux savoir.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je maintiens ma

 22   position en disant que le plan général correspondait au but ultime. Quant

 23   aux plans spécifiques, ils étaient la conséquence des réflexions menées sur

 24   l'évolution de la situation.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est important ce que vous venez de dire. Tout le

 26   monde comprend.

 27   S'il y a un plan général qui, d'après vous, est en concordance avec le but

 28   ultime qui est la Grande-Serbie, à ce moment-là, le terrain des combats est

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  1   un terrain unique, oui ou non ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Au niveau stratégique, le champ de bataille

  3   était unique.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vais répéter ce que vous avez dit,

  5   parce qu'il m'apparaît que c'est très important, parce qu'il faut que ça

  6   soit bien évident dans le transcript. Vous avez dit que pour vous le champ

  7   de théâtre est unique, oui ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour la force qui souhaitait occuper -- je ne

  9   sais pas quel pourcentage, mais disons à peu près 70 % de l'ex-Yougoslavie,

 10   il existait un plan unique et un théâtre unique des opérations. Quant à la

 11   Croatie, comme pour la Slovénie, et plus tard pour la Bosnie-Herzégovine

 12   qui cherchait à s'extirper de cela, chacun abordait ses problèmes comme ils

 13   le pouvaient. Le but étant de s'opposer à cette idée qui venait d'un lieu

 14   unique.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 16   Général Praljak, je vous redonne la parole, mais il m'apparaissait

 17   important de mettre en évidence cette question. Merci.

 18   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, Monsieur le Président Antonetti.

 19   Q.  Général Beneta, jusqu'à quelles frontières de la Croatie devaient

 20   arriver les forces de l'armée populaire yougoslave, plus précisément les

 21   forces serbes, en application du plan stratégique ? Vous connaissez déjà

 22   ces frontières --

 23   R.  Général, je regrette de ne pas pouvoir vous présenter les choses

 24   graphiquement, mais ce sont des frontières bien connues qui sont évoquées

 25   par eux dans leurs mémorandums et dans leurs livres. C'est la frontière, la

 26   ligne qui va de Virovitica à Karlobag.

 27   Q.  Karlovac.

 28   R.  Oui, Virovtitica-Karlovac-Karlobag.

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  1   Q.  En Croatie ou au sein de l'OTAN, si les forces de l'agresseur attaquent

  2   sur le théâtre des opérations à quelque endroit que ce soit, à quelque

  3   moment que ce soit, et à l'aide de quelques équipements que ce soit, est-ce

  4   que ceci serait considéré comme justifié, selon la doctrine militaire

  5   générale ?

  6   R.  Oui, et elle demande des conseils avant de se faire afin d'obtenir un

  7   équilibre sur le front.

  8   Q.  Merci beaucoup. Regardez, je vous prie, cette carte. Pouvez-vous nous

  9   dire quelle est la date qui figure en haut de la carte.

 10   R.  Déploiement des forces 1er octobre 1991.

 11   Q.  Etes-vous au courant du fait que la situation que vous voyez illustrée

 12   sur cette carte correspond à la réalité, étant donné l'attaque menée par

 13   l'armée populaire yougoslave et les soldats monténégrins sur ce territoire

 14   à ce moment-là ?

 15   R.  Oui. Par cette attaque, Dubrovnik a failli tomber - ce n'était plus

 16   qu'une question de temps - et Dubrovnik a été coupée du reste de la

 17   République de Croatie.

 18   Q.  Etes-vous au courant du fait qu'à la défense du Dubrovnik ont participé

 19   des volontaires venus d'Herzégovine ?

 20   R.  Oui, comme cela a été le cas aussi dans d'autres zones. Ils y ont

 21   participé.

 22   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les

 23   Juges, est-ce que nous allons faire une pause maintenant, pour que j'ai 15

 24   à 20 minutes à ma disposition ?

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Il est presque 10 heures 30, donc on va faire la

 26   pause. On fait une pause de 20 minutes.

 27   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

 28   --- L'audience est reprise à 10 heures 53.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

  2   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] 

  3   Q.  Général Beneta, vous avez examiné la carte. Puisque nous ne pouvons pas

  4   vous la donner maintenant, est-ce que vous auriez signé cette carte pour

  5   indiquer que ceci correspond à la situation de fait pendant cette période-

  6   là, d'après vos connaissances ?

  7   R.  Oui. D'ailleurs, ceci était signé par quelqu'un en qui j'ai une

  8   confiance absolue, donc je maintiens cela.

  9   Q.  Qui l'a signée ?

 10   R.  C'est le colonel Milan Perkovic, qui a mené une analyse de cette

 11   situation lorsque nous avons essayé de comprendre ce qui se passait dans

 12   cette région.

 13   Q.  Merci. Est-ce que vous étiez volontaire de l'armée croate ou est-ce que

 14   quelqu'un vous a convoqué conformément aux plans de mobilisation ?

 15   R.  Dans l'armée croate ?

 16   Q.  Oui.

 17   R.  Volontaire.

 18   Q.  Le général Petkovic, est-ce qu'il était mobilisé ou volontaire ?

 19   R.  Pour autant que je le sache, volontaire aussi.

 20   Q.  En 1991, c'est-à-dire presque au moment de la reconnaissance, quel

 21   était le pourcentage de volontaires au sein de l'armée croate ?

 22   R.  Le pourcentage était extrêmement élevé, presque tout le monde.

 23   Q.  Presque tout le monde; c'est exact, cela ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Donc jusqu'à la reconnaissance de la Croatie, en janvier 1992.

 26   Apparemment, il y a eu un problème de compte rendu d'audience.

 27   A quel moment est-ce que la Croatie a été reconnue par les Etats de

 28   l'Union européenne ?

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  1   R.  Je pense que, le 15 janvier 1992, nous avons obtenu cette

  2   reconnaissance, et toutes les personnes qui avaient incorporé les unités

  3   avant cette date ont encore aujourd'hui le statut de volontaire.

  4   Q.  Merci. Ce qui m'intéresse maintenant c'est la chose suivante. Après,

  5   vous avez travaillé dans l'armée croate et juste aujourd'hui. Entre autres

  6   choses, afin d'harmoniser l'armée croate par rapport aux normes de l'OTAN;

  7   est-ce que ceci est exact ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Lorsque je parle de l'"harmonisation," je parle des procédures, du

 10   commandement, du contrôle, des communications, des actions coordonnées,

 11   donc toute une série d'éléments et de critères indiquant de quelle manière

 12   il faut agir dans telle ou telle situation; est-ce que ceci est exact ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Général Beneta, même si l'armée croate était déjà une armée à l'époque,

 15   combien de temps et combien d'effort fallait-il déployer afin de faire en

 16   sorte que le système de l'armée croate soit harmonisé avec les normes de

 17   l'OTAN ?

 18   R.  Nous travaillons là-dessus depuis la fin de la guerre de manière

 19   intense. Nous commencions à travailler là-dessus à partir de 1999, et nous

 20   n'avons pas encore terminé ce travail.

 21   Q.  Dites-moi maintenant : quelles sont les procédures qui s'appliquaient

 22   dans l'armée croate, constituée de volontaires en 1992 ? Est-ce que ceci

 23   était satisfaisant en vertu des critères de la JNA ou de quelque autre

 24   armée que ce soit ? Est-ce que ces critères étaient satisfaits, ou est-ce

 25   que c'était plutôt le système -- ?

 26   R.  Il est difficile de répondre lorsqu'il est question de procédure dans

 27   les forces armées. La question ne se posait pas de savoir si on allait

 28   appliquer les procédures de la JNA ou les procédures de l'OTAN. La question

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  1   se résumait au nombre de membres d'une unité, combien de personnes, il y

  2   avait, qui pouvaient commander, compte tenu du fait que ces personnes

  3   n'avaient aucune expérience de commandement préalable.

  4   S'agissant de la première unité que j'ai créée, c'était un bataillon.

  5   Je l'ai créé avec deux officiers seulement ayant une expérience précédente.

  6   C'était moi et mon adjoint, M. Milan Perkovic, qui avons signé le document.

  7   Personne d'autre n'avait d'expérience militaire, sauf qu'ils avaient leur

  8   service militaire et savaient comment tirer avec un fusil.

  9   Q.  Est-ce que la situation était encore pire ailleurs, par exemple, à

 10   Vukovar, Mitnica, Borovo Naselje, la route de Trpinjska, et cetera, que

 11   c'était tout simplement des jeunes hommes qui s'étaient regroupés sur place

 12   et ils ne faisaient que se défendre ?

 13   R.  Pour autant que je le sache, dans l'ensemble de la défense de Vukovar,

 14   je me souviens de quatre ou de cinq personnes, peut-être, qui avaient une

 15   expérience de commandement précédente et qui avaient fait auparavant une

 16   carrière militaire.

 17   Q.  Pendant que les combats se déroulaient et qu'on n'a pas le temps, est-

 18   ce qu'un ordre verbal a la même valeur qu'un ordre écrit, à des moments

 19   pareils dans l'armée ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Nous nous approchons de la fin.

 22   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Veuillez maintenant, s'il vous plaît,

 23   examiner le document dont le numéro est PO 3983.

 24   Q. Général Beneta, savez-vous que pendant un certain temps, j'ai été le

 25   commandant de l'état-major principal du HVO ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Saviez-vous que mon adjoint était le général Petkovic, et que le chef

 28   de l'état-major du HVO était le général Tole, alors que moi, j'étais le

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  1   commandant ?

  2   R.  Je ne peux pas le confirmer concernant M. Tole, mais je peux confirmer

  3   pour ce qui est de M. Petkovic.

  4   Q.  Voici ma question : Savez-vous à quoi ressemblait la structure du HVO

  5   pour ce qui est du droit de donner les ordres ? Est-ce que vous aviez des

  6   connaissances là-dessus ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Bien. Veuillez examiner ce document, le point 2.

  9   Vous voyez là, il y est écrit :

 10   "Qui, dans de telles conditions qui prévalaient là-bas le 29 septembre

 11   1993."

 12   Veuillez voir ma signature. Mais non. En fait, ce n'est pas le bon

 13   document.

 14   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Là, c'est le document PO 4668. J'avais

 15   donné la mauvaise cote tout à l'heure, donc le document qui nous intéresse

 16   est PO 5468. Excusez-moi.

 17   Q.  Donc, ici, nous voyons que le groupe de commandement de services et

 18   décrets, qui doit régler les problèmes tels que le niveau de préparation,

 19   régler toutes les questions extraordinaires, commander les actions de

 20   combat par rapport au commandement directement subordonné et les unités

 21   subordonnées, c'était à M. Beneta. Vous ne connaissiez pas les détails,

 22   mais si la situation le demande et si vous ne pouvez pas changer la

 23   situation, est-ce que vous allez vous adapter, adapter le commandement à la

 24   situation plutôt que de s'en tenir de manière rigide aux règlements qui

 25   aboutira à une défaite militaire et entraînera des pertes des hommes et des

 26   territoires ?

 27   R.  L'on s'attend qu'un commandant s'adapte à la situation, car dans le

 28   cadre des critères généraux de commandement, il est plus important

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  1   d'accomplir la mission plutôt que de s'en tenir de manière rigide aux

  2   règlements.

  3   Q.  Bien. Voici une autre carte. Je n'ai pas eu le temps de la photocopier.

  4   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Veuillez remettre cela au témoin.

  5   Q.  Hier, le Juge Trechsel vous a demandé où se trouvait l'Herzégovine.

  6   Mais, Général, vous aurez maintenant la carte de l'Herzégovine et veuillez

  7   y dessiner, s'il vous plaît --

  8   Mme PINTER : [interprétation] L'huissier pourrait-il prendre la carte et la

  9   placer devant le témoin, c'est-à-dire sur le rétroprojecteur ?

 10   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 11   Q.  Vous allez, s'il vous plaît, indiquer l'Herzégovine sur cette carte.

 12   Vous allez écrire l'Herzégovine de l'est et de l'ouest; ensuite, vous allez

 13   écrire la Bosnie centrale; ensuite, la Bosnie occidentale ou la Krajina

 14   bosniaque; la Posavina et la Bosnie orientale, de sorte que l'on puisse

 15   avoir une meilleure idée de ces rapports régionaux au sein de la Bosnie-

 16   Herzégovine. Mais veuillez prendre un marqueur assez intense pour que l'on

 17   puisse bien voir ce qui est annoté.

 18   Veuillez placer cela sur le rétroprojecteur, là où on voit une partie de

 19   l'Herzégovine.

 20    Q.  Que se trouve-t-il à droite de Mostar, donc à l'est ?

 21    R.  A droite se trouve l'Herzégovine orientale.

 22   Q.  Veuillez apposer le chiffre 1, s'il vous plaît.

 23   R.  [Le témoin s'exécute]

 24   Q.  Qu'est-ce qu'il y a à l'ouest de la Neretva ?

 25   R.  A l'ouest de la rivière de Neretva se trouve l'Herzégovine occidentale.

 26   Q.  Est-ce que Tomislav Grad et Livno en feront partie ?

 27   R.  Je vais dresser une ligne qui traverse ces endroits-là. Comme ça,

 28   personne ne sera offusqué car ils n'ont pas encore trouvé un accord.

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  1   Q.  Bien. Merci. Veuillez marquer la Bosnie orientale, maintenant, et

  2   veuillez apposer le chiffre 2 à l'endroit que vous venez de dessiner.

  3   R.  [Le témoin s'exécute]

  4   Q.  [aucune interprétation] 

  5   R.  Le chiffre 3 ?

  6   Q.  Oui, 3. Veuillez maintenant marquer la Posavina bosniaque.

  7   Il n'est pas important si vous n'êtes pas précis à 100 %, Général.

  8    R.  [Le témoin s'exécute]

  9   Q.  Veuillez maintenant marquer la Bosnie occidentale ou la Krajina

 10   bosniaque.

 11   R.  [Le témoin s'exécute]

 12   Q.  Ce qui est au milieu, nous pouvons l'appeler en termes généraux la

 13   Bosnie centrale; est-ce exact ?

 14   R.  Oui, plus ou moins.

 15   Q.  Plus ou moins. Veuillez, s'il vous plaît, signer la carte et y apposer

 16   la date d'aujourd'hui.

 17   R.  [Le témoin s'exécute]

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- un numéro IC pour la carte.

 19    M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, le document qui

 20   vient d'être annoté par le témoin aura la cote IC 1100. Merci, Messieurs

 21   les Juges.

 22   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti --

 23   Mme PINTER : [interprétation] Le témoin n'a pas signé.

 24   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 25   Q.  Veuillez signer.

 26   R.  [Le témoin s'exécute]

 27   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 28   Q.  Si, vous avez signé.

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  1   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti0, s'il

  2   vous plaît, demain lorsque cette carte sera reçue -- lorsque les

  3   photocopies seront reçues - vous savez, ce matin, je n'ai absolument pas pu

  4   le faire - mais est-ce que cette carte photocopiée pourra recevoir un

  5   numéro IC ?

  6   Merci du temps accordé. J'ai réussi à terminer un peu avant.

  7   Q.  Merci beaucoup, Général Beneta, de vos réponses.

  8   M. STEWART : [interprétation] Je suis perplexe à nouveau.

  9   La carte précédente à laquelle a fait référence le témoin, qu'il a

 10   signé, il a dit que ceci avait été signé par quelqu'un dans lequel il avait

 11   pleine confiance. D'après ce que j'ai compris, d'après les propos de M. le

 12   Juge Trechsel, parce que cette carte n'a pas été annotée, cette carte ne

 13   reçoit pas de cote IC ou de numéro IC. Mais ceci me trouble; qu'arrive-t-il

 14   à cette carte ? C'est quelque chose qui a été évoqué pendant son

 15   témoignage, mais on ne sait pas très bien à quel endroit cela se situe. Je

 16   suis très perplexe, je ne sais pas comment ceci peut fonctionner. Je ne

 17   vois pas comment ceci peut dans la réalité, d'après ce que les Juges ont

 18   dit peut être expliqué.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : La carte qui est au fond, est-ce que vous demandez

 20   un numéro IC ?

 21   Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, avant le début du

 22   contre-interrogatoire du général Praljak, nous avons expliqué que cette

 23   carte avait été obtenue pendant la nuit. Nous n'avons pas eu le temps de la

 24   photocopier. Si l'on demande maintenant le numéro IC, n'aurons plus la

 25   carte en question. Donc nous avons demandé de l'avoir pour faire des

 26   photocopies et qu'ensuite, un numéro IC lui soit attribué. Car le témoin

 27   s'est exprimé là-dessus, il a fait des commentaires. Il a même indiqué qui

 28   était l'auteur de ce document. Il a dit qu'il s'agissait de quelqu'un qui

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  1   bénéficiait de sa confiance absolue. Donc tous les critères sont remplis

  2   mais tout simplement physiquement nous n'avons pas eu le temps de la

  3   photocopier. Compte tenu du fait que c'est la seule carte posséder par le

  4   général, nous ne pouvons pas nous en séparer avant. C'est ça le problème.

  5   Mais, aujourd'hui, nous la photocopierons, et demain, nous pouvons la

  6   remettre.

  7   Mais puisque je suis debout, Monsieur le Président, si je puis

  8   continuer, s'agissant du compte rendu d'audience, certains numéros

  9   manquent, à savoir lorsque le général Praljak a posé des questions au

 10   témoin au sujet des positions ou plutôt de là où se trouve l'Herzégovine de

 11   l'est et de l'ouest, le témoin répondait à ces questions-là; cependant, les

 12   numéros ne figurent pas dans le compte rendu d'audience, les numéros que le

 13   -- les chiffres apposés par le témoin pour indiquer de quelle partie de la

 14   Bosnie-Herzégovine il était question. Donc si l'on peut compléter le compte

 15   rendu d'audience, ce serait utile.

 16   Voici ce que je veux dire, nous avons le chiffre 3, mais il faudrait

 17   marquer la Posavina bosniaque. Le témoin l'a marqué, c'était le cas de la

 18   Krajina bosniaque, le témoin a écrit le chiffre et a marqué cela dans la

 19   carte, mais ceci ne figure pas dans le compte rendu d'audience. Donc pour

 20   le compte rendu d'audience, je souhaite simplement indiquer qu'il s'agit

 21   des régions mentionnées par le témoin, à savoir le numéro 4 correspond à la

 22   Posavina bosniaque. Ai-je raison, vous ne vous souvenez plus, en fait, les

 23   chiffres suivaient l'ordre des questions; 4 était Posavina, et 5, Krajina

 24   de Bosnie.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Occidental.

 26   Mme PINTER : [interprétation] Ensuite la Bosnie centrale, c'était le

 27   chiffre 6. Voici ce que j'indique pour le compte rendu d'audience.

 28   M. STEWART : [interprétation] Messieurs, je suis tout à fait d'accord avec

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  1   ce que dit Me Pinter, pour ce qui est en fait de [imperceptible] et de la

  2   façon dont les numéros ont été utilisés, les numéros IC. Ça, je comprends

  3   qu'il s'agit de solution pratique. Mais dans une interprétation rigoureuse

  4   de vos propos l'autre jour, moi, j'avais l'impression que ce document ne

  5   devrait pas avoir de numéro IC du tout. Donc si on obtient un numéro IC, à

  6   ce moment-là, on résout le problème, parce que je suis sûr que l'on

  7   pourrait récupérer le document une fois que ce document disparut dans les

  8   arcanes du Tribunal pour avoir un numéro IC. Je pense que l'on pourrait le

  9   retenir pour l'instant.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : D'après ce que j'ai compris, la carte que nous

 11   avons, le général Praljak ne l'a eue que dans la nuit. Donc votre collègue

 12   n'a pas pu faire des copies pour tout le monde. Si d'ores et déjà on donne

 13   un numéro IC, le Greffier va prendre la carte. Parce qu'il est dépositaire

 14   du document. Donc pour éviter cela, votre collègue suggère que demain,

 15   parce que dans l'après-midi elle va faire les copies, et demain, elle

 16   demandera officiellement que la carte ait un numéro IC. Voilà, moi, c'est

 17   ce que j'ai compris.

 18   M. STEWART : [interprétation] Je suis heureux de pouvoir vous dire que

 19   c'est exactement ce que j'avais compris aussi, Monsieur le Président,

 20   lorsque je me suis levé il y a quelques instants. C'est ainsi que j'avais

 21   compris les choses, et je vous remercie beaucoup d'avoir compris que la

 22   compréhension que j'avais de la situation était en réalité exacte. Je vous

 23   remercie.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Beneta, tout à l'heure, j'ai une question de

 25   suivi, parce que le général Praljak, en vous posant une question vous avez

 26   fait dire que l'armée croate, le HV, pas le HVO, était constitué de

 27   volontaires, et qu'il n'y avait pas à l'époque de conscrits. C'est ce que

 28   j'ai compris, que l'armée croate de l'époque des années 1992, 1993 et

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  1   suivantes était constituée uniquement de volontaires; est-ce bien cela

  2   qu'on doit comprendre dans ce que vous avez dit ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, oui, jusqu'à la

  4   reconnaissance de l'Etat de Croatie, reconnaissance internationale de la

  5   République de Croatie. A partir de ce moment-là, ceux qui avaient passé 100

  6   jours sur le front, avant le 15 janvier 1992, bénéficient encore

  7   aujourd'hui du statut de volontaire.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Autrement dit, cette personne était censée

 10   avoir incorporé les forces armées avant le mois de septembre 1991, ainsi il

 11   a le droit d'obtenir ce statut.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Aujourd'hui, l'armée croate, sauf erreur de ma part,

 13   est constituée d'environ 17 000 hommes. Il y aurait 110 000 réservistes, et

 14   approximativement, une population de 1 million de soldats potentiels âgés

 15   de 18 ans à 50 ans, en cas de nécessité, dont 850 000 seraient aptes à être

 16   combattants. Je crois que le budget de votre armée fait un peu plus de 2 %

 17   du produit intérieur brut. Etant précisé que votre budget diminue  au fil

 18   des années. On ne sait pas pourquoi, mais vous avez un budget de défense

 19   qui diminue. Alors le 15 janvier 1992, vous dites qu'à ce moment-là, il y a

 20   eu un changement et que l'armée croate, si je comprends bien a été

 21   constituée également de conscrits; est-ce bien cela ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous dites qu'à l'époque, ceux qui avaient

 24   passé 100 jours au front ont continué à garder leur statut de volontaires ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux, qui avaient passé 100 jours sur le front

 26   avant le 15 janvier, avaient le statut de volontaire, dans le sens de la

 27   reconnaissance de certains privilèges qui lui sont accordés aujourd'hui par

 28   l'Etat de Croatie. Avec la constitution des unités, ils ont commencé à

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  1   faire partie de cette structure, et leur statut n'a rien à voir avec leurs

  2   fonctions d'aujourd'hui.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez dit que vous étiez occupé de mettre aux

  4   normes de l'OTAN l'armée croate. Vous, que quiconque, vous savez que ce

  5   statut de volontaires n'existe pas dans les armées dites occidentales dans

  6   les années 90, car il y avait uniquement la conscription, donc nous on a du

  7   mal à comprendre ce qui est au juste un volontaire. Mais depuis quatre ans

  8   qu'on parle de cela, on commence un peu à mettre le doigt sur ce statut.

  9   Si je comprends bien, le volontaire était quelqu'un qui décidait de

 10   lui-même de rejoindre l'armée sans que personne ne lui en donne l'ordre, et

 11   c'est comme cela que vous, vous avez été volontaire pour aller en

 12   République de Bosnie-Herzégovine. Est-ce que je me trompe quand je dis ça

 13   ou pas ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] La période dont il est question est une

 15   période pendant laquelle l'Etat était en cours de création. L'armée était

 16   en cours de création et la guerre commençait. Les choses qui sont normales

 17   dans des Etats dans le système politique existent depuis longtemps. Dans de

 18   tels pays, les choses sont réglées suivant un ordre logique. Or nous en

 19   1991, nous étions dans une situation où en même temps il fallait former

 20   l'armée, commencer la guerre et créer l'Etat sur le plan politique. Si vous

 21   me demandez d'établir un parallèle entre les deux situations, il serait

 22   très difficile de le faire.

 23   Je pense que c'est le général Praljak qui est plus proche de la

 24   vérité lorsqu'il dit que les gens qui étaient au poste de commandement, et

 25   je pense que c'était vrai pour les politiques aussi, essayaient de faire de

 26   leur mieux compte tenu de ce qui était possible à ce moment-là. La

 27   probabilité de commettre des erreurs dans une telle situation est plus

 28   grande. Parfois il n'était pas possible de les éviter, mais vraiment l'on a

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  1   essayé de faire de son mieux.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je souhaite vous poser une question,

  3   Monsieur Beneta.

  4   Avant la pause ce matin, lorsque vous avez répondu à une question de M.

  5   Praljak, vous avez dit que vous n'avez pas demandé à Zagreb l'autorisation

  6   de rejoindre le HVO en tant que volontaire. Est-ce que vous avez demandé

  7   l'autorisation à quelqu'un d'autre ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] M. Dzanko, qui m'avait demandé de partir là-

  9   bas, était à cette époque-là l'adjoint du commandant de la Région militaire

 10   de Split. Je n'estimais pas qu'il était nécessaire de demander l'avis de

 11   qui que ce soit d'autre, puisque c'est lui qui m'avait demandé d'y aller.

 12   Si quelqu'un ayant un grade ou un statut inférieur que le sien m'avait

 13   demandé la même chose, j'aurais contacté le commandant de la région

 14   militaire.

 15   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie. Donc ceci me

 16   paraît très plausible. Vous nous avez dit que M. Dzanko vous a demandé de

 17   vous y rendre. Est-ce que vous confirmez cela ?

 18   Non, non, Maître Alaburic.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Il y a une erreur d'interprétation. Je peux

 20   vous lire ce que ma collègue, Sarah Lustig, qui a fait les études à New

 21   York, m'a dit. Elle a dit qu'il y a eu une erreur de traduction, qu'il a

 22   été dit que : "Il m'a demandé d'y aller --" alors ils auraient dû dire --

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Ecoutez, vous abusez. C'est moi qui

 24   pose la question, et vous répondez en disant que c'est quelqu'un de New

 25   York qui vous a dit quelque chose.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] -- "qui m'a demandé si je voulais y aller,"

 27   et non pas "qui m'a demandé d'y aller." "Il m'a demandé si je voulais y

 28   aller."

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  1   Compte tenu du fait qu'il s'agit d'une nuance de la langue anglaise,

  2   moi, je fais référence à ma collaboratrice qui parle pratiquement l'anglais

  3   comme une langue maternelle. Donc si vous pouviez ajuster votre question

  4   vraiment à la bonne interprétation des propos tenus par le témoin.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Quoi qu'il en soit, Monsieur le

  6   Témoin, ce n'est pas sur votre propre initiative, ce n'était pas à

  7   l'origine votre idée de vous rendre ou de rejoindre le HVO. C'est une idée

  8   qui vous a été suggérée. On vous a demandé si vous étiez disposé à y aller,

  9   si vous étiez disposé à rejoindre le HVO; c'est exact, n'est-ce pas ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, M. Dzanko m'a demandé si j'étais prêt à

 11   aller avec lui.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, si vous lui avez dit: "Non, ça ne

 14   m'intéresse pas, je ne veux pas y aller," qu'est-ce qui se serait passé ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Il ne se serait rien passé. J'aurais continué

 16   à exercer mes fonctions comme avant, et il aurait demandé à une autre

 17   personne de partir avec lui.

 18   Mais, excusez-moi, je ne reçois pas la traduction en anglais à l'écran à

 19   gauche, donc je ne peux pas suivre le curseur pour savoir quand c'est fini.

 20   Est-ce qu'on peut remédier à cela ?

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : M. l'Huissier va regarder ça. Il fait tellement de

 22   choses --

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est bon maintenant.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous pose cette question pour la raison suivante.

 25   Il y a plusieurs mois, on a vu un document où des soldats de l'armée croate

 26   devaient aller en République de Bosnie-Herzégovine, et ils n'ont pas voulu.

 27   A ce moment-là, il y a eu des poursuites contre eux. Alors, comment vous

 28   expliquez cela ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, pour moi, c'est la

  2   première information de cette nature. Ma pratique m'a laissé avec des

  3   expériences différentes. Si vous le souhaitez, je vais vous citer des

  4   exemples concrets.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Général, si je comprends bien, quand on est

  6   volontaire, on peut décider de son affectation. Mais quand on est conscrit,

  7   à ce moment-là on n'a pas la liberté de choix. Est-ce que c'est comme cela

  8   que marchait l'armée croate ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui est du départ et de la

 10   participation aux opérations sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine,

 11   l'armée croate a participé de manière organisée à une partie de la région

 12   frontalière, ce qui était sensible du point de vue de la défense du

 13   territoire face à l'agression contre la République de Croatie. Lorsque j'ai

 14   parlé de la position de mon unité, j'en ai parlé en détail hier. Pour ce

 15   qui est de tous les autres départs, pour autant que je le sache, ils se

 16   déroulaient de manière suivante : les gens qui souhaitaient partir

 17   partaient.

 18   Je vais être ouvert et dire aussi que je crois que les autorités

 19   croates trouvaient un intérêt dans le renfort de la défense dans la partie

 20   frontalière alors que la Croatie n'avait pas de possibilité d'influencer

 21   directement ce qui se passait dans cette région-là. Donc je ne m'attendais

 22   pas à avoir des problèmes si j'allais me porter volontaire pour aller aider

 23   la défense de la Bosnie-Herzégovine. Pareillement, parfois on laissait

 24   partir des groupes de personnes qui partaient donc en groupes.

 25   Parfois il y a eu des situations où j'ai dû arrêter les hommes, les

 26   Croates nés en Croatie, les empêcher de partir avec leurs co-combattants

 27   dont les parents vivaient sur le territoire de Bosnie-Herzégovine car, en

 28   raison du sentiment de reconnaissance et afin de créer l'esprit d'équipe

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  1   dans la guerre, ils voulaient les aider et partir avec eux sur le

  2   territoire de la Bosnie-Herzégovine. Moi, en tant que commandant, j'avais

  3   des missions qui concernaient la défense du territoire de la Croatie.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Beneta, il y a quelque chose que je ne

  5   comprends pas et vous allez certainement m'éclairer.

  6   En répondant à la question de mon collègue, vous avez dit que le général

  7   Dzanko vous avait demandé si vous vouliez aller en République de Bosnie-

  8   Herzégovine. Vous lui avez dit oui. On a passé la matinée à comprendre,

  9   enfin, moi, c'est ce que j'ai compris, qu'il y avait un champ de théâtre

 10   unique parce que vous aviez un ennemi qui était les forces serbes. J'ai cru

 11   comprendre que la République de Croatie était en danger. Dans ce cas,

 12   pourquoi vous demander si vous voulez y aller ou pas ? Il y avait qu'à

 13   simplement vous dire : "Monsieur Beneta, à compter de lundi, vous allez

 14   vous retrouver à Split et de là, vous allez partir en République de Bosnie-

 15   Herzégovine. Exécutez l'ordre."

 16   Pourquoi on vous demande votre consentement ? C'est ça que j'ai du

 17   mal à comprendre.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Là, nous avons deux moments-clés sur la base

 19   desquels on peut conclure que c'est important. D'un côté, d'après la

 20   succession de l'ex-Yougoslavie, la Croatie, elle aussi - je pense que c'est

 21   même dans sa constitution - elle a écrit qu'elle allait mener un combat

 22   armé pour défendre son territoire. Avant d'entrer au sein de l'OTAN, ce qui

 23   attend la Croatie maintenant c'est toute une série d'événements liés à

 24   l'état de sa République. L'autre raison, c'est que la communauté

 25   internationale, je crois d'ailleurs que c'est toujours le cas aujourd'hui,

 26   ne comprenant pas la situation dans tous ces détails, a empêché l'Etat

 27   croate de faire ce que vous-même, Monsieur le Président, considérez comme

 28   logique, à savoir porter atteinte à l'ennemi dans les plus brefs délais et

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  1   donc diminuer les dangers qui menaçaient son développement ultérieur.

  2   Pour toutes ces raisons, l'Etat de Croatie et la politique menée par l'Etat

  3   de Croatie fut telle qu'elle ne permettait pas aux commandants militaires

  4   d'emmener leurs unités sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, même si

  5   des demandes allant dans ce sens existaient. Je dois admettre que si

  6   j'avais eu la liberté de choix lorsque je commandais une brigade, c'est

  7   avec un grand plaisir et avec le soutien de tous les combattants que je me

  8   serais rendu sur le territoire menacé à l'époque; car à cette époque-là,

  9   les forces serbes occupaient plus de 70 % du territoire de la Bosnie-

 10   Herzégovine. Mais nous ne pouvions pas faire cela. Donc il y avait une

 11   certaine compréhension sur le plan politique pour les gens qui partaient à

 12   titre de volontaires, mais le départ officiel des unités était interdit.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je crois avoir bien compris maintenant. Vous

 14   nous dites que pour des raisons politiques, la République de Croatie, M.

 15   Tudjman pour ne pas le nommer, ne voulait pas qu'officiellement l'armée

 16   croate soit présente en République de Bosnie-Herzégovine et que donc la

 17   solution qui avait été trouvée était de demander à des soldats de l'armée

 18   croate de se porter volontaires pour aller en République de Bosnie-

 19   Herzégovine ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Et d'ailleurs, je ne peux pas dire que ce

 21   sont les autorités croates qui ont demandé aux soldats d'aller en Bosnie-

 22   Herzégovine, mais la possibilité existait que cela se fasse s'il y avait

 23   des demandes allant dans ce sens. Lorsque nous avons évoqué cette question

 24   pour la première fois, je dois dire que nous avons même été surpris par la

 25   situation lorsque nous avons vu que 30 % par exemple de mes soldats avait

 26   le désir de quitter mon unité pour retourner chez eux, pour aller là où se

 27   trouvaient leurs familles et nous avons, en réaction à cette situation,

 28   conseillé les personnes concernées, concernait aussi la hiérarchie pour

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  1   conseiller qu'on les autorise à partir, sinon ils seraient partis de leur

  2   propre chef.

  3   Cette situation est restée la même que ce que je viens de dire pendant

  4   toute la guerre. La signature d'un accord et les opérations que nous avons

  5   menées avec l'ABiH sont une chose, mais je peux supposer aujourd'hui que la

  6   guerre aurait dû durer beaucoup moins de temps si l'accord en question

  7   avait été signé plus tôt et si un tel accord nous avait mis à disposition

  8   un cadre politique qui nous aurait permis de faire plus efficacement

  9   pression sur l'ennemi.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais demander à la Défense de M. Coric si elle a

 11   des questions à poser.

 12   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je

 13   n'ai pas de questions. Nous remercions le témoin pour son témoignage.

 14   Merci.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais terminer par la Défense de M. Pusic. Est-ce

 16   que Me Ibrisimovic a des questions ?

 17   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous

 18   n'avons pas de questions à poser à ce témoin.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci, Maître.

 20   Je me tourne maintenant vers M. le Procureur et je vais lui laisser la

 21   parole, en le remerciant de nous avoir donné le classeur qui est bien

 22   constitué comme d'habitude.

 23   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie. Bonjour à tous dans le

 24   prétoire.

 25   Je vous remercie.

 26   Contre-interrogatoire par M. Laws :

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, Général Beneta.

 28   Tout d'abord, j'ai quelques questions à vous poser à propos de la

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  1   chronologie. J'aimerais savoir exactement à quel moment vous avez été

  2   déployé en Bosnie-Herzégovine. Vous avez dit que vous vous y trouviez en

  3   1992 et vous vous y trouviez aussi en 1993; c'est bien cela ?

  4   R.  Exact.

  5   Q.  Je vous remercie. Donc nous allons étudier ces deux déploiements sur le

  6   terrain séparément.

  7   Tout d'abord 1992. Nous savons qu'en 1992, vous vous y trouviez en juin

  8   pour la libération de Stolac; c'est bien cela ?

  9   R.  Non. J'étais là-bas déjà avant en tant que chef d'état-major de la 4e

 10   Brigade des Gardes dans le secteur de Hutovo qui se trouve également sur le

 11   territoire de la Bosnie-Herzégovine --

 12   Q.  En effet, c'est ma faute. Donc vous vous y trouviez en juin pour la

 13   libération de Stolac. J'aimerais savoir : à quel moment êtes-vous arrivé ?

 14   Donc combien de temps s'est écoulé avant la libération de Stolac ? Ensuite

 15   j'aimerais savoir : combien de temps vous êtes resté en Bosnie-Herzégovine

 16   après de Stolac ?

 17   Commençons d'abord par la première question. Vous étiez à Hutovo, dans la

 18   zone de Hutovo, avec la 4e Brigade des Gardes avant juin 1992; pourriez-

 19   vous nous dire à peu près, exactement le mois pendant lequel vous êtes

 20   arrivé ?

 21   R.  Tout de suite après le Nouvel an de 1992, la 4e Brigade des Gardes a

 22   renforcé les positions à côté de la frontière, mais sur le territoire de la

 23   Bosnie-Herzégovine, grâce à l'ajout d'un bataillon dans le secteur de la

 24   vallée de la Neretva; et ensuite, progressivement, nous avons transféré

 25   depuis le théâtre des opérations de Zadar plusieurs bataillons, les uns

 26   après les autres, et au mois de février déjà, nous avons installé un poste

 27   de commandement dans la région sud du théâtre des opérations, lorsque nous

 28   avons trouvé un espace valable.

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  1   Q.  Veuillez vous arrêter, s'il vous plaît, parce que ma question était

  2   très courte. Je voulais juste savoir pendant quel mois vous êtes arrivé

  3   dans cette région; est-ce en janvier 1992 ou un autre mois de 1992 ?

  4   R.  Vous me posez la question à moi personnellement ou au 1er Bataillon ?

  5   Q.  Oui, vous vous-même, Colonel Beneta, vous étiez colonel à l'époque.

  6   R.  Au cours de la première quinzaine du mois de janvier 1992.

  7   Q.  Je vous remercie. Combien de temps êtes-vous resté sur le territoire de

  8   la Bosnie-Herzégovine après la libération de Stolac ?

  9   R.  J'y suis resté jusqu'au mois d'août 1992.

 10   Q.  Je vous remercie. Maintenant pour ce qui est de 1993, nous savons que

 11   vous vous êtes à nouveau trouvé sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine,

 12   vous vous y trouviez en juillet pour l'opération Jug. Donc pourriez-vous

 13   nous dire à quel moment vous êtes arrivé exactement en territoire de

 14   Bosnie-Herzégovine avant cette opération ?

 15   R.  Je suis arrivé sept jours avant le début de l'opération.

 16   Q.  Combien de temps êtes-vous resté après la fin de l'opération Jug ?

 17   R.  Je suis reparti vers le 10 août de la même année.

 18   Q.  Très bien. Donc de 1992 jusqu'au moment où vous êtes parti en août 1993

 19   après l'opération Jug, avez-vous eu -- avez-vous été déployé sur le

 20   territoire de la Bosnie-Herzégovine, mis à part ces deux périodes dont vous

 21   nous avez parlées ?

 22   R.  Non, je n'ai été déployé nulle part ailleurs que ces lieux dont j'ai

 23   parlés, c'est-à-dire avec la 4e Brigade des Gardes, avec la 106e Brigade de

 24   Stolac et dans le cadre de l'opération Jug.

 25   Q.  Je vous remercie. J'ai quelques questions à vous poser à propos de la

 26   présence des troupes de la HV en République de Bosnie-Herzégovine. Première

 27   question : vous êtes resté soldat de l'armée croate pendant toute période,

 28   n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Merci. Nous allons maintenant étudier vos deux déploiements de façon

  3   séparée, mais nous allons faire un peu des allers retours entre 1992 et

  4   1993 au cours du premier volet de mon contre-interrogatoire. Résumons les

  5   choses : En 1992, vous avez été envoyé en Bosnie-Herzégovine pour lutter

  6   contre les Serbes puisque les Serbes représentaient une menace, en ce qui

  7   concerne la Croatie. C'est bien cela ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  En 1993, on vous a envoyé faire partie de l'opération Jug pour vous

 10   battre contre l'armée de l'ABiH, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Vous le saviez avant de partir pour prendre part au combat en Bosnie-

 13   Herzégovine, n'est-ce pas ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Ah, il va donc falloir que nous éclaircissions ce point. Vous nous avez

 16   dit que vous vous êtes porté volontaire ou le général Dzanko vous a demandé

 17   de vous porter volontaire, on verra plus tard. Mais vous ne saviez pas que

 18   vous alliez combattre l'armée de la République de Bosnie-Herzégovine, c'est

 19   cela ?

 20   R.  Exact.

 21   Q.  D'après vous, qui était l'ennemi ?

 22   R.  Je m'attendais à ce qu'une opération soit menée contre les forces

 23   serbes.

 24   Q.  Donc vous êtes en train de nous dire, car je voudrais que ce soit très

 25   clair, Général Beneta. Donc vous êtes en train de nous dire qu'en 1993,

 26   lorsque la 116e Brigade a été mobilisée et envoyée au de la frontière, vous

 27   pensiez tous aller combattre les Serbes une fois de plus ?

 28   R.  Je vous prie à m'excuser, je vous demanderais de préciser votre

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  1   question car je la trouve très bizarre. Comment est-ce que vous pouvez

  2   penser qu'en 1993, je suis allé avec la 116e Brigade me battre contre les

  3   Serbes ? Moi, je suis parti là-bas en ma qualité de personnel, et sous le

  4   commandement de la région militaire. Le commandant de la 116e, je l'ai

  5   remis entre les mains de quelqu'un d'autre au mois de mars 1993 déjà.

  6   Q.  Je vous pose des questions à propos de votre deuxième déploiement en

  7   1993, qui a été baptisé "opération Jug," et j'aimerais juste savoir si vous

  8   voulez vraiment nous dire que vous vous attendiez à ce que l'opération Jug

  9   consiste à une lutte contre les Serbes, en une lutte contre les Serbes

 10   puisque cela semble être ce que vous voulez nous dire ? Mais je voulais que

 11   ce soit parfaitement clair, qu'il n'y ait plus d'ambiguïté.

 12   R.  Oui, c'est ce que j'ai et je le maintien.

 13   Q.  Nous y reviendrons plus tard.

 14   Alors, à quel moment vous êtes-vous rendu compte que vos informations

 15   étaient erronées et vous ne luttiez pas contre les Serbes, mais que vous

 16   luttiez contre l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

 17   R.  Je m'en suis rendu compte au moment où j'étais au commandement avec M.

 18   Dzanko au poste de reconnaissance. Il nous a expliqué à ce moment-là

 19   quelles seraient nos missions et nous a montré le terrain qui serait

 20   concerné.

 21   Q.  Donc c'est lorsque vous vous trouviez en Bosnie, et pas avant ?

 22   R.  Exact.

 23   Q.  Il faut nous aider. D'après vous, est-ce que la même chose s'appliquait

 24   aux autres hommes déployés dans le cas de l'opération Jug. Ils pensaient

 25   aussi qu'on les envoyait en Bosnie pour lutter contre les Serbe ?

 26   R.  Je ne sais pas à quel moment chacun de ces autres hommes a reçu son

 27   affectation, mais les affectations que nous avions décidées, elles ont été

 28   communiquées aux hommes lorsqu'ils se trouvaient sur le terrain, donc

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  1   lorsqu'ils étaient déjà sur les positions.

  2   Q.  Les hommes que vous commandiez, vous vous entreteniez avec eux, vous

  3   avez parlé avec eux. Vous leur avez dit : "Nous allons aller en Bosnie

  4   lutter contre les Serbes --"

  5   M. LAWS : [interprétation] Je pense que le général Praljak veut attirer

  6   l'attention des Juges qu'il doit quitter rapidement le prétoire.

  7   [L'accusé Praljak quitte le prétoire]

  8   M. LAWS : [interprétation]

  9   Q.  Donc les hommes sous vos ordres ne pouvaient pas en savoir plus que

 10   vous en ce qui concerne le rôle qu'ils étaient censés jouer, n'est-ce pas ?

 11   R.  Je ne peux pas répondre à cette question par oui ou non, mais je vais

 12   expliquer la situation et donc ma réponse sera claire.

 13   Nous avons reçu des effectifs quand nous avons constitué des groupes

 14   opérationnels en situation d'urgence, ad hoc. Donc nous avons reçu des

 15   effectifs venus du conseil croate de Défense, c'était des hommes qui

 16   étaient déjà sur ce territoire et même plus précisément sur cette ligne qui

 17   tenait déjà ce front. Ces forces et leurs commandants avaient suivi

 18   l'évolution de la situation là-bas de jour en jour. Moi, je suis arrivé

 19   avec un de mes collègues là-bas. Nous y avons rencontré M. Dzanko qui nous

 20   attendait, il nous a expliqué la situation et nous a donné -- nous a

 21   expliqué les grandes lignes de l'opération. Ensuite il a dit que l'ABiH se

 22   préparait à attaquer et à effectuer une percée dans la vallée de la

 23   Neretva. Une percée jusqu'à Ploce, Ploce qui se trouvait sur territoire

 24   croate. Je dois admettre qu'à ce moment-là, cette annonce m'a surpris. Mais

 25   les événements qui se sont déroulés au nord de Mostar, je crois que c'était

 26   dans le secteur de Bijelo Polje, et en particulier les événements survenus

 27   les 14 et 15, c'est-à-dire avant le début de notre opération, m'ont

 28   convaincu parce que pour moi cela représentait des signes très clairs du

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  1   fait que le jugement qui avait présidé à notre engagement reposait sur des

  2   indices très sérieux et sur des faits très graves.

  3   [L'accusé Praljak vient au prétoire]

  4   M. LAWS : [interprétation] 

  5   Q.  C'est dont pour cette raison que vous aviez décidé de rester volontaire

  6   dans le cadre de cette exposition même si vous vous étiez rendu compte que

  7   maintenant l'ennemi que vous alliez affronter était bien différent que

  8   celui auquel vous attendiez au départ ?

  9   R.  Oui. Je dois admettre que j'ai été très affecté personnellement par

 10   cette situation étant donné que j'avais mis en place une défense mixte

 11   croate musulmane dans le secteur de Stolac.

 12   Q.  Nous allons y revenir mais nous comprenons bien que cela vous a plus ou

 13   moins surpris puisque vous aviez pensé au départ que vous luttiez contre un

 14   ennemi commun les Serbes, et tout d'un coup, vous vous rendez compte que

 15   vous êtes censé combattre les forces qui sont en fait les forces du

 16   gouvernement du pays dans lequel vous vous trouvez. Et vos hommes étaient-

 17   ils aussi surpris que vous ?

 18   R.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, me définir exactement ce que signifie

 19   "vos hommes" ?

 20   Q.  -- par les hommes sous vos ordres dans le cadre de l'opération Jug.

 21   R.  Manifestement, vous avez mal compris quelque chose. Dans cette

 22   opération, j'étais chef d'état-major. Mes hommes c'était les membres de

 23   l'état-major. Je ne commandais pas aux unités. Mais si vous m'interrogez au

 24   sujet des unités qui étaient chargées de mener à bien cette opération, il

 25   s'agissait - et je le répète - des unités qui avaient déjà passé des mois

 26   là-bas sur ces mêmes positions qui, tous les jours, participaient à des

 27   combats et qui avaient été mis en place face aux forces de l'ABiH.

 28   Q.  A votre connaissance, y a-t-il des volontaires, puisque vous les

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  1   appelez ainsi qui ont changé d'avis, à ce moment-là ou à un autre moment,

  2   au cours de l'opération Jug ?

  3   R.  Je ne dispose pas de ce type de renseignements dont je ne peux pas vous

  4   dire, oui, pas plus que je ne peux vous dire non.

  5   Q.  Très bien. Nous reviendrons à l'opération Jug plus tard. Mais je

  6   voudrais maintenant que nous étudions ce concept de volontaire. Vous en

  7   avez déjà parlé donc je ne parle pas de volontaires de l'armée croate mais

  8   les volontaires de l'armée croate qui sont partis se battre en Bosnie-

  9   Herzégovine. C'est cela qui m'intéresse.

 10   Je vais revenir maintenant à nouveau en 1992 où une autre unité de la

 11   HV a été déployée en avril 1992, quelques mois après votre premier

 12   déploiement en janvier 1992. Il s'agissait d'une Unité de la ZNG, donc des

 13   Gardes nationaux. Saviez-vous donc -- étiez-vous au courant de ce

 14   déploiement de cette unité sur Citluk ? Est-ce que ça vous rappelle quelque

 15   chose ?

 16   R.  Non. Je ne suis pas au courant de cela.

 17   Q.  Très bien. Veuillez, s'il vous plaît, étudier le premier document du

 18   classeur qui vous a été remis, le P 001258.

 19   Avez-vous trouvé le document ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Le 12 avril 1992. Il s'agit d'un ordre envoyé au commandant de la 4e

 22   Brigade du Corps de la Garde nationale, ZNG :

 23   "Suite à la situation qui est intervenue en Herceg-Bosna, et suite à

 24   l'ordre du général Janko Bobetko," souligné à la main, je donne l'ordre

 25   suivant.

 26   Donc le but est d'empêcher la pénétration de l'ennemi dans la zone de

 27   Citluk. Au paragraphe 2, les troupes sont censées contacter M. Perak, le

 28   commandant de la défense de cette partie de l'Herzégovine à Citluk; le

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  1   voyez-vous sur le document ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Pourriez-vous maintenant, s'il vous plaît, regarder le dernier

  4   paragraphe ? Il y a deux -- malheureusement, il y a deux points numéro 6,

  5   mais je parle du dernier, et je donne lecture :

  6   "Tout insignes de l'armée croate ne doivent pas être arborés par les

  7   combattants et les combattants doivent se présenter comme étant volontaires

  8   défendant la patrie."

  9   Le voyez-vous ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Lorsque vous avez été déployé en janvier 1992, avez-vous reçu des

 12   consignes identiques ?

 13   R.  Non. Nous arborions toutes les insignes de l'armée croate.

 14   Q.  Etiez-vous censé vous présentez comme étant des combattants volontaires

 15   venus défendre leur patrie ? Vous a-t-on donné ce type de consignes en 1992

 16   ?

 17   R.  Vous me demandez si j'ai reçu pour consigne d'enlever les insignes de

 18   l'armée de Croatie ?

 19   Q.  Non, la question que je vous pose c'est de savoir si vous avez reçu des

 20   consignes, si vous deviez vous présenter comme volontaire défenseur de la

 21   patrie ?

 22   R.  Non. Moi, j'étais là-bas en tant que chef d'état-major de la 4e Brigade

 23   des Gardes et plus tard en tant que commandant de la 116e Brigade. Nous

 24   portions tous les insignes de l'armée croate et j'étais membre de l'armée

 25   de Croatie. Mes hommes, à l'époque, n'étaient pas des volontaires, c'était

 26   des hommes qui étaient allés de territoire de la Croatie dans un territoire

 27   menacé pour supprimer le danger qui menaçait cette partie du territoire

 28   croate.

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  1   Q.  Bien. Alors veuillez passer dans votre classeur au document P 05 --

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Au paragraphe 6, il y en a deux, mais le dernier

  3   paragraphe, où il y a marqué : "Défendre votre patrie." Je crois que, dans

  4   votre langue, c'est le terme "Dobrovoljni." Qu'est-ce que ça veut dire ?

  5   C'est défendre la patrie de la République de Croatie, ou la patrie d'un

  6   Croate de l'Herceg-Bosna ? Comment on peut interpréter la phrase ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, pour être très franc

  8   avec vous, ce document m'est revenu en mémoire quand il m'a été montré. Ce

  9   document est arrivé sous la forme qu'il revêt ici au commandement de la

 10   brigade. Nous avons envoyé ce bataillon les hommes arborant tous leurs

 11   insignes là où ils devaient aller. Il a rempli les missions qui étaient les

 12   siennes là-bas de concert avec les autres brigades car un danger menaçait

 13   le front dans ce secteur. Là-bas, ces hommes étaient membres de l'armée de

 14   Croatie et avaient les mêmes missions, appliquaient les mêmes principes et

 15   subissaient les mêmes contraintes que les autres brigades. Ce texte a été

 16   écrit par quelqu'un qui se trouvait au commandement à Split qui ne

 17   possédait pas tous les éléments d'information au sujet de notre situation

 18   sur place.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Dois-je en conclure que le terme "patrie" c'est la

 20   défense de la République de Croatie ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Moi, c'est ce que je comprends.

 22   M. LAWS : [interprétation]

 23   Q.  Le document suivant est le P 05880, et si cela peut vous aider si vous

 24   allez à la fin de ce classeur, c'est le cinquième document à partir de la

 25   fin, environ.

 26   Vous avez ce document sous les yeux ?

 27   Nous avançons dans le temps, nous passons au mois d'octobre 1993. Il s'agit

 28   là d'un document qui émane du général de brigade Ivan Kapular. Cet homme,

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  1   comme nous le constaterons, a écrit un certain nombre de lettres au cours

  2   de la journée. Ceci dit qu'il s'agit d'un ordre portant sur le transport et

  3   qui est dû au besoin pressant d'avoir une relève des troupes sur le front

  4   sud. Le front du sud est une expression utilisée que nous entendons ici de

  5   temps en temps dans ce prétoire. Je souhaite vous poser cette question-ci,

  6   si vous le permettez.

  7   Il s'agit là me semble-t-il d'une expression qui voulait signifier

  8   déploiement des troupes croates dans la République de Bosnie-Herzégovine en

  9   1993, n'est-ce pas ?

 10   R.  Non. Les termes "froncides," je les comprends comme étant synonyme au

 11   mot "théâtre des opérations du sud," qui était également une expression

 12   largement utilisée et qui recouvrait les forces qui se trouvaient des deux

 13   côtés, ainsi que dans la partie plus étroite de la République de Croatie et

 14   dans la partie frontalière entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. Là

 15   encore, on constate ici qu'on discute de concept très divers parce qu'à

 16   l'époque sur le plan des principes, sur le plan de la doctrine, sur le plan

 17   juridique les définitions n'avaient pas été bien précisées. Il est

 18   difficile d'expliquer ce genre de chose à des hommes qui n'ont pas beaucoup

 19   d'expérience de travail à l'état-major, par exemple. Mais tout cela, cette

 20   formation devait se faire en parallèle avec les entraînements au combat.

 21   Q.  Le front sud est quelque chose qui est évoqué dans cet ordre, comme

 22   nous venons de le voir. Est-ce que vous voulez bien regarder le deuxième

 23   paragraphe, s'il vous plaît, lisez le paragraphe à voix basse. Ceci traite

 24   du transport d'une partie de la compagnie du génie qui le lendemain de cet

 25   ordre, à savoir le 15 octobre, cette compagnie va être transportée à bord

 26   de véhicules à moteur et leur voyage se terminera à Prozor en passant par

 27   Split, en passant par Tomislavgrad pour atteindre Prozor. Lorsque cette

 28   compagnie arrive à Prozor elle doive se présenter au colonel Siljeg; est-ce

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  1   que vous voyez cela ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Prozor n'a pas de frontière avec la Croatie du sud, n'est-ce pas ?

  4   R.  Non.

  5   Q.  Il s'agit d'une distance plus importante que ces 20 à 25 kilomètres que

  6   vous avez évoquée hier, n'est-ce pas, de la frontière croate me semble-t-il

  7   ?

  8   R.  En effet.

  9   Q.  Moi, l'idée que je vous suggère c'est celle-ci. Il s'agit là d'un ordre

 10   qui porte sur le roulement des troupes sur le front sud porte sur Prozor,

 11   et ceci nous dit que Prozor est considéré par l'auteur de ce document, M.

 12   Kapular, comme étant une région qui fait partie du front sud; est-ce que

 13   vous êtes d'accord avec cela, Général, ou pas ?

 14   R.  M. Kapular, ce qu'il écrit ici concerne une partie du théâtre du sud,

 15   en effet, et je préciserais qu'il parle d'une partie d'une compagnie du

 16   génie et pas de la compagnie complète. Il ne parle que de 14 hommes. Ce qui

 17   correspond au concept dont j'ai déjà parlé, à savoir que c'était des

 18   volontaires qu'on faisait partir pour cet endroit s'ils le souhaitaient.

 19   Q.  Très bien. Passons maintenant au document auquel a fait référence, je

 20   crois, le Président de la Chambre.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur, à juste titre, vous fait remarquer que

 22   dans le document il y a Prozor et effectivement c'est au point 2, et il

 23   semble qu'on organise le transport de 14 soldats, 14 soldats c'est 14

 24   soldats, qui vont monter dans un minibus et dont le voyage est Vinkovci,

 25   Djakovo, et cetera, point final, Prozor. On peut se demander qu'est-ce

 26   qu'ils vont faire à Prozor, parce que le poste militaire 38132, Tavin Kuci

 27   [phon], c'est quand même assez loin de Prozor. Quelle est l'explication que

 28   vous pouvez donner ? N'était-il pas plus simple de leur dire de faire du

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  1   stop pour aller à Prozor ou de se débrouiller, pourquoi déployez toute la

  2   logistique de l'armée croate pour amener 14 soldats à Prozor ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que ceci

  4   donnera lieu de ma part à la même justification. Je dirais ce qui aurait pu

  5   se passer selon ce que j'ai vécu moi-même. Moi, j'ai eu à faire face à la

  6   même situation au début de 1992; 30 % de combattants sous mes ordres ont à

  7   tout prix exprimé le désir d'aller défendre les biens de leurs familles et

  8   leurs familles en Bosnie-Herzégovine.

  9   Moi, j'étais j'ai eu de nombreuses hésitations avec le commandement,

 10   comment les laisser partir et finalement nous leur avons permis de partir

 11   en groupes unifiés afin d'éviter qu'ils se fassent tuer. Nous pensions que

 12   ce qu'il fallait c'était que de -- si déjà ils partaient, ils puissent

 13   faire quelque chose là-bas et pas que chacun y aille individuellement

 14   défendre individuellement sa propre famille. Donc ce texte, moi, je le lis

 15   comme suit :

 16   Je pense que le transport des hommes qui s'étaient exprimés comme

 17   ayant la volonté d'aller apporter leur aide dans une situation sans doute

 18   difficile à la population qui se trouvait sur le territoire en question.

 19   Ce transport a été organisé -- a été réalisé de façon organisée. Ils

 20   avaient demandé à partir et leurs commandements ont accepté d'organiser

 21   leur transport, leur voyage et de leur fournir des véhicules.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous soumets deux hypothèses. Moi je n'ai pas la

 23   solution. Il y a deux hypothèses. Première hypothèse : l'armée croate

 24   estimait que son champ de compétence allait jusqu'à Prozor et que donc on

 25   sort cet ordre organisant le transport de 14 soldats. Ça c'est une première

 26   lecture.

 27   Deuxième hypothèse : le colonel Siljeg qui est mentionné dans le document

 28   demande du renfort, demande des soldats. On lui donne satisfaction en

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  1   organisant le départ de Vinkovci de 14 soldats avec armes et bagages, car

  2   c'est indiqué, vous voyez, ils peuvent transporter leur équipement et leur

  3   arme. Voilà. Il y a deux hypothèses. Moi, je ne sais pas quelle est la

  4   bonne. Mais vous, qu'est-ce que vous dites ?

  5   Mais il y en a peut-être une autre, hein. Il y a peut-être d'autres

  6   hypothèses. Qu'est-ce que vous nous dites ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, d'après mon estimation,

  8   il s'agissait là de personnes qui voulaient partir là-bas qui m'étaient

  9   appelés soit directement individuellement, quelqu'un de là-bas, c'était

 10   annoncé à eux pour qu'ils viennent, pour qu'ils viennent en renfort aux

 11   forces qui sont dans une situation difficile là-bas. Lorsque les

 12   volontaires se sont présentés et qu'ils ont dit -- enfin, ils ont dit, à ce

 13   moment-là, qu'ils souhaitaient y aller, et je pense que ceci ne relevait

 14   pas de la compétence de l'armée croate pour ce qui est de leur départ à

 15   Prozor et je ne pense pas que c'est la conclusion qu'on puisse tirer sur la

 16   base de ce texte.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc votre vision, c'est de dire : il y avait

 18   des volontaires et donc on a fait le nécessaire pour qu'ils aillent à

 19   Prozor. C'est ce que vous nous dites.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais, Général, non pas que je veux vous mettre en

 22   difficulté. C'est très facile pour une juge professionnel de mettre

 23   quelqu'un en difficulté mais, moi, ce n'est pas mon éthique.

 24   Je remarque, regardez au paragraphe 6, on demande qu'il y ait donc des

 25   rapports réguliers avant le départ, après l'arrivée à destination, avant

 26   qu'ils aillent sur le champ, "the field," ça doit être le champ de

 27   bataille, je présume. Après le retour du champ, donc manifestement, ces 14

 28   soldats vont pour une opération donnée, et ensuite ils vont revenir.

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  1   Qu'est-ce que vous en pensez ? Donc ils seraient volontaires pour une

  2   opération.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois, Monsieur le Président, que jusqu'à

  4   ce moment-là, déjà une certaine partie de l'unité dans laquelle il y avait

  5   un grand nombre de personnes de la région de l'Herzégovine, je crois qu'il

  6   y a eu des situations dans laquelle ils se relayaient, qu'ils trouvaient un

  7   accord pour s'y rendre car leurs familles étaient sur le territoire de la

  8   Croatie. Donc pendant un certain temps, ils souhaitent être auprès de leurs

  9   familles et pendant un certain temps dans les opérations. Donc je crois

 10   qu'il y a eu certaines relèves de ces personnes afin de leur permettre

 11   d'avoir aussi des contacts avec leurs familles et puis d'autre part de

 12   participer à l'aide.

 13   Tout au long de la guerre, nous étions dans une telle situation,

 14   c'est-à-dire s'agissant des personnes originaires de la Bosnie-Herzégovine

 15   dans la plupart des unités et notamment les unités qui entre-temps ont eu

 16   le statut d'unités professionnelles, donc tels que la Garde nationale. Il

 17   s'agissait là des personnes qui ne souhaitaient pas perdre ce statut car il

 18   offrait une certaine sécurité. Ces gens-là se présentaient pour partir là

 19   où la situation était difficile et il fallait venir, et surtout s'il

 20   s'agissait de la région dont ils étaient originaires et où se trouvaient

 21   leurs parents.

 22   Moi, personnellement, je ressentais ce besoin même si je souligne la

 23   première fois j'ai été surpris par une telle demande. Mais par la suite,

 24   nous avons essayé de canaliser cela, d'organiser cela et de faire en sorte

 25   que ceci fonctionne.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce habituel qu'un général, en l'espèce

 27   Ivan Kapular, fasse lui-même un ordre pour 14 soldats inconnus, alors que

 28   ça aurait pu être réglé à un échelon tout à fait inférieur ? Vous avez une

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  1   explication ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Compte tenu du fait que l'unité logistique,

  3   qui avait les véhicules, qui avait la possibilité d'organiser le passage,

  4   le sous-groupe à travers la Croatie était organisé au niveau de la brigade,

  5   l'Unité du Génie militaire n'avait pas de moyens de possibilité, ni

  6   d'organisation qui s'en occupe à son niveau à elle. Ceci doit être pris en

  7   charge par la logistique de la brigade.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Procureur.

  9   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Si vous me le permettez, j'ai une

 10   question à propos de cet ordre. Cet ordre est également envoyé ou transmis

 11   ou remis au commandant adjoint chargé des affaires politiques et de la

 12   propagande. Est-ce que vous avez une explication à nous fournir à cet effet

 13   ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'entre autres, personne au sein du

 15   commandement cet homme lui aussi était censé suivre les déplacements des

 16   membres de la brigade. Autrement dit, il fait partie de ses devoirs

 17   d'informer les familles au cas où quelqu'un qui fait partie de ce groupe

 18   perdait la vie, donc il était censé être informé de leur déplacement.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 20   M. LAWS : [interprétation]

 21   Q.  Alors nous allons voir quelque chose dans le même ordre d'idée. Mais

 22   avant de mettre ce document de côté, je souhaite simplement que vous

 23   répondiez de façon très simple, la simple vérité, si je puis dire. L'armée

 24   croate envoie 14 membres du génie, des spécialistes, pour aider le HVO sur

 25   la ligne de front. En fait, c'est très clair et vous pouvez le constater

 26   autant d'autres personnes.

 27   R.  Je le confirme entièrement et j'indique que ces 14 personnes, d'après

 28   la manière dont je comprenais la situation à l'époque et d'après bien

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  1   d'autres exemples, ont pris leur propre décision d'y aller et que personne

  2   ne les avait forcés à ce faire.

  3   Q.  Très bien. La 4e Brigade motorisée a-t-elle été déployée en Bosnie-

  4   Herzégovine dans la deuxième moitié de l'année 1993 ?

  5   R.  Je ne saurais vous répondre exactement à cette question. Ça faisait

  6   déjà un mois que je n'étais plus membre de cette brigade donc je ne saurais

  7   vous dire exactement où elle se trouvait à ce moment-là. Mais si vous avez

  8   un document à me présenter je suppose que je pourrais y trouver un appui.

  9   Q.  Bien. Donc veuillez regarder en même temps que nous, la pièce P 05355.

 10   C'est sept documents à partir de la fin du document si cela peut vous être

 11   utile.

 12   Est-ce que vous avez ce document sous les yeux, Général ?

 13   Je vous en prie, vous pouvez le lire à voix basse pendant quelques

 14   instants. Vous constaterez que c'est un document qui est très court qui

 15   émane du ministère de la Défense de la République de Croatie, qui est daté

 16   du 24 septembre 1993. C'est un groupe de combat est envoyé et qui comprend

 17   le 4e Bataillon motorisé, en fait, on dit ici en croate "MTB," est-ce exact

 18   ?

 19   R.  Moi, j'ai l'abréviation en anglais. Il est écrit ici "Bataillon

 20   motorisé."

 21   Q.  -- si vous tournez la page vous trouverez la version croate également.

 22   R.  Oui, c'est le 4e Bataillon motorisé.

 23   Q.  Oui, merci. Cette unité-là est envoyée au poste de commandement avancé

 24   de Prozor, c'est en tout cas ce qui -- c'est qui semble être le cas, n'est-

 25   ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Veuillez regarder maintenant la pièce P 11033, s'il vous plaît.

 28   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Puis-je faire une intervention

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  1   technique ?

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Général Petkovic.

  3   L'ACCUSÉ PETKOVIC : [interprétation] Une intervention technique.

  4   Le témoin peut-il se pencher sur le sceau car il était question de la

  5   4e Brigade pour qu'il n'y ait pas de confusion pour savoir si la 4e Brigade

  6   était allée à Vinkovci, ou pas. Merci.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je dois avouer que je trouve cela

  8   extrêmement étrange. Je ne peux pas établir un lien entre ce sceau et ce

  9   document.

 10   M. LAWS : [interprétation]

 11   Q.  Veuillez nous aider avec ce cachet, qu'est-ce que cela nous dit ?

 12   R.  Vous parlez ici, si j'ai bien compris, des forces de la 4e Brigade.

 13   Mais visiblement il s'agit ici du groupe de combat qui fait partie du 4e

 14   Bataillon renforcé donc. Donc je répète, je souligne de nouveau, il ne

 15   s'agit pas du bataillon mais du groupe de combat. Et par rapport aux

 16   volontaires on revient à la même question.

 17   Q.  Merci. Donc j'avais commencé par vous demander si la 4e Brigade

 18   motorisée mécanisée avait été déployée en Bosnie-Herzégovine, et vous nous

 19   avez dit que vous n'étiez pas en mesure de répondre à cette question sans

 20   voir un document. Donc ce document n'est pas utile pour vous; c'est cela ?

 21   R.  Dans ce document, il n'est pas question de la 4e Brigade, mais du 4e

 22   Bataillon. Non, pardon, il s'agit d'un groupe qui faisait partie du 4e

 23   Bataillon donc ce n'est pas la 4e Brigade. Visiblement c'est le poste

 24   militaire, aux postes militaire  3132, ce qui correspond visiblement à une

 25   autre unité et non pas une unité de la 4e Brigade des Gardes.

 26   Q.  Merci beaucoup. Je vous demande maintenant de regarder le P 1 --

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi, mais je n'ai pas tout

 28   à fait bien compris.

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  1   La version anglaise évoque un groupe de combat qui comprend le 4e

  2   Bataillon mécanisé. En fait, on ne parle pas de brigade ici mais de

  3   bataillon. Donc vous avez corrigé, et si on lit ce document on fait état

  4   ici de l'ensemble du bataillon, de tout le bataillon. On ne parle pas d'un

  5   bataillon qui serait moins important. Vous semblez dire qu'il s'agit d'un

  6   bataillon moins important vous semblez parler d'une partie du bataillon. Je

  7   souhaite vous demander pourquoi vous dites cela, si je vous ai bien

  8   compris.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. C'est justement ce que

 10   je souhaitais souligner comme différence. Si un bataillon avait été envoyé,

 11   il aurait fallu écrire l'on envoie le 4e Bataillon en tant que renfort. Or

 12   ici il est écrit on envoie un groupe de combat du 4e Bataillon en tant que

 13   renfort. C'est justement la différence donc on n'envoie pas le bataillon

 14   mais un groupe appartenant à ce bataillon.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : -- un bataillon, il y a combien d'hommes dans un

 16   bataillon ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Un bataillon compte d'après la constitution

 18   entre 500 et 650 personnes.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Entre 500 et 650, et là, on demande 350.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Ici avec les renforts venant des autres unités

 21   visiblement il s'agit de 350 personnes, donc non seulement les membres de

 22   ce bataillon mais aussi les renforts au total ça fait 350 hommes.

 23   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Où trouvez-vous les renforts ?

 24   Pourriez-vous nous l'indiquer où cela se trouve dans le texte, s'il vous

 25   plaît, "Renforcements" ? Pardonnez-moi, je l'ai trouvé.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez.

 27   Mon Général, il y a peut-être un problème de traduction. Le mieux ça

 28   serait que vous lisiez les deux lignes, ce n'est pas long, et comme ça, ça

Page 46681

  1   sera beaucoup plus clair. Lisez à voix lente les deux lignes, et comme ça,

  2   les traducteurs vont nous dire ce qui est écrit exactement plutôt qu'on

  3   passe quasiment dix minutes là-dessus.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je dis, je lis :

  5   "Au cours de la nuit du 23 au 24 septembre 1993, l'on a envoyé un groupe de

  6   combat, constitué du 4e Bataillon motorisé, plus les renforts s'élevant à

  7   350 soldats."

  8   L'INTERPRÈTE : [aucune interprétation] 

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans la traduction française, il est traduit

 10   directement à partir de votre langue. Voilà ce qui est dit : l'on a envoyé

 11   un groupe de combat, constitué du 4e Bataillon motorisé, plus les renforts

 12   s'élevant à 350 soldats.

 13   Dans la version française, elle a peut-être fait une erreur, mais

 14   dans la version française, telle que je l'ai entendue dans mes écouteurs,

 15   c'est le 4e Bataillon motorisé qui va être renforcé par 350 soldats. Donc

 16   ce n'est pas tout à fait la même chose.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, l'explication que vous

 18   avez fournie par rapport à ce qui aurait dû être écrit, et d'après ce que

 19   j'ai entendu, dans mon interprétation, c'est ce qui aurait dû être écrit.

 20   Si l'on voulait dire que ceci correspond à l'ensemble du bataillon. Dans

 21   l'original, ce qu'on voulait dire, on souligne le mot, groupe de combat,

 22   et, "groupe de combat," ça veut dire que ce n'est pas une unité

 23   organisationnelle mais un groupe constitué ad hoc.

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je suis désolé, mais puisqu'on est

 25   sur le sujet, essayons d'aller au fond des choses. Ce que vous venez de

 26   nous lire a été traduit en anglais comme étant, "un groupe de combat venant

 27   des rangs de" et non pas "constitué de." Donc on peut en déduire que ce

 28   n'est pas un bataillon complet, c'est ce qui est dit ou non ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Le texte avec une telle phrase laisse

  2   comprendre que pour cette mission, l'on a constitué un groupe de combat à

  3   base de membres et l'on ne voit pas le nombre de ces membres du 4e

  4   Bataillon plus les renforts, et au total, il s'agit de 350 personnes.

  5   Mathématiquement même ceci ne peut pas correspondre au nombre de membres

  6   d'un bataillon plus les renforts. L'on utilise justement le mot groupe pour

  7   souligner le fait qu'il ne s'agit pas d'une unité organisationnelle. Donc,

  8   pour moi, il est clair, il ne fait aucun doute qu'il s'agit ici d'une

  9   partie du 4e Bataillon et certains membres supplémentaires pour arriver au

 10   nombre de 350 personnes, c'est-à-dire 70 % du bataillon.

 11   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je reste perplexe, car tel que vous

 12   nous l'avez présenté, il s'agirait d'une partie du bataillon avec le

 13   renfort des 350, donc en tout, on ne peut pas arriver à 350, la somme doit

 14   être supérieure à 350; sinon, j'ai vraiment besoin d'aide, une aide

 15   linguistique. La somme un plus cinq ne peut pas être égale à un.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ici l'information la plus

 17   importante est entre celui qui envoie le message et celui qui reçoit le

 18   message, par rapport au nombre de personnes. Certainement il s'agit ici du

 19   chiffre total; sinon, ce document du point de vue militaire mais même d'un

 20   autre point de vue aurait été problématique, donc il s'agit ici du seul

 21   chiffre qui apparaît à savoir, le nombre total de personnes.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'en doute. Un bataillon motorisé

 23   possède des véhicules. Donc s'il s'agissait d'un ordre complet, il faudrait

 24   aussi préciser le nombre de véhicules. Donc je trouve tout ceci très

 25   laconique. Cela dit, il n'est pas besoin peut-être d'y passer la journée,

 26   on a au moins 350 personnes voire plus.

 27   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de la cabine française : il s'agit

 28   d'une phrase ambiguë linguistiquement, donc il est très difficile de savoir

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  1   quelle est l'interprétation exacte.

  2   M. LAWS : [aucune interprétation]

  3   Mme ALABURIC : [interprétation] Je m'excuse. Si je peux corriger une erreur

  4   du compte rendu d'audience car, sinon, c'est sans logique.

  5   Le témoin a dit : "Plus les membres supplémentaires de 350 soldats". Ce

  6   chiffre de 350 portait sur le chiffre supplémentaire, et ne devait pas donc

  7   représenter le total.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que maintenant nous créons une

  9   confusion encore plus grande.

 10   Pour moi, le chiffre total des hommes envoyés est le chiffre de 350

 11   personnes, et avec beaucoup de certitude, je maintiens cela.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président,

 13   apparemment, j'ai mal compris les propos du témoin. Excusez-moi.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- une pause, parce que la Juriste de

 15   la Chambre me dit qu'on a déjà dépassé, donc il faut faire 20 minutes de

 16   pause, on reprendra après.

 17   --- L'audience est suspendue à 12 heures 37.

 18   --- L'audience est reprise à 12 heures 58.

 19    M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, vous avez la parole.

 20   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 21   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, Général, vous pencher sur la pièce P 11033.

 22   Il s'agit du troisième document à partir de la fin du gros classeur, P

 23   11033.

 24   Il s'agit d'un document qui semble avoir été rédigé par Ivan Kapular, le

 25   voilà, page 4, de la version en anglais qui correspond à la version -- à la

 26   même page dans la version en B/C/S. C'est la personne qui envoyait ces 14

 27   spécialistes du génie à Prozor. Dans la pièce P 05880 que nous avons

 28   discuté précédemment, vous vous en souvenez ?

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  1   R.  Excusez-moi, je lisais le document. Je n'ai pas entendu votre question.

  2   De quoi est-ce que je devrais me souvenir ?

  3   Q.  La personne qui a signé ce document est Ivan Kapular; c'est la même

  4   personne que celui qui avait organisé le transport par minibus des 14

  5   sapeurs pour aller aider le colonel Siljeg, soit, en tant que volontaire,

  6   soit en tant déploiement de l'armée croate; vous vous en souvenez quand

  7   même, c'était avant la pause ?

  8   R.  [aucune interprétation]

  9   Q.  Je vous ai vu opiné du chef, mais il faut que vous disiez quelque chose

 10   pour que ce soit noté au compte rendu.

 11   R.  Oui, oui.

 12   Q.  Donc dans ce document dont vous venez de prendre connaissance nous

 13   avons le nom de 17 gardes provenant de la 4e Brigade motorisée et c'est un

 14   ordre qui, en page 2, en B/C/S c'est en page 2 en anglais, décrit sous

 15   l'intitulé : "Exposé les motifs, sont responsables de…" non, sont

 16   responsables du fait d'avoir refusé d'obéir aux ordres leur demandant de se

 17   rendre sur le front sud le 7 [comme interprété] octobre 1993, et le 11

 18   novembre 1993, en tant que membres de la 4e Brigade motorisée. Il est écrit

 19   que : "Ils ont enfreint donc la discipline militaire," et on apprend un peu

 20   plus loin que : "Leur solde sera réduit de 20 % pendant trois mois."

 21   Vous le voyez ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Le front, je vais affirmer la chose suivante. Selon moi, lorsque l'on

 24   parle du front sud on parle du territoire de Bosnie-Herzégovine et ces

 25   hommes sont donc sanctionnés en les privant d'un cinquième de leur solde

 26   parce qu'ils refusent de se rendre sur ce front sud. Je vous affirme que

 27   c'est donc la signification de ce document. Pouvez-vous me dire quelle est

 28   votre opinion à propos de ce document ?

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  1   R.  Oui, exact.

  2   Q.  Donc je vais être juste dans ma question j'inclus la chose suivante.

  3   Lorsque l'on parle de "front du sud," "southern front," on parle en fait du

  4   territoire de Bosnie-Herzégovine, et ces hommes sont sanctionnés parce

  5   qu'ils ne sont pas rendus en Bosnie-Herzégovine. C'est ce que je vous

  6   affirme et il faut que vous preniez ça en compte lorsque vous répondrez à

  7   ma question.

  8   R.  Je pensais que nous avions défini les termes "théâtre des opérations du

  9   sud," et quand je dis ce que je dis je n'exclus pas la possibilité que ces

 10   hommes étaient destinés à se rendre exclusivement sur les territoires de la

 11   Bosnie-Herzégovine. Le théâtre du sud est une partie du théâtre des

 12   opérations qui se trouve au sud de la Croatie qui recouvre une partie de

 13   territoire de Croatie et une partie de territoire de Bosnie-Herzégovine.

 14   Q.  Saviez-vous qu'à la fin de 1993, il y avait un problème important ? Un

 15   grand nombre de soldats croates ne voulaient pas aller combattre en

 16   Croatie, donc si vous avez raison, et lorsque vous dites que le front sud

 17   comprenait une partie du territoire croate, saviez-vous qu'il existait un

 18   problème et si justement nous avons 26 membres des Gardes de la 4e Brigade

 19   motorisée qui ne veulent pas se battre pour leur propre pays ?

 20   R.  S'agissant de ce cas particulier bien concret, je n'avais pas, à

 21   l'époque, le moindre élément d'information, mais j'ai été informé de bien

 22   d'autres situations et moi-même j'ai imposé des mesures disciplinaires

 23   pendant que j'étais commandant contre des hommes qui avaient refusé

 24   d'obtempérer et d'obéir aux ordres.

 25   Q.  Très bien. Soyons clair. Je vous affirme que lorsque l'on prend

 26   connaissance de ce document, il s'agit de personnes qui ne voulaient pas se

 27   rendre en Bosnie-Herzégovine et qui de ce fait sont sanctionnés. Pour

 28   étayer tout ceci veuillez, s'il vous plaît, à la page 4 de la version en

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  1   B/C/S, qui correspond à la page 3 en anglais. Donc sur votre page 4,

  2   veuillez prendre connaissance du deuxième paragraphe à partir de la fin, et

  3   en anglais le paragraphe qui nous intéresse c'est le dernier paragraphe de

  4   la page 3. Il est écrit, et je vous donne lecture :

  5   "L'une des fonctions principales des Gardes est d'effectuer toutes les

  6   missions qui leur sont ordonnées de façon scrupuleuse, il faut les remettre

  7   en cause de façon indépendante, et professionnellement, il faut essayer

  8   qu'ils soient prêts à faire des sacrifices personnels et prendre des

  9   risques professionnels. Je considère donc qu'en l'état il n'y avait pas

 10   lieu d'avoir des opinions -- d'avoir une opinion quelconque à propos de

 11   l'ordre qui leur a été donné, et donc c'est -- en fait, ces soldats ont

 12   enfreint la discipline."

 13   Entre autres termes, on est en train de dire qu'un soldat ne doit pas

 14   refuser un ordre parce qu'il a une autre opinion à propos de quelque chose

 15   il doit obéir; c'est ce qui est écrit dans ce paragraphe, n'est-ce pas ?

 16   R.  Exact.

 17   Q.  Donc il s'agit de personnes qui ne veulent pas aller se battre en

 18   Bosnie; c'est cela ?

 19   R.  Je ne trouve pas un seul argument à l'appui de votre thèse. Ils ont

 20   refusé de se rendre sur le théâtre de guerre méridional, et ce théâtre de

 21   guerre méridional est un espace qui va du Delta de la Neretva à gauche de

 22   la carte, et un peu plus haut et jusqu'au point que j'indique ici.

 23   [Le témoin s'exécute]

 24   Et cette espace recouvre les deux côtés de la frontière, d'ailleurs

 25   hier nous avons parlé de cela longuement en long et en large. A mes yeux,

 26   ceci est un ordre qui émane d'un commandant de la brigade qui parle de

 27   punition imposée à des membres de la brigade qui ont refusé de se rendre

 28   dans le théâtre de guerre du sud. Moi, je ne peux rien confirmer à la

Page 46687

  1   lecture de ce document d'autre ce que je dis ici. J'ai bien sûr examiné

  2   l'intégralité du document assez vite parce que je cherchais à y trouver

  3   d'éventuelles indices montrant que ces hommes avaient été punis

  4   éventuellement parce qu'ils auraient refusé de se rendre en Bosnie centrale

  5   ou sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine ou je ne sais où. Je n'ai pas

  6   trouvé de tel indice dans le texte qui peut me permettre de confirmer votre

  7   thèse.

  8   Q.  Vous dites donc que ces soldats croates, peut-être de façon subjective,

  9   ne veulent pas aller se battre dans leur propre pays. Donc c'est une

 10   explication. Ils ne veulent pas se rendre en Croatie bien qu'ils soient

 11   quand même gardes au sein de l'armée croate.

 12   R.  Là, je suis appelé à supputer de ce qui s'est passé. Mais d'après ce

 13   que j'ai lu dans ce document, c'est une éventualité que je considère comme

 14   possible.

 15   Q.  Très bien. Nous allons en rester aux conjectures en ce qui concerne le

 16   front sud et les volontaires, et étudiaient un autre document rédigé par la

 17   même personne, donc Ivan Kapular, la pièce P 03667.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous avais posé une question en faisant référence

 19   à un document, et c'était ce document auquel je me référais. Le 27 novembre

 20   1993, le général Kapular prend des mesures de discipline à l'égard de

 21   plusieurs soldats. C'est un événement apparemment considérable. Car ce

 22   n'est pas un, deux, trois, mais 26 et même plus puisqu'il y en a d'autres

 23   qui vont avoir une réduction de 20 % de leur salaire. Ça me faisait penser

 24   un peu à la révolte en août 1789 des marins du "Bounty." C'est un événement

 25   considérable; à partir de là, un juge raisonnable se demande pourquoi.

 26   Alors il aurait pu avoir une réponse si le Procureur avait pu recueillir

 27   l'ensemble de la procédure concernant ce problème, mais nous n'avons que

 28   cet ordre sous les yeux. Donc on tombe au niveau des hypothèses.

Page 46688

  1   Première hypothèse que je vous soumets, les combats à Prozor étaient

  2   tels qu'il y avait des risques de perdre la vie, et l'on voit dans ce

  3   document qu'en réalité, ils ont refusé à deux reprises - pas une seule

  4   fois, à deux reprises, le 2 octobre et le 11 novembre. Pourquoi ont-ils

  5   refusé ? Ça n'apparaît pas dans le document. Avaient-ils peur pour leur

  6   propre vie, c'est possible, je n'en sais rien.

  7   Ou bien n'y avait-il pas une autre hypothèse, à savoir que ce front

  8   sud pouvait aller jusqu'à Prozor, et que les soldats croates dont nous

  9   avons les noms estimaient que ce n'était pas leur combat, qu'ils n'avaient

 10   rien à faire en République de Bosnie-Herzégovine, et qu'à ce moment-là, ils

 11   ne voyaient pas l'intérêt d'aller combattre là-bas.

 12   Une source d'étonnement de ma part, c'est la faiblesse des mesures

 13   qui sont prises, parce qu'en termes purement militaires, c'est une

 14   rébellion, en période de guerre, dans certains pays ça s'est traduit devant

 15   des pelotons d'exécution. Alors en ce qui concerne, vous, qui n'avez pas eu

 16   à connaître peut-être ce type de situation, est-ce qu'au point de vue

 17   disciplinaire, la mesure est bien proportionnée; ou si elle est faiblement

 18   proportionnée, n'est-ce pas à dire qu'il y avait des éléments de nature

 19   beaucoup plus compliquée qui ont fait qu'on a préféré passer l'éponge sur

 20   cette rébellion ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, d'après votre question,

 22   je peux en déduire que vous maintenez la position consistant à penser que

 23   ces hommes ont été punis parce qu'ils ont refusé de se rendre sur le

 24   territoire de la Bosnie-Herzégovine. Si je développe cette hypothèse plus

 25   avant, ils auraient eu une raison très valable de refuser cela, à savoir la

 26   politique de l'Etat de Croatie. Je dis bien si c'est bien cela qui est en

 27   cause, parce que ce n'est pas ce que j'ai lu dans le document, moi. Mais si

 28   c'est ce qui est en cause dans le document, alors ils auraient eu des

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  1   raisons de faire objection à ces mesures qui leur ont été imposées, et de

  2   demander à l'état d'annuler cette décision du commandant et de prendre des

  3   mesures à l'encontre du commandant. Parce que selon cette hypothèse, selon

  4   l'hypothèse que vous évoquez ces soldats auraient bénéficié de l'appui de

  5   la politique menée par la République de Croatie.

  6   Mais, moi, je continue à défendre mon point de vue, à savoir que ces

  7   mesures ont été prises parce qu'ils avaient refusé d'aller se battre sur le

  8   front sud que ce soit d'un côté ou de l'autre, de ce théâtre des

  9   opérations, mais en tout cas, dans le cadre de l'armée de Croatie. Donc je

 10   souligne encore une fois parce que l'hypothèse que vous avez indiquée

 11   existe, si cela avait bien été dû au refus de ces hommes d'aller se battre

 12   sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, ils auraient très facilement pu

 13   obtenir l'annulation des sanctions en portant plainte contre le commandant.

 14   Parce qu'un tel refus aurait découlé de la politique de la République de

 15   Croatie, consistant à dire qu'il était proscrit d'envoyer des unités de

 16   l'armée sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, dans le cadre d'unité

 17   organisée et que le seul moyen était d'y envoyer des volontaires.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Général, j'ai écouté avec attention ce que vous avez

 19   dit, comme d'ailleurs je le fais lorsque le témoin réponde à mes questions.

 20   Vous, vous dites et le document ne vous contredit pas, vous dites que les

 21   sanctions ont été prononcées parce que ces soldats ont refusé d'obéir à un

 22   ordre au niveau du front sud, et que dans ce document, et je pense que vous

 23   avez raison, à aucun moment il est indiqué qu'ils ont refusé d'aller se

 24   battre en République de Bosnie-Herzégovine. J'ai regardé le document en

 25   long et en large, et je ne vois rien en ce domaine. Donc votre thèse c'est

 26   de dire, oui, ils n'ont pas exécuté un ordre, mais on ne sait pas si ça

 27   concernait la République de Bosnie-Herzégovine. Sur ce que vous dites, moi,

 28   le document je ne vois pas la mention comme quoi ils n'auraient pas voulu

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  1   pas aller à Prozor ou en République de Bosnie-Herzégovine. Il y est

  2   simplement marqué, de refuser d'obéir à l'ordre de marche de l'unité du

  3   front sud. Voilà, c'est tout ce qui est marqué.

  4   Bien. Monsieur le Procureur, à la lumière de ce que dit le témoin, je vous

  5   redonne la parole.

  6   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie.

  7   Q.  Ce n'est pas écrit explicitement mais pas explicitement qu'ils ont

  8   refusé de se rendre en Bosnie-Herzégovine, tout simplement parce que le

  9   terme consacré était "front sud," c'était le nom de code qui est employé

 10   dans ce type de document. C'est pour ça qu'il n'est pas explicitement écrit

 11   Bosnie-Herzégovine ?

 12   R.  Monsieur le Président, on attend de moi que je réponde à une question

 13   qui porte sur un sujet, tout simplement je n'ai plus la moindre raison de

 14   continuer à participer à ce débat. J'ai dit ce que je pensais de ce

 15   document. Je maintiens mon point de vue, et on essaie de me pousser vers

 16   quelque chose avec des questions supplémentaires. J'ai l'impression qu'on

 17   m'interroge au sujet de quelque chose qui ne fait de ma part l'objet

 18   d'absolument aucun point de vue.

 19   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Général Beneta, je comprends très

 20   bien vous soyez un peu mécontent. Les témoins dans le cadre du contre-

 21   interrogatoire ressentent souvent ce type de sentiment. Mais un témoin

 22   malheureusement doit se soumettre à ce genre de situation déplaisante, même

 23   s'il ne l'apprécie pas. C'est au Procureur de choisir ses questions, donc

 24   malheureusement vous êtes témoin et votre devoir c'est de répondre aux

 25   questions qui vous sont posées, à toutes les questions -- qui vous sont

 26   posées de façon concise, de façon en disant la vérité quel que soit vos

 27   réserves, les réserves que vous pourriez avoir à propos de ces questions.

 28   Vous ne pouvez pas choisir les questions qui vous plaisent et ne pas

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  1   répondre aux autres. Donc veuillez poursuivre, Monsieur Laws, et Témoin,

  2   continuez à coopérer, s'il vous plaît.

  3   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie. Bien, nous essayons, Monsieur

  4   le Juge.

  5   Q.  Nous essayons de voir s'il y a des éléments de preuve que l'on peut

  6   mettre dans la balance par rapport à votre témoignage, à savoir que les

  7   volontaires de Croatie cherchaient à obtenir une autorisation pour aller se

  8   battre en Bosnie-Herzégovine ou si alors la position était tout à fait

  9   contraire. C'est que nous essayons de faire. Ceci va nous prendre un petit

 10   peu plus de temps.

 11   Veuillez vous reportez au document P 03667. Cela se trouve au milieu de

 12   votre classeur, à peu près au milieu; vous l'avez ?

 13   R.  Oui, oui, oui.

 14   Q.  Inutile de le lire en entier encore une fois il s'agit là d'un document

 15   qui émane d'Ivan Kapular, qui était la personne en fait qui gérait les

 16   sanctions imposées aux 26 gardes qui ne souhaitaient pas se rendre sur le

 17   front sud. En fait vous voyez ce document ? 0Il correspond au poste

 18   militaire 3132, ce qui nous ramène au document que nous avons vu juste

 19   avant la pause en fait qui évoquait le bataillon, le 4e Bataillon motorisé.

 20   Veuillez regarder bataillon/brigade. Alors veuillez regarder l'intitulé,

 21   numéro 2, deuxième paragraphe, bas de la page 2, pour vous : "Etat de

 22   préparation au combat et du moral des troupes," bas de la page en fait Les

 23   derniers événements sur le front sud.

 24   Est-ce que vous y êtes, est-ce que vous voyez cela ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Ce document est daté du 23 juillet 1993 et relate les événements

 27   récents qui se sont déroulés sur le front sud y compris les pertes en

 28   hommes. Et dans quelle brigade étiez-vous en 1993, au mois de juillet ?

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  1   R.  Je ne faisais pas partie d'une brigade. Je dépendais de la Région

  2   militaire de Split à ce moment-là et j'étais engagé par M. Dzanko à peu

  3   près à cette date dans l'opération --

  4   Q.  -- de la 5e Brigade des Gardes, est-ce qu'elle était impliquée dans

  5   l'opération sud ?

  6   R.  Pour répondre à cette question, je dois compléter ma réponse. En effet

  7   les membres de la 5e Brigade des Gardes ont eux aussi participé à cette

  8   opération, la 5e Brigade des Gardes, non.

  9   Q.  Je vous remercie. Fort bien. Mais ce que M. Kapular décrit ici ce sont

 10   les événements récents qui se sont déroulés sur le front sud le 23 juillet,

 11   autrement dit, une semaine après l'opération Jug, n'est-ce pas ou sud ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Il dit que les pertes en hommes ont -- au niveau du front sud pour la

 14   5e Brigade des Gardes, a eu un impact négatif sur le secteur civil plutôt

 15   que sur les membres de la brigade. Par exemple, il y a eu un rassemblement

 16   spontané de parents à Nova Gradiska devant le bâtiment municipal où ils ont

 17   exigé le retour de leurs enfants et des informations sur l'endroit où ces

 18   derniers se trouvaient.

 19   Marquons une pause simplement à cet endroit-là.

 20   Après l'opération sud, il y a eu un malaise en Croatie et je pèse mes mots

 21   lorsque je dis ça.

 22   R.  Je ne serais pas d'accord avec vous pour dire qu'il y a eu un malaise

 23   en Croatie. Il n'y avait rien de particulier.

 24   Q.  Or, rien de significatif, alors poursuivons.

 25   Je souhaite citer maintenant le fait que toute personne à Nova Gradiska

 26   c'est où se trouve le front sud de façon à ce que des connotations

 27   négatives sur le plan politique se sont fait sentir en lien avec cela. Donc

 28   il promet de mettre à discussion, de fournir un rapport détaillé. Nous

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  1   allons regarder ce rapport dans quelques instants. Je sais que vous n'aimez

  2   pas le fait que j'insiste là-dessus mais s'il vous plaît, veuillez nous

  3   aider. Ce que l'on invoque ici c'est le déploiement de troupes croates dans

  4   le cadre de l'opération sud où il y a eu des pertes en hommes et ceci

  5   n'était pas très populaire sur le plan national. C'est cela, non ?

  6   R.  D'après ce document, il est possible d'estimer qu'un groupe de civils a

  7   protesté en raison des pertes de certains membres de la 5e Brigade des

  8   Gardes dont le front sud.

  9   Q.  Oui, une des choses que vous avez dite au moins quatre fois jusqu'à

 10   présent c'est que les volontaires de l'armée croate étaient très nombreux

 11   ou bon nombre d'entre eux souhaitaient se porter volontaire pour aller

 12   aider les habitants des différents villages où se trouvaient leurs parents

 13   en Bosnie-Herzégovine. Vous avez dit cela au moins quatre fois et vous avez

 14   dit que c'était la raison pour laquelle les soldats croates souhaitaient

 15   aller se battre en Bosnie. Et ce document montre que les parents des

 16   documents qui sont en train de mourir ne sont pas en Bosnie-Herzégovine

 17   mais protestent à Nova Gradiska pour dire : nous savons où se trouve le

 18   front sud et ils ne sont pas très heureux de la situation. C'est -- les

 19   choses étaient comme cela, n'est-ce pas, Général ?

 20   R.  Je crois que oui car ces parents ont protesté en raison du fait qu'une

 21   partie du personnel avait perdu la vie dans une région qui est à une

 22   vingtaine de kilomètres de la frontière croate du côté de la Bosnie-

 23   Herzégovine.

 24   Q.  Donc n'allaient pas se battre pour protéger leurs parents mais

 25   mouraient dans un pays différent d'un pays dans lequel habitaient leurs

 26   parents allant qu'au regret. 

 27   R.  Visiblement, il y a eu de tels cas, également ce qui n'exclut pas ce

 28   que j'ai dit jusqu'à présent à ce sujet-là, à savoir qu'il y a eu un

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  1   certain nombre de personnes qui étaient originaires de cette région-là.

  2   Puis deuxièmement, j'ai dit également qu'une partie des combattants croates

  3   nés en Croatie eux-mêmes souhaitaient y aller eux aussi pour venir en aide

  4   à leurs collègues qui étaient originaires de cette région.

  5   Q.  Alors regardons un autre document qui émane de M. Kapular sur le même

  6   sujet.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors ce rapport est fait par l'officier qui

  8   s'occupe des affaires politiques, c'est le lieutenant Vladimir Kokeza. Donc

  9   comme c'est l'officier chargé des affaires politiques, ce document doit se

 10   lire au travers de lunettes politiques.

 11   Au paragraphe 3, informations et activités. Il dit que :

 12   "L'intérêt des soldats serait dû à la situation politique en République de

 13   Croatie."

 14   Donc il ne dit pas que c'est lié à la République de Bosnie-

 15   Herzégovine, mais à la situation politique en République de Croatie, et

 16   spécialement par "l'ouverture du pont de Maslenica." C'est quoi ce pont ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, comme je l'ai déjà

 18   mentionné, s'agissant de la mission dans la région au sud de Mostar, j'y

 19   suis allé suite aux fonctions que j'avais exercées dans la région militaire

 20   de Split, à savoir la protection du pont suspendu. Pendant cette période au

 21   cours de la première moitié de l'année 1993, le sud de la Croatie était

 22   relié avec le nord de la Croatie avec une seule route, c'était la nationale

 23   de Jadran [phon], de l'Adriatique, et plus loin vers Senj, enfin, de Senj

 24   vers Zagreb, et à cet endroit-là la mer en profondeur de la terre à travers

 25   le canal de Velebit où il y a deux baies. Nous appelons ça deux baies, mais

 26   en fait il s'agit d'une longueur d'environ 20 kilomètres. La fin de cette

 27   baie était contrôlée par les forces croates. Le pont qui se trouvait à cet

 28   endroit avait été détruit pendant la guerre. Les seuls passages

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  1   s'effectuaient par la mer avec les capacités bien limitées des ferry-boats.

  2   La région militaire a décidé, avec l'approbation de Zagreb - à moins que ce

  3   ne soit l'inverse, c'est-à-dire que Zagreb avait décidé et la région

  4   militaire - l'a accepté, je ne suis pas sûr, mais visiblement le président

  5   Tudjman l'a accepté lui aussi - donc il a été décidé de créer un pont

  6   suspendu. Ce pont suspendu a été créé en utilisant plusieurs barges tirées

  7   par des bateaux. Et ces barges ont permis la circulation de manière rendue

  8   bien plus difficile mais c'est redevenu possible.

  9   A ce moment-là, il nous a été extrêmement difficile de maintenir ce

 10   pont ouvert et utilisable, car il essuyait les tirs réguliers de

 11   l'artillerie serbe, et ceux, qui devaient participer au combat dans cette

 12   région-là, se rendaient dans la région la plus dangereuse à l'époque en

 13   Croatie. Puis il y avait aussi des parties des unités venant des régions

 14   différentes et les membres de ces unités n'étaient pas contents de recevoir

 15   cette mission car elle était très dangereuse.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant le pont, c'est très clair. Le côté

 17   dangereux venait des tirs des Serbes. Mais le document continue en disant

 18   également le développement de l'offensive musulmane en Bosnie centrale.

 19   Alors à votre connaissance, combien de "volontaires," entre guillemets,

 20   Croates, avaient pu être tués en Bosnie centrale, qui fait que les familles

 21   qui étaient en Croatie étaient inquiètes ? Il y en avait beaucoup, pas

 22   beaucoup ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, visiblement ici on

 24   utilise de façon erronée la notion de la "Bosnie centrale." Visiblement ça

 25   a été écrit par quelqu'un qui ne connaissait pas la géographie bien. Il

 26   s'agit ici de la mort des membres de la 5e Brigade des Gardes qui

 27   participaient à l'opération Sud, au sud de Mostar, car les dates

 28   correspondent aussi. Donc je pense que quelque part dans le texte ceci est

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  1   mentionné également, ou peut-être elle n'est pas mentionnée, donc

  2   l'opération Sud. Mais d'après la date de ce rapport, je crois qu'il s'agit

  3   des morts survenues au cours de cette période. Donc ce n'est pas la Bosnie

  4   centrale, mais la région frontalière, entre la Croatie et la Bosnie dans

  5   une profondeur de 20 kilomètres environ.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Combien de soldats de la 5e Brigade ont été tués ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le même

  8   jour 12 personnes ont trouvé la mort, et encore une personne a décédé à

  9   l'hôpital par la suite, donc ça fait au total 13 personnes qui ont été

 10   tuées ce jour-là.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le fait que 13 personnes - évidemment, le

 12   chiffre est important, mais il y a des conflits - ça suffit à lui-même pour

 13   entraîner la réaction des familles des volontaires en Croatie, posant ainsi

 14   un problème politique majeur, ou bien il y a des causes plus profondes ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, s'agissant de ce

 16   document, je peux conclure que les personnes, les gens étaient préoccupés,

 17   ils se demandaient où se trouvaient leurs enfants ou leurs cousins. Car il

 18   y avait un problème lié à l'évacuation des cadavres. Après l'évacuation qui

 19   a échoué, le problème du retrait des cadavres se posait, et ceci a duré

 20   quelques jours, plusieurs jours.

 21   D'après les expériences des autres fronts, j'ai pu conclure que les gens

 22   exprimaient le plus vivement leur mécontentement. Si en plus de la mort

 23   survenue, qui était, bien sûr, l'événement le plus tragique, s'il n'avait

 24   en plus de cela pas l'occasion d'enterrer leurs proches.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, il nous reste quelques

 26   minutes avant la fin de l'audience.

 27   M. LAWS : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur le

 28   Président.

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  1   Q.  Nous allons continuer à parler de Nova Gradiska et passer à la page --

  2   pardonnez-moi, le document P 04979, c'est un autre document de M. Kapular.

  3   Nous allons commencer à lire ce document au bas de la page 1 en anglais,

  4   cela correspond également au dernier paragraphe de la version en B/C/S.

  5   Le document est daté du 12 septembre 1993. Veuillez lire les dernières six

  6   phrases de la première page, ensuite les six phrases sur la page suivante,

  7   il s'agit d'un autre rassemblement des civils le 11 septembre 1993.

  8   Avez-vous pu lire cela, Général ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Donc il y a des troubles qui éclatent. La police militaire a tenté de

 11   raisonner les parents et les parents proches des soldats morts, et ils

 12   rencontrent une certaine résistance. Les civils souhaitent que quelqu'un du

 13   commandant supérieur vienne leur expliquer pourquoi leurs enfants, fils et

 14   maris doivent se faire tuer pour l'Herzégovine, alors que les Bosniaques et

 15   les habitants d'Herzégovine se promènent en Croatie.

 16   Lorsque M. Kapular indique dans ce dernier document, tout le monde sait où

 17   se trouvait le front sud. Il est en train de dire : Vous ne dupez personne

 18   avec ce "front sud." C'est le nom de code, n'est-ce pas ?

 19   R.  Avec toutes mes tentatives de suivre vos questions et d'y répondre,

 20   vraiment je n'ai rien à répondre à cette question. Je ne sais pas sur la

 21   base de quoi devrais-je dire oui ou non.

 22   Q.  Fort bien. Le passage que nous venons de regarder dans ce document

 23   comprend un registre des parents qui ont demandé à ce que quelqu'un du

 24   commandement supérieur leur explique pourquoi leurs fils et maris doivent

 25   être tués pour l'Herzégovine, alors que les Bosniaques et les habitants

 26   d'Herzégovine se promènent en Croatie. Vous venez de nous dire au fil des

 27   derniers jours que ces hommes sont des volontaires, et la réponse qu'on

 28   aurait pu donner à ces parents endeuillés c'est de dire : bien, vos fils et

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  1   vos maris se sont portés volontaires, c'est la guerre. Ce n'est pas ce que

  2   nous dit ce document, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui, ici c'est seulement la description des événements.

  4   Q.  Il ne s'agit pas simplement de la description d'un événement. Ici on

  5   enregistre la colère qui signifie que la police militaire doit intervenir,

  6   parce que leurs enfants sont envoyés quelque part en Bosnie-Herzégovine

  7   pour mourir, pour se faire tuer, non pas parce qu'ils se sont portés

  8   volontaires. C'est ça la différence. Et, Général, je comprends fort bien

  9   que ce sujet ne vous met pas très à l'aise, mais en réalité c'est ça la

 10   réponse toute simple. Est-ce que vous souhaitez nous la donner maintenant :

 11   Oui, volontaires cela correspond aussi à un mot de code, comme : "Le front

 12   sud" ?

 13   R.  Je n'ai pas accepté la réponse ni oui ni non s'agissant du "front sud"

 14   que ceci correspondait à l'Herzégovine orientale, et je ne veux pas non

 15   plus confirmer que les volontaires étaient un mot de code. Au contraire,

 16   j'ai des arguments indiquant que le front sud faisait partie de la Bosnie-

 17   Herzégovine -- du théâtre de la guerre de Croatie, puis j'ai des documents

 18   et des ordres émanant de la République de Croatie indiquant que les unités

 19   militaires ne pouvaient pas être envoyées en Bosnie-Herzégovine. Donc je

 20   n'ai pas de connaissance concernant la stratégie, je suis au courant de la

 21   situation sur le terrain et je peux simplement m'exprimer sur la base de

 22   cela. Je n'ai pas de raison de dire que ceci a été fait de manière

 23   différente même sur la base des documents présentés ici.

 24   Si les civils ou les familles des combattants protestent contre

 25   l'utilisation des soldats, bien, c'était aussi pour empêcher que l'on

 26   envoie les soldats de la Slavonie en Dalmatie. Ils se disaient que les gens

 27   de la Dalmatie devaient faire la guerre en Dalmatie. Même à Rijeka qui

 28   était à 100 kilomètres du front, bien, même à Rijeka, ils pouvaient dire

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  1   que les municipalités qui font partie du théâtre de la guerre fassent la

  2   guerre. Pourquoi nous, et nous avions ce genre de réactions. Malgré une

  3   bonne réponse à la mobilisation, à Rijeka, par exemple, nous avions des cas

  4   de personnes qui refusaient d'aller faire la guerre. Dans les conditions de

  5   la démocratisation que l'on souhaitait appliquer, ceci était le droit

  6   justifié des personnes d'exprimer leur accord ou leur désaccord avec

  7   quelque chose.

  8   Je ne sais pas comment M. Kapular faisait des choses, mais moi, lorsqu'on

  9   me demandait pourquoi faire la guerre de l'autre côté de la frontière,

 10   bien, je me suis présenté aux gens, je leur ai expliqué les raisons et ils

 11   ont accepté cela. Si j'ai commis une erreur, j'accepte de me mettre à côté

 12   de ces six personnes-là pour être la septième, mais je pense que je me suis

 13   acquitté de mes tâches de manière professionnelle, alors que j'ai

 14   l'impression que l'on doute de mon caractère professionnel maintenant ici.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Général, personne ne doute de votre caractère

 16   professionnel, le Procureur pose des questions et vous suggère des

 17   hypothèses et vous, vous répondez. Voilà. C'est ce qu'on appelle le débat

 18   judiciaire. Nous aurons l'occasion certainement de revenir sur ce document

 19   demain.

 20   D'ailleurs, je mets un petit post-it parce que j'aurai une question à vous

 21   poser.

 22   J'indique à M. le Procureur qui lui restera deux heures encore

 23   puisqu'il n'a utilisé qu'une heure. Voilà.

 24   Donc je vous souhaite à tous une bonne fin de journée et nous nous

 25   retrouverons demain à 3 heures.

 26   [Le témoin quitte la barre] 

 27   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mercredi 11

 28   novembre 2009, à 9 heures 00.