Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 26 novembre 2009

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Les accusés Coric et Pusic sont absents]

  5   [Le témoin vient à la barre]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  8   l'affaire, s'il vous plaît.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   toutes les personnes présentes.

 11   Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts. Merci, Monsieur

 12   le Président.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 14   En ce jeudi 26 novembre 2009, je salue les quatre accusés présents; il y en

 15   a deux apparemment qui sont malades. Je salue Mmes et MM. les avocats. Je

 16   salue M. le Témoin. Je salue M. Bos, M. Scott et leur collaboratrice ainsi

 17   que toutes les personnes qui nous assistent. Je salue également les

 18   officiers de sécurité qui sont présents.

 19   Nous devons donc poursuivre le contre-interrogatoire. D'après les calculs,

 20   il semble que le Procureur a encore à sa disposition 40 minutes pour

 21   terminer le contre-interrogatoire. Mais avant de lui donner la parole, je

 22   voudrais, Monsieur le Témoin, vous poser une question de suivi.

 23   LE TÉMOIN : TEMOIN 4D-AB [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous m'indiquer qui était le commandant de la

 26   zone opérationnelle de votre brigade ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'entends pas l'interprétation.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Je repose ma question.

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  1   Pouvez-vous m'indiquer, Monsieur le Témoin, qui était le commandant de la

  2   zone opérationnelle de votre brigade ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Pourriez-vous répéter je n'entendais pas les

  4   interprètes ?

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors j'espère que les interprètes se sont

  6   réveillés. Pour la troisième fois, je répète ma question : pouvez-vous

  7   m'indiquer qui était le commandant de la zone opérationnelle de votre

  8   brigade ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous appartenions à la Zone opérationnelle du

 10   sud-est et c'était Mica Lasic qui était le commandant.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Quand il y avait des opérations d'envergure, y

 12   avait-il des opérations menées conjointement par plusieurs zones

 13   opérationnelles ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Si nous parlons de Konjic, je pense qu'il n'y

 15   en a pas eu, sauf lorsque nous avons demandé de l'aide, et en même temps,

 16   nous avons demandé aux deux autres zones opérationnelles de nous apporter

 17   des renforts car nous étions s'agissant de cette partie de la Bosnie trois

 18   zones opérationnelles agissant ensemble.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous étiez dans votre brigade le 15 avril

 20   1993, alors ma question peut être difficile parce que vous demandez si vous

 21   souvenez exactement ce que vous faisiez le 15 avril, moi je serais

 22   incapable d'y répondre. Bon, mais vous, vous êtes plus jeune que moi, donc

 23   votre mémoire doit mieux fonctionner. Est-ce que, le 15 avril 1993, vous

 24   auriez appris que le commandant de la Brigade du HVO de Zenica, un sieur

 25   Zivko Totic, avait été enlevé par des Musulmans; est-ce que vous auriez

 26   appris cela ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] A ce moment-là, je n'étais pas au courant de

 28   cela.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites : à ce moment-là, je n'étais pas au

  2   courant; vous l'aviez appris quand ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Au moment où notre -- où cette partie de la

  4   brigade est sortie de l'encerclement jusqu'à aujourd'hui et jusqu'à ce

  5   moment-là, il s'est passé un an et je ne sais pas si, pendant cette année-

  6   là, les gens ont parlé d'une ou de nombreuses personnes enlevées,

  7   emprisonnées, arrêtées, donc je ne suis pas tout à fait au courant. Peut-

  8   être que j'en ai vaguement entendu parler mais, non, je ne suis pas au

  9   courant.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'êtes pas au courant. Alors pourquoi je vous

 11   pose cette question ? Pour la raison suivante : moi, je suis transparent et

 12   dans mes questions il n'y a jamais de piège, il y a une transparence

 13   totale. Pour l'Accusation, le 15 avril, il y avait un ultimatum, et suite à

 14   l'ultimatum il y a eu une offensive générale du HVO dans plusieurs

 15   localités, notamment en Bosnie centrale, d'où les attaques d'Ahmici, Vitez,

 16   et cetera. Une des versions avancées par les Défenses dans les affaires

 17   Kordic, Blaskic et autres, les attaques du 16 avril n'étaient que la

 18   conséquence de l'enlèvement de ce sieur Totic qui aurait fait par exemple

 19   que le colonel Blaskic aurait pris le 15 avril à 18 heures 30 un ordre de

 20   mobilisation de brigade pour des actions défensives. C'est pour cela que je

 21   vous ai demandé si vous aviez appris que, le 15 avril, il s'était passé

 22   quelque chose. Vous me dites, "non," donc je dois en tirer la conclusion

 23   qu'au niveau de votre brigade, le 16 avril, il n'y a pas eu de plan

 24   d'actions défensives ou offensives comme on veut à votre niveau.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui nous concerne, dans notre brigade

 26   -- enfin, dans les éléments de ma brigade, plus précisément composée par le

 27   1er Bataillon, une attaque de l'ABiH a eu lieu déjà, le 13 avril et le 14

 28   avril, les attaques de l'ABiH contre le territoire tenu par mon bataillon,

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  1   stationné à Konjic, s'est développé. Quant à nous, nous n'avons commis

  2   aucun acte offensif puisque de toute façon nous étions divisés en petits

  3   groupes, et voilà.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Merci pour ces réponses.

  5   Bien, Monsieur Bos, je vous redonne la parole.

  6   M. BOS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   Bonjour, bonjour à toutes les personnes ici présentes.

  8   Contre-interrogatoire par M. Bos : [Suite]

  9   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 10   M. l'Huissier pourrait-il vous remettre le classeur avec les pièces ? Il y

 11   a un sujet que je voudrais évoquer avec vous aujourd'hui, ce sont les

 12   événements qui sont survenus vers le milieu du mois d'avril 1993; M. le

 13   Président de la Chambre vous a déjà posé quelques questions à ce propos.

 14   Nous allons regarder de nouveau si vous voulez bien la pièce P 01911, il

 15   s'agit là du rapport de la MOCE que nous avons déjà examiné. Je vous

 16   rappelle le numéro P 01911.

 17   Je vais vous donner lecture de la section 5 du rapport, après quoi je vous

 18   poserai quelques questions. C'est un rapport du 16 avril, voyez le numéro

 19   5, l'officier décrit la situation qui prévaut à ce moment-là dans la

 20   région.

 21   "Le conflit fait rage entre les villages qui se trouvent au nord de

 22   Jablanica avec les villages du HVO qui sont bien mieux équipés, avec des

 23   chars T-34 [comme interprété] et des roquettes, bien mieux équipés que la

 24   communauté musulmane. L'ABiH essaie : A, de saisir la position stratégique

 25   de Zlatar, juste à l'est de Konjic, que le HVO ne veut pas partager avec

 26   elle; B, blocage de l'accès de Prozor vers Jablanica avec des éléments

 27   blindés du HVO à Slatina, où des positions très fortifiées se trouvent et

 28   de gros blocs de granite empêchent toute circulation du véhicule; C, chassé

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  1   toutes les unités du HVO de Jablanica et de Konjic."

  2   Je m'arrête là.

  3   L'officier qui rédige ce rapport décrit la situation dans l'optique de

  4   l'ABiH. Qu'en pensez-vous ? Est-ce que ceci traduit bien la situation qui

  5   se présentait ce jour-là le 16 avril, en ce qui concerne l'ABiH et ce que

  6   cette armée faisait ?

  7   R.  Eu égard aux faits que vous venez d'évoquer, et qui sont écrits dans ce

  8   texte, pour autant que je le sache, nous n'avions pas de chars T-84, enfin

  9   pour autant que je le sache. C'est une arme de très grande taille, donc si

 10   elle avait existé, j'aurais dû la voir. S'agissant de la prise de Zlatar,

 11   nous avons pas mal parlé de la prise de ce point stratégique important, qui

 12   abritait notre centre de Transmission. Donc les Musulmans souhaitaient

 13   s'emparer de notre centre de transmission à tout prix, et quand vous prenez

 14   le centre de Transmission d'une unité, vous l'avez battu à plus de 50 %,

 15   parce que cette unité n'a plus de possibilité de communiquer et n'a plus

 16   grand-chose d'autre.

 17   Donc le passage vers Jablanica nous le connaissons très bien sûr la base

 18   des documents que nous avons examinés précédemment, qui étaient des ordres

 19   destinés à empêcher le passage vers Prozor, mais également la circulation

 20   sur toutes les autres voies de communication, pour empêcher que des

 21   renforts n'arrivent à Konjic.

 22   Les Unités du HVO de Jablanica nous avions commencé à en parler hier, nous

 23   avons dit hier que notre bataillon a eu de très grands problèmes à

 24   Jablanica et il est normal que par la suite elle ait été contrainte de

 25   partir de Jablanica pour aller dans le village de Sovici.

 26   Q.  Vous conviendriez que ceci traduit bien la situation telle qu'elle se

 27   présentait vers la mi-avril 1993, en ce qui concerne la partie que je viens

 28   de lire ?

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  1   R.  Bien. Non, je ne suis pas d'accord, car j'ai commencé par dire que les

  2   arguments que l'on voit ici ne sont pas exacts. Est-ce que nous avions un

  3   char ? Non, nous n'en avions pas, donc je ne peux pas être d'accord pour

  4   dire que c'était bien le cas.

  5   Q.  Excusez-moi. Vous aviez bien dit que vous n'aviez pas de char, mais je

  6   parlais de ce que faisait l'ABiH, et vous semblez confirmer que ce qui est

  7   dit ici dans ce rapport, c'est bien ce que faisait l'ABiH, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, mais pas dans le contexte décrit dans ce document. L'ABiH avait

  9   des intentions différentes de celles qui sont indiquées ici qui

 10   consisteraient à protéger quelque chose.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, je n'avais pas particulièrement fait

 12   attention à la question du tank T-54, et puis en vous écoutant que je me

 13   pose la question de la véracité de ce rapport que nous avons tous sous les

 14   yeux.

 15   Si l'auteur de ce rapport mentionne qu'il y a un T-54, des deux choses

 16   l'une, T-54, pourquoi il y a "84,"

 17   L'INTERPRÈTE : T-84.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors si ce char existe, les observateurs l'ont vu,

 19   et c'est ce qui est incroyable, c'est que, vous, vous dites : moi, dans la

 20   région, je n'en ai jamais vu. Alors quelle conclusion vous en tirez ? Parce

 21   que de deux choses : une, c'est eux qui font une erreur, ou c'est vous qui

 22   mentez.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que je dis c'est que de char T-84, il n'y

 24   en avait pas. Est-ce qu'il y avait d'autres véhicules blindés, peut-être,

 25   mais ce qui est écrit dans ce document : c'est que l'ABiH possédait un

 26   obusier autopropulsé, or cette arme ressemble beaucoup à un char, et l'ABiH

 27   le transportait sans arrêt de Konjic vers la zone de la Brigade de la

 28   Neretvica, et puis il y avait aussi le Détachement Lisin qui utilisait

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  1   cette arme, qui était positionnée en surplomb par rapport au village. C'est

  2   ça qui est évoqué dans le document. La Brigade de Lisin fait partie de

  3   l'ABiH.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Bos.

  5   M. BOS : [interprétation]

  6   Q.  Poursuivons la lecture du numéro 5 :

  7   "Le HVO attaque la position de Slatina à l'artillerie depuis Ustirama; B,

  8   attaque des positions à Ostrozac, dont le fameux centre des Réfugiés, à

  9   l'artillerie et au char depuis Kostajnica; C, tire à l'artillerie depuis le

 10   sud du lac Ramsko; D, attaque les unités se trouvant dans la vallée de

 11   Dreznica qui se trouve à l'ouest de la vallée de la Neretva (entre Mostar

 12   et Jablanica) avec des chars et artillerie depuis le sud et l'ouest; E,

 13   pilonne Jablanica depuis Kostajnica et Doljani (à l'ouest de Jablanica)."

 14   Je vous repose la même question : quel serait votre commentaire par rapport

 15   à ces faits énoncés ici ?

 16   R.  Je ne sais pas comment je peux commenter ce passage, sauf à dire que

 17   les observateurs de l'Union européenne ont surpris un rapport de l'ABiH où

 18   un certain nombre de choses avaient été jetées au hasard. Parce que si vous

 19   connaissez le terrain dont nous sommes en train de parler ici, il est

 20   impossible de dire qu'à partir de Kostajnica, on peut pilonner Jablanica,

 21   en passant par-dessus le mont Boksevica; c'est impossible, absolument

 22   impossible. Je ne sais pas que dire d'autre au sujet de ce rapport, c'est

 23   absolument une reproduction d'éléments d'information provenant d'une autre

 24   source. Ceci correspond tout à fait au scénario que mettait en œuvre

 25   l'ABiH, qui adressait des rapports au média, et à la FORPRONU, et à tous

 26   ceux qui voulaient l'entendre.

 27   Hier, quand vous m'avez interrogé au sujet d'un certain nombre d'événements

 28   survenus dans la municipalité de Konjic, je vous ai dit qu'il existait des

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  1   groupes sur le plan de l'organisation. Je ne sais pas comment les

  2   qualifier, je ne sais pas vous dire s'il s'agissait de structures

  3   militaires ou civiles mais en tout cas les membres de ces groupes portaient

  4   l'uniforme à l'époque, et étaient chargés de créer des campagnes

  5   médiatiques, de diffuser des contrevérités, et en fait non seulement de

  6   terroriser la population dans la ville de Konjic et sa région, mais de

  7   créer entre la population croate et musulmane de Konjic. Hier, je voulais

  8   parler de cela, mais je n'ai pas eu le temps de poursuivre. Des groupes

  9   agissant ainsi, il y en avait beaucoup. Ces groupes agissaient non

 10   seulement à Konjic, mais aussi sur tous les territoires dont nous sommes en

 11   train de parler ici. Ces groupes avaient pour tâche d'œuvrer sur le plan

 12   médiatique, sur le plan de l'information, des renseignements, mais ils

 13   étaient également chargés d'acheter des armements et des moyens

 14   d'équipement pour le HVO, comme moyen de transmission, armement, et cetera.

 15   Donc ces groupes --

 16   Q.  Monsieur le Témoin, je vais vous interrompre car vous n'êtes plus en

 17   train de répondre à ma question. Je vous demandais simplement si vous étiez

 18   d'accord avec les faits énoncés dans ce rapport, et maintenant vous avez

 19   pris une tangente; je vous demande répondre à la question posée; êtes-vous

 20   d'accord avec ce qui est décrit, s'agissant de la situation prévalant le 15

 21   avril ?

 22   R.  Oui, et je vous l'ai dit d'ailleurs. J'ai dit que je n'étais pas

 23   d'accord avec ce rapport, parce que ce rapport a été élaboré par le genre

 24   de groupe dont je viens de parler à l'instant. Des groupes qui lorsqu'ils

 25   élaboraient des rapports de ce genre, ils les envoyaient immédiatement à la

 26   FORPRONU, à tous les médias en Bosnie-Herzégovine et même encore plus loin.

 27   Q.  Très bien. Donc vous n'êtes pas d'accord. Ceci suffira.

 28   Voyons un autre document --

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- un autre document. J'ai une question

  2   sur le document.

  3   Le Procureur vous a demandé de confirmer que l'ABiH avait bien, c'est au

  4   paragraphe 5, mené des actions décrites dans ce document, et dans le cadre

  5   de cette action, il y a donc Zlatar. Vous nous avez dit que c'était un

  6   centre de Transmission. En vous écoutant, je replace la question du

  7   Procureur dans sa théorie générale liée au fait que, le 16 avril, le HVO a

  8   fait une opération d'envergure contre l'ABiH et non pas le contraire. Si la

  9   théorie du Procureur est bonne, à ce moment-là, l'ABiH est attaqué de

 10   toutes parts, dans toute une série de localités. Mais lorsqu'on est attaqué

 11   de toutes parts, va-t-on contre-attaquer en prenant une position de

 12   transmission, celle de Zlatar, alors même qu'il y a peut-être d'autres

 13   objectifs plus importants dans une action défensive. En termes militaires,

 14   est-ce pour vous cohérent qu'une partie qui est attaquée va à ce moment-là

 15   se défendre en prenant un centre de transmission ? Est-ce que ça obéit à

 16   une logique militaire ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Le 14 avril, je crois que nous l'avons dit et

 18   nous l'avons démontré en montrant les documents. C'est l'ABiH qui a attaqué

 19   le HVO, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je n'ai pas vu un seul

 20   document indiquant que le HVO ou dans la région de Konjic, en particulier

 21   aurait attaqué l'ABiH. Donc il n'y avait aucune raison pour l'ABiH de

 22   s'emparer de la position de Zlatar, sauf si elle avait l'intention de

 23   procéder à des actions offensives pour rendre impossible l'utilisation du

 24   centre de Transmission et paralyser l'armée adversaire.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne répondez pas tout à fait à ma question, mais

 26   je vais la formuler de manière différente.

 27   Imaginons que, vous, HVO, vous êtes attaqué par l'ABiH - c'est une

 28   hypothèse. Vous êtes attaqué, et si vous êtes attaqué, vous allez vous

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  1   défendre. En vous défendant, est-ce que vous irez, à ce moment-là, attaquer

  2   le centre de Transmission de l'ennemi; c'est ça que je veux savoir ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Toute armée, quand elle attaque une autre

  4   composante d'une autre armée ou une autre armée, évidemment, le centre de

  5   Transmission de cette armée est importante pour elle, et pour l'ABiH,

  6   l'objectif, à ce moment-là, était de s'emparer du centre de Transmission.

  7   Car comme je l'ai déjà dit tout à l'heure, ce centre de Transmission c'est

  8   le nœud même de nos structures militaires d'une unité militaire, car si

  9   vous n'avez pas de centre de Transmission, l'unité en question ne peut pas

 10   coordonner quoi que ce soit.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous ne comprenez pas ma question. Je la répète.

 12   Je pars de l'hypothèse où vous êtes le HVO et vous êtes attaqué. Je

 13   pars même de l'hypothèse où, vous, vous êtes le commandant de la brigade,

 14   et on vous dit : voilà l'ABiH nous attaque de toutes parts, à tel endroit,

 15   à tel endroit; est-ce que, vous, en tant que commandant du HVO, vous direz,

 16   à ce moment-là, à vos troupes qui sont attaquées : vous allez contre-

 17   attaquer en prenant leur centre de transmission ? Vous voyez, ma question,

 18   elle est technique.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, j'ai répondu

 20   à votre question. J'ai dit que, dans une situation de ce genre, si nous,

 21   nous avions été à l'origine de l'attaque, j'aurais fait la même chose.

 22   J'aurais voulu m'emparer de centre de Transmission, c'est logique. Je crois

 23   donc vous avoir répondu.

 24   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, toutes mes

 25   excuses, mais je crois que le témoin n'a pas compris que la question

 26   concernait une contre-attaque, une défense contre une attaque.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Je remercie, Maître Alaburic.

 28   Moi, ma question concerne une contre-attaque, pas une attaque, une contre-

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  1   attaque.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin

  3   manifestement a toujours été attaqué et il n'arrive pas à cette intuition.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Bon. Donc, il a du mal à se mettre dans

  5   la situation. Bien.

  6   Monsieur Boss, continuez.

  7   M. BOS : [interprétation]

  8   Q.  Je vais vous demander d'examiner la pièce P01915.

  9   C'est un rapport d'étape du commandant Siljeg, adressé notamment au

 10   département de la Défense du HVO, à l'état-major principal du HVO. Je

 11   voudrais examiner ce document de plus près. Commençons par le début, puis

 12   en cours de route, je vais vous poser quelques questions.

 13   Je vous le disais, c'est un rapport adressé au département de la Défense, à

 14   l'état-major principal du HVO, Tomislavgrad. Je lis :

 15   "Nous établissons un IZM OZ SC d'Herzégovine au commandement de la Brigade

 16   de Rama.

 17   "Deuxièmement : établir une liaison avec les installations de Boksevica,

 18   Pisvir, Sovicka Vrata, avec le commandement du Bataillon de Mijat Tomic

 19   dans le village de Doljani."

 20   Nous avons déjà parlé de Boksevica, mais est-il vrai que Pisvir et Sovicka

 21   Vrata se sont des hauteurs à proximité de Sovici et de Doljani ?

 22   R. Oui, c'est tout à fait clair. Ce sont des côtes qui sont proches.

 23   Q.  Je poursuis :

 24   "L'artillerie est disposée comme suit…"

 25   Ensuite, il y a différents emplacements qui sont mentionnés. Je vais vous

 26   demander si vous savez où ils se trouvent.

 27   "Village de la région de Dobrosa."

 28   Je ne vais pas donner lecture du type de pièces d'artillerie qui y

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  1   sont placées. Vous pouvez le lire.

  2   Mais pouvez-vous me dire où se trouve cette région de Dobrosa ? Peut-être

  3   pourriez-vous le trouver sur la carte ? En tout cas, savez-vous où cela se

  4   trouve ?

  5   R.  Je ne sais pas. C'est quelque chose que je ne connais pas, parce que je

  6   n'y suis jamais allé. C'est déjà la zone opérationnelle de Prozor-Rama. Je

  7   peux essayer de le retrouver mais je ne peux pas vous dire que je sache

  8   quoi que ce soit à ce sujet, et je n'y suis jamais allé. C'est déjà une

  9   autre municipalité, une autre zone opérationnelle et une autre brigade.

 10   Q.  Dans quelle municipalité se trouve Dobrosa ?

 11   R.  La municipalité de Prozor.

 12   Q.  Qu'en est-il du village de la région de Mlusa, qui est au deuxième

 13   alinéa du point 3 ? C'est à l'ouest de Prozor ?

 14   R.  Il me semble que c'est également dans la municipalité de Prozor.

 15   Q.  Ensuite, nous avons le village de Donja Vast. C'set à l'est de Prozor,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  J'ai dit avoir une connaissance vraiment très limitée de la

 18   municipalité de Prozor. Je ne m'y suis jamais rendu ni n'ai eu, en ma

 19   qualité de civil, à faire là-bas avant la guerre, si bien que je connais

 20   très mal la municipalité de Prozor. Je peux parler de Konjic, en revanche,

 21   mais pour ce qui est de Prozor, je peux essayer de retrouver ces noms sur

 22   la carte, si vous le souhaitez. Mais cela pourrait prendre du temps parce

 23   que --

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Procureur, je sais pas

 25   si très utile de demander au témoin s'il sait où se trouvent ces localités.

 26   Tout le monde sait où elles se trouvent, il suffit de regarder sur une

 27   carte. Regardez donc la carte IC 693, c'est la carte de la région de

 28   Prozor, en fait, elle est légendée "Konjic 1" et on trouve toutes ces

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  1   localités sur la carte.

  2   M. BOS : [interprétation] Très bien. Je vais donc laisser tomber.

  3   Q.  Mais avant, j'aimerais quand même poursuivre avec le village

  4   d'Ustirama, qui est bel et bien au nord de Slatina, n'est-ce pas ?

  5   R.  Ustirama se trouve sur la route de Jablanica vers Prozor, et c'est dans

  6   la municipalité de Mostar à Prozor.

  7   Q.  Bien. Nous allons maintenant passer au point numéro 4 de ce rapport. Je

  8   donne lecture :

  9   "Les positions vers les villages Here, Kute, Scipe ont été sécurisées. Le

 10   col de Makljen a été renforcé à l'aide d'une section."

 11   Avez-vous des commentaires à faire à ce propos ?

 12   R.  Je vais essayer. Si c'est bien ce à quoi je pense, parce que je pense

 13   qu'ici, lorsqu'on parle du col de Makljen, il s'agit d'une route qui va de

 14   Prozor en direction de Vakuf ou Uskoplje. Je crois que ce peloton avait la

 15   mission d'empêcher la venue de renforts en provenance de Vakuf, et pour ce

 16   qui concerne Here, Kute et Scipe, je pense que c'est la même chose. C'est

 17   là où la zone défensive avait été mise en place, je crois.

 18   Q.  Je poursuis, je donne lecture du point numéro 5 :

 19   "Deux chars d'assaut sont prêts pour faire montre de force si nécessaire,

 20   et manoeuvrent sur les axes des villages de Kute, Here, Scipe et vers le

 21   village de Slatina. Mais nous n'avons pas assez de munitions pour ces chars

 22   d'assaut."

 23   Point numéro 7 :

 24   "La coordination avec Tuta se fait au travers de l'Unité de Posusje sur

 25   Sovicka Vrata."

 26   Savez-vous qui était Tuta ?

 27   R.  Oui, je le sais.

 28   Q.  A-t-il eu quoi que ce soit à faire avec les opérations qui ont eu lieu

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  1   à Sovici et Doljani ?

  2   R.  J'ignore s'il avait le moindre lien avec ces opérations. Je pense qu'il

  3   participait déjà à une opération donnée lorsque ces villages ont été

  4   occupés par l'ABiH. Il participait, me semble-t-il, à une opération dans la

  5   zone de Sovici, je crois, mais je ne sais pas exactement où, en fait.

  6   Q.  Mais Sovicka Vrata est une hauteur qui se trouve aux environs de

  7   Doljani, n'est-ce pas et de Sovici ? Vous l'avez dit il y a une seconde.

  8   R.  Oui. C'est au-dessus de Sovici en direction de Risovac. C'est Sovicka

  9   Vrata, en effet.

 10   Q.  Point numéro 9, maintenant :

 11   "Les demandes à la Brigade Herceg Stjepan ne sont pas réalistes et ne sont

 12   pas logiques. On a l'impression qu'ils ne connaissent pas la situation mais

 13   que leurs rapports sont écrits comme des rédactions enfantines ou comme des

 14   articles de journaux et non pas comme des rapports militaires. Nous ne

 15   savons pas ce qu'il se passe parce que nous n'avons pas de rapports

 16   précis."

 17   Numéro 10 :

 18   "Selon les demandes présentées, nous devrions utiliser toutes les munitions

 19   qui sont disponibles en une journée et ensuite, nous n'en aurons plus et

 20   devrons nous débrouiller sans."

 21   Donc, le commandant Siljeg critique les rapports qui proviennent de Konjic.

 22   Pouvez-vous commenter les propos de M. Siljeg ?

 23   R.  Oui. Pour ce rapport qui arrivait de Konjic, je pense que j'ai dit,

 24   hier ou avant-hier, que dans la situation dans laquelle se trouvait notre

 25   brigade, donc les rapports n'étaient pas rédigés par des personnes

 26   compétentes ou des personnes dont c'était la fonction. Notre brigade - et

 27   on le voit également dans ces différents plans - on voit donc dans quelle

 28   situation se trouvait notre brigade et ses effectifs étaient complètement

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  1   éclatées, divisées, sans aucun moyen de communication, si bien que les

  2   rapports qui étaient envoyés à l'attention de nos supérieurs n'étaient même

  3   pas envoyés par des personnes qui avaient un grade, qui étaient des

  4   officiers ou des assistants d'officiers ou des capitaines. A un certain

  5   moment, c'était des chefs de peloton qui le faisaient et ce n'était pas des

  6   requêtes ou des demandes, c'était tout simplement des appels au secours. Si

  7   vous vous retrouvez dans un endroit avec une vingtaine d'hommes et que vous

  8   êtes attaqués par 200 soldats ennemis, ça ne peut pas être une requête, ça

  9   ne peut être qu'un appel au secours. La teneur en est simplement : nous

 10   demandons de l'aide et nous vous demandons de nous venir en aide dès que

 11   possible. Ce n'était pas des exigences ou des demandes, c'était tout

 12   simplement des appels au secours. Quant à l'ennemi et à la position de

 13   supériorité écrasante qu'il avait, cette suprématie était si grande que --

 14   et là, c'est quelque chose qu'on voie dans les demandes qui sont formulées

 15   et pour chaque membre du HVO, il y avait 20 soldats de l'ABiH. On était

 16   dans un rapport numérique de 1 contre 20 à cet instant-là.

 17   Q.  Je comprends bien vos propos mais tout dépend où l'on se trouve dans la

 18   région. Vous, vous parlez -- nous parlons de Konjic mais qu'en est-il des

 19   autres régions, des régions avoisinantes, Jablanica, Prozor, tout ce qui

 20   avoisinait la région de Konjic ? Vous ne parlez pas de la région en entier,

 21   vous parlez uniquement de la région où vous vous trouviez ?

 22   R.  Monsieur le Procureur, je laisse de côté Prozor, je parle maintenant de

 23   la zone de responsabilité de ma brigade. Je parle donc de Konjic, de la

 24   vallée de la Neretvica donc du 1er Bataillon et je parle également de cette

 25   partie qui s'étend jusqu'à Jablanica. Dans cette partie-là, selon

 26   l'évaluation qui avait été la nôtre, alors dans la mesure où cela a été

 27   possible, il y avait pour chaque soldat du HVO 20 soldats de l'ABiH qui

 28   attaquaient, et par conséquent, dans cette situation à votre avis, quel

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  1   type de rapport doivent-ils être envoyé ? Est-ce qu'on était seulement en

  2   situation de rédiger des rapports en bonne et due forme, là il est

  3   manifeste que ce n'était pas le cas et qu'il n'y avait même plus de

  4   communication pour des moyens de communication pour demander des renforts ?

  5   Q.  Bien. Nous allons poursuivre la lecture de ce rapport, les derniers

  6   paragraphes maintenant :

  7   "Il y a un lien filaire vers le commandement Herceg Stjepan à partir duquel

  8   nous avons -- par lequel nous avons demandé des rapports précis sur la

  9   situation et les demandes concernant les opérations. Nous continuons à

 10   travailler selon le plan prévu."

 11   Donc vous êtes d'accord avec ce rapport de Siljeg qui confirme la

 12   conclusion de la MOCE sur lequel il y avait une opération du HVO en cours

 13   dans la région Prozor-Jablanica-Konjic et qu'il y avait bel et bien un plan

 14   du HVO pour s'emparer de la région ?

 15   R.  Une opération a été conduite sur le territoire des municipalités de

 16   Konjic et de Jablanica, conformément au plan conçu par l'ABiH que nous

 17   avons examiné hier et avant-hier, il était possible d'y voir très

 18   précisément les différentes missions telles qu'elles étaient attribuées aux

 19   différentes unités de Radina jusqu'à Jablanica, Aleksin Han, et jusqu'à cet

 20   axe en direction de Sovici et Doljani et en direction de Prozor.

 21   Q.  Bien. Nous allons maintenant --

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, puisqu'on va passer à un autre

 23   document, le Procureur a sauté le point 8, et je voudrais appeler votre

 24   attention sur le point numéro 8. Regardez au 8, ce qui est indiqué. Au

 25   point 8, il y a deux endroits qui sont bien précisés, le village de Slatina

 26   et Sovici. Il doit y avoir une opération à 7 heures du matin à Slatina et à

 27   Sovici à 9 heures, et ce qui me trouble c'est qu'il y a marqué des cibles

 28   sélectionnées. Alors le document du colonel Siljeg et du 16 avril, c'est un

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  1   rapport intérimaire établi à 8 heures. Le numéro de ce rapport c'est

  2   "202/93." Il aurait été intéressant de regarder qu'est-ce qu'il y a au 201,

  3   au 200, au 199. Je n'ai pas eu le temps de faire ce travail, je le ferai

  4   parce que j'ai tous les documents dans mon bureau, classés par ordre

  5   chronologique, donc je ferai cette vérification pour voir s'il existe ces

  6   documents. Je n'en sais strictement rien. Mais si c'est un rapport

  7   intérimaire, ça veut dire qu'il y a déjà eu un autre rapport qui a peut-

  8   être lui été fait pour la -- durée à 6 heures du matin, peut-être j'en sais

  9   rien. Mais à ce moment-là, ce document contredit un peu ce que vous nous

 10   dites parce qu'il semblerait qu'à ce moment-là, il y a eu une préparation

 11   d'objectifs sur Slatina et Sovici, et la préparation sur les objectifs ne

 12   s'est pas faite le 16 avril mais le 15, le 14 ou le 13, puisqu'il y est

 13   marqué de cibles sélectionnées, donc ça ne s'est pas fait au dernier

 14   moment.

 15   Alors en termes militaires, comment vous interprétez ce paragraphe numéro

 16   8, est-ce que ça veut dire qu'il y avait déjà un plan sur Slatina et Sovici

 17   ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si l'on essaie de se

 19   rappeler l'ordre émis par le commandant de l'ABiH à Jablanica, et bien il

 20   lançait ses unités dans la direction dont on parle maintenant, c'est-à-dire

 21   Slatina et que je vois le point 7, Slatina donc et Sovici. Il y a envoyé

 22   ses propres unités et il y avait là une Unité de Sabotage qui était équipée

 23   pour procéder à la destruction de pièces d'artillerie et de tous les autres

 24   matériels se trouvant dans la zone de Risovac selon leur propre évaluation.

 25   Cela signifie que ces unités avaient déjà pris position à ses côtes et il

 26   me semble que cet ordre avait été émis un ou deux jours au préalable, un ou

 27   deux jours avant. Alors le rapport lui venait probablement du terrain et

 28   leur était adressé en signalant que les mouvements, que ces mouvements

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  1   avaient été observés qui étaient les leurs, leurs mouvements de

  2   déploiement. 

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors si je comprends bien, vous vous expliquez ce

  4   document par le fait que l'ABiH, ayant elle attaqué, le HVO a préparé donc

  5   la riposte et la contre-attaque, ce qui expliquerait, au point 8, le

  6   colonel Siljeg a prévu une opération à Slatina et à Sovici. C'est ce que

  7   vous venez de dire; est-ce bien cela le sens de vos propos ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que j'ai voulu dire, c'est le sens de

  9   ce que j'ai voulu dire puisque ces unités qui entraient dans cette zone ont

 10   été percées à jour, ont été découvertes, et c'est là ce qui était censé

 11   être fait, vous avez raison.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Témoin, vous êtes peut-être

 13   surpris par mes questions, mais la difficulté que nous les Juges nous avons

 14   c'est que nous dépendons entièrement de ce qu'on nous donne, ce que le

 15   Procureur nous donne, et ce que la Défense nous donne, et c'est à partir de

 16   là qu'on en tira des conclusions. Dans un autre système, ce qu'un juge de

 17   civil law aurait fait, il aurait mis sur la table tous les ordres de l'ABiH

 18   et tous les ordres du HVO, et il aurait comparé, et de la comparaison la

 19   lumière aurait jailli, et on aurait gagné un temps considérable. Voilà,

 20   donc c'est pour cela que je suis obligé de vous poser des questions pour

 21   faire des vérifications. Avec toutes les difficultés, c'est que nous

 22   n'avons pas nous, sous les yeux tous les documents.

 23   Si j'avais fait ce travail de manière professionnelle, j'aurais

 24   regardé le 201, le 200, le 199, le 198, puis j'aurais regardé tous les

 25   ordres de toutes les autres zones opérationnelles, et cetera, et cetera, et

 26   j'aurais fait de même au niveau du 3e Corps de l'ABiH, des autres corps et

 27   la lumière aurait jailli. Mais comme on nous donne qu'une partie des

 28   documents d'un côté et de l'autre, d'où les difficultés et d'où mes

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  1   questions que je pose.

  2   Bien, Monsieur Bos, continuez.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je comprends.

  4   M. BOS : [interprétation]

  5   Q.  Pourriez-vous regarder maintenant cet ordre du commandant Lasic,

  6   sur la date du 14 avril, le P 01872 ? Je vais lire le paragraphe

  7   opérationnel de cet ordre. Il est écrit :

  8   "Afin d'effectuer la mission de combat dans la zone de Prozor-Jablanica-

  9   Konjic, je donne l'ordre…"

 10   Ensuite l'ordre est donné.

 11   Donc le libellé montre, n'est-ce pas, qu'il n'y avait pas que le commandant

 12   Siljeg, mais c'est le commandant Lasic qui était impliqué dans cette

 13   opération, donc la zone opérationnelle sud-est et la zone opérationnelle

 14   nord-ouest étaient aussi impliquées dans cette opération sur Prozor-Konjic-

 15   Jablanica ?

 16   R.  J'ignore qui a participé. Cet ordre, je le vois pour la première fois,

 17   je n'étais pas en mesure de le voir avant. A l'époque, vous le savez vous-

 18   même, où je me trouvais.

 19   Q.  Dans ce cas, repassons au document P 01911, le rapport de la MOCE.

 20   Je vais vous donner lecture du point numéro 7, "analyse."

 21   "Le HVO veut sécuriser la région de Klis, dans le cadre ou sous couvert du

 22   plan Vance-Owen, du fait de l'importance économique et militaire de cette

 23   région.

 24   "Le HVO se lance dans une campagne politique et diplomatique pour

 25   s'emparer de la région sans intervention internationale et sans soulever la

 26   fureur de la communauté internationale.

 27   "A l'heure où nous écrivons ces lignes, le HVO fait de grandes

 28   tentatives pour isoler Jablanica, avant de s'emparer.

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  1   "Plusieurs avancées sont attendues dans la région de Prozor, où il

  2   n'y a ni présence de la FORPRONU, ni présence de la MOCE pour intervenir à

  3   aucun moment que ce soit.

  4   "Toute initiative de l'HVO devrait utiliser -- doit avoir recours à

  5   la force maximum afin de minimiser les victimes et d'avancer le plus

  6   rapidement possible.

  7   "La région doit être sécurisée avant que les négociations

  8   internationales ne reprennent et ne mettent un terme aux initiatives

  9   militaires."

 10   Donc ici, on parle du fait que le HVO voulait sécuriser la région de

 11   Klis. Donc pourriez-vous tout d'abord, sur la carte nous dire où se trouve

 12   exactement cette région de Klis ?

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur le Procureur, hier on a - je

 14   regarde la carte - hier le témoin a fait des cercles, a positionné des

 15   villages, et cetera, et je ne crois pas qu'on ait donné un numéro IC.

 16   M. BOS : [interprétation] Non, en effet, pas encore. Parce que nous voulons

 17   continuer à annoter la carte. Mais ensuite, nous demanderons un numéro IC.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien, alors n'oubliez, parce que je m'étais

 19   posé la question de savoir si vous aviez oublié.

 20   M. BOS : [interprétation]

 21   Q.  Donc pourriez-vous, s'il vous plaît, encercler la région de Klis,

 22   Monsieur le Témoin, et apposez un C à côté de ce cercle ?

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- un D, parce qu'il a mis C pour -- le

 24   C a déjà été fait, donc ça doit être un D maintenant.

 25   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 26   [interprétation] C'est ce cercle-ci, peut-être faudra-t-il juste un

 27   tout petit peu l'élargir, mais celui-ci, c'est la zone de Klis. Alors peut-

 28   être que je n'ai pas été à 100 % précis, mais c'est ça.

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  1   M. BOS : [interprétation]

  2   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, apposer un D à côté de ce cercle ?

  3   R.  [Le témoin s'exécute]

  4   M. BOS : [interprétation] Pourrions-nous maintenant avoir une cote IC pour

  5   cette carte ?

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, on va donner un numéro IC.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Tout à fait. Ce document qui vient d'être

  8   annoté par le témoin recevra la cote IC 1129, je vous remercie.

  9   M. BOS : [interprétation]

 10   Q.  Maintenant, Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire si les propos

 11   de l'observateur de la MOCE sont corrects ? Le HVO est-il en train

 12   d'essayer de s'emparer de la région de Klis, sécuriser du moins ?

 13   R.  [aucune interprétation]

 14   Q.  Vous n'avez pas besoin de regarder le document, je vous ai donné

 15   lecture du rapport de la MOCE, et ce représentant de la MOCE dit dans ce

 16   paragraphe que le HVO veut s'emparer de la région de Klis; est-ce vrai ou

 17   non ?

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 19   il me semble qu'indépendamment de la citation qui est faite de ce rapport,

 20   mon confrère, M. le Procureur, devrait peut-être préciser ce que recouvre

 21   cette notion de "sécuriser" une zone. Parce que l'ensemble de cette zone de

 22   Klis était sous le contrôle des autorités croates, donc je ne vois pas très

 23   bien où mon confrère veut en venir.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, c'est vrai que vous avez dit

 25   "sécuriser;" comment le témoin doit comprendre quand vous dites "sécuriser"

 26   ? Qu'est-ce que vous vouliez dire pour que le témoin puisse répondre ?

 27   M. BOS : [interprétation] Contrôler, garder la main mise sur la région.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] comme cela a déjà été dit, à Klis en majorité

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  1   des localités croates ou alors des localités mixtes, ce qui signifie qu'il

  2   n'y avait pas la moindre opération offensive de la part du HVO là-bas qu'il

  3   ne souhaitait absolument pas conduire des opérations offensives. La

  4   situation était tout simplement que chacun y tenait sa propre localité.

  5   Chaque unité restait dans son propre village. Il s'agit d'unité locale. Par

  6   conséquent, le HVO n'était pas en train d'essayer de passer en territoire -

  7   - sur un territoire où se trouvaient des Musulmans. Il n'y a pas eu un seul

  8   cas où on aurait vu un soldat portant les insignes du HVO tenter de prendre

  9   ou d'entrer dans un village peuplé de Musulmans.

 10   Alors à partir d'autres documents, on voit également qu'il y a eu des

 11   opérations offensives dirigées contre le village de Buscak, on procédait à

 12   une -- il y a une division et c'est à partir du 13 ou du 14, c'est-à-dire

 13   bien plus tôt.

 14   M. BOS : [interprétation]

 15   Q.  Dans ce rapport de la MOCE il est aussi écrit que le HVO a essayé

 16   d'isoler Jablanica, maintenant veuillez regarder la pièce P 01876. Examinez

 17   la pièce P 01876, s'il vous plaît.

 18   C'est un avertissement du commandant Lasic à Pasalic envoyé le 14 avril

 19   1993, à propos des intentions de l'ABiH de se débarrasser du poste de

 20   contrôle du HVO à Radesine, et il lui dit :

 21   "Ne pensez même pas à vous occuper du poste de contrôle de Radesine

 22   puisqu'il se trouve en territoire contrôlé par la Communauté croate

 23   d'Herceg-Bosna."

 24   Quand vous lisez cet ordre, quand vous envoyez le ton, est-ce qu'il ne

 25   donne pas l'impression que Konjic est en train ou que le HVO de Konjic est

 26   en train d'être attaqué par l'ABiH ?

 27   R.  Pour ce qui est du point de contrôle de Radesine, je vais vous dire ce

 28   qu'il en est, indépendamment de tous les efforts sur lesquels nous nous

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  1   sommes penchés, visant à mettre en place des points de contrôle communs et

  2   qui ont échoué, les points de contrôle qui se trouvaient le long de la

  3   route M-17, et je vais répéter, encore une fois, il s'agissait de ce

  4   Aleksin Han, et ensuite on a Jablanica, Ostrozac, Konjic, tout le long de

  5   la route jusqu'à Bradina, et tous ces postes de contrôle étaient contrôlés

  6   par l'ABiH.

  7   Q.  Ici est-ce qu'on ne parlait pas de Radesine ? Est-ce que Radesine, le

  8   14 avril, était contrôlé par le HVO, ou est-ce qu'il était contrôle par

  9   l'ABiH ? Veuillez répondre à cette question.

 10   R.  Je vais vous répondre, mais je dois d'abord vous expliquer pourquoi un

 11   point de contrôle du HVO avait été mis en place à Radesine, c'était parce

 12   que nous n'avions pas le moindre point de contrôle sur la route M-17, et

 13   ce, de Donja Jablanica tout le long de la route jusqu'à Bradina. Par

 14   conséquent, si nous souhaitions être battus à pleine couture nous aurions

 15   pu laisser la situation en l'état. Mais nous étions dans l'obligation de

 16   contrôler la situation parce que nous avions des renseignements nous

 17   indiquant que le long de la route M-17 en direction de -- en provenance de

 18   Bradina, il y a deux brigades de l'ABiH qui étaient passées.

 19   M. KARNAVAS : [interprétation] Je dois vous interrompre; ceci parle de la

 20   notion de tu quoque, on dit que c'est ce que la Défense essaie de faire.

 21   Donc je pense qu'il faudrait laisser le temps au témoin de répondre, de

 22   fournir une explication. Le Procureur essaie d'utiliser un rapport de la

 23   MOCE. Je ne sais pas d'où ça vient. Il y a la réponse du témoin qui

 24   contredit le rapport, lui-même. Il explique pourquoi il y a ce poste de

 25   contrôle, et ceci est contraire à la thèse de l'Accusation qui essaie

 26   d'isoler ou dit qu'on essaie d'isoler Jablanica, et sans cette explication,

 27   je ne pense pas que la Chambre puisse parvenir à une bonne décision. Je

 28   pense qu'il faut laisser le temps au témoin d'expliquer pourquoi ça se

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  1   trouve là, comment ça se fait qu'il était placé là, et la Chambre pourra

  2   décider si c'était pour isoler la ville ou pas. Parce qu'ici, nous avons

  3   des individus qui sont parachutés dans cette région et qui n'ont aucune

  4   idée de ce qui s'y passe.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, ce que vous dites est au transcript, mais

  6   j'avais l'intention de poser une question de suivi sur Radesine. Mais je

  7   laisse M. Bos terminer.

  8   M. BOS : [interprétation]

  9   Q.  Moi, ce que je veux savoir - et c'est la raison de ma question, il vous

 10   suffit de répondre à cette question-ci - si le HVO contrôlait le point de

 11   contrôle de Radesine, le 14 avril, est-il vrai que l'ABiH à Jablanica était

 12   isolée par rapport à Konjic ? Il n'y avait pas possibilité pour des

 13   effectifs de l'ABiH d'aller de Jablanica à Konjic à cause de ce poste de

 14   contrôle ?

 15   R.  Ce n'est pas exact, et encore une fois, je peux expliquer pourquoi.

 16   Parce que, si à Ostrozac l'ABiH contrôlait tout, et en particulier tous les

 17   autres postes de contrôle, et d'après les renseignements dont nous

 18   disposions, la M-17 était uniquement utilisée par l'ABiH pour le transport

 19   de ses troupes, de ses forces depuis Jablanica, en fait, plutôt de Bradina

 20   vers Jablanica, nous, nous prenions cette route -- nous avons créé ce poste

 21   de contrôle uniquement dans le but de contrôler la circulation mais pas

 22   pour empêcher qui que ce soit d'aller plus loin, et le faire rebrousser

 23   chemin. C'était simplement pour avoir une idée des déplacements des forces

 24   de l'ABiH, et ce représentant de l'ABiH, ça le gênait. Nous, nous n'étions

 25   pas gênés par leurs huit postes de contrôle, mais eux étaient gênés par

 26   cela.

 27   M. BOS : [interprétation] -- vous avez une question de suivi, Monsieur le

 28   Président ?

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, le document que nous voyons, qui

  2   est daté du 14 avril, qui est signé par M. Lasic, est un ordre qui commence

  3   le 14 avril, à midi, et cet ordre s'applique à partir de midi. Dans cet

  4   ordre, il n'y a pas -- c'est donc le document P 1872. Dans cet ordre, il y

  5   a le positionnement de certaines unités, la communication qui est mise en

  6   place, et également le fait qu'il doit y avoir sur le plan logistique, un

  7   support mis en place par le RTP de Medjugorje. C'est quoi le "RTP" ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas trouvé ce document, et je ne sais

  9   pas ce que c'est qu'un "RTP."

 10   L'INTERPRÈTE : Votre micro, Monsieur le Président.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, il y a marqué "RTP-Medjugorje;" vous ne savez

 12   pas ce que c'est ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Je ne sais pas exactement. Je

 14   ne parviens pas à me rappeler. Je ne sais pas ce que c'est qu'un "RTP."

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : On regarde le document P 1876 qui concerne, lui,

 16   Radesine. En lisant ce document, qui est adressé à M. Pasalic, M. Lasic

 17   l'informe que le "check point" de Radesine va être donc contrôlé par le

 18   HVO, mais que, si jamais l'ABiH essaie de faire quoi que ce soit, à ce

 19   moment-là, des mesures vont être prises contre Ostrozac, Konjic, Jablanica

 20   et Mostar. On peut interpréter cet ordre -- non, ce rapport, ce n'est pas

 21   un ordre parce que, dans la version anglaise, il y a marqué "rapport." Ce

 22   document peut être interprété comme l'information donnée à M. Pasalic que

 23   dorénavant, le HVO va s'occuper de ce "check point." Alors, le procureur en

 24   vous posant la question part de l'idée qu'à partir de ce point de contrôle,

 25   le HVO est en train d'isoler Jablanica et d'empêcher l'ABiH d'y aller.

 26   Quand on regarde la carte, on s'aperçoit que cette localité est entre

 27   géographiquement, Jablanica et Konjic. La région est vallonnée, ce qui veut

 28   dire qu'en termes militaires, si on est positionné là, on peut empêcher les

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  1   circulations de l'ABiH dans un sens ou dans l'autre. C'est la thèse du

  2   Procureur, telle que j'ai pu la comprendre.

  3   Alors, vous avez répondu pour partie à la question du Procureur. Vous dites

  4   : non, on n'était pas là pour contrôler et empêcher, mais simplement pour

  5   vérifier la circulation. C'est ce que vous nous dites mais un point de

  6   contrôle, vous pouviez empêcher les troupes de l'ABiH de passer; oui ou non

  7   ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Au poste de contrôle, il était possible

  9   d'arrêter la circulation, mais j'ai expliqué quels étaient les motifs qui

 10   auraient présidé à la création de ce poste de contrôle à Radesine. Je crois

 11   que l'ABiH n'a pas dit ne serait-ce qu'une seule fois qu'une Unité de

 12   l'ABiH aurait été contrainte de rebrousser chemin, après avoir été arrêtée

 13   au poste de Radesine. Pour ma part, j'ai expliqué les raisons qui

 14   existaient pour justifier de la part du HVO la création du poste de

 15   Radesine. Tous les points, depuis la municipalité de Konjic dans la région,

 16   allant de Donja Jablanica jusqu'à Radisa Han, étaient contrôlés par l'ABiH.

 17   Je le répète une nouvelle fois. Il est bien connu qu'à ces postes de

 18   contrôle, les membres de notre armée, le Conseil croate de Défense, étaient

 19   arrêtés et obligés de rebrousser chemin. Nous, nous avons créé Radesine de

 20   façon à pouvoir suivre les déplacements des forces de l'ABiH et avoir des

 21   renseignements sur les endroits où elles se regroupaient. Donc, l'ABiH

 22   avait huit postes de contrôle et nous, le Conseil croate de Défense, nous

 23   pensions qu'il était normal dans ces conditions que nous puissions au moins

 24   avoir un poste de contrôle pour suivre les déplacements dans nos villages,

 25   dans nos zones.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de nature purement technique.

 27   Dans ce poste de contrôle, à votre avis, il y avait qui comme force du HVO

 28   ? Deux individus, trois individus, dix individus, un tank ? Il y avait qui

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  1   exactement à ce poste de contrôle ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] A ce poste de contrôle, il y avait au maximum

  3   dix hommes.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y avait au maximum dix hommes. Vous êtes sûr ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, j'entre dans la thèse du Procureur. Le

  7   Procureur semble dire qu'à partir de ce point de contrôle, le HVO avait

  8   l'intention d'isoler Jablanica et d'empêcher l'ABiH d'y aller. Est-il

  9   logique qu'une telle opération militaire ne soit conduite que par dix

 10   hommes ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que ce poste de contrôle n'avait

 12   absolument pas l'intention de faire ce que le Procureur dit que ce poste

 13   avait l'intention de faire. J'ai expliqué pour quelles raisons il avait été

 14   créé. Nous avons reçu des renseignements de nos services de renseignements

 15   qui nous disaient que des forces se regroupaient vers Jablanica en

 16   provenance de Bradina, et ce que nous voulions simplement voir c'est si

 17   cela était exact ou pas. Donc, nous avons créé ce poste de contrôle pour

 18   pouvoir compter les passages de membres de cette unité. Si dix soldats

 19   étaient capables d'arrêter les membres de cette unité, alors on pourrait

 20   dire que oui, nous avons créé ce poste pour empêcher cette unité de

 21   poursuivre son chemin. Mais étant donné nos forces à ce poste de contrôle,

 22   je pense qu'il est impossible de dire cela.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne connais pas les lieux parce que je n'y suis

 24   jamais allé. Mais si la Chambre avait été sur place pour effectuer une

 25   opération militaire digne de ce nom, si on veut empêcher l'ennemi à passer

 26   par la route, est-ce qu'il n'aurait pas fallu mettre, à ce moment-là, à ce

 27   point de contrôle, un tank, deux tanks, de telle façon que vu la

 28   configuration des lieux, l'ABiH ne puisse pas prendre le poste de contrôle

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  1   et pas mettre simplement dix soldats ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je répète encore une fois.

  3   Nous n'avions absolument pas pour intention de stopper qui que ce soit

  4   parce que Radesine, c'est bien connu, c'est un village qui ensuite a été

  5   remis entre les mains du Bataillon espagnol. Vous trouverez des preuves qui

  6   vous montreront qu'il y avait là une cinquantaine d'habitants, civils et

  7   militaires, que nous n'avions absolument aucun char dans ce village et que

  8   ce char a été encerclé, qu'il s'est battu pendant 13 jours contre

  9   l'agresseur qu'était l'ABiH qui avait tous pouvoirs et toute puissance dans

 10   ces circonstances, que les munitions ont fini par disparaître et que ces

 11   gens-là ont eu l'intention de se rendre au Bataillon espagnol, ce qui a été

 12   fait. Le Bataillon espagnol les a mis entre les mains, enfin, les a mis

 13   sous la responsabilité d'une unité qui s'appelait l'Unité Akrapi. Cette

 14   unité a pris toutes ces personnes et les a emmenées à Celebici où elles ont

 15   subi des sévices, ont été frappées et il y a même une personne qui est

 16   décédée des suites des blessures dues à ces coups. D'ailleurs, il y a

 17   quelques jours, le responsable de la mort de cet homme, le responsable de

 18   la mort de Marinko, Panjo [phon] dans la municipalité de Konjic a été jugé

 19   il y a quelques jours et condamné par le tribunal de Konjic.

 20   Donc, si l'on prend en compte les effectifs respectifs des unités en

 21   présence, il est tout à fait clair que l'objectif n'était pas d'arrêter qui

 22   que ce soit à ce poste de contrôle.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Bos.

 24   M. BOS : [interprétation]

 25   Q.  Mais est-ce que la base du problème ce jour-là, lors des opérations du

 26   15 avril, est-ce que ce n'était pas si le HVO avait le plan de prendre le

 27   contrôle de la zone de Konjic et Jablanica, où il y avait une majorité de

 28   Musulmans qui y habitaient, donc ils essayaient d'attaquer la région, et il

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  1   s'est avéré qu'en fait, la résistance s'est opposée par l'ABiH était bien

  2   plus forte que prévu; est-ce que ce n'est pas là le cœur du sujet ?

  3   R.  Non, Monsieur. Je répète ici pour la énième fois que sur le territoire

  4   de la municipalité de Konjic, le HVO n'avait absolument pas l'intention

  5   d'accomplir quelque acte offensif que ce soit. Nous avons vu des documents

  6   qui montrent que l'ABiH a mené des attaques dans la direction de Konjic, en

  7   passant par Klis, pour aller dans la direction de Boksevica et, par

  8   ailleurs, les unités stationnées à Jablanica avaient pour mission de

  9   s'emparer de la zone située dans le secteur de Prozor de Risovac et de

 10   Boksevica. Donc, là encore, nous parlons d'une attaque du HVO alors que

 11   cette attaque n'a absolument pas eu lieu. A l'instant, je vous ai dit point

 12   par point dans quelle situation se trouvait le Conseil croate de Défense le

 13   15, le 16 et le 17 avril, et je -- il est bien dit que ces Unités du HVO

 14   étaient des unités brisées, dispersées, qui ne pouvaient plus communiquer

 15   les unes avec les autres, qui n'avaient même plus de centres de

 16   Transmission pour qu'il y a la moindre coordination entre elles et je vous

 17   ai dit qu'elle était l'ampleur de l'attaque lancée par l'ABiH contre le

 18   conseil croate de Défense.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, une correction au

 20   compte rendu, je vous prie. Ligne 10 de la page affichée à l'écran en ce

 21   moment, le témoin parlait de l'offensive du HVO en disant : nous ne pouvons

 22   pas parler d'une offensive de la part du HVO. Il a dit : pourquoi est-ce

 23   qu'on parle d'une offensive, d'une attaque de la part du HVO alors que

 24   celle-ci n'a jamais existé ? En anglais, ceci a été interprété par les

 25   termes "une action contre le HVO" et il n'y en a jamais eu, "against" en

 26   anglais "contre." Le mot "against" en anglais n'a pas été prononcé par le

 27   témoin. Si on enlève le mot "against" dans le compte rendu en anglais, je

 28   pense que ce qu'a dit le témoin deviendra tout à fait logique et clair.

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  1   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine anglaise, effectivement : confirmation par

  2   les interprètes français de ce qu'a dit Me Alaburic.

  3   M. BOS : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus d'autres

  4   questions. J'ai terminé.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Juste pour terminer le point de contrôle de

  6   Radesine, vous connaissez les lieux ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je les connais.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Est-ce que par rapport à cet endroit, il n'y a

  9   pas une rivière ou un fleuve qui longe ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] En dessous de Radesine, il y a le lac de

 11   Jablanica et puis ensuite la voie ferrée et à une dizaine de mètres en

 12   dessous de la voie ferrée le lac de Jablanica.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Il y a donc le lac de Jablanica. Est-ce que l'ABiH,

 14   à votre connaissance, avait des embarcations qui pouvaient leur permettre

 15   de se déplacer sur le lac ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils n'avaient pas de bateaux mais ils

 17   empruntaient cette route parce que nous ne leur interdisions pas de passer.

 18   Nous avions certainement un poste de contrôle comme je l'ai dit, c'était un

 19   poste destiné à contrôler mais pas à arrêter la circulation. Il n'y avait

 20   pas de barricades, il n'y avait pas de chemins de prise, enfin rien qui

 21   empêchait le passage. Ce que nous souhaitions simplement c'était forcer ces

 22   véhicules à ralentir leur vitesse pour voir ce qui se passait exactement.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : J'essaie de vérifier par mes questions la thèse du

 24   Procureur. Je vous demande si par le lac on pouvait se mouvoir par des

 25   embarcations. C'est ça que je veux savoir ? Vous me dites : où l'ABiH a des

 26   embarcations ou il n'en n'a pas.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Elles n'avaient pas de bateaux, mais elles

 28   pouvaient aussi utiliser la voie ferrée qui était ouverte et que personne

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  1   n'empêchait de fonctionner.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Indépendamment de la voie ferrée, est-ce qu'il

  3   n'y avait pas indépendamment de cette route des chemins de terre qui

  4   auraient permis à des fantassins de l'ABiH de contourner votre point de

  5   contrôle sans aucune difficulté ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] En effet.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Par ces chemins, est-ce qu'ils auraient été sous le

  8   tir, le cas échéant, du HVO sous le feu du HVO, ou bien en toute

  9   tranquillité, ils auraient pu cheminer tranquillement ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils n'auraient pas pu cheminer tranquillement

 11   depuis le village de Celebici ou d'Idbar, pour passer par le village de

 12   Radesine et arriver plus tard au village de Seljani, et puis depuis Seljani

 13   -- et puis depuis Seljani poursuivre jusqu'à Ribici. Non.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc vous dites : ils n'auraient pas pu passer

 15   tranquillement ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils auraient pu passer sans problèmes par ce

 17   passage que je viens de décrire. C'est un chemin piétonnier. 

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- parce que ma question est de savoir

 19   si les soldats de l'ABiH à pied circulant par ces chemins risquaient des

 20   tirs du HVO ou ils ne risquaient pas d'être vus et touchés.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, non. Ils ne se seraient pas exposés

 22   au feu du HVO parce que le village de Radesine est un petit village et

 23   c'était simplement les habitants de ce village majoritairement -- de ce

 24   village croate qui défendait leur village. Mais ceux qui étaient de l'autre

 25   côté du mont dont j'ai parlé, ceux qui étaient dans les villages de

 26   Celebici-Idbar-Seljani-Ribici, avaient beaucoup plus de possibilités de

 27   communiquer les uns avec les autres.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Il est donc l'heure. Nous allons donc faire la

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  1   pause et puis après on recommencera avec les questions supplémentaires.

  2   --- L'audience est suspendue à 10 heures 25.

  3   --- L'audience est reprise à 10 heures 48.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

  5   Avant d'oublier, je voudrais indiquer une décision orale de la Chambre sur

  6   la durée du temps pour la semaine prochaine.

  7   Comme vous le savez, le Témoin Filip Filipovic va témoigner la semaine

  8   prochaine, et le début de l'autre semaine. Donc la Chambre qui avait libéré

  9   fixe pour la durée de l'interrogatoire principal et des questions

 10   supplémentaires pour la Défense Petkovic, quatre heures; les autres

 11   Défenses auront, pour le contre-interrogatoire, deux heures; et le

 12   Procureur aura quatre heures pour son contre-interrogatoire. Voilà.

 13   Maître Alaburic, pour vos questions supplémentaires, dont le temps vous

 14   sera décompté du temps global, puisque la Chambre vous avait attribué trois

 15   heures, que vous avez utilisées, donc maintenant tout le temps passé

 16   viendra en déduction.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Je souhaiterais simplement rappeler que, dans le contre-

 19   interrogatoire, il y a eu de nouveaux sujets qui ont été abordés qui

 20   n'avaient pas abordés lors de l'interrogatoire principal. Je vais

 21   m'efforcer de concevoir ces questions supplémentaires afin d'y passer le

 22   moins de temps possible, et je veux croire que nous en aurons terminé dès

 23   que possible.

 24   Nouvel interrogatoire par Mme Alaburic :

 25   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 26   Nous allons démarrer avec une question portant sur le point de contrôle de

 27   Radesine. Vous nous avez dit, Monsieur le Témoin, qu'il s'agissait d'un

 28   point de contrôle et non pas d'un point où l'on arrêtait la circulation,

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  1   n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui, c'est exact.

  3   Q.  Dans la lignée de la question posée par M. le Juge Antonetti, je vais

  4   vous poser la question suivante : est-ce qu'un bataillon de l'ABiH fort

  5   d'environ 300 hommes, donc si un tel bataillon avait voulu passer par la

  6   route M-17, et avait voulu traverser ce point de contrôle de Radesine,

  7   indépendamment de la position prise par le HVO, y avait-il la moindre

  8   possibilité de les arrêter ?

  9   R.  Non, c'était impossible. Comme j'ai déjà dit, il y avait à ce poste de

 10   contrôle environ dix hommes qui se seraient retrouvés donc face à 300

 11   hommes, c'était tout à fait impossible.

 12   Q.  Vous nous avez dit que l'ABiH a rapidement pris le contrôle du village

 13   de Radesine; est-ce bien le cas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Le Procureur vous a présenté des documents datés du 14 avril 1993,

 16   veuillez juste m'écouter pour le moment, le Procureur donc au moyen de ces

 17   documents a essayé de vous montrer --

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Alaburic, attention,

 19   souvenez-vous de M. Praljak, il a demandé à ce que nous soyons très précis.

 20   Or, bientôt me semblait être un terme extrêmement vague : "L'ABiH a

 21   rapidement pris le contrôle." Rapidement c'est quoi, c'est le jour suivant,

 22   le mois suivant, la semaine suivante ?

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, nous avons vu des détails

 24   à ce sujet dans le document, c'est pourquoi je n'ai pas estimé

 25   indispensable de revenir sur ces détails.

 26   Q.  Mais le témoin va pouvoir nous dire quand Radesine est tombé.

 27   R.  Radesine est tombé 13 jours après le début de l'agression contre le

 28   HVO.

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  1   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Mme ALABURIC : [interprétation]

  3   Q.  Pouvez-vous nous dire exactement quel jour cela s'est produit ?

  4   R.  C'était le 26 ou le 27 avril, il me semble.

  5   Q.  Quelle année ?

  6   R.  1993.

  7   Q.  Très bien. M. le Procureur a commencé à la date du 14 avril, et je vais

  8   maintenant vous rappeler ce document sur lequel nous nous sommes penchés au

  9   cours de l'interrogatoire principal, et qui nous dit quelle était la

 10   situation le jour précédent, à savoir le 13 avril. Le document se trouve

 11   dans ma liasse de documents, dans la partie finale, donc dernière section

 12   portant sur les événements d'avril. Les documents sont rangés par ordre

 13   chronologique.

 14   Si bien que si vous le souhaitez, Messieurs les Juges, vous pouvez le

 15   retrouver, c'est le P 1874, P 1874.

 16   Il s'agit d'un rapport de synthèse pour la date du 13 avril. Alors

 17   voyons ce qui s'est passé le jour précédent, la date de ce document qui

 18   vous a été présenté par le Procureur. Il est dit que ce jour-là, le village

 19   croate Buscak a été attaqué; est-ce exact, Monsieur le Témoin ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Il est dit ensuite que l'ABiH a essayé de percer, de passer en force en

 22   direction du lac, en provenance d'Ostrozac, et qu'elle s'était forcée de

 23   prendre la colline. Ensuite, il est dit que Buturovic Polje a été pilonné,

 24   et qu'au moment de l'écriture de ce rapport, Kostajnica fait l'objet de

 25   pilonnage, qu'une action débute à Konjic, qu'une action donc commence à

 26   Konjic, Konjic qui est soumis à un blocus tout comme Jablanica. Ensuite il

 27   est indiqué en dernière phrase que :

 28   "Ces opérations continuent et s'intensifient."

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  1   Alors, Monsieur le Témoin, est-ce que la situation était bien telle que

  2   décrite ici, à la date du 13 avril ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Alors le rapport suivant de Konjic dans ce même document dit que :

  5   "Le village de Buscak est sur le point de tomber, qu'il y a beaucoup

  6   de blessés et de prisonniers. Il est demandé d'agir de façon urgente

  7   conformément aux demandes précédentes envoyées à Prozor. Il est dit que des

  8   renforts sont envoyés, beaucoup de renforts sont arrivés en provenance de

  9   Jablanica et avancent dans une opération visant à prendre Boksevica. Il est

 10   dit que Buscak est tombé."

 11   Alors selon vous, Monsieur le Témoin, est-ce que les choses se sont

 12   bien passées ainsi à cette date ?

 13   R.  Oui, c'est bien ce qui s'est passé, Buscak est tombé à cette date-là.

 14   Q.  Alors dans le même document, troisième rapport venant de Konjic, il est

 15   indiqué que l'ABiH agit au moyen de mortiers et qu'elle vise Ljesovina,

 16   Buturovic Polje et Kostajnica en tirant de façon intense. Des éléments ont

 17   été infiltrés à Mrakovo et Djukovica [phon], bien que ces éléments

 18   n'agissent pas encore, à partir d'Orlovac, on tire également sur Ljesovina.

 19   Un ultimatum a été lancé au village de Radesine exigeant la remise de leurs

 20   armes avant 13 heures, et Konjic est sous la menace de forces se trouvant

 21   en Bosnie. Dernière phrase, il s'agit d'une attaque totale contre Jablanica

 22   et Konjic.

 23   Alors, Monsieur le Témoin, est-ce que ce qui figure dans ce rapport est

 24   exact ?

 25   R.  Oui, et nous l'avons confirmé il y a quelques jours.

 26   Q.  Le --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est une question que j'aurais certainement

 28   l'occasion de poser au général Petkovic, mais je peux aussi vous la poser.

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  1   Ce document qu'on a déjà vu qui revient lors des questions supplémentaires,

  2   est un rapport collectif concernant plusieurs zones opérationnelles, nord-

  3   ouest, Bosnie centrale, sud-ouest. Quand je regarde ce document, je suis

  4   très frappé par le fait que en Bosnie centrale, apparemment il ne se passe

  5   pas grand-chose, c'est calme, plus ou moins, mais enfin. Par contre, dans

  6   votre région, là, c'est extrêmement grave, il se passe beaucoup

  7   d'événements. Quand on regarde ce document, est-ce que, d'après vous,

  8   l'autorité militaire au niveau central, au niveau état-major, aurait dû,

  9   constant qu'il y a une telle situation envoyer du renfort à Konjic, pour

 10   faire face à la situation qui était en train de se dérouler ? Comme vous,

 11   vous étiez sur place, est-ce que vous avez eu l'impression qu'on est venu à

 12   votre secours, ou bien on vous a laissé vous débrouiller ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour ce qui nous concernait, l'ABiH dans notre

 14   zone, où se trouvait ma brigade, s'est livrée à une agression contre notre

 15   unité, et cela était manifeste dans les documents que nous avons examinés.

 16   Si nous rappelons, par exemple, les documents sur lesquels nous nous sommes

 17   penchés, notamment l'ordre du commandant de la Neretva à Jablanica, il

 18   était prévu que l'ABiH et ces commandants demanderaient de l'aide -- ou

 19   plutôt, l'ABiH et ces commandants avaient prévu que nous demanderions de

 20   l'aide d'une zone -- d'autres zones opérationnelles en cas d'attaque, et

 21   c'est bien ce que nous avons fait; mais il avait prévu cela, et ils ont

 22   pris des mesures afin d'empêcher l'arrivée de renforts -- d'arrivée de

 23   quelque unité que ce soit du HVO en provenance de n'importe quelle

 24   direction, donc aussi bien en provenance de Mostar que de Posusje ou de

 25   Prozor. Cela signifie qu'ils ont rendu impossible l'accès à nos unités ils

 26   ont empêché ces unités qui devaient venir nous aider, et ce, Aleksin Han, à

 27   Sovicka Vrata, et sur l'axe qui allait vers Prozor, ils les ont empêchés de

 28   passer à ces endroits. La conséquence a été que nous nous sommes retrouvés

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  1   tout seul à faire face à un ennemi qui bénéficiait d'une supériorité

  2   écrasante, comme j'ai décrit précédemment.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors votre réponse c'est de dire, Nous n'avons pas

  4   eu de renfort, mais pour vous, c'est parce que l'ABiH avait fait en sorte

  5   que vous n'ayez pas de renfort. Bien, ça, ça peut être la réalité, mais il

  6   peut y en avoir une autre. Que je vais vous soumettre, imaginons je suis

  7   sur le terrain des hypothèses que depuis un certain temps le HVO avait

  8   l'intention de préparer un plan pour attaquer en Bosnie centrale. Tout

  9   était prêt, mais voilà qu'il découvre qu'il y a au niveau de Konjic une

 10   attaque de l'ABiH. Mais comme ils ont préparé une attaque en Bosnie

 11   centrale, ils ne bougent pas ils vous laissent vous débrouiller pour au

 12   jour J, lancer le 16 avril l'attaque en commençant par Ahmici, Vitez, et

 13   cetera. Est-ce que cette hypothèse est crédible ou farfelue ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je n'étais pas informé

 15   d'un tel plan en Bosnie centrale, et de mouvements ou d'intentions du HVO

 16   de procéder à des mouvements ou à des opérations offensives en Bosnie

 17   centrale.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous, vous n'étiez au courant de rien. Très

 19   bien. Merci.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation]

 21   Q.  Veuillez maintenant, Monsieur le Témoin, vous référer aux documents qui

 22   vont s'afficher à l'écran. Il n'est pas nécessaire pour vous de feuilleter

 23   des classeurs.

 24   Le document P 1876, P 1876, voilà c'est bien celui-là. Alors c'est le bref

 25   rapport de Miljenko Lasic, adressé à Arif Pasalic, concernant le poste de

 26   contrôle de Radesine. Il va s'afficher pour vous à l'écran très bientôt. Le

 27   voilà.

 28   Alors, M. Bos vous a dit aujourd'hui, et c'est consigné en page 24 du

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  1   compte rendu d'audience, que la tonalité de ce rapport le ton qui est

  2   employé permet de conclure que le HVO est en train de préparer une

  3   offensive dirigée contre l'ABiH dans la zone de Konjic.

  4   Si bien que je vous demande à présent de bien vouloir nous dire, Monsieur

  5   le Témoin, si ici Miljenko Lasic est en train d'apporter une réponse à une

  6   menace émanant de l'ABiH, ou bien, si lui-même profère une menace à

  7   l'encontre de l'ABiH ?

  8   R.  Ici M. Miljenko Lasic répond à ce qui est une menace émanant de l'ABiH.

  9   Donc il n'adresse de menace à personne. Il se contente de répondre à une

 10   menace. Ce qu'il dit si jamais on -- si jamais il était procédé à une

 11   action contre ce point de contrôle par la force --

 12   Q.  Alors voyez l'introduction. Il est dit que l'ABiH menace de recourir à

 13   la force pour enlever ce point de contrôle du HVO à Radesine. Alors est-ce

 14   que ce document contient une menace selon laquelle le HVO recourait à la

 15   force pour neutraliser les points de contrôle de l'ABiH dans la même zone ?

 16   R.  Non. Il n'est fait ici référence qu'au poste de contrôle de Radeseine.

 17   Personne au sein du HVO n'a menacé quiconque par rapport aux points de

 18   contrôle. La menace était faite contre le HVO, et elle aurait été mise à

 19   exécution, elle était censée être mise à exécution si le HVO n'enlevait son

 20   propre point de contrôle.

 21   Q.  Monsieur le Témoin, comment comprenez-vous ce rapport ? Le HVO informe

 22   l'ABiH de son intention de défendre ce point de contrôle, est-ce que c'est

 23   cela qu'on doit comprendre, ou bien est-il fait état d'intentions

 24   offensives à l'égard de l'ABiH ?

 25   R.  Oui, il s'agit ici simplement d'une information adressée à l'ABiH le

 26   HVO l'informe de son intention de défendre son propre point de contrôle.

 27   Q.  Voyons le document suivant, le P 1872. Il s'agit encore une fois d'un

 28   document qui émane de Miljenko Lasic. C'est un ordre du 14 avril 1993.

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  1   Voilà nous l'avons à l'écran, Monsieur le Témoin.

  2   Pouvez-vous nous dire, si sur la base de cet ordre, certaines unités du HVO

  3   se dirigent vers certaines localités, sont censées se diriger vers

  4   certaines localités, ou bien est-ce que c'est autre chose que l'on ordonne

  5   dans cet ordre ?

  6   R.  Dans cet ordre, il est demandé à ces unités de se déployer sur des

  7   positions à partir desquelles elles pourront apporter une aide, si jamais

  8   cela était nécessaire et demandé. Alors le 13, nous avions déjà demandé de

  9   l'aide auprès des zones opérationnelles, donc ici c'est un ordre dans le

 10   cadre duquel on prépare des moyens afin de pouvoir venir en aide à

 11   quelqu'un en l'occurrence nous dans une zone bien précise.

 12   Q.  Voyons les localités où ces différentes Unités du HVO sont censées se

 13   déployer, elles sont censées s'y rendre. On parle de Sovicka Vrata, et de

 14   l'axe dans lequel le déplacement doit se faire, on parle de Citluk,

 15   Ljubuski, Posusje, Rakitno, et Risovac. C'est là la description qui est

 16   donné de cet axe selon lequel le mouvement doit se faire, donc Rakitno, et

 17   Risovac pour finir. Alors au point 8 encore une fois on dit que :

 18   "Après être arrivés dans la zone de Risovac," et cetera.

 19   Alors, Monsieur le Témoin, est-ce que, dans l'interrogatoire principal,

 20   nous avons déjà abordé ces localités de Risovac et Sovicka Vrata ? Si vous

 21   vous en souvenez, pouvez-vous nous dire dans quel contexte ?

 22   R.  Oui, nous avons parlé de cette localité et de cet axe de communication

 23   vers Risovac. C'était cette direction à partir de laquelle il existait une

 24   possibilité d'arriver de nos renforts, de nos unités venant de Posusje.

 25   C'était l'un des axes par lesquels une aide pouvait nous parvenir à Konjic.

 26   Q.  Aux fins du compte rendu d'audience, je vais maintenant rappeler quel

 27   était l'ordre que nous avons examiné. C'est le document 2D 246, ordre

 28   émanant d'Enes Kovacevic, commandant de l'ABiH, daté du 14 avril.

Page 47382

  1   Alors, Monsieur le Témoin, si vous vous en souvenez, peut-être pourrez-vous

  2   nous le dire, si vous ne vous en souvenez pas, nous nous pencherons sur le

  3   document à nouveau. Est-ce qu'en vertu de ce document, il avait été décidé

  4   que l'ABiH devait prendre un certain nombre de positions autour de Sovicka

  5   Vrata et de Risovac, et ceci, afin d'empêcher la venue d'éventuels renforts

  6   du HVO à Konjic et à Jablanica ?

  7   R.  Oui. L'ABiH, je ne vais peut-être pas le dire maintenant avec une

  8   totale exactitude, mais je sais qu'un détachement de l'ABiH avait été

  9   dépêché en direction de Sovici et Doljani. Une unité de sabotage avait été

 10   envoyée directement à Sovicka Vrata. En fait, selon leur propre estimation

 11   à eux, c'était le seul endroit à partir duquel il était possible d'agir, où

 12   il était possible de déployer de l'artillerie. C'était la seule côte élevée

 13   à partir de laquelle l'artillerie pouvait agir. Et ils ont envoyé cette

 14   Unité de Sabotage pour qu'elle intervienne au cas où de l'artillerie y

 15   serait positionnée.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Je voudrais d'abord apporter une correction

 17   au numéro du document. En ligne 8, il n'a pas été bien consigné. C'est le

 18   document qui porte la cote 2D 246. Voilà, c'est maintenant correct.

 19   Q.  Voyons le document suivant, Monsieur le Témoin, c'est le P 1915,

 20   P 1915. Voilà, c'est cela. Nous avons ici un rapport extraordinaire émanant

 21   du commandant de la zone opérationnelle, Zeljko Siljeg. Voilà, vous l'avez

 22   maintenant à l'écran. Peut-être que nous pourrions juste réduire un peu la

 23   taille afin de voir l'ensemble du texte. Je voudrais attirer votre

 24   attention juste sur deux points de ce rapport. Au point 9, on qualifie les

 25   rapports et les demandes qui sont arrivés de la Brigade Herceg Stjepan.

 26   Vous nous avez apporté des explications détaillées à ce sujet. Au point 12,

 27   il est dit, je cite :

 28   "Une liaison filaire a été mise en place avec le commandement de la Brigade

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  1   Herceg Stjepan, brigade à laquelle nous avons demandé un rapport détaillé

  2   de la situation et des instructions précises pour ce qui est de

  3   l'intervention qui est censée être la nôtre."

  4   Monsieur le Témoin, vous avez pu lire l'ensemble de ce rapport, qui vous a

  5   également été présenté par M. Bos; est-ce que vous concluez de ce rapport

  6   que la zone opérationnelle de M. Siljeg a des plans qui sont des plans

  7   offensifs dans la zone de Jablanica et qui sont les siens seuls, ou bien

  8   vous concluriez plutôt qu'elle attend en fait des instructions précises

  9   venant de la Brigade de Konjic avant de lancer ses propres actions ?

 10   R.  Dans ce rapport, on voit que Zeljko Siljeg ne se livrait à aucune

 11   opération offensive. Il se contentait d'attendre des rapports venant de

 12   notre brigade parce qu'il ne souhaitait pas intervenir au milieu de ce

 13   désordre et de tous ces appels au secours qui étaient lancés par des sous-

 14   officiers. Il a préféré attendre, et il a établi une liaison filaire avec

 15   notre centre de transmission, et ceci, afin de pouvoir intervenir et agir

 16   de façon très précise dans les zones où la situation était la plus

 17   critique. Donc aucune action offensive. Ce n'était que dans le cas où la

 18   Brigade Herceg Stjepan aurait demandé de l'aide qu'une action aurait été

 19   lancée.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation]

 21   Monsieur le Témoin, j'aimerais que vous m'expliquiez ce que veut bien

 22   signifier le point 8 de cet ordre dans ce cas. On y lit :

 23   "Début des opérations aujourd'hui sur des cibles sélectionnées près

 24   du village de Slatina, 7 heures du matin, et sur le village de Sovici, 9

 25   heures du matin."

 26   Il ne semble pas que l'on attende la moindre demande. Enfin, peut-être

 27   pouvez-vous m'expliquer ce que signifie ce point 8.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai dit tout à l'heure ce

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  1   qu'il en était de ce qui apparaît au point numéro 8, concernant Sovici et

  2   Slatina, si je me rappelle bien.

  3   A 7 heures -- oui, Sovici et Slatina. Si vous vous en souvenez, il y avait

  4   là également un ordre selon lequel il convenait d'envoyer un détachement de

  5   la Brigade Neretva à Jablanica dans ces localités, dans le secteur qui nous

  6   intéresse ici, donc Sovici et Slatina. Je crois que c'était déjà le jour

  7   précédent qu'ils étaient entrés avec une partie de leurs unités et qu'ils

  8   avaient pris position avec leurs effectifs et leurs armes. Alors il est

  9   probable que nos hommes ont observé ces mouvements et ils ont demandé à

 10   Zeljko Siljeg de leur venir en aide à cet égard, et lui, il répond qu'il le

 11   fera le lendemain matin.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je remarque qu'à deux reprises, vous

 13   avez dit "j'imagine," donc vous n'êtes pas très sûr.

 14   C'est quelque chose que vous pensez avoir vu plutôt que quelque chose que

 15   vous savez avoir eu lieu ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas simplement ce que je pense, parce

 17   que j'ai dit tout à l'heure que c'était un fait bien connu. Je répondais à

 18   M. le Président qui m'a interrogé sur ce même sujet. Je n'étais pas sur

 19   place, donc je ne peux pas vous dire avec une totale certitude, Ceci s'est

 20   passé comme cela. Mais si nous nous penchons sur les documents qui traitent

 21   de la question, des documents où nous voyons que le commandant de la

 22   Brigade de la Neretva de Jablanica dit avoir envoyé les membres de son

 23   unité dans ces secteurs, cela signifie que ces unités de l'ABiH sont déjà

 24   sur le terrain concerné et qu'elles y mènent déjà à bien les missions qui

 25   leur ont été confiées. Autrement dit, elles sont déjà en train de préparer

 26   des actions offensives, à moins qu'elles n'aient même déjà commencé leurs

 27   actions offensives. Bien, dans ces conditions, il est logique que les

 28   membres de notre 3e Bataillon, Mijo Tomic, qui était dans la région, ait

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  1   demandé un appui de l'artillerie ou d'autres unités dépendant de Zeljko

  2   Siljeg, Monsieur le Juge.

  3   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Poursuivez, Madame Alaburic.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur le Témoin, nous avons regardé il y a un instant le rapport

  6   concernant le 13 avril. Il s'agit de la pièce P 1874. C'est un rapport

  7   synthétique, et dans ce document eu égard à la journée du 13 avril, il est

  8   écrit qu'à partir du secteur de Konjic et de Jablanica des demandes d'aide

  9   ont été envoyées. Voilà, j'ai trouvé la page exacte. Je cite :

 10   "Agir rapidement pour répondre à nos premières demandes envoyées à Prozor,"

 11   en d'autres termes, envoyées à la zone opérationnelle de Zeljko Siljeg.

 12   Il est vrai, n'est-ce pas, Monsieur le Témoin, que le 13 avril déjà, votre

 13   brigade ou, en tout cas, certains éléments constitutifs de votre brigade

 14   ont envoyé des demandes d'aide à la zone opérationnelle de Zeljko Siljeg ?

 15   R.  Oui, c'est exact.

 16   Q.  Revenons maintenant sur le document de Zeljko Siljeg, la pièce P 1915,

 17   1915. Dites-moi, au paragraphe 12 de ce document, Zeljko Siljeg déclare

 18   qu'il attend des renseignements précis relatifs à l'action. Alors, pouvez-

 19   vous me dire pourquoi il insiste en utilisant ce mot "précise" pour

 20   qualifier les demandes d'intervention ?

 21   R.  Il demande des demandes précises d'intervention afin de pouvoir agir

 22   exactement contre les cibles militaires qui mettent en danger nos unités

 23   dans le secteur déjà indiqué.

 24   Q.  Dites-moi, Monsieur le Témoin, en votre qualité de militaire, si Zeljko

 25   Siljeg s'apprêtait à lancer des actions offensives, est-ce qu'il aurait

 26   connu exactement les cibles qu'il planifiait et souhaitait attaquer ?

 27   R.  Oui, naturellement. Car s'il avait pour but de lancer une action

 28   offensive, s'il avait déjà planifié une action offensive, dans le cadre de

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  1   cette planification, les objectifs qui auraient dû être pris pour cibles

  2   afin d'être visés ou neutralisés auraient bien naturellement été

  3   déterminés.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me semble que ma

  5   question, telle qu'interprétée en anglais, n'est pas tout à fait conforme à

  6   ce que j'ai dit. Je vais donc la répéter. Ma question était la suivante :

  7   si Zeljko Siljeg avait planifié une action offensive, est-ce que lui,

  8   Zeljko Siljeg, aurait su quelles sont les cibles qu'il avait été planifié

  9   d'attaquer ou qu'il aurait souhaité neutraliser ? Parce que dans

 10   l'interprétation faite jusqu'à présent, il semble être apparaître que j'ai

 11   demandé au témoin si le témoin aurait su cela. Mais le témoin a bien

 12   répondu puisqu'il a visiblement compris la question en m'écoutant, moi,

 13   dans ma langue.

 14   Q.  Alors penchons-nous maintenant sur la pièce P 1911. C'est un rapport

 15   des observateurs européens qui a fait l'objet de nombreuses réponses de

 16   votre part. Et c'est le paragraphe 5 de ce rapport qui va m'intéresser dans

 17   l'immédiat. Monsieur le Témoin, je ne vous demande pas de vous prononcer

 18   sur l'exactitude de telle ou telle chose de façon synthétique pour

 19   l'ensemble, parce que vous avez déjà dit que certaines choses n'étaient pas

 20   exactes, mais voyons si tout de même il n'y a pas des éléments particuliers

 21   qui, eux, pourraient être exacts. Nous n'allons pas apprécier les jugements

 22   de valeur prononcés par les observateurs parce qu'ils ne sont pas

 23   pertinents en l'espèce, mais voyons ce qu'ils disent sur les faits.

 24   Alors nous lisons dans ce paragraphe que l'ABiH aurait tenté de s'emparer

 25   de Zlatar. Est-ce que ce fait est exact, Monsieur le Témoin ?

 26   R.  Oui, il est exact.

 27   Q.  Un peu plus bas, nous lisons que l'ABiH bloque les sorties de Prozor

 28   vers Jablanica et place des obstacles sur la route sous forme de gros blocs

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  1   de béton. Est-ce que vous avez quelque renseignement que ce soit ? Est-ce

  2   que vous savez quoi que ce soit au sujet de ce blocage de la route à la

  3   sortie de Prozor et Jablanica ?

  4   R.  C'est l'ABiH qui voulait bloquer ? Je n'ai pas très bien compris.

  5   Q.  Au point B, nous lisons que l'ABiH bloque les sorties de Prozor vers

  6   Jablanica, et un peu plus bas, nous lisons que l'ABiH pose des blocs de

  7   béton.

  8   R.  Oui, oui, ceci aussi est exact, car nous savons que le commandant de la

  9   Brigade de la Neretva de Jablanica a rédigé un rapport dans lequel il

 10   indique qu'une compagnie avait été chargée de bloquer cette route allant de

 11   Prozor à Jablanica en y posant des obstacles.

 12   Q.  Au paragraphe 5(C), nous lisons que l'ABiH souhaite chasser toutes les

 13   unités du HVO hors de Jablanica et de Konjic. Selon ce que vous saviez de

 14   la situation sur le terrain, est-ce que ce fait correspond à la réalité,

 15   oui ou non ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Dans la suite du rapport, il est question de ce que fait le HVO.

 18   Puisque nous n'avons que la version affichée à l'écran, je vais vous en

 19   parler moi-même. Ecoutez-moi avec attention. Il est dit que le HVO attaque

 20   la position de Slatina à l'aide d'artillerie, qu'il attaque les positions

 21   d'Ostrozac, qu'il attaque les villages de Here et de Scipe, et qu'il

 22   attaque les unités stationnées dans la vallée de la Dreznica.

 23   Et maintenant, je vais vous interroger au sujet de localités bien précises.

 24   Si nous essayons d'établir un lien entre ces localités et les localités

 25   citées dans la pièce au document 2D 246, si vous vous souvenez de ce

 26   document, l'ordre d'Enes Kovacevic en date du 14 avril, est-ce que ces

 27   localités sont bien celles où l'ABiH avait installé ses positions afin

 28   d'empêcher l'arrivée des unités du HVO dans ces lieux et donc d'empêcher

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  1   que des renforts soient apportés au HVO de Konjic ?

  2   R.  Oui, ce sont ces mêmes positions.

  3   Q.  Monsieur le Témoin, je vais maintenant vous poser quelques brèves

  4   questions liées aux documents des Nations Unies ainsi qu'à une déposition

  5   dans l'affaire Blaskic.

  6   Rapport du secrétaire général du secrétaire général des Nations Unies,

  7   pièce P 1391. Ecoutez-moi simplement. P 1391, du 2 février 1993. Au

  8   paragraphe 1 de ce rapport, nous lisons que parmi les participants se

  9   trouvaient, et je cite :

 10   "Les dirigeants des trois parties en présence en Bosnie-Herzégovine,

 11   notamment Alija Izetbegovic, Radovan Karadzic et Mate Boban."

 12   Au paragraphe 8, les noms de ces trois hommes sont une nouvelle fois

 13   cités, et il est dit que Mate Boban - il est question du plan Vance-Owen

 14   dans ce paragraphe 8 - donc il a signé les principes constitutionnels, et

 15   la carte de la province, ainsi que la carte illustrant l'accord, que

 16   M. Izetbegovic a accepté les principes constitutionnels ainsi que l'accord

 17   militaire, mais qu'il n'a pas adopté la carte, et que Karadzic n'a pas

 18   encore répondu. Et au paragraphe 9, une nouvelle fois, il est question des

 19   trois parties en présence en Bosnie.

 20   Alors, d'après ce que vous savez, Monsieur le Témoin, à cette époque-là,

 21   existait-il en Bosnie-Herzégovine trois parties opposées, à savoir la

 22   partie musulmane, la partie serbe et la partie croate ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Selon ce que vous savez, Radovan Karadzic, était-il le chef de la

 25   partie serbe ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Est-ce que d'après ce que vous savez, Mate Boban était le chef de la

 28   partie croate ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que, d'après ce que vous savez, Alija Izetbegovic était le chef

  3   de la partie musulmane ?

  4   R.  Oui.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Madame Alaburic, je me pose vraiment

  6   beaucoup de questions à propos de vos questions. Ce sont des faits que nous

  7   connaissons depuis trois ans et demi. Pourquoi nous faut-il un témoin qui

  8   les confirme à nouveau, vous perdez votre temps. En tout cas, c'est ce que

  9   je pense.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, je considère que ce n'est

 11   pas une perte de temps, parce que dans ce prétoire, on n'arrête pas de nous

 12   présenter Alija Izetbegovic comme le président d'un Etat qui aurait dû

 13   défendre les intérêts de tous les habitants de Bosnie-Herzégovine, et puis

 14   on nous présente l'ABiH, comme la seule armée légale et légitime sur le

 15   territoire de toute la Bosnie-Herzégovine.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Nous avons entendu un grand nombre

 17   d'arguments qui est dans le sens contraire. Sachez-le.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Mais, Monsieur le Juge, une chose encore

 19   que je voudrais dire, et puis progressivement on en arrive à la question de

 20   savoir si le HVO était un organisme légal ou contraire ou illégal; est-ce

 21   qu'il était une armée paramilitaire ou je ne sais quelle autre force armée

 22   ? Donc je considère qu'il importe de préciser tous ces sujets, et

 23   d'ailleurs, j'en ai presque terminé sur ce point.

 24   Je n'ai plus qu'une question à poser au témoin sur ce sujet.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, puisque nous avons défini comme nous venons de le

 26   faire ces trois parties, pouvez-vous me dire qui en Bosnie-Herzégovine

 27   selon ce que vous pensez à l'époque s'intéressait de façon égale à la

 28   défense des intérêts des trois peuples, et donc de tous les habitants, tous

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  1   les citoyens de Bosnie-Herzégovine, sans différenciation entre eux ?

  2   R.  A ce moment-là, chacun s'occupait du peuple qu'il représentait. Il n'y

  3   avait pas une seule entité qui se soit occupée de la défense des intérêts

  4   des trois peuples en même temps.

  5   Q.  Monsieur le Témoin, je vais vous rappeler le document qui vous a été

  6   montré par mon collègue de l'Accusation, il s'agit de la pièce P 11086,

  7   11086. C'est un rapport de Zarko Keza, du 7 décembre 1992, dans lequel il

  8   est dit que certains commandants de l'ABiH ont déclaré que les Croates ne

  9   recevraient que 25 % du pouvoir au sein de l'armée. Alors Monsieur le

 10   Témoin, est-ce que à ce moment-là, autrement dit à la fin de l'année 1992,

 11   ceci représentait à peu près le pourcentage de la population croate par

 12   rapport au total de la population de Konjic ?

 13   R.  Oui, selon le recensement de 1990, Konjic était habité par 26 % -- ou

 14   plutôt très précisément 27 % de population croate.

 15   Q.  Monsieur le Témoin, vous-même, étant un Croate de Konjic, donc vous-

 16   même et peut-être l'un ou l'autre de vos amis, aviez-vous un peu peur de

 17   cette éventualité qu'en tant que Croate, vous ne disposiez que d'une partie

 18   du pouvoir proportionnel à votre représentation démographique au sein de la

 19   population, à savoir ce que proposaient les autorités musulmanes ?

 20   R.  Oui, naturellement nous avions un peu peur de cela, parce que si les

 21   Croates ne représentaient que 27 % de la population, si nous tenons compte

 22   du fait qu'en 1992, la population serbe avait quitté la municipalité de

 23   Konjic, et bien, le véritable pourcentage devait être réduit par rapport à

 24   celui qu'exprimait le recensement. Autrement dit nous n'étions plus 27 % du

 25   total mais un pourcentage plus important puisque les Serbes n'étaient plus

 26   là.

 27   Q.  Pourriez-vous répondre brièvement, je vous prie. En tant que Croate,

 28   est-ce que vous aviez peur de ne plus jouir que du pourcentage de droit que

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  1   vous promettaient les autorités musulmanes étant donné votre représentation

  2   numérique au sein de la population ?

  3   R.  Oui, naturellement nous avions peur.

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  5   j'en ai fini de mes questions complémentaires. Je vous remercie.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Témoin, au nom de mes collègues,

  7   je tiens à vous remercier d'être venu à la demande de la Défense Petkovic,

  8   apporter votre témoignage. Je formule mes meilleurs vœux pour votre retour

  9   dans votre pays. Je vais demander à M. l'Huissier de bien vouloir vous

 10   raccompagner, étant précisé que c'est peut-être le dernier acte que va

 11   faire M. l'Huissier.

 12   Bien. Alors, Maître Alaburic, donc pour la semaine prochaine, vous allez

 13   rencontrer le témoin, le préparer et donc il sera à la disposition de la

 14   Chambre dès lundi après-midi ?

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. La semaine

 16   prochaine nous déménageons pour parler du nord de la Bosnie. Nous nous

 17   intéresserons à nombre de nouveaux sujets. Je vous remercie.

 18   [Le témoin se retire ]

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 20   S'il n'y a donc plus de questions, je remercie tout le monde, et donc

 21   je vous invite à préparer évidemment l'audition du prochain témoin, et

 22   d'ici là, je vous dis à tous à lundi. Merci.

 23   --- L'audience est levée à 11 heures 35 et reprendra le lundi 30 novembre

 24   2009, à 14 heures 15.

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