Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 48169

  1   Le mardi 12 janvier 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  7   l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges et toute les

  9   personnes présentes dans le prétoire.

 10   Il s'agit de l'affaire IT-04-74-T, le Procureur contre Prlic et consorts.

 11   Merci, Messieurs les Juges.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 13   Je souhaite, en ce mardi 12 janvier 2010, la bienvenue à notre témoin. Mon

 14   Colonel, j'espère que la soirée s'est bien passée.

 15   Je souhaite également une bonne journée à tous les accusés présents, à Mmes

 16   et MM. les avocats, à Mme West et aux membres du bureau du Procureur.

 17   LE TÉMOIN : VINKO MARIC [Reprise]

 18   [Le témoin répond par l'interprète]

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, mon Colonel, hier, on a terminé rapidement

 20   l'audience parce que nous avions dépassé 19 heures, et j'avais quelques

 21   questions de suivi à vous poser que je vais vous poser très rapidement.

 22   Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais nous avons déjà entendu

 23   des témoins et nous avons des documents établissant qu'il y a eu des

 24   pilonnages. A titre d'exemple, je cite la date du 11 septembre 1993, où le

 25   quartier musulman de Mostar a été pilonné. Il y aurait eu - j'emploie le

 26   conditionnel - trois morts et 20 blessés. Ceci ressort du témoignage d'un

 27   Témoin CB, page de transcript 10 158. Le 13 septembre 1993, il y aurait eu

 28   également des grenades et des tirs par canons anti-tanks ayant causé trois

Page 48170

  1   morts et deux blessés. Ceci résulte toujours du Témoin CB, page 10 159.

  2   Au mois d'août 1993, on a eu un témoin, un sieur Cedric Thornberry, qui

  3   était chef adjoint de la mission de la FORPRONU, qui a déclaré que Mostar

  4   Est n'avait pas été épargnée par les bombardements. Transcript, page 26

  5   166.

  6   Au mois de septembre - je me contente, septembre jusqu'à octobre - en

  7   septembre, on a un rapport, pièce P 05428, qui mentionne cinq impacts

  8   d'obus, d'artillerie à Mostar Est, provenant de la partie sous contrôle du

  9   HVO; ayant entraîné cinq morts et 13 blessés.

 10   On a un autre document, P 5625 - parce que j'ai passé une partie de la nuit

 11   à travailler tout cela pour vous poser des questions - c'est un sieur Larry

 12   Forbes qui explique que l'hôpital de Mostar Est a été pris pour cible par

 13   des tirs d'artillerie dans la nuit du 4 au 5 octobre 1993.

 14   Alors, on a plusieurs témoins, plusieurs documents qui nous parlent de tirs

 15   d'artillerie.

 16   Alors, moi, le problème est la suivant : surtout au regard d'une

 17   jurisprudence récente de la Chambre d'appel dans l'affaire Dragomir

 18   Milosevic, il faut que les Juges établissent, bien entendu, s'il y a eu des

 19   victimes et qu'ils établissent d'où sont partis les tirs. Car si on

 20   n'arrive pas à établir cela, il est impossible à ce moment-là de mettre en

 21   cause les accusés, et c'est la jurisprudence de la Chambre d'appel en la

 22   matière, jurisprudence constante.

 23   Alors, en réfléchissant à toutes ces situations, j'envisage les

 24   possibilités suivantes et vous me direz votre point de vue. Première

 25   possibilité, le HVO tire, soit intentionnellement, et là, il y a peut-être

 26   eu des ordres écrits que jusqu'à présent, moi, je n'ai pas vus; ou bien,

 27   deuxième hypothèse, le HVO réplique à des tirs, soit des tirs en provenance

 28   des Serbes, soit des tirs en provenance de l'ABiH et dans le cadre de la

Page 48171

  1   réplique, il y a des dommages collatéraux. Ça, c'est une première

  2   hypothèse.

  3   Deuxième hypothèse. Ce sont les Serbes qui tirent et on a des documents qui

  4   indiquent que les Serbes utilisaient l'artillerie. Je vais rentrer dans le

  5   détail, mais on a des documents, et à ce moment-là, il y a des dommages sur

  6   des civils provenant des tirs serbes. Ou bien, deuxième sous-hypothèse, les

  7   Serbes tirent et le HVO réplique et à ce moment-là, il y a des dommages à

  8   la population civile parce que les tirs ont été effectués dans la rapidité

  9   avec des mauvais calculs et les obus, au lieu de tomber dans les lignes

 10   serbes, vont tomber dans les lignes occupées par l'ABiH, puisque vous nous

 11   avez expliqué hier avec précision qu'entre vous et les Serbes, il y avait

 12   Mostar Est. Ça, c'est la deuxième hypothèse. Il y a une troisième hypothèse

 13   qui consisterait à dire que ce sont les Musulmans eux-mêmes, pour des

 14   raisons politiques ou autres raisons qui auraient pu provoquer également

 15   des tirs sur leur propre population, alors dans l'histoire, on a vu ce type

 16   de situation.

 17   Moi, en tant que Juge professionnel spécialiste en matière de procès

 18   pénal, je n'exclus aucune hypothèse. J'écoute l'hypothèse du Procureur,

 19   j'écoute l'hypothèse de la Défense, mais je peux inclure également des

 20   hypothèses non envisagées par les uns et par les autres. Donc concernant

 21   ces tirs, il y a tout un champ de possibilité qui fait que le tir peut

 22   provenir des trois parties : HVO, ABiH, Serbes.

 23   Alors vous êtes sous la foi du serment. Pour vous, quand il y a eu

 24   des tirs avec des victimes civiles, tel que cela peut résulter de certains

 25   documents, d'où provenaient ces tirs ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Messieurs les Juges, pendant toute la

 27   durée de la guerre avec la partie serbe et ultérieurement contre la partie

 28   musulmane, c'est-à-dire l'ABiH - je me rectifie, pas la partie musulmane,

Page 48172

  1   l'ABiH - les activités de l'artillerie du HVO ont toujours été conformes au

  2   principe tel que prescrit dans toutes les armées, donc là à partir du point

  3   où l'on met en péril vos propres forces vous ripostez pour cibler ces

  4   endroits-là.

  5   Il est vrai que pendant toute la durée de la guerre entre le HVO et

  6   l'ABiH, il y a eu aussi des tirs venant des positions de l'armée de la

  7   Republika Srpska. Cela a notamment été le cas lorsqu'il y a eu des conflits

  8   au début, et pendant les périodes de temps où il y a eu des attaques de

  9   lancées notamment au mois de septembre vers les positions du HVO par

 10   l'armée de la Republika Srpska. La thèse suivant laquelle ils auraient pu

 11   se tirer dessus eux-mêmes, je n'y crois pas. Indépendamment du fait que

 12   cela ait pu être possible. Mais je ne crois pas que quelqu'un ait

 13   délibérément accepté de tirer sur les siens.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien votre réponse, pour vous,

 15   les tirs n'ont pu provenir que, soit du HVO, soit de la Republika Srpska.

 16   Vous excluez totalement la possibilité que les Musulmans puissent eux-mêmes

 17   se causer des propres dommages, bien, mais vous me dites que quand le HVO a

 18   tiré, il a tiré conformément au droit en la matière après avoir pris toutes

 19   les précautions d'usage. C'est ceci votre réponse à ma question.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci.

 22   Maître Alaburic.

 23   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, bonjour. Bonjour,

 24   Monsieur Maric. Bonjour à tous et à toutes dans le prétoire.

 25   Interrogatoire principal par Mme Alaburic : [Suite]

 26   Q.  [interprétation] Je me propose, Monsieur Maric, de continuer avec mon

 27   interrogatoire.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Je demanderais à M. le Juge Antonetti

Page 48173

  1   d'éteindre son micro.

  2   Q.  Alors, Monsieur Maric, je vais poursuivre mon interrogatoire dans la

  3   lancée des questions posées par M. Antonetti, et de mon avis, il s'agit là

  4   de questions fort importantes pour vous en tant que témoin. J'ai prévu ce

  5   type de question à la fin de mon interrogatoire. Mais je vais réorganiser

  6   celui-ci.

  7   Alors il me semble qu'il y a eu des cas où je n'ai pas très bien compris,

  8   du moins, moi, je n'ai pas compris. En la ligne 7, page 4, vous avez dit

  9   qu'il y a eu des opérations offensives lancées par l'armée de la Republika

 10   Srpska au mois de septembre.

 11   R.  Au mois de septembre j'ai parlé des attaques de l'ABiH. Je me suis

 12   peut-être mal exprimé.

 13   Q.  Quelle année était-ce ?

 14   R.  C'était l'année 1993.

 15   Q.  On va montrer des documents à cet effet, mais avant que de le faire, je

 16   vais dire ce qui suit : dans l'acte d'accusation, le Procureur affirme que,

 17   pendant une période d'un an lorsqu'il y a eu conflit entre le HVO et l'ABiH

 18   sur le territoire de Mostar Est, il y a eu quelque 135 civils de tués. La

 19   formulation exacte dit au moins 135 civils pendant une période d'un an.

 20   Alors essayons de définir d'abord le territoire de Mostar Est. En votre

 21   qualité de personne ayant vécu là-bas, pouvez-vous nous indiquer quelle est

 22   la longueur de ce territoire de la municipalité de Mostar du côté est de la

 23   Neretva ?

 24   R.  Ce que je considère être la ville ça fait quelque quatre à cinq

 25   kilomètres.

 26   Q.  La municipalité de Mostar ?

 27   R.  La municipalité de Mostar, elle, ça fait à peu près 20 et quelque

 28   kilomètres; peut-être un peu plus, disons, 25 kilomètres.

Page 48174

  1   Q.  Comme M. le Juge Antonetti vous l'a dit en vertu des documents que nous

  2   avons versé au dossier, on pourrait tirer la conclusion qui serait celle de

  3   dire que les pilonnages les plus intenses à partir des positions du HVO se

  4   sont produits de septembre à mi-octobre 1993. Alors est-ce que vous pouvez

  5   nous dire si pendant cette période sur le territoire entier de la

  6   municipalité de Mostar il y a eu des activités de combat entre le HVO et

  7   l'ABiH ?

  8   R.  Oui. C'est la période des attaques planifiées les plus intenses sur le

  9   territoire de Mostar, et ce, par les soins de l'ABiH.

 10   Q.  Pouvez-vous nous dire s'il y a eu des actes d'opération de conduite ou

 11   s'il n'y a eu que planification de celle-ci ?

 12   R.  Celles auxquelles je fais allusion ont été conduites, réalisées, et au

 13   début, ils ont connu certains succès; cependant, grâce aux efforts -- à des

 14   efforts surhumains, les forces du HVO ont réussi à stopper ces attaques, et

 15   là où on a perdu nos positions au bout d'un certain temps, on a quand même

 16   réussi à récupérer les dites positions.

 17   Q.  Veuillez nous indiquer si, dans ces opérations, l'ABiH s'est servie de

 18   mortier et autres pièces d'artillerie pour tirer sur les positions du HVO ?

 19   R.  Toutes ces opérations qui ont été conduites à l'époque l'ont été en

 20   application de toutes les règles régissant les opérations d'attaque. Donc y

 21   compris l'utilisation intensive de l'artillerie.

 22   Q.  Est-ce que, lors de ces attaques, il y a eu participation des effectifs

 23   locaux de l'ABiH seulement ou ces forces locales auraient été renforcées

 24   par des effectifs venus de l'extérieur de Mostar ?

 25   R.  Lors de ces opérations d'attaque conduites par l'ABiH, l'accent a été

 26   mis sur l'utilisation de forces toute fraîches qui sont venues de secteur

 27   extérieur à Mostar, qui sont venus du nord de Mostar, bien sûr, avec la

 28   participation des effectifs qui se trouvaient dans Mostar même.

Page 48175

  1   Q.  Veuillez préciser ces sites au nord que vous évoquez ?

  2   R.  Messieurs les Juges, c'est mon village local de naissance, Vrdi, puis

  3   il y a le plateau de Raska Gora, puis Rastani, puis les axes de Mostar,

  4   dont un point stratégique qui est la colline de Hum. C'était donc cela les

  5   axes les plus importants de l'attaque lorsqu'elle a été lancée.

  6   Q.  Monsieur Maric, je ne vous ai pas demandé quels étaient les axes

  7   d'attaque. Je vous ai demandé d'où étaient venues ces forces, ces effectifs

  8   tout frais, depuis la région nord de Mostar.

  9   R.  Je voulais dire qu'ils étaient venus de Konjic et de Jablanica.

 10   Q.  Avez-vous des informations disant qu'on pouvait s'attendre aussi à

 11   l'arrivée d'unités arrivées de Sarajevo ?

 12   R.  Il y a eu aussi des unités ayant participé à ces opérations venues de

 13   territoires autres, Sarajevo et même Zenica.

 14   Q.  De quelle armée parlez-vous lorsque vous évoquez ces villes ?

 15   R.  Je parle du 6e Corps venu de Jablanica, le 1er Corps, donc une partie

 16   des effectifs du 1er Corps de Sarajevo, et la 7e Brigade musulmane dont le

 17   siège, autant que je le sache, se trouvait à Zenica. Il y a également eu

 18   des parties d'autres unités d'assaut de l'ABiH.

 19   Q.  D'après vos informations, est-ce que l'ABiH, à l'époque de ces

 20   opérations d'attaque, a manqué de munitions et y a-t-il eu des moments où

 21   l'ABiH n'a pas pu attaquer parce qu'elle n'avait pas suffisamment de

 22   munitions ?

 23   R.  Au vu de la situation, telle qu'elle se présentait à l'époque,

 24   l'intensité des activités de combat de l'ABiH m'ont laissé conclure du fait

 25   qu'ils n'ont pas été dans une situation où il y aurait eu manque de

 26   munitions -- pénurie de munitions.

 27   Q.  Penchons-nous sur plusieurs documents qui se trouvent au bout du

 28   classeur, après le dernier -- la page verte de séparation. C'est le dernier

Page 48176

  1   sous-ensemble, 4D 741.

  2   Alors, il s'agit d'une protestation de la part de l'officier chargé des

  3   liaisons avec la FORPRONU dans la zone opérationnelle de l'Herzégovine du

  4   sud-est, 13 août 1993, où l'on informe la FORPRONU du fait que l'armée

  5   musulmane a tiré en direction du commandement de la zone opérationnelle et

  6   l'a touchée.

  7   Alors, ma question, Monsieur Maric, est celle-ci : où se trouvait le siège

  8   du commandement ?

  9   R.  Le siège du commandement se trouvait à Mostar.

 10   Q.  D'après ce que vous en savez, est-ce que ce rapport est exact ?

 11   R.  Oui, ce rapport est exact.

 12   Q.  Est-ce que vous vous souvenez en personne de l'événement lorsqu'un obus

 13   est tombé sur le commandement ?

 14   R.  Oui. J'étais dans les locaux du commandement.

 15   Q.  Penchons-nous sur le document suivant, 4D1702. Il s'agit ici d'un

 16   document rédigé par Sefer Halilovic et approuvé par Rasim Delic. Il s'agit

 17   d'une carte où l'on montre le plan d'opération d'attaque appelé Neretva.

 18   Monsieur Maric, est-ce que vous avez entendu parler de cette opération

 19   déployée par l'ABiH ?

 20   R.  Oui, certes.

 21   Q.  Lors de vos préparatifs en vue du témoignage, est-ce que vous avez eu

 22   l'occasion de vous penchez sur cette carte sur l'ordinateur et

 23   l'agrandissement du secteur autour de Mostar pour voir un peu les axes

 24   d'attaque ?

 25   R.  Oui, j'ai eu l'occasion de le faire.

 26   Q.  Pouvez-vous nous dire si cette opération de l'ABiH attaquant le secteur

 27   de Mostar s'est bien déroulée suivant les axes tels qu'indiqués sur cette

 28   carte ?

Page 48177

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Penchons-nous sur le document suivant, 4D 778. Il s'agit d'un document

  3   émanant de Sefer Halilovic à l'intention du commandement du 1er Corps où il

  4   est demandé de procéder d'urgence à l'envoi d'une unité dans la vallée de

  5   la Neretva.

  6   Ma question pour vous, Monsieur Maric, est la suivante : où se trouvait le

  7   commandement du 1er Corps de l'ABiH ?

  8   R.  Le commandement du 1er Corps se trouvait à Sarajevo.

  9   Q.  Et partant de ce document, que pourriez-vous nous dire pour ce qui est

 10   de l'utilisation des unités de l'ABiH de Sarajevo pour cette opération

 11   d'attaque lancée dans la vallée de la Neretva.

 12   R.  Je pourrais dire seulement ce qui suit. Les intentions de l'ABiH lors

 13   de cette opération était celle de maîtriser à tout prix le territoire --

 14   s'emparer à tout prix de ce territoire pour mettre en place les préalables

 15   qui -- d'une avancée au-delà, plus vers le sud.

 16   Q.  Je vais maintenant vous montrer deux autres documents pour vous poser

 17   ma question suivante. Le premier document c'est le 4D 1719, 1719. Il s'agit

 18   d'un ordre émanant du chef d'état-major Zarko Tole. C'est daté du début du

 19   mois de septembre 1993.

 20   Zarko Tole, d'après le témoignage du général Praljak, était chargé du

 21   secteur Mostar au sein du HVO. En comparant les chiffres - et je n'ai pas

 22   le temps de tout évoqué - mais on voit, de façon évidente -- claire que,

 23   partant de cet ordre, le commandant de cette zone opérationnelle, Miljenko

 24   Lasic, a donné un ordre, qui est la pièce P 4743.

 25   A cet effet, s'agissant des deux documents en question, je vous pose

 26   ma question. Etiez-vous au courant de l'ordre donné par Miljenko Lasic ?

 27   R.  Oui.

 28   Mme WEST : [interprétation] Excusez-moi. Bonjour, Monsieur le Président.

Page 48178

  1   Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à toutes les personnes ici présentes.

  2   Kim West, représentant le bureau du Procureur.

  3   Un tout petit commentaire. Je relève que ce matin c'est au moins la

  4   troisième fois que le conseil fait des déclarations. D'abord, elle a parlé

  5   du nombre de personnes tuées à Mostar Est. La deuxième déclaration

  6   concernait des tirs offensifs de l'ABiH fin septembre, début octobre.

  7   Maintenant, c'est la troisième déclaration -- affirmation qu'elle fait au

  8   regard de ce document.

  9   Peut-on demander au conseil de s'abstenir d'énoncer des faits aux

 10   fins du dossier. La seule -- les éléments de preuve doivent venir du témoin

 11   et de lui seul ? Merci.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, vous tenez compte de ce qui

 13   vient d'être dit.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, j'estime que cette

 15   objection est tout à fait infondée. Je pense avoir le droit d'expliquer au

 16   témoin les circonstances au sujet desquelles je suis en train de poser

 17   certaines questions, et ce que j'ai fait ne consiste qu'à citer des parties

 18   de l'acte d'accusation. Je crois qu'il relève de mon droit, avant de poser

 19   toute question, d'indiquer les raisons po0ur lesquelles cela est important,

 20   parce que tout ce qui se trouve opéré sera pertinent pour ce qui est

 21   d'évaluer le poids du témoignage de ce témoin, et je ne pense pas lui avoir

 22   suggéré des réponses aux questions. Je n'ai fait que contextualiser la

 23   question que je pose.

 24   Q.  Alors, Monsieur Maric, vous nous dites que --

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, mon collègue va intervenir mais,

 26   moi, juste un petit détail. Mme West dit, en citant plusieurs exemples,

 27   mais, moi, je vais en prendre. Vous avez dit une opération offensive, ligne

 28   7, page 10, bien, donc vous induisez qu'il y a eu une opération offensive.

Page 48179

  1   Alors que le document ne peut pas le dire. Donc à ce moment-là, vous dites

  2   au témoin : "Voyez, je vous présente un ordre d'Halilovic. D'après vous,

  3   c'est une action offensive ou défensive ?" Le témoin dit : "C'est une

  4   action offensive." Et vous envoyez, voilà c'est tout. C'est purement

  5   technique, mais on ne va pas perdre de temps là-dessus. Mon collègue va

  6   intervenir.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] J'allais vous conseiller plus ou

  8   moins la même chose, Maître Alaburic. Il suffit que vous disiez, d'après

  9   ceci ou cela, celui-ci ou celui-là, c'est censé s'être passé. Ce n'est pas

 10   vous, à ce moment-là, qui faites une déclaration, mais vous vous présentez

 11   les choses autrement. Disons que c'est peut-être un petit peu d'onguent

 12   linguistique qui fera mieux passer la pilule pour l'Accusation.

 13   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. J'accepte

 14   volontiers vos suggestions. Je pense être tout à fait correct. Je m'efforce

 15   de ne pas enfreindre les règles de procédure de ce Tribunal.

 16   Q.  Alors, Monsieur Maric, dites-nous si vous vous souvenez de la carte de

 17   Sefer Halilovic approuvée par Rasim Delic. Lorsque sur une carte de ce

 18   genre on place des flèches, dites-nous ce que veulent dire ces flèches ?

 19   R.  Ces flèches indiquent les axes d'attaque.

 20   Q.  Lorsque nous parlons d'"axe d'attaque," est-ce que nous qualifions

 21   attaque de défense d'un territoire ou attaque dans l'intention de s'emparer

 22   d'un territoire, de maîtriser un territoire ? Qu'est-ce que veut dire axe

 23   d'attaque en termes militaires ?

 24    R.  La règle veut que l'axe d'attaque, et d'après cette carte et d'après

 25   les événements réels sur le terrain, cela signifie s'emparer des

 26   territoires sous le contrôle de la partie adverse.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, cette notion d'attaque

 28   je l'interprète ainsi. Donc du point de vue de valorisation, je suis

Page 48180

  1   neutre. Je sais bien que si quelqu'un de la BiH était venu témoigner, il

  2   dirait libération. Si on a des gens du HVO ils diraient qu'il s'agit d'une

  3   agression contre les territoires tenus par les autorités croates. Voilà,

  4   j'estime que cette explication est suffisante, du moins j'espère qu'elle

  5   l'est.

  6   Q.  Alors vous avez reçu l'ordre de Miljenko Lasic. Dans cet ordre de Zarko

  7   Tole qui est suivi de l'ordre de Miljenko Lasic, il est indiqué que les

  8   forces MOS sont en train de planifier des activités d'attaque et des

  9   activités militaires et offensives sur tout le long du front. Alors est-ce

 10   que ceci est exact ?

 11   R.  Oui.

 12   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, il me faut simplement

 13   une précision. Page 12, ligne 2, je vois que Me Alaburic indique c'est

 14   précisément comment elle interprète le terme. Si on avait un représentant

 15   de la BiH il dirait que c'était une libération. Un représentant du HVO

 16   dirait que c'est une agression sur le territoire contrôle par le HVO. Ce

 17   n'est pas très clair. Est-ce que c'est une question qu'on pose, ou est-ce

 18   que c'est une autre affirmation que fait la Défense ? Je pense qu'il

 19   faudrait le préciser aux fins du dossier.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, je pense --

 21   Mme ALABURIC : [interprétation] Très volontiers. Très volontiers, je le

 22   dirai. Alors je pense que dans les propos tenus à l'intention des Juges de

 23   la Chambre il était clair que ces deux ou trois phrases se rapportaient aux

 24   instructions qui ont été données pour ce qui est de l'utilisation de

 25   certaines notions. J'ai posé ma question au témoin pour indiquer aux juges

 26   quelles étaient mes intentions. Je ne voulais en aucune façon entrer dans

 27   les sujets relatifs à la libération, à l'agression ou quoi que ce soit de

 28   similaire. Donc il s'agissait de la poursuite de la communication établie

Page 48181

  1   entre les Juges de la Chambre et les parties en présence, y compris Mme

  2   West qui a présenté son objection.

  3   Q.  Ma question suivante au sujet de ces documents se réfère au paragraphe

  4   6 de M. Tole, il est dit :

  5   "Lignes de la défense à aménager du point de vue du génie pour

  6   entraver le déplacement de l'adversaire."

  7   Alors, de votre avis, de quoi s'agit-il ? Quelles sont les activités

  8   envisagées par le HVO ?

  9   R.  Les effectifs du HVO, en application de cet ordre, dans ce paragraphe

 10   6, se doivent de :

 11   "Travailler ou d'œuvrer de façon intense pour ce qui est de la

 12   fortification des lignes de défense aux fins d'entraver le déplacement de

 13   l'ennemi devant les lignes de la défense pour ralentir l'avancée ou

 14   empêcher l'avancée de l'agresseur…"

 15   Alors cela ne se fait qu'à des fins défensives.

 16   Q.  Penchons-nous sur le 4D 786 --

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question accessoire.

 18   [hors micro]

 19   Bien, je reprends ma question. Monsieur le Témoin, regardez le

 20   document de M. Tole. Au numéro 1, il est demandé donc aux troupes de se

 21   placer immédiatement en état de combat. Quand je lis ça, je me pose la

 22   question suivante : n'étions-nous pas à l'époque dans une situation où

 23   chacun était positionné sur le terrain en fonction de l'espace militaire et

 24   puis, de temps en temps, il y avait des tensions, et à ce moment-là, on

 25   demandait aux uns et aux autres de se placer en situation de combat, ce qui

 26   pourrait dire pour un juge qui réfléchit que la situation militaire pouvait

 27   être la plupart du temps calme, et de temps en temps, il y avait des

 28   incidents qui entraînaient à ce moment-là une mobilisation des uns et des

Page 48182

  1   autres; ou bien étions-nous à l'époque dans une situation de plein combat

  2   où la mobilisation était permanente ?

  3   Or, le paragraphe 1 semble - mais je me trompe peut-être - militer

  4   par une mobilisation suite à un événement qui est certainement l'opération

  5   Neretva.

  6   Alors est-ce que vous pouvez m'aider et m'éclairer sur ce point ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, le HVO avec une partie de

  8   ses unités, ce n'est qu'une ligne de la défense face aux côtés de l'ABiH

  9   face à l'armée de la Republika Srpska. Donc ici partant du renseignement

 10   militaire, on s'attendait à des attaques plus fortes, et au paragraphe 1 je

 11   le comprends de la façon suivante : le chef d'état-major s'appuie sur des

 12   évaluations et programme une aptitude de combat pleine et entière parce

 13   qu'il a jugé que les attaques allaient être si intenses que ce n'est

 14   qu'ainsi que l'on pourra défendre cette première ligne de défense.

 15   Je précise que les axes d'attaque, en cas de succès, signifieraient la

 16   chute de toutes les lignes de défense du HVO face à la BiH, parce que la

 17   configuration du terrain se prête à cela, et c'est notamment l'axe Vrdi qui

 18   était le point sensible.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci.

 20   Mme ALABURIC : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Maric, veuillez nous indiquer s'il y a des divergences entre

 22   l'ordre relevant le niveau d'aptitude au combat, et l'ordre qui demande à

 23   ce que des activités de combat soient entreprises ?

 24   R.  Quand un ordre est donné de lever le niveau d'aptitude de combat, ça

 25   signifie que tous les éléments d'une unité se doivent de se placer à un

 26   degré telle qu'ils pourraient se battre tout de suite, dès que besoin il y

 27   aurait de le faire. L'ordre portant attaque - si j'ai bien compris votre

 28   question - sous-entend l'élaboration de documents de combat précis pour

Page 48183

  1   explicitement confier des missions aux différents éléments de chacune des

  2   unités en présence.

  3   Mme ALABURIC : [interprétation] Penchons-nous sur le 4D 786, qui est le

  4   document suivant.

  5   Q.  Il s'agit d'un document de l'ABiH daté du 11 septembre 1993. Il y est

  6   dit :

  7   "Ordre d'attaquer pour ce qui est de l'opération appelée Défense des

  8   droits du peuple, Vrdi 1993."

  9   Alors, Monsieur Maric, est-ce que vous avez entendu parler de cette

 10   opération-ci ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Au début de cet ordre, on précise les axes des activités de combat. De

 13   mémoire, est-ce que vous pouvez nous dire si c'est bien ainsi que l'attaque

 14   s'est déroulée dans la réalité ?

 15   R.  Je peux vous confirmer que l'attaque s'est déroulée conformément aux

 16   dispositions de cet ordre pour ce qui est de l'action à lancer.

 17   Mme ALABURIC : [interprétation] Document suivant, 4D 1722, maintenant.

 18   Il s'agit, une fois de plus, d'un ordre émanant du chef de l'état-

 19   major, M. Zarko Tole.

 20   Et juste après, le document 4D 1547, qui est un ordre de la même

 21   teneur adressée aux différentes unités par le commandant de la zone

 22   opérationnelle.

 23   Q.  Alors, Monsieur Maric, est-ce que vous étiez au courant de cet ordre

 24   lancé par votre commandant de la zone opérationnelle ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Dans la partie introductive de cet ordre, il est précisé que les forces

 27   musulmanes ont préparé des activités offensives de grande envergure sur

 28   toutes les lignes de front. On mentionne Dreznica, Vrdi, Mostar, Buna et

Page 48184

  1   Dubrava; veuillez nous indiquer si les sites qui viennent d'être énumérés

  2   se trouvent, bien sûr, le territoire de votre zone opérationnelle.

  3   R.  Oui. Ça se trouve sur le territoire de la zone opérationnelle de

  4   l'Herzégovine du sud-est.

  5   Q.  Mi-septembre 1993, l'ABiH, sur ces territoires-là, a-t-elle bel et bien

  6   lancé des opérations d'attaque ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Dites-nous si c'étaient des activités visant à s'emparer des

  9   territoires jusque-là contrôlés par les autorités croates, ou est-ce qu'il

 10   s'agissait d'une défense des positions déjà sous le contrôle de l'ABiH ?

 11   R.  Ici, il s'agit d'une volonté de s'emparer des territoires sous le

 12   contrôle des unités du HVO.

 13   Q.  Dans le paragraphe 6 de cet ordre de Zarko Tole, il est dit :

 14   "D'urgence, entreprendre des tirs d'artillerie et fortifier les

 15   lignes de la défense en profondeur des zones d'activités de combat."

 16   Alors est-ce que vous pouvez décrire de quels types d'activités du HVO

 17   s'agit-il, ici ?

 18   R.  Je répète que, comme dans les ordres précédents, où l'on a prévenu de

 19   la nécessité de fortifier la première ligne par des activités du génie,

 20   donc ici aussi, on demande à fortifier par les soins du génie les positions

 21   pour ce qui est des attaques à venir et en profondeur. Pour nous,

 22   militaires la pire des choses, c'était de nous demander que de fortifier en

 23   profondeur, parce que cela signifiait et cela voulait nous informer que les

 24   attaques risquent d'être telles que nous pouvons fort bien perdre des

 25   parties de territoire.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation] Document suivant, 4D 12 --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, ce document, j'essaie d'en faire une

 28   interprétation politique. Si les informations reçues par M. Tole sont

Page 48185

  1   exactes, puisque manifestement, il a eu des informations des services de

  2   renseignement disant qu'il y a cette offensive. Mais je vois aux points 2

  3   et au 3 de l'explication de l'ordre qu'il y aurait une coordination entre

  4   la VRS et l'ABiH.

  5   Partant de là, je présume que les militaires, d'un côté, Halilovic et de

  6   l'autre, Mladic, ont dû se couvrir politiquement en mettant dans

  7   l'opération Izetbegovic et Karadzic.

  8   D'après vous, quand M. Tole dit qu'il y a une coordination entre la

  9   Republika Srpska et l'ABiH, est-ce que pour vous ça a une signification

 10   politique ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu votre question.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites oui. Alors, je vous demande laquelle,

 15   quelle signification politique ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, à l'époque, nous le savons

 17   de façon tout à fait sûre, il y a eu des réunions entre chefs politiques

 18   locaux de Mostar et les chefs de l'armée de la Republika Srpska et les

 19   milieux politiques des autres communautés environnantes, par rapport à

 20   Mostar, Nevesinje, et cetera. Donc le sujet de ces entretiens a porté sur

 21   une coopération militaire en premier lieu pour porter le plus de dégâts à

 22   l'armée du HVO. Pour ce qui est des analyses plus approfondies de la

 23   coopération politique, je ne m'en suis pas occupé ni à l'époque, ni plus

 24   tard.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, tout ce que vous me dites, c'est que vous

 26   savez que les leaders poils de la région se sont réunis pour parler de

 27   cela. Bien. Merci.

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] 4D 1219, maintenant, s'il vous plaît.

Page 48186

  1   Il s'agit d'une présentation schématique des opérations d'attaque de l'ABiH

  2   sur le territoire de Mostar Est, voire Mostar tout court, mi-septembre

  3   1993.

  4   Q.  D'après vous, est-ce que ceci présente une bonne représentation

  5   schématique des opérations de l'ABiH ?

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour éviter les problèmes ultérieurs, si ce document

  7   est demandé en admission, je sais pas s'il a été admis ou pas, pouvez-vous

  8   nous dire qui l'a établi, les couleurs ABiH, HVO, VRS ? Qui l'a fait, ce

  9   document ?

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, ceci est l'une des cartes

 11   d'une série de cartes que nous avons voulu présenter pour simplifier les

 12   événements sur le terrain, et plus de la moitié de ces cartes ont été

 13   versées au dossier, mes confrères me font savoir que ça déjà été versé au

 14   dossier comme élément de preuve donc. Nous n'avons pas besoin de redemander

 15   son versement puisqu'il y a déjà un statut d'élément de preuve mais je

 16   précise que toutes ces cartes ont été l'œuvre de la Défense du général

 17   Petkovic.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- me dire si c'est le général Petkovic

 19   en personne qui a mis les couleurs, avec les flèches, et cetera ?

 20   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, c'est de la façon

 21   suivante qu'on a procédé : le général Petkovic lui faisait l'essentiel, les

 22   éléments cruciaux, où se trouvaient les uns et les autres et les tiers, et

 23   ensuite les couleurs on les a établies à des niveaux ou échelons

 24   militairement inférieurs aux siens.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Merci.

 26   Mme ALABURIC : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Maric, d'après vous, est-ce que cette présentation schématique

 28   correspond aux événements réels sur le terrain mi-septembre 1993 ?

Page 48187

  1   R.  En terme simple, ça s'est présenté de façon simple mais, moi, qui ai eu

  2   à connaître la situation sur le terrain, je trouve que c'est convaincant

  3   que cette présentation schématique des axes d'attaques prévus, envisagés et

  4   planifiés, et réalisés par l'ABiH en direction des positions tenues par le

  5   HVO.

  6   Q.  Dernier document que nous avons préparé pour votre interrogatoire sur

  7   ce sujet, Monsieur Maric, 4D 793, il s'agit d'un document émanant d'Arif

  8   Pasalic, du 20 septembre 1993. Je me propose de donner lecture de deux

  9   appréciations et je vous demanderais un commentaire.

 10   Donc le commandant de l'ABiH, de son 4e Corps dit - c'est vers la moitié de

 11   la première partie :

 12   "Il parle du territoire où l'ABiH, la République de Bosnie-Herzégovine, le

 13   territoire solidement tenu par l'ABiH, croît -- grandit d'une heure à

 14   l'autre."

 15   Alors est-ce que l'ABiH véritablement sur le territoire de Mostar a procédé

 16   à un élargissement du territoire placé sous son contrôle ?

 17   R.  Oui. A l'époque de la rédaction de ce document, l'ABiH a contrôlé

 18   certains territoires jusque-là tenus par les Unités du HVO.

 19   Q.  Au paragraphe 2 de ce document, le commandant du 4e Corps dit que :

 20   "Les positions tenues par l'ABiH ont été déplacées vers l'avant,

 21   c'est-à-dire vers le sud, le centre, et le nord, avec prise de plusieurs

 22   côtes très importantes revêtant une importance stratégique, au centre de la

 23   ville de Mostar il y a des combats de rue véritables qui sont en cours et

 24   les activités de combat se poursuivre à pleine intensité."

 25   Alors, Monsieur Maric, est-ce que ces dires du commandant de l'ABiH sont

 26   exacts ?

 27   R.  Absolument exact.

 28   Q.  Merci beaucoup.

Page 48188

  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Messieurs les Juges, c'est ce que j'avais

  2   prévu pour interroger le témoin sur ce sujet. Nous avons énormément de

  3   documents sur tout ceci, mais nous avons pensé que cela suffirait. S'il n'y

  4   a pas de questions, ah, j'ai l'impression qu'il y en a.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais je vais laisser la parole à mon collègue,

  6   mais j'ai une question aussi.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Monsieur le Témoin, je vois ce rapport dans lequel le commandant d'un corps

  9   d'armée de l'ABiH, de la République de Bosnie-Herzégovine, fait état du

 10   fait que le territoire contrôlé par la République de Bosnie-Herzégovine

 11   s'agrandit.

 12   Politiquement où est-ce que nous en sommes aussi sur le plan du droit ? Où

 13   est-ce que tout ceci se passe ? Sur le territoire de quelle entité, est-ce

 14   que ceci se passe de quel Etat ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors tout ceci se passe en Bosnie-

 16   Herzégovine, à Mostar.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Est-ce qu'il n'est pas tout à fait

 18   légitime que la République de Bosnie-Herzégovine récupère un territoire qui

 19   est le sien ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, à aucun moment je n'ai eu le

 21   sentiment de ne pas appartenir aux unités qui défendaient le territoire de

 22   la Bosnie-Herzégovine. Donc je ne peux pas admettre que je n'étais pas en

 23   train de le défendre parce que c'était déjà le territoire de la Bosnie-

 24   Herzégovine que ce soit le HVO ou quelqu'un qui le défendre.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je veux être clair. Vous êtes ici en

 26   qualité de témoin. Vous n'êtes pas ici en tant qu'accusé. Ceci ne

 27   concernait pas la propriété éventuelle de vos activités, n'avait pas --

 28   n'ayez pas le sentiment que vous avez l'obligation de défendre vos propres

Page 48189

  1   actions.

  2   Pour moi, c'est assez troublant de voir qu'apparemment les unités de la

  3   République fédérale de Bosnie-Herzégovine, qui est un Etat souverain

  4   reconnu par la communauté internationale, que ces unités défendent le

  5   territoire de cette entité, alors que le HVO affirme lui aussi défendre

  6   l'intégrité territoriale de cette même entité. Quelque part ça me semble

  7   assez absurde. Est-ce que vous pourriez rationaliser la situation en noter

  8   l'aspect absurde, ou me dire pourquoi je me trompe lorsque je trouve que

  9   cette situation est assez absurde.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne cesse de répéter

 11   depuis le début, que tous les ordres que j'ai reçus qui provenaient de ceux

 12   qui me donnaient des ordres allaient dans le sens de la défense de la

 13   Bosnie-Herzégovine. Je n'avais aucune fonction politique, et je n'avais pas

 14   non plus le moyen d'estimer tout cela du point de vue politique.

 15   A partir du moment où nous avons été attaqués, le devoir de mon unité était

 16   d'assurer la défense, et je ne suis rentré dans les questions politiques ni

 17   à l'époque ni aujourd'hui.

 18   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, je vous

 20   prierais de bien vouloir m'accorder la possibilité de poser quelques

 21   questions au témoin suite aux questions que vient de poser M. le Juge

 22   Trechsel, après quoi je suis sûr que vous aurez des questions d'autre

 23   nature à poser.

 24   Q.  Je n'ai l'intention d'aborder les questions politiques, d'ailleurs je

 25   ne pense pas qu'il soit bon de parler de politique avec un soldat, mais,

 26   Monsieur Maric - et je vous prie, de m'en excuser à l'avance - je vais tout

 27   de même vous poser la question suivante : vous-même personnellement

 28   considériez-vous que l'ABiH défendait les intérêts du peuple serbe de

Page 48190

  1   Bosnie-Herzégovine ?

  2   R.  Ce n'est pas la conclusion que j'ai pu tirer à examiner les activités

  3   de l'ABiH.

  4   Q.  Considériez-vous que l'ABiH défendait les intérêts du peuple croate de

  5   Bosnie-Herzégovine ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  A votre avis, les intérêts de quel peuple étaient défendus par l'ABiH

  8   selon vous ?

  9   R.  L'ABiH défendait les intérêts du peuple musulman de Bosnie.

 10   Q.  Si quelqu'un vous disait qu'en Bosnie-Herzégovine l'ABiH à elle seule

 11   défendait les intérêts de tous les peuples de toutes les minorités de

 12   Bosnie-Herzégovine et de tous les habitants de la Bosnie-Herzégovine, que

 13   diriez-vous ? Quel serait votre commentaire ?

 14   R.  Je contredirais cette thèse à tout moment, car chaque fois que je me

 15   lève, chaque fois que je m'assieds, je ressens dans ma chaire ce que j'ai

 16   subi pour avoir défendu la Bosnie-Herzégovine. Autrement dit, mon état de

 17   santé, mon état physique a été mis en cause par le fait que j'ai défendu la

 18   Bosnie-Herzégovine, et je ne le regrette pas.

 19   Q.  Vous avez été blessé dans quelles conditions et en raison des tirs de

 20   quelle armée ?

 21   R.  J'ai été blessé à la mi-novembre 1993, par un obus qui a été envoyé par

 22   l'ennemi.

 23   Q.  De quelle direction ou de quelles positions venait cet obus, si vous le

 24   savez ?

 25   R.  Je vous dirais immédiatement que je n'ai pas grand plaisir à dire ce

 26   qu'il en est, car j'aurais de loin préféré avoir été blessé par un obus

 27   provenant des positions de l'armée de la Republika Srpska, mais je suis en

 28   regret de devoir dire que cet obus provenait des positions de l'ABiH.

Page 48191

  1   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président Antonetti, je vous

  2   remercie de m'avoir accordé ces quelques questions supplémentaires.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, par rapport au document, je regardais

  4   la version en B/C/S puis la traduction en anglais. Le général Pasalic, qui

  5   est décédé, mais nous avons déjà vu des vidéos de lui, on l'a vu avec ses

  6   contacts, avec le général Petkovic, avec le HVO.

  7   Apparemment, on avait l'impression que les relations étaient bonnes

  8   entre M. Pasalic et les officiers du HVO, d'autant plus qu'ils avaient

  9   combattu ensemble.

 10   Dans le document, il signe le texte suivant, nous sommes le 20

 11   septembre. Il est 19 heures, et il dit ceci : que les extrémistes du HVO et

 12   de l'armée croate n'ont pas respecté le cessez-le-feu qu'ils avaient signé,

 13   et dans la matinée, ils ont pilonné les lignes de défense dans Mostar dans

 14   l'ère de responsabilité du 4e Corps. Avec l'artillerie et les armes, donc

 15   il y a eu des centaines d'obus en provenance des tanks, howitzers,

 16   mortiers, et cetera.

 17   Alors, moi, ce qui m'interpelle dans ce texte, pourquoi il qualifie

 18   les extrémistes du HVO et de l'armée croate. Il semblerait, mais

 19   malheureusement il ne pourra jamais nous dire ce qu'il a voulu écrire

 20   puisqu'il n'est plus là, il n'est plus de ce monde. Mais il semblerait

 21   quand on lit ce texte que dans son esprit il y a le HVO et l'armée croate,

 22   et puis des extrémistes et que ce sont ceux-là qui sont des fauteurs de

 23   trouble.

 24   Alors qu'est-ce que vous en pensez ? D'abord, n'y a-t-il pas un

 25   mensonge dans le document, puisque d'après lui c'est vous qui avez pilonné

 26   et attaqué, puis deuxièmement pourquoi fait-il cette distinction entre des

 27   extrémistes et ceux qui ne le seraient pas ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que, par cette rhétorique, M. Pasalic

Page 48192

  1   voulait simplement imprimer un autre ton à cette dépêche; et qu'il y avait

  2   d'un côté des extrémistes et de l'autre côté l'armée régulière, ça c'est

  3   quelque chose que je ne peux pas admettre. Je considère donc ces propos

  4   comme l'expression d'une volonté de donner un poids particulier à ce

  5   document, un ton particulier également.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Sur l'attaque conduite par le HVO, vous êtes

  7   d'accord avec lui que, le 20 septembre, c'est le HVO qui a pilonné, en

  8   violation du cessez-le-feu ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas d'accord que le HVO a ouvert le

 10   feu en violant le cessez-le-feu. Car ceci était impossible. Je ne me

 11   rappelle pas ce jour-là s'il y a eu des combats ou pas. Mais, en tout cas,

 12   le HVO à lui seul ou qui que ce soit à lui seul ne pouvait pas ouvrir le

 13   feu en l'absence d'un ordre, et je ne me souviens pas qu'un ordre ait été

 14   donné permettant d'ouvrir le feu.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.

 16   Mme ALABURIC : [interprétation]

 17   Q.  Nous allons maintenant revenir un peu en arrière ou plus précisément

 18   reprendre à l'endroit où nous nous sommes arrêtés hier, Monsieur Maric, à

 19   la mi-avril à 1993. Je voudrais revenir sur un point relatif à Sovici. Vous

 20   n'avez pas besoin de chercher un document, je vais réduire le nombre de

 21   documents au minimum. Vous avez dit que Konjic et Jablanica étaient dans

 22   votre zone opérationnelle. Vous vous souvenez d'avoir dit ça ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Voici ma question suivante : A la mi-avril 1993, y a-t-il eu

 25   redéploiement de l'artillerie de la zone opérationnelle dans les secteurs

 26   de Sovici, Vrata, et d'autres localités de la municipalité de Jablanica ?

 27   R.  Oui. Un groupe de lance-roquettes et d'artillerie ou, plus précisément,

 28   un groupe de tirs d'artillerie a été retiré de l'artillerie de la zone

Page 48193

  1   opérationnelle pour être muté dans la zone connue sous le nom de Risovac,

  2   qui faisait également partie de la zone du sud-est de l'Herzégovine, et ces

  3   hommes ont pris position à cet endroit.

  4   Q.  Quel était l'objet de ce redéploiement des armes d'artillerie ?

  5   R.  Selon les commandants qui en avaient donné l'ordre, l'objet de ce

  6   redéploiement des matériels et des pièces d'artillerie visait à permettre

  7   d'ouvrir le feu sur des cibles militaires situées le long de l'axe

  8   Jablanica-Konjic. Tout ceci avait pour but d'alléger le fardeau et de

  9   réduire autant que faire se pouvait les obstacles dus aux attaques

 10   agressives nombreuses que subissait le HVO à Konjic.

 11   Q.  D'après ce que vous savez, est-ce que le HVO avait l'intention de

 12   s'emparer de la ville de Jablanica ?

 13   R.  Le HVO n'en avait pas l'intention et n'en avait pas non plus la

 14   possibilité. La création d'un groupe de tirs d'artillerie selon les moyens

 15   disponibles ne pouvait en aucun cas donner une quelconque garantie qu'il y

 16   avait possibilité de s'emparer de quoi que ce soit.

 17   Q.  Vous êtes-vous trouvé dans la région de Sovici et des alentours de

 18   Sovici dans la période où le HVO a attaqué ce village ?

 19   R.  Non. J'ai simplement participé à la préparation du transport de ce

 20   groupe d'artillerie vers Risovac.

 21   Q.  Nous allons maintenant parler d'une autre journée, celle du 9 mai 1993,

 22   à Mostar. Je dirai quelques mots à titre d'introduction, après quoi je vous

 23   montrerai quelques documents, mais nous manquons de temps.

 24   Est-ce que vous étiez à Mostar dans la nuit du 8 au 9 mai 1993 ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Où vous trouviez-vous exactement cette nuit-là ?

 27   R.  J'étais dans ma maison qui est assez près du centre de Mostar où se

 28   trouvait le commandement de la zone opérationnelle.

Page 48194

  1   Q.  Cette nuit-là, quelque chose d'inhabituel s'est-il passé par rapport à

  2   la situation des nuits antérieures ?

  3   R.  Dans les premières heures de la matinée, j'ai été réveillé par des tirs

  4   intensifs provenant d'armes d'infanterie, et l'on entendait également

  5   régulièrement et de plus en plus fréquemment des bruits d'explosion, donc

  6   des détonations qui pour certaines, provenaient des armes d'infanterie mais

  7   pour d'autres, provenaient de pièces d'artillerie.

  8   Q.  Qu'avez-vous fait à ce moment-là ?

  9   R.  Etant donné qu'à ce moment-là j'avais un contact avec la zone

 10   opérationnelle, j'ai immédiatement appelé le service compétent au sein de

 11   la zone opérationnelle. M. Bozo Raguz a répondu au téléphone. J'étais le

 12   premier qui l'appelait et je lui ai demandé ce qui était en train de se

 13   passer. Il avait une voix terrorisée et c'est avec cette voix emplie de

 14   peur qu'il ait dit :

 15   "Je ne sais rien, j'ai l'impression que nous sommes en train de nous

 16   faire attaquer."

 17   Dès cet instant, j'ai commencé à me préparer et entre le moment où je me

 18   suis réveillé et mon arrivée au centre de la zone opérationnelle, il a dû

 19   s'écouler à peine 20 minutes, à une ou deux minutes près.

 20   Q.  Combien y avait-il d'hommes au commandement de la zone opérationnelle

 21   lorsque vous y êtes arrivée ?

 22   R.  A ce moment-là, le nombre normal d'officiers et d'employés travaillant

 23   aux transmissions, à la logistique et dans d'autres services se trouvaient

 24   là, c'est-à-dire cinq à six hommes, à peu près.

 25   Q.  Quand vous dites "le nombre normal," vous parlez du nombre normal pour

 26   quoi ?

 27   R.  C'était le nombre normal d'hommes présents au commandement à des

 28   moments où il n'y avait pas de combats. Donc, je parle d'employés,

Page 48195

  1   d'officiers qui étaient en nombre minimal en l'absence de combats.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur Maric,

  3   pourriez-vous nous dire à quelle heure vous êtes arrivé au quartier général

  4   ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Il était un peu après 5 heures du matin, 5

  6   heures à peu près, quelque chose comme ça.

  7   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation]

  9   Q.  Le commandant de la zone opérationnelle était-il présent au

 10   commandement quand vous y êtes arrivé ?

 11   R.  Non. Dès que je suis entré au commandement, j'ai demandé au responsable

 12   de service, Raguz, s'i avait communiqué avec le commandant la zone

 13   opérationnelle, et il m'a répondu :

 14   "Oui, je l'ai eu au téléphone alors qu'il était chez lui à Siroki

 15   Brijeg, et il m'a dit qu'il arrivait immédiatement."

 16   Q.  M. Lasic est-il arrivé effectivement ?

 17   R.  M. Lasic est arrivé à peu près 40 minutes après moi.

 18   Q.  Dites-nous rapidement ce qu'a fait à ce moment-là le commandant de la

 19   zone opérationnelle ?

 20   R.  Dès son arrivée sur place, il a réagi en posant la question de savoir

 21   si le contact avait été établi avec les unités sur le terrain et est-ce que

 22   des renseignements avaient pu être obtenus qui étaient susceptibles

 23   d'indiquer ce qui était en train de se passer effectivement.

 24   Q.  Selon les premiers renseignements reçus sur le terrain, qu'était-il en

 25   train de se passer sur le terrain ?

 26   R.  La seule chose que nous savions avec certitude, c'est que dans la

 27   direction de la rue Liska et dans la direction de Podhum, des Groupes

 28   d'Infanterie qui, jusqu'à ce moment-là, étaient abrités dans des bâtiments

Page 48196

  1   de l'ABiH, s'étaient mis en route. Donc à ce moment-là, M. Lasic est allé

  2   au centre de Transmissions et nous n'avons plus été ensemble pendant une

  3   quinzaine de minutes, parce que je suis pour ma part resté dans mon bureau

  4   à réfléchir à la situation qui était en train de survenir.

  5   Q.  Ces Groupes d'Infanterie de l'ABiH avaient-ils l'appui de groupes

  6   d'artillerie ?

  7   R.  Oui. Ils avaient le soutien de mortiers de 60 et 82 millimètres, ainsi

  8   que d'autres armes comme les Zolja, les lance-roquettes multiples et lance-

  9   roquettes portables, et d'autres armes similaires.

 10   Q.  Quel a été le premier ordre qui a été donné aux unités du HVO à ce

 11   moment-là ?

 12   R.  J'ai entendu de la bouche de M. Lasic que le premier ordre donné visait

 13   à ne pas refuser le combat sur les axes qui avaient subi l'attaque, et donc

 14   à établir la communication avec toutes les unités subordonnées le long de

 15   ces axes.

 16   Q.  Si vous vous en souvenez, pouvez-vous nous dire quel était l'objectif

 17   poursuivi par les unités du HVO lorsqu'elles se sont engagées dans le

 18   combat à ce moment-là ?

 19   R.  L'objectif poursuivi par toutes les unités -- ou plutôt, par tous les

 20   groupes qui ont réussi à ce moment-là à s'engager dans les combats à

 21   Mostar, donc, le premier objectif poursuivi par ces groupes du HVO

 22   consistait à arrêter l'avancée de l'adversaire en profondeur du territoire

 23   dans la partie occidentale de Mostar.

 24   Q.  Etait-il prévu de faire battre en retraite les unités de l'ABiH qui

 25   avaient réussi leur avancée dans ce secteur ?

 26   R.  En même temps que l'on réfléchissait au plan qui visait à arrêter leur

 27   avancée, on pensait en même temps à la meilleure façon d'obtenir que les

 28   unités de l'ABiH qui s'étaient avancées sur cet axe rebroussent chemin.

Page 48197

  1   Q.  Quelle était la position vers laquelle il fallait contraindre ces

  2   Groupes de l'ABiH de retourner ?

  3   R.  Etant donné qu'à ce moment-là, il n'existait pas de ligne de

  4   démarcation classique sur le plan militaire entre l'ABiH et le HVO et qu'il

  5   n'y avait pas de positions militaires au propre sens du terme qui séparait,

  6   donc, ces deux armées - je parle du HVO et de l'ABiH - l'endroit qui a

  7   concentré l'attention de chacun a été ce qu'on appelait "Le boulevard."

  8   C'était l'endroit qui se prêtait le mieux à la création d'une ligne de

  9   défense.

 10   Q.  Est-ce a ligne de séparation qui avait fait l'objet d'un accord dès le

 11   mois d'avril entre l'ABiH et le HVO sous l'égide de la FORPRONU ? Car,

 12   lorsque vous avez parlé de cela, vous avez prononcé le mot Bulevar.

 13   R.  Oui. C'est précisément cet endroit.

 14   Q.  A ce moment-là, est-ce que le HVO a également décidé de s'emparer d'un

 15   certain nombre d'installations ou de positions de l'ABiH ?

 16   R.  Oui. Etant donné que les tentatives faites pour arrêter l'avancée de

 17   l'ABiH ont réussi et que les Unités de l'ABiH ont toutes été renvoyées à

 18   leur point de départ, donc une fois ce succès remporté, il a été décidé de

 19   s'emparer du bâtiment qui abritait le 4e Corps d'armée de l'ABiH, c'est-à-

 20   dire l'immeuble à Vranica.

 21   Q.  D'après ce que vous savez, est-ce qu'une quelconque action menée par le

 22   HVO à ce moment-là a visé un bâtiment ou une installation autre qu'un

 23   bâtiment militaire ?

 24   R.  A ce moment-là, le gros des efforts visait à les contraindre à

 25   retourner sur leur ligne de départ et à les empêcher d'avancer, et je n'ai

 26   pas souvenir qu'il y ait eu la moindre intention de s'emparer d'un

 27   quelconque autre bâtiment hormis le siège du 4e Corps de l'ABiH.

 28   Q.  Monsieur Maric, durant cette journée du 9 mai, avez-vous vu, à quelque

Page 48198

  1   moment que ce soit, un regroupement d'un nombre particulièrement important

  2   de personnes au stade de Velez ?

  3   R.  Ce jour-là, je ne suis sorti du commandement qu'à deux reprises, et ce

  4   très brièvement, mais cela m'a suffit pour voir que pas mal de personnes

  5   étaient en train de se déplacer à peu près dans la direction du stade.

  6   Q.  Savez-vous pourquoi ces personnes se trouvaient là, au voisinage du

  7   stade de Velez ?

  8   R.  Je ne connais pas toutes les raisons permettant d'expliquer cela, mais

  9   en passant, j'ai posé la question à plusieurs personnes que je connaissais

 10   en leur disant :

 11   "Mais où est-ce que tu vas ? Qu' est-ce que tu es en train de faire

 12   ?"

 13   J'ai entendu la réponse de ces personnes qui disaient :

 14   "Lâche-moi. Toi, reste ici et essaie de rester en bonne santé."

 15   Donc c'était principalement des habitants des quartiers de la ville

 16   où, ce matin-là, des combats avaient éclaté.

 17   Q.  Est-ce qu'un représentant des structures civiles ou militaires du HVO

 18   vous a dit ce qui était en train de se passer, pourquoi toutes ces

 19   personnes se trouvaient là-bas ?

 20   R.  D'après ce que je savais, cela a été fait pour des raisons préventives.

 21   Autrement dit, il s'agissait d'une évacuation de civils destinée à les

 22   éloigner de lieux où des combats étaient en train de se mener.

 23   Q.  La gare routière de Mostar se trouve où, si vous pouvez nous le dire ?

 24   R.  La gare routière se trouve à 70 mètres du stade, et les autobus, leur

 25   lieu de parking était tout autour du stade.

 26   Q.  Etait-il courant, pendant la nuit, de voir des autobus garés à cet

 27   endroit; et si oui, combien ?

 28   R.  Cela se passait depuis des années avant la guerre, tous les autobus des

Page 48199

  1   transports publics de la ville se trouvaient, la nuit, principalement à cet

  2   endroit-là.

  3   Q.  Monsieur Maric, si nous partons de l'idée que les gens qui se

  4   trouvaient au stade de Velez se sont regroupés là pour être évacués hors de

  5   Mostar et que pour leur évacuation il était nécessaire de se fournir un

  6   grand nombre d'autobus, je vous demande s'il y aurait eu besoin de

  7   consacrer pas mal de temps à la mise en service -- au démarrage de tous ces

  8   autobus ?

  9   R.  Non, non. Cela n'aurait pas pris beaucoup de temps.

 10   Q.  Pouvez-vous nous dire de combien de temps il aurait fallu disposer ?

 11   Aurait-il suffi  de passer un coup de fil aux chauffeurs de ces autobus et

 12   ensuite de tourner la clef de l'autobus pour qu'il démarre ?

 13   R.  Oui. Voilà, c'est à peu près ça. Il aurait fallu appeler les

 14   chauffeurs. Parce que dans ces sociétés de transport public, les chauffeurs

 15   étaient en fait employés à temps plein et avaient donc le devoir de faire

 16   démarrer les autobus quand on le leur demandait.

 17   Q.  Vous rappelez-vous si le HVO s'est effectivement emparé de l'immeuble

 18   Vranica qui abritait le commandement du 4e Corps d'ABiH ?

 19   R.  Oui. Le HVO s'est emparé de l'immeuble Vranica dans le courant de la

 20   journée du lendemain.

 21   Q.  Durant la journée du lendemain --

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, on va arrêter parce que c'est 10

 23   heures et demie. Evidemment les questions sont importantes. Je ne vais pas

 24   manquer moi-même de reposer certaines questions. Mais au point de vue du

 25   temps qui vous reste, à mon avis, il doit vous rester autour de 20 minutes,

 26   peut-être même moins. Notre Greffier, qui est revenu parmi nous, va vous

 27   dire exactement combien de temps il vous reste, ce qui vous permettra,

 28   pendant la pause, de reformater les documents que vous avez l'intention de

Page 48200

  1   nous présenter dans les 20 minutes qui reste; puis, moi, j'aurai des

  2   questions à reposer, parce que c'est un sujet extrêmement important.

  3   Alors nous allons faire 20 minutes de pause.

  4   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

  5   --- L'audience est reprise à 10 heures 54.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.

  7   Maître Alaburic.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, il me reste

  9   seulement 18 minutes, et de l'avis de la Défense du général Petkovic, il y

 10   a d'autres dates, d'autres journées qui sont plus importantes que celle du

 11   9 mai 1993, donc je n'ai plus de questions à poser sur ce sujet, mais

 12   puisque vous avez annoncé que vous aviez vous-même des questions, je me

 13   propose de vous passer la parole.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, mon Colonel, j'ai écouté avec attention les

 15   questions et réponses. La date du 9 mai est une date importante pour le

 16   bureau du Procureur qui, dans l'acte d'accusation, indique que le 9 mai, il

 17   y a eu des événements à Mostar qui ont entraîné des conséquences et tout ça

 18   dans le cadre d'une entreprise criminelle commune.

 19   Prenons le cas où le HVO aurait - je dis bien "aurait" - attaqué

 20   l'ABiH. Si le HVO avait attaqué l'ABiH, y aurait-il eu une phase de

 21   préparation avec des ordres, notamment concernant le positionnement de

 22   l'artillerie ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Sous la foi du serment, je vous demande

 25   est-ce qu'il y a eu avant le 9 mai ce type d'ordres.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Juge.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors de deux choses l'une, mon Colonel. Ou vous

 28   dites la vérité et la thèse du Procureur s'effondre totalement, car ce

Page 48201

  1   n'est pas le HVO qui a attaqué, mais l'ABiH, ou vous ne dites pas la

  2   vérité. Alors je vais essayer d'explorer cette possibilité.

  3   Vous nous dites si j'ai bien compris qu'entre 4 heures du matin et 5 heures

  4   vous étiez en train de dormir. Quand vous avez entendu des tirs, vous avez

  5   téléphoné à Raguz, l'officier de permanence, et vous vous êtes tout de

  6   suite rendu au centre opérationnel, où ne se trouvait pas le sieur Lasic.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Exact.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Si le HVO avait attaqué - je dis bien "si" - M.

  9   Lasic aurait-il été présent au centre des Opérations ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc si je comprends bien, comme vous, il était en

 12   train de dormir quand vous avez été réveillé.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai été réveillé par les

 14   détonations, et le commandant Lasic, lui il a été demandé parce qu'il

 15   dormait à près de 30 kilomètres de Mostar, lui.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc lui il était à 30 kilomètres de Mostar. Alors

 17   vous êtes un militaire. Vous avez une formation extrêmement poussée, et il

 18   faut aborder ceci en termes purement militaires.

 19   Est-il concevable, en termes militaires, que le commandant du HVO ne soit

 20   pas là, que le ministre de la Défense ne soit pas là, que le commandant de

 21   la zone opérationnelle ne soit pas là, que le responsable de l'artillerie

 22   ne soit pas là ? Est-ce que, militairement, il est possible que toutes ces

 23   personnes ne soient pas là et que le HVO attaque ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est impensable d'imaginer chose pareille.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Si le HVO avait attaqué, je présume qu'il y aurait

 26   eu des réunions préparatoires, vu évidemment la prise de contrôle du

 27   quartier général de l'ABiH en plein Mostar ouest. Je présume qu'il y aurait

 28   eu une kyrielle d'ordres. Je présume qu'il y aurait eu une élévation de la

Page 48202

  1   mobilisation des soldats, je présume que tout le monde aurait été présent

  2   sur les lieux avec armes et bagages, et cetera.

  3   Est-ce qu'en termes militaires, ça aurait dû être le cas ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors j'abandonne cette partie. Vous avez dit

  6   tout à l'heure, concernant le stade de Velez et les bus, quelque chose

  7   d'important qui m'avait, je l'avoue, totalement échappé et qui est

  8   important. Vous avez donné un petit détail, mais qu'on n'a peut-être pas

  9   bien perçu, mais qui pour moi a une importance. J'avais cru, d'après l'acte

 10   d'accusation et les écritures dans le mémoire préalable du Procureur, que

 11   tout ceci avait été organisé, et que, notamment, les bus avaient été

 12   requis, et j'avais dans l'esprit que ces bus appartenaient à des

 13   entreprises privées, ce qui aurait nécessité toute une organisation. Voilà

 14   que vous nous dites tout à l'heure, mais c'est la première fois que je

 15   l'entends, ça va faire quatre ans qu'on est ici, c'est la première fois que

 16   j'entends cela, vous nous dites deux choses importantes. Un, les bus

 17   étaient stationnés tous à côté du stade. Ça a toujours été comme ça. Puis

 18   deuxièmement, vous rajoutez également que les bus, en réalité, c'étaient

 19   des bus appartenant à l'entreprise publique de transport. Ce qui fait

 20   qu'ils étaient là, et que les chauffeurs de bus, qui étaient donc les

 21   fonctionnaires de cette entreprise, ils étaient disponibles.

 22   Alors, à votre connaissance, c'est bien comme cela que les bus étaient

 23   présents et qu'ils ont pu, le cas échéant, convoyer les personnes ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Les bus étaient là-bas, je l'ai indiqué, même

 25   avant la guerre pendant bien des années. Le garage principal de Mostar de

 26   l'entreprise communale de transport se trouve à 70 mètres du stade, et un

 27   grand plateau à côté du stade servait de parking et on pouvait y garer

 28   jusqu'à 30 bus. Ça a duré pendant des années avant la guerre.

Page 48203

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors vous avez dit aussi quelque chose d'important.

  2   Vous aviez appris que les gens qui avaient été au stade et qu'on a mis

  3   ailleurs après, c'était dans le cadre de l'évacuation des civils parce

  4   qu'il y avait des combats. Très bien. Mais comment vous pouvez justifier le

  5   fait qu'un certain nombre de ces personnes se sont retrouvées à l'Heliodrom

  6   et certaines sont restées pendant un certain temps ? Peut-être que vous

  7   n'avez pas de réponse, mais comment se fait-il que des personnes qu'on

  8   voulait protéger et évacuer des lieux de combat se sont retrouvées - entre

  9   guillemets - "détenues," "isolées," "incarcérées" ? On peut employer tous

 10   les mots que l'on veut, je ne me prononce sur aucun, mais ces personnes, un

 11   certain nombre, se sont retrouvées à l'Heliodrom ? Avec parfois, mais il

 12   n'y a que quelque cas, des personnes très âgées, voire quelques enfants.

 13   Mais quelque cas. Alors comment vous pouvez expliquer cela ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, mon explication pour ce fait

 15   c'est ce qui suit : L'Heliodrom c'est un grand plateau avec des

 16   constructions qui étaient pratiquement vides. Il n'y a qu'une partie de ces

 17   installations qui était utilisée. Il y avait là les conditions requises

 18   pour évacuer en toute sécurité un certain nombre de civils afin qu'ils ne

 19   soient pas mis en péril par les activités de combat, parce que là il n'y a

 20   pas eu de combat à l'époque, et éventuellement on les mettait à l'abri de

 21   toute influence négative venue de l'extérieur. C'est mon opinion.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : L'Heliodrom nous connaissons parce que les Juges on

 23   est allés sur place et on a visité les lieux. Effectivement, c'est assez

 24   grand.

 25   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous avez dit

 26   que vous aviez parlé à certaines personnes qui se dirigeaient vers le stade

 27   Velez. Est-ce que vous avez une idée, une impression de la composition

 28   ethnique de ce groupe ? Est-ce qu'il y avait pour moitié des Musulmans,

Page 48204

  1   pour moitié des Croates ? Ou est-ce que c'étaient surtout des Croates ? Ou

  2   peut-être surtout des Serbes ? Est-ce que vous avez une idée à ce propos ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Les gens que j'ai rencontrés, sur la dizaine

  4   d'entre eux que j'ai reconnus, il y en avait six ou sept de Musulmans,

  5   trois Croates, que je connaissais personnellement.

  6   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Pourriez-vous nous donner le nom de

  7   ces Croates que vous connaissiez personnellement et qui avaient été emmenés

  8   au stade Velez ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait Mme Pehar, Zorica. Je ne sais pas

 10   son nom de famille, et eux, ils habitaient non loin du Bulevar dans la rue

 11   Liska.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, c'est important parce que c'est

 14   la première fois que nous avons cet élément. Vous dites en citant des noms

 15   que parmi les dix personnes que vous avez rencontrées qui partaient vers le

 16   stade il y avait des Croates. Mais alors, ces Croates qu'on faisait quitter

 17   les lieux, on les a mis à l'Heliodrom ou pas ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas d'information à ce sujet.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : La dizaine de personnes que vous avez rencontrées,

 20   est-ce qu'on les faisait partir vers l'Heliodrom en les menaçant avec un

 21   fusil, ou bien de bouche à oreille on avait dit, Il faut vous en aller de

 22   là, allez au stade Velez ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je les rencontrais en

 24   déplacement lorsqu'il y a eu un déplacement vers le stade de Velez. Pour ce

 25   qui est du reste, je ne sais pas vous en parler.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Maître Alaburic, il vous reste 18 minutes.

 27   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, juste une petite

 28   rectification. Page 37, ligne 7, on dit : "I sent them," "je les ai

Page 48205

  1   envoyés." Or, lui, il a dit : "Je les ai vus," "I saw them;" pour qu'il n'y

  2   ait pas de confusion pour ce qui est du rôle de M. Maric et de ce qu'il a

  3   fait.

  4   Q.  Alors, Monsieur Maric, très brièvement, penchons-nous sur certains

  5   événements importants à Mostar suite aux conflits du 9 et du 10 mai. J'ai

  6   un jeu de documents relatifs au mois de mai. Je vais d'abord vous montrer

  7   les documents, puis je vous poserai ma question ensuite.

  8   Alors penchez-vous sur le moniteur, parce que je ne sais pas vous

  9   indiquer maintenant où se trouve le document dans votre registre. C'est le

 10   secteur relatif à la situation qui a suivi à Mostar après le 9 et 10 mai.

 11   Alors le 4D 1680. Il s'agit d'un rapport du commandant de la zone

 12   opérationnelle relatif à la situation de Mostar, daté du 14 mai, et dans

 13   ledit rapport, il est dit que dans la ville de Mostar, on entend ça et là

 14   des tirs, et la conclusion est qu'il s'agit d'une situation relativement

 15   paisible.

 16   Le document suivant c'est le 4D 1681.

 17   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Maître Alaburic, donnez-nous

 18   le temps de trouver ces documents, de repérer où ces documents se trouvent.

 19   Parce qu'ils se trouvent dans l'ordre que vous aviez prévu au départ, mais

 20   maintenant il nous faut un peu partir tous azimuts pour trouver les

 21   documents. C'est bon.

 22   Mme ALABURIC : [interprétation]

 23   Q.  Si nous pouvons continuer, le document suivant il s'agit du 4D 1681, il

 24   est question d'un rapport de Miljenko Lasic daté du 15 mai. On constate

 25   que, somme toute, c'est paisible. Et par la suite dans les rapports

 26   relatifs au mois de mai on voit que c'est la même constatation que l'on

 27   peut lire. Je ne vais pas tous les montrer parce que je n'ai pas le temps.

 28   Alors, Monsieur Maric, est-ce qu'il s'agit bel et bien de rapports émanant

Page 48206

  1   du commandant de votre zone opérationnelle à vous ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Dites-nous, ces appréciations formulées dans les rapports sont-elles

  4   exactes pour ce qui est d'une situation relativement paisible pendant ces

  5   journées-là ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Si vous deviez nous décrire brièvement la situation au cours du mois de

  8   mai à Mostar, que diriez-vous ? Comment s'est-elle présentée, cette

  9   situation ?

 10   R.  Sur le terrain la situation allait vers un apaisement d'un jour à

 11   l'autre, et dans les âmes des gens il y a eu un certain optimisme, qui leur

 12   laissait présager d'un temps de paix imminent.

 13   Q.  Dites-nous jusqu'à quand cette situation de paix relative a régné dans

 14   Mostar.

 15   R.  Ça a duré à peu près pendant les mois de mai et juin 1993.

 16   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi. Monsieur Maric,

 17   document 4D 1681, M. Lasic fait rapport d'attaque au mortier intensive

 18   dirigée sur la caserne Tihomir Misic. Est-ce que ceci cadre bien avec

 19   l'idée selon laquelle la situation était calme ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ce n'est pas si conforme

 21   dans une certaine mesure, mais cette caserne Tihomir Misic est un peu à

 22   l'écart de la ville, ce qui fait que la situation dans la partie

 23   agglomération était paisible, et pour nous, à nos yeux, c'était

 24   primordialement la chose la plus importante.

 25   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Moi aussi, j'aurais une question à

 26   poser à propos de ce même document. Quatrième ligne du document, je cite :

 27   "La FORPRONU est arrivée à Konjic hier, mais elle n'est pas entrée

 28   dans les villages croates de cette zone."

Page 48207

  1   Voici ma question : quelle est la cause ayant empêché la FORPRONU d'entrer

  2   dans ces villages croates ? Est-ce que c'est parce que la FORPRONU n'a pas

  3   été autorisée à le faire, ou quelle serait une autre raison ayant empêché

  4   la FORPRONU d'entrer dans ces villages croates ? Est-ce que ma question est

  5   claire ? Merci.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ces villages croates se

  7   trouvaient totalement encerclés par l'ABiH. Je ne sais pas pourquoi

  8   l'armija ne les a pas laissés entrer dans ces villages croates. Il est

  9   certain que les unités du HVO ne pouvaient pas interdire l'accès à ces

 10   villages. 

 11   M. LE JUGE PRANDLER : [interprétation] Je vous remercie.

 12   Mme ALABURIC : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Maric, M. le Juge Trechsel a attiré votre attention sur une

 14   partie du rapport de M. Lasic pour ce qui est de l'attaque lancée par

 15   l'ABiH contre la caserne Tihomir Misic.

 16   Alors si vous vous penchez sur les autres rapports de Miljenko Lasic, que

 17   vous avez vus en vous préparant pour ce témoignage, et les Juges peuvent

 18   les consulter aussi, on pourra voir que sur les journées qui se trouvent

 19   autour de ces dates-là, il y a eu d'autres attaques de l'ABiH contre cette

 20   caserne de Tihomir Misic ?

 21   R.  Messieurs les Juges, dans la période entre le 9 et la fin du mois de

 22   mai, donc le 9 et le 30 mai, cette caserne de Tihomir Misic a eu 17 morts

 23   parmi les membres du HVO pour ce qui est donc de tireurs de sniper de

 24   l'ABiH. Et parmi eux, il y avait 11 connaissances à moi, et même amis

 25   proches à moi. Donc, il y a eu surtout des tirs de tireurs isolés depuis

 26   les positions de Zalik.

 27     Q.  Veuillez nous indiquer, lorsque dans un rapport militaire, on parle

 28   de "paix relative;" qu'est-ce que cela veut bien dire ?

Page 48208

  1   R.  Ça veut dire qu'il n'y a pas d'activités de combat mettant en péril les

  2   lignes de front, mais qu'il y a des échanges de tir sporadiques qui sont

  3   là, qui ont lieu pour perturber la paix de la partie adverse ou dans les

  4   rangs de la partie adverse.

  5   Q.  Supposons que l'ABiH lancerait des attaques contre cette caserne de

  6   Tihomir Misic et que dans le reste des secteurs, c'est paisible. Est-ce

  7   qu'on pourrait qualifier cela de situation relativement paisible ?

  8   R.  On la qualifiait de relativement paisible à ce moment-là dans le désir

  9   de voir une paix véritable instaurée. Mais les événements ultérieurs nous

 10   ont fait comprendre que ces tirs de sniper en direction de la caserne

 11   avaient pour objectif d'affaiblir le moral des défenseurs de cette caserne

 12   de Tihomir Misic, donc le moral des militaires, parce que 17 jeunes gens

 13   ont été tués en un mois, et ce n'est pas peu.

 14   Q.  Monsieur Maric, après les conflits du 9 mai sur le secteur de Mostar, y

 15   a-t-il eu un nombre important de soldats du HVO appartenant au groupe

 16   ethnique musulman aurait, oui ou non, quitté les rangs du HVO ?

 17   R.  Après les conflits du 9 mai, une partie des membres du HVO, ceux qui

 18   faisaient partie du groupe ethnique musulman, a commencé à quitter les

 19   rangs des Unités du HVO, oui.

 20   Q.  D'après vos informations, comment le HVO s'est-il comporté à l'égard de

 21   ses propres soldats qui étaient désireux de quitter les rangs du HVO ?

 22   R.  De façon tout à fait correcte, conformément à la réglementation

 23   relative à la démobilisation des membres des forces armées et de façon

 24   émotionnelle, très émotionnelle même, au niveau des commandants subalternes

 25   qui ont combattu côte à côte avec ces soldats contre un ennemi commun.

 26   Q.  Vous avez évoqué le règlement relatif à la mobilisation. Est-ce que

 27   cela signifie que les soldats qui voulaient partir ont tout simplement été

 28   démobilisés ? Est-ce que c'est bien ce que vous vouliez nous dire ?

Page 48209

  1   R.  C'est à leur propre demande ou suite à leur propre demande qu'ils ont

  2   été, qu'ils ont rendu leur matériel, les équipements techniques et autres,

  3   moyennant signature de bordereau de restitution, et suite à cela, ils ont

  4   eu la possibilité d'aller où bon leur semblait.

  5   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Excusez-moi, mais ce n'est pas tout

  6   à fait au niveau de la traduction. On dit : "Ils sont rentrés remettre leur

  7   matériel." Ça veut dire qu'ils l'ont rendu, ils l'ont restitué, ou est-ce

  8   que ça veut dire qu'ils ont été autorisés à garder leur matériel ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Ceux qui demandaient à quitter l'unité - et

 10   c'était une partie d'entre eux - ces hommes-là avaient pour devoir la

 11   restitution de leurs armes.

 12   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Oui. Je pense que, maintenant, c'est

 13   bien écrit, donc ça a été remis à un certain endroit, donc, ils ont remis

 14   leur matériel à un certain endroit. Merci.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation]

 16   Q.  Nous allons tout de même devoir examiner un certain nombre de

 17   documents, et je crains de devoir consacrer pas mal de temps à cela.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions sur le

 19   document 4D 1180.

 20   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ce document se trouve dans la

 21   liasse que vous avez reçue, quelques documents après celui qui était censé

 22   venir maintenant. Donc, j'en ai sauté quelques-uns.

 23   Q.  Ce document est un document qui émane d'un commandant de brigade et

 24   celui-ci accepte la démobilisation d'un soldat, ou même de plusieurs

 25   soldats musulmans à leur demande. Lorsque je dis "musulmans," c'est d'après

 26   leurs noms que je le détermine. Il est mentionné dans ce document que ces

 27   soldats ont restitué leurs armes et leur matériel qu'ils avaient reçus à

 28   leur entrée dans l'unité.

Page 48210

  1   Alors, Monsieur Maric, pouvez-vous nous dire si c'est bien la procédure à

  2   suivre lorsqu'un soldat souhaite quitter son unité de son propre chef ?

  3   Est-ce que c'est la procédure à suivre pour le démobiliser, c'est-à-dire

  4   qu'il doit rendre ses armes au préalable ?

  5   R.  Oui, c'est tout à fait cela.

  6   Q.  Un commandant de son unité devait dans des situations de ce genre

  7   accorder son consentement ?

  8   R.  Le commandant était habilité à consentir à ce départ.

  9   Mme ALABURIC : [interprétation] Penchons-nous maintenant sur le document

 10   suivant : 4D 1225.

 11   Q.  Ce document émane également du commandant de la 2e Brigade du HVO, qui

 12   propose un certain nombre de soldats qui, à en juger par leurs noms, sont

 13   de groupe ethnique musulman. Donc, il propose leur démobilisation en raison

 14   du fait que depuis le 9 mai 1993, ces soldats ne sont pas apparus au sein

 15   de l'unité.

 16   Alors, Monsieur Maric, pouvez-vous nous dire si cette procédure était

 17   également une procédure valable pour démobiliser un soldat, à savoir si ce

 18   dernier ne se présente tout simplement pas dans son unité ?

 19   R.  Oui, c'était la procédure en vigueur, et bien sûr, la liste de ces noms

 20   est envoyée au département qui suit l'évolution des effectifs de l'unité

 21   afin que les soldats démobilisés puissent bénéficier de tous les avantages

 22   financiers et percevoir toutes les soldes qui leur sont dues avec

 23   ajustements nécessaires.

 24   Q.  Qu'en était-il des matériels et équipement de ces soldats qui ont tout

 25   simplement cessé de se présenter au sein de l'unité ?

 26   R.  Ces matériels et équipement étaient stockés, de façon tout à fait

 27   régulière, dans les bâtiments destines à cet effet qui faisaient partie de

 28   l'unité.

Page 48211

  1   Q.  Je ne crois que vous m'ayez comprise, Monsieur Maric. Je prends

  2   l'exemple de soldats qui tout simplement ne se présentent plus, cessent de

  3   venir au sein de l'unité. Qu'est-ce qui se passe avec le matériel et les

  4   équipements détenus par ces soldats ?

  5   R.  Tous les matériel et équipement qui étaient en la possession des

  6   soldats au moment où ceux-ci ont cessé de se présenter dans l'unité, tous

  7   ces matériel et équipement, les soldats en question les conservent. Mais ce

  8   que j'ai dit tout à l'heure, c'était ce qu'il en était de l'application de

  9   la procédure régulière applicable à des soldats qui auraient reçu

 10   l'autorisation de partir.

 11   Q.  Quel a été le comportement qui a été appliqué aux soldats de groupe

 12   ethnique musulman qui sont restés dans les Unités du HVO ?

 13   R.  Comme d'habitude, le même comportement que celui dont bénéficiaient

 14   tous les autres soldats du HVO.

 15   Q.  Y a-t-il eu qui que ce soit au sein du HVO qui aurait infligé le

 16   moindre désagrément à un soldat musulman désireux de rester au sein des

 17   Unités du HVO ?

 18   R.  Pour ma part, je n'ai pas connaissance de cas de ce genre.

 19   Q.  Dites-nous à présent, Monsieur Maric, étant donné que vous vous

 20   trouviez sur le territoire de Mostar, la date du 30 (corr5,35) juin 1993 a-

 21   t-elle une quelconque importance pour vous ?

 22   R.  Oui. Cette date est d'une très grande importance pour Mostar. Cette

 23   nuit-là en effet, toutes les chances de voir rétablir la paix, paix que

 24   nous attendions avec une très grande impatience et que nous avions tout

 25   fait pour faire advenir les chances de la paix, ont volé en éclats. Cette

 26   nuit-là, je ne sais pas, mais je continue à penser que tout a été planifié

 27   pour que des éléments - je dis bien des éléments - musulmans du HVO, de

 28   concert avec des éléments de l'ABiH, procèdent à une attaque contre les

Page 48212

  1   dirigeants et les unités du HVO, donc des membres d'autres unités. Lorsque

  2   je parle des membres musulmans responsables de cela, il s'agissait de

  3   soldats provenant de Bijelo Polje, qui étaient à leurs domiciles cette

  4   nuit-là, et ensemble, ils ont donc attaqué des Unités du HVO, le

  5   commandement et les hommes de la 2e Brigade principalement, ainsi que

  6   Rastani et la caserne Tihomir Misic.

  7   Cette nuit-là, à notre grande surprise - et nous sommes également

  8   responsables des mauvaises appréciations, des mauvaises évaluations faites

  9   par nous - certains soldats musulmans du HVO se sont retournés contre nous,

 10   ont enlevé leurs insignes et attaqué les hommes avec lesquels ils avaient

 11   servi depuis le premier jour et jusqu'à la veille.

 12   Q.  Monsieur Maric, je vais vous dire maintenant comment le général Praljak

 13   a qualifié cette date, ce jour-là, et je vous demanderais votre

 14   commentaire. Il a dit que ce jour-là était le début d'une guerre tous

 15   azimuts à Mostar entre le HVO et l'ABiH. Est-ce qu'à votre avis, cette

 16   appréciation est exacte ?

 17   R.  Oui, tout à fait exacte.

 18   Q.  L'ABiH, grâce à ces événements du 30 juin, a-t-elle obtenu le contrôle

 19   de la zone située au nord de Mostar Est, c'est-à-dire le secteur de

 20   Jablanica et de l'est de Sarajevo ?

 21   R.  Cette nuit-là, l'ABiH a acquis le contrôle du territoire qui commence

 22   au Camp du nord et se poursuit vers Zalik, Rastani, Vrapcici, Bijelo Polje,

 23   pour se poursuivre ensuite toujours vers le nord, dans la direction de

 24   Dreznica et Jablanica.

 25   Q.  Monsieur Maric, si après le 30 juin, un habitant souhaitait se rendre à

 26   Mostar à partir de Mostar Est vers Jablanica, est-ce qu'il pouvait le faire

 27   ?

 28   R.  Oui. Il pouvait le faire. 

Page 48213

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  

Page 48214

  1   Q.  Auriez-vous appris qu'un quelconque civil ou un quelconque soldat

  2   aurait trouvé la mort sur la grande route reliant Mostar à Jablanica en

  3   raison de tirs d'artillerie ou d'autres tirs dus au HVO ?

  4   R.  Je n'ai le souvenir d'aucun cas de ce genre et je n'ai pas eu

  5   connaissance de l'existence d'un cas de ce genre.

  6   Q.  Je vous proposerais d'examiner un seul document relatif à cette route

  7   Mostar-Jablanica que je considère comme particulièrement pertinent, et je

  8   n'utiliserai pas tous les autres documents que j'avais prévus pour ce

  9   sujet.

 10   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 11   je vous propose de vous saisir du document qui vient en troisième position

 12   après le dernier que vous avez ouvert.

 13   Q.  Monsieur Maric, vous pouvez simplement vous contenter de m'écouter sans

 14   nécessairement lire le document.

 15   Mme ALABURIC : [interprétation] Il s'agit du document 4D 719 qui est déjà

 16   versé au dossier.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Votre temps est épuisé. Essayez maintenant de

 18   conclure.

 19   Mme ALABURIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Simplement

 20   quelques questions au sujet de ce document qui porte sur la route et j'en

 21   aurai terminé.

 22   Q.  Monsieur Maric, contentez-vous de m'écouter, si vous voulez bien. Dans

 23   ce document, le chef d'état-major du 4e Corps de l'ABiH dit à la mi-octobre

 24   ce qui suit, entre autres.

 25   "Il est indispensable d'arrêter la circulation sur la grand route au niveau

 26   des positions de la compagnie susmentionnée."

 27   La phrase se poursuit mais pour ma part, je l'interromps ici.

 28   A votre avis, Monsieur Maric, que signifie exactement cette phrase ? De

Page 48215

  1   quoi l'on parle lorsqu'on parle de cette circulation sur la grand route ?

  2   Est-ce qu'elle existait ou pas ?

  3   R.  Une circulation existait sur la grand route, et la phrase en question

  4   indique que cette circulation était si importante que de temps en temps,

  5   elle pouvait même nuire aux déplacements des relèves régulières des unités

  6   de l'ABiH.

  7   Q.  Un peu plus loin, nous lisons, je cite :

  8   "Le transport de la population civile et d'autres personnes qui se dirigent

  9   vers le nord et le sud constitue un très gros problème pour nous. C'est la

 10   raison pour laquelle les organes du pouvoir civil devraient se charger du

 11   transport des civils."

 12   J'arrête ma lecture à ce niveau. Selon ce que vous savez, Monsieur Maric,

 13   si un civil provenant de Mostar Est souhaitait se rendre à Jablanica, par

 14   exemple, pouvait-il le faire ?

 15   R.  Il le pouvait.

 16   Q.  Un peu plus loin dans le texte, nous lisons, je cite :

 17   "De gros problèmes se posent pour le transport des blessés et d'autres

 18   personnes vers la ville, et ceci fait apparaître la nécessité d'utiliser la

 19   nuit des blindés pour assurer ce transport.

 20   "

 21   Alors, dites-nous : étiez-vous au courant du fait que l'ABiH transportait

 22   ses blessés vers l'hôpital de la ville, la nuit ?

 23   R.  J'étais au courant.

 24   Q.  Un peu plus loin, nous lisons que l'approvisionnement des Unités de

 25   l'ABiH en pain pose un problème important, car il faut d'abord aller à

 26   Mostar pour trouver la boulangerie et qu'ensuite il fallait transporter le

 27   pain depuis Mostar jusqu'à Bijelo Polje. Selon vous, est-ce que cette

 28   phrase confirme ou infirme l'existence d'une circulation possible entre

Page 48216

  1   Mostar et Bijelo Polje ?

  2   R.  Ceci confirme l'existence effective d'une circulation entre Mostar et

  3   Bijelo Polje dans les deux sens.

  4   Q.  Un peu plus loin nous lisons, je cite :

  5   "En raison du départ de ce qu'on appelle les groupes spéciaux hors de

  6   Mostar, groupes spéciaux et unités spéciales hors de question, les

  7   combattants qui se trouvent sur le front protestent au sein du bataillon,

  8   et on remarque également un déplacement important de civils et de soldats

  9   vers le nord."

 10   Alors ma question est la suivante : est-ce que vous aviez

 11   connaissance de ces déplacements vers le nord ?

 12   R.  J'avais des informations provenant des services de renseignement qui

 13   indiquaient cela.

 14   Q.  Saviez-vous qu'il y avait des déplacements importants sur le plan

 15   numérique, déplacements de personnes importants ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Enfin, Monsieur Maric, faute de temps, je vous demanderais de nous

 18   donner votre avis le plus sincère possible. Nous avons besoin de connaître

 19   votre avis dans ce procès. Lorsque vous avez organisé l'armée et lorsque

 20   vous avez créé le HVO, quelle était votre opinion ? D'après vous, quel Etat

 21   étiez-vous en train de défendre en agissant ainsi ?

 22   R.  Moi-même, et tous ceux qui ont collaboré avec moi, défendions l'Etat de

 23   Bosnie-Herzégovine.

 24   Q.  [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- mes collègues disent que vous avez

 26   déjà largement dépassé le temps et qu'il faut arrêter. Alors est-ce que

 27   c'est votre dernière question ?

 28   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est ma dernière

Page 48217

  1   question. Je pense qu'elle est importante, donc je vous demande de

  2   m'autoriser à la poser.

  3   Q.  Monsieur Maric, que pensez-vous de la multiethnicité à Mostar ?

  4   Estimez-vous que Mostar aurait dû devenir une ville exclusivement croate ?

  5   R.  A mon avis, Mostar était et continuera à être une ville multiethnique

  6   en Bosnie-Herzégovine, c'est la seule possibilité.

  7   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie des

  8   quelques minutes supplémentaires que vous m'avez accordées.

  9   Monsieur Maric, merci beaucoup. J'en ai terminé.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de donner la parole aux autres défenses qui

 11   ont une heure 30 pour vous poser également des questions, nous sommes, nous

 12   les Juges, devant le problème suivant, qui n'est pas un problème

 13   fondamental mais qui est dans l'acte d'accusation et dans le mémoire

 14   préalable. L'Accusation soutient que les civils qui étaient à Mostar Est ne

 15   pouvaient pas quitter la ville, soit, par le nord, soit, par le sud. C'est

 16   la thèse que Mme West a d'ailleurs défendue ici en contre-interrogeant

 17   plusieurs témoins carte à l'appui.

 18   Tout à l'heure, on a vu un document qui émane de l'ABiH, donc de l'autre

 19   partie, où le général Pasalic manifestement demande que ça soit les

 20   autorités civiles qui assurent le transport des civils vers le nord et vers

 21   le sud. C'est écrit noir sur blanc. Si le général Pasalic écrit ça, à moins

 22   qu'il soit à l'époque totalement incompétent, c'est que, dans son esprit,

 23   les civils pouvaient se déplacer. Vous, vous avez, en répondant à Me

 24   Alaburic, dit qu'ils pouvaient se déplacer.

 25   Mais, moi, ce que je veux savoir, car on a vu tout à l'heure un autre

 26   document où on demandait au 1er Corps qui était à Sarajevo d'envoyer des

 27   unités. Quand l'ABiH était renforcée au point de vue des unités, les

 28   soldats de l'ABiH qui arrivaient au niveau de Mostar, comment ils faisaient

Page 48218

  1   pour arriver ? On les envoyait par parachute ou ils passaient par la route

  2   ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, l'arrivée des effectifs

  4   attendue par des unités à Mostar était possible en provenance du nord et

  5   l'a été pendant tout le temps en passant par Glogosnica-Glogovo, Bijela,

  6   Ravni et Bijelo Polje. La même chose a été possible avec quelques

  7   interruptions en utilisant la grande route Konjic-Jablanica-Bijela, et

  8   pendant une période assez brève cela a été possible en passant par la

  9   montagne ce qui impliquait une heure de marche à peu près vers le village

 10   de Ravno, et ensuite il était de nouveau possible d'utiliser des véhicules

 11   pour aller vers Kotoni [phon] et Bijelo Polje.

 12   Cela a été possible également parce que les forces de l'ABiH avaient un

 13   raccourci en passant par le Vieux pont de Bijela, en passant sous le Vieux

 14   pont de Bijela, à savoir en empruntant l'ancienne route reliant Jablanica à

 15   Mostar. Il y avait donc en utilisant les canalisations qui alimentaient la

 16   centrale électrique de Salakovac, il était possible d'utiliser un autre

 17   passage.

 18   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, une correction, s'il

 19   vous plaît. A la ligne 18, de la page 48, il est indiqué au compte rendu

 20   que le témoin aurait dit en empruntant la route de Konjic alors que le

 21   témoin a dit en empruntant la grande route partant de Konjic et reliant

 22   Jablanica à Mostar.

 23   Q.  [aucune interprétation]

 24   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je pensais que vous corrigiez

 25   simplement le compte rendu d'audience et que vous ne posiez pas d'autre

 26   question étant donné que vous n'avez plus de temps.

 27   Monsieur le Témoin, vous avez dit que pendant un court laps de temps, ceci

 28   se trouve à la page 48, ligne 19, que pour un court laps de temps, il était

Page 48219

  1   possible de passer par la colline si on allait à pied pendant une heure

  2   environ. Pourquoi avez-vous dit pendant un court laps de temps ? Pourriez-

  3   vous nous expliquer ceci, s'il vous plaît ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était une période qui a fait suite aux

  5   affrontements puis au retrait de certains éléments des unités du HVO dans

  6   la zone de Bijelo Polje, plus précisément, dans les villages situés en

  7   surplomb de Bijelo Polje. Après le 30 juin, peu de temps après cette date,

  8   l'ABiH a ajusté le niveau du lac de retenu de la centrale électrique de

  9   Salakovac ce qui permettait d'emprunter la route jusqu'au pont de Bijela,

 10   et ensuite de monter à bord d'un véhicule pour poursuivre jusqu'au village

 11   de Ravno. Voilà ce que j'avais à l'esprit, lorsque j'ai dit pendant une

 12   brève période, car je pensais à la période allant du 30 juin aux environs

 13   du 10 juillet.

 14   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les Juges,

 15   je demande encore une correction au compte rendu qui est importante, car il

 16   y est précisément à la question posée par M. le Juge Trechsel. Je dois dire

 17   que je comprends mal ce qui est écrit au compte rendu. Le témoin n'a pas

 18   dit "pendant une brève période," n'a pas dit "for a short time," mais a dit

 19   "after a short time." Donc après une période assez courte, une nouvelle

 20   voie de circulation s'est ouverte, je crois que c'est cela que le témoin a

 21   voulu dire.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 23   Alors je vais maintenant interroger la Défense pour savoir qui va

 24   commencer. On va commencer par D1 -- des questions pour D1 ?

 25   Mme TOMANOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Messieurs

 26   les Juges. La Défense de M. Prlic n'a pas de questions à poser à ce témoin.

 27   Je vous remercie.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : D2 ?

Page 48220

  1   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour. La

  2   Défense de M. Stojic n'a pas non plus de questions à poser à ce témoin.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. D3 ?

  4   Mme PINTER : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire. Bonjour,

  5   Monsieur le Président, Messieurs les Juges. La Défense du général Praljak -

  6   - ou plutôt, le général Praljak en personne, aura des questions à poser à

  7   ce témoin. Le général Praljak a été évoqué comme ayant abordé certaines

  8   questions. Ceci a été dit au cours de l'interrogatoire principal. Par

  9   ailleurs, il a participé personnellement à des événements qui ont été

 10   évoqués, et il a des renseignements tout à fait particuliers au sujet de

 11   ces journées, donc voilà quels seront les sujets abordés par le général

 12   Praljak dans son contre-interrogatoire.

 13   Il est de mon devoir d'informer les personnes présentes dans le prétoire au

 14   sujet de la pertinence des sujets qui seront abordés au cours du contre-

 15   interrogatoire. Les documents utilisés seront le 3D 00455, qui concerne le

 16   paragraphe 112 de l'acte d'accusation, 17.3(i), et ce sujet est évoqué en

 17   page 64 du compte rendu de la journée d'hier. Pour le paragraphe de l'acte

 18   d'accusation, j'ai dit numéro 117. Le document suivant que nous allons

 19   utiliser est une pièce déjà versée au dossier. Il s'agit de la pièce

 20   P 6365, qui concerne directement le paragraphe 114 de l'acte d'accusation,

 21   et au compte rendu d'audience, ce sujet a été évoqué hier suite à une

 22   question posée par M. le Juge Antonetti au moment où l'on était en train de

 23   discuter du document d'Arif Pasalic, 4D 00488, dans lequel on aborde

 24   également la question des tireurs embusqués. Les autres questions que

 25   j'aborderai concernent les paragraphes 27, 26, 88 à 117, qui concernent

 26   Mostar, tous sujets abordés au cours de l'interrogatoire principal.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Général Praljak.

 28   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

Page 48221

  1   Messieurs les Juges. Je vous remercie.

  2   Contre-interrogatoire par l'accusé Praljak :

  3   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Maric.

  4   R.  Bonjour.

  5   Q.  Bien. Allons-y. Me connaissez-vous ?

  6   R.  Je vous connais.

  7   Q.  Nous allons rapidement passer en revue un certain nombre de sujets. Je

  8   voudrais que nous simplifiions au maximum la procédure. Alors je vous

  9   prierais de réfléchir un peu à la question de l'artillerie. Qu'en est-il

 10   des modalités de dépense -- d'utilisation des munitions d'artillerie, et ce

 11   en rapport avec les objectifs visés par les actions en question ? Je vous

 12   demanderais de vous pencher sur le document 3D 00455. C'est un document

 13   déjà versé au dossier et vous y trouverez deux tableaux. Si l'on souhaite

 14   neutraliser 25 % des objectifs de l'ennemi ou neutraliser 80 % des

 15   objectifs de l'ennemi -- donc je parle de l'objectif poursuivi, 80 % de

 16   destruction ou 25 % de destruction.

 17   Alors voici ma question : suite aux affrontements du 30 juin 1993,

 18   quelle était la rue principale de Mostar Est ?

 19   R.  La rue principale de Mostar Est est la rue de Tito.

 20   Q.  La rue du maréchal Tito; c'est bien ça ?

 21   R.  La rue du maréchal Tito, oui.

 22   Q.  Alors dites-moi : est-ce que l'ABiH avait, dans cette rue-là, des

 23   installations militaires, autrement dit centres de Commandement ou quelque

 24   chose de ce genre ? Si vous le savez, pouvez-vous nous dire quels sont les

 25   objectifs militaires que l'ABiH a installés dans la rue principale de

 26   Mostar Est ?

 27   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je sais qu'il y avait, dans

 28   cette rue-là, plusieurs objectifs militaires utilisés par les forces de

Page 48222

  1   l'ABiH, à commencer par l'immeuble du SDK qui abritait le commandement du

  2   4e Corps d'armée en passant par le théâtre national, l'immeuble de

  3   Razvitak, qui avait des caves très vastes, et puis l'immeuble de l'ancienne

  4   JNA, c'était son centre régional qui se trouvait non loin de la gare

  5   ferroviaire, et il y avait aussi la prison militaire qui était abritée dans

  6   l'école primaire numéro 4. Cette rue du maréchal Tito se poursuit ensuite

  7   vers le sud, et le camp sud de l'ex-JNA se trouvait dans les confins

  8   méridionaux de la ville, parallèlement à cette rue du maréchal Tito, et

  9   pendant la guerre, ce camp sud a été utilisé par les forces de l'ABiH.

 10   Q.  Monsieur le Brigadier, est-ce que pendant la guerre, une installation

 11   militaire constitue une cible militaire ?

 12   R.  Une installation militaire en temps de guerre constitue une cible

 13   militaire légitime.

 14   Q.  Tout ce que vous venez d'énumérer, et ce que vous n'avez pas énuméré

 15   aussi, était-ce installé dans une agglomération peuplée de façon dense

 16   d'une population civile ?

 17   R.  La plupart de ces installations se trouvent dans la partie densément

 18   habitée de la ville.

 19   Q.  Monsieur le Brigadier, de l'autre côté, pendant ce temps, le commandant

 20   du HVO c'est moi; est-ce bien exact ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Le commandant de la zone opérationnelle, c'est M. Mico Lasic, n'est-ce

 23   pas, le général ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  En 1993, dans la deuxième moitié de 1993, dans le secteur de Mostar,

 26   une zone opérationnelle de Mostar, qui attaque qui, et comment est-il

 27   attaqué ? De façon moyenne, forte, faible ?

 28   R.  Dans la deuxième moitié de 1993, les Unités du HVO subissent des

Page 48223

  1   attaques de la part des unités de l'ABiH.

  2   Q.  Je vais mentionner le 4D 00793. Il s'agit du document daté du 20

  3   septembre 1993 où le général Pasalic dit que le HVO a attaqué avec

  4   l'artillerie ses premières lignes de front à lui. Alors est-ce que vous

  5   pouvez vous rappeler de cette grande attaque contre le mont Hum où il y a

  6   eu de grosses pertes de subies par -- vous souvenez-vous de cela ? Il

  7   s'agissait d'une attaque de l'ABiH sur le mont Hum et, en contrebas de Hum,

  8   vers la rue Liska, le secteur qu'on appelle pont Hum ?

  9   R.  Si je me souviens bien, c'est la date du 19 septembre.

 10   Q.  C'est exact. Alors, dites-moi maintenant, est-ce que vous vous rappelez

 11   du soutien à l'artillerie bénéficié par l'ABiH lors de l'attaque ce jour-

 12   là, et cela venait de la part de qui ?

 13   R.  Je m'en souviens fort bien. Cela venait de trois origines. Il y avait

 14   un soutien de la part de l'armée de la Republika Srpska.

 15   Q.  Monsieur, Brigadier Maric, penchez-vous sur les tableaux de données,

 16   ici. Si j'avais eu à accomplir ma mission, moi et Mico Lasic, si on avait

 17   donné l'ordre à l'artillerie de détruire les installations militaires de

 18   l'ABiH qui, comme vous nous l'avez dit, avait lancé une attaque contre nous

 19   - donc je parle des installations militaires dans la ville de Mostar - est-

 20   ce que nous aurions eu à dépenser des milliers et des milliers d'obus pour

 21   procéder à une neutralisation des cibles à 80 % de celles-ci, par exemple ?

 22   R.  C'est exact, mon Général.

 23   Q.  Si une source neutre internationale qui avait compté les obus qui sont

 24   tombés sur la partie est vous disait que pendant cinq mois et demi de cette

 25   deuxième moitié de l'année 1993 sur la partie est de Mostar, on a compté en

 26   tout et pour tout 850 obus, est-ce que vous trouveriez que ce serait là un

 27   pilonnage non sélectif exagéré, ou est-ce que vous auriez estimé que c'est

 28   du minimum de ce que l'on pourrait tirer pour ce qui est des circonstances

Page 48224

  1   de l'attaque de l'ABiH ?

  2   R.  J dirais que c'est le minimum minimorum.

  3   Q.  Dites-moi -- quoi ?

  4   Mme ALABURIC : [interprétation] Rectification de la traduction, de

  5   l'interprétation. Je demande au témoin de répéter sa réponse et je demande

  6   à ce que l'on traduise exactement ce que le témoin a dit.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que je n'avais pas d'autre terme pour

  8   remplacer le minimum du minimum, et pour s'exprimer de façon imagée, je

  9   dirais que ça aurait été le minimum minimorum pour ce qui est de ce

 10   rapprocher des normes nécessaires aux fins de détruire les cibles qui se

 11   trouvaient de l'autre côté auprès de l'ABiH.

 12   M. PRALJAK : [interprétation]

 13   Q.  Les observateurs en matière d'artillerie, d'après vous, est-ce qu'ils

 14   rapportaient de la chose, à savoir que l'ABiH avec ses mortiers et tirs de

 15   mortiers et tirs de Zis [phon] et autres pièces d'artillerie procédaient à

 16   des tirs depuis la ville même, c'est-à-dire à proximité, depuis les

 17   alentours de l'hôpital et autres sites ?

 18   R.  Les observateurs qui ont été là-bas pour suivre tout ce qui se passait

 19   ont rapporté ce type de chose précisément.

 20   Q.  Mon Brigadier, nous sommes en 1992. Veuillez me dire à quel groupe

 21   ethnique appartenez-vous ?

 22   R.  Je suis Croate de naissance.

 23   Q.  Est-ce que de votre connaissance, les Croates, en application de la

 24   constitution de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine,

 25   constituaient un peuple constitutif de cette République de Bosnie-

 26   Herzégovine ?

 27   R.  Oui.

 28   Mme WEST : [interprétation] Objection. Il ne s'agit pas de questions

Page 48225

  1   portant sur l'artillerie ici, Monsieur le Président.

  2   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Bon. Alors, il s'agissait de savoir,

  3   enfin, qui avait droit à des droits en Bosnie-Herzégovine et c'est une

  4   question posée par M. le Juge Trechsel.

  5   M. PRALJAK : [interprétation]

  6   Q.  Est-ce que nous, Croates en Bosnie-Herzégovine, en nous présentant un

  7   référendum, avons rendu possible à la Bosnie-Herzégovine une reconnaissance

  8   internationale ?

  9   R.  Oui. En nous présentant au référendum, nous avons de notre propre gré -

 10   -

 11   Mme WEST : [interprétation] Objection. Même si ceci a été évoqué pendant

 12   l'interrogatoire principal, ceci n'autorise pas M. Praljak à poser cette

 13   question.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre sait que vous avez une grande compétence,

 15   y compris en matière constitutionnelle ou politique. Nous le savons, ce

 16   qu'on ne savait pas au début mais nous le savons maintenant. Mais le

 17   témoin, il vient pour parler d'artillerie. Alors, c'est beaucoup plus

 18   important qu'il nous dise, par exemple, mais si vous posez pas la question,

 19   moi je vais la poser, la question du Vieux pont.

 20   Comment est-ce que le Vieux pont a pu s'écrouler suite à un tir "d'un

 21   tank" ou d'ailleurs ? Voilà. C'est certainement plus intéressant que les

 22   problèmes constitutionnels que tout le monde connaît, que le témoin

 23   connaît. Voilà. Et d'où l'objection de Mme West.

 24   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, mais c'est

 25   vous qui avez demandé au témoin justement qui est-ce qu'il défendait. Moi,

 26   je lui demande de nous tirer la chose au clair. Qui est-ce que nous

 27   défendions ? Je voulais savoir si M. Maric était venu en Bosnie-Herzégovine

 28   depuis la Croatie, de la Tanzanie ou d'un pays exotique quelconque, ou est-

Page 48226

  1   ce qu'il est venu en Bosnie-Herzégovine, ou est-ce qu'il est venu donc de

  2   Bosnie-Herzégovine pour se défendre.

  3   M. PRALJAK : [interprétation] ?

  4   Q.  Qui est-ce que vous défendiez ? Qui est-ce qui vous attaquait ?

  5   R.  En 1992, l'ennemi pour ce qui est du peuple croate et du peuple

  6   bosnien, c'était l'armée populaire yougoslave et l'armée de la Republika

  7   Srpska.

  8   Q.  M. le Juge Antonetti vous a demandé si M. Izetbegovic avait disposé

  9   d'une armée pour l'envoyer aider Mostar à se défendre ou est-ce que d'après

 10   ce que vous en savez, il avait considéré la JNA, jusqu'à l'attaque de

 11   Sarajevo, comme étant l'armée qui viendrait aider la Bosnie-Herzégovine et

 12   sauver la Bosnie-Herzégovine ?

 13   R.  Oui. Pour autant que je le sache --

 14   Mme WEST : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Même

 15   question. Le fait qu'on en ait parlé pendant l'interrogatoire principal

 16   n'autorise pas pour autant M. Praljak à poser la question.

 17   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je peux

 18   avoir l'autorisation de répondre ? Parce que c'est une question militaire,

 19   la question de savoir s'il y avait une armée à combattre ou pas, et M.

 20   Praljak - vous le savez tous parfaitement - a été partie prenant d'emblée

 21   d'entrée de jeu. Donc, je pense que c'est manifestement pertinent.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. De mon point de vue, le témoin peut répondre,

 23   mais l'utilité du témoin me semble vraiment autre. D'ailleurs, je lui ai

 24   posé la question déjà. Vous voulez revenir dessus. J'ai pas insisté, mais

 25   bon. Posez votre question mais il vaut mieux passer à autre chose après.

 26   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge Antonetti, j'y

 27   viendrai à cette question, étant donné que j'ai le temps de le faire et je

 28   le ferai très prochainement. Ce que je voulais dire et demander au témoin,

Page 48227

  1   c'est de nous répondre s'il y avait une autre armée, mis à part le HVO, à

  2   même à l'époque d'empêcher l'avancée de la JNA vers l'ouest en passant par

  3   Mostar.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Sur ce secteur-là, je sais pour sûr qu'il n'y

  5   avait pas d'autres effectifs, si ce n'est les effectifs du HVO.

  6   M. PRALJAK : [interprétation]

  7   Q.  Dites-nous : qui est-ce qui a bombardé en 1992 Mostar, a commencé par

  8   le mois d'avril ?

  9   R.  C'est les membres de l'armée populaire yougoslave qui ont bombardé

 10   Mostar.

 11   Q.  Combien de parties de Mostar a-t-on détruit pendant ces bombardements ?

 12   R.  Je ne sais pas vous donner de pourcentage, mais la grande majorité des

 13   installations a été détruite par les tirs de l'armée populaire yougoslave,

 14   y compris la totalité des ponts dans la ville sur la Neretva ce qui était

 15   utilisé pour le trafic des voitures, des véhicules.

 16   Q.  A quelle date l'armée de Republika Srpska, voire la JNA a-t-elle chassé

 17   la totalité des gens de la rive est vers la rive ouest ?

 18   R.  Ça c'est au début du mois d'avril 1992 que ça s'est passé.

 19   Q.  Quand à peu près y a-t-il eu cette opération de libération de la rive

 20   droite de la Neretva, la partie droite de Mostar puisque les Serbes étaient

 21   sur les collines sur les hauteurs, quand cette opération a-t-elle donc eu

 22   lieu ?

 23   R.  Elle a eu lieu début juin 1992.

 24   Q.  Qui est-ce qui a commandé l'ordre de la conduite de cette opération ?

 25   R.  Oui, vous, Monsieur -- mon Général.

 26   Q.  Au bout de quelques journées, il y a eu traversée de la Neretva depuis

 27   Buna et au-delà plus au nord et avant cela sur l'axe Capljina-Stolac, et

 28   qui est-ce qui a donné l'ordre de traverser et qui est-ce qui a commandé ne

Page 48228

  1   serait-ce que pendant une partie de cette opération, si ce n'est pas

  2   jusqu'à la fin ?

  3   R.  Vous, mon Général.

  4   Q.  D'après vos renseignements à vous, combien a-t-on eu de pertes, de

  5   morts et de blessés pendant cette opération ? Si vous n'avez pas de donnée

  6   précise, tant pis.

  7   R.  Je n'ai pas de donnée précise, mais pour ce qui est des opérations

  8   contre les Serbes, nous avons eu des dizaines de victimes à Mostar.

  9   Q.  Dites-nous, Brigadier Maric : combien d'obus d'artillerie avions-nous à

 10   notre disposition au moment où nous avons décidé de traverser la Neretva

 11   pour libérer la partie est ?

 12   R.  Etant donné que dans les documents ça s'exprime par jeux de combat ou

 13   sets de combat, nous avions pour chaque pièce d'artillerie un set

 14   incomplet.

 15   Q.  Alors s'il y avait eu un accord avec les Serbes, cela aurait-il

 16   constitué une opération facile, et pourquoi du reste serions-nous allés

 17   vers l'est puisqu'il y avait une majorité musulmane là-bas ? Pourquoi

 18   aurions-nous établi un accord avec les Serbes ?

 19   R.  Je ne suis pas du tout au courant de l'existence d'un accord avec les

 20   Serbes.

 21   Q.  Lorsque nous avons libéré la rive droite de la Neretva, qu'est-il

 22   arrivé aux 115 Croates et Musulmans qui se trouvaient à Uborak et Sutina ?

 23   R.  Il y a eu des meurtres, un massacre.

 24   Q.  Qui a tué qui ?

 25   R.  C'est les forces serbes qui ont commis des meurtres de Musulmans et

 26   Croates.

 27   Q.  Vous nous dites que le Vieux pont était le seul à être resté. Est-ce

 28   que lors des combats, pour traverser vers la partie est, il y a eu

Page 48229

  1   protection de ce pont moyennant cubes et planches ?

  2   R.  Oui, Général.

  3   Q.  Etait-ce à l'époque où on s'était battu pour des fortifications à

  4   proximité du pont ?

  5   R.  Ça je ne sais pas vous le dire avec précision.

  6   Q.  Qui est-ce qui a protégé ce Vieux pont ?

  7   R.  Ce Vieux pont a été protégé par les Unités du Génie du HVO.

  8   Q.  Savez-vous nous dire qui est-ce qui a donné l'ordre, pendant la durée

  9   des combats, de procéder à des mesures de protection du Vieux pont ?

 10   R.  Je le sais. Mon Général, c'est vous.

 11   Q.  Veuillez nous indiquer, depuis le début jusqu'à la fin, l'artillerie

 12   serbe, en tirant en direction de la partie ouest et de la partie est de

 13   Mostar, s'est-elle efforcée de générer des conflits entre l'ABiH et le HVO,

 14   et ce, sans cesse jusqu'à la fin de la guerre ?

 15   R.  Ça c'est absolument exact. Les unités serbes ont constamment généré des

 16   conflits entre ces deux armées-là.

 17   Q.  Essayons de tirer au clair à présent ceci. Jusqu'à la fin de l'année

 18   1993, et ce, à commencer par le moment de la libération de Mostar, saviez-

 19   vous que le HVO à quelque niveau que ce soit aurait planifié ou attaqué ou

 20   de quelque façon que ce soit entravé la création d'Unités de l'ABiH dans ce

 21   secteur ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Est-ce que l'ABiH de facto tout ce qu'elle avait comme arme et armement

 24   elle l'avait reçu de la part des Croates, c'est-à-dire du HVO ?

 25   R.  D'après mes informations, oui, et je puis notamment confirmer qu'il y a

 26   eu de grandes quantités de saisies suite aux opérations contre les Serbes

 27   que j'ai distribuées en personne en partant de Mostar jusqu'à Sarajevo.

 28   Q.  Revenons à cette deuxième moitié de l'année 1993. Vous avez énuméré

Page 48230

  1   Vrdi, Jug, Blagaj, Buna, Hum. Est-ce que les attaques de l'ABiH, peuvent

  2   être qualifiées, comme l'a demandé M. le Juge Antonetti, elles peuvent être

  3   qualifiées d'escarmouches, ou est-ce que ce sont là des grandes batailles

  4   ou opérations de combat pour nos circonstances à nous où nous nous sommes

  5   défendus et où l'ABiH attaquait ?

  6   R.  Il y a eu des combats de longue durée, intenses et violents suite aux

  7   attaques lancées par l'ABiH contre les positions du HVO.

  8   Q.  Du point de vue de l'artillerie, vous aviez une position tenue à Hum.

  9   Est-ce que vous pouvez placer là-bas un canon de 130 millimètres ?

 10   R.  Non, mon Général, pas à Hum. Un canon de 130 millimètres ne peut pas

 11   être placé à Hum.

 12   Q.  Qu'est-ce qu'on peut placer ?

 13   R.  Un calibre de moindre taille.

 14   Q.  Est-ce que depuis cet endroit-là il vous est donné la possibilité de

 15   voir - excusez-moi d'aller si vite - est-ce que depuis là vous pouvez voir

 16   le Vieux pont, c'est-à-dire est-ce que vous pouvez le voir dans

 17   l'alignement de votre canon, sans avoir à calculer la trajectoire ou quoi

 18   que ce soit d'autre ?

 19   R.  A partir de certains endroits, oui.

 20   Q.  Si je l'avais voulu, moi ou quelqu'un d'autre, est-ce que, dans la

 21   matinée lorsque le jour commence à pointe, on pouvait moyennant deux ou

 22   trois obus détruire le Vieux pont à quelque moment que ce soit de nos

 23   conflits contre l'ABiH ?

 24   R.  Je ne suis pas sûr avec trois obus, mais avec dix obus, oui.

 25   Q.  Donc en tirant vers le milieu avec des tirs à retardement --

 26   R.  Je n'ai pas ce type d'expérience.

 27   Q.  Ça, on va le demander au général Petkovic le moment venu. Les autres

 28   questions vous seront posées par M. le Juge Antonetti. Moi, je n'ai plus de

Page 48231

  1   questions à vous poser au sujet de ce Vieux pont, parce que tout ce que

  2   j'avais eu à dire sur ce sujet, je l'ai déjà dit.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question de suivi sur le Vieux pont. Vous

  4   connaissez l'importance symbolique de ce Vieux pont. Vous savez qu'il a été

  5   détruit. Vous savez que des tankistes ont été poursuivis, et puis vous

  6   savez que les accusés ici présents sont rendus responsables de la

  7   destruction du Vieux pont.

  8   Alors, moi, en termes militaires -- uniquement en termes militaires,

  9   comment ça se passe si on demande à l'artillerie de détruire un pont ? Y a-

 10   t-il un ordre ? Y a-t-il des préparatifs ? Comment techniquement ça peut se

 11   passer ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la

 13   destruction d'une construction de ce genre exige une longue préparation. Il

 14   faut commencer par observer, faire des choix, choisir une position de tir,

 15   choisir les équipements et les instruments nécessaires, choisir les

 16   munitions qui sont les plus appropriés, et effectuer un certain nombre de

 17   travaux de construction. Il faut aussi toutes sortes d'autres conditions

 18   préalables de moindre importance, et notamment, il faut disposer

 19   d'instruments très élaborés qui peuvent vous permettre d'apprécier la

 20   distance exacte vous séparant de l'objectif. Donc toutes sortes d'éléments

 21   de plus ou moins grande importance sont nécessaires. Autrement dit, un tel

 22   travail exige de nombreuses actions préalables avant de pouvoir se lancer

 23   dans la destruction d'un pont de ce genre.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Toujours en termes militaires, est-il

 25   concevable qu'un tank se positionne sans ordre et se mette à tirer sur le

 26   Vieux pont ? Est-ce que militairement c'est possible ou pas ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que militairement ceci est

 28   impossible.

Page 48232

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, dans l'hypothèse où ça se serait passé comme

  2   cela, un tank aurait tiré sur le Vieux pont sans ordre, ou avec ordre, mais

  3   s'il y a un ordre, on doit nous le produire. Moi, jusqu'à présent, je n'ai

  4   vu aucun ordre. Mais si un tank tire sans ordre, l'autorité de

  5   commandement, que doit-elle faire ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Par les moyens les plus rapides, donc en

  7   urgence, retirer cette arme en l'empêchant d'agir.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Le jour où le pont s'est écroulé c'était au mois de

  9   novembre 1993. Vous étiez où vous ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est arrivé quelques jours avant que je ne

 11   sois blessé. J'étais, à ce moment-là, en tournée d'inspection sur les

 12   champs de bataille du sud à une dizaine de kilomètres de Mostar -- au sud

 13   de Mostar.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Vous étiez à dix kilomètres au sud de Mostar.

 15   Mais partant de l'hypothèse où le général Praljak aurait pris la décision

 16   de détruire le Vieux pont, je suppose qu'il y aurait eu des ordres écrits,

 17   et je suppose peut-être que vous, en tant que responsable de l'artillerie,

 18   vous auriez été au courant.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suppose que cela se serait passé ainsi.

 20   Mais je n'ai eu aucune information indiquant que qui que ce soit du côté du

 21   HVO aurait pu planifier et mener à bien cette opération.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Si je pars de l'hypothèse -- si on procède par

 23   hypothèse où le général Praljak aurait décidé, pour une raison X, Y ou Z,

 24   de détruire le Vieux pont, est-ce qu'il aurait, à ce moment-là, convoqué le

 25   responsable de l'artillerie pour étudier avec lui le meilleur moyen de

 26   procéder pour détruire le Vieux pont ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Si tel avait été le plan, il est évident qu'il

 28   m'aurait convoqué, moi-même ou qui que ce soit d'autre responsable d'une

Page 48233

  1   mission de ce genre. Si, par exemple, j'avais refusé cette mission.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. A quel moment vous avez appris que le Vieux

  3   pont avait été détruit ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors que nous étions sur le chemin de retour,

  5   nous avons rencontré un officier subalterne du HVO qui nous a dit que le

  6   Vieux pont avait été détruit, qu'il était tombé.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle a été votre réaction ? Est-ce que vous vous

  8   êtes renseigné sur savoir qui avait fait ça, comment ça avait pu se passer

  9   dans votre dos ? Parce que s'il fallait détruire, on aurait dû certainement

 10   avoir recours à vous, et vous avez dit que vous auriez refusé. Est-ce que

 11   vous avez demandé à votre commandement qu'on fasse une enquête ? Quelle a

 12   été votre réaction ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Etant donné que l'artillerie du HVO n'a aucun

 14   rapport avec la destruction du Vieux pont, je n'ai personnellement demandé

 15   aucune enquête. Mais les organes compétents de la zone opérationnelle ont

 16   sans doute été informés de la destruction du Vieux pont. Cela dit, je ne

 17   sais pas si une enquête a été menée ou à quel niveau elle a pu l'être.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question : le tank qui tire sur le Vieux

 19   pont - je ne dis pas que c'est le tank qui a détruit le Vieux pont je n'en

 20   sais rien, les Juges en délibéreront entre eux - mais le tank qui aurait -

 21   j'emploie le conditionnel - tiré sur le Vieux pont et détruit le Vieux

 22   pont, il relèverait, lui, de quelle autorité de commandement, à votre

 23   connaissance ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la zone opérationnelle de Mostar, il y

 25   avait un Bataillon de Tanks qui possédait un certain nombre de chars assez

 26   anciens qui, pour la plupart, agissaient aux fins d'empêcher un afflux de

 27   l'ennemi dans des secteurs franchissables par des tanks. Donc ils avaient

 28   une mobilité très réduite, ces tanks dont je parle, et le bataillon en

Page 48234

  1   question se trouvait sous le commandement de la région militaire de Mostar

  2   -- de la zone opérationnelle de Mostar.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc zone opérationnelle de Mostar. Bon, très

  4   bien.

  5   Général Praljak, continuez.

  6   M. PRALJAK : [interprétation]

  7   Q.  Les chars n'ont aucun rapport avec l'artillerie, n'est-ce pas ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Deuxièmement, les chars sont normalement subordonnés directement au

 10   commandement du Bataillon de Chars, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Ce commandant est subordonné au commandant de la zone opérationnelle,

 13   n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Etes-vous au courant du fait qu'après la destruction du Vieux pont, une

 16   enquête a été menée mais elle n'a jamais été terminée, et elle avait pour

 17   but de déterminer qui avait tiré sur le Vieux pont ?

 18   R.  Je suis au courant.

 19   Q.  Avez-vous à quelque moment que ce soit eu sous les yeux les résultats

 20   écrits de cette enquête ?

 21   R.  Pour autant que je le sache, il a été question de deux ou trois noms de

 22   suspects éventuels pour cette action, suspects de participation à cette

 23   action.

 24   Q.  D'accord. Voyons un autre document. C'est un film qui est déjà versé au

 25   dossier.

 26   M. PRALJAK : [interprétation] La pièce P 6365.

 27   Q.  Vous verrez donc ce film dont l'auteur affirme --

 28   [Diffusion de la cassette vidéo]

Page 48235

  1   M. PRALJAK : [interprétation] Je demande que l'on revienne en arrière.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois rien sur mon écran. 

  3   M. PRALJAK : [interprétation] Rembobinage, s'il vous plaît.

  4   [Diffusion de la cassette vidéo]

  5   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  6   "Peu de temps après, une autre scène chargée d'émotion. Peu de temps après,

  7   une autre urgence. Une femme gît au bas d'un terre-plein."

  8   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

  9   M. PRALJAK : [interprétation]

 10   Q.  S'il vous plaît. L'auteur de ce film déclare que cette malheureuse

 11   femme a été touchée par un tir de tireur embusqué. Elle est sur la rive

 12   gauche de la Neretva, tir provenant des positions du HVO.

 13   Alors, ma question, Monsieur, puisque vous êtes habitant de Mostar et qu'en

 14   votre qualité d'artilleur, vous avez un bon sens de l'orientation, depuis

 15   le Vieux pont où se trouvaient les lignes, y a-t-il un seul endroit dans la

 16   partie ouest de la ville à partir duquel on peut voir la rive gauche de la

 17   Neretva ?

 18   Mme WEST : [interprétation] Excusez-moi d'avoir attendu la fin de la

 19   question pour savoir si c'est en rapport avec ce que le témoin a dit à

 20   propos de l'artillerie mais ce n'est pas le cas. Donc, mon objection.

 21   Mme PINTER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais répondre à

 22   cette objection.

 23   Dans les paragraphes 7 et 8 de l'acte d'accusation ainsi que dans les

 24   paragraphes 16 et 17 de cet acte d'accusation, il est affirmé que le

 25   général Praljak, entre autres, serait responsable de tous les événements

 26   survenus à Mostar, de même que de ces incidents liés aux tireurs embusqués.

 27   Ça, c'est mon premier point.

 28   Deuxième point. Le terrain de Mostar est bien connu par le général Praljak

Page 48236

  1   car il a habité dans cette ville, il est allé à l'école dans cette ville.

  2   Il connaît donc très bien les deux rives de la Neretva. Nous parlons donc

  3   d'un domaine qui fait l'objet de la part du général Praljak de

  4   connaissances tout à fait approfondies, car elles proviennent de son vécu.

  5   Donc, Mme West a élevé une objection qui est infondée.

  6   Par ailleurs, le témoin, M. Maric, connaît bien également les deux rives de

  7   la Neretva, ainsi que la ville de Mostar.

  8   Mme ALABURIC : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le

  9   Président, j'aimerais joindre ma voix à celle de Me Pinter. Conformément à

 10   l'article 90(H)(i), le contre-interrogatoire peut s'appuyer sur les sujets

 11   déjà abordés au cours de l'interrogatoire principal, peut également évoquer

 12   des sujets liés à la crédibilité du témoin et peut également concerner

 13   d'autres sujets directement pertinents pour le procès.

 14   Donc dans le contre-interrogatoire, les parties n'ont pas nécessité de

 15   demander l'autorisation à la Chambre de première instance d'aborder ces

 16   sujets. Je vous rappelle ceci pour déterminer également le rôle de la

 17   Chambre de première instance qui a déjà décidé --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : -- [hors micro] Me Kovacic que je pose la question.

 19   Que le général Praljak connaisse les lieux et la vidéo, on est tous

 20   d'accord. Mais le seul problème, c'est de savoir : est-ce que le témoin

 21   connaît les lieux et que peut-il apporter comme valeur ajoutée ? Parce que

 22   si c'est pour confirmer ce que connaît le général Praljak, il nous l'a déjà

 23   dit. Donc, la question, c'est : qu'est-ce que le témoin peut apporter par

 24   rapport à cette vidéo ?

 25   Bien. Alors, Monsieur mon Colonel, vous avez entendu, vous avez vu très

 26   rapidement une vidéo. Vous connaissez les lieux, vous pouvez apporter, dire

 27   quelque chose ou bien vous ne pouvez rien dire ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'est très désagréable de regarder ces

Page 48237

  1   images, mais je demanderais tout de même que l'on rembobine la vidéo et

  2   qu'on me montre à plus faible vitesse les images depuis le début.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  5   "Le commentateur : Cette femme lavait son linge.

  6   Une autre femme : Vous voyez où elle a été touchée ?

  7   Le commentateur : Elle est déjà morte. Elle a été touchée par un tir de

  8   tireur embusqué croate."

  9   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 10   M. PRALJAK : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur le Témoin, à dix mètres de la rivière, quand les gens

 12   s'approchent du cadavre, est-ce qu'on voit la rive droite de la Neretva ?

 13   Est-ce qu'à partir de l'endroit en question, on voit la rive droite de la

 14   Neretva ?

 15   R.  Non.

 16   Q.  Donc la rivière est profonde --

 17   [Diffusion de la cassette vidéo]

 18   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 19   "Une autre urgence. Une femme gisait sur les rives du fleuve. Elle -- le

 20   corps d'une femme gît sur le bord de la rivière. Elle était en train de

 21   laver son linge."

 22   M. PRALJAK : [interprétation] Stop.

 23   [Fin de la diffusion de cassette vidéo]

 24   M. PRALJAK : [interprétation]

 25   Q.  Donc, voici ma question. Encore une fois, vous avez vu des gens qui

 26   couraient. Vous connaissez la Neretva. Vous savez très bien que si vous

 27   êtes à dix mètres de la rive, vous ne voyez ni un côté, ni l'autre. Moi, je

 28   le sais. Je ne sais pas si vous savez la même chose que moi ou si vous avez

Page 48238

  1   un avis différent du mien.

  2   R.  Monsieur le Général, cette victime se trouve sur la rive droite et pas

  3   sur la rive gauche. Parce que d'après le courant de la Neretva, on voit que

  4   l'eau coule vers la droite. Donc la victime est sur la rive droite de la

  5   Neretva, et en été, la Neretva a une profondeur de 27 mètres à peu près au

  6   niveau du Vieux pont, 23 mètres au niveau du pont Tito et 22 mètres au

  7   niveau du pont de Carina. Donc, ici, on est dans une gorge et on voit qu'il

  8   -- si je regarde du côté des positions tenues par le HVO, je ne peux en

  9   aucun cas admettre la possibilité que quiconque puisse à partir de là voir

 10   la rive droite de la Neretva.

 11   Q.  Quand vous dites que la Neretva a une certaine profondeur, vous voulez

 12   dire la profondeur entre le fond et la surface de l'eau ?

 13   R.  Oui, c'est ce que je voulais dire, jusqu'à la surface de l'eau. Donc,

 14   si une victime est au niveau de la surface de l'eau, on ne peut

 15   certainement pas la voir et ouvrir le feu sur elle à partir des positions

 16   du HVO.

 17   Q.  Mais si vous regardez à partir du pont de Carina, est-ce que vous voyez

 18   toute la rivière --

 19   R.  Toute la rivière en aval jusqu'aux positions du HVO, en ville.

 20   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Monsieur Praljak, vous allez

 21   beaucoup plus vite tous les deux et il y a chevauchement. Nous ne pouvons

 22   pas suivre. Donc, ayez l'amabilité de ralentir. J'ai élevé la voix mais je

 23   souhaitais simplement appuyer sur le frein.

 24   Allez-y, ou en tout cas, reprenez.

 25   M. PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Juge Trechsel, je vous suis

 26   reconnaissant d'être intervenu. Vous auriez pu le faire, y compris plus

 27   fort, car cela s'explique tout à fait étant donné l'émotion développée à la

 28   vue de ces images.

Page 48239

  1   Q.  Encore un point, Monsieur le Témoin. Si c'est un sniper qui a tué cette

  2   femme, pourquoi est-ce qu'il n'a pas tué le soldat qu'on voit sur les

  3   images ?

  4   R.  Je n'ai aucune réponse intelligente à vous fournir.

  5   Q.  Je vous remercie, mon Colonel. Mon Colonel, cette vidéo nous l'avons

  6   déjà vue à plusieurs reprises, et c'est une vidéo évidemment qui provoque

  7   chez tout le monde un choc émotionnel voyant cette femme en train de laver

  8   son linge être abattue, abattue par qui on ne sait pas mais le commentateur

  9   de la bande dit que c'est le HVO. Je n'ai pas très bien saisi au départ les

 10   questions de M. Praljak, mais vos réponses semblent dire que, pour vous, il

 11   était impossible qu'elle soit abattue par un tireur du HVO car depuis les

 12   positions du HVO, on ne pouvait pas toucher quelqu'un qui était à cet

 13   endroit. C'est ça que vous voulez nous dire ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il était

 15   impossible de toucher quelqu'un qui se serait trouvé sur la rive droite,

 16   d'ailleurs sur la rive gauche non plus, mais sur la rive droite

 17   certainement pas, parce qu'il est évident au vu de ces images que la

 18   victime se trouve sur la rive droite de la Neretva. Le courant de la

 19   Neretva va du nord vers le sud.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes affirmatif ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument affirmatif.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Prlic.

 23   L'ACCUSE PRLIC : [interprétation] Il y a bien évidemment une erreur au

 24   compte rendu d'audience c'est la raison qui explique votre question, me

 25   semble-t-il, Monsieur le Juge Antonetti. A la ligne 8, le témoin a répondu

 26   en disant :

 27   "Je n'ai pas une réponse intelligente à cette question. Je n'ai pas

 28   de réponse claire."

Page 48240

  1   Dans le compte rendu d'audience, on lit :

  2   "J'ai une réponse intelligente par opposition, je n'ai pas de réponse

  3   claire."

  4   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Prlic.

  5   Monsieur le Témoin, peut-être que Me Alaburic pourra nous aider en la

  6   matière parce qu'il existe dans ce dossier une carte de Mostar, et si vous

  7   regardez cette carte, ce qui m'intéresse c'est si vous êtes en mesure de

  8   dire où cette femme gisait. Pourriez-vous nous donner le numéro du document

  9   qui est une carte de la ville de Mostar ? C'est un document que j'ai vu,

 10   mais je ne sais pas exactement où.

 11   Mme ALABURIC : [interprétation] Monsieur le Juge, les cartes de Mostar que

 12   nous avions préparées à votre intention ne me paraissent pas les plus

 13   adaptées pour discuter de cette question. Mais nous avons ce qu'il est

 14   convenu d'appeler une carte touristique de Mostar avec les cibles qui ont

 15   été visées nous l'avons préparée pour discuter de la journée du 9 mai. Vous

 16   avez cette carte dans votre dossier. La voici, je vous la montre. C'est une

 17   carte qui permet à chacun de se situer assez facilement. Je peux la faire

 18   remettre au témoin et le témoin pourrait la placer sur le rétroprojecteur

 19   et l'annoter, mais je pense qu'il serait bon au préalable de demander au

 20   témoin s'il pense pouvoir situer l'endroit où se trouve le corps de cette

 21   femme sur cette carte, ou s'il n'est capable d'après cette carte que de

 22   déterminer sur quelle rive le corps de cette femme gisait.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Mon Colonel, vous avez entendu Me Alaburic. Le

 24   problème qui se pose : est-ce qu'à partir de ce que vous avez vu et à

 25   partir de la carte touristique, vous pourriez pour éclairer mon collègue

 26   nous dire d'après vous où était cette dame ?

 27   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Point technique pour tout un chacun,

 28   le document est le 4D 000918, me semble-t-il.

Page 48241

  1   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les

  2   Juges, est-ce que je peux aller chercher dans mon cartable la photographie

  3   de Mostar et le témoin pourrait nous dire si d'à partir d'un certain

  4   bâtiment dans quelque quartier que ce soit on peut voir, j'ai les papiers

  5   là dans mon cartable ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne crois que je n'ai

  7   même pas besoin de ces photographies pour vous fournir une réponse de

  8   qualité. 95 sinon 100 % des deux rives de la Neretva du côté droit et du

  9   côté gauche sont des rives qui ne sont pas ordonnées. Pour l'essentiel, il

 10   s'agit d'amoncellement, de rochers, de végétation sauvage, et donc tout

 11   ressemble à tout. Sur les deux rives de sorte qu'une position comme celle-

 12   ci peut être moins à une dizaine d'endroits différents et personne - même

 13   les habitants de Mostar les plus anciens - ne pourrait pas reconnaître

 14   l'endroit précis, à moins peut-être d'être né il y a longtemps et de ne pas

 15   avoir quitté la ville un seul instant. Donc je ne crois pas qu'il soit

 16   possible d'identifier l'endroit au vu de un ou deux rochers particuliers.

 17   95 % de ces rives sont des rives sauvages, on ne peut se baigner dans la

 18   Neretva qu'à deux ou trois endroits si l'on veut revenir vivant d'une telle

 19   baignade.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que vous serez dans l'incapacité de

 21   positionner cet endroit. Bon.

 22   Général Praljak.

 23   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 24   Q.  Je voulais simplement montrer une photographie, pas pour déterminer

 25   l'emplacement de ce cadavre car je sais que c'est impossible, mais pour

 26   qu'à partir de cette photographie, on détermine si votre affirmation qui

 27   est également la mienne d'ailleurs est valable, à savoir qu'il est

 28   impossible d'avoir la moindre visibilité sur la rivière. Donc qu'un tireur

Page 48242

  1   embusqué qui serait à l'étage du lycée ne pourrait pas tirer sur la Neretva

  2   ceci; est-il exact ?

  3   R.  Mon Général, lorsque je suis venu ici, j'ai fait serment de dire ce que

  4   je savais au mieux de mes connaissances, et j'affirme effectivement qu'à

  5   partir des positions du HVO, il était impossible même en temps de paix,

  6   même si la personne souhaitant le faire pouvait se déplacer à son gré,

  7   qu'il ait impossible de voir la rive droite de la Neretva.

  8   Q.  D'accord. La question relative à cette route qui part de Mostar pour

  9   aller à Jablanica et Bijelo Polje n'a pas été totalement résolue.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : On va faire la pause parce qu'il est 1 heure moins

 11   20. Général Praljak, c'est votre dernière question, parce que si c'est le

 12   cas, on fera la pause après, ou bien vous avez d'autres questions ?

 13   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] C'est ma dernière question.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y.

 15   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation]

 16   Q.  Donc cette route après les affrontements, ou plus précisément l'attaque

 17   de l'ABiH du 30 juin, en dehors d'une toute petite portion, est-ce que

 18   cette route était carrossable et utilisable vers le nord, de façon

 19   permanente, étant donné que l'ABiH la contrôlait ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Donc les routes de montagne étaient le seul moyen pour quelqu'un qui

 22   souhaitait aller vers le nord.

 23   R.  Oui.

 24   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Merci, je n'ai plus de questions.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire 20 minutes de pause et on

 26   reprendra à 13 heures.

 27   --- L'audience est suspendue à 12 heures 44.

 28   --- L'audience est reprise à 13 heures 04.

Page 48243

  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, le général Praljak avait terminé.

  2   Je vais interroger D5. Est-ce que la Défense de M. Coric a des

  3   questions à poser ?

  4   M. KOVACIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant que de

  5   poursuivre, juste une petite correction, si vous le permettez. Pour ce qui

  6   est du compte rendu, page 73, ligne 16, on dit qu'il y a une question posée

  7   par le général Praljak que les sentiers de montagnes étaient les seuls

  8   passages utilisables si -- et quand vous les passez. Mais en fait, la

  9   question posée par M. Praljak était :

 10   "Donc ces sentiers de montagnes étaient les moyens de substitution, les

 11   voies que quelqu'un pouvait utiliser autrement s'il voulait passer."

 12   C'est ce qui avait été dit en croate dans l'original, et c'est comme

 13   ça que la question avait été comprise par le témoin. Merci.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est au transcript.

 15   D5, des questions ? D5, des questions ?

 16   Mme TOMASEGOVIC TOMIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Pas

 17   de questions.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : D6 ?

 19   M. IBRISIMOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, pas de

 20   questions.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Madame West, vous avez donc vos trois heures.

 22   Vous pouvez commencer, puisque nous avons tous nos classeurs.

 23   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Contre-interrogatoire par Mme West:

 25   Q.  Bonjour, Monsieur Maric.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  Quelle était votre adresse exacte en 1993 ? Pourriez-vous le dire aux

 28   Juges ?

Page 48244

  1   R.  En 1993, si j'ai bien compris ?

  2   Q.  Oui.

  3   R.  En 1993, mon adresse était à Mostar, Victimes de Blajburskih Zrtava 202

  4   [phon], Bosnie-Herzégovine -- rue des Victimes de Blajburskih.

  5   Q.  Cette adresse se trouvait dans quel quartier ?

  6   R.  C'est dans la partie ouest de la ville.

  7   Q.  Est-ce que ce quartier porte un nom précis ?

  8   R.  Bihovic.

  9   Q.  Est-ce que le nom de la rue a changé ou est-ce qu'elle porte encore ce

 10   nom aujourd'hui ?

 11   R.  Avant 1992, cette rue s'appelait la rue des Brigades d'outre-mer.

 12   Q.  Est-ce que vous viviez dans un appartement ou dans une maison familiale

 13   ?

 14   R.  Dans une maison familiale.

 15   Q.  Est-ce que vous aviez des voisins musulmans ?

 16   R.  Le premier des voisins musulmans se trouvait à quelque 120 mètres de ma

 17   maison.

 18   Q.  Pourriez-vous nous donner le nom de cette personne ?

 19   R.  Ils étaient plusieurs : Kajan [phon] --

 20   Q.  Vous avez un autre nom à nous donner ?

 21   R.  Je n'arrive pas à m'en souvenir. Peut-être si nous revenions un peu

 22   plus tard, cela me reviendra-t-il à la mémoire.

 23   Q.  Monsieur, en mai 1993, où se trouvaient vos bureaux ?

 24   R.  Au mois de mai 1993, mon bureau se trouvait au commandement de la zone

 25   militaire de Mostar dans l'immeuble de --

 26   Q.  Quelle était l'adresse de ce bâtiment ?

 27   R.  Maintenant, me semble-t-il -- je ne sais pas vous répondre exactement.

 28   Je ne sais pas. Peut-être que l'on pourra tomber sur ce renseignement-là

Page 48245

  1   dans l'un quelconque des documents.

  2   Q.  Ce n'est pas grave. Est-ce que, pendant le reste de l'année de 1993,

  3   vous avez changé d'adresse de bureau ou est-ce que vous êtes resté au même

  4   endroit ?

  5   R.  A la fin, tout à la fin de 1993, mon bureau a déménagé à Rudnik. C'est

  6   une cité qui s'appelle Rudnik.

  7   Q.  Est-ce que vous avez travaillé la plupart du temps, pendant 1'année

  8   1993, dans vos bureaux ?

  9   R.  Bien, le descriptif de mes tâches nécessitait de ma part un temps

 10   maximum de passer au bureau. Parfois, quand il y avait des ordres de la

 11   part du commandant, je pouvais être chargé de reconnaissance en compagnie

 12   d'autres officiers, collègues, faisant partie du même commandement.

 13   Q.  Ce n'est pas encore -- on va presque perdre la page de ce compte rendu.

 14   Vous avez donné l'adresse qui était la vôtre, mais on n'a pas bien vu

 15   l'orthographe du nom de la rue. Vous pourriez nous le donner, l'épeler ?

 16   R.  B-l-a-j-b-u-r-s-k-i-h Z-r-t-a-v-a.

 17   L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que le nom est Blajburiskih Zrtava, en

 18   traduction, Victimes de Blajburskih Zrtava.

 19   Mme WEST : [interprétation]

 20   Q.  Est-ce que vous pourriez simplement répéter le nom de la rue.

 21   R.  Blajburiskih Zrtava.

 22   Q.  Vous aviez ajouté que cette rue portait peut-être un autre nom en 1992.

 23   Pourriez-vous nous donner cet autre nom ?

 24   R.  Put Prekomorski Brigada, Voies des Brigades d'outre-mer.

 25   Q.  Merci, Monsieur Maric. Parlons, si vous le voulez bien, de votre

 26   métier, où vous avez décrit à l'intention des Juges le rôle que vous avez

 27   exercé étant chef adjoint de l'artillerie. Page 36 du compte rendu d'hier,

 28   on vous a demandé ceci :

Page 48246

  1   "Serait-il exact de dire que par rapport au commandement, du commandant de

  2   la zone opérationnelle, vous aviez un rôle consultatif ?"

  3   Vous avez dit : "Précisément, c'était un rôle de conseiller que j'avais.

  4   J'avais ces responsabilités consultatives envers le commandant de la zone

  5   opérationnelle."

  6   A la même page, nous trouvons une autre question, celle-ci :

  7   "Et si quelqu'un reprenait votre analyse, estimation et calcul, il donnait

  8   partant de là des ordres, qui serait-ce ?"

  9   Réponse :

 10   "Ce serait le chef d'artillerie et le commandant de la zone opérationnelle

 11   ou encore le chef de brigade ou le chef d'une autre unité."

 12   Moi, je vous demande simplement une précision à ce propos. Je vous demande

 13   ceci : est-ce que votre travail consistait à analyser l'ensemble de la

 14   situation militaire de la zone après quoi vous deviez fournir des conseils

 15   ou une analyse au commandant pour savoir quel est le meilleur parti qu'on

 16   pouvait tirer de l'artillerie du HVO ?

 17   R.  La structure du commandant était la suivante : commandant, chef d'état-

 18   major, et là, il y a rassemblement des activités de la totalité des chefs

 19   de corps d'armée -- ou d'armes au sein du commandement, et mon rôle à moi

 20   consistait à intervenir en matière de conseil et assistance à apporter lors

 21   de la planification de l'utilisation, de la création, de l'entretien, de

 22   l'emploi, renforcement ou déploiement uniforme de ces pièces d'artillerie,

 23   conformément aux rapports requis par le commandement.

 24   Q.  -- faire ce travail, surtout le volet de la planification, est-ce que

 25   vous aviez connaissance de toute la situation militaire qui prévalait à

 26   Mostar ?

 27   R.  Messieurs les Juges, il s'est avéré nécessaire d'être informé pour ce

 28   qui me concernait de la situation au niveau des théâtres de combat là où il

Page 48247

  1   y avait les unités déployées en vue de l'organisation de la défense.

  2   Q.  Merci. M. le Juge Antonetti vous a posé une question à la page 52. Il

  3   demandait si l'artillerie soutenait l'infanterie, et vous avez répondu par

  4   l'affirmative. Moi, je vous demande ceci : pour avoir une utilisation

  5   efficace de l'artillerie en tant qu'appui de l'infanterie du HVO et de ces

  6   plans opérationnels, est-ce qu'il était important que vous connaissiez le

  7   plan d'ensemble, le plan directeur militaire pour la municipalité toute

  8   entière de Mostar ?

  9   R.  Messieurs les Juges, mes fonctions de responsable de l'artillerie, je

 10   me trouvais informé de la totalité de la situation prévalant sur les

 11   théâtres de combat, où il y avait implication d'unités disposant de pièces

 12   d'artillerie appartenant à la zone opérationnelle, l'accent étant mis sur

 13   le déploiement et le rôle à faire jouer aux Unités de l'Artillerie.

 14   Q.  Je vais vous donner lecture du résumé fourni par Me Alaburic. Je sais

 15   que vous ne l'avez pas écrit vous-même, mais voici ce qu'elle dit :

 16   "Pour comprendre le moment ou l'intensité de l'artillerie à Mostar, il faut

 17   connaître la totalité des activités de combat de l'ABiH et du HVO dans la

 18   zone de Mostar."

 19   Ce n'est pas vous qui avez écrit ceci, mais ceci reflète-t-il la vérité ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Merci. Parlons plus précisément des éléments composants l'artillerie du

 22   HVO et vous avez longuement parlé hier, page 48 on vous a posé une question

 23   à propos du régiment d'artillerie lance-missile question, qui commence à la

 24   ligne 14, je cite :

 25   "Dites-nous : au niveau de la zone opérationnelle, est-ce qu'il y avait une

 26   Unité d'Artillerie donc au niveau de cette zone opérationnelle ?

 27   Réponse : Oui.

 28   Question : Quelle était cette unité ?

Page 48248

  1   Réponse : Il y avait une unité appelée Régiment d'Artillerie de lance-

  2   missiles, qui avait la force de l'unité, et qui contenait de l'armement

  3   compétent pour renforcer un bataillon -- ou dans un bataillon renforcé.

  4   Question : Quelles étaient les pièces d'artillerie qu'avait ce régiment ?"

  5   Vous avez dit :

  6   "Au départ il y avait les canons de 130 millimètres; les obusiers de 120

  7   millimètres; D-30; 122-D38, et 15 pièces d'artillerie d'obusier. C'est à

  8   peu près ce qui constituait l'artillerie de ce régiment."

  9   Donc c'est ce que vous avez dit au niveau de la zone opérationnelle, mais

 10   n'est-il pas vrai qu'à un moment donné cette unité était placée sous le

 11   contrôle direct de l'état-major principal ?

 12   R.  Messieurs les Juges, il est exact de dire qu'à un moment donné cette

 13   unité a été placée sous le commandement opérationnel de l'état-major.

 14   Q.  Je vais vous lire ce qu'a dit le général Praljak pendant son audition.

 15   Je pense que vous avez allé sous peu ce texte à l'écran. Nous sommes là le

 16   20 août 2009, sur ce même point voici ce que déclarait le général Praljak.

 17   Question :

 18   "Je vais vous demander de parcourir les différentes unités que nous avons

 19   cernées, c'est ce qui m'intéresse surtout. Ici on parle de ce régiment

 20   d'artillerie et de roquette, d'après cet ordre, n'est-ce pas, ce régiment

 21   est une des unités qui se trouve directement subordonnée à l'état-major

 22   principal du HVO ?"

 23   Réponse de M. Praljak :

 24   "C'est l'artillerie. Elle est censée établir un contrôle complet, c'est

 25   pour ça que j'ai demandé que certaines de ces Unités d'Artillerie soient

 26   resubordonnées et placées sous le commandement de l'état-major principal

 27   pour que nous puissions imposer un contrôle efficace et nous assurer que

 28   rien ne se faisait hors de notre contrôle."

Page 48249

  1   Etes-vous d'accord avec moi pour dire que c'est un élément significatif que

  2   celui-ci il y avait des éléments importants de l'artillerie devaient être

  3   placés sous le contrôle de l'état-major principal ?

  4   R.  Si jugé nécessaire par le commandement en question, moi, je

  5   considèrerais que cela est tout à fait justifié.

  6   Q.  Y avait-il d'autres pièces d'artillerie qui étaient contrôlées

  7   directement par l'état-major principal ?

  8   R.  Messieurs les Juges, il n'y avait pas eu d'autre arme relevant de

  9   l'artillerie placée sous le contrôle de l'état-major.

 10   R.  Vous allez voir un autre extrait de ce témoignage il s'agit du 20 août

 11   toujours, et c'est encore le témoignage de M. Praljak, c'est une question

 12   qui portait sur ceci :

 13   "Alors essayons de résumer ce point. Sommes-nous d'accord pour dire que

 14   votre intention ici, au niveau de cet ordre" - et je vous montre le

 15   document -"eu égard à l'artillerie, il faut que l'état-major exerce un

 16   contrôle plus important sur l'emploi de ces canons de 130 millimètres, en

 17   indiquant que dans certaines circonstances il puisse s'avérer approprier

 18   d'utiliser qu'un commandant de zone opérationnelle utilise ces canons avant

 19   de recueillir la permission de l'état-major principal ?"

 20   Le général Praljak a répondu en disant :

 21   "Ecoutez, si on ne peut pas joindre la personne de l'état-major principal,

 22   conformément aux règlements, ils peuvent en fait s'en servir."

 23   Et que ces canons de 130 millimètres et que des pièces d'artillerie qui

 24   étaient sous le contrôle directe de l'état-major principal ?

 25   R.  A un moment donné dans le temps, oui.

 26   Q.  Regardons maintenant les brigades et bataillons. On vous a posé la

 27   question, on vous a posé une question hier à ce sujet, également, à la page

 28   55. On vous a demandé :

Page 48250

  1   "Est-ce que vous pouvez nous dire quel type de pièces d'artillerie,

  2   de quelles pièces d'artillerie disposent les brigades ?"

  3   Vous avez répondu en disant :

  4   "D'après les règlements, les Bataillons d'Artillerie disposaient de

  5   mortiers jusqu'à 122 millimètres."

  6   En fait, vous avez corrigé cela et en indiquant qu'il s'agissait de 120

  7   millimètres.

  8   "Etant donné que nous disposions de ces armes dans la zone de combat et

  9   d'opérations, ceci a été mis à la disposition des bataillons avec la mise

 10   en garde suivante, c'est-à-dire que les autres bataillons disposaient

 11   d'autres canons, donc d'autres calibres."

 12   Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'en tout cas, pour ce

 13   qui est des brigades, ces brigades avaient accès à ces canons de 120

 14   millimètres et mortiers ?

 15   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, en effet, je suis d'accord.

 16   Il y avait des mortiers de calibre 120 dans les pièces utilisées par les

 17   Bataillons d'Infanterie.

 18   Q.  -- à la page 56, vous dites très précisément que :

 19   "Les bataillons, qui étaient principalement des groupes d'artillerie et de

 20   combat - cela dépendait de la situation - bien sûr, faisaient partie de la

 21   responsabilité du bataillon."

 22   Question :

 23   "Est-ce que vous pourriez nous donner le calibre de tels mortiers

 24   lorsqu'ils se retrouvaient dans des groupes de combat d'artillerie ?"

 25   Vous avez répondu en disant qu'il s'agissait "d'un calibre plus petit,

 26   c'est 60 et 82."

 27   Donc, vous êtes d'accord, Monsieur Maric, pour dire que les bataillons

 28   disposaient de mortiers qui étaient encore plus petits à leur disposition ?

Page 48251

  1   R.  D'après les règlements des Brigades d'Infanterie, celles-ci

  2   disposaient, au sein de leurs Bataillons d'Infanterie, de mortiers de

  3   calibre 60 et 82, et c'est exactement ce que j'ai dit.

  4   Q.  Pendant que nous avons établi maintenant que pour ce qui est des

  5   brigades et des bataillons, ils disposaient de mortiers, j60, 82 et 120

  6   millimètres. Ensuite, pour ce qui est des Régiments d'Artillerie et de

  7   Lance-missiles, on a indiqué que ceci était placé sous le commandement de

  8   l'état-major principal qui disposait, en fait, de canons de 130

  9   millimètres, d'obusiers de 120 millimètres et de 150 obusiers militaires.

 10   Ensuite nous sommes arrivés à la conclusion que l'état-major principal en

 11   tout cas, pendant un certain temps, il contrôlait des canons de 133

 12   millimètres. Est-ce que ce résumé est exact, Monsieur Maric ?

 13   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Monsieur le Président --

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- Praljak.

 15   L'ACCUSÉ PRALJAK : [interprétation] Cela va encore compliquer la tâche de

 16   mes conseils. Il faut lire ma déclaration jusqu'au bout. Il faut lire

 17   précisément la réponse que le Procureur ne cesse d'évoquer et dans laquelle

 18   elle affirme qu'il existait un ordre. Quand et dans quelle intention est-ce

 19   que j'ai demandé certaines pièces d'artillerie sous mon commandement et

 20   pourquoi ? Voilà lorsque question qu'il convient de se poser. Il n'y avait

 21   pas de canons de 130.

 22   Mme WEST : [interprétation]

 23   Q.  -- et l'état de l'artillerie, et sous quel contrôle ceci était placé en

 24   1993 ? J'ai résumé ceci correctement ?

 25   R.  En 1993, l'artillerie présente dans les brigades est restée inchangée.

 26   La seule chose qui a changé, c'était l'aspect numérique des choses en

 27   fonction de la situation sur le terrain. Quant aux pièces disponibles dans

 28   le Régiment des Lance-roquettes et de l'Artillerie, elles étaient le plus

Page 48252

  1   souvent resubordonnées au commandement de la zone opérationnelle et il y a

  2   eu aussi des moments où elle dépendait de l'état-major principal du HVO.

  3   J'aimerais donc joindre ma voix à celle de l'auteur de l'objection étant

  4   donné qu'un calibre qui n'était pas utilisé dans l'artillerie a été évoqué.

  5   Je ne voudrais pas subir des conséquences d'une absence de réaction de ma

  6   part. Si cela n'est pas pertinent, j'admets y compris avoir pu faire une

  7   erreur parce que je sais que le Procureur préférerait cela.

  8   Q.  [aucune interprétation]

  9   R.  -- c'étaient des pièces d'artillerie qui, pour l'essentiel, ont été

 10   évoquées au compte rendu d'audience au moment où Me Alaburic m'a interrogée

 11   sur ce sujet. Donc dans les endroits où le nombre de pièces d'artillerie

 12   prévu par les règlements n'était pas présent, il était possible que l'on

 13   fasse appel à des armes de nature similaire, mais dont l'intention

 14   présidant à l'utilisation était différence.

 15   Q.  [aucune interprétation]

 16   Mme ALABURIC : [interprétation] Excusez-moi. Une correction au compte

 17   rendu. Ligne 7 de la page présente à l'écran actuellement, il est inscrit

 18   que le témoin aurait utilisé le mot "canons,". Autrement dit, des canons,

 19   alors que le témoin a parlé de "pièces d'artillerie." Le témoin n'a donc

 20   pas prononcé le mot de "canons," mais a parlé de "pièces d'artillerie," qui

 21   est un concept plus large, plus générique que les simples canons. Merci.

 22   Mme WEST : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Maric, ces pièces d'artillerie étaient-elles sous le contrôle

 24   de la zone opérationnelle ?

 25   R.  Toutes les pièces présentes dans les brigades étaient avant tout sous

 26   le contrôle du commandement des brigades respectives. Mais en même temps,

 27   dans le cas de resubordination, les brigades étaient responsables devant la

 28   zone opérationnelle, c'est-à-dire le niveau hiérarchique supérieur. Donc,

Page 48253

  1   il en découle que ces pièces d'artillerie étaient placées sous le contrôle

  2   de la direction du commandement de la zone opérationnelle via, par le

  3   truchement du commandement des brigades.

  4   Q.  Je vous remercie. Donc, je comprends ceci comme étant une réponse

  5   affirmative.

  6   Alors, parlons maintenant de ce que vous nous avez décrit comme étant ce

  7   système de subordination. Lorsque l'on tient compte de ces systèmes de

  8   subordination aux chaînes de commandement, est-ce que vous conviendrez pour

  9   dire que toute l'artillerie était à terme placée sous la chaîne de

 10   commandement de l'état-major principal directement ?

 11   R.  Toutes les unités qui font partie de l'organigramme d'une armée, à

 12   officiellement parler, sous le contrôle de l'état-major principal. Mais si

 13   nous parlons de l'exercice du commandement et des ordres que l'on peut

 14   donner à certains éléments constitutifs de l'armée, ces ordres sont données

 15   à des niveaux distincts, et la section qui est équipée d'un mortier, par

 16   exemple, est un élément constitutif d'une armée. Donc, officiellement, elle

 17   est sous le contrôle de l'état-major principal. Autrement dit, sur le plan

 18   structurel, l'état-major principal était supérieur hiérarchiquement à

 19   toutes les unités et à tous les éléments constitutifs de l'armée. Mais ces

 20   éléments constitutifs de l'armée se composaient de brigades et d'autres

 21   formations militaires, donc le Régiment des Lance-roquettes et de

 22   l'Artillerie. C'était le cas la plupart du temps.

 23   Q.  On vous a posé une question de suivi -- on lui a demandé :

 24   "… les autres formes d'armes, le 05 [comme interprété], et les 60, et

 25   les mortiers, et les RPG, lance-roquettes multiples qui restaient à

 26   l'intérieur de la brigade ou des bataillons, ces armes-là, la questions

 27   étaient tout simplement celle-ci : est-ce que celles-ci étaient

 28   indirectement sous la chaîne de commandement ou restaient sous la chaîne de

Page 48254

  1   commandement, étaient un peu plus loin dans la chaîne. N'est-ce pas la

  2   façon la plus appropriée de l'exprimer ?"

  3   M. Praljak a répondu :

  4   "Oui, en partie. Tout fait partie de la chaîne de commandement de

  5   l'état-major principal. Pour les Régiments de l'Artillerie et de Lance-

  6   missiles, ce serait le soldat qui serait en charge de cela, et lorsqu'il y

  7   a une attaque, de manière formelle en fait, tout ceci fait partie de la

  8   chaîne de commandement de l'état-major principal."

  9   Donc je suppose que vous conviendrez avec moi -- vous conviendrez

 10   avec les propos du général -- vous serez d'accord avec les propos du

 11   général Praljak ?

 12   R.  Monsieur le Président, je suis d'accord avec ce qu'a dit le

 13   général Praljak.

 14   Q.  Pour le compte rendu d'audience, c'est le numéro du compte rendu

 15   d'audience 43 575.

 16   Est-ce que vous deviez remettre des rapports à l'état-major principal ?

 17   R.  Sur le plan de l'exercice de son métier, un chef, à quelque niveau

 18   qu'il soit dans la hiérarchie, est tenu de rédiger des rapports destinés au

 19   niveau hiérarchique supérieur et de lire les rapports qu'il reçoit du

 20   niveau inférieur. En tout cas, ce sont les règles qui ont été fixées par le

 21   commandement supérieur.

 22   Q.  Je comprends votre réponse comme étant un oui ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous êtes d'accord pour dire que ceci est important, de façon à ce que

 25   l'état-major principal puisse exercer le contrôle ?

 26   R.  Je l'ai déjà dit, il s'agissait de rapports périodiques qu'il était

 27   prévu de rédiger selon les besoins, et ces rapports étaient toujours

 28   adressés du niveau hiérarchique inférieur au niveau hiérarchique supérieur.

Page 48255

  1   Q.  Donc, par exemple, c'était important pour vous de vous assurer que

  2   l'état-major principal avait pleine connaissance sur l'emploi des munitions

  3   parce que l'état-major principal prenait les décisions quant à

  4   l'affectation de ses munitions ?

  5   M. KOVACIC : [interprétation] Pardonnez-moi si j'interromps, mais nous

  6   avons regardé le compte rendu d'origine dans le système électronique et

  7   nous avons repris le témoignage de M. Praljak. Il semblerait que les

  8   numéros des pages que vous nous avez -- qui sont indiqués sur l'extrait que

  9   nous avons à l'écran, ces chiffres ne correspondent pas. Ils sont

 10   complètement faux. Si vous regardez la page que nous avons maintenant à

 11   l'écran, dans le système électronique, c'est le 43 575, et ici, nous avons

 12   le numéro -- la question de M. Stringer, et ensuite la réponse. Ceci ne

 13   coïncide pas. Il doit y avoir une erreur. Donc nous ne pouvons pas revoir

 14   le compte rendu d'audience et vérifier. En d'autres termes, est-ce que vous

 15   -- bon, si vous souhaitez faire référence à ces chiffres par la suite,

 16   bien, ce sera très confus.

 17   Mme WEST : [interprétation] Merci beaucoup.

 18   M. KOVACIC : [interprétation] Nous pouvons évidemment le corriger

 19   maintenant, mais il faudra apporter des corrections.

 20   Mme WEST : [interprétation] Merci beaucoup. S'il y a une erreur, j'y

 21   remédierai. Mais pour ce qui est des termes eux-mêmes, les termes sont les

 22   termes qui sont ceux du compte rendu d'audience. Néanmoins nous allons

 23   corriger cela.

 24   Q.  Donc, Monsieur Maric, ma dernière question : par exemple, il était

 25   important pour vous de vous assurer que l'état-major principal disposait

 26   d'une pleine et entière connaissance de l'emploi des munitions, parce que

 27   c'est l'état-major principal qui prenait les décisions sur les affectations

 28   de ces derniers, n'est-ce pas ?

Page 48256

  1   R.  L'état-major principal n'était pas responsable de mon approvisionnement

  2   en munitions, moi, qui dirigeais l'artillerie. La zone opérationnelle avait

  3   sa propre base logistique et elle avait des entrepôts qui contenaient

  4   certaines quantités de munitions, et donc si j'avais une demande

  5   d'approvisionnement à faire, je l'envoyais à la base logistique de la zone

  6   opérationnelle. En fait, c'est ce qui était discuté lors des réunions

  7   d'information qui se tenaient dans les différentes parties de la zone

  8   opérationnelle, réunions auxquelles assistaient des officiers de tous les

  9   niveaux, y compris des officiers de la logistique. Ensuite, suite aux

 10   rapports écrits ou oraux qui étaient adressés au commandant de la zone

 11   opérationnelle, une intervention venait de la base logistique conforme à la

 12   demande qui pouvait être signée uniquement par le commandant de la zone

 13   opérationnelle.

 14   Q.  -- ce qu'a dit le général Praljak à ce sujet. Le numéro du compte rendu

 15   d'audience est 44 407. On lui a posé les questions à propos de ces rapports

 16   :

 17   "Général, est-il exact de dire que les rapports qui ont été établis par les

 18   unités appropriées et envoyés à l'état-major principal quant à l'usage et -

 19   - l'emploi de l'artillerie et la prise pour cible à Mostar, c'est une

 20   question qui faisait partie des rapports qui étaient envoyés à l'état-major

 21   principal ?

 22   Réponse : Oui, pendant un certain temps, et la plupart restait au sein de

 23   la zone opérationnelle, mais ensuite, le nombre de munitions correspondait

 24   à dix à 15 jours. Il y avait différents rapports sur la quantité de

 25   munitions utilisée, et ceci parvenait à l'état-major principal également.

 26   Oui, c'est exact.

 27   Question : Est-ce que c'est l'état-major principal alors qui devait

 28   coordonner la quantité de munitions --

Page 48257

  1   Est-ce l'état-major principal qui aurait alors coordonné la quantité de

  2   munitions qui devait -- et affecté les différentes -- les munitions et ce

  3   genre de choses pour savoir où ces munitions seraient employées et comment

  4   ces munitions seraient employées ?

  5   Réponse : Le chef de l'artillerie de l'état-major principal contrôlait la

  6   quantité de munitions qui devait être employée, quelles munitions restaient

  7   dans les dépôts. Donc c'est le chef de l'artillerie, et dans la zone

  8   opérationnelle de l'état-major principal qui s'occupe de cela et, bien sûr,

  9   qui fait un rapport sur la situation, qu'il m'envoie, soit à moi, soit à

 10   quelqu'un d'autre qui fait partie de l'état-major principal."

 11   Donc, Monsieur Maric, vous venez de dire dans votre témoignage que d'après

 12   vous, l'état-major principal ne s'occupait pas de réapprovisionnement en

 13   munitions, et nous voyons ici ce qu'a dit le général Praljak. Compte tenu

 14   de cela, est-ce que vous pensez que c'est toujours le cas ou est-ce que le

 15   général Praljak parlait d'autre chose ?

 16   R.  Monsieur le Président, Messieurs les Juges, peut-être n'ai-je pas été

 17   suffisamment clair. Les rapports que j'envoyais, je les envoyais à la

 18   demande du chef de l'état-major principal, et je traitais dans ces rapports

 19   des questions que m'avait chargé de traiter le chef de l'état-major

 20   principal de temps en temps, en fonction de la situation sur le terrain.

 21   Ces questions avaient un rapport avec la disponibilité des munitions et,

 22   bien entendu, c'était le chef d'état-major qui était tenu de rendre compte

 23   à ses supérieurs à l'état-major principal de ces questions. Mais il n'avait

 24   pas besoin de le faire en s'adressant au chef de l'état-major principal

 25   parce qu'à l'état-major principal, il y avait aussi une direction de

 26   chacune des branches militaires qui constituaient des entités bien

 27   définies, avec leur propre chef qui communiquait avec le chef de l'état-

 28   major principal. Je sais cela parce qu'en 1994, j'étais personnellement

Page 48258

  1   membre de cet organe.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro] -- et que, moi, j'ai un autre procès

  3   après. Vous avez déjà utilisé 35 minutes, donc il vous reste deux heures 25

  4   minutes.

  5   Donc, mon Colonel, vous reviendrez demain à 9 heures. Je vous remercie.

  6   --- L'audience est levée à 13 heures 45 et reprendra le mercredi 13 janvier

  7   2010 à 9 heures 00.

  8  

  9  

 10  

 11  

 12  

 13  

 14  

 15  

 16  

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28