Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 16 février 2011

  2   [Plaidoiries de la Défense Stojic]

  3   [Audience publique]

  4   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  5   [L'accusé Pusic est absent]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame le Greffier, appelez le numéro de l'affaire,

  8   s'il vous plaît.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à

 10   toutes les personnes ici présentes. Affaire IT-04-74-T, le Procureur contre

 11   Prlic et consorts.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Madame le Greffier.

 13   En ce mercredi 16 février 2011, je salue MM. les accusés, Mmes et MM. les

 14   avocats, les membres du bureau du Procureur et toutes les personnes qui

 15   nous assistent.

 16   Je vais céder la parole à Me Nozica qui va poursuivre sa plaidoirie pour M.

 17   Stojic.

 18   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 19   Juges. Je tiens à dire à bonjour à tous et à toutes dans le prétoire.

 20   Messieurs les Juges, hier, dans le courant de la première partie de notre

 21   exposé, nous avons parlé des impressions que les représentants des

 22   organisations internationales ont communiquées soit ici devant les Juges de

 23   la Chambre, soit dans leurs rapports, au sujet de Bruno Stojic. Nous avons

 24   vu quelles étaient leurs impressions. Il est probable que les Juges de la

 25   Chambre se poseront la question de savoir comment se fait-il que plusieurs

 26   représentants d'organisations internationales se soient fait une idée assez

 27   similaire de Bruno Stojic.

 28   Messieurs les Juges, la Défense de Bruno Stojic affirme que cette opinion a


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  1   été mise en place, en fait, par Bo Pellnas, qui a organisé une réunion à la

  2   date du 17 avril 1993 à Mostar. Vous vous souviendrez de cette réunion, il

  3   s'agit de la réunion où Bo Pellnas a fait venir un membre de la présidence

  4   de Bosnie-Herzégovine, à savoir M. Ganic.

  5   Bruno Stojic est entré dans la salle où devait se tenir la réunion, et il a

  6   dit que l'ABiH en Bosnie centrale était en train de lancer des attaques

  7   contre le HVO. Alors, de façon évidente, ceci a mis en colère Bo Pellnas,

  8   parce qu'il est le seul à avoir, dans son rapport, présenté des détails qui

  9   ne se trouvent dans aucun autre rapport en provenance de ladite réunion.

 10   Devant la porte, non pas dans la salle de la réunion, mais devant la porte,

 11   il y avait le Témoin Beese. Il est évident que Bo Pellnas et Beese se sont

 12   fait une idée de Bruno Stojic dès lors et l'ont transmise, cette idée, à

 13   d'autres.

 14   Alors, on a entendu les opinions des observateurs des organisations

 15   internationales disant qu'eux ont eu à se déplacer sur des terrains assez

 16   vastes et ils ont eu bon nombre de contacts avec un certain nombre

 17   d'individus. Pour cette raison-là, et parce que très souvent ils n'avaient

 18   pas assez de temps pour ce qui est d'être récolés avant que d'arriver en

 19   Bosnie-Herzégovine, ils ont dû forcément se référer aux informations

 20   communiquées par d'autres, d'autres observateurs, sans pour autant les

 21   vérifier. Bon nombre d'entre eux sont donc venus avec des préjugés déjà en

 22   place, chose que nous a confirmé le Témoin Slobodan Bozic, qui se trouvait

 23   être membre de cette commission du HVO de la HZ HB chargée des relations

 24   avec les observateurs internationaux et qui, de façon objective, a eu le

 25   plus de contacts avec ces observateurs internationaux. Et c'est précisément

 26   de cela qu'il s'agit au paragraphe 530 du mémoire en clôture de

 27   l'Accusation. Le Procureur s'y réfère une fois de plus au Témoin Beese. Le

 28   paragraphe c'est le 530.


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  1   Oui, je vois les avertissements de M. le Juge Prandler. Je vais m'efforcer

  2   d'être plus lente encore.

  3   S'agissant de cette réunion, il en a découlé pas mal de rapports, mais ce

  4   n'est que dans le rapport conjoint de Bo Pellnas qui a été rédigé le 23

  5   avril, donc six jours après la réunion, qu'il y a une constations

  6   d'avancée, à savoir celle d'avoir vu Stojic menacer et offenser Ganic, et

  7   disant aussi qu'il avait un pistolet sur lui. Il s'agit du document P 2054.

  8   Ces dires ne sont confirmés par aucun autre rapport de ladite réunion. Pas

  9   plus que les témoignages de ceux qui ont pris part à la réunion : M.

 10   Milivoj Petkovic, le Témoin 1D AA et le (expurgé). Les rapports

 11   relatifs à cette réunion et qui ne confirment pas les affirmations avancées

 12   par Bo Pellnas sont les suivants, et j'attire votre attention sur le fait

 13   qu'il s'agit de rapports de la MOCE, et je rappelle aussi que le Témoin

 14   Beese avait fait partie des observateurs de ladite organisation. Il s'agit

 15   de P 1950, P 1965,    P 1980 et P 2016.

 16   Dans la totalité de ces rapports, c'est de façon identique qu'on a dit que

 17   Bruno Stojic était entré dans cette pièce où était censée se tenir la

 18   réunion, et il a dit qu'une grande offensive de l'ABiH venait de commencer

 19   en Bosnie centrale. La réunion a été reportée. Je tiens à rappeler aux

 20   Juges de la Chambre le fait que dans ces rapports, il a été indiqué que

 21   jusque-là, les décisions cruciales avaient déjà prises, à savoir la

 22   création de commissions pour essayer de réduire les tensions dans Mostar.

 23   Et dans ces rapports, il n'est pas question d'attaque verbale lancée contre

 24   Ganic, pas plus que de menaces. Personne non plus n'a mentionné le fait que

 25   Bruno Stojic avait porté un pistolet.

 26   Partant de la déclaration de Milivoj Petkovic, page 50 068 à 50 071, il

 27   découle le fait que cette réunion était déjà terminée lorsque Bruno Stojic

 28   est arrivé avec un rapport relatif à une attaque de l'ABiH lancée à


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  1   Travnik. Bruno Stojic ne s'est attaqué à personne, ni n'a offensé personne.

  2   Il n'avait pas non plus de pistolet, parce que le Témoin Petkovic ne l'a

  3   jamais vu portant un pistolet.

  4   M. Petkovic a aussi indiqué que M. Ganic était resté la journée d'après, le

  5   19 avril 1993, à Mostar, et que le 20 avril 1993, ils sont partis ensemble,

  6   escortés par la FORPRONU, à Zenica aux fins d'y tenir une réunion.

  7   Alors, Messieurs les Juges, je présente la totalité de ces détails pour une

  8   raison; M. Bo Pellnas, lorsqu'il a témoigné devant cette Chambre, a relaté

  9   une situation dramatique où ils auraient dû escorter M. Ganic suite à ces

 10   menaces. Mais partant des dires de M. Petkovic, on peut voir que c'est de

 11   façon tout à fait normale qu'il est allé à cette réunion avec lui et qu'il

 12   s'est attardé dans Mostar deux jours après ladite réunion. Une façon

 13   identique de se comporter de la partie Bruno Stojic a été décrite par un

 14   autre témoin, 1D AA, aux pages 28 995 à 29 002.

 15   Messieurs les Juges, le fait que l'information relative à l'attaque lancée

 16   par l'ABiH contre le HVO se trouve être confirmée par un PV de la session

 17   du HVO de la HZ HB daté du 19 avril 1993, donc daté de la journée d'après,

 18   la journée qui a suivi la réunion avec Ganic, et je vous renvoie au

 19   document 1D 1664. A l'occasion de cette session-là, il a été discuté, et je

 20   cite :

 21   "Des rapports dramatiques nous parvenant ces jours-ci depuis Zenica, Vitez

 22   et Busovaca."

 23   Ces rapports dramatiques n'ont pas été transmis à la réunion par Bruno

 24   Stojic, parce que, tout simplement, il n'a même pas assisté à cette

 25   réunion. Alors que M. Ganic, membre de la présidence de Bosnie-Herzégovine

 26   et membre du commandement Suprême de l'ABiH, se trouvait dans Mostar est à

 27   la date du 19 avril 1993, il y a eu un ordre notoirement connu émanant du

 28   4e Corps, qui fait l'objet de la pièce P 1970. Cet ordre a constitué un


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  1   plan d'attaque de l'ABiH contre le HVO à Mostar, attaque qui a eu lieu le 9

  2   mai 1993. Ceci se trouve être confirmé à part entière par un extrait du

  3   livre intitulé "Le règlement de compte politique bosno-croate" dont

  4   l'auteur est le Dr Ismet Hadziosmanovic, et cela se trouve à la page 197

  5   faisant l'objet du document 3D 3101.

  6   Lorsque l'on suit le cours planifié de l'attaque conformément à l'ordre

  7   donné, ainsi que le descriptif des événements fourni dans le livre

  8   susmentionné du Dr Hadziosmanovic, qui lui, à l'époque, se trouvait être

  9   président du SDA pour Mostar, il est possible d'en tirer une conclusion

 10   comme suit : l'attaque a été lancée conformément à l'ordre daté du 19 avril

 11   1993.

 12   On vient de me faire savoir qu'on n'a pas consigné au compte rendu une

 13   référence, le P 1970. Mais c'est une chose que nous avons d'ores et déjà

 14   convenue, à savoir qu'après l'audience, nous vérifierons le compte rendu

 15   dans son intégralité pour contrôler ce qui a été consigné et ce qui n'a pas

 16   été consigné. Donc point n'est besoin de perdre du temps à ce sujet.

 17   Messieurs les Juges, il est difficile de croire que M. Ganic, en sa qualité

 18   de vice-président de la présidence de Bosnie-Herzégovine et, qui plus est,

 19   membre du commandement Suprême de l'ABiH, n'avait pas pris part à cette

 20   décision relative à l'ordre en question, et ce, notamment à l'époque où, à

 21   une réunion avec les représentants du HVO, il s'emploie en faveur de la

 22   paix. C'était, en termes simples, un double jeu.

 23   Le Procureur, un peu plus loin, décrit Bruno Stojic comme étant un membre

 24   de la ligne dure, un dur de la partie en question. Ici, il est fait état au

 25   FN 1214, paragraphe 62 de la déclaration du Témoin BA, qui fait l'objet de

 26   la pièce P 9712. Alors, nous affirmons que dans cette note de bas de page

 27   il n'a pas été présenté ce type de constatation. Mais cette partie de la

 28   déclaration se trouve être importante pour une autre raison. Et comme ce

 


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  1   document est sous pli scellé, je ne vais en donner lecture que d'une petite

  2   partie.

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  7   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  8   M. SCOTT : [interprétation] Excusez-moi, je m'excuse de violer ce code du

  9   silence qui s'impose à nous, mais je crois qu'il y a quelque chose qui

 10   n'aurait pas dû être dit. Est-ce qu'il est possible de passer quelques

 11   instants à huis clos partiel, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Huis clos.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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  5   [Audience publique]

  6   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je m'excuse. Je

  7   vais demander un huis clos partiel alors pour redire ce qu'il importe de

  8   consigner au compte rendu d'audience.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on repasse à huis clos partiel.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes désormais à huis clos

 11   partiel, Monsieur le Président.

 12   [Audience à huis clos partiel]

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  2   [Audience publique]

  3   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, je tiens à vous le

  4   rappeler une fois de plus, il s'agit de la date du 10 juin 1993. Je vous

  5   rappelle également l'existence d'un document, P 2690, qui constitue un

  6   communiqué signé par Bruno Stojic après l'attaque de Travnik. Et partant de

  7   la déclaration d'un témoin de l'Accusation, il nous est donné la

  8   possibilité de voir qu'il y a bel et bien eu une attaque à Travnik le 9

  9   juin 1993. Nous en avons déjà parlé au paragraphe 528. Ce qu'il convient de

 10   souligner, Messieurs les Juges, c'est le fait que le HVO n'a pas riposté à

 11   ces attaques, parce que dès le 12 juin 1993, il y a eu signature d'un

 12   accord relatif à la cessation des hostilités entre l'ABiH et le HVO. Je

 13   vous renvoie au document P 2726. Il n'en demeure pas moins que l'ABiH a

 14   poursuivi son offensive en Bosnie centrale, chose qui est confirmée par un

 15   rapport de la FORPRONU, le P 2750.

 16   Messieurs les Juges, nous avons versé au dossier un fort grand nombre de

 17   documents pour étayer ce que nous venons de dire. Je viens à présent de

 18   présenter ce qu'il convient de considérer comme étant un rapport objectif,

 19   un document de la FORPRONU, document fort important, parce que d'un jour à

 20   l'autre, il montre ce qui a fait l'objet des rapports relatifs à la Bosnie

 21   centrale.

 22   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Désolé de vous interrompre. Je pense

 23   qu'il faut éviter de faire référence à des rapports présentés par une

 24   institution qui insiste tant sur la confidentialité. L'opinion publique

 25   n'est pas supposée savoir que nous avons, en tant qu'éléments de preuve,

 26   des rapports au nom de cette organisation. Je pense que là, il faudrait

 27   expurger aussi.

 28   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Juge, les rapports de la FORPRONU


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  1   ne font pas partie de cette catégorie. Peut-être avez-vous mal compris.

  2   M. LE JUGE TRECHSEL : [interprétation] Il se peut que je me trompe moi

  3   aussi.

  4   Mme NOZICA : [interprétation] Messieurs les Juges, dans cette partie de

  5   notre exposé, nous avons abordé une partie des rapports présentés par les

  6   organisations internationales qui ont comporté des opinions et des

  7   conclusions qui ne se sont pas fondées sur des événements réels. Merci,

  8   Monsieur le Juge Trechsel. Chez nous, on dit personne n'est parfait. Tout

  9   le monde peut se tromper.

 10   Nous avons montré que certaines opinions relatives à des individus et à la

 11   HZ HB en général étaient peu objectives et partiales. Mon éminent confrère,

 12   M. Karnavas, en a déjà parlé. Cela a pu aussi être constaté par MM. les

 13   Juges à l'occasion des témoignages desdits témoins. Je suis convaincue du

 14   fait que vous avez vous aussi été de cet avis. Nous nous souvenons tous de

 15   ce Témoin BH, qui a fourni des appréciations relatives à la situation dans

 16   Mostar et qui, en répondant à des questions de Mme Alaburic, ma consoeur,

 17   n'a pas su répondre à où est-ce que se trouve le bâtiment de Vranica, et

 18   non plus à ce qui s'est passé le 9 mai 1993.

 19   M. le Juge Antonetti a même exprimé sa surprise du fait de cette

 20   méconnaissance de la situation à Mostar par ce témoin; pages du compte

 21   rendu 17 714, 17 715. Or, il s'agissait d'un représentant officiel haut

 22   placé de cette communauté internationale.

 23   Indépendamment du fait qu'il a été évident qu'ils n'avaient pas de bonnes

 24   informations très souvent ou des informations objectives, ils continuaient

 25   à rédiger des rapports pour les envoyer à leurs supérieures.

 26   Messieurs les Juges, la totalité des résolutions du Conseil de sécurité a

 27   été adoptée partant des rapports fournis par les observateurs

 28   internationaux qui se trouvaient sur le terrain. On a vu ici, ne serait-ce


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  1   qu'en partie, comment ces rapports ont été rédigés, et c'est partant de

  2   cela, en bonne partie, qu'il y a eu un acte d'accusation de dressé contre

  3   les six accusés, mon client y compris, s'agissant du chef d'entreprise

  4   criminelle conjointe. Alors, ces rapports ont constitué des petites images,

  5   des bouts de mosaïque qui ont donné une image générale, qui s'est soldée,

  6   elle, par la conclusion d'accords de paix. La constitution issue de Dayton

  7   -- je veux dire, les accords de Dayton, c'est quelque chose qui a été

  8   conclu sous les auspices de la communauté internationale, qui s'est fondée

  9   sur les rapports en provenance du terrain pour récompenser le nettoyage

 10   ethnique en Republika Srpska, en reconnaissant ce territoire comme étant

 11   une entité particulière. Ce Tribunal créé par le même Conseil de sécurité a

 12   rendu bon nombre de jugements relatifs au génocide ou à l'entreprise

 13   criminelle commune et autres délits graves relevant des compétences de ce

 14   Tribunal à l'égard de représentants haut placés politiques et militaires de

 15   la Republika Srpska. Ce bureau du Procureur qui fait partie du Tribunal

 16   international a déclaré que la HZ HB était une création paraétatique, chose

 17   qui a été repris par le Procureur dans son mémoire en clôture.

 18   Ainsi donc, les accords de Dayton créent un Etat qui ne peut pas

 19   fonctionner encore aujourd'hui, 15 ans plus tard. Quinze ans depuis les

 20   accords de Dayton, cet Etat ne fonctionne toujours pas, ce qui n'a rien

 21   d'étonnant. L'Etat comporte deux entités, dont l'une comporte toutes les

 22   attributions d'un Etat et le drapeau, et puis l'autre se trouve être

 23   divisée en dix entités. L'Etat compte en tout 13 gouvernements et trois

 24   présidents à la tête de l'Etat.

 25   La plupart des Croates de Bosnie-Herzégovine considèrent encore aujourd'hui

 26   que cette structure qui leur a été imposée par les accords de Dayton les

 27   empêche de bénéficier des droits qui seraient les leurs en tant qu'un des

 28   peuples constitutifs. Même dans des Etats démocratiques, c'est toujours le


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  1   peuple le moins important en nombre qui rencontre des problèmes, et surtout

  2   la situation du peuple le moins important est telle dans l'Etat composé

  3   comme l'est aujourd'hui la Bosnie-Herzégovine.

  4   Ce manque de solutions apportées à la question des relations entre les

  5   peuples empêche le fonctionnement de toute la Bosnie-Herzégovine. Ces

  6   jours-ci, les représentants politiques des Croates de Bosnie-Herzégovine

  7   reviennent à la question de la restructuration de la Bosnie-Herzégovine et

  8   ils demandent cela pour pouvoir jouir de leurs droits en tant que peuple

  9   constitutif. Aujourd'hui, le pouvoir officiel de Zagreb exprime toute son

 10   inquiétude à l'égard de la position des Croates de Bosnie-Herzégovine, même

 11   si le président Tudjman n'est plus parmi nous depuis longtemps. Même le

 12   président actuel de la Croatie, qui est un membre du Parti social

 13   démocrate, prône cela, ainsi que le chef du gouvernement, Mme le Premier

 14   ministre qui représente le HDZ, ainsi que d'autres hommes politiques de

 15   premier plan qui s'étaient trouvés dans l'opposition au pouvoir de Franjo

 16   Tudjman.

 17   La troisième entité, l'Herceg-Bosna, ne constitue plus un tabou comme cela

 18   était le cas à l'issue de la guerre jusqu'aux élections du mois d'octobre

 19   2010.

 20   Nous avons entendu ici des représentants qui ont été relevés de leurs

 21   fonctions par le haut représentant de la communauté internationale en

 22   Bosnie-Herzégovine. Ils ont été relevés de leurs fonctions lorsqu'ils

 23   participaient à des réunions où on évoquait la troisième entité ou

 24   l'Herceg-Bosna. Aujourd'hui, ce ne sont plus des sujets tabous.

 25   Aujourd'hui, le haut représentant ne prend plus de mesures comparables.

 26   La troisième entité ou une autre solution intéresse aujourd'hui ne nombreux

 27   --

 28   M. SCOTT : [interprétation] Je suis désolé. Je sais que nous avons eu


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  1   énormément de latitude, mais ceci n'est pas du tout au compte rendu.

  2   Normalement, ce qui doit être présenté doit être au dossier. Or, tout cela

  3   n'est pas au dossier et ne devrait pas être mentionné. De plus, ce n'est

  4   même pas fiable. Ce n'est qu'il y a quelques jours que l'ambassadeur des

  5   Etats-Unis auprès de la Bosnie a condamné la création d'une troisième

  6   entité en Bosnie. Tout d'abord, ce n'est pas au dossier, donc ça ne devrait

  7   pas être présenté. Et deuxièmement, c'est faux.

  8   M. KHAN : [interprétation] Je suis désolé, car je ne suis d'accord avec

  9   cette intervention. Je ne suis pas du tout d'accord avec cette

 10   intervention. En effet, la courtoisie fait qu'il ne faut pas interrompre

 11   les plaidoiries. C'est bien connu. Nous avons été courtois envers

 12   l'Accusation, d'ailleurs. Nous ne sommes pas du tout d'accord avec un grand

 13   nombre des arguments présentés par l'Accusation, que ce soit l'histoire des

 14   petits-enfants ou des voyous et des crapules, et cetera. Nous n'avons

 15   jamais interrompu. Donc M. Scott, au nom de l'Accusation, peut demander par

 16   écrit la parole, mais je demanderais à ce qu'il ne prenne pas la parole

 17   comme ça, à brûle-pourpoint, et qu'il reste assis -- surtout qu'il reste

 18   assis pour permettre à la plaidoirie de se dérouler normalement et pour que

 19   l'on puisse entendre la voix de M. Stojic et qu'elle ne soit pas noyée sous

 20   le vacarme.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais consulter mes collègues.

 22   M. SCOTT : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que j'ai à dire, c'est que je suis issu d'un

 24   système où la parole du Procureur et de la Défense n'est jamais interrompue

 25   par l'autre partie. J'ai été procureur. Jamais quelqu'un ne serait venu

 26   intervenir pendant mon réquisitoire, et je n'ai jamais assisté à une

 27   intervention du Procureur quand la Défense plaidait.

 28   Donc je vais consulter mes collègues pour savoir la position à


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  1   prendre, qui me paraît assez extraordinaire compte tenu de l'intervention

  2   de M. Scott.

  3   M. SCOTT : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'est-ce que vous voulez ajouter, Monsieur

  5   Scott ?

  6   M. SCOTT : [interprétation] Je me suis levé avec beaucoup de réserve. Je

  7   savais que j'étais resté ici assis les deux ou trois jours sans me lever.

  8   Je veux bien qu'on m'insulte moi-même. Je suis d'accord pour qu'on insulte

  9   les membres du bureau du Procureur. On peut nous dire tout ce qu'on veut,

 10   mais il faut quand même présenter des éléments qui sont au dossier. Il faut

 11   parler des éléments qui sont au dossier. Ce ne sont pas des arguments, ce

 12   sont des assertions factuelles qui sont faites. C'est pour ça que je me

 13   suis levé, parce que c'est vraiment une position extrême. Je suis

 14   absolument désolé, mais je considère que c'est complètement inacceptable.

 15   Donc il s'agit d'assertions factuelles qui ne sont pas au dossier, et donc

 16   je me suis levé, à contrecoeur certes, mais je me suis levé. J'en suis

 17   désolé, mais j'ai dû le faire.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, la Chambre, qui a délibéré, comme vous

 20   le voyez, tient à rappeler qu'elle avait rendu une décision écrite dans

 21   laquelle elle avait pris le soin de bien mentionner qu'il n'y aurait pas

 22   d'objection de quiconque, que ça soit du Procureur ou de la Défense,

 23   lorsque l'une ou l'autre des parties ferait son réquisitoire ou sa

 24   plaidoirie. Donc nous avions anticipé le problème et, de ce fait, nous

 25   rejetons l'objection du Procureur concernant les propos tenus par la

 26   Défense de M. Stojic.

 27   Maître Nozica, continuez.

 28   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Je peux rajouter également une chose. La Chambre

  2   tient à rappeler également que le Procureur peut, après les plaidoiries,

  3   demander, au titre de sa réplique, la parole, et la Chambre l'autorisera ou

  4   ne l'autorisera pas. Donc ce type d'intervention pourrait très bien se

  5   faire après les plaidoiries.

  6   Mme NOZICA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

  7   Juges. Je me félicite de cette intervention de M. Scott, parce que ce que

  8   j'ai dit n'est rien d'autre que l'affirmation que ce sujet est aujourd'hui

  9   publiquement abordé en Bosnie-Herzégovine et qu'une troisième entité ou une

 10   autre solution est un sujet qui intéresse aujourd'hui de nombreux

 11   protagonistes politiques sur la scène internationale qui ont compris que la

 12   Bosnie-Herzégovine, telle qu'elle est issue des accords de Dayton, ne

 13   saurait pas fonctionner.

 14   Je connais la position de l'ambassadeur américain qui s'oppose à la

 15   création d'une troisième entité. Cela est exact, mais il n'en est pas moins

 16   exact que nous affirmons -- à savoir que ce sujet est aujourd'hui un sujet

 17   de débat 15 ans après les accords de Dayton, et ce simple fait est quelque

 18   chose d'important.

 19   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous soulignons que face à ces

 20   exigences des représentants politiques des Croates de Bosnie-Herzégovine,

 21   ils n'ont certainement pas pu être influencés par l'avis de ces accusés qui

 22   sont ici depuis cinq ans, mais je ne souhaite pas du tout aborder des

 23   points dénués de pertinence qui ne font pas partie du dossier. Je suis

 24   certaine que la décision de la Chambre sur l'entreprise criminelle commune

 25   sera apportée sur fond de faits en l'espèce et sur la base du contexte dans

 26   lequel nous vivons aujourd'hui, puisque nous avons deux courants en

 27   parallèle : d'une part, le procès qui est celui-ci, et d'autre part, les

 28   revendications et les objections des Croates de Bosnie-Herzégovine


Page 52348

  1   réitérées parce qu'ils ne sont pas en mesure de jouir de leurs droits. Cela

  2   était très important face aux thèses qui ont été avancées par le Procureur

  3   sur le plan de l'entreprise criminelle commune, des thèses faisant partie

  4   de son réquisitoire et de son mémoire en clôture.

  5   Permettez-moi d'aborder maintenant le chapitre concernant la participation

  6   délibérée de Stojic à l'entreprise criminelle commune de l'Herceg-Bosna

  7   alléguée par l'Accusation. Au paragraphe 532, le Procureur tente de

  8   démontrer la participation de Bruno Stojic à l'entreprise criminelle

  9   commune à partir de l'année 1991 au moment où il a été adjoint du ministre

 10   des Affaires intérieures dans la République de Bosnie-Herzégovine, le

 11   moment où, d'office, à cause de ce poste-là, il a été également membre de

 12   la cellule de Crise du HDZ.

 13   Cette thèse du Procureur consistant à affirmer qu'en tant que membre de la

 14   cellule de Crise du HDZ, Bruno Stojic a, en fait, commencé à participer à

 15   l'entreprise criminelle commune est une thèse qui ne saurait pas être

 16   validée. En tant qu'adjoint du ministre des Affaires intérieures de Bosnie-

 17   Herzégovine, Bruno Stojic était d'office membre de la cellule de Crise du

 18   HDZ. Cela a été confirmé par un témoin de l'Accusation, M. Stjepan Kljuic;

 19   compte rendu d'audience pages 7 962 à 7 966. Cette instance n'était

 20   nullement illégale ni criminelle, puisque c'est Stjepan Kljuic qui s'est

 21   trouvé à la tête de cette cellule, un Croate modéré, comme cela a été

 22   avancé à plusieurs reprises par l'Accusation.

 23   La mission de la cellule de Crise du HDZ consistait à protéger les

 24   citoyens, car il était évident que le système de défense de Bosnie-

 25   Herzégovine s'était effondré, un système fondé, avant tout, sur la JNA.

 26   Bruno Stojic était adjoint du ministre des Affaires intérieures de la

 27   République de Bosnie-Herzégovine, et il avait la charge des finances. A

 28   l'époque, le ministre, après les premières élections pluripartites, était


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  1   d'appartenance musulmane. Le ministère a apporté ces décisions lors des

  2   réunions collégiales des ministres, et Bruno Stojic s'acquittait d'une

  3   manière tout à fait professionnelle et conforme à la loi de ses

  4   obligations, et ce, au nom de l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine, en

  5   prônant une Bosnie-Herzégovine entière; pièce 2D 841. Le Témoin Davor Korac

  6   en a témoigné, quelqu'un qui a été employé dans ce ministère. Je vous

  7   renvoie aux pages du compte rendu d'audience 38 825 à 38 832.

  8   Bruno Stojic n'a pas quitté Sarajevo pour rejoindre la HZ HB. A l'époque,

  9   Bruno Stojic vivait avec sa famille à Neum, et le week-end, il se rendait

 10   auprès des siens. Au début du mois d'avril 1992, pendant qu'il se trouvait

 11   à Neum, les accès à la ville de Sarajevo se sont trouvés bloqués, et Bruno

 12   Stojic n'a pas pu revenir au travail. Le Témoin Davor Korac en parle aux

 13   pages du compte rendu d'audience 38 825 à 38 826.

 14   En outre, il est exact, comme l'affirme le Procureur, que Bruno Stojic a

 15   pris part à l'approvisionnement en armes pendant cette période-là, car cela

 16   faisait partie de ses obligations, de son travail en tant qu'adjoint du

 17   ministre des Affaires intérieures. Cependant, ces armes ont été distribuées

 18   tant aux Croates qu'aux Musulmans.

 19   Le témoignage du Témoin Zoran Buntic, pages du compte rendu d'audience 30

 20   587 à 30 592, et Slobodan Bozic, je vous renvoie à son témoignage, pages du

 21   compte rendu d'audience 36 192 jusqu'à 36 196.

 22   Nous avons également à ce sujet un document qui constitue un extrait du

 23   livre du Dr Ismet Hadziosmanovic, comme je l'ai déjà dit, il a été à

 24   l'époque le président du parti SDA à Mostar, et son livre constitue le

 25   document 2D 976.

 26   Nous avons en plus le témoignage de Bahto, Hamid, pages 37 900 et 37 901 du

 27   compte rendu d'audience, ainsi que le document 2D 1253.

 28   Le Procureur affirme que cette cellule de Crise a précédé l'armée du HVO,


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  1   et il cite à l'appui le document P 56. Lorsqu'on voit cette liste des

  2   membres de la cellule de Crise du HDZ, il n'y en a qu'un seul qui se

  3   retrouvera plus tard dans la branche militaire du HVO, à savoir Ivo

  4   Lozancic.

  5   Donc, compte tenu du fait qu'à partir du paragraphe 533, les activités de

  6   Bruno Stojic dans le département de la Défense font l'objet d'un examen

  7   dans le texte, je souligne que ce sont des questions que nous avons

  8   abordées dans le chapitre 32 de notre mémoire en clôture et que nous avons

  9   précisé notre position là-dessus.

 10   Il n'empêche que je souhaite ajouter comme suit : Bruno Stojic a été à la

 11   tête du département de la Défense à partir du 3 juillet 1992 jusqu'au 10

 12   novembre 1993. S'agissant de la fin de son emploi au département, je cite

 13   la déposition de Slobodan Bozic pages 36 163 à 36 164, ainsi que 36 204

 14   jusqu'à 205, ainsi que le document P 6583 ainsi que le document 2D 416.

 15   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si je le souligne, c'est parce

 16   que dans le mémoire en clôture de l'Accusation, malgré ces preuves

 17   présentées, le Procureur affirme que Bruno Stojic reste à la tête du

 18   département de la Défense jusqu'à la fin du mois de novembre, comme si l'on

 19   n'avait pas présenté de preuve démontrant exactement à quel moment Bruno

 20   Stojic a quitté son poste. Nous estimons que cela constitue un fait de

 21   première importance. Le département de la Défense a constitué l'un des

 22   départements du HVO de la HZ HB ayant les mêmes capacités que tout autre

 23   département. Ici, dans la suite de notre exposé, nous allons nous référer

 24   aux paragraphes 223 à 231 du mémoire en clôture de la Défense de M. Prlic

 25   ainsi qu'à la plaidoirie de cette Défense du 14 février 2011.

 26   Puis, les décrets portant sur les forces armées, P 289 ainsi que P 588,

 27   régissaient les liens entre l'ensemble des organes de la HZ HB avec le

 28   président de la HZ HB, également le lien entre le HVO de la HZ HB et le


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  1   département de la Défense.

  2   Quant à ses activités au sein du HVO de la HZ HB, Bruno Stojic en rendait

  3   compte au HVO de la HZ HB de la même façon que tout autre chef. Et dans le

  4   cadre de ses activités au HVO de la HZ HB, que ce soit de jure ou de facto,

  5   il n'avait aucun lien direct avec le président de la HZ HB. Le lien entre

  6   le département de la Défense et le président de la HZ HB était un lien de

  7   nature administrative. Il concernait des désignations des officiers à des

  8   échelons inférieurs dans la branche militaire du HVO. Revenons maintenant à

  9   la question la place du département de la Défense au sein du HVO de la HZ

 10   HB.

 11   Le département de la Défense rédigeait son programme des activités

 12   sur la base des demandes, des exigences du HVO de la HZ HB, tout comme les

 13   autres départements. A l'appui, je cite les documents 1D 110, document

 14   P 4890 ainsi que le document P 646.

 15   Le département de la Défense présentait un rapport sur ses activités au HVO

 16   de la HZ HB, de même que tous les autres départements. Ce rapport était

 17   présenté par le HVO de la HZ HB au président de la HZ HB. L'état-major

 18   principal, à titre séparé du département de la Défense, présentait son

 19   rapport au HVO de la HZ HB, et ce rapport était présenté au président. A

 20   l'appui, les rapports P 128 et P 4699, rapports présentés deux fois par an,

 21   tous les six mois. Je ne cite pas les rapports créés après le 10 novembre

 22   1993, et je ne le fais pas délibérément, puisque Bruno Stojic a quitté son

 23   poste de chef à ce moment-là. Ces rapports étaient adoptés par le HVO de la

 24   HZ HB; pièce 1D 1607 ainsi que pièce P 4008.

 25   Le département de la Défense proposait les fonctionnaires nommés par le HVO

 26   de la HZ HB ainsi que ces documents relevant de son ressort de la même

 27   façon que tous les rapports, et ils recevaient des moyens financiers pour

 28   pouvoir mener à bien ses activités, et ce, de la même façon que tout autre


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  1   département, car pendant cette période-là, nous parlons de l'année 1992 et

  2   l'année 1993, le HVO de la HZ HB n'avait pas de budget. Alors, nous

  3   citerons les réunions où il a été question du financement du département de

  4   la Défense ou de la branche militaire. Il s'agit de documents comme suit :

  5   P 578, P 950, P 1137, P 1197, P 1324, P 1388, P -- 1D 1183, P 5799 et,

  6   enfin, P 6689. Il s'agit là d'une correspondance du gouvernement de la

  7   HR HB du 16 décembre 1993 adressée à toutes les municipalités d'où il

  8   ressort que le gouvernement exige, sur la base des conclusions de

  9   l'assemblée, qu'un système unique financier soit mis sur pied afin de

 10   pouvoir financer la défense, la police et le système judiciaire. Donc nous

 11   voyons que même à la fin de l'année 1993, le système financier au niveau de

 12   la HZ HB n'est toujours pas mis sur pied, et cela réfute les affirmations

 13   de l'Accusation consistant à dire que les municipalités n'ont pas joué un

 14   rôle important dans le financement de l'armée.

 15   Le chef du département de la Défense informait de la situation sécuritaire

 16   le HVO de la HZ HB de manière générale, mais le HVO de la HZ HB convoquait

 17   à ses réunions les chefs de l'état-major lorsqu'ils voulaient recevoir des

 18   informations précises. Mme West a cité ces réunions de manière très

 19   précise; je n'ai pas besoin de les répéter ici.

 20   Alors, les questions relevant du ressort du département de la Défense ont

 21   fait l'objet de débats lors de 80 % des réunions du HVO de la HZ HB

 22   pratiquement. Nous n'avons pas suffisamment de temps pour les énumérer ici,

 23   mais nous sommes convaincus que ces PV ainsi que  tous les autres documents

 24   feront l'objet d'un examen très attentif de la part des Juges de la

 25   Chambre. Même si lors de la majorité de ces réunions il a été débattu des

 26   questions de la défense, à aucune de ces réunions il a été question de

 27   commandement opérationnel, donc de plans, de projets, de quoi que ce soit

 28   qui reviendrait au commandement opérationnel du HVO, car cela ne relevait


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  1   pas des compétences ni du département de la Défense ni du HVO de la HZ HB.

  2   Donc, si nous nous penchons sur les PV de l'ensemble des réunions du HVO de

  3   la HZ HB, on verra que le département de la Défense, tout comme tous les

  4   autres départements, dépendait dans ses activités des décisions du HVO de

  5   la HZ HB et qu'il n'occupait aucune place spécifique ou qu'il n'entretenait

  6   pas de lien spécifique avec Boban, quelque chose qui aurait pu influer sur

  7   ses activités.

  8   La Défense de Jadranko Prlic a tenté de suggérer aux Juges de la Chambre

  9   que le département de la Défense entretenait ces liens spéciaux avec le

 10   président de la HZ HB, ce qui est simplement inexact. Nous devons souligner

 11   que Bruno Stojic n'a jamais émis de communiqué de concert avec Mate Boban,

 12   ce qui est tout à fait logique, parce qu'il n'a été que l'un des chefs au

 13   sein de la HZ HB. Tandis que cela n'est pas vrai pour Jadranko Prlic, ce

 14   qui est tout à fait logique également compte tenu de son poste. Je vous

 15   renvoie au document P 2346, où il est question de la situation militaire.

 16   Même si la Défense de Jadranko Prlic cherche à exclure le département de la

 17   Défense du HVO de la HZ HB, elle ne peut pas y parvenir car les preuves

 18   témoignent à l'appui, ainsi que la logique.

 19   Alors, les documents ainsi que les textes législatifs qui déterminent le

 20   ressort et les compétences du département de la Défense et du chef de ce

 21   département sont les décrets sur les forces armées, à savoir la pièce P 289

 22   ainsi que la pièce P 588. La décision portant création du département de la

 23   Défense est la pièce P 586. La décision sur l'organisation et sur les

 24   responsabilités des départements et des commissions du HVO de la HZ HB est

 25   la pièce P 440.

 26   Dans l'ensemble de ces textes, il est tout à fait manifeste que, par

 27   rapport à la branche militaire du HVO, le département de la Défense a la

 28   charge des questions administratives et techniques ainsi que des questions


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  1   budgétaires et du ravitaillement en matériel et de la structure. Le

  2   président du département de la Défense ne commandait pas l'armée, comme

  3   nous l'avons dit. C'est l'état-major principal qui s'est vu conférer ce

  4   pouvoir. Nous en avons parlé en détail dans le paragraphe 331 de notre

  5   mémoire en clôture. Très brièvement, je souhaite aborder la pièce P 586

  6   afin de préciser quels sont les pouvoirs du chef Bruno Stojic par rapport

  7   aux commandants des brigades, puisque cela nous permet de réagir aux

  8   paragraphes 65 à 106, 376 à 364 et 614 du mémoire en clôture de la Défense

  9   Petkovic. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous avez ce document

 10   dans votre classeur.

 11   Très brièvement, je souhaite rappeler un point même si nous en avons parlé

 12   à plusieurs reprises. Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, vous

 13   reporter à l'article 9 de la pièce P 586, où l'on voit très clairement

 14   précisées quelles sont les questions pour lesquelles l'état-major est

 15   subordonné au président et pour lesquelles il est subordonné au chef du

 16   département de la Défense. Et pour ces mêmes activités, l'on voit que les

 17   brigades sont subordonnées au chef du département de la Défense --

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Il n'y a plus d'interprétation en français. C'est

 19   corrigé.

 20   Mme NOZICA : [interprétation] Donc il n'existe pas le moindre élément de

 21   preuve indiquant que les commandants de brigade aient été subordonnés à

 22   Bruno Stojic dans quelque autre domaine ou activité que ce soit, à

 23   l'exception des questions administratives, budgétaires, d'approvisionnement

 24   et d'organisation. Aucun élément de preuve n'existe permettant d'indiquer

 25   que les commandants de brigade se soient adressés au chef du département de

 26   la Défense, Bruno Stojic, pour d'autres questions que celles-là. Aucun

 27   élément de preuve n'indique que Bruno Stojic ait émis le moindre ordre à

 28   l'attention des commandants de brigade, à l'exception de ceux portant sur


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  1   des questions administratives. Le mémoire en clôture de la Défense Petkovic

  2   suggère que le département de la Défense aurait été le supérieur des

  3   commandants de brigade également dans le domaine des prisons, puisqu'il

  4   s'agissait d'une activité qui n'est pas relative aux combats. Mais cette

  5   affirmation n'est fondée sur aucun des éléments de preuve présentés. Dans

  6   la note en bas de page 646 du mémoire en clôture de la Défense Petkovic, on

  7   évoque des éléments de preuve censés appuyer cette thèse. Il s'agit des

  8   rapports du SIS des brigades, et non pas des commandants desdites brigades.

  9   Au paragraphe 332 de notre mémoire en clôture, nous avons fourni des

 10   références aux éléments de preuve pertinents montrant la façon dont

 11   fonctionnait le SIS sur le territoire de la HZ HB ainsi que des éléments de

 12   preuve qui confirment de façon indubitable les faits suivants : les

 13   assistants chargés du SIS au sein des brigades étaient subordonnés à tous

 14   égards aux commandants de brigade. Ceci a été confirmé notamment par le

 15   Témoin Zrinko Tokic, témoignant pour les Défenses Praljak et Petkovic, aux

 16   pages du compte rendu d'audience 45 458, lignes 10 à 15.

 17   Alors, passons au paragraphe 533 du mémoire en clôture de l'Accusation.

 18   L'Accusation avance que Bruno Stojic serait demeuré actif dans le domaine

 19   des armes et de la logistique en tant que chef du bureau chargé de la

 20   production et de la vente d'armes et de matériel militaire de la HR HB

 21   après sa prise de fonctions à ce poste le 16 décembre 1993. Le Procureur,

 22   en revanche, n'a fourni aucun élément de preuve relatif au rôle de Bruno

 23   Stojic dans l'entreprise criminelle commune après son départ du poste de

 24   chef du département de la Défense à la date du 10 novembre 1993.

 25   La Défense de Bruno Stojic affirme, concernant le paragraphe numéro 339, et

 26   nous avons affaire à ce qui est avancé concernant l'ultimatum, nous

 27   affirmons donc qu'il n'y a pas eu d'ultimatum le 15 janvier 1993. Pas plus

 28   qu'il n'y en a eu à la mi-avril 1993. A ce sujet, nous avons fourni une


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  1   argumentation détaillée au paragraphe 243 de notre mémoire en clôture.

  2   Concernant les compétences qui auraient été celles de Bruno Stojic pour

  3   émettre l'ordre P 1140, il s'agit de cet ordre du 15 janvier 1993 que l'on

  4   qualifie d'ultimatum, et conjointement avec les deux autres, nous

  5   soulignons qu'il s'est contenté de mettre en œuvre la décision du HVO de la

  6   HZ HB conformément aux attributions qui étaient les siennes en application

  7   de l'article 9 de la décision portant organisation du département de la

  8   Défense. Nous soulignons ici que, sur la base de cet ordre de Bruno Stojic,

  9   on voit clairement qu'il ne peut aucunement s'agir d'un ultimatum. La même

 10   chose vaut pour l'ordre du général Petkovic.

 11   Je prie les Juges de la Chambre de bien vouloir porter leur attention sur

 12   le point 1 de cet ordre de Bruno Stojic, dans lequel il est indiqué que

 13   l'état-major principal des forces armées du HVO a l'obligation de se mettre

 14   en contact avec toutes les zones opérationnelles et les états-majors de

 15   l'ABiH sur les territoires des provinces numéro 3, 8, 10, 1, 5 et 9, afin

 16   de concrétiser la mise en œuvre de cette décision du HVO de la HZ HB. Il

 17   s'agit là d'une décision qui nous montre clairement qu'il ne peut

 18   aucunement s'agir d'un ultimatum si l'on est censé prendre contact avec les

 19   commandants et les états-majors desdites provinces comme c'est indiqué ici.

 20   Je voudrais demander aux Juges de la Chambre, concernant l'ensemble de ces

 21   trois documents relatifs à l'ultimatum, qu'ils les analysent avec beaucoup

 22   d'attention, parce que cela fait maintenant cinq années entières que l'on

 23   qualifie ces documents et ces actions d'ultimatum. C'est pourquoi il

 24   convient de les évaluer avec un soin particulier. Dans la région d'où je

 25   viens, on a coutume de dire qu'un mensonge répété trois fois devient

 26   vérité. Nous sommes peut-être malheureusement dans cette situation

 27   concernant ces ultimatums, bien qu'il n'en ait rien été. Je suis persuadée

 28   que les Juges de la Chambre détermineront avec une grande précision ce dont


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  1   il s'agissait réellement concernant ces supposés ultimatums.

  2   Concernant le document P 1137, ordre pris par le général Petkovic,

  3   dans son point numéro 7, il est dit que les commandants des zones

  4   opérationnelles ont l'obligation de prendre langue avec les commandants de

  5   la BiH et de trouver les meilleures solutions permettant de constituer des

  6   commandements conjoints. Alors, comment de telles décisions pourraient-

  7   elles être considérées comme des ultimatums alors qu'elles ne peuvent être

  8   mises en œuvre qu'en coopération avec l'ABiH ? Ces documents ont été

  9   adoptés sur la base des positions communes adoptées par les négociateurs de

 10   Genève et sur la base des conversations entre Izetbegovic et Boban à

 11   Zagreb, comme l'a indiqué le général Praljak dans sa déposition devant la

 12   présente Chambre aux pages 40 568 à 40 573 du compte rendu d'audience.

 13   L'adoption de ces documents et l'affirmation correspondante du général

 14   Praljak trouvent également une confirmation dans l'ordre de Bozo Rajic,

 15   qui, à l'époque, était ministre de la Défense de la Bosnie-Herzégovine;

 16   voir le document 2D 1409.

 17   Dans cet ordre du ministre de la Défense de Bosnie-Herzégovine, qui y a

 18   inclus également les unités de la VRS, on trouve, au point numéro 6, que

 19   pour ce qui concerne la mise en œuvre de cet ordre, tous les commandants

 20   lui répondent de sa mise en œuvre.

 21   Alors, comme nous avons constaté qu'il y a une opposition à la mise

 22   en œuvre de cet ordre dans le délai fourni et précisé par le ministre de la

 23   Défense lorsqu'il a adopté cet ordre le 21 janvier 1993, M. Izetbegovic a

 24   changé d'avis. Pourquoi ? Il suffit pour le comprendre d'examiner le

 25   document 2D 48, dont vous disposez dans votre classeur, Messieurs les

 26   Juges. Il s'agit d'un entretien accordé par Sefer Halilovic au quotidien

 27   "El Pais" le 27 janvier 1993. Il y a indiqué que personne ne peut détruire

 28   l'idée de la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat unitaire et souverain et


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  1   personne ne peut le faire au moyen de négociations. Les négociations sont

  2   bienvenues, mais si l'on ne parvient pas à nos fins de cette façon, nous y

  3   parviendrons sur le théâtre des opérations.

  4   Suit le commentaire du journaliste. La position et l'opinion de Halilovic a

  5   très probablement une importance plus grande que l'opinion du président

  6   Izetbegovic, car bien qu'il ne dispose pas de sa propre place à la table

  7   des négociations à Genève, il représente ceux qui se battent sur la ligne

  8   de front.

  9   Par conséquent, il n'y a pas eu le moindre ultimatum. Il s'agissait d'une

 10   tentative d'organiser, de structure la Bosnie-Herzégovine de la façon qui

 11   avait fait l'objet de l'accord des représentants de la Bosnie-Herzégovine à

 12   Genève. Cependant, les autorités de Sarajevo ont retiré leur accord, et ce,

 13   après que les décisions et les ordres correspondants aient été adoptés par

 14   le HVO de la HZ HB.

 15   Puisque le Procureur présente cet ultimatum comme l'un des éléments

 16   de preuve cruciaux de l'entreprise criminelle commune, nous devons poser, à

 17   l'inverse, la question suivante : que se serait-il passé si ces décisions

 18   avaient bien été mises en œuvre de façon conjointe ?

 19   On peut assez logiquement conclure, en tout cas c'est l'une des

 20   conclusions principales possibles, que la question des relations entre les

 21   Bosniens et les Croates aurait sans doute trouvé une solution au mois de

 22   janvier 1993. La relation entre les Bosniens, ou plutôt les Musulmans à

 23   l'époque, et les Croates était d'emblée l'objet d'une conception différente

 24   de l'organisation interne de la Bosnie-Herzégovine, et l'entretien que je

 25   viens de citer du général Halilovic abonde évidemment dans ce sens. D'un

 26   côté, nous trouvions la position des autorités de Sarajevo insistant pour

 27   que la Bosnie-Herzégovine reste un Etat unitaire, alors que d'autre part,

 28   la majorité du peuple croate tenait à ce que l'Etat soit décentralisé sous


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  1   forme de cantons, de provinces ou d'une communauté de républiques. Cette

  2   notion était également acceptée par la communauté internationale, qui a

  3   proposé des solutions qui ont toutes été acceptées par les autorités de la

  4   HZ HB. Cependant, aucune de ces solutions n'a été acceptée par les

  5   autorités de Sarajevo.

  6   Cependant, sous la pression de la communauté internationale, il a été mis

  7   fin à la guerre, et on a conclu les accords de Washington. Les accords de

  8   Washington s'inscrivent précisément dans la droite ligne des demandes qui

  9   avaient été celles des représentants de la HZ HB, parce que la Fédération

 10   de Bosnie-Herzégovine a bien été, justement, divisée en cantons.

 11   Nous avons vu dans le document 2D 1183, notamment l'article 1, qu'en

 12   Fédération de Bosnie-Herzégovine, aussi bien l'ABiH que le HVO étaient

 13   reconnus en tant que forces armées de la Bosnie-Herzégovine, et c'est

 14   encore le cas aujourd'hui. On a déterminé les délais sous lesquels il

 15   convenait de mettre en place un commandement conjoint, et ceci a bien été

 16   fait. Cependant, cela n'a pu être fait que deux ans après la guerre et

 17   l'échec de cette conception d'un Etat unitaire défendue par Alija

 18   Izetbegovic dès le début.

 19   De la même façon que mon estimé confrère, Ken Scott, a procédé, je

 20   vais demander aux Juges de la Chambre de bien vouloir lire attentivement le

 21   compte rendu de cette réunion entre les présidents Izetbegovic et Tudjman

 22   du 12 juillet 1992. Il s'agit de la pièce     P 336. A la lumière de ce

 23   document, on voit justement la confrontation à laquelle donnent lieu ces

 24   deux conceptions différentes de l'organisation interne de la Bosnie-

 25   Herzégovine. D'une part, la notion d'un Etat unitaire; d'autre part, la

 26   vision d'un Etat découpé en cantons.

 27   Il faut certainement examiner ces éléments à la lumière des accords

 28   de Washington et de la solution qu'ils mettent en avant. Dans le procès-


Page 52360

  1   verbal de cette réunion, on voit tout à fait clairement, et d'ailleurs M.

  2   Izetbegovic le confirme également, que le HVO a été le premier à

  3   s'organiser pour défendre la Bosnie-Herzégovine au moment où les forces du

  4   gouvernement étaient encore dépourvues d'organisations. Nous voyons dans ce

  5   procès-verbal les remerciements que la Bosnie-Herzégovine et le président

  6   Izetbegovic adressent à la Croatie pour tout ce qu'elle a fait pour les

  7   réfugiés de Bosnie-Herzégovine jusqu'à ce moment-là. On y voit également le

  8   souhait qui est celui d'Alija Izetbegovic de voir la Croatie poursuivre ses

  9   efforts visant à apporter son aide à la Bosnie-Herzégovine, mais on voit

 10   aussi qu'il n'accepte pas les demandes des Croates visant à obtenir une

 11   cantonisation.

 12   Je voudrais passer au paragraphe 540. Dans la continuité de cette thèse

 13   concernant la prise de la décision du 15 janvier 1993 que le Procureur

 14   qualifie d'ultimatum, ce même Procureur essaie de transférer cette même

 15   présentation des faits aux événements qui ont suivi la date du 30 juillet

 16   1993. Il fait état du document P 3038, qui est un communiqué cosigné par

 17   MM. Prlic et Stojic le 30 juin 1993. Le Procureur établit un lien avec les

 18   ordres de Petkovic concernant l'augmentation du niveau de préparation au

 19   combat, P 3082, et l'ordre P 3128 ainsi que P 3019. Alors, contrairement à

 20   l'affirmation du Procureur qui nous dit qu'il y avait là un lien de

 21   subordination, la Défense souligne que le seul moment pertinent à prendre

 22   en considération pour la prise conjointe de cette décision était l'attaque

 23   lancée par l'ABiH le 30 juin 1993 contre le HVO.

 24   Par ordre chronologique, c'est d'abord l'ordre P 3019 qui a été adopté et

 25   émis, ensuite le P 3082, et enfin il y a eu signature conjointe par MM.

 26   Stojic et Petkovic de l'ordre P 3128.

 27   La Défense de M. Petkovic, dans les paragraphes 253 et 254 de son mémoire

 28   en clôture, avance que ce serait M. Petkovic, le 30 juin 1993, après la


Page 52361

  1   prise de cet ordre P 3019, qui aurait informé Bruno Stojic du fait que

  2   toutes les mesures nécessaires avaient été prises afin que les Musulmans

  3   soient écartés du HVO, et que le 22 juillet 1993, la même chose aurait donc

  4   été réitérée, soit deux jours avant son départ du poste de chef d'état-

  5   major.

  6   Il est exact que des mesures visant au désarmement des membres du HVO

  7   d'appartenance ethnique musulmane ont été prises et qu'on a procédé à une

  8   mobilisation supplémentaire. On a avancé les documents 4D 480 et P 3642 à

  9   l'appui de cette affirmation. De même, nous devons reconnaître et souligner

 10   qu'il est exact de dire que dans aucun de ces documents on ne peut trouver

 11   la moindre mention que les membres musulmans du HVO devraient être mis en

 12   isolement. Ces deux documents n'ont pas été remis à M. Stojic, parce qu'il

 13   se serait trouvé dans une chaîne de commandement de M. Petkovic. A l'appui

 14   de ceci, je cite le document P 3029, qui a été remis à M. Blaskic. Il

 15   s'agit d'un document identique au document 4D 480. Le document P 3642 est

 16   un rapport semestriel. En tout cas, c'est ce qui s'y trouve indiqué.

 17   La Défense de M. Bruno Stojic souligne que le Procureur lui-même,

 18   dans son réquisitoire, a reconnu que le 30 juin 1993, on a assisté à un

 19   changement de situation en HZ HB, mais la Défense de M. Stojic affirme que

 20   c'est là la date où la guerre a effectivement commencé entre l'ABiH et le

 21   HVO, et ce, sous la forme de cette attaque lancée par l'ABiH contre le HVO.

 22   Passons maintenant à la partie du mémoire en clôture de l'Accusation

 23   intitulé : "Stojic avait un plein pouvoir et une pleine responsabilité pour

 24   le département de la Défense du HVO."

 25   Mais Bruno Stojic n'avait pas un plein pouvoir ni une pleine

 26   responsabilité pour toutes les activités du département de la Défense. Nous

 27   avons étayé ceci dans le paragraphe 3 de notre mémoire en clôture. Bruno

 28   Stojic n'émettait pas d'ordres à l'attention des assistants du département


Page 52362

  1   de la Défense et il n'émettait pas d'ordres à l'attention des commandants

  2   de l'état-major principal.

  3   Concernant le paragraphe 542 maintenant, le Procureur avance la thèse

  4   que Bruno Stojic aurait disposé d'une large autorité de commandement et de

  5   contrôle sur le département de la Défense, y compris de la possibilité

  6   d'émettre des ordres aux assistants du HVO et de l'état-major principal

  7   ainsi qu'à d'autres organes. A l'appui de cette affirmation, le Procureur

  8   ne cite aucun élément de preuve qui pourrait venir véritablement l'étayer.

  9   Parmi ceux qu'il évoque, nous trouvons le document P 5259. Il s'agit

 10   d'instructions pour le travail du SIS de Travnik. Mais il s'agit là d'un

 11   document qui n'a pas été adopté par Bruno Stojic. Du reste, il n'est pas

 12   signé du tout. Mais on voit dans son en-tête qu'il a été adopté par le

 13   secteur de la sécurité, et non pas par Bruno Stojic.

 14   Au paragraphe 543, le Procureur affirme que collège du département de

 15   la Défense aurait conseillé Bruno Stojic quant à différentes questions

 16   relatives à la défense et aux forces armées et que Stojic aurait accordé de

 17   l'importance aux réunions concernées en indiquant au général Praljak que ce

 18   dernier devrait être personnellement présent à la réunion du 2 septembre

 19   1993, réunion à laquelle on dit qu'il aurait dépêché son adjoint.

 20   En note de bas de page 1 272, le Procureur cite la déposition du

 21   Témoin Slobodan Bozic, et ils affirment que le collège avait pour fonction

 22   de conseiller Stojic pour différentes questions relatives à la défense et

 23   aux forces armées. Mais ce n'est pas ce que le témoin a dit. Le témoin a

 24   dit que :

 25   "Le collège était un organe informel qui n'était régi par aucun

 26   document ni aucun texte." Il a dit que : "La finalité des réunions qui

 27   étaient celles de cet organe était la suivante : il s'agissait d'aborder

 28   tous les sujets qui étaient intéressants du point de vue du département de


Page 52363

  1   la Défense et qui étaient pertinents du point de vue de la préparation des

  2   textes et des documents censés être adoptés à l'échelon de la HZ HB ou de

  3   son président. L'idée était de débattre de tous ces sujets en donnant la

  4   possibilité à tous les membres du collège de participer à ce débat afin de

  5   dégager les meilleures propositions et solutions possibles susceptibles

  6   ensuite de donner lieu à un traitement ultérieur."

  7   Les réunions du collège n'avaient pas pour but de conseiller Bruno Stojic

  8   sur des questions militaires ou relatives à la défense. Lors des réunions

  9   de ce collège, il a été débattu de nombreuses questions administratives et

 10   techniques relatives au fonctionnement du département de la Défense, et

 11   c'est quelque chose qui est clairement visible dans tous les procès-verbaux

 12   desdites réunions. Ces procès-verbaux montrent aussi clairement que chaque

 13   secteur s'acquittait de ses propres tâches de façon indépendante et que le

 14   chef du département de la Défense ne décidait en rien de la façon dont ces

 15   secteurs procédaient.

 16   Je voudrais maintenant passer à ce sujet du collège et présenter quelques

 17   documents. Je voudrais que cela puisse représenter un tout afin que je

 18   n'aie pas à m'interrompre dans la présentation de ces procès-verbaux. Est-

 19   ce qu'il serait donc possible de faire la pause maintenant afin de

 20   s'organiser ainsi ?

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Il était quasiment d'ailleurs l'heure de faire la

 22   pause. On va faire 20 minutes de pause.

 23   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

 24   --- L'audience est reprise à 10 heures 50.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.

 26   Maître Nozica, vous avez la parole. Le Greffe m'a indiqué que vous

 27   avez utilisé deux heures et 57 minutes. Donc il vous reste presque deux

 28   heures.


Page 52364

  1   Mme NOZICA : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie de

  2   cette information. Il me semble que nous pourrons terminer, du moins je

  3   m'efforcerai d'en finir pendant cette session-ci, et l'exposé de clôture

  4   sera fait par mon éminent confrère.

  5   Mais avant que de passer à la suite, je voudrais procéder à un rectificatif

  6   du PV, et je remercie ma consoeur, Mme Alaburic, d'avoir attiré mon

  7   attention. Page 19, ligne 3, j'ai dit "commandants subalternes", or il

  8   fallait entendre "commandants supérieurs".

  9   Je m'excuse auprès des Juges et je m'excuse auprès de tous et toutes dans

 10   le prétoire, il se peut qu'il y ait pas mal d'erreurs au niveau des

 11   références, des chiffres, mais dans le courant de l'après-midi, nous

 12   réexaminerons tout ce qui a été consigné, et si besoin de rectifier, nous

 13   le ferons demain matin avant la reprise, ou nous pourrions faire une

 14   communication par écrit pour rectifier le tout.

 15   Je reviens maintenant à cette administration collégiale du département de

 16   la Défense. Alors, je vais les citer tous.

 17   Et on voit que ces directions collégiales ont débattu de questions

 18   administratives. Je vous renvoie au 2D -- je vais les donner par ordre

 19   chronologique. 1362, une invitation à une réunion.

 20   Puis, le 2D 1363. Et j'attire votre attention sur le fait que sur le PV, au

 21   paragraphe 6, il est clairement donné de voir le rôle administratif de

 22   Bruno Stojic pour ce qui est des nominations, qui se trouve être expliqué

 23   dans le détail dans notre mémoire en clôture, qu'il s'agisse du personnel

 24   dans les secteurs ou dans les différentes unités. M. Stojic a demandé à la

 25   totalité de ses assistants à faire en sorte que le lundi 30 novembre,

 26   soient communiquées des propositions de solutions du point de vue des

 27   cadres dans leurs services respectifs. Et il demandé également à ce que

 28   soient communiquées les différentes solutions en matière de cadres relatifs


Page 52365

  1   à différentes brigades.

  2   Puis, la date suivante des sessions de cette administration collégiale,

  3   c'est le 2D 1443, puis le 2D 1444, puis le P 880, puis le P 1075 et le P

  4   4646.

  5   Ainsi que le P 4756. Messieurs les Juges, il s'agit de cette réunion où M.

  6   Bruno Stojic avait convié le général Slobodan Praljak, mais celui-ci n'est

  7   pas venu. Celui qui est venu à la réunion c'est le général Matic, qui

  8   était, de fait, l'homme numéro 4 à l'état-major.

  9   Les débats à l'alinéa 1 permettent de voir, et je crois que les Juges ont

 10   ce document à leur disposition, montrent donc qu'à l'ordre du jour, il y

 11   avait le changement d'organisation de l'état-major, tel qu'avancé par le

 12   responsable du département à la Défense.

 13   Alors, le responsable du département à la Défense, à la date du 18

 14   septembre 1992, a présenté un organigramme temporaire de l'état-major, qui

 15   est le P 502, où l'on a prévu aux positions-clés à l'état-major un chef

 16   d'état-major, un suppléant et un assistant. Alors, comme on peut le voir à

 17   partir de la discussion du général Matic, la confusion s'est créée pour ce

 18   qui est de la mise en place de nouveaux postes : chef d'état-major et

 19   suppléant du chef d'état-major, qui n'existaient pas à l'organigramme

 20   temporaire. Ce qui fait que l'on ne voyait pas clairement quelles étaient

 21   les compétences du chef d'état-major et quelles étaient celles de son

 22   suppléant. Le responsable était donc tenu de présenter un nouvel

 23   organigramme pour répondre à la situation factuelle.

 24   C'est la raison pour laquelle il fallait que -- à cette session, on

 25   avait souhaité la présence de l'homme numéro un de l'état-major. Et comme

 26   il n'a pas été présent, la tâche n'a pas été accomplie. Il a été fixé des

 27   délais nouveaux, et on a demandé à ce que les services compétents de

 28   l'état-major rédigent des instructions pour ce qui est du fonctionnement de


Page 52366

  1   cet état-major. Nous soulignons que jusqu'au départ de Bruno Stojic de ses

  2   fonctions de responsable du département à la Défense, la tâche en question

  3   n'a pas été finalisée.

  4   Messieurs les Juges, ceci ne constitue pas une chose si importante. C'est

  5   important pour le bureau du Procureur, qui, lui, affirme que Bruno Stojic

  6   avait convoqué le général Praljak. Or, il s'agissait là de questions

  7   administratives. Le général Praljak c'était le numéro un à l'état-major, et

  8   il eut été normal de le voir présent s'agissant de ces questions

  9   administratives pour apporter des opinions de sa part.

 10   Au paragraphe 545 du mémoire en clôture du Procureur, il est dit que Bruno

 11   Stojic avait des pouvoirs à l'égard des forces armées, y compris le droit

 12   de donner des ordres au chef d'état-major, or il n'est avancé aucun élément

 13   de preuve pour cette affirmation. Ceci est inexact comme information, et il

 14   n'y a pas d'élément de preuve à cet effet. Les seuls ordres que Bruno

 15   Stojic ait adressés à l'intention de l'état-major ne se rapportaient qu'à

 16   des questions administratives pour ce qui est de l'organigramme des unités

 17   ou de l'organigramme relatif aux officiers subalternes à l'état-major. Et

 18   ceci était tout à fait conforme aux attributions qui étaient les siennes en

 19   application de l'article 9 portant décision sur les bases de l'organisation

 20   au sein du département à la Défense; pièce P 586.

 21   Il est dit plus loin que Bruno Stojic pouvait donner l'ordre de créer des

 22   unités du HVO, de les démanteler ou de les rattacher à d'autres. Le bureau

 23   du Procureur avance une pièce P 3149, qui ordonne la recomposition d'une

 24   brigade qui est celle de Knez Domagoj, or cet ordre n'est pas donné par

 25   Bruno Stojic. C'est un document qui est co-signé par lui et le chef d'état-

 26   major. Si cela avait fait l'objet de ses attributions propres, il aurait

 27   donné l'ordre en question tout seul.

 28   Bruno Stojic, dans cet ordre, au paragraphe 2, donne au département à la


Page 52367

  1   Défense pour mission de procéder à l'accomplissement de certaines tâches.

  2   Et on l'a dit, le département de la Défense, cela comportait un secteur

  3   civil au département de la Défense. Il ne s'est pas agi ici d'un ordre du

  4   responsable du département à la Défense. Cela se trouve être confirmé par

  5   un document, qui est la pièce P3151, qui constitue un ordre de la part de

  6   M. Obradovic, et ce dernier redescend l'ordre vers les unités subalternes,

  7   et il se réfère à l'ordre donné par l'état-major, et non pas à l'ordre

  8   donné par le responsable du département à la Défense.

  9   Je passe à présent au sous-intitulé du mémoire de l'Accusation, qui

 10   dit que Bruno Stojic a joué un rôle actif pour ce qui est du commandement

 11   et contrôle des forces armées du HVO. Bruno Stojic n'a pas eu les

 12   compétences pour ce qui est de donner des ordres au HVO, et il ne l'a

 13   jamais fait. Ceci se trouve être expliqué dans le détail au paragraphe 331

 14   de notre mémoire en clôture.

 15   Ici, dans le prétoire, en guise de témoins, nous avons entendu deux

 16   commandants de l'état-major : Milivoj Petkovic et Slobodan Praljak. Les

 17   deux ont confirmé qu'ils n'ont jamais reçu d'ordres de la part de Bruno

 18   Stojic pour ce qui est du commandement opérationnel des unités du HVO. Ceci

 19   se trouve être indiqué au compte rendu, pages 43 446 jusqu'à 43 447, de

 20   même qu'à la page 50 349.

 21   Ceci se trouve être confirmé par le bureau du Procureur dans sa première

 22   phrase du paragraphe 547. Dans aucun document que le bureau du Procureur a

 23   utilisé pour étayer cette thèse ne se trouve confirmée la thèse en

 24   question. L'allégation du Procureur disant que les ordres donnés par Stojic

 25   faisaient -- qu'il les donnait en mettant des gants, parce que cela est

 26   inacceptable, parce qu'on ne peut donner d'ordres que de façon directe, et

 27   le bureau du Procureur se doit donc d'avancer des preuves à cet effet, or

 28   il ne l'a pas fait.


Page 52368

  1   A l'avenant N, le Procureur cite plusieurs documents qui prétendument

  2   prouvent que Bruno Stojic avait commandé et contrôlé les unités du HVO.

  3   Aucun desdits documents ne le démontre.

  4   Et j'attire une fois de plus l'attention sur le témoignage du chef de

  5   l'état-major qui confirme le fait que Bruno Stojic n'a pas donné d'ordres

  6   opérationnels aux unités du HVO.

  7   Messieurs les Juges, je tiens à souligner que la Défense de M. Bruno Stojic

  8   ne nie pas le fait que l'état-major faisait partie intégrante du

  9   département à la Défense. Le département à la Défense par rapport à l'état-

 10   major avait des attributions qui se trouvent être énumérées à l'article

 11   numéro 9. Cela a été confirmé à maintes reprises. Mais la lecture de cet

 12   article permet de juger de jure et de facto pour ce qui est des éléments de

 13   preuve avancés dans cette affaire qui montrent que Bruno Stojic n'avait ni

 14   des attributions de planification ni de commandement.

 15   Vous verrez à l'avenant N, Messieurs les Juges, et dans le mémoire en

 16   clôture du Procureur, qu'il y a des rapports de M. Zeljko Siljeg qui ont

 17   été communiqués par le commandant de la zone opérationnelle à Bruno Stojic,

 18   aux responsables de la HZ HB et à d'autres personnes encore. Je ne vais pas

 19   toutes les énumérer. Si j'ai le temps, je crois que je pourrais montrer ou

 20   faire référence à un tel document. Mais pour que les Juges puissent décider

 21   du fait de savoir si Bruno Stojic recevait ces rapports pour information ou

 22   pour agir en fonction, il convient de se pencher sur le fait que Bruno

 23   Stojic n'a pas reçu de tels rapports de la part des commandants des autres

 24   zones opérationnelles en sa qualité de responsable du département de la

 25   Défense. Afin de pouvoir, comme l'affirme le Procureur, participer à

 26   l'élaboration de plans ou à l'adoption de certains ordres, même en mettant

 27   des gants, comme le dit le Procureur, en principe, il faudrait qu'il puisse

 28   recevoir des rapports de la part de la totalité des zones opérationnelles.


Page 52369

  1   Or, comme ce n'est pas le cas, la seule chose qui peut être conclue ou

  2   tirée comme conclusion, c'est que M. Siljeg, de par la façon dont il a

  3   appris à fonctionner, a envoyé ces rapports comme une copie de l'ordre au

  4   département à la Défense ainsi qu'aux autres instances de la HZ HB, mais il

  5   n'y a aucun élément de preuve disant que Bruno Stojic lui répondait à des

  6   questions posées dans ces documents ou lui aurait éventuellement donné des

  7   instructions, voire des ordres.

  8   Le paragraphe 459 maintenant. Le Procureur y affirme que s'agissant des

  9   questions militaires, Bruno Stojic avait un lien étroit avec le ministre de

 10   la Défense de la Croatie, M. Gojko Susak, et on indique en guise de preuve

 11   une transcription d'une réunion du conseil de la Défense nationale de

 12   Croatie datée du 3 novembre 1992, où Susak fournit les informations disant

 13   que le 19 août 1992, il a eu une réunion avec 17 responsables de Bosnie-

 14   Herzégovine, dont Bruno Stojic. Ceci, de façon évidente, ne confirme en

 15   rien la thèse avancée par le Procureur pour ce qui est de relations proches

 16   et directes entre M. Bruno Stojic et Gojko Susak.

 17   Le Procureur indique plus loin que partant du compte rendu daté du 27

 18   janvier 1993, il est donné de voir que Stojic avait informé abondamment

 19   Gojko Susak de ces opérations militaires qui se déroulaient contre l'ABiH

 20   en Bosnie centrale, y compris le secteur de Gornji Vakuf, et on avance à

 21   cet effet la pièce P 1325.

 22   Messieurs les Juges, je vous convie à vous pencher sur cette transcription

 23   parce que la Défense de Bruno Stojic affirme que ne s'y trouve pas ce que

 24   le Procureur dit s'y trouver au niveau du paragraphe indiqué.

 25   On va passer maintenant au segment où est affirmé que Stojic avait contrôlé

 26   les effectifs du HVO, la logistique et les finances. Au 556, le Procureur

 27   dit que Stojic avait demandé au ministre de la Défense de Croatie le

 28   paiement des effectifs militaires et Susak était la personne qui


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  1   approuvait. Le témoin n'a pas dit cela. Le Procureur a montré au témoin

  2   deux documents, à savoir le P 10290 et le P 10291, et le témoin a dit que

  3   la signature qui s'y trouvait n'était pas celle de Bruno Stojic. Cette

  4   déclaration explicite de la part de ce témoin de l'Accusation se trouve

  5   être indiquée à la page 23 375, lignes 9 et 10. Il suffit de se pencher sur

  6   les documents en question pour constater qu'il n'y a pas d'en-tête du

  7   département de la Défense, qu'il n'y a pas de numéro ou de référence de

  8   communication au bureau de la Défense, il n'y a pas de cachet du

  9   département de la Défense, et ils ne sont pas signés par Bruno Stojic.

 10   A l'occasion de l'interrogatoire de ce témoin et du contre-interrogatoire

 11   de ce témoin, on a montré le décompte final du département de la Défense

 12   relatif à l'année 1993; pièce P 8118, pages 7 et 8. C'est un document

 13   volumineux. Le Procureur et les Juges l'ont en leur possession. Et on y

 14   montre les recettes du département de la Défense exprimées en dinars

 15   croates. Ici, le montant qui est indiqué est celui que le département de la

 16   Défense a reçu de la part du ministère de la Défense de la République de

 17   Croatie et du département des Finances de la HR HB. Le montant reçu de la

 18   part du département à la Défense de la République de Croatie se chiffre à

 19   16 764 924 236 dinars croates.

 20   A l'occasion du témoignage de ce Témoin Miroslav Rupcic, on a procédé à une

 21   conversion du dinar croate pour avoir le montant en marks allemands. Cela

 22   se trouve au paragraphe 214 de notre mémoire en clôture. Le témoin a dit

 23   qu'il s'agit de la fin 1993, donc le montant envoyé par le ministère de la

 24   Défense de la République de Croatie se chiffrait à 4 408 445 marks

 25   allemands. Ceci est consigné au compte rendu, pages 23 573 à 23 578.

 26   Lorsque nous avons présenté au témoin cet élément de preuve, M. le Juge

 27   Antonetti, partant des données figurant à cet élément de preuve, a indiqué

 28   que ce montant obtenu de la part du ministère de la Défense de la


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  1   République de Croatie était de 10 % inférieur, chose qui se trouve être

  2   tout à fait exacte. Ceci est confirmé au compte rendu, pages 23 576 jusqu'à

  3   23 571 -- non, je m'excuse, là, il y a une erreur. Compte rendu 23 576,

  4   lignes 17 et 28.

  5   La Défense de M. Bruno Stojic souligne, chose qui peut être vue dans les

  6   documents P 10290 et 1291, il s'agissait de montants prêtés par le

  7   ministère de la Défense de la République de Croatie au département de la

  8   Défense. Et la Défense indique également que les moyens envoyés par la

  9   République de Croatie ont été collectés de la part des citoyens de la

 10   totalité de Bosnie-Herzégovine se trouvant à l'extérieur de la Bosnie-

 11   Herzégovine. Ceci s'est trouvé être confirmé par le Témoin Miroslav Rupcic,

 12   en pages 23 579 à 23 581, ainsi qu'à la page 23 585. Nous attirons

 13   l'attention des Juges de la Chambre sur le fait qu'en cette occasion-là, le

 14   témoin s'est vu montrer la pièce 2D 532, qui se trouve être versée au

 15   dossier au 1D 1755.

 16   Le témoin a expliqué pourquoi ces fonds-là ont été versés vers des comptes

 17   en Croatie, et non pas vers des comptes en Bosnie-Herzégovine. Ce qu'il

 18   convient de souligner ici, du fait des allégations du Procureur concernant

 19   l'entreprise criminelle commune, et ce, dans la partie relative au soutien

 20   financier apporté par la République de Croatie. Le fait est que la Défense

 21   a montré une pièce, la pièce 2D 545, qui constitue garantie du ministère

 22   des Finances de la République de Croatie, datée du 13 mai 1992, qui montre

 23   bien qu'on garantissait le fait qu'à la cellule de Crise des Musulmans de

 24   Croatie pour la République de Bosnie-Herzégovine. Il sera versé une

 25   assistance en contre-valeur de 30 millions de dollars USA. Point n'est

 26   nécessaire de commenter ces deux montants parce qu'il est clair que la

 27   République de Croatie avait envoyé des fonds tant à l'intention de la HZ

 28   HB, mais elle a aussi apporté des garanties pour la République de Bosnie-


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  1   Herzégovine, des garanties à concurrence d'au moins neuf fois plus pour ce

  2   qui est des approvisionnements nécessaires à la Bosnie-Herzégovine.

  3   Paragraphe 558 maintenant. Le Procureur affirme que Bruno Stojic a organisé

  4   des centres spéciaux d'information, tant à Mostar qu'à Zagreb, et il est

  5   avancé un élément de preuve en note de bas de page de P 2044. Mais cette

  6   affirmation ne découle pas du document qui est cité. Le centre

  7   d'information à Mostar existait avant la guerre et il a continué d'exister

  8   pendant la guerre. Ceci se trouve confirmé par le document P 7344, pages 41

  9   à 45, qui nous montre quel a été le rôle de ce centre. Ces centres-là

 10   étaient, en premier lieu, destinés à alerter les citoyens, à informer les

 11   citoyens d'éventuelles attaques, informer les citoyens aussi de la

 12   praticabilité des routes, informer les citoyens pour ce qui était du niveau

 13   des eaux ou pour ce qui est de consigner la totalité des événements de

 14   cette nature. Et comme la Bosnie-Herzégovine avait une frontière avec la

 15   Croatie - elle l'a encore - il était normal que l'on voit ces centres-là

 16   coopérer. En temps de paix, les centres de cette nature coopèrent dans

 17   différents Etats pour ce qui est des échanges d'information revêtant un

 18   certain intérêt pour les ressortissants des pays voisins.

 19   Le Procureur affirme que Bruno Stojic avait aussi coopéré avec les Serbes

 20   pour ce qui était de s'approvisionner en armes de la part de ces Serbes de

 21   Bosnie. Alors, pour ce qui est des allégations relatives à la coopération

 22   avec les Serbes, s'agissant des carnets de Mladic, nous avons fourni une

 23   documentation dans la partie de notre mémoire en clôture, qui se trouve au

 24   252.

 25   La Défense de Bruno Stojic affirme que l'achat des armes auprès des Serbes

 26   de Bosnie a été la résultante de l'environnement pour ce qui est de

 27   certains territoires de la HZ HB qui ont constamment été attaqués par

 28   l'ABiH et qui ne pouvaient pas se procurer autrement des armes, pas plus


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  1   que ces secteurs ne pouvaient, dans ces enclaves, bénéficier des soins

  2   médicaux parce qu'ils n'avaient pas d'hôpitaux sous la main. Ceci se trouve

  3   être confirmé par un témoin de l'Accusation, M. EA.

  4   Le fait que ces territoires aient été encerclés a été mis à profit par les

  5   Serbes de Bosnie pour vendre des armes et des moyens matériels et

  6   techniques à des prix nettement plus grands, des prix de neuf à dix fois

  7   plus grands que ne l'était leur valeur réelle.

  8   Et à l'occasion de l'interrogatoire de ce témoin, j'ai utilisé le terme de

  9   "chantage", et cela a été véritablement du chantage, confirmé par EA en

 10   page 24 904 et pages 24 913 à 24 917. Ceci se trouve être confirmé par le

 11   document P 9967 aussi.

 12   Ce document montre les prix qui ont été versés en contrepartie des moyens

 13   matériels et techniques. J'attire l'attention des Juges qu'à l'occasion des

 14   contre-interrogatoires, nous avons montré au témoin ce document, tout comme

 15   le document 2D 577, où l'on voit les prix qui ont été pratiqués pour les

 16   approvisionnements de l'ABiH et par le HVO au niveau des usines d'armes à

 17   Travnik. Nous avons procédé avec ce témoin à une comparaison des prix, et

 18   nous avons déterminé que les prix pratiqués par les Serbes étaient jusqu'à

 19   neuf fois plus grands. La chose est consignée aux pages 24 913 à 24 917 du

 20   compte rendu de l'audition du témoin de l'Accusation portant le pseudonyme

 21   EA.

 22   J'attire brièvement l'attention des Juges sur un document qui est le

 23   P 9965, et ce, notamment sur la dernière des phrases du document, où l'on

 24   voit que le HVO de Kiseljak a payé aux Serbes, sur ces deniers, un million

 25   de marks allemands. Ceci est une preuve de plus abondant dans le sens de

 26   l'affirmation au terme de laquelle ce sont les autorités locales qui

 27   finançaient l'armée sur leurs propres terrains.

 28   Je parle maintenant de la partie où il est dit que Bruno Stojic avait


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  1   exercé un contrôle à l'égard de la police militaire. Au paragraphe 561, il

  2   est décrit des activités administratives qui relevaient des attributions de

  3   Bruno Stojic, ainsi que de celles du chef de la police militaire, M.

  4   Valentin Coric.

  5   Au paragraphe 564, le paragraphe avance que la veille de l'ultimatum lancé

  6   par le HVO, le 15 avril, l'ultimatum qui se situe, d'après le Procureur, à

  7   la journée du 15, donc la veille de ce jour-là, le commandant de la police

  8   militaire Lovric aurait précisé le plan afin d'établir un contrôle intense

  9   sur la ville de Mostar sur ordre du chef du département de la Défense. Je

 10   vous invite à consulter la pièce P 1868, que vous avez dans vos classeurs.

 11   Et cette affirmation de l'Accusation n'est pas exacte. Il s'agit

 12   effectivement d'un plan visant à renforcer le contrôle de la ville de

 13   Mostar, mais dans ce document, il est dit que ce plan résulte d'un besoin

 14   créé par la complexification de la situation sur le plan sécuritaire en

 15   tant que conséquences du conflit entre l'ABiH et le HVO de Konjic. Donc il

 16   n'y a rien à voir entre ce plan et l'ultimatum.

 17   Le Témoin Dragan Juric a déposé au sujet de cette attaque de l'ABiH. A

 18   l'appui, je vous renvoie à deux documents : le document    P 1874 et le

 19   document P 1879. Dans ce même paragraphe, il est affirmé que Bruno Stojic,

 20   après la prise du campement nord par l'ABiH, que Bruno Stojic aurait placé

 21   sous ses ordres la police civile, qui, elle, tenait la première ligne, en

 22   fait, qu'il l'aurait resubordonnée au commandant de la police militaire.

 23   Dans le mémoire en clôture, la pièce P 3124 est citée, mais cela n'est pas

 24   exact. Je cite à l'appui la pièce P 3027 ainsi que la pièce P 3123. Il

 25   s'agit des ordres du chef du département des Affaires intérieures, qui lui

 26   avait le droit de commander la police civile.

 27   S'agissant maintenant du déploiement de la police militaire de Livno et

 28   leur arrivée à Mostar, sur quel ordre a agi le commandant, eh bien, le


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  1   commandant a témoigné, page 50 973 du compte rendu d'audience.

  2   Voyons maintenant le paragraphe 567. Dans ce paragraphe, le Procureur

  3   affirme qu'après les tensions de Prozor en octobre, le département de la

  4   Défense de Stojic a renforcé le contrôle qu'exerçait le HVO sur Mostar, à

  5   savoir qu'il a donné l'ordre à la police militaire, en passant par

  6   l'entremise de Valentin Coric, de, comme l'affirme le Procureur dans son

  7   mémoire, qu'il s'approprie le contrôle sur les bâtiments les plus

  8   importants de la ville. La pièce P 619 est citée à l'appui par le

  9   Procureur. Dans ce rapport, l'on voit que sur ordre du chef, et ce, sur la

 10   base de la décision de la présidence du HVO, on a effectivement pris

 11   contrôle d'un certain nombre de bâtiments à Mostar.

 12   Le témoin du Procureur, le Témoin CV, a dit au moment de sa

 13   déposition que cela a eu lieu dans le cadre d'une action conjointe menée

 14   par l'ABiH et le HVO; page du compte rendu d'audience 12 590, lignes 13 à

 15   20. Et cela a été confirmé par le Témoin Vidovic. Je vous renvoie aux pages

 16   5 149 à 5 154.

 17   Au paragraphe 568, le paragraphe précise que le document P 670 montre le

 18   rôle actif joué par Bruno Stojic dans le cadre des opérations militaires à

 19   Prozor. Le document lui-même permet de voir qu'il s'agit de tentatives qui

 20   viennent tant de la part de Bruno Stojic que de la part de Slobodan Praljak

 21   visant à résoudre les problèmes liés à un départ d'un groupe de militaires

 22   vers Jajce attaqué par les Serbes un jour seulement après l'accord qui

 23   serait intervenu entre le HVO et les Serbes, l'accord de Jajce du 26

 24   octobre 1992. Je renvoie à la pièce P 11380.

 25   Il ressort de ce document que cela fait 58 heures que l'on déploie des

 26   efforts pour assurer le passage d'une unité armée du HVO vers Jajce, mais

 27   elle y est constamment empêchée par des unités musulmanes, et il y est dit

 28   :


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  1   "Impliquez-vous au maximum pour résoudre ces malentendus avec les

  2   Musulmans dans les secteurs de Novi Travnik et de Jajce. Agissez auprès des

  3   Musulmans, intervenez auprès d'eux pour que de ce côté-là également la

  4   circulation sans entrave sois permise vers Jajce."

  5   Pourquoi était-ce important, Messieurs les Juges ? Parce que cette unité

  6   qui est partie vers Jajce, elle part à cause d'une attaque très intense

  7   lancée par les Serbes. Jajce était défendue par les Croates et par les

  8   Musulmans ensemble, et cette unité était composée à la fois de Croates et

  9   de Musulmans. Et à l'appui, la pièce 3D 484.

 10   Ce document ne peut pas être interprété comme étant un ordre. Il s'agit

 11   plutôt d'un appel demandant que l'on fasse tout ce qui est possible pour

 12   sauver Jajce.

 13   Le document suivant utilisé par le Procureur pour affirmer que Bruno Stojic

 14   a pris part aux événements de Prozor en 1992 constitue la pièce P 799. Le

 15   Procureur affirme que Bruno Stojic aurait invité, le 25 octobre 1992, les

 16   commandants de brigade du HVO --

 17   Excusez-moi un instant, je suis en train de surveiller l'heure. Excusez-

 18   moi. Je reprends.

 19   Le Procureur affirme que Bruno Stojic aurait convoqué, le 25 octobre 1992,

 20   un commandant des brigades du HVO et des commandants de la police militaire

 21   à Mostar pour qu'ils l'informent de la situation qui prévalait à Prozor. Il

 22   cite à l'appui la pièce P 799.

 23   Lorsque nous examinerons ce document, nous verrons clairement que ce

 24   qu'affirme le Procureur n'en découle absolument pas. Et pourquoi ? Quelle

 25   est la raison pour laquelle Bruno Stojic a envoyé cet appel ? Cela est tout

 26   à fait clair si vous vous penchez sur la pièce P 853. Car cinq jours

 27   seulement après cette réunion, Bruno Stojic a émis l'ordre de nomination

 28   dans la Brigade de Rama des autres officiers et des commandants adjoints,


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  1   et ce, en se basant sur ses attributions qui lui sont conférées par

  2   l'article 34 du décret sur les forces armées.

  3   Donc, si nous établissons des comparaisons entre ces deux documents, nous

  4   verrons que, de toute évidence, l'ordre du jour de cette réunion était bien

  5   ce sujet-là, parce que sinon, de toute manière, ce serait complètement

  6   contraire à la logique que ce chef de département convoque l'ensemble des

  7   responsables de l'ensemble du territoire pour qu'ils viennent l'informer de

  8   la situation sept jours après ces événements.

  9   Le Procureur a eu recours à plusieurs reprises aux documents de l'adjoint

 10   du SIS dans les différentes unités pour démontrer un certain nombre de ces

 11   affirmations, même si ces documents, de toute manière, n'étaient pas

 12   envoyés à Bruno Stojic. Bruno Stojic ne pouvait pas être au courant de la

 13   teneur de ces documents même si on les envoyait à l'administration du SIS.

 14   Le Procureur n'a pas démontré que Bruno Stojic exerçait le contrôle

 15   plein sur quelque secteur du département de la Défense que ce soit.

 16   Le paragraphe 571 maintenant. Par rapport à ce qui est allégué dans ce

 17   paragraphe du Procureur, la Défense réagit en soulignant qu'aucune preuve

 18   ne démontre que Bruno Stojic était au courant des prétendues attaques

 19   lancées par le HVO après le 15 avril 1993 en Bosnie centrale et que le

 20   Procureur n'a pas étayé cela par aucun des documents qu'il cite à l'appui.

 21   Dans les paragraphes 572 et 573, le Procureur affirme que l'opération du

 22   HVO sur Sovici et Doljani a été une opération de taille faisant intervenir

 23   deux zones opérationnelles et qu'elle ne pouvait qu'être coordonnée par des

 24   instances très haut placées, y compris par Bruno Stojic. Il affirme même

 25   que cette même opération s'est déroulée conformément au plan, et que si

 26   Stojic n'y a pas pris part, au moins il était au courant de l'existence du

 27   plan.

 28   Le Procureur n'a démontré au-delà de tout doute raisonnable aucune de ces


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  1   affirmations. Il cite à l'appui deux ordres de Miljenko Lasic qui n'ont pas

  2   été communiqués à Bruno Stojic. Il cite également la pièce P 1915, de

  3   laquelle il ressort que cette pièce concerne les attaques menées par l'ABiH

  4   sur la Brigade du HVO Herceg Stjepan déployée à Konjic le 14 juin 1993, ce

  5   qui a fait l'objet du témoignage du Témoin Juric Dragan aux pages du compte

  6   rendu d'audience 39 318 jusqu'à 39 321.

  7   En outre, la pièce P 2085 n'a pas été reçue par Stojic, pas plus que par le

  8   département de la Défense; on peut le voir dans le registre des messages

  9   codés de l'état-major, à savoir la pièce P 463.

 10   Le Procureur n'a pas démontré non plus qui est ce dénommé Dragan dans le

 11   document cité.

 12   Aux paragraphes 576 et 577, le Procureur affirme que Bruno Stojic a joué un

 13   rôle principal dans les opérations militaires du 9 mai 1993 et il cite à

 14   l'appui l'enregistrement de la BBC du 10 mai, qui a été cité par le

 15   Procureur, P 4238.

 16   Vous vous souviendrez des propos du Procureur dans le paragraphe 577. Ces

 17   propos ne viennent pas de Bruno Stojic, mais du journaliste. Le journaliste

 18   apporte une réponse dans une partie de cet enregistrement, donc la

 19   prétendue réponse de Bruno Stojic. Dans la suite, nous entendons la voix de

 20   Bruno Stojic. Nous affirmons que ces propos n'ont pas été prononcés par

 21   Bruno Stojic, car si cela avait été le cas, le journaliste l'aurait

 22   enregistré, tout comme il a enregistré la partie non contestée de sa

 23   déclaration.

 24   Des observations très importantes et des questions posées par M. le

 25   Président Antonetti au sujet de cette vidéo, au sujet de l'aspect du

 26   cabinet de Bruno Stojic et de la carte que l'on voit figurent aux pages 35

 27   985 à 35 961 du compte rendu d'audience.

 28   Au sujet du bombardement de Mostar après le 9 mai 1993 et les prétendues


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  1   raisons de ce bombardement, le Procureur affirme que Bruno Stojic était au

  2   courant de cela. Il l'affirme sur la base de la déclaration du Témoin CB

  3   qui aurait entendu les raisons du pilonnage de Mostar ouest de la part de

  4   l'adjoint de Stojic, Slobodan Bozic. Le Procureur n'a fourni aucune preuve

  5   démontrant que Bruno Stojic était au courant de cette déclaration, même si

  6   elle avait eu lieu, même si elle avait été prononcée. La Défense affirme

  7   que cela est inexact, que la déclaration n'a pas été donnée et que le

  8   témoin l'a inventée.

  9   Cette déclaration n'a été enregistrée dans aucun rapport des membres du

 10   Bataillon espagnol. Qui plus est, à la page précitée du compte rendu

 11   d'audience, le témoin affirme que Slobodan Bozic se présentait parfois en

 12   tant que ministre, parfois en tant qu'officier de liaison. L'on ne peut pas

 13   prêter foi à un témoin qui confirme qu'il ne savait pas qui était Slobodan

 14   Bozic, qui était en contact régulier avec le Bataillon espagnol parce qu'il

 15   était membre de la commission du HVO de la HZ HB chargée des contacts avec

 16   les organisations internationales.

 17   J'attire votre attention sur le paragraphe 580. Dans ce paragraphe de son

 18   mémoire, le Procureur affirme que Bruno Stojic était au courant de la mort

 19   du sergent Fernandez, et le Procureur affirme toujours que cette balle qui

 20   l'a tué a été tirée par le HVO.

 21   Ces éléments ont été expertisés. Je vous renvoie au document  2D 117,

 22   qui constitue un rapport sur les résultats de l'enquête menée par la

 23   commission chargée d'examiner les circonstances de la mort de ce

 24   lieutenant. Et ce rapport date du 14 juin 1993. Les éléments figurant dans

 25   ce rapport ont été utilisés dans la lettre envoyée par Bruno Stojic au

 26   ministre espagnol de la Défense.

 27   Je me permets de rappeler que des officiers espagnols ont eux aussi

 28   pris part aux activités de la commission, à savoir le colonel Castro et le


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  1   colonel De Salas, donc Bruno Stojic ne s'est pas placé de son propre chef

  2   dans cette position de rendre compte du comportement des soldats du HVO.

  3   Nous voyons dans le rapport 2D 117 qu'un récit a été construit qui découle

  4   de hauts officiers espagnols, probablement grâce aux éléments fournis par

  5   le Bataillon espagnol, que le HVO était responsable, qu'il convenait de

  6   sanctionner le HVO et la Croatie. Mais cela a été fait sans aucune preuve.

  7   C'est la raison pour laquelle Bruno Stojic réagit en envoyant cette lettre

  8   au ministre espagnol. Donc Bruno Stojic ne se met pas de son propre chef 

  9   dans cette position de rendre compte du comportement des soldats du HVO,

 10   comme l'affirme le Procureur. Aussi, l'on voit dans ce rapport que le HVO

 11   n'est pas responsable de la mort du lieutenant Fernandez et jamais personne

 12   n'a pu établir autre chose sur cet évènement.

 13   A la suite du rapport de cette commission, la police civile des

 14   Nations Unies a eu pour mandat d'enquêter sur les circonstances de la mort

 15   de ce lieutenant, mais ils ne l'ont jamais fait. Je vous renvoie à la pièce

 16   2D 118.

 17   La deuxième affirmation du Procureur ne peut pas être maintenue non

 18   plus, à savoir que le HVO ait jamais été déclaré responsable de ce meurtre.

 19   Je reprends la dernière phrase du rapport 2D 117. Nous avons vu là

 20   comment on a manipulé cette mort du lieutenant Fernandez au détriment du

 21   HVO. Mais on voit la même chose également dans le rapport du général

 22   Petkovic, à savoir la pièce P 2808. Cette manipulation se poursuit par le

 23   Témoin van der Grinten dans son témoignage, lorsqu'il affirme que Bruno

 24   Stojic, au moment de son entretien avec ce témoin le 16 juin 1993, aurait

 25   dit que c'était lui qui contrôlait les tireurs isolés du HVO.

 26   Dans le rapport émanant de cet entretien, à savoir la pièce    P 286

 27   -- je pense que la cote n'est pas exacte. Je pense qu'il manque un chiffre,

 28   mais je vérifierai cela, je le corrigerai. Donc il y est dit que le HVO


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  1   contrôlait les tireurs isolés.

  2   De toute évidence, il s'agit d'un faux témoignage fourni par ce témoin, car

  3   c'est au détriment de toutes les règles de la logique que Bruno Stojic a

  4   dit cela pour que cela ne figure pas dans ce rapport. Au paragraphe déjà

  5   cité du mémoire en clôture du Procureur, dans la dernière phrase, l'on voit

  6   que le Procureur lui non plus ne le considère pas complètement crédible.

  7   Voyons maintenant le paragraphe 588 par rapport aux déclarations du

  8   Procureur disant que le HVO aurait attaqué l'ABiH le 24 août 1993 à

  9   l'emplacement du campement nord, de la centrale électrique et du village de

 10   Rastane. La Défense affirme qu'il ressort précisément des documents cités

 11   par le Procureur dans les notes de bas de page 1 369, 1 370 et 1 371 que

 12   cette attaque a été lancée par l'ABiH. Les documents qui sont énumérés ici

 13   n'ont pas été reçus par Bruno Stojic. D'ailleurs, ils ne lui ont pas été

 14   envoyés non plus. Il ressort de ces documents qui décidait des unités du

 15   HVO, qui participerait à ces opérations militaires, et ces décisions ne

 16   venaient pas de Bruno Stojic, comme nous l'avons déjà dit.

 17   Ensuite, s'agissant de l'affirmation qui figure dans les documents P 4401

 18   et P 4435 au sujet de Bruno Stojic sur les unités professionnelles et sur

 19   leur niveau d'entraînement, nous soulignons que dans ces rapports, il n'est

 20   pas cité à quel moment Bruno Stojic l'aurait dit, ses propos ne figurent

 21   pas entre guillemets, mais puisque l'ABiH a attaqué le HVO le 24 août, même

 22   si ces affirmations étaient exactes, donc consistant à dire que Bruno

 23   Stojic était convaincu de la professionnalité, du bon entraînement et

 24   formation des unités, il n'aurait pas pu savoir que cette opération

 25   militaire allait avoir lieu ni qui allait y prendre part.

 26   Nous ajoutons que dans le journal des activités du Bataillon espagnol, à

 27   savoir la pièce P 1717, pendant la période concernée, l'on ne retrouve

 28   aucune trace de conversation avec Bruno Stojic.


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  1   Paragraphe 589. Dans ce paragraphe, le Procureur affirme qu'après la prise

  2   de Rastane de la part de l'ABiH le 20 septembre 1993, que Stojic et Praljak

  3   ont réagi rapidement en mobilisant toutes les ressources humaines pour

  4   qu'on détruise les groupes terroristes du MOS qui s'étaient infiltrés là.

  5   Les documents cités à l'appui sont les documents P 5235 et P 5232. Ces deux

  6   ordres n'ont rien à voir avec l'opération du HVO à Rastane, qui se situe au

  7   nord de Mostar.

  8   Nous citons à l'appui la pièce P 9276, à savoir la carte 18. M. le

  9   Président et MM. les Juges pourront voir où se situe Rastane grâce à cette

 10   carte.

 11   L'ABiH a pris Rastane le 21 septembre 1993, et cela ressort du rapport de

 12   l'état-major principal, à savoir la pièce 2D 338. Les opérations du côté du

 13   HVO ont été commandées par le commandant de la zone opérationnelle de

 14   l'Herzégovine du sud-est, Miljenko Lasic. Cela est visible dans le document

 15   P 5303.

 16   Les ordres de Stojic et de Praljak concernent l'entrée des groupes

 17   terroristes dans le secteur de Capljina, à savoir au sud de Mostar, et non

 18   pas l'action de Rastane.

 19   Slobodan Praljak, dans son témoignage, explique qu'il a reçu l'ordre de

 20   Bruno Stojic et qu'il a barré de sa propre main dans cet ordre le mot

 21   "Mostar" et qu'il a écrit lui-même "Ljubuski" et qu'il a paraphé cette

 22   modification; page du compte rendu d'audience 42 078.

 23   Il ressort de ces ordres que la mission de procéder à une mobilisation, ce

 24   qui ressortait effectivement des attributions de Bruno Stojic, mais

 25   également que les forces rassemblées soient mises à la disposition du

 26   colonel Obradovic. Pour ce qui est de la mobilisation, elle devait être

 27   menée à bien par la police militaire et la police civile. C'est la raison

 28   pour laquelle un ordre identique a été émis par le chef du département des


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  1   Affaires intérieures, à savoir la pièce 2D 3002.

  2   De toute évidence, cette intervention était urgente, et nous verrons

  3   pourquoi, c'est la raison pour laquelle ces trois ordres sont quasiment

  4   identiques, à cela près que l'ordre de Slobodan Praljak comporte une

  5   différence sur un point de détail essentiel. A la fin de son ordre, il

  6   ajoute : le commandant du 1er Secteur, le colonel Obradovic, m'informera

  7   régulièrement de l'exécution du présent ordre.

  8   Par conséquent, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, chacun agit

  9   dans le cadre de ses pouvoirs, de ses attributions. L'ordre de Bruno

 10   Stojic, pièce P 5232, ne peut pas être considéré comme étant un ordre donné

 11   aux unités du HVO comme l'affirme le Procureur à l'annexe N. S'agissant de

 12   cette infiltration des groupes terroristes dans la zone plus large de

 13   Capljina, deux rapports du Bataillon espagnol le démontrent en date du 12

 14   septembre et du 27 septembre 1993, à savoir les pièces P 4971 et P 5416.

 15   Dans le premier document, page 5, il est dit :

 16   "La patrouille logistique qui revenait après avoir ravitaillé les

 17   militaires sur la ligne de front est tombée dans une embuscade à

 18   Stanojevici, et à cette occasion, six soldats du HVO ont été tués."

 19   A l'appui, je cite une carte, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 20   Pièce IC 1108. Je ne voulais pas l'insérer dans votre classeur. Cette carte

 21   nous permet de voir où se trouve cette localité de Stanojevici. Donc cela

 22   se situe dans la municipalité de Capljina.

 23   Dans l'autre rapport, page 5, il est dit que le groupe d'éclaireurs, sur

 24   une demande lancée par le HVO dans la localité d'Oplicici, a trouvé cinq

 25   cadavres, dont deux en uniforme, les mains liées dans le dos, et les cinq

 26   cadavres comportaient un grand orifice d'entrée ou de sortie à la nuque.

 27   Où se situe la localité d'Oplicici ? Vous pourrez vous convaincre qu'il

 28   s'agit du plateau de Dubravska et que cela est très près des zones devant


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  1   faire partie de la mobilisation. A l'appui, nous citons la pièce IC 0018.

  2   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il ressort de ces documents

  3   qu'il y a eu infiltration de groupes terroristes - cela ressort de manière

  4   tout à fait incontestable - et il en ressort qu'il y a eu des exécutions

  5   menées par ces groupes. Je ne vois pas comment on pourrait qualifier ces

  6   agissements autrement, compte tenu des descriptions de l'état des corps qui

  7   ont été retrouvés par des membres du Bataillon espagnol. Ce sont eux qui

  8   les ont décrits.

  9   Ensuite, le Procureur affirme que Bruno Stojic a félicité Tuta et le

 10   Bataillon disciplinaire après ces opérations de septembre 1993 de Rastane

 11   au lieu de mener à bien une enquête et de sanctionner les crimes. La

 12   Défense souligne qu'aucun crime commis en septembre 1993 à Rastane ne

 13   figure dans l'acte d'accusation de l'espèce.

 14   Alors, au paragraphe 591 du mémoire en clôture de l'Accusation, le

 15   Procureur y fait référence à deux documents portant sur la connaissance

 16   qu'aurait eue Bruno Stojic de l'expulsion de personnes de leurs

 17   appartements et du transfert de femmes et d'enfants vers la rive gauche. Il

 18   s'agit des documents P 5554 et P 5518.

 19   Aucun de ces documents n'a été remis ni au HVO de la HZ HB ni à Bruno

 20   Stojic. L'un de ces documents a été d'ailleurs commenté par mon estimé

 21   confrère, Me Karnavas.

 22   Le Procureur n'a pas prouvé au-delà de tout doute raisonnable que Bruno

 23   Stojic aurait disposé de quelque élément de connaissance que ce soit

 24   concernant ces événements.

 25   Paragraphe 593 à présent. Le Procureur y avance que Bruno Stojic, suite aux

 26   crimes de Stupni Do, aurait proposé, ou plutôt, comme le dit le Procureur,

 27   aurait fait les louanges et proposé la promotion d'Ivica Rajic au grade de

 28   colonel d'active.


Page 52386

  1   Pour ce qui concerne l'attribution d'un grade à Ivica Rajic, et je dis bien

  2   attribution d'un grade, et non pas louange ni promotion. Mais il s'agissait

  3   bien d'une proposition d'attribution de grade. On le voit dans le document

  4   P 6328, et à ce sujet le Témoin EA a déposé en page 24 904 du compte rendu,

  5   lignes 1 à 17.

  6   Le Procureur n'a pas démontré au-delà de tout doute raisonnable que Bruno

  7   Stojic aurait été au courant ou aurait pu être au courant de la

  8   responsabilité d'Ivica Rajic dans les crimes de Stupni Do.

  9   A la lumière de toutes les pièces à conviction versées au dossier en

 10   l'espèce jusqu'à la date du 10 novembre 1993, moment où Bruno Stojic quitte

 11   le poste de chef du département de la Défense, on voit qu'aucun soupçon

 12   n'existait selon lequel Ivica Rajic aurait été responsable desdits crimes.

 13   Plus précisément, à ce stade, aucun élément n'existait susceptible

 14   d'indiquer qu'Ivica Rajic aurait pu participer à des activités illégales.

 15   Le Procureur poursuit en indiquant qu'Ivica Rajic, après les crimes de

 16   Stupni Do, aurait continué à envoyer des informations à Stojic, Praljak et

 17   Petkovic concernant la coopération croato-serbe, et notamment qu'il aurait

 18   transmis une demande à laquelle Stojic aurait répondu dès le jour suivant.

 19   Cette affirmation du Procureur est inexacte, Messieurs les Juges. Il

 20   convient de se pencher sur le document P 6219. C'est précisément ladite

 21   demande d'Ivica Rajic en date du 29 octobre 1993 demandant une assistance

 22   en effectifs en provenance de Vares. Cette demande est remise au chef du

 23   département de la Défense. Et le deuxième document est le P 6267, qui

 24   concerne un convoi censé se déplacer selon l'axe Berkovici-Nevesinje-

 25   Konjic, convoi destiné à apporter de l'aide à la population civile et aux

 26   soldats du HVO qui se trouvaient dans la région de Turije et Zabrdje, donc

 27   dans la poche de Konjic que nous avons très souvent évoquée et au sujet de

 28   laquelle le Témoin Juric, Dragan a déposé. Par conséquent, ces deux


Page 52387

  1   documents n'entretiennent aucun lien de causalité.

  2   Au paragraphe 594 du mémoire en clôture de l'Accusation, il est indiqué que

  3   Bruno Stojic aurait directement eu la responsabilité des camps, qu'il

  4   aurait contribué de façon active à la mise en place d'un système ayant

  5   permis d'expulser un grand nombre de prisonniers musulmans ainsi que leurs

  6   familles et de les déporter hors de Bosnie-Herzégovine. Bruno Stojic

  7   n'était pas directement chargé des camps, il ne l'était pas du tout, et

  8   nous avons fourni tous les éclaircissements nécessaires à cet effet dans

  9   notre mémoire en clôture.

 10   Concernant le document fourni à l'appui de cette affirmation, il s'agit

 11   d'un document proposé par le Procureur qui concerne avant tout les camps,

 12   mais qui concerne également la déportation des Musulmans. Le Procureur

 13   avance donc le document P 3573.

 14   Mais ce document s'inscrit en faux contre les affirmations du Procureur

 15   relatives à l'implication directe de Bruno Stojic pour ce qui concerne les

 16   camps. Il s'agit d'un procès-verbal de la réunion du HVO du HZ HB en date

 17   du 20 juillet 1993. Il s'agissait là d'une de ces réunions au cours

 18   desquelles il a été débattu des camps.

 19   Je propose aux Juges de la Chambre d'examiner le document P 3560, qui

 20   correspond donc à une de ces séances qui ont précédé celle enregistrée et

 21   consignée dans le document P 3573. On y examine la demande émanant de la

 22   municipalité de Capljina dans laquelle il est demandé le transfert des

 23   détenus. Il s'agit également de l'examen du statut et des conditions

 24   d'hébergement des détenus et des personnes placées en isolement dans le but

 25   d'améliorer les conditions dans lesquelles ils sont placés. Suite aux

 26   débats et à la discussion, une conclusion est adoptée, dans laquelle il est

 27   dit que :

 28   "Il convient d'assurer de bonnes conditions de détention pour les


Page 52388

  1   prisonniers de guerre qui soient conformes aux conventions de Genève."

  2   Il est également dit que si les conditions actuelles de détention ne sont

  3   pas satisfaisantes, le chef du département des Affaires juridiques

  4   déterminera de nouvelles installations et de nouveaux endroits pour la

  5   détention de ces personnes.

  6   Voilà ce qui est maintenant important. Il est dit que :

  7   "Le département de la Défense sera chargé de la mise en place de ces

  8   nouvelles installations."

  9   Un groupe de travail de trois personnes a été nommé et chargé de se rendre

 10   dans la municipalité de Capljina ainsi que de proposer des mesures suite à

 11   l'évaluation de la situation sur place.

 12   Par conséquent, lors de cette séance, il a dit que ce n'était qu'après la

 13   détermination de nouvelles localités que le département de la Défense

 14   prendrait en charge les tâches concernées. Il s'agit du décret P 292, et il

 15   s'agissait uniquement de ces nouvelles localités.

 16   Nous affirmons avec force que Dretelj et Capljina, localités où étaient

 17   détenus des prisonniers, les prisonniers condamnés et parfois des

 18   prisonniers de guerre, n'ont pas été mises en place en application de ce

 19   décret.

 20   Revenons maintenant à la séance du 20 juillet, à laquelle se réfère le

 21   Procureur dans ce même paragraphe de son mémoire en clôture. Il s'agit du

 22   document P 3573.

 23   Lors de cette réunion, un rapport a été présenté, un rapport de ce groupe

 24   de travail, et le groupe de travail a déterminé que les allégations de

 25   certains médias étaient inexactes. Il s'est rendu sur place. Il a fait part

 26   de sa propre évaluation. Et concernant les centres de transit et la

 27   tentative de trouver de nouvelles localités pour permettre le transfert des

 28   détenus de Capljina, il a été conclu que - et ceci est très important, donc


Page 52389

  1   je vais maintenant avancer - il est conclu donc que le CICR et d'autres

  2   organisations internationales, afin de permettre le contrôle des conditions

  3   de détention des personnes détenues, se verront permettre un accès.

  4   Deuxièmement, on maintient une initiative de mise en place d'un centre de

  5   transit à Ljubuski destiné aux personnes souhaitant quitter les zones en

  6   guerre pour se rendre dans des pays tiers. Le HCR en est informé.

  7   De nouveau, une commission de trois personnes est nommée pour se pencher

  8   sur les possibilités d'accueil d'un certain nombre de personnes qui ne

  9   tomberaient pas dans ces catégories, qui ne souhaiteraient pas partir.

 10   Merci.

 11   Donc ce sont là les informations reçues par Bruno Stojic lors de cette

 12   réunion, et on a particulièrement porté à son attention le fait que le HCR

 13   participait à cette initiative. Par conséquent, Bruno Stojic ne participait

 14   d'aucune façon aux activités qui avaient pour but l'expulsion et la

 15   déportation. Nous soulignons que les deux commissions ou les deux groupes

 16   de travail chargés d'évaluer la situation et les conditions de détention

 17   ainsi que de choisir de nouvelles localités ne comportaient aucun membre du

 18   département de la Défense la HZ HB. La commission qui a été fondée le 6

 19   août 1993 par Bruno Stojic, document P 3995, n'a jamais réellement

 20   fonctionné. C'est quelque chose que nous avons répété dans notre mémoire en

 21   clôture, et maintenant nous le soulignons encore une fois en indiquant

 22   qu'aucun élément de preuve ne vient appuyer cette idée.

 23   Concernant le rôle du SIS dans la procédure d'échange de prisonniers, nous

 24   soulignons que le document 6D 128 montre que le centre du SIS a délivré une

 25   attestation indiquant qu'il n'y avait pas d'objection à relâcher une

 26   personne donnée de la prison centrale militaire, comme cela y figure, mais

 27   qu'il ne prenait pas les décisions relatives à cette libération. Le

 28   document P 4686 montre clairement que cette personne, la personne


Page 52390

  1   concernée, a été libérée suite à une approbation délivrée par le bureau

  2   chargé des échanges.

  3   Messieurs les Juges, bien que les centres du SIS aient fait partie de

  4   l'administration du SIS et du secteur de la sécurité, le Procureur n'a pas

  5   démontré que Bruno Stojic connaissait ou aurait pu connaître les activités

  6   dudit centre.

  7   Concernant le paragraphe 597, le paragraphe [phon] y affirme que Josip

  8   Praljak, le 27 octobre 1993, aurait envoyé à Bruno Stojic un rapport

  9   concernant la situation à l'Heliodrom. Il cite à l'appui la pièce P 6170.

 10   La Défense affirme que ce rapport n'a jamais été envoyé à Bruno Stojic. Non

 11   seulement Bruno Stojic ne l'a jamais reçu, mais il n'a jamais été envoyé.

 12   Le contenu de ce document d'ailleurs  montre qu'il s'agissait là

 13   d'information que le témoin concerné adressait, en réalité, à M. Naletilic.

 14   M. Naletilic, que ce témoin considérait, pour des raisons connues de lui

 15   seul, comme étant le conseiller de Bruno Stojic et comme étant une personne

 16   plus haut placée que Bruno Stojic. Ce lien que le témoin entretient avec M.

 17   Naletilic est patent à l'examen du document P 6844, qui est un rapport de

 18   la section judiciaire de la police militaire daté du 24 novembre 1993,

 19   rapport rédigé par cette section judiciaire.

 20   M. Praljak a été entendu pour transmission non autorisée d'informations

 21   appartenant à la documentation de la prison centrale militaire,

 22   transmission de ces informations à Naletilic.

 23   Alors, aux pages 14 866 à 14 873 du compte rendu d'audience, nous pouvons

 24   voir la question qui a été posée et l'étonnement qui était celui du Juge

 25   Antonetti.

 26   M. le Juge Antonetti a présenté à ce témoin une liste de personnes à

 27   qui ces informations étaient censées être fournies et il a demandé au

 28   témoin comment il avait pu considérer une personne de rang inférieur comme


Page 52391

  1   étant plus haut placée. Le témoin a répondu qu'il s'agissait d'une erreur

  2   de dactylographie.

  3   Nous affirmons qu'il ne s'agissait en rien d'une erreur de dactylographie

  4   et que ce rapport n'a jamais été destiné à Bruno Stojic. A-t-il été remis à

  5   Naletilic ? Seul le témoin le sait. De plus, si Bruno Stojic, en tant que

  6   chef du département de la Défense, avait bien la charge de la prison

  7   centrale militaire de l'Heliodrom, comme l'affirme le témoin, et si ce

  8   Témoin Josip Praljak, qui était employé au sein de cette prison,

  9   s'adressait à lui comme à un supérieur, comment serait-il possible

 10   d'expliquer que ce même témoin, à la date du 24 novembre 1993, a adressé à

 11   Bruno Stojic une lettre, versée sous la cote P 6848, et qu'il l'ait fait

 12   deux semaines après la publication officielle de la liste des membres du

 13   nouveau gouvernement qui ne comprenait pas Bruno Stojic, versée sous la

 14   cote P 6583, et qu'il l'ait fait également deux semaines après que Bruno

 15   Stojic a cessé d'être employé au sein du département de la Défense ?

 16   Passons maintenant à la section 7. Je cite : "Stojic a contribué en

 17   connaissance de cause et de manière importante au fonctionnement des camps

 18   du HVO, à l'emprisonnement illégal de Musulmans et au travail forcé auquel

 19   ils ont été soumis et a voulu ces crimes."

 20   Au paragraphe 600 de son mémoire en clôture, le Procureur affirme que lors

 21   de sa déposition, M. Petkovic aurait rejeté l'ensemble de leur

 22   responsabilité pour les comptes du HVO sur le département de la Défense, à

 23   la tête duquel se trouvait Bruno Stojic. Mais M. Petkovic n'a pas vraiment

 24   dit cela de façon si explicite, et on le voit en page 50 670 du compte

 25   rendu d'audience.

 26   Messieurs les Juges, M. Petkovic a dit, et je vais maintenant paraphraser

 27   en espérant ne pas me tromper, qu'au sein du HVO de la HZ HB, il y avait

 28   des prisons où des détenus étaient emprisonnés. Certains purgeaient leur


Page 52392

  1   peine, et le décret pertinent déterminait précisément qui avait la

  2   responsabilité de ces centres. C'était le décret P 292 signé par Boban. M.

  3   Petkovic savait quels étaient les centres formés en application de ce

  4   décret, mais ce n'est pas important à ce stade. Ce que nous avançons à

  5   l'attention des Juges de la Chambre, c'est que -- en fait, nous savons bien

  6   que les Juges de la Chambre le ferons même sans que nous le suggérions,

  7   mais je veux croire que les Juges de la Chambre examineront la déposition

  8   de M. Petkovic à la lumière de l'ensemble des éléments de preuve dont ils

  9   ont été saisis concernant cette question des camps de prisonniers, et nous

 10   espérons qu'à la lumière de tous ces éléments, les Juges de la Chambre

 11   seront en mesure de parvenir à une conclusion juste.

 12   Le Procureur s'appuie sur un certain nombre de documents censés venir

 13   appuyer son affirmation selon laquelle Bruno Stojic était responsable des

 14   camps. Nous allons prendre position seulement concernant certains d'entre

 15   eux.

 16   Messieurs les Juges, parfois -- en fait, plus que parfois, à la lecture du

 17   mémoire en clôture de M. Scott et également des mémoires en clôture de mes

 18   estimés confrères, j'ai parfois, même souvent, eu l'impression que nous

 19   n'avons même pas présenté d'éléments à décharge, et c'est comme si aucune

 20   des Défenses n'avait cité le moindre témoin à la barre. Le Procureur

 21   persiste à maintenir toutes les affirmations et allégations figurant à

 22   l'acte d'accusation comme si c'était en vain que nous avions passé tout ce

 23   temps à remettre en question ces mêmes thèses, comme si c'était en vain que

 24   nous avions présenté tous ces éléments de preuve et cité tous nos témoins.

 25   Mon estimé confrère, Me Khan, ainsi que Me Karnavas ont dit comprendre que

 26   le Procureur n'accorde pas trop de crédit aux témoins de la Défense. Mais

 27   concernant des faits comme la date du départ de Bruno Stojic du département

 28   de la Défense, il s'agit quand même de choses que le Procureur ne peut pas


Page 52393

  1   ignorer. Pourtant, c'est ce qu'il fait, il fait comme si rien de tout cela

  2   n'avait jamais existé.

  3   C'est, par exemple, le cas de ce que nous trouvons au document P 893, et ce

  4   n'est que l'un des exemples. Il s'agit ici de la décision portant

  5   attribution d'une caserne à Dretelj. Je dois vous dire que je me sens

  6   particulièrement mal parce que j'ai vraiment l'impression d'être en train

  7   de répéter cinq ou six fois la même chose devant vous, mais j'y suis

  8   contrainte, parce que le Procureur a de nouveau inclus les mêmes

  9   affirmations et les mêmes thèses dans son mémoire en clôture. Par

 10   conséquent, je n'ai pas d'autres choix.

 11   Il s'agit donc du document P 893, décision portant attribution de la

 12   caserne de Dretelj au bénéfice et à l'usage de la police militaire. Cette

 13   décision n'a pas le moindre rapport avec les arrestations de personnes

 14   intervenues après la date du 30 juin 1993, arrestations et placement non

 15   pas dans cette caserne.

 16   Les Juges se sont rendus en visite sur le terrain. Il s'agit d'un bâtiment

 17   qui se trouve à l'avant, et c'est derrière lui que se trouvait le complexe

 18   où étaient détenus ces prisonniers.

 19   Cette décision a été adoptée lors de la séance du collège dont on trouve le

 20   contenu dans la pièce P 880. Il s'agit du bâtiment où était cantonnée la 3e

 21   Compagnie du 3e Bataillon de la Police militaire. Ce bâtiment était très

 22   endommagé, ce que confirme le document 2D 518. Des travaux ont donc été

 23  entamés, qui se sont terminés début mars 1993. (expurgé)

 24  (expurgé), en page 22 431 du compte

 25   rendu d'audience, ligne 11, jusqu'à la page 22 434.

 26   Y a-t-il une difficulté ? Le témoin est protégé. Excusez-moi, il y a juste

 27   une correction à apporter au compte rendu. C'est une erreur de ma part. Je

 28   ne m'en suis pas rendu compte. Probablement, parce que ça me semblait si


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  1   univoque.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  3   M. STRINGER : [interprétation] Je suis désolé, Monsieur le Président, mais

  4   il nous faut une expurgation, il me semble.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  6   Madame le Greffier, préparez une ordonnance.

  7   Mme NOZICA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

  8   Messieurs les Juges. Excusez-moi, c'est une pure erreur de ma part. Je ne

  9   me suis pas rendue compte du statut de ce témoin.

 10   Le Témoin C a confirmé ceci en page 22 431, ligne 11 du compte rendu,

 11   jusqu'à la page 22 434, ligne 9.

 12   Les premières personnes qui ont été placées en détention à la prison de

 13   Dretelj, et non pas dans ladite caserne, l'ont été après le 30 juin 1993.

 14   Alors, je ne vais pas revenir sur toute cette histoire des événements du 30

 15   juin 1993 et sur ce qui s'est alors passé, mais il est absolument hors de

 16   doute que ce bâtiment était en cours de rénovations pour devenir une prison

 17   et que ceci a été fait avant l'attaque portée par l'ABiH, attaque qui a été

 18   la cause de l'arrestation des membres du HVO appartenant au groupe ethnique

 19   musulman.

 20   Alors, le document suivant que le Procureur cite à l'appui dans ce même

 21   paragraphe est le P 2806. Dans ce rapport du 16 juin 1993, M. Stojic parle

 22   de 504 prisonniers faisant l'objet d'une enquête. Il importe ici de

 23   souligner concernant ce rapport que ce n'est pas Bruno Stojic qui est à

 24   l'origine de cette donnée chiffrée; elle provient en fait des observateurs

 25   de la MOCE qui eux-mêmes l'ont obtenue du directeur de la prison à la date

 26   du 11 juin 1993. A cette date, ils se rendaient en visite à ladite prison.

 27   Et tout ceci figure dans la pièce P 2721.

 28   Deuxièmement, Bruno Stojic, lors de la réunion du collège du 2 septembre


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  1   1993, a dit, ce que l'on peut lire dans la pièce P 4756 :

  2   "Nous disposons de deux prisons militaires; il s'agit de la prison centrale

  3   militaire de l'Heliodrom et de Ljubuski."

  4   Parce que ce que lui savait, c'était que dans la prison centrale militaire

  5   de Ljubuski étaient détenues des personnes qui faisaient l'objet de

  6   poursuites au pénal et contre lesquelles des enquêtes au pénal étaient

  7   diligentées. C'était le juge d'instruction qui avait pleine et entière

  8   responsabilité, ou le président du tribunal.

  9   Bruno Stojic n'avait pas le moindre élément de connaissance concernant les

 10   éventuels emprisonnements de différents prisonniers de guerre après le

 11   rapport du 31 octobre 1992; pièce P 677.

 12   Bruno Stojic n'était pas au courant du recours systématique aux prisonniers

 13   musulmans pour les envoyer à des travaux forcés. Le Procureur affirme, en

 14   revanche, ceci, mais ils ne l'étayent par aucun document, aucun élément de

 15   preuve.

 16   Le document P 5222 est un rapport de l'administration du SIS du 20

 17   septembre 1993 émanant de la prison de Dretelj. Il faut également se

 18   pencher sur le rapport daté de la même date émanant de la prison de Gabela,

 19   P 5223. Ils ont été remis au président de la HZ HB comme le confirme le

 20   document 2D 926. Ces deux rapports résultent de l'application d'une

 21   conclusion du collège, et notamment de sa séance du 2 septembre 1993. Comme

 22   nous l'avons cité précédemment, on retrouve le contenu correspondant dans

 23   la pièce P 4756.

 24   Ces deux rapports n'ont pas été transmis à Bruno Stojic, parce que le 15

 25   septembre 1993, le président de la HZ HB a émis l'ordre, versé sous la cote

 26   P 5104, ordre en vertu duquel il a ordonné qu'au sein des centres de

 27   détention pour prisonniers de guerre dans lesquels on parviendrait à la

 28   conclusion que les conditions prévues par les conventions de Genève ne sont


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  1   pas entièrement respectées, il convient immédiatement d'assurer le respect

  2   de ces dernières.

  3   De par cet ordre, le président du HVO de la HZ HB a donné obligation à

  4   l'état-major principal, au point numéro 7 de cet ordre donc, de transmettre

  5   le même ordre à tous les commandements et à toutes les unités et a donné

  6   pour obligation de fournir une assistance technique dans la mise en œuvre

  7   de cet ordre auxdites unités et aux commandements. Cet ordre a été fourni

  8   au département de la Défense pour information et à l'état-major principal

  9   pour action. Il a été fourni à toutes les unités, comme on le voit dans la

 10   pièce  P 5199, ainsi que 1D 1704 et 2D 1319.

 11   La Défense de M. Prlic, hier, a souligné à deux reprises que cette décision

 12   avait été adoptée en conformité -- ou plutôt, que c'était M. Boban qui

 13   avait pris cette décision se référant à l'article 30, ce qui est tout à

 14   fait exact. Il s'agit de l'article 30 du décret portant sur les forces

 15   armées, versé sous la cote P 588.

 16   Nous ne comprenons pas, en fait, ce qui est ici controversé, et mes estimés

 17   confrères pourraient dire cela, parce que ce décret, dans son premier

 18   paragraphe, confirme justement à Boban le pouvoir d'émettre des ordres, et

 19   la Défense de M. Prlic a fait toute une histoire autour de cet article 30.

 20   Mais pour être tout à fait précise, je vais en donner lecture aux Juges de

 21   la Chambre, bien que je n'aie pas le moindre doute quant à la connaissance

 22   très précise qu'ils ont déjà du contenu de cet article. Article 30 donc du

 23   document P 588, je cite le paragraphe (1) :

 24   "Dans l'accomplissement des tâches relevant de sa compétence ou de

 25   son domaine, le commandant suprême des forces armées adopte des directives,

 26   émet des ordres et adopte les autres textes nécessaires.

 27   "(2) Le commandant suprême des forces armées a la possibilité de transférer

 28   l'acquittement de certaines tâches et la direction des forces armées au


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  1   chef du département de la Défense."

  2   Donc, lorsque le commandant suprême émet des ordres et lorsqu'il se réfère

  3   à l'article 30, il ne se réfère à rien d'autre qu'à sa propre compétence,

  4   au pouvoir qui lui est conféré d'émettre des ordres. Si, en revanche, il

  5   avait transmis sa compétence à quelqu'un d'autre, il aurait été contraint

  6   de se référer à l'article 30, alinéa 2, et non pas 1. Or, ce n'est pas le

  7   cas dans le cas présent. Et non pas seulement dans le cas présent

  8   d'ailleurs. Je dois ajouter qu'il n'existe aucun document dans lequel on

  9   puisse voir que Boban ait jamais conféré la compétence qui était la sienne,

 10   la compétence du commandement aux forces armées, à Bruno Stojic en

 11   application de cet alinéa 2.

 12   Alors, il convient de souligner, et je reviens de nouveau sur le

 13   déroulement des événements concernant les prisons, que lors de cette séance

 14   du 6 septembre 1993, consignée dans la pièce P 4841, il a été à nouveau

 15   débattu des prisons et des nouvelles localités que l'on pourrait peut-être

 16   trouver. On a également donné au département de la Défense pour obligation

 17   de trouver de telles nouvelles localités sous quinzaine.

 18   Lorsque nous consultons ce procès-verbal, il apparaît tout à fait illogique

 19   que le département de la Défense puisse faire quelque chose tout seul sous

 20   quinzaine, parce qu'il ne s'est même pas écoulé trois mois pour l'ensemble

 21   du HVO de la HZ HB. Mais laissant cela de côté, cette conclusion émanant de

 22   cette même séance du 6 septembre 1993 a perdu toute pertinence de par la

 23   prise de cette décision      P 5104 par le président Boban et de par la

 24   définition qu'on y trouve des différentes obligations et des différentes

 25   personnes qui sont censées assumer ses obligations.

 26   Paragraphe 611. Dans ce paragraphe, le Procureur affirme que Stojic et

 27   Coric savaient que les prisonniers avaient été emmenés pour faire des

 28   travaux, et cela est illustré par un document, le P 8424.


Page 52398

  1   Dans ce document -- on peut voir que celui-ci a été rédigé le 12 mai 1994,

  2   donc six mois après le départ de Bruno Stojic de ce département de la

  3   Défense, et Valentin Coric, de ses fonctions de chef de la police

  4   militaire.

  5   Au paragraphe 613, il est dit -- ou le Procureur affirme que Bruno Stojic

  6   avait reçu des rapports portant sur de grosses destructions de biens

  7   musulmans à Prozor. Et il est fait référence à deux documents, à savoir le

  8   P 1315 et le P 3375. Il s'agit de rapports de Zeljko Siljeg datés du 29

  9   novembre 1993. C'est l'un des documents dont j'ai parlé tout à l'heure. Ils

 10   ont été communiqués à la présidence de la HZ HB, au gouvernement du HVO, au

 11   département à la Défense, à l'état-major et à la zone opérationnelle. Ces

 12   rapports ont été compilés partant des obligations découlant de la

 13   déclaration conjointe signée par Boban et Izetbegovic à la date du 27

 14   janvier 1993 à Genève par laquelle ils avaient engagé l'état-major de

 15   l'ABiH et l'état-major du HVO pour ce qui était de déterminer les

 16   responsabilités concernant les conflits survenus entre l'ABiH et le HVO.

 17   Partant de cette déclaration, le chef d'état-major, le même jour, a donné

 18   un ordre, faisant l'objet de la pièce P 1322, où au paragraphe 4, il donne

 19   obligation aux commandants de zone de responsabilité pour ce qui est de

 20   déterminer les causes, les raisons et les conséquences, tout comme les

 21   responsabilités des membres des unités du HVO et de l'ABiH au sujet des

 22   conflits survenus. Partant des documents susmentionnés, il est clairement

 23   possible de voir que la responsabilité -- il relevait de la responsabilité

 24   des commandants des zones opérationnelles de déterminer les

 25   responsabilités.

 26   Bruno Stojic n'avait, ni de jure ni de facto, l'obligation de procéder à

 27   cette détermination.

 28   Le Procureur, au paragraphe 619, indique que le HVO de la HZ HB a tenu deux


Page 52399

  1   réunions pour ce qui était de contrecarrer la criminalité; pièces P 2606 et

  2   P 4276.

  3   Je tiens à préciser, Messieurs les Juges, le fait que le HVO de la HZ HB a

  4   vaqué en continuité à des mesures visant à contrecarrer la criminalité pour

  5   faire tout ce qui était en son pouvoir.

  6   Je n'ai pas trop le temps. Mon temps est en train de toucher à sa fin, et

  7   je voudrais, avant la pause, en terminer pour ce qui est des sessions du

  8   gouvernement. Mais étant donné que les sessions du HVO de la HZ HB vont

  9   certainement faire l'objet de l'intérêt porté par les Juges, je crois bien

 10   que les Juges le remarqueront par eux-mêmes. Je tiens à souligner que les

 11   activités du HVO de la HZ HB ne peuvent exclure l'obligation du commandant

 12   des unités du HVO dont les subalternes auraient commis des délits au pénal

 13   tels que déterminés par l'article 27 du décret relatif aux tribunaux de

 14   district sur le plan militaire, pièce P 587, comme le dit la Défense de M.

 15   Petkovic.

 16   Et on dit que Stojic a été au courant, on le dit au paragraphe 625. Il

 17   avait été mis au courant des meurtres ou viols délibérés des membres du

 18   HVO. Et il n'a pas été prouvé au-delà de tout doute raisonnable que Bruno

 19   Stojic avait eu vent de ces événements.

 20   Parmi ces documents, on peut retrouver celui qui porte la référence

 21   P 2770. Il a souvent été montré dans le prétoire. Il s'agit d'une

 22   conversation interceptée. Les Juges ont compris, je n'ai pas à le leur

 23   expliquer. Ils le savent mieux que moi. Ils savent comment cela se fait

 24   pendant la guerre dans les armées. Les services s'écoutent entre eux. Il y

 25   a beaucoup de propagande dans ce type de rapport, et ils savent combien

 26   d'exactitude on peut retrouver ce type de rapport. Mais le Procureur a

 27   manqué à prouver que le rapport en question a été communiqué à Bruno Stojic

 28   et que l'inscription à la main "Bruno" se rapporte à lui.


Page 52400

  1   A l'occasion de la présentation de ses arguments, le Procureur a

  2   donné lecture d'un nom qui est inscrit à la main, Keza, page 36, lignes 5

  3   et 6, et il a dit qu'il croyait bien qu'il s'agissait de Zarko Keza [phon].

  4   Alors, nous ne savons pas en fonction de quoi le Procureur estime que la

  5   même main a inscrit le nom de Bruno et qu'il s'agirait là de Bruno Stojic.

  6   Nous attirons l'attention des Juges sur le fait que le document P 2769

  7   montre bien ce qui s'était passé le 14 juin 1993 dans la cité de Dum. Il

  8   s'agit d'un rapport de la police militaire qui a consigné les événements

  9   qui se sont produits, et cela ne correspond pas à ce qui est décrit au

 10   niveau de cette transcription de la conversation interceptée.

 11   Le paragraphe 626 -- et je tiens à vous dire qu'il ne me reste plus qu'un

 12   paragraphe. Je crois que cela fera plaisir aux Juges, et ça me fait plaisir

 13   aussi.

 14   Je parle maintenant du paragraphe 626. Ça se reporte aux événements

 15   de Rastane du 24 août 1993. Et à ce sujet, le Procureur dit que l'ingérence

 16   du secteur chargé de la santé suite à ces événements, tout en se référant à

 17   un document qui est le P 4653, indique qu'il n'est pas probable que Bruno

 18   Stojic n'ait pas eu vent de ces décès. Partant de ce document, il peut être

 19   vu qu'il s'agit d'une réponse du responsable adjoint du département de la

 20   Défense chargé de la santé suite à un ordre donné par le chef de l'état-

 21   major, Zarko Tole. Bruno Stojic ne savait pas et n'avait pas à savoir de

 22   ces activités du département chargé de la santé. Le Procureur n'a pas

 23   montré qu'il avait exercé un contrôle plein et entier de facto à l'égard de

 24   la totalité de ces secteurs et du département de la Défense. Un tel

 25   contrôle qui sous-entend des informations au sujet de toute activité dans

 26   le cadre d'une telle instance, telle que le département de la Défense, se

 27   trouve être impossible ni en temps de paix et encore moins en temps de

 28   guerre.


Page 52401

  1   S'agissant des paragraphes 629 à 632, la Défense du Bruno Stojic

  2   souligne que Bruno Stojic, ni de jure ni de facto, ne s'était trouvé chargé

  3   d'enquêter au sujet de délits au pénal commis par certains membres du HVO.

  4   En application de l'article 27 du décret relatif aux tribunaux militaires

  5   de district, pièce P 587, cela relevait des obligations des commandants des

  6   unités.

  7  

  8   Alors, je tiens à vous remercier, Messieurs les Juges, de la

  9   coopération que vous avez fait preuve pendant toutes ces années, et je

 10   tiens aussi à m'excuser une fois de plus auprès des interprètes, parce que

 11   j'ai appris, malheureusement, que j'ai été dans ce prétoire en position

 12   numéro un - et je vois que M. Trechsel hoche de la tête; je croyais qu'il

 13   n'allait pas le confirmer - mais que j'ai été l'une des plus rapides à

 14   parler, et je reconnais la chose. Je m'en excuse auprès des interprètes et

 15   auprès de tous ceux qui m'ont écoutée dans ce prétoire. Merci.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, après la pause qui va intervenir et qui

 17   va durer 20 minutes, j'ai cru comprendre que Me Khan prendrait la parole.

 18   Après les calculs fort savants de Mme le Greffier, il doit nous rester

 19   moins de 30 minutes, peut-être 28, 29, quelque chose comme ça. Voilà.

 20   Alors, donc on va reprendre aux environs d'une heure moins 10, on ira

 21   jusqu'à une heure 20, et théoriquement, la Défense Praljak devrait

 22   intervenir. Alors, ça sera peut-être très court, mais elle pourra peut-être

 23   prendre la parole pour quelques propos liminaires. Je n'en sais rien

 24   puisque je ne sais pas à l'avance ce qu'elle va nous dire. Alors, nous nous

 25   arrêtons pendant 20 minutes et nous reprenons dans 20 minutes.

 26   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 27   --- L'audience est reprise à 12 heures 52.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : L'audience est reprise.


Page 52402

  1   Alors, le greffe m'indique qu'il reste à Me Khan 24 minutes.

  2   M. KHAN : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Est-ce

  3   que vous me donnez un petit instant, parce que j'aimerais que le système

  4   "Livenote" fonctionne sur mon écran.

  5   Je vais me débrouiller.

  6   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, bien entendu, ce sont nos

  7   dernières minutes pour vous demander d'étudier les éléments du dossier, des

  8   éléments retenus contre Bruno Stojic, et de les examiner sous l'éclairage

  9   in dubio pro reo, ça veut dire que chacune des questions en litige, chaque

 10   fois qu'un doute plane sur elle, c'est le doute qui doit primé dans

 11   l'intérêt de M. Stojic.

 12   Dans notre mémoire en clôture, nous ne nous sommes pas penchés sur la

 13   question de la peine. Bien entendu, c'est ardu pour un conseil - comment

 14   dire - d'une part, de défendre avec ferveur, avec enthousiasme et passion

 15   son client et demander son acquittement, et de dire à titre subsidiaire, à

 16   défaut, si vous n'êtes pas d'accord avec nous, si vous estimez que vous

 17   avez l'obligation de prononcer une peine, à ce moment-là, de vous dire :

 18   Mais condamnez-le à autant d'années. Cependant, Messieurs les Juges, c'est

 19   ce qu'exige le Règlement. Il faut, en tout cas, en parler de façon générale

 20   s'agissant de la peine à imposer.

 21   L'exigence primordiale qui chapeaute tous les éléments et dont un

 22   juge doit se saisir lorsqu'il détermine la peine. Il doit la juger à l'aune

 23   des charges, il doit individualiser la sentence. Mais je pense qu'il y a

 24   des facteurs qui doivent intervenir lorsque vous allez examiner tous les

 25   éléments retenus à propos de M. Stojic.

 26   Vous avez rendu une première décision de mise en liberté provisoire,

 27   c'est alors que vous avez constaté qu'en dépit du fait qu'il existait des

 28   indications selon lesquelles il était recherché par le TPIY, M. Stojic


Page 52403

  1   n'était pas passé dans le maquis. Il n'était pas devenu clandestin. Il n'a

  2   pas essayé de se soustraire à la justice, non, il s'est livré de son plein

  3   gré à ce Tribunal et à sa compétence. La jurisprudence du Tribunal,

  4   notamment dans l'affaire Simic, le montre clairement : quelqu'un qui se

  5   livre de son plein gré peut être une circonstance atténuante.

  6   Au cours du temps qu'il a passé dans ce prétoire, jamais il n'a

  7   boycotté le procès. Il n'a jamais fait de difficultés ni de sottises

  8   particulières. Je pense qu'il a toujours coopéré et collaboré de façon

  9   exemplaire avec l'autorité que vous incarnez en tant que Juges désignés par

 10   la communauté internationale pour déterminer son sort et pour voir si

 11   l'Accusation a raison d'avancer les accusations qu'elle porte contre lui.

 12   Et je pense que ce comportement exemplaire est une autre circonstance à

 13   prendre en compte en sa faveur.

 14   Il me demande de dire ceci : il vous remercie de l'humanité dont

 15   chacun d'entre vous, vous avez fait preuve. Le dossier le montre pour ce

 16   qui est des demandes de mise en liberté provisoire, pour ce qui est de

 17   demandes de mise en liberté pour des raisons humanitaires, à bien des

 18   reprises, l'Accusation, avec véhémence, s'y est opposée, s'est opposée aux

 19   requêtes et a même cherché à faire appel de décisions que vous aviez

 20   rendues à cet égard. Mais lorsque vous allez vous acquitter de votre

 21   devoir, vous allez effectivement montrer la foi que vous avez en M. Stojic,

 22   comme vous l'avez fait à chaque fois que vous avez accordé sa mise en

 23   liberté provisoire. Les termes et les conditions ont été respectés. Il n'y

 24   a aucune violation, aucun signe qu'on aurait essayé d'intimider un témoin,

 25   de faire pression sur un témoin, et je pense que jamais il n'a perturbé le

 26   déroulement de ce procès. Et le contenu de ces demandes montre tout ce que

 27   ceci signifie pour lui, pour son épouse, pour ses parents. Et je pense qu'à

 28   chaque fois, vous avez bien fait, parce que la présomption de liberté


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  1   c'est, bien entendu, le corollaire, la conséquence naturelle de la

  2   présomption d'innocence, et je tiens, en son nom, à vous en remercier.

  3   Dans l'arrêt Blaskic, paragraphe 728, et dans le jugement Kordic-

  4   Cerkez, paragraphe 1073 [comme interprété], c'est bien dit, lorsqu'on

  5   respecte les conditions posées à une mise en liberté provisoire, le

  6   comportement affiché pendant le procès peut être des circonstances

  7   atténuantes. Et le fait de ne pas avoir de casier judiciaire, d'avoir une

  8   bonne personnalité sont des éléments aussi qu'on peut prendre en compte.

  9   Hier, j'ai parlé de Davor Korac, qui était le supérieur hiérarchique

 10   de M. Stojic au ministère de l'Intérieur, et le fait qu'il avait de bons

 11   rapports avec les membres de toutes les collectivités, c'est ce qu'a dit

 12   Tomislav Kresic, son ami - j'espère que je n'ai pas estropié son nom cette

 13   fois-ci – en parlant de sa vie personnelle. C'est important quand vous

 14   voulez voir l'homme, et pas les mots qui le dissimulent, pas cette vision

 15   caricaturale qu'on a voulu tracer de lui ici, mais de voir l'homme que vous

 16   avez vu ici pendant de si nombreuses années.

 17   Je veux aussi parlé de Hamid Bahto, un général. C'est important de

 18   tenir compte de ce qu'il a déclaré, presque avant d'examiner les preuves à

 19   charge, pour essayer de neutraliser une partie de ces préjugés et de ces

 20   invectives lancés par l'Accusation, et n'a cessé de le faire d'ailleurs,

 21   pour essayer de faire croire que c'était là la vérité. Mais les choses ne

 22   sont jamais si simples qu'elles ne le semblent à première vue. La recherche

 23   de la vérité pour qu'elle se manifeste, c'est un périple périlleux où il

 24   faut voir toutes sortes de synopsies, de scénarios, de scripts. Et vous

 25   aurez à prendre tout cela à bras-le-corps au cours des prochains mois à

 26   venir.

 27   Le général Makar, on ne saurait vraiment pas le traiter de partisan,

 28   d'être témoin biaisé. Loin de là. Vous l'avez dit, Monsieur le Président,


Page 52405

  1   c'est un Croate, mais il a épousé une Serbe, qui a combattu dans l'ABiH.

  2   Vous ne pourriez vraiment pas trouver un équilibre aussi parfait des

  3   ethnies en Bosnie-Herzégovine. Et ce témoin a eu le courage de comparaître

  4   en audience publique devant vous et de parler pour la Défense de M. Stojic.

  5   Mais ça c'est différent pour toutes les parties au conflit. C'est

  6   difficile de trouver des témoins, quel que soit le conflit, mais il y a des

  7   difficultés encore plus grandes qu'il faut essayer de surmonter quand on

  8   cherche des témoins à décharge. Comment trouver la voix de quelqu'un qui

  9   est accusé, que vous défendez et qui va lui-même quelques fois à faire face

 10   à des accusations difficiles, de trouver des gens alors qu'on vit dans des

 11   gens qui n'ont jamais qu'une version des faits en général et qui ont des

 12   sentiments très forts, très affirmés. Et ce fut le cas pour la plupart des

 13   témoins à charge. Et tant mieux pour eux, il faut les féliciter d'être

 14   venus ici. Et je dis que c'étaient des Musulmans parce que l'Accusation l'a

 15   souligné elle-même. Hamid Bahto, et puis l'autre Musulman s'appelait Nedzad

 16   Cengic, ce sont des témoins importants. Ces trois témoins, y compris donc

 17   le général Makar, qui faisait partie de l'ABiH, ce sont des faits tout

 18   particulièrement significatifs.

 19   Ce que vous a dit le général Nedzad Cengic, c'est important pas

 20   seulement pour l'homme qu'est Bruno Stojic. C'est peut-être important pour

 21   d'autres éléments que j'esquissais au début. Mais ce qu'il vous a tracé

 22   comme tableau, c'est celui d'une situation chaotique, anarchique. Rappelez-

 23   vous ce qu'il vous a dit lorsqu'il a rencontré Bruno Stojic. M. Stojic

 24   voulait aider. Il n'était pas hostile du tout. Il voulait donner un coup de

 25   main, mais il a éprouvé des difficultés et c'est pourquoi il s'est tourné

 26   vers le général Cengic et lui a dit : Revenez le lendemain. Lorsque celui-

 27   ci est revenu, apparemment, cette assistance, il l'avait trouvée, parce que

 28   c'est là que le général Petkovic et le général Praljak étaient -- la


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  1   demande, on y a fait droit, elle a été accordée. Les moyens techniques et

  2   scientifiques, le matériel qu'on a demandé, il a été fourni.

  3   Il ne faut pas mettre sur la touche d'autres éléments. Quelquefois,

  4   ils ne sont pas agréables. Ils sont incommodes, parce que pour

  5   l'Accusation, ça ne soutien pas sa thèse, sa cause, mais ce sont là des

  6   éléments qui sont loin d'être dénués de pertinence. C'était assez

  7   révélateur. Rappelez-vous ce que vous avez vous-même demandé, Monsieur le

  8   Juge Antonetti, Président de cette Chambre. Sous serment, on a demandé au

  9   témoin ceci : Qui était le supérieur, à votre avis, de Bruno Stojic, qui

 10   était à l'échelon supérieur au   sien ? Et voici ce que le témoin répondit

 11   : 

 12   "A mon avis, en attendant, c'était M. Praljak, parce qu'on attendait

 13   l'autorisation; c'est M. Praljak et M. Petkovic, parce qu'il leur fallait

 14   attendre qu'un accord soit obtenu; et troisièmement, lorsqu'on attendait,

 15   on essayait de gagner du temps pour voir ce qui se passait."

 16   Parlant de l'assistance fournie, il a ajouté plus tard qu'à son avis, ces

 17   hommes n'étaient pas ses ennemis, et il l'a expliqué. Il a expliqué son

 18   point de vue. Mais, Messieurs les Juges, le fait qu'à ses yeux, c'était le

 19   général Praljak qui était un supérieur hiérarchique, ce n'est pas sans

 20   importance, à mon humble avis. Lorsque vous allez examiner cette montagne

 21   de documents, l'ensemble du dossier, n'oubliez pas la réalité; ne perdez

 22   pas de vue le HVO. Il existait avant la création du département de la

 23   Défense. Ce qui s'est passé du jour au lendemain ? Est-ce que ça veut dire

 24   qu'on a effacé d'un trait de plume tout le modus operandi qu'il y avait, à

 25   savoir la subordination aux structures administratives ? Est-ce que ça se

 26   passe où que ce soit dans le monde, ce genre de choses, ou est-ce qu'on

 27   peut penser que le HVO, dans la façon dont il fonctionnait avant la

 28   création du département de Défense, s'est pérennisé, s'est perpétué de


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  1   façon significative et importante ? A notre avis, ce fut effectivement le

  2   cas.

  3   Et puis, vous aurez comme guide les éléments de preuve, j'en suis certain,

  4   vous vous êtes fait votre idée personnelle, les personnalités que vous avez

  5   vues au fil de ces années dans ce prétoire, et vous êtes des gens

  6   expérimentés et chevronnés, et je sais que vous avez toujours puisé dans

  7   cette expérience pour essayer de maintenir le cap dans ce procès, vu les

  8   différentes personnalités qui se sont affrontées ici. Maintenant, on laisse

  9   croire qu'au niveau humain, qu'en fait, c'est Bruno Stojic le commandant

 10   effectif de gens comme le général Praljak ou le général Petkovic et qu'il

 11   se serait trouvé sur le même pied d'égalité avec un homme hautement

 12   instruit comme M. Prlic. C'est une absurdité, mais ça arrange. Ça arrange

 13   certains, mais ce n'est pas pour autant la vérité.

 14   Hier, j'ai rapidement parlé de ces MTS fournis par la Croatie. C'est

 15   important. Veuillez remarquer le paragraphe 215 de notre mémoire en

 16   clôture. Je l'ai dit et le répète car c'est important, il s'agit ici de la

 17   formation assurée et fournie par la République de Croatie. Ceci est précisé

 18   au paragraphe 216 et aussi par le document 3D 00299 du 4 janvier 1993.

 19   Paragraphe 278 de notre mémoire en clôture. Rappelez-vous les soldats

 20   blessés de l'ABiH décrite comme étant une armée où on a à nouveau arraché

 21   de son contexte des bribes, et déplacé dans le temps aussi. Vous avez des

 22   soldats qui sont traités dans le même hôpital que les Croates, qui sont

 23   emmenés à Split, et ça ne cadre pas du tout si on juge bien les éléments du

 24   dossier avec ce qu'a voulu vous dépeindre l'Accusation. On ne donne pas des

 25   armes à l'ennemi. On ne les forme pas, ces ennemis. On ne les soigne pas.

 26   La seule conclusion logique et équitable c'est de dire que ces gens-là, ce

 27   ne sont pas vos ennemis comme le prétend le scénario avancé par

 28   l'Accusation.


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  1   Me Nozica vous a présenté de façon détaillée l'ultimatum, il s'agit ici du

  2   paragraphe 172 de notre mémoire en clôture, et le fait aussi que le Témoin

  3   DE, à partir du compte rendu d'audience 15 671 et 72, relève que 11

  4   brigades du HVO, dont un bataillon, se trouvaient sous le commandement de

  5   l'ABiH dans les zones qui n'étaient pas contrôlées par le HVO. Mais

  6   pourquoi, pourrait-on se demander. Pourquoi donner des moyens utiles comme

  7   des armes pour prêter concours à l'ennemi dans d'autres zones ? On ne peut

  8   pas avoir le beurre et l'argent du beurre. On ne peut pas dire que c'était

  9   pour combattre les Serbes. Mais qu'en est-il de cet accord conjoint de Graz

 10   ou bien de Karadjordjevo ? Pourquoi a-t-il fallu lutter contre les Serbes

 11   si l'accord était aussi simple que l'Accusation n'a voulu le faire croire ?

 12   Pourquoi aider ?

 13   Cette aide, elle est fournie car il n'y avait pas d'intention

 14   délictueuse ni criminelle de découper la Bosnie-Herzégovine, du moins pas

 15   dans le chef de M. Stojic.

 16   Pour ce qui est de l'idée de la Grande-Croatie, il est important de voir ce

 17   que dit l'Accusation dans ses paragraphes et dans ses notes de bas de page.

 18   Au paragraphe 169, l'Accusation s'appuie sur deux documents pour informer

 19   qu'en fait, c'était la Croatie qui tirait les ficelles en coulisses.

 20   Voyez maintenant la pièce P 09839. Vous pourrez examiner le document.

 21   Mais on cite aussi Prlic, qui dit ceci : si on n'a pas pris Jablanica et

 22   Konjic, c'est en raison même des pressions exercées contre cette idée par

 23   la République de la Croatie. Au paragraphe 170, donc paragraphe suivant de

 24   l'Accusation, et puis on s'appuie sur la pièce P 09258, il est noté que le

 25   président Tudjman avait refusé que M. Praljak s'empare de Mostar est parce

 26   que ce serait une perte politique.

 27   La diplomatie internationale, elle exige des médiateurs, des

 28   interventions, de l'assistance, quels que soit les rêves qu'on nourrit,


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  1   quels que soit les scénarios envisagés par M. Tudjman pour ce qui est de

  2   l'aspect final qu'aurait la carte de la Croatie. Et c'était peut-être

  3   qu'une option ambitionnée, mais il faut voir. A ce moment-là, la question

  4   qui se pose, c'est de savoir si on peut discerner une intention criminelle

  5   ou s'il y a un doute alors qu'on a ici dit que c'était vraiment une

  6   intention massive et lourde. Cet avis qui vous a été présenté était trop

  7   simpliste.

  8   L'Accusation a parlé de ce qui vaut pour l'un vaut pour l'autre. Mais

  9   parlons pâtisserie. On ne peut pas avoir son gâteau et le garder et le

 10   manger en même temps -- le beurre et l'argent du beurre. Et l'Accusation

 11   parle toujours de cette coopération entre les Serbes et les Croates comme

 12   s'il y avait une affaire, un truc, une manigance, un marché qui avait été

 13   conclu entre ces parties. Aux paragraphes 277, 281, 285 ainsi 289 de son

 14   mémoire, l'Accusation parle de coopération, notamment du CICR. Aux

 15   paragraphes 871 et 888, il est question du fait que les Croates étaient

 16   prêts à combattre avec les Serbes à Zepce. Oui, mais Zepce ne fait pas

 17   partie de la partie de la région dont l'Accusation affirme qu'elle faisait

 18   partie de la Communauté croate d'Herceg-Bosna. Et si on parle d'assistance

 19   prêtée au Musulmans dans cette zone, l'Accusation dit : Ah, ça, ça n'a pas

 20   d'importance, parce que ça s'inscrit dans la grande théorie de l'entreprise

 21   criminelle commune. Mais quand on dit qu'on aide l'"armija", l'Accusation

 22   dit que c'est sans importance parce que c'est en dehors de cette zone. Mais

 23   ce qui vaut pour l'un vaut pour l'autre. Et je pense que là

 24   qu'effectivement, on a une politique, un double jeu dont a parlé

 25   l'Accusation. Mais si vous croyez ce que l'Accusation dit, ce sera vraiment

 26   une vision unilatérale des choses. L'Accusation ne peut pas plaider tout et

 27   son contraire.

 28   Bruno Stojic n'a jamais, jamais rencontré le président Tudjman. On ne peut


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  1   pas simplement mettre ça sous la touche et écarter ça d'un revers de main.

  2   C'est quand même très important. Pourquoi est-ce important ? Le fait que le

  3   général Petkovic, que le général Praljak, que M. Prlic ont rencontré

  4   Tudjman, cela montre qui sont les personnalités de premier plan dans cette

  5   histoire. Le fait qu'avant avril 1992, Bruno Stojic était le commandant

  6   responsable de la logistique, et qu'en décembre 1993, il s'occupait de la

  7   production d'armes, c'est important. Est-ce que l'Accusation dit que tout

  8   d'un coup, il a été catapulté à des positions de haute responsabilité, à

  9   des postes de commandement ou commandement administratif, enjambant ou

 10   assis sur la communauté croate comme si c'était un colosse tout-puissant ?

 11   Non. Il n'avait qu'un rôle administratif. Il n'avait pas de pouvoir de

 12   commandement ni de direction. Vous le verrez, on a mis en fin de mémoire

 13   une liste de documents officialisés par Bruno Stojic, mais après que des

 14   décisions eussent été prises par d'autres. Est-ce qu'il disposait d'un

 15   commandement effectif ou est-ce qu'il ne faisait qu'entériner des décisions

 16   déjà prises avant ? Nous, nous disons que jamais, jamais il n'a participé à

 17   une entreprise criminelle commune. Il n'en avait pas connaissance. Il ne

 18   savait pas qu'elle existait. La cause de l'Accusation n'est pas corroborée

 19   sur des points tout à fait concrets et importants. Ce n'est pas l'invective

 20   qui va porter ses fruits, et ce n'est pas le dur labeur déployé par

 21   l'Accusation, ou parce qu'elle croit détenir la vérité et que vous, vous

 22   devez les croire comme on croit à l'évangile. Il y a doute, et ceci doit

 23   mener à une seule conclusion, celle que notre client doit être acquitté.

 24   Je vous remercie.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Maître Khan. Vous avez parfaitement respecté

 26   le temps imparti et je vous en remercie.

 27   Défense du général Praljak. Il nous reste 30 minutes. Essayons de les

 28   utiliser au mieux.

 


Page 52411

  1   [Plaidoiries de la Défense Praljak]

  2   M. KOVACIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, comme vous nous l'aviez demandé

  4   lorsque nous avons préparé ces audiences, je tiens à vous informer avant de

  5   commencer que la Défense du général Praljak s'exprimera comme suit : je

  6   prendrai la parole en premier et j'aborderai les allégations de

  7   l'Accusation affirmant qu'à l'époque des faits en Bosnie-Herzégovine, il

  8   existait l'état de conflit armé international, et à ce sujet également, je

  9   me réfèrerai aux allégations affirmant que l'état d'occupation existait en

 10   Bosnie-Herzégovine.

 11   Par la suite, ma consoeur, Me Pinter, prendra la parole. Elle répondra aux

 12   allégations figurant dans le mémoire en clôture de l'Accusation, surtout

 13   s'agissant du chapitre 11 du mémoire en clôture de l'Accusation, chapitre

 14   qui porte sur la responsabilité pénale de notre client. Et enfin, c'est le

 15   général Praljak qui s'adressera en personne à la Chambre pour utiliser les

 16   30 minutes qui lui ont été accordées.

 17   S'agissant du conflit armé international, maintenant l'Accusation affirme

 18   qu'en Bosnie-Herzégovine, à partir du mois d'avril 1993 jusqu'en mars 1994,

 19   on constate l'état de conflit armé international; paragraphes 71 à 92 de

 20   leur mémoire, avec un certain nombre d'arguments liés à cela dont ils font

 21   part aux paragraphes 163 à 206.

 22   Je me permets de rappeler que dès son mémoire préalable, la Défense a

 23   précisé que la République de Croatie n'a pas été un seigneur de guerre

 24   intervenant en Bosnie-Herzégovine, seigneur de guerre de cette guerre qui a

 25   opposé l'ABiH et le HVO. Pendant le procès, la Défense a maintenu cette

 26   affirmation, et nous avons présenté des pièces à l'appui, de nombreuses

 27   pièces. Je ne reviens pas d'arguments qui étayent cette affirmation. A

 28   l'instant, mon confrère vient d'en citer quelques-uns. Je me contenterai de


Page 52412

  1   signaler que toute une série de faits nous permet de voir qu'il est tout à

  2   fait impossible d'accepter l'idée que la République de Croatie était

  3   opposée dans le cadre d'un conflit international avec la Bosnie-

  4   Herzégovine, que ce soit directement ou indirectement, en apportant son

  5   soutien au HVO. Le général Praljak s'exprimera lui-même là-dessus.

  6   La République de Croatie a reconnu la Bosnie-Herzégovine souveraine

  7   immédiatement suite à sa proclamation de l'indépendance en avril 1992.

  8   Cette reconnaissance est intervenue un jour seulement après la

  9   reconnaissance par l'Union européenne. La Bosnie-Herzégovine a ouvert son

 10   ambassade à Zagreb quelques jours après la reconnaissance. Des relations

 11   diplomatiques ont été établies. Et fait tout à fait important : jamais

 12   pendant la guerre, de 1991 à 1994, aucun gouvernement, aucun fonctionnaire

 13   des autorités de la République de Croatie ou de Bosnie-Herzégovine n'a

 14   déclaré, n'a sous-entendu, et encore moins déclaré explicitement qu'il

 15   existait un état d'hostilité opposant ces deux Etats.

 16   Je reviens à cette ancienne théorie abandonnée dans le droit international

 17   sur la déclaration de guerre nécessaire. Cette théorie a été abandonnée,

 18   mais une certaine forme de manifestation politique doit être constatée. Or,

 19   nous ne l'avons pas ici. Jamais personne n'a dit : Nous sommes en guerre

 20   avec cet autre Etat.

 21   Sans précédent dans toute l'histoire, la République de Croatie n'a jamais

 22   mis sur pied de mesures restrictives, quelles qu'elles soient, visant des

 23   biens ou des moyens en propriété de la Bosnie-Herzégovine ou de ses

 24   citoyens sur le territoire de la République de Croatie. Cependant, le

 25   Procureur se permet de simplement ne pas tenir compte de ces faits.

 26   Il est tout à fait certain dans l'histoire des relations internationales et

 27   dans l'histoire des conflits internationaux qu'un tel précédent n'existe

 28   pas. Il ne s'est jamais produit nulle part que l'une des parties


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  1   belligérantes, pendant la durée même du conflit, aide à profusion l'autre

  2   partie pour qu'elle se maintienne, pour qu'elle survive à l'agression.

  3   Le Témoin Peter Galbraith, que nous hésitons à citer parce que ses

  4   appréciations sont tout à fait inacceptables pour nous, toutefois, malgré

  5   ses prises de position politiques, malgré tout, à un endroit pendant un

  6   contre-interrogatoire, page 6 599 du compte rendu d'audience, en date du 13

  7   septembre 2006, malgré tout, il confirme que la Bosnie-Herzégovine n'aurait

  8   pas pu se maintenir sans l'aide venue de la République de Croatie, sans

  9   l'approche adoptée par la République de Croatie. Ce qui nous incite à poser

 10   une question, à savoir : pourquoi la République de Croatie ferait-elle tout

 11   ce que nous avons mentionné si, dans ce même temps, elle s'est dotée d'un

 12   plan cherchant à s'emparer d'une partie du territoire de la Bosnie-

 13   Herzégovine et que dans la mise en œuvre de ce plan, elle aide et contrôle

 14   le HVO ?

 15   Tout simplement, le Procureur se contente d'apporter une réponse

 16   naïve, toute simple. Il dit : C'est simplement une politique de double jeu.

 17   La Défense répond à cela en disant que premièrement, il s'agit là d'une

 18   réponse naïve qui passe outre les faits; et deuxièmement, qu'aucune preuve

 19   concrète n'a été offerte à l'appui pour confirmer l'existence de ce double

 20   jeu.

 21   Troisièmement, toute politique, et en particulier sur le plan

 22   international, la politique menée par les Etats, et en particulier dans ce

 23   type de situations, est d'une certaine manière, si je puis m'exprimer

 24   ainsi, une politique de double jeu. Jamais aucun pays n'a révélé toutes ses

 25   cartes dans ce type de situations.

 26   L'Accusation affirme que la République de Croatie avait des aspirations

 27   territoriales, des visées sur une partie du territoire de Bosnie-

 28   Herzégovine, et dans ce contexte, elle développe sa thèse sur l'existence


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  1   d'un conflit armé international.

  2   Les faits que je viens de mentionner nous montrent clairement que tel n'a

  3   pas été le cas. Mais penchons-nous sur le témoignage du Témoin Miomir

  4   Zuzul, page 27 644 du compte rendu d'audience à partir de la ligne 15,

  5   jusqu'à la page 27 646, ligne 5.

  6   Ce témoin a précisé ici que pendant toute la durée des négociations de

  7   paix, qui n'ont jamais été interrompues, qu'Izetbegovic a proposé à Tudjman

  8   de prendre une partie de Bosnie-Herzégovine pour la République de Croatie,

  9   donc c'est des municipalités herzégovines, la banovina soi-disant, ce que

 10   Tudjman a refusé.

 11   Et j'ajoute qu'à l'appui de cette affirmation avancée par Miomir Zuzul, la

 12   Défense cite également la déposition du Témoin Jean -- Jacques Klein en

 13   application de l'article 92 bis. Il s'agit d'un général américain, d'un

 14   haut fonctionnaire de l'ONU en Croatie à l'époque des faits, qui l'a

 15   explicitement confirmé. Hélas, et je dois dire hélas, pour des raisons qui

 16   m'échappent encore à ce jour, malgré tout, la Chambre a refusé de verser au

 17   dossier ses déclarations ainsi que de nombreuses autres décisions. Il

 18   semblerait que cette honorable Chambre n'accepte pas le principe

 19   généralement admis, à savoir qu'une plus grande quantité de preuves,

 20   d'éléments d'information et de preuve en l'espèce apporterait une meilleure

 21   manifestation de la vérité.

 22   Mais revenons aux faits. Si la République de Croatie avait eu des visées

 23   territoriales sur le territoire de Bosnie-Herzégovine, cette offre qui a

 24   fait l'objet de la déposition de Zuzul se serait concrétisée, mais cela ne

 25   s'est pas passé, donc c'est un fait. Pourquoi la République de Croatie

 26   aurait-elle joué un rôle actif en Bosnie-Herzégovine, soi-disant se

 27   contentant d'aider uniquement le HVO dans son conflit l'opposant à l'ABiH,

 28   si elle aurait pu obtenir le territoire auquel elle aspirait grâce à un


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  1   accord ? Et l'offre a été avancée. A cela, le Procureur ne sait pas

  2   répondre. D'ailleurs, il ne le mentionne même pas dans son mémoire en

  3   clôture. C'est, là encore, un des faits qu'ils préfèrent ne pas voir parce

  4   que cela n'est pas conforme à sa thèse.

  5   J'espère que la Chambre saura reconnaître les faits qui ne cadrent pas avec

  6   les affirmations de l'Accusation, en particulier ce qui figure au

  7   paragraphe 15.

  8   Il existe en plus des preuves indubitables qui démontrent de manière

  9   tout à fait manifeste et sans aucune ambiguïté possible que la direction

 10   politique de la République de Croatie n'a pas seulement apporté son soutien

 11   à la création d'un Etat indépendant de Bosnie-Herzégovine, mais que, de

 12   plus, pendant la durée du conflit en Bosnie-Herzégovine, elle a activement

 13   apporté son aide au maintien de ce nouvel Etat indépendant. Citons des

 14   faits à l'appui :

 15   Premièrement, la direction politique de la République de Croatie et

 16   du premier parti politique en Croatie ont directement invité et encouragé

 17   les ressortissants de nationalité croate de Bosnie-Herzégovine à prendre

 18   part au référendum, donc à participer au référendum, et de voter pour la

 19   création de l'Etat indépendant de Bosnie-Herzégovine.

 20   Je rappelle que c'était une condition posée par la communauté

 21   internationale pour reconnaître la Bosnie-Herzégovine en tant qu'Etat

 22   indépendant. L'occident avait exigé la tenue de ce référendum.

 23   Donc les Croates l'ont accepté, ils ont voté au nom du référendum et

 24   ils ont voté pour l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. Comme le vote

 25   également est secret, nous ne savons pas qui s'est exprimé comment, mais

 26   nous savons compter. Le référendum a été un succès à l'issue. Il y a eu, au

 27   début du mois d'avril 1992, déclaration de l'indépendance de la Bosnie-

 28   Herzégovine.


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  1   Et compte tenu du nombre de peuples constitutifs en Bosnie-Herzégovine,

  2   compte tenu du nombre de votants, des Musulmans, des Serbes, des Croates,

  3   le référendum n'aurait pas pu être un succès si les Croates n'y avaient pas

  4   participé. Et les résultats nous permettent de voir qu'ils ont voté

  5   favorablement à l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. Ce sont des

  6   calculs tout simples.

  7   Par conséquent, la République de Croatie, par ce soutien qu'elle a accordé,

  8   a contribué de façon tout à fait indubitable à l'indépendance de la Bosnie-

  9   Herzégovine. La Croatie souhaitait donc une Bosnie indépendante à ses

 10   propres frontières. C'est un fait que l'on ne peut tout simplement pas

 11   ignorer. C'est pourtant ce qu'a choisi de faire le Procureur.

 12   Dans la situation chaotique de la décomposition de la RSFY, les

 13   représentants des municipalités dans lesquelles les Croates représentaient

 14   une majorité absolue, ou au moins relative, ont fondé la HZ HB dès le 18

 15   novembre 1991, et ce, en qualité de structure temporaire appelée à suppléer

 16   aux fonctions que les autorités étatiques de l'époque n'étaient pas en

 17   mesure d'accomplir. Ceci a créé les conditions rendant possible la

 18   fondation ultérieure du HVO en avril 1992 en tant qu'organe exécutif et en

 19   tant qu'organe militaire nécessaire à la défense de la Bosnie-Herzégovine

 20   contre l'agression de la JNA. La HZ HB était, à l'époque, la seule et

 21   unique structure - j'insiste - la seule et unique structure organisée en

 22   Bosnie-Herzégovine qui s'est avérée, au moins en partie, capable de

 23   s'opposer à l'agression par les armes. Il est un fait notoire que les

 24   Musulmans aussi bien que les Croates se sont présentés volontairement pour

 25   devenir membres des unités du HVO et qu'ils ont défendu la Bosnie-

 26   Herzégovine côte à côte jusqu'à la fin de 1992 et, dans une certaine

 27   mesure, jusqu'en mai 1993, au moment où a commencé ce conflit entre eux.

 28   Mais ce qui est intéressant, c'est que même à ce moment-là, ils ont


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  1   combattu côte à côte dans les parties du territoire de la Bosnie-

  2   Herzégovine où il n'existait pas de conflit direct entre ces deux parties.

  3   Mon estimé confrère, Me Khan, s'est précisément exprimé à ce sujet il y a

  4   quelques minutes.

  5   Lorsqu'on ajoute à cela le fait que la présidence de la Bosnie-

  6   Herzégovine n'a proclamé l'état de guerre dans le pays que le 20 juin 1992,

  7   c'est-à-dire à un instant où la JNA occupait déjà la plus grande partie du

  8   territoire qu'elle avait l'intention d'occuper, on pourrait dire que

  9   quasiment tout avait été conquis, et on voit alors clairement que seuls la

 10   HZ HB et le HVO s'étaient engagés à temps dans les préparatifs nécessaires

 11   à la défense du pays.

 12   Et je cite ici à l'appui la pièce P 00274, qui est le décret portant

 13   proclamation de l'état de guerre par la présidence à la date du 20 juillet

 14   1992. Ceci confirme la thèse qui est la nôtre et qui a déjà été évoquée

 15   d'une certaine façon, à savoir que la HZ HB avait précisément été créée

 16   parce qu'il n'y avait personne d'autre pour défendre ce territoire. Donc ce

 17   n'est qu'en juillet 1992 que la présidence proclame l'état de guerre. On

 18   n'en est même pas encore à la phase des préparatifs et encore moins à celle

 19   où quelqu'un va commencer à se battre contre l'agression serbe.

 20   Les faits qui ont été cités, notamment le référendum portant sur

 21   l'indépendance ainsi que l'organisation en temps utile de la défense de la

 22   Bosnie-Herzégovine, montrent de façon indubitable et permettent de conclure

 23   que la République de Croatie souhaitait une Bosnie-Herzégovine en tant

 24   qu'Etat indépendant se trouvant à sa frontière. Cela montre également que

 25   sans la participation active de la République de Croatie, la Bosnie-

 26   Herzégovine n'aurait probablement pas vu le jour et n'aurait pas pu se

 27   maintenir comme Etat indépendant.

 28   Comment dans ces conditions peut-on maintenir la thèse de


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  1   l'Accusation consistant à dire qu'il existe une entreprise criminelle

  2   commune et un conflit armé international ? A la lumière de ces faits, cela

  3   ne tient tout simplement pas. Cela ne peut tenir que si on ignore ces mêmes

  4   faits.

  5   Alors, il s'agit ici d'une question peut-être un peu plus technique,

  6   mais concernant la période de la commission des actes.

  7   Le Procureur affirme dans son mémoire en clôture que le conflit

  8   international armé existait en Bosnie-Herzégovine au moins d'avril 1992 à

  9   mars 1994. Ceci figure dans le paragraphe 71 dudit mémoire. Mais afin

 10   d'établir la vérité purement factuelle, il est nécessaire de déterminer à

 11   quel moment il est possible de situer le début de cet éventuel conflit armé

 12   international, et c'est nécessaire avant tout, par exemple, pour évaluer la

 13   pertinence des éléments de preuve sur lesquels s'appuie le Procureur dans

 14   son annexe C. Je ne peux pas tout passer en revue parce que je sais que

 15   vous pourrez examiner tout ceci vous-mêmes.

 16   Mais les premiers neuf documents qui sont cités dans l'annexe C comme

 17   confirmant l'existence d'un conflit international armé concernent tous des

 18   événements survenus avant la proclamation de l'indépendance de la Bosnie-

 19   Herzégovine en tant qu'Etat, donc avant le 5 avril 1992.

 20   Alors, la seule façon dont je puis comprendre ces événements, c'est

 21   qu'ils concernent une période de temps où la Bosnie-Herzégovine était

 22   encore une entité fédérale d'une Yougoslavie en cours de décomposition,

 23   alors que la Croatie était déjà en conflit armé avec cette même RSFY, et

 24   ce, parce que cette même armée de la RSFY attaquait simultanément la

 25   Croatie. Donc s'appuyer sur ces documents pour appuyer l'idée d'un conflit

 26   armé international en Bosnie-Herzégovine est totalement dénué de

 27   pertinence, parce que cet Etat n'existait pas à ce moment-là en tant

 28   qu'Etat indépendant.


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  1   Aucun des documents cités dans l'annexe C et dont la date correspond

  2   à celle du 9 mai 1992 n'a davantage de pertinence. En fait, nous

  3   considérons cette date parce que nous estimons que c'est celle à laquelle

  4   il est possible de situer la date du tout début d'un conflit entre le HVO

  5   et l'ABiH.

  6   Mais ce que fait l'Accusation, c'est d'interpréter ces documents hors

  7   de leur contexte et sans tenir compte des événements et des éléments de

  8   preuve montrant que la République de Croatie n'a pas du tout le contrôle du

  9   conflit en Bosnie-Herzégovine et qui montrent que la thèse de l'Accusation

 10   est tout à fait irrationnelle.

 11   Nombre de ces documents sont émis par la HV et concernent ce qu'il

 12   est convenu d'appeler le front sud, la région de Split et Dubrovnik. Je

 13   parle toujours des documents de l'annexe C. Alors, j'avais l'intention d'en

 14   parler, je crois qu'on a déjà entendu beaucoup de choses à ce sujet, mais

 15   je vous réfère aux dépositions des témoins Beneta, Petkovic, Praljak, Zuzul

 16   et autres. Parce que du point de vue du Procureur, ce front sud peut être

 17   assimilé -- est en quelque sorte un synonyme de la guerre en Bosnie-

 18   Herzégovine. Mais cela, encore une fois, ne tient pas du tout, parce que la

 19   République de Croatie n'est pas en mesure de défendre son territoire si

 20   elle ne peut pas compter sur ses propres arrières et si ce front sud n'est

 21   pas défendu.

 22   Je souhaite simplement attirer ici l'attention sur un certain nombre

 23   de documents correspondant à cette même partie. Ce sont ces documents pour

 24   lesquels j'ai suggéré qu'il était nécessaire de les examiner dans leur

 25   contexte. Et notamment, c'est le cas du 5D 64, il s'agit de la déclaration

 26   conjointe Tudjman-Izetbegovic; du 3D 647, il s'agit de l'accord d'amitié et

 27   de coopération de l'été 1992; je pense également au 1D 02283 daté du 25

 28   février 1993; ainsi qu'au décret de la présidence de Bosnie-Herzégovine


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  1   portant sur les forces armées versé sous la cote 4D 00410; ainsi que toute

  2   une série d'autres éléments de preuve appartenant à la même catégorie.

  3   Ce n'est qu'une fois que l'on a examiné l'ensemble de ces éléments

  4   qu'il est possible de constater l'existence indubitable d'une coopération

  5   militaire sur ce territoire, parce que la HV intervient le long de la

  6   frontière pour protéger ses propres arrières en Dalmatie.

  7   Que le HVO soit l'une des deux composantes des forces de défense de

  8   la Bosnie-Herzégovine est clairement visible à la lumière de la pièce 3D

  9   00450, équivalente également à ce que montre la pièce 3D 00420. Il s'agit

 10   de la décision de la présidence de Bosnie-Herzégovine portant nomination

 11   des commandants de la Défense territoriale en date du 27 mai 1992. En

 12   effet, dans cette décision, on ne trouve pas citées les municipalités de la

 13   HZ HB. Par conséquent, on peut en conclure très clairement qu'Izetbegovic

 14   lui-même considérait la défense dans ces dites municipalités comme ayant

 15   déjà été organisée par le HVO, si bien qu'il se contente de nommer des

 16   commandants dans seules les régions de Bosnie-Herzégovine dans lesquelles

 17   il n'y a pas encore de défense organisée. Donc ils constatent que là, il y

 18   a déjà des gens qui se défendent, et qu'à d'autres endroits, ce n'est pas

 19   le cas, et c'est dans ces autres endroits qu'ils décident de nommer des

 20   commandants.

 21   Alors, le Procureur affirme que le contrôle exercé par la Croatie sur

 22   le HVO peut être étayé sur la base du fait que Praljak était commandant,

 23   qu'il avait un contrôle de jure et de facto sur les unités du HVO en

 24   Bosnie-Herzégovine. Par la même, le Procureur implique que le général

 25   Praljak aurait été un agent de la République de Croatie.

 26   On retrouve ceci aux paragraphes numéro 71, 75, 76, 673 et encore

 27   d'autres paragraphes du mémoire en clôture de l'Accusation.

 28   Monsieur le Président, je crois que -- ah, j'ai encore le temps d'avancer


Page 52421

  1   un petit peu.

  2   Les éléments de preuve de la déposition du général Praljak et d'autres

  3   témoins ainsi que tous les documents disponibles montrent de façon

  4   indubitable que le général Praljak a bénéficié de différents statuts aux

  5   différentes périodes de la guerre en Bosnie-Herzégovine, mais qu'à chaque

  6   fois, il est intervenu en qualité de volontaire dans les différents rôles

  7   qui ont été les siens. Il a été simple combattant, commandant d'une zone,

  8   médiateur en mission de paix, tout comme il a été commandant de l'état-

  9   major principal du HVO. Tout ceci sont des faits indubitables.

 10   Et ce qui est controversé, toutefois, c'est que le général Praljak

 11   aurait eu un contrôle de facto et de jure.

 12   Alors, je crois que le moment est peut-être bien venu de m'interrompre.

 13   Avec votre permission, Monsieur le Président, d'après les calculs qui sont

 14   les nôtres, mais nous nous en remettons évidemment à vous en la matière,

 15   vous êtes bien plus efficaces pour gérer le temps, je crois qu'il nous

 16   manquera probablement une quinzaine de minutes pour pouvoir présenter tout

 17   ce que nous avons terminé. Si, par conséquent, on pouvait prendre une

 18   disposition nécessaire pour que l'audience de demain dure 15 minutes de

 19   plus, nous pourrions terminer. Enfin, je préfère le signaler, parce que

 20   d'un point de vue purement technique, j'ai l'impression que nous manquerons

 21   peut-être de cinq minutes. Je ne suis pas en train de demander du temps

 22   supplémentaire. C'est le temps de prévu pour l'audience qui me préoccupe.

 23   Si, du point de vue technique, c'est possible, je pense que cela aiderait

 24   tout le monde.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Le juriste de la Chambre va prendre la tâche

 26   avec la juriste de la Chambre Tolimir, dont un éminent juge est présent, et

 27   peut-être qu'il n'y aura pas de problème et on pourra prolonger.

 28   Etant précisé que vous avez utilisé 30 minutes, et donc qu'il vous


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  1   reste quatre heures 30 demain.

  2   Sur ce, je remercie tout le monde et j'invite tout le monde à venir à

  3   l'audience qui débutera à 9 heures du matin.

  4   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le jeudi 17

  5   février 2011, à 9 heures 00.

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