Affaire n° : IT-03-67-PT

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II

Composée comme suit :
M. le Juge Carmel Agius, Président
M. le Juge Jean-Claude Antonetti
M. le Juge Kevin Parker

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
1er mars 2005

LE PROCUREUR

c/

VOJISLAV SESELJ

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DÉCISION PORTANT SUR LA « REQUÊTE PRÉSENTÉE PAR L’ACCUSÉ AUX FINS DE NORMALISER LES CONDITIONS DE PRÉPARATION DE SA DÉFENSE »

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Le Bureau du Procureur :

Mme Hildegard Uertz-Retzlaff
M. Ulrich Mussemeyer
M. Daniel Saxon

L’Accusé :

Vojislav Seselj

Le Conseil d’appoint :

M. Tjarda Eduard van der Spoel

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE II (la « Chambre de première instance ») du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal »),

VU la requête de l’Accusé aux fins de normaliser les conditions de préparation de sa défense (Motion by the Accused for Normalisation of Conditions for Preparing a Defence), déposée le 9 novembre 2004 au nom de Vojislav Seselj (la « Requête » et l’« Accusé »), dans laquelle ce dernier demande à la Chambre de première instance d’ordonner au Greffe du Tribunal (le « Greffe ») que les vingt-deux (22) personnes nommées dans la Requête soient « inscrites au registre du Greffe en tant que membres d’une équipe d’experts chargée d’assister l’Accusé à préparer sa défense […] qu’il conduit lui-même devant [le Tribunal]1 »,

ATTENDU que, dans la Requête, l’Accusé confirme sa décision de conduire lui-même sa défense, fait valoir qu’il remplit personnellement toutes les conditions posées par l’article 44 du Règlement de procédure et de preuve2 pour les conseils exerçant devant le Tribunal, et demande des fonds et l’« enregistrement d’une équipe d’experts » chargée de l’aider à préparer sa défense, car selon lui « [l]e droit d’assurer sa propre défense n’exclut pas le droit d’un accusé à une équipe d’appui3 »,

VU la réponse à la Requête (Prosecution’s Response to Motion by the Accused for Normalisation of Conditions for Preparing a Defence), déposée le 25 novembre 2004 (la « Réponse »), dans laquelle le Bureau du Procureur (l’« Accusation ») fait observer que la Chambre de première instance devrait rejeter la Requête au motif que celle-ci relève en fait de la compétence du Greffe,

VU la décision portant prorogation de délai déposée le 6 décembre 2004, dans laquelle le Juge de la mise en état a fait droit à la requête présentée par l’Accusé aux fins d’autorisation de déposer une réplique et aux fins de prorogation du délai de réplique, et ce, au motif que l’Accusé n’avait pas obtenu un document cité dans la Réponse et pouvant présenter un intérêt pour lu4,

ATTENDU en outre que le Juge de la mise en état a informé l’Accusé que, s’il souhaitait déposer une réplique, il disposait pour ce faire de sept jours à compter du dépôt de la Décision portant prorogation de délai,

VU le document n° 63 (Submission Number 63) déposé le 30 décembre 2004, dans lequel l’Accusé objecte que le délai de réplique de sept jours devrait plutôt courir à compter de la date à laquelle le document susmentionné lui est communiqué, et demande pour cette raison la certification d’un appel contre la Décision portant prorogation de délai,

ATTENDU que, comme il est précisé dans la Décision portant prorogation de délai, le Juge de la mise en état avait oralement demandé au Greffe de communiquer le document susmentionné à l’Accusé, qu’il s’était assuré que l’Accusé avait bien reçu ledit document avant le dépôt de la décision, et donc que le choix de la date à compter de laquelle le délai devait courir ne réduisait en rien le temps dont disposait l’Accusé pour répliquer mais jouait au contraire en sa faveur5,

ATTENDU par conséquent que la Décision portant prorogation de délai ne touche pas une question qui satisfait aux critères énoncés à l’article 73 B) du Règlement pour que la Chambre de première instance puisse certifier un appel,

VU la réplique déposée le 30 décembre 2004, dans laquelle l’Accusé soutient en outre qu’il appartient à la Chambre de première instance de traiter toutes les questions liées au statut d’un accusé, compte tenu du fait surtout que « le Greffe n’est pas une autorité judiciaire mais un organe administratif responsable de questions d’ordre technique6 »,

ATTENDU que l’Accusé aborde dans la Requête des questions relevant du Règlement, notamment de ses articles 447 et 458, ou de la Directive relative à la commission d’office de

conseils de la Défense9, lesquels fixent les conditions et modalités de la désignation et de la commission d’office de conseils, et disposent que le Greffe est responsable au premier chef du règlement des questions relatives à la désignation et à la commission d’office de conseils et du personnel d’appui,

ATTENDu qu’il ressort du document n° 66 (Submission Number 66) déposé le 5 janvier 2005 et adressé au Greffe, que celui-ci et l’Accusé sont toujours en train de débattre des questions soulevées dans la Requête,

ATTENDu par conséquent que la Requête est prématurée puisque le Greffe n’a pas encore pris de décision au sujet de ces questions,

PAR CES MOTIFS,

EN APPLICATION des articles 54 et 73 du Règlement de procédure et de preuve,

REJETTE la Requête et la demande de l’Accusé aux fins de la certification d’un appel contre la Décision portant prorogation de délai.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 1er mars 2005
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre de première instance II
_____________
Carmel Agius

[Sceau du Tribunal]


1. Requête, page 10.
2. Règlement de procédure et de preuve, IT/32/REV.33, 17 décembre 2004 (le « Règlement »).
3. Requête, pages 3 et 10.
4. Décision relative à la requête aux fins d’autorisation de déposer une réplique et aux fins de prorogation du délai de réplique, 6 décembre 2004 (la « Décision portant prorogation de délai »).
5. Voir la Décision portant prorogation de délai.
6. Submission Number 64, 30 décembre 2004 (la « Réplique »).
7. L’article 44 du Règlement dispose que le « conseil choisi par un suspect ou un accusé dépose dans le plus bref délai son mandat auprès du Greffier », et énumère toutes les conditions dont un conseil doit convaincre le Greffe qu’elles sont remplies.
8. Aux termes du paragraphe A) de l’article 45 du Règlement, « [c]haque fois que l’intérêt de la justice l’exige, un conseil est commis d’office pour représenter un suspect ou un accusé qui n’a pas les moyens de le rémunérer », et le paragraphe B) du même article dispose qu’à cette fin le Greffe tient une liste des conseils dont il s’est assuré qu’ils remplissent les conditions qui y sont visées.
9. Directive relative à la commission d’office de conseils de la Défense, Directive N° 1/94, IT/73/REV. 10, 4 août 2004 (la « Directive »). La Directive dispose également que l’accusé qui veut obtenir la commission d’office d’un conseil en fait la demande au Greffe, et que peut être commise d’office comme conseil de l’accusé toute personne dont le Greffe a pu s’assurer que son nom figure sur la liste des conseils mentionnée à l’article 45 B) du Règlement, lequel fixe les conditions que les conseils doivent remplir à cette fin. La Directive prévoit aussi qu’à la demande du conseil principal, le Greffe peut nommer d’autres personnes telles que des « assistants juridiques, consultants, enquêteurs et interprètes, selon les besoins, pour assister le conseil dans ses tâches » (le « personnel d’appui »). Voir les articles 7 A), 14 A) et 16 C) iii) de la Directive.