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1 Le mercredi 12 mars 2008
2 [Audience publique]
3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 8 heures 35.
5 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de
7 l'affaire, s'il vous plaît.
8 M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.
10 En ce mercredi 12 mars 2008, je salue tous les représentants de
11 l'Accusation. Je salue M. le Témoin, je salue M. Seselj ainsi que toutes
12 les personnes qui nous aident. Nous devons donc poursuivre l'audience par
13 le contre-interrogatoire.
14 Avant cela, j'indique à M. Seselj que la Chambre d'appel a rendu hier sa
15 décision sur l'appel que nous avions certifié relatif à une décision orale
16 que nous avions rendue concernant la venue de témoins dans le cadre de la
17 ligne de conduite délibérée. La Chambre d'appel n'a pas fait droit à la
18 requête de l'accusé et a donc rejeté sa requête. Ce qui fait qu'en fonction
19 de cette jurisprudence, l'Accusation peut faire venir à l'audience des
20 témoins concernant les municipalités qui avaient été supprimées de l'acte
21 d'accusation, à savoir notamment Brcko, Bijeljina.
22 Voilà, alors, Monsieur Seselj, vous aurez l'arrêt de la Chambre d'appel qui
23 fait huit pages, qui sera traduit rapidement et je tenais à vous en
24 informer.
25 De ce fait, nous pouvons maintenant passer au contre-interrogatoire,
26 Monsieur Seselj, et je vous donne la parole.
27 LE TÉMOIN : VILLEM KARLOVIC [Reprise]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
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1 Contre-interrogatoire par M. Seselj :
2 Q. [interprétation] Monsieur Karlovic, vous avez quel
3 diplôme ?
4 R. J'ai fait les études secondaires.
5 Q. A quelle école ?
6 L'INTERPRÈTE : Réponse inaudible pour l'interprète.
7 Q. Et vous avez quel grade ?
8 R. Capitaine -- capitaine quatre étoiles.
9 Q. [aucune interprétation]
10 R. Sous-lieutenant, lieutenant, et après c'est capitaine, deuxième grade
11 au-dessus ?
12 R. Je pense que c'est capitaine. Je pense que c'est un capitaine de
13 première classe.
14 Q. Donc, quatre étoiles. Et vous avez pris votre retraite très jeune, pour
15 quelle raison ?
16 R. Je n'ai pas besoin de m'étendre sur des raisons de ma mauvaise santé.
17 Q. Donc, des raisons de santé.
18 R. Oui.
19 Q. Et n'empêche que vous avez atteint un grade élevé compte tenu du fait
20 que vous n'êtes pas sorti d'une école militaire et que vous n'avez que
21 l'éducation secondaire ?
22 R. Je dois dire que j'ai eu des résultats assez importants pendant que
23 j'ai combattu, et je suis allé à l'école.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : -- des pauses entre les questions et les réponses
25 parce que les interprètes ont du mal.
26 L'INTERPRÈTE : L'interprète française signale qu'il n'y a aucune pause
27 entre la question et la réponse.
28 M. SESELJ : [interprétation]
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1 Q. Je vous pose les questions sur votre éducation -- sur votre école
2 secondaire pour savoir ce que signifie, à votre avis, l'expression
3 "cocarde" -- "une cocarde."
4 R. D'après moi, une cocarde --
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Avant de répondre à la question cocarde, je reviens
6 parce que ça m'avait aussi interpellé. Votre parcours militaire, vous avez
7 terminé capitaine de première classe. J'avais noté que vous n'aviez pas
8 fait la JNA ni les écoles militaires et je m'étais dit que vous aviez fait
9 un parcours assez extraordinaire dans l'armée croate.
10 Et puis, hier, vous nous avez dit que vous aviez été reçu par le
11 président Tudjman à l'époque. Alors, ce matin et cette nuit, je me suis
12 demandé s'il n'y avait pas une relation de cause à effet. Pouvez-vous,
13 Monsieur le Témoin, me dire si, dans l'armée croate, on peut devenir
14 capitaine, comme vous l'avez été, sans passer par les écoles d'officiers
15 croates ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Premièrement, je n'ai pas été reçu par
17 le président Tudjman, mais j'ai été reçu dans son bureau. C'est l'une des
18 personnes se trouvant dans son bureau qui m'a reçu où j'ai fait ma
19 déclaration sur les événements d'Ovcara.
20 Deuxièmement, dans l'armée croate, il était possible d'atteindre ce
21 grade. J'ai eu des fonctions les moins élevées jusqu'au commandant de
22 bataillon en fin de carrière et, en parallèle, nous avons été formés à
23 l'école pour des fonctions correspondant à nos grades et à nos fonctions.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, merci.
25 Monsieur Seselj.
26 M. SESELJ : [interprétation]
27 Q. Mais je vous ai déjà demandé, et ce que signifiait, à votre avis,
28 l'expression "une cocarde" ?
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1 R. Une cocarde, pour moi, c'est donc quelque chose qui est typiquement
2 serbe, un blason serbe utilisé sur des couvre-chefs serbes, des sajkaca,
3 des bonnets traditionnels serbes et des chapeaux de fourrure.
4 Q. Mais pourquoi est-ce que c'est nécessairement serbe ? En serbe -- en
5 langue serbe, comment est-ce qu'on qualifierait le blason français sur le
6 couvre-chef d'un officier français ?
7 R. Je ne sais pas vous répondre. Je ne vous comprends pas, je ne comprends
8 pas ce que vous me demandez.
9 Q. Mais, vous, les Croates, comment est-ce que vous appelez l'insigne en
10 métal sur un couvre-chef d'officier, d'un policier, d'un cheminot, d'un
11 postier, d'un pompier ? Comment est-ce que vous appelez ce signe
12 métallique, ce blason ?
13 R. Nous, nous l'appelons, en Croatie, blason.
14 Q. Donc, blason; vous n'avez pas un terme spécifique.
15 R. Non, nous n'en n'avons pas.
16 Q. En langue serbe, une cocarde, bien, c'est tout signe que l'on pose sur
17 un couvre-chef. Vous ne le savez pas ?
18 R. Non.
19 Q. Donc, sur un uniforme, sur un couvre-chef, tout signe s'appelle
20 cocarde. Donc, du temps communiste, on a appelé ça "étoile à cinq
21 branches," n'est-ce pas ? Vous, vous en souvenez ? Vous êtes jeune, mais
22 vous devez vous en souvenir de l'époque communiste.
23 R. Je me souviens de l'étoile à cinq branches.
24 Q. Donc, ça s'appelait étoile à cinq branches sur un couvre-chef
25 militaire, rarement a-t-on utilisé le terme cocarde. Mais dans la langue
26 serbe, la seule expression qui existe pour ce qu'on porte sur un couvre-
27 chef militaire c'est une cocarde.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : -- excusez-moi de vous interrompre. Posez-lui là
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1 parce que là, vous êtes en train de témoigner. Posez-lui la question en
2 disant : voilà, si je vous dis qu'en Serbie l'expression cocarde veut dire
3 ça, est-ce que vous pourriez être d'accord avec moi ou pas ? Sinon, c'est
4 vous qui témoigné, et à ce moment-là, le Procureur va se lever et il va
5 faire des objections et on va perdre du temps. Alors, essayons d'être
6 efficace les uns et les autres.
7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas dit qu'en Serbie, on appelle ceci
8 une cocarde mais dans la langue serbe, Monsieur le Président, justement
9 j'allais poser ma question et vous m'avez interrompu, à ce moment-là.
10 Q. Donc, lorsqu'on dit une cocarde, est-ce que cela signifie
11 nécessairement toujours que c'est une cocarde chetnik ?
12 R. Avant cela, je n'avais jamais vu nulle part ce que vous appeliez un
13 blason et je ne savais pas non plus, je ne connaissais pas, je ne connais
14 pas la langue serbe, je ne savais pas ce que signifiait le mot cocarde,
15 blason ou autre chose. Quand j'étais petit, j'ai vu ça dans les films. J'ai
16 vu que des Chetniks portaient cela, et par la suite, je l'ai vu dans la
17 guerre et je ne peux pas maintenant m'étendre là-dessus. Je ne sais pas
18 comment on dit, en langue serbe, blason.
19 Q. Mais je ne vous ai pas demandé ça, Monsieur Karlovic. Je vous ai
20 demandé : si d'après vous, lorsqu'on dit "cocarde" -- le mot "cocarde,"
21 rien de plus, donc, est-ce que cela signifie nécessairement toujours que
22 c'est un symbole chetnik, ou c'est un terme un peu plus large que quelque
23 chose qui désignerait un symbole chetnik ? Est-ce que c'est nécessairement
24 chetnik ? C'est ça ma question ?
25 R. Pour moi, d'après ce que je sais, une cocarde c'est toujours Chetnik,
26 voilà.
27 Q. Mais vous avez eu l'occasion, par exemple, lorsque vous avez combattu à
28 Vukovar et, par la suite, lorsque vous avez combattu, est-ce que vous avez
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1 rencontré diverses cocardes ?
2 R. A Vukovar, oui. Mais par la suite, je n'ai plus revu la cocarde, ce que
3 j'appelle une cocarde.
4 Q. Mais vous pouvez me décrire ce que vous appelez cocarde ?
5 R. C'est un symbole métallique pour moi du blason serbe sur des couvre-
6 chefs traditionnels serbes, des sajkaca et des chapeaux de fourrure.
7 Q. Donc, un blason métallique serbe sur un couvre-chef serbe, sajkaca, ou
8 chapeaux de fourrure. C'est ça pour vous une cocarde ?
9 R. Oui.
10 Q. Et rien d'autre.
11 R. Dans mon esprit pour moi, non, mais je ne sais pas.
12 Q. Très bien. Mais vous seriez d'accord avec moi pour dire que vous ne
13 savez pas très bien ce que c'est qu'une cocarde ?
14 R. Oui, je pourrais en convenir avec vous. Je vous dis ce que je pense
15 qu'est cela mais peut-être que vous savez mieux que moi.
16 Q. Très bien.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, j'aimerais que l'on place sur le
18 rétroprojecteur 4186, la photographie qui a déjà été montrée pendant
19 l'interrogatoire principal. Je ne l'ai pas ici. Je ne peux pas tout
20 apporter sur moi, 4186, 65 ter.
21 L'INTERPRÈTE : Note : il n'y a pas de pause entre la question et la
22 réponse.
23 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, juste une observation. Dans la mesure
24 où cette pièce a déjà un numéro "d'exhibit," je pense qu'il serait plus
25 simple qu'on réfère au numéro "d'exhibit," plutôt, qu'à un numéro 65 ter.
26 C'est le but du numéro "d'exhibit."
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Il y a le numéro qui a été donné.
28 Alors, je voudrais juste faire un commentaire avant que le témoin réponde.
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1 Cette photo telle qu'on la voie à l'écran est une photo amputée parce que
2 cette photo qui semble être connue dans le monde entier, il y a un autre
3 personnage qui se trouve à gauche que l'on ne voit pas sur la photo. Donc,
4 il y a un autre personnage qui est à gauche et cette photo on la trouve
5 partout.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas qui est cet individu sur la
7 gauche; je ne sais pas pourquoi le Procureur nous donne des photographies
8 tronquées. Il devrait nous donner les photographies intégrales. Monsieur le
9 Président, je ne peux pas citer des cotes de pièces à conviction parce que
10 jamais je n'ai reçu la liste des pièces versées au dossier. Je suppose que
11 quelqu'un devrai à chaque fois qu'on a versé au dossier des pièces --
12 remettre la liste. Je ne peux pas mémoriser tout ça.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Hier, quand le Procureur a demandé le versement de
14 cette photo au dossier, le Greffier a donné un numéro, et ça vous a peut-
15 être échappé, mais il y a un numéro qui a été donné. Bon. Mais c'est
16 secondaire, c'est secondaire.
17 Oui.
18 M. DUTERTRE : Juste un petit point par rapport à la notion d'images
19 tronquées. Je dois dire que c'est une un style -- enfin, une vue prise
20 d'une vidéo, donc, c'est forcément un moment -- une partie de la vidéo et
21 il n'y a pas d'intention délibérée de la part du parquet de tronquer des
22 images.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, posez votre question, Monsieur Seselj.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, Monsieur le Président, le Procureur
25 aurait dû me remettre la vidéo et c'est sur la base de l'enregistrement
26 vidéo qu'on aurait pu avoir un débat ici et non pas sur la base d'une
27 photographie, un arrêt sur image fait par le Procureur sur la base d'un
28 enregistrement, je pense que ce n'est pas régulier comme démarche. Mais,
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1 s'il vous plaît, je voudrais demander autre chose, affichez-moi la
2 photographie.
3 M. SESELJ : [interprétation]
4 Q. Vous voyez ici quatre militaires et un civil ?
5 R. Oui.
6 Q. Un militaire est loin à l'arrière, on ne le voit pas bien à cause de
7 cela et il est possible qu'il y ait un militaire également derrière ce
8 soldat à gauche parce qu'on voie des bottes qui appartiendrait à quelqu'un.
9 R. Je ne vois rien à l'écran, donc, je ne peux rien vous dire. Bien, je
10 vois maintenant.
11 Q. Pendant l'interrogatoire principal, pour ces deux militaires - l'un à
12 gauche, l'autre au milieu - et pour le civil, vous avez -- derrière le
13 civil, vous avez dit que c'étaient des militaires de la JNA, et puis pour
14 l'autre, vous avez dit que c'était un Chetnik ?
15 R. Mais j'ai rien dit au sujet de celui qui est à l'arrière : je ne le
16 vois pas. Pour celui à gauche et à droite, j'ai dit -- pour celui qui est à
17 droite, j'ai dit qu'à cause du chapeau de fourrure, je le rangerais dans
18 cette catégorie-là. C'était ça mon opinion; c'est ce que j'ai dit.
19 Q. Très bien. Mais est-ce que vous voyez que ces deux militaires n'ont pas
20 sur leur casque une étoile à cinq branches. Vous l'avez remarqué ?
21 R. Je vois, je vois.
22 Q. Est-ce que vous voyez qu'à la place, que l'étoile rouge a été effacée
23 et qu'on a collé une cocarde par-dessus. Vous le voyez en blanc en haut du
24 casque ?
25 R. Ecoutez, honnêtement, il faut dire que ni vous ni moi nous sommes
26 certains de ce qui a été collé. Est-ce que c'est le drapeau serbe, est-ce
27 que c'est une étoile à cinq branches ? Est-ce que c'est une [imperceptible]
28 ?
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1 Q. Non, non, c'est rouge nécessairement l'étoile à cinq branches ?
2 R. Non, je voulais dire le drapeau serbe peut-être.
3 Q. Mais ce serait en couleur, rouge, blanc, bleu, n'est-ce
4 pas ? De toute évidence, ce n'est pas un drapeau serbe. C'est un aigle
5 bicéphale blanc, c'est un symbole serbe ?
6 R. C'est possible, c'est possible.
7 Q. Oui. Donc, puisque ces deux militaires ont le blason serbe à la place
8 de l'étoile rouge à cinq branches, on pourrait les appeler Chetniks
9 également, n'est-ce pas ?
10 R. Ecoutez, je l'ai catégorisé comme je l'ai pensé, je suppose que oui.
11 Q. Vous voyez ce militaire à droite il a en fait un symbole bizarre sur
12 son chapeau de fourrure. Jamais je n'ai vu moi, par exemple, ce symbole.
13 C'est quoi ? Vous le savez, vous ? Ce n'est pas un blason serbe.
14 R. Avec ce chapeau, c'est un chapeau chetnik pour moi - donc, je vous dis
15 ce que je pense - avant, je n'ai pas affirmé non plus que c'était à 100 %
16 cela, mais j'ai dit ce que je pensais.
17 Q. Monsieur Karlovic, je vais vous dire quelque chose. Vous n'avez pas
18 besoin d'être sur la défensive tout le temps. Au fond j'accepte votre
19 déclaration. Je pense qu'à 90 % vous avez dit la vérité, je vous le dis par
20 avance. Il n'y a pas de raison de vous mettre sur la défensive comme ça.
21 Essayons ensemble de voir ce qui en est, de tirer ça au clair parce que ça
22 m'étonne, moi aussi, donc, j'ai besoin d'élucider cela dans un échange avec
23 vous.
24 Parce que je voudrais relativiser les catégories que vous avez introduites
25 la JNA, la Défense territoriale, et les Chetniks, parce que je pense que là
26 vous n'avez pas fourni des bases solides pour ces catégories. Mais 90 % de
27 ce que vous avez dit pour moi est la vérité, donc je pense que vous n'avez
28 pas menti pour ce qui vous est arrivé et pour ce que vous avez dit là-
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1 dessus. J'espère vous avoir apaisé un petit peu et maintenant nous allons
2 pouvoir débattre des choses qui peut-être ne vous paraissent pas
3 suffisamment sérieuses, mais pour moi, elles sont importantes.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc, redonnez-moi la photo, s'il vous plaît.
5 La photographie à l'écran.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je l'ai sur deux écrans.
7 M. SESELJ : [interprétation]
8 Q. Vous êtes privilégié par rapport à moi, moi, je ne l'ai que sur un
9 écran, j'ai un écran.
10 Vous voyez, sur la droite, il y a ce militaire il a l'uniforme au complet
11 de la JNA mis à part le casque ou un couvre-chef militaire; c'est ça ?
12 R. Oui, c'est exact. D'après ce que j'ai dit, si vous m'avez écouté j'ai
13 dit je le mettrais dans la catégorie où je l'ai mis à cause de son couvre-
14 chef.
15 Q. Très bien. Je vais vous poser des questions brèves et il me faudra me
16 répondre brièvement. Il ne faut pas m'expliquer, mais nous allons revoir
17 ça, par le menu détail. J'ai deux heures et demie et je veux explorer ça en
18 détail. Nous voyons sur lui un uniforme de la JNA, l'ancien uniforme vers
19 gris olive, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Et par-dessus, il y a un gilet par balle; c'est bien ça ?
22 R. Oui.
23 Q. Qui est un peu plus récent de toute évidence parce que c'est un gilet
24 de camouflage.
25 R. Je suppose.
26 Q. Et ces deux militaires ils ont l'uniforme classique de la JNA,
27 l'uniforme SNB, vert olive -- gris vert olive.
28 R. Oui.
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1 Q. Vous devriez savoir qu'en 1991 la JNA n'avait que cet uniforme-là.
2 R. Vert gris olive.
3 Q. Oui.
4 R. Je vous le demande ?
5 Q. Vous le savez.
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que vous savez que pendant la deuxième moitié de 1991 la JNA
8 s'est mise à fabriquer en masse des uniformes de camouflage ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous savez qu'il est arrivé au sein d'une unité de la JNA
11 qu'en partie il y a des soldats qui [imperceptible] anciens uniformes gris
12 vert olive et d'autres qui aient ces nouveaux uniformes de camouflage ?
13 R. Oui, je comprends.
14 Q. Vous le ne contestez pas ?
15 R. Non.
16 Q. Donc, est-ce que vous seriez d'accord pour dire sur la base de cette
17 photographie que l'on ne peut pas affirmer avec certitude, s'il s'agit là
18 de militaires de la JNA ou non pour ces deux militaires qui font leur
19 service régulier --
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
21 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, objection. Le témoin a déjà
22 parfaitement répondu à quel groupe l'un ou l'autre de ces soldats
23 appartenaient. La question lui a été posée plusieurs fois. Il a dit que
24 c'était son sentiment, et il l'a expliqué pourquoi. Et donc, je m'objecte à
25 ce que la question lui soit reposée encore une nième fois.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur Seselj, l'accusé a répondu que, pour
27 lui, comme vous le laissiez sous-entendre, ils appartiennent à la JNA,
28 alors, ne lui reposez pas dix fois la même question.
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1 Alors, moi, je vais vous poser une question parce que c'est important. On a
2 une photo où il y a quatre individus, plus une personne âgée et qui est sur
3 cane qui manifestement est accompagnée ou prisonnier. On ne sait pas trop.
4 Mais, Monsieur le Témoin, ces quatre soldats, dont l'un n'a pas un casque,
5 pour vous c'est JNA, Défense territoriale ou volontaires ? Quelle est votre
6 conclusion ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après moi, je répète, ils feraient partie
8 d'une unité chetnik. Et encore une fois, je répète, c'est mon opinion.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc, vous, pour vous, même s'ils ont une tenue
10 vert olive avec casque pour vous, Unité chetnik. Bon. Les quatre ou celui
11 qui a le bonnet sur la tête ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, juste -- je pense juste à l'homme qui
13 porte ce chapeau.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Celui qui a le bonnet sur la tête, lui, Unité
15 chetnik, par contre les autres JNA. C'est ça que vous dites ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour moi, à cause de ce bonnet, il ferait
17 partie d'une unité chetnik. C'est comme ça que je l'aperçois.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, le soldat qui a le bonnet. Mais les quatre
19 autres que l'on voit en vert olive eux c'est Chetniks ou JNA ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ce que je vois, les autres ne seraient
21 pas membres d'Unité chetnik. Soit la réserve soit -- enfin, ils sont un peu
22 plus -- un peu trop âgé pour faire partie de l'active -- de la JNA.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Très bien.
24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous m'empêchez de mener mon contre-
25 interrogatoire. Lorsque le Procureur a posé des questions ne serait-ce les
26 plus dénouées de sens, vous n'êtes pas intervenu, vous n'avez pas posé de
27 question pour moi, toutes ces questions sont très importantes je veux
28 relativiser les affirmations du témoin et la distinction qu'il a opéré
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1 entre les soldats de la JNA, les Chetniks, la Défense territoriale. Ça vous
2 dérange. Je vais m'attarder sur cette photo et, Monsieur le Juge, je vous
3 en prie, ne dites pas que cet homme est quelqu'un qui a été capturé. C'est
4 un civil, une personne âgée qui a été probablement trouvé par des
5 militaires dans une cave. Comme le front s'est déplacé, il a été sorti de
6 là, il n'est pas attaché, les fusils ne sont pas pointés sur lui, donc,
7 rien ne nous permet de dire que c'est quelqu'un qui a été capturé.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Je n'ai pas dit qu'il a été capturé. J'ai dit qu'il
9 y a deux situations. Il peut être capturé parce que la photo montre qu'il
10 est entouré, il est -- mais l'autre situation, il peut être aussi
11 accompagné. C'est que j'avais déjà dit, que je reconfirme. Donc, on ne
12 connaît pas la situation exacte de la personne. Mais le problème n'est pas
13 là. Le problème est de savoir si les militaires que l'on voit sont de la
14 JNA, de la Défense territoriale, ou d'une Unité chetnik, tel que semble
15 dire le témoin pour l'un d'entre eux, celui qui a le bonnet sur la tête.
16 Donc, continuez.
17 M. SESELJ : [interprétation]
18 Q. Est-ce que vous excluez la possibilité que ces soldats avec les --
19 soient des Chetniks ?
20 R. Non, je ne peux pas exclure cette possibilité.
21 Q. Très bien. Merci. Est-ce qu'étant donné que vous aviez un poste
22 d'officier, vous n'étiez pas encore officiellement officier à Vukovar mais
23 vous étiez le commandant d'une section, n'est-ce pas, c'est déjà une
24 position d'officier ?
25 R. Non, non, non. J'étais sous officier, à ce moment-là.
26 Q. Très bien. D'accord. Alors, à ce moment-là, est-ce que vous avez
27 entendu qu'il existait une Unité de Chetniks et qui s'appelait
28 officiellement "Unité de Chetniks," à Vukovar du côté opposé ?
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1 R. Non, je n'ai pas entendu parler d'une telle unité qui portait cette
2 appellation officielle.
3 Q. Je vous dirais en réalité que cette unité n'a jamais existé, c'est pour
4 cela que vous n'avez jamais entendu parler de ce type d'unité, de cette
5 unité ?
6 R. Mais je ne sais pas.
7 Q. En fait, c'était la 1ère Brigade de Gardes qui était de l'autre côté
8 avec les unités de la Défense territoriale ainsi que les volontaires,
9 n'est-ce pas ?
10 R. Non, je ne sais pas exactement qui se trouvait, qui combattait contre
11 nous officiellement. Je n'ai jamais su ce détail.
12 Q. Très bien.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] S'agissant maintenant de la photo 4245, une
14 photo 65 ter, j'aimerais demander qu'elle soit affichée s'il vous plaît,
15 4245. Étant donné que cela prend un peu plus de temps, j'aimerais demander
16 que l'on prépare la vidée 6033 que je vais demander après la photo.
17 M. SESELJ : [interprétation]
18 Q. Sur ces photographies nous apercevons très bien ce civil. Il est
19 évident qu'il s'agit d'un homme âgé, n'est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Et c'est un handicapé ou un invalide. Nous avons vu qu'il marchait ou
22 il se déplaçait à l'aide d'une cane ?
23 R. Je le présume, je ne le sais pas.
24 Q. C'est probablement un homme malade. On peut voir d'après l'expression
25 de son visage qu'il a dû passer un certain temps dans une cave ?
26 R. Probablement que oui.
27 Q. Vous voyez deux soldats à côté de lui, l'un de ces soldats porte un
28 uniforme de camouflage sans casque, sans bonnet, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Et l'autre soldat porte un uniforme vert olive avec casque, n'est-ce
3 pas ?
4 R. [aucune interprétation]
5 Q. Alors, là où on est censé voir une étoile à cinq branches sur le
6 casque, il n'y a pas d'étoile ?
7 R. Oui, c'est exact.
8 Q. Est-ce que vous voyez que, sur le casque en haut, il y a un blason avec
9 l'aigle à deux têtes blanc ?
10 R. Je ne vois pas très bien.
11 Q. En fait, il serait beaucoup mieux de nous faire montrer la vidéo, mais
12 l'Accusation ne le permet pas pour une raison ou pour une autre.
13 R. Je vois la moitié du casque.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, vous aviez la vidéo.
15 M. DUTERTRE : Oui, tout à fait. On avait choisi des -- pour gagner du temps
16 mais on peut tout à fait la jouer si la Chambre nous invite.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Seselj, la vidéo existe; si vous
18 voulez, on peut la voir.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Très bien, que l'on passe la vidéo.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on va passer la vidéo.
21 [Diffusion de la cassette vidéo]
22 M. SESELJ : [interprétation]
23 Q. Vous avez vu cette première séquence où les soldats courraient, n'est-
24 ce pas, c'était tout près de la première ligne des combats, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
26 Q. Donc, les soldats étaient en train de faire sortir un civil depuis les
27 premières lignes de front et passent à un endroit où il est plus sûr. Et,
28 nous voyons un autre groupe donc nous ne voyons pas là de tireurs embusqués
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1 ni de rien d'autres ?
2 R. Oui, c'est tout à fait possible. Il y a plusieurs possibilités,
3 plusieurs situations sont possibles.
4 Q. Très bien. Est-ce que vous excluez la possibilité s'agissant de ces
5 autres soldats qu'il s'agisse de Chetniks ?
6 R. Oui, j'exclus cette possibilité.
7 Q. Pourquoi ?
8 R. J'ai vu qu'ils étaient habillés de façon semblable à la personne pour
9 laquelle j'ai déjà dit que selon moi cette personne ne devrait sans doute
10 pas appartenir à une formation de Chetniks. Et s'agissant du casque, je ne
11 vois vraiment pas du tout de quoi il s'agit. Nous voyons une espèce de
12 trace blanche, mais je ne peux pas le dire. Alors que sur le bonnet, je
13 voyais très bien qu'il y avait une cocarde.
14 Q. Est-ce que vous savez que du côté adverse, il était très rare que l'un
15 des soldats portait soit une sajkaca ou un chapeau de fourrure que la
16 plupart des personnes portaient un casque ?
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
18 M. DUTERTRE : Je ne veux pas inutilement interrompre M. Seselj, mais M.
19 Seselj pose une question de manière assez générale : à quel groupe
20 appartenaient les autres soldats ? Quand on a passé la vidéo, il y a
21 beaucoup de soldats qu'on voit et on ne sait pas exactement de à quoi on se
22 réfère lorsque la question est posée. Peut-être
23 M. Seselj pourrait nous dire exactement à quel passage de la vidéo il se
24 réfère et à quel soldat il se réfère parce que je ne suis dans la capacité
25 de comprendre en ce qui me concerne de quel soldat on parlait précisément.
26 M. SESELJ : [interprétation]
27 Q. Est-ce que vous savez Monsieur Karlovic, qu'il est assez rare qu'un
28 soldat qu'il s'agisse de soldat de la JNA ou des soldats de la Défense
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1 territoriale ou des volontaires, que très rarement les soldats portaient
2 soit des bonnets de fourrure ou des sajkaca; que ceci pourrait arriver mais
3 que c'était très rare ?
4 R. S'agissant des opérations de combat c'est vrai, c'est tout à fait exact
5 que pratiquement parlant il est assez rare que l'on voie quelqu'un
6 participer aux opérations de combat avec un bonnet de fourrure avec une
7 sajkaca. Mais lorsque la guerre -- la ville était tombée, là, il y avait
8 des personnes qui pouvaient porter ce genre d'insigne.
9 Q. Vous voulez dire qu'à ce moment-là, il y avait des personnes qui
10 auraient pu mettre une sajkaca, même si elles ne l'avaient jamais porté
11 avant ?
12 R. Je ne peux pas vous répondre à cette question.
13 Q. Très bien.
14 M. SESELJ : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on passe la vidéo
15 6033, s'il vous plaît.
16 [Diffusion de la cassette vidéo]
17 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
18 "Il y a une -- parmi les Serbes militaires, nous pourrons voir des femmes
19 qui se posent également et qui montrent leur triomphe. C'est une fête
20 matinale avec de la musique et des rires. Nous pouvons également voir une
21 inscription sur ce drapeau, 'liberté ou mort'."
22 [Fin de la diffusion de cassette vidéo]
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Arrêtez, je vous prie, la vidéo. Nous allons
24 maintenant revenir au début, s'il vous plaît.
25 M. SESELJ : [interprétation]
26 Q. Qu'est-ce que -- qu'est-ce qui, selon vous, représente cette unité ?
27 Qui est cette unité ? Est-ce que c'est une Unité de la JNA, ou s'agit-il
28 d'une unité de la Défense territoriale, ou est-ce une unité de volontaires
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1 ?
2 R. Croyez-moi que, moi aussi, je me suis posé la question lorsque j'ai vu
3 cet extrait.
4 Q. Mais il est évident qu'il s'agisse d'une unité de soldats se trouvant
5 du côté adverse, n'est-ce pas ?
6 R. Je ne sais pas si pour vous c'est vraiment des soldats.
7 Q. Pourquoi ce ne serait pas des soldats ?
8 R. Je ne sais pas. Je ne sais pas comment répondre à cette question. Je ne
9 sais vraiment pas. Je ne sais pas ce qu'ils sont.
10 Q. Vous ne savez pas ce que ces personnes sont ? Très bien. Alors, moi, je
11 vais vous dire ce que je pense et je vais vous demander si vous êtes
12 d'accord.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Qu'est-ce qu'il y a ?
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez trop vite. La sténotypiste a du mal à
15 suivre en anglais.
16 Bien, reprenez, Monsieur.
17 M. SESELJ : [interprétation]
18 Q. Vous avez vu que la plupart de ces personnes portaient des casques,
19 n'est-ce pas ?
20 R. Disons que oui.
21 Q. Et que, certainement, ces personnes portaient soit une sajkaca ou des
22 bonnets de fourrure, peut-être une personne portait un bonnet de fourrure?
23 R. Oui, on a plusieurs peut-être.
24 Q. Et il y a également un drapeau chetnik, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
26 Q. Et parmi eux, il y a également des femmes, n'est-ce pas ?
27 R. Oui, c'est exact.
28 Q. Est-ce qu'on peut parler de volontaires à ce moment-là ?
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1 R. Probablement que oui.
2 Q. Car les femmes ne faisaient pas partie de la JNA, n'étaient pas
3 recrutées par la JNA, les femmes ne faisaient pas leur service militaire
4 normal ?
5 R. Non.
6 Q. Les femmes n'étaient pas des réservistes non plus ?
7 R. Non.
8 Q. Et, il n'y en avait pas non plus dans la Défense territoriale ?
9 R. Non, ce n'était pas nécessairement le cas.
10 Q. Vous voulez dire qu'il pouvait y avoir des femmes volontaires ?
11 R. Oui.
12 Q. Et donc, il s'agit ici de volontaires, c'est clair ?
13 R. Oui.
14 Q. Ils se sont rassemblés et ils célèbrent une victoire.
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce que ces personnes ont l'air ivre selon vous ?
17 R. Je ne peux pas l'évaluer. Je vois qu'il y a de l'alcool là mais c'est
18 possible.
19 Q. Est-ce que vous avez remarqué qu'il n'y avait qu'une bouteille d'alcool
20 ?
21 R. Oui, c'est vrai que je vois seulement une bouteille d'alcool ici.
22 Q. Est-ce que c'est possible que la personne qui les a filmés, le
23 journaliste étranger leur a donné une bouteille de cognac parce que ces
24 derniers lui avaient permis de les filmer ?
25 R. Je ne peux pas le savoir. Vous me placez dans une position très
26 difficile, comme vous, vous ne pouvez pas le savoir.
27 Q. Mais non, moi, je ne le sais pas. Je ne fais qu'émettre des
28 conjectures. Enfin je vous demande de me confirmer ou infirmer cette
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1 position.
2 R. Je ne sais pas tout est possible.
3 Q. Est-ce que c'est possible qu'ils se soient rassemblés parce qu'ils
4 doivent se déplacer quelque part ?
5 R. Encore une fois c'est une supposition, n'est-ce pas ?
6 Q. Oui, c'est une supposition, bien sûr.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez trop vite. Nos interprètes font des
8 prouesses mais vous allez trop vite.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je ne fais que dire oui ou non, mais
10 attendez que M. Seselj pose la question -- attendez quelques secondes avant
11 de répondre.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi.
13 M. SESELJ : [interprétation]
14 Q. Une question très importante qui a trait à cette image, plutôt à cet
15 extrait. C'est probablement filmé le 18, le 19, ou le 20 novembre, n'est-ce
16 pas ? Si vous comparez ces gens, l'expression de leurs visages, leur
17 gaieté, si vous comparez ces derniers avec les soldats d'Ovcara, qu'il
18 s'agisse de soldats de la JNA, de soldats de la Défense territoriale, des
19 Chetniks, peu importe. Est-ce que ces derniers démontrent ou semblent
20 pareil ? Est-ce qu'ils ont la même attitude ? Est-ce qu'il semble avoir les
21 mêmes intentions ?
22 R. Si j'examine cette image figée je ne peux pas rien vous dire. Je ne
23 peux rien vous dire, je ne peux pas répondre à votre question simplement à
24 l'examen de cette image. Je me souviens de la situation à Ovcara je sais
25 qu'on était assoiffé de voir notre sang à nous, après j'ai vu des vidéos,
26 je ne sais pas s'il s'agit du même rassemblement, mais j'ai vu d'autres
27 vidéos, je ne sais pas si c'est cette vidéo-ci mais j'avais entendu des
28 chants, tel : "Il y aura de la viande et on mangera du Croate."
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1 Q. Je voulais simplement que vous me répondiez, que vous répondiez à ma
2 question. Vous avez parlé de la chanson : "Oh, Slobo envoie-nous de la
3 salade il y aura de la viande, nous allons égorger des Croates."
4 Est-ce que c'est vrai qu'il y avait une telle chanson ?
5 R. Oui.
6 Q. Est-ce que vous n'avez jamais entendu cette chanson-là avant la guerre
7 ?
8 Par exemple, sur les stades de football ?
9 R. Non, non. En fait, je n'allais pas à des matchs de foot.
10 Q. Est-ce que vous n'avez jamais entendu un chant des supporteurs croates
11 assez semblables : "Tue, tue les Serbes" ?
12 R. Il est vrai que lors des matchs de foot j'ai entendu des chants
13 semblables des deux côtés.
14 Q. Et ces deux chants sont assez semblables, c'est-à-dire qu'il y a des
15 ripostes et on chante ces chants-là lors des matchs de foot ?
16 R. Oui.
17 Q. Monsieur Karlovic, à Ovcara vous étiez sur place votre vie était
18 menacée, et cetera, vous aviez peur, je comprends tout à fait vos
19 sentiments de l'époque, mais est-ce que vous avez pu remarquer que ces
20 personnes qui avaient commencé à tabasser, ou qui tabassaient les autres
21 personnes connaissaient personnellement la plupart des détenus ?
22 R. Oui, c'était tout à fait exact, ils connaissaient les détenus.
23 Q. Ceci veut dire qu'ils avaient des comptes personnels à régler avec eux
24 ?
25 R. Je ne sais pas. Je ne peux pas vous dire.
26 Q. Donc, ils se connaissaient ?
27 R. Oui, certains d'eux se connaissaient.
28 Q. Et ce sentiment de vengeance pouvait existé et ait pu avoir des racines
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1 dans certaines choses qui s'étaient passées avant à Vukovar ?
2 R. Je ne peux pas vous le dire. Je venais de vous Zagreb. Je n'avais pas
3 séjourné à Vukovar avant cela.
4 Q. Très bien. Vous avez vu là-bas selon vos dires des officiers de la JNA,
5 n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Et lorsque le tabassage a cessé vous avez dit que les officiers avaient
8 commencé à faire des listes de détenus à Ovcara; est-ce que c'est exact ?
9 Est-ce que je vous ai bien compris ?
10 R. Oui.
11 Q. Très bien. Le fait qu'ils aient rédigé des listes, est-ce que ceci veut
12 dire qu'à ce moment-là la décision relative à la fusillade n'avait pas
13 encore été rendue, c'est-à-dire est-ce que vous pensez que quelqu'un aurait
14 dressé une liste de noms avant une fusillade ?
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
16 M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président. On demande au témoin de spéculer.
17 J'objecte à cette question.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, la question est très spéculative, Monsieur
19 Seselj.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais non, ce n'est pas une question spéculative
21 du tout. M. Karlovic est un officier, il a une expérience de guerre assez
22 longue, et il peut sur la base de son expérience personnelle à Ovcara peut
23 tirer certaines conclusions. Vous avez toujours permis ce genre de chose et
24 lorsqu'il s'agissait de témoins avant lui.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Posez votre question, Monsieur Seselj.
26 M. SESELJ : [interprétation]
27 Q. Est-ce que du point de vue logique, si on examine la problématique d'un
28 point de vue logique si déjà une intention existait, à savoir que ce groupe
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1 de détenus soient exécutés, qu'à ce moment-là, des officiers arrivent sur
2 place, qu'ils procèdent à un tabassage, et qu'ensuite, d'autres officiers
3 se présentent qu'ils soient assis autour d'une table, dressent une liste;
4 est-ce que c'est logique, ne trouvez-vous pas ça un peu bizarre ?
5 R. Je ne sais pas. C'est peut-être étrange.
6 Q. Vous, en tant que soldat, est-ce que vous trouvez ça un peu bizarre ?
7 R. Non, je ne peux pas trouver ça bizarre puisque je ne me suis jamais
8 trouvé dans une situation pareille.
9 Q. Est-ce que vous ne trouvez pas ça bizarre que ce groupe de soldats -
10 vous avez parlé des soldats de la JNA, des membres de la Défense
11 territoriale, des Chetniks, et cetera - que ces derniers aient pu tabasser
12 de façon violente des prisonniers alors que ces prisonniers étaient censés
13 être exécutés ? S'ils savaient très bien qu'ils allaient les exécuter plus
14 tard, pourquoi les passer à tabac avant ?
15 R. Voyez-vous, Monsieur Seselj, c'était le bal des vampires. Ce n'était
16 pas nécessaire simplement de tuer -- le but ultime n'était pas seulement
17 d'exécuter les personnes mais simplement de les casser, de les briser, de
18 les tabasser et ensuite de les exécuter.
19 Q. Je suis tout à fait d'accord qu'il s'agit d'un crime violent, il est
20 tout à fait vrai qu'un crime violent ait eu lieu. Je n'ai jamais contesté
21 que ce crime soit violent. J'essaie simplement de préciser les
22 circonstances entourant cet événement.
23 R. Je ne sais pas comment vous répondre autrement que ce que je vous ai
24 déjà dit.
25 Q. Très bien, c'est une réponse. Monsieur Karlovic, peu de temps avant le
26 début de la guerre, vous vous êtes marié, n'est-ce
27 pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Et votre alliance vous la portiez sur vous, n'est-ce pas, lorsque vous
2 êtes allé combattre ?
3 R. Oui, sur la main gauche.
4 Q. Vous êtes de confession catholique, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Et chez les Catholiques on a l'habitude de porter une alliance sur la
7 main gauche, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Est-ce que vous savez que les Serbes orthodoxes portent les bagues ou
10 les alliances sur la main droite ?
11 R. Je ne le savais vraiment pas, je n'en avais aucune idée.
12 Q. Très bien, c'est quelque chose que l'on sait de façon Générale.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais demander que l'on affiche -- qu'on
14 continue la vidéo, s'il vous plaît.
15 [Diffusion de la cassette vidéo]
16 M. SESELJ : [interprétation]
17 Q. Vous voyez ici, examinez très activement cet homme. Voyez-vous sa main
18 gauche ?
19 R. Oui.
20 Q. Voyez-vous que cet homme portait une alliance à la main gauche ?
21 R. Je vois une bague. Je ne sais pas si c'est une alliance, je ne sais
22 pas.
23 Q. Vous devez savoir à quoi ressemble une alliance ?
24 R. Oui.
25 Q. Est-ce que vous appelez ça une alliance, une "burma" ?
26 R. Bien, c'est une bague de mariage, mais je sais ce que "burma" veut
27 dire.
28 Q. C'est donc une alliance c'est un jonc sans pierre dessus, n'est-ce pas
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1 ?
2 R. Oui.
3 Q. Vous avez vu que cet homme portait une alliance à la main gauche ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que c'est un homme de confession orthodoxe ?
6 R. Je ne peux vraiment pas vous le dire, je n'ai absolument aucune idée,
7 comment voulez-vous que je le sache.
8 Q. Il porte une alliance sur la main gauche comme les Catholiques, n'est-
9 ce pas ?
10 R. Oui, il porte une bague sur un doigt de la main gauche.
11 Q. Très bien, c'est ce que nous avons compris.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, le Procureur peut vous poser des
13 questions, à savoir sur quelle bague les Orthodoxes portent leur alliance,
14 mais pour l'instant, je vais passer à autre chose.
15 M. SESELJ : [interprétation]
16 Q. Parlons maintenant de ce qui vous est arrivé. Lors de l'interrogatoire
17 principal vous aviez mentionné le Bataillon de Mitnik.
18 R. Oui, il s'était rendu deux jours avant.
19 Q. Et ils sont tous partis pour Sremska Mitrovica ?
20 R. Oui.
21 Q. Dans une prison civile dont une partie avait été prise par l'armée pour
22 y placer des prisonniers de guerre ?
23 R. Oui.
24 Q. Et d'autres n'ont pas voulu se rendre et ils se sont précipités en
25 masse à l'hôpital de Vukovar; est-ce que c'est exact ?
26 R. Oui, mais la différence est la suivante : c'est que là où nous étions,
27 nous n'étions pas du tout organisés, alors que Mitnica était organisée.
28 C'est-à-dire que nous n'avions plus de personne donnant des ordres à
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1 Vukovar.
2 Q. Et le Détachement de Mitnica s'était rendu, selon toutes les règles
3 conformes, n'est-ce pas ?
4 R. Oui, d'après ce que j'en sais, oui.
5 Q. Lorsque vous avez parlé de Stuka, vous avez décrit la façon dont était
6 vêtu cet homme et vous avez mentionné qu'il portait des vêtements assez
7 divers, c'est-à-dire qu'il portait des vêtements civils et des vêtements
8 militaires à la fois sur lui.
9 R. Moi, j'ai dit que, si je me souviens bien, il portait comme un blouson
10 de pilote.
11 Q. Mais ce n'était pas unité de l'aviation de l'air, n'est-ce pas ?
12 R. Non, non, c'est tout à fait exact. C'est très inhabituel de voir un
13 blouson de cuir de ce type-là à cet endroit-là.
14 Q. Mais vous saviez que Stuka était un soldat de la JNA ?
15 R. Oui, il l'avait dit lui-même.
16 Q. Il faisait son service militaire régulier ?
17 R. Si cela est vrai, si ce qu'il avait dit était vrai c'était ainsi mais
18 il est exact qu'à ce moment-là il s'était présenté comme s'appelant Ilija
19 mais son nom n'était pas du tout Ilija.
20 Q. Il s'appelait Spasoje ?
21 R. Oui, il s'appelait Spasoje.
22 Q. En tant que soldat de la JNA, donc, il n'était pas vêtu tout à fait de
23 façon conforme aux autres soldats de la JNA, ou conforme aux règles de la
24 JNA ?
25 R. Oui.
26 Q. Donc, en temps de guerre, on ne se penchait pas trop sur une façon
27 tribunaux stricte de s'habiller ?
28 R. Oui, c'est exact.
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1 Q. Et de votre côté à vous, vous aviez également des soldats qui étaient
2 vêtus de façon assez diverse, n'est-ce pas ?
3 R. Dans mon unité à moi nous étions vêtus plus ou moins de façon unifiée,
4 mais c'est vrai que dans d'autres sections ou unités il y avait des
5 personnes qui étaient vêtus de façon différente.
6 Q. Mais il y avait également des personnes qui combattaient dans des --
7 bleus de travail ?
8 R. C'étaient des hommes de la police de réserve. Mais je ne suis pas tout
9 à fait certain, je ne sais pas combien il y en avait.
10 Q. Moi, j'ai déjà -- j'ai vu des personnes décédées portant des bleus de
11 travail.
12 R. Mais je crois que c'étaient des membres de la police de réserve.
13 Q. Mais il y avait également des membres des HOS, des membres de l'Unité
14 paramilitaire de Paraga, ils étaient là également ?
15 R. Oui.
16 Q. Ils avaient leurs propres uniformes aussi, les hommes de Paraga ?
17 R. Si je me souviens bien, non, non, non. Ils portaient également des
18 uniformes verts olive.
19 Q. Et ces derniers se trouvaient à l'extérieur de votre ou en dehors de
20 votre détachement. Vous étiez le "Zbor Nerdne Garde" [phon] -- comment le
21 Rassemblement de la Garde nationale ?
22 R. Oui.
23 Q. Et vous portiez des bottes de Borovo jaunes ?
24 R. Oui, nous les avions pris à Vukovar.
25 Q. Et ces bottes étaient nouvelles ?
26 R. Oui.
27 Q. Est-ce que vous avez donné des bottes comme ça à Stuka ?
28 R. Oui.
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1 Q. Est-ce que Stuka vous a donné ses propres bottes ?
2 R. Non, il ne m'a pas donné ses bottes à lui. Mais il a pris des bottes
3 qui se trouvaient sur un tas de vêtements où il y avait des bottes aussi et
4 il m'a remis des chaussures en fait se trouvant sur cette pile de
5 vêtements.
6 Q. Quel type d'armes portait Stuka ?
7 R. Si je me souviens bien il avait un fusil de calibre assez important,
8 soit un fusil à pompes ou quelque chose comme ça, mais je sais que c'était
9 un fusil de gros calibre.
10 Q. Est-ce que vous savez que la JNA s'agissant de son armement régulier ne
11 disposait pas de fusils à pompes ?
12 R. Si d'après ce que j'en sais, je crois que oui, mais ce sont des détails
13 que je n'ai peut-être pas, dont je n'ai peut-être pas connaissance précise.
14 Je ne connaissais pas très bien les armements de la JNA.
15 Q. Et si je vous disais que la JNA n'avait pas ce type d'armes dans le
16 cadre de son armement, est-ce que vous me croyez ?
17 R. Je n'ai pas de raison pour ne pas vous croire.
18 Q. Et est-ce que les ZNG avaient également des fusils à pompes faisant
19 partie de son armement ?
20 R. Nous n'avions pas de fusils à pompes.
21 Q. Mais vous pouvez parler de votre unité seulement, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Très bien. Si moi je vous disais que j'ai vu personnellement nos forces
24 ayant confisqué un certain nombre de fusils à pompes, est-ce que vous me
25 croirez ?
26 R. Oui.
27 Q. Alors, pourquoi n'est-il -- pourquoi est-ce que cela ne serait pas
28 possible que si Stuka effectivement avait un fusil à pompes qu'il s'agirait
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1 d'un fusil confisqué, qui faisait partie d'un butin de guerre ?
2 R. Oui, c'est tout à fait possible. Mais encore une fois dans ma tête à
3 moi c'est un fusil à pompes.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
5 Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] -- dans cette question, en tout cas,
6 la dernière, on demande constamment de -- au témoin de spéculer, et
7 j'objecte à cette -- cette ligne de questions.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne demande pas au témoin de se livrer à des
9 conjectures. Je lui pose des questions et il donne des réponses, d'après
10 son expérience, d'après ses connaissances. Je ne demande absolument rien
11 d'autre du témoin. Si le témoin ne veut pas donner réponse à une question,
12 je ne peux pas le forcer à répondre. Et je crois que cette objection est
13 déplacée.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, continuez. Je ne vois pas
15 l'objectif que vous recherchez concernant cette fusil à pompes ou pas, mais
16 vous avez certainement une idée derrière la tête mais si l'idée vous
17 n'arriviez pas à la concrétiser, c'est du temps perdu.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai abouti à pas mal de
19 chose déjà. J'espère que vous avez forcément compris la chose. Dans toutes
20 mes questions jusqu'à présent ce à quoi j'ai abouti c'est de voir le témoin
21 confirmé ma thèse, à savoir que d'après l'apparence extérieure des choses
22 on ne pouvait pas faire fiablement [comme interprété] la distinction entre
23 les soldats de la JNA, les membres de la TO et des volontaires. Et j'ai
24 abouti à mon objectif. Je vais passer à un autre sujet. Si je n'avais
25 réussi qu'à faire ceci dans mon contre-interrogatoire, j'ai bien des
26 raisons d'être satisfait d'ores et déjà.
27 Puis-je continuer, Monsieur le Président ?
28 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
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1 M. SESELJ : [interprétation]
2 Q. Nous allons passer outre un certain nombre d'événements et nous allons
3 en arriver à cette menuiserie dont vous a fait sortir un groupe de
4 Chetniks. C'est bien ce que vous nous avez dit ?
5 R. Oui.
6 Q. Vous avez tiré une conclusion qui est celle de dire que c'étaient des
7 Chetniks d'après leur apparence physique ?
8 R. Non. Ils m'ont dit qu'ils étaient des Chetniks.
9 Q. Et vous ont-ils dit que c'étaient des volontaires du Parti radical
10 serbe ?
11 R. Ça, ils ne l'ont pas dit, bien sûr.
12 Q. Est-ce que l'un quelconque d'entre eux aurait mentionné le Parti
13 radical serbe pendant que vous étiez à leur côté ?
14 R. Non, je n'ai pas dit cela.
15 Q. Je ne vous accuse pas. Entendons-nous bien. Ce que je veux, c'est que
16 nous soyons ici tout à fait explicits.
17 Lorsqu'on vous a amené là-bas, à Petrovo Gora, dans une maison, on vous a
18 torturé ?
19 R. Oui.
20 Q. Et à l'occasion de ces tortures, par hasard, il y a Marko Ljuboja,
21 Mare, qui fait son apparition et qui voit ce qu'on vous fait, n'est-ce pas
22 ?
23 R. Marko Ljuboja est arrivé plus tard. C'est d'abord quelqu'un d'autre de
24 la maison même qui s'est insurgé, qui est sorti de façon démonstrative, et
25 ensuite, est arrivé Marko Ljuboja, surnommé Mare, et Predrag Milojevic,
26 surnommé Kinez.
27 Q. Ils sont venus ensemble ?
28 R. Oui, ces deux-là ils sont venus ensemble.
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1 Q. Et alors, serait-il justifié de penser que l'homme qui s'était révolté
2 est allé là-bas et tombé sur eux, leur a raconté ce qui se passait ?
3 R. C'est à peu près ainsi que les choses se sont passées d'après ce que
4 j'ai appris ultérieurement.
5 Q. Et alors, ces deux, Mare Ljuboja et Predrag Milojevic, surnommé Kinez,
6 arrivent et essayent de vous sauver, n'est-ce pas ?
7 R. C'est exact.
8 Q. Et ils s'exposent à un péril, personnellement, ce faisant ?
9 R. Absolument.
10 Q. Vous avez dit qu'il y avait là-bas une vingtaine d'hommes que vous
11 aviez qualifié de Chetniks et qui vous avaient torturés, n'est-ce pas ?
12 R. Et qui s'étaient présentés de la sorte.
13 Q. Oui. Alors, il faut que vous confirmiez aussi que c'étaient eux qui
14 s'étaient présentés en disant qu'ils étaient des Chetniks. Or ici ils
15 n'étaient que deux les autres ?
16 R. Exact.
17 Q. Kinez avait un fusil automatique et Mare Ljuboja avait un pistolet
18 seulement, n'est-ce pas ?
19 R. C'est exact.
20 Q. Et les 20 prétendus chetniks, ils étaient tous armés ?
21 R. Absolument.
22 Q. Donc, d'un côté, nous avons Predrag Milojevic, Kinez et Marko Ljuboja,
23 Mare, avec des armes pointées, et de l'autre côté, il y a une vingtaine
24 d'hommes qui sont armés jusqu'aux dents, n'est-ce pas ?
25 R. Est-ce que je peux expliquer ?
26 Q. Oui. Allez-y.
27 R. Lorsqu'ils sont entrés dans cette salle, ils n'ont pas tout de suite
28 pointés leurs armes. Il n'y a pas tout de suite eu pointage d'armes mais
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1 c'est lorsque nous sommes sortis de cette maison que la situation s'est
2 corsée et qu'il y a eu --
3 Q. Vous avez mentionné, à un moment, un homme qui était surnommé Belgija,
4 le Belge. C'était votre tortionnaire le plus important ?
5 R. Oui, c'est lui qui m'emmenait, c'était mon tortionnaire principal.
6 Q. Et Kinez, d'une façon cynique, lui a demandé : "Est-ce que c'est toi
7 qui l'a capturé sur la première ligne de front, Belgija ?"
8 R. Oui, c'est exact.
9 Q. Est-ce que vous avez compris la chose comme moi ? Parce que, moi, j'ai
10 compris que Kinez se moquait de lui, ou il se moquait des aptitudes
11 militaires et du courage du dénommé Belgija. Belgija c'était quelqu'un qui
12 avait fui la première ligne, il n'a pas pu vous capturer nulle part au
13 niveau de la première ligne ?
14 R. Cela se peut. Ecoutez, il se peut que --
15 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] On nous prévient une fois de plus que nous
17 allons trop vite, nous allons ralentir quelque peu. On va ralentir.
18 M. SESELJ : [interprétation]
19 Q. D'après la façon dont j'ai compris les choses, Belgija c'est un homme
20 que la première ligne n'a pas vu, il a fait la guerre dans les arrières. Et
21 s'il s'emparait au prisonnier, gare au prisonnier.
22 Ai-je raison de dire que, dans cette guerre, il y avait suffisamment eu de
23 situations fréquentes de ce genre, à savoir que les vrais combattants n'ont
24 pas commis des crimes pour l'essentiel, et que les crimes étaient commis
25 par des lâches qui montraient peu de rendements sur les premières lignes de
26 front ? Est-ce que vous pensez que j'ai raison ?
27 R. De mon côté et partant de mon expérience, je puis dire que c'est à peu
28 près ce que j'ai vécu à Vukovar -- en ma qualité de prisonnier ou de
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1 captif, je peux dire qu'il en était ainsi, mais on ne peut pas dire à 100 %
2 qu'il en a été ainsi. On peut tirer seulement cela comme conclusion.
3 Q. Ecoutez, moi, je vous ai demandé de commenter une opinion qui était la
4 mienne, c'est tout.
5 Pendant que durait ce débat --
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, la question que
7 M. Seselj vous pose est une question importante qui peut avoir des
8 conséquences ultérieures. Les gens qui vont -- ont torturé, qui vous ont
9 battu, est-ce que vous aviez le sentiment que ces gens-là avaient été avant
10 sur la ligne de front ? Parce que vous avez combattu, vous, donc, vous avez
11 pu vous rendre compte s'ils ont fait comme ont dit le coup de feu, ou bien,
12 c'était des gens qui étaient en réserve, qui n'avaient pas combattu et qui
13 en ce moment-là pouvaient se livrer à des exactions à l'encontre des
14 prisonniers ?
15 Alors, ma question elle est très précise. Les gens qui ont commis les
16 mauvais traitements d'après vous, avaient-ils été antérieurement sur la
17 ligne de feu au front ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, Monsieur Seselj, je n'ai
19 jamais réfléchi de cette façon-là. Se battaient-ils, étaient-ils des lâches
20 ? Ce que je sais, c'est qu'ils m'ont torturé et c'était ma dernière des
21 préoccupations que de penser si c'était de vrais combattants ou des lâches.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux continuer ?
23 M. SESELJ : [interprétation]
24 Q. Monsieur Karlovic, il y a eu ce débat violent entre Kinez et Mare d'un
25 côté et la vingtaine de Chetniks comme vous les qualifiez, de l'autre côté.
26 C'était devenu tellement violent qu'ils avaient pointé les armes les uns
27 contre les autres ?
28 R. C'est exact.
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1 Q. S'il s'agissait de la même qualité de combattants, est-ce que vous
2 pensez que deux soldats, armes à la main, pourraient parer avec succès à
3 une vingtaine de soldats, armes à la main aussi ?
4 R. Dans mon témoignage précédent ou mes témoignages précédents, j'ai
5 précisé qu'il me semblait que Kinez et Mare, c'était des hommes qui avaient
6 de l'autorité -- qui bénéficiaient d'une grande autorité, notamment Kinez.
7 Q. Mais ce qui s'est avéré, c'est qu'ils n'appartenaient pas à la même
8 unité ?
9 R. Je ne sais pas.
10 Q. Mais ça été dit à l'occasion. Je vous rappelle le procès à Belgrade, ça
11 a été confirmé, vous avez témoigné là-bas en faveur de Kinez et Mare ?
12 R. Oui, mais je ne pense pas avoir dit cela moi-même. Moi, je pensais
13 qu'ils n'appartenaient pas à la même unité.
14 Q. On va citer les transcriptions tout à l'heure.
15 R. Ecoutez, c'est possible. Ce que je sais, c'est qu'ils n'appartenaient
16 pas à la même unité, je l'ai appris ultérieurement ça. J'ai compris qu'ils
17 n'appartenaient pas à la même unité.
18 Q. Mais ce qui est évident, c'est qu'il s'agissait là de deux héros, de
19 deux hommes courageux qui en faisant leur apparition se faisaient respecter
20 ?
21 R. C'est ce que j'ai pensé. Je pensais qu'ils étaient vraiment des gens
22 héroïques.
23 Q. Est-ce que vous avez compris qu'ils étaient prêts à mourir pour vous
24 sauver ?
25 R. C'est l'impression que j'ai eue. Ils ont fait cela pour me sauver.
26 Q. Et les autres, bien qu'étant une vingtaine, ont pris peur et ont
27 reculé. Il n'y a pas eu d'échanges de tirs pour finir ?
28 R. C'est exact.
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1 Q. Donc, c'était des lâches parce que s'ils s'étaient aventurés à faire
2 quelque chose avec cette supériorité numérique, c'était des lâches. Etes-
3 vous d'accord pour dire que c'était des lâches ?
4 R. Ecoutez, on peut les prendre pour des lâches, on peut aussi considérer
5 qu'ils sont rendus à la raison. Je sais que Kinez a dit : "Ecoutez, mes
6 frères, nous n'allons quand même pas nous tirer dessus les uns les autres."
7 Q. Oui, mais partant de la façon dont ils vous ont torturé, avez-vous pu
8 tirer la conclusion disant que c'était des lâches ou des psychopathes ?
9 R. Oui. Compte tenu de ce qu'ils ont fait, c'est ce que je pourrais dire.
10 Q. Parce qu'un homme normal ne pourrait pas permettre cela, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Lorsqu'on vous a emmené de Petrova Gora --
13 M. LE JUGE ANTONETTI : [aucune interprétation]
14 M. DUTERTRE : J'aimerais une clarification dans la question qui était posée
15 : "Compte tenu du fait qu'ils vous ont torturé, pouvez-vous tirer la
16 conclusion qu'ils étaient des lâches et des psychopathes ?"
17 En fait, il y a une double question et quand le témoin répond, on ne sait
18 pas à quoi exactement il répond. Est-ce qu'on pourrait subdiviser les
19 questions parce que si on pose des doubles questions, j'objecte à cette
20 manière de faire.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
22 Monsieur Seselj, votre question avait deux connotations parce qu'on
23 peut être lâche sans être psychopathe, on peut être psychopathe sans être
24 lâche et on peut être les deux à la fois. Donc, les situations sont très
25 variées.
26 Alors, pouvez-vous, si vous estimez que c'est important, subdiviser votre
27 question ?
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, le témoin m'a bien
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1 compris. Un simple lâche se serait enfui. Un lâche psychopathe fuit la
2 première ligne de front mais guète toute occasion pour se venger sur des
3 prisonniers, les captifs ou des civils. Donc, quelqu'un qui est inoffensif.
4 Moi, je suis satisfait de sa réponse, je n'ai aucune raison de répéter ma
5 question, je voudrais bien continuer si vous le permettez.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, les gens qui vous ont torturé,
7 pour vous, ils étaient lâches ? Ils étaient
8 psychopathes ? Ils étaient les deux ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] A mes yeux, c'était ce qu'il peut y avoir de
10 pire.
11 M. SESELJ : [interprétation]
12 Q. Pour moi aussi, nous sommes d'accord, donc, allons de l'avant. Ils sont
13 ce qu'il y a de pire, alors qu'on me croit, ou comme me croit pas, je le
14 pense.
15 Quand on vous emmenait de Petrova Gora, Kinez et Mare vous ont raconté que
16 c'était des hommes qui portaient atteinte aux traditions des anciens
17 combattants serbes ?
18 R. C'est exact.
19 Q. Vous vous en souvenez ?
20 R. Oui, je m'en souviens.
21 Q. Ils vous ont parlé de tradition héroïque, de tradition chevaleresque et
22 que ces gens-là faisaient honte à tout le monde ?
23 R. Oui.
24 Q. Savez-vous à quelle unité appartenaient Predrag Milojevic, Kinez, et
25 Marko Ljuboja, Mare ?
26 R. Je sais que c'était des volontaires, je ne sais pas à quelle unité ils
27 appartenaient.
28 Q. Avez-vous entendu parler du Détachement Leva Supoderica ?
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1 R. Oui, j'en ai entendu parler mais plus tard.
2 Q. Et au procès de Belgrade, vous avez appris que c'était des membres du
3 Détachement Leva Supoderica ?
4 R. Il me semble avoir entendu la chose là-bas, oui.
5 Q. Monsieur Karlovic, saviez-vous qu'au champ de bataille à Vukovar, tous
6 les combattants du Parti radical serbe n'appartenaient qu'au Détachement
7 Leva Supoderica. Le saviez-vous ?
8 R. Je dois être sincère que je ne le sache pas. Je ne savais pas qu'ils
9 appartenaient au Parti radical serbe.
10 Q. Moi, je ne dis pas que ces deux-là étaient membres du Parti radical.
11 R. Non, je parle du détachement si c'est à cela que vous faisiez
12 référence.
13 Q. Oui, c'est à cela que je faisais référence, mais si vous ne le savez
14 pas, vous n'êtes pas tenu de le savoir quand même.
15 Bon, alors, je vais vous donner lecture d'un passage des notes
16 sténographiées du procès à Belgrade. En votre présence la chose se passe.
17 Vous avez présenté votre déposition, vous avez fait votre déposition et
18 Marko Ljuboja, Mare, et Predrag Milojevic, Kinez, vous posent certaines
19 questions, n'est-ce pas ? C'est ce qui s'est passé à Belgrade ? Et vous
20 avez dit bonjour de façon tout à fait cordiale là-bas ?
21 R. Absolument.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai ce document ici, ça m'a été communiqué par
23 l'Accusation mais je ne n'ai pas de numéro ERN. Il s'agit d'une
24 transcription audio de l'audition principale en chambre, donc, le 13
25 septembre 2005. Vous pouvez entendre cela et voir cela en page 32/45 et on
26 peut placer le texte sur le rétroprojecteur. Mais je n'ai pas de numéro ERN
27 parce qu'on ne l'a pas noté.
28 Est-ce que c'est un problème pour le Greffe ? Ça fait problème ou pas ?
Page 4797
1 Peut-être vaudrait-il mieux le placer sur le
2 rétroprojecteur ?
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il vaudrait peut-être mieux placer le document
4 sur le rétroprojecteur parce que le Greffe me dit qu'il ne peut pas le
5 passer.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne peux pas vous mettre mon document sur le
7 rétroprojecteur parce que, sinon, je ne peux pas vous lire. Moi, j'ai ici
8 quelques pages de surlignées dont je voudrais citer des parties. Le
9 Procureur doit pouvoir avoir une copie de ce document puisqu'ils sont
10 préparés pour -- de toute façon, ce sont eux qui nous ont communiqué cela.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Allez-y posez votre question à partir de votre
12 document.
13 M. SESELJ : [interprétation]
14 Q. Vous avez entendu dire là-bas que Marko Ljuboja, Mare, a présenté sa
15 version des événements, pour ce qui est de cette maison de Petrova Gora,
16 puis le président de la Chambre vous a demandé de dire quelle était votre
17 opinion à ce sujet, n'est-ce pas ?
18 R. Oui, c'est cela.
19 Q. Et Marko Ljuboja, Mare, a dit --
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Avez-vous retrouvé ce passage ? Il s'agit de la
21 page 32/45, oui c'est cela. Alors, 32/45, paragraphe 4.
22 M. SESELJ : [interprétation]
23 Q. Non, on ne va pas passer par ce passage. C'est Marko Ljuboja, Mare, qui
24 décrit la situation. Vous étiez torse nu sur une chaise, on vous torturait
25 et on a brandi des armes, et cetera. Alors, dernier paragraphe sur cette
26 page, Marko Ljuboja, Mare, explique ses motifs pour ce qui était de vous
27 sauver. Est-ce que vous pouvez donner lecture de ce qu'il a dit ? Savez-
28 vous lire les caractères cyrilliques ?
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1 R. Je vais essayer.
2 Q. Si vous avez des problèmes, je peux bien le faire.
3 R. "A ce moment-là, c'était un prisonnier de guerre croate et rien de plus
4 pour moi. C'était donc un soldat croate, un soldat ennemi prisonnier, et je
5 n'ai pas permis à ce qu'on l'exécute de cette façon-là, rien d'autre. En
6 d'autres termes, il n'y avait aucune autre raison pour moi de le sauver. A
7 ce moment-là, lorsque nous avons sorti nos armes, lorsque nous avons
8 dégainé, si Villem s'en souvient, je tenais mon pistolet avec la balle dans
9 le canon, et eux, ils avaient leur fusil pointé sur nous, et nous allions
10 vers l'arrière. On a fait tout le couloir de la sorte en gardant l'armée
11 pointée l'un sur l'autre."
12 Est-ce que c'est vrai ?
13 R. C'est exact.
14 Q. Merci. Alors, vous continuez, c'est vous qui avez enchaîné pour ce qui
15 est des propos de Mare. Donnez-nous lecture, s'il vous plaît, du premier
16 paragraphe à la page suivante pour qu'on sache ce que vous avez dit.
17 R. "Et ainsi on est sorti dans la cour. Et vous, vous m'avez mis derrière
18 vos dos" --
19 Q. Non, on dit : "Sur votre dos."
20 R. Non, non, c'est un lapsus : "Derrière le dos, ils avaient leurs armes,
21 ils avaient les leurs et elles étaient pointées les uns vers les autres."
22 Q. Bien. Donc, il y a eu échange d'injures aussi, n'est-ce
23 pas ?
24 R. Oui.
25 Q. Entre les uns et les autres, ceux qui vous seraient et qui vous avaient
26 torturé, n'est-ce pas ?
27 R. Oui.
28 Q. Et, ici, Mare mentionne quelles étaient les injures proférées.
Page 4800
1 R. Oui.
2 Q. On a injurié la mère de l'un et de l'autre.
3 R. Oui, les uns ont dit qu'ils pouvaient me tuer seulement une fois eux
4 morts.
5 Q. Donc, c'est Kinez qui avait dit qu'il pouvait vous tuer une fois ces
6 deux-là morts aussi.
7 R. Oui.
8 Q. On voit que c'est Mare Ljuboja, Mare, qui dit que c'était Kinez qui
9 l'avait dit, un peu plus bas dans le texte, vous le voyez le passage ?
10 R. Oui, je le vois. Vous pouvez -- Kinez me demande : "Est-ce que Kinez
11 m'a dit vous pouvez le tuer seulement nous morts ?" Réponse : "Oui."
12 Q. Donc, lorsque vous avez pris la porte, quelqu'un vous a suivi et
13 certains ont sauté par la fenêtre pour être plus rapide.
14 R. Moi, je ne me souviens pas de ceux qui avaient sauté par la fenêtre.
15 Q. Oui, c'est Marko Ljuboja, Mare, qui le dit ici, voyez-vous ?
16 R. Oui, je le vois. Donnez-moi un instant.
17 Q. Peu importe si vous n'avez pas trouvé. Alors, passons à ce que vous
18 avez dit. C'est Mare Ljuboja qui vous interroge : "Est-ce qu'il s'est
19 excusé et il vous demande pourquoi ?" Et vous avez répondu un, deux, trois,
20 quatre, cinq, six petits passages à compter du haut, le Témoin Villem
21 Karlovic -- et vous répondez. Est-ce que vous pouvez donner lecture parce
22 que ce sont vos mots à vous ?
23 R. Un instant.
24 Q. "Tu m'excuses parce que si tu étais Serbe."
25 Vous avez trouvé ?
26 R. Oui. Vous voulez que je lise ?
27 Q. Oui, oui.
28 R. "Que tu m'excuses car si tu étais Serbe qui croit en Dieu et que tout
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1 ce qui s'était passé et qui aurait dû se passer, je veux dire que cela
2 n'est pas l'œuvre de tous les Serbes, et je veux que tu m'excuses au nom du
3 peuple serbe tout entier."
4 Q. Donc, c'est vous qui le dites; est-ce que Marko Ljuboja, Mare, vous
5 demande quelque chose ensuite ?
6 R. Oui, Mare Ljuboja me demande : "Est-ce que j'ai dit que je m'excusais
7 au nom de la Serbie et de la Première guerre mondiale, parce que l'armée
8 serbe n'a jamais fait chose pareille." Et moi, j'ai répondu : "C'est exact,
9 je viens de m'en souvenir."
10 Q. Puis ensuite, il vous dit encore quelque chose aussi au niveau des
11 traditions de l'armée serbe, peu importe. Passez à la page suivante, je
12 vous prie; oui, oui, c'est la page d'après. Vous avez un troisième
13 paragraphe à compter du haut. Le Président de la Chambre demande à Marko
14 Ljuboja : "Qui sont ces gens ? Qu'on explique s'il peut le faire," et il
15 donnait lecture de ce que Marko Ljuboja a répondu.
16 R. "Je ne sais pas qui sont ces gens. Je suis venu parce que mon soldat,
17 Plave, m'a dit qu'on faisait la fête à quelqu'un." Réponse, oui. "Et, qu'on
18 jetait des grenades et que les gens ne pouvaient pas dormir autour. J'ai
19 pensé donc que c'était mon unité à moi. Une fois je suis entré, j'y ai
20 trouvé ces gens-là -- ces hommes, et c'est pour cela qu'ils ont réagi de la
21 sorte. Ils ont dit : 'Ce n'est pas ton unité, ce n'est pas ton
22 prisonnier'."
23 Q. Allez encore deux pages vers l'avant, page 36/45. Ici, c'est Predrag
24 Milojevic, Kinez, qui explique quelle est l'unité en question. Est-ce que
25 vous pouvez, je vous prie, donner lecture également. Si vous êtes fatigué,
26 je peux en donner lecture mais ce sont vos amis à vous. C'est eux qui vous
27 ont sauvé.
28 R. Aucun problème. Je vais donner lecture.
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1 Q. Ayez l'amabilité de le faire, page 36/45, s'il vous plaît.
2 R. Je vois que c'est un peu plus bas.
3 Q. Non, non, la première ligne, tout en haut, c'est Predrag Milojevic,
4 Kinez, qui prend la parole.
5 R. Vous voulez que je lise ?
6 Q. Oui.
7 R. "Pour ce qui est de la composition des effectifs, je voudrais des
8 explications pour ce qui est donc de la composition des effectifs qui
9 étaient là."
10 Le Président de la Chambre : "Et qui étaient ces gens ?"
11 Milojevic : "Ce que je sais, je connais leurs surnoms, Belgija,
12 Spasoje."
13 Q. C'est ce que vous avez probablement entendu déjà dire; vous avez
14 confirmé ?
15 R. Oui, j'ai entendu parler de Belgija, pas de Spasoje. Predrag Milojevic,
16 Belgija, Itziga.
17 Q. Oui, Itziga.
18 R. "Il y avait une femme dans la salle," c'est ce que j'ai dit, moi.
19 Predrag Milojevic dit : "Je ne me souviens pas de la femme. Il y avait un
20 homme âgé originaire de Vinkovci, qu'on appelle Cica."
21 Q. Vous avez mentionné le dénommé Cica ?
22 R. Moi, j'ai mentionné à Miljan ou à Miljan, j'ai dit que c'était
23 quelqu'un qui était plus âgé que les autres.
24 Q. Et qu'avez-vous dit alors à son sujet ?
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez trop vite. Bien, reprenez.
26 M. SESELJ : [interprétation]
27 Q. Alors, pour Cica, vous dites que c'est lui qui vous avait attaché ?
28 R. Non, non. Je n'ai pas été attaché. Vous êtes sûr que j'ai dit cela ?
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1 Q. Moi, je ne suis sûr de rien, je vous montre la transcription.
2 R. Où est-ce que vous voyez cela ?
3 Q. Tout de suite après Milojevic qui mentionne Cica, et vous dites :
4 "C'est lui qui m'a attaché."
5 R. Moi, j'ai dit : "Non, non, c'est lui qui m'a coupé." C'est peut-être
6 une erreur de frappe.
7 Q. Moi, je veux bien vous croire.
8 R. Oui, mais, moi, je fais des pauses. On peut continuer ?
9 Q. Oui. Alors, il s'agit d'une erreur de frappe; dites-vous ?
10 R. A 100%.
11 Q. Vous avez dit que l'autre vous avait entaillé la chair, vous avait
12 coupé ?
13 R. Oui.
14 Q. Et qu'a dit Milojevic après cela ?
15 R. J'ai dit que c'était quelqu'un d'originaire de Vinkovci plus âgé, qu'on
16 appelait Cica, ça veut dire "pépé." Il a débattu avec moi, il s'est disputé
17 avec moi, il a mis sa main sur son pistolet, pas son fusil. Et quand j'ai
18 dit qu'on ne pouvait pas -- qu'on ne doive pas, ils ont pris leurs armes.
19 Alors, moi, je me suis levé et j'ai dit : "Ne touchez pas à vos armes."
20 Mare, à ce moment-là, avait tenu son pistolet de la sorte, si vous vous en
21 souvenez, et moi, je réponds : "Oui, je m'en souviens." Et Milojevic dit :
22 "J'ai dit, je l'ai pris et je l'ai mis derrière parce que je n'osais pas le
23 mettre à côté de Karlovic afin que quelqu'un ne vienne pas tirer sans
24 distinction."
25 M. SESELJ : [interprétation]
26 Q. Alors, ce qui est important c'est la question du Président de la
27 Chambre : "Bon, bon, mais qui sont ces gens ? Quelle est cette unité,
28 Monsieur Milojevic ?" Et Milojevic répond. Et donnez une lecture, s'il vous
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1 plaît, de cela.
2 R. Je vais vous le dire maintenant : "C'était des gens originaires de
3 Vinkovci. Le dénommé Cica en personne venait de Vinkovci. Il y avait un
4 dénommé Zolja, si vous vous en souvenez." Moi, je réponds que : "Je ne m'en
5 souviens pas." Vous voulez que je continue ?
6 Q. Oui, s'il vous plaît.
7 R. "Et il y a eu plusieurs, cinq ou six jeunes hommes. Eux ont été
8 mentionnés quand je leur ai dit, N'avez-vous pas honte de torturer cet
9 homme devant ces enfants qui n'ont pas encore de barbe, et ils se
10 trouvaient au coin à gauche, vous en souvenez-vous ?" Moi, je réponds que
11 "oui."
12 Q. Ensuite, il enchaîne Milojevic : "Et Ceda m'a répondu : "Je vais
13 m'exprimer de façon peu polie, mais il m'a dit la phrase suivante : "Qu'ils
14 aillent se faire foutre. Qu'il faut tremper le fer. C'est ce que vous leur
15 dites ?'"
16 Vous avez dit : Oui, que Ceda et l'autre ont été les plus agressifs.".
17 Et que dit Milojevic : Ceda et Belgija, il y en avait un qui était
18 surnommé" - mais attention, c'est une Unité de Vinkovci - et Predrag
19 Milojevic, Kinez, dit que : "C'est une Unité originaire de Vinkovci" ?
20 R. Oui.
21 Q. Mais que peut être une Unité de Vinkovci parce que Vinkovci ça n'a
22 jamais été sous contrôle serbe pendant cette guerre-là ?
23 R. Ça n'a pas été sous contrôle serbe parce qu'à Vinkovci, pour autant que
24 je sache, il y avait plus de 90% de population croate.
25 Q. Mais il y avait un groupe de serbes qui avait fuit Vinkovci et ils ont
26 créé une unité, n'est-ce pas, c'est ce qu'on voit de là ?
27 R. Oui, c'est ce qu'on peut comprendre.
28 Q. Mais Vinkovci ça se trouve plus à l'ouest par rapport à Vukovar ?
Page 4805
1 R. Oui.
2 Q. Par conséquent, ce n'est pas en Serbie, ce ne sont pas des volontaires
3 originaires de Serbie ?
4 R. Heureusement, non.
5 R. Non, moi, je dis aussi heureusement.
6 Q. Et heureusement que Vinkovci ce n'est pas en Serbie.
7 Q. Non, moi, je ne veux pas dire cela. Je veux dire, heureusement que ce
8 ne sont pas des volontaires originaires de Serbie; c'est ce que j'ai voulu
9 dire.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Quel est le problème maintenant ? Nous allons
11 trop vite.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez trop vite et --
13 L'INTERPRÈTE : La sténotypiste dit que les interprètes n'ont pas eu le
14 temps de dire question, réponse et qu'ils ne savent pas qui parle, parce
15 que cela va si vite.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous voulez que je répète, Monsieur le
17 Président ?
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, répétez, parce que, comme ce point est
19 important, autant qu'il soit au transcript.
20 M. SESELJ : [interprétation]
21 Q. Je vais répéter lentement et écoutez-moi attentivement. Vinkovci c'est
22 une ville en Slavonie, n'est-ce pas ?
23 R. C'est exact.
24 Q. Pendant toute la durée de la guerre, Vinkovci ont été uniquement été
25 sous le contrôle croate, ça n'a jamais été placé sous le contrôle serbe,
26 n'est-ce pas ?
27 R. C'est exact.
28 Q. A Vinkovci, il y avait un certain pourcentage de serbes; je ne sais pas
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1 trop combien ils étaient, mais ils n'étaient pas nombreux, n'est-ce pas ?
2 R. Pour autant que je sache, ces deux pourcentages étaient très faibles.
3 Q. Mais un certain nombre de Serbes avaient fui Vinkovci, n'est-ce pas ?
4 R. Cela se peut.
5 Q. Ensuite, Predrag Milojevic, Kinez, dit que ces Serbes ont créé une
6 unité, n'est-ce pas ?
7 R. C'est exact.
8 Q. Donc, ces gens-là, qui vous ont torturé, d'après Predrag Milojevic,
9 Kinez, c'étaient des gens originaires de Vinkovci.
10 R. Belgija s'est présenté et m'a dit d'où il était.
11 Q. D'où ?
12 R. Il a dit qu'il était de Belgrade et que c'était le chef des supporters
13 de l'équipe de foot Partizan.
14 Q. Mais, écoutez, il a pu vous dire n'importe quoi. On parle maintenant de
15 ce qui s'est dit lors de l'audition à Belgrade. Il aurait pu vous dire
16 qu'il s'appelait par mon nom, qu'il portait mon nom, n'est-ce pas ?
17 R. Oui. Enfin, vous voulez que je confirme qu'ils étaient originaires de
18 Vinkovci, peut-être l'étaient-ils, peut-être pas.
19 Q. Non, je ne veux pas que vous le disiez, nous sommes en train de nous
20 pencher sur la transcription du procès de Belgrade. Vous ne connaissiez pas
21 ces gens-là, n'est-ce pas ?
22 R. Absolument pas.
23 Q. Donc, nous sommes en train de parcourir la transcription d'un
24 témoignage à Belgrade. C'est ce qui est important à mes yeux, ici, parce
25 que je ne suis pas au courant de ces événements. Avant d'avoir vu votre
26 déclaration, je n'en avais aucune idée. Me croyez-vous ?
27 R. Pourquoi voulez-vous que je ne vous crois pas ?
28 Q. Donc, ce qui est important ici pour moi, ce sont les gens qui
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1 connaissent les faits, vous, Kinez, et Mare.
2 M. DUTERTRE : Mais, Monsieur le Président, le témoin vient de dire qu'il ne
3 connaissait pas ces gens. Donc, on lui présente un transcript, mais je
4 pense que si on veut mettre ces éléments de preuve devant la Chambre, il
5 serait particulièrement approprié pour l'accusé d'appeler la personne qui a
6 donné ce témoignage au cours de cette audience et qui donne des indications
7 sur l'origine de cette unité. Et le parquet serait en position de poser des
8 questions et de le cross-examiner [comme interprété] ce qui est le principe
9 du procès équitable.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que cette objection est dénuée de sens
12 parce que je me sers d'un document qui m'a été communiqué par l'Accusation
13 pour que je m'en serve. Et ce n'est pas l'Accusation qui va désigner qui
14 est-ce que je vais citer à comparaître comme témoin de la Défense. Je
15 citerai à comparaître ceux que je veux. Mais je suis en train, maintenant,
16 de contre-interroger un témoin de l'Accusation et je me sers de documents
17 qui m'ont été confiés par l'Accusation. Je procède de façon tout à fait
18 bonne. Et ce témoin est témoin oculaire de ce qui s'est passé et il a
19 raconté au prétoire de ce -- de tribunal de procès à Belgrade, et il nous a
20 dit ce qui s'est passé dans le prétoire.
21 Est-ce que c'est peut-être l'heure de la pause, Monsieur le Président
22 ?
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Avant de faire la pause, j'ai juste une
24 question à vous poser, Monsieur le Témoin. Devant les juges du tribunal à
25 Belgrade, il semble apparaître, d'après le document qu'on a sous les yeux,
26 que l'unité qui vous a torturé dans cette menuiserie serait des gens de
27 Vinkovci qui est une localité qui n'est pas en Serbie, mais en Croatie. Et
28 un juge raisonnable pourrait tirer la conclusion que ceux qui vous ont
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1 torturé sont membres de cette unité. Toutefois, il semblerait qu'à un
2 moment donné, le fameux Belgija, le belge ou je ne sais quoi, vous aurait
3 dit qu'il était le chef des supporters de l'équipe de football du Partizan
4 de Belgrade, et que de là, pourrait un juge responsable en tirer la
5 conclusion que ce Belgija serait en fait non pas originaire de Vinkovci
6 mais de Belgrade. Alors, quel est votre sentiment, si vous en avez un ? Ou
7 vous n'en avez pas, est-ce qu'on peut parfaitement comprendre ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me suis pas posé la question de savoir
9 d'où ils étaient originaires. Je sais seulement ce que Belgija m'a dit. Je
10 n'ai pas tiré de conclusion. Et pour ce qui est de Vinkovci, la première
11 fois où j'en ai entendu parler c'est à Belgrade.
12 M. SESELJ : [interprétation]
13 Q. Monsieur Karlovic, jamais auparavant est-ce que vous auriez mentionné
14 dans une déclaration que Belgija s'est présenté à vous en tant que
15 quelqu'un de Belgrade ?
16 R. Oui. Je l'ai mentionné, mais peut-être que je ne l'ai pas mentionné
17 ici; je l'ai mentionné lorsque j'ai fait ma déclaration en Croatie. Je ne
18 sais pas si je l'ai dit ailleurs devant les tribunaux.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, pendant la pause, est-ce
20 que vous pouvez charger le Procureur de retrouver dans ses documents s'il
21 est arrivé que M. Karlovic dise au sujet de Belgija qu'il est de Belgrade.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux vous aider.
23 M. SESELJ : [interprétation]
24 Q. Oui.
25 R. Je pense que je ne l'ai jamais dit ici.
26 Q. Jamais ?
27 R. Non, je pense que jamais.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc, je renonce à ma demande.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, il est l'heure de faire la pause. On va faire
2 20 minutes de pause.
3 --- L'audience est suspendue à 10 heures 03.
4 --- L'audience est reprise à 10 heures 26.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, l'audience est reprise.
6 Tout d'abord, première chose, je voudrais que M. le Greffier me donne
7 le décompte du temps déjà utilisé par M. Seselj.
8 Puis deuxième chose, je m'adresse à M. Seselj et à M. le Témoin :
9 ralentissez le débit parce que, comme vous l'avez vu tout à l'heure, les
10 interprètes et la sténotypiste ont du mal. Donc, Monsieur le Témoin, avant
11 de répondre à la question posée par
12 M. Seselj, attendez quelques secondes avant de répondre. Il y a une
13 technique, vous comptez dans votre tête jusqu'à cinq avant de répondre, et
14 comme ça, ça permettra de tout enregistrer parce que quand ça va trop vite,
15 il se peut qu'un élément très important, un mot, une phrase ne soient pas
16 pris en compte, alors même que ça peut être très, très important. Donc,
17 c'est ce que je rappelle.
18 Alors, pour le moment, M. Seselj a utilisé une heure 15. Il lui reste
19 une heure 15.
20 M. SESELJ : [interprétation]
21 Q. Monsieur Karlovic, la dernière chose que vous avez dite avant la pause
22 c'était le fait de confirmer que vous n'aviez jamais déclaré auparavant que
23 Belgija se soit présenté à vous en tant que chef des supporteurs du peuple
24 Partizan de Belgrade ?
25 R. Je pense que je n'ai pas dit ici devant -- devant cette Chambre dans
26 cette affaire.
27 Q. Et à une autre affaire ?
28 R. Je pense que, lors d'aucun procès, je n'ai mentionné cela.
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1 Q. Très bien. Je vous remercie. Peut-être que ceci est tout à fait exact
2 que ça vous est venu et revenu à l'esprit, mais est-ce que vous êtes
3 parfaitement certain de ce que vous dites ? Est-ce que vous voyez la
4 question qui se pose à moi lorsque je décide de vous faire confiance là-
5 dessus ? Monsieur Karlovic, vous savez, pas mal de Serbes de Croatie
6 étaient des supporteurs soit de Partizan, soit de l'Etoile rouge de
7 Belgrade, ces deux clubs de foot -- foot; vous le savez ?
8 R. Oui, je le sais.
9 Q. Donc, voilà. Si je vous faisais confiance que Belgija vous avait
10 réellement dit cela, est-ce qu'il vous a dit qu'il était de Belgrade et que
11 c'est là qu'il est à la tête des supporteurs de Partizan, ou il était à
12 Vinkovci, à la tête des supporteurs de Partizan ? Qu'en pensez-vous ?
13 R. Je me suis contenté de dire ce qu'il m'avait dit, lui, la manière dont
14 il s'était présenté à moi. Et je répète : il m'a dit qu'il était Belgija de
15 Belgrade et qu'il était le chef des supporteurs de Partizan.
16 Q. Pendant la pause, j'ai pris contact avec mes collaborateurs. Il y a là
17 des gens qui sont des supporteurs de Partizan et ils me disent que jamais
18 il n'y a eu un chef des supporteurs de Partizan de Belgrade dont le surnom
19 aurait été Belgija. Il y avait Celzi, Combe, il y avait plusieurs autres --
20 plusieurs autres surnoms atypiques, mais jamais Belgija.
21 R. Ecoutez, je n'affirme pas, ce n'est pas quelque chose d'important à mes
22 yeux. Je répète ce que l'homme m'avait dit.
23 Mme LE JUGE LATTANZI : Excusez-moi, Monsieur Seselj.
24 Monsieur le Témoin, est-ce que, de l'accent d'une personne parlant un
25 serbo-croate, on peut comprendre s'il est de Belgrade ou d'une région de la
26 Croatie ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, on peut distinguer. Est-ce qu'il vient de
28 Belgrade c'est-à-dire est-ce qu'il a un accent serbe ou un accent croate ?
Page 4811
1 Bien sûr qu'on peut faire la différence, si j'ai bien compris votre
2 question.
3 Mme LE JUGE LATTANZI : Vous avez bien compris. Et dans ce cas particulier,
4 vous avez mémoire d'avoir pu faire cette distinction ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce ne serait pas correct de ma part de dire
6 que je me souviens. Est-ce que c'était du ékavien, du ijkavien ou un autre
7 accent ? Ce ne serait pas correct de ma part. Je ne me rappelle pas. Je
8 sais ce que l'homme m'a dit.
9 Mme LE JUGE LATTANZI : Merci.
10 M. SESELJ : [interprétation]
11 Q. Est-ce que vous excluez toute possibilité qu'il se soit présenté en
12 tant que chef des supporteurs de Partizan -- du Partizan de Belgrade, mais
13 qu'il n'ait pas dit qu'il venait de Belgrade, lui-même ?
14 R. Il m'a dit précisément de Belgrade, chef des Partizan -- des
15 supporteurs de Partizan; je répète ce qu'il m'a dit.
16 Q. D'accord, Monsieur Karlovic. Si vous l'aviez déclaré précédemment,
17 j'aurais eu le temps de me pencher là-dessus, mais je n'ai pas là que je
18 n'ai pas pu le faire. Enfin, peu importe.
19 Passons aux pages 37/45. Vous l'avez trouvée ? Le Président de la
20 Chambre, dans le premier paragraphe, s'adresse à Predrag Milojevic, Kinez,
21 et il dit qu'il a été chez Lancuzanin, et que d'autres étaient chez
22 Bojkovski et Vadic, et cetera. Et puis, au quatrième paragraphe, Predrag
23 Milojevic précise dans son explication de quelles unités étaient ces hommes
24 qui vous ont enlevé, torturé et qui avaient l'intention de vous tuer. Ce
25 quatrième paragraphe, s'il vous plaît, Predrag Milojevic s'exprime, est-ce
26 que vous pouvez --
27 R. "Il a été beaucoup question ici des unités. Jamais on est arrivé à la
28 bonne conclusion sur toutes les unités armées qui ont agi là-bas. Vous
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1 aviez là-bas des Unités à Velepromet et certainement une cinquantaine
2 d'hommes qui se sont joints et qui ne sont pas joints aux unités."
3 Q. Arrêtez un petit peu. Comment est-ce que vous expliquez cela ?
4 R. Je dois vous dire que je n'ai pas très bien compris : "Ils se sont
5 rattachés ou rejoints, ou ne se sont pas rattachés, n'ont pas rejoints."
6 Q. Moi aussi, j'essaie de comprendre. Il y avait une cinquantaine d'hommes
7 qui par moment allaient dans des unités et par moment ne le faisaient pas,
8 c'était comme des Iduks [phon] à part.
9 R. Oui, c'est la conclusion que l'on pourrait tirer.
10 Q. C'étaient des hommes armés, qui n'ont pas fait partie des unités armées
11 de la JNA ou des forces placées sous le contrôle de la JNA ?
12 R. C'est ce que dit Predrag.
13 Q. Et d'après tout ce qu'on voit, ce serait à la sauvage qu'ils auraient
14 combattu, ce serait des combattants irréguliers. Est-ce que c'est la
15 conclusion que vous tirez en tant que militaire ?
16 R. On pourrait dire ça.
17 Q. Très bien. Allez, poursuivez la lecture, s'il vous plaît, jusqu'à la
18 fin du paragraphe.
19 R. "Je pense qu'ils sont entrés dans la composition de la
20 2e Compagnie, cette unité, donc de la composition de la 2e Compagnie. Car
21 là, il y avait des gens de Negoslavcani et ils appartenaient au Bataillon
22 de Negoslavci. C'est ce que je pense, car celui de Vinkovci, Cica, qui
23 était, il faisait partie du Bataillon de Negoslavci, car lorsque nous avons
24 fait la citée ou l'agglomération, la partie droite, je l'ai retrouvée j'ai
25 opéré un contact avec lui et il faisait partie du Bataillon de Negoslavci."
26 Q. Lorsque Predrag Milojevic, Kinez, dit : "Lorsque nous avons fait
27 l'agglomération," il veut dire lorsque nous nous sommes emparés de
28 l'agglomération ?
Page 4813
1 R. Oui.
2 Q. Donc, c'est clair, et lorsqu'il s'est emparé de cette agglomération il
3 est entré en contact avec le Bataillon de Negoslavci; c'est ce que vous
4 avez compris ?
5 R. Oui.
6 Q. Et Cica faisait partie de ce Bataillon de Negoslavci; ai-je raison ?
7 R. Oui.
8 Q. Et le Bataillon de la TO de Negoslavci, vous en avez entendu parler ?
9 R. Pas à ce moment-là, plus tard.
10 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que Predrag Milojevic identifie
11 ce groupe d'hommes en tant que membres de la
12 2e Compagnie du Bataillon de la TO de Negoslavci ?
13 R. Je ne vois que ce que Predrag a déclaré. Il me reste à lui faire
14 confiance.
15 Q. Vous lui faites confiance ?
16 R. Oui.
17 Q. Il a déclaré ?
18 R. Oui, il a déclaré.
19 Q. Merci, Monsieur Karlovic. Vous savez où sont Negoslavci ?
20 R. A peu près.
21 Q. C'est au niveau de Vukovar, un village ?
22 R. Oui.
23 Q. D'accord.
24 L'INTERPRÈTE : Il n'y a pas de pause entre la question et la réponse.
25 M. SESELJ : [interprétation]
26 Q. Voyons, maintenant, une question qui porte sur ce compte rendu, ou bien
27 on peut en terminer avec le compte rendu.
28 Monsieur Karlovic, vous savez que Marko Ljuboja, Mare, et Predrag
Page 4814
1 Milojevic, Kinez, se sont faits jugés à Belgrade pour des crimes de guerre.
2 R. Je suis au courant de cela.
3 Q. Est-ce que vous savez que Predrag Milojevic, Kinez, en tant que l'un
4 des commandants - je pense qu'il était l'adjoint de Kameni - a été condamné
5 à 20 ans de prison ?
6 R. Je le sais.
7 Q. Savez-vous que la seule preuve contre lui c'est que le jour en
8 question, la veille du crime, il a été vu à Ovcara ?
9 R. Je ne sais pas quelle est la seule preuve sur la base de laquelle il a
10 été condamné. Véritablement je ne le sais pas.
11 Q. Et Predrag Milojevic, Kinez, et Marko Ljuboja, Mare, lorsqu'ils vous
12 ont sauvé, vous aviez l'impression que c'étaient des gens qui venaient de
13 rentrer d'Ovcara où ils avaient exécuté des gens pendant toute la nuit, et
14 que ça leur ait venu à l'esprit après tout ça de venir vous aider ? C'est
15 l'impression que vous avez eue ?
16 R. J'ai déjà apporté une réponse comparable à Belgrade. J'ai dit que tout
17 simplement je ne croyais pas que ces hommes, après ce qu'ils ont fait pour
18 moi, pouvaient être des assassins. C'est mon opinion. C'est ce que je pense
19 d'eux.
20 Q. Connaissez-vous les noms des autres accusés dans le procès de Belgrade
21 ? Vous connaissez ces noms ?
22 R. Franchement, je vous dirais que non, si ce n'est un nom d'un homme qui
23 était le témoin protégé.
24 Q. D'accord, on ne va pas le mentionner. Mais savez-vous que Predrag
25 Milojevic, Kinez; Marko Ljuboja, Mare; Milan Lancuzanin, Kameni, leur
26 commandant; et Slobodan Katic; en tant que membres du Détachement Leva
27 Supoderica, qu'ils ont été jugés à Belgrade uniquement pour créer un lien
28 artificiel entre moi et le crime d'Ovcara ? Est-ce que ça vous le comprenez
Page 4815
1 ?
2 R. Je vais juste vous dire ce que j'ai entendu parler de Kameni, excusez-
3 moi, je viens de vous dire à l'instant que je n'ai pas entendu parler de
4 lui. Oui, j'ai entendu parler de Lancuzanin. Et là, vous venez de poser une
5 question, véritablement je ne sais pas que ce procès a eu lieu contre vous.
6 Ça vraiment je n'en ai pas -- je n'en ai aucune idée.
7 Q. Vous comprenez dans la rhétorique, il y a aussi des questions
8 rhétoriques qu'on pose, et on ne s'attend pas à recevoir des réponses à ces
9 questions ?
10 R. Oui, je sais que vous maîtrisez cela très bien.
11 Q. Très bien, Monsieur Karlovic. Alors, passons maintenant à l'examen
12 d'une chose -- de quelque chose --
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Une petite question, Monsieur le Témoin. Quand vous
14 avez été au procès de Belgrade, vous étiez témoin de qui, de l'Accusation
15 ou de la Défense ?
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, objection. Excusez-moi,
17 c'était le système du droit continental et tous les témoins sont des
18 témoins du tribunal. C'est le tribunal qui décide qui sera cité, ni le
19 Procureur ni la Défense ne peuvent de leur propre chef citer un témoin. Ils
20 proposent et c'est le tribunal qui décide qui sera sur la liste des
21 témoins.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez reçu un ordre pour comparaître
23 devant le Tribunal, comme le dit M. Seselj, c'était indiqué le tribunal
24 vous demande de comparaître et pas le procureur ou la défense ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà. Je vais vous expliquer un petit peu par
26 mes propres mots. Je vais vous dire comment j'ai compris les choses là-bas.
27 J'ai été le premier au tribunal qui a dit que je n'étais ni le témoin de la
28 défense ni de l'accusation mais le témoin de la vérité, et le Président de
Page 4816
1 la Chambre, le Juge, me l'a confirmé là, il m'a dit que j'étais là
2 uniquement au service de la vérité, ni le témoin de la défense, ni de
3 l'accusation. J'espère que vous comprenez -- comprenez ma réponse.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : -- si votre réponse comme devant ce Tribunal, vous
5 êtes aussi le témoin de la vérité, bien que vous soyez cité par
6 l'Accusation. Mais moi, ma question était d'ordre technique et vous ne
7 pouvez pas y répondre, à savoir que c'est le Tribunal qui vous a demandé de
8 venir et non pas le Procureur ou la Défense.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le Tribunal qui m'a adressé la citation.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Merci.
11 M. SESELJ : [interprétation]
12 Q. Monsieur Karlovic, vous avez fait des commentaires sur le drapeau
13 chetnik, vous l'avez décrit. C'est lui que nous avons vu à l'image dans cet
14 enregistrement vidéo, et vous avez dit que vous n'aviez jamais vu ce
15 drapeau à Vukovar, mais qu'il vous est arrivé de le voir à la télévision
16 croate. N'avez-vous jamais vu par deux fois le même drapeau, donc,
17 identique à l'identique avec la même inscription, les mêmes symboles
18 représentés de la même façon, ou est-ce que chaque drapeau était une pièce
19 unique en fait ? C'est selon l'inspiration des uns et des autres qu'ils
20 étaient réalisés en fait ?
21 R. Vraiment, je n'arrive pas à me souvenir de ça. Je me souviens juste de
22 ce drapeau noir avec cette tête de mort, deux os croisés. Peut-être que je
23 n'ai pas bien compris votre question.
24 Q. D'accord. Mais si je vous disais que jamais depuis les années 90, on a
25 produit en série dans les usines les drapeaux chetniks mais qu'à chaque
26 fois, ces drapeaux étaient réalisés par des individus lorsque quelqu'un
27 avait un souhait d'en faire un, lorsque quelqu'un éprouvait un besoin de le
28 faire; est-ce que vous me faites confiance là-dessus ?
Page 4817
1 R. Vous me placez dans une situation un peu commode. Est-ce que je vous
2 fais confiance, vous me demandez. Tout est possible. Je ne sais pas. Ce
3 serait vrai, ça n'aurait vraiment aucun sens.
4 Q. Très bien. Je ne vais pas vous malmener là.
5 Donc, passons maintenant à une autre question, une question que vous
6 n'aviez jamais mentionnée précédemment et puis soudain cette question
7 apparaît dans votre déclaration consolidée. Vous savez de quelle question
8 il s'agit ?
9 R. Je suppose des haut-parleurs et porte-voix.
10 Q. Oui, tout à fait. Il nous faudrait maintenant nous y attarder un petit
11 peu. Vous avez dit du 10 au 15 novembre --
12 R. A peu près.
13 Q. Oui, environ. Entre le 10 et le 15 - on ne sait pas exactement - à
14 plusieurs reprises, vous auriez entendu ma voix diffusée par les haut-
15 parleurs où j'invitais à la reddition.
16 R. J'ai entendu une voix qui était comparable à la vôtre, qui ressemblait
17 à votre voix.
18 Q. Vous n'êtes pas certain que ce fût ma voix.
19 R. Mais, bien sûr, que je ne suis pas certain. Ça ressemblait beaucoup à
20 mes oreilles à votre voix.
21 Q. Et cet individu disait : "Oustachi, rendez vous. Il n'y a plus besoin
22 que vous vous fassiez tuer, la ville est achevée, terminée, donc, rendez
23 vous pour ne pas vous faire tuer pour rien."
24 R. Oui, quelque chose de ce genre.
25 Q. Vous savez, à partir du début de la guerre, il n'y avait plus de
26 courant -- électricité, à Vukovar ?
27 R. Oui, je le sais.
28 Q. Mais ces haut-parleurs ça dépendait d'un groupe électrogène de quoi;
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12 Page blanche insérées d’assurer la correspondance entre la
13 pagination anglaise et la pagination française.
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1 comment est-ce qu'on le faisait marcher ?
2 R. Peut-être que ça n'a pas été noté, mais j'ai dit que j'avais la
3 sensation que c'était -- ce haut-parleur était placé sur un véhicule parce
4 que ça bougeait. Et vous, vous savez très bien qu'à des fins militaires, on
5 peut fabriquer de l'électricité indépendamment de savoir s'il y a du
6 courant ou pas.
7 Q. Oui, Monsieur Karlovic, on peut -- on peut, mais je vous pose ma
8 question parce que je n'avais jamais entendu dire qu'on se serait servi à
9 Vukovar d'un haut-parleur et aucun témoin de l'Accusation n'en n'a jamais
10 parlé qu'ils s'agissent des témoins des faits, ou de témoins du côté serbe.
11 Donc, c'est ça qui m'étonne un petit peu que ça vous vienne à l'esprit
12 comme ça, de manière soudaine, cette voix du haut-parleur, ce message,
13 alors que je n'avais jamais entendu antérieurement parler de ça.
14 R. Est-ce que vous voulez que je réponde ? Je suis censé répondre à ça ?
15 Q. Mais donnez une impression, une opinion, un commentaire.
16 R. Mais je ne peux que répéter ce que j'ai entendu et de quelle façon je
17 l'ai entendu et c'est à 100 % ça. Je me suis contenté de dire que cette
18 voix ressemblait à votre voix.
19 Q. Mais comment ça se fait que jamais auparavant dans toutes ces
20 déclarations et témoignages, et cetera, ça ne vous est pas venu à l'esprit
21 de le dire ?
22 R. Je vais vous dire une chose. Il y a toujours des choses dont on se
23 souvient et des choses qu'on oublie. Voilà. Tout cela c'est possible.
24 Q. Vous auriez entendu un de mes entretiens, interviews dans une émission
25 radio où j'aurais dit qu'il fallait que vous vous rendiez et que ça n'ait
26 pas de sens, vous n'avez pas fait une confusion.
27 R. A l'époque, je n'avais pas encore des hallucinations.
28 Q. Ecoutez, je ne comprends vraiment pas d'où viennent ces haut-parleurs.
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1 Je n'ai jamais entendu parler de ça.
2 R. Mais renseignez-vous un petit peu. Il y a eu des porte-voix et des
3 haut-parleurs.
4 Q. Et que je me renseigne pour savoir si, moi, j'en ai -- j'ai parlé en me
5 servant de ça ?
6 R. Non. Renseignez-vous. C'est certain qu'il y en a eus.
7 Q. Mais quand je suis allé à Vukovar, j'ai vu le commandant Sljivancanin
8 par exemple. J'ai vu qu'il avait un Motorola, un poste radio pour
9 s'entretenir avec Jastreb, votre commandant, Mile Dedakovic, n'est-ce pas ?
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Une fois de plus, vous allez trop vite.
11 Mme LE JUGE LATTANZI : Et une fois de plus, vous témoignez.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais justement j'allais poser une question au
13 témoin et vous intervenez tout de suite.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai le droit de poser des questions
16 directrices.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez le droit de poser des questions
18 directrices, mais vous posez la question directement. Faites pas d'abord un
19 monologue et puis la question après. Vous allez directement à la question.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Puisque le témoin n'est pas certain d'avoir
21 véritablement entendu ma voix, je n'ai pas de raison de m'y attarder et de
22 perdre mon temps. Donc, je vais passer à autre chose. Une nouvelle
23 question.
24 M. SESELJ : [interprétation]
25 Ici, j'ai reçu de la part du Procureur d'autres documents. Alors, je
26 voudrais un document sur le rétroprojecteur ERN0207-7562.
27 De toute évidence, c'est un recueil d'un ministère croate. Je ne sais pas
28 si c'est le ministère de la Défense ou la police, c'est juste une partie du
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1 document qui m'a été communiqué. Je vais vous le présenter.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Seselj. Avec le numéro ERN, le
3 Greffier ne peut pas retrouver le document. Alors, à ce moment-là, il vaut
4 mieux le mettre sur le rétroprojecteur.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] La seule chose que j'ai c'est un exemplaire que
6 j'ai sur moi. Je n'ai pas fait de photocopie parce que je me suis dit que
7 vous l'aviez, donc, il faudrait que l'huissière me l'apporte rapidement.
8 Bon, placez-le sur le rétroprojecteur. J'ai souligné ces deux phrases dont
9 je voudrais parler ici. Donc premièrement placez cette page-ci et puis la
10 suivante, puis je vais vous montrer autre chose.
11 M. SESELJ : [interprétation]
12 Q. C'est donc un document officiel du gouvernement croate qui était chargé
13 de mener une enquête concernant les événements de Vukovar. Ils ont
14 également -- ils ont montré leur version mais ce qui m'intéresse c'est une
15 phrase ce qu'ils constatent d'après leur enquête que sous les ordres du
16 commandant de la 1ère Brigade de Garde, regardez ce qui est souligné qu'il y
17 avait un -- très divers : Détachements de Volontaires chetniks, de
18 Détachements de la Défense territoriale du village de Negoslavci, ainsi que
19 de la commune locale de Vukovar Petrova Gora, n'est-ce pas ?
20 R. Vous voulez que je réponde à ceci.
21 Q. Non, je veux dire ce que je vous demande de me dire. Voilà. Le
22 gouvernement croate dit qu'il s'agit de divers Détachements de Volontaires
23 chetniks, alors, divers -- "divers," c'est le mot-clé ici pour ce qui me
24 concerne.
25 R. Oui.
26 Q. Est-ce que vous estimez que c'est ce qui correspond à la vérité, à la
27 situation telle qu'elle était sur le terrain ?
28 R. Je ne pourrai pas répondre à cette question car je sais qu'il y avait
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1 des Détachements de Chetniks; je ne sais pas s'il y avait de divers
2 Détachements de Chetniks. Je sais qu'il y avait des volontaires, possible,
3 je ne sais pas. Je ne sais pas comment répondre à cette question.
4 Q. Est-ce que tous les détachements de volontaires pour vous, ce sont des
5 Détachements de Chetniks ?
6 R. Non.
7 Q. Est-ce que vous savez que les hommes politiques croates et que la
8 propagande croate considérait la JNA comme étant d'une armada Yugo-chetnik,
9 et que c'est ainsi qu'ils l'appelaient ?
10 R. Je ne me souviens pas de ceci, mais c'est possible.
11 Q. Est-ce que vous savez que très souvent, du côté croate, tous les
12 combattants serbes étaient appelés Chetniks ?
13 R. Non, ce n'est pas exactement comme ça, non, non.
14 Q. Est-ce que vous savez que un très grand nombre de combattants serbes
15 dans cette guerre-ci étaient fiers de s'appeler Chetniks. Eux-mêmes
16 s'appelaient, entre eux, Chetniks, indépendamment de l'information à
17 laquelle ils appartenaient ?
18 R. Je ne sais pas qui était fier de quoi, je ne sais pas s'ils étaient
19 fiers de cela. Je ne peux pas répondre à cette question. Je n'ai aucune
20 idée.
21 Q. Lors de votre déposition à Belgrade, vous avez corrigé une fois, vous
22 avez dit lorsque j'ai parlé de Chetnik, je ne veux pas offusquer qui que ce
23 soit; est-ce que vous pensez que c'est
24 offensant ?
25 R. Cela dépend comment les gens voient les choses. Je ne sais pas.
26 Q. Veuillez, je vous prie, prendre la page suivante. On voit également une
27 trace qui est soulignée ici.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne l'ai pas encore sous les yeux, pas
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1 encore.
2 M. SESELJ : [interprétation]
3 Q. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, lire cette phrase ?
4 R. "Un très grand nombre de Chetniks au début pour augment leur
5 participation dans la libération de Vukovar se sont présentés de façon
6 mensongère comme étant des exécuteurs et des participants d'exécution,
7 mais, en réalité, ils ont participé -- un très grand nombre de membres de
8 la 1ere Brigade de la JNA ont participé, ainsi que les membres de la Défense
9 territoriale."
10 Q. Bien. En fait, j'aimerais savoir : est-ce que vous voyez de quelle
11 façon les autorités croates identifient les auteurs de
12 crimes ?
13 R. Je ne sais pas si ceci a trait avec moi. J'ai vu ce que -- je vous
14 parle de ce que j'ai vu à Ovcara.
15 Q. Je vous demande de nous donner votre opinion sur ceci.
16 R. Je vois là vous ai donné lecture du passage en question. C'est ce que
17 j'ai dit, c'est ce que j'ai lu, mais je ne sais pas quelle est l'opinion
18 que vous aimeriez que je vous donne concernant ce passage ?
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, relisez lentement le paragraphe
20 parce que ça a été tellement vite qu'il m'a échappé quelque chose. Pouvez-
21 vous relire tout ce qui a été souligné ou même là-dessus début du
22 paragraphe ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] "A la suite de cet événement, les Chetniks ont
24 célébré une fête dans la ville de Vukovar. Il est vrai qu'on a énormément
25 parlé dans la République de Croatie de cet horrible crime. Un très grand
26 nombre de Chetniks au tout début pour augmenter leur participation dans la
27 libération de Vukovar se présentaient de façon mensongère comme étant des
28 exécuteurs et de participants du massacre. En réalité, un très grand nombre
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1 de la
2 1ère Brigade de la JNA a participé à ce massacre ainsi que des Détachements
3 de la Défense territoriale qui lui étaient subordonnés. Et, il est
4 incontestable que --"
5 M. SESELJ : [interprétation]
6 Q. Très bien. Merci. C'est ce que je voulais vous demander. Je ne veux pas
7 que l'on --
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, ce rapport qui semble émaner des
9 Croates, c'est une enquête qui a dû être faite suite à ce qui s'est passé
10 à Vukovar. Donc, c'est la partie croate, ce n'est pas un rapport du côté
11 serbe, mais côté croate, et ce rapport semble conclure que les crimes qui
12 ont été commis sont imputables à la JNA et à la Défense territoriale. Et ce
13 rapport rajoute que les Chetniks ont célébré la victoire, comme d'ailleurs,
14 on l'a vu dans une vidéo mais qu'en réalité, ils se seraient fait passer
15 pour des exécutants, mais ce ne serait pas, si je comprends bien la phrase,
16 eux, mais en réalité la JNA et la Défense territoriale. Alors, cette
17 conclusion, vous en êtes d'accord, pas d'accord ? Vous la contestez ou vous
18 ne pouvez rien dire ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, ce n'est pas moi qui ai mené une
20 enquête, et deuxièmement, j'étais sur les lieux et je peux vous dire que
21 tous ont participé à ces crimes.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites tous, y compris les
23 Chetniks ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Les tortionnaires -- mes tortionnaires à moi
25 se sont présentés comme étant des Chetniks.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne conteste pas ceci, Monsieur le Président,
28 mais ce terme "chetnik" est beaucoup trop large, et il ne représente pas --
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1 il n'englobe pas seulement les volontaires du Parti radical serbe. C'est là
2 mon point. J'espère que vous me comprenez.
3 Apportez-moi ces documents, s'il vous plaît.
4 M. SESELJ : [interprétation]
5 Q. Monsieur Karlovic, à la lecture de la suite de ce document, nous
6 pouvons conclure que le document en question a été rédigé sur la base
7 également de votre déposition. Malheureusement, je n'ai pas le transcript
8 de vos propos lors de votre témoignage, mais les autorités croates disent,
9 je cite : "Les autres témoins," et votre nom figure en première classe. Et
10 aimeriez-vous consulter ces documents pour le confirmer ? Est-ce que c'est
11 exact ce que je viens de dire ?
12 R. Oui, oui.
13 Q. Très bien, d'accord.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, rendez-moi le document, s'il vous plaît.
15 Nous allons passer à autre chose, à un autre document.
16 M. SESELJ : [interprétation]
17 Q. Monsieur Karlovic, est-ce qu'avant de venir à La Haye pour déposer dans
18 cette affaire-ci menée à mon encontre, avez-vous -- donc, vous, êtes-vous
19 plutôt entretenu avec une autorité croate militaire ou policière ?
20 R. Depuis les dix dernières années, aucun représentant croate ne s'est
21 entretenu avec moi, disons, environs dix ans.
22 Q. Mais dans l'affaire Mrksic, Sljivancanin et Radic, vous avez confirmé
23 qu'on vous a parlé avant le témoignage.
24 R. On m'a parlé, j'ai eu en fait un entretien avant ma toute première
25 comparution, mais après ceci, personne ne s'est entretenu avec moi.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais que l'on place sur le
27 rétroprojecteur le document 0261-2957.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Le Greffier me dit qu'il a du -- il ne peut pas
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1 retrouver ce document dans le système e-court, alors, il vaut mieux le
2 mettre sur l'ELMO.
3 Monsieur Seselj, vous l'avez ce document ou pas ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Juge, je l'ai, mais je suis étonné
5 de conclure que votre système ne fonctionne pas très bien. Alors, je vous
6 demanderais de montrer, Madame, d'abord, la page de garde, et ensuite, la
7 page que j'ai indiquée sur le rétroprojecteur. D'abord, montrez au prétoire
8 la page de garde. J'aimerais que l'on puisse voir la page au complet.
9 M. SESELJ : [interprétation]
10 Q. Vous voyez, Monsieur Karlovic, qu'il s'agit de document officiel du
11 ministère de la Défense croate ?
12 R. C'est exact.
13 Q. C'est un service de Sécurité et d'Information dont l'acronyme est le
14 SIS, n'est-ce pas ?
15 R. Oui.
16 Q. C'est un service de Renseignement militaire, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Nous, les Serbes ont dit service de Sécurité de l'armée, n'est-ce pas ?
19 R. D'accord.
20 Q. Ce document je n'ai pas personnellement -- je ne l'ai pas
21 personnellement trouvé moi-même. Je n'ai pas accès aux archives croates. Ce
22 document m'a été remis par l'Accusation. Et nous pouvons conclure à la
23 lecture de ce document que le SIS du ministère de la Défense de Croatie a
24 participé à la préparation de votre témoignage dans l'affaire Mrksic,
25 Sljivancanin, et Radic.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Prenez, je vous prie, maintenant la page que
27 j'ai identifiée et montrez-là à M. Karlovic. Je l'ai identifiée en
28 retournant le feuillet en haut.
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1 M. SESELJ : [interprétation]
2 Q. Veuillez, je vous prie, nous donner lecture du paragraphe numéro 5,
3 sans mentionner le nom de l'autre homme qui figure après votre nom, car cet
4 autre nom est un témoin protégé qui viendra témoigner et je n'ai absolument
5 aucune raison de mentionner son nom.
6 R. Vous parlez du cinquième paragraphe ?
7 Q. Oui.
8 R. "Ce service a pris part au récolement des témoins de l'Accusation si
9 l'acte d'accusation est confirmé contre Mrksic, Radic, et Sljivancanin,
10 dans l'affaire contre Dokmanovic." Et on cite des noms, le mien y figure --
11 Q. Très bien. Ne donnez pas lecture des autres noms. Ce n'est pas
12 nécessaire. Maintenant, Monsieur, voyez-vous que, dans un document officiel
13 du SIS, ils confirment, c'est un document qui est strictement confidentiel,
14 qu'ils ont pris part au récolement de votre témoignage dans l'affaire
15 appelée le trio de Vukovar; est-ce que c'est exact ?
16 R. Oui.
17 Q. Ils mentent peut-être. Je ne vais pas entrer dans ces détails-là. Mais
18 je dois me -- je ne peux que lire le document que l'Accusation m'a remis.
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que c'est erroné ? Est-ce qu'ils mentent lorsqu'ils disent
21 qu'ils ont participé à votre récolement ?
22 R. Vous ne m'avez pas compris. Je n'ai jamais nié cela.
23 Q. Est-ce qu'ils ont participé au récolement de votre témoignage ?
24 R. C'est ainsi qu'ils l'appellent.
25 Q. Comment vous l'appelez, vous ?
26 R. Il n'était pas nécessaire de me préparer, de me récoler. J'ai
27 simplement eu à présenter mon récit des événements de Vukovar.
28 Q. Donc, vous, vous avez été préparé à présent ces derniers récoler, alors
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1 que vous n'avez pas compris que ce qu'ils faisaient c'était une sorte de
2 récolement que vous étiez préparé par le
3 parquet ?
4 R. Non.
5 Q. [aucune interprétation]
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai un autre document, 0629-29.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
8 M. DUTERTRE : Objection. Ce n'est pas un terme de préparation que
9 j'interprète ce document. J'objecte à ce qu'on présente ce document comme
10 indiquant cela au témoin, qui a d'ailleurs donné sa position.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
12 Monsieur le Témoin, je suis un peu perdu, et je vais vous dire pourquoi. Au
13 départ on vous demande si vous aviez rencontré les services de Sécurité de
14 la Croatie avant ce procès. Alors, vous avez dit : "Oui, mais tout au
15 début." Bon. Moi, c'est ce que j'avais compris, tout au début. Après quoi,
16 M. Seselj vous demande à nouveau : "Est-ce que vous les avez rencontrés,"
17 et vous avez dit : "Non." Bon, donc, moi, j'en étais resté il les a
18 rencontrés tout au début mais après [imperceptible], et voilà qu'il y a un
19 document qui semble indiquer que, dans le cadre -- ah, il n'y a pas --
20 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Je répète. Est-ce que vous m'entendez
22 là ?
23 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Alors, je répète tout.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai tout compris.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, je vais synthétiser. Au départ, vous
27 aviez dit : "Je m'étais entretenu avec les services de Sécurité tout au
28 début," après quoi M. Seselj vous a reposé la question et vous avez dit :
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1 "Non, depuis lors, je ne les ai plus revus." Voilà qu'apparaît un document,
2 qui semble -- je dis bien qui "semble" indiquer que vous auriez été récolé,
3 c'est-à-dire vous avez eu un entretien avec eux dans le cadre de la
4 préparation, alors, je ne sais pas si c'est de l'acte d'accusation ou du
5 procès Mrksic, et j'ai vu sur le document une date, 1999, semble-t-il.
6 Donc, vous auriez rencontré ces gens-là avant 1999.
7 Alors, pour éclaircir tout cela, en quelle année vous avez rencontré les
8 membres de la sécurité de votre pays ? Quelle année exactement ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je d'abord répondre à la question qui ne
10 vous était pas tout à fait claire, à savoir pourquoi oui, pourquoi non.
11 D'abord, puis-je répondre à cette question-là ?
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai dit, "non," j'avais compris -- et
14 j'ai peut-être mal compris M. Seselj, mais j'ai dit que "non," j'ai répondu
15 avec la négative à la question, à savoir si avant de venir déposer contre
16 lui -- contre M. Seselj, si j'ai eu des contacts et j'avais répond par la
17 négative. Car, dans ce contexte-là, la réponse était non mais s'agissant
18 des contacts avec ces services je les avais dans une période antérieure
19 1996, 1997, à peu près. Je ne sais plus. C'était les seuls contacts que
20 j'ai eus avec eux et après cela -- après cette date-là, je n'ai plus eu de
21 contact avec d'autres services ou personnes. Est-ce que vous me comprenez ?
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous comprends, donc, si je comprends bien,
23 depuis dix ans, vous n'avez eu aucun contact.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Absolument aucun.
25 Mme LE JUGE LATTANZI : D'ailleurs c'est ce que le témoin nous a dit, et qui
26 se trouve enregistré à la page 66, ligne 9.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Seselj, que vouliez-vous faire
28 ressortir ?
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je vais continuer,
2 lorsque j'aurais terminé cette partie-là de mon contre-interrogatoire, vous
3 verrez ce que là où je veux en venir. Je ne me demande pas de vous montrer
4 toutes mes cartes avant.
5 M. SESELJ : [interprétation]
6 Q. Monsieur Karlovic, avant votre déposition dans l'affaire Sljivancanin,
7 Radic, et Mrksic, ou comme on l'appelle le trio de Vukovar, le 21 mars
8 2006, à la page du transcript 6 449, lorsqu'on vous a posé la question, à
9 savoir je cite : "A qui avez-vous donné des déclarations deux jours avant
10 de venir déposer à La Haye ? A qui concrètement avez-vous donné des
11 déclarations ?" Vous avez dit : "A deux personnes qui travaillaient dans ce
12 service, je crois que l'un deux s'appelle Stjepan Udiljak alors que pour
13 l'autre personne je sais qu'il s'appelle Tomislav, mais je ne me souviens
14 pas de son nom de famille."
15 Est-ce que c'est ce que vous aviez répondu ?
16 R. Oui.
17 Q. Très bien, Monsieur Karlovic. Merci.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous allons maintenant examiner un autre
19 document. Auriez-vous l'obligeance, je vous prie, Madame, de bien vouloir
20 le placer sur le rétroprojecteur ? Il s'agit d'un autre document du secteur
21 de sécurité du ministère de la Défense. Veuillez, je vous prie, placer ce
22 document sur le rétroprojecteur. Nous allons d'abord voir la page de garde.
23 M. SESELJ : [interprétation]
24 Q. Vous voyez, n'est-ce pas, que c'est un autre document officiel du
25 ministère de la Défense croate, n'est-ce pas ?
26 R. Oui.
27 Q. Est-ce que vous avez des raisons de douter quant à l'authenticité de ce
28 document ?
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1 R. Voyez-vous, étant donné qu'une copie n'est jamais une originale, je
2 pourrais mais je ne vais pas douter.
3 Q. Veuillez, je vous prie, examiner la pièce ERN qui a posé le parquet ?
4 R. Oui, oui. D'accord, je fais confiance au document.
5 Q. C'est un document qui est un secret d'Etat, n'est-ce pas ?
6 R. Oui.
7 Q. Je vous prie maintenant de montrer la page que j'ai identifiée et
8 encore une fois je vous demande seulement de donner lecture du passage
9 indiqué.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais ne montrez pas, s'il vous plaît, le nom de
11 la personne qui se trouve à côté du nom de
12 M. Karlovic. Donc, est-ce que vous pouvez faire en sorte que l'on peut, que
13 l'on montre ce passage à l'interne, c'est-à-dire dans le prétoire mais sans
14 faire -- sans le montrer au public.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, c'est possible.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, je vous demande de montrer la page que
17 j'ai identifiée. Voilà, c'est cette page-ci. Alors, montrez seulement le
18 passage que j'ai identifié là.
19 M. SESELJ : [interprétation]
20 Q. Pourriez-vous, je vous prie, donner lecture du titre, mais ne
21 mentionnez pas les deux noms qui se trouvent à côté du vôtre ?
22 R. "Ce service a pris part à la préparation et au récolement du témoin de
23 l'Accusation, si l'acte d'accusation est confirmé contre Mrksic, Radic et
24 Sljivancanin dans l'affaire contre Dokmanovic."
25 Q. En premier lieu, on voit votre nom, n'est-ce pas ?
26 R. Oui, c'est exact.
27 Q. Merci.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Rendez-moi le document, s'il vous plaît. Très
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1 bien.
2 M. SESELJ : [interprétation]
3 Q. Alors, Monsieur Karlovic, je vous montre ce document car je suis
4 convaincu que lorsque vous avez témoigné dans cette affaire-ci, vous avez
5 fait l'objet de préparation à Zagreb, c'est-à-dire de conversations
6 préparatives [comme interprété] ou de récolement ?
7 R. Je témoigne ici sous serment, je n'ai absolument aucune raison de
8 mentir. C'est à vous de me croire ou pas.
9 Q. Malheureusement, je n'ai absolument aucune preuve pour contredire ceci.
10 J'ai d'autres preuves pour d'autres affaires, mais je n'ai pas de preuves
11 pour vous, mais merci, Monsieur Karlovic.
12 Nous avons maintenant encore quelques questions plus courtes à aborder.
13 Quand êtes-vous arrivé précisément à Vukovar ?
14 R. Le 1er octobre, entre 3 heures ou 4 heures du matin en 1991.
15 Q. "Listopad," qui est l'indication en croate et ce que les Serbes
16 appellent octobre.
17 R. Oui, c'est le dixième mois.
18 Q. Très bien. Donc, lorsque votre nom a été communiqué, j'ai commencé une
19 enquête vous concernant.
20 R. D'accord.
21 Q. Est-ce que vous avez demandé de témoigner avec des mesures de
22 protection car vous êtes un témoin protégé ?
23 R. Non, pas -- non, mais la première fois, oui, parce que lorsque j'ai
24 compris que la Défense doit toujours savoir qui vient témoigner, cette
25 Défense, ces moyens de défense ont perdu leur sens.
26 Q. La première fois, c'était dans l'affaire Dokmanovic, n'est-ce pas ?
27 R. Je crois que oui.
28 Q. Et jamais dans l'affaire contre moi, vous n'avez jamais demandé des
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1 mesures de protection pour témoigner en tant que témoin dans cette affaire-
2 ci ? Est-ce que vous me le confirmez ?
3 R. Oui, je n'ai jamais demandé des mesures de protection.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
5 Juges, c'est une question très sérieuse. C'est un problème très important.
6 M. SESELJ : [interprétation]
7 Q. Est-ce que vous croyez que j'ai quelque manière, quelque façon que ce
8 soit de vous faire quelque chose de mal si je l'avais voulu ?
9 R. Il y a toujours des moyens, oui, c'est toujours possible.
10 Q. Mais c'est dans le domaine du fantastique.
11 R. Bien, vous personnellement peut-être pas, mais il y a toujours moyen de
12 faire tort à quelqu'un.
13 Q. Est-ce que vous n'avez jamais senti une peur, la peur lorsque vous êtes
14 venu témoigner -- à venir témoigner dans l'affaire ici ?
15 R. Non, jamais.
16 Q. Et qu'est-ce que vous pensez ? Quels seraient les motifs que les autres
17 Croates engagés par les -- par le parquet à venir témoigner dans cette
18 affaire --
19 R. [aucune interprétation]
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
21 M. DUTERTRE : Objection. On demande au témoin de spéculer.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
23 Alors, Monsieur le Témoin, sans spéculer, la peur c'est peut-être quelque
24 chose de quantifiable, donc, la question qui vous a été posée, est-ce que
25 vous aviez eu peur à un moment donné. Vous dites : non, jamais.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas eu peur.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez été témoigné à Belgrade, dans le
28 procès des Kameni et des autres, ça s'est passé sans aucuns problèmes. Vous
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1 êtes arrivé à Belgrade. Vous avez été au tribunal, puis vous êtes reparti.
2 Tout s'est passé dans le meilleur climat ou il y a eu des problèmes ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai reçu des protections par le tribunal. A
4 la frontière, j'ai été escorté par les services de Sécurité policière et on
5 m'a raccompagné jusqu'à la frontière, donc, je n'ai absolument aucuns
6 problèmes. Il est certain que je ne me suis pas déplacé tout seul à bord de
7 mon véhicule à Belgrade pour aller témoigner à Belgrade au tribunal.
8 M. SESELJ : [interprétation]
9 Q. Est-ce que vous avez passé la nuit à l'hôtel ?
10 R. Oui.
11 Q. Est-ce que vous pouviez vous promener dans Belgrade ?
12 R. J'avais toujours un homme qui s'occupait, qui veillait à ma sécurité.
13 Q. C'était un homme ?
14 R. Oui.
15 Q. Et vous vous êtes déplacé librement dans la ville ?
16 R. Non, je ne me suis pas promené puisque je suis arrivé dans la nuit --
17 dans la soirée et j'ai témoigné le lendemain, et ensuite, je suis rentré
18 immédiatement, donc, je ne me suis pas promené dans Belgrade.
19 Q. Et voici ma dernière question. Ma dernière question était à savoir, si
20 vous pensiez -- si vous pensez qu'il y a des raisons pour que les autres
21 Croates qui étaient des victimes à Ovcara qui, par hasard, ont eu leurs
22 vies sauvé tout comme vous. Vous connaissez certains d'entre eux, mais ne
23 les mentionnez pas. Est-ce qu'il y a des raisons quelconque pour que ces
24 derniers demandent des mesures de protection pour venir témoigner dans
25 cette affaire-ci ?
26 R. Monsieur Seselj, voyez-vous, la peur est une affaire subjective.
27 Quelqu'un peu se sentir effrayer, peut sentir une crainte, d'autres
28 personnes, non. Moi, j'ai remis ma vie il y a très longtemps entre les
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1 mains de Dieu.
2 Q. Mais je vous parle de circonstances objectives. Est-ce qu'il y a une
3 raison objective pour que ces derniers aient peur de venir témoigner ici en
4 audience publique en donnant leur nom et prénom ?
5 R. Vous me posez cette question mais est-ce que vous acceptez quand je
6 vous dis que je l'ignore.
7 Q. Très bien. Oui, oui.
8 Monsieur Karlovic, est-ce que vous savez qu'avant votre arrivée à Vukovar
9 et lors de votre séjour à Vukovar là-bas, il y a eu comme mission d'un
10 assez grand nombre de crimes à l'égard de civils serbes.
11 R. Je n'en sais rien.
12 Q. Vous n'en savez rien.
13 R. C'est cela.
14 Q. Me croiriez-vous dès qu'on a communiqué votre nom en guise de témoin
15 protégé, j'ai d'abord procédé à des vérifications pour savoir si vous étiez
16 sur une liste de criminels ?
17 R. Moi, je veux bien croire que vous avez tout fait pour me discréditer.
18 Q. Je vais vous dire sincèrement que vous ne figurez pas sur la liste de
19 criminels. Je vais vous montrer une liste de criminels que je me suis
20 procuré.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Ayez l'amabilité de placer ceci, je vous prie -
22 -
23 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, je me demande : quelle est la
24 pertinence de cela par rapport à l'affaire, et si c'est bien de nature à
25 éclairer le Tribunal pour les questions qu'il a à résoudre ? J'en doute.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : -- alors, vu l'objection, Monsieur Seselj, en quoi
27 le document que vous allez montrer est pertinent -- est utile ? Et si ce
28 document existe, d'où vient-il ? Pouvez-vous nous donner des éléments
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1 d'information parce que tout le monde est capable de prendre un bout de
2 papier puis de marquer des noms de criminels supposés sans aucun fondement
3 ? Donc, si vous avez un document, ce document doit émaner d'une autorité
4 quelconque ou d'un groupe et d'une procédure policière, judiciaire. Alors,
5 pouvez-vous répondre à mes questions ?
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je vais procéder dans
7 l'ordre pour répondre à toutes vos questions.
8 Vous savez que la thèse de ma Défense est celle-ci : le chef du service
9 militaire de la sûreté de la JNA, le général Aleksandar Vasiljevic, a donné
10 l'ordre d'exécuter des prisonniers de guerre croate à Ovcara. La deuxième
11 thèse de ma Défense est celle de dire qu'il n'y a pas eu de difficultés à
12 trouver les auteurs directs. Les auteurs directs ont été retrouvés parmi
13 les personnes ayant subi des frustrations, notamment des citoyens de
14 Vukovar qui ont eu des proches de tuer, car la terreur vis-à-vis de la
15 population civile serbe à Vukovar a duré des mois durant. Alors, il n'y a
16 pas eu d'auteurs directs -- il n'y a pas eu de difficulté à trouver les
17 auteurs directs.
18 Pour ce qui est de la présentation des renseignements relatifs aux crimes
19 commis à l'encontre des Serbes, ce n'est pas une façon pour moi de créditer
20 ce témoin ceci, je n'ai aucune raison de discréditer ce témoin-ci. Ce qui
21 est problématique, c'est seulement une déclaration à lui qu'il aurait
22 entendu ma voix partant d'un porte-voix pour ce qui est de la reddition. Et
23 il a relativisé par la suite, il a dit que c'était une voix qui ressemblait
24 à la mienne, mais il n'y a rien dans la déclaration de ce témoin-ci qui
25 serait à charge pour moi. Je suis content et satisfait de son témoignage.
26 Mais je veux mener à son terme sur le contre-interrogatoire suivant
27 une façon logique. J'essaie d'expliquer la nature du crime à Ovcara. Je
28 tiens à présenter des faits qui nous permettent de voir qu'il y a eu un
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1 certain nombre de personnes parmi les membres de la Défense territoriale
2 pour ce qui est d'une vengeance personnelle et de ces gens-là il ne pouvait
3 pas y en avoir parmi les volontaires parce que leurs proches, leurs
4 familles, parents ne vivaient pas dans Vukovar.
5 Et si vous le permettez, j'aimerais montrer une liste qui a été
6 publiée par le journal Politika Ekpress, le 18 mars 1997, où l'on indique
7 les noms de tous les Croates qui ont participé aux crimes à l'encontre de
8 Serbes pour que je puisse poser la question au témoin, qui est celle-ci,
9 connaît-il deux, quatre, six, huit, dix, personnes sur cette liste ? S'il
10 me dit je connais, je ne connais pas, on mène la chose à son terme.
11 Permettez-moi donc de lui poser cette question.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Si je comprends bien, c'est un article dans le
13 journal, en date du 18 mars 97, qui a listé des noms de Croates qui ont
14 pris part à des crimes commis contre les Serbes. C'est ce que j'ai compris.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est ça.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Et je vais vous montrer le document officiel,
18 j'ai le document officiel aussi.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Procureur, avant de vous donner
20 la parole, il s'agit d'un article de presse public. Alors, quelle est
21 l'objection ?
22 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, je ne sais pas quelle est la
23 pertinence -- la scientificité de cet article, et s'il a un contenu
24 diffamatoire à l'égard de l'un ou l'autre des personnes mentionnées, je
25 saurai un peu marré que nous soyons le vecteur de potentielles
26 diffamations.
27 Quant au reste, le témoin n'est pas de Vukovar. Il venait de l'extérieur et
28 ce n'est pas la personne appropriée à mon sens pour présenter ce type de
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1 preuve et il n'est pas le témoin exact pour faire cela. Je vous remercie.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, le Procureur fait une objection
3 estimant que le témoin n'est pas le bon témoin pour confirmer ou infirmer
4 votre document. Bon, à ceci près, s'il y a des noms, il y a peut-être des
5 gens qu'il connaît. Est-ce que ce sont des Croates qui étaient sur place à
6 Vukovar parce que, si c'est le cas, là, il y a un lien. Si ce n'est pas le
7 cas, il n'y en a aucun. Alors, vous pourrez répondre, Monsieur Seselj ?
8 Est-ce que, dans cet article, les noms des Croates sont des Croates qui
9 étaient à
10 Vukovar ?
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je suis surpris par la
12 question que vous posez. Pourquoi voulez-vous qu'ils soient tous des
13 Croates originaires de Vukovar même ? Peut-être sont-ils d'ailleurs;
14 comment voulez-vous que je sache d'où ils sont ? Mais c'est une liste qui a
15 été publiée. On dit qu'ils ont commis des crimes à l'encontre de Serbes à
16 Vukovar et dans ses parages. J'ai noté dix noms et je souhaite poser au
17 témoin la question de savoir s'il connaît ces personnes. Il y a un texte
18 qui suit, rien ici ne se rapporte au témoin. Donc, je ne cherche pas à
19 remettre en question sa crédibilité. Je suis satisfait de son témoignage.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : -- mes collègues pour savoir s'ils sont pour ou
21 contre. Moi, qui n'ai rien à masquer je suis pour, donc, si mes collègues
22 sont contre, et bien, ils le diront et, à ce moment-là, ce ne sera pas
23 présenté. C'est -- donc, je vais demander à mes collègues leur position.
24 [La Chambre de première instance se concerte]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, j'ai recueilli l'avis de mes collègues
26 qui sont contre à la majorité; moi, je vous ai dit je suis pour. Donc,
27 Monsieur Seselj, vous ne pouvez pas utiliser ce document. Mais je
28 rajouterai, je pense que la Chambre est unanime là également, vous auriez
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1 l'occasion d'utiliser ce document en faisant venir vos propres témoins qui
2 auront un lien direct avec ledit document.
3 Mme LE JUGE LATTANZI : Peut-être même avec un autre témoin de l'Accusation.
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour le moment, c'est le seul des témoins de
5 l'Accusation pour ce qui est de la base des crimes à Vukovar qui vient
6 témoigner viva voce ici. Je n'en ai aucun autre d'annoncer et je n'ai pas à
7 qui poser cette question parce que ceux qui vont défiler en application du
8 92 ter; je ne veux pas avoir affaire à eux.
9 Mme LE JUGE LATTANZI : C'est nous qui poserons la question.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur Seselj, il vous reste 30
11 minutes encore.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je m'attendais à ce que vous posiez cette
13 question, comme Mme Lattanzi vient de le dire, mais comme --
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais elle -- alors, attendez, je vais lui donner la
15 parole si elle veut intervenir.
16 Mme LE JUGE LATTANZI : Non seulement pour dire qu'on ne s'est pas compris
17 M. Seselj, je regrette qu'il ne m'ait pas compris. C'est ma faute sûrement.
18 Je disais que, dans le cas où un témoin vient 92 ter, et il y aurait des
19 questions pertinentes à poser, vous ne posez pas parce que vous refusez le
20 contre-interrogatoire; ce seront les Juges à poser les questions
21 pertinentes.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, par ailleurs, concernant les
23 témoins qui avaient été prévus pour Vukovar, j'ai les numéros que je vous
24 cite en vrac. Il y avait les témoins 2, 4, 9, 12, 14, 16, 30, 34, 35, 36,
25 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, donc, il y en a toute une série qui
26 figuraient sur la liste 65 ter. Donc, on aura certainement l'occasion de
27 voir encore des témoins viva voce. Vous aurez peut-être l'occasion
28 d'introduire ce document. Mais même pour le cas où ça ne serait pas
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1 possible, vous aurez toujours la possibilité d'introduire ce document avec
2 vos propres témoins.
3 Donc, voilà. Moi, si j'y étais favorable, c'était dans un esprit de gagner
4 du temps et d'être efficace, mais je m'incline. De ce fait, donc, il vous
5 reste 30 minutes.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Étant donné que vous venez de m'interdire de
7 contre-interroger ce témoin-ci concernant les connaissances qui sont les
8 siennes, au sujet de personnes accusées d'avoir commis des crimes à
9 l'encontre de civils serbes, je refuse de continuer mon contre-
10 interrogatoire de ce témoin.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, Monsieur le Témoin, l'accusé ne veut
12 plus vous poser de questions.
13 Moi, j'aurai une question importante à vous poser qui est restée dans
14 l'ombre. L'Accusation ne vous l'a pas posée, peut-être que M. Seselj vous
15 l'aurait posée mais je n'en sais rien.
16 Questions de la Cour :
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous aviez indiqué qu'après que vous ayez été sauvé
18 en quelque sorte de la menuiserie, ultérieurement vous avez été conduit
19 dans la prison civile de Mitrovica et vous avez indiqué que vous avez été
20 relâché, le 22 mai 1992, dans le cadre d'un échange d'un prisonnier. Alors,
21 moi, ce qui m'intéresse c'est de savoir ceci : en Serbie - mais c'est dans
22 tous les pays du monde - quand quelqu'un est placé en prison, il y a un
23 document, il y a un titre. On ne place pas les gens en prison sans
24 document. Quand vous, vous avez été placé dans cette prison, est-ce qu'à
25 votre connaissance, il y a eu un document vous passant en prison ? Est-ce
26 que vous avez rencontré un avocat ? Est-ce que vous avez rencontré un juge
27 d'instruction ? Qu'est-ce qui s'est passé pendant les mois où vous étiez
28 dans cette prison ?
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1 R. Tout d'abord, pendant deux mois, j'ai été gardé en prison comme si en
2 terme pratique je n'existais pas. Donc, il n'y a pas eu de renseignement,
3 communiqué, ni à la Croix-Rouge ni d'imprimer de rempli démontrant que
4 j'étais présent. J'ai été fiché dans le cadre des interrogatoires réalisés
5 par des officiers de la JNA, et là-bas, il y avait mon nom et mon prénom,
6 qui plus est, on nous a pris en photos.
7 Le 26 janvier, j'ai été recensé pour la première fois au niveau de la
8 Croix-Rouge, 26 janvier 1992, et c'est là qu'on a su que j'existais en ma
9 qualité de prisonnier.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous dites que vous avez été interrogé par des
11 officiers de la JNA. C'étaient des officiers qui appartenaient à la police
12 militaire ou pas ?
13 R. Je ne peux pas le savoir. Je ne sais pas. Ils avaient des uniformes
14 différents ce qui fait que je n'en ai aucune idée.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Et quand vous avez rencontré la Croix-Rouge, ils
16 vous ont demandé pourquoi vous étiez là ?
17 R. Non, ils ne m'ont pas demandé cela. Nous étions nombreux et on savait
18 fort bien pourquoi on était là. Mais, moi, personnellement, personne ne m'a
19 demandé pourquoi j'étais là.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, il semblerait que, pendant ces
21 interrogatoires, vous auriez été battu; c'est vrai, c'est faux ?
22 R. Oui, c'est vrai.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Et qu'est-ce qu'on voulait vous faire dire ? On
24 voulait vous accuser de crimes ? Pourquoi ces interrogatoires ?
25 R. Je n'ai pas cru comprendre qu'on voulait me mettre en accusation d'un
26 crime quelconque. Ils m'ont posé des questions habituelles. Ils voulaient
27 savoir quelle était la situation à Vukovar, et des tas de fois je ne savais
28 même pas pourquoi on me donnait des coups.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Si vous le permettez, je vais faire un retour en
2 arrière. Quand vous arrivez à Vukovar, à l'époque, votre pays, la Croatie,
3 était-elle indépendante, reconnue par la communauté internationale, ou
4 bien, elle s'était autoproclamé indépendante ? Est-ce que vous saviez
5 exactement la situation à l'époque ?
6 R. Le parlement croate a déclaré la sécession vis-à-vis de la Yougoslavie
7 et a déclaré son indépendance. La Croatie a été internationalement reconnue
8 par certains pays avant le 15 janvier, mais je crois que c'est le 15
9 janvier 1992, qu'il y a eu reconnaissance internationale.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pendant la bataille de Vukovar, Vukovar
11 appartenait selon vous ou pas à l'ex-Yougoslavie, ou à la Croatie ?
12 R. C'était absolument une ville croate, cela faisait partie de la Croatie.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : C'était une ville croate qui appartenait à l'ex-
14 Yougoslavie ou à la Croatie ? Je dis en novembre 1991.
15 R. C'était une ville croate.
16 Mme LE JUGE LATTANZI : -- la Croatie -- à l'Etat croate comme Etat
17 autonome, ou comme Etat indépendant, selon vous ?
18 R. Nous parlons de la Croatie en sa qualité d'Etat indépendant, dont le
19 parlement a proclamé son indépendance. Et on sait que le parlement est
20 constitué par -- ou composé suite à un vote fait par sa population.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais saviez-vous que la communauté
22 internationale n'a reconnu votre pays qu'au mois de janvier 1992 ?
23 R. Mais elle l'a reconnu.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais en janvier 1992.
25 R. A mes yeux, cela n'a pas d'importance. Je m'en excuse.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Quand les officiers de la JNA vous a interrogé à la
27 prison, vous me dites qu'ils voulaient savoir ce qui s'était passé à
28 Vukovar. C'étaient les seules questions qui posaient ou ils ont posé
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1 d'autres ?
2 R. Quand je parle de questions, il y a eu toute une série de questions,
3 D'où viens-tu ? Pourquoi es-tu allé là-bas ? A quelle unité appartiens-tu ?
4 Où as-tu à combattre ? Et ainsi de suite. Donc, c'est toute une série de
5 questions, ce n'est pas une seule ou quelque question simple.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous pose cette question parce qu'un autre témoin
7 nous avait dit qu'il avait été accusé de rébellion, alors, est-ce que ces
8 officiers vous reprochaient de vous être rebellé contre l'Etat, qui était
9 l'ex-Yougoslavie ou pas ? Est-ce que ça rentrait dans l'interrogatoire les
10 questions posées ?
11 R. Ecoutez, personne ne m'a accusé, mais ce genre d'attitude a existé
12 envers nous, à savoir qu'on était des rebelles, une sorte de
13 paramilitaires. C'est comme ça qu'ils se sont comportés à notre égard, et
14 ce qu'ils disaient. Mais personne ne m'a accusé moi de rébellion.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, vous nous confirmez qu'aucun juge ne
16 vous a vu ni aucun procureur militaire.
17 R. Du moins personne ne s'est présenté comme tel. Dans la majorité, je
18 voyais des officiers et est-ce qu'ils auraient pu être des procureurs
19 militaires, des juges militaires, ou autre chose, ça je n'en ai pas l'ombre
20 d'une idée. Ils n'avaient pas l'habitude de se présenter.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Je vais demander à mes collègues s'ils ont
22 d'autres questions.
23 Mme LE JUGE LATTANZI : Une question. Le personnel de la Croix-Rouge vous a
24 interrogé sur le traitement que vous avez reçu ?
25 R. Je ne m'en souviens pas.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que, Monsieur le Procureur, vous avez des
27 questions supplémentaires ?
28 M. DUTERTRE : Oui, effectivement, Monsieur le Président, Madame, Monsieur
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1 les Juges, j'ai des questions supplémentaires.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, on peut peut-être faire la pause et
3 vous reprendrez après la pause.
4 M. DUTERTRE : Très certainement.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, on fait 20 minutes de pause.
6 --- L'audience est suspendue à 11 heures 42.
7 --- L'audience est reprise à 12 heures 01.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, pour les questions supplémentaires,
9 Monsieur le Procureur.
10 M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président.
11 Nouvel interrogatoire par M. Dutertre :
12 Q. [interprétation] Monsieur Karlovic, page 14 aujourd'hui du transcript
13 où vous avez répondu à une question de M. Seselj en indiquant :
14 [aucune interprétation]
15 En vous référant à l'ennemi, ma question est la suivante : dans
16 Vukovar, vous avez bien à faire à la fois à l'armée JNA, les TO et les
17 Chetniks ?
18 R. Oui, c'est exact.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais pourquoi est-ce que vous autorisez ces
20 questions directrices à ce point, Monsieur le
21 Président ? Dans les questions supplémentaires, ceci n'est pas autorisé non
22 plus.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Le Procureur reprend la page 14 où le témoin a
24 répondu suite à une de vos questions. Donc, en question supplémentaire, il
25 a le droit de revenir sur votre -- de votre question sur la réponse et il
26 demande au témoin, à son avis : est-ce que ceux qui étaient à Vukovar, il y
27 avait la JNA, le TO, les Chetniks ? Et il dit : est-ce correct ou pas
28 correct ? Il aurait pu le dire aussi. Et le témoin répond : "Yes, that's
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1 correct." Bon, voilà. Alors, moi, je ne vois pas où était la question
2 directrice en la matière surtout que cette question. Les Juges ont
3 également abordé à diverses reprises cette question, et le témoin a répondu
4 toujours dans le même sens.
5 Alors, Monsieur le Procureur, continuez.
6 M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président.
7 Q. Monsieur Karlovic, est-ce que vous avez vu quand vous étiez à Vukovar
8 en 1991 des soldats réguliers de la JNA portaient le chapeau de fourrure
9 chetnik ?
10 R. Je n'en ai pas vu.
11 Q. Et toujours dans la même période en 1991, lorsque vous étiez à Vukovar,
12 est-ce que vous avez vu des soldats chetniks rasés, cheveux coupés,
13 globalement apprêtés de la même manière et avec les mêmes uniformes que les
14 soldats réguliers de la JNA ?
15 R. Je n'en ai pas vu comme ça.
16 Q. Et par rapport aux forces territoriales, quel était leur habillement
17 régulier ? C'était l'habillement qui ressemblait à l'habillement JNA, ça
18 ressemblait aux Chetniks; quel était leur habillement régulier ?
19 R. Ça ressemblait beaucoup à la JNA régulière, à cette armée-là, sauf
20 qu'il y avait des drapeaux serbes généralement.
21 Q. Je vous remercie.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur, vous rajoutez quelque chose qui
23 n'est jamais apparu jusqu'à présent. Le Procureur vous demande si vous
24 faisiez une distinction entre les soldats de la JNA et de la Défense
25 territoriale. Bon, vous dites : c'était similaire, mais vous rajoutez sauf
26 pour les drapeaux. Alors, expliquez-nous, la Défense territoriale avait des
27 drapeaux, la JNA avait des drapeaux; c'est quoi ce problème des drapeaux ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle de ce que je sais, et sur la base de
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1 mes opinions et ce que j'en sais de la Défense territoriale, ses membres se
2 sont servis du drapeau serbe - c'était un de leur symbole - et ils avaient
3 un uniforme qui ressemblait beaucoup à celui de la JNA.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Mais ils avaient un drapeau serbe aux combats --
5 pendant les combats, il y avait un drapeau ? Parce que quand vous avez été
6 arrêté, vous, à part le drapeau qu'on a vu, on n'en voit pas d'autres
7 apparaître. Alors, vous dites ce que vous savez, mais vous le savez après
8 ou c'était à Vukovar que vous avez vu les drapeaux ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu des drapeaux serbes, des drapeaux
10 yougoslaves également; c'est ce que j'ai vu quand j'ai été capturé, en
11 particulier quand on a passé par différents quartiers de la ville où ils se
12 déplaçaient où ils fêtaient.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Ce qui est bien c'est quand on pose les questions on
14 a toujours d'autres éléments qui arrivent. Là, il y a un nouveau drapeau
15 qui apparaît, des drapeaux yougoslaves. Qui c'est qui avait des drapeaux
16 yougoslaves ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Essentiellement, j'en ai vu sur des blindés,
18 des chars. Et les drapeaux serbes, ils les portaient parfois sur eux, avec
19 eux.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, les blindés de la JNA, je présume, avaient des
21 drapeaux yougoslaves. Par contre, les soldats pouvaient avoir des drapeaux
22 serbes; c'est ce que vous dites ? Bon.
23 M. DUTERTRE : Peut-être un élément de clarification.
24 Q. Monsieur Karlovic, quand vous dites "des drapeaux," vous vous référez à
25 des drapeaux taille normale ou des drapeaux réduits, cousus sur les
26 vêtements ? A quoi vous pensez exactement ? Est-ce que vous pouvez
27 clarifier ce point ? Je parle donc des drapeaux donc qui étaient portés par
28 les membres des TO ?
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1 R. Je pense aux drapeaux qu'on peut hisser mais je pense aussi aux
2 insignes sur un uniforme.
3 Q. Entendu, et donc, pour être spécifique les TO portaient des drapeaux
4 éventuellement sur les uniformes et c'étaient des drapeaux représentant
5 quoi, c'est un drapeau de l'armée yougoslave, c'était le drapeau serbe,
6 vous pouvez préciser ce point ?
7 R. Je parle du drapeau serbe.
8 Q. Je vous remercie.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur le Témoin, je vais vous poser une
10 question mais peut-être vous n'allez pas pouvoir y répondre parce qu'elle
11 est complexe et elle a des connotations juridiques. Mais on ne sait jamais.
12 On parle de la Défense territoriale de Vukovar. Si j'ai bien compris, ce
13 matin, je regardais la carte, Vukovar est en Croatie. De l'autre côté c'est
14 la Serbie puisque c'est la rivière qui fait la frontière en quelque sorte.
15 Et on a vu donc une carte là-dessus.
16 Alors, si d'un côté il y a la Croatie, Vukovar, et de l'autre côté la
17 Serbie, la Défense territoriale de Vukovar c'est laquelle ? Est-ce que
18 c'est la Défense territoriale Vukovar croate ou la Défense territoriale
19 Vukovar mais serbe parce qu'à l'époque, l'ex-Yougoslavie existait, et vous
20 semblez le confirmer en me disant qu'il y avait des drapeaux yougoslaves
21 sur les chars. Alors, est-ce que sur la Défense territoriale vous pouvez
22 nous éclairer ou pas ? Si vous ne pouvez pas, ce n'est pas grave.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] La Défense territoriale c'est une appellation
24 qu'on utilise mais qui correspond à ce qu'ils disaient, eux, pour eux-
25 mêmes. Et puis, au sujet de la Défense territoriale, il faut dire que ça
26 prend des racines plus loin, comment est-ce qu'elle a été créée et qui la
27 composait ? Je ne sais pas si vous voulez qu'on rentre là-dedans dans tout
28 ce débat. Donc, pour l'essentiel, on se sert de ce terme, Défense
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1 territoriale, parce que c'est comme ça qu'eux s'appelaient, eux-mêmes, pour
2 les distinguer plus facilement, on se sert du même terme.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. J'ai compris ce que vous dites.
4 M. DUTERTRE : Juste un point, page 87, lignes 8 et 9, j'avais demandé, si
5 ma mémoire ne me fait pas défaut, si les Chetniks avaient la même apparence
6 et uniforme que les soldats de la JNA. Et je -- dans la version du
7 transcript en anglais, je ne vois pas cette référence à l'uniforme. Je l'ai
8 indiqué pour mémoire.
9 Je souhaiterais maintenant soumettre un document au témoin qui fait suite à
10 la longue discussion que M. Seselj a eu avec lui concernant la photo où on
11 voit ce monsieur d'un certain âge avec une canne. Et j'ai des copies à la
12 fois pour l'Accusation, pour la Chambre, pour le Témoin. C'est un document
13 en B/C/S. Je n'ai pas encore de traduction, mais nous aurons une
14 traduction, je l'espère, par les interprètes.
15 J'aimerais qu'on puisse le mettre sur le --
16 M. LE JUGE ANTONETTI : -- le document est pertinent. D'où vient-il, et
17 cetera.
18 M. DUTERTRE : Alors, le document, Monsieur le Président, est trouvé sur le
19 site internet qui est référencé en haut. Il vient très précisément de
20 l'agence News Agency pour/for Croatia, et la date mentionnée est le 20
21 février 2008.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, vous m'avez interdit --
23 vous m'avez interdit de me servir de textes de journaux. Or, vous autorisez
24 le Procureur à se servir d'articles pris sur internet, mais j'imagine que
25 lorsqu'on sait qui est le rédacteur en chef d'une publication, c'est bien
26 plus fiable que ce qui est placé sur internet, et le plus souvent on ne
27 sait pas d'où ça vient.
28 Et ici, je vois quelque chose d'invraisemblable -- une idiotie complètement
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1 invraisemblable. On voit le capitaine Radic sur -- il n'y a pas de
2 capitaine Radic sur cette photographie. Et -- mais, vous, vous avez deux
3 poids deux mesures, d'un côté le Procureur, d'autre part moi-même.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : -- sur les deux poids deux mesures, vous et le
5 Procureur. Je tiens à rappeler que tout à l'heure la Chambre ne vous a pas
6 permis d'utiliser un document qui provenait d'un article de presse au motif
7 que dans ce document il y avait cité des noms de Croates incriminés et la
8 Chambre à la majorité a décidé de ne pas permettre l'utilisation de cet
9 article tout en soulignant que vous aurez l'occasion de l'introduire le
10 moment venu avec vos propres témoins.
11 Donc, voilà ce que nous avons décidé et que nous vous rappelons à nouveau
12 il n'y avait pas de la part de la Chambre une volonté de vous interdire en
13 quoi que ce soit. Simplement, chaque fois qu'il y a un document, nous
14 devons vérifier un, si le document est pertinent; deux, si le document ne
15 porte pas atteinte injustement à des personnes qui pourraient être le cas
16 être -- le cas échéant, être cité alors même que ces personnes n'ont peut-
17 être rien à voir; et trois, est-ce que le document peut avoir une certaine
18 valeur probante.
19 Dans le document que je découvre aujourd'hui, bon, il y a une photo de
20 quelqu'un. Je ne sais pas qui c'est, mais le Procureur va peut-être nous le
21 dire. Et en revanche, sur la pertinence, il y en a une parce que nous avons
22 la photo que nous avions vue tout à l'heure et c'est la même photo. Mais vu
23 sous un autre angle puisqu'on reconnaît le monsieur qui a une canne, celui
24 qui porte un bonnet, les soldats, et apparaît également un autre individu
25 car cette photo est mondialement connue. Voilà. Alors, je ne sais pas dans
26 quel but le Procureur veut l'utiliser. Le tout maintenant c'est d'écouter
27 la question qu'il va poser.
28 M. DUTERTRE : Oui, mais j'aimerais préalablement, Monsieur le Président,
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1 que le témoin lise ce document qui fait deux pages mais qui est assez
2 court. Ensuite, de quoi je lui poserai ma question ? Je le prierais de lire
3 lentement pour que les interprètes aient la possibilité de traduire.
4 Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai un problème. Avant tout, je voulais dire qu'en
5 ce qui concerne la décision précédente, mon problème c'était la question du
6 lien avec le témoin et la question de la pertinence. Et donc, moi aussi, je
7 -- ce même problème ici donc je voudrais bien qu'avant de faire lire le
8 document, le Procureur puisse nous expliquer la pertinence et le lien avec
9 ce témoin.
10 M. DUTERTRE : Oui, Madame le Juge, très certainement. Cet article est
11 relatif à la personne que l'on voie avec une canne sur ce qui lui est
12 arrivé. Nous avançons, nous, dans le document, nous avons ce qu'il lui est
13 arrivé et les conséquences pour une autre personne mentionnée sur la photo.
14 En termes judiciaires, cette personne ayant eu à répondre de ses actes
15 devant la justice - et il est possible - c'est le lien par rapport au
16 témoin, que le témoin ait une connaissance du procès qui a donné lieu à cet
17 article dans la New Agency for Croatia, et j'aimerais lui poser des
18 questions à ce sujet.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Procureur, si j'ai bien compris -
20 parce que ce qui préoccupe la Chambre c'est la question du lien - le
21 monsieur, qui a une canne, M. Seselj nous a dit tout à l'heure que c'était
22 quelqu'un qui avait dû être dans une cave et qui sort de sa cave, et à ce
23 moment-là, on le conduit quelque part pour le soigner ou je ne sais quoi.
24 Ça c'est la version de M. Seselj. Et partant de là, vous dites que c'est
25 faux parce que le document dit le contraire. C'est ce que je crois
26 comprendre. Oui, mais répondez.
27 M. DUTERTRE : Oui, je ne veux pas, moi-même, témoigner et dire ce qui est
28 faux ou vrai. Nous avons un article de journal qui fait trait, qui a trait
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1 à une procédure judiciaire menée à la suite de ce qui arrivait à cet homme
2 avec une canne. En conséquence de ce qui est arrivé à cet homme avec une
3 canne, l'une des personnes sur la photo a été poursuivie, et donc, il y a
4 eu un procès public et j'aimerais savoir ce que le témoin sait de cela. Il
5 a été longtemps interrogé par M. Seselj sur ce point et je -- je crois que
6 c'est une fondation pour revenir sur cette question avec le témoin.
7 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Si je ne me trompe pas, cette
8 photographie aurait été montrée pour la première fois afin d'obtenir de la
9 part du témoin la reconnaissance des différents protagonistes au conflit,
10 en particulier il s'agissait du chapeau de fourrure que porte cet -- un
11 homme et de la cocarde, et aussi des insignes sur des casques de deux
12 hommes. La question, qui n'avait pas de pertinence, c'était la question de
13 cet homme devant, donc, si maintenant, vous voulez explorez cela, ça va
14 paraître dénué de pertinence. Et je rejoins Mme le Juge Lattanzi.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Alors --
16 M. DUTERTRE : Juste pour --
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
18 M. DUTERTRE : Si vous me le permettez, Monsieur le Président, c'est --
19 enfin, il y a eu un certain nombre de propos tenus par
20 M. Seselj quant à la personne de cette personne qui est au centre. Et c'est
21 d'importance dans -- pour le dire [imperceptible] des faits en général à
22 Vukovar, et donc, je ne fais que rebondir sur les propres allégations de M.
23 Seselj en "re-direct."
24 M. LE JUGE ANTONETTI : La Chambre va délibérer pour savoir si on vous
25 autorise ou pas à utiliser ce document.
26 [La Chambre de première instance se concerte]
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, la Chambre qui en a délibéré,
28 n'autorise pas le Procureur à utiliser ce document dans la mesure où la
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1 Chambre estime qu'il n'y a pas de pertinence par rapport à l'utilisation
2 originale de cette photo qui était la question de la cocarde.
3 Donc, ce fait, passez à autre, Monsieur le Procureur.
4 M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président. Je ne sais pas si le
5 témoin entre-temps a lu le document. S'il l'a lu, je ne lui poserais pas de
6 question; s'il ne l'a pas lu, je peux lui poser éventuellement une ou deux
7 questions sans produire le document.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais ne posez pas de question sur la personne
9 qui a la cane.
10 M. DUTERTRE : Non. Je passe à autre chose tout à fait différente, Monsieur
11 le Président.
12 Q. Vous nous avez indiqué, Monsieur Karlovic, que dans cette pièce à
13 Motadeks, vous avez été emmené il y avait une vingtaine de Chetniks, et
14 puis deux personnes sont venues vous sauver de la situation dans laquelle
15 vous vous trouviez. Est-ce que vous pouvez dire avec certitude - je dis
16 bien "avec certitude" - quelle était leur motivation réelle en dehors de ce
17 qu'ils ont pu dire, quelle était leur motivation réelle pour venir vous
18 sauver ?
19 R. Tout simplement je pense que c'étaient des gens comme ça. C'est ça leur
20 caractère. Ils n'ont pas permis qu'il y ait assassinat, torture, et
21 massacre. Je sais que Mare m'a dit qu'il était Serbe qui croyait en Dieu.
22 Voilà. Même pour moi, il est difficile de trouver une autre motivation.
23 Q. Je vous remercie. Quelle connaissance directe, personnelle avez-vous de
24 ce qu'ils ont pu faire avant et après la période où vous avez été en
25 contact avec eux et pendant laquelle ils vous ont extrait de cette maison ?
26 R. Je n'en sais rien.
27 Q. Je vous remercie. Vous nous avez indiqué qu'après d'être sorti de cette
28 maison, vous avez été conduit à Velepromet, que vous avez eu un traitement
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1 médical. De fait, d'après ce que vous nous avez expliqué vous aviez été
2 torturé et battu, étiez-vous compte tenu de cet état physique dans une
3 position qui vous permettait de voir sur le visage de ces deux personnes
4 qui vous ont sauvé s'ils avaient fait ou non des actes répréhensibles avant
5 ? Est-ce que vous étiez dans une situation d'observer cela ?
6 R. Je n'ai pas eu l'occasion de le faire, et je n'aurais pas pu savoir ce
7 qu'ils avaient fait précédemment.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je me dois d'observer
9 que, maintenant, c'est le contre-interrogatoire mené par le Procureur et il
10 essaie de remettre en question la déposition de son propre témoin. Je viens
11 de faire cette objection et vous allez faire ce que vous voulez.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Procureur. Dans les questions
13 supplémentaires, il faut d'abord poser le fondement en rappelant la
14 question qu'avait posée l'accusé, pour revenir sur la réponse donnée.
15 M. DUTERTRE : Oui, je voulais gagner du temps, mais de mémoire, l'accusé
16 avait demandé si d'après le -- je ne sais pas [imperceptible] choisi, mais
17 si d'après leur apparence, ils étaient
18 -- ils apparaissaient comme des gens qui avaient pu la veille faire une
19 chose et -- ou avant faire une chose, et ensuite, le contraire. C'était le
20 fondement de ma question. J'ai raccourci, je m'en excuse, pour être le plus
21 court possible, mais il y avait bien un suivi par rapport à une question de
22 l'accusé.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, reposez votre question au témoin.
24 M. DUTERTRE : Et je crois qu'il a répondu, Monsieur le Président, en
25 réalité.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : -- le début --
27 M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président.
28 Q. Monsieur Karlovic, l'accusé vous a demandé si ces personnes pouvaient -
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1 - avaient l'apparence de personnes qui la veille auraient pu commettre - je
2 ne sais pas de façon exacte, mais c'est l'esprit - avaient pu commettre des
3 chose répréhensibles et puis avaient pu vous sauver par la suite. Donc, ma
4 question était : est-ce que vous étiez dans une condition physique
5 suffisante pour pouvoir observer cette chose et avoir une opinion sur cette
6 chose ?
7 R. Je vais vous le dire : j'ai donné mon estimation. D'après leur
8 caractère et de la manière dont ils m'ont sauvé, j'ai dit que je croyais
9 que ce n'était pas le type d'hommes qui auraient pu tuer quelqu'un de sang
10 froid. Mais je n'aurais pas pu identifier et savoir à qu'ils appartenaient,
11 ce qu'ils avaient fait, quelle est l'unité exactement à laquelle ils
12 appartenaient. Ça je n'étais pas en mesure de l'identifier. Donc, mon
13 opinion c'est de me dire, ils m'ont sauvé moi : est-ce que ça peut être des
14 gens qui auraient pu tuer de sang froid quelqu'un d'autre. Je vous ai donné
15 ma réflexion. J'espère que j'ai été clair.
16 Q. C'est suffisamment clair. Lorsque vous étiez à la fois à l'hôpital,
17 puis à la caserne de la JNA, puis à Ovcara, est-ce que vous avez vu --
18 entendu des Chetniks ou d'autres soldats présents pour reconnaître parmi
19 vous des prisonniers comme ayant été sur la ligne de front, et comme ayant
20 participé à des combats ? Est-ce que certains du côté ennemi ont reconnu
21 parmi les prisonniers des combattants qu'ils auraient pu identifier sur la
22 ligne de front ?
23 R. C'était à Ovcara que l'on pouvait remarquer ceci le plus. Oui, il y en
24 avait à Ovcara. Maintenant, pour l'hôpital, je ne peux pas m'en souvenir.
25 Pour la caserne, non plus, je ne me souviens pas. Je sais que pour Ovcara
26 je peux vous dire que c'est là qu'on a pu reconnaître des gens le plus.
27 Q. Entendu. Et un dernier point de clarification. L'accusé vous a présenté
28 différents documents concernant des rapports que -- un entretien avec la
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1 sécurité militaire, et puis il y a eu une citation d'un transcript dans
2 l'affaire Mrksic, où on parlait d'un contact deux jours avant de venir
3 témoigner devant le Tribunal. Et je n'étais pas bien sûr d'avoir compris.
4 Je voulais une clarification puisque cette citation était un peu sortie du
5 contexte. Et donc, je voulais savoir : quand vous avez répondu : "Oui, il y
6 avait eu un contact deux jours avant de venir pour témoigner devant le
7 Tribunal," vous vous référiez à votre venue pour témoigner en 1996 -- ou à
8 votre venue devant le Tribunal pour témoigner en 2006 ?
9 R. Si je puis je vais vous corriger pour essayer de comprendre, en fait,
10 ce document a été rédigé de façon générale. Je n'ai peut-être pas remarqué
11 que l'on ait cité strictement que deux jours avant de venir témoigner dans
12 l'affaire Mrksic, j'ai été récolé. Je ne sais pas si on peut regarder ce
13 document de nouveau, mais je l'ai vu nulle part que Vilim Karlovic a été
14 récolé ou préparé deux jours avant l'affaire en question.
15 Ce sont des documents généraux où le service donnait -- faisait des
16 rapports, et donc, je répète qu'entre 1996 et 1998, je ne sais pas trop à
17 quel moment précis, il y a eu effectivement un entretien. Mais par la suite
18 je ne me suis plus du tout entretenu avec qui que ce soit des services du
19 renseignement et de sécurité militaire, alors, en fait, maintenant, pour
20 vous dire, il n'y a pour sauf ma famille qui sait que je suis ici.
21 Q. En tout état de cause, c'était une fois et simplement en 1996 ? C'est
22 ce que je voulais comprendre de votre réponse que vous avez eu ce contact.
23 R. Oui, oui, car je n'ai pas de raison de dire que je n'ai pas d'autres
24 entretiens. S'il y avait eu d'autres entretiens, je vous l'aurais dit, mais
25 là, il n'y a vraiment pas eu d'autres entretiens.
26 Q. Je vous remercie.
27 M. DUTERTRE : Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le Président.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, si aucun Juge n'a de questions à poser,
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1 Monsieur, je vais vous remercier d'être venu apporter votre témoignage à La
2 Haye pendant ces deux jours et je vous souhaite donc un bon retour. Et je
3 demande à Mme l'Huissière de vous raccompagner.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci à tous.
5 [Le témoin se retire]
6 [La Chambre de première instance se concerte]
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je me tourne vers l'Accusation. Est-ce que le
8 témoin suivant est prêt ?
9 M. MUNDIS : [interprétation] Bien. On va introduire le témoin. Monsieur le
10 Président, l'Accusation est prête à continuer avec le témoin prochain;
11 c'est M. Dragutin Berghofer, et c'est M. Ferrara qui procédera à son
12 interrogatoire principal conformément à l'article 92 ter.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, la Chambre salue M. Ferrara et qui dont
14 intervient la première fois devant cette Chambre.
15 M. FERRARA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est bien la
16 première fois. Je me suis joint au bureau du Procureur en octobre 2007, et
17 c'est donc ma première fois. C'est la première fois que j'interviens dans
18 cette affaire.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, je rappelle qu'on avait indiqué, pour ce
20 témoin, que l'Accusation aura 30 minutes et M. Seselj une heure 30, s'il
21 veut contre-interroger.
22 Alors, Monsieur Ferrara, dans la procédure 92 ter, il faudra que vous
23 fassiez un bref résumé du contenu de la déclaration écrite quand le témoin
24 sera là, encore faut-il qu'il soit là. Tout à l'heure on m'avait dit qu'il
25 avait disparu. Alors, j'espère qu'on l'a retrouvé.
26 M. FERRARA : [interprétation] Oui, mais nous l'avions retrouvé par la
27 suite.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Madame l'Huissière dit non.
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1 "The Witness, no" ?
2 Non, le témoin a disparu à nouveau.
3 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Il y a environ
4 20 minutes on m'a informé que le témoin était en route. Je ne sais pas dans
5 quel hôtel il séjourne et combien de temps il lui faut pour venir jusqu'au
6 Tribunal. Nous pouvons peut-être prendre une brève pause, si vous le
7 voulez, ou simplement l'appeler demain matin, comme vous le souhaitez, bien
8 sûr.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : -- délibérer.
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. D'après les dernières informations, il est dans
12 le bâtiment et il est en route. Encore faut-il qu'il ne se trompe pas de
13 salle d'audience ?
14 J'en profite pour demander à M. Seselj : vous confirmez toujours que vous
15 ne voulez pas contre-interroger ce témoin ?
16 Monsieur Seselj.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'accepterai jamais de mener un contre-
18 interrogatoire d'un témoin qui vient témoigner en vertu de l'article de 92
19 ter, bis, et quater, et aucun témoin qui témoigne par vidéoconférence.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis.
21 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je ne
22 voulais pas ajouter autre chose sur ce point, mais en attendant que le
23 témoin ne se présente dans le prétoire, je souhaiterais profiter de cette
24 occasion pour soulever une question, si je puis.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous le pouvez.
26 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie. Le 7 mars 2008, l'Accusation
27 a déposé une requête afin de remettre dix pièces sur la liste 65 ter, et il
28 y avait également une liste confidentielle en annexe de ce document.
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1 Le deuxième document qui se trouve dans le tableau en B/C/S qui porte le
2 numéro ERN0094-9847-0094-9852, ces documents figurent déjà sur la liste 65
3 ter sous le numéro 1-5-2-3, 1523. A la suite de -- il semblerait que ce
4 document apparaisse deux fois sur notre liste. L'ancien numéro étant un 1-
5 5-8-5, et un 1339, et le document 65 ter
6 -- le vieux numéro 65 ter 1595 qui figurait dans la première requête 94(B)
7 a été biffé car c'était un duplicate.
8 Et le numéro 65 ter que nous avons actuellement 1523, qui porte le numéro
9 ERN que j'ai mentionné il y a quelques instants, ne doit pas être placé sur
10 la liste de pièces courantes. Nonobstant ce fait, l'Accusation demande à la
11 Chambre de bien tenir compte de ce document avec la requête 94(B) qui a été
12 déposée un peu plus tôt. Merci.
13 M. LE JUGE ANTONETTI : -- il vous en est donné acte et la Chambre rendra
14 une décision suite à votre requête après avoir recueilli les observations
15 de la Défense.
16 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur Mundis, en français, le
17 numéro que vous avez évoqué, le numéro 65 ter que vous avez donné à la
18 ligne 1, à la page 101, a été listé comme étant le numéro 1923, alors je
19 voulais simplement m'assurer de savoir si c'est bien le bon numéro car au
20 transcript on voit 1523.
21 M. MUNDIS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge Harhoff. Ce
22 sont les bons numéros, c'est le numéro qui figure sur le transcript en
23 anglais.
24 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.
25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier
27 que vous entendez bien dans votre langue la traduction de mes propos.
28 Pouvez-vous décliner votre nom, prénom et date de naissance ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Dragutin Berghofer. Je suis né le 29 octobre
2 1940 à Osijek.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : -- une profession, une activité, ou bien, êtes-vous
4 retraité ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis retraité.
6 M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous, Monsieur, déjà témoigné devant un
7 tribunal sur les faits qui se sont déroulés dans l'ex-Yougoslavie, et si
8 c'est le cas, devant quel tribunal ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge, j'ai déjà témoigné
10 trois fois et c'est ma quatrième fois ici devant ce Tribunal.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez témoigné trois fois déjà. Pouvez-vous, si
12 vous vous en souvenez, m'indiquer dans quelle affaire vous avez témoigné ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] La première fois que j'ai témoigné c'était
14 pour M. Slavko Dokmanovic, c'était à deux reprises, et une fois pour M.
15 Seselj -- non, excusez-moi, mon Dieu -- Sljivancanin. Excusez-moi.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Et dans les trois fois où vous êtes venu,
17 c'était à la demande de l'Accusation ? Vous étiez le témoin de l'Accusation
18 ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Je suis venu témoigner en ma qualité
20 de témoin.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Lisez le serment, s'il vous plaît.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
23 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
24 LE TÉMOIN : DRAGUTIN BERGHOFER [Assermenté]
25 [Le témoin répond par l'interprète]
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur, vous pouvez vous asseoir.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Quelques brèves explications de ma part. Comme
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1 c'est la quatrième fois que vous venez, vous savez comment nous
2 fonctionnons mais peut-être pas dans le cadre de cette procédure dite de
3 l'article 92 ter. Vous allez devoir répondre à quelques questions qui vont
4 vous être posées par M. Ferrara, que vous avez dû rencontrer, et la Chambre
5 a prévu une demi-heure. A l'issue de cette phase, normalement l'accusé
6 devrait vous contre-interroger, mais l'accusé nous a fait savoir qu'il ne
7 vous contre-interrogera pas. Le cas échéant, les Juges qui sont devant vous
8 pourront également vous poser des questions. Voilà.
9 Donc, je donne la parole à M. Ferrara, qui va d'abord faire un bref résumé
10 de votre déclaration.
11 M. FERRARA : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
12 Le Témoin Dragutin Berghofer a vécu à Vukovar depuis l'âge de six ans et
13 jusqu'à 1991 il a vécu à Vukovar. C'était un homme d'affaire.
14 L'INTERPRÈTE : Ralentissez, s'il vous plaît.
15 M. FERRARA : [interprétation] J'ai des documents que je peux remettre --
16 Il était un entrepreneur. Il avait cinq magasins et plusieurs maisons à
17 Vukovar. Il était divorcé -- avait deux filles. Une s'appelait Vesna, qui
18 était âgée de 17 ans; et Jasna, qui avait 26 ans, à l'époque; il vivait à
19 l'époque avec une femme appelée Ljubica.
20 Le 24 août 1991, la guerre de Vukovar a éclaté et en trois mois, il a tout
21 perdu. Le jour où la guerre a commencé, sa maison a été détruite par un
22 char de la JNA, et il était contraint de vivre dans la cave avec -- dans
23 une cave avec plus de 40 personnes jusqu'à ce que la prise de la ville. Le
24 15 septembre 1991, sa fille, Vesna, avait été enlevée à Negoslavci par les
25 soldats de la JNA qui faisaient un nettoyage de la région. Par la suite, il
26 a découvert qu'après la chute de Vukovar, elle avait été ramenée à la
27 maison, mais autour du 10 décembre 1991, sa fille s'est fait enlevée de
28 nouveau par des habitants du cru qu'ils avaient remise entre les mains des
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1 Serbes. En 2000, 2001, son corps a été découvert dans le cimetière de
2 Vukovar.
3 Le 6 novembre 1991, la femme avec qui il vivait, Ljubica, avait été tuée
4 par un éclat d'obus qu'il l'a touchée au cou. Lorsque la guerre a commencé,
5 M. Berghofer a rejoint la défense de Vukovar, et par la suite, il a été
6 reconnu comme étant un membre des ZNG de la ZNG. Il n'était pas combattant,
7 mais il s'occupait de l'approvisionnement en nourriture, et de la
8 logistique, pour les personnes qui vivaient dans les caves de la ville.
9 Le 17 novembre 1991, M. Berghofer a mené une colonne de plus de 300
10 personnes pour faire une percée, mais très vite, il a compris qu'il était
11 impossible de quitter la ville dû à un pilonnage nourri par la JNA et les
12 mines antipersonnel qui étaient placés autour de la ville, c'est ainsi
13 qu'il a pris la décision d'aller à l'hôpital.
14 Entre-temps, il y avait des personnes qui pouvaient marcher on leur a dit
15 d'aller à l'hôpital, et les haut-parleurs disaient que les personnes
16 devaient se rendre donc à l'hôpital et qu'un convoi allait les emmener à
17 Zagreb. Il a trouvé à l'hôpital une situation de chaos total, il y avait
18 des personnes dans le couloir, et dans les lits, il y avait jusqu'à trois
19 personnes. Il est resté là pendant la nuit et il s'est nourri avec de la
20 poudre pour bébé -- la nourriture pour bébé.
21 Vers 4 heures de l'après-midi -- vers 6 heures de l'après-midi, le 19
22 novembre 1991, les soldats de la JNA sont entrés dans l'enceinte de
23 l'hôpital. Au cours de cette période, M. Berghofer a entendu 18 coups de
24 feu et il a entendu également le bruit des moteurs des bus et des camions
25 qui avaient commencé l'évacuation de l'hôpital.
26 Le matin du 19 novembre 1991, le témoin avec d'autres personnes, avait été
27 fouillé -- placé à bord de bus, et emmené vers la caserne de la JNA. Les
28 détenus sont restés à bord du bus pendant environ quatre heures, et toutes
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1 les personnes autour de lui portaient des uniformes et des vêtements
2 civils, avec de longues barbes et des caps et des couvre-chefs. Ils se
3 promenaient autour des autobus, ils célébraient, ils se réjouissaient, ils
4 portaient de longs fusils, et des couteaux.
5 Plus de 15 personnes se sont faits descendre du bus, ils ont été battus
6 férocement, et par la suite, on les a placé à bord de bus militaires
7 jusqu'à Negoslavci. Plus tard, le témoin --
8 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi ce qu'a dit
9 M. Ferrara.
10 M. FERRARA : [interprétation] Vers une heure de l'après-midi, le bus
11 a quitté la baraque d'Ovcara et c'est là que les détenus avaient été de
12 nouveau fouillés. On les a pillé de leurs biens, ils ont été forcés
13 d'entrer dans un hangar en passant par une haie -- une double haie de
14 soldats. Il y avait des gens -- des hommes serbes portant différents
15 uniformes et des vêtements civils et ils ont été battus avec tout ce qu'ils
16 avaient des bâtons de bois, des coups-de-poing, des coups de pied, ainsi
17 que des crosses de fusil et des barres de fer.
18 Ensuite, le témoin a vu Zamarcic, appelé "le grand gars," et Milos,
19 et à la suite, il n'a plus montré de signe de vie, dit le témoin, donc,
20 Milos, qui n'a plus montré de signe de vie. Il a également vu que Gaspar,
21 dont le nom de famille est inconnu, et un autre homme avait été battu à
22 mort après leur arrivée aux hangars. A l'intérieur du hangar, le témoin a
23 vu une atmosphère horrible. Des gens criaient -- ils ont été passés à
24 tabac, ils criaient, les gens leur donnaient des coups de pied, et on les
25 battait avec des barres de fer et des crosses de fusil. A l'intérieur du
26 hangar vers le milieu du hangar, il y avait de la paille et du sang.
27 Un peu plus tard, quatre Chetniks sont entrés avec une barre de métal
28 et ils lui ont donné un coup très violent.
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1 Par la suite, le témoin a été séparé avec d'autres personnes placées
2 à bord d'un petit -- une camionnette où il a été emmené à Velepromet; il a
3 été ensuite emmené à l'usine de Modateks où il a passé la nuit. Il a été
4 insulté, interrogé.
5 Le lendemain matin, on l'a emmené à Velepromet où il est entré dans
6 ce qu'on appelait "la chambre de la mort," et c'est là qu'il a vu un très
7 grand nombre de ces connaissances battues à tabac et emmenées. René
8 Matausek, le fils de Dzemo, Crk, Golac, et Tihomir Perkovic. Le premier
9 était René Matausek. M. Berghofer ne les a plus jamais revus.
10 Il a été sauvé par un capitaine de la JNA qui était entré dans la
11 caserne de la JNA peu de temps avant minuit, le 21 novembre. Par la suite,
12 il y a eu des prisonniers à Sremska Mitrovica, et le 17 mars -- le 27 mars
13 1992, il a fait l'objet d'un échange tout près de [imperceptible].
14 Ceci met fin à la lecture de mon résumé. Merci.
15 Interrogatoire principal par M. Ferrara :
16 Q. [interprétation] Avant de parler des pièces, Monsieur Berghofer, est-ce
17 que vous avez rencontré les représentants du bureau du Procureur, le 6 mars
18 2008 ?
19 R. Oui, Monsieur le Président.
20 Q. Est-ce que vous avez donné une déclaration aux représentants du bureau
21 du Procureur relative aux événements qui vous ont arrivé en 1991 à Vukovar,
22 ainsi qu'à d'autres personnes ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de relire la déclaration écrite que
25 vous avez donnée, et ce dans votre propre langue ?
26 R. Oui.
27 Q. Quelle est votre langue, Monsieur ?
28 R. Le croate.
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1 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Greffier, je vous demanderais de
2 montrer sur le prétoire électronique le document 65 ter portant la cote
3 7178. Je m'excuse. Le numéro est en fait le 7183. Il s'agit d'une
4 déclaration du témoin Dragutin Berghofer en application du 92 ter.
5 Q. Monsieur le Témoin, au vu de la première page, est-ce que vous pouvez
6 voir votre signature au bas de la page ?
7 R. Oui.
8 Q. Je voudrais que vous feuilletiez les autres pages et que vous nous
9 disiez si au bas de ces pages-là on peut voir vos parafes.
10 R. Moi, je ne le vois pas ici. Je ne le vois qu'au niveau de la liste des
11 victimes d'Ovcara. Non, ça n'y figure pas.
12 M. FERRARA : [interprétation] J'aimerais que l'Huissière vous le
13 montre.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Ah là, oui, ce sont les initiales que
15 j'ai apposées.
16 M. FERRARA : [interprétation]
17 Q. Justement. Est-ce que vous reconnaissez ces initiales qui
18 figurent au bas des pages ?
19 R. Oui, je les reconnais.
20 Q. Ce document, montre-t-il la date à laquelle vous avez signé ?
21 R. Oui. Ça s'est passé le 6 de ce mois-ci.
22 Q. Est-ce que la déclaration reflète, de façon précise, le souvenir que
23 vous avez gardé des événements qui y sont décrits ?
24 L'INTERPRÈTE : Le témoin hors micro.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux parler ? Je vois qu'à un mot près, à
26 gauche ou à droite; le reste est bon.
27 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Président, nous aimerions
28 que ce document soit versé au dossier. Il s'agit du document 7183 de la
Page 4867
1 liste 65 ter.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P278, Monsieur le
4 Président.
5 M. FERRARA : [interprétation] J'aimerais demander à M. le Greffier de
6 nous montrer le numéro 7178 de la liste 65 ter.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez dit -- à un
8 moment donné, quand le Procureur vous a demandé si le document est bien
9 conforme à ce que vous aviez dit, vous avez dit oui, à un mot près, à
10 droite ou à gauche. Quel est le mot que vous auriez aimé changé ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Si j'ai bien compris, Monsieur le Juge, on a
12 dit que ma fille avait 17 ans. Non, il y en a une qui avait 26 et l'autre
13 27 ans. Ensuite, l'épouse de la mère de ces filles c'était Jelka Djitko, et
14 Ljubica, c'était une amie. On peut dire que c'était ma femme, mais que nous
15 n'étions pas véritablement mariés, conjoints de fait.
16 Je voudrais également ajouter autre chose.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous en sommes très rapidement arrivés à
19 Velepromet. On n'a pas -- on n'est pas resté un peu sur Modateks. Il s'est
20 produit des choses là-bas, mais c'est à peu près ce que j'ai raconté.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc, si je comprends bien, celle qui a été
22 tuée le 6 novembre, c'est votre concubine, pas votre femme que vous avez
23 épousée en 1900 -- que vous aviez épousée dont vous aviez divorcée en 1982;
24 c'est bien ça ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est cela. Disons que c'était mon amie. On a
26 dit mon épouse. Disons que nous ne sommes pas mariés.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci.
28 M. FERRARA : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre le
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1 document 2513 en application du 65 ter.
2 Q. Monsieur Berghofer --
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce que vous reconnaissez cette photo ?
5 R. Oui, je la reconnais.
6 Q. Qu'est-ce que c'est ?
7 R. C'est l'hôpital de Vukovar.
8 Q. Combien de nuits avez-vous passées là-bas ?
9 R. Et bien, à compter du 17, la nuit du 17, le 18, et jusqu'au 19.
10 Q. Et où vous a-t-on emmené depuis l'hôpital ?
11 R. Nous sommes d'abord allés à la caserne.
12 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais que
13 l'on passe au versement de ce document aux pièces à conviction.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, un numéro pour cette carte --
15 pour cette photo plutôt.
16 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le 279, Monsieur le Président.
17 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Greffier, veuillez nous
18 montrer maintenant le 4040, page 3 du 65 ter.
19 Q. Monsieur Berghofer, pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que
20 cette photo nous montre ?
21 R. Oui, c'est la route de Negoslavci. Il y a là l'entrée secondaire,
22 l'entrée accessoire de la caserne.
23 Q. Pourriez-vous -- vous avez un stylo électronique; est-ce que vous
24 pouvez nous indiquer par où l'autocar est entré dans l'enceinte de cette
25 caserne de la JNA ?
26 R. [Le témoin s'exécute]
27 Q. Est-ce que ceci est une vue depuis l'extérieur ou depuis l'intérieur de
28 la caserne ?
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1 R. C'est une vue à partir de l'enceinte.
2 Q. Donc depuis l'intérieur.
3 R. C'est cela.
4 Q. Combien de temps êtes-vous resté dans ce campement à bord des autocars
5 ?
6 R. Madame, Messieurs les Juges, entre à 8 heures 39, on était encore à
7 l'hôpital. Il faut ajouter une quinzaine de minutes. Donc, ça nous donne
8 quatre, cinq heures. On est arrivé donc à 13 heures 30 à Ovcara. Je m'en
9 souviens très bien.
10 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire rapidement ce qui s'est passé à
11 bord des autocars et à l'extérieur ?
12 R. Oui, oui. Ils sont arrivés à bord de ces autocars avec des plaques de
13 la ville de Zrenjanin. Il y avait à peu près 45 sièges dans ces autobus, et
14 disons que nous sommes restés assis quatre heures, peut-être un peu plus,
15 pendant ce temps, de jeunes soldats ont assuré le gardiennage aux portes
16 d'entrée des autobus. Et à un moment donné, il est sorti de mon autocar le
17 Pr Licina, puis un dénommé Hedik, qui était horloger de son état, et le
18 mari de ma cousine -- ou sœur Biba, excusez-moi, je vais essayer de m'en
19 souvenir avec précision.
20 Il y a eu trois personnes de descendues qui ont été libérées. Et comme moi,
21 j'ai -- comme j'ai pu remarquer, on a sorti des gens des autres autocars.
22 Je me suis dit, ils en ont de la chance, mais quand j'ai vu par la suite
23 qu'on leur donnait des coups de pied, qu'on leur donnait des coups de cross
24 sur la tête, qu'on les bousculait, et qu'on leur assénait des coups-de-
25 poing, j'ai changé de --
26 Q. Est-ce que quelque chose se serait produit là à l'endroit où vous avez
27 indiqué tout à l'heure ?
28 R. Oui, tout ça parce que les personnes qu'on a sorties des cars, du moins
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1 celles que j'ai vues recevoir des coups, ont été placées à bord d'un
2 septième autocar, qui lui était militaire.
3 Q. Est-ce que vous pouvez marquer sur la photo où est-ce que cela s'est
4 produit ?
5 R. C'est trop étroit. Là, il y avait encore des maisons ou des bâtiments
6 dans l'enceinte et nous autres, on était debout ici.
7 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais que soit
8 versé au dossier cette pièce à conviction 4040 du 65 ter.
9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce P
10 280.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais ajouter, si vous me le permettez.
12 La troisième personne c'était Koljesar, le mari de cette infirmière Biba,
13 il travaillait pour Elektro Slavonija; c'est la troisième personne.
14 M. FERRARA : [interprétation]
15 Q. Monsieur Berghofer, où est-ce que vous avez été emmené après la caserne
16 ?
17 R. A Ovcara.
18 M. FERRARA : [interprétation] J'aimerais qu'on montre maintenant au témoin
19 la pièce 2825 du 65 ter.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, je vous signale qu'il vous
21 reste cinq minutes dans le temps qu'on vous a imparti. De ce fait, si les
22 Juges n'ont pas de questions à poser, on pourrait terminer aujourd'hui.
23 M. FERRARA : [interprétation] J'ai quelques questions encore.
24 Q. Monsieur Berghofer, qu'est-ce que c'est cette liste ?
25 R. C'est tous ces jeunes que j'ai trouvés à Ovcara et aux côtés desquels
26 j'ai été passé à tabac, moi aussi.
27 Q. Donc, qui a rédigé cette liste ?
28 R. C'est moi.
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1 Q. Quand ?
2 R. Ça fait à peu près deux ans. J'ai eu dix minutes de temps pour le
3 faire. Je l'ai rédigé ici de tête, au Tribunal, ici.
4 Q. Où avez-vous vu les gens qui figurent sur cette liste ?
5 R. C'étaient des gens qui étaient avec moi à Ovcara.
6 Q. Avez-vous revu ces gens-là encore à quel que moment que ce soit ?
7 R. Jamais.
8 Q. Savez-vous si on les a retrouvés par la suite, et si oui, où ?
9 R. Certains ont été retrouvés à Ovcara. D'autres n'ont pas encore été
10 retrouvés, Madame et Messieurs les Juges.
11 Q. Quand vous dites certains ont été retrouvés à Ovcara, que voulez dire
12 par là ? Les a-t-on retrouvés vivants ou morts ?
13 R. Morts, morts.
14 Q. Vous avez dit que vous avez rédigé cette liste il y a deux ans, où
15 exactement ?
16 R. Lorsque le Procureur, c'était M. Moore ici. Et je crois que c'était le
17 3 mars, si mes souvenirs sont bons, le 3 mars 2006. Il doit y avoir une
18 date dessus.
19 Q. Est-ce que vous avez rédigé cette liste avant que d'avoir témoigné dans
20 un procès ?
21 R. J'avais eu une autre liste antérieure encore en 1992 quand je suis
22 rentré de Mitrovica, j'avais un papier. Et le jour même s'agissant des
23 personnes dont je me souvenais je les ai listées dès que je suis retourné
24 de mon emprisonnement. Mais chez M. Moore, comme je ne l'avais pas apporté,
25 je n'ai pas été obligé, mais il m'a dit simplement comment se fait-il que
26 vous n'avez pas -- n'ayez pas pris cette liste. Mais, moi, je ne
27 l'apportais jamais, donc, c'est de mémoire à la va-vite en dix minutes que
28 j'ai rédigé tout cela parce que c'est des fils de certains de mes
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1 collègues. Et aussi, il y avait même des amis, des amis de mon âge, des
2 gens avec qui j'avais grandi, donc, je n'ai pas eu de gros problèmes à
3 rédiger cette liste.
4 Q. Fort bien.
5 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais verser au
6 dossier cette liste qui est la pièce 2825 du 65 ter.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P281, Madame et
9 Messieurs les Juges.
10 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Greffier, pouvez-vous nous
11 montrer maintenant le 4103 du 65 ter ?
12 Q. Monsieur Berghofer.
13 R. Oui.
14 Q. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre ce que cette photo nous montre
15 ?
16 R. Ici c'est la photo de Velepromet.
17 Q. Est-ce que vous pouvez indiquer avec le stylet l'entrée de Velepromet
18 et la pièce où vous avez été emmenée ?
19 R. C'est ce qu'on appelait "la pièce de la mort, la chambre de la mort."
20 Q. Vous pouvez y mettre une croix, si vous le souhaitez.
21 R. [Le témoin s'exécute]
22 Q. C'est l'entrée ?
23 R. Ici à droite. Ça va, c'est la route aussi vers Negoslavci. Plus en
24 avant, il y a la caserne.
25 Q. Vous avez fait deux marques, vous avez mis une fléchette à droite et à
26 gauche.
27 R. Oui.
28 Q. Alors, qu'est-ce qu'on voie à gauche et qu'est-ce qu'on voie --
Page 4873
1
2 R. A gauche, c'est cette "chambre de la mort." C'est là qu'on nous a mis
3 dedans.
4 Q. Pourquoi a-t-on appelé cela la "chambre de la mort" ?
5 R. Parce que, Mesdames et Messieurs les Juges, mis à part nous sept ou
6 huit, plus personnes n'en n'est ressorti vivant. Plus personne n'est jamais
7 revenu.
8 Q. Vous pourriez inscrire le chiffre 1 à côté de "la chambre de la mort" ?
9 R. [Le témoin s'exécute]
10 Q. Merci. Vous vous souvenez des noms des personnes qui ont été emmenées
11 de cette pièce pendant que vous étiez là ?
12 R. Très bien, puisque je les connais. Je suis originaire de Vukovar,
13 depuis 1992, 1993, j'en ai parlé. C'était Matausek, Golac, Tihomir
14 Perkovic. Du tzigane, Dzema, qui jouait de l'accordéon - c'est comme ça
15 qu'on l'appelait - il y avait son fils, Crk, qui était directeur de
16 l'entreprise agroalimentaire, Pik. Il était à la tête de l'abattoir, chef
17 de l'abattoir.
18 Q. Les avez-vous revus par la suite ?
19 R. Non, jamais.
20 Q. Savez-vous si on les a retrouvés ?
21 R. Tihomir Perkovic j'ai été sauvé avec lui d'Ovcara pour autant que je le
22 sache n'a jamais été retrouvé.
23 Q. Et les autres ?
24 R. Pour autant que je le sache, je pense que Matausek, non plus. Puis pour
25 ce qui est de Golac, son père était en Allemagne. Il l'a cherché une fois
26 mais après, je n'en n'ai plus entendu parler, ni de son père. En fait, ils
27 n'ont pas été retrouvés.
28 Q. Monsieur Berghofer, toutes ces personnes que vous avez mentionnées
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1 c'étaient des civils ou des militaires ?
2 R. Pour autant que je le sache, seul le fils de Dzema, le tzigane, il
3 était le seul à être en uniforme. Il n'était pas très grand, un mètre 60, à
4 peu près. Et l'autre l'a soulevé, l'a placé sur un table, donc, ce
5 réserviste, ce même qui les a tous extrait par la suite, les a fait sortir
6 et il a dit : ça c'est un vrai ZNG mais pas vous au sens des organes
7 génitaux féminins, enfin, si vous me permettez. Mais il a dit ça dans
8 l'original.
9 Q. Ma dernière question. Vous n'arrêtez pas d'utiliser le terme Chetnik.
10 Qu'entendez-vous par là ?
11 R. Ecoutez, j'ai grandi en Yougoslavie. J'ai vu tous ces films sur la
12 résistance des Partisans, les Chetniks, ils étaient représentés avec une
13 cocarde, barbus, qui avaient des couteaux, qui étaient des égorgeurs, qui
14 se tenaient mal. Voilà. C'est ce que j'ai vu dans des films; cependant, là
15 aussi, il est arrivé que parfois il y en avait qui est-ce qu'on appelle la
16 sajkaca serbe et qu'il y a une insigne et qu'ils soient barbus.
17 Q. Vous avez vu ce type d'hommes à Vukovar pendant la guerre, ce que vous
18 venez de nous décrire ?
19 R. Oui, Madame, Messieurs les Juges.
20 M. FERRARA : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais verser au
21 dossier la pièce 65 ter 4103.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Un numéro.
23 M. FERRARA : [interprétation] Avec des marquages, bien entendu.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P282.
25 M. FERRARA : [interprétation] Tous ces documents sont annexés à la
26 déclaration du témoin que nous avons versé au dossier au début de cet
27 examen. Je n'ai pas d'autres questions.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : J'aurais juste une question avant de terminer,
Page 4875
1 Monsieur le Président.
2 Questions de la Cour :
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Comment faites-vous la différence entre les Chetniks
4 et les soldats de la JNA ou de la Défense territoriale ? Qu'est-ce qui vous
5 permet de faire la distinction ?
6 R. Voilà, Monsieur le Juge, les jeunes soldats réguliers de l'armée, ils
7 avaient des uniformes vert gris olive. Les gens du cru, les réservistes,
8 ils avaient un uniforme un peu plus ancien de la JNA. Il y avait des gens
9 de Vukovar parmi eux certains les hommes du cru étaient en civil et
10 d'autres on les avait jamais vus. Vous aviez des gens comme Topala, c'était
11 un tireur, qu'il avait le bonnet monténégrin puis il y en avait qui avait à
12 la caserne une sajkaca, puis à Ovcara également, certains avaient la même
13 chose avec des insignes. Voilà. Je me suis dit que c'étaient des Chetniks,
14 c'est comme ça que je les ai vus.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur, votre témoignage vient de se
16 terminer puisque l'accusé ne veut pas vous contre-interroger.
17 Donc, je vous remercie, d'être venu à la demande de l'Accusation, et
18 la Chambre évidemment tient à vous faire part de toute sa compassion pour
19 ce qui est arrivé aux membres de votre famille, votre fille, et votre
20 compagne.
21 Je vais donc demander à Mme l'Huissière de bien vouloir vous
22 raccompagner.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
24 [Le témoin se retire]
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Très vite, maintenant, je vais aborder avec
26 l'Accusation le programme. Bien.
27 Demain, nous aurions pu, le cas échéant, entendre le témoin qui était prévu
28 la semaine prochaine, ça ne sera pas possible, Monsieur Mundis, le témoin
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1 de --
2 M. MUNDIS : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Ce témoin
3 n'arrivera que dimanche à La Haye, malheureusement.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, nous risquons de nous trouver dans le même
5 cas de figure qu'aujourd'hui, puisque M. Seselj ne voulant pas contre-
6 interroger, ça risque donc d'aller très vite avec le témoin qui est prévu
7 mardi. Pourriez-vous également préparer aussi le témoin suivant qui était
8 prévu pour mercredi et jeudi ? De telle façon qu'on puisse commencer dès
9 mardi avec le témoin suivant.
10 M. MUNDIS : [interprétation] Nous nous emploierons à faire cela, Monsieur
11 le Président, et je vais vous informer également de la suite. Nous sommes
12 en train de revoir les vidéos avec l'intention de visionner éventuellement
13 des vidéos pour pouvoir pleinement utiliser le temps du prétoire.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et demain, on n'aurait pas pu utiliser le
15 temps avec les vidéos ?
16 M. MUNDIS : [interprétation] Nous serons peut-être en position de faire
17 cela. Je vais recueillir l'avis des membres de mon équipe. Nous pourrions
18 peut-être communiquer à la Chambre et au Dr Seselj la liste des vidéos.
19 Peut-être dès demain. Si je puis avoir deux heures à ma disposition pour
20 voir quelle est la situation, nous pourrions en informer la Chambre par la
21 voix du juriste de la Chambre et ainsi également M. Seselj à l'unité de
22 Détention. Nous pourrions dire quelles sont les vidéos que nous serions en
23 mesure de visionner demain.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, la dernière fois, vous nous aviez
25 dit que vous n'aviez d'opposition pour la vidéo vous concernant, vous êtes
26 toujours dans cette état d'esprit ?
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, ce n'est pas ce que j'ai
28 dit. J'ai dit en revanche qu'il était possible de verser directement les
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1 enregistrements vidéo au dossier sans passer par la déposition d'un témoin,
2 sans le témoignage d'un témoin, uniquement lorsque je suis visible en train
3 de faire quelque chose quoi que ce soit à l'image. C'est uniquement là que
4 ça fait sens de verser au dossier ce genre d'enregistrements. Donc tous les
5 autres cas il faut expliquer de quoi il s'agit, d'où ça vient, quelle est
6 la source ? On doit établir la pertinence et tout le reste. Et comment
7 entendez-vous cela qu'on me fournisse la liste des vidéos ce soir, et que
8 dès demain, on commence à les visionner ?
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, la liste de vidéos vous l'avez déjà
10 depuis des années. Donc, toutes ces vidéos vous les avez et vous les avez
11 peut-être visionnées. L'intérêt c'est de passer donc des vidéos, de
12 regarder les vidéos tout le monde sans qu'il y ait nécessité d'avoir un
13 témoin sur la vidéo juste pour visualiser. Quitte après à repasser ces
14 vidéos, si besoin s'en faisait sentir, lorsque nous aurions des témoins.
15 Par exemple, la vidéo qu'on a vu ce matin, si elle avait déjà été vue avant
16 tout le monde aurait vu cette vidéo, et le Procureur ou vous-même aurait pu
17 pour confirmer un point repasser la vidéo. Voilà. Donc ça permet de gagner
18 du temps et d'être au fait. Alors, moi, j'avais cru comprendre que vous
19 étiez d'accord pour les vidéos -- c'était vos discours à vous. En revanche,
20 vous n'étiez pas d'accord sur les autres vidéos. Et je crois comprendre que
21 vous maintenez cette position.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, il y a quatre ou cinq
23 ans j'ai reçu plus de 100 heures d'enregistrements vidéo. C'était en 2003,
24 2004. C'était à l'époque où ils m'envoyaient des enregistrements vidéo
25 classiques avant qu'ils n'essaient de me fournir des DVD. Quand ils se sont
26 mis à me fournir des DVD j'ai refusé. Donc, de vraies cassettes vidéo que
27 l'on peut visionner j'en ai reçu plus de 100 heures, donc, que l'on regarde
28 d'un magnétoscope classique. Mais là, il y a toutes sortes de choses sur
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1 ces enregistrements. Si j'essaie, à cette distance-ci, d'apprécier la
2 pertinence, peut-être 5 % pas plus de pertinence.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Mundis, compte tenu des objections ce qui
4 faudrait c'est que vous nous adressiez, mais, maintenant, c'est trop tard
5 parce que, pour d'ici demain, on ne pourrait pas gérer ce problème. Il
6 faudrait que vous nous dressiez la liste des vidéos que vous pourriez nous
7 diffuser. A ce moment-là,
8 M. Seselj fera valoir ses observations et puis la Chambre décidera. Parce
9 que, là, ça serait aller trop vite de décider de passer des vidéos dès
10 demain alors même qu'il peut y avoir encore des problèmes. Donc, le mieux
11 c'est établissez une liste de vidéos, il y a trois catégories. La première
12 catégorie c'est les vidéos où M. Seselj fait des discours. Deuxième
13 catégorie, il y a des vidéos qui sont des reportages de CNN, Sky News ou
14 tout ce que l'on veut sur certains événements, et puis la troisième
15 catégorie, ça peut être des vidéos qui obligatoirement doivent être
16 présentés à un témoin. Donc, faites une liste selon vous des vidéos qui
17 rentreraient dans plusieurs catégories. M. Seselj dirait : "Je suis
18 d'accord, je ne suis pas d'accord." Et à ce moment-là, dès qu'on aurait un
19 créneau, on passe les vidéos.
20 Oui, Monsieur Mundis.
21 M. MUNDIS : [interprétation] Cela sera fait, Monsieur le Président.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, de ce fait, demain nous n'aurons pas
23 d'audience, nous reprendrons donc l'audience mardi prochain à 14 heures 15
24 puisque nous sommes d'après --
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande, Monsieur le Président, que les
28 quatre heures perdues de demain, vous l'imputez de l'Accusation ou le
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1 soustrayez du temps loué à l'Accusation car c'est la faute au parquet du
2 fait qu'il n'ait pas d'autre témoin. Des quatre heures pleines.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est un autre problème.
4 Oui, Monsieur Mundis, vous vouliez intervenir.
5 M. MUNDIS : [interprétation] J'ai cru comprendre que l'heure -- le temps
6 qui a été alloué à l'Accusation c'est l'heure allouée à l'interrogatoire
7 principal, donc, comme il n'y a pas d'interrogatoire principal, on ne peut
8 pas déduire ce temps de l'Accusation. Et je souhaiterais dire au compte
9 rendu d'audience qu'il est tout à fait clair, maintenant, et que je
10 comprends maintenant que le Dr Seselj n'examinera ou ne contre-interrogera
11 jamais les témoins 92 ter, et bis, quater. Et donc, à l'époque où le
12 calendrier a été fait, il n'était pas tout à fait clair, comme il est
13 aujourd'hui, que
14 M. Seselj ne contre-interrogera jamais ces témoins. Maintenant, cela dit,
15 on ne peut pas changer de calendrier en 24 heures. Ça prend normalement
16 cinq jours ouvrables pour faire venir d'autres témoins, c'est-à-dire je ne
17 peux pas maintenant remplir des journées comme ça. Nous ne pouvons pas --
18 cela prend environ cinq jours avant de faire venir des témoins, donc, je ne
19 peux pas les faire venir comme ça au pied levé. Donc malheureusement je ne
20 suis pas d'accord avec la suggestion du Dr Seselj pour les raisons que je
21 viens d'évoquer.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, déjà l'année dernière,
23 j'avais dit que je ne procéderais jamais au contre-interrogatoire de
24 témoins qui viennent témoigner en vertu de l'article 92 ter. Vous vous
25 souvenez que j'ai déjà -- qui, alors, que vous étiez encore juge de la Mise
26 en état, et de façon catégorique, je me suis battu pendant un an contre cet
27 article, contre la façon de procéder de cette façon-là. Je n'ai surpris
28 personne. Vous ne me croyiez peut-être pas. Vous n'avez peut-être pas cru
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1 que j'allais catégoriquement dire que je ne contre-interrogera pas, mais ce
2 n'est pas ma faute non plus.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant le temps, le temps que la Chambre a
4 déterminé pour le Procureur, c'est un temps qui est -- a été fonction de --
5 des déclarations écrites et des intentions du Procureur. Concernant le
6 témoin qui a témoigné, on lui a donné 30 minutes, donc, vous avez -- les 30
7 minutes ont été utilisées. Maintenant, le temps du contre-interrogatoire,
8 si M. Seselj ne l'utilise pas, c'est tant pis pour lui. Donc, ce temps est
9 un temps qui est perdu pour lui, mais qui n'est pas non plus gagné pour
10 l'Accusation. Ceci étant dit, quant à moi, ce que j'ai dit, ce n'est pas 14
11 heures 15 mardi, mais 14 heures 45. Voilà ce que je tenais à préciser. Je
12 vous remercie, et nous nous retrouverons mardi à 14 heures 45.
13 --- L'audience est levée à 13 heures 34 et reprendra le mardi 18 mars 2008,
14 à 14 heures 45.
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