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1 Le jeudi 12 juin 2008
2 [Audience publique]
3 --- L'audience est ouverte à 9 heures 00.
4 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler le numéro
6 de l'affaire, s'il vous plaît ?
7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Madame, Messieurs les Juges.
8 C'est l'affaire IT-03-67-T, le Procureur contre Vojislav Seselj.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, en ce jeudi 12 juin 2008, je salue les
10 représentants de l'Accusation, je salue M. Seselj, ainsi que
11 M. le Greffier, Mme l'Huissière, et tous ceux qui nous assistent dans notre
12 tâche.
13 Nous avons un témoin qui va venir. J'ai cru comprendre que
14 M. Mundis voulait intervenir mais, avant qu'il intervienne, je voudrais
15 rappeler à M. Mundis que la Chambre lui a demandé de nous donner une liste
16 actualisée des témoins 65 -- des témoins qui vont venir à partir de la
17 liste 65 ter. Nous avons besoin de cette liste, et moi, à titre personnel,
18 j'en ai besoin pour savoir s'il ne conviendra pas, le cas échéant,
19 d'amputer un certain nombre d'heures à l'Accusation, compte tenu du fait
20 que certains témoins ont manifesté leur intention d'être des témoins de la
21 Défense. Donc, ça peut avoir des conséquences sur la location du temps.
22 Donc, j'ai besoin le plus tôt possible de cette liste.
23 Je sais que ça peut vous amener -- prendre beaucoup de temps parce qu'il
24 faut vérifier certaines données, mais il y a quasiment un mois que je l'ai
25 demandé
26 Monsieur Mundis.
27 M. MUNDIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 Bonjour, Madame, Messieurs les Juges. Bonjour, Professeur Seselj, et toutes
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1 les personnes présentes dans le prétoire.
2 Pour ce qui est de votre demande, je vais m'efforcer de remettre ceci aux
3 Juges de la Chambre mardi de la semaine prochaine. Comme je vous l'ai déjà
4 précisé, je souhaite dire que l'Accusation - et sa position est celle-ci -
5 nonobstant le fait que certains de ces témoins ont précisé qu'ils
6 souhaitent être plutôt des témoins de la Défense si en soit ne signifie pas
7 pour autant que l'Accusation enlève leurs noms de la liste, et ceci ne le
8 justifie pas. Nous allons en somme vous remettre quasiment la même liste
9 que celle qui a été déposée et remise aux Juges de la Chambre précédemment.
10 Mais je vais de toute façon vous remettre une liste qui sera mise à jour et
11 qui contient les noms de tous ces témoins qui ont déjà témoigné.
12 Comme vous le savez, Madame, Messieurs les Juges, il y a plusieurs semaines
13 déjà, après un débat sur la question de fournir une longue liste au Pr
14 Seselj, il nous a précisément demandé à ce que nous lui communiquions des
15 images vidéo qui étaient en possession de l'Accusation. Ces images vidéo ne
16 comprennent pas des interviews ou des auditions avec des suspects ou
17 d'autres auditions de témoins ou suspects qui ont été filmés. Aujourd'hui,
18 je dispose de 11 disques durs -- 11 disques durs qui contiennent 3 000
19 gigaoctet de données environ. Ceci représente environ 6 600 heures de
20 visionnage ou d'images vidéo. Nous sommes en mesure de communiquer ceci au
21 Pr Seselj aujourd'hui.
22 D'après ce que je comprends, sur un plan logistique, ceci pourrait poser
23 problème au niveau du quartier pénitentiaire. Ceci se trouve en fait dans
24 cinq cartons sur les tablettes derrière moi.
25 Avant de communiquer ceci, néanmoins, l'Accusation demande à ce que le Juge
26 de la Chambre rende une ordonnance à cet égard, demandant au Dr Seselj,
27 premièrement, de rendre toutes ces images vidéo, DVD, et disques durs au
28 bureau du Procureur dès qu'il aura ou à la fin de cette procédure. Nous
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1 demandons également à ce que M. Seselj ne copie pas ces images vidéo et,
2 troisièmement, une ordonnance demandant à
3 M. Seselj de ne pas communiquer ces images à quiconque -- que quelqu'un qui
4 n'a pas de lien avec l'équipe de la Défense.
5 J'estime également que je dois faire inscrire au compte rendu que le plus
6 gros de ces images vidéo nous a été fourni -- a été fourni au bureau du
7 Procureur par des sociétés commerciales de diffusion d'images, et donc,
8 sujet au droit de la propriété ne peuvent pas être copiées. Donc, je
9 souhaite insister sur ce fait, le "seul" usage légitime de cette image par
10 l'accusé c'est de s'en servir dans le cadre de sa défense.
11 Je souhaite préciser ceci car, par le passé, le Pr Seselj a publié
12 certaines des déclarations des témoins recueillies par le bureau du
13 Procureur qui lui avaient été communiquées, certaines de ces déclarations
14 ont été publiées dans ses livres. Et sauf votre respect, compte tenu du
15 fait que ces images sont communiquées dans un but très précis, et parce
16 qu'il y a différents droits à la propriété sur les diffuseurs commerciaux
17 qui ont fourni ceci au bureau du Procureur dans un but bien précis, à
18 savoir dans le cadre d'une enquête, et suivi de procès, il serait peu
19 approprié, par conséquent, que le Pr Seselj utilise ces images pour toute
20 autre raison, par exemple, pour créer des documentaires ou tout autre
21 élément qui serait diffusé ou rediffusé simplement parce que ceci lui a été
22 remis par le bureau du Procureur. Ceci, d'après nous, n'est pas une façon
23 appropriée de se servir de ces images, et nous demandons précisément aux
24 Juges de la Chambre de rendre une ordonnance à cet effet, pour qu'encore
25 une fois, ces images doivent nous être rendues, que ceci ne doit pas être
26 copié, et que ceci ne doit pas être communiqué ni diffusé d'une manière ou
27 d'une autre ou transformé en documentaires commerciaux, ou films
28 commerciaux, ou diffusés d'une manière ou d'une autre.
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1 Nous demandons, par conséquent, à ce que les Juges de la Chambre rendent
2 une ordonnance à cet effet, et nous pensons que ceci est une démarche
3 prudente, compte tenu de l'historique de certains documents qui ont été
4 communiqués au Pr Seselj et qui par la suite sont arrivés dans le domaine
5 public suite à des publications et autres mesures prises par le Pr Seselj.
6 Merci.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Deux questions de nature technique à vous poser,
8 Monsieur Mundis.
9 La première question est sur le point suivant : si ces copies sont données
10 à M. Seselj, dans votre esprit, est-ce que lui peut les transmettre à ces
11 collaborateurs, qui sont à Belgrade, pour regarder ces vidéos qui font 6
12 000 heures de vision ? Donc, il est impossible pour M. Seselj de visionner
13 pendant 6 000 heures. Enfin, quel est l'individu qui peut passer 6 000
14 heures, donc il faut qu'il y ait une équipe. Donc, à ce moment-là, ne
15 pouvant le faire lui-même, techniquement, bon, enfin, il nous dira ce qu'il
16 en pense, mais, moi, j'anticipe sur les problèmes. Je vous demande si, de
17 votre point de vue -- d'après vos propos, il a le droit pour le cas où la
18 Chambre ferait droit à ceci, s'il a le droit de transmettre à ses
19 collaborateurs ce matériel. Ça c'est ma première question.
20 Allez-y.
21 M. MUNDIS : [interprétation] Ecoutez, la réponse à votre question c'est
22 "oui." Comme je vous l'ai précisé avant, ça serait un usage légitime de ces
23 images et les membres de son équipe il peut en fait visionner ces images.
24 Nous comprenons fort bien que le temps requis est important. C'est une des
25 raisons par laquelle nous avons en fait remis en même temps un tableur de
26 plusieurs milliers de pages qui représente toutes ces images. Et le Pr
27 Seselj a indiqué qu'il souhaitait avoir tous les documents.
28 Donc, nous lui avons tout remis. Ceci représente un volume important. C'est
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1 dans un format électronique qui peut être vu sur des écrans d'ordinateur,
2 le seul tableur que nous lui avons remis représente plus de 1 000 pages, et
3 donne des informations détaillées sur le contenu de ces images vidéo sur
4 les disques durs mais c'est une question simple. Il s'agit d'utiliser un
5 simple câble comme tout disque dur externe et de le raccorder à
6 l'ordinateur les différents supports de l'ordinateur qui permettraient de
7 visionner ces images. En fait on peut tout à fait de façon légitime être
8 utilisé par ces collaborateurs. A notre sens, si ceci devait être diffusé à
9 nouveau ou converti en documentaire à quelque chose, non, dans ce cas-là,
10 non. simplement parce que ces documents en fait sont assujettis aux droits
11 à la propriété, ces différents supports et comme ceci a été remis au bureau
12 du Procureur par des entités commerciales chargées de diffuser ces images,
13 en fait, simplement dans le but de l'enquête et ce procès.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Deuxième question de ma part qui est illustrée par
15 une partie de la réponse que vous venez de faire. Vous avez donc un tableur
16 qui fait quasiment sept ou huit cents pages, enfin disons un millier de
17 pages où vous avez répertorié toutes ces vidéos et donc on peut à ce
18 moment-là à partir de ce tableur savoir quelle est la vidéo. Mais, dans ce
19 nombre de vidéos, vous avez dû, en tant que bureau du Procureur, recevoir
20 des vidéos de différentes origines, des vidéos de nature publique et des
21 vidéos de nature privée, avec -- et vous l'avez à juste titre indiquer des
22 problèmes liés à la propriété commerciale, la propriété intellectuelle, et
23 "copyright," et cetera. Et que, donc, imaginons parce que, moi, je n'ai pas
24 le tableur sous les yeux, donc, j'ignore totalement d'où viennent ces
25 vidéos. Mais imaginons qu'une société commerciale quelconque - prenons la
26 BBC, par exemple - qui a tourné un reportage quelconque, elle a des droits.
27 Elle a des droits de diffusion, et donc, elle peut exiger de celui qui
28 diffuserait éventuellement ce travail qui a été fait, la perception de
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1 droits. Et là, il peut y avoir un problème.
2 Est-ce que, dans le tableur, vous avez des références très précises aux
3 vidéos qui, en tout état de cause, sont protégées par ce type de droits et
4 dont les sociétés commerciales, qui vous les ont transmises, vous ont dit :
5 "Nous vous les communiquons dans le cadre de votre enquête sous réserve de
6 leur exploitation et sous réserve des droits." A ceci près, c'est que ces
7 sociétés ne pouvaient pas, en droits stricts, s'opposer à ce que les bandes
8 vidéo soient diffusées dans la salle d'audience, mais, en revanche, peuvent
9 avoir leur mot à dire sur l'exploitation commerciale de la diffusion.
10 Alors, ma question est donc très simple : dans la liste des vidéos,
11 faites-vous bien la distinction entre ce qui est du domaine public et du
12 domaine soumis à la perception de droits ?
13 M. MUNDIS : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : -- problème. Mon collègue a aussi une question.
15 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 Monsieur Mundis, je voulais simplement m'assurer de ceci : lorsque
17 vous remettez les documents à l'accusé -- pardonnez-moi, est-ce que vous
18 avez un outil qui permet de reconnaître les différentes entrées dans le
19 registre que vous remettez la vidéo ? Est-ce qu'il y a -- lorsque vous avez
20 votre liste devant vous et que vous, par exemple, souhaitez voir un passage
21 en particulier, est-ce que vous pouvez à partir de là trouver le passage
22 dans les DVD ?
23 M. MUNDIS : [interprétation] Monsieur le Juge, les 11 disques durs
24 contiennent un index, et sur le contenu en fait de chaque disque dur, donc,
25 l'index de mille pages en fait a été divisé et on peut voir
26 individuellement ce que chaque DVD contient, quel fichier se trouve sur
27 chaque disque dur, et ensuite, se reporter à ces fichiers parce qu'il y a
28 des numéros ERN qui figurent dans l'index et qui représentent si vous
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1 voulez le numéro de fichier pour chaque séquence vidéo.
2 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Donc, vous pouvez confirmer qu'il est
3 facile en fait de trouver les éléments qu'on cherche parce que, sinon, 6
4 000 heures, 6 600 d'images, cela ne sert à rien, à moins d'avoir un outil
5 très performant qui permet de repérer les passages qui nous intéressent.
6 M. MUNDIS : [interprétation] Tout à fait. C'est pour ça que la première
7 étape de ce processus consistait justement à fournir un index qui
8 permettrait au professeur de Seselj de sélectionner ce qui l'intéresse; et
9 j'insiste, c'est lui qui a demandé cela. Il a demandé à ce que tout ceci
10 soit fait pour toutes ces images. Moi, je ne rentre ici dans le prétoire,
11 et je ne remets pas simplement 6 600 heures d'images comme ça à quelqu'un,
12 à un accusé qui se défend lui-même. C'est lui qui a demandé à ce que ceci
13 soit fait après que nous lui ayons fourni un index détaillé qui lui permet
14 de sélectionner le passage en question. Ceci en partie, en raison due au
15 fait qu'il nous a demandé cela. Il a demandé à ce que toutes ces images
16 soient préparées ainsi. Ce qui a donné lieu à notre demande. Nous
17 souhaitons que ceci ne soit pas diffusé par des chaînes commerciales, que
18 ceci ne soit pas utilisé par d'aucuns et utiliser de façon inappropriée.
19 Je souhaite simplement faire une autre remarque assez brève sur
20 l'utilisation de ce type d'image.
21 Comme le Président de la Chambre nous l'a clairement précisé, certaines de
22 ces images proviennent de sources autres qui ne proviennent pas en fait de
23 sociétés commerciales. Une victime ou peut-être quelqu'un ou un témoin qui
24 a filmé quelque chose et qui nous aurait remis ceci. Ceci en fait serait
25 soumis à des droits à la propriété de même qu'un film de la BBC. Et la
26 vraie question qui se pose ici c'est de ceci, quasiment toutes les images
27 qui sont communiquées, et quelqu'un a un droit dessus. Le fait que ceci a
28 été utilisé dans le cadre de ce procès ou que ceci relève du domaine
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1 public, cela ne signifie pas pour autant que cela peut être utilisé à des
2 fins commerciales par quelqu'un d'autre.
3 Donc, nous estimons nonobstant que le fait qu'il n'y a pas en fait une
4 indication précise qui nous indique dans quelle catégorie, à quelle
5 catégorie correspond chaque vidéo. Nous estimons simplement que ces images
6 -- toutes ces images ne doivent utilisées que dans le cadre d'une enquête
7 de ce procès. Ces images ne doivent pas être communiquées au Pr Seselj pour
8 qu'il puisse les diffuser ailleurs. Par exemple, des sociétés de diffusion
9 d'images ou des sociétés de production de film de façon à pouvoir
10 promouvoir sa carrière puisqu'il publie beaucoup de choses. Il faut en
11 faire un usage responsable et légitime parce que ceci entre dans le cadre
12 d'une étude médico-légale, c'est la raison pour laquelle ça a été
13 communiqué ici. Nous avons demandé à ce qu'une ordonnance soit rendue pour
14 que ces images nous soient retournées, que ceci ne soit pas copié, que ceci
15 ne soit pas communiqué, que ceci ne soit pas diffusé à l'extérieur et que
16 seule l'équipe du Pr Seselj peut regarder ces images pour justement
17 préserver les droits des auteurs de ces images et qui ont été remises au
18 Tribunal simplement dans un cadre médico-légal.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : -- question.
20 Mme LE JUGE LATTANZI : Je voulais savoir si le répertoire est en B/C/S ou
21 en anglais ?
22 M. MUNDIS : [interprétation] Le tableur est en anglais, et il faudrait
23 beaucoup de temps pour le faire traduire en B/C/S. Sauf votre respect, nous
24 estimons que ce ne serait pas un très bon usage en fait de notre temps et
25 de nos ressources en traduction, en matière de traduction.
26 Je souhaite dire ceci parce qu'un bon nombre de vidéos portent sur des
27 dates, des noms d'endroits, on peut simplement en regardant ces tableurs
28 identifier en fait et reconnaître, et savoir ce que c'est. Bien sûr, le
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1 tableur d'origine a été fourni en anglais, et à l'époque, lorsque le Pr
2 Seselj a précisé qu'il accepterait ces images vidéo, il a précisé et c'est
3 au compte rendu qu'il accepterait les vidéos dans la langue d'origine.
4 Bon nombre de ces images, en fait, les vidéos elles-mêmes, sont en B/C/S;
5 pas toutes, bien sûr, bon nombre ont été diffusées dans différentes
6 langues, en allemand, en anglais, en français, et cetera.
7 Mme LE JUGE LATTANZI : -- une autre question. Vous avez dit qu'il -- que
8 ces vidéos peuvent être mises -- mis à la disposition des collaborateurs de
9 M. Seselj. Je voulais savoir si vous entendez tous les collaborateurs ou
10 seulement ceux qui ont un statut de confidentialité avec le Tribunal ?
11 M. MUNDIS : [interprétation] Ecoutez, nous pensons que ce serait plutôt la
12 dernière catégorie : ceux qui disposent de ce statut de confidentialité
13 comme vous nous l'avez indiqué, Madame le Juge.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : -- donc, passer la parole à M. Seselj étant observé
15 qu'à ma connaissance, c'est une première dans l'histoire de la justice ce
16 problème lié en cours de procès à la communication d'éléments concernés par
17 des droits d'auteur et droits liés à la propriété commerciale. Et donc,
18 l'affaire est apparemment, sur le point juridique, extrêmement complexe.
19 Alors, M. Seselj va certainement nous éclairer.
20 Monsieur Seselj, alors, quelle est votre position, ou bien, vous voulez
21 faire des écritures suite à ce qui a été dit ? Je vous donne la parole.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais m'exprimer comme ceci pour aller
23 plus vite.
24 Tout d'abord, jusqu'à présent, je n'ai jamais publié -- je n'ai jamais
25 communiqué dans le public aucun document que j'ai reçu du Procureur du
26 Tribunal ou du Greffe quand il s'agissait de documents confidentiels.
27 D'ailleurs, je ne suis lié à la confidentialité uniquement par le document
28 qui vient du Procureur ou des Juges. S'il s'agit d'un document confidentiel
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1 qui vient du Greffe et qui me concerne moi, personnellement, quand il
2 s'agit donc de ma grève de faim, et cetera, de mon état de santé, on ne
3 peut pas me forcer à rester confidentiel à ce sujet.
4 Donc, les Juges ont le droit de déclarer quelque chose de
5 confidentiel; le Procureur aussi a ce droit.
6 Moi, je n'ai jamais communiqué de tels documents dans mes livres, je n'ai
7 publié que des documents qui relèvent du domaine public.
8 En ce qui concerne l'interview, donc, les entretiens du Procureur avec
9 différentes personnes, avec des suspects, moi, je les ai publiés quand le
10 suspect lui-même m'apportait un enregistrement vidéo et me permettait donc
11 de le retranscrire et de le publier. Et j'avais le droit de le faire parce
12 que c'est le suspect qui avait le droit et qui décidait de le rendre
13 public, ou non, cet entretien. On ne peut pas faire un entretien avec
14 quelqu'un -- avec un suspect, lui donner l'enregistrement vidéo de cet
15 entretien et lui interdire ensuite de le rendre public. Et c'est comme cela
16 que j'ai pu donc publier l'entretien avec Ljubisa Petkovic dans mon livre :
17 "Les disciples du Diable et le criminel Jean Paul II." J'ai aussi publié
18 des informations qui venaient des partis tiers qui -- des déclarations, et
19 cetera, qui n'avaient rien à voir avec mes rapports, avec le Procureur ou
20 avec les Juges.
21 Ici, la question qui se pose est assez précise : le Procureur a
22 l'intention de me communiquer une grande quantité d'enregistrements vidéo,
23 et il demande certaines garanties. Tout d'abord, il demande que ceci soit
24 fait à la fin de -- du procès, et je pense qu'il y a pas de problème là-
25 dessus. Ensuite, il demande que ceci ne soit jamais publié dans des films
26 documentaires ou à des fins commerciaux. Ceci -- la question ne se pose
27 même pas puisque je ne l'ai jamais fait et je n'ai aucune intention de le
28 faire, donc, le Procureur peut être tranquille à ce sujet. Je ne suis pas
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1 fou de faire une chose pareille et ensuite de devoir rendre des comptes à
2 cause de droits d'auteur parce que je ne les aurais pas respectés.
3 Ensuite, le troisième point, je serai obligé de faire un certain nombre de
4 copies. Les choses que je vais considérer comme pertinentes en l'espèce, je
5 serai obligé de les sortir du lot, de les isoler.
6 Toutes les informations qui me seront utiles au cours de ma
7 présentation de preuves, je serai obligé de les isoler et de les intégrer
8 dans mes préparations de mon -- ma présentation des moyens de preuve.
9 Ensuite, 6 000 heures de vidéo, mon équipe n'est pas capable de les
10 visionner telle qu'elle est. Moi, j'ai une équipe plus large où il y a
11 beaucoup de gens qui ne sont pas enregistrés auprès du Tribunal et qui
12 travaillent pour moi, et je serais obligé de leur fournir ces matériaux --
13 ces documents pour qu'ils visionnent tout cela. Mais ces gens aussi sont
14 liés par des obligations, ils ont des devoirs même s'ils ont pas signé
15 vraiment de close de confidentialité avec le Procureur. Ils me rendent
16 compte à moi parce que, moi, j'aurais besoin -- je serais responsable de ce
17 qu'ils vont faire et je serais obligé de leur fournir ces documents, et ils
18 vont les visionner et ils vont respecter toutes les closes et principes de
19 confidentialité.
20 Donc, je pense qu'ici, on pose un problème qui n'est pas un véritable
21 problème. Il suffit que le Procureur fasse la liste de ses désiratas [comme
22 interprété], qu'est-ce qu'il veut que l'on ne fasse pas avec ces documents,
23 eh on va le respecter. Et ensuite, ce qui va être dit publiquement dans ce
24 prétoire, cela va être présenté sur mon site internet. Le Procureur ne peut
25 pas empêcher cela. Tout cela est sur mon site internet puisque c'est un
26 site internet qui est le plus visionné du monde en ce moment, on ne peut
27 rien faire là-dessus. Donc, uniquement, ce que je vais présenter ici dans
28 ce prétoire dans le cadre de mon procès, là, il y a plus de droits
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1 d'auteur, c'est du domaine public et personne ne peut protéger cela. Donc,
2 je pense qu'on peut répondre assez brièvement à la question sauf
3 qu'aujourd'hui moi je ne peux pas prendre ce chariot avec tous ces
4 documents parce que le Procureur sera obligé de me les apporter dans le
5 quartier pénitentiaire parce que j'aurai mon gilet pare-balles, je serai
6 restreint de mes mouvements. Donc, moi, je vais m'occuper de tous ces
7 documents et, à la fin du procès d'ici une dizaine d'années, je vais
8 retourner ces documents, je vais les rendre au Procureur.
9 Et puis, puisque là, nous avons une question de procédure, je
10 voudrais vous faire part d'un autre problème, avec votre permission.
11 [La Chambre de première instance se concerte]
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur Seselj, bon, je vous ai écouté. Vous
13 nous avez dit que -- que, si vous avez cela, vous prenez l'engagement que
14 ça ne soit pas communiqué à l'extérieur, et cetera. Bon, j'ai écouté ce que
15 vous dites, mais vous avez dit deux choses qui m'étonnent.
16 Vous avez dit : "Le Procureur va m'adresser cela à la fin du procès."
17 Alors, j'ai peut-être mal compris ce qu'a dit le Procureur, mais, moi, j'ai
18 cru comprendre que dès que nous rendions notre décision, il vous donnerait
19 ça tout de suite, pas à la fin, mais le plus tôt possible. Voilà, bon.
20 Donc, ça vous serait communiqué le plus tôt possible, et une fois que vous
21 auriez terminé l'utilisation parce que le procès sera terminé, vous, vous
22 allez rendre au Procureur.
23 Et puis, vous, vous avez rajouté autre chose, et vous avez dit que, dans
24 dix ans, après -- quand tout ça sera terminé, vous avez l'intention
25 d'utiliser tout cela. Bon, alors, du coup, la question des droits d'auteur
26 est toujours permanente et n'est pas réglée. Alors, est-ce que vous pouvez
27 me dire qu'est-ce que vous entendiez en disant que, dans dix ans, vous
28 allez utiliser cela ?
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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que vous avez reçu une interprétation
2 catastrophique, car j'ai compris que l'Accusation me proposait cela
3 aujourd'hui et j'ai dit qu'il fallait qu'ils envoient ça dans ma prison
4 plutôt que de faire en sorte que je prenne ça dans mes dents car, moi, je
5 suis ligoté, je suis menotté en partant d'ici et les mains sont contre mon
6 corps.
7 Et puis, deuxièmement, j'ai dit que j'allais restituer cela à
8 l'Accusation à la fin du procès, et ce sera d'ici une dizaine d'années car
9 vous voyez la lenteur. Il y a 115 témoins, maintenant, puis 115 des miens,
10 ça c'est trois ans au moins encore. Ensuite, la procédure d'appel puis
11 après d'autres demandes supplémentaires. Dieu sait combien de temps ça va
12 durer encore et devant quel Tribunal ce procès va se terminer
13 définitivement si ce Tribunal termine son travail en 2010. C'est ce que
14 j'ai voulu dire sachant tout ce qui viendra après.
15 Et je pense que vous avez certainement reçu une interprétation
16 catastrophique. Je n'arrive pas à comprendre que l'on ait pu faire cette
17 interprétation là.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : -- bien, maintenant, ce que vous avez dit.
19 Bien.
20 Alors, donc, on est saisis de la requête orale, on a eu des
21 observations de M. Seselj, et la Chambre rendra une -- une décision en la
22 matière.
23 Alors, nous allons introduire le témoin, je vais --
24 Oui, à moins que vous ayez un autre sujet à évoquer ?
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, j'ai annoncé le fait que je devais
26 soulever un problème.
27 Je n'ai pas pu le faire avant car, la semaine dernière, nous n'avons
28 pas eu suffisamment de temps. Il ne s'agissait pas de quelque chose de
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1 tellement urgent mais, à mon avis, c'est très important. Vous savez que
2 vous êtes la seule instance dont je peux attirer l'attention sur les
3 conditions irrégulières de ma détention dans le quartier pénitentiaire de
4 Scheveningen.
5 J'ai eu un problème à la fin de la semaine d'il y a deux semaines.
6 Conformément à votre ordonnance, Ljubisa Petkovic, l'un des témoins clés de
7 ma Défense a été arrêté, et on l'a fait venir au quartier pénitentiaire.
8 Nous ne faisons pas partie du même groupe. Et mon groupe est sorti se
9 promener vendredi, donc, il y a deux semaines, et Ljubisa Petkovic est
10 apparu à la fenêtre. Il a fait des signes de la main, moi, j'ai fait des
11 signes de la main aussi depuis la cour et je lui ai dit qu'il tienne bon.
12 Le chef des gardes de la prison a fait irruption et il a interrompu la
13 promenade de nous tous, il nous a fait rentrer dans la cellule. Nous tous,
14 pas seulement moi.
15 Et j'attire votre attention sur le fait que nous avons le droit à au
16 moins une heure de promenade à l'extérieur par jour. En Serbie et dans des
17 pays civilisés, il s'agit de deux heures par jour, et c'est un droit absolu
18 des prisonniers et des détenus. C'est un droit absolu qui ne peut pas être
19 remis en cause -- en raison de quoi que ce soit. Si je crie dans la cour et
20 si je mets les mains dans l'air ne veut pas dire qu'on puisse m'interdire
21 la promenade, personne ne peut le faire. Et non seulement ils me l'ont
22 interdit à moi, mais à tout le groupe de neuf personnes. On nous a ramenés
23 tous dans nos cellules. Et ça s'est passé comme ça ce jour-là.
24 Au début de la semaine d'après - je pense que c'était lundi - de
25 nouveau, nous sommes sortis afin de nous promener. Ljubisa Petkovic ne --
26 n'apparaissait plus à la fenêtre. Je suppose que, lui aussi, il a été
27 intimidé, Dieu sait ce qu'on lui a fait. Moi, je pensais qu'il avait déjà
28 été transféré dans une autre aile de ce bâtiment dont on ne peut pas le
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1 voir, et un garde de la prison en uniforme est apparu à la fenêtre.
2 Normalement, il vérifie la situation sur le toit une fois par moi pour être
3 sûr que personne ne va s'évader ou pour voir si un hélicoptère peut arriver
4 et tout ça. En le voyant sur le toit, je lui ai dit s'il trouve une balle
5 sur le toit qu'il nous la jette, car il y avait des balles de football et
6 de basket-ball qui avaient terminé avant sur le toit, car les prisonniers
7 parfois en jouant jettent la balle trop haut. Et c'est ce -- ça finit sur
8 le toit. Il a vérifié et il a dit qu'il n'y en a pas.
9 Et arrive un responsable, il s'appelle (expurgé), de la prison. Il
10 interrompt cette fois-ci seulement ma promenade et il me ramène dans ma
11 cellule, sans aucune raison. Moi, j'avais l'impression que quelqu'un m'a
12 convoqué, le directeur ou un médecin. Et c'est pour cela que j'ai répondu;
13 sinon, je ne l'aurais pas fait. Et j'ai dit que, la prochaine fois qu'il
14 fait ça, il va falloir qu'il me porte sur son dos, je n'irai pas de mon
15 propre gré.
16 Le troisième problème est apparu puisque Ljubisa Petkovic est venu
17 ici presque sans rien -- pratiquement sans rien. Et le pauvre, j'ai
18 l'impression qu'il ne fait pas plus de 20 kilos, il est tout recroquevillé.
19 Et j'ai demandé au garde qui était de service à mon étage, je lui ai
20 demandé de lui apporter dix cartes téléphoniques et j'ai soumis une demande
21 par écrit au directeur en demandant que l'on transfère un peu d'argent de
22 mon compte sur celui de Ljubisa Petkovic. Au bout de trois jours, on m'a
23 rendu les cartes téléphoniques et le directeur -- ou plutôt, l'adjoint du
24 directeur, parce que celui-ci a pris sa retraite, donc, un certain (expurgé),
25 il a dit que ceci n'était pas permis car tout contact entre moi et Ljubisa
26 Petkovic était interdit. Mais de quel contact il s'agit ?
27 Il ne s'agit pas là de la première fois que j'aidais un autre
28 prisonnier dans la mesure de mes possibilités. Il est habituel que les
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1 prisonniers s'entraident ainsi dans une prison.
2 Et je pense qu'une chose incroyable a eu lieu et je pense que ceci
3 nécessite une intervention de la Chambre de première instance.
4 Je dois dire qu'il y a eu parfois des problèmes avec le directeur
5 précédent, je vous en ai fait part parfois, mais plus ou moins. La
6 situation était plutôt favorable, il n'y a pas eu d'incident dans la
7 prison, le directeur savait se comporter de manière assez correct. Depuis
8 que le directeur a pris sa retraite,(expurgé),ce(expurgé) qui le remplace, il
9 est tout à fait incroyable dans la manière dont il agit.
10 Et je pense que les choses deviennent, petit à petit, insupportables.
11 Je vous ai raconté seulement les problèmes qui me concernent
12 personnellement et le problème concernant tout mon groupe que, apparemment,
13 j'aurais provoqué moi-même et c'est à cause de moi qu'ils ont été privés de
14 la promenade ce jour-là.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans ce que vous dites, il y a une partie dont la
16 Chambre a été informée et une partie où nous découvrons à l'audience le
17 problème.
18 Un bref retour en arrière.
19 La Chambre a décidé que M. Petkovic n'aurait aucun contact avec vous dans
20 la mesure où M. Petkovic, pour le moment, est un témoin -- était un témoin
21 de la Chambre. De ce fait, il n'a pas à avoir des contacts avec quiconque.
22 Ça, c'est ce que nous avions indiqué à l'administration de la prison.
23 Est apparue la fin de ce que vous venez de dire, à savoir que vous avez
24 voulu lui donner de l'argent et, également, des cartes téléphoniques. Dans
25 la mesure où tout contact est interdit et que lui donner de l'argent dans
26 ces conditions pouvait poser un problème. Et nous avons été informés de
27 cela.
28 Je ne connais pas la situation matérielle de l'intéressé. S'il a des
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1 problèmes matériels, il en fait part à la direction de la prison qui en
2 fera part à la Chambre. Donc, il a la possibilité de téléphoner, d'avoir ou
3 de recevoir des mandats de sa famille, et cetera. Donc, là-dessus, il n'y a
4 pas de problème.
5 En revanche, la question des signes de la main et autres -- bon,
6 normalement ça n'aurait pas dû arriver si la prison avait fait en sorte
7 d'éviter de ceci. Bon, manifestement, ça n'a pas été fait, mais en soi ce
8 n'est pas -- ce n'est pas grave. Mais simplement, par contre, ils ont pris
9 la décision de suspendre la promenade. Bon, mais ça, là-dessus, moi, je
10 n'ai rien à dire parce que c'est leur -- c'est leur problème à eux et ce
11 n'est pas à la Chambre de gérer les promenades ou autres. Donc, ça, ça
12 relève de leur autorité; moi, là-dessus je n'ai rien à dire. Par contre,
13 nous allons demander donc au responsable de nous indiquer comment se fait-
14 il qu'il a pu y avoir entre vous deux un contact.
15 Bon, maintenant, concernant l'histoire de la balle qui était sur le toit,
16 bon, c'est vrai que cet incident est tout à fait mineur, et ça aurait dû se
17 régler au mieux.
18 En tout cas, tout ce que vous avez dit est au transcript, et en temps réel
19 immédiatement, donc, le Greffier est informé du problème, et donc, c'est à
20 lui de répondre. La Chambre vous réaffirme que pour le moment, M. Petkovic
21 ne doit pas avoir un quelconque contact avec vous.
22 Donc, voilà une clarification de la situation.
23 Mais je vous ferais part de ce que nous dira l'administration de la prison
24 suite aux divers problèmes, étant acquis pour tout le monde, que dans une
25 prison l'ambiance doit être la meilleure possible, entre les gardiens, les
26 détenus, et tous les intervenants extérieurs dans l'intérêt général.
27 Nous allons maintenant introduire le témoin.
28 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, je vous demande de re-
2 confirmation du fait que le témoin ne veut pas de mesure de protection;
3 c'est bien ça ?
4 M. DUTERTRE : Oui. Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour, Madame le Juge.
5 Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour, Monsieur Seselj. Effectivement, je
6 confirme qu'aux dernières nouvelles le témoin ne souhaitait pas de mesure
7 de protection.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Procureur, ce qui veut dire que le
9 témoin peut venir sans qu'on baisse les rideaux avant ?
10 M. DUTERTRE : C'est ce que je comprends de ce qu'il nous a indiqué.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Alors, on va l'introduire et on va lui demander
12 des précisions là-dessus. Bien. Alors, qu'il rentre.
13 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Je vais d'abord vérifier que vous
15 entendez bien dans votre langue la traduction de mes propos. Si c'est le
16 cas, dites que vous me comprenez.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur, avant de vous faire prêter serment,
19 j'ai quelques petites brèves questions à vous poser.
20 La première est la suivante : avant que vous veniez ce jour, le Procureur
21 nous avait demandé des mesures de protection pour vous, nous avons appris
22 tout récemment que vous ne demandiez plus des mesures de protection. Alors,
23 pouvez-vous nous dire pourquoi vous aviez demandé des mesures de protection
24 et pourquoi vous avez changé d'idée ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Parce que vis-à-vis de mon peuple et de tout
26 le monde, j'ai voulu prouver que, par le biais de mes déclarations et de ce
27 qui m'est arrivé pendant la guerre, que je prouve la justice -- que j'aide
28 à ce que la justice soit faite, compte tenu du fait que moi-même j'ai été
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1 soupçonné par les miens.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc, c'est une démarche personnelle. Personne
3 ne vous a dit ce qu'il fallait faire; c'est vous qui avez décidé cela.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, vous n'avez eu aucune menace et aucune
6 pression ? Personne ne vous a dit : "Il faut faire ci, il faut faire cela"
7 ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur, avez-vous déjà témoigné devant un
10 Tribunal sur les faits qui se sont déroulés dans votre -- dans l'ex-
11 Yougoslavie, ou bien, c'est la première fois que vous témoignez ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois que je témoigne, c'est
13 ici.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Pouvez-vous me donner votre nom, prénom, et
15 date de naissance ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Safet Sejdic, et je suis né en 1969 à Visoko.
17 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Témoin, les interprètes ne peuvent
18 pas bien vous entendre. Pouvez-vous, s'il vous plaît, rappeler votre nom ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Safet Sejdic. Je suis né en 1969
20 à Visoko.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous êtes né en 1969. Quel jour, quel mois, s'il
22 vous plaît ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 10 novembre.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Avez-vous, Monsieur, une profession ou une
25 activité actuellement ? Et si oui, laquelle ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. En ce moment, je travaille dans la voirie
27 dans le cadre du maintien des rails.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Je vous demande de lire le serment.
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
2 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
3 LE TÉMOIN : SAFET SEJDIC [Assermenté]
4 [Le témoin répond par l'interprète]
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, une brève information de ma part.
8 Tout d'abord je vous indique et il peut y avoir un problème comme il peut
9 ne pas y en avoir, il est prévu que le Procureur va vous interroger pendant
10 deux heures et demi, comme l'accusé aura également deux heures et demie, et
11 que les Juges auront certainement des questions à vous poser, nous ne
12 terminerons pas aujourd'hui, et qu'à ce moment-là, il faudra continuer avec
13 vous mardi prochain. Est-ce qu'à votre niveau, ça pose ou pas un problème ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Pas de problème.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Pas de problème; très bien.
16 Alors, le Procureur a dû vous le dire quand il vous a rencontré, mais je le
17 répète néanmoins. Vous allez devoir répondre à des questions qu'il va vous
18 poser, et il va certainement vous présenter des documents. Donc vous devez
19 répondre à ses questions de manière la plus précise possible afin que nous
20 apprécions la portée de vos réponses. Si vous ne comprenez pas le sens de
21 la question demandez au Procureur de vous reposer la question.
22 Une fois que ceci se sera déroulé, l'accusé qui est à votre gauche, qui
23 s'appelle M. Seselj, vous posera également des questions. Il a le droit
24 puisque c'est la procédure qui est comme cela, et il posera donc des
25 questions pour vérifier votre crédibilité et également sur les éléments que
26 vous aurez amenés dans vos déclarations faites au Procureur, et dans les
27 réponses que vous allez donner aux questions posées, et l'accusé aura le
28 même temps que le Procureur. Les trois Juges qui sont devant vous pourront
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1 aussi vous poser des questions afin d'éclaircir certains points ou de
2 combler certaines lacunes qui ont pu apparaître.
3 Toutes les heures et demie, nous faisons une pause de 20 minutes pour
4 des raisons techniques parce qu'il y a des bandes de vidéo qu'il faut
5 changer ou des bandes audio. Comme nous avons commencé l'audience à 9
6 heures, nous ferons donc la prochaine pause à 10 heures 30.
7 Mais si à un moment donné vous ne vous sentez pas bien, vous avez un
8 malaise ou vous voulez qu'on s'arrête, vous levez la main et vous me
9 demandez que j'arrête l'audience et, à ce moment-là, nous arrêterons
10 l'audience. Si, par ailleurs, à tout moment vous voulez vous adressez à la
11 Chambre, n'hésitez pas à le faire puisque nous sommes également là pour
12 répondre à toute question que pourrait avoir à l'esprit un témoin.
13 A partir de maintenant, vous êtes maintenant le témoin de la justice
14 puisque vous venez de prêter serment. Ce qui veut dire que vous n'avez plus
15 maintenant de contact avec les représentants du Procureur ni également avec
16 la Défense, et encore moins évidemment avec les Juges puisque nous n'avons
17 pas à avoir de contact avec vous postérieurement.
18 Je vous dis ça parce que comme votre audition continuera la semaine
19 prochaine, vous allez donc rester pendant quelques jours ici et de ce fait,
20 il vous est fait donc interdiction d'avoir des contacts avec quiconque,
21 sauf évidemment avec les membres de votre famille avec qui vous pouvez vous
22 entretenir à titre privé.
23 Voilà ce que je voulais vous dire, Monsieur, afin que l'audience se
24 déroule le mieux possible et dans un esprit de sérénité. J'insiste sur le
25 mot sérénité, voilà.
26 Monsieur le Procureur, je vous donne la parole pour le début de
27 l'interrogatoire principal.
28 M. DUTERTRE : Je prends sereinement la parole, Monsieur le Président.
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1 Interrogatoire principal par M. Dutertre :
2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Sejdic.
3 R. Bonjour.
4 Q. Merci. Nous avons un aperçu sur votre identité, votre activité
5 professionnelle. Je vais commencer par une première série de questions
6 liées à votre background général, je pourrais utiliser cet anglicisme.
7 Est-ce que vous pouvez m'indiquer où vous viviez avant le début de la
8 guerre en Bosnie-Herzégovine ?
9 R. Je vivais dans la région de Vogosca, à Semizovac. Le village s'appelle
10 Svrake, il s'agit de la municipalité de Vogosca.
11 Q. Depuis combien de temps viviez-vous à Svrake ?
12 R. J'ai vécu là-bas depuis plus de 20 ans.
13 Q. A quelle distance le village de Svrake se situe par rapport à Sarajevo
14 ?
15 R. Environ 12, 13 kilomètres.
16 Q. Est-ce que vous pourriez nous préciser, Monsieur Sejdic, quelle est la
17 composition, quelle était la composition ethnique de votre village, Svrake,
18 avant le début du conflit en Bosnie-Herzégovine ?
19 R. C'était un beau village. Pour moi, c'est la ville préférée, celle dans
20 laquelle j'ai grandi, c'est là que j'allais à l'école et ainsi de suite.
21 Q. Je vais repréciser ma question. Est-ce que vous pouvez nous dire quelle
22 était l'origine ethnique des différents habitants ? J'entends par là, il y
23 avait une majorité de Serbes, une majorité de Musulmans, des Croates,
24 quelle était la composition de votre
25 village ?
26 R. Il y avait les Serbes, les Croates et les Musulmans. Il y avait aussi
27 un certain nombre de Roms, et ainsi de suite.
28 Q. Quel était le groupe majoritaire, s'il y en avait un ?
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1 R. Il y avait surtout des Serbes. La majorité c'étaient des Serbes.
2 Q. Je vous remercie. Quelle est votre origine ethnique ?
3 R. Je suis Rom.
4 Q. Est-ce que vous avez une religion que vous pratiquez ?
5 R. Oui.
6 Q. Est-ce que vous pouvez nous préciser laquelle ?
7 R. Musulmane.
8 Q. Je vous remercie. En 1992, est-ce que vous étiez marié ?
9 R. Oui.
10 Q. Est-ce que vous aviez des enfants ? Et si "oui", combien ?
11 R. J'ai eu un fils qui est né le 18 mars 1992.
12 Q. En 1992, vous aviez d'autres enfants à part ce fils ?
13 R. J'avais une fille qui est née en 1993.
14 Q. Entendu. Est-ce que vous aviez des frères et sœurs ?
15 R. Oui.
16 Q. Est-ce que vous pouvez nous préciser combien de frères, combien de
17 sœurs ?
18 R. J'ai eu trois frères et une sœur.
19 Q. En 1992, où habitaient vos parents ?
20 R. Dans le village de Svrake.
21 Q. Entendu. J'en ai fini avec ce premier aspect, Monsieur Sejdic, et je
22 vais maintenant essayer de brosser très rapidement, avec votre aide, une
23 chronologie de ce qui vous est arrivé pendant le conflit. Après ça, je
24 prendrai différents incidents dans le détail desquels je vais rentrer.
25 Donc, je vais vous poser maintenant un certain nombre de questions pour
26 juste brosser un tableau général, et c'est après que je rentrerai dans les
27 détails dans un second temps.
28 Première question : qu'est-il arrivé à votre village au début du mois
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1 d'avril 1992 ?
2 R. Au début du mois d'avril 1992, les forces musulmanes et serbes et les
3 autres ont commencé à se regrouper pour commencer cette guerre, et ainsi de
4 suite. Cependant, soi-disant ils voulaient éviter une guerre entre les
5 Musulmans et les Serbes, là-bas, ils ont commencé à dire qu'ils voulaient
6 éviter des incidents. Donc, ils se réunissaient ainsi et au bout de trois
7 jours, ils l'ont commencée.
8 Q. Est-ce que vous pouvez nous préciser ce que vous entendez par "au bout
9 de trois jours, ils ont commencé." A quoi vous faites référence, est-ce que
10 vous pouvez clarifier cela. En fait, je reviens toujours à cette idée de ce
11 qui est arrivé à votre village en avril 1992, qu'est-ce qui s'est passé à
12 votre village en avril 1992 ?
13 R. En 1992, la guerre a commencé, donc les Serbes des localités alentour
14 des collines dans le village de Svrake, de Semizovac, ils ont commencé une
15 attaque de toutes parts. Ils ont tiré de toutes parts. Les Musulmans
16 n'avaient pas suffisamment de forces pour se retourner contre eux, pour
17 défendre ce village puisqu'ils n'avaient pas autant d'armes non plus.
18 Q. Quand vous dites ce village, c'est votre village Svrake, on est bien
19 d'accord ?
20 R. Oui.
21 Q. Est-ce que vous-même, vous aviez des armes
22 personnellement ?
23 R. Non.
24 Q. Combien de temps est-ce que les Musulmans de votre village ont résisté
25 à cette attaque ?
26 R. A peu près pendant deux jours il y a eu une résistance, autant que cela
27 puisse se faire.
28 Q. Après la fin de cette résistance, est-ce que vous pouvez nous préciser
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1 où les Musulmans hommes de votre village ont été emmenés par les
2 assaillants ?
3 R. Ils ont emmené les Musulmans --
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Ce type de question n'est pas
5 autorisé. Le Procureur ne peut pas demander à partir du moment où il n'y
6 avait plus de résistance, que cela a été brisé où est-ce qu'on a emmené les
7 Musulmans du village. Il peut demander ce qui s'était passé à la fin de la
8 résistance. Il ne peut pas suggérer le fait qu'on ait emmené les Musulmans,
9 on ne le sait pas encore.
10 M. DUTERTRE : Soit.
11 Q. Une fois que la résistance a terminé, Monsieur Sejdic, est-ce que vous
12 pouvez nous préciser ce que les assaillants ont fait des hommes musulmans
13 de votre village ?
14 R. Les attaquants ont mis les hommes d'un côté et les femmes et les
15 enfants de l'autre côté. Ils les ont emmenés à la caserne de Semizovac.
16 Q. Une fois à la caserne de Semizovac, qu'est-ce qui s'est passé, qu'est-
17 ce qui est arrivé à ces hommes ?
18 R. Certains ont été emmenés là-bas, et ils ont demandé à ces hommes des
19 armes et ils leur ont demandé qui avait une arme, et pendant cette
20 reddition ou remise des armes, certains ont jeté une arme, d'autres ne
21 l'ont pas fait, s'ils n'en avaient pas. Et puis ceux qui n'avaient pas
22 d'arme, ils les ont emmenés dans d'autres prisons que ceux qui en avaient
23 une.
24 Q. Vous-même qu'est-ce qui vous est arrivé ? Vous étiez avec ces hommes à
25 Semizovac, vous étiez resté à Svrake ? Qu'est-ce qui était votre sort ?
26 R. Mon sort, j'ai pris ma femme et mon enfant et je suis parti vers
27 Semizovac, comme les autres en passant par le pont. Pour ce qui est des
28 Serbes, certains savaient que je n'avais pas une arme et que je n'avais pas
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1 fait partie de cela, alors je suis parti, je suis allé jusqu'à Semizovac.
2 Il y avait des autocars devant Kulin Dvor près de la maison de Kuzman à
3 Semizovac.
4 Q. Et vous êtes ensuite resté à Semizovac ou vous êtes parti ailleurs ?
5 Qu'est-ce qui s'est passé ?
6 R. On avait mis à la disposition deux autocars pour partir avec les femmes
7 et les enfants et les personnes âgées vers Srednje, avec ceux qui n'avaient
8 pas reçu d'arme, qui n'avaient pas d'arme, qu'on sache.
9 Q. Donc si j'ai bien compris, les membres de votre village qui n'étaient
10 pas armés se sont dirigés à Srednje. Vous pouvez nous préciser qui
11 commandait à Srednje, qui était les forces en charge de Srednje ?
12 R. Les Serbes étaient là-bas.
13 M. DUTERTRE : Je crois que ma question, page 27, ligne 25, n'a pas été
14 traduite correctement, mais je passe pour gagner du temps.
15 Q. Et qu'est-ce que les Serbes de Srednje ont fait de vous quand vous êtes
16 arrivé là-bas à Srednje ?
17 R. Un commandant, je ne sais pas s'il était commandant de la ligne de
18 cette localité, il est sorti et il a demandé qu'on sépare les hommes, les
19 femmes et les enfants.
20 Q. Et une fois que ça a été fait, qu'est-ce qui s'est passé ?
21 R. Nous, les hommes, avant cela nous avions vu un autocar qui était criblé
22 de balles. Il y avait du sang. Les vitres étaient brisées. Il était
23 complètement criblé de balles cet autocar. C'était un autocar des
24 transports municipaux d'avant.
25 Quand nous avons commencé à sortir, les femmes et les enfants se sont mis à
26 pleurer, et l'homme numéro 1, je suppose, n'a pas voulu, n'a pas pu
27 continuer d'écouter cela. Il a dit qu'il fallait remettre tout le monde
28 dans les autocars et que les autocars devaient repartir vers Semizovac, la
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1 caserne.
2 Q. Entendu. Juste pour clarifier, donc vous et votre famille, vous êtes
3 repartis dans le car vers Semizovac; c'est bien ça ?
4 R. Oui.
5 Q. Sur le chemin vers Semizovac; est-ce que vous pouvez nous décrire ce
6 qui s'est passé ?
7 R. Il y avait des véhicules de l'armée serbe, des Golf. Une était à
8 l'avant, et l'autre était à l'arrière. Il y avait deux hommes, deux
9 Musulmans qui ont conduit l'autocar. Ce Musulman a viré brusquement vers le
10 village de Korita. C'était la ligne musulmane là-bas et le front et là il y
11 avait des Musulmans qui vivaient là-bas. Il a tourné rapidement vers
12 Korita, et ces deux autocars ont évité de retourner à Semizovac.
13 Q. Entendu. Donc, vous êtes -- vous avez réussi à fausser compagnie à ces
14 deux voitures qui vous escortaient, vous arrivez à Semizovac qui est sous
15 le contrôle musulman. Combien de temps êtes-vous resté à cet endroit à
16 Korita ?
17 R. J'y suis resté à peu près une vingtaine de jours.
18 Q. Et après une vingtaine de jours, où vous êtes-vous rendu ?
19 R. On m'a dit que puisque j'étais la minorité, j'étais Rom, il y avait des
20 Musulmans et puis aussi je pense des Croates, certains Croates, quelques-
21 uns, je ne sais pas exactement combien. Ils avaient organisé des tours de
22 garde ensemble pour que les Serbes ne viennent pas dans ce village, je
23 pense que nous ils ne voulaient pas que moi, mon père, et mon frère, ils ne
24 voulaient pas qu'on fasse partie de ces patrouilles peut-être qu'ils ne
25 nous faisaient pas confiance parce qu'on était des Roms.
26 Q. Entendu. Et donc, je comprends qu'apparemment à Korita, vous aviez
27 l'impression qu'on ne vous faisait pas confiance parce que vous étiez Rom,
28 et donc, où êtes-vous allé ?
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1 R. Oui. Ils nous disaient que la situation était calme à Semizovac, qu'on
2 pouvait tous rentrer chez soi ou aller rejoindre la famille à Sarajevo, que
3 l'autorisation avait été donnée de passer librement.
4 Q. Juste un point de clarification. Entre Semizovac et Svrake, quelle est
5 la distance ?
6 R. La distance de Semizovac à Svrake c'était peut-être à cinq à dix
7 minutes de marche.
8 Q. -- entendu. Donc, vous êtes à Korita, vous nous le dites, et vous nous
9 indiquez que les personnes à Korita vous disent que la situation était
10 tranquille et pacifique -- et pacifiée à Semizovac. Donc, qu'est-ce que
11 vous avez fait ? Vous vous êtes rendu à
12 Semizovac ? Vous vous êtes rendu ailleurs ? Vous êtes allé à
13 Sarajevo ? Qu'est-ce que vous avez fait ?
14 Q. Mon père, comme il avait de la famille à Sarajevo, ses parents et ses
15 sœurs, lui il disait que donc il fallait qu'on aille à Sarajevo. Donc,
16 d'abord à Semizovac, puis de Semizovac à Sarajevo, si c'était possible.
17 Mais ça n'a pas été possible. Nous sommes arrivés près de Semizovac, à côté
18 de la poste d'avant et près de la maison de Kuzman, et nous nous sommes
19 arrêtés là. Et c'est un -- c'est
20 M. Nebojsa Spiric qui est venu nous voir.
21 Q. Entendu. Juste -- je vais juste revenir un -- un peu en arrière. Quand
22 vous dites vous -- que vous êtes allé à Semizovac, est-ce que vous pouvez
23 nous dire qui exactement était avec vous ? Quelles -- les personnes qui
24 étaient avec vous ?
25 R. Il y avait moi, mon père, ma mère, deux frères, ma sœur, mon fils et
26 mon épouse.
27 Q. Entendu. Et, à ce moment-là, on -- on comprend qu'en avril, votre
28 village a été attaqué, il y a eu deux ou trois jours de résistance.
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1 Ensuite, vous êtes passés à Semizovac, vous êtes ensuite allés à -- à
2 Korita où vous êtes resté 20 jours. Donc, le -- au moment où vous revenez à
3 Semizovac et où vous voyez M. Nebojsa Spiric, on se situe à quelle période
4 ? On est au mois de mai, on est fin mai, on est début juin ? Est-ce que
5 vous pouvez nous expliquer cela ?
6 R. Je ne peux pas vous dire la date exacte, je ne sais pas quand
7 exactement cela s'est passé, mais c'était donc 20 jours après le début de
8 l'attaque sur Svrake, et donc on nous -- nous ont chassés et expulsés vers
9 Srednje. Et quand nous sommes arrivés au village de Korita, c'est à peu
10 près une vingtaine de jours après cela, donc.
11 Q. Entendu. Vous nous avez mentionné qu'au retour vous avez rencontré
12 Nebojsa Spiric. Qui est Nebojsa Spiric ?
13 Et d'abord, je vais commencer par une question précise : quelle est sa --
14 son origine ethnique ?
15 R. Il est serbe.
16 Q. Entendu. Et avec qui était-il, si toutefois il était avec quelqu'un ?
17 On sait pas. Il était seul ? Il était accompagné de quelqu'un ? Et s'il
18 était avec quelqu'un, qui était cette personne ?
19 R. Il y avait -- il était là avec Miro Kuzman, là, dans ce secteur. Il se
20 tenait là, il a vu que j'arrivais, moi, mon père, mes frères, sœur, femme,
21 et qu'on est arrivés là. Il s'est approché de nous et il a dit au sujet de
22 mon frère, comme il le connaissait, comme il savait que mon frère avait
23 fait partie de la Défense territoriale du côté musulman lorsqu'ils se sont
24 emparé du village de Svrake; à ce moment-là, mon frère faisait partie de la
25 Défense territoriale de Svrake, il avait une arme et il était du côté de
26 l'armée musulmane. Et ils l'ont reconnu quand il se tenait sur le pont de
27 Svrake, quand il gardait Svrake pour que les Serbes ne rentrent pas dans le
28 village.
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1 Q. Et ayant reconnu votre frère comme ayant participé à la Défense -- en
2 tout cas, ayant gardé le pont de Svrake, qu'est-ce que M. Spiric a fait ?
3 R. M. Spiric, il s'est approché et il a dit à mon père et ma mère que mon
4 frère devait l'accompagner pour qu'il lui pose des questions et soi-disant
5 qu'il allait le laisser repartir rentrer chez lui, qu'il fallait pas qu'ils
6 se fassent du soucis.
7 Q. Et est-ce que, de fait, M. Spiric a gardé votre frère avec lui ?
8 R. Il l'a emmené, et pendant quelques temps, il lui a posé des questions,
9 il l'a interrogé. Et nous, il nous a dit : "Rentrez chez vous." Et nous, on
10 a dit qu'on voulait partir pour Sarajevo. Il a répondu que ce n'était pas
11 possible, qu'il fallait qu'on rentre chez nous dans nos maisons, qu'on
12 allait pas nous faire de mal, qu'il le garantissait puisqu'on connaissait
13 Spiric d'avant la guerre, c'était un Serbe du cru, c'était un voisin. Avant
14 -- également avant la guerre, il était actif et se comportait de manière
15 variée. Il pouvait parfois être violent, il se lançait dans des bagarres
16 sans arrêt. Il était un gangster, pour ainsi dire.
17 Q. On reviendra sur les détails concernant M. Spiric un peu plus tard.
18 J'essaie toujours de brosser un peu une chronologie générale.
19 Donc, à ce moment-là, je -- si j'ai bien compris, vous retournez dans votre
20 maison avec votre famille à Svrake, c'est bien cela ?
21 R. Non, à Semizovac.
22 Q. Entendu. En fait, est-ce que vous pouvez clarifier ça : vous-même,
23 votre maison est à Svrake ou à Semizovac ? Ou est-ce que c'est la maison
24 d'un de vos parents qui est à Semizovac ou à Svrake ? Est-ce que vous
25 pouvez le clarifier ? J'ai cru comprendre au début que votre maison était à
26 Svrake.
27 R. Oui, c'est ça. J'étais -- je vivais avec mon épouse et mon enfant dans
28 l'ancienne maison de grand-père à Svrake. Et c'est au carrefour de
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1 Semizovac que mon père avait reçu un appartement municipal. Il avait un
2 deux pièces avec une salle de bain et un couloir. Et pendant l'attaque sur
3 Svrake, mon père est venu me rejoindre dans ma maison chez moi puisque
4 c'était là, à Svrake, qu'il y avait la majorité de nos Musulmans plutôt
5 qu'à Semizovac.
6 Q. Entendu. Et vous venez juste de me dire que vous êtes, peut-être j'ai
7 mal compris, que vous étiez retourné, donc après avoir vu M. Spiric,
8 retourné à Semizovac. Donc, vous aviez une maison aussi à Semizovac ? Est-
9 ce que je dois comprendre cela ? Est-ce que vous pouvez clarifier ce point
10 ?
11 R. C'était l'appartement de mon père que j'ai décrit.
12 Q. D'accord. Est-ce que vous avez revu M. Spiric ce jour-là après qu'il a
13 emmené votre frère ?
14 R. Oui.
15 Q. Et où l'avez-vous revu ?
16 R. Nous sommes partis au carrefour à Semizovac de notre maison et il y
17 avait là un poste de police avant la guerre. Et dans ce poste de police de
18 Semizovac, c'est là qu'ils l'ont emmené -- Spiric l'a amené là, mais il y
19 avait des Serbes qui étaient comme une sorte de police. Ils se sont mis à
20 le frapper, à le tabasser. Et nous, on voyait ça de nos yeux. On s'est
21 approchés de Spiric, on lui a dit : "S'il vous plaît, ne le battez pas, ne
22 touchez pas à lui." Il nous a dit de rentrer chez nous, que rien n'allait
23 lui arriver, qu'il allait s'occuper de ça, qu'il allait régler ça et qu'il
24 allait le renvoyer à la maison.
25 Q. Entendu. Donc, est-ce que vous êtes rentré chez vous à ce moment-là ?
26 R. Oui.
27 Q. Et, une fois chez vous, est-ce que vous avez revu, ce jour-là, M.
28 Spiric ou pas ?
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1 R. Il nous a dit de ne pas sortir de chez nous et il est venu nous parler
2 de notre frère et il nous a dit qu'il était -- soit placé en détention
3 qu'on n'allait pas lui faire de mal. Ma mère s'est mise à pleurer ainsi que
4 mon père et nous tous, et on lui a dit : "S'il te plait, M. Spiric, faites
5 que rien ne lui arrive, il n'est pas coupable. Nous ne sommes pas
6 coupables," et il a dit : "N'ayez pas peur, on ne vous fera rien de mal.
7 Personne ne touchera à vous, restez chez vous."
8 Q. En dehors de ça, qu'est-ce que M. Spiric vous a dit d'autres ? Est-ce
9 qu'il vous a donné des consignes, qu'est-ce qu'il vous a dit ?
10 R. Il a juste dit qu'il était à la prison de Vogosca et qu'on n'allait pas
11 lui faire de mal là-bas. C'est tout ce qu'il nous a dit.
12 Q. Est-ce que vous avez -- est-ce que d'autres personnes sont venues,
13 d'autres Serbes sont venus à votre domicile ce jour-là ?
14 R. Personnes, sauf lui, quand il est venu lui, il est venu à notre porte.
15 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, j'aimerais juste rafraîchir si
16 possible la mémoire du témoin sur un point, et c'est l'audition 92 ter,
17 dont la version anglaise c'est la page 12, paragraphe 49. Je vais lire ce
18 paragraphe, je commence à lire : "Spiric, était le premier à venir chez
19 nous le premier jour. Nous sommes de retour à Semizovac. Plus tard, alors
20 que Spiric était encore chez nous, Novo Divljanovic et Mico Colakovic sont
21 venus nous chercher pour que nous accomplissions notre premier travail pour
22 les Serbes."
23 Q. Est-ce que bien ce que vous avez déclaré et ce qui s'est passé,
24 Monsieur Sejdic ?
25 R. Oui, je voulais le dire par la suite. Lorsque Spirit est parti, Novo
26 Divljanovic est venu, et il nous a dit qu'il fallait qu'on aille nettoyer
27 Semizovac, qu'on allait faire partie du premier peloton de travail, qu'il
28 fallait qu'on aille faire ce travail.
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1 Q. En quoi exactement consistait ce travail, qu'est-ce que vous deviez
2 faire ?
3 R. On nettoyait la poubelle à Semizovac. On enlevait la poubelle, et puis
4 également on nettoyait ses locaux, là où il allait se mettre lui avec ses
5 soldats, son armée, et puis il y avait un bunker d'où on a nettoyé la
6 poubelle, et c'est là qu'il a mis, installé une sorte de café pour lui.
7 Puis on a nettoyé autour de la communauté locale, ce bâtiment-là. Et puis,
8 il y avait un commerce, puis on a enlevé toute la poubelle à Semizovac.
9 Q. Et combien de temps ces travaux ont pris ? Pendant combien de temps
10 avez-vous effectué ce type de travail ?
11 R. Ça a pris peut-être un jour ou deux de travail.
12 Q. Et vous avez continué à faire cela, ensuite, est-ce que vous pouvez
13 préciser ?
14 R. On a -- oui, après on a nettoyé leur jardin, leur champ où ils allaient
15 semer. On a conduit du bois et après ils nous ont mis dans des pelotons de
16 travail. Il fallait creuser des tranchées et on est resté dans ce peloton
17 de travail.
18 Q. Entendu. Vous dites que vous avez coupé du bois, nettoyé enfin les
19 champs, et qu'ensuite vous avez été mis dans des pelotons de travail pour
20 creuser des tranchées; est-ce que vous pouvez nous dire à partir de quel
21 moment ce travail qui consistait à creuser des tranchées a commencé ? Et
22 donc je peux reformuler en sens inverse.
23 Pendant combien de temps avez-vous effectué des travaux disons
24 domestiques avant de commencer à creuser des tranchées ?
25 R. Ça n'a pas duré très longtemps, peut-être deux ou trois jours et après,
26 ils ont commencé à nous amener là où ils s'emparaient d'une ligne de front
27 près du village de Njavocici [phon], ça s'appelait Vranjak. Là, quand ils
28 s'emparaient des positions, ils nous emmenaient pour avoir une base là,
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1 pour pouvoir rester là pour que les Musulmans n'attaquent. Donc, là, ils
2 établissaient une ligne de front, ils nous amenaient pour creuser des
3 tranchées.
4 Q. Pendant combien de temps, de mois, d'années, avez-vous dû effectuer ce
5 travail, le long des lignes de front ?
6 R. A partir de ce jour-là quand on a commencé jusqu'à ce que la guerre
7 dure, tant qu'il a fallu, ils nous emmenaient, il fallait qu'on reste là,
8 qu'on travaille, voilà.
9 Q. Vous pouvez nous donner une date, au moins une année, être un peu plus
10 précis. Pendant combien de temps êtes-vous resté dans ces unités et ces
11 patrouilles de travail ?
12 R. Nous sommes restés à partir du début, donc 1992, quand ça a commencé
13 jusqu'en 1994. Moi, j'ai fait partie d'un peloton de travail.
14 Q. Et après 1994, quelle a été votre destination, affectation, enfin
15 qu'est-ce que vous avez dû faire ?
16 R. Oui, à ce moment-là, je suis allé avec M. Rajko Jankovic, il était
17 commandant de la ligne de front à ce moment-là, il était commandant du
18 Bataillon de Semizovac également. Je l'accompagnais pour le peloton
19 d'intervention à lui. Je portais des munitions, des vivres, de l'eau, et
20 puis au moment des actions qu'ils lançaient ou des attaques sur des
21 tranchées musulmanes, j'évacuais des corps et puis les blessés, voilà.
22 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, jamais juste à nouveau peut-être
23 rafraîchir la mémoire du témoin sur ces questions de date pour être sûr,
24 peut-être après, on pourrait faire la pause; ce serait un moment adéquat.
25 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, allez-y.
26 M. DUTERTRE : Alors, toujours l'audition 92 ter donnée les 16, 17, 20
27 octobre 2006. Dans la version anglaise, page 20, paragraphe 109. Je
28 commence à lire, début de citation : "Je faisais partie du Peloton de
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1 Travail depuis le début de la guerre et jusqu'au
2 23 juillet 1995, lorsque j'ai été transféré sur les ordres de Rajko
3 Jankovic, un Peloton d'Intervention de Semizovac et de ses bataillons."
4 Q. Est-ce bien ce que vous avez déclaré, Monsieur Sejdic, et est-ce que
5 c'est l'exacte chronologie des faits que je viens de vous lire ?
6 R. Oui, oui, c'est ça. A partir de 1994 donc jusqu'en 1995, j'étais avec
7 lui. J'étais joint à lui à son Unité du Peloton de Travail.
8 M. DUTERTRE : On peut peut-être faire la pause, et après je continue.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous allons faire une pause de 20 minutes.
10 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
11 --- L'audience est reprise à 10 heures 53.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise.
13 Monsieur le Procureur, vous avez la parole.
14 M. DUTERTRE : Oui, Monsieur le Président, je vous remercie.
15 Q. Monsieur Sejdic, vous nous avez confirmé que donc jusqu'en 1995, vous
16 travailliez dans la patrouille de travail et que vous êtes transféré
17 ensuite à la patrouille d'intervention. La patrouille d'intervention, c'est
18 une Unité de Combat ? C'est une Unité de Travail ? Est-ce que vous pouvez
19 nous clarifier cela ?
20 R. Non, ce n'était pas une Unité de Travail. C'était un peloton
21 d'intervention de Ranko Jankovic, c'était une Unité spéciale à lui, une
22 Unité d'Attaque.
23 Q. Est-ce que vous pouvez nous préciser pourquoi vous avez été transféré à
24 cette unité d'intervention ?
25 R. J'ai été transféré dans cette unité d'intervention de Ranko Jankovic
26 pour lui apporter ses armes, la nourriture, les munitions, et cetera.
27 Q. Ça va reprendre la question que je viens de poser.
28 Mais globalement, du début de la guerre jusqu'à cette affectation
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1 dans l'Unité d'Intervention, est-ce que vous travailliez de façon
2 volontaire ou non ?
3 R. Je n'ai pas très bien compris la question.
4 Q. Votre travail dans la patrouille de travail sur la ligne de front et
5 ensuite votre affectation dans l'Unité d'Intervention, est-ce que c'est
6 quelque chose que vous faisiez de votre plein gré ?
7 R. Non.
8 Q. Est-ce que vous receviez un salaire ?
9 R. Non.
10 Q. Et pourquoi donc -- est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi vous
11 faisiez ce travail et qu'est-ce qui vous conduisait à faire ce travail ?
12 R. Parce qu'ils me demandaient de le faire. Parce que j'ai été là avec ma
13 famille, emprisonné, et je n'avais pas le choix, c'est ce qu'ils me
14 disaient. Il fallait que j'écoute leurs ordres, que je fasse ce qu'ils
15 voulaient que je fasse. Ils m'ont dit que si jamais j'essayais de m'évader,
16 que ma famille, mes enfants, ma femme, tous allaient être en danger.
17 Q. Par "danger", qu'est-ce que vous voulez -- qu'est-ce qu'ils entendaient
18 ? Qu'est-ce qu'ils voulaient dire ?
19 R. Ils voulaient dire que si jamais j'essayais de m'évader pour passer du
20 côté musulman pour devenir un soldat, ils m'ont dit de ne même pas y penser
21 parce qu'ils allaient tuer mon père, ma mère, ma femme et mon enfant.
22 Q. Entendu. Maintenant, je vais essayer de faire un bref résumé des
23 différents événements que vous nous avez indiqués, et vous allez me dire si
24 j'ai bien compris et si c'est exact.
25 Donc votre village est attaqué à Svrake en avril 1992.
26 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Le Procureur n'a pas le droit de
27 faire de résumé de cette façon-ci.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Je ne suis pas d'accord avec vous. Le Procureur a
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1 parfaitement le droit de rappeler ce que le témoin vient de dire et de lui
2 poser la question, confirmez-vous ce que vous venez de dire ? Donc, il fait
3 un rappel des réponses qu'il a données aux questions posées. Voilà. Alors,
4 posez votre question à partir de ce rappel des réponses données.
5 M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président.
6 Q. Donc, Monsieur Sejdic, votre village est attaqué en avril 1992. Il y a
7 une résistance de deux à trois jours. Ensuite, vous êtes dirigé à Srednje
8 via Semizovac -- via Semizovac. De Semizovac, vous êtes renvoyé -- enfin,
9 de Srednje -- excusez-moi, vous êtes renvoyé à Semizovac. Sur le chemin,
10 les deux cars réussissent à fausser compagnies à l'escorte serbe et
11 arrivent à Korita sous contrôle musulman. Vous y restez une vingtaine de
12 jours, et on vous dit que la situation est calme à Semizovac et c'est la
13 raison pour laquelle vous y retournez. Sur le chemin, vous rencontrez M.
14 Spiric, qui arrête votre frère. Ensuite, on vous oblige à faire des travaux
15 d'ordre domestique pendant deux, trois jours. Et puis, jusqu'en 1995, on
16 vous force à travailler dans la "working platoon" et ensuite, à joindre
17 "l'intervention platoon" de M. Jankovic. Est-ce bien cela ? Est-ce un
18 résumé exact ?
19 R. Rajko Jankovic, oui.
20 Q. Donc, c'est un résumé -- je vais maintenant revenir sur certains
21 points. Maintenant, qu'on a ça en tableau, en background, et je reviens un
22 peu à l'attaque sur votre village et à ce qui se passait un peu avant.
23 Ma première question est la suivante : est-ce qu'il y avait des membres du
24 SDS dans votre village de Svrake avant l'attaque d'avril 1992 ?
25 R. Vous parlez des Serbes du cru ou de ceux qui venaient de l'extérieur ?
26 Q. Des membres de votre village, des Serbes du cru.
27 R. Oui, ils y étaient.
28 Q. Est-ce que vous pouvez donner les noms des personnes de votre village
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1 de Svrake qui étaient membres du SDS ?
2 R. Oui.
3 Q. Vous pouvez les énumérer pour nous, pour informer la Chambre ?
4 R. Oui. Peut-être que je ne vais pas me rappeler de tout le monde parce
5 que cela fait longtemps, mais je peux vous répondre de mémoire. Il y avait
6 Ilija Crnogorac, Nedjo Djukic, Nenad Boskovic, Zarko Mumalo, Blagoja
7 Mumalo, Novo Divljanovic, Major Djukic, Cetko Jovicovic, Dragan Jeremic,
8 Nenad Kuzmanovic, Jevto Vlahovic, Jevto Djukic, Miro Kuzman, et puis les
9 autres dont je ne me souviens plus des noms.
10 Q. Et ces personnes dont vous venez de mentionner les noms, ils sont de
11 votre village ou ils sont aussi des villages
12 environnants ?
13 R. Ils étaient pour la plupart de Semizovac, Israk [phon] et Donja
14 Vogosca, Vranjak, donc, de Semizovac et Svrake et des villages aux
15 alentours. C'était les gens du cru.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, j'ai écouté attentivement ce que
17 vous avez dit. Vous avez énuméré toute une liste de personnes qui
18 appartiennent au SDS, mais comment savez-vous que ces gens-là appartiennent
19 au SDS ? Qu'est-ce qui vous permet de dire qu'ils sont membres du SDS ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient les gens qui avaient une certaine
21 importance au moment où j'ai été capturé. Je sais que c'est eux qui
22 escortaient les gens qui étaient placés en détention, qui ont été
23 emprisonnés.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais votre réponse soulève d'autres problèmes.
25 Vous dites que ce sont eux qui vous ont escorté pendant que vous avez été
26 conduit en détention. Alors on pourrait en conclure que c'est le SDS qui a
27 fait l'opération ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Les Serbes. Je sais pas ce que cela veut dire,
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1 le SDS.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de dire que vous ne savez pas ce que ça
3 veut dire SDS, mais en répondant aux questions du Procureur, vous -- il
4 vous a demandé : "Quels étaient ceux du SDS ?" et vous avez donné la liste.
5 Alors, c'est peut-être là où vient l'erreur, c'est-à-dire que quand la
6 question a été posée, on vous demandait le nom des Serbes qui vous ont
7 arrêté et non pas les membres du SDS.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont les gens, en 1992, mes voisins que je
9 connaissais, donc je vous ai donné leurs noms.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Procureur, je vous donne la
11 parole, mais il y a certainement un problème.
12 M. DUTERTRE : Je vais tenter de vérifier cela, Monsieur le Président.
13 Q. Monsieur Sejdic, est-ce que vous savez ce que -- ce qu'est le Parti --
14 le "Serbian Democratic Party" ?
15 R. Non, je ne sais pas exactement ce que cela veut dire. Je sais qu'ils
16 étaient des Serbes, tout simplement. Et je vous ai énuméré les Serbes que
17 je connaissais, qui habitaient dans mon village -- qui habitaient mon
18 village et que je connaissais très bien.
19 Q. Entendu. La liste des listes que vous nous avez donnée, c'est donc la
20 liste des gens qui ont participé -- enfin, qui vous -- en tout cas, vous
21 ont détenu à un moment donné ?
22 R. Pas seulement moi, les autres aussi.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Tout d'abord, le Procureur a demandé
24 au témoin quels étaient les membres du SDS à Svrake, et le témoin a énuméré
25 les noms de ces gens. Ensuite, on a établi que le témoin ne savait pas ce
26 que c'était que le Parti démocratique serbe. Ensuite, le Procureur dit :
27 "Bon, c'étaient donc les gens qui vous ont arrêté." Et nous avons vu
28 comment cela s'est passé avec les témoins précédents. Le Procureur apporte
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1 un élément nouveau puisque le témoin a tout simplement donné le nom de tous
2 les Serbes de son village, il n'a pas dit que tous ces Serbes l'ont arrêté.
3 Le Procureur ne peut pas parler comme ça, il ne peut pas poser des
4 questions comme cela, ce sont des questions directrices.
5 M. DUTERTRE : Ce n'est pas une question directrice. C'est ce que je me
6 souviens avoir entendu de la traduction française de la réponse. Alors
7 peut-être la traduction est mauvaise, peut-être moi j'ai mal entendu, c'est
8 possible. Je n'entends pas en faire un point de fixation, on demande --
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Continuez.
10 M. DUTERTRE :
11 Q. Donc, cette liste de personnes que vous avez donnée, Monsieur Sejdic,
12 c'est quoi ? C'est la liste des gens de votre village, Serbes ? C'est la
13 liste des personnes qui vous ont arrêté ? C'est -- c'est quoi ? Elle
14 correspond à quoi cette liste ?
15 R. C'est la liste des Serbes de mon coin, ceux qui étaient responsables
16 des Musulmans, du peuple musulman. C'est eux qui exerçaient les pressions
17 sur mes voisins, les Musulmans, que l'on arrêtait, que l'on plaçait en
18 détention, que l'on emmenait.
19 Q. Je vous remercie. Quand votre village a été attaqué, est-ce que vous
20 pouvez nous dire quelles étaient les différentes unités qui attaquaient ?
21 On est donc en avril 1992.
22 R. Notre village a été attaqué, donc, de Semizovac en direction de
23 Krivoglavci, Donja Vogosca, et depuis d'autres endroits aussi.
24 Q. Entendu. Et quels étaient, si vous le savez, quels étaient les
25 différents types d'unités qui attaquaient ? C'était l'armée régulière,
26 c'était des volontaires ? Est-ce que vous avez pu identifier au cours des
27 deux, trois jours qu'a duré l'attaque ? Et ensuite, lorsque les assaillants
28 sont arrivés dans votre village, est-ce que vous avez pu identifier qui
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1 étaient les attaquants, quelles unités c'était ?
2 R. C'étaient les Serbes du cru, c'est ceux-là qui attaquaient.
3 Q. Est-ce qu'il y avait des Unités de l'armée régulière
4 serbe ?
5 R. Oui. Il y en avait qui était dans la caserne. Il y avait des soldats
6 là-bas. Ils étaient là avec eux aussi.
7 Q. Et ces soldats vous les avez vus participer à l'attaque, vous-même, ou
8 c'est quelque chose que vous avez entendu [imperceptible] ensuite ?
9 R. Je l'ai entendu par la suite. Je ne l'ai pas vu de mes propres yeux.
10 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Le Procureur à nouveau pose une
11 question qui n'est pas supportable. Jusqu'à 19 mai, la seule armée
12 régulière était la JNA, avec la Défense territoriale, et donc, il ne peut
13 pas lui demander si c'étaient les Unités de l'armée régulière serbe. Quelle
14 est cette armée régulière serbe ? Donc, soit il y avait la JNA soit la
15 Défense territoriale, soit des unités qui ne faisaient pas partie ni de la
16 JNA ni de la Défense territoriale.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Nous sommes le 19 mai 1992; c'est bien ça ?
18 M. DUTERTRE : -- mois d'avril 1992.
19 M. LE JUGE ANTONETTI : -- en avril 1992, bien. Pas au mois de mai. En avril
20 1992, la Bosnie-Herzégovine n'a été reconnue à l'ONU que le 22 mai 1992,
21 sauf erreur de ma part. Donc, normalement, à cette date, l'armée c'est
22 celle de l'ex-Yougoslavie.
23 Alors, Monsieur le Procureur, posez des questions au témoin pour savoir
24 quelle était sa connaissance de l'armée, de ceux qui en faisaient partie,
25 des éléments qui étaient dans l'attaque. Bon. J'ai bien vu que vous avez
26 essayé de lui poser la question, il dit les "Serbes," on ne sait pas trop.
27 Alors peut-être que vous pouvez aborder cela par d'autres questions, sur
28 l'habillement, et cetera. Ou si vous avez le sentiment qu'il a oublié
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1 certaines choses par rapport à sas déclaration, vous pouvez toujours lui
2 rafraîchir la mémoire.
3 M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président.
4 Q. Monsieur Sejdic, lorsque les assaillants serbes sont arrivés dans votre
5 village, est-ce que vous pouvez nous décrire, si d'abord première question
6 : ils étaient tous habillés de la même pareille et de la même manière ou
7 non ?
8 R. Non, ils n'étaient pas tous habillés de la même façon. Il y en avait
9 qui avait l'ancien uniforme militaire. D'autres portaient des vêtements
10 civils ou peut-être des uniformes dépareillés, juste une chemise ou un
11 pantalon.
12 Q. Est-ce que vous connaissiez l'uniforme de l'armée de la JNA, est-ce que
13 le connaissiez au moment de l'attaque, vous saviez à quoi ils ressemblaient
14 ?
15 R. Oui, c'est l'ancien uniforme d'avant la guerre que l'on portait dans
16 l'armée. Je le connais ces uniformes.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Vous connaissez, vous-même vous aviez fait
18 votre service militaire dans la JNA ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Pendant combien de temps ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Douze mois.
22 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc, vous êtes capable de distinguer un
23 uniforme de la JNA, parce que vous en avez porté, d'un uniforme qui n'est
24 pas de la JNA ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]
27 M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président, c'était la question
28 de suivi que je voulais poser.
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1 Q. Est-ce que vous pouvez -- donc, on comprend qu'il y a des soldats qui
2 ont -- qui pénètrent dans le village qui ont l'uniforme
3 -- l'ancien uniforme de la JNA, est-ce que vous pouvez nous décrire comment
4 étaient habillés les autres ?
5 R. Les autres portaient les uniformes noirs de camouflage. Là, c'étaient
6 les hommes de Rajko Jankovic. Ils avaient des uniformes spéciaux noirs, les
7 autres portaient des vêtements -- des uniformes de l'ancienne armée. Ceux
8 qui avaient ces uniformes, c'étaient des forces spéciales. Et les autres --
9 ceux qui n'avaient pas d'uniforme spéciale, et ils avaient des uniformes
10 d'avant, des uniformes militaires.
11 Q. Est-ce que vous avez vu parmi les gens qui portaient des anciens habits
12 enfin des habits de la JNA, des officiers ?
13 R. Non, je n'ai pas vu d'officier.
14 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire d'où est originaire Rajko Jankovic ?
15 R. Rajko Jankovic de Semizovac, du village de Svrake.
16 Q. Et quelle est son origine ethnique ?
17 R. Il est serbe.
18 Q. En dehors des soldats qui portaient l'habit de la JNA et des hommes de
19 Rajko Jankovic, avez-vous noté la présence d'autres soldats appartenant à
20 d'autres unités ?
21 R. Ils portaient les mêmes vêtements. Les gens de Vogosca et Ilijas, en
22 direction de Semizovac, ceux qui se sont regroupés, ils portaient à peu
23 près les mêmes uniformes. Les vieux uniformes de la couleur vert olive ou
24 bien des uniformes militaires, mis à part les spéciaux donc, parce que ceux
25 qui appartenaient à des Unités spéciales, et ils portaient des uniformes de
26 camouflage.
27 M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, vous parlez des unités spéciales. Alors, en
28 écoutant ce que vous dites, j'ai constaté qu'il y en a qui avait des
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1 uniformes noirs, alors, pouvez-vous nous décrire dans le détail, si vous
2 vous en souvenez, comment ils étaient habillés, équipés; est-ce que vous
3 pouvez nous donner des éléments d'information ?
4 Puisque c'est vous-même qui avez dit ce sont des Unités spéciales;
5 alors, pouvez-vous nous dire : ils sont spécial en quoi ? Quelle est la
6 différence entre eux et ceux qui avaient des uniformes vert olive ou ceux
7 qui étaient habillés en civil ? Pourquoi ils sont spéciaux ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient des jeunes gens qui portaient un
9 équipement spécial. Donc, ceux qui étaient vêtus de ces uniformes, alors
10 que les gens plus âgés, les Serbes du cru, ils étaient plus âgés, et ils
11 portaient les vieux uniformes, ils ne participaient pas aux actions de
12 combat. C'étaient des gens d'un certain âge qui partaient pour garder les
13 lignes, ou les tranchées.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Vous dites que c'étaient des jeunes mais ils
15 avaient des armes ? Si oui, lesquelles ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ils portaient des armes automatiques, des
17 pistolets, des grenades à main, et ils portaient des gilets.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Des gilets par-balles ou pour se protéger du froid ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, des gilets par-balles. C'est ce qu'ils
20 portaient.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Et sur le visage il y avait quelque chose sur leur
22 visage ou il y avait aucune marque sur le visage ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Certains d'entre eux prenaient une espèce de
24 crème noire pour mettre cela sur le visage, et parfois ils portaient un
25 foulard autour de la tête, et là, je parle des jeunes parmi eux.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Un petit détail, qu'il n'en est pas mais ça peut
27 être intéressant. Ces jeunes avaient donc sur le visage des traces noires.
28 Ca vous en avez vues, vous en êtes sûr ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Et ils étaient combien dans le groupe ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Environ 15 était ainsi au moment de l'attaque,
4 au début de l'attaque.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Et vous les avez entendu parler entre eux ou pas ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter la question,
7 parler de quoi ?
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce que -- ces 15 jeunes habillés en noir, est-ce
9 que vous les avez entendu dire des mots parlés entre eux-mêmes ? Est-ce que
10 vous les avez entendu parler ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, simplement ils étaient souriants, ils
12 étaient contents de partir au combat. Ils mettaient ces crèmes noires avec
13 des foulards noirs et ils étaient contents, ils riaient.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : D'après vous ces jeunes, ils étaient originaires de
15 la région ou ils venaient d'ailleurs ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient surtout des gens du cru.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.
18 M. DUTERTRE : Merci, Monsieur le Président.
19 Q. Sur ce point, vous dites surtout des gens du cru. Est-ce que parmi les
20 assaillants vous avez constaté la présence d'unités qui n'étaient pas de la
21 région ? Des Serbes qui n'étaient pas de la région ?
22 R. Oui. Déjà lorsque ceux de Semizovac, donc, les unités lorsqu'ils
23 lançaient une attaque, c'était dans la région d'Ilijas, Vogosca, cette
24 région-là que les groupes se réunissaient, et ensuite, ils partaient
25 ensemble sur les lignes afin de s'emparer des positions musulmanes et des
26 tranchées musulmanes.
27 Q. Je vais préciser ma question. Au moment de l'attaque sur votre village
28 en 1992, est-ce que vous avez constaté la présence d'Unités serbes qui
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1 n'étaient pas de la région des environs ?
2 R. Oui, effectivement. Il y en avait de la région d'Ilijas, donc, Ilijas
3 et Vogosca.
4 Q. Est-ce qu'il y avait des unités qui, selon ce que vous avez pu
5 constater ou non, provenaient d'autres endroits que la région proche,
6 c'est-à-dire d'autres endroits qu'Ilijas ou de la municipalité de Vogosca ?
7 R. Oui. C'était des réfugiés, par exemple, qui avaient fui Visoko, Zenica,
8 Kakanj, et ils sont venus s'intégrer dans leur section -- leur peloton et
9 ils ont rejoint leur rang après avoir fui leurs villes.
10 Q. Est-ce que vous avez vu s'il y avait d'artillerie en avril 1992 autour
11 de votre village et qui aurait pu tirer sur votre
12 village ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que cette artillerie était utilisée contre votre village au
15 moment de l'attaque ?
16 R. Oui, elle était utilisée.
17 Q. Et qui contrôlait -- commandait -- enfin, activait cette artillerie si
18 vous avez pu le constater toutefois ?
19 R. Je ne sais pas exactement qui l'utilisait car tout ceci était sur les
20 collines. Il y avait des semeuses de la mort, il y avait des obusiers et
21 puis il y avait des armes antiaériennes. Je ne sais plus comment ça
22 s'appelle, je ne me souviens pas de l'appellation exacte de cette arme, les
23 semeuses de la mort antiaérienne, quelque chose comme ça.
24 Q. Je vous remercie. Est-ce que vous vous souvenez du nom des musulmans de
25 votre village qui ont été arrêtés ?
26 R. Oui, je me souviens.
27 Q. Vous pouvez nous donner ces noms ?
28 R. Il y avait Ekrem Piknjac, Muju Muftic, Ekrem Skando, Esad Muratovic,
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1 Esad Fejzovic, et puis Karaga, Himzo. Puis, Idriz, Ahmo Zigic, Bego Kerla,
2 puis Esad Fejzovic, Ahmo Fejzovic, Salko Tiric, Avdo Tiric, et d'autres
3 dont je ne me souviens pas des noms en ce moment.
4 M. DUTERTRE : J'aimerais, Monsieur le Président, afficher la pièce 65 ter
5 portant le numéro 1689, 1689.
6 Q. Monsieur Sejdic, est-ce que vous avez déjà vu ce document auparavant ?
7 R. Oui.
8 Q. Quand est-ce que vous l'avez vu pour la première fois ?
9 R. Je l'ai vu pour la première fois lorsque j'ai fait une déclaration
10 allant dans ce sens.
11 Q. C'est-à-dire quand ?
12 R. Au début de la guerre, et du début à la fin de la guerre, je
13 connaissais ces personnes.
14 Q. Est-ce que vous pouvez clarifier, vous avez vu ce document au début de
15 la guerre, ou vous connaissez ce dont le document parle depuis le début de
16 la guerre ? Deux choses différentes.
17 R. Je connaissais ces gens-là au début de la guerre.
18 Q. Quand avez-vous vu ce document, ce qui est affiché pour la première
19 fois ?
20 R. Lorsque j'ai fait ma déclaration.
21 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire quand ? A quelle date vous vous
22 référez.
23 R. Je l'ai fait à la fin de la guerre, en 1995.
24 Q. Est-ce que vous pouvez nous confirmer que d'après le titre, c'est un
25 rapport établi suite à la visite à Svrake par une commission indiquant --
26 enfin, qui établisse un certain nombre de maisons libres.
27 R. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, me répéter la question ?
28 Q. Est-ce que vous pouvez confirmer que suivant le titre, c'est un rapport
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1 établi suivant une visite à Svrake par une commission qui établit qu'il y a
2 un certain nombre de maisons de famille vides ?
3 R. Oui.
4 Q. Est-ce qu'on peut passer à la page 3 en B/C/S --
5 Mme LE JUGE LATTANZI : Excusez-moi, Monsieur le Procureur, quelle est la
6 page de ce rapport ?
7 M. DUTERTRE : Excusez-moi, Madame le Juge, c'est la page 3.
8 J'y vais tout de suite, est-ce qu'on peut afficher la page 3. Peut-
9 être qu'on va le mettre sur l'ELMO parce qu'il ne semble pas --
10 C'est la page 3 que je souhaite. Il semble qu'il -- la page 2.
11 L'INTERPRÈTE : Microphone, Monsieur Dutertre, s'il vous plaît.
12 M. DUTERTRE : Ça doit être la page 2 -- c'est la page 3, voilà.
13 Q. Monsieur Sejdic, est-ce que vous pourriez nous confirmer que la date de
14 ce document, enfin, qui est mentionné sur le document, c'est : "Vogosca, 14
15 octobre 1992" ?
16 R. Oui.
17 Q. Est-ce que vous connaissez l'un ou l'autre des membres de la
18 commission, Vlaco, Brane; Krunic, Boro; Jovicevic, Dusko ?
19 R. Oui, je les connais.
20 Q. Qui connaissez-vous parmi ces trois personnes ?
21 R. Je connais les trois.
22 Q. Qui est M. Brane Vlaco ?
23 R. Brane Vlaco, c'était la personne principale pour la prison à Vogosca.
24 Q. Et les deux autres personnes, est-ce que vous pouvez nous dire ce
25 qu'ils -- quelle était leur activité, leur emploi ?
26 R. Dusko Jovicevic, il a été dans le commandement, dans le bureau de
27 Rajko. Je pense qu'il était chargé des questions de logistique, quelque
28 chose comme ça.
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1 Q. Et le troisième individu, Boro Krunic ?
2 R. Boro Krunic, lui aussi, il était dans le commandement, mais je ne sais
3 pas exactement quelles étaient ses fonctions.
4 Q. L'origine ethnique de ces trois personnes, est-ce que vous la
5 connaissez ?
6 R. Serbe.
7 Q. Je vous remercie. J'aimerais revenir à la page 1 dans e-court.
8 Est-ce que, Monsieur Sejdic, vous connaissez le nom des personnes
9 décrites comme anciens propriétaires, donc la liste apparemment des
10 personnes qui sont sur la droite, commençant par Alija Beslija jusqu'à
11 Zahid Skamo; est-ce que vous connaissez ces personnes ?
12 R. Ce sont des Musulmans. Je les connais, ce sont mes gens. Des
13 Musulmans qui vivaient dans la région de Svrake, Semizovac avant la guerre.
14 Q. Je vous remercie. Et est-ce que vous connaissez l'un ou l'autre,
15 l'une ou l'autre des personnes qui sont mentionnées sur la gauche, des
16 numéros 1 à 19, commençant par Srpko Stanisic jusqu'à Mihajlo Kapikul ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce que vous pouvez nous préciser lesquelles de ces personnes vous
19 connaissez, en indiquant le numéro ?
20 R. Je connaissais Srpko Stanisic, Jovan Djukic, Vinko Knezevic, Tonka
21 Knezevic, Jevto Djukic, Srpko Stanisic, Milorad Budesa, Slobodan Crnogorac,
22 Jovo Arnautovic, Nenad Kuzman, Sretko Cetkovic, et Mihajlo Kapikul.
23 Q. Quelle est l'origine ethnique de toutes ces personnes ?
24 R. Serbe.
25 Q. Est-ce que vous savez ce qu'ils faisaient pendant le confit entre 1992
26 et 1995 ?
27 R. A ce moment-là, lorsque l'attaque contre le village de Svrake a
28 commencé et contre le village de Semizovac, à ce moment-là, ils étaient à
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1 Svrake. Ce sont eux qui arrêtaient les gens. Ce sont les personnes dont les
2 noms figurent sur la liste et que j'ai mentionnées. A cette époque-là,
3 c'étaient eux les personnes principales.
4 Q. Entendu. Est-ce que vous pouvez nous confirmer qu'en dessous du titre,
5 il y a une phrase qui indique que les personnes dans la liste de gauche
6 occupent les maisons des personnes dans la liste de droite ?
7 R. Pourriez-vous me répéter la question, s'il vous plaît, concernant la
8 partie à droite.
9 Q. Est-ce que vous pouvez me confirmer que ce document suivant la première
10 phrase qui figure en dessous du titre, indique que les personnes de 1 à 19
11 dans la liste de gauche occupent les maisons des personnes qui figurent
12 dans la liste sur la droite du document ?
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
15 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Cette question est tout à fait
16 directrice, et le témoin l'a confirmée. Moi, j'attendais exprès pour voir
17 ce que le témoin allait dire. La phrase au-dessus de la liste dit : "Parmi
18 les structures libres," autrement dit : "Les maisons vides, celles-là sont
19 occupées par des citoyens suivants."
20 Certains ont occupé les maisons vides, donc ce sont les citoyens qui
21 ont déjà leur propre appartement et leur propre maison qui ont occupé ces
22 maisons vides. Ils n'avaient pas besoin d'hébergement car dans la fin et il
23 est écrit : "Ceux qui ont un hébergement --
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Je vais intervenir parce qu'il faut qu'on règle ce
25 problème qui est important.
26 Monsieur le Témoin, on a une liste qui est établie en octobre 1992, c'est-
27 à-dire plusieurs mois après l'attaque du village. Nous constatons dans la
28 liste que d'anciens propriétaires, les numéros 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9,
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1 ne sont plus là et il y a des nouvelles personnes qui sont là. Il en est
2 aussi pour le 11, le 13, le 14, le 15 et le 16. Donc, plusieurs Musulmans
3 ne sont plus là et leurs maisons sont occupées par d'autres personnes dont
4 on a la liste.
5 Il se trouve qu'en répondant au Procureur, vous avez dit que les personnes
6 qui occupent ces appartements vous les connaissez, par exemple, Stanisic,
7 Djukic, vous en connaissez plusieurs et il se trouve que ce sont des
8 Serbes. Alors, en vous écoutant, je me suis posé la question suivante : ces
9 appartements sont libres parce que les propriétaires sont partis dans des
10 conditions que vous nous avez indiquées. Ces appartements étant libres ont
11 été occupés par d'autres personnes, mais ces autres personnes que vous
12 connaissez qui sont Serbes, avant le mois d'avril, elles avaient leurs
13 maisons aussi ? Alors comment se fait-il que M. Stanisic, prenez le numéro
14 1, qui devait habité quelque part, vient occuper maintenant l'appartement
15 d'Alija Beslija ? Vous avez une explication à nous donner ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils prenaient les maisons et les occupaient.
17 Si les maisons étaient belles et bien équipées, ils prenaient ces maisons,
18 ils prenaient les meubles ou les biens, ils ramenaient cela chez eux et au
19 moment où les gens de leur propre peuple fuyaient les régions placées sous
20 le contrôle des autorités musulmanes, qu'ils se réfugiaient ou qu'ils
21 venaient en raison d'un échange, lorsqu'ils venaient dans cette région-là,
22 ils les plaçaient, ils les installaient dans ces maisons-là qui étaient
23 libres et abandonnées et qu'eux ils occupaient.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on a donc 14 Serbes qui avaient des maisons
25 ou des appartements et qui sont venus occuper d'autres maisons qui
26 appartenaient à des Musulmans soit pour la raison que ces maisons étaient
27 plus belles, c'est ce que vous avez dit, mais quand ils ont quitté leurs
28 propres maisons, ces maisons ont été occupées par d'autres Serbes qui
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1 venaient d'ailleurs. Très bien. Mais il y a un petit problème, Monsieur,
2 que je vais vous exposer et j'aimerais que vous m'éclairiez dessus.
3 M. Stanisic, le numéro 1, qui avait une maison, je ne connais pas sa
4 maison. On ne sait pas, peut-être qu'on aurait dû aller sur place pour voir
5 cela, peut-être qu'on ira, il quitte sa maison pour aller occuper la maison
6 de M. Beslija, mais la maison qu'il quitte, elle est à lui ? En quittant sa
7 maison, il va la laisser à des inconnus qui viennent d'ailleurs. Pour vous,
8 c'est normal, c'est logique ?
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Peut-être vous n'avez pas bien compris lorsque
10 j'en ai parlé. Ils occupaient ces maisons lorsque ces maisons étaient
11 pleines des meubles et des biens, et ils prenaient les meubles et les
12 biens. Ensuite, lorsque d'autres réfugiés venaient, ils les installaient
13 dans ces maisons-là. Si c'était un membre de sa famille par exemple, ils
14 mettaient à la disposition de celui-ci cette maison qu'il avait occupée
15 précédemment.
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Je fais bien de poser des questions parce qu'on
17 découvre des aspects inattendus.
18 La maison de Stanisic, quand la commission vient et le mentionne comme
19 apparemment occupant des lieux, on peut en déduire que des Serbes occupent
20 les lieux. Mais là vous donnez une autre explication. Vous dites ce n'est
21 pas tout à fait ça, c'est-à-dire que Stanisic a pris ce qu'il y avait dans
22 la maison de Beslija, alors j'anticipe peut-être une télévision, meubles,
23 chaises, et cetera, pour les ramener chez lui et ce sont d'autres Serbes
24 qui sont venus occuper la maison de Stanisic ? Est-ce que c'est comme ça
25 qu'on doit comprendre ce que vous nous dites, ce qui évidemment complique
26 les choses ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai dit.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, pourquoi la commission qui en octobre
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1 est sur les lieux marque le nom de Stanisic, alors que d'après ce que vous
2 dites il devrait y avoir normalement une autre famille serbe qui est là
3 peut-être, et pourquoi à ce moment-là il ne met pas le nom de l'autre
4 famille serbe puisque M. Stanisic continue à habiter chez lui.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit simplement des noms de personnes qui
6 à ce moment-là ont occupé ces maisons, et donc, ils gardaient ces maisons,
7 ils en étaient responsables. Et au moment où les réfugiés venaient, ils les
8 mettaient à la disposition des réfugiés mais, moi, je n'ai pas dit qu'ils
9 vivaient là-bas, qu'ils les occupaient et habitaient dans ce sens-là.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, donc, voilà encore un élément de
11 complication. Vous dites que ces personnes gardaient les maisons, c'est-à-
12 dire qu'ils en étaient dépositaires temporaires de ces maisons et que quand
13 les autres arrivaient, il y avait un transfert de garde ou de propriété sur
14 les nouveaux arrivants. Bon. C'est une affaire extrêmement complexe.
15 Monsieur le Procureur.
16 M. DUTERTRE : Oui. Je vous remercie, Monsieur le Président, de ces éléments
17 de clarification. Je veux juste continuer sur un point.
18 Q. Les personnes figurant en tant qu'anciens propriétaires, et qui
19 figurent donc à droite, est-ce que vous pouvez nous dire s'ils sont partis
20 au moment de l'attaque ou si certains étaient là encore quand vous êtes
21 revenus; et dans l'affirmative, quand ils sont
22 partis ?
23 R. Cette question elle m'inquiète beaucoup. J'ai dit que ces gens, qui
24 étaient là au début de la guerre, quand les Musulmans ont été enlevés de
25 ces maisons, à ce moment-là, on a vu arriver ceux qui sont sur la liste,
26 que j'ai mis sur la liste. Ils se sont emparés de ces maisons, et si les
27 maisons étaient riches, je l'ai déjà dit, ils ont emporté ce qu'ils ont
28 trouvé et puis lorsque leurs réfugiés arrivaient, ils les mettaient à leur
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1 disposition pour qu'ils s'y installent pour qu'ils y résident, y vivent
2 puisque les maisons; par exemple, il est possible qu'ils se soient emparés
3 de ces maisons lorsque les Musulmans les ont chassés, lorsqu'il y a eu des
4 activités et des actions ailleurs. Puis certains sont arrivés avec des
5 tracteurs, d'autres avec des camions. S'ils avaient quelque chose pour
6 mettre dans la maison, ils les mettaient, sinon --
7 Q. Ma question était : est-ce que -- les anciens propriétaires, M. Alija
8 Beslija jusqu'à Zahid Skamo, est-ce qu'ils sont partis juste après
9 l'attaque en avril 1992, ou est-ce que certains sont partis entre avril
10 1992 et octobre 1992 qui est la date du document ?
11 R. Ils ont été chassés, à ce moment-là, on les a emmenés. On les a emmenés
12 de l'endroit où ils étaient, de leur immeuble -- bâtiment. Il y avait
13 Kuzman, Nenad qui vivait dans la maison de Skamo.
14 Q. Entendu, c'est clair. Donc, quand vous dites "à ce moment-là," ces
15 attaques, en avril 1992 ?
16 R. Oui.
17 M. DUTERTRE : J'aimerais verser ce document comme élément de preuve au
18 dossier, Monsieur le Président.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Monsieur le Président, Madame et
20 Messieurs les Juges, ce document ne peut nullement être versé au dossier.
21 Premièrement, dans l'en-tête, il n'y a pas d'organe qui aurait mis sur pied
22 cette commission. Nous n'y voyons aucun tampon, aucun cachet, aucun numéro
23 d'enregistrement et aucune signature non plus. La première fois que le
24 témoin a vu ce document, c'est lorsque les enquêteurs de La Haye lui ont
25 montré le document.
26 En réalité, ceci n'est pas un document du tout. Peut-être que le
27 Procureur l'a dactylographié sur une machine à écrire, il l'a peut-être
28 montré au témoin par la suite. Peut-être que tout cela s'est passé comme
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1 s'est écrit ici, peut-être que, véritablement, une commission existait.
2 Mais ce document-ci ne constitue pas une preuve montrant que cette
3 commission existait.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, la Chambre va délibérer.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE ANTONETTI : On va demander au Procureur s'il fait une réplique,
7 mais --
8 M. DUTERTRE : Oui, deux points. Déjà, premièrement, le bureau du Procureur
9 ne -- ne fabrique pas des éléments de preuve. Secondement, s'il y a des
10 questions quant à l'origine de la création de la commission, ce genre de
11 chose c'est -- tout cela va sur le poids que la Chambre va accorder au
12 document et -- et donc, je pense qu'il est parfaitement admissible.
13 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, écoutez, Monsieur Dutertre,
14 allez-vous pouvoir authentifier ce document ? Etes-vous en mesure de le
15 faire ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est mon document. Il y a des signatures
17 sur mes documents, sur les déclarations que j'ai remises. Mais beaucoup de
18 temps s'est écoulé après la guerre. Je ne sais pas ce que j'ai mangé il y a
19 15 jours. Comment voulez-vous que je me rappelle tout ce qu'il y a dans --
20 dans mes documents ?
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, comment vous avez obtenu ce
22 document ?
23 M. DUTERTRE : Il faudrait que je -- je ne peux pas vous répondre de -- de
24 tête immédiatement, Monsieur le Président. Il faudra que je puisse -- on
25 puisse revenir sur cette question éventuellement ultérieurement. On peut
26 remettre --
27 [La Chambre de première instance se concerte]
28 M. LE JUGE ANTONETTI : -- donner un numéro MFI.
Page 8199
1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Sous réserve d'authentification, bien
2 sûr. Ce sera la pièce P463.
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Une objection supplémentaire. Comment est-ce
4 qu'on peut constater l'authenticité d'un document qui ne porte aucune
5 signature, aucun tampon, pas de titre, pas d'intitulé de l'organe qui
6 aurait créé cette commission. Comment ? Qu'est-ce qui constituerait en
7 l'authenticité ?
8 M. LE JUGE ANTONETTI : On va pas perdre du temps. Un document n'est pas
9 uniquement authentique parce qu'il y a un tampon et une signature. Il y a -
10 - il y a des documents qui n'ont ni tampon, ni signature qui peuvent être
11 authentiques. Donc, l'authenticité n'est pas liée au fait qu'il y ait un
12 tampon ou une signature. C'est la raison pour laquelle on a demandé au
13 Procureur de nous dire comment il a eu en sa possession ce document. Voilà.
14 MFI, ça ne veut pas dire que, pour le moment, c'est admis.
15 Continuez, Monsieur le Procureur.
16 M. DUTERTRE : Merci, Monsieur le Président. Je vous reviendrai
17 effectivement sur cette question qui tout à fait -- tout à fait pertinente
18 et légitime.
19 Q. Je passe, Monsieur Sejdic, à un autre point qui est la question du --
20 du travail forcé. Vous avez indiqué que vous avez effectué deux ou trois
21 jours de travaux domestiques, et ensuite, que vous avez été affecté à une
22 unité de travail, que vous n'aviez pas de salaire et que ce n'était pas
23 volontaire de votre part de travailler. Est-ce que vous pouvez nous
24 préciser combien y avait-il de personnes dans l'Unité de Travail à laquelle
25 vous avez été affectée en 1992 ?
26 R. Nous étions à peu près une quinzaine, une vingtaine de personnes.
27 Q. Quelle était l'origine ethnique des personnes qui composaient avec vous
28 cette patrouille, unité de travail ?
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1 R. Il n'y avait qu'un -- qu'un seul Croate, les autres étaient des
2 Musulmans.
3 Q. Est-ce que vos collègues dans cette Unité de Travail percevaient un
4 salaire ?
5 R. Ça je ne sais pas exactement.
6 Q. Est-ce que vous les avez vus toucher un salaire ?
7 R. Non.
8 Q. Est-ce qu'ils vous ont dit qu'ils -- est-ce que l'un ou l'autre vous a
9 dit qu'il recevait un salaire ?
10 R. Non, personne ne me l'a dit.
11 Q. Et quelle est votre impression ? Est-ce que vous pensez qu'ils
12 travaillaient là volontairement ou qu'ils étaient obligés de travailler ?
13 R. Ce n'est pas de manière volontaire qu'ils ont travaillé, donc ils ont
14 été capturés et ils ont subi des pressions pour qu'on soit obligés de
15 travailler, donc, de faire ce qu'ils nous disent de faire.
16 Q. Monsieur Sejdic, vous nous avez expliqué le genre de pression qui était
17 exercée sur vous-même, est-ce que vous pouvez nous dire quel genre de
18 pression était exercé sur les autres membres de cette unité de travail ?
19 R. Tout ce qui m'est arrivé à moi leur est arrivé à eux aussi, aux autres.
20 De même, tout comme on a agit avec moi, c'est avec les autres également.
21 Q. Est-ce que vous pouvez préciser qu'est-ce qui leur serait arrivé s'ils
22 avaient voulu s'échapper ?
23 R. Ils ne pouvait s'enfuir nulle part même s'ils l'avaient souhaité. Ce
24 qui se serait produit, c'est qu'on les aurait frappés, tabassés, on aurait
25 tiré sur eux, et cetera.
26 Q. Et qu'est-ce qui serait arrivé à leurs familles, le cas échéant ?
27 R. C'est ce qu'ils leur disaient toujours quand on allait faire ces
28 travaux forcés, creuser des tranchés, quand on allait au front. Tout ce
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1 qu'ils disaient de faire, ils disaient toujours aussi : "Ne songez pas à
2 vous enfuir parce que vous savez ce qui vous attend. Les autres peuvent
3 vous tuer, mais nous aussi. Et puis, vous avez à la maison des femmes, des
4 enfants, enfin, tout -- tout cela, on va vous l'égorger et tuer, exécuter."
5 Voilà, c'est ce qu'ils disaient.
6 Q. Entendu. Est-ce que la composition de votre Unité de Travail était
7 stable pendant ces trois années, 1992, 1994, 1995, ou est-ce qu'elle a
8 évolué ? Est-ce que c'était les mêmes personnes pour -- pour faire simple ?
9 R. Oui, c'était toujours ces gens-là, sauf que Mehmedovic, Idriz a perdu
10 la vie, Skando, Nermin et Tiric, Avdo. Eux, ils ont -- ils ont été tués
11 quand il y a eu l'attaque sur Zuc. Et c'était quand ils nous ont emmenés
12 pour faire bouclier humain, Tiric, Avdo; et Skamo -- Skando, Nermin ont été
13 tués, à ce moment-là, ces deux-là, et Mehmedovic, Idriz.
14 Q. Entendu. Est-ce que vous pouvez donner le nom des autres personnes,
15 vous nous avez donné quelques noms de personnes qui étaient décédées, est-
16 ce que vous pouvez nous donner le nom des autres personnes de votre Unité
17 de Travail ?
18 R. Oui. Osmanovic, Meho, il y avait aussi -- un instant, que ça me
19 revienne exactement tous ces -- tous ces noms des nôtres, parce que je --
20 j'ai un petit peu perdu le pied dans tout cela. C'est Sejdic, Kasim, mon
21 père; il y avait aussi Nijas, Avdo -- enfin, Ahmo, Armo était son nom, il y
22 avait lui. Nijas, j'ai déjà mentionné, il y avait --
23 Q. -- prénoms et noms de famille en même temps pour que ça soit complet.
24 R. Muratovic, Edin; Osmanovic, Meho; Zigic, Ahmo; Skando, Nermin; il y
25 avait Muftic, Mujo -- il y avait Muftic, Mujo. Je n'arrive pas à me
26 rappeler tout cela exactement.
27 M. DUTERTRE : Je passe maintenant -- peut-être on pourrait -- c'est des --
28 quelque chose sur lequel je pourrais éventuellement rafraîchir rapidement
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1 la mémoire du témoin, Monsieur le Président, si vous m'y autorisez.
2 M. LE JUGE ANTONETTI : Sur --
3 M. DUTERTRE : La composition de son Unité de Travail.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
5 M. DUTERTRE :
6 Q. Donc paragraphe 58, page 13, l'audition 92 ter donnée les 16, 17, 20
7 octobre 2006. Je lis début citation :
8 [interprétation] "Il y avait environ 25 d'entre nous dans cette
9 patrouille, y compris Idriz Mehmedovic, Nijaz Mustapic, Mujo Muftic, Meho
10 Osmanovic, Edin Muratovic, Ahmo Zigic - qui a été tué lorsqu'un obus l'a
11 atteint près de l'église à Solakovici - Remzija Sejdic, mon oncle, Reso
12 Zukic, Fadil Zukic, Huso Cebo, Safet Cebo."
13 [en français] [hors micro]
14 R. Oui, oui, c'est exact.
15 Q. Je vous remercie, Monsieur Sejdic. Quelle était la personne en charge
16 de votre Unité de Travail qui la dirigeait, qui la commandait ?
17 R. Jankovic, il était en charge de nous, et Djukic, Nedjo nous emmenait.
18 Il nous emmenait travailler. C'est Nedjo Djukic qui était en charge de ce
19 Peloton de Travail.
20 Q. On le sait déjà pour Rajko Jankovic --
21 R. Rajko --
22 Q. Excusez-moi, quelle est l'origine ethnique de Nedzo
23 Djukic ?
24 R. Serbe.
25 Q. Et quel rôle jouait, si toutefois il en jouait un là-dedans, Rajko
26 Rajic ?
27 R. Rajko il n'est pas Hadzic. Il s'appelle plutôt Rajko Jankovic. Et il y
28 a aussi Rajko - ah, j'oublie les noms de famille.
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1 Q. Une question de prononciation. Rajko Rajic.
2 R. Oui, Rajko Rajic, oui.
3 Q. Quel rôle jouait Rajko Rajic par rapport à votre Unité de Travail, si
4 toutefois il en jouait un ?
5 R. Lui, Rajko, il était comme en charge de nous, il a été placé là comme
6 chargé de logistique. Je ne sais pas trop. Pour s'occuper de nous, nous
7 emmener là où il fallait travailler -- enfin, faire ce qu'il fallait. Il
8 venait nous chercher. Il nous emmenait et puis nous remmenait.
9 Q. Entendu. Savez-vous s'il y avait d'autres Unités de Travail, autres que
10 la vôtre dans la région ?
11 R. Oui, à Vogosca, il y en avait à Ilijas. Il y en avait deux autres --
12 deux autres Unités de Travail. Mais je ne sais pas trop, on ne nous mettait
13 pas ensemble tellement.
14 Q. Entendu. Et d'après ce que vous savez, c'était dans ces deux autres
15 unités de travail; c'était des volontaires ou des gens qui étaient forcés
16 comme vous de travailler ?
17 R. C'était des gens capturés qui étaient là-dedans, on les a emmenés en
18 prison et aussi on les emmenait par la suite. Les autres on les emmenait au
19 front quand il y avait plus de travail à faire, quand il fallait creuser
20 des tranchées plus rapidement, alors, à ce moment-là, on les emmenait eux.
21 Nous, mais normalement on ne nous mettait jamais ensemble avec eux.
22 M. DUTERTRE : J'aimerais afficher le document portant le numéro 65 ter
23 1637.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, il est dans le classeur parce
25 que je ne le trouve pas.
26 M. DUTERTRE : Normalement, oui, Monsieur le Président. Je vais feuilleter
27 rapidement mon classeur.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Allez-y.
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1 M. DUTERTRE : Oui.
2 Q. Monsieur Sejdic, est-ce que vous pouvez -- est-ce que vous avez déjà vu
3 ce document antérieurement ?
4 R. Non, je ne peux pas dire que je le reconnais vraiment cela. Je ne me
5 souviens pas très bien.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Là encore, nous avons un document
7 qui ne comporte aucune mention officielle. Et immédiatement ce qui me vient
8 à l'esprit c'est que ça a été dactylographié par le Procureur lui-même.
9 Nous n'avons pas de numéro de registre alors qu'il y a une place prévue
10 pour cela. Il n'y a pas de signature non plus. On voit un nombre, Branko
11 Vlaco, mais il n'y a pas sa signature. Il n'y a pas de cachet non plus.
12 Alors, je suppose que le Procureur ne saura pas nous dire la source non
13 plus.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, c'est très grave ce que -- la façon
15 dont vous procédez. Vous dites ce que me vient à l'esprit c'est que le
16 Procureur l'a dactylographié lui-même. Vous accusez la Procureur
17 d'introduire des faux documents qu'il confectionnerait. Je ne sais pas si
18 vous vous rendez compte de la portée de vos propos.
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, rappelez-vous le
20 traitement réservé aux documents par le Procureur lorsque c'est moi qui me
21 sers de documents pendant le contre-interrogatoire. Et je ne demande pas le
22 versement du tout alors que tous mes documents ont été visés par un
23 Tribunal et/ou l'authenticité est certifiée. S'il n'y a pas de preuve
24 d'authenticité mais comment est-ce que ça peut lui venir à l'esprit de
25 présenter un document de ce type-là ? Qu'est-ce qu'il devrait venir dans
26 mon esprit ? Quelle idée de penser s'il n'y a pas de numéro de registre ?
27 Pourquoi vérifier s'il n'y a pas de signature à défaut de cachet ? Il y a
28 rien.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Justement, Monsieur le Greffier, le document en
2 B/C/S, pouvez-vous le monter pour qu'on voit ce qu'il y a en bas ? Parce
3 qu'on a l'impression -- continuez, il n'y a rien d'autre. Bon. Donc, il n'y
4 a pas de cachet sur ce document.
5 M. DUTERTRE : Monsieur le Président --
6 Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai une chose à dire.
7 Monsieur Seselj, parce que j'avais dit précédemment que toutes les
8 fois que vous vous référiez à vos documents, que vous nous présentez,
9 j'aurais précisé cela étant donné que vous dites que tous ces documents
10 sont certifiés, authentifiés. Je voulais encore une fois préciser que c'est
11 seulement la signature de ceux qui ont fait cette déclaration qui est
12 certifiée, la signature, pas le document. Seulement pour le compte rendu,
13 sans vos commentaires, s'il vous plaît.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur Seselj, pour répondre, parce que vous
15 avez soulevé un problème sur les documents en laissant penser que la
16 Chambre fait deux poids deux mesures. Les documents du Procureur on les
17 admet, les vôtres on ne les admet pas. Moi, ma position personnelle, ce
18 n'est pas au nom de la Chambre que je parle, c'est ma position, les
19 documents que vous avez obtenus par vos collaborateurs concernant le témoin
20 que vous aviez l'intention de venir, pour moi, ces documents ont toutes les
21 apparences de fiabilité, et à titre personnel, je les aurais admis. Donc,
22 que tout soit bien clair, Monsieur Seselj.
23 Il n'y a pas deux poids de mesure pour l'admission d'un document. Il
24 y a des critères de fiabilité qui peuvent être le contenu du document, ça
25 peut être des mentions diverses, des tampons, des numéros d'enregistrement,
26 des signatures, toute une série d'éléments qui peuvent laisser penser que
27 c'est une fiabilité. Dans les documents que vous avez présentés, il y avait
28 des signes de fiabilité puisqu'il y avait des noms, des prénoms, des
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1 personnes qui avaient signé, une certification de leur signature. Pour moi,
2 ça me suffisait.
3 Le contenu, c'est une autre chose. Le contenu, la valeur probante ce
4 n'est qu'à la fin que l'on voit. Dans l'admissibilité des documents, il y a
5 une admission prima facie en fonction de certains éléments, pertinence,
6 évaluation toute provisoire d'une valeur probante éventuelle, et critère de
7 fiabilité. Voilà comment moi je fonctionne.
8 Le document que nous avons sous les yeux, au travers de cette grille, il
9 n'y a effectivement pas de signature, il n'y a effectivement pas de tampon,
10 il n'y a effectivement pas de numéro d'enregistrement. En revanche, en
11 critère positif, nous avons le nom de quelqu'un qui est le directeur de la
12 prison, qui est M. Brane Vlaco, apparemment, ça concerne des prisonniers
13 dont il y a une série de noms et que le témoin peut authentifier le cas
14 échéant. C'est évidemment pertinent. Voilà. Maintenant, la valeur probante,
15 ça, c'est dans le futur.
16 Bien, ceci étant dit, Monsieur le Procureur, quelle était la question que
17 vous vouliez poser à partir de ce document ? Je l'ai complètement oubliée.
18 M. DUTERTRE : Je ne l'avais pas encore posée, Monsieur le Président, c'est
19 donc normal.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, c'est le moment ou jamais de la poser.
21 M. DUTERTRE : Juste brièvement pour dire pour le parquet que les
22 accusations faites par M. Seselj concernant la fabrication de preuves sont
23 tout à fait inadmissibles et qu'on s'inscrit évidemment en faux contre ce
24 genre d'assertion.
25 Deuxièmement, je ne vais le présenter que pour le verser à titre
26 d'identification MFI, et troisièmement, je reviendrai ensuite vers la
27 Chambre à l'instar de l'autre document pour donner davantage d'explications
28 sur l'origine de ce document.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, à ce propos, Monsieur le Procureur, bien
2 entendu, il faut toujours nous indiquer d'où vient ce document. Mais vous
3 remarquerez et ce n'est pas sans intérêt que ce document, il y avait
4 d'autres documents qui étaient attachés puisqu'il y est marqué, "Liste 1,"
5 il y avait donc deux reçus et notifications. Donc, ce document n'est pas
6 unique en lui-même, il doit y avoir d'autres documents d'où l'intérêt de
7 savoir comment vous l'avez eu et qu'est-ce qu'il y avait avec.
8 M. DUTERTRE : Tout à fait. Je ferai des recherches en ce sens.
9 Mme LE JUGE LATTANZI : Oui, Monsieur Dutertre, ce serait aussi bien que
10 vous faisiez le contrôle avant pour qu'on ne perde pas de temps.
11 M. DUTERTRE : J'entends bien, Madame le Juge.
12 Q. Monsieur Sejdic, si on refait placer le document vers le haut --
13 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, Monsieur le Procureur.
14 Non pas qu'on veuille vous empêcher de faire votre travail, mais mon
15 collègue me signale que c'est peut-être le moment ou jamais de faire la
16 pause. Alors, on va faire donc 20 minutes. Peut-être que vous allez,
17 pendant les 20 minutes, retrouver trace desdits documents.
18 Donc, on fait la dernière pause de la journée, 20 minutes.
19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 15.
20 --- L'audience est reprise à 12 heures 35.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, l'audience est reprise.
22 Monsieur le Procureur, s'il n'y a pas d'incidents de procédure,
23 normalement, vous devriez pouvoir terminer votre interrogatoire principal.
24 M. DUTERTRE : Je le souhaite ainsi, Monsieur le Président.
25 Je dispose d'exactement combien de temps ? Est-ce qu'on peut me le dire ?
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Et bien, je vais vous le confirmer. Commencez.
27 M. DUTERTRE :
28 Q. Monsieur Sejdic, ce document comporte des dates, 30 août 1992 et 29
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1 août 1992. En bas du document, il y a le nom de M. Vlaco, Branko.
2 R. Oui.
3 Q. Ce document indique que huit prisonniers ont été emmenés à Zuc pour
4 travailler. Est-ce que vous connaissez l'une ou l'autre de ces personnes
5 dans la liste des huit prisonniers en question ?
6 R. Je ne connais pas ces gens, mais j'ai entendu parler d'eux et j'ai
7 entendu dire qu'il y avait Vlaco qui était le chef de la prison à l'époque
8 et qui les a emmenés au mont Zuc.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, il vous reste une heure et
10 deux minutes.
11 M. DUTERTRE : Je vous remercie, Monsieur le Président.
12 Je constate que page 67, ligne 18, il est marqué "Vlaco, Vinko" au lieu de
13 "Vlaco, Branko."
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas bien entendu. Il lui
15 reste combien de minutes au Procureur ?
16 M. LE JUGE ANTONETTI : Ça n'a pas été inscrit. Une heure et deux minutes.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
18 M. DUTERTRE : Il y a encore une erreur, mais page 68, ligne 3, je n'y
19 reviens pas.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, alors, je répète parce qu'il reste au Procureur
21 une heure et deux minutes.
22 M. DUTERTRE : Merci.
23 Et donc, page 67, ligne 18, j'avais dit : "Vlaco, Branko," et non pas
24 "Vlaco, Vinko."
25 Q. Monsieur Sejdic, est-ce que vous pouvez nous détailler les différents -
26 -
27 M. DUTERTRE : J'aimerais -- excusez-moi, j'aimerais verser ce document pour
28 identification avec un numéro MFI, Monsieur le Président.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien, numéro MFI.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce MFI P464.
3 M. DUTERTRE : Merci.
4 M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez, on a toute une série de problèmes. C'est
5 MFI P464.
6 M. DUTERTRE : Merci, Monsieur le Président.
7 Q. Monsieur Sejdic, vous l'avez un peu effleuré, ce point, mais j'aimerais
8 que vous le détailliez maintenant. Est-ce que vous pouvez indiquer les
9 différents travaux qu'on vous faisait faire. J'ai bien compris qu'on vous
10 faisait creuser des tranchées. Qu'est-ce qu'on vous faisait -- et vous avez
11 mentionné aussi que vous faisiez le bouclier humain. Qu'est-ce qu'on vous
12 faisait faire d'autre ?
13 R. Depuis le début de la guerre jusqu'à la fin de la guerre, tout ce qui
14 leur passait par la tête de nous faire faire, je l'ai fait. J'ai creusé des
15 tranchées, j'ai coupé du bois, j'ai nettoyé des cours autour de leurs
16 maisons, j'ai travaillé dans leurs jardins, je leur ai porté du bois de
17 chauffage pour l'hiver, et puis quand on n'était pas au front, quand il n'y
18 avait pas d'attaque, que sais-je, ils nous emmenaient à la maison parce
19 qu'ils ne voulaient pas qu'on se repose et qu'on se regroupe et qu'on soit
20 libre. Donc, il fallait qu'on fasse tout ce qu'ils nous disaient de faire.
21 Q. Et vous avez mentionné cette question du rythme de travail. Vous étiez
22 amené à travailler tout le temps ? Régulièrement ? Fréquemment ? Rarement ?
23 C'était tous les jours ? C'était -- est-ce que vous pouvez préciser ?
24 R. Ça dépendait de ce qu'il leur venait à l'esprit, un non-stop. Quand il
25 fallait faire quelque chose, ils nous emmenaient le faire.
26 Q. Et lorsque vous n'étiez pas au travail, est-ce que vous étiez libre à
27 votre domicile, est-ce que vous y étiez détenu ? Est-ce que vous pouvez
28 nous expliquer quelle était votre situation quand vous n'étiez pas en train
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1 de travailler ?
2 R. Pendant quelque temps, on était chez nous, dans nos différentes
3 maisons, et Nedjo Djukic venait nous chercher, ou Rajko le faisait. Ils
4 nous donnaient des ordres, ils nous disaient ce qu'il fallait faire.
5 Parfois ils nous emmenaient. Quand on avait bien fait quelque chose pour
6 eux, quand on avait creusé à temps des tranchées, ils nous laissaient
7 repartir chez nous pour voir notre famille, la femme et les enfants.
8 Parfois ils nous emmenaient pendant un mois au front et pendant un mois, on
9 ne voyait pas la femme et les enfants.
10 Q. Et à ces occasions quand vous étiez au front, vous étiez -- comment
11 vous étiez -- enfin, vous ne pouviez pas travailler tout le temps, 24
12 heures sur 24, j'imagine. Est-ce que vous étiez gardé, détenu quelque part,
13 enfermé, libre de vos mouvements ? Comment ça se passait ?
14 R. Près du commandement à Semizovac, Kulin Dvor, là, ils avaient comme une
15 maisonnette et c'est là qu'ils nous détenaient, c'est là qu'ils nous
16 gardaient. A chaque fois qu'il fallait quelque chose au front, ils garaient
17 un camion là, ils nous mettaient à bord du camion et ils nous emmenaient.
18 Q. Entendu. Je passe à un autre sujet maintenant, et je vais m'intéresser
19 à la personne portant le nom de Vasilije Vidovic. Qui est Vasilije Vidovic,
20 Monsieur Sejdic ?
21 R. Vasilije Vidovic, appelé Chetnik, son titre était "Vaske," on
22 l'appelait "Vasko." S'il faut que je le décrive, je vais le décrire.
23 M. DUTERTRE : -- juste lui poser d'autres questions entre-temps.
24 Q. Est-ce que vous l'avez vu de vos yeux, de vos propres yeux, pendant le
25 conflit entre 1992, 1995 ?
26 R. Oui, il m'est arrivé de le voir, je le voyais sans cesse pendant qu'il
27 était dans le secteur de la guerre en 1992 jusqu'en 1995. Et il était
28 toujours partout là où j'étais avec l'Unité de Rajko. Il y avait lui et son
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1 unité également. Et je pouvais toujours le voir.
2 Q. Est-ce que vous pouvez préciser des lieux de lignes de front, des
3 endroits où vous l'avez vu ?
4 R. Partout où il fallait capturer des positions au front, Ravne [phon]
5 Nabozic ou Srednje ou plus haut, vers Zuc, à chaque fois il y avait lui qui
6 arrivait avec ses hommes.
7 Q. Et est-ce que -- est-ce que vous vous souvenez où -- ou en tout cas à
8 quelle date -- à quelle date, vous l'avez vu pour la première fois,
9 approximativement ?
10 R. La première fois que je l'ai vu, c'était en 1992. Peut-être trois ou
11 quatre mois s'étaient écoulés en 1992 depuis la création de leurs unités --
12 quand ils étaient à Ilijas quand il y a eu une jonction avec le Bataillon
13 d'Ilijas. Et quand Rajko allait au front ou quand il s'emparait des
14 tranchées musulmanes, alors, ces deux se regroupaient et ils agissaient
15 ensemble avec leurs unités, ils attaquaient comme ça.
16 Q. Entendu. Est-ce que vous pouvez nous décrire comment il était habillé
17 en général ?
18 R. Vous parlez de Vasko [comme interprété] ?
19 Q. Je parle de Vaske, effectivement.
20 R. Il avait des cheveux longs, il n'était pas très grand de taille et il
21 boitillait, et il avait une casquette, les cheveux rentrés dedans et ils
22 retombaient par en arrière. Il avait une combinaison noire comme des
23 pilotes d'avion. C'était une combinaison en une pièce, noire. Et il avait
24 sur lui généralement un fusil avec un tube court, et il avait un pistolet,
25 des grenades, et il avait également une épée.
26 Q. Est-ce qu'il avait des insignes ? Et si oui, lesquelles ? Pourriez-vous
27 les décrire ?
28 R. Oui, il avait une cocarde sur son couvre-chef -- sur la casquette. Et
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1 il avait un brassard bleu quand il partait en action, jaune ou rouge, ça
2 dépendait. C'était un bout de tissu qu'ils attachaient pour savoir que ses
3 combattants et lui partaient au combat, pour savoir qui c'est.
4 Q. Est-ce que vous pouvez décrire la cocarde que vous avez mentionnée ?
5 R. Mais on sait comment est une cocarde. Je ne suis pas le seul à avoir vu
6 leurs cocardes, on sait. On sait qu'il y a comme deux aigles. Et puis on
7 sait comment c'est fait, leurs cocardes.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : -- vous dites "on sait". Les Juges ne savent pas.
9 Donc, c'est à vous de nous dire ce que c'est.
10 M. DUTERTRE : -- j'allais faire cette remarque précisément.
11 Q. Je voulais effectivement, Monsieur le Témoin, que vous puissiez
12 expliquer aux Juges quel était votre souvenir de cette cocarde et de la
13 décrire donc un peu de façon précise pour éclairer les Juges.
14 R. Bien, ça ressemble comme à un aigle. Et de côté, voilà, c'est à peu
15 près comme ça, cette taille-là, la cocarde. Et ils mettent ça --
16 Q. -- notez que le témoin a écarté son pouce et son index d'une longueur
17 qui -- de quelques centimètres. Enfin, je ne veux pas -- et de quelle
18 couleur était cette cocarde ?
19 R. Je ne peux pas me souvenir exactement de la couleur. Voyez-vous,
20 comprenez pas mal, je ne me suis pas contenté d'examiner la cocarde,
21 j'essayais de mémoriser comment était l'homme. Et la cocarde, ça ne m'a pas
22 tellement intéressé, j'ai pas tant regardé.
23 Q. Entendu. Comment se déplaçait Vasilije Vidovic ?
24 R. Il avait ses hommes, il avait son équipe, son équipement, un char, des
25 obusiers, il avait des pièces antiaériennes -- comment on appelle ça ? Des
26 canons avec trois tubes sur des camions. Et leurs camions étaient des
27 camions de camouflage, c'était en noir et vert, c'était peint. Et ils
28 mettaient des drapeaux sur les camions avec deux épées croisées et une tête
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1 de mort de Vasko sur certains camions. Généralement, Vasko, avec une jeep à
2 lui. Au départ, elle était noire, la jeep, et elle portait cet aigle comme
3 insigne, et il y avait cette tête de mort avec deux épées, ce drapeau noir.
4 Q. Vous parlez d'une jeep. Est-ce que vous pouvez préciser ce que vous
5 entendez quand vous utilisez le mot "jeep" ? Qu'est-ce que -- qu'est-ce que
6 vous voulez dire par le mot "jeep" ? Il y a peut-être une question de
7 langue à clarifier.
8 R. C'était un véhicule, un 4x4 tout terrain. C'est qu'on appelle ça une
9 jeep, une Mercedes, je pense. Je ne sais pas, en fait, de quelle
10 fabrication -- comme les -- les Nations Unies avaient ce type de 4x4.
11 Q. Est-ce que -- combien de fois vous avez vu ce véhicule jeep de Vasilije
12 Vidovic ?
13 R. Je l'ai vu tant que j'étais là, donc je l'ai toujours vu, j'ai toujours
14 vu son véhicule. Quand on voyait son véhicule, ça signifiait aussi qu'on
15 l'avait vu lui, Vaske. Ça voulait dire qu'il arrivait, passait par là,
16 partait à l'attaque. Donc, je l'ai toujours vu, lui.
17 Q. Est-ce qu'il y avait d'autre chose que ce drapeau sur le véhicule
18 ?
19 R. Non, il n'y avait que ça et puis on savait il y avait leur -- comment
20 dire, insigne. Quand ils conduisaient, ils mettaient comme un ruban sur
21 l'antenne, parfois c'était bleu, parfois jaune, rouge, quand ils partaient
22 à l'attaque.
23 Q. Et sur le véhicule, est-ce que Vaske avait mis quelque chose en dehors
24 du drapeau ?
25 R. Oui, il avait une tête de mort de Musulman qui pendant l'attaque -- une
26 attaque, quand il allait y avoir une attaque sur le plateau de Crna Rijeka
27 Visoravan, là, Vasko avait une tête de mort sur son véhicule, une tête de
28 mort de Musulman.
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1 M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, une tête de mort ça peut être un
2 insigne, un dessin, ou bien, c'était une tête qu'on avait coupée et il
3 avait mis la tête sur le véhicule ?
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils avaient ce crâne sur le véhicule de Vaske.
5 C'était un crâne et quand il y a eu une attaque sur le plateau de Crna
6 Rijeka, il avait un vrai crâne qu'il avait coupé à un Musulman à l'époque.
7 M. LE JUGE ANTONETTI : Il avait un vrai crâne, il ne restait que l'os du
8 crâne avec les dents ou il y avait la peau, les cheveux. C'est peut-être
9 effroyable, mais il faut dire les choses telles que vous les avez vues.
10 Parce que vous, vous dites, c'est une tête de Musulman, mais c'est peut-
11 être un crâne qu'il a trouvé quelque part et il l'a pris pour le mettre sur
12 le capot, alors qu'est-ce qui vous permet de dire c'est une tête de
13 Musulman ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais juste dire en quelques mots. Vous
15 m'avez posé la question : est-ce qu'il avait un autre insigne sur le
16 véhicule ? Là j'ai oublié de dire qu'il avait cette tête de mort, ce crâne,
17 sans rien, sans cheveu, sans rien sur le véhicule. Mais quand il y avait
18 l'attaque au plateau, il avait coupé une tête de Musulman et il a placé
19 cette tête à côté du crâne. Et comme ça on savait que c'était le véhicule
20 de Vaske, et que c'est Vaske qui avait fait ça.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Donc à un moment donné sur le véhicule, il y avait
22 le crâne plus la tête coupée ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Monsieur le Procureur.
25 M. DUTERTRE : Merci, Monsieur le Président.
26 Q. Donc, est-ce que Vaske était le seul à avoir un véhicule de ce type
27 avec ces éléments que vous venez de décrire ?
28 R. Oui, il n'y avait que lui à avoir ça.
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1 Q. Quel était le nom de son unité, l'unité qu'il dirigeait ?
2 R. C'était l'équipe et l'équipement de Vaske.
3 Q. Est-ce que vous pouvez détailler, clarifier ce que vous entendez par
4 Vaske "skalamerija" [phon], c'est ce qui est sur le transcript. Est-ce que
5 vous pouvez par une périphrase -- enfin, dire avec une phrase ce que ça
6 signifie, Vaske "skalamerija" ?
7 R. Ça c'était ses véhicules et ses soldats quand ils arrivaient avec ses
8 hommes et ses véhicules, c'est comme ça qu'on appelait l'Unité de Vaske.
9 Donc, on disait : "Vasko est arrivé avec son équipement et ses hommes."
10 Q. Entendu. Quelle était la réputation de l'Unité de Vaske ?
11 R. Que pensez-vous par "réputation" ?
12 Q. Quelle réputation, quelle idée les gens autour avaient de l'équipe de
13 Vaske, de ce qu'ils faisaient, de leurs actes, est-ce qu'ils étaient connus
14 pour être des bons combattants, pour faire certaines choses; est-ce que
15 vous pouvez décrire cela ?
16 R. Quand ils arrivaient près de Kulin Dvor, près du commandement Jankovic,
17 quand il fallait qu'ils partent à l'attaque ou autre chose, ils sifflaient,
18 ils se réjouissaient, ils criaient, ils riaient, les jeunes se peignaient
19 en noir, mettaient des insignes, ils se préparaient pour l'attaque. Tout
20 simplement, c'était comme ça.
21 Q. Et pendant les attaques, quel était leur comportement par rapport aux
22 personnes du camp d'en face, comment se comportaient-
23 ils ?
24 R. Comment se comportaient-ils ? Mais on sait comment ils se comportaient
25 quand ils partaient à l'action, c'était tout sens dessus dessous. Ils
26 attaquaient comme s'ils étaient fous, comme s'ils n'avaient pas de
27 cervelle, pas de raison, je ne sais pas. Je ne sais pas comment dire. Ils
28 attaquaient ceux qui leur tombaient sous la main, ceux qu'ils pouvaient
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1 attraper, ils tuaient, ils tiraient, ils égorgeaient; c'est ça qu'ils
2 faisaient.
3 Q. Où était principalement basé Vaske et son équipe, à quel endroit ?
4 R. Leur base était à Ilijas, près de l'hôtel d'Ilijas. Ça avait été un
5 hôtel jadis. Donc, ils avaient pris cet hôtel et c'est là qu'ils avaient
6 leurs chambres, le commandement, comment dire, de Vaske.
7 Q. Est-ce que vous pouvez nous donner les noms de certains membres de
8 l'Unité de Vaske, si vous vous en souvenez ?
9 R. Je sais qu'il y avait Okil [phon] Sladjan qu'ils l'appelaient comme ça;
10 Zenica, il y en avait un qui était surnommé Zenica; et ces deux étaient les
11 pires. Puis les autres, j'en connaissais quelques-uns de vue, mais je n'ai
12 pas pu mémoriser tout ça parce qu'à l'époque je n'avais pas, comment
13 dirais-je, l'autorisation de me trouver parmi ces soldats parce que Rajko,
14 il ne nous laissait pas aller à lui et il ne nous mettait pas ensemble.
15 Q. Entendu. A qui est-ce que Vaske rendait des comptes ? Qui lui donnait
16 des ordres ? Quel était son chef ?
17 R. Son chef, c'était Dragan Josipovic. Lui et Rajko Jankovic l'avaient
18 pour chef, donc, Josipovic, et le commandant Radic, il était chef de Dragan
19 Josipovic à l'époque. Dragan Josipovic était donc au camp chez Sonja,
20 c'était son établissement, l'endroit principal, c'était comme le
21 commandement de Dragan Josipovic.
22 Q. Est-ce que vous pouvez nous indiquer qui c'était plus précisément
23 Dragan Josipovic; c'était un soldat professionnel, c'était un engagé
24 volontaire, c'était -- il avait un rang dans l'armée, s'il était dans
25 l'armée ? Est-ce que vous pouvez être plus précis ?
26 R. Oui, je peux. Je pense qu'il était, ne comprenez pas mal, je pense
27 qu'il a eu peut-être un grade ou des grades avant la guerre dans une armée,
28 et quand il est arrivé là dans ce commandement chez Sonja avec son
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1 principal, Radic, son homme, ces deux, ils ont dû des grades peut-être
2 d'avant. Et Dragan il était comme Rajko Jankovic, il était plus maigre que
3 Rajko Jankovic, il était de ma taille à peu près. Il était en uniforme --
4 en combinaison de camouflage noire et il n'avait qu'un pistolet sur lui.
5 Q. -- est-il --
6 R. Pardon.
7 Q. Quel grade avait-il ?
8 R. Je pense que son grade c'était celui de colonel peut-être, ou
9 commandant, quelque chose comme ça. L'un de ces deux grades.
10 Q. Et l'unité qu'il commandait directement selon votre souvenir c'était
11 une unité de soldats professionnels ou de volontaires; est-ce que vous
12 pouvez nous éclairer là-dessus ?
13 R. C'était donc une unité. Il y avait des réguliers, des irréguliers, des
14 professionnels. C'est lui qui les dirigeait, commandait.
15 Q. Entendu. Je passe à un autre point maintenant, vous nous avez indiqué
16 que vous avez été utilisé comme bouclier humain. A quel endroit pour la
17 première fois avez-vous été utilisé comme bouclier humain ?
18 R. La première fois lorsqu'il y a eu le bouclier humain c'était l'attaque
19 sur Zuc, à ce moment-là. Je ne sais pas si je peux me souvenir de la date
20 exacte, parce qu'à l'époque on ne pensait pas aux dates on pensait à rien,
21 puisque j'aurais du mal à me rappeler la date, la chute de Zuc, je ne
22 savais même pas si j'allais pouvoir garder la vie sauve. Donc, quand il a
23 eu l'attaque sur Zuc on s'est servi de nous comme bouclier humain. C'est là
24 que j'ai été blessé. Si vous voulez, je peux montrer où j'ai été blessé
25 parce que je n'ai pas honte.
26 Q. Ce ne sera pas nécessaire, je vous remercie. Approximativement est-ce
27 que vous pouvez nous dire quand c'était sans donner une date précise
28 approximativement ?
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1 R. Je pense que c'était vers la fin de l'année 1993, vers fin 1993, 1994,
2 par là.
3 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, j'aimerais rafraîchir la mémoire du
4 témoin sur ce point, si vous permettez.
5 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. S'il ne se rappelle pas, --
6 M. DUTERTRE : Oui. C'est page 15, paragraphe 73, de l'audition 92 ter du
7 16, 17 d'octobre 2006. Et il indique : "At the end of summer…"
8 [interprétation] "A la fin de l'été 1993, mon Unité de Travail et les
9 Unités d'Intervention ont été utilisées comme bouclier humain, lorsque
10 l'ABiH a pour la première fois attaqué l'élévation 830."
11 [en français] -- se trouve à Zuc.
12 Est-ce que c'est bien cela, Témoin, Monsieur Sejdic ?
13 R. Oui, c'est ça. C'est ça. Quand l'ABiH a lancé une attaque sur la côte
14 830 serbe c'était 850 la côte musulmane, donc, quand ils sont partis pour
15 s'emparer de la côte 830 il y a eu une attaque très intense. Et certains
16 Serbes donc qui se sont trouvés au front, des chefs, des commandants, ils
17 n'ont pas pu arrêter l'ABiH tant qu'il n'y a pas eu des Pelotons
18 d'Intervention, des forces spéciales, et dans ces unités, il y avait des
19 hommes de Jankovic. Il y avait des hommes de Vaske, ceux de Dragan
20 Damjanovic, et les autres.
21 M. DUTERTRE : Juste pour le transcript, page 77, ligne 25, et c'est sans
22 doute ma faute, j'avais commencé par dire : "At the end of summer 1993," il
23 n'y a que le trois qui est indiqué. Juste pour [imperceptible].
24 Q. Monsieur Sejdic, qui vous a ordonné de faire le bouclier humain à Zuc,
25 à cette époque-là ?
26 R. A cette occasion, Dragan Damjanovic, on le connaissait, nous. Je pense
27 que pendant quelque temps au départ il était pire que Vasko, donc, je n'ai
28 pas appris qui était Vasko c'était lui qui était pire pendant cette
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1 période-là à Svrake, quand on s'est emparé de Svrake, quand on a pris
2 Svrake, quand il a regroupé les gens, quand il les a emmenés dans les
3 prisons. C'était lui le pire, à ce moment-là. Mais, lui, il tenait une
4 ligne de front de Svrake, c'étaient des hommes de Svrake, des Serbes, il
5 tenait la colline de Zuc et le jour où a commencé la chute de Zuc, lui, il
6 arrivait d'en bas avec ses hommes, et tous ces hommes dans l'unité de
7 travail il y avait un conteneur près de Zuc, et ils nous mettaient là quand
8 il fallait qu'on aille creuser des tranchées on nous emmenait là. Mais là
9 ils nous ont laissés sortir de ce conteneur et ils nous ont mis en première
10 ligne pour avancer, pour arrêter l'ABiH pour qu'ils ne tirent pas tant sur
11 eux qu'ils ne tuent pas leurs hommes, donc, ils nous tuent plutôt nous, et
12 qu'ils arrêtent comme ça donc les tirs de l'ABiH pour qu'eux puissent se
13 rapprocher de leur ligne. Et c'était ça cette attaque où nous étions, nous,
14 des Unités de Travail, et quand cela s'est passé à Zuc. Et Dragan
15 Damjanovic, parmi nous, nous étions 25 hommes qui fuyions d'en haut
16 puisqu'il y avait cette attaque très importante, lui, il a exécuté 25
17 hommes, lui, personnellement.
18 Q. -- revenir sur ce point. Il y avait votre -- quand vous dites vous
19 étiez plusieurs patrouilles de travail à être utilisées comme bouclier
20 humain. D'où venaient les autres patrouilles de travail ? Il y avait la
21 vôtre et d'où venait -- de quel endroit venaient les autres patrouilles de
22 travail ?
23 R. Les autres pelotons de travail se trouvaient à Ilijas, à Vogosca; à
24 Vogosca et autour, il y avait des villages, ils les faisaient venir de ces
25 villages à partir du moment où les arrêtaient donc au cours de l'attaque en
26 1992.
27 Q. Vous, qu'est-ce qu'ils vous ont dit pour vous forcer, vous inciter à
28 faire le bouclier humain; est-ce qu'ils vous ont menacés ? Est-ce qu'ils
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1 vous ont -- qu'est-ce qu'ils vous ont dit ?
2 R. Quand ils ont laissé sortir ces gens du conteneur ils nous ont fait
3 venir la veille pour creuser des tranchées, et nous ne savions pas qu'il y
4 avait d'autres gens qui étaient en train de creuser des tranchées de
5 l'autre côté de Zuc. Donc, quand ils ont fait venir ces gens ils les ont
6 mis dans ce conteneur, alors que nous, ils nous ont emmenés à Semizovac.
7 Donc, le soir quand on a fini nos travaux on nous amenés à Semizovac. Donc,
8 c'était les hommes de Jankovac qui faisaient partie de ce peloton de
9 travail, donc, moi et les hommes que j'ai déjà mentionnés, mon frère, et
10 cetera. Et le soir quand on est venu travailler on a vu ces gens dans ce
11 conteneur, et on n'est passé par là, on n'était pas loin, donc on les a vus
12 là-dedans; cependant, au moment de l'attaque, alors qu'ils étaient en train
13 de s'échapper de cette ligne de front ou de ce conteneur en direction de
14 Vogosca, parce que de toute façon ils ne pouvaient pas
15 -- ils n'avaient nulle part où aller, il fallait revenir en arrière et
16 c'est à ce moment-là que c'est Dragan Damjanovic est arrivé et il nous a
17 dit qu'il fallait avancer. Et c'est comme cela qu'il y a eu des personnes
18 qui se sont faits tuées au cours de l'attaque. Moi, j'étais blessé. J'ai
19 fui à partir d'en haut. Mais, à ce moment-là, alors que j'étais en train de
20 fuir Dragan Damjanovic a injurié notre mère turque, en nous chassant, en
21 nous demandant de revenir et qu'ils allaient tous nous égorger.
22 Q. -- par étape. Si j'ai bien compris, vous êtes utilisé comme bouclier
23 humain avec d'autre travail, et vous indiquez -- vous l'avez mentionné qu'à
24 un moment donné, Dragan Damjanovic a tué 25 personnes; est-ce que vous
25 pouvez nous dire pourquoi Dragan Damjanovic a tué 25 personnes qui
26 servaient comme de bouclier humain, si j'ai bien compris ce que vous avez
27 dit ?
28 R. Oui, vous m'avez bien compris. Il a tué 25 personnes, il les a
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1 fusillées, qui faisaient partie d'un Peloton de Vogosca. Ce sont des gens
2 qui étaient dans le container. Il les a fusillés parce qu'il n'était pas
3 content, parce que les Musulmans avaient déjà pris le contrôle de certaines
4 tranchées sur cette élévation. Il n'était pas content parce que la ligne
5 était en train de tomber entre les mains des Musulmans. Quand il les a vus
6 fuir, il leur a injurié leur mère turque de balija, en disant qu'il allait
7 tous les tuer, les égorger, parce que ses hommes étaient en train de périr,
8 et donc, eux aussi, il fallait qu'ils meurent. C'est ce qu'il disait.
9 Q. Dragan Damjanovic était le seul à tirer, ou il y avait d'autres
10 personnes avec lui qui tiraient sur ces 25 membres de l'Unité de Travail de
11 Vogosca ?
12 R. Il y avait un autre qui était avec lui, c'est vrai. C'était Vlado
13 Cetkovic. Il était le commandant de la ligne à Zuc, et avant la guerre, il
14 habitait à Svrake, dans mon village, là où j'habitais, moi aussi, je le
15 connais très bien. Je connais très bien ce Vlado Cetkovic.
16 Q. Et à quelle unité appartenait Vlado Cetkovic ?
17 R. Il appartenait, à moitié il était à Vogosca, moitié à Svrake, parce que
18 ce sont eux qui tenaient la ligne à Zuc, c'était lui qui était le
19 commandant de cette ligne.
20 Q. Et au moment où ces personnes ont été exécutées, à quelle distance
21 étiez-vous, vous-même ?
22 R. J'étais à une cinquantaine de mètres de là.
23 Q. Est-ce que, lorsque ça s'est passé, Vaske était sur les lieux ?
24 R. Non, Vaske est venu plus tard, il est venu plus tard avec son unité.
25 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire qui est Avdo Tiric ?
26 R. Avdo Tiric faisait partie de mon peloton de travail. Dès le début, au
27 début de l'année 1992, j'ai mentionné son nom ainsi que Nermin Skando. Ils
28 faisaient partie donc du Peloton de Travail avec nous. Mais parfois on les
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1 faisait passer à Vogosca, parfois ils venaient avec nous selon les besoins.
2 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire ce qui leur est arrivé ce jour-là,
3 où vous avez été utilisé pour la première fois comme bouclier humain ?
4 R. Donc, ils ont péri pendant cette action, à Zuc, quand il y a eu cette
5 attaque. Alors, je ne sais pas si ce sont les Musulmans qui leur ont tiré
6 dessus ou si c'est l'armée serbe. Mais, en tout cas, ils sont morts tous
7 les deux.
8 M. DUTERTRE : Monsieur le Président, j'aimerais rafraîchir la mémoire du
9 témoin sur ce point.
10 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
11 M. DUTERTRE : Page 16, paragraphe 82 de l'audition 92 ter du 16, 17 octobre
12 2006, déclaration écrite : "J'ai aussi vu le meurtre de ces deux hommes de
13 mes propres yeux."
14 -- que les deux hommes quand on lit le paragraphe 81, il s'agit d'Avdo
15 Tiric et de Nermin Skando.
16 Je reprends la citation : "Notre patrouille de bouclier humain descendait
17 en courant de la colline, assez près du groupe de Vogosca, le plus loin
18 possible des tranchées de l'armée de Bosnie."
19 L'ACCUSÉ : [interprétation] 82, moi, je ne le vois pas dans ce paragraphe.
20 Peut-être un autre numéro, un autre paragraphe.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : C'est bien le paragraphe 82 ?
22 M. DUTERTRE : Je lis le paragraphe 82 et j'ai interrompu ma citation pour
23 dire que les deux personnes dont on parle sont Avdo Tiric et Nermin Skando,
24 dont il est question dans le paragraphe 81.
25 Maintenant, je peux lire 81 et 82 pour clarifier tous mes --
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Oui.
27 M. DUTERTRE : Je continue : "Quand j'ai vu Damjanovic et Cetkovic, qui
28 tiraient sur Avdo et Nermin, je voyais que Damjanovic était furieux du fait
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1 de ce qui s'était passé pendant la bataille. Mon Peloton de Travail a
2 trouvé les deux autres corps alors que nous étions en train d'en tirer les
3 25 autres."
4 Q. Monsieur Sejdic, est-ce ce que vous avez déclaré -- à l'époque, est-ce
5 que vous confirmez cela ?
6 R. Oui, je maintiens cela, parce que moi, alors que j'étais en train de
7 fuir de cette colline, j'ai vu Dragan et cet autre comment s'appelait-il
8 déjà, j'ai oublié son nom --
9 Q. Dragan et Cetkovic.
10 R. Oui, Cetkovic, donc, je les ai vus tous les deux en train de tirer sur
11 Nermin Skando et Avdo Tiric. Alors, je ne sais pas s'ils étaient encore en
12 vie, ou bien s'ils étaient déjà morts et s'ils avaient été touchés par un
13 autre feu ou bien le feu de l'ennemi.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. Là, il ne s'agit pas de rafraîchir
15 la mémoire, il s'agit de contradiction qui existe entre ce que le témoin a
16 dit ici au cours de son interrogatoire principal et entre ce qui figure
17 dans sa déposition en vertu de l'article 92 ter.
18 M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le cadre du contre-interrogatoire, vous pouvez
19 revenir sur cet élément. Ce qui est important, Monsieur le Témoin, vous
20 avez semble-t-il enterré 27 personnes. Les 25 qui avaient été d'après vos
21 dires tués dans une première partie et les deux autres qui ont été tués
22 après. Donc, vous confirmez bien que vous, avec vos camarades, vous avez
23 creusé les tombes pour mettre les 27 corps dans les trous ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, je confirme cela. Nous les avons mis
25 dans une fosse commune. Nous n'avons pas creusé des tombes pour chaque
26 cadavre, donc nous les avons mis ensemble alors que Nermin Skando et Avdo
27 Tiric, nous les avons enterrés à côté de la mosquée de Semizovac,
28 puisqu'ils étaient originaires de ce village, du village de Semizovac et
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1 Svrake.
2 L'ACCUSÉ : [interprétation] A nouveau, j'ai une objection parce que là, il
3 s'agit d'une question procédurale. Ce n'est pas quelque chose qui doit
4 faire l'objet du contre-interrogatoire. Quand le Procureur a lu ce qui
5 figure soi-disant dans cette déclaration 92 ter, qui est une compilation du
6 Procureur, le témoin a dit : "J'ai vu Damjanovic et Cetkovic en train de
7 tirer sur Nermin Skando et Avdo Tiric sans savoir s'ils étaient déjà morts
8 ou en vie encore." Donc, la possibilité qu'ils ont tiré sur des cadavres,
9 et le témoin est mis ici dans une situation extrêmement difficile, puisque
10 le témoin est obligé de confirmer ce que le Procureur lui dit, parce que
11 quand il parle librement, il parle de façon sincère. Il dit qu'il ne les a
12 pas vus se faire tuer, qu'ils sont tués sur la première ligne de front,
13 qu'il ne sait pas de quel côté venait le feu. Si vous, vous pensez que
14 c'est bien, cela ne me dérange pas.
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Ça ne m'a pas échappé et je confirme qu'au titre du
16 contre-interrogatoire, vous auriez pu revenir là-dessus. Donc, on va vous
17 imputer le temps sur le contre-interrogatoire à partir de la ligne 10 de la
18 page 84.
19 Monsieur le Procureur, le témoin a répondu quelque chose et il vous incombe
20 d'éclaircir ce qu'il a pu dire.
21 M. DUTERTRE : Tout à fait, Monsieur le Président, et le témoin n'est pas
22 obligé, contrairement à ce que M. Seselj dit, de confirmer les questions
23 que je lui pose. Il est libre de répondre, ça ne doit échapper à personne.
24 Q. Monsieur Sejdic, lorsque vous avez vu les tirs sur Avdo Tiric et Nermin
25 Skando par Damjanovic et Cetkovic, est-ce qu'ils étaient debout, à genoux,
26 allongés ? Quel est votre souvenir ?
27 R. Moi, j'ai vu que toutes les personnes qui descendaient la colline en
28 courant qui sont arrivées jusqu'à lui, que Cetkovic et Dragan Damjanovic
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1 ont ouvert le feu sur eux et je les ai vu tomber. Et pendant que moi je
2 courais, je les ai vus. Donc, M. Seselj dit que ce n'est pas vrai, et lui
3 non plus, il n'aurait pas osé se retourner et regarder parce que moi-même
4 je courais et j'avais peur. Je les ai vus tirer, tirer aussi bien sur eux
5 que sur les autres personnes, sur les autres 25 personnes. Pourquoi sinon
6 voulez-vous qu'Avdo Tiric et Nermin Skando soient tués ? Je ne vois pas de
7 logique.
8 Q. J'ai compris que vous descendiez la colline, vous étiez en amont,
9 c'est-à-dire derrière Nermin Skando et Avdo Tiric, ou vous étiez devant
10 Nermin et Avdo quand ça s'est passé ? Quelle était votre position ?
11 R. Moi, j'étais sur leur gauche. Vous avez la colline, moi j'étais sur la
12 gauche, eux ils étaient plus en aval. Il fallait que je descende, que je
13 descende en passant par la gauche pour arriver là où ils étaient.
14 Q. Quelle distance approximativement y avait-il entre Damjanovic et
15 Cetkovic, d'une part, et Nermin Skando et Avdo Tiric, d'autre part ?
16 R. La distance n'était pas longue. Ils étaient ensemble.
17 Q. Et vous, à quelle distance étiez-vous d'eux ?
18 R. Je l'ai déjà souligné, je pense que j'étais à une distance de 50 mètre
19 environ d'eux. C'est là que je l'ai vu.
20 Q. Entendu. Monsieur Sejdic, est-ce que vous pensez avoir vu M. Seselj
21 pendant le conflit de Sarajevo entre 1992 et 1995 ?
22 R. Tout comme je le vois maintenant, M. Seselj. Il peut me regarder bien
23 dans les yeux pour que je le voie aussi bien que je le vois et que je l'ai
24 vu. Il était au plateau de Crna Rijeka, lui,
25 M. Karadzic, M. Mladic, Rajko Jankovic, Dragan Josipovic. Ils se tenaient à
26 côté des chars. Est-ce que vous vous souvenez de moi, peut-être ? Je
27 portais les munitions, je passais à côté de vos chars.
28 Q. Monsieur Sejdic, est-ce que vous aviez déjà vu M. Seselj antérieurement
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1 ou c'était la première fois ?
2 R. Je l'ai vu une fois auparavant à la télévision. Il soulevait son peuple
3 et sa rébellion en Serbie. A ce moment-là, j'ai vu son visage, mais je ne
4 vais jamais nier cela et je vais vous dire clairement qu'il était là, à ce
5 plateau de Crna Rijeka. C'est pour cela que je suis venu ici, pour dire que
6 je l'ai vu personnellement de mes propres yeux. C'est pour cela que je le
7 dis publiquement.
8 Q. Quand vous l'avez vu au plateau Crna Rijeka, c'était à peu près à
9 quelle époque ?
10 R. C'était en 1993, 1994, au moment de l'attaque contre le plateau de Crna
11 Rijeka. Donc, l'armée -- tous ceux qui se sont regroupés là-bas d'Ilijas,
12 Vogosca, Rajlovac, Ilidza, les forces affluaient de toutes les directions
13 au plateau de Crna Rijeka. A ce moment-là, les combats se sont dirigés vers
14 Olovo et vers Crna Rijeka.
15 Q. Vous avez indiqué que vous l'aviez déjà vu une fois à la télévision si
16 je ne m'abuse, c'était combien de temps auparavant cet événement où vous
17 l'avez vu en 1993, 1994 ?
18 R. Je n'ai pas bien compris la question. Dans quel sens ? Vous voulez dire
19 à la télévision ou lorsque je l'ai vu --
20 Q. La première fois. Enfin, quand vous l'aviez vu à la télévision, c'était
21 quand ?
22 R. Je l'ai vu une fois à la télévision lorsque je travaillais dans le
23 peloton de travail et lorsqu'ils m'ont laissé partir afin de rendre visite
24 à ma femme et à ma famille chez moi. Je dois dire que chez nous là où on
25 était, on avait la télévision. Chez moi, ma femme elle regardait toujours
26 la télévision. Lorsque je suis rentré afin de voir ma femme et mes enfants,
27 j'ai vu en même temps la télévision, lui en train de parler lors de ce
28 rassemblement aux côtés de Vuk Draskovic, je crois. Il criait des choses à
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1 son peuple, il tenait un discours, il était à la tête d'un rassemblement,
2 je crois. C'est là que je l'ai vu.
3 Q. Entendu.
4 M. DUTERTRE : Page 96, ligne 6. 1993 et 1994, et non pas "1983 ou 1984."
5 Q. Toujours là, lorsque vous l'avez vu, vous indiquez l'avoir vu au
6 plateau, est-ce que sa visite avait été annoncée ?
7 R. Je ne le sais pas.
8 Q. A quelle distance étiez-vous exactement de lui et de
9 M. Mladic et Karadzic que vous mentionnez également ?
10 R. A environ 30 mètres d'eux. J'étais sur ce plateau de Crna Rijeka, près
11 de leurs chars au moment où les soldats tiraient des chars. Et moi, je
12 faisais partie du peloton de travail, je transportais les munitions, la
13 nourriture et l'eau. J'étais avec les hommes appartenant à leurs forces.
14 M. LE JUGE ANTONETTI : Une brève question, Monsieur. Vous faisiez partie de
15 ce peloton de travail, comment étiez-vous habillé, vous ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je portais des vêtements civils.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.
18 Monsieur le Procureur.
19 M. DUTERTRE :
20 Q. Combien y avait-il de personnes autour de M. Seselj ?
21 R. Ils étaient peut-être environ 30, ils étaient sur les chars, ils
22 étaient à côté de lui, l'armée aussi, certains membres de l'armée de
23 l'Unité de Vasko et Jankovic. Ils étaient derrière son dos, autour de lui,
24 car ce Fratra [phon] est arrivé aussi, car ils utilisaient tous les moyens
25 afin de s'attaquer à Crna Rijeka.
26 Q. Entendu. Est-ce que vous pouvez nous indiquer comment
27 M. Seselj était habillé à cette occasion ?
28 R. Je ne l'ai pas vu très bien en ce qui concerne les vêtements, car il
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1 était entouré par d'autres. J'ai vu que Mladic et Karadzic portaient des
2 uniformes, des combinaisons militaires de couleur verte d'olive militaire.
3 Maric [phon] avait une jumelle dans les mains, il portait une ceinture, un
4 ceinturon avec un pistolet, Karadzic --
5 Q. Monsieur Sejdic, combien de temps êtes-vous resté à cet endroit vous-
6 même ?
7 R. Pas longtemps. J'étais de passage à cet endroit lorsque j'allais
8 derrière Rajko et certains soldats qui partaient en action et je devais
9 courir derrière eux et transporter les munitions et la nourriture et tout
10 le reste.
11 Q. Est-ce que vous avez entendu ce que cette personne que vous identifiez
12 comme M. Seselj a dit ?
13 R. Il disait "Il faut tirer dans les fesses des Balijas et des Turcs.
14 Allez-y, mes frères serbes. Agressez-les, ne laissez personne vivant devant
15 vous. C'est ce qu'il disait."
16 Q. Est-ce que Vaske était présent ?
17 R. Oui.
18 Q. A quoi vous avez reconnu que ça pouvait être M. Seselj, cette personne
19 ? Puisque vous ne voyiez pas les vêtements, j'ai cru comprendre qu'il était
20 entouré d'autres personnes.
21 R. Oui, j'ai vu son visage, j'ai vu ses lunettes, je l'ai vu tout comme je
22 le vois maintenant.
23 Q. Quel degré de certitude avez-vous que c'était bien
24 M. Seselj ?
25 R. Le degré de certitude ? Vous savez, je ne serais pas venu ici lui dire
26 droit dans les yeux et en tête-à-tête que je l'ai vu personnellement et que
27 c'était bien lui.
28 Je souhaite demander aux personnes présentes de lui demander de ne
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1 pas rire et se moquer de moi, ou peut-être il ne faut pas que je le
2 regarde, je n'ai pas beaucoup de patience et vous savez c'est sérieux ici.
3 M. LE JUGE ANTONETTI : Vous venez de donner la meilleure solution. Ne
4 le regardez pas, regardez moi, regardez le Procureur, ne le regardez pas.
5 Je ne eux pas l'empêcher de sourire ou de ne pas être d'accord avec vous.
6 Donc, voilà, bon.
7 M. DUTERTRE :
8 Q. Monsieur Sejdic, quand est-ce que vous avez mentionné pour la première
9 fois au parquet que vous aviez vu M. Seselj ce jour-là au plateau de Crna
10 Rijeka ?
11 R. A ce moment-là, vous voulez dire quand je l'ai mentionné ? Est-ce que
12 vous pouvez répéter la question, s'il vous plaît.
13 Q. Quelle est la première fois où vous avez fait part de cette information
14 suivant laquelle vous aviez identifié M. Seselj au plateau de Crna Rijeka ?
15 R. Quand je l'ai dit, je crois que c'est écrit dans ma déclaration, que
16 c'est là qu'on peut trouver la réponse à cette question. C'était au moment
17 où j'ai fait d'autres déclarations.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. J'exige que l'Accusation le rappelle
19 à quel moment il l'a dit. Et ça aussi, c'est une objection procédurale.
20 Mme LE JUGE LATTANZI : Vous pouvez lui demander de préciser cela pendant le
21 contre-interrogatoire, Monsieur.
22 M. DUTERTRE : Je crois que j'ai fini avec mes questions, Monsieur le
23 Président, comme convenu dans le temps imparti. Je vous remercie.
24 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Il nous reste quelques minutes avant de
25 clôturer et le contre-interrogatoire de M. Seselj pourra débuter la semaine
26 prochaine. J'ai quelques brèves questions complémentaires à vous poser,
27 Monsieur le Témoin.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Pouvez-vous me dire -- me rappeler exactement à
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1 quelle date vous avez retrouvé la liberté ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque j'ai retrouvé ma liberté, vous savez,
3 je n'ai pas été libéré. J'ai fui Ilija, donc c'était vers la fin de la
4 guerre, c'était peut-être en 1996, je ne suis plus sûr, 1995, fin 1995 ou
5 1996, c'est à ce moment-là que j'ai réussi à fuir lorsque les Serbes
6 quittaient Rajlovac ou Gocera [phon] Ilidza lorsque les Bérets verts
7 entraient dans la région de Vogosca autour de Sarajevo et lorsque le convoi
8 bleu a été ouvert. C'est à ce moment-là que j'ai réussi à m'échapper.
9 M. LE JUGE ANTONETTI : J'en reviens au plateau et le jour où vous avez vu
10 M. Seselj. D'après ce que j'ai compris, il y avait donc des combats parce
11 que, s'il y avait Karadzic ou Mladic, des tanks, et cetera, il y avait des
12 combats importants. Est-ce que vous pouvez me renseigner sur ce point ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je peux. Concernant quoi, Monsieur le
14 Président ?
15 M. LE JUGE ANTONETTI : Concernant l'épisode du plateau où vous aviez vu M.
16 Seselj en compagnie de Karadzic et Mladic. Vous avez mentionné qu'il y
17 avait des tanks, des troupes. Alors je peux en déduire qu'il devait y avoir
18 des combats importants, alors c'était quoi le combat en cours ?
19 R. Oui, je peux le dire puisque j'y étais personnellement. Ils utilisaient
20 tous les moyens, des chars, des canons, des lance-mines, des fusils
21 mitraillettes. Ils attaquaient de tous les côtés, ils s'attaquaient aux
22 villages. C'étaient leurs unités qui allaient après l'artillerie. D'abord,
23 l'artillerie tirait et ensuite ils allaient dans le village et tuaient tous
24 ceux qu'ils trouvaient sur place. Ils tuaient, ils prenaient la nourriture,
25 les tracteurs, les camions, tout ce qu'ils trouvaient dans des maisons.
26 M. LE JUGE ANTONETTI : Ça, c'est sur le plan général. Moi, ce que je veux
27 savoir, c'est : ils attaquaient qui au juste ? Vu la mobilisation de toutes
28 ces hautes personnalités, quelle était la cible, quel était l'objectif de
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1 cette attaque ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Le but de cette attaque résidait dans le fait
3 que Crna Rijeka était liée à Olovo et à Tuzla, et c'est là que se
4 trouvaient des forces musulmanes sur le plateau de Crna Rijeka et dans les
5 villages aux alentours. Ils tenaient les lignes et empêchaient les Serbes
6 d'attaquer leurs villages. Mais puisque les Serbes étaient plus puissants à
7 l'époque dans leurs attaques et avaient des chars et tout le reste, ils se
8 sont regroupés sur ce plateau. Il y avait des gens qui sont venus d'Ilijas,
9 de Rajlovac, de Vogosca. Tous ceux qui étaient les plus forts à l'époque,
10 ils sont venus là-bas à ce moment-là.
11 M. LE JUGE ANTONETTI : J'ai cru comprendre que vous, en civil, et vous
12 n'étiez pas certainement le seul qui aidait à transporter les munitions,
13 j'ai cru comprendre, mais si je me trompe, vous me le direz, que vous, vous
14 transportiez les munitions, les obus, pour les lieux où partaient les tirs
15 d'artillerie ou d'autres. C'était bien cela votre contribution ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Moi, je transportais les munitions pour
17 la Section d'Intervention de Jankovic. Je portais leurs munitions et s'ils
18 trouvaient quelque chose lourd, ils me le donnaient à moi pour que moi je
19 le transporte. Eux, ils avaient des munitions dans leur camion, et leur
20 camion s'appelait camion 150. Je ne sais pas, c'est un camion avec une
21 bâche, et c'est là qu'ils étaient chargés des caisses d'obus, des obus qui
22 sont lancés des lance-roquettes portatifs, et sur les camions on mettait
23 les équipements dans lesquels il était possible de placer trois grenades à
24 main. Moi, je portais leurs munitions et la nourriture, et je courrais
25 derrière eux et s'ils avaient besoin de quelque chose, de munitions ou
26 autre chose, j'étais prêt. Et si quelqu'un d'entre eux étaient touché par
27 balle, il fallait que je le retire sur le territoire sûr.
28 M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question. D'après vous,
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1 M. Seselj est resté pendant quelque temps, pendant longtemps, pendant toute
2 l'opération, quel est votre souvenir ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque je me suis avancé en allant derrière
4 la Section d'Intervention de Jankovic, je ne sais pas exactement combien de
5 temps encore ils sont restés derrière moi, ils y sont restés mais je ne
6 sais pas pendant combien de temps ils avaient cette réunion, mais je n'ai
7 pas pu rester pour voir car il a fallu que je suive les autres.
8 M. LE JUGE ANTONETTI : Indépendamment de M. Seselj, y avait-il d'autres
9 personnes qui n'avaient -- qui n'étaient pas membres de la VRS qui étaient
10 là présentes comme, je ne sais pas moi, observateur, visiteur, curieux ?
11 Est-ce qu'il y avait d'autres personnes, ou bien M. Seselj était la seule
12 personne autre que l'état-major de la VRS ou M. Karadzic ? Y avait-il
13 d'autres personnes que M. Seselj ?
14 R. Non. Je n'ai pas vu d'autres personnes de la sorte. J'ai simplement vu
15 leurs soldats, je les ai vus, eux, et j'ai vu les gardes du corps de
16 Karadzic et Mladic qui étaient à leurs côtés.
17 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Dernière sous-question et après j'arrête. Est-
18 ce que Vaske, le fameux Vaske dont vous avez parlé, est-ce qu'il était là,
19 lui ?
20 R. Oui.
21 M. LE JUGE ANTONETTI : Il était là.
22 R. Oui.
23 M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, il est l'heure de terminer parce
24 qu'après, il y aura une autre audience. Donc, je vous renouvelle mes
25 consignes, aucun contact avec personne jusqu'à la semaine prochaine. Alors,
26 la semaine prochaine, nous commencerons mardi matin, à 8 heures 30 parce
27 qu'on est d'audience de matin, ce qui vous permettra donc peut-être de
28 partir après, dans l'après-midi. Sur ce, Monsieur Mundis, il y a un
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1 programme de témoins. J'ai cru comprendre, je ne dis pas de nom parce que
2 s'il y a des témoins protégés -- mais a priori il y aura le 1060; c'est
3 bien ça ?
4 M. MUNDIS : [interprétation] En réalité, Madame, Messieurs les Juges,
5 compte tenu du fait que M. Sejdic va poursuivre son audition, le Témoin
6 1060 est reporté à la semaine d'après. Ainsi, le calendrier pour la semaine
7 prochaine, c'est M. Sejdic qui va terminer sa déposition et ensuite nous
8 entendrons le Témoin 1012, qui est le témoin que nous devions entendre
9 mercredi et jeudi après le 1060, donc nous inversons. Nous allons entendre
10 la fin de la déposition de M. Sejdic et ensuite entendre le Témoin 1012
11 pour le restant de la semaine.
12 M. LE JUGE ANTONETTI : Comme ça, M. Seselj, est informé du planning, donc
13 nous aurons 1012.
14 La juriste de la Chambre m'indique que pour le 1012 nous avions simplement
15 prévu une heure 30 pour l'interrogatoire principal. Je rappelle cela à
16 l'Accusation.
17 Bien. Vous avez pris bonne note, Monsieur Mundis ?
18 M. MUNDIS : [interprétation] Oui, tout à fait. Merci, Monsieur le
19 Président.
20 M. LE JUGE ANTONETTI : -- donc souhaite une bonne soirée à tout le monde,
21 et nous nous retrouverons, Monsieur le Témoin, mardi prochain, mardi matin
22 à 8 heures 30. Je vous remercie.
23 --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le mardi 17 juin 2008,
24 à 8 heures 30.
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