Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 14 octobre 2008

  2   [Audience publique]

  3   --- L'audience est ouverte à 14 heures 16.

  4   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, appelez le numéro de

  6   l'affaire, s'il vous plaît.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Je remercie M. le Président. Madame,

  8   Monsieur les Juges.

  9   Il s'agit de l'affaire IT-03-67-T, l'Accusation contre Vojislav

 10   Seselj.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur le Greffier.

 12   En ce mardi 14 octobre 2008, je salue les représentants de l'Accusation

 13   ainsi que leurs collaborateurs. Je salue M. Seselj et toutes les personnes

 14   qui nous assistent pour cette audience.

 15   Nous avons aujourd'hui donc un témoin qui va venir dans quelques instants.

 16   Je rappelle pour mémoire que l'Accusation a envisagé deux heures, sauf

 17   erreur de ma part, d'interrogatoire principal. La Défense aura donc deux

 18   heures pour le contre-interrogatoire.

 19   Le dernier jour de la semaine, nous aurons un 92 ter qui viendra selon la

 20   procédure 92 ter.

 21   Monsieur Seselj, très vite, parce que je crois que vous avez quelque chose

 22   à nous dire.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Deux choses, très brièvement.

 24   Premièrement, en passant par les gardes de la prison vendredi dernier et

 25   lundi, le Procureur a tenté de me faire remettre les mêmes documents sur

 26   CD-ROM, je l'ai refusé catégoriquement. J'ai remarqué en passant que ces

 27   documents portaient sur le travail d'Ewa Tabeau en tant que témoin expert.

 28   Je ne sais pas ce que cela contient. Ils l'ont fait malgré votre ordonnance

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  1   demandant que tout me soit remis sur copie papier.

  2   Deuxièmement, vous vous rappellerez, à plusieurs reprises j'ai demandé que

  3   le Témoin VS-1131 dépose viva voce à la place du 92 ter. Hier, j'ai reçu de

  4   la part du Procureur une nouvelle requête demandant que ce témoin vienne

  5   déposer en application de 92 ter. Cette requête porte la date du 25

  6   septembre, ce n'est qu'hier que je l'ai reçue, cependant. Cette fois-ci, ce

  7   que je suis en mesure de faire, c'est de répondre oralement à cette requête

  8   pour accélérer la procédure vu que le témoin est prévu dans une quinzaine

  9   de jours. Donc ce témoin dépose en application du 92 ter malgré tout compte

 10   tenu des fonctions qu'il a exercées au moment pertinent compte tenu de son

 11   poste de commandement. Mais enfin, ce serait insensé, insensé de le voir

 12   déposer ici en application de 92 ter. Si vous examinez la teneur de sa

 13   déclaration, vous verrez tout à fait clair là-dedans.

 14   Je ne voudrais pas m'attarder là-dessus, je pense que vous prendrez

 15   connaissance vous-même de la chose.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Nous prendrons connaissance de cela.

 17   Très rapidement, Madame, pour Ewa Tabeau, la question des

 18   CD-ROM, c'est quoi au juste ?

 19   Mme DAHL : [interprétation] Je suis désolée, je ne peux pas vraiment

 20   répondre à votre question. Il faut que je sache ce qui a été communiqué

 21   d'abord.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va donc introduire le témoin et lui faire

 23   prêter serment.

 24   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Bonjour, Monsieur. Pouvez-vous me donner votre nom,

 26   prénom et date de naissance, s'il vous plaît.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis Franja Baricevic, je suis né le 3 juin

 28   1953 à Hrtkovci.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelle est votre profession

  2   actuellement ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis mécanicien dans le domaine de la

  4   voiture.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Avez-vous, Monsieur, témoigné devant un tribunal

  6   international ou un tribunal national sur les faits qui se sont déroulés

  7   dans l'ex-Yougoslavie, ou bien c'est la première fois que vous témoignez ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la première fois.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Je vous remercie. Vous pouvez lire le serment que

 10   nous vous présentons.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai besoin de prendre mes lunettes.

 12   Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et

 13   rien que la vérité.

 14   LE TÉMOIN : FRANJA BARICEVIC [Assermenté]

 15   [Le témoin répond par l'interprète]

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur. Vous pouvez vous asseoir.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Quelques explications de ma part sur la façon dont

 19   va se dérouler cette audience, puisque c'est la première fois de votre vie

 20   que vous témoignez devant un tribunal et c'est un événement qui marque, en

 21   règle générale, le témoin. Donc ma mission est d'abord de vous rassurer en

 22   vous expliquant ce qui va se passer.

 23   Vous allez devoir répondre à des questions que le représentant du Procureur

 24   va vous poser. Vous avez dû le rencontrer, pour le moins, ce matin ou hier

 25   en vue de la préparation de cette audience. Il se peut également que le

 26   Procureur vous présente des documents.

 27   Après cette phase, M. Seselj, qui se trouve à votre gauche dont vous avez

 28   certainement entendu parler, vous posera des questions dans le cadre de son

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  1   contre-interrogatoire. Il aura donc le droit de vous poser des questions.

  2   En règle générale, les questions visent à tester la crédibilité du témoin

  3   et à aborder les questions de fond qui ont été mentionnées lors de

  4   l'interrogatoire principal.

  5   Les trois Juges qui sont devant vous pourront aussi à tout moment

  6   intervenir sur tel ou tel point afin que votre témoignage éclaircisse, si

  7   besoin est, des zones d'ombre. Essayez d'être précis dans les réponses que

  8   vous allez donner aux questions posées. Si vous ne comprenez pas le sens

  9   d'une question, n'hésitez pas à demander à celui qui vous pose la question

 10   de la reformuler. Même si c'est un Juge qui pose une question, n'hésitez

 11   pas à demander au Juge de la reposer, car il faut que vous compreniez la

 12   question afin d'y répondre le mieux possible.

 13   Nous faisons des pauses toutes les heures et demie, pauses d'une durée de

 14   20 minutes, ce qui veut dire que dans à peu près une heure et quelques,

 15   nous allons nous arrêter pendant 20 minutes.

 16   Vous avez prêté serment et à partir de maintenant, vous êtes le témoin de

 17   la justice, ce qui veut dire que vous n'aurez plus aucun contact avec le

 18   Procureur.

 19   Si votre audition se termine aujourd'hui, tant mieux, mais je ne sais pas,

 20   elle pourra peut-être se poursuivre demain, ce qui veut dire que vous

 21   reviendrez donc demain après-midi sans aucun contact avec le Procureur.

 22   Bien entendu, la Chambre est à votre disposition pour répondre à toutes

 23   questions que vous pourriez lui poser en cas de besoin.

 24   Voilà ce que je voulais vous dire afin que cette audience se déroule de la

 25   meilleure façon possible.

 26   Je vous salue, Monsieur le Procureur, et je vous laisse la parole.

 27   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je vous remercie. Bonjour à tous dans le

 28   prétoire.

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  1   J'ai deux points à soulever avant de commencer l'interrogatoire principal.

  2   J'aimerais tout d'abord présenter Christian Simon, qui est notre stagiaire

  3   et qui nous aide à préparer cette audience.

  4   Aussi, je pense que je n'aurai pas besoin de deux heures, 90 minutes

  5   devraient suffire.

  6   Interrogatoire principal par M. Mussemeyer :

  7   Q.  [interprétation] Tout d'abord, bonjour, Monsieur le Témoin.

  8   R.  Bonjour.

  9   Q.  J'aimerais que nous nous penchions d'abord sur vous-même et votre

 10   carrière. Donc pouvez-vous nous dire exactement quelle est votre

 11   nationalité et votre appartenance ethnique ?

 12   R.  Je suis Croate, catholique.

 13   Q.  Etes-vous marié, avez-vous des enfants ?

 14   R.  Je suis marié. Mon épouse s'appelle Jadranka. J'ai une fille et un

 15  fils. Ma fille est née en 1978 et mon fils en 1983. Je vis à Jaksic.(expurgé)

 16  (expurgé)

 17   Q.  Pourriez-vous nous dire dans quel pays se trouve ce

 18   village ?

 19   R.  Le village se situe en Croatie.

 20   Q.  Avez-vous toujours vécu en Croatie ?

 21   R.  Non. Jusqu'au 19 mai 1992, je vivais à Hrtkovci, en Vojvodine. Rue

 22   Savska, numéro 19.

 23   Q.  Pouvez-vous nous dire jusqu'à quand vous avez habité à Hrtkovci ?

 24   R.  J'ai vécu à Hrtkovci depuis ma naissance en 1953 jusqu'à la date que je

 25   viens de vous donner.

 26   Q.  Vos parents habitaient-ils aussi à Hrtkovci ?

 27   R.  Ma mère -- en réalité, mon arrière-grand-père, mon grand-père et ma

 28   mère étaient la population autochtone de Hrtkovci, mon père est arrivé dans

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  1   la région de Lika, c'est en Croatie aujourd'hui.

  2   Q.  Pouvez-vous nous dire quel était votre métier à Hrtkovci ?

  3   R.  A Hrtkovci, j'ai fait l'école secondaire. En fait, ça a duré trois ans

  4   à Ruma, cet apprentissage. Après, c'est à Sombor que j'ai fait mon service

  5   militaire. J'y suis resté pendant deux mois et demi pour suivre un

  6   entraînement, et au bout de cette période-là, j'ai été affecté à Tuzla.

  7   Donc en tout, au bout de 15 mois de service, je suis parti à Zagreb. J'ai

  8   travaillé pour le chemin de fer. C'est là que je suis devenu chauffeur des

  9   équipements qui circulent sur les rails et aussi des véhicules à moteur. Au

 10   bout de trois ans, je suis rentré à Hrtkovci, et là j'ai commencé à assurer

 11   la maintenance des installations de plomberie. C'est là que j'ai travaillé

 12   jusqu'en 1992.

 13   Q.  Avez-vous fait de la politique à un moment ou à un autre ?

 14   R.  Alors que j'étais encore dans l'armée, j'étais membre de la Ligue des

 15   Communistes, jusqu'à la mort de Josi Broz Tito. A sa mort, j'ai rendu ma

 16   carte de membre et depuis je n'ai plus été membre d'un parti politique.

 17   Q.  Donc vous n'avez jamais fait partie d'un parti politique, mais avez-

 18   vous eu des activités politiques à un moment ou à un

 19   autre ?

 20   R.  Non, non.

 21   Q.  Je suis désolé. Je ne sais pas si vous -- 

 22   R.  Je ne sais pas comment vous allez comprendre cela. La seule chose,

 23   c'est que j'étais membre de l'assemblée municipale. L'assemblée municipale,

 24   c'est l'organe qui dirige la commune locale, qui s'occupe d'assurer le

 25   fonctionnement de la commune locale, en fait, de la vie au quotidien, la

 26   commune locale. Mais ce n'est pas une activité politique. Oui, c'est ce que

 27   j'ai fait, et j'ai eu un mandat de quatre ans.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Une petite précision.

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  1   Vous nous avez dit que vous aviez été membre du Parti communiste. A

  2   l'époque, sur 100 personnes, combien étaient membres du Parti communiste;

  3   10 %, 20 %, 50 % ? Ou bien une toute petite minorité ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, la majorité des gens qui

  5   travaillaient auprès de la municipalité et la commune locale, il fallait

  6   qu'ils soient membres de la Ligue des Communistes pour avoir leur emploi.

  7   C'était une règle tacite.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc si je comprends bien, vous étiez membre du

  9   Parti communiste pour votre emploi, pas pour convictions idéologiques.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est cela. C'est cela.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Merci.

 12   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 13   Q.  Savez-vous quelle était la population de Hrtkovci à l'époque ?

 14   R.  Je ne vous ai pas compris. Pendant quelle période ? Vous voulez dire

 15   quand j'ai commencé à travailler à la commune locale ou en 1992 ?

 16   Q.  Non, en 1990.

 17   R.  Dans les années 90, il y avait dans notre village 2 900 habitants, à

 18   peu près -- un de plus, un de moins.

 19   Q.  Pouvez-vous nous dire la composition ethnique de votre village ?

 20   J'imagine qu'il y avait plus d'une nationalité représentée.

 21   R.  Dans notre village, il y avait 13 groupes ethniques. Là, vous aviez 75

 22   % d'entre eux qui étaient soit des Croates, soit des Hongrois, puis 25 %

 23   étaient les autres -- là, vous aviez tous les autres.

 24   Q.  Connaissez-vous le pourcentage de Serbes parmi cette population ?

 25   R.  Les Serbes d'appartenance serbe, il y avait à peu près 20 % de

 26   personnes, donc les 5 % restants sont les autres -- les Roumains et les

 27   autres.

 28   Q.  Pourriez-vous nous décrire les relations entre les différents groupes

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  1   ethniques avant 1990 ?

  2   R.  Oui. Voyez-vous, ce village c'était un village où les gens

  3   travaillaient, où tout le monde s'entendait bien, était calme et serein.

  4   Les gens, ils ne s'intéressaient qu'au travail, ils travaillaient. Ils ne

  5   se posaient pas d'autres questions, et il n'y avait pas de différences

  6   faites selon l'appartenance nationale ou autre chose.

  7   Q.  Y a-t-il eu des tensions entre les différents groupes ethniques ?

  8   R.  Des tensions sur le plan national, ça a commencé -- on sait que

  9   Milosevic a organisé des rassemblements, ça a commencé au Kosovo et ça

 10   allait jusqu'en Vojvodine. Puis dans le village, les gens ont commencé -

 11   comment dirais-je ? Vous savez, on trouve de l'ivraie dans chaque bon

 12   grain. Certains ont commencé un petit peu à se distinguer, mais la majorité

 13   des gens ne leur prêtaient pas attention, puis avec le temps, il y en a eu

 14   de plus en plus.

 15   Q.  Si je vous ai bien compris, avant que Milosevic n'organise ces

 16   meetings, les relations entre les groupes ethniques étaient tout à fait

 17   normales; il n'y avait pas de tensions; c'est cela ?

 18   R.  C'est ça. C'est cela.  Mais c'était calme. Comme je vous disais, tout

 19   allait bien.

 20   Q.  Pourriez-vous nous dire à quel moment les choses ont commencé à changer

 21   ? Nous donner l'année, par exemple ?

 22   R.  Comme je viens de vous dire, avec ces rassemblements de Milosevic, on a

 23   créé le parti de Vuk Draskovic et aussi le parti de Seselj, voyez-vous, et

 24   alors, les gens - je ne sais pas comment dire. Vous avez des gens qui

 25   étaient favorables à ce parti, ils ont commencé un petit peu à se mettre à

 26   part et a créé quelques petits problèmes, des excès dans le village.

 27   Q.  Savez-vous quand le parti de Seselj a été créé à Hrtkovci ?

 28   R.  C'était à peu près en 1991. Dans le village, on a créé une branche, une

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  1   branche du parti du Seselj. D'abord, Aco Ejic, il a créé ce parti, et

  2   Ostoja Sibincic a créé le SPO. Par la suite, Aco Ejic a renoncé, puis

  3   Sibincic est resté au sein du SPO. Dans le parti de Seselj, excusez-moi.

  4   Q.  Nous y reviendrons. Pourriez-vous nous dire les raisons pour lesquelles

  5   ces tensions sont arrivées ?

  6   R.  Je ne vous ai pas compris. Excusez-moi, je ne vous ai pas compris.

  7   Q.  Vous -- je résume ce que vous venez de nous dire. Vous nous avez dit

  8   que jusqu'en 1990, les relations entre les groupes ethniques étaient tout à

  9   fait normales; ensuite, à partir de 1991, les tensions ont commencé à

 10   monter, et j'aimerais savoir, d'après vous, quelle était la raison derrière

 11   cette tension.

 12   R.  Juste un instant. Les tensions, elles ont commencé à naître, comme je

 13   vous ai dit, depuis la création de ce parti. Aussi, au départ, on a vu

 14   arriver des réfugiés. Il y a eu un groupe de 160 réfugiés arriver de

 15   Slavonie, et alors, c'est là qu'on a vu naître des tensions dans la

 16   population.

 17   Q.  Pourriez-vous nous dire qui étaient ces réfugiés et d'où ils venaient ?

 18   Vous nous avez déjà dit qu'ils venaient de "Slavonie," mais expliquez-nous,

 19   pourquoi ils sont arrivés, et qui ils étaient ?

 20   R.  De Slavonie. Ecoutez, c'était une première vague de réfugiés, cela --

 21   pardon. Vous aviez cette première vague de réfugiés qui sont arrivés de

 22   Slavonie.

 23   Oui, c'est [inaudible].

 24   Donc cette première vague de réfugiés, ces gens sont arrivés de

 25   Slavonie, et la commune locale de Hrtkovci a trouvé où placer ces gens,

 26   c'était dans des appartements qu'on a mis à leur disposition, on les a

 27   aidés aussi pour ce qui est des vivres. On a fait la collecte, la collecte

 28   de vivres pour eux. La commune locale a même acheté des cuisinières pour

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  1   eux, pour ceux qui n'avaient pas de quoi se faire à manger chez eux, et

  2   même on a fait des contributions en argent pour ces gens-là qui ont dit

  3   qu'ils n'avaient pas d'argent.

  4   Q.  Y avait-il assez de place à Hrtkovci pour tous ces réfugiés au début ?

  5   R.  Non. Ils avaient, comme vous savez, des parents ou de la famille, mais

  6   il n'y avait pas suffisamment de place pour eux.

  7   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur le Témoin, on est toujours en 1991 ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, là nous sommes déjà en 1992, le début de

  9   l'année 1992.

 10   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Un petit mystère que je n'ai pas pu élucider jusqu'à

 12   présent.

 13   Ces réfugiés qui viennent de Slavonie, pourquoi ils viennent dans votre

 14   village ? Ils pouvaient pas aller ailleurs ? Est-ce que votre village est

 15   sur la route de la Slavonie ? Pour quelle raison, d'après vous, ils sont

 16   venus là ? Pourquoi ils ont pas été à Belgrade directement ? Pourquoi ils

 17   sont venus chez vous ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette question, moi aussi je ne sais pas y

 19   répondre, mais je vais vous dire. Ces gens-là, ils avaient une direction.

 20   Ils se sont présentés à ce président, ils sont venus voir ce président de

 21   cette branche du parti. De quel contact il s'agissait, je ne saurais pas

 22   vous dire, mais ils arrivaient tous à Hrtkovci.

 23   Est-ce qu'un tel ou un autre les a appelés, je ne peux pas vous le dire.

 24   Pour ce groupe, ce premier groupe, je ne saurais pas vous dire pour quelle

 25   raison ils sont arrivés, mais je sais qu'ils se sont adressés tous à Ostoja

 26   Sibincic.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Très bien.

 28   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

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  1   Q.  Vous avez déjà parlé d'Ostoja Sibincic. Pourriez-vous nous dire quel

  2   rôle il jouait dans le village à ce moment-là ?

  3   R.  Ostoja Sibincic, je le connais bien. Il est un peu plus âgé que moi. Il

  4   a fait une académie militaire et il a été évincé de là-bas. Il est venu à

  5   Ruma pour travailler comme un responsable de l'ordre communal, et il était

  6   à la tête du parti de Seselj. C'était un membre très actif.

  7   Q.  Faisait-il partie du parti de M. Seselj depuis le début ou faisait-il

  8   partie d'un autre parti au départ ?

  9   R.  Je vous ai déjà dit. Tout d'abord, il a accepté le SPO; puis

 10   rapidement, il est passé dans le parti de Seselj.

 11   Q.  Le connaissiez-vous personnellement ?

 12   R.  Oui, personnellement, puisque nous venons de deux rues qui sont juste à

 13   côté l'une de l'autre.

 14   Q.  Pourriez-vous nous parler de son attitude politique ?

 15   Mme LE JUGE LATTANZI : -- et ce passage d'un parti à l'autre se serait

 16   réalisé à quelle date ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne connais pas la date, voyez-vous, mais

 18   c'était à la fin de l'année 1991.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, les questions que le Procureur vous pose

 20   et que les Juges vous posent sont des questions très importantes pour nous.

 21   Je dirais même essentielles. C'est de savoir à quel moment le Parti radical

 22   serbe a eu pignon sur rue, c'est-à-dire un siège, une reconnaissance de

 23   l'existence de ce parti.

 24   En vous écoutant, vous dites M. Seselj avait son parti. Nous, ça nous

 25   suffit pas. Il faut qu'on sache la date exacte, et qu'est-ce qui vous

 26   permet de dire que c'était le parti de M. Seselj. Alors pouvez-vous nous

 27   apporter des précisions ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, je ne suis pas sûr de la

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  1   date exacte, mais c'était à fin de l'année 1991. Il avançait toujours le

  2   fait qu'il était membre du Parti radical -- et il n'avait pas de siège du

  3   parti, par conséquent, il tenait des réunions dans son appartement. Son

  4   appartement, vous savez, était au plein milieu du village.

  5   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

  6   Q.  Monsieur Baricevic, vous avez décrit M. Sibincic comme étant un

  7   extrémiste. Savez-vous s'il appelait les Serbes qui avaient des liens

  8   d'amitié avec les Croates d'un nom bien spécifique ?

  9   R.  Bien, comme je l'ai dit, j'étais membre de l'assemblée de la commune

 10   locale, et nous avons eu une réunion à laquelle a assisté aussi Ostoja

 11   Sibincic. Le président de l'assemblée de la commune locale était un Serbe,

 12   Dobrosav Markovic, qui lui a dit, je cite -- enfin, il lui a dit à lui, je

 13   cite : "Comment vous dites être Serbes, puisque vous avez pu vivre côte à

 14   côte avec les Oustachi depuis aussi longtemps ?"

 15   Q.  Savez-vous quelle expression il a employée, si vous vous en souvenez ? 

 16   R.  Oui, il a dit que les Serbes locaux depuis longtemps c'étaient des

 17   Serbes sans qualité, alors que les Serbes qui étaient venus de la Slavonie

 18   étaient des Serbes de qualité. J'avais oublié de dire ça.

 19   Q.  Pourquoi les Serbes du cru étaient-ils appelés des Serbes de peu de

 20   qualité ?

 21   R.  Bien, car ils s'entendaient bien avec les Croates. Comme je l'ai déjà

 22   dit, ils entretenaient des rapports fraternels. Ils vivaient ensemble,

 23   comme je vous l'ai déjà dit. C'était un village paisible avec les gens qui

 24   s'entendaient bien entre eux.

 25   Q.  Vous avez déjà parlé de la façon dont Ostoja Sibincic était impliqué

 26   dans les problèmes de logement.

 27   R.  Comme je l'ai déjà dit, tous ces gens, tous ces réfugiés s'adressaient

 28   à lui personnellement, et lui il donnait les adresses des maisons de

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  1   personnes qui travaillaient à l'étranger, en Italie, en Allemagne, en

  2   France, en Belgique, aux Pays-Bas, partout en Europe; et quant à ces

  3   maisons-là ils avaient laissé leurs maisons à leur famille, à leurs

  4   cousins, ou voisins, pour que ceux-ci veillent un peu sur elles. Mais ils

  5   revenaient chez eux pendant les vacances.

  6   Q.  Ostoja Sibincic qu'a-t-il proposé afin de trouver un endroit pour les

  7   réfugiés ?

  8   R.  Bien, il a proposé que ces personnes y déménagent. Cependant, la

  9   commune locale ne pouvait pas céder les biens d'autrui sans l'accord du

 10   propriétaire.

 11   Q.  C'est une des raisons pour lesquelles les tentions ont augmenté ?

 12   R.  Oui, c'était la raison des tensions qui ont éclaté. Les gens ont été

 13   obligés de fermer leurs maisons à clé et appeler les propriétaires des

 14   maisons vacantes pour les informer de la situation au village.

 15   Q.  Vous souvenez-vous  de noms de personnes qui sont venus - je veux

 16   parler de noms de réfugiés qui sont venus de Slavonie à

 17   Hrtkovci ? Vous souvenez-vous de certains noms précisément ?

 18   R.  Je sais que je me souviens d'un nom, Rade Cakmak. Rade Cakmak qui est

 19   entré par la force dans une maison qui appartenait elle aussi à un homme

 20   qui travaillait en Allemagne. Cette maison avait été fermée à clé. Elle

 21   était bien remplie, cet homme avait travaillé depuis 30 ans en Allemagne.

 22   Q.  Est-ce qu'il y a eu un moment où cette situation au niveau de

 23   l'hébergement est devenue critique lorsque les réfugiés sont arrivés de

 24   Slavonie ?

 25   R.  Bien, la situation est devenue critique, car dans le village les gens

 26   ont perdu leur tranquillité. Ils sont devenus angoissés. Et ceux qui

 27   étaient venus de la Slavonie, ils cherchaient une solution.

 28   Q.  Savez-vous si des promesses avaient été faites à ces réfugiés eu égard

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  1   à leur logement ?

  2   R.  Ces réfugiés ils ont été dupés. On leur avait dit que les maisons

  3   étaient vides, que les gens de Hrtkovci étaient partis rejoindre les rangs

  4   des Oustachi. Cependant, lorsqu'ils sont venus, les maisons étaient

  5   occupées, les gens y vivaient, les gens qui vivaient travaillaient là-bas.

  6   Q.  Les réfugiés se sont-ils plaints de cette situation ?

  7   R.  Oui. Ils ont demandé une réunion. Ils ont demandé que Seselj y assiste.

  8   Cependant, au moment de Pâques -- ou plutôt, Vendredi saint, une femme

  9   militante de Ruma est venue. Je ne sais pas quel est son nom, mais de toute

 10   façon elle est venue assister à cette réunion qui a eu lieu dans la maison

 11   de la culture à Hrtkovci.

 12   Q.  Monsieur Baricevic, ce que je souhaite savoir c'est ceci : d'où savez-

 13   vous que les réfugiés se sont plaints de la situation ? Est-ce que vous

 14   pouvez nous le dire ?

 15   R.  Bien sûr que oui, je le sais. Pendant que j'étais dans la commune

 16   locale, pendant que j'y ai travaillé, j'étais sans cesse avec eux, et je

 17   savais aussi qu'une réunion allait avoir lieu car j'avais les clés de la

 18   salle. Moi, à Hrtkovci, j'avais les clés de tous les bâtiments importants

 19   car je travaillais dans la commune locale. Donc eux ils ont demandé les

 20   clés pour tenir cette réunion et je leur ai donné les clés.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Ce que ma collègue me disait, et moi-même je faisais

 22   la même remarque. Nous avons besoin de savoir exactement les dates. Il y a

 23   cette réunion de cette dame qui vient de Ruma. A quelle date ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] A Pâques, Pâques catholique -- ou plutôt,

 25   Vendredi saint, en 1992.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Au mois d'avril 1992. Enfin, on va vérifier.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. C'était Vendredi saint pour être

 28   tout à fait précis --

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Autre chose également.

  2   Vous avez dit, ils avaient été dupés. Alors quand je vous ai entendu dire

  3   ça, je me suis demandé dupés par qui; par les Croates qui leur avaient dit

  4   : "Partez et vous aurez des maisons à Hrtkovci," ou bien par des Serbes,

  5   qui leur auraient dit vous aurez des maisons à Hrtkovci. Qui les a dupé au

  6   juste ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, bien sûr que c'étaient

  8   les Serbes, car ils leur avaient dit que les Croates étaient partis joindre

  9   les Oustachi, dans l'armée croate, et que leurs maisons étaient restées

 10   vides. C'était les autorités de là-bas, je suppose, qui les a dupés

 11   puisqu'ils ont dit cela à eux.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Donc les Serbes de la Slavonie, c'est eux qui

 13   les auraient dupés.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Exactement, oui.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Procureur.

 16   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 17   Q.  Revenons à Vendredi saint au mois d'avril 1991. Vous avez indiqué

 18   qu'une --

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Pas en 1991, 1992, il l'a dit, alors il faut savoir

 20   --

 21   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Pardonnez-moi. C'est une erreur. Je

 22   voulais parler de l'année 1992. Je vous remercie de m'avoir corrigé.

 23   Q.  Vous nous avez dit que les réfugiés n'étaient pas satisfaits avec ce

 24   que cette militante, cette femme leur a dit. Souhaitaient-ils que quelque

 25   chose d'autre soit fait pour trouver une solution à leurs problèmes à

 26   Hrtkovci ?

 27   R.  Après cela -- ils étaient mécontents, et après cela, ils ont demandé

 28   d'avoir une réunion avec Seselj. Ils ont demandé que Seselj vienne en

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  1   personne dans le village afin de tenir cette réunion avec eux.

  2   Q.  Pourquoi ont-ils demandé à ce que M. Seselj vienne à Hrtkovci ?

  3   R.  Je ne sais pas ce qui s'est passé lors de cette réunion, mais ces gens-

  4   là ils étaient mécontents. Ils ont demandé que cette réunion ait lieu, et

  5   la réunion a eu lieu le 6 mai.

  6   Q.  Nous allons y venir un peu plus tard. Veuillez nous dire, s'il vous

  7   plaît, s'il y avait des préparatifs avant ce rassemblement, avant l'arrivée

  8   de M. Seselj ? 

  9   R.  Oui, bien sûr. S'agissant de ce rassemblement, pendant toute la

 10   journée, on entendait très fort la musique chetnik.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Un moment, Témoin. Comme on est sur des sujets

 12   extrêmement importants, il faut progresser à pas de loup et ne pas faire

 13   d'erreur. Et donc je suis très attentif à tout ce que vous dites.

 14   Si je comprends bien, des Serbes mécontents ont voulu rencontrer M. Seselj,

 15   et à ce moment-là c'est une dame qui vient de Ruma, et --

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : -- et les personnes qui voulaient voir Seselj ne le

 18   voient pas puisque c'est la dame qui vient. Et vous dites --

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : -- a été organisée la rencontre du 6 mai. Nous, nous

 21   savons que le 6 mai il y a eu un discours de M. Seselj.

 22   Alors comment savez-vous que tout cela s'est passé, à savoir les

 23   Serbes mécontents qui veulent voir M. Seselj, c'est la dame de Ruma qui

 24   vient et on organise la réunion du 6 mai ? Comment le savez-vous ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, je travaillais dans le

 26   village. J'étais entouré des gens. Je savais car on en parlait. Vous savez,

 27   c'est un village, les gens parlent entre eux de ce qui se passe. Comme je

 28   l'ai déjà dit, je leur ai donné les clés de la maison de la culture dans

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  1   laquelle ils ont tenu cette réunion avec cette femme. J'avais commencé à

  2   dire que j'ai mis à leur disposition pour le 6 mai les haut-parleurs de la

  3   maison de la culture, car l'assemblée de la commune locale mettait cela à

  4   la disposition de tous les partis politiques. On mettait à leur disposition

  5   l'espace et les haut-parleurs.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : -- et les Juges ont déjà un certain nombre

  7   d'éléments. Nous savons qu'il y avait une campagne électorale à l'époque,

  8   il y avait une campagne électorale qui était en cours, et que donc, dans le

  9   cadre de la campagne électorale, il peut y avoir des hommes politiques

 10   comme M. Seselj qui viennent au village pour faire des discours politiques

 11   afin d'avoir des élus lors des prochaines élections. Or, vous, vous

 12   affirmez que la réunion du 6 mai n'est pas liée à la campagne politique, si

 13   je comprends bien, mais aux Serbes mécontents qui voulaient voir M. Seselj.

 14   Alors d'après vous, il y a deux causes : ou c'est la campagne politique, et

 15   c'est pour ça que M. Seselj vient, ou bien c'est parce que les Serbes

 16   mécontents veulent rencontrer M. Seselj.

 17   Alors, pour vous, quelle est la raison ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Justement, c'est cela la raison. Ils ont voulu

 19   rencontrer M. Seselj afin qu'il leur donne des lignes directrices pour

 20   qu'ils sachent quel chemin prendre, pour vous dire simplement.

 21   Mme LE JUGE LATTANZI : -- M. Seselj, qui n'avait pas une position

 22   officielle dans la commune locale ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils souhaitaient s'adresser à une instance

 24   plus haut placée du Parti radical. Ils n'étaient pas contents d'Ostoja

 25   Sibincic. Ils voulaient s'adresser à quelqu'un de plus haut placé pour

 26   recevoir les lignes directrices, pour savoir comment faire et ce qu'il

 27   fallait faire.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On va continuer.

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  1   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Pardonnez-moi.

  2   Q.  Je vous demandais s'il y avait des préparatifs à ce rassemblement, et

  3   avant que le Président de la Chambre ne vous pose des questions

  4   supplémentaires, vous avez commencé à répondre en disant qu'il y avait de

  5   la musique. De quoi s'agissait-il ? Y avait-il peut-être autre chose ?

  6   R.  Il y avait la musique, il y avait les affiches dans les rues, et en

  7   face de la station à essence, on avait monté une espèce de podium. On a

  8   fait venir une remorque, puis on a baissé les côtés, et ceci était censé

  9   être un podium.

 10   Q.  Où dans le village; pourriez-vous nous le dire ?

 11   R.  Pour répondre précisément, je vais vous dire que c'était dans la rue de

 12   Vladimir Nazor. Autour du numéro - attendez - autour du numéro 15, car

 13   c'est là que se trouvait le carrefour. C'est là qu'il y avait le plus de

 14   place et on a utilisé la pelouse qui était autour de la partie en face de

 15   la station à essence de l'autre côté de la route.

 16   Q.  Avant l'arrivée de M. Seselj le 6 mai, est-ce que d'autres personnes

 17   sont arrivées dans le village ?

 18   R. Un autocar est venu. (expurgé)

 19   (expurgé)

 20   (expurgé) les Aigles blancs étaient

 21   dans cet autocar. Ils ont dit que c'était eux qui fournissaient la sécurité

 22   de Seselj.

 23   Q.  Comment saviez-vous qu'il s'agissait d'Aigles blancs ?

 24   R.  Ils portaient des uniformes noirs, et ils portaient des fusils, des

 25   armes.

 26   Q.  Mais il y avait également d'autres personnes qui portaient des

 27   uniformes noirs et qui avaient des fusils. Ceci ne m'explique pas pourquoi

 28   il aurait dû s'agir d'Aigles blancs.

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  1   R.  Eux ils ont dit qu'ils étaient des Aigles blancs et qu'ils faisaient

  2   partie de la sécurité de Seselj.

  3   Q.  Avez-vous entendu parler d'un groupe politique auquel appartenaient les

  4   Aigles blancs ?

  5   R.  C'était, comment dire, attendez. Comment ils ont dit ?

  6   Q.  Si vous ne nous vous en souvenez pas, nous pouvons aborder la question

  7   suivante. Ceci ne revêt pas une importance particulière pour moi.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Témoin, je reviens à quelque chose de très important

  9   que vous avez dit, c'est la première fois qu'on l'entend et ça mérite qu'on

 10   prête attention.

 11   Vous avez dit ces hommes en noir et avec des fusils, ils ont dit qu'ils

 12   étaient des Aigles blancs et qu'ils étaient chargés de la sécurité de M.

 13   Seselj. Alors quand vous dites "ils," ils vous l'ont dit à vous ou c'est

 14   quelque chose que vous avez entendu de quelqu'un d'autre ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Pas à moi personnellement, mais ils l'ont dit

 16   -- nous, nous étions à la station à essence, et ils l'ont dit aux personnes

 17   regroupées là-bas. Moi, je n'étais pas loin, mais ils ne me l'ont pas dit

 18   personnellement, ils assuraient la sécurité de l'espace autour de la

 19   station à essence et autour du podium.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, si je comprends bien, il y a un groupe de

 21   gens qui sont près de la station d'essence. Les Aigles blancs arrivent, et

 22   ils disent à ce groupe qu'ils étaient chargés de la sécurité de M. Seselj.

 23   Et vous, vous entendez quelqu'un du groupe vous le dire, ou ils ont discuté

 24   entre eux et vous avez appris cela ? C'est comme cela que ça s'est passé ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, ils ont parlé, et c'est ainsi que j'ai

 26   appris qu'ils étaient là.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Et les Aigles blancs, vous en aviez entendu parler

 28   avant, ou c'est la première fois que vous en voyiez ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous voulez dire dans le village ?

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Dans le village.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était la première fois.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Avant, ils étaient connus, les Aigles blancs ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] On avait entendu parler d'eux, mais ils

  6   n'étaient pas venus au village. C'était la première fois qu'ils sont venus.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- parlait comment; en bien, en mal ? Qu'est-ce

  8   qu'on disait d'eux ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] En mal. On parlait de ces gens-là en mal. Ce

 10   n'était pas vraiment une armée. Ils avaient des cheveux longs. Ils avaient

 11   un aspect physique désordonné. Puis certains portaient des bottes, d'autres

 12   portaient d'autres types de chaussures. On voyait bien qu'il ne s'agissait

 13   pas de l'armée régulière.

 14   Mme LE JUGE LATTANZI : Excusez-moi. Je ne comprends pas quelque chose.

 15   Alors quand la municipalité locale est informée qu'il y a une manifestation

 16   d'un parti politique et elle décide de donner des instruments, des choses

 17   pour faire cette manifestation, est-ce qu'elle informe aussi la police

 18   locale de la nécessité de venir dans le village ? Et la police locale,

 19   était là, et la police locale permettait qu'un groupe qui n'était pas de la

 20   police locale puisse maintenir l'ordre à Hrtkovci ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends. La police était là, mais

 22   elle n'était pas à ce rassemblement, la police des autorités de l'époque.

 23   Mais elle était à 1 kilomètre de là et régulait la circulation des deux

 24   côtés à une distance de 1 kilomètre. Ils ne faisaient que réguler la

 25   circulation. Mais ils n'ont pas assisté au rassemblement.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. On voit très bien.

 27   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 28   Q.  Vous-même, vous êtes allé à ce meeting ?

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  1   R.  Comme je vous l'ai dit, j'ai assisté à ce rassemblement qui a eu lieu

  2   aux alentours de la station à essence.

  3   Q.  Pourquoi y êtes-vous allé ?

  4   R.  J'étais curieux, je voulais voir quelle allait être la décision et la

  5   solution par rapport aux Croates, j'ai entendu des histoires différentes et

  6   je me suis dit, je vais y aller moi-même afin d'entendre quelle sera la

  7   solution. Comme je le l'ai dit, j'étais curieux.

  8   Q.  Y êtes-vous allé seul, ou étiez accompagné de quelqu'un ?

  9   R.  Non, je n'y suis pas allé seul, car mon frère, ou plutôt mon demi-

 10   frère, est venu de France pour passer ses vacances, il s'appelle Ladislav

 11   Hunjadi, nous avons déjeuné ensemble, et je lui ai dit "Apparemment, c'est

 12   la dernière fois que tu viens me rendre visite." Puis il m'a regardé. Il

 13   avait l'air étonné. Puis je lui ai dit, "Tu vas voir après ce

 14   rassemblement."

 15   Q.  Pourquoi éprouviez-vous ce sentiment ? Pourriez-vous nous l'expliquer ?

 16   R.  Comme je l'ai déjà dit, je travaillais dans ce village, je pouvais voir

 17   les gens, je les entendais, je voyais les déplacements des gens, donc on

 18   pouvait très bien comprendre tout ce qui se passait.

 19   Q.  Savez-vous environ combien de personnes ont participé à ce meeting ?

 20   R.  Ils étaient assez nombreux. Les gens affluaient de tous les côtés, des

 21   villages différents. Il y avait environ 2 000 personnes.

 22   Q.  Savez-vous qui a prononcé un discours pendant ce meeting ? Pourriez-

 23   vous nous le dire ?

 24   R.  Le rassemblement a été inauguré par Milan Zilic. C'était devant sa

 25   maison à lui que ce podium avait été monté.

 26   Q.  Pouvez-vous nous décrire la scène, comment ceci était monté, de quel

 27   podium s'agissait-il ?

 28   R.  Comme je l'ai dit tout à l'heure, on a fait venir une remorque de

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  1   tracteur, on a ouvert les côtés, et c'est là qu'on a placé le podium, en

  2   haut, qui devait servir à ceux qui tenaient les discours.

  3   Q.  M. Zilic a-t-il cité des noms d'habitants d'Hrtkovci ?

  4   R.  M. Zilic a tenu un discours, et il a mentionné les noms des personnes

  5   qui étaient déjà en Croatie; certains d'entre eux étaient en Croatie,

  6   certains étaient en Allemagne et certains, en Autriche. Si nécessaire, je

  7   peux énumérer : Sostaric, les frères Grdic, les frères Cindric, Stepic,

  8   Markus, Mate, et d'autres. Il a dit qu'ils avaient rejoint les rangs de la

  9   ZNG, la Garde nationale croate, qu'ils s'attaquaient aux Serbes une Kama

 10   [phon] oustachi à la main. C'est ainsi qu'il a présenté ces personnes

 11   depuis son podium.

 12   Q.  A-t-il dit ce qui allait advenir de ces familles ou de ces personnes ?

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, on aborde aussi -- enfin, tout ce que vous

 14   dites est très important. Je dois vous dire, pour éviter que vous fassiez

 15   des extrapolations, que nous avons le discours de ce qui a pu être dit par

 16   les autres, ils ont été trois à intervenir. Donc nous avons le discours, et

 17   là je viens de me rendre compte que vous venez de dire quelque chose qui

 18   n'est pas dans le discours. A un moment donné, vous avez dit que M. Zilic

 19   avait parlé des couteaux oustacha, et cetera. Vous êtes bien sûr de ça,

 20   vous l'avez entendu de vos oreilles ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : -- sûr ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis tout à fait certain.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Qu'est-ce qu'il a dit au juste ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça c'était les noms des premières personnes

 26   qu'on a entendu citées au début du discours, à savoir qu'ils étaient dans

 27   la ZNG et qu'ils lancent des assauts avec ce couteau Kama oustachi.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. C'est "couteau" ou "poignard" oustachi ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai jamais vu de Kama, je ne sais pas ce

  2   qu'il avait à l'esprit. Mais c'est comme ça qu'il s'est exprimé.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

  4   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais apporter

  5   une petite correction. Nous avons le discours publié par M. Seselj dans son

  6   livre. Je voulais juste que vous -- m'assurer de cela.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  8   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Procureur, vous parlez de

  9   la version du discours que nous avons vu, celle qui figure dans le livre de

 10   M. Seselj, savez-vous s'il existerait un enregistrement audio de ce

 11   discours qui aurait été ensuite

 12   transcrit ?

 13   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Tout ce que je peux vous dire, c'est

 14   que pendant deux ans on a essayé d'obtenir l'enregistrement audio de ce

 15   discours, il existe normalement. Mais on n'a jamais réussi à le trouver.

 16   Lorsque M. Seselj témoignait dans l'affaire Milosevic, il a dit à trois

 17   reprises qu'il avait même la vidéo de ce discours, mais qu'il l'emploierait

 18   pour sa propre affaire. Donc on a un petit peu abandonné. On n'arrive pas à

 19   trouver ce discours. Quand on a essayé d'obtenir ce discours, il s'est

 20   passé des choses très étranges. Des archives ont brûlé, donc on a tout

 21   simplement abandonné -- on n'a pas le discours. Nous n'avons que ce qui a

 22   été publié par M. Seselj. On nous a dit que ça a été publié dans un de ses

 23   livres dont je ne me souviens pas du titre et qui a été publié alors qu'il

 24   était déjà en prison. Nous n'avons pas d'autre version.

 25   Donc on a regardé dans tous les livres. On ne l'a pas trouvé, de toute

 26   façon. Je serais très reconnaissant à M. Seselj s'il pouvait nous dire

 27   exactement où se trouve ce discours dans l'un de ses 80 livres.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, vous nous avez dit la dernière fois

  2   que vous aviez cette vidéo. Et, bien entendu, quand vous nous avez dit que

  3   vous n'avez pas collaboré avec le Procureur et que vous n'avez pas

  4   l'intention de le donner. Mais c'est important, alors la Chambre se

  5   retourne vers vous. Si vous avez cette vidéo et la bande audio, autant la

  6   donner. Ça peut être utile pour vous.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai cet enregistrement vidéo, j'avais

  8   l'intention de m'en servir pendant le contre-interrogatoire d'Aleksa Ejic.

  9   Mais comme vous le savez bien, tous contacts avec mes collaborateurs m'ont

 10   été interrompus, avec mes conseillers juridiques, et je ne suis pas en

 11   mesure de me servir de cet enregistrement. Mais M. Mussemeyer devrait vous

 12   dire deux choses; quelles sont ces archives qui ont brûlé, qui

 13   appartenaient à qui, où est-ce que cela a eu lieu; et aussi, M. Mussemeyer

 14   devrait reprendre ces 80 livres que j'ai remis ici aux représentants de

 15   l'Accusation, ici dans le prétoire. C'est dans ces livres qu'on trouve

 16   l'intégralité de la transcription du rassemblement de Hrtkovci. Ce ne sont

 17   pas des reliures cartonnées, mais souples. Vous avez les autres également,

 18   mais toutes ces reliures souples ce sont des publications qui datent

 19   d'avant mon arrivée à La Haye.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, les archives qui ont brûlé ou

 21   je ne sais quoi -- vous faites référence à quoi au

 22   juste ?

 23   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je dis que lorsque nous avons essayé

 24   d'obtenir la vidéo et le discours, on n'y est pas arrivés. On a essayé de

 25   faire tout ce qu'on pouvait, on cherchait en Allemagne, en Autriche, en

 26   France. On recherchait aussi en Serbie, on n'a jamais réussi à mettre la

 27   main sur cette vidéo. On a contacté une station de télévision. A un moment,

 28   on nous a dit non, les archives ont brûlé, il n'y a plus rien. A d'autres

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  1   reprises, on nous a dit que les bandes audio avaient été réutilisées, parce

  2   qu'on manquait de bandes et donc on avait réenregistré des choses dessus.

  3   Donc on n'a jamais réussi à mettre la main sur cette bande vidéo.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : -- et peut-être que prochainement les collaborateurs

  5   de M. Seselj lui enverront cela, on aura peut-être l'occasion de revoir

  6   cette bande. Il ne faut jamais désespérer.

  7   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Oui, un petit commentaire au passage. Nous

  8   avons quand même recherché dans les 80 livres. Je ne l'ai pas fait

  9   personnellement, certes, puisque je ne parle malheureusement pas le B/C/S,

 10   mais nous avons des analystes qui ont lu tous les livres à la recherche de

 11   ce passage sur Hrtkovci et ils ne l'ont pas trouvé. Peut-être qu'ils ne

 12   l'ont pas vu, mais ce serait vraiment très utile si M. Seselj pouvait nous

 13   dire dans lequel de ses 80 livres est publié ce discours.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, dans quel livre exactement ? Oui,

 15   dans quel livre exactement est publié votre discours ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne peux pas me rappeler exactement sur les

 17   80 titres dans lequel d'entre eux. Mais le titre n'est pas "Les discours

 18   prononcés à Hrtkovci," mais "La grande importance des élections du mois de

 19   mai," c'est sous ce titre-là qu'ils doivent le rechercher.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Il faut rechercher dans "La grande importance des

 21   discours du mois de mai."

 22   Bien. Continuez.

 23   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 24   Q.  Revenons-en au discours de Milan Zilic. Vous nous avez dit qu'il a

 25   mentionné des noms de famille de résidants de Hrtkovci. Est-ce qu'il a

 26   parlé de vous ?

 27   R.  Non. Mon nom n'a pas été cité pendant ce discours, le discours de Milan

 28   Zilic.

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  1   Q.  Qui a pris la parole après M. Zilic ?

  2   R.  C'était une femme que je ne connais pas. Je ne sais pas comment elle

  3   s'appelle, mais elle a parlé très brièvement. Elle n'avait pas de discours

  4   long. C'était très court.

  5   Q.  Ensuite, qui a pris la parole ?

  6   R.  Après elle, c'est Seselj, Vojislav Seselj, qui a pris la parole.

  7   Q.  Est-ce que vous l'avez entendu et vu clairement ?

  8   R.  Comme je l'ai déjà dit, j'étais à 30 ou 40 mètres de ce podium, et on

  9   entendait bien clairement.

 10   Q.  Vous souvenez-vous des sujets principaux abordés dans ce discours par

 11   M. Seselj ?

 12   R.  Je me souviens. Pour l'essentiel, au début, il a dit - parce qu'il y

 13   avait des problèmes avec les haut-parleurs - il a dit qu'il fallait

 14   débrancher cela, la sono, et qu'il fallait enlever les espèces de rubans

 15   qu'ils avaient installés. Ensuite, le discours a commencé avec le sujet

 16   connu des frontières Virovitica, Karlobag, enfin que sais-je, comme il

 17   avait l'habitude de le dire, c'est ces frontière de la Grande-Serbie de

 18   l'avenir.

 19   Q.  A-t-il aussi prononcé des noms propres, noms de famille lors de son

 20   discours ?

 21   R.  Comme j'ai déjà dit, il a pris la parole. Il a fait ce discours bref,

 22   ensuite pour ce qui est des noms des personnes en vue du village, il les a

 23   cités, le directeur de la scierie, Samov Mato [phon], Franjo, le Dr

 24   Vuksanic Branko, Barisic Zdenko, qui était chef du bureau municipal. Et moi

 25   aussi j'ai été cité parmi ces gens-là, et d'autres.

 26   Q.  Est-ce que vous vous souvenez quand --

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Attendez. Monsieur, le discours, vous l'avez bien

 28   écouté. Parce que vous avez dit que vous étiez venu par curiosité, vous

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  1   étiez à 30 mètres de M. Seselj, et vous l'avez bien écouté. Vous vous en

  2   rappelez très bien de ce discours ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je vais vous lire un petit bout de phrase

  5   qu'il a dite, et j'aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez. Voilà

  6   ce qu'il dit :

  7   "Nous devons maintenir l'existence de la Yougoslavie, parce qu'il sera

  8   alors bien plus facile pour les Serbes de la Krajina et de la Bosnie-

  9   Herzégovine serbe d'intégrer la Yougoslavie en tant qu'entité fédérale,

 10   bien plus que si nous avions proclamé l'Etat de Serbie et s'ils avaient dû

 11   l'intégrer par la suite. De cette manière, pour intégrer la Yougoslavie,

 12   ils n'auront qu'à dire qu'ils ne l'ont jamais quittée, ce qui les placera

 13   en bien meilleure posture sur la scène internationale."

 14   Dans ce discours, il a parlé de la Yougoslavie, et il semble avoir dit à

 15   tous ceux qui l'écoutaient qu'il était pour le maintien de l'existence de

 16   la Yougoslavie. Est-ce que vous vous souvenez de cela; et si vous vous en

 17   souvenez, qu'est-ce que vous en avez pensé ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas de cela. Je me souviens

 19   qu'il a dit : "La Dubrovnik serbe, le Karlovac serbe, la Virovitica serbe."

 20   Attendez. Et c'est ainsi qu'il a énuméré.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc, vous vous souvenez de l'autre partie. Très

 22   bien.

 23   Monsieur le Procureur, continuez.

 24   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 25   Q.  Vous avez dit que vous avez entendu votre nom prononcé par M. Seselj;

 26   c'est bien vrai, n'est-ce pas, je ne me suis pas trompé ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  A-t-il dit ce qui allait arriver aux gens dont il prononçait le nom ?

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  1   R.  Il a dit pour ce qui est des réfugiés serbes que ce sont des sans-abri

  2   et que les Croates devaient quitter le village en trois jours, qu'ils

  3   allaient recevoir des clés et des adresses, et il fallait qu'ils quittent

  4   le village, sinon ils allaient être mis à bord des autocars et envoyés à la

  5   frontière. "Qu'ils s'en aillent dans leur jolie patrie."

  6   Q.  Avons-nous la moindre idée de l'endroit où M. Seselj a réussi à obtenir

  7   ces noms puisqu'il n'est pas de Hrtkovci au départ ?

  8   R.  Bien sûr que non. Cette liste lui a été donnée par Sibincic Ostoja, la

  9   direction et par les membres de ce parti.

 10   Q.  C'est une conjecture que vous faites, ou est-ce que vous en êtes sûr ?

 11   R.  J'en suis certain. Je le sais pour sûr, parce que Seselj ne savait pas

 12   qui travaillait où, quelles étaient les fonctions des uns et des autres, et

 13   il a tout lu exactement.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, là aussi, un point capital que

 15   vous abordez.

 16   Dans le discours que nous avons mais qui est tiré du livre de M. Seselj,

 17   ceci n'apparaît pas. Il y a deux raisons possibles : ou dans l'extrait

 18   qu'il donne dans son livre, il a manipulé son discours en enlevant le

 19   passage que vous indiquez, ou bien c'est vous qui rajoutez des propos qu'il

 20   n'aurait pas tenus ?

 21   D'où ma question, à nouveau très importante, êtes-vous sûr que M. Seselj

 22   lors de ce discours a lu une liste de noms de gens de votre village qui

 23   étaient des Croates et qui devaient partir ? Est-ce qu'il l'a lue, vous en

 24   êtes affirmatif ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait certain.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous en êtes certain. Donc quand il publie son

 27   livre, il falsifie la vérité ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour l'essentiel, je peux vous dire qu'il a lu

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  1   les noms de ces personnes, et ces gens ont déménagé, ils ont quitté le

  2   village.

  3   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez nous

  4   préciser la différence entre la liste lue par Zilic et la liste de M.

  5   Seselj ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Volontiers. M. Zilic a lu des noms de

  7   personnes qui étaient déjà absentes. Ils étaient déjà en Autriche, en

  8   Allemagne et en Croatie, ces gens-là, et ça faisait des années qu'ils y

  9   travaillaient. Or maintenant, ces noms lus par Seselj, ces gens

 10   travaillaient à Hrtkovci, ils vivaient à Hrtkovci à ce moment-là, quand il

 11   est venu pour ce rassemblement.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Imaginons que ce que vous dites c'est la vérité. M.

 13   Seselj fait un discours et il va donner des noms. A ce moment-là, dans

 14   votre souvenir, il sort un papier de sa poche pour lire ou il donne des

 15   noms dans la continuité de son discours ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas vu qu'il ait sorti quelque chose

 17   de sa poche, qu'il ait sorti la liste de sa poche. Mais je sais que ces

 18   gens, on a cité leurs noms et il ne pouvait pas connaître ces noms, les

 19   noms des personnes qui vivaient là-bas. Mais ce sont les dirigeants qui lui

 20   ont donné cette liste pour qu'il la lise.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors ça veut dire, si vous dites la vérité, ça veut

 22   dire que M. Seselj avant de faire son discours s'entretient avec les

 23   dirigeants, qui lui donnent la liste. Et lui, qui ne connaît personne du

 24   village - parce que c'est la première fois qu'il vient dans ce village - de

 25   mémoire, il va être capable de restituer entre cinq et dix noms de

 26   villageois, ce qui voudrait dire qu'il apprend par cœur les dix noms pour

 27   les sortir dans le fil du discours, parce que dans le discours que j'ai

 28   sous les yeux, il a cité beaucoup de noms, mais des gens qui n'avaient rien

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  1   à voir avec le village. Il a cité, par exemple, des membres de la Ligue

  2   communiste, Vuk Draskovic, Milan Komenic, Dragoljub Misilevic [phon], Zoran

  3   Djindjic, Kosta Kovarski [phon], Nikola Milosevic. Il a cité des tas de

  4   gens. Donc il a une capacité intellectuelle à citer des noms de gens mais

  5   qu'il connaît pour des raisons politiques, mais les villageois, il ne les

  6   connaissait pas, lui. Donc ça voudrait dire, si vous dites bien la vérité,

  7   qu'il a appris par cœur cinq à dix noms qu'il a livrés, comme cela, à tout

  8   le monde.

  9   C'est ça l'explication ou pas ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je souhaite vous dire quelque chose.

 11   Ostoja Sibincic c'était le bras droit de Seselj. Et la chose la plus

 12   probable, c'est qu'il était en contact tous les jours avec lui pour lui

 13   parler de la situation dans le village.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Donc vous pensez qu'Ostoja Sibincic était en

 15   contact permanent avec M. Seselj, et que c'est comme ça qu'il a appris les

 16   noms. Bon. C'est peut-être possible. Mais en tant que Juge, je suis obligé

 17   d'envisager toutes les possibilités.

 18   Bien. Monsieur le Procureur, il nous reste encore sept à huit minutes avant

 19   de la pause.

 20   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 21   Q.  Monsieur Baricevic, M. Seselj a-t-il aussi parlé des mariages mixtes

 22   dans son discours ?

 23   R.  Oui. Voici ce qu'il a dit : les mariages mixtes, il faut qu'ils soient

 24   annulés et qu'il y ait des divorces, et les enfants issus de mariages

 25   mixtes vont être tués.

 26   Q.  En êtes-vous absolument sûr ?

 27   R.  A 100 %.

 28   Q.  Bien. Nous allons maintenant passer à la période qui a suivi le

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  1   discours.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, je reviens là-dessus parce

  3   que là aussi c'est très important ceci.

  4   Vous entendez dans vos oreilles que M. Seselj dit : il faut que les enfants

  5   nés de mariages mixtes soient tués ? C'est une phrase énorme, énorme, qui

  6   est dit devant --

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est un crime.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : -- devant 2 000 personnes, enfin, vous, vous dites

  9   "2000" et il y a un autre témoin qui nous disait 700. Mais bon.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Deux mille, oui.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Et il aurait dit ça. Bon. Dans le discours,

 12   dans le livre, ça n'y est pas, je vous l'indique tout de suite. Donc vous

 13   êtes sûr de ça ? Mais --

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Certain.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Petite question : y avait-il des journalistes quand

 16   il était là ? Y avait-il des journalistes ? Est-ce que le lendemain du

 17   discours dans les journaux il y a eu des extraits du discours de M. Seselj

 18   ? Ou la radio en a-t-elle parlé en disant que M. Seselj est venu à Hrtkovci

 19   pour faire un discours ? Est-ce qu'il y a eu des articles ou des reportages

 20   effectués sur ce

 21   discours ? Parce qu'un homme politique qui, en 1992, le 6 mai 1992, dit :

 22   "Il faut tuer les enfants nés de mariages mixtes," ça fait la une de toute

 23   la presse mondiale. Alors ma question : y avait-il des journalistes ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas vu de journalistes, mais j'ai vu

 25   par la suite qu'il y a eu des articles sur ce rassemblement. Le journal

 26   "Borba" a écrit là-dessus.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Le journal "Borba" ? Bon.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc le journaliste était là, peut-être.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est après que j'ai lu qu'on a écrit sur ce

  3   rassemblement.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien.

  5   Mme LE JUGE LATTANZI : Excusez-moi. La police locale qui contrôlait la

  6   circulation pouvait entendre parler aux haut-parleurs le discours de M.

  7   Seselj ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que Seselj a demandé que l'on

  9   débranche les haut-parleurs, la sono et qu'on enlève les cordes ou les

 10   rubans. Donc je ne pense pas qu'il y ait --

 11   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Monsieur le Procureur.

 13   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Combien de temps ai-je encore jusqu'à la

 14   pause ? Cinq minutes --

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Trois minutes.

 16   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Merci.

 17   Q.  J'aimerais maintenant demander au témoin si l'ambiance a changé après

 18   le départ de M. Seselj, après qu'il ait fait le

 19   discours ?

 20   R.  Après ce discours, dans le village il y a eu une escalade. C'est par la

 21   force qu'un groupe de personnes pénétraient dans les maisons. Ils

 22   chassaient les gens de leurs foyers.

 23   Q.  Est-ce que vous ou d'autres habitants de Hrtkovci ont essayé de se

 24   faire protéger par la police ou par les autorités ?

 25   R.  Il faut savoir que j'étais de la commune locale et le président de

 26   l'assemblée de la commune locale était Dobrosav Markovic, alors ensemble

 27   nous sommes partis pour Ruma au service de la Sûreté d'Etat. Nous sommes

 28   allés voir Slavko Kulundzic, qui était responsable de ce secteur, nous

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  1   voulions qu'il trouve une solution pour le village parce que c'était le

  2   chaos. Nous sommes allés le voir et nous avons demandé qu'il nous aide. Et

  3   lui, voici ce qu'il nous a dit, je reprends ses mots, il a dit : "Ceux qui

  4   doivent partir, qu'ils partent." Donc nous n'avons reçu aucune protection.

  5   Et pour ce qui est de la police locale, quand les gens demandaient de

  6   l'aide, ce n'était pas refusé. On disait : "Oui, oui, d'accord," mais tout

  7   simplement on passait sous silence. On ne réagissait pas. On n'intervenait

  8   pas. On confirmait qu'on a entendu l'autre, mais c'était tout.

  9   Q.  Savez-vous quel était le but de ce harcèlement auquel ont procédé les

 10   réfugiés, le harcèlement des Croates de Hrtkovci ?

 11   R.  L'objectif, c'était le nettoyage ethnique, de chasser les Croates en

 12   Croatie et que les Serbes s'installent à Hrtkovci.

 13   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Maintenant je pense qu'il serait opportun

 14   de faire la pause.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est le bon moment.

 16   Nous allons faire une pause de 20 minutes. Nous nous retrouverons

 17   dans 20 minutes. 

 18   --- L'audience est suspendue à 15 heures 45.

 19   --- L'audience est reprise à 16 heures 14.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est reprise. Monsieur le Procureur,

 21   vous avez la parole.

 22   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Avant de commencer, Madame, Messieurs les

 23   Juges, avant de revenir pour l'interrogatoire principal, nous avons regardé

 24   pendant la pause l'ouvrage évoqué par M. Seselj dans lequel son discours a

 25   été publié, "L'importance capitale des élections du mois de mai." Nous

 26   avons trouvé un livre intitulé "L'importance capitale des élections du mois

 27   de mai." Je souhaite savoir de la bouche de l'accusé, de savoir si c'est à

 28   cet ouvrage-là auquel il faisait référence.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ce n'est pas le titre du livre, mais le titre

  2   de l'article contenu dans le livre. C'est "L'importance vitale des

  3   élections de mai." C'est le titre d'une section du livre. Montrez-moi le

  4   livre, et je vais tout vous dire. Je suppose que vous l'avez sur vous, le

  5   livre.

  6   M. MUSSEMEYER : [interprétation] La prochaine fois, je ne l'ai pas ici.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- la prochaine fois, le livre, comme ça, vous lui

  8   montrerai et il vous dira si c'est dans le livre.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite simplement

 10   vous dire la chose suivante : dès 2003, j'avais recueilli de Belgrade

 11   l'ensemble de mes œuvres en reliure souple, et la nouvelle édition en

 12   reliure cartonnée a commencé à être publiée après mon arrivée à La Haye.

 13   Pour le moment, j'ai seulement cette reliure ferme, et tout ce que j'avais

 14   en reliure souple, je l'ai rendu à l'Accusation dès 2003.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, c'est ce que M. Seselj nous avait dit il y

 16   longtemps. C'est que quand il est arrivé, il vous a donné -- enfin, il a

 17   donné à l'Accusation - pas à vous, mais à l'Accusation - tous les livres

 18   qui étaient en reliure souple. Alors a priori, ce livre vous devez l'avoir

 19   en reliure souple, et dans le livre il y a un chapitre "L'importance vitale

 20   des élections du mois de mai."

 21   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Ce que je peux confirmer c'est que nous

 22   disposons de ces ouvrages, parce que j'étais présent dans le prétoire

 23   lorsqu'il en a parlé. Je crois que c'était peut-être le 23 octobre 2003, si

 24   je me souviens bien. Mais nous allons le vérifier, et nous avons lu ces

 25   ouvrages, analysé beaucoup de documents, et nous allons, dans un avenir

 26   proche, tenter de verser au dossier une partie par le biais d'une requête

 27   et par le biais d'échange d'éléments de preuve de façon indirecte, nous

 28   allons tenter de verser au dossier une partie de ces ouvrages.

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  1   Je souhaite revenir à l'interrogatoire principal, Monsieur Baricevic.

  2   Monsieur le Greffier, à l'écran, numéro 65 ter 1497. C'est un article

  3   extrait de la presse Vreme où on parle de "menaces, de pillages,

  4   d'expulsions de Hrtkovci contre la population non-serbe." Je demande au

  5   témoin de lire le premier paragraphe. Ceci est daté du 13 juillet.

  6   R.  Excusez-moi, je ne vois pas. C'est trop petit pour moi.

  7   Q.  Juillet 1993, la première colonne.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, la première question est

  9   de savoir quel est le lien entre le témoin et ceci, car d'après la

 10   déclaration du témoin, il est parti le 15 mai environ de Hrtkovci, et cet

 11   article a été publié en juillet 1992. Donc le témoin ne peut pas faire de

 12   commentaires là-dessus. Je suis sûr qu'il ne l'a même pas vu au moment des

 13   faits, et il s'agit ici des événements qui ont eu lieu après son départ.

 14   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je pense que nous pouvons -- 

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, très bien.

 16   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je crois que nous pouvons prendre une

 17   décision lorsque le témoin l'aura lu parce que cet article évoque les

 18   événements qu'il a vécus à l'époque et dont il a été le témoin à l'époque.

 19   Donc je souhaite que le témoin lise le paragraphe qui commence par : "La

 20   procédure qui consiste à chasser." Est-ce qu'il peut le lire ? Pas si nous

 21   avons un problème d'ordre technique.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer. Il est dit :

 23   "La procédure d'éviction. Nedeljka, Jelica et Radmila sont des

 24   Serbes, femmes serbes, mariées aux Croates ou Hongrois. Lors des appels

 25   téléphoniques -- "

 26   Je ne saurais pas -- est-ce que quelqu'un d'autre ? Je n'arrive pas à lire.

 27   C'est trop petit pour moi. Je ne vois pas.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Greffier, est-ce que vous pouvez

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  1   agrandir la page de gauche ? Non ?

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai une objection supplémentaire.

  3   Si l'on insiste pour que le témoin lise cela, c'est une autre forme de

  4   suggestion, d'action directrice vis-à-vis du témoin. S'il doit lire un

  5   article d'un journal antiSerbe et dire s'il est d'accord ou pas avec le

  6   texte alors que l'article ne date pas de la période que le témoin a passée

  7   là-bas.

  8   Le témoin doit parler de ses expériences et des événements qu'il a vécus.

  9   Il n'est pas un expert pour faire des commentaires. D'ailleurs, l'article

 10   ne porte pas sur lui pour qu'il puisse dire, "Oui, effectivement," c'est ce

 11   qu'il lui est arrivé.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, on vous a donné l'article. Sur

 13   l'objection, la Chambre peut dire ceci : c'est que ce journal apparemment

 14   antiSerbe - dixit M. Seselj - relate ce qui a pu se passer avec des

 15   personnes présentes à ce moment-là, et notamment des femmes serbes mariées

 16   à des Croates ou à des Hongrois qui faisaient l'objet d'appels

 17   téléphoniques ou de propos divers. Alors il est peut-être intéressant de

 18   savoir si ce qui est relaté dans cet article vous en avez eu connaissance.

 19   Alors vous avez l'article sous les yeux. Est-ce que vous pouvez lire dans

 20   votre langue à partir du journal qu'on vous a donné ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Maintenant, je peux.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Lisez.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] S'il vous plaît, je souhaite juste souligner

 24   un point.

 25   Je ne suis pas parti le 15, mais le 19.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Le 19 mai. Continuez à lire le texte.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] "La procédure d'éviction. Nedeljka, Jelica et

 28   Radmila sont des femmes serbes mariées aux Croates ou Hongrois. Lors des

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  1   appels téléphoniques ou dans la rue, on les appelle putes oustachi ou

  2   serbes nulles et bien d'autres choses. Elles ne sont pas les seules avec

  3   lesquelles nous avons parlé, et tout le monde dit pratiquement la même

  4   chose.

  5   "La promotion du Parti radical serbe a eu lieu le 6 mai. Seselj y était lui

  6   aussi. Une liste contenant 17 noms de personnes non souhaitables dans le

  7   village a été lue. A partir de ce moment, l'on commence à les faire partir,

  8   que ce soit de leur propre gré ou par la force. Dans le deuxième cas, voici

  9   comment ça se passe : ils viennent dans un groupe. L'un deux tenait un

 10   papier sous la main pour que tu signes, que tu échanges ta maison natale

 11   contre une maison quelque part en Croatie. Tu ne sais même pas si elle

 12   existe. Tu n'as pas le droit d'emporter ton poste de télévision, ton

 13   tracteur, rien de valeur et surtout pas l'argent. Une quarantaine de

 14   maisons ont ainsi été vidées. Les autres sont partis tout seuls, pour la

 15   plupart, lorsqu'un dossier leur est constitué indiquant qu'ils auraient

 16   aidé la Croatie de façon financière ou en envoyant les armes ou en

 17   indiquant que leurs fils font partie de la ZNG. Jusqu'à ce que notre tour

 18   arrive, nous leur faisions presque confiance. Maintenant qu'ils parlent de

 19   nous en mêmes termes, nous savons que ceci n'est pas la vérité. Nous

 20   comprenons que ce n'était pas la vérité non plus s'agissant de ceux qui

 21   sont partis avant nous. Dit une femme --"

 22   Q.  Merci, Monsieur le Témoin. Je pense que ceci suffit au sujet de cet

 23   article, ce que je souhaite savoir c'est si vous avez vécu de tels

 24   événements et si vous pouvez confirmer ce qui est écrit dans ce journal.

 25   R.  En réalité, je pourrais confirmer ce qui est relaté dans la presse ici,

 26   et je vais vous dire ce qui m'est arrivé à moi.

 27   Ma fille rentrait de l'école, et elle a été arrêtée dans la rue par

 28   certaines personnes qui lui ont demandé : "Est-ce que ton père te préfère

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  1   toi ou ton frère ? Il peut amener l'un de vous en Croatie, et quant à

  2   l'autre on sait ce qui lui arrivera." Puis ils m'ont menacé par téléphone

  3   aussi en me disant qu'est-ce que j'attends ? Pourquoi est-ce que je ne pars

  4   pas ? Ça s'est passé plusieurs fois jusqu'au moment où j'ai échangé ma

  5   maison.

  6   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Avant d'évoquer la pièce suivante, je

  7   demande le versement au dossier de cette pièce, s'il vous plaît, le numéro

  8   65 ter c'est le 4967 [comme interprété].

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : -- j'ai regardé l'article, et je vais tout à la fin

 10   de l'article où le journaliste dit qu'il a rencontré le secrétaire du Parti

 11   radical serbe local, Milan Zilic. Voilà ce que dit le journaliste.

 12   Alors à votre connaissance, Monsieur, Milan Zilic c'était le secrétaire du

 13   Parti radical serbe ? C'est ce que dit le journaliste.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne saurais vous le dire.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur le Greffier, un numéro pour ce

 16   document.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, ce sera la

 18   pièce P561.

 19   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Monsieur le Greffier, puis-je avoir à

 20   l'écran, s'il vous plaît, le numéro 65 ter 1309. C'est une pièce qui a déjà

 21   un numéro et une cote qui est le numéro 555 [comme interprété], il s'agit

 22   d'un article de presse de "Borba" du 14 mai 1992. Le titre est "La moitié

 23   du village est en train de faire ces villages [comme interprété] après des

 24   menaces contre la population non-serbe de Hrtkovci." C'est encore une fois

 25   au moment où le témoin était dans ce village, le 14 mai 1992.

 26   Q.  Pourriez-vous lire le premier paragraphe de la première colonne, s'il

 27   vous plaît, qui commence par : "Les voyages d'un village multiethnique ont

 28   commencé…"

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  1   R.  Est-ce qu'on peut agrandir ? C'est l'article en question ?

  2   Q.  Je ne vois pas le début, le titre. Je ne peux pas vous le dire. Non, je

  3   crois qu'il ne s'agit pas de l'article en question. Ceci est intitulé, "La

  4   moitié du village fait ses valises." Ça y est, et voici le deuxième

  5   paragraphe. Je le vois maintenant. Veuillez le lire depuis le début du

  6   deuxième paragraphe.

  7   R.  "Tous les troubles de ce village multinational ont commencé le jour de

  8   la Saint-George lorsque Vojislav Seselj a tenu un discours dans le centre

  9   du village en disant clairement qu'il n'y avait plus de place là pour tous

 10   ceux qui n'étaient pas des Serbes. A partir de ce moment-là, tous les

 11   jours, des groupes de personnes inconnues déambulent dans le village,

 12   malmènent les propriétaires de maisons, font irruption dans leurs maisons

 13   et pillent. Les réfugiés de la Croatie et de la Bosnie s'installent de

 14   force dans…"

 15   Attendez :

 16   "…dans les maisons des Croates ou des Serbes qui les soutiennent. En même

 17   temps, alors que la peur règne dans le village, les gens qui -- doivent,

 18   doivent. Les gens qui font leurs valises --"

 19   Oui, c'est bien, là :

 20   "En même temps, alors que la peur règne dans le village, les gens qui font

 21   leurs valises soulignent qu'ils n'ont pas d'autres choix. La plupart

 22   d'entre eux, en tant que réservistes de la JNA, avaient passé l'année

 23   dernière sur le front, surtout à Vukovar. C'est pourquoi ils soulignent que

 24   la Croatie et les autorités là-bas ne les intéressent pas. Les gens se sont

 25   retirés dans les maisons lorsque la nuit tombe --"

 26   Q.  Monsieur Baricevic, je vous remercie beaucoup. Je crois que ceci me

 27   suffit. C'est ce que je voulais savoir de vous, est-ce que cette

 28   description correspond à ce que vous avez vécu ou ce dont vous avez été le

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  1   témoin.

  2   R.  Tout à fait, je suis tout à fait d'accord avec ce texte.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

  4   Juges, je pense qu'il serait au moins poli de la part de l'Accusation qu'il

  5   demande au témoin s'il est d'accord avec le contenu de l'acte d'accusation;

  6   et s'il le confirme, il ne sera pas nécessaire de perdre du temps

  7   supplémentaire. Ceci est vraiment absurde, ça n'a aucun sens.

  8   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je demande à ce que le témoin lise le

  9   deuxième paragraphe de cette coupure de presse --

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : Une question préalable, Monsieur le Témoin.

 11   Ce journal, "Borba," que je ne connais pas, c'est un journal qui est publié

 12   en Croatie, je suppose.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. C'était un journal qui était publié à

 14   Belgrade, un journal qui était publié tous les jours, quotidien.

 15   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je demande à ce que le témoin lise le

 16   deuxième paragraphe après la phrase : "L'enfant que vous aimez le plus."

 17   Q.  Est-ce que vous voyez cette phrase-là, Monsieur Baricevic ?

 18   R.  Non.

 19   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Mme l'Huissier, il y a un en- tête de

 20   chapitre qui se lit comme suit : "Quel est l'enfant que vous aimez le

 21   plus," et --

 22   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 23   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je souhaite passer à la deuxième page --

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] "Quel enfant tu aimes plus ?"

 25   "'Je suis une Macédonienne mariée à un Croate, et je vis ici depuis plus de

 26   deux décennies,' raconte Marija Los [phon]. 'Mon mari a passé trois mois et

 27   demi sur le front de Vukovar, et nous n'avons nulle part où aller, et nous

 28   ne souhaitons partir.' Seulement au cours des deux, trois derniers jours,

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  1   six maisons ont été cambriolées dans le village alors que des personnes

  2   inconnues se sont installées de force dans trois maisons. Le meilleur

  3   exemple est celui d'Andrija Cergi. La vieille maison dans laquelle jadis sa

  4   mère vivait, il l'a donnée aux réfugiés, maintenant des personnes inconnues

  5   lui ont ôté la nouvelle aussi. Ces derniers jours, la maison de Vlado Bakic

  6   elle aussi a été cambriolée, et des personnes inconnues ont fait irruption

  7   dans la maison de la vieille Rozalija Sakic et l'ont harcelée. Sur la liste

  8   des personnes non souhaitables se trouve aussi Franja Samu, directeur de la

  9   scierie. Il a immédiatement présenté sa démission, que les employés n'ont

 10   pourtant pas acceptée, employés qui demandent qu'il continue à rester à la

 11   tête de l'entreprise qu'il dirige bien. Franja Baricevic fait ses valises

 12   lui aussi. Il travaille dans le bureau de la commune locale. Pendant la

 13   nuit, lorsqu'on lui donne l'ordre de partir par téléphone, on lui demande

 14   même quel est l'enfant qu'il aime le plus. Au début de la guerre" --

 15   Q.  Monsieur Baricevic, merci beaucoup. C'est tout ce que je souhaitais que

 16   vous lisiez.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Procureur, c'est une

 18   question qui a trait à la traduction, je pense qu'il serait utile de

 19   préciser avant de poursuivre.

 20   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Oui, je m'en suis rendu compte.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] En fait, est-ce qu'il s'agit de trois

 22   jours ou de trois mois, car au vu des dates de l'article, il semblerait que

 23   ce soit le 14 mai 1992, bien évidemment, il est important de savoir si les

 24   maisons ont été investies au cours des "trois derniers mois," comme ceci

 25   est dit dans la traduction, ou si ceci s'est passé au cours des "trois

 26   derniers jours", comme le témoin vient de le dire lorsqu'il a lu l'article

 27   en question. Est-ce qu'il s'agit de mois ou de jours ?

 28   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je ne lis pas le B/C/S, je crois qu'il

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  1   s'agit de jours, mais on va demander au témoin de confirmer ceci.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Trois jours, "au cours des trois derniers

  3   jours."

  4   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Une autre question, je crois qu'il manque

  5   une phrase, je viens de m'en rendre compte --

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  7   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je me rends compte qu'il manque une phrase

  8   dans la traduction anglaise qui évoque le directeur de la scierie, et je ne

  9   le trouve pas dans la version anglaise que j'ai ici et qui fait partie du

 10   classeur utilisé dans le prétoire. Je crois qu'il faudrait vérifier cela ou

 11   le traduire à nouveau. Pour les besoins de la Chambre, il n'est pas utile

 12   de demander le versement au dossier car ce document a déjà été versé.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Une petite question.

 14   Il se trouve que dans l'article, que j'ai lu entièrement, apparaît votre

 15   nom. Vous êtes dans l'article. Vous ne le saviez peut-être pas, vous êtes

 16   dans l'article. Votre nom est cité comme quoi vous travailliez pour les

 17   autorités locales. Et durant la nuit, vous auriez eu des appels

 18   téléphoniques où des personnes apparemment inconnues vous auraient dit

 19   lequel de vos enfants vous aimez le plus. Alors, dans votre souvenir, vous

 20   avez rencontré le journaliste de "Borba" qui s'appelle Branislav Gulan ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors comment pouvait-il savoir que vous aviez des

 23   appels téléphoniques chez vous la nuit ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Ça s'est passé avant, les gens se plaignaient

 25   les uns auprès des autres. Et lorsqu'ils ont rencontré ma fille, les

 26   enfants l'ont vu aussi, les enfants rentraient de la maison, ensuite ils

 27   ont relaté ce qui s'est passé chez eux.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : La conclusion de l'article du journaliste, qui

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  1   semble avoir rencontré beaucoup de monde, parce qu'il cite toute une série

  2   de personnalités du village. Et il dit ceci : "Nous quittons Hrtkovci." Le

  3   village est désert, seules quelques personnes sont dans la rue. Mais il

  4   continue, et il dit à la fin qu'il y a des gens qui vont s'adresser au

  5   président de la république et au premier ministre, parce que de leur point

  6   de vue, dans une république fédérale on ne peut pas forcer les gens à

  7   partir parce qu'ils ne sont pas Serbes. C'est ce que dit le journaliste.

  8   Alors, à votre connaissance, il y a des citoyens qui ont saisi le premier

  9   ministre et le président de la république de la situation qui se déroulait

 10   dans ce village ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous dire, j'ai entendu dire qu'un

 12   groupe de personnes du village était parti pour Belgrade, mais je ne sais

 13   pas de qui il s'agissait. J'en ai simplement entendu parler.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc ils ont été à Belgrade pour --

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce qu'on m'a dit.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous, vous lisiez les journaux à l'époque ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] A vrai dire, je n'avais pas envie de lire la

 18   presse.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous n'aviez pas envie, mais les journaux, ils

 20   arrivaient dans votre village ? Il y avait des journaux qui étaient en

 21   vente ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Les journaux étaient vendus régulièrement,

 23   tous les jours.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur le Procureur.

 25   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Dans l'intervalle, j'ai trouvé, Madame,

 26   Messieurs les Juges, ceci, l'article de presse a été publié dans l'ouvrage

 27   de Seselj intitulé "Le cri des étoiles filantes en 1994 à Belgrade." Ceci

 28   figure sur la liste des pièces et a le numéro 1310. Nous pouvons vérifier

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  1   la traduction. C'était simplement pour vous apporter une précision.

  2   Q.  Monsieur le Témoin, nous avons entendu ce qui s'est passé  --

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : [hors micro]

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que l'Accusation doit vous donner

  6   l'information entière.

  7   Il s'agit effectivement de mon livre, mais c'est moi simplement qui l'ai

  8   arrangé. Il s'agit d'un recueil des pires attaques contre moi, et le titre,

  9   "Le cri des étoiles filantes," je me suis fondé sur un conte très connu de

 10   Dragoslav Mihajlovic, qui est très connu, et qui s'appelle "Le cri d'une

 11   étoile filante," et je l'ai paraphrasé de manière ironique, et l'Accusation

 12   peut vous le confirmer, il s'agit d'un recueil qui remplit le livre entier

 13   -- recueil des articles qui sont les plus véhéments et qui s'opposent à moi

 14   et au Parti radical serbe.

 15   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur --

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour le transcript, la conclusion peut être la

 18   suivante : c'est que cet article, qui est sous la cote P555, a été publié

 19   dans le livre de M. Seselj, livre qui serait un recueil de tous les

 20   articles écrits contre lui ou contre son parti. Voilà, donc cet article est

 21   dans son livre.

 22   Bien.

 23   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Monsieur le Président, c'était le P556 et

 24   non pas le P555.

 25   M. LE JUGE ANTONETTI : Le greffier m'a indiqué que c'était P556. Très bien.

 26   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Baricevic, quelle a été votre réaction après ces événements ?

 28   R.  Quand il y a eu ces menaces, et en particulier quand on a fait cela aux

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  1   enfants, la nuit, j'ai plié bagage et je les envoyés en Croatie en passant

  2   par la Hongrie. Je les ai envoyés à mes beaux-parents, ma femme et mes

  3   enfants.

  4   Q.  Etes-vous resté à Hrtkovci à l'époque ?

  5   R.  Je suis resté encore pendant quelques jours, je suis resté pour

  6   travailler comme d'habitude. Mais trois jours plus tard, un homme est venu

  7   de Jaksic. Il est venu dans la maison d'Ante Grizel à Hrtkovci. Il a pris

  8   cette maison et il m'a donné à moi une adresse, l'adresse de ma future

  9   maison. C'était rue Pavla Radica, numéro 7, à Jaksic.

 10   Q.  Avez-vous vu la maison avant de vous y rendre ? La question n'est pas

 11   très bien posée, je m'en excuse. Avez-vous signé un contrat pour obtenir la

 12   propriété de cette maison ?

 13   R.  J'ai signé un contrat à Pozega, chez l'avocate Mira Primorac, de

 14   Pozega. Que vouliez-vous que je fasse ? Il fallait prendre ce qui

 15   s'offrait. J'ai laissé derrière moi deux maisons, une maison détruite,

 16   incendiée. Il fallait sauver la vie, puis que les enfants soient placés en

 17   sécurité.

 18   Q.  Pourriez-vous nous décrire votre maison de Hrtkovci et nous décrire

 19   aussi la maison dans le village où vous avez dû emménager par la suite ?

 20   R.  J'ai dit la maison de Jaksic, de ce village-là, était incendiée, et à

 21   Hrtkovci j'avais une maison bâtie en 1983 de briques de bonne qualité, 12

 22   mètres sur 11 à peu près, c'était ça les dimensions de la maison. C'était

 23   ma maison, et il y avait une maison familiale dans la même cour. Cette

 24   maison familiale est datée de 1953, et elle était en très bon état. Et j'ai

 25   oublié de dire une chose, ma maison avait un grenier en plus.

 26   Q.  Donc vous avez dû échanger deux maisons contre une seule ?

 27   R.  C'est cela.

 28   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourrions-nous

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  1   avoir, s'il vous plaît, la pièce 65 ter 1976 à l'écran et afficher, s'il

  2   vous plaît, la page 162 de la version en B/C/S.

  3   Q.  Monsieur Baricevic, pourriez-vous ensuite lire les trois premiers

  4   paragraphes qui suivent une très longue question qui se trouve sur cette

  5   même page.

  6   Vous voyez la question, elle est en gras, et ce qui m'intéresse c'est que

  7   vous lisiez les trois paragraphes qui suivent cette question en gras.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur, cet article, il vient d'où,

  9   vous pouvez nous donner des précisions ?

 10   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Désolé de vous avoir donné [comme

 11   interprété] ces informations essentielles. Il s'agit d'un chapitre du livre

 12   d'interviews de M. Seselj, intitulé "Philipics d'un duc chetnik". C'est

 13   l'un des 80 livres qu'il nous a donnés le 29 octobre 2003.

 14   Q.  Monsieur Baricevic, pourriez-vous nous lire les trois premiers

 15   paragraphes qui suivent la question en gras ? C'est la réponse que fait M.

 16   Seselj à une question posée par un journaliste.

 17   R.  "J'affirme catégoriquement, en engageant toute ma responsabilité morale

 18   et matérielle, que les persécutions sur la base d'appartenance nationale, à

 19   savoir ce qu'on a appelé des nettoyages ethniques, sous l'égide ou

 20   organisés par le Parti radical serbe, n'ont jamais eu lieu et n'auront

 21   jamais lieu à l'avenir, jamais et nulle part. Les témoins payés qui ont la

 22   mission de nous accuser ne peuvent pas et ne pourraient pas avoir

 23   d'ailleurs aucune preuve contre nous. Qu'ils citent le nom, le lieu et la

 24   date de l'endroit, de la situation où des radicaux serbes auraient malmené

 25   quelqu'un, ou ils auraient persécuté ou tué quelqu'un pour la seule raison

 26   que cette personne n'était pas de nationalité serbe."

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] "Dans ces fameux…"

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] "Dans ces fameux…"

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le mieux ce serait que j'en donne lecture au

  2   témoin. De toute évidence, il ne sait pas bien lire; puis il tronque, il

  3   écorche mon texte.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez du mal à lire le texte

  5   ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Est-ce qu'on peut agrandir ? Non.

  8   Le Greffier me dit que c'est le maximum. Vous ne pouvez pas lire plus, ce

  9   n'est pas grave.

 10   Monsieur le Procureur, posez-lui une question à partir du texte, et il dira

 11   "oui", "non" ou "je ne sais pas."

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. Puisque le

 13   Procureur a demandé qu'on lise cette partie, j'insiste, il faut qu'on lise

 14   le tout, car si le témoin s'est arrêté juste avant la partie la plus

 15   importante on privera l'audience de la partie essentielle. A savoir il

 16   s'agit de ma déclaration, mon discours, mon texte, ma réponse à une

 17   question d'un journaliste.

 18   M. MUSSEMEYER : [interprétation] J'ai une copie papier peut-être cela

 19   serait plus facile pour le témoin.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que dans ce type de situations, un

 21   employé du Tribunal qui connaît la langue serbe peut donner lecture.

 22   Puisque ce n'est pas un texte du témoin il ne faut pas torturer le témoin à

 23   lire cela s'il n'y arrive pas.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous avez le texte. Vous pouvez

 25   le lire ou pas ? Si vous ne pouvez pas, vous le dites.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas. Non, je ne peux pas lire.

 27   C'est trop petit.

 28   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors je vais demander à mes collègues si M. Seselj

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  1   doit lire le texte.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : La solution serait que, comme il y a le texte sur

  4   l'écran, les interprètes lisent le texte et nous traduisent le texte. Est-

  5   ce que c'est possible ? Non. Bien. Ça dépasse tout le monde alors.

  6   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Nous pourrions peut-être donner une copie

  7   papier aux interprètes, ainsi ils pourraient faire une traduction à vue à

  8   partir de la copie papier.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Madame l'Huissière, allez prendre le texte et

 10   amenez-le à la cabine d'interprète.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère que le texte sera lu en serbe et qu'il

 12   sera interprété dans vos langues, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc il faudrait que l'interprète lise d'abord en

 14   serbe et qu'ensuite les interprètes en anglais et en français traduisent.

 15   J'ai l'impression que c'est impossible.

 16   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Non ? Non, il paraît que c'est impossible.

 18   Bien, Monsieur le Procureur, il fallait y penser avant. Vous auriez dû,

 19   lors du récolement, vérifier l'état de ses lunettes et ne pas être surpris.

 20   On ne peut pas.

 21   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Il pouvait lire, parce que la lumière

 22   était bien meilleure lors de la séance de récolement.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, mais là maintenant, on ne peut pas.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, les interprètes ont

 25   désormais un exemplaire du texte. Si j'en donne lecture, ils peuvent

 26   vérifier si je lis correctement et ils peuvent vous le signaler. Je suppose

 27   qu'avant, vous ne me faisiez pas confiance que j'allais lire correctement,

 28   maintenant vous avez des contrôleurs.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Comme les interprètes ont le texte, alors lisez dans

  2   votre langue le passage, Monsieur Seselj.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je donne lecture après la partie lue par le

  4   témoin, c'est bien ça ?

  5   "Dans ce fameux Hrtkovci tiré en épingles par les médias qui, depuis belle

  6   lurette sont cités en tant que preuves cruciales de nos soi-disant

  7   tortures, il n'y a eu aucun meurtre sur une base nationale. Il y a eu un

  8   meurtre crapuleux. On a tué quelqu'un qui, par un concours de

  9   circonstances, s'est trouvé être Croate, mais les assassins ont été trouvés

 10   et ils répondront de ce crime. Il y a eu, certes, des départs de villages,

 11   mais les Croates le faisaient de leur propre chef. Personne ne les a forcés

 12   à faire cela, et en particulier pas les membres de notre parti. C'est de

 13   leur propre chef, d'après leur choix, qu'ils ont échangé leurs biens et

 14   leurs maisons avec des Serbes de Croatie, et dans ces transactions

 15   organisées par l'Eglise catholique, généralement c'est eux qui s'en

 16   tiraient le mieux. Mais les Hrtkovci --"

 17   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je voulais que le témoin ne lise que le

 18   paragraphe que M. Seselj a terminé il y a quelques phrases, pas le

 19   paragraphe suivant. Enfin s'il veut continuer, ça ne me gêne pas vraiment.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que ces deux phrases qui s'inscrivent

 21   en dernier sont très importantes, mais c'est à vous de décider.

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Lises les deux phrases.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] "Mais Hrtkovci, on s'en sert encore en tant

 24   que," - entre guillemets,"preuve," - "que, sur le territoire de la SR

 25   [phon] Yougoslavie, il y a eu des nettoyages ethniques. Ceux qui contribue

 26   à cela, ce sont de nombreux renégats d'entre nous qui circulent de par le

 27   monde, qui se prostituent politiquement et qui mentent sur instructions de

 28   leurs patrons aisés."

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Merci, Monsieur Seselj, pour cette lecture.

  2   Monsieur le Procureur, alors quelle est la question que vous vouliez poser

  3   au témoin ?

  4   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Baricevic, est-ce que ce qu'a dit M. Seselj est correct, le

  6   fait qu'aucun Croate n'ait dû quitter Hrtkovci suite à des harcèlements,

  7   principalement harcèlements de membres du SRS ?

  8   R.  Absolument, ce n'est pas vrai.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur, comme vous, vous êtes un des témoins qui a

 10   signé l'échange de ces maisons, vous nous avez décrit que vous aviez une

 11   maison qui était en briques, il y en avait une autre qui avait été

 12   construite en 1953, alors c'est très intéressant votre cas personnel

 13   puisque vous avez signé le contrat chez un avocat, Primorac. Comment avez-

 14   vous fait pour aller chez cet avocat ? C'est de vous-même que vous avez été

 15   là-bas, ou c'est quelqu'un qui vous a dit, "Allez voir Primorac" ?

 16   Expliquez-nous ce qui s'est passé.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. C'est en 1983 qu'on a construit

 18   la nouvelle maison, 1983. L'ancienne date de 1953.

 19   Pour ce qui est de cette maison, pour l'adresse qu'on m'a donnée, je me

 20   suis rendu à cette adresse, et --

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : -- adresse, qui vous a donné l'adresse de Primorac,

 22   qui ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit dans la maison d'Ante Grizelj,

 24   Spasojevic de Jaksic est venu. Tout de suite, il a choisi une maison et il

 25   m'a donné l'adresse de Branko Milosavljevic, et c'est avec lui que j'ai

 26   échangé la maison, car c'est ce qui a été dit au rassemblement, que les

 27   Croates allaient recevoir des adresses de Serbes vivant en Croatie. J'ai

 28   reçu une adresse, et je suis parti parce que mes enfants et ma femme, je

Page 10648

  1   venais déjà de les envoyer en Croatie. Donc que voulez-vous que je fasse,

  2   il fallait que je prenne ce qu'on m'offrait.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est un peu confus, ce que vous dites. Il y a un

  4   dénommé Spasojevic qui vient de la maison de Grizelj, étant précisé que

  5   Spasojevic vient de Jaksic ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vous donne l'adresse de la maison de Branko

  8   Milosavljevic avec qui vous allez échanger votre maison; c'est ça ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait, justement, parce qu'ils

 10   étaient voisins. A 150 mètres, c'était les deux maisons.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Mais si vous n'aviez pas voulu, vous auriez pu dire,

 12   "Moi, ça ne m'intéresse pas, je reste là" ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Avec toutes sortes de menaces et on était

 14   malmenés tous les jours. J'avais déjà envoyé des enfants ailleurs pour

 15   protéger leurs vies, mon épouse. Il fallait bien que je choisisse le moins

 16   bien des maux.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous allez aller chez l'avocat, Primorac, pour

 18   signer le contrat. Qui vous donne l'adresse de cet avocat ? Qui vous dit

 19   d'aller voir Primorac ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout d'abord, je me suis adressé au

 21   propriétaire de la maison, Branko Milosavljevic. Nous sommes allés voir

 22   l'avocat.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : D'accord. L'avocat a préparé tous les papiers ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils avaient tout préparé, tous les documents.

 25   J'ai pris ce qu'ils m'ont donné pour vivre en paix.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. La nouvelle maison que vous avez eue, elle

 27   était mieux ou moins bien que ce que vous aviez avant ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, on ne s'est pas bien compris.

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  1   Cette maison, c'était une vieille maison et incendiée.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous avez été perdant. Vous avez laissé une

  3   belle maison pour avoir une vieille maison incendiée. Donc vous avez été

  4   floué ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai perdu une maison qui était toute neuve.

  6   Pour construire une maison, il faut deux générations.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Je comprends mieux la situation. Monsieur le

  8   Procureur.

  9   M. MUSSEMEYER : [interprétation]

 10   Q.  [aucune interprétation]   

 11   R.  D'après ce que j'en sais, l'Eglise catholique n'a nullement pris part à

 12   l'échange des biens. Mais vous aviez des catholiques qui allaient chercher

 13   des certificats, des actes de mariage et de baptême pour prouver en Croatie

 14   qu'ils étaient bien des Croates et catholiques, c'était pour régulariser

 15   leurs papiers, toute la documentation, tout ce qu'il fallait pour l'avenir,

 16   pour les documents à venir.

 17   Q.  Monsieur Baricevic, une dernière question. Au début de votre

 18   déposition, vous nous avez dit qu'environ 75 % des habitants de Hrtkovci

 19   étaient des Croates. Connaissez-vous le pourcentage de Croates habitant

 20   aujourd'hui à Hrtkovci ?

 21   R.  Je ne connais pas le pourcentage, mais je sais que 460 foyers ont

 22   quitté Hrtkovci. Je sais qu'en l'espace d'un mois après le rassemblement,

 23   300 foyers sont partis.

 24   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Baricevic. Je

 25   n'ai plus de questions à vous poser.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Une petite question de suivi suite à la question que

 27   le Procureur vient de vous demander.

 28   Je reviens à l'article de ce journaliste de "Borba," M. Branislav

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  1   Gulan, qui dit dans son article - mais ce n'est pas la peine de le

  2   regarder, faites-moi confiance - que dans ce village, il y avait 20 ethnies

  3   différentes. Donc c'était un village multiethnique, et il va citer des

  4   chiffres très précis. Il dit qu'il y avait 1 079 Croates, 558 Serbes, 516

  5   Hongrois, 452 Yougoslaves, quatre Macédoniens, puis des Slovaques, des

  6   Russes, des Albanais, des Monténégrins et des Rom. Alors quand on regarde

  7   ces chiffres, on s'aperçoit que les Serbes étaient minoritaires, 558

  8   Serbes. Alors peut-être que parmi les Yougoslaves il y avait des Serbes

  9   aussi, donc le chiffre est supérieur, mais les Croates et les Hongrois

 10   étaient majoritaires.

 11   Alors suite à l'échange de tous ces appartements, on doit comprendre

 12   que la majorité des Croates était partie ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart des Croates sont partis de

 14   Hrtkovci.

 15   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors vous, vous avez été victime de cet

 16   échange d'appartement puisque vous avez récupéré une maison qui, d'après

 17   vous, était brûlée et ancienne, alors que pour construire une belle maison

 18   il faut au moins deux générations. Et vous nous avez expliqué que la maison

 19   que vous aviez construite ça avait été dans les années 80. Donc vous aviez

 20   été perdant dans cet échange.

 21   Par la suite, vous avez été indemnisé, ou bien vous avez totalement perdu

 22   ce que vous aviez ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai reçu aucune indemnisation. Seulement,

 24   j'ai réussi, avec deux témoins, avec deux garants, j'ai pu emprunter une

 25   petite somme, un petit crédit, pour couvrir la maison.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. C'est tout.

 27   Donc vous avez été perdant dans cet échange, apparemment.

 28   Oui, Monsieur le Procureur.

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  1   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Oui. Je voudrais que nous versions au

  2   dossier le dernier article du livre de M. Seselj, celui que nous avons lu.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : On va donner un numéro. Monsieur le Greffier.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] S'il vous plaît, il est très important que le

  5   Procureur nous dise l'année de publication et d'édition de ce livre.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. L'article qui paraît dans le livre de M.

  7   Seselj, c'est en quelle année le livre ?

  8   M. MUSSEMEYER : [interprétation] D'après les informations que j'ai, ce

  9   serait 1994, publié à Belgrade.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : 1994, Belgrade. Bien.

 11   Ma collègue a une question.

 12   Mme LE JUGE LATTANZI : Monsieur le Témoin, savez-vous quelque chose du

 13   meurtre de Milan Stefanac, ou cela est arrivé après votre départ ? Qu'en

 14   savez-vous ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai entendu parler de ce meurtre. Mais ça

 16   s'est produit après mon départ. Milan Stefanac a été tué, j'ai entendu dire

 17   qu'il a été retrouvé dans le village voisin. Mais je ne connais pas de

 18   détails là-dessus. J'en sais rien.

 19   Mme LE JUGE LATTANZI : Merci.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, numéro.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 0196 [comme interprété]

 22   recevra la cote P572 [comme interprété].

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Alors il vaut peut-être mieux qu'on fasse

 24   la deuxième pause maintenant. On reprendra vers 6 heures moins 20, et M.

 25   Seselj pourra commencer son contre-interrogatoire plutôt que de commencer

 26   le contre-interrogatoire et couper au milieu.

 27   Donc on va faire 20 minutes de pause et on reprendra après pour le contre-

 28   interrogatoire.

Page 10652

  1   --- L'audience est suspendue à 17 heures 15.

  2   --- L'audience est reprise à 17 heures 45.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. L'audience est donc reprise. Monsieur Seselj,

  4   vous avez la parole pour le contre-interrogatoire.

  5   Contre-interrogatoire par M. Seselj :

  6   Q.  [interprétation] Monsieur Baricevic, lorsque vous êtes venu à Slavonska

  7   Pozega en mai 1992 et par la suite, avez-vous eu des entretiens avec la

  8   police croate ou avec d'autres services croates, services d'Etat ?

  9   R.  Lorsque je suis venu en Croatie, je suis allé chercher les documents,

 10   et pour le reste, je ne vois pas où vous voulez en venir en parlant des

 11   entretiens.

 12   Q.  Vous ne pouvez pas le voir, vous n'êtes pas en mesure de voir ce à quoi

 13   je pense, mais répondez à ma question.

 14   R.  La réponse est non.

 15   Q.  Vous n'avez pas eu d'entretien avec la police secrète dans un autre

 16   Etat ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Jamais au cours de ces 16 dernières années vous n'avez donné de

 19   déclarations au sujet des événements de Hrtkovci, comme vous le dites, à

 20   aucune instance de pouvoir ?

 21   R.  Ce n'est pas la police secrète.

 22   Q.  C'est quoi ?

 23   R.  C'est le tribunal.

 24   Q.  Lequel ?

 25   R.  Le bureau du procureur militaire à Osijek.

 26   Q.  A quel moment leur avez-vous fourni une déclaration ?

 27   R.  Je ne me souviens pas exactement, mais c'était à un moment donné en

 28   1994.

Page 10653

  1   Q.  Qu'avez-vous dit dans cette déclaration ?

  2   R.  La même chose qu'ici.

  3   Q.  La même chose ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Et le bureau du procureur militaire à Osijek, qu'est-ce qu'ils ont fait

  6   ? Quel était l'objet de leurs recherches ?

  7   R.  Je ne sais pas.

  8   Q.  Comment est-ce que ça s'est fait, ils vous ont appelé en 1994 ? Est-ce

  9   que vous êtes parti de Slavonska Pozega à Osijek ?

 10   R.  Non, ils sont venus me voir.

 11   Q.  A Slavonska Pozega ? A Jaksic, qui est la banlieue de Slavonska Pozega;

 12   est-ce exact ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Qui est venu chez vous ?

 15   R.  Je ne sais pas.

 16   Q.  Combien de personnes sont venues vous voir ?

 17   R.  Deux.

 18   Q.  Portaient-ils un uniforme ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Vêtements civils. Que vous ont-ils dit ?

 21   R.  Ils m'ont demandé la même chose que l'Accusation m'a demandée tout à

 22   l'heure.

 23   Q.  Au sujet de tout ce qui vous est arrivé prétendument à Hrtkovci; est-ce

 24   exact ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce qu'ils ont recueilli une déclaration sur la base de cela ? Est-

 27   ce qu'ils ont enregistré cette conversation ?

 28   R.  Je ne sais pas. Je n'ai pas vu un enregistrement.

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  1   Q.  Mais est-ce qu'ils ont fait une déclaration que vous aviez signée ?

  2   R.  Non.

  3   Q.  Est-ce qu'ils ont simplement pris des notes ?

  4   R.  Ils écrivaient quelque chose, je ne sais pas quoi.

  5   Q.  Est-ce que vous avez eu d'autres conversations avec une instance d'Etat

  6   ?

  7   R.  Non, pas croate.

  8   Q.  Comment est-ce que vous êtes entré en contact avec les enquêteurs de La

  9   Haye ?

 10   R.  Ils sont venus chez moi.

 11   Q.  A Slavonska Pozega ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Que vous ont-ils dit ?

 14   R.  Ils m'ont demandé comment j'étais venu -- à quoi ressemblait la

 15   situation là-bas, et tout ce que j'ai raconté, je l'ai raconté aussi aux

 16   enquêteurs de La Haye.

 17   Q.  C'était en quelle année ?

 18   R.  C'était il y a cinq, six ans.

 19   Q.  Vous avez eu combien d'entretiens avec les enquêteurs de La Haye ?

 20   R.  Je ne sais pas. Peu.

 21   Q.  Qu'est-ce que ça veut dire "peu" ? Un, deux, trois ?

 22   R.  Deux.

 23   Q.  En quelle année ?

 24   R.  L'année dernière.

 25   Q.  Est-ce que l'année dernière vous avez signé une

 26   déclaration ?

 27   R.  Oui.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

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  1   Juges, la déclaration que ce témoin a fournie au bureau du Procureur de La

  2   Haye l'année dernière ne m'a pas été communiquée. Je pense que ce problème

  3   est tellement important que ceci remet en cause la suite du contre-

  4   interrogatoire. Je n'ai que la déclaration de 2002.

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, on va essayer d'y voir clair.

  6   Monsieur le Témoin, nous, on ne l'a pas. Mais l'année dernière, vous avez

  7   fait une nouvelle déclaration au bureau du Procureur ici ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'est la seule.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Parce que là vous avez, en répondant à M.

 10   Seselj, dit "oui." M. Seselj vous demande s'il y en avait une ou deux. Vous

 11   dites : "Two," "deux." M. Seselj vous dit : "Mais en quelle année ?" Vous

 12   dites : "L'année dernière." Alors.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Une déclaration a été fournie au Tribunal de

 14   La Haye, et ceux qui sont venus d'Osijek, c'était le bureau du procureur

 15   militaire.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : -- le Procureur d'ici, vous avez une déclaration que

 17   vous avez signée, puisque nous, nous l'avons, le 28 septembre 2002. Est-ce

 18   qu'il y en a eu une autre, ou pas du tout,

 19   ici ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la seule.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors, Monsieur Seselj.

 22   M. SESELJ : [interprétation]

 23   Q.  Que s'est-il passé l'année dernière ?

 24   R.  L'année dernière, enfin, l'enquêteur est venu simplement afin de

 25   s'entretenir avec moi.

 26   Q.  Qu'est-ce qu'il a voulu lors de cet entretien ?

 27   R.  Que je confirme ma déclaration.

 28   Q.  L'avez-vous confirmée ?

Page 10657

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Avez-vous signé quelque chose de nouveau ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Comment est-ce que vous avez confirmé ? Oralement ?

  5   R.  Je l'ai lue.

  6   Q.  Vous l'avez signée en ayant lu la déclaration ?

  7   R.  Elle était déjà signée.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois, c'est

  9   moi qui ai raison. L'Accusation doit disposer d'un procès-verbal, d'une

 10   note concernant cette conversation de l'année dernière.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand vous avez eu la conversation l'année dernière

 12   avec l'enquêteur, il vous a donné son nom ? C'était qui ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Paolo.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. C'est un Italien ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Il vous a montré quelque chose. Il vous fait signer

 17   quelque chose ou pas ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il ne me l'a pas demandé, il a demandé

 19   simplement que je lise la déclaration. Elle a été traduite en langue

 20   croate, et il a demandé que je lise la déclaration. Je n'ai rien signé.

 21   M. LE JUGE ANTONETTI : Que vous lisiez la déclaration de 2002, la seule

 22   déclaration ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] La seule déclaration.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Monsieur Mussemeyer ou Madame Dahl,

 25   l'enquêteur, Paolo Stocchi, il a fait un compte rendu, ou c'était informel

 26   ?

 27   M. MUSSEMEYER : [interprétation] A mon sens, il n'a pas préparé de compte

 28   rendu. Je pense qu'il a fait cela, mais je vais me renseigner et savoir

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  1   d'où émane cette confusion.

  2   A mon sens, il existe une déclaration faite par le témoin déjà évoquée, les

  3   27 ou 28 septembre 2002. Nous avons un ensemble de documents 92 bis où le

  4   témoin a signé encore une fois la même déclaration, qui est datée du 1er

  5   décembre 2005. Il s'agit d'un ensemble de documents 92 bis, et ceci est

  6   entièrement en serbe ou en croate, et ceci a été donné à Marco Bonavello

  7   [phon], qui était l'officier en charge à ce moment-là au mois de décembre

  8   2005.

  9   M. LE JUGE ANTONETTI : Cette déclaration 92 bis, c'était pour quel procès ?

 10   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je vais vérifier. J'ai le renseignement

 11   ici. Je crois que c'était le procès contre M. Seselj.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous aviez envisagé un 92 bis. Bon.

 13   Voilà, Monsieur Seselj.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, M. Mussemeyer vient de

 15   dire justement que cette déclaration de 2005 est plus ou moins la même que

 16   celle de 2002. Moi, le plus et le moins m'intéresse, et la partie où c'est

 17   la même chose ne m'intéresse pas.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : S'il y a une déclaration de 2005, il fallait que M.

 19   Seselj la connaisse, parce que vous avez dit, plus ou moins. Si c'est plus,

 20   c'est à charge contre lui. Si c'est moins, c'est à décharge. Donc dans l'un

 21   ou l'autre des cas, il fallait qu'il ait connaissance de cette déclaration.

 22   Alors, qu'est-ce qui s'est passé encore ?

 23   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. En fait, ceci

 24   n'a pas été communiqué. Je suis presque sûr. Je peux le lire :

 25   "La déclaration en annexe, datée du 27, 28 septembre 2002, est certifiée

 26   par la personne qui a signé le 1er décembre 2005. Le témoin en question a

 27   été édifié comme en étant l'auteur."

 28   C'est la procédure 98 bis appliquée à l'époque, mais je vais vérifier pour

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  1   voir si ceci a été communiqué à M. Seselj.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon, très bien.

  3   Continuez, Monsieur Seselj.

  4    M. SESELJ : [interprétation]

  5   Q.  Monsieur Baricevic, avez-vous eu un entretien avec les enquêteurs de La

  6   Haye en 1995 ?

  7   R.  [aucune interprétation]

  8   Q.  Lorsque vous dites "Rujan," en croate ça correspond à quel mois, c'est

  9   "septembre" ?

 10   R.  C'est "septembre."

 11   Q.  C'est quel mois, "Rujan" ?

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Un moment. M. le Procureur a peut-être des éléments.

 13   Oui.

 14   M. MUSSEMEYER : [interprétation] J'ai trouvé la date de communication de

 15   cet ensemble de documents 92 bis. Le numéro ERN est le 0465-6571 à 65

 16   [comme interprété], ceci a été communiqué à M. Seselj le 10 juillet 2006.

 17   Le reçu comporte le numéro 23, je crois que M. Seselj l'a signé. Je dois le

 18   vérifier.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors Monsieur Seselj, vous auriez eu communication

 20   de cela le 10 juillet 2006. Reçu numéro 23.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, à deux reprises, on m'a

 22   communiqué la déclaration de 2002. Il est vrai qu'elle a été retapée, mais

 23   l'année 2002 est marquée sur les deux. On ne voit nulle part 2005 ou 2006.

 24   Que l'Accusation prouve que ceci m'a été remis. Donc j'en ai deux. Le texte

 25   est identique. Les machines à dactylographier n'ont pas été les mêmes, et

 26   la date est la même, les 27 et 28 septembre 2002.

 27   Q.  Monsieur Baricevic, je vous ai demandé si, en 1995, vous avez fait une

 28   déclaration auprès du bureau du Procureur de La Haye.

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  1   R.  Je vous ai déjà répondu. Je ne me souviens plus de l'année, mais

  2   c'était la seule déclaration que j'ai faite auprès des enquêteurs de La

  3   Haye.

  4   Q.  J'ai ici un document de l'Accusation dont le numéro est 0307-3665 où il

  5   est écrit que l'interprète du bureau du Procureur confirme que, le 28

  6   septembre 1995, il est écrit "Rujan" ici, elle a interprété votre

  7   conversation avec eux. Donc 1995, et je n'ai jamais reçu cette déclaration

  8   -- il n'y a aucune trace de cette déclaration. Mais ici, j'ai le document

  9   qui a été communiqué par erreur. Je vais vous répéter le numéro si vous le

 10   souhaitez.

 11   Donc c'était en 1995, un entretien a eu lieu avec vous. J'ai un document

 12   qui le prouve. C'est la confirmation ou le certificat fait par l'interprète

 13   indiquant qu'elle avait interprété cet entretien avec vous.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, est-ce qu'il n'y aurait pas une

 15   erreur sur la date parce que 28 septembre 1995 ou 28 septembre 2002, c'est

 16   peut-être la même chose ?

 17   Alors Monsieur le Témoin, il faut dire la vérité. M. Seselj travaille

 18   beaucoup, voit tous les détails, rien ne lui échappe. Il a un document dont

 19   il donne le numéro, ERN 0307-3665, qui semble dire que le traducteur du

 20   bureau du Procureur aurait dit quelque chose sur un mot croate, enfin je

 21   crois c'est "rulan," ou "ulan," je ne sais plus, je ne m'en souviens pas.

 22   Alors la question est très simple.

 23   Est-ce qu'en 1995, c'est-à-dire très peu de temps après les événements qui

 24   ont eu lieu en 1992, vous avez rencontré un enquêteur du bureau du

 25   Procureur, ou bien vous ne l'avez rencontré qu'en 2002 ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai rencontré les enquêteurs, et je les ai

 27   rencontrés au moment où j'ai fourni ma déclaration, et c'est la seule

 28   déclaration que j'ai faite auprès des enquêteurs, c'était une seule.

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  1   Maintenant je ne me souviens pas de la date, et je ne saurais vous dire à

  2   quel moment ça s'est passé, mais il y en avait une seule.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

  4   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Oui. Cette certification de l'enquêteur à

  5   laquelle a fait référence l'accusé appartient à la liasse de pièces 92 bis

  6   de 2005. Le numéro ERN est le même, 0307 et ensuite 3665, qui a été cité

  7   par l'accusé. Donc il doit y avoir une erreur au niveau des dates, car on

  8   parle du 28 septembre -- je ne connais pas le nom du mois -- septembre

  9   1995. Mais ce que l'accusé a omis de dire c'est qu'il y a un deuxième

 10   numéro ERN sur la même page, 0456-6579, qui contient la liasse des

 11   documents 92 bis du mois de décembre. Il y a une erreur au niveau de la

 12   date, mais ceci a été communiqué, ce qui prouve que cet ensemble de

 13   documents 92 bis a été communiqué à M. Seselj, ceci en est la preuve.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien pour cette précision.

 15   Alors Monsieur le Témoin, vous n'avez vu les enquêteurs que pour la

 16   déclaration, c'est celle de 2002, pas en 1995.

 17   Monsieur Seselj, continuez.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, il a rencontré

 19   aussi M. Paolo Pastore-Stocchi en 2005 ou l'année dernière, comme le témoin

 20   l'a dit tout à l'heure. Mais ce qui n'a pas été clarifié c'est qu'est-ce

 21   qui s'est passé en 1995. Si c'est une erreur et si la dactylographe du

 22   bureau du Procureur peut faire une telle faute en dactylographiant "1995"

 23   au lieu de "2002," quel est le psychologue qui aurait pu expliquer une

 24   telle erreur, si elle avait écrit "2003" à la place de "2002" ou de "2008,"

 25   ça je veux bien comprendre. Mais si quelqu'un vit en 2002 et si la personne

 26   tape cela pour écrire à la fin "1995," ceci n'est pas possible, ou peut-

 27   être c'est possible, car peut-être il y a de nouvelles maladies qui

 28   circulent depuis que je suis isolé dans la prison. Donc je ne suis pas au

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  1   courant. Mais je souhaitais simplement vous indiquer à quel point

  2   l'Accusation fait son travail sans sérieux.

  3   M. LE JUGE ANTONETTI : Pour le moment, l'Accusation indique que ça doit

  4   être une erreur de frappe. On a tapé "1995" alors que ça aurait dû être

  5   "2002." Voilà l'explication qui est donnée.

  6   Continuez.

  7   M. SESELJ : [interprétation]

  8   Q.  Lorsque vous avez parlé avec les enquêteurs de La Haye, vous avez parlé

  9   en 2002 avec Paolo Pastore-Stocchi; est-ce exact ?

 10   R.  J'ai parlé avec lui, mais je ne sais pas en quelle année.

 11   Q.  Est-ce que les deux fois vous lui avez parlé à lui ou bien une seule

 12   fois ?

 13   R.  Je lui ai parlé deux fois. Mais je ne me souviens pas des dates.

 14   Q.  Bien. Vous lui avez parlé deux fois ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Vous lui avez dit que, lors du rassemblement à Hrtkovci, j'ai demandé

 17   que l'on tue tous les enfants issus de mariages mixtes?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Vous lui avez dit à lui ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Lorsque vous lui avez dit cela, comment a-t-il réagi ? C'est ça qui

 22   m'intéresse. Est-ce qu'il a été étonné ?

 23   R.  Je ne sais pas s'il a été étonné, mais c'est ce qu'il a écrit.

 24   Q.  Est-ce qu'il vous a simplement écouté attentivement et après il a

 25   rédigé la déclaration que vous avez signée par la suite sans commentaire ?

 26   R.  Il a rédigé la déclaration, et moi je l'ai signée.

 27   Q.  Donc aucune question n'a été posée par lui à ce sujet ?

 28   R.  On a parlé. Maintenant, je ne me souviens plus de détails.

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  1   Q.  Bien. Si vous ne savez pas. Je comprends, avec l'âge on commence à

  2   perdre la mémoire et il y a des processus différents qui se déroulent dans

  3   la tête d'un homme, mais peu importe. Quand est-ce que vous êtes venu à La

  4   Haye pour déposer ?

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Un moment. Une question de suivi.

  6   C'est très important la question que M. Seselj vous a posée. Les 27 et 28

  7   septembre 2002, vous rencontrez l'enquêteur du bureau du Procureur, et vous

  8   avez une discussion avec lui qui va durer combien d'heures ? Vous vous en

  9   souvenez ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] On s'est rencontré deux fois, pendant deux

 11   jours, environ huit, neuf heures, ça a duré les deux fois.

 12   M. LE JUGE ANTONETTI : Donc vous lui avez dit beaucoup de choses, et après

 13   quoi il va préparer votre déclaration que vous allez signer et qu'on va

 14   vous lire dans votre langue. C'est ce qui est marqué dans le document.

 15   Quand vous avez discuté avec l'enquêteur, vous lui avez dit, "Je me

 16   souviens que M. Seselj dans son discours a dit que les enfants nés de

 17   mariages mixtes devaient être tués," et lui le redit, ou bien vous avez dit

 18   M. Seselj a parlé des mariages mixtes et vous n'avez pas dit qu'ils

 19   devaient être tués ? Alors qu'est-ce que vous lui avez dit exactement, à

 20   l'enquêteur ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je souhaite répéter ce que j'ai dit. Il a dit

 22   qu'il fallait divorcer les couples, les mariages mixtes et tuer les

 23   enfants.

 24   M. LE JUGE ANTONETTI : C'est M. Seselj qui a dit ça ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce que j'ai entendu.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous l'avez dit à l'enquêteur qui l'a traduit dans

 27   le texte.

 28   Continuez, Monsieur Seselj.

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  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Quand êtes-vous venu déposer dans cette affaire, ici, à La Haye ?

  3   R.  Je suis venu dimanche.

  4   Q.  Aujourd'hui, on est mardi ? Donc ça fait deux jours que vous êtes ici ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Combien de fois est-ce que vous avez parlé avec les représentants du

  7   bureau du Procureur au cours de ces deux jours ?

  8   R.  Une fois.

  9   Q.  Est-ce que vous avez parcouru l'ensemble de votre déclaration ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Lorsque vous êtes arrivé à la partie où vous affirmez que lors du

 12   rassemblement vous auriez déclaré que j'ai dit qu'il fallait tuer tous les

 13   enfants des mariages mixtes, est-ce que l'Accusation vous a dit que peut-

 14   être il ne fallait pas dire ça comme ça ?

 15   R.  Il m'a demandé si c'était vraiment comme ça que vous l'aviez dit.

 16   Q.  Vous avez confirmé ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Ensuite, ils n'ont rien dit d'autre ?

 19   R.  Ils ont dit, "Si c'est ce qu'il a dit, on va passer à autre chose."

 20   Q.  C'était une conversation très brève, c'est comme ça que ça s'est

 21   terminé ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Vous avez dit que les tensions à Hrtkovci avaient débuté lors des

 24   rassemblements de Milosevic dans les années 80; est-ce

 25   exact ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Ce que vous appelez les rassemblements de Milosevic c'était en réalité

 28   les rassemblements des Serbes de Kosovo, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Je ne sais pas qui se rassemblait, mais c'était les rassemblements qui

  2   s'étalaient du Kosovo à la Vojvodine. Mais c'était les rassemblements de

  3   Milosevic.

  4   Q.  Qui le dit ?

  5   R.  C'était les gens qui le disaient.

  6   Q.  Mais est-ce que c'était Miroslav Solevic, Kosta Bulatovic, et bien

  7   d'autres, des gens de Kosovo qui le dirigeaient ?

  8   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, je n'étais pas actif politiquement, je ne

  9   m'intéressais pas à la politique et je ne saurais vous dire quels étaient

 10   les noms des personnes qui étaient à la tête de ces rassemblements.

 11   Q.  Est-ce que les Serbes au Kosovo se sentaient menacés face aux

 12   séparatistes albanais ?

 13   R.  Je n'étais pas au Kosovo, et je ne saurais faire de commentaires à ce

 14   sujet.

 15   Q.  Pour quelle raison alors est-ce que vous avez été inquiet en raison de

 16   ces rassemblements ? Est-ce qu'on mentionnait des Croates lors de ces

 17   rassemblements ?

 18   R.  J'ai dit clairement que certaines personnes, dès cette époque-là, pour

 19   le dire simplement, relevaient leurs têtes, si vous voulez.

 20   Q.  Quels individus ?

 21   R.  Des individus dans le village.

 22   Q.  Mais comment ça ils relevaient les têtes ?

 23   R.  Ils portaient des couvre-chefs chetniks, ils criaient, "Ceci est la

 24   Serbie, et non pas la Croatie," et ainsi de suite. Donc ces petites

 25   provocations avaient commencé.

 26   Q.  Mais qu'aviez-vous contre les couvre-chefs chetniks ? Il s'agit des

 27   couvre-chefs serbes traditionnels, du blason serbe traditionnel.

 28   R.  J'ai dit que c'était un village tranquille qui ne s'intéressait pas à

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  1   la politique, seulement au travail.

  2   Q.  Si quelqu'un dit, "C'est la Serbie," ou bien si quelqu'un scande,

  3   "Serbie, Serbie, Serbie," pourquoi est-ce que ça vous gêne ? Hrtkovci

  4   c'était toujours la Serbie, n'est-ce pas ?

  5   R.  Moi ça ne me gêne, rien ne me gêne.

  6   Q.  Pourquoi voulez-vous que quelqu'un dise, "Ceci n'est pas la Croatie"

  7   puisqu'on savait que ce n'était pas la Croatie et que ça ne pouvait

  8   absolument pas l'être.

  9   R.  Je ne disais ni que c'était la Serbie ni que c'était la Croatie. Je

 10   vaquais à mes affaires de façon honnête dans ce village.

 11   Q.  Peu m'importe ce que vous faisiez, vous. Mais d'où vient cette

 12   déclaration que vous avez faite, à savoir que les tensions avaient commencé

 13   à monter dès la période des rassemblements de Milosevic ? C'est ce que vous

 14   avez dit, et maintenant vous ne pouvez pas l'expliquer.

 15   R.  J'ai dit que des individus l'ont commencé un peu --

 16   Q.  Quoi ?

 17   R.  Ils ont commencé un peu à faire des troubles, ont commencé un peu dans

 18   le village.

 19   Q.  Quels troubles ?

 20   R.  Je vous ai déjà expliqué que certains individus portaient des couvre-

 21   chefs, chantaient des chansons, et c'est ce qui préoccupait la population.

 22   Q.  Mais pourquoi est-ce que les chansons vous

 23   préoccuperaient ? Est-ce que les Croates étaient mentionnés dans ces

 24   chansons ?

 25   R.  Je ne sais pas si c'était vraiment les Croates.

 26   Q.  Pourquoi est-ce que vous devez être inquiété par les chants

 27   patriotiques serbes ? Pourquoi est-ce que ceci vous préoccuperait ?

 28   R.  Je ne sais pas si ces chants serbes sont patriotiques ou différents,

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  1   mais comme je l'ai dit une fois, et je répète, les troubles ont commencé.

  2   Q.  Vous ne pouvez pas m'expliquer de quels troubles il s'agissait. Comment

  3   ils se reflétaient ?

  4   R.  Je l'ai dit.

  5   Q.  Quelqu'un chantait un chant ou portait un blason serbe sur la cocarde ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Mais je ne vois pas de troubles. On se libère du communisme. On

  8   renouvelle de vieilles traditions serbes. Pourquoi est-ce que c'est le

  9   trouble, vous regrettez le fait que l'on se soit libérés du communisme ?

 10   Vous, vous n'avez pas quitté la Ligue des Communistes en 1980 lorsque Tito

 11   est mort, mais en 1990 lorsque la Ligue des Communistes s'est dissolue ?

 12   R.  Non, lorsque Tito est mort.

 13   Q.  A qui avez-vous redonné la carte de membre ?

 14   R.  Je l'ai laissée dans les locaux de la commune locale.

 15   Q.  Quel est le lien de la commune locale et de la Ligue des Communistes ?

 16   R.  C'est le secrétaire du parti qui s'y rendait.

 17   Q.  Mais vous avez continué de payer la cotisation jusqu'en 1990 ?

 18   R.  Non.

 19   Q.  Mais c'est ce qui est enregistré dans les archives. Bon.

 20   Dans la déclaration que vous avez signée, vous dites qu'en 1990, le

 21   Mouvement du Renouveau serbe et le Parti radical serbe, avec Vuk Draskovic

 22   à leur tête et Vojislav Seselj respectivement, ont ouvert leurs branches à

 23   Hrtkovci. Quatrième paragraphe de votre déclaration.

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Mais en 1990, le Parti radical serbe n'était pas encore créé ?

 26   R.  Je sais qu'il y avait des gens qui sont venus s'inscrire. Est-ce que le

 27   parti existait ou pas, mais on venait s'enregistrer.

 28   Q.  On ne peut pas s'enregistrer dans un parti inexistant.

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  1   R.  Je ne sais pas.

  2   Q.  Oui, c'est possible, mais on ne peut pas l'expliquer; c'est ça ?

  3   R.  Non, non, non. Vous devriez leur poser la question à eux.

  4   Q.  A "eux" ?

  5   R.  Aux membres.

  6   Q.  Mais je ne peux pas leur poser la question puisque le parti n'existait

  7   pas en 1990, et c'est ce que vous dites, qu'en 1990 on s'enrôlait dans le

  8   Parti radical serbe qui a ouvert sa branche à Hrtkovci. Or, le Parti

  9   radical serbe a été créé le 23 février 1991. Vous déclarez qu'un an

 10   auparavant, il y avait déjà une branche à Hrtkovci et qu'on venait s'y

 11   enrôler ?

 12   R.  J'ai peut-être fait une erreur de date.

 13   Q.  Très bien. Vous avez peut-être fait une erreur, mais vous faites trop

 14   d'erreurs. Vous dites qu'Ostoja Sibincic présidait le Mouvement du

 15   Renouveau serbe dans la localité, et Aleksa Ejic était à la tête du Parti

 16   radical serbe dans la municipalité ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Aleksa Ejic n'a jamais été dans le Parti radical serbe.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Procureur.

 20   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, nous avons

 21   communiqué les notes de récolement à M. Seselj qui apportaient une

 22   correction à cela, justement. Lors du récolement de M. Baricevic, il s'est

 23   rendu compte qu'il avait fait une erreur, et cela a été communiqué à M.

 24   Seselj la semaine dernière. Donc il ne doit pas insister sur la chose et

 25   s'acharner dessus. Il sait qu'il y a eu une correction et il ne devrait pas

 26   essayer d'embrouiller le témoin à ce propos.

 27   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. Monsieur Seselj, le Procureur vous avait

 28   informé que le témoin avait dit qu'il avait fait une confusion.

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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais peu m'importe, Monsieur le Procureur

  2   [comme interprété], pourquoi est-ce que je devrais tenir compte de ce qui

  3   m'a été dit par le Procureur ? Je cherche les points faibles dans la

  4   déclaration et dans le témoignage. Les informations portant sur le

  5   récolement, ce n'est pas un document sur lequel je dois me fonder. Oui,

  6   éventuellement, si j'y trouve des faiblesses, mais qu'a posteriori, le

  7   Procureur cherche à réconforter le témoin, à renforcer sa déposition.

  8   Voyez-vous que ce n'est pas possible puisque le témoin ne sait pas à quel

  9   moment le parti a été créé.

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : -- que le témoin a reconnue. Alors par contre, là

 11   vous étiez en train de poser une question très importante sur Ostoja

 12   Sibincic, alors continuez.

 13   M. SESELJ : [interprétation]

 14   Q.  Comment pouvez-vous affirmer qu'Aleksa Ejic était à la tête du Parti

 15   radical serbe de la branche locale puisqu'il n'a jamais été membre de ce

 16   parti ? A Hrtkovci, tout le monde le sait, et Aleksa Ejic l'a même confirmé

 17   ici, il est venu déposer ici avant vous.

 18   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Procureur.

 19   M. MUSSEMEYER : [interprétation] A nouveau, toujours la même chose. Ceci a

 20   déjà été corrigé dans les notes de récolement. Cela a été communiqué à M.

 21   Seselj. Si vous le voulez, je peux lire exactement ce qui a été clarifié,

 22   et je pense que M. Seselj ne devrait plus utiliser cela parce qu'en fait ce

 23   n'est pas correct.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais on ne peut pas corriger de cette manière

 25   la déclaration du témoin. Le témoin confirme qu'Aleksa Ejic était le

 26   président du Parti radical serbe. Il vient de le confirmer devant vous, et

 27   de toute évidence, on a instrumentalisé le témoin, mais le témoin n'est pas

 28   capable de mener à bien sa mission. N'acceptez pas que le représentant de

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  1   l'Accusation interrompe mon contre-interrogatoire de cette manière, le

  2   témoin a confirmé devant vous qu'Aleksa Ejic était le président de la

  3   branche locale du Parti radical serbe.

  4   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, Monsieur le Procureur, j'avais cru comprendre,

  5   en début de l'interrogatoire principal, que M. Aleksa Ejic avait rempli ces

  6   fonctions politiques, puis maintenant il apparaît que, lors du récolement,

  7   il s'est trompé aussi ?

  8   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Je peux vous le lire -- les notes de

  9   récolement sont très courtes

 10   M. LE JUGE ANTONETTI : -- comme ça. Allez-y.

 11   M. MUSSEMEYER : [interprétation] Dans la déclaration du TPY, à la page 2,

 12   donnée les 27 et 28 septembre 2002. Baricevic a dit qu'Ejic était le

 13   président du SRS à Hrtkovci. Au cours du récolement, Baricevic a déclaré

 14   qu'Ejic était le président du parti SPO local --"

 15   "Au cours du récolement, Baricevic a déclaré qu'Ejic était le

 16   président du parti local du SPO et de Vuk Draskovic. Lors du récolement,

 17   Baricevic a dit que ce qu'il avait dit à propos d'Ejic comme président du

 18   SRS à Hrtkovci est une erreur. Baricevic a confirmé qu'il n'y avait pas de

 19   bureau du SRS à Hrtkovci, au moins jusqu'à ce que Baricevic quitte

 20   Hrtkovci."

 21   Au deuxième paragraphe, il est écrit :

 22   "Au cours du récolement, Baricevic a dit que Sibincic travaillait

 23   avec les radicaux à Hrtkovci. Dans sa déclaration du TPY, à la page 2,

 24   Baricevic avait déclaré qu'en 1991, Sibincic était membre actif du SRS.

 25   Baricevic ne sait pas, en fait --"

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je vais contre-interroger M.

 27   Mussemeyer désormais comme représentant de

 28   l'Accusation ?

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Laissez M. Mussemeyer terminer la note qu'il vous a

  2   adressée et que je ne connaissais pas. Oui -- il y avait "Baricevic does

  3   not know," puis après qu'est-ce qu'il y a ?

  4   M. MUSSEMEYER : [interprétation] "Baricevic ne sait pas, en fait, si

  5   Sibincic était officiellement membre du SRS ou s'il n'était que là dans le

  6   coin à traîner avec les sympathisants du SRS."

  7   Voici les notes de récolement que nous avons envoyées à l'accusé.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien. C'était important de le savoir.

  9   Monsieur Seselj.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, il est beaucoup plus

 11   important de savoir qu'aujourd'hui, pendant l'interrogatoire principal, ce

 12   témoin ici devant vous, et vous l'avez dans le compte rendu d'audience, a

 13   déclaré qu'Aleksa Ejic a fondé le Parti radical serbe et Ostoja Sibincic a

 14   fondé le Mouvement du Renouveau serbe à Hrtkovci. Vous l'avez pendant

 15   l'interrogatoire principal d'aujourd'hui. Mais vérifiez dans le compte

 16   rendu d'audience.

 17   Je ne vois pas pourquoi j'aurais à me préoccuper de ce qui figure

 18   dans les notes de récolement ? Aujourd'hui, dans le prétoire, le témoin a

 19   dit qu'Aleksa Ejic a créé le Parti radical serbe à Hrtkovci. Ce qui est

 20   écrit, les représentants du Procureur ont été stupéfaits, ceux qui l'ont

 21   amené ici en tant que témoin. Mais cette information ne m'intéresse pas.

 22   C'est le Procureur qui l'a rédigée. Moi ce qui m'intéresse, c'est ce qui a

 23   été dit par le témoin dans l'interrogatoire principal, et là il a dit, et

 24   il vient de le confirmer pendant le contre-interrogatoire, qu'Aleksa Ejic a

 25   créé le Parti radical serbe à Hrtkovci. C'est ça que le témoin a déclaré

 26   pendant l'interrogatoire principal et pendant le contre-interrogatoire, je

 27   ne vois pas comment est-ce qu'on peut accepter. C'est absurde que le

 28   Procureur corrige le témoin.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

  2   Monsieur le Témoin, dans l'interrogatoire principal, vous aviez dit

  3   qu'Aleksa Ejic avait fondé le Parti radical serbe à Hrtkovci. Ça, je m'en

  4   souviens. Voilà maintenant qu'il apparaît que vous aviez corrigé cela

  5   pendant le récolement. Alors comment se fait-il qu'en répondant en début

  6   d'après-midi à M. le Procureur, vous avez dit quelque chose que vous aviez

  7   corrigé avant ? Alors là, j'ai du mal à comprendre. Alors --

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, mais il est possible que

  9   j'aie fait une erreur, mais Ostoja Sibincic, dans mon esprit, c'était le

 10   membre du Parti radical. Oui, peut-être que je l'ai mentionné une fois, Aco

 11   Ejic, mais je n'arrêtais pas de dire qu'Ostoja était le membre du Parti

 12   radical serbe.

 13   M. LE JUGE ANTONETTI : Alors j'ai deux questions à vous poser. Est-ce que

 14   M. Aleksa Ejic a créé le Parti radical serbe dans votre village ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant quelque temps, il a été comme

 16   président, mais après il s'est retiré. Il a vu, parce qu'il avait une femme

 17   qui était hongroise, il a vu que cela n'allait apporter rien de bien, donc

 18   il s'est retiré. Il n'était pas actif.

 19   M. LE JUGE ANTONETTI : Deuxième question.

 20   Est-ce qu'Ostoja Sibincic était membre du Parti radical serbe ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Il dit qu'il était membre. Moi je n'ai pas vu

 22   sa carte de membre.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 24   Juges, mais le témoin vient de démentir une information qui, soi-disant,

 25   provenait du récolement. Il vient de confirmer qu'Aleksa Ejic était le

 26   président du Parti radical serbe de Hrtkovci. Il a répondu à votre

 27   question, Monsieur le Président, donc cette information émanant du

 28   récolement, c'est un faux de la déclaration que répète le témoin dans la

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  1   déclaration préalable, pendant l'interrogatoire principal, le contre-

  2   interrogatoire et les questions des Juges. Voilà, maintenant on découvre

  3   quelles sont les méthodes employées par le Procureur pendant le récolement.

  4   Je peux continuer, maintenant ? Je continue ?

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Procédez.

  6   M. SESELJ : [interprétation]

  7   Q.  Vous avez dit que, dès 1991, un groupe de 160 réfugiés est arrivé de

  8   Slavonie et vous avez dit que cela a créé des tensions à Hrtkovci; c'est

  9   bien cela ?

 10   R.  Oui, 160 réfugiés sont arrivés, oui.

 11   Q.  Vous avez dit que la commune locale a mis à la disposition de ces gens

 12   des appartements, qu'on leur a distribué des vivres, des cuisinières, et

 13   cetera ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Où est-ce qu'ils ont été placés, où est-ce qu'on a trouvé des logements

 16   pour les placer ?

 17   R.  Dans des maisons. Lorsque quelqu'un avait deux maisons, lorsque ses

 18   parents étaient décédés, ou des maisons un peu anciennes à Hrtkovci même.

 19   Q.  Donc les maisons qui n'étaient pas habitées ?

 20   R.  Pendant quelque temps, oui.

 21   Q.  Aussi, des maisons des personnes qui, depuis longtemps, ne vivaient

 22   plus à Hrtkovci, mais qui avaient donné leur approbation ? Par téléphone,

 23   vous avez parlé avec ces gens, leur avez posé la question, et ils étaient

 24   d'accord ?

 25   R.  Je pense qu'il y avait uniquement une seule maison dans ce cas de

 26   figure.

 27   Q.  Il y en a eu plusieurs, mais vous ne pouvez pas vous rappeler tout,

 28   vous ne pouvez pas tout savoir. Puis les réfugiés qui ont commencé à

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  1   s'installer comme ça dans les différentes maisons, parfois il est arrivé

  2   qu'ils rentrent même sans poser la question préalable dans des maisons

  3   vides parce qu'ils allaient pas rester sous la pluie avec femmes et

  4   enfants, il fallait bien trouver un

  5   toit ?

  6   R.  Ils entraient par infraction. Ils s'installaient dedans.

  7   Q.  Des maisons vides ?

  8   R.  Elles n'étaient pas vides.

  9   Q.  Il y avait des meubles dedans ?

 10   R.  Oui, des meubles, de l'équipement, appareils.

 11   Q.  Il n'y avait pas de personnes, vous voulez dire ? Il n'y avait pas de

 12   personnes qui vivaient à ce moment-là; c'est ça ? Mais à votre avis,

 13   lorsqu'on s'enfuit de Croatie où les membres de sa famille sont menacés de

 14   mort, il arrive en Serbie, il ne sait pas où caser sa femme et enfants, il

 15   voit une maison vide depuis des années, elle est inhabitée; alors est-ce

 16   qu'il va respecter la loi, les règlements et les droits de propriété, il va

 17   abandonner sa femme et ses enfants sous un pont ou sous un arbre sans

 18   s'installer dans cette maison ? Quoi de plus naturel que de rentrer dans un

 19   logement vide et de s'y installer tant qu'on ne vient pas l'en chasser ?

 20   R.  Je ne pense pas qu'il en soit ainsi.

 21   Q.  Vous ne le pensez pas. Vous avez déclaré ici que Sibincic est devenu

 22   membre du Parti radical serbe fin 1991, et maintenant, lorsque les Juges

 23   vous ont posé la question, vous avez dit en mai 1992 que vous ne savez même

 24   pas si officiellement, formellement, il était membre du Parti radical serbe

 25   ?

 26   R.  Non, ce n'est pas ça.

 27   Q.  [aucune interprétation]

 28   R.  J'ai dit que je n'ai pas vu sa carte de membre.

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  1   Q.  Mais comment saviez-vous qu'il est devenu membre du Parti radical serbe

  2   ?

  3   R.  Mais comment est-ce que je le savais ? Parce qu'on disait ça -- on

  4   disait que c'était des radicaux et c'était lui leur chef.

  5   Q.  Des radicaux ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Mais qu'en est-il de Milan Zilic, notre radical qui a fondé le parti à

  8   Hrtkovci ? Il était à la tête du comité municipal. Lui, où est-ce que l'on

  9   trouve là-dedans ?

 10   R.  Je n'en ai pas la moindre idée.

 11   Q.  Milan Zilic, vous en faite abstraction alors qu'il était président du

 12   parti et vous en inventez un autre ?

 13   R.  Ce que je sais, c'est qu'il y a eu de sales besognes et c'est Ostoja

 14   Sibincic qui faisait cela et c'est lui qui se présentait comme le président

 15   du Parti radical serbe.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, nous savons que vous avez été

 17   membre de la Ligue communiste, que vous avez pendant plusieurs années eu

 18   des fonctions municipales. Vous êtes quelqu'un qui me semble capable de

 19   comprendre. Si ce que vous dites est vrai, à savoir que M. Ostoja Sibincic

 20   était le président du Parti radical serbe à Hrtkovci, à ce moment-là, M.

 21   Seselj vient faire son discours le 6 mai; c'est lui qui doit être sur la

 22   tribune pour dire, "Frères, sœurs de Serbie, je vous présente M. Seselj qui

 23   va," et cetera. Or, c'est pas lui, c'est Zilic. Alors comment vous

 24   expliquez ça ? Comment vous expliquez que le président du Parti radical

 25   n'est pas sur le podium quand M. Seselj vient alors même qu'il y a deux

 26   personnes qui vont préparer son entrée en scène, Zilic et cette dame, lui

 27   arrive en troisième, Sibincic il n'est pas là ? Vous trouvez ça normal ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, je ne sais pas. La

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  1   seule chose que je sache c'est qu'Ostoja Sibincic était à la tête des gens.

  2   Il donnait des adresses. Il emmenait ces radicaux. Mais je ne sais pas

  3   quelles sont les fonctions, qui était secrétaire, qui était le numéro un,

  4   qui était le trésorier, ça je ne sais pas, car je n'étais pas membre de ce

  5   parti. Mais je sais pour ce qui est des gens qui dirigeaient les autres

  6   pour semer le malheur dans le village.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, continuez.

  8   M. SESELJ : [interprétation]

  9   Q.  En cette année-là, 1991, les réfugiés serbes de Croatie, ils arrivaient

 10   uniquement à Hrtkovci, ou bien il y en avait partout en Serbie, en

 11   particulier en Vojvodine ?

 12   R.  Ce que j'en sais, c'est la situation à Hrtkovci.

 13   Q.  Vous ne vous êtes jamais rendu ailleurs ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Donc vous avez l'impression que les réfugiés serbes ne sont venus qu'à

 16   Hrtkovci ?

 17   R.  Je ne sais pas s'il y en a eu qui sont allés ailleurs dans d'autres

 18   localités. Je ne sais pas leur nombre, mais je sais ce qui s'est passé à

 19   Hrtkovci.

 20   Q.  Vous avez dit jusqu'en avril 1992 -- attention. Avril 1992, vous avez

 21   dit qu'environ 500 réfugiés étaient déjà arrivés à

 22   Hrtkovci ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Les problèmes sont devenus importants ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  On n'avait plus où placer ces réfugiés ?

 27   R.  Ces réfugiés, la deuxième vague de réfugiés, quand ils sont arrivés, la

 28   commune locale là encore a réagi et ces gens-là, de manière temporaire, ils

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  1   ont été placés sur une propriété où il y avait des lits, il y avait une

  2   cuisine et il y avait des salles de bain.

  3   Q.  Je voudrais juste réitérer vos propos, vous avez dit que c'est

  4   particulièrement à ce moment-là que les problèmes sont devenus importants ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Les réfugiés étaient mécontents ?

  7   R.  Parce qu'on leur avait promis des maisons.

  8   Q.  Mais qui leur a promis ?

  9   R.  Je suppose, les autorités serbes de Croatie.

 10   Q.  Mais quelles autorités serbes de Croatie auraient pu leur promettre des

 11   maisons ?

 12   R.  Mais là où il y avait la guerre.

 13   Q.  Mais là, c'étaient des autorités croates qui les ont chassés. Pourquoi

 14   est-ce que les autorités serbes les auraient chassés ? Les autorités

 15   serbes, c'était dans la Krajina serbe, et là c'était en Slavonie

 16   occidentale.

 17   R.  Ils sont arrivés de Slavonie occidentale.

 18   Q.  Oui, mais Grubisno Polje c'était entre les mains des Croates, puis en

 19   décembre 1991, les Croates se sont emparés pratiquement de toute la

 20   Slavonie occidentale, il ne restait plus qu'Okocani aux Serbes et une zone

 21   jusqu'à Topokrac [phon], donc les autorités croates les ont bel et bien

 22   chassés, ce ne sont pas les Serbes ?

 23   R.  Ecoutez, je ne sais pas qui leur a promis les maisons. J'ai dit qu'on a

 24   trompé et dupé les gens, et c'est certain que les Serbes leur ont promis.

 25   Ils leur ont dit, "Allez-y. Rendez-vous là-bas, les gens sont partis, les

 26   Oustachi sont partis à l'armée, il y a des maisons vides."

 27   Q.  Oui. Les Serbes ont chassé les Serbes pour vous faire du mal. Ça, c'est

 28   tout à fait clair.

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  1   Maintenant, les réfugiés au mois d'avril demandent qu'on résolve les

  2   problèmes. Vous, vous affirmez qu'ils ont demandé que je vienne à une

  3   réunion de la commune locale où on allait évoquer leurs problèmes ?

  4   R.  Non, je n'ai pas affirmé ça. J'ai dit une réunion avec Vojislav Seselj,

  5   pas de la commune locale, mais réunion avec eux pour que ces problèmes

  6   soient réglés.

  7   Q.  Avec les réfugiés ?

  8   R.  Uniquement avec les réfugiés.

  9   Q.  Mais moi, d'où est-ce que je tire mon importance pour qu'ils demandent

 10   de me rencontrer ?

 11   R.  Je ne sais pas.

 12   Q.  Etais-je au pouvoir ?

 13   R.  Je ne sais pas.

 14   Q.  Il y avait combien de députés à l'assemblée nationale du Parti radical

 15   serbe à l'époque ?

 16   R.  Je ne sais pas.

 17   Q.  Un seul. Est-ce que je vous ai rafraîchi la mémoire ? J'étais le seul

 18   député, vous ne savez pas ça non plus. La seule chose que vous savez, c'est

 19   ce qu'on vous a rédigé une première fois pour que vous répétiez comme un

 20   perroquet votre déclaration, dès qu'on s'écarte de cela, vous ne savez plus

 21   rien et vous commencez à être trempé de sueur.

 22   R.  Je ne sais rien. Je ne sais rien.

 23   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, d'abord, réfléchissez à la

 24   situation suivante : est-ce que vous connaissiez la situation politique en

 25   Serbie, ou bien dans votre village vous ne vous occupiez pas de ce qui se

 26   passait ?  

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suivais pas la politique. Je travaillais

 28   et je m'occupais uniquement de ce qui me regardait. Je sais ce qui se

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  1   passait dans le village. Puis la politique, je ne suivais pas ça.

  2   M. LE JUGE ANTONETTI : Quand des réfugiés mécontents en appellent à M.

  3   Seselj, qui pouvait être le sauveur qui allait peut-être tout régler. M.

  4   Seselj, à l'époque, a un parti politique qui a un député. Comment pouvait-

  5   il, alors même qu'il semblait même ne pas être d'accord avec M. Milosevic

  6   sur un certain nombre de sujets, comment pouvait-il résoudre ce problème

  7   d'ampleur nationale serbe ? Vous, est-ce que vous avez réfléchi à ça ou

  8   personne n'y avait réfléchi ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez-vous, les gens, je ne sais pas à quoi

 10   ils pensent, ce qu'ils ont à l'esprit, mais ils ont demandé que Vojislav

 11   Seselj se déplace, qu'il vienne et qu'il résolve leurs problèmes. Je vous

 12   ai dit la première fois ils ont demandé ça, et une femme est venue de Ruma

 13   et elle a fait cette réunion avec eux. Ils étaient mécontents, puis ils ont

 14   demandé de nouveau qu'il vienne, et je suppose qu'on a organisé cette

 15   réunion avec Seselj, et le 6 mai il est venu à Hrtkovci.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Dernière question, vous-même, M. Seselj, vous en

 17   aviez entendu parler, vous saviez qui c'était ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'en ai entendu et j'ai vu à la

 19   télévision.

 20   M. LE JUGE ANTONETTI : Et c'était qui ? Vous l'avez vu à la télévision,

 21   quelle impression il vous donnait ? Comme quelqu'un qui pouvait régler tous

 22   les problèmes, qui était un opposant à

 23   Milosevic ? Qui était-il, d'après vous ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] A mes yeux, c'était un homme politique comme

 25   tous les autres à l'assemblée. Je ne pensais du mal d'aucun d'entre eux.

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Bon. Bien.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne pensais pas de mal quand je regardais ça

 28   à la télévision.

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  1   M. SESELJ : [interprétation]

  2   Q.  Très bien. Alors cette femme qui est venue de Ruma pour cette réunion à

  3   Hrtkovci, c'était qui ?

  4   R.  J'ai dit que je ne connaissais pas son nom. 

  5   Q.  Vous avez dit quel étai membre du Parti radical serbe ?

  6   R.  Oui, c'est ce que j'ai dit.

  7   Q.  Mais une femme du Parti radical serbe qui se rend de Ruma à Hrtkovci,

  8   comment est-ce qu'elle pouvait aider les réfugiés ?

  9   R.  Mais c'est la raison pour laquelle les gens ont demandé que Seselj

 10   vienne.

 11   Q.  De Ruma on a vu arriver Divna Icitovic, qui était la présidente de la

 12   municipalité de Ruma, n'est-ce pas ? Mais son nom vous l'avez entendu ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Mais vous étiez actif dans la commune locale, vous ne connaissez pas le

 15   nom de la présidente de la municipalité de Ruma, comment est-ce possible ?

 16   R.  Vous, vous savez qui c'était, mais je ne sais pas vraiment, je ne sais

 17   pas. J'ai dit dans ma déclaration je ne savais pas qui était à la réunion.

 18   Q.  Je ne sais pas, ce sont mes enquêteurs qui l'ont trouvé. Ils l'ont

 19   appris. Mais vous, vous auriez dû le savoir puisque vous vivez dans la

 20   municipalité de Ruma, vous étiez actif dans la commune locale, d'office par

 21   la nature des choses, collaborer avec la municipalité. Et puisque vous

 22   étiez en train de rencontrer des problèmes importants à Hrtkovci, Divna

 23   Icitovic, la présidente de la municipalité s'est rendue à Hrtkovci, elle a

 24   essayé de calmer le jeu, d'avoir des entretiens avec les réfugiés et

 25   trouver des solutions.

 26   R.  Je ne sais pas de quoi elle a parlé avec eux, mais je sais que les gens

 27   ont demandé de nouveau qu'il y ait une réunion.

 28   Q.  Est-ce que je suis venu à une réunion ?

Page 10684

  1   Mme LE JUGE LATTANZI : J'ai une question pour le témoin.

  2   Monsieur le Témoin, cette dame qui est venue de Ruma, est la même qui a

  3   participé à la manifestation du 6 mai quand M. Seselj est venu là ou non ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais comme j'ai dit, cette réunion, cette

  5   première réunion, quand elle est venue, quand il y a eu cette réunion et

  6   quand il y avait les radicaux, je n'y étais pas et je ne connais pas cette

  7   dame. Je ne sais pas comment je peux comparer si c'était la même ou pas.

  8   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, vous étiez au discours de M.

  9   Seselj, vous vous rappelez. Tout d'abord, il y a M. Zilic qui est

 10   intervenu. Après M. Zilic, il y a une dame qui est intervenue, cette dame

 11   s'appelle Marisa Pacanin.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai déclaré que je ne connaissais pas le nom

 13   de la femme. Je l'ai dit dans ma déclaration.

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Voilà que maintenant M. Seselj dit que la dame qui

 15   est venue de Ruma, elle s'appelle Divna Icitovic. Bon. Alors elle serait

 16   venue avant le 6 mai, avant le 6 mai, c'est Divna Icitovic qui vient, et le

 17   6 mai, on a Pacanin. On a donc deux dames qui viennent de Ruma. C'est

 18   possible, c'est impossible, ou c'est la même dame qui est venue ? Qu'est-ce

 19   que vous en dites ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai dit que je n'étais pas

 21   présent pendant la première réunion, je ne sais pas. Comment --

 22   M. LE JUGE ANTONETTI : Très bien.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais le témoin dépose comme s'il savait, comme

 24   s'il y avait été, et il affirme que c'était une réunion avec des activistes

 25   du Parti radical serbe. J'attire votre attention là-dessus.

 26   M. SESELJ : [interprétation]

 27   Q.  Enfin prenons une hypothèse, les réfugiés demandent que je me rende à

 28   cette réunion. Je le fais, je fais un rassemblement. Est-ce que le

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  1   rassemblement c'est la même chose qu'une réunion ? 

  2   R.  Non, c'était un rassemblement.

  3   Q.  Mais est-ce que les gens ont pu me parler ou c'était moi, seul, qui

  4   parlais, je me suis mis dans la voiture, j'ai serré les mains, puis je suis

  5   reparti pour Belgrade ? Est-ce que pour des gens réunis, pour le public,

  6   c'était possible de s'adresser à moi ?

  7   R.  Non.

  8   Q.  Mais alors, ce n'était pas une réunion ?

  9   R.  Alors, très bien, c'était un rassemblement.

 10   Q.  Donc ce n'était pas une réunion.

 11   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur le Témoin, là aussi il y a quelque chose

 12   qui n'est pas logique. Si M. Seselj vient à la demande des Serbes expulsés

 13   de Croatie mécontents, à ce moment-là, dans le canevas, M. Seselj arrive,

 14   fait son discours, et au moins, au minimum, rencontre ces gens pour

 15   discuter avec eux de leurs problèmes. Or, il arrive en voiture, on a eu

 16   beaucoup de détails, même à un moment donné il y a un pneu qui a crevé, ça

 17   veut dire qu'on est au courant de tout. Il fait son discours, et il repart.

 18   Donc manifestement, il n'a pas discuté avec les gens, et c'est là où il y a

 19   quelque chose qui n'est pas logique.

 20   S'il vient à la demande de la population parce qu'il va régler le problème,

 21   il doit au minimum discuter avec eux. Or, il arrive avec plusieurs

 22   voitures, il y a la sécurité, et il repart. Comment vous expliquez cela ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est vrai qu'il a tenu un discours et qu'il

 24   a donné aux gens les lignes directrices par rapport à ce qu'ils devraient

 25   faire. Et lorsqu'il a terminé, je me suis retourné et je suis parti. Je ne

 26   sais pas s'il est resté à parler avec les gens ou pas, vraiment je ne le

 27   sais pas. Mais il a donné les lignes directrices aux gens, leur indiquant

 28   ce qu'ils devaient faire.

Page 10686

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je poursuivre ?

  2   M. SESELJ : [interprétation]

  3   Q.  D'accord. Donc moi depuis le podium, j'aurais dit prétendument que tous

  4   les enfants des mariages mixtes devraient être tués. Est-ce que ceci a été

  5   reçu par des applaudissements frénétiques du public par des ovations?

  6   Comment est-ce que les gens ont réagi à ma prétendue déclaration qu'il

  7   fallait tuer tous les enfants des mariages mixtes ?

  8   R.  Je ne sais pas comment les gens ont réagi, mais je sais que j'ai été

  9   horrifié lorsque j'ai entendu cela.

 10   Q.  Est-ce qu'il y a eu des applaudissements, des ovations ?

 11   R.  Non.

 12   Q.  Est-ce qu'il y a eu un grand nombre de femmes lors de ce rassemblement

 13   ?

 14   R.  Oui, il y a eu beaucoup de femmes.

 15   Q.  Comment est-ce les femmes ont réagi lorsqu'elles ont entendu que j'ai

 16   proposé que l'on tue les enfants des mariages

 17   mixtes ? Elles étaient ravies, elles sautaient de joie ?

 18   R.  Je ne dis pas qu'elles étaient ravies, j'ai dit que j'ai été horrifié.

 19   Q.  Ces femmes autour de vous, à quoi ressemblaient-elles ? Est-ce qu'il y

 20   a eu beaucoup d'enfants lors de ce rassemblement ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Comment ça se fait qu'il n'y a pas eu beaucoup d'enfants ? Il y en a

 23   toujours, surtout dans des villages.

 24   R.  Il n'y en avait pas.

 25   Q.  Pas d'enfants ?

 26   R.  Juste quelques-uns.

 27   Q.  Vous inventez, il y a eu beaucoup d'enfants. Ces enfants, vous dites

 28   qu'il y en avait quelques-uns; est-ce que ces enfants étaient ravis

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  1   lorsqu'ils ont entendu que je proposais que l'on tue les enfants issus de

  2   mariages mixtes ?

  3   R.  Je n'ai pas parlé avec ces enfants ni avec d'autres personnes. Comme je

  4   l'ai dit, lorsque j'ai entendu cela, j'ai été horrifié et je suis rentré

  5   chez moi.

  6   M. LE JUGE ANTONETTI : Vous avez été horrifié. Tout le monde est horrifié

  7   en entendant ce type de paroles. Il se trouve que nous avons eu un témoin

  8   avant vous. Ce témoin a un mariage mixte. Il avait deux enfants. Ce témoin

  9   était là, il a entendu le discours. Il ne nous a pas dit qu'il avait

 10   entendu cela. Alors, comment vous expliquez que lui n'entend pas et que

 11   vous, vous entendez, alors que s'il y a quelqu'un qui doit être concerné,

 12   c'est bien lui ? Comment expliquer ça ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas comment il a fait pour ne pas

 14   l'entendre ou ne pas le dire. Mais, Monsieur le Président, c'est ce qui a

 15   été dit lors de ce rassemblement.

 16   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, on va arrêter. J'ai une décision à

 17   lire, qui peut prendre un certain temps. Le greffier nous fera le décompte

 18   du temps qui reste demain à M. Seselj, qui poursuivra son contre-

 19   interrogatoire.

 20   Monsieur, nous nous reverrons demain à 14 heures 15. Je vous renouvelle les

 21   recommandations. Vous n'avez pas à avoir quelque contact que ce soit avec

 22   quiconque pour parler de l'audience parce que l'audience va se poursuivre

 23   demain. Donc vous allez quitter la salle d'audience pour me permettre de

 24   lire la décision orale. Voilà.

 25   [Le témoin quitte la barre]

 26   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, en début d'après-midi, vous nous

 27   avez parlé de l'audition du témoin qui va venir après celui-ci - je ne

 28   donne pas le nom, parce que nous avons été saisis de demande de mesures de

Page 10688

  1   protection - c'est le VS-1134. Alors, voilà la décision orale de la

  2   Chambre, je vais la lire lentement.

  3   Vu la requête de l'Accusation déposée le 25 septembre 2008 aux fins

  4   d'admettre la déclaration écrite du Témoin VS-1134 en date du 11 septembre

  5   2008 en vertu de l'article 92 ter;

  6   Vu la réponse et l'opposition formulée oralement par l'accusé en audience

  7   le 14 octobre 2008;

  8   Attendu en outre que l'accusé a réitéré à plusieurs reprises son opposition

  9   de principe à l'application de l'article 92 ter du Règlement;

 10   Attendu que la déclaration écrite de ce témoin se rapporte à la présence

 11   d'unités de volontaires à Vukovar ainsi que sa propre présence à Ovcara -

 12   attendez, je vais consulter la juriste de la Chambre quelques instants.

 13   [La Chambre de première instance et la Juriste se concertent]

 14   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui, alors, j'ai demandé à la juriste de la Chambre,

 15   parce que le témoin, il s'appelle Milorad Vosnovic [phon], et lui, il ne

 16   vient pas demain, il vient le 6 novembre. Donc c'est pour ça que je voulais

 17   vérifier cela.

 18   Alors, je reprends :

 19   Attendu que la déclaration écrite de ce témoin se rapporte à la présence

 20   d'unités de volontaires à Vukovar ainsi que sa propre présence à Ovcara;

 21   Attendu que la Chambre estime que cette déclaration est pertinente, car

 22   elle se rapporte clairement à des faits allégués dans l'acte d'accusation;

 23   Attendu que dans l'esprit d'efficacité et de rapidité recherché par

 24   l'article 92 ter, il est dans l'intérêt de la justice de permettre que ce

 25   témoin dépose devant la Chambre sur le fondement de l'article 92 ter du

 26   Règlement.

 27   Par ces motifs, premièrement, le témoin Milorad Vosnovic déposera le 6

 28   novembre 2008 en application de l'article 92 ter, sur la base de sa

Page 10689

  1   déclaration du 11 septembre 2008. Deuxièmement, la Chambre décide

  2   d'attribuer 30 minutes à l'Accusation pour remplir les formalités requises

  3   en application de l'article 92 ter. Troisièmement, la Chambre décide que

  4   l'accusé disposera d'une heure pour le contre-interrogatoire du témoin. Et

  5   quatrièmement, la Chambre décide que la déclaration écrite en date du 11

  6   septembre 2008 ne sera admise qu'après que les critères formels de

  7   l'article 92 ter auront été remplis. Donc voilà pour ce témoin, qui lui,

  8   déposera le 6 novembre.

  9   Mais avant cela, il faut que je vous en informe, Monsieur Seselj, parce que

 10   c'est urgent aussi. Je voulais aborder le témoin qui vient avant Milorad

 11   Vosnovic.

 12   C'est pour ça que vous vous levez, Madame ?

 13   Mme DAHL : [interprétation] Monsieur le Président, j'essaie de faire

 14   correspondre le pseudonyme et les noms corrects de témoins. Est-ce que nous

 15   pouvons passer à huis clos partiel pendant quelques instants, s'il vous

 16   plaît.

 17   M. LE JUGE ANTONETTI : Oui. Monsieur le Greffier.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Messieurs les Juges, nous sommes à huis

 19   clos partiel.

 20   [Audience à huis clos partiel]

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  4   [Audience publique]

  5   M. LE JUGE ANTONETTI : Monsieur Seselj, je dois vous indiquer qu'il y a

  6   quelques jours, le bureau du Procureur nous a adressé une requête afin que

  7   le témoin Vesna Bosanac soit entendue selon la procédure de l'article 92

  8   ter. Cette requête était en cours de traduction, alors je ne sais pas si

  9   elle vous a été adressée dans votre langue, mais si elle ne vous a pas été

 10   adressée, je vous informe que le Procureur a donc pris une nouvelle

 11   déclaration il y a quelques jours de Vesna Bosanac, et le Procureur demande

 12   à ce que celle-ci soit entendue selon la règle 92 ter, étant précisé que le

 13   Procureur a prévu également pour vous du temps pour votre contre-

 14   interrogatoire, ce qui explique que cette dame est prévue sur deux jours.

 15   Alors la Chambre vous demande de nous dire aujourd'hui, oralement, quelle

 16   est votre position.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Comme vous le savez, je m'oppose absolument à

 18   l'application de l'article 92 ter, car ceci entrave de manière importante

 19   mes droits et rend le procès impossible.

 20   Deuxièmement, le bureau du Procureur a perdu beaucoup de temps en

 21   faisant venir les témoins qui déposent au sujet des crimes, alors qu'il

 22   s'agit souvent des événements qui ne sont plus dans l'acte d'accusation,

 23   donc ils ont ainsi perdu du temps. Et s'agissant des localités qui sont

 24   encore dans l'acte d'accusation, ils demandent 92 ter. Et même si c'était

 25   approprié, ce ne serait pas du tout rationnel d'agir ainsi, et compte tenu

 26   du fait qu'ainsi mes droits sont violés, s'agissant de l'application de 92

 27   ter, je ne souhaite même pas entrer dans le débat. Cet article n'existe pas

 28   pour moi.

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  1   M. LE JUGE ANTONETTI : Bien. Alors, que je vous dise j'ai lu de manière

  2   très attentive la déclaration 92 ter de ce témoin, Mme Vesna Bosanac. Dans

  3   sa déclaration, à aucun moment il n'est fait état de vous. Les membres du

  4   Parti radical serbe ne sont jamais mentionnés. Elle va témoigner sur ce qui

  5   s'est passé à l'hôpital qui a été pilonné, et elle va également, dans sa

  6   déclaration, évoquer tout ce qu'elle a fait en s'adressant aux autorités

  7   croates et aux autorités de la JNA. Et ensuite, elle va relater ce qui lui

  8   est arrivé lorsque l'hôpital a été pris. Voilà. Voilà le contenu de ce

  9   témoignage. Alors bon, la Chambre a enregistré vos observations, et nous

 10   vous dirons quelle est notre décision collégiale en la matière.

 11   Oui, Monsieur Seselj.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, la situation au sujet

 13   d'Ovcara est très, très floue, et vous et vos collègues, vous avez pu le

 14   constater déjà. Même le procès contre Mrksic et les autres n'a rien

 15   clarifié, finalement. Mrksic a été condamné sur la base de suppositions

 16   seulement, il n'y a pas de faits indiquant qui a décidé de faire aller les

 17   prisonniers à Ovcara, où est le registre de leur remise, quel était le rôle

 18   des quatre colonels du service de sécurité qui ont été réactivés même s'ils

 19   avaient été en retraite et qui sont allés sans papiers à Vukovar, qui a

 20   décidé d'exécuter les prisonniers et qui gardant le silence pendant des

 21   mois après l'exécution.

 22   S'agissant du colonel Milorad Vojnovic, vous lui permettez de déposer

 23   en vertu de 92 ter. Il était le commandant de la ville à laquelle

 24   appartenait Ovcara. Et à partir du 23 novembre, pendant plusieurs mois, il

 25   était commandant de Vukovar. Alors plutôt que d'être ici comme accusé, vous

 26   lui permettez de déposer ici en vertu de l'article 92 ter contre moi, qui

 27   ne savait même pas ce qui se passait là-bas.

 28   Si vous pensez que c'est la bonne manière de procéder, allez-y

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  1   jusqu'au bout, mais il vient déposer ici contre moi, et sa police militaire

  2   de sa brigade était à Ovcara jusqu'au dernier moment. Et ils ont remis les

  3   détenus aux gens là-bas sans aucune trace écrite et ces gens-là ont été

  4   exécutés, et il vient déposer contre moi. C'est possible aussi. Allez-y.

  5   Mais moi, je ne vais pas lui poser de questions s'il dépose en vertu de 92

  6   ter.

  7   M. LE JUGE ANTONETTI : -- vient déposer contre vous, raison de plus pour

  8   vous de le contre-interroger, raison de plus de le contre-interroger. Le 92

  9   ter, le Procureur dit : Voilà, il y a une déclaration, je vais demander

 10   qu'il confirme la déclaration, je demande l'admission de telle ou telle

 11   pièce. Voilà. Et après, vous avez le champ libre pour poser des questions.

 12   Vous ne voulez pas. Bon, vous ne poserez pas vos questions, mais moi, je

 13   poserai les questions qui sont nécessaires dans l'intérêt de la justice, et

 14   je ferai mon travail même si vous ne dites rien.

 15   Donc j'ai pris bonne note de ce que vous avez dit pour ce témoin et

 16   les Juges poseront les questions. Nous avons des déclarations et nous

 17   vérifions tout, et vous vous en êtes rendu compte déjà. Nous ne sommes pas

 18   là pour laisser dans l'ombre des points importants, parce que nous avons

 19   une très grave responsabilité. C'est de dire, à la fin du procès, si vous

 20   êtes coupable ou si vous êtes innocent. C'est une responsabilité énorme, et

 21   nous n'avons pas droit à l'erreur. Et c'est pour ça que nous poserons les

 22   questions si vous ne faites pas le contre-interrogatoire. Voilà.

 23   Alors demain, nous allons poursuivre -- vous allez poursuivre le contre-

 24   interrogatoire. Il vous reste pour ce témoin une heure 30 pour terminer, et

 25   une fois que le témoin aura donc terminé le contre-interrogatoire, il y

 26   aura peut-être des questions supplémentaires, je ne sais pas, et après

 27   quoi, nous entamerons avec le témoin suivant qui est annoncé. Voilà.

 28   Je m'excuse auprès des interprètes d'avoir pris cinq minutes de plus sur

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  1   leur temps, et ils m'en excuseront.

  2   Donc nous nous retrouverons tous demain à 14 heures 15. Je vous remercie.

  3   --- L'audience est levée à 19 heures 05 et reprendra le mercredi 15 octobre

  4   2008, à 14 heures 15.

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