LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Richard May, Président
M. le Juge Mohamed Bennouna
M. le Juge Patrick Robinson

Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Ordonnance rendue le :
19 octobre 1999

LE PROCUREUR

C/

DRAGAN KOLUNDZIJA

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ORDONNANCE AUX FINS DE MESURES DE PROTECTION

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Le Bureau du Procureur :

M. Grant Niemann
M. Kapila Waidyaratne
M. Michael Keegan

Le Conseil de la Défense :

M. Dusan Vucicevic

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le "Tribunal international"),

VU la « Requête du Procureur aux fins de protéger les victimes et les témoins », déposée par le Bureau du Procureur (« l’Accusation ») le 1er octobre 1999 (la « Requête »), aux fins d’obtenir certaines mesures de protection pour les victimes et les témoins qui pourraient être cités au procès,

ATTENDU que la Défense ne s’est pas opposée aux mesures de protection demandées,

ATTENDU que l’article 20 du Statut du Tribunal international (le « Statut ») enjoint la Chambre de première instance de veiller à ce que les droits de l’accusé soient pleinement respectés et que la protection des victimes et des témoins soient dûment assurée pendant le procès,

VU les droits de l’accusé tels que définis à l’article 21 du Statut et, en particulier, son droit à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense,

ATTENDU que l’article 22 du Statut stipule que le Tribunal international prévoit dans ses règles de procédure et de preuve (le « Règlement ») des mesures de protection des victimes et des témoins,

VU les dispositions des articles 69, 75 et 79 du Règlement relatives à la protection des témoins,

VU, EN OUTRE, les obligations imposées par le Code de déontologie pour les avocats comparaissant devant le Tribunal international et les codes de tout organe ou organisation nationale dont le conseil dépend éventuellement,

EN APPLICATION des articles 20 et 22 du Statut et des articles 69, 75 et 79 du Règlement,

ORDONNE ce qui suit :

1) Sous réserve de nouvelles requêtes aux fins de mesures de protection pour des témoins, l’Accusation fournira immédiatement à la Défense les copies non expurgées de toutes les déclarations préalables de témoins jointes à l’Acte d’accusation initial ou à l’Acte d’accusation modifié lorsque confirmation a été demandée,

2) l’Accusation, l’accusé, son conseil et leurs représentants ne divulgueront pas au public, aux médias ou à des membres de leurs familles et à des associés l’identité, les coordonnées ou toute autre donnée permettant l’identification des témoins, sauf dans la mesure où cette divulgation est nécessaire à la préparation du dossier,

3) l’Accusation, l’accusé, son conseil et leurs représentants ne divulgueront pas au public, aux médias ou à des membres de leurs familles et à des associés la teneur, en tout ou en partie, des déclarations préalables de témoins que le Procureur communique en application de son obligation de communication des documents, sauf dans la mesure où cette divulgation est nécessaire à la préparation du dossier,

4) l’Accusation et la Défense tiendront un registre indiquant le nom, l’adresse et la position de chaque personne ou entité qui reçoit une copie d’une déclaration de témoin ainsi que la date de la communication. S’il est fait état d’une violation des dispositions de la présente ordonnance, l’Accusation ou la Défense en informeront la Chambre de première instance, laquelle pourra soit examiner les allégations de violations, soit renvoyer l’affaire à une personne désignée, telle que le juge de permanence. Si la Chambre délègue cette affaire au juge de permanence, ce dernier examinera le registre des communications de documents et tirera des conclusions factuelles dont il fera part à la Chambre en lui proposant les mesures appropriées à prendre,

5) l’Accusation et la Défense informeront les personnes qui auront reçu une copie desdites déclarations qu’elless ne peuvent les reproduire, sous peine de se rendre coupable d’outrage au Tribunal, et qu’elles sont tenues de restituer lesdits documents dès qu’elles n’en auront plus l’utilité,

6) l’Accusation et la Défense vérifieront que les personnes à qui une copie des déclarations préalables de témoin aura été fournie respectent scrupuleusement leurs obligations de ne pas les reproduire et de les restituer dès qu’elles n’en auront plus l’utilité,

7) la Défense ne peut entrer en contact avec un témoin ou un témoin potentiel, dont l’identité lui a été communiquée par l’Accusation, ou avec une personne dont la ou les déclaration(s) préalable(s) écrite(s) ou le témoignage confidentiel a(ont) été communiqué(es) par l’Accusation, que sur notification écrite préalable à l’Accusation dans des délais raisonnables.

Aux fins de la présente ordonnance, le terme « public » signifie et inclut toutes personnes, gouvernements, organisations, entités, clients, associations et groupes, autres que les Juges du Tribunal international et les membres du Greffe, de l’Accusation et de la Défense. « Le public » comprend expressément, mais sans s’y limiter, la famille, les amis et les associés de l’accusé, les accusés dans d’autres affaires ou actions traduites devant ce Tribunal, les conseils de la défense dans d’autres affaires portées devant ce Tribunal, les médias et les journalistes.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le Président de la Chambre de première instance
(signé)
M. le Juge Richard May

Fait le 19 octobre 1999
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]