Affaire No : IT-02-54-T

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Richard May, Président
M. le Juge Patrick Robinson
M. le Juge O-Gon Kwon

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
21 mars 2002

LE PROCUREUR
C/
SLOBODAN MILOSEVIC

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DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE DE L’ACCUSATION AUX FINS DE DÉPOSER À TITRE CONFIDENTIEL LES LISTES DE TÉMOINS ET DE PIÈCES À CONVICTION EN APPLICATION DE L’ARTICLE 65 ter ET LES DÉCLARATIONS DE TÉMOINS EN APPLICATION DE L’ARTICLE 66 A) ii)

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Le Bureau du Procureur :

Mme Carla Del Ponte
Mme Hildegard Uertz-Retzlaff
M. Geoffrey Nice M. Dermot Groome

L’accusé :

Slobodan Milosevic

Amici Curiae :

M. Stevan Kay
M. Branislav Tapuskovic
M. Mischa Wladimiroff

 

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 («le Tribunal international»),

VU la «Requête de l’Accusation aux fins de déposer à titre confidentiel les listes de témoins et de pièces à conviction en application de l’article 65 ter du Règlement et les déclarations de témoins en application de l’article 66 A) ii)» déposée à titre confidentiel par le Bureau du Procureur («l’Accusation») le 18 mars 2002 (la «Requête»), demandant qu’en vertu de l’article 75, soit ordonné ce qui suit :

a) que l’Accusation soit autorisée à déposer à titre confidentiel sa liste de témoins en application de l’article 65 ter E) ii),

b) que l’Accusation soit autorisée à déposer à titre confidentiel sa liste de pièces à conviction en application de l’article 65 ter E) iii),

c) que l’Accusation soit autorisée à déposer à titre confidentiel ses déclarations de témoins en application de l’article 66 A) ii),

d) que jusqu’à la levée de la confidentialité desdites pièces, l’accusé et les amici curiae s’abstiennent de communiquer les pièces au public, sauf sous certaines conditions spécifiques ; et

e) que l’accusé et les amici curiae tiennent le registre des personnes à qui les pièces sont fournies et leur fassent signer un accord de non-divulgation,

ATTENDU que les pièces devant être communiquées en vertu des articles 65 ter E) ii), 65 ter E) iii) et 66 A) ii) doivent l’être le 30 avril 2002 au plus tard,

VU la «Décision relative à la Requête de l’Accusation aux fins de mesures de protection provisoires en application de l’article 69 du Règlement» rendue le 19 février 2002 («la Décision»), la «Décision relative à la Requête de l’Accusation aux fins de mesures de protection en faveur de victimes et de témoins», rendue le 19 mars 2002 («la deuxième Décision») et la «Décision relative à la Requête de l’Accusation aux fins d’obtenir une prorogation du délai dont elle dispose pour approcher des témoins», rendue le 5 mars 2002 («Décision relative à la prorogation de délai») s’agissant des pièces jointes accompagnant l’acte d’accusation relatif à la Bosnie, aux termes desquelles la Chambre de première instance a ordonné ce qui suit :

a) la non-divulgation au public des pièces jointes en application de l’article 53 A) du Règlement ;

b) des mesures de protection en faveur de certains témoins identifiés, en application de l’article 69 A) ; et

c) que l’Accusation aura jusqu’au 5 avril 2002 pour entrer en rapport avec les témoins dont les déclarations faisaient partie des pièces jointes, afin de lui permettre de présenter de nouvelles requêtes spécifiques aux fins de mesures de protection provisoires en application de l’article 69 A) du Règlement,

ATTENDU que si une ordonnance faisant droit à la requête de l’Accusation était rendue, il ne serait pas porté préjudice aux droits de l’accusé aux motifs suivants :

a) l’accusé se verra signifier les listes et déclarations en question sous une forme non expurgée, sous réserve de toutes ordonnances de la Chambre de première instance imposant des mesures de protection

b) il pourra communiquer lesdites pièces dans la mesure où cela est directement et spécifiquement nécessaire à la préparation et à la présentation de son dossier; et

c) sous réserve des ordonnances portant mesures de protection que la Chambre de première instance rendra en temps voulu, les pièces sur lesquelles porte la Requête seront divulguées au public dans un délai bien défini,

ATTENDU qu’il serait préférable que l’Accusation détermine le plus rapidement possible les mesures de protection qu’elle souhaite demander en faveur des témoins qu’elle entend appeler dans les parties du procès qui seront consacrées à la Croatie et à la Bosnie ;

ATTENDU que, conformément à la deuxième Décision, la Chambre de première instance n’estime pas qu’il soit utile, dans l’absolu, d’imposer aux amici curiae et à l’accusé de signer des accords de non-divulgation et de tenir des registres de non-divulgation,

EN APPLICATION DE L’ARTICLE 75 du Règlement de procédure et de preuve («le Règlement») du Tribunal international,

ORDONNE CE QUI SUIT :

1) autorise l’Accusation à déposer à titre confidentiel les pièces relevant des articles 65 ter E) ii, 65 ter E) III) et 66 A) ii) le 30 avril 2002,

2) autorise l’Accusation à présenter toute demande de mesures de protection qu’elle souhaitera en faveur de certains témoins identifiés dans les pièces qui doivent être déposées à titre confidentiel le 1er juin 2002 au plus tard,

3) après cette date, sous réserve des ordonnances que la Chambre de première instance aura éventuellement rendues, l’Accusation rendra publiques toutes les pièces qu’elle aura déposées en application des articles 65 ter E) ii), 65 ter E) iii) et 66 A) ii) du Règlement,

4) jusqu’à la date où les pièces en question seront rendues publiques, l’accusé et les amici curiae ne les communiqueront pas au public, excepté dans la mesure où pareille divulgation est directement et particulièrement nécessaire à la préparation et à la présentation de sa défense, ou dans la mesure où les amici curiae convainquent la Chambre de première instance de la nécessité de pareille divulgation dans l’exercice de leur fonction consistant à l’assister.

Aux fins de la présente Décision, on entend par le «public» toutes les personnes physiques, États, organisations, entités, clients, associations et groupes, autres que les Juges du Tribunal, le personnel du Greffe (qu’il soit assigné aux Chambres ou au Greffe), le Procureur et l’accusé. Le «public» comprend en particulier, sans s’y limiter, la famille, les amis et les associés de l’accusé, les accusés dans d’autres affaires ou actions devant le Tribunal, et le Conseil de la Défense dans d’autres affaires ou actions devant le Tribunal.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

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Richard May
Président de la Chambre de première instance

Fait le 21 mars 2002
La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]