Affaire n° : IT-02-54-T

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit :
M. le Juge Richard May, Président
M. le Juge Patrick Robinson
M. le Juge O-Gon Kwon

Assistée de :
M. Hans Holthuis, Greffier

Décision rendue le :
13 janvier 2004

LE PROCUREUR

c/

SLOBODAN MILOSEVIC

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DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE DE L’ACCUSATION AUX FINS D’ADMISSION, EN APPLICATION DE L’ARTICLE 92 BIS D) DU RÈGLEMENT, DES COMPTES RENDUS DES DÉPOSITIONS DES TÉMOINS B-1032, B-1034 et B-1083

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Le Bureau du Procureur :

M. Geoffrey Nice
Mme Hildegard Uertz-Retzlaff
M. Dermot Groome

L’Accusé :

Slobodan Milosevic

Les Amici Curiae :

M. Steven Kay
M. Branislav Tapuskovic
M. Timothy L.H. McCormack

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis 1991 (le « Tribunal international »),

Vu la requête aux fins d’admission, en application de l’article 92 bis D) du Règlement, de comptes rendus de dépositions relatives aux événements de Prijedor (Prosecution Motion for Admission of Transcripts Pursuant to Rule 92 bis D) in Relation to Events in Prijedor), déposée à titre confidentiel le 12 décembre 2003 par l’Accusation (« la « Requête »), par laquelle elle demande notamment à la Chambre de première instance de verser au dossier, en application de l’article 92 bis D) du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international (le « Règlement »), les comptes rendus des dépositions des témoins B-1032 et B-1034, ainsi que les pièces à conviction y afférentes, sans que lesdits témoins comparaissent en vue d’un contre-interrogatoire, et le compte rendu de la déposition du témoin B-1083 portant sur les événements survenus à Prijedor, ainsi que les pièces à conviction y afférentes, (l’Accusation ayant reconnu que ce témoin devait être soumis à un contre-interrogatoire),

ATTENDU que l’Accusation fait valoir que ces éléments de preuve devraient être admis car 1) ils contiennent des informations qui tendent à prouver les crimes commis sur le terrain, et non les actes et le comportement de l’Accusé, et 2) ne sont pas d’une importance cruciale pour la cause de l’Accusation et ne se rapportent pas directement à l’Accusé au point que la Chambre de première instance devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et exclure les comptes rendus de dépositions,

ATTENDU que les paragraphes D) et E) de l’article 92 bis du Règlement disposent que la Chambre de première instance 1) peut verser au dossier le compte rendu d’un témoignage entendu dans le cadre de procédures menées devant le Tribunal international et qui tend à prouver un point autre que les actes et le comportement de l’accusé et 2) décide s’il convient de verser le compte rendu au dossier, en tout ou en partie, ou s’il convient d’ordonner que le témoin comparaisse pour être soumis à un contre-interrogatoire,

ATTENDU que les informations contenues dans les comptes rendus de dépositions et les pièces à conviction y afférentes ne tendent pas à prouver les actes ou le comportement de l’accusé et qu’elles sont dès lors recevables en application de l’article 92 bis D) du Règlement,

ATTENDU que le témoin B-1032 a été contre-interrogé par la Défense dans le cadre d’une précédente affaire, et que les informations contenues dans le compte rendu de son témoignage et les pièces à conviction y afférentes ont trait à des questions qui pourraient revêtir une importance cruciale pour la défense de l’Accusé, mais que ces questions ont été dûment couvertes lors des contre-interrogatoires antérieurs (opinion que ne partage pas le Juge Robinson), sauf pour ce qui est des références à la JNA (ou à l’une de ses unités) figurant dans le témoignage antérieur et les pièces à conviction y afférentes,

ATTENDU que dans sa Requête, l’Accusation fait valoir que le témoin B-1034 n’ayant pas été « un témoin direct des faits, un doute subsiste » quant à la fiabilité de sa déposition antérieure,

ATTENDU que l’Accusation a reconnu que le témoin B-1083 devrait comparaître pour être soumis à un contre-interrogatoire,

VU les articles 20 et 21 du Statut du Tribunal international,

ATTENDU que l’Accusé s’oppose en règle générale à l’admission d’éléments de preuve présentés en application de l’article 92 bis du Règlement,

EN APPLICATION des articles 54 et 92 bis D) et E) du Règlement,

ORDONNE ce qui suit :

    1. Le compte rendu de la déposition du témoin B-1032, ainsi que les pièces à conviction y afférentes, seront versés au dossier, sans que ledit témoin ait à comparaître en vue d’un contre-interrogatoire, à condition que les passages du compte rendu ainsi que des pièces à conviction y afférentes où il est question de la JNA (ou de l’une de ses unités) soient supprimés [opinion que ne partage pas le Juge Robinson], faute de quoi le témoin devra se présenter pour se soumettre à un contre-interrogatoire.
    2. Le compte rendu de la déposition du témoin B-1034, ainsi que les pièces à conviction y afférentes, ne seront pas versés au dossier.
    3. Le compte rendu de la déposition du témoin B-1083, ainsi que les pièces à conviction y afférentes, seront versés au dossier sous réserve que le témoin puisse être contre-interrogé.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

Le 13 janvier 2004
La Haye (Pays-Bas)

Le Président de la Chambre de première instance
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Richard May

[Sceau du Tribunal]