Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Lundi 9 septembre 2002.)

2 (L'audience est ouverte à 9 heures 05.)

3 (Audience publique.)

4 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Ryneveld, nous poursuivons

5 l'audition de M. Zdrilic; elle avait commencé lundi de la semaine

6 dernière. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de faire prononcer la

7 déclaration solennelle au témoin.

8 (Interrogatoire principal du témoin, M. John M. Zdrilic, par M.

9 Ryneveld.)

10 M. Ryneveld (interprétation): Si je me souviens bien, à la fin de la

11 dernière journée d'audience, vous avions dû suspendre votre audition et, à

12 ce moment-là, vous discutiez avec nous d'un document que vous aviez

13 préparé en tant qu'annexe JZ1. Je pense que vous aviez dit, à l'époque,

14 que c'était le nom qui avait été donné d'une famille précise. Vous aviez,

15 au fond, expliqué que ce ceci représentait l'arbre généalogique d'une

16 famille. Et puis, vous avez expliqué la légende, les croix représentant

17 les personnes portées disparues.

18 M. Zdrilic (interprétation): Oui.

19 Question: Et les parties soulignées ou en rayé, qu'est-ce qu'elles

20 représentent?

21 Réponse: Ce sont les résultats de l'analyse ADN, faite dans un laboratoire

22 espagnol, de ces restes venant de Batajnica, en Serbie.

23 Question: Vous avez fourni quatre de ces annexes; permettez-moi d'en

24 aborder une dernière: JZ2, je pense que vous l'avez. Serait-il possible de

25 la placer sur le rétroprojecteur?

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1 (Intervention de l'huissière.)

2 Très rapidement, Monsieur Zdrilic, pourriez-vous dire aux Juges ce que

3 représente ce document-ci?

4 Réponse: Le document JZ-2 est notre arbre généalogique de Vesel et Hava

5 Berisha –nous avons mentionné le nom de Berisha- et on voit les enfants,

6 les dates. Certains noms sont mis en exergue. Je représente que ce sont

7 des personnes ayant été identifiées à la suite de l'analyse ADN faite en

8 Espagne.

9 Question: Et on voit des croix au regard des noms. Est-ce qu'elles

10 indiquent que ces personnes sont mortes ou qu'on croit qu'elles sont

11 mortes?

12 Réponse: Oui. Apparemment, ce sont des personnes qui ont été tuées le 26

13 mars dans l'incident du café. Et puis, il y a une étoile au regard de

14 certains noms; comme le dit la légende, cette étoile montre quels sont les

15 corps qui ont été repris ou trouvés dans le cadre de l'exhumation en 1999

16 à Suva Reka. Et donc les personnes pour lesquelles il y a cette étoile

17 sont les personnes concernées.

18 Question: Apparemment, il y a aussi deux noms soulignés. Quels sont ces

19 noms?

20 Réponse: Je vous le montre ici, sur le document. Il y a d'abord Vjollca

21 Berisha, 36 ans, et son fils Gramoz Berisha, 8 ans, deux survivants de

22 l'incident de ce café.

23 Question: Est-ce que nous pouvons voir rapidement l'annexe JZ-3? Pour être

24 bref, je répète que c'est un autre arbre généalogique que vous avez

25 fourni, n'est-ce pas, avec les mêmes légendes qui présentent les mêmes

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1 indicateurs avec les croix et les étoiles?

2 Réponse: C'est exact. C'est l'arbre généalogique de la famille Faik

3 Berisha.

4 Question: Ce qui m'intéresse particulièrement, c'est le nom qui se trouve

5 au centre et qui est souligné. Apparemment, c'est un enfant… Excusez-moi,

6 pourriez-vous nous dire qui est cette personne?

7 Réponse: Vous parlez de Shyhrete Berisha, 37 ans? Elle était la femme de

8 Nexhat Berisha qui était le fils de Faik Berisha. Shyhrete est souligné et

9 surligné; c'est aussi un survivant de l'incident du café de Suva Reka en

10 1999.

11 M. Ryneveld (interprétation): En tant qu'enquêteur, pouvez-vous nous dire

12 si cette personne a déposé dans ce procès?

13 M. Zdrilic (interprétation): Oui, Shyhrete a déposé en tant que témoin

14 dans ce procès.

15 M. Kwon (interprétation): Shyhrete Berisha; cette personne a-t-elle été

16 témoin?

17 M. Ryneveld (interprétation): Oui; c'est la raison pour laquelle j'avais

18 posé ma dernière question, Monsieur le Juge.

19 Je vais demander que ces annexes reçoivent une cote, Monsieur le

20 Président.

21 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de l'accusation 314.

22 M. Ryneveld (interprétation): Merci. Très rapidement, excusez-moi si je

23 répète certains éléments de votre déposition faits le dernier jour de

24 celle-ci. Nous avons déjà une cote pour ce rapport de l'Espagne.

25 Après avoir reçu ce rapport et vu les connaissances que vous avez de

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1 l'enquête à ce jour, pourriez-vous nous dire combien de personnes s'étant

2 trouvées dans le café ont fait l'objet d'une identification positive, pour

3 ce qui est de la fosse commune de Batajnica?

4 M. Zdrilic (interprétation): Onze personnes ont été identifiées

5 aujourd'hui, avec ce fœtus qu'on a retrouvé.

6 Question: Et ces 11 personnes se trouvaient parmi combien de personnes

7 qui, apparemment, se trouvaient dans ce café?

8 Réponse: De 40 à 44.

9 Question: Encore deux choses. Tout d'abord, ceci: vous êtes employé par le

10 Bureau du Procureur. Dans ce cadre, avez-vous eu l'occasion de prendre

11 connaissance de certains documents qui montrent la correspondance qu'il y

12 a eu entre le Bureau du Procureur ou le Tribunal et les autorités serbes,

13 ainsi que les autorités de la République fédérale de Yougoslavie?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Je vais demander l'aide de l'huissière pour vous montrer une

16 dizaine de documents où il y a des éléments surlignés.

17 (Intervention de l'huissière.)

18 Nous allons prendre cette liasse et les examiner, ces documents, un par

19 un. Ils seront posés sur le rétroprojecteur.

20 Messieurs les Juges, j'ai fourni un bref résumé, mais je vais demander que

21 ces documents soient posés sur le rétroprojecteur, car je veux poser

22 quelques questions au témoin.

23 Nous avons des copies supplémentaires que je remets à l'instant même à Mme

24 l'huissière.

25 (Intervention de l'huissière.)

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1 M. le Président (interprétation): Est-ce que ces documents faisaient

2 partie de la déclaration préalable?

3 M. Ryneveld (interprétation): Non. Rappelez-vous, nous avons eu une

4 discussion sur la question de savoir si l'accusation allait demander si M.

5 Kevin Curtis allait être appelé à la barre; et on a laissé entendre que

6 certains documents devaient être présentés et versés au dossier par son

7 intermédiaire, mais on pourrait fort bien le faire par ce témoin-ci.

8 Nous nous sommes dit que c'était la façon la plus aisée de verser ces

9 documents au dossier.

10 M. le Président (interprétation): Si vous le voulez bien, voulez-vous nous

11 expliquer en quoi ces documents sont pertinents pour ce procès?

12 M. Ryneveld (interprétation): Volontiers, Monsieur le Président.

13 S'ils sont pertinents, c'est notamment parce que nous avons l'obligation,

14 au vu des charges retenues contre l'accusé, l'obligation de montrer que

15 l'accusé était informé des faits. Et ce document montre qu'à partir du 17

16 mars 1998, et ce jusqu'au 25 mars, je pense, ou plutôt le 26 mars 1999,

17 des lettres du Bureau de Procureur et de Mme la Procureure Louise Arbour

18 avaient été envoyées à celui qui était alors le Président Milosevic; et

19 ces lettres portaient sur un comportement qui était très préoccupé, parce

20 qu'apparemment, des infractions graves au droit international étaient

21 commises. Nous avions dit au Président d'alors que nous voulions mener des

22 enquêtes pour éviter que des crimes similaires se reproduisent, montrent

23 qu'il y avait l'exercice de l'autorité par Milosevic sur ses subordonnés,

24 qu'il devait empêcher la perpétration d'autres crimes et prendre toutes

25 les mesures nécessaires pour empêcher que ses subordonnées commettent de

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1 tels actes.

2 M. le Président (interprétation): Ce sont des lettres envoyées par Mme

3 Arbour?

4 M. Ryneveld (interprétation): Oui, ce sont des lettres envoyées à M.

5 Milosevic, qui était alors Président, et ces lettres vont jusqu'au 26 mars

6 1990. Elles montrent notamment que des représentants de la communauté

7 internationale avaient mis l'accusé en garde du comportement affiché, qui

8 était tout à fait contraire à la norme et qui était tout à fait

9 inacceptable, et pouvait représenter des crimes de guerre. Mais la

10 Procureure elle-même, à l'époque, l'avait prévenu de tout cela, l'avait

11 averti de ces faits. Voilà en quoi ces documents sont pertinents.

12 M. le Président (interprétation): Fort bien, nous allons examiner la

13 chose.

14 M. Ryneveld (interprétation): Merci.

15 (Les Juges se concertent sur le siège.)

16 M. le Président (interprétation): Nous allons considérer ces documents

17 recevables. Ils feront partie du dossier de l'audience et de la genèse de

18 celui-ci.

19 M. Ryneveld (interprétation): Merci. Je propose un bref examen de chacun

20 de ces documents; ils seront posés sur le rétroprojecteur. Nous allons

21 reprendre certains éléments mis en exergue uniquement pour que ceci soit

22 plus lisible pour vous, Messieurs les Juges.

23 M. le Président (interprétation): Agissons au plus vite. Je ne sais pas

24 s'il est nécessaire de les poser sur le rétroprojecteur. Renvoyez-nous

25 simplement aux parties importantes puisque nous avons les documents.

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1 M. Ryneveld (interprétation): Merci. Je vais le faire par l'intermédiaire

2 du témoin en lui demandant s'il corrobore ce que je vais dire.

3 Vous avez d'abord un premier document en date du 17 mars 1998, lettre de

4 la Procureure Louise Arbour à celui qui était alors le Président

5 Milosevic. Convenez-vous, Monsieur, du fait que, dans cette lettre, elle

6 dit qu'elle recueille des éléments d'intervention pour apporter la preuve

7 de la perpétration des crimes au Kosovo et elle dit que le Tribunal a

8 compétence pour poursuivre vu ces actes. Et elle demande un rapport

9 s'agissant des personnes qui ont été tuées, arrêtées, victimes de

10 violences sexuelles, privées de liberté, transférées ou expulsées du

11 Kosovo par la force.

12 Est-ce bien exact?

13 M. Zdrilic (interprétation): Oui.

14 Question: On me demande de ralentir, c'est toujours le problème lorsqu'on

15 essaie d'aller vite.

16 Examinez, si vous le voulez bien, le deuxième document. Apparemment, il

17 est en date du 14 octobre 1998. C'est apparemment une déclaration à la

18 suite de la réunion du gouvernement fédéral qui avait à sa tête Vladimir

19 Bulatovic.

20 Est-ce que ceci confirme le soutien par le gouvernement de l'accord

21 Milosevic-Holbrooke?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Et est-ce qu'il dit qu'il approuve la mise en oeuvre de la

24 Résolution du Conseil de sécurité 1199 en ce qui concerne les vols

25 observés au Kosovo?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Troisième document, du 15 octobre 1998.

3 Est-ce que c'est là aussi une lettre de Louise Arbour à celui qui était

4 alors le Président Milosevic où elle dit qu'elle a l'intention de

5 reprendre des enquêtes sur le Kosovo le plus vite possible et d'envoyer

6 une équipe qu'elle dirigera sur le terrain pour que celle-ci rencontre le

7 gouvernement et d'autres représentants officiels, recueille des éléments

8 d'information et interroge des témoins potentiels? Et elle demande

9 l'assurance de ce que des visas seront fournis en application de la

10 demande faite auprès de l'ambassade de La Haye?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Document suivant… L'ordre n'est pas tout à fait respecté dans la

13 liasse qui vous a été remise. J'ai essayé d'agir dans l'ordre

14 chronologique.

15 Le document suivant, c'est le cinquième dans votre classeur. 4 novembre

16 1998. C'est une lettre de Zoran Knezevic, qui était alors ministre fédéral

17 de la Justice, qui l'envoie à Louise Arbour, Procureure du Tribunal.

18 M. le Président (interprétation): Je ne sais pas si j'ai cette lettre.

19 M. Ryneveld (interprétation): Oui, mais l'ordre n'est pas tout à fait

20 respecté; je vous l'ai dit et j'en suis désolé.

21 M. le Président (interprétation): Oui, je l'ai. Merci.

22 M. Ryneveld (interprétation): Monsieur le Témoin, à votre connaissance,

23 est-ce que c'est là la réponse à la lettre de Mme Arbour du 15 octobre? La

24 RFY explique pourquoi elle n'accepte pas la compétence du TPIY pour ce qui

25 est des événements du Kosovo puisqu'on y indique qu'il n'y avait pas de

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1 guerre, selon eux. Et les autorités de l'Etat compétent, dit cette lettre,

2 mènent des enquêtes sur les crimes commis, invitent une équipe de

3 policiers scientifiques internationale pour mener une enquête et insistent

4 sur le maintien de la coopération avec le Tribunal.

5 M. Zdrilic (interprétation): Oui, c'est une enquête en anglais et en

6 serbe.

7 Question: Je vois. Merci.

8 Document suivant: ce sera le document 4 dans votre liasse. Et puis, nous

9 reprendrons l'ordre tel qui est présenté.

10 Document suivant, Monsieur le Témoin: 6 novembre; c'est une lettre du

11 Président de ce Tribunal, Mme McDonald, envoyée à M. Burleigh, Président

12 du Conseil de sécurité à New York.

13 Voyez-vous ce document, l'ambassadeur étant Peter Burleigh?

14 Réponse: Je vois.

15 Question: Est-ce qu'on parle du refus obstiné de la République fédérale de

16 Yougoslavie à coopérer avec le Tribunal parce qu'il a refusé l'octroi de

17 visas destinés aux personnes qui allaient enquêter sur place au Kosovo? Et

18 la RFY n'accepte aucune enquête par le TPIY au Kosovo et estime que ce

19 n'est pas là une mesure prise en contravention de la résolution du Conseil

20 de sécurité.

21 Est-ce que ceci montre que, le 15 octobre 1998, Mme Arbour avait, dans une

22 lettre, parlé de son intention de mener une enquête et de demander des

23 visas? Est-ce qu'on indique aussi que c'était la quatrième fois qu'on

24 relevait des exemples de non-conformité de la RFY à l'exécution de

25 décisions prises par le Conseil de sécurité?

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1 Réponse: C'est exact.

2 Question: Autre document en date du 6 novembre 1998 aussi. C'est une

3 lettre de Mme Arbour à Zoran Knezevic, ministre de la Justice en RFY, qui

4 accuse réception de la lettre de M. Knezevic, en date du 4 novembre, en

5 réponse à sa correspondance du 15 octobre 1998.

6 Elle dit que le fait que la RFY n'accepte pas la compétence du Tribunal au

7 Kosovo ne cadre pas avec le droit international. Cette lettre montre le

8 mandat à compétence du Procureur et dit que la poursuite des violences

9 armées au Kosovo nécessite manifestement une enquête. Et cette lettre

10 ajoute que la question de la compétence ne doit pas être déterminée par un

11 Etat, mais que c'est le Tribunal lui-même qui doit en décider en audience.

12 Est-ce là un bon résumé de ce que dit ce document?

13 Réponse: Oui, c'est un résumé fidèle.

14 Question: Parlons maintenant du septième de ces 10 documents.

15 Ici, nous sommes le 18 janvier 1999; c'est de nouveau une déclaration du

16 gouvernement fédéral à la suite d'une réunion. Dans ce document, est-ce

17 que sont dénoncées ce qu'il appelle les affirmations fausses et

18 mensongères de ce qui se serait passé à Racak? Cette lettre se plaint des

19 activités déployées par M. Walker, qui est, selon eux, une persona non

20 grata et doit quitter le territoire yougoslave en l'espace de 48 heures.

21 Est-ce que ce document répète que le Tribunal de La Haye n'a pas de

22 compétence au Kosovo, indique que des représentants du Tribunal peuvent

23 venir dans leur pays pour négocier à propos de l'accord, mais ne peuvent

24 pas mener d'enquête ni d'inspection au Kosovo? Est-ce que cette lettre

25 réitère la volonté de coopérer avec l'OSCE et la KVM?

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1 Réponse: Oui, c'est un résumé fidèle.

2 Question: N°8: 2 février 1999, lettre de M. Blewitt, Procureur adjoint du

3 Tribunal, adressée à M. Knezevic, ministre de la Justice en RFY, fait état

4 de conversations avec le Procureur et demande, en application de l'Article

5 7bis-B) du Tribunal, une requête selon laquelle le Président notifie le

6 Conseil de sécurité du fait que la RFY n'a pas respecté ses engagements.

7 Le Procureur ne s'opposerait pas à ce que la RFY vienne arguer de tout

8 ceci en audience. Et puis, on a…

9 Je vais me répéter. En annexe, demande du 1er février du Procureur, c'est

10 un document de 25 pages, document déposé à un dossier d'audience.

11 Réponse: C'est exact.

12 Question: Encore deux documents que j'aimerais examiner.

13 25 mars 1999: déclaration de la réunion du Gouvernement de la RFY qui fait

14 état d'une décision prise par la RFY de couper les relations diplomatiques

15 avec les Gouvernements des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France

16 et de l'Allemagne pour raison d'agressions et d'utilisation d'armes

17 militaires en quantités énormes et de potentiel de mort. Il décide de voir

18 quels sont les autres pays qui, de façon directe ou indirecte, auraient

19 participé à cette agression. Cette lettre exprime la solidarité avec les

20 gouvernements qui sont solidaires avec la RFY et parle des moyens

21 financiers, des impôts qui seront imposés afin de financer l'effort de

22 guerre.

23 Réponse: Oui.

24 Question: Et enfin -j'en ai déjà parlé lorsque vous expliquiez quelle

25 était la pertinence de ces documents-, c'est une lettre d'introduction de

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1 Mme Arbour, envoyée à l'ambassade de la Haye, à l'ambassadeur en place à

2 ce moment-là, M. Grubic. Nous étions le 26 mars 1999. Cette lettre demande

3 que les lettres versées en annexe soient envoyées de toute urgence au

4 Président Milosevic et à d'autres représentants officiels nommés. Elle dit

5 le fait que ces lettres soient envoyées et rendues publique et verse en

6 annexe la lettre du 26 mars 1999 à celui qui était alors le Président

7 Milosevic.

8 Il y a huit points mentionnés.

9 A. Le fait que la RFY n'a pas voulu coopérer avec le Bureau du Procureur

10 sur l'enquête à mener sur les crimes du Kosovo, et ceci est mentionné par

11 le président du Tribunal au Conseil de sécurité des Nations Unies.

12 B. Cette lettre dit que les rapports de l'époque sur l'escalade de la

13 violence au Kosovo préoccupent vivement, du fait qu'il y a poursuite des

14 infractions du droit international.

15 C. Fournie en annexe, une copie des parties les plus importantes du Statut

16 du TPIY, en anglais et en BCS.

17 Si M. Milosevic en venait encore à douter de la pertinence du droit

18 concerné, elle dit avoir l'intention de mener ces enquêtes sur les

19 infractions graves et qu'elles doivent se faire dans l'enceinte

20 internationale, surtout lorsqu'il y a attaque dirigée contre la population

21 civile. Elle met en garde sur le fait qu'il faut toujours tout faire pour

22 empêcher que de nouveaux crimes soient commis, se tourne vers Milosevic

23 afin qu'il exerce son autorité sur ses subordonnés, qu'il fasse preuve de

24 ses qualités de dirigeant pour empêcher que d'autres crimes soient commis

25 et prenne toutes les mesures pour punir tout subordonné ayant commis des

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1 infractions graves au droit humanitaire international au Kosovo.

2 Est-ce que ceci est un résumé raisonnable de la teneur de ce document?

3 Réponse: Oui. Vous le trouvez dans le document en serbe également.

4 Question: Et vous comprenez le serbe?

5 Réponse: Oui.

6 M. Ryneveld (interprétation): C'était donc la question que je voulais

7 poser à ce propos.

8 Est-il possible d'accorder une cote à cette liasse de documents pour leur

9 valeur historique?

10 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de l'accusation 315.

11 (Intervention de l'huissière.)

12 M. le Président (interprétation): Avant de poursuivre, Monsieur Ryneveld,

13 normalement, on donne ceci sous forme d'intercalaires, mais je constate

14 qu'ici, en l'occurrence, nous avons une cote pour chacun de ces documents.

15 On pourra, à l'avenir, se référer à ces documents en mentionnant et la

16 cote et le numéro de chaque document.

17 M. Ryneveld (interprétation): Nous garderons ceci à l'esprit, Monsieur le

18 Président. Merci.

19 Voilà, c'est ce que j'allais poser comme questions dans le cadre de

20 l'interrogatoire principal du témoin, mais il me vient à l'esprit qu'il y

21 a peut-être un autre domaine sur lequel je poserai quelques questions, à

22 la lumière des dépositions que nous avons entendues vendredi.

23 Monsieur Zdrilic, vendredi dernier, un témoin est venu témoigner ici sous

24 un pseudonyme, qui est celui de K41. A l'occasion du contre-

25 interrogatoire, on a demandé à ce témoin s'il connaissait le nom de

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1 l'enquêteur qui avait recueilli sa déposition; il ne pouvait pas se

2 rappeler le nom de cet enquêteur. Est-ce que vous sauriez, vous, nous dire

3 de qui il s'était agi?

4 M. Zdrilic (interprétation): Oui, c'était moi qui avais recueilli la

5 déposition de K41.

6 Question: Fort bien. Pouvez-vous, entre autres, nous préciser, Monsieur,

7 au cas où vous le sauriez, comment il s'est fait que K41 soit devenu

8 témoin du Tribunal international?

9 Réponse: K41 est entré en contact avec une autre personne qui avait été

10 interviewée par le Bureau du Procureur; cette personne avait exprimé son

11 intention ou plutôt sa disponibilité pour ce qui était de s'entretenir

12 avec les enquêteurs du Tribunal. Lorsque nous avons reçu cette

13 information, je suis entré en contact avec K41 et j'ai recueilli sa

14 déposition.

15 Question: Cette autre personne avec qui K41 avait été en contact et à qui

16 il avait dit qu'il serait désireux de faire une déposition, serait-ce la

17 personne qui correspondrait au K32?

18 Réponse: Oui, c'est exact.

19 M. Ryneveld (interprétation): Je n'ai plus de question. Merci.

20 M. le Président (interprétation): Vous avez la parole, Monsieur Milosevic.

21 M. Milosevic (interprétation): Avant que je ne commence le contre-

22 interrogatoire de M. Zdrilic, je voudrais faire objection pour ce qui de

23 cet amas de paperasseries que M. Ryneveld a présenté, parce que je ne vois

24 pas en quoi cela a quelque chose à voir…

25 Il n'y a que moi à ne pas recevoir la traduction?

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1 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas obtenu la traduction.

2 Je voudrais que vous repreniez, Monsieur Milosevic.

3 M. Milosevic (interprétation): J'ai dit tout à l'heure qu'avant que de

4 commencer à contre-interroger M. Zdrilic, je voulais faire objection pour

5 ce qui est de cet amas de paperasseries que M. Ryneveld vient de vous

6 remettre et qui a trait à l'échange de courrier entre Louise Arbour, enfin

7 plutôt ses courriers adressés aux autorités de la République fédérale de

8 Yougoslavie, et les réponses qu'elle a obtenues. Ceci n'a rien à voir avec

9 le témoignage du témoin ici présent. Cela aurait quelque chose à voir avec

10 le témoignage de Mme Louise Arbour, si jamais elle venait à comparaître

11 ici, ou alors l'un quelconque des représentants des Nations Unies -si l'on

12 se réfère déjà aux Nations Unies-, ou alors aux représentants des

13 instances ou des autorités yougoslaves qui avaient établi cette

14 communication avec Mme Arbour.

15 Je ne vois même pas de raison formelle pour que Louise Arbour se mette à

16 communiquer avec un chef d'Etat et s'attende de sa part à ce qu'il lui

17 réponde.

18 Et parmi les documents qui sont fournis, il figure une réponse du ministre

19 fédéral de la Justice qui explique très clairement les positions de la

20 Yougoslavie à l'égard de cette institution-ci, ainsi que les positions de

21 la Yougoslavie concernant les crimes possibles. Parce qu'il est bien

22 précisé qu'il n'est point de doute que quelques crimes commis seraient

23 soumis à la législation pénale en vigueur en Yougoslavie.

24 Par voie de conséquence, cette correspondance indique bien que la

25 Yougoslavie, conformément à la législation qui est la sienne et qui ne

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1 diffère pas de celle des autres pays, se conforme à ce qui se passe sur

2 son territoire, exerce ses droits souverains et, comme cela est d'ailleurs

3 très clairement expliqué, là où il n'y a pas eu de guerre, la

4 participation de quelques institutions illicites ou même licites –si tant

5 est qu'elles l'avaient été- à ce qui se passait là-bas. Donc je ne vois

6 aucune corrélation entre le témoignage d'un enquêteur, à savoir d'un

7 employé de ce même Bureau du Procureur, et cet amas de courriers qui sont

8 présentés ici.

9 Je ne pense pas qu'il soit chose soutenable que de se pencher actuellement

10 sur toutes les allégations qui sont faites et dont chacune pourrait être

11 contestée une par une.

12 Nous avons là des vingtaines de pages ou plutôt 27 pages de déclarations

13 faites par Louise Arbour, ou appelez cela comme vous voulez, mais cela

14 sort tout à fait du cadre de ce que vous voudriez présenter ici.

15 Et au cas où vous voudriez qu'on en débatte, faites donc venir Louise

16 Arbour, entendez-la comme témoin et laissez-moi la possibilité de lui

17 poser à elle ce type de questions. Je ne vois pas pourquoi je poserai à M.

18 Zdrilic des questions concernant le courrier de Mme Louise Arbour et

19 concernant des positions qui ne se défendent pas, mais qui n'ont rien à

20 voir avec lui. Vous auriez pu demander également à l'huissière de cette

21 salle d'audience de lui poser des questions. Elle a autant à voir avec ces

22 courriers que le témoin que vous avez fait venir, donc il n'y saurait pas

23 témoigner des positions de Mme Louise Arbour. Ce sera la remarque que

24 j'aurais à formuler.

25 M. le Président (interprétation): Bien. Si ceci est une objection, il est

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1 certain que vous vous attendez à une décision de notre part et si ce n'est

2 qu'un commentaire, je ne vois pas pourquoi vous l'auriez alors fait. Donc

3 nous allons considérer qu'il s'était agi ici d'une objection. Ce que vous

4 venez de nous communiquer, nous en avons pris bonne note.

5 Les raisons pour lesquelles les documents ont été jugés admissibles au

6 travers du témoignage de ce témoin, c'est parce que ce témoin est

7 représentant du Bureau du Procureur. Il est peut-être le seul représentant

8 du Bureau du Procureur que nous ayons accepté d'entendre ici et il est en

9 position de produire des documents. Et, comme vous le savez, nous avons

10 une réglementation qui permet l'admission de documents au cas où ces

11 documents parleraient pour eux-mêmes. Dans la plupart des cas, ces

12 documents-là sont admissibles au travers du témoignage de ce témoin.

13 Donc si vous le souhaitez, vous avez la possibilité de le contre-

14 interroger. Par contre, si vous exprimez le souhait de faire venir

15 quelqu'un à une position supérieure aux fins de contre-interroger cette

16 personne-là, nous allons nous pencher sur cette requête.

17 Mais il n'est point de doute que, pour ce qui a été présenté par le Bureau

18 du Procureur, les documents sont admissibles et ils parlent pour eux-

19 mêmes. Et le témoin ici présent était en mesure de les produire.

20 Vous pouvez répondre.

21 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, c'est précisément de cela

22 qu'il s'agit. Je ne vois pas… Pour ce qui est des détails contenus dans

23 les lettres de Mme Louise Arbour, je pourrais interroger M. Zdrilic; ce

24 n'est pas lui qui les a rédigés et on ne lui a pas demandé à lui ce qu'il

25 fallait indiquer dans ces courriers-là, parce qu'il s'agit d'une

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1 correspondance entre le Gouvernement fédéral et Mme Louise Arbour.

2 (Les Juges se concertent sur le siège.)

3 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous devez contre-

4 interroger ce témoin. Je viens de vous expliquer les raisons pour

5 lesquelles ces documents sont admissibles.

6 Au cas où, à la fin du contre-interrogatoire de ce témoin, il y aurait des

7 sujets au sujet desquels vous voudriez contre-interroger un représentant

8 du Bureau du Procureur à un niveau plus élevé et au cas où ces matières-

9 là, où ces sujets-là seraient jugés par nos soins comme étant pertinents,

10 nous nous pencherons sur la question. Vous devez procéder au contre-

11 interrogatoire et non pas vous disputer avec le témoin. Donc, si vous avez

12 des questions que vous voudriez poser au sujet de certains thèmes

13 soulevés, nous déciderons de la question. Mais entre-temps, si vous avez

14 des questions à poser au témoin, je vous demanderai de les poser tout de

15 suite pour que nous puissions continuer avec notre travail.

16 (Contre-interrogatoire du témoin, M. John Martin Zdrilic, par l'accusé M.

17 Milosevic.)

18 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur May, je vais entamer le

19 contre-interrogatoire du témoin ici présent.

20 Monsieur Zdrilic, partant de ce que vous avez déclaré, on peut voir que

21 vous êtes employé comme enquêteur au Bureau du Procureur, ceci depuis la

22 fin mars 1999. Et auparavant, vous avez travaillé pendant toute une série

23 ou un bon nombre d'années comme officier de police ou détective.

24 Vous êtes donc policier de profession et vous exercez un métier

25 d'enquêteur. C'est bien cela?

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1 M. Zdrilic (interprétation): C'est exact.

2 Question: Je voudrais que vous me répondiez à la question suivante: est-ce

3 que, en votre qualité d'enquêteur, vous avez pour mission de recueillir,

4 de la façon la plus conforme à la vérité, des faits concernant les

5 événements au sujet desquels vous êtes censé faire des rapports? Ou alors

6 votre mission est telle, étant donné que vous êtes un employé du Bureau du

7 Procureur, de procéder à la sélection de certains faits, et ceci en vous

8 efforçant de recueillir les éléments qui sont susceptibles d'abonder dans

9 le sens de cet Acte d'accusation erroné?

10 Réponse: C'est plutôt une question exhaustive que vous venez de poser,

11 mais, bien entendu, en ma qualité d'enquêteur, je dois m'efforcer à tout

12 moment de déterminer la vérité concernant les incidents ou événements qui

13 sont survenus. C'est la chose que je m'efforce de faire en ma qualité

14 d'employé du Bureau du Procureur.

15 Question: Bien. Alors, essayez de me répondre aux questions que j'ai

16 posées de façon plus concrète, et ceci partant d'un exemple qui a été

17 mentionné tout à l'heure par M. Ryneveld.

18 En effet, M. Ryneveld a parlé de l'exemple du Témoin K41, qui est venu

19 d'ailleurs témoigner ici, et sur la déposition duquel figure également

20 votre nom. Par conséquent, est-ce que la teneur de sa déclaration à lui

21 constitue, en gros la teneur des réponses aux questions que vous lui avez

22 posées?

23 Réponse: La déclaration elle-même est une déclaration qui est la sienne.

24 Mon rôle là-bas avait consisté à l'aider à noter les informations qui

25 étaient les siennes et de procéder dans un ordre chronologique pour ce qui

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1 est de relater les événements qu'il a décrits.

2 Question: Bien. Je suppose que, lorsque vous avez recueilli sa

3 déclaration, il vous appartenait de lui poser des questions que vous aviez

4 juger pertinentes pour recueillir le récit des faits concernant les

5 événements qu'il avait décrits. C'est bien cela ou pas?

6 Réponse: Ce serait en partie exact. Il me décrivait des événements et,

7 lorsque je prenais des notes, j'avais la possibilité de lui poser des

8 questions supplémentaires pour des éclaircissements éventuels ou alors des

9 questions visant à préciser certains détails.

10 Question: Prenons donc un exemple. Dans sa déclaration -et il a été

11 interrogé à ce sujet-là; je ne sais pas pourquoi il y a toute cette

12 microphonie-, il a été donc interrogé par le représentant de la partie

13 adverse, il a parlé d'événements au village de Jeskovo. Et en cette

14 occasion-là, il a expliqué que des civils avaient péri là-bas, et ainsi de

15 suite. C'est bien cela?

16 Réponse: J'aurais besoin de revoir cette déposition, mais pour autant que

17 mes souvenirs sont bons, je crois que c'est effectivement le cas.

18 Question: Voyez-vous maintenant, vous êtes enquêteur et j'imagine que vous

19 recueillez tous les faits afférents à un événement donné. D'après les

20 renseignements dont je dispose, cet événement du village de Jeskovo avait

21 été suivi par des représentants du centre régional de Prizren, s'agissant

22 donc de représentants de la Mission de vérification de l'OSCE. Et ils ont

23 vérifié qu'il y avait neuf terroristes tués dans cet événement. Ces

24 hommes-là avaient porté des armes et des uniformes. Cela diverge de façon

25 considérable de ce que votre témoin affirme, à savoir M. K41, dont vous

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1 avez d'ailleurs recueilli la déposition.

2 Etant donné que d'office, vous étiez censé prendre connaissance des

3 événements véritables, étant donné que vous aviez disposé des rapports de

4 la Mission de vérification au Kosovo, s'agissant d'un témoin témoignant au

5 sujet de l'événement à Jeskovo, est-ce que vous avez posé des questions

6 qui découleraient des éléments d'information découlant de ce que vous avez

7 recueilli de la part de la Mission d'observation, et qui ne concorderaient

8 pas ou qui seraient complètement opposés à ce que ce témoin a dit. Oui ou

9 non?

10 Réponse: Pour répondre à la dernière partie de votre question, étant donné

11 que vous avez posé pas mal de questions, je dirais non, je n'avais à ma

12 disposition aucun document émanant de la Mission de vérification au

13 Kosovo, s'agissant de l'OSCE.

14 Je peux répondre aux autres questions, si vous le souhaitez.

15 M. Milosevic (interprétation): Oui, allez-y.

16 M. le Président (interprétation): Monsieur Zdrilic, si vous souhaitez

17 ajouter autres choses vous pouvez le faire.

18 M. Zdrilic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

19 on m'a posé bon nombre de questions ici.

20 M. le Président (interprétation): Ce que l'accusé est en train de dire,

21 c'est qu'il y a divergence entre ce que l'OSCE a noté au niveau du village

22 de Jeskovo et ce que le témoin a relaté concernant les événements dans le

23 même village. De là à savoir si cela est exact, c'est une chose qu'il nous

24 faudra déterminer en nous penchant sur tous les éléments de preuve. Mais

25 si vous voulez ajouter quelque chose concernant votre rôle, vous pouvez le

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1 faire.

2 M. Zdrilic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. S'agissant de

3 toutes les questions que vous avez à poser concernant la Mission de

4 vérification de l'OSCE au Kosovo, je crois qu'il faudrait les adresser à

5 un représentant de cette organisation. Maintenant, s'agissant de cette

6 déclaration, j'ai recueilli les informations qu'il m'a communiquées, j'ai

7 noté ce qu'il m'a fourni comme informations concernant l'incident de

8 Jeskovo.

9 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur Zdrilic. Mais vous deviez

10 forcément être au courant du fait que le soi-disant incident du village de

11 Jeskovo correspond, ne serait-ce qu'au niveau de la date, avec la période

12 de temps couverte par l'intervention de la Mission de vérification au

13 Kosovo. Et cela relevait des attributions de la représentation à Prizren,

14 dirigée par M. Maisonneuve. Je crois que ces faits-là devraient vous être

15 connus: en a-t-il donc été ainsi ou pas?

16 M. Zdrilic (interprétation): Bien entendu que je savais que ces gens-là

17 avaient été présents au Kosovo à l'époque.

18 Question: Je vais donc vous poser cette question-ci: si vous accomplissez

19 votre mission d'enquêteur de façon consciencieuse aux fins de recueillir

20 des faits et de consigner des rapports pertinents pour ce qui est votre

21 travail, est-ce que vous ne pensez pas qu'il relèverait de votre devoir

22 d'entendre ou de recueillir une documentation afférente émanant de ce

23 centre, en corrélation avec leur travail, leurs attributions, et ceci en

24 corrélation avec le même événement au sujet duquel vous êtes en train de

25 recueillir des dires ou le témoignage d'un témoin?

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1 Réponse: Oui, c'est exact. Ce serait exact: au cas où il y aurait un

2 incident ou un secteur d'enquête qui ferait l'objet d'investigations, tel

3 que prévu par l'Acte d'accusation, eh bien, le témoin est censé fournir un

4 récit et les informations susceptibles de corroborer. Et si moi, de mon

5 côté, j'avais su quelles étaient les informations recueillies, je l'aurais

6 certainement fait.

7 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous êtes en train de nier le

8 fait d'avoir su qu'à l'époque, il y avait une Mission de vérification au

9 Kosovo et que, par conséquent...

10 M. le Président (interprétation): Mais il vous a déjà répondu! Il n'est

11 aucun besoin de débattre avec le témoin pour ce qui est de ce que vous

12 affirmez être des divergences. Il a dit qu'il avait recueilli la

13 déclaration du témoin que nous avons déjà entendu ici et il a décrit ce

14 que ce témoin lui a relaté. Vous êtes en train de préciser qu'il y a des

15 divergences et il vous a répondu. Nous ne pouvons perdre notre temps en

16 dispute sur le fait de savoir s'il était au courant, s'il n'était pas au

17 courant, s'il y avait des choses pertinentes ou pas.

18 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je suis en train d'essayer de

19 déterminer de quelle façon un enquêteur accomplit sa tâche. Il n'est point

20 de litige pour ce qui est de la connaissance qu'avait ce témoin de

21 l'existence de cette mission de vérification.

22 Donc la question que je pose est de savoir pourquoi il a omis, en faisant

23 une enquête concernant l'événement, d'entendre ou de voir le rapport de

24 cette mission de vérification pour comparer avec ce que lui dit le témoin

25 avec lequel il s'entretient.

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1 Pouvons-nous alors constater qu'il n'a pas accompli sa tâche comme il

2 était censé le faire?

3 M. le Président (interprétation): Non. Nous allons permettre au témoin de

4 répondre à cette assertion que vous venez de faire et nous allons aller de

5 l'avant.

6 Monsieur Zdrilic, pensez-vous pouvoir répondre à la dernière question de

7 l'accusé?

8 M. Zdrilic (interprétation): Oui, en effet.

9 En bref, étant donné que nous sommes en train de parler concrètement du

10 Témoin K41 et d'un intervalle de temps où cette déposition a été

11 recueillie, je vous ferai remarquer que la déposition a été recueillie il

12 y a fort peu de temps. Par conséquent, en s'entretenant avec le témoin en

13 question, quand bien même aurais-je souhaité continuer mon enquête, je

14 n'aurais pas eu suffisamment de temps.

15 Vous remarquerez probablement que, partant des dépositions recueillies en

16 1999 et en 2000, lorsqu'il y a eu des informations recueillies, nous avons

17 certainement procédé à des investigations concernant les informations en

18 question.

19 M. Milosevic (interprétation): Mais écoutez, Monsieur Zdrilic, étant donné

20 que dans votre déclaration il est précisé que vous avez été employé au

21 Bureau du Procureur en tant qu'enquêteur depuis cette date-là, est-ce que

22 vous avez eu l'opportunité de vous entretenir, étant donné que vous avez

23 enquêté dans ce secteur, avec le général Maisonneuve qui avait été le chef

24 du centre à cette époque-là?

25 M. Zdrilic (interprétation): J'ai eu bon nombre de raisons de m'entretenir

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1 avec les représentants de cette Mission d'observation, mais je ne me suis

2 pas entretenu avec le général Maisonneuve en personne.

3 Question: Mais, étant donné que ce centre de Prizren était un centre

4 important, est-ce que vous avez-vous eu un entretien avec l'un quelconque

5 des autres représentants? Vous aviez M. Cianglinski de Pologne, M. Koenen

6 (phon.) de Hollande, André Borodine de Russie, vous aviez Roberto Bonneti

7 d'Italie. Est-ce qu'avec l'un quelconque de ces représentants, l'une

8 quelconque de ces personnes qui constituaient l'équipe du général

9 Maisonneuve sur ce territoire, vous avez eu l'opportunité de vous

10 entretenir aux fins de déterminer certains des faits pertinents pour la

11 tâche qui vous avait été confiée?

12 Réponse: En répondant à la question de savoir si je m'étais

13 personnellement entretenu avec l'une quelconque des personnes que vous

14 avez mentionnées, je dirais non. Cependant, pour ce qui est de la question

15 de savoir si l'un quelconque de mes collègues s'était entretenu avec ces

16 personnes, je dirais oui.

17 Question: Comment se fait-il que leur activité n'ait pas trouvé quelque

18 place que ce soit au niveau des activités que vous avez déployées vous-

19 même, pour ce qui est des dires recueillis par des témoins concernant donc

20 le fait de corroborer ce qui a été recueilli par vos autres collègues et

21 ce qui émane de cette Mission de vérification pour savoir s'il y a

22 correspondance entre les uns et les autres?

23 Réponse: Il n'est pas question de voir un enquêteur vivre ou déployer ses

24 activités de façon indépendante et isolée par rapport à ses collègues.

25 Donc s'il y a des dépositions recueillies par l'un quelconque de mes

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1 collègues au niveau des personnes ou des témoins qui sont pertinents pour

2 le secteur d'opérations dont je suis chargé, il est certain que j'aurais

3 pris connaissance de cette déposition.

4 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Zdrilic, prenons un exemple, au

5 niveau de Jeskovo, il y a un rapport rédigé par la Mission de vérification

6 qui précise que neuf terroristes ont été tués.

7 M. le Président (interprétation): Tout d'abord, il convient de voir ce que

8 vous êtes en train de nous dire. Dites-nous à quoi vous vous référez,

9 quelle est la référence à laquelle vous vous référez pour que nous

10 puissions vous suivre. Si vous n'avez pas cela, nous pouvons le voir

11 demain.

12 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, j'imagine que la partie

13 adverse, celle qui se trouve sur le banc d'en face, y compris tous ses

14 employés, doivent vérifier ou consulter les rapports de la Mission de

15 vérification de l'OSCE. Je crois que c'est leur travail que de le faire!

16 M. le Président (interprétation): Ne polémiquez pas. Donnez-nous la

17 référence dont vous parlez, nous allons vérifier, il se peut que vous

18 soyez tout à fait dans votre droit, mais il n'y a aucune raison de

19 polémiquer avec le témoin ici présent à ce sujet.

20 Entendez-nous un moment: le devoir de l'accusation est de mettre à la

21 disposition de la Chambre toutes les informations dont ils disposent.

22 S'ils ont un témoin qui a fait une déposition importante, il est de leur

23 devoir de communiquer à la Chambre la teneur de cette déposition dans la

24 forme appropriée. Il ne leur appartient pas ou il ne relève pas de leur

25 tâche de modifier les témoignages ou les dépositions.

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1 Donc s'il y a des éléments de preuve qui contrediraient ce qu'un témoin

2 aurait dit, comme vous venez de l'affirmer, il est de leur devoir de

3 placer cette information ou de communiquer cette information à la Chambre.

4 Et ils vous ont communiqué le document de l'OSCE.

5 Maintenant, ce qui arrive est la chose suivante: dans le courant du

6 procès, vous avez alors l'opportunité, comme vous l'avez d'ailleurs fait,

7 de présenter cette divergence au témoin. Puis, vous pouvez attirer notre

8 attention sur cette divergence ultérieurement, lorsque le moment sera

9 venu, à savoir lorsque vous présenterez vos éléments de preuve à décharge

10 et lorsque nous nous pencherons sur la totalité des témoignages des

11 témoins. Mais il n'est aucunement utile de polémiquer avec un enquêteur à

12 ce sujet.

13 Bien entendu, vous souhaitez répéter le plus souvent possible vos

14 assertions, mais nous n'allons pas vous le permettre, nous n'allons pas

15 vous autoriser à ce faire. Donc, à moins que vous n'ayez des questions à

16 poser, des questions à ce témoin-ci, nous n'allons plus traiter de ce

17 thème du contre-interrogatoire. Et si vous pouvez faire référence au

18 rapport afférent à l'incident de Jeskovo, faites-le; sinon, nous allons

19 estimer que cela n'existe pas. Donc ce sera pertinent lorsque nous

20 évaluerons la valeur probante des éléments de preuve ou des témoignages.

21 Donc le témoin ici présent vous a dit ce qu'il a fait. Je vous ai expliqué

22 quelles sont, pour ma part, les tâches qui sont les siennes et les tâches

23 qui sont celles de la Chambre: il n'est point nécessaire de polémiquer

24 davantage.

25 Avez-vous des questions autres à poser à ce témoin? Et s'agissant des

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1 courriers échangés, nous allons nous pencher dessus.

2 Monsieur Nice, ou plutôt, Monsieur Ryneveld, vous venez d'entendre la

3 polémique relative à la correspondance.

4 L'accusé à peut-être tout à fait raison. Il n'y a aucune finalité, pour ce

5 qui est de contre-interroger de sa part le témoin ici présent, au niveau

6 des échanges de courriers qui ont eu lieu. Peut-être serait-il préférable

7 que nous entendions un employé à un niveau supérieur?

8 Peut-être votre micro ne fonctionne-t-il pas?

9 Oui, oui, il fonctionne, mais vous avez mis le doigt dessus.

10 M. Ryneveld (interprétation): Monsieur le Président, eh bien, cette

11 documentation, à notre avis, est une documentation qui se trouve en

12 possession de l'accusé depuis très longtemps, certainement depuis 1999.

13 Donc la documentation est à sa disposition depuis tout ce temps-là. Nous

14 estimons que cela est pertinent et cela est présenté à la Chambre.

15 Bien entendu, au cas où, pendant la continuation de l'affaire, nous

16 pouvons effectivement demander à une personne plus haut placée de venir

17 témoigner. Mais nous allons, bien entendu, avoir à demander une

18 autorisation particulière par la Chambre.

19 M. le Président (interprétation): Nous pouvons vous fournir une ordonnance

20 à ce sujet.

21 M. Ryneveld (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

22 M. le Président (interprétation): Avez-vous des questions autres à poser à

23 ce témoin concernant son témoignage?

24 M. Milosevic (interprétation): Je ne viens que de commencer, Monsieur May,

25 mais il me semble que nous perdons notre temps, car ici il a été apporté

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1 beaucoup plus d'éléments qui ne figurent absolument pas dans la

2 déclaration de ce témoin. Mais soit, j'irai de l'avant.

3 Je voulais tout simplement constater s'il était tout à fait normal,

4 lorsque je parle de l'enquêteur, de le voir procéder comme il l'a fait,

5 étant donné les devoirs et les missions qui sont les siens, car cela me

6 semble important pour juger de la véracité, de la valeur ce qu'il avait

7 alléguée. Etant donné ce qu'a dit le témoin K41 et étant donné les faits

8 et connaissances qu'il a pu recueillir, je lui ai demandé si, tout

9 simplement, il devait lui poser des questions là-dessus, oui ou non.

10 M. Zdrilic (interprétation): Normalement, lorsqu'on demande des précisions

11 à un témoin au moment de recueillir sa déclaration, oui, c'est ce qui se

12 fait; je puise dans mes propres connaissances, les connaissances que j'ai

13 des événements dont il discute.

14 M. Milosevic (interprétation): Donc il s'agit de ces connaissances-là

15 auxquelles je me suis référé tout à l'heure, que vous n'avez pas eues en

16 vue, vous n'avez pas eu connaissance de cela, vous n'avez pas considéré

17 nécessaire d'en parler?

18 M. le Président (interprétation): (Hors micro.) Non, je ne vais pas

19 autoriser ce genre de questions.

20 Si vous voulez évoquer d'autres questions, d'autres points, libre à vous

21 de le faire, mais nous n'allons plus autoriser que vous reveniez sur ce

22 point que vous avez déjà épuisé.

23 M. Milosevic (interprétation): Bien. Dans votre déclaration –déjà, nous le

24 voyons dans le second paragraphe de votre déclaration-, vous dites que ce

25 que vous avez fait devait comprendre plusieurs missions menées par vous en

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1 Albanie en 1999. Et vous dites: "J'ai pu recueillir, entre autres choses,

2 pas mal de conversations que j'ai pu avoir avec des personnes pertinentes

3 du Kosovo".

4 Nous avons entendu récemment la déposition de la journaliste Jacky Rowland

5 qui a dit, dans ses rapports, que ce qui a été fait et dit en Albanie

6 semblait être pas mal en désaccord avec ce qui se passait au Kosovo. Est-

7 ce que vous l'avez eu à l'esprit ou pas, ou vous preniez les choses toutes

8 faites et, lorsque vous en parlez, vous ne faites valoir que ce que vous

9 avez entendu en Albanie?

10 Réponse: Lorsque j'interroge une personne et quand je suis face à face à

11 face avec cette personne, il m'est impossible de corroborer les

12 informations qui me sont transmises par elle. Vous assurez le meilleur

13 moyen et la façon la plus professionnelle de recueillir cette déclaration

14 et c'est seulement après, après avoir fait ce travail, que vous cherchez

15 confirmation des informations qui s'y trouvent.

16 Pour toutes les déclarations concernant l'Albanie, c'est en Albanie

17 qu'elles ont été recueillies, notamment par moi, et il est certain que ces

18 déclarations ont été confirmées par d'autres informations.

19 Question: Bon. Moi, je suis en train de parler de différences; vous parlez

20 de confirmations. Mais cela me semble logique, étant donné que le rôle qui

21 est le vôtre ici est celui de témoin, et également celui d'un employé du

22 personnel du Bureau du Procureur.

23 Mais dites-moi, puisque déjà vous êtes en train de parler du meurtre

24 contre la famille Berisha de Suva Reka, avez-vous recueilli une

25 information ou, par exemple, avez-vous recueilli la déclaration de Marjan

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1 Krasniqi -un des témoins-, laquelle déclaration accuse le fait, par

2 exemple, que le meurtre de ces gens-là à Suva Reka a été l'œuvre d'un

3 groupe d'éléments criminels? Est-ce que vous avez une information de ce

4 genre-là qui accuserait un tel fait?

5 Réponse: En ce qui concerne Marjan Krasniqi -c'est bien le nom que vous

6 avez prononcé, je pense-, pour autant que je m'en souvienne, j'ai

7 recueilli la déclaration de cette personne et, si je ne me trompe pas, je

8 l'ai fait en Albanie en 1999.

9 Quant à savoir si cet homme affirme que ces incidents ont été l'œuvre d'un

10 groupe de criminels local, je ne me souviens pas de cela. Je suis tout à

11 fait prêt à repasser en revue cette déclaration, si on me la remet, mais

12 je ne me souviens pas que ce monsieur aurait dit que c'était l'œuvre d'un

13 groupe criminel local.

14 Question: Bien, Monsieur Zdrilic, voyons maintenant ces différentes

15 questions qui découlent de votre déclaration.

16 Votre déclaration concerne, pour la plupart, certaines enquêtes faites

17 sporadiquement, ensuite les résultats de médecine légale; c'est là-dessus

18 que vous vous étendez surtout dans votre rapport, n'est-ce pas?

19 Réponse: Monsieur Milosevic, ce n'est pas comme cela que j'aurais formulé

20 la chose. Mais dans ma déclaration, je pense avoir résumé les résultats

21 obtenus par ces personnes qui sont des experts en médecine légale

22 notamment. J'ai examiné ces résultats et j'en ai fait la synthèse; et j'ai

23 formulé ceci en anglais de façon simple dans ma déclaration.

24 Question: Oui, mais peu importe s'il s'agit d'en parler dans un langage

25 anglais simple ou pas, il s'agit d'analyses en matière desquelles vous

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1 n'êtes pas un expert, non plus que moi d'ailleurs.

2 Réponse: Mais peut-être ai-je plus d'expériences que vous, Monsieur

3 Milosevic! Quoi qu'il en soit, c'est vrai, je ne suis pas expert en la

4 matière et je n'ai pas moi-même réalisé de comparaison d'analyses d'ADN.

5 Question: Oui, mais ne conviendriez-vous pas de dire que ce lot important

6 de textes portant sur l'ADN, sur des corrélations et comparaisons à faire,

7 sur des travaux exécutés par des experts d'équipe technique, tout cela ne

8 serait pas de nature à mettre au second plan certaines questions au sujet

9 desquelles un policier enquêteur devrait avoir pas mal de réponses pour

10 pouvoir procéder à des analyses auxquelles vous vous référez, ADN, etc.?

11 Réponse: Oui, je serais d'accord avec cela.

12 Question: Si oui, alors, je vous prie de répondre à la question suivante:

13 votre réponse s'avère-t-elle claire lorsqu'il s'agit de savoir comment et

14 dans ces circonstances ces gens ont perdu leur vie?

15 Réponse: Je crois personnellement que les personnes, dont on dit qu'elles

16 ont été les victimes de l'incident du café de Suva Reka, comme c'est dit

17 dans les annexes de l'Acte d'accusation, je crois que ces personnes ont

18 été tuées en deux endroits: dans la maison et dans le café. Et ces

19 personnes ont été tuées par la police serbe de sang-froid.

20 C'est ce que je pense, vu les enquêtes que j'ai menées eu égard à cet

21 incident, les enquêtes que je mène depuis 1999 jusqu'à aujourd'hui, et

22 enquêtes qui se poursuivent d'ailleurs.

23 Question: Oui, vous dites, vous, que vous croyez qu'il en était ainsi?

24 Réponse: Tout à fait.

25 M. Milosevic (interprétation): Avez-vous des preuves à l'appui? Avez-vous

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1 une réponse à la question de savoir dans quelles circonstances ces gens-là

2 ont perdu leur vie?

3 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vais vous

4 interrompre parce que c'est à nous qu'il revient de statuer sur la

5 question. C'est précisément la question qu'il nous incombe d'examiner et à

6 laquelle il faut trouver une réponse.

7 L'avis personnel qu'aurait le témoin sur ce problème, sauf le respect que

8 je dois au témoin, importe peu, parce qu'en fin de compte, c'est nous qui

9 allons nous prononcer au vu des éléments de preuve qui nous sont soumis.

10 Et de façon plus générale, je vais vous dire ceci parce que c'est quelque

11 chose de récurrent, qui se répète tout au cours du procès. Et puisque

12 c'est vous qui vous défendez en personne, il faut répéter ces

13 explications. Il n'est pas toujours facile en effet de comprendre ceci.

14 Lorsque vous avez des polémiques par rapport à tel ou tel événement -et je

15 suis sûr que c'est ce que vous alliez commencer à faire par rapport à ce

16 qui s'est passé à Suva Reka avec le témoin-, ce sont des discussions, des

17 arguments qu'il vous faut nous adresser à nous. Vous aurez le temps de le

18 faire, je vous l'ai déjà dit, et vous pourrez aisément le faire à ce

19 moment-là.

20 Que peut faire un témoin? Il peut au plus vous dire ce que lui a fait.

21 S'agissant de l'opinion qu'il aurait à propos de ces éléments de preuve,

22 ceci compte peu. Le fait qu'il pense cela, que la preuve était à apporter

23 ou pas importe tout aussi peu. Le poids qu'il accorderait à l'élément de

24 preuve, je suis certain que vous allez lui poser des questions à ce

25 propos, ceci importerait peu aussi.

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1 Ce sont des questions qu'il ne revient pas au témoin de trancher. Ce sont

2 des questions qu'il faudra argumenter, ce ne sont pas des questions qu'il

3 faut poser à un témoin. Il ne faut pas demander à un témoin comment il

4 apporterait la preuve de telle ou telle thèse.

5 Je vous l'ai dit, vous aurez le loisir de vous adresser à nous sur tous

6 ces points. Mais, dans l'intervalle, rappelez-vous que votre

7 interrogatoire doit porter sur ce que ce témoin a fait et non pas sur ce

8 qu'il pense éventuellement.

9 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je fais de mon mieux pour le

10 contre-interroger sur ce qui ce qu'il a fait lui-même, pas au sujet de

11 quoi que ce soit d'autre.

12 Monsieur Zdrilic, ai-je bien compris en quoi consistait ce travail de

13 technicien, de personnel de médecine légale, c'est-à-dire leur travail

14 concernait les dépouilles mortelles qui ont été mises à leur disposition?

15 C'est un premier élément.

16 Un second élément qui consisterait à dire que toutes les analyses ont été

17 effectuées après juin 2001 découle, ainsi que je viens de le dire, de

18 votre rapport à vous: est-ce exact?

19 M. Zdrilic (interprétation): Je me permets de vous demander une précision.

20 Vous parlez du travail de médecine légale, vous parlez du travail que je

21 mentionne dans ma déclaration, des exhumations qui ont été réalisées en

22 1999 et en 2000 au Kosovo.

23 Est-ce que vous parlez des analyses d'ADN qui ont été, elles, réalisées en

24 Espagne? Je ne vois pas à quoi vous faites référence ou ce sur quoi porte

25 votre question.

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1 Question: Eh bien, je parle de tout ce dont il a été traité dans votre

2 déclaration, Monsieur Zdrilic.

3 Premièrement, avez-vous une réponse à savoir où ces cadavres ont été

4 exhumés?

5 Réponse: Je le répète, Monsieur Milosevic, votre question n'est pas

6 claire. Je suppose que nous parlons de l'ensemble des corps.

7 Pour répondre à votre question, je dirais que plusieurs corps ont été

8 exhumés de Suva Reka, suite aux opérations menées en 1998. C'était une

9 équipe britannique qui travaillait au nom du Bureau du Procureur et sous

10 la direction de la police qui a mené cette exhumation. Ces corps ont été

11 identifiés par des parents et ceux-ci sont mentionnés dans les tableaux

12 préparés pour la Chambre. Vous avez un astérisque au regard de ces noms.

13 Pour ce qui est du reste des corps, nous n'allons pas parler de cette

14 série d'événements, des lieux où ils ont été enterrés d'abord.

15 Mais apparemment, le dernier lieu de sépulture, tout du moins d'un bon

16 nombre de ces corps, se trouve à Batajnica dans ce lieu d'entraînement:

17 c'est la caserne des blindés de l'Unité antiterroriste (SAJ) du 13 mai; ce

18 sont ces corps qui ont été trouvés et qui ont été mentionnés dans la

19 première exhumation: Batajnica I.

20 Nous avons pris des échantillons, nous les avons comparés exactement, ce

21 que j'interprète: avec le sang prélevé de certains de leurs parents. Nous

22 avons identifié plusieurs personnes donc nous croyons que ce sont des

23 victimes de l'incident du café de Suva Reka dont les corps se trouvent

24 aujourd'hui à Batajnica.

25 Question: Monsieur Zdrilic, vous venez de fournir une partie de la réponse

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1 à la question. Mais votre déposition, à combien de personnes tuées se

2 rapporte-t-elle?

3 Réponse: Nous avons sous les yeux une déclaration, ce qu'elle fait tout

4 simplement c'est résumer les résultats. On parle de 11 personnes mais,

5 pour ce qui est de la totalité de la déclaration en tant que telle, sont

6 mentionnées toutes les personnes qui apparemment ont été les victimes de

7 l'incident du café. Ces noms correspondent aux noms qui sont repris dans

8 l'annexe versée à cette déclaration.

9 Question: Donc votre rapport, votre déclaration porte sur 11 personnes. Et

10 vous venez d'ajouter que certaines de ces personnes tuées ont été exhumées

11 à Batajnica. Quand ont-elles été exhumées à Batajnica?

12 Réponse: Je ne pourrais pas vous donner de date précise, mais je sais que

13 des éléments de preuve ont été soumis à la Chambre à ce propos, déjà.

14 En bref, cela s'est passé l'année dernière, cette exhumation de Batajnica

15 a été réalisée l'année dernière.

16 Question: Et quand les travaux d'exhumation ont-il été commencés à

17 Batajnica?

18 Réponse: Je crois de la Chambre dispose déjà de ces informations. Je ne me

19 souviens pas de la date précise, mais je suis sûr que cela s'est passé

20 l'année dernière pendant les mois les plus chauds, les mois d'été ou de

21 printemps 2001; c'est à ce moment-là qu'a commencé l'exhumation et qu'elle

22 s'est terminée à Batajnica I.

23 Question: D'accord, mais est-ce que je ne m'abuse pas si, à lire tout

24 cela, j'essaie de conclure que les experts en médecine légale ne sauraient

25 être en mesure de dire à quel moment ces corps ont été transportés ou

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1 avaient été transportés à Batajnica? Et pendant combien de temps ces corps

2 se trouvaient à Batajnica même?

3 Réponse: Je suis sûr que ce sont des questions à poser à ceux qui ont

4 examiné les corps. Donc c'est quelqu'un de l'institut de médecine légale

5 de Belgrade, je pense que ce sont ces gens-là qui ont procédé à

6 l'exhumation des restes qui ont été recueillis à Batajnica I. Je suis donc

7 sûr qu'un expert de cet institut serait la personne idoine.

8 Question: Mais c'était plutôt une question d'ordre policier que de

9 médecine légale, parce que, si je comprends bien, ils ne sont pas en

10 mesure d'assurer pendant quel espace de temps ces corps se trouvaient là

11 depuis la mort, depuis le décès des personnes ou de la personne en

12 question.

13 Or vous qui êtes expert, vous devez pouvoir me répondre; moi, je ne suis

14 pas versé dans cela: y a-t-il eu une méthode quelconque au moyen de

15 laquelle ils ont pu constater à quel moment les corps ont été déplacés,

16 ont été emmenés à Batajnica?

17 Réponse: Il se peut que les techniques d'enquêtes diffèrent d'un pays à

18 l'autre, cela je le comprends, mais un enquêteur serait en mesure

19 d'établir ou tout du moins de recueillir des éléments d'informations

20 permettant d'établir à quel moment des corps se sont trouvés à tel

21 endroit, par exemple à Batajnica I.

22 Mais un enquêteur pourrait établir ces éléments en interrogeant des

23 témoins, en recueillant des informations qui risquent d'établir ce genre

24 de choses ou en parlant à une personne présente au moment où ces corps ont

25 été enterrés, si vous parlez à une personne qui aurait transporté ces

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1 corps à cet endroit.

2 Je ne peux vous répondre que par d'autres questions hypothétiques.

3 Je le dis dans ma déclaration et je suis sûr qu'un enquêteur ou une équipe

4 d'enquête examinerait ce type de raisonnement.

5 Question: Je vous comprends, Monsieur Zdrilic, mais c'est vous qui déposez

6 ici et je voulais, pour ma part, établir ce que vous avez comme

7 connaissance certaine de et sur tout cela.

8 Etes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il est fort important, pour ne

9 pas dire essentiel, à quel moment ces corps ont été enterrés à Batajnica?

10 Réponse: Je ne suis pas nécessairement d'accord avec vous, non, même si on

11 a obtenu des informations selon lesquelles ces personnes sont mortes en

12 mars 1998, ont été exhumées de cette fosse de Batajnica en 2001 en Serbie.

13 Alors, vous me demandez maintenant de donner une date exacte; je ne pense

14 pas que ce soit d'une pertinence extrême. Ce n'est pas, en tout cas, plus

15 important que le fait de pouvoir établir quelle est l'identité de ces

16 corps ou d'établir la cause de leur décès.

17 Votre question, sur une liste de priorités ou d'importance, elle

18 interviendrait sans doute au niveau 3 ou 4, pour ce qui est des urgences

19 en matière d'enquêtes.

20 Question: Je suis d'accord avec vous pour dire que cette question

21 viendrait seulement en troisième ou quatrième place par ordre, à condition

22 que vous vous rappeliez ce que je vous ai demandé tout à l'heure, à savoir

23 quelles étaient les conditions, les circonstances dans lesquelles ces

24 gens-là ont perdu leur vie. Or M. May m'a dit que c'est à eux, maintenant,

25 évidemment, de juger et que vous ne serez pas autorisé à répondre. Voilà

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1 pourquoi je vous pose des questions sur ces troisième ou quatrième

2 questions, par ordre, et auxquelles vous devez pouvoir me répondre étant

3 donné que ceci fait partie de votre fonction et de votre tâche.

4 Donc vous ne savez pas, pour parler évidemment de ces corps qui ont été

5 analysés, vous ne savez pas à quel moment ces corps ont été déplacés vers

6 Batajnica?

7 Réponse: Je ne pourrais pas vous dire à quel moment on les a emmenés à

8 Batajnica. Je pourrais passer en revue l'information que nous avons dans

9 notre service pour essayer de circonscrire une période de temps à votre

10 intention.

11 Je vous l'ai déjà dit, je fais des enquêtes depuis au moins le mois de

12 mars 1999 et jusqu'à ce jour, je l'ai déjà dit, c'est une enquête qui se

13 poursuit, d'ailleurs. Vous avez donc sous les yeux le produit, le résultat

14 des enquêtes menées à ce jour et ces enquêtes ne sont pas terminées.

15 Question: Oui, mais est-ce que j'ai bien compris que ces corps avaient

16 d'abord été enterrés à un endroit donné pour être déterrés, pour être

17 déplacés et emmenés à Batajnica, ou plutôt jetés dans les eaux du Danube

18 pour être repêchés, repérés, pour être ensuite déplacés et enterrés à

19 Batajnica? Est-ce que vous êtes en mesure de décrire le sort qui a été

20 celui de tous ces corps, de tous ces restes de ces gens tués?

21 Réponse: Je crois que c'est esquissé de façon sommaire dans ma

22 déclaration, mais je pense -et c'est là le résultat de mon enquête- que

23 ces corps se sont trouvés dans le café de Suva Reka. Puis, on les a placés

24 dans un camion; celui-ci a été conduit dans un endroit qu'on appelle ce

25 périmètre de tir d'une caserne désaffectée de la JNA et c'est entre les

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1 villages de Ljubija et Krushice, dans la municipalité de Prizren.

2 Nous pensons sans aucun doute que ces corps ont été enterrés à cet endroit

3 et nous savons de façon certaine que des personnes se sont trouvées sur ce

4 lieu, ont examiné un grand nombre de corps de ce lieu et les ont chargés

5 dans un camion. On sait également que le corps des personnes assassinées

6 au café de Suva Reka ont été retrouvés plus tard dans Batajnica I, aux

7 abords de Belgrade.

8 Question: Bien. Mais étant donné que, dans votre déclaration, à l'avant-

9 dernier paragraphe de votre déclaration, vous dites que les corps ont été

10 déterrés moyennant une excavatrice et manuellement, que le personnel de la

11 voirie les a montés sur un camion et, entre parenthèses, nous lisons:

12 "tirés de la déclaration de Ali Zogaj", je m'y réfère.

13 Est-ce que c'est vous-même qui avez recueilli ces déclarations d'Ali

14 Zogaj?

15 Réponse: Je la connais, en tout cas, mais non, je ne pense pas que ce soit

16 moi qui aie recueilli ces déclarations; c'est un collègue qui l'a fait.

17 Question: D'accord. Est-ce que vous vous rappelez la déclaration d'Ali

18 Zogaj?

19 Réponse: Malheureusement pas. Je n'ai pas vu son audition parce que je

20 n'étais pas dans le pays, à l'époque.

21 Question: Oui. Mais est-ce que vous avez souvenance du fait qu'il y a eu

22 un problème de date et qu'Ali Zogaj a primitivement dit que cette

23 exhumation, les travaux de déterrement de ces champs de tir ont été

24 effectués au printemps 2000?

25 Réponse: Je ne vois pas comment je pourrais répondre, parce que je ne

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1 connais pas la teneur de la déposition de ce monsieur. Je ne peux pas vous

2 aider.

3 M. Milosevic (interprétation): Oui. Mais est-ce que vous avez tout de

4 même, entre-temps, pris en considération le fait que ces corps avaient été

5 déjà déplacés quelques mois avant d'être découverts à Batajnica, mais donc

6 pas en 1999? Avez-vous pris en considération cette possibilité aussi,

7 Monsieur Zdrilic?

8 M. Zdrilic (interprétation): N'oubliez pas qu'il y a certains éléments

9 dont je ne peux pas discuter, puisqu'il y a encore des enquêtes en cours.

10 Nombreuses sont les possibilités que nous examinons, Monsieur Milosevic,

11 et que nous continuons d'examiner. Ce sont des choses que nous gardons à

12 l'esprit jusqu'au moment où nous sommes en mesure de les éliminer. Ce

13 serait bien sûr une option, une possibilité, à savoir que ces corps aient

14 été transférés à Batajnica peu de temps avant d'être découverts. Il n'est

15 pas possible de savoir pendant combien de temps ces corps se sont trouvés.

16 Ce qui est connu de façon sûre, je vous l'ai déjà dit, c'est que ces corps

17 ont été enterrés, là, dans ce terrain que j'appelle le périmètre de tir.

18 Ce que l'on sait aussi, c'est que, à ce jour, au moins neuf de ces corps

19 sont identifiés comme venant de Batajnica I, aux abords de Belgrade.

20 Maintenant, nous essayons de combler ces espaces, ces blancs qui restent.

21 Et l'enquête se poursuit dans ce sens.

22 M. le Président (interprétation): Nous allons faire une pause.

23 Vous avez bénéficier du même temps, Monsieur Milosevic, que le temps

24 réservé au Bureau du Procureur. Puisque des arguments juridiques ont été

25 utilisés et présentés pendant votre contre-interrogatoire, vous aurez un

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1 peu plus de temps.

2 M. Milosevic (interprétation): Cela ne me semble pas suffisant, Monsieur

3 May. Vraiment, c'est loin d'être suffisant.

4 M. le Président (interprétation): Vous disposerez d'un quart d'heure de

5 plus.)

6 Pause de 20 minutes.

7 (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 10 heures 55.)

8 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic, poursuivez.

9 M. Milosevic (interprétation): Comme je vous ai compris, il se peut donc

10 que ces corps aient étaient transférés à Batajnica, peut-être après un

11 espace de temps relativement court, après avoir été déterrés, n'est-ce

12 pas, Monsieur Zdrilic?

13 M. Zdrilic (interprétation): C'est une possibilité, mais c'est fort peu

14 probable, à mon avis.

15 Question: Oui, mais serait-il improbable de voir que ceci devait être pour

16 des motifs de monter de toutes pièces des arguments, sur la base desquels

17 les autorités auraient caché tous ces corps et les déplacer du Kosovo vers

18 d'autres régions de Serbie?

19 Réponse: Quant à savoir si les autorités ont essayé de fabriquer des

20 preuves de toutes pièces, je ne peux pas vous le dire. Je vous l'ai déjà

21 dit: vu le niveau des enquêtes actuelles, il semble que ces corps n'ont

22 pas été transférés peu de temps avant la découverte de ces corps à

23 Batajnica, mais bien longtemps avant. Et ceci serait encore mis en

24 évidence par les conditions dans lesquelles ces exhumations ont été

25 effectuées. En effet, il y avait déjà beaucoup de végétation qui avait

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1 poussé. Comment dire? Ce n'était pas une zone où il y avait eu des

2 mouvements de terrain récents et, déjà en soi, ceci indique que cette

3 fosse commune s'était trouvée à cet endroit depuis un certain temps, un

4 temps certain.

5 Question: Un certain temps, dites-vous. Et si l'on prend en considération

6 qu'une végétation pousse, etc., alors depuis octobre/novembre 2000

7 jusqu'en mai/juin 2001, cela veut dire que l'automne passe, l'hiver passe,

8 pratiquement une bonne partie du printemps; par conséquent, le temps tout

9 à fait suffisant en faveur de ce que vous avez dit tout à l'heure, n'est-

10 ce pas, oui ou non?

11 Réponse: Peut-être que oui, effectivement, mais vous devriez poser la

12 question à quelqu'un qui a participé à l'opération d'exhumation, à

13 quelqu'un qui s'y connaît pour ce qui est du terrain de la région dont

14 nous parlons.

15 Question: Cela dit, je suppose que ceci devrait être pris en photographie

16 -les sites et le reste- avant de procéder à des exhumations, ne serait-ce

17 que pour établir approximativement au moins de quoi il s'agissait. Cela a-

18 t-il été connu de vous?

19 Réponse: Pour autant que je sache, les photographies consacrées à

20 l'exhumation de Batajnica I sont connues de la Chambre. Vous avez raison

21 de dire que, si l'on examine ces photographies, on a une idée beaucoup

22 plus visuelle de l'aspect que présentait cette région avant l'exhumation.

23 M. Milosevic (interprétation): Le témoin qui, vers la fin de la semaine

24 dernière, devait répondre aux questions posées par un de ces messieurs,

25 assis au sein de la Chambre de première instance -il s'agit notamment du

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1 témoin nommé Stijovic- à qui, chemin faisant, on a posé des questions

2 comme quoi lui, il avait établi le fait qu'une fosse commune avait été

3 repérée et déterrée du Kosovo. Et lorsque la question lui a été posée de

4 savoir ce qui a été fait de tout cela, il a dit en réponse que les corps

5 ont été remis aux membres de famille.

6 Alors, dites-moi maintenant, comment se fait-il que cette même police, une

7 fois qu'elle fait des travaux d'exhumation, lorsqu'elle établit une

8 identification des corps tels quels, lorsque les restes des corps ont été

9 remis à des membres de famille, tout d'un coup, cette même police –ce que

10 vous intitulez comme étant les forces serbes- se met à enterrer ou par

11 exemple à mettre cela dans des cours qui seraient les cours de la police

12 ou ailleurs, oui ou non?

13 M. le Président (interprétation): S'il ne vous est pas possible de

14 répondre à cette question, dites-le, Monsieur le Témoin.

15 M. Zdrilic (interprétation): Je ne pourrai pas répondre à toute la

16 première partie. Et puis, on me demande "s'il semblerait logique pour un

17 officier de police", je répondrais: non, non, ce n'est pas du tout

18 logique.

19 M. Milosevic (interprétation): Bien. Etant donné que j'ai très peu de

20 temps à ma disposition, occupons-nous très brièvement de ce qui suit.

21 Comment procédait-on à l'identification lorsqu'une analyse ADN n'a pas été

22 effectuée?

23 M. Zdrilic (interprétation): Si vous pensez à une identification qui a été

24 réalisée au Kosovo même, ce serait fait de plusieurs façons. D'abord, une

25 identification par présomption, grâce à des enquêtes qui auraient été

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1 menées dans ce sens. Et puis, au moment de l'exhumation, on peut faire un

2 examen physiologique ou physique, en se servant de membres de la famille

3 qui seraient en mesure d'identifier les corps. Et la première forme

4 d'identification peut se faire ou a pu se faire au cours des exhumations

5 réalisées en 1999.

6 Question: Oui, mais, lors des exhumations qui ont été effectuées en 2001,

7 ceci n'a certainement pas été possible.

8 Réponse: Il n'y a pas eu d'exhumation. Vous pourrez peut-être me corriger,

9 mais je ne pense pas qu'il y ait eu d'exhumation faite par le Bureau du

10 Procureur au Kosovo en 2001.

11 Question: Dites-moi, est-ce possible de dire qu'il est suffisant pour une

12 identification de trouver par exemple certains articles de vêtements ou de

13 pièces d'identité de la personne, etc.? Est-ce possible pour procéder à

14 une identification?

15 Réponse: Cela, à lui seul, ne suffit pas pour établir une identification

16 positive.

17 Question: Dites-moi, est-il possible de faire l'identification au moyen de

18 la méthode de reconnaissance du corps après tout ce temps écoulé, et

19 lorsqu'il s'agit de corps sur lesquels vous êtes en train de déposer?

20 Réponse: Si vous examinez l'aspect physique des corps, c'est possible,

21 mais c'est très improbable.

22 Question: Dites-moi, a-t-on fait des prélèvements pour analyse de l'ADN

23 lorsqu'il s'agit de ces 11 corps qui ont été déterrés près de Prizren?

24 Réponse: Vous parlez de quels 11 corps? Pourriez-vous être plus précis?

25 Question: Je crois que j'ai lu quelque part dans votre rapport qu'il

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1 s'agissait de 11 corps déterrés près de Prizren, et, si j'ai bien compris,

2 il s'agit bien de ce site-là. A-t-on procédé à des analyses d'ADN ou bien

3 s'agit-il de dire que ceux que vous avez décrits, vous, là, étaient les

4 seuls cas où des prélèvements en cette matière ont été faits?

5 Réponse: Je voudrais aider les Juges. Je pense que vous parlez de

6 l'endroit dans ma déclaration où je mentionne un examen du site qu'on

7 appelle "le périmètre de tir" dans la municipalité de Prizren entre les

8 villages de Korisa et Ljubizda.

9 Effectivement, plusieurs articles ont été repérés, des papiers

10 d'identification, des vêtements, des chaussures, ce genre de choses. Il y

11 a eu parmi ces éléments 11 objets, ou près de 11 objets qui ont été

12 identifiés par des membres de familles, comme appartenant à des personnes

13 dont on pense que ce sont des victimes de l'incident du café de Suva Reka,

14 en mars 1999. Je pense que vous parlez de ce chiffre de 11, mais ce sont

15 11 objets qui ont été identifiés à la suite de cette exhumation en 1999.

16 Question: Y a-t-il une possibilité de vérifier et confirmer l'objectivité

17 de ces travaux ainsi effectués lorsqu'il s'agit d'analyses ADN à faire?

18 Réponse: Non. Nous parlons de l'objectivité des analyses faites au

19 laboratoire en Espagne?

20 Question: Peu importe. Ma question est plutôt une question de principe: y

21 a-t-il une possibilité de vérifier et faire vérifier l'objectivité des

22 travaux effectués en laboratoire en matière d'analyses d'ADN? Peu importe

23 le laboratoire dont il s'agit.

24 Réponse: On peut vérifier. Tout du moins en ce qui concerne les résultats.

25 Le résumé des conclusions qu'on tire à partir de ces résultats, cela peut

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1 être vérifié, sans nul doute. Je réponds donc par l'affirmative: on peut

2 vérifier l'objectivité de résultat.

3 Question: A-t-on procédé à des doubles prélèvements de tissu en vue d'une

4 analyse ADN?

5 Réponse: Je ne sais pas combien d'échantillons ont été prélevés. Mais, je

6 le répète, c'est une question qu'il faudrait poser à l'Institut de

7 médecine légale de Belgrade pour savoir combien d'échantillons ont été

8 prélevés. Ce que je sais, c'est qu'il y a un ensemble d'échantillons remis

9 par les représentants de l'Institut de Belgrade au laboratoire de Madrid

10 en Espagne.

11 Question: Y a-t-il une possibilité de voir les échantillons prélevés

12 contaminés? Par exemple, dans le cas de Glodane, une déclaration a été

13 faite comme quoi, étant donné la contamination, les prélèvements n'ont pas

14 été possibles.

15 Réponse: Je crois que vous avez vous-même répondu à votre question.

16 Est-ce qu'on peut avoir une contamination d'échantillons, bien sûr, mais

17 est-ce que c'était le cas ici, en l'espèce? De nouveau, c'est une question

18 qu'il faut poser à l'Institut de médecine légale à Belgrade. Mais, pour

19 moi, c'est fortement improbable parce que, je pense, on a vu comment

20 fonctionne cet Institut; c'est une institution éminemment professionnelle

21 qui sait très bien ce qu'elle fait, et rien ne porte à croire qu'il y a eu

22 la moindre contamination dans les échantillons remis à l'Institut de

23 Madrid en Espagne.

24 Question: Non, ce n'est pas que j'exprime un doute quelconque, pour ce qui

25 est de la qualité des travaux effectués par l'Institut de médecine légale

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1 de Belgrade. Ma question était plutôt d'ordre formel; ce n'est que par

2 principe que j'en parle; que je crois, pour ma part, que ce sont tous des

3 gens experts et qu'ils ont été bien consciencieux dans leurs travaux.

4 Mais il s'agit maintenant de cet institut madrilène. Y a-t-il lieu de dire

5 que, par exemple, étant donné un mauvais conditionnement, les prélèvements

6 étaient inutilisables en vue de tests ultérieurs?

7 Réponse: Je vous fournirais la même réponse. Je n'ai pas de raison de

8 croire que l'institut madrilène aurait fait preuve de moins de sens

9 professionnel que celui de Belgrade. Aucune raison, disais-je, de croire

10 qu'il y aurait une quelconque contamination que ce soit de ces

11 échantillons.

12 Question: Oui. Seriez-vous aimable de me donner quelques explications au

13 sujet, par exemple, de ce qui est considéré comme second rapport établi

14 sur la valeur générique des restes des corps retrouvés dans Batajnica-1.

15 Je me réfère à la page 8, paragraphe 6. Vous dites en résultat et en

16 conclusion: "Cela ne me semble pas tout à fait clair".

17 Ce qui m'intéresse, c'est de savoir votre explication du phénomène. Vous

18 parlez de prélèvements osseux, etc. Nous y lisons des chiffres. Donc ces

19 prélèvements osseux et autres, présentent le même profil RTL; disons que

20 ces deux prélèvements osseux devraient découler d'une même personne,

21 devraient avoir pour origine la même personne.

22 La seconde phrase se lit comme suit: "Pourtant, on ne peut pas exclure, on

23 ne doit pas exclure que ceci pourrait être le prélèvement de Vesel Shaban,

24 son père, etc.". Les résultats indiquent qu'il s'agit d'une même personne,

25 mais on ne peut exclure non plus la possibilité que ceci peut être bien

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1 sûr les prélèvements d'une autre personne.

2 Alors, qu'y a-t-il ici, Monsieur, de prépondérant pour vous dans vos

3 évaluations, lorsqu'il s'agit de dire qu'il s'agit d'une même personne,

4 que les restes étaient identiques toujours ou peut-être que les

5 prélèvements ont été faits sur deux personnes différentes?

6 Réponse: Une petite précision d'abord: il n'est pas question ici de

7 préférence, cela va de soi. Que disent ces conclusions? C'est que des

8 échantillons osseux, BA 22 et BA 59, ont été reçus par cet institut. Une

9 analyse ADN a été réalisée; ainsi a été établi le profil ADN de ces deux

10 échantillons. Il a été déterminé que ces deux échantillons, BA22 et BA59,

11 provenaient d'une seule personne. C'est une des conclusions tirées: ces

12 deux échantillons osseux venaient d'une même personne.

13 Mais le laboratoire va plus loin: il dit que ces deux échantillons

14 provenant d'une seule et même personne peuvent être de Vesel Shaban; on

15 fait état de Vesel Shaban Berisha que nous voyons dans l'arbre

16 généalogique que j'ai préparé: JZ-1. C'est le père biologique de Kuci

17 Vesel Dasurije. Vous le trouvez, ce dernier, dans le premier tableau.

18 Je vous renvoie au premier tableau JZ-1 et vous verrez qu'en haut de ce

19 tableau, le chef de cette famille, c'est Vesel Shaban âgé de 61 ans. A

20 côté de lui, apparemment, on voit que c'est une personne qui aurait été

21 tuée lors de l'incident du café de Suva Reka. Deux échantillons osseux ont

22 été examinés et ont été prouvés comme originaires de la même personne. Ces

23 échantillons ont ensuite été identifiés, par comparaison ADN, comme étant

24 ceux du père biologique de Dasurije Kuci qui est la personne qui se trouve

25 à l'extrême droite de ce même tableau, fille de Vesel et Sofia Shaban.

Page 9916

1 Que fait le laboratoire? Il fait deux choses: il dit d'abord que nous

2 avons deux échantillons osseux venant d'une seule et même personne; il

3 ajoute qu'il a été identifié que ces échantillons provenaient du père

4 biologique de Dasurije Kuci.

5 J'espère que j'ai été clair.

6 Question: Est-ce bien votre explication pour l'autre BA29, BA37, où vous

7 dites que "ces deux prélèvements devraient avoir pour origine une même

8 personne, encore que l'on n'est pas en mesure d'exclure…". Et le texte

9 suit.

10 Votre explication demeure-t-elle toujours la même, comme tout à l'heure?

11 Réponse: Elle est très similaire: BA29 et 37, comme vous l'avez dit à

12 juste titre, ont effectivement été identifiés par analyse ADN. Ils

13 proviennent du même individu qui est identifié comme étant deux choses:

14 premièrement, la fille biologique de Vesel Shaban Berisha et, deuxième

15 chose, la fille biologique de Sofia Berisha. Et vous avez fait l'impasse

16 sur l'identification de cette dernière.

17 Et c'est le point intermédiaire. Nous avons les deux personnes à la tête

18 de cet arbre généalogique, Vesel et Sofia, qui ont tous deux été

19 identifiés comme étant les parents biologiques de Dasurije Kuci et, à

20 partir de là, à partir de cette identification, Fatmire, leur fille, a été

21 identifiée comme étant la fille biologique de ces deux personnes.

22 Question: Bien. Mais je vois maintenant à la page 2, en haut de la page et

23 au bas de la page, il y a deux points où l'on dit: "Il est exclu tout

24 rapport entre ces personnes en question."

25 Alors, à combien de personnes se réduit-on pour ainsi dire pour dire qu'il

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1 devait y avoir évidemment une corrélation directe?

2 Réponse: Est-ce que vous pourriez répéter votre question? Je ne vois pas

3 clairement où vous voulez en venir?

4 Question: Page 9, en haut de la page, nous ne voyons pas de chiffres, nous

5 ne voyons que des cases où nous voyons des écarts d'un fragment à l'autre.

6 Page 9: "Il est exclu que la personne dont provient l'échantillon, etc.,

7 etc." Et en bas de la page, on dit : "Il est exclu que la personne dont on

8 a fait les prélèvements osseux, etc., etc."

9 Alors, à combien de personnes se résume tout cela où vous dites qu'il y a

10 corrélation entre les personnes pour lesquelles des analyses ont été

11 effectuées?

12 Réponse: Je ne vois pas très bien où vous voulez en venir, mais, à la

13 suite de la comparaison ADN effectuée par l'Institut de Madrid en Espagne,

14 à ce jour, 11 personnes en tout ont été identifiées, dont on croit

15 qu'elles sont victimes de l'incident du café de Suva Reka en mars 1999. Ce

16 sont 11 personnes qui ont été identifiées et dont on sait que les restes

17 se trouvent au site d'exhumation de Batajnica.

18 Question: Bon, étant donné que vous êtes policier de profession, répondez-

19 moi à la question suivante: indubitablement, ces gens-là sont morts.

20 Plusieurs d'entre eux ont été identifiés.

21 Est-ce que cela sert d'une façon quelconque pour répondre aux questions:

22 par qui ils ont été tués, dans quelles circonstances et pour quels motifs?

23 M. le Président (interprétation): Non, non. Inutile que le témoin réponde

24 à une question qui tombe sous le sens. Nous n'allons pas revenir sur cette

25 chose qui a déjà été évoquée.

Page 9918

1 Vous avez déjà bénéficié de 1 heure et 10 minutes; c'est amplement

2 suffisant et c'est de loin supérieur au temps qui aurait dû être consacré

3 à ce contre-interrogatoire. Il vous reste le temps d'une question encore.

4 M. Milosevic (interprétation): D'accord.

5 Monsieur Zdrilic, vous avez pris connaissance de plusieurs camps

6 d'exécution où furent tués, massacrés et incinérés des Serbes.

7 Votre institution, le service pour lequel vous travaillez, la profession

8 que vous embrassez… Vos collègues ont-ils procédé à des identifications

9 suivant la façon qui était la vôtre dans le cas de ces 11 personnes où les

10 victimes de ces crimes, de toute évidence, étaient des Serbes?

11 M. Zdrilic (interprétation): Lorsqu'on mène une enquête au nom du Bureau

12 du Procureur, c'est certain que nous menons ces enquêtes sur des

13 infractions alléguées au droit humanitaire international quels que soient

14 les auteurs présumés. Il n'y a aucun préjugé. Nous avons travaillé au

15 départ en Albanie –nous l'avons dit- et puis au Kosovo, et où que ce soit

16 d'autre où nous auraient menés nos enquêtes. Nous avons mené celles-ci

17 pour recueillir des preuves sur ces allégations d'incidents qui se

18 seraient produits pendant la période des faits au Kosovo.

19 Question: Ma question était de savoir si vous aviez établi des rapports

20 similaires concernant les analyses d'ADN, comme vous en avez parlé, car

21 j'ai en vue plus de 1.500 Serbes disparus pour lesquels on suppose qu'ils

22 ont été tués pour être cachés ensuite quelque part.

23 Avez-vous procédé à des analyses de ce genre-là qui auraient indiqué le

24 chemin des analyses à faire sur des Serbes portés disparus, disparus ou

25 perdus, ou bien retrouvés dans ces différents sites et champs d'exécution

Page 9919

1 au cours de la campagne du Kosovo? Est-ce que vous avez des résultats?

2 Réponse: Moi, personnellement, non. Mais je sais que le Bureau du

3 Procureur mène une ou des enquêtes en suivant les mêmes grands axes que

4 ceux que vous venez de mentionner et je sais que des éléments

5 d'informations ont été recueillis. Et si je suis appelé à témoigner

6 s'agissant de ces choses, je le ferai.

7 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, que l'on essaye tout de même,

8 à titre d'éclaircissement, de dire quelque chose comme suit: vous ne me

9 permettez plus de question. J'en ai pourtant une trentaine là-dessus. Mais

10 enfin, essayons de trancher un peu la question de cet amas de papiers avec

11 lequel travaille M. Ryneveld.

12 Il a été dit ici que quelqu'un d'une instance supérieure devrait être

13 interrogé lorsqu'il s'agit de ces documents-là.

14 Je voudrais être un peu plus précis: lorsqu'il s'agit d'un courrier

15 concernant Louise Arbour, on ne devrait pas parler d'une instance

16 supérieure mais il faut parler de "Mme Louise Arbour". Lorsqu'il s'agit du

17 ministre fédéral de la Justice, il s'agit de ce ministre de la Justice à

18 interroger et pas quelqu'un d'autre. Voilà donc les questions dans le

19 cadre desquelles peuvent être contre-interrogées et interrogées uniquement

20 les personnes qui sont les signataires de ces documents.

21 Si vous me permettez une autre remarque, Monsieur May, vous disiez, vous,

22 que M. John Zdrilic était le seul employé de ce soi-disant Bureau du

23 Procureur. Or qui est venu là pour déposer? On a vu Fred Abrahams, on a vu

24 Baccard, Paul… et une série d'employés du Bureau du Procureur...

25 M. le Président (interprétation): Je vais vous interrompre.

Page 9920

1 La plupart de ces personnes étaient des anciens employés. Il n'y en a

2 qu'un ou deux qui travaillent encore au Bureau du Procureur.

3 Mais pour ce qui est de la production de cette correspondance, il est vrai

4 que ce témoin pouvait les produire.

5 Nous allons examiner la question que vous soulevez, s'agissant de savoir

6 quel serait le témoin qui se prêterait à ce type de contre-interrogatoire.

7 Y a-t-il des questions, Monsieur Wladimiroff?

8 M. Wladimiroff (interprétation): Non.

9 M. Ryneveld (interprétation): Très rapidement, uniquement quelques

10 questions pour apporter des précisions.

11 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. John Martin

12 Zdrilic, par M. Ryneveld.)

13 Une des questions qui vous a été posée en contre-interrogatoire, Monsieur

14 Zdrilic, portait sur le fait que les autorités auraient peut-être monté de

15 toutes pièces certains éléments. Vous avez répondu en disant que vous ne

16 saviez pas.

17 A quelles autorités pensiez-vous lorsque l'accusé vous a posé cette

18 question-là?

19 M. Zdrilic (interprétation): Eh bien, il s'agissait d'autorités auxquelles

20 nous nous étions référés de façon claire. Etant donné que tout ceci s'est

21 fait en Serbie, ces autorités seraient des autorités de la République de

22 Serbie et de la Yougoslavie.

23 Question: Mais en répondant de la sorte, vous aviez sous-entendu: "les

24 autorités au sein du Bureau du Procureur"?

25 Réponse: Tout à fait.

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1 Question: Donc, est-ce que votre réponse inclut la possibilité que le

2 Bureau du Procureur aurait pris part à la fabrication de ces éléments de

3 preuve?

4 Réponse: Ma réponse serait certainement de dire que le Bureau du Procureur

5 n'a certainement pas pris part à la fabrication, au montage des pièces à

6 conviction. Nous n'avons pas également été impliqués dans les exhumations

7 qui ont été réalisées.

8 Question: Une autre question, Monsieur: s'agissant de la possibilité selon

9 laquelle ces cadavres, ou ces corps auraient été fraîchement déplacés vers

10 Batajnica, depuis le 12 juin 1999, sauriez-vous nous dire s'il y a eu

11 présence de la KFOR au Kosovo?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Et d'après ce que vous en savez, est-ce qu'une exhumation

14 quelconque ou un quelconque transport de cadavres depuis le Kosovo, depuis

15 la date du 12 juin 1999, aurait pu être réalisé sans l'autorisation d'une

16 organisation telle que la KFOR, qui avait exercé son autorité sur le

17 Kosovo?

18 Réponse: Tout à fait certain.

19 Question: Peut-être n'est-ce pas assez clair. Vous entendez, bien sûr,

20 qu'il eût fallu avoir l'autorisation de la KFOR?

21 Réponse: C'est tout à fait exact.

22 Question: Troisième chose: vous avez également mentionné, lorsqu'il avait

23 été question des transports d'échantillons depuis Belgrade vers Madrid,

24 vous avez donc dit que vous saviez que quelqu'un avait emporté cela.

25 S'agissait-il du professeur Dunjic?

Page 9922

1 Réponse: Oui.

2 Question: C'est un professeur qui provient de l'institut de Belgrade?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Et d'après ce que vous savez nous en dire, c'est lui qui a

5 emporté ces échantillons vers l'Espagne?

6 Réponse: C'est lui qui a pris en charge les échantillons à Belgrade pour

7 les remettre à l'institut de Belgrade.

8 Question: Enfin, Monsieur le Président, ce n'est peut-être pas une

9 question supplémentaire, mais une question que je voudrais soulever pour

10 aider la Chambre.

11 Lors du contre-interrogatoire de ce témoin, il a été suggéré qu'il y avait

12 des rapports de l'OSCE-Kosovo, comme cela a été cité; et je vous demande

13 de vous référer à la page 340 qui reprend un rapport concernant les

14 opérations des forces de sécurité en date du 11 mars au village de

15 Jeskovo. Je voudrais préciser: Monsieur Zdrilic, lorsque vous avez prélevé

16 ou recueilli les dires du témoin K41, est-ce qu'il était en train de vous

17 décrire un incident qui a eu lieu au mois de février 1999 à Jeskovo?

18 Réponse: C'est exact.

19 M. Ryneveld (interprétation): Monsieur le Président, vous remarquerez

20 qu'en page 340 dudit rapport, on affirme qu'une opération a été réalisée à

21 Jeskovo en date du 11 mars 1999. Soit il s'agit donc d'une opération

22 différente qui s'est tenue à un moment différent ou alors, si c'est la

23 même opération, le rapport précise que la plupart des effectifs de l'OSCE,

24 ou plutôt de la Mission de contrôle de l'OSCE, n'avaient pas accès à la

25 région. On dit que l'UCK s'était infiltré à l'intérieur de Jeskovo,

Page 9923

1 village déserté une semaine plus tôt.

2 Et il est précisé que le 12 mars, la police avait demandé à visiter

3 Jeskovo et les vérificateurs de l'OSCE avaient vu sept corps d'hommes

4 armés, en uniforme noir de l'UCK; d'après la police, tous ces hommes

5 avaient été tués par arme à feu au cours de l'opération des forces de

6 sécurité. Une autre citation dit que les équipes n'avaient pas été en

7 mesure de conclure que ces membres de l'UCK avaient été tués aux sites où

8 ils avaient été retrouvés, etc.

9 Donc Messieurs les Juges, si vous voulez vérifier pendant les

10 délibérations qui seront les vôtres, je vous demanderai de consulter la

11 page 340 qui est le passage pertinent pour ce qui est de ce qui a fait

12 l'objet du contre-interrogatoire.

13 M. le Président (interprétation): Merci.

14 Monsieur Zdrilic, je vous remercie d'être venu témoigner. Vous êtes libre

15 de vous en aller.

16 (Le témoin, M. John Martin Zdrilic, est reconduit hors du prétoire.)

17 (Questions relatives à la procédure.)

18 Monsieur Nice, je voudrais que l'on se penche sur la question pour savoir

19 quel est le témoin approprié pour ce qui est du versement de cette

20 correspondance au dossier.

21 M. Nice (interprétation): Permettez-moi de vous dire une chose. La

22 question qui se pose, c'est de savoir si ces lettres ont été bien reçues

23 et si ces dépositions et déclarations ont été faites. J'ai suivi le

24 contre-interrogatoire et je n'ai pas cru comprendre que l'accusé ait

25 contesté le fait que ces lettres lui aient été envoyées, mais nous nous en

Page 9924

1 remettons à la Chambre.

2 M. le Président (interprétation): Nous estimons que nous devrions faire

3 venir un témoin à ce sujet. Et, si je puis le dire, ceci est un exemple

4 pour illustrer les raisons qui ont été les miennes pour les hésitations

5 quant au versement de ces éléments de preuve au dossier, pour ce qui est

6 donc aussi de savoir pour quelles raisons la Chambre consacrerait du temps

7 sur ces questions périphériques. Donc peut-être l'accusation devrait

8 prendre en considération les opportunités qui pourraient être offertes à

9 l'accusé pour procéder au contre-interrogatoire.

10 M. Nice (interprétation): Oui, Monsieur le Président. S'agissant de ces

11 questions concrètes, nous les estimons…, enfin, nous pensons que cela est

12 important.

13 Maintenant, pour qui est des candidats, pour ce qui est du versement au

14 dossier autre que M. Zdrilic, ça pourrait être un officier supérieur de ce

15 dernier ou alors une autre personne faisant partie du Bureau du Procureur.

16 Toutefois, la question demeure de savoir quelles sont les questions que

17 souhaite poser l'accusé. La question n'est pas contestée de dire que les

18 lettres avaient effectivement été envoyées et reçues. Et l'on n'a pas

19 identifié la question…, que le domaine d'intervention.

20 M. le Président (interprétation): Eh bien, c'est la difficulté qui est

21 celle de voir un accusé se défendre en personne et dans quelle mesure il

22 convient de lui fournir le droit de procéder à des contre-interrogatoires.

23 Mais, en tout état de cause, nous allons nous pencher sur la question

24 ultérieurement.

25 Peut-être pourriez-vous nous préciser quelles sont les personnes que vous

Page 9925

1 entendez faire venir à présent?

2 M. Nice (interprétation): Nous allons citer Mme Olivera Antonic-Simic,

3 comme nous l'avons annoncé la semaine passée, puis nous allons avoir M.

4 Coo.

5 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous pensez que nous allons

6 pouvoir finir demain ou pas, compte tenu du temps que nous avons consacré

7 à la chose aujourd'hui?

8 M. Nice (interprétation): Je crois, j'espère que nous allons pouvoir

9 terminer d'ici demain. Mais il y a toute une série de questions

10 administratives que nous voudrions soulever. Peut-être serait-il utile de

11 ne pas en discuter au cours des cinq dernières minutes d'une journée de

12 travail? Je voudrais que la Chambre nous autorise à travailler mercredi,

13 si cela s'avère nécessaire.

14 (M. le Président s'entretient avec Mme la Greffière.)

15 M. le Président (interprétation): Je crois qu'il serait peut-être utile de

16 procéder à la prise de mesures pour couper le public de ce qui se passe

17 dans le prétoire. Je ne vois pas de raisons apparentes pour ce faire. Je

18 voudrais donc que l'on n'interrompe pas le débat public qui est en train

19 de se dérouler.

20 M. Nice (interprétation): Il y a un certain nombre de choses que je

21 voudrais que nous étudiions. Il conviendrait que nous entamions le

22 processus de préparatifs pour ce qui est des phases ultérieures de ce

23 procès.

24 M. le Président (interprétation): Il est donc réaliste de penser que nous

25 allons travailler mercredi également.

Page 9926

1 M. Nice (interprétation): Je crois que nous allons quand même pouvoir

2 peut-être terminer demain.

3 M. le Président (interprétation): Eh bien, nous pourrions peut-être

4 commencer la suite de l'affaire dans les deux semaines qui suivent. Et ce

5 sera probablement jeudi. La date m'échappe maintenant.

6 M. Nice (interprétation): Ce serait le 26, je pense.

7 M. le Président (interprétation): Très bien. Vous pouvez faire entrer le

8 témoin.

9 M. Nice (interprétation): Merci. Eh bien, pour ce qui est de ce témoin,

10 nous allons procéder à une déformation des traits du visage et ceci sur

11 demande de ses employeurs plutôt qu'à la demande du témoin lui-même.

12 Le problème qui s'est posé, c'est qu'on a fait une référence sans citer

13 l'ouvrage de l'OSCE "As seen as told"; je vais essayer de voir cette

14 rubrique, mais je veux voir aussi si nous avons une version électronique

15 pour laquelle vous pourriez effectuer une recherche électronique. Nous

16 avons une version électronique, nous ne savons pas si on peut la

17 parcourir, mais si c'est le cas, je pense que ceci risque de vous aider,

18 Messieurs les Juges. Et nous allons mettre cette version à votre

19 disposition.

20 M. le Président (interprétation): En tout cas, à l'un d'entre nous.

21 M. Nice (interprétation): Oui, effectivement. Je pense que nous aurons

22 aussi l'aide de notre assistance, Mme Graham, et ceci sera très utile pour

23 tout le monde. Je pense que je n'aurai qu'une demi-douzaine de questions à

24 poser à ce témoin.

25 (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 33.)

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1 M. Nice (interprétation): L'accusé a contre-interrogé le témoin précédent

2 portant sur cette déclaration et le témoin est conscient de la nature du

3 contre-interrogatoire. Elle s'inquiète aussi du fait qu'il y a un extrait

4 plus long de la déclaration qui devrait être examiné. De toute façon, le

5 passage plus conséquent, qui nous intéresse, sera posé sur le

6 rétroprojecteur.

7 On pourrait peut-être demander à un stade ultérieur le dépôt au dossier de

8 sa déclaration préalable.

9 (Le témoin, Mme Olivera Antonic-Simic, est introduit dans le prétoire.)

10 M. le Président (interprétation): Oui, Madame, je vous demande de

11 prononcer la déclaration solennelle.

12 Mme Antonic-Simic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai

13 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

14 M. le Président (interprétation): Merci, Madame. Veuillez vous asseoir.

15 (Le témoin s'exécute.)

16 (Interrogatoire principal du témoin, Mme Olivera Antonic-Simic, par M.

17 Nice.)

18 M. Nice (interprétation): Vous appelez-vous Olivera Antonic-Simic, Madame?

19 Mme Antonic-Simic (interprétation): Oui.

20 Question: Est-ce que vous travaillez auprès de l'agence des renseignements

21 de la sécurité, ce qui était auparavant RDB? Et est-ce que vous travaillez

22 depuis 1996 pour ces organisations?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Est-ce que vous avez travaillé avec M. Stijovic, qui a été

25 témoin de cette affaire, au moment où il a réalisé des entretiens avec

Page 9928

1 Rade Markovic?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Est-ce que vous avez participé, en une quelconque façon, à la

4 teneur de ces entretiens, ou est-ce que vous avez simplement fait la

5 dactylographie, l'impression de ces déclarations?

6 Réponse: Je n'ai fait que la dactylographie, l'impression de sa

7 déposition.

8 Question: Est-ce qu'il y avait, parmi ces entretiens, notamment celui qui

9 portait sur le camion frigorifique?

10 Réponse: Oui.

11 Question: S'agissant de la teneur de cet entretien-là ou de tout autre

12 entretien, que pourriez-vous répondre si on laissait entendre que M.

13 Markovic serait tombé dans un piège, aurait été forcé de répondre ou de

14 signer une déclaration ou des déclarations qui lui auraient été présentées

15 d'une façon qui aurait été complétée? Que diriez-vous face à de telles

16 suggestions?

17 Réponse: Je n'ai pas assisté à ce genre de choses. Je dirais donc non.

18 Question: Votre réponse est: "Je n'ai pas assisté à cela, non".

19 La question était de savoir ce que vous répondriez si on lui laissait

20 entendre qu'on l'avait fait tomber dans un piège, qu'il y avait un

21 stratagème ou qu'on aurait essayé d'obtenir sa signature d'une façon ou

22 d'une autre. Est-ce qu'il y aurait la moindre vérité dans de telles

23 affirmations?

24 Réponse: Je dirai plutôt que cela n'a pas été fait en ma présence.

25 Question: Je vous remercie.

Page 9929

1 Vous avez sans doute vu à la télévision, ou d'une autre façon, la

2 déposition de M. Stijovic, n'est-ce pas?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Est-ce que vous auriez marqué un désaccord avec une partie

5 quelconque de sa déposition?

6 Réponse: Non.

7 M. Nice (interprétation): Il y a une partie de votre déclaration préalable

8 dont on dit qu'elle est incomplète. Je vais demander qu'on remette au

9 témoin la déclaration préalable dans sa propre langue et qu'on place sur

10 le rétroprojecteur la partie en anglais. Je parle ici de la partie

11 intérieure de la première page.

12 M. le Président (interprétation): Il serait utile que nous disposions de

13 ces déclarations préalables.

14 M. Nice (interprétation): Tout à fait, Monsieur le Président. J'espère

15 qu'elles sont disponibles.

16 (Intervention de l'huissière.)

17 Peut-on placer la partie intérieure de la première page sur le

18 rétroprojecteur?

19 (Intervention de l'huissière.)

20 Apparemment, il y a un problème: il y a interférence dans les différents

21 canaux réservés à la diffusion audiovisuelle et autres. Vous trouverez ce

22 document sur le canal vidéo.

23 A partir du bas de la page, troisième paragraphe, est-ce qu'on lit ceci

24 -je vais donner lecture de la totalité puisque vous vous inquiétez de la

25 façon dont cette question a été abordée précédemment-: "Aujourd'hui, mardi

Page 9930

1 3 septembre 2002, l'enquêteur Fulton du Bureau du Procureur du TPIY m'a

2 montré une photocopie d'une déclaration. Je l'ai examinée et je peux

3 affirmer que cette photocopie semble porter ma signature. Mais je ne peux

4 pas être plus précis parce que ce n'est pas le document original. Ce

5 document semble aussi porter les signatures de M. Markovic et de Zoran

6 Stijovic.

7 La teneur de cette déclaration m'est connue, mais je ne suis pas en mesure

8 de confirmer que la teneur de cette déclaration qui m'a été montrée est ce

9 que j'ai dactylographié ce jour-là. Il y a plus d'un an que j'aurais

10 dactylographié cette déclaration. Je ne me souviens donc pas de sa teneur.

11 Cependant, la déclaration porte sur les sujets qui ont fait l'objet de cet

12 entretien précis".

13 Et puis, vous expliquez comment cet entretien a été réalisé de façon

14 professionnelle.

15 Ce que vous dites dans votre déclaration préalable, Madame, est-il exact?

16 Réponse: Oui.

17 M. Nice (interprétation): Je vous remercie, Madame. Il se peut que

18 d'autres questions vous soient posées.

19 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le témoin dépose sur

20 une question très circonscrite. J'espère que vous pourrez vous livrer à un

21 contre-interrogatoire très bref, en tout cas avant l'heure de

22 l'interruption suivante qui est à 12 heures 15. Vous avez la parole.

23 (Contre-interrogatoire du témoin, Mme Olivera Antonic-Simic, par l'accusé,

24 M. Milosevic.)

25 M. Milosevic (interprétation): J'espère que ce sera effectivement le cas

Page 9931

1 mais, au préalable, je voudrais faire une petite remarque. Ceci est

2 probablement un cas des plus rares dans la pratique des tribunaux

3 ordinaires, que de voir le Procureur faire venir des témoins pour

4 contester des dépositions de ses propres témoins. Parce que Rade Markovic

5 a été témoin de l'accusation, puis on fait venir d'autres témoins pour

6 contester son propre témoignage.

7 M. le Président (interprétation): Vous pouvez dire ce que vous souhaitez

8 dire, au bon moment. Mais ce n'est pas le bon moment; ce témoin est venu

9 ici pour témoigner du sujet pour lequel on l'a fait venir. Vous pouvez lui

10 poser un certain nombre de questions, mais au niveau d'un volet étroit de

11 questions.

12 M. Milosevic (interprétation): OK. J'irai sur un segment étroit.

13 Madame Antonic-Simic, vous avez suivi le témoignage de M. Stijovic; vous

14 venez de le confirmer tout à l'heure. Il a expliqué que vous n'étiez pas

15 une dactylo.

16 Mme Antonic-Simic (interprétation): Je ne le suis pas, en effet.

17 Question: Je lui avais posé la question de savoir… Si cela était le cas,

18 je ne vais pas perdre de temps. Et il avait dit: "Dans ce cas concret, son

19 travail avait été celui d'une dactylo, mais elle n'est pas dactylo".

20 Qu'est-ce que vous êtes? Quelles avaient été les fonctions que vous

21 exerciez?

22 Réponse: J'étais analyste.

23 Question: Analyste?

24 (Le témoin fait un signe affirmatif de la tête.)

25 Est-ce que vous avez travaillé au département de M. Stijovic?

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1 Réponse: Oui, j'avais travaillé au sein de l'unité organisationnelle où il

2 avait été l'un des chefs.

3 Question: Et est-il usuel, quand on effectue ce type d'entretiens, d'avoir

4 non seulement un dactylographe ou une dactylographe, mais aussi un

5 technicien d'un niveau supérieur, étant donné que vous n'êtes pas

6 seulement dactylo? Si j'ai bien compris, vous êtes analyste de profession?

7 Réponse: Oui, cela arrive parfois.

8 Question: Dans quelque type de situation cela arrive-t-il?

9 Réponse: Je ne saurais vous apporter de réponse me concernant, s'agissant

10 de cette question. Parce que, dans le cas concret, j'avais reçu des

11 instructions et je me suis conformée aux instructions de mon supérieur

12 hiérarchique.

13 Question: Donc vous avez frappé uniquement ce que M. Stijovic a dicté?

14 Réponse: J'ai frappé ce qu'ont dicté M. Stijovic et M. Radomir Markovic.

15 Question: Dites-moi, je vous prie, combien de fois avez-vous été présente

16 lors des entretiens avec Markovic, c'est-à-dire lors des entretiens de

17 Stijovic et Markovic?

18 Réponse: Je n'arrive pas à me souvenir du nombre de ces entretiens, mais

19 il y en a eu plusieurs. Cela a duré, je pense, pendant deux mois.

20 Question: Mais à quelle fréquence êtes-vous allée, pendant ces deux mois?

21 Tous les jours, tous les deux jours, un jour sur cinq? A peu près.

22 Réponse: C'était pratiquement quotidien.

23 Question: Donc vous avez au moins, à une cinquantaine de reprises, été

24 présente lors des entretiens que Stijovic a eus avec Radomir Markovic?

25 Réponse: Non, je ne sais vraiment pas vous donner de chiffres de ce genre.

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1 Question: Quand vous dites pendant deux mois, presque tous les jours?

2 Réponse: C'est possible.

3 Question: Donc c'est possible. Et combien de temps ces entretiens-là

4 duraient-ils, d'habitude, les entretiens que vous avez eus avec le général

5 Markovic, Stijovic et vous?

6 Réponse: Pendant plusieurs heures.

7 Question: Combien de temps au moins et combien de temps au plus?

8 Réponse: Je ne sais vraiment pas vous le dire, je ne m'en souviens pas,

9 mais cela durait plusieurs heures, à peu près. C'est ce que je puis vous

10 dire avec le plus de précision possible.

11 Question: Et dites-moi: quand ces entretiens ont-ils eu lieu? Dans quelle

12 période de la journée?

13 Réponse: Parfois dans la matinée, parfois dans l'après-midi, en fonction

14 des possibilités, en fonction des possibilités de bénéficier d'un accès.

15 Et ça dépendait des autres obligations de M. Markovic.

16 Question: Mais étant donné qu'il y a eu plusieurs dizaines d'entretiens de

17 plusieurs heures chacun, quels avaient été les domaines sur lesquels vous

18 vous étiez entretenus?

19 Réponse: Ça, je ne peux vraiment pas m'en souvenir. Les thèmes étaient

20 variés.

21 M. Milosevic (interprétation): Mais citez-moi au moins quelques sujets.

22 Mme Antonic-Simic (interprétation): Je ne sais pas si je serai autorisée à

23 parler d'autres sujets ici, si ce n'est celui pour lequel je suis venue,

24 compte tenu de la confidentialité et du secret de ces informations.

25 M. le Président (interprétation): Vous n'avez pas à répondre si vous

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1 estimez que vous êtes liée par des obligations de confidentialité. Et en

2 tout état de cause, cela peut ne pas être pertinent; j'imagine qu'il y a

3 eu d'autres sujets en plus de celui-ci.

4 Mme Antonic-Simic (interprétation): Je le pense aussi.

5 M. Milosevic (interprétation): Mais pouvez-vous me dire si la plupart des

6 entretiens que vous avez eus, à savoir ces plusieurs dizaines

7 d'entretiens, avaient trait en majeure partie concernant les chefs

8 d'accusation de M. Markovic, ou également a–t-il été question des autres

9 volets d'intervention, de fonctionnement, d'organisation du service de

10 sécurité?

11 M. le Président (interprétation): J'ai déjà dit que le témoin n'avait pas

12 à répondre à cette question.

13 M. Milosevic (interprétation): Je ne comprends pas, Monsieur May. Je ne

14 lui demande pas ici de dévoiler des secrets d'Etat et de parler de

15 questions concrètes; je lui avais demandé quels étaient les domaines. Et

16 je ne vois pas en quoi cela serait un secret dont elle ne serait pas

17 autorisée à parler.

18 M. le Président (interprétation): Je ne vois pas quelle est la pertinence

19 de ces questions.

20 M. Milosevic (interprétation): Je voudrais d'abord entendre la réponse et

21 je vous dirai ensuite quelle est la pertinence.

22 M. le Président (interprétation): Si vous voulez poser des questions, je

23 crois que vous devriez préciser quelle en est la pertinence d'abord.

24 M. Milosevic (interprétation): Je crois que c'est pertinent, Monsieur May,

25 parce que le témoin est venu témoigner ici et il est pertinent de savoir

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1 de quoi elle avait eu à s'entretenir étant donné qu'elle est en train de

2 témoigner sur les sujets dont a parlé le général Markovic; moi, je demande

3 à savoir de quoi il avait parlé.

4 M. le Président (interprétation): Mais nous sommes en train de traiter

5 d'une question particulière, à savoir le fait de savoir si elle avait été

6 exposée à des pressions pour ce qui est de faire la déposition qu'elle a

7 faite et qui a été présentée ici comme élément de preuve.

8 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, à savoir si c'est la seule

9 question ou pas, c'est une chose fort relative parce qu'ici, ce qui se

10 pose comme question, c'est de savoir si le traitement de M. Markovic avait

11 été conforme à la loi et si le traitement illicite dans une détention

12 préventive peut être considéré comme étant une pression exercée contre

13 telle personne.

14 Par conséquent, vous avez ici une déclaration qui a été rapportée par un

15 employé de la police et qui n'a pas découlé de plusieurs dizaines

16 d'entretiens qui ont eu lieu pendant deux mois; cela a pu être le résultat

17 d'un seul entretien.

18 M. le Président (interprétation): C'est votre interprétation à vous. Je

19 crois que nous allons pouvoir clarifier avec le témoin combien

20 d'interviews ont eu lieu à ce sujet. Et si vous voulez savoir si ces

21 dépositions est le résultat de plusieurs interviews, vous pouvez le poser.

22 Mais je ne vois pas en quoi les autres discussions peuvent sembler

23 pertinentes pour ce qui est de savoir quels ont été les autres sujets des

24 interviews étant donné qu'il y a le problème de la confidentialité.

25 M. Milosevic (interprétation): Madame Antonic-Simic, dites-nous si la

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1 plupart de ces entretiens avaient été consacrés aux questions qui avaient

2 fait l'objet de chefs d'accusation contre le général Markovic?

3 Réponse: Non.

4 Question: Quelle est la part des entretiens qui avaient été consacrés à

5 cela?

6 Réponse: Pour autant que je m'en souvienne, s'agissant des thèmes qui

7 avaient trait aux chefs d'accusations du général Markovic, on n'en a pas

8 parlé du tout.

9 Question: Très bien. Dites-moi si vous vous souvenez si M. Stijovic avait

10 prévenu M. Markovic de son droit à la présence d'un avocat?

11 Mme Antonic-Simic (interprétation): Ça, je n'arrive pas à m'en souvenir;

12 je ne sais pas vous dire si oui ou non il l'a fait.

13 M. le Président (interprétation): Je crois que le témoignage de M.

14 Stijovic avait porté sur les interviews qui s'étaient tenus conformément à

15 certaines dispositions de la procédure pénale qui ne prévoyaient pas la

16 présence d'un avocat. C'est du moins le souvenir que j'en ai, peut-être

17 que je me trompe.

18 M. Milosevic (interprétation): Si vos souvenirs sont bons, Monsieur May,

19 il est venu témoigner ici pour dire que ce type de déclaration ne pouvait

20 pas être utilisé non plus dans une procédure en justice et, si vous tenez

21 à citer Stijovic, mentionnez également cette partie-là de l'article de la

22 loi en question.

23 Par conséquent, ce n'est pas le cas.

24 Dites-moi, je vous prie, s'agissant de ce qui est écrit ici, est-ce que,

25 par exemple, le sujet concernant lequel la déclaration a été faite a fait

Page 9937

1 l'objet d'entretiens pendant une journée, deux journées ou plusieurs

2 journées?

3 Réponse: Pour autant que je m'en souvienne, une seule journée.

4 M. Milosevic (interprétation): Donc, sur les interviews de deux mois,

5 plusieurs dizaines d'entretiens de plusieurs heures chacune, ceci a fait

6 l'objet d'une interview d'une seule journée?

7 Monsieur May, hier, M. Nice nous a fourni une traduction comme il a dit

8 "officielle" de la déclaration recueillie auprès de M. Markovic. Est-ce

9 que j'ai bien compris?

10 M. le Président (interprétation): Oui, du moins d'après ce que j'ai

11 compris.

12 M. Milosevic (interprétation): Bien. Auriez-vous l'amabilité de me faire

13 parvenir une photocopie de la déclaration de M. Markovic en langue serbe,

14 étant donné qu'en ce moment-ci je n'en ai pas une seule?

15 M. le Président (interprétation): Est-ce que l'accusation dispose d'une

16 copie?

17 Je ne doute pas du fait que l'accusé ait reçu cela auparavant.

18 M. Nice (interprétation): Oui, voici une copie.

19 (Intervention de l'huissière.)

20 M. Milosevic (interprétation): Je ne conteste pas le fait d'avoir reçu

21 cela, je ne dispose pas de cette copie-là en ce moment-ci.

22 M. le Président (interprétation): Le témoin devrait également disposer de

23 la même copie.

24 (Intervention de l'huissière.)

25 M. Milosevic (interprétation): Je tiens à vous rappeler, Messieurs, que

Page 9938

1 j'ai posé à M. Stijovic la question qui a consisté à citer une partie de

2 sa déposition et je lui ai demandé s'il était possible que le général

3 Markovic, avec toute son expérience de travail dans la police, avait pu

4 prononcer une phrase de ce type: qui s'énonce comme suit: "Il s'agit d'une

5 réunion qui a le plus probablement été consacrée aux questions du Kosovo

6 et à laquelle très probablement, ont pris part des représentants... à

7 laquelle ont, le plus probablement assisté des représentants de la VJ.

8 Donc il a dit: "Le plus probablement que cela avait été consacré au Kosovo

9 et probablement qu'il y avait des représentants de la VJ" et je lui ai

10 demandé de savoir si cela avait eu lieu au sein d'une bibliothèque et non

11 pas sur un pré, donc comment ne pouvait-il pas savoir qui étaient les

12 personnes présentes? Je l'avais demandé parce que la traduction dit: "the

13 most likely this meeeting", en anglais, donc, cette réunion avait le plus

14 probablement été tenue et pour que les choses ne soient pas, ne sonnent

15 pas de sorte aussi stupide, on a dit "probablement".

16 Alors, je voudrais que l'on m'explique: pour ce qui est du côté

17 linguistique, cela peut se tenir, mais pour ce qui est du point de vue de

18 l'authenticité des textes, je crois que la phrase a une consonance si

19 incroyablement stupide que je ne pense pas qu'il ait pu la prononcer.

20 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, nous nous sommes

21 entretenus longuement là-dessus. Vous avez dit ce que vous pensiez à ce

22 sujet. Il nous appartiendra de trouver cela stupide ou pas. Il s'agit

23 d'une phrase ordinaire et nous allons nous pencher sur la chose.

24 Vous avez un témoin qui écoute pendant deux ou trois minutes sans que vous

25 lui ayez posé la question. Posez votre question.

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1 M. Milosevic (interprétation): Très bien, très bien.

2 Madame Olivera Antonic-Simic, veuillez nous dire, au sujet de votre

3 déposition écrite, où vous dites de façon très précise, étant donné que je

4 n'en dispose qu'en langue anglaise, afin que je n'ai pas à traduire de

5 façon erronée pour qu'on ne vienne pas en abuser par la suite: "La teneur

6 de la déposition ne m'est pas inconnue…"

7 Je ne reçois par la traduction.

8 M. le Président (interprétation): Essayez une fois de plus.

9 M. Milosevic (interprétation): "La teneur de cette déposition ne m'est pas

10 inconnue. Toutefois, je ne suis pas en mesure réellement de confirmer que

11 la teneur de cette déclaration qui m'a été montrée a été ce que j'ai tapé

12 ce jour particulier." (Fin de citation.)

13 C'est ce que vous avez dit. Vous avez donc dit que vous n'étiez pas mesure

14 de confirmer que ceci était ce que vous aviez tapé ce jour-là. Et vous

15 venez de nous dire tout à l'heure que cela avait fait l'objet de vos

16 entretiens en une seule journée, en une journée seulement, n'est-ce pas?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Et troisièmement, en répondant à l'une des questions de M. Nice

19 tout à l'heure, lorsqu'il vous avait demandé de savoir quelle aurait été

20 votre réaction si quelqu'un venait dire -et pour ne pas citer M. Nice, je

21 vais paraphraser en disant- que "cette déclaration lui avait été faite

22 sous signature", vous avez dit que vous n'aviez pas été présente, n'est-ce

23 pas?

24 Mme Antonic-Simic (interprétation): Oui.

25 M. Milosevic (interprétation): Merci. Je n'ai plus de question pour vous.

Page 9940

1 M. le Président (interprétation): Attendez, attendez, je voudrais que

2 cette dernière chose que vous venez de dire soit tout à fait claire.

3 Vous avez dit, j'ai pensé, Madame Antonic-Simic, que vous aviez dit,

4 pendant que vous étiez présente, qu'"il n'y avait pas eu de tentative de

5 tromper ou de forcer M. Markovic pour qu'il signe une déclaration qui

6 n'aurait pas été la sienne". Et maintenant, l'accusé vient de dire que

7 vous n'aviez pas été présente lorsque M. Markovic a signé cette

8 déclaration.

9 Vous serez d'accord avec moi pour dire que ce sont là deux choses tout à

10 fait différentes.

11 Et si nous nous penchons sur la version originale de la déclaration, nous

12 constaterons que la signature de M. Markovic figure à plusieurs endroits

13 et que votre signature à vous figure également sur cette déclaration. Donc

14 avez-vous été présente, oui ou non, lorsque M. Markovic a signé cette

15 déclaration à chacune de ces pages et à la fin de la déclaration?

16 Réponse: Oui, j'ai été présente. Ce qui a prêté à confusion, c'est peut-

17 être le fait que j'ai assisté à toutes les déclarations et contresigné

18 toutes les déclarations pour confirmer son authenticité. Chacune de ces

19 déclarations a été tapée, imprimée et signée dans les locaux de ce

20 Tribunal départemental de Belgrade.

21 Maintenant, pour ce qui est de la possibilité qui a été mentionnée ici, à

22 savoir qu'il y ait eu supercherie ou qu'il y ait eu piège éventuellement

23 posé pour telle ou telle chose, c'est là une chose dont je ne puis

24 témoigner parce que je n'ai pas été présente.

25 Si cette signature figure donc sur la version originale de la déclaration,

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1 cette signature confirme son authenticité et son exactitude. Mes réserves

2 dans ma déclaration, la déclaration que j'ai faite auprès des enquêteurs,

3 avaient porté sur le fait qu'on m'avait présenté une photocopie du

4 document.

5 Et pour ce qui est de la teneur, étant donner le fait que j'avais tapé

6 cette déclaration il y a plus d'un an, comme cela est précisé dans ma

7 propre déclaration, je dirais que je ne me suis pas efforcé à l'époque non

8 plus de me la remémorer; et c'est précisément ce que j'ai dit, à savoir

9 que je ne pouvais pas affirmer que c'était précisément le texte que

10 j'avais tapé, compte tenu du temps qui s'était écoulé et compte tenu du

11 fait que je ne pouvais pas me rappeler les termes exacts de la teneur que

12 j'avais tapé.

13 M. le Président (interprétation): Y a-t-il quelqu'un d'autre à poser des

14 questions?

15 Oui, Maître Tapuskovic?

16 (Question de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin, Mme Olivera

17 Antonic-Simic.)

18 M. Tapuskovic (interprétation): Madame Antonic-Simic, je souhaite poser

19 deux questions. A savoir, toutes les fois où vous incitiez à de telles

20 conversations, toujours des notes ont été prises ou bien un procès-verbal

21 a-t-il été rédigé? Ou tout simplement M. Stijovic a-t-il procédé à une

22 prise de notes pour rédiger le rapport plus tard?

23 Mme Antonic-Simic (interprétation): Ils s'étaient entretenus, MM. Markovic

24 et Stijovic. Pendant leurs entretiens, M. Stijovic a pris des notes. Ce

25 qu'il en a fait plus tard, je ne peux pas le savoir. Mais si M. Markovic

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1 était consentant pour donner une déclaration sur tel ou tel sujet, la

2 déclaration devait être d'abord formulée dans l'office même, dictée et

3 rédigée.

4 Question: Est-ce que cela est dû au fait que M. Markovic ne disposait pas

5 d'une aide de professionnels, d'un professionnel? A-t-il demandé peut-être

6 de faire de brèves haltes? A-t-il fait preuve du fait qu'il était peut-

7 être fatigué ou pas?

8 Réponse: Non, à moins de parler évidemment de l'ambiance dans laquelle

9 nous étions où personne ne saurait être de belle humeur et d'une

10 disposition d'esprit de ce genre-là.

11 Question: Je voulais savoir tout simplement si M. Markovic avait formulé

12 ses réserves du fait qu'il n'avait pas eu d'assistance quelconque d'un

13 professionnel.

14 Réponse: Non.

15 Question: Et, en définitive, savez-vous quelle a été la date qui a été

16 apposée à ce document, la date qui se trouve au-dessous de sa signature à

17 lui?

18 Réponse: Je crois que c'est une question qui a trait à sa façon d'écrire,

19 son écriture à lui: à plusieurs reprises, on parlait de ce chiffre 2 comme

20 étant le 1! Mais je crois que c'est une question qui a trait à son

21 écriture.

22 Question: Ecoutez, est-ce que vous avez suivi la déposition télévisée de

23 M. Markovic?

24 Réponse: En partie, pas en totalité.

25 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Madame Antonic-Simic.

Page 9943

1 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, Mme Olivera Antonic-

2 Simic, par M. Nice.)

3 M. Nice (interprétation): Juste un tout petit détail, Monsieur le

4 Président et Messieurs les Juges, en ce qui concerne les préparations. A-

5 t-on d'abord procédé à faire un projet de déclaration qui devrait être

6 revenu par M. Markovic pour procéder à l'impression définitive de sa

7 déclaration?

8 Mme Antonic-Simic (interprétation): Oui, chacune de ces déclarations a été

9 formulée à haute et intelligible voix. Je me suis occupée de la frappe et,

10 la déclaration faite, je devais remettre le texte à M. Markovic pour qu'il

11 en prenne connaissance et le lise. Si celui-ci avait des remarques ou des

12 corrections à faire apporter, évidemment, ceci devrait être fait. Et c'est

13 en définitive seulement qu'au nombre d'exemplaires voulus, cette

14 déclaration a dû être imprimée, une fois révisée et rédigée ainsi.

15 M. Nice (interprétation): Bien. Encore un autre point relevé par M. le

16 Juge. La copie de la déclaration de Markovic, dont nous disposons, porte

17 évidemment la signature "Olivera Antonic-Simic"; il s'agit évidemment

18 d'une copie du document. Est-ce bien votre signature à vous?

19 Réponse: Oui, en effet, cela semble être tout à fait ma signature.

20 M. Nice (interprétation): Merci.

21 Je n'ai plus de questions à poser à ce témoin, à moins que nous devions

22 peut-être traiter la question de savoir si sa déclaration à elle devrait

23 être versée au dossier.

24 M. le Président (interprétation): Oui.

25 Mme Anoya (interprétation): Il s'agira de la pièce à conviction B316.

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1 M. Nice (interprétation): Juste avant de suspendre l'audience pour une

2 pause, je voudrais tout d'abord que l'on raccompagne le témoin du

3 prétoire, car nous avons un autre point dont nous devons nous occuper.

4 M. le Président (interprétation): Merci, Madame Antonic-Simic, d'être

5 venue déposer devant le Tribunal international.

6 Veuillez patienter une seconde, nous devons baisser les stores. Puis

7 après, nous avons quelques points dont nous devons nous occuper avant la

8 suspension d'audience.

9 M. Nice (interprétation): Peut-être serais-je de ceux qui sont du monde

10 des inventeurs, mais il me semble que, lorsqu'on baissait les stores de

11 façon manuelle, cela se faisait moins entendre, c'était moins bruyant.

12 M. le Président (interprétation): Allez-y, Monsieur Nice.

13 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges, une

14 seconde. Le témoin a-t-il fini avec sa déposition?

15 M. le Président (interprétation): Oui, je la remercie.

16 Vous pouvez disposer, Madame.

17 (Le témoin, Mme Olivera Antonic-Simic, est reconduit hors du prétoire.)

18 (Audience publique.)

19 (Questions relatives à la procédure.)

20 M. Nice (interprétation): Je sais qu'avant la déposition de M. Coo, il y a

21 deux arguments au sujet desquels nous devons nous faire entendre, nous,

22 les amici curiae, etc.

23 J'ai pu découvrir récemment une autre source tout à fait autoritaire qui

24 concerne la situation et la position d'expert, c'est-à-dire qu'il s'agit

25 de quelqu'un qui serait intéressant à l'issue de ce jugement.

Page 9945

1 Il s'agit évidemment de plusieurs copies dont je dispose à l'intention de

2 la Chambre de première instance et des amici, si vous le souhaitez. Après

3 quoi, il s'agit de trois pages, de trois extraits de texte pertinents, à

4 mon sens, si cela vous intéresse.

5 M. le Président (interprétation): Oui, je vous en prie, assurez la

6 distribution de ce texte.

7 (Intervention de la Greffière.)

8 M. Nice (interprétation): Il s'agit bien sûr de la cour d'appel anglaise.

9 Il s'agit d'ailleurs de points de litige. Il s'agit des pages 19 à 21 qui

10 nous intéressent, cette fois-ci.

11 M. le Président (interprétation): Madame l'Huissière, ne faites pas encore

12 entrer le prochain témoin.

13 M. Nice (interprétation): Oui, il s'agit de quelques paragraphes

14 seulement, en page 20, qui nous intéressent. Je pourrais peut-être vous

15 donner quelques copies supplémentaires. Peut-être deux copies encore pour

16 Messieurs les Juges? Merci.

17 (Intervention de l'Huissière.)

18 Et puis, un second point au sujet de l'objection, des objections

19 soulevées. J'ai déjà dit comment je voulais travailler cette fois-ci pour

20 interroger ce témoin. Je n'ai pas vu d'opposition d'amici curiae. Peut-

21 être que la Chambre de première instance a son avis, mais je crois que M.

22 Coo doit être ici d'abord dans le prétoire avant que je présente le résumé

23 d'une partie de ses attitudes à lui au sujet des déclarations faites par

24 lui.

25 M. le Président (interprétation): Oui, d'accord. Nous allons d'abord

Page 9946

1 entendre les arguments que vous avancez. Tout était préparé ici par écrit,

2 les requêtes faites par écrit… enfin, toute requête verbale doit être

3 courte. Pourrions-nous nous en occuper par la même occasion?

4 Et puis, nous permettrons à M. Coo d'être présent également lors de la

5 présentation des arguments.

6 M. Nice (interprétation): Je vous remercie.

7 M. le Président (interprétation): Très bien. L'audience est suspendue pour

8 20 minutes.

9 (L'audience, suspendue à 12 heures 15, est reprise à 12 heures 40.)

10 (Le témoin, M. Philip Coo, est déjà dans le prétoire.)

11 (Débat relatif aux arguments de M. Nice concernant M. Coo.)

12 M. Nice (interprétation): Je ne sais pas si vous allez demander, Monsieur

13 le Président, à M. Coo de prononcer la déclaration solennelle?

14 M. le Président (interprétation): Nous allons d'abord aborder les

15 arguments; nous ferons la déclaration solennelle ensuite.

16 Monsieur Nice, vous avez la parole.

17 M. Nice (interprétation): D'abord, la question des documents.

18 Deux rapports ont été déposés. Je crois que, dans chacun des deux cas, il

19 y a eu, en plus de ce rapport, un rapport supplémentaire qui comprend des

20 notes de bas de page qui sont en référence croisée avec des tableaux. Moi,

21 je m'étais préparé à l'autre système, mais nous allons adopter le système

22 qui conviendra aux Juges.

23 Pour ce qui est du second rapport, il y a d'abord eu un projet de texte,

24 puis une version définitive. Moi, j'utilise bien sûr la version

25 définitive.

Page 9947

1 M. le Président (interprétation): Oui.

2 M. Nice (interprétation): La Chambre se demande-t-elle si elle utilise la

3 première version du rapport ou celle qui a des références croisées,

4 puisque dans la seconde, il y a davantage de pages? Nous verrons en cours

5 de route.

6 M. le Président (interprétation): Apparemment, j'ai la version, la

7 dernière version en date du rapport définitif.

8 M. Nice (interprétation): Merci.

9 Comment voulez-vous que j'aborde les objections soulevées?

10 M. le Président (interprétation): Nous avons eu l'occasion de lire la

11 totalité de l'argumentaire; nous ne voulons pas que les arguments soient

12 répétés. Bien sûr, s'il y a des arguments nouveaux, nous les entendrons,

13 nous en serons saisis.

14 M. Nice (interprétation): Je viens aussi de remettre la jurisprudence la

15 plus récente.

16 M. le Président (interprétation): Parcourez-la rapidement.

17 M. Nice (interprétation): C'est une décision de la Cour d'appel

18 britannique, rendue le 3 juillet, dans l'affaire "Factortame contre le

19 secrétariat d'Etat aux Transports". Inutile de dresser le cadre factuel;

20 c'était une affaire très complexe qui concerne des pêcheurs espagnols et

21 leur droit de pêche. Mais page 20 –19, 20-, on parle de la situation d'un

22 témoin expert.

23 Page 19, nous avons le premier des brefs extraits que je vous ai remis en

24 sus du rapport complet; on parle des devoirs incombant à un expert. Ceux-

25 ci sont énoncés, inutile de les parcourir.

Page 9948

1 Et puis, à la page 20, au sommet de la page, on reprend une citation du

2 juge May, vice-président de la cour d'appel dans l'affaire "Field contre

3 Leeds City Council." Et voilà ce qui est dit; ce sont les paragraphes 69

4 et 70 qui me semblent être les plus pertinents quant aux questions d'avis.

5 "De façon générale -dit le Juge May- je suis tout à fait d'accord avec le

6 maître du barreau pour dire qu'il n'y a pas d'objection à ce qu'il y a ait

7 une discussion par une personne qualifiée qui donne son avis d'expert

8 parce qu'il est employé par l'une des parties. Le fait qu'il est employé

9 ne doit pas intervenir dans le poids à donner…", mais c'est une autre

10 question.

11 Et puis, lorsqu'il y a une affaire… Il y a là l'affaire "Liverpool Roman

12 Catholic Archdiocesan Trustees Inc. contre Goldberg"; cette question

13 concerne une affirmation de négligence professionnelle par rapport aux

14 conseils donnés par un avocat, "Queens's Consel", qui se spécialise en

15 droit fiscal, eu égard au plaignant qui s'inquiétait de sa situation

16 fiscale. L'accusé appelé à déposer était un ami de longue date de

17 l'avocat. La question était de savoir si, dans de telles circonstances, la

18 déposition de l'expert était recevable. Cette question a été soulevée au

19 début du procès.

20 Le juge a décidé de pas aborder la question de la recevabilité à ce stade,

21 mais de le faire dans le cadre du jugement. L'affaire étant réglée, le

22 juge a pensé qu'il était adéquat de parler de la recevabilité de la

23 déposition d'un expert et a estimé que celle-ci n'était pas recevable pour

24 une raison de politique publique, à savoir que la justice ne doit pas être

25 faite, mais qu'elle doit aussi donner l'impression de l'être.

Page 9949

1 Il dit ceci: "J'accepte que le paragraphe 3 de l'acte de 1972… Les

2 autorités découlant de ceci nous disent expressément qu'il faut exclure la

3 déposition d'un expert parce qu'il est un ami d'une des parties.

4 Cependant, lorsqu'il est prouvé qu'il existe un rapport entre l'expert et

5 la partie qui l'appelle et que ceci risque d'affecter l'avis qu'a l'expert

6 de façon à être indûment favorable à la partie, et si l'on pense que cet

7 avis ou cette relation est de nature à affecter l'avis de l'expert, à ce

8 moment-là, la déposition de l'expert ne doit pas être reçue, même si

9 l'avis de cet expert est sans doute dépourvu de préjugés".

10 La question qui se pose ici est une question de fait, de la nature et de

11 l'étendue du rapport existant entre le témoin proposé et la partie.

12 Le paragraphe 70 nous dit ceci: "Apparemment, ce passage semble appliquer

13 à un témoin expert le même critère du préjudice apparent que celui qui

14 s'appliquerait au Tribunal". Pour moi, ceci veut dire la composition du

15 Tribunal.

16 Le jugement se poursuit en disant ceci: "Nous ne croyons pas que ce soit

17 là une démarche correcte, parce que forcément elle exclurait qu'un employé

18 dépose en tant qu'expert au nom d'un employeur. La déposition d'un expert

19 se présente de diverses façons et a trait à différents types de questions.

20 Il est toujours souhaitable qu'un expert n'ait pas d'intérêts véritables

21 ni apparents dans l'issue d'une procédure dans laquelle il dépose, mais

22 cette absence d'intérêt n'est pas nécessairement ou automatiquement une

23 condition préalable à la recevabilité de sa déposition.

24 Si un expert a un intérêt d'un type ou d'un autre à l'issue d'un procès,

25 ce fait devrait être rendu à la connaissance des Juges le plus rapidement

Page 9950

1 possible.

2 La question de savoir si ce témoin expert proposé devrait être autorisé à

3 déposer, doit être alors tranchée, tranchée dans le cadre de la conduite

4 du procès. Et dans l'examen de cette question, le Juge doit voir quelles

5 sont les autres options qui lui sont laissées, si la déposition de cet

6 expert est exclue. Et puis, ceci se concentre sur la règle d'objectifs

7 prédominants qui est celui de la procédure civile".

8 Je m'excuse auprès des interprètes, mais je pense que ce jugement cadre

9 parfaitement avec les arguments ici présentés. Et le bon sens, notre

10 expérience nous montrent que c'est le cas.

11 Puisque dans un procès, des témoins experts peuvent faire partie du

12 parquet en tant que tel -je pense à des officiers de police, à des experts

13 en médecine légale, à des pathologistes- on pourrait effectivement les

14 qualifier de cette façon, puisqu'ils appartiennent aux mêmes services.

15 Nous le voyons ici dans cette affaire et, dans d'autres procès, nous

16 voyons de façon régulière des membres du Bureau du Procureur ou des

17 contractuels du Bureau du Procureur qui viennent déposer.

18 Je sais, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, que vous ne voulez

19 pas que je parcoure les éléments déjà présentés par écrit. Il y a un

20 jugement rendu récemment qu'il me semble utile d'évoquer, puisqu'il aborde

21 une des questions soulevées par les amici. Et ce jugement ne fait que

22 corroborer la position que je viens de présenter. Bien sûr, ici, en

23 l'espèce, les amici ne veulent pas dire que M. Coo serait autre chose

24 qu'un expert, mais je vous demande d'examiner la question pour ce qu'elle

25 vaut.

Page 9951

1 L'autre question…

2 M. Robinson (interprétation): Est-ce qu'il y a une distinction à faire

3 entre une personne qui est un employé permanent d'un parti, et qui dépose

4 pour cette personne en tant qu'expert, et une personne qui est employée de

5 façon ad hoc en tant qu'expert?

6 M. Nice (interprétation): Il y a une différence factuelle. Peut-être donc

7 au niveau des faits qu'il y en a une, mais pas dans le principe.

8 M. Robinson (interprétation): La déposition de l'un comme de l'autre

9 serait recevable?

10 M. Nice (interprétation): Tout à fait. Il n'y a pas de différence de

11 principe, pas la moindre.

12 Je suppose qu'aux Etats-Unis -là, je vais me tourner vers M. Shin pour

13 qu'il me donne son avis- aux Etats-Unis, c'est le dernier type de témoin

14 qui sera plutôt attaqué ou démoli au cours d'un contre-interrogatoire

15 parce qu'il travaille sur une base de contrat ad hoc. Et je suppose qu'on

16 lui demande pourquoi il reçoit l'argent qu'il reçoit comme honoraires.

17 Mais je ne pense pas que ce problème se pose en Angleterre.

18 Dans certains systèmes, l'expert indépendant est considéré comme étant

19 plus suspect que l'expert, par exemple du Bureau du Procureur. Il n'y a

20 pas de différence au niveau du droit et ce n'est pas une question qui se

21 pose, ici, en l'espèce.

22 Bien sûr, nous avons déjà eu des témoins experts ad hoc, vous avez déjà eu

23 un assistant qui, s'il n'a pas déposé en tant qu'expert, s'en rapprochait

24 beaucoup. Nous avons évoqué beaucoup d'autres exemples, ici, dans ce

25 présent Tribunal, où ce type de déposition a été fait.

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1 Il y a une autre rubrique, et puis, des points de détails. Je ne sais pas

2 si vous voulez que je parcours ces éléments puisque je les ai indiqués

3 déjà.

4 J'ai le sentiment qu'il y a seulement deux autres choses à mettre en

5 exergue pour le moment.

6 D'abord, l'objection soulevée si un expert vient donner son avis sur un

7 élément de preuve qui a déjà fait l'objet d'un témoignage. Tout d'abord,

8 cet expert comme un autre reconnaîtra aisément que les questions de fait

9 sont à trancher par les Juges. Son avis d'expert est tributaire de la

10 question de savoir si la déposition ou le témoignage du témoin sera retenu

11 par la Chambre ou pas. Cela relève du bon sens, mais ceci étant, il n'est

12 pas inutile de se rappeler que, de façon classique, c'est ce que fait un

13 expert.

14 Prenez l'expert en pathologie -c'est peut-être le cas le plus classique

15 d'un expert- dans un procès où il y a des accusations de meurtre.

16 Normalement, un tel témoin intervient à la fin de la présentation des

17 moyens à charge. Il dépose longuement, de façon circonstanciée, à partir

18 de plusieurs hypothèses factuelles, n'est-ce pas?

19 M. le Président (interprétation): Oui, mais l'objection qui est faite ici,

20 c'est que l'essentiel de ce que va dire ce témoin, c'est un commentaire,

21 ni plus ni moins.

22 M. Nice (interprétation): Pour moi, je ne comprends pas ces critiques dans

23 ce sens. Ma grille de lecture, c'est plutôt qu'on critique la question

24 ultime et c'est à cela que j'arriverai. On ne parle pas nécessairement

25 dans le cadre de ces critiques de commentaires.

Page 9953

1 Si vous examinez les éléments qui font l'objet d'objections, soit ce sont

2 des questions très circonscrites -on répète ce que disent les documents

3 d'origine-, parfois c'est le résultat d'analyses faites par M. Coo grâce

4 aux compétences dont il dispose et qui lui sont propres à lui en tant

5 qu'expert, parfois ce sont des commentaires; notamment dans la deuxième

6 partie, me semble-t-il. Section E, notamment, là où il établit des liens

7 avec des lieux de crimes ou entre lieux de crimes.

8 Il s'agit là d'éléments de preuve qui ont été soumis à la Chambre, et lui,

9 tire des conclusions à leurs propos. Mais tout ce qu'il dit, il le

10 reconnaît -et nous le reconnaissons aussi-, tout ceci est tributaire des

11 conclusions que tirera la Chambre. Et il fait ce que fait tout expert.

12 Prenez l'autre exemple le plus classique d'expert. Dans un système

13 national, vous avez l'expert en médecine légale où il y aurait

14 effectivement un plaignant qui se plaint de préjudices personnels subis.

15 Ce témoin expert va déposer pour voir si les affirmations présentées par

16 le plaignant sont solides ou pas; et la Chambre aura à déterminer la

17 partie de ses dires où réside la vérité. Et le témoin expert va dire:

18 "Mais puisque ces symptômes sont bien décrits, ça c'est de l'idéologie. Et

19 si je me trompe, si les symptômes ne sont pas bien décrits, mon avis aura

20 moins de valeur". Et c'est là, si vous voulez, une pratique tout à fait

21 classique bien connue des chambres et des tribunaux.

22 Je vous ai donné deux exemples très simples, et rappelez-vous, ceci se

23 passe devant un jury comme devant des juges; parce que même lorsqu'il y a

24 un jury, le juge peut diriger la conduite du procès de telle façon à ce

25 que la déclaration du témoin expert ait la dimension qui lui revient et le

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1 poids qui lui revient.

2 M. Robinson (interprétation): Mais je pense que quelquefois l'objection,

3 elle, tient à ce que des questions pour lesquelles on donne un avis

4 d'expert ne nécessitent pas ce type de connaissances d'expert.

5 M. Nice (interprétation): Il y en a certains de ces exemples vers la fin.

6 Je ne sais pas si je les ai bien repris, j'essaie de trouver. C'est dans

7 le deuxième rapport si je ne m'abuse, vers la fin... Oui, dans mon texte,

8 c'est bien le second rapport page du Greffe: 13837.

9 Mais il est peut-être utile que je vous donne une autre référence.

10 Deuxième rapport, disais-je, deuxième partie C, page 13. C'est le

11 paragraphe 18 qui m'intéresse, c'est là un des exemples cités auxquels je

12 pensais.

13 M. le Président (interprétation): Excusez-moi de vous interrompre, mais

14 peut-être qu'un exemple plus parlant se trouve cinq pages plus loin, page

15 18, paragraphes 25 et 26, où le témoin se contente de faire un commentaire

16 sur les éléments de preuves présentés. On parle du général Drewienkiewicz

17 qui faisait part de son avis d'expert militaire.

18 M. Kwon (interprétation): C'est la partie 2B2.

19 M. Nice (interprétation): Ah oui! Excusez-moi. C'est un problème de numéro

20 de page, effectivement. Nous avons le paragraphe 25. Je l'ai trouvé. Non,

21 je ne l'ai pas trouvé! Partie 2B, paragraphe 26, je vous remercie.

22 Excusez-moi de vous avoir interrompu.

23 M. le Président (interprétation): Je disais simplement que voilà un

24 commentaire qui est livré à l'encontre d'un témoin. Ce n'est pas un avis

25 d'expert, c'est simplement un commentaire relatif à un témoin. Or, il nous

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1 incombe à nous de tirer ce genre de conclusion.

2 M. Nice (interprétation): Bien sûr que cet exercice incombe aux Juges, je

3 le disais à l'instant. Le témoin, que fait-il ici?

4 Il parle, si vous voulez, de la symétrie qu'il y a entre les dépositions

5 qui sont faites par des témoins et la doctrine qu'il aborde de jure dans

6 un de ces rapports pour voir s'il y a correspondance.

7 Dans ce genre de sujet, comme dans d'autres, il est important que la

8 Chambre soit au courant et c'est d'ailleurs le type de questions que je

9 vais poser au témoin en sus des questions déjà reprises dans ce rapport,

10 pour dire qu'il n'y a pas d'éléments qui soient, à son avis, contraires à

11 l'essentiel de la doctrine militaire de la VJ dans un domaine particulier.

12 Je dirai: "Voilà, la doctrine de la VJ et voici d'ailleurs ce que disait

13 le général Drewienkiewicz, est-ce qu'il y a correspondance ou

14 dissymétrie?". Et le témoin dirait : "Eh bien, je n'ai pas trouvé de

15 choses en contradiction."

16 M. le Président (interprétation): Mais ça, c'est un autre problème parce

17 que ceci s'aventure en fait dans des domaines qui sont les vôtres. C'est à

18 vous qu'il reviendra de retirer tous les fils de l'écheveau pour en donner

19 un argument persuasif plutôt que le faire par le biais d'un témoin.

20 M. Nice (interprétation): Mais je vais le faire, Monsieur le Président,

21 sans nul doute. Je me permets respectueusement de suggérer qu'il n'y a

22 rien de mal à voir ceci couché dans un rapport, ne serait-ce que pour que

23 vous disiez: "Voilà, de toutes façons, c'est nous qui décidons".

24 Je pense qu'il est utile d'avoir un témoin qui dépose sur ce genre de

25 choses et qui cadre d'ailleurs avec ce que j'ai déjà dit dans ce procès, à

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1 savoir la doctrine d'une armée, pour dire qu'il y a effectivement

2 correspondance. Et je pense qu'il est préférable d'avoir deux choses, de

3 recevoir ceci de la bouche d'un témoin expert que de ma part à moi.

4 M. Robinson (interprétation): Je suis d'accord avec le Juge May pour dire

5 que c'est une question que vous devrez aborder dans vos arguments de

6 clôture et qu'il ne faut pas un expert pour nous dire qu'il y a

7 correspondance entre deux choses. Ça, c'est un argument juridique qu'il

8 faut apporter.

9 M. Nice (interprétation): Si deux Juges sont de cet avis, je ne vais pas

10 poursuivre. Ici, je ne veux pas faire de décomptes… (Coupure du micro.)

11 M. Kwon (interprétation): Nous sommes trois.

12 M. Nice (interprétation): Oui, je ne vais pas recommencer ce que j'ai dit.

13 Prenons un autre exemple classique. Le plus classique dans une affaire de

14 meurtre, mis à part l'expert en pathologie, c'est le psychiatre qui va

15 parler de la diminution de la responsabilité mentale. Cet expert va

16 expliquer quel est le critère appliqué, ceci à l'intention du jury. Il va

17 mentionner certains éléments qu'examineront peut-être les Juges et puis il

18 va dire: "Voilà, j'étais moi-même dans le prétoire, je sais que des

19 témoins sont venus déposer sur ceci et, si leurs dires sont acceptés, ceci

20 cadre avec telle ou telle théorie".

21 Tout le monde sait que, ce faisant et en présentant une telle hypothèse,

22 le psychiatre ne s'immisce aucunement dans le domaine d'un juge des faits

23 et, effectivement, vous le dites souvent, c'est à vous qu'il revient de

24 statuer sur les faits. Mais, en tout cas, le psychiatre va dire: "Voilà le

25 critère, le test; si on accepte que ce comportement était bien celui de la

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1 personne, voilà ce qu'il se passe".

2 Donc, si vous me permettez de le dire, les amici, leur document qui a pour

3 vocation de faire ce que ne peut faire l'accusé, est le plus complet

4 possible, car ils savent qu'ils ne peuvent pas faire de choix entre deux

5 arguments pour retenir le plus fort de ces arguments.

6 Mais il ne le fait pas et il n'indique pas qu'il y a eu préjudice

7 quelconque. Vous êtes -je m'en rends bien compte- trois Juges de carrière,

8 trois Juges expérimentés qui peuvent parfaitement retenir l'essentiel

9 plutôt que l'accessoire.

10 Mais, à notre avis, la portée de ce rapport correspond bien à la

11 connaissance d'expert de ce témoin et au Règlement qui s'applique.

12 Permettez-moi de relever autre chose: il y a beaucoup d'objections au

13 titre et au motif du fait que ce sont des questions à régler en dernier

14 recours, en fin de procès.

15 Je dirai deux choses à cet égard: dans pratiquement tous les systèmes où

16 l'on autorise des experts à se prononcer sur des questions ultimes, il y

17 avait une vieille fiction selon laquelle, en fait, la manifestation de la

18 vérité devait être retenue pour le dernier moment, pour le moment où le

19 jury interviendrait.

20 Mais je reprends l'exemple de la diminution de la responsabilité mentale:

21 le fait de faire une différence entre la question ultime et puis le jury

22 en tant qu'expert ultime. Cette diminution est révolue depuis des dizaines

23 d'années puisque vous avez des experts qui déposent maintenant un peu

24 partout. Donc, finalement, cette question de la question ultime n'est pas

25 un motif valable d'objection.

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1 Beaucoup des amici disent que les questions évoquées par le témoin sont

2 des questions ultimes. Mais non, la question ultime, c'est l'innocence ou

3 la culpabilité face à telle ou telle charge retenue contre un accusé.

4 On essaiera toujours de dire qu'il y a une question ultime alors qu'elle

5 fait partie de l'administration de la preuve.

6 Plusieurs questions ont été abordées par le témoin expert, mais ces

7 questions ne sont pas des questions ultimes, celles-ci étant la

8 culpabilité ou l'innocence.

9 Je reviens à la diminution de la responsabilité. C'est un bon exemple

10 parce que, si par exemple, vous avez des accusations de meurtres et si

11 l'on admet qu'il y a eu meurtre ou pas, et si l'autre question, la

12 question ultime, est celle de la responsabilité diminuée, à ce moment-là,

13 effectivement, cette dernière aura une incidence sur le verdict.

14 Et je pense que, pendant longtemps, on a estimé qu'il n'était pas

15 souhaitable qu'un expert dise: "Moi, j'estime que l'accusé souffre d'une

16 responsabilité diminuée"; même cela est révolu aujourd'hui.

17 Ici, on ne s'approche même pas de loin de cette question puisque, si l'on

18 voit ce dont traite M. Coo, il parle de questions militaires et d'autres

19 questions en cours de route également.

20 J'ai pris un certain temps, mais j'espère que cela n'a pas été inutile et

21 je vous fais humblement valoir que, peut-être, la marche à suivre, à

22 retenir, c'est de prendre le rapport en l'état; les amici auront toujours

23 le loisir –comme ils l'ont laissé entendre hier- de faire valoir, de faire

24 entendre leurs arguments dans la mesure où le témoin ne les convainc pas.

25 Vous aussi, bien sûr, vous pourrez tirer cette conclusion, mais si vous

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1 estimez que le témoin ne fait pas ce que laisse entendre les amici, à ce

2 moment-là, vous pourrez tirer les conclusions en temps utile et il n'y

3 aura aucun préjudice à avoir admis le rapport.

4 M. le Président (interprétation): Merci, Monsieur Nice.

5 Maître Wladimiroff, avez-vous quelque chose à ajouter?

6 M. Wladimiroff (interprétation): Pas-grand-chose. Merci, Monsieur le

7 Président.

8 Ce n'est d'ailleurs pas le premier rapport qui préoccupe le plus vivement

9 les amici puisque, ici, il y a une description de faits objectifs

10 décrivant comment l'armée fonctionne, comment le MUP fonctionne et comment

11 les unités de défense locale existent et fonctionnent. Nous avons déjà

12 ceci dans un rapport.

13 Mais ce qui nous préoccupe davantage, c'est le deuxième rapport. Celui-ci

14 ressemble davantage à une espèce de note établie peut-être par un

15 assistant, un assistant juridique qui aurait rédigé cette note pour aider

16 son juge.

17 Cette partie aborde des questions qui reviennent, en fait, à la Chambre et

18 non pas à un témoin expert. En effet, ce témoin expert, dans son rapport,

19 passe en revue les éléments et présente des commentaires à un niveau qui,

20 à notre avis, ne nécessite pas l'intervention ou le savoir-faire d'un

21 expert.

22 Je vais tenter de faire la synthèse des questions qui se posent ici.

23 Je le répète, ce qui nous préoccupe, c'est que, dans ces deux rapports, il

24 y a des questions de jugement de la preuve apportée, chose qui revient aux

25 juges davantage qu'à l'expert.

Page 9960

1 En outre, un avis d'expert ne serait "autorisable" et recevable qu'à

2 condition que ce qu'il apporte comme élément aide les Juges dans le

3 règlement des questions qui leur sont posées.

4 Il y a une affaire, l'affaire qui est citée dans le deuxième rapport, et

5 nous nous référons à cela. Nous estimons que l'avis d'un expert n'est pas

6 nécessaire, surtout lorsque des conclusions sont tirées sur des questions

7 factuelles. Questions factuelles qui ne nécessitent pas du tout

8 l'intervention ou l'avis d'un expert, comme l'a justement fait valoir le

9 Juge Robinson.

10 Voici des questions que nous avons circonscrites, qui sont d'une

11 compréhension facile et ne nécessitent pas l'avis d'un expert.

12 Effectivement, les amici ont soulevé le fait que le témoin est un employé

13 permanent du Bureau du Procureur. Nous ne voulons pas dire par là que le

14 fait d'être employé le disqualifie; nous sommes tout à fait d'accord avec

15 la citation qui a été faite dans l'affaire Factortame, telle que

16 mentionnée par le Procureur.

17 Le problème qui se pose est différent. Un expert doit éviter d'être

18 surtout intéressé à faire la preuve de quelque chose plutôt que d'apporter

19 un avis d'expert. Ce zèle nous préoccupe. Et, selon nous, il montre qu'il

20 y a un parti pris par rapport à l'accusé. Bien sûr, c'est une question

21 qu'il revient aux Juges d'examiner.

22 Nous l'avons dit dans nos secondes écritures, nous ne faisons pas

23 d'objection pour ce qui est de l'exclusion mais, effectivement, c'est une

24 question qui doit être soulevée et soumise à l'examen des Juges parce

25 qu'elle nous préoccupe.

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1 Nous avons suggéré, ou laissé entendre, que l'expert tire des conclusions

2 qui sont sans doute sans fondement ou hors de sa connaissance à lui. Un

3 expert peut aider une chambre, un tribunal, en témoignant au mieux de ses

4 connaissances d'expert et aussi en conformité avec ce que pensent d'autres

5 experts de son domaine sur des questions qui lui sont soumises et après

6 analyse des documents qu'il a passés en revue.

7 Nous laissons aussi entendre qu'un expert ne peut pas remplacer les Juges

8 dans le jugement qu'il tire au vu des éléments de preuve ou sur un domaine

9 qui est en dehors de son domaine d'expérience et de connaissances. Par

10 exemple, l'expérience militaire de M. Coo: il est peut-être expert, mais

11 ce n'est pas un expert en question d'interprétation des questions

12 militaires ni en questions juridiques, par exemple dans le droit

13 constitutionnel. Ce sont les Juges qui doivent examiner ces questions, qui

14 doivent examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis.

15 Le témoin expert ne doit pas remplacer le parquet pour ce qui est de faire

16 valoir du caractère approprié ou de la valeur probante qu'aurait tel ou

17 tel élément qu'il aurait passé en revue. Je pense, ici, aux conclusions

18 qu'il a tirées en matière de droit.

19 Et ce sont toutes ces raisons qui nous poussent à penser que le témoin

20 expert a présenté des avis qui ne sont pas de son domaine, comme nous

21 l'avons dit dans notre avis. C'est la raison pour laquelle nous demandons

22 à la Chambre de tenir compte de nos objections, d'exclure ces éléments de

23 preuve ou de leur accorder la valeur probante qui leur revient.

24 Je n'ai rien à ajouter.

25 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Monsieur Wladimiroff.

Page 9962

1 Monsieur Milosevic, ici, nous avons à faire à une question tout à fait

2 limitée. Vous avez le droit d'intervenir sur la question. Le tout est de

3 savoir si ce témoignage doit être considéré comme recevable ou pas. Si

4 vous l'admettez, vous aurez l'occasion de contre-interroger ce témoin.

5 Donc inutile d'intervenir sur le fond de la question, c'est uniquement une

6 question de droit qui se pose. Mais, après avoir entendu ces arguments,

7 vous avez maintenant le droit de vous adresser à nous.

8 M. Milosevic (interprétation): Je serais très bref dans mes commentaires

9 et mes commentaires seront beaucoup plus courts que les autres précédents.

10 Je crois que, pour parler de caractéristiques d'experts devant un

11 tribunal, pour parler d'une caractéristique de base et de fond d'un expert

12 devant un tribunal, un quelconque tribunal dans le monde entier, eh bien,

13 la caractéristique générale est son impartialité, l'impartialité de

14 l'expert. Et évidemment, ceci n'est pas litigieux.

15 Or, ici, dans le cas présent, il s'agit d'un employé du Bureau du

16 Procureur qui, lui, est payé et qui a pour tâche de prouver ce que l'autre

17 partie soutient. Ceci ne peut pas être impartial.

18 Or, dans le cas présent, le vaste tableau parfaitement clair de l'ensemble

19 de ce montage se présente de façon liminaire et tout à fait limpide. Or,

20 voilà que le Bureau du Procureur peut s'occuper et se servir de ses

21 propres allégations comme étant quelque chose qui devrait être

22 l'allégation d'un autre.

23 Il s'agit d'un perpétuel mobile qui n'arrête pas. Qui plus est, le Bureau

24 du Procureur fait valoir les éléments de preuve qui sont les siens par le

25 truchement d'un témoin. Je dirai que ceci veut dire une archi et hyper

Page 9963

1 violation de tout ce qui devrait être impartialité, lorsque l'on veut

2 établir une vérité quelconque. Laquelle matière devrait être du ressort

3 d'un tribunal.

4 Mais, cette fois-ci, permettez-moi de dire que, quand je dis "le témoin

5 ici présent", je dirai que c'est toujours entre guillemets parce que nous

6 sommes loin de pouvoir évidemment considérer sa déposition comme étant

7 méritoire.

8 Qui plus est, je pourrais ajouter que tout à l'heure, M. Nice a parlé pour

9 dire -je ne suis pas capable de le citer, mais je vais paraphraser ses

10 propos et je le ferai avec exactitude- qu'en effet, "le fait que le témoin

11 ici présent est employé au Bureau du Procureur -et il fait là une

12 référence visant à la juridiction anglaise- n'est pas forcément de nature

13 à disqualifier et rendre incapable la déposition de ce témoin", mais il a

14 dit entre-temps que "ce fait-là n'est pas sans se répercuter sur le poids

15 de la déposition.

16 Mais voilà le plus important de l'ensemble de la matière, partout on nous

17 présente tout ce vaste kaléidoscope de tous ces témoins. Je crois qu'il

18 est nécessaire de parler du poids de la déposition du témoin. Or, dans ce

19 cas précis, le poids est nul.

20 Je crois que vous n'êtes pas sans vous en rendre de compte -tout le monde

21 s'en rend compte- mais vous, vous êtes censé avoir les critères qui sont

22 les vôtres. C'est conduit par vos critères que vous allez prendre une

23 décision.

24 J'en ai parlé à plusieurs reprises.

25 Vos amis de la Chambre, vos amis de la Cour ne sont pas très catégoriques

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1 eux non plus. Permettez-moi de citer leurs avis, ce que nous lisons à la

2 page 2: "Pourtant, la question essentielle qui se pose est celle de

3 l'indépendance et de l'impartialité d'un employé qui est cité à la barre

4 pour déposer en tant qu'expert". Quelle absurdité!

5 Monsieur Coo, ici en présence, est employé en tant qu'analyste militaire

6 au Bureau du Procureur. Or les amici curiae, eux, sont concernés par

7 certains textes qui sont de nature à rendre l'affaire compromise.

8 Evidemment, il s'agit d'un point qui n'a pas pu échapper à l'avis de vos

9 amici curiae.

10 Je crois que je n'ai plus guère besoin de faire de commentaires. Je vous

11 remercie.

12 (Les Juges se concertent sur le siège.)

13 M. le Président (interprétation): La Chambre aura l'occasion d'examiner.

14 Vous voulez ajouter quelque chose?

15 M. Nice (interprétation): Non, mais je pensais que vous alliez vous

16 adresser à nous.

17 M. le Président (interprétation): Oui, je vais le faire. Je vais vous

18 faire part de notre décision, mais vous n'avez pas à vous lever.

19 La Chambre a eu l'occasion de prendre connaissance des conclusions

20 déposées et de les examiner. Et la Chambre a maintenant eu la possibilité

21 d'entendre des arguments présentés à l'audience. Je vais vous faire part

22 de notre décision.

23 La première question qui se pose est celle de l'indépendance de l'expert.

24 Est-il juste de dire qu'un témoin employé par une des parties devrait être

25 autorisé à déposer en tant que témoin expert au motif qu'il est impartial,

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1 ou que son impartialité serait limitée ou entamée par le fait qu'il est

2 employé?

3 La Chambre a examiné cette question, ainsi que les objections soulevées

4 par les amici curiae et par l'accusé.

5 La Chambre conclut cependant que ce n'est pas une question de recevabilité

6 qui se pose ici mais plutôt celle de savoir le poids qu'il faut accorder à

7 la déposition d'un témoin. Cet avis est renforcé par le jugement qu'on

8 vient de nous montrer, rendu par la cour d'appel d'Angleterre et du Pays

9 de Galles dans l'affaire "Factortame contre le secrétariat d'Etat aux

10 Transports", 3 juillet 2002, où l'avis de Lord May est mentionné également

11 dans l'affaire "Field contre Leeds City Council, 8 décembre 1999".

12 S'agissant de la question de l'avis abordé de façon générale, il n'y a pas

13 d'objection prépondérante à ce qu'une personne dûment qualifiée donne un

14 avis d'expert parce qu'elle est employée par l'une des parties.

15 Le fait que cette personne est employée peut intervenir pour diminuer le

16 poids ou la valeur probante donnée à son témoignage, mais c'est une autre

17 question qui se pose ainsi.

18 Et dans l'affaire Factortame, la cour d'appel ou Lord May a dit au

19 paragraphe 70 qu'un "avis d'expert peut se présenter de diverses façons,

20 qu'il est toujours souhaitable qu'un expert n'ait pas d'intérêts effectifs

21 ou apparents à l'issue d'une procédure, mais que l'absence d'intérêts

22 n'est pas forcément ni automatiquement une condition préalable à la

23 recevabilité de la déposition dudit expert". (Fin de citation.)

24 Nous sommes d'accord en tant que Juges avec ces observations.

25 Second motif d'objection soulevée par les amici, c'est que certaines

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1 déclarations et conclusions du rapport se fondent sur des moyens de preuve

2 insuffisants.

3 Là aussi, c'est une question qui intervient uniquement pour déterminer le

4 poids, la valeur probante à donner à cet élément de preuve. Elle

5 n'intervient pas dans la question de sa recevabilité.

6 L'objection la plus substantielle à la déposition du présent témoin

7 s'établit au motif que sa déposition intervient dans le cœur même de la

8 question que doit trancher la Chambre de première instance, la question

9 ultime, comme on l'a appelée.

10 La Chambre de première instance relève tout d'abord que l'accusation le

11 dit correctement: cette question ultime, cette doctrine de la question

12 ultime est un concept de common law qui est obsolète aujourd'hui dans

13 beaucoup de systèmes nationaux.

14 Par exemple, le règlement de procédure et de preuve fédéral aux Etats-Unis

15 permet à des experts d'aborder ce qui est appelé la question ultime,

16 article 704A, et au Royaume-Uni, dans l'affaire Stockwell, rapport

17 criminel 260 de 1997, la cour d'appel rejette de façon spécifique et

18 abroge cette interdiction qui pesait autrefois sur la présentation de tels

19 témoignages d'experts.

20 De même, dans l'affaire "Re M. contre R.", en 1996, Rapport Angleterre

21 2084, la cour d'appel autorise ce type de déposition dans des procédures

22 civiles.

23 Par conséquent, le Règlement qui stipule uniquement qu'un témoin expert ne

24 doit pas déposer sur des questions qui doivent être tranchées en dernier

25 ressort par la Chambre, à savoir la culpabilité ou l'innocence de

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1 l'accusé, cet article du Règlement ou cette règle juridique n'a plus de

2 raison d'être aujourd'hui; elle n'est plus utilisée.

3 Dès lors, la Chambre estime que cette règle juridique n'a pas lieu d'être

4 dans un Tribunal international où la Chambre de première instance se

5 compose de Juges professionnels, parfaitement compétents pour trancher par

6 eux-mêmes, même si un expert offre son avis.

7 J'ajouterai qu'en tout état de cause, cette règle de common law avait été

8 introduite afin d'assurer la protection des membres d'un jury.

9 Enfin, puisqu'on a fait référence à cet aspect-ci, nous l'évoquons. Dans

10 l'affaire Kordic/Cerkez, la Chambre de première instance a rejeté, exclu

11 certains éléments de preuves présentés par M. Cigar, dans le cadre du

12 règlement de la question ultime.

13 Cependant, cette décision-ci était à considérer comme étant une décision

14 portant sur des faits précis, de cette espèce-là. La Chambre avait alors

15 apporté le commentaire suivant: "Que le rapport d'expert était rempli de

16 commentaires et d'inférences qui n'étaient d'aucune utilité à la Chambre

17 de première instance puisqu'il ne s'agissait pas là d'éléments de preuve

18 ayant une valeur probable au titre de l'Article 89C) du Règlement de

19 procédure et de preuve".

20 Référence a été faite au procès Kordic/Cerkez, ceci se trouve à la page

21 13.305 du compte rendu d'audience jusqu'à la ligne 07 des pages 305 à 307

22 du compte rendu d'audience.

23 Par ailleurs, en la présente espèce, il n'y a pas de rapport dans lequel

24 sont dispersées des conclusions, comme c'était dans l'affaire Kordic.

25 Rares sont de telles occurrences.

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1 Et la Chambre estime que le rapport de l'expert est pertinent et de valeur

2 probable, comme ceci est entendu à l'Article 89C) du Règlement.

3 Cependant, la Chambre va exclure certains éléments présentés dans le

4 rapport, là où ces éléments se fondent sur des observations, sur des

5 questions ou des commentaires faits par l'accusé au cours de contre-

6 interrogatoires, et là où ces conclusions se basent sur des observations

7 faites au cours de des positions faites par d'autres témoins.

8 S'agissant des questions soulevées par l'accusé ou de commentaires

9 formulés par lui, la Chambre relève que ceci ne constitue pas un élément

10 de preuve, ceci a été suffisamment répété à l'accusé: ce qu'il dit au

11 cours d'un contre-interrogatoire n'est pas assimilable à un élément de

12 preuve. C'est en fait de la rhétorique ou des questions soit rhétoriques

13 ou hypothétiques. Et la Chambre de première instance estime que les

14 commentaires se trouvant dans le rapport de l'expert ne doivent pas

15 reposer ou se fonder sur ces commentaires tels que formulés par l'accusé.

16 S'agissant des observations formulées par l'expert eu égard à d'autres

17 dépositions faites par des témoins à charge, dans certains cas, ces

18 commentaires ne se résument à rien d'autre qu'à des évaluations des moyens

19 de preuve, qu'à des arguments.

20 Or, il revient à la Chambre de première instance et non pas à l'expert de

21 formuler de telles conclusions. Ce sont là les motifs qui font que les

22 sept passages suivants de la deuxième partie du rapport seront exclus.

23 Je pense qu'il serait utile que M. Nice et le témoin prennent le rapport.

24 Je vais mentionner ces rapports qui sont maintenant exclus. D'abord, c'est

25 la section B, page 1, paragraphe 1, troisième phrase, plus citation. C'est

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1 la phrase qui commence par les mots suivants: "Il y a des preuves

2 attestant du fait que ce principe a été reconnu". Suit alors une citation

3 prise du compte rendu d'audience; ce passage-là sera exclu.

4 Deuxième passage exclu, 2, page 18, partie B, paragraphe 25; c'est une

5 fois de plus un commentaire qui est cité, commentaire de l'accusé: la

6 totalité de ce paragraphe est biffé, est exclu.

7 Paragraphe suivant: on y trouve un commentaire que la Chambre estime

8 inapproprié concernant la déposition d'un témoin. Ce paragraphe est donc

9 rejeté.

10 Nous sommes maintenant à la page 20, dernier paragraphe de cette page,

11 c'est le paragraphe n°31.

12 Première ligne, le membre de phrase et déclaration allant dans le même

13 sens, faite par l'accusé, ainsi que la note de bas de page n°53. De

14 nouveau, ceci renvoie à des commentaires faits par l'accusé; c'est exclu.

15 Partie C, page 5, paragraphe 6: c'est la deuxième partie, C, page 5.

16 Deuxième et troisième phrases du paragraphe 6, c'est de nouveau un

17 commentaire de la part de l'expert sur des questions qu'il incombe à la

18 Chambre de trancher. La phrase commence par le terme suivant "une tactique

19 très similaire". Et puis, on voit le nom du colonel Ciaglinski, c'est

20 l'autre phrase qui commence par ces termes.

21 Puis, nous sommes à la page 13 de la section C, paragraphe 18, troisième

22 phrase qui commence par les mots suivants "…des témoins tel que le général

23 Maisonneuve", et se terminant "…pour certains sites particuliers repris

24 dans l'Acte d'accusation". Ces phrases sont rejetées au même motif, à

25 savoir que ce sont des arguments et des questions qui seront tranchés par

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1 la Chambre de première instance.

2 Enfin, nous avons dans la partie D, donc 2D, à la page 1, le premier

3 paragraphe, A et B. On commence par les termes suivants: "Au cours de sa

4 déposition, le colonel Richard Ciaglinski…"; ça, c'est au paragraphe A.

5 Et puis, on tourne la page et l'on arrive au paragraphe B. Et les

6 arguments à l'appui de cette affirmation devraient se présenter à huis

7 clos. Ces deux alinéas sont rejetés, exclus, parce que, de l'avis de la

8 Chambre de première instance, ce sont uniquement des arguments et des

9 commentaires qu'un expert n'a pas lieu de présenter. C'est une question

10 qui sera, en temps utile, réglée par la Chambre de première instance.

11 Sous réserve de ces exclusions, le reste du rapport sera versé au dossier.

12 M. Nice (interprétation): Je vous remercie.

13 Je vais demander que le témoin prononce sa déclaration solennelle, que son

14 curriculum vitae soit présenté et, peut-être, pourrait-on l'avoir demain.

15 M. le Président (interprétation): Oui. Monsieur le Témoin, prononcez la

16 déclaration solennelle.

17 M. Coo (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la vérité,

18 toute la vérité, rien que la vérité.

19 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

20 (Interrogatoire principal du témoin, M. Philip Coo, par M. Nice.)

21 M. Nice (interprétation): Monsieur Philip Coo, c'est bien votre nom,

22 n'est-ce pas?

23 M. Coo (interprétation): Oui.

24 Question: Vous êtes employé par le Bureau du Procureur en qualité

25 d'analyste militaire?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Depuis combien de temps, combien d'années?

3 Réponse: A peu près trois ans. J'ai commencé en juin 1999.

4 Question: Je vais examiner vos expériences et bagages en quelques

5 instants. Vous travaillez donc comme analyste au Bureau du Procureur. Quel

6 genre de documents, en règle générale, examinez-vous?

7 Réponse: En général, des documents de nature militaire et les sources sont

8 diverses.

9 Question: Pourriez-vous nous donner quelques exemples, pour que ceux qui

10 suivent la procédure aient une idée plus précise de ce que vous faites? Ce

11 sont, quelquefois, des ordres militaires, n'est-ce pas?

12 Réponse: Tout à fait. Pour ce qui est de cette affaire, j'ai consulté

13 plusieurs ordres militaires délivrés par le commandement suprême et la VJ,

14 et je me suis aussi servi de documents du domaine public, par exemple

15 "Vojska", le magazine hebdomadaire de la VJ, la législation, je devrais

16 dire plutôt la législation serbe, et de la RFY qui était à notre

17 disposition au Bureau du Procureur. Se joignent quelques exemples à peine

18 du type de documents utilisés pour rédiger mon rapport.

19 Question: Fort bien. Je parlais de votre contexte. Vous avez été un

20 soldat, n'est-ce pas?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Pendant combien d'années?

23 Réponse: J'ai été agent de renseignements pendant 10 ans dans les forces

24 canadiennes.

25 Question: Et vous avez commencé en quelle année et terminé en quelle

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1 année?

2 Réponse: J'ai commencé en 1988 et j'ai terminé en 1999. C'est à cette

3 époque-là que j'ai commencé à travailler pour le Bureau du Procureur.

4 Question: Et donc vous avez été, pendant toute cette période, agent en

5 matière de renseignements. Pourriez-vous, de la façon la plus simple

6 possible, nous dire ce que fait un tel officiel lorsqu'il travaille dans

7 votre armée, par exemple, et de quel document se sert-il?

8 Réponse: Un responsable du renseignement évalue des informations très

9 diverses pour faire une synthèse de ce qui se passe sur le terrain à

10 l'intention d'un officier, d'un commandant. Et, ce faisant, il va avoir

11 pour rôle de déterminer quelles sont notamment les structures de

12 l'organisation ou des organisations s'opposant à son commandant.

13 Question: Vous parlez de renseignements concernant ce qui se passe sur le

14 terrain. Cela peut concerner vos forces, des forces alliées ou des forces

15 ennemies, n'est-ce pas? L'une ou l'autre ou les trois types de force?

16 Réponse: En général, ce sont les forces ennemies qui sont examinées, ce

17 que nous nous appelons les forces ennemies.

18 Question: Au cours des 10 années que vous avez passées à votre poste, il

19 se peut que vous n'ayez pas été engagé dans des combats actifs, bien sûr,

20 mais y avait-il des documents que vous avez utilisés qui soient différents

21 des documents utilisés ici ou qui y ressemblent?

22 M. Coo (interprétation): J'ai examiné des éléments de doctrine qui

23 fournissaient des renseignements sur la doctrine, sur la façon dont des

24 systèmes militaires fonctionnaient. Mais ce type de documents n'était pas

25 exactement le même que ceux dont je me suis servi pour rédiger ce rapport,

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1 mais la nature de l'information en tant que telle était très semblable.

2 M. le Président (interprétation): Je pense qu'il faudra en terminer sous

3 peu, Monsieur Nice.

4 M. Nice (interprétation): Je pense que je pourrai, dans quelques phrases,

5 en terminer.

6 Dans votre curriculum vitae, dont dispose la Chambre, même s'il n'y a pas

7 encore eu de dépôt officiel, vous montrez votre expérience en tant

8 qu'agent de renseignement et les écoles que vous avez fréquentées, les

9 écoles militaires, les postes que vous avez occupés.

10 Peut-être allons-nous y revenir rapidement, mais à l'époque, vous aviez

11 quel grade?

12 M. Coo (interprétation): J'étais capitaine lorsque j'ai quitté l'armée.

13 M. Nice (interprétation): Et quel était votre dernier poste?

14 M. Coo (interprétation): J'étais responsable d'une section des

15 renseignement dans une unité de réserve dans le Canada occidental.

16 M. le Président (interprétation): Fort bien. Nous allons lever l'audience.

17 Je vous dis, Monsieur Coo, officiellement, que vous n'êtes censé parler à

18 personne de votre déposition tant que celle-ci n'est pas terminée et ceci

19 inclut bien entendu des membres du Bureau du Procureur.

20 M. Coo (interprétation): Oui.

21 M. le Président (interprétation): L'audience est suspendue. Elle reprendra

22 demain matin à 9 heures.

23 (L'audience est levée à 13 heures 46.)

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