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1 (Mercredi 9 octobre 2002.)
2 (L'audience est ouverte à 9 heures 32.)
3 (Audience publique.)
4 (Le témoin, M. Nikola Samardzic, est dans le prétoire.)
5 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice, vous avez la parole.
6 (Interrogatoire principal du témoin, M. Nikola Samardzic, par M. Nice.)
7 M. Nice (interprétation): Nous sommes au paragraphe 36 du résumé. Je crois
8 que l'heure est venue d'examiner la pièce 338, intercalaire 8.
9 (Intervention de l'huissier.)
10 Ce document est un document où sont consignées les conclusions de
11 l'Assemblée qui a tenu une réunion les 24 et 25 octobre 1991. Vous avez
12 rapidement fait référence à ce document hier, mais aujourd'hui, je vous
13 demande de l'examiner. Brièvement d'ailleurs.
14 Il y est dit ceci -je cite-: "Conclusions de l'Assemblée de la République
15 du Monténégro. L'Assemblée de la République du Monténégro soutient la
16 participation de la délégation de la République du Monténégro à la réunion
17 plénière de la conférence consacrée, à La Haye, à la Yougoslavie, et
18 relève que la délégation a agi conformément aux pouvoirs qui lui ont été
19 conférés lors de la discussion de la dernière séance de l'Assemblée de la
20 République du Monténégro et les conclusions adoptées jusqu'à présent par
21 l'Assemblée afin de trouver une solution pacifique et démocratique à la
22 crise yougoslave. Il est suggéré qu'il est nécessaire de poursuivre la
23 participation à la conférence de La Haye, compte tenu des intérêts des
24 Monténégrins, de la République, de ses citoyens, du peuple monténégrin."
25 Et au paragraphe 2 -je lis une partie de celui-ci-: "L'Assemblée de la
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1 République du Monténégro conclut que la crise yougoslave doit trouver une
2 solution pacifique et démocratique. Les principes de base soutenue par
3 l'Assemblée sont ceux de l'égalité entre citoyens et nations, et du droit
4 inaliénable que ceux-ci ont à prendre des décisions finales de façon
5 directe et que soient respectés leurs intérêts est le souhait de toutes
6 les nations -et j'insiste surtout-, les nations qui s'opposent à
7 l'abolition bilatérale de la Yougoslavie et ont manifesté le souhait de la
8 conserver."
9 M. Kwon (interprétation): Je constate que le rétroprojecteur ne fonctionne
10 pas pour le moment.
11 M. Nice (interprétation): Je m'en excuse. Effectivement, le
12 rétroprojecteur n'est pas branché. Merci, Monsieur le Juge.
13 M. le Président (interprétation): Apparemment, le rétroprojecteur ne
14 fonctionne pas. Nous avons un technicien qui vient d'entrer dans le
15 prétoire pour examiner l'appareil.
16 M. Nice (interprétation): Je viens de vous résumer les parties
17 essentielles de ce document. Avez-vous des commentaires à faire
18 personnellement, mis à part ce que dit le document lui-même?
19 M. Samardzic (interprétation): Le document indique clairement que
20 l'Assemblée, à savoir le Parlement du Monténégro, a adopté une position
21 qui était celle de la délégation du Monténégro à la Conférence de La Haye,
22 ainsi que les positions prises par le Président Bulatovic pour ce qui est
23 de l'acceptation du plan de Carrington. Ceci a donc été fait. La session a
24 eu lieu au moment où M. Bulatovic a dû renoncer à ses positions, et ceci
25 sous des pressions.
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1 Le Parlement du Monténégro a exprimé ses positions de façon claire. Il
2 n'est point besoin de faire de commentaire, mais, malheureusement, la
3 chose n'a pas été réalisée et il en va de même pour ce qui est de la
4 dernière conclusion. Je ne sais pas si vous en avez donné lecture, mais il
5 a dit "qu'il convenait de continuer pour ce qui était de la mise en oeuvre
6 des conclusions adoptées", et ainsi de suite. Malheureusement, cela ne
7 s'est pas fait ainsi.
8 M. Nice (interprétation): Je vous remercie. Messieurs les Juges, à la
9 suite de la version en anglais du document, vous trouvez dans votre liasse
10 de documents un document de deux pages qui porte le n°03005627. On voit
11 qu'il s'agit de la "vecerni list". Ce document n'est pas à sa place là; je
12 pense qu'on peut l'enlever.
13 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons le faire, ainsi que
14 l'original qui sera enlevé puisque manifestement, c'est un article de
15 journal.
16 M. Nice (interprétation): Oui.
17 M. le Président (interprétation): Nous allons l'enlever. Voulez-vous que
18 l'huissier reste auprès du rétroprojecteur?
19 M. Nice (interprétation): Non.
20 Monsieur le Témoin, encore deux sujets avant de passer à un autre point
21 important, à savoir la Conférence de La Haye. Nous parlons simplement pour
22 le moment des contacts, dont vous étiez au courant, qui ont eu lieu entre
23 Bulatovic et Djukanovic, Président et Premier ministre respectivement, et
24 aussi pour ce qui est des contacts avec la direction militaire, notamment
25 avec Miodrag Jokic.
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1 Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure il y avait des contacts entre
2 ces partis? Et s'il y avait des informations, d'où les tenez-vous?
3 M. Samardzic (interprétation): Je ne saurais vous dire rien de concret à
4 ce sujet-là parce que Jokic, à l'époque où il y a eu la guerre à côté de
5 Dubrovnik, ne se trouvait pas lui-même à Titograd, à savoir à Podgorica,
6 mais il était sur le front. Djukanovic, lui, était à Titograd, donc je ne
7 saurais vous dire dans quelle mesure ils ont été en contact. Ils l'ont
8 probablement été, mais ce que je sais vous dire, c'est que la direction du
9 Monténégro avait été en contact avec la direction militaire, les généraux.
10 Mais de là à vous dire dans quelle mesure Djukanovic était en contact avec
11 eux, ça, je ne sais pas le faire.
12 Question: Pourriez-vous nous aider pour ce qui est de la voie hiérarchique
13 de la chaîne de commandement militaire? Etait-elle claire et quelle était
14 la structure par laquelle les échelons faisaient rapport aux échelons
15 supérieurs? Et pourriez-vous dire à la Chambre de première instance, si
16 vous êtes en courant, comment il se fait que vous le soyez?
17 Réponse: Eh bien, j'en ai appris le plus à partir des entretiens que j'ai
18 eus avec Bulatovic dans son bureau ou à l'occasion du voyage en avion
19 jusqu'à La Haye. Il apparaissait clairement, à mes yeux, que les
20 opérations militaires étaient conduites par les officiers, les généraux de
21 l'armée populaire yougoslave qui se trouvaient sur le front. Et pour ce
22 qui est de la marine de guerre qui s'attaquait également à Dubrovnik, cela
23 avait été conduit par l'amiral Jokic. Je pense que les hommes politiques
24 ne s'étaient pas mêlé des opérations militaires, mais qu'ils avaient été
25 contactés et que les informations devaient forcément circuler entre les
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1 uns et les autres; du moins je crois qu'il en a été ainsi.
2 M. Nice (interprétation): Est-ce qu'à un moment donné il a paru possible
3 ou certain que des crimes avaient été commis dans le cadre de ces combats
4 et est-ce qu'on a discuté de cette possibilité, voire de cette réalité? Et
5 si tel a été le cas, est-ce que vous, vous avez eu l'occasion d'en
6 discuter avec l'un quelconque des dirigeants politiques?
7 M. Samardzic (interprétation): Il n'en a pas été question aux sessions
8 officielles. Je me suis entretenu de cela avec le Président Bulatovic et
9 je me dois de dire que lui aussi exprimait de la répugnance pour ce qui
10 est des informations qui provenaient du théâtre de guerre mais
11 officiellement, rien n'a été entrepris.
12 Je vais ajouter également ceci: en sus des entretiens dont j'ai eu vent au
13 niveau du gouvernement, concernant les pillages, j'en ai entendu parler de
14 la part de citoyens et j'ai vu dans Budva des yachts venus de Dubrovska
15 Rijeka. Et il y avait une espèce de centre qui était mis en place pour
16 collecter les butins de guerre; ce n'était pas du butin de guerre, c'était
17 du pillage et c'étaient des maisons qu'on avait vidées. Je ne sais pas où
18 se trouvait ce centre; c'était le motel "Vinogradi" en direction de la
19 frontière croate. Cela avait été gardé par l'armée. Mais je n'ignorais
20 pas, partant des entretiens que j'ai eus avec des citoyens et des
21 entretiens que j'ai eus avec le Président Bulatovic, que les biens pillés
22 étaient portés là-bas. J'ai également appris que des objets tels que les
23 équipements de l'aéroport de Cilipi avaient été enlevés et emportés vers
24 le Monténégro. Je sais que les biens agricoles avec les équipements, les
25 vaches, le bétail avaient été transférés vers le Monténégro. S'agissant
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1 des autres détails là-dessus...
2 M. le Président (interprétation): Un instant, Monsieur le Témoin. Est-ce
3 que ceci est repris dans l'Acte d'accusation, le pillage? Je ne m'en
4 souviens pas.
5 M. Nice (interprétation): Non, mais ceci relève quand même du caractère
6 généralisé. Je vais trouver… Il se peut que je me trompe, mais...
7 M. le Président (interprétation): Vous aborderez ceci en temps utile.
8 M. Nice (interprétation): De toute façon, nous en sommes bientôt au
9 paragraphe 44.
10 Mais je reviens à la question que je vous ai posée au départ, Monsieur le
11 Témoin. Je parlais des conversations que vous auriez eues avec Bulatovic à
12 propos de certains crimes. A propos de ceux des crimes qui se sont commis
13 à Dubrovnik, est-ce qu'il a parlé d'autres événements notoires qui
14 auraient eu lieu sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, hormis ceux de
15 Dubrovnik?
16 M. Samardzic (interprétation): Oui, avant la bataille de Dubrovnik il y a
17 eu des crimes au nord du Monténégro, des crimes où des membres d'unités
18 paramilitaires avaient massacré des familles musulmanes au nord du
19 Monténégro. En outre, vers Zvornik, cela était le cas aussi. Cela est
20 devenu notoirement connu, on a commencé à en parler dans les médias. Je
21 dois dire que le Président Bulatovic avait été stupéfait, et il
22 s'attendait, étant donné que la guerre n'avait pas encore commencé, comme
23 cela a été par la suite le cas, il s'attendait à ce que le Président
24 Milosevic démissionne, pour ces raisons. Cette opinion avait été plutôt
25 naïve, mais je tiens à dire que le Président Bulatovic avait été de cet
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1 avis. Il y a eu un scandale d'envergure que nous n'avions pas connu au
2 Monténégro. Par la suite, on s'est habitué à ce type d'événement, mais au
3 début, il en a été ainsi, et c'est de cela que je me souviens.
4 Question: Pendant que tout ceci se produisait, est-ce que vous avez appris
5 de façon directe que certains avaient déserté d'une ligne de front en
6 Slavonie occidentale?
7 Réponse: Oui. Pour parler plus exactement, il s'agissait de déserteurs
8 originaires de Banja, des unités du Monténégro. Je crois qu'une unité
9 avait été envoyée là-bas.
10 Et un jour, dans mon bureau, quelque 25 soldats ont débarqué; ils étaient
11 exténués par le long voyage qu'ils avaient fait. Ils m'ont dit qu'ils
12 avaient fui le théâtre de guerre et ils avaient demandé mon aide pour les
13 protéger des séquelles, des conséquences qu'ils étaient censés subir. Ils
14 avaient redouté, en effet, d'être jugés par les autorités militaires en
15 qualité de déserteurs. Ils m'avaient relaté la façon dont les combats
16 s'étaient déroulés dans la Banja. A ce moment-là, j'ai fait ce que j'avais
17 pu faire: je suis allé voir le Président Bulatovic, je lui ai présenté
18 toute l'affaire, je lui ai demandé de faire en sorte que ces jeunes gens
19 n'aient à subir quelque conséquence que ce soit. Alors, il m'a dit qu'il
20 ne pouvait pas faire grand-chose. Il leur a dit de rester à la maison et
21 que, telle que la situation se présentait, il y avait de fortes chances
22 que personne ne songe à les chercher. Il en a été ainsi.
23 Bulatovic, par la suite, a donné l'ordre que les soldats monténégrins se
24 retirent de Banja et retournent vers le Monténégro. Cela avait été
25 contraire à la politique du commandement militaire et de Slobodan
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1 Milosevic, mais cela a été fait ainsi.
2 Question: Fort bien. Merci. A Morinje, au Monténégro, est-ce qu'il y avait
3 un camp?
4 Réponse: Oui, il y avait un camp pour des prisonniers croates emprisonnés.
5 Mais, dans ce camp, il y avait aussi des gens qui n'étaient pas soldats.
6 C'était des gens que l'on avait pêchés aux alentours de Dubrovnik et qu'on
7 avait ramenés là.
8 Question: Est-ce que vous avez appris ce qui se passait dans ce camp par
9 l'intermédiaire de quelqu'un qui avait été un de vos employés au moment où
10 vous étiez directeur de l'entreprise ou la compagnie "Jugooceanija"?
11 Réponse: Oui. Il y avait un employé à moi, qui est devenu par la suite
12 directeur lui aussi. Et dans les effectifs de réserve, il se trouvait être
13 officier du KOS, du contre-espionnage et, une fois mobilisé, il était
14 censé être de garde là-bas, enfin de l'équipe de gardiens de cette prison
15 de Morinje. Par la suite, il est venu travailler à Malte. Il m'a raconté
16 la situation qui avait prévalu dans ce camp de détention, dans cette
17 prison, pour ce qui est des prisonniers croates, et il a dit qu'il n'y
18 avait pas de pitié pour eux.
19 Question: Est-ce qu'il vous a donné des exemples concrets de ce qui était
20 fait aux prisonniers: de ce que lui-même avait fait ou de ce qu'il avait
21 vu qu'on faisait aux prisonniers?
22 Réponse: Oui, il y a eu des gifles d'administrées. Il y a eu des
23 engueulades, mais il n'y a pas eu de meurtres comme cela s'est fait
24 ultérieurement dans la Bosnie. A Morinje, ils n'ont tué personne, mais le
25 régime de détention était très stricte; ça, c'est une chose tout à fait
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1 évidente.
2 Question: Est-ce que, parmi les incidents, il y en a eu un impliquant un
3 certain Ante Prlanda?
4 Réponse: Ah! Oui, étant donné qu'il y avait là des gardiens de Kotor. Il y
5 avait un prisonnier qui s'appelait en Ante Prlanda, et il était originaire
6 de Dubrovnik. Mais nous, dans "Jugooceanija" nous avions un homme qui
7 s'appelait Ante Prlanda. Donc l'intéressé aurait reçu une gifle parce
8 qu'il s'appelait comme l'autre Ante Prlanda. C'est un petit incident, mais
9 d'après les récits qui sont parvenus jusqu'à moi, c'était en effet
10 l'incident qui est arrivé.
11 Question: Je vois. Fort bien. Nous allons maintenant passer à l'examen de
12 quelques autres documents. Il y a notamment la pièce 338, intercalaire 9.
13 La date n'apparaît pas clairement. Nous allons poser l'original sur le
14 rétroprojecteur pour voir quel est le titre donné à ce document, en
15 cyrillique.
16 (Intervention de l'huissier.)
17 Le titre est traduit en anglais. Nous le voyons ici. Donc le titre est le
18 suivant: "Positions".
19 Monsieur Samardzic, est-ce un document que vous avez déjà vu?
20 Réponse: Oui, je l'ai reçu tout de suite, dès que cela a été rédigé et
21 apporté de Belgrade. Je crois que c'est Kostic qui l'avait apporté en
22 personne suite à ce qui s'était passé à La Haye. Je pense qu'il s'agit là
23 de positions qui esquissent les activités futures pour ce qui est de la
24 mise en place d'un Etat conjoint entre la Serbie et le Monténégro à
25 l'avenir, et je crois que ce sont là les premières positions qui ont été
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1 rédigées et apportées chez nous pour ce qui est de la Constitution de cet
2 Etat commun à la Serbie et au Monténégro.
3 Question: Nous voyons ici: "Etant donné la situation actuelle dans le cas
4 de la résolution à la crise yougoslave et compte tenu du fait que les deux
5 assemblées ont adopté l'initiative de Belgrade et les bases fondamentales
6 de ce Règlement des Relations au sein de la Yougoslavie, adoptent les
7 résolutions suivantes:
8 1. Dans notre demande, nous décidons que la résolution de la crise
9 yougoslave doit se baser sur la légalité et la continuité de la
10 Yougoslavie en tant qu'Etat plutôt que sur son interruption et sa
11 dissolution, parce que certaines de ces nations constitutives ne veulent
12 plus vivre ensemble.
13 2. Nous exprimons notre plein et entier respect pour ce qui est du droit à
14 l'autodétermination de chaque nation constitutive yougoslave qui ne vit
15 plus en Yougoslavie. Cependant, nous exigeons que la volonté des peuples
16 serbes et monténégrins soit pleinement respectée ainsi que celle des
17 citoyens de la République de la Serbie et du Monténégro, telle qu'elle
18 s'est exprimée, afin que soit préservée la Yougoslavie en tant qu'Etat
19 commun.
20 Dans le cadre de cet Etat commun, les peuples serbes et monténégrins ainsi
21 que les citoyens de la République de Serbie et du Monténégro avec les
22 autres nations yougoslaves qui le désirent, il faut donc que tous ces
23 peuples soient sur un pied d'égalité et se voient pourvus des conditions
24 permettant d'exprimer et de protéger leurs intérêts et de se développer
25 avec succès.
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1 3. A partir du fait que les Assemblées de la République de Serbie et du
2 Monténégro ont adopté l'initiative de Belgrade et les principes
3 fondamentaux régissant les relations en Yougoslavie, ils vont établir une
4 commission d'experts constitués conjointement sur la base du principe de
5 l'égalité afin que soient élaborés les documents constitutionnels et
6 légaux à partir de ces positions."
7 Voilà donc le projet qui vient de Belgrade. Est-ce que projet a abouti? Et
8 s'il y a eu progrès, quelle fut la démarche qui l'a permis?
9 Réponse: Il n'y a pas eu de progrès, mais une régression. Ce qui a été
10 fait, c'est qu'on a supprimé ce que Lord Carrington avait proposé et, à la
11 place du plan de Lord Carrington concernant la mise en place d'Etats
12 indépendants à partir des six Républiques précédentes, il a été établi un
13 nouvel Etat conjoint de la Serbie et du Monténégro. Et, jusqu'au 27 avril
14 1992, c'est ce qui a effectivement été fait.
15 Comme je l'ai dit, le 24 octobre, le Monténégro, le Parlement du
16 Monténégro –je me reprends- dit que la position prise par la délégation
17 monténégrine à La Haye avait été justifiée, mais la tâche a été poursuivie
18 dans une direction opposée pour ce qui est donc de la création d'un Etat
19 conjoint à la Serbie et au Monténégro.
20 Ce sont là des positions de départ qui se sont, par la suite, traduites
21 par le texte du référendum au Monténégro. Référendum qui, selon moi, s'est
22 tenu de façon illicite et non conforme aux modalités de la tenue de
23 référendum où la population du Monténégro aurait dit, se serait prononcée
24 en faveur d'une vie conjointe avec la Serbie, dans un Etat commun.
25 Par la suite -si vous me permettez de conclure-, je dirai que toute de
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1 suite après il s'est tenu une session du Parlement du Monténégro le 23
2 avril où, à la va-vite, il a été adopté une nouvelle Constitution rédigée
3 également à la hâte, et il a été promulgué une République fédérale de
4 Yougoslavie par la suite, ceci de façon illégale par des députés dont le
5 mandat avait déjà pris fin, cela s'est passé le 27 avril 1992.
6 Question: (Hors micro.)
7 Merci, Monsieur Samardzic. Nous allons suivre l'ordre chronologique des
8 événements.
9 (Intervention de l'huissier.)
10 Nous suivons l'ordre chronologique de façon générale. Voyons dans quelle
11 mesure M. Bulatovic était informé des avis qu'il y avait à l'époque.
12 Est-ce que nous pouvons examiner l'intercalaire 10 de la pièce 338? C'est
13 une lettre ouverte qui a été envoyée à M. Bulatovic.
14 (Intervention de l'huissier.)
15 Je crois qu'effectivement on peut placer ce document sur le
16 rétroprojecteur puisqu'on a côte à côte l'original et la traduction.
17 Monsieur l'Huissier, veuillez placer la première page sur le
18 rétroprojecteur, merci.
19 Monsieur le Témoin, ayez l'obligeance de suivre ce document sur l'écran,
20 c'est sans doute la meilleure chose à faire. Aussi pour ceux qui nous
21 regardent.
22 Il s'agit ici d'une lettre ouverte provenant du Parlement de la République
23 de Croatie, du Comité des Affaires étrangères, lettre ouverte adressée au
24 président de la présidence du Monténégro, Momir Bulatovic. Je cite le
25 document: "Je vous écris pour vous avertir que vos tentatives sont trop
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1 tardives, si vous essayez de tromper les Monténégrins sur ce qui se passe
2 à Dubrovnik".
3 Quatre lignes plus loin, on dit: "Trop de sang a été versé. La Croatie a
4 été pillée et dévastée au-delà de toute description surtout dans les zones
5 proches du Monténégro. En silence, vous regardez et vous voyez comment
6 Milosevic, par les paroles de son ministère Jovanovic, vous couvre de
7 honte devant le monde entier lorsqu'il nie le fait que la Serbie est
8 impliquée dans cette sale guerre, lorsqu'il dit que l'armée de Yougoslavie
9 et le Monténégro sont en guerre avec Dubrovnik".
10 Nous passons à la page suivante, nous commençons par le début de celle-ci.
11 On parle des obligations qui incombe à un homme exerçant des fonctions
12 élevées: "Un homme de ce genre, en fait, n'a pas le droit de rester
13 silencieux dans ces jours graves".
14 Quelques lignes plus loin: "Arrêtez la dissémination des mensonges et le
15 fait d'attiser la haine contre Dubrovnik et la Croatie".
16 A l'avant-dernier paragraphe, on dit: "Vous avez une responsabilité non
17 seulement politique. Il faut empêcher que les Monténégrins envahissent les
18 villages d'autres personnes, d'autres peuples, les maisons, en tant
19 qu'agresseurs, qu'occupants et que pilleurs, et s'exposent aux canons de
20 ceux qui défendent Dubrovnik".
21 Et tout à fait à la fin, ici on parle de Njegos qui dit: "Celui qui
22 cherche la force, la matraque va laisser des traces caractérisées par
23 l'inhumanité".
24 M. le Président (interprétation): Quelle est la date, Monsieur Nice?
25 M. Nice (interprétation): Je ne sais plus quel est le mois lorsqu'on parle
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1 de "prosinac". C'est bien le mois de décembre?
2 Effectivement, au cours de quel mois ceci s'est-il passé, Monsieur
3 Samardzic?
4 M. Samardzic (interprétation): La date est inscrite sur le document, c'est
5 le 11 décembre 1991.
6 Question: Merci. Je crois que cette lettre se passe de commentaire, n'est-
7 ce pas?
8 Réponse: Absolument exact, la lettre se passe de commentaire. Je tiens à
9 dire que cela a été rédigé après les attaques les plus violentes sur
10 Dubrovnik, le 6 décembre, et ceci à partir des terres et des mers. C'est
11 cette attaque du 6 décembre.
12 Question: Merci. Pour ce qui est des événements dont étaient informées les
13 autorités, maintenant nous allons examiner l'intercalaire 11 de cette
14 pièce 338.
15 Monsieur l'Huissier, ayez l'obligeance de placer l'original sur le
16 rétroprojecteur afin que nous voyons ce dont il s'agit.
17 (Intervention de l'huissier.)
18 Il s'agit ici d'une publication ultérieure, me semble-t-il. Examinons la
19 version en anglais.
20 M. le Président (interprétation): En fait, nous avons empêché l'accusé de
21 procéder à un contre-interrogatoire sur ce type de document. Alors,
22 pourquoi est-ce que nous l'empêchons lui, et pas vous?
23 M. Nice (interprétation): Si vous examinez la page 3, vous voyez qu'il y a
24 eu des notifications publiques.
25 M. le Président (interprétation): Soyons clairs, vous ne demandez pas le
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1 versement de ce document en tant que pièce à conviction pour ce qui est de
2 sa teneur?
3 M. Nice (interprétation): Non, c'est le fait d'informer qui nous
4 intéresse.
5 M. le Président (interprétation): Avez-vous quelque chose à dire, Maître?
6 On fait un distinguo entre le contexte et la teneur. C'est peut-être une
7 différence assez subtile, mais c'en est une quand même, donc le fait pour
8 le contexte que quelque chose ait été porté à la connaissance de M.
9 Bulatovic?
10 M. Kay (interprétation): Ceci ne concerne pas un événement qui s'est passé
11 pendant la période couverte par l'Acte d'accusation, ça s'est passé bien
12 plus tard. Pour ce qui est de documents de ce type, on ne peut pas
13 vraiment qualifier ceci de façon particulière. C'est simplement une
14 publication, c'est le lien qu'on établit avec des faits consignés dans
15 l'Acte d'accusation qui n'est pas prouvé ici, qui n'est pas établi.
16 Monsieur le Président, vous avez évoqué une autre question: les Chefs 28 à
17 32. Ce sont ceux-là qui sont concernés par le pillage.
18 (Les Juges se concertent.)
19 M. Nice (interprétation): Avant que vous ne fassiez part de votre
20 décision, je me permettrai d'attirer votre attention sur la façon dont est
21 présenté ce document. C'est l'avis d'intellectuels, de différentes
22 personnes; c'est un peu un recueil de ces avis.
23 On voit qu'on fait une référence historique ou simplement une référence à
24 un entretien qui a été donné le 1er novembre 1991, dans le premier
25 paragraphe. Et je pense que ce témoin pourra parler à propos d'éléments
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1 repris dans cette pièce. Il y a un seul aspect que je vais sonder en
2 profondeur, et il pourra nous dire si ce type de document était envoyé à
3 ceux qui avaient des postes de pouvoir à l'époque.
4 M. le Président (interprétation): Ça, c'est une question différente. Mais
5 il faut bien dire que nous avons -à juste titre, d'ailleurs- empêché, au
6 moment du contre-interrogatoire de l'accusé, qu'il pose des questions à
7 propos de l'avis exprimé par des journalistes ou des universitaires et
8 intellectuels. Et je pense qu'il faut appliquer la même mesure à
9 l'accusation, parce que ce document est d'une valeur limitée. Bien sûr,
10 c'est de l'ouï-dire et de l'ouï-dire d'un type qui, à notre avis, ne
11 devrait pas être admis. La distinction qui est faite entre le versement au
12 dossier d'un tel document simplement pour montrer que ce genre de chose
13 était publiée, à l'époque, par rapport à ce qui serait versé à cause de
14 l'élément de véracité ou de vérité qu'il y aurait dans de tels documents,
15 la distinction est trop grande pour que nous autorisions le versement d'un
16 tel document.
17 En conséquence, l'intercalaire 11 sera exclue et je vais peut-être
18 remettre ma copie de cet intercalaire 11 à la Greffière d'audience, ainsi
19 que l'autre document dont on ne parle pas pour le moment.
20 M. Nice (interprétation): Je pense que le témoin a déjà longuement parlé
21 du pillage et M. Kay a déjà abordé ce que j'allais évoquer, à savoir les
22 chefs 28 à 31. Vous trouvez, dans l'Acte d'accusation, notamment au
23 paragraphe 77 et au paragraphe 81, des références à cette question.
24 Le témoin a déjà longuement évoqué les moyens que je souhaitais lui voir
25 évoquer, les moyens de preuve. Il y a peut-être encore un aspect qu'il
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1 nous faut examiner; ce ne sera pas long.
2 Monsieur Samardzic, je ne sais pas si vous vous êtes déjà exprimé pour
3 nous dire si vous saviez quelles étaient les unités qui auraient participé
4 aux pillages dont vous avez parlé, des pillages qui se produisaient autour
5 de Dubrovnik et à Dubrovnik, et comment les objets pillés ont été renvoyés
6 ou ramenés au Monténégro.
7 M. Samardzic (interprétation): Pour être concret, je ne saurais dire
8 quelles sont les unités, quels étaient les noms des unités -parce que
9 chaque unité a un nom-, donc des unités qui ont pillé. Mais ce qui a été
10 pillé…, les pillages ont été perpétrés par des individus, pas toute
11 l'armée. Ce sont des groupes et des individus qui ont fait cela, qui ont
12 pillé. Et une partie de ces gens-là avait été organisée par le
13 commandement de l'armée; tout cela avait été rassemblé dans ce motel de
14 "Vinogradi" et les autres objets avaient été transportés vers l'intérieur
15 du Monténégro.
16 Je ne saurais vous dire concrètement qui a fait cela; je n'ai pas de noms
17 et de prénoms à vous donner, mais je suis certain du fait que cela a été
18 fait.
19 Question: A la lumière de ce que vous venez de dire, examinons la pièce
20 suivante. Il s'agit de l'intercalaire 12.
21 (Intervention de l'huissier.)
22 Réponse: Est-ce qu'il est possible que l'écran soit mieux éclairé, parce
23 qu'il m'est impossible de lire ce qui est à l'écran.
24 Question: Peut-on remettre au témoin l'original alors que nous allons
25 placer la version en anglais sur le rétroprojecteur?
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1 Monsieur le Témoin, nous sommes en train de voir un document qui porte la
2 date du 28 décembre 1991. Il émane du Commandement du 9e Secteur naval et
3 nous voyons qu'il est signé par le contre-amiral Jokic. On dit ceci:
4 "Conformément au mémorandum du 26 décembre, l'ordre consiste à dire ceci:
5 à l'hôtel "Vinogradi" du secteur Sutorinsko Polje, il faut établir un
6 centre de rassemblement afin que soient rassemblés les documents ou les
7 équipements capturés et confisqués en tant que butin de guerre."
8 Le document se poursuit. Je reprends le paragraphe 2: on parle de la
9 nomination d'un directeur; aussi du fait que des véhicules à moteur seront
10 conservés dans le parking du motel, alors que les autres équipements armés
11 militaires seront gardés dans l'entrée.
12 Et puis, au paragraphe 3, on dit qu'il y aura des policiers qui viennent
13 des conscrits du 9e Bataillon de police militaire.
14 Paragraphe 4: la question des matériels venant de ce centre de
15 rassemblement pour être acheminés soit vers des unités militaires ou des
16 institutions physiques et légitimes, sans autorisation.
17 Et puis, paragraphe 5: "Le commandement du 9e Secteur naval va passer
18 contrat avec une organisation dont on ne connaît pas le sigle." C'est ce
19 qui est dit dans le texte. C'est une entreprise à capital social. Pour ce
20 qui est de la location de trois bungalows où seront logés les membres du
21 personnel et où sera entreposé le matériel qui se trouve au motel
22 "Vinogradi" à partir d'une offre qui sera faite.
23 Passons à la page suivante. On voit que "le colonel Petar Dragicevic et un
24 autre commandant sont responsables de l'opération commanditée par Jokic".
25 Est-ce qu'en matière de pillage, c'est bien ce genre de chose qui s'est
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1 passé?
2 Réponse: Oui, cela coïncide complètement. Mais je tiens à préciser que
3 cela n'a été fait que le 28 décembre; or la guerre près de Dubrovnik avait
4 duré depuis trois mois déjà: donc tout le mois d'octobre, tout le mois de
5 novembre et une bonne partie du mois de décembre. Et jusque là, les
6 pillages ont eu lieu, des pillages ont eu lieu également, mais il n'a pas
7 été mis en place un… Si on peut le dire ainsi, on n'a pas mis de l'ordre
8 dans tout cela. Et ici, on dit qu'il s'agirait de butin de guerre
9 militaire et on parle de ce motel de "Vinogradi" où cela devrait être
10 rassemblé. Il n'y avait pas eu jusque là de centre de rassemblement; cela
11 avait été emmené un peu partout au Monténégro. Cela avait été fait de
12 façon organisée, mais bon nombre de soldats et d'officiers ont pris des
13 objets de valeur à titre individuel et les ont emportés vers le
14 Monténégro.
15 M. Nice (interprétation): Merci.
16 M. Kwon (interprétation): Un instant, Monsieur Nice.
17 Monsieur Samardzic, il y a un instant à peine, vous avez dit que vous ne
18 pouviez pas dire ici, à la barre des témoins, que la totalité de l'armée
19 se soit livrée au pillage, qu'il n'y avait que certains individus et
20 certaines unités qui l'avaient fait. Auriez-vous un commentaire à faire eu
21 égard à ce document-ci que nous examinons?
22 M. Samardzic (interprétation): En dépit du document ici présent, qui a été
23 rédigé par le commandant en chef, je continue à penser que l'armée tout
24 entière n'a pas pillé, parce que j'ai foi en ce peuple monténégrin qui est
25 le mien et ils ne sont pas tous des voleurs. Et ce qu'a rédigé Miodrag
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1 Jokic, en sa qualité de contre-amiral, donne en fait des ordres qui se
2 réduisent à du pillage; vous avez raison. Mais en dépit de ce fait-là, les
3 soldats qui se trouvaient là-bas ne sont pas tous des pilleurs, mais,
4 malheureusement, un groupe de personnes dont fait partie, hélas, l'amiral
5 Jokic étaient des pilleurs.
6 M. Kwon (interprétation): A votre avis, à quoi M. Jokic faisait-il
7 allusion lorsqu'il parlait de butin de guerre?
8 M. Samardzic (interprétation): Monsieur Jokic, l'amiral Jokic, lorsqu'il
9 avait parlé de butin de guerre, pour lui, c'était tout ce que l'on pouvait
10 ramasser et ramener à l'hôtel "Vinogradi". Et la plupart des choses
11 n'avaient pas été des affaires dont avait besoin l'armée; c'étaient des
12 objets, des ustensiles ou des appareils domestiques, et des affaires
13 autres, des objets de valeur. Et tout ce qui avait donc été ramassé dans
14 les maisons privées avait été ramené ainsi au Monténégro.
15 M. Kwon (interprétation): Merci.
16 M. Nice (interprétation): Pourriez-vous nous dire si des personnes
17 occupant des postes élevés, au niveau politique ou militaire, ont
18 bénéficié, ont profité de ces pillages? Et, si c'est le cas, quelles sont
19 les personnes concernées?
20 M. Samardzic (interprétation): Vous me posez cette question?
21 Question: Oui, excusez-moi. Excusez-moi.
22 Réponse: Je ne puis concrètement montrer du doigt quelque personne que ce
23 soit et dire, par exemple: "Untel a pris ceci pour lui". Il y a eu des
24 rumeurs qui ont circulé, mais comme le Tribunal ne tient pas compte des
25 rumeurs, je ne saurais dire ici si, concrètement, l'amiral Jokic a pris
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1 quelque chose pour soi. Il y a eu des rumeurs, en effet, mais je ne peux
2 personnellement pas le confirmer. Je puis dire seulement qu'il y a eu
3 pillage et qu'il y a eu destruction de biens de personnes à Dubrovnik.
4 M. Nice (interprétation): Encore trois sujets assez courts pour reprendre
5 peut-être ce qui n'a pas été… Mis à part ce qui n'a pas été dit hier, pour
6 évacuer toutes les questions, et nous en aurons bien terminé.
7 Paragraphe 50. Pouvez-vous nous parler de la participation de l'accusé
8 pour ce qui est de la désignation du premier ou du deuxième Président de
9 la RFY, de ce qui est devenu la RFY?
10 M. Samardzic (interprétation): Oui, je puis vous dire quelque chose à ce
11 sujet. Je n'ai voyagé qu'une seule fois avec Bulatovic et l'accusé
12 Milosevic en avion. Nous avions notre avion à nous, mais après les propos
13 que nous avons tenus à La Haye et les positions différentes que nous
14 avions exposées, contrairement à la politique qui était la sienne, il
15 avait demandé que nous fassions le voyage ensemble. Et dans l'avion, il
16 s'était entretenu avec Bulatovic. Il procédait à des consultations pour ce
17 qui était de la personne à désigner ou nommer au poste de… aux fonctions
18 de Président de la Yougoslavie. Cela s'est fait donc quelques jours avant
19 cette session solennelle, le 27 avril, à Belgrade.
20 Bulatovic avait été d'accord avec sa proposition; et sa proposition avait
21 été de nommer Dobrica Cosic, un écrivain à orientation nationaliste qui a
22 participé à la rédaction du mémorandum et qui a participé à la mise en
23 place de cette idée d'établissement d'une Grande Serbie allant de Karlobag
24 jusqu'à Virovitica. Peut-être Milosevic s'en souviendra-t-il: je n'ai pas
25 participé à cet entretien, je n'étais pas sur pied d'égalité avec lui et
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1 il ne prêtait pas attention à ce que je faisais.
2 J'avais dit à Bulatovic: "Monsieur le Président, celui-ci va vous
3 poignarder dans le dos tôt ou tard". Et l'accusé Milosevic n'a rien dit.
4 Mais c'est ce qui lui était arrivé: Dobrica Cosic l'a poignardé dans le
5 dos, comme on le dit dans notre peuple, et il l'a quitté.
6 Pour ce qui est maintenant de Lilic, c'est un danseur de ballet, c'est une
7 personnalité tout à fait inconnue. Il avait amené également...
8 M. le Président (interprétation): Il faudrait voir quelle est la
9 pertinence de ceci. Est-ce que je vous ai bien compris, Monsieur le
10 Témoin? Cette conversation, elle a eu lieu dans l'avion qui les ramenait
11 de La Haye?
12 M. Nice (interprétation): Oui.
13 Répondez par oui ou par non. Lilic a été désigné plus tard. Est-ce que
14 vous savez si l'accusé a participé à la désignation de cet homme et
15 pourquoi il l'a choisi? Ne nous faites pas de commentaire à propos de
16 Lilic; ce qui nous intéresse, c'est la prise de décision éventuelle ou le
17 mécanisme de prise de décision qu'aurait eu l'accusé? Pourriez-vous nous
18 parler de la participation de l'accusé à la prise de décision?
19 M. Samardzic (interprétation): C'est lui qui l'avait proposé; pas
20 publiquement, mais tel que les choses se faisaient à l'époque, c'était
21 l'homme de son choix et rien d'autre. Donc ce n'est pas dans l'avion qui
22 nous ramenait de La Haye à Belgrade que cet entretien a eu lieu, mais dans
23 l'avion qui nous emmenait de Belgrade à La Haye, cet entretien concernant
24 Cosic.
25 Question: Et toujours en ce qui concerne la participation de l'accusé,
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1 s'agissant de fonctions ministérielles ou la position de ceux qui
2 occupaient ces fonctions… Nous avons maintenant parlé de Pavle Bulatovic
3 qui était notamment un ministre fédéral. Pourriez-vous nous dire si vous
4 savez ce qui s'est passé lorsqu'il a quitté ses fonctions, lorsqu'il a
5 perdu ce poste, et si l'accusé a participé à ce que M. Bulatovic perde ses
6 fonctions?
7 Réponse: De quelles fonctions êtes-vous en train de parler? Le feu Pavle
8 Bulatovic avait exercé plusieurs fonctions; desquelles êtes-vous en train
9 de parler?
10 Question: Je ne vais pas poursuivre, Monsieur le Président.
11 Réponse: Excusez-moi… Maintenant, je m'en souviens. Pavle Bulatovic a été
12 nommé aux fonctions de ministre fédéral de l'Intérieur après les fonctions
13 qu'il avait exercées au Monténégro, qui étaient celles de ministre de
14 l'Intérieur également. Il avait été le premier à être nommé ministre
15 fédéral de l'Intérieur en Yougoslavie, en cette République fédérale de
16 Yougoslavie nouvellement créée.
17 Par la suite, il a été organisé un putsch assez étrange. Le secrétariat de
18 l'intérieur de Serbie est arrivé un jour dans le grand bâtiment de la rue
19 Knez Mihajlova et a chassé, expulsé tous les employés du ministère
20 fédéral. Et donc, le ministère serbe s'est emparé du bâtiment, de tous les
21 équipements qui figuraient dans ce ministère fédéral et les employés ont
22 été chassés dans la rue, pratiquement parlant. Ce qui fait que Pavle
23 Bulatovic n'a pas été révoqué; il a été chassé, expulsé de son propre
24 bureau. Et cela a été saisi par le ministère serbe et c'est le ministère
25 serbe qui a joué le rôle du ministère fédéral. Le ministère fédéral
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1 existait pour la forme; il y avait un ministre. Et voilà de quel type de
2 fédération il s'agissait.
3 Question: Encore un détail avant de parler de la conférence de Vienne,
4 paragraphe 52. A votre connaissance, est-ce que des armes ont circulé, ont
5 été fournies en partance du Monténégro et à destination de la Republika
6 Srpska, avant et/ou après le blocus?
7 Réponse: Il y a eu un flux d'armes, mais je ne puis témoigner à ce sujet
8 parce que, lorsque...
9 Question: Quelles sont les sources de vos renseignements, s'il vous plaît?
10 Réponse: Mes sources d'information sont des amis qui savaient que des
11 armes avaient été transportées vers la Bosnie et j'en ai entendu parler
12 dans le gouvernement. Par la suite, quand je suis parti à Malte -et je
13 suis parti à Malte lorsqu'on a mis en place des sanctions, lorsque j'ai
14 été révoqué et j'ai démissionné-, donc j'ai démissionné et j'ai été
15 révoqué de mes fonctions de ministre; je suis parti à Malte. Et je ne
16 pouvais véritablement pas être au courant du fait du nombre d'armes et des
17 quantités d'armes qui partaient vers la Bosnie, mais j'ai ouï-dire que
18 toutes sorte d'armes s'en allaient vers la Bosnie-Herzégovine.
19 Question: Fort bien.
20 Parlons maintenant, si vous le voulez bien, de la conférence de Vienne et
21 puis, après encore quelques questions, nous en aurons terminé.
22 Vous avez parlé de votre déposition d'avril 1992 mais cette conférence
23 s'est tenue du 12 au 15 avril 1992. Pourriez-vous, en quelques mots, nous
24 résumer que ce qui s'est passé à Vienne, du moins en ce qui concerne
25 l'accusé?
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1 Réponse: Il y a eu une table ronde en Europe à l'époque sur l'initiative
2 d'un certain nombre d'hommes politiques européens et sur l'initiative du
3 gouvernement autrichien. Ceci a rassemblé un nombre imposant de personnes,
4 et la réunion avait été consacrée à l'agression de la Serbie contre la
5 Bosnie.
6 Quelques jours auparavant, le 7 avril, l'agression avait commencé sur la
7 Bosnie alors que la Bosnie venait d'être reconnue comme Etat indépendant.
8 Cette table ronde, organisée par l'Europe, a adopté une résolution
9 condamnant l'agression contre la Bosnie et a convié la Serbie, ainsi que
10 l'armée yougoslave, à quitter cette Bosnie.
11 J'ai ajouté ma voix à celle de ceux qui ont adopté cette résolution,
12 quoique cela n'ait pas été la politique officielle ni de la Serbie ni du
13 Monténégro. Et j'ai confirmé la chose à la télévision de Vienne.
14 J'ai publiquement demandé, pour rétablir la paix en Bosnie, que l'armée
15 yougoslave quitte la Bosnie parce que la Bosnie était devenue un Etat
16 internationalement reconnu et que l'armée yougoslave, pour cette raison-
17 là, se devait de quitter l'Etat en question au plus vite.
18 J'ai été critiqué pour cette raison-là, et je dois dire que Djukanovic et
19 Bulatovic ne m'ont rien dit à ce sujet, mais j'ai appris que j'avais été
20 censé être arrêté parce que j'avais entrepris quelque chose qui, à l'égard
21 de la politique conduite par Slobodan Milosevic à l'époque, était
22 complètement inacceptable.
23 Question: Merci. Dernier intercalaire de la pièce 338, il s'agit de
24 l'intercalaire 13. Ce document existe uniquement en anglais. L'original
25 est en anglais. Nous allons le placer sur le rétroprojecteur.
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1 (Intervention de l'huissier.)
2 Vous allez le parcourir en même temps que nous, Monsieur le Témoin; vous
3 pourrez suivre ce qui s'est dit.
4 Il s'agit ici d'une résolution prise à l'issue de cette table ronde de
5 l'Europe. Date du 14 avril 1992.
6 "Elle condamne l'agression militaire brutale en violation du droit
7 international et des droits de l'homme; agression commise en Croatie et en
8 Bosnie-Herzégovine par l'ancienne armée fédérale yougoslave et par des
9 commandos de guérilla serbes qui tentent de déplacer les frontières de
10 l'Etat souverain par la violence, causant des souffrances incommensurables
11 à une population innocente.
12 Cette résolution exhorte le Conseil de sécurité des Nations Unies à
13 prendre toutes les mesures nécessaires au rétablissement de la paix et
14 dans les Etats qui ont succédé à l'ex-Yougoslavie.
15 De plus, nous exigeons que tous les réfugiés soient placés sous la garde
16 de la famille européenne des peuples, ce qui veut dire concrètement que
17 nous endossons la responsabilité pour ce qui est de trouver un logement et
18 d'accorder tous les soins nécessaires à ces personnes, ainsi que leur
19 protection individuelle.
20 L'Union, la Communauté européenne, ainsi que les autres Etats et
21 institutions d'Europe sont exhortés à veiller à l'exécution de cette
22 obligation de façon compatible avec la dignité humaine et avec l'aide
23 d'organisations humanitaires telle que la Croix-Rouge.
24 Nous condamnons l'attitude de la Serbie qui exige des garanties pour les
25 minorités serbes en Croatie, en Bosnie-Herzégovine, alors qu'elle commet
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1 des violations graves en ce qui concerne les droits des minorités et des
2 nationalités dans les régions autonomes de Vojvodine et du Kosovo.
3 Et nous exigeons exactement que tous les droits soient immédiatement
4 restitués à la nation albanaise du Kosovo, ainsi qu'aux minorités
5 ethniques en Vojvodine et en Serbie."
6 Voilà donc la résolution adoptée à l'issue de cette réunion.
7 Vous avez décrit la façon dont vous étiez intervenu et ceci aussi se passe
8 de commentaire, n'est-ce pas, Monsieur Samardzic?
9 Réponse: Oui, c'étaient les conclusions de cette réunion-là. Ces
10 conclusions parlent pour elles-mêmes et ce n'est pas ici le texte entier,
11 nous n'avons ici qu'une partie du texte.
12 Question: Merci.
13 Je crois que j'ai maintenant abordé des questions résiduelles par rapport
14 à hier. Il n'est pas utile que je vous importune davantage puisque le
15 témoin a abordé toutes les facettes de la problématique d'une façon ou
16 d'une autre.
17 Encore une chose. Je vais demander qu'on remette une fois de plus cette
18 carte, la pièce 326 - intercalaire 3, au témoin.
19 (Intervention de l'huissier.)
20 En quelques mots, Monsieur le Témoin, et je pèse mes mots: en effet, vous
21 avez déjà fourni diverses explications mais je pense que ceci pourrait
22 aider les Juges de la Chambre. Est-ce que vous estimez qu'au niveau de la
23 formation de la Croatie, il y a deux ailes, disons? Et si c'est le cas,
24 est-ce que vous établissez un lien par rapport au plan général, au plan
25 directeur, si vous voulez, un lien entre ce qui se passait dans la zone de
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1 Dubrovnik, se dirigeant à partir du Monténégro, et ce qui se passait au
2 nord? Est-ce que vous pourriez fournir une brève explication aux Juges à
3 ce propos?
4 Réponse: Oui. La Croatie a les mêmes frontières aujourd'hui, comme cela
5 avait été le cas de ces frontières lorsque c'était une République de la
6 Yougoslavie.
7 Quand vous voyez cette carte, vous voyez deux ailes ou plutôt cela donne
8 l'impression d'être une demi-lune.
9 A l'occasion de la guerre qui s'est tenue, sur le théâtre de guerre de
10 Dubrovnik, à mon avis, on visait non seulement à s'emparer de Dubrovnik
11 mais à remonter jusqu'à Karlobag; parce qu'on s'était attaqué en même
12 temps à toutes les villes importantes sur la côte Adriatique jusqu'à
13 Karlobag, et on ne s'était pas attaqué aux villes au-delà de Karlobag.
14 S'agissant du nord, dès avant le théâtre de guerre de Dubrovnik, des
15 combats ont eu lieu pour la ville de Vukovar, ainsi que sur d'autres
16 secteurs ou certaines parties de ce qui n'a pas été encore saisi et qui
17 avait été désigné comme étant des régions serbes autonomes, et ceci en
18 Slavonie orientale et occidentale et extrême occidentale, dans l'objectif
19 d'aller de Vukovar jusqu'à Virovitica; c'était une distance bien plus
20 petite que de Dubrovnik à Karlobag. Ces opérations avaient pour objectif…
21 M. le Président (interprétation): Je pense que c'est une question que
22 nous, nous devrons trancher.
23 Désolé de vous interrompre, Monsieur le Témoin, mais votre déposition doit
24 porter sur ce que vous-même, en personne, avez entendu ou vu. Il nous
25 revient à nous de déterminer quel était l'objectif ou l'objet de cette
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1 attaque à Dubrovnik.
2 M. Nice (interprétation): Si c'est le cas, je n'ai plus de question à
3 poser à ce témoin.
4 M. le Président (interprétation): Je vous remercie.
5 Oui, Monsieur Milosevic, à vous.
6 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Nikola Samardzic, par l'accusé M.
7 Milosevic.)
8 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je voudrais d'abord que nous
9 déterminions l'intervalle de temps que j'ai à ma disposition. Hier,
10 l'interrogatoire principal a duré exactement 3 heures et, aujourd'hui, 1
11 heure et 10 minutes, comme vous pouvez le constater. Ce qui fait un total
12 de 4 heures et 10 minutes. Je voudrais que vous ne perdiez pas la chose de
13 vue, étant donné que, jusqu'à la fin de notre journée prolongée, il reste
14 bien moins de temps, bien moins que 4 heures et 10 minutes; 4 heures et 10
15 minutes que j'estime être de votre obligation de m'accorder.
16 M. le Président (interprétation): Puisque nous parlons d'horaire,
17 aujourd'hui, 1 heure 5 minutes a été consacrée à l'interrogatoire
18 principal et, hier, 2 heures 40, ce qui fait un total de 3 heures 45. Et
19 je pense que 3 heures 30 devraient suffire. Mais je vais consulter mes
20 collègues.
21 (Les Juges se concertent sur le siège.)
22 Monsieur Milosevic, nous aimerions, si c'est possible, que vous en
23 finissiez aujourd'hui, avant la fin de la journée, mais vous pouvez bien
24 sûr disposer du même temps que l'accusation, c'est-à-dire 3 heures 45.
25 Cela étant, je vous invite à terminer avant.
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1 Et je vais vous dire ce qui suit pour vous aider: ce n'est pas nécessaire
2 de contre-interroger ce témoin au sujet des théories qu'il expose, car,
3 comme je viens de le signaler moi-même, ces théories exposées par lui ne
4 font pas l'objet de la déposition, ne sont pas intéressantes à titre de
5 déposition, ne seront pas prises en tant que dépositions, mais vous pouvez
6 vous concentrer sur les éléments de preuve en tant que tels.
7 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, vous le voyez vous-même en
8 regardant l'horloge: nous ne disposons plus que de 3 heures 15 de travail
9 pour la journée d'aujourd'hui. Et vos comptes sont inexacts, car hier, 1
10 heure 45 a été consacrée à l'interrogatoire principal dans la deuxième
11 partie de la journée, précédée de 1 heure 15 dans la partie précédente,
12 avant la pause. Donc de midi à 1 heure moins 12; c'est une des parties de
13 la séance qui a été consacrée à l'interrogatoire principal et, de 14
14 heures 30 à 16 heures 15, auxquelles s'ajoutent les 1 heure 10 minutes
15 d'aujourd'hui. Donc 4 heures 10 minutes au total. Je ne sais pas comment
16 vous êtes arrivés au chiffre bien plus faible que vous avez cité
17 aujourd'hui, mais il y a des enregistrements du temps et des
18 enregistrements de ce qui a été dit. En tout cas, le temps que vous m'avez
19 imparti sera insuffisant pour moi pour ce contre-interrogatoire, même si
20 vous avez raison au sujet des horaires.
21 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, c'est le temps dont
22 vous disposez. Donc, plutôt que de discuter, essayez de commencer et d'en
23 terminer aussi vite que possible.
24 Monsieur Samardzic, je voudrais vous dire ce qui suit: bien sûr, il y aura
25 des explications à fournir dans le cadre des réponses; le temps sera
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1 limité, comme je l'ai dit, selon l'ordre que nous venons de rendre. Donc
2 il serait utile que vous répondiez aussi brièvement que vous le pouvez.
3 Essayez, si vous le pouvez, de suivre la question et d'y répondre
4 précisément; et si cela est impossible, vous pouvez répondre à la question
5 d'une façon plus prolongée, mais essayez tout de même.
6 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
7 M. Milosevic (interprétation): Vous avez dit que vous étiez retraité,
8 n'est-ce pas?
9 M. Samardzic (interprétation): Je suis retraité yougoslave, mais je vis en
10 (expurgé) et j'y travaille toujours. J'ai une petite entreprise dont le
11 siège est à la maison, donc j'y travaille.
12 Question: Recevez-vous votre retraite au Monténégro et vivez-vous en fait
13 au Monténégro?
14 Réponse: Oui, je reçois ma retraite au Monténégro, mais je ne réside pas,
15 je ne vis pas au Monténégro.
16 Question: Est-il vrai que vous avez fui en (expurgé) après avoir vidé le
17 compte de l'entreprise "Jugooceanija" à la banque où se trouvaient 400.000
18 dollars que vous avez pris avant de partir?
19 Réponse: C'est un mensonge absolu! Ces informations proviennent de la
20 police secrète, de votre police secrète. Je n'ai jamais emporté d'argent
21 hors de… Je n'ai jamais pris l'argent de "Jugooceanija".
22 Question: Bien. Est-ce que de l'argent a été pris à l'entreprise
23 "Jugooceanija" et placé sur votre compte privé?
24 Réponse: Les fonds de l'entreprise n'étaient pas mon compte privé; ceci
25 est un mensonge avéré.
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1 Question: Ma police secrète n'existe pas, elle n'a jamais existé. Si vous
2 parlez de la police secrète de Serbie, je suppose que vous savez qu'elle
3 ne travaillait pas jusqu'au Monténégro?
4 Réponse: Oui, elle était responsable du Monténégro également, mais nous
5 pouvons discuter de cela un autre jour.
6 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, la déclaration que vous
7 faites est totalement contraire à la vérité et -je ne vais pas en faire la
8 preuve ici- ce que vous disiez l'époque en tant que ministre des Affaires
9 étrangères du Monténégro est totalement différent de ce que vous disiez en
10 tant que directeur de l'entreprise "Jugooceanija". Alors, pouvez-vous me
11 dire ce qu'on vous a promis, quelles sont les promesses qui vous ont été
12 ont été faites en échange d'une telle masse de contre-vérités, pour dire
13 les choses tranquillement?
14 Avez-vous un permis de construire ou de résidence en Croatie? Est-ce que
15 c'est cela que vous voulez acquérir, que vous voulez vous acheter un
16 permis de construire en Croatie?
17 M. le Président (interprétation): Une chose à la fois!
18 Avez-vous reçu des promesses, Monsieur, en échange de votre déposition?
19 C'est ce qui vous est suggéré ici.
20 M. Samardzic (interprétation): Monsieur le Président, ceci est un non-
21 sens. Ce que l'accusé dit est complètement dépourvu de sens. Aucune
22 promesse ne m'a été faite; ce qu'il dit est le produit de son imagination.
23 Je n'ai jamais demandé de permis de résidence en Croatie et je n'ai pas
24 non plus de passeport de la République de Serbie yougoslave; je n'ai même
25 pas demandé un passeport de cette espèce.
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1 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Comment avez-vous, dans ce cas,
2 obtenu votre passeport pour aller en (expurgé)?
3 M. Samardzic (interprétation): Le passeport rouge de la Yougoslavie
4 socialiste, Monsieur Milosevic, pas le vôtre; ce n'est pas le vôtre que je
5 détiens.
6 Question: Très bien. Dites-moi, Monsieur, lorsque vous étiez ministre du
7 Gouvernement monténégrin et une personne de confiance, vous étiez tout en
8 haut du pouvoir au Gouvernement du Monténégro, vous représentiez… Et
9 pourtant ici, vous représentez une espèce de dissident; vous vous
10 présentez comme une sorte de communiste repenti. Vous donnez cette image
11 de vous, alors que vous avez fait une très belle et bonne carrière dans le
12 système dans lequel vous avez vécu. Vous avez obtenu des postes très
13 importants, vous avez très bien vécu de vos revenus. Donc comment est-ce
14 que, tout d'un coup, vous voulez donner cette image de vous et pourquoi
15 faites-vous ce choix?
16 Réponse: Ce n'est pas vrai que je suis un dissident, ce n'est pas vrai que
17 j'ai abandonné les idées de la Ligue des communistes. C'est une invention
18 de votre part, faite par vous à l'instant même. Ces idées et ces idéaux de
19 la Ligue des communistes yougoslaves, les idéaux de l'appartenance à la
20 Yougoslavie, c'est vous qui les avez abandonnés en agissant comme vous
21 l'avez fait. Votre Etat –et vous comprenez cela très bien, je vais en tout
22 cas vous le dire maintenant-, votre Etat m'était… pour employer des mots
23 décents…, a plongé -pour employer un mot décent-, plongé dans l'abîme,
24 pour ne pas en dire plus.
25 Question: Monsieur Samardzic, je comprends ce que vous êtes en train de
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1 faire, mais essayons d'avancer et revenons sur les observations que vous
2 avez faites et les réponses aux questions qui vous ont été posées.
3 Mais à cet égard, vous avez déclaré qu'il n'y avait pas de place sous le
4 soleil pour vous au Monténégro, que vous n'étiez pas bien traité en tant
5 que cadre, que vous avez été accusé de traîtrise et que cela est dû au
6 fait que votre père a passé un certain temps en prison, etc. Et puis, vous
7 dites quelque chose de complètement opposé: vous dites que vous avez
8 occupé des postes importants, et puis vous énumérez ces postes. Donc pour
9 moi, tout cela a l'air d'être un montage de toutes pièces. Ce que vous
10 dites dans votre déclaration écrite est bien un peu différent, n'est-ce
11 pas?
12 Réponse: Non, pas du tout. Vous renversez tout, vous inversez tout. Mon
13 père était un soldat de l'armée de libération. Je suis allé à l'île de
14 Goli Otok pour y voir mon père pendant un certain temps avant d'avancer
15 dans ma carrière. Et j'ai pu avancer dans le cadre de "Jugooceanija". Et,
16 plus tard, au gouvernement où j'ai élu ministre, j'ai été élu par
17 l'Assemblée yougoslave. Donc cela n'a rien à voir avec ce que vous dites.
18 J'ai fait une carrière due à mes propres qualités et j'en suis fier. Mais
19 je ne serai jamais d'accord pour que l'on me qualifie de "dissident". Je
20 ne veux pas être qualifié de "dissident", même si j'ai agi contre votre
21 police criminelle qui détruisait la Yougoslavie et commettait des crimes
22 sous vos ordres et en votre nom.
23 Question: Très bien. Très bien, Monsieur Samardzic. Très bien, mais
24 calmez-vous et essayez de répondre à vos questions. Ne devenez pas aussi
25 excité!
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1 Réponse: Je ne m'excite pas!
2 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que… Vous aurez tout le temps de
3 vous exciter pendant ce contre-interrogatoire!
4 M. Samardzic (interprétation): Je ne suis pas du tout excité!!
5 M. le Président (interprétation): Un instant. Je vous demande à tous les
6 deux de vous rappeler que des interprètes travaillent ici et qu'il
7 convient de penser au débit de votre parole.
8 M. Milosevic (interprétation): Dans votre déclaration écrite, vous dites
9 que vous êtes allé à La Haye avec Bulatovic, mais que vous êtes passé par
10 Prague pour éviter que l'armée ne vous tire dessus. Pouvez-vous expliquer
11 ce mensonge, cette route détournée que vous avez prise pour éviter soi-
12 disant que votre avion soit pris pour cible par l'armée? Que voulez-vous
13 dire par "route détournée"? Je suppose qu'entre la Yougoslavie et La Haye,
14 le vol vous fait passer au-dessus de Prague?
15 Et vous vous rappelez également que lorsque vous avez fait ce voyage, vous
16 avez dit que ce n'était pas votre avion que vous avez utilisé, mais qu'un
17 avion vous a été prêté par l'armée. Alors, comment peut-on imaginer
18 l'armée qui prête un avion pour ensuite tirer sur cet avion? Pourquoi est-
19 ce que vous avez imaginé tout cela? Pouvez-vous nous le dire? D'où
20 viennent ces fabrications de toutes pièces, à côté de centaines d'autres?
21 M. le Président (interprétation): Revenons à la question.
22 On vous demande, Monsieur Samardzic, ce qu'il en est de cette route
23 détournée que vous dites avoir pris pour aller à La Haye. Pouvez-vous vous
24 expliquer sur ce sujet?
25 M. Samardzic (interprétation): Au lieu d'arriver à La Haye, on a été
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1 détourné, on est arrivé à Prague. C'est un fait bien connu, de notoriété
2 publique, qu'atterrir à Prague n'est pas le chemin direct pour aller à La
3 Haye, car Prague n'est pas dans la même direction. Donc ce qui vient
4 d'être dit est inexact et insensé et voilà quelle est la raison.
5 En tout cas, l'armée risquait de tirer sur l'avion; d'où notre position,
6 notre attitude, notre décision. Cela aurait été fait sur votre ordre,
7 l'armée ne l'aurait pas décidé d'elle-même.
8 Question: Qui vous a raconté tout cela?
9 Réponse: Eh bien, Bulatovic m'en a parlé, m'a parlé de cette possibilité.
10 Question: Très bien. Bulatovic toujours. Vous semblez revenir toujours sur
11 Bulatovic. Vous avez parlé de sa gentillesse et, apparemment, il vous
12 racontait tout.
13 Maintenant, dites-moi ce qui suit: est-il vrai, est-il exact que cet
14 avion, pour des raisons techniques, a dû faire escale brièvement à Prague
15 pour aller ensuite vers La Haye? Mais en tout cas, Prague et La Haye sont
16 toutes deux au nord de la Yougoslavie et, à partir de Podgorica, on a
17 beaucoup de chance de survoler dans le même corridor aérien les deux
18 villes, comme n'importe quel autre avion, n'est-ce pas, Monsieur
19 Samardzic?
20 Réponse: Bien sûr que ce n'est pas vrai, regardez la carte de l'Europe et
21 vous verrez où se trouve La Haye, ici, et Prague là. Pourquoi est-ce que
22 vous racontez cela? Pourquoi est-ce qu'on aurait dû aller à Prague,
23 survoler Prague pour aller à La Haye? Si vous ne pouvez pas survoler la
24 Croatie en raison de la guerre, vous passez par Budapest, Vienne, et vous
25 arrivez à La Haye.
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1 Question: Bien, lorsque vous allez à La Haye, est-ce que vous survolez
2 Budapest, ou peut-être est-ce que vous survolez même l'Italie?
3 Réponse: Ce que vous dites est très drôle! C'est complètement ridicule:
4 aucun avion ne va jusqu'à Prague pour se rendre à La Haye. Examinez un
5 instant la carte de l'Europe.
6 Question: Très bien, Monsieur Samardzic. Nous n'allons pas nous disputer
7 et passer du temps sur ces détails ridicules; c'est tout simplement
8 comique.
9 Mais dites-moi donc, vous avez parlé d'une conférence présidée par
10 Carrington et vous dites que M. Milosevic n'a pas apprécié la déclaration
11 de Bulatovic à cette conférence, qu'il a sauté de sa chaise, qu'il était
12 furieux, qu'il vous a menacé du doigt et verbalement, qu'il s'est approché
13 vous. Tout cela, bien sûr, n'est pas vrai, mais c'est intéressant parce
14 qu'en fait cela démontre jusqu'où quelqu'un peut aller pour imaginer un
15 comportement diplomatique scandaleux.
16 Comment se fait-il que personne d'autre n'ait remarqué tout cela, à part
17 vous-même? Et vous en avez parlé longuement. Comment est-ce que je
18 pourrais qualifier tout cela, Monsieur Samardzic, des spéculations, peut-
19 être?
20 Réponse: Kiro Gligorov est encore vivant, et il était à côté de nous. Et
21 il est ministre comme Momir Bulatovic. Ils sont encore vivants, ils ont
22 entendu quand vous vous êtes brutalement levé de votre siège. Je ne vous
23 ai pas vu courir. Je ne vous ai pas vu courir. Je ne suppose pas,
24 d'ailleurs, que vous puissiez courir, mais vous vous êtes approché, et
25 c'est ce que vous avez dit : "Je vous aurai pour ça. Je vous ai donné un
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1 Monténégro indépendant et souverain". C'était la menace que vous avez
2 faite et cela signifiait que vous pouviez faire n'importe quoi de négatif
3 qui vous venait à l'esprit. C'est l'entière vérité.
4 Question: Très bien, Monsieur Samardzic. Vous avez encore une fois pensé à
5 M. Bulatovic, comme vous l'avez fait au moins 50 fois hier; c'est ce que
6 Momir Bulatovic lui-même aurait dit, je suppose. Donc, je vous en prie,
7 répondez à mes questions une fois que je vous en aurais donné lecture de
8 ce passage d'un texte. Car s'agissant du témoignage de M. Samardzic, le
9 ministre des Affaires étrangères devant le Tribunal de La Haye, je fais la
10 déclaration suivante: dans le témoignage de Nikola Samardzic, il y a de
11 nombreux éléments inexacts.
12 M. le Président (interprétation): Un instant.
13 M. Nice (interprétation): (Hors micro.)
14 Et voilà, nous y sommes.
15 M. le Président (interprétation): Quand cette déclaration a-t-elle été
16 faite, Monsieur Milosevic, par M. Bulatovic, comme vous le dites?
17 M. Milosevic (interprétation): Ce matin, Monsieur May. Monsieur Bulatovic
18 a entendu ce qui se passait ici et il a été étonné, comme l'ensemble du
19 Monténégro, par tous ces mensonges.
20 M. le Président (interprétation): Très bien. Objection de l'accusation,
21 nous allons l'examiner.
22 (Les Juges se concertent sur le Siège.)
23 Nous autorisons la question à être posée.
24 M. Milosevic (interprétation): Merci beaucoup.
25 M. le Président (interprétation): Il est donc permis à l'accusé de
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1 demander au témoin ce qu'il pense de ce qu'a dit M. Bulatovic, mais, bien
2 sûr, les propos de M. Bulatovic ne constituent pas un élément de preuve, à
3 moins qu'il ne vienne ici pour témoigner.
4 Cela étant, vous pouvez vérifier la crédibilité des dires du témoin en
5 soumettant au témoin ce qu'a dit M. Bulatovic.
6 M. Milosevic (interprétation): Ce que vous dites, Monsieur le Président,
7 me suffira.
8 Donc, Monsieur Samardzic, je poursuis -je cite-: "Toute une série de
9 choses inexactes qui ne reposent sur aucun événement réel datant de
10 l'époque au sujet de laquelle ils témoignent." Ceci peut être prouvé en
11 jetant un simple coup d'œil au document et au rapport de presse qui
12 rapportent les événements de l'époque." (Fin de citation.)
13 Un peu plus loin -je cite-: "M. Samardzic témoigne d'une rencontre
14 gouvernementale du Monténégro, du Gouvernement du Monténégro, le 1er
15 octobre 1991, au cours de laquelle certains généraux qui participaient à
16 cette réunion, des généraux de la JNA donc, se seraient exprimés. et il
17 présente cette réunion comme une manipulation de l'opinion publique
18 monténégrine par la JNA et le début de la mise en place d'un plan qui… -en
19 tout cas, du noyau d'un plan- prévoirait de s'emparer de Dubrovnik, de
20 conquérir Dubrovnik.
21 En fait, il s'agissait d'une séance conjointe de la présidence de la
22 République du Monténégro, donc au niveau du Gouvernement du Monténégro,
23 qui regroupait les plus hauts fonctionnaires, les plus hauts représentants
24 du pays pour parler de sécurité.
25 Cette réunion avait un caractère commémoratif, car c'est ce jour-là qu'à
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1 la frontière, huit membres de la JNA avaient été tués par un obus de
2 mortier provenant des unités paramilitaires croates. Parmi les soldats
3 décédés, deux d'entre eux étaient des Albanais du Kosovo et Metohija, un
4 était originaire de Macédoine, un de Tuzla en Bosnie-Herzégovine. C'est à
5 l'issue de cette réunion qu'un journal, un quotidien a publié la
6 déclaration du ministre Samardzic dans une colonne distincte, comme je le
7 lis dans ce texte.
8 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons interrompre ici
9 la lecture, car le but consiste tout de même à interroger le témoin.
10 Ce qu'on vous suggère, Monsieur Samardzic, c'est que cette rencontre du
11 1er octobre n'avait pas pour but de discuter d'une action militaire, mais
12 avait une nature commémorative en l'honneur de huit soldats de la JNA qui
13 avaient été tués. Pouvez-vous répondre à cela, réagir: est-ce exact ou
14 pas?
15 M. Samardzic (interprétation): Ce que M. Milosevic vient de dire est
16 absolument contraire à la vérité. Il ne s'agissait nullement d'une séance
17 commémorative, mais d'une réunion du commandement suprême de l'armée.
18 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)
19 M. le Président (interprétation): Laissez-le finir.
20 Vous pouvez poursuivre, Monsieur Samardzic.
21 M. Samardzic (interprétation): Il s'agissait d'une séance du commandement
22 suprême de l'armée; les représentants de l'armée sont d'ailleurs arrivés
23 portant l'uniforme de combat, ceci montrait bien que la guerre avait
24 commencé ce jour-là. D'ailleurs, ce que vient de dire l'accusé Milosevic,
25 c'est la première fois que j'en entends parler. Je n'ai jamais entendu
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1 dire que qui que ce soit se soit fait tuer ce jour-là.
2 Ce jour-là, on s'est lancé sur Dubrovnik. Et ce que j'ai dit est tout à
3 fait exact, car j'ai parlé de la deuxième partie de cette réunion puisque
4 Bulatovic m'avait demandé de l'accompagner dans les musées de Cetinje, de
5 le guider. Et je n'ai pas assisté jusqu'à la fin, donc je ne savais
6 absolument pas que la guerre avait commencé.
7 M. Milosevic (interprétation): Je peux poursuivre, parce que ce n'est pas
8 moi qui vous parle, mais je lis la déclaration de Momir Bulatovic -je
9 cite-: "L'Assemblée parlementaire du Monténégro, qui est tripartite -je le
10 dis pour ceux qui ne le savent pas-, s'est réunie le 4 octobre. Et M.
11 Samardzic a participé à cette réunion. Le général Bozidar Babic a pris la
12 parole le premier. Le ministre de la Défense de l'époque a informé
13 l'Assemblée et le public, et la réunion a été filmée par la télévision
14 nationale. Il a dit qu'au cours des trois premiers jours de combat, 28
15 membres de la JNA avaient été tués, dont 12 provenaient du Monténégro.
16 C'est dans cette même période que 100 hommes ont été blessés..."
17 M. le Président (interprétation): Un instant! Un instant! Donnons la
18 parole au témoin pour entendre sa réponse. Après quoi, nous aurons la
19 pause.
20 Monsieur Samardzic, ce qui vient d'être dit est-il exact ou pas?
21 M. Samardzic (interprétation): Ceci n'a rien à voir avec le 1er octobre.
22 D'ailleurs, lui-même vient de dire à l'instant que c'était le 4 octobre.
23 Oui, en effet, une réunion de ce genre s'est tenue le 4 octobre, mais, à
24 part avoir présenté l'initiative pour des négociations avec la Croatie,
25 moi, je n'y ai pas participé. Je ne sais combien d'hommes sont morts,
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1 combien d'hommes ont été blessés. Je n'ai rien dit à ce sujet dans ma
2 déposition jusqu'à présent. Et ce que dit M. Milosevic est tout à fait
3 inexact.
4 J'ai parlé du 4 et du 7 octobre, dates auxquelles le Gouvernement a siégé
5 pour prendre une décision au sujet de l'initiative et j'ai soumis un
6 document à cet égard. Je n'ai rien dit de la façon dont se déroulaient les
7 opérations armées sur le terrain. Il y en avait et des hommes ont été
8 tués, je le sais, car les cadres étaient très mauvais et les hommes
9 tombaient, ce qui était un crime contre le Monténégro.
10 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic,...
11 M. le Président (interprétation): Nous allons suspendre pendant une demi-
12 heure. Je vous demanderais de revenir dans une demi-heure.
13 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, à un moment dans la
14 journée d'aujourd'hui, et si possible avant le déjeuner, je vous
15 demanderai un huis clos complet de cinq minutes -pas plus- pour traiter de
16 questions administratives.
17 M. le Président (interprétation): Oui, juste avant la pause déjeuner.
18 M. Nice (interprétation): Merci.
19 (L'audience, suspendue à 11 heures 6, est reprise à 11 heures 40.)
20 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic.
21 M. Milosevic (interprétation): Vous m'avez interrompu tout à l'heure et je
22 tiens à terminer ce que je voulais dire.
23 La phrase que je n'ai pas pu lire dans ce point-là dit que "les unités de
24 la JNA avaient été constituées à l'époque de personnes originaires de
25 quatre Républiques yougoslaves. Et toutes ces victimes et ces morts sont
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1 tombés avant que l'on n'ait atteint Dubrovnik."
2 Et s'agissant de la déposition de Nikola Samardzic concernant les armes
3 entreposées au port de Bar, quoique admettant qu'il n'avait aucun
4 renseignement à ce sujet, il avait supposé que "cela avait été passé en
5 contrebande en provenance des régions qui étaient devenues théâtre de la
6 guerre" et il accuse Milo Djukanovic et les autres. Et son neveu. Ces
7 armes ont passé des années dans ce port de Bar en tant que résultat des
8 affaires commerciales d'une personne originaire du Proche-Orient. Etant
9 donné qu'il n'avait pas payé la location des entrepôts, ces armes ont été
10 reprises par la police et l'armée fédérale. Il y a une documentation
11 afférente auprès des institutions fédérales qui, indubitablement, peut
12 certifier du fait que ces armes ne sont pas parvenues dans les régions qui
13 ont été théâtre de guerre. Malheureusement, ces régions-là avaient disposé
14 de trop d'armes déjà, sans ces armes-là."
15 M. le Président (interprétation): Vous n'êtes pas ici pour nous donner
16 lecture, vous êtes censé contre-interroger le témoin et non pas donner
17 lecture des dépositions.
18 Monsieur Samardzic, ce qui est dit ici, c'est que ce que vous avez déclaré
19 sur le port de Bar est tout à fait contraire à la vérité. Vous allez peut-
20 être vouloir répondre à ceci.
21 Mais l'autre point qui vous est soumis est celui-ci: il s'agissait d'un
22 entrepôt qui était la propriété d'un homme d'affaires privé et que ces
23 armes n'avaient pas été amenées par la voie légale sur le territoire de la
24 RFY.
25 Pourriez-vous répondre à ces deux éléments?
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1 M. Samardzic (interprétation): Oui. Je n'ai rien à ajouter à ce que j'ai
2 déjà dit. Je n'ai pas accusé Djukanovic et son frère non plus. Et ce qui
3 figure au compte rendu était une erreur. Je n'ai pas mentionné cela ici,
4 au Tribunal.
5 L'essentiel, c'est de dire que je sais que des navires se trouvaient face
6 au port de Bar; ces navires étaient pleins d'armes. J'ai déclaré, et je
7 déclare une fois de plus, que je ne savais pas où ces armes avaient
8 abouti; je ne pouvais faire que des suppositions.
9 Donc je ne vois rien de terrible dans ce que j'ai témoigné et je ne vois
10 pas en quoi ce que j'ai dit serait contraire à la réalité.
11 M. Milosevic (interprétation): Bien. Puis-je continuer si vous le
12 permettez?
13 Il dit: "On présente de façon inexacte le rôle de Branko Kostic, membre de
14 la présidence de la RSFY, originaire du Monténégro. Dans son intention de
15 montrer que Kostic avait été complètement instrumentalisé par Slobodan
16 Milosevic, Samardzic dit que Kostic n'avait pas participé à la prise de
17 décision par les organes du Monténégro et qu'il n'avait pas respecté les
18 décisions de ces organes, mais qu'il ne faisait que leur transmettre les
19 décisions de Belgrade.
20 Par analyse des comptes rendus d'audience et des transcriptions, on voit
21 que Kostic avait participé, tout comme Nikola Samardzic, à toutes les
22 réunions et il n'est jamais intervenu pour prendre des positions
23 contraires à celles du Monténégro. Dans les sténogrammes de ces décisions,
24 on voit ce qu'ont dit tant Kostic que Samardzic.
25 M. le Président (interprétation): Quelle est la question?
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1 M. Milosevic (interprétation): Donc vous avez menti, Monsieur Samardzic,
2 s'agissant de ce que vous avez dit au sujet de M. Kostic.
3 M. Samardzic (interprétation): Je n'ai pas menti! C'était un de vos hommes
4 à vous, un serviteur à vous, pour ce qui était de discipliner le
5 Monténégro. C'est là la pleine vérité. Je tiens à préciser, puisque vous
6 me posez la question de le savoir à La Haye, lorsque Lord Carrington lui
7 avait retiré la parole et lorsqu'il s'était levé, fâché, pour quitter la
8 séance, les trois autres membres de la présidence, qui étaient des hommes
9 à vous, quoique Lord Carrington ne leur avait rien dit, s'étaient levés et
10 sont partis également. Donc tous les quatre faisaient ce que vous leur
11 disiez de faire.
12 C'est ce que j'ai témoigné; je maintiens mon témoignage et ce n'est là
13 aucun mensonge.
14 Question: Donc, Monsieur Samardzic, vous êtes en train de décrire un
15 événement: lorsque Lord Carrington avait retiré la parole à Branko Kostic
16 et que lui s'était levé pour quitter la séance, vous affirmez donc que
17 c'est moi qui lui ai dit de se lever et de quitter la séance lorsque Lord
18 Carrington lui avait retiré la parole?
19 Réponse: Non, vous êtes en train d'inventer. Je n'ai pas dit cela. J'ai
20 dit que lui et que les trois autres, donc à eux quatre, ils faisaient
21 ensemble ce que vous aviez souhaité qu'ils fassent et qu'ils intervenaient
22 en conformité avec votre politique. C'étaient des hommes obéissants, des
23 hommes à votre botte; et tout le monde le sait, la Serbie et le
24 Monténégro.
25 Question: S'agissant de ces membres de la présidence, organe collégial et
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1 chefs d'Etat collégial, vous ne fondez vos opinions sur aucun fait. Vous
2 êtes juste en train d'affirmer cela gratuitement?
3 Réponse: Ce n'est pas exact. Les faits existent et leur intervention
4 politique à l'époque le montrent clairement.
5 Question: Comme vous pouvez le voir, M. Bulatovic est en train de démentir
6 complètement ce que vous avez dit. Mais continuons.
7 Bulatovic dit: "S'agissant d'une grosse partie de son témoignage, M.
8 Samardzic le fonde sur des informations que je lui aurais communiquées à
9 l'occasion d'entrevues privées. Je reste surpris par les motivations qui
10 ont donné lieu à son interprétation tout à fait différente des événements
11 de l'époque. Mais, étant donné que je ne puis m'aventurer à expliquer la
12 chose, je puis dire en toute responsabilité que je n'ai jamais dit à
13 Samardzic que sa vie était en péril, ou que la mienne était en péril, ou
14 que j'étais menacé pour des décisions politiques. Et je n'ai jamais dit
15 que Slobodan Milosevic était censé démissionner. Donc toutes ces choses-là
16 et toute une série d'autres choses sont une interprétation erronée de sa
17 part."
18 M. le Président (interprétation): Un instant. Ces commentaires de
19 Bulatovic ne vont ni dans un sens ni dans l'autre, mais il est possible
20 que le témoin veuille répondre à ces allégations, notamment à propos d'une
21 chose dont il a témoigné dans le cadre de sa déposition.
22 C'est ce matin, je pense, que vous avez dit, Monsieur, que de l'avis de M.
23 Bulatovic, M. Milosevic devrait se retirer, démissionner vu les crimes
24 commis notamment au Monténégro.
25 Avez-vous quelque chose à dire à ce propos, Monsieur le Témoin?
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1 M. Samardzic (interprétation): Je répète ce que j'ai dit: Momir Bulatovic
2 me l'avait dit, il avait été étonné, surpris par les crimes qui avaient
3 été perpétrés à l'encontre des Musulmans -cela a fait été publié par la
4 presse, l'opinion publique en parlait- et il avait estimé que M. Milosevic
5 était censé démissionner.
6 M. Milosevic (interprétation): Restons-en là, s'il vous plait. Est-ce que
7 ces crimes ont été perpétrés au Monténégro?
8 M. Samardzic (interprétation): Certains au Monténégro et d'autres ont été
9 perpétrés quelque part en Bosnie.
10 M. Milosevic (interprétation): Mais, bien. Comme vous le savez, moi,
11 j'étais Président de la Serbie. Quelle corrélation y a-t-il entre la
12 Serbie et ces crimes au Monténégro? Est-ce que quelqu'un de Serbie est
13 venu perpétrer des crimes au Monténégro? C'est ce que vous êtes en train
14 de nous dire?
15 M. Samardzic (interprétation): Je n'affirme pas cela. Les crimes ont été
16 perpétrés au nom de cette idée "Grand Serbe", donc on a tué des Musulmans
17 pour procéder au nettoyage ethnique des Musulmans au Monténégro, en Bosnie
18 et dans d'autres régions qui étaient censées devenir partie de la Grande
19 Serbie. Cela a été fait, cela a été fait en votre nom, vous étiez le
20 leader, le grand leader des Serbes en cette période.
21 M. le Président (interprétation): Un instant, Monsieur Samardzic, je vais
22 vous demander de vous concentrer sur les questions qui vous sont posées
23 afin d'y répondre. Elles sont quelquefois provocantes, peut-être, mais
24 essayez d'y répondre du mieux que vous pouvez.
25 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur Samardzic. Savez-vous qu'il
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1 y a eu quelque événement que ce soit concernant des crimes perpétrés
2 contre des Musulmans en Serbie?
3 M. Samardzic (interprétation): …
4 M. Milosevic (interprétation): Continuons. Pendant les dix années de la
5 crise?
6 M. Samardzic (interprétation): Je suis au courant d'un événement sur la
7 voie ferrée Beograd-Bar à Strpci: on a fait sortir 20 Musulmans et un
8 Croate, on les a tués et on les a jetés dans la rivière.
9 Question: Monsieur Samardzic, savez-vous que la gare de Strpci ne se
10 trouve pas en Serbie mais en Bosnie-Herzégovine? Et il y a neuf kilomètres
11 de voie ferrée qui traverse le territoire de la Bosnie-Herzégovine, le
12 savez-vous?
13 Réponse: Je le sais, mais cette voie relie la Serbie et le Monténégro. Et
14 si, à un bon endroit seulement… Et ce n'est pas une gare officielle, les
15 trains ne s'arrêtent pas régulièrement là, on a arrêté le train là, donc
16 cet acte a été perpétré en Serbie.
17 Question: Cela n'a pas été fait en Serbie parce que cela ne fait pas
18 partie du territoire serbe. Si vos souvenirs sont bons -personnellement,
19 je suis allé immédiatement à Prijepolje parce que ces gens étaient
20 originaires de Prijepolje- et à Prijepolje, la structure de la population
21 est moitié serbe et moitié musulmane, donc l'intention avait été d'avoir
22 une coexistence pacifique, une bonne coopération.
23 J'avais dit que cela avait certainement été fait pour transposer les
24 incendies et les conflits depuis la Bosnie vers la Serbie, et j'avais
25 demandé aux gens de continuer à vivre en paix. Nous avions entrepris des
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1 enquêtes, des instructions, et j'avais informé Owen et Stoltenberg pour
2 demander qu'une unité de notre police soit autorisée à accéder au
3 territoire de Strpci, à l'endroit de la gare de Strpci pour protéger cette
4 gare des unités paramilitaires qui avaient fait ce qu'elles voulaient. Le
5 savez-vous?
6 Réponse: Je ne suis pas au courant de la chose, mais c'étaient des
7 habitants de Serbie et des habitants du Monténégro qui avaient été
8 victimes. Vous n'avez rien fait de pratique pour que l'on découvre les
9 auteurs et vous pouviez le faire parce que vous aviez exercé votre pouvoir
10 tant au niveau de la Serbie que de la Republika Srpska. Donc vous auriez
11 pu faire en sorte que ces gens-là soient retrouvés. Les choses se sont
12 tassées et le Monténégro a été le seul à condamner la chose; et ce n'est
13 qu'au bout de neuf ans, maintenant dernièrement, que l'on a fait quelque
14 chose, que l'on a condamné un certain Ranisavljevic à ce sujet et le reste
15 s'est tassé.
16 Question: Monsieur Samardzic, cet homme avait été accusé en 1994 et non
17 pas tout dernièrement, comme vous venez de le dire. Nous avons le jugement
18 ici et je pourrais vous le montrer.
19 Réponse: Il est en détention depuis cette date-là, mais il n'y a que
20 quelques mois qu'il a été condamné.
21 M. Milosevic (interprétation): Mais s'il a été emprisonné en 1994 et s'il
22 est condamné à 20 ans de prison, qui est une peine maximum en Yougoslavie,
23 vous ne pouvez pas dire que rien n'a été fait.
24 Deuxièmement, vous ne m'avez pas répondu à la question que j'ai posée, à
25 savoir celle de savoir si, sur le territoire de la Serbie, il a été
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1 perpétré quelque meurtre que ce soit de la part de quelque unité
2 paramilitaire que ce soit, s'agissant de l'un quelconque des Musulmans de
3 Serbie.
4 M. Samardzic (interprétation): Je n'ai jamais affirmé que sur le
5 territoire de la Serbie: "Exception faite de Strpci, ça, ça appartient à
6 la Serbie", Vous ne pouvez pas vous en sortir en disant qu'il s'agit d'un
7 petit territoire autre que la Serbie. C'est une honte qui incombe à la
8 direction serbe et la direction serbe, c'est vous. Laissez-moi vous
9 répondre.
10 M. le Président (interprétation): Monsieur Samardzic. Monsieur Samardzic,
11 veuillez, je vous prie, ralentir d'abord et vous contenter de répondre aux
12 questions, vous en tenir aux questions, s'il vous plaît. Elles sont peut-
13 être provocantes, mais essayez de ne pas argumenter avec l'accusé. On vous
14 a demandé déjà de ne pas polémiquer avec l'accusé.
15 Oui, Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
16 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, il ne s'agit pas de questions
17 provocantes puisque je ne fais que soumettre au témoin la déclaration de
18 Momir Bulatovic.
19 M. le Président (interprétation): Il la ressent peut-être comme
20 provocante.
21 M. Milosevic (interprétation): Peut-être que la teneur de tout cela est
22 ressentie comme provocante par le témoin qui ne fait que démentir ce qu'on
23 lui soumet, mais vous voyez que Momir Bulatovic a une opinion tout à fait
24 contraire à celle du témoin quant aux sources des informations.
25 Je poursuis. Je suis lié par les décisions prises par la Conférence de
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1 paix de La Haye et je voudrais revenir sur les interprétations faites par
2 M. Samardzic à ce sujet qui sont tout à fait inexactes.
3 D'abord, que "le 18 octobre 1991, Slobodan Milosevic se serait levé lors
4 de la séance en face de Lord Carrington pour proférer des menaces à haute
5 voix contre moi et lui."
6 Lui, c'est vous, Monsieur le Témoin.
7 "Un tel comportement dans une conférence internationale est impossible et
8 Slobodan Milosevic aurait été le dernier à pouvoir adopter un tel
9 comportement…"
10 M. le Président (interprétation): Le témoin a déjà parlé de cela. Il a
11 décrit ce qui s'était passé et il a répondu. Passons à autre chose.
12 M. Milosevic (interprétation): Mais Momir Bulatovic dit ce qui suit -je
13 cite-: "Donc tout ceci est totalement inexact."
14 Deuxième contre-vérité liée à cette conférence, c'est l'affirmation selon
15 laquelle, par la suite, sur pression, j'aurais modifié mon point de vue
16 pour retirer ma voix déjà donnée précédemment au plan de Lord Carrington.
17 "Les faits montrent ce qui suit." (Fin de citation.)
18 J'en ai encore pour quelques instants et j'en aurai terminé.
19 M. le Président (interprétation): Un instant, un instant.
20 Monsieur Nice?
21 M. Nice (interprétation): Apparemment, l'accusé contre-interroge à partir
22 d'une déclaration privée, pas d'une déclaration publique parue dans un
23 journal, dans la presse. Dans certains systèmes judiciaires, lorsqu'une
24 déclaration, lorsqu'un texte est utilisé pour contre-interroger, on
25 autorise le témoin à disposer de ce texte sous les yeux, ce qui pourrait
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1 être une précaution intelligente dans la présente affaire.
2 Je ne dis pas que le document que lit l'accusé durant son contre-
3 interrogatoire devrait être versé au dossier en tant que pièce à
4 conviction. Je dis qu'en toute équité il devrait être mis à la disposition
5 du témoin dans son intégralité. Et il serait bon également que je l'aie
6 sous les yeux, avec l'aide de quelqu'un qui me ferait comprendre le
7 contenu.
8 M. le Président (interprétation): Si c'est un document qui est entre les
9 mains de l'accusé, il a le droit de l'utiliser et d'en soumettre le
10 contenu au témoin. Il n'a pas besoin de vous le montrer, il me semble. Je
11 ne vois pas pourquoi il le ferait.
12 M. Nice (interprétation): Il y a des règles, puisque très souvent des
13 documents sont utilisés, des règles selon lesquelles les documents sont
14 montrés aux témoins pour qu'ils puissent voir ce qui figure dans ce
15 document. Autrement, on ne sait pas exactement ce qui figure dans le
16 texte.
17 M. le Président (interprétation): J'ai déjà dit les choses très
18 clairement. Ce qui est dans cette déclaration, dans ce texte, n'a pas
19 d'importance; c'est la réponse du témoin qui constitue l'élément de
20 preuve. Donc quoi que dise le texte en question, cela n'a pas
21 d'importance. Je crois l'avoir dit très clairement à l'accusé au début de
22 son contre-interrogatoire, lorsque j'ai fait la comparaison avec les
23 documents publiés dans la presse, mais la différence n'a peut-être pas été
24 saisie.
25 M. Nice (interprétation): Comme vous voulez, Monsieur le Président.
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1 M. le Président (interprétation): Oui, nous pensons que l'accusé, après
2 consultation avec mes collègues, peut utiliser ce document; il n'a pas
3 besoin de le communiquer.
4 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
5 M. Milosevic (interprétation): Donc la deuxième contre-vérité est liée au
6 fait que j'ai subi des pressions et des menaces pour ensuite modifier ma
7 position et retirer mon vote favorable au plan de Carrington. Les faits
8 disent une chose contraire.
9 Je n'ai plus que cinq points à lire qui, chacun, se composent de deux
10 lignes. Très rapidement.
11 "D'abord, Le plan de Lord Carrington n'aurait été concerné que si les six
12 Républiques yougoslaves l'avaient adopté.
13 Deuxièmement, le fait que le Président de la Serbie ait exprimé des
14 réserves sur une partie du plan ne signifiait pas qu'il interrompait le
15 processus des négociations, mais simplement qu'il voulait le poursuivre
16 tant que celui-ci était acceptable pour lui.
17 Troisièmement, ma position à La Haye était appuyée par le Parlement du
18 Monténégro. J'ai été critiqué pour…, mais il n'y a pas eu de pressions.
19 Quatrièmement, lors de la séance suivante de la conférence…"
20 M. le Président (interprétation): Le témoin ne peut pas suivre ce que vous
21 dites, cela va trop vite. Et j'aimerais que le témoin puisse lire ce qui
22 figure sur l'écran.
23 Désormais, Monsieur Samardzic, pouvez-vous répondre à la première partie
24 de cette question où il est dit que Bulatovic n'a jamais changé son point
25 de vue sur le plan de Carrington? Qu'est-ce qui est vrai?
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1 Réponse: Dès qu'il est arrivé à Podgorica, il a changé de point de vue.
2 C'est bien connu, il a changé d'avis deux ou trois jours plus tard; tout
3 le monde le sait.
4 M. Milosevic (interprétation): Bien. Point suivant… Lui, en tout cas, dit
5 que ce n'est pas vrai.
6 "Quatrièmement, lors de la séance suivante de la conférence sur la
7 Yougoslavie, Slobodan Milosevic et moi-même avons confirmé une proposition
8 conjointe d'amendements au projet de texte. Ces amendements ont été
9 appuyés par la Présidence de la RSFY et par le Parlement du Monténégro et
10 de la Serbie. La conférence présidentielle de Yougoslavie a examiné les
11 amendements au projet de texte en préparation à la conférence à partir du
12 5 novembre 1991. Par ce biais, le processus de négociations a pris un
13 nouveau visage et un nouvel élan pour s'approcher d'une solution.
14 Cinquièmement, le processus de négociations dirigé par Lord Carrington n'a
15 malheureusement pas abouti. Mais ceci n'est pas le fait de l'intervention
16 de telle ou telle personne exclusivement, mais en raison des positions
17 prises par Lord Carrington, en raison de l'intervention de certains Etats
18 et de l'Union…, de la Communauté européenne en particulier qui a fait
19 savoir qu'elle allait reconnaître l'indépendance de deux Républiques. Ce
20 qui a fait perdre son objet à la conférence. Je veux parler de la Croatie
21 et de la Slovénie".
22 M. le Président (interprétation): Nous nous écartons beaucoup du sujet et
23 nous parlons maintenant des positions et des opinions de M. Bulatovic.
24 J'ai dit que ce n'était pas pertinent. Avez-vous une question à adresser à
25 ce témoin?
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1 M. Milosevic (interprétation): Bien, mais j'ajouterai simplement le
2 dernier point de la déclaration de M. Bulatovic signée par lui.
3 M. le Président (interprétation): Non, non, non, je vais vous interrompre.
4 Vous nous parlez ici de choses absolument non pertinentes. Avez-vous une
5 question à poser au témoin?
6 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je ne vais vous prendre que
7 dix secondes pour lire la dernière phrase qui se lit comme suit -je cite-:
8 "Sur ces sujets et tout autre sujet où je pourrais contribuer à faire
9 valoir la vérité et la justice, je suis prêt à témoigner à la demande de
10 la défense de Slobodan Milosevic." (Fin de citation.)
11 M. le Président (interprétation): Très bien. Très bien. Citez-le à la
12 barre; vous pouvez le faire et nous entendrons ce qu'il a à dire. Ces
13 sujets peuvent lui être soumis. Tout ce qui se passe ici peut lui être
14 soumis pour voir ce qu'il a à dire. Veuillez poursuivre.
15 M. Milosevic (interprétation): Donc, Monsieur Samardzic, je viens de vous
16 donner lecture de ce texte qui traite… parlant de votre témoignage, de ce
17 que vous avez dit en disant que vous avez évoqué un grand nombre
18 d'événements et de faits que vous avez déformés parce que vous ne vous
19 êtes pas fondé, pour ce faire, sur un seul événement de l'époque au sujet
20 de laquelle vous témoignez. Est-ce exact, Monsieur Samardzic?
21 M. Samardzic (interprétation): C'est absolument inexact. Ce que vous venez
22 de lire à l'instant, cette déclaration de Momir Bulatovic, montre qu'il a
23 changé d'avis et que ce soi-disant processus qui aurait commencé après La
24 Haye est bien la preuve du fait qu'avec vous, il s'est mis d'accord pour
25 ne plus appuyer les propositions de Lord Carrington.
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1 Donc tout ce qui vient d'être dit montre bien qu'il a décidé de s'écarter
2 du plan de Lord Carrington et de s'engager dans une voie différente pour
3 résoudre la crise yougoslave. Et c'est exactement ce que j'ai dit dans ma
4 déposition. Donc, par ce que vous venez de lire, vous vous démentez vous-
5 même.
6 Question: Ce n'est pas la conclusion que j'en tirerais moi-même. La seule
7 conclusion que je peux tirer, c'est que Bulatovic dément tout ce que vous
8 avez dit en vous référant à lui, en invoquant son nom.
9 Quant à ce que j'ai fait à La Haye ce jour-là, je vais laisser de côté les
10 insinuations selon lesquelles j'aurais usurpé le microphone, et Lord
11 Carrington ne m'aurait pas donné la parole alors qu'il présidait la
12 réunion. Cela aurait été tout à fait incorrect de ma part d'agir ainsi.
13 Je vais vous lire un paragraphe, un paragraphe qui est contesté et qui nie
14 également ce que vous venez de dire -je cite-: "Les propositions pour une
15 solution générale de la crise en ex-Yougoslavie suspendent le cours légal
16 normal à l'intérieur de la Yougoslavie. Par ce biais, l'application de la
17 Constitution en Yougoslavie est interrompue et l'Etat yougoslave cesse
18 d'être un Etat intégré, contrairement à ce qu'il est depuis plus de 70
19 ans. Une organisation internationale, une Conférence internationale ne
20 peut pas décider d'interrompre l'existence légale d'un Etat. Seuls peuvent
21 le faire ceux qui ont créé cet Etat.
22 La Yougoslavie a été créée par les peuples et nationalités yougoslaves;
23 une décision de mettre un terme à l'existence de cet Etat ne peut être
24 prise que par le biais de référendums au niveau national. Aucun mandat n'a
25 été donné à l'un quelconque des représentants de cette Conférence pour
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1 adopter les prépositions qui y sont faites et aucun organisme n'a de tels
2 mandats non plus." (Fin de citation.)
3 Vous rappelez-vous, Monsieur Samardzic, qu'après cette réunion, après
4 avoir prononcé ce discours, j'ai dit que "la Yougoslavie ne pouvait pas
5 être supprimée par un coup de plume"? Et j'ai demandé que le processus de
6 paix se prolonge, que des solutions pacifiques et négociées soient
7 trouvées pour tous les problèmes et tous les peuples yougoslaves, etc. Je
8 ne vais pas vous donner lecture de l'intégralité du discours, car cela me
9 prendrait trop de temps.
10 M. le Président (interprétation): Mais cela fait cinq minutes, en tout
11 cas, disons deux minutes que vous lisez. Donc le témoin devrait pouvoir
12 répondre.
13 Vous rappelez-vous cette allocution, Monsieur Samardzic? Vous rappelez-
14 vous ce qu'a dit l'accusé à ce moment-là? Est-ce que cela correspond à ce
15 qui vient d'être lu, dans votre souvenir, Monsieur Samardzic?
16 M. Samardzic (interprétation): Ce que nous avons entendu à l'instant est
17 une partie de l'allocution prononcée par lui. Mais on voit bien, y compris
18 dans ce qui vient d'être lu, quelles étaient les intentions, parce que la
19 Yougoslavie à l'époque avait déjà cessé d'exister, en tant que telle, par
20 ces faits et par la politique qui était appliquée par lui. Il ne pouvait
21 pas venir à La Haye pour exiger que la Yougoslavie continue à exister,
22 alors que la Yougoslavie n'existait plus à ce moment-là.
23 J'ajouterais la chose suivante: je n'ai pas dit qu'il avait usurpé le
24 micro à la Conférence; Lord Carrington lui avait effectivement donné la
25 parole, mais, conformément à l'ordre prévu pour cette Conférence, c'était
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1 la Bosnie qui devait s'exprimer la première. Monsieur Milosevic a pris la
2 parole le premier cependant et a détruit toutes les propositions de
3 Carrington dans son discours. C'est exact, je l'ai déjà dit, et je m'en
4 tiens à cela.
5 M. Milosevic (interprétation): Le chef de votre délégation affirme
6 pourtant le contraire; je veux parler de Bulatovic.
7 M. le Président (interprétation): Non, cela n'a pas d'importance. Vous
8 avez entendu le témoin.
9 M. Milosevic (interprétation): Je vous en prie. Contrairement à beaucoup
10 d'autres personnes, je peux citer l'intégralité de toutes mes allocutions
11 précédentes et je n'aurais pas honte d'un seul mot que j'ai prononcé.
12 Alors, j'aimerais, je vous prie, que vous regardiez cet exemplaire de mon
13 discours. Je ne peux pas vous le lire intégralement malheureusement, cela
14 prendrait trop de temps; il comporte cinq, non six pages. Il date du 1er
15 octobre.
16 J'en demande le versement au dossier.
17 M. le Président (interprétation): Oui, une cote sera affectée au document,
18 puis traduit.
19 Mme Anoya (interprétation): Pièce à conviction de la défense D44.
20 M. le Président (interprétation): Qu'on remette ce texte à l'accusation.
21 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, hier, vous avez dit
22 qu'ensuite a commencé l'initiative née à Belgrade sur la base de laquelle
23 s'est donc appuyée la création de la République fédérale yougoslave; et
24 comme vous l'avez dit, le 27 avril, cette République fédérale yougoslave a
25 été créée.
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1 S'agissant de cela et s'agissant également de ce que vous venez de dire il
2 y a quelques instants, à savoir que la Yougoslavie avait cessé d'exister à
3 l'époque, je voudrais vous rappeler le fait qu'en langage de droit
4 international, ce que vous dites est inexact.
5 Je dispose ici de mon discours du 6 mai 1992, à Bruxelles, donc dix jours
6 après la création de la République fédérale yougoslave, en tout cas dix
7 jours après l'adoption de la Constitution de la République fédérale
8 yougoslave. Discours dans lequel je dis d'abord que les délégations du
9 Monténégro et de la Serbie à cette instance sont considérées comme la
10 délégation fédérale yougoslave, désormais que la situation s'est
11 stabilisée sur le territoire de la Yougoslavie, que la Yougoslavie n'est
12 pas un nouvel Etat mais simplement une refonte de ce qu'était l'ancien
13 Etat yougoslave.
14 Et, à ce moment-là, je souligne, à titre tout à fait particulier, une
15 déclaration qui est adoptée à côté de la Constitution et dans laquelle
16 sont énumérés les objectifs et les principes qui guident la politique
17 régissant les relations entre la République fédérale yougoslave et les ex-
18 Républiques de l'ex-Yougoslavie.
19 Je vais vous lire quatre points de ce texte; ils contiennent pas mal de
20 choses intéressantes –je cite-: "La République fédérale yougoslave est
21 prête à respecter les intérêts des anciennes Républiques et s'attend à ce
22 que ces intérêts soient respectés par celles-ci sur un pied d'égalité
23 complète. La République fédérale yougoslave est prête à apporter sa
24 contribution aux liens…, au maintien des liens coupés sur le territoire de
25 l'ex-Yougoslavie. La République fédérale yougoslave n'a aucune aspiration
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1 territoriale vis-à-vis de qui que ce soit dans le voisinage. La République
2 fédérale yougoslave s'en tiendra strictement aux objectifs et principes de
3 la Charte des Nations Unies, des documents de la CSCE et notamment au
4 principe de non-recours à la force pour régler des problèmes
5 internationaux. Et nous espérons que les menaces de chantage ne
6 s'appliqueront pas à la République fédérale yougoslave pour résoudre la
7 crise".
8 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vais vous
9 interrompre. Vous parlez depuis trois ou quatre minutes sans interruption
10 et je ne vous ai pas interrompu. Vous devriez inclure tout cela dans votre
11 défense. Mais nous devons en arriver à comprendre quel est votre objectif
12 et quelle est la question que vous posez au témoin.
13 M. Milosevic (interprétation): Je demande au témoin comment il peut
14 affirmer que la Yougoslavie avait cessé d'exister et ce, parce que
15 simplement la Slovénie et la Croatie s'en étaient retirées, alors que le
16 témoin lui-même -je l'espère- ne peut pas contester ce qui figure dans mon
17 allocution. D'ailleurs, je l'ai lue.
18 Donc je vous en prie, Monsieur le Témoin, si vous le souhaitez, contestez-
19 le.
20 M. le Président (interprétation): Mais dites-nous quelle est la question.
21 Parlons de votre première question.
22 Monsieur le Témoin, il a été dit que vous aviez tort d'affirmer que la
23 Yougoslavie avait cessé d'exister. Pensez-vous avoir quelque chose à
24 ajouter ou bien avez-vous d'autres éléments à nous soumettre, en dehors de
25 ce que vous avez déjà dit, Monsieur Samardzic?
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1 M. Samardzic (interprétation): Absolument. J'aurai grand plaisir à
2 répondre à cette question.
3 La Yougoslavie, cela signifie l'Etat des Slaves du sud. La Yougoslavie,
4 sans la Croatie, sans la Slovénie, sans la Macédoine, sans la Bosnie,
5 n'est pas la Yougoslavie; ce n'est plus l'Etat des Slaves du sud. La
6 Yougoslavie sans les autres peuples, une Yougoslavie dans laquelle, sur
7 sept peuples slaves du sud, il n'en reste que deux, n'est pas la
8 Yougoslavie. La Yougoslavie ne peut pas être la Yougoslavie si elle ne
9 compte plus que 20% de Slaves du sud. Ça, ce sont des faits.
10 La déclaration de Slobodan Milosevic au sujet de la continuité de l'Etat,
11 au sujet du fait que la République fédérale est toujours la Yougoslavie,
12 reprend des positions qui sont personnelles à Slobodan Milosevic et qui
13 n'ont rien à voir avec les faits. Effectivement, il s'est engagé en faveur
14 de la continuité de la Yougoslavie en tant qu'Etat, mais la communauté
15 internationale ne l'a pas acceptée, cette continuité en tant qu'Etat. Et
16 cette continuité a fini par disparaître après le limogeage par le peuple
17 de Slobodan Milosevic.
18 La Yougoslavie, encore aujourd'hui, est en train de modifier son statut
19 international en acceptant que ce qui reste de l'ex-Yougoslavie, ce ne
20 sont que des restes. Le Monténégro et la Serbie ne constituent pas la
21 Yougoslavie. Aujourd'hui, donc, il y a la Serbie et il y a le Monténégro
22 qui constituent un Etat. Parce que ce qu'a fait Slobodan Milosevic le 27
23 avril –le 27 avril, c'était l'achèvement de son travail-, ce n'était pas
24 la Yougoslavie.
25 Personnellement, j'ai été ministre des Affaires étrangères, j'ai été
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1 député et, pendant tout ce temps, j'ai refusé publiquement de me rendre à
2 la séance qui était destinée à proclamer, à promouvoir la soi-disant
3 Yougoslavie. Je l'ai fait publiquement parce que ce n'était pas l'Etat
4 pour lequel se sont battus mes aïeux et ses aïeux également; c'était une
5 fiction destinée à maintenir en place un gouvernement, un pouvoir qui
6 était celui qu'il avait mis en place et qui a duré jusqu'à son limogeage
7 par le peuple.
8 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, à l'époque j'étais
9 Président de Serbie et, comme vous le savez vous-même, je n'ai pas posé ma
10 candidature à la Présidence de la Yougoslavie. Mais je vais vous lire un
11 paragraphe et ensuite, je démentirai ce que vous venez de dire.
12 Je cite, c'est toujours un passage de mon discours à Bruxelles le 6 mai:
13 "L'idée de démantèlement a été avancée pour dissimuler une sécession
14 unilatérale et due à la force. Une thèse de ce genre est inacceptable,
15 d'autant plus que nous avons toujours souligné que nous ne mettrions
16 aucune entrave à ceux qui souhaitaient quitter la Yougoslavie pour créer
17 leurs Etats indépendants. Nous n'avions rien contre le fait qu'ils
18 agissent de la sorte, dans la paix et dans la tranquillité, mais que nous
19 n'allions pas cesser d'exister par le fait qu'ils se séparaient de nous et
20 ce, parce qu'ils ne pouvaient décider que de leur sort en votant des
21 déclarations favorables à la séparation. Ils ne pouvaient pas, de cette
22 façon, décider de notre sort à nous.
23 Le droit à la sécession ne doit pas pouvoir être plus fort que le droit à
24 l'appartenance à l'Etat dont on relève. C'est une position que nous avons
25 prise précédemment et que nous maintenons; c'est une position de principe.
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1 Faire sécession d'un côté et empêcher l'application du droit d'aimer et de
2 respecter sa patrie d'autre part, en faisant des allégations contraires à
3 celle-ci, ne peut pas aller ensemble, ne peut pas aller de pair et ne peut
4 conduire à aucune solution équitable et juste." (Fin de citation.)
5 Ensuite, je parle de coopération avec les Etats de la communauté
6 européenne; je fais référence à d'autres éléments de la situation de
7 Bosnie, à notre position de principe quant au fait qu'en Bosnie, les trois
8 peuples doivent participer à la recherche d'une solution, etc.
9 J'aimerais demander le versement au dossier de ce document également.
10 Le fait demeure, à moins que vous ne le contestiez également, Monsieur
11 Samardzic.
12 M. Robinson (interprétation): Monsieur Milosevic, normalement je suis
13 quelqu'un de très patient, mais je dois dire que la façon dont vous
14 contre-interrogez le témoin demande beaucoup à ma patience.
15 Vous lisez des passages de vos discours, mais vous ne posez pas de
16 questions. La Chambre a été très libérale avec vous jusqu'à présent parce
17 que vous n'avez pas de conseil. Je pense que dans la plupart des systèmes
18 judiciaires, vous n'auriez pas l'autorisation de contre-interroger de
19 cette manière.
20 Vous pouvez lire un passage d'un texte, une dizaine de lignes, par
21 exemple. Mais quelle est la question?
22 Le procès poursuit un objectif bien particulier: nous sommes appelés ici à
23 juger sur des faits et nous ne pouvons pas nous livrer à la lecture de
24 passages d'une telle longueur.
25 Donc posez des questions parce que, quand vous en aurez fini, le témoin
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1 aura oublié le premier passage de l'extrait que vous avez lu. Alors,
2 formulez une question. Vous connaissez l'extrait du texte, vous n'avez pas
3 besoin de le lire. Vous pouvez simplement le résumer et poser une question
4 sur la base du contenu de ce passage; cela nous permettra de gagner
5 beaucoup de temps.
6 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Robinson, ce témoin a cité les
7 positions prises par moi lors de la Conférence sur l'ex-Yougoslavie et je
8 considérais que je pouvais… qu'il était bon que je présente ces positions
9 qui étaient les miennes en me fondant sur l'original du texte. D'ailleurs,
10 c'est ce que M. May m'a conseillé de faire hier. Je pensais que cela
11 pouvait me permettre de démentir l'intégralité des propos du témoin.
12 Alors, Monsieur Samardzic, voici ma question: est-il exact que les
13 habitants du Monténégro ont organisé un référendum au sujet de la
14 République fédérale yougoslave et que, sur la base de ce référendum, le
15 Monténégro est devenu un élément constitutif de la République fédérale
16 yougoslave en même temps que la Serbie?
17 M. Samardzic (interprétation): Dans l'exposé que j'ai fait, j'ai dit qu'il
18 y avait eu un référendum, mais je répète maintenant, une fois de plus, que
19 ce référendum ne s'est pas fait de façon légale, que cela ne s'est pas
20 tenu en posant la bonne question aux citoyens et on n'a pas respecté la
21 réglementation régissant la tenue des référendums. Ce qui fait que,
22 juridiquement parlant, ce référendum est infondé, n'a aucun fondement. Et,
23 dans le reste du monde, la communauté internationale n'a pas accepté ce
24 référendum comme étant justifié et effectué de façon convenable.
25 J'ai pris connaissance de ce que vous avez dit dans vos discours à
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1 Bruxelles et à La Haye. Vous avez donné lecture de ce que vous avez dit,
2 mais c'est de l'hypocrisie absolue. Comment pouvez-vous parler et dire que
3 vous attribuiez, que vous accordiez aux autres peuples et autres
4 Républiques le droit de faire sécession, alors que vous aviez occupé le
5 tiers de la Croatie, et que vous aviez créé et mis en place des Krajina
6 serbes dans l'objectif de dissocier ces territoires-là du territoire
7 croate?
8 Et vous aviez compté, à l'époque, avant le début de la guerre en Bosnie,
9 vous aviez à l'esprit le fait que la Bosnie devait être entièrement serbe.
10 Vous aviez procédé à un camouflage de cette idée "Grand Serbe" au travers
11 de la Yougoslavie, aux fins de mettre en place un Etat de ce genre, étant
12 donné que vous aviez échoué dans le courant de l'année 1992. Et vous aviez
13 voulu créer une petite Yougoslavie avec la Serbie et le Monténégro. Alors,
14 pouvez-vous concevoir quel est l'élément constitutif d'égalité en droit?
15 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, nous n'avons pas le droit
16 d'écouter vos discours, Monsieur Samardzic. Vous êtes censé répondre à mes
17 questions. Vous avez dit qu'il y avait eu un référendum et vous contestez
18 ce référendum du point de vue de la légalité. Mais, à l'époque, personne
19 ne l'avait contesté du point de vue de la légalité de sa tenue. Mais vous
20 souvenez-vous, à l'époque…
21 M. le Président (interprétation): Juste un moment. Laissez l'opportunité
22 au témoin de répondre à votre assertion.
23 Monsieur le Témoin, est-ce qu'à l'époque, quiconque avait contesté la
24 légalité du référendum?
25 M. Samardzic (interprétation): Oui, la Communauté européenne l'avait fait,
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1 les représentants de la Communauté européenne l'ont fait; j'ai des
2 documents à cet effet. Les représentants de la communauté internationale
3 ont affirmé que ce référendum ne s'était pas tenu de façon légale et, je
4 crois qu'il n'est point nécessaire de le prouver, il suffit de présenter
5 les documents qui émanent de la Communauté européenne de l'époque, à
6 savoir du Conseil de la Communauté européenne de M. Van den Broek. Et, à
7 bon nombre d'endroits, il a été noté que le référendum au Monténégro ne
8 s'était pas réalisé de façon juridiquement justifiée.
9 Maintenant, de là à savoir quelle était la validité qui lui était
10 attribuée au Monténégro et en Serbie, c'est autre chose. Il y avait la
11 force du pouvoir derrière.
12 Mais, le 27 avril, lorsque cette proclamation s'est fait, aucun des
13 ambassadeurs à Belgrade, exception faite de l'Irak et de la Libye, n'était
14 venu participer et n'avait accepté la création de cette nouvelle
15 République fédérale de Yougoslavie. Cette République de Yougoslavie n'a
16 été reconnue par personne. La politique a, par la suite, changé à l'égard
17 de la Serbie et du Monténégro, mais la communauté internationale avait
18 insisté à l'époque.
19 M. le Président (interprétation): Oui, oui. Bien, Monsieur Samardzic.
20 M. Milosevic (interprétation): A part les ambassadeurs de l'Amérique et de
21 l'Union européenne, tous les autres ambassadeurs accrédités en Yougoslavie
22 -ils étaient plusieurs dizaines- ont assisté à la proclamation. Il y a des
23 enregistrements vidéo, un film télévisé à cet effet. Et, une fois de plus,
24 vous être en train de raconter des contre-vérités.
25 Mais, vous souvenez-vous, Monsieur Samardzic, étant donné que vous êtes en
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1 train d'affirmer que personne n'avait voulu reconnaître cet Etat, si vous
2 vous en souvenez, en août 1996, j'avais signé un document avec M. Tudjman
3 concernant la normalisation de nos relations où la Croatie avait accepté
4 de reconnaître la continuité de la Yougoslavie. Cela s'est fait à Athènes.
5 Les hôtes avaient été le Premier ministre grec, M. Simitis, à l'époque, et
6 il y avait d'autres représentants du Gouvernement grec. Ce gouvernement
7 existe concernant l'acceptation de la continuité de la République de
8 Yougoslavie.
9 En octobre de cette année, notre hôte avait été Jacques Chirac, s'agissant
10 de moi-même et de M. Izetbegovic. Et, en cette occasion-là, nous avions
11 procédé à la normalisation des relations entre la République fédérale de
12 Yougoslavie et la Bosnie-Herzégovine.
13 Là aussi, on a précisé des dispositions où a été reconnue la continuité de
14 la Yougoslavie. Donc, de tout temps, la Yougoslavie avait son représentant
15 au siège des Nations Unies. Maintenant, le fait que le nouveau
16 gouvernement Quisling a tout jeté à l'eau depuis, ce n'est pas un
17 argument.
18 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)
19 …précédent. Ici, vous faites de nouveau des discours. Quelle est la
20 question que vous voulez poser au témoin?
21 M. Milosevic (interprétation): Vous souvenez-vous de ces documents signés
22 en 1996, au mois d'août et au mois d'octobre, avec Tudjman et Izetbegovic,
23 s'agissant de la question relative à la continuité? Est-ce que vous en
24 souvenez?
25 M. Samardzic (interprétation): Permettez-moi de répondre à la question.
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1 Je suis en train de parler ou j'étais en train de parler de l'année 1992
2 et non pas de l'année 1996. J'ai dit tout à l'heure qu'en 1992, lorsqu'il
3 y a eu proclamation de votre soi-disant Yougoslavie, personne, aucun des
4 grands pays du monde n'a reconnu cet Etat à l'époque. Et je me souviens
5 que l'administration américaine avait insisté sur le fait d'appeler cela
6 "Serbie et Monténégro" et non pas "Yougoslavie".
7 Maintenant, pour ce qui est arrivé en 1996, donc pour ce qui est du
8 changement de la politique à l'égard de la Yougoslavie, c'est une chose
9 que je ne peux nier. Je regrette que cela soit arrivé. Il y a pour cela
10 des complications supplémentaires, mais c'est là une Yougoslavie au sujet
11 de laquelle je n'ai pas témoigné.
12 Moi, j'ai témoigné concernant l'année 1992, Monsieur Milosevic: c'était un
13 pays déformé aux yeux de l'opinion publique mondiale.
14 Question: Monsieur Samardzic, mais prenez cette année 1992, étant donné
15 que vous aviez été ministre des Affaires étrangères au moment de la
16 création de la République fédérale de Yougoslavie, vous souvenez-vous des
17 dizaines d'ambassades de pays étrangers qu'il y avait dans cette
18 République fédérale de Yougoslavie? En 1992 jusqu'en 1996. Et, si vous ne
19 comptez pas la Chine, la Russie, l'Inde et les autres grands pays comme
20 étant des grands pays, mais si, par grands pays, vous ne pensez ou ne
21 jugez qu'il ne puisse s'agir que de l'Union européenne et des pays de
22 l'OTAN, ça, c'est un problème qui vous concerne.
23 Réponse: Non, là, vous procédez à une supercherie; je n'ai pas considéré
24 que les grands pays étaient les pays membres de l'OTAN. Et je n'ai pas
25 assisté à cette proclamation parce que j'ai démocratiquement refusé d'être
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1 présent à cette session et à cette proclamation de la Yougoslavie, faite
2 par vos soins: Yougoslavie qui n'a pas eu son Parlement, mais qui n'avait
3 que des délégués, des députés et dont le mandat avait pris fin. Et il n'y
4 avait que deux Républiques de représentées et non pas six.
5 Donc votre proclamation de la Yougoslavie était tout à fait illégale, tout
6 à fait contraire au droit. Je ne voulais pas y aller. Mais ce que vous
7 êtes en train de demander, combien d'ambassadeurs il y avait, vraiment je
8 ne sais pas vous le dire; je ne sais pas. J'ai ouï dire qu'il y avait eu
9 quelques-uns de ces ambassadeurs, comme le représentant de Fidel Castro de
10 Cuba, le représentant de l'Irak, de la Libye et ainsi de suite. De là à
11 savoir s'il y avait le représentant de la Chine, je ne sais pas le dire;
12 s'il avait été là-bas, je me rétracte. Donc ils n'étaient que deux ou
13 trois. Mais là, je n'ai vu que le représentant de la Libye; c'est la
14 personne qu'on avait pu voir à la télévision.
15 M. Milosevic (interprétation): Soyez un peu plus bref parce que vous
16 prenez mon temps. Là, n'est pas l'important!
17 M. le Président (interprétation): Un instant, Monsieur Samardzic. Calmons-
18 nous!
19 Je crois que nous avons épuisé ce sujet, Monsieur Milosevic. Passons à
20 autre chose. Vous vouliez demander le versement d'un discours, n'est-ce
21 pas?
22 La cote sera?
23 Mme Anoya (interprétation): Le discours de Bruxelles du 6 mai deviendra la
24 pièce de la défense n°45.
25 M. Milosevic (interprétation): Avant de passer à un autre sujet,
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1 concernant les questions que j'avais à poser, je voulais juste prouver que
2 vous n'aviez pas dit la vérité quand vous avez parlé de la session du
3 Gouvernement en date du 1er octobre, et que c'est Bulatovic qui a dit la
4 vérité. J'ai un procès-verbal de cette 46e Session du Gouvernement du
5 Monténégro, qui s'est tenue le 26 septembre 1991.
6 Au point 14, on dit: "Bozidar Babic, ministre de la Défense, a informé le
7 Gouvernement concernant la situation relative à la sécurité aux frontières
8 entre la Croatie et le Monténégro, et les mesures prises pour la
9 protection des frontières et des citoyens." Et il y a ensuite les
10 conclusions du Gouvernement. C'est donc le procès-verbal de cette 46e
11 Session du 26 septembre.
12 Comme vous étiez ministre, vous souvenez-vous du fait qu'à toutes les
13 sessions suivantes, il a été procédé à l'adoption du procès-verbal de la
14 session précédente. C'est bien ainsi qu'on procédait, Monsieur Samardzic?
15 M. Samardzic (interprétation): Je ne sais pas quelle est votre question?
16 Question: Ma question: étant donné qu'il s'agit là d'un PV du 26
17 septembre, de la session du 26 septembre et c'était la 46e Session?
18 Réponse: Mais je n'ai pas du tout…
19 M. Milosevic (interprétation): Mais laissez-moi finir! Vous avez un
20 procès-verbal de la 47e Session du Gouvernement du Monténégro, du mois
21 d'octobre, du 3 octobre. Cela signifie que la session que vous avez citée
22 en date du 1er octobre, avec Bulatovic et les généraux, n'avait pas été
23 une session du Gouvernement, mais cela avait été une session
24 commémorative, comme le précise Momir Bulatovic dans sa déclaration.
25 M. le Président (interprétation): Je ne comprends pas cette citation.
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1 M. Milosevic (interprétation): Je parlais du 26 septembre et du 3 octobre.
2 M. le Président (interprétation): Que vouliez-vous faire valoir? Vous
3 dites que ce n'était pas un procès-verbal, donc cela montre selon vous que
4 c'est autre chose, que c'est quelque chose de différent d'une session
5 normale?
6 M. Milosevic (interprétation): J'entends dire par là que le témoin a dit
7 des contre-vérités là aussi et Bulatovic avait bien précisé qu'il ne
8 s'agissait pas d'une session du gouvernement.
9 M. le Président (interprétation): Mais quelle est la thèse que vous
10 soumettez au témoin afin de réfuter ses dires? Il vous a dit avoir dit la
11 vérité: alors, qu'est-ce que vous dites pour réfuter ses dires?
12 M. Milosevic (interprétation): Je suis en train de lui présenter des faits
13 pour confirmer le fait que cette fameuse session du 1er octobre, en
14 présence de Bulatovic, de huit officiers dont quatre généraux, comme il
15 l'avait dit, n'avait pas été une session du Gouvernement, comme il l'a
16 affirmé; mais, comme l'a dit Bulatovic, une session commémorative.
17 M. le Président (interprétation): Très bien. Je pense que le témoin a déjà
18 répondu.
19 Est-ce que c'était une session officielle du Gouvernement ce jour-là ou
20 pas, Monsieur le Témoin?
21 M. Samardzic (interprétation): Il s'est tenu une session officielle du
22 Gouvernement ce jour-là et je le maintiens; c'est la vérité. Ce que M.
23 Milosevic est en train de nous présenter ici, ce sont des faux et il est
24 tout à fait inexact d'affirmer que c'était là une session commémorative.
25 Cela avait été, je le répète, une session portant sur la défense du pays
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1 face à l'agression de la Croatie contre le Monténégro, à savoir la baie de
2 Kotor. Et les généraux ne sont pas venus pour présenter des condoléances,
3 mais ils étaient venus en uniforme de combat, prêts à la bataille, et non
4 pas en uniforme officiel de cérémonie ou d'apparat pour commémorer quoi
5 que ce soit. C'était donc une session qui avait visé à discipliner le
6 Monténégro dans une guerre injuste contre la Croatie, guerre qui nous a
7 privés de beaucoup de jeunes vies du Monténégro.
8 Ce que vous êtes en train de nous relater maintenant, ce sont des
9 falsifications pures et simples. J'imagine que c'est ainsi que l'on en
10 fait.
11 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, je regrette beaucoup
12 que vous ayez à dire autant de contre-vérités, mais il s'agit ici de PV de
13 sessions de votre gouvernement à vous. Je n'ai pas affirmé qu'il
14 s'agissait là d'une session commémorative; c'est Momir Bulatovic qui le
15 dit, et je vous en ai donné lecture. On voit que la 46e Session du
16 Gouvernement a eu lieu le 26 septembre, et le 3 octobre, la 47e Session.
17 Donc la session que vous êtes en train de mentionner, en date du 1er
18 octobre, n'avait pas été une session du gouvernement mais une autre
19 assemblée quelconque. Mais, allons de l'avant.
20 M. le Président (interprétation): Non, non, laissez le temps au témoin de
21 répondre.
22 Monsieur le Témoin, apparemment ce que dit l'accusé, c'est qu'il n'y avait
23 pas de procès-verbal officiel ou que, s'il y en avait un, on n'y fait pas
24 état de cette réunion, que par conséquent ce n'était pas là une réunion du
25 gouvernement. Avez-vous quelque chose à ajouter?
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1 M. Samardzic (interprétation): Oui. En ce moment-ci, au bout de dix ans ou
2 plus, 11 ans… Je n'arrive plus à me souvenir de ce qui est écrit dans
3 chacun des PV, mais je crois que c'est encore une provocation. Le PV doit
4 forcément exister, mais je ne puis affirmer avec certitude. Ce que j'ai
5 affirmé tout à l'heure, je le maintiens; cela avait été une session du
6 gouvernement.
7 En effet, je ne sais pas dire s'il y avait eu un PV tenu à jour; il y en a
8 probablement eu un. De là à affirmer qu'il y avait des généraux, oui, ils
9 étaient là, ma mémoire ne m'a pas fait défaut à ce point-là, et il y avait
10 eu d'autres dirigeants du Monténégro. La session n'avait pas été consacrée
11 à des activités commémoratives, mais à des efforts de guerre contre la
12 Croatie. C'est la seule vérité. Le reste, ce sont des tentatives de
13 contourner la vérité et de trouver des modalités pour prouver que cela n'a
14 pas eu lieu. Cela a eu lieu; cela avait une session qui visait à faire
15 entrer le Monténégro…, à faire participer le Monténégro à la guerre contre
16 la Croatie. Le Monténégro avait fait la guerre et la Serbie était en
17 retrait et de côté; c'était l'objectif.
18 Question: Je vous prierai de ne pas prendre trop de mon temps. Je suis en
19 train de présenter ici des faits purs et simples et non pas des assertions
20 ou des allégations. J'ai présenté des faits concernant les sessions du
21 gouvernement. Avez-vous été présent à la session du gouvernement du 26
22 septembre?
23 Réponse: Il est très probable que j'y aie été présent. Je n'ai pas
24 témoigné concernant cette session.
25 Question: Mais avez-vous été présent à la Session du gouvernement le 3
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1 octobre?
2 Réponse: Oui.
3 M. Milosevic (interprétation): Je vais vous donner lecture du PV de cette
4 session qui s'est tenue… -laissez-moi voir, je vous prie…- le 3 octobre,
5 donc, PV de la session du gouvernement tenue le 3 octobre. Le Président
6 était Milo Djukanovic et chaque session du gouvernement est sténographiée.
7 Alors Zoran Zizic, vice-Président Vojin Djukanovic; il y a Kostic, et
8 autres sont présents. Vous n'avez pas, donc, été présent. Et, personnes
9 absentes: Nikola Samardzic, etc. Donc ces membres-là ont été absents.
10 Je vous pose maintenant la question de savoir… Etant donné que vous avez
11 dit qu'après cette réunion du 18 octobre, à la conférence qui avait été
12 présidée par Lord Carrington, il s'est ensuivi une initiative émanant de
13 Belgrade.
14 Je tiens à dire que dans ce PV daté du 3 octobre, donc 15 jours avant la
15 session de cette conférence présidée par Lord Carrington, au point 2, il
16 est dit -et les procès-verbaux originaux peuvent être demandés au
17 gouvernement monténégrin, qui les remettra probablement-: "Le Gouvernement
18 du Monténégro s'est penché sur une proposition d'aménagement des relations
19 dans la Fédération (initiative de Belgrade) concernant la proposition du
20 Gouvernement et à l'Assemblée du Monténégro".
21 Là-aussi, vous n'avez pas dit la vérité, Monsieur Samardzic. Donc 15 jours
22 avant, le gouvernement présente ces opinions et ces positions concernant
23 l'initiative de Belgrade. Donc vous êtes en train de mentir de façon
24 éhontée.
25 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin répondre au fur et à
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1 mesure.
2 Monsieur Samardzic, il est dit ici que vous n'êtes pas en train de dire la
3 vérité. Vous êtes à présent en possibilité de répondre à ce que l'accusé a
4 dit, si toutefois vous le souhaitez.
5 M. Samardzic (interprétation): J'ai dit que suite à la conférence de La
6 Haye, l'initiative de Belgrade a obtenu une force suffisante pour
7 remplacer les propositions de Carrington. Je ne me suis pas épanché, je
8 n'ai pas raconté les histoires de tout ce qui se passait à Belgrade avant.
9 Ce que vient de lire M. Milosevic a sans doute été dit à cette séance
10 puisque, au compte rendu, il est mentionné que je n'étais pas présent à
11 l'époque. Puisque j'étais directeur de "Jugooceanija", j'arrivais souvent
12 en retard à ces réunions; c'est sans doute pour cela qu'il est dit que
13 j'étais absent à ces réunions dans les comptes rendus. Mais moi, je ne
14 faisais pas de déclarations et je ne m'occupais pas de très près des
15 décisions qui étaient prises.
16 Le 4 octobre, je suis allé à la réunion mais je suis arrivé en retard.
17 Quant au 27, est-ce qu'y était ou pas…? Là, puisque 11 ans se sont écoulés
18 depuis, il est possible que ma mémoire m'ait fait défaut parce que, à
19 cette réunion, le 27 septembre, la guerre n'avait pas encore commencé et
20 la réunion n'était pas très importante. Il est possible que je n'y aie pas
21 été.
22 Mais ce que j'ai dit dans ma déposition, c'est ce qui s'est passé à la
23 réunion du Gouvernement du 1er octobre –je dis bien le 1er octobre-, 1er
24 octobre où les généraux ont rencontré les membres de la présidence du
25 Monténégro et les membres de la présidence du pays. Il n'y a aucun
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1 mensonge, aucune contre-vérité dans tout cela; c'est la vérité.
2 Question: Vous témoignez au sujet d'une réunion du gouvernement à laquelle
3 vous n'avez pas assisté et vous ne témoignez pas au sujet de celles
4 auxquelles vous avez assisté.
5 Maintenant, je vais vous poser d'autres questions au sujet de ce qui
6 figure au compte rendu, au PV de réunion. Et je vous rappelle que
7 l'initiative n'était pas une initiative de Belgrade; c'était une
8 initiative conjointe de Belgrade et du Monténégro. Cela a à voir avec les
9 avis du gouvernement au sujet de cette initiative conjointe de Belgrade et
10 du Monténégro.
11 Je vous lis les minutes de la réunion.
12 Je cite: "Les bases pour la réorganisation de la Yougoslavie confirment
13 que la Yougoslavie est un Etat qui regroupe des peuples des Républiques et
14 des habitants jouissant de droits égaux. Elle s'appuie sur les principes
15 les plus élémentaires qui respectent les droits et libertés des peuples
16 sur la démocratie multiparlementaire, sur l'économie de marché et sur
17 l'égalité de tous les biens, dans l'intérêt commun des peuples et des
18 Républiques, dans l'intérêt de la justice et de la liberté des peuples,
19 avec intervention des forces armées, des Affaires étrangères et des autres
20 ministères en tant que pays souverain dans ses frontières avec autonomie
21 confirmée et droit très large des Républiques dans la composition de cet
22 Etat. Il s'agit d'une communauté dans laquelle toutes les possibilités
23 d'organisation, toutes les possibilités de domination d'une religion sur
24 les autres, d'une République sur les autres, d'un peuple sur les autres,
25 sont exclues.
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1 Compte tenu du fait que les rapports en Yougoslavie entre les différents
2 éléments doivent être les plus complets, correspondre aux intérêts
3 historiques et actuels des habitants des Républiques et du pays, qui
4 doivent pouvoir continuer à vivre ensemble dans le respect des droits
5 sociaux et des normes les plus élevées de notre civilisation, ce document,
6 une fois qu'il aura été adopté par les parlements des différentes
7 Républiques, doit rester ouvert aux nouvelles idées, etc., etc." (Fin de
8 citation.)
9 Monsieur Samardzic, dans ces conditions, comme vous le constatez, les
10 qualités mentionnées dans ce document sont avant tout l'égalité en droit
11 des citoyens, des Républiques, des peuples, l'unité de l'Etat et
12 l'autodétermination des Républiques, etc. Où est-ce que vous voyez ici,
13 puisque tout cela est dit au nom de la République fédérale yougoslave, où
14 voyez-vous dans ce document, dans lequel le mot le plus souvent mentionné
15 et le plus fort est le mot "égalité", où voyez-vous le moindre signe, la
16 moindre trace de Grande Serbie, en septembre 1991?
17 Réponse: En septembre 1991, comme vous le dites, la Grande Serbie était
18 bien là. Si 95% de la population constitue la Grande Serbie et que 5% du
19 Petit Monténégro ne sont que le Petit Monténégro, nous sommes en présence
20 de la Grande Serbie, Monsieur Milosevic. Il n'y a aucune égalité dans tout
21 cela. Et ce que vous venez de lire, ce ne sont que des mots dans des
22 déclarations. Rien de plus.
23 Question: Monsieur Samardzic, je vous donne lecture des constatations
24 faites par votre Gouvernement, auquel vous apparteniez, dont vous étiez un
25 représentant. Quant à ce que vous considérez comme un défaut, moi, je
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1 considère que c'est une grande qualité.
2 Il est exact que la population yougoslave est supérieure et que le
3 territoire de la Serbie est 18 fois plus important que celui du
4 Monténégro, mais il est vrai également qu'en dépit de cela, les
5 Républiques sont, en tous points, égales au sein de la République fédérale
6 yougoslave. Est-ce que vous démentez cela également? Est-ce que peut-être
7 vous allez me demander de qualifier la Constitution que vous avez
8 qualifiée vous-même? Moi, je dis ici le contraire de ce que vous dites
9 aujourd'hui, mais à l'époque, vous disiez la même chose.
10 Réponse: Vous venez de donner lecture d'un texte et vous dites que j'étais
11 d'accord. Je n'étais pas d'accord pour la création de cet Etat ou la
12 proclamation, en tout cas pas en public, de cet Etat. Mais l'égalité en
13 droit de la Serbie et du Monténégro n'a pas pu durer 11 ans depuis la
14 création de cet Etat. Donc ce que vous venez de lire, ce qui est écrit
15 dans cette déclaration, ce n'était pas seulement l'expression de la
16 position du Gouvernement du Monténégro puisque 15 ou 17 ou 18 jours plus
17 tôt, à La Haye, Momir Bulatovic, Président du Monténégro, avait adopté une
18 position tout à fait différente de celle qui est décrite dans la
19 déclaration de Belgrade; il l'a fait en se prononçant en faveur de la
20 proposition de Lord Carrington. Il est le premier qui a rejeté ce dont je
21 viens de parler ici, alors que vous, vous m'accusez de mentir.
22 M. Milosevic (interprétation): Je demande que ces comptes rendus de
23 réunion du Gouvernement du Monténégro soient versés au dossier, puisque
24 vous m'accusez de ne pas rendre compte de la réalité en termes fidèles à
25 la réalité.
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1 M. le Président (interprétation): Nous ne pouvons pas revenir incessamment
2 sur ces mêmes points de vue. Nous avons entendu votre position, nous avons
3 ce qu'a dit le témoin; il était à la Conférence de La Haye.
4 Veuillez passer à autre chose.
5 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, j'ai pas mal de question à poser.
6 Et d'ailleurs, le témoin va sans doute nous dire qu'il n'a pas dit ce
7 qu'il a dit à l'époque, officiellement donc.
8 (Rire du témoin.)
9 Ecoutez, puisque vous en avez parlé il y a un instant, je vous rappelle
10 qu'hier, dans votre déposition, vous avez dit avoir rencontré les
11 dirigeants de la Republika Srpska lorsque Milo Djukanovic est arrivé à Bar
12 et que vous les avez rencontrés par son intermédiaire.
13 Je ne peux pas rentrer dans vos intérêts personnels, qui ne sont que des
14 intérêts qui vous sont personnels à vous et qui ont, cela dit –ça, c'est
15 la vérité-, un lien direct avec l'Acte d'accusation mensonger dressé
16 contre moi.
17 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, je vous en prie,
18 arrivez à votre question.
19 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je vais vous donner lecture, page
20 8, premier paragraphe, d'un passage de votre déclaration préliminaire
21 devant ce Tribunal.
22 Je cite: "Djukanovic avait des contacts, beaucoup plus nombreux que
23 Bulatovic, avec d'autres dirigeants serbes en Yougoslavie. Il essayait
24 tout le temps de se faire des amis d'influence. Je sais par exemple que,
25 dans sa maison à Bar, il a fait venir les dirigeants des Serbes de Bosnie
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1 pour un certain nombre de réunions. Moi, j'avais une maison à Budva et, un
2 jour, en ville, j'ai rencontré Djukanovic. C'était assez inhabituel, mais
3 il m'a demandé de l'accompagner à Bar où il avait, m'a-t-il dit, des amis
4 de la Republika Srpska qui étaient en visite chez lui.
5 Je suis parti à ses côtés et, à notre arrivée, j'ai rencontré Momcilo
6 Krajisnik, Biljana Plavsic et Nikola Koljevic qui étaient tous présents,
7 qui étaient tous là. Ils parlaient de la façon dont ils allaient
8 construire ce nouvel Etat serbe de Bosnie. Etc."
9 Et à la fin, vous dites -je cite-: "Je ne suis pas resté longtemps et je
10 suis allé rendre visite à des amis qui habitaient à Bar par la suite".
11 (Fin de citation.)
12 M. Nice (interprétation): Il a sauté une ligne du passage en question.
13 M. le Président (interprétation): Vous pourriez lire cette ligne peut-
14 être?
15 M. Milosevic (interprétation): Oui, elle est là, la ligne.
16 Je cite: "Je me souviens aussi que, chaque fois qu'ils parlaient des
17 Musulmans, ils les appelaient des Turcs. Je ne suis pas resté longtemps
18 cependant. Et plutôt que de rester là, je suis allé rendre visite à des
19 amis qui habitaient à Bar". (Fin de citation.)
20 Je ne vois pas en quoi ce que j'ai sauté avait la moindre importance par
21 rapport à ce que nous disons, par rapport au but qui est le mien dans
22 cette question. Parce que hier, le témoin a dit qu'il était dans un lieu
23 public, un café, une taverne ou je ne sais trop quoi, et il s'est efforcé
24 d'accuser Djukanovic de quelque chose dont Djukanovic ne peut absolument
25 pas être tenu responsable.
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1 M. Samardzic (interprétation): Ce n'est pas vrai! Il n'est pas vrai que
2 j'ai essayé d'accuser Djukanovic; ce n'était pas du tout mon objectif.
3 J'ai simplement dit que j'étais allé à Bar avec Djukanovic et que nous les
4 avions rencontrés. Djukanovic n'a pas de maison dans la région, donc il…
5 -en tout cas, je ne crois pas qu'il en ait une encore aujourd'hui-, donc
6 nous n'avons pas pu rencontrer ces gens dans une maison qui lui aurait
7 appartenu; je n'ai pas pu dire cela. Mais ce que j'ai dit, et ce qui est
8 pertinent, c'est que les ai rencontrés. Je ne vois rien de mal à les avoir
9 rencontrés…
10 M. Milosevic (interprétation): …
11 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, veuillez laisser
12 terminer le témoin.
13 M. Milosevic (interprétation): Que les choses soient claires...
14 M. Samardzic (interprétation): Vous essayez de m'induire en erreur ou de
15 me piéger depuis le début. Personne ici n'a accusé le Président Djukanovic
16 de quoi que ce soit. Nous nous sommes rencontrés par hasard à Budva, nous
17 sommes allés à Bar. J'ai vu ces Bosniaques dans un café, je les ai
18 reconnus parce que je les avais déjà vus à la télévision. Ils ont commencé
19 à parler de la Republika Srpska, ils ont parlé des Turcs. Tout cela est
20 vrai parce que c'est comme cela qu'on appelait les Musulmans en Bosnie. Et
21 puis, je suis parti.
22 Je n'ai accusé Djukanovic de rien dans ce que j'ai dit. Et la chose
23 s'arrête là. Ce que vous essayez de m'imputer est complètement faux.
24 Question: Autre citation qui a quelque chose à voir avec notre sujet -je
25 cite-: "Durant l'été 1991, j'ai appris qu'au moins cinq bateaux avaient
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1 amerri et s'étaient ancrés au Monténégro; et ils transportaient des armes.
2 Le frère de Milo Djukanovic, Aleksandar, a dit: "Aco Djukanovic a facilité
3 la tâche à ces navires auprès de la police et de l'armée. Je ne sais pas
4 d'où venaient ces cargaisons mais, une fois arrivées à Bar, ces armes ont
5 été transportées dans des véhicules militaires pour être distribuées aux
6 Serbes de Krajina et de Bosnie. Dans la même période, le ministre
7 monténégrin de l'Intérieur a commencé à distribuer des armes aux gens du
8 Monténégro, qui étaient connus pour leurs orientations chetniques, et donc
9 à appuyer les buts de la Grande Serbie. Ceci a été coordonné par l'adjoint
10 au ministre de l'Intérieur, Nikola Pejakovic." (Fin de citation.)
11 J'ai cité votre déclaration préalable, celle que vous avez signée, n'est-
12 ce pas, Monsieur Samardzic, devant ce Tribunal, et vous prétendez
13 aujourd'hui que j'interprète de façon erronée vos propos.
14 Réponse: Bien sûr que ce que j'ai dit au sujet de Pejakovic est exact. Il
15 a distribué des armes aux Chetniks et Djukanovic a pris part à cette
16 distribution d'armes. C'est quelque chose qu'il faut bien comprendre parce
17 que, dans ma déclaration, j'ai dit que j'avais rencontré Vasiljevic et
18 tout ce que vous dites, de toute façon, n'est qu'hypothèse et supposition.
19 Voilà tout ce qui s'est passé au sujet de ces armes. C'est ce que je sais.
20 Je ne sais pas qui a apporté sa contribution exactement à tout cela, mais
21 je sais que des bateaux étaient là et qu'ils portaient des armes.
22 Question: Monsieur Samardzic, votre déclaration de témoin dit ce que je
23 viens de lire. Je l'ai lue et cela figure au compte rendu d'audience.
24 Est-ce que j'ai fait une erreur de citation? J'ai lu votre déclaration
25 signée par vous, mot pour mot. Est-ce que vous dites que je n'ai pas lu
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1 correctement?
2 Réponse: Non, je ne dis pas cela. Tout ce que je dis, c'est que ce n'est
3 pas la réalité de mes propos lorsque j'ai donné cette déclaration. Il se
4 peut qu'il y ait eu erreur d'interprétation, parce que je n'ai jamais
5 accusé M. Djukanovic ou son frère d'avoir quoi que ce soit à voir avec ces
6 armes.
7 Question: Est-ce que vous dites que cette partie de votre déclaration
8 préalable est inventée?
9 Réponse: Non, je dis simplement qu'il y a une erreur.
10 Question: Comment est-ce que vous pouvez penser qu'une erreur a été faite
11 au sujet des noms propres dans la déclaration?
12 Réponse: Eh bien, elle a été faite. Si vous le voulez, j'admettrai que
13 c'est moi qui l'ai faite, mais je n'ai pas menti. J'ai dit tout ce que je
14 savais au sujet des armes. Je sais que ces armes sont arrivées sur des
15 bateaux et que, tout d'un coup, elles ont disparu. Pour aller où? Je ne
16 sais pas.
17 Question: Voulez-vous dire que ce qui est écrit dans votre déclaration
18 signée par vous a été dit par erreur?
19 Réponse: Non, il n'y a pas d'erreur, sauf le fait que je n'ai pas parlé du
20 frère de Djukanovic à quelque moment que ce soit, parce que ça, ce n'est
21 pas vrai.
22 Question: Est-ce écrit dans votre déclaration préalable?
23 Réponse: Probablement.
24 Question: Est-ce que cela signifie que cette déclaration est un faux,
25 qu'elle a été falsifiée?
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1 Réponse: Non, elle n'a pas été falsifiée. C'est simplement une erreur. Je
2 n'ai pas reproduit cette erreur ici dans le prétoire et je ne l'accepte
3 pas.
4 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Est-ce que je peux lire un autre
5 passage?
6 M. le Président (interprétation): Monsieur Tapuskovic?
7 M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, j'aimerais aider
8 les Juges de la Chambre. Cela se trouve en page 9, paragraphe 2 de la
9 déclaration préalable du témoin.
10 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas cette déclaration, de
11 toute façon.
12 M. Nice (interprétation): Elle peut vous être remise.
13 M. le Président (interprétation): Oui, cela pourrait être préférable.
14 Ainsi que de la verser au dossier; je l'attends après la suspension.
15 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
16 M. Milosevic (interprétation): Je vous lis un autre passage de votre
17 déclaration.
18 M. le Président (interprétation): Excusez-moi de vous interrompre, mais je
19 vous rappelle que le Procureur souhaitait traiter d'une question
20 administrative avant la pause déjeuner. Et autorisation a été donnée à
21 l'accusation pour ce faire.
22 Monsieur Milosevic, nous reprendrons votre contre-interrogatoire après la
23 pause déjeuner.
24 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je souhaite simplement que
25 vous ne perdiez pas de vue que vous avez commencé la présente session avec
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1 cinq minutes de retard. Vous me devez 40 minutes demain, d'après vos
2 calculs, pas d'après les miens.
3 M. le Président (interprétation): Cela sera enregistré, ne vous inquiétez
4 pas.
5 M. Milosevic (interprétation): D'accord. D'accord. Faites.
6 M. le Président (interprétation): Le témoin peut-il se retirer?
7 M. Nice (interprétation): Oui, effectivement, il devrait se retirer. Et
8 j'ai demandé un huis clos, en fait un huis clos partiel.
9 M. le Président (interprétation): Monsieur Samardzic, nous allons lever
10 l'audience pour le déjeuner. Je vous demande de revenir dans ce prétoire à
11 14 heures 30, dans ce prétoire, si vous le voulez bien.
12 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)
13 Passons à huit clos partiel, si vous le voulez bien.
14 (Huis clos partiel à 13 heures.)
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22 (L'audience, suspendue à 13 heures 05, est reprise à 14 heures 40.)
23 (Audience publique.)
24 (Le témoin, M. Nikola Samardzic, est déjà dans le prétoire.)
25 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice?
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1 M. Nice (interprétation): Déclarations préalables de ce témoin avec
2 annexes. Ce sont des déclarations, je pense, en BCS et en anglais; nous
3 sommes en train de les fournir.
4 M. le Président (interprétation): Quelles sont les annexes?
5 M. Nice (interprétation): C'est simplement une partie de la déclaration
6 initiale et des pièces auxquelles le témoin a fait référence. Il y a un
7 certain effet de répétition, mais pas pour tout.
8 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas besoin de verser au
9 dossier les annexes. Nous nous contenterons des déclarations préalables,
10 mais nous les prendrons en l'état. Pour le moment, nous allons fournir une
11 cote.
12 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce de l'accusation 339.
13 (Mme Anoya distribue les documents aux Juges.)
14 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic. Vous avez la
15 parole.
16 M. Milosevic (interprétation): J'espère que vous avez constaté qu'il est 3
17 heures moins 20. Et avant que de reprendre, j'avais demandé que ces
18 procès-verbaux des sessions du Gouvernement du Monténégro, qui sont des
19 documents officiels émanant du Gouvernement du Monténégro et qui parlent
20 de toute une série de points soulevés ici par le témoin -à titre tout à
21 fait erroné-, que ces PV soient versés au dossier étant donné notamment le
22 fait...
23 M. le Président (interprétation): Oui, oui.
24 M. Milosevic (interprétation): Il s'agit là de documents officiels et je
25 crois que nous devrions les verser au dossier. Nous pouvons continuer, si
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1 vous le voulez bien.
2 M. le Président (interprétation): Un instant.
3 Nous allons obtenir une cote pour ce document?
4 Mme Anoya (interprétation): Il s'agira de la pièce de la défense 46.
5 M. le Président (interprétation): Poursuivez, Monsieur Milosevic.
6 M. Milosevic (interprétation): Dans votre déposition, vous avez précisé
7 -et je me réfère à la page 8, avant-dernier paragraphe-, lorsqu'il s'agit
8 des raisons pour lesquelles Bulatovic et Djukanovic avaient accepté les
9 plans de Milosevic avec enthousiasme, vous avez dit qu'il y avait pour
10 cela plusieurs raisons.
11 "Bulatovic aimait à être Président du Monténégro et il voulait conserver
12 cette fonction. Cela signifiait qu'il fallait qu'il soutienne en esclave
13 Milosevic, quoi qu'il fasse.
14 Djukanovic, de l'autre côté, voulait avancer sur les échelons, progresser
15 et il voulait devenir le remplaçant et peut-être l'héritier de Milosevic,
16 ou peut-être devenir la personne régnant sur des territoires élargis dans
17 cette Grande Serbie nouvellement installée. (Fin de citation.)
18 Dites-moi, m'avez-vous entendu, moi-même ou Bulatovic ou Djukanovic, à
19 quelque opportunité que ce soit, parler d'une Grande Serbie? Dites-moi
20 seulement si oui ou non.
21 M. Samardzic (interprétation): Oui, je vous ai entendu parler de la Grande
22 Serbie.
23 M. Milosevic (interprétation): Alors, étant donné que cela est absolument
24 faux, je voudrais que vous me disiez où j'ai dit cela et qu'est-ce que
25 j'ai dit au juste?
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1 M. Samardzic (interprétation): A la Conférence de La Haye, vous vous êtes
2 employé en faveur d'une Grande Serbie, à savoir en faveur du fait de faire
3 en sorte que la Krajina serbe reste dans le cadre de d'un nouvel Etat.
4 Vous avez parlé de la nécessité de faire en sorte que les Serbes vivent
5 dans un seul et même Etat. Pas une fois, plusieurs fois.
6 Attendez, attendez… Laissez-moi finir!
7 Vous avez à plusieurs reprises parler de la nécessité pour tous les Serbes
8 de vivre dans un même Etat. Vous avez visé à créer la Grande Serbie en
9 mettant en place une Krajina allant pratiquement jusqu'à Karlobag. Et
10 votre candidat pour la présidence de la Serbie, le candidat actuel,
11 Seselj, ne cesse de parler de "la Grande Serbie allant jusqu'à Karlobag et
12 Virovitica". Il n'a de cesse de réclamer une Grande Serbie, votre candidat
13 à vous. Et il va plus loin.
14 M. le Président (interprétation): Nous ne pourrions pas parler de la
15 situation politique actuelle, Monsieur Samardzic. Nous traitons ici
16 d'événements qui se sont produits, vous le savez bien, il y a dix ans.
17 Est-ce que M. Seselj tenait ce genre de propos à l'époque?
18 M. Samardzic (interprétation): Il avait justement parlé de cela, tant à
19 l'époque qu'à présent. Il n'a jamais cessé d'en parler. C'est ce que je
20 tiens à déclarer: il n'a jamais changé ses déclarations. Il a dit que
21 Rijeka devrait être le port principal de la Serbie, alors que Rijeka est
22 au-delà de cette ligne.
23 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, je vous demanderais
24 d'épargner mon temps.
25 Vous n'ignorez pas que ma position, s'agissant de la Yougoslavie, était
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1 celle de la préserver et que cela relevait de l'intérêt de tous les
2 peuples yougoslaves. Et que le peuple serbe avait un intérêt
3 supplémentaire parce que, dans cet Etat-là, les Serbes étaient en mesure
4 de vivre dans un même Etat. Le même Etat dans lequel vivraient tous les
5 Serbes, c'était la Yougoslavie; ce n'était pas une Grande Serbie. Donc je
6 vous ai demandé de savoir, de nous dire si j'ai jamais parlé d'une Grande
7 Serbie.
8 Réponse: Le fait d'avoir affirmé que les Serbes étaient censés vivre dans
9 un même Etat, c'était ça la Grande Serbie. La Yougoslavie, elle, s'est
10 démantelée et n'existait plus. La Yougoslavie!
11 Question: Bien, bien, Monsieur Samardzic. La Yougoslavie en fait, selon
12 vous, c'était la Grande Serbie? D'accord.
13 Est-ce que vous avez entendu parler Djukanovic ou Bulatovic s'employer en
14 faveur de la Grande Serbie?
15 Réponse: Je n'ai dit nulle part que j'avais entendu de leur bouche dire
16 choses pareilles. Vous êtes en train d'essayer de tromper l'audience.
17 Question: Mais vous avez dit, tout à l'heure, que les deux également
18 s'employaient en faveur de l'idée de la Grande Serbie?
19 Réponse: Non, je n'ai jamais dit cela.
20 Question: Puis vous dites -je continue à vous citer dans ce même
21 paragraphe- que "Djukanovic et Bulatovic étaient expressément orientés de
22 façon anti-catholique et anti-croate. Et le grand-père de Djukanovic,
23 Blazo, était commandant chetnik et a été tué dans les combats au cours de
24 la Deuxième Guerre mondiale. Il était très respecté: c'est pour cela que
25 Djukanovic a eu son prénom. La mère de Bulatovic est d'origine
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1 herzégovienne et son père avait été tué par les Oustachis pendant la
2 Deuxième Guerre mondiale. Elle l'a élevé dans la haine des Croates et des
3 catholiques en général. Donc c'est par haine de tout ce qui n'est pas
4 orthodoxe que les deux, Djukanovic et Bulatovic, ont entraîné le
5 Monténégro à suivre les pas de Milosevic vers la catastrophe."
6 Vous êtes donc en train de dire que ce sont en quelque sorte des
7 fanatiques, que ce sont des fanatiques orthodoxes. Comment pouvez-vous
8 l'affirmer, alors que vous savez pertinemment bien que ce n'est pas exact?
9 Réponse: Je n'ai pas voulu dire qu'ils étaient fanatiques orthodoxes,
10 mais, à l'époque, l'euphorie avait cette apparence-là, lorsque la guerre a
11 commencé contre la Croatie. Et tout ce qui était croate était oustachi; il
12 fallait donc forcément le combattre. Je crois que c'est dans ce sens que
13 j'ai dit quelque chose. Mais je ne vois pas cela tel que vous en avez
14 donné lecture.
15 Question: Monsieur Samardzic, je n'ai rien dit d'autre, je n'ai fait que
16 lire la déposition que vous avez signée. Ce ne sont pas mes paroles à moi,
17 ce sont vos paroles à vous.
18 Réponse: Je n'ai pas signé. J'ai fait des déclarations semblables, mais il
19 n'y a pas de signature à moi et vous êtes en train d'ajouter des choses de
20 façon évidente. J'affirme ce que je viens de vous dire et ce que j'ai
21 affirmé devant le Tribunal. Et c'est précisément ce que je présente ici
22 comme étant vrai.
23 Question: Ecoutez, on dit ici: "Confirmation du témoin: j'ai pris lecture
24 de cette déposition constituée de 34 pages. Elle comporte tout ce que j'ai
25 dit au meilleur de mes souvenirs et au meilleur de mes connaissances. J'ai
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1 fait cette déposition de mon plein gré et l'ensemble peut être utilisé
2 devant le Tribunal international pénal international pour les crimes en
3 ex-Yougoslavie. Et je suis conscient du fait de pouvoir être cité à
4 témoigner publiquement devant le Tribunal en question.
5 Il y a la date du 23 octobre 2000. Maintenant, vous nous dites que ce
6 n'est pas votre déclaration. Je pense que c'est là. Je ne veux pas manquer
7 de sérieux pour qualifier la chose.
8 Comment qualifierez-vous ou commenteriez-vous le passage en page 22? Vous
9 dites: "Comme je l'ai déjà précisé auparavant", je parle donc de cette
10 page 2, "Djukanovic avait des relations très proches avec le commandement
11 de la Republika Srpska. De grandes quantités d'armes et de carburant
12 avaient été fournies, livrées aux Serbes de Bosnie et le mérite en revient
13 à Ozu Djukanovic, le frère de Milo. Et même lorsque M. Milosevic avait
14 soi-disant introduit un blocus à l'égard de la Republika Srpska suite au
15 rejet du plan de Vance-Owen, les équipements ont continué à affluer en
16 abondance en Republika Srpska par le biais de la frontière avec le
17 Monténégro. Et, pour autant que je sache, les observateurs internationaux
18 ne se trouvaient qu'à un passage frontière à Scepan Polje, ce qui fait que
19 la contrebande se déroulait sans entraves." (Fin de citation.)
20 Comment pouvez-vous affirmer des choses pareilles et comment pouvez-vous
21 accuser des gens de faire quoi que ce soit sans avoir des arguments à
22 l'appui?
23 Réponse: Je n'accuse personne. On sait fort bien que les armes allaient
24 via le Monténégro vers la Bosnie, et le Gouvernement du Monténégro le
25 savait. Et c'était la guerre en Bosnie. Je n'étais plus ministre à ce
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1 moment-là, mais j'ai appris la chose par diverses personnes qui m'ont dit
2 que les armes passaient.
3 Question: Mais vous n'avez aucune connaissance personnelle à ce sujet.
4 Vous êtes en train de nous parler de ouï-dire.
5 Réponse: Ce n'est pas du ouï-dire, ni des ragots, ni des rumeurs.
6 C'étaient des choses qui étaient notoirement connues au Monténégro, mais
7 je n'avais plus, à ce moment-là, été ministre; c'est dans ce sens-là que
8 j'ai dit ce que j'ai dit dans ma déposition.
9 Question: Et vous dites que les formations paramilitaires qui sont
10 intervenues d'abord en Croatie puis en Bosnie ont été formées et avaient
11 des installations d'hébergements au Monténégro. Vous dites également que
12 vous étiez au courant de deux grandes centres de formations militaires qui
13 ont fonctionné à partir de la mi-1991 jusqu'à la mi-1992, l'un de ces
14 camps se trouvait à Niksic et l'autre à Golobovci, près de Podgorica et
15 Babic, Pavle Bulatovic, Djukanovic et d'autres étaient au courant. Et vous
16 dites, entre parenthèses, que Niksic est la ville natale de Djukanovic.
17 C'est votre seul argument à l'appui de ce que de vous avez fait comme
18 accusation.
19 Réponse: Je n'ai pas fait d'accusation et cela n'a rien à voir que
20 d'affirmer que Niksic est la ville natale. J'ai probablement dit que la
21 ville de Niksic était sa ville natale...
22 Laissez-moi répondre, finir.
23 Le fait qu'il y ait eu des centres de formation au Monténégro est une
24 chose exacte, mais j'avais voulu éviter de présenter cela, c'est-à-dire
25 redire ce que j'ai dit-il y a deux ans. Mais, si vous insistez, oui, c'est
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1 vrai, il y a eu des centres de formation et d'entraînement au Monténégro.
2 Question: Et vous dites qu'il ne se peut pas que ces camps aient pu
3 exister sans leur appui, leur soutien. Ces unités paramilitaires sont
4 responsables de la persécution des familles musulmanes et de l'expulsion
5 de ces familles de leur maison. C'étaient les derniers restes dans la zone
6 de Bukovica, c'étaient les derniers restes de familles musulmanes après
7 les nettoyages ethniques de 1924.
8 Tous étaient au courant de ce qu'avaient fait ces formations
9 paramilitaires et il est clair que la police et l'armée étaient au courant
10 de ces événements. C'est ce que vous affirmez.
11 Réponse: J'affirme qu'à l'époque les familles musulmanes de Bukovica ont
12 été nombreuses à être massacrées. Et, c'est là chose notoirement connue,
13 c'est une chose qui est arrivée au Monténégro.
14 Question: Vous dites plus loin: "Tout au début de la guerre en Bosnie, je
15 me souviens que Djukanovic avait dit à l'occasion d'une réunion du
16 gouvernement –vous le citez-: 'Nous, les Montenegrins, devons arrêter les
17 Musulmans et faire en sorte qu'ils cessent de tuer nos frères serbes.'
18 (Fin de citation.)
19 Toutefois, suite à la décision de M. Milosevic de retirer la JNA de
20 Bosnie, on a pu très peu apprendre concernant la Bosnie aux sessions
21 publiques; étant donné que la Serbie s'était retirée officiellement de la
22 Bosnie, il en allait de même pour le Monténégro." (Fin de citation.)
23 Mais savez-vous que, sans citation ou guillemets de quelque sorte que ce
24 soit, lorsque la République fédérale de Yougoslavie a été promulguée, les
25 unités de l'armée populaire yougoslave ont reçu l'ordre de se retirer et
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1 de retourner en Yougoslavie?
2 Réponse: Quelle est votre question?
3 Question: Pourquoi accusez-vous Djukanovic d'avoir expliqué, à cette
4 réunion du gouvernement "qu'il fallait se battre contre les Musulmans pour
5 qu'ils cessent de tuer nos frères serbes"? Je n'ai vu cela dans aucun PV
6 des réunions du Gouvernement monténégrin.
7 Réponse: Il s'est passé deux ans. Je ne me souviens pas d'avoir déclaré
8 les choses telles qu'elles sont inscrites là. Je ne pense pas avoir dit
9 cela en ces termes-là, mais si cela figure au PV, je veux bien.
10 Question: Alors, vous ne vous souvenez pas de ce qui s'est passé en 2000,
11 et vous vous souvenez de ce qui s'est passé en 1991 et 1992? Et en l'an
12 2002, vous ne souvenez pas de ce qui s'est passé en l'an 2000?
13 Réponse: Non, je ne m'en souviens pas. Il se peut que je ne me souvienne
14 pas de choses datant d'hier.
15 Question: Et vous dites que certains nombre de Musulmans de Foca ont été
16 tués et jetés dans le lac de Piva, et ainsi de suite. C'est ce que vous
17 affirmez.
18 Réponse: Oui. Une famille musulmane a été jetée dans le lac de Piva, mais
19 je n'ai jamais accusé Djukanovic de la chose; c'est vous qui êtes en train
20 d'ajouter la chose et d'inventer.
21 Question: Je n'invente rien.
22 Réponse: Mais si j'ai accusé Djukanovic de la chose, dites-le clairement
23 et donnez-nous lecture de la chose. Est-ce que c'est inscrit également
24 dans ce texte?
25 Question: Mais répondez-moi donc à ma question suivante. Vous vous
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1 attaquez à Cosic, Président de la République fédérale de Yougoslavie de
2 l'époque, et c'est le plus grand des écrivains serbes qui soit encore en
3 vie, ce fait-là n'est pas remis en doute.
4 Et vous affirmez qu'à Herceg-Novi, plus tard -et cela figure en page 24,
5 avant-dernier paragraphe-, après être devenu Président de l'Etat, il a
6 fait un discours et il a dit que "la Yougoslavie ne renoncerait jamais à
7 Prevlaka, parce que la lutte pour Prevlaka n'est pas une lutte du peuple
8 de Herzégovine et de Kotor, mais aussi celle des Serbes de Kragujevac et
9 de Pancevo. Mais, par la suite, M. Milosevic lui a dit de signer un accord
10 pour ce qui est du retrait de la JNA de Prevlaka et la restitution de
11 Prevlaka à la Croatie, quoique sous surveillance des Nations Unies. Mais
12 pourquoi affirmez-vous cela?
13 Kostic était occupé à une fonction au dessus de la mienne. Comment
14 pouvais-je lui donner des ordres? Et deuxièmement, cela n'avait-il pas été
15 là un geste pacifique de placer cette zone sous la surveillance des
16 Nations Unies en attendant une solution pacifique?
17 Réponse: Cela s'est passé exactement comme vous l'avez lu; il avait fait
18 un discours à Herceg Novi à l'égard de Prevlaka et sept jours après, suite
19 à ordre de votre part, il a convenu avec Tudjman de la restitution de
20 Prevlaka à la Croatie. Il n'y a rien d'étrange à cela. Ce n'est pas lui
21 tout seul, sans vous, qui a restitué Prevlaka, c'est certain.
22 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Mais dites-moi: étant donné que
23 vous avez dit, dans cette déposition –et je ne pense pas que vous puissiez
24 le contester, étant donné que vous êtes en train de tenir ce propos-, vous
25 dites: "Personne n'a remis en question le fait que Prevlaka avait été une
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1 partie du territoire croate et qu'elle a toujours été partie de ce
2 territoire"; c'est ce qui figure en fin de page 24.
3 Je voudrais que vous me disiez la chose suivante: étant donné que votre
4 récit relatif à Prevlaka est particulièrement intéressant… Je crois que
5 vous avez affirmé que Prevlaka avait été pris pour prétexte pour attaquer
6 Dubrovnik et que cela n'a été contesté par personne, que cela n'a pas été
7 contesté comme étant partie intégrante du territoire croate.
8 Je voudrais vous poser la question suivante: étant donné que vous êtes la
9 première personne à avoir contesté la chose et avoir remis cela en
10 question, dans les journaux du 3 octobre 1991, donc à l'époque où vous
11 affirmez avoir été opposé à la guerre, vous dites –et je vous cite, je
12 cite le journal "Pobjeda", le plus grand journal monténégrin-, donc je
13 cite ce que vous avez dit: "Aux côtés de la question de Prevlaka, il
14 convient de prouver que Prevlaka est une partie intégrante de notre
15 territoire et qu'elle n'a jamais fait partie du territoire croate. Avec
16 quel droit, de quel droit sont-ils en train de vouloir prendre cela et de
17 quel droit sont-ils en train de nous attaquer? Alors, s'il en est ainsi,
18 nous allons nous battre parce que nous nous défendons." (Fin de citation.)
19 C'est ce qui a été publié dans le journal "Pobjeda" et c'est ce que vous
20 avez déclaré.
21 M. le Président (interprétation): Il faut que vous posiez une question
22 pour que le témoin puisse y répondre.
23 Tout d'abord, Monsieur le Témoin, vous souvenez-vous de ce qui vous est
24 attribué, de ce qui aurait été dit le 3 octobre 1991? Est-ce
25 qu'apparemment ce sont des paroles qui vous sont attribuables? Pouvez-vous
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1 nous aider là-dessus?
2 M. Samardzic (interprétation): Tout à fait inventé! Je ne pense pas que
3 cela a été publié par "Pobjeda". Et si cela a effectivement été publié par
4 "Pobjeda", cela est une invention pure et simple; ça a été monté de toutes
5 pièces par le rédacteur en chef qui, à l'époque, s'appelait Konatar. Et on
6 appelait cela "la Victoire de Konatar", parce qu'il avait été fervent
7 défenseur de la guerre ou très en faveur de la guerre. Et je n'ai jamais
8 pu déclarer cela.
9 M. Milosevic (interprétation): Très bien, très bien. Mais serait-il
10 suffisant de dire que vous avez dit la même chose à la session de la
11 présidence et du gouvernement que ce que vous avez dit à "Pobjeda"?
12 M. Samardzic (interprétation): Vous entendez ce que "Pobjeda" a publié?
13 Non, certainement, je n'ai jamais dit cela.
14 Question: Bien. A l'occasion de la Conférence de La Haye -pour ce qui est
15 du journal "Pobjeda", on retrouvera ce que vous avez dit-, vous avez
16 déclaré le 12 septembre, en session plénière à La Haye, que le Monténégro
17 s'employait en faveur de la préservation de la Yougoslavie. Et maintenant,
18 vous êtes en train d'affirmer ici qu'il s'employait en faveur de
19 l'instauration d'une Grande Serbie.
20 Je vous rappelle le ministre Samardzic, en séance plénière, ministre des
21 Affaires étrangères du Monténégro, à la session plénière de la Conférence
22 de La Haye, le 12 septembre 1991: "C'est une chose notoirement connue que
23 d'affirmer que le Monténégro était favorable à la préservation de la
24 Yougoslavie sous condition de procéder à des changements au niveau des
25 organes fédéraux afin que cette Fédération soit meilleure que jusqu'à
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1 présent.".
2 Donc pourquoi avez-vous dit cela? Est-ce que la Serbie et le Monténégro
3 s'employaient en faveur d'une Grande Serbie ou de la préservation de la
4 Yougoslavie?
5 Réponse: Mais vous êtes en train d'essayer de me piéger et de dire que je
6 m'étais employé en faveur de la Grande Serbie. Pas moi.
7 M. Milosevic (interprétation): Vous avez dit que le Monténégro tout entier
8 était favorable à une Grande Serbie et que le Monténégro n'était pas
9 favorable à la Yougoslavie, mais à une Grande Serbie. C'est votre
10 témoignage. C'est la teneur de votre témoignage?
11 M. le Président (interprétation): Un instant. Un à la fois, s'il vous
12 plaît.
13 Monsieur Samardzic, ce qui est suggéré ici, c'est que vous avez fait une
14 déclaration à La Haye, le 12 septembre de cette année-là, et la
15 déclaration qui vous est attribuée… Comment dire? La lecture qu'en a faite
16 l'accusé est celle-ci, à savoir que le Monténégro préconise le maintien de
17 la Yougoslavie et de la Fédération yougoslave. Est-ce que vous avez fait
18 une déclaration dans ce sens ou dans un sens similaire?
19 M. Samardzic (interprétation): Oui, j'ai fait des déclarations de ce genre
20 et c'est ce que je prouve moyennant présentation des documents émanant des
21 sessions du début du mois d'octobre au Monténégro, parce que la direction
22 du Monténégro s'était employée en faveur de la paix et en faveur de la
23 préservation de la Yougoslavie, d'une façon ou une autre. Il n'y avait pas
24 encore de République fédérale de Yougoslavie ni de Slobodan Milosevic. Et
25 je ne vois rien de mal pour ce qui… ce que l'accusé Milosevic est en train
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1 d'essayer de présenter pour me piéger.
2 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, je n'y vois rien de mal
3 parce que je m'étais employé, moi aussi, en faveur de la préservation de
4 la Yougoslavie. Là où je vois du mal, c'est dans le fait de vous voir
5 parler autrement, de faire un discours autre que celui de l'époque; c'est
6 là le hic, ce n'est pas le fait de s'être employé en faveur de quelque
7 chose d'erroné.
8 Je vais vous donner citation de votre phrase suivante du discours de la
9 Conférence de La Haye qui figure dans les documents officiels. A cette
10 même session, vous avez dit littéralement ce qui suit -je cite-: Le
11 Monténégro, dans le respect des droits des peuples de Croatie et de
12 Slovénie à l'autodétermination, a toujours souligné que le peuple serbe
13 vivant en Croatie a également le droit de rester en Yougoslavie.
14 Je vais vous donner votre citation exacte de votre discours: "Dans le
15 respect plein et entier du droit des peuples de Croatie et de Slovénie à
16 l'autodétermination et à la sécession de la Yougoslavie, le Monténégro a
17 toujours souligné que le même droit devait être attribué au peuple serbe
18 résidant en Croatie afin de faire en sorte qu'il puisse opter en faveur de
19 la vie en Yougoslavie. Nous sommes convaincus qu'une solution juste,
20 équitable et pacifique de la question du peuple serbe en Croatie est l'un
21 des éléments clés, l'un des facteurs clés pour une solution d'ensemble de
22 la crise yougoslave.
23 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît. Attendez.
24 Tout d'abord, vérifions que le témoin est d'accord pour dire qu'il est
25 effectivement l'auteur de cette longue citation que vous relisez.
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1 Vous la voyez apparaître à l'écran, Monsieur le Témoin. Convenez-vous du
2 fait que vous auriez tenu ces propos ou des propos similaires à cette
3 réunion?
4 M. Samardzic (interprétation): Il s'est passé 11 ans. J'ai certainement
5 dit quelque chose d'analogue, de semblable, mais je n'ai certainement pas
6 dit que le peuple serbe devait faire sécession et quitter la Croatie. Mais
7 j'avais entendu qu'une solution devait être trouvée pour le peuple serbe
8 en Croatie. C'est dans ce sens-là que j'étais intervenu.
9 La première partie est tout à fait exacte et la deuxième est à peu près
10 exacte. Mais je ne vois rien de terrible ou rien de mal dans ce que j'ai
11 dit à l'occasion de cette session, et ceci en défendant les intérêts du
12 Monténégro.
13 Question: Je ne vois rien de mal ni de terrible, moi non plus. Ce que je
14 vois de terrible et de mal, c'est que vous êtes en train d'affirmer le
15 contraire.
16 Réponse: En quoi est-ce que j'affirme le contraire? En quoi ai-je affirmé
17 le contraire en disant que le Monténégro avait procédé autrement? J'ai
18 essayé de prouver à tout moment que la direction monténégrine avait
19 essayé, depuis le début, de se soustraire à votre influence, pour autant
20 que faire se pouvait.
21 M. Milosevic (interprétation): Cela n'a rien à voir avec cette question.
22 Vous avez parlé, à l'époque, de façon opposée au discours actuel. Vous
23 avez dit que le même droit devait être imparti au peuple serbe pour
24 pouvoir opter à vivre et rester en Yougoslavie. Vous avez dit cela de
25 façon très explicite. Pourquoi êtes-vous en train de nous dire le
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1 contraire maintenant?
2 M. Samardzic (interprétation): Je ne dis rien de contraire.
3 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)
4 Un instant, s'il vous plaît.
5 Est-ce qu'il vous est arrivé de dire que les Serbes en Croatie pouvaient
6 choisir de vivre en Yougoslavie?
7 M. Samardzic (interprétation): Oui. Je me souviens de cette session. Oui,
8 je l'ai dit à l'époque.
9 M. le Président (interprétation): Fort bien.
10 Oui, Monsieur Milosevic, quel est l'argument ou la thèse que vous essayez
11 de faire valoir auprès de ce témoin par ces longues citations?
12 M. Milosevic (interprétation): Justement, le témoin, qui disait à l'époque
13 des choses qui étaient tout à fait raisonnables, rationnelles et
14 correctes, est en train de désigner cela comme étant un crime, comme étant
15 un expansionnisme "grand serbe".
16 M. le Président (interprétation): Qu'est-ce que vous contestez, de façon
17 précise?
18 M. Milosevic (interprétation): Ce que je conteste, c'est la véracité de
19 ses dires, en totalité. Parce que ce témoin-ci est en train de mentir,
20 Monsieur May. C'est de cela qu'il s'agit. Parce qu'il…
21 M. le Président (interprétation): (Hors micro.)
22 M. Milosevic (interprétation): Il affirme que la Serbie et le Monténégro,
23 et le tout ensemble, sous ma direction à moi, avaient pris de force des
24 frontières allant de Karlobac-Karlobag jusqu'à Virovitica, et il affirme
25 que la population serbe résidant en Krajina, souhaitant rester en
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1 Yougoslavie, avait le droit de rester en Yougoslavie; chose en faveur de
2 laquelle il s'était employé, à l'époque. Et, dans sa déposition, il
3 désigne ou il qualifie cela, dix ans après, d'expansionnisme grand serbe
4 et de crime. C'est de cela qu'il s'agit. Mais je crois que c'est tout à
5 fait évident.
6 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, ce qu'on peut dire
7 tout simplement, c'est que vous ne vous faites pas comprendre. Mais nous
8 permettrons au témoin de répondre à cela.
9 Ce qu'il est possible de dire et ce que l'on peut dire, c'est la chose
10 suivante, et je vous demande, Monsieur le Témoin, d'y répondre: est-ce
11 qu'à l'époque -et peut-être pourrez-vous nous aider sur ce point-, vous
12 vous êtes plaint ou vous avez protesté contre ce qu'on peut appeler
13 aujourd'hui "l'expansionnisme serbe" ou "les projets de Grande Serbie"?
14 Pouvez-vous nous apporter votre aide?
15 M. Milosevic (interprétation): Monsieur le Président…
16 M. le Président (interprétation): Ne nous interrompez pas! J'ai posé une
17 question au témoin.
18 M. Samardzic (interprétation): A l'époque, je parlais d'expansion de la
19 part de la Grande Serbie, dans son intention de reprendre par la force des
20 territoires de Croatie. A l'époque, j'avais moins de connaissances
21 qu'aujourd'hui et je me fondais sur les connaissances que j'avais à
22 l'époque.
23 Donc la prise de territoires en Croatie, je la qualifiais d'expansionnisme
24 que je condamnais à l'époque et que je continue à condamner aujourd'hui.
25 Le Dr Kacic et le Dr Weinands l'ont confirmé dans leurs écrits. Le Dr
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1 Kacic et le Dr Weinands l'ont dit à l'époque dans leurs ouvrages.
2 Je condamnais la violence, la violence dirigée contre les territoires
3 situés en Croatie; et ceci n'a rien à voir avec le droit des Serbes à
4 l'autodétermination, ce pourquoi ils me critiquent aujourd'hui. Donc j'ai
5 présenté mes positions lors de la réunion et je m'en tiens à ces positions
6 aujourd'hui. Je les ai défendues à l'époque.
7 J'ai condamné ce qui se passait en Croatie, ce qui a été fait par l'armée
8 connue sous le nom "d'armée yougoslave", sous votre direction. Voilà ce
9 que je condamnais: ce qui était fait et les méfaits commis en Croatie par
10 ces forces.
11 M. Milosevic (interprétation): Donc vous pouvez appeler les deux choses
12 -car il s'agit toujours de la même conception- "le droit des Serbes à
13 vivre et demeurer en Yougoslavie"? C'est ce concept qui existait il y a
14 dix ans, et dont vous venez de parler, en disant qu'il s'agit
15 "d'expansionnisme grand serbe", c'est bien ça?
16 Réponse: Là encore, vous essayez de me piéger parce que ce n'est pas du
17 tout cela. C'est un truc de votre part.
18 Je continue à penser que les Serbes avaient le droit à
19 l'autodétermination, ce qui veut dire que le peuple serbe de Croatie a le
20 droit de jouir de son autonomie, comme l'avait proposé Lord Carrington
21 lui-même; et c'est ce qui aurait dû être mis en oeuvre plutôt que
22 d'envoyer l'armée contre la Croatie.
23 Question: Monsieur Samardzic, vous ne savez rien de tout cela parce que
24 vous ne diriez pas ce que vous dites aujourd'hui si vous saviez quoi que
25 ce soit. Mais je serai plus précis.
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1 Dans ce même discours que vous avez prononcé à la Session plénière de La
2 Haye -donc ceci n'est pas un article de journal: c'est bien la teneur de
3 votre discours-, vous dites ce qui suit -je cite-: "Le Monténégro se
4 trouve toujours parmi les Républiques yougoslaves et devrait rester dans
5 la même situation, à condition que la Yougoslavie demeure un Etat intégré
6 et un sujet international légitime." (Fin de citation.)
7 Vous rappelez-vous avoir dit cela?
8 Réponse: Oui, je l'ai dit. Qu'est-ce qu'il y a de mal à cela?
9 Question: Cela veut dire que la Yougoslavie reste dans ses frontières et
10 que celles-ci ne doivent pas être changées. Alors, qui a demandé un
11 changement des frontières? Ce sont les Serbes de Croatie, alors que la
12 Yougoslavie continuait à être un pays intégré? Vous rappelez-vous qu'ils
13 ont voté en faveur de la continuation de la Yougoslavie? Ce n'est pas le
14 cas, oui ou non?
15 Réponse: Eh bien, la Yougoslavie avait déjà presque disparu à l'époque où
16 la Croatie a proclamé son indépendance; donc il ne sert à rien de parler
17 de conserver la Yougoslavie dans ses frontières à l'époque, parce que la
18 Yougoslavie avait cessé d'exister déjà.
19 Question: Comment pouvez-vous dire que la Yougoslavie, que le Monténégro
20 s'est battu à l'époque comme il se bat encore aujourd'hui? Est-ce que vous
21 vous battiez pour cela: pour que la Yougoslavie n'existe plus, pour dire
22 qu'elle avait déjà disparu?
23 Réponse: Eh bien, il n'y avait pas encore de reconnaissance officielle,
24 mais elle avait déjà disparu, alors que le Monténégro se battait pour
25 préserver la Yougoslavie. C'est ce qui s'est passé. Que voulez-vous? C'est
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1 comme ça.
2 Question: Bien. Mais vous avez utilisé le passé une fois et le présent
3 ensuite.
4 Réponse: Eh bien, peut-être que c'était une erreur, mais j'ai utilisé le
5 passé.
6 Question: Vous avez utilisé le passé et le présent.
7 Réponse: Ne me piégez pas en me présentant un mot que j'aurais dit.
8 M. Milosevic (interprétation): Alors, voilà, c'est la déclaration faite
9 par votre estimé témoin, M. Samardzic, à la Conférence de La Haye.
10 J'aimerais demander le versement au dossier de ce document.
11 Peut-on maintenant passer à autre chose?
12 M. le Président (interprétation): Un instant.
13 Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, il s'agira de la pièce
14 à conviction de la défense 47.
15 M. Milosevic (interprétation): Document qui émane de vous: "Nikola
16 Samardzic, ministre des Affaires étrangères, et de Momo Knezevic, ministre
17 de la Justice." Titograd, 15 septembre 1991, c'est la date du document.
18 Vous avez soumis un rapport sur le travail effectué devant la Conférence
19 ministérielle sur l'ex-Yougoslavie.
20 Alors, dites-moi la chose suivante: vous dites dans votre rapport, qui est
21 un rapport écrit, que vous avez établi et que vous avez soumis à la
22 rencontre devant Lord Carrington -je cite-: "Nous présentons un certain
23 nombre de détails pour expliquer la position présentée à la Conférence
24 plénière. Ces positions sont les suivantes: les conflits en Croatie sont
25 dus au fait que les Serbes vivant dans cette République était en danger."
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1 (Fin de citation.)
2 Est-ce bien exact, Monsieur Samardzic? C'est ce que vous avez dit dans
3 votre rapport à l'époque: que les conflits en Croatie ont succédé, ont été
4 causés par le fait que les Serbes étaient menacés dans cette région.
5 Aujourd'hui, vous dites qu'ils étaient menacés parce que Milosevic a lancé
6 une guerre de conquête pour que les frontières s'étendent jusqu'à
7 Karlobag.
8 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin répondre.
9 Voilà ce qui est allégué comme ayant été dit par vous à l'époque.
10 M. Samardzic (interprétation): Eh bien, ce que nous avons écrit, c'était
11 un rapport. Je reconnais que nous l'avons rédigé; nous l'avons présenté à
12 Lord Carrington, oralement et par écrit, pour justifier ce qui se passait
13 à l'époque en Croatie, de façon à nous protéger d'une certaine façon à
14 l'époque. Et je reconnais que ce que j'ai dit à l'époque n'était pas
15 entièrement exact ni entièrement précis. Je parle de mon discours à Lord
16 Carrington.
17 M. Milosevic (interprétation): Bien, très bien. Dans votre rapport, vous
18 poursuivez en indiquant ce qui suit, Monsieur Samardzic; c'est ce que vous
19 avez dit à Carrington lors de cette rencontre séparée avec vous et le
20 ministre de la Justice. Donc c'est écrit dans ce rapport -je cite-: "La
21 conscience collective et les souvenirs des Serbes de Croatie quant au
22 génocide qui a eu lieu en cet endroit 50 ans avant, du fait des autorités
23 traîtres de Croatie, donc génocide commis contre les Serbes est toujours
24 très présent et très fermement inscrit dans la psyché de la population
25 serbe résidant en Croatie." (Fin de citation.)
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1 C'est bien ce que vous avez dit?
2 M. Samardzic (interprétation): Oui et je peux le confirmer aujourd'hui: le
3 fait que, dans la conscience des Serbes vivant en Croatie, ceci existe,
4 que l'idée du génocide commis durant la Deuxième Guerre mondiale existe,
5 est exact; tout cela est vrai. Mais en quoi tout cela nous intéresse-t-il?
6 Au lieu de plonger la Yougoslavie dans une crise, vous auriez pu prendre
7 une autre position…
8 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin finir, Monsieur
9 Milosevic.
10 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, écoutez, j'ai obtenu une réponse à
11 ma question, Monsieur May. Je n'ai pas besoin de continuer à entendre ce
12 que le témoin veut continuer à dire.
13 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin finir.
14 Monsieur Samardzic, vous avez la parole.
15 M. Samardzic (interprétation): Momo Knezevic et moi-même avons dit la
16 vérité. Oui, il est vrai que les Serbes de Croatie craignaient une
17 répétition de ce qui s'était passé en 1941; c'est la raison pour laquelle
18 ce symptôme aurait du être pris en compte et traité parce que la Croatie,
19 en 1941, n'était pas la Croatie qui a existé par la suite. Mais plutôt que
20 de traiter cette maladie, vous avez instillé la crainte ressentie par la
21 population serbe à l'époque.
22 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?
23 M. Milosevic (interprétation): Mais vous-même, Monsieur Samardzic, avez
24 écrit ce qui suit -je cite-: "Le peuple serbe de Croatie considère les
25 nouvelles autorités croates comme une réapparition du fascisme et des
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1 souvenirs durables laissés par les fascistes qui étaient les plus grands
2 alliés de l'Allemagne fasciste, qui a déclaré la guerre à la Grande-
3 Bretagne, aux Etats-Unis et à l'URSS." (Fin de citation.)
4 C'est ce que vous avez écrit vous-même dans ce document. Est-ce que c'est
5 ce que vous pensiez, ce que vous avez dit? Pourquoi parliez-vous
6 différemment à l'époque et aujourd'hui?
7 Réponse: Je ne dis rien de différent aujourd'hui. Je ne fais que confirmer
8 qu'Ante Pavelic était ce qu'il était.
9 Question: Je vous interroge à propos de la première partie de votre phrase
10 où vous dites que "le peuple serbe de Croatie a considéré les nouvelles
11 autorités croates comme une résurgence de ce type de fascisme". Et vous
12 avez été très éloquent pour expliquer cela à l'époque.
13 Est-ce que vous souffrez de démence, d'une sorte ou d'une autre,
14 aujourd'hui, pour ne plus pouvoir vous expliquer sur ce point?
15 Réponse: Ce peuple serbe de Croatie pensait que ce qui se passait allait
16 se reproduire, mais cela ne s'est pas passé, parce que la Croatie créée en
17 1991 -et je me répète sur ce point- n'était pas la même Croatie que celle
18 de 1941. Et c'est là que vous auriez dû les aider à surmonter la peur de
19 voir une effusion de sang se reproduire la base là-bas de ce qui s'était
20 passé précédemment en Croatie. Donc c'est une accusation que je porte
21 contre vous: vous auriez dû prendre des mesures pour empêcher tout cela.
22 M. le Président (interprétation): Un instant, un instant. Faites une
23 pause.
24 M. Milosevic (interprétation): Je prouve ici que vous ne dites pas la
25 vérité. Et, dans le même paragraphe, phrase suivante, vous dites à Lord
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1 Carrington, auquel vous êtes censé dire des choses exactes, vous dites le
2 contraire. Ce que vous dites, c'est que les effusions de sang en Croatie
3 auraient pu être beaucoup plus graves, incomparablement plus graves, si
4 l'armée n'avait pas empêché la multiplication des affrontements et des
5 conflits. C'est ce que vous dites dans le texte, dans ce même texte et,
6 aujourd'hui, vous accusez l'armée d'y être allée pour provoquer le conflit
7 et les affrontements.
8 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, un instant.
9 M. Milosevic (interprétation): Ce n'est pas exact, Monsieur Samardzic, ce
10 n'est pas ce que vous êtes en train de faire?
11 M. le Président (interprétation): J'interromps, je coupe le micro parce
12 que tout le monde parle en même temps; il faut ménager des pauses.
13 Alors, la question qui vous est adressée est que vous avez dit que
14 l'effusion de sang aurait été plus grave si l'armée n'était pas intervenue
15 pour empêcher les affrontements, si l'armée n'avait pas empêché la
16 multiplication des affrontements. Avez-vous dit cela? Et, si oui,
17 qu'aviez-vous à l'esprit en le disant?
18 M. Samardzic (interprétation): Oui, j'ai dit cela, Monsieur le Président.
19 C'était le 12 septembre et, à ce moment-là, je pensais encore que l'armée
20 yougoslave, l'armée qui correspondait à mes souvenirs d'enfance,
21 défendrait le patrimoine hérité du mouvement de libération yougoslave de
22 la Deuxième Guerre mondiale. C'est ce que je croyais et j'en étais
23 convaincu.
24 Cependant, plus tard, à partir du 1er octobre, avec l'évolution des
25 événements, j'en suis arrivé à comprendre que cette armée n'était plus
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1 celle que j'avais aimée et respectée par le passé. Donc c'est là que
2 réside la différence et c'est ce que l'accusé Milosevic veut dire.
3 M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur Samardzic. Mais encore
4 un point, s'il vous plait, une autre explication sur la base de ce
5 rapport.
6 Répondant à une question de Lord Carrington quant au fait de savoir
7 pourquoi l'armée détruisait des villes, vous avez répondu que l'armée
8 essayait de débloquer les casernes assiégées et encerclées dans certaines
9 villes de Croatie et qu'à ces casernes, les approvisionnements en
10 électricité, en eau et en vivres avaient été coupés. "L'armée devait agir
11 ainsi pour rejoindre ces unités." (Fin de citation.)
12 Pourquoi est-ce que vous disiez cela à l'époque qui diffère complètement
13 de ce que vous dites aujourd'hui dans votre déposition?
14 Et puis, il y a encore une phrase dans ce même texte qui donne plus de
15 précisions –je cite-: "Nous n'avons pas d'éléments nous prouvant que
16 l'armée détruit des villes, donc nous pensons que la communauté européenne
17 devrait envoyer des observateurs également dans les casernes." (Fin de
18 citation.)
19 Ça, ça vous donne une précision supplémentaire. Pourquoi est-ce que vous
20 parliez de cette façon à l'époque, si différemment d'aujourd'hui?
21 M. Samardzic (interprétation): Encore une fois, vous me trompez, vous
22 m'induisez en erreur, vous me piégiez. Ce que j'ai dit le 12 septembre,
23 c'est exactement ce que je pensais et je l'ai dit comme je le pensais.
24 Mais, quand vous avez attaqué Dubrovnik, quand vous avez commencé à
25 détruire Dubrovnik, j'ai changé de position; j'ai adopté une position
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1 consistant à penser que c'était totalement injustifié, que c'était une
2 guerre inique et, donc, j'ai dit ce que j'ai dit par la suite et agi en
3 conséquence.
4 Il est vrai qu'il y avait un certain nombre de casernes qui étaient
5 assiégées et encerclées. Il fallait que les soldats puissent sortir de ces
6 casernes, et ils en sont sortis, comme cela s'est passé à Rijeka, par
7 exemple.
8 Et ce que j'ai écrit -vous êtes d'accord avec ce que j'ai écrit, vous
9 aussi- il n'y a aucune contradiction avec cela et le fait que plus tard,
10 quand j'ai appris et vu ce qui se faisait aux environs de Vukovar et quand
11 j'ai appris ce qui se passait sur le terrain de guerre de Dubrovnik, il
12 n'y a aucune contradiction avec le fait qu'à partir de ce moment-là, j'ai
13 commencé à porter des condamnations, cela ne correspondait plus à ce en
14 quoi je croyais.
15 Mais le 12 septembre, je croyais encore que l'armée allait défendre la
16 Yougoslavie et qu'elle allait l'emporter dans cette tentative de défendre
17 le pays. Mais vous… -permettez-moi de terminer-, vous avez mené une
18 politique complètement différente. Par votre politique de la Grande
19 Serbie, vous avez mis la main sur l'armée, vous l'avez pratiquement
20 transformée en armée serbe et, après le 1er octobre, les choses ont
21 complètement changé à partir du moment où vous avez attaqué Dubrovnik.
22 Il n'y a là aucune contradiction, de quelque sorte que ce soit, et il n'y
23 a aucun mensonge de ma part. Oui, j'ai écrit le rapport dont vous venez de
24 donner lecture. Oui, j'ai discuté avec Lord Carrington en lui disant ce
25 que je lui ai dit à ce moment-là. Mais quand j'ai vu ce qui se passait aux
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1 alentours de Vukovar… pas vu d'ailleurs, mais appris. Quand j'ai appris,
2 donc, ce qui se passait aux environs de Vukovar, quand j'ai vu et appris
3 ce qui se passait aux environs de Dubrovnik, il est tout à fait normal que
4 je l'aie condamné. Et ça, les gens qui me rencontraient à l'époque l'ont
5 confirmé dans leurs ouvrages, aussi bien le Dr Kacic que le Dr Weinands.
6 Donc il n'y a aucune contradiction.
7 M. le Président (interprétation): Monsieur Samardzic, il faut que nous
8 essayions de ne pas perdre de temps.
9 M. Milosevic (interprétation): Vous n'avez pas besoin de vous justifier
10 autant pour les occasions où vous disiez la vérité. Ici, vous n'êtes pas
11 venu pour dire ce que vous disiez à l'époque et qui correspondait à la
12 vérité, vous êtes venu ici pour justifier l'Acte d'accusation.
13 Mais, je vous en prie, quand vous dites que nous avons attaqué Dubrovnik,
14 comment la Serbie pourrait-elle avoir le moindre rapport avec l'attaque
15 sur Dubrovnik? Est-ce la Serbie qui a attaqué Dubrovnik? Pourquoi avez-
16 vous qualifié la lettre du président du gouvernement, du chef du
17 gouvernement de "document cynique", etc.? Pourquoi dites-vous que la
18 Serbie aurait attaqué Dubrovnik? D'où vous vient cette idée?
19 M. le Président (interprétation): Laissez le témoin répondre. Les
20 questions se multiplient, laissez le témoin répondre.
21 M. Samardzic (interprétation): L'armée yougoslave a attaqué Dubrovnik et
22 l'armée yougoslave, à l'époque où elle a attaqué Dubrovnik, est devenue
23 une armée qui était tombée entre vos mains. Elle est devenue pratiquement
24 une armée serbe. Il est vrai qu'il y avait des réservistes du Monténégro
25 dans cette armée qui avaient été enrôlés dans l'armée au nom de l'armée
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1 yougoslave, mais ce qui s'est fait aux environs de Dubrovnik ne pouvait en
2 aucun cas être fait sans l'intervention de la Serbie et de sa direction.
3 Zelenovic lui-même -lisez-le, lisez-le vous-même- dans une lettre envoyée
4 à la Défense territoriale et à l'armée yougoslave, fera ceci et cela. Donc
5 le Président du gouvernement de Serbie dit ce que va faire l'armée
6 yougoslave et dit ce que va faire la Défense territoriale du Monténégro.
7 Donc c'est avec un ton très dominateur, le ton de quelqu'un qui donne des
8 ordres, qu'ils ont pris des décisions relatives à ce qui se passait aux
9 environs de Dubrovnik.
10 M. Milosevic (interprétation): Ceci est totalement inexact. Ceci n'est pas
11 écrit dans la lettre de Zelenovic; je reviendrai sur cette lettre demain,
12 si nous avons le temps pour cela, car ce qui est écrit dans cette lettre
13 est exactement le contraire de ce que vous venez de dire. C'est la raison
14 pour laquelle je n'ai pas envie maintenant de passer trop de temps sur
15 cette lettre.
16 Je demande que le dernier document dont nous venons de parler, la lettre
17 du ministre de la Justice et de Nikola Samardzic, soit versé au dossier;
18 le ministre de la Justice, Momo Knezevic. Merci.
19 En tout cas, vous expliquez donc dans ce document que l'armée débloque les
20 casernes, exerce des pressions; c'est ce que vous avez dit à Lord
21 Carrington?
22 M. Samardzic (interprétation): Qu'est-ce que j'ai dit à Lord Carrington?
23 M. le Président (interprétation): Un instant, un instant. Jetons un coup
24 d'œil à ceci. C'est bien ce document que vous souhaitez verser au dossier?
25 M. Milosevic (interprétation): Oui, oui, c'est le rapport de son ministre
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1 de la Justice dont j'ai cité des passages. A l'époque, il relatait les
2 événements conformément à la réalité; aujourd'hui, il nous donne une
3 version complètement opposée.
4 M. le Président (interprétation): Un instant, un instant. Demandons une
5 cote pour ce document.
6 Mme Anoya (interprétation): Pièce 48.
7 M. Milosevic (interprétation): Vous rappelez-vous, Monsieur Samardzic, que
8 c'est moi qui, lorsque les premiers obus sont tombés sur Dubrovnik, ai
9 condamné toutes ces attaques contre Dubrovnik et ce, en présence de Lord
10 Carrington et de Tudjman? J'ai dit que Dubrovnik était une ville croate et
11 qu'il était absolument insensé de bombarder ou d'attaquer Dubrovnik, une
12 ville qui était un véritable trésor, pas seulement dans la région, mais
13 pour toute la Yougoslavie. Vous rappelez-vous que j'ai dit cela?
14 M. Samardzic (interprétation): Vous pouvez avoir dit cela, mais cela
15 faisait partie de votre politique. Il n'en reste pas moins que c'est
16 l'armée commandée par vous qui a détruit Dubrovnik à l'époque. Il n'y a
17 aucun doute là-dessus. Et bien sûr, il est possible que vous ayez dit
18 cela, que vous ayez dit ces choses très atténuées à Lord Carrington en
19 privé.
20 M. Milosevic (interprétation): Nous reviendrons sur ceci plus tard, mais
21 ce n'était pas dans une conversation privée, c'était en public que j'ai
22 dit cela.
23 Alors, dites-moi, quel est le fondement de ce que vous prétendez, à savoir
24 que la Serbie a participé à cela d'une façon ou d'une autre? Est-ce qu'il
25 y a eu, à quelque moment que ce soit, un représentant de Serbie? Je veux
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1 parler du niveau officiel, parce que le reste ne m'intéresse pas. Y a-t-il
2 jamais eu un représentant officiel de Serbie qui ait prétendu autre chose
3 que de dire que l'attaque contre Dubrovnik n'était qu'une attaque digne du
4 Moyen-Age?
5 M. Samardzic (interprétation): Laissez-moi dire que cette campagne contre
6 Dubrovnik était dirigée par les officiers de l'armée yougoslave sous votre
7 commandement, des officiers serbes. Par ailleurs, le Dr Kacic, dans son
8 ouvrage, je ne sais pas si vous l'avez lu…
9 M. le Président (interprétation): Monsieur Samardzic, un instant, je vous
10 interromps. Nous ne pouvons pas parler d'un livre dont vous n'êtes pas
11 l'auteur, ce n'est qu'un témoignage de deuxième main.
12 Monsieur Milosevic, un instant, je vous prie, un instant.
13 Pouvez-vous, Monsieur le Témoin, nous aider sur le point suivant? Vous
14 dites que vous avez condamné cette attaque sur Dubrovnik. Quel est votre
15 argument sur ce plan? Je veux dire: d'après vous, qui a attaqué Dubrovnik?
16 De façon à ce que le témoin puisse ensuite répondre.
17 M. Milosevic (interprétation): Nous avons travaillé avec Lord Carrington
18 lors de cette conférence, et la nouvelle est arrivée un jour; nouvelle
19 selon laquelle certains étaient en train de pilonner Dubrovnik. Et comme
20 je viens de le dire, c'était absolument insensé; je ne l'ai pas cru. Mais
21 si quoi que ce soit de ce genre s'est réellement passé, c'est un acte qui
22 mérite d'être condamné.
23 Dubrovnik est une ville croate et ceci serait intolérable. Il ne fait
24 aucun doute qu'à quelque niveau du gouvernement yougoslave ou serbe,
25 Dubrovnik était considérée comme une ville croate. Et ces histoires au
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1 sujet de la République de Dubrovnik sont totalement insensées.
2 M. le Président (interprétation): Mais d'après vous, qui -diriez-vous- a
3 attaqué Dubrovnik?
4 M. Milosevic (interprétation): Nous en parlerons plus tard. A ce moment-
5 là, quand je suis rentré, j'ai reçu… .
6 M. le Président (interprétation): Vous ne pouvez pas nous le dire
7 maintenant? Vous n'êtes pas obligé, bien sûr, mais si vous le pouvez,
8 dites-nous qui, d'après vous, était responsable?
9 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, les explications que j'ai reçues à
10 l'époque consistaient à dire que les attaques frappaient l'armée et qu'il
11 était tout à fait inexact que l'armée ait attaqué Dubrovnik car si elle
12 l'avait fait, elle s'en serait emparée. Mais elle s'est simplement
13 efforcée de répliquer aux actions de la ZNG et d'autres unités dont nous
14 parlerons plus tard, quand je traiterai plus en détail de ces sujets.
15 Monsieur Samardzic, comme vous le savez très bien, aucun des dirigeants de
16 l'une quelconque des Républiques de la Yougoslavie ne pouvait prendre le
17 commandement de l'armée yougoslave; cela n'entrait pas dans leurs
18 attributions.
19 Monsieur Samardzic, vous avez présenté un rapport au Président de la
20 République, Momir Bulatovic, en date du 13 décembre. Dans ce rapport, vous
21 avez précisé que les positions de la Croatie étaient les plus dures et les
22 plus inébranlables, que le ministre Separovic ne manquait pas une seule
23 occasion pour accuser la Serbie et l'armée et que vous avez eu une
24 attitude critique à l'égard de la politique croate. Et vous êtes en train
25 d'affirmer tout à fait le contraire. Je suis en train de citer notamment…
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1 On dit sur cette page: "Nikola Samardzic, Momo Knezevic à l'intention de
2 Momo Bulatovic, Président de la présidence du Monténégro. Communiqué bref
3 relatif aux travaux de la conférence".
4 Et au point 5, vous dites que les positions adoptées par la Croatie sont
5 les plus dures et les plus inébranlables: "Le ministre Separovic n'a pas
6 manqué une seule occasion pour accuser la Serbie et la JNA. Il a pris la
7 parole à la conférence de presse à l'occasion de la visite de Lord
8 Carrington", et ainsi de suite.
9 Vous affirmez cela, et puis vous m'attribuez la chose par la suite, en
10 disant que c'est sur mon initiative que j'avais pris la parole, enfin
11 usurpé la parole et ainsi de suite. Par la suite, il y a eu les dires de
12 Igalo.
13 Je voudrais que cela soit versé au dossier. Je demanderais à M. l'huissier
14 d'en prendre possession.
15 Pouvez-vous nous expliquer cela, Monsieur le Témoin?
16 Réponse: Très aisément. C'est la session du mois de septembre. Comme je
17 l'ai dit auparavant, j'avais cru à l'époque que l'armée populaire
18 yougoslave allait empêcher les conflits en Yougoslavie et non pas en
19 créer. J'y croyais à l'époque et c'est ce que j'ai écrit. Et j'ai écrit la
20 vérité.
21 Le ministre agressif de la Croatie avait été à l'époque Separovic. Celui-
22 ci avait véritablement été agressif et violent dans les positions qu'il
23 avait prises et je n'ai pas été d'accord avec lui. Donc je n'ai pas changé
24 sensiblement ce que j'ai dit auparavant.
25 Lorsque la Croatie avait été attaquée de la façon dont elle avait été
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1 attaquée au niveau de Dubrovnik, c'est une chose que j'ai condamné. J'ai
2 condamné l'attaque lancée contre Dubrovnik et la façon dont cela a été
3 fait. Ce que vous êtes en train de nous raconter, à savoir que les membres
4 des ONG s'étaient dirigés vers le Monténégro et que vous étiez en train de
5 vous défendre, que c'étaient là les informations qui vous étaient
6 parvenues, ça, c'est tout à fait inexact. Je ne sais pas quelles sont les
7 informations qui vous sont parvenues, mais c'est du Monténégro que l'armée
8 yougoslave est partie; elle a fait à Dubrovnik et autour de Dubrovnik bon
9 nombre de destructions et a procédé à des pillages. J'ai condamné à
10 l'époque la chose et je la condamne actuellement. Il n'y a aucune
11 contradiction entre ce que j'ai dit à l'époque et ce que je dis à présent.
12 M. Robinson (interprétation): Cette attaque, elle a été condamnée à la
13 fois par M. Milosevic et par le témoin.
14 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, il est certain que
15 personne n'a justifié les pillages, les meurtres de personnes innocentes,
16 ni les meurtres de soldats, ni de qui que ce soit d'autre. Je suis en
17 train de dire, Monsieur Samardzic, que vous êtes en train de nous relater,
18 de nous parler d'autre chose, de nous faire un discours autre que celui
19 que vous aviez tenu à l'époque.
20 M. Samardzic (interprétation): Ce n'est pas exact. J'avais dit exactement
21 la même chose à l'époque et maintenant.
22 Question: Monsieur Samardzic, répondez-moi à la question pour ne pas
23 perdre de temps. Voilà votre discours à la Conférence plénière de La Haye,
24 en date du 19 septembre.
25 Réponse: Le 15.
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1 Question: Le 19. Je vais être bref.
2 Vous êtes en train de dire ici: "La tragédie du peuple serbe en Croatie et
3 en Bosnie pendant les deux guerres mondiales et -je souligne- l'effusion
4 de sang actuelle en Croatie sont les principales causes de cette crise
5 yougoslave, de la tragédie et de la crise de Yougoslavie. Et sans résoudre
6 ces questions-là, il ne saurait y avoir de solution à la crise en
7 Yougoslavie et à la question serbe en Croatie."
8 Ce sont là vos propres termes, Monsieur Samardzic, à cette session
9 plénière. Pourquoi dites-vous maintenant tout à fait le contraire?
10 Pourquoi tenez-vous un discours tout à fait contraire à ce que vous aviez
11 fait comme discours, en votre qualité de ministre, pour expliquer les
12 causes de la crise?
13 Réponse: Il n'est pas exact de dire que je dis le contraire. Je répète une
14 fois de plus que la population serbe en Croatie et en Bosnie, grâce à leur
15 direction -et vous n'étiez pas encore né à l'époque-, a connu les
16 tragédies les plus grandes pendant la Première et la Deuxième guerre
17 mondiale. C'est exact, je l'ai écrit à l'époque et je ne puis que le
18 confirmer aujourd'hui.
19 Il est tout aussi exact de dire que la population serbe, en Croatie et en
20 Bosnie, a connu une grande tragédie grâce à votre politique et à votre
21 conduite politique. Il n'y a aucune contradiction entre l'un et l'autre.
22 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, vous n'arrêtez pas de
23 répéter, en dépit du fait que tous les arguments présentés vous démentent,
24 vous répétez sans cesse une phrase: "ma politique". Et dans toutes les
25 citations dont je vous ai donné lecture, vous parlez des causes de la
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1 guerre qui sont tout à fait autres.
2 Monsieur, je voudrais que ce communiqué et votre discours à la Conférence,
3 l'un et l'autre, soient versés au dossier en leur qualité de documents
4 officiels.
5 Pour ne pas perdre davantage de temps, je voudrais vous demander la chose
6 suivante: le 20 septembre 1991, à la conférence de presse qui s'est tenue
7 à La Haye…
8 M. le Président (interprétation): Plus tard pour le versement. Plus tard.
9 M. Milosevic (interprétation): Vous avez dit que la tradition de l'armée
10 populaire yougoslave date de sa résistance héroïque au fascisme et ainsi
11 de suite. Et par la suite, vous dites: "C'est la raison pour laquelle la
12 délégation monténégrine rejette toutes les diffamations à l'intention de
13 l'armée populaire yougoslave". Vous êtes en train de diffamer l'armée
14 yougoslave.
15 Puis vous dites dans ce texte: "Nous avons bon nombre de faits et de
16 preuves abondant dans le sens de l'assertion aux termes de laquelle la JNA
17 a empêché bon nombre d'effusions de sang entre les citoyens de l'ex-
18 Yougoslavie. La JNA, dans la plupart des cas, n'a pas répondu aux
19 provocations et aux attaques lancées contre elle, et ceci pour éviter la
20 perte de vies humaines et des destructions matérielles. L'armée yougoslave
21 ne détruit pas les villes croates. Si, sur une église, les forces croates
22 placent un tireur isolé ou un tireur au bazooka, c'est là la profanation
23 de ces installations religieuses; ce n'est pas la JNA qui fait cela, ce
24 sont les troupes croates."
25 M. le Président (interprétation): Je vais vous interrompre. Nous devons
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1 interrompre ce type de lecture; le témoin ne peut pas absorber tout cela.
2 Monsieur Samardzic, vous voyez ce qui est suggéré ici. Apparemment, c'est
3 ce que vous auriez dit lors d'une conférence de presse qui s'est tenue le
4 20 septembre à La Haye, vous auriez dit -je parcours ceci-: "La délégation
5 yougoslave rejette toutes les tentatives visant à faire porter le blâme
6 par la JNA". Vous avez dit: "Apparemment, ceci avait permis d'empêcher un
7 conflit beaucoup plus généralisé et l'effusion de sang. Elle n'avait pas
8 répondu aux attaques pour éviter qu'il y ait davantage de victimes,
9 qu'elle n'avait pas détruit de villes yougoslaves". Et puis, il y a
10 d'autres allégations à propos "des effectifs croates qui auraient placé
11 une mitrailleuse dans un clocher d'église".
12 Est-ce que vous avez dit quelque chose dans ce sens-là ou pas? Si ce n'est
13 pas le cas, vous pouvez de toute façon nous donner une explication.
14 M. Samardzic (interprétation): Oui, j'ai dit cela. Et je l'ai dit dans ce
15 sens-là parce que je croyais profondément à l'époque que l'armée
16 yougoslave ne ferait pas ce qu'elle a commencé à faire dix jours après
17 cela; et je parle là du 20 septembre. La guerre n'avait pas encore
18 commencé pour Dubrovnik.
19 S'agissant des événements qui avaient cours autour de Vukovar, je n'en
20 étais pas au courant. Et je répète une troisième fois à l'intention de
21 l'accusé Milosevic que je croyais encore à l'époque que l'armée yougoslave
22 allait empêcher l'effusion de sang en Yougoslavie; j'y croyais
23 profondément. J'ai été déçu lorsque j'ai vu ce qui se faisait autour de
24 Dubrovnik.
25 Je répète une fois de plus: je suis issu d'une famille de partisans et,
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1 lorsque j'étais tout petit, j'ai retenu ce qu'avait été la lutte de
2 libération nationale et ce qu'avait été l'armée. Je croyais donc
3 profondément en notre armée. Mais lorsque j'ai vu, à Dubrovnik, qu'une
4 brigade, la 5e Brigade monténégrine qui porte fièrement le nom de 5e
5 Brigade du Monténégro, lorsque vous avez envoyé le voïvodat Seselj pour
6 faire une inspection des troupes, lorsque vous avez permis que les gens
7 portent des cocardes…
8 M. le Président (interprétation): Monsieur Samardzic, essayez de répondre
9 de façon concise à la question qui vous est posée.
10 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, pourquoi prononcez-vous
11 des contre-vérités de cette taille? Là, l'armée yougoslave et quelque
12 instance officielle que ce soit de Serbie et la police de la Serbie, sur
13 son territoire, n'ont jamais porté des insignes autres que des insignes
14 officiels et aucun insigne du genre de ceux que vous êtes en train de
15 citer.
16 Pour ce qui est des différents partis au Monténégro, le Parti populaire et
17 les partis variés que vous avez mentionnés en Serbie, vous savez fort bien
18 que c'étaient des partis de l'opposition, tant en Serbie qu'au Monténégro.
19 Par conséquent, ces partis n'avaient et ne pouvaient avoir quelque rôle
20 que ce soit pour ce qui est du fonctionnement de l'armée yougoslave ou
21 pour ce qui est de la police du Monténégro ou de la police de Serbie ou de
22 quelque autre instance officielle de ces Républiques. C'est une
23 contrevérité. Pourquoi êtes-vous en train de monter cela de toutes pièces?
24 Est-ce que vous avez vu Seselj effectuer une inspection des unités des
25 troupes?
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1 M. Samardzic (interprétation): J'ai vu Seselj à la télévision et cela a
2 été repris par les médias. Et j'en suis encore stupéfait. Il bénéficie de
3 nos jours du soutien pour devenir Président de la Serbie et il est
4 voïvodat chetnik?
5 M. Milosevic (interprétation): Mais, Monsieur Samardzic, je ne pense pas
6 que la Serbie soit menacée par les chetniks; elle est menacée par les
7 Oustachis, ceux qui font des élections montées et qui travaillent pour le
8 compte des agresseurs...
9 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, nous n'allons pas
10 nous aventurer dans la politique actuelle.
11 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur May. Nous avons entendu, je
12 pense fort bien, que tout ce qu'il a constaté, les choses étaient tout à
13 fait exactes à l'époque. Et, maintenant, M. Samardzic a dit qu'en effet,
14 il en avait été ainsi jusqu'au moment où il s'était rendu compte du fait
15 que les unités de la JNA s'étaient attaquées à Dubrovnik, chose qui n'est
16 pas exacte parce que Dubrovnik n'a pas été détruite.
17 Et, étant donné qu'il trouve des explications dans le mois de septembre,
18 je vais me déplacer vers le mois de décembre.
19 Voici un texte qui émane de vous, Monsieur Samardzic, qui a été rédigé à
20 New York, le 6 décembre de cette même année. Et dans ce texte, il est dit
21 ce qui suit: "Aspect historique de l'alliance entre la Serbie et le
22 Monténégro -c'est le titre-: Le Monténégro ne nie pas, mais souligne son
23 alliance avec la Serbie lorsqu'il s'agit de la protection des intérêts et
24 de la vie même des vies serbes en Croatie."
25 Vous rédigez cela au mois de décembre, je précise.
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1 Puis vous dites: "Les pouvoirs croates actuels sont en train de procéder à
2 un génocide à l'égard de la population serbe et ce serait le troisième
3 génocide perpétré contre ce qui reste de ce peuple."
4 Et ce que vous avez rédigé à l'époque, Monsieur Samardzic, était exact,
5 mais vous êtes en train de dire autre chose maintenant. Vous le disiez à
6 l'époque...
7 M. le Président (interprétation): Donnez le temps au témoin de répondre.
8 Monsieur le Témoin, on vous pose une question à l'encontre d'une
9 déclaration que vous auriez faite le 6 décembre à New York, au moment où
10 vous soulignez l'existence alliance entre la Serbie… Vous parliez de la
11 nécessité de protéger le peuple serbe en Croatie. Pourriez-vous nous aider
12 sur ce point?
13 M. Samardzic (interprétation): Oui, ceci est un montage, un faux. Je n'ai
14 pas fait de déclaration à New York parce que j'étais à New York en
15 délégation avec le Président Bulatovic. Et si quelqu'un avait fait des
16 déclarations, c'est bien lui, pas moi.
17 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, je suis en train de
18 parler de votre texte en votre qualité de ministre accompagnant le
19 Président et qui rédige son aide-mémoire officiel pour ses interventions.
20 C'est votre texte à vous et il porte la date du "6 décembre 1991, New
21 York, Nikola J. Samardzic". C'est votre texte à vous!
22 M. le Président (interprétation): Montrez-lui ce texte, qu'il le voie.
23 M. Milosevic (interprétation): Aucun problème, comme vous le savez, à
24 prouver la chose. Et vous pouvez, autant que vous le voudrez, nier ce qui
25 ne vous plaît pas. Mais c'est la quatrième des pièces à conviction. Versez
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1 tout cela comme pièce à conviction et moi, je n'ai aucun problème pour ce
2 qui est…
3 M. le Président (interprétation): Non, ce ne sera pas versé au dossier
4 tant que nous n'aurons pas entendu la réaction du témoin. S'il accepte ce
5 document comme étant le sien, nous allons peut-être autoriser le
6 versement.
7 (Intervention de l'huissier.)
8 (Le témoin consulte le document.)
9 M. Samardzic (interprétation): Ceci n'est pas un texte à moi, mais je dois
10 vous apporter une explication. J'avais présenté au Président Bulatovic des
11 faits et il avait pris des notes concernant ces faits en corrélation avec
12 la Première et la Deuxième Guerre mondiale, des faits qui étaient
13 importants pour les relations entre la Serbie et le Monténégro, et dans
14 les Balkans d'une manière générale. Je lui ai présenté des faits
15 concernant les 14 points présentés par le Président Wilson des Etats-Unis
16 d'Amérique.
17 M. Milosevic (interprétation): Cela y figure?
18 M. Samardzic (interprétation): Oui, cela y figure et c'est ce que j'ai
19 dit, mais moi, je n'ai pas rédigé, je n'ai pas dit… Je crois que là, on
20 est en train de me piéger pour affirmer que les pouvoirs actuels en
21 Croatie étaient génocidaires. Et j'ai précisé qu'il y avait eu des
22 autorités enclines au génocide en 1941. C'étaient les pouvoirs d'Ante
23 Pavelic qui avaient été un régime marionnette, fantoche, de Hitler.
24 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît.
25 Pourriez-vous nous dire ceci: vous examinez un document; on dit de ce
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1 document qu'il est un texte, mais qu'est-ce qu'il est censé être?
2 M. Samardzic (interprétation): A part certains faits historiques que
3 j'avais présentés à Bulatovic, il avait pris des notes et c'est un
4 document de ce genre. Mais je n'ai jamais signé ceci, ce n'est pas moi qui
5 ai rédigé ceci. Et il y a ce texte où l'on fait état de ces faits
6 historiques de la Première et de la Deuxième Guerre mondiale et où il y a
7 une constatation disant que les autorités en place en 1990 étaient portées
8 sur le génocide.
9 Je n'ai jamais dit cela. J'ai présenté à Bulatovic des faits historiques
10 dans le courant de notre vol aérien jusqu'aux Etats-Unis et j'avais
11 insisté ou plutôt je lui avais proposé…
12 M. Robinson (interprétation): Est-ce qu'il y a une signature apposée à ce
13 texte?
14 M. Samardzic (interprétation): Personne n'a signé cela, non. C'est juste
15 rédigé et je suppose qu'il s'agit ici…, que Momir a rédigé cela à
16 l'ambassade ou ailleurs, et qu'il avait préparé cela pour faire un exposé.
17 Il a fait un exposé, en effet, et il a présenté certains faits historiques
18 dont j'avais parlé; il les avait repris. Mais je n'ai jamais, au mois de
19 décembre, rédigé un texte où il aurait été dit que les autorités croates,
20 en 1990, étaient enclines ou portées, favorables au génocide.
21 M. Milosevic (interprétation): Avez-vous affirmé ou est-ce que ce que vous
22 êtes en train de nous dire que M. Momir Bulatovic avait placé en bas de la
23 page, lui-même, la date du 6 décembre 1991 et que c'est lui qui aurait
24 placé "Nikola J. Bulatovic"? Donc Bulatovic aurait pris des notes de ce
25 que vous lui avez raconté dans l'avion et, par la suite, il aurait mis en
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1 bas de page vos nom et prénom sur des notes que vous lui auriez
2 communiquées par voie verbale? Mais savez-vous que la délégation tout
3 entière peut témoigner ici du fait que c'est vous qui lui avez remis ce
4 texte en tant qu'aide-mémoire pour son exposé là-bas?
5 M. le Président (interprétation): Peu importe. Peu importe ici, en ce qui
6 concerne la totalité de la délégation.
7 Est-ce que votre nom apparaît, figure au bas de ce document, Monsieur
8 Samardzic?
9 M. Samardzic (interprétation): Oui, en caractères d'imprimerie, il est
10 inscrit: "Nikola Samardzic". Cependant, moi, je n'ai pas signé cela. Je
11 répète, une fois de plus, que j'avais présenté à Momir Bulatovic des faits
12 historiques relatifs à la Première et à la Deuxième Guerre mondiale; je
13 les présenterai, s'il le faut, une fois de plus et je les maintiens. J'ai
14 souvent parlé de la chose, non seulement dans l'avion; j'avais
15 publiquement parlé de ces faits-là à bon nombre d'occasions.
16 M. le Président (interprétation): Pourriez-vous nous dire de quelle façon
17 votre nom en est venu à figurer au bas de ce document?
18 M. Samardzic (interprétation): Eh bien, tel que le texte est rédigé, je ne
19 saurais vous aider. Je ne me souviens pas du fait de savoir qui a écrit.
20 Je me souviens des faits historiques que j'avais présentés à Momir
21 Bulatovic et je me souviens des faits historiques que j'avais exposés moi-
22 même à bon nombre d'endroits.
23 Je m'emploie en faveur d'un Monténégro indépendant et, très souvent, j'ai
24 précisé que le Président des Etats-Unis s'était employé en faveur d'un
25 Monténégro indépendant, le Président Wilson. Et sur les 14 points avancés
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1 par le Président Wilson, il est clairement fait état de la nécessité de
2 faire du Monténégro un Etat indépendant.
3 Et, Monsieur le Président et Messieurs les Juges, puisqu'on en est là,
4 permettez-moi d'ajouter encore quelque chose: les 14 points avancés par le
5 Président Wilson, c'est le programme du monde démocratique présenté au
6 Congrès américain en date du 8 janvier 1918, donc trois mois après la
7 révolution d'octobre en Russie.
8 M. le Président (interprétation): Monsieur Samardzic, je me dois de vous
9 arrêter ici. On ne peut pas commencer une leçon d'histoire ici. Est-il
10 possible d'examiner le document?
11 M. Milosevic (interprétation): Tous les faits mentionnés par M. Samardzic
12 se retrouvent dans ce texte. Ce sont les thèses et l'aide-mémoire à
13 l'intention de son chef pour la rencontre à New York.
14 (Les Juges se consultent sur le siège.)
15 M. Robinson (interprétation): Monsieur Samardzic, êtes-vous en train de
16 dire que votre nom, lequel figure à la page 4, au haut de la page, a été
17 écrit par quelqu'un d'autre, a été dactylographié par quelqu'un? C'est ça
18 que vous nous dites?
19 M. Samardzic (interprétation): Certainement! Parce que je n'ai pas rédigé
20 ce texte et je ne l'ai pas accepté. Et je tiens à répéter encore une fois
21 que les faits historiques présentés dans ce texte émanent de moi. Je les
22 ai avancés à plusieurs endroits et, à l'occasion de notre vol vers New
23 York, je les ai présentés au Président Bulatovic. Je les ai avancés
24 auparavant encore. Je tiens à maintenir les faits historiques, mais je
25 n'ai pas affirmé à ce moment-là que les autorités en Croatie, à cette
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1 époque, étaient génocidaires. J'avais présenté des faits historiques, mais
2 de là à savoir qui a rédigé ce texte-là, j'imagine que c'est quelqu'un
3 dans les services, partant de ce que j'avais dit à l'intention du
4 Président Bulatovic. Parce qu'il y avait dans cette délégation plusieurs
5 personnes et il n'y aura personne pour confirmer que c'est moi qui ai
6 rédigé cela. Mais j'ai, en effet, parlé de la Première Guerre mondiale et
7 de la Deuxième guerre mondiale.
8 M. Robinson (interprétation): Je vous remercie de cette explication.
9 Nous allons donner une cote d'identification à ce document, dont nous
10 allons demander la traduction.
11 M. le Président (interprétation): Oui, nous allons autoriser une cote
12 d'identification.
13 Et, dans l'intervalle, Monsieur Milosevic, vous vouliez le versement d'un
14 autre document: n'était-ce pas une déclaration en date du 20 septembre?
15 M. Milosevic (interprétation): (Hors micro.)
16 M. le Président (interprétation): Veillons à ce que ceci soit versé au
17 dossier dans l'ordre. Voyons ce que nous avons maintenant reçu.
18 Mme Anoya (interprétation): S'agissant du document en date du 30 septembre
19 1991, ce sera la pièce de la défense 49. S'agissant du document en date du
20 19 septembre 1991, ce sera la pièce de la défense n°50. Et le document du
21 12 et 13 septembre 1991 portera la cote 51, D51. Dernier document en date
22 du 6 décembre 1991, il recevra une cote d'identification, en l'occurrence
23 la cote D52.
24 M. le Président (interprétation): Merci.
25 Poursuivez, Monsieur Milosevic.
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1 M. Milosevic (interprétation): En outre, outre ces documents que vous avez
2 remis vous-même à votre Président, en qualité d'aide-mémoire pour les
3 interventions qu'il devait avoir…
4 M. le Président (interprétation): Ne polémiquez pas, le témoin a déjà dit
5 ce qu'il voulait dire.
6 M. Milosevic (interprétation): Bien, bien.
7 Monsieur Samardzic, vous souvenez-vous du fait de lui avoir donné
8 également un texte intitulé "Questions qui pourraient soulevées à
9 l'intention du Président Bulatovic, lors de sa visite aux USA, et brèves
10 thèses de réponses possibles"? Vous souvenez-vous de cela, Monsieur
11 Samardzic?
12 Vous aviez accompagné votre Président. Vous aviez rédigé de brèves thèses
13 pour ce qui est des questions qu'on pouvait lui poser et des réponses
14 qu'il pouvait y apporter.
15 Réponse: Mais donnez-moi ces thèses et je vais vous répondre. Je ne peux
16 pas vous répondre…
17 Question: Je vais vous poser plusieurs questions d'abord. Puis je vous le
18 donnerai également. Il est authentique aussi: "République du Monténégro à
19 ministère des Affaires étrangères. Questions susceptibles d'être posées au
20 Président Bulatovic à l'occasion de sa visite. Thèses brèves concernant
21 les réponses qu'il pourrait y faire".
22 Titograd. Mois de décembre, donc juste avant la visite. Vous êtes en train
23 de préparer la visite de votre Président -je ne peux pas tout vous lire-
24 et vous avez une question: "Quelles sont les causes de la crise
25 yougoslave?".
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1 Et puis, il y a des tirets en dessous: "-Les nouvelles autorités en
2 Croatie sont en train de procéder à un génocide à l'égard du peuple serbe.
3 Deuxième tiret: "-La mémoire collective du peuple serbe, s'agissant du
4 génocide perpétré en 1941, est encore très forte et présente dans l'esprit
5 du peuple serbe.
6 Troisième tiret: "-Compte tenu de la mémoire collective et du génocide de
7 1941 et du pouvoir actuel, le peuple serbe ne veut pas rester vivre en
8 Croatie indépendante".
9 Quatrième tiret: "-Si le peuple croate a le droit de partir, de quitter la
10 Yougoslavie, le peuple serbe en Croatie a également le droit de rester en
11 Yougoslavie".
12 Ce sont là des thèses brèves que vous avez préparées à l'intention de la
13 visite de votre Président aux Etats-Unis. Vous êtes en train de parler du
14 contraire, et vous aviez affirmé ce qu'il avait affirmé lui-même et ce
15 qu'affirmait toute la politique de la République.
16 M. le Président (interprétation): Ne tenez pas compte du commentaire.
17 M. Milosevic (interprétation): Bien. Question suivante: y a-t-il des
18 différences, des divergences entre les positions du Monténégro et de la
19 Serbie pour ce qui est de la solution de la crise? Vos thèses de réponses
20 sont les suivantes:
21 "Les positions de base sont conjointes et identiques. Les divergences
22 existent pour ce qui est des modalités, des cheminements de solution à
23 adopter. Le Monténégro est une unité sur pied d'égalité dans la Fédération
24 yougoslave et il est tout à fait normal qu'elle ait des positions qui sont
25 les siennes.
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1 Est-ce qu'il en a été ainsi, Monsieur Samardzic? Etait-ce là les thèses
2 que vous aviez préparées à l'intention de votre Président de la
3 République?
4 M. le Président (interprétation): Laissez le temps au témoin de répondre.
5 M. Samardzic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
6 je voudrais bien voir ce document pour pouvoir répondre.
7 M. Milosevic (interprétation): Je vais vous le donner.
8 M. le Président (interprétation): Nous allons examiner le document.
9 M. Milosevic (interprétation): Mais je voudrais poser encore quelques
10 questions portant sur ce document parce qu'il y a beaucoup de choses.
11 M. le Président (interprétation): Mais attendez, vous avez posé vos
12 questions.
13 M. Milosevic (interprétation): "-Question: Pourquoi il n'y a que des
14 réservistes monténégrins qui font la guerre autour de Dubrovnik?". Et vos
15 quelques thèses avancées: "Alors, autour de Dubrovnik, il règne une paix
16 relative. Et je parle du mois de décembre. On respecte le cessez-le-feu
17 sur ce théâtre de guerre. Le cœur historique de Dubrovnik n'a pas été
18 détruit et endommagé".
19 "-Question suivante: Est-ce que vous pensez que le siège de Dubrovnik est
20 nécessaire et rationnel du point de vue militaire et humanitaire?"
21 Vous répondez: "La vérité, c'est qu'il n'y a pas de caserne militaire à
22 Dubrovnik. Mais cette intervention est due aux interventions autour de
23 Prevlaka et l'intention des formations militaires croates avait été celle
24 de s'attaquer à toutes les casernes de la JNA, et les activités autour de
25 Dubrovnik, les activités militaires autour de Dubrovnik ont probablement
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1 une logique qui est celle de réduire les pressions des unités
2 paramilitaires sur les autres casernes de la JNA sur le territoire de la
3 Croatie.
4 La JNA s'efforce, avec tous ses potentiels, de ne pas endommager le noyau
5 historique de la ville de Dubrovnik, s'efforce de normaliser la vie à
6 Dubrovnik et, pour l'une et l'autre de ces assertions, il est bon nombre
7 de preuves".
8 Ce sont là les thèses que vous avez présentées.
9 M. le Président (interprétation): Je crois que vous avez été suffisamment
10 long. Laissez le témoin voir ce document.
11 M. Milosevic (interprétation): Voyez donc, Monsieur Samardzic, les
12 questions que vous aviez prévues, comme étant des questions pouvant être
13 posées à votre Président.
14 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, j'ai débranché votre
15 micro parce que votre question était bien assez longue. Laissons le temps
16 au témoin de voir ce document. Il ne reste que cinq minutes avant la fin
17 de l'audience et nous allons entendre la réponse du témoin.
18 (Le témoin prend connaissance du document.)
19 M. Samardzic (interprétation): Je viens d'examiner le document; ce n'est
20 pas moi qui ai rédigé ce document et je n'ai rien à voir avec ce document.
21 Il est probable et il se peut que quelqu'un ait rédigé cela au niveau du
22 ministère. Il y avait des collaborateurs au sein du ministère qui avaient
23 directement coopéré avec le Président Bulatovic. Il est très probable que
24 ce soit l'un de ceux-là qui ait rédigé cela.
25 Je n'ai pas rédigé, je n'ai pas signé cela. Il est dit ici que cela émane
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1 de Nikola Samardzic; il est des positions qui sont les miennes, mais je
2 n'ai pas participé à l'élaboration de ce texte.
3 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic...
4 M. le Président (interprétation): Restituez le texte à l'accusé, je vous
5 prie.
6 (Intervention de l'huissier.)
7 M. Milosevic (interprétation): S'agit-il là d'un texte authentique du
8 ministère des Affaires étrangères du Monténégro?
9 M. Samardzic (interprétation): Je ne sais pas, je ne peux pas vous le
10 confirmer. Ce n'est pas un texte qui émane de moi.
11 Aujourd'hui, je ne suis plus ministre, mais je sais que ce n'est pas moi
12 qui ai rédigé cela.
13 Permettez-moi encore une chose; je dois dire encore ce qui suit: vous êtes
14 en train de manipuler des faux importants et je parle de ce procès-verbal
15 de cette session du Gouvernement du 1er octobre.
16 Vous niez qu'il y ait eu cette session partant des procès-verbaux, mais je
17 vous affirme que le sténogramme entier des sessions du Gouvernement de
18 l'époque, y compris la session du 1er octobre, ont été imprimés dans la
19 revue "Moniteur". Et si je mens, la revue "Moniteur" ment aussi, qui a
20 publié tout cela.
21 Vous êtes donc en train de dire qu'il n'y a pas eu de session et que tous
22 ces documents que vous êtes en train d'utiliser sont des faux.
23 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, vous êtes en train de
24 nous dire que les procès-verbaux des sessions du gouvernement du
25 Monténégro que l'on m'a remis sont des faux, n'est-ce pas?
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1 Réponse: Si quelqu'un l'affirme, et c'est vous qui l'affirmez, à savoir
2 qu'il n'y a pas eu de session du Gouvernement le 1er octobre avec des
3 généraux, alors c'est un faux. Il y a eu une réunion.
4 Et toute autre assertion, avec quelque document que ce soit, autre, ne
5 saurait être qu'un faux.
6 Je vous prie de vous pencher sur le journal "Moniteur" de cette époque:
7 ils ont publié dans plusieurs numéros les sténogrammes des sessions du
8 Gouvernement.
9 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Samardzic, je n'ai pas du tout
10 suivi les sessions du Gouvernement du Monténégro; j'espère que tout le
11 monde pourra me croire sur parole. Je me suis juste procuré les procès-
12 verbaux qui sont des documents officiels du Gouvernement du Monténégro et
13 je vous ai donné lecture de la déclaration du Président de la République
14 de l'époque, M. Momir Bulatovic, qui faisait référence à cette réunion
15 dont vous avez parlé vous-même, à laquelle vous êtes arrivé en retard,
16 comme vous l'avez dit. Et je vous ai donné lecture de ce qui a été dit à
17 deux sessions consécutives.
18 M. le Président (interprétation): Mais on a déjà parlé de ces procès-
19 verbaux!
20 M. Milosevic (interprétation): Je voudrais savoir autre chose, Monsieur
21 Samardzic. Etant donné que vous avez eu ceci entre les mains -vous êtes
22 ici un témoin qui témoigne sous serment-, vous venez d'avoir ce document
23 entre vos mains, c'est un document du ministère des Affaires étrangères du
24 Monténégro; est-ce que vous êtes en train d'affirmer que ceci n'est pas un
25 document authentique émanant du ministère des Affaires étrangères du
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1 Monténégro? Dites-moi par oui ou non si c'est le cas et qu'on aille de
2 l'avant.
3 M. Samardzic (interprétation): Je ne maintiens pas ce qui est dit dans ce
4 document, il n'émanait pas de moi à l'époque ni d'aujourd'hui. Maintenant,
5 de là à savoir si quelqu'un au ministère l'a rédigé ou pas, ça, je ne sais
6 pas le nier, je ne peux pas le nier.
7 Question: Monsieur Samardzic, vous n'êtes pas en mesure de nier, mais
8 avez-vous été ministre des Affaires étrangères? Qui avait été ministre des
9 Affaires étrangères?
10 Réponse: Je l'avais été.
11 M. Milosevic (interprétation): Etiez-vous…
12 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le témoin a répondu;
13 il a répondu en disant qu'il ne savait rien de cela.
14 Mais n'allons pas plus loin sur ce point. Si, en temps utile, vous voulez
15 prouver quelque chose en rapport avec ce document, vous pouvez citer vos
16 propres témoins. Le témoin ne peut pas aller plus loin que ce qu'il a fait
17 jusqu'à présent.
18 Il faut maintenant lever l'audience. Nous ne pouvons pas poursuivre. Il
19 est déjà 16 heures 10; vous avez disposé de plus de trois heures jusqu'à
20 présent et vous aurez encore trois quarts d'heure demain.
21 M. Milosevic (interprétation): Je vous demande de rallonger le temps
22 imparti. J'insiste pour qu'on me donne plus de temps.
23 M. le Président (interprétation): Nous verrons, nous verrons. Pour
24 l'instant, suspension.
25 Nous levons l'audience jusqu'à demain matin, 9 heures 30.
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1 (L'audience est à 16 heures 12.)
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