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1 (Vendredi 18 octobre 2002.)
2 (L'audience est ouverte à 9 heures 03.)
3 (Audience publique.)
4 (Le témoin, M. Jovan Dulovic, est déjà dans le prétoire.)
5 (Matières relatives aux éléments de preuve.)
6 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
7 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, si je puis me
8 permettre, avant le début de l'interrogatoire, j'aimerais vous informer au
9 sujet de ce qui s'est passé avec l'enquêteur.
10 Un enquêteur du Bureau du Procureur a parlé à la femme de M. Dulovic hier
11 et ce matin; et la nature de la menace qui pèse sur Mme Dulovic est la
12 suivante: c'est un appel téléphonique qui a été adressé à un membre de la
13 famille de M. Dulovic et qui a utilisé un langage injurieux et insultant
14 pour menacer cette personne. Je tiens à dire que le ministre Mihaljovic et
15 Nenad Milic sont immédiatement intervenus sur cette question, et je pense
16 que ceci a sans doute eu pour effet de freiner un peu les choses. A
17 Belgrade, on sait que des menaces ont été proférées contre M. Dulovic,
18 c'est la raison pour laquelle nous avons demandé un huis clos.
19 J'inviterai la Chambre, dans la mesure où elle le juge utile, à
20 reconnaître en public l'engagement de M. Mihaljovic qui a garanti que tout
21 témoin coopérant avec le Tribunal et comparaissant devant le Tribunal
22 bénéficiera des mesures de protection nécessaires en cas de menaces.
23 M. le Président (interprétation): Très bien. Nous allons examiner la
24 question.
25 Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
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1 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Jovan Dulovic, par l'accusé M.
2 Milosevic.)
3 M. Milosevic (interprétation): Nous nous sommes arrêtés sur cette
4 déclaration que vous avez faite au Tribunal.
5 Les auteurs de crime sont considérés comme inconnus, mais vous avez
6 mentionné une certaine Dragica. Et en page 5 de votre déclaration
7 préalable, vous dites ce qui suit -je cite-: "Je n'ai jamais appris le nom
8 de famille ou le prénom exact de cette femme et je ne sais pas où elle se
9 trouve, mais je sais qu'elle était très connue, à cette époque, dans cette
10 partie du Vukovar." (Fin de citation.)
11 Donc même lorsqu'il est question de cette autre personne, vous ne savez
12 pas non plus de qui il s'agit. Dans ces conditions, est-il anormal, à
13 votre avis, que les instances judiciaires aient mené une enquête au sujet
14 de ces personnes dont l'identité était inconnue, afin de permettre leur
15 identification?
16 M. Dulovic (interprétation): Je ne suis pas rentré dans ces questions.
17 J'ai dit ce que j'avais à dire et je maintiens ce que j'ai dit, à savoir
18 que Dragica était connue de tous; elle est originaire de Novi Sad. Je ne
19 sais pas ce qu'a dit M. Sljivancanin ou ce qu'ont dit d'autres personnes,
20 mais il est très facile de confirmer qui a fait cela et sur l'ordre de qui
21 il l'a fait.
22 Question: Monsieur Dulovic, vous connaissez sans doute les explications
23 qui ont été fournies dans cette affaire, à savoir que ce groupe de
24 prisonniers provenait des rangs de la population et il s'agissait de
25 citoyens armés qui constituaient une foule en furie. Personne ne justifie
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1 leur meurtre, mais des armes ont été utilisées pour les… des armes ont été
2 enlevées aux soldats qui les possédaient et ce n'est pas l'armée qui a
3 fait cela. Je pense qu'il est clair à vos yeux que ce qui s'est passé, que
4 ces explications sont claires à vos yeux, à moins qu'elles ne le soient
5 pas?
6 Réponse: Il ne m'appartient pas de dire ce qui est clair ou ce qui ne
7 l'est pas. J'ai dit ce que je savais, ce que j'ai entendu et découvert, et
8 je sais que ces personnes ont circulé en liberté pendant des mois après
9 cette affaire.
10 Question: De quelles personnes parlez-vous: les personnes de la région ou
11 d'autres personnes? Vous dites que vous ne les connaissez pas et cette
12 femme, vous dites que vous n'avez pas réussi à déterminer son prénom et
13 son nom de famille; est-ce que vous parlez de ces personnes?
14 Réponse: Les personnes dont je parle sont les personnes qui ont commis ces
15 actes.
16 M. Milosevic (interprétation): Il n'est pas clair, à vos yeux, que ceci
17 n'a pas été le fait du commandant Sljivancanin ou du général Mrksic? Vous
18 dites dans votre déclaration préalable…
19 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, encore une fois vous
20 tirez partie de l'occasion qui vous est donnée pour polémiquer et
21 présenter votre thèse. Il n'appartient pas au témoin d'interpréter des
22 éléments de preuve; c'est à nous que revient cette tâche.
23 Vous pouvez demander au témoin ce qu'ont dit ces gens, bien sûr, mais ce
24 qui est clair ou ne l'est pas relève des éléments de preuve et il
25 appartient au Tribunal d'en décider; ce n'est pas une question à poser au
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1 témoin.
2 M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur May.
3 Monsieur Dulovic, vous dites dans votre déclaration préalable que vous
4 n'avez pas vu Mrksic au cours de votre séjour à Vukovar. "J'ai entendu
5 -dites-vous- qu'il se trouvait à Negoslavci; c'est la seule chose que j'ai
6 entendue. Je n'ai pas non plus parlé à qui que ce soit de ce sujet".
7 Savez-vous que Mrksic n'était même pas en Slavonie, à l'époque, il était à
8 Belgrade?
9 M. Dulovic (interprétation): J'ai dit que je n'ai pas vu Mrksic, mais que
10 j'ai entendu dire qu'il se trouvait à Negoslavci.
11 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Monsieur Dulovic, voyons un peu
12 où nous en sommes. Je cherche à retrouver votre autorisation de séjour,
13 votre permis de séjour.
14 M. le Président (interprétation): Quel document? Le document de Vukovar?
15 C'est la pièce à conviction 342, intercalaire 1.
16 M. Milosevic (interprétation): Oui, oui, à Vukovar. A Vukovar. Voilà,
17 voilà, je l'ai.
18 M. le Président (interprétation): Attendez que ce document soit remis au
19 témoin. Un instant, je vous prie.
20 (Intervention de l'huissier.)
21 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, dans le texte de cette
22 autorisation il est indiqué que votre séjour à l'endroit en question est
23 autorisé entre le 9 octobre et le 9 novembre. C'est bien cela?
24 M. Dulovic (interprétation): Je n'ai pas reçu le bon document.
25 (Intervention de l'huissier.)
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1 Question: On lit en haut de la page: "Secrétariat fédéral à la défense
2 populaire. Administration chargée de l'éducation morale, etc., etc.
3 Politika Belgrade, etc." Tout cela est écrit.
4 Donc vous étiez autorisé à rester sur place du 9 octobre au 9 novembre, un
5 mois autrement dit. Et vous témoignez ici au sujet d'événements qui se
6 sont déroulés, alors que vous n'étiez pas là-bas, n'est-ce pas?
7 Réponse: Non, ce n'est pas le cas.
8 Question: Alors, qu'est-ce qui est exact?
9 Réponse: D'abord, il est écrit un peu plus loin que cette autorisation est
10 valable y compris après cette date, dans des conditions exceptionnelles.
11 Et on voit la signature du commandant Petkovic et Aso.
12 Ensuite, depuis le mois de mai, lorsqu'on avait une carte de presse -en
13 tout cas, c'était le cas au début-, c'est seulement par la suite qu'une
14 autorisation spéciale a été demandée, et donc c'est à ce moment-là que
15 j'ai été contraint de me procurer une autorisation.
16 Question: Monsieur Dulovic, vous avez réalisé un film de propagande dont
17 vous avez tiré un extrait. Quand avez-vous tourné ce film?
18 Réponse: En 1995 ou 1996, je crois.
19 M. Milosevic (interprétation): Donc plusieurs années après ces événements,
20 vous avez réalisé ce film dont vous avez extrait certaines séquences. Eh
21 bien, voyez-vous, j'ai ici sous les yeux une transcription de cette
22 conversation avec Sljivancanin qui n'était pas très claire, et je n'ai pas
23 très bien compris, mais il est écrit ici:
24 "-M. Nikola Borsinger: Non, je suis...
25 -M. Sljivancanin: Quel est le problème?
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1 -M. Borsinger: J'ai été habitué à une meilleure coopération avec la JNA
2 que celle que je bénéficie aujourd'hui.
3 -M. Sljivancanin: Interprète-moi "mieux qu'aujourd'hui", mais de quoi
4 s'agit-il?
5 -M. Borsinger: Le colonel connaît tous les problèmes.
6 -M. Sljivancanin: Mais il n'y a aucun problème, c'est seulement…
7 -M. Borsinger: Voici le colonel.
8 -M. Sljivancanin: Je sais simplement qu'il y a quelques civils…. Quel est
9 le problème, s'il vous plaît? Expliquez-moi le problème?
10 -M. Borsinger: Le problème, c'est que je vois des soldats marchant dans la
11 rue, je vois des camions qui arrivent. Regardez! Regardez par là-bas.
12 -M. Sljivancanin: Eh bien, je viens de rouvrir le pont à la circulation.
13 -M. Borsinger: Ce pont n'était pas ouvert à la circulation.
14 -M. Sljivancanin: Parce que j'ai entendu qu'on tirait des coups de feu là-
15 bas. Est-ce que vous avez entendu, Messieurs?
16 -M. Borsinger: Mes collègues se trouvaient là-bas.
17 -M. Sljivancanin: Je vous en prie, Messieurs, ce qui m'intéresse
18 uniquement, ce sont les gens qui étaient dans la cave et que mes soldats
19 ont protégé. On s'en est occupé. Si le fait que mes jeunes soldats qui ont
20 18, 19, 20 ans sont en train de mourir ne vous intéresse pas, vous n'êtes
21 pas bienvenu ici, Monsieur. Ce soir encore, mes hommes sont morts ici. Et,
22 Monsieur, ici, c'est la guerre.
23 -M. Borsinger: Je sais.
24 -M. Sljivancanin: Et nous nous sommes efforcés de vous garantir une
25 sécurité pleine et entière et la possibilité de circuler en paix, alors
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1 que vous me parlez de problèmes. Si cela ne vous plaît pas, je vous en
2 prie, retournez où vous voulez! Cela me fait honte que vous vous
3 comportiez de cette façon à mon égard! Tout ce que vous avez demandé, je
4 vous l'ai garanti."
5 (Fin de citation.)
6 M. le Président (interprétation): Mais ce n'est pas une question en bonne
7 et due forme. Qu'est-ce que vous essayer de prouver en parlant de cette
8 séquence du film? De quoi parlez-vous?
9 M. Dulovic (interprétation): Vous confondez...
10 M. le Président (interprétation): Il appartient à la Chambre de déterminer
11 ce qui est prouvé, mais le témoin peut parler des conditions dans
12 lesquelles cette conversation s'est déroulée.
13 Que s'est-il passé, Monsieur Dulovic, exactement?
14 M. Dulovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
15 l'accusé fait une confusion au sujet de ce film. Je n'ai pas participé à
16 la réalisation de ce film. Il n'a pas écouté attentivement lorsque la
17 question a été discutée dans ce prétoire, c'est un extrait d'un autre
18 film.
19 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Je parle de l'extrait où l'on a
20 vu Sljivancanin, c'est l'extrait que je souhaite évoquer; cela importe peu
21 qu'il soit extrait de votre film ou pas. En tout cas, c'est vous qui avez
22 fourni cette séquence.
23 Alors, quel est l'objet de ma question? Quel est le but que je poursuis en
24 parlant de cette conversation? Eh bien, je le fais parce que je ne vois
25 rien dans cette conversation…
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1 M. le Président (interprétation): Ecoutez, c'est encore une polémique.
2 Vous pouvez discuter avec nous. Le témoin ne peut pas répondre à la
3 question. C'est simplement une séquence qui a été diffusée dans le
4 prétoire.
5 Mais je vous en prie, ne perdez pas de vue, Monsieur Dulovic, que nous
6 vous demandons ce qui s'est passé ce matin-là entre le représentant de la
7 Croix-Rouge et le commandant Sljivancanin. Pouvez-vous nous aider sur ce
8 point?
9 M. Dulovic (interprétation): Oui. D'abord, je n'ai pas participé au
10 tournage du film dont il est question ici. C'est une autre équipe de
11 télévision qui a tourné ce film. J'ai écouté M. Sljivancanin; il y avait
12 d'ailleurs d'autres phrases où il apportait des explications à ce
13 représentant de la Croix-Rouge en lui disant que nous nous trouvions dans
14 une zone de guerre, qu'il y avait une guerre qui était en cours, qu'il y
15 avait des Oustachis en armes à cet endroit, quelque chose de ce genre-là.
16 Quant à la séquence dont il vient d'être question, je n'étais pas avec lui
17 à ce moment-là, lorsque ce qu'on voit sur cette séquence a été enregistré.
18 M. le Président (interprétation): Un instant.
19 Que les choses soient claires: lorsque vous dites qu'il ne voulait pas
20 laisser passer le représentant de la Croix-Rouge, est-ce que ce
21 représentant de la Croix-rouge demandait un accès quelconque à l'hôpital?
22 M. Dulovic (interprétation): C'était à l'entrée de l'hôpital, pas dans
23 l'hôpital mais devant le bâtiment, à cinq ou six mètres de l'entrée. C'est
24 une autre scène. Je parle de celle dont il est question ici dans la
25 séquence dont il vient de d'être discuté.
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1 M. Milosevic (interprétation): Etes-vous en train de dire, Monsieur
2 Dulovic, que cette scène dont il vient être question n'a rien à voir avec
3 votre témoignage?
4 M. Dulovic (interprétation): Non, ce n'est pas exact. Cela a quelque chose
5 à voir avec mon témoignage, mais la scène a duré beaucoup plus longtemps.
6 J'ai simplement dit ce que j'ai entendu lorsqu'il a parlé. Il criait, le
7 commandant Sljivancanin était assez énervé à ce moment-là.
8 Quant aux détails de la conversation avec le représentant de la Croix-
9 Rouge, je ne les connais pas, mais il a crié ce que j'ai cité devant tout
10 le public et à l'adresse du public parce qu'il y avait pas mal de
11 journalistes autour de lui.
12 Question: Il criait donc pour être entendu par le public en expliquant que
13 ses soldats avaient été tués et qu'il faisait tout ce qui lui était
14 demandé.
15 Réponse: C'est l'impression que j'ai eue.
16 M. Milosevic (interprétation): Très bien. Revenons maintenant sur le film
17 dont j'ai parlé tout à l'heure, à savoir le film de propagande que vous
18 avez réalisé en 1995, d'après ce que vous dites.
19 M. le Président (interprétation): Un instant. Il est possible qu'une
20 critique implicite soit sous-entendue dans cette question. Il faut donc,
21 Monsieur le Témoin, que vous ayez la possibilité de répondre à cela.
22 Est-ce une bonne manière de refléter la situation que d'utiliser ces
23 termes ou pas: film de propagande?
24 M. Dulovic (interprétation): C'est ici que j'ai vu ce film pour la
25 première fois, ou, pour être plus précis cette scène, cette séquence.
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1 Peut-être a-t-elle été diffusée également à la télévision, mais je ne sais
2 pas qui l'a tournée.
3 M. le Président (interprétation): Il y a sans doute un malentendu, très
4 compréhensible d'ailleurs. Si je comprends bien ce que dit l'accusé, il
5 parle du film plus long que vous avez réalisé, le film au sujet des
6 "Guêpes jaunes". Je crois que c'est de ce film que parle l'accusé et il le
7 qualifie de film de propagande.
8 M. Dulovic (interprétation): Non, c'est inexact. Ce film reflète la
9 vérité, il rend compte de ce que j'ai vu de mes yeux et de ce qui s'est
10 passé dans la salle d'audience lors du procès des "Guêpes jaunes". Il y a
11 également une interview de Vojin Vuckovic, et d'autres séquences.
12 Mais la séquence dont il vient d'être question, ce n'est pas moi qui l'ai
13 tournée; le réalisateur l'a montée à partir de documents publics. Donc je
14 n'ai pas discuté du sujet avec lui; je veux parler de cet extrait ou l'on
15 voit le commandant Sljivancanin.
16 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, vous avez parlé dans
17 votre déposition d'une coopération que j'aurais eue, en 1991 ou 1992, avec
18 Vojislav Seselj. Comme vous le savez, ce dernier était dans l'opposition.
19 J'aimerais donc que vous commentiez cette lettre venant de lui, que j'ai
20 reçue par le truchement de mes collaborateurs et qui traite de vous ainsi
21 que d'un autre journaliste de "Vreme".
22 Je ne vais pas donner lecture de l'intégralité de la lettre, même si elle
23 est écrite à la main et qu'elle ne fait même pas une page, ce qui veut
24 dire qu'elle fait à peine un tiers de page imprimée.
25 Je cite: "Ils invoquent tous les deux de prétendues déclarations de ma
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1 part, de prétendues déclarations faites après les faits. Et sans doute au
2 cours d'une féroce guerre de propagande entre le Parti serbe et un autre
3 parti lors des moments que j'ai passés hors de prison. Ces déclarations
4 sont le fait de protagonistes passionnés à un conflit politique, qui se
5 font concurrence et qui, en aucun cas, ne s'approchent même de la vérité."
6 (Fin de citation.)
7 Plus loin, nous lisons: "Je cite M. Milosevic: Je vous rappelle que nous
8 nous sommes rencontrés pour la première fois à la fin février 1992, lors
9 de la réunion de l'Assemblée nationale de Serbie et nous nous sommes
10 contentés de nous serrer la main." (Fin de citation.)
11 Ce qui est vrai. Lorsque je suis arrivé au Parlement, j'ai serré la main
12 des personnes qui étaient près de moi physiquement et des députés qui
13 étaient autour de moi.
14 La suite du texte se lit comme suit -je cite-: "Nous n'avons pas parlé
15 ensemble." (Fin de citation.)
16 Bien sûr, ceci est vrai.
17 Je cite: "Notre première conversation a eu lieu en mai 1992, de façon
18 anonyme. Elle traitait des élections fédérales qui approchaient. Nous
19 n'avons pas discuté des opérations de guerre ou de l'envoi de volontaires.
20 Le Parti radical serbe a envoyé tous ses volontaires dans les unités de la
21 JNA et ils se sont tous retrouvés dans la caserne de Bubanj Potok. Tous
22 ces volontaires étaient des soldats de l'armée régulière, de la JNA, et le
23 fait qu'ils aient servi en temps de guerre est enregistré dans leur livret
24 militaire. Un nombre limité de volontaires a été versé dans les rangs de
25 la Défense territoriale en Slavonie, dans la Région autonome serbe de
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1 Slavonie, de Baranja et du Srem occidental et, plus tard, dans les rangs
2 de l'armée de la Republika Srpska.
3 Le Parti radical serbe n'a jamais eu de formations paramilitaires.
4 Je suis prêt, Monsieur Milosevic, à témoigner fidèlement des événements
5 qui se sont déroulés pendant la guerre. Et je suis surpris que le
6 Procureur de La Haye me considère comme impossible à atteindre. Dès que je
7 recevrai une convocation officielle, je viendrai. Respectueusement vôtre,
8 Vojislav Seselj". C'est signé et daté d'aujourd'hui.
9 M. le Président (interprétation): Ce que Vojislav Seselj dit dans cette
10 lettre et vient d'être lu, je ne suppose pas que le témoin puisse le
11 commenter, mais nous allons lui poser la question.
12 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, deux choses.
13 D'abord, je demande que cette lettre soit enregistrée et, si M. Milosevic
14 ne souhaite pas la verser au dossier, le Procureur demande qu'elle soit
15 conservée. Il y a deux raisons à cela, je pense que c'est un élément de
16 preuve important, compte tenu de ce qu'il contient.
17 M. le Président (interprétation): Je dois vous dire que, jusqu'à présent,
18 nous n'avons pas eu pour habitude d'admettre au dossier les diverses
19 déclarations que M. Milosevic a utilisées dans son contre-interrogatoire.
20 Pour la très bonne raison que ce ne sont pas des éléments de preuve, ce
21 sont simplement des documents qu'il soumet.
22 Et il y a un danger à les verser au dossier, dirais-je, parce que vous
23 souhaitez simplement que ces documents soient enregistrés, mais il se peut
24 qu'il y en ait un très grand nombre. De toute façon, nous allons
25 réfléchir.
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1 M. Groome (interprétation): Ce que je souhaite dire, Monsieur le
2 Président, s'agissant de ce document en particulier, c'est que je
3 m'inquiète de savoir comment M. Seselj a su que ce témoin témoignait
4 aujourd'hui, alors que nous sommes à huis clos? Cette séquence vidéo a été
5 diffusée à huis clos et nous avons une réponse de M. Seselj dans les 24
6 heures. Ceci me préoccupe un peu, notamment au vu des événements d'hier.
7 M. le Président (interprétation): Bien. Monsieur Milosevic, pouvez-vous
8 nous aider sur ce point?
9 M. Milosevic (interprétation): Je vous en prie, Monsieur May.
10 D'abord, je répondrai à vos questions uniquement lorsque je m'exprimerai
11 en tant que témoin, mais également aujourd'hui. Respectez vos propres
12 règles, je vous prie.
13 Et pour ne pas prolonger les débats, je ne lirai pas le début de cette
14 lettre, mais elle dit ce qui suit -je cite-: "Cher Monsieur Milosevic, je
15 suis ébahi par les faux témoignages de deux journalistes de "Vreme", Jovan
16 Dulovic et un autre journaliste, qui ont prouvé depuis longtemps qu'ils
17 sont des agents des services de renseignement occidentaux". (Fin de
18 citation.)
19 Ensuite, il poursuit en disant ce que j'ai lu: "il parle des déclarations
20 faites prétendument après les faits, à l'époque d'une féroce guerre de
21 propagande, à l'époque où des affrontements intenses opposaient le Parti
22 socialiste serbe et le Parti radical serbe qui m'attaquait. Et bien sûr,
23 il a souhaité me faire autant de mal qu'il l'a pu avec ses déclarations".
24 Donc voilà ce qu'il dit s'agissant de ces deux témoins: "Ce qui est
25 important ici, c'est qu'il n'y a aucun fondement aux histoires qu'a
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1 raconté ce témoin au sujet des volontaires. Je n'ai vu cet homme pour la
2 première fois qu'un an plus tard et nous avons parlé pour la première fois
3 de façon plus prolongée encore ultérieurement. Le sujet de notre
4 conversation était les élections; nous n'avons jamais discuté d'affaires
5 gouvernementales ou de membres de l'opposition et de l'envoi de
6 volontaires".
7 Ceci est une remarque qui porte sur les deux témoins entendus récemment et
8 je peux vous fournir cette lettre pour que vous l'examiniez. La voici.
9 M. le Président (interprétation): Est-ce que ceci, les propos de M. Seselj
10 ont été abordés en public?
11 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, la séquence vidéo a été
12 diffusée à la fin de l'interrogatoire principal, hier, à huis clos. Je
13 peux vérifier, Monsieur le Président.
14 M. Kwon (interprétation): C'était le 16 octobre, jour 110, et je suppose
15 que c'était en public.
16 M. Groome (interprétation): La première séquence vidéo, la séquence de
17 Vukovar a été diffusée le premier jour.
18 M. le Président (interprétation): Il s'agit de la vidéo de Seselj qui a
19 été diffusée vers la fin du témoignage du témoin.
20 M. Groome (interprétation): Je m'en souviens, Monsieur le Président, mais
21 je vérifie mes notes.
22 M. Kwon (interprétation): Pouvez-vous vérifier page 11.680 du compte rendu
23 d'audience?
24 M. Groome (interprétation): Bien, Monsieur le Juge.
25 M. Kwon (interprétation): Ligne 21.
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1 M. le Président (interprétation): La Greffière d'audience indique que
2 cette déposition a sans doute été faite en public et que la séquence vidéo
3 n'est pas conservée sous scellés. C'est sans doute exact, mais ne perdons
4 pas de temps sur ce sujet, nous pouvons le vérifier plus tard.
5 Un instant, Monsieur Milosevic. Il est demandé que ce document soit versé
6 au dossier. Donc la première question, je vous la pose, Monsieur
7 Milosevic. Avez-vous une objection?
8 M. Milosevic (interprétation): Parlez-vous de la lettre de M. Seselj?
9 M. le Président (interprétation): Oui.
10 M. Milosevic (interprétation): Oui, vous pouvez l'avoir. Vous pouvez
11 l'avoir, bien sûr, pas de problème.
12 M. le Président (interprétation): Un instant. Avant de traiter du sujet,
13 nous allons décider si nous admettons ou pas ce document.
14 Monsieur Dulovic, vous êtes assis patiemment pendant que tout ceci se
15 passe. Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez dire à ce sujet? Vous avez
16 la possibilité de répondre.
17 M. Dulovic (interprétation): Tout d'abord, ce film avait été un film
18 documentaire. Ça a été tourné en tant que film documentaire. Deuxièmement,
19 lorsqu'on parle de l'armée et des volontaires, je tiens à dire que j'ai
20 fait des recherches en ce sens et je sais de façon tout à fait fiable que
21 les membres du Parti radical de M. Seselj se présentaient en tant que
22 volontaires; ils se présentaient au niveau des comités locaux du Parti
23 radical et c'est là qu'on établissait des listes de noms. Ces noms ont,
24 par la suite, été envoyés vers le siège du MUP de la République pour
25 vérification.
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1 Je ne sais pas ce que l'on vérifiait. Est-ce qu'on vérifiait qu'il y avait
2 des dossiers, des casiers judiciaires? S'agissait-il de criminels ou pas?
3 Ou quelque chose d'autre?
4 Par la suite, ces listes étaient restituées aux comités municipaux qui,
5 eux, envoyaient aux volontaires des convocations, du moins aux volontaires
6 dont la souscription était acceptée. Par la suite, ces volontaires étaient
7 dirigés vers un terrain d'entraînement, un polygone militaire près de
8 Belgrade qui s'appelle "Bobanj Potok"; ces volontaires ont, pendant un
9 certain temps, reçu une formation de combat en qualité de soldats. Puis,
10 de là, l'Etat leur assurait un transfert jusqu'à l'endroit où on avait
11 besoin d'eux en tant que ce soldats, puis on leur donnait des armes.
12 Ce que j'ai pu voir moi-même, c'est par exemple un événement à Vukovar où
13 il y avait ledit Kameni, le chef de l'une de ces unités qui se trouvait à
14 proximité et qui avait un commandement à elle, à savoir un chef. Mais si
15 besoin était, on avait recours à eux pour certaines opérations. Cela ne
16 signifie toutefois pas qu'ils ne se rendaient pas de façon autonome, je
17 dirais même sans contrôle aucun de la part de l'armée, pour faire ce
18 qu'ils ont fait.
19 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic…
20 M. Dulovic (interprétation): Juste un moment, je vous prie. J'ai omis,
21 tout à l'heure, de dire qu'aucune visite médicale n'avait été ménagée à
22 l'intention de ces hommes-là, ce qui fait -j'en suis sûr- que j'ai vu que
23 l'on acceptait des gens qui ne sauraient être admis dans l'armée suite à
24 examen psychiatrique; et il y a eu des gens de ce genre.
25 Question: Monsieur Dulovic, vous avez dû voir n'importe quoi sur les
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1 champs de bataille. Mais parlant des volontaires dans l'armée populaire
2 yougoslave, c'étaient alors des soldats de l'armée populaire yougoslave et
3 non pas des membres d'unités paramilitaires. Et M. Seselj dit que le Parti
4 radical serbe n'avait jamais disposé de formations paramilitaires.
5 Réponse: Ce n'est pas exact.
6 Question: Bien, vous savez probablement mieux. Moi, je vous dis ce qui est
7 écrit ici.
8 Et vous souvenez-vous du fait que la position de notre Etat a, de tout
9 temps, été très catégoriquement opposée aux formations paramilitaires
10 parce qu'on avait jugé que c'étaient des pilleurs purs et simples et non
11 pas des combattants?
12 Réponse: Je ne serai pas d'accord avec vous.
13 M. Milosevic (interprétation): Bien, Monsieur Dulovic, ne perdons pas de
14 temps. Je voudrais que vous preniez note du fait que nous avons perdu
15 beaucoup de temps de façon tout à fait inutile, et ceci en débats que je
16 n'ai pas occasionnés. Je voudrais donc que vous en teniez compte dans le
17 calcul du temps qui m'est imparti.
18 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous n'allez pas
19 vous en tirer aussi facilement que cela, parce que ces genres de
20 commentaires ne sont pas du tout adéquats. Ce sont des questions
21 importantes que vous, vous avez soulevées; c'est vous qui avez donné
22 lecture de la lettre de Seselj. Ne soyez pas étonné si on demande des
23 éclaircissements. Vous n'aimez peut-être pas la réponse qui est donnée par
24 le témoin, mais c'est ce qu'il dit dans sa réponse.
25 La Chambre va voir si elle va déclarer recevable au dossier cette lettre
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1 ou pas.
2 (Les Juges se concertent sur le siège.)
3 Nous n'allons pas admettre cette lettre au dossier; cependant, nous allons
4 lui donner une cote d'identification puisqu'une question a été soulevée.
5 On a demandé si elle avait été obtenue ou pas dans certaines circonstances
6 au moment où le témoignage se faisait à huis clos; il se peut que ce soit
7 vrai, mais le contraire peut l'être aussi. Nous allons donc attribuer à ce
8 document une cote d'identification, mais dans un but très restreint.
9 Un instant, un instant, Monsieur Milosevic. Attendez que la Greffière
10 d'audience donne la cote.
11 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la cote d'identification de la défense
12 55.
13 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
14 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je ne voulais perdre notre
15 temps. J'avais demandé à mes collaborateurs de poser la question à M.
16 Seselj pour ce qui est de savoir quand et où il a accordé une interview de
17 ce genre parce que cela doit forcément être erroné. Il est impossible
18 qu'il ait parlé de la chose alors qu'à l'époque, je ne connaissais pas du
19 tout cet homme-là. Par conséquent…
20 M. le Président (interprétation): Oui, oui. Il faudra que ce soit nous qui
21 tirions une conclusion au vu des moyens de preuve. Voulez-vous ajouter
22 quelque chose? Vous voulez fournir une autre explication?
23 M. Milosevic (interprétation): Mais c'est pour ça que je le dis; il n'est
24 point nécessaire de faire des enquêtes pour savoir si c'était en session
25 publique ou à huis clos. Mais j'avais été stupéfait de voir que quelqu'un
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1 était en mesure de raconter des stupidités et des énormités de la sorte;
2 j'avais donc voulu que l'on dise si cette interview a été accordée ou pas
3 et vous venez d'entendre son explication.
4 Ça date de la période des conflits entre le Parti radical serbe et le
5 Parti socialiste de Serbie et il ne visait qu'à causer des dégâts, les
6 plus grands dégâts possibles à son adversaire politique. Je ne connaissais
7 pas cet homme-là à l'époque. Et il affirme lui-même qu'il n'avait pas
8 disposé de formations paramilitaires.
9 Par conséquent, mon objection, Monsieur May, concernant le temps dépensé
10 n'était pas dû au fait que les réponses du témoin ne me plaisaient pas,
11 mais c'était dû au fait de voir mon temps épuisé et de me voir me priver
12 d'autres questions que je voulais poser. Cela avait juste une corrélation
13 avec le temps dépensé et cela n'avait pas de corrélation avec le fait
14 d'aimer ou de ne pas aimer ses réponses.
15 Monsieur Dulovic, vous êtes revenu par la suite à Belgrade?
16 M. le Président (interprétation): Un instant, la Greffière veut
17 intervenir.
18 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièceD55, code d'identification
19 "confidential", sous pli scellé.
20 M. Groome (interprétation): Je relève, aux fins du dossier d'audience, que
21 M. Milosevic vient de nous dire qu'après les événements d'hier matin et vu
22 les craintes exprimées par le témoin, apparemment, il y a des craintes les
23 plus extrêmes à propos de certaines choses qu'il a dites hier. Et
24 apparemment, ceci aurait été communiqué à cette personne même.
25 M. le Président (interprétation): Je ne vais pas me lancer dans cette
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1 interprétation et je ne vais pas enquêter. Il se peut que M. Milosevic ait
2 parlé à ses associés à la fin de la première journée du témoignage de ce
3 témoin, qui était en audience publique.
4 Poursuivez, Monsieur Milosevic.
5 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, quoi qu'il advienne à huis clos ou
6 en session publique, j'ai le droit de poser des questions. Quand on
7 affirme que telle chose s'est passée, j'ai le droit de demander pourquoi
8 untel a affirmé telle chose, s'il l'a affirmée, et j'ai bien le droit de
9 déterminer si ce qu'il a affirmé est vrai ou pas.
10 Et il ne s'agit pas de M. Dulovic ni de qui que ce soit d'autre. Il s'agit
11 d'une interview d'une personne à qui on avait posé la question et on lui a
12 posé la question de savoir ce qui s'était passé effectivement.
13 Monsieur Dulovic, dites-nous, je vous prie, vous avez mentionné notamment
14 une personne, puis une deuxième personne en corrélation avec ce qui s'est
15 passé à Vukovar, notamment au niveau d'Ovcara. Puis vous êtes revenu à
16 Belgrade -peu importe à quelle date-, mais un jour, vous êtes revenu à
17 Belgrade, au bout de cinq, dix ou quinze jours. Peu importe.
18 Une fois arrivé à Belgrade, est-ce que vous êtes allé présenter,
19 communiquer, faire une notification de ce qui vous a été dit auprès de
20 quelque autorité?
21 M. Dulovic (interprétation): Non.
22 Question: Bien, Monsieur Dulovic. Mais en votre qualité de journaliste en
23 matière judiciaire, vous n'ignorez pas que, lorsque quelque chose ne va
24 pas bien, que quelque chose cloche, vous êtes tenu de présenter la chose
25 aux instances concernées?
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1 Réponse: Ces instances étaient sur le terrain; il serait stupide de leur
2 faire notification de quelque chose alors qu'ils étaient présents sur
3 place.
4 Question: Est-ce que vous estimez que l'armée a quelque chose à avoir avec
5 cet événement?
6 Réponse: Je ne considère rien du tout. J'ai dit ce que j'ai vu et c'est
7 autre chose que de me demander ce que je pense personnellement.
8 Question: En page 6 du dernier paragraphe, vous dites, tout de suite après
9 la présentation de ces événements, vous dites qu'un ordre est arrivé pour
10 ce qui est du désarmement de tous les volontaires?
11 Réponse: Ce n'est pas ce que j'ai dit. Vous feriez bien de mieux lire ce
12 qui est écrit.
13 Question: Voilà comment s'énonce le dernier paragraphe, page 6 sur un
14 total de 11.
15 "Le jour d'après, on a donné ordre à tous les volontaires de restituer les
16 armes.
17 Réponse: Exact. L'opération de Vukovar est terminée: on n'a plus besoin
18 d'eux. Il fallait qu'ils restituent leurs armes et qu'ils rentrent chez
19 eux. C'est ce que j'ai compris: ce n'est pas le fait de les désarmer, mais
20 ils devaient restituer les armes qui leur avaient été confiées, ce qui n'a
21 rien à voir avec les événements afférents à Ovcara.
22 Question: Moi, je les ai placés en corrélation parce que cela figure dans
23 le paragraphe suivant, après l'endroit où vous mentionnez Ovcara. Vous
24 dites que ce jour-là, il a été donné l'ordre à tous les volontaires de
25 restituer leurs armes.
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1 Réponse: Cela n'a rien à voir l'un avec l'autre.
2 Question: Bien, bien, Monsieur Dulovic. Je ne fais que constater le fil du
3 récit dans votre déclaration préalable et je me suis dit que cela avait
4 été une réaction par rapport aux instances dont vous avez parlé sur le
5 terrain.
6 Réponse: Votre supposition est erronée.
7 Question: Mais comment savez-vous qu'il n'y a pas eu de réaction?
8 Réponse: Eh bien, parce que toutes les unités autour de Vukovar, qui
9 n'avait rien à voir avec ce qui s'est passé, étaient tenues de restituer
10 de leurs armes, étant donné qu'ils n'avaient plus besoin de ces armes, il
11 n'y avait plus eu de combat.
12 Question: C'est maintenant que vous expliquez cela. Dans la déposition, il
13 est dit autre chose.
14 Réponse: Mais non, il n'est pas dit autre chose!
15 Question: Je vous en prie, ne perdons pas notre temps.
16 Vous avez parlé d'échange. Est-ce que vous savez qu'un échange est
17 intervenu en mars 1992, au moment où 41 personnes ont été confiées par la
18 partie croate et on leur a confié un groupe de 380 membres des formations
19 paramilitaires croates, étant donné que l'armée a accepté d'échanger tous
20 contre tous, pour calmer, pour apaiser la situation. Cet échange a eu lieu
21 fin mars 1992.
22 Savez-vous donc à ce sujet tout ce qui a été fait avec les personnes qui
23 avaient été arrêtées?
24 Réponse: Non.
25 Question: Donc je ne vais pas vous poser de question là-dessus. C'était
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1 essentiellement des civils; il y avait même des femmes parmi eux. La
2 personne la plus jeune avait 24 ans, la personne la plus âgée avait 73
3 ans. Je ne vais pas vous donner lecture donc, mais il serait bon que vous
4 vous renseigniez un peu là-dessus. Peut-être alors serait-il plus
5 difficile pour vous de parler du bon traitement dont les Serbes avaient
6 bénéficié à Vukovar.
7 Réponse: Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est eux qui l'ont dit.
8 Question: Très bien, Monsieur Dulovic. Et vous n'ignorez pas en votre
9 qualité de journaliste en affaire judiciaire, en matière judiciaire, que
10 trois témoins diront des choses différentes. J'ai trop peu de temps à ma
11 disposition, il faut que je me réfère aussi à une partie de votre
12 témoignage, celle relative à la Bosnie. Vous avez suivi les événements de
13 Zvornik et vous expliquez que vous êtes arrivé à Zvornik, les choses
14 étaient dangereuses, la situation était dangereuse et que vous êtes
15 retourné immédiatement à Mali Zvornik. Puis vous dites que pour
16 l'essentiel, là-bas, il y avait des formations paramilitaires.
17 Vous dites également que par la suite donc vers le 10 mai, il y avait eu
18 un panneau, une inscription "Republika Srpska" dessus. Et puis, vous avez
19 vu des membres de la police fédérale et de la police de la République de
20 Serbie. La police de la République de Serbie, j'imagine que vous ne l'avez
21 vu qu'au passage frontière, n'est-ce pas, Monsieur Dulovic?
22 Réponse: C'est une question?
23 Question: La police de la République de Serbie, c'est une police que vous
24 n'avez pu voir qu'au passage frontière, oui ou non?
25 Réponse: Si là où je les ai vus, c'était un passage frontière, c'est bien
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1 le cas.
2 Question: Mais le pont sur la Drina entre Mali Zvornik et Zvornik,
3 j'imagine. Enfin, il n'est pas contesté que Mali Zvornik est en Serbie et
4 que Zvornik se trouve en Bosnie. Je ne dirai pas Veliki Zvornik à la
5 différence de Mali Zvornik, parce qu'il ne s'appelle pas "Veliki Zvornik";
6 c'est Zvornik, et Mali Zvornik en traduction: "Petit Zvornik".
7 Réponse: Je ne savais pas qu'il s'agissait là d'un passage frontière.
8 Personne n'avait demandé mon passeport.
9 Question: Je ne vais pas dire "passage frontière", si vous le voulez. Eh
10 bien, c'était le pont qui reliait la Serbie et la Bosnie-Herzégovine?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Donc, ce n'est que sur ce pont que vous avez pu voir la police
13 de la République de Serbie. Vous n'en avez pas vu de l'autre côté, en
14 Bosnie-Herzégovine?
15 Réponse: Oui, je n'ai pas pu voir ceux qui étaient sur le pont, en Bosnie
16 également.
17 Question: Mais est-ce que vous avez vu des policiers de la République de
18 Serbie de l'autre côté?
19 Réponse: En uniforme, vous voulez dire?
20 Question: Des policiers, des nôtres, de Serbie, les avez-vous vus en
21 Bosnie-Herzégovine?
22 Réponse: Non. Non.
23 Question: Je voulais juste tirer les choses au clair. Vous vous trouviez
24 donc, et eux aussi, sur le territoire de la République de Serbie; c'était
25 d'ailleurs leur tâche de se trouver là. Or, vous dites qu'ils ne
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1 permettaient à personne portant des armes, de venir en Serbie. Que
2 pouvaient-ils faire?
3 Réponse: Eh bien, c'est absolument vrai. Ce n'est pas contesté ni
4 contestable.
5 Question: Est-ce que c'est à ce moment-là que vous avez appris qu'à
6 Zvornik il y avait beaucoup de criminels et de bandits, et qu'il était
7 dangereux pour vous de vous rendre là-bas?
8 Réponse: Oui.
9 Question: Est-il logique que la police en Serbie sur le pont qui relie la
10 Serbie à la Bosnie -Bosnie où il y a eu beaucoup de violences- eh bien,
11 que cette police ne permette pas qu'on vienne en Serbie avec des armes? Et
12 indépendamment du fait que ce soit là encore une Yougoslavie et qu'on
13 n'ait pas eu besoin de passeport -là, vous avez raison-, eh bien, la
14 police a tout le même le droit de ne pas laisser passer quelqu'un si
15 celui-ci est suspect ou s'il ne sait pas expliquer ce qu'il vient chercher
16 en Serbie?
17 Réponse: Oui, absolument vrai. Mais il y a un détail très important: ils
18 n'ont pas laissé passer Vojin Vuckovic et les siens, à savoir les membres
19 de l'Unité de Seselj au sujet desquels vous dites vous-même qu'elle avait
20 été sous l'égide de la JNA. Donc cette unité-là, s'agissait-il de pilleurs
21 ou pas? Je ne le sais pas, mais c'était des membres d'une unité "Zute
22 Ose", à savoir les "Guêpes jaunes", sous le commandement du commandant
23 Dusan Vojin Vuckovic qui avait été, comme il l'avait dit, instructeur au
24 sein de la police fédérale.
25 Question: Ecoutez, Monsieur Dulovic, je ne vous ai pas dit moi-même qu'il
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1 avait été sous l'égide de la JNA. Ces membres des "Guêpes jaunes" ont été
2 mis aux arrêts par la police fédérale. Est-ce que vous comprenez que la
3 police fédérale avait procédé aux arrestations des membres des "Guêpes
4 jaunes" ?
5 Réponse: Bien longtemps après la fin des conflits.
6 Question: Combien de temps?
7 Réponse: Plusieurs années après.
8 Question: Vous avez dit que le procès de Vuckovic a eu lieu en 1996?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Et partant du fait que ce procès a eu lieu en 1996, on doit
11 pouvoir s'imaginer que quelqu'un a eu l'idée pour des raisons plutôt
12 formalistes ou politiques, d'entamer un procès en 1996. C'est
13 l'interprétation que vous faites?
14 Réponse: Non, l'interprétation que je suis en train de faire, c'est qu'il
15 fallait montrer que nous, en Serbie, nous sommes également en mesure de
16 juger des criminels de guerre. Ça avait été un échec total.
17 Question: Donc quelqu'un a eu l'idée de l'affaire en 1996, n'est-ce pas?
18 Réponse: Oui, c'est exactement comme cela que ça s'est passé.
19 Question: Très bien, Monsieur Dulovic. J'ai ici un document judiciaire
20 "République de Serbie, ministère public de Sabac", parce que c'est là que
21 ça s'est passé, il s'agissait du juge d'instruction du Tribunal du
22 district de Sabac. On dit ici qu'il y a notification et plainte pénale
23 pour ce qui est de Vuckovic Dusko surnommé "Repic", on dit ensuite le nom
24 de son père et de sa mère. Puis, on dit quelles sont les choses dont on
25 l'accuse, etc., etc. On dit que, pendant la guerre civile en Bosnie-
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1 Herzégovine en violation des règles du droit humanitaire international
2 pendant les conflits, il a procédé à des meurtres et tortures de
3 population civile. Et on indique "encore".
4 Ainsi, le 10 juin 1992, à la maison de la culture de Celopek où l'on avait
5 détenu plusieurs civils originaires de Divic, il avait torturé ces civils
6 en organisant des matchs de boxe en promettant de garder la vie sauve au
7 plus fort.
8 Puis il a coupé l'oreille de Enes Cikaric, puis il a tiré avec un fusil de
9 petit calibre sur deux personnes. Il a tué deux personnes et il avait
10 poignardé des blessés dans la zone du cœur. Il a ainsi privé de leur vie
11 17 personnes. Ces personnes ont été transportées, transférés vers une
12 carrière de graviers; et il avait emmené 4 personnes pour aller les
13 chercher, il a tué ces 4 avec un fusil de petit calibre. Donc il a été
14 accusé de 21 meurtres auxquels des tortures avaient précédé. Ça, c'est une
15 chose dont vous êtes au courant?
16 Réponse: Oui, tout à fait. Dans les détails, même.
17 M. Milosevic (interprétation): Donc… Mais je crois qu'il y a un tout petit
18 détail que vous n'avez pas remarqué. La date, c'est l'année 1993, Monsieur
19 Dulovic, et non pas l'année 1996. Et personne, en 1996, n'a eu l'idée de
20 poursuivre des criminels mais déjà, en 1993, à cette date, comme je vous
21 l'ai indiqué…
22 Je voudrais que l'huissier se saisisse de cette pièce à conviction.
23 Et ceci est non seulement vrai, mais cela va nous illustrer la fiabilité
24 de témoin qui nous a affirmé à cinq reprises que ça s'est passé que 1996.
25 M. Dulovic (interprétation): Je n'ai pas affirmé, j'avais dit que je
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1 pensais que c'était le cas puisque ça s'était passé il y a longtemps.
2 M. le Président (interprétation): Nous allons examiner la question. Quant
3 à savoir l'importance que revêt la différence entre 1993 et 1996, nous
4 verrons. Oui, nous allons verser ce document au dossier.
5 (Intervention de l'huissier.)
6 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, mais la finalité de ce que je
7 viens de dire, ce n'est pas seulement la date de 1993 ou 1996; cela
8 illustre l'exactitude du témoignage. Mais la finalité, en fin de compte,
9 c'est le fait que la Serbie a jugé des personnes pour la perpétration de
10 ce type de délit. Il en avait tué 17, il en avait tué par la suite 4 de
11 façon brutale, avec les tortures et tout le reste. Donc il est évident que
12 personne n'avait eu l'intention de dissimuler quoi que ce soit lorsqu'il
13 s'agissait de ce type d'accusé.
14 M. le Président (interprétation): Quelle sera la cote, Madame la
15 Greffière?
16 Mme Anoya (interprétation): Pièce de la défense D56 confidentielle, sous
17 pli scellé donc.
18 (Les Juges se concertent sur le siège.)
19 M. le Président (interprétation): Oui, poursuivez.
20 M. Milosevic (interprétation): Tirons ceci au clair. Vous avez donc vu les
21 "Guêpes jaunes"? C'était une unité paramilitaire ordinaire qui n'avait
22 rien à voir avec l'armée ou les forces de la police de la Republika Srpska
23 ni avec l'armée de la Republika Srpska, n'est-ce pas?
24 M. Dulovic (interprétation): Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est
25 que ces hommes étaient en tenue régulière de camouflage, portaient tous
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1 des armes, et ressemblaient… avaient l'apparence, l'aspect d'une armée
2 officielle. A l'exception des cheveux qui n'étaient pas bien coiffés et
3 des couvre-chefs qu'ils avaient.
4 Question: Fort bien, Monsieur Dulovic.
5 J'ai cru comprendre ce que vous avez dit de la façon suivante: les Serbes,
6 là-bas, avaient pris le contrôle de Zvornik et il n'y avait eu aucune
7 violence, il n'y avait eu aucun danger. C'est ce que vous vouliez dire
8 dans le cadre de votre déposition, si je l'ai bien comprise?
9 Réponse: Non, vous n'avez pas bien compris. Ce n'est pas exact. Ce n'est
10 pas ce que j'affirme.
11 Question: Alors, dites-moi: comment les affrontements se sont-ils produits
12 à Zvornik? Est-ce que vous êtes au courant des violences commises contre
13 les Serbes en Bosnie-Herzégovine, après que la décision ait été prise
14 d'abandonner le plan Cutilliero, après que l'armée régulière croate ait
15 lancé un raid sur la région en traversant la rivière, après avoir tué des
16 civils? Ceci a été le fait des forces armées croates et musulmanes?
17 Réponse: Moi, je n'étais pas là au moment où tout ceci a commencé; je
18 n'étais pas sur les lieux. Je ne sais pas ce dont vous parlez.
19 Question: Eh bien, je vais me contenter de mentionner quelques éléments
20 seulement en ce qui concerne la municipalité de Zvornik, puisque vous y
21 étiez et c'est là-dessus que porte votre déposition. Ici, c'est une longue
22 liste de personnes qui ont été tuées. Je vais me contenter de ne donner le
23 nom que des femmes, des femmes qui ont été tuées pendant la période où
24 vous étiez vous-même à Zvornik, Monsieur Dulovic.
25 Par exemple: Stojanka Grujic, Gornje Baljkovica, municipalité de Zvornik;
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1 son mari s'appelait Uros, elle était née en 1936, elle a été tuée début
2 mai 1992. Vous, vous êtes arrivé le 10; elle a été tuée le 9, au moment où
3 l'armée musulmane s'était emparée de son village, avait lancé une attaque
4 sur son village. Son corps a été trouvé près du village.
5 Puis il y Mica Zaric, 56 ans, tuée le 6 mai, au moment où les Musulmans
6 ont attaqué Gornja Baljkovica.
7 Julka Kojic; elle a été tuée, elle avait 67. Elle a été tuée, elle aussi,
8 début mai 1992.
9 La suivant est N. Mitrovic; elle a été tuée. Son mari s'appelait Bora;
10 elle venait du village de Srpski Nezuk, municipalité de Zvornik. Elle a
11 été tuée le 6 mai par des membres des forces armées musulmanes.
12 Et puis, une autre dame s'appelant Mitrovic, 45 ans, tuée aussi par les
13 forces musulmanes dans le village de Gornji Ba, tuée le 6 mai, et ainsi de
14 suite.
15 Je me contente donc de donner lecture du nom des femmes qui ont été tuées.
16 J'en ai une autre ici: N. Savic, femme de Milos Savic, du village de
17 Boskovici, municipalité de Zvornik, tuée le 5 mai 1992, au moment de
18 l'attaque musulmane sur son village. Savic Simka, de Gornja Boljkovica, 65
19 ans, tuée le 9 mai, au moment de l'attaque musulmane sur son village.
20 Il y en a beaucoup d'autres de ces femmes tuées, reprises sur cette liste.
21 Je ne peux pas lire tous les noms, mais dans cette liste de personnes
22 tuées, on trouve 118 hommes tués dans la municipalité de Zvornik à elle
23 seule. Or vous affirmez, s'agissant de cette municipalité, que c'étaient
24 les Serbes qui avaient attaqué des Musulmans innocents et puis auraient
25 provoqué une guerre.
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1 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous avez vu une quelconque
2 de ces femmes qui auraient été tuées, Monsieur Dulovic?
3 M. Dulovic (interprétation): Non. Non, je crois que ceci s'est passé dans
4 certains villages et moi, je ne suis pas allé dans ces villages; j'étais
5 tout à fait ailleurs. Je n'étais pas là où ces personnes ont été tuées.
6 M. Milosevic (interprétation): Fort bien, Monsieur Dulovic.
7 Je vous dis notamment qu'ici, il y a beaucoup de noms, mais j'ai 118 noms
8 de Serbes tués dans la municipalité de Zvornik et j'ai cru comprendre,
9 d'après vos dires, que vous aviez dit que les Serbes étaient allés là pour
10 tuer les Musulmans?
11 M. le Président (interprétation): Quelle est votre réponse, Monsieur
12 Dulovic? Est-ce bien ce que vous avez dit?
13 M. Dulovic (interprétation): Non, jamais.
14 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, nous avons ici… Est-ce
15 que vous êtes au courant de ces tueurs du côté musulman? Est-ce que vous
16 avez entendu parler de l'un quelconque de ces tueurs? Est-ce que vous avez
17 entendu parler des crimes qu'ils ont commis à l'encontre de la population
18 serbe de la municipalité de Zvornik, puisqu'on parle de Zvornik?
19 Réponse: Moi, je parle de la ville même de Zvornik, pas de la
20 municipalité. En effet, celle-ci inclut plusieurs villages. Or moi, je ne
21 parle que de certains quartiers de la ville en plus.
22 Question: Mais j'ai toute une liste de personnes tuées à Zvornik même et
23 elles sont nombreuses.
24 Mais la question que je vous pose est celle-ci: est-ce que vous avez
25 entendu parler de tout cela?
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1 Réponse: Non.
2 Question: J'ai ici sous les yeux 38 noms. Le nom d'auteurs de crimes
3 commis contre les Serbes dans la municipalité de Zvornik à elle seule; 38
4 noms. Mais puisque vous n'avez pas entendu parler, je ne vais pas les
5 citer.
6 Hajrudin Mesic, surnommé "Labud", de Teocak: il a organisé l'assassinat de
7 civils dans la municipalité de Zvornik entre mai 1992 et août 1993?
8 Réponse: Non, je n'en ai pas entendu parler.
9 Question: Bon. Il me faudrait trop de temps pour donner lecture de tous
10 ces 38 noms, puisque vous dites que vous n'avez entendu parler de personne
11 qui aurait commis des crimes dans la municipalité de Zvornik.
12 Réponse: Non, on n'en parlait pas à l'époque. Peut-être qu'on en a parlé
13 plus tard.
14 M. Milosevic (interprétation): Mais, Monsieur Dulovic, vous affirmez ici
15 qu'il y a eu des crimes musulmans dans la municipalité de Zvornik, dont
16 vous parlez, et vous dites que c'est le résultat de la propagande serbe,
17 que ce ne serait pas le résultat des faits que je vous soumets.
18 M. le Président (interprétation): Vous parlez de quelle partie de sa
19 déposition?
20 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, j'ai entendu ce témoin dire
21 ici, dans ce prétoire, au micro… -je ne peux pas vous donner le numéro de
22 la ligne ni son passage précis-, mais j'ai entendu dire de ce témoin qu'il
23 n'y avait rien, que c'était simplement de la propagande serbe et que ce
24 serait une façon pour les Serbes d'attiser la guerre.
25 M. le Président (interprétation): Maintenant, vous ne parlez plus de
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1 Zvornik même, mais de façon générale: c'est bien cela? En effet, il est
2 vrai que le témoin a parlé de façon générale de la propagande serbe et de
3 la façon dont celle-ci incitait. Ce que le témoin a dit finalement, cela
4 revenait à dire qu'on incitait, que cette propagande incitait à la guerre,
5 ou essayait d'instiller la peur chez les gens, que c'était uniquement de
6 la propagande. Voulez-vous poser des questions à ce propos?
7 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, je ne comprends pas. Pour
8 inciter des gens à faire quelque chose, si on publie que des personnes
9 âgées, des femmes, des civils, des paysans ont été tués, les gens sont
10 libres.
11 Libre à eux de publier ce qu'ils veulent: est-ce qu'on peut ordonner à qui
12 que ce soit, à un journal, de pas imprimer, de ne pas publier telle ou
13 telle chose.
14 M. le Président (interprétation): Mais ce qui était dit, c'est que
15 c'étaient des récits qui n'étaient pas véridiques, qui n'étaient pas
16 conformes à la réalité. C'est cela qu'on a dit.
17 Est-ce que vous avez d'autres questions à poser? Si vous avez des
18 questions à poser à ce témoin à ce propos, faites-le.
19 M. Milosevic (interprétation): Je lui ai posé une question: je lui ai
20 demandé comment il pouvait affirmer que tout ceci ne s'était pas passé.
21 Quand je dis tout ceci, je parle de ce que je viens de lire et que cela
22 aurait été le produit d'une imagination serbe, quelque chose qui aurait
23 été monté de toutes pièces par les Serbes; or la situation était
24 radicalement différente.
25 M. Dulovic (interprétation): Eh bien, c'est une interprétation tout à fait
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1 erronée de mes dires. Je n'ai pas nié. J'ai simplement dit que je n'étais
2 pas au courant de ces victimes dont vous avez parlé. Lorsque j'ai évoqué
3 la question de la propagande, je parlais, de façon générale, de la
4 propagande qui avait été lancée. Il y avait de l'euphorie.
5 Je ne veux pas vous donner d'exemples maintenant, mais beaucoup de choses
6 ont été écrites dans les journaux. On a dit qu'en Bosnie, les animaux au
7 zoo étaient nourris avec des enfants serbes, des nourrissons serbes, que
8 des enfants étaient tués parce qu'il manquait de l'oxygène quelque part
9 ailleurs. Il y a eu ce genre d'inventions d'envergure considérable qui
10 étaient destinées à attiser, à alimenter l'extrémisme nationaliste qui a
11 provoqué ce que nous savons qui l'a provoqué.
12 Question: Vous savez que la politique des politiques était tout à fait
13 différente. Je vous donne un exemple de la zone dont vous êtes originaire.
14 Vous êtes allé à Mali Zvornik, territoire serbe, de l'autre côté de la
15 Drina. Vous avez dit qu'à l'époque, elle avait une largeur d'environ 50
16 mètres.
17 Réponse: Moi, je n'ai pas mesuré exactement, mais c'est à peu près ça: le
18 fleuve a cette largeur à cet endroit.
19 Question: Donc à Mali Zvornik -si la Drina fait 50 mètres de largeur, peu
20 importe: elle pourrait faire 150 mètres, peu importe sa largeur à cet
21 endroit-là-, mais au moment que vous évoquez, il y avait 20% de Musulmans
22 qui vivaient.
23 La population de Mali Zvornik comptait 20% de Musulmans. Or ce chiffre n'a
24 jamais diminué. Bien au contraire, il a augmenté, puisque certains
25 Musulmans ont traversé la rivière pour passer en territoire serbe. Or rien
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1 ne leur est arrivé, à aucun d'entre eux, lorsqu'ils se sont trouvés en
2 territoire serbe.
3 Et il y a plus d'arrivées à Mali Zvornik aujourd'hui, de Musulmans
4 j'entends, qu'il y a dix ans. Je pense qu'il y en avait plus aussi qui
5 arrivaient en 1986, après la signature d'accords de paix de Dayton; il y
6 avait plus de Musulmans, à ce moment-là, qu'au début de la guerre en 1991.
7 Est-ce que vous savez tout cela? Est-ce que vous êtes au courant de ça,
8 Monsieur Dulovic?
9 Réponse: Non.
10 Question: Donc vous ne savez rien à ce propos?
11 Réponse: Je ne dis pas que ce n'est pas vrai, mais je ne suis pas au
12 courant. C'est la première fois que j'entends parler de ceci et c'est de
13 votre bouche.
14 M. Milosevic (interprétation): Mais qu'aurait été la cause de tout ceci,
15 alors qu'à quelques centaines de mètres à peine, de l'autre côté de la
16 Drina, on aurait dit que les Serbes incendiaient des maisons musulmanes,
17 alors qu'on n'a jamais essayé de faire ce genre de choses en République de
18 Serbie même?
19 M. le Président (interprétation): Vous ne cessez de faire ceci, vous ne
20 cessez de polémiquer, d'argumenter. Les témoins viennent parler de ce
21 qu'ils ont vu, de ce qu'ils ont entendu; or, vous essayez d'argumenter
22 avec eux. C'est une perte de temps; vous gâchez, vous gaspillez le temps
23 du Tribunal.
24 Demandez à ce témoin ce qu'il a vu, ce qu'il a entendu; c'est là-dessus
25 que porte votre déposition. On ne veut pas entendre votre argument selon
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1 lequel les Serbes ou les Musulmans auraient fait ceci ou cela; ce n'est
2 pas là-dessus que le témoin dépose.
3 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, ce témoin "hic et nunc", si
4 vous l'entendiez et vous l'avez écouté il y a deux minutes, a dit que ce
5 qui avait été organisé, c'était une campagne médiatique destinée à attiser
6 la haine contre les Musulmans. C'est un mensonge patent parce que si une
7 telle campagne avait existé, comment peut-il expliquer que 50 mètres plus
8 loin, de l'autre côté de la Drina, pas un seul Musulman, pas un seul
9 Bosnien n'a été touché et qu'ils sont même venus de l'autre côté pendant
10 cinq ans?
11 M. le Président (interprétation): Posez-lui une question à propos de cette
12 campagne. Il dit que c'est une campagne de propagande qui répandait des
13 mensonges, où des mensonges étaient concoctés pour attiser la haine de la
14 population. Si vous dites que cela n'est pas vrai, si vous dites notamment
15 qu'il n'y a pas eu…
16 Un instant, s'il vous plaît. Si vous dites qu'il n'y a pas eu de rumeur
17 propagée selon laquelle on nourrissait les animaux avec des enfants, si
18 vous dites que ce n'est pas vrai, eh bien, dites-le au témoin; soumettez-
19 le au témoin, dites-lui que c'est erroné.
20 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, les journaux de tous bords
21 ont écrit toutes sortes de choses ignominieuses, et moi, je ne vais pas en
22 parler. Je me contente de demander à ce témoin s'il peut recadrer ces
23 faits dans un contexte logique, au regard des affirmations qu'il a
24 portées, des allégations, à savoir qu'on essayait d'attiser la guerre
25 contre les Musulmans. Or, il n'est rien arrivé aux Musulmans pendant la
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1 guerre. En fait, ici on peut parler de 70.000 réfugiés musulmans pendant
2 la guerre.
3 Est-ce que vous êtes au courant de cela, Monsieur Dulovic?
4 M. Dulovic (interprétation): Non.
5 M. Milosevic (interprétation): Il a bien répondu, il a dit non.
6 M. le Président (interprétation): Laissez-le répondre. Avez-vous une autre
7 question?
8 M. Milosevic (interprétation): Mais votre réponse a été non, n'est-ce pas?
9 J'ai une autre question.
10 M. Dulovic (interprétation): La première fois, je vous ai dit non. Mais
11 qu'est-ce que je sais? Est-ce que je peux lire?
12 M. le Président (interprétation): Arrêtons, arrêtons. Il y a une certaine
13 confusion dans l'esprit du témoin.
14 Est-ce que vous voulez lui poser une autre question? Essayons de passer à
15 un autre sujet, puisque vous avez peu de temps.
16 M. Milosevic (interprétation): Je lis le compte rendu d'audience, là.
17 Je vous ai posé une question précise à ce propos, à propos de l'absence de
18 propagande contre les Musulmans, puisque les Musulmans n'ont rien subi, il
19 n'a pas été touché à un seul Musulman en Serbie; donc ça n'aurait pas été
20 le cas s'il y avait cette propagande. Et de fait, nous avons accueilli
21 70.000 réfugiés de Bosnie pendant la guerre.
22 M. le Président (interprétation): A quoi sert-il de répéter ce que vous
23 avez déjà dit? Vous tenez des discours, maintenant.
24 (Le micro de M. Milosevic n'est pas branché.)
25 Monsieur Milosevic, on vous a dit à plus d'une reprise qu'un contre-
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1 interrogatoire ne sert pas à soumettre une thèse. Bien sûr, vous pouvez le
2 faire, mais ne perdez pas le temps de la Chambre par des polémiques
3 incessantes.
4 Est-ce que vous avez une question à poser à ce témoin?
5 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Dulovic, savez-vous qu'autour de
6 Mali Zvornik –là, nous parlons du territoire de la République de Serbie et
7 j'estime que je suis responsable de ce territoire de Serbie, puisque
8 j'étais le Président de la Serbie-, savez-vous que dans les environs de
9 Mali Zvornik il y a quelques villages qui sont uniquement musulmans et
10 que, dans ces villages, pas un seul habitant n'a jamais été perturbé,
11 alors que la Drina n'a qu'une largeur de 50 mètres, et que sur l'autre
12 rive, il y avait une guerre civile qui faisait rage?
13 M. Dulovic (interprétation): Je ne suis pas au courant.
14 Question: Savez-vous qu'il y a aussi une mosquée à Mali Zvornik, puisqu'il
15 y a des Musulmans qui y habitent, et que cette mosquée n'a jamais été
16 endommagée, pas plus qu'elle n'aurait vu ses murs couverts de graffitis ou
17 quoi que ce soit?
18 Réponse: Je sais qu'il y avait une mosquée à cet endroit et qu'elle était
19 gardée par des policiers.
20 Question: Est-ce que vous trouvez ça logique? Trouvez-vous logique qu'il
21 faille surveiller cette mosquée alors qu'à 50 mètres, sur l'autre rive, il
22 y avait des assassinats graves, il y avait des exactions, il y avait des
23 troubles?
24 Réponse: J'ai seulement dit ce que j'ai vu. Il ne me revient pas de penser
25 ou de dire ce que je pense.
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1 Question: Fort bien, Monsieur Dulovic.
2 Avez-vous la moindre information à propos de l'attaque menée par les
3 forces armées musulmanes sur Kamenica, Gornje Kamenica et sur le fait que
4 beaucoup de personnes ont été assassinées? Cette attaque avait à sa tête
5 Esad Mehmedovic, un ancien policier, Suljagic, ainsi que Esad et Mehmed
6 Grebic.
7 Etes-vous au courant de cela?
8 Réponse: Je ne sais même pas où se trouve cet endroit et je n'y suis
9 jamais allé.
10 Question: Savez-vous ce qui s'est passé sur la route allant de Zvornik à
11 Sehovici? Les forces musulmanes ont attaqué une colonne de véhicules à cet
12 endroit. Dans cette colonne se trouvaient des civils serbes.
13 Réponse: Non.
14 Question: Douze ont été tués. Il y avait notamment parmi les victimes une
15 femme enceinte; elle a été grièvement blessée. Est-ce que vous êtes au
16 courant de cela? Est-ce que vous vous souvenez de cet événement?
17 Réponse: Non. Non, non, je ne suis pas du tout au courant.
18 Question: Avez-vous la moindre information concernant une attaque? Enfin,
19 ce sont tous des villages tout proches de Zvornik, dans les environs de
20 Zvornik; Boljkovica aussi. Là, 14 civils serbes ont été tués; je ne vais
21 pas donner lecture de leurs noms, mais je les ai. Avez-vous entendu parler
22 de cela?
23 Réponse: Non.
24 Question: Il y avait bien sûr du pillage, le bétail a été emmené, ce genre
25 de choses?
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1 Réponse: Non. Non, je n'étais pas là sur le terrain.
2 Question: Etes-vous au courant de Snagovo, du fait qu'il y a eu assassinat
3 massif de populations civiles par les Musulmans? Et que certains hommes
4 ont été castrés, il y a eu mutilation et tortures à Zvornik et aux
5 alentours? Avez-vous été mis au courant de cela?
6 Réponse: Non. Moi, je me suis trouvé à Zvornik, mais très peu de temps.
7 Par conséquent, je n'ai pas eu l'occasion d'entendre parler de tout cela.
8 Question: Avez-vous notamment entendu parler de l'assassinat de Mihajlo
9 Pantic? C'était un Serbe; il y avait 90 ans et il a été tué de trois
10 balles.
11 Réponse: Je n'ai pas entendu parler de cela parce que je n'étais pas là.
12 Question: Bon. Avez-vous, d'une quelconque façon, entendu parler
13 d'assassinats dans la municipalité de Zvornik, assassinats et meurtres
14 commis dans la municipalité? Avez-vous entendu parler de ce qu'ont fait
15 des unités qui avaient à leur tête Naser Oric de Srebrenica? Savez-vous
16 combien de massacres ils ont commis dans la municipalité de Zvornik?
17 Réponse: Non.
18 Question: Mais vous voyez: ici par exemple, vous dites que le 10 mai, vous
19 étiez à Zvornik.
20 Réponse: Oui.
21 Question: Le 5 mai, il y a eu un massacre massif de la population civile,
22 juste aux abords de Zvornik, à Boskovici, Dragoslava Cvijetic a été tuée,
23 Spasojevic Stanka; ce sont des femmes qui ont été tuées. Peut-être qu'on
24 ne reconnaît pas le fait que ce sont des femmes à entendre leurs noms.
25 Draga Lukic, Milosava Kostic, Draga Tesic, et ainsi de suite.
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1 Il y avait beaucoup de femmes parmi ceux qui ont été tués le 5 mai, et
2 vous n'en avez pas du tout entendu parler alors que vous étiez à Zvornik
3 le 10, cinq jours l'événement?
4 Réponse: Oui, c'est logique, logique que je n'ai pas du tout entendu
5 parler de cela: les nouvelles se propageaient lentement, les gens
6 s'occupaient de leurs affaires personnelles. Moi, j'en ai pas entendu
7 parler. Ce n'était pas un sujet dont on parlait à l'époque.
8 Question: Très bien. Alors, de quoi parlait-on, si l'on ne parlait pas des
9 crimes?
10 Examinez ceci: mois d'avril. Remontons d'un mois dans le temps. Avant
11 votre arrivée à Zvornik, quand est-ce que vous êtes arrivé la première
12 fois à Zvornik?
13 Réponse: C'est dit dans le texte.
14 Question: Mais je ne peux pas le trouver dans le texte.
15 Réponse: Avril.
16 Question: Quelle date?
17 Réponse: Je l'ai dit, j'avais les documents sur moi, je ne m'en souviens
18 pas pour le moment. Je pense que là aussi, c'était le 10 avril.
19 M. Milosevic (interprétation): Le 10 avril, et puis c'est le 10 mai?
20 M. Dulovic (interprétation): Oui, c'est comme ça.
21 M. le Président (interprétation): Le témoin a dit "10 mai". Passons à
22 autre chose. Ici, ce n'est pas un examen de bonne mémoire ou de capacité
23 de rétention.
24 M. Milosevic (interprétation): Je ne mets pas à l'épreuve la capacité de
25 mémoire de ce témoin. J'ai dans mes notes ce que j'ai écrit à propos de
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1 son arrivée, par exemple. J'ai ici des éléments qui portent sur ce qui
2 s'est passé le 17 avril 1992, des événements très graves: un grand nombre
3 de personnes ont été tuées, toujours dans la municipalité de Zvornik,
4 village de Rastusnica.
5 Avez-vous entendu parler de cette attaque menée par les forces musulmanes?
6 M. Dulovic (interprétation): Non. Non, à l'époque, quand je me trouvais à
7 Zvornik, ce dont on parlait, c'était l'affrontement entre le commandant de
8 la Défense territoriale et une forte formation paramilitaire. L'homme qui
9 était en la tête de cette formation, c'était un homme de Seselj, disait-
10 il; c'était Cele. C'est de cela qu'on parlait à l'époque. Il ne m'était
11 pas possible de m'entretenir avec les gens de ce qui se passait parce que
12 ce sujet-là, que je viens d'évoquer, était plus urgent.
13 Question: D'accord, mais qu'est-ce qui est plus urgent, Monsieur Dulovic,
14 que de telles tueries, le massacre de civils sur toute la municipalité de
15 Zvornik? Ne me dites pas qu'il est plus important de savoir si un bandit
16 se dispute avec un autre. Vous dites que vous avez déjeuné avec cet homme
17 et que l'entretien a duré plusieurs heures, n'est-ce pas?
18 Réponse: Oui.
19 Question: Est-ce que vous avez pensé que c'était la chose la plus urgente
20 qu'il fallait faire: déjeuner avec cet homme pendant plusieurs heures,
21 pour discuter de tout cela? C'était plus urgent que tout ce que je viens
22 de vous citer là?
23 Réponse: Ce qui était de plus urgent pour moi, c'était de savoir ce qui se
24 passait à Zvornik et qui étaient les protagonistes.
25 Question: Et vous pensiez qu'une telle source serait fiable? Ou partiez-
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1 vous du principe que cette source voulait plutôt vous donner sa version
2 des événements, de la façon qui lui était la plus commode? Un tel criminel
3 est-il, à vos yeux, une source fiable?
4 Réponse: Je me suis contenté de transmettre ici ce que cet homme m'avait
5 dit.
6 Question: D'accord. Fort bien, Monsieur Dulovic. Je ne vous pose pas de
7 questions en ce qui concerne chacun de ces noms, chacune de ces personnes,
8 je vous ai dit combien de personnes étaient concernées. Mes questions
9 portent sur l'ensemble de la situation.
10 Est-ce qu'il vous est arrivé d'obtenir des renseignements concernant ce
11 nombre considérable de civils tués dans la municipalité de Zvornik?
12 Laissons les noms des femmes des autres de côté. Est-ce qu'il vous est
13 arrivé d'apprendre ce qui est s'était passé? Est-ce qu'il vous est arrivé
14 d'écrire à propos de ces pertes civiles et des auteurs de ces crimes dans
15 la municipalité de Zvornik?
16 Réponse: Ça, c'est ce que faisait le correspondant local.
17 Question: Qui était-il?
18 Réponse: Mais le correspondant en question.
19 Question: Mais vous étiez le correspondant de "Politika Ekspres", n'est-ce
20 pas?
21 Réponse: Non, à l'époque, j'étais journaliste et j'étais attaché au siège
22 de la rédaction. Vous avez des correspondants qui étaient dans toutes les
23 différentes villes de Yougoslavie.
24 Question: D'accord. Mais si vous étiez journaliste attaché à la rédaction,
25 vous allez quelquefois sur le terrain. A ce moment-là, est-ce que vous
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1 êtes un envoyé spécial, n'est-ce pas, faisant un reportage sur le terrain?
2 Réponse: On pourrait le dire comme ça, mais tout est fonction du sujet
3 concerné.
4 Question: Fort bien. Alors quel était le sujet qui vous concernait? Quel
5 était le sujet d'actualité pour vous, au moment où vous étiez à Zvornik?
6 Est-ce que vous deviez parler de qui s'affrontait parmi ces criminels ou
7 deviez-vous parler de ce qui se passait?
8 Réponse: Ça, c'était une décision prise par moi et par le rédacteur en
9 chef qui voulait savoir ce qui se passait à Zvornik.
10 Question: D'accord. Est-ce qu'il vous est jamais arrivé d'apprendre quoi
11 que ce soit à propos de ces fosses communes, dans la municipalité de
12 Zvornik, 50 kilomètres au sud, dans le village de Kamenica. Est-ce qu'il
13 vous est arrivé d'en entendre parler, à fortiori d'en parler? Je suppose
14 que vous n'avez jamais écrit d'articles à ce propos.
15 Réponse: Jamais je n'en ai entendu parler et jamais je ne me suis trouvé
16 sur les lieux.
17 Question: Bon, bon, Monsieur Dulovic. Ici, vous avez expliqué, assez
18 longuement d'ailleurs, que Zeljko Raznatovic alias "Arkan" était membre du
19 ministère fédéral de l'Intérieur. Pour en apporter la preuve, vous avez
20 mentionné le fait qu'à l'occasion du procès que vous avez suivi un
21 certificat aurait été montré. Il portait sur un emprunt ou un prêt et ceci
22 était censé apporter la preuve de l'appartenance de "Arkan" au ministère
23 fédéral de l'Intérieur, c'est bien cela?
24 Réponse: Oui.
25 Question: Et puis, on a fait de la surenchère. Et puis, on a parlé d'un
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1 chiffre de plusieurs milliers de dollars. Nous sommes à ce moment-là dans
2 les années 80. Les taux de conversion de devises variaient bien sûr, mais
3 ça représentait sans doute à l'époque 3.000 dinars pour un dollar; ce qui
4 veut dire que si vous aviez 3.000 dollars, ça devait faire 9 millions de
5 dinars. Pourquoi est-ce que je perdrais mon temps à vérifier ceci, s'il
6 suffit de consulter les listes de conversion de devises qui étaient du
7 domaine public à l'époque? Vous pouvez obtenir ce renseignement vous-même.
8 Savez-vous qui était le ministre de l'Intérieur, dans les années 80, en
9 Yougoslavie?
10 Réponse: J'ai oublié, je ne sais plus.
11 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que vous vous souvenez que c'était
12 Stane Dolanc, qui était un dirigeant slovène, et c'est lui qui était à la
13 tête du MUP?
14 M. Dulovic (interprétation): Oui.
15 M. le Président (interprétation): Nous allons faire une pause.
16 Mais, auparavant, aidez-nous sur ce point, Monsieur Groome. Nous avons
17 plusieurs requêtes, nous avons plusieurs propositions de pièces pour
18 versement au dossier concernant le témoin n°36. Je crois qu'il est sur la
19 liste. Peut-être pourriez-vous savoir nous dire quand est-ce qu'il est
20 prévu de l'entendre?
21 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je pense qu'il s'agit
22 du 29 ou 30 de ce mois-ci.
23 M. le Président (interprétation): Ce n'est donc pas son tour maintenant,
24 tout de suite après?
25 M. Groome (interprétation): Non, non, pas du tout.
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1 M. Milosevic (interprétation): Puis-je dire quelque chose?
2 M. le Président (interprétation): Oui, allez-y.
3 M. Milosevic (interprétation): Je n'ai aucun aperçu, aucune liste pour ce
4 qui est des témoins qui viendront comparaître, exception faite des deux
5 témoins suivants. Je suis au courant des deux témoins suivants. L'un…
6 comment s'appelle-t-il? (expurgé) qui vient après ce témoin-ci, et le suivant
7 c'est un certain (expurgé).
8 M. le Président (interprétation): Oui, oui, un instant, un instant,
9 Monsieur Milosevic.
10 Monsieur Groome, est-ce que vous pouvez nous aider. L'accusé devrait
11 disposer d'une liste plus longue que celle-ci, donc je vous demanderais
12 d'y veiller pour que les noms des témoins qui seront entendus cette
13 semaine et toute la semaine prochaine figurent sur cette liste. Nous
14 suspendons, maintenant, pendant 20 minutes.
15 (L'audience, suspendue à 10 heures 32 est reprise à 10 heures 55.)
16 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, vous avez la parole.
17 M. Milosevic (interprétation): Donc nous allons reprendre là où nous avons
18 interrompu tout à l'heure. Vous constatez donc que Zeljko Raznatovic
19 "Arkan" a été à un certain moment fonctionnaire du ministère fédéral de
20 l'Intérieur, et ça c'était dans les années 80. Il y a eu ce procès à ce
21 moment-là et avant il était donc fonctionnaire. Et puis, maintenant, on
22 constate cela. Alors, qu'est-ce que cela peut faire s'il était
23 fonctionnaire du ministère de l'Intérieur dans les années 80? Qu'est-ce
24 que cela fait? Quel sens cela a-t-il?
25 M. le Président (interprétation): C'est à nous de dire si cela à un sens
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1 quelconque, pas au témoin.
2 M. Milosevic (interprétation): Mais vous rappelez-vous qu'à ce moment-là,
3 à la tête de ministère de l'Intérieur, se trouvait Stane Dolanc, un
4 dirigeant slovène, qui était à l'époque un dirigeant de ce ministère?
5 M. Dulovic (interprétation): Oui, je m'en rappelle.
6 Question: Au cours de l'interrogatoire principal on vous a demandé… Je
7 vous demande pour commencer si Vuckovic est bien ce "Cele" dont vous avez
8 parlé?
9 Réponse: Non.
10 Question: Qui est Vuckovic?
11 Réponse: Vojin Vuckovic et son frère Dusan Vuckovic étaient une formation
12 armée.
13 Question: Bien. Ecoutez, moi, ce qui m'intéresse c'est de faire la clarté
14 sur un point particulier. On vous a demandé s'il avait un quelconque
15 rapport avec des organes gouvernementaux, des instances gouvernementales
16 de la Yougoslavie ou de la Serbie. Et, à cette question, vous avez répondu
17 qu'à un certain moment il avait été employé comme instructeur en affaires
18 militaires par le SUP fédéral? C'est bien cela?
19 Réponse: Oui.
20 Question: Est-ce que cela prouve un lien? Prenez par exemple un
21 instructeur anglais qui travaille au SUP fédéral pour enseigner l'anglais
22 ou un professeur de français ou un professeur de mathématiques qui donne
23 des cours par exemple, est-ce que cela prouverait que l'homme en question
24 a un rapport quelconque avec les instances gouvernementales?
25 Réponse: Oui.
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1 Question: Donc cela signifie que si l'on a un infirmier qui travaille dans
2 un hôpital et cet hôpital est un hôpital d'Etat, il a quelque chose à voir
3 avec les instances gouvernementales?
4 Réponse: Cette comparaison n'est pas appropriée.
5 Question: Bien, bien, Monsieur Dulovic. Mais en dehors du fait que cet
6 homme aurait été employé par le SUP en tant qu'instructeur, vous n'avez
7 rien d'autre qui indique un rapport quelconque entre lui et les instances
8 gouvernementales?
9 Réponse: Je dispose de mes observations.
10 Question: Eh bien, qu'avez-vous observé par rapport à cette relation?
11 Réponse: Avec les autorités de Sabac quand il a été jugé là-bas.
12 Question: Quelle était la nature de ses relations?
13 Réponse: Il a approché le président de la Chambre et il s'est passé
14 quelque chose de tout à fait inhabituel, à savoir qu'ils ont chuchoté tous
15 les deux dans cette salle d'instance.
16 Question: Est-ce que cet homme a été condamné?
17 Réponse: Il a été condamné avec sursis.
18 Question: Donc il n'est pas allé en prison?
19 Réponse: Vojin Vuckovic n'a pas été emprisonné.
20 Question: L'homme qui a tué 17 personnes, c'est bien de lui que vous
21 parlez?
22 Réponse: Non, je parle de Vojin Vuckovic, le frère aîné.
23 Question: Moi, ce qui m'intéresse, c'est celui qui est accusé de meurtre.
24 Réponse: Vous parlez de celui qui a été accusé le 17 mai.
25 Question: Oui, oui.
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1 Réponse: Il a été condamné à sept ans de prison en première instance. Je
2 ne sais pas s'il est toujours en prison ou si d'ailleurs il a fait de la
3 prison à quelque moment que ce soit.
4 Question: Vous ne savez pas quel a été le jugement en appel?
5 Réponse: Non.
6 Question: Très bien. J'ai mis par écrit une réponse que vous avez faite à
7 une question concernant vos sources d'informations. Vous avez dit que vous
8 avez appris quelque chose de la bouche de gens dont vous supposiez qu'ils
9 savaient, donc il s'agissait d'une supposition de votre part, n'est-ce
10 pas?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Estimez-vous que des renseignements recueillis de cette façon,
13 de la bouche de personnes, dont vous supposez qu'elles savent quelque
14 chose, peuvent être considérés comme des renseignements sérieux?
15 Réponse: Tout dépend de mon appréciation personnelle.
16 Question: Estimez-vous que lorsque vous parlez avec un criminel comme ce
17 "Cele" et qu'il vous raconte quelque chose, estimez-vous que ce qu'il vous
18 a raconté constitue des informations valables?
19 Réponse: Dans ce cas concret, je pense que c'était le cas.
20 Question: Bon, mais écoutez…
21 Réponse: Il était convaincant.
22 Question: Supposez-vous que quelqu'un qui tue et pille ne peut pas mentir?
23 Ou bien pensez-vous qu'il est vraisemblable qu'il puisse mentir également;
24 parce que s'il tue et pille, comment peut-il dire la vérité?
25 Réponse: Pas toujours.
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1 Question: Vous avez dit à un certain moment, en parlant de votre voyage à
2 Uzice, que vous avez donc fait ce voyage, quels autres journalistes vous
3 ont accompagné dans ce voyage à Zvornik et Visegrad?
4 Réponse: Bojana Marjanovic, ma collègue.
5 Question: Seulement elle?
6 Réponse: Et le chauffeur.
7 Question: Très bien. Vous avez annoté sur la carte l'endroit à partir
8 duquel vous avez vu des maisons brûlées de l'autre côté de Drina.
9 Réponse: Oui.
10 Question: Bien. Monsieur Dulovic, savez-vous, puisque vous avez emprunté
11 ce chemin que de l'autre côté de la Drina, qu'il y a des monts assez
12 élevés et des forêts très épaisses et que donc vous n'aviez aucune chance
13 de voir les maisons brûlées depuis l'endroit où vous vous trouviez, et que
14 vous avez annotées sur la carte?
15 Réponse: Ce n'est pas exact.
16 Question: Ma supposition est-elle exacte: à savoir que c'est plus tard que
17 vous vous êtes rendu dans tous ces endroits pour vérifier ce qui s'était
18 passé à quel endroit et que vous n'avez pas fait ce voyage à ce moment-là
19 parce que c'était impossible?
20 Réponse: C'est une supposition de votre part. Il était possible d'y aller,
21 et ce que j'ai dit est exact.
22 Question: Bien.
23 Réponse: Parce que la fumée monte très haut.
24 Question: Oui, mais vous voyez sur la carte quelle est la distance et vous
25 voyez à quelle hauteur se trouve le village dont vous parlez?
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1 Réponse: Ces villages –et j'en ai parlé-, ce sont des gens qui étaient sur
2 la rive du côté serbe de la Drina qui m'en ont parlé. Ils regardaient ce
3 qui se passait et quand j'ai demandé ce qui s'était passé, ils m'ont dit
4 que cela s'était passé dans tel ou tel village, Redzeci, Djapici,
5 Krasnopolje, Rzine, Lonjin.
6 Question: Je vois la carte en ce moment même et je vois l'annotation que
7 vous avez apposée. Et je constate qu'il y a dans cette région une centaine
8 de villages, pour la seule petite portion de la carte que vous avez
9 fournie. Et Redzici se trouve au milieu de cette carte?
10 Réponse: Oui.
11 Question: C'est bien de cela que vous parlez, n'est-ce pas, Monsieur
12 Dulovic?
13 Réponse: Oui, ce village a été mentionné.
14 Question: Bon. Et vous affirmez que c'est à partir de cet endroit que vous
15 avez pu voir des incendies de l'autre côté?
16 Réponse: Ce n'est pas moi qui l'affirme, c'est vous qui dites que je
17 l'affirme.
18 Question: Mais ce n'est pas moi qui ai apporté cette carte de Redzici;
19 c'est vous qui avez parlé de Redzici et d'incendies.
20 Réponse: Moi, je ne connaissais pas le terrain. J'ai demandé aux gens ce
21 qui se passait et ils m'ont dit que les villages dont j'ai donné les noms
22 étaient en feu.
23 Question: Bon, Monsieur Dulovic, ceci suffit à montrer la fiabilité de vos
24 propos.
25 Réponse: Ce sont des gens qui possèdent des fermes dans ces coins-là et
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1 qui connaissent chacune des maisons qui m'en ont parlé. Et je ne parle
2 même pas des villages de l'autre côté de la Drina.
3 Question: Est-ce que vous parvenez à plusieurs kilomètres de distance?
4 Réponse: Je ne sais pas.
5 Question: Et en plus, cela se trouve en haut de collines?
6 Réponse: Je ne sais pas.
7 Question: Très bien, Monsieur Dulovic.
8 Encore une question au sujet des notes que vous avez prises au sujet de ce
9 qu'a dit M. Seselj lorsqu'il était à Vukovar. Avez-vous publié un article
10 sur ce sujet?
11 Réponse: Je ne me souviens pas.
12 Question: Mais je suppose, si vous preniez des notes, que lorsque vous
13 preniez des notes c'était en général dans le but d'écrire?
14 Réponse: Oui, mais je ne me souviens pas si j'ai mentionné cela dans le
15 texte. Je devrais vérifier.
16 Question: Bien. Vous dites que la politique qui prévalait consistait à
17 nettoyer l'armée de ses cadres non serbes; c'est bien ce que vous avez
18 dit?
19 Réponse: Je ne pense pas m'être exprimé ainsi. Il faudrait que vous me
20 relisiez ce passage.
21 Question: Je crois qu'au cours de l'interrogatoire principal -je ne sais
22 pas à quel endroit exactement ou à quel moment- il me semble que vous avez
23 dit qu'il existait une tendance à nettoyer l'armée de ses cadres non
24 serbes. Avez-vous dit cela ou pas?
25 Réponse: Ce n'est pas moi qui ai dit cela.
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1 Question: Bien. Mais êtes-vous au courant du fait que ce même Taso Enes
2 qui était colonel et ensuite général était un Musulman?
3 Réponse: Je ne sais pas s'il est musulman.
4 Question: Vous pensez que le prénom Enes est un prénom serbe?
5 Réponse: Je ne veux rien penser du tout. Je ne sais pas s'il est musulman
6 ou pas.
7 Question: Bien. Mais savez-vous par exemple que, y compris durant
8 l'agression de l'OTAN en 1999 -bien sûr, cette période est plus longue que
9 cela- à ce moment-là, à la tête du service de sécurité militaire, c'est-à-
10 dire occupant une des fonctions les plus sensibles qui soient, notamment
11 en temps de guerre, qu'à ce poste on trouvait le commandant Geza Farkas,
12 un Hongrois?
13 Réponse: Oui, je sais.
14 Question: Savez-vous combien d'autres postes importants étaient occupés
15 par toutes sortes de gens qui n'étaient pas de nationalité serbe, à
16 l'époque?
17 Réponse: Mais je ne sais pas pourquoi vous racontez cela, alors que les
18 mots consistant à dire que l'armée devait être nettoyée de ses cadres non
19 serbes ne sont pas des mots que j'ai prononcés, moi. Ce n'est pas une
20 conclusion que j'ai tirée moi-même. C'est quelque chose qui a été dit par
21 un homme qui avait des formations paramilitaires sous ses ordres; il
22 s'agit de votre ami Vojislav Seselj.
23 Question: Monsieur Dulovic, c'est un fait bien connu que Seselj était mon
24 opposant et pas mon ami.
25 Réponse: En tout cas, il était lié à vous, il était votre ami.
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1 Question: Il a écrit une lettre en rapport avec votre témoignage; il a
2 estimé que c'était de son devoir d'agir ainsi. Je n'en tirerai pas la même
3 conclusion que vous.
4 Mais vous avez parlé d'un télégramme. Y a-t-il des éléments, dans ce
5 télégramme, qui indiqueraient qu'il existait un rapport légal et tout à
6 fait correct, dirais-je, de l'armée par rapport à certains éléments dont
7 vous avez parlé?
8 Voilà, je vais vous lire ici ce que j'ai sous les yeux; c'est un
9 télégramme. On lit: "Adjoint du commandant, lieutenant-colonel Milan
10 Eremija".
11 Et au milieu de la page, il parle –je cite- d'un "certain nombre
12 d'éléments qui affectent négativement le moral des unités", entre autres.
13 Et il parle également d'un traitement correct à l'égard des prisonniers.
14 Est-ce que cela indique qu'il y avait, dans l'armée, une atmosphère qui
15 avait un effet positif sur les hommes? Est-ce que cela n'indique pas qu'il
16 y avait un comportement tout à fait correct à l'égard de ceux que l'on
17 combat au cours d'une guerre? Ne pensez-vous pas que ceci contredit ce que
18 vous avez dit?
19 Réponse: Il ne m'appartient pas de traduire ce télégramme, ce document.
20 Question: Vous l'avez soumis à la Chambre, donc je suppose que vous l'avez
21 fait avec une intention précise?
22 Réponse: Que celui qui sait interpréter ce texte le fasse!
23 Question: Bon. Ensuite, il est proposé que des mesures soient prises pour
24 améliorer le moral des troupes. Et au nombre de ces mesures, il n'y a pas
25 de numéro inscrit, mais en première place on trouve ce qui suit: "Que l'on
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1 procède régulièrement au désarmement des unités paramilitaires, des
2 soldats d'"Arkan" et des Chetniks notamment, ainsi que de "l'Unité de
3 Dusan Silni", et que les organes de la République de Serbie participent à
4 cette opération."
5 Estimez-vous que cette mesure, cette proposition est également
6 l'illustration d'une attitude correcte de la JNA à l'égard des événements
7 que vous dites avoir observés sur le terrain?
8 M. Dulovic (interprétation): Il ne m'appartient pas d'interpréter ces avis
9 très divers, ou ces interprétations du document.
10 M. le Président (interprétation): Il convient de noter pour le compte
11 rendu d'audience que l'accusé fait référence à la pièce à conviction 342,
12 intercalaire 11.
13 Vous pouvez poursuivre.
14 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, moi, j'ai l'intercalaire 11
15 après ce document. Mais je suppose que vous avez un classeur mieux
16 organisé que le mien; en général, ce qu'on me donne n'est pas très bien
17 organisé. Moi, je l'ai à l'intercalaire 10, mais je suppose qu'il n'y a
18 pas de danger de confusion, car il n'y a qu'un seul télégramme dans ces
19 documents.
20 Monsieur Dulovic, vous dites ne parler que de ce que vous avez vu. Je vous
21 demande, par conséquent, si vous vous souvenez, Monsieur Dulovic -et je ne
22 parle pas que de la frontière vers la Slavonie orientale, donc de la
23 frontière avec le territoire de Serbie, mais je parle aussi du territoire
24 situé à l'intérieur- avoir vu un certain nombre de points de contrôle
25 policiers où les gens étaient arrêtés, les véhicules fouillés, pour voir
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1 s'il y avait des armes ou pour voir s'il y avait le moindre indice
2 d'activité criminelle ou de pillage? Et que ces points de contrôle ont
3 fonctionné tout le temps, qu'il n'y avait pendant la guerre, dans ces
4 territoires affectés par la guerre, une seule route dépourvue de barrage
5 routier? Et que ces barrages, ces points de contrôle étaient contrôlés par
6 la police, qui fouillait les gens pour essayer de voir s'il y avait
7 éventuellement la moindre trace de présence criminelle ou d'action
8 criminelle? Vous vous rappelez cela?
9 M. Dulovic (interprétation): Non.
10 Question: Vous ne vous rappelez pas?
11 Réponse: Non.
12 Question: Vous n'avez pas franchi de tels points de contrôle?
13 Réponse: J'ai franchi un point de contrôle, qui me semblait un point de
14 contrôle régulier, sur l'autoroute menant de Belgrade à Zagreb.
15 Question: Monsieur Dulovic, dites-moi, s'il vous plaît, si à quelque
16 moment que ce soit et à quel endroit que ce soit, vous avez vu en Serbie
17 une quelconque formation paramilitaire?
18 Réponse: Je ne sais pas où j'aurais pu en voir?
19 Question: Moi non plus.
20 Réponse: A Belgrade, je n'en ai pas vu et, d'ailleurs, je ne sais pas ce
21 que sont les formations militaires et ce que sont les formations non
22 militaires. Et je ne sais pas si elles sont armées ou pas. J'ai dit que
23 ces hommes recevaient leurs armes uniquement lorsqu'ils allaient sur le
24 terrain, lorsqu'ils allaient loin de l'endroit où ils vivaient.
25 Question: Bon. Vous avez relaté les événements survenus devant l'entrée de
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1 l'hôtel à Visegrad, lorsqu'un officier de la JNA, de l'armée yougoslave, a
2 arrêté un homme qui, d'après vous, était membre d'une formation
3 paramilitaire, qui avait brisé la porte d'entrée de l'hôtel et pénétré en
4 trombe dans l'hôtel?
5 Réponse: Oui.
6 Question: Avez-vous vu quoi que ce soit que l'armée aurait fait qui
7 n'était pas correct, qui n'était pas en accord avec le règlement militaire
8 ou la discipline militaire, et que vous pourriez nous rapporter?
9 Réponse: Oui.
10 Question: Qu'avez-vous vu, Monsieur Dulovic?
11 Réponse: Sur la route de Trpinska Cesta, j'ai vu un char et, sur les
12 tourelles de ce char, sur les côtés, étaient accrochés des skis, ce qui
13 était un peu surprenant.
14 Question: Puisque vous dites avoir vu le cadavre d'un vieil homme non loin
15 de Visegrad, était-ce sur les bords de la Drina, en tout cas sur les bords
16 d'un cours d'eau?
17 Réponse: Oui, oui, mais ce n'était pas la Drina.
18 Oui, j'ai vu le cadavre d'un homme. Ses mains étaient entravées dans le
19 dos, il avait un bâillon en chiffon sur la bouche, il était près du cours
20 d'eau. Il y avait là des officiers réservistes et également un médecin
21 d'Uzicka Pozega avec qui j'ai parlé. Le cadavre se trouvait à quelques
22 mètres à peine de chez nous.
23 Et je lui ai demandé ce qui s'était passé; on m'a répondu que l'homme
24 avait été étranglé. C'était un Musulman. J'ai demandé comment…
25 Question: Oui, oui, j'ai entendu tout cela.
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1 Réponse: Alors, pourquoi vous me reposez la question?
2 Question: Je voulais vous demander si vous aviez vu ce vieil homme qui
3 avait été étranglé. Très bien. Je suppose que le médecin avait pu vérifier
4 qu'il y avait eu étranglement. Donc si ces questions sont posées, c'est
5 uniquement à des fins d'observation.
6 Mais permettez-moi de vous poser la question suivante: ceci s'est passé
7 dans les environs de Visegrad. Est-ce qu'il y a eu un autre cadavre: celui
8 d'un homme pour lequel quelqu'un savait de quelle façon cet homme avait
9 été tué? Avez-vous vu quelqu'un d'autre qui a été tué au cours de ces
10 actions que vous avez décrites lors de votre voyage à Visegrad aux abords
11 de la ville? Avez-vous vu quelque chose de particulier se passer?
12 Réponse: Pour la première fois, en avril, lorsque j'ai voulu pénétrer dans
13 Zvornik depuis l'autre côté, donc pas depuis le côté serbe, j'ai vu le
14 long de la rivière Drina plusieurs cadavres qui gisaient là. Je n'ai pas
15 pu établir s'il s'agissait d'hommes ou de femmes ou découvrir quoi que ce
16 soit au sujet de leur identité, de leur appartenance ethnique, de leur
17 âge, de leur sexe, etc. J'ai vu cela mais c'était de l'autre côté et les
18 gens qui étaient de l'autre côté l'ont vu aussi.
19 Question: Bien, je comprends. Depuis le territoire serbe, de l'autre côté
20 de la Drina, vous avez vu plusieurs cadavres et vous ne savez pas quel
21 était leur sexe, leur appartenance ethnique, etc. Vous les avez vus sur
22 les rives de la rivière en territoire de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas?
23 Réponse: Oui.
24 Question: Bon. Plus tard, lorsque vous êtes revenu le 10 mai, si j'ai bien
25 compris ce que vous avez dit, c'est à ce moment-là que vous avez vu des
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1 chars et des pièces d'artillerie à Veliki Zvornik. Et puis, vous avez
2 parlé de ce panneau où était écrit Republika Srpska , n'est-ce pas?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Bon. Savez-vous qu'à ce moment-là l'armée de la Republika Srpska
5 avait déjà été créée et que la République fédérale de Yougoslavie avait
6 adopté une nouvelle Constitution avec composition du pays, avec
7 appartenance au pays de la Serbie et du Monténégro le 27 avril 1992. Je
8 suppose que vous vous souvenez de cela? Cela avait été proclamé.
9 Réponse: Je ne me souviens pas. Ce dont je me se souviens, c'est que le
10 chef d'un de ces chars, le commandant qui était donc de l'autre côté sur
11 le pont du côté musulman, j'ai parlé avec lui lorsque je suis passé à côté
12 de lui et ce char appartenait à l'armée yougoslave.
13 Question: Savez-vous qu'après la proclamation de la Constitution de la
14 République fédérale yougoslave, donc après le 27 avril, il a été décidé
15 que tous les citoyens de la République fédérale yougoslave qui font partie
16 de l'armée populaire yougoslave ont pour devoir de venir sur le territoire
17 de la République fédérale yougoslave?
18 Réponse: Je ne sais pas. Moi, je me souviens de ce que j'ai vu et des
19 conversations que j'ai eues.
20 Question: Bien. Etes-vous informé de ce fait, qui est tout à clair et net:
21 durant l'existence de la Grande Yougoslavie de la RSFY, la JNA relevait de
22 la totalité de la Yougoslavie; à partir du moment où la République
23 fédérale yougoslave a été créée, les ressortissants du Monténégro et de la
24 Serbie qui constituent la République fédérale yougoslave ont été extraits
25 des territoires situés hors de la République fédérale yougoslave -tout
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1 comme c'était le cas pour ceux qui étaient en Serbie et au Monténégro et
2 qui venaient d'autres régions de la RSFY précédemment- ils ont dû
3 retourner dans leur République. Est-ce que vous êtes au courant de ce
4 fait?
5 Réponse: Je dois dire une nouvelle fois, parce que vous vous concentrez
6 sur ce que j'ai dit, et ce que j'ai dit avoir vu et entendu. Mais la seule
7 chose dont je veux parler, c'est ce que j'ai vu et entendu. Ce que vous
8 racontez, je n'en ai pas la moindre idée. La seule chose que je sais,
9 c'est ce que j'ai vu et entendu.
10 M. Milosevic (interprétation): Bon. Donc vous n'avez pas la moindre idée
11 du fait qu'après la création de la RFY les ressortissants...
12 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le témoin vous a
13 répondu. Passons à autre chose.
14 M. Milosevic (interprétation): Je n'ai plus de questions. Monsieur May,
15 j'ai respecté le délai qui m'avait été imparti.
16 M. le Président (interprétation): Oui.
17 Maître Tapuskovic, vous avez la parole.
18 (Questions de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin, M. Jovan
19 Dulovic.)
20 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je vais
21 m'efforcer d'en terminer avec mes questions en 10 à 12 minutes.
22 Monsieur Dulovic, vous avez dit qu'à partir de mai 1991 et jusqu'en
23 novembre 1991, donc pendant six ou sept mois, avec quelques petites
24 interruptions, vous étiez pratiquement en permanence en Slavonie
25 orientale, vous êtes allé dans différents villages et dans des villes pour
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1 voir ce qu'il se passait?
2 M. Dulovic (interprétation): Oui.
3 Question: Pendant cette période, donc jusqu'à l'obtention par vous de
4 l'autorisation dont nous avons parlé, il ne fallait pas jusqu'à ce moment-
5 là d'autorisation pour circuler sur le terrain?
6 Réponse: Au début, non.
7 Question: Merci. Ensuite, vous avez obtenu cette autorisation, que l'on
8 trouve à l'intercalaire 1, Monsieur le Président, et qui concerne comme
9 cela est écrit dans le document la période qui va du 9 octobre au 9
10 novembre et vous êtes resté quelques jours de plus, n'est-ce pas?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Est-ce que pendant toute cette période -je parle de la période
13 où vous aviez une autorisation et de celle dont vous n'en aviez pas
14 besoin- il y avait dans cette période d'autres journalistes ou d'autres
15 observateurs d'organisations internationales dans cette région, notamment
16 durant les mois pendant lesquels vous aviez besoin d'une autorisation?
17 Réponse: Il y avait des journalistes et je me souviens qu'il y avait des
18 internationaux. Vous savez… Ah oui, je ne parviens pas à me souvenir des
19 dates. C'était à Borovo Selo, il y avait là des étrangers qui devaient
20 conclure un accord avec Goran Hadzic au sujet d'un échange, ou plutôt
21 s'organisaient avec les officiers de liaison au sujet d'un cessez-le-feu à
22 venir.
23 Question: Monsieur Dulovic...
24 Réponse: Henri Vermeer, c'était le nom d'un de ces hommes et c'était un
25 envoyé de M. Van den Broek.
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1 Question: Merci. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si pendant cette
2 période, donc y compris durant le mois qui va jusqu'au 12 novembre, il y
3 avait quelqu'un qui a permis à des journalistes, à des observateurs
4 étrangers et du pays de suivre les événements dans cette région de
5 Slavonie orientale?
6 Réponse: Eh bien, la plus grande partie du temps, nous pouvions suivre les
7 événements.
8 Question: Merci, c'est ce qui m'intéressait.
9 Maintenant, je vais vous demander la chose suivante: le 9 octobre, quand
10 vous avez reçu cette autorisation et que vous êtes arrivé sur le terrain,
11 où se trouvait l'armée yougoslave? A quelle distance de la ville de
12 Vukovar ou, pour être plus précis, du centre de Vukovar?
13 Réponse: Il me faudrait une carte.
14 Question: Je vous en prie.
15 Réponse: Par exemple, depuis Borovo Selo, les soldats étaient aux confins
16 de Borovo Selo; pas dans la direction de Vukovar, mais dans la direction
17 opposée. Je parle d'une unité de chars. Donc il y a Borovo Selo et puis,
18 la ligne de chemin de fer, un aéroport, un terrain de sport et de nouveau
19 un hameau, Borovo Naselje. Mais je ne sais pas vraiment….
20 Question: Mais c'était dans la région? A quelle distance de la ville?
21 Réponse: De la ville, vous dites? Eh bien, je ne sais vraiment pas.
22 Question: A quelle distance de Borovo Selo?
23 Réponse: Eh bien, je n'ai jamais parlé de distance. Il faudrait regarder
24 la carte pour vérifier.
25 Question: Mais l'armée n'était pas dans la ville, n'était pas au centre de
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1 la ville?
2 Réponse: Quelle ville?
3 Question: La ville de Vukovar.
4 Réponse: Je n'étais pas à Vukovar. J'étais à Borovo Selo, dans les
5 environs de Vukovar.
6 Question: Mais à quelle distance cela se trouve-t-il?
7 Réponse: Je ne sais pas, je ne ferai que supposer.
8 Question: Très bien. Passons à autre chose, Monsieur Dulovic. Vous avez
9 dit hier que vous aviez entendu de la bouche d'un officier de l'armée
10 yougoslave quelles étaient les unités qui se trouvaient à Vukovar?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Ce même officier vous a-t-il dit quelles étaient les unités
13 croates qui se trouvaient dans la ville même de Vukovar?
14 Réponse: Non, non.
15 Question: Merci. Eh bien, puisque vous avez reçu l'autorisation de voir
16 tout ce qui se passait de ce côté-là, êtes-vous parvenu à obtenir un
17 laissez-passer pour entrer dans la ville même et voir ce qui se passait
18 dans la ville?
19 Réponse: Je n'ai pas essayé d'entrer en ville. Mon collègue reporter, le
20 correspondant de "Vecernje Novosti", a essayé de rentrer en ville et il a
21 été tué. Ils ont retrouvé son cadavre. En d'autres termes, il n'était pas
22 possible d'entrer à Vukovar.
23 Question: Donc celui qui a essayé d'entrer en ville a été tué, c'est bien
24 cela?
25 Réponse: Oui, il a été tué par des membres de la Défense territoriale. Il
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1 y avait beaucoup de tirs dans ce secteur, tout le monde tirait sur tout et
2 sur n'importe quoi; personne ne savait ce qui se passait, il y avait des
3 hommes en uniforme, en civil, des vêtements de toutes sortes.
4 Question: Comment savez-vous qu'il a été tué par des membres de la Défense
5 territoriale et pas par quelqu'un d'autre? Comment savez-vous qu'il n'a
6 pas été touché par une balle perdue?
7 Réponse: Le lieutenant de l'unité de chars, Borisa Doknic, m'en a parlé,
8 ainsi que de nombreux autres officiers.
9 Question: Très bien. Merci.
10 Maintenant, Monsieur Dulovic, lorsque l'armée était loin du centre de
11 Vukovar, dans les environs de la ville, est-ce que des tentatives ont été
12 faites pour trouver une solution pacifique et mettre fin au conflit et
13 empêcher la multiplication des victimes?
14 Réponse: Oui, c'est ce que j'ai cru comprendre; il y a eu des tentatives
15 de ce genre, pour autant que je m'en souvienne.
16 Question: Merci. Maintenant, passons à autre chose. Ce qui m'intéresse,
17 c'est la chose suivante: vous avez dit qu'il y avait des coups de feu qui
18 venaient de la ville en réplique à une attaque. Donc lorsque ces gens
19 étaient attaqués, ils rétorquaient et tiraient. Ce qui m'intéresse, c'est
20 de savoir quelle était la puissance du tir. Est-ce que la puissance du tir
21 en réplique était la même que celle de l'attaque?
22 Réponse: C'est difficile à dire. J'observais la situation depuis les
23 abords mêmes de Borovo Selo, de l'autre côté de la ligne de chemin de fer.
24 Il y avait… Nous étions plusieurs à observer ce qui se passait.
25 Nous avons vu nos chars, donc des chars serbes, qui se dirigeaient dans la
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1 direction de Borovo Naselje; c'est un lieu qui se trouve encore plus près
2 de Vukovar, après la piste d'atterrissage, l'aéroport. Il y avait
3 plusieurs chars, une dizaine, et lorsqu'ils ont pris la direction de
4 l'aéroport, les Croates ont utilisé des mortiers et commencé à pilonner.
5 Un grand nombre de personnes ont péri dans ces tirs de mortiers.
6 Question: Qui a péri: des civils ou des soldats?
7 Réponse: Il n'y a pas de civils, Monsieur Tapuskovic, il n'y a pas de
8 civils dans une attaque de ce genre, lorsque les chars sont en train
9 d'avancer. C'étaient des soldats, c'étaient des réservistes ou quelque
10 chose de ce genre, je ne sais pas exactement. Mais l'attaque a été arrêtée
11 et il y a eu des réactions par tirs de mortiers et les membres de
12 l'infanterie qui suivaient les chars ont subi ces pertes humaines.
13 Certains des chars ont sauté sur des mines et ont donc été arrêtés de
14 cette façon, mais ils sont tous revenus. L'attaque a avorté. Et lorsqu'ils
15 se sont retirés, une fois que les forces se sont retirées, les tirs de
16 mortiers ont cessé. Donc c'est un exemple du genre de choses que l'on
17 pouvait voir là-bas.
18 Question: Est-ce que les choses se passaient toujours de la même façon?
19 Réponse: Non, pas toujours; cela s'est passé deux ou trois fois. En fait,
20 des tentatives de ce genre ont été faites à plusieurs reprises. Badza, le
21 commandant de la Défense territoriale, je l'ai entendu de la bouche de
22 certaines personnes, a donné des ordres pour que ce genre d'offensive ne
23 soit plus lancée; parce que des pertes humaines étaient toujours subies en
24 grand nombre.
25 M. Tapuskovic (interprétation): Dans votre déposition, vous avez dit…
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1 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Tapuskovic?
2 M. Tapuskovic (interprétation): Vous avez dit dans votre déposition que
3 des obus étaient tirés. Quelle était la nature de ces obus?
4 M. Dulovic (interprétation): Pour l'essentiel, des obus de mortiers. Oui,
5 parce que c'étaient les plus efficaces. Et je ne sais pas s'ils avaient
6 des pièces d'artillerie de plus gros calibre. Par la suite, j'ai entendu
7 dire qu'ils n'en possédaient pas.
8 Question: Donc vous pourriez dire à peu près que dans ces ripostes aux
9 attaques qui ont été lancées, à l'occasion donc des ripostes en provenance
10 de Vukovar, combien de soldats il a péri, du moins à peu près, d'après ce
11 que vous avez pu voir arriver?
12 Réponse: Je ne saurai vous le dire.
13 Question: Et à peu près?
14 Réponse: Pas à peu près non plus.
15 Question: Donc ce que Sljivancanin avait dit sous nos yeux, à partir de
16 l'enregistrement vidéo et qui disait donc que de jeunes soldats avaient
17 péri, c'était exact?
18 Réponse: Mais la chose n'est pas contestée du tout.
19 M. Tapuskovic (interprétation): Mais sauriez-vous nous dire combien de
20 personnes à peu près...
21 M. le Président (interprétation): Mais quelle est la finalité. Il s'agit
22 peut-être d'un malentendu, peut-être avez-vous mal compris la chose? Ce
23 que j'ai compris, c'est que Sljivancanin avait empêché les membres de la
24 Croix-Rouge d'accéder à l'hôpital et c'est depuis l'hôpital qu'on avait
25 évacué des gens. C'est là la substance même de cette partie du témoignage.
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1 M. Tapuskovic (interprétation): Vous avez entendu M. Sljivancanin dire
2 dans cet entretien que des jeunes gens étaient en train de périr. Ce que
3 je voulais faire entendre à la Chambre, c'est qu'à l'occasion du feu
4 ouvert en riposte, en provenance de Vukovar, il y avait eu beaucoup de
5 soldats qui avait péri.
6 C'est la chose que j'avais voulu laisser entendre aux Juges de la Chambre.
7 A savoir qu'il y avait des obus et du feu d'infanterie qui était ouvert de
8 l'autre partie. Cela n'a aucune corrélation avec le reste de ce que
9 Sljivancanin a fait. Sljivancanin avait affirmé qu'il y avait des jeunes
10 gens en grand nombre qui avaient péri. Il avait dit… le témoin Dulovic
11 n'en a pas parlé hier. J'ai estimé qu'il était important de préciser que
12 beaucoup de gens étaient tombés. C'était là mon intention.
13 M. le Président (interprétation): Et quand bien même cela serait exact, ce
14 qui s'est passé par la suite à Ovcara, bien entendu, ne saurait en aucun
15 cas être justifié, si véridique comme affirmé, à savoir qu'il y a eu des
16 tueries de soldats.
17 M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, je suis l'une des
18 personnes qui en est profondément convaincue. Ce que je voulais justement
19 faire savoir, c'est qu'à Vukovar, il y avait des gens qui tombaient pour
20 rien. Il y a probablement eu ces événements; je ne désire pas le
21 contester. C'est une horreur que tout citoyen de la Yougoslavie a très mal
22 vécu.
23 Donc ne doutez pas des positions qui sont les miennes et qui sont
24 identiques aux vôtres. Mais je voudrais que, dans le contexte du
25 rapprochement des forces armées de Vukovar, que l'on sache ce qui s'est
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1 passé pour qu'on ait une vue d'ensemble sur le problème entier. Par
2 contre, ce qui s'est passé à Ovcara, personne ne le conteste et je suis le
3 dernier à le contester. La seule chose que j'avais souhaité faire, c'est
4 qu'on en débatte de la façon la plus appropriée qui soit.
5 Messieurs les Juges, le témoin Dulovic est venu témoigner ici. Il a passé
6 six mois dans cette région, peut-être davantage encore. Ce que je voulais
7 savoir, c'est comment se faisait-il que le témoin Dulovic n'ait pas appris
8 la chose.
9 Je ne conteste pas qu'il y ait eu des victimes du côté des Croates;
10 personne ne le conteste, mais comment se fait-il, s'il avait séjourné là-
11 bas en sa qualité de reporter, comment n'a-t-il pas pu constater que
12 d'autres personnes avaient péri? Je ne parle pas des groupes ethniques,
13 mais je viens de vous dire qu'il n'y avait pas seulement des Croates, mais
14 qu'il y avait des uns, des autres et des tiers, et que beaucoup de gens
15 avaient péri.
16 Ce que je voulais donc demander à M. Dulovic, c'est comment il se faisait
17 qu'il n'ait pas eu connaissance de ce qui était arrivé aux Serbes?
18 M. Dulovic (interprétation): Les sources officielles ne voulaient pas en
19 parler à l'époque. C'était là chose logique parce que, s'il y avait eu des
20 morts -en effet, il y en a eu-, cela ne sonnerait pas bien aux oreilles du
21 public, d'après l'opinion de qui de droit. Et aussi, le nombre de ces
22 victimes-là n'avait pas été accessible à l'opinion publique et personne ne
23 fournissait officiellement des renseignements de ce type aux journaux et
24 aux médias.
25 Question: Mais vous avez interviewé tous ces gens-là, vous vous êtes
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1 entretenu sur bon nombre de sujets, vous avez entendu parler de victimes
2 croates? Comment se fait-il que vous n'ayez pas eu vent des victimes des
3 autres groupes ethniques? C'est ça que je voulais vous demander.
4 Réponse: Pendant la guerre?
5 Question: Non, pas pendant la guerre: pendant la période qui a précédé le
6 siège de Vukovar, à savoir entre le mois de mai et le mois d'octobre.
7 Réponse: Non, je n'ai pas pu l'apprendre.
8 Question: Merci. Je voulais également vous demander la même chose au sujet
9 de Bosanska Krajina. Vous nous avez dit que vous avez séjourné là-bas
10 pendant un mois, comme expliqué tout à l'heure, à savoir sur le territoire
11 de la Bosnie, n'est-ce pas?
12 Réponse: Non.
13 Question: Mais combien de temps avez-vous passé là-bas?
14 Réponse: Je suis allé deux fois en Bosnie.
15 Question: Et vous vous êtes entretenu avec les gens là-bas?
16 Réponse: Oui.
17 Question: Vous avez été à Zvornik qui se trouvait sous le contrôle de la
18 Défense territoriale. Vous a-t-il été possible de vous rendre sur le
19 territoire sous le contrôle des effectifs musulmans?
20 Réponse: Je ne sais pas sous quel contrôle cela avait été. Mais, à Zvornik
21 même, les effectifs qui se trouvaient à Zvornik ne permettaient pas
22 d'aller plus loin, vers d'autres villages à l'extérieur de Zvornik.
23 Question: Bien. Je vais mener à terme cet interrogatoire pour ne pas
24 retenir davantage l'attention de la Chambre.
25 Comment se fait-il que vous n'ayez rien entendu? Et vous vous êtes
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1 entretenu avec bon nombre de gens, vous êtes allé là-bas pour parler d'un
2 conflit, tel que vous l'avez décrit; vous êtes allé là-bas pour apprendre
3 ce qui se passait. Vous avez parlé d'une mosquée qui avait été détruite,
4 vous avez parlé des victimes musulmanes, mais vous n'avez rien dit sur les
5 rumeurs… ou plutôt -je me reprends- vous n'avez pas eu d'entretien avec
6 vos interlocuteurs concernant des victimes. Avez-vous eu connaissance des
7 victimes du côté serbe?
8 Réponse: Il y en a certainement eu.
9 Question: Mais qu'en savez-vous? Est-ce que vous vous êtes renseigné à ce
10 sujet?
11 Réponse: On m'a relaté cela.
12 Question: Mais que vous a-t-on relaté?
13 Réponse: Je ne me souviens pas. Je pense avoir publié cela.
14 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Messieurs les Juges.
15 M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, à vous.
16 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, Jovan Dulovic, par M.
17 Groome.)
18 M. Groome (interprétation): Je voudrais que l'on montre au témoin la pièce
19 342, intercalaire 1.
20 Dans l'attente du document, je voudrais vous demander la chose suivante.
21 Monsieur Milosevic vous avait posé des questions concernant la période de
22 temps couverte par l'autorisation de séjours à Vukovar. Est-ce que vous
23 avez obtenu une prolongation de l'autorisation en question, telle que
24 présentée à la Chambre?
25 Je demanderai à M. l'huissier de se déplacer vers le témoin pour placer le
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1 document en question sur le rétroprojecteur.
2 (Intervention de l'huissier.)
3 M. Dulovic (interprétation): Oui.
4 Question: Et cette prolongation, comment était-elle inscrite sur ce
5 permis?
6 Réponse: Après écoulement de cette période, je suis allé dans la ville
7 même. Je ne me souviens plus au juste où exactement. Vers un bureau de
8 presse de l'armée, j'avais trouvé une personne qui avait été chargée de la
9 délivrance de ces permis. C'était un commandant, son grade était celui de
10 commandant; je crois qu'il s'appelait Popovic. Il m'a rédigé un texte en
11 disant que le permis continuait à être valide. Donc il avait prolongé sa
12 validité au-delà du 9 octobre.
13 Question: Monsieur Dulovic?
14 Réponse: Oui.
15 Question: Je demanderais que l'on place ceci sur le rétroprojecteur. Et
16 veuillez nous indiquer, Monsieur le Témoin, l'endroit où se trouve cette
17 indication?
18 (Le témoin indique l'endroit à l'aide du pointeur.)
19 Réponse: Il faudra peut-être, Monsieur l'Huissier, que vous déplaciez le
20 document.
21 Question: Monsieur le Témoin, est-ce que vous indiquez le coin intérieur
22 gauche du document?
23 Réponse: Ici, c'est écrit: "Le permis continue à être valide. (Il est fait
24 exception à l'ordre du secrétariat fédéral à la défense.)".
25 Il y a là le sceau de l'armée et aussi la signature de ce commandant. Ce
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1 qui fait que j'étais tout à fait capable ou autorisé à y rester sans
2 limitation. Il y a deux cachets, qui plus est: ici, il y a le poste
3 militaire 923 et ici le cachet d'un autre poste militaire. Donc à deux
4 instances officielles, on m'a accordé la chose.
5 Question: Au cours de cette période, vous aviez d'autres permis, vous
6 aviez davantage que les deux permis que vous avez montrés ici dans ce
7 prétoire et produits par la même occasion?
8 Réponse: Oui, oui.
9 Question: Est-ce que vous aviez un permis vous autorisant à être à
10 Zvornik, le 10 avril 1992? Est-ce que vous aviez réussi à obtenir cette
11 autorisation avant d'aller à Zvornik?
12 Réponse: Le 10 avril?
13 Question: Oui, la première fois où vous êtes allé à Zvornik?
14 Réponse: Lorsque j'ai, pour la première fois, essayé d'accéder à la ville
15 de Zvornik.
16 Question: Excusez-moi, je n'étais pas exact. Quand vous avez essayé
17 d'entrer dans Zvornik.
18 Réponse: Oui, là aussi j'avais obtenu un permis, mais à ce moment-là rien
19 n'y faisait, il n'était pas possible d'accéder à Zvornik. Tout simplement,
20 il ne laissait personne passer par le pont.
21 Question: Monsieur Milosevic, vous a demandé si on vous avait empêché
22 d'exercer votre fonction de journaliste, si on vous interdisait l'entrée
23 dans Zvornik, en dépit du fait que vous aviez ce permis. Est-ce que pour
24 vous c'était une entrave à l'exercice de votre profession?
25 Réponse: Absolument. Il y a eu des localités, peut-être pourrais-je même
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1 m'en souvenir, mais il y avait des localités où aucun permis n'était
2 valide. Et j'entends par là que, même disposant d'un permis, on ne pouvait
3 pas y aller pour voir, pour aller s'entretenir ou quoi que ce soit
4 d'autres.
5 Question: Etes-vous au courant, vous personnellement, d'autres endroits où
6 en dépit du fait que vous aviez un permis on ne vous avait pas autorisé à
7 entrer sur les lieux, dans une zone par exemple où l'armée yougoslave
8 était présente?
9 Réponse: Je ne sais pas. Je n'arrive pas à m'en souvenir, exception faite
10 de Zvornik. Pour la première fois, je n'arrive pas à m'en souvenir.
11 Question: Autre domaine sur lequel portera ma question, c'est celui-ci: M.
12 Milosevic, vous avait demandé si vous n'aviez jamais été témoin d'actes de
13 la JNA, que vous auriez jugé inappropriés; et puis vous avez relevé une
14 observation concernant un char.
15 Revenons, si vous le voulez bien, sur Visegrad. Quand vous vous y
16 trouviez, d'abord sur les fortifications de l'armée yougoslave puis dans
17 la ville, est-ce que vous vous êtes forgé une opinion? Est-ce que vous
18 avez pu établir s'il leur était possible à l'armée yougoslave d'entrer
19 dans la ville plus tôt qu'elle ne l'a fait?
20 Réponse: Oui. A l'époque, où j'étais arrivé là-bas moi-même -et je l'ai
21 dit, la ville avait une apparence de ville fantôme-, je n'ai vu qu'un
22 homme en train de travailler dans son jardin et j'avais l'impression que
23 la ville était complètement déserte. C'était plutôt étrange, parce que
24 l'armée en puissance était censée entrer moyennant combat dans une ville,
25 une ville abandonnée.
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1 Question: Merci, Monsieur Dulovic. Peut-on montrer au témoin la pièce de
2 la défense 56, et plus exactement la dernière page de cette pièce, afin
3 que le témoin puisse voir la signature de la personne qui a apposé sa
4 signature à la dernière page?
5 (Intervention de l'huissier.)
6 Veuillez examiner la signature et le nom de la personne que l'on trouve à
7 la dernière page. Pouvez-vous lire ce nom pour nous?
8 Réponse: Oui. Il est question du ministère public du district et l'on
9 parle de M. Branko Njegovan. Je me suis entretenu avec ce procureur à
10 Sabac. J'ai même fait une interview avec lui.
11 Question: Vous avez donc eu une interview avec ce procureur. Est-ce qu'on
12 le voit sur cette cassette dont on a vu un extrait? Il s'agissait de la
13 pièce de l'accusation P342, intercalaire 13. Il s'agissait de l'Unité des
14 "Guêpes jaunes".
15 Réponse: Oui.
16 Question: Quelle est la question que vous avez posée à M. Njegovan dans le
17 cadre de cette interview que vous avez recueillie auprès de lui?
18 Réponse: Eh bien, j'ai fait cette interview il y a longtemps; l'interview
19 même était relativement courte. Et je n'arrive vraiment pas à me rappeler
20 ce que je lui avais demandé. Je lui ai posé plusieurs questions.
21 Question: Monsieur le Président, peut-on montrer au témoin la pièce de
22 l'accusation P342, intercalaire 13, page 14? Excusez-moi, page 24.
23 (Intervention de l'huissier.)
24 Monsieur le Témoin, je vous demande d'examiner une transcription de cette
25 interview, d'en prendre connaissance pour voir si ceci ravive vos
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1 souvenirs. Oui, nous avons la version en serbe. En fait, la version en
2 serbe et la version en anglais se trouvent sur la même page; ça va de la
3 page 25 à la page 25, bas de la page 24, et le texte se poursuit à la page
4 25.
5 (Le témoin lit le document.)
6 Est-ce que vous voyez la rubrique "Branko Njegovan"?
7 Réponse: Oui.
8 Question: Est-ce que ceci vous rappelle la teneur de l'interview que vous
9 avez eue avec ce procureur?
10 Réponse: Je me suis penché sur la première page et il y a constamment une
11 erreur. On dit "Jovan Dulic"; mon nom est Dulovic. En fait, c'était moi.
12 Oui, oui, je reconnais.
13 Question: Pourriez-vous résumer ce qu'a dit le procureur? Excusez-moi, je
14 reviens à ma question initiale: quelle est la question que vous avez posée
15 au procureur?
16 Réponse: J'avais un acte d'accusation dans les mains -l'acte d'accusation
17 concernait les frères Vuckovic- et j'avais demandé au procureur pourquoi
18 il n'y avait rien, dans cet acte d'accusation, concernant l'expulsion de
19 civils de l'agglomération civile Divic vers Celopek, vers la Maison de la
20 Culture où l'on avait placé en détention des civils originaires de
21 Celopek?
22 Question: Lui avez-vous également demandé pourquoi aucun des survivants
23 n'avait été appelé à comparaître au cours du procès intenté contre ces
24 deux hommes?
25 Réponse: Probablement. Oui, oui, je m'en souviens maintenant. En fait, il
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1 n'y avait pas de témoins pour témoigner de ce qu'avait fait Vuckovic
2 Dusan, celui qui avait le surnom de "Repic". Il y avait là-bas un gardien
3 qui avait, me semble-t-il, été interrogé, mais pas à Sabac, mais il ne
4 voulait en aucun cas venir témoigner lorsque Dusan Vuckovic avait ouvert
5 le feu et tué ces 17 civils originaires de Divic, dans la Maison de la
6 Culture de Celopek. La chose s'était prolongée.
7 Question: Monsieur Dulovic, excusez-moi, mais ma question était plus
8 précise. Je vous ai demandé quelle était, d'après les dires du procureur,
9 la raison pour laquelle il n'avait cité à la barre en tant que témoins
10 aucun des survivants, dans le cadre de ce procès intenté contre ces deux
11 hommes?
12 Réponse: Eh bien, il n'avait soi-disant pas pu entrer en contact avec eux,
13 si mes souvenirs sont bons. Et si cela figure ici, j'aimerais bien jeter
14 un coup d'œil. Enfin, je crois qu'il avait dit qu'il ne pouvait pas entrer
15 en contact avec les témoins.
16 Question: J'appelle votre attention à la ligne 8 de la page 25.
17 Réponse: Oui, oui, c'est cela.
18 M. Groome (interprétation): Et est-ce que vous avez également parlé avec
19 un des survivants qui vous a dit qu'il serait prêt à témoigner par vidéo
20 ou par cassette vidéo, mais que ces personnes n'avaient pas été contactées
21 par M. Njegovan?
22 M. Dulovic (interprétation): Je ne me souviens que de mon entretien avec
23 un architecte, M. Himza Tulic. Lui s'était trouvé à Zvornik et il était
24 l'homme n°1 à l'établissement chargé de l'urbanisme. Il se trouvait en
25 Autriche. C'est lui qui m'avait parlé de tous ces crimes commis à Zvornik.
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1 Il avait mentionné les frères Vuckovic et bon nombre d'autres, tant
2 criminels que victimes, par leurs noms et prénoms. Mais je ne peux pas
3 m'en rappeler, il faudrait que je consulte.
4 Et la question, c'était quoi?
5 M. le Président (interprétation): Monsieur Dulovic, je crois que nous
6 avons compris la quintessence de ce que vous vouliez dire.
7 M. Groome (interprétation): J'ai encore quelques dernières questions à
8 vous poser; elles portent sur la grande quantité de crimes, crimes
9 horribles d'après leur description, celle qui a été faite par M.
10 Milosevic.
11 Monsieur Milosevic vous a demandé si vous étiez au courant de ces crimes
12 et du fait qu'ils faisaient partie du contexte dans lequel vous vous
13 trouviez.
14 Ma question est la suivante: pendant tout le temps que vous avez passé à
15 Ulica Nova en présence de la JNA, de la Défense territoriale de Vukovar,
16 des Hommes de Seselj et d'autres paramilitaires, est-ce qu'il vous est
17 arrivé dans ce lieu, dont vous avez dit que c'était un centre de
18 commandement, est-ce que vous avez entendu l'un quelconque de ces hommes
19 parler des crimes, des atrocités qui vous ont été présentés par M.
20 Milosevic, aujourd'hui, ici, à l'audience?
21 M. Dulovic (interprétation): Je pense qu'on ne me l'avait pas dit à
22 l'époque, du moins je ne m'en souviens pas. Mais cela ne m'étonnerait pas
23 parce que c'était une partie de Vukovar appelait "Sajmiste", qui était
24 habitée par une population serbe. Ils sont restés tout le temps là-bas et,
25 d'après leur récit à eux, les Croates ne sont pas du tout venus, n'ont pas
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1 du tout eu d'intervention sur ce secteur de Sajmiste auquel appartient
2 cette Ulica Nova 81. De là à savoir s'ils le savaient ou pas, je ne peux
3 pas vous le dire, mais je ne me souviens pas que l'on m'ait parlé de cela.
4 Question: Lorsque vous avez interviewé des Serbes qui s'étaient trouvés
5 piégés à Vukovar, est-ce qu'ils ont parlé de ces atrocités décrites par M.
6 Milosevic et qui ont été commises contre des Serbes? Est-ce que ces gens-
7 là, à qui vous avez parlé, vous ont relaté certaines choses?
8 M. Dulovic (interprétation): Non, non, certainement pas. On ne m'a pas
9 décrit les choses telles que reprises par Monsieur Milosevic.
10 M. Groome (interprétation): Je vous remercie, Monsieur Dulovic.
11 Je n'ai plus de question à poser au témoin, Monsieur le Président.
12 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?
13 M. Milosevic (interprétation): Cette question relative à l'entretien avec
14 le Procureur n'avait pas été soulevée à l'occasion de l'interrogatoire
15 principal. Et compte tenu de ce fait, j'estime que j'aurais le droit de
16 poser quelques questions au témoin sur ce sujet-là.
17 M. le Président (interprétation): Mais ces questions ont découlé du
18 document que vous avez présenté au témoin. Et, dans l'ensemble, je pense
19 qu'il faut s'en tenir à une règle selon laquelle il faudra tôt ou tard
20 mettre un terme à l'interrogatoire du témoin, l'audition de celui-ci.
21 Nous allons peut-être faire une exception, ici, en l'espèce. Il vous est
22 autorisé de poser des questions à ce propos, mais vous avez au maximum
23 deux ou trois minutes, vous n'allez pas pouvoir ratisser large.
24 (Contre-interrogatoire supplémentaire du témoin, M. Jovan Dulovic, par
25 l'accusé M. Milosevic.)
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1 M. Milosevic (interprétation): Je n'ai pas l'intention de ratisser large
2 et de poser toutes les questions que j'aimerais poser mais je voudrais
3 tirer au clair quelque chose.
4 Quand il s'agit de ce procès, étant donné que vous avez été rapporteur
5 judiciaire pendant très longtemps, j'imagine que vous n'ignorez pas le
6 fait que les autorités en Serbie et en Yougoslavie, à l'époque et à
7 présent, se fondaient sur un principe du partage du pouvoir et qu'il y
8 avait un pouvoir exécutif, législatif et judiciaires, et que le pouvoir
9 judiciaire n'est pas tenu de répondre de ce qu'il fait aux autorités
10 législatives?
11 M. Dulovic (interprétation): Ça, c'était vrai, mais sur papier seulement.
12 Le pouvoir judiciaire n'a jamais été indépendant, tout comme le pouvoir
13 législatif. Tout était placé sous l'autorité du pouvoir exécutif.
14 Question: Non, moi je vous affirme le contraire. Et, dans ce cas concret,
15 dans ce qui fait partie du pouvoir exécutif, la police donc, la police a-
16 t-elle arrêté les auteurs du crime? A-t-elle présenté des informations
17 partant desquelles on voyait qu'il avait tué 17 personnes puis 4 autres
18 personnes et qu'auparavant il les avait torturées? Si la police avait donc
19 fourni toutes ces informations-là au pouvoir judiciaire…
20 Réponse: Et, mon Dieu, il n'y a plus eu de témoin!
21 Question: Monsieur le Témoin, Monsieur Dulovic, je vous pose une question.
22 Etant donné qu'il n'y a pas un seul président du Tribunal et aucun juge en
23 Yougoslavie qui pourraient dire qu'ils ont fait l'objet d'une intervention
24 quelconque pour ce qui est de la façon dont ils devaient juger, des cas
25 comme cela, il n'y en a pas eu.
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1 Donc, est-ce que vous pensez que le pouvoir exécutif, avec toutes les
2 preuves à l'appui figurant à l'acte d'accusation, s'est emparé de
3 l'individu, l'a mis aux arrêts et l'a confié aux autorités judiciaires.
4 Oui ou non?
5 Réponse: Les procureurs publics en Serbie, pour ce qui est du règne de
6 l'accusé, eh bien, ces procureurs publics étaient absolument liés par la
7 politique et par ce que le pouvoir exécutif leur servait: à savoir, leur
8 disait ce qu'il fallait poursuivre en justice, quels sont les actes
9 d'accusations à dresser ou pas. Ils étaient donc inféodés à ce pouvoir et
10 l'accusé le sait pertinemment bien.
11 Question: Monsieur Dulovic, si nous partons de cette hypothèse...
12 Réponse: Ce n'est pas une hypothèse, c'est pendant des années que…
13 Question: Est-ce que le procureur public, dans ce cas-là, a dressé un acte
14 d'accusation? Est-ce que dans ce cas concret il a dressé un acte? Et vous
15 l'avez dans les pièces jointes; dans cet acte d'accusation, il est précisé
16 que cet homme a torturé des gens, il en tué 17 puis il en a tué 4 autres.
17 Il a été accusé et confié au tribunal.
18 M. le Président (interprétation): Ce sera votre dernière question,
19 Monsieur Milosevic.
20 Oui, Monsieur Dulovic, voulez-vous répondre?
21 M. Dulovic (interprétation): Oui, je veux répondre.
22 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ce procès, c'était ce qu'il y
23 avait de plus honteux de ce que j'ai pu voir en 40 ans et plus. Une telle
24 chose n'est jamais arrivée. Par exemple, à ce procès, il y avait un
25 témoin, une Musulmane, qui avait été violée par le dénommé "Repic". Devant
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1 le Tribunal, elle a dû répondre en pleurant à toutes les questions
2 éhontées qui ont été posées par le juge chargé de l'affaire, pour ce qui
3 est de décrire le viol dans tous ses détails.
4 D'après notre Code pénal, un procès pour viol dans la pratique est un
5 procès à huis clos, parce qu'on estime que le public n'est pas nécessaire
6 et n'est pas souhaitable. Ici, la salle d'audience était pleine de public
7 et la victime a dû répondre dans tous les détails, de façon éhontée, sur
8 la façon dont elle a été violée.
9 Et c'est ça l'expérience et la justice dont est en train de parler M.
10 Milosevic. Elle a dû revenir trois fois pour raconter le même récit au
11 Tribunal. Ce que je voulais dire, c'est que cette femme qui a été victime
12 a été humiliée dans une mesure des plus effarante. C'est ce que j'avais à
13 dire.
14 M. le Président (interprétation): Nous devons en terminer. Il est
15 impossible de poursuivre de la sorte. Vous avez eu le temps de poser vos
16 questions.
17 Monsieur Dulovic, ceci met terme à votre déposition. Merci d'être venu la
18 faire devant le Tribunal pénal international. Vous pouvez désormais
19 disposer.
20 (Le témoin, M. Jovan Dulovic, est reconduit hors du prétoire.)
21 M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant faire une pause
22 de 20 minutes.
23 (L'audience, suspendue à 12 heures 06, est reprise à 12 heures 33.)
24 (Audience publique avec mesures de protection.)
25 (Le Témoin C-1141 est déjà dans le prétoire.)
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1 M. le Président (interprétation): Je vais demander au témoin de donner
2 lecture de la déclaration solennelle.
3 Témoin C-1141 (déclaration): Je déclare solennellement que je dirai la
4 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
5 M. le Président (interprétation): Je vous remercie, Monsieur. Veuillez
6 vous asseoir.
7 Monsieur Groome, vous avez la parole.
8 M. Groome (interprétation): Merci, Monsieur le Président.
9 Avant de commencer, je dirai ceci: il y a une partie de la déposition du
10 témoin qui concerne plus directement les chefs d'accusation de l'Acte
11 d'accusation, paragraphe 8. Je pense que nous pouvons aborder les autres
12 points de façon sommaire.
13 Et avec votre autorisation, je guiderai des questions qui guideront le
14 témoin pour ce qui des premiers paragraphes de résumé.
15 M. le Président (interprétation): Et s'il y a des points susceptibles de
16 porter à polémique, revenez à la façon habituelle de poser des questions.
17 Mais pour ce qui est des questions non polémiques, guidez le témoin.
18 M. Groome (interprétation): Je vais demander à ce qu'on passe à huis clos
19 partiel pour l'identité du témoin et quelques questions de détail.
20 M. le Président (interprétation): Aux fins du compte rendu, je pense qu'il
21 faudra donner le pseudonyme du témoin.
22 M. Groome (interprétation): Il s'agit du témoin C-1141.
23 M. le Président (interprétation): Merci.
24 (Huis clos partiel à 12 heures 37.)
25 (Expurgé)
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14 (Expurgé)
15 (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures 40.)
16 Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à nouveau en audience publique.
17 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin C-1141, dites-nous, si vous
18 le voulez bien, combien il y a de villages dans la municipalité de
19 Hrvatska Dubica?
20 Témoin C-1141 (interprétation): Eh bien, pour ce qui est de cette ex-
21 municipalité de Hrvatska Dubica -et pourquoi dis-je "ex", c'est parce que
22 quand je suis arrivé à Hrvatska Dubica la municipalité a été dissolue et a
23 commencé à faire partie de Kostajnica-, dans l'ex municipalité de Hrvatska
24 Dubica, il y avait quatre villages.
25 Question: Comment s'appelaient-ils ces villages?
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1 Réponse: Ces villages s'appelaient Zivaja, Cerovljani, Bacin et Slabinja.
2 Question: Et quels étaient parmi ces villages celui où il y avait surtout
3 des Croates qui y habitaient?
4 Réponse: Bacin et Cerovljani.
5 Question: Quels étaient les villages où ils avaient surtout des Serbes qui
6 y habitaient?
7 Réponse: Zivaja et Slabinja.
8 Question: Et est-ce qu'à Hrvatska Dubica il avait un quartier où il y
9 avait pratiquement une répartition à part égale entre Serbes et Croates?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Et est-ce que c'était là le village même de Hrvatska Dubica?
12 Réponse: Oui.
13 Question: Avant 1990, quels étaient les rapports existants entre Serbes et
14 Croates, comment pourriez-vous les qualifier?
15 Réponse: Vous voulez que je sois bref ou vous voulez un descriptif?
16 Question: Bref, s'il vous plaît.
17 Réponse: En bref, les relations étaient normales et tout le monde vivait
18 bien ensemble; il n'y avait pas de haine.
19 Question: Savez-vous, de façon approximative, à quel moment est intervenu
20 un changement dans ces rapports? A quel moment avez-vous décelé ce
21 changement à Hrvatska Dubica?
22 Réponse: En 1990, lorsqu'il y a eu les élections pluripartites, il y a eu
23 à Dubica plusieurs partis.
24 Question: Serait-il exact de dire que, s'agissant des rapports entre les
25 deux communautés ethniques et au fur et à mesure que ce rapport s'est
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1 détérioré, les deux partis ont commencé à s'armer et à se mobiliser en vue
2 d'un éventuel conflit?
3 Réponse: Oui.
4 Question: Est-ce qu'il est arrivé un moment où des paramilitaires venant
5 de la République de Serbie sont arrivés à Hrvatska Dubica?
6 Réponse: Ça, je ne le sais pas.
7 Question: Est-ce que vous, à un moment donné, vous avez quitté Hrvatska
8 Dubica?
9 Réponse: Oui. Oui.
10 M. Groome (interprétation): Quand êtes-vous parti? Je vous demande
11 simplement une date pour le moment?
12 Témoin C-1141 (interprétation): Le 13 septembre, on a miné… on a fait
13 sauter le pont de Hrvatska Dubica; et je crois que c'était un jeudi, le 14
14 septembre, que j'ai appris ce qui était arrivé. Mon épouse, je l'ai
15 envoyée vers Zagreb, mais moi je suis resté à la maison.
16 M. le Président (interprétation): Nous parlons de quelle année, s'il vous
17 plaît? Pouvez-vous l'établir?
18 M. Groome (interprétation): On parle de quelle année, Monsieur le Témoin?
19 Témoin C-1141 (interprétation): Je parle de l'année 1991.
20 Question: Vous avez emmené votre femme à Zagreb, et après êtes-vous rentré
21 à Hrvatska Dubica?
22 Réponse: Moi, je ne suis pas allé à Zagreb, je suis resté à la maison. Et
23 ce jeudi-là, le vendredi et le samedi soir, je suis resté. Puis je suis
24 allé à Dubica toujours, mais dans un hameau, à quelques deux kilomètres de
25 là. C'est là que résidait un de mes amis qui travaillait avec moi à
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1 l'école. J'y suis allé en mobylette.
2 Une fois arrivé chez lui, je l'ai trouvé là-bas avec son père et une femme
3 âgée que je ne connaissais pas. Ils étaient en train de se préparer, ils
4 étaient en train de charger quelque chose à bord de la remorque du
5 tracteur. Je leur ai demandé ce qui se passait, et ils m'ont dit qu'il
6 fallait qu'ils s'en aillent. J'ai laissé la mobylette chez eux, dans la
7 cave; et avec lui, son père et cette femme âgée, nous sommes tous montés à
8 bord de ce tracteur, et nous sommes allés à Kutina, il faisait nuit.
9 Question: Par la suite, à un moment donné, êtes-vous rentré à Hrvatska
10 Dubica en passant par la Bosnie?
11 Réponse: Oui.
12 Question: A quel moment l'avez-vous fait?
13 Réponse: Le 2 octobre 1991.
14 Question: Auparavant, vous nous avez expliqué qu'on avait fait sauter le
15 pont. Dans quel état le pont se trouvait-il lorsque vous êtes rentrés ce
16 jour-là?
17 Réponse: Une partie du pont était écroulé mais on pouvait traverser quand
18 même, parce que des espèces de madriers ou de planches très larges avaient
19 été placées; on descendait une planche pour remonter par une autre
20 planche.
21 Question: Vous êtes rentré dans votre village à ce moment-là. Est-ce que,
22 cette fois là, vous avez vu des forces armées dans le village et aux
23 alentours?
24 Réponse: Il n'y en avait pas dans le village, mais à l'extérieur, oui, en
25 direction de la rivière, la Sava. C'était à quatre ou cinq kilomètres de
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1 là. Il y avait une forêt. C'était Cerovljani et Zivaja. En fait, cela
2 s'étire depuis Jasenovac, cette forêt -c'est une vraie forêt- et la
3 rivière Sava. C'était là que se trouvait la ligne de front, si je puis
4 m'exprimer ainsi.
5 Question: Est-ce que vous avez vu des membres de l'armée populaire
6 yougoslave qui auraient fait partie de cette force armée?
7 Réponse: Ce que j'ai vu, c'étaient des réservistes en uniforme vert olive.
8 C'étaient des réservistes dont je connaissais certains, c'étaient des gens
9 du coin.
10 Question: C'étaient des réservistes de la JNA?
11 Réponse: Oui.
12 Question: Avez-vous vu des membres de la police de la SAO de Krajina sur
13 les lieux?
14 Réponse: Oui.
15 Question: Avez-vous vu des forces paramilitaires, quelles qu'elles soient,
16 à ce moment-là?
17 Réponse: A part les réservistes et la police, je n'ai vu personne d'autre.
18 Question: Savez-vous où se trouvait le quartier général de la police de la
19 SAO de Krajina, dans votre région?
20 Réponse: Je sais vous le dire: dans la vieille école, parce qu'entre-
21 temps, on a construit une nouvelle école. Dans cette vieille école, il
22 avait été créé un domaine agricole, dans les locaux mêmes de cette vieille
23 école.
24 M. Groome (interprétation): Qui était à ce moment-là le commandant de la
25 police locale, de la brigade de la police locale plus exactement?
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1 Témoin C-1141 (déclaration): Je ne sais pas au juste. Ils avaient été
2 deux: Radunovic Veljko et son fils Stevo. A mon avis, c'étaient eux qui
3 commandaient. Je connaissais l'un et l'autre.
4 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?
5 M. Milosevic (interprétation): Il faudrait déterminer d'abord s'il y avait
6 véritablement une brigade de la police, parce qu'il me semble qu'une
7 brigade, c'est une formation importante pour une petite localité.
8 M. le Président (interprétation): Lorsque vous aurez l'occasion de
9 procéder au contre-interrogatoire, vous pourrez poser la question.
10 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin C-1141, pourriez-vous nous
11 dire combien il y avait de membres dans cette police locale de votre
12 région?
13 Témoin C-1141 (déclaration): Une trentaine… 31, 32, je ne sais pas trop.
14 Question: Veuillez vous concentrer sur la journée du 20 octobre 1991. Vous
15 souvenez-vous de l'endroit où vous trouviez ce matin-là?
16 Réponse: Je m'en souviens. J'étais chez moi.
17 Question: C'était quel jour de la semaine? Vous en souvenez-vous?
18 Réponse: C'était un dimanche, au matin, vers 8 heures et demie.
19 Question: Est-ce qu'à un moment donné, vous êtes allé chez un voisin pour
20 emprunter une tasse de lait?
21 Réponse: Oui.
22 Question: Et qu'est-ce qui s'est passé pendant que vous étiez chez votre
23 voisin?
24 Réponse: Eh bien, pendant que cette femme âgée était en train de me verser
25 du lait, dans la maison, sa fille se trouvait à l'extérieur, dans le
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1 jardin. Tout à coup, elle est rentrée en trombe dans la maison.
2 Question: Est-ce qu'elle a dit quoi que ce soit au moment où elle est
3 entrée dans la maison?
4 Réponse: Quand elle est rentrée, elle m'a dit: (expurgé)
5 (expurgé).
6 Question: Je vais vous demander de ne pas mentionner de nom ni de surnom
7 pendant que nous sommes en audience publique, ni d'informations de nature
8 à révéler votre identité.
9 Est-ce que vous êtes sorti de chez votre voisin?
10 Réponse: Oui.
11 Question: Pourriez-vous nous dire ce que vous avez vu au moment où vous
12 êtes sorti?
13 Réponse: Lorsque je suis arrivé jusqu'à la porte ou plutôt à ma maison, la
14 petite porte d'entrée au niveau de la clôture métallique, j'ai été
15 accueilli par un jeune gaillard qui avait une pèlerine parce qu'il
16 pleuvait. Il y avait un camion derrière lui. Il m'a demandé si c'était
17 bien ma maison; je lui ai dit que oui. Il m'a dit: "Prépare-toi. Nous
18 allons ensemble au foyer des sapeurs-pompiers pour une réunion".
19 Question: Monsieur le Témoin C-1141, dites-nous, est-ce que sur le côté du
20 camion il y avait une inscription quelconque?
21 Réponse: Oui, il y avait une inscription qui disait "Milicija - SAO
22 Krajina", à savoir "Police de SAO Krajina".
23 Question: Mis à part l'homme que vous venez de décrire, cet homme qui vous
24 a parlé, est-ce qu'il y avait d'autres hommes qui étaient présents à ce
25 moment-là?
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1 Réponse: Oui. Dans le camion, il y avait un jeune homme, un chauffeur, qui
2 était au volant du camion.
3 Question: Est-ce que ces deux hommes avaient un uniforme, portaient un
4 uniforme, d'après ce que vous avez pu juger? L'un ou l'autre d'ailleurs?
5 Réponse: Eh bien, comme il pleuvait, celui qui m'a accueilli, qui n'était
6 donc pas dans le camion, il avait une espèce de pèlerine, je ne sais pas,
7 quelque chose de ce genre. Pour ce qui est de l'autre, je n'ai pas pu voir
8 s'il avait un uniforme puisqu'il était dans le camion.
9 Question: L'homme vous a dit: "Préparez-vous parce qu'on va au foyer ou à
10 la brigade des sapeurs-pompiers pour avoir une réunion". Qu'est-ce que
11 vous avez fait après cela?
12 Réponse: Je suis rentré chez moi, j'ai mis un blouson, j'ai pris un
13 couvre-chef, je suis ressorti, j'ai fermé à clef la maison et le portail
14 de la clôture. Et je suis monté à bord du camion. En fait, je lui ai
15 d'abord dit que je pouvais venir à pied, que je savais venir tout seul. On
16 m'a dit: "Non, non, il pleut. Il vaut mieux que tu viennes avec nous en
17 camion".
18 Donc je suis monté à bord et à l'intérieur, il y avait quatre femmes
19 âgées. Elles étaient assises sur une sorte de banc en bois, je ne sais
20 comment le qualifier ou le décrire. Le camion était couvert d'une bâche
21 et, comme je l'ai dit, il pleuvait. Il est venu tout de suite après ma
22 voisine, celle qui m'avait donné du lait, et sa fille. Puis sont arrivés
23 d'autres voisins, une femme et son mari, les deux étant des retraités.
24 Question: Monsieur le Témoin, vous dites qu'"ils sont venus". Est-ce que
25 ça veut dire qu'ils sont montés à l'arrière du camion, là où vous vous
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1 trouviez déjà?
2 Réponse: Non, ils ne sont pas montés, ils les ont aidés à monter. Ce
3 soldat avait aidé ces vieilles femmes à monter à bord du camion.
4 Question: Est-ce qu'à un moment donné, le camion est parti de l'endroit où
5 il se trouvait, près de chez vous, pour aller ailleurs?
6 Réponse: Non. Une fois que nous étions montés, il a roulé puis, avant
7 d'arriver au foyer des sapeurs-pompiers, il s'est arrêté à plusieurs
8 endroits. Et à chaque arrêt, il montait des personnes, des vieillards et
9 des vieilles femmes.
10 Question: Avant d'arriver à la brigade des sapeurs-pompiers, combien de
11 personnes sont montées à l'arrière du camion? Pourriez-vous nous le dire
12 de façon approximative?
13 Réponse: Eh bien, lorsque nous sommes arrivés à cette caserne de sapeurs-
14 pompiers, j'ai compté et j'ai vu que nous étions environ 23.
15 Question: Toutes les autres personnes qui étaient dans le camion, est-ce
16 que vous les avez reconnues? Est-ce que c'étaient des personnes qui
17 vivaient dans le même quartier que vous?
18 Réponse: Oui, tous étaient de Dubica, je les connaissais, bien sûr.
19 J'avais enseigné à leurs enfants et à leurs petits-enfants.
20 Question: Vous êtes arrivé à la caserne des sapeurs-pompiers. Qu'est-ce
21 qui s'est passé, à ce moment-là?
22 Réponse: Nous sommes descendus du camion, il pleuvait toujours, et nous
23 nous sommes mis devant la caserne des sapeurs-pompiers, sous l'espèce
24 d'auvent. Au bout de cinq à dix minutes, je ne sais pas exactement, mais
25 aussitôt après il est arrivé un autocar en provenance de Dubica, lui
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1 aussi, il amenait depuis un quartier de Dubica des vieilles femmes et des
2 vieillards. Eux étaient moins nombreux que nous-mêmes, je ne sais pas vous
3 dire exactement, mais peut-être étaient-ils 15 ou 16.
4 Question: Pourriez-vous nous dire à quelle heure vous êtes arrivé à la
5 caserne des pompiers?
6 Réponse: Il devait être vers 8 heures 30, plus ou moins. Plutôt 9 heures;
7 enfin, entre 8 heures et demie et 9 heures.
8 Question: Est-ce que, à un moment donné, vous êtes entré dans la caserne
9 des pompiers?
10 Réponse: Lorsque ces vieillards et ces vieilles femmes sont descendus,
11 ceux qui se trouvaient dans le car, on est resté un peu de temps ensemble.
12 Puis, juste après 9 heures, il est arrivé une femme et un homme en armes.
13 Ils nous ont dit d'entrer dans la caserne de ces sapeurs-pompiers et, une
14 fois entrés, il n'y avait plus de sortie.
15 Question: Mis à part ces deux personnes que vous venez de décrire et dont
16 vous avez dit qu'ils étaient en armes, est-ce qu'il y avait d'autres
17 personnes armées, à ce moment-là, à proximité de la caserne?
18 Réponse: Non. C'étaient des gardes. Il y avait trois fois deux gardes qui
19 alternaient, qui se relevaient dans la journée. Bien sûr, tous portaient
20 des armes.
21 Question: Vous venez de parler des gardes. Est-ce que vous avez été en
22 mesure de reconnaître leurs uniformes, au singulier ou au pluriel?
23 Réponse: Des uniformes vert olive.
24 Question: Est-ce que, pour vous, cela voulait dire qu'ils appartenaient à
25 une unité bien précise?
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1 Réponse: Oui.
2 Question: Quelle unité, selon vous?
3 Réponse: Je ne sais pas comment elle s'appelait, mais le QG de cette unité
4 se trouvait à Zivaja. Le commandant de ce QG ou de cette unité ou…
5 -comment s'appelait-elle, déjà? Je ne sais plus si c'était un bataillon
6 ou… Peu importe-, c'était une personne que je ne connaissais pas, un homme
7 d'un âge moyen.
8 Question: Est-ce que ces gardes, c'étaient en fait des militaires ou des
9 policiers?
10 Réponse: Des militaires. Parce qu'ils étaient en vert olive.
11 Question: Est-ce que vous pourriez nous donner une idée approximative du
12 nombre de personnes qui se retrouvaient à la caserne des pompiers après
13 avoir été rassemblées, ramassées dans toute la région?
14 Réponse: 53.
15 Question: Avez-vous une idée de l'âge de ces personnes?
16 Réponse: Tous avaient plus de 60 ans, exception faite d'un jeune homme. Je
17 ne sais pas comment, mais il avait une jambe cassée ou il traînait la
18 jambe ou il avait du mal à marcher. Sa jambe portait un plâtre. Lui était
19 plus jeune que nous, les autres étaient tous âgés.
20 Question: Mis à part ce jeune homme, qui était la personne la plus jeune
21 dans ce groupe?
22 Réponse: Ça, je ne sais pas vous le dire. Moi-même, j'étais à l'époque
23 plus jeune que ces vieillards et ces vieilles femmes, enfin...
24 Question: Pourrez-vous nous donner une idée approximative du nombre
25 d'hommes et du nombre de femmes qu'il y avait dans le groupe?
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1 Réponse: Eh bien, ils devaient être à égalité. Il se peut qu'il y eût un
2 peu plus de femmes.
3 Question: Pourriez-vous nous dire quelle était la composition ethnique de
4 ce groupe de 53 personnes?
5 Réponse: Il y avait des Serbes, des Croates et des Musulmans, mais la
6 majorité, c'étaient des Croates.
7 Question: Monsieur le Témoin, quelle est votre appartenance ethnique à
8 vous?
9 Réponse: Je suis serbe.
10 Question: Les personnes qui avaient été rassemblées à la caserne des
11 pompiers, est-ce qu'ils étaient libres de la quitter cette caserne, de
12 partir?
13 Réponse: Non. Non.
14 Question: Vous nous avez dit qu'on vous avait dit que vous deviez aller à
15 la caserne des pompiers en vue d'une réunion, mais est-ce qu'il n'y a
16 jamais eu une telle réunion?
17 Réponse: Eh bien, lorsqu'on ramassait les autres et lorsqu'ils sont venus
18 chez moi, sur le chemin de l'aller, on avait affirmé qu'il allait y avoir
19 une réunion mais jamais il n'y a eu de réunion.
20 Question: Vous nous avez dit que ces 53 personnes n'avaient pas le droit
21 de partir. Qu'est-ce que vous avez observé de façon plus précise qui vous
22 permettait d'affirmer que ces personnes n'avaient pas la liberté de
23 quitter la caserne des pompiers?
24 Réponse: Eh bien, comme il y avait des relèves de gardes, les deux
25 premiers gardes une fois entrés, ont donné lecture des noms parce qu'ils
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1 avaient une liste, quelqu'un leur avait donné cette liste. Ils ont donné
2 lecture de ces noms, j'ai compté jusqu'à 53, j'étais le cinquante
3 troisième. Puis, ils sont ressortis, ils ont refermé la porte à clef et
4 l'un des gardiens allait derrière, vers le contre bas de cette caserne, et
5 l'autre se tenait devant.
6 Question: Y avait-il des toilettes dans la caserne des pompiers?
7 Réponse: Non. Ou plutôt oui, mais on ne pouvait pas accéder aux toilettes
8 partant de là. Il fallait sortir, faire le tour du bâtiment et aller aux
9 toilettes.
10 Question: Et les personnes se trouvant à l'intérieur du bâtiment, avaient-
11 elles été autorisées à sortir de celui-ci pour aller aux toilettes?
12 Réponse: J'ai vu que certaines personnes qui voulaient aller aux toilettes
13 cognaient contre la porte. Le gardien ouvrait, il demandait ce qu'on
14 voulait et il faisait sortir la personne en question, fermait la porte à
15 clef une fois de plus et l'emmenait probablement vers les toilettes en
16 faisant le tour du bâtiment puis revenait, ouvrait la porte et refermait à
17 clef par la suite.
18 Donc ceux qui avaient demandé de sortir pour aller aux toilettes, on les
19 faisait sortir.
20 Question: Ce jour-là, à un moment donné, avez-vous eu une dispute, une
21 querelle avec un des gardes?
22 Réponse: Je n'ai pas eu une dispute ni une querelle, mais j'étais sorti
23 vers 5 heures, 5 heures et demie. En fait, j'avais reconnu le gardien qui
24 se trouvait là, devant. (expurgé)
25 (expurgé)
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1 (expurgé). Il m'a fait sortir, il a
2 refermé la porte à clef, et la pluie n'avait pas arrêté de tomber.
3 Mais nous étions là au contre(bas de l'escalier, encore sous l'auvent
4 formé par le toit. Alors, il m'a demandé de savoir ce que je voulais, je
5 lui ai dit qu'il pouvait me laisser partir à la maison parce que j'avais
6 l'impression qu'il n'y aurait pas de réunion et que la nuit allait bientôt
7 tomber. En plus, j'étais pauvrement vêtu et je risquais d'avoir froid. Il
8 m'avait dit de rester, il ne fallait pas partir parce que quelqu'un allait
9 venir et que nous allions avoir cette réunion et que, par la suite, nous
10 allions tous pouvoir partir.
11 Dans le courant de cet entretien…
12 Question: Avant que vous ne poursuiviez, j'aimerai établir ceci. Vous avez
13 dit avoir une discussion avec ce garde, cette discussion a commencé entre
14 17 et 17 heures 30, c'est bien cela?
15 Réponse: Oui.
16 Question: Et vous étiez arrivé à la caserne où vous étiez entré vers 9
17 heures du matin?
18 Réponse: Oui.
19 Question: Vous avez parlé de 53 personnes, excusez-moi?
20 Réponse: Non, à 17 heures 30, pas à 5 heures 30. Je parle de l'après-midi,
21 enfin de la soirée.
22 Question: Effectivement. Entre le temps qui s'est écoulé depuis le moment
23 où vous êtes entré dans la caserne et le moment ou entre 17 heures et 17
24 heures 30 vous avez eu cette discussion avec le garde, est-ce que toutes
25 ces 53 personnes ont été gardées ensemble dans la caserne?
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1 Réponse: Non.
2 Question: Est-ce qu'à un moment donné, certaines personnes ont été
3 autorisées à partir?
4 Réponse: Oui.
5 Question: Pourriez-vous nous dire combien de personnes ont été autorisées
6 à quitter la caserne?
7 Réponse: Six.
8 Question: Pourriez-vous nous dire dans quelles circonstances ces personnes
9 ont été autorisées à partir?
10 Réponse: Quelqu'un est venu et avait demandé qu'on les fasse sortir. J'en
11 ai vu un. L'une de ces personnes, je l'avais vue, enfin de celle qui était
12 venue. Je l'ai vue par la fenêtre, cette personne était devant la caserne
13 des sapeurs pompiers. Le gardien est resté devant et il a fait sortir
14 cette personne; et ces six personnes sont toujours en vie.
15 Question: J'aimerais maintenant attirer votre attention sur ce moment où
16 vous avez eu une discussion avec le garde. Quelque chose de particulier
17 s'est-il passé pendant cette discussion avec le garde?
18 Réponse: Oui. J'ai dit au garde: "Ecoute-moi, j'ai froid, si tu ne me
19 laisses pas partir, je vais m'en aller. Et si je dois le faire par la
20 force, je partirai de toute façon, tu n'as qu'à me tirer dans le dos!". Il
21 a fait tout ce qu'il a pu, il a fait tout ce qu'il a pu et il a commencé à
22 pleurer. Il m'a dit: (expurgé)
23 (expurgé). Et il m'a dit
24 encore: "Ne t'en va pas pendant que je suis de garde", ce qui veut dire
25 qu'il craignait, si je partais, lorsque la relève arriverait, qu'il y ait
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1 un appel.
2 Entre-temps, une voiture est arrivée, j'ai vu les phares. Elle s'est
3 arrêtée à une cinquantaine de mètres de la caserne, devant un bâtiment. En
4 face de ce bâtiment, se trouvait la vieille poste. Et quelqu'un qui… un
5 homme qui ne portait pas de couvre-chef est sorti de cette voiture. Il
6 portait également une espèce de veste imperméable, je ne sais pas
7 exactement ce que c'est. Mais en fait, cette personne a fait un signe. Les
8 autres n'ont rien dit, mais ils ont fait un signe au gardien pour
9 l'appeler.
10 Moi, j'attendais à côté de l'escalier pendant que le garde est allé voir
11 cet homme. Il est donc allé jusqu'à la voiture, ils ont discuté ensemble.
12 Je ne sais pas ce qu'ils se sont dit. Le garde est ensuite revenu et voilà
13 ce qu'il a dit: "Va vers la voiture, cet homme veut te rencontrer". J'ai
14 obtempéré, je suis allé jusqu'à la voiture et j'ai reconnu… Est-ce que
15 j'ai déjà dit le nom? J'ai reconnu Janjeta.
16 Question: Est-ce qu'il y a une bonne raison pour que vous hésitiez à
17 prononcer ce nom?
18 Réponse: Eh bien, non, non. Non, non, il n'y a aucune raison. Je n'ai pas
19 mentionné de nom jusqu'à présent.
20 Question: Dites-nous qui était la personne qui se trouvait à côté de la
21 voiture?
22 Réponse: C'était aussi un de mes élèves mais, par la suite, j'ai entendu
23 dire -en tout cas, c'est ce qu'on racontait- qu'il était probable qu'il
24 ait été le chef d'équipe des gardiens. Moi, je ne sais pas si c'était vrai
25 ou pas, mais c'est ce que j'ai entendu dans les récits de tierces
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1 personnes.
2 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, pouvons-nous passer à
3 huis clos partiel quelques instants?
4 M. le Président (interprétation): Oui.
5 (Huis clos partiel à 13 heures 14.)
6 (Expurgé)
7 (Expurgé)
8 (Expurgé)
9 (Expurgé)
10 (Expurgé)
11 (Expurgé)
12 (Expurgé)
13 (Expurgé)
14 (Expurgé)
15 (Expurgé)
16 (Expurgé)
17 (Expurgé)
18 (Expurgé)
19 (Expurgé)
20 (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 15.)
21 Mme Anoya (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
22 nous sommes de nouveau en audience publique.
23 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, cette personne qui était à
24 côté de la voiture, est-ce qu'elle vous a dit quelque chose au sujet du
25 fait que vous étiez en détention dans cette caserne de sapeurs-pompiers?
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1 Témoin C-1141 (interprétation): Cette personne ne m'a rien dit de
2 particulier, mais m'a demandé ce dont j'avais discuté avec le gardien.
3 Moi, j'ai répondu très simplement que j'avais demandé au gardien de me
4 laisser rentrer chez moi pour que je puisse me changer, parce que la nuit
5 arrivait et il commençait à faire froid. Et à cela, il a ajouté: "Mais
6 qu'as-tu dit d'autre au gardien?".
7 Moi, j'ai dit: "Je n'ai rien dit d'autre" et il a insisté. Encore une
8 fois, il a dit: "Mais qu'est-ce que tu lui as encore dit?". Apparemment,
9 le gardien aurait dit à cet homme que j'avais annoncé au gardien que
10 j'allais m'évader si on ne me laissait pas partir. Alors moi, j'ai dit:
11 "Oui, j'ai dit au gardien que s'il ne me laissait pas partir, j'allais de
12 toute façon partir, de gré ou de force".
13 Il m'a, à ce moment-là, ordonné de m'asseoir dans la voiture et je me suis
14 assis dans la voiture.
15 Question: Vous a-t-il emmené quelque part dans cette voiture?
16 Réponse: J'ai pris place dans la voiture, et lui est retourné voir le
17 gardien. A son retour, il s'est assis dans la voiture et il m'a emmené sur
18 la route qui va vers Kostajnica.
19 Question: A un certain moment, êtes-vous sorti de la voiture?
20 Réponse: Je ne suis pas sorti de la voiture, mais c'est lui qui, un
21 kilomètre à peu après la caserne des sapeurs-pompiers, a fait demi-tour et
22 il a repris le chemin inverse, donc en direction de ma maison. D'abord, il
23 est passé devant la caserne, ensuite il a continué jusqu'à ma maison.
24 Il faisait déjà nuit lorsque nous sommes arrivés devant ma maison. Il a
25 éteint le moteur, arrêté la voiture et il m'a dit ce qui suit: "Surtout,
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1 ne passe pas la nuit chez toi." Ça, c'était la première chose. Et,
2 deuxièmement, il m'a dit: "Et surtout, ne dis jamais à personne que tu
3 étais avec moi si jamais on t'attrape".
4 Question: Etes-vous resté chez vous, cette nuit-là?
5 Réponse: Non. Non.
6 M. Groome (interprétation): Où êtes-vous allé? Mais ne nous dites pas le
7 nom de la personne que vous êtes allé retrouver. Simplement, donnez-nous
8 une idée générale de l'endroit où vous êtes allé.
9 Témoin C-1141 (interprétation): Je suis allé dans les montagnes; nous, on
10 appelle ça des montagnes. Ma maison, en effet, se trouve tout en bas, près
11 de la rivière. Moi, je suis monté sur la colline en traversant une forêt;
12 je n'ai pas emprunté la route. Donc j'ai grimpé et je suis arrivé jusqu'à
13 la maison de quelqu'un avec qui je m'entends très bien et qui s'entend
14 toujours très bien avec moi aujourd'hui, qui est vivante encore
15 aujourd'hui, cette personne.
16 Il y avait un éclairage à l'avant de la maison. Moi, je me suis arrêté
17 devant la façade. Et à l'arrière de la maison, il y avait des champs de
18 maïs. Je suis arrivé jusqu'à la clôture, tout près de la maison, et je
19 suis entré dans le champ de maïs.
20 M. le Président (interprétation): Avec le respect que je dois au témoin,
21 nous n'avons pas besoin de tant de détails.
22 M. Groome (interprétation): Très bien, Monsieur le Président.
23 M. le Président (interprétation): Essayons d'avancer un peu plus vite pour
24 en arriver au cœur du problème.
25 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, à un certain moment, avez-
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1 vous essayé de vous évader et avez-vous été arrêté par la police locale,
2 oui ou non?
3 Témoin C-1141 (interprétation): Oui.
4 Question: Lorsque vous avez été placé en détention au poste de police,
5 avez-vous été frappé et interrogé?
6 Réponse: Oui, mais ils ne m'ont pas frappé.
7 Question: Que vous est-il arrivé?
8 Réponse: Rien ne m'est arrivé. On m'a interrogé. Je suis resté deux jours
9 et deux nuits dans la même pièce. L'accusation principale à mon encontre
10 était le fait que je m'étais enfui de la caserne, et puis on pensait aussi
11 que j'avais des armes, que je cachais des armes à la maison; et on m'a
12 beaucoup accusé aussi de ne pas avoir accepté d'adhérer au parti SDS.
13 Question: A un certain moment, avez-vous quitté la région de Hrvatska
14 Dubica?
15 Réponse: Oui.
16 Question: En dehors des 53 personnes dont vous avez déjà parlé, vous avez
17 dit que six personnes étaient parties, alors que vous-même étiez dans les
18 locaux de la caserne des pompiers. C'est bien cela?
19 Réponse: Oui, c'est cela. Oui.
20 Question: Avez-vous appris plus tard que trois autres personnes avaient
21 été autorisées à quitter la caserne des pompiers, après votre départ de la
22 caserne?
23 Réponse: Oui. Oui, oui.
24 Question: J'aimerais appeler votre attention sur les mois de mars et avril
25 1997. Etiez-vous présent lors de l'exhumation d'un certain nombre de
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1 cadavres à Bacin?
2 Réponse: Oui.
3 Question: Cette exhumation a-t-elle permis d'exhumer les corps d'un
4 certain nombre de personnes qui étaient avec vous dans la caserne des
5 pompiers, le 20 octobre?
6 Réponse: Oui.
7 Question: Monsieur, avez-vous établi une liste, à l'intention du Bureau du
8 Procureur, des personnes qui se trouvaient dans la caserne des pompiers et
9 qui ne sont pas parties, donc qui ne faisaient pas partie du groupe de
10 six, pas plus que du groupe de trois qui sont partis, donc des gens qui
11 sont restés dans la caserne des pompiers? Avez-vous établi une telle
12 liste?
13 Réponse: Oui.
14 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je demande que cette
15 pièce à conviction soit enregistrée et remise au témoin.
16 (Intervention de l'huissier.)
17 Il n'y a pas de classeur dans le cadre de l'audition de ce témoin, car
18 nous ne lui soumettrons qu'une seule pièce.
19 Mme Anoya (interprétation): Cette pièce sera enregistrée sous la cote 344,
20 pièce du Procureur. Confidentielle, donc conservée sous scellés.
21 M. Groome (interprétation): Monsieur, j'aimerais que vous jetiez un coup
22 d'œil à cette pièce à conviction 344 de l'accusation. C'est un document de
23 trois pages. Je vous demande si c'est bien la liste que vous avez établie
24 et sur laquelle on trouve les noms des personnes qui sont restées dans la
25 caserne des pompiers?
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1 Témoin C-1141 (déclaration): Oui.
2 Question: Pouvez-vous nous donner une idée de la composition ethnique de
3 ce groupe de 43 personnes dont les noms figurent sur votre liste,
4 personnes qui sont restées dans la caserne des pompiers?
5 Réponse: Deux Serbes et les autres étaient des Croates.
6 Question: Savez-vous personnellement ce qu'il est advenu de certaines des
7 personnes dont les noms figurent sur cette liste, étant entendu que
8 certaines de ces personnes ont été tuées et que leurs cadavres ont été
9 exhumés plusieurs années plus tard, à Bacin?
10 Réponse: Le dimanche soir, lorsque j'ai réussi à quitter la caserne des
11 pompiers, eux sont restés dans la caserne. Mais tôt le matin, le
12 lendemain, on les a entassés à bord d'un autobus et on les a emmenés dans
13 la direction de Kostajnica, sur la route. A quatre ou cinq kilomètres de
14 Dubica, à Bacin, près de la rivière, on les a fait descendre et on les a
15 tous abattus. Ces 43 corps ont été exhumés.
16 Question: Monsieur, avez-vous vu cela de vos yeux ou s'agit-il d'une
17 information que vous avez apprise de la bouche d'un tiers?
18 Réponse: Je n'ai pas assisté à cela personnellement parce j'étais en
19 fuite, j'étais dans la montagne. Mais de l'autre côté, sur l'autre rive de
20 la rivière, en Bosnie, il y a un village qui se situe au maximum à une
21 distance d'un kilomètre par rapport à l'endroit où toutes ces personnes
22 ont été abattues. Certains des habitants de ce village ont raconté à
23 l'époque, et continuent encore à raconter aujourd'hui, qu'ils ont entendu
24 des coups de feu et des cris, des gémissements.
25 M. Groome (interprétation): Je n'ai pas d'autre question pour ce témoin.
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1 Merci, Monsieur.
2 M. Robinson (interprétation): Monsieur Groome, j'aimerais simplement
3 expliciter un peu les circonstances dans lesquelles le témoin est monté à
4 bord d'un camion. Vous savez?
5 M. Groome (interprétation): Oui, Monsieur le Juge.
6 M. Robinson (interprétation): Dans quelles conditions exactes est-il monté
7 à bord de ce camion? Est-il monté à bord de ce camion volontairement ou
8 l'a-t-il fait sous la contrainte?
9 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez dit dans
10 déposition, il y a un instant, que vous avez proposé d'aller à pied
11 jusqu'à la caserne des pompiers. Estimez-vous que vous auriez eu la
12 liberté d'y aller à pied si vous l'aviez souhaité?
13 Témoin C-1141 (déclaration): Je pense que je n'aurais pas pu le faire.
14 M. Groome (interprétation): Pouvez-vous nous dire ce que vous avez vu ou
15 ce qu'on vous a dit qui vous a permis de conclure que vous étiez privé de
16 votre liberté et que vous étiez obligé de voyager avec ces deux hommes à
17 bord du camion?
18 Témoin C-1141 (déclaration): Ils ont dit que nous allions à un entretien
19 et que nous ne devrions pas y aller à pied, parce qu'il fallait être sûr
20 que tout le monde soit présent, tous ceux qui étaient encore en attente,
21 parce que c'était une réunion importante, un entretien important. Donc je
22 suis monté à bord du camion -j'ai dit: "Ça va!".
23 M. Robinson (interprétation): Pouvez-vous demander au témoin qui est donc
24 d'appartenance ethnique serbe de quelle façon il a été traité pendant le
25 voyage?
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1 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, vous avez entendu la
2 question de M. le Juge. Pouvez-vous nous dire en tant que Serbe comment
3 vous avez été traité alors que vous étiez en détention au sein d'un groupe
4 majoritairement composé de Croates?
5 Témoin C-1141 (interprétation): La cause principale, c'est que fin juin,
6 début juillet, j'avais refusé de devenir président du parti SDS. A mon
7 avis, c'est la raison principale de tout cela. Eux ont distribué des armes
8 aussi, mais moi je n'ai pas pu obtenir une arme parce qu'ils étaient
9 suspicieux à mon égard. Et à l'époque, comme j'ai continué à le faire par
10 la suite, je me suis toujours opposé à un certain comportement dont
11 j'estimais qu'il n'était pas correct des actes que je jugeais inconvenant.
12 Mais eux, et notamment les chefs, n'ont pas apprécié et donc ils se sont
13 comportés à mon égard comme ils se sont comportés.
14 Question: Pourriez-vous décrire plus précisément le type de comportements
15 que vous avez pu voir et auxquels vous vous êtes opposé?
16 Réponse: Eh bien, j'étais contre les pillages. J'étais contre les
17 déplacements de population, parce que tout simplement ils faisaient de
18 leur propre initiative des choses. Je parle de ces habitants de la région,
19 ces miliciens de la Région autonome serbe de Krajina. Je ne sais même pas
20 comment ils s'appelaient à l'époque. Mais en tout cas les habitants
21 n'osaient même plus bouger à l'époque, ils n'osaient plus bouger de chez
22 eux pendant tout l'été. Tout le monde était terriblement effrayé.
23 M. Groome (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Juge.
24 M. Robinson (interprétation): Le témoin connaît-il les autres Serbes qui
25 étaient dans la caserne des pompiers avec lui?
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1 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, connaissez-vous les autres
2 Serbes qui étaient avec vous dans la caserne des pompiers?
3 M. Robinson (interprétation): Et le témoin pourrait-il dire pour quelle
4 raison il se trouvait là?
5 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, le Juge Robinson vous
6 demande si vous savez pour quelle raison les autres Serbes qui ont été
7 placés en détention dans la caserne des pompiers avaient leur nom sur la
8 liste et ont été amenés à cet endroit?
9 Témoin C-1141 (interprétation): Ça, je ne saurais pas vous le dire. Ils
10 ramassaient tout le monde. Mais il y a une chose que je peux dire: c'est
11 qu'une personne qui n'a jamais revêtu l'uniforme, et quand j'ai refusé de
12 prendre la direction du SDS, c'est cette personne, plus jeune, qui a été
13 nommée à ce poste. Donc il était dirigeant du SDS. Et quand après toute
14 cette histoire, j'ai réussi à m'enfuir en direction de Bosanska Dubica,
15 cet homme m'a vu devant les bâtiments des eaux et forêts, j'étais debout
16 devant le bâtiment. Il m'a vu, il s'est arrêté à côté de moi et il m'a
17 raconté un certain nombre de choses, notamment qu'il avait donné l'ordre
18 que l'on efface mon nom de cette liste. Alors, je lui ai répondu: "Mais
19 pourquoi seulement mon nom? Pour quelle raison cette liste a été
20 établie?". Mais, en tout cas, c'est de cette conversation que j'ai conclu
21 que lui savait que cette liste avait été dressée et toutes les personnes
22 dont les noms figuraient sur la liste ont été emmenées jusqu'à la caserne
23 de pompiers.
24 M. Groome (interprétation): Merci.
25 M. Kwon (interprétation): Monsieur le Témoin, j'aimerais vous poser
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1 quelques questions au sujet des dix autres personnes remises en liberté en
2 dehors de vous. Ces personnes étaient-elles toutes serbes ou y avait-il
3 des Croates parmi elles?
4 Témoin C-1141 (interprétation): Il y avait aussi des Croates, des
5 Musulmans et également des Serbes.
6 M. Kwon (interprétation): Etes-vous en mesure de nous dire pour quelle
7 raison ces personnes ont été relâchées?
8 Témoin C-1141 (déclaration): Ça, je ne saurais pas le dire. Quelqu'un est
9 venu les chercher, mais qui? Ça, je ne le sais pas. Et cela ne s'est pas
10 passé en une seule fois, cela a duré toute la journée.
11 Il y a un exemple que je pourrais vous donner, c'est quelque chose que
12 j'ai vu de mes yeux. Une personne, un Serbe est arrivé, et c'est un homme
13 qui était marié à une Croate; son épouse avait un frère, un peu bossu, qui
14 était balayeur de rue à Bosanska Dubica. Eh bien, l'homme dont je vous
15 parle a fait sortir le frère de sa femme, etc. Il y a un jeune homme qui
16 est venu ici et qui a fait sortir une serveuse, c'était une serveuse au
17 café du coin. Donc ça, je l'ai vu mais le reste je ne l'ai pas vu.
18 M. Kwon (interprétation): Merci.
19 M. Groome (interprétation): Monsieur le Témoin, sur cette liste, pièce à
20 conviction de l'accusation 344, la liste sur laquelle figurent les 43 noms
21 des personnes qui ont finalement ont été tuées, combien de personnes dont
22 les noms figurent sur cette liste n'étaient pas croates?
23 Je vous en prie, n'hésitez pas à lire la pièce à conviction que vous avez
24 sous les yeux.
25 (Le témoin lit le document en question.)
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1 M. Kwon (interprétation): Si je me souviens bien, le témoin a dit qu'il y
2 avait deux Serbes parmi ces 43 personnes. C'est bien cela?
3 Témoin C-1141 (déclaration): Les voilà!
4 M. Groome (interprétation): Je vous prie de prononcer des noms.
5 Témoin C-1141 (déclaration): Oui, oui, ils sont là. Deux, oui.
6 M. Groome (interprétation): Merci.
7 Plus de question, Monsieur le Président.
8 (Les Juges se concertent sur le siège.).
9 M. le Président (interprétation): Contre-interrogatoire lundi matin. Nous
10 n'allons pas commencer maintenant.
11 Monsieur Milosevic, vous disposerez d'une heure pour ce contre-
12 interrogatoire, comme cela a été le cas pour les autres témoins parlant
13 des crimes lors de la première partie du procès. Ce qui fait donc un peu
14 plus de temps que l'accusation.
15 Lundi matin…
16 (Interruption de M. Milosevic.)
17 M. Milosevic (interprétation): …
18 M. le Président (interprétation): Que se passe-t-il, Monsieur Milosevic?
19 M. Milosevic (interprétation): Bien sûr que je vais poser la question à ce
20 témoin, mais ne vous semble-t-il pas absolument absurde de faire venir des
21 témoins de ce genre pour dire quelque chose de négatif à mon encontre?
22 Quel rapport est-ce que je peux avoir et d'ailleurs quel rapport peut
23 avoir n'importe quel Serbe avec les événements que ce témoin vient de
24 relater? On peut aussi bien prendre quelqu'un dans la rue, n'importe où.
25 M. le Président (interprétation): Nous entendrons vos arguments lorsque
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1 vous les présenterez en temps utile, mais il n'est pas utile d'insulter le
2 témoin, de quelque façon que ce soit.
3 Si vous êtes d'accord avec la déclaration préalable du témoin et que vous
4 ne souhaitez pas que le témoin soit appelé à la barre, vous pouvez le
5 faire savoir et cela permettra de disposer d'un élément de preuve en
6 gagnant du temps.
7 Maintenant, si vous voulez procéder au contre-interrogatoire dans les
8 conditions habituelles, bien sûr, vous pourrez le faire. Comme vous le
9 savez, un article du Règlement nous permet d'admettre au dossier un
10 document en l'absence de contre-interrogatoire. Il n'y a donc aucune
11 nécessité à être insultant à l'égard du témoin.
12 Monsieur le Témoin C-1141, comme vous venez de l'entendre, je vous
13 demande, s'il vous plaît, de bien vouloir revenir dans ce prétoire lundi
14 matin. Je pense que ce sera à 9 heures.
15 On me dit que c'est bien le cas. Donc je vous demande de revenir lundi
16 matin et je vous demande également de veiller, pendant les suspensions
17 d'audience, à ne parler à personne du contenu de votre déposition. Lorsque
18 je dis "personne", cela concerne également les membres du Bureau du
19 Procureur.
20 Monsieur Milosevic, nous suspendons maintenant. Lundi matin, dans ce même
21 prétoire.
22 (L'audience est levée à 13 heures 38.)
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