Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Jeudi 31 octobre 2002.)

2 (La réunion est ouverte à 9 heures 33.)

3 (Audience publique.)

4 (Le témoin, M. Slobodan Lazarevic, est dans le prétoire.)

5 (Questions relatives à l'ordre de présentation des témoins.)

6 M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, avant de commencer

7 l'audience d'aujourd'hui, je voulais aborder une question maintenant parce

8 qu'elle devient urgente. Je crois comprendre que le témoin C-036 devrait

9 être le témoin suivant?

10 M. Groome (interprétation): C'est exact.

11 M. le Président (interprétation): Et le témoin d'après sera un témoin

12 assez bref, court?

13 M. Groome (interprétation): C'est vrai aussi, Monsieur le Président.

14 M. le Président (interprétation): Nous avons eu l'occasion de nous saisir

15 de l'application de l'Article 92bis. Voici la conclusion que nous avons

16 tirée. Il ne s'agit pas ici, stricto sensu, d'une question de contexte de

17 cadre. En fait, le témoin dépose sur des questions qui font tout à fait

18 partie des faits de la cause, il est donc préférable que tout ceci soit

19 abordé à l'audience de viva voce.

20 Nous comprenons également que ce témoin peut présenter beaucoup d'éléments

21 de preuve. Par conséquent, ceci présentera une difficulté pour toutes les

22 parties, vu le volume de pièces concernées. Nous aimerions que le Bureau

23 du Procureur réexamine certaines des pièces à conviction parce que, comme

24 l'ont dit les amis de la Chambre, la pertinence de certaines de ces pièces

25 peut être mise en doute ou en question. L'accusation, à nos yeux, pourra

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1 plus aisément juger la pertinence de chacune de ces pièces davantage que

2 la Chambre de première instance.

3 Mais voici la question que nous posons: est-il vraiment nécessaire de

4 produire autant de pièces, par exemple, pour les ordres de la SAO de

5 Krajina, du moment que certains documents seront produits pour montrer que

6 la SAO fonctionnait en quantité? On peut se demander s'il est vraiment

7 utile d'avoir beaucoup d'autres documents qui reviendraient sur le même

8 point.

9 Nous serions gré à l'accusation d'examiner la question. Et nous ajoutons

10 que nous nous inquiétons de la durée du témoignage, durée probable de ce

11 témoin. Nous pourrons peut-être imposer des limites en matière de temps.

12 Nous ne voulons pas le faire, mais il faut penser à la durée totale du

13 volet de ce procès, la durée totale de ce témoignage pour ce témoin, temps

14 qu'il faudra peut-être ôter du temps réservé à d'autres témoins à venir.

15 Je ne pense pas que ce soit vous qui alliez interroger le témoin, mais

16 pensez-y avec vos collègues et, en temps utile, nous reviendrons sur toute

17 question qui nécessite une décision au moment de la comparution du témoin.

18 M. Groome (interprétation): Oui, Monsieur le Président, nous transmettrons

19 les inquiétudes de la Chambre et nous agirons en conséquence.

20 M. le Président (interprétation): Merci.

21 M. Robinson (interprétation): A l'appui de ce que vient de dire le

22 Président de la Chambre de première instance, je reviens à un terme

23 utilisé par M. Nice: il parlait de toute une collection, une véritable

24 bibliothèque de documents. A mon avis, un procès n'a pas pour vocation

25 d'établir une collection de documents. Nous voulons uniquement des

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1 éléments de preuve qui soient pertinents. Et nous pensons que si nous

2 autorisons la constitution d'une telle bibliothèque, nous allons peut-être

3 autoriser le versement au dossier de pièces qui ne sont pas vraiment

4 nécessaires.

5 M. Groome (interprétation): Merci, Monsieur le Juge.

6 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

7 M. Milosevic (interprétation): Je tiens, une fois de plus, à soulever une

8 question relative à l'ordre de comparution des témoins. A l'exception de

9 celui que vous venez de mentionner, je n'ai aucun autre témoin d'annoncé.

10 Je n'ai aucune connaissance concernant les témoins à venir. Je sais pour

11 celui d'aujourd'hui, le C-034, et le C-036 pour lequel on m'a fourni des

12 documents avant-hier et ces derniers jours, des amas de document. Mais

13 s'agissant des autres témoins, je n'ai aucun renseignement pour ce qui est

14 de leur comparution. Et, si j'ai bien compris, vous avez pris une décision

15 disant qu'il faudrait, au moins une semaine à l'avance, me communiquer

16 l'ordre de comparution des témoins. Or cette fois-ci, une fois de plus,

17 cela n'est pas le cas.

18 M. le Président (interprétation): Si j'ai bien compris, voilà comment se

19 présente la situation: Le témoin C-036 va nécessiter au moins une semaine,

20 donc ça s'est réglé. Mais il est clair que vous devriez être informé dans

21 les temps.

22 Monsieur Groome, pourriez-vous dire à l'accusé, à la Chambre, quels seront

23 les témoins après le témoin C-036?

24 M. Groome (interprétation): Vous aurez ces informations après la première

25 pause, Monsieur le Président.

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1 M. le Président (interprétation): Oui.

2 Monsieur Lazarevic, désolé de vous faire attendre pendant que nous réglons

3 ces questions.

4 Monsieur Milosevic, si j'ai bien compris, il vous reste une heure et

5 trois-quarts d'heure.

6 (Contre-interrogatoire du témoin, M. Slobodan Lazarevic, par l'accusé M.

7 Milosevic, suite.)

8 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Lazarevic, dans le courant de la

9 journée d'hier, suite à une insistance de ma part pour ce qui est

10 d'identifier ne serait-ce que l'une quelconque des personnes faisant

11 partie du groupe antiterroriste ou de la compagnie anti-terroriste, à

12 savoir le groupe chargé de la sale besogne, vous avez dit à son sujet que

13 son chef avait été Sinisa Martic dont le surnom était également "Paraga",

14 n'est-ce pas?

15 M. Lazarevic (interprétation): Exact.

16 Question: Voyez-vous, Monsieur Lazarevic, je dispose de certaines

17 informations disant qu'en effet Sinisa Martic existe, mais que son surnom

18 n'est pas "Paraga" mais "Silt" et ce commandant Sinisa Martic n'a pas du

19 tout fait partie du 21e Corps. Pouvez-vous nous dire quoi que ce soit à ce

20 sujet?

21 Réponse: Monsieur Milosevic, "Silt" avait été commandant de l'unité

22 antiterroriste à Banja et pas à Kordun. Monsieur "Paraga" qui a été tué en

23 1995 à Topusko avait, lui, été commandant du groupe antiterroriste au sein

24 du 21e Corps. J'ai été à ses funérailles et, si mes souvenirs sont bons,

25 le nom donné à l'enterrement était celui de Sinisa Martic.

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1 M. Milosevic (interprétation): Bien. Il me semble que vous avez rassemblé

2 pas mal de commérages à ce sujet, mais Sinisa Martic n'a pas été le

3 "Paraga" dont vous avez parlé. C'est une chose qui semblait évident

4 partant des renseignements qui sont présentés par des personnes qui sont

5 certainement au courant.

6 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, le témoin vient de

7 dire que ce n'est pas exact. Il vous a donné sa réponse. Avez-vous

8 d'autres éléments de preuve? Si c'est le cas, vous pourrez les présenter

9 en temps utile.

10 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Je voudrais maintenant que vous

11 nous fassiez quelques commentaires, étant donné que vous avez parlé hier

12 de l'armement en fusil et de Mile Bosnic. Vous vous souvenez de cela?

13 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

14 M. Milosevic (interprétation): Je viens d'obtenir un démenti par écrit de

15 la part de Mile Bosnic et je voudrais que vous le commentiez. Je vais vous

16 le communiquer. C'est signé par ses soins, mais je vous demande d'écouter

17 d'abord la teneur.

18 D'abord, on dit en haut: "Mile Bosnic, ex-membre du comité principal du

19 SDS de la Krajina, Président de la mairie de Slunj et membre du

20 Gouvernement de Borislav Mikelic. Démenti".

21 Je connais M. Lazarevic, originaire de Velika Kladusa, non pas en sa

22 qualité d'officier de la KOS, mais en sa qualité de traducteur dans

23 "Agrokomerc" à Velika Kladusa, et en sa qualité d'interprète dans notre

24 corps d'armée. Je suis surpris d'apprendre qu'il avait été officier de la

25 KOS, alors que depuis son âge de 18 ans jusqu'à 1984 il avait été un

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1 émigré. Ce Lazarevic n'avait...

2 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît. Qu'est-ce

3 que ce commentaire veut dire? Qu'est-ce que vous soumettez comme hypothèse

4 à ce témoin: qu'il n'était pas membre de la KOS, par exemple?

5 M. Milosevic (interprétation): Mais, Monsieur May, vous n'avez pas été

6 présent hier. Bien sûr qu'il n'y a pas travaillé, parce que personne à la

7 KOS n'est au courant d'un dénommé Slobodan Lazarevic. Il apparaît avec

8 évidence qu'il a travaillé pour quelqu'un de tout à fait autre, et on y

9 viendra peut-être.

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Lazarevic, pourriez-vous, ne

11 serait-ce qu'à mon intention, nous dire ce qu'il en est et quelle est la

12 situation?

13 M. Lazarevic (interprétation): Tout à fait, Monsieur le Président.

14 J'ai effectivement travaillé. Ce démenti, que vient de lire M. Milosevic,

15 dit précisément que j'ai été émigré à partir de l'âge de 18 ans.

16 Cependant, l'accusation a mon livret militaire qui montre clairement qu'à

17 18 ans je faisais mon service militaire obligatoire à Kraljevo depuis 1966

18 jusqu'à 1968, ce qui veut dire que j'avais 20 ans. Ce monsieur dit qu'à 18

19 ans j'aurais quitté le pays. C'est tout à fait ridicule comme déclaration,

20 comme affirmation.

21 M. le Président (interprétation): Oui.

22 Poursuivez, Monsieur Milosevic.

23 M. Milosevic (interprétation): On dit plus loin: "Lazarevic n'avait rien à

24 voir avec moi pour ce qui est de l'armement, de la JNA et de la police

25 parce qu'avec lui, je n'ai eu aucun contact et je n'ai pu recevoir de

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1 personne et encore moins de Lazarevic, des armes militaires. Ni fusils, ni

2 bombes, ni Scorpion, ni Motorola, jamais et à aucun endroit, ne m'ont été

3 confiés par l'intéressé. Il n'y a pas eu de groupes formés à Velika

4 Kladusa et il n'y a pas eu de groupes d'armés. Par conséquent, je n'ai pas

5 pu participer ou recevoir des armes ni planifier des actions quelconques.

6 Je suis sorti de Velika Kladusa de mon plein gré et, dans mon appartement,

7 on n'a retrouvé aucune arme. Je n'ai eu à Kladusa aucun problème, et je

8 n'ai pas eu besoin de m'armer et d'entreprendre des actions. Monsieur

9 Lazarevic doit certainement savoir que jusqu'à la deuxième quinzaine du

10 mois de novembre 1991, je n'ai eu aucun contact avec les officiers de la

11 JNA parce que j'avais estimé qu'ils étaient neutres et qu'ils ne nous

12 aidaient pas. Il doit certainement savoir que pour les mêmes raisons, je

13 n'ai pas eu de bonnes relations ou plutôt j'ai été en conflit avec ces

14 gens du MUP parce que Milos et Toso Pajic avaient communiqué avec le

15 groupe de la Croatie, ce qui fait que je n'ai pas pu me procurer d'armes,

16 ni par leur intermédiaire, ni par l'intermédiaire d'un quelconque facteur.

17 En 1991, au mois d'octobre, j'ai été directeur de radio télévision à

18 Petrova Gora, et là aussi je n'avais rien à voir avec les armes et

19 l'armement de Velika Kladusa ou de quelque autre lieu…"

20 M. le Président (interprétation): Un instant. Ceci est censé être un

21 contre-interrogatoire, ce n'est pas censé être un lieu où on fait des

22 déclarations et où on les lit. Bien sûr, vous pouvez tenir la déclaration

23 ou la teneur de celle-ci au témoin, il doit avoir l'occasion cependant de

24 pouvoir répondre.

25 Monsieur Lazarevic, s'agissant de ce qui vous a été soumis jusqu'à

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1 présent, vous voyez ce qu'on vous dit, en l'occurrence que cet homme

2 n'avait rien à voir avec des armes quelconques, aucune arme n'aurait été

3 trouvée dans son appartement. Pourriez-vous tout d'abord répondre à ça?

4 Je ne sais pas si vous avez un commentaire à faire. Et puis vous pourrez

5 aborder la teneur du paragraphe suivant.

6 M. Lazarevic (interprétation): Tout à fait, Monsieur le Président.

7 La lettre dit également que M. Bosnic n'avait aucun lien, aucun rapport

8 avec moi. C'est un mensonge flagrant là aussi parce que M. Bosnic et moi-

9 même, nous étions les co-organisateurs d'une société culturelle à Topusko

10 début 1991. Elle s'appelait "Savo Mrkalj". J'avais une carte de membre

11 avec le n°9: c'était la neuvième carte qui avait été délivrée. Le comité

12 organisateur comptait dix membres. Ceci montre de façon claire que M.

13 Bosnic et moi, nous nous sommes trouvés souvent ensemble.

14 En fait, M. Bosnic avait reçu cet armement. On affirme que rien n'a été

15 trouvé dans son appartement au moment où il a quitté Velika Kladusa; cela

16 veut dire tout simplement, et cela ne peut vouloir dire que ceci: c'est

17 qu'il a emmené ces armes avec lui!

18 M. le Président (interprétation): Avez-vous quelque chose à dire à propos

19 d'autres éléments? Apparemment, il aurait été en conflit avec le MUP. Il

20 était le directeur de la télévision. Par rapport au MUP, il n'aurait pas

21 pu recevoir d'armes d'eux parce qu'il était en conflit avec le MUP. Et on

22 dit aussi qu'il n'avait rien à voir à la télévision, pas plus avec des

23 armes. Avez-vous quelque chose à dire?

24 M. Lazarevic (interprétation): Il a bénéficié d'une excellence

25 collaboration avec le MUP. Il était en contact direct avec M. Toso Pajic.

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1 Pourquoi M. Bosnic apporte ce démenti? Je ne le sais vraiment pas.

2 M. le Président (interprétation): Merci.

3 Poursuivez, Monsieur Milosevic.

4 M. Milosevic (interprétation): Il dit encore, Monsieur Lazarevic: "Après

5 la libération de Slunj le 19 novembre 1991, donc après les opérations

6 militaires, donc je suis devenu maire de Slunj et, une fois de plus, je

7 n'avais rien à voir avec l'armement.

8 Les événements de juin 1992 ont eu lieu à Jelov Klanac, où un groupe

9 terroriste d'Oustachis a tué cinq civils. Entre autres, une petite fille

10 de 14 ans; son enterrement s'est fait en présence de l'armée et de la

11 police qui étaient là pour sécuriser les lieux.

12 Entre Cetingrad et Sturlic, il y a eu un crime en novembre 1991 et il y a

13 eu 11 morts, tous originaires de la municipalité de Slunj. En mai 1992, il

14 y a eu 15 morts originaires de Slunj, et ceci dans les parages de

15 Cetingrad.

16 En voyant ce que Lazarevic a dit et tous les mensonges qu'il a proférés à

17 La Haye, la question qui se pose c'est de savoir s'il a fui à Kladusa pour

18 ses dettes de jeu ou parce qu'il a été persécuté en sa qualité de Serbe.

19 Sachant pourquoi il a fui cette ville, la question que je me pose, c'est

20 de savoir s'il a vendu sa foi pour le dîner qu'on lui a offert…"

21 M. le Président (interprétation): Sérions les questions tout d'abord.

22 Abordons-les une à la fois. Première chose.

23 Un instant, Monsieur Lazarevic. Parcourons les différents éléments.

24 M. Lazarevic (interprétation): Oui, tout à fait.

25 M. le Président (interprétation): On affirme d'abord ceci: cet homme

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1 aurait été le président de Slunj, ou maire; il n'aurait rien eu à voir

2 avec des armes quelles qu'elles soient, a-t-il ajouté. Et puis certaines

3 allégations sont formulées par lui quant à ce qui s'est passé sur les

4 lieux. Avez-vous d'abord quelque chose à dire à propos de Slunj ou de

5 l'implication de ce monsieur?

6 M. Lazarevic (interprétation): Non, pas vraiment. Je n'ai rien à ajouter.

7 M. le Président (interprétation): Nous poursuivons. Oui, nous revenons sur

8 des points concernant là aussi Slunj. Puis, il dit que vous avez proféré

9 des mensonges à son encontre. Là, nous avons déjà répondu à cet aspect-là.

10 Viens alors une question: ce que cet homme semble alléguer, c'est que

11 vous, vous auriez quitté Kladusa parce que vous aviez des dettes de jeu.

12 C'est une suggestion qui semble être formulée ici.

13 M. Lazarevic (interprétation): Tout ce que j'ai à dire, Monsieur le

14 Président, c'est ceci: M. Milosevic présente des récits tout à fait

15 incroyables à propos de dettes de jeu que j'aurais. C'est tout à fait

16 inexact.

17 Le jour de mon départ de Velika Kladusa, je suis parti. Pourquoi? Parce

18 que je craignais pour ma vie. En effet, je faisais l'objet d'observation

19 et de surveillance quotidienne par les deux frères Brajdic, des Croates

20 émigrés bien connus de Suède. J'ai contacté Vojnic par Motorola. Je n'ai

21 pris qu'une des armes qui m'avaient été données, celle qui avait un

22 silencieux, c'était un Scorpion; et je suis allé à pied de mon lieu de

23 résidence jusqu'à la frontière avec la RSK.

24 M. Robinson (interprétation): Mais est-ce que vous aviez des dettes de

25 jeu?

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1 M. Lazarevic (interprétation): Non, pas du tout, Monsieur. Pas du tout.

2 Aucune!

3 M. le Président (interprétation): Je suppose que la question suivante qui

4 s'impose est celle-ci: est-ce que vous jouez? Est-ce que vous vous adonnez

5 au jeu?

6 M. Lazarevic (interprétation): Oui. Bon, on sait bien que je joue de temps

7 en temps au poker avec des amis. Il n'y a pas de mal à ça! Mais pas dans

8 la mesure où il me faudrait quitter un pays ou une région parce que

9 j'aurais des dettes de jeu.

10 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Groome?

11 M. Groome (interprétation): Avant de poursuivre, Monsieur le Président, je

12 vois que M. Milosevic lit une lettre. Et je re-cite un extrait: "C'est une

13 question que j'aimerais poser à M. Lazarevic".

14 Apparemment, il y a toute une série de questions, mais je trouve que M.

15 Bosnic n'a pas à poser ces questions; c'est M. Milosevic qui doit poser

16 ces questions au témoin.

17 M. le Président (interprétation): Mais, voyez la difficulté: c'est qu'il y

18 a ici un accusé qui se défend. C'est vrai que ceci pourrait être vrai

19 lorsque vous avez un avocat de la défense, mais je crois que, vu les

20 circonstances, il faut s'adapter. Et lorsqu'il y a lecture de quelque

21 chose, on peut partir du principe que l'accusé fait siens les propos de

22 cette tierce personne.

23 Evidemment, s'il y avait un avocat, il pourrait déposer une déclaration

24 faite par autrui. Mais il faudrait le faire sous la forme

25 d'interrogatoire. Or l'accusé, en l'espèce, aurait des difficultés à le

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1 faire, ne peut pas le faire.

2 Monsieur Milosevic, avez-vous d'autres choses à lire, s'agissant de cette

3 déclaration?

4 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, il y a là encore une question qui

5 est la suivante. Est-ce qu'il a accepté d'être menteur à ce soi-disant

6 Tribunal moyennant un peu de sous et moyennant une identité nouvelle?

7 M. le Président (interprétation): Nous n'avons pas besoin des commentaires

8 de cet homme à propos du Tribunal. Je vous remercie.

9 Peut-être que ceci a déjà été présenté hier, j'étais malade, je n'étais

10 pas présent à l'audience, mais je pense que vous pourriez répondre à cette

11 question, Monsieur le Témoin.

12 On suggère ici, on laisse entendre qu'en fait, c'est pour des raisons

13 d'argent que vous avez dit des contre-vérités. Pourriez-vous très

14 rapidement répondre à cela?

15 M. Lazarevic (interprétation): A quelque moment que ce soit, jamais

16 l'accusation ne m'a offert l'immunité, ni de l'argent ni d'autres

17 avantages pécuniaires ou autres, que je pourrais tirer de ma déposition.

18 Si je dépose ici, c'est de mon plein gré uniquement. En effet, j'estime

19 que l'homme qui est responsable d'innombrables tragédies dans les Balkans,

20 que cet homme en fin de compte devrait répondre à des accusations portées

21 contre lui.

22 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Lazarevic, nous avons entendu, par

23 les soins de la partie adverse, que vous avez obtenu des papiers

24 d'identité nouveaux et un lieu de résidence autre. Ce n'est pas une

25 assertion de ma part: c'est la partie adverse qui l'a dit. Je suppose que

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1 vous en êtes conscient.

2 M. Lazarevic (interprétation): Une fois de plus, vous n'avez pas raison:

3 ce n'est pas exact ce que vous dites.

4 M. Milosevic (interprétation): Fort bien. Nous avons tous pu l'entendre.

5 Voilà la lettre en question, Monsieur May. Je crois qu'il faudrait la

6 verser au dossier.

7 M. le Président (interprétation): Nous avons déjà décidé, lorsque ce genre

8 de question se pose, si voulez appeler à la barre M. Bosnic, libre à vous

9 de le faire, mais nous n'allons pas admettre au dossier de l'audience ce

10 type de pièces.

11 M. Milosevic (interprétation): Très bien, Monsieur May. Cela ne me pose

12 aucune difficulté.

13 Et j'ai ici un autre démenti; aussi voudrais-je donner lecture de celui-

14 ci. C'est un démenti de Borislav Mikelic, ex-Premier ministre de la RSK et

15 président du Comité des personnes déplacées; c'est une organisation non

16 gouvernementale et il se trouve à Zagreb.

17 Il dit: "Etant donné que j'ai été Premier ministre de la Krajina serbe

18 avec deux autres ministres du gouvernement -à savoir le ministre de

19 l'Intérieur et le ministre de la Défense, entre le 20 avril 1994 et le 29

20 mai 1995, j'étais membre du Conseil suprême de la Défense de la RSK, qui

21 était constitué par Milan Celeketic, en sa qualité de chef d'état-major,

22 et Milan Martic, Président de la République de la Krajina serbe et qui

23 était président de ce Conseil de la Défense suprême- je me considère tenu

24 de démentir ce que M. Lazarevic a déclaré devant le Tribunal de La Haye en

25 date du 30 octobre 2002. Etant donné qu'il a affirmé que cette armée avait

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1 été sous le commandement de Momcilo Perisic et de l'état-major de Belgrade

2 et qu'il y a eu des effectifs de Kordun; et que le 21e Corps de l'armée

3 serbe de Krajina n'avait pas pu quitter l'encerclement en passant par le

4 territoire croate pour se diriger vers la République fédérale de

5 Yougoslavie, je tiens à répondre ce qui suit.

6 En toute responsabilité, j'affirme que, pendant l'année où j'ai été

7 Premier ministre et où j'étais membre du Conseil suprême de la Défense,

8 sécession du Conseil suprême de la défense de la Krajina serbe, nous

9 n'avons ni étudié ni obtenu aucun ordre ou quelque instruction que ce

10 soit, émanant de l'état-major de l'armée de Yougoslavie, pas plus que du

11 général Momcilo Perisic.

12 Donc j'affirme, en toute responsabilité, que l'armée de la RSK a été

13 commandée par M. Celeketic et qu'il y avait sous son commandement six

14 corps d'armée de la République serbe de la Krajina."

15 Il les énumère et je vais gagner du temps et sauter tout cela.

16 "Je tiens également à souligner que le chef de l'état-major avait été

17 Dusan Loncar et le ministre de la Défense, le Dr Rade Tanjiga.

18 Toutes les décisions prises avaient trait à la défense de la RSK et aux

19 questions de la condition matérielle des membres de l'armée de la RSK. Ce

20 sont les questions qui ont été traitées par le Conseil suprême de la

21 Défense. Et si certaines questions autres ont été traitées, cela avait été

22 fait par la volonté de certains autres membres de l'armée de la RSK et

23 n'avait rien à voir avec l'état-major de l'armée de Yougoslavie.

24 Je dois préciser que M. Lazarevic, d'après les connaissances dont je

25 dispose, avait été interprète dans la région de Kordun pour les autorités

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1 militaires et civiles de la RSK, d'une part; et, d'autre part, pour les

2 membres de la Forpronu et les membres des organisations humanitaires

3 internationales.

4 M. le Président (interprétation): Nous allons maintenant nous arrêter,

5 faire une pause pour aborder toutes ces questions.

6 Monsieur Lazarevic, vous devriez avoir l'occasion de répondre à ceci.

7 Apparemment, cet homme s'appelle Mikelic qui écrit quelque chose ou fait

8 des affirmations, apparemment. Il affirme que l'armée de la RSK était

9 commandé par Celeketic, qu'il y avait six corps d'armée sous son

10 commandement, qu'il n'y avait pas d'ordres émanant du grand quartier

11 général ni de Perisic, que toutes les décisions militaires étaient prises

12 dans le cadre de la Défense de la RSK et que ces décisions étaient prises

13 lors de réunions du Conseil suprême de la Défense. C'est la première chose

14 qui est affirmée.

15 La deuxième -je ne sais pas si vous voudrez répondre à cela- mais c'est

16 ceci: si des questions se posaient, dit-on, qui sortaient du cadre,

17 c'était dû au côté arbitraire de l'action de certains. Ce qu'on dit ici,

18 c'est qu'il ne peut s'agir de contrôle ni de participation du grand

19 quartier général de l'armée de Yougoslavie; qu'au contraire, c'étaient des

20 décisions prises par une entité indépendante et autonome, la RSK, mais

21 qu'il se pourrait que certains individus aient agi en dehors de ce cadre.

22 Apparemment, c'est ce qui vous est soumis comme hypothèse. Quel serait

23 votre commentaire?

24 M. Lazarevic (interprétation): Monsieur le Président, nous serons très

25 brefs à ce propos.

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1 Il y a des faits qui ne sont pas contestés, à savoir que 100% des cadres

2 de l'armée de la RSK, c'étaient des officiers d'active de la JNA. La JNA

3 étant devenu plus tard la VJ. Et ces officiers étaient payés par le grand

4 quartier général de Belgrade, faisaient partie de la liste du personnel

5 recevant rémunération. Et le colonel Bulat, ceci est aussi irréfutable, le

6 colonel Bulat était mon commandant et il se trouvait quasiment en contact

7 quotidien, contact téléphonique avec Belgrade, avec le grand quartier

8 général. Personnellement, j'étais présent, dans son bureau, au moment où

9 il a parlé directement avec le général Perisic.

10 M. Milosevic (interprétation): Je ne vais pas m'attarder davantage sur

11 cette question étant donné que nous avons débattu de la chose hier. Et le

12 temps court, le temps qu'il me reste est fort limité.

13 Ce que l'ex-Premier ministre de la RSK dit, ne fait que confirmer ce que

14 j'ai avancé moi-même hier et il dément les dires du témoin.

15 Point 2, étant donné que personne n'a contesté le fait que les officiers

16 de l'armée avaient été des officiers auparavant dans la JNA, tout comme

17 les officiers de l'armée croate avaient également été des officiers de la

18 JNA pendant que cette JNA existait, et les officiers musulmans, eux aussi,

19 avaient été des officiers de la JNA, alors que celle-ci existait et

20 qu'elle avait constitué une force militaire unique…

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, nous en avons déjà

22 parlé, nous vous avons compris. L'autre chose que vous avez affirmée,

23 c'est que ces officiers faisaient partie de la liste des personnes

24 salariées et payées par le grand quartier général de Belgrade. Mais

25 passons à autre chose, s'il vous plaît. Avançons.

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1 M. Milosevic (interprétation): L'aide économique n'a rien à voir avec le

2 commandement, Monsieur May, et vous devez certainement le savoir. Je

3 voudrais parler d'autre chose. Je tiens donc à sauter l'encerclement de

4 Topusko et ainsi de suite.

5 Et il dit: "Après le 4 août…" -pas comme Lazarevic le dit- "Le 4 août,

6 l'opération Tempête a commencé et, à Topusko, il y a eu 20.000 Serbes

7 originaires de Kordun avec une partie des membres du 21e Corps de l'armée

8 serbe de Krajina".

9 Fort bien.

10 (M. Milosevic a été ralenti dans sa lecture par les interprètes.)

11 "Et étant donné qu'entre le 4 et le 6 août 1995, un grand nombre de

12 personnes originaires de Lika, Kordun et Banja, avec le gros des effectifs

13 militaires, ont dû quitter cette région par le passage situé à Dvor, sur

14 la rivière de Una, le sort des Serbes de Kordun et d'une partie des

15 membres de ce 21e Corps est devenu dramatique, parce que les effectifs des

16 forces armées croates ont détruit le pont sur la Una, au niveau de la

17 ville de Dvor.

18 Etant donné qu'il ne leur a pas été possible d'établir des communications

19 depuis Topusko avec qui que ce soit…" Je saute là quelques passages.

20 "…y compris la Forpronu, Zagreb, Belgrade et ainsi de suite, ils sont

21 entrés en contact par liaison par satellite avec moi-même, en ma qualité

22 de Président du Gouvernement, du Premier ministre. Et avec le portable de

23 Djuro Skaljac dont les communications sont passées par la Slovénie, ils

24 ont donc établi un contact avec moi-même; il savait qu'en ma qualité de

25 chef de l'équipe de négociation, j'avais disposé d'un téléphone cellulaire

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1 qui m'avait été confié par Thornvald Stoltenberg. Une fois qu'il m'avait

2 présenté cette situation dramatique, pour ce qui est de 20.000 Serbes

3 civils et une partie du 21e Corps de Topusko, j'ai établi une

4 communication avec le QG de la Forpronu à Zagreb, à savoir avec M. Akashi

5 et je lui ai demandé d'intervenir d'urgent."

6 M. le Président (interprétation): Le témoin ne saurait répondre à ceci.

7 Etes-vous au courant de quoi que ce soit s'agissant de ce qui vous est

8 soumis? D'après cet homme, c'est tout ce qui se serait passé, celui qui se

9 trouvait à l'autre bout du fil. Etes-vous au courant de ceci?

10 M. Lazarevic (interprétation): Moi, je ne suis pas au courant du fait que

11 M. Skaljac aurait pris contact avec Milosevic. Des contacts ont été

12 établis, certes, à partir du bureau du QG des Nations Unies avec le

13 commandant de secteur du secteur nord, et s'agissant de ces coups de fils,

14 j'étais présent, j'étais dans le bureau. Mais, à part moi dans le bureau,

15 il y avait M. Skaljac, M. Pajic et le colonel Bulat.

16 J'ai fourni une explication très claire, je vous ai dit qui étaient leurs

17 interlocuteurs et quelle réponse ils avaient fourni.

18 Si nous avons réussi à sortir de là, ce n'est pas grâce à M. Milosevic,

19 c'est grâce aux Nations Unies envers lesquelles nous devons une gratitude

20 éternelle.

21 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Lazarevic, ceci est un démenti

22 émanant de M. Mikelic, et non pas de M. Milosevic. Vous avez fait une

23 confusion. Ce que je viens de vous lire, cela a été rédigé par l'ex-

24 Président de la RSK: il s'appelle Mikelic et pas Milosevic.

25 Réponse: Monsieur le Président m'a posé une question à propos de cette

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1 information, selon laquelle j'aurais parlé par portable à ce monsieur. Et,

2 apparemment, vous nous auriez aidé au moment où il était question de la

3 reddition du 21e Corps. Ce qui est tout à fait faux.

4 Question: J'ai dit? Excusez-moi, je ne vous ai pas très bien compris?

5 Réponse: Je vais vous le répéter en langue serbe, Monsieur l'ex-Président.

6 Dans cette partie-là de votre exposé, vous avez dit que M. Skaljac est

7 entré en contact avec vous par téléphone cellulaire en direct.

8 M. Milosevic (interprétation): Moi, je vous donne lecture du démenti de M.

9 Mikelic. Quand j'ai dit, quand j'ai donné lecture: "est entré en contact

10 avec moi", j'ai cité ce qu'a écrit M. Mikelic.

11 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, il est vraiment

12 inutile d'avoir ce genre de polémique. C'est inutile de se disputer. Nous

13 savons exactement ce qui est en train d'être dit. Poursuivez.

14 M. Milosevic (interprétation): Voulez-vous jeter un oeil sur cette lettre?

15 M. le Président (interprétation): Mais que voulez-vous, Monsieur

16 Milosevic, Quelle devrait être la réponse du témoin? Avez-vous d'autres

17 questions à lui poser en ce qui concerne cette lettre? Si vous voulez le

18 faire, faites-le!

19 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, tout le récit que nous avons

20 entendu hier de la bouche du témoin concernant les 20.000 personnes

21 encerclées là-bas, se trouve expliqué autrement ici. Je voulais donc

22 montrer la chose parce que j'affirme que ce témoin-ci ne dit pas la vérité

23 dans toute la déposition qu'il a faite, et là je viens de ne donner que

24 quelques exemples. Mais nous pouvons aller de l'avant.

25 M. le Président (interprétation): Cela, c'est une question de commentaire.

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1 Je suis sûr que tôt ou tard il faudra bien que nous tranchions ces

2 questions. Mais passons à autre chose, s'il vous plaît.

3 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Lazarevic, avez-vous traité de

4 vente d'armes à quelque occasion que ce soit pendant que vous étiez là-bas

5 au sein du 21e Corps?

6 M. Lazarevic (interprétation): Absolument pas.

7 Question: Avez-vous vendu un pistolet de fabrication tchèque à un homme

8 qui s'appelle Djuric et ce pistolet avait appartenu à un Croate qui s'est

9 perdu et qui est arrivée à Turalj, sur le territoire serbe?

10 Réponse: Je répète que non.

11 Question: Lui, il affirme que oui. Vous, vous affirmez que ce n'est pas le

12 cas. Je vais faire état d'une autre contre-vérité qu'il n'est pas

13 difficile de constater, mais je crois que nous pourrions analyser chacune

14 de vos phrases de la même façon.

15 En page 19, alinéa 6, vous affirmez que Mlado Karan, membre de la SDB qui

16 a été envoyé dans la Krajina par Belgrade, avait dirigé les unités de la

17 police militaire. Veuillez vous pencher sur cette déclaration.

18 Page 19, en dernier paragraphe, vous dites: "Mlado Karan, membre de la

19 SDB, des services de sécurité d'Etat qui a été envoyé dans la Krajina par

20 Belgrade, la KOS ne l'aimait pas beaucoup en raison des rivalités entre

21 ces deux services." Vous le dites donc, en page 19, au sujet de Karan

22 qu'il n'était pas apprécié par la KOS en raison des rivalités qui

23 existaient entre ces deux services.

24 Puis… Revenez un peu, s'il vous plaît.

25 M. Kwon (interprétation): En version en anglais, c'est la page 21.

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1 M. Milosevic (interprétation): C'est bien ce que vous avez dit dans votre

2 déposition, qu'il n'était pas apprécié par la KOS en raison des rivalités

3 entre ces deux services?

4 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

5 M. Milosevic (interprétation): Je vous demande de passer à la page 12,

6 avant-dernier paragraphe, où vous affirmez -et là, je vous cite une fois

7 de plus. Je vous demande de ne pas perdre de vue que je cite quelqu'un, ce

8 n'est pas moi qui parle. En 1993, à sa place, vous parlez de Petar Surla,

9 mais peu importe.

10 Dans la deuxième phrase vous dites: "En 1993, il est venu à sa place Mlado

11 Karan qui avait été chargé pour la KOS dans le secteur nord jusqu'au mois

12 d'août 1995."

13 Donc vous dites qu'il était de la DB, et qu'il n'était pas aimé par la

14 KOS; et puis après, vous dites qu'il avait été l'homme qui avait dirigé la

15 KOS. Et là encore, vous dites des contre-vérités, Monsieur Lazarevic,

16 c'est vrai ou pas?

17 M. Lazarevic (interprétation): Monsieur Milosevic, vous commencez en

18 partant d'une position incroyable. Tout le monde est en train de mentir,

19 il n'y a que vous à dire la vérité.

20 Le fait est que cette déposition que j'ai donnée est reprise au travers de

21 40 pages. J'ai affirmé que Mlado Karan avait été colonel de la KOS. Il

22 avait été commandant des services de sécurité du 21e Corps. Ceci est une

23 petite erreur où on a mis "DB" au lieu de "KOS". J'imagine que l'erreur a

24 dû être faite à un moment où je n'ai plus été en mesure de rectifier.

25 C'est le seul endroit où on dit qu'il était membre de la DB. Dans tous les

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1 autres documents, on dit clairement qu'il a été membre de la K-O-S.

2 M. le Président (interprétation): Est-il possible d'avoir un exemplaire de

3 ceci?

4 M. Lazarevic (interprétation): Monsieur le Président, puis-je m'adresser à

5 vous?

6 M. le Président (interprétation): Un instant, s'il vous plaît. Oui?

7 M. Lazarevic (interprétation): Il y a aussi un tableau qui a été soumis à

8 la Chambre, un organigramme qui montre très clairement quelle était la

9 fonction exercée par le colonel Karan dans la structure du 21e Corps.

10 M. le Président (interprétation): Est-ce que nous pourrions obtenir cette

11 pièce? C'est bien la cote 348, intercalaire 1?

12 M. Groome (interprétation): Oui.

13 M. le Président (interprétation): Pourrions-nous rapidement l'obtenir,

14 puisqu'on en parle? Et pourrait-on placer ce document sur le

15 rétroprojecteur.

16 (Intervention de l'huissier.)

17 Veuillez nous indiquer la place qu'occupait ce monsieur dans la structure.

18 M. Lazarevic (interprétation): Vous le verrez dans la deuxième case,

19 Monsieur le Président. Dans la même colonne, Mlado Karan, à partir de 1993

20 jusqu'en 1995. Et il y a une ligne directe qui mène au commandement de la

21 KOS à Belgrade. Il n'y a aucun lien établi entre cet homme et la SDB de

22 Serbie.

23 M. Milosevic (interprétation): Mais qui a décidé cet organigramme?

24 M. Lazarevic (interprétation): Moi, Monsieur Milosevic .

25 M. Milosevic (interprétation): Donc, par votre organigramme que vous avez

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1 inventé de toutes pièces, vous voulez montrer et démontrer autre chose que

2 vous avez également monté de toutes pièces? Avec vos dessins, vous

3 démontrez...

4 M. Lazarevic (interprétation): Je ne vois vraiment pas, Monsieur

5 Milosevic, la finalité de vos dires.

6 M. Milosevic (interprétation): Mais vous venez de nous dire que c'est vous

7 qui l'avez dessiné!

8 Mais puisque vous nous le dites, Monsieur Lazarevic, que là, il y a eu une

9 erreur qui a échappé à tout un chacun pour ce qui est de SDB. Mais il n'y

10 a pas que l'erreur au niveau de la SDB; il y a toute la signification de

11 l'assertion que vous y faites, dans cette information, qui dit autre

12 chose. Parce qu'on dit: "Mlado Karan, membre de la SDB, qui a été envoyé à

13 la SDB par Belgrade, n'était pas apprécié par la KOS en raison des

14 rivalités entre ces deux services".

15 Donc il n'y a pas une erreur de frappe pour ce qui de dire "SDB" au lieu

16 de "KOS". Mais, en substance, vous parlez de rivalité entre deux services

17 et des raisons pour lesquelles la KOS n'aimait pas ledit Karan. Par

18 conséquent, les choses sont claires et nettes. Peut-être ne sont-elles pas

19 claires pour vous, à moins que ce ne soit pas votre déposition à vous?

20 M. Lazarevic (interprétation): Monsieur le Président, je suis absolument

21 certain qu'ici, il y a simplement un problème de coquille, d'erreur

22 typographique. Si l'on remplace la "DB" par la "KOS", à ce moment-là, tout

23 devient limpide, et vous comprendrez parfaitement ce que j'ai déclaré

24 auparavant, à savoir qu'au sein de la KOS, il y avait deux filières, si

25 vous voulez, deux services courants.

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1 D'un côté, il y avait le service qui s'occupait de la sécurité intérieure,

2 avec à sa tête le colonel Karan. Et de l'autre côté, vous aviez le service

3 qui s'occupait de la sécurité extérieure du pays. Ce sont donc deux

4 services qui font partie d'une seule et même organisation. C'est entre ces

5 deux services qu'il y avait un certain antagonisme.

6 Par conséquent, si cette coquille est corrigée, et si on lit "KOS" en lieu

7 et place de l'autre dénomination, à ce moment-là la déclaration est tout à

8 fait exacte.

9 M. Milosevic (interprétation): Puis-je continuer, étant donné que ceci ne

10 mérite plus d'explication, de façon évidente?

11 En page 20, paragraphe 2, vous affirmez que Vujadinovic est tombé en

12 disgrâce, fin 1994 et début 1995, au moment où il a arrêté Ajdinovic parce

13 qu'il s'était emparé de certains équipements de surveillance, équipements

14 qui provenaient d'un avion sans pilote. Où?

15 Réponse: A proximité de Glina.

16 Question: Mais qui a fait tomber cet avion?

17 Réponse: Notre partie, je suppose.

18 Question: Vous affirmez donc, outre les renseignements dont on dispose,

19 que Ajdinovic n'a jamais été arrêté et qu'il n'a jamais été placé sous

20 garde à vue, alors que ces équipements très coûteux de surveillance ont

21 été mis à la vente, alors, l'avion a été touché par une roquette; cet

22 avion, il est tombé de plusieurs milliers de mètres d'altitude et on a

23 récupéré les équipements?

24 Mais comment pouvez-vous sortir des sornettes de ce genre? C'est bien ce

25 que vous affirmez?

Page 12612

1 Réponse: Qu'est-ce que j'affirme? Je ne comprends pas du tout ce que vous

2 me demandez.

3 Question: L'avion qui a été touché par une pièce d'artillerie quelconque,

4 de façon évidente, donc par une arme à feu, une roquette, un missile, peu

5 importe… cet avion est tombé d'une grande altitude sur le sol et

6 l'équipement de surveillance est resté intact. Quelqu'un a donc récupéré

7 cela pour aller le vendre. C'est ce que vous affirmez?

8 Réponse: Moi, j'affirme que l'avion a été abattu. Cela peut être constaté

9 par les PV des Nations Unies.

10 Question: Soit, on a fait tomber l'avion. Et alors?

11 Réponse: Et les entretiens au niveau du commandement du 21e Corps disent

12 que M. Ajdinovic avait été arrêté à ce moment-là. Je n'ai à aucun moment,

13 dans ma déclaration, dit que j'avais été présent sur le terrain.

14 Question: Mai comment le savez-vous?

15 Réponse: C'est le colonel Bulat qui me l'a dit, et bon nombre d'officiers

16 également.

17 Question: A chaque fois que je vous pose la question de savoir d'où vous

18 le savez, vous dites que vous avez entendu cela de la bouche d'un tel ou

19 d'un tel autre. Mais, enfin, allons un peu de l'avant.

20 Là, les choses sont plutôt douteuses, les choses dont vous parlez: vous

21 parlez d'exhumations de cadavres et d'échanges avec les Musulmans. Serait-

22 il exact de dire que vous avez affirmé qu'à cette fin-là, vous avez

23 déterré 99 cadavres et qu'il en fallait encore une dizaine pour les

24 échanges? Cela figure au paragraphe 5 de la page 20.

25 Réponse: Je n'ai pas dit que j'ai déterré. J'ai dit qu'il en manquait.

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1 Dans la déposition, on dit combien j'en ai déterré.

2 Question: Mais où a-t-on exhumé ces 99 corps?

3 Réponse: Sur le territoire de la RSK tout entière.

4 Question: Sur le territoire de la RSK tout entière? Eh bien, dites-nous,

5 s'agissait-il là de cadavres de Musulmans ou de qui au juste?

6 Réponse: Les cadavres étaient ceux des membres du 5e Corps de l'ARSK qui

7 étaient tombés au cours des batailles.

8 Question: Mais, dites-moi, comment des cadavres musulmans se sont-ils

9 trouvés sur le territoire de la RSK?

10 Réponse: Pour une raison tout à fait simple: l'armée de la RSK avait eu

11 des activités de combat sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine.

12 Question: Vous voulez dire en Province autonome de Bosnie occidentale de

13 Fikret Abdic?

14 Réponse: Vous avez raison.

15 Question: Donc vous affirmez que l'armée de la RSK avait pris ces cadavres

16 musulmans pour les transporter et les enterrer sur le territoire de la

17 RSK?

18 Réponse: Personne n'affirme qu'ils ont été enterrés. Ce que j'ai affirmé,

19 c'est qu'on les a donnés pour les échanger. Il n'est pas inhabituel de

20 voir une armée ramasser les morts de l'autre armée pour procéder aux

21 échanges de corps.

22 Question: Monsieur Lazarevic, je vous ai demandé il y a 30 secondes où

23 l'on a ramassé ces corps. Vous avez répondu: sur le territoire de la RSK.

24 Les Musulmans ne pouvaient pas être tués sur le territoire de la RSK parce

25 qu'ils n'ont jamais fait la guerre sur le territoire de la RSK.

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1 Réponse: Monsieur Milosevic, on m'a remis ces corps sur le territoire de

2 la RSK.

3 Question: Monsieur Lazarevic, on ne vous a jamais remis des cadavres,

4 quels qu'ils soient. Mais nous allons le constater un peu plus tard.

5 Avez-vous les noms des personnes? Etant donné que vous avez dirigé ces

6 échanges, j'imagine que vous devez disposer des noms des personnes dont

7 les corps, les cadavres -comme vous l'avez précisé- ont été échangés par

8 la suite?

9 Réponse: Bien sûr que je ne les ai pas, Monsieur Milosevic. La plupart de

10 ces cadavres n'ont pas été identifiés.

11 Question: Donc vous ne les avez pas! Mais dites-moi alors, puisque vous

12 affirmez qu'il vous manquait encore 10 cadavres… Laissez-moi voir… Djuro

13 Skaljac vous a dit qu'il fallait aller à côté de Vojnic, à proximité de la

14 rivière, et d'en déterrer encore quatre, n'est-ce pas?

15 Réponse: Djuro Skaljac m'a personnellement emmené à l'endroit où l'on en

16 avait enterré quatre.

17 M. Milosevic (interprétation): A côté de quelle rivière avez-vous creusé?

18 M. Lazarevic (interprétation): Je ne sais pas. Il y a des tas de petites

19 rivières dans la région de Kordun. Je peux vous dire que cela se trouve à

20 un kilomètre, un kilomètre et demi de Vojnic, en direction de Petrova

21 Gora.

22 M. le Président (interprétation): Je dois vous rappeler à tous deux qu'il

23 vous faut ralentir le débit. Pensez aux interprètes.

24 M. Milosevic (interprétation): Je tiendrai compte des interprètes,

25 Monsieur le Président.

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1 M. Lazarevic (interprétation): Je m'excuse également.

2 Question: Vous affirmez que ces hommes ont été tués par les policiers de

3 la Krajina. Et de qui étaient ces corps?

4 Réponse: La seule chose que j'ai dite, c'est que c'étaient quatre hommes

5 dont les mains, les poignets étaient ligotés avec du fil de fer et que

6 c'étaient des personnes qui avaient été exécutées et non pas des personnes

7 qui étaient tombées sur le champ de bataille.

8 Question: Mais là aussi, vous ne savez rien nous dire concernant

9 l'identité des personnes dont vous avez parlé, n'est-ce pas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Bien. Alors, vous dites plus loin -en page 21, premier

12 paragraphe- que cinq autres cadavres vous ont été confiés par le capitaine

13 Sarac, un homme d'"Arkan", à Velika Kladusa. Et c'est Pejovic, un colonel

14 d'"Arkan", surnommé "Peja", qui vous a dirigé vers lui?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Laissez-moi jeter encore un regard. J'avais quelque chose à ce

17 sujet.

18 Oui, alors, le colonel Pejovic surnommé "Peja" vous a dirigé et, par la

19 suite, plus loin dans le texte -en page 22- vous le mentionnez une fois de

20 plus, et vous précisez qu'il a toujours eu une attitude très correcte à

21 votre égard, ce Pejovic surnommé "Peja", n'est-ce pas?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Cela figure à la page 22, deuxième paragraphe. Mais si vous

24 comptez le paragraphe qui a été transposé de la page d'avant, c'est le

25 troisième paragraphe. Donc c'est le Pejovic surnommé "Peja" qui vous a

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1 aidé à résoudre le problème que vous aviez.

2 Réponse: Vous avez oublié de mentionner le fait que le colonel Karan

3 m'avait dirigé sur lui.

4 Question: Mais, moi, j'avais des questions à vous poser concernant ce

5 Pejovic qui s'était comporté de façon correcte à mon égard. Mais je ne

6 parle pas de moi; je lis ce que vous avez dit, donc je parle de vous.

7 Réponse: Monsieur Pejovic a, en effet, eu une attitude très correcte à mon

8 égard.

9 Question: Vous le décrivez. Vous dites qu'il est blond, qu'il est âgé

10 d'une quarantaine d'années et qu'il s'est comporté de façon correcte à mon

11 égard. C'est bien ce que vous avez dit?

12 Réponse: Oui, c'est exact.

13 Question: Bien. S'il vous plaît, savez-vous comment on surnommait ce

14 "Peja"?

15 Réponse: "Peja".

16 Question: Il avait un autre surnom. Le connaissez-vous?

17 Réponse: Je ne sais pas. Je le connaissais sous le nom colonel Pejovic

18 surnommé "Peja".

19 Question: Cela n'est pas contesté. Vous le mentionnez à deux endroits et

20 vous venez de le confirmer. Savez-vous que ses camarades l'appelaient

21 "Peja Ciganin", "le Gitan".

22 Réponse: Je doute que les membres de son commandement l'auraient surnommé

23 de façon péjorative "Peja, le Gitan".

24 M. Milosevic (interprétation): Mais savez-vous pourquoi ils l'ont surnommé

25 comme cela?

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1 M. Lazarevic (interprétation): Mais est-ce que c'est pertinent?

2 M. le Président (interprétation): Un instant. Laissez le temps au témoin

3 d'intervenir.

4 M. Milosevic (interprétation): Mais étant donné que vous affirmez ici -et

5 vous l'avez écrit-: blond, âgé d'une quarantaine d'années, savez-vous

6 qu'on l'appelait ainsi parce qu'il avait les cheveux noirs comme un

7 corbeau et qu'il était très mat de peau, et il n'était pas blond? Donc

8 vous ne l'avez pas du tout vu. Vous venez de confirmer que c'est la bonne

9 description qui est celle que vous avez donnée dans votre déposition, mais

10 lui il avait des cheveux noirs et c'est pour cela que ses amis l'avaient

11 surnommé "Peja, le Gitan"; donc tout à fait le contraire.

12 Quelqu'un vous a vendu une espèce de commérage, dont vous vous êtes

13 habilement servi, mais vous ne l'avez jamais vu cet homme-là!

14 M. le Président (interprétation): Je ne suis plus du tout la question.

15 Veuillez recommencer, Monsieur Milosevic.

16 Et là, je tiens à corriger le compte rendu d'audience, cinq ou six lignes

17 plus haut. Ce que j'ai dit, en fait, c'est ceci, j'ai dit: "Laissez poser

18 la question et nous verrons". Et c'était en réponse à un commentaire fait

19 par le témoin qui demandait si c'était vraiment pertinent la question

20 qu'on lui posait.

21 Monsieur Milosevic, quelle est la question que vous soumettez au témoin?

22 Vraiment, vraiment il est impossible de suivre ce qui vient d'être dit. Et

23 dans quelle mesure ceci va-t-il nous aider pour trancher les faits en

24 cause?

25 M. Milosevic (interprétation): Il a donné une description de Pejovic. Le

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1 témoin a donné une description de ce Pejovic surnommé "Peja", et il a dit

2 qu'il était blond. Alors, que toute personne connaissant l'intéressé sait

3 parfaitement bien que c'était quelqu'un à la peau mate et qui avait des

4 cheveux noirs, noir de jais. Alors, c'est…

5 M. le Président (interprétation): Fort bien. Arrêtons! Arrêtons. Nous

6 avons compris maintenant. Arrêtons-nous là pour parler de ça d'abord.

7 Le colonel Pejovic, surnommé "Peja": apparemment, vous auriez fourni une

8 description erronée de cette personne. Monsieur Lazarevic, pouvez-vous

9 répondre à cela?

10 M. Lazarevic (interprétation): Monsieur le Président, l'homme qui s'est

11 présenté à moi la première fois, c'était le colonel Pejovic, surnommé

12 "Peja". Tous ces officiers, y compris M. Pejovic, avaient les cheveux

13 coupés très courts, très ras. Il portait un béret et moi, j'ai eu

14 l'impression que c'était un blond.

15 Mais permettez-moi de relever que je me suis trouvé à "Pauk" à plusieurs

16 reprises. J'ai rencontré le colonel Pejovic au moins, au moins trois fois.

17 Et j'ai toujours trouvé que c'était un monsieur tout à fait correct, un

18 gentleman. Pourquoi dirait-on aujourd'hui que je n'ai pas rencontré cet

19 homme? Je n'en ai pas la moindre idée!

20 M. Milosevic (interprétation): Eh bien, je crois que la raison est tout à

21 fait évidente, Monsieur Lazarevic. Votre description est diamétralement

22 opposée à l'apparence réelle de cet homme-là. Serait-il exact de dire,

23 Monsieur Lazarevic, que les autres hommes que vous mentionnez, en disant

24 qu'ils avaient été présents sur le territoire de la RSK, vous les

25 mentionnez en prouvant leur présence par leur présence à une parade, une

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1 cérémonie de parade, à la célébration de la Saint-Guy, de la Vidovdan, et

2 pas autrement?

3 Réponse: Mais soyez aimable, expliquez-moi: quelle est votre question, au

4 juste?

5 Question: Ma question est tout à fait simple. Je pense que vous êtes en

6 train de spéculer, de jouer avec les faits. Vous avez mentionné en effet

7 plusieurs personnes. Vous avez montré des photographies, des photographies

8 de personnes qui ont été présentes, comme vous l'affirmez, à Petrova Gora

9 et ainsi de suite, mais vous avez en fait montré des photographies

10 provenant de cette cérémonie de la parade de Slunj, à la date de Vidovdan,

11 à laquelle vous avez été présent en votre qualité d'interprète, n'est-ce

12 pas?

13 Réponse: Ce n'est pas exact.

14 Question: Mais n'avons-nous pas déterminé que cela était public, que cela

15 a été diffusé à la télévision?

16 Réponse: Vous m'avez demandé si j'étais là-bas en ma qualité d'interprète,

17 j'ai répondu non parce que j'étais là-bas en ma qualité d'officier de

18 liaison.

19 Question: Mais c'est égal.

20 Réponse: Ce n'est pas égal.

21 Question: Est-ce qu'il est contesté le fait que c'était une parade

22 officiellement organisée?

23 Réponse: Non.

24 Question: Est-ce que cela a été diffusé par la télévision?

25 Réponse: Ce n'est pas contesté.

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1 Question: Est-ce qu'il n'est pas contesté qu'il y ait eu là-bas, comme à

2 toute fête, toute parade, des invités?

3 Réponse: Moi, je ne peux pas vous répondre à cette question; ce n'est pas

4 moi qui ai fait la liste des invités, Monsieur Milosevic.

5 Question: Mais est-il contesté le fait qu'il y ait eu des invités en

6 provenance de Serbie, en provenance de la Republika Srpska, en provenance

7 de la province autonome de Bosnie occidentale, à savoir des Musulmans de

8 Fikret Abdic, des officiers des Nations Unies et des gens de la République

9 de Krajina serbe et des officiers des Nations Unies? Ce n'est pas

10 contesté?

11 Réponse: Ce n'est pas contesté.

12 Question: Donc, s'agissant de Petrova Gora et des gens qui s'étaient

13 trouvés là-bas, vous présentez des éléments de preuve issus de la parade

14 où il y avait des invités de toutes les régions, de la Krajina, de la

15 Province autonome de Bosnie occidentale, de la République de Serbie, des

16 Nations Unies, n'est-ce pas bien ainsi?

17 Réponse: Monsieur Milosevic, s'agissant du colonel Pejovic, cela avait

18 trait au commandement de "Pauk" en Bosnie. A aucun moment, je n'ai dit que

19 je l'avais rencontré à Petrova Gora, mais je l'ai rencontré à "Pauk". Et

20 ce commandement avait été présent à la parade.

21 Mais laissez-moi revenir à cet échange des 100 malheureuses personnes qui

22 sont tombées au cours des combats ou peu importe où, n'entrons pas dans

23 ces détails.

24 La plupart ou la majeure partie de ces échanges n'auraient pas pu être

25 effectués sans la présence et le travail, les activités déployées par les

Page 12621

1 commandements, les commissions des deux côtés de la RSK, de la Republika

2 Srpska, du Corps de Kordun et du Corps de la Banja. Il aurait été

3 impossible de réaliser la chose sans la présence des Nations Unies, les

4 Nations Unies nous ayant donné les sacs pour mettre les cadavres dedans.

5 Il y a des PV à cet effet, Monsieur Milosevic, qui le confirmeront

6 indubitablement.

7 Question: Les avez-vous?

8 Réponse: Je ne les ai pas, mais je vous parle de mémoire.

9 Question: Si vous parlez de mémoire, si vous avez pris possession de

10 certains cadavres, c'étaient des cadavres serbes ces 99 cadavres?

11 Réponse: Oui, vous avez raison.

12 Question: Mais vous souvenez-vous ou avez-vous noté quelque part, ne

13 serait-ce que le nom d'une famille serbe à laquelle vous auriez restitué

14 le corps du membre de leur famille?

15 Réponse: Monsieur Milosevic, tous ces cadavres ont été transférés en

16 Bosnie au service de pathologie à Banja Luka. Les 99 cadavres ont été

17 transférés directement là-bas.

18 Question: Donc, vous ne connaissez aucun nom des personnes dont les corps

19 ont été échangés, il n'y en a pas eu un seul d'identifié, il n'y en a pas

20 eu un seul à pouvoir identifier? Il n'y a pas une seule famille, à votre

21 connaissance, qui aurait été intéressée par la reprise de la dépouille de

22 l'un des leurs?

23 Réponse: Monsieur Milosevic, la commission chargée des échanges ne s'est

24 pas entretenue avec les familles des morts, mais s'est entretenue avec le

25 commandement des Nations Unies afin de voir de quelle façon on pouvait

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1 procéder le plus rapidement qu'il soit à ces échanges, un pour un.

2 Question: Mais comment se fait-il que personne, du moins pour la région

3 dont vous parlez vous-même, n'a procédé à des échanges de corps? Je ne dis

4 pas qu'il n'y a pas eu d'échanges pendant la guerre, mais l'échange dont

5 vous parlez n'a pas eu lieu. Personne n'est au courant de la chose.

6 Réponse: Mais les parents des morts le savent.

7 Question: Mais vous, vous ne savez pas de qui il s'agit, il y a eu

8 beaucoup de morts. Vous avez inventé cela de toutes pièces, Monsieur

9 Lazarevic.

10 Réponse: Non, je n'ai pas inventé cela, Monsieur Milosevic.

11 Question: Est-ce que vous êtes en train d'affirmer que vous avez été

12 présent au quartier général de Petrova Gora?

13 Réponse: J'affirme que j'ai été au quartier général à "Pauk", auprès de

14 Velika Kladusa, si tant est que c'est bien la question que vous avez

15 l'intention de poser.

16 Question: Je n'ai pas l'intention de poser cela comme question. Je suis en

17 train de lire votre déclaration. Vous dites: "Dans le complexe de Petrova

18 Gora, j'y suis allé trois fois". "Je suis allé trois fois" et vous

19 mentionnez là "Peja", vous dites qu'il est blond alors qu'il était brun.

20 Et moi j'affirme que vous n'êtes jamais allé à cette base de Petrova Gora;

21 c'est pour cela que je vous pose la question de savoir si vous y êtes

22 allé.

23 Réponse: Oui, j'y suis allé. Vous oubliez, Monsieur Milosevic, que Petrova

24 Gora avait été le commandement du 21e Corps avant que les unités du MUP et

25 les unités spéciales du MUP de Serbie ne s'y installent.

Page 12623

1 M. Milosevic (interprétation): Mais vous avez affirmé auparavant qu'un

2 autre endroit avait été en question et je vous ai démenti à ce moment-là

3 en disant que le commandement se trouvait à Petrova Gora et non pas là où

4 vous affirmez qu'il se trouvait. Et vous trouvez maintenant que cela s'est

5 trouvé à Petrova Gora. C'est très bien. Une fois que vous aurez comparé

6 les comptes rendus d'audience, vous vous rendrez compte de ce que vous

7 avez dit.

8 M. Lazarevic (interprétation): Non, nous n'allons pas aller de l'avant. Je

9 vais expliquer à la Chambre pourquoi je l'ai affirmé.

10 Je parlais du commandement du 21e Corps d'armée, Monsieur le Président,

11 Messieurs les Juges. Au départ, le 21e Corps a été déployé, le

12 commandement a été logé aussi en haut de la colline, donc non loin de la

13 base des Nations Unies, à l'hôtel de Topusko.

14 A la fin de 1992, ce commandement s'est retiré de cet endroit et a donc

15 quitté les installations militaires de Petrova Gora en haut de la colline.

16 Après l'arrivée des forces spéciales de la police de Serbie, ces

17 installations leur ont été données et le 21e Corps a encore une fois

18 déménagé son commandement pour se rendre aux abords de Vojnic, dans un des

19 lieux, des sites qui appartenaient au ministre Spegelj, si je me souviens

20 bien.

21 M. le Président (interprétation): Bon. Voyons, voyons, est-ce que j'ai

22 bien suivi; cela pourrait être important. Je relis ce qui figure sur mon

23 écran.

24 Au départ, le commandement se trouvait à Topusko. Alors, je vous demande

25 si, à un certain moment, le commandement s'est trouvé à Petrova Gora ou

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1 s'il a été déplacé directement de Topusko à Vojnic?

2 M. Lazarevic (interprétation): Le seul commandement qui, apparemment avant

3 la création du 21e Corps, a existé, eh bien, c'était le commandement du 8e

4 Groupe opérationnel de la JNA.

5 M. le Président (interprétation): Oui mais, Monsieur Lazarevic, je crains

6 de ne pas vous avoir suivi. Vous avez dit qu'au départ le 21e Corps a été

7 déployé -en tout cas, c'est ce que je lis sur l'écran-, le commandement a

8 été sis en haut de la colline, au-dessus de l'hôtel de Topusko. Donc là on

9 parle du premier quartier général.

10 Je poursuis la lecture: "Ensuite, le commandement a été déplacé vers

11 Vojnic, c'était le commandement du 21e Corps".

12 Et moi, je vous pose la question de savoir si ce déménagement s'est fait

13 directement de Topusko à Vojnic ou s'il y a eu une étape intermédiaire à

14 Petrova Gora?

15 M. Lazarevic (interprétation): Monsieur le Président, entre Vojnic et

16 Topusko, le 21e Corps a été logé dans les installations militaires de

17 Petrova Gora.

18 M. le Président (interprétation): Oui, merci.

19 M. Milosevic (interprétation): Bien, nous avons déjà discuté de tout cela

20 hier. Je ne voudrais pas perdre du temps sur cette question car comme vous

21 le savez bien, Monsieur Lazarevic, hier, lorsque vous avez déclaré avoir

22 été emmené pour la première fois auprès du commandement de ce groupe

23 opérationnel et que vous avez expliqué qu'il se trouvait dans un autre

24 endroit, je vous ai dit que ce que vous disiez n'était pas exact parce que

25 le commandement se trouvait à Petrova Gora. Et nous parlons de 1994 et

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1 1995. Donc tout ce que vous dites est inexact.

2 Maintenant, en page 24 de votre déclaration, vous parlez de l'enlèvement

3 d'un journaliste français et vous affirmez avoir découvert que cet homme

4 avait été enlevé par la police spéciale.

5 M. Lazarevic (interprétation): Non. Non, ce n'est pas moi qui l'ai

6 découvert ça, ce n'est pas exact.

7 M. le Président (interprétation): Peut-on réessayer, Monsieur Milosevic?

8 M. Milosevic (interprétation): Pourquoi réessayer, Monsieur May? Quel est

9 le problème?

10 M. le Président (interprétation): Réessayez, reposez votre question. Page

11 24, quelle était votre question? Les interprètes n'ont pas pu saisir.

12 M. Milosevic (interprétation): Je parle de l'endroit du texte où vous

13 parlez de l'enlèvement de journaliste, donc page 24 de votre déclaration.

14 Et je cite: "Ces deux journalistes ont essayé de passer de Bosnie-

15 Herzégovine en RSK. Au poste de passage, se trouvaient des policiers de la

16 police spéciale de Serbie, c'est-à-dire des gens de Stamatovic. Les

17 membres de la police spéciale les ont arrêtés alors qu'ils essayaient de

18 franchir ce passage. Ces deux journalistes avaient une autorisation du

19 ministère de l'Information de l'ARSK de Knin pour circuler librement sur

20 le territoire de la RSK. Ils sont restés plusieurs jours dans le secteur

21 nord et sont ensuite passés en Bosnie-Herzégovine. Quand ils sont passés

22 en Bosnie-Herzégovine, ils ont disparu. Quelqu'un de Zagreb s'est

23 renseigné pour savoir où ils se trouvaient. Manifestement, ces deux

24 journalistes n'ont pas appelé la personne qu'ils étaient censé appeler, et

25 des renseignements ont été demandés.

Page 12626

1 Le ministère de l'Information de la RSK m'a appelé à Topusko pour se

2 renseigner et savoir où se trouvaient ces deux journalistes. Je savais

3 qu'ils étaient passés en Bosnie-Herzégovine, mais je ne savais pas ce qui

4 leur était arrivée par la suite. Et un doute s'est créé quant au fait que

5 nous aurions fait quelque chose à ces hommes; ce qui était inexact. De

6 sorte que j'ai commencé à me renseigner pour lever ce doute qui pesait sur

7 moi et sur la RSK en même temps. J'ai découvert que la police spéciale de

8 Serbie les avait ramassés pour les accuser d'espionnage."

9 (Fin de citation.)

10 Alors, je vous ai posé la question il y a quelques instants: vous avez

11 déclaré que vous les avez découverts, que vous aviez découvert qu'ils

12 avaient été enlevés par la police serbe qui les accusait d'espionnage, et

13 vous dites ensuite que ce n'est pas vous qui avez découvert cela.

14 M. Lazarevic (interprétation): "Découvert", comme vous le dites dans votre

15 première question, semble vouloir dire que j'ai mené une enquête, une

16 enquête personnelle. Or ce qui est vrai, c'est que le commandant de

17 Topusko, le commandant de la Forpronu avait une description très détaillée

18 de ces hommes et que, à son retour à Zagreb, ces hommes ont donc été

19 décrits avec y compris description des insignes et des emblèmes qu'ils

20 portaient.

21 Question: Quand vous parlez de l'enlèvement des journalistes français,

22 vous dites que vous avez découvert qu'ils avaient été enlevés par la

23 police spéciale de Serbie.

24 Réponse: Oui.

25 Question: Et vous dites maintenant que ce n'est pas vous qui avez

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1 découvert cela.

2 Réponse: Non, j'ai simplement expliqué, il y a un instant, que vous

3 sembliez dire que tout le monde comptait sur moi pour faire la vérité sur

4 cette histoire.

5 Question: Je ne sais pas qui comptait sur vous. Je ne sais même pas qui

6 compte sur vous aujourd'hui d'ailleurs. J'ai simplement cité une phrase

7 venant de vous et qui dit -je cite-: "J'ai découvert qu'ils avaient été

8 enlevés par la police spéciale de Serbie et accusés d'espionnage." (Fin de

9 citation.)

10 C'est ce qui est écrit dans votre déclaration écrite. Il n'est donc pas

11 difficile, n'est-ce pas, de conclure que vous prétendez avoir découvert

12 cela parce que c'est ce que vous dites vous-même?

13 Réponse: Oui, je l'ai découvert.

14 M. Milosevic (interprétation): Bien. Mais alors, vous le dites vous-même,

15 et dans ce cas-là, ce que vous avez écrit est exact?

16 M. Lazarevic (interprétation): Oui, c'est exact.

17 M. le Président (interprétation): On vous demande à tous les deux de

18 ralentir.

19 M. Milosevic (interprétation): Vous dites, Monsieur Lazarevic, dans le

20 paragraphe suivant -je cite-: "Après que ces deux hommes ont été relâchés

21 et qu'ils sont retournés à Zagreb, ils ont porté plainte, fait des

22 déclarations à la police militaire de la RSK et au secteur nord, au

23 quartier général du secteur nord des Nations Unies. C'est ainsi que j'ai

24 appris leurs arrestations."

25 Voilà ce qui est écrit. Je n'ai aucun doute quant au fait que c'est

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1 exactement ainsi que vous avez appris leur arrestation. Mais ne voyez-vous

2 pas la contradiction inhérente dans la phrase suivante? Vous dites -je

3 cite-: "Sur la base de la plainte déposée à leurs retours à Zagreb, vous

4 avez appris leurs arrestations". (Fin de citation.)

5 Et dans la phrase suivante, vous dites que vous avez découvert qu'ils

6 avaient été enlevés par la police spéciale de Serbie.

7 Réponse: La suite de l'information présentée ici n'est pas nécessairement

8 présentée de la façon la plus correcte qui soit.

9 Je vais m'arrêter pour donner un peu d'air aux interprètes.

10 M. Milosevic (interprétation): Vous n'avez pas besoin de donner de l'air

11 aux interprètes. Il y en a pas mal ici, ils sont très, très compétents. Et

12 vous pouvez d'ailleurs parler serbe parce qu'ils parlent sans doute, en

13 tout cas, l'anglais mieux que vous ne le parlez vous-même.

14 M. Lazarevic (interprétation): C'est bien pour ça que je ne travaille pas

15 ici!

16 Monsieur le Président, j'ai dit très clairement que dans toute cette

17 affaire, lorsque je l'ai apprise, eh bien, c'est à ce moment-là que j'ai

18 commencé à essayer de me renseigner, à enquêter sur les événements. Le

19 commandant de secteur m'a donné une photocopie des déclarations de ces

20 deux journalistes français, dans lesquelles on trouvait une description

21 très détaillée de leur uniforme, des emblèmes et des insignes que

22 portaient sur leurs épaulettes les personnes qui les avaient arrêtés.

23 Par conséquent, quand j'ai dit avoir découvert qui avait commis cet acte,

24 je l'ai dit en me fondant sur un certain nombre d'éléments et de preuves

25 qui m'ont été apportés. Il est possible, cela dit, que dans ma déclaration

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1 écrite les choses aient bougé un petit peu; et donc que nous ayons eu

2 cette première phrase suivie de cette autre, qui ne concordent pas

3 entièrement, une des phrases étant en bas d'une page et l'autre en haut.

4 Mais je peux répéter mot pour mot pour vous dire comment exactement les

5 choses se sont passées.

6 M. Milosevic (interprétation): Bon, écoutez. Ce n'est pas la première fois

7 qu'il y a une erreur ou quelque chose dont vous dites que ce qui est écrit

8 dans votre déclaration écrite n'est pas ce qui devrait être écrit. Vous

9 l'avez déjà dit à plusieurs reprises hier.

10 Passons maintenant, si vous le voulez bien, à la partie de votre

11 déposition qui a trait à ces conférences internationales dont vous avez

12 parlé.

13 Vous avez déclaré pouvoir présenter votre passeport diplomatique. Alors,

14 je vous demande d'avoir l'amabilité de bien vouloir présenter

15 effectivement votre passeport diplomatique.

16 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, en pièce à conviction

17 de l'accusation 347, intercalaire 7, plusieurs passeports de M. Lazarevic

18 ont été versés au dossier. Je demande que cette pièce conviction soit

19 soumise à M. Lazarevic de façon à ce qu'il puisse confirmer ou infirmer

20 qu'il s'agit bien de son passeport diplomatique.

21 M. le Président (interprétation): Mais l'accusé souhaitait sans doute voir

22 l'original. Ce sont des photocopies dont vous parlez, n'est-ce pas?

23 M. Groome (interprétation): Oui.

24 M. Milosevic (interprétation): Non, non, non. Je souhaite voir la

25 photocopie. Cela me suffira. Mais c'est le passeport diplomatique qui

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1 m'intéresse.

2 Où est cette photocopie? J'aimerais qu'on la mette sur le rétroprojecteur.

3 Je veux simplement la voir.

4 M. Groome (interprétation): C'est une pièce à conviction qui a sept pages.

5 J'aimerais donc qu'on remette l'intégralité de cette pièce à conviction au

6 témoin pour qu'il puisse feuilleter ce document et voir toutes les pages.

7 M. Milosevic (interprétation): Ecoutez, mais allez… Mettez-le sur le

8 rétroprojecteur.

9 M. le Président (interprétation): Donnez le temps au témoin de voir cette

10 pièce. Et ensuite, Monsieur Milosevic, vous pourrez lui poser la question

11 qui vous intéresse.

12 (Intervention de l'Huissier.)

13 M. Milosevic (interprétation): Oui, oui. J'ai bien ça sous les yeux. Je

14 l'ai moi aussi, mais ce n'est pas un passeport diplomatique. Donc, là

15 encore, Monsieur, vous ne dites pas la vérité. Où voit-on les mots

16 "Passeport diplomatique"?

17 M. le Président (interprétation): Laissez le temps au témoin de regarder

18 la pièce avant de poursuivre.

19 Bien. Monsieur Lazarevic, je vous demande de nous dire quelle est la

20 nature de ce document, je vous prie?

21 M. Lazarevic (interprétation): C'est tout à fait lisible et clair. Il est

22 écrit en français et en anglais qu'il s'agit d'un passeport de service; ce

23 qui montre que ce passeport est le résultat d'un privilège particulier en

24 matière de voyage.

25 (En anglais) Moi, j'ai utilisé le terme passeport diplomatique parce qu'en

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1 tant que voyageur, au verso de cette page, on trouvait un certain nombre

2 de règles, de dispositions qui constituaient pour moi, pour le voyageur,

3 un certain nombre de privilèges pas forcément égaux à ceux d'un

4 ambassadeur. Mais c'était, en tout cas, bien un passeport officiel, un

5 passeport de service de la République fédérale de Yougoslavie.

6 Et, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il est établi clairement

7 que mon lieu de naissance a été falsifié.

8 M. le Président (interprétation): Oui, oui, nous savons cela. Nous avons

9 entendu votre déposition à ce sujet sur ce point précédemment.

10 Monsieur Milosevic, quelle est votre question?

11 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, il n'y a aucun rapport entre

12 un passeport diplomatique et un passeport de service. Il a affirmé avoir

13 un passeport diplomatique.

14 M. le Président (interprétation): Cela ne sert à rien de m'interroger moi

15 ou de me soumettre ces choses à moi. C'est au témoin que vous devriez vous

16 adresser.

17 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Lazarevic, puisque vous avez lu ce

18 qui est écrit au recto de ce passeport, en français -et je le lis moi-même

19 en français- "Passeport de service", je vous demande si vous savez que,

20 sur un passeport diplomatique, ce qu'on lit, ce sont les mots français

21 "Passeport diplomatique"? Le savez-vous?

22 M. Lazarevic (interprétation): Sans doute, Monsieur Milosevic.

23 Question: Même ça, vous ne le savez pas?

24 Réponse: Je ne suis pas un spécialiste des passeports diplomatiques,

25 puisque je considère que le mien était un passeport diplomatique d'une

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1 certaine sorte.

2 Question: Le passeport diplomatique porte la mention "Passeport

3 diplomatique" et n'est pas délivré uniquement aux ambassadeurs, mais y

4 compris aux personnes ayant le rang le plus bas, le rang le moins élevé en

5 tant qu'employé d'une ambassade ou d'un consulat. Même celui qui appose

6 les tampons dans les passeports reçoit un tel passeport diplomatique,

7 alors que le passeport de service est délivré à des personnels

8 auxiliaires, à des gens qui doivent par exemple escorter une délégation,

9 accompagner une délégation.

10 Mais savez-vous que la grande différence entre les deux vient du fait

11 qu'un passeport diplomatique est délivré par le ministère des Affaires

12 étrangères, alors que le passeport de service est délivré par le ministère

13 de l'Intérieur comme tous les autres passeports? Le savez-vous?

14 Réponse: La seule chose que je sais, c'est que j'ai reçu ces trois

15 passeports qui m'ont été délivrés à Belgrade et qui me permettaient de

16 voyager et de franchir les frontières. Et qui m'ont d'ailleurs permis de

17 le faire même par la suite, même après tous les événements, sans aucun

18 obstacle, sans aucune entrave. Donc c'était une sorte de passeport

19 diplomatique.

20 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Lazarevic, ce que vous venez de

21 dire n'est pas non plus exact, parce que même un passeport diplomatique ne

22 peut pas vous garantir l'absence de fouille ou d'interrogatoire par des

23 douaniers ou des policiers d'un pays étranger en cas de doute. Donc, ce

24 que vous dites n'est pas exact non plus.

25 Mais est-il exact que ce passeport de service que l'on délivre à tout le

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1 personnel auxiliaire, sur ce passeport, on lit "Slobodan Lazarevic,

2 interprète"? Et vous avez reçu ce passeport de service parce que vous avez

3 accompagné une délégation qui participait à une conférence internationale,

4 pas en tant qu'interprète?

5 Donc vous vous êtes efforcé ici de prétendre posséder un passeport

6 diplomatique et avoir une fonction particulière que vous n'avez, en fait,

7 jamais eue. Vous avez essayé de vous valoriser.

8 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, c'est à nous qu'il

9 appartiendra de déterminer ce qui est écrit sur ce passeport. Ce passeport

10 de service n'est pas passeport diplomatique; si c'est ce que vous vouliez

11 dire, je crois que vous avez fait comprendre votre argument.

12 Maintenant, le temps de la pause est arrivé: une demi-heure. Et vous avez

13 encore 20 minutes à votre disposition.

14 M. Milosevic (interprétation): Monsieur, présenter les choses de façon

15 mensongère est toujours pertinent lorsqu'il s'agit d'un témoin qui fait

16 une déposition. Je ne sais pas pourquoi vous semblez indiquer le

17 contraire.

18 M. le Président (interprétation): Une demi-heure de pause.

19 Monsieur Lazarevic, dans une demi-heure retour dans le prétoire.

20 (L'audience, suspendue à 11 heures 04, est reprise à 11 heures 30.)

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, poursuivez.

22 M. Milosevic (interprétation): Je voudrais que vous m'indiquiez combien de

23 temps j'ai à ma disposition d'après vos calculs.

24 M. le Président (interprétation): Je pense que vous avez encore 20

25 minutes.

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1 M. Milosevic (interprétation): Cela ne me suffira pas!

2 M. le Président (interprétation): Vous savez, vous avez eu beaucoup de

3 temps pour procéder au contre-interrogatoire de ce témoin.

4 M. Milosevic (interprétation): Oui, mais dans l'interprétation la plus

5 stricte du temps imparti, étant donné que nous avons commencé à 10 heures

6 moins le quart et non pas 9 heures 30, cela devrait au moins signifier un

7 quart d'heure de plus. Donc ce n'est pas 1 heure 45 que j'ai eue.

8 M. le Président (interprétation): Nous allons voir, mais poursuivez

9 d'abord votre contre-interrogatoire.

10 M. Milosevic (interprétation): Bien.

11 Monsieur le Témoin, vous avez donné une description concernant les

12 rencontres internationales que vous avez eues, et vous avez parlé de la

13 façon dont ces consultations se sont déroulées, notamment avec les

14 représentants de la Yougoslavie ou de la Serbie.

15 Vous avez dit que vous arriviez, que vous descendiez dans un hôtel, et que

16 le segment militaire allait vers l'état-major et le segment civil allait

17 au gouvernement ou vers mon cabinet, vous ne savez pas trop où, mais vers

18 des autorités civiles. C'est à peu près la description que vous avez

19 donnée, n'est-ce pas?

20 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

21 Question: Donc vous, personnellement, n'avez pas été présent à l'occasion

22 de ces consultations, mais vous savez seulement que certains se rendaient

23 auprès d'autorités civiles et d'autres auprès d'autorités militaires pour

24 avoir des consultations avant les conférences internationales?

25 Réponse: Au retour, on nous disait qu'ils avaient été à tel endroit pour

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1 avoir débriefings.

2 Question: Mais vous n'avez pas participé vous-même à ces briefings. Vous

3 n'en savez que ce qu'ils vous ont dit, ces briefings n'ont pas eu lieu en

4 votre présence, n'est-ce pas?

5 Réponse: C'est cela.

6 Question: Bien. Une fois que les choses sont tirées au clair et s'agissant

7 de ces déclarations-là, je voudrais que vous vous penchiez sur ce qui est

8 dit en page 14, avant-dernier paragraphe. Et je vais vous donner lecture

9 de ce qui est dit pour ce qui concerne vos propres paroles:

10 "A l'occasion de ces briefings, moi-même je donnais lecture des points de

11 l'ordre du jour, un par un. Ensuite, le représentant du gouvernement

12 présent à Belgrade nous donnait des instructions. On nous disait s'il

13 convenait d'accepter tel point ou pas, si nous devions accepter telle

14 chose dans quelle mesure, jusqu'à quel point et ainsi de suite." (Fin de

15 citation.)

16 Donc par conséquent, ce qui est écrit ici se trouve en contradiction

17 directe avec ce que vous venez de nous dire tout à l'heure, Monsieur

18 Lazarevic. Est-ce que cela vous paraît comme étant chose évidente?

19 Réponse: Très évidente. Et j'ai une explication.

20 Question: Donnez-nous cette explication.

21 Réponse: J'ai demandé aux équipes qui étaient chargées d'enquêtes de

22 changer la chose. Je n'ai jamais fait cette déclaration.

23 Question: Là aussi, comme pour Topusko pour ce qui est du minage du

24 terrain, ils ont ajouté des trucs que vous n'avez pas dit, n'est-ce pas?

25 Réponse: Vous avez raison, Monsieur. Les hommes font des erreurs, c'est

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1 humain.

2 Question: Oui, c'est clair. Allons de l'avant. Allons donc de l'avant!

3 Vous avez décrit, dans le détail, la réunion du 16 juin à Genève, si j'ai

4 bien compris, n'est-ce pas, Monsieur Lazarevic?

5 Réponse: D'après mes souvenirs, oui.

6 Question: Et, à ce moment-là, vous avez dit que Goran Hadzic avait

7 téléphoné à Zoran Lilic, Président de la RFI, pour avoir des

8 consultations, et ce à partir d'un bureau qui était plein où vous étiez

9 tous, et quelqu'un de l'armée avait téléphoné à quelqu'un vers l'état-

10 major pour poser des questions. C'est ce que vous nous avez dit?

11 Réponse: Cela concerne la réunion de la Norvège.

12 Question: Ah bon! La Norvège seulement. Mais étant donné que la partie

13 adverse a également constaté que vous avez décrit dans le détail la

14 réunion de Genève?

15 Réponse: Eh bien, il s'était agi de la réunion de Genève. J'ai répondu à

16 des questions et il se peut que je me sois trompé, que M. Hadzic n'ait pas

17 été présent à la première réunion, mais il n'en demeure pas moins que des

18 PV existent concernant les personnes présentes et s'agissant de Goran

19 Hadzic, il y a des photographies de lui et de moi…

20 Question: De Genève?

21 Réponse: Non, de Norvège.

22 Question: Mais non, moi je ne vous parle pas de Norvège, je vous parle de

23 Genève. Il y avait eu quatre réunions. Qu'avez-vous dit concernant Genève?

24 Réponse: Cette réunion a eu lieu, elle a été très courte, deux ou trois

25 heures seulement.

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1 Question: Et vous avez dit que rien n'a été convenu?

2 Réponse: C'est exact.

3 Question: Bien. D'après ce que j'ai comme information ici, ce qui m'a été

4 communiqué comme information, le chef délégation à cette réunion à Genève

5 s'appelait Novakovic, n'est-ce pas?

6 Réponse: Délégation militaire?

7 Question: Quoi?

8 Réponse: Délégation militaire.

9 Question: Est-ce que vous affirmez que Hadzic était présent à cette

10 réunion?

11 Réponse: Je l'ai dit tout à fait clairement, je ne peux pas être

12 absolument sûr. Je suis en train de répondre à vos questions en fonction

13 de mes souvenirs et il y avait M. Kosta Novakovic. Le colonel Kosta

14 Novakovic était chef de la délégation militaire, c'était le segment

15 militaire.

16 Question: C'était une délégation mixte. D'abord, il y avait Srba Jarcevic

17 et Paspalj à cette réunion, et le chef de la délégation était Novakovic.

18 C'est exact ou pas?

19 Réponse: C'est possible.

20 Question: D'après ce que j'ai comme note ici, cette réunion s'est fait

21 sous les auspices du général Wahlgreen (phon.), qui avait été le

22 commandant à la Forpronu à l'époque, c'est bien exact?

23 Réponse: Pour autant que je m'en souvienne, oui.

24 Question: Serait-il exact de dire qu'ils avaient convenu d'établir une

25 ligne de démarcation?

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1 Réponse: Si mes souvenirs sont bons, il a également été question de cette

2 ligne de démarcation.

3 Question: Votre affirmation n'est pas exacte, celle qui dit que rien n'a

4 été arrêté.

5 Réponse: Je sais seulement qu'il y a eu une réunion par la suite parce que

6 rien n'a été réalisé sur le terrain, donc il n'y a pas eu d'accord.

7 Question: Mais d'après les notes dont je dispose ici, Monsieur Lazarevic,

8 il est précisé ici que vous n'avez pas assisté à cette réunion à Genève.

9 Réponse: Vous n'avez pas raison, Monsieur Milosevic, malheureusement.

10 Question: Je n'ai pas personnellement été là-bas, je ne peux pas le dire

11 moi-même, mais vous affirmez que vous étiez présent le 16 juin à Genève à

12 cette réunion, n'est-ce pas?

13 Réponse: C'est exact.

14 Question: Vous avez été présent à l'occasion de la deuxième de ces

15 réunions entre le 6 et le 8 juillet, n'est-ce pas?

16 Réponse: A Genève?

17 Question: Oui.

18 Réponse: Où? A Vienne.

19 Question: Donc vous y étiez?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Qui était présent à cette réunion?

22 Réponse: La délégation à chacune de ces réunions se faisait de plus en

23 plus grande, et je ne recevais pas la liste des personnes qui allaient

24 être présentes et, personnellement, ça ne m'intéressait pas non plus.

25 Question: D'après les notes dont je dispose, c'était la même délégation,

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1 mais il n'y avait qu'une délégation militaire et une composante militaire

2 et il n'y avait pas un civil.

3 Réponse: D'après mes souvenirs, les délégations étaient toujours composées

4 d'une parti politique, d'un segment politique et d'un segment militaire de

5 la délégation.

6 Question: Donc vous affirmez que les notes dont je dispose ne sont pas

7 exactes et qu'il s'était agi là aussi d'une délégation mixte, n'est-ce

8 pas?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Et quel avait été le sujet des entretiens?

11 Réponse: Pour des raisons inconnues, j'ai toujours à l'esprit ces

12 malheureuses turbines vers Knin qui avaient été envoyées pour réparation

13 ou entretien à Zagreb.

14 Question: Moi, j'ai ici un sujet qui a trait aux cessez-le-feu et à la

15 ligne de démarcation.

16 Réponse: Cela ne fait que confirmer qu'à la première réunion rien n'a été

17 convenu.

18 Question: Oui mais cela a été une question qui a été tout le temps

19 présente en fonction de l'endroit où l'on discutait.

20 Dites-moi, s'il vous plaît, si à cette réunion il y avait eu la présence

21 de M. Hadzic?

22 Réponse: Je pense que non, il n'avait pas été présent à la première

23 réunion non plus, du moins c'est très probable.

24 Monsieur Milosevic, nous sommes en train de parler d'une période d'il y a

25 10 ou 11 ans. Je n'ai pas pris des notes à ce sujet, j'essaie de m'en

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1 rappeler. Le fait est que j'ai assisté à ces réunions-là et, d'après mes

2 souvenirs, c'est tout ce que je puis vous dire en guise de témoignage.

3 Question: Bien. Je souhaite seulement qu'il soit constaté que ce que vous

4 avez déclaré ne concorde pas avec les faits dont je dispose. De là à

5 savoir maintenant s'il en a été ainsi ou pas, on verra.

6 A laquelle de ces réunions, il y avait eu M. Galbraith? Parce que je n'ai

7 nulle part une note m'indiquant sa présence.

8 Réponse: En Norvège.

9 Question: Je crois que vous en avez parlé à l'époque, à mon avis, de façon

10 assez erronée. Du moins d'après la lecture du compte-rendu d'audience, je

11 crois qu'il y a une mauvaise interprétation. Et je voudrais que vous vous

12 rappeliez de cet événement ou plutôt de la partie du témoignage où vous

13 avez parlé de Goran Hadzic.

14 Et comme vous avez, à un moment, expliqué que lorsque Galbraith s'était

15 adressé à lui en disant "Monsieur le Président", il avait rétorqué qu'il

16 avait été chargé du "dispatching". Je crois que c'est une chose que vous

17 avez dit ici viva voce, plus ou moins. Je n'ai pas le compte-rendu

18 d'audience, mais c'est ce que vous avez décrit.

19 Réponse: C'est parce que c'était une déclaration importante et c'est pour

20 cela que je m'en suis souvenu.

21 Question: Mais toutefois, comme vous le savez, il n'avait pas été chargé

22 de "dispatching" ou de quoi que ce soit. Et avant la guerre, il avait été

23 manutentionnaire chargé de la gestion d'un entrepôt, c'est ce qu'il avait

24 fait comme métier avant. Vous le savez?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Donc, il n'avait pas été chargé du "dispatching"; il n'a pas dit

2 cela dans une signification qui voudrait dire qu'il était là pour

3 transmettre des dépositions d'autrui, il avait parlé de son métier.

4 Réponse: Cela n'a pas été compris comme tel, parce qu'on s'était adressé à

5 lui en disant "Monsieur le Président" et il a répondu par ces termes.

6 Question: C'est Galbraith qui l'a dit?

7 Réponse: Je ne sais plus si c'était lui, l'ambassadeur canadien ou un

8 autre ambassadeur américain.

9 M. Milosevic (interprétation): Bien. Mais cette réunion a eu lieu alors

10 que Goran Hadzic était Président de la RSK. Hadzic avait été employé dans

11 un entrepôt avant la guerre. C'est ce qui figure dans la version serbe à

12 la page 14.

13 M. Tapuskovic (interprétation): Il s'agit de la page 15 en version

14 anglaise, paragraphe 2.

15 M. Milosevic (interprétation): Bien. Je donne lecture de ce que vous avez

16 dit: "Hadzic avait été manutentionnaire avant la guerre, et c'était

17 quelqu'un de primitif, un vrai plouc. Il s'intéressait plutôt à courir

18 après les femmes, à se saouler, et à faire des choses de ce genre plutôt

19 que de diriger un gouvernement. Il était conscient du fait d'être à des

20 fonctions trop élevées pour ses capacités. Puis, à une occasion, lorsque

21 je me suis adressé à lui disant "Monsieur le Président", il m'a répondu:

22 "Je ne suis pas Président, je suis magasinier." (Fin de citation.)

23 Vous affirmez autre chose ici: ce n'est ni l'ambassadeur canadien, ni je

24 ne sais quel autre ambassadeur de ceux que vous avez mentionnés -et

25 Galbraith n'avait pas d'ailleurs été présent du tout à cette réunion-,

Page 12642

1 mais c'est vous, c'est vous qui dites que vous vous étiez adressé à lui

2 par ces termes et qu'il vous avait rétorqué qu'il était magasinier, chose

3 qu'il avait été en effet avant la guerre, c'était son métier. C'est bien

4 cela, Monsieur Lazarevic?

5 M. Lazarevic (interprétation): J'ai dit ici, à la lettre, une fois; cette

6 fois-là, c'était en Norvège.

7 Question: Bien, mais "cette fois-là, je m'étais adressé à lui": donc

8 c'était vous qui vous étiez adressé à lui en vous servant des termes

9 "Monsieur le Président" et il vous a répondu à vous: "Je ne suis pas

10 Président, je suis magasinier". Pourquoi affirmez-vous alors que c'était

11 là un contact formel entre lui et l'un quelconque des ambassadeurs, alors

12 que cela avait été un entretien entre vous, membres de la délégation où

13 vous avez été interprète?

14 Réponse: Monsieur Milosevic, je crois que j'ai fait cette déclaration de

15 façon très claire et j'ai répété la chose de façon très nette. C'était en

16 Norvège; M. Hadzic était en train de ranger ses cartes, de faire un jeu de

17 patience.

18 M. Milosevic (interprétation): Mais je ne vous parle pas de ces questions!

19 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président?

20 M. le Président (interprétation): Oui.

21 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, je pense que M.

22 Milosevic interrompt le témoin et ne lui laisse pas le temps de terminer

23 ses réponses.

24 M. le Président (interprétation): Oui, laissez le témoin terminer ses

25 réponses.

Page 12643

1 Avez-vous quelque chose à ajouter, Monsieur le Témoin?

2 M. Lazarevic (interprétation): Cela s'est bien passé en Norvège. Jamais je

3 n'ai rencontré M. Hadzic en tête-à-tête, de façon officieuse, pour

4 discuter de quoi que ce soit avec lui.

5 M. le Président (interprétation): Poursuivez, Monsieur Milosevic.

6 M. Milosevic (interprétation): Monsieur Lazarevic, je n'ai pas affirmé

7 pour ma part que vous l'avez rencontré à des occasions officieuses

8 quelconques. Je suis en train de vous donner lecture de votre propre

9 déposition où, à la lettre, il est dit que, lorsque vous vous étiez

10 adressé ainsi à lui, il vous a rétorqué qu'il était magasinier, chose

11 qu'il était.

12 M. le Président (interprétation): Il a déjà parlé de cela.

13 M. Milosevic (interprétation): Donc ce que vous avez dit concernant la

14 façon dont Galbraith se serait adressé à lui ou à un ambassadeur canadien,

15 et ce qu'il aurait répondu à cette occasion-là, c'était là aussi une

16 contre-vérité?

17 Réponse: Non, Monsieur Milosevic, c'est une vérité des plus complètes.

18 Question: Mais pourquoi, s'il en est ainsi, pourquoi avez-vous rédigé une

19 telle chose alors que ce que vous avez raconté ici est en contradiction?

20 Réponse: Je ne vois aucune contradiction. J'ai dit une fois, et ça n'a

21 aucune corrélation avec quelque autre occasion que ce soit, j'ai dit une

22 fois, à une occasion: pour la Norvège.

23 Question: Oui, mais vous avez dit qu'il s'était entretenu avec un

24 ambassadeur d'un pays étranger ou alors il s'était entretenu avec vous en

25 votre qualité d'interprète?

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1 Réponse: Mais, en principe, il ne s'entretenait pas avec moi.

2 Question: Donc il ne s'adressait…

3 Réponse: Non, les ambassadeurs s'adressaient à lui par mon intermédiaire

4 et M. Hadzic leur répondait à eux par mon intermédiaire.

5 M. Milosevic (interprétation): Mais non! Ici, dans le texte, on dit ici

6 que c'était vous qui vous étiez adressé à lui par…

7 M. le Président (interprétation): Ecoutez, on est en train de perdre du

8 temps. Or ce procès va durer longtemps et durera encore plus longtemps si

9 vous revenez sans arrêt sur ce type de choses.

10 M. Milosevic (interprétation): Ensuite, vous avez mentionné le fait qu'il

11 y avait en Norvège -et j'ai là une liste-: Hadzic, Jarcevic, Kovacevic,

12 Vujinovic, Ergic; c'était une délégation militaire et civile. Et de

13 Croatie: Sarinic, Ucekovic, Stipetic. Et les intermédiaires: Vollebaek,

14 qui remplaçait Stoltenberg, puis Ahrens qui remplaçait Owens et Jeannie

15 Peterson.

16 C'est ce qui est dit ici. Il n'y a aucun Savo Milosevic, que vous avez

17 intégré à la liste.

18 Est-ce que vous pourriez nous expliquer qui est ce Savo Milosevic. Je

19 connais un Savo Milosevic, qui est un joueur de foot de la sélection

20 nationale; il marque beaucoup de buts. Mais je ne pense pas que c'est à ce

21 Savo qui est marqueur de buts que vous vous étiez référé. Donc dites-nous

22 un peu qui est ce Savo Milosevic, parce que qu'il ne figure pas dans les

23 informations dont je dispose. Dites-nous de qui il s'agit.

24 Réponse: Vous avez beaucoup de sens de l'humour. Je crois avoir dit qu'il

25 s'agissait d'un Savo ou d'un Miso. Mais le fait est que ce Milosevic-là

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1 avait été présenté comme étant l'hôte de nos deux réunions à Genève. Et

2 permettez aussi la possibilité qu'à la réunion en Norvège, il y ait eu un

3 groupe d'observateurs qui n'avaient pas eu des fonctions officielles, mais

4 qui étaient là, observateurs, à la réunion.

5 Question: Mais vous avez accordé à cette présence une importance qui

6 n'était pas celle d'un observateur ou d'un hôte de la réunion, mais vous

7 avez parlé d'autre chose. Et ils avaient parlé -dites-vous- de moi-même et

8 vous avez dit que ce Savo Milosevic avait parlé de moi en disant "Slobo".

9 C'est ce que vous disiez?

10 Réponse: C'est ce que j'ai dit et je maintiens ce que j'ai dit.

11 Question: Donc rien que lui? De tous les membres de la délégation et

12 quelques millions de Serbes qui parlent de moi en disant "Slobo", chose

13 que vous ne devez pas ignorer, j'espère.

14 Réponse: Mais vous savez, Monsieur, c'était dans un contexte souvent

15 négatif qu'on mentionnait ce surnom.

16 M. Milosevic (interprétation): Vous le pensez peut-être, mais je ne pense

17 pas qu'ils le pensaient, eux. Et savez-vous que personne de mon entourage

18 ne m'appelait "chef" ou "patron". Et encore moins quelqu'un de la

19 Republika Srpska ou de la Krajina serbe.

20 M. le Président (interprétation): Que le témoin réponde à cela: donnez-lui

21 le temps de le faire.

22 M. Lazarevic (interprétation): La plupart des personnes dans la Krajina

23 serbe qui intervenaient dans mon entourage, vous désignaient en disant

24 "chef ". C'était votre surnom officiel.

25 M. Milosevic (interprétation): Bien, bien. Monsieur Lazarevic, vous savez

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1 ces choses-là de façon meilleure que moi-même; cela est évident. Je ne

2 pense pas qu'il soit nécessaire d'en débattre davantage.

3 Mais comme vous avez affirmé qu'ils avaient obtenu des instructions pour

4 ne rien accepter… C'est bien ce que vous avez dit?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Mais pourquoi passaient-ils des coups de fil ou passaient-ils

7 soi-disant des coups de fil, comme vous l'avez dit, pour consulter un tel

8 ou un tel autre si, d'avance, ils avaient pour instruction de ne rien

9 accepter, pourquoi feraient-ils alors ces appels téléphoniques si leur

10 rôle était tout simplement de faire obstruction?

11 Réponse: La réponse est tout à fait simple, Monsieur Milosevic. C'est

12 quand ils étaient dans des situations où il n'y avait pas de réponse à des

13 questions concrètes et où ils ne savaient pas que faire, c'est la raison

14 pour laquelle ils appelaient votre cabinet, vous-même, vos conseillers

15 Lilic, Stanisic.

16 Question: Dites-moi, qui appelaient-ils au niveau de mon cabinet? L'avez-

17 vous appris?

18 Réponse: Non, je ne le sais pas. L'un quelconque de vos conseillers, vous

19 en aviez des tas et des tas.

20 Question: Vous dites qu'il y avait une multitude de conseillers dans mon

21 cabinet?

22 Réponse: Oui, Monsieur Milosevic.

23 Question: Bien, bien. Non, c'est vraiment très intéressant.

24 Ceux d'en face affirment que j'ai travaillé dans un bureau vide et que je

25 n'avais pas de collaborateurs. Vous, vous affirmez que j'en avais une

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1 multitude. Très bien.

2 Réponse: Les collaborateurs n'étaient pas forcément en train de partager

3 votre bureau.

4 Question: Très bien. Mais lorsqu'on appelait mon cabinet, il y avait là

5 moult collaborateurs qui étaient installés à donner des instructions. Mais

6 ne nous n'attardons pas là-dessus.

7 Comme vous nous avez dit que Belgrade avait insisté sur la nécessité

8 d'obtenir un ordre du jour à l'avance, ne vous semble-t-il pas logique

9 que, lorsque l'on fait une réunion internationale, il soit fourni un ordre

10 du jour? On n'invite pas les gens en disant: "Venez, et puis on verra de

11 quoi on discutera", mais on envoie un ordre du jour. D'habitude, cet ordre

12 du jour est demandé à votre avis, oui ou non?

13 Réponse: Oui, il est logique de demander un ordre du jour d'avance, mais

14 il n'est pas logique qu'un deuxième ou troisième Etat en conflit, qui n'a

15 soi-disant rien à voir avec un conflit, demande l'ordre du jour.

16 Question: Comment savez-vous que quiconque de Belgrade a jamais demandé un

17 ordre du jour?

18 Réponse: Mais j'étais présent lorsqu'il avait été question de cela,

19 Monsieur Milosevic.

20 Question: Qui s'était entretenu de la chose?

21 M. Lazarevic (interprétation): La plupart des hommes politiques et la

22 plupart des militaires, et c'était le chef qui devait décider de ce qu'il

23 convenait de faire.

24 M. Milosevic (interprétation): Je crois que vous avez inventé cela,

25 Monsieur Lazarevic, tout simplement, parce qu'il apparaît avec évidence

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1 que la chose est inexacte. Vous n'avez pas pu entendre cela de la bouche

2 de personne.

3 M. le Président (interprétation): C'est ce que le témoin affirme. Il dit

4 que cela s'est passé. Inutile de revenir là-dessus. Vous avez demandé cinq

5 minutes de plus vous les avez.

6 M. Milosevic (interprétation): Je pense, au demeurant, que cela reste trop

7 peu de temps. Passons rapidement par-dessus cela.

8 En 1995 vous êtes arrivé à Belgrade, n'est-ce pas?

9 M. Lazarevic (interprétation): Exact.

10 Question: Vous avez commencé à travailler pour une société LCI dont le

11 siège était à Londres et dont le propriétaire était … (note de

12 l'interprète: inaudible).

13 Réponse: Je crois que c'était novembre, décembre 1995.

14 Question: N'est-il pas exact de dire que le directeur principal était

15 Aleksandar Margetic à Belgrade?

16 Réponse: Non, ce n'est pas exact.

17 Question: Serait-il exact de dire que cette société a déposé une plainte à

18 la police de Belgrade, une plainte pénale, suite à quoi un avis de

19 recherche a été lancé vous concernant?

20 Réponse: C'est tout à fait faux.

21 Question: Serait-il exact de dire que vous avez travaillé dans une société

22 appelée "Five Stars" à Belgrade dans une rue Ustanicka avec une Ivanka

23 Golusin qui avait été gardée à vue pour escroquerie lorsque vous avez

24 vendu des contrats de time-sharing en Serbie et en Vojvodine?

25 Réponse: Non. Du time-sharing en Vojvodine?

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1 Question: Vous avez vendu des contrats de ce type en Vojvodine et en

2 Serbie ou plutôt en Serbie et, notamment, en Vojvodine, ce n'est pas

3 exact?

4 Réponse: Ce n'est pas exact, Monsieur Milosevic.

5 Question: Bien, mais après cette société n'avez-vous pas enregistré une

6 société appelée "Melbourne" dont le siège se trouve à Belgrade?

7 Réponse: Ce n'est pas exact.

8 Question: Et il n'est pas exact que ces appartements inexistants à Malte

9 en Espagne vous ont permis d'escroquer 13.000 marks de M. Jokic et de M.

10 Antonijevic et 60.000 marks d'un certain Antonijevic, c'est exact ou pas?

11 Réponse: Ce n'est pas exact, Monsieur Milosevic. Vous êtes en train de

12 raconter des sornettes!

13 Monsieur le Président, si quelqu'un a entendu parler de ce time-sharing,

14 comment se pourrait-il qu'une seule personne consacre 65.000 dollars

15 apparemment pour une seule semaine d'utilisation d'un appartement de ce

16 genre, s'il y avait ce partage de temps pour les appartements!

17 Question: N'allons pas plus loin! Je vous ai demandé si c'était exact,

18 vous avez dit que ce n'était pas exact. Allons de l'avant. Moi, cela ne me

19 gêne pas que vous disiez que ce ne soit pas vrai, mais n'est-il pas exact

20 qu'il y ait eu un avis de recherche émis par le SUP de Belgrade pour délit

21 pénal d'escroquerie? Il n'y a que cela ou est-ce qu'il y avait encore

22 autre chose?

23 Réponse: Non, ce n'est pas exact. Permettez-moi de répondre.

24 Vous avez dit qu'un avis de recherche a été lancé en novembre 1995 après

25 moi. Je vivais à Belgrade en 1999, j'ai été déclaré à la même adresse et

Page 12650

1 donc personne du SUP n'aurait pu me trouver s'il y avait eu des avis de

2 recherche et non pas un avis, deux, trois avis de recherche et j'allais au

3 travail tous les jours, allons!

4 Question: Monsieur Lazarevic, vous avez dit et nous avons constaté tout à

5 l'heure que, partant du terrain de foot à Tobusko jusqu'aux choses que

6 vous ne savez pas comme cette question retrouvée dans votre déposition de

7 la façon dont elle s'est retrouvée, vous ne saviez pas comment ces

8 éléments-là s'étaient retrouvés dans votre déposition…

9 Réponse: Répétez, je vous prie.

10 Question: Au sujet de quelques exemples que je vous ai cités au niveau de

11 votre déposition, vous avez dit que vous ne saviez pas comment ces choses-

12 là ont fini dans votre déposition, partant du terrain de foot à Topusko

13 avec le terrain de mine. Puis, tout à l'heure, vous avez dit que vous

14 n'aviez pas déclaré cela, et cela s'est retrouvé dans votre déposition.

15 Réponse: Oui, il y a plusieurs choses qui sont apparues comme étant des

16 erreurs. Et l'une de ces choses-là est, de façon évidente, une erreur de

17 frappe, une coquille où on a dit que M. Karan avait été colonel de la

18 sécurité d'Etat au lieu de la KOS, oui, là c'était une erreur, les erreurs

19 arrivent.

20 Question: Oui, mais vous avez parlé aussi du minage du terrain de foot à

21 Topusko.

22 Réponse: C'est exact, je n'ai jamais déclaré cela.

23 Question: Mais comment cela a fait son apparition dans la déposition?

24 Réponse: Je n'en sais rien.

25 Question: Et qu'est-ce que cet arrangement actuel signifie, cet

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1 arrangement que vous avez actuellement?

2 Réponse: Quel arrangement?

3 Question: Avec la partie adverse, ceux d'en face!

4 Réponse: Je n'ai aucun arrangement avec eux.

5 Question: Monsieur Lazarevic, il y a une chose que je n'arrive pas à

6 m'expliquer. Expliquez-nous, je vous prie: puisque vous êtes en train

7 d'affirmer -c'est là la thèse que vous présentez vous-même- que les Serbes

8 tuaient des Serbes au sein du 21e Corps pour accentuer les tensions et

9 susciter un conflit, c'est exact?

10 Réponse: Oui, c'est exact et j'ai donné l'exemple d'une situation.

11 M. Milosevic (interprétation): Bien. Mais comme je ne crois pas qu'un

12 Serbe ait pu rédiger chose pareille, je voudrais vous demander si vous

13 savez qu'une partie étant la partie tuant les siens c'était une

14 caractéristique de la guerre en Bosnie, caractéristique à laquelle a eu

15 recours notamment la partie bosnienne? Le savez-vous, Monsieur Lazarevic?

16 M. Lazarevic (interprétation): Non.

17 M. le Président (interprétation): C'est une question sans aucun intérêt,

18 sans pertinence.

19 M. Milosevic (interprétation): C'est pertinent, Monsieur May, parce que

20 j'estime que c'est une preuve. Cette pratique de tuer les siens avait été

21 une caractéristique de la partie musulmane en Bosnie-Herzégovine; et des

22 accusations analogues erronées et fausses disant que cela avait été le cas

23 chez le Serbe montrent bien que ce sont là des assertions, des allégations

24 qui proviennent de la même cuisine ou plutôt de la même source, à savoir

25 de la cuisine de ceux qui ont travaillé au démantèlement de la

Page 12652

1 Yougoslavie.

2 M. le Président (interprétation): Et d'après vous, Monsieur Milosevic, qui

3 a trempé dans ce complot, dans cette cuisine interne? D'après vous, qui

4 était le responsable? Si vous nous le dites, nous pourrons soumettre la

5 question au témoin.

6 M. Milosevic (interprétation): Eh bien dans cette cuisine, entre autres, a

7 pris part la partie adverse, ceux qui se trouvent en face de moi qui

8 affirment et qui formulent des allégations mensongères à mon égard, mais,

9 pour être tout à fait concret, je dirai que vous avez eu des entretiens

10 avec Kerim Krstic, Clint Williams?

11 M. le Président (interprétation): Le temps que vous avez s'est écoulé,

12 s'est épuisé. Cependant, nous permettrons que vous posiez cette dernière

13 question en ce qui concerne M. Kerim Krstic.

14 Monsieur le Témoin, dites-nous, ce que l'on suggère ici, c'est que vous

15 avez parlé de Serbes qui auraient tué des Serbes et, si vous avez dit

16 cela, c'est parce qu'il y aurait un complot tramé, veillant à formuler ce

17 genre d'allégations et dans lequel est impliquée l'accusation. Est-ce

18 exact ou pas?

19 M. Lazarevic (interprétation): C'est adressé à moi?

20 M. le Président (interprétation): Oui, veuillez répondre.

21 M. Lazarevic (interprétation): L'accusation n'a absolument rien à voir

22 avec quelque complot tramé contre M. Milosevic que ce soit. Moi, en tant

23 que témoin, j'essaie simplement d'apporter mon écot à la manifestation de

24 la vérité.

25 M. le Président (interprétation): Oui, vous pouvez encore poser encore une

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1 question, Monsieur Milosevic.

2 M. Milosevic (interprétation): Bien. Si ce n'est qu'une seule question,

3 j'aimerais, Monsieur Lazarevic, que vous disiez pour qui vous travaillez

4 aujourd'hui? Ou, pour être plus précis, depuis combien de temps

5 travaillez-vous pour les services britanniques?

6 M. Lazarevic (interprétation): Je ne peux pas m'empêcher de rire, Monsieur

7 Milosevic! Allons! Voilà une question des plus inhabituelles. Bien sûr que

8 je ne travaille pas pour les services d'espionnage britanniques!

9 M. le Président (interprétation): Les amis de la Chambre ont-ils des

10 questions à poser?

11 (Questions de l'amicus curiae, M. Tapuskovic, au témoin, M. Slobodan

12 Lazarevic.)

13 M. Tapuskovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je vous

14 demanderais un peu de temps. Je m'efforcerai pour ma part d'être dans les

15 limites du temps qui m'avait été attribué jusqu'à ce jour.

16 Cela dit, je voudrais demander à M. Lazarevic s'il serait en mesure de

17 répondre en BCS, en serbo-croate ou bosnien, afin que je puisse maîtriser

18 ce qu'il répond de meilleure façon afin de ne pas perdre de temps.

19 Monsieur Lazarevic, en ma qualité d'amicus, je n'ai aucun droit de

20 conduire des enquêtes pour ma part; et toutes les questions que je

21 voudrais vous poser auraient plutôt trait à des questions qui ont été

22 posées à l'occasion de l'interrogatoire principal et pour ce qui est de ce

23 qui figure déjà dans votre déposition. Ce n'est que de cela que je puis

24 parler.

25 Je voudrais que vous m'expliquiez l'organigramme qui a été établi par vos

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1 soins. Cet organigramme a-t-il été établi lorsque vous avez fait votre

2 déposition en janvier et juillet 1999, ou lorsque vous avez eu vos

3 entretiens?

4 M. Lazarevic (interprétation): Oui, une partie de cela a été fait en

5 janvier, février 1999.

6 Question: L'organigramme?

7 Réponse: Oui, je vous parle de l'organigramme. Une partie a été faite à

8 cette époque, et une partie il y a sept, huit jours, ici.

9 Question: Le jeu d'éléments de preuve que nous avons obtenu ces jours-ci,

10 ici, nous ont permis de voir des documents concernant 1993, 1994 et 1995.

11 Je voudrais savoir si vous avez des documents en corrélation avec

12 l'organigramme entre le 1er août 1991 jusqu'au mois de juin 1992?

13 Réponse: Mais personne ne m'a demandé de l'établir.

14 Question: Merci. Avez-vous disposé de quelque élément de preuve que ce

15 soit, et notamment élément de preuve écrit, à partir duquel il aurait pu

16 être constaté qu'il y avait eu un plan de purification ethnique et de

17 perpétration de crime dans cette période, entre août 1991 et juin 1992?

18 Réponse: Non.

19 Question: Vous nous avez dit que vous avez travaillé pour le KOS de la JNA

20 entre 1968 et 1998, n'est-ce pas?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Je demanderais aux Juges de la Chambre et je vous demanderai de

23 vous référer à la page 29 en version serbe. Et en anglais, c'est la page

24 32, paragraphe 3.

25 Ma question serait la suivante: dans cette période, cet intervalle qui a

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1 duré 30 ans ou, pour être plus précis, deux ou trois ans de moins, lorsque

2 vous étiez rémunéré pour vos activités, est-ce que vous rencontriez des

3 gens du KOS?

4 Réponse: A l'extérieur du pays, non.

5 Question: Mais à l'intérieur?

6 Réponse: Non.

7 Question: Avez-vous rencontré l'une quelconque de ces personnes?

8 Réponse: Le colonel Zimonja.

9 Question: Vous dites ici, et je voudrais que vous nous expliquiez, qu'en

10 1995, vous êtes allé pour la première fois chez Zimonja, dans son bureau?

11 Réponse: Oui, à Belgrade.

12 Question: Et, dans la dernière phrase de ce paragraphe, vous dites: "Si

13 quelque chose lui était arrivé, s'il venait à disparaître, je ne savais

14 personne d'autre, au niveau du KOS, avec qui je pourrais entrer en

15 contact".

16 Est-ce que cela signifie que, pendant ces 30 ans ou presque 30 ans, vous

17 n'avez eu qu'une personne, qu'un homme de contact?

18 Réponse: Il n'y avait que M. Zimonja ou une personne recommandée par ses

19 soins.

20 Question: Vous venez de dire que si Zimonja venait à disparaître, vous ne

21 saviez qui contacter au niveau du KOS?

22 Réponse: Oui. Je n'ai pas dit que personne n'aurait su que j'avais

23 travaillé pour le KOS; dans ce cas, je n'aurais pas su moi-même qui

24 contacter au niveau du KOS.

25 Question: Fort bien. Dans cette version anglaise, page 32, paragraphe 2

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1 -c'est juste le paragraphe avant celui dont nous venons de parler-, vous

2 avez dit que vous avez travaillé pour Zimonja jusqu'en 1998, n'est-ce pas?

3 Réponse: Non.

4 Question: Bien. Non? Merci. Et vous avez dit que "jusqu'en 1998, moment où

5 j'ai enfin obtenu des papiers d'identité"… et cela a eu lieu en 1998,

6 n'est-ce pas?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Entre parenthèses, ici, on dit "après avoir reçu ces documents,

9 je suis allé pour la première fois à l'ambassade des Etats-Unis

10 d'Amérique". Pourquoi?

11 Réponse: Parce que j'avais souhaité quitter le pays.

12 Question: Pour la première fois. Est-ce que vous y êtes allé encore une

13 autre fois?

14 Réponse: Non.

15 Question: Bien. Vous avez soumis au Bureau du Procureur un nombre

16 considérable de photographies. Comme cela est précisé dans votre

17 déposition, et cela se termine ainsi, vous auriez remis quelques 90

18 photographies, n'est-ce pas?

19 Réponse: Très probable. Je ne sais pas combien j'en ai remis au juste.

20 Question: Je voudrais que l'on se penche sur la photographie 98 et je

21 voudrais que les Juges se penchent sur la partie finale de la déposition,

22 notamment sur le point 18.

23 On dit ici: "Un capitaine français, qui parlait couramment le serbe -ses

24 parents ayant été serbes, mais lui était né en France-, il a servi

25 d'officier de liaison au niveau du Bataillon français dans la poche de

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1 Bihac. Et sur cette photo-ci, je porte un uniforme britannique."

2 Pouvez-vous nous expliquer ici comment se fait-il que vous ayez porté un

3 uniforme d'officier britannique?

4 Réponse: J'avais collectionné les uniformes et j'avais beaucoup

5 d'uniformes dans mon appartement.

6 Question: Et à cette occasion-là, vous avez porté un uniforme?

7 Réponse: Ce n'était pas une réunion officielle. J'étais dans mon

8 appartement et c'est là que j'avais mis cet uniforme.

9 M. Tapuskovic (interprétation): Merci. Je voudrais que l'on se penche sur

10 cette photo tout à l'heure.

11 Au point 52, vous dites: "L'homme à droite est Goran Gvozdenovic. Il avait

12 pour charge 22 policiers militaires."

13 Pardon! Pardon, je me suis trompé. J'ai sauté quelque chose. Je voulais

14 dire: point 40. Excusez-moi. Je m'excuse auprès des Juges.

15 "… le Bataillon polonais et quelques Français, Danois et Canadiens.

16 Pendant cette cérémonie de remise de décoration, je porte un uniforme

17 britannique". Comment expliquez-vous cela?

18 M. Lazarevic (interprétation): C'était un banquet, j'avais -je crois-

19 porté cet uniforme-là.

20 M. Kwon (interprétation): Un instant. Les interprètes n'ont pas saisi

21 votre réponse, Monsieur le Témoin. Veuillez la répéter.

22 M. Lazarevic (interprétation): C'était un banquet informel à Slunj, s'il

23 s'agit bien de cette photographie. Et j'ai effectivement porté un uniforme

24 britannique, mais les insignes étaient des insignes de l'armée yougoslave.

25 M. Tapuskovic (interprétation): La chose peut être vérifiée. Merci.

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1 Je reviens maintenant à ce que vous avez dit hier s'agissant de Bent

2 Jenssen. Je me réfère notamment à la page 25 de la version BCS. Et en

3 version anglaise, il s'agit de la page 27, paragraphe 4.

4 Vous avez dit ici d'abord que Bent Jenssen vous a remis les plans croates

5 pour ce qui est de l'attaque le jour ou la nuit d'avant, n'est-ce pas?

6 Réponse: Oui.

7 Question: A qui avez-vous transmis ces plans?

8 Réponse: Au QG du 21e Corps, au colonel Bosanac.

9 Question: Bien. Merci. Vous nous avez dit hier -et cela ne figure nulle

10 part dans votre déposition préalable- le fait que vous avez été présent

11 aux entretiens ou aux tentatives de s'entretenir avec les cabinets du

12 Président Milosevic, de M. Stanisic et de M. Perisic, n'est-ce pas?

13 Réponse: Répétez votre question.

14 Question: Vous avez dit, à plusieurs reprises ici, que vous avez été

15 présent lorsque l'on avait appelé les cabinets de MM. Milosevic, Perisic

16 et Stanisic?

17 Réponse: Exact.

18 Question: Vous ne l'avez mentionné nulle part dans votre déposition de

19 1999? Comment expliquez-vous la chose?

20 Réponse: Je crois que, dans ma déposition en 1999, il a été dit dans le

21 détail tout ce qui s'est passé le jour du retrait de ce corps d'armée de

22 la Krajina. Et j'ai clairement indiqué avec qui ces hommes avaient parlé

23 et de quoi ils s'étaient entretenus.

24 Question: Dans le paragraphe après Bent Jenssen, vous avez dit ce qui

25 suit.

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1 Vous avez obtenu, le jour d'avant, les documents en question. Puis, on

2 dit: "Tout de suite après l'attaque du début, un commandant de l'armée

3 croate, Tihomir Tica, surnommé "Brckan" nous a appelés". Vous dites ce qui

4 s'est passé.

5 Puis vous dites: "Brckan m'a dit d'aller jusqu'à Trnje avec mon épouse

6 pour nous assurer un passage. Il m'a dit d'expliquer à Bulat que le mieux

7 serait de se rendre. Je lui ai expliqué que je ne pouvais pas passer du

8 côté croate parce que mon peuple me tuerait et me considérerait comme

9 étant un traître. "Brckan" m'a dit qu'il allait m'envoyer un autre

10 officier de liaison en provenance de Sisak et lui dirait pour moi et pour

11 mon épouse afin qu'il ne nous arrive rien".

12 Comment avez-vous eu cet entretien le lendemain après l'attaque?

13 Réponse: Cela ne s'est pas passé le lendemain, mais tout de suite après

14 l'attaque. Monsieur "Brckan" m'avait téléphoné au QG des Nations Unies.

15 Monsieur "Brckan" avait été officier de liaison de la zone croate de

16 Karlovac et de l'armée croate, et nous avons eu des contacts très

17 fréquents.

18 Question: Bien. Merci. Qui a déterminé la direction qu'allait prendre le

19 convoi des réfugiés comptant 24.000 personnes, dont vous avez parlé hier?

20 Réponse: C'était un accord conjoint; je parle du secteur nord et de

21 l'encerclement. Il y avait donc les Croates, l'ECMM, les Nations Unies

22 secteur Nord, les organisations internationales. Tout le monde était

23 impliqué.

24 Question: Il n'y avait pas eu de communication entre vous et votre épouse

25 et la partie croate, à cet effet?

Page 12660

1 Réponse: Absolument pas.

2 Question: Page 27 en BCS. Version anglaise, troisième paragraphe de la

3 page 30.

4 Je cite: "Mon épouse a proposé que nous concluions un accord avec les

5 Croates de façon à entrer dans le convoi qui traverserait le territoire

6 croate. Et c'est ce que nous avons fait". (Fin de citation.)

7 Est-ce que c'est effectivement ce que vous avez fait?

8 Réponse: Oui, nous l'avons fait. J'ai expliqué pourquoi.

9 Question: Il y avait 24.000 personnes dans le convoi, c'est bien ça?

10 Réponse: C'est la conclusion que j'ai tirée. Je n'ai pas besoin

11 d'expliquer de quelle façon, c'est une déduction.

12 Question: Et vous dites que 14.000 ou 15.000 personnes finalement sont

13 arrivées sur le territoire serbe, parce qu'un certain nombre de personnes

14 ont quitté le convoi à la frontière entre la Croatie et la Serbie. C'est

15 bien cela?

16 Réponse: Il est possible que d'autres personnes l'aient fait, qu'un nombre

17 supérieur de personnes l'aient fait. Mais ce que j'ai dit…

18 Question: Moi, ce qui m'intéresse, c'est le convoi dans lequel vous vous

19 trouviez, celui que vous escortiez.

20 Réponse: Je n'ai pas escorté un convoi. J'étais dans le quatrième ou le

21 cinquième véhicule du convoi à la tête de la colonne.

22 Question: Mais, hier, vous avez dit que vous étiez le dernier à passer, à

23 franchir la frontière?

24 Réponse: Oui, j'étais convaincu que j'étais l'un des derniers à franchir

25 la frontière parce que personne n'est arrivé après moi pendant une heure

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1 ou deux.

2 Question: Et qu'est-il arrivé aux personnes qui ont franchi la frontière?

3 Réponse: Je ne sais pas.

4 Question: Vous ne pouvez pas expliquer?

5 Réponse: Non, je ne peux pas, je ne sais rien à ce sujet.

6 Question: Donc les personnes qui ont franchi, après le passage de la

7 frontière, se sont retrouvées dans un camp et elles ont vécu des choses

8 très désagréables, on les a gardées et torturées dans ce camp comme vous

9 l'avez dit.

10 Réponse: Pour certaines d'entre elles: oui, c'est exact.

11 Question: Dans votre déclaration préalable, page 1, vous déclarez que

12 votre première mission importante pour la KOS a consisté à soumettre, à

13 placer en possession d'un touriste allemand, un certain nombre de films.

14 Réponse: Oui.

15 Question: Vous dites que cela s'est passé à Rab. Et puis vous dites:

16 "Lorsque l'Allemand est sorti de sa tente, j'ai simplement placé ce

17 rouleau de pellicule dans ses affaires personnelles, dans sa tente".

18 Réponse: Oui.

19 Question: Et vous n'avez pas voulu savoir ce qu'il est advenu de cet homme

20 par la suite?

21 Réponse: Non, cela ne m'intéressait pas.

22 Question: Combien de missions de cette nature avez-vous reçues?

23 Réponse: Je ne sais pas. Je ne gardais pas la comptabilité des missions

24 que j'effectuais.

25 Question: Donnez-nous un chiffre à approximatif.

Page 12662

1 Réponse: De mission comparable?

2 Question: Oui, de mission comparable à celle que vous a donnée la KOS ce

3 jour-là.

4 Réponse: Je n'ai vraiment pas tenu une comptabilité des missions que j'ai

5 exécutées pendant 30 ans.

6 Question: Très bien. Hier, vous avez parlé des frères Brajdic à plusieurs

7 reprises, et vous avez dit que vous aviez reçu pour tâche de les tuer.

8 Réponse: Oui, c'est exact.

9 Question: En page 8 de la version anglaise, paragraphe 4 de votre

10 déclaration préalable, vous dites que le lendemain des événements survenus

11 dans le café dont il a été question hier -je cite-: "Le même soir, les

12 frères Brajdic sont venus chez moi à la maison. Ils ont garé leur voiture

13 de l'autre côté de la rue à côté de l'épicerie et ils se sont mis à

14 observer la maison". (Fin de citation.)

15 C'est bien cela?

16 Réponse: Oui.

17 Question: Et vous avez immédiatement mis votre femme à l'abri, n'est-ce

18 pas?

19 Réponse: Bien entendu.

20 Question: Et puis vous avez appelé Vojnic, vous avez raconté ce qui

21 s'était passé, et il vous a dit que vous aussi il serait bon que vous

22 disparaissiez de ce coin le plus rapidement possible.

23 Réponse: Cela s'est passé dans une période d'un mois et pas le même jour.

24 Question: Donc, vous avez décidé, vous êtes rendu compte que les frères

25 Brajdic étaient au courant de ce qui était censé leur arriver. Vous avez

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1 décidé d'interrompre l'initiative dans laquelle vous étiez lancé, mais ce

2 n'est pas une décision que vous avez prise de votre propre initiative;

3 c'est parce que vous avez compris que les frères Brajdic étaient au

4 courant?

5 Réponse: Oui, c'est exact.

6 Question: Vous avez également dit que vous aviez travaillé pour

7 "Agrokomerc" pendant quelques années.

8 Réponse: Oui, quelque six ou sept ans.

9 Question: Effectivement. Et puis, vous avez ensuite perdu votre emploi au

10 retour d'Abdic parce qu'une femme de ménage vous avait vu prendre des

11 documents dans un bureau.

12 Réponse: C'est ce qu'elle a dit.

13 Question: Mais c'était inexact?

14 Réponse: Non, ce n'était pas exact, en effet.

15 Question: Et en page 5 de votre déclaration préalable, page 5 de la

16 version anglaise, deuxième paragraphe, vous parlez du fait qu'il est

17 ironique que vous ayez perdu votre emploi pour cette tâche particulière

18 parce que vous aviez fait des choses beaucoup plus compliquées, plus

19 difficiles.

20 Réponse: Ce que je voulais dire, c'est que c'était assez ironique de voir

21 que j'ai perdu mon emploi pour quelque chose que je n'avais pas fait,

22 alors que j'aurai pu perdre mon emploi à l'occasion de choses que j'avais

23 faites plus difficiles et plus pénibles par le passé.

24 Question: Très bien. Maintenant, vous avez parlé du climat de peur qui

25 régnait. J'aimerais appeler votre attention sur la page 26, dernier

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1 paragraphe de votre déclaration préalable. Page 26 de la version serbe.

2 Là, vous parlez du climat de peur. Vous parlez du fait que beaucoup de

3 choses étaient imaginés par les gens. Et à un certains endroits, vous

4 dites -je cite-: "La rumeur circulait que les Oustachis allaient

5 assassiner tous les civils. Je connais certaines personnes qui ont été

6 chargées de circuler à gauche, à droite pour diffuser des rumeurs

7 consistant par exemple à dire que les Oustachis assassinaient les

8 enfants". (Fin de citation.)

9 C'est bien cela?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Et vous ajoutez -je cite-: "Dans ces conditions, personne ne

12 voulait consacrer du temps à vérifier la véracité ou non de ces rumeurs et

13 tout le monde quitterait les lieux". C'est bien ça?

14 Réponse: Pouvez-vous répéter?

15 Question: Non, je n'ai pas besoin de répéter cela. Ce qui importe vient

16 maintenant -je cite-: "Personnellement, j'ai inventé une histoire au sujet

17 de civils qui auraient été assassiné par les Musulmans du 5e Corps d'armée

18 de Topusko ce que CNN a diffusé, c'est bien exact?

19 Réponse: Ce n'est pas exact.

20 Question: Vous n'avez pas dit cela?

21 Réponse: Non. Cette partie de la déclaration préalable en anglais, j'ai

22 demandé qu'elle soit modifiée parce, oui, l'attaque a effectivement eu

23 lieu; et j'ai dit à CNN qu'il y avait eu une attaque sur le 5e Corps

24 d'armée qui se déplaçait dans la direction de Kordun.

25 Question: Mais pourquoi est-ce que ce paragraphe est resté dans votre

Page 12665

1 déclaration telle quelle? Et pourquoi y figure t-il encore aujourd'hui?

2 Réponse: Ça, je n'en sais rien.

3 Question: Est-ce bien ce que vous avez déclaré?

4 M. Lazarevic (interprétation): Non, non pas de cette façon-là.

5 M. Tapuskovic (interprétation): Bien. Parlons maintenant de la mission des

6 observateurs européens et des contacts que vous avez eus avec cette

7 mission début de 1992. Hier, il en a été question mais nous n'avions pas,

8 à ce moment-là, tous sous les yeux, le document. Donc, j'aimerais que vous

9 preniez la page 9 en version serbe, page 10, paragraphe 2 en version

10 anglaise de votre déclaration préalable.

11 Monsieur le Juge Robinson n'avait pas le texte sous les yeux hier

12 lorsqu'il a parlé de cela. Et ce que je souhaite faire aujourd'hui, c'est

13 vous soumettre ce que vous avez dit.

14 S'agissant du travail accompli avec des représentants des observateurs de

15 la mission européenne, vous dites -je cite-: "Nous faisions tout notre

16 possible pour établir des rapports avec eux, et ensuite il était beaucoup

17 plus facile pour eux d'admettre les mensonges diffusés par nous. Personne

18 ne voulait croire qu'un ami proche pouvait mentir. Donc cette façon de

19 procéder nous paraissait intéressante et je pense qu'elle nous rendait

20 plus efficaces que les Croates en la matière. (Fin de citation.)

21 Est-ce bien ce que vous avez déclaré sur la façon dont vous travailliez?

22 M. Lazarevic (interprétation): Oui.

23 M. Tapuskovic (interprétation): Merci.

24 M. le Président (interprétation): Avant de poursuivre, nous avons deux

25 photographies auxquelles Me Tapuskovic avait fait référence. J'aimerais

Page 12666

1 qu'elles soient remises à Me Tapuskovic et ensuite au témoin.

2 (Intervention de l'huissier.)

3 M. Tapuskovic (interprétation): Oui.

4 M. le Président (interprétation): Sont-ce bien les photographies

5 auxquelles vous pensiez?

6 M. Tapuskovic (interprétation): Je n'ai pas d'autres éléments que ceux que

7 j'ai mentionnés; je crois que ce sont bien ces photographies.

8 M. le Président (interprétation): Très bien, très bien. Qu'on les remette

9 au témoin pour qu'il y jette un coup d'œil d'abord et nous les

10 regarderons. Nous voyons donc les uniformes dont il a été question.

11 Monsieur Lazarevic, est-ce bien l'uniforme que vous portiez? Ne nous

12 montrez pas cela pour le moment. Est-ce bien l'uniforme que vous avez

13 porté?

14 M. Lazarevic (interprétation): Oui, c'est tout à fait clair sur la

15 photographie: vous voyez que cet uniforme est en fait une combinaison, un

16 mélange de plusieurs uniformes.

17 M. le Président (interprétation): Oui.

18 M. Lazarevic (interprétation): Et vous voyez aussi qu'il y a un officier

19 de la JNA à côté de moi. Donc personne n'a trouvé à redire au fait que je

20 ne porte pas un de ces uniformes.

21 M. le Président (interprétation): Monsieur Groome, y a-t-il des raisons

22 pour que ce document ne soit pas versé au dossier?

23 M. Groome (interprétation): Pas du tout, Monsieur le Président.

24 M. le Président (interprétation): Très bien. Eh bien, nous trouverons sans

25 doute un bon moyen de verser ces photos au dossier; peut-être que ces

Page 12667

1 photos, puisqu'elle viennent du Procureur, pourraient être la pièce à

2 conviction suivante de l'accusation?

3 M. Groome (interprétation): Peut-être pourrait-on l'appeler "intercalaire

4 15" dans l'ordre des intercalaires de la pièce 348?

5 Mme Anoya (interprétation): Il s'agira donc de la pièce 348 de

6 l'accusation, intercalaire 15.

7 M. le Président (interprétation): Mais je crois savoir qu'en fait, la

8 déclaration préalable du témoin n'a pas été versée au dossier et qu'il

9 conviendrait de lui donner la cote suivante dans l'ordre des pièces à

10 conviction.

11 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, il y a en fait deux

12 photographies; il faudrait donc s'occuper de la deuxième.

13 M. le Président (interprétation): Très bien.

14 Mme Anoya (interprétation): Est-ce que l'accusation souhaite que la

15 déclaration préalable du témoin soit conservée sous scellés?

16 M. Groome (interprétation): Oui, l'accusation demande que cette

17 déclaration soit conservée sous scellés, car elle comporte des éléments

18 permettant d'identifier le témoin.

19 M. le Président (interprétation): Très bien.

20 Mme Anoya (interprétation): Donc la déclaration sera la pièce à conviction

21 de l'accusation 348, intercalaire 17, sous scellés, confidentielle.

22 M. le Président (interprétation): Il est très important, bien sûr, que les

23 pièces à conviction conservées sous scellés ne soient pas rendues

24 publiques par la suite. Nous n'allons pas en parler maintenant, car nous

25 devons poursuivre ce qui est commencé, mais il serait peut-être bon que

Page 12668

1 vous réfléchissiez à la façon dont nous pouvons traiter de la question de

2 façon plus générale.

3 M. Groome (interprétation): Monsieur le Président, pendant la pause

4 déjeuner, nous allons expurger le document de tous les éléments qu'il

5 convient d'expurger; et ensuite, cette pièce deviendra une pièce publique.

6 M. le Président (interprétation): Oui, je crois que c'est une très bonne

7 eu idée.

8 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin, M. Slobodan Lazarevic,

9 par M. Groome.)

10 M. Groome (interprétation): Monsieur Lazarevic, M. Milosevic vous a

11 demandé si vous travailliez actuellement pour les services britanniques?

12 M. Lazarevic (interprétation): Je vous demande un instant, je vous prie.

13 Je demanderais aux interprètes de ne pas m'interpréter, parce que

14 j'entends deux choses à la fois.

15 Question: Mais vous pouvez enlever vos écouteurs, Monsieur.

16 Réponse: Oui, d'accord. Merci.

17 Question: Monsieur Milosevic vous a demandé si vous travailliez en ce

18 moment pour les services secrets britannique. Vous avez répondu "non". Je

19 vous demande, pour ce qui me concerne, si à quelque moment que ce soit,

20 vous avez fait partie des services de renseignement britanniques?

21 Réponse: Absolument jamais.

22 Question: Avez-vous jamais fait partie d'autres services de renseignement

23 que le KOS, c'est-à-dire les services de renseignement de l'armée

24 yougoslave?

25 Réponse: Non, non.

Page 12669

1 Question: Avant de nous fournir des détails qui permettraient

2 éventuellement de déterminer où vous résidez actuellement, pourriez-vous

3 nous dire en quelques mots quelle est la nature de l'emploi que vous

4 exercez actuellement?

5 Réponse: Je travaille en tant que responsable de la sécurité dans un

6 aéroport international qui ne se trouve pas en Yougoslavie.

7 Question: Monsieur Milosevic a parlé et prétendu que des mandats d'arrêt

8 existaient à votre encontre, en rapport avec de prétendus actes

9 répréhensibles que vous auriez commis.

10 J'aimerais vous demander de regarder une nouvelle fois la pièce à

11 conviction 348, intercalaire 7, à savoir la photocopie de votre passeport

12 et j'aimerais que vous vous penchiez de plus près sur une rubrique datée

13 1996 et trois rubriques comportant la date de 1997.

14 Réponse: Oui, j'ai trouvé ces lignes.

15 Question: Pouvez-vous nous dire en quelques mots quelles sont ces

16 inscriptions qui figuraient dans votre passeport? De quoi parlent-elles?

17 Réponse: De vacances. Je crois qu'une fois, c'était en Grèce et la

18 deuxième fois à Malte, si je ne m'abuse.

19 Question: Ce passeport port le nom de Slobodan Lazarevic, n'est-ce pas?

20 Réponse: Oui, absolument.

21 Question: Chaque fois que vous passiez dans un aéroport yougoslave, vous

22 a-t-on indiqué à quelque moment que ce soit qu'un mandat d'arrêt existait

23 à votre encontre?

24 Réponse: Non.

25 Question: Monsieur Milosevic a également cité une liste de noms dont il

Page 12670

1 prétend qu'il s'agit des membres de la délégation à la conférence de

2 Norvège. Et il a parlé d'un certain Savo ou Miso Milosevic, dont le nom

3 n'était pas inclus dans cette liste.

4 Je vais demander que la pièce à conviction de l'accusation 348,

5 intercalaire 8, soit placée sur le rétroprojecteur.

6 (Intervention de l'Huissier.)

7 On voit cette personne sur cette photographie.

8 Je vous demande si toutes les personnes qu'on voit sur cette photographie

9 étaient membres de la délégation qui a fait le voyage de Belgrade en

10 Norvège?

11 Réponse: Oui, Monsieur.

12 Question: Sur les sept personnes représentées sur cette photographie,

13 combien avaient leurs noms sur la liste dont M. Milosevic a donné lecture?

14 Réponse: Deux.

15 Question: Ce qui signifie, n'est-ce pas, que cinq personnes au moins

16 représentées sur cette photographie faisaient partie de la délégation,

17 mais que leurs noms ne figurent pas sur la liste dont M. Milosevic a donné

18 lecture?

19 Réponse: C'est exact, en effet.

20 Question: Monsieur Milosevic vous a laissé entendre que lorsque M. Hadzic

21 avait parlé de lui comme "dispatcher", il parlait de l'emploi qu'il

22 exerçait dans un entrepôt.

23 La question que je vous pose est la suivante: au moment où Goran Hadzic

24 vous a dit cela, il était président de la séance, n'est-ce pas?

25 Réponse: C'est exact, Monsieur.

Page 12671

1 Question: Y a-t-il quoi que ce soit qui indique qu'outre ses fonctions

2 présidentielles, en fait, il continuait à travailler en tant que

3 magasinier dans un entrepôt?

4 Réponse: Absolument pas.

5 Question: Bien. Maintenant, nous allons vous soumettre une nouvelle pièce

6 à conviction qui pourrait peut-être être désignée sous la cote

7 intercalaire 18. Il en existe des exemplaires pour toutes les personnes

8 présentes dans ce prétoire et je demande que ce document soit distribué.

9 (Intervention de l'huissier.)

10 Pendant la distribution, je vais vous poser la question que je souhaite

11 vous poser. Monsieur Milosevic a présenté une lettre de M. Bosnic qui

12 prétend qu'en 1968 vous n'étiez pas en Yougoslavie et vous avez parlé de

13 votre livret militaire. Pouvez-vous expliquer ce qu'est l'intercalaire 18

14 de la pièce à conviction de l'accusation 348?

15 Réponse: C'est un livret militaire.

16 Question: De qui?

17 Réponse: La République socialiste fédérative de Yougoslavie.

18 Question: Quel est le nom qui figure sur ce livret militaire?

19 Réponse: Le mien.

20 Question: Et est-il indiqué que vous avez accompli votre service militaire

21 dans les années 1960?

22 Réponse: Oui, à la page 3 du document.

23 Question: Pouvez-vous nous dire quelles sont les dates indiquées à cet

24 endroit?

25 Réponse: Nous lisons les mots "VP - Poste militaire 8977 - Ville de

Page 12672

1 Kraljevo" et les dates sont celles du 29 février 1966 jusqu'au 12 février

2 1968.

3 M. Groome (interprétation): Je demande que ce document soit placé sur le

4 rétroprojecteur.

5 M. le Président (interprétation): Vous avez parlé de l'intercalaire 15. En

6 fait, il faut parler de l'intercalaire 18.

7 M. Groome (interprétation): Je vous présente mes excuses.

8 J'aimerais donc maintenant qu'on vous montre un autre document qui lui

9 portera donc la cote intercalaire 19.

10 Je demande que les exemplaires existants soient distribués aux membres de

11 la Chambre.

12 (Intervention de l'huissier.)

13 Monsieur Lazarevic, je vous demande si vous reconnaissez ce document?

14 M. Lazarevic (interprétation): Oui, il est signé par le colonel Cedomir

15 Bulat.

16 Question: Quelle est la nature de ce document?

17 Réponse: Il est censé apporter la preuve, à fin de pension, du nombre

18 d'années que j'ai passées au sein du 21e Corps d'armée dans une zone de

19 guerre. Ce qui me permettait pendant ces années d'obtenir le doublement de

20 mes droits à la retraite.

21 Question: Pouvez-vous, je vous prie, lire à notre intention ce qui est

22 écrit s'agissant du temps que vous avez servi au sein du Corps de Kordun,

23 le 21e Corps d'armée?

24 Réponse: "Il est confirmé par la présente que Slobodan Lazarevic s'est

25 trouvé dans la zone de guerre en tant que membre du 21e Corps, c'est à

Page 12673

1 dire Corps de Kordun, depuis le 21 décembre 1991 jusqu'au 14 août 1995.

2 Question: Merci. Monsieur Milosevic vous a également présenté une lettre

3 qui est censée provenir d'un certain Mikelic et je vous pose la question

4 suivante à ce sujet.

5 Vous avez parlé d'un certain nombre d'appels téléphoniques faits sur un

6 téléphone cellulaire au moment de l'Opération Tempête. Je vous demande si

7 vous avez, à quelque moment que ce soit, été présent lorsque M. Mikelic

8 était appelé au téléphone?

9 Réponse: Absolument pas.

10 Question: A votre connaissance, en dehors de ce téléphone cellulaire que

11 le colonel Bulat a utilisé en votre présence, existait-il dans la zone de

12 responsabilité du 21e Corps d'armée un quelconque autre téléphone

13 cellulaire?

14 Réponse: Non, Monsieur; c'est la raison pour laquelle nous avions ce

15 bureau dans les locaux des Nations Unies pour pouvoir téléphoner.

16 Question: Suis-je en droit de dire que, dans les commentaires de M.

17 Mikelic qui vous ont été soumis, il n'a jamais nié le fait que M. Perisic

18 ait été quotidiennement en contact avec le colonel Bulat?

19 Réponse: Oui, il était quotidiennement en contact avec lui. Et si je puis

20 me permettre, le dernier appel du colonel Bulat à l'intention du général

21 Perisic était assorti du commentaire: "C'est notre dernier rapport du

22 terrain."

23 Question: Est-ce que ceci indiquait qu'il était peu probable que le

24 colonel Bulat rappelle par la suite M. Mikelic?

25 Réponse: Oui, à l'époque. Mais de qui parlez-vous?

Page 12674

1 Question: Vous disiez que c'était le dernier appel que le colonel Bulat

2 avait passé?

3 Réponse: Le dernier rapport -c'est ce qu'il a dit, "qu'il s'agissait du

4 dernier rapport"- provenant des champs de bataille, dernier rapport

5 adressé au général Perisic: il expliquait la situation dans laquelle nous

6 nous trouvions.

7 Question: Y a-t-il une possibilité que quelqu'un, après que vous avez

8 quitté le bureau, après que le colonel Bulat fut rentré, ait eu une

9 conversation avec M. Mikelic dont vous n'auriez pas eu connaissance?

10 Réponse: Non, nous sommes tous partis du bureau ensemble.

11 Question: J'aimerais maintenant appeler votre attention sur l'assassinat

12 du maire Obradovic. Avez-vous vu son cadavre après qu'il a été tué.

13 Réponse: Non, Monsieur.

14 M. Groome (interprétation): Monsieur Milosevic, hier, vous a dit que des

15 policiers de la République serbe de la Krajina ont été engagés par le MUP

16 de la République de Serbie pratiquement à titre de faveur ou, en tout cas,

17 à titre d'aide dans le cadre du conflit.

18 Durant votre déposition, vous avez parlé d'un incident au cours duquel 400

19 à 500 policiers de la RSK sont arrivés à Belgrade et qu'ils ont été

20 utilisés pour s'opposer à des manifestants.

21 M. Milosevic (interprétation): Monsieur May?

22 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic, de quoi s'agit-

23 il?

24 M. Milosevic (interprétation): Il est inexact que j'ai affirmé que la

25 police de la République serbe ait engagé ou qu'elle ait eu recours à des

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1 policiers en Krajina serbes. Il est dit ici que les policiers de Krajina

2 serbe ont été engagés dans les rangs de la police de République de Serbie.

3 Je n'ai pas dit cela hier, c'est inexact.

4 Hier, j'ai parlé du témoignage de quelqu'un qui a témoigné ici avec des

5 mesures de protection et qui a parlé de cette participation au conflit de

6 forces provenant de la Région autonome de Bosnie occidentale et du 5e

7 Corps d'armée d'Izetbegovic, disant que "ces hommes avaient travaillé

8 comme instructeurs et qu'ils étaient soit volontaires soit mercenaires".

9 Mais ce que j'ai dit n'avait absolument aucun rapport avec une quelconque

10 affirmation selon laquelle ce serait la police de la République serbe qui

11 les aurait engagés parce que, si quelqu'un payait quelqu'un, les seules

12 personnes qui pouvaient les payer, c'étaient celles pour lesquelles ils

13 travaillaient; ils se battaient pour la Région autonome de Bosnie

14 occidentale et pour personne d'autre, en tout cas pas pour la République

15 de Serbie.

16 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, réentendons la

17 question de M. Groome.

18 M. Groome (interprétation): Les 400 à 500 officiers dont vous avez parlé

19 dans votre déposition, vous avez dit qu'ils avaient quitté la RSK, qu'on

20 leur avait donné des uniformes de la police de la République de Serbie et

21 qu'on les avait engagés pour mater une manifestation contre M. Milosevic.

22 Cette mission était-elle une mission de courte durée ou était-elle censée

23 être une mission de longue durée? Etait-ce une affectation de longue durée

24 dans les rangs de la police de Serbie?

25 M. Lazarevic (interprétation): Non, c'était une mission très courte; je

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1 crois qu'elle a duré quatre ou cinq jours, cinq jours maximum. Tout était

2 fini à ce moment-là.

3 Question: Et quand ces policiers sont rentrés, ils ont repris leurs postes

4 initiaux au sein de la police de la RSK, n'est-ce pas?

5 Réponse: Oui, Monsieur.

6 Question: Monsieur Milosevic vous a également interrogé au sujet de soins

7 médicaux. En dehors des soins médicaux dont vous avez parlé dans votre

8 déposition, soins médicaux dont vous avez dit que c'était en fait une

9 façon d'expulser des vieillards croates, avez-vous eu connaissance d'une

10 quelconque tentative légitime de la part du 21e Corps d'armée d'apporter

11 une aide médicale aux civils croates qui vivaient dans la zone de

12 responsabilité de ce corps d'armée?

13 Réponse: Cela a toujours été nié, Monsieur.

14 Question: Qu'est-ce qui a été nié?

15 Réponse: L'aide médicale.

16 Question: Donc êtes-vous en train de dire dans votre déposition qu'il y a

17 eu des cas où des Croates ont demandé une aide médicale et ne l'ont pas

18 reçue?

19 Réponse: Monsieur, des requêtes arrivaient par le biais de l'ECMM:

20 c'étaient des Croates âgés de ces villages qui demandaient un aide

21 médicale. Et ces demandes ont été rejetées au motif que nous n'avions pas

22 de soins médicaux pour nous, et encore moins pour eux.

23 Question: Bien. J'aimerais vous interroger au sujet de cette parade de

24 Vidovdan. Dans quel but a eu lieu cette énorme manifestation de forces

25 militaires que nous avons vue sur les images de la vidéo?

Page 12677

1 Réponse: Eh bien, l'objectif était tout à fait évident: il consistait à

2 montrer aux Croates combien nous étions puissants et à le montrer

3 également au 5e Corps d'armée.

4 Question: Monsieur Milosevic vous a dit qu'il n'était pas rare de voir des

5 membres d'autres unités, en particulier d'unités du MUP de la République

6 de Serbie ou des unités de la VRS ou de l'armée populaire yougoslave,

7 participer à des célébrations de ce genre.

8 Avez-vous pu déterminer quelles étaient les unités présentes ce jour-là

9 qui étaient invitées à la fête et quelles étaient les unités qui

10 participaient de leur plein droit à la parade?

11 Réponse: Oui, nous avons un moyen d'évaluer cela, de façon assez sûre.

12 Question: Pouvez-vous nous dire si vous pouvez distinguer donc entre ceux

13 qui participaient réellement à la parade et ceux qui étaient invités?

14 Réponse: Oui, sur la base des postes occupés; ça, c'est un point.

15 Et puis, l'autre moyen, c'était à qui était présenté le Président Martic à

16 l'époque. Les véhicules utilisés au cours de la parade également. Ceux qui

17 appartenaient aux 21e Corps d'armée ou à d'autres corps d'armée de la RSK

18 avaient leurs propres plaques d'immatriculation, et on y trouvait la

19 lettre cyrillique "Z". Quant aux véhicules qui portaient des roquettes et

20 qui provenaient de la République de Serbie, les numéros d'immatriculation

21 de ces véhicules avaient été retirés et, après la parade, ils ont été

22 replacés sur ces véhicules lorsque les véhicules sont sortis de l'ARSK

23 pour retourner en République de Serbie.

24 Question: Serait-ce de notre part une conclusion raisonnable de dire que,

25 si les lance-roquettes ont été simplement invités à cette fête, il

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1 n'aurait pas été indispensable d'en retirer les plaques d'immatriculation

2 de la VRS?

3 Réponse: Bien sûr. Si ces véhicules avaient été invités, pourquoi le

4 cacher?

5 Question: Bien. Bien. Maintenant, dans l'extrait vidéo qui a été diffusé

6 ici, dans le prétoire, nous avons vu un certain nombre d'hommes portant

7 des uniformes bleus devant un podium. Vous rappelez-vous ces hommes?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Pouvez-vous identifier d'où ils venaient?

10 Réponse: L'uniforme de parade qu'ils portaient indique qu'ils étaient

11 membres d'une brigade spéciale de Belgrade.

12 Question: Pouvez-nous dire quels étaient les postes occupés par eux,

13 compte tenu de l'endroit où ils se trouvaient sur le podium?

14 Réponse: C'était un poste honorifique.

15 Question: Monsieur Milosevic a laissé entendre qu'on ne vous connaissait

16 pas à la KOS et que vous n'étiez rien qu'un simple interprète, en fait.

17 Pendant le temps que vous avez passé en Krajina, y avait-il d'autres

18 personnes à Knin qui étaient aussi qualifiées que vous pour interpréter

19 entre des gens parlant serbe et des gens parlant anglais?

20 Réponse: Pas seulement à Knin, Monsieur. Je suppose qu'il y avait des gens

21 très qualifiés en RSK, mais également à Belgrade.

22 Question: Et parmi les gens qui auraient eu les mêmes qualifications que

23 vous, est-il permis de penser qu'un grand nombre de ces personnes étaient

24 en fait originaires de Knin ou de la RSK?

25 Réponse: Excusez-moi, je n'ai pas bien compris votre question.

Page 12679

1 Question: Ces gens dont je suis en train de parler, ces gens qui pouvaient

2 interpréter aussi bien vous...

3 Réponse: Oui?

4 Question: Etaient-ce des gens nés dans la région ou venus de l'extérieur?

5 Réponse: Non, la plupart venaient de l'extérieur. Je me souviens d'une

6 femme américaine qui, en fait, était une Américaine mariée à quelqu'un de

7 Knin et qui a interprété pendant la guerre pour le général Musa Bamayi.

8 Question: Y avait-il plusieurs interprètes qui étaient néanmoins nés dans

9 la région, qui étaient de la région et résidant dans la région?

10 Réponse: Oui, certainement.

11 Question: Combien à peu près, si vous le savez?

12 Réponse: A peu près 75, 80% des interprètes.

13 Question: Y a-t-il une raison particulière à laquelle vous pourriez penser

14 qu'elle justifierait que vous accompagniez une délégation de la RSK en

15 tant qu'interprète et que vous prétendiez être originaire de Knin, comme

16 l'auraient fait des interprètes réellement originaires de Knin?

17 Réponse: Bien sûr, il y a une raison justifiant cela.

18 Question: Quelle est cette raison?

19 Réponse: La raison, c'est que le colonel Zimonja m'avait donné une tâche

20 particulière.

21 Question: Monsieur Milosevic a laissé entendre que les membres de l'armée

22 de la RSK qui étaient officiers étaient simplement membres de l'armée

23 Yougoslave, mais dans la RSK, sur le territoire de la RSK, et qui étaient

24 restés sur ce territoire après le retrait de la JNA.

25 Alors, la question que je vous pose est la suivante: parmi les officiers

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1 nés sur le territoire de la RSK, combien sont restés chez eux, hors du

2 territoire de la RSK et dans la région de Belgrade?

3 Réponse: 99,9%.

4 Question: Et où est-ce que résidaient leurs familles?

5 Réponse: Certaines en Serbie, si elles avaient un appartement ou maison en

6 Serbie.

7 Question: Donc, en dehors du fait que ces hommes étaient nés en Krajina,

8 est-ce qu'il y avait un lien entre eux et la Krajina, s'agissant du lieu

9 de résidence de leurs familles?

10 Réponse: Non, certains officiers pouvaient recevoir de temps en temps la

11 visite de leurs femmes ou bien ils revenaient de Belgrade pour rendre

12 visite à leurs familles, mais aucun d'entre eux ne résidaient de façon

13 permanente dans la région.

14 Question: Monsieur Milosevic vous a dit qu'en fait, c'était le Conseil

15 suprême de Défense de la RSK qui était l'organe légitime responsable de

16 l'armée de la République serbe de Krajina. Alors, la question que je vous

17 pose est la suivante: pendant le temps que vous avez passé au sein du

18 quartier général du 21e Corps d'armée, avez-vous jamais reçu des ordres du

19 Conseil suprême de la Défense ou de la RSK?

20 Réponse: Je crois que cela a eu lieu une fois: un ordre signé de Martic.

21 Question: Vous rappelez-vous quelle était la nature de cet ordre?

22 Réponse: Je me souviens qu'il s'agissait d'ouvrir le feu dans le cadre

23 d'une attaque de la partie croate.

24 Question: Pendant le temps que vous avez passé au sein du quartier général

25 du 21e Corps d'armée, avez-vous jamais entendu le colonel Bulat parler

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1 d'un membre du Conseil suprême de la Défense de la RSK?

2 Réponse: Non, pas une seule fois.

3 Question: Bien. Dans la législation de l'ex-Yougoslavie, pendant la guerre

4 il est prévu que les unités de police soient placées sous l'autorité de

5 l'armée. A quelque moment pendant les conversations que vous avez eues

6 avec Toso Pajic, vous a t-il été indiqué que celui-ci recevait ses

7 instructions du Conseil supérieur de la Défense de la RSK?

8 Réponse: Jamais.

9 Question: Pendant les négociations de paix auxquelles vous avez assisté,

10 est-il jamais arrivé que des membres de la République serbe de Krajina, du

11 Conseil suprême de la Défense de cette République, présents à ces

12 négociations, négocient de questions militaires?

13 Réponse: Si je me souviens bien, pas une seule fois.

14 Question: Pouvez-vous nous donner davantage de détails au sujet de

15 conversation que la Délégation a eu à Belgrade? A votre connaissance, y a-

16 t-il jamais eu un quelconque entretien ou un appel téléphonique destiné à

17 un membre du Conseil suprême de Défense de la RSK pendant les conférences

18 de paix auxquelles vous avez assisté?

19 Réponse: En ma présence, pas une seule fois cela ne s'est produit.

20 Question: Monsieur Milosevic vous a dit que votre déclaration préalable

21 était en fait fondée sur le fait que vous aviez lu l'Acte d'accusation

22 dressé contre lui, et que vous avez repris un certain nombre de passages

23 de cet Acte d'accusation pour les inclure dans votre déclaration. L'Acte

24 d'accusation a été rédigé en novembre 2001.

25 Votre déclaration, vous l'avez faite en quelle année?

Page 12682

1 Réponse: En 1999, de février à juin.

2 Question: Donc deux ans avant la rédaction de l'Acte d'accusation, n'est-

3 ce pas?

4 Réponse: C'est exact, Monsieur.

5 Question: Monsieur Milosevic a également affirmé que votre déposition

6 était due en partie aux avantages matériels que vous pouviez tirer de

7 votre coopération. J'aimerais vous demander de comparer la qualité de

8 votre vie actuelle à celle de votre vie à Belgrade avant votre décision de

9 coopération avec le Bureau du Procureur.

10 Réponse: Eh bien, je dois dire que lorsque je vivais à Belgrade j'avais un

11 niveau de vie bien meilleur que celui dont je jouis aujourd'hui.

12 Nous en avons parlé les tous les deux, n'est-ce pas? Donc je pense que je

13 peux vous rappeler que j'ai laissé là-bas une Porsche, une Mercedes et

14 bien d'autres choses. Je suis parti de Yougoslavie en n'emportant qu'une

15 petite valise et j'ai tout laissé derrière moi.

16 Question: Avez-vous envisagé votre possibilité de vivre dans un autre pays

17 et l'octroi d'une nouvelle identité comme des avantages en nature ou bien

18 comme une mesure destinée à assurer votre sécurité?

19 Réponse: Ceci est dû uniquement à des considérations de sécurité, mais ce

20 n'est en aucun cas une récompense pour ma déposition.

21 Question: Monsieur Milosevic a qualifié votre témoignage de trahison de

22 vos collègues et de la Serbie. En 1991 et 1992, pouvez-vous nous dire si

23 vous croyiez à la cause serbe?

24 Réponse: Absolument! J'y croyais de tout mon coeur.

25 Question: A l'époque, vous considériez-vous comme un Serbe loyal?

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1 Réponse: Je me considère encore aujourd'hui comme un Serbe loyal.

2 Question: Et ma dernière question est la suivante. Monsieur Milosevic a

3 dit hier ce qui suit, à la page 88 du compte rendu d'audience -je cite-:

4 "Ici, il est question de toutes sortes d'excès et il y en a sans doute eu.

5 Que des centaines ou des milliers de personnes y aient participé, en tout

6 cas, des injustices et des excès se sont produits de façon assez

7 courante". (Fin de citation.)

8 Alors, vous fondant sur les observations des excès en question et des

9 injustices que vous avez pu faire vous-même, combien de ces excès étaient

10 inévitables et combien auraient pu être évités?

11 Réponse: Est-ce que nous parlons des réfugiés qui ont été emmenés de la

12 Yougoslavie vers la Bosnie et la Croatie?

13 Question: Je vous interroge au sujet des injustices dont vous avez parlé

14 pendant les deux jours de votre témoignage ici, des injustices commises

15 contre les Serbes et contre les Croates.

16 Réponse: Excusez-moi, je n'avais pas bien compris. Il y en a pas mal qui

17 étaient évitables et qui sont totalement superflues à mon avis.

18 Question: Monsieur Milosevic a poursuivi en disant que "ces excès et ces

19 injustices n'étaient pas le fait de la politique officielle". Etes-vous

20 d'accord avec cette déclaration?

21 Réponse: Non, j'estime plutôt qu'ils étaient le résultat de la politique

22 officielle menée depuis l'époque jusqu'à ce jour.

23 Question: De la politique de qui?

24 Réponse: De celle de M. Milosevic.

25 M. Groome (interprétation): Je n'ai plus d'autres questions pour ce

Page 12684

1 témoin, Monsieur le Président.

2 M. le Président (interprétation): Monsieur Lazarevic, nous sommes arrivés

3 au terme de votre déposition devant le Tribunal International. Merci

4 d'être venu. Vous pouvez maintenant vous retirer.

5 M. Lazarevic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

6 M. le Président (interprétation): Cela ne vous concerne pas, Monsieur

7 Lazarevic, mais je dois rendre une ordonnance en rapport avec l'accusé.

8 On me demande de rendre une ordonnance lui accordant la possibilité de

9 rencontrer ses collaborateurs ce soir, dans les locaux du Tribunal, et

10 c'est l'ordonnance que je rends à l'instant.

11 Suspension jusqu'à 14 heures 30.

12 (L'audience, suspendue à 13 heures 01, est reprise à 14 heures 36.)

13 (Matières relatives aux éléments de preuve.)

14 M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Groome?

15 M. Groome (interprétation): Il y avait des photographies et, s'agissant

16 des pièces considérant ce dernier témoin, la pièce 336.SL page 20. Et puis

17 nous avions tous les intercalaires de la pièce 348 de 1 à 19,

18 l'intercalaire 17 étant sous pli scellé. Et l'accusation va produire une

19 version expurgée de cette pièce demain matin. Et puis, il y aura aussi la

20 pièce de l'accusation 349, intercalaire 1.

21 M. le Président (interprétation): Merci.

22 M. Nice (interprétation): Le témoin suivant sera le témoin C-034. Mais ce

23 témoin a pris une décision, il y a quelques jours de cela, en

24 collaboration avec la Section des victimes et des témoins et il a décidé

25 de ne pas demander de mesures de protection.

Page 12685

1 J'appelle à la barre ce témoin.

2 M. le Président (interprétation): Fort bien.

3 M. Nice (interprétation): Ce témoin ne produira que trois pièces.

4 (Le témoin, M. Mustafa Candic, est introduit dans le prétoire.)

5 M. le Président (interprétation): Je vais demander au témoin de prononcer

6 la déclaration solennelle.

7 M. Candic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

8 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

9 M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir, Monsieur.

10 M. Candic (interprétation): Merci.

11 (Interrogatoire principal du témoin, M. Mustafa Candic, par M. Nice.)

12 M. Nice (interprétation): Monsieur, veuillez donner votre identité

13 complète.

14 M. Candic (interprétation): Monsieur le Président, je m'appelle Mustafa

15 Candic.

16 Question: Etes-vous né en mars 1953 à Brcko, ou à proximité de Brcko en

17 Bosnie-Herzégovine? En temps utile, nous avons toutes vos données de

18 contexte; si ceci est important, nous nous pourrons les donner.

19 Mais est-ce qu'à un moment donné vous êtes devenu capitaine de 1ère classe

20 dans le groupe central de contre-espionnage des organes de sécurité des

21 forces aériennes et des forces de défense aérienne à Zemun en Serbie, et

22 est-ce que vous avez commencé à exercer ces fonctions en 1988?

23 Réponse: Messieurs les Juges, je suis né le 24 mars 1956, et pas le 19

24 février 1956. Il est vrai que pour ce qui est de mes fonctions au groupe

25 de renseignement central de l'aviation de guerre et de la défense

Page 12686

1 aérienne, j'ai rejoint les rangs de ces unités-là au mois de décembre de

2 l'année 1988.

3 Question: Je ne sais pas. Il y a peut-être eu une erreur. On avait parlé

4 peut-être d'une date en février mais moi, j'avais parlé du mois de mars

5 1956. Il y a une petite erreur qui s'est glissée, mais peu importe.

6 Vous avez passé une quinzaine d'années dans la JNA. Après quoi, vous avez

7 quitté les rangs de cette armée le 19 février 1992. Pourquoi avez-vous

8 décidé de quitter la JNA? Dites-le nous carrément, sans plus tarder.

9 Réponse: Messieurs les Juges, il est exact que j'ai quitté l'ex-JNA le 19

10 février 1992.

11 Il est maintes raisons pour lesquelles j'ai pris une décision aussi

12 importante, vu que j'étais conscient du fait que cette décision impliquait

13 une remise en question de la source de revenus pour moi-même et pour ma

14 famille. Mais s'agissant de ces raisons multiples, je n'en citerai plus

15 qu'une seule.

16 Au travers du fonctionnement opérationnel et au travers de mes activités

17 dans ce groupe de renseignement central, je me suis procuré des

18 renseignements au travers de mes activités opérationnelles. Donc j'ai vu,

19 de mes propres yeux vu que je me déplaçais sur le territoire de la Bosnie-

20 Herzégovine et de la République de Croatie. J'ai donc pu voir que la JNA,

21 en sa qualité d'institution qui avait été celle de toute l'ex-Yougoslavie,

22 s'était rangée de jure et de facto aux côtés d'un groupe ethnique

23 seulement, à savoir du groupe ethnique serbe.

24 Question: Merci, Monsieur Candic. Vous êtes d'origine musulmane, c'est

25 exact?

Page 12687

1 Réponse: Oui, c'est exact. De par mon groupe ethnique, je suis Musulman.

2 Question: C'est tout ce qu'il suffit de dire, je vous remercie.

3 Pouvons-nous maintenant parler des forces dans lesquelles vous

4 travailliez? Je pense qu'on peut appeler ce service de contre-espionnage

5 "K-O-G". Et nous allons voir un organigramme qui nous montrera la

6 structure de ces unités des services de renseignements et de contre-

7 espionnage.

8 Mais parlons de ce K-O-G, "KOG"-même.

9 En fait, il y avait les services de renseignements à l'étranger, les

10 communautés d'émigrés yougoslaves; et puis ce qu'on a appelé aussi

11 "l'ennemi interne, intérieur"?

12 Réponse: Messieurs les Juges, lorsqu'il s'agit du groupe de contre-

13 espionnage, je tiens à préciser qu'en son sein, il comportait trois

14 ensembles distincts. Et l'un de ces ensembles-là avait été une branche ou

15 un secteur qui traitait des services de renseignements étrangers et qui

16 faisaient des recherches dans ce sens. L'autre segment était chargé de

17 recherches au niveau des activités de l'émigration ennemie yougoslave. Le

18 troisième département était chargé de l'ennemi à l'intérieur, à savoir

19 tous les groupes qui avaient pour visée d'anéantir l'ordre constitutionnel

20 de la République Socialiste Fédérative de Yougoslavie.

21 Question: Monsieur Candic, lorsque je vous pose une question à laquelle il

22 est possible de répondre par un simple "oui", n'hésitez pas à le faire;

23 ceci nous permettra de gagner du temps.

24 Donc ce que je vous avais semé comme hypothèse, c'était exact? Répondez

25 par un simple "oui" ou par "non". Vous, vous travailliez bien dans la

Page 12688

1 section s'occupant de l'ennemi à l'intérieur. Est-ce exact?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Quelle était votre zone de responsabilité? Est-ce quelle

4 incluait bien le Kosovo et 19 municipalités se trouvant dans le nord-est

5 de la Bosnie-Herzégovine? Mais, est-ce qu'en plus de cela vous aviez aussi

6 pour instruction et pouvoir de mener des enquêtes ailleurs, en RSFY?

7 Réponse: Cela est exact également.

8 Question: Vous avez été promu au grade de commandant en 1990 et vous êtes

9 devenu un des quatre chefs en second de ce KOG pour la section de

10 l'ennemie à l'intérieur. Et c'était le colonel Tomislav Cuk qui était le

11 chef du groupe central, de KOG central. Est-ce exact?

12 Réponse: C'est exact. Le 22 décembre, j'ai été promu commandant dans les

13 rangs de l'aviation avant le terme prévu, et je suis devenu l'un des

14 assistants du chef du directeur du groupe central de contre-espionnage sis

15 à Zemun.

16 Question: Et quel était le supérieur du colonel Tomislav Cuk, est-ce bien

17 le colonel Slobodan Rakocevic?

18 Réponse: Le colonel Tomislav Cuk, le chef du groupe de contre-espionnage

19 était subordonné au colonel Rakocevic Slobodan qui était chef de

20 l'aviation de guerre et de la défense anti-aérienne.

21 M. Nice (interprétation): Je pense qu'il y a les classeurs des pièces qui

22 sont à la disposition de la Chambre. Je pense qu'il faudra donner une cote

23 au classeur. Moi, je vais maintenant me pencher sur un organigramme.

24 Mme Anoya (interprétation): Ce sera la pièce d'Accusation 350.

25 M. Nice (interprétation): Merci. Et je pense que cet organigramme

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1 constituera l'intercalaire n°1 de ladite pièce. Je vais demander à ce

2 qu'on place sur le rétroprojecteur la version anglaise du document.

3 (Intervention de l'huissier.)

4 Merci. Avez-vous préparé en version manuscrite qui pourrait être examinée

5 autant que de besoin par la Chambre ou l'accusé, un organigramme qui

6 montre la structure de ces services? Ceci ensuite a été transformé en une

7 version anglaise.

8 Et vous êtes prêt à fournir des explications au regard de la version

9 anglaise, et vous attirerez immédiatement notre attention sur le fait

10 qu'il y a eu traduction de vos mentions manuscrites en anglais et qu'il y

11 a eu une erreur d'orthographe.

12 Je pense que là on voit un nom "Slobodan Kovacevic". Mais, en fait, il

13 faudrait lire "Slobodan Rakocevic", R-A-K-O-C-E-V-I-C. Est-ce bien exact?

14 C'est ce qu'on voit sur le côté gauche de l'organigramme?

15 Réponse: Il est exact de dire que c'est moi-même qui ai tracé de ma propre

16 main un schéma, un organigramme du système d'organisation dans les forces

17 armées de l'ex-armée populaire yougoslave. Le schéma ou l'organigramme que

18 j'ai retrouvé ici, en version anglaise, correspond à l'organigramme que

19 j'ai dessiné moi-même.

20 Question: Mais il s'inspire donc de ces mentions manuscrites. Pourriez-

21 vous nous aider sur les parties de cet organigramme en anglais qui

22 intéresse les Juges?

23 Est-il exact qu'il y a une direction de la sécurité au centre? Il y a le

24 secrétariat national de la Défense nationale, "S-S-N-O"? Et on voit entre

25 parenthèses le nom d'Aleksandar Vasiljevic au regard de cette mention, de

Page 12690

1 cette case. Est-ce que cet homme était un officier au de grade général, et

2 est-ce que c'était lui le responsable?

3 Réponse: C'est exact, l'administration de la sécurité se trouvait être le

4 niveau le plus élevé, chargé de la sécurité ou dans les forces armées. Et

5 à la tête de cette direction chargée de la sécurité, il y avait un général

6 répondant au non de Aleksandar Vasiljevic.

7 M. Nice (interprétation): En dessous de cette case-là, vers la droite, on

8 voit qu'on fait référence…

9 M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic?

10 M. Milosevic (interprétation): Est-ce que je peux obtenir moi aussi cet

11 organigramme? Parce que dans le jeu qui m'a été donné, il n'y a pas

12 d'organigramme, il y a juste le règlement de service.

13 M. le Président (interprétation): Vous devriez trouver ceci à

14 l'intercalaire n°1.

15 Examinez l'intercalaire n°1, s'il vous plaît. Est-ce que vous l'avez

16 trouvé?

17 M. Milosevic (interprétation): Oui, en effet.

18 M. Nice (interprétation): Que trouve-t-on sous cette case où l'on avait

19 trouvé la mention "SSNO", s'agissant de la 1re, de la 3e, de la 5e et de la

20 7e Armées, qui ne nous intéressent pas aujourd'hui? Mais on voit à gauche

21 quelque chose à propos de quoi vous pouvez nous aider, puisqu'on parle là

22 des forces aériennes et de la défense aérienne, du service de sécurité

23 relevant de celui-ci. Le chef de la sécurité était Slobodan Rakocevic:

24 est-ce exact?

25 Réponse: C'est exact.

Page 12691

1 M. Nice (interprétation): Et puis, on voit une séparation à partir de

2 cette case; on voit trois QG ou sections de service de contre-espionnage

3 du KOS. Est-ce que vous travaillez dans un de ces services?

4 M. Kwon (interprétation): Est-ce que cela ne devrait pas être KOG plutôt

5 que KOS?

6 M. Nice (interprétation): Effectivement, il faudrait que ce soit KOG, K-O-

7 G, plutôt que KOS. Est-ce que vous travaillez dans l'un de ces trois

8 services?

9 M. Candic (interprétation): L'appellation officielle n'a jamais été KOS,

10 K-O-S. Dans les forces armées, l'appellation officielle dans l'ex-

11 Yougoslavie avait été de dire "Service de sécurité dans les forces

12 armées". Et, dans le cadre de ce service de sécurité, il y avait des

13 organes de sécurité au sein des unités, à savoir qu'il s'agissait

14 d'officiers en uniforme et il y avait des groupes de contre-espionnage, à

15 savoir des officiers qui étaient en civil et qui, eux, avaient des tâches

16 tout à fait différentes par rapport aux officiers qui se trouvaient, eux,

17 au sein des unités où il y avait d'autres soldats et d'autres officiers

18 confondus.

19 M. Nice (interprétation): Revenons, si vous le voulez bien, à la question

20 qu'avait posée le Juge Kwon.

21 Sur cet organigramme qui traduit assez bien ce que vous avez dit ou peut-

22 être moins bien -on ne le sait pas-, on voit une inscription: KOS. Est-ce

23 que cela devrait être KOS ou KOG, ou ni l'une ni l'autre?

24 M. Candic (interprétation): Sur l'organigramme, là où l'on a inscrit KOS,

25 il vaut mieux mettre KOG, parce qu'il s'agissait de "groupe" de contre-

Page 12692

1 espionnage. Je parle là de la partie gauche de la page.

2 M. le Président (interprétation): Avant de passer à autre chose, je

3 précise que nous avons entendu parler pendant tout ce volet du procès du

4 KOS. Pourrait-on avoir une explication à ce propos?

5 M. Nice (interprétation): Pourriez-vous aider les Juges sur ce point? Est-

6 ce que le terme KOS était utilisé, même s'il l'était à mauvais escient, et

7 à quoi faisait-on référence lorsqu'on utilisait ce terme?

8 M. Candic (interprétation): Bien sûr que je peux apporter une explication.

9 Le terme "KOS" est utilisé exclusivement dans le peuple, parce que c'est

10 une appellation qui est restée depuis la Deuxième Guerre mondiale. KOS

11 voulait dire "Service de contre-espionnage". Mais ce service-là, après la

12 Deuxième Guerre mondiale, a été modifié au sein de la JNA et est devenu

13 "Service de sécurité des forces armées de la RSFY". Et l'appellation

14 officielle est "Service de sécurité" et non pas KOS.

15 Question: Il faudrait donc que ce soit KOG et non pas KOS, qui est un

16 reliquat du passé.

17 Nous sommes toujours à l'examen de cet organigramme. Nous voyons sur la

18 gauche qu'il y a un lien avec les forces aériennes, la défense

19 antiaérienne et les unités de sécurité de ce commandement, sections 1, 3

20 et 5. Puis, on voit en dessous ces unités qui travaillaient dans cette

21 zone immédiate.

22 Pourriez-vous nous donner une phrase ou deux en guise d'explication? Vous

23 ne travaillez pas dans ce secteur, mais il serait utile que nous soyons

24 informés.

25 Réponse: Je n'ai pas travaillé dans ce secteur à l'époque où j'étais dans

Page 12693

1 la KOG, mais auparavant j'avais travaillé dans l'un des segments

2 concernés: il s'agissait d'unités subordonnées au commandement de

3 l'aviation de guerre et de la défense antiaérienne. Dans ces départements,

4 il y avait des secteurs de sécurité pour ce qui est du 1er, du 3e et du 5e

5 Corps. Le 1er Corps se trouvait à Belgrade, le 3e se trouvait à Nis et le

6 5e Corps de l'aviation avait son siège à Zagreb. Et dans ces Corps, il y

7 avait des départements chargés de la sécurité, tout comme au commandement

8 de l'aviation de guerre, il y avait un secteur chargé de la sécurité.

9 Question: L'organigramme nous donne une idée d'ensemble qui nous permet de

10 voir qu'il y avait bien sûr les forces aériennes, l'armée de terre. Il y

11 avait peut-être aussi les forces navales; je n'en suis pas trop sûr.

12 Pouvez-vous nous aider sur ce point-ci: est-ce que les forces aériennes et

13 leur service de sécurité avaient un intérêt ou une responsabilité

14 particuliers qui auraient été supérieurs à la sécurité dont disposait

15 notamment l'armée de terre ou des unités de ce type?

16 Réponse: Le secteur chargé de la sécurité au niveau du commandement de

17 l'aviation de guerre et toutes les unités qui figurent sur la partie

18 gauche de l'organigramme se trouvaient ramifiés sur tout le territoire de

19 l'ex-Yougoslavie; ce qui fait que le département de la sécurité de

20 l'aviation de guerre et de la défense antiaérienne revêtait une importance

21 bien plus grande que les services de sécurité de l'armée de terre ou de

22 l'armée de mer, puisque leur zone de responsabilité ou l'envergure de leur

23 responsabilité était bien moindre que pour ce qui est de l'aviation de

24 guerre et pour ce qui est de l'armée de terre.

25 Question: Les forces aériennes avaient, en fait, sous leur tutelle un

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1 ensemble du territoire, alors que ce n'était pas le cas pour les forces de

2 l'armée de terre qui avaient une zone de responsabilité plus limitée, est-

3 ce exact?

4 Réponse: Précisément.

5 Question: Voie hiérarchique ou chaîne de commandement, nous allons voir ce

6 qui devrait se passer d'après la loi dans un instant. Mais nous voyons un

7 de ces KOG, K-O-G: d'après vos souvenirs, la voie hiérarchique allait

8 d'abord du commandement des unités de sécurité des forces aériennes et de

9 défense aérienne et puis repartait vers la direction de la sécurité sous

10 la direction de Aleksandar Vasiljevic. Mais, en pratique, au moment où

11 vous exerciez vos fonctions de sécurité, comment fonctionnait la chaîne de

12 commandement?

13 Réponse: Lorsque je vaquais à des fonctions liées à la sécurité, la chaîne

14 de commandement, à savoir le commandement professionnel des unités suivant

15 une ligne verticale ou une hiérarchie verticale, allait d'un organe

16 inférieur vers un organe supérieur, puis celui-ci passait les informations

17 à l'échelon supérieur jusqu'à l'administration de la sécurité et, à son

18 sommet, le général Aleksandar Vasiljevic. Il n'était pas question de

19 sauter l'un quelconque des paliers, il fallait passer par les différents

20 échelons.

21 Question: Cela, c'est en théorie. Mais est-ce que ça voulait dire qu'en

22 théorie les décisions prises en matière d'espionnage faisaient l'objet de

23 rapports à des unités individuelles qui n'étaient pas nécessairement que

24 des unités de sécurité? Par exemple, est-ce qu'une des unités du KOG

25 devait faire rapport aux unités des forces aériennes et de la défense

Page 12695

1 aérienne même?

2 Réponse: Cela ne pouvait fonctionner ainsi et cela ne devait pas

3 fonctionner ainsi.

4 Question: Fort bien. Donc cela remontait directement à Vasiljevic en

5 passant par chacun des échelons, si vous voulez, de cette voie

6 hiérarchique?

7 Réponse: C'est précisément ainsi que cela se passait.

8 Question: Voyons la même pièce qui porte la cote P350. L'accusé a fait

9 référence à cette partie de la pièce. Etait-ce bien l'intercalaire n°2?

10 (L'assistante acquiesce.)

11 Et plus exactement, ce qui nous intéresse, ce sont les paragraphes 16 et

12 17. Peut-on les placer en anglais sur le rétroprojecteur alors que la

13 version BCS sera remise au témoin pour ces paragraphes-là.

14 (Intervention de l'huissier.)

15 Je pense qu'il n'est pas inutile non plus de placer sur le rétroprojecteur

16 le titre de cet ouvrage. En fait, il s'agit d'un extrait du règlement

17 intérieur des organes de sécurité ou des règlements de service des organes

18 de sécurité des forces armées de la RSFY.

19 Nous allons placer la première page pour voir ce dont il s'agit, et puis

20 nous allons placer sur le rétroprojecteur les paragraphes 16 et 17.

21 Ceux-ci se lisent comme suit: "L'organe de sécurité est en rapport de

22 subordination directe à l'officier du commandement de l'unité de

23 l'institution ou de l'état-major des forces armées dont les effectifs sont

24 placés sous ses ordres de façon organique. Et il est responsable de ses

25 activités alors que les organes de sécurité de la JNA dans les

Page 12696

1 organisations de la NVO sont responsables ou doivent rendre compte au

2 secrétaire fédéral adjoint à la Défense nationale."

3 Paragraphe 17: "Le secrétaire fédéral à la Défense nationale ou à un

4 officier militaire agréé par lui, gère les organes de sécurité de la JNA

5 s'agissant de l'application des méthodes et des moyens nécessaires aux

6 activités de ces organes." (Fin de citation.)

7 Est-ce que la chaîne de commandement, dans les faits, fonctionnait

8 conformément aux exigences exprimées dans ce règlement de service,

9 Monsieur le Témoin?

10 Réponse: Eh bien, tel que c'est écrit, non, cela ne correspond pas à la

11 réalité.

12 Question: Et est-ce que ceci tient au fait, comme vous l'avez déjà

13 expliqué, que la chaîne de commandement remontait en passant par les

14 différents paliers des groupes de sécurité et du personnel, jusqu'à

15 Vasiljevic?

16 Réponse: En effet. Il y avait cette ligne verticale et une ligne technique

17 qui remontait vers le général Vasiljevic. Mais maintenant, quand on dit

18 que les organes de sécurité sont subordonnés et tenus responsables à

19 l'égard du commandant de l'unité, à savoir le premier supérieur

20 hiérarchique dans lequel ces organes de sécurité se trouvent, c'est une

21 chose qui n'était là que pour figurer sur le papier. Ils étaient

22 assistants du commandant, oui; mais pour s'exprimer en pourcentage, je

23 dirai qu'à 10% ils l'étaient, et qu'à 90% le fonctionnement des organes de

24 sécurité allait vers la verticale et qu'il se résumait à informer les

25 supérieurs suivant cette filière-là pour remonter jusqu'au général

Page 12697

1 Vasiljevic en direct.

2 Question: Est-ce que, de ce fait, les officiers de sécurité aux différents

3 échelons disposaient d'une autorité qui était suivant les cas, supérieure

4 ou inférieure à ce que semblait indiquer le grade dont ils étaient

5 revêtus?

6 Réponse: Les attributions des officiers chargés de la sécurité ont

7 toujours été plus grandes que leur grade ne l'indiquait dans la pratique.

8 Question: Vous, vous faisiez partie d'une unité de contre-espionnage, ce

9 qui vous préoccupait c'était l'ennemi à l'intérieur. Nous sommes

10 maintenant au début des années 1990, je pense.

11 A l'intention de ceux qui ne connaissent peut-être pas les pays où existe

12 ce type de pénétration en matière de sécurité, est-ce que vous pourriez -à

13 l'intention de ces personnes- nous dire dans quelle mesure les

14 organisations, les entreprises, les écoles étaient infiltrées par les

15 services de renseignement?

16 Réponse: Messieurs les Juges, quoique la chose ait été contraire aux

17 dispositions de la loi -et quand je dis "contraire aux dispositions de la

18 loi", cela signifie qu'à l'époque ce qui était fait par les organes de

19 sécurité n'était pas conforme aux dispositions légales-, toutefois, en

20 1989, 1990 et 1991, suivant des instructions et ordres émanant du chef de

21 l'administration de la sécurité, à savoir le général Aleksandar

22 Vasiljevic, et le directeur du département chargé de la sécurité, à savoir

23 mon supérieur direct, le colonel Slobodan Rakocevic, nous avions mis en

24 place un réseau de collaborateurs, un réseau d'informateurs dans toutes

25 les sphères de la société civile.

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1 Question: Vous dites: "toutes les sphères". Prenons quelques exemples

2 hypothétiques. Si vous aviez une petite entreprise avec 50 employés, est-

3 ce que vous pouviez vous attendre à ce qu'il y ait une infiltration de ce

4 genre? S'il y avait une petite école comptant une dizaine d'enseignants,

5 est-ce que vous pouviez vous attendre à ce que, là aussi, il y ait

6 infiltration?

7 Réponse: L'objectif fondamental de cette intégration, infiltration dans

8 toutes les sphères de la vie sociale, y compris les entreprises et les

9 écoles, je dirais que la finalité était celle de s'infiltrer dans les

10 instances dirigeantes du pouvoir et de la police. Et il convient d'ajouter

11 à cela que la sphère des médias, en premier lieu, puis la sphère

12 économique, la sphère de l'éducation, avaient en effet fait l'objet de

13 l'intérêt des organes de sécurité pour ce qui est de la mise en place de

14 réseaux de collaborateurs.

15 M. Nice (interprétation): Nous allons reprendre dans un instant ces

16 différentes instances dont vous avez parlé. Mais, pour terminer ma

17 question, est-ce qu'on a ciblé aussi les commerces, les entreprises, les

18 écoles ou pas? De cette façon, nous aurons une idée plus précise de la vie

19 telle qu'elle se présentait sur le territoire.

20 M. Candic (interprétation): Je vais reprendre. Tous les segments de la

21 société avaient été visés, entre autres, les écoles et les entreprises. Et

22 l'objectif fondamental était de se placer au service des instances de

23 pouvoir et de la police.

24 M. Robinson (interprétation): Et est-ce que cette pénétration, cette

25 infiltration se faisait sans qu'on tienne nullement compte de

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1 l'appartenance ethnique?

2 M. Candic (interprétation): Cette infiltration se faisait indépendamment

3 de l'appartenance ethnique.

4 M. Nice (interprétation): En vertu de la loi, est-ce que votre service

5 était autorisé à mener des enquêtes sur des particuliers, sur des civils,

6 en temps normal?

7 Réponse: D'après la loi, les services de sécurité des forces armées

8 n'avaient jamais le droit de conduire des investigations contre des

9 civils, à moins que ces civils-là n'aient déployé des activités dirigées

10 contre les forces armées. Mais, dans ce cas-là également, ces organes de

11 sécurité étaient censés s'adresser par écrit, présenter une demande par

12 écrit aux autorités compétentes du ministère de l'Intérieur, et réaliser

13 ce type de tâches de concert avec le ministère de l'Intérieur, à savoir de

14 concert avec leur service de sécurité à eux.

15 Question: Au moment qui nous intéresse, à cette époque-là, est-ce qu'en

16 pratique, vos services menaient des enquêtes sur des civils sans

17 s'acquitter de toutes ces formalités?

18 Réponse: Quand on parle de la pratique des années 1989, 1990, 1991, le

19 service de sécurité met l'accent, pour ce qui est de ses activités, sur

20 l'élément civil et n'informait de la chose en aucune façon le ministère de

21 l'Intérieur, pas plus que les organes de la sûreté d'Etat, également

22 compétents. Je dirais même plus: les réseaux de collaborateurs ou

23 d'informateurs étaient créés au sein même des organes auprès desquels on

24 était censé présenter des requêtes.

25 Question: D'après ce que vous avez pu en juger, ces formes non légales

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1 d'enquêtes faisaient-elles l'objet de rapports allant jusqu'à l'échelon de

2 Vasiljevic, ou bien est-ce qu'il était autorisé ou pas à donner son feu

3 vert pour donner son feu vert pour ce type d'enquêtes illégales?

4 Réponse: Le général Aleksandar Vasiljevic et Slobodan Rakocevic avaient

5 précisément été les personnes qui avaient initié ce que je viens de vous

6 raconter: cela avait été leurs ordres à eux; aucun autre organe de

7 sécurité ne songerait à faire une chose pareille. Il ne leur viendrait

8 même pas à l'esprit de faire quelque chose sans qu'ils le sachent.

9 Question: Avant de passer à autre chose, je vais évoquer quelque chose

10 qu'on ne trouve pas dans le résumé, mais bien dans la déclaration

11 préalable de l'accusé; l'accusé ou les amici pourront trouver ceci à la

12 page 4 de la déclaration.

13 Est-ce qu'en 1990 ou 1991, il s'est présenté une situation au cours de

14 laquelle Rakocevic a fait référence à l'accusé, ainsi qu'à l'Académie des

15 sciences?

16 Réponse: Messieurs les Juges, il y a eu une situation de la sorte, à

17 savoir qu'il s'est tenu une réunion particulière avec les membres du

18 groupe central de contre-espionnage, donc les gens qui avaient eu pour

19 mission d'intervenir sur le territoire tout entier de l'ex-Yougoslavie.

20 Car, comme on peut le voir sur le premier des schémas que nous avons

21 étudiés, ce groupe de renseignement central avait trois secteurs: un

22 premier, un deuxième et un troisième, à Skopje, Zagreb et Sarajevo.

23 Et depuis tout le territoire de la Bosnie-Herzégovine, les collaborateurs,

24 les informateurs présentaient des rapports aux organes de sécurité

25 appartenant à ce groupe de contre-espionnage. Ces informations ont donné

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1 lieu à la rédaction de rapports qui allaient directement jusqu'à Rakocevic

2 et, bien entendu, jusqu'à Aleksandar Vasiljevic qui avait chapeauté cette

3 administration des services de sécurité.

4 A la réunion dont j'ai parlé et qui a été organisée par Slobodan

5 Rakocevic, je dirais qu'il avait été visiblement très en colère. Pourquoi?

6 Parce qu'il n'avait pas eu l'occasion de lire pratiquement aucun des

7 rapports venant de Belgrade. Et il avait expliqué sa colère en disant qu'à

8 Belgrade, ceux qui menaient la ronde, c'était l'Académie serbe des

9 sciences et des arts et qu'il y avait sur scène un projet appelé

10 "Mémorandum" -l'initiateur principal de ce projet appelé "Memorendum"

11 était Slobodan Milosevic-, et que nous autres, en notre qualité d'organe

12 de sécurité, nous n'avions aucun point d'appui, aucune information

13 concernant ce qui se passait à Belgrade.

14 M. Nice (interprétation): Par conséquent, nous avons ici un officier du

15 grade de Slobodan Rakocevic. Et est-ce qu'il était colonel? Il me semble

16 que oui.

17 Et le problème que vous aviez c'est que, vous ou lui, c'est que vous ne

18 receviez aucun renseignement de ce service, alors que vous obteniez des

19 renseignements de partout ailleurs, chaque fois que vous l'estimiez

20 nécessaires grâce à votre réseau de sources diverses, n'est-ce pas?

21 M. Candic (interprétation): C'est exact. Le colonel Slobodan Rakocevic

22 voulait dire par là que les organes de sécurité de ce groupe de contre-

23 espionnage n'avaient pas de filière de collaborateurs à Belgrade à partir

24 d'où l'on tirait tous les fils, pour reprendre ses termes.

25 Question: Avant de passer à autre chose, je vous demande ceci: est-ce que

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1 c'était surprenant ou est-ce qu'il était courant qu'un officier de ce

2 grade, à cette époque-là, établissait un lien s'agissant de ces problèmes

3 dont on vient de parler avec l'Académie des Sciences et des Arts, de la

4 façon dont il l'a fait?

5 Réponse: Eh bien, d'après ce qu'il a fait, je dirai qu'il l'a fait selon

6 la façon dont j'ai compris les choses. Eh bien, ça s'est fait pour une

7 raison simple: il a vu dans ce "Memorendum" et dans ce que Slobodan

8 Milosevic était en train de faire, que l'on s'aventurait ainsi vers un

9 démantèlement de la République socialiste fédérative de Yougoslavie, une

10 désintégration de cette RSFY et une mise en place d'un projet de Grande

11 Serbie.

12 Question: Paragraphe 11 du résumé. Au mois d'octobre 1991, donc un peu

13 plus tard, après le retrait du 5e Corps d'armée des forces aériennes

14 depuis Zagreb jusqu'à Bihac…

15 Ce sera la page 26, coordonnée B2 de l'atlas. Je ne pense pas que ce soit

16 nécessaire de poser cette partie de l'atlas sur le rétroprojecteur. Je

17 pense que les Juges sont au courant, c'est simplement pour qu'ils aient

18 une référence.

19 Est-ce qu'après cette date vous vous êtes trouvé dans une situation où

20 vous avez escorté des gens qui allaient mener une enquête sur l'émetteur

21 radio à la base aérienne de Bihac? Et est-ce que vous avez passé environ

22 quatre jours à cet endroit?

23 Réponse: Messieurs les Juges, c'est exact. Vers fin septembre/début

24 octobre, et là je n'arrive pas à me remémorer la date juste, j'ai reçu un

25 ordre de la part du colonel Slobodan Rakocevic, au terme duquel il

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1 s'agissait pour moi de faire passer une colonne de trois véhicules de

2 reconnaissance radio qui avaient pour mission de détecter par

3 radiogoniométrie afin de découvrir les sites des émetteurs-récepteurs

4 d'amateurs à proximité de l'aéroport de Bihac. Ces émetteurs-récepteurs

5 faisaient transmission de renseignements à Zagreb concernant tout

6 décollage d'avions partant depuis cet aéroport de Bihac.

7 Question: Est-il exact de dire qu'au moment où vous vous êtes trouvé sur

8 les lieux, vous avez constaté que les organes de sécurité et les services

9 de contre-espionnage du 5e Corps avaient été déplacés, s'étaient installés

10 au pavillon de chasse de Bihac et que c'est là que vous avez rencontré un

11 de vos amis le commandant Cedo Knezevic?

12 Réponse: D'abord, j'ai confié ces véhicules à un colonel Jovan Topalovic,

13 chef du secteur de sécurité du 5e Corps de l'aviation à l'aéroport de

14 Bihac. Et lui, à l'époque… à ce moment-là plutôt, avait été soul. A mon

15 arrivée, j'ai pu voir qu'il y avait plusieurs endroits où l'on voyait

16 jaillir des flammes à proximité de l'aéroport. Il était très en colère. Je

17 lui avais demandé de savoir ce qui se passait, et il m'a dit que tous les

18 avions de l'aéroport de Bihac avaient pris l'air et qu'ils avaient

19 incendié ou carrément rasé le sol de Zegar ou quelque chose de ce genre…

20 Vaganac ou Zegar. Mais, je crois avoir vu cela de mes yeux.

21 M. Nice (interprétation): Cet incident ne se trouve pas dans le résumé,

22 mais bien à la page 5 de la déclaration préalable.

23 Essayons d'avancer dans le temps, dans la mesure du possible, Monsieur le

24 Témoin.

25 Si je ne m'abuse, lorsque je vous ai parlé de ces événements généraux, il

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1 va aboutir à cette rencontre avec le commandant Knezevic. Est-ce qu'à ce

2 moment-là, à ce pavillon de chasse vous avez également vu certains membres

3 du SDB de Serbie?

4 M. Candic (interprétation): A mon arrivée à Bihac, je ne savais pas au

5 juste où se trouvait Cedo Knezevic. J'ai interrogé le colonel Topalovic,

6 c'est lui qu'il m'a dit où il se trouvait; il m'a donné un véhicule pour

7 aller jusqu'à cette maison de chasse où se trouvait le commandant Cedo

8 Knezevic. A côté de Cedo Knezevic, dans cette maison, il y avait plusieurs

9 membres du 2ème Détachement du service de renseignement de l'aviation de

10 guerre et de la Défense antiaérienne, et il y avait d'autres personnes qui

11 n'avaient pas d'insigne de l'armée populaire yougoslave, et quelques

12 membres de la police militaire officielle.

13 Question: Est-ce que vous avez pu découvrir s'il y avait à cet endroit des

14 membres du SDB de Serbie? Répondez simplement par oui ou par non.

15 Réponse: Il y avait aussi des membres du service de sûreté de l'Etat de

16 Serbie.

17 Question: Avez-vous découvert les circonstances qui les avaient amenés à

18 cet endroit? Et, si c'est bien le cas, de quelle façon l'avez-vous appris?

19 Est-ce qu'on vous a relaté ces circonstances ou est-ce que cela venait

20 d'autres sources?

21 Réponse: Je savais que certains membres du service de sûreté de l'Etat de

22 Serbie, notamment ceux qui avaient fui la République de Croatie à savoir

23 des Serbes qui avaient travaillé à la sûreté de l'Etat de la République de

24 Croatie, étaient reçus ou employés aux services de la sûreté de l'Etat de

25 Serbie, puis allaient à Bihac, Lika, Banija, Kordun pour se mettre à la

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1 tête des unités des formations paramilitaires sur ces territoires-là.

2 Bien entendu, l'endroit où ils s'attardaient avant que d'aller dans les

3 régions que je viens de citer, c'était précisément cette maison de chasse

4 à Bihac où avait son siège le commandant Cedo Knezevic, ainsi que certains

5 autres agents opérationnels de ce groupe de contre-espionnage de

6 l'aviation de guerre et de la défense antiaérienne.

7 Question: Quelle que soit leur évolution de carrière au moment où ces

8 hommes ont été redéployés sur Bihac, ils étaient anciennement des membres

9 du SDB?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Passons à ce que vous avez appris de la part du commandant

12 Knezevic. Vous êtes-vous rendu compte qu'il menait des actions, notamment

13 avec le lieutenant colonel Smiljanic?

14 Réponse: Oui, je l'ai constaté.

15 Question: Et vous a-t-il dit qu'on lui avait assigné une mission spéciale?

16 Réponse: Il ne me l'a pas dit lui-même. Je lui ai demandé s'il était là

17 pour dormir, pour rester coucher ou s'il faisait quelque chose parce que

18 je n'ai rien entendu dire à son sujet à Belgrade. Alors, il a commencé à

19 m'expliquer quelle avait été sa mission, quelles avaient ses tâches. Pour

20 être plus concret, je dirai qu'il m'a expliqué qu'il était en corrélation

21 directe avec l'administration de la sécurité et le général Aleksandar

22 Vasiljevic, qu'il était chargé de conduire l'action opérationnelle appelée

23 "Proboj-1", "Percée-1", et que se trouvait être chef de cette action

24 opérationnelle le dénommé Smiljanic Dusan, et que lui était son adjoint.

25 Et en répondant à l'une de mes questions consistant à savoir quelle avait

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1 été la finalité de cette action opérationnelle, il m'a répondu qu'il

2 s'agissait d'armer les Serbes dans la Banija, Lika, Kordun et dans la

3 Krajina de Bosnie.

4 Question: Un petit instant, s'il vous plaît, nous allons nous interrompre

5 une seconde pour parler de ces zones. Ce ne sont pas vraiment des villes

6 qui sont concernées. On trouvera ces régions à la page 22 de l'atlas à la

7 lettre "C". Et si je vous montre mon atlas à moi, vous verrez que ce qui

8 nous intéresse, ce sont ces deux endroits assortis d'une lettre qui se

9 répartissent sur toute la page. Vous voyez donc ce dont il s'agit: Kordun

10 et Banija. C'est un peu difficile à voir sur l'atlas.

11 Il vous a dit que c'était là l'objectif poursuivi dans cette mission.

12 Plus tard, je vais vous demander quelles sont les parties dont vous avez

13 vous-même été témoin et pour quelles parties vous avez dû dépendre de ce

14 qu'il vous a dit. Cependant, cet homme vous a-t-il expliqué comment ce

15 processus d'armement devait se dérouler?

16 Réponse: Oui, il m'a expliqué comment le processus entier était censé se

17 dérouler. En effet, par le biais des collaborateurs, le réseau

18 d'informateurs et collaborateurs et les responsables du SDS dans les

19 régions que j'ai citées, eh bien, ces gens-là venaient en personne chez

20 lui ainsi que chez le lieutenant-colonel Smiljanic pour indiquer quel est

21 l'armement, quelles sont les munitions qui leur sont nécessaires aux fins

22 de pouvoir se préparer, voire réaliser certaines actions sur ces

23 territoires-là et aux fins d'être à même de s'opposer aux Croates étant

24 donné qu'à ce moment-là la guerre en Croatie avait déjà commencé.

25 Question: C'est l'explication qu'il vous a donnée! Mais vous, est-ce que

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1 vous avez été le témoin oculaire d'une partie de ce processus ou pas?

2 Réponse: Je lui ai d'abord demandé: "D'où te procures-tu les armes?". Et

3 il m'a répondu qu'ils donnaient cela depuis les entrepôts de la Défense

4 territoriale de Bosnie-Herzégovine. Puis, comme c'était le soir, il

5 faisait déjà nuit, il m'a dit que le lendemain il allait me montrer

6 certains de ces entrepôts; et je dirai qu'il l'a effectivement fait. Je me

7 suis rendu dans trois de ces entrepôts.

8 Question: Et dans ces entrepôts, quelle quantité d'armes avez-vous

9 trouvée?

10 Réponse: Eh bien, dans ces trois entrepôts -et je n'ai pas vu tous les

11 entrepôts, je ne savais pas au juste combien il y en avait-, il devait y

12 en avoir plus que trois, mais les trois où j'ai été étaient à moitié

13 vides, mais si l'on additionne les choses dans les trois, il devait

14 certainement y avoir de quoi armer de 20 à 30.000 hommes; à coup sûr.

15 Question: Merci.

16 Est-ce qu'il y avait des archives montrant comment se déroulait ce

17 processus d'armement et du fait que des armes étaient délivrées à des

18 particuliers?

19 Réponse: C'est tout à fait par hasard que j'en suis arrivé à apprendre

20 qu'il y avait un registre très précis, tenu à jour, pour ce qui est des

21 armes délivrées aux individus et des quantités, notamment qui ont été

22 distribuées.

23 Je me suis procuré ce renseignement-là un soir, quand j'étais couché dans

24 une pièce qui avait servi de bureau et qui avait servi aussi de pièce de

25 repos. J'étais en train de regarder la télévision, et le commandant Cedo

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1 Knezevic était en train de taper à la machine un rapport quelconque. A un

2 moment, je lui ai demandé s'il avait besoin d'un coup de main de ma part.

3 Je m'étais levé du lit et je me suis rapproché, je suis venu dans son dos;

4 il m'a dit que non, que ce n'était pas nécessaire. Sur le papier qui était

5 dans la machine à écrire, j'ai vu l'en-tête et, dans l'en-tête, il y avait

6 écrit "Action opérationnelle Proboj-1 (Percée 1) - Teneur des activités

7 reliées à l'armement des Serbes pour tel et tel jour".

8 Par la suite, sous ce petit objet, j'ai vu les noms des personnes

9 auxquelles on avait distribué des armes. Et d'après ce que j'ai pu

10 remarquer -je ne me suis pas attardé très longtemps derrière son dos,

11 parce que je sais que les gens n'aiment pas cela-, j'ai pu constater que

12 tous les noms étaient des noms serbes.

13 Question: Avez-vous pu voir à qui cette lettre était adressée ou bien

14 quelqu'un vous l'a-t-il dit?

15 Réponse: Bien sûr. Sur la page de droite, il était écrit "Administration

16 de la sûreté - A remettre entre les mains du général Aleksandar

17 Vasiljevic."

18 Question: J'aimerais qu'on remette maintenant au témoin et qu'on place

19 également sur le rétroprojecteur la dernière pièce à conviction parmi les

20 trois que nous allons examiner, pièce à conviction 350 -je crois que c'est

21 l'intercalaire 3.

22 Je demande à Mme l'Huissière d'avoir l'amabilité de placer la première

23 page de la version en cyrillique sur le rétroprojecteur, en premier, et

24 puis ensuite, la dernière page de la version en cyrillique où l'on voit la

25 ligne de signatures que nous souhaitons également voir sur le

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1 rétroprojecteur.

2 Nous constatons donc qu'il s'agit d'une lettre datée du 15 ou du 16

3 octobre… -non, je crois que c'est bien le 16 octobre 1994- et qu'elle

4 émane de Dusan Smiljanic, l'homme dont vous avez parlé, avec lequel

5 Knezevic travaillait à l'époque.

6 Je demanderai maintenant à Mme l'Huissière de bien vouloir placer la page

7 3 de la version anglaise sur le rétroprojecteur, et de mettre sous les

8 yeux du témoin la page qui comporte le numéro du Greffe 02009470. C'est la

9 troisième page de la version originale. Merci beaucoup.

10 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, ceci est une longue lettre

11 envoyée au général Mladic, émanant -comme nous venons de le dire- de

12 Smiljanic. C'est une lettre historique qui comporte un certain nombre de

13 protestations; celles-ci peuvent être intéressantes, mais elles n'ont pas

14 un lien direct avec notre travail ici.

15 Mais, en tout cas, sur la page que nous sommes en train d'examiner, est-ce

16 qu'on trouve, Monsieur Candic, le texte suivant? Voyez-vous dans un

17 passage de ce texte les mots suivants -je cite-: "Au début d'août 1991,

18 sur instruction de l'administration de la sûreté de la DB, l'équipe

19 opérationnelle Proboj-2 a été créée sous ma direction." (Fin de citation.)

20 Ensuite, d'autres références à ce même fait.

21 Si nous descendons plus bas dans la page, au paragraphe suivant, on trouve

22 -je cite-: "Dans la période allant d'août à octobre 1991, nous avons

23 distribué ou fait sortir de ce qui désormais représente des arsenaux

24 oustachis près de 20.000 armes, et participé à l'organisation et à la

25 réalisation de tâches professionnellement liées à la sécurité, c'est-à-

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1 dire d'un niveau de qualité élevé que le général connaissait lui aussi.

2 Ceci peut être prouvé par des documents et des rapports. (Fin de

3 citation.)

4 Si nous descendons plus bas dans la page -j'essaie d'aller vite-, vers le

5 bas de la page, nous reprenons donc avec la phrase qui commence par "A

6 Bihac…"

7 Je cite-: "A Bihac, en janvier 1991, j'ai accepté la fonction de chef de

8 la sécurité au sein du 10e Corps d'armée."

9 Ensuite, il est fait mention des supérieurs et d'autres officiers. Et

10 puis, plus bas dans le texte, nous lisons -je cite-: "Un grand nombre

11 d'officiers, notamment ceux de la région, étaient grandement démoralisés."

12 (Fin de citation.)

13 Et puis, encore plus bas, pratiquement tout en bas de la page -je cite-:

14 "En raison d'un accord avec la OB, j'ai organisé des officiers provenant

15 de la police pour armer les Serbes de la ville. Je ne me souviens pas

16 exactement, mais je pense que 5.000 armes d'infanterie ont été

17 distribuées. La base logistique dirigée par le colonel Skondric était la

18 source d'où provenaient ces armes." (Fin de citation.)

19 Sur la page suivante, est-ce que nous trouvons la phrase suivante -je

20 cite-: "Alors que l'unité avait déjà commencé à être créée, on nous a

21 demandé d'engager au sein de cette unité, immédiatement, des officiers

22 venant de ces régions." (Fin de citation.)

23 Et puis, le texte se poursuit, et je ne crois pas que j'ai besoin de faire

24 d'autres citations.

25 Je reviendrai à Proboj-2 dans une seconde. Mais s'agissant de ce passage

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1 de la lettre où il est question de l'armement des Serbes, est-ce que ceci

2 concorde avec ce que vous nous avez dit et ce que vous avez vécu, Monsieur

3 le Témoin?

4 Réponse: Ce que j'ai vu lorsque vous avez fait lecture de ce texte, et

5 j'ai lu ce passage également, correspond à 100%, même si je n'avais pas

6 connaissance de l'existence de ce document. Mais tout cela est exact et il

7 me semble que l'appréciation du nombre d'armes distribuées faite par moi

8 est à peu près exacte, aussi bien que les localités dont il a été

9 question. Je reste sans voix; en fait, je crois que tout ceci est très

10 vrai.

11 M. Nice (interprétation): Selon cette lettre…

12 M. le Président (interprétation): Oui, il y a une objection?

13 Mme Higgins (interprétation): Monsieur le Président, j'aimerais élever, en

14 quelques mots, une objection en effet.

15 Mon collègue a dit que cette lettre était une lettre historique.

16 Cependant, il n'est pas tout à fait évident que le témoin puisse

17 réellement parler de cette lettre, même s'il affirme avoir connaissance de

18 son contenu. La Chambre de première instance a été relativement stricte

19 jusqu'à présent s'agissant des lettres soumises par l'accusé et vous

20 pourriez peut-être réfléchir à l'admissibilité de ce document, compte tenu

21 du fait que le témoin a déclaré qu'il ne savait rien réellement au sujet

22 de l'existence de cette lettre.

23 M. le Président (interprétation): Eh bien, Madame Higgins, les lettres que

24 l'accusé a présentées sont des lettres qui venaient de lui et qui lui ont

25 servi à des contre-interrogatoires. Nous l'avons autorisé à se servir de

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1 ces lettres pour ses contre-interrogatoires. Nous n'avons pas autorisé

2 l'accusé à les verser au dossier en tant que pièces à conviction pour une

3 très bonne raison: c'est que c'était en fait des documents qui étaient

4 très utiles au contre-interrogatoire et que l'accusé peut citer des

5 témoins pour en parler plus tard.

6 Quant à ce document -et le Procureur peut nous parler de son

7 authenticité-, il parle de lui-même et nous pensons qu'il n'est pas besoin

8 de preuve supplémentaire à ce sujet. Mais nous demanderons au Procureur

9 s'il peut nous dire quelques mots pour confirmer l'authenticité du

10 document.

11 M. Nice (interprétation): Monsieur le Président, je peux parler de la

12 provenance de ce document en quelques mots. C'est un document qui parle de

13 lui-même. J'ai utilisé le mot "historique" parce que, bien sûr, il est

14 daté de 1994 et il rend compte d'événements qui ont eu lieu avant. Ceci ne

15 change rien du point de vue de son admissibilité.

16 La capacité du témoin à identifier des passages de ce texte concordant

17 avec son expérience est très utile s'agissant du document en tant que tel,

18 que nous cherchons à vous soumettre et donc s'agissant de confirmer des

19 preuves déjà présentées. Donc l'exercice auquel nous procédons en ce

20 moment est très utile et tout à fait approprié.

21 Et, si vous me le permettez, dans une minute à peu près, je parlerai à

22 nouveau de la provenance du document que vous avez sous les yeux.

23 Puis-je maintenant poursuivre? Est-ce que cela convient?

24 Monsieur le Témoin, la lettre, pour autant que nous puissions nous en

25 rendre compte, parle de la période d'août à octobre 1991 et fait mention

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1 de quelque chose que l'on appelle Proboj-2. Nous avons entendu des

2 interprètes quel est le sens à donner au mot "Proboj", à savoir "Percée".

3 Est-ce que vous avez appris l'existence de Proboj-2 à un moment ou un

4 autre?

5 M. Candic (interprétation): Il est vrai que j'ai eu connaissance de

6 l'existence de ce Proboj-2, qui était également une opération sous la

7 direction du commandant Karan Ljuban, du groupe opérationnel de contre-

8 espionnage, à armer les Serbes, mais cette fois-ci en Slavonie orientale

9 et en Baranja.

10 Question: Je me permettrai de vous interrompre quelques instants. Cela

11 n'est aucunement une critique de la façon dont vous présentez votre

12 témoignage, mais j'aimerais intervenir pour faciliter la tâche des Juges.

13 Compte tenu de ce que vous avez appris au sujet de ce projet, que vous

14 dites avoir appris, je vous demande si vous avez constaté l'existence du

15 projet par vous-même ou si vous en avez simplement entendu parler?

16 Question: Lorsque je parle de l'opération Proboj-2, je ne fais pas

17 référence à des choses comme on m'a dite, mais à des choses que j'ai vues.

18 Mais évidemment, avant Proboj-2, il y avait un certain nombre d'événements

19 où j'étais un participant actif, donc que j'ai vus de mes yeux.

20 Il s'agit de cela. Peu de temps après que j'ai appris l'existence de

21 l'action opérationnelle Proboj-1, Knezevic est venu à Belgrade et, pour

22 être plus précis, en fait à Zemun. Et, avec le commandant Ljuban Karan et

23 lui, nous avons pris un café ce jour-là, ensemble.

24 Et le commandant responsable de la Slavonie orientale et de la Baranja

25 s'est plaint du fait que les Serbes dans ces régions n'avaient pas

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1 suffisamment d'armes. A ce moment-là, Cedo Knezevic a offert ses bons

2 services et a dit: "Pourquoi tu ne me l'as pas dit avant? Moi, j'ai

3 suffisamment d'armes pour armer la moitié de l'Amérique." Et il a promis

4 de s'occuper de cela dès son retour à Bihac, d'envoyer des camions remplis

5 d'armes.

6 Ces deux camions sont effectivement arrivés, mais ils sont arrivés un jour

7 où le commandant Karan Ljuban n'était plus là, car il était en mission en

8 Slavonie orientale avec les membres de son équipe. Et comme ceux qui

9 avaient apporté les armes à bord des camions ne savaient pas quoi en

10 faire, moi, je suis allé voir le colonel Slobodan Rakocevic pour lui

11 demander ce qu'il convenait de faire avec ces deux camions, pensant qu'il

12 était au courant de leur arrivée.

13 Le colonel Slobodan Rakocevic m'a à ce moment-là agressé; il était très

14 fâché. Sur-le-champ, il a laissé tomber les papiers qu'il examinait à ce

15 moment-là, il est sorti et il a ordonné que les armes soient déchargées

16 dans un grand entrepôt central du groupe contre-espionnage central de

17 Zemun, dans des salles de classe.

18 Et les rapports qui ont été rédigés par la suite par le commandant Karan

19 Ljuban, depuis la Slavonie orientale et la Baranja, ces rapports, à partir

20 de ce jour-là, portaient en en-tête le titre "Action opérationnelle

21 Proboj-1". Ensuite, il y avait une description des événements et quelques

22 détails au sujet de la façon dont ces choses ont fini par être connues.

23 Donc j'ai également entendu parler de certains détails relatifs à l'action

24 opérationnelle Proboj-2 et j'ai vu aussi un certain nombre de choses liées

25 à ce projet.

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1 Question: L'opération que vous venez de décrire à laquelle a participé le

2 commandant Ljuban Karan, c'était Proboj-2 qui n'a pas réussi en raison de

3 l'opposition de Rakocevic.

4 Mais quelles étaient les raisons pour lesquelles il était opposé à cette

5 fourniture d'armes?

6 Réponse: Moi, je ne voudrais pas supputer quant à ses motivations, mais je

7 sais ce qu'il m'a dit à ce moment-là. Ce qu'il m'a dit, c'était: "Pourquoi

8 est-ce que vous agissez sans que je le sache? Nous avons l'armée populaire

9 yougoslave, et s'il faut faire la guerre c'est l'armée populaire

10 yougoslave qui fera la guerre et pas des formations paramilitaires". Voilà

11 ce que je sais.

12 Maintenant, quelle était la véritable raison et y avait-il une autre

13 raison que celle-ci? Je ne saurais le dire.

14 Question: Durant cette action Proboj-2 qui a pratiquement totalement

15 échoué, les noms de Hadzic et de "Arkan" ont-ils commencé à être entendu

16 ici ou là?

17 Réponse: Même avant l'opération Proboj-2 dont j'ai appris l'existence et

18 en rapport avec laquelle j'ai vu un certain nombre de choses, j'avais

19 entendu parler, je connaissais l'existance de Goran Hadzic et de "Arkan".

20 Je savais qu'ils étaient très bons amis et sous le pseudonyme de "V-4",

21 Goran Hadzic était en fait une source de renseignements pour le commandant

22 Ljuban Karan. Il leur arrivait d'ailleurs assez souvent d'aller ensemble à

23 Novi Sad sans qu'il y ait de raison particulière à leur voyage.

24 Question: L'attitude de Hadzic à l'égard des services de renseignements

25 dont vous faisiez partie, a-t-elle changé lorsqu'il est devenu Président?

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1 Réponse: Eh bien, l'attitude de Hadzic, c'est qu'il ne venait même jamais

2 rendre visite au groupe de contre-espionnage. Il était collaborateur du

3 commandant Ljuban Karan, mais ce dernier pouvait assez souvent, même si ce

4 n'était pas tout à fait ouvertement, dire que Hadzic avait de très bons

5 rapports avec les services de sécurité de Serbie ainsi que les gens du

6 ministère de la Défense de Serbie et qu'il avait une grande autorité, une

7 grande influence en tant que Président de la Région autonome serbe de

8 Slavonie Orientale, Baranja et Srem.

9 Question: Toujours dans le cadre de cette opération Proboj-2 et des

10 préparatifs de cette action, avez-vous appris de la bouche de Ljuban Karan

11 quelque chose de particulier au sujet de la participation de "Arkan", donc

12 au sujet de la participation éventuelle de "Arkan" dans les opérations

13 menées par les volontaires ou l'approvisionnement en armes?

14 Réponse: Monsieur le Président, Messieurs les Juges, j'ai toujours entendu

15 dire au commandant Ljuban Karan un certain nombre de choses au sujet de

16 "Arkan". Le commandant Ljuban Karan ne disait que de bonnes choses à son

17 sujet, il disait que si ce n'était que pour "Arkan" et ses volontaires,

18 les Serbes de Slavonie, de Baranja et de Srem seraient dans une situation

19 très difficile mais que, grâce à lui, les Serbes en question pouvaient

20 être en meilleure posture en Krajina. Et selon les mots utilisés par lui,

21 "Arkan" faisait tout ce que l'armée populaire yougoslave était censé

22 faire, alors que l'armée, pour sa part, gardait un profil bas, étant

23 inférieur à lui en nombre et en puissance.

24 Question: Et finalement est-ce qu'à votre connaissance quelques armes du

25 plan Proboj-2 ont effectivement été distribuées?

Page 12717

1 Réponse: Immédiatement à son retour de Slavonie, lorsqu'il a eu

2 connaissance de l'arrivée de ces deux camions et de leurs déchargements,

3 dans les entrepôts du groupe de contre-espionnage central, le commandant

4 Karan est allé voir Rakocevic. Il était très fâché, il voulait que toutes

5 les armes lui soient données à lui et donc qu'elles soient transférées en

6 Slavonie Orientale par la suite. Cependant, il n'a pas eu gain de cause,

7 parce que Rakocevic lui a dit qu'il lui en livrerait simplement quelques

8 caisses, c'est-à-dire donc quelques fusils, mais à destination uniquement

9 de collaborateurs et de source de grande qualité en tant que récompense

10 pour le travail accompli par ses sources. Et, pour autant que je le sache,

11 ce jour-là Ljuban Karan n'a réussi à obtenir que sept ou huit caisses sur

12 la totalité du chargement, et il a emporté ses fusils en voiture. Le

13 reste, comme je vous l'ai dit, est resté dans cette salle de classe du

14 quartier général du groupe de contre-espionnage central.

15 M. Nice (interprétation): Avant de passer à Proboj-2, j'aimerais que nous

16 examinions la pièce à conviction 350, intercalaire 3, qui a été remis à un

17 enquêteur qui sera témoin ici plus tard, et je crois qu'il pourra

18 témoigner au sujet de l'auteur et de l'authenticité de cette lettre.

19 En tout cas, est-ce qu'après Proboj-2, il y a un Proboj-3 qui n'a pas du

20 tout réussi non plus?

21 M. Candic (interprétation): A l'initiative du commandant Ljuban Karan et

22 d'un organe de sécurité qui lui était subordonné, un homme marié à une

23 femme de Ljubusko a été amené, a été contraint par Karan à créer un réseau

24 de sources dans cette région.

25 Question: Je vais vous interrompre parce que puisque l'opération n'a pas

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1 réussi, nous n'avons pas besoin d'en traiter en détail. Mais l'intention

2 présidant à ce plan était-elle d'armer des régions? Et si oui, quelles

3 populations et quelles régions?

4 Réponse: Toujours la population serbe.

5 Question: Dans quelle région?

6 Réponse: En Herzégovine occidentale.

7 Question: La région dont nous venons de parler se trouve en page 23,

8 coordonnée D2 de l'atlas. Je vais passer maintenant au paragraphe 18 du

9 résumé de la déposition du témoin.

10 Des efforts ont-ils été accomplis pour distribuer des armes dans le nord-

11 est de la Bosnie-Herzégovine?

12 Réponse: Ce n'est pas que des efforts ont été faits mais l'armement des

13 Serbes au nord-ouest de la Bosnie où j'étais chargé d'actions

14 opérationnelles dans le domaine de la sécurité pour cette région; et

15 puisque nous parlons d'armement des Serbes dans cette région, c'est moi

16 qui, en tant que responsable de la sécurité, ai créé trois catégories,

17 trois lignes d'action.

18 Premièrement, pour armer les Serbes du nord-ouest de la Bosnie à partir du

19 17e Corps d'armée, un grand nombre d'armes et de munitions ont été

20 emmenées sur le mont Ozren près de Tuzla et ces armes ont été entreposées

21 dans une mine désaffectée appelée Okna (phon.). J'ajouterai que sur ce

22 mont Ozren, la population présente est exclusivement serbe et il ne s'y

23 trouvait aucune unité de l'armée populaire yougoslave, pas plus que des

24 positions tenues par des réservistes. Et pour ma part, je ne voyais pas

25 pourquoi des armes provenant d'un entrepôt officiel auraient dû être

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1 emportées pour être entreposées dans une mine désaffectée.

2 Question: Est-ce que nous pourrions jeter un coup d'œil à Ozren. Le mont

3 Ozren est à l'ouest de Tuzla, page 28, coordonnées C2 de l'atlas.

4 En l'absence de toute unité de la JNA à cet endroit, quelle est la

5 conclusion que vous avez tirée? Vous pensiez que ces armes devaient être

6 livrées à qui?

7 Réponse: Aux dirigeants du SDS. D'ailleurs, mes collaborateurs m'ont

8 apporté des informations sur ce point. C'étaient des gens qui

9 travaillaient dans le service de sécurité et qui avaient eux aussi

10 officiellement un réseau d'informateurs qui leur donnaient des

11 informations, et ce sont eux qui m'ont fait savoir que des rapports de

12 cette nature existaient.

13 Question: Vous avez dit avoir créé trois catégories ou avoir agi dans

14 trois orientations. Alors la deuxième, quelle était-elle?

15 Réponse: La deuxième modalité de l'armement des Serbes dans le nord-ouest

16 de la Bosnie -et d'ailleurs, je dirai même dans toute la Bosnie-

17 Herzégovine-, cela était la proclamation de la mobilisation en Bosnie-

18 Herzégovine qui devait donc entraîner une réaction de la part des Serbes,

19 des Bosniens et des Croates.

20 Cependant, très peu de temps après, le Président de la présidence de

21 Bosnie-Herzégovine, Alija Izetbegovic, a lancé un appel en demandant aux

22 Bosniens et aux Croates de ne pas répondre à cet ordre de mobilisation. Il

23 a ajouté que ceux qui avaient déjà été incorporés, devaient abandonner

24 leurs unités et rentrer chez eux.

25 Donc la population civile mobilisait les réservistes, autrement dit, était

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1 exclusivement serbe, et ils ont été incorporés dans les unités de l'armée

2 populaire yougoslave en qualité de réservistes. Ils ont reçu des armes et

3 un équipement militaire. C'est donc ainsi que des armes leur ont été mises

4 entre les mains. Par ailleurs, ils ont également reçu de très bonnes

5 soldes pour le temps passé dans les rangs de ces unités. Et je sais qu'ils

6 rentraient chez eux.

7 Question: Et la troisième grande orientation pour cette action d'armement

8 quelle était-elle?

9 Réponse: Puisque nous parlons de l'armement des Serbes dans le nord-ouest

10 de la Bosnie, la troisième voie d'armement m'a beaucoup rappelé ce qui

11 s'était passé à Bihac dans ce pavillon de chasse. Tout ce que j'ai dit

12 lorsque j'ai parlé du commandant Cedo Knezevic et du lieutenant-colonel

13 Dusan Smiljanic, à savoir qu'un jour Svetozar Dzigurski, qui était

14 lieutenant-colonel et très proche de certains membres du service de sûreté

15 de l'Etat de Serbie, m'a dit qu'il s'était entendu avec le commandant Cedo

16 Knezevic pour que, depuis Bihac, Cedo Knezevic envoie un Pinzgauer, un

17 véhicule de police de taille moyenne, avec à l'intérieur des armes et des

18 munitions, et ce véhicule devait aller jusqu'à un certain Stevan Todorovic

19 dans un village situé près de Bosanski Samac répondant au nom de Slatina.

20 A moi, il a demandé -parce que c'étaient des policiers de l'armée

21 populaire yougoslave qui conduisaient ce véhicule- d'attendre ce véhicule

22 entre Derventa et Doboj à bord de ma voiture personnelle, et puisque je

23 connaissais bien le terrain du nord-ouest de la Bosnie, il m'a demandé de

24 précéder ce véhicule jusqu'au village de Slatina, de retrouver Stevan

25 Todorovic, et de veiller à ce que ces armes lui soient effectivement

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1 remises.

2 Question: Merci. Nous allons maintenant parler des rapports rédigés par

3 vous. Lorsque vous adressiez des rapports à vos supérieurs au sujet de ces

4 événements -lorsque je dis "supérieurs" je veux parler de Vasiljevic et de

5 Rakocevic-, est-ce que vous étiez autorisé ou encouragé ou sinon -qu'en

6 était-il?- à rédiger des rapports très complets au sujet de ce qui se

7 passait?

8 Réponse: Monsieur le Président, lorsqu'on travaille dans un organe de la

9 sûreté de l'Etat, et plus précisément en fait dans un groupe opérationnel

10 de contre-espionnage, comme c'était mon cas, eh bien, j'écrivais de façon

11 très réelle et donnais tous les détails des évènements survenus dans ma

12 zone de responsabilité, donc dans le secteur du nord-ouest de la Bosnie.

13 Entre autres, j'écrivais également quelles avaient été les activités des

14 dirigeants du SDS, du SDA, du HDZ, mais je parlais également de l'armement

15 de ces trois groupes.

16 Question: Est-ce que vos rapports ont été acceptés tels que rédigés, ou

17 vous a-t-on encouragé à les modifier d'une façon quelconque?

18 Réponse: Les rapports que j'ai rédigés, lorsqu'il s'agissait de l'armement

19 des Serbes et des activités du SDS, étaient prédominants, pas parce que

20 j'étais Bosnien et que j'avais grossi les choses, gonflés les événements

21 pour indiquer que telle partie était plus dangereuse que l'autre, mais

22 parce que c'était le type de rapports que j'obtenais de la part de mes

23 collaborateurs, de mes informateurs.

24 Et partant de la façon dont mes supérieurs avaient réagi à ce que j'avais

25 écrit, j'ai pu constater qu'ils n'accordaient aucune espèce d'importance à

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1 des informations très importantes, très substantielles, pour ce qui est de

2 l'armement des Serbes en Bosnie du nord-est.

3 Question: Est-ce qu'à un moment donné vous avez souhaité voir le général

4 Vasiljevic à ce propos?

5 Réponse: Oui, j'avais souhaité rencontrer le général Vasiljevic. J'étais

6 très en colère parce que j'avais obtenu des renseignements très fiables,

7 des information authentiques pour ce qui est des décisions prises par le

8 sommet du SDS, par la direction du SDS disant que la population non serbe

9 de Bijeljina, Bratunac et Srebrenica devrait être déménagée vers Tuzla,

10 alors que la population serbe, quant à elle, depuis Tuzla et les environs

11 de Tuzla devrait déménager vers les régions de Bijeljina, de Bratunac,

12 Zvornik et Srebrenica, à savoir les territoires qui se trouvent le long de

13 la rivière Drina.

14 Le rapport que j'ai présenté a été, pour le moins qu'on puisse dire,

15 dénigré: on avait dit que cela était impossible. Par contre, moi, je

16 savais que c'était un rapport des plus sérieux parce que je savais

17 parfaitement bien de qui les renseignements émanaient.

18 Et révolté, très encore colère, je m'étais adressé au colonel Cuk pour

19 demander une entrevue chez le général Vasiljevic pour qu'il m'explique

20 pourquoi cela n'était pas intéressant aux yeux des services de sécurité

21 des forces armées.

22 Question: Est-ce que vous avez été autorisé à voir le général, à le

23 rencontrer?

24 Réponse: Le général Tomislav Cuk ne m'a pas autorisé à le faire. Il m'a

25 tapé sur l'épaule et il m'a dit: "Laisse tomber "Muki"." et il ne m'a pas

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1 autorisé à y aller.

2 J'aurais pu éventuellement y aller sans lui demander son avis, j'aurais pu

3 aller chez Vasiljevic sans passer par le biais de mon supérieur, mais je

4 ne l'ai pas fait parce que j'avais commencé à ranger les pièces du puzzle

5 dans ma tête et c'est la raison pour laquelle, par la suite, j'en suis

6 venu à quitter l'armée populaire yougoslave.

7 Question: Avant d'aborder encore un ou deux sujets, parlons encore du

8 général Vasiljevic. Il était de loin votre supérieur. Cependant, avez-vous

9 eu l'occasion de le voir à vos réunions? Est-ce qu'il assistait à vos

10 réunions?

11 Ceci ne se situe pas dans le résumé mais bien à la page 4 de votre

12 déclaration préalable.

13 Réponse: Bien sûr, le général Aleksandar Vasiljevic, en sa qualité de

14 directeur des services de sécurité et en sa qualité d'autorité éminente en

15 matière de sécurité, en sa qualité de professionnel éminent, avait été

16 l'invité… ou plutôt que de le qualifier d'invité, je dirais qu'il s'était

17 efforcé d'assister à toutes les réunions des secteurs de sécurité tant au

18 niveau de la marine que des autres secteurs de l'armée.

19 Question: Est-ce que vous vous souvenez d'une réunion du colonel Rakocevic

20 où le général Vasiljevic était présent, et où l'on a parlé de devoir ou de

21 serment de loyauté que les généraux étaient censé signer, auxquels ils

22 étaient censé adhérer?

23 Réponse: Messieurs les Juges, j'avais été présent à l'une de ces réunions

24 lorsque le général Aleksandar Vasiljevic… et je tiens à préciser que je

25 savais qu'il lui arrivait d'être en colère, mais je ne l'ai jamais vu dans

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1 un état pareil, il était hors de lui.

2 Il nous a dit que Slobodan Milosevic se permettait le toupet d'exiger de

3 la part des généraux de l'armée populaire yougoslave, des Serbes de cette

4 JNA, de lui signer des actes d'allégeance. Son commentaire avait été si

5 colérique qu'il nous a juste fait savoir la chose; et il l'a dit pour que

6 nos activités soient réalisées de façon à ce que nous ayons à l'esprit le

7 fait qu'il n'y a pas que des généraux qui se comportent de cette façon-là

8 mais que d'autres officiers ont la même optique.

9 Question: Pourriez-vous nous donner la date approximative de cette réunion

10 au cours de laquelle Vasiljevic s'était plaint du fait qu'on lui demandait

11 de signer un acte d'allégeance envers l'accusé?

12 Réponse: Messieurs les Juges, il me semble que cela s'est passé juste

13 avant les événements en République de Slovénie.

14 M. Nice (interprétation): Paragraphe 20.

15 Je pense à l'heure qui passe. A quelle heure allons-nous terminer

16 l'audience?

17 M. le Président (interprétation): 16 heures 15.

18 M. Nice (interprétation): Est-ce qu'il y a eu un incident où un prêtre

19 catholique était concerné et vous vous êtes devenu impliqué dans cet

20 incident vers la fin de celui-ci?

21 M. Candic (interprétation): Oui, je suis au courant de l'incident avec le

22 prêtre catholique. Si mes souvenirs sont bons, je pense qu'il s'appelait

23 Josip… quelque chose. Je ne suis pas sûr de son nom de famille.

24 J'ai été convoqué par le colonel Slobodan Rakocevic qui m'a donné l'ordre

25 de me présenter chez Radenko Radojcic pour aller avec lui chez ce prêtre

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1 pour le transporter dans un véhicule Marica -donc une fourgonnette de

2 police- vers Brcko, une région habitée par des Croates.

3 Question: Est-ce que vous avez fait cela et est-ce que vous avez appris à

4 l'époque, ou vers cette époque, ce qu'il était advenu du prêtre?

5 Réponse: Bien sûr. J'ai accepté les ordres émis par le colonel Slobodan

6 Rakocevic. Je me suis présenté chez Radenko Radojcic. Je suis rentré en

7 contact avec ce dernier, et c'est la première fois que, là, j'ai appris

8 qu'il y avait un prêtre catholique qui avait été arrêté sur le territoire

9 de Banija.

10 On avait essayé de mettre en place une collaboration avec lui sur le

11 territoire, que cela n'avait pas marché et que c'était pour cela qu'on

12 l'avait transféré à l'aéroport de Batajnica où il était détenu.

13 Lorsque nous l'avons pris en charge, j'ai constaté qu'il avait été

14 torturé, qu'il était épuisé et qu'il ne pouvait tout simplement pas rester

15 debout.

16 Question: D'après ce que vous avez compris ou d'après vos calculs et vos

17 réflexions, qu'est-ce qui faisait que cette personne avait été emmenée à

18 Brcko ou dans la région de Brcko? Quelle était la raison de tout cela?

19 Réponse: D'après moi, la raison du transfert vers le secteur de Brcko

20 c'était précisément en raison du fait de cette population croate et pour

21 qu'il soit accepté par cette population. Parce que c'était une personne

22 âgée, donc il fallait qu'ils ne sachent pas leur dire où il avait été,

23 qu'il leur dise quelles sont les souffrances qu'il avait subies. Et

24 d'autre part pour que ces gens-là l'aide à retourner vers sa région

25 d'origine, à savoir Banija ou plutôt, comme cela se trouve à la frontière

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1 de la Croatie, le transférer vers la République de Croatie.

2 De ce fait, on cherchait à engendrer la peur et la panique parmi la

3 population croate sur le territoire de la Posavina.

4 M. le Président (interprétation): Je pense que le moment se prête bien à

5 la suspension de l'audience.

6 M. Nice (interprétation): Désolé, ce témoignage ou du moins

7 l'interrogatoire principal dure un petit peu plus longtemps que ce que

8 j'avais prévu, mais je n'en ai plus pour longtemps; encore 20 minutes à

9 peu près.

10 M. le Président (interprétation): Monsieur Candic, nous allons maintenant

11 suspendre l'audience jusqu'à demain matin 9 heures. Veillez à être de

12 retour à l'audience à ce moment-là pour poursuivre votre déposition.

13 Et rappelez-vous ceci: au cours de la suspension, vous n'êtes censé parler

14 à personne de votre déposition. Tant que votre déposition n'est pas

15 terminée, vous ne devez parler à personne, pas non plus aux représentants

16 du Bureau du Procureur.

17 (Le témoin acquiesce.)

18 L'audience est suspendue jusque demain matin, 9 heures.

19 (L'audience est levée à 16 heures 15.)

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