Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Jeudi 21 novembre 2002.)

  2   (L'audience est ouverte à 9 heures 6.)

  3   (Audience publique avec mesures de protection.)

  4   (Matière relative à la présentation des témoins.)

  5   ( Milan Babic est dans le prétoire.)

  6   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Nice?

  7   M. Nice (interprétation): Permettez-moi de revenir à la question de la

  8   durée du temps disponible pour l'examen principal l'interrogatoire

  9   principal de ce témoin.

 10   M. le Président (interprétation): Nous avons déjà entendu des conclusions

 11   à ce propos et, je crois, fort bien présentées par Mme Uertz-Retzlaff.

 12   Nous avons eu l'occasion et le temps de penser à la chose et nous avons

 13   rendu une décision. Je ne sais pas si vous pouvez ajouter quoi que ce

 14   soit.

 15   M. Nice (interprétation): D'abord, j'aimerais faire valoir ou apporter une

 16   précision sur deux, voire trois points. Et je ne le fais que parce que je

 17   suis responsable de la poursuite dans ce procès.

 18   Au cas où il y aurait des ambiguïtés, une ambiguïté quelconque, nous

 19   demandons 6 jours de plus et non pas 4. J'espère que c'est clair. Puis

 20   nous estimons qu'il serait erroné, vu la qualité, l'intégralité et la

 21   connaissance détaillée des événements de ce témoin, il serait erroné

 22   d'exclure sa déposition. Troisième argument -et je ne sais pas si ceci a

 23   été dit de façon suffisamment détaillée hier soir-, nous avons des

 24   statistiques quant au nombre de témoins. On pourrait faire des économies

 25   de témoins, pour ainsi dire. Je pense que l'analyse de ce document serait

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  1   perdue si l'on avait moins que six jours pour la présentation en

  2   interrogatoire principal.

  3   Des statistiques aideront peut-être la Chambre et si vous voulez revoir

  4   certaines décisions prises à titre provisoire, qui seraient autres que

  5   l'octroi de ces deux jours supplémentaires.

  6   Au départ, nous avions 71 témoins pour la Croatie. Bien sûr, les

  7   prévisions ne peuvent pas être précises mais, pour le cinquième jour de

  8   déposition, si l'on avait ce cinquième jour pour ce témoin, on pourrait

  9   faire l'économie de 8 témoins que nous allions citer à la barre: 4

 10   experts, 2 initiés de moindre rang et 2 vérificateurs de documents

 11   pourraient être épargnés. Le sixième jour nous permettrait de faire

 12   l'économie de 5 témoins à propos des crimes supplémentaires et de 1

 13   journaliste qui viendrait parler de cette base du lieu du crime.

 14   Ce qui veut dire que, si nous avons deux jours supplémentaires, nous

 15   pourrons faire l'économie de quelque 14 témoins, ce qui représente quelque

 16   20% du temps alloué.

 17   Et nous faisons humblement valoir qu'il est tout à fait juste que ce

 18   témoin soit entendu dans son intégralité. Si ce n'est pas le cas, des

 19   documents, des éléments de preuve pourraient rester sur la touche et ils

 20   comprendraient les contacts directs qui ont existé entre le témoin et

 21   d'autres membres de l'entreprise criminelle commune. A cela,

 22   s'ajouteraient des éléments de preuve qui ne sont pas disponibles

 23   ailleurs, concernant la structure militaire de la zone où les crimes

 24   auraient été commis.

 25   A notre avis, ce sont la des éléments que la Chambre doit avoir et doit

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  1   recevoir sous la forme la plus économique, à savoir par ce témoin. Je

  2   crois qu'il serait erroné d'exclure ces éléments.

  3   Merci de m'avoir permis d'ajouter quelques arguments à ceux qui ont été,

  4   je le reconnais, fort bien exprimés par Mme Uertz-Retzlaff, mais elle l'a

  5   fait avant d'avoir l'occasion d'en discuter avec le reste de l'équipe hier

  6   soir, après les recherches effectuées.

  7   M. le Président (interprétation): Je trouve que ce volet du procès se

  8   déroule très lentement: en plus de 20 jours, nous n'avons entendu que 12

  9   témoins à peu près. Bien sûr, c'est une question qui nous préoccupe.

 10   Comment allez-vous présenter la totalité de vos moyens d'ici à la date que

 11   nous avons prévue, arrêtée, bien sûr, tenant compte des dispositions qu'il

 12   faut prendre lorsqu'il y a maladie ou indisposition.

 13   M. Nice (interprétation): Permettez moi de répondre. Je ne sais pas si

 14   vous avez terminé, Monsieur le Président?

 15   Vous dites que la présentation s'est faite lentement. Nous n'acceptons pas

 16   ceci parce que les éléments de preuve sont tout à fait différents et aussi

 17   beaucoup plus denses. Le contexte est plus fourni et nous avons fait

 18   l'impossible pour que tout se passe le plus vite possible. Bien sûr, nous

 19   sommes tenus par la décision prise par la Chambre, relevant de l'Article

 20   92bis.

 21   Nous prévoyons cependant que la nature même de la déposition ou des

 22   éléments de preuve présentés dans la première phrase du volet, que ceci

 23   nous permettra d'administrer la preuve de nos thèses et nous espérons,

 24   nous nous attendons à ce que nous puissions respecter le temps prévu par

 25   la Chambre.

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  1   M. le Président (interprétation): Je pense que nous avions arrêté la date

  2   du 12 mai. Bien sûr, nous apporterons les ajustements nécessaires en temps

  3   utile, mais c'était la date que nous avions retenue, Monsieur Nice, et

  4   gardez-la à l'esprit.

  5   M. Nice (interprétation): S'agissant les témoins qui restent, nous ferons

  6   l'impossible. Vous savez, moi-même et les autres membres de l'équipe

  7   essaient sans arrêt de tirer parti de la procédure pour essayer d'écourter

  8   la présentation des moyens de preuve, mais nous sommes tenus par le

  9   Règlement du Tribunal, ainsi que par la pratique de cette Chambre. Par

 10   conséquent, nous vous exhortons à dire qu'il est tout simplement inadéquat

 11   et inapproprié de limiter la déposition de ce témoin.

 12   M. le Président (interprétation): Il ne s'agit pas de la déposition elle-

 13   même, de l'élément de preuve. C'est la rapidité du déroulement du procès:

 14   je pense qu'on pourrait agir plus vite, à mon avis.

 15   M. Nice (interprétation): Permettez-moi de ne pas être d'accord avec vous,

 16   Monsieur le Président.

 17   Mon éminente consœur, bien sûr, régit les détails de la déposition, de

 18   même que le fait le témoin et, forcément, cette déposition se fait à un

 19   rythme qui est tel qu'il permet que tout soit compris et bien assimilé.

 20   Bien sûr, on peut présenter des moyens de preuve d'une autre façon et je

 21   pourrais bien le faire aussi. On pourrait faire la lecture des

 22   déclarations, ou lecture préalable des déclarations et le témoin peut

 23   faire sienne cette déclaration. Mais ce ne sont pas là des pratiques que

 24   la Chambre est déjà en mesure d'accepter. Par conséquent, nous avons le

 25   système viva voce, questions-réponses. Et je serais catégoriquement opposé

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  1   à l'idée selon laquelle ma consœur aurait agi trop lentement.

  2   M. le Président (interprétation): Ce n'est pas mon avis, on ne formule pas

  3   de critique ici, si vous me permettez de le dire, puisque bien sûr le

  4   conseil a sa façon personnelle de présenter les questions. Nous le

  5   reconnaissons, Mme Uertz-Retzlaff est consciente de la tâche et du devoir

  6   qui est le sien de nous présenter les éléments et quelquefois le témoin

  7   répond assez longuement.

  8   Mais nous allons étudier la question, y réfléchir.

  9   M. Nice (interprétation): Merci.

 10   M. Kwon (interprétation): Je crois que je vous comprends, Monsieur Nice,

 11   mais, au départ, l'accusation avait dit qu'elle s'attendait à ce que ce

 12   témoin fasse une déposition de 3 jours et demi. Pourquoi est-ce que cela a

 13   changé?

 14   M. Nice (interprétation): Jusqu'au moment où les choses se passent, il

 15   n'est jamais possible de prévoir quelle sera leur durée. Madame Uertz-

 16   Retzlaff était bien consciente des pressions considérables exercées par la

 17   Chambre sur elle afin qu'un certain rythme soit maintenu. Mais tant qu'on

 18   n'est pas à la l'audience, il est impossible de savoir comment les choses

 19   vont se dérouler. S'agissant de ce témoin-ci, je crois qu'il faut en tenir

 20   compte. Les témoins ne sont pas toujours ce que nous voudrions qu'ils

 21   soient: ils sont ce qu'ils sont. Cet homme peut parler de façon détaillée

 22   des événements en fonction de ses souvenirs et aussi de son raisonnement;

 23   on ne peut pas disons transformer à satiété un témoin en un autre.

 24   M. Robinson (interprétation): Monsieur Nice?

 25   M. Nice (interprétation): Excusez-moi. Merci. Madame Uertz-Retzlaff me

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  1   passe un document ici.

  2   Bien sûr, nous devons rappeler à la Chambre ceci: nous vous avons exhortés

  3   à appliquer les dispositions du 92bis qui nous aurait permis de faire une

  4   grande économie d'heures, voire de journées, mais nous aurions préféré que

  5   tous les documents de contexte soient lus au préalable. Et nous avons dit

  6   à la Chambre que c'était là une procédure tout à fait correcte pour

  7   respecter les droits de l'accusé. La Chambre n'était pas d'accord, nous

  8   respectons son avis.

  9   M. Robinson (interprétation): Je ne dirai pas que j'accéderai à la

 10   requête, mais j'aurais l'impression que, si vous étudiez la question et si

 11   vous examiniez ceci sous un oeil favorable, nous devrions vous obliger à

 12   respecter cet engagement, à savoir que vous n'allez pas citer à la barre

 13   les 14 témoins. Et j'aimerais avoir le nom de ces 14 témoins que vous ne

 14   pourriez ne pas citer.

 15   M. Nice (interprétation): J'espère que la parole que j'exprime à

 16   l'audience dans ce prétoire est une parole qui sera respectée. Là, vous

 17   voulez m'imposer que soit respecté cet engagement de 14 témoins. Bien sûr,

 18   je le ferai, je n'aurai pas de difficulté à le faire. Je peux vous fournir

 19   le nom des témoins et la liste de noms, qui, pour le moment, sont

 20   considérés comme des témoins qui ne devraient plus être appelés à la

 21   barre. Je peux vous fournir cette liste.

 22   M. le Président (interprétation): Fort bien, nous allons étudier la

 23   question.

 24   M. Nice (interprétation): Merci.

 25   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la

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  1   parole.

  2   (Interrogatoire principal du Milan Babic par Mme Uertz-Retzlaff.)

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

  4   Bonjour, Monsieur le Témoin.

  5   Milan Babic (interprétation): Bonjour.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Veillez à bien parler dans le

  7   microphone car les interprètes ont quelquefois du mal à vous entendre.

  8   Hier, nous avons parlé du fait que "Frenki" et le "capitaine Dragan"

  9   avaient été délogés ou obligés de quitter la région au mois d'août. Dans

 10   ce contexte, je vous ai posé une question à propos d'une réunion, mais

 11   j'aimerais poser cette question à huis clos partiel.

 12   M. Kwon (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, pourriez-vous nous

 13   rappeler où nous en sommes dans ce résumé? Faites-le de temps à autre.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui. Nous sommes maintenant à

 15   l'examen du paragraphe 191. (Audience à huis clos partiel à 9 heures 18)

 16   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 17   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Après le départ de "Frenki" de la

 19   région, est-ce que vous avez rencontré M. Stanisic à Knin?

 20   Milan Babic (interprétation): Pouvez-vous reprendre votre question? A qui

 21   vous référez-vous dans votre question, en fait?

 22   Question: Je n'ai pas reçu l'interprétation. Maintenant, j'entends

 23   l'interprétation en anglais.

 24   Avez-vous rencontré M. Jovica Stanisic, M. Martic ainsi que M. Orlovic au

 25   mois d'août 1991 à Knin? Et, si ça a été le cas, où vous êtes-vous

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  1   rencontré et de quoi avez-vous parlé?

  2   Réponse: C'est exact, nous nous sommes rencontrés. Cela s'est fait une

  3   fois que "Frenki" et le "capitaine Dragan" sont partis. Jovica Stanisic

  4   est ensuite venu à Knin. Et on m'a convié à venir. Il y avait lui et

  5   Martic dans le restaurant "Vrelo" à proximité de Knin. Et à mes côtés,

  6   Stanisic était en train de critiquer Orlovic concernant les événements

  7   survenus auparavant. Martic ne faisait que sourire, il ne s'était pas

  8   senti mal à l'aise. Orlovic avait accepté les critiques, mais il ne se

  9   sentait pas trop mal à l'aise non plus.

 10   Question: Au cours de cette conversation, M. Stanisic a fait des

 11   références quelles qu'elles soient à M. Milosevic?

 12   Réponse: Non. Ou plutôt, je m'excuse, oui, oui, bien sûr. A l'occasion de

 13   cet entretien-là, oui; il a dit: "Pourquoi font-il cela ainsi?" au sujet

 14   de ce qui se passait à Knin. "Et pourquoi est-ce que M. Milosevic doit-il

 15   intervenir?"

 16   Question: Monsieur le Témoin, quel était le rôle de Stanisic? Quels

 17   étaient ses rapports avec M. Milosevic?

 18   Réponse: C'était un fonctionnaire qui exécutait les instructions de M.

 19   Milosevic. Et je le voyais comme étant l'homme n°2 dans le régime de M.

 20   Milosevic. C'était, si vous voulez, l'homme n°2 de par l'importance qu'il

 21   revêtait.

 22   Question: Est-ce que M. Stanisic a dit quoi que ce soit dans ce sens? Est-

 23   ce qu'il vous a dit quoi que ce soit dans ce sens?

 24   Réponse: Bon nombre de renseignements concernant ses relations avec

 25   Milosevic. Disons un exemple relatif à la politique intérieure en Serbie,

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  1   Stanisic a dit à un moment: "Le Président fait de la politique étrangère.

  2   Moi, je fais de la politique intérieure. C'est moi qui lui ai remporté les

  3   élections".

  4   Puis, il a parlé de certaines interventions en Bosnie, notamment dans les

  5   environs de Gorazde en 1994, vers le mois d'avril ou fin avril, tout début

  6   mai. Il a dit que, suite à l'accord obtenu entre Milosevic et Karadzic

  7   avec la communauté internationale concernant le cessez-le-feu en Bosnie,

  8   Jovica Stanisic a fait le commentaire suivant; il a dit que leurs unités

  9   spéciales de la police -et je crois qu'il avait précisément nommé "Frenki"

 10   à leur tête avaient contribué le plus à l'issue de ces combats et, au-delà

 11   des approbations fournies par Milosevic, ils auraient poursuivi des

 12   opérations de combat au sujet desquelles le Président n'était pas au

 13   courant. Et il avait, en quelque sorte, éclipsé le rôle de Milosevic dans

 14   ces événements; c'était donc un exécutant qui s'érigeait en protecteur de

 15   Milosevic.

 16   Question: A quel moment a-t-il fait ces remarques ou cette remarque à

 17   propos des unités spéciales se trouvant à Gorazde? A quelle période

 18   pensait-il, faisait-il référence?

 19   Réponse: Cela se rapportait à la période mars, avril 1994.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 21   publique, Monsieur le Président.

 22   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 23.)

 23   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): A plusieurs reprises, nous avons

 25   parlé, nous avons mentionné M. Martic. Et puis, vous avez aussi parlé du

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  1   soutien dont il a bénéficié de la part de la Serbie. Est-ce que M. Martic

  2   était un homme loyal à Milosevic? Etes-vous en mesure de le dire?

  3   Milan Babic (interprétation): Oui.

  4   Question: Est-ce que M. Martic a reconnu en public sa loyauté envers

  5   Milosevic au cours de la campagne électorale qu'il a menée en 1993 et en

  6   1994?

  7   Réponse: Oui. A l'époque, de façon publique, pendant et après la campagne

  8   électorale, il disait qu'il serait Président provisoire de la Krajina; une

  9   fois élu, il a dit qu'il serait peu de temps Président et qu'il allait

 10   remettre le bâton de relais comme un titre d'exercice des fonctions, à

 11   Milosevic. Et les gens à Knin faisaient même des blagues à son sujet en

 12   disant qu'il allait passer sa matraque de policiers à Milosevic.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 14   (Audience à huis clos partiel à 9 heures 25)

 15   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 16   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel

 17   Mme Uertz-Retzlaff : Avez-vous eu une discussion avec M.

 18   Milosevic et M. Martic en août 1991, à propos du poste ou de la position

 19   du commandant de la Défense territoriale dans la Krajina?

 20   Milan Babic (interprétation): C'est . J'ai eu cet entretien au sein du

 21   cabinet de M. Milosevic. J'ai été convié à venir là-bas et j'y ai retrouvé

 22   M. Martic qui se trouvait déjà chez M. Milosevic. Et Milosevic, sans faire

 23   trop d'introduction, a dit la chose suivante: il fallait que Mile –Mile

 24   étant Mile Martic qui était présent- devant devenir commandant de la

 25   Défense territoriale. L'entretien a duré, je pense, presque deux heures et

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  1   Milosevic ne faisait que répéter cette phrase-là. Il me semblait qu'il

  2   avait répété cette phrase un nombre innombrable de fois. Seulement…

  3   Question: Est-ce que vous vous êtes opposé à ce que Martic devienne

  4   commandant de la Défense territoriale? Et si vous l'avez fait, pourquoi?

  5   Réponse: C'est exact, je m'y opposais. C'est la raison pour laquelle

  6   Milosevic ne faisait que répéter cette phrase, suite à mes oppositions. Eh

  7   bien, j'avais demandé des raisons objectives. Tout simplement, j'avais

  8   dit: "Mais c'est un policier et on ne peut pas faire d'un policier un

  9   commandant de la Défense territoriale!". De par les affectations

 10   habituelles, c'était un général ou quelqu'un qui avait fait de hautes

 11   écoles militaires, sans peut-être avoir le grade de général, mais peut-

 12   être de colonel. Et c'est là un poste de professionnel qui nécessite

 13   d'avoir une équipe d'au moins dix personnes à ses ordres. C'était là la

 14   nature des objections que j'avais soulevées.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir audience

 16   publique.

 17   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 27.)

 18   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): J'aimerais l'aide de l'huissier pour

 20   présenter au témoin l'intercalaire 64 de la pièce 352. Il s'agit ici d'une

 21   désignation, la désignation de Milan Martic au poste de commandant adjoint

 22   de la TO de la SAO de Krajina. Pourquoi a-t-il été nommé à ce poste?

 23   Quelles étaient les compétences qui assortissaient cette fonction?

 24   Milan Babic (interprétation): Il a été nommé parce qu'il avait été

 25   ministre de l'Intérieur. Et ainsi, la police de la Krajina s'incorporerait

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  1   dans le système nouvellement mis en place et se placerait sous l'autorité

  2   de ce Gouvernement de la Krajina.

  3   Question: Monsieur le Témoin, hier nous avons évoqué un rapport; c'était

  4   l'intercalaire 67, une pièce à conviction, un rapport portant sur les

  5   activités militaires de la région en août 1991. Ce rapport a également été

  6   adressé à "Frenki". Dans ce rapport, il était fait mention d'un cessez-le-

  7   feu, d'un ordre donné par Milan Martic à propos d'un cessez-le-feu? Est-ce

  8   qu'un cessez-le-feu a été convenu le 6 août 1991?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Et en dépit de ce cessez-le-feu, est-ce que Kijevo a été attaqué

 11   en août 1991?

 12   Réponse: Oui, c'est le 6 août… le 26 août qu'il a eu cette attaque. Et

 13   avant cela, Milan Martic avait formulé un ultimatum à l'attention de la

 14   population et de la police de Kijevo en leur disant qu'il fallait

 15   absolument qu'ils abandonnent Kijevo. Je crois que cela s'est fait le 19

 16   ou le 20 août.

 17   Question: J'aimerais l'aide de l'huissier pour présenter au témoin

 18   l'intercalaire 68 de la pièce 352.

 19   (Intervention de l'huissier.)

 20   Est-ce qu'il s'agit ici de l'ultimatum dont vous venez de parler?

 21   Réponse: Oui.

 22   Mme Uertz-Retzlaff : Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 23  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 30) [Confidentialité levée par une

 24   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel

 25  .Mme Uertz-Retzlaff : Vous avez reçu des nouvelles à propos

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  1   de cet ultimatum? Après les avoir reçues, qu'avez-vous fait?

  2   Milan Babic (interprétation): J'ai entendu parler de cet ultimatum par

  3   les médias. Et c'est par les médias que j'ai fait un démenti; j'ai dit que

  4   les forces armées de la SAO de Krajina n'allaient pas enfreindre le

  5   cessez-le-feu. Je crois que cela s'est fait le 24 août; en fait, le jour

  6   d'après, donc lorsque j'ai… une fois que j'ai entendu parler de la chose

  7   par les médias.

  8   Question: Et ce démenti, l'avez-vous fait publiquement?

  9   Réponse: Oui, c'était public. La presse a rapporté la chose.

 10   Question: Ce démenti a-t-il provoqué une réaction de la part de Martic, de

 11   la JNA ou des autorités de Belgrade?

 12   Réponse: Non, sauf le fait qu'ils sont devenus encore plus intolérants à

 13   mon égard.

 14   Question: Est-ce que vous avez été convoqué à Belgrade le 25 août 1991?

 15   Réponse: Oui, j'ai été convoqué à Belgrade et je devais me présenter chez

 16   le Président Milosevic.

 17   Question: De quoi avez-vous parlé, lors de cette réunion?

 18   Réponse: De deux choses. D'abord, lorsque je suis arrivé, le Président

 19   Milosevic m'a demandé: "Comment ça va là-bas, à Knin?". Je lui ai répondu

 20   qu'il y avait beaucoup de problèmes au niveau de Velika et Otisic, que la

 21   police croate de Sinj maltraitait la population dans le village d'Otisic

 22   et qu'il n'y avait pas d'armée de la JNA pour les protéger.

 23   Il m'a demandé: "Mais est-ce que cela n'est pas déjà arrangé?". Je lui ai

 24   répondu que je ne savais pas. Et après la réunion, on m'a dit que la JNA

 25   et les autres formations armées faisant partie de la JNA se sont attaquées

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  1   à Kijevo et à la région.

  2   On m'a demandé de savoir quel type de personne était le général Spiro

  3   Nikolic. Je ne savais rien dire à son sujet, je n'avais rien contre lui.

  4   Il était commandant du Corps de Knin. Ensuite, il a dit que "Frenki"

  5   devrait retourner dans la Krajina, et que "c'est un brave type, "Frenki"".

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

  7   publique.

  8   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 34.)

  9   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pendant votre absence de Knin, dans

 11   le cadre de ces nouvelles fonctions dont vous venez parler, est-ce ce

 12   jour-là précisément que Kijevo a été attaqué?

 13   Milan Babic (interprétation): Oui, ce jour-là Kijevo a été attaqué dans

 14   la matinée.

 15   Question: Et quelles sont les forces qui ont participé à cette attaque?

 16   Réponse: Le Corps de Knin, les unités de la police de la Krajina et la TO

 17   locale.

 18   Question: Comment le savez-vous? Est-ce que vous avez vu quoi que ce soit

 19   vous le montrant?

 20   Réponse: Le jour d'après, je suis passé par cette région et j'ai vu le

 21   commandant de la Brigade de Knin, le colonel Jukic, et des officiers qui

 22   l'entouraient. Il m'a dit que le chef du quartier général du Corps, Ratko

 23   Mladic, se trouvait devant lui, qu'il était dans la direction de Otisic et

 24   qu'il avait envoyé une colonne de chars qui étaient commandés par Jukic.

 25   J'ai vu ces unités-là à proximité du village Cetina, en direction de

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  1   Jezevic; et on m'a dit qu'il y avait la police là-bas, Martic et Milenko

  2   Zelenbaba. Chose qui a été d'ailleurs diffusée par la télévision de

  3   Belgrade.

  4   Question: L'avez-vous vu à la télévision de Belgrade? Est-ce que vous avez

  5   vu Martic et Kijevo à la télévision de Belgrade?

  6   Réponse: Oui, la télévision de Belgrade a diffusé deux scènes en

  7   provenance de Kijevo. Dans l'une de ces scènes, on voyait Martic et

  8   Zelenbaba enlever le drapeau croate, le fouler au pied et s'embrasser. Et

  9   dans la deuxième scène, on voyait Vesna Ljubovic, une journaliste de

 10   Belgrade, interviewer un soldat de la JNA sur la route dans le village de

 11   Kijevo. Ou plutôt, elle avait enregistré son entretien, sa conversation

 12   avec un vieillard de Kijevo qui était resté après les combats; et le

 13   soldat avait demandé au vieillard: "Est-ce que c'est toi qui as tué mon

 14   grand-père en 1941?" L'homme a répondu: "Mais non!"

 15   Question: (Inaudible) …près d'ici. Vous dites, Monsieur le Témoin, que

 16   vous avez traversé cette région un jour plus tard. A quoi ressemblait

 17   Kijevo? Avez-vous vu des Croates? Le village était-il intact?

 18   Réponse: Le village était déserté de ses habitants. Le village avait été

 19   également saccagé à coups de tirs d'artillerie.

 20   Question: Ce jour-là, avez-vous vu M. Mladic sur le terrain, ce jour-là ou

 21   les jours suivants?

 22   Réponse: Dans la journée qui a suivi ou deux jours après, lorsque je suis

 23   passé par cette route et lorsque j'ai traversé Vrlika.

 24   Question: Lorsque vous l'avez vu, que faisait-il?

 25   Réponse: Eh bien, il s'en revenait d'Otisic. Il accompagnait un groupe de

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  1   représentants des autorités croates originaires de Sinj et de Split, et il

  2   les accompagnait vers Vrlika qui se trouvait sous son autorité.

  3   Question: Est-ce que M. Mladic a effectivement participé à des activités

  4   de combat sur le terrain? Etes-vous au courant?

  5   Réponse: Oui, il a participé, c'est-à-dire qu'il a commandé. Les

  6   journalistes disaient même qu'il se trouvait dans les premières lignes de

  7   combat, qu'il avait déminé des obstacles et que, seul ou avec certains

  8   groupes, il allait de l'avant. Et lorsque le nouveau commandant du corps,

  9   le général Vukovic, est arrivé, il avait demandé à Mladic de lui dire où

 10   sont disposées les unités du corps; Mladic lui a montré sur la carte des

 11   petits groupes répartis sur différents secteurs du front, au niveau du

 12   territoire de la Dalmatie du Nord. Et Vukovic a commencé à s'arracher les

 13   cheveux en disant: "Mais où est mon corps?"; c'était Mladic qui avait

 14   commandé ce corps-là.

 15   Question: Vous avez déclaré que Mladic commandait ce corps? Est-ce qu'il

 16   était le commandant du corps ou…? Quelle était sa fonction précise?

 17   Réponse: Mladic, dans l'été et au courant de l'automne, avait été le

 18   directeur du Corps. Eté/automne 1991. Et pendant un certain temps, lorsque

 19   Spiro Nikolic, le général précédent a été déplacé vers d'autres positions

 20   lorsque Vukovic est arrivé, c'était lui l'officier le plus haut gradé. En

 21   1992, il était le commandant du corps, Mladic.

 22 Mme Uertz-Retzlaff : J'aimerais que nous repassions rapidement à un huis clos

 23  partiel pour parler de la réunion suivante qui a eu lieu avec Milosevic.

 24  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 40)

 25  [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

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  1   Mme Anoya (interprétation): C'est fait.

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous rencontré M. Milosevic en

  3   1991 à propos du commandant de la TO nécessaire pour la Krajina?

  4   Milan Babic (interprétation): Oui, vers le 12 septembre 1991, pour ce qui

  5   est du QG de la Défense territoriale et des officiers de ce QG de la TO de

  6   Krajina.

  7   Question: Est-ce que vous aviez une proposition à faire s'agissant de

  8   l'homme qui devrait devenir le nouveau commandant de la TO?

  9   Réponse: Oui, il y avait Borivoj Rasuo et Zoran Kalicanin, un homme qui

 10   appartenait au service d'information de la JNA; ils m'ont recommandé

 11   Radosav Markovic, un colonel que j'avais rencontré, et, avec dix autres

 12   officiers, il devait constituer le QG de la TO de la Krajina. Et Maksic a

 13   demandé que j'aille demander à Milosevic son approbation pour qu'il soit

 14   révoqué, ou plutôt libéré de ses fonctions pour faire un service actif à

 15   Belgrade.

 16   Question: Et comment avait réagi Milosevic lorsque vous lui avez transmis

 17   ces informations?

 18   Réponse: Il a dit qu'il ferait en sorte qu'il vienne.. Il était de bonne

 19   humeur. C'est là que j'ai rencontré Jovica Stanisic, pas dans la même

 20   pièce mais dans la pièce à côté, toujours au sein du cabinet. Et c'est là

 21   que, pour autant que je le sache, il était de la meilleure des humeurs

 22   possible, parce qu'il a même partagé son déjeuner avec moi.

 23   Question: Mais est-ce que cela veut dire que M. Milosevic a marqué son

 24   accord eu égard à cette proposition qui était la vôtre de démettre le

 25   commandant de la TO et d'y désigner Maksic. Que vous a-t-il dit?

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  1   Réponse: Il a dit: "C'est cela, il viendra".

  2   Question: Vous avez parlé de M. Stanisic et vous dites l'avoir vu ce jour-

  3   là également. Quelle a été la nature du contact que vous avez eu avec lui?

  4   Comment celui-ci s'est-il fait et de quoi avez-vous parlé avec lui?

  5   Réponse: Avant que je n'entre dans le bureau de travail du Président

  6   Milosevic, sa secrétaire nous a dit que le Président faisait une pause

  7   pour déjeuner et elle m'avait demandé d'attendre dans la pièce d'à côté ou

  8   dans la pièce qui était juste à côté de celle-ci, au coin. Je suis allé

  9   là-bas; derrière la table, il y avait debout Jovica Stanisic et, devant

 10   lui, une carte où il y avait des lignes de disposition des unités de

 11   l'armée. Il m'a jeté un coup d'œil en me faisant signe de regarder vers la

 12   carte; puis il m'a fait sortir de cette pièce pour aller dans la pièce d'à

 13   côté, qui était une pièce semi-ovale. Il a ouvert la porte et a dit:

 14   "C'est la pièce où l'on présente nos rapports". Et lorsque je suis rentré,

 15   la secrétaire m'a dit que je pouvais entrer. "Le Président vous recevra",

 16   m'a-t-elle dit. Le Président m'a reçu en effet, quoiqu'il n'avait pas fini

 17   son repas et il a partagé son repas avec moi.

 18   Question: Je vous arrête un instant. Qu'avez-vous vu sur la carte dont

 19   s'occupait M. Stanisic? Est-ce que vous vous souvenez du type de carte que

 20   c'était, quelle région elle montrait?

 21   Réponse: C'était une carte topographique militaire; l'échelle était

 22   1/50.000 ou 1/100.000. Il avait dessus une ligne rouge de tirée sur le

 23   terrain de la Dalmatie du Nord. Je connais bien le coin, je suis

 24   originaire de là-bas, je connais bien les lieux topographiquement parlant

 25   et j'ai compris que c'était là la ligne qui indiquait la disposition des

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  1   unités de l'armée. Cela passait par Perucac, par Slivaja, Petrovo Polje et

  2   Moksvic, Cikova et les environs de Benkovac et Zadar.

  3   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir audience

  4   publique.

  5   (Audience publique avec mesures de protection à 9 heures 45.)

  6   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que le colonel Maksic a fini

  8   par arriver avec ces 10 officiers?

  9   Milan Babic (interprétation): Il s'est passé une dizaine de jours et il

 10   ne venait toujours pas; alors, j'ai téléphoné à la secrétaire du Président

 11   Milosevic et je lui ai demandé de voir avec le Président? Elle m'a dit

 12   qu'il n'était pas sur place mais qu'elle allait établir la communication

 13   et qu'elle le retrouverait là où il était. Lorsque la communication était

 14   établie, je lui ai demandé ce qu'il était advenu des officiers et il m'a

 15   répondu qu'ils venaient le lendemain; mais ils ne sont pas venus le

 16   lendemain, ils sont arrivés au bout de cinq ou six jours. Et il n'est

 17   arrivé que Maksic et encore 2 hommes; ils étaient 5 ou 6.

 18   Question: Qui sont les hommes qui sont arrivés et quels postes ont-ils

 19   occupés?

 20   Réponse: Il n'étaient pas 5 ou 6, ils étaient 2. Lorsqu'ils sont arrivés,

 21   il y avait le colonel Dusan Kasum, qui était chef d'état-major, et le

 22   colonel Vuletic, chef des transmissions. Et il y avait aux fonctions de

 23   directeur des opérations le colonel Maksic. Ils sont venus chez Martic, à

 24   la forteresse de Knin, et ils m'ont demandé de venir; une fois arrivé,

 25   j'ai vu qu'ils n'étaient que 3 en tout et pour tout; ils ont haussé les

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  1   épaules. Je leur ai demandé qui était le commandant; on m'a dit que

  2   c'était Maksic et ils m'ont dit de téléphoner au général Simovic, ministre

  3   de la Défense de Serbie. J'ai appelé Simovic et je lui ai demandé: "Est-ce

  4   que Maksic est commandant du quartier général de la TO de Krajina?" Il m'a

  5   répondu qu'ils avaient désigné le général Djujic et il m'a fourni une

  6   explication quelconque en disant que Maksic ne pouvait pas être

  7   commandant.

  8   Question: Quelle était la raison pour laquelle le général Djujic était

  9   censé assumer ces fonctions, prendre ce poste?

 10   Réponse: Simovic avait dit que Maksic était un alcoolique.

 11   Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour vous soumettre

 12   rapidement les décisions prises à cet effet. Il s'agit de l'intercalaire

 13   69: "Nomination du général Djujic", intercalaire 70. Pour le 69, il y

 14   avait le général Djujic, Maksic et Vuletic. Intercalaire 70: "Nomination

 15   du colonel Djujic". Intercalaire 71: "Nomination de Maksic". Intercalaire

 16   72: "Ordre de relever de ses fonctions Djujic". Intercalaire non pas 46,

 17   mais 49.6: c'est une décision portant "nomination du colonel Tabok", alors

 18   que nous avons à l'intercalaire 51.1 et à l'intercalaire 51.2, des

 19   décisions consistant à relever de la fonction Dusan Starevic, Velibor

 20   Matijasevic.

 21   Est-ce que ce sont là des décisions prises en rapport avec le commandement

 22   de la Défense territoriale?

 23   Réponse: Oui.

 24   Question: Est-ce qu'en fait, c'est vous, dans la Krajina, qui avez pris

 25   ces décisions importantes, substantielles ou est-ce que ce sont là

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  1   simplement des documents officiels qui confirment des décisions prises par

  2   d'autres?

  3   Réponse: C'étaient des décisions officielles, juridiques; cela ne faisait

  4   que confirmer les décisions prises par les instances compétentes à

  5   Belgrade. Dans ce cas concret, c'était le grand état-major, ainsi que le

  6   secrétaire fédéral à la Défense nationale.

  7   Et s'agissant des deux documents où il est question de Starevic et

  8   Matijasevic, cela n'a rien à voir avec le QG de la TO, mais du

  9   fonctionnement de la structure parallèle et des obstructions au niveau du

 10   parlement pour influer sur l'issue de ce qui viendrait à être négocié à La

 11   Haye.

 12   Question: Monsieur le Témoin, ces commandants de la TO ont été nommés:

 13   est-ce que ces hommes étaient contrôlés par les hommes politiques de la

 14   Krajina ou est-ce qu'ils devaient rendre des comptes à ces hommes

 15   politiques de la Krajina ou pas?

 16   Réponse: Non, ils n'avaient pas à rendre des comptes. Eux-mêmes n'avaient

 17   pas établi de contrôle sur la TO unifiée de la SAO de Krajina et ils sont

 18   restés subordonnés aux unités compétentes ou aux commandements compétents

 19   de la JNA, selon les régions.

 20   Question: Dans ce contexte, je dois vous présenter un autre document qui

 21   se trouve à l'intercalaire 73. Examinons l'intercalaire 73 de la pièce

 22   352.

 23   (Intervention de l'huissier.)

 24   Il s'agit ici d'un ordre, certificat signé par Branko Kostic, Président de

 25   la RSFY, et par Milos Kosic, colonel Milos Kosic; cet ordre porte sur la

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  1   promotion du colonel Kasum qui devient chef d'état-major de la Défense

  2   territoriale en avril 1992. C'est exact?

  3   Réponse: Il est promu au grade de général. Et on voit qu'au préalable, il

  4   a été affecté aux fonctions de chef du QG de la TO dans la République

  5   serbe de Krajina.

  6   Question: En d'autres termes, là, nous parlons du mois d'avril 1992. Est-

  7   ce que cela veut dire que les rapports ou ce rapport entre l'état-major de

  8   la TO, les officiers qui en font partie et la JNA ou la VJ, comme l'armée

  9   a été appelée par la suite, est-ce que cela veut dire que ces rapports

 10   sont restés les mêmes?

 11   Réponse: Ils sont restés les mêmes jusqu'en août 1995. Et pratiquement,

 12   c'est Slobodan Milosevic qui désignait les commandants de l'armée serbe de

 13   la République serbe de Krajina.

 14   Question: Monsieur le Témoin, en ce qui concerne la TO de Krajina, avez-

 15   vous eu l'occasion d'examiner, au cours des conversations que vous avez

 16   eues à La Haye, un grand nombre de documents portant sur des nominations,

 17   sur l'organisation d'unités, est-ce que vous avez passé en revue de tels

 18   documents?

 19   Réponse: Oui.

 20   Question: Seriez-vous en mesure d'authentifier tous ces documents? Les

 21   connaissiez-vous?

 22   Réponse: Oui, c'est exact.

 23   Question: Messieurs les Juges, je ne souhaite pas présenter la totalité de

 24   ces documents au témoin. Je voulais me borner à donner les titres des

 25   documents pour vous et pour le dossier de l'audience, documents à propos

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  1   desquels le témoin a apporté la confirmation qu'ils étaient préparés par

  2   les autorités de la région.

  3   Il s'agit de la pièce 352, des intercalaires 114, 115, 117 à 119, de 121 à

  4   141, de 144… 145, 148, 150, 151. Ce sont les documents auxquels j'aimerais

  5   faire référence dans ce cadre, puisqu'ils portent tous sur la formation

  6   d'unités ou sur des nominations.

  7   Ces décisions qui ont été prises ont-elles été respectées, appliquées par

  8   la JNA et par la police de Martic?

  9   Réponse: Certaines décisions, oui, d'autres pas. Les décisions afférentes

 10   aux officiers actifs et leurs rôles ont été respectées. Une partie des

 11   décisions prises au cours des mois de juillet, août et septembre de

 12   l'année 1991 n'ont pas été respectées.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, s'il vous plaît.

 14   M. Kwon (interprétation): Aux fins du dossier de l'audience, je précise

 15   que la pièce 151 a été abandonnée.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Juge, de me

 17   l'avoir rappelé. Ma collègue me l'indiquait à l'instant. 

 18  (Audience à huis clos partiel à 9 heures 57) [Confidentialité levée par une

 19   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): S'agissant des problèmes qui ont

 21   surgi à l'encontre des décisions portant sur la Défense territoriale,

 22   venant des hommes politiques, et aussi par rapport à la JNA, au fait que

 23   la JNA a ignoré une partie de ces décisions, est-ce que vous avez eu une

 24   réunion avec le général Vukovic et avec le général Djujic en octobre 1991?

 25   Milan Babic (interprétation): Oui, vers le 10 octobre 1991. A Benkovac.

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  1   Question: De quoi avez-vous parlé? Quelle fut l'issue de ces discussions?

  2   Réponse: Le général Djujic a pris l'initiative de cette rencontre avec le

  3   général Vukovic aux fins de résoudre les questions de supériorité et de

  4   subordination au niveau de la TO, pour savoir qui serait le commandement

  5   compétent: serait-ce le commandement du Corps de la JNA ou alors le QG de

  6   la TO de la Krajina? Le général Vukovic a dit qu'il n'avait pas de

  7   compétences à ce sujet et qu'à ce sujet-là, il fallait contacter le

  8   général Adzic au grand état-major de Belgrade.

  9   Question: L'avez-vous fait? Avez-vous contacté le général Adzic?

 10   Réponse: J'ai été reçu par le général Adzic, non pas au commandement de

 11   l'état-major mais dans un bâtiment militaire autre.

 12   Question: De quoi avez-vous discuté avec lui et quel a été résultat,

 13   l'issue de cette discussion?

 14   Réponse: Cela a été l'un des thèmes principaux. Et l'issue, c'est qu'il

 15   n'allait rien changer au niveau des compétences, que les compétences

 16   allaient demeurer au niveau de la JNA, qu'il en était ainsi dans le

 17   système et que ça allait rester ainsi.

 18   Nous avons parlé d'autres questions; je crois qu'il y avait cinq ou six

 19   sujets autres. J'avais pris des notes dans mon calepin que j'avais emporté

 20   pour avoir un aide-mémoire. Et Djujic… Il y avait là les sujets qu'avait

 21   mentionnés Djujic concernant ceux dont il fallait parler avec Adzic au

 22   niveau des approvisionnements, du statut des gens du personnel au sein de

 23   la TO et ainsi de suite.

 24   Question: Quelle était la position… Quelle a été la position du général

 25   Adzic par rapport à vos demandes? Comment a-t-il réagi?

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  1   Réponse: En disant quelque chose du genre: "Il ne va pas y avoir de

  2   problèmes". Il n'a pas prononcé exactement ces mots-là, mais c'était le

  3   sens de ce qu'il a dit.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Audience publique, je vous prie.

  5   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures.)

  6   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avec l'aide de Mme l'huissière,

  8   j'aimerais soumettre au témoin le document 74 de la pièce à conviction

  9   352.

 10   (Intervention de l'huissière.)

 11   Monsieur le Témoin, quelle est la nature de ce document, je vous prie? Et

 12   qui a établi ce document?

 13   Milan Babic (interprétation): Ce document a été établi au grand quartier

 14   général de la SAO de Krajina, de la Défense territoriale de la SAO de

 15   Krajina. C'est un rapport qui expose la situation au sein de la Défense

 16   territoriale de la SAO de Krajina, en octobre 1991.

 17   Question: A l'intention de qui ce document a-t-il été établi et à qui a-t-

 18   il été transmis?

 19   Réponse: Il a d'abord été établi pour le Président du gouvernement, pour

 20   le chef du gouvernement et ensuite pour le grand quartier général de la

 21   JNA. C'est là qu'il devait être transmis.

 22   Question: A-t-il été transmis au général Adzic?

 23   Réponse: Je ne le sais pas exactement. Mais il recevait en général des

 24   informations sur ces questions selon les modalités dont nous avons déjà

 25   parlé ici.

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  1   Question: Les sujets traités dans ce document et relatifs à la Défense

  2   territoriale sont-ils les mêmes que ceux dont vous venez de parler comme

  3   étant ceux que vous avez discutés avec le général Adzic lorsque vous

  4   l'avez rencontré?

  5   Réponse: Oui. A peu près.

  6   Question: Monsieur le Témoin, j'aimerais maintenant que nous parlions des

  7   discussions qui ont eu lieu au sujet du plan Carrington et de l'avenir de

  8   la Yougoslavie. Quelles étaient les propositions relatives à la Krajina?

  9   Qu'est-ce qui était proposé pour la Krajina?

 10   Réponse: Dans le plan de Lord Carrington, il y avait trois possibilités

 11   s'agissant de la façon dont seraient réglés les rapports entre les

 12   Républiques de l'ex-Yougoslavie et les régions dans ces diverses

 13   Républiques où les communautés ethniques avaient certaines

 14   caractéristiques. Dans ces cas-là, il était prévu qu'un statut territorial

 15   particulier soit accordé, et ce statut concernait bien entendu la Krajina

 16   également.

 17   Question: Etait-il prévu une certaine autonomie en Croatie?

 18   Réponse: Oui, c'est tout à fait cela, une autonomie territoriale à

 19   l'intérieur de Croatie.

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Huis clos partiel, je vous prie.

 21 (Audience à huis clos partiel à 10 heures 03) [Confidentialité levée par une

 22  ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 23  Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous participé à trois

 24 réunions de négociations avec l'ambassadeur néerlandais M. Wijnaendts sur le

 25 sujet du plan Carrington?

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  1   Milan Babic (interprétation): C'est cela. C'est tout à fait cela. Chaque

  2   fois, la veille de la conférence plénière.

  3   Question: Avant de vous rendre à ces négociations avec M. Wijnaendts,

  4   rencontriez-vous M. Milosevic à Belgrade?

  5   Réponse: Chaque fois. Toujours. C'est tout à fait ça. Chaque fois qu'il y

  6   avait une rencontre de ce genre, j'avais d'abord une réunion avec M.

  7   Milosevic.

  8   Question: Est-ce que vous alliez le voir pour recevoir des instructions?

  9   Ou, dans le cas contraire, pourquoi est-ce que vous alliez le voir?

 10   Réponse: Nous étions convoqués à Belgrade pour recevoir des instructions

 11   quant à la conduite à adopter.

 12   Question: Quand est-ce que vous y êtes allé pour la première fois?

 13   Réponse: Je pense, le 13 octobre ou à peu près à cette date. En tout cas,

 14   avant le 14.

 15   Question: Quelles instructions avez-vous reçues?

 16   Réponse: Les instructions consistaient à nous dire que le plan était bon

 17   pour nous. Il ne nous était pas dit tout à fait clairement qu'il fallait

 18   l'adopter, mais que ce plan était bon pour nous. C'est ce qu'a dit M.

 19   Milosevic, ainsi que les quelques personnes qu'il avait invitées dans son

 20   cabinet pour nous expliquer la teneur du plan.

 21   Question: Qui vous a expliqué la teneur de ce plan? S'agissait-il de

 22   responsables du gouvernement de Belgrade?

 23   Réponse: Il y avait Vladan Kutlesic, un conseiller politique de Milosevic,

 24   et en tout état de cause il s'agissait de personnes, en général, des

 25   professeurs d'université: Ratko Markovic, Kosta Mihajlovic, Vasilije

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  1   Krestic, Smilja Abramov; donc des professeurs d'université qui étaient des

  2   hommes avec lesquels M. le Président Milosevic collaborait.

  3   Question: Cette première fois où vous avez eu une rencontre de ce genre à

  4   Belgrade, est-ce que quelque chose de particulier s'est passé à Knin qui

  5   vous a alerté?

  6   Réponse: Effectivement, Velibor Matijasevic, le Président du Parlement de

  7   la SAO de Krajina a convoqué une séance du Parlement dès notre départ de

  8   Knin, où il demandait un rapport sur le travail du Gouvernement de la SAO

  9   de Krajina. Et puis, la deuxième chose qui s'est passé, et c'est Ljubica

 10   Solaja qui me l'a dit, c'est qu'au poste de police de Knin, "Frenki" a

 11   incité les Serbes présents à déclarer que Babic était un traître.

 12   Tout cela s'est donc passé avant mon départ. Et au cours de ma rencontre

 13   avec Milosevic, j'ai subi certaines pressions indiquant qu'il fallait que

 14   je me rende à La Haye. Alors, il a dit: "Je n'en sais rien"; et c'est

 15   Jovica… il avait à l'esprit Jovica Stanisic. Milosevic est ensuite sorti.

 16   Puis, au bout d'un certain temps, j'ai obtenu l'information disant que la

 17   session du Parlement avait été annulée, que Matijasevic avait carrément

 18   annulé la tenue de cette assemblée.

 19   Question: Donc vous êtes allé à Paris. Et quelle était la position que

 20   vous avez adoptée à Paris? Est-ce que vous avez accepté le plan ou est-ce

 21   que vous vous êtes exprimé favorablement par rapport à ce plan?

 22   Réponse: Non, ni moi ni les autres membres de la délégation n'avons fini

 23   par accepter ce plan. Nous ne nous sommes pas prononcés en faveur du plan,

 24   mais nous avons exprimé notre disponibilité pour ce qui était de continuer

 25   à négocier.

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  1   Question: A votre retour de Paris, est-ce que vous avez rendu compte de la

  2   conduite des négociations à M. Milosevic?

  3   Réponse: Milosevic était informé de ces négociations puisque nous nous

  4   étions de nouveau retrouvés chez lui avant le 18. Et ce jour-là, je m'en

  5   souviens très bien, il a réagi de façon très ferme à mon égard. Il a dit:

  6   "Accepte! Pour que je sois débarrassé de votre problème. La Serbie est la

  7   seule à avoir une chance de devenir un Etat, et tous les autres vont être

  8   avalés par la nuit".

  9   Moi, je n'ai pas accepté cette proposition.

 10   Question: Qu'a-t-il dit exactement? Que voulait-il dire, lorsqu'il a dit

 11   que la Serbie avait une chance d'être un Etat? A quoi cela fait-il

 12   référence?

 13   Réponse: De conserver le statut d'Etat et que tous les autres allaient

 14   être perdus et démantelés par la guerre. La Serbie, autrement dit,

 15   s'agissant de tous les territoires de l'ex-Yougoslavie, était la seule à

 16   avoir une chance de continuer à être un Etat; toutes les autres régions

 17   seraient avalées par la nuit, autrement dit deviendraient colonisées ou en

 18   tout cas dépendantes d'une autre puissance. C'était cela que cela voulait

 19   dire.

 20   Question: Est-ce que cela faisait référence à la Croatie, à la Slovénie, à

 21   la Bosnie?

 22   Réponse: Il a parlé de toutes les régions, à part la Serbie.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Mais lors de cette deuxième rencontre

 24   avec Wijnaendts, quelle position avez-vous adoptée? Avez-vous accepté le

 25   plan?

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  1   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic, lui, dit qu'il faut

  2   qu'il accepte le plan; et à présent, il semblerait qu'il n'a pas accepté

  3   le plan. Moi, j'ai du mal à suivre. Je ne comprends vraiment rien à ce qui

  4   est en train d'être dit ici. Pourrait-on demander au témoin d'expliquer sa

  5   position?

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, pourriez-vous

  7   expliquer la position de M. Milosevic lorsque vous êtes allé le voir pour

  8   la deuxième fois afin, comme vous l'avez dit vous-même, de recevoir des

  9   instructions? Quelle a été, ce jour-là, la position de M. Milosevic par

 10   rapport au plan Carrington et qu'avez-vous, vous-même, fait, par la suite?

 11   Milan Babic (interprétation): Le plan du Président Milosevic, c'était que

 12   nous, s'agissant de la partie du plan qui nous concernait, autrement dit

 13   ce statut spécial à l'intérieur des frontières croates, qu'il fallait que

 14   nous acceptions cette partie du plan.

 15   M. le Président (interprétation): Oui. Et étiez-vous prêts à accepter

 16   cette partie du plan ou pas?

 17   Milan Babic (interprétation): Non, à ce moment-là nous n'étions pas prêts

 18   à accepter cela. Nous comprenions que le Président Milosevic souhaitait

 19   sortir sain et sauf de la guerre en nous laissant, nous, nous dépatouiller

 20   et en permettant aux Croates de se venger sur nous.

 21   M. le Président (interprétation): Oui.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Lorsque vous étiez à Paris, après

 23   cette deuxième rencontre avec Wijnaendts, est-ce que vous avez exprimé

 24   votre position publiquement?

 25   Milan Babic (interprétation): La deuxième rencontre s'est passée dans les

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  1   locaux du ministère des Affaires étrangères de La Haye. J'ai fait une

  2   série de déclarations à ce moment-là et, dans l'une de ces déclarations,

  3   j'ai dit que je représentais la SAO de Krajina et la Région autonome de

  4   Krajina bosniaque. Or cela n'avait pas été convenu lors de la réunion. Et

  5   à cette occasion, nous n'avons pas non plus accepté le plan.

  6   La proposition de l'ambassadeur Wijnaendts, ce jour-là, nous proposait en

  7   fait d'étudier le statut du Tyrol en Italie pour voir si ce statut pouvait

  8   constituer un modèle nous concernant à l'intérieur de la Croatie.

  9   Question: Avez-vous rencontré M. Milosevic après cette deuxième réunion

 10   avec Wijnaendts? Avez-vous, une nouvelle fois, parlé à M. Milosevic en

 11   octobre 1991?

 12   Réponse: Oui, effectivement, le 20 octobre et le 23 octobre, il me semble.

 13   D'abord dans son cabinet et, la deuxième fois, dans le palais de la

 14   Fédération à Novi Beograd.

 15   Question: Parlons de la réunion du 20 octobre. Cet entretien du 20

 16   octobre, quel était son objet et qu'est-ce qui a été dit durant cet

 17   entretien?

 18   Réponse: Cet entretien avait pour objet de lui permettre de me dire qu'il

 19   fallait que je me rende à Banja Luka pour rencontrer Radovan Karadzic,

 20   puisque c'est Karadzic qui organisait les choses là-bas, afin d'obtenir le

 21   rejet du plan Carrington. Autrement dit, les représentants serbes de

 22   Bosnie et de la SAO Krajina de Slavonie occidentale devaient rejeter ce

 23   plan. Or je ne sais pas si c'était vraiment son intention, mais il a

 24   traité Momir Bulatovic de "traître" de la façon la plus ferme qui soit

 25   avant de me dire cela, et il a ajouté qu'il avait là-bas des hommes qui

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  1   allaient régler le problème de Momir Bulatovic au Monténégro, qui allaient

  2   le calmer.

  3   Question: Qu'avait fait Momir Bulatovic pour provoquer la colère de M.

  4   Milosevic?

  5   Réponse: Bulatovic, à la deuxième séance plénière de La Haye, avait

  6   accepté le plan Carrington.

  7   Question: Monsieur le Témoin, vous venez de nous dire que M. Milosevic

  8   vous a, en fait, donné pour instruction d'accepter le plan Carrington.

  9   Pouvez-vous vous expliquer sur ce point?

 10   Réponse: Maintenant, c'était une réaction différente des deux précédentes.

 11   Est-ce que la raison de cela c'était que, dans ce plan, on examinait

 12   également le statut du Kosovo décidé en 1974? Ou est-ce que c'est parce

 13   que Milosevic et tous ceux qui l'entouraient émettaient des critiques

 14   quant au fait que, selon ces modalités, la Yougoslavie et l'idée de la

 15   Yougoslavie qu'ils défendaient était en fait niée, donc que la partie de

 16   la Yougoslavie qu'ils voulaient conserver ne pouvait pas l'être? Peut-être

 17   que c'étaient les deux raisons pour lesquelles, désormais, le point de vue

 18   avait changé sur le plan Carrington?

 19   Question: Donc la proposition, à ce moment-là, différait de celle que M.

 20   Milosevic vous avait demandé d'accepter?

 21   Réponse: C'est cela. Même chose pour le 23, jour où il m'a proposé quatre

 22   points à débattre pour la rencontre à venir avec Wijnaendts. Je parle de

 23   la réunion qui s'est tenue au palais de la Fédération à Novi Beograd.

 24   Question: Etes-vous en train de parler de la réunion du 23 octobre?

 25   Réponse: C'est cela?

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Qui a assisté à cette rencontre?

  2   Milan Babic (interprétation): Il y avait pas mal de monde: des

  3   représentants de la Serbie, du Monténégro, du peuple serbe de Bosnie-

  4   Herzégovine et de la SAO de Krajina, de Slavonie orientale et Slavonie

  5   occidentale. Le Président Milosevic était présent, des académiciens de

  6   l'Académie des sciences et lettres serbe, Branko Kostic, Kanazir, Jovic,

  7   Karadzic, ses hommes de Bosnie et d'autres.

  8   M. le Président (interprétation): Quel a été le résultat de la rencontre

  9   du 23 octobre?

 10   Milan Babic (interprétation): Le résultat, c'est que Branko Kostic qui

 11   présidait la réunion a estimé, à la fin, que la majorité du peuple, de la

 12   population, était favorable à la Yougoslavie -il a parlé de 54% à peu

 13   près- et que donc, il était constaté que la Yougoslavie devait demeurer en

 14   existence, que c'était le point de vue de la majorité et que ce serait

 15   donc la position exprimée à la conférence de La Haye, s'agissant du plan

 16   de Lord Carrington.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur Milosevic vous a-t-il donné

 18   des instructions spéciales, ce jour-là?

 19   Milan Babic (interprétation): Oui, il m'a dit que Wijnaendts m'attendait

 20   à Paris -excusez-moi, oui, oui, c'était bien à Paris, la troisième fois-

 21   et il m'a proposé quatre points à débattre, quatre positions que je devais

 22   défendre lors de cette réunion de Paris: premièrement, le statut spécial

 23   de la Krajina et… Les autres, je ne me souviens plus ce qu'ils étaient.

 24   Moi, j'étais méfiant. J'ai dit: "un statut spécial, pourquoi?". Il a

 25   ajouté: "Sur le territoire yougoslave". Et il m'a donné un document, un

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  1   document que Borisav Rasuo possède aujourd'hui, je pense; je n'en suis pas

  2   tout à fait sûr.

  3   En tout cas, j'ai pris ce document; et à la conférence de Paris, Son

  4   Excellence l'ambassadeur Wijnaendts, dès le début de la réunion -je

  5   n'avais pas encore exposé nos positions- a dit: "Monsieur Babic, nous ne

  6   pouvons pas accepter le premier point.". Donc je suppose que M. Milosevic

  7   lui avait déjà fait connaître ce qu'il était convenu d'appeler "nos

  8   positions" qui en fait étaient les positions élaborées par lui.

  9   Question: Ce document que vous avez reçu de M. Milosevic était-il écrit

 10   par lui? Y avait-il son écriture sur ce document?

 11   Réponse: C'était un document tapé à la machine sur lequel étaient inscrits

 12   les quatre points et il a ajouté de son écriture "sur le territoire

 13   yougoslave".

 14   Question: Est-ce que cela signifie "Statut spécial sur le territoire

 15   yougoslave"? Etait-ce sa proposition?

 16   Réponse: C'est cela que cela voulait dire, même si cela pouvait être

 17   interprété différemment. En tout cas, moi personnellement, cela a créé une

 18   certaine confusion dans mon esprit. Je ne pouvais pas supporter cela. Je

 19   ne voulais pas aller à Paris, je suis parti pour Knin en déclarant que

 20   j'étais malade.

 21   Question: Mais êtes-vous tout de même allé à Paris finalement et pourquoi?

 22   Réponse: Il m'a rappelé quelques jours plus tard par téléphone. C'était

 23   donc le 28 ou le 29 octobre, en me disant: "Mais qu'est-ce qui se passe?"

 24   J'ai dit que j'étais malade. Il m'a dit: "Je ne crois pas aux médecins qui

 25   sont malades. Allez, vas-y! Wijnaendts t'attend." Et j'y suis allé.

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  1   Question: Comment êtes-vous arrivé là-bas?

  2   Réponse: J'y suis allé en avion. Deux fois, nous avons fait le voyage dans

  3   un petit avion du gouvernement fédéral, la première fois et la deuxième

  4   fois, et, la troisième fois, c'était un petit avion militaire. C'est un

  5   avion qui a décollé de Batajnica où se trouve l'aérodrome militaire et qui

  6   était piloté par des soldats.

  7   Question: Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez rencontré M. Milosevic

  8   à nouveau à la fin du mois de novembre ou au début du mois de décembre

  9   1991, au sujet du plan Vance?

 10   Réponse: C'est cela, effectivement, aux environs du 23 novembre.

 11   Question: A cette date, le plan Vance avait-il déjà été accepté par M.

 12   Milosevic, M. Kadijevic et M. Tudjman? Le savez-vous?

 13   Réponse: C'est cela. En effet, il avait été accepté.

 14   Question: De quoi avez-vous parlé avec M. Milosevic dans ces conditions?

 15   Réponse: Milosevic m'a présenté les éléments fondamentaux de l'acceptation

 16   du plan. Il m'a montré quels étaient les territoires concernés sur la

 17   carte; il m'a montré donc sur la carte des parties en jaune qui étaient

 18   les municipalités de Croatie et qui étaient concernées par le plan. Mais

 19   certaines parties de certaines municipalités, et notamment les

 20   municipalités de la SAO de Krajina et de la région nord de la Dalmatie, de

 21   Lika et de Banja ne figuraient pas en jaune sur la carte. Mais il n'a pas

 22   voulu parler de cela avec moi. Il m'a indiqué que je devrais en parler

 23   avec la délégation internationale des Nations Unies qui se trouvait à

 24   l'étage inférieur, dans un salon. Et là, j'ai retrouvé Vlatko Jovanovic

 25   qui a interprété pour moi la conversation que j'ai eue avec des

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  1   représentants du Conseil de sécurité des Nations Unies. Ces derniers m'ont

  2   présenté la même idée que celle que lui venait de me présenter quelques

  3   instants auparavant. J'ai pour ma part tenté de faire quelques

  4   observations, les mêmes observations que celles que je ne cessais de

  5   répéter depuis deux mois au moins.

  6   Question: Monsieur Milosevic vous a-t-il demandé d'accepter le plan Vance

  7   quand vous l'avez rencontré ce jour-là?

  8   Réponse: Oui, il a demandé que nous fassions savoir que nous l'acceptions.

  9   Question: L'avez-vous fait?

 10   Réponse: Non, non.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous demandé des amendements au

 12   plan? Et si oui, lesquels?

 13   Milan Babic (interprétation): C'est cela, j'ai demandé que la JNA reste

 14   en Krajina, que les forces de paix se déploient sur le front entre les

 15   parties serbe et croate, ce qui était convenu d'appeler la ligne verte sur

 16   le modèle de Chypre. J'ai demandé que l'on n'abandonne pas la Défense

 17   territoriale de la SAO de Krajina, que les lois de Croatie ne s'appliquent

 18   pas en SAO de Krajina.

 19   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, peut-être pouvez-

 20   vous demander au témoin de nous rappeler quels étaient les éléments

 21   fondamentaux du plan. Après quoi, nous pourrons mieux comprendre pourquoi

 22   le témoin a adopté le point de vue qui a été le sien.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, quels étaient les

 24   points principaux du plan Vance? Vous venez de mentionner ces territoires

 25   de couleur jaune sur la carte, mais quel était le destin promis à ces

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  1   territoires?

  2   Milan Babic (interprétation): C'était un plan provisoire qui devait

  3   permettre la démilitarisation de ces régions, à savoir de plusieurs

  4   secteurs indiqués sur la carte comme secteurs de Krajina Ouest, secteur de

  5   Krajina Est; plus tard, il a été question également du secteur Nord et du

  6   secteur Sud. La JNA devait donc se retirer de ces régions, toutes les

  7   unités qui étaient encore présentes de la JNA devaient se retirer et les

  8   forces armées qui demeuraient sur ces territoires devaient être

  9   démantelées, y compris les unités de la Défense territoriale; toutes les

 10   unités de volontaires devaient donc sortir du territoire de la Krajina. Je

 11   parle des volontaires qui étaient arrivés sur ce territoire de

 12   l'extérieur.

 13   Donc quatre secteurs étaient établis, qui devaient être sous contrôle de

 14   la police, donc d'hommes portant des armes à la ceinture et plus d'armes à

 15   canon long. Et les structures démographiques devaient être conformes à

 16   celles qui existaient avant le conflit, tout cela pour trouver une

 17   solution politique au problème. Au point 1, il était déclaré que neuf

 18   régions seraient créées, notamment en Croatie.

 19   M. le Président (interprétation): Oui, Monsieur Milosevic?

 20   M. Milosevic (interprétation): Je suis très fatigué de devoir lire sur

 21   l'écran ce que dit ce témoin, parce que je ne l'entends absolument pas. Il

 22   est tourné de l'autre côté, les interprètes l'entendent parce qu'il a un

 23   micro destiné aux interprètes, mais, pour la langue serbe, il n'a pas de

 24   micro. Il y a déformation de sa voix, je comprends tout à fait cette

 25   mesure, mais, je vous en prie, demandez-lui de parler plus fort. Je suis

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  1   certain que Me Tapuskovic n'entend rien non plus, mais il n'ose sans doute

  2   pas se plaindre parce qu'il se sent mal à l'aise.

  3   M. le Président (interprétation): Je crois que si Me Tapuskovic voulait se

  4   plaindre, il le ferait. Cela ne fait aucun doute.

  5   M. Tapuskovic (interprétation): Monsieur le Président, je me suis déjà

  6   plaint une fois, mais je ne voulais pas vous ennuyer. Vous vous

  7   souviendrez qu'avant hier, j'ai déjà dit que je n'entendais rien.

  8   Vraiment, je n'entends rien. Je me suis plaint le premier jour. Quand il

  9   explique des choses à huis clos, il parle plus fort et quand il parle en

 10   audience publique, vraiment il parle de façon inintelligible.

 11   M. Kwon (interprétation): Je remarque que M. Muller est debout.

 12   M. Muller (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je souhaite

 13   simplement vous informer du fait que mes écouteurs sont absolument

 14   impeccables, parfaits, ce qui signifie que j'entends le témoin très, très

 15   nettement, tout aussi nettement qu'en traduction anglaise.

 16   M. le Président (interprétation): Merci. Nous avons entendu tous les

 17   commentaires. Je crois que nous allons maintenant suspendre l'audience.

 18   M. Kwon (interprétation): Est-ce que nous sommes à huis clos?

 19   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May…

 20   M. le Président (interprétation): Un instant, un instant, je voudrais

 21   parler au témoin.

 22   Monsieur le Milan Babic, vous avez entendu ce qui vient d'être dit. Un

 23   des problèmes qui se posent, c'est que vous donnez de très nombreux

 24   détails dans votre déposition et il est important que chacun puisse suivre

 25   et comprendre ce que vous dites, assimiler ce que vous dites. Et il est

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  1   assez difficile de le faire compte tenu du nombre de détails que vous

  2   fournissez -comme on vous l'a demandé d'ailleurs. Donc il serait peut-être

  3   utile que vous parliez davantage dans le micro, que vous parliez à voix

  4   plus haute, et, lorsque vous fournissez vos réponses, que vous ayez

  5   l'amabilité de bien vouloir nous faire face à nous, les Juges, de façon à

  6   ce que votre voix puisse être entendue dans toutes les parties du

  7   prétoire. Donc tournez-vous vers nous plutôt que vers le Procureur. Voilà,

  8   c'est la fin de mes commentaires.

  9   Milan Babic (interprétation): J'ai compris.

 10   M. Kwon (interprétation): Monsieur Milosevic, si vous n'entendez pas bien

 11   ce que dit le témoin en serbe, je vous demande une nouvelle fois pourquoi

 12   vous n'acceptez pas de mettre les écouteurs sur vos oreilles, car cela

 13   vous permettrait de suivre très clairement.

 14   Et puis, le deuxième point est le suivant: nous passons très souvent à

 15   huis clos partiel, donc si vous avez des difficultés à suivre les propos

 16   du témoin, pourquoi ne demandez-vous pas à vos collaborateurs d'entrer

 17   dans le prétoire pour vous apporter leur aide? Je vous dis cela parce que

 18   nous sommes à huis clos partiel en ce moment et cela vous permettra d'y

 19   réfléchir.

 20   M. Milosevic (interprétation): Je ne comprends pas, Monsieur Kwon, comment

 21   quelqu'un peut me permettre ou m'aider à mieux entendre. Aucun de mes

 22   collaborateurs ne peut m'aider à mieux entendre. Moi, j'ai posé une

 23   question de nature technique; je disais simplement que je n'entendais pas

 24   ce que le témoin disait, mais je n'ai absolument pas laissé entendre que

 25   M. Muller n'entendait pas. Je crois tout à fait que M. Muller entend bien.

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  1   Mais la remarque que j'ai faite concernait ma personne; j'ai dit que moi,

  2   je n'entendais pas.

  3   M. le Président (interprétation): Suspension de 20 minutes.

  4   (L'audience, suspendue à 10 heures 31, est reprise à 10 heures 57.)

  5   M. le Président (interprétation): Nous allons revenir en audience publique

  6   pour aborder une question.

  7   Mme Anoya (interprétation): Messieurs les Juges, nous sommes en audience

  8   publique.

  9   (Audience publique avec mesures de protection à 10 heures 57.)

 10   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, nous nous sommes

 11   saisis de la requête déposée par vous et M. Nice; nous vous l'accordons:

 12   vous allez bénéficier de ces six journées. Cependant, nous nous attendons

 13   à recevoir de votre part une liste de 14 témoins dans un délai de sept

 14   jours.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, nous

 16   avons déjà retenu les noms de ces 14 témoins et nous pourrons déjà vous

 17   les fournir dès demain.

 18   M. le Président (interprétation): Fort bien. Merci beaucoup.

 19   Oui, faut-il revenir à huis clos partiel?

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, nous pouvons rester en audience

 21   publique. J'aimerais apporter un éclaircissement sur certains points du

 22   plan Vance, pour que tout soit clair, pour que soient clairement énoncées

 23   les dispositions ou les suggestions.

 24   Tout d'abord, Monsieur le Témoin, est-ce que le plan Vance prévoyait la

 25   réintégration de ces trois SAO dans la République de Croatie, ceci dans le

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  1   cadre d'une certaine période donnée?

  2   Milan Babic (interprétation): Le plan n'en a pas fait état, pas de façon

  3   directe, exception faite de l'introduction où il est question de régions

  4   diverses sur le territoire de la Croatie. Le plan n'avait pas trait à la

  5   solution politique parce que, explicitement, il avait été dit qu'une

  6   solution politique devait être trouvée. Et le plan concernait la période

  7   en attendant la solution politique. C'est ce qui figurait en alinéa 1.

  8   Question: Et la disposition prévoyait une démilitarisation des trois SAO,

  9   et il y aurait uniquement les forces de police qui resteraient dotées des

 10   armes dont disposent, en général, les forces de police; est-ce à cela que

 11   vous pensiez?

 12   Réponse: C'est exactement la substance du plan; il s'agissait de

 13   démilitariser ces régions.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que ce plan prévoyait

 15   l'arrivée de troupes des Nations Unies et ces troupes, où allaient-elles

 16   être cantonnées?

 17   Milan Babic (interprétation): C'est exact. Ce plan, outre la

 18   militarisation ou plutôt après la démilitarisation, devait faire en sorte

 19   que les effectifs de paix, les forces de paix des Nations Unies soient

 20   réparties sur ces territoires pour contrôler les accès et les sorties dans

 21   cette région. Et il fallait contrôler les entrées et les sorties pour que

 22   l'on ne fasse pas entrer d'armes dans cette région.

 23   M. Kwon (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, est-ce que nous avons ce

 24   document dans notre classeur avec le plan Carrington, le plan  Vance?

 25   Peut-être qu'il serait utile, plus tard, de nous le fournir?

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  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je ne suis pas au courant. Je ne

  2   pense pas que ce soit le cas, Monsieur le Juge.

  3   M. le Président (interprétation): Pourrions-nous avoir un exemplaire?

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Si je vous ai bien compris et compris

  5   vos inquiétudes, Monsieur le Témoin, certaines des zones ou régions

  6   contrôlées par les Serbes n'étaient pas incluses dans ces zones qui

  7   allaient être supervisées par les forces des Nations Unies?

  8   Milan Babic (interprétation): C'est exact.

  9   Question: Est-ce que, dans ce plan Vance, il y avait aussi une disposition

 10   portant sur le retour des personnes déplacées, retour de ces personnes

 11   dans ces territoires?

 12   Réponse: C'est exact. Cela avait été l'un des objectifs, ou plutôt l'une

 13   des missions de cette communauté internationale.

 14   Question: Est-ce que, dans ce plan Vance, il y avait aussi une disposition

 15   portant sur des effectifs conjoints de la police, avec des Croates et des

 16   Serbes, dans ce territoire?

 17   Réponse: C'est cela, c'est ce que j'ai dit. Cela devait être proportionnel

 18   à la composition ethnique de la population avant le conflit.

 19   Question: Témoin, au moment où l'on discutait du plan Vance -et vous avez

 20   dit que ça a duré près de deux mois, il a fallu deux mois pour discuter

 21   des avantages et des inconvénients de ce plan-, est-ce que, pendant ce

 22   temps, la RSK a été établie, la République de la Krajina serbe?

 23   Réponse: Oui, le 19 décembre 1991.

 24   Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour présenter au témoin

 25   l'intercalaire 68 de la pièce 351. Je vais uniquement demander au témoin

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  1   d'y jeter un coup d'œil, nous n'allons pas en discuter dans le détail.

  2   Est-ce qu'il s'agit ici de la Constitution et de la loi constitutionnelle

  3   d'application de la création de la RSK en date du 19 décembre 1991?

  4   (Intervention de l'huissier.)

  5   Réponse: C'est exact.

  6   Question: Pourquoi a-t-on formé la RSK, à l'époque? Dans quel objectif?

  7   Réponse: La Conférence internationale de La Haye a constaté qu'il fallait

  8   reconnaître toutes les Républiques de l'ex-Yougoslavie qui demanderaient à

  9   être reconnues. En termes pratiques, cela signifiait que l'ex-Yougoslavie

 10   s'était désintégrée, chose qu'avait d'ailleurs constatée la Commission de

 11   Badinter, nommée en tant que telle par la Conférence. Et c'était la raison

 12   pour laquelle l'une des parties des territoires de cette ex-Yougoslavie, à

 13   savoir la SAO de Krajina se proclama comme étant une république.

 14   Question: Et la République de Krajina serbe a-t-elle demandé à être

 15   reconnue par la communauté internationale? A cet égard, je voudrais

 16   soumettre au témoin les intercalaires 71.1 et 71.2 de la pièce 351.

 17   (Intervention de l'huissière.)

 18   Réponse: Oui.

 19   Question: Est-ce que ce sont là les deux lettres envoyées à des

 20   fonctionnaires internationaux?

 21   Réponse: C'est exact.

 22   Question: Est-ce que vous avez été reconnu?

 23   Réponse: Non.

 24   Question: Est-ce que le territoire de la RSK coïncidait avec le territoire

 25   de la SAO de Krajina, ou est-ce que la RSK avait un territoire qui

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  1   englobait le territoire des trois SAO, tel qu'il se présentait à l'époque

  2   le 19 décembre?

  3   Réponse: Le 19 décembre, la SAO de la Krajina est devenue la République

  4   serbe de la Krajina. Ce jour-là, le Parlement de l'assemblée de cette

  5   région de la Slavonie, de l'est de la Baranja et du Srem occidental a

  6   proclamé son unification avec la République serbe de la Krajina. Et, deux

  7   jours après, l'assemblée de la SAO de la Slavonie occidentale a également

  8   proclamé son unification avec la Krajina.

  9   Mais, avant le 26 février 1992, il n'y avait pas eu d'unification; c'est

 10   alors que ces trois régions s'étaient constituées et réunifiées pour créer

 11   une République serbe de la Krajina constituée par ces trois régions.

 12   Question: Nous avons parlé du plan Vance, de ses dispositions. En matière

 13   de démilitarisation de cette région, est-ce que vous -pas vous

 14   personnellement mais les hommes politiques de la Krajina-, vous vous

 15   opposiez à cette idée d'une démilitarisation?

 16   Réponse: C'est exact.

 17   Question: Et pourquoi vous y êtes-vous opposés?

 18   Réponse: Parce que le plan de Vance était délimité sur une période de six

 19   mois et qu'il fallait ensuite débattre de sa prolongation, de cette

 20   prorogation. Dans ces conditions-là, la Krajina devait être démilitarisée,

 21   alors que la Krajina ne devait pas l'être. Donc la Krajina pouvait

 22   s'exposer à la possibilité de voir la Croatie imposer une solution

 23   politique par les armes, par la force.

 24   Question: Est-ce que vous vous opposiez également à l'arrivée des troupes

 25   des Nations Unies?

Page 13213

  1   Réponse: A la conception de son arrivée. Pas au fait même, mais à la

  2   conception. Parce qu'il s'agissait de mettre en place une ligne verte

  3   suivant le modèle chypriote.

  4   Question: Qu'est-ce que ça veut dire?

  5   Réponse: Cela sous-entendait le fait de séparer les parties belligérantes,

  6   la partie serbe et la partie croate, mais non pas la démilitarisation de

  7   la région. A cet effet, il avait été demandé qu'il soit procédé à une

  8   modification du plan Vance. Le plan a été accepté mais, à cet effet-là, on

  9   a demandé qu'il soit modifié dans certain de ses segments.

 10   Question: Est-ce que c'était vraiment une option que d'obtenir une

 11   modification du plan Vance, ou est-ce que ceci était tout à fait hors de

 12   question?

 13   Réponse: D'après ce que j'en sais, il y avait une possibilité de le faire.

 14   Et certains segments ont été modifiés pour ce qui est de la répartition

 15   des troupes initiales, sur une période de six mois à un an. Le Secrétaire

 16   général des Nations Unies a présenté au Conseil de sécurité un rapport; il

 17   avait été donc proposé que l'on applique là la législation qui était

 18   existante au préalable et non pas les nouvelles lois croates. Donc il

 19   avait été question que la Défense territoriale soit incorporée dans la

 20   police sans qu'il y ait des canons longs à sa disposition, mais cela n'a

 21   pas été résolu. Il n'y a juste eu des débats à ce sujet. Donc certains

 22   segments ont finalement été modifiés.

 23   Question: Vous avez mentionné le fait que, pendant deux mois, les Serbes

 24   de la Krajina se sont opposés au plan Vance. Est-ce qu'ils s'opposaient

 25   tous à ce plan ou est-ce qu'il y a une certaine division au sein de la

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  1   classe politique de la Krajina?

  2   Réponse: Au début, tous étaient contre. Et petit à petit, le nombre des

  3   hommes politiques qui acceptaient le plan augmentait, de la façon dont le

  4   Président Milosevic l'avait accepté. A la fin, le Président de la

  5   République et le gouvernement, une partie de l'assemblée avaient continué

  6   à s'opposer à ce plan, demandant des modifications de ce dernier, et une

  7   partie de l'assemblée et des hommes politiques de la Slavonie de l'Est et

  8   de Srem occidental, ainsi qu'une partie de l'assemblée de la SAO Krajina

  9   et certains autres hommes politiques avaient accepté. Donc l'assemblée

 10   qui s'était réunie à Glina, le 9 février 1992, avait approuvé le plan

 11   sous les pressions ou après les pressions qui provenaient du côté du

 12   Président Milosevic et de la présidence de Yougoslavie, de l'état-major

 13   général de l'armée de Yougoslavie, de la campagne de médias, etc.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pouvons-nous passer à huis clos

 15   partiel pour évoquer certains détails du plan Vance?

 16   (Audience à huis clos partiel à 11 heures 11)

 17   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 18   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 19   Mme Uertz-Retzlaff : Monsieur le Témoin, avez-vous assisté

 20   à une réunion avec M. Milosevic, M. Karadzic et M. Koljevic, réunion

 21   portant sur ce point le 23 décembre 1991?

 22   Milan Babic (interprétation): C'est exact. Ce jour, lorsqu'il y a eu

 23   l'élection du gouvernement, de la nomination ou l'élection du Gouvernement

 24   de Serbie qui s'est fait au cabinet du Président Milosevic.

 25   Question: Sans aborder cette discussion dans trop de détails, quelle fut

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  1   la position adoptée par vous, par Koljevic, Karadzic et Milosevic?

  2   Réponse: Ma position avait été la même: à savoir le plan oui, mais avec

  3   des modifications. Milosevic avait demandé qu'on l'accepte de façon

  4   inconditionnelle et en totalité. Et il s'agissait pour moi de faire un

  5   communiqué public. Koljevic demandait également que le plan soit accepté

  6   sans modification. Milosevic, à la fin, m'a donné un papier et un crayon

  7   et m'a dit: "Va dans l'autre pièce et rédige un communiqué". J'ai rédigé

  8   un communiqué sur une page où j'ai présenté toutes mes positions; il a

  9   pris son stylo et il a dit: "Je ne vais pas biffer, mais je vais souligner

 10   ce qu'il faut que tu effaces." Et il a pratiquement souligné le tout, sauf

 11   la phrase où l'on disait que le plan de Vance était accepté.

 12   J'ai continué à m'opposer et il s'est levé, il a dit qu'il devait aller à

 13   la séance du Parlement serbe et Radoman Bozovic devait conduire cette

 14   session de l'assemblée. Il m'a dit: "Tiens, Radoman Bozovic peut t'aider."

 15   Quand il est parti, Karadzic avait continué à essayer de me persuader

 16   d'accepter. J'ai dit à Radovan: "Parlons maintenant de la Bosnie, si tu

 17   veux bien". Et il est resté silencieux. Donc je m'en suis allé et j'ai

 18   fait l'annonce publique que j'ai faite comme conformément à mon brouillon.

 19   Question: Un éclaircissement. Je trouve dans le compte rendu d'audience

 20   une remarque. Vous dites "Radovan Bozovic sera le Premier ministre de ce

 21   gouvernement." Je ne comprends pas le contexte!

 22   Réponse: Radoman Bozovic, j'ai dit Radoman Bozovic.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, mais qu'est-ce qu'il a à voir

 24   avec le plan Vance et la discussion que vous avez eue avec M. Milosevic,

 25   M. Karadzic également et M. Koljevic? Je ne comprends pas le contexte de

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  1   ceci. Pourriez-vous nous donner une explication?

  2   Milan Babic (interprétation): La prestation de serment de Radoman Bozovic

  3   et des membres du nouveau gouvernement au sein du Parlement de Serbie

  4   avait été la raison pour laquelle Milosevic avait dû quitter la réunion à

  5   laquelle nous assistions. Donc il fallait qu'il quitte son bureau et qu'il

  6   aille de l'autre côté de la rue au niveau du Parlement de Serbie.

  7   M. le Président (interprétation): Il est difficile pour nous de comprendre

  8   le contexte. A quoi devait servir cette remarque que vous venez de faire?

  9   Quel était son sens?

 10   Réponse: Eh bien, son sens… Quelle était la question que vous venez de

 11   poser, Monsieur le Président?

 12   M. le Président (interprétation): Le contexte.

 13   Milan Babic (interprétation): Le contexte était le suivant: une fois que

 14   Milosevic m'avait souligné dans ma déclaration tout ce qu'il fallait

 15   biffer, il a quitté cette réunion pour la raison que je vous ai déjà

 16   donnée. Il a quitté la réunion avec moi, Karadzic et Koljevic pour partir

 17   dans le bâtiment d'en face et il m'a laissé pour que je discute de la

 18   chose avec Karadzic et Koljevic. Et il a prononcé les paroles suivantes:

 19   "Que Radovan, que Radovan t'aide à rédiger une déclaration différente."

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, merci. Maintenant je crois que

 21   nous avons compris.

 22   Avez-vous également discuté du plan Vance avec le général Adzic? Avez-vous

 23   discuté particulièrement avec lui de vos inquiétudes s'agissant de la

 24   sécurité des Serbes en Krajina?

 25   Milan Babic (interprétation): C'est exact. Je suis allé voir le général

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  1   Adzic et je lui ai demandé que la JNA reste dans la Krajina. Il m'a

  2   répondu que la JNA allait se retirer, mais que nous n'avions rien à

  3   craindre parce qu'elle serait disposée, répartie sur les frontières de la

  4   Bosnie, de l'autre côté de la Krajina et qu'il enverrait 10.000 gens de la

  5   Krajina, 10.000 hommes de la Krajina faisant partie de la JNA sur le

  6   territoire de la Bosnie face à la Krajina, pour le cas où la Croatie nous

  7   attaquerait. Et il m'a dit qu'ils arriveraient à Knin avant l'armée croate

  8   si besoin était. Je lui ai dit: "Mais, Général, vous croyez que la Bosnie

  9   resterait en Yougoslavie si jamais la Bulgarie et la Turquie ont déjà

 10   déclaré qu'elles allaient reconnaître l'indépendance de la Bosnie-

 11   Herzégovine?" Il m'avait regardé avec étonnement et il avait dit que cela

 12   n'avait aucun sens et que l'armée allait rester en Bosnie. Il avait

 13   l'impression que l'armée resterait certainement en Bosnie quoique la

 14   Bulgarie et la Turquie aient déjà reconnu l'indépendance de la Bosnie-

 15   Herzégovine et que l'assemblée de la Bosnie-Herzégovine ait déjà fait une

 16   déclaration parlant de cette Bosnie-Herzégovine.

 17   M. Kwon (interprétation): Est-ce que la régie peut augmenter le volume?

 18   Nous avons une interférence pour les canaux anglais et serbe.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Cela m'est déjà arrivé et je pense

 20   que vous pouvez régler l'équilibre du son sur votre propre console.

 21   M. Kwon (interprétation): Merci.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Dans le cadre de cette contestation

 23   au niveau du plan, est-ce qu'il y a eu un échange de correspondance entre

 24   vous et Milosevic en janvier 1992? Est-ce que vous avez échangé des

 25   lettres publiques?

Page 13218

  1   Milan Babic (interprétation): C'est exact. Nous avons échangé des lettres

  2   publiques et nous avons échangé aussi des courriers à titre privé. Le 8

  3   janvier, un courrier m'a été envoyé par le Président Milosevic et m'est

  4   parvenu au bout de quelques jours par la poste. Et cela a été publié dans

  5   les médias, dans la "Politika", dans les autres quotidiens, à la

  6   télévision. Quelques jours plus tard, j'ai rédigé une réponse qui était la

  7   mienne et je l'ai faxée au Président Milosevic et aux médias.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander l'aide de

  9   l'huissière pour soumettre au témoin les intercalaires 79, 80 et 81 qui

 10   portent sur ces lettres. Ce sont des lettres tout à fait spéciales, il

 11   faut qu'elles soient déposées sous pli scellé et qu'elles fassent l'objet

 12   de débats à huis clos partiel, ce qui est le cas en ce moment.

 13   (Intervention de l'huissier.)

 14   La pièce se trouvant à l'intercalaire 79 est une lettre.

 15   M. le Président (interprétation): Quel classeur?

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est la pièce 352, Monsieur le

 17   Président.

 18   M. le Président (interprétation): Oui?

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Pièce 79: est-ce bien là la lettre

 20   écrite par M. Milosevic? Est-ce que la pièce se trouvant à l'intercalaire

 21   80 est bien la lettre que vous, vous avez fournie en réponse?

 22   M. Kwon (interprétation): Vous avez parlé de 78, 79; apparemment, ça,

 23   c'est l'article de "Politika"?

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est vrai, Monsieur le Président.

 25   C'est en fait la lettre publiée dans son intégralité dans le magazine

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  1   "Politika"; c'est une publication intégrale de cette lettre.

  2   M. le Président (interprétation): Apparemment, l'intercalaire 80, c'est la

  3   correspondance entre les deux hommes, alors que, du moins dans mon

  4   classeur, à l'intercalaire 79, se trouve l'article de "Politika".

  5   M. Kwon (interprétation): Oui, 79, c'est une lettre ouverte de ce témoin à

  6   M. Milosevic.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je ne sais pas pourquoi, moi, je n'ai

  8   que la version BCS, plus exactement en serbe, en cyrillique, écriture que

  9   je ne peux pas lire. Donc je n'ai pu que deviner la teneur de ce document.

 10   Vous avez tout à fait raison, Monsieur le Juge: à l'intercalaire 79, se

 11   trouve la lettre originale de M. Milosevic.

 12   Est-ce que vous avez les originaux de ces lettres sur vous, Monsieur le

 13   Témoin?

 14   Milan Babic (interprétation): Oui, je les ai, mais ça se trouve chez mon

 15   avocat qui est présent dans le prétoire.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Messieurs les Juges, avons-nous

 17   besoin des originaux? Je ne sais pas si vous voulez les examiner. Ou est-

 18   ce que nous pouvons nous occuper des copies?

 19   M. le Président (interprétation): A moins qu'il n'y ait contentieux à

 20   propos de ces lettres, je pense que nous pouvons poursuivre l'examen des

 21   pièces que nous avons déjà.

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est bien mon avis aussi. Je ne veux

 23   pas aborder ces lettres dans le détail, puisqu'elles se passent de

 24   commentaires.

 25   Je voulais simplement savoir ceci de votre part, Monsieur le Témoin: pour

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  1   vous, ces lettres constituaient-elles une menace, incluaient-elles des

  2   menaces de démission à votre égard? Est-ce qu'on vous menaçait de vous

  3   démettre du poste que vous occupiez à l'époque?

  4   Milan Babic (interprétation): Oui, c'est ce qui est dit dans la lettre du

  5   Président Slobodan Milosevic. Il avait dit qu'il fallait me révoquer et

  6   élire quelqu'un d'autre. C'est ce qui figure… enfin, c'est ce qui a été

  7   dit d'une façon assez particulière. C'est ce qui figure dans la dernière

  8   phrase de cette lettre.

  9   Question: Où est-ce que vous trouvez cette remarque? Est-ce que vous

 10   pourriez en donner lecture?

 11   Réponse: Voilà la dernière phrase de cette lettre.

 12   Question: Je vous en prie, veuillez lire cette phrase qui, d'après vous,

 13   est une demande de limogeage.

 14   Réponse: C'est ce qui est dit dans la lettre. On dit: "L'aide de la Serbie

 15   au peuple de la Krajina ne sera pas remise en question en temps de paix,

 16   mais les citoyens de la Krajina doivent forcément savoir qu'ils ont perdu

 17   toute confiance de notre part de par leurs actes et que les relations

 18   futures avec les autorités de la République de Serbie doivent voir

 19   déléguer des gens, des personnes qui auront pour intérêt l'intérêt

 20   national, l'intérêt du peuple, ce dernier se trouvant au-dessus de

 21   l'intérêt ou du prestige politique personnel".

 22   Question: Et qu'avez-vous répondu à cela dans votre lettre?

 23   Réponse: Dans ma lettre, j'ai répondu que je comprenais que cela était une

 24   incitation au limogeage de ma personne.

 25   Question: Oui. Il n'est pas nécessaire d'aborder davantage ce détail

Page 13221

  1   puisque, je l'ai dit, cette lettre se passe de commentaire.

  2   Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez également participé à la séance

  3   de la Présidence prolongée, en date du 31 janvier 1992?

  4   Réponse: C'est exact. Le 31, le 1er et le 2 février.

  5   Question: Un autre témoin nous a déjà fourni des détails de cette réunion;

  6   il n'en demeure pas moins que j'aimerais évoquer avec vous aussi certains

  7   points. Vous avez dit qu'elle a duré trois jours. Est-ce que vous avez pu

  8   quitter cette réunion quand vous le vouliez ou est-ce que vous n'étiez pas

  9   autorisé à le faire?

 10   Réponse: Non. Toute personne pouvait quitter la réunion, sauf moi. Je

 11   devais forcément rester présent à la réunion en attendant de me voir me

 12   prononcer en faveur de l'acceptation inconditionnelle et complète de ce

 13   plan de Vance.

 14   Question: Qui vous l'a dit? Qui vous a tenu ces propos ou de quelle façon

 15   vous a-t-on forcé à rester jusqu'au moment où vous auriez changé d'avis?

 16   Réponse: Branko Kostic pour la forme, mais Borislav Jovic, en fait, et il

 17   y avait les autres membres de la Présidence, du grand état-major et

 18   d'autres participants. La réunion a été conduite de façon à ce que cela

 19   soit continué, diffusé en permanence par deux caméras pour que le public

 20   sache bien que la session dure. Et quelqu'un avait dit que Milosevic avait

 21   donné l'ordre que je ne pouvais pas quitter cette réunion avant que

 22   d'accepter le plan de Vance. Et il a été fait deux pauses pour permettre

 23   aux présidents des assemblées municipales de la Krajina de venir, aux

 24   membres du gouvernement de la Krajina de venir. L'autre pause a été celle

 25   où l'on m'avait permis de sortir pour faire venir, pour convoquer les

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  1   présidents des assemblées municipales. Et je ne suis pas revenu: c'est

  2   ainsi que je me suis enfui de cette session au troisième jour.

  3   Question: Vous avez dit que quelqu'un vous avait dit que M. Milosevic

  4   avait dit que vous n'étiez pas censé quitter cette réunion. Qui vous a dit

  5   cela?

  6   Réponse: Je pense que c'est soit Radoman Bozovic, le président du

  7   gouvernement, le chef du gouvernement serbe, ou alors c'est par son biais

  8   que quelqu'un d'autre m'a fait parvenir l'information. Et par la suite, en

  9   1993, lorsqu'il m'a rencontré, Jovica Stanisic m'a dit que Milosevic lui

 10   avait donné l'ordre de m'arrêter pour le cas où je m'en irais.

 11   Question: A quelle occasion M. Stanisic vous a-t-il dit cela?

 12   Réponse: En 1993, lorsqu'on avait célébré la journée de la police dans un

 13   restaurant.

 14   Question: Au cours de la réunion ou plutôt des pauses qui se sont faites

 15   pendant cette réunion, est-ce que vous avez été intimidé, est-ce qu'on a

 16   exercé des pressions ou proféré des menaces à votre encontre, d'une façon

 17   ou d'une autre?

 18   Réponse: Kadijevic disait qu'on pouvait me révoquer, qu'on pouvait me

 19   faire tout un tas de choses. Et je leur ai dit qu'ils pouvaient très bien

 20   le faire, mais que j'avais mon opinion, mon attitude et que j'allais en

 21   rester là.

 22   Adzic, le général Adzic voulait s'attaquer physiquement à un membre du

 23   gouvernement; il avait traité de tous les noms, il avait traité les gens

 24   de la Krajina de tous les noms; c'est ce qui m'a été rapporté par les

 25   personnes qui avaient continué à prendre part à la réunion. Moi, j'étais

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  1   sorti de la salle pour faire un communiqué à l'intention du public. Et

  2   Adzic était énervé; il ne pouvait pas attendre que je revienne et il avait

  3   demandé que la réunion continue en mon absence. Mais Jovic et Kostic ne

  4   voulaient pas; et il avait été tellement irrité qu'il voulait s'attaquer

  5   physiquement aux gens qui venaient de la Krajina.

  6   Question: Est-ce que vous, vous vous êtes opposé au plan Vance-Owen

  7   pendant tout ce temps, ou est-ce qu'à un moment donné vous avez changé

  8   d'avis?

  9   Réponse: J'ai défendu mon opinion jusqu'au bout. Mais j'ai ajouté, j'ai

 10   complété ma proposition, au mois de février, en disant qu'on pouvait

 11   mettre en place un protectorat complet des Nations Unies dans la Krajina;

 12   cela nous permettrait de bénéficier d'un protection politique de la part

 13   des Nations Unies en attendant de résoudre le statut du gouvernement de la

 14   Krajina. Je m'excuse: c'était début mars de l'année 1992.

 15   Question: La réunion autour du plan Vance a fait l'objet d'une discussion.

 16   Vous avez dit que vous vous étiez enfui, que vous aviez quitté

 17   pratiquement cette réunion. Quand vous êtes parti, est-ce que quelqu'un a

 18   marqué son accord à ce plan Vance à votre place?

 19   Réponse: C'est Mile Paspalj qui a été d'accord, avec le Président de

 20   l'assemblée de la Krajina, j'entends. Et il a dit qu'en l'absence du

 21   Président de la République, c'est lui qui dispose des attributions

 22   nécessaires pour assumer les fonctions du Président de la République. Et

 23   c'est dans cette fonction-là qu'il avait fait une déclaration en disant

 24   que le plan était effectivement accepté.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

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  1   publique, Monsieur le Président.

  2   (Audience publique avec mesures de protection à 11 heures 31.)

  3   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Alors que M. Paspalj acceptait ce

  5   plan Vance, les hommes politiques de la Krajina qui étaient opposés à ce

  6   plan, est-ce qu'ils ont maintenu leur opposition? Est-ce qu'ils ont même

  7   appelé à tenir un référendum sur cette question dans la Krajina?

  8   Milan Babic (interprétation): C'est exact. Une partie de l'assemblée et

  9   des hommes politiques qui s'y opposaient ont fixé la tenue d'un référendum

 10   pour que la population se prononce elle-même, avec deux questions. L'une

 11   étant: êtes-vous favorable à l'adoption du plan Vance, de façon complète

 12   et inconditionnelle, telle qu'acceptée par Kadijevic, Tudjman et les

 13   autres, ou alors favorable à une modification de ce plan conformément aux

 14   propositions formulées par le gouvernement de la Krajina.

 15   Question: Vous avez déjà parlé de la session de l'assemblée à Glina, le 9.

 16   Au cours de cette séance de l'assemblée…

 17   En fait, est-ce que c'était une séance officielle convoquée par le

 18   Président de l'assemblée? Est-ce que tous les membres de l'assemblée y ont

 19   participé?

 20   Réponse: Tous les délégués n'ont pas pris part. J'ai même appris qu'ils

 21   étaient minoritaires. Mais il y avait une délégation en provenance de

 22   Belgrade qui y avait pris part.

 23   Question: Vous mentionnez le fait que la délégation de Belgrade y a

 24   participé. Quels étaient les membres de la délégation de Belgrade à cette

 25   réunion?

Page 13225

  1   Réponse: Les membres de la présidence de la RSFY, Branko Kostic, Jugoslav

  2   Kostic, le chef de l'état-major général Adzic et certains autres généraux

  3   avec leur escorte et les gens autour d'eux, le ministre chargé des Serbes

  4   hors de Serbie. C'était une délégation assez nombreuse.

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Messieurs les Juges, nous avons

  6   préparé l'intercalaire 88 de la pièce 352; il s'agit d'une séquence vidéo,

  7   un extrait d'une petite allocution faite par le président de la

  8   présidence, M. Kostic…, ou plutôt le vice-président, à l'occasion de cette

  9   séance de travail de Glina. Vous avez la transcription à cet intercalaire.

 10   Vous disposez en fait de la totalité de l'allocution. Cependant, nous

 11   n'allons diffuser que de la page 35 à la page 36. La page 35 à partir des

 12   deux derniers paragraphes et la page 36 jusque vers le milieu de la page.

 13   Lorsque vous serez prêt à la régie, envoyez la séquence.

 14   (Diffusion de l'extrait vidéo.)

 15   Est-ce qu'on voit ici la délégation de Belgrade qui arrive, Monsieur?

 16   Réponse: Kostic. On voit Adzic. Son escorte.

 17   (Interprétation de l'extrait vidéo.)

 18   "-Journaliste: Docteur Kostic, bonjour. Bienvenue à Glina. Vous êtes venus

 19   ici pour assister à l'assemblée au Parlement de la Krajina. Qu'attendez-

 20   vous de cette session?

 21   -M. Kostic: Nous sommes venus assez nombreux. Et, suite à des débats assez

 22   importants au sein de la présidence de Yougoslavie, nous tenons à prendre

 23   part aux débats de ce Parlement de la Krajina; d'une part, aux fins de

 24   rejeter toutes les accusations qui ont été faites de façon injustifiée

 25   parmi cette population disant que nous abandonnions cette dernière; et

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  1   nous voulons dire, aux députés du Parlement de la Krajina serbe et à la

  2   population de la Krajina, que ce sont là des mensonges, que nous sommes du

  3   côté de cette population mais que nous tenons à les aider, dans la mesure

  4   de nos possibilités, afin que la raison l'emporte et afin que cette

  5   population et les députés de cette population comprennent que ce qui a été

  6   obtenu par la guerre peut être défendu par des moyens de paix avec des

  7   garanties des Nations Unies et avec le recrutement des Casques bleus.

  8   -Journaliste: Je vous remercie au nom de la télévision de Novi Sad.

  9   -M. Kostic: Merci aussi.

 10   -Deuxième journaliste: Docteur Kostic, quel est le message que vous

 11   adresseriez à la population de Glina et de la Krajina?

 12   -Branko Kostic: Nous sommes et nous restons fermement aux côtés de ce

 13   peuple. Et entre le choix de la guerre et de la paix, le moment est venu

 14   de choisir la paix pour nous défendre, défendre ce que ce peuple a acquis

 15   par les armes; et non pas en prolongeant la guerre à l'infini et avec la

 16   possibilité de voir cette guerre s'élargir vers la Bosnie et englober,

 17   enflammer la Yougoslavie toute entière, voire les Balkans, chose qui

 18   pourrait résulter par la perte de ce que cette population a obtenu par la

 19   guerre".

 20   (Fin de l'extrait.)

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons arrêter ici. Merci.

 22   Vous le voyez à la lecture de la transcription: après cet extrait, il y a

 23   une courte allocution faite à l'assemblée et on énumère le nom de toutes

 24   les personnes de Belgrade; ceci suit cet extrait, à la page 36. Inutile

 25   d'en voir les images. Je pense que nous tous, y compris M. Milosevic et

Page 13227

  1   les amis de la Chambre, nous pouvons lire ces noms.

  2   Vous avez déjà mentionné une autre session de l'assemblée à Glina. Est-ce

  3   qu'il y en a eu une le 16 février 1992? Et est-ce que le Premier ministre

  4   qui était alors en fonction a été démis de ses fonctions?

  5   Milan Babic (interprétation): Oui, c'est le Président de la République de

  6   la Krajina serbe qui a été démis de ses fonctions.

  7   Question: Au cours des réunions suivantes qui ont eu lieu le 26 février

  8   1992 notamment, est-ce que Goran Hadzic a été nommé, élu Président de la

  9   RSK, le Président suivant?

 10   Réponse: Oui, c'est exact.

 11   Question: Et est-ce qu'il y avait des fonctionnaires de Belgrade qui

 12   avaient assisté à cette séance? Le savez-vous?

 13   Réponse: J'ai entendu dire qu'il y avait Budimir Kosutic; je ne sais plus

 14   qui il y avait encore. On m'a dit qu'il y avait d'autres personnes, mais

 15   je n'étais pas présent.

 16   Question: Je vais demander l'aide de l'huissier pour que soit présentée au

 17   témoin l'intercalaire 74 de la pièce 351.

 18   (Intervention de l'huissier.)

 19   Il s'agit de la décision prise par l'assemblée de la RSK le 26 février

 20   1992. Dans cette décision, la SAO de Slavonie occidentale de Baranja et de

 21   Srem occidental rejoint officiellement la RSK; est-ce bien exact?

 22   Réponse: C'est exact.

 23   Question: Inutile d'examiner de façon détaillée cette pièce.

 24   Réponse: On constate qu'elles se sont associées pour faire le territoire

 25   de la République de la Krajina serbe.

Page 13228

  1   Question: Je vous remercie. Goran Hadzic, quel poste occupait-il avant la

  2   guerre?

  3   Réponse: Goran Hadzic est devenu président du comité municipal du SDS à

  4   Vukovar en été 1990. Par la suite, il avait été élu pour être président de

  5   ce conseil national serbe de la Slavonie de l'Est, de la Baranja et du

  6   Srem occidental. Par la suite, il a été élu Président du Gouvernement de

  7   cette région de la Slavonie orientale, de la Baranja et du Srem

  8   occidental.

  9   Question: Et quelle était sa profession avant la guerre?

 10   Réponse: Je ne l'ai pas entendu me le dire, mais tous disaient qu'il avait

 11   été magasinier, à savoir employé dans un entrepôt quelconque. Je ne sais

 12   pas trop.

 13   Question: Avez-vous eu l'occasion de le voir au cours de réunions?

 14   Réponse: Oui. Pas mal de fois.

 15   Question: Est-ce qu'il disposait des compétences politiques et

 16   intellectuelles aptes ou suffisantes pour lui permettre de bien remplir

 17   ses fonctions de Président de la RSK? Vous l'avez observé; avez-vous un

 18   commentaire à faire?

 19   Réponse: Je me sens plutôt mal à l'aise pour ce qui est de parler des

 20   qualifications et des tâches qu'untel ou tel autre avait accomplies. Mais

 21   ce que je puis dire, c'est qu'il n'était pas particulièrement éloquent. Et

 22   pour ce qui est de son attitude politique, cela ne correspondait pas au

 23   modèle d'homme politique qui était sous-entendu.

 24   Mais les gens de la Slavonie de l'Est m'ont dit qu'il avait été élu à ces

 25   fonctions parce qu'il avait été courageux, il avait fait preuve de

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  1   courage, qu'il s'était opposé à la politique croate à Vukovar et qu'il

  2   était le premier à bondir sur un tracteur; c'est ainsi qu'il est devenu

  3   personnalité éminente là-bas.

  4   Question: Et est-ce qu'il était une personnalité politique dominante au

  5   sein de la RSK ou est-ce que c'était plutôt quelqu'un d'autre qui avait

  6   cette fonction?

  7   Réponse: Dans la RSK, il détenait le pouvoir sur les territoires… Enfin,

  8   le pouvoir était détenu par Milan Martic et les structures parallèles qui

  9   avaient fait partie des structures du pouvoir dans cette partie de la

 10   Krajina.

 11   Goran Hadzic, lui, résidait la plupart du temps à Novi Sad. Je ne sais pas

 12   quelle avait été son influence en Slavonie orientale. Il venait ça et là

 13   jusqu'à Knin.

 14   Question: Vous parlez de cette structure parallèle qui entourait Milan

 15   Martic. Est-ce la même structure parallèle que celle qui concernait

 16   "Frenki", celle dont vous avez parlé auparavant et qui existait en 1991?

 17   Réponse: C'est exact. Il convenait de dire que c'était, à l'époque, les

 18   pouvoirs officiels au sein de la RSK.

 19   Question: Vous avez déjà parlé de Badza Stojicic. Quelle était sa position

 20   ou quels étaient les rapports qu'il entretenait dans la SAO de Slavonie

 21   orientale, Baranja et Srem occidental?

 22   Réponse: Il était commandant de la Défense territoriale dans cette région.

 23   Question: Est-ce qu'il a exercé une influence sur M. Hadzic? Le savez-

 24   vous?

 25   Réponse: Pour autant que je le sache, Hadzic le mentionnait souvent et il

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  1   en faisait de même pour un certain "Jajo" comme étant les personnalités

  2   principales avec lesquelles il coopérait.

  3   Question: Quel rapport M. Hadzic entretenait-il avec M. Milosevic? Avez-

  4   vous pu faire des observations dans ce sens?

  5   Réponse: C'était une attitude d'obéissance complète à l'égard de M.

  6   Milosevic. Donc Hadzic était complètement à la botte de M. Milosevic.

  7   Question: Et est-ce que M. Hadzic avait des rapports quelconques avec M.

  8   Stanisic? Et, si c'était le cas, lesquels étaient-ils?

  9   Réponse: Ils étaient très proches. Je sais que Stanisic l'accompagnait

 10   souvent jusqu'à la présidence de Serbie. On disait également qu'il passait

 11   la nuit chez Stanisic à Belgrade, lorsqu'il venait à Belgrade, donc il

 12   était passé complètement sous son contrôle de Stanisic. Il me semble

 13   qu'une fois, il avait même porté un uniforme de camouflage dans Belgrade

 14   sur incitation de Stanisic lorsqu'il venait à une réunion chez M.

 15   Milosevic.

 16   Question: Je vais demander l'aide de l'Huissière pour que soit présenté au

 17   témoin l'intercalaire 84 de la pièce 352. Il s'agit d'une photographie. Je

 18   vais demander qu'on la pose sur le rétroprojecteur.

 19   (Intervention de l'huissière.)

 20   Pouvez-vous nous dire où ces photos ont été prises et seriez-vous en

 21   mesure de nous indiquer qui est M. Hadzic, pour autant qu'il figure bien

 22   sûr sur cette photographie?

 23   Réponse: Ceci est une photographie prise le 31 janvier 1992. C'est une

 24   photo de la présidence élargie de la RSFY.

 25   Question: Est-ce que l'on voit M. Hadzic sur l'une de ces photos? Si c'est

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  1   le cas, où?

  2   Réponse: On voit des membres de son gouvernement ici.

  3   Question: Est-ce qu'on peut déplacer la photo?

  4   Réponse: Ici, ce sont des membres de son gouvernement, mais lui, on ne le

  5   voit pas. Il ressemble à cet homme-ci, mais cet homme s'appelle Rade

  6   Leskovac, me semble-t-il.

  7   Question: Je vous remercie infiniment. Donc il ne figure pas sur ces

  8   photos. Merci.

  9   Réponse: Non, je ne le vois pas.

 10   Question: Merci.

 11   Madame l'Huissière, nous n'avons plus besoin de cette pièce.

 12   (Intervention de l'huissière.)

 13   Monsieur le Témoin, vous nous avez parlé des dispositions du plan Vance.

 14   Dites-nous ceci: ce plan Vance, Monsieur le Témoin, est-ce qu'il a jamais

 15   été mis en oeuvre dans la Krajina ou dans la RSK?

 16   Réponse: Non.

 17   Question: Est-ce que les territoires ont été démilitarisés?

 18   Réponse: Non.

 19   Question: Pourquoi pas?

 20   Réponse: Parce que les armes et les équipements militaires n'ont pas

 21   quitté la région, pas en totalité. La majeure partie de ces équipements et

 22   armes a été cachée, dissimulée. La police de la Krajina a continué à

 23   disposer de ces armes-là et il est resté sur place des formations armées,

 24   des formations militaires armées.

 25   Par la suite, vers le début de l'année 1993, on a sorti également les

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  1   armes lourdes des entrepôts qui étaient surveillés par les effectifs des

  2   forces de paix. Une fois de plus, il a été donné le nom d'armée serbe à

  3   ces effectifs armés de la RSK qui existaient depuis mai 1992, en fait.

  4   Question: Est-ce que des unités de police pluriethniques, comprenant donc

  5   des Croates et des Serbes, ont été établies?

  6   Réponse: Non.

  7   Question: Est-ce que des Croates sont effectivement rentrés dans leurs

  8   villages?

  9   Réponse: Non.

 10   Question: Et pourquoi ne sont-ils pas rentrés?

 11   Réponse: On ne les a pas laissés revenir, les autorités de la Krajina ne

 12   les ont pas laissés revenir.

 13   Question: Vous parlez des autorités de la Krajina, qu'est-ce que vous

 14   voulez dire? De quelle façon a-t-on empêché le retour de ces Croates?

 15   Réponse: C'est la police qui les a empêchés, c'est Martic. Et la décision

 16   politique prise par le gouvernement a été de cette nature.

 17   Question: Est-ce que M. Milosevic était impliqué, d'une façon ou d'une

 18   autre, dans ces réactions au plan Vance?

 19   Réponse: Excusez-moi, mais pouvez-vous reprendre votre question?

 20   Question: Vous avez mentionné le fait que les autorités de la Krajina

 21   n'avaient pas mis en oeuvre le plan Vance et je posais la question de

 22   savoir si, d'une façon quelconque, M. Milosevic avait participé à cette

 23   action et influé sur les autorités de la Krajina pour qu'elles ne le

 24   fassent pas?

 25   Réponse: Oui, Milosevic avait procédé à la militarisation. En d'autres

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  1   termes, il avait appuyé, soutenu les positions aux termes desquels il

  2   n'était pas question de démilitariser. Il s'agissait, au contraire,

  3   d'apporter son soutien à la militarisation, à la création de formations

  4   militaires, à la création d'une autre armée dans la Krajina, une armée

  5   serbe de la RSK, et il a nommé les commandants, les a financés, leur a

  6   apporté appui logistique, le tout jusqu'en 1995. Août 1995, pour être

  7   précis.

  8   Question: Vous avez dit que la JNA avait quitté la RSK. A quel moment, ce

  9   retrait a-t-il commencé et quand s'est-il terminé?

 10   Réponse: Le retrait de la JNA depuis la Croatie, en passant par la

 11   Krajina, a commencé en octobre 1991. Les garnisons de Zagreb, de Zadar, de

 12   Sibenik et de Sinj, et d'autres localités se sont retirées par voie

 13   maritime, chose que je n'ai pas vue mais j'ai entendu parler de la chose.

 14   Et pour ce qui est du retrait depuis la Krajina, cela s'est terminé en mai

 15   1992.

 16   Question: Je vais demander l'aide de l'huissière pour présenter deux

 17   pièces au témoin: l'intercalaire 75 et l'intercalaire 76 de la pièce 351.

 18   (Intervention de l'huissière.)

 19   Intercalaire 75: il s'agit d'une décision prise par l'assemblée de la RSK,

 20   en date du 18 mai 1992, modifiant la Constitution de la République de la

 21   Krajina serbe et constituant une armée de la RSK. L'autre pièce date de

 22   1993: décision de l'assemblée de la RSK du 21 avril 1993 pour modifier la

 23   structure de l'armée serbe de la RSK. Il fallait pour ça une modification

 24   de la Constitution de la RSK, pour changer la structure de l'armée et son

 25   commandement. Et c'est fait par cette décision.

Page 13234

  1   S'agit-il ici de l'armée dont vous avez parlé, il y a un instant à peine?

  2   Réponse: Oui, c'est bien cela.

  3   Question: Je vous remercie. Je vais simplement vous renvoyer à un document

  4   D12.

  5   On voit l'article 1er: "La République de Krajina serbe aura une armée

  6   serbe en temps de paix. En temps de paix, l'armée se composera d'unités de

  7   Défense territoriale. Et s'il y a menace imminente de guerre et en temps

  8   de guerre, des unités d'affectation spéciale de la police rejoindront

  9   l'armée serbe".

 10   Mais de quelles forces spéciales de la police parle-t-on dans cet article?

 11   Qu'est-ce que cela veut dire précisément?

 12   Réponse: Les unités spéciales de la police qui existaient dès 1991! Et

 13   c'est la chose dont nous avons déjà débattu ici, auparavant. Ce sont les

 14   unités qui avaient commencé à se constituer en avril 1991.

 15   Question: Oui. Monsieur le Témoin, cette armée serbe de la Krajina, est-ce

 16   qu'elle a repris à son compte les biens, propriétés de la JNA, ainsi que

 17   les armes que la JNA avait laissées derrière elle?

 18   Réponse: C'est exact. Une partie des armes a été dissimulée à l'occasion

 19   du retrait de la JNA, et en 1993, on a repris les armes qui se trouvaient

 20   dans les entrepôts gardés par les effectifs des forces de paix.

 21   Question: Nous avons déjà parlé de la dépendance financière. Mais, ici,

 22   est-ce qu'il s'agissait d'une armée indépendante?

 23   Réponse: Oui, cela faisait partie de la structure militaire de la

 24   Yougoslavie.

 25   Question: Sur quoi vous basez-vous? De quelle façon y avait-il une partie

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  1   de dépendance? Comment est-ce que c'était une partie de la structure de la

  2   Yougoslavie?

  3   Réponse: La plupart des cadres du commandement étaient des officiers

  4   actifs de l'armée de Yougoslavie qui étaient sur les listes de paix et qui

  5   étaient à la solde du grand état-major de l'armée yougoslave qui était

  6   nommé et placé là par le département chargé du personnel du grand état-

  7   major de la JNA. Et ces commandants de l'armée ont, en réalité, été nommés

  8   par le Président de la Serbie qui est devenu par la suite Président de la

  9   Yougoslavie, à savoir Slobodan Milosevic. Elle a été financée, elle a

 10   bénéficié du soutien logistique en provenance de Yougoslavie. Et pour ce

 11   qui est de la Krajina, elle fournissait les effectifs, les hommes, mais

 12   cela fournissait une couverture juridique officielle pour son

 13   fonctionnement.

 14   Question: J'aimerais maintenant que nous avancions un peu dans la

 15   chronologie des rencontres que vous avez eues avec M. Milosevic.

 16   J'aimerais savoir si, en 1994, des responsables de la RSK ont participé à

 17   des négociations avec les autorités croates? Etes-vous au courant de cela?

 18   Réponse: Oui.

 19   Question: Quand ces représentants se rendaient à des rencontres avec des

 20   représentants des autorités croates, avaient-ils au préalable des contacts

 21   avec M. Milosevic?

 22   Réponse: C'est cela. En effet, c'est exact. Son approbation était demandée

 23   et le contenu des entretiens était déterminé par lui. Il suivait également

 24   les discussions pendant leur déroulement et était informé de l'avancée des

 25   débats.

Page 13236

  1   Question: Est-ce que vous deviez lui demander son accord avant de vous

  2   engager sur tel ou tel point?

  3   Réponse: Oui, c'est cela, cela se passait formellement par voie de

  4   consultation, mais en réalité c'est lui qui décidait si un accord devait

  5   être donné, et sur quoi.

  6   Question: Que se serait-il passé si telle ou telle personne prenait une

  7   décision isolée sans consulter au préalable M. Milosevic? Le savez-vous?

  8   Réponse: Ça, ce n'était pas possible parce que des personnes dans cette

  9   situation en auraient subi les conséquences. Et il y a même eu parfois des

 10   sévices physiques, des emprisonnements à l'occasion de l'accord bien connu

 11   de Daruvar des gens ont été emprisonnés. Il s'agissait de personnes qui

 12   avaient pris des engagements indépendants vis-à-vis de la Croatie. Et puis

 13   l'exemple de (expurgée) est là pour le prouver également.

 14   Question: Des responsables de la Krajina ont-ils, à quelque moment que ce

 15   soit, pris des engagements vis-à-vis des Croates sans consultation

 16   préalable ou accord de M. Milosevic au préalable?

 17   Réponse: Je crois que c'est peut-être le cas de cet accord de Daruvar, je

 18   n'en suis pas sûr. Mais ce dont je suis sûr c'est que le plan Z-4 a été

 19   approuvé, adopté en présence de l'ambassadeur Albright et sans l'accord de

 20   M. Milosevic, en tout cas avant une quelconque demande d'accord de sa

 21   part.

 22   Question: Quelle est la nature des négociations qui ont eu lieu avec les

 23   Croates en 1994? Ces négociations portaient-elles sur la recherche d'une

 24   solution politique ou uniquement sur des questions économiques?

 25   Réponse: Depuis la mi-1994 et jusqu'au début de 1995, il était question

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  1   d'un accord censé régler les rapports économiques avec la Croatie,

  2   approvisionnement en carburant, problème d'électricité, approvisionnement

  3   en eau, création d'autoroutes, problèmes liés aux voies ferroviaires, etc.

  4   Question: Monsieur Milosevic vous a-t-il autorisé à accepter de tels

  5   rapports économiques?

  6   Réponse: Oui, oui, oui, il a même pris une part active à la rédaction de

  7   l'accord, y compris pour ce qui concerne le nom de l'entreprise mixte qui

  8   devait être créée.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, j'aimerais

 10   maintenant que nous parlions d'une rencontre qui s'est tenue le 5

 11   septembre 1994. Je demande un huis clos partiel.

 12   (Audience à huis clos partiel) [Confidentialité levée par une ordonnance de

 13   la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin,

 15   avez-vous participé à une rencontre en septembre 1994 à laquelle

 16   participaient également M. Martic et M. Mikelic? Et si oui, quel a été le

 17   sujet discuté ce jour-là?

 18   Milan Babic (interprétation): J'étais présent à cette réunion, Jovica

 19   Stanisic y était également. Nous étions chez Milosevic et c'est lui qui a

 20   commandé un déjeuner pour nous tous dans les locaux où nous nous

 21   trouvions; dans une pièce voisine du bureau où nous étions, une pièce

 22   assez sombre. C'était assez étonnant. Au cours de la réunion, il a

 23   critiqué Martic parce que ce dernier avait déclaré qu'il soutenait Radovan

 24   Karadzic au sujet des projets prévus pour la Bosnie-Herzégovine.

 25   Question: Je vous demande un éclaircissement: qui a critiqué M. Martic,

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  1   Monsieur Stanisic ou M. Milosevic?

  2   Réponse: Monsieur Milosevic a dit: "Martic, je ne veux pas que tu

  3   deviennes un deuxième Karadzic." Et l'autre riait, il avait une espèce de

  4   sourire honteux. Je parle de Martic. Et il a dit: "Mais Babic lui-même est

  5   en connivence avec les religieux."

  6   C'est une phrase dans laquelle il donnait un sens politique. Et donc j'ai

  7   répondu: "Il s'agit de l'aspect spirituel des choses, c'est mon choix

  8   personnel." Voilà, je dis cela parce que je viens de m'en souvenir.

  9   Question: Monsieur le Témoin, vous avez dit que M. Milosevic a critiqué

 10   Martic parce qu'il avait appuyé Radovan Karadzic, mais en rapport avec

 11   quoi?

 12   Réponse: Milosevic exerçait des pressions sur Karadzic et sur l'assemblée

 13   de la Republika Srpska pour qu'elle accepte le plan de la communauté

 14   internationale prévoyant une solution pacifique pour la Bosnie-

 15   Herzégovine. C'était au mois d'août. Et l'assemblée de la Republika Srpska

 16   a rejeté ce plan, après quoi Milosevic a imposé un blocus de la Republika

 17   Srpska.

 18   Question: De quelle façon M. Martic avait-il appuyé M. Karadzic? Qu'avait-

 19   il dit ou fait en public à cet égard?

 20   Réponse: Oui, oui, il avait appuyé Karadzic publiquement en disant qu'il

 21   fallait rejeter le plan. Il a même voté dans ce sens, parce qu'un

 22   référendum a été organisé dans cette période sur le territoire de la

 23   Republika Srpska à Drvar. Il a voté dans ce sens alors qu'il n'était pas

 24   électeur de la région.

 25   Question: Vous avez dit que, formellement, M. Milosevic avait imposé un

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  1   blocus. Mais quelque chose s'est-il passé de façon non formelle, de façon

  2   informelle?

  3   Réponse: Je sais que de façon informelle il y a eu des livraisons de

  4   carburant et une aide apportée à l'armée de la Republika Srpska par M.

  5   Milosevic.

  6   Question: Comment le savez-vous?

  7   Réponse: Je le sais en raison d'une rencontre qui s'est tenue à Bijeljina,

  8   dont j'ai déjà parlé, où Stanisic et Karadzic ont demandé que certains

  9   paiements soient effectués.

 10   Question: Monsieur, je vous interromps: vous n'avez pas besoin de répéter

 11   ce que vous avez déjà dit. Mais auriez-vous quelque chose à ajouter à ce

 12   que vous avez déjà dit? Disposez-vous d'informations supplémentaires

 13   montrant qu'il poursuivait son appui?

 14   Réponse: Après mon arrivée à Belgrade, en 1995, j'ai appris qu'aux

 15   environs de Srebrenica, l'armée de la Yougoslavie avait participé aux

 16   opérations de guerre menées aux environs de Srebrenica, en ayant donc

 17   franchi la rivière Drina.

 18   Question: Qui vous a dit cela?

 19   Réponse: Des gens de Perucac, qui est une localité située au bord de la

 20   Drina en Serbie, sur la rive opposée donc.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en public,

 22   Monsieur le Président.

 23   (Audience publique avec mesures de protections à 12 heures 08.)

 24   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous venez de parler, Monsieur le

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  1   Témoin, du plan Z-4. Quels étaient les principaux points évoqués dans ce

  2   plan Z-4?

  3   Milan Babic (interprétation): Ce plan avait pour objectif de faire en

  4   sorte que le territoire de la RSK -qui s'était appelé par le passé Région

  5   autonome serbe de Krajina et qui, dans le cadre des secteurs Nord et Sud,

  6   était protégé par les Nations Unies-, donc le but était que cette région

  7   obtienne des structures politiques officielles en tant que territoire

  8   autonome de la République de Croatie. Il s'agissait donc de créer un

  9   parlement, un gouvernement, un certain nombre d'institutions, une monnaie

 10   qui devait être frappée par la banque nationale croate. Et ce plan était

 11   censé déterminer un certain nombre d'attributions pour la police, les

 12   tribunaux, dans le cadre d'une autonomie plus importante.

 13   Question: Qui a émis les propositions contenues dans le plan Z-4? Etait-ce

 14   une proposition internationale?

 15   Réponse: Ce plan a reçu ce nom parce qu'il a été le fruit du travail de

 16   quatre ambassadeurs présents à Zagreb, donc des représentants de la

 17   communauté internationale.

 18   Question: Au compte rendu d'audience, un peu plus haut, en page 61 du

 19   compte rendu, ligne 14, en anglais, il est mentionné que l'ambassadeur

 20   Albright avait accepté le plan Z4. Ceci est-il exact? Est-ce l'ambassadeur

 21   Albright?

 22   Réponse: Il s'agit de Galbraith, Galbraith qui était ambassadeur à Zagreb

 23   et qui est le principal auteur et, en fait, à l'origine de ce plan. Peter

 24   Galbraith.

 25   Question: Ce plan impliquait-il la réintégration des trois régions

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  1   composant la RSK: à savoir la Krajina, la Slavonie occidentale et la

  2   Slavonie orientale au sein de la République croate?

  3   Réponse: C'est cela. Pour la Slavonie orientale, il y avait une période

  4   transitoire de cinq ans qui était prévue. Et pour la SAO de Krajina,

  5   l'autonomie territoriale devait être importante au sein de la République

  6   de Croatie. Alors que pour la Slavonie occidentale, la question devait

  7   être réglée immédiatement.

  8   Question: Les représentants politiques de Krajina, qui occupaient donc des

  9   postes officiels, ont-ils accepté ce plan Z-4, les représentants de la

 10   RSK?

 11   Réponse: Au début du mois de mars 1995, les représentants politiques de la

 12   Krajina ont rejeté ce plan; à moins que ce ne soit à la fin du mois de

 13   février 1995. Et ce plan a finalement été accepté par le Premier ministre

 14   de la République serbe de Krajina, en août 1995.

 15   Question: Lorsque vous parliez de février et de mars, vous parliez de

 16   quelle année: de 1995 également?

 17   Réponse: Oui, en effet.

 18   Question: Qui s'est opposé au plan Z-4?

 19   Réponse: Le Président de la République de Serbie, sur instruction de Milan

 20   Martic qui, une demi-heure avant la rencontre prévue avec les

 21   représentants internationaux, a dit que le Président Milosevic avait

 22   déclaré que "ce plan ne devait même pas être examiné".

 23   Question: Quand M. Milan Martic a-t-il consulté M. Milosevic? Et de quelle

 24   période parlez-vous lorsque vous parlez d'une rencontre avec les

 25   représentants de la communauté internationale?

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  1   Réponse: C'était au cours de cette semaine qui, si je ne m'abuse, était à

  2   la fin février ou au début du mois de mars. Je ne sais plus si c'était un

  3   lundi ou un mardi. Mais, en tout cas, au début de la semaine, Martic est

  4   allé à Belgrade pour consultation. Et le jeudi, l'annonce du Conseil de

  5   défense suprême de la République serbe de la Krajina a été faite, c'était

  6   une annonce négative au sujet du plan. Et par la suite, le lundi suivant,

  7   une rencontre a eu lieu avec les représentants de la communauté

  8   internationale, au cours de laquelle Martic a déclaré, donc une demi-heure

  9   avant le début de la rencontre, que Milosevic avait dit que le plan ne

 10   devait même pas être examiné. Et durant la rencontre avec les

 11   représentants de la communauté internationale, M. l'Ambassadeur a tenté de

 12   lui remettre le plan; il n'a même pas voulu le prendre dans ses mains.

 13   Question: Ce jour-là donc, est-ce que les autorités de la Krajina ont

 14   rejeté le plan, au cours de cette rencontre dont vous parlez avec les

 15   représentants de la communauté internationale?

 16   Réponse: Ce plan n'a même pas été pris en considération, n'a même pas été

 17   examiné, donc il s'ensuit qu'il n'a pas été accepté.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous avons besoin d'un huis clos

 19   partiel, Monsieur le Président, pour traiter d'une rencontre à laquelle a

 20   participé le témoin. (Audience à huis clos partiel à 12 heures 14)

 21  [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 22   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous personnellement parlé avec

 24   M. Milosevic de ce plan Z-4?

 25   Milan Babic (interprétation): Oui, au début du mois d'avril 1995.

Page 13243

  1   Question: De quoi avez-vous discuté avec lui?

  2   Réponse: C'est lui qui, le premier, a évoqué le plan en disant que le plan

  3   Z-4 était bon, mais qu'il faudrait diviser dans le sens de la longueur le

  4   territoire de la municipalité de Slunj. Il n'a pas donné d'explications

  5   plus étendues sur ce point. Ensuite, les événements survenus à Livanjsko

  6   Polje ont été discutés, ainsi que les événements survenus dans l'intérieur

  7   du territoire environnant Knin, donc les attaques du HVO contre Knin. J'ai

  8   déjà parlé de cela.

  9   Et puis il a ajouté qu'il n'y avait pas 300.000 personnes en Krajina et 4

 10   millions de Croates, mais que toute la logistique de Serbie était derrière

 11   les Serbes de Krajina.

 12   Voilà, c'est ce qui a été discuté au cours de cette réunion.

 13   Question: Monsieur le Témoin, vous avez déclaré que M. Milosevic était

 14   favorable au plan Z-4 lorsqu'il vous en a parlé. Est-ce que ceci est bien

 15   certain? Est-ce que la seule remarque qu'il a eu à faire concernait cette

 16   municipalité de Slunj?

 17   Réponse: Apparemment, oui. Mais, avec lui, on ne pouvait jamais être sûr

 18   que ce qu'il disait correspondait tout à fait à ce qu'il pensait. Moi, en

 19   tout cas, je ne me sentais jamais certain de ce qu'il disait.

 20   Question: Vous avez déjà parlé de cette rencontre où il a été question des

 21   combats qui se déroulaient en même temps en Bosnie, avec participation de

 22   Milan Martic et de ses forces. Vous avez déjà parlé de la région de Livno

 23   et de ce geste fait par M. Milosevic qui impliquait un certain nombre de

 24   sous-entendus.

 25   Des combats se déroulaient-ils également, à l'époque dans la zone de Bihac

Page 13244

  1   avec participation également des forces de la RSK?

  2   Milan Babic (interprétation): Oui. Ça, c'était une deuxième étape.

  3   M. le Président (interprétation): Je vois l'heure, il est déjà un peu plus

  4   de midi et quart. Pouvons-nous revenir en audience publique?

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

  6   M. le Président (interprétation): Bien. Pause de 20 minutes.

  7   (L'audience, suspendue à 12 heures 18, est reprise à minute à 12 heures

  8   40.)

  9   (Audience publique avec mesures de protection.)

 10   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique, Monsieur le

 11   Président.

 12   M. le Président (interprétation): Vous pouvez procéder.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, merci.

 14   J'indique à votre intention, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 15   que nous en sommes arrivés au paragraphe 280 du résumé de la déposition de

 16   ce témoin. Et j'aborderai également le paragraphe 312, car il porte sur le

 17   même contexte. Cela nous permettra d'avancer plus rapidement. Monsieur le

 18   Témoin, la participation de Martic ou plutôt les forces de la RSK aux

 19   opérations en Bosnie, M. Martic et les forces de la RSK ont-elles

 20   participé au combat en Bosnie-Herzégovine dès l'été 1992?

 21   Milan Babic (interprétation): C'est cela. Dans ce qu'il était convenu

 22   d'appeler le corridor en Bosnie-Herzégovine.

 23   Question: S'agit-il du corridor de Posavina?

 24   Réponse: C'est cela.

 25   Question: En quoi résidait l'importance de ce corridor de Posavina pour

Page 13245

  1   les Serbes de Bosnie-Herzégovine et pour les Serbes de la Krajina?

  2   Réponse: C'était le lien qui permettait de relier la Krajina de Bosnie et

  3   la République serbe de Krajina à la Serbie ou plutôt à la République

  4   fédérale yougoslave.

  5   Question: Dans quelle période les forces de la RSK et Milan Martic ont-ils

  6   participé aux combats en 1992?

  7   Réponse: Au début de l'été 1992, ils y étaient déjà au mois de juin, à la

  8   fin du mois de juin.

  9   Question: Qui était responsable des opérations menées dans le corridor de

 10   Posavina?

 11   Réponse: L'armée de la Republika Srpska donc le général Mladic.

 12   Question: Vous avez déjà parlé des combats qui ont eu lieu en 1994/1995

 13   dans la zone de Livno en Herzégovine. Et juste avant la pause, je vous ai

 14   posé la question de savoir si les forces de la RSK ont également participé

 15   aux combats qui se sont déroulés aux environs de Bihac?

 16   Réponse: Oui.

 17   Question: Quelles étaient les forces présentes des deux côtés? Qui

 18   combattait contre qui à Bihac?

 19   Réponse: D'un côté, on trouvait le 5e Corps d'armée de Bosnie-Herzégovine,

 20   qui défendait donc son territoire attaqué par les forces de l'armée de la

 21   Republika Srpska, et par les forces de la RSK qui comprenaient l'armée

 22   serbe, la police et les services secrets serbes, la sûreté, ainsi que,

 23   excusez-moi, les forces de Fikret Abdic.

 24   Question: Les forces policières et la sûreté de Serbie qui ont participé à

 25   ces combats, qui les commandait?

Page 13246

  1   Réponse: On m'a dit que c'était "Frenki" qui les commandait, donc la

  2   sûreté de Petrova Gora.

  3   Question: Qui vous a dit cela?

  4   Réponse: Des gens de Kordun, des membres du gouvernement de la Krajina.

  5   Question: Cette participation des forces de la RSK aux combats en Bosnie-

  6   Herzégovine a-t-elle causé des problèmes s'agissant de la position de la

  7   RSK vis-à-vis de la communauté internationale et des autorités croates?

  8   Réponse: C'est cela. En 1994 et notamment 1995, cela a compromis

  9   grandement la position de la RSK vis-à-vis de la communauté internationale

 10   parce que la zone de Bihac était une zone protégée par la communauté

 11   internationale.

 12   Question: Ceci a-t-il accru un danger d'attaque généralisée par les forces

 13   croates contre la RSK?

 14   Réponse: C'est cela. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'armée

 15   croate et le HVO du territoire de Bosnie-Herzégovine ont lancé une

 16   offensive pour débloquer la zone de Bihac. C'est ce qui a été dit

 17   publiquement par le Gouvernement croate s'agissant de la Bosnie-

 18   Herzégovine. Et c'est cela qui a provoqué une séparation entre la

 19   République serbe de Krajina et la Republika Srpska, d'une part, et la

 20   Yougoslavie, de l'autre.

 21   Question: Les autorités de la RSK et de la Republika Srpska avaient-elles

 22   conclu un accord d'entraide dans cette période?

 23   Réponse: Je sais qu'un accord avait été conclu entre Martic et Karadzic,

 24   donc entre les autorités de la Republika Srpska et celle de la République

 25   serbe de Krajina, et que cet accord portait sur un certain nombre de

Page 13247

  1   brigades de l'armée de la Republika Srpska qui déclaraient vouloir aider

  2   l'armée de la RSK. Quant aux autres éléments de l'accord, je n'en ai pas

  3   une connaissance certaine; il s'agissait de huit brigades.

  4   Question: Avec l'aide de Mme l'huissière, j'aimerais que l'on soumette au

  5   témoin la pièce à conviction 352, intercalaire 96.

  6   Monsieur le Témoin, il s'agit là d'un document datant du 30 juillet 1995,

  7   qui traite d'une visite de M. Akashi, le représentant spécial du

  8   Secrétaire général des Nations Unies, et d'autres personnes, en rapport

  9   avec un projet de d'accord.

 10   (Intervention de l'huissière.)

 11   Le projet d'accord dont il est question dans ce document est-il le plan Z-

 12   4?

 13   Réponse: Non. Cette rencontre était prévue pour discuter des conditions

 14   dans lesquelles le plan Z-4 serait mis en oeuvre. Et, dans ce texte, il

 15   est question d'un accord relatif au désengagement de l'armée de la RSK

 16   dans la poche de Bihac. D'ailleurs, pour être plus précis, je dirai qu'il

 17   ne s'agissait pas d'un accord en tant que tel; c'était l'annonce d'un

 18   futur accord, l'annonce donc de l'approbation des propositions faites par

 19   M. Akashi à la direction de la RSK.

 20   Question: La proposition consistait à dire qu'aucun soldat ne

 21   participerait aux combats dans la poche de Bihac. L'accord prévoyait

 22   également la fin de toute action de la part de soldats venant de l'autre

 23   côté de la frontière. C'est bien ce qui est écrit dans ce texte, n'est-ce

 24   pas?

 25   Réponse: Oui, c'est cela. C'est exact.

Page 13248

  1   Question: On voit une note manuscrite sur ce document. Ah! Non, excusez-

  2   moi. J'ai mal formulé ma question.

  3   Cette proposition de désengagement de la part de la RSK, a-t-elle été

  4   appliquée?

  5   Réponse: Non. Non.

  6   Question: Que s'est-il passé réellement? Qu'est-ce qui a été fait, en

  7   réalité?

  8   Réponse: Les combats se sont poursuivis. Ni Mrksic ni Mile Novakovic qui

  9   commandaient des troupes là-bas, ni la police, c'est-à-dire le MUP de

 10   Serbie, ne se sont retirés de la région.

 11   Question: Au compte rendu d'audience en anglais, nous lisons le nom de

 12   Maksic, mais le nom que vous avez prononcé est bien celui de Mrksic,

 13   n'est-ce pas?

 14   Réponse: En effet, il s'agit de Mile Mrksic, du général Mile Mrksic,

 15   commandant de l'armée de la RSK.

 16   Question: Oui, merci. Nous pouvons maintenant retirer ce document.

 17   (Intervention de l'huissière.)

 18   Monsieur le Témoin, en 1994, le ministre de l'Intérieur de la RSK a-t-il

 19   éprouvé des problèmes pour prendre le contrôle de la police sur le

 20   territoire de Slavonie orientale, Baranja et Srem occidental?

 21   Réponse: Oui, c'est exact.

 22   Question: Pourquoi?

 23   Réponse: Le ministre de l'Intérieur?

 24   Question: Oui, oui. Qui était le ministre de l'Intérieur en 1994?

 25   Réponse: C'était Ilija Prijic qui était ministre de l'Intérieur jusqu'à la

Page 13249

  1   fin de 1994. Ensuite, il a été démis de ses fonctions et remplacé par M.

  2   Peric qui, en fait, n'a pas réellement pris ses fonctions.

  3   Donc à partir de la fin 1994 et jusqu'au mois d'août 1995, la RSK n'a pas

  4   eu de ministre de l'Intérieur. C'est l'un des adjoints qui était ministre

  5   en exercice.

  6   Question: Une délégation de la RSK a-t-elle rencontré M. Milosevic pour

  7   discuter de ces problèmes?

  8   Réponse: C'est cela, en 1994. Au mois d'avril, aux environs du 26 avril.

  9   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

 10   Juges, je dois vous prier de m'excuser mais nous avons besoin d'un huis

 11   clos partiel pour les questions qui viennent.

 12   (Audience à huis clos partiel à 12 heures 55)

 13   [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 14   Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 15 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Faisiez-vous partie de cette délégation?

 16   Milan Babic (interprétation): Oui.

 17   Question: Qui d'autre était présent, des deux côtés?

 18   Réponse: Oui. Borislav Mikelic, Uros Funduk, Slobodan Milosevic, Jovica

 19   Stanisic; pour autant que je m'en souvienne. Peut-être y avait-il encore

 20   d'autres personnes, mais je ne m'en souviens pas aujourd'hui.

 21   Question: Qu'avez-vous demandé à M. Milosevic, si vous lui avez demandé

 22   quelque chose?

 23   Réponse: Il a été demandé à Milosevic d'autoriser Slobodan Perisic, celui

 24   qui avait été choisi pour devenir ministre de l'Intérieur de la RSK, de

 25   prendre donc ses fonctions de ministre de l'Intérieur de la RSK.

Page 13250

  1   Question: Quelle a été la réaction de M. Milosevic à cela? Que s'est-il

  2   passé au cours de cette réunion?

  3   Réponse: Jovica Stanisic a été le premier à commenter cette demande.

  4   Jovica Stanisic a dit: "Nous avons trop investi dans cela -il parlait du

  5   MUP de Krajina- pour le donner maintenant à quelqu'un d'autre".

  6   Et à cela, Slobodan Milosevic a réagi en disant: "Membres de la délégation

  7   de la RSK -donc il nous parlait à nous-, il faut que vous compreniez que

  8   nous sommes obligés de vous aider par ce biais -il parlait donc du biais

  9   des services de la sûreté- parce que nous travaillons d'une façon un petit

 10   peu clandestine, donc nous ne pouvons pas vous aider autrement".

 11   Et, en disant cela, il apportait son soutien à Jovica Stanisic et à son

 12   point de vue sur toutes ces questions.

 13   Question: Est-ce que le problème a été réglé le jour de cette réunion?

 14   Est-ce que M. Milosevic vous a aidés, s'agissant de nommer à son poste le

 15   ministre de l'Intérieur de la RSK?

 16   Réponse: Non. La RSK a continué à ne pas avoir de ministre de l'Intérieur.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

 18   publique, Monsieur le Président.

 19   (Audience publique avec mesures de protection à 12 heures 57.)

 20   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avec l'aide de Mme l'huissière,

 22   j'aimerais soumettre un document au témoin, à savoir l'intercalaire 97 de

 23   la pièce 352.

 24   Monsieur le Témoin, ce document parle de ce ministre, M. Peric.

 25   Donc il est question de M. Peric et du poste occupé par lui, également de

Page 13251

  1   l'appartenance de certains aux forces policières. Qui a élaboré ce

  2   document?

  3   M. Kwon (interprétation): Sommes-nous actuellement en audience publique?

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui.

  5   Milan Babic (interprétation): C'est Slobodan Peric qui m'a fait connaître

  6   l'existence de ce document. C'est de lui que je l'ai reçu.

  7   Question: Au dernier paragraphe de ce texte, nous lisons -je cite-: "Lors

  8   de toutes les rencontres, Milosevic donne son accord pour que Peric prenne

  9   le contrôle du MUP, alors que Stanisic, immédiatement après lui, donne son

 10   accord à Martic pour empêcher cela." (Fin de citation.)

 11   Est-ce bien la situation telle qu'elle était qui est décrite dans ce

 12   paragraphe?

 13   Réponse: Moi, je connais la situation comme correspondant à ce qui est

 14   décrit, donc je dirais oui, mais j'ajouterais que je n'ai pas entendu dire

 15   que Milosevic était d'accord avec cela.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En mai 1995, un problème s'est-il

 17   posé en rapport avec le commandement des forces armées de la RSK, après

 18   l'opération "Eclair"?

 19   Milan Babic (interprétation): C'est exact.

 20   M. Kwon (interprétation): Vous avez quelque chose à dire, Monsieur

 21   Milosevic?

 22   M. Milosevic (interprétation): Simplement que je ne trouve pas ce

 23   document, car à l'intercalaire 97, moi, j'ai un document qui porte sur une

 24   annonce de Tanjug par le Président de la République serbe de Krajina; donc

 25   ce n'est pas le document dont vous parlez. Et j'ai soigneusement recherché

Page 13252

  1   l'intercalaire 97 dans les documents mis à ma disposition.

  2   M. le Président (interprétation): Le document va vous être remis.

  3   Veuillez procéder, Madame Uertz-Retzlaff.

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je ne peux pas

  5   expliquer comment cela s'est produit.

  6   M. le Président (interprétation): Il a un exemplaire du document.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bien, bien. Intercalaire 97. Je

  8   suppose que je n'ai pas besoin de répéter ce qui a déjà été dit?

  9   M. le Président (interprétation): Non.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Encore une question, Monsieur le

 11   Témoin, en rapport avec cet intercalaire 97. Lorsque vous avez parlé avec

 12   les représentants du Bureau du Procureur de La Haye, avez-vous remis ce

 13   document au Bureau du Procureur?

 14   Milan Babic (interprétation): Oui.

 15   Question: Il me semble que vous n'avez pas encore répondu à la question

 16   que je vous ai posée, à savoir: y avait-il un problème quelconque,

 17   s'agissant du commandant des forces armées de la Krajina serbe, après

 18   cette opération "Eclair"? Qui se trouvait à la tête des forces armées de

 19   la RSK au cours de cette opération "Eclair"?

 20   Réponse: Le général Celeketic.

 21   Question: A-t-il été révoqué de ses fonctions une fois que les forces

 22   croates ont pris le contrôle sur le territoire de la Slavonie occidentale

 23   après l'opération "Eclair"?

 24   Réponse: Oui, c'est exact. Dans le courant du mois de mai 1995.

 25   Question: Est-ce qu'au sein du Conseil suprême de la défense de la Krajina

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  1   -je n'ai pas à l'idée vous-même, votre personne-, mais est-ce que le

  2   Conseil suprême de la défense de la RSK a été d'accord pour ce qui est

  3   d'un nouveau candidat, à savoir Mile Novakovic?

  4   Réponse: Je me dois d'expliquer cela, à savoir que le Premier ministre ou

  5   le Président de la République de la SAO Krajina, le chef du Conseil

  6   suprême de la défense, avait proposé le général Mile Novakovic pour en

  7   faire un nouveau commandant. Cependant, le Président Milosevic a rejeté la

  8   chose et il a désigné le général Mile Mrksic pour que celui-ci devienne le

  9   nouveau général commandant l'armée de la RSK.

 10   Question: Monsieur le Témoin, est-ce que le Conseil suprême de la défense

 11   de la RSK a été d'accord pour que cela soit M. Novakovic?

 12   Réponse: Il a été d'accord avec la décision pour ce qui est de faire Mile

 13   Mrksic commandant. Et cela a été entériné, formalisé officiellement.

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je dois vous

 15  redemander un huis clos partiel pour tirer la chose au clair.

 16  (Audience à huis clos partiel à 13 heures 04) [Confidentialité levée par une

 17   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya : Nous sommes à huis clos partiel.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, avez-vous vu M.

 19   Milosevic en rapport avec le nouveau commandant de la TO, en même temps

 20   qu'une délégation? Et si c'est le cas, quand ceci s'est-il passé?

 21   Milan Babic (interprétation): Oui, vers le 9 mai de l'année 1995. Et

 22   ceci, dans le cabinet du Président Milosevic.

 23   Question: Vous vous y êtes rendu en même temps que la délégation. Et qui

 24   vous accompagnait?

 25   Réponse: La délégation était présidée par le chef du Gouvernement, M.

Page 13254

  1   Borisav Mikelic. (expurgée)

  2   (expurgée)

  3   Question: Est-ce qu'il a fait une proposition à M. Milosevic, s'agissant

  4   de qui devrait être le nouveau commandant?

  5   Réponse: Il avait proposé le général Mile Novakovic qui avait déjà été

  6   commandant de l'armée serbe en 1993; j'entends par là l'armée serbe de la

  7   Krajina.

  8   Question: Est-ce que M. Milosevic a rejeté cette proposition ou comment se

  9   fait-il que tout d'un coup ce fut M. Mrksic?

 10   Réponse: Il a refusé. Il n'a pas donné de raison et il a dit seulement

 11   qu'il avait été décidé que ce soit Mile Mrksic.

 12   Question: Et savez-vous qui a pris cette décision? Parce que vous dites

 13   "il avait été décidé que ce serait le général Mile Mrksic", mais savez-

 14   vous qui a pris cette décision?

 15   Réponse: J'ai ouï dire que Milosevic avait interrompu cette réunion, qu'il

 16   était sorti et qu'après une petite pause, il a dit: "Le nouveau commandant

 17   sera Mile Mrksic". Certaines personnes ont dit qu'elles avaient entendu

 18   dire que c'était le Conseil suprême de la défense qui avait décidé de la

 19   chose, mais je n'en suis pas certain. Moi, j'ai cru comprendre à cette

 20   réunion que c'était Slobodan Milosevic qui avait désigné Mile Mrksic aux

 21   fonctions de nouveau commandant. Et quand j'ai dit "Conseil suprême de la

 22   défense", j'entendais par là le Conseil suprême de Yougoslavie.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que nous pouvons passer à huis

 24   clos partiel? Merci.

 25   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes à huis clos partiel.

Page 13255

  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que le gouvernement de la RSK

  2   a approuvé, a avalisé cette décision en nommant officiellement le général

  3   Mile Mrksic?

  4   Milan Babic (interprétation): Eh bien, la procédure suivie, c'est que ça

  5   passait par le Conseil suprême de la défense de la RSK et l'assemblée de

  6   la RSK. Et c'est ainsi que l'on a décidé, je dirais plutôt accepté,

  7   confirmé de façon officielle et juridique qu'il en soit ainsi.

  8   Question: A quel moment M. Mile Mrksic est-il arrivé en RSK en tant que

  9   commandant?

 10   Réponse: On l'y a vu le 16 mai 1995. L'assemblée l'a nommé entre le 18 et

 11   le 20 mai de cette même année 1995.

 12   Question: Quel poste occupait-il avant son arrivée en RSK? Le savez-vous?

 13   Réponse: Il avait été commandant de la brigade de la garde de la JNA à

 14   Belgrade. Il avait commandé ces unités-là pendant l'attaque sur Vukovar.

 15   Et avant cela il avait fait quelque chose à l'état-major général, mais je

 16   ne sais pas quoi au juste.

 17   Question: A son arrivée en RSK, est-il devenu officiellement un employé

 18   des forces de la RSK ou est-ce qu'il est resté en situation d'employé

 19   d'officier de la VJ?

 20   Réponse: Il était officier de l'armée de Yougoslavie.

 21   Question: S'agissant des deux commandants précédents que vous avez

 22   mentionnés, M. Mile Novakovic et M. Celeketic, est-ce qu'ils étaient eux

 23   aussi, sont-ils restés membres de la VJ pendant tout leur temps de service

 24   en RSK? Au cours des conversations que vous avez eues avec le Bureau du

 25   Procureur à La Haye, avez-vous passé en revue divers ordres signés par M.

Page 13256

  1   Martic portant sur la promotion, la nomination et la relève du général

  2   Celeketic? Vous en souvenez-vous?

  3   Réponse: Oui.

  4   Question: Messieurs les Juges, je ne pense pas qu'il soit nécessaire de

  5   soumettre tous ces documents au témoin. Il s'agit des intercalaires 98,

  6   99, 100, 101 de la pièce 352. Tous ces documents portent sur la

  7   nomination, la promotion et la relève du général Celeketic.

  8   Mais j'aimerais vous soumettre, Monsieur le Témoin, le document de

  9   l'intercalaire 102.

 10   (Intervention de l'huissière.)

 11   Nous sommes à l'intercalaire 102 de cette même pièce, la pièce 352.

 12   C'est en fait un document signé par Dusan Zoric, poste militaire 1790,

 13   Belgrade, en date du 21 décembre 1994, et qui concerne la promotion de

 14   Celeketic au rang de général de divisions. Pourrez-vous nous dire qui est

 15   cet homme, Dusan Zoric? Quel poste occupait-il?

 16   Réponse: Chef par intérim du département chargé des effectifs au sein du

 17   grand état-major de l'armée de Yougoslavie. Du moins c'étaient les

 18   fonctions qu'il effectuait à l'époque.

 19   Question: Merci. Je pense qu'il nous faudra passer à huis clos partiel.

 20   (Audience à huis clos partiel à 13 heures 11) [Confidentialité levée par

 21   une ordonnance de la Chambre]. Nous abordons maintenant le

 22   paragraphe 293 et les deux paragraphes suivants du résumé.

 23   Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez eu une conversation avec M.

 24   Milosevic à propos du plan Z-4 en 1995?

 25   Réponse: Oui, un entretien téléphonique.

Page 13257

  1   Question: A l'époque est-ce que vous avez discuté de ce plan Z-4 avec M.

  2   Galbraith?

  3   Réponse: Oui, avec M. l'Ambassadeur Peter Galbraith, à plusieurs reprises

  4   avant cela.

  5   Question: Et aussitôt avant, juste avant cette conversation, entretien

  6   téléphonique quelle était l'option que vous avez présentée M. Galbraith?

  7   Réponse: Il a proposé d'accepter ce plan Z-4, d'accepter le désengagement

  8   des forces armées de la Krajina dans la poche de Bihac, d'accepter un

  9   nouveau mandat des forces de paix plus connues sous l'appellation UNCRO et

 10   d'ouvrir les voies de communication en Croatie, les routes de Croatie.

 11   Question: Est-ce qu'à l'époque vous étiez le président de la RSK?

 12   Réponse: J'étais chef du gouvernement de la RSK et c'était Martic le

 13   Président.

 14   Question: Pourquoi est-ce que vous n'avez pas tout simplement accepté ce

 15   plan?

 16   Réponse: J'avais accepté en ma qualité de Premier ministre et j'ai précisé

 17   à M. l'Ambassadeur Galbraith que cela ne pouvait pas se réaliser sans

 18   l'approbation du Président Milosevic.

 19   Question: Vous avez déclaré que vous aviez eu un entretien téléphonique

 20   avec M. Milosevic le 3 août 1995. Comment êtes-vous parvenu à l'atteindre,

 21   à le joindre? Est-ce que quelqu'un vous a aidé pour établir la connexion?

 22   Réponse: Oui, Jovica Stanisic. Et ça s'est fait depuis le cabinet de

 23   Jovica Stanisic.

 24   Question: Est-ce que vous vous êtes rendu dans son bureau? Et où se

 25   trouvait ce bureau?

Page 13258

  1   Réponse: Je suis allé chez Stanisic, dans son bureau qui se trouvait dans

  2   le bâtiment du secrétariat fédéral, à l'Intérieur.

  3   Question: Qui d'autre était présent au moment où vous l'avez vu?

  4   Réponse: Il y avait Radovan Stojicic Badza, puis il y avait le chef des

  5   services de contre-espionnage au niveau des services de sûreté d'Etat de

  6   Serbie; un homme dont je ne me souviens plus du nom, mais qui ressemblait

  7   à "Frenki".

  8   Question: Est-ce ce même homme dont vous avez déjà parlé et que vous avez

  9   vu dans une autre réunion avec Kertes?

 10   Réponse: C'est cela; c'est ce même homme. C'était le 4 janvier 1992.

 11   Question: Avez-vous expliqué à ces trois hommes que vous vouliez accepter

 12   le plan Z-4 et que vous vouliez en discuter avec M. Milosevic?

 13   Réponse: Oui, je leur ai dit que j'avais accepté cela avec Galbraith. Et

 14   ils avaient eu une attitude inamicale, une attitude hostile, et ils m'ont

 15   mis en contact avec Milosevic.

 16   Question: Et qu'a dit M. Milosevic par rapport à ce plan Z-4?

 17   Réponse: Il a réitéré ou… Je dirais plutôt qu'il avait marmonné. Pour être

 18   tout à fait précis, je dirais: comme s'il parlait pendant qu'il dormait.

 19   Et il avait dit: "Oui, du calme, du calme, allez doucement.". Il m'a dit

 20   aussi au téléphone: "Adresse-toi à Vlatko Jovanovic".

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): L'avez-vous fait?

 22   Milan Babic (interprétation): Oui. J'ai rencontré le ministre des

 23   Affaires étrangères, Vlatko Jovanovic, ministre des Affaires étrangères de

 24   Yougoslavie, dans les locaux du ministère.

 25   M. le Président (interprétation): Monsieur Milosevic?

Page 13259

  1   M. Milosevic (interprétation): Juste un petit rectificatif technique. Le

  2   témoin dit que je lui avais répondu "Oui, du calme" et ici, on a traduit

  3   "Oui, tout doucement". Entre "du calme" et "doucement", notamment

  4   lorsqu'il s'agit de guerre et de paix, il y a une grosse différence. Le

  5   témoin a dit "du calme" et on a traduit "lentement", "doucement".

  6   M. le Président (interprétation): Oui, ce sera relevé.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Quels sont les termes exacts utilisés

  8   par M. Milosevic pour vous parler, pour tirer ceci au clair? Que vous a-t-

  9   il dit exactement?

 10   Milan Babic (interprétation): "Da, da. Tout doit être fait dans le

 11   calme".

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, est-ce qu'en

 13   fait, à l'époque, vous aviez le temps d'agir lentement ou calmement, ou

 14   est-ce qu'il y avait une certaine urgence? Qu'est-ce que vous avait dit M.

 15   Galbraith? Il vous donnait combien de temps pour vous décider?

 16   M. Milosevic (interprétation): Monsieur May, le témoin n'a pas du tout

 17   utilisé le terme de "lentement".

 18   M. le Président (interprétation): Oui, je sais, nous avons entendu.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce qu'il y avait une urgence

 20   particulière, ce 3 août 1995?

 21   Milan Babic (interprétation): Oui, parce qu'il fallait réagir le

 22   lendemain, il fallait que je fasse une déclaration et que l'on réalise ce

 23   que j'avais accepté, ce qui devait faire l'objet de la déclaration que

 24   j'étais censé faire au public.

 25   Question: Est-ce qu'en fait, vous aviez un ultimatum de M. Galbraith? Est-

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  1   ce qu'il vous disait qu'il fallait accepter ce plan sur-le-champ, faute de

  2   quoi il y aurait des conséquences?

  3   Réponse: Il a dit ce à quoi il fallait s'attendre si nous n'acceptions

  4   pas. Et il avait dit que nous pouvions nous attendre à une agression de la

  5   part de la Croatie et que nous pouvions subir le sort de la Slavonie

  6   occidentale.

  7   Question: Est-ce que vous avez accepté ceci publiquement? Et est-ce que

  8   vous avez pu empêcher cette agression?

  9   Réponse: Oui, j'ai accepté, j'ai fait une déclaration aux termes de

 10   laquelle il avait été dit que nous acceptions.

 11   Question: Est-ce que la RSK a été attaquée?

 12   Réponse: Oui, le lendemain au matin.

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander l'aide de l'huissier

 14   pour montrer au témoin l'intercalaire 103 de la pièce 352.

 15   Ce document est le procès-verbal de la première séance du Gouvernement de

 16   la République de Krajina serbe du 28 juillet 1995. Il y est fait référence

 17   à des négociations internationales. Il n'est pas nécessaire d'en discuter

 18   davantage puisqu'il se passe de commentaires.

 19   Mais outre ce document, j'aimerais vous soumettre, Monsieur le Témoin,

 20   l'intercalaire 104. Nous sommes toujours dans la pièce 352.

 21   (Intervention de l'huissier.)

 22   Il s'agit ici d'un envoi par câble, codé, en date du 3 août 1995. Je vais

 23   faire une citation de ce document. Mais tout d'abord se pose cette

 24   question-ci: est-ce que ce document vous a été montré? Est-ce qu'une

 25   partie du document a été traduite dans le cadre des entretiens que vous

Page 13261

  1   avez eus avec le Bureau du Procureur?

  2   Milan Babic (interprétation): Oui, de façon orale; ça m'a été montré.

  3   M. le Président (interprétation): Avant d'aller plus loin, il faut savoir

  4   ce que ce document est et d'où il vient.

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est un envoi par câble codé de

  6   l'ambassade britannique de Zagreb, portant sur une conversation qui s'est

  7   tenue entre l'ambassadeur Galbraith et le Premier ministre de la RSK.

  8   M. Milosevic (interprétation): Une fois de plus, dans mon registre, moi,

  9   j'ai autre chose. J'ai un procès-verbal d'une session du gouvernement sous

 10   ce même classeur, enfin, ou sous le même numéro d'intercalaire.

 11   M. le Président (interprétation): Veillez à ce que l'accusé dispose du bon

 12   document.

 13   (Intervention de l'huissière.)

 14   M. Milosevic (interprétation): Moi, je vérifie sur le compte rendu

 15   d'audience. Sur le compte rendu d'audience, on dit bien "104".

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Messieurs les Juges, à la lecture de

 17   cette citation, je comprends qu'il faut passer à huis clos partiel.

 18   Mme Anoya (interprétation): Mais nous sommes à huis clos partiel.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Fort bien.

 20   "Le Premier ministre de la RSK dit à mon collègue américain que pour

 21   éviter la guerre, il est prêt à accepter les conditions imposées par

 22   Tudjman, et il va l'annoncer aujourd'hui. Il n'est pas clair s'il a de son

 23   côté d'autres dirigeants de la RSK. Milosevic a été informé, par les

 24   Américains, des discussions de Galbraith avec Babic et il faut obtenir le

 25   soutien de Belgrade pour donner davantage de crédibilité." (Fin de

Page 13262

  1   citation.)

  2   Témoin, est-ce que c'est bien la situation telle qu'elle se présentait à

  3   l'époque? Et cette citation est-elle exacte? Est-ce qu'elle reflète bien

  4   les entretiens que vous avez eus avec M. Galbraith?

  5   Milan Babic (interprétation): Oui, exception faite du fait que je ne sais

  6   rien du briefing fait par les intervenants internationaux à l'égard de

  7   Milosevic. Je sais seulement qu'un membre de l'Ambassade de France à

  8   Belgrade m'avait dit que Milosevic ne nous apportait pas son soutien.

  9   M. Kwon (interprétation): Si vous examinez le paragraphe 9 du document, il

 10   est dit que Galbraith nous a assuré qu'il avait le plein et entier soutien

 11   du service d'Etat. Ici "nous", qu'est-ce que cela veut dire?

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): C'est l'Ambassade britannique. Il

 13   s'agit, en fait, d'un rapport établi par l'Ambassade britannique à propos

 14   d'une discussion de M. Galbraith avec le témoin; et dans ce rapport, on

 15   trouve aussi le suivi de cette discussion, les autres considérations

 16   émises par M. Galbraith.

 17   M. Kwon (interprétation): Fort bien, je me suis trompé.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Avez-vous vu M. Milosevic après

 19   l'attaque, après ce qu'on a appelé l'opération "Tempête", le 8 août 1995?

 20   Milan Babic (interprétation): Oui, vers le 8 août 1995, dans la villa de

 21   la rue Boticeva.

 22   Question: Qu'est-ce que c'est que cette villa dans la rue Boticeva? Quel

 23   genre d'édifice, de bâtiment est-ce? Est-ce que c'est un bâtiment

 24   officiel?

 25   Réponse: C'est la résidence du gouvernement de la Serbie.

Page 13263

  1   Question: Avez-vous demandé à avoir cette réunion avec M. Milosevic?

  2   Réponse: La première des initiatives est venue de Buba Morina, commissaire

  3   chargé des réfugiés de la République de Serbie à Banja Luka, en me disant

  4   qu'il fallait que j'aille à Belgrade aux fins de trouver des solutions et

  5   d'obtenir des informations pour ce qui est de savoir où iraient les

  6   réfugiés de la Krajina.

  7   Je suis allé à Belgrade. Je me suis annoncé chez le Chef du Gouvernement,

  8   M. Mirko Marjanovic. Il m'a demandé une déclaration de ma part et, après

  9   avoir reçu cette déclaration, il a établi le contact entre moi et le

 10   Président Milosevic.

 11   Question: Quelle genre de déclaration vous a-t-il demandé de faire?

 12   Réponse: Mirko Marjanovic m'a demandé une déclaration aux termes de

 13   laquelle il découlerait qu'il n'y a pas de culpabilité de la Yougoslavie

 14   pour ce qui se passait dans la Krajina et l'exode du peuple serbe. Il m'a

 15   même fourni quelques phrases qui devaient figurer dans cette déclaration.

 16   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais demander l'aide de

 17   l'huissière pour présenter au témoin l'intercalaire 105 de la pièce 352.

 18   (Intervention de l'huissière.)

 19   Est-ce ce bien ici la déclaration que vous avez faite à la demande de M.

 20   Marjanovic?

 21   Réponse: Oui.

 22   Question: Inutile de vous demander un autre commentaire à propos de ce

 23   document.

 24   Monsieur le Témoin, vous avez vu M. Milosevic; que lui avez-vous demandé,

 25   de quoi avez-vous discuté avec lui?

Page 13264

  1   Réponse: Je suis venu chez lui; c'était à la veille de son départ à Moscou

  2   pour rencontrer Eltsine. La sécurité ne m'a d'abord pas laissé entrer;

  3   puis il est sorti et m'a fait entrer. Et nous nous sommes entretenus dans

  4   la pièce à côté de l'entrée. Dans la pièce principale, il y avait des

  5   représentants de la Yougoslavie, de l'armée. J'ai vu à l'entrée des

  6   plaques d'immatriculation des voitures qui me le disaient. C'était une

  7   brève rencontre. Je lui ai demandé où les gens de la Krajina, qui avaient

  8   fui la Krajina, allaient être installés.

  9   Question: Et quelle a été sa réponse?

 10   Réponse: Il a dit: "Au Kosovo". J'ai demandé: "Mais combien pouvait-on en

 11   mettre au Kosovo?". Et je savais que le Kosovo était surpeuplé, qu'il y

 12   avait des tensions interethniques. Il a dit: "100.000. Et bon nombre

 13   d'entre eux peuvent aller dans la Republika Srpska".

 14   Je lui ai demandé alors si nous pouvions aller vers la Slavonie orientale.

 15   Il a dit: "Non. Pas pour le moment".

 16   Je lui ai demandé: "Et où irait le gouvernement, le gouvernement de la

 17   Krajina?". Il m'a dit: "Qu'il reste à Belgrade, si besoin est, pour des

 18   négociations. Et toi, personnellement -m'a-t-il dit- pour ce qui est de

 19   tes besoins personnels, tu n'as qu'à aller voir Mirko Marjanovic".

 20   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense que nous pouvons revenir en

 21   audience publique, Monsieur le Président.

 22   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 30.)

 23   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 24   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que les réfugiés de la RSK ont

 25   fini au Kosovo ou en Bosnie-Herzégovine? Où sont-ils allés?

Page 13265

  1   Milan Babic (interprétation): Tout d'abord, le jour d'après, ce jour-là,

  2   le jour où l'exode a commencé dans la Krajina, Ratko Mladic, le commandant

  3   de l'armée serbe de la Republika Srpska, a imposé un blocus au niveau du

  4   pont sur la rivière Vrbas et il n'a pas permis aux réfugiés d'aller au-

  5   delà. Je suis allé le voir.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je pense qu'il faut passer à huis

  7   clos partiel pour parler de cette réunion.

  8  (Audience à huis clos partiel à 13 heures 31) [Confidentialité levée par une

  9   ordonnance de la Chambre] Mme Anoya (interprétation): C'est fait.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Vous dites avoir été voir M. Mladic:

 11   où l'avez-vous rencontré? Pourquoi vouliez-vous le voir?

 12   Milan Babic (interprétation): A Banja Luka, parce que Mladic avait établi

 13   des blocus et il avait empêché le déplacement des réfugiés; et les

 14   réfugiés avaient constitué deux colonnes de réfugiés entre Bosanski Novi

 15   et Prijedor en direction de Banja Luka. Et d'autre part, en provenance de

 16   Bosanski Petrovac, de Mirkovic Grad en traversant Manjaca pour aller vers

 17   Banja Luka. Et il y avait des bouchons, la situation était véritablement

 18   très pénible. Beaucoup de gens avaient de la famille en Vojvodine, à

 19   Belgrade, dans d'autres localités et ils ne voulaient pas rester sur la

 20   route.

 21   D'après ce que les autorités de la Republika Srpska m'avaient dit, ils

 22   avaient eu l'idée d'installer les réfugiés à Manjaca. Je suis allé voir

 23   Mladic pour le supplier de débloquer la route, je suis donc allé le voir

 24   ainsi à Banja Luka. Il a dit qu'il allait débloquer le passage jusqu'à

 25   Derventa. Il a dit qu'il fallait rester dans la Republika Srpska parce que

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  1   c'était notre terre à nous; et il a effectivement débloqué le passage au

  2   niveau de la rivière Vrbas. Mais les blocus se sont situés après au niveau

  3   de la Drina et de la Sava. On a dissocié les hommes en âge de combattre de

  4   leur famille, on a séparé ces hommes de leur famille et les autres

  5   pouvaient passer vers la Serbie.

  6   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous pouvons revenir en audience

  7   publique.

  8   (Audience publique avec mesures de protection à 13 heures 33.)

  9   Mme Anoya (interprétation): Nous sommes en audience publique.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Témoin, vous dites que

 11   les hommes en âge de combattre ont été séparés de leur famille. Pourquoi

 12   l'a-t-on fait? Et qu'est-ce qu'ils étaient censés faire?

 13   Milan Babic (interprétation): Ils sont devenus partie intégrante de

 14   l'armée de la Republika Srpska. Et ceux qui sont passés en Serbie, ceux-là

 15   ont été arrêtés et ont été emmenés en Slavonie orientale vers les

 16   campements tenus par "Arkan" ou au front vers ce qu'on appelait les

 17   premières lignes.

 18   Question: Est-ce que cela veut dire qu'ils ont été recrutés et versés dans

 19   la VRS par la force ainsi que dans l'unité de "Arkan"?

 20   Réponse: C'est exact.

 21   Question: Ceux qui sont arrivés en Serbie, où se sont-ils installés?

 22   Réponse: Ils se sont installés de deux façons. D'abord, les gens qui

 23   avaient de la famille sur la première lignée de par la descendance

 24   pouvaient rester avec leur famille. Tous les autres étaient transportés ou

 25   escortés par la police vers d'autres centres sur le territoire de la

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  1   Serbie, y compris le Kosovo. Alors c'étaient soit des colonnes de

  2   véhicules, soit des trains. J'ai pu entendre les récits d'un grand nombre

  3   de personnes qui m'ont raconté qu'en arrivant à Pristina, ils étaient

  4   stupéfaits, ils n'en croyaient pas leurs yeux et ils cherchaient à revenir

  5   aussitôt qu'ils le pouvaient.

  6   Question: Est-ce que des réfugiés de la Krajina sont arrivés en Vojvodine?

  7   Réponse: Oui.

  8   Question: Est-ce que les habitants croates ont été chassés à ce moment-là

  9   de la Vojvodine? Etes-vous au courant?

 10   Réponse: Il y a eu des intrusions dans les maisons croates comme à

 11   Golubici, mais la police de Serbie est intervenue et a empêché que l'on

 12   occupe ainsi des maisons croates.

 13   Question: Nous allons maintenant passer à un chapitre tout à fait

 14   différent. Il concerne Milan Martic. Est-ce qu'à un moment donné cet homme

 15   a été arrêté en Bosnie?

 16   Réponse: Oui, en septembre 1991.

 17   Question: Est-ce qu'un mandat d'arrêt avait été décerné contre lui?

 18   Réponse: Oui, de la part du gouvernement croate.

 19   Question: Avec l'aide de l'Huissière, j'aimerais montrer au témoin

 20   l'intercalaire 111A.

 21   (Intervention de l'huissière.)

 22   Est-ce que c'est ici le mandat d'arrêt ou plutôt le décret concernant M.

 23   Milan Martic?

 24   Réponse: Moi, je sais que cela existait par les médias.

 25   Question: Est-ce que, dans le cadre des entretiens que vous avez eus avec

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  1   le Bureau du Procureur, on vous a montré ce document?

  2   Réponse: Oui.

  3   Question (interprétation): Monsieur le Président, nous avons reçu ce

  4   document du Gouvernement de la République de la Croatie, dans un envoi du

  5   mois de mai 2002. Je tenais à vous le préciser.

  6   J'aimerais l'aide de l'huissière pour présenter au témoin l'intercalaire

  7   111B. Nous sommes toujours dans la pièce 352.

  8   (Intervention de l'huissier.)

  9   C'est aussi un document reçu du Gouvernement de la Croatie en annexe au

 10   mandat d'arrêt.

 11   Monsieur le Témoin, il s'agit ici d'un décret concernant une enquête menée

 12   suite sur des activités déployées par M. Milan Martic et d'autres. Est-ce

 13   que vous avez eu le temps de lire ce document? Est-ce que vous l'avez lu

 14   au moment de l'entretien que vous avez eu avec le Bureau du Procureur?

 15   Réponse: Oui.

 16   Question: On fait référence dans ce document au "conseil de la résistance

 17   populaire".

 18   Vous avez déjà mentionné ce conseil comme étant la source et l'origine de

 19   provocations. Sont énumérés bon nombre d'événements à partir du mois

 20   d'octobre 1990 jusqu'en avril 1991, et ce sont des événements divers. Il y

 21   a des attaques menées contre la police croate, le fait qu'on a tiré sur

 22   des civils, que des magasins ont été détruits, ainsi que des maisons, des

 23   véhicules, à l'explosif; il y a eu aussi des attaques sur des voies

 24   ferrées.

 25   Vous avez examiné ce document. Est-ce que vous estimez qu'il est correct,

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  1   est-ce que les faits énumérés dans ce document sont exacts?

  2   Réponse: Oui, j'ai examiné cela et ils sont exacts.

  3   Question: Ces biens qui ont été détruits, ces personnes qui ont subi un

  4   préjudice, est-ce que c'étaient des Croates ou est-ce que c'étaient des

  5   bien publics qui ont été touchés?

  6   Réponse: Oui, il s'agissait de Croates et de biens publics. Et il

  7   s'agissait d'Albanais aussi.

  8   Question: Merci. Ceci suffira pour ce document.

  9   (Intervention de l'huissier.)

 10   Au moment de l'arrestation de M. Martic en Bosnie, que faisait-il en

 11   Bosnie? A-t-il été le seul à être arrêté ou avec qui a-t-il été arrêté?

 12   Réponse: Il passait par un village appelé Otoka, peuplé de Musulmans, à

 13   côté de Bosanska Krupa. Il y avait là-bas encore quelqu'un de son escorte

 14   et des gens, des officiers de la JNA.

 15   Question: Savez-vous ce que ces hommes faisaient en Bosnie?

 16   Réponse: Je ne sais pas au juste.

 17   Question: Au moment où ils ont été appréhendés, l'ont-ils été sur un

 18   itinéraire emprunté pour le transfert des armes et du matériel militaire

 19   destinés aux forces militaires de la Krajina?

 20   Réponse: Oui.

 21   Question: Est-ce que c'était à l'époque le seul itinéraire, la seule route

 22   ouverte? Ou est-ce qu'il y en avait plusieurs?

 23   Réponse: Il y avait deux itinéraires.

 24   Question: Quels itinéraires empruntait-on pour le transport des armes?

 25   Réponse: En passant par Bosanski Novi et par Grahovo.

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  1   Question: D'où venaient ces armes?

  2   Réponse: Les armes venaient de deux sources; l'une de ces sources était la

  3   Serbie et l'autre était les dépôts d'armes de la JNA sur le territoire de

  4   la Krajina.

  5   Question: Est-ce qu'il y avait aussi un entrepôt ou arsenal militaire à

  6   Bihac d'où l'on pouvait obtenir des armes?

  7   Réponse: Oui, Zeljava.

  8   Question: Est-ce que cela se trouve près de l'aéroport de Bihac?

  9   Réponse: Oui, tout à fait. C'est pratiquement la base à proximité de

 10   l'aérodrome de Bihac.

 11   Question: Pour recevoir des armes de l'aérodrome de Bihac, à qui devaient

 12   s'adresser les autorités de la Krajina? Qui pouvait leur faciliter cet

 13   acheminement?

 14   Réponse: Moi, je sais pour ce qui est du colonel Smiljanic.

 15   Question: Qui était ce colonel Smiljanic?

 16   Réponse: Il était chef chargé de la sécurité du Corps de Zagreb pour la

 17   JNA, il était à cette fonction quand j'ai fait sa connaissance.

 18   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, je crois qu'il

 19   est temps d'en terminer.

 20   M. le Président (interprétation): Oui.

 21   Madame Uertz-Retzlaff, au contraire de ce que nous avons dit au début,

 22   nous semblons avoir bien progressé aujourd'hui.

 23   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, mais il y a un problème qui

 24   s'annonce demain; enfin, ce n'est pas un problème véritablement: nous

 25   allons nous livrer à un exercice différent parce que nous allons parler

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  1   des détails de l'arrestation de Martic et nous allons aborder beaucoup

  2   d'écoutes téléphoniques.

  3   Aujourd'hui, j'ai fait l'impasse sur ces écoutes pour avancer, mais il

  4   faudra bien en parler tôt ou tard, donc demain. Je vais le faire de façon

  5   groupée parce ce sera plus rapide, me semble-t-il.

  6   M. le Président (interprétation): Fort bien. Nous avons été mis en garde.

  7   Nous allons lever l'audience.

  8   Monsieur le Milan Babic, soyez de retour demain matin à 9 heures.

  9   Milan Babic (interprétation): Fort bien.

 10   (L'audience est levée à 13 heures 46.)

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